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ARCHIVES PARLEMENTAIRES
Société d'imprimerie et librairie administratives PAUL DUPONT, 41, rue J.-J.-Rousseau (Cl.) 15.8.83.
ARCHIVES RARLEMENTAIRES DE 1787 A 1860
RECUEIL COMPLET DES DÉBATS LÉGISLATIFS & POLITIQUES DES CHAMBRES FRANÇAISES IMPRIMÉ PAR ORDRE DU SÉNAT ET DE LA CHAMBRE DES DÉPUTÉS socs la direction de M. J. MAVIDAL CHEF DU BUREAU DES PROCÈS-VERBAUX, DE L'EXPÉDITION DES LOIS, DES PÉTITIONS, DES IMPRESSIONS ET DISTRIBUTIONS DE LA CHAMBRE DES DÉPUTÉS ET DE M. E. LAURENT BIBLIOTHÉCAIRE DE LA CHAMBRE DES DÉPUTÉS
PREMIÈRE SÉRIE TOME XVI ASSEMBLÉE NATIONALE CONSTITUANTE DU
PARIS SOCIÉTÉ D'IMPRIMERIE ET LIBRAIRIE ADMINISTRATIVES ET DES CHEMINS DE FER PAUL DUPONT 41 , RUE JEAN - JACQUES - ROUSSEAU
1883
Séance du
ouvre la séance à 9 heures du matin.
, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier qui est adopté.
, député de Saint-Quentin, fait, au nom des communes deTrescon, Villecholles et Vermand , Whommage de leurs dons patriotiques, et l'abandon de leur bénéfice sur l'imposition des privilégiés pour les six derniers mois 1789, montant, pour la première municipalité, à 1,010 livres ; pour la seconde, à 339 livres 3 sols 6 deniers ; pour la troisième, à 7,571 livres 9 sols 3 deniers.
L'Assemblée applaudit à ces actes de patriotisme, et aux sentiments exprimés dans les adresses de ces municipalités.
, secrétaire, fait connaître, par extrait, à l'Assemblée, une délibération de la municipalité de Yéron, district de Sens, par laquelle elle exprime son respect et sa reconnaissance pour tous les décrets de l'Assemblée, et notamment pour ceux qui permettent a^ux municipalités d'acquérir des biens ecclésiastiques et domaniaux , et se soumet d'en acquérir jusqu'à concurrence de la somme de 133,666 livres;
Une adresse d'adhésion du district de Briançon, département des Hautes-Alpes, aux décrets
de l'Assemblée; les habitants de ces montagnes seront d'autant plus fidèles à là
Constitution, qu'ils en ont toujours senti le prix, et avaient acheté chèrement, du dernier
souverain du Dauphiné, des privilèges devenus aujourd'hui le droit commun du royaume: « Notre
pauvreté, disent-ils, » était extrême, mais nos larmes ne coulaient » pas sur des fers. »
(de Coutances). Le comité des rapports m'a chargé de vous présenter un projet de décret : voici les faits qui le rendent nécessaire. Lors de la mort de M. ue Voisins, à Valence, trois jeunes officiers du régiment de Grenoble, artillerie, ont été arrêtés et mis en prison. Il n'y a aucune inculpation contre eux. La municipalité de Grenoble demande qu'ils soient relâchés. Le comité des rapports pense que l'Assemblée doit déclarer qu'aucun citoyen ne pouvant être détenu qu'en vertu de la loi, et que n'y ayant aucune inculpation contre les trois officiers du régiment de Grenoble, artillerie, en garnison à Valence, ils doivent être mis en liberté.
L'avis du comité des rapports est adopté et le décret suivant est rendu :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu son comité des rapports :
« Déclare qu'aucun citoyen ne pouvant être arrêté ni détenu que dans les cas déterminés par la loi, et suivant les formes qu'elle a prescrites, la détention actuelle des trois officiers du régiment de Grenoble, en garnison à Valence, n'étant précédée ni suivie d'accusation, de décret ni d information, ne peut être prorogée ;
« Déclare qu'elle m3t lesdits officiers sous la sauvegarde de la loi ;
« Ordonne que le président se retirera, dans le jour, par devers le roi, pour le supplier de donner les ordres nécessaires pour faire remettre lesdits officiers en liberté. »
, député de Châtellerautt. Je dois rendre compte à l'Assemblée de la difficulté qu'éprouve, dans certains départements, la libre circulation des grains. La ville de Châtellerautt a envoyé à Orléans un député extraordinaire pour acheter les grains dont elle manque. Les officiers municipaux d'Orléans ont prêté leur concours avec cordialité, mais en observant que le peuple s'opposerait peut-être à l'enlèvement de ces grains. Je demande donc à l'Assemblée de décréter ce qui suit :
« L'Assemblée nationale décrète qu'il sera délivré aux députés extraordinaires de Chàtelle-
rault des expéditions pu forme des décrets sanctionnas par le roi, qui autorisent la circulation des grains dans l'intérieur du royaume ;
» Décrète, en outre, que son président sera chargé d'écrire que Ja commission dqnt sont chargé^ les députés extraordinaires de Châtelle-ranit, d'acheter des subsistances dans les villes d'Orléans, Ëlampes et autres villes, est parfaitement conforme aux vœux ue l'Assemblée nationale, et qu'il ne peut être permis d'en troubler ni arrêter le transport pour le lieu de leur destination. »
Je dépose, sur le bureau, des pièces qui prouvent que d.ms le régiment de ftoyaJ-Mur rine, en garnison àAix, on coupe les cheveux et les oreilles aux soldats et qu'on les reuvoie ensuite avec des cartouches jaunes.
Je vais rendre compte de ce qui s'est passé dans le corps de Royal-Marine. Quelques grenadiers ayant fait des menaces au major du régiinen', un d'eux ayant été jusqu'à tirer son sabre et porter un coup au major sans l'atteindre, un autre grenadi r cria : « Que ceux des grenadiers qui restent fidèles se joignent à moi. » Sur 80 hommes, 60 se détachèrent. Ils désarmèrent les 20 autres, les emprisonnèrent et arrêtèrent qu'ils seraient rasés et chassés du régiment. Tandis qu'un caporal rasait le grenadier qui a tiré son sabre, ceiui-ci lui a dit des injures. Ge caporal obéissant à un mouvement de colère, s'est permis de lui couper une oreille; il n'y a pas de doute qu'il mérite d'être puni sévèrement. Voilà le fait. Je demande le renvoi de cette affaire aux trois comités réunis des rapports, des recherches et militaire.
(Ce renvoi est pronom.é.)
L'Assemh'ée reprend la suifede la discussiondu plan du comité ecclésiastique relatif à l'orgawisq-tion et à la constitution du clergé,
, député d'Alençon, Messieurs, si votre rupjUô s'était contenté de vous proposer la réforme des abus qui se sont introduits dansi?adUHuitiration eccttsiastique,s'il vous avait demandé de pioté^er les lègles de l'Eglise, uous aurions tous applaudi à son tiav .il ; mais il n'a présenté que suppression et de.-truction. Déjà les maisons religieuses n'existent plus; il lie -re&te pointu'asileala piété fervente. Les évêchés, les archevêchés, les collégiales et les cathédrales sont menai;* s de proscription, et dans un royaume qui fait profession de la religion catholique, on n'a pas encore pensé à abJir les maisons de débauche et de prostitution, ces tombeaux de lu for-r tune et de la vie des citoyens; c'est là que des régénérateurs auraient dû porter toute leur sevé-r rité; mais des vues financières dirigent celte Assemblée....,
Les pouypirs de l'Eglise sont inaliénables et '^prescriptibles; leur essence est diyine.: elle peut donc les exercer dans toute leur indépendance, Saint Athanasedenaande quel est le canon qpi autorise à envahir les é^lisi g, à s'emparer de l'adinipjslralioji ecclésiastique .Tel le était I hérésie des Anens.... L'Eglise a reçp, avec le dipjt d'eu? s î^ner, tous les droits du gouvernement ecclésiastique; la législation pour le bien général; la coacliou pourariêter les inlractions qui seraient fait s à ta loi; la juridiction pour punir les coupables, et l'institution pour instituer les pasteurs. Jésus-Christ était bien loin de donner aux empe-
reurs ie gouvernement des églises ; il a dit qu'ils en seraient les persécuteurs.....L'Eulise a une juridiction extérieure, qui se manifeste par des actes publics; elle a le droit de faire des canons, d'étaphr la discipline ecclésiastique; elle doit avoir la force nécessaire poilr faire exécuter les canons et maintenir cette discipline, Pïous iisons dans l'Evangile que l'Eglise doit punir les pécheurs incorrigibles ; les Pères reconnaissent une juridiction; ils reconnaissent que les évêques peuvent recevoir les accusations, entendre lesté-moins, et juger. Dans les délits ecclésiastiques, dit Justinien, c'est aux évêques à examiner et à punir. Régir, gouverner les églises, reg er la discipline, faire des lois, instituer les prêtres; telle est la juridiction ecclésiastique. Or, nue juridiction pareille ne peut venir que de Jésus Cnrist; donc elle est indépendante des institutions sociales. En euvaliis-ant celte juridiction, on irait contre les intentions de l'Eglise et de s n fondateur. Les prince*, protecteurs des droits de l'Eglise, au lieu de les matn.enir, en seraient les usurpateurs. A Dieu ne plaise, dit Fénel n, que le projeteur gouverne I il attend humblement que sa protection soit demandée; il obéit lui-même.
Charlemagne, eu qualité de protecteur des canons, exerçait les droiis de sa juridiction en ordonnant l'exécution de ce qui avait été ordonné par les évêques. Lo is le Déb mnaire, à i'uniia-tion de Qtiarleinague, s'est renfermé comme loi dans les bornes prescrites; il a pris, non le titre de législaieur, mais celui de moniteur des lois ecclésiastiques. Les princes neièglent donc pas les églises, ne lont donc pas les canons, ils ajoutent à 1 autorité de l'Eglise celle que Dieu a mise dans leurs mains.Ainsi la protection du souvraiu doit se bornera faire les lois nécessaires à l'exécution des lois de l'Egise, à faire celles que sollicite 1 Eglise, celles qui la protègent, et que l'Eglise adopte et valide par un consentement exprès outacite.....L'Assemblée nationale ne se montrera >pas moins attachée que nos rois à faire executer les lois ecclé.-iastiques. Depuis l'origine ne I Eghse, il n'y a pas eu un évêche institué par la puissance temporelle ; il en est de même de la suppression, car celui-là seul qui peut créer peut anéantir. L'autorité séculière est donc toujours incompétente quand il s'agit de faire des chmgemerils à l'état de l'Eglise. Elie ne se gouverne pas par des spéculations de finances..... Je ne parlerai pas d'un grand nombre d'évêquesqui ue peuvent légitimement être déposés s'ils n'ont commis des crimes. Je ne parlerai pas des curés que vous estimez. et qui cependant se trouveraient bannis et inteidts.... La puissance spirituelle, étant la seule collatrtce "es bénéfices, peut seule juger de la capacité des sujets et de la validité des titres. -L'élection par le peuple serait une usurpa ion et peut-être une simonie. Dans les premiers siècle-, les élections se faisaient par le peuple, mais comme elles causaient oes troubl s, elles ont été attribuées aux évêques, et, depuis, les rois ont succède à ce droit.. .Doit-pn faire illusion au clergé du second ordre.,... (Il s'élève des murmures.)
Je ne l'envisage point ieicummeun ordre politique; je parle seulement d'après la hiérarchie consacrée par le co cile de Trente. En assimilant les eprés aux 72 disciples, et non en les indiquant comme les successeurs des apôtres, on ne s'éloigne pas des principes. Je serai tiaèle à ces principes, parce qu'i s tiennent à la foi. Nous condamnons hautement une doctrine qui couuuitau pre-byté-rauisine, et Si nous pouvions ne pas nous placer contre elle, les évêques, le jour du jugement,
seraient en droit de nous demander compte de notre lâ heté. J'adhère donc à la déclaration de M. l'Archevêque d'Aix, et j'y souscris tant pour moi que pour les églises que je représente.
, Etant député du bail-ljage ïfAieheo», ainsi que le piéopinant, je représente la même Église, et àju-ie titré, puisque l'Kglise est composée de l'universalité des fidèles. Je tiésavbue donc, au nom (Je mes commettants, au nom de la nation tout entière, la déclaration qu'il vient de laire.
Je me bornerai à rappeler en tjeux mots }es maximes évidentes qui jusijfipnt ip (ilfin du comité. £je plan ne fait autre chose qup consacrer les lojs sociales qui établissent les rsppofts des ministres du cuite ayec la société.' Les prêtres, dans l'ordre social, sont de véritables jpayistrats destinés au maintien et au Service du culte. De ces notions simples dérivent tuqs |es principes: j'en présenterai trois qui se rapportent aux trois chapitres du plan du comité. Premier principe : toutes les fonctions publiques sont d institution sociale : elles ont pour but l'ordre et le bonheur de la société; il s'ensuit qu'il ne peut exister dans la société aucune fonction qui ne soit utile. Dey^nt cette maxime dis-paniissept les bénéfices et les établissements sans objet, les cathédrales, les collégiales, les cures et tous les i vêehés que ne demandent p^s les besoins publics. Je mé bornerai à ajouter que le comité a négligé les archeyêques qui n}ont aucunes fonctions séparées cje celles ue§ évêques, qui ne présentent qu'une yaine suprématie. On né doit tfqnp conserver eq France que des évêques et des cures.
Il est une autre application du prin ipe déjà préparée jiqr l'opinion publique; elle concerûe une dignité étrangère, ponféree par un prince étranger, est qui lui donné pour ainsi dire des sujets hors des pays soumis à sa domination. Ainsi les cardinaux disparaissent également de-vant le prinçipe,
Second principe. Les officiers ecclésiastiques étant institués pour le bonheur des ïiomm s et Mur le bien du peuple» il s'ensuit que le peuple do t les nommer; Iles! dé principe qu'il doit conserver tous les drojts qu'j'l peut exercer; or, le peuple peut élire ses parleurs, cppûnq les magisr trats et autres officiers publics. Vous cleyez donc conclure que nqù seulement le peuple doit nom-iper {es évêques, rqais voiis devez encore écarter les eqtrayes qqe le Comité lqi-même q nuises à l'exercice de ce droit.
Troisième principe. Les officiers ecclésiastiques étant établis pour fe bien de la société, iï s'ensuit que la mesure de leur traitement doit être subqr-qpniiée à l'intérêt et à l'utilité''générale, pt non au désir de gratifier et d'enrichir ceux âuftfpir veu t exercer pès'fouctions. S'il s'agissait ijçi d'une simple faveur? je ne balancerais pas à l'accorder aux eèfiiésja§tiuues? et même aux evêques; mais ces traitement^ pe peqyeniêtre sù|"érieurs 4 ceux qu'on donne aux officiers'publics. Ne pérdons pas de yqe que ces traitements seront pavés par ie peuple, par la classe la moins aisée ue la société : ainsi? déierminér çes traitements avec rpservè, cé n'est pas être cruel enyers jes évéques, c'est seulement être juste et compatissant pu y ers les malheureux. Ges trois principes renferipeut la justification complète du projet du comité.
J'ajouterai U'ieob.-ervation d'une grande importance, et que j'au.ais peut-être dû présenter d abord : Quand il s'agit de fixer la constitution
ecclésiastique, c'est-à-dire les rapports des ministres du culte public avec la société, il faut donner à ces magistrats, à ces officiers publics, des motifs qui umissent plus particulièrement leur intérêt à l'intérêt nublic. Il est donc nécessaire d'attacher les prêtres à la société par tons les liens, en... (L'orateur est. interrompu par des murmures et par des applaudissements.) Je ne v> ux rien dire qui puisse orfepser a raison, ainsi que l'opinion générale... (On rappelle à l'ordre du jour.) Je finis en présentant des articles qui for in. ni le résu i ê de mon opinion : Ie il n'existera plus d'autres officiers ecclésiastiques que des évôjues et des curés dans un nombre qui sera proportionné aux besoins de la société; 2° les titres d'arehevéques et de cardinaux seront supprimés; 3° quant au traitement des curés et des évêques, je me réfère au comité ; 4° les évêques et les curés seront élu? par le peuple. 11 est un cinquième article, plus important que tous les autres, que j'aurais énoncé, si l'Assemblée l'avait permis, c'est... (Il s'élève des murmures qui empêchent l'orateur d'achever.)
(1). Messieurs, l'objet soumis à votre délibération est l'ensemble et les bases du plan de la constitution du clergé, proposé par votre comité ecclésiastique. Il ne s'agit point e:i ce moment des détails j il ne s'agit pas non plus d'examiner, en tfié-e générale, les bornes re pec tives de l'autorité ecclésiastique et de la puissance séculière: ilestque-tjon de savoir uniquement si ce que votre comité vous propose peut se faire; et sh'i peqt se faire par vous, sauf les amendemenis et les proposition^ pariiculières qui devront être examinées dans les détails de l'opération.
Le plan cju comité me paraît pouvoir être divisé relativenjent à q taire"grands objets : la distribution des archevêchés et évêrhés; la distribution des paroisses; la manière de pourvoir aux arcne-vêchés, évêchés et cures : lu comité ecclésiastique propose d'y pourvoir par la voie d'élections; enfin, les appels dans l'ordre des matières et de la juridiction ecclésiastique : le comité propose d'anéantir les appels a Rome.
C'est donc sur ces quatre objets :
Distribution (lu territoire des archevêchés et évêchés;
Distribution des paroisses;
Election des évêques et des curés ;
Appels à Rome,
Qu'il faut coqsulter les principes, développer les conséquences, répondre aux objections.
Mais, dès le premier pas, nous nous trouvons arrêtés par une première question que nécessite l'opinion de M. l'archevêque d'Aix: nous spmuie3 obligés de voir où l'on doit puiser les principes.
Après avoir y»ulu l'aire entendre que la division Jes diocèses venait de l'institution mè ne de Jésus-Christ, M. J'arçhevêque d'Aix s'est appuyé de l'autorité des constitutions apostoliques, de la pratique d^s papes, du concile de Trente. Il a cité le concile de ïîicée (Jaos un endroit, a-t-il dit, oji il est question d'arche yêqpes et voulant parler d'un texte de I3 pragmatique de Saiut:Louis, il ne l'a citée, cette ioï, qu'avec la réserve suivante : la pragmatique vraie ou prétendue de Saint-Louis.
ELL vérité, il est bien étonnant que, dans l'As-
11 n'existe point de texte du concile de Nicée où il soit mention d'archevêque. Le premier concile où ce nom ait été employé, est celui d'Ephèse, tenu en 431, plus d'un siècle après le concile de Nicée (1).
La pratique des papes a été, depuis bien des siècles, et même du huitième, un tissu continuel d'entreprises contre les évêques et les princes.
Le concile de Trente n'est pas reçu en France.
Il ne restait donc d'autorité réelle, parmi celles que M. l'archevêque d'Aix a citées, que la pragmatique de Saint-Louis: ordonnance célèbre d'un des plus sages de nos rois, ordonnance qui est uu des fondements les plus précieux de la liberté de l'Eglise gallicane: et c'est précisément sur cette autorité que M. l'archevêque d'Aix à des doutes I c'est à ce moment r.eul qu'il hésite s'il peut ou non l'employer, tandis qu'il n'hésite pas sur le respect que l'on doit aux constitutions apostoliques !
Les preuves que M. Treilhard a données de l'authenticité de la pragmatique de Saint-Louis, me dispensent d'y insister. Si la question n'eût pas été traitée, il m'aurait suffi de renvoyer à une excellente note d'un de nos collègues, M. Durand de Maillane, dans son recueil des Libertés de l'Eglise gallicane, tome 3, page 633 ; mais il m'était impossible, et comme chrétien, et comme Français, de ne pas réclamer sur le choix, tout à fait extraordinaire, que M. l'archevêque d'Aix a fait des sources où il à été puiser ses principes.
Quant à moi, voici les sources où je puise les miens:
L'Evangile;
Les écrits et la conduite des apôtres;
Le code célèbre de Denis-le-Petit, publié en France par Gharlemagne, à la fin du huitième siècle et qui renferme les décrets des premiers conciles généraux, ceux de l'Église d'Afrique, si célèbre par ses saints évêques Cyprien et Augustin, et ceux de quelques autres Eglises ancien -nés;
Les Pères de l'Église, et les conciles généraux.
Toutes les décisions et les pratiques postérieures à celles de ces premiers temps, ou sont conformes à ce qui avait précédé (et alors j'y reconnais celte tradition qui est une des règles de notre foi), ou elles sont contraires : et alors ce sont des nouveautés et des abus à proscrire. On doit les tolérer, lorsqu'on n'est pas assez fort pour les réprimer; ce serait ignorance de ne pas les distinguer des saintes et anciennes règles; lâcheté de les pallier; crime de ne pas les faire cesser quand on en a le pouvoir,
Ouvrons maintenant les sources que j'ai indiquées; lisons-y les principes.
Jesus-Christ, daus le cours de sa mission sur
Après sa résurrection, notre divin Sauveur confirme à ceux qu'il laissait après lui sur la terre la mission qui leur avait donnée, et voici les expressions dont il se sert : Euntes in mun-dum universum prœdicate Evangelium omni crea-turce (Marc. xvi. 15). Il n'y a pas dans cette mission de distinction de territoire; c'est dans tout le monde que les ministre*; de Jésus-Christ sont envoyés pour prêcher à toute créature.
Il n'est donc pas de l'essence de la religion que les diocèses et les paroisses soient divisés, comme il est de l'essence de la religion qu'il y ait des évêques et des prêtres pour prêcher, baptiser et remplir lea autres fonctions de ministres de Jésus-Christ.
Sans doute, le bon ordre, la police devaient déterminer bientôt à distribuer les différents lieux entre les pasteurs, à donner à chacun un territoire particulier, confié spécialement à ses soins. Cette division parait établie dès le temps des apôtres : mais comment Fest-elle? Elle l'est sur le même pied que la division civile, qui existait avant la prédication de l'Evangile. Cela est clairement exprimé dans le texte de saint Paul, où, parlant à Tite, son disciple, il lui dit : Je vous ai laissé en Crètë pour établir des prêtres dans les villes : Hujus rei gratiâ reliqui te Cretœ, ut..... constituas per civitates presbyteros (Ad. Tit. I. 5). Le mot de presbyter employé ici, et que nous traduisons, pour nous conformer à l'usage, par le mot de prêtre, signifie fréquemment a cette époque, un évê^ue : cela est manifeste dans le texte que nous citons, par la fuite des paroles de saint Paul, qui, décrivant les qualités des personnes qu'il avait ordonné à son disciple d'établir dans les villes, dit : Oportet enim episcopum sine crimine esse.
Mais ce qui est à remarquer relativement à la question présente, c'est les lieux où saint Paul prescrit d'établir les personnes dont il s'agit. Elles seront établies dans les villes. Or, qu'est-ce qui constitue un lieu quelconque comme ville, plutôt que comme bourg ou village? Certainement, c'est l'état politique et civil de ce lieu ; c'est de l'organisation civile qu'il résulte qu'un lieU est une cité, civitas : l'autorité spirituelle n'entre évidemment pour rieu dans celte opération.
Ainsi, nous sommes fondés à faire ce raisonnement : L'état des villes, de leurs dépendances et de leur territoire, est déterminé par la puissance civile. Donc, quand l'apôtre déclare qu'on doit établir les évêques dans tes villes, il veut que l'on suive, pour la distribution des territoires entre les pasteurs, l'ordre établi par la puissance civile.
Ce raisonnement est appuyé par la pratique uniforme et constante des premiers siècles de l'Eglise. On sait que l'Empire romain était divisé en plusieurs provinces, dont chacune avait sa métropole. C'est exactement sur le plan de cette division que les diocèses ont été formés, que le territoire de ce que nous appelons aujourd'hui êvèchés et archevêchés, a été circonscrit. Tous les monuments historiques établissent ce fait : les
preuves en ont été recueillies par un savant théologien, aussi exact que critique judicieux, L. Ë. Dupin, dans se3 dissertations sur la discipline de i Eglise. Il y dit expressément que toute l'ancienne distribution de l'Empire romain : Tota ecclesiarum distributio ad formant imperii facta est. Les conciles se sont conformés exactement à cette direction : Hœc consuetudo Cano-nibus confirmata est, totaque Ecclesia ad formam folitici regiminis disposita et distributa est (1). t, par une suite de cette règle, lorsque la distribution civile d'une province changeait, la distribution ecclésiastique changeait pareillement : Cum provincial dividebantur, non raro ecclesiarum quoque status mutari solebat (2).
Ce qui avait été pratiqué dans les différentes parties de l'Ëmpire romain, le fut également dans les Gaules, qui étaient alors une portion de cet empire. Lorsque la religion chrétienne s'y établit, les évéques y furent placés dans les villes, les métropolitains dans les métropoles que la puissance civile avait déterminées. Dupin, après avoir rapporté la distribution civile des Gaules, dit formellement que c'est là la distribution qui a servi de base à la constitution de l'église gallicane : Hœc est Gallice divisio, ad cujus formam olim Ecclesia gallicana constituta fuit (3).
Il était tellement assuré que la qualité de métropolitain, dans l'ordre ecclésiastique,
dépendait du fait que le siège épiscopal était établi dans une ville qui, selon l'ordre
civil, était au rang des métropoles, que l'on voit dans l'Orient, des évéques, ambitieux du
rang de métropolitain, s'adresser à l'empereur pour faire ériger leur ville en métropole, et,
par cela seul, acquérir- le droit de métropolitains dans l'ordre ecclésiastique. L'abus
devint tel à cet égard, que le concile de Calcédoine fut obligé d'y pourvoir : mais, en même
temps, le principe qui annexait la qualité de métropole ecclésiastique à toute métropole
civile était si bien reconnu que le concile ne crut pas possible de le combattre directement.
Après avoir défendu aux évêques toutes ces intrigues et ces sollicitations, il déclara que
ceux qui avaient fait ériger leur ville en métropole par le prince, jouiraient du titre et
des honneurs de métropolitain, mais sans préjudice des droits de l'évêque de l'ancienne
métropole (4). Par un autre canon, qui u'est pas moins remarquable, il défend de troubler les
évêques dans l'exercice de leur juridiction sur les paroisses à l'égard desquelles ils
pourront justifier d'une possession trentenaire ; mais il y ajoute celte disposition : à
moins que l'empereur ne fasse quelque distribution nouvelle à l'égard des villes, auquel cas,
la distribution des paroisses
En France, il se forma, au v® siècle, une contestation qui fut de très longue durée, entre l'évêque d'Arles et l'évêque de Vienne, sur la qualité de métropolitain. La question ayant été portée à juger au concile de Turin en 401, il prononça que, conformément aux canons, celui des deux évêques qui prouverait que la ville avait la qualité de métropole dans l'ordre civil, exercerait les droits de métropolitain dans la province qui en dépendait (2).
Dans l'usage même présent, il subsiste un vestige bien marqué de l'ancienne règle qui veut que les évêcbés et les métropoles soient distribués selon l'état civil et politique des lieux. Lorsque le pape, d'après un usage abusif dont nous allons parler, érige un évêché, il commence, avant d'établir l'èvêché dans tel lieu, par ériger ce lieu en ville, en cité (3). Croira-t-oa de bonne foi qu'il appartienne au pape d'ériger un lieu eu ville ou en cité? Non, sans doute. C'est à la puissance civile seule que ce droit appartient : mais puisqu'un évêché ne peut être établi que dans un lieu qui soit susceptible du nom de cité, et que c'est à la puissance civile à régler l'ordre, le rans et la distribution des cités, nous devons conclure que, dans cette matière, l'Eglise ne peut faire que suivre ce qui est établi par la puissance civile soit pour le siège des évêchés, soit pour le siège des métropoles, soit pour l'étendue du territoire des évêchés et des métropoles.
On oppose à ce qui vient d'être établi, l'usage où sont les papes, depuis plusieurs
siècles, d'ériger les évêchés et les métropoles. Mais on connaît l'époque de cet usage, de
cette possession. Elle date de la lin du huitième siècle, de l'époque où des prélats
ambitieux, tels qu'Ingelram, évêque de Metz, voulant obtenir de Rome des privilèges qui les
établissaient au-dessus de leurs collègues, et des dispenses contraires aux saints cauons,
jetaient, dans des écrits supposés, les fondements des fausses décrétales : ces pièces
funestes à l'Eglise, qui ont causé tant de désordres dans la discipline, et boulversé
entièrement le bel ordre que les Pères y avaient établi. C'est
Qu'importe donc en ce moment» l'Habitude où l'on était en France de recourir au pape pour l'érection des évêchés, pour la division îles provinces, pour Ja disposition des métropoles? L'i sage exi-tait, parce que la nation Française n'exerçait pas ses droits; Dès qu'elle reprend Pex rcice de ses droits» les usages qui n'étaient fondés que sur sort inaction et sur son silence doivent disparaître.
C'est l'Eglise, diUon» qui confie à un évêque l'exercice de la juridiction splritttëlle sur telle ou telle étendue de tenitbire : l'Eglise seule peut lui ôter ce qu'elle lui a donné; et l'évêque qui viendrait exercer sa juridiction sur le territoire que l'Egli e avait assigné à un autre évêque, et qu'elle ne lui avait pas Ôté, serait un usurpateur.
La base dé toute cette Argumentation pofte sur un fait fadX : fiaVoir» que ce suit l'Eglise qui ait déterminé les territbifes des dibcèses. Je Vois bien qbe c'est le pape gui limite et circonscrit le diocè?e de Blois, en 1697 ; mais le pape n'est pas l'Eglise. Il agit, me dira-t-on, au nom et par délégation de l'Eglise ; mais je doute que l'on puisse montrer fcetlë délejiatiob écrite dans Un titre légitime ériianë de l'Eglise; Je saià bien que les pnnes ont déclaré due Ce dfolt leur appar tenait (S2) ; tnais il me Semble quë le liti*y qu'oh se fait à soi-même n'est pas valable. Je montre le titre vi« ieux dé la possession deâ papes ddîis les décrétâtes tëborlbucs fausses ; et quand, remontant aU delà de céttë tiialhebrëuse épOi(de des fausses décrétales, je i-echérche quelle conduite l'Eglise a tehUe, je vois qu lie distribue les êvêques selon la distribution civile des pïuviu-ces ; j'entends les Pères du concile de Galcedoine ordonner de suivre, peut* la disposition ecclésiastique des provinces, les dispositions qui sont faites parla puissance civile: je co iclus que la conduite qui a été tenue alors doit être tenue aujourd'hui ; qu'il appartient à la nation de désigner cei e de ses villes qui seront le chef-lieu d'un diocèse, etqUe l'ïïgliSë ne pourra ni établir, iii conserver Uiie distribution dë phbvitice coh-tiàireà celle que la puissance publique aura établie.
L'Eglise n'a point de territoire 5 c'est une maxime vulgaire parmi nous* Que
sighifie-t-elle, sinon que tout ce qui regarde la disposition des territoires est uU bUr
temporel qui ile iegarde que la pUiéstlhctî eîvilë. Il txiste utlë Ville qui est le chel-lieu
d'un territdire dêténiiinê : l'Église doit y établir un évéque. Lu ville n'existe
On appréhende que Gette suppression de certains sièges épiscopa.ux ne porte quelque atteinte à la perpétuité de la tradition qui se conservé dans chaque église principale, et qui se transmet, sans interruption, d'évêque en évéque.
Cet argument ne, prouve rien, parce qu'il prouve trop. Sa conséquence serait qu'il, ne faut jamais supprimer d'éxêchés, les transférer, ni même en ériger de nouveaux : toutes conséquences évidemment fausses. La seuie Conséquence vraie, est que ces opérations ne doivent pas se faire sans d s raisons graves : ce sont des opérations importantes, mais non des opérations imposSibles.
Vous privez, objecte-t-on, un éveque d'une partie des droits que l'Eglise lui avait donnés; carélle lui avait donné juridiction sur tels iieux qui étaient de son diocèse, et que vous en ré-tranche^ : or, comment pouvez-vous retrancher ce que l'Eglise a donné?
Je réponds que c'ei-t là, précisément ce qui e3t en question savoir si I Eglise a donné juridiction sur tels lieux nommément et individuellement. Il me paraît évident, au contraire, que là cir conscription du diocèse, existant par le fait de la dtsiribution établie par la puissance civile, l'Eglise, lorsqu'elle consacre un évêque, ne lui assigne pas pour l'exercice de sa juridiction tels lieux nommément^ mais le toiàl des lieux qui, selon l'ancienne distribution civile* ont formé le diocèse! distribution toujours susceptible d'être changée par la puissance civile, parce que c'est d'elle seule que* dans le principe, elle a été l'ouvrage;
Au moins, dit-on encore, vous ne pouvez s as nier que vuus ôtez à un évêque ce dont il jouissait; que vous réduisez au néant le pouvoir d'un ministre qui; n'ayant ps prévariquë^ nedoit perdre ni le titre, rti les droits, ni ie pouvoir qui lui avaient été confiés pour sa vie.
Je reponds qu'il ne faut pas confondre, ainsi qu'on fait daris cette objection, les actes du pouvoir judiciaire avec lesacteadu pouvoir législatif, ni les opérations générales avec lés opérations particulières* II a été tiès sagement établi qu'au-cuné puissance ne pourrait priver un particulier de son droit, sans Un jugement rendu d'après des formes pour constater que ce particulier individuellement avait mérité de perdre son droit: autrement le despotisme et l'arb.t: aire n'auraient point de borneSs Mais ce qui a été établi pour ie cas particu ier cesse d'être vrai pour une disposition générale du Corps législatif. Le juge applique la loi existante; le législateur anéantit la loi existante et eu fait une nouvelle. Le paitt-culier pebt perdre quelque- avantages par ta disposition générale, nouvelle, mais il ne peut pas appeler injustice une loi laite pool* le biëti géUé-ral de la nation dont il est membre,
PouiqUoi l'Eglise, qui est tlàiiS l'Étàt, â'ë'ève-râjU-elle,contre une disposition, qui est faite par l'État ? N'est-ce pas une vérité certaine qu'uuè nàtion a le pouvoir d'admettre dans son sein telle ou telle religion ? Elle abusé de sun pod-Vbif, si elle fyflise dë rëëeVdir là triiië religion, Si ellé eîi âJuiet uilë faussé: tiiatë edlin, tel est son pouvoir. Saris doute, uhë nation de.peut pas, eu admettant uhe religion, refuser de la laisser jouir de ce qui es! essentiel à cette religion ; on
ne peut pas vouloir une chose sans vouloir ce qui est de son essence* Mais pour tout ce qui n'est qu'accessoire^ la nation est libre; elle peut faire ses conditions et l'on doit y souscrire.
La nation française fait aujourd'hui sa Constitution ; e le est assemblée en G invention nationale; elle se rendrait coupable d'un crime horrible si connaissant* ainsi qu'elle a le bon-hmr dé le connaître, la vérité et la sainteté de la religion catholique, elle la rejetait ; elle tomberait dans une absurdité insensee si, en admettant la religion catholique/ elle rte voulait pas admettre des évêques et des prêtées, ministres essentiels de sa foi et de son culte: mais pourquoi ne serait-elle pas l'ondée à dire aux chefs de cette religion : Il vous faut des villes épiscop îles : nous vous en donnons quatresvir]yt-t:os, et nuus né croyons pas bon«pour l'ordre civil et politique de l'État qu'il y eu ail davantage? Cette condition impossible à rejeter au momént où une Convention nationale admettrait la religion catholique, nous paraît également impossible à rejeter au moment où uhe Convention nationale conserve,- comme elle le doit, la religion de nos père*, la religion venitable.
Les principes qui règlent la distribution des diocèses et des évêchés né sont pas moins vrais à l'éyard dè la distribution des paroisses* Comme il ne doit être établi d'evêchés que dnns le* vides principales et les chefs-lieux, il nedoilêtre établi decuns que dàbs les villes, les bourgs, les lieux où l'existence d'un pasteur est nécessaire^ parue qu'il y a un troupeau suffisant à conduire; L'état des bo.irgs ét des villages, la circonscription de leur teHiloire, la désignation de leurs limites étant encore des objets qui appartiennent à la puissance poliiqne et civile, la détermination du territoirë des paroisses est de son rfes^drt» et il n'y a pas de motif pour s'écarter ici de la règle générale du cuncile de Calcédoine* qui prescrit de se confi rnier, dans toutes ces matières, aux ^ dispositidhs de la puissance civile.
Je passe, Messieurs, an second objet principal du plan du comité* qui est la disposition des évêchés et des cures par la voie de l'élection.
Un des préopinaots, M. Tréilliàrdj après vous avo r exposé les différentes ma dères de pourvoir aux évêchés et aux cures, a conclu de cette variété que la forme de disposer île ces places etiiii pleinement dans lu main de la puissaiicë temporelle. Je ne suis point dè cet uvisj. La tniinière dé disposer des ëvêchés et des curés n'est pas arbi* traire : elle a été fixée pur les apôtrek* Gètte manière de disposer, seule canonique, seule légitime* est la voie de l'élection* ét toutes les fois qu'un s'e i est écarts ça été par un abus dont l'Eglise* la religion et la raison sollicitaient la réforme.
Dès les premiers jours de lartuissaneede lEgiise, il fadt î'érriplir la jdace qdé Judas laisfe1 vacunte dans l'apostolat. Pierre en fait la proposition uu nillieu de l'assi mblée tlés frètes iii itiedio fra-trum; au milieu de tout cë qui composait alors 1 Ëiil'Séj état aulëïix turba hôtttiiluin sirrtul féfe centum viginti. Il leur demanfe qui ils choisissent: B irsabas et Mât)Hias leur paraissant d'un ipérite éfjalj ils les présentent tous deux* et sta-iuerunt duos : aiors on Convient de s'en i apporter au sort pour se décider éntre les deux ; et dede-rutlt tories super eli (Aèt. ûpost. c. i) C'est la su" cii'lë ëHilMi- des fldOlës, tÛVbh HonitiîiitH, qui Choisit, slàtueruiit; qui détérhiine la voié dd Sort, dederuht sortes: Pierre lié fait que présider à, |'aciioUi commune; lesurt tpmbe sur Matthias^ et il est mis au nombre des apôtres.
Gat exemple était trop respectable, il était trop formel pour ne pas le suivre, lorsque l'on aurait à nommer les évêques successeurs dés apôtres. Aussi le voyons-nons eonstahirnenl entretenu pendant 1 s premiers siècles de l'Eglise. S'il s'introduit une autre forme de nommer aux évêchés, il est facile d'apercevoir les causes et les, motifs de l'interversion de la forme ancienne. Ce sont des intérêts particuliers qui la forit cesser; les princes recommandent d'abord, pois ils exigent, puis ils disposent seuls : mais personne n'ignore ce qui fut dit généralement lors de la passation du concordat de 1560.
que le râpe, en donnant à François Ier le droit de nommer aux évêchés, et François Ier en donnant au pape les annales, avaient également disposé l5un et l'autre de ce dont ils n'étaient propriétaires.ni l'un ni l'autre.
Les réclamations de la nation et de l'Eglise gallicane contre la cessation des élections
sont Consignées dans la pragma'i iue de sainf Louis» de l'année 1268;dans celle.de ChaHes
VII, dé 14181 dans l'Assemblée des Etats à Orléans, sut la demande desquels les élections
furent rétablies par l'article 1er de l'ordonnance du mois de
janvier 1560;
Au surplus, lorsque je parle ici d'éléction, j'entends un chois fuit par tout le peuple auquel il s'agit de donner un pasteur. Les apôtres proposèrent l'élection à faire, pour re nplacer J nias, à tout le peuple nui composait l'Eglise* turba komi-nurht Les successeurs des apôlres, fidèles à leurs préceptes* ne devaent p :s exclure le peuple des élections; ils 1rs y appelaient : le fait est file à justilier par une multitude d'exeinnles, je vais avoir occasion d'en rappeler particulièrement quelques-uns.
M. l'archevêque d'Aix prétend que le peuple n'était présent aux élections que eomine témoin, poUr averlir les évêiues qui y présidaient» si le nouveau pasleur qt» on allait établir s'était rçndu indigue de I'épiscopaÈ par sa conduite } il ajouta que ce droit du peuple est conservé par la demande qu'on lui fait* au moment de la consécration d'un évêjue* s'il n'a aueune plainte à proposer.
Il est fâcheux pour ce système, que les textes les plus respectables expriment formellement le contraire. Saint Cvprien rapporte, dans une lettre oU'il à écrite en 232, lu Itfanière dont le pape CoriiPille a été élevé sur le siège d(: Rome, et il dit: Faetiis ést Cornélius epiScopus deDai et Ûhrisii ejus jitdiûiOi decleriëorumpeneomnium testimonio, de plebis quee tune affuit suffragio (1).
Suivant ce texte le cierge ne fuit que rendre témoignage de la vie passée de celui que l'on peut souhaiter pour pasteur; nous l'ôvous vu parmi nous* fidèle à ses devoirs, de mœurs pures* d'une piété et d'une science qui le rendent capable Je CondUiré lé péuplë de ûieui Voilà Ce.qu saint Cyprien appelle clericorum omnium testimonium, ti c'est sur ce témoignage que le peuple expr ime son vœu, qu'il donne so i suffrage, et que par ses voix rédhieé il fdhne l'êlétitionJ plebissuffragiwm.
On a vu, daUë quelque^ tircOttstàncëS, lë peuple insister avec fermeté pour ôbtenil- Un
evêqUë de son choix libre, contre je Voéd deê éVêqUëâ qui le refusaient, et cette fermeté
être justifiée par l'excellence de la personne que le peuple avait choisie. C'est ce qui
arriva à I élection de sai.nt Martin. Sulplcé-Sévèré ëii a déliril toutes lés
eir-coostaritirS. Il n'y eut peiit^ètie juniais d'assem-
« On avait tellement égard au consentement du « peuple dans les élections, dit l'abbé Fleury, que « s'il refusait de recevoir un évêque après" qu'il « était ordonné, on ne l'y contraignait pas, et on « lui en donnait un autre qui lui l'ut agréable (2). »
Les évêques doivent être élus par le peuple du diocèse. Pourquoi les curés ne seraient-ils pas élus par le peuple de leur paroisse? Ils sont, quoique dans un rang différent, pasteurs les uns et les autres, établisles uns et les autres par Jésus-Christ pour gouverner son église. J'ai remarqué dans les expressions dont M. l'archevêqued'Aix s'est servi pour exposer l'état des évêques et celui des prêtres, une différence qui couvre une inexactitude dans la doctrine. Il a dit que les évêques recevaient leur pouvoir de Jésus-Christ; que les prêtres les tenaient de Jésus-Christ par le minis-tèredesévêqurs. Que signifient ces derniers mots? Veulent-ils dire que c'est par l'ordination dout les évêques sont les ministres, que la mission divine est donnée aux prêtres? Cela n'est pas moins vrai des évêques que des prêtres: les évêques ne reçoivent eux-mêmes la mission divine que par la consécration, de laquelle d'autres évêques sont les ministres. Mais si M. l'archevêque d'Aix a voulu, par les expressions qu'il a employées, faire entendre que la mission divine des prêtres était moins directe et moins immédiate que celle des évêques, il a avancé une proposition fausse. L'Eglise a constamment reconnu que les évêques* comme successeurs des apôtres, et les curés, comme successeurs des soixante-douze disciples, tenaient directement etimu.édiatement leurs pouvoirs de Jésus-Christ, quoique ce pouvoir ne leur fut transmis que par un sacrement dont les hommes sont les ministres.
Les pasteurs de l'Église doivent être choisis par les peuples. Donc les curés, pasteurs comme les évêques, quoique dans un rang différent, doivent être choisis par le peuple aussi bien que les évêques.
M. l'archevêque d'Aix assure qu'on ne trouverait pas un exemple d'élection faite pour
nommer a une cure. Les persoanes instruites ne lui passeront pas cette assertion; Gohard
rapporte des preuves contraires (Théor. du droit canon, tom. II, p. 709). Si les exemples de
ces élections sont moins communs, en voici la cause.
Mais les prêtres, comment étaient-ils ordonnés, et par les suffrages de qui étaient-ils élevés au sacerdoce? Par les suffrages du peuple. Lorsque les apôtres avaient institué les diacres, ils s'étaient adressés au peuple, ils avaient convoqué tous les disciples, convocantes multitudinem dis-cipulorum; ils leur avaient dit de choisir sept personnes recommandables par leur vie passée, et la multitude entière avait choisi Etienne et les autres : Placuit sermo corarn omni multitudine, et elegerunt Stephanum (Act. Apost., cap. VI). Gomment n'aurait-on pas suivi la même règle pour élever à un ministère plus important, au sacerdoce? Aussi saint Cyprien, ce fidèle témoin de la discipline la plus pure de l'Eglise dans ses beaux jours, nous atteste-t-il que l'ordination des prêtres ne se faisait qu'en présence du peuple, d'après son vœu ; et il ne reconnaît d'ordination juste et légitime que celle qui est fondée sur le suffrage, l'examen et le jugement de tous (1).
Les évêques écartent insensiblement le suffrage du peuple, ils ne l'appellent plus aux ordinations; mais peu de temps après on voit les patronages s'établir, et ces droits de patronage n'étaient-ils pas une sorte de droit d'élection? ceux que l'on appelait alors seigneurs de paroisses, n'étaient-il3 pas tout dans la paroisse? le peuple était-il compté pour quelque chose? et lorsqu'à cette époque vous voyez le seigneur choisir le curé pour le présenter à l'évêque, n'est-ce pas réellement le peuple qui choisit son curé par la voie de son seigneur? Aujourd'hui, Messieurs, que vous avez remis les seigneurs dans le rang des autres citoyens ; aujourd'hui que vous avez rendu au peuple ses droits, l'électiou qui se faisait par un seul, doit être faite par tous, et c'est le choix commun qui doit déférer le droit de conduire les autres.
La religion veut les élections : je viens de vous en donner les preuves; j'ajoute que si
elle ne disposait de rien à cet égard, la raison exigerait que les pasteurs fussent établis
sur l'élection du peuple. C'est alors qu'on est obéi avec respect, quand on n'a été élevé que
sur les preuves publiques et connues des talents et de la vertu. On affectionne comme des
enfants ceux que l'on conduit, lorsque ce sont eux-mêmes qui ont donné le nom de Père; la
confiance est intime entre celui qui a été appelé et ceux qui l'ont appelé. Comment
choisirait-on un homme qu'on ne respecterait pas, ou comment ne respecterait-on pas celui
qu'on a choisi par la seule considération de son mérite? L'expérience est uo sûr
Les appels sont le quatrième objet principal de la constitution proposée par le comité ecclésiastique. J'ai remarqué, Messieurs, que votre comité supprimait les appels à Rome, et sur ce point encore il faut convenir que le comité rappelle les maximes exactes de l'ancienne et pure discipline ecclésiastique.
A Dieu ne plaise que je méconnaisse ni la primauté des successeurs de saint Pierre, ni la nécessité indispensable que toutes les églises du monde communiquent avec l'Eglise de Rome comme avec le centre de l'unité de la religion catholique; mais de ce qu'il doit exister un centre d'unité, il ne suit pas que celui qui occupe ce centre doive avoir juridiction sur toutes les églises. La primauté de Pierre fut une primauté de surveillance et d'exhortation, ce ne fut point une primauté de juridiction.
J'aperçois, au ive siècle, des tentatives faites par les papes pour s'attribuer une juridiction universelle, un droit de revision ou de ressort sur les autres Églises; mais en même temps, je vois dans une Église célèbre, l'Eglise d'Afrique, l'Eglise qui fut gouvernée par les Cyprien et les Augustin, une résistance, aussi ferme qu'elle était juste et éclairée, à ces entreprises nouvelles.
Vers l'an 417, Apiaritis, diacre de l'Eglise d'Afrique, ayant été excommunié par son évêque, s'adressa au pape Zozime, qui se permit de prononcer son absolution. Il lit plus, il nomma des légats pour aller rétablir Apiarius en Afrique et envoyer son évêque à Rome, s'il refusait d'obéir aux légats. L'Eglise d'Afrique s'assembla en concile. Les légats argumentèrent du concile de Nicée. Lesévéques africains déclarèrent qu'ils étaient prêts à se soumettre à ce concile tant respecté; leur conduite avait été formée sur ses décrets, le cinquième de ses canons voulant expressément que toutes les plaintes qui seront portées contre la sentence d'un évêque soient définitivement jugées dans le concile de la province. Les légats du pape citèrent d'autres canons qu'ils attribuaient au concile de Nicée et qui donnaient au pape le droit de revision. Les évêques africains furent surpris de cette citation; ils ne trouvaient aucun texte semblable dans leurs collections du concile de Nicée; on examina les faits; il fut vérifié que le texte était pris dans un concile particulier, tenu à Sardique en 347, et que les légats l'attribuaient faussement au concile général de Nicée (2).
Une pareille conduite n'était pas propre sans doute à déterminer l'admission des appels à
Rome ; aussi les évêques africains les rejetèrent-ils plus fortement encore qu'ils n'avaient
fait, et ils déclarèrent que quiconque croirait pouvoir appeler à un tribunal outre-mer (à
Rome) ne serait reçu dans la communion d'aucun évêque d'Afrique (3).
Je pense donc, Messieurs, que le plan de votre comité est bon dans sa généralité, que les bases sur lesquelles il repose sont bien fondées et que, dans ses opérations essentielles, il ne vous présente rien au-dessus de votre pouvoir. Le3 détails ne me paraissent pas tous également bons; mais ce n'est pas de ces détails qu'il s'agit en ce moment. La question est, en général, de savoir si vous pouvez faire ce que l'on vous propose, et je n'y vois pas de difficulté.
J'irai plus loin, Messieurs, et, supposant une incertitude, que je ne vois pas, sur le pouvoir que vous avez d'établir la démarcation des diocèses et des paroisses, je dis qu'il ne serait pas conforme aux lois de la religion de résister à l'exécution de vos décrets, de les arrêter par des oppositions, par des protestations, par le refus des secours spirituels de la part des pasteurs dont on aurait étendu le territoire, ou par la persistance de la part de ceux qui ne seraient pas conservés, à offrir aux membres de la nation des secours que la nation ne leur demanderait plus.
Il est dans l'Eglise une grande loi, une loi supérieure à toutes les autres : la loi de charité. Elle passe avant toutes les règles particulières, et, lorsqu'elle se trouve en concurrence avec quelque autre loi,- la loi de la foi exceptée, elle l'emporte et elle règle la conduite du vrai fidèle. Les règlements de la discipline ne sont rien auprès des devoirs de la charité : l'histoire de l'Eglise nous en fournit un exemple mémorable.
Les Dohatistes s'étaient séparés de l'Église; des évêques avaient été entraînés dans le
schisme ; d'autres avaient été ordonnés par les schisma-tiques. Saint Augustin et lesévéques
catholiques d'Afrique avaient fuit tous leurs efforts pour les ramener à la véritable foi :
ils avaient eu des conférences avec eux; ils les avaient convaincus de leur erreur, mais il
se , trouvait un grand obstacle à leur retour à l'Église. Le peuple ne voulait pas abandonner
les évêques qu'il avait choisis, et ceux-ci mêmes étaient attachés à la qualité qu'ils
avaient reçue. Dans cette position, les évêques catholiques consentirent, dans deux conciles
successifs (1), à partager avec eux l'ad-
Les évêques craindraient-ils d'exercer leur ministère au delà des anciennes bornes tle leur diocèse? prétendraien^ils n'avoir pas de juridiction au delà db ces limites? ils auraient doue oublié Cette vérité si hautement attestée par saint Cyprien, qué l'épiscopat est tin ; que chaque évêque possède une partie du pouvoir épiscdpul* mais pour l'exercer solidairement avec les autres, dans le cos bù le bien d s fllèlës l'exige (3) ; qbe si la juridiction des évê|Ues connaît des limites, la charité èpiscopale n'en connaît pas (4); « Dans les occasions de nécessité, disaient les « évêqiles de France en 1665, les évêques sbnt « dispensés de garder les bornes qui sont mises « à la juridiction i car aiors* ajoutilient-ils dvec 8 saint Epiphàtiej ilsdevieutn nt universels, et ne « doivent reconnaître abeune loi que' la cliurilé I nui est au-dessus de toutes les lois (5).
Ainsi la question doit se réduire, à l'égard même des esprits lés plus timides et les plus
Scrupuleux, à cette proposition:. Supposé que la nàtioii* faisadt des lois cons
ituiiouneiles, Outrepasse les bordes de son pouvoir en règlailt les limites des diocèses et
Ues paroiss-es, faut-il se Cohformér à cetté décision, ou y résister éh re-fusant les
sacremehts et autre.> secours de l'Eglise, à ceux qlii se trouveraient dans les parties
ajoutées âi X anciens diocèses; en exerçant, contre la Volonté dé la nation, par les évêqUes
dont les sièges ne seraient pas conservés, leurs anciens pouvoirs?
Mou avis est qu'on délibère sur le plan du co nité, sauf les amendemeuts à proposer sur les articles paiticuliers.
Plusieurs irriémbrës demandent l'impression du discours de M. CamuS.
L'IdipiV-ssiou est ordonnée.
propose de fermer la discussion.
Cette motion est rejëtéè.
, curé dé Roanne, député du Forez (I); Messieurs avant d'aborder cette ijues-tioii importante soumise à votre eXuni' ri* je dois vous prévenir qu'il ne s atiit point du temporel, mais uniquement de la puissance spirituelle; il ne s agit point d'un décret porté par l'Assemblée, mais d'un i tojet uu Comité ecclésiastique.
Vous ne devez point craindre que ceux qui, par état et devoir, prê lient la soumission à là loi et à toute puissance léfiilime, s'oubliént jamais jusquà autoriser, par leurs Conseils et leurs exemples* l'insuboidinaiiou. Je vous prie aussi, Messieurs, dé vouloir bien iri'edtendre jusqu'à la lin parce que Souvent les conclusions indiquent uu rapprochement q ie la i-uite du discours he paraissait point promettre.
Mes setitiniénts ne doivent poi-.t vous être suspecta Ma reunioh aux communes* dans le inu-mént où le salut de l'Etat paraissait la commander, doit éloigner tout soupdon défavorable à mon pa'.ribtisméi L'esprit du véritable citoyen ne s'éteindra jamais en moi, et mon dernier soupir sera pour le bonheur du peuple.
J'ai pu, j'ai du me taire, loi-sq l'on dépouillait le clergé; 'coïàrii tàûdeîitë sè
obfautescël. Lé phi-
Oui, Messieurs, il y a des abus dans le clergé : abusdans ladistriliiitiondeses biens, abus daus le gouvernement particulier de certains diocèses et de cet laines paroisses. Il y a des scandales dans le sanctuaire; mais où n'y en a-t-il pas et de plus grands encore? Cette A^sembiee même, convoquée pour traiter des intérêts de la fiation* en est-elle exempte? Il y a des abus; mais à qui les attribuer? Ëst*ce au clergé* qui gémit et ne peut que gémir sur le scundule ne ses membre^ qui déshonorent et surchagent sont e*irtence? Est-ce au roi dont la religion est Surprise? 11 y a des abus, et il y en aura toujours, parce qu ; l'homme ne co*se pas d'être homme en servant la divinité. Mais est-il surprenant que le Glergé, obligé de vivre au milieu d'un monde si dépraVé, où l'impiété a renverse tous les principes de la morale* desséché jusqu'au germe des vertus* érigé le vice même en maxime; est-il surpieuant que le clergé se soit ressenti de la contagion? Il y a des anus; mais j ose vous le demander* Messieurs* avec confiance* quel est le corps où il se trouva à proportion» plus de vertus? Vous allez me citer un grand nombre de clercs qui se pio-duisent au milieu des scandales du monde; vous ne v yrz que ceux-là, parce que les aulres vivent dans le silencé et la retraite, ethese montre que par nécessité; Mais allezdans les presbyiè es, dans les egliseâ, daus les éémiiulirbé, dans les retraites* dans les congrégations ecclésiastiques; regardez eniiu partout ailleurs que dans les assemblées du monde* et vous y admirerez un grand nombre d'ecclésiastiques que vous ne connaissez pas, et que vous euveloppez sous l'ana-thè ne.
Il y a des abus* et combien de fois le clergé, pour les réformer, a demandé inutilement la permission de tenir des conciles provinciaux ? moyen le plus naturel de ré.ablir la discipliné ecclésiastique* Il y a des abus; il ne faut doue pas détruire l'autorité épiscopale* qui seule peut les réformer;
Gui Messieurs* je le dis avec assurance, parqe que ma réponse a pour base Un article de foi» Il n'appartient qu'à la puissance apostolique de réformer les abuSdj gouvernement ecclésiastique, par conséqueut c'est aux évêques seuls, qui sont les successeurs des apôtres* et ont reçu le même
pouvoir qneJ.-C. donna àses anôtres4 que ce droit est incontestablement et uniquement dévolu.
For i ez donc* Messieurs, des vœu* pour la réforme; so licitez là, prési rlteg des projets; on applaudira à votre zèle: mais laissez-en l'examen aux évêques et au souverain pontife,n'attendez que d'eux des règlements qui puissent avoir force de loi. G'est au pape seul qbeJ.-G* a confié le gouvernement de l'Eglise universelle avec juridiction; c'est aux évêjtles seuls qu'est confié le gouvernement des diocèses particuliers; associés à leur ehefj ils participentausâi au gbuvernemeut de lEglise universellei Les curés, les prêtres ont une portion de l'autorité s;icerdutnle pour veiller aux soins du troupeau dont ils sont les pasteurs; ils sont le conseil de l'évépie, ses eoopérateurs, non ses égàux ni quant à l'ordre, ni quant à la juridiction du gouver.nem.ent» pas même en ce qui regarde l'administration de leurs paroissesiA nsi les ciiré-!, les autres prêtres et les ministres iiifé' rieurs exerçant une partie des fonctions apostoliques avec subordination à 1 vè |ue» le^ évêques exerçant toujours les fonctions apostoliques avec juridiction sur leurs diocèses» forment, par la chaîné di*.la .niérarchie ecclésiastique, ce qu'on appelle l'fijlise enseignante; ét, par .l'union dé tous les lidèies subordodnés à l'Église enseignante, soit par rapnort au dogme, soit par rapport à la discipline» ils forment l'Eglise universele.
Te le est ma foi, telle est la foi de tous teé catholiques; tèlie est sans doute la foi de cette respectable Assemblée. La constitution d'un gouvernement civil peut phanger; mais celle, du gouvernement ecclésiastique est immuable: J.-G. l'a fondée sur la pierre, rien ne saura t l'ebranler, rien ne saurait l'entamer* et s'il était en votre pouvoir de détacher une seule pierçede l'édifice, vous le feriez crouler en entier; Interceptez là correspondance qui doit nécessairement exister entre les évê iues et le papp» rompez les liens de subordination qui lient les méines éVèques aveG leur chef» et qui forment l'uni é de l'épisco^at, il n'y aura plus en France que des petites Eglises isolées et indépendantes dans chaque diocèse. L'indépendance des évêques dégénérera bi niôt en une déplorable servitude* Pour éviter le prétendu despotisme qu'on a reproché au souverain pontife, les prêtres et les ministres inférieurs voudront partager avec les évêjlies l'autorité de de juridiction ; ils ieur oppo-eroiit, pout-se rendre indépendants dans leurs paroisses, et pour reje-lër tous lés ordréâ et tods lëS maridéhi^htsqu'on leur adre^érii, touteé les ràisonà, tous lés prê^ textes qu'Un allègue pour soustlairè lés évêques à la jiiriilibiion dé3 paptrè. Le§pÙf'çS et l&s prêtres, b'etuiit alfranchis dé la feubof-dlnaiion envers répiàCOpàt, se irbUverbpt éuk-tliêines â leur toùr asservis â ll'Urs parOlssiétls (jùi leur donneront des ofdrek, qui l'êglerUnt le gouvernement dÔS (iardiSSeS, et qiil h tir répéteront Sans ces^e ce qu'un maître dit îi Séà ouvriers: Mps^ siéuts, noité voili payons. CtJà coliséqiietiCeS commence l Uëjâ â se réaliser. L'artariihië Spirituelle serdit-elle donc moins ëffràyànle que l'arnarchiè politique?
Podr vous convdinére, Mestéiëurâ, ét faitë pas* serdans votre âtbe la iljstë teriedb que j'épfouVôj suivez aVec iHol les plihcii»àdx afticlés llll rapport dé votre comité qui est âûliiriiâ à voti é ëxa-men :
« Votre comité ecclésiastique a pensé qu'il hè « pouvait rieii faire de mieux que de prendre I « pour base de son travail les maximes de l'an-
« cienne discipline. Depuis huit à neuf cents « ans elle est l'objet des regrets de tous les gens « de bien. Les plus saints personnages et les « écrivains les plus distingués par leurs lumières « et leur piété n'ont cessé de faire des vœux « pour son rétablissement. Plusieurs conciles « ont tenté de nous y ramener, et l'ont tenté « inutilement. L'intérêt personnel et les passions « des hommes y ont apporté les obstacles les « plus insurmontables. Il fallait, Messieurs, toute « la force de la Révolution dont nous sommes « témoins; il fallait toute la puissance dont vous « êtes revêtus pour entreprendre et consommer « un aussi grand ouvrage (page 7). »
C'est-à-dire que, depuis buità neuf cents ans, ce que les vœux de tant de gens de bien, ce que les lumières de tant d'écrivains distingués, ce que tant de conciles généraux et particuliers tenus dans le monde entier ont tenté inutilement, c'est à vous, c'est à votre sagesse, à votre puissance à l'exécuter; à vous, quoique vous ne soyez assemblés, quoique vous n'ayez mission que pour traiter des affaires civiles, quoique vous ne pouviez en avoir d'autres; à vous, quoique, pour pour la plupart, vous n'ayez jamais fait une étude particulière des principes du gouvernement ecclésiastique, ni des vérités théologiques qui leur servent de fondement -, quoique J.-C. ne vous ait donné aucune mission, quoiqu'il ne vous ait promis aucune grâce, il vous était réservé d'entreprendre et de consommer ce grand ouvrage. Une adulation aussi emphatique, capable d'exciter la risée de l'Europe eutière, l'entendez-vous sans indignation, et lorsque vous voudriezpou-voir l'exiler à jamais du séjour de vos rois, ose-rez-vous l'accueillir favorablement dans l'Assemblée des législateurs qui ne doivent voir que la justice et la vérité? On reproche aux lutheriens et aux calvinistes de réformer la discipline à leur façon, mais du moins dans l'exercice révoltant d'un droit qui ne leur appartient point, ils laissent la discussion des points de réforme à leurs docteurs, qui sont chez eux comme nos évêques, les prêtres de la réforme. Ici c'est un comité composé pour la plus grande, partie de laïques, à qui le gouvernement de l'Église est étranger ; c'est le comité qui enfante le plan général de la réforme; mais sur quelle base reposera-t-il? Votre comité a pensé qu'il ne pouvait rien faire de mieux que de prendre pour base les maximes de l'ancienne discipline.
Mais qu'entend-on par maximes de l'ancienne discipline, deux termes qu'on n'avait jamais vus ensemble? Ne croyez pas, Messieurs, que ce soit une simple dispute de mots. Entend-on, par ces termes, les canons de l'ancienne discipline qui peuvent varier ? Entend-on les maximes sur lesquelles est fondée l'ancienne discipline ? Mais ces maximes qui tiennent aux vérités de la foi sont immuables, et soumises, comme telles, aux jugements des évêques.
Veut-on dire qu'on a pris pour base de la réforme, les canons, les usages de l'ancienne église sur la discipline? Je dirai : point de canon plus ancien et plus respectable que le décret du concile des apôtres qui défendait de manger du sang des animaux. Rien de plus respectable que le précepte que fait saint Paul aux femmes, de ne jamais paraître dans les assemblées qu'avec un voile sur la tête. Ordonnerez-vous l'observance de ces règlements ?
Dès le commencement de l'Église, on voyait des diaconesses, ou prenait des repas modestes
dans le temple; voudriez-vous les rétablir? On permettait dans l'église de Jérusalem, du temps des apôtres, à chaque fidèle de parler et d'instruire selon qu'il était inspiré,^ de parler même en une langue que les autres n'entendaient pas : on donnait le baptême par immersion, la communion aux fidèles sous les deux espèces ; voudriez-vous rétablir cet usage?Les cérémonies, les prières de l'Eglise étaient très différentes de celles d'aujourd'hui; vous proposera-t-on de les reprendre? Dans la suite on a fait de nouveaux règlements de discipline; ces règlements ont varié selon les temps, les lieux et les circonstances. Autre était la discipline d'Afrique ; autre était la discipline de Milan, comme nous voyons dans l'oblation que sainte Monique voulut porter sur le tombeau des martyrs.
Eh bien ! adoptera-t-on tous ces anciens canons, tous ces anciens usages? Non, sans doute, me répondra-t-on; mais on fera un triage. Ce n'est donc plus l'ancienneté des canons, ni l'autorité de ceux qui les ont faits qui doivent servir de règle. Cependant le projet de réforme est assis sur cette base. Que doit-on attendre du projet en lui-même? Qui fera donc ce triage? Nous-mêmes, répondra-t-on. Oui, ce sera nous-mêmes qui choisirons ceux qu'il convient d'adopter relativement aux préceptes de l'Evangile, que nous interpréterons suivant que nous serons inspirés^ relativement aux besoins des fidèles, aux inconvénients, aux avantages des diocèses, des paroisses dont les sollicitudes ne neus ont jamais occupés. C'est en partant du même principe que Luther a commencé sa réforme, qu'il a supprimé les messes privées, supprimé les habits sacerdotaux, supprimé les cérémonies publiques de religion, changé les prières de l'Eglise, introduit des rites nouveaux. Il avait vu des prêtres mariés au commencement de l'Eglise, il n'y avait point vu de vœux solennels de religion; en conséquence, il abolit tous les monastères, il décida que le vœu de chasteté était contraire à la loi de Dieu, et il se maria avec une religieuse : c'est le dénouement de la scène. Après qu'un ecclésiastique, un grand vicaire, s'est permis d'enseigner publiquement, dans un projet de réforme, que le vœu de chasteté était un vœu anti-social, et par conséquent nul, nous devons nous attendre tous les jours à voir parmi nous des imitateurs de cet hérésiarque. Que faut-il donc faire? Il ne faut donc pas prendre les anciens canons pour règle ; mais la base sur laquelle est fondée toute la discipline de l'Eglise, les anciens canons comme les modernes; et cette base qui est immuable, qui tient à la foi de l'Eglise, c'est qu'il n'y a que l'autorité de l'Eglise, qui réside dans l'épiscopat, qui ait droit de faire ce discernement, relativement aux besoins du peuple, et aux circonstances des temps ; elle seule peut donner force de loi aux canons de discipline qui existent ou qu'on pourrait faire revivre ; elle seule a reçu mission pour le gouvernement spirituel ; elle seule a la promesse d'une assistance divine qui préservera le corps épiscopal de toute erreur et sur la doctrine et sur les canons qui règlent la discipline ecclésiastique. L'autorité des évêques est la même que celle des apôtres dont ils sont les successeurs. Ils peuvent seuls aujourd'hui tout ce que pouvaient les apôtres, concernant le gouvernement de l'Eglise ; et jamais ni les ministres inférieurs, encore moins les simples fidèles, n'ont entrepris de leur prescrire des lois. Tout ce que l'Assemblée pourrait statuer à cet égard, tout ce que les princes et les rois de la terre pour-
raient prescrire serait donc essentiellement nul s'il n'est muni de l'autorité épiscopale.
Voilà donc la base qu'il fallait d'abord poser pour asseoir une réforme; c'est sur cette base que porte toute la discipline de l'Eglise, et que les saints Pères ont perpétuellement opposée au schisnieet à l'hérésie. Que personne ne fasse rien, écrivait saint Ignace, martyr, aux Magnésiens, en ce qui concerne l'Eglise, sans l'évêque (I). Saint Ignace, qui était disciple de saint Jean l'évangé-liste, ne pouvait toucher de plus près à la source de la tradition et de l'ancienne discipline qu'on • invoque; je pourrais vous citer encore et Tertul-lien et les canons apostoliques, saint Cyprien, saint Ambroise, saint Cyrille d'Alexandrie, qui vivaient aux premiers siècles de l'Eglise. Mais pourquoi tant d'autorités pour balancer cette autorité éphémère de votre comité ? Le concile d'Autriche tenu en 341, enseigne dans le canon vingt quatre, que les affaires ecclésiastiques ne doivent être ^ administrées qu'avec la puissance de l'évêque à qui le soin des fidèles est confié.
Je m'arrête au dernier concile œcuménique (2), qui déclare que les évêques sont les successeurs des apôtres, qu'ils ont le premier rang dans la hiérarchie de l'Eglise, et au-dessus des prêtres, et que Dieu les a institués, comme dit l'apôtre, pour gouverner l'Eglise de Dieu. Declarat sancta synodus episcopos qui in apostolorum locum successerunt.....ad hune hierarchicum ordinempree-cipue pertinent, et positos, sicut apostolus ait, a spiritu sancto regere ecclesiam Dei, eosque presby-teris superiores esse. (Trid. sess. 23, cap. 4, de ordinat.
Le projet de discipline qu'on vous propose devait donc être rejeté par là même que, n'étant point autorisé par l'Eglise, vous bâtiriez sur Je sable. Mais enfin, jetons un coup d'œil rapide sur les principaux articles.
Premièrement, on vous propose de suppprimer desévêchés et des cures; de partager les évêchés et les cures entre les évêques et les curés conservés : a-t-on donc cru parler à des presbytériens ? est-ce donc à la nation à prononcer, non seulemeut sur la répartition des évêchés et des cures, mais encore à priver un évêque, un curé, de la juridiction qu'ils ont sur leurs troupeaux, et à leur donner celle qu'ils n'ont pas? vit-on jamais interdire à un père le gouvernement de ses enfants; sépare-t-on jamais les époux malgré eux-mêmes, et sans un jugement préalable ? et vous arracheriez à son diocèse un évêque, à ses paroissiens un curé, vous les sépareriez de leurs épouses et de leurs enfants, sans leur consentement; cette propriété spirituelle et sacrée n'est-elle pas aussi respectable, et ne sera-t-elle pas aussi respectée que la propriété temporelle?
Qui donnera à ces institués la juridiction ? de quelle autorité uu évêque, un
métropolitain, peut-il donner à un nouvel évêque, à un curé sur un diocèse étranger, une
juridiction qu'il n'a pas lui-même? Les évêques d'Orient étaient institués, il est vrai, par
le métropolitain, ou par les conciles provinciaux, mais c'était en vertu d'un usage établi et
consenti par l'Eglise. Sans entrer dans la discussion des motifs qui ont concouru à cette
discipline, je me borne à dire que, par la discipline ® 8.)
Par la discipline actuelle le pape seul a le pouvoir d'accorder certaines dispenses, comme celles d'empêchements de mariage, du moins à certains degrés, celle de l'émission des vœux ; toutes les dispenses qu'on obtiendrait d'ailleurs seraient donc aussi radicalement nulles, par conséquent ces mariages nuls, et de vrais concubinages.
Cependant le projet après avoir dit, article 7, titre 1, qu'en aucun cas, pour quelque cause et sous prétexte que ce soit, aucune Eglise, aucune paroisse ne pourra recourir à un évêque ou métropolitain dont le siège serait établi sous la domination d'une puissance étrangère, et après avoir défendu par là tout recours au pape, ajoute à l'article suivant : qu'en aucun cas on ne pourra avoir de recours que de l'évêque au synode diocésain, et du métropolitain au synode ae la métropole. Il semble que l'auteur craignait de n'être pas assez entendu pour intercepter toute communication avec le pape, sans oser cependant s'expliquer encore clairement; mais il le fait d'une manière expresse, titre II, article 19, en défendant à un évêque élu de recourir à Rome. Le nouvel évêque, dit-il, ne pourra s'adresser à l'évêque de Rome pour obtenir aucune confirmation (1) ; il ne pourra que lui écrire, comme au chef visible de l Église universelle, et en témoignage de l'unité de foi et de la communion qu'il est dans la résolution d'entretenir avec lui.
Reconnaissez ici, Messieurs, la formule de la petite Eglise d'Utrech, séparée de l'Eglise romaine toutes les fois qu'elle élit un nouvel évêque.
Selon la nouvelle discipline, non seulement l'évêque ne sera point obligé de recourir au
pape, mais il ne lui sera pas même permis d'y avoir avoir recours, il ne pourra. On veut donc
nous séparer absolument au chef de l'Eglise? on veut donc entraîner l'Eglise gallicane dans
le schisme, et par là même partout où l'on voudra? On attaque le chef, on veut dissoudre les
liens qui l'unissent avec l'Eglise de France, pour faire périr cette Eglise si féconde en
saints et eu martyrs ; et on propose ce beau projet à une assemblée catholique, apostolique
et romaine 1 Y a-t-il une Eglise catholique dans l'univers à laquelle on ait défendu le
recours au sa nt-siège? Yen a-t-il une où cette communication n'ait été établie,
Après avoir frap,é sur le chef de l'Eglise, on renverse l'autorité des vêques.
Il sera procédé, dit-on (article litre I,) sur l'avis de l'évêque et de iadministration de chaque département, à une nouvelle formation et circonscription de toutes paroisses du royaume.
Mais quelle sera' la piépoiidéràuce de l'évêque dans son propre diocèse, dans ses propres paroisses? On n'ose le dire, mais i| est bien évident qu'il aura tout simplement son suffrage comme tous les membres du département? Qui décidera sur les paioiss's qu'il laut supprimer ou conserve?? le Corps législatif, où il'y a très peu u'évêqués (aiticle 22, titre 1). Qui est-pe qui requerra les suppressions ou réunions des paroisses? les communes (titre I, articles 25 et 26). LVvêque aura les mains liées jusqu'à celte réquisition. Toutes les élections se feront par la voie du scrutin et à la pluralité absolue des suffrages. L'élection d'un évêque se fera dans la ferme prescrite et par le eo'ps électoral. L't vê |U(j n'aura' encore que sa voix, et il n'agira etisuiip après l'élection que comme un êtie passif dont on prend la main pour instituer vicaire ou pour ordonner un évêque, car évêque ne pourra refuser llinstitution canonique que' de l'avis de son conseil, sur une délibération 'prise à la pluralité des suffrages (titre JI, article 34). Si l'évêque refuse, il sera evqqué un synode diocésain, lequel jugera définitivement de la cause du refus (même titre, article 85). Le métropolitain ne pourra refuser la confirmation canonique de l'évêque élu qu après en avoir délibéré avec tout le clergé, de son église ; et si le métropolitain refuse il sera convoqué un synode de la métropole, lequel jugçra en dernier ressort les causes du refas (même titre, articles 16 et 17). L'évêque ne pourra refuser son approbation à l'un des trois prêtres qui lui seront présentés par le curé, que de l'avis de son conseil. En cas de refus de l évêque de donner son approbation à aucun des prêtres présentés, le curé pourra demander la convocation du synode, lequel pvononcera définitivement sur les causes du refus (arides 44 et 45). Ainsi le synod, coinpqsé de prêtres, pourra réformer le jugement de son évêque. Ainsi le synode pourra approuver le prêtre que l'évêque aura refusé d'approuver. Enfin l'Assemblée déciétera, dé sa pleine autori.é, sans ayqir besoin des evêques, la suppression de tous les bénéfices des églises collégiales et cathédrales. (Préambule, pug.9.)
Ce n'est donc plus' le gouvernement épi-çopal qui est le gouvernement de l'Eglise
catholique, apostolique et romaine ; c'est l.e. gouvernement presbytérien des calvinistes
qu'on vut introduire, et on fait assez peu de cas, Messieurs, de votre fui pour osep vous le
proposer. Est-il un seul catholique qui ne frémisse d'indignation à
Je demandp que l'orateur sojt rappelé à l'ordre. '
poursuit : L'article 19 du titre second po le que le niètropolitain ne pourra exiger de ( évêque élu d'autre déclaration ou serment, sinon qu'il fait profession de la religion catholique, apostolique et romaine; et, article 37 du même titre, que ('évêque ne pourra exiger d'un curé élu d'autre déclaration ou serment, Sinon qu'il fait profession, etc."
C'est pour pienager, comme on sent, l'entrée au gouvernement de l'Eglise à des hopiinés qui, portant l'hérésie au fonu de 'pâme, veulent encore appartenir à KEglise catholique, apo-tolique et romaine, qu'ils déchirent j tout le monde entend ce langage. Avec une pareille profession de foi. Anus aurait pu être élu patriarche d'Alexandrie, car bien qu'il eût été condaipné par le coot cile de Nicée. il prétendait bien professer la foi de l'Eglisp catholique, apostolique et rpmatne. Tous les hérétjques qui arriveront, quelles que soient leurs erreprs, pourvu qu'ils ne se séparent pas extérieurement de l Eglise, feront la même prolession de foi. Si 'les évêques, les curés, et les autres ministres de la religion. Vous dît-on dans le préambule, p«jge (7,'ne sont' établis que pour le peuple, à qui convient-il mieux qu aq peuple de les choisir ?
Mais si les instituteurs ne sont établis que pour les enfants, à qui çonviendra-t-il mieux qu'au$ enfants ne les choisir? Il ne faut qq'une comparaison pour faire sentir l'absurdité de ta maxime. Les évêques, quoi qu'on en di^e, sont les pères ues peuples, ils connaissent mieux (es besoins de leurs enfants que j. s enfants eux-mêmes ; ils le veulent plus sincèrement, ils connaissent mieux les sujets qui conviennent aux paroisses, relativement yux circonstances; les paroissiens ne connaissent que les prêtres qti'ils ont sous leurs yeux. Je convieqs que les co i sidérât lions humaines et l'intérêt personnel ont trop souvent décidé du choix des évêques et des cu4 rés ; mais espèr -t-n que dans une asç> mblée de paruiissé,- m chacun aura ses parti-ans, »eé anus, srs parents, ou les' inirjgjints qui pourront répandre de l'argent, qui sont toujours les plqs audacieux» et par conséquent les sujets les jdus indignes, ne ieamurterouj; j^as sqr 1 homme vertueux, dont le partage gst" la tpodestte et, la réserve ?
Croit-on qpe tout se p^sserç sans passion, sans intrigue, pour l'ejei tiçn des çvê hes? Çest bien peu connaître les passions du cçÉspr humain» et la déj.ravaiioh de noire siècle, et ta décadepce de la loi. L,e crédjt influait sur la nomination des évêchés. Mas il est déippntré qu'il influera encore davantage dans une assepijDiée où les électeurs, étant moins indépendants, pourri"1 êire plus sémeni assujettis par iîj cipnite de ceij^qui peu? vent h s servir ou jejjf npire, La, sjpipnie pouvait s'ouvrir l'entrée aux évêchés, mais ce n'était jamais que par des détours; dans le plan que vous propose?, 'i^elje liberté, quelle force vous donnez a tous ses ressQUs; et ep voulant péfonner les abus, quelle plaie profonde vous allez faire à l Eg ise, en facilitant aux indignes l'entrée du sanctuaire ?
Je sais que dans l'élection d'un apôtre et des
diacres, Ips apôtres consultèrent Ie& fidèles; mais alors les chrétiens n'avaient qu'un cœur et qu'une âme, le choix n'é ait pas difticile, lorsque tous aspiraient à la palme du m irlyre, lorsque le ciel s'expliquait par des prodiges, lorsque l'E-ilise comptait autant de saints que de tirées. Cette forme se conserva pendant quelque temps, surtout dans les églises d'Orient, pour l'élection des ëyèques; mais, dans la suite, l'usage a varié, parce que l'esprit primitif de l'Eglise, cet esprit de fep* veur s'étapt affaibli, le choix devint trop difficile pour pouvoir être conlié à la multitude. L'elec» lion fut dévolue au clergé, aux chapitres, et enfin en France elle fut attribuée au roi par le cou? cordaf.
Mais il est fauxque la discipline de laprimitive Eglise ne connaissait point d'autre forme dt pourvoir aux offices ecclésiastiques, ijjtisi qu'Qn ose l'affirmer, page 17 du préambule. Il est encore plus faux que les vœux de la multitude décidassent j^majs du choix • p'etajt le juétionoliliiiu ou le concile provincial jq.i exupni lyit la capacité du su^et proposé, qui le rejetait ou j'adi)!etïait, suivant qu'il le jugeait ronveRajjje. Nous eq voyons nne preuve irappaqt.e au lu6 siècle, dans saint Grégoire Ncocesarée, qui, refusant fous ceux que l'assemblée fies fidèles demandait pour évéque, leur doppa Alexandre le (Ijiafbypuhr, qu'on lui proposait par dérision, et qui obtint la couronne uu martyre. Il est faux qu'on doive rétablir un ancien usage, par e qu'il était dans la discipline de la primiiive K/li e. Je l'ai prouvé par le droit et le fait, puisqu il y a des canuiis apostoliques qu on se garderait bien de remettre en vigueur! Il est faux qu'il suit au pouvoir des peuples ou de simples prêtres, de perler les articles de l'ancienne discipline qu'on doit faire revivre, encore plus de leur donner force de (ois, encore plus d'abolir les règlements adoptés par té corps épi-'copai et par le souverain pontife, autrement le gouvernement ecclésiastique ne sera plus «jije le p. esbyb rani>niedes protestants ; d où il suit que tout ce que vous pourriez statuer à cet égard serait absolument invuline.
Ce projet, en paraissant élever les eufés, les humilie, eu effet, en paraissant les rendre indépendants, les condamne à la servitude, rend leur existence précaire; elle dépend, en effet, du nom-brede leurs paroissiens, du mauvais étal de leurs églises, de leurs presbytères, de la réquisition de la commune, qui verra dans un pasteur fitèle à ses devoirs un censeur importun de ses vices, qui verra dans sou salaire un impôt dont elle peut se délivrer.
Le curé aura la liberté de choisir ses vicaires, maM le projet se garde bien de dire qu'il aura celle de les Mivoyer. Les fabriques pourront fournir, suivant leurs facultés, autant de pré res auxiliaires; mais ces collaborateurs, sur le choix desquels lecuié aura très peu d influence, seront^ ils toujours ses coopérateurs, et ne deviendrons ils jamais ses contradicteurs, la croix et l'écueil de sou ministère?
Qui donnera au curé un second ou troisième vicaire? Le directotredu district. Qu il est à craindre nue l'intérêt pécuniaire soit plus consulté que les besoins spirituels d'une paroisse!
Lorsque les travaux, les inlirmités commanderont impérieusement le repos à qu euré, à qui s'adressera-t-il pour avoir uu suppléant? Au directoire du district, Pour faire consentir à cette nouvelle depense, que d'obstacles je vois à surmonter !
- Youdra4«il s'absenter pour ses affaires les plus
urgentes, ou pour voir ses parents les plus proches? Il faudra la permission de son évéque et du directoire. Quel assujeuissement!
Son traitement en argent seFa payé par le trésorier du district, à peine par lui d'y être contraint par corps mais quand les districts seront devenus nos maîtres, aurons-nous la force d'usep d'une voie si rigoureuse? Se con-nlie-t-el le d'ailleurs avec l'esprit de notre ministère, et faut-il que n»us soyons armés contre nos paroissiens?
En humiliant nos chefs, uns supérieurs légitimes, nos protecteurs-nés, nous ne voyons pour nous nu'une plus honteuse servitude et la chute de notre ministère, flous ne serons point séduits par la perspective dangereuse d'être élevés au-dessus même des éyêques par la force que nous donnerait notre pluralité; nous ne verrons point u'un œil indiffep, ut l'évêque réduit à un simu^ laepe. et nous places à son niveau.
La forGe de l'autorité piscopale ne vient que de son unité avec le souveraiu pontife; séparés de lui, les évêjue» ne sont plus que des ministres isolés et sans aprui. Les pasteurs ne peuvent conserver 1t.» po i voiF du miuisière, et l'autorité qu'il nous donne sup les fidèles confiés à nos soins, que par leur union avec l'évéque, et la mission qu'ils en reçoivent. Séparés de lui, ils ne sont plus que des ouvriers salariés, à la disposition de ceux qui les salaneut.
On murmure tous les jo.jfs sur les mœups du clergé, et quoique le tableau qu'on en tFace avec la malignité de la censure suit beaucoup au-dessus ne la réalité, nous convenons que la dépravation des mœurs a pénétré jusque uaus le sanctuaire. Mais espèrert-on que le c ergé sera plus impeccable quant il sera deveuu plus indépendant des supérieurs légitimes? Le projet de reforme presenfe-t-il un seul moyen pour expulser du sanctuai e le prêtre, l'évéque même scandaleux? S'il s'élèvé d-s discussions entre un diqcése et un autre, entra une métropole et une autre, entre le synode d'une métropole et le synode d'uue uu re mé.ropote, qui esfe- e qui décidera, puisque le syuode métropolitain n'a t>oiilt de tribunal au-dessus de lui? S> l'un des synodes adopte des innovation essentielles dans la uoetrine ou dans la discipline, qui est-ce q ii jugera? Qui est-ce qui'réformera? On n'en dit nen. Ce. seront sans uoute les administrateurs des départements qui sont établis les arbities des diocèse?. Nous voilà presbyterieus. Voilà la France divisée eu autant de petites Egii es in dépendantes qu'il y aura de dépaptein nts. Voilà tous les liens ue l'unité dissous. Ces petites Eglises n'appartiennent plus a l'Eglise catholique, qui ne peut sub-r sister qu'avec l'oidie hiérarchique de son gou^ vepuemeut, et qui subordonne les prêtres a la juridiction des évêques, et les évê.jues à la juridiction du souverain p rntife. Ainsi vit-on l'heresie ue Luther, suus l'apparence de corriger 1 s maux de l'Egli.-e la diviser, porter la uésolatiou dans 1 A'iema^ue, se diviser ensuite en une multitude d'autres sectes, renouveler les mêmes horr urs en Angleterre, eu France, en Hollande, sans être jamais stable, parce qu'elle u'a plus de centre de gouvernement ; parce qu'elle ne connaît plus d'autorité visible capable de réprimer les innovations, de fixer les incertitudes et les variations de l'esprit humain, am4 que Bossuet et tous les conlroveiSiSti s l'out démontré aux protestants.
Vous désirez ta réforme des anus. iNwUs la désirons autant que vous, car nous désirons non seulement la réfoimeuu clergé, mais encore la rétorme des peuples, dont il parait, Messieurs,
permettez-moi de vous le dire, que nous nous occupons fort peu. Cependant la dépravation des mœurs, le mépris de la religion sont parvenus au point le plus alarmant pour la gloire et la prospérité de cet empire.
Si vous voulez sincèrement la réfôrme des abus, commencez par poser la base sur laquelle doit porter la réforme ; protéger l'autorité épis-copale, et gardez-vous de l'asservir et de l'abattre. Demandez l'assemblée d'un concile national, les assemblées périodiques des conciles provinciaux que le clergé demande depuis si longtemps, et toujours inutilement.
L'auteur du projet prend pour base l'ancienne discipline : pourquoi, en vous proposant la réforme des abus, oublie-t-il que parmi les moyens de réforme, c'est le plus ancien de la discipline que l'Eglise a constamment employé depuis les apôtres? Ah 1. c'est que ce serait reconnaître solennellement la puissance qui seule a le droit de régler la discipline, èt qu'il voudrait mettre entre vos mains une autorité qui ne peut appartenir qu'aux successeurs des apôtres.
Suivons donc la route tracée par nos pères, confirmée par un usage constant. Demandons, je le répète, un concile national ; présentez-lui vos projets, il les recevra avec reconnaissance ; et il jugera, parce que seul il à le droit de juger.
Vous vous plaignez que les évêchés et les grands bénéfices ne sont donnés qu'à la faveur, nous nous plaignons autant et plus que vous. Suppliez le roi de composer un conseil de personnes les plus vertueuses de son royaume, qui ne puissent jamais solliciter ni pour elles-mêmes, ni pour ceux qui leur appartiennent ; que ces personnes, choisies avec le plus grand soin, présentent au roi, pour éclairer sa religion, les ministres les plus distingués par leurs talents, leurs verlus et leurs travaux. Bientôt vous verriez le sanctuaire dans toute sa majesté.
Je me borne, Messieurs, à ces deux points essentiels; et finis non seulement en retusant mou suffrage à un projet que mes sentiments catholiques repoussent loin de moi, mais en vous conjurant, par les intérêts les plus chers de la patiie, à ne pas l'agiter par des disputes et des entreprises sur la puissance spirituelle : ce plan d'organisation du clergé intéresse-t-il donc vos finances? Et lorsque vous vous êtes emparés de ses biens, voudi iez-vous et puurriez-vous le dépouiller d'une autorité qu'il a reçue du ciel, et qui n'existe que pour la gloire et raffermissement de cette monarchie? Je vous conjure donc par les monuments sacrés et antiques de la religion, par la loi de vos pères, par vos propres sentiments, par ce respect qui ne vous a pas même permis, dites-vous, de délibérer 6ur l'existence de la religion ; par ce grand principe politique qui défend la réunion des pouvoirs uaus une seule main; principe que vous violeriez, si vous adoptiez ce projet qui met dans vos mains l'exercice de la puissance spirituelle ; je vous conjure, au nom du dieu de paix, de rejeter toute innovation qui alarmerait les fidèles, et nous empêcherait de jouir des fruits de nos travaux. La constitution de l'état civil doit suffire à votre zèle. Le peuple la demande à grands cris, et l'intention de la nation n'est point de vous changer en pontifes, et cette assemblée en concile.
Je pense donc, Messieurs, qu'à l'exception du traitement pécuniaire, qui est un objet temporel, et qui par conséquent est de votre ressort, il n'y a pas lieu à délibérer sur le surplus du projet.
Si cependant vous en désirez l'exécution dans toutes ses parties, et que la voie d'un concile national nous paraisse trop longue et difficile dans ces circonstances ; après avoir décrété que l'institution des évêques parle souverain pontife et leur subordination au chef visible, de même que celle des prêtres et des pasteurs à leurs évêques sera conservée, vous pourriez présenter au roi les différents articles du projet que vous auriez décrétés à la majorité ; d'après les am3ndemenls dont ils seront susceptibles, vous supplieriez sa majesté de vouloir bien les envoyer au souverain pontife, avec prière d'approuver ce règlement de discipline: c'est le seul moyen de remplir vos vues et d'éviter le schisme, qui doit effrayer et attrister toute personne attachée à l'Eglise catholique, apostolique et romaine.
demande l'impression (te cette opinion.
, curé de Sergy. L'opinant a accusé le comité de tendance au schisme et à l'hérésie. Ce comité est composé d'ecclésiastiques qui connaissent leur devoir aussi bien que lui. Il n'y a pas lieu à délibérer sur la demande de l'impression, (L'Assemblée décide de reprendre l'ordre du jour.)
demande un congé de trois semaines pôUr cause de santé.
sollicite l'agrément de l'Assemblée pour s'absenter pendant un mois.
Ces deux congés sont accordés.
Un de MM. les secrétaires annonce qu'il vient d'être adressé à M. le président différentes piè-, ces qui annoncent qu'un sieur Sarnerin, auteur d'une expérience aérostatique faite la veille au profit des pauvres, est détenu à Pantin, pour dégâts commis dans les emblaves, tant par la chute du ballon, que par le concours de la multitude qui s'est portée vers l'endroit où il est tombé. L'Assemblée renvoie cette affaire au pouvoir exécutif.
La discussion sur le plan de constitution du clergé est reprise.
En examinant le projet de décret présenté par le comité ecclésisastique, on reconnaît aisément non des institutions nouvelles, mais le renouvellement d'une ancienne discipline, qu'une longue suite d'erreurs avait fait négliger, et dont la piété des véritables chrétiens a conservé soigneusement le souvenir. Les préopinants ont prouvé ce que personne ne,contestait...... L'Assemblée nationale se propose de supprimer les titres sans fonctions, de réduire le nombre de ceux dont l'institution est utile, s'il n'est pas proportionné aux besoins delasociété, de rendre le droit, d'élection aU peuple a qui il appartenait. Les opinants qui ont attaqué un aussi sage projet de réforme ont cité beaucoup de conciles sur des articles de foi, mais.il ne s'agit pas ici d'articles de foi. Ils ont dit que les papes ont érigé des sièges épiscopaux; ils ne l'ont fait que par la tolérance delà puissance civile. Je prie ceux qui combattent le plan du comité de déclarer nettement s'ils regardent comme point essentiel de doctrine qu'il y ait dans le royaume plus ou moins d'évêques, qu'il en soit établi dans telle ville plutôt que dans telle autre; je leur demande si l'institution sera moins parfaite, quand au lieu de 120 évêques il n'y en aura que 83? C'est donc ici un objet de police civile, et non un article de foi.
Mais certes le Souverain ne pourra jamais dire dans un état catholique : Je ne veux point d'évê-ques : ce serait attaquer la religion. N'est-il pas de l'intérêt de la nation, comme de celui de la religion, que tous les citoyens d'un département, réunis par tous les rapports politiques, le soient encore par les rapports religieux? On dit que l'Assemblée est incompétente : il ne s'agit point d'un établissement nouveau : M. l'archevêque d'Aix lui-même, et toutes les persoones instruites, reconnaissent qu'il ne s'agit que de faire revivre une discipline antique et sainte. On s'effraie beaucoup de ce que les non-catholiques concourront à l'élection de l'évêque, pourquoi non? Ils concourent bien à le salarier. Le pasteur choisi par eux pourra gagner leur confiance, ou du moins il assurera leur union avec les catholiques, s'il ne parvient à réunir hs opinions. Enfin comment ose-t-on élever de semblables oppositions, quand on a vu, au bas d'une protestation destinée à demander exclusivement le culte public pour la religion catholique, des signatures de non-catholiques adossées à des signatures épiscopales?... Des chapitres sont reconnus inutiles; ils sont alors intolérables, parce que toute institution inutile ne peut être admise dans un gouvernement bien organisé. M. l'archevêque dvAix a fait valoir les prières publiques qui sont faites par les chapitres ; mais les prières publiques comprennent en même temps la prédication, l'instruction des fidèles : peut-on appeler prières publiques une psalmodie précipitée, payée par les chanoines trop riches pour la faire eux-mêmes?... Je conelus à ce que l'ensemble du plan, proposé par le comité, soit adopté comme entièrement conforme aux anciennes maximes de l'Eglise, et à ce qu'on passe immédiatement à la discussion article par article, sans s'arrêter à la déclaration de M. l'archevêque d'Aix.
On confond sans cesse l'E^lise-et la discipline ecclésiastique. L'Eglise est la réunion universelle des fidèles sous l'autorité d'un chef légitime : la discipline est ou intérieure ou extérieure. La discipline extérieure u'appar-tient en rien à l'Eglise: je vais le prouver. Saint Mathias fut d'abord élu par les fidèles. Les fidèles, dont le nombre était augmenté, demandèrent qu'on augmentât celui des pasteurs : « Choisissez, dirent les apôtres, et nous instituerons.... (Il s'élève des murmures dans la partie droite de Z'Assemblée.)^ fais profession d'aimer, d'honorer la religion, et de verser, s'il le faut, tout mon sang pour elle...
, curé de Serqy. Tous les ecclésiastiques de cette Assemblée fout la même profession de foi.
(Quelques ecclésiastiques, placés dans la partie gauche de l'Assemblée, se lèvent pour s'unir à cette déclaration.)
Dès que les apôtres se furent répandus sur la terre, ils prescrivirent d'établir des prêtres dans les villes où ils le jugeraient convenable, mais il qe s'ensuit pas qu'ils aient voulu regarder le peuple comme déchu des élections qu'eux-mêmes avaient ordonnées. Ce droit a été rendu au peuple. J'ajoute, à l'exemple de saint Grégoire qu'on a déjà cité, celui de saint Ambroise : ainsi donc il est certain que l'élection pour les fonctions ecclésiastiques appartient au peuple. Quant à la formation des métropolitains, elle tient uniquement à la juridiction civile. Saint
Jean, l'apôtre, avait fondé des églises dans l'Asie ; saint Paul, dans la Grèce; saint Marc, disciple converti, institua l'Eglise d'Alexandrie, qui obtint le patriarchat, parce que cette ville était une capitale. Byzance n'avait ooint de patriarche, Constantin voulut qu'elle en eût un, et Rome, Cous-tantinople et Alexandrie furent le siège d'un patriarchat; Rome l'a emporté sur Antioche : pourquoi? parce que Rome était la capitale de l'Empire romain. Il y a eu la même variété dans les églises d'Afrique. Tout le monde connaît le fait de saint Bazile le grand; tout le monde sait que quand les rois l'ont voulu, ils ont donné la primatie ecclésiastique à telle ou telle ville... Le plan du comité est donc conforme aux anciens usages; il a pour but de nous ramener à l'église primitive, et sans doute c'est la seule manière de se bien conduire... On a puisé des autorités dans des siècles d'erreur, pour déftindre une mauvaise cause. Gomment a-t-on pu dire qu'on attaquait l'autorité ecclésiastique en demandant un synode? J'avoue que croyant à la hiérarchie ecclésiastique je ne pouvais penser que les évêques fussent institués par Dieu, et les curés par les évêques. On dit que les évêques sont les successeurs des apôtres, et les curés les successeurs des disciples: mais les apôtres et les disciples étaient également d'institution divine. (L'opinant, pour appuyer son opinion, cite un texte latin.)
Nous n'entendons pas le latin.
(M. l'abbé Gouttes continue.)
Ce passage est inexactement cité.
Je suis accusé de citer à faux. Il y a près d'ici des bibliothèques, on peut faire venir des livres; je confondrai l'accusateur. J'ai seulement voulu, en citant ce passage, prouver qu'on avilit à tort les curés, en disant qu'ils sont les simples mandataires des évêques, et que les évêques ne les ont pas traités en frères. (On applaudH.) Mon intention était de prouver que I union des évêques et des curés est nécessaire à la splendeur, à la sainteté même de la religion, et que ce serait.à tort qu'un évêque voudrait décliner le synode. Qu'on lise l'histoire, on verra que les diacres de Rome ont appelé le pape à uu synode; on verra que chez les anciens les mots évêque et prêtre étaient synonymes. J'ai tenu ce langage afin que les évêques sussent que leur supériorité dans l'ordre civil est plutôt une coutume de l'Eglise qu'une émanation de la volonté divine. (L'opinant cite encore de mémoire le texte latin qui se rapporte à ces dernières expressions.)
Lisez cela.
Il est indécent' d'interrompre ainsi un opinant. Voici du français : Saint Augustin, évêque d Hippone, écrit à saint Jérôme: « Car encore que, selon les titres d'honneur,, l'épiscopat soit au-dessus de la prêtrise, Augustia est au-dessous de Jérôme, sans compter que nous devons être prêts à recevoir la correction, même de ceux qui sont au-dessous de nous. » On trouve dans les canons deCarthage : « L'évêque, à l'église, doit avoir le premier rang; de retour à la maison, il ne doit jamais souffrir qu'un prêtre soit debout ni découvert devant lui. » La preuve que ce I n'étaient pas les évêques seuls qui déterminaient
les affaires ecclésiastiques se trouve dans une lettre de saint Cyprien à ses prêtres: « Quant à ce que m'ont écrit nos confrères (les prêtres), je n'ai rien pu répondre, parce que je me puis imposé la loi de ne rien faire sans votre consentement et sans le consentement du peuple... »
Ainsi, dans l'Eglise, la loi étant faite par tous, la volonté de tous dpit être pégeisaire ppur former la disciplina. Il faljaij que les règles fussent aimées de tous, pour être exactement observées. Je conclus et je dis que (es affaires de discipline extérieure sont de |a compétence de la nation, et qu'elle peut fixer l'éteqdue et lp npajfre des diocèses et des paroisses. J'exprime cette opinion avec d'autant plus de satisfaction, que Çharle-magne a ordonné les mêmes dispositions'..
Je finis par une observation impprtantè. yous avez des affaires très urgentes a traiter ; ne serait-il pas cppvenahle qu'après ayoir terminé la discussion au fowj» on se bornât 4 décréter les sept premiers articles du titre Ier, et la totalité du titre 111% et que le reste du projet de décret f&t renvoyé après l'achèvement de la Constitution ?
Je demande que la discussion soif fermée sqr l'ensemble du plan, et aue demain on discute article par article. Quand 1 opinion est faite, une plys longue discussion ne ferait qu'occasionner la perte a un temps dont nous sommes comptables à là nation.
, évêque de Lidda. Je supplie l'Assemblée de me permettre qqelques observations ayan t la clôture de la discussion.
J'ai demandé la parole avant M. l'évêque de Lidda. J'ai égarement des ohservaMqnS à faire..Je deqjgQjjfe qu'on cite un seul exemple 4?4n Synode qui ait jugé un évêque,
(La discussion est fermée à une très grande majoritèf)
(de ^qi^t-rJea^d'Angely). L'Assemblée a décidé qu'elle tiendrait deux séances chaque jour afin de hâter l'expédition des affaires en souffrance. Cette mesure, si elle était maintenue plus longtemps, lirait un résultat qpposéà yos intentions, car elle arrêterait le travail de vos comités. Je propose donc que, sauf la séaqce de ce soir, nous adoptions comme règle de tenir une deuxième séance seulement trois îoi$ par semaine.
J'ajoute aux motifs du préopinaqt, que pendant les phaleurs de l'été, il ne serait pas posiqple de conserve^ la salubrité de la salle en siégeant dèux fois par jour,
consulte l'Assemblée qui décide qu'il nry aura que trois séances du soir par semaine.
Un de MM. les secrétaire} fçiit lecture d'une lettre des officiers municipaux de MonÇauban, et d'une proclamation que cette municipalité a fait publier: cette proclamation a pour objet de calmer l'effroi du peuple, et d'augmenter encore « sa confiance dans la sagesse de i'A.ssemWee nationale. »
La séance est ieyêe à quatre heures moins un quart.
Séance du
La séance est ouverte à six heures et demie du soir.
, feerétaire, donne lecture de l'extrait des adresses ainsi qu'il suit :
Adresse des citoyens actifs de la ville de ChaourGe, réunis en assemblée primaire, contenant l'adhésion la plus formelle à tous les décrets rendus par l'Assemblée nationale.
Adresse de la municipalité de la ville d'Agde, qui s'élève avec force contre la déclaration d'une partie de l'Assemblée nationale; elle envoie la délibération du corps des hebdomadiers et pré-bendiers du chapitre cathédral de cette ville, qui, en improuvant tout ce que le chapitre a fait a leur insu, en donnant les pouvoirs les plus étendus au chapitre cathédral de Parie, manifestent des sentiments bien opposés pour tous les décrets de l'Assemblée.
Adresse des communautés de Maretay et Saint-Pierrerde-iuiiliers ; elles supplient l'Assemblée de ne pâs se séparer avant d'avoir perfectionné la Constitution ; elles la consultent en même temps sur plusieurs difficultés relatives aux rôles d'impositioos,
Adresses des députés des communes et des gardes nationales du département de l'Aube, qui ont formé un pacte fédératif auquel ont adhéré les villes de Sens, Langres, Chaumond, Sainte-Menebould, Rethel^Mazarin, Villeneuve-le-Roi et Villeneuverl'APChevêque ; cette réunion vraiment civique présente une fopce de soixante mille hommes, qui seront toujours prêts à maintenir la Constitution et l'exécution des lois, et à marcher au secours de tous les citoyens des différentes parties de la France, si le despotisme menaçait leur liberté.
Adresse du conseil général de la commune de Nîmes ; il supplie l'Assemblée de permettre que la municipalité de Mîmes fasse un emprunt de 15>0,QQ0 livres pour l'établissement d'une caisse patriotique, où l'qn échangera contre de l'argent, et sans autre intérêt que celui déterminé par les décrets, les assignats de 200 et de 300 livrés.
Adresses des électeurs du département du Doubs, de celui de la Marne, de celui de la
Gôte-d'Or et de celui de Qhauny, qui consacrent les premiers moments où ils se trouvent
réunis pour exprimer à l'Assemblée les sentiments de respect, de reconnaissance et de
dévouement qu'ont gravés dans leur cœur son patriotisme, son courage, et les bienfaits d'une
régénération à jamais mémorable ; ils manifestent en même temps l'amour le plus tendre et îe
plus dévoué pour la personne sacrée du roi. Les électeurs du département de la Côte^d'Or
adhèrent principalement au décret qui a mis à la disposition de la ^ nation les biens
possédés par les ecclésiastiques et regardent comme également traîtres envers la religion et
la patrie ceux qui s'opposent à l'exécution de ce décret. Tous supplient instamment
Adresse du même genre des administrateurs du district d'Orgelet, département du Jura» et de celui de Yesoul» département de la Haute-Saône.
Adresse des commissaires du roi au départes ment de la Haute-Saône, qui annoncent que toutes leurs opérations seront terminées à 'a Un du présent mois» ils supplient l'Assemblée d'accueillir leurs hommages respectueux, et de recevoir l'assurance que je plus pur patriotisme, éclairé par la sagesse d« ses décrets, a dirigé toutes leurs démarches : t Nous nous ferons tou- jours gloire, disent-ils, d'avoir coopéré les « premiers à l'établissement du régime électif « tant désiré, et d'avoir contribué à fonder l'é-« difice qui doit fafre le bonheur et la prospérité « du royaume..»
Adressa du même genre des administrateurs dy district de OQie, département du Jura.
Adresse du conseil général dé là commune de Saint-Rem y, département des Bouches-du-Rhône; du conseil général de la potpmuqe de et de la garde nationale de SaintrServan ; de la municipalité 4e la ville de Lisieux ; du conseil général de commune de Nemours ; de ta municipalité de la ville dé Meaux; de la garde nationale de Mon^ivilljers ; de (a commune de Cbà- teau-Renard ; du conseil général de Tarascon ; de la société ecclésiastique établie à Saint-Ram-bert en Bugey; de MM. les curé, maire et officiers municipaux de Waucharap ; 4e la munici? palité et des volontaires de la gardé nationale d'Hardinghen, chef-lieu de canton, district de Boulogne au département du Pas-de-Calais; des citoyens actifs de la ville et canton 4e Saint-Martin (Ile de Ré) ; des officiers municipaux de la ville de Dax ; dés citoyens armés de Yille-franche-de-Rouergue ; des cpfpç municipaux des communes de la ville de Massëdan," Saiut-Mé-dard, Sourzac, Saint-Front, Saint-Louis, Dou-zillàc, Saint-Géry, Bosset, les Lèches, Faye près Beapronne, Bourgnac, Saint-Martin, Eglise-Neuve, Saint-Severiu, Issac, Beauronne et Saint-Étienne, département de la Dordogne, où se trouvent exprimés les mêmes sentiments qp respect, de reconnaissance^ de soumission envers l'Assemblée nationale, de dévouement parfait et d'adhésion formelle à tous ses décrets, avec l'impro-bution de tous actes contraires.déjà consignée dans une multitpde d'adresses.
Adresse de la municipalité de Saiut-Servan, au département d'IUe-et-Vilaine, contenant adhésion aux décrets" de rAssemblée nationale, avec im-probation des déclarations contraires ; une délibération du conseil général de la commune de Saint-Brieuc, par laquelle ledit conseil déclare aahérèr purement et simplement, sans restriction mentale, ni direction d'intention, tous éqijjyo-ques et subterfuges cessants, avec une' pleine et entière franchise, à, tous les décrets rendus par l'Assemblée nationale, pour la gloire de la nation, le bonheur inaltérable de l'empire français, et la prospérité du règne immortel de Sa Majesté. Dans cette adresse se trouve une pétition pour imposer une certaine somme en faveur dés pauvres.
Délibération de la ville de Villeneuve, département de ÇQt-et-rGarnnne» qui confirme, en tant que de besoin, les pouvoirs de ses représentants, et accepte la Constitution,
Adresse de la municipalité de Pyriac, qui demande une brigade de maréchaussée.
Adresse des Citoyens du canton dit Vieux-Marché, avec adhésion de quelques municipalités voisines, et une exposition des motifs de fixer une juridiction de premier degré dans le canton du Vieux -Marché.
Adresse de la ville de Gredé, en Bretagne, pour obtenir une juridiction royale.
Adresse de |a municipalité d'Izé, département de Lille, qui réclama contre les habitants d'un canton de cette parole, qui ont voulu former une municipalité,
Délibérations de la municipalité de la ville de Mâcqn, qui fait ses soumissions pour acquérir tous les biens nationaux situés dans sou district; de la commune de la ville de Salies, en Commin-ges, portant soumission d'acquérir les biens nationaux situés dans l'arrondissement de son canton -, de la municipalité et commune d'Arcueil, avec soumission d'acheter les biens nationaux de son territoire; de la ville de Tulle, avec soumission d'acquérir des biens nationaux pour un million ; des officiers municipaux de Vendôme, qui fout soumission, au nom de leur ville, d'acquérir pour deux millions des biens nationaux» Toutes ces villes adhèrent formellement à tous les décrets de l'Assemblée nationale.
Soumission de la municipalité de la ville d'Au-xerre, pour acquérir des biens nationaux jusqu'à concurrence de la somme de huit millions; cette soumission faite par M. Marie de la Forge, député à l'Assemblée nationale, a été accompagnée d'une adhésion entière aux décrets de l'Assemblée nationale.
M, Godefroy fait hommage à l'Assemblée nationale de la gravure de quatre médaillons, au-dessus desquels on lit ; * Louis XVI a su réunir aux intentions populaires de Théopompe, les ver* tus touchantes de Marc-Anrèle, et le courage de Gharlemagne» 11 a fait plus pour sou peuple que chacun d'eux n'avait fait pour le sien. C'est ainsi qu?en méritant l'amour de la génération présente, il acquiert les droits à l'estime et à ia reconnaissance de la postérité. »
, ieerèiaire, donne lecture du procès-verbal de l'assemblée générale des officiers, bas-officiers et soldats du corps royal dej,'artillerie, présents à Strasbourg, le 27 mai 1790. Ce procèsi-verbal est ainsi conçu :
L'assemblée générale des officiers, bas-officiers et soldats dp corps royal de l'artillerie, présents à Strasbourg, convoquée avec l'autorisation des chefs militaires, a arrêté, dans sa séance du 22 mai 179Q, qu'il serait nommé douze commissaires chargés de faire un rapport détaillé des événements survenus depuis le 15 mai, à l'occasion de la pétition que M. Du lac, lieutenant au régiment de Strasbourg, a adressée au ministre de la guerre.
Les commissaires ont demandé la convocation de l'assemblée générale le 27 mai, ét ont fait leur rapport en ces termes :
Messieurs, les événements qui sont arrivés dans le régiment de Strasbourg du corps royal de l'artillerie, depuis le 15 de ce mois, ont du fixer l'attention généralê; chacun les à racontés à sa manière; et, suivant l'usage, ils ont été dénaturés. Nous ne pouvons douter que l'armée entière ne soif instruite d'un événement en apparence fort extraordinaire. Notre but, nous osons dire notre devoir, est de fixer l'attention générale sur un répit qqi doit porter tous les caractères de l'authenticite. Oui peut mieux que nous, Messieurs, déterminer le jugement du publie sur des
faits dont le principe nous est étranger, qui ne sont pas dénaturé à compromettre l'honneur du régiment et dont les auteurs principaux n'ont pu perdre notre estime.
En effet, la pétition de M. Dulacest une affaire particulière, dont le jugement ne saurait nous appartenir (1). La manière franche avec laquelle il l'a présentée et publiée, nous prouve la droiture de son cœur, et qu'il a peut-être été mû par l'exaltation d'un jeune homme qui se révolte contre toute idée de violation des droits de l'homme. D'un autre côté, M.de Puységur a effacé l'impression de son avancement prématuré, par ses principes honnêtes et l'estime qu'il a su généralement se concilier ; aussi nous ne pouvons et nous ne devons nullement prendre en considération le principe de cette affaire.
Il ne nous reste donc plus qu'à développer les événements qui sont arrivés le lundi 17. Ici, Messieurs, qu'il nous soit permis de présenter quelques réflexions : nous devons tous rendre hommage à la vérité. La conduite de M. de Puységur a su lui concilier l'estime et l'attachement de tous les soldats du régiment; perdre leur colonel seraitpour eux une véritable peine : c'est dans ce sentiment pur que l'on découvre le principe des événements de ce jour. La pétition de M. Dulac, mal interprétée peut-être, devait échauffer les esprits; les soldats croient voir une {iersécutiou contre un colonel, qu'ils chérissent ; e bruit de sun départ augmente leur inquiétude; et pour lui donner une preuve de leur amour, ils imaginent defaire transporter les drapeaux chez lui (2); ils en obtiennent l'agrément du lieutenant-colonel ; la vue de ces drapeaux entretient l'effervescence de leur imagination; c'est dans ce moment que le hasard leur fait rencontrer M. Dulac. Des cris se font entendre ; plusieurs sergents craignent que l'exaltation des esprits n'occasionne une catastrophe; aussitôt ils courent à M. Dulac et l'entourent. De nouveaux cris se font entendre et ces mots rendez lesarmes sont prononcés, ce qui engage les sergents à les lui demander ; M. Dulac leur a-remis son épée et sa canne.
On ne peut ici que rendre justice à la noble résignation de M. Dulac, qui, convaincu de la loyauté de ses frères d'armes, ne témoigne nulle inquiétude sur son sort. Cependant pour sa propre sûreté ces bas-officiers le reconduisent chez lui et lui font promettre d'éviter de se montrer dans ces premiers instants. Dès lors, tout rentre dans l'ordre.
Bientôt la nouvelle de cette rumeur se répand dans la ville. La garde nationale apprend,
par la voie trompeuse du public, souvent mal informé, que la vie d'un citoyen est en danger.
Son zèle ne lui laisse pas le temps d'apprécier ces bruits mensongers: elle offre avec
empressement les secours qu'elle pense nécessaires à celui qu'elle croit opprimé. Ùu camarade
de M. Dulac, présent à l'instant de la crise, exprimesa reconnaissance à la garde nationale
et refuse ce secours comme superflu. La garde nationale apprenant que cet
Le corps royal doit encore ici le témoignage de sa reconnaissance au corps municipal /fui, chargé spécialement de veiller à la tranquillité publique, a pensé, avec raison, que ce courtmo-mentd'effervescence ne pouvaitavorrde suite dans unrégimentoù les sentiments patriotiques ne sont point suspects, puisqu'ils ont pour base l'amour de la loi. Jamais le régiment de Strasbourg n'aura à rougir d'avoir enfreint les principes d'une Constitution qu'il défendra jusqu'à la dernière goutte de son sang. Il sait que la liberté repose sur la loi, qui n'est que l'expression de la volonté générale : hors delà loi, il n'ignore pas que la liberté devient licence et que bientôt l'Etat est dissous. Il a juré obéissance sans borne aux lois militaires, parce qu'il sait qu'elles ne peuvent attaquer la liberté des citoyens.
En un mot, il n'oubliera jamais le serment qu'il a prononcé librement d'être fidèle à la nation, à la loi et au roi, et il attendra dans un silence respectueux le jugement que portera sur le principe de cétte affaire un roi citoyen, que la nation a déclaré chef suprême de l'armée et qui jouit de l'amour de tous les Français.
A Strasbourg, le
Voirot, second canonnier ; Bigot, sergent ; Là Lorre, sergent-major; Le Gros, lieutenant en
3e ; Destrés, lieutenant en 3® ;
Grosselin, sergent ; Ali, lieutenant en 1er; d'arthan, capitaine
en lep; Dufort cadet, capitaine en 2o, Wertz. serpent-major;
Cornet, capitaine eu 1er ; Montrichard, lieutenant en 1er.
L'assemblée générale des officiers, bas-officiers et soldats du corps royal d'artillerie, présents à Strasbourg, ayant entendu le rapport de ses commissaires, l'a adopté à l'unanimité et en a ordonné l'impression et la publication.
A Strasbourg, le
Signé : Bonnefous , lieutenant-colonel, commandant ledit régiment, président.
Chanteclair, capitaine en 1er et Boissière, lieutenant en 1er
secrétaire.
Ce procès-verbal est accompagné d'une adresse à l'Assemblée nationale exprimant leur soumission aux décrets et témoignant le désir que le grade de colonel soit confirmé à M. de Puységur.
Messieurs, les bas-officiers, canooniers et soldats du régiment d'artillerie de Strasbourg, m'ont fait l'honneur de m'écrire, pour me prier d'appuyer leur demande auprès de l'Assemblée nationale; il* sont vivement alarmés de la demande faite par un officier de ce régiment contre la nomination de M. le marquis
de Puységur, obtenue par lui en 1778. Je n'entrerai, Messieurs, dans aucun détail sur cette affaire qui me paraît n'être pas du ressort de l'Assemblée nationale; mais je aois, pour remplir le vœu du régiment de Strasbourg, vous dire, en son nom, qu'il est vivement attaché à M. de Puységur, qu'il le regarde comme son père et qu'il se rend caution de ses sentiments et de son patriotisme ; ce témoignage d'affection des soldats envers leur colonel, cette union entre le régiment et son chef est si précieuse, Messieurs, qu'après vous avoir proposé de renvoyer cette affaire au pouvoir exécutif, je crois devoir engager l'Assemblée de charger son président d'écrire au régiment d'artillerie de Strasbourg, pour lui témoigner la satisfaction qu éprouve l'Assemblée nationale de l'union intime qui règne entre ce régiment et son chef.
(Cette motion est mise aux voix et adoptée.)
, procureur du roi de la prévôté de Tulle, admis à la barre, supplie l'Assemblée d'ordonner que toutes les minutes des procédures pour cause d'attroupement soient renvoyées sur le champ au comité des rapports. Il prononce le discours suivant :
Messieurs, je réclame l'exécution des lois ; je plaide la cause de l'humanité.
Le-tribunal prévôtal de Tulle, où je suis procureur du roi, a méprisé toutes les règles, violé toutes les formes, il est toujours dirigé par les mêmes principes et je ne le défère à cette auguste Assemblée qu'après m'être inutilement adressé aux tribunaux supérieurs.
Ces magistrats, jaloux de cacher et d'ensevelir dans l'oubli les vices d'une juridiction qu'ils dirigent à leur gré, n'ont fait aucun droit sur ma réclamation.
Je me suis plaint à eux de ce qu'on avait condamné plusieurs particuliers pris en attroupement à Favars, sans avoir fait droit, ni même prononcé sur ma demande en cassation de la procédure.
Je me suis plaint, Messieurs, de ce qu'on s'était permis de juger, et surtout de prononcer des peines de murt, sans qu'il y eût aucune conclusion sur le fond.
Je me suis plaint de ce que ce tribunal avait condamné à mort un homme qu'il ne déclarait que coupable d'avoir été pris dans un attroupement les armes à la main et violemment soupçonné (tavoir brûlé une amorce, tandis qu'aux termes de la loi martiale, de cette loi, que les circonstances avaient nécessitée, il ne pouvait condamner à la mort que ceux qu'il déclarait atteints et convaincus d'avoir usé de violence.
Mes supérieurs me répondirent: l'un qu'il n'était juge que des compétences, l'autre qu'il y avait trop de vivacité de ma part, comme si l'on pouvait se plaindre froidement de ce qu'on a fait périr des malheureux qui ne le méritaient pas, ou qui n'étaient pas légalement condamnés.
Des discussions survenues entre Tulle et Brive engagèrent ces deux villes à envoyer des députés vers l'Assemblée nationale.
Si les députés de Tulle s'étaient renfermés dans les termes de leur mission, je n'aurais pas cru devoir me présenter sur la scène, laissant à l'Assemblée nationale le soin de rendre justice à qui elle était due.
Mais, Messieurs, j'ai vu pendant ces discussions les haines s'accroître dans notre province, les passions fermenter, les préventions grossir, j'ai vu l'opinion publique s'altérer par les intrigues des ennemis de la Constitution* par ces ennemis
qui seuls, depuis le décret de sursis, entretiennent les divisions entre les municipalités de la province. J'ai vu l'innocence exposée aux fureurs des méchants.
Je me suis vu inculpé moi-même pour avoir fait le bien, pour avoir cédé aux mouvements d'une âme compatissante et pour avoir fait éclater mon zèle pour le maintien et l'exécution des lois.
Un des députés extraordinaires a présenté comme un crime, à tous mes concitoyens, le soin que j'avais pris d'éclaircir, aux yeux de mes supérieurs, la conduite du tribunal prévôtal de Tulle.
Si je n'avais eu à combattre que cette inculpation particulière, si je n'avais eu qu'un intérêt personnel à défendre, après avoir rempli mes devoirs, j'aurais attendu patiemment, du temps et de la vérité, ma justification.
Mais j'ai tremblé qu'une ligue avide du sang des hommes ne parvint à remettre en des mains dangereuses un glaive qu'elles pourraient souiller encore..... Mais j'ai craint que les intrigues du parti anticonstitutionnel n'égarassent les esprits dans notre province.
Je n'ai plus hésité sur le parti qui me restait à prendre : j'accours pour faire connaître à l'Assemblée nationale les fautes graves, les erreurs volontaires, et puisqu'il faut le dire, les prévarications de ce tribunal qui fait tant d'efforts pour se renantir d'un pouvoir dont il a tant abusé.
Ce corps cherchera vainement, comme il l'a fait jusqu'ici, à confondre son intérêt avec celui de la commune et de la garde nationale de Tulle.
Ce n'est, Messieurs, ni cette garde nationale ni cette commune que j'attaque.
Je m'empresse, au contraire, de louer le patriotisme et le zèle qui les ont distinguées.
Je m'empresse de reconnaître et de publier que c'est principalement à la garde nationale de Tulle qu'est dû le rétablissement du repos public dans notre province et j'ose même dire que j'ai partagé sa gloire et ses dangers.
Je n'attaque que le tribunal prévôtal, au sort duquel l'honneur de la ville et celui de la garde nationale ne sont point attachés.
Les citoyens de Tulle doivent considérer que mon zèle embrasse leurs plus chers intérêts, puisqu'il est dans l'ordre des événements possibles qu'ils soient eux-mêmes exposés quelque jour aux procédures de la prévôté.
N'est-il pas affreux de sentir perpétuellement son ârne oppressée par la douleur de voir qu'on a sacrifié des victimes, plus malheureuses que coupables, et par la crainte d'en voir sacrilier d'autres aux passions haineuses et sans cesse agissantes des ennemis du peuple?
Pour vous mettre à portée de connaître les abus que je n'ai pu arrêter et d'en prévenir surtout de plus grands, je vous supplie, Messieurs, d'ordonner que toutes les minutes des procédures instruites par le tribunal prévôtal de Tulle, pour cause d'attroupement, soient renvoyées sur le champ à votre comité des rapports. Je dis sur le champ et j'ai les plus fortes raisons pour désirer que cet ordre soit accéléré.
répond :
L'Assemblée nationale prendra votre pétition en considération et elle vous permet d'assister à la séance.
demande que l'affaire soit renvoyée
au cotriitê des reports, Que le diééoUrs du pro^ CUreUr dtl roi Soit déposé sttr lé bureau ét (jue ledit procureur soit entendu lorsque l'affaire Sera discutée.
La motidn, toise âUx voix, eit décrétée.
, électeur et représentant de lit cofiimune dè Paris, ftdmié à lâ barre, prononce un.dïscours et présente un me* moire sur la nécessité de formër unè ééole d'éx-périeUcë pbùr la pàftie inorâle dë l'éducation publique ; il présente en tnème temps uu arrêté dé la municipalité de Pàris qui jUge l'expéfieboe nécessaire.
répbnd :
« L'ÂsSembiéë tiatfonale} jui veut fôttdeî Sur des bases solides le bonheur qu'elle jjféparë S là France, connaît toute l'itrifJoHaiiée et të pHi d'Uiië éducation nationale connue Sbf tie bdùs principes, plie sait quë lès cœurs inhbfcètlts et pUbS de là jeunesse sont ie monument lé plds précieux ét le plus durable sur lequel elle jpui^sè graver 1& Constitution. Ëlle ne péUt donc Voir qu'avec uti extrême intérêt que vous çohSàcflëÉ à Cet Utile emploi les fruits de Voâ vêillëé et de Votre expérience. Elle prendra eti cohsldêràtiun les projeté qUe voué lui SOuinettëz êt VOUS permet d'aèsiSiêr a sa sëanéë. »
L'Assemblée dévête qUé le Mémoire sur l'êdu* cation, présenté par M. fioUfdod, sera rëftVbyë au comité de Constitution.
, maire de Lishuiic, admis à la bàrrë? prononce un discours dans lequel il annonce tjUé la municipalité dë Llsiëux, ahiEfiêë du désii1 de coopérer, autant qu'il éSt ëtl.éllé, à PèUblléSèriiëîit et au maintien dë la CbtiStjtutibn, l'à Chargé de mettre soùâ iës yëUi de l'Ààsérhblëë f i° Un arrête dû d^eburarit. par léqUel. ën sttpbrimànt et anéantissant un" miéUë- fanatique, intitulé : J)èciafdtiôii dès catholiques dè Rmtès, {î]lë tièclarë interrôdipré toute correspondance iràtëiinëHe~ët-amicaleavec la municipalité dë Nîmes, jusqu'à Cë qu'elle ait jâuthênudiiërflebt déSâtoUë cë ridicUle ouvrage; 2b Uû autre arrêté du lendemain 18, ayant pour objët Ûti: imprimé incendiaire qui à poUr titré : Adresse âux assemblées primaires du département dè Châlofis. M. LefbV àjoutë au®, la gardé nationale et là municipalité de Llsiëut, animées du taéttië eëprii dU bteh public, s'ôfcçU*-peut des moyens dé fBffiier, &Veë iës troupëë nationales dés villes Voisines, une cbufèdérâtion qui, en assurant la tràbdiiiliité dans Cë& cantons. Otera àUx antipatriotës tout éSpbir dé trOUblei* ët apporter obstacle aux décrit de i'Aëâëifibtèé nationale.
admet M. Leroy à la séance.
Un membre fait la motion que l'Assemblée Charge don président d'écrire à la garde nationale de Ltslëux, pour l'assurer que l'Assemblée natio»-nale applaudit au patriotisme qui anime cette garde. La dlbtiOn* mise aux voix* est décrétée.
s'étant retiré par devers le roi, M. Camus prend place àù fauteuil.
(de tfemôurs) présenté à 1 Assemblée la soumission de la municipalité de la ville d'Auxerre, pour acquérir des biens nationaux jusqii â concurrence aé Id somme de 8 millions.
Cëtte soumission est accompagnee d'une ad hesion entiere aux decrets de l'Assemblee nationale.
Il donné ëftsûite lecture d'une adresse du coii-seil général de là CotoriluUë ae NëfnourS, qui contient: 1° l'expression dés sentiments d'admirâ-tion dë respect ët de soumission dent tous lés citoyens de la Ville dé Nemours Sont pénétrés pour tous les décrets emanes dë l'Asseinblée nationale et Sanctionnes par lë roi. « Nous y àdhê-rons dé lôutës nos forces, disént-ilS, Cdrtimë à la léi qui ëbligë; èôtotaé k la /ëliglbn qui perâUâdë, eomnie au bonheur qui fait tout tibire ës3poir-; «> lë sobiflissM d'âctjuêHr pôur 1 ùlillibh dëâ fonds nàtiohadx; 3Ô lë tbôùtànt dë la Contribution patriotique, 37,369 livrent enfin, la dénohciktiôtt d'écrits tldcè'ftdiàirëé. Cëtté adféssé ést terminée par cëttë phfàSëi à j^os CtëUrs, fios fbttunëâ, tios biens sont tout entiers à la Gonstitutiôû. •
déclare qu'ayant déjà offert, âii tUoià-d'octobre dernïer^une somme de i,Û0D livres, a titré dë don patriotique, pour le Siéur Rouillé, receveur du grenier à sel, à San-cërrë, il est encore chargé par cè citôyçn esh-mablë d'Offrir, pour èa contribution patriotique, pne somme de.2»00ô livresLformânt iion pas seulement lë quart, mais la moitié a^ sop'ravënu, laquelle somme a été réalisée aujourd'hui, à là caisse dëi dons t^triotiquës par lui, Salle de Choux, député du Bérry.
, au bom du comité chargé de l'aliénation des domaines nationaux, fait lecture d'une instruction pour l'exécution du décret du 14 mtfi* sur la vente des dettiaihes nationaux.
fait la Motion de déôfêter que ritiëtrdëttbu sera exécutée suivant Sa fo?tflë ët tënëdh côfflmé lë déërët dti 14 mai, et qu'elle serâ jôintë â Bëb proces-Verbal ..dë ce jour»
Cette motion est adoptée. Suit la teneur de l'ina-truction :
Instruction pour l'execution du decret de l'Assem-blee nationale, du 14 mai 1790, sur la vente des domaines nationaux.
Les dispositions de la loi sont renfermees sous trois titres differents.
Le premier auiorisè toutes lés feunicipalités du royaume à acquérir des domaines nationaux jusqu'à coBCdrijëncë d une sommëi de 4Ù0 millionSj règle lës formalités et lès Conditions qu'elles auront à remplir et fixe les profits qu'elles doivent rètirér de iëurs acquisitions.
Lë sëcônd assure â chaque municipalite Une préférënce sur les biéhs situés dans l'étendue aë son territoire, lui permet de se faire subroger à là mÛnicipàlite qui les aurait précédemment âc-? quis, et détermine les conditions, lés formes éc les avantages delà subrogation. .
Le troisième oblige les municipalités â revendre aussitôt qu'il leUr sera fait dés offres égales au prix de l estimatioh, et régie les tërmës et lés fa-cilités qui seront accordés aux acquêrëiirs particuliers.
L'analyse.ët.lé dévëlôppemëîlt dés dispositions de lk loi, faciliteront rintëlligéncë, ët pfêviéii-dront les difficultés que son exécution pourrait rairë naître.
Il faut distinguer, dans les quatorze article^ du premier titré, huit principaux objets:
1. Les opérations antérieures aux ventes;
2. La fixation du prix;
3. Ce qui forttiëra le titi^ë t^anêlatif dë propriété en faveur des municipalités ;
4. Là riiàmère dont le payement dbit s'effectuer ;
5. Lés préckùtlôns prises pbtlt* assuréH'aëfrdit-temetit exact de toutes lès Obligations dés municipalités, même pëhdant ledr jouissance intermédiaire, jusqu'à l'époque des rëvëntës;
6. Lës prdftts accordés àdx municipalités, et la manière dont il lëur én sera fait raison ;
7. Lës obligations qui leur sont imposees;
8. Enfin, quelques dispositions qui ne tiennënt qu'indirectement à l'esprit général de la loi.
Lé tftëtaiër et le âéboild objet sbût règléM pâr leë ambles 1, 3 ët 4.
Lës municipalités èohvdcruërdnt le conseil général de leur commuhë pour en connaître të Vted sur l'acquisition des domaines nationaui. Si i'ac-qûisifcidti est résolue par conseil général, safts uttë désignation exprëssë deé objets, la municipalité s'occupera incessamment d'ën àfrôtel1 lé choix ët d'ën fairë l'indication.
La cbbhaiéSarièe dès baux dé ftës biens Ibi sera fournie à sa première réquigitititi, âbit parlés miitiicipalitës qtii en auront dressé ntivéntaiPë, soit par tous àutrës dépositaires fjubliës OU .par-ticuliers, ët mëtrië pâr lëk fermiers et locataires.
Là mnnidpaUté désignera, pàPsà dëibàiidë, les biettë qu'éllé aura ëhoisié, et cbnrbf-merà sês offres àtii disnô^itidiis dii décret ët àu modèle annexé a lâ presente instruction.
Il faddrà distinguer ïibignetiSëfiiëttt lës biens des trois premières classes, de betîX dë la quatrième.
Point Je diffléultë idPsttiié lés baux tie Fëttfëf-niérbttt que clëg biëns de là pfëthiêPe elàSsè. Là municipalité offrira vittgt-àëui fbiâ lë mbntabt de la redevance annuelle.
Les impbéitiôhâ dtiës à ràiébh de là propriété, soit qiië ruëlifrditieP lés pppôrip du chië le fef-miëP les paie à sa décharge, Seront dédîiités p'odf déterminer lë mdtitànt dii rëVëntt lièt, ét nier cëlui du càpitàl.
Lofsqtié lës bàux renfermeront des biëîlà dë là première, des deuxième et troisième ClàBséS, s'il est possible de distinguer avec précision les portions de redevance appliquées aux uns et aux autres, les municipalités pourront offrir vingt-deux fois le montant de làrëdëVahce des biens de la Eremière classe, vingt fois le montant de celle des iens de la deuxième, et quinze fois le montant .de celle des biens.de la troisième;
Lorsqu'une distinction précise ne sera pas possible, et toutes les fois que les biens demandés seront de la quatrième classe ou. confondus avëc des biens des trois dernières* il sera indispensable de procéder à une estimation ou ventilation.
La ventilation sera également nécessaire à l'égard des biens de la première classe qui sont affermés confusément avec des dîmes ou dés droits féodaux supprimés, dont le fermage n'est pas déterminé par les baux.
Les experts seront nommés, l'ini pjiï là municipalité, l'autre pàr rassemblée dti le directoire du district; et le tiers expert, ën çàâ dé partage, par le département ou son directoire.
Les départements ët directoires sont Speciàle-mëhi autorisés à faire ces nominations, et chargés d'entretenir une côrrespphdàncé exacte avec le comité dè l'Assemblée nationale.
Toutes personnes pourront etre admises aux fonctions d'experts; il suffira qu'elles en aient ete jugees capables, et choisies par les parties in-teressees.
Lorsque ta demande d'pnë municipalité donnera lieu â une estimàtion où vëhtiiàtidn, elle désignera, pàr sa demande même, 1 expert qu elle voudra choisir.
Quant à la Commune de Paris, dont la municipalité n'est pàs formée, les experts seront nommés, l'iîn par les commissaires actuels de là dom-ihuhé, l'autre pàr ceux dç l Àssëmbléë nationale, qui, relativement àuX biens situés hors du dë* partement de Paris, chargeront de ces nominations les districts des lieux ou leur directoire, S'il est bésoin d'un tiers expert, le comité lé nommera, poUr les biens situés dans te département de Paris; et, pour les autres, il le iera nommér par lës assëthblèes ou directoires de départements.
Les ëxpërts donneront, dans leurs rapports, Une connaissance exacte, claire ét précise des objets demandés et du produit annuel} mais ils s abstiendront des détails qtii ne serviraient qu'à multiplier les frais.
Les experts estimeront, par des rapports séparés, les biens situés sUr des territoires différents, sauf les. cas énoncés par l'article % du titre II.
3° Lës décrets, par lesquels, après l'évaluation des objets, les offres dés municipalités seront admises, soit qu'ils concernent une èeu le où plusieurs municipalités réunies, formeront leurs titres de propriété.
Quant aux municipalités qui qnt fait ou feront des sbumissions pour des sommes considérables, les biens Qu'elles voudront acquérir pourront leur être adjuges par des décrets séparés,et successifs.
4° et 5°t Les articles 5f 6 1Q,11 et 12 du premier titre, 6 et 7 du second, et 5 du troisième doivent être ràpprôchés et réunis.
Ils assurent le payement très exact de toutes lès sommés qui .seront dues par lés municipalités* eu capital et intérêts.
Jusques aux reventes, les fermages et loyers des biens qu'elles auront acquis, les renfes^ctives, les produits des bois qu'elles auront droit d'exploiter) sêrqnt payés, a concurrence des intérêts de leurs obligations, dans la caisse de l'Extraor-dinairéi ou dans celles des, districts qui seront préposées â cet ëïfet, et avec lesqliellès là caisse de l'Extraordinaire, correspondra.
Quànt aux municipalités qui, n'ayant pas revendu, auraient besoin de recourir à des emprunts, pour se libérer, l'article 12 veut qu'elles y soient autorisées par l'Assemblée nationale, ou les législatures suivantes qui ëh régleront les conditions.
Les municipalités paieront les intérêts de leurs obligations^ supporteront les impositions» à compter du jour du décret pàr leqtiel leurs bffres auront été admises, et percevront les fruits des biens acquis, à compter de la même époque, en proportion delà durëede leur jouissance;en sorte qu'une municipalité, dont lés offres auront été admises le 1er juillet, aura droit à la moitié des fruits ; de l'année, soit que la récolte ait précédé ou suivi sou acquisition.
Lorsque les reventes seront effectuées, les de-
niers qui en proviendront seront tous versés directement à la caisse de l'Extraordinaire ou dans celles des districts.
Les receveurs et trésoriers de l'Extraordinaire et des districts feront annuellement raison aux municipalités des profits qui leur seront acquis ; et, après leur libération complète, de la totalité des sommes qui leur appartiendront. C'est ainsi que doit s'entendre l'article 10 qui oblige les municipalités à compter de clerc à maître du produit de toutes les reventes.
6° Les avantages accordés aux municipalités par les articles 5, 7,8 et 11 ont le même motif. C'est parce que le prix de toutes les reventes entrera direct' ment dans la caisse de l'Extraordinaire que les municipalités ne sont soumises à y déposer des obligations que jusqu'à concurrence des trois quarts du prix convenu. Ain-i, jusqu'à l'époqre des reventes, elles profiteront d'une portion des intérêts de leurs obligations; et, après les adjudications, du seizième du prix de toutes les reventes aux particuliers.
Ce profit ne sera point, dans le premier cas, du quart entier de l'intérêt de leurs obligations; puisque, d'un côté, leur capital ne leur donnera pas un produit annuel de cinq pour cent, tandis qu'elles payeront ainsi l'intérêt des obligations, et que de l'autre elles auront des charges à supporter. Dans le cas de reventes, le profit du seizième sera égalemént diminué par les frais des estimations, ventes, subrogations et reventes.
7° Les municipalités sont tenues, ainsi que les, adjudicataires particuliers, à l'entretien des baux antérieurs au 2 novembre 1789, et conformes aux différentes lois, statuts et coutumes du royaume, et elles demeureront chargées des réparations locatives et usufruitières.
8° L'article-2 a pour objet de rendre possible la vente des domaines nationaux qui ne seraient demandés ni par les municipalités des lieux, ni par aucune autre, et surtout de répondre au voeu d'un grand nombre de citoyens qui désirent pouvoir en acquérir directement.
Les soumissions multipliées que les particuliers adressent au comité sont et seront aussi inscrites, toutes par ordre de dater en un registre tenu à cet effet, et envoyées aux départements et districts ou à leurs directoires.
Un décret spécial réglera incessamment les formes des adjudications qui seront faites directement aux particuliers.
Un comité exprès sera chargé de la liquidation des objets énoncés en l'article 7. Sa disposition et celle de l'article 14 n'apportéront aucun changement à l'intention principale de la loi. Les ventes qui seront faites en vertu du décret du 14 mai seront portées à une somme de 400 millions, déduction faites dés rachats et remboursements dont la nation est chargée par le même article.
TITRE II.
De la préférence réservée aux municipalités sur les biens situés en leurs territoires.
Les dispositions de cé titre déterminent :
1. La nature et l'objet du droit de subrogation accordé aux municipalités des lieux;
2. L'obligation imposée en leur faveur aux municipalités qui auront acquis directement;
3. Celles qu'auront à remplir les municipalités qui voudront être subrogées :
4. Les conditions desquelles dépendra, pour^ ces dernières, la conservation entière des profits de l'acquisition ;
5. Les précautions prises pour que les subrogations n'arrêtent, en aucun cas, l'activité des reventes.
1. Les articles 1, 2 et 3 font très clairement connaître les domaines nationaux pour lesquels chaque municipalité aura un droit de préférence, et ceux qu'elle sera tenue de réunir dans sa dè-mande;
2. La notification qui leur sera faite, par la municipalité qui les aurait directement acquis, ne leur laissera point ignorer l'existence de leur droit. L'article 4 les avertit qu'elles n'ont, pour l'exercer, que le délai d'un mois, à compter du jour de la notification ;
3. Les articles 5, 6 et 8 leur indiquent très précisément les obligations qu'elles auront à remplir pour obtenir et conserver l'effet de la subrogation ;
4. Ce qu'elles doivent surtout soigneusement distinguer, c'est le cas où les municipalités subrogées profiteront seules du bénéfice accordé par l'article 2 du premier titre, et celui où. elles le partageront avec les municipalités évincées par la subrogation.
Le bénéfice appartiendra en entier à toute municipalité qui aura demandé et obtenu la subrogation dans le mois de la publication de la loi. Elle n'en conservera que les trois quarts lorsque la subrogation n'aura point été demandée et obtenue dans ce délai.
Mais comme il ne serait pas juste qu'une municipalité souffrît d'un retard qui ne serait pas de son fait, elle sera censée avoir demandé et obtenu la subrogation dans le délai fixé, lorsque, dans le mois de la publication de la loi, sa demande en subrogation sera parvenue au comité, avec les états contenant la désignation des biens, et les offres de soumissions, aux termes de l'article 6 du titre II.
Il sera tenu, par le comité, un registre général où seront très exactement inscrites, par tirdre de date, toutes les demandes des municipalités, à l'effet d'en constater les époques et les objets, et d'éviter entre elles toute espèce de difficultés.
5. Une municipalité qui, sur des offres particulières, aura fait commencer les publications, les fera continuer, et poursuivra l'adjudication définitive. Le bénéfice sera ou ne sera point partagé, suivant que la municipalité subrogée aura ou n'aura point satisfait aux conditions imposées dans les délais prescrits.
TITRE III.
Des reventes aux particuliers.
Les deux premiers et les sept derniers articles du titre III n'exigeant point d'éclaircissements, on se bor-nera à quelques observations relatives aux articles 3 et 4, et à l'exécution générale de ia loi.
Les adjudications définitives seront faites à la chaleur des enchères et à l'extinction des feux.
On entend par feux, en matière d'adjudication,
de petites bougies qu'on allume pendant les enchères et qui doivent durer chacune au moins un demi quart d'heure.
L'adjudication prononcée sur la dernière des enchères, faites avant l'extinction d'un feu, sera seulement provisoire, et ne sera définitive que lorsqu'un dernier feu aura été allumé, et se sera éteint sans que, pendant sa durée, il 'ait été fait aucune autre enchère.
Les municipalités, dans l'acquisition desquelles il se trouvera des portions de bois aménagés se conformeront aux règles précédemment observées pour la coupe de ces bois.
A l'égard de ceux qui n'étaient point aménages, les municipalités ne pourront faire de coupes qu'en vertu de l'autorisation des départements, qui, dans leurs décisions, suivront l'usage le plus ordinaire des lieux.
Si pendant la jouissance intermédiaire d'une municipalité, de grosses réparations sont jugées nécessaires, elle ne pourra en faire la depense sans y être autorisée par le département, qui ne décidera que sur 1 avis du directoire du district.
Les municipalités ne pourront également commencer ou suivre des contestations en justice qu'en vertu d'une pareille autorisation.
Quant aux étangs et aux usines, les départements et districts sont spécialement chargés de veiller à ce que les municipalités, et même les acquéreurs particuliers, jusqu'à l'entier acquittement des obligations, n'y causent point des dégradations et en jouissent en bons pères de famille.
Décret du 31 mai,
sanctionné par le roit le
L'Assemblée nationale approuve l'instruction, et décrète qu'elle sera suivie et exécutée suivant sa forme et teneur, comme le décret du 14 mai présent mois, et que le modèle de soumission et le tableau du calcul des annuités seront imprimés à la suite.
Signé : de Beaumetz, président.
Chabroud,
L'abbé Colaud de la Salcette,
De Fermon,
Le Baron de Jesse,
Prieur,
Royer, curé de Ghavannes,
secrétaires.
Suit un modèle de soumission à souscrire par les municipalités qui veulent acquérir des domaines nationaux ; leur teneur avec indication de la date et du prix des baux.
Nota. Les municipalités qui ont déjà formé des demandes sont invitées à envoyer, sans délai, au comité chargé de l'aliénation aies domaines nationaux, une nouvelle soumission dans la forme indiquée. Leur première soumission enregistrée au comité servira néanmoins à constater, par Vordre de la date, la priorité, dans le cas de concours.
Instruction pour le payement dés annuités et leur remboursement.
L'Assemblée nationale a autorisé les acquéreurs de domaines nationaux à ne payer comptant qu'une partie du prix, à condition qu'ils acquitteraient le reste en douze payements égaux faits d'année en année, le premier payement devant avoir lieu un an après le jour de l'adjudication.
L'acquéreur devant payer l'intérêt de la somme dont il reste débiteur, les douze payements égaux doivent être déterminés de manière que chacun de ces payements renferme d'abord l'intérêt qui est dû, et de plus une partie du capital. Le taux de cet intérêt est fixé à cinq pour cent, sans retenue.
L'on sait qu'on appelle, en général, annuités, des payements égaux destinés à répartir également, sur un certain nombre d'années, l'acquittement d'un capital et de ses intérêts.
D'après cette vue, l'Assemblée nationale a converti la portion du prix que l'acquéreur ne paye pas comptant en une annuité payable pendant douze années : l'intérêt à cinq pour cent s'y trouvant compris.
Pour cent livres de capital avec l'intérêt sur ce pied, l'annuité est de 11 livres 5 sols 7 deniers : ainsi un acquéreur doit, par an, autant de fois 11 livres 5 sols 7 deniers qu'il lui restera de fois 100 livres à payer.
Mais voulant donner aux acquéreurs la facilité de se libérer quand ils le désirent, l'Assemblée nationale a décrété qu'ils pourraient rembourser leurs annuités à volonté; mais seulement néanmoins un an avant l'époque de chaque échéance, afin d'éviter les fractions d'année dans le calcul des intérêts.
Deux exemples, ou deux tableaux de calcul, vont rendre cette opération sensible.
PREMIER EXEMPLE.
Le débiteur d'une annuité de 11 livres 5 sols 7 deniers veut la rembourser ; la somme nécessaire, pour opérer ce remboursement, dépend du nombre d'années pendant lequel il doit payer encore, ou du nombre d'années pour lequel il veut la rembourser; le remboursement se faisant toujours un an avant l'époque de l'échéance suivante.
Ainsi le débiteur de cette annuité (de 11 liv. 5 s. 7 d.) voulant la rembourser, dès la première échéance, c'est-à-dire ayant encore à la payer pendant douze années, doit rembourser une somme de 100 livres.
Première table relative au premier exemple.
Pour le remboursement des douze échéances d'une annuité de 11 liv. 5 s. 7 den. . 1001. s. d.
Pour onze années...... 93 14 5
Pour dix années...... 87 2 4
Pour neuf années...... 80 3 11
Pour huit années...... . 72 18 5
Pour sept années. ..... . 65 5 9
Pour six années...... 57 5 4
Pour cinq années. . . . . .48 17 »
Pour quatre années ........ 40 » 2
Pour trois années. ...... 30 14 6
Pout deux àntlëes......29 49 7
Pour une année .......10 14 11
Le détail des éléments de ce calcul serait trop long à insérer ; chacun pourra en vérifier ou faire vérifier l'exactitude.
Eu jetant les yeux sur cette table, chaque acquéreur voit* suivant le nombre d'années qu'il veut rembourser* quelle somme il doit payer pour chaque annuité de 11 livres 5 sois 7 deniers; il doit payer autant de foiseette somme qu'il devait payer de fois une annuité de il livres 5 sois 7 deniers, ou, ce qui revient au même> qu'il lui restait à payer autant de fois 1Ô0 livres sur le prix de son acquisition.
Gomme il peut être commode aux acquéreurs, et qu'ils peuvent préférer de payer une annuité d'une somme exprimée en nombre rond, comme de 100 livres, par exemple ; et que, dans ce cas* il est convenable qu'ils connaissent précisément la somme dbnt ils s'acquitteront en capital,en se soumettant au payement d'une annuité de 10Ô livres, la table suivante présentera cette indication, ainsi qUe celle des sommes qu'un acquéreur devra payer lorsqu'il voudra également rembourser une annuité de 100 livres.
La soranie représentée par une annuité, de 100 livres laquelle comprend le capital et l'intérêt) est de 886 livres 6 âôls 5 deniers.
Ainsi, un acquéreur acquittera} sur le prix de son acquisition, autant de bis la somme de 886 livres 6 sdls 5 deniers, qu'il se sera Soumis à payer d'annuités de 100 livres.
Et lorsque le débiteur d'une annuité de 10Ô livres voudra le rembourser* il aura à payer les sommes indiquées par la table sUivdnte, d'après le nombre d'années pour lequel il s'agira de la rembourser.
Seconde table.
Un an avant la pfëthlèrè échêatttëfe, c'est-à-dire aussitôt après l'acquisition, il faut payer :
Pour les douze années. . . 886 1. 6 f. 5d.
Pour onze années . ........... » 830 12 10
Pour dix années ......... 772 2 5
Pour neuf années . ... 710 16 10
Pour huit annéeB ........... 646 6 5
Pour sept années . . ..... . 578 12 8
Pour six années,.............507 11 6
Pour cinq années ............432 18 10
Pour quatre années. . . . 354 12 2
Pour trois années .............. 272 6 5
Pour'deux aùnées ............ 185 18 10
Pour uue année ... . ... 95 4 8
Par le moyen de ces deux .tables et de l'obeer* vation qu'une annuité de 11 livres 5 sols 7 deniers répond à 100 livres de capital, et 886 livres 6 sols 5 ,deniers de capital, à une annuité de 100 livres, on u*aura beàom que de calculs très simples pour appliquer à chaque acquisition particulière les clauses du décret.
(de Coutances), membre du comité des rappqrts, rend compte de r.emprisonnement du. sieur Séguy, arrêté par ordre d'une municipalité ivoisine .de Périgueux. Le sieur Séguy est aecusé d'avoir fait des efforts pour diviser la milice nationale et d'avoir cherché à troubler la tranquillité publique.
Le décret suivant est rendu sur cette affaire.
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu son comité des rapports, décrète que son président se retirera par devers le roi, pour le prier de donner les ordres nécessaires pour que lé hônimë Séguy, détenu dans les prisons dé Périguëuk, soit renvoyé et poursuivi par devant.les jugés Ordinaires du lieu où le délit dont il est préVëHti a été commis* et que les informations déjà faites contre lui par la municipalité a'Egliât soient Remises au ministère public, pour lui tenir lieu de dénonciation* et être jointes à là procédure. ».
lève la séance.
Séanoe du ermardi juin
1790
, secrétaire, lit le procèS-vèrbâl de là séàdcéd'hiéf au matin. Il ne ge produit aucuiie réclamation et ië procès-Verbal est adopté:
, dépiilê du Bèrry et rapporteur du comité ecclésiastique, obtiëht là pàrolé et proposé, aii nom aë Ce fcorhité, que déé éommissàlres, tant de cë comité qiie dés comités dé Gdfiâtitution, des finàhcèé, d'àgriciiltdfë, ët poui1 l'aliénation des biens nationaux, soient cfiargés de dresâèi* Une instruction pour indiquer aux assemblées admininistratives les objets dont elles doivent s'occuper.
L'Assemblée rend sur cette proposition le décret suivant :
« L'Assemblée nationale a décrété et décrète que, par dës membres pris au nombre de deux dans chacun des comités de Constitution, ecclésiastique, finances, agriculture, et aliénation des. biens nationaux,, il 6eratfait une instruction relative aux objets d'administration confiés aux assemblées de district et de département, laquelle instruction ils. présenteront à l'Assemblée daus lé délai de huitaine du jour du présent décret. »
donne connaissancë a l'Assemblée de deux lettres qu'il a reçues de M. de Saint-Priest, ministre^ contenant envoi, l'une^de pièces concernant iitié affairé de la garde nâtib-nale de Soubise, l'autre de pièces qi^i regardent la municipalité d'Auray, un capitaine-commandant du régiment de Roûérgué, et dés difficultés sur la tfàifl-fortë que doivent fournir les troupes réglées. Le premier paquet est rénvôyé àu comité des rapports, et le second au comité de Constitution.
Un de MM. les secrétah'es fait lecttire d'une lettre de M» de la TOur^dù-Pin* par laquelle ce ministre informé l'Assemblée des ordres qu'il adonnés pour faire arrêter les trois dràgohs qui Ont suscité l'insurrection du régiment de Lorraine, ci-devant dénoncée à l'Assemblée.
fait lectdre d'une lëttfë dàtëé de Llfflôurs, 29 fcbài* cdntènânt déBohcià^ tioti d'un
jugëinent rehdti ëâ f à vêtir dii sieur abbé
Cette lettre est renvoyée au èoolite êcclesias-tique.
se piâlût des dégradations iioift-breuses qui sé commettent dans ïe| biens nationaux. Pour1 rêpfiniër abus il dëtflândë què l'Assemblée charge sëé codiiteè dë faifrë dès recherches à cet égard ét d'éh présenté* ensuite le résultat.
dit que le ëôfcfaifë ecclésiastique s'ëèt occupé dë dët bbjët et qu'il n'attêfid qu'Uri tbdiùënt favofâblë poiir en ëntfëtehi^ l'Âs-ëénibléë.
, cnt Un congé d'un mois pour rai* Ion de santé.
Lé sieur Béhoîi Boulet, prêtre: âê Paris, écrit à VAss'emblèê là leltrè suivante pat laquelle il déclare abandonner a la nation les deux seuls bénéfices dont il sqîi pourvu, :
« Nosseigneurs, c'ëst avec dbuleur que le sous* Signé voit, aépûislongtemps,que l'intérêt personnel déguisé sous le faux prétexté de là religion qui le repreuve, continue à égarer un grand nombre de ses confrères, que notre heureuse Révolution aurait dû rappelèr aux vrais principes dé cette religion et du bien publie. Il a dons pensé que hop seulement il étdit convenable, mais qu'il devenait même nécessaire, en de .pareilles circonstances* que ceux qui ont le bonheur deconnaître et d'aimer ces principes en fissent une profession publique et donnassent à leurs frères égarés l'exemple du désintér^ssemenV lë^plus entier.
Le soussigné à'estimera trop heureux si* par l'abandon qu'il fait par les présentes à la nation, des deux modiques bénéfices qu'il possède, il peut être de quelque utilité à la patrie et encourager, par son exemple, cëuxde ses confrères de Paris qui n'ont pas encore ©sé se déclarer pour elle. Son sacrifice es^ entier, Ôomme il est volontaire : il ne pofesêde rien de plus.
« Signé : Boulet, prêtre.
« Paris, ce er juin 1790
Cette lettre est, renvoyée au comité ecolésias-tiques ainsi que les titres qui y sont joints.
annonce que la communauté de fielrupf, district de Verdun, département de la Meuse, offre d acquérir les biens nationaux qui sont dans son territoire.
, Cette soumission est renvoyée au comité pour l'aliénation de ces biens.
, rapporteur du comité des rap-ports. Messieurs, la nouvelle municipalité de Sau-veterre a décerné une contrainte par corps contré les anciens officiers municipaux de cette localité qui* sur la demande.qui leur en avait été faite de rendre compte de, leur gestion* avaient répondu n'avoir pas de deniers entre leurs mains et avaient/renvoyé au. régisseur. A leur tour, les anciens, offi.ciers municipaux se sont pourvus au parlement de Navarre* le g mai dernier, et ont obtenu un arrêt de .défense contre là. contrainte par corps ët une autorisation de prendre à partie
la nitfnlè'lpâlitè hdtiVëiié. Dë part ét d'antre il exiëtë tidë grandë ahifnùsitë, ët il y à fiôlation dëS règles, puisque les affaires administratives doiVeht être portées préalablement devant les assemblées de département.
Lë comit£ Vous propose, sur cette affaire, un decrét ainsi conçu :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu son comité dès rapports, considérant que lès assemblées administratives ne peuvent;être troublées dans leurs fonctions par aucun acte du pouvoir judiciaire; qu'avant de porter une dénpn -ciàtion dans les tribùnàiix Contre lés, .officiers municipaux, cèttë dénonciation doit être sotir mise à l'administration ou au directoire du département;
« Déclare non avenu l'arrêt .rendu par lé parlement de Navarre le, 8 mai dernier, contré lés ofûciérs municipaux actuels de Sâuvetérrë, ainsi que tout ce qui s'est ensuivi.
« Déclaré également non avenue la contrainte par corps décerpée par les officiers municipaux àctuetë déjÇaûv^terré, contrë leurs prédécëssèurs* sauf auxdits officiers municipaux actuels & porter leur réclamation devant l'administration m dirëctôiré .du degàrtëmënt. qui, âpres avoir pris l'avis de 1 administration au district ou dé soii directoire, enverra, s il y a heu, a ceux qui ën devront connaître. »
, député du Béarn. fies motifs de justice m'obligent.à prehdre la Raroie pour justifier la conduite du parlement de Pau. Les an" ciens officiers municipaux de JjauVeterfe ;n'è-taient point .comptables puisqu'ils n'ont àueun maniement de dëpiers publics et qu ils ne sont qdé simples ordonnateurs des dépenses» Le seul officier comptable est le grande la communauté, et ce n'est que lorsqu'on juge son compte que l'on ëxamihe le mérite des mandements donnés par les officiers municipaux, sur lesquels on accorde au garde une action en, garantie, si les articles de dépense .sont cancellés.
Les officiers actuels ed ordonnant aux anciens dé fôûrnir un compte et èn décèrnant la contracte par corps* ont fait aGtç de juge, qualité qui leur appartenait en vertu de la coutume de Ëèârn; aussi la plainte des officiers anciens n'a été relevée au parlement que par la, voie de l'appel, conformément à une décision du Conseil de 1712 et d'autres arrêts du Conseil de 1773 et 1741, revêtues de lettres patentes» Le parlement était le seUl qui $ût en connaître* et, son arrêt est rempli dë justice, quant à la prise à,partie, parce ç[ue les officier^ actuels ont. excédé leur pouvoir, pâr^e aue d'ailleurs ils ont connu de là màtièré, quoiqu ils plaidassent avec, les officiers anciens, qu'ils fussent eUx-mêmes intéressés ën partie dans lâ comptabilité qu'ils recherchaient, et qu'enfin les officiers actuels se s&nt associés, en décerriàrit la contrainte, les notables oui n'ont aucun droit de prendre part a un pareil acte de iuridictipné Je demande, sans pronducer la nullité de 1 arrêt* le renvoi du tout à l'assemblée de départementales choses demeurant en l'état.
, député du Béarn. Je ne cherche ni à justifier ni à inculper le parlement, car' je sUis fort éloigné dë croire que, ni dahs l'ancien ni dans le nouvel ordre de (choses* la prise, à' partie puisse être accordée* ,n( qu'il puisse, être fait des défenses sous peine de punition exemplaire, sur une seule requête. Le parlement aurait agi d'une maniéré plus convenable dans les
circonstances, s'il s'était contenté de surseoir à la contrainte par corps décernée par la municipalité actuelle contre les anciens officiers municipaux. Il règne des divisions entre ceux-ci et les nouveaux officiers ; l'élection est contestée et le comité a renvoyé cette contestation à l'assemblée du département. Il serait convenable d'y renvoyer aussi la reddition des comptes. J'adopte cependant le projet de décret présenté par le comité des rapports.
Ce projet est décrété.
demande à faire une motion tendant à suspendre l'activité des anciens tribunaux.
L'orateur annonce qu'à la première séance du soir il rendra compte de l'adhésion de plus de deux cents curés aux décrets de l'Assemblée nationale, ainsi que des vexations que la plupart éprouvent en diverses parties du royaume à causes des preuves d'attachement qu'ils donnent à la nouvelle Constitution.
11 rend compte qu'un de ses confrères, entre autres, curé de Mondeville, diocèse de Sens, a été saisi au collet par le maire, qu'on lui a déchiré ses vêtements, qu'on a fini par lui laisser le choix ou d'être massacré, ou de faire l'abandon de deux contrats d'acquisition qu'il venait de faire.
L'orateur annonce ensuite que depuis le décret de suppression des anciens tribunaux, la défiance s'e3t tellement répandue sur leurs jugements que les plaideurs emploient toutes sortes des moyens pour éloigner la décision des affaires. En conséquence, il demande que le jugement des affaires qui n'exigent pas beaucoup de célérité soit suspendu jusqu'à la nouvelle organisation judiciaire.
L'Assemblée renvoie au comité des rapports l'affaire du curé de Mondeville et rejette la motion relative aux tribunaux.
, rapporteur du comité de Constitution, fait un rapport sur les irrégularités des assemblées primaires de la ville de Colmar et dit:
Le comité de Constitution m'a chargé de vous rendre compte des illégalités qui ont eu lieu dans les assemblées primaires de Gohnar. Les décrets rendus sur la contribution patriotique et sur le serment civique n'ont pas été exactement observés. Ou a bien affiché les noms des citoyens qui ont fait leur contribution patriotique, mais on n'a pas publié la quotité des sommes pour lesquelles les citoyens ont fait leur soumission. Le sermeut civique qui doit être prêté individuellement en faisant prononcer à chaque citoyen, je le jure, a été prêté collectivement. Le commissaire du roi a pris pour les élections des dispositions propres à favoriser l'intrigue et la cabale ; ces assemblées ont été convoquées chacune à deux jours de distance, de manière que la seconde pût connaître les opérations de la première. Le comité pense que les opérations de ces assemblées doivent être déclarées nulles et que l'on doit ordonner qu'une convocation nouvelle sera faite et indiquée pour le même jour.
Voici le projet de décret que nous vous proposons :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de Constitution, et avoir examiné les ordonnances du commissaire du roi pour l'établissement des districts et du départe-
ment du Haut-Rhin, le réquisitoire du procureur de la commune de Colmar, et la délibération de la municipalité de là même ville :
« Décrète que les assemblées primaires, dans lesquelles n'ont pas été littéralement exécutés les décrets relatifs à la contribution patriotique, et au serment civique que doit individuellement prêter chaque votant dans les assemblées primaires, sontirréguliêres, et que les élections qui y ont été faites sont nulles ;
« Qu'eu conséquence, lesdites assemblées primaires se réuniront de nouveau pour procéder à de nouvelles élections ; que tout citoyen jouissant de plus de 400 livres de rente, et paraissant auxdites assemblées primaires, ne sera admis à y voter qu'en représentant l'extrait des rôles d'impositions auxquelles il est assujetti, et le certificat de sa déclaration pour la contribution patriotique, lesquels seront lus à haute voix dans les assemblées: qu'avant le scrutin, tous les citoyens prêteront, chacun individuellement, le serment civique dans les mêmes termea et dans la forme décrétés par l'Assemblée nationale ;
« Que les assemblées primaires de la ville de Colmar se tiendront toutes le même jour et à la même heure, et procéderont dans le même temps aux élections, et que les derniers décrets rendus le 28 mai relativement aux assemblées primaires, seront littéralement exécutés. »
consulte l'Assemblée et le projet de décret est adopté.
, au nom du comité des finances, rend compte du travail des commissaires chargés de veiller à la fabrication des assignats; il dit que les précautions les plus minutieuses ont été imaginées et prises pour la sûreté de ce papier-monnaie.
Le comité de Constitution propose un projet de décret.
Plusieurs membres proposent de discuter et de voter le décret article par article.
répond qu'une discussion sur l'ensemble est suifisant parce qu'il y a urgence à prendre une détermination et à ne pas perdre un temps précieux.
consulte l'Assemblée qui ordonne que la discussion aura lieu sur l'ensemble.
Il est fait une nouvelle lecture du projet de décret.
(de Tours). Je propose de décréter qu'il y aura des bureaux de vérification dans toutes les principales villes du royaume.
J'appuie l'amendement qui vous est proposé, car l'assurance que l'on preudra au bureau de vérification facilitera la circulation des assignats. Il faut également que les personnes qui signeront les assignats répondent de leur sincérité.
Si l'on adoptait la vérification, il faudrait établir des bureaux dans toutes les villes et dans tous les bourgs du royaume, ce qui serait créer des obstacles à la circulation, sous prétexte de procurer des assurances. Je désapprouve également l'obligation que M. Rœderer veut imposer aux endosseurs, parce que
l'endossement n'est proposé par le comité des finances que pour assurer la propriété de l'effet à la personne qui y sera nommée et pour éviter les interceptions.
Je demande la question préalable sur les amendements.
La question préalable est prononcée.
Le projet de décret est ensuite mis aux voix et adopté ainsi qu'il suit :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport des commissaires du comité des finances chargés de surveiller la fabrication des assignats, a décrété et décrète ce qui suit :
Art. 1er. « Les 400 millions d'assignats créés par les décrets
des 19 et 21 décembre 1789, 16 et 17 avril 1790, seront divisés en douze cent mille billets,
savoir :
« 150 mille billets de mille livres;
« 400 raille billets de trois cents livres ;
« 650 mille billets de deux cents livres.
« Les billets de mille livres seront divisés en six séries, de 25,000 billets chacune, numérotés depuis un jusqu'à 25,000.
« Les billets de trois cents livres seront divisés en huit séries, de 50 mille billets chacune, numérotés depuis 1 jusqu'à 50,000.
« Les billets de deux cents livres seront divisés en treize séries, de 50,000 billets chacune, numérotés depuis 1 jusqu'à 50,000.
Art. 2. Les billets cfe mille et de deux cents livres seront imprimés sur du papier blanc, et ceux de trois cents livres sur du papier rose.
« Les billets de mille livres seront imprimés en lettres rouges ; ceux de trois cents et de deux cents livres, en lettres noires.
Art. 3. « Chaque assignat aura pour titre : Domaines nationaux hypothéqués au remboursement des assignats décrétés par l'Assemblée natio-lale les 19 et 21 décembre 1789 ; 16 et 17 avril 1790, sanctionnés par le roi.
« Le corps de l'assignat contiendra un billet à ordre sur la caisse de l'Extraordinaire, signé au bas dudit billet, par le tireur, et au renvers par l'endosseur, lesquels tireur et endosseur auront été nommés par le roi.
Art. 4. « Au-dessus du billet à ordre sera imprimée l'effigie du roi ; et au-dessous dudit billet, un timbre aux armes de France, avec ces mots : la Loi et le Roi.
Art. 5. « Trois coupons d'une année d'intérêt chacun seront placés au bas de chaque assignat; et au revers des lignes qui les séparent, seront imprimés les mots Domaines nationaux et Caisse de l'Extraordinaire. Ces mots seront disposés de manière qu'on ne puisse séparer le coupon de l'assignat, sans en couper une ligne entière dans sa longueur.
« Un timbre sec, aux armes de France, sera frappé sur le revers desdits coupons.
Art. 6. « Le revers de l'assignat sera divisé en plusieurs cases, dont la première recevra la signature de l'endosseur nommé par le roi. Les autres cases serviront aux autres endosseurs, s'il y a lieu.
Art. 7. « Il pourra être établi dans chaque ville chef-lieu de département, et dans toutes autres villes principales du royaume, sur leur demande, un bureau de vérification sous la surveillance, soit des municipalités, et d'après le règlement que le roi sera supplié de rendre.
« D'après les demandes qui seront faites par lesdites assemblées de département ou municipalités, il leur sera adressé les instructions né-
cessaires pour la personne commise à la vérification.
« Un double de cette instruction sera déposé au greffe du tribunal du département.
Art. 8. a Les vérificateurs seront tenus, toutes les fois qu'ils en seront requis, de procéder, sans frais, à la vérification des assignats qui leur seront présentés et de les certifier.
Art. 9. « Lorsque les assignats seront envoyés par la poste, ils pourront être passés à l'ordre de celui à qui ils seront adressés ; et dès lors, ils n'auront plus de cours que par sa signature.
Art. 10. « Les formes qui auront été employées pour la fabrication du papier, ainsi que les lettres majuscules, les planches gravées et les différents timbres qui auront été employés à leur composition, seront déposés aux archives de l'Assemblée nationale, et ne pourront en être déplacés que par un décret spécial.»
annonce que M. Henrion de Bussy fait hommage à l'Assemblée d'un ouvrage intitulé : De la destruction de la mendicité.
L'Assemblée ordonne qu'il sera fait mention de cet hommage au procès-verbal et que le projet de M. de Bussy sera renvoyé au comité de mendicité.
M. de Cernon demande à faire un rapport, au nom du comité des finances, sur les besoins actuels du Trésor public.
M. de Cernon. C'est au commencement du mois que nous devons vous rendre compte de l'état du Trésor public. La section du comité des finances, chargée de recevoir semaine par semaine les états de recette et de dépense du Trésor royal, m'a confié le soin de vous présenter ce rapport. Les dépenses du mois se sont élevées à 31 millions 607,000 livres. Il reste en caisse 13 millions 160,000 livres, dont la plus grande partie est en argent. Le mois qui commence se trouve chargé de l'acquittement des anticipations. Cet acquittement ne peut se faire qu'avec des "assignats ou des billets de caisse qui les remplace provisoirement. Le comité propose, en conséquence, le décret suivant :
« L'Assemblée nationale, considérant le délai indispensable pour la fabrication des assignats et la nécessité de réunir un grand nombre de précautions pour éviter les contrefaçons ; considérant également que leur emploi est urgent pour le service du mois de juin, a décrété et décrète que la Caisse d'escompte fournira au Trésor public 20 millions de billets portant promesse d'assignats, lesquels seront remplacés par des assignats sitôt leur fabrication. »
J'observe que ce n'est point ici un nouveau prêt de la Caisse d'escompte, mais un emploi que vous faites des assignats suivant leur destination. J'ajoute que la section chargée de suivre les opérations du Trésor royal ne peut encore offrir le compte des dépenses depuis le mois de mai 1789 jusqu'à ce moment. Ce travail immense fait au Trésor public ne lui a pas encore été remis.
Je m'oppose à ce qu'on accorde les 20 millions demandés; il faut fournir aux dépenses nécessaires du Trésor public ; mais s'il est aisé de connaître les dépenses, il n'en est pas de même de la recette. Nous avons demandé l'état du recouvrement des impositions et de l'arriéré des receveurs généraux et particuliers. Ce décret n'est point exécuté.
J'appuie l'obser^ vation du préopinant ; l'état des finances e&t encore un secret jfljpénéfrabjg. On ne dit pas si 1 on a vërif}ê ia facette-. I| nous faut un bilan exact. Tqu's les mots on viendra nous demander10 nu 20 miilions,
Comment est-il possible que dans un royaume ou lepeuple paye 4 ou 500,000,000 livres d'impositions,"... (Il s'élève des murmures ; plusieurs yoix dirent : « On no payé pas! ») lin honorable membre m'atteste que dans une des grandes provinces de France, flans Bretagne, la perception des impositions n'éprouve pas le moindre retard- Je sais qu'il en est de même dans Jes prpvipcps vpisjnes de Paris. Dans d'au-, très les contribuables demandent qu on fasse les recouvrements. L'Assemblée nationale devrait être informée $'que manière exacte pourquoi de 36 millions d'impositions qu on devrait recevoir par mois, on n'en reçoit que neuf- Qn §e demande pourquoi, quand les fermiers payent la taille, les propriétaires les vingtièmes, et .quanu les privilégiés sçnt as^uieUjsanx impositions, il faut yiyre pur l^s capitaux de nation, au lieu de vivre sur le produit des contributions ?
(de Saint-Jean-d'Angely). il est bou que la nation connaisse les motifs qui nous déterminent à faire le service sur les capitaux et non sur les revenus; nous avons états des "receveurs généraux dés finances^ Ces états, qui paraissaient faciles à pregenittjr, donneraient (le trè^ gra.nde8 lumières ; les receveurs généraux popy^iept dirg f « ta ayons reçu tant,11 reste ^Ut 4 re^e^QiFc » Qè opuv^it présenter également des bordereaux des aides. §i ces états avaient été envoyés £}. domicile,," cfiqpun de nous pourrait en fie giomep^ voter de'mapiêre à ne pas compromettre'sa délicatesse epvers ses copi-mettants. Ce Que M. Fréteau a dit e$t yr$i, mais il faut ausfi qu'on sache que plusieurs pro-vincesles intendants ét lés suljdejégués s'étant retirés pour cause, les pôles ne sont pas faits.
Je çite notamment la mienne, mais on peut voir combien les impositions produisaient; les receveurs généraux savent chacun ce que doit produire leur généralité, je .4en^an4e donc que tous les mois ils présentent uu état de recette ayec les indications des parties payantes- Dn receveur général dira : « J'ai reen dans ce mois de tel receveur particulier la somme de tant- i Les détails VOUS seront remis, VOUS les comparerez à la recette du Trésor royal, et il se fera de cette manière un contrôle très utile. Nous pourrons échaulfer le zèle des habitants dès campagnes, ùuyapplauqir. Je demande Ménisque, soit pour l'arriéré de 17$), soit pour le courant de 179Q, l'état des SQmïnès reçues receveurs particuliers soit envoyé avec i'etat de recette du Trésor royal à chaque député, de mois en mois,
, Je prie M. le président de demander à la section du comité des finances si elle a les pièces probantes pour la rentrée des impositions de mois en mois; sinon il me semble convenable de nommer des commissaires.
Si j'avais préyu que l'Assemblée dési?4t, cet te occasion, goingle. du travail de la section, je me serais muni des pièces nécessaires. J'observe cependant à M. Fréteau nue les receveurs généraux n'ont rien reçu des fonds de l'année 1790. sur 32,000 roles il n'v en
a encore que 14,000 de faits» Quant à la recette de 1789, le terme du payement est arrivé; les fonds doivent être rentrés ap Trésor public, La gabelle est remplacée, mais les rÇdeg du reuipl&r cernent ne sont point encore rédigés, donc il n'y a pas encore de recette sur cet objet; ferme du tabac éprouve p^e diminution presque totale; les droits p'aides sont aussi diminués parce que la récolte a été mauvaise, Railleurs les r^epur? vrements se f°Bt presque toujours en autogpine; les impôts des barrières ont donné peu de pro-* duit, à cause des contraventions et du déperûh-semerit du ço^gierce, Yoija les causer des embarras du Trésor public. Les 20 millions demandés aujourd'hui sont destinés À payer lés anticipations dopt yous avez défendu le renouvellement, ce ne sont donc pas çles anticipations qu'on prO" posé, niais un emploi déterminé: vpns »vejç' de même ordonné que le? rentes servent payées en assignats. Ainsi on ne sollicite pas un seçours pour le Trésor pnbljÇj mais lès moyens d?un acquittement que vous avufl ordonne- Quant à la demande de M» Régnant l^fiY^i à domicile serait déjà fait si nous y avions lté autorisés par un défiret. A l'exçepftpn pe j'etat de l'arriéré des receveurs particuliers, 4011s les autres états sont entre lés mains dij ppgilté» Il yériijèra l'état général ffliï- les états 'parfiçqîie1'3? et l'Assemblée trouver^ d^qs pe tr$vgilrqùi lpi sèr^ incessamment présenté, de quoi satisfaire sa juste impatience.
M, Regnaud se (rompe sur l'état de sa province. J'ai dans les mains des extraits de rôles, faits depuis un moi§ pour les paroisses voisines de'Saintes, Je demande à M. Regnaud que les états des receveurs particuliers nous soient envoyés et que les nombres de l'Assemblée veuillent, par leurs relations, s'assurer de leur exactitude.
consulte l'Assemblée qui adopte la proposition du comité des finances et celle de M. Regnaud (de Sajnt-Jea.n-d'Angely), En conséquence, les deux décrets suivants sont fendus :
PREMIER DÉCRET,
« L'Assemblée nationale, considérant le délai indispensable' dans la febrication des assignats, et la nécessité de réùnir toutes "les précautions possiblés pour garantir èt ëyiter la pontrefaçon ; ëonsidéraat également que leur emploi ë§t urgent pour le' service'du frésor oublie dans le Courant du ïnoisrdê juio°, à décrété qûe la Ga|sse d'escompte fournira au Trésor public la somme de 20 millions en billets-assignats, lesquels seront remplacés en assignats aussitôt après leur fabrication." »
deuxième decret.
L'Assemble nationale décrète que chaque mois les receveurs généraux des finances et ceux des impositions .dç Paris fourniront un état de l^ur recette, tant sur l'arriéré des rôles de 1789 et années antérieures, en énonçant le montant de l'arriéré restant à rentrer, que sur les recouvrements à compte de ceux de 1790.
Ils désigneront dans les états les sommes
reçues de chaque receveur particulier, et si elles l'ont été en espèces, assignats, promesses d'assignats ou lettres de change.
« Ces états seront imprimés et distribués chaque mois aux membres de l'Assemblée, avec les états généraux de recette du Trésor puhlic-pendant ce même mois. »
On passe à l'ordre du jour qui consiste dans la discussion des articles au titre premier du projet de décret proposé par le comité des office? eçclé-siastiques. Les six premiers articles sont relatifs à l'épiscopat.
(Voyez le rapport de M. Martineau du 24 avril 1790. — Archives par\emev,ta,ives, t. XIII, p. 166).
, écavez fermé la discussion, je ne me permettrai .pas de~ la recommencer; mais je crois devoir à mon ministère et à mop caractère d'adhérer à la demande d'un concile natiopal, poqr prononcer sur tout ce qui concerne la discipline ecclésiastique, sauf l'accession et la protectiop de la puissance civile. Autant j'ai de respect pour les décréts rendus par cette Assemblée, sur tout ce qui est temporel, autant je me dois de déclarer que je ne puis reconnaître la compétence deï'Assemblée pour ce qui concerne le spirituel.
(Quelques ecclésiastiques de la partie droite de l'Assemblée se lèvent pour adhérer à cette déclaration.)
, arçhevêque d'Arles. Je supplie l'Assemblée de statuer sur la demande d'un renvoi à un concile national.Cette demande est appuyée ; l'Assemblée peut décider par oui ou par non.
, évêque de Lidda (1). Messieurs, votre intention n'a jamais été et pe sera jamais de dépasser la ligne de démarcation qui sépare les pouvoirs des deux puissances spirituelle et temporelle, et, en respectant les droits de la pre^ mière, vous n'entendez pas soustraire à l'obéissance due à ses lois et définitions, en ce qui regarde la validité des sacrements et les choses nécessaires au salut, les fidèles soumis à votre autorité temporelle, |l est doue de votre volonté, que tout ce que les conciles généraux et œcuméniques ont défini et décrété dans des matières purement spirituelles et notamment concernant les choses nécessaires à la validité des sacrements, soit religieusement observé en France, et vous ne voulez pas établir de loi qui y soit contraire.
Il s'ensuit que les canons et décrets du concile de Trente, qui portent sur des objets par lui reconnus nécessaires à la validité des sacrements, par conséquent au salut, et par là même des objets purement spirituels, sont obligatoires en France, quoique le môme concile p'y ait pas été reçu quant à la discipline.
Voilà donc une vérité irréfragable et un principe qu'il faut allier avec lee vues salutaires dé notre comité ecclésiastique sur la réforme et l'organisation du clergé de France. Et c'est sur cela que je dois vous faire une observation.
Le concile de Trente, session 14 de la pénitence, ebap. 7, a déclaré nulle l'absolution donnée par un prêtre à une personne sur laquelle il n'a aucune juridiction ordinaire ou déléguée.
De plus, en son canon 9 du même titre, il dé-
Et, au canon 11, il proponce anathème contre ceux qui diront que les évêques n'ont pas le droit de se réserver des cas, si ce n'est pour la police extérieure, et conséquemment que cette réservation n'empêche qu'un prêtre pe puisse véritablement en absoudre.
Je me borne à cet article du sacrement de pénitence, pour n'être pas trop long, d'autant qu'il suffit pour vous proposer ma difficulté.
Selon cette définition du concile de Trente, les pouvoirs que le prêtre a reçus dans son ordination de remettre ou de retenir les péchés, ne suffisent pas pour la validité de l'absolution. Il lui faut encore une juridiction sur la personne qu'il veut absoudre, soit ordinaire, soit déléguée, et que le cas ne soit pas réservé à l'éyêque. Ceci, nous sommes tous tenus de le erpire en France, comme dans le surplus de la chrétienté (1).
Voyons maintenant comment il faudra faire pour concilier, avec cet objet de notre foi cathor lique, Indivision du royautneenquatré-vingt-trois éyêchés. Et, pour rendre la chose plus sensible, supposons, pour un instant, qu'il ne s'agisse que du démembremept de ja yille et du territoire de I4Ue en Flandre, du siège de Tourpai, dont ils dépendent présentement, quant au diopèse, et de leur union à un siège établi en France.
Il est hors de doute qu'en ordonnant ce démembrement et cette union, vous ne fassiez une chose utile aux habitants de la ville et du territoire de Lille, puisqu'ils leur présentent un intérêt à la fois spirituel et temporel.
Mais l'intérêt spirituel que vous voulez procurer aux habitants de L4Ue dépend de la
réalité des pouvoirs qu'exercera leur nouvel évêque, ainsi que les prêtres par lui institués
ou délégués; l'exercice dp ces pouvoirs tient incontestablement à la nécessité de leur salut.
Il faudra donc arranger les choses de manière que lesdits habitants puissent être valablement
absous sous le nouveau régime dans lé tribunal de la pénitence, et que, voulant contracter un
mariage
D'après la constitution actuelle de l'Eglise, et selon les décrets du concile, que j'ai cités, il n'y a que M. l'évêque de Tournai, ou les prêtres qui, de son autorité, exercent sur les âmes la juridiction ordinaire ou déléguée, qui puissent leur administrer le sacrement de pénitence et les absoudre; et aucun évêque de ses voisins ne peut valablement les dispenser d'un empêchement de mariage.
Or, je vous demande, Messieurs, d'après ces vérités, qui aura donc la puissance de priver M. l'évêque de Tournai de la juridiction spirituelle attachée à son siège, qu'il exerce sur les habitants de Lille, et de la transporter à l'évêque d'un siège de France? Car entin il ne s'agit pas seulement de diviser ou démembrer le territoire, ce que vous pouvez effectivement faire, de même que l'ont fait Charlemagne et plusieurs autres princes chrétiens; mais il s'agit, à la suite de cette division ou de ce démembrement, de donner au nouvel évêque, relativement à ses pouvoirs, l'activité nécessaire au salut des habitants de ce territoire. Croyez-vous , Messieurs , être compétents pour cette translation, et que les princes que j'ai nommés l'aient été? Croyez-vous que le nouvel évêque puisse, sans crainte de blesser la soumission qu'il doit à l'autorité de l'Eglise, et d'exposer les fidèles à être privés de l'effet des sacrements, exercer ses pouvoirs sur les habitants du territoire de Lille, en conséquence de la seule division et démembrement du territoire que vous aurez commandés?
Permettez, Messieurs, que, d'après ma conscience, je vous dise qu'il ne le peut pas, et que
toutes ses opérations seraient nulles et sans erlet devant Dieu, car retirer de la main d'un
évêque, canoniquement institué, l'exercice des pouvoirs nécessaires au salut des fidèles,
pour le placer dans les mains d'un autre évêque, est une choseÏmrement spirituelle, qui
excède la puissance de 'autorité temporelle. Ainsi,il faudra nécessairement recourir à
l'autorité de l'Eglise, puisqu'elle seule peut donner au nouvel évêque, sur les fidèles ou
nouveau territoire, la juridiction spirituelle nécessaire à l'exercice des pouvoirs qu'il
tient de Dieu (1).
Je sens tout l'avantage et toute l'utilité qui résulteraient d'un concile national, qui
nous est demandé, parce que ce n'est que dans une assemblée de pasteurs, versés dans la
conduite des âmes, et qui, par la desserte et visite des paroisses, ont acquis la
connaissance des abus et relâchements dans la pratique des devoirs de la religion et dans la
discipline, qu'il peut être crayonné un tableau exact de tous les besoins relatifs au régime
et à la constitution des diocèses. Mais comme vous trouverez peut-être, dans votre sagesse,
que les circonstances actuelles ne sont pas propres à la convocation d'un concile national,
je vous propose uu moyen plus simple et plus court, qui consiste à ajouter aux articles du
plan de votre co-
(1). Messieurs, les motifs que le préopinant vient de vous exposer sont extrêmement respectables; ils méritent toute votre attention : ses craintes exigent une discussion tranquille et réfléchie. Je distingue deux parties dans son opinion: l'exemple particulier de l'approbation pour la confession; la nécessité absolue de la juridiction dans le pasteur sur les peuples commis à ses soins. Je commence par ce second objet comme étant plus général.
A cet égard, Messieurs, la discussion retombe entièrement dans ce qui a été dit hier; mais puisqu'il reste des doutes sur ce point, il faut chercher à s'expliquer dans les termes les plus clairs et les plus précis possibles; il faut remonter aux vérités élémentaires.
Le prêtre, au moment où il est ordonné, reçoit un pouvoir général et illimité d'exercer le saint ministère qui lui est confié : accipe spiritum sanc-tum, quorum remiseris peccataremittuntur eis, et quorum retinueris retenta sunt. Voilà littéralement la formule du Pontifical (2). Dans la consécration d'un évêque, le consécrateur commence par lui exposer, dans les termes les plus généraux, ses devoirs, et par conséquent ses droits : il faut qu'un évêque juge, interprète, consacre, ordonne, offre le saint sacrifice, baptise et confirme (3). Ces expressions illimitées sont exactement conformes à celles de la mission donnée par Jésus-Christ à ses ministres : euntes inmundum universum prœdicate evangelium 'omni creaturœ.
Le bon ordre ne permettait pas que les pouvoirs illimités de chaque évêque et de chaque prêtre eussent concurremment leur exercice par tout le monde. Ce serait des conflits journaliers d'autorités et d'opérations. Une sage institution a voulu que l'autorité de chaque évêque et de chaque prêtre ne s'exerçât que surles peuples sur lesquels il lui serait assigné une juridiction.
L'assignation de juridiction se fait de deux mariières, par la collation d'un titre auquel
le soin d'un certain nombre de personnes, d'une certaine étendue de lieu est attaché, et par
une délégation spéciale et passagère sur telle et telle personne, -sur tel ou tel lieu.
L'effet de la collation de ce que nous appelons un titre en cette matière, c'est-à-dire d'un
évêché, d'une cure, et l'effet de la délégation, diffèrent en ce que la délégation ne donne
droit que sur les personnes exprimées dans les lettres de délégation ; au lieu que la
collation du titre donne droit sur toutes les dépendances du titre, quelles qu'elles soient.
Par exemple, que l'on confère à un prêtre la cure de Sèvres, il acquiert le droit d'exercer
ses fonctions, ou, pour parler avec plus de vérité, il est obligé à remplir tous les devoirs
de pasteur à l'égard de la totalité des personnes qui habitent dans la paroisse de Sèvre,
telle qu'elle est et telle qu'elle sera circonscrite. Ses paroissiens ne sont ni telles per-
On annonce des craintes que la puissance civile ne veuille attribuer la faculté de donner des pouvoirs que l'Eglise seule peut transmettre. Les pouvoirs attachés au sacerdoce et la circonscription des limites d'un territoire sont deux objets trop distincts pour les confondre. Jamais la puissance civile n'aura la volonté, pas plus qu'elle n'a le droit, de doilner le pouvoir d'administrer les sacrements. Les évêques et les prêtres reçoivent ce pouvoir de Dieu; ils né peuvent le recevoir que de Dieu ; ils le reçoivent dans le sacrement de l'ordination que l'Eglise leur confère. Mais dans quels lieux exerceront-ils leur pouvoir? dans des villes que les hommes bâtissent et dont la société temporelle détermine la circonscription et les limites. L'Eglise consacre un évêque pour Paris ; lorsqu'il est consacré, c'est dans les lois civiles, et non dans les lois ecclésiastiques, qu'il doit rechercher les limites du territoire de Paris (1).
On a un exemple bien frappant de la distinction entre l'attribution du pouvoir en lui-même
et la faculté de l'exercer en tel lieu, dans la disposition de ce que nous appelons les
bénéfices de collation laïcale, ou titres ecclésiastiques de pleine collation laïcale. On
sait que ce sont des places auxquelles sont attachées des fonctions ecclésiastiques, et dont
les laïcs disposent sans aucune participation d'un supérieur ecclésiastique quelconque. Le
laïc, qui donne ces bénéfices, ne confère pas la prêtrise à celui qui va être tenu de dire la
messe dans le lieu assigné pour la des-
Et qu'on n'objecte pas que les bénéfices dont je parle ne sont pas des bénéfices à charge d'àmes : je répondrai qu'il en existe môme de cette nature; et si l'on ajoute qu'à l'égard de ceux-ci lë prêtre qui en est pourvu n'exerce ces fonctions qu'après avoir obtenu de l'évêque diocésain l'Institution autorisable, je répondrai que cet usage est moderne; j'en assignerai l'origine. Le roi conférait en régale purement et simplement, sans aucune participation des supérieurs ecclésiastiques, des doyennés de chapitre et des archi-diaconés qui sont des bénéfices à charge d'âmes. Vers la fin du siècle dernier, le clergé, après avoir souscrit aux désirs de Louis XIV sur différents objets relatifs à l'étendue de la régale, profita de l'occasion pour demander à ce prince qu'il obligeât ceux qu'il pourvoirait d'arcnidiaconés, théologales, etc., à ne faire aucune fonction avant de s'être présentés soit aux vicaires généraux des chapitres, soit aux évêques, pour en obtenir l'approbation et mission canonique. Le roi l'ayant ordonné ainsi par son édit du mois de janvier 1682. les autres laïcs pourvus par les collateurs de bénéfices ont été insensiblement soumis à la même règle.
Un exemple bien, plus frappant est celui du grand-aumônier (1). L'évêque pourvu de cette charge est l'évêque de la cour. C'est lui qui donne les dispenses nécessaires aux officiers de la cour» qui approuve les confesseurs et autres, ecclésiastiques attachés soit à la chapelle du roi, soit aux régiments, soit à certains hôpitaux qui sont actuellement sous la conduite uu grand-aumônier ; cependant cet évêque, nommé par le roi, entre en fonctions sur le seul brevet du roi. Il n'est point cpnsacré pour être évêque de la cour : le roi choisit une personne qui ait déjà le caractère épiscopal, qui soit déjà évêque; et d'après la nomination du roi, le grand-aumônier exerce, sans scrupule, un pouvoir spirituel sur tout ce qui dépend de la grande-aumônerie.
Il ne faut donc jamais confondre le pouvoir ni la source du pouvoir aveo la détermination de l'étendue plus ou moins grande des lieux, le nombre plus ou moins grand de personnes sur lesquelles s'exerce un pouvoir légitimement reçu d'ailleurs.
Je passe à l'exemple particulier cité par le préo-pinant. Je suis surpris qu'il ait confondu avec le jouvoir pour absoudre, l'approbation établie par e concile de Trente pour exercer ce pouvoir; je suis surprix qu'il ait regardé les discussions relatives à l'approbation comme des discussions de dogme, et non de discipline.
Le concile de Trente, après avoir dit que les prêtres reçoivent dans leur ordination le
pouvoir d'absoudre des péchés, décrête cependant qu'aucun prêtre ne pourra entendre les
confessions, ni être réputé idoine à cet effet, à moins qu'il ne possède un bénéfice cure, ou
qu'après avoir été jugé idoine» il ait eu l'approbation de l'évêque (2).
Ce décret du concile do Trente n'est qu'un décret de discipline et non de dogme; c'est même un décret de discipline fort récente, et dont malheureusement ou a beaucoup abusé.
C'est une discipline récente ; tous les monuments historiques attestent, tous les auteurs conviennent qu'avant le concile de Trente on ne connaissait pas la uécessité de l'approbation qu'il a établie.
Les évêques de France ont regardé le règlement fait à cet égard comme tellement, appartenant à la discipline, qu'ils se sont adressés au roi pour obtenir le même pouvoir, et que même ils se sont permis de solliciter et d'obtenir du roi plus^que le concile n'avait ordonné. Auraient-ils prétendu recevoir du roi des décisions dogmatiques? Leurs tentatives ont été faites d'abord au nom particulier de quelques évêques et pour quelques diocèses isolés. En 1695, les évêques assemblés obtinrent les lettres patentes connues sous le nom d'Edit d'avril 1695, dont l'article 11 est conçu en ces termes : « Les prêtres séculiers et réguliers ne pourront administrer le sacrement de pénitence sans en avoir obtenu permission des archevêques ou évêques, lesquels la pourront limiter pour les lieux, les personnes, le temps et les cas, ainsi qu'ils le jugeront à propos, et la révoquer même avant le terme expiré, pour causes survenues depuis à leur connaissance, lesquelles ils ne seront pas obligés d'expliquer. » Voilà des facultés de limiter, de révoquer, de ne pas expliquer les causes de là révocation, qui ne sont pas dans le concile de Trente.
Il n'est personne de vous, Messieurs, qui ne sache combien on a abusé de cette disposition
des lettres-patentes de 1695 pour tourmenter les peuples, inquiéter les consciences des
fidèles, troubler les âmes pieuses, en réduisant à l'inaction des prêtres auxquels elles
s'étaient adressées avec confiance pour les conduire; combien on en a abusé pour faire tomber
sur des prêtées .vertueux et éclairés le poids toujours accablant du despotisme, soit que 1
ignorance l'aveuglé, ou que l'entêtement et mille petites passions, nées dans l'esprit des
subalternes, le dirigent (2); '
Au milieu de ces variations* tantôt introduites sans assez de prudence, tantôt exigées par la nécessité de faire cesser les maux que les changements antérieurs ont occasionnés, le pouvoir spirituel des pasteurs et des prêtres, sur les âmes des fidèles, reste dans son entier; il est inattaquable et il n'est pas attaqué» Ceux qui l'exercent ne le tiennent que de Dieu; mais ils ne peuvent l'exercer publiquement que dans les lieux où la puissance civile les reçoit, dans les territoires qu'elle assigne aux chefs-lieux où ils sont établis; et là aussi il est d'obligation pour eux de l'exercer, Leur institution leur en imposé le devoir : la charité les presse de l'accomplir.
On demande, à droite, que je rappelle à l'Assemblée qu'il s'agit de savoir si la priorité sera accordée à la motion de M. l'archevêque d'Aix, renouvelée par M. l'évêque de Gler-mont?
Je demande que la discussion soit fermée sur la question qu'on agite en ce moment.
Ce qu'a dit M. l'évêque de Lydda est la doctrine du concile de Trente et ne concerne en rien la discipline ecclésiastique. Toutcequi tient à l'essen ce et à la validité des sacrements tient à la foi et non à la discipline. Quand les apôtres ont institué les évêques d'Ephèse et autres, ils ne leur ont pas donné des pouvoirs qui s'étendissent sur toute la terre, autrement ilsauralent établi l'anarchie épis-copale. Le gouvernement de Jésus-Christ est sage et modéré; de votre systèmérôsulterait le désordre : il n'est donc pas conforme au gouvernement de JésustaGhtiBt. Un évêque est consacré pour toutè la terre, un prêtre est ordonné pour tout le royaume; mais l'ordination et la consécration né donnent aucune juridiction..; Le roi n'a jamais pu ériger ou supprimer des êvêchés sans lé con* cours de la puissance ecclésiastique. Le roi a la police extérieure; la police intérieure appartient aux successeurs des apôtres. Je demande que le plan proposé ne Boit adopté qu'en observant les formes canoniques nécessaires et convenables.
Je ne veux citer qu'un passage d'un procès-verbal d'une assemblée du clergé; je n'y ajouterai aucune réflexion. Èn 1665 l'évêque de Digne disait : On sait que, dans les cas de nécessité, les évêques sont dispensés de s'attacher aux formes. La charité doit être la première loi ; ainsi Eusèbe parcourait plusieurs provinces et ordonnait les ministres dans celles qui en avaient besoin.
, curé de Potltivy. Je vais faire Une proposition qui peut convenir aux deux parties : elle consiste à décréter d'abord et eu ces termes le dernier article du projet de décret ! « Le roi sera supplié de prendre toutes les mesures qui seront jugées nécessaires tt qui seraient conformes aux saints canoni et aux libertés de l'Eglise gallicane, pour assurer la pleine et entière exécution du présent décret. »
Là discussion était
fermée hier, on la recommence aujourd'hui ; on s'écarte ainsi des dispositions de l'Assemblée pour lui faire perdre un temps considérable.
***.le demande à parler m la manière de poser la question.
La question est bien simple, on cherche en ce moment à faire divaguer l'Assemblée*
L'Assemblée décide, à une grande majorité, que M» l'abbé "** ne sera pas entendu.
On demande à passer à i'o-dre du jour, o'est-à-dire à revenir à la discussion des articles du plan proposé par le comité.
L'Assemblée décide, à une grande majorité, de passer à l'ordre du jour.
On fait lecture de l'article lep dêt offices eôùlê siastiques; il est ainsi conçu
« Art. 1er. Il y aura en chaque département, un siège épiscopal
ou archiépiscopal, et il ne pourra pas y en avoir davantage. En conséquence, de deux ou
plusieurs sièges établis dans un dé*-pârtement il n'en sera conservé qu'un seul; les autres
seront transférés dans les départements où il n'en existe pas actuellement, ou seront éteints
et supprimés. »
Cet article doit être précédé d'un autre article essentiel; il donne lieu à uqe observation importante; il renferme le mot archevêque: les autres articles parlent des métropolitains. Nous reconnaissons tous l'épiscopat) le sacerdoce; nous reconnaissons tous un centre d'unité; mais l'autorité du métropolitain me paraît aussi contraire à la pureté de {'ancienne discipline ecclésistique qu'à la Constitution que vous venez d'établir. Sur les trenté-deux provinces qui existaient autrefois, ii n'y avait que douze archevêchés : la Bretagne, la Bourgogne étaient obligées d'aller chercher très loin un jugement sou4-verain. On ne peut conserver l'autorité métropolitaine dans la personne du métropolitain. L'article que je propose est ainsi conçu « Les titres d'archevêques et de suffragants, ainsi que la juridiction des métropolitains, sont supprimés pour l'avenir* »
Je suis étonné dé là confiance avec laquelle on vous représente l'autorité métropolitaine èomtne un anus ; si c'est un abus il remonte très loin. Il fut ordonné dans le boncile de Nicéé dé maintènir lës métropolitains dans leurs fonctions : il n'y a pas un auteur qui ne nous les représente comme une institution apostolique. Le travail du comité a pour objet la police ecclésiastique purement extérieure et de ramener l'Eglise à sa pureté primitive. Je voudrais bien que les opinants eussent quelque confiance en nous. Quand on prétend que nous, nous sommes trompés, on devrait examiner les monuments historiques.. Tous prouvent que non seulement il existait des métropolitains, mais encore des primaties et des patriarchats. Je vais plus loin ; quand {es électeurs nomment un évêquer ils ne font qu'une véritable présentation : la juridiction métropolitaine sera donc nécessaire pour confirmer le choix du peuple.
Ce n'est pas là là question. Le premier article suppose que la puissance temporelle a le droit d'ériger ou de supprimer des évêchés. M. l'archevêque d'AfMfc a
rappelé la motion de M. l'archevêque d'Aix : elle doit être délibérée. Je demanderai ensuite la Ii berté de faire un amendement à l'article, de dis cuter la question qu'il contient, et de relever les inexactitudes des citations de M. l'abbé Gouttes
Je n'ai pas voulu dire que l'auto rité métropolitaine ne fût pas ancienne, mais qu'elle était purement politique. Si vous voulez un appel, faites-le porter à un synode composé des quatre ou cinq é\ êques voisins et des députés des prêtres. Si cependant on passe sur le champ à la discussion de l'article, je demande que vous en retranchiez le mot archevêque. Tout tombe dans l'anarchie si vous mettez dans la main d'un homme seul l'autorité qui n'appartient qu'à une réunion d'hommes.
Je demande l'ajournement à demain de la question élevée par M. Fréteau . Si l'on n'ajourne pas, il faut au moins discuter*
Je demande que le premier article du plan du comité soit décrété sans désemparer, et qu'on ajourne l'amendement de M. Fréteau.
On fait dans cette partie de la salle une proposition toute contraire. Nous demandons que l'amendement soit décidé sans désemparer, et qu'on remette à demain la décision très importante du nombre des évêques.
L'autorité métropolitaine est un degré de juridiction ecclésiastique ; peut-on, à la fin d'une séance, décider une question de cette importance? J'en appelle à la bonne foi de l'Assemblée?
La question proposée par M. Fréteau est une grande question. M. de Robespierre seul en a dit un mot. Seriez-vous d'accord avec vos règlements en suivant une telle marche? Yous autoriseriez ceux qui voudraient dire que vos arrêtés ne sont pas mûrement réfléchis. Je vous conjure, pour votre propre intérêt, d'ajourner cette question... (Murmures.) Vous ne le vouiez pas ! Je remets sur votre tête tous les maux qui peuvent en arriver.
L'Assemblée, consultée, décrète qu'il ne sera pas délibéré sans désemparer.
La séance est levée à 3 heures et demie.
Séance du ermardi juin 1790
MM. les secrétaires font lecture des procès-verbaux de la séance de la veille au soir et de celle de ce matin.
Ces procès-verbaux sont adoptés après quelques observations.
Il est donné lecture d'une adresse de la municipalité de Montargis, portant offre et soumission expresse d'acheter des biens nationaux situés tant dans cette ville que dans l'étendue de son district, jusqu'à concurrence de la somme d'un million.
Un de MM. les secrétaires donne connaissance de plusieurs adresses et délibérations ainsi qu'il suit :
Adresse de la ville de Beaune, qui dénonce à l'Assemblée, comme antipatriotique et très dangereuse, la lettre de M. Bergasse à ses commet-mettants, au sujet des assignats-monnaie.
Adresse de la ville de Montdidier, chef-lieu de district au département de la Somme, portant adhésion formelle aux sages décrets de l'Assemblée nationale, et respectueuse invitation aux représentants de la nation de ne point cesser leurs importants travaux avant l'entière confection d'une Constitution qui doit opérer le bonheur de la France. Cette ville, peu considérable, annonce en même temps que sa contribution patriotique du quart se monte à près de 60,000 liv. malgré les pertes prodigieuses qu'elle a éprouvées par les divers accidents qui, depuis plusieurs années, ont affligé son canton, et malgré le nombre de ses pauvres qu'elle n'a cessé de soulager, sans aucun secours étranger.
Adresse de la garde nationale de Grenoble, contenant le procès-verbal de la fédération dés gardes nationales du Dauphiné et d'une grandè partie du royaume, réunies sous les murs de celte ville, le 11 avril dernier. Elle supplie l'Assemblée de s'occuper de l'organisation des gardes nationales.
Délibération du conseil général de la commune d'Artonne, portant soumission d'acquérir pour la somme de 200,000 liv. de biens nationaux, pris par préférence parmi ceux situés dans l'étendue de son canton, avec l'offre de remettre, si elles l'exigent, à chacune des municipalités dudit canton, les objets qui sont situés dans leur territoire, et pour le même prix qu'ils auront été adjugés à la municipalité de cette ville.
Adresses des villes de Chartres et de Meulan, qui adhèrent avec une respectueuse reconnaissance au décret relatif au droit de paix et de guerre.
Adresses de félicitation, adhésion et dévouement des nouvelles municipalités des communautés de Saint-Grégoire-d'Ardenne, en Sain-tonge, et des Aldudes.
Adresse de la ville de Mamer-au-Maine, qui improuve de la manière la plus forte la déclaration d'une partie de l'Assemblée nationale.
Adresse des membres de l'assemblée électorale du district de Lure, qui réitèrent leur profonde soumission aux décrets de l'Assemblée, leur dévouement au salut de la Patrie, et bénissent à la fois le monarque chéri qui préside à l'édifice de notre bonheur; ils réclament la permanence fixe à Vesoul, du département de la Haute-Saône.
Adresses des assemblées primaires du canton de la ville de Sainte-Livrade, département de Lot-et-Garonne, de ceux de Montpezat, de Sainte-Jalle, district du Buis, département de la Drôme, de Surgères, d'Agellez, de Bagnères et d'Aigueperse, qui toutes expriment avec énergie les sentiments d'admiration, de reconnaissance et de dévouement dont elles sont penétrées pour l'Assemblée nationale; la plupart s'élèvent avec force contre la déclaration d'une partie de l'Assemblée nationale, et supplient instamment l'Assemblée de ne
pas se séparer avant d'avoir achevé la Constitution qu'elle a si glorieusement commencée.
Adresse de la municipalité de Bordeaux, contenant l'expression de la vive satisfaction qu'elle a éprouvée en apprenant l'approbation honorable que l'Assemblée nationale a bien voulu accorder à sa conduite, relativement à la malheureuse affaire de Montauban.
Délibération de la municipalité de Pléhérel, pour annoncer son adhésion aux décrets de l'Assemblée, ainsi que sa reconnaissance éternelle pour la majorité des représentants de la nation.
Adresse des citoyens de Camarès, en Rouergue, qui expriment leur admiration, leur reconnaissance pour les travaux de l'Assemblée, leur adhésion à ses décrets, et leur regret de ne pouvoir, à raison de la misère de leur ville, offrir qu'une médiocre contribution patriotique, qui est pour eux le denier de la veuve.
Adresse de la municipalité de Versailles, qui annonce à l'Assemblée nationale que la contribution patriotique de cette ville, malgré les pertes immenses qu'elle a faites, quoique sa population soit considérablement diminuée, s'élève en ce moment à près de 1,270,000 livres, et que l'on continue à recevoir tous les jours des déclarations. Sur cette somme, le receveur des impositions avait perçu, le 26 du mois dernier, environ 86,000 livres.
Adresse de féiicitation à l'Assemblée nationale, par M. Legrand, soldat citoyen de Chaillot.
Adresse du conseil municipal de la ville de Pont-de-Vaux, qui rend compte à l'Assemblée de la dénonciation qui lui a été faite d'un écrit intitulé : Déclaration d'une partie de VAssemblée nationale sur le décret du 13 avril, concernant la religion; l'assurant, déplus, qu'il adhère à ses sages décrets, qu'il maintiendra de tout son pouvoir et de toutes ses forces la Constitution, et qu'il s'élèvera dans tous les temps contre tous ceux qui y apporteraient la moindre atteinte.
Adresses des nouvelles municipalités de la ville deSaint-Ghamond, Saint-Julien-en-Jarrets, Farney, Sainl-Martin-en-Coalieu,Saint-Andéol-de-la-Valla, Saint-Christol, Gellieu, Lachal, Valfleurie, Doisieu, qui se font un devoir de renouveler à l'Assemblée nationale l'hommage de leur respect et de leur reconnaissance, et d'une entière adhésion à tous ses décrets sanctionnés par le roi; elles déposent sur l'autel de la patrie une offrande proportionnée à leurs forces respectives. Saint-Gnamond offre la cession de l'imposition des six derniers mois de 1789 des ci-devant privilégiés, qui monte à 4,429 livres 10 sols; elle y joint un don patriotique de 8,137 livres 1-6 sols en vaisselle d'argent, bijoux d'or et espèces; elle annonce que la contribution patriotique arrivera vraisemblablement à la somme de 100,000 livres, et qu'elle est déjà portée à 94,597 livrés.
Les religieux de la Chartreuse de Sainte-Croix font un don de 1,026 livres et dix-neuf marcs d'argenterie.
Le bourg de Saint-Julien-en-Jarrets, Sub-Urbe-de-Saint^Chamond, a livré en vaisselle, bijoux d'or et argent monnayé 706 livres 4 sols ; il offre en outre, comme session de taille principale, subsidiaires et capitation de ses priviligiés pour les six derniers mois de 1789,1a somme de 2,906 livres.
Saint-Andéol-de-la-Valla, celle de 1,119 livres.
Saint-Paul-en-Jarrets, celle de 3,065 livres, 4 sols 2 deniers.
Farney, celle de 462 livres 1 sol.
Enfin, trente-huit habitants de Doisien offrent de compter la somme de 831 livres 12 sols.
Us déposent sur le bureau, en lettres de charge,
par les mains de M. Flachat, la somme de 9,970livres, produit du don des citoyens de Saint-Gha-mond, Saint-Julien et des révérends pères Chartreux. Les communautés environnantes demandent, pour la ville de Saint-Chamond, un tribunal de justice.
Adresse du district de Pont-de-Vaux, département de l'Ain, portant adhésion aux décrets de l'Assemblée nationale.
Délibération de la commune et municipalité de Fleury, district de Narbonne, qui porte offre de faire l'acquisition pour la somme de trente mille livres des biens contenus dans: son territoire, et dépendant de l'ordre de Malte, de la chapelle de Liesse, de la cure, ensemble les fossés dudit lieu.
Adresse de la ville de ;Brioude, qui contient adhésion à tous les décrets de l'Assemblée nationale, et expressément à ceux qui concernent la vente des biens ecclésiastiques et domaniaux: elle improuve, autant qu'il est en elle, toutes réclamations faites ou à faire, soit par des particuliers, soit par des villes ou municipalités qui pourraient, par séduction, confondre ou affecter de confondre l'intérêt imposant de la religion, avec celui de ses ministres. Elle fait sa soumission d'acquérir pour un million de biens nationaux situés dans le territoire de sa municipalité, ou dans celui des municipalités voisines.
Lettre des officiers et volontaires du détachement de la garde Bordelaise, qui témoignent leur sensibilité de l'approbation que l'Assemblée a bien voulu donner à leur expédition patriotique et qui sollicitent de la justice des lois un jugement prompt et sévère des ennemis du peuple, qui lui ont mis les armes à la main, au nom d'un Dieu de paix.
Adresse d'un grand nombre de curés de la Lorraine allemande, pour marquer leur indignation contre ceux qui s opposent à l'exécution des décrets de l'Assemblée nationale, auxquels ils adhèrent, et dont ils font gloire d'être les interprètes auprès de leurs peuples.
Adresse des curés Lorrains, réunis à Ramber-viliiers, qui annonce que les pasteurs et les peuples de cette contrée ne font qu'un ; qu'ils reçoivent avec plaisir, publient avec zèle et développent avec énergie et clarté les décrets de l'Assemblée nationale.
L'Assemblée nationale permet à M. Grégoire, leur confrère, de leur marquer que l'Assemblée nationale applaudit au zèle de ces bons pasteurs.
, député de Reims, remet sur le bureau une somme de soixante-douze livres,' offerte en don patriotique par des citoyens soldats de la quatrième division de la première compagnie de la milice de Reims.
Ces citoyens, la plupart ouvriers, ont cru ne pouvoir faire un emploi plus noble d'une somme qui leur avait été remise de la part de la ferme générale, pour assistance prêtée à ses employés, somme qu'ils n'ont acceptée que pour en faire don à la patrie.
Une députation du district de Saint-Nicolas-du-Chardonnet, chargée de présenter à l'Assemblée nationale là rétractation de l'abbé Gros, curé de cette paroisse, de la signature qu'il a apposée à la déclaration d'une partie de l'Assemblée nationale, sur le décret du 13 avril, se présente à la barre.
, orateur de la députation, prononce le discours suivant :
Messieurs,
Permettez qu'au nom du district de Saint-Nn colas-du-Chardonnet, nous ayons l'honneur d'ajouter un hommage nouveau à tous ceux qu'on n'a cessé de vous rendre jusqu'à ce jour.
Ce n'était pas sans la plus vive douleur que nous avions vu attaquer vos décrets par une foule d'écrits plus criminels les uns que les autres : cependant nous nous étions contentés de les condamner, par notre silence, à rester ensevelis dans les ténèbres d'où ils étaient sortis.
Mais tous nos gens se sont révoltés quand nous avons appris qu'on s'était servi de ces écrits pour allumer partout le flambeau de la discorde et pour armer le bras du fanatisme.
Alors, dans les transports d'une sainte indignation, nous avons, par un arrêté, exclu de nos assemblées tous ceux qui, ayant signé, ou fait des écrits contraires à vos décrets, ne se rétracteraient pas.
Nous nous sommes flattés, Messieurs, en prenant cet arrêté, que bientôt les auteurs de ces écrits et ceux qui en auraient signé quelques-uns, seraient les premiers à les condamner et à gémir des malheurs qu'ils ont causés ; et déjà nous voyons une partie de nos espérances qui commence à se réaliser.
Qu'il est doux, Messieurs, qu'il est flatteur pour nous d'offrir à la nation entière, en la personne de ses augustes représentants, la rétractation que l'amoUr de la paix vient de dicter à M. l'abbé Gros notre pasteur, et l'un des membres de cette honorable Assemblée !
Qu'il est glorieux pour lui d'avoir fait le premier le sacrifice d'une opinion particulière à l'intérêt général !
Qu'il est grand de sa part, d'ayoir vaincu tous ces funestes préjugés* qui seuls, peut-être en ce moment, retiennent encore nombre de personnes prêtes à suivre un aussi bel exemple !
Heureux ceux qui, s'étant par malheur laissé écarter des vrais principes, auront,comme lui, le noble courage d'y revenir! et puissent tous ceux qui se seraient égarés, même les plus coupables, ne pas oublier qu'un seul repentir suffit pour désarmer ce peuple fait pour aimer bien plus que pour haïr !
C'est, Messieurs, pour hâter ce repentir que nous sommes venus vous offrir l'expression de nos sentiments et de ceux de notre généreux pasteur.
Souffrez qu'en déposant une aussi précieuse offrande sur l'autel ae la patrie, nous renouvelions sur ce même autel le serment que nous avons fait de ne vivre que pour la liberté, et répandre jus ju'à la dernière goutte de notre sang pour maintenir la Constitution française.
Puissiez-voUs, Messieurs, voir bientôt, avec de semblables serments, se multiplier de semblables offrandes !
répond : « Messieurs, l'Assetn blée nationale est très satisfaite de l'activité de yptre patriotisme. Elle vous félicite du succès de vos démarches, et yous permet d'assister k sa séance. »
L'Assemblée ordonne l'impression du discours de M, Lessorre et l'insertion au procè^yerbal de la réponse du président.
, député de Coutances, membre du comité des rapports, rendcomptad'une affaire relative à la comm une de Mirepoix et d'rçn arrêt du
parlement de Toulouse. ïl propose un projet de décret qui est adopté en oes termes ;
«. L'Assemblée nationale, après avoir ouï son comité des rapports, déclare comme non avenus les arrêts rendus par le parlement de Toulouse les 11 décembre 1789, 12 janvier 1790, et 30 mars suivant, à l'occasion du renouvellement des consuls de la ville de Mirepoix , fait le 22 novembre dernier, âinsique tout ce qui s'est ensuivi, et charge son président de se retirer par devers le roi pour prier Sa Majesté d'expédier tous ordres nécessaires afin qu'il ne soit donné aucune suite aux-dits arrêts. »
(de Nemours) fait une motion rela- -tive à la police intérieure de l'assemblée natioalé,
Il s'exprime en ces termes:
Un des attributs les plus indélébiles de votre dignité, c'est la police ae votre Assemblée.
J'ai droit de la réclamer. Je réclaipe votre justice et votre protection contre une imputation que j'apprends qui m'a été faite samedi dernier par un de mes.collègues, dans le cours de la délibération. '
J'exposerai le fait très brièvement ; ma justification ne sera pas longue-, je me la dois, je vous la dois.
Vous vous rappelez» Messieurs, que j'ai soumis à votre considération ee faiSl remarquable, qu'au moment ou on soulevait le peuple ae Paris contre le Châtelet, on faisait proposer, dans une assemblée convoquée à Brignoles, sur la demande de la ville de Marseille, de détruire lé Châtelet, qui ne peut avoir aucun tort vis-à-vis du peuple de Marseille, ni de celui de Brjgnoles.
Quelques journaux disent, et plusieurs de mes collègues confirment que M, Gaultier de Biauzat vous a observé que la question, que je proposai de faireà oet égard aux députés de Marseille, était captieuse et évidemment ministérielle, èt qu'il a même ajouté aiA pavais ét$ instruit par M, de Saint Priêst. Si le bruit qu'on faisait alors m'eût permis d'enteqdre M. de Biauzat, ybu? ine connaissez assez, Messieurs, pour être sûrs que je l'aurais sommé de prouver son accusation, que j'aurais démontré, comme je vais vous démontrer j qu'elle est injuste et mal fondée ; que j'aurais démandé à M. le président et à vous de le rappeler à l'ordre.
Je sais, Messieurs, que cette imputation d'être livré au ministère, lorsqu'elle tombe sur un homme de bien dont la vie publique et privée est sans reproche, dont la bonne foi, le désintéressement et l'intrépidité sont connus, ne montre que la mauvaise volonté de ceux qui l'attaquent, et ne saurait lui être très nuisible..
Je remercie le petit nombre de méchants de l'un et de l'autre parti de ce qu'ils me font l'honneur de me cfoire redoutable; je remercie encore plus la Providence de ce que ne pouvant attaquer une seule de mes actions ils sont réduits, pour tâcher de me décrier, à éléver contre moi une accusation vague et démentie par le fait, quoique propre, au premier abord,à faire impression sur une Assemblée justement jalouse de la liberté de ses membres.
Mais on ne peut décrier et perdre que les gens qui méritent d'être décriés ou perdus, ou les hommes faibles ou sans défense qui se laissent faire. Je ne suis ni dans l'une ni dans l'autre classe; d'ailleurs la nature a voulu que la méchanceté fût presque touj ours aussi maladroite qu'elle est honteuse.
Dans ia circonstance actuelle, le hasard fait
(et ce que je vais vous dire est su de tous ceux qui vivent un peu dans le monde) que M. de Saint-Priest, dont je ne désavouerais certainement pas la connaissance, si j'avais l'honneur d'avoir avec lui quelques rapports, est précisément le seul des ministres duroi avec lequel je n'ai aucuneespèce de liaisons.
Je ne l'ai vu que deux fois dans ma vie, dont une avant son départ pour Constantinople.
Il y a quatre autres ministres avec qui j'ai des travaux à suivre, tant comme inspecteur général du commerce et des manufactures, que comme chargé de la collection et du dépôt des lois commerciales étrangères.
Je n'en fais pas mystère, et je le ferais mal à propos car la chose est imprimée en quatre endroits dans l'Almanach royal.
Mais ces ministres ne m'ont jamais commandé arbitrairement, jamais ils ne m'ont fait faire que ce que j'ai cru juste et utile. Je suis toujours resté libre et indépendant de toute autre passion, de tout autre intérêt que celui du bien public, au milieu d'eux, Messieurs, comme au milieu de vous.
On a constamment su et dit dans l'administration que je n'étais propre qu'à bien faire, et que Von ne pouvait obtenir de moi. aucun autre service; douce récompense de ma vie, que toutes les fois qu'on a voulu malfaire, on m'a repoussé, renvoyé, disgracié ; que toutes les fois que le zèle patriotique ou l'amour de la réputation ont porté le gouvernement à faire du bien, on m'a fait l'honneur de me rechercher, de me rappeler, de m'em-ployer.
Je reviens à l'imputation particulière que m'a faite M. de Biauzat,
Non, Messieurs, je n'ai point été instruit par M, dé Saint-Priest, que je ne connais pas, d'un fait qui se trouve depuis cinq jours dans tqytes les lettres de commerce ; j'ai eu la première, connaissance de ce fait, à l'occasion du travail dont vous et votre comité des finances m'avez chargé relativement au débit du sel, appartenant à la nation et provenant des salines de province,
Vous n'ayez point cru, vous n'avez point dit, comme M. de Biauzat l'a fait imprimeri que ma motion fût évidemment ministérielle, l^es insinuations intéressées, injustes et secrètes de quelques particuliers à leurs voisins, si elles ont eu lieu» ne sont pas des débats de votre Assemblée.
Fallait-il donc être ministériel pour remarquer dans un temps où le tribunal que vous avez établi, où la municipalité de Paris, que vous avez mise a portée de vérifier les faits, vous ont tous deux avertis, vous ont tous deux affirmé qu'il y aeu)des distributions d'argent ; qu'elles continuent-, qu'elles parafent venir d'une cour étrangère; fallait-il donc être ministériel pour remarquer quels peuvent en être les effets?
Quoi, Messieurs, vous savez qu'il y a eu et qu'il y a encore des distributions d'argent, et vous avez vu que l'attentat commis sur M. d'Albert de Riom avait été annoncé à Paris avant d'avoir é^é effectué ; que la prise des forts de Marseille avait été un bruit public à Paris ayant qu'on l'eût tentée ; qu'on parlait à Paris de leur démolition lorsqu'à peine on la commençait; vous avez vu que je même jour de la prise de Marseille, presque tous les autres forts des provinces méridionales ont été pris, ou attaqués ou menacés; vous voyez quç? tandis que M-de fcafayette et la garde nationale de Paris déployaient toute leur activité et leur courage pour préserver le Gbàtelet de l'in-surrection de quelques brigands étrangers qui
cherchaient à égarer, par de mauvaises perfidies, le très bon peuple de la capitale, la motion de détruire le Ghâtelet se faisait à 200 lieues de Paris, chez des gens à qui le Ghâtelet ne peut faire ni bien ni mal : et l'on passera pour ministériel, si l'on fixe, sur cette correspondance de faits si bien liés les uns aux autres, vos regards patriotiques et ceux des citoyens vertueux de Paris ! Messieurs, si une parfaite habileté est une grande maladresse, les puissances étrangères sont mal servies : elles ont des agents également indiscrets dans les choses et dans les paroles.
Oui, Messieurs, je suis ministériel en un sens: lorsque je vous dis ces vérité* importantes, je remplis en effet un ministère, un ministère saint et sacré, le ministère pour lequel nous avons été envoyés de toutes les parties au royaume, le ministère auquel nous avons tous fait serment de dévouer notre vie; je remplis le ministère de la vertu et du patriotisme indignés qui se révoltent contre l'accumulation des intrigues par lesquelles on voudrait faire écrouler cet empire et perdre la Constitution qui vous coûte tant de peines et de travaux.
Vous remplirez le vôtre, en la préservant de toute atteinte, en faisant de toutes parts respecter la souveraineté de la nation, en réprimant tous les désordres, en rendant inatiles tant de coupables efforts.
J'ai honte de vous parler encore de la plainte que j'ai mise sous vos yeux, lorsqu'il S'agit d'objets d'une si grande importance.
Que suis-je pour vous occuper ? Rien. Mais, à côté même de la patrie, l'honnêteté et la vérité qui la servent avec zèle sont quelque chose à vos yeux.
Je puis, donci demander, car vous demanderez vous-mêmes que M. Gaultier de Biauzat soit rappelé à l'ordre, et qu'il lui soit enjoint de ne pas inculper ses collègues sans preuves.
G'est à quoi je conclus,
La cause de M. Dupont est celle de tous les honnêtes gens» parce qu i! a toujours défendu la Vértu.
Il s'établit une discussion pour savoir si M. de Biauzat sera ou ne sera pas rappelé à l'ordre.
Plusieurs membres réclament l'ordre du jour.
{de Nemours). Je n'ai besoin d'autre récompense de l'Assemblée que de l'assurance de son estime; je consens que l'on passe à l'ordre du jour, pourvu que ie sois assuré que je n'en ai pas perdu la plus faible portion. (Qn passe 4 l'ordre du jour.)
donne lecture] de lettres patentes données sur les décrets.
Expéditions en .parchemins pour être déposées dans les archives de PAssembfée patronale :
« 1° De lettres patentes sur le décret du 14 du mois dernier, qui prohibe l'entrée Au sel étranger dans le royaume*
« 2° De lettres patentes sur le décret du wêroe jour* qui autorise les officiers municipaux de Gauderot, à imposer sur les habitants de cette ville la somme de douze cent dix livres*
m 3° De lettres patentes sur le décret du (JL portant que toute demande en retrait féodal ou censuel, qui n'a pas été adjugée avant la publication des lettres patentes du 3 novembre dernier, est et doit demeurer saps êffeti ,
« 4° D'une proclamation sur le décret du i portant que .le corps administratif du département
de l'Oise résidera alternativement dans les villes de Beativais et Gompiègne.
5° Enfin, d'une proclamation sur le décret du 28, portant que la démolition de la citadelle de Marseille sera arrêtée sur-le-champ.
(de Tours) sollicite l'attention de l'Assemblée nationale sur une rivalité survenue et excitée entre l'ancienne milice bourgeoise d'Amboise et les gardes nationales de la même ville ; il propose et fait adopter le décret dont la teneur suit:
« L'Assemblée nationale décrète que l'ancienne milice bourgeoise d'Amboise ne sera admise à aucun service qu'autant que ses membres s'incorporeront aux gardes nationales, où ne pourront être admis que les citoyens actifs et les fils de citoyens actifs; ordonne que les drapeaux de l'ancienne milice bourgeoise seront déposés dans l'église paroissiale d'Amboise. »
propose à l'Assemblée de s'occuper à l'instant de différents désordres qui ont eu lieu dans plusieurs corps de troupes de l'armée, notamment dans les régiments de Lorraine et de la reine.
Cette affaire est renvoyée au comité militaire.
, député du Berry, demande la permission d'instruire l'Assemblée d'un refus de la maréchaussée de la Châtre de prêter main-forte dans une occasion pressante.
Cette affaire est renvoyée au comité des rapports.
, rapporteur du comité de police, propose un projet de décret concernant les boucheries de Paris, concerté avec le comité d'agriculture et de commerce.
propose d'ajouter à ce décret : sauf aux parties à se pourvoir devant les juges à qui il appartiendra.
La question préalable est demandée et prononcée sur cet amendement.
Le décret est ensuite rendu en ces termes :
« L'Assemblée nationale, sur le rapport de son comité de commerce et d'agriculture, de la contestation relative aux étaux des boucheries de Paris,
« A décrété que la nouvelle municipalité de Paris, aussitôt qu'elle sera formée, fera l'examen des anciens règlements relatifs aux étaux des boucheries, pour, sur le résultat de cet examen, être ensuite statué;
« Déclare, sur le surplus, n'y avoir lieu à délibérer. »
fait lecture d'une lettre de M. le curé de Saint-Germain-l'Auxerrois : il prévient l'Assemblée nationale que le roi et la famille royale se rendront à 9 heures pour entendre la grand'messe et aller à la procession; l'Assemblée décide qu'elle s'y rendra à 8 heures trois quarts. On fait lecture d une lettre de M. le maire et de M. le commandant général de la garde nationale : ils demandent les ordres de l'Assemblée sur la manière dont elle veut composer sa garde pour la procession du jour de la Fête-Dieu.
Etant au milieu de nos concitoyens, nous n'avons besoin d'aucune garde; quant à la police, c'est à M. le maire à prendre les mesures qu'il croira convenables.
, député duVerman-dois, menacé de la perte d'un œil, demande un congé d'un mois qui lui est accordé.
La séance est levée à 10 heures du soir.
Séance du
, député de Saint-Flour, entretient l'Assemblée d'une délibération et d'une adresse de la commune de la ville de Murât, en Auvergne, sur lesquelles il est instant de statuer; cette localité demande que la libre circulation des grains soit assurée et qu'il lui soit permis de contracter un emprunt pour achats de blés afin que son marché, gui est le seul où les habitants des montagnes puissent acheter des grains, soit constamment approvisionné. Il propose un projet de décret qui est adopté ainsi qu'il suit:
« L'Assemblée nationale décrète que son président se retirera, dans le jour, par devers le roi, pour supplier Sa Majesté de faire donner ses ordres aux municipalités et aux gardes nationales du département du Cantal, de protéger, par tous les moyens qui leur sont confiés, la libre circulation des grains ; et, au surplus, que la municipalité de la ville de Murât est autorisée à faire un emprunt de la somme de vingt-quatre mille livres, pour l'employer à l'achat des grains nécessaires à la consommation de cette ville, à la charge du remboursement, six mois après, du produit de la revente desdits grains .»
, au nom du comité de Constitution, demande à faire un rapport sur les réclamations des villes de Soissons et de Laon qui réclament toutes les deux le privilège d'être chef-lieu du département.
L'Assemblée ajourne cette affaire à une séance extraordinaire qui, à cet effet, est indiquée pour ce soir.
, Vun des secrétaires, donne lec-. ture d'une adresse de la ville et canton de Maronnes. L'esprit de patriotisme qui respire dans cet écrit est applaudi.
demande qu'il soit fait une mention honorable de cette adresse au procès-verbal.
Cette proposition est adoptée.
, au nom des comités de Constitution et des recherches réunis, demande à faire un rapport sur les troubles des départements du Cher, de la Nièvre, de VAllier et de la Corrëze.
L'Assemblée décide qu'il sera entendu.
Messieurs, dans les anciennes provinces du Bourbonnais, du Nivernais, du Berry et du
Limousin, les assemblées primaires et électorales ont donné lieu à de très grands troubles.
Plusieurs municipalités ont été forcées de publier
Ces excès vous ont été dénoncés plusieurs fois, et en dernier lieu les députés de la commune de Tulle vous ont présenté un mémoire (Voy. cette piècjs annexée à la séance de ce jour) qui ne laisse subsister aucun doute sur l'étendue du mal qui afflige leur province.
Le comité de Constitution et le comité des recherches réunis m'ont chargé de proposer à l'Assemblée des dispositions propres à remédier à de pareils désordres.
(M. Target donne lecture d'un projet de décret).
Le décret est très propre à prévenir des troubles ; je demande qu'il soit envoyé dans tout le royaume.
Je fais une motion qui me paraît urgente : c'est que les curés qui se refuseront à publier les décrets de l'Assemblée nationale seront privés de tous honoraires attachés à leurs bénéfices, et que cette même peine sera étendue aux évêques, prêtres, religieux, ex-religieux et moines fanatiques ou séditieux qui formeront des complots contre la Constitution.
La mesure proposée par M. Bouche est trop violente pour que vous puissiez l'adopter, mais j'ai un autre amendement qui serait de nature à atteindre le but que nous nous proposons tous et que je formule ainsi : « Les dé-« crets seront publiés par les curés sur la réqui-« sition des officiers municipaux, qui, en cas de « refus, en dresseront procès-verbal et le procu-« reur de la commune en fera la dénonciation « aux juges qui en doivent connaître. »
Les dispositions qui vous sont proposées sont impraticables, car dans le Périgord plusieurs curés ont été arrachés de leur chaire pour avoir voulu publier vos décrets.
, curé d'Evaux. Je demande qu'il y ait un terme à la peine de la privation des droits de citoyen actif contre les curés qui n'auraient pas publié les décrets et que ces droits leur soient rendus lorsqu'ils déclareront à la municipalité qu'ils se repentent.
Rien ne peut excuser un curé du refus de publier les décrets acceptés et sanctionnés par le roi. En conséquence, un curé qui est tombé dans cette faute ne doit en être relevé qu'après que la municipalité l'a jugé digne d'user des droits de citoyen actif.
fait lecture de tous les amendements.
.On demande la question préalable, qui est prononcée.
Lp projet de décret du comité est relu et adopté dans la teneur suivante :
« L'Assemblée nationale, informée et profondément affligée des excès qui ont été commis par des troupes de brigands et de voleurs dans les départements du Cher, de la Nièvre et de l'Allier, et qui se sont étendus jusque dans celui de la Corrèze ; excès qui, en attaquant la tranquillité publique, les propriétés et les possessions, la sûreté et la clôture des maisons et des héritages, la liberté si nécessaire de la vente et circulation des grains et subsistances, répandent par-toutla terreur, menacent même la vie des citoyens, et amèneraient promptement, s'ils n'étaient réprimés, la calamité de la famine ; excès, enfin, qui, par la contagion de l'exemple, par des insinuations perfides, par la publication de faux décrets de l'Assemblée nationale, ont entraîné quelques-uns des bons et honnêtes habitants de campagne dans des violences contraires à leurs principes connus, et capables de les priver pour longtemps du bonheur que l'Assemblée nationale travaille sans cesse à leur procurer ;
« Considérant qu'il n'y a que deux moyens d'empêcher les désordres : l'un en éclairant continuellement les bons citoyens et les honnêtes gens, que les ennemis de la Constitution et du bien public essayent continuellement de tromper; l'autre, en opposant aux brigands, d'un côté, des forces capables de les contenir, d'un autre côté, une justice prompte et sévère qui punisse les chefs, auteurs et instigateurs de troubles, et effraye les méchants qui pourraient être tentés de les imiter : Ouï le rapport à elle fait, au nom de son comité de Constitution et de sou comité des recherches, décrète ce qui suit :
« Art. 1er. Tous ceux qui excitent le peuple des villes ou des
campagnes à des voies de fait et violences contre les propriétés, possessions et clôtures des
héritages, la vie et la sûreté des citoyens, la perception des impôts, la liberté de vente et
de circulation des denrées et subsistances, sont déclarés ennemis de la Constitution, des
travaux de l'Assemblée nationale, de la nation et du roi ; il est enjoint à tous les honnêtes
gens d'en faire la dénonciation aux municipalités, aux administrations de département, et à
lAs-semblée nationale.
« Art. 2. Tous ceux qui excitent le peuple à entreprendre sur le pouvoir législatif des représentants delà nation, en proposant des règlements quelconques sur le prix des denrées, la police champêtre, l'évaluation des dommages, le prix et la durée des baux, et les droits sacrés de la propriété, et autres matières, sont également déclarés ennemis de la Constitution, et il est
enjoint de les dénoncer ; tous réglementa semblables sont déclarés nuls et de nul effet.
« Art. 3. Tous ceux qui se prévaudront d'aucuns prétendus décrets de l'Assemblée nationale, non revêtus des formes prescrites par la Constitution, et non publiés par les officiers qui sont chargés de cette fonction, sont déclarés ennemis de la Constitution, de la nation et du roi ; il est enjoint de les dénoncer, et ils seront punis comme perturbateurs du repos public, aux termes de l'article premier du décret du 23 février dernier,
« Art. 4. Les curés, vioaires et desservants qui se refuseront à faire au prône, à haute et intelligible voix, la publication des décrets de l'Assemblée nationale acceptés ou sanctionnés par le roi, sont déclarés incapables de remplir aucune fonction de citoyen actif ; à l'effet de quoi il sera dressé procès-verbal, à la diligence du procureur de la commune, de la réquisition faite aux curés, vicaires et desservants, et de leurs refus,
v Art. 5. Il est défendu à tous citoyens actifs de porter aucune espèce d'armes, ni bâtons, dans les assemblées primaires ou électorales ; il est enjoint aux maire et ofticiers municipaux d'y veiller, tant en empêchant les citoyens de parti* armés pour le chef-lieu de canton,qu'en obligeai!', à l'arrivée dans le chef-lieu, les citoyens actiis des différentes paroisses de déposer les armes qu'ils pourraient avoir, et leurs bâtons, avant d'entrer dans l'assemblée ; il est expressément défendu de porter aucune espèce d'armes dans les églises, dans les foires, marchés, et autres lieux de rassemblement, sans préjudice des gardes chargées du maintien de la police,
« Art. 6. Tout citoyen qui, dans une assemblée primaire ou électorale, se portera à quelque violence, fera quelque menace, engagera quelque acte de révolte, exclura ou proposera d'exclure de l'assemblée quelque citoyen reconnu pour citoyen actif, sous le prétexte de son état, de sa profession, et sous tout autre prétexte, sera jugé à l'instant par l'assemblée même, condamné à se retirer, et privé de son droit de suffrage. Les honnêtes gens et les amis de la Constitution sont spécialement chargés de veiller à l'exécution du présent article.
« Art. 7. Les officiers municipaux, tant du chef-lieu que des paroisses dont les habitants composeront les assemblées primaires, se concerteront ensemble, pour avoir une force suffisante à l'effet de maintenir la tranquillité publique et l'exécution des articles ci-dessus, dans le lieu des assemblées, sans néanmoins qu'aucun homme puisse entrer dans ces assemblées, si ce n'est dans les cas prévus par Je décret du mai dernier-
« Art. 8. tous les citoyens, quel que soit leur état et profession, les laboureurs, fermiers et métayers, les commerçants et marchands de grains et subsistances, toute propriété et toute possession actuelle sont placés sous la sauve* garde et protection de la loi, de la Constitution, du roi, et de l'Assemblée nationale, sans préjudice, soit de? actions que chacun pourra porter devant les tribunaux, soit des précautions que les corps municipaux ou administratifs prendront pour assurer, d'une manière paisible, la subsistance du peuple, Tous ceux qui contreviendront au présent article seront reconnus et dénoncés par les honnêtes gens, comme ennemis de la Constitution et des travaux de l'Assemblée nationale, de la nation et du roi,
« Aftt 9. Çeu qui se permettront des excès ou
outrages à l'égard des officiers municipaux, des administrateurs de département et de district, et des juges, seront rayés du tableau civique, déclarés incapables, et privés de tout exercice des droits de citoyen actif, en punition d'en avoir violé les devoirs.
« Art. 10. Quant à ceux qui auront commis ou commettront des voies de fait ou des violences, soit contre les propriétés et possessions actuelles, soit contre les personnes, et particulièrement quant aux chefs des émeutes, et surtout aux auteurs et instigateurs de pareils attentats, ils seront arrêtés, constitués prisonniers, et punis selon toute la rigueur des lois, sans préjudice de l'exécution de la loi martiale, dans le cas où elle doit avoir lieu suivant le décret du 21 octobre dernier.
« Art. 11, Tous les citoyens de chaque commune qui auront pu empêcher les dommages causés par ces violences, en demeureront responsables, aux termes de l'article 5 du décret du 23 février dernier.
* Art, 12, Les gardes nationales, qui ne sont que les citoyens actifs eux-mêmes, et leurs en-fants, armés pour la défense de la loi, les troupes réglées, les maréchaussées déféreront sans délai à toutes réquisitions qui leur seront faites par les corps administratifs et municipaux, pour le maintien de la tranquillité et du respect pour les décrets de l'Assemblée nationale; elles veilleront particulièrement sur le bon ordre dans les assemblées qu'il est d'usage de former en divers lieux pour célébrer la fête de chaque paroisse, ou pour louer les domestiques de campagne.
« Art. 13. Le président de l'Assemblée se retirera, dans le jour, par devers le roi, pour le supplier de faire passer dans les départements du Cher, de la Nièvre, de. l'Ai lier et ae la Gorrèze, des forces suffisantes pour assurer le repos public et l'exécution des décrets.
« Art. 14. La connaissance et le jugement en dernier ressort des crimes et attentats commis dans les émeutes et attroupements qui ont eu lieu, à compter dù 1er mai dernier, ou qui auraient lieu à l'avenir dans lesdits quatre départements, sont attribués respectivement aux sièges présidiaux, bailliages et sénéchausséess de Bourges, Saint-Pierre-le-Moutier, Moulins et Limoges; il leur est enjoint de rechercher principalement, et de punir suivant toute la rigueur des lois-, les auteurs, fauteurs et instigateurs des troubles, et de faire, sans retardement de jugement, parvenir à l'Assemblée nationale, tous les renseignements, instructions et preuves qu'ils auront pu se procurer par la voie de la procédure.
« Le présent déoret sera porté sur le champ à l'acceptation et à la sanction du roi, qui sera supplié de prendre les mesures les plus promptes pour le faire parvenir, publier et exécuter dans tous les tribunaux et toutes les municipalités du royaume, et spécialement aux présidjaux, bail» liages et sénéchaussées, ainsi qu'aux villes, bourgs et communautés des quatre départements mentionnés au présent décret. »
L'Assemblée passe à son ordre du jour, qui est la suite de la discussion sur les articles du projet de décret, concernant l'organisation du clergés
Vous avez renvoyé hier à cette séance un amendement proposé par M, Fréteau ; cet honorable membre s'est rendu au comité ecclé* siastique, où nous avons discuté cet objet, leg monuments historique pop les yeux, M, Fréteau
et les membres qui étaient alors présents au comité se sont aisément conciliés. Nous sommes convenus qu'il faut supprimer ee qui, dans les juridictions métropolitaines, est attaché à un siège particulier, conserver ce que cette juridiction a d'essentiel, et laisser exercer cette partie de la juridiction.métropolitaine au plus ancien évêque d'un arrondissement déterminé. Ces dispositions sont conformes aux usages des églises d'Afrique. En examinant les premiers articles du rapport du comité, nous avons cru qu'ils devaient éprouver quelques changements. Ils sont ainsi conçus :
« Art. ler. Il y aura en chaque département un siège épiscopal
ou archiépiscopal, et il ne pourra pas y en avoir davantage. En conséquence, de deux ou de
plusieurs sièges établis dans un département, il n'en sera réservé qu'un seul; les autres
seront transférés dans les départements où il n'en existe pas actuellement, ou seront éteints
ut supprimés.
« Art. 2. De deux ou plusieurs sièges établis dans un département, sera conservé de préférence celui qui aura le titre d'archevêché, et, en cas d'égalité,.celui qui se trouvëra le plus au centre, et dans la ville la plus importante.
« Art. 3. Chaque évêque sera tenu de Veiller sur toutes les églises et paroisses renfermées dans les limités dé son département, et d'administrer, à tous ceux qui y demeurent tous les secours spirituels dont ils auront besoin, sans pouvoir exercer aucune autorité dans les départements voisins.
« Art, 4. Aucune église ou paroisse de l'empire français, aucun citoyen ne pourra en aucun cas, pour quelque cause et sous quelque prétexte que ce soit, recourir a un évêque ou métropolitain dont le siège serait établi sous la domination d'une puissance étrangère, non plus qu'à, leurs délégués résidant èn France ou ailleurs. »
Le comité a changé sa rédaction et propose de remplacer ces quatre articles par les deux articles suivants :
v Art, 1er Chaque département formera un seul diocèse, chaque
diocèse aura la même étendue et . les mômes limites qu'un département,
« Art. 2. Il est défendu à toute église ou pa-r roisse de l'empire français et à tous citoyens français de reconnaître, en aucun eas et sous quelque prétexte que ce soit, l'autorité des évêques ou métropolitains dont le siège serait établi sous }a domination d'une puissance étrangère, ni celle çle ses délégués résidants en France ou ailleurs. »
Je suis flatté que les membres assemblés hier au comité ecclésiastique aient présenté d'une manière plus simple les articles que nous avions proposés. J'observerai seulement, sur ce qui a été dit relativement à l'amendement de M, Fréteau, qu'il n'est pas bien démontré que dans l'église d'Afrique la juridiction métropolitaine fût confiée au plus ancien des évêques.
Nous étant livrés à la recherche des autorités qui pouvaient fixer notre opinion sur cette matière,nous avons vu que dans l'Eglise d'Afrique, où d'abord le patriarche d'Alexandrie avait une juridiction qui s'étendait jusqu'à la Libye* et où une division fut ensuite faite, l'on institua les primats de Numidie, etc. Il s'établit en usage que le plus ancien évêque présida l'assemblée des évêques...
, que Je
demande, pour mon instruction, si c'était un concile ou une Assemblée natiohale?
Nous avons aussi trouvé des textes absolument discordants. Le canon des apôtres porte expressément que « les évêques chargés du snin. des provinoes doivent regarder et suivre, comme le troupeau qui suit le berger, l'évêque métropolitain, leur chef et leur tête, de maniéré qu'ils ne fassent rien de quelque importance, sans sa participation... >» Voulez^vous établir en France deux sortes d'évêques ? Des évêques qui soient tout, et des évêques qui ne soient rien ? Dans l'incertitude que devait causer cette diversité de textes, j'ai eu l'hopneur de proposer hier un article auquel nous Rivons réuni l'article 5, avec des changements importants; il se trouve conçu en ces termes; il formera l'article 3 :
« Art. 3. La distinction entre les métropolitains et leurs suffragants, telle qu'elle existe maintenant dans le royaume, n'aura pas lieu à l'avenir, Les contestations seront jugées par le synode diocésain, et, en cas d'appel, par un synode supérieur, composé du nombre d'évêques et de curés qui sera déterminé ci-après ; ce synode sera tenu par le plus ancien desdtts évêques, qui porter^ le titre de président, et qui consacrera les évêques nouvellement institués, »
Il me semble que la discussion se prolonge inutilement. La discussion faite hier était déjà suffisante. Cela vient de ce que l'on a confondu deux choses très disparates : le diocèse, et celui qui exerce la juridiction dans le diocèse. Il s'agit uniquement de savoir combien il y aura de diocèses. Je demande que la discussion s'établisse sur cet objet, et qu'on en vienne enfin à une décision quelconque sur un article relatif au clergé. Nous ne rentrerons vraiment dans nos droits, et nous n'écarterons les cabales et les intrigues que quand nous aurons décrété un article. Je demande donc qu'on mette aux voix, sauf amendements, cette question : « Combien y aura-t-il de di ocèses ? *
On applaudit et l'on demande à aller aux voix.
MM. de Grillon et Rœderer paraissent à la tribune. *tï On demande de nouveau à aller aux voix.
JeJ demande à présenter un amendement ; si l'Assemblée n'en veut entendre aucun, il faut qu'elle le décrète,., 11 me semble convenable de réunir deux départements pour former un diocèse... (îl s'élève des murmures.)Par le régime constitutionnel que vous avez établi, chaquedépartementasesétablissements tellement déterminés que tous les départements pourraient aisément se former en républiques fédératives.Le moyen que je propose en les réunissant sous lé rapport spirituel ferait éviter ce danger. Il faut aussi que tous les fonctionnaires publics ne mènent pas une vie oisive. Un département në suffira point pour occuper les loisirs d'un évêque, En diminuant le nombre des évêques on peut augmenter celui des curés, et l'on donne douze cent mille livres au Trésor public.
, député de Ville-franche-de-Rouergue. Je suis chargé de demander, au nom des habitants du diocèse de Vabres, la conservation de l'évêché, de la cathédrale de Vabres et de tout ce qui a rapport au culte dans e§ pays , Je prie l'Assemblee de peser dans se
sagesse la justice de cette demande, qu'il était de mon devoir de lui présenter.
, député de Comminqes. Messieurs, dans le département de la Haute-ôaronne, il y a outre l'archevêché de Toulouse, un évêché de Gomminges qui est situé dans les Pyrénées. Le district dans lequel il est placé est le plus grand de tout le royaume ; les distances, les neiges qui couvrent le pays une partie de l'année, nécessitent la conservation de cet évêché.
, député de Saint-Gaudens. Je suis également chargé par le pays de Comminges de demander la conservation de son diocèse, qui comprend la vallée d'Aran, province espagnole. Les Arabes ont fondé, concurremment avec les habitants de Gomminges, un séminaire où les clercs espagnols viennent se faire instruire : ils reçoivent les ordres des mains de l'évêque de Gomminges. Les députés de ce département consentent à ce que le diocèse soit conservé. Les habitants espagnols de la vallée d'Aran vous enverront une pétition à ce sujet, et je vous demande la permission de vous lire le mémoire de la municipalité de Saint-Gaudens.
Voix nombreuses : Non, non, c'est inutile, vous nous avez distribué ce mémoire (Yoy. ce document annexé à la séance de ce jour.)
consulte l'Assemblée qui décide qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur la demande des députés de Gomminges.
L'Ile de Gorse a 540 lieues carrées et elle est traversée par une chaîne de montagnes ce qui rend les communications fort difficiles. Je demande qu'on lui conserve plusieurs évêchés.
Cette demande est ajournée.
M. Duval d'Eprémesnil remet un amendement à M. le président, sur l'article ler".
Mon amendement est fort simple et serait plus facile à saisir si M. Fréteau avait répondu à mon observation sur les anciens usages relatifs à la juridiction métropolitaine. Voici quel est cet amendement : « L'Assemblée nationale, désirant que la constitution ecclésiastique du royaume soit conforme à la constitution civile, a arrêté que le roi sera supplié de recourir, suivant les saints canons, à la puissance spirituelle, afin qu'il soit pourvu à l'exécution de ce plan, selon les formes ecclésiastiques. » Quand l'Assemblée aura pris sur elle de faire autre chose, et de décider ce qui ne l'a été dans les premiers siècles que par les évêques et par les conciles, et depuis le sixième siècle que par le concours des deux puissances, l'Assemblée sera constituée en schisme. (Il s'élève beaucoup de murmures.)
L'Assemblée, consultée, décide qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur cet amendement.
L'article 1er est adopté ainsi qu'il suit :
« Art. 1er. Chaque département formera un seul diocèse ; et
chaque diocèse aura la même étendue et les mêmes limites que le département. »
(La partie droite de l'Assemblée ne prend pas part au vote.)
Le second article est mis à la discussion •
11 ne suffit pas de
défendre de reconnaître l'autorité des évêques étrangers, il faut encore proscrire les juridictions métropolitaines étrangères auxquelles, par exemple, sont soumis les évêchés de Toul, Metz, Verdun, Strasbourg, etc.
Je demande si le souverain pontife est renfermé dans cet ana-thème ?
L'intention de l'Assemblée est de réduire l'autorité du souverain pontife à de justes bornes; mais elle l'est également de ne pas faire de schisme. On pourrait ajouter : a sans préjudice de la hiérarchie du souverain pontife. »
Qu'est-ce que cela veut dire ? Nous connaissons la hiérarchie des évêques, des archevêques et non du souverain pontife.
Le comité ecclésiastique n'aurait pas cru nécessaire de faire un article additionnel pour reconnaître l'autorité de l'évêque de Rome.
Cette expression est familière aux hérétiques.
L'évêque de Rome est pour les catholiques le souverain pontife.
J'observe que le terme de. souverain pontife a été donné autrefois à beaucoup d'évêques.
Le comité a reconnu l'évêque de Rome « chef visible de l'Eglise universelle». Voyez article XX. Je propose en amendement : « sauf l'Union des catholiques avec le chef de l'Eglise. »
Le traité de Westphalie, qui est la base du droit politique de l'Europe, a réservé à des évêques d'Allemagne l'autorité métropolitaine sur des évêques français. On pourrait dire en amendement que « le roi sera supplié d'ouvrir des négociations pour offrir des indemnités aux évêques allemands. »
L'amendement est simo-niaque.
Il appartient à la loyauté d'un peuple devenu libre de respecter les traités. Si le mot dont je me suis servi est mal sonnant, et il paraît qu'il l'a été pour M. l'abbé Grégoire, , je demande toujours que le roi entre en négociation pour obtenir la résiliation de ia stipulation du traité de Westphalie.
Je demande pour cet amendement le même ajournement que celui qui vient d'être décrété relativement à la Gorse.
(L'Assemblée décide qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur l'ajournement.)
, abbé d'Abbécourt. On pourrait placer à la suite du titre proposé l'article 20 du titre II : il est ainsi conçu : « Le nouvel évêque ne pourra point s'adresser à l'évêque de Rome pour en obtenir aucune confirmation; il ne pourra que lui écrire comme chef visible de l'Eglise universelle, et en témoignage de l'unité de foi et de la communion qu'il est dans la résolution d'entretenir avec lui. »
Il n'est pas possible d'intercaller cet article sans déranger l'ordre des matières; mais je propose d'ajouter à l'article 2 cette disposition : « Le tout sans préjudice de l'unité de foi et de la communion qui sera entretenue avec le chef visible de l'Eglise, ainsi qu'il sera dit ci-après.
L'amendement est adopté et l'article 2 est décrété en ces termes :
Art. 2. « 11 est défendu à toutes églises ou paroisses de France, et à tous citoyens français, de reconnaître, en aucun cas et sous quelque prétexte que ce soit, l'autorité d'un évêque ordinaire "ou métropolitain, dont le siège serait établi sous la domination d'une puissance étrangère, ni celle de ses délégués résidants en France ou ailleurs ; le tout, sans préjudice de l'unité de foi et de la communion qui sera entretenue avec le chef visible de l'Eglise, ainsi qu'il sera dit ci-après. »
, évêque de Clermont, demande à faire une déclaration au nom des évêques députés à l'Assemblée nationale et commence ainsi :
Je prie l'Assemblée de recevoir la déclaration que nous ne voulons prendre aucune part à la 1a délibération............ (Quelques évêques se lèvent.)
Je supplie l'Assemblée de bien observer que M. l'évêque de Clermont n'a fait cette déclaration qu'après que vous avez, par un décret formel, déclaré que vous vouliez conserver l'unité de foi et la communion avec le chef visible de l'Eglise.
(La discussion est ouverte sur l'article 3 proposé par M. Fréteau.)
Dès les premiers Siècles de l'Eglise, il y a eu des métropolitains : pourquoi détruire les métropolitains qui existent pour en faire d'autres ? Vous leur oterez tout ce qu'ils avaient reçu d'un usage abusif, vous ne leur laisserez plus que les objets spirituels. Le recours aux métropolitains a été décidé par l'Eglise : une assemblée tenue par elle ne peut rien changer à cette décision. D'ailleurs, dans l'article présenté, l'organisation n'est pas complète. Je proposerai de décréter que les métropoles qui existent seront conservées. Lorsque l'évêque diocésain aura prononcé dans son synode sur les matières de sa compétence, il y aura lieu au recours au métropolitain, lequel prononcera dans le synode métropolitain. Si la décision de ce synode porte contravention aux lois canoniques ou aux lois du royaume, la partie intéressée s'adressera à la cour de revision.
Quelque parti que vous preniez, vous ne violerez en rien la juridiction ecclésiastique. Si vous maintenez la juridiction métropolitaine, vous respecterez des institutions anciennes et dignes de respect ; mais, si vous la réformez, vous vous rapprocherez de l'Eglise primitive. Jésus-Christ n'a pas donné aux apôtres de l'autorité les uns sur les autres. (Ces paroles ^e font entendre du côté droit : Et Saint Pierre?) Saint Pierre a présidé le concile de Jérusalem, mais cette présidence ne lui a donné aucune juridiction sur les apôtres. Je ne connais, dans le premier et dans le second siècle de l'Eglise, aucun exemple d'un évêque qui ait exercé aucune juridiction sur un autre évêque.
Il y a ici beaucoup de personnes plus instruites que moi, je les prie de s'expliquer si elles connaissent quelques-uns de ces exemples.
Je réponds à la question de M. Treilhard que l'Assemblée est transformée en concile, et en concile schisma-tique et presbytérien.
***. On cherche à prouver que l'Eglise n'a pas de juridiction extérieure, c'est une hérésie manifeste. Jésus-Çhrist dit à saint Pierre : « Je change votre nom de Simon en Pierre, parce que sur cette pierre j'établirai mon église.» Après la faute de saint Pierre, Jésus lui dit : « Pierre, m'aimez-vous?—-Oui, Seigneur, je vous aime. — «Paissez mes agneaux», dit Jésus. «Pierre, m'aimez-vous?—Oui,Seigneur, jevous aime.—Paissez mes brebis,» dit Jésus. VoilàPierre pasteur du troupeau, pasteur des pasteurs, et le pasteur a sans doute une juridiction sur le troupeau. C'est à saint Pierre que Jésus-Christ a dit : « Je vous remets les clefs du paradis ; ce que vous lierez sur la terre sera lié dans lé ciel; ce que vous délierez sur la terre sera délié dans le ciel. » — On m'objectera que Jésus-Christ a dit la même chose à tous les apôtres; mais c'est à saint Pierre seul qu'il a remis les clefs du paradis, comme, dans une maison bien ordonnée, les clefs se remettent tous les jours au chef. Saint Pierre est le premier intendant delà maison de Dieu, il est l'administrateur universel, donc il a une juridiction universelle. Mais ce n'est pas seulement par les paroles de l'Evangile qu'on établit les principes de la foi, il est encore des articles de foi comprit implicitement et obscurément dans l'Evangile.......Tout bien considéré, je trouve que vous vous embarrassez beaucoup. Vous avez des manières abrégées de finir un fond de contestation dont vous ne vous tirerez jamais. Vous exposez les évêques à n'être pas évêques, les curés à n'être pas curés, les fidèles à n'être pas absous. Que le pape se réserve certains cas dans l'Eglise, que les évêques se réservent certains cas dans leur diocèse, c'est affaire de discipline. Si vous vous écartez de cette discipline, le fidèle sera-t-il absous de son péché?
J'avais demandé qu'on citât un fait contre mon assertion, on n'en a cité aucun. J'en citerai un absolument conforme à mon opinion. Dans le troisième siècle, saint Cyprien écrit au pape saint Corneille : « Il ne faut pas que ceux qui nous ont été soumis aillent plaider leur cause ailleurs. » Nous ne voyons pas, dans le concile de Nicée, que l'évêque de Rome eût une juridiction sur les autres évêques.....
M. Ce n'est pas là ce que vous avez dit.
J'ai dit que saint Pierre a présidé le concile de Jérusalem, et que cette qualité de chef du concile ne donnait pas de juridiction sur les autres évêques.....(M. Treilhard est interrompu par des murmures.)
Je demande que la discussion soit fermée.
Sera-t-il donc impossible de ramener l'Assemblée à l'ordre? Les clameurs ne servent à rien. Deux cents personnes qui parlent à la fois ne peuvent être entendues. Je demande donc que M. Treilhard parle, qu'on l'écoute, et,
lorsqu'il aura parlé, on le réfutera si l'Assemblée le permet.
On ne veut discuter que pour renouveler les inculpations d'hérésie contre l'Assemblée nationale, afin de jeter le trouble dans le royaume. Je demande que la discussion soit fermée. (Cette demande est fortement appuyée.)
Il s'agit de savoir si vous conserverez la juridiction métropolitaine : elle est dë pure police. Nous trouvons ce principe dans les livres les plus élémentaires»».. {On demande encore que la discussion soit fermée») L'impatience de l'Assemblée prouve que j'ai raison. Je n'en dirai pas davantage» Nous sommes Convention nationale. Il a été prouvé, dans une discussion qu'on n'a pas réfutée, que nous pouvons changer tout ce qui est de pure police et de simple discipline. Nous pouvons faire tout ce que nous ferions s'il s'agissait d'admettre la religion dans le royaume_____... (il ssélève de violents murmures.) Il est très aisé de pousser des rugissements quand je parle ♦ mais il paraît très difficile de me répondre. Je me résume. Nous pouvons réformer l'autorité métropolitaine et revenir aux usages des trois premiers siècles» Il faut surtout èptirer le conseil de l'évêque» L'évêque ne faisait alors rien sans consulter sou clergé et le peuple. Je réclame cette disposition des pre* miers siècles, et je demande que* tous les ans, le peuple choisisse trois curés qui formeront le conseil de l'évêque, et sans lequel l'évêque ne pourra rien décider.
J'ai demandé que la discussion fut fermée.
Permettez-moi de vous ïàppeier ce que jai dit hier. La difficulté la plus efficace dé l'exécution ue voâ décretSj celle qui les fera échouer, lé plus grand danger que puissent éprouver vos décisions.....La difficulté la plus efficace.....Il est de l'intérêt de laisser à chacun le champ libre et le plus étendu... Je dis donc> Messieurs, que le plus grand danger..^ (Plusieurs voix s'élèvent du côté droit et disent î On vous interrompt, parce que vous l'avez déjà dit, ce n'est pas ià la question.) Il faut consulter l'Assemblée pour savoir si elle veut entendre, si elle né veut pas entendre] elle n'est pas libre. Si elle n'est pas libre, il 117 à pas dé décrets. S'il y a dés choses Vraies dans ce qu'on veut vous dire, il faut les entendre, car sahs doute vous cherchez la lumière. Dans Une matière qui touche à la conscience, il faut laisser la plus grande liberté et la plus grande étendue à la disCUêsiôn. ftous avons besoin d'être éclairés et d'entendre les principes que nous connaissons aussi bien que ceul qui ont Pair d'avoir étudié la matière.
(M. l'évêque de Clermont demandé la parole.)
, curé ctVssel. Je demande s'il est à propos de fermer la discussion, quand on se présente pour réfuter de grandês erreurs. M. Treilhard a dit que jusqu'au quatrième slècife les évêques de Rome n avaient pas eu de juridiction sur les autres évêques.
Il paraît étonnant qu'un fait très authentique ait échappé à l'érudition de M. Treilhard. Victor, évêque de îlome, menaça d'excommunication les évêques d'Afrique tombés dan$ l'erreur de quartâ decimâ : saint ilréhëè, éVêquède Lyon, èôrivait à
saint Victor pôur réclamer sa charité. Sâlnt Cy-prien écrivait aussi au pape pour lui demander de séparer de la communion catholique l'évêque Saturnin. Donc saint Gyprien et saint Irénée reconnaissaient la juridiction de Rome.
, évêque de Clermont^oUS ne me regardes pas sans doute commeasséBinconséquent pour vouloir. délibérer sur cette matière : mais comme évêque, je dois réclamer contre les hérésies sans cesse préseatées dans cette tribune» Il n'est pas un chrétien qui ne sache qUè le pape a la primatie d'homme et de juridiction sur toute l'Eglise. On a dit hier te Contraire. Je dénonce cette v assertion»»»» Vous avez dit que vous respectiez tout ce qui tient à la religion ; craignez qu'en attaquant ses dogmes on ne croie pas à cette profession».».. Quoique je ne doive pas prendre part à la délibération i je relèverai des erreurs dans lesquelles on pourra tomber au sujet de la religion, avec tout ie courage de la foi, comme avec toute la modération qui doit m'attirer le respect»
fait lecture de i'arlicle qu'il a proposé.
Je déclaré que je m'oppose à une décision schismatique.
: C'est un véritable presbytéranisme.
Comment peut-on?»....
Vous donnez aux simples prêtres une juridiction sur les évêques; c'est bien là le véritable presbytéranisme. Je suis bien étonné qu'un homme aussi instruit que M. Fréteau ignore que dans le synode les Gurés rendent compte de leUr conduite aux evêques, et que les évêques rendent compte de la leur aux conciles provinciaux.
Il ne s'agil ici que de discipline extérieure; on ne touche pas au dogme. Je demande donc que la discussion soit fermée.
(La discussion est fermée.)
On demande la priorité pour la motion de M. Camus.
Je n'ai pas entendu conserver plusieurs métropoles dans le même département. Nous sommes d'accord, M» Fréteau et moi, qu'il faut en supprimer. Je conserve l'ancienne juridiction métropolitaine; M. Fréteau ën établit une nouvelle; je crois cela très dangereux» Je trouve encore des différences essentielles dans la rédaction. M. Fréteau parle de contestation; il ne faut pas se servir de ce mot. L'évêque n'a nulle juridiction contentieuse ; parlons des matières ae sa compétence, et nous conserverons ies véritables idées. L'évêque jugera si les prêtres ont manqué à la discipline, s'ils ont les qualités requises pour être ordonnés. Ne conservons pas tous les métropolitains, mais conservons ceux qui seront nécessaires.
11 faut adopter la motion de M. Fréteau,. ou bien vous serez obligés de créer des métropolitains ; vous avez des sièges qui n'en ont pas»
(La priorité est accordée à la motion de M. Ga-mus.)
Il n'est pas possible d'envoyer les prêtres d'un département a Gent lieues de là. Je propose cet amendemeot : « Le nombre des métropolitains sera déterminé» et les lieux où ils seront établis fixés selon qu'il sera convenable»»
(Cet amendement est adopté.)
Je demande que le métropolitain, qui est évêque avant d'être métropolitain, soit soumis, dans un jugement qu'il aura rendu comme évêque, à l'appel à une autre métropole.
Il faut ajourner cet amendement; le comité vous présentera un travail sur la juridiction ecclésiastique.
(L'amendement est ajourné.)
La motion de M. Camus, amendée par M» Defermon, est décrétée en ces termes :
Art. 3. « Il sera conservé tel nombre de métropoles qu'il sera jugé convenable, et ies iieux de leurs sièges seront déterminées Lorsque l'évêque diocésain aura prononcé dans son synode sur le6 matières de sa compétence, il y aura lieu au recours au métropolitain, lequel prononcera dans le synode métropolitain. »
annonce que l'Assemblée se réunira demain à 7 heures et demie, pour se rendre à la paroisse de Sai n t- Germain-1'Au xer-rois, et assister à la grand'messe et à la procession.
J'ai reçu de la municipalité de Montauban une lettre qui m'annonce que la tranquillité est rétablie dans cette ville* J'en donne lecture :
« Monsieur le Président,
« Nous nous empressons de vous annoncer la plus heureuse nouvelle. La paix et la concorde sont rétablies dans la ville de Montauban ; les prisonniers que le peuple avait faits dans la sanglante journée du 10 mai sont en liberté. C'est ce même peuple qui a demandé leur élargisse-^ ment, par un transport de générosité qu'aucune expression ne saurait peindre (Il s'élève des murmures). M. Dumas, maréchal général des logis de la garde nationale parisienne, chargé des ordres du roi pour le rétablissement de la tranquillité publique dans notre ville, a su l'intéresser, l'émouvoir et éteindre en lui tout sentiment d'aversion et de haine ; l'éloquence touchante et le caractère de franchise et de loyauté qu'il a déployés, lui ont gagné tous les cœurs. Nous lui devons ces témoignages, qu'il est bien doux pour nous de lui rendre, en éGhange de la paix et du bonheur qu'il nous a procurés. (On applaudit,)
« Le temps ne nous permet pas de vous donner les détails d'un événement qui nous comble de joie, mais nous ne tarderons pas à vous en envoyer un récit circonstancié; nous espérons qu'il réconciliera tous les Français au peuple de Montauban, qui n'a pas été moins généreux dans le pardon, que modéré dans la colère {les murmures se reproduisent)y tque les calomnies odieuses, répandues de la manière la plus atroce, semblaient devoir rendre moins accessible aux sentiments de l'humanité qu'à ceux de l'aigreur et de la vengeance. Nous espérons surtout que l'auguste Assemblée que vous présidez, éclairée par l'amour de la justice et de la vérité, rendra son estime et sa protection à une cité malheureuse, que lâ stagnation du commerce et des pertes de tout genre
ont réduite à la plus extrême détresse. Pour nou6, qu'une prévention aveugle a outrageusement inculpés, nous attendons avec courage et avec sécurité les lumières de l'information que Sa Majesté a ordonnée 'et nous sommes sûrs, non seulement qu'elle ne donnera lieu à aucune inculpation contre nous, mais qu'elle manifestera» de la manière la plus éclatante, la pureté et la noblessë de notre conduite, et qu'elle nous fera obtenir de tous les hommes sages» et surtout de l'Assemblée nationale» dont le suffrage est le plus précieux à nos cœurs, des applaudissements et des actions de grâces. »»
(Cette lettre est renvoyée au comité des rapports»)
Je dois informer l'Assemblée que je viebs de recevoir une lettre de M. de Saint-Priest, relative à l'affaire de Marseille.
Plusieurs membres demandent le renvoi au comité des rapports.
Une partie de l'Assemblée insisté pour que la lettre soit lue
lit cette lettre qui est ainsi Gonçue :
« Paris. le
Monsieur le Président, j'ai lu dans le Moniteur en quels termes m'avait dénoncé à l'Assemblée nationale Un député extraordinaire de Marseille» ët j'ai été informé que cette affaire était renvoyée au comité des rapports ; je crois devoir vous adresser mes répliques
« Pour suivre l'ordre de l'accusation, jé commence par un reproche dont le Moniteur a fait sans doute trop peu de cas pour le rapporter, mais qui n'a pas moins été articulé contre moi.*»
(Il s'élève de grarids murmures*)
(On demande encore le renvoi au comité des rapports.)
On ne peut refuser d'entendre la lecture de cette lettre. On le doit d'autant plus qu'une partie de l'Assemblée a les mêmes plaintes à former contre le Moniteur 1 il ne dit jamais que ce qui est contraire à cette partie de l'Assemblée*
continue la lecture de la lettre de M* de Saint-Priest 1
« On m'a imputé d'avoir fait une réponse ironique à une demande de la ville de Marseille à Sa Majesté, pour en obtenir des fusils. J'ai rendu compte au roi de cette demande \ et d'après l'examen de l'état des arsenaux dans les provinces méridionales, le roi m'a autorisé à faire espérer des armes à la Ville de Marseille, si l'on pouvait recouvrer une partie de celles qui avaient été pillées récemment à Lyon, ainsi qu'on y était parvenu quelque temps auparavant à Saint-Etienne-en-Forez, après un semblable désordre. Ce n'était point là de l'ironie, et je fespécte trop mes devoirs pour l'employer en pareil cas.
« Je vais suivre le Moniteur pour de qui peut me concerner dans le discours du député de Marseille à l'Assemblée nationale*
* Une lettre du ministre est arrivée avee l'ordre à la garde nationale d'évacuer lés fdrts, et au régiment de Vexin d'en sortir également, pour être remplacé par celui d'Ernëit» Ainsi, ou punissait des soldats qui avalent donné une preuve du
patriotisme en ne voulant pas tirer sur des Français ; ainsi le ministre prenait des mesures différentes de celles que vous aviez ordonnées par votre décret ; ce décret accompagnait la lettre du ministre, mais il n'était pas revêtu des formes constitutionnelles. »
« Pour juger de la vérité des allégations de ce député, il suffit de connaître la teneur du décret, la voici :
« L'Assemblée nationale, profondément affligée « des désordres qui ont eu lieu dans plusieurs « endroits du royaume, et notamment dans la ville « de Marseille, charge son président de sè retirer « vers le roi, pour remercier Sa Majesté des me-« sures qu'elle a prises, tant pour la recherche « des coupables que pour la réparation de ces « excès, et renvoie l'examen de cette affaire et « de ses dépendances au comité des rapports. »
« Quelles étaient ces mesures dont on remerciait le roi? Les mêmes dont j'ai rendu compte à l'Assemblée par ma lettre du 11 mai, en lui communiquant ma lettre du 10 à la municipalité de Marseille. Elle porte uniquement « de faire éva-« cuer immédiatement par la troupe nationale « les forteresses où elle s'est introduite, en le3 « remettant aux troupes qui en avaient ci-devant « la garde exclusive. » Or, le régiment de Vexin seul composait ci-dëvant la garnison des forts; l'ordre du roi dit simplement, « pour la garde en « être faite par ses troupes, » sans aucune désignation du régiment d'Ernest.
« A l'égard de la forme constitutionnelle qui manquait, a-t-ondit, au décret, j'observe que les décrets n'en sont revêtus que lorsqu'ils contiennent des dispositions exécutoires. Celui dont il s'agit n'en renfermait aucune, ainsi qu'on l'a vu; si j'en ai envoyé copie à la municipalité de Marseille, ce n'a été que pour lui faire connaître l'adhésion de l'Assemblée nationale aux mesures ordonnées par Sa Majesté.
« La harangue du député s'est terminée en ces termes : « Vous ne souffrirez pas que cette ville t intéressante reste sous le despotisme d'un mi-« nistre que nous avons dénoncé, que nous dé-« nonçons encore ; qui, en donnant une extension « arbitraire à votre décret, a fait d'une loi pater-« nelle une loi de sang, qui nous a induits en er-« reur en nous transmettant un décret non re-« vêtu des formes nécessaires pour qu'il fût « authentique, et q[ui vient nous accuser encore.»
« Après les explications que j'ai déjà données, je crois pouvoir me dispenser de répondre à ce paragraphe; on trouvera difficilement dans le recueil imprimé des pièces relatives^ aux forts de Marseille, à quoi se rapportent les mots : « des-« potisme d'un ministre, extension arbitraire des •« décrets, loi paternelle devenue loi de sang : » une loi de sang, grand Dieu !
« On a de plus imputé au ministre, en cette occasion, une marche hâtive et vindicative. Lés ordres du roi et ma lettre, quoique signés le 10 mai, ne sont cependant partis que le 13, et parce qu'étant informé que l'Assemblée s'occupait d'un décret à rendre sur le même sujet, j'ai cru plus convenable que le même courrier fût porteur du décret et des ordres de Sa Majesté.
« Quant à l'épithète vindicative, ]'observe qu'après m'être constamment occupé depuis plus de vingt ans de la prospérité de Marseille et de son commerce, j'y ai reçu à mon retour de Gonstan-tinople des témoignages peu équivoques de l'affection et de la reconnaissance de ses citoyens. Je ne les oublierai jamais, et je n'effacerai de ma mémoire que les reproches peu mérités que me
fait aujourd'hui la municipalité de "cette ville, si intéressante sous tant de rapports. »
lève la séance à trois heures et demie, et renvoie la suivante à ce soir, six heures.
Séance du
, secrétaire, fait l'énonciation des adresses et délibérations suivantes :
Adresses de félicitation,adhésion et dévouement des communautés de Bremur et d'Origny, département de la Côte-d'Or; du conseil général de la commune et de la troupe patriotique des paroisses d'Eraville et de Roquebrune, département de la Charente; des villes de Dôle et de. Théobon ; des officiers municipaux de la ville et de la garde nationale de Bergerac; du district de Saint-Pierre-de-Lyon ; enfin, de la ville de Gastelnaudary: toutes ces adresses improuvent expressément la déclaration d'une partie de l'Assemblée nationale, ainsi que tous autres écrits qui tendent à affaiblir le respect et la confiance dus à ses décrets. La municipalité de Castelnaudary envoie en même temps une délibération des officiers du présidial de cette ville, renfermant les mêmes sentiments.
Adresses de la communauté de Leguevin, département de la Hautè-Garonne*; et de celles de Montevraiu et de Veziunes, département de l'Yonne; elles font le don patriotique du produit des impositions sur les ci-devant privilégiés.
Adresses des communautés de Ghaillé-les-Marais, département de la Vendée ; de Saint-Victor et du bourg d'Ornes-en-Verdunois, dont tous les habitants ont prêté, de concert avec les officiers municipaux, le serment civique.
Adresses des municipalités des paroisses formant le canton de Dammarie, département d'Eure-et-Loir; elles exposent la misère extrême des habitants affligés par des grêles successives, et implorent la protection de l'Assemblée.
Adresses des membres de la fédération du département de la Haute-Vienne et des départements limitrophes, qui a eu lieu à Limoges,le 9 du mois dernier; ils expriment avec énergie la résolution qu'ils ont prise de défendre jusqu'au dernier soupir la Constitution : « Daignez, disent-ils, continuer ce grand œuvre : il immortalisera la nation française, parce que l'univers entier admirera ses lois, et voudra se les approprier ; » ils supplient l'Assemblée de s'occuper de l'organisation des gardes nationales.
Adresse de la municipalité du bourg de Ghoisy-le-Roi ; elle annonce que la contribution patriotique des habitants monte à 17,415 livres.
Adresses des communautés formant le canton du Sap ; de l'assemblée électorale du district
de Lons-le-Saunier ; de l'assemblée primaire du canton de Sos, département d'Agen ; de
l'assemblée des électeurs du département du Loiret, tenue à Orléans; et, enfin, de celle du
département de
Soumissions de la municipalité de Tarare, d'acheter des biens nationaux pour 77,754 livres.
Déclaration des ecclésiastiques, nobles et ci-devant privilégiés de la ville et canton de Melle portant qu'ils se soumettent à tous les décrets de l'Assemblée et promettent de maintenir de tout leur pouvoir la Constitution. L'Assemblée l'a ouïe avec intérêt.
Délibération et adresse de la société aes amis de la Constitution de la ville de Tulle, contenant improbation de la prétendue déclaration d'une partie de l'Assemblée nationale, du 19 avril, et adhésion aux principes de l'Assemblée.
Toutes ces adresses nous font perdre du temps qui pourrait être employé bien plus utilement. Je vous en supplie, unissons-nous; une législature suprême ne doit pas s'occuper à lire des adresses qui, au lieu de ramener la concorde, ne tendent qu'à aigrir les esprits. Je demande qu'on n'en lise pas davantage.
Ce n'est que par l'assentiment général des provinces du royaume que nous pouvons déconcerter tous les projets des ennemis de la Constitution, et en connaître les vrais amis. Je demande l'ajournement de la motion deM.d'Ain-bly, jusqu'à ce que les 304 députés qui ont signé la protestation l'aient désavouée.
Dans une législature nombreuse, il est impossible que tout le monde pense de même; lorsqu'on n'agit point, il est indifférent de quelle manière on pense. Vous n'avez aucun pouvoir sur ma façon de penser; ce n'est que par la douceur, la persuasion, que nous ferons aimer notre Constitution.
reprend la lecture des adresses et délibérations :
Déclaration des paroisses de Landreville et Loches de se soumettre à acquérir les biens nationaux dépendants de leur territoire.
Soumission du conseil de la commune de Daix contenant son adhésion aux décrets de l'Assemblée, et sa soumission d'acquérir des biens nationaux pour 30,000 livres.
Adresse de la garde nationale de Tournon contenant la promesse de soutenir de toutes ses forces la Constitution.
Adresse de la ville de Nuits qui demande la conservation de sa collégiale, ou son remplacement par une paroisse.
Délibération du conseil général delà commune de Saint-Omer contenant sa soumission d'acquérir pour douze millions de biens nationaux.
Délibération de la municipalité et de la garde nationale de Lauzun contenant l'expression de leurs sentiments de patriotisme.
Délibération ae la municipalité d'Annonay contenant adhésion aux décrets de l'Assemblée, et promesse de les faire exécuter.
Adresse de la paroisse de Breilley, district d'Amiens, qui adhère aux décrets de l'Assemblée, et offre en don patriotique la contribution des ci-devant privilégiés, pour les six derniers mois de 1789.
Adresse de la municipalité de Corseul, district de Dinan, qui déclare accepter la Constitution, et charge ses représentants de l'achever.
Adresse de la municipalité de la ville de Saint-Sever contenant le témoignage de son adhésion et de son zèle, offre d'acheter des biens nationaux pour douze cent mille livres, et demande de l'établissement d'un collège pour lequel elle a un emplacement salubre et commode.
Adresse des curés de l'arrondissement d'Héricy près Fontainebleau, diocèse de Sens, contenant leur protestation de fidélité à la Constitution.
Adresse de plusieurs autres curés du département de Lot-et-Garonne qui promettent d'employer les moyens qui dépendent d'eux au maintien de la Constitution.
L'Assemblée ordonne l'insertion dans son procès-verbal de ces deux adresses qui sont anisi conçues :
« Nosseigneurs, les pasteurs que vous avez honorés d'une considération particulière pourraient-ils refuser à vos travaux infatigables et à la sagesse de vos décrets le tribut de reconnaissance qui vous est dû? Non, Nosseigneurs; dans l'arrondissement d'Héricy, près Fontainebleau, diocèse de Sens, il n'en est pas un qui n'ait pris lexte dans vos délibérations pour exhorter sou troupeau à mériter vos bienfaits, à ne pas abuser de la liberté que vous lui avez rendue, au maintien de la tranquillité publique.
« Comment n'applaudiraient-ils pas au spécifique unique préparé depuis longtemps, et mis à sa perfection pour le bonheur de la France ? Avant sa régénération, elle n'était plus qu'uu tableau de prix à qui la vieillesse avait ôté le coloris ; mais il était réservé à de nouveaux So-lon de lui redonner de l'éclat.
« Si, parmi les Français, partout reconnus à l'empreinte des vertus sociales, il s'en est trouvé quelques-uns coupables d'erreurs, leur vivacité naturelle les rend excusables en quelque sorte : si elles ont atteint jusqu'aux apôtres de la paix, c'est à eux de donner l'exemple du pardon.
« Ils abjurent les sentiments de tous ceux qui auraient pu compromettre la Constitution et l'objet de leur mission ; ils n'ont d'autre jouissance que de pouvoir concourir au bien public.
« Permettez-leur, Nosseigneurs, de renouveler le serment civique qu'ils ont prononcé à la face des autels.
Nous jurons d'être fidèles à la nation, à la loi et au roi, et de maintenir de tout notre pouvoir la Constitution acceptée et sanctionnée par le roi.
« Nous sommes avec un profond respect,
« Nosseigneurs,
« Vos très humbles et très obéissants serviteurs,
« Protat, curé d'Héricy ; Daniel, prêtre-vicaire d'Héricy; Vallin de Surges, curé de Samoi-reau; Ollivier, curé de Vernon; Auger, curé de Vulaines; Toussaint, curé de Thomery ; Daurlaine, vicaire, P.-A. Etienne, curé de la Selle-sous-Moret, Delemotte, curé de Machaux; Fromentin, curé de Fericy ; Noleau, curé du Châtelet-en-Brie ; Chatel, vicaire du Ch&telet, Leroy, curé de Champagne; Chaperon, curé de Sivry; Nègre, prieur-curé de Samois; Lair, curé de Fontaine-le-Port.
« Ce
« Nosseigneurs, jusqu'ici, en applaudissant à vos décrets, eu participant de cœur et d'esprit aux pénibles travaux, aux continuelles sollicitudes que vous coûte la régénération de l'empire,
nous nous sommes contentés de faire des vcèux pont le succès de vos opérations importantes. Plus d'une fois, lorsque la discorde, toujours ennemie du bien public, faisait tous ses efforts pour tenir feéparés trdis Ktatà dont le bonheur des peuples demandait depuis longtemps la réunion; lorsque l'affreux despotisme, trop faible pour résister à la forcé* employait tour à tour les menaces et les caressés pour étayer son empire cbancelant; enfin, lorsque des hommes intéressés à l'ancien régime suscitaient obstacles sur obstacles, difficultés sur difficultés, pour empêcher la liberté d'éclore, ou, pour l'étouffer dès son berceau, plus d'ufle fois, disons-nous, nous avons demandé à l'Être suprême dë soutenit son ouvrage, et de nous conserver les têtes précieuses dont il se servait pour opérer une si heureuse Révoldlion.
« Mais dans ce nibihent où l'intérêt privé, toujours occupé dfe lui seul, va pour se défendre, chercher dahs la religion des moyens qu'elle désavoue; uahs cë, moment où là patrie .mécontenté. se trouble, è àgitè poiir éliider le sacrifice que démande réxplation dés erreurs denos pères; un devoir impériëux, & dignité pastorale, la confiance des (jiêiipjèé» le bien public, la religion même, nous portent, Nosseigneurs, à faire nos preuves de désintéresseriient et aé patriotisme par cette déclaration solennelle.
« Nous recevrons toué vOs décrets avec la plus grandè soumission-^ Citoyens et pasteurs, nous tiendrons d'urië main l'Evahgilé et de l'autre la Constitution ; et puisant tçUr à tour dans ces ueux sources les vrais principes des moeurs chrétiennes et civiques, nous élèverons nés peuples à rendre à pieu ce qu'ils doivent à Dieu, et à la pàtrie ce qU'ils doivent à là patrie. La perte de nos dîmes et dé nos champs hé sera bour nous qu'une doucé consolation, dès qu'elle doit tourner au bonheur de la nation. Contents de tout ce que l'Assemblée nationale prononcera sur notre sort, de concert avec mille autres pasteurs dont nous osons interpréter les sentiniënts, nous imiterons ce noble désintéressement dont nos chers collègues, nos représentants nous donnent le premier exemple; et, d'après le serment civique que nous avonè fait dàhs notrë assemblée primaire, nous maintiendrons de tout notre pouvoir là constitution du royaume, et nous, vivrons et mourrons fidèles à la nation, à la loi et au roi.
« Nous sommes avec un très profond respect
« Nosseigneurs,
« Vos très humbles et très obéissants serviteurs,
« Paganel, curé ; BrugNiére, curé de Saint-Foy-de-Pujols ; Nauton, curé de Penne, a rchi-prêtre de Villeneuve, électeur de Penne; Gui-bert, curé ; Bley, curé ; Labre; curé de SoubiroUx ; Paute, curé du Temple ; Gardette de Bordeneuve, curé de Saint-Just; Geraud, curé du Laurier; Barret, curé de Sembas, et maire ; Capiel, curé de Saint-Sulpice* de Rive-lède et Sai n t-J ean-de-Therm, et son annexe ; Seré, curé de Gastelnau ; Costetz, curé du Poht de Penne; Tàncoigne, curé de Pinel; Delberg, curé de Saiut-HUaire-de-Roger ; Lasséverie, curé de Saint-Paul-le-Vieux ; Paillé, curé de CollongUës, procureur de la commune de Pu-jols ; Joobest, curé de Sainte-Colombe ; Roux, curé d'Autelâge; Bounel, curé de Sainte-Qliitte-rie ; LéauMonî, cUré de Fi-ëspech, Saint-Clair, Sainte-Fby, annexe; Boyssier, Curé; LAcrôssë,
Curé ; Pe Beàufrëî. curé dé Saint-Sulpicë-Vi-telot, soUs la cdndition que l'exposé ne contienne rien qUi Soit contrairë à l'Eglise dé Jésus-Christ ; Moyzan, ctii-é du Mailh ; Fauché, curé de Saint-Pierrë-de-Courbiac ; Cabannes, curé de Livrade; Vayssie, curé de Miets; Com-tat, CUré de Pujbls; Argenton, de Saint-Ân-toihe et Lontivdiï; Pons, Curé dë Sain t-Cyprien.
« Du
, député de Comminges. Une horde de brigands répaudUe dans le pays deComminges volé pendant la nUit lëâ troupeaux et se livre à de nombreux méfaits. Différentes Villes se sont réunies pour donner la chasse à ces malfaiteurs et ont fait de nombreux prisonniers qui, de municipalité en municipalité, ont été conduits à 1 Isle-ën-Dodon. où ,se trouve ia seule prison de toute la contreë. Lés officiers royaux de cette ville he veulent juger les Criminels qu'après y avoir été autorisés par l'Assemblée nationale, parce que les délits ont été commis en diverses juridictions. Je demande, en conséquence, que l'Assethblée rende Un décret à ce sujet et je propose le suivant :
« L'Assemblée nationàle a décrété et décrète qu'elle approuve le, zèle des officiers royaux de la ville de l'Isle-en-Dodon dans le Comminges; et, au surplus, elle les autorise provisoirement, et jusqu'après l'organisation du pouvoir judiciaire, a informer des faits de brigandage commis par les personnes qui sont détenues ou seront traduites dans les prisons de ladite ville, décréter et juger définitivement, sauf l'appel par devant qui de droit. » (Ce projët dè décret est adopté.)
, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance de ce jour, au matin.
demande la parole. Je viens, dit-il, au nom de l'humanité, vous prier de retrancher de l'article 14 du décret rendu ce matin, la disposition qui concerne Je département de la Gor-rèze. Les troubles du Bas-LimoUsin tendent à se cal nier et il rie faut pas les raviver par des poursuites intempestives.
Les troubles du Bas-Limousin ont eu trop dë retehtissement pour qu'il soit possible d'amnistier ainsi les coupables et dë les encourager à de hoUVeaux méfaits. Prësquë toUtëS les municipalités dtt département ont protesté contre des excitations et Contre des attentats dont les auteurs avaient à Brive leur quartier général.
Je demande à l'Assemblée de revenir sur son décret et de déclarer au nibins, tant pour le département de la Cdrrèze que pour les autres départements, que la disposition ne concerne point les troubles antérieurs au 1er mai.
, rapporteur, ne s'oppose pas à la modification demandée.
L'Assemblée décide, en conséquence, que le changement sera fait dans le texte du procès-verbal et du décret.
cède le fantëuil à M. Le Chapelier, ex-prësidéfit, pour se rendrë àuprès du roi et présenter à la sanction de Sa Majesté les derniers décrets dé l'Assembléë.
, rapporteur du comité de Cens-
HtïiUoh, fend ctimptë à l'Aemblée dtl différend qui éxistë entre les villës dé Labn et de Soîssons qui prétendent totitëë les dëUX à être cfiéf-lieu dit département de l'Aisne..
Youâ ^Ve2 brdoiiné, dit lë tappBrtëttr, qUe les électélirô fc'aSsëmblëraieHi; d'âbdra 8 Ghauny riblir choisir teBtre lès dëu& villed Hvàleë. Gettë asséttl-blée à eu lieu : Après tin jour dë diifcSùsSioh, on a procédé âu èërtitih adnt le résiliât a ddtiné 411 suffrage^ à L'aon ët 68 à Sdisébris. PluSiëtii's élëcteurs oht prtitesté co titré cettë délibération, en prétëddànt qiië lè ècriitîfi n'était pàs reStë ouvert JUâes ioii^temp^ et tfu on n'avait pas vdiilU consigner leîir dire dacis le proCës-vërbàl : mais, en pnMèncë dû Vceji iiiahifëstë des populations, et dé la gtande .Mldirité àcqliise à Laoh, votre comité ine Charge dé .vdûs propdsei* lé décrët suivant qiii feàâCfibhrie le Vote émis par lës électeurs de 1 Alsrie :
« L'Assemblée nationale, conforiiiéiriedt à l'avis du comité.dë Gonstitutioti, cbnfirmë là, délibération des êiëcjteurs du département dë l'Aisne du 20 mai qëriiier, §t décrète ÇUë ràssembleë de cë dépàrtement së tiendra dans la vitlë de Laon. » (Ce projet de décrët est mis aux voix et adopte.)
, ex-prèsiâent. Je rappelle que les mënjbrés dë 1 Assemblée devront se réij-nir dângcettesâlle demain,,à sè.pt heUrçs et demië du matin pour ëë rendre à Samt-Germain-l'Auxer-roîs.
Là prochaine séance est fixée à vendredi, neiif heures dù mâtin.
La Séance est levée à dix heures et demie.
à la séance de VAssemblée nationale du
Mémoire des députés de la ville de Tullèr relatif auao troubles du Bas-Limousin, pour être mis sous les yeux de l'Assemblée nationale (1).
tes vlllëè, paroisses et riïtinicipalités de trille, Limôged, UzercheS, Alassac, Martël etï Quercy, Vigeois, Ëeâuliëu, Forzès, Seilhaç, Saint-Clément, Saint-SalVôidoi/r, Beaumont, Meyniàc, Corrèze, Egletons, Altillac, Treignac, SeZ-vières, Argentat, Ussel, Lubersac, Përpësàc, Saint-Chamane, Saint-Pardoux, lè Lonzâc, NeuVle,Chàmbouiivè, EymoU-tier, Liourd^e, Sioniac, Billac, Tudëil, Bort, Sâinte-Fortunade,. Puy-d'Arriac, Hàute-Fàgë, Meyssac, Colongës, Nates, etc. :
Ayant été toutes témoins, èt plusieurs d'entre elles victimes dejs violences exercées dans le Bas-Limousin et partie du Quércy, par dés troupes de malfaiteurs rassemblés jusqu'au nombre de 7 et 800 hom'mës, M ont pillé des Châteaux, et un plus grand nombre dè rùaisons de bourgeois et de cultivateurs, exigé des contributions en argent, consommé ou gâte ies denrées et provisions, rompu lës digues ët chaussées des étangs, et péché le pOiOù, et cOfnmis beaucoup d'autres
exfcêâ, dont lës preuves résulteront des,pfcopèà-Vërbâux mis sous les yëux du . comité des rapports de l'AsSëmbléë; ët ayattt lied de Craindte îe rëtbur de ces désordres; implorent àVeC bon» fiance et respect la jUàtlCè de l'Assemblée nationale pour obtenir d'elle qu'elle prenne dans sa sagesse les moyens efficaces de rétablir et d'assuré^ dans le BaS-Limousin et lëS prbviUces adjacentes, là sûrëté et la tràhquillité publiquës.
Cetté dëmandë est l'objet de là mission dè dëux dépUtéS extraordinaires de là Ville dë Tulle auprès de l'Assemblée natidnale, autorisés par un nombre Considérable des villés qu'bn viedt dë nommef, et chàrgés, ëfl céld, des intérêts dU Limousin et dë quatre provinces voisines, le Quercy, le PéHgord, le RÔUër^uë èt l'AngoU-mois.
Gës Villes et cë$ prOvitlCès, àiiiméeë du zèle de tous lëi? UoUfe Citdyens bOUr uotre libètlé naissante èt pour rherit'eUse Coristitjition tjui va nous ràssùrër à jamais; pleines d'un respect ^ui ne s'ëst jàiïiàié déifient! pouf rAssetUbléé dationale, ét VoUée§ à line a.biiiiiièsio£i entiêrë à ses décrets, n'aùràiëni; pas été dans la népessite de ^recourir à elle au UiiliëU dë sëS iiiipdrtàntëS ët pressantes Occupâtions, fei le sursis décrété lê 3 mars n'avait affaibli ou même dëtfuit l'exécution de toutes les sefltences pf-éVOtdlës, lë moven puissant à l'aide duquel elles avaient recoUvi-é èt elles inain-tëriaiènt chez elles fa tranquillité publique.
Elleë ne dissimulent point qu'elles regardent le établissement de l£l justice établie dans toute son activité et sëlon lës fOrinës qui Ont potiHli sagëllièrit à en prétenir toUs les àbUs'J Cdrùmfe le seul mûyèn d'as^Ui^ef chez ellës la iranqUillité publique d'ici à l'étâblissetnènt dë l'ordre jUdi-ciaîl'è, de garaUtir les propriétés des citoyens Paisibles, fié fàiré exécuter les décrets de l'Assemblée riàtiotiàle, et d'aChëVer l'édifice de la Constitution par la formation complète des municipalités, des districts et des départements. Elles croieiit ëUfih qUë C'ëst l'unique route qui puisse iheriei' au but vers lequel tendent avec ardeur tous lës boiis Citoyens, l'achèvement du grand ouvrage, suivi avec tant de zèlë et de courage par lës représentants de la nation.
Le décret, dont nous éteignons de fâcheuses suites, ayant été rendu à la sollicitation de la commune de Pafrs, à laquelle les affaires de nos provinces semblent devôir être étrangères, et sur la motion d'un député qui n'appartient à aucune d'elles, hdùs sonimes forCés de remonter aux auteurs des impressions communiquées à la commune, et qui ont passé dans l'Assemblée nationale ; et dans cette recherche iioUs reconnaissons que C'est sur de faux exposés des faits que la commune ët le mëtabrë de l'Assemblée qui a provoqué le décret, ët l'Assemblée elle-même, se sont laissés conduire, Tout notre travail se réduit par là à rétablir les faits, à présëhter les conséquences qui résultent de ceux qui ont eu lieu réellement, et de l'état actuel où se trouvent aujourd'hui les provinces dont ùous défendons la Cause et les intérêts.
Pour remplir cette tâché, nôùs tracerons d'abord un tàbleau raccourci des troubles qui ont désolé nos provinces, qui sera suivi de la discussion des fausses allégations et imputations misés soUs les yeux de la coriimune de Paris, du comité des rapports, et dè l'Assembléë nationale ; et nous prouverons éûsuite l'indispensable nécessité dè rétablir instamment dans le Limoùsin l'activité de la justice,' à peine de voir se renouveler les désordres dont nos provinces Ont été le théâtre.
Récit abrégé des désordres qui ont eu lieu dans le Bas-Limousin et partie du Quercy, tiré des procès-verbaux dressés sur les lieux, et transmis au comité des rapports de VAssemblée nationale, ou déposés dans les greffes respectifs.
La destruction des balustrades et bancs des églises, et celle des poteaux de justice a été le prélude des insurrections dans le Bas-Limousin. Bientôt on a planté des potences pour ceux qui exigeraient ou paieraient les rentes. Des émissaires répandus dans les campagnes propageaient cet esprit de révolte et de sédition. Les cultivateurs paisibles étaient quelquefois forcés de quitter leurs foyers, tantôt se dérobant aux séditieux, et tantôt forcés de les suivre. Le ralliement se faisait avec un tambour, et on était parvenu à fermer une troupe considérable, armée de fusils et autres instruments. Ce9 désordres ont commencé à éclater à Gignac, Martel, Yegennes, Cure-monte, Cressenssac, Saint-Julien, Mayssac, Co-longes, Argentat, la Xaintrie, Chamboulive, Saint-Bonnet-les-Forêts, Saint-Hilaire, Saint-Ger-main-les-Vergnes, Cornil, Saint-Salvadour, etc.
Bientôt la licence croissant par l'assurance de l'impunité, se porta à de plus grands excès dans les paroisses de Lissac, Chanteix, Orgnac, Alas-sac, Favars, Glandier, etc.
Il est notoire qu'au château de Lissac, le seigneur, âgé de 78 ans, et la dame, ont été personnellement insultés et menacés par des gens en armes ; que la fontaine du château a été démolie; qu'unepotence a été dressée à la porte du château ; que le seigneur de Lissac a été tellement affecté de ces outrages, qu'il est mort deux jours après; que la dame de Lissac a été obligée de fuir avec ses enfants, et d'abandonner sa maison au pillage ; que le château a été en effet dévasté, les bâtiments dégradés, les portes et fenêtres brisées et brûlées, les denréesconsomméesoudétruites, qu'on s'y est fait donner de forcede l'argent etdes déclarations, etc.
Il est prouvé qu'à Allassac, Je 24 janvier, jour auquel avaient été publiés au prône les décrets de l'Assemblée nationale, sur l'organisation des municipalités, un attroupement se-forma, qui alla briser la balustrade de l'église paroissiale, enleva les bancs des officiers de justice et ceux de différents particuliers d'Alassac et les brûla sur la place publique; que les officiers municipaux s'étant transportés sur les lieux, et ayant exhorté les mutins à se séparer, ils furent menacés d'être jetés dans les flammes; que la municipalité et les notables rassemblés s'étant déterminés,d'après une délibération, à publier la loi martiale, étayant exécuté cette publication, et sommé les gensattroupés de se retirer, furent assaillis à coups de pierres, et forcés de se réfugier dans une maison voisine; que, Je même soir, les maisons des sieurs deBruchard, d'Eysat,Lasteyrie,Ghatras,Cledat,Bonnelie,Treuil, et de quelques autres bourgeois et habitants, ont été pillées, leurs portes et fenêtres brisées, les armoires enfoncées, les meubles, le linge, etc.,et jusqu'aux instruments aratoires em portés,les vins bus, et que, de plusieurs d'entre eux, on a exigé des (juittances et des reconnaissances, et de l'argent comptant; que le même jour, après le pillage des maisons bourgeoises, l'attroupement se porta sur le château de Roussignac, appartenant à M. de La-maze, dont on commença à briser les toits et les croisées à coups de pierres ; qu'après divers pourparlers et représentations des assiégés, les assiégeants continuant leurs violences, les gens du château tirèrent sur eux, et qu'il y eut deux per-
sonnes tuées ; sur quoi il est important d'observer que leur attaque se faisait danslanuit, puisqu'elle avait commencé vers les huit heures du soir, et qu'elle dura jusqu'à onze heures.
Que le lendemain 25, les désordres recommencèrent,ainsi que le pillage des maisons particulières qu'on mit à contribution, et que, malgré une nouvelle publication de la loi martiale, faite par le maire d'Uzerches, arrivé avec un petit détache-, ment de sa garde nationale, et malgré l'arrivée d'un détachement de près de trois cents hommes de la milice nationale de Brive, et qui se retira sans avoir dissipé l'attroupement, une nouvelle troupe de gens étrangers à la paroisse d'Alassac (et à la tête de laquelle se montra le sieur Durieux), réunie à la première, se précipitèrent sur le château de Roussignac, que le sieur de Lamaze et sa famille avaient abandonné, sur l'assurance que la milice de Brive lui avait donnée de le défendre; que les toits ont été brisés à coups de pierres, les portes du salon fracassées, et les volets et leurs serrures enlevés ; tous les carreaux des fenêtres^asSés, la glace du salon brisée en petits morceaux, ainsique beaucoup de meubles, les armoires enfoncées, les effets en habits et linge enlevés, les papiers et l'argent pillés, les outils aratoires emportés, etc., tous faits consignés dans le procès-verbal dressé les 15, 16 et 17 février, et prouvés par la teneur des informations ; il est prouvé de même, par dif férents procès-verbaux dressés par des officiers de justice, que tous les étangs des Chartreux de Glandier, situés sur la paroisse de Chanteix, ont été vidés et péchés par des troupes de paysans armés ; qu'ils ont dévasté la maison, chassé les religieux ; qu'ils s'y sont fait donner de force du vin, de l'argent, des quittances de rente.
Il est prouvé encore, pour le lieu de Favars, que l'espoir du pillage et de l'impunité augmentant tous les jours le nombre des malfaiteurs, des troupes de paysans, de journaliers, de déserteurs, d'ouvriers ramassés sur les ateliers des grandes routes, presque tous gens sans propriétés, se sont rassemblés, se faisant annoncer dans les différentes paroisses, avec ordre aux propriétaires les plus aisés de se procurer des provisions pour les recevoir; qu'un attroupement de cette espèce étant occupé le 24 janvier à éventrer la digue de l'étang de Favars, la maréchaussée de Tulle, sollicitée par la dame de Saint-Hilaire de venir à son secours, ne put arrêter le dégât qu'en se saisissant d'un nombre de séditieux, ce qu'elle fil sans tirer un coup de fusil, quoiqu'il soit constant par l'information que les cavaliers ont été couchés en joue, et des amorces brûlées par les mutins; que le lendemain 25, un attroupement de 8 à 900 hommes, formé audit lieu de Favars, a forcé la dame de Saint-Hilaire d'écrire à la municipalité de Tulle pour obtenir l'élargissement des dix-huit mutins pris la veille, ayant, en cas de refus, le projet de fondre sur la ville de Tulle, pour tirer de force des prisons ceux quiy^étaient détenus; que la municipalité de Tulle, reconnaissant la nécessité instante de prévenir des désordres qui menaçaient toute la province, ayant déterminé de joindre quatre-vingts hommes de la milice nationale à la maréchaussée, la troupe étant arrivée au lieu de Favars, après avoir fait serment de ne tirer que dans le , cas d'une absolue nécessité, le sieur de Marcil-lac, commandant de la maréchaussée, parlant aux séditieux, et leur ordonnant de se retirer, a reçu trois coups de fusil, dont il est resté grièvement blessé; que plusieurs volontaires, ainsi que des cavaliers de maréchaussée, ont été blessés pareillement et quelques-uns démontés ;
et qu'enfin, obligés de repousser la force par la force, ils ont fait feu sur les mutins et eu ont arrêté huit les armes à la main, et dans les jours suivants plusieurs autres connus pour avoir été dans les attroupements, et entre autres le nommé Ûurieux, tambour-major de la milice nationale de Brive.
Ces faits ont été altérés et dénaturés par divers moyens contre lesquels les villes et municipalités du haut et du bas Limousin ne peuvent se dispenser de réclamer.
Le premier est un mémoire de deux députés extraordinaires de la ville de Brive, présenté à la commune de Paris, et remis ensuite au comité des rapports. Ce mémoire inculpe les propriétaires qui se sont défendus contre les violences des brigands, la conduite de la milice nationale de la ville de Tulle, pour réprimer et contenir les brigandages, et enfin les procédures et jugements du prévôt de Tulle.
Le second moyen, employé pour dénaturer et altérer les faits, est l'usage qu'ont fait les mêmes députés des papiers publics, et notamment des Annales politiques et du Journal de Paris.
Nous discuterons ces pièces après avoir mis en avant quelques observations sur la démarche faite par les sieurs Serre le jeune et Faye, se disant députés extraordinaires auprès de la commune de Paris, et sur la facilité avec laquelle leur dénonciation y a été accueillie.
La province et la ville dont nous sommes les organes sont bien éloignées de méconnaître les obligations qui les attacheront éternellement à la capitale du royaume, pour les grands et importants services qu'elle a rendus à la liberté française, à l'époque critique où s'est décidée une Révolution qui doit faire la gloire et le bonheur de la nation.
Elles reconnaissent aussi sans peine la supériorité d'importance et de force d'une ville qui est depuis si longtemps le centre du gouvernement, le foyer des lumières, la patrie des arts, l'école du goût, la métropole de l'Europe. Mais tous ces avantages de la capitale ne lui donnent, dans le système d'une libre constitution, aucune autorité sur les autres villes du royaume, et la ville de Paris, qui a montré tant de zèle pour la liberté générale, n'a jamais entendu affecter sur les provinces aucune suprématie.
D'aprèsun principe si incontestable, ne pouvons-nous pas nous étonner de la démarche des députés de Brive, qui vont porter à la commune de Paris une cause qui divise les villes et les habitants d'une des provinces du royaume ? A quel titre cette commune pouvait-elle être juge de nos différends,et dans l'éloignement où elle est du théâtre des faits, décider entre Brive d'une part, et de l'autre Tulle, Limoges et tant d'autres villes et municipalités? quel rapport, même éloigné, peuvent avoir ses intérêts, ses fonctions et ses droits, avec des événements passés dans le Limousin et dans Je Quercy?
Nous ne craignons pas de dire qu'en s'adres-sant ainsi à un tribunal sans autorité sur nos provinces, les députés de Brive accusent la faiblesse de leur cause par l'emploi d'un moyen aussi irrégulier que celui-là. Le comité des rapports, et d'après lui et l'exposé des faits et des raisons, l'Assemblée nationale, ou un tribunal distinct, auquel il est encore plus naturel de renvoyer de semblables questions, étaient les seuls juges sous les yeux desquels il fallait mettre les pièces du procès et les plaintes et réclamations des parties.
On nous dira peut-être que la commune elle-même, en recevant la dénonciation faite par les députés du comité de Brive, a justifié leur démarche, qu'elle aurait repoussée si elle l'avait crue déplacée.
Mais cette apologie nous paraît insuffisante.
L'assemblée de la commune, qui doit son existence à l'esprit de liberté, et qui montre tant de zèle pour tout ce qui tient à une si juste cause, a pu se laisser aller trop facilement à recevoir une dénonciation qui semblait avoir pour motif les intérêts des citoyens contre une oppression ; mais jusques dans la facilité avec laquelle elle a accueilli les députés de Brive, en rendant justice à la droiture de ses intentions, on ne peut croire à la justesse de ses vues. De jeunes gens viennent lui présenter un mémoire contenant le récit de vexations horribles, de massacres faits sous le nom de justice, de citoyens opprimés, assassinés par le glaive d'un prévôt; les sentiments s'exaltent, mais en même temps le jugement s'altère. Le doute et la réserve doi vent alors garder la sagesse de l'homme public ; il doit se défier de ses vertus mêmes, pour n'écouter la voix de l'humanité que lorsqu'elle est d'acord avec celle de la justice; et nous osons croire qu'en se conformant à ces règles, la commune de Paris n'eût point accueilli la dénonciation des dépuiés de Brive , et surtout ne l'eût jamais portée à l'Assemblée nationale.
Cette plainte sans aigreur, que nous croyons pouvoir nous permettre au nom de nos commettants, se trouvera bien justifiée par l'exposé vrai de la manière dont la dénonciation des députés de Brive a été présentée à la commune, exposé que nous puiserons dans la lettre écrite à MM. de Brive par leurs députés, et dont nous avons la copie sous les yeux. Nous ne ferons qu'en citer quelques traits.
Ces messieurs nous apprennent d'abord que, d'après le récit qu'ils ont fait verbalement de leur affaire, plusieurs membres se sont levés et ont pris vivement le parti du peuple opprimé.
Ainsi c'est d'après un simple récit verbal, sans vu de pièces et de preuves, que des juges se lèvent et prennent vivement (notez vivement) le parti du peuple qu'on leur représente comme opprimé, sans savoir s'il l'est en effet, sans s'en assurer par aucun moyen.
Nous prévenons nos lecteurs, une fois pour toutes, âe l'abus qu'ont fait les députés de Brive de ce mot peuple, en l'appliquant à des brigands contre lesquels le vrai peuple, le peuple citoyen de nos provinces ne cesse d'invoquer la force publique.
C'est sans doute un mouvement louable que de prendre le parti du peuple opprimé; mais si ce qu'on appelle le peuple opprimé n'est qu'une troupe de brigands, se livraut aux plus grands excès : si ce sont, au contraire, de vrais citoyens, des bourgeois, des cultivateurs, des ouvriers paisibles qui ont été victimes de ces violences, ne voit-on pas que des hommes publics doivent fermer leur âme aux mouvements d'une semblable compassion.
Ne fallait-il pas encore distinguer sûrement les oppresseurs et les opprimés, ce que ne pouvait pas faire la commune de Paris, sur un récit fait verbalement par les députés de Brive , sans pièces à l'appui, comme sans contradiction.
Cette réflexion est si naturelle, qu'elle n'a paî échappé à quelques membres de la commune, qui ont remarqué, disent les députés, que (l'assemblée avant de se déterminer à user de son
créfyt sur ses représentants à VAssemblée nationale, pour leur recommander l'affaire de MM- le3 .députés de Brive, devait prendre connaissance des prçcès-yerbaïuc faits sur h,s. lieux des insurrections. Cette remarque était juste et les députée en cqnviennent. Ils y répondent que les pièces étaient entre les maïqs de MM. du comité des rapports; mais cette réponse ne peut les excuser de n'avoir P^s différé leur demande 4 là commune jusqu'à ce qu'ils eussent pièces en main, et U reste toujours à demander comment la commune a cru à leur simple récit verbal.
Nous lisons ensuite, dans la lettre des députés de Brive, que là commune ayant Invité ces mes-: sieurs à revenir, le lendemain, munis de leurs pièces justificatives, il furent assez malheureux pour ne pat remontrer M. le président du oomité dçs rapports, qui en était la détenteur; mais que, réfléçbissqni çopnbien Iq, protection de la commune de Paris pouvait être, utile ^ leur.çàuse., Us prirent le parti de faire un précis des procès-verbaux, tel que leur xnémoir«e le leur, fournissait, des faits arrivés dans les troubles de. fa province
Quelle négligence d'abord» et ensuite quelle légèreté de§députés! Il s'agit des intérêts de leur ville et de toute une province, en matière grave assurément, et ils ne prennent pas les moyeps ordinaire^ et sûrs de trouver M. le président chez lui, d'obtenir de lui des pièces sans lesquelles ils ne pouvaient faire une démarche si impoçr tante auprès d'uqe assemblée aussi respectable que celle de ]a commune, et ils croient pouvoir substituer à ces pièces un précis fait de mémoire On laisse au lecteur à qualifier cette conduite.
Mais voici quelque chose de plus étrange enr core, toujours tiré de leur lettre. Introduits dans la salle de la commune, ils y avouent qu'ils n\ont pas pu se procurer. Us procès-verbaux, mais, à la place, ils engagent leur parole A honneur pour preuve do l'authenticité de$ faits contenus anifté-moire qu'ils laissent sur lk bureau.
Ce mémoire est celui qu'ils ont présenté ensuite au comité des rapports ; et on verra tout à l'heure, par l'analyse que nous en ferons, quels faits ces messieurs ont garantis sur leur parole d'hoDneur. Mais peut-on asseï s'étonper de l'assurance avec laquelle ils substituent cette parole à des procès-verbaux? ; - ;
Leur assurance prouve, dira-t-on, leur fran? chise, leur conviction, et nous voulons bien y croire. Il paraît* en effet, impossible (Qu'ils se soient déterminés à une démarche si importante par elle-même et par ses suites, sans être convaincus de (q justice de la cause qu'ils se chargeaient de soutenir.
Mais la conviction de deux hommes, sur des faits dont ils n'ont pas été les témoins, n-est pas une preuve, elle n'en est pas une surtout lorsqu'elle n'est pas énoncée dans les formes prescrites par les lois de tous les pays, elle ne peut pas tenir lieu d'un procès-verbal lait sur les lieux et des informations et auditions de témoins.
Que sera-ce, si, comme sous le démontrerons tout à l'heure* la conviction des députes porte sur des faits que les procès-verbaux, démettent absolument, et sur les faits les plus graves, les plus décisifs.de la question?
Nous ajouterons enfin que, 3i cet engagement de leur parole d'honneur pouvait être de quelque poids, ce ne serait que sur des faits assez simples pour que l'imagination, l'esprit de parti, la passion trop commune dans les moments critiques où nqus nous trouvons, et qui souille l'intention la plus droite, ne pussent pas les repré-
senter sous de faux joitfs. Mais il s'en fout bien que ce que les qéputés appellent des (fûts dans leur mémçûre soient 4e cette nature; sont, au contraire, très mêlés dp circon stances, appuyés 4e suppositions, pxphqnés par des raisonnements; eÇ totit homme sage reconnaîtra, à la simple lecture du mémoire auquel leg députés rendaient, que rien n'est moins propre que de pareils feitg à êfre constatés par une simple parole d'honneur.
Cependant les députés de BrJxft assurent, dans leur lettre à leurs commettants, qup MM- de la commune furent satisfaits fie cette caution.
Nous voudrions pQuypir penser qup cette assertion de leur part es|, aussi fc^r^éQ que beaucoup d'autres qu'ils se pont permises; mais Iq démarche de la commune auprès de 1 Assemblée nationale est une preuve que, en effet, eue s'est cou testée 4e la parole 4'bpnqeur de 4eU£ députés de Brive pour déférer a l'Àssemj^e ujUicmalé la conduite du prévit et 4e la yil?§ qé Tulle, et des citoyens qui ont repoussé les brigands. Il nq nous appartient pas de càr«içiéFi§8f cette facilité, mais nous en appelons à tout juge impartial et sage #ur les plaintes que nous en formons-
Nous trouvons cependant « dans la suite du récit des députés, sinon de quoi excuser, au moins de quoi expliquée ce mouvement imprimé à la commune} et dont il nous semble, qu'elle eût dû se défendre.. Us nous apprennent qu'après avoir lu leur mémoire, ils invitèrent la commune à protéger leur cause, qui était, dirent-ils» celle, de rhumanité outragée i que l'impression que fit leur réçiï fut vive; que l'assemblée et la galerie le témoignèrent d'une manière qui fut de bon augure pour eux* et qu'après plusieurs discours de la plus grande éloquence, prononcés par, d honorables membres, et point préparés, lu commune arrêta quil serait nommé sur le champ six députés vers l'Assemblée nationale, etc,
Cette humanité outragée, cette grande éloquence, çes discours sans préparation, et surtout cette intervention de la jjakrie spnt en effet capables de faire des impressions fortes» Mais une assemblée d'hommes publics ne devrait-elle pas s'en défendre et se tenir en défiance contre l'emploi de semblables moyens?
Une assemblée n'a pas dû croire, sans preuves, que la cause des prisonniers de Tulle était celle de l'hurqanité outragée; elle n'a pas dû. cé4er à des discours d'une grande éloquence, si l'on veut, mais prononcés sans préparation} et par conséquent sans examen, dans une question qu'on ne pouvait juger sans examen. Bufip, elle n'a pas dû céder aux mouvements d'une galerie tumultueuse qu'on peut agiter avec les mots d'humanité et de liberté, jusqu'à fouler aux pieds l'une et l'autre, et qui, à coup sûr, n'est pas en état de juger avec équité une affaire si compliquée, qui ne lui est pas présentée avec tous les moyens d'instruction qui doivent servir à la décider.
La commune de Paris ne s'est point tenue dans ces sages limites, lorsque, tpujourg sans avoir eu aucune pièce sous les yeux, elle a arrêté son adresse a l'Assemblée nationale pour lui témoigner, disent les députés, le vif intérêt qu'elle prend au sort des infortunés paysans du Bas-limousin, détenus dans les prisons ne Tulle, et menacés de périr par les mains des bourreaux, comme avaient déjà péri deux de leurs frères. Car, comment et sur quel motif ne voit^elle que d'infortunés paysqns dans des hommes pillant des maisons, se faisant donner des contributions , menaçant ifi vie des citoyens, etc., enfin pris eu flagrant délit et les
armes à la main, tous faits incontestables, puisqu'ils résultent de tous les procès-verbaux et informations subséquentes?
Gomment se permet-on cet emploi des mots pathétiques de bourreaux et de frères, qui ne prouvent rien ? Ne faut-il pas des bourreaux où il y a des criminels et des dévastateurs, et des brigands sont-ils nos frères et ne sont-ils pas des ennemis publics?
La lettre des députés de Brive à leurs commettants nous présenterait beaucoup d'autres traits qui serviraient à caractériser l'esprit de leur démarche. Ils y annoncent, par exemple, qu'il règne dans VAssemblée une très grande horreur pour les juridictions prévôtales; que leur destruction ne peut manquer d'arriver sous peu de jours ; que le grand prévôt de Marseille est convaincu des plus grandes prévarications envers les citoyens défenseurs de la Révolution; que ceux-ci ne sont accusés de sédition que par les aristocrates
Mais nos lecteurs n'ont pas besoin d'être avertis combien toutes ces assertions sont légères et imprudentes.
La destruction des justices prévôtales avant l'établissement entier d*un nouvel ordré judiciaire, où elles auront certainement un équivalent, n'est pas prête à être prononcée.
Le prévôt de Marseille n'a pas été convaincu de prévarications, puisqu'il a été mis hors de cause.
Il est, à toute force, possible que des défenseurs très zélés de la Révolution méritent l?animadver-sion de la justice, et que ceux qui regarderaient de tels hommes comme coupables de grands crimes ne soient pas des aristocrates^
Il est temps de passer à l'examen du mémoire fourni au comité des rapports par les députés de Brive, et que nous avons dit être la première pièce, où les faits arrivés dans le Bas-Limousin on t été altérés et dénaturés pour provoquer la décision de l'Assemblée, portant suppression de l'exécution des jugement prévôtaux.
I. Selon le mémoire présenté au comité des rapports par les députés de Brive,
Les paysans qui ont été arrêtés dans le Bas-Limousin ne sont coupables que par l'ignorance absolue où ils vivent des décrets de l'Assemblée nationale, que les riches ont affecté de leur cacher, ainsi qu'à tous autres.
On demande d'abord si les paysans du Bas-Li-mousin sont assez ignorants pour croire ne rien faire que de légitime en assiégeant un château et en pillant les maisons même des bourgeois et des cultivateurs, et s'il est besoin que les décrets de l'Assemblée les éclairent sur cette violation de la propriété et de la sûreté de leurs concitoyens?
On prie MM. les députés de Brive d'expliquer ce qu'ils entendent par l'affectation des riches à cacher aux paysans les décrets de l'Assemblée. Les riches sont-ils, en cettequalité,chargésde faire connaître aux pauvres les décrets de l'Assemblée? Ces décrets ne sont-ils pas envoyés à toutes les municipalités? Ce qui intéresse le plus particulièrement les gens de la campagne, n'est-il pas lu au prône, affiché à la porte des églises? Le "décret relatif à la tranquillité publique, ou loi martiale, n'a-t-il pas été répandu, connu dans toutes les parties du royaume? Comment les riches s'y seraient-ils pris pour en dérober la connaissance au peuple? Et par quelle extravagance et quel oubli de leurs intérêts mêmes auraient-ils affecté de cacher cette loi protectrice de leurs propriétés?
De quelle indécence n'est pas dans la bouche des députés cette distinction des riches d'avec les
paysans? distinction, il faut le dire, qui, en appelant les pauvres à la guerre contre les riches, donne le signal du bouleversement des empires.
Les paysans, continuent les députés, ont été arrêtés au hasard, sans qu'on ait eu soin de s'informer s'il était vrai qu'il y en eût de coupables, quoiqu'ils ne fussent que de simples spectateurs, et qu'ils fussent entraînés par l1 éscemple et par le torrent.
Quel mépris, nous osons le dire, des plus simples notions de la justice et de l'ordre public!
Dans les insurrections et les mouvements populaires, la police la plus humaine est toujours forcée de regarder comme coupables toutes les personnes attroupées. Cinq ou six cents hommes ravagent les campagnes, pillent, brûlent les habitations; il est impossible de distinguer parmi eux celui gui a ipis le feu, qui a pillé ou tué ceux qui ont fait quelque résistance. Tous sont coupables aux yeux de loi, parce que tous et chacun d'eux concourent à unê action méchante et destructive de tout ordre publie^
Dans une insurrection de ce genre, ceux qu'on arrête ne sont donc point arrêtés âu hasard, puisque, arrêtés en insurrection actuelle et en armes, ils sont coupables par cela seul d'un délit que punissent les lois de tous les pays civilisés.
Mais d'où savent Mty. les députés, et comment prouveraient-ils que lés paysans arrêtés et dète-tenus n'avaient contre eux que ce délit commun et général de s'être trouvés dans Tattroupeipent? Gonnaissent-ils les motifs particuliers de l'emprisonnement de chacun? Si l'on n'a cherché à arrêter que les plus violents, ceux qui ont tiré, ceux qu'on a cru voir menant les autres, il ne sera plus vrai qu'on les ait arrêtés au hasard. On a pu se tromper en cherchant à faire cette distinction. Aussi de 26 détenus dans l'affaire de Favars, en a-t-on relâché 16. Mais ceux-là mêmes n'ont pas été arrêtés au hasard.
En vain les députés nous disent-ils qu'il n'y a point eu en Limousin de moteur des désordres; que les paysans sont incapables de forrner aucun plan d}attaque ni d'insurrection ; qu'aiicurpe n'a été ni préméditée, ni prèvu,e ; qu'elles ont été l'effet naturel des circonstances èi du mouvement des esprits.
Il est difficile en effet de croire à cette étrange méchanceté qui règle d'avancé un plan 'de dévastation ; qui dispose froidement un systèqie d'incendie et de meurtre ; mais en cieçà de ce degré de perversité, il en est beaucoup d'autres que la société doit réprimer de toutes ses forces. Qu'importe que des brigands aient oup'aient pas de plan ; qu'ils aient ou n'aient pas un premier chef qui les dirige ? lorsqu'ils pillent et qu'ils ravagent, a-t-on besoin de savoir cpmrrçeht et par qui ils sont poussés? Le droit natqrelj celui de ta défense légitime, n'autorise-t-il pas à repousser la force par la force ?
On peut dire cependant que la populace ep insurrection a toujours quelques chefs qui l'e^cj.'-tent et la conduisent, et qu il serait sans doute très désirable qu'on pût les distjnguer et les punir, ou plus sévèrement, ou même sejîls, lorsque leur punition suffirait à la tranquillité publique. -
Mais quoique la loi ne puisse pas toujours distinguer ainsi le plus coupable,' il rie s'ensuit pas qu'elle puisse laisser le crime impuni, lorsqu'en son moindre degré il est encore une sourfee de malheurs publies/ Si par la raison qu'on n'aurait pas pu distinguer op saisir le chef et le principal moteur d'uné insurrection, il faH
lait laisser les émeutes impunies, où en serait la société ?
Si l'on voulait absolument, disent les députés, trouver des coupables, la justice voulait du moins que le procès des nobles et des bourgeois qui ont tiré les premiers fût instruit avec la même rigueur: car aux yeux de l'Assemblée nationale le sang du peuple n'est pas moins précieux que celui des autres classes de citoyens .»
Nous ne craignons pas de dire que cette observation porte le caractère de l'injustice la plus révoltante.
Qu'entend-on par ces paroles : si l'on voulait absolument trouver des coupables ? Qui est-ce qui veut trouver des coupables là où il n'y aurait que des innocents? le prévôt et les magistrats qui ont condamné deux des séditieux à mort sur vingt-six, les ont donc condamnés parce qu'ils ont voulu les trouver coupables. Quelle horrible inculpation, et sur quelle base porte-t-elle 1
Ën second lieu, quelle est donc cette justice qui veut qu'on fasse le procès aux nobles et aux bourgeois qui ont tiré les premiers sur des gens qui venaient piller leurs maisons ? En vertu de quelle loi, de quelle nation que ce soit, un homme assailli dans l'asile domestique est-il obligé d'attendre qu'on le fusille lui et les siens, pour avoir le droit de se défendre contre un tel brigandage par tous moyens ?
3°. Selon le second procès-verbal remis au comité des rapports par les députés de Brive, et que nous avons sous les yeux, à la première attaque faite aux paysans, après la lecture de la loi martiale, on n'a pas su qu'il y ait eu personne de blessé ; et lors même que le sieur de Lamaze s'est défendu de sa maison investie par des brigands, on n'a pas pu savoir de quel côté est parti le premier feu.
Il n'y aurait donc pas matière à faire le procès aux nobles et aux bourgeois pour avoir tiré les premiers ; et les députés dans leur mémoire sont ici en contracdiction manifeste après le procès-verbal dressé par leurs commettants.
4° La dernière réflexion de ces messieurs est encore plus répréhensible. Ils veulent qu'on fasse le procès aux nobles et aux bourgeois, parce qu'aux yeux de l'Assemblée nationale, le sang du peuple n'est pas moins précieux que celui des autres citoyens.
C'est là, sans doute, une vérité incontestable ; mais on en fait ici, je ne crains pas de le dire, un usage bien immoral et bien criminel.
Dans quel esprit peut-on opposer ainsi les nobles et les bourgeois au peuple? Le peuple français est composé de citoyens de tous les étals et de tous les degrés de fortune. Les nobles et les bourgeois en font partie, et les en séparer c'est les mettre en butte à la haine de la multitude, - uniquement parce qu'ils ne sont pas le plus grand nombre. C'est seconder et justifier les Violences de ceux qui n'ont rien à perdre, contre ceux qui ont quelque propriété ; c'est, encore une fois, allume, la guerre des pauvres contre les riches, qui est la subversion de toute société.
Le sang de tout citoyen est également précieux aux yeux de la loi, mais nous osons assurer qu'il l'a été également et pour uotre milice niionale et pour notre municipalité, qui se sout employées à réprimer les désordres de la province, et pour la juridiction prévôtaie uuie à notre sénéchaussee, qui a puni uu petit nombre de coupables dans ce qu'on appelle le peuple.
Si deux malfaiteurs, condamnés par uu ju-
gement régulier, ont payé de leur vie les crimes qu'ils ont commis contre la tranquillité publique/ en attentant à la vie et à la propriété des citoyens, comment ose-t-on en prendre droit d'insinuer que le sang de ce qu'on appelle le peuple a eu moins de prix à nos yeux que celui des nobles et des bourgeois?
Des brigands ont beau faire partie du peuple, lorsqu'ils deviennent criminels leur sang n'est plus précieux aux yeux de la loi. La loi regarde comme un devoir pour elle d'aider de toute la force publique tous les citoyens dans la défense de leurs personnes et de leurs propriétés, et ne craint pas dans cette légitime défense de voir verser le sang de l'homme du peuple, devenu par ses violences ennemi de la société.
Parmi les faits altérés dans le même mémoire que nous examinons ici, se trouvent encore tous ceux qui sout relatifs au sieur Durieux, maître de billard dans la ville de Brive, tambour-major de sa milice nationale, et membre de sou comité, arrêté dans la ville de Tuile comme y tenant des propos séditieux, et accusé par la voix publique d'avoir été l'auteur et partie de plusieurs attroupements.
Le sieur Durieux se trouvant ainsi impliqué dans les procédures faites à Tuile, comme prévenu d'avoir été le moteur et l'instigateur de plusieurs insurrections, sa cause se trouve liée à celle de la municipalité, et du prévôt, et de la milice nationale dans cette ville ; aussi les députés de Brive ont-ils regardé sa justification comme un objet de leur mission : par cette même raison nous sommes forcés de les suivre dans la discussion de la cause du sieur Durieux.
Il faut d'abord savoir que le sieur Durieux est prévenu par une dénonciation de la dame de Lissacdu 27 février 1790, parle procès-verbal de son arrestation du même jour, par un réquisitoire en plainte du procureur du roi de Tulle, et par les dépositions de cinquante et tant de témoins, de propos séditieux, de violences, de pillage, de s'être trouvé comme excitateur et complice dans plusieurs attroupements, et notamment:
1° D'avoir été à la tête des attroupements à Martel ;
2° De s'être rais en possession du domaine de la Brande, et d'en avoir pillé les denrées;
3° D'avoir répandu en différents endroits que chacun pouvait aujourd'hui se rendre justice ; qu'il ne fallait plus payer de rente, et autres propos séditieux, aux yeux même des paysans qui ont déposé contre lui;
4° De s'être trouvé à l'attroupement de Lissac, prés de Brive, où il s'est commis les plus grands excès ;
5° D'avoir été à Alassac le jour de l'attroupement, et d'y avoir déclaré que la milice de Brive ne ferait rien à ceux qui brûleraient le château, pour venger ceux d'entre eux qui avaient été tués, qu'il appelait leurs frères;
6° De s'être rendu à Favars, situé à plus de dix milles de Brive, dès le lendemain de l'émeute ; d'avoir dit aux paysans qu'ils avaient mal fait de ne pas brûler le château ; que les villes de Paris et de Bordeaux puniraient la ville de Tulle, pour s'être opposée aux dégâts, et qu'il fallait employer contre la milice de Tulle les fléaux dout on bat le blé, etc.
Eutin le sieur Durieux se trouve chargé, par une dénonciation de la dame de Lissac du 27 février 1790, par le procès-verbal de son arrestation du même jour, par un réquisitoire en plainte
du procureur du roi de Tulle, et par les dépositions de 50 et tant de témoins, de propos séditieux, de violences, de pillage ; de s'être trouvé, comme excitateur et complice dans les attroupements de Lissac, de Vegennnes, d'Alassac, de Martel, de Favars, etc.
C'est de cet homme que les députés de Brive disent, dans leur mémoire au comité des rapports, qu'il est un bon citoyen, et dans une lettre signée d'eux, et insérée au journal de M. Mercier, intitulé, Annales politiques, qu'il est leur camarade ; qu'ils se font gloire de l'avouer, et que la ville de Brive le reconnaît comme un des plus zélés et des plus braves citoyens qu'elle renferme dans son sein.
Nous ne prétendons ni prévenir, ni diriger le jugement suspendu sur la tête d'un accusé ; mais les éloges donnés au sieur Durieux par les députés de Brive étant en contradiction avec les plaintes et les dénonciations de toutes les municipalités de la province, nous nous permettrons de discuter l'apologie du sieur Durieux, faite par MM. les députés.
MM. les députés s'efforcent d'infirmer ou d'adoucir les inculpations rapportées ci-dessus, par les raisons suivantes :
La première est que le sieur Durieux n'est pas plus coupable que les autres prisonniers. Mais comme les autres prisonniers ont été, au moins la plupart, pris en flagrant délit ; qu'ils ont tous eu part aux attroupements et aux désordres qui les ont accompagnés, on laisse à juger comment cet argument prouve l'innocence du sieur Durieux.
La second raison en sa faveur, c'est qu'il a montré un grand zèle pow la formation de la milice de Brive, une grande assiduité, aux assemblées de l'hôtel de ville et des intentions bien connues pour le maintien de la Révolution. Sur quoi on se conteutera ue demander à ces messieurs, s'ils pensent véritablement que tous ceux qui ont pris les armes pour former la milice nationale, qui ont été assidus aux assemblées, ei qui ont montré du zèle pour la Révolution, sont par cela seul à l'abri de tout soupçon, sont tuus des hommes irréprochables, incapables d'aucune mauvaise action, incapables de brûler et de piller les châteaux et même des maisons de simples bourgeois, etc. ; que si, comme beaucoup d'exemples Te prouvent et comme le plus simple uon sens l'enseigne, il est très possible qu'a un très grand zèle pour la Révolution, on joigne des actions très criminelles; il faut eu revenir à juger la conduite du sieur Durieux d'après les laits ; et 1 on a vu combien, en suivant cette route, ou arrive à des préventions fâcheuses puur lui.
Les députés nous assurent ensuite qu'à Alassac le sieur Durieux s'est comporté de manière à ne pas mériter le blâme de ses supérieurs, et eux-mêuies se douneut comme garants de sa conduite, et prétendent que le sieur ue Lamaze lui devrait des remerciements, au lieu de te porter pour sou dénonciateur.
Mais ces messieurs nous permettront d'observer que, de ce qu'ils n'ont m vu aucune action blâmable, ni entendu aucun propos violent du sieur Durieux à Alassac, il ne s'ensuit pas qu'il u'ait ni commis d'action blâmable, ni tenu des propos violents ; car peuuant 12 ou 14 heures que ta milice de Brive est restée à Alassac, iis ne uiront pas sans doute qu'ils n'ont jamais perdu de vue le sieur Durieux , et leur témoignage négatif ue détruit pas la force des dépositions consignées
dans l'information sur ce qui s'est passé à Alassac.
Or,dans l'information faite contre le sieur Durieux, parmi les témoins entendus, le 1er, le 3e, le 4e, le 5», le 10e, le 12e, le 14e, le 17e, le 19e, le 20e, le 22e, le 36e, le 46e déposent de propos séditieux et inflammatoires de Durieux à Alassac, et le représentent comme ayant excité et encouragé les violences qui s'y sont faites.
MM. les députés voulant affaiblir les soupçons, qui résultent bien naturellement contre le sieur Durieux de son voyage de Brive à Favars, situé à quatre lieues de Brive, où il se rend dès ie lendemain du pillage, et où il est accusé d'avoir reproché aux paysans de s'être mal défendus contre la maréchaussée et la milice nationale, et de leur avoir enseigné à se défendre mieux désormais, nous disent que Durieux allait à Tulle, et que Favars étant sur sa route, il fut obligé d'y passer, et que la vue des corps des paysans tués la veille y exalta son imagination, ce qui lui fit tenir à Tulle des propos indiscrets, à l'occasion desquels il y a été arrêté.
On remarquera d'abord qu'il n'est pas vrai que Favars soit sur le chemin de Brive à Tulle, de sorte, comme ces messieurs le disent, qu'on soit obligé d'y passer.
Lorsqu'on voit d'ailleurs le sieur Durieux se trouver à toutes les émeutes, et courir, pour ainsi dire, les séditions, on peut bieu croire que ce n'est pas uniquement pour suivre sa route qu'il s'est rendu à Favars en allant à Tulle.
Après tout, il avait sans doute le droit d'aller à Favars, mais il n'avait pas celui de reprocher aux paysans de n'avoir pas brûlé le château, de les exciter à de nouvelles violences, de les rassurer contre la milice et la maréchaussée de Tulle, en leur enseignant à s'en défendre; et comme ces faits sout établis par des dépositions, il faut, puur les détruire, autre chose que les témoignages d'estime que donnent au sieur Durieux Messieurs les députés.
Or, parmi les témoins entendus contre Durieux, le 7e, le 8e, le 11e, le 46e déposent des propos tenus par Durieux à Favars ; propos qu'on ne peut regarder comme de simples conversations, et dout la tendance manifeste était, selon l'exposé des témoins, d'exciter les paysans au pillage, à la sédition, aux attroupements.
Les deux députés, suivant encore l'apologie du sieur Durieux, ajoutent que, loin d'avoir fomenté aucune insurrection contre la ville de Martel, ils ne croient pas qu'il y ait mis les pieds.
Il ne s'agit pas de ce que croient ou ne croient pas xMM. les députés; on recueille des informations par témoins, que ie sieur Durieux a été à la tête des attroupements de la ville de Martel: il faut ou démentir les témoins, ou en convenir, et l'opinion des députes ne fait neu à cela. ,'
Que peuveut-ils opposer en effet aux dépositions des lbe, 23e, 44e, 45e, 48e, 49e, 50e, 51e, 53e témoins, assurant tous que Durieux était à ta tête de l'attroupement de Martel, et quelques-uns qu'il rangeait les attroupés en ligne?
Que peuvent-ils enfin contre les dépositions qui nous montrent Durieux exerçant les violences, excitaut les insurrections à Vegennes, à Lissac, à Jugeai, à Giguac, etc. ?
C'est sans doute la difficulté de contestér tous ces faits qui a réduit les députés à chercher des excuses pour Durieux, eu tes supposaut vrais.
Ils disent d'abord que « l'imagination de Durieux, facile à émouvoir, a été exaltée à Tuile par la vue des préparatifs de guerre fort déplacés
qu'il y trouva, et qu'il lui échappa à cette occasion certains propos indiscrets^ »
Ces propos doivent se trouver dans l'information, et ce n'est que d'après Jes pièces qu'on peut juger si la qualification de propos indiscrets n'est pas un peu trop faible pour désigner côux qu'a ' tenus le sieup Durieux. On voit bien qu'un homme dont l'imagination s'exalte si facilement, a pu dépasser de beaucoup cette mesure; et après tout, lorsque les magistrats ont à empêcher ou à punir des propos séditieux, il ne sont pas tenus, ce me semble, de s'informer si celui qui les répand dans le peuple a une imagination facile à s'exalter. Ils voient le fait et ses suites dangereuses à la tranquillité publique, sans remonter aux causes.
Ils ajoutent un autre aveu qui trahit bien toute la faiblesse de leur cause, en se rejetant sur les attaques d'épilepsie auxquelles cet homme est sujet : mais que p'ont-ils eu recours à ce moyen tout de suitq? Ils n'avaient besoin d'aupun autre. Un homme dont l'esprit s'aliène à la sui(e d'un mal aussi terrible que l'épiiepsie, ne peut plus être coupable. Si le sieur Durieux s?e$t' trouvé à toufes les émeutes du pays, s'il a excité les paysans aux pillages, aux incendies, s il a dit aux gens de Tulle que les canons étaient là pour les massacrer, etc., c'est qu'il se ressentais des attaques de son épilepsie, et qu'il avait l?esprit aliéné.
Ce fait une fois constaté, le crime s'évanouit, s'il est commis dans l'accès. Il ne faut que plaindre le malade. Il faut seulement tenir renfermé un homme auquel les accès de son mal laissent des mouvements si dangereux, et en -ce cas en^ core, il faudrait qu'il fût toujours gardé à Tulle, et non pas rendu à Brive, où la bonne opinion qu'on a de lui, malgré son épilepsie, pourrait engager les habitants à lui rendre une liberté si funeste et à le faire de nouveau membre de leur comité.
Nous ne pouvons nous dispenser d'ajouter quelques observations sur une autre pièce, tendant aussi à la justification du sieur Durieux, et faite dans les mêmes principes. Elle est signée: les membres du comité et de la garde nationale de la ville de Brive, et revêtue d'environ vingt signatures.
L'apologie qu'on y fait de sieur Durieux est fondée sur les motifs suivants :
Que lp sieur Durieux n'a été qu'indiscret, qu'il a ignoré les dispositions de la loi martiale, et qu'il a été emporté par son %èle pour la Révolution; qu'il a souvent des atteintes de démence et d'alié* nation d'esprit, ce qui ept attesté par les médecins ou chirurgiens, et enfin qu'il est chargé d'une nombreuse famille.
Cette apologie rentrant à beaucoup d'égards dans celle que nous venons de combattre, il nous suffira d'observer:
1. Que les informations font foi que les propos du sieur Durieux ont un tout autre caractère que celui de la simple indiscrétion;
2° Qu'un citoyen aussi zélé pour la Constitution, aussi assidu aux assemblées de l'hôtel de ville que l'a été le sieur Durieux, selon le témoignage que lui rendent les députés de la ville de Brive dans le mémoire remis au comité des rapports, et que nous analyserons tout à l'heure, ne peut pas avoir ignoré l'existence, et les dispositions, et le but véritable de la loi martiale ;
3° Que le zèle pour la Révolution ne saurait excuser des actipns vraiment criminelles, s'il est prouvé que le sieur Durieux en ait commis de telles.
4° Qu'il y a contradiction à vouloir justifier un homme d'actions violentes, séditieuses et même criminelles, lorsqu'on convient qu'il a souvent l'esprit aliéné, et qu'il est abandonné à lui-même, et sans cesse en activité comme Je sieur Durieux;
5° Enfin que la considération de la nombreuse famille dont est chargé le sieur Durieux peut exciter ]a compassion epvers eljp, et non envers celui qui, avec de plus puissants motifs, serait coupable du crime de lèse-tranquillité publique.
Telles soqt Jes réflexions que nous avions à opposer popr notre province, et pour la ville de Tulle , et pour tous les citoyens qui ont défendu leurs propriétés contre les brigands, aux deux pièces présentées par les députés extraordinaires de Brive, soit à l'assemblée de la commune de Paris, soit au comité des rapports, et qui ne tendent à rien moins qu'a excuser des violer) cës intolérables dans tput Rays policé, él dpni l'impunité ne peut se concilier avec la tranquillité publiqup.
La prqvipce se plaindrait des députés extraordinaires de Brivé avec moins d amertume, s'ils n'eussent employé d'êtres moyens que (les pjè-ces de ce gèqre, qpi sont judiciaires et spumisps à l'examen dé juges qUi, pouvant constater les faits et discuter à fpnd la validité des preuves, àrriveni' à la vénté, p't y ramènent tôt pu tard l'opipion publique. Mais comment pârdOtiner à ces députés d'avoif consigné dans des ouvrages périodiques, ïe journal du sietjr Mercier et le Journal de Paris, des imputations ipjurieijses à toute upe ville,' à toute une province, à un grand nombre de citoyens^ à un corps Be ' magistrats ; des imputations dépourvues de preuves, et qui sont de nature à'"ne pouvoir japaais être présentées séparément des preuves qui pourraient les appuyer, s'il y en avait dé telles T ''
On ne peut prendre sans doute des moyens trop prompts et trop efficaces de publier et de répandre la vérité, de dénoncer' l'oppression, ét de venger hautement l'innoCence ; mais c'est là vérité prouvée, l'oppression constatée, l'innocence reconnue; et si pn répand â faUssetés, si l'on dénonce commé coupables ' ^'Oppression dés hommes opprimés eux-mêmes, et leurs oppresseurs comme innocents, et si, pour accréditer cés calomnies, ou seulement des accusations dé-, nuées de preuves, on se sert d'un ouvrage périodique, dont il se répand en un jour plusieurs milliers d'exemplaires, ne se rend-on pas coupable envers la société?
L'imprimerie était déjà une qrme terrible dans les inains de la calomnie; mais bornée à ses moyens ordinaires,/et, pour ainsi dire naturels de diffusion, elle était bien moins meurtrière, qu'aidée, qu'on nous pardonne cette expression, des ailes que lui prêté la périodicité.
Une calomnie répandue dans un livre ordinaire ne se propage que lentement ; elle va successivement à différents lecteurs, et à un beaucoup moindre nombre; on a quelque temps pour en prévenir les effets, ou pour s'en défendre ; en la repoussant aussi dans un ouvrage imprimé, on la combat avec des armes moins inégales;
Mais comment se défendre d'une imputation calomnieuse, reçue en une matinée par dix mille personnes, et transmise, dans la journée, à vingt et quarante mille autres? Reste-t4l quelque moyen humain de détromper des hommes avides de croire le mal, ayant toujours les oreilles ouvertes à la calomnié, et ennuyés du seul titre de réponse, de défense, d'apologie ?
A Dieu ne plaise qu'on veuille donner atteinte
ici à la liberté de la presse, ce mpyen conservateur des soqjâtés, et fa véritable çpurcg où elles peqvent puiser Je bonheur auquel elles doivent atteindre! Mais cette liberté utile est celle de la discussion des principes généraux, des vérités fécondes, et non des faits individuels et des allégations personnelles. Le bonheur des sociétés ne tient pas à ce qu'on puisse imprimer, sans preuves et sans autorité, et surfont imprimer dans un ouvragp périodique, qu'un tel individu, même lorsqu'il remput des fonctions publiques, est coupable4'UP tel crime, d'une telle prévarication; il n est point nécessaire aux progrès des lumières qu'on puisse avancer dans les Annales politiques que le prévôt de Tqllp et les magistral? avec lesquels il a jugé SQfitdeç aristocrate ont VrU pour victimes les bons citoyens, qui les imrfiQlent au ressentiment des riçhe$ privilégiés, et le$ as-, sassinçnt pqr le couteau des qristQcrq,fei} ou 43QS le Journal de Par}$, que U glaive du priUQt de Tulle se promène, frappant comme au hasard de$ innocentes.
Cet usage de la presse est moins funeste encore par i'èffèt qu'il produit dans la capitale, que par ceux qu'on en ressent au loin et dans les provinces- Ici l'impression d'une calomnie est affaiblie par cçôç autres qu'on entend pu lit le même jour. L'abus énorme qu'on .en fait devient lui-même un remède au mal. D'ailleurs l'erreur, en ce gpnre, conduit plus difficilement les habitants d'une grande ville à l'action ; et enfin une police vigilante et vigoureuse peut y empêcher plus aisément l'abus qu'on peut faire d'un semblable moyen.
Mais en province c'est autre chose, Un papier périodique S'y répand, où l'auteur traite à sa maniée, avec ses préventions, ses préjugés, et quelquefois son injustice et sa violeace, des nommes qui sont l'objet de 1 attention publique; et dans le cas dont il s'agit ici, les officiers d'un tribunal, d?une municipalité, les chefs de la garde nationale, une classe eqtière de citoyens désignés sous le nom de ci-devant privilégiés, de propriétaires, de bourgeois, de riches qui ont été forcés d'implorer la fprce publique contre une partie nombreuse du peuple. Les déclamations du journaliste deviennent le texte d'un démagogue forcené; et, la feuille à la main, il entraîne le peuple à de nouveaux excès. Voilà certainement des abus d@ la liberté de la presse, à laquelle il faut bien que la nation trouve quelque remède; et ce que nous allons relèves des Annales politiques et du Journal de Paris en fera sentir encore mieux la nécessité.
La pièce insérée dans }es Annales politiques et littéraires, dont nous ayons lieu de nous plaindre, est une lettre datée du 1 mars, et signée des sieurs Serre jeune, et Faye, se disant députés extraordinaires de la cpmmune de Brive.
Qn y dit d'abord, que les troubles du Bas-Limou* sin ont été exagérés par les aristocrates nombreux de ce pays, avec leur, malignité ordinaire, quoir qu'ils puissent bien eux-mêmes en être les auteurs secrets. Ce qu'on peut dire de plus modéré pur cette première allégation, dénuée dp preuves et de vraisemblance, est qu'a les auteurs de la lettre ont écrit avec l'étourderie de leur âge et la violence de leurs opinions.
Il Dire que les désordres de la province ont été exagérés, c'est se soupiettre à l'obligation de s isscrire en faux contré les procès-verbaux où l'on présente des habitations pillées, des citoyens rançonnés, des chaussées d'étang percées, des troupes de sept à huit cents brigands parcourant
et dévastant le pays, et menaçant partout la tranquillité et la sûreté des citoyens, et ces procès-verbaux n'ont pas epcorp été argués de faux.
En second lieu, une lâcheté d'appeler du nom odieux d'aristocrates des gens qui racoptënt les violences dont i]s ont spuffert. et les accqser de malignitf, lorsqu'ils se pjaigpent des excès dont ils ont étp les viptipqes%
En troisième lieu, qu'est-ce que cette é^ange imputation faite àux prétendus arï^opfâtes» d'être les auteurs secrets des dévastations leurs propres possessions? Qu'une calomnie aqsgi Jé-pourvue 4P sens puisse $re crue p^r le peuple le plus grbssipr, c est ce qu'on a peine à comprendre; mais cqmmeqt concevoir qqe les deux députés de Brive se la 'permettent?
On peut dire, il est vrai, qu'ils ne la dopnept pas comme prouvée, et qp'ijs se ppp^ntént de dire que les aristocrates du Limpuspowxaiént bien être les secrets pillage fte lears.praprès maisons.
Mais quelle criminelle légèreté cjans des hommes rpvêtus d'up caractère pqpliçj qup d'appuyer sur une prétendue possibilité une imputation atroce ) Dans quelle moraïé et chez qytei|e na^Pn pplicée peut-il être permis de répandre, par la vpip de l'impressipp, que tel ou tpl citoyen, ou un prdre de citoyens? peuvent bien être fes (lu* teurssecrets d'un crime, et dont les auteurs immé-diats font conn,us?
Les auteurs de la lettre attestent ensuite au public, que les paysqns de la prQyînçe nêrçÙ d'un bon naturel; et ce q'gst pas nous qui démentirons, en cela, leur témoignage. Mais à quoi peut-il servir en une pareille cause f
Ôn peut dire généralement, avec vérité, que les hommes sont bons; que les peuples policés sont bons; que le peuple des grandes villes l'est; et cependant, dans les temps d'agitations? {te troubles, de guerres civiles, .que d'atrocités ne se sont pas commisesl l'histoire dp tputeç les nations en est remplie* Nos provinces en ont été récemment le théâtre; et jusques dans là capitale, on en a vu des exemples qiji ont fait frémir l'humanité, et que tous les bons citoyens voudraient effacer de leur souvenir. Il est vrai que c'est prostituer le nom dp peuple, que de le donner à des hommes capables dp Ppf excès. Mais c'est l'effet malheureux des grandes agitations populaires de faire oublier aux hommes leur justice et leur bonté naturelle. En disant que le peuple du ÇaitLimousin est ban, on n'opère donc pas sa justification.
Dans tous les temps, disent les députés, les paysans ont été crueUemerit vexé*, et U$ tfont encore tiré aucune vengeant de ces vatjgftflpf.
On demande à toute pèrspnne qui a conservé quelque sentiment de justice pt de modération, si ce langage et ces expressions sont convenables dans la boucha des députés d'une commune, d'hommes qui ont revêtu un caractère public?
Les vexations dont ils parlent ici, en les supposant les plus réelles et les mieux constatées, tenaient à l'ordre ancien» pu étaient des violences particulières et personnelles des seigneurs et des riches.
Dans le premier cas, il est aussi déraisonnable qu'injuste d'approuver les vengeances que tireraient aujourd'hui les paysans de ce qq'on apr pelle les vexations qu'ils ont souffertes de l'an-* cien régime féodal. Tout ce que peut et doit faire une nouvelle Constitution, est dp détruire jusques dans leurs racines les abus auxquels donnait lieu l'ancien état ; el c'est ce qu'a fait l'Assemblée, et
ce qui lui méritera la reconnaissance éternelle de la nation. Mais l'Assemblée n'a pas prétendu, sans doute, qu'après avoir détruit ces tyrannies, qui étaient celles des lois, et non celles des bommes, il restât au peuple le droit de s'en venger aujourd'hui ; et la même justice et la même humanité qui l'ont conduite à rendre au peuple ses véritables droits, lui feront regarder dans le peuple, comme autant de crimes punissables par toute la rigueur des lois, tout acte de violence dicté par le retentissement de ce qu'il a souffert de l'ancien désordre.
Il est bon d'observer que la province du Limousin ne connaissait point de servitudes personnelles, et que parmi les défenseurs des seigneurs se sont presque toujours trouvés leurs censitaires.
^Quant aux vexations particulières qu auraient pu exercer tels ou tels seigneurs envers les paysans, MM. les députés de Brive auraient dû les rapporter. 11 est bien aisé d'avancer dans un papier Public, que, dans les paroisses où le désordre a régné, ce désordre a été le fruit de l'imprudence ou de la cruauté des ci-devant privilégiés. Mais une assertion de cette nature doit être prouvée autbentiquement, sous peine d'être regardée comme une atroce calomnie. Nous sommons donc les sieurs Serre et Faye d'articuler quelles cruautés, ou, si l'on veut seulement, quelle imprudence ils ont commise envers des paysans dont la plus grande partie au moins n'étaient -pas de leurs terres. La dame de Saint-flilaire, dame de Favars, le sieur de Lamaze, seigneur de Roussignac, et les dix bourgeois d'Alassac, dont les maisons ont été pillées, et les Chartreux de Glandier, etc.; et nous osons dire que leur silence forcé accusera la fausseté de l'imputation qu'ils n'ont pas craint de se permettre.
Nous ajouterons enfin que si, parmi les propriétaires dont les habitations ont été dévastées, il y en a qui aient commis des violences antérieures, ce ne serait pas encore de quoi justifier les excès que des troupes de paysans se sont permis; sans doute, nous n'en sommes pas encore à n'avoir de justice que celle que chacun peut se faire à soi-même.
Les auteurs de la lettre, continuant l'apologie des brigandages commis dans notre province, nous donnent comme une puissante raison: qu'owcwn des ci-devant privilégiés n'a été tué ni blessé; qu'aucun château n'a été incendié ni pillé, proprement dit, tandis que du côté des paysans on compte plus de 30 morts, et un plus grand nombre de blessés.
11 y a dans ce peu de lignes beaucoup de déraison et de grandes faussetés.
La déraison est à prétendre conclure quelque chose en faveur de brigands qui assaillent, de leur maladresse même. Ils n'ont tué personne: mais n'ont-ils pas tiré? MM. les députés nieront-ils ces faits, déposés dan s tous les procès-verbaux? Il n'est point rare, et il est tout simple que des paysans mal armés, sans ordre, incertains et chancelants jusque dans le crime même, auquel ils sont entraînés,tirent mal et ne tuent personne; et si des hommes qui se défendent de leurs maisons, accoutumés a manier des armes, ajustent mieux leurs coups, que s'en suit-il de là qui puisse justifier les premiers et accusér les seconds ?
Mais que dire de cette assertion de MM. les députés de Brive, qu'aucun des ci-devant privilégiés du Bas-Limousin n'a été tué ni blessé, lorsque les procès-verbaux font foi du contraire? Le
vieux M. de Lissac, après avoir vu élever une potence pour lui à la porte de son château, après avoir été insulté par Durieux, est mort le 6, et sa veuve forcée d'anandonner sa maison au pillage pour sauver sa vie et celle de ses enfants.
Maisil estdurde la part de ces messieurs d'exiger que ce soient précisément des privilégiés qui aient été tués ou blessés; et si parmi ceux qui ont défendu les privilégiés, il y en a eu de tués ou de blessés, ils conviendront sans doute que leur raisonnement en sera fort affaibli. Or, il est constant parle procès-ver bal dressé àl'occasion de l'émeute de Favars, appartenant à la dame de Saint-Hilaire, que le sieur de Marsillac, lieutenant de la marécnaussée y a reçu un grand nombre de balles dans le corps, et que deux cavaliers de la maréchaussée et plusieurs volontaires de la garde Tulle ont été grièvement blessés.
Mais l'excès de l'étourderie et de la légèreté, car nous ne pouvons penser que les députés de Brive aient sciemment nié des fàits notoires et publics, est de dire, ainsi qu'ils le font, qu'aucun château n'a été incendié ni pillé, proprement dit.
C'est d'aprè3 la teneur de procès-verbaux que nous avons rapporté ci-dessus les désordres commis à Alassac, a Favars, à Glandier, etc.
Nous ne savons pas s'il y a d'autres manières de piller que celle-là, et nous demanderons ce qu'il faut y ajouter pour en faire un pillage proprement dit? Mais après tout, et quand on pourrait encore faire mieux en matière de pillage, il faudrait être bien aguerri pour n'être pas effrayé de celui-là, et pour entreprendre de cal mer l'indignation qu'il doit causer.
Mais MM. les députés ne se contentent pas de défendre les auteurs de ces excès, en niant ou atténuant les faits; ils vont jusqu'à faire un crime aux malheureux ci-devarit privilégiés, des moyens qu'ils ont employés pour se défendre.
« Ce que n'ont eu garde de dire les perfides « ennemis du peuple, c'est l'attentat qu'ils ont « commis eux-mêmes en publiant la loi martiale, « sans le concours ni l'aveu des municipalités « et en tirant sur un peuple désarmé, assemblé « uniquement pour brûler les bancs d'une église, • et en faisant feu les premiers sur le peuple en « un autre endroit, sans qu'il ait été question de « la loi martiale. »
On le demande aux hommes modérés et justes: ce langage dans des hommes publics est-il toléra-ble? Peut-on pardonner aux députés de la ville de Brive de tràduire ces citoyens qui viennent de souffrir si horriblement des violences du peuple, sous le nom d a perfides ennemis du peuple ? Veulent-ils donner le signal d'égorger tous les ci-devant privilégiés, veulent-ils allumer la guerre civile?
Et combien ne sont-ils pas plus coupables encore, si les faits sur lesquels ils appuient une si criminelle déclamation, sont notoirement faux et démentis par toutes les preuves sur lesquelles les hommes peuvent et doivent fonder leur croyance?
Ils ne craignent pas de dire que dans l'émeute d'Alassac la loi martiale a été publiée sans le concours ni l'aveu des municipalités.
Mais le procès-verbal fait par les officiers municipaux de la ville d'Alassac atteste qu'avant le pillage des maisons bourgeoises d'Alassac et les insultes faites au château de Rouffignac, les officiers municipaux avaient fait des représentations au peuple, et l'avaient sommé de se retirer; qu'ensuite eux-mêmes, joints aux notables, lurent la
loi martiale aux gens attroupés, en arborant le drapeau rouge.
Ils avancent qu'on a tiré sur un peuple désarmé, et tous les procès-verbaux constatent que les pillards d'Alassac étaient armés, non seulement de bâtons, de niques, de ferrements, mais encore de fusils. Tous n'en avaient pas sans doute, et bien en prend au pays, mais un grand nombre parmi eux en avaient. Tous les récits de l'action s'accordent sur ce point. Dans les détails du procès-verbal cité ci-dessus, il est fait mention des marques et traces des coups de fusil dans les portes, dans les fenêtres, et enfin un peuple nombreux qui lance des grêles de pierres n'est-il pas armé?
Ils disent que ce peuple était assemblé uniquement dans l'intention de brûler les bancs d'une église, et ce peuple a détruit dix maisons dans la petite ville d'Alassac; et pour brûler uniquement les bancs on pouvait se dispenser d'assiéger la maison du seigneur à onze heures du soir; et il est constant que tant qu'ils n'ont fait que brûler les bancs, les gens du château n'ont pas tiré sur eux, et encore une fois tous ces faits sont consignés dans les procès-verbaux.
Ils soutiennent qu'en un autre endroit les perfides ennemis du peuple, c'est-à-dire des hommes qui défendaient leur domicile et leur propriété contre une troupe de brigands auxquels on prostitue le nom du peuple, ont fait feu les premiers .
Nous dirons d'abord qu'il n'est point prouvé qu'en aucun endroit les propriétaires aient tiré les premiers sur le peuple.
Il ne peut être en effet question que des deux affai-faires d'Alassac et de Favars. Or, à Alassac il est prouvéau procès-verbal et par les informations,que le seigneur d'Alassac et ses amis, assaillis dans leur maison, et se présentant dans la cour, ayant demandé aux brigands ce qu'ils voulaient, et les ayant avertis de se retirer, ceux-ci répondirent qu'ils voulaient du feu, et firent en même temps une décharge de beaucoup de coups de fusil, ce qui détermina les gens du château à cheval de foncer sur eux, et les hommes à pied de tirer aussi.
Quant à Favars, il est encore constaté, par les procès et l'information, que les brigands ont les premiers tirés sur le lieutenant de la maréchaussée, qui s'était avancé pour raisonner, et qui a reçu plusieurs balles, tant dans le corps que dans ses habits; qu'il a trois postes dans les chairs d'un bras et plusieurs blessures dangereuses; que plusieurs cavaliers et chevaux de sa troupe ont été blessés. Telle est l'infidélité révoltante des auteurs de la lettre envoyée au journal du sieur Mercier ?
Mais que fait à la question présente que des gens attaaués aient tiré les premiers, ou tiré sans avoir publié la loi martiale, ou après l'avoir publiée sans officiers municipaux?
L'établissement de la loi martiale a eu pour objet de réprimer, par un appareil imposant, les mouvements populaires à leur naissance, et même avant qu'ils soient portés jusqu'aux voies de fait. Une insurrection se forme ; le peuple a des griefs, il lesexpose; on en reçoit la dénonciation; on signifie au peuple la loi, on le somme de se dissiper ; s'il résiste ou s'il s'obstine, la loi martiale autorise à faire feu en ce cas, même quand le peuple n'exercerait aucune violence. Il n'est pas possible de contenir par d'autres moyens un peuple nombreux, qui une fois assemblé au nombre de plusieurs milliers d'hommes, si on donne à l'at-
troupement le temps de se former, renverserait tout devant lui comme un torrent impétueux.
Mais il est sensible que si ce même peuple était actuellement occupé a dévaster, à saccager, à massacrer, il serait bien ridicule de venir lui lire la loi martiale, et de lui faire trois sommations pour l'engager à cesser ses violences. Si le peuple de Paris pillait actuellement la Caisse d'escompte, ou le Trésor royal, où le palais des Tuileries, nous ne pensons pas qu'aucun officier chargé de la sûreté publique se crut obligé de faire lire la loi martiale par un officier municipal avant de repousser la force par la force.
Ce que la force publique ferait pour défendre des établissements publics, tout particulier, soit eh invoquant cette force, soit en employant à sa défense ses propres moyens, est en droit de le faire. Je n'ai besoin ni de loi martiale, ni d'officier municipal pour la lire, lorsque ma maison est investie par des brigands. Le droit de la défense naturelle me suffit sans la loi martiale. Je n'ai point d'explication à demander à des voleurs et à des assassins, à des violateurs de l'asile domestique ; par la raison que je puis tuer d'un coup de pistolet le voleur qui m'arrête sur un grand chemin, je puis, de mon autorité privée, tuer ceux qui m'attaquent dans ma maison : ce sont les lois de tous les pays, et ce n'est pas assurément dans des temps de trouble et de désordre comme cslui où nous vivons qu'on peut y apporter des exceptions.
Si ces principes sont incontestables, je demande comment on peut faire un crime, soit au sieur de Lamaze et à ses gens, assiégés par des brigands, soit à la milice nationale et à la maréchaussée de Tulle, dans l'affaire de Favars d'avoir tiré, sans avoir lu ,1a loi martiale, sur des gens pris en flagrant délit, attroupés au nombre de sept à huit cents, perçant les digues et chaussées des étangs, pillant le château, etc. ? Etait-il besoin de leur demander ce qu'ils faisaient et ce qu'ils voulaient, et fallait-il leur expliquer qu'ils étaient coupables d'une méchante et criminelle action en se portant à de si grands excès?
Et cependant ceux qui ont ramené; par unè conduite courageuse et ferme, la tranquillité de la province, et qu'on inculpe ici d'avoir abusé de la force contre un peuple qu'on appelle désarmé, et en particulier le commandant de la maréchaussée et celui de la milice de Tulle, n'ont pas suivi ces maximes sévères et justes à la rigueur, dans l'affaire de Favars en particulier. Ils n'ont donné des ordres rigoureux qu'après avoir essayé tous les moyens d'humanité et de douceur. C'est en exhortant les séditieux à se retirer que le sieur de Marsillac reçut à la fois quatre coups de fusil, dont aucun heureusement n'a été mortel, mais qui ne sont pas moins une preuve de la violence du peuple et de la modération de ceux qui voulaient le contenir.
Nous terminerons ici les réflexions que nous avions à opposer aux imputations calomnieuses insérées dans le journal du sieur Mercier contre la milice nationale et la municipalité de notre ville, et la maréchaussée qui a prêté son secours aux propriétaires attaqués, et contre ces propriétaires qui se sont défendus.
Nous avons aussi sujet de nous plaindre du Journal de Paris, du lundi 8 mars, n° 67, où l'on paraît avoir recueilli aveuglément, et avec la même précipitation, les inculpations injustes faites aux propriétaires de la province, repoussant des brigands, et à la municipalité, et à la milice nationale qui leur a prêté leur secours,
et au prévôt et â la séiiêcliauàsêe qtii dht Condamné les coupables pris les armes â la main et rétabli la tranquillité publique par cette juste sévérité.
Il s'en faut bien, dit d'abord journaliste, qu'il soit prouvé dé quel côté ènt été les ptuè grands crimes, ou dû côté des paysans qiii se àôht attrdupés en tumulte et en êefiiUon autour des, châteaux, ou du côté des propriétaires de eèi châteaux.
N'est-ce pas là un étrange ëxpësédë la qties-tiou? Les propriétaires dont lés châteaux Sont investis par les pàysaiis ne Sopt manifestement pas les agresseurs ; ils ii'ont pas attiré ces paysans autour de leùr$ demeures p'out les assassiner. Ces paysans attroupés autour des châteaux, en tumulte et en sédition, y venaient pour piller et exercer des violences, puisque le pillage, tes dégâts, et les violences ont été partout l'objet avoue et la fin de toutes lës expéditions de ce genre. Dès lors» commërit peut-On douter de duel côté soî\t les criiaes, piitéqu'ën un cas pareil le seul criminel ëst l'agresseur, àelôn les notions dii plus simple bbn sens? .
Cependant le doute du journaliste est fondé sur ce que, selon lui, H les paysans se sont attroupés en tumulte et en sédition, ce qu'il Vëût bien regarder comme un crime, ae Utot. côté lés propriétaires des , châteaux ont fait feu , sur ces paysans, tantôt sans aucune forrnàlité, tantôt en faisant lecture de là loi martiale, que ces malheureux paysans ne pouvaient pas entendre, et sans avoir avec eux aucun officier municipal.
On voit que ces allégations ont .été prêtées à l'auteur du journal par lës deux députés de Bri-\e, et quHl les a crues sans examen, Lés observations que nous avons faites ci-dessus en démontrent pourtant la fausseté, qui résulte de l'inspection des procès-verbaux. Mais n'est-il pas affligeant de voir lin ouvrage aussi répandu que le Journal de Paris, propagër dans tout le royaume, contré l'intentipn de 1 auteur, une calomnie qui ne tend à rien moins qu'à excuser le brigandage et à inculper eeux qui en sont les victimes ? Peut-on mettre une si grande légèreté à l'adopter sur un simple récit de personnes en qui l'on pourrait soupçonner et èràindre des préventions?
Nous répéteront enclore ce que nous avons dit plus haut de l'importance attachée mal à proposa ia lecture de la loi martiale à des gens exerçant des violences actuelles; Est-ce que les, paysans les plus grossiers ont besoin de tant d'explications pour comprendre qu'il ne «prit pas en droit dè piller les maisons, de rançonner les propriétaires, de crever les digues des étangs, etc, ? Est-ce 1$ temps de leur expliquer ia loi martiale, que celui où ils sont actuellement occupés à commettre ces violences 7
Mais voici le grand reproche du journaliste de Paris. Ce qu'il y a de certain, dit-il,, c'est qu'aucun propriétaire de château n'a été tué et qu'un grand nombre de paysans est resté sur la piace4
Mais le journaliste ne pouvait-il pas considérer qu'il n'y a, dans chaque lieu qu'on pijle, qu'un propriétaire de château contre un militer de brigands qui l'assaillent, ce qui donne à ce propriétaire beaucoup de chance d'échapper* Le propriétaire de. château est d'ailleurs renfermé chez lui et.défendu par des murs; il s'expose moins ; il fait la guerre défensive ; au lieu que les brigands, pour le piller, obligés d'escalader ses murs et de forcer ses portes, sont, il faut en convenir, exposés à un plus grand danger. Nous
avons observé d'ailleurs ci-dessus que les malheureux paysans sont mal armés et tirent mal. Il ne faut dbnë pas s'étonnél* que, jusqu'à présent, aucun prdbHëtîilrë dë Château n'ait été tué dans le bas Limdbsiti.' Maiè hoUS në noùs étobnëridos paâ noti plu9 que le Journal de Parii, ënvoyé dans eës prdvinëes; en fît tuer désël-mais davan-tagë. -
Quant au nombre dë ça^SanS qui ont été tués en assiégeant et iiillànt lés fctiâtëàux, l'auteur du jdiirhàl aurait dû le fàiFè connaître à sèS lecteurs, afift qu'ils pusôënt juger s'il ëfct gfand .en ëffet. Grand est un tërmë de rëlatioii; Certaine-raent c'est trop d'titi Seul homme tilë (à moins qu'il ne soit propriétaire de châtëàu) ; thàis après aVtiii* vu des trôupës de sept à huit ceîtts brigands, marchant au pillage et aux dévastations, misant le siège des màlsonS qd'otl ne lelir ouvre pas, violant l'asile domestiqué, mettàht lës cl-toVëns à codtributiôn. ctitisumant èt dissipant les détirées d'iin jïère dë famille; ëriiiti mot, établissant une guerrë "Véritable ati àein de leur profite pays, lorèque ricltis apprenons quë dans Vingt msdrirëctltihs de de gèhrë il a tféfî hùit où dix de. ces malbeùreux, tués par des propriétaires qui àe défendent s tir leur ftrëbfe terrain et dans leurs fo^èrs, ou par une milicë nationale qui leur prêté son sècobrs , on pëut dire sans barbarie que lé nonibi-e dës tuéS n'est pas grand, ët hdiiis në veirëns qu'ufte fkdsse tttfmàhité et une fausse injustice dans l'écrivain qui prétend excitée là cdihpàèsioh eUvé^S d'injustes èt vlblënts agreésèdrs ëè lë • bîâiiië contre fcèùx qui lés dtit repoussés, en faisant constater bâthêtiquëihedt le nombre de ceux qui soiit tués eh pillant àtec le pë'tit ndMbre de cëux qui sont tues eii se défendant du |iiliagë.
Ce qU'il y a de certain, dit ëricore le jotirna-liste, c'est que lés fHâlhëureux paysans, après avoir été fusillés, ont été jetés dané dës cachots, où ôh.lès tir dit les uns dprès les autres pour les menér à la potence, saris avoiï eii d'autrés juges qu'un prévôt ; boité, dés faits indubitables, tous les aûtreè sont mal éclaircis.
Cé qtt'il y à dë certaiti, diroùs-nous, ë'est quë cet exposé est faux dans toutes ses parties.
Les procès-verbatix font foi que' de vingt-six prisonniers détenus, arrêtés dàns l'affaire de Fa-vars, tous eu flagrant délit ou les armés à la màirt, il y en a eu seize Relaxés, quatre condamné! au carcan ët au fouet sahs marqtie, quatre â un an do prison et dëùx pendus. On en a arrêtés une vingtaifoe en différentes occasions, mais dont aucun n'a été encore itlgé ni exécuté,
Que veut-on dite âvçc cette aeclatfiàtioti qui nous présèhié de ihalhèureux paysans jetés dans des cachots d'où on les tire les uns après les autrest pour lés mener à td potence i Quoi ! ç'ëst de deux brigands pendus sur vingt-six quë fous arguez pour aeplover ùrië fausse rhétorique l Vous nous représentés unë boucherie ï il s'agit dans la vérité de «jeuX hommes pris les armes à la main dans le pillage» et vous appelez celai tirer de lettré cachots de màlheurëùx paysans les uns après lés autres, pour lés mener à Id, potence 2 Quel abus ^e l'art d'écrire, et Quelle éloquence que celle qui altère ainsi la Vérité !
Mais c'est bien pis encore de présenter ces hommes comme mènes à la potence sans avoir eu d'autre juge qu'un prévdt. Le journaliste në devrait-il pas savoir qu'un jugement prévôtal ne peut être prononcé que par sept juges, sans compter le prévôt qui n'a que sa voix, et qui ne ia donne qu'après le rapporteur et un conseiller?
Les jugements rendus à Tulle l'ont été d'après cette forme prescrite par les ordonnances encore en vigueur. Il y a même assisté un plus grand nombre de juges que celui qui est prescrit, car tous les îuàgistrats de la sénéchaussée y ont intervenu et le jngement a été Unanime. Il y a plus, d'aphès les nouvelles formes judiciairës déjà établies par lës décrets de l'Assemblée, l'information et audition des témoins ont été faites en présence des àcecsës, et ils ont eu des avocats de leur choix. Comment peut donc dirë le journaliste que ces malhëUreux ont été menés à la potédce sans avoir eu d'autre juge qu'un pré-vôt, et que c'est là un fait indubitable ? et dirons-nous assez en lui reprochant sa légèreté ët son inconsidération ?
« En attendant que la luthière arrivât, conti-nue^t-il, on faisait périr dans lë supplice le plus infâme, des infortunés qui n'avaient répandu le sangde personne et, qui encommettant quelques violences coupables, étaient plds égarés que cri* ffiitiëls.
Nous avons déjà répondu à l'apologie des brigands, fondée Bur ce qu'ils n'ont répandu encore le sang d'aucun propriétaire de château. Ici le journaliste, emporté par soU zèle pour eux, va plus loin, et avance qu'ils n'ont répandu le sang dë pèrsoitne.
Mais les prdcès-vërbàux constatent nue le lieutenant de maréchausséë, qui commandait à Fâ-vars, a été dangereusement bleSsé en voulant parlementer avec les brigands; qUe déUx dé sës cavaliers et plusieurs Officiers volontaires de là milice nàtionale de Tullé ont reçu des blessures. Voilà donc du sang répandu, ët Ces faits sont plùs incontestables èt mieux éclaircis que ceux que le journaliste â drus Si légèrement.
Revenons d'ailleurs sur cette belle raison donnée comme une justification des brigands. Supposons qu'ils n'ont, en effet, répandu le sang de persotine, ce qui est arrivé en quelques endroits, soit par leur maladressë, soit par la fuite de ceux qu'ils attaquaient, Soit parce qu'on né leur résistait pas, est-ce là de quoi les justifier ? Ils sont attroupés, ils Soht ën armes, ils forcent les maisons et les pillent : y a-t-il une seule nation policée oû de pareils excès he soient assimilés aux meurtres et aux assassinats, et punis de la même manière, et où l'on se croié obligé d'attëndre que des brigands aient répandu lë sartg de quelqu'un pour les repousser à force ouverte ?
On voit par là même combien l'auteur du journal est inconsidéré en présentant ces hommes comme plUs trompés que coupables, et plus égarés que Criminels. Que prouvent cës antithèsës? Tous les malfaiteurs sont trompés, égarés ; mais, s'ils sont vraiment coupables, qu'importe la comparaison de leur égarement avec leur dépravation ? La loi ne peut instituer cette comparaison. Elle voit des actions violentes, crimidelies, attentatoires à la tranquillité et à la propriété des citoyens et tendant au bouleversement de la société ; il faut bien qu'elle sévisse, ou la société s'en va dissoute.
" Quelle erreur même peUt-tih supposer, dans les auteurs de semblables excès, fjiii puisse les èxcu-ser aux yeux de la loi? Ont-ils pu se persuader qu'il leur était loisible de détruire et de pilier les maisons, de crever les diguës des étangs, de mettre les propriétaires à dddtribUtitih, dë planter dés potences, de se faire donner par force des quittances d'arrérages de rentes, d'exiger des obligations, et seulemënt de s'attrouper au
nombre de sept ou huit cents, et de courir les campagne en armes, contre la teneur de toutes les lois dés peuples policés ët de celles qui sont en vigueur parmi iibus èt qui sont connUes des enfants mêmes? Ils ont donc été vraiment coupables, et coupables à leur ësfeient ; on lës justifie dbttc màl eh disant qd'ils ôdt été plus égarés qUë criminels.
C'est une allégation non moins réprêhensible de l'auteur du journal que de représenter, toujours ën abusant des figurés oratoires, le glaive dû prévôt du Limousin qui se promène, frappant comme au hasard des tètes qui peuvent être innocentes.
Quelle rhétorique que celle qui ne s'appuie pas sur la vérité et sur la justice 1 Gomment ce glaive, conduit pas un tribunal nombreux et régulier, soumis à toutes lës formes prescrites pour constater le crime et ne pas compromettre rinnotjëflèë; corfiment, dlsdns-ÙbUS, ëe glaive est-il celUi du préiiôi seul, lorqu'll est vraiment celui de la justice; comment, ose-t-on dire qu'il se promène au hasard, lorsqu'il ne frappe qu'après avoir reconnu le crime et le,coupable? De quel droit suppose-t-on que des têtes condamnéës par dix et douze juges, après une in formation publique, peuvent être innocentes?
Nous pourrions multiplier les questions de ce genre, mais il suffit de celles-là poUr reconnaître combien légèrement le journaliste prononce que la justice et l'humanité doivent des remercîments à la commune de Paris, pour être venue supplier l'Assemblée nationale d'arrêter le glaive du prévôt du Limousin.
C'est certainement une étrange chdse tjue des citoyens attaqUéâ dans leurs propriétés, pillés par des brigands, que cëux qui leur ont prête un généreux Secours, ët que les niàgistrats qui ont jugé les hommes doupables de ses excès, soient forcés de descendre à une sdrte dë justicà-tion contre des imputations imprimées dànS un oUvragë périodique qhi va se répandant dans léUrs provinces, et qui est capable d'y ramener les désordres qu'on y a réprimés si difficilement.
Mais tel est l'empire des circonstances, qu'aucune précaution n est à négliger, même pour les hommes les plus irréprochables, lorsqu'ils ont à craindre les mouvements publics.
C'est ce qui nous a déterminés à demander au rédacteur des Annales politiques d'insérer dans ses propres feuilles un désaveu de sa facilité à admettre la lettre de MM. les députés de Brive. Nous avons droit d'attendre la même justice de l'auteur du Journal de Paris, lorsque nos observations lui seront parvenues, et nous lui demandons hautement ou de les démentir preuves à la main, ou de convenir qu'il a cru trop légèrement les députés de Brive.
Voici, au réstë, de quoi rendre pour lui ce désaveu plus facile, eh même temps qu'on y trouvera une approbation bien flatteuse de cette même conduite, qu'il n'a pas craint de censurer avec tant de véhémence.
Cette pièce est Une rôie de la lettre écrite par M. le président de l'Assemblée nationale à la garde nationale de là ville de Tulle, lë 7 mars 1790, c'est-à-dire au même jour où le journaliste écrivait contre ëëlte même gàrdë, et contre les propriétaires qU'ëlle a sëdôurus, la déclamation qu'on lit dans le journal du 8 mars 1790.
Copie de la lettre écrite le 7 mars 1790 par M. le Président de l'Assemblée nationale, à la garde nationale de la ville de Tulle.
« L'Assemblée nationale me charge, Messieurs, de vous témoigner sa satisfaction de votre conduite également sage et prudente; les troubles qui régnaient dans le Bas-Limousin^ avaient excité sa sollicitude. L'Assemblée nationale a appris avec plaisir que la tranquillité était rétablie dans cette partie du royaume, et que c'était à votre zèle et à votre courage que cet heureux retour à la paix était dû : c'est une justice que l'Assemblée nationale vous rend par mon organe, et elle a ordonné qu'il serait fait sur son procès-verbal une men tionnonorable de votre patriotisme.
« Je suis, Messieurs, votre très humble et très obéissant surviteur.
« Signé : l'abbé de Montesquiou, président de l'Assemblée nationale.
« Paris, le
Et plus bas est écrit: Garde nationale de la ville de Tulle.
Après un si glorieux témoignage, nous ne nous attendions pas, nous l'avouons, au décret par lequel l'Assemblée nationale a sursis à l'exécution des jugements rendus ou à rendre par la justice* prévôtale de la ville de Tulle, décret provoqué par le discours de la commune de Paris, s'immisçant dans nos affaires sans connaissance préalable et légale des faits, et d'après le seul mémoire.présenté par les deux députés extraordinaire de Brive au comité des rapports, dont nous avons montré l'insuffisance et la faiblesse.
Nous ne pouvons nous dissimuler que le sursis à l'exécution des jugements portés contre des hommes trouvés coupables dans les insurrections, est une censure de notre municipalité, de notre garde nationale, dans les moyens qu'elles ont pris pour arrêter les insurrections, des propriétaires qui ont imploré notre secours et du tribunal qui a puni les coupables.
C'est d'après les plaintes portées à l'Assemblée nationale, de paysans arrêtés au hasard, de peuple sur lequel on a tiré sans provocation et sans lui avoir lu la loi martiale; c'est d'après le tableau effrayant du glaive du prévôt du Limousin, frappant des têtes innocentes, qu'on a cru nécessaire de surseoir aux jugements prononcés contre des hommes qu'on a supposés si faussement arrêtés, jugés, condamnés, exécutés avec autant de précipitation que de barbarie.
On a vu par les détails qui précédent, et il demeure prouvé avec la dernière évidence, par les pièces et informations remises au comité des rapports, qu'en toutes les mesures prises pour ramener la tranquillité dans nos provinces, il n'y a eu ni précipitation, ni barbarie.
Mais si nous pouvons supporter une opinion défavorable à nos provinces et à notre ville en particulier, parce que nous sommes bien assurés de la voir bientôt dissipée, il ne nous est pas permis de dissimuler les effets funestes que nous prévoyons devoir suivre nécessairement et promp-tement, de l'interruption du cours de la justice, dans les circonstances critiques où se trouvent le Bas-Limousin et les provinces qui nous avoisi-nent.
C'est contre cette interruption que nous sommes chargés d'apporter à l'Assemblée nationale la ré-
clamation d'une province entière, réclamation fondée sur des motifs nombreux et puissants.
Et d'abord n'est-ce pas un argument irrésistible en faveur du rétablissement de l'activité de la justice, que l'expérience heureuse faite par la province de l'utilité d'un tribunal qui a fait cesser chez elle les désordres dont elle était la proie ?
On ne peut révoquer en doute ni la réalité, ni la grandeur des maux qui ont affligé le Bas-Li-mousin, jusqu'au moment où le prévôt de Tulle, sollicité par les citoyens et secondé par le zèle de la municipalité de Tulle, et le courage de la garde nationale, a eu saisi et jugé un petit nombre de brigands, dont l'exemple a réprimé les autres.
Plusieurs émeutes avaient éclaté dans nos provinces dès le mois de décembre, ainsi que nous l'avons observé plus haut, et principalement dans les cantons les plus voisins de Brive, d'où l'oft avait imploré le secours de cette ville, et toujours inutilement.
Il est notoire que la milice de cette ville, sollicitée de venir au secours d'Alassac, ne s'y est pas rendue assez tôt pour sauver les maisons bourgeoises attaquées le 24, et qu'arrivée le 25, elle a laissé, en se retirant, piller le château presque sous ses yeux.
Ces désordres menaçaient de s'étendre dans toute la province. Tous les propriétaires, tous les bons citoyens, nobles, bourgeois et paysans même, étaient dans les plus vives alarmes. Quelques particuliers d'abord ont formé et exécuté la résolution de se défendre dans leurs foyers; mais trop faibles pour résister à des attroupements qui devenaient tous les jours plus nombreux, ils ont imploré le secours des milices nationales des villes voisines, des troupes régulières, des maréchaussées.
C'est à leur sollicitation que les milices nationales de Tulle , d'Uzerche , de Lubersac, un détachement de Royal-Navarre et un petit nombre de cavaliers de maréchaussée, ont porté, à di-yerses fois, leurs secours aux endroits attaqués par les brigands. Quelques-uns des attroupés ont été tués, parce qu'ils ont refusé de se dissiper et qu'ils ont-opposé une résistance armée et des coups de fusil. On en a saisi un certain nombre les armes à la main, ou faisant partie des attroupements qui avaient commis des violences. De vingt-six emprisonnés à Tulle, on en a relâché seize, condamné deux à mort, et puni du carcan ou de la prison huit autres, et les troubles de la province se sont arrêtés sur le champ. Cet exposé tout seul ne suffit-il pas pour prouver la nécessité absolue d'employer la force publique et l'activité de la justice à réprimer les désordres et l'efficacité de ces deux moyens réunis?
A cet argument tiré de l'expérience que vient de faire la province, s'en joint un bien plus puissant, la réclamation universelle de cette même province par l'organe de toutes, ou de presque toutes les municipalités de ses villes, bourgs et paroisses, dont cinquante-cinq ont exprimé leur vœu dans des délibérations et des adresses à l'Assemblée nationale, sans qu'aucune (la seule ville de Brive, ou plutôt une partie seulement des citoyens de Brive, contre Je vœu et les protestations de plus de cent des citoyens les plus estimés et les plus distingués), sans qu'aucune, dis-je, ait réclamé.
Ces cinquante-cinq municipalités, et, ce qui est à remarquer, toutes nouvellement formées d'après les décrets de l'Assemblée nationale, parmi , lesquelles ( autre observation importante ) il ue
trouve uu grand nombre de municipalités de campagne, et de celles-là même qui ont le malheur de voir quelques-uns de leurs habitants au nombre des prisonniers faits à Tulle, comme Alassac, Chanteix, Glandier, de Perpezac, Fa-vant-Saint-Germain, reconnaissent unanimement qu'elles doivent leur salut et celui de la province à la municipalité et garde nationale de Tulle, et à la justice faite par le tribunal prévôtal de cette ville, et demandent unanimement que cette justice soit rétablie dans toute son activité, si l'on veut sauver la province du plus grand danger.
Porteurs de ces délibérations et adresses à l'Assemblée nationale, chargés de les remettre au comité des rapports, nous avons pensé que pour éclairer la justice des représentants de la nation, qui tous ne pourraient consulter par eux-mêmes un si grand nombre de pièces, nous ne devions pas nous contenter d'en énoncer généralement le résultat et le but, et qu'un extrait fidèle de chacune remplirait mieux notre mission.
Dans ce travail, tout abrégé qu'il est, nous n'avons pu éviter des répétitions ; les délibérations de ces communes, ayant toutes un même objet, rentrent continuellement dans les mêmes routes et emploient souvent les mêmes expressions; mais nos juges et nos lecteurs peuvent s'épargner et le temps et les redites, en en lisant au hasard quelques-unes des plus développées, telles que celles d'Uzerche, de Perpezac, de Saint-Germain-les-Vergnes, d'Altillac, de Favars, de Martel, de Salon, de Vigeois, de Beaulieu, Forzès, etc.
NOMS DES VILLES, BOURGS ET PAROISSES DU LIMOUSIN
qui réclament contre le sursis, et dont les réclamations nous sont parvenues.
Alassac.
AHillac.
Argentat.
Arnac-Pomp^dour.
Beaulieu.
Beynat.
Bort.
Brive, en partie.
Chabreignac.
Ghamboulive.
Ghamberet.
Chanteix.
Golonges.
Goncèze.
Corrèze.
Egletons.
Eymoutier.
Favars.
Forzès.
Haute-Fage.
La Groizille.
La Garde.
La Graulière.
Le Lonzac.
Limoges.
Lubersac.
Martel.
Meymac.
Meyssac.
Naves.
Neuvic.
Nonars.
Orgnac.
Perpezac.
Pierrefite.
Puy-d'Arnac.
Sanit-Ghamans et Saint Pardoux.
Sainte-Fortunade.
Saint-Jal
St-Germain-les-Vergnes.
St-Pardoux-l'Enfantier.
Sainte-Solve.
Salon.
Seilhac.
Saint-Clément.
St-SalvadouretBeaumont.
Servières.
Soudaine-la-Vinadières.
Treignac.
Trocne.
Tudel.
Tulle.
Vigeois.
Ussel.
Uzerche.
ALASSAC.
Lettre de la municipalité d'Alassac aux officiers municipaux de la ville de Tulle, pour en obtenir
des secours contre une nouvelle émeute dont elle se croyait menacée le 30 janvier. Il est dit dans cette lettre que, malgré la plus grande proximité de Brive, on a des raisons de ne pas s'adresser à elle.
Autre lettre des mêmes, où l'on se plaint que le procès-verbal fait par la municipalité de Brive de ce qui s'était passé à Alassac, a été remis à un nommé Delmond, arrêté à Alassac par la maréchaussée de Tulle, et conduit dans les prisons de Tulle. On y dit aussi que le secours porté à Alassac par la municipalité de Brive, est devenu pour Alassac un fléau cruel. Et enfin on y remercie la ville de Tulle, avec des expressions d'une reconnaissance très vive, des grands services qu'elle a rendus à la ville d'Alassac.
Délibération de la commune d'Alassac, signée de vingt-cinq, tant officiers municipaux que notables et autres citoyens, du 1-7 mars, adressée à l'Assemblée nationale, dans laquelle, adhérant à la délibération de la ville d'Uzerche, du 11 du même mois (voyez ci-après), elle représente à l'Assemblée que l'amnistie sollicitée par la ville de Brive pour les séditieux détenus à Tulle, perdrait la province.
Elle se plaint du défaut de secours de la part des troupes conduites par le comité de Brive; elle atteste que ces troupes ont abandonné la ville d'Alassac aux attroupements qui s'y étaient portés; que les chefs n'ont pas voulu y laisser un détachement de 50 hommes, avec lequel oh aurait pu se défendre des brigands; que la garde nationale de Brive, se retirant, a vu commencer le pillage du château de Boussignac, sans y apporter aucun obstacle; que la province doit sa tranquillité à la bonne conduite des gardes nationales d'Uzerche et de Lubersac à Glandier et à la Chapelle, ainsi qu'à l'expédition de Favars par la milice nationale de Tulle. Elle finit par supplier l'Assemblée d'ordonner que le procès soit mit au sieur Durieux, qu'elle inculpe sur plusieurs faits passés à Alassac, et aux autres prisonniers de Tulle; moyen qu'elle regarde comme le seul capable d'assurer la tranquillité publique.
ALTILLAC.
Délibération de la municipalité d'Altillac, dans laquelle il est dit que, dans l'état actuel des choses, toute insurrection, tout acte d'hostilité entre les citoyens ne pouvant que retarder l'établissement de la Constitution et favoriser les desseins des ennemis de la liberté, en jetant de l'embarras dans la marche de l'Assemblée nationale, elle juge que, d'après ces principes, les citoyens de Tulle ont fait un acte de patriotisme lorsqu'ils ont secouru les campagnes attaquées par les brigands. En conséquence, elle charge son maire cle présenter aux citoyens de Tulle les sentiments de sa reconnaissance et de son estime pour leur dévouement généreux et leur activité courageuse, auxquels ils croient être redevables de la . sûreté et de la tranquillité actuelle de la province.
ARGENTAT.
Lettre des officiers municipaux de la ville d'Argentat, du 12 février, offrant à la ville de Tulle de coopérer avec elle à la tranquillité publique, et lui adressant des remercîments pour le patriotisme et la vertu courageuse qu'elle a montrés dans l'affaire de Favars, et sa reconnaissance de
ce qu'elle a dissipé les ennemis du repos public
Délibération prise le lti mars par la même ville, dans laquelle elle réclame contre la lettre des deux députés extraordinaires du comité de Brive les sieurs Serre le jeune, et Paye, insérée au n° 55 des Annaleé du sieur Mercier, comme Capable, sous l'apparence de la commisération pour les séditieux, d'exciter et d'entretenir l'esprit d'insurrection.
Bile y attribue la tranquillité de la province au courage de la garde nationale de Tulle et de la maréchaussée qui y était jointe !et aux punitions qui ont suivi les jugements fendus dans la ville de Tulle, et supplie l'Assemblée nationale de ne point laisser enhardir le Grime par l'impunité, et de rassurer les citoyens sur le sort de leurs personnes et de leurs propriétés.
ÀRNAC-POMPAÛOtJR.
Délibération de la commune d'Arnac-Pompa-dour, du 19 mars, dans laquelle, avertie que certaines personnes travaillent auprès de l'Assemblée nationale pour soustraire à la justice les prisonniers détenus à Tulle, elle sollicite l'Assemblée de donner au contraire ses ordres afin que le procès soit fait selon la rigueur des lois à tous les auteurs et moteurs des désordres commis à Alaseac» Glandief et autres lieux» et que l'impunité ramènerait les troubles de la province.
BEAÙL1EU.
Lettre, du 1er mars, de là municipalité de la Ville dé
BêâtiUêti à la municipalité de Tulle, pàr laquelle elle se plaint de n'être pas dans
l'en-céinie du département de Tulle, en lui témoignant sa recoûùaissance pour le courage
qu'elle a montré, et auquel on doit, dit-elle, le calme de la province; elle est signée de
dix-sept citoyens, tous officiers municipaux ou notables.
Délibération du 16 mars, de la thème villë de Beaulieu, sur lé rapport d un des officiers municipaux. Dans Ce rapport, il est dit que les excès commis dans la province sur divers châteaux, maisons religieuses et maisons bourgeoises et particulières, n'ont pu être réprimés que par les maréchaussées ët les secours de la milice nationale de Tulle» que la conduite de cette milice et du tribunal de la ville, qui a jugé quelques-uns des malfaiteurs, a été mai à prOpos inculpée dans une lettre incendiaire attribuée à deux citoyens de Brive; qu'on y cherche à justifier le nommé Durieux, prévenu d'avoir eu part aux insurrections ; que oette lettre peut rallumer dans la province un feu mal éteint et faire reprendre les armes au peuple, en faisant entëndre que ceux qui ont été punis l'oht été sans sujet
Là commune délibère que Nosseigneurs de l'Assemblée nationale seront suppliés d'onlonner que la lettre insérée au 155 da sieur Mercier, sera supprimée comme incendiaire et capable d'exciter de nouveaux attroupements, et que le procès du nommé Durieux lui sera fait et par* fait jusqu'à jugement définitif.
BËYNAT.
Adresée de la municipalité de Beynat à l'Assemblée nationale, dans laquelle elle annonce à l'As»* semblée elle-même sa-recennaissnce envers la milice nationale de la villë de Tulle, pour la
conduite prudente et courageuse que cette milice a tenue, en réprimant les violences exercées dans le Bas-Limousm, et dans lesquelles on a, dit-elle, ouvert les digues des étangs, pillé et dévasté les châteaux et les maisons des particuliers. Elle exprime son étonnement des inculpations calomnieuses répandues par de soi-disant députés de la commune de Brive, contre la garde nationale et le tribunal prévôtal de la ville de Tulle; atteste que la conduite de cette garde envers les insurgés a été légale et irréprochable ; qu'elle n'a agi que par esprit de patriotisme, et que sa prudence et son courage ont rétabli la paix dans le Bas-Limousin. L'adresse est du 25 mars.
BORT.
Lettre du 6 mars, de la municipalité de Bort à celle de Tulle, pour la féliciter de ce qu'on a placé le siège du département dans cette dernière ville, où l'amour de la justice est réuni aux plus grandes lumières.
délibération du conseil général de la commune de Bort, du 15 mars, où elle adresse aux représentants de )a nation les témoignages de sa vive reconnaissance, de son respect, de son adhésion à tous ses décrets, et le serment qu'elle réitère de maintenir la Constitution, d'être fidèle à la nation, à la loi et au roi.
En même temps qu'elle exprime sa reconnaissance envers la municipalité et la garde nationale de Tulle, à qui elle reconnaît devoir le rétablissement de la tranquillité publique, elle supplie l'Assemblée de continuer de faire instruire le procès des gens arrêtés à Favars, et détenus dans les prisons de Tuile.
GHABREIGNAC.
Délibération de la commune de Chabreignac, du 23 mars, par laquelle elle adhère, d'une voix unanime, à la délibération de la ville d'Uzerche, dont la teneur se trouvera ci-après, et supplie l'Assemblée nationale de donner les ordres les plus exprès et les plus prompts pour faire instruire, sans aucun délai, le procès des instigateurs et auteurs des désordres causés à Favars, a Alassac, à Glandier, qui sont détenus dans les prisons de Tulle, parce que, dit-elle, si on accordait une amnistie, le mal reviendrait plus grand que jamais, et qu'on s'égorgerait dans la province; autorisant les députés de Tulle à porter ses Vœux à l'Assemblée nationale.
CHAJÏBERET.
Délibération dë la commune de Ghamberef, du 21 mars, où elle reconnaît l'obligation qu'elle a d'avoir été exempte des désordres, des insurrections, au secours et au courage de la garde nationale de Tulle, qui a défendu ses foyers, et sans lesquels le mal se fût étendu sur toute la province. Elle demande que les insurgés, détenus dans les prisons de Tulle, et notamment le nommé Durieux, soient jugés conformément à la nature de leur délit. Elle pense que leur jugé* ment et leur punition, si elle a lieu, est urgente; et quoiqu'il en coûte à sa sensibilité, les circonstances et la crainte que les désordres ne recommencent, lui imposent l'obligation de solliciter auprès de l'Assemblée nationale l'exécution et la sévérité deâ lois.
CHAMBOtiLlVE.
Délibération dé la commune dé ChambouliVë, du Vf mars, sur le discours de sou procureur-gyndic. Selon Cet officier, tous les bous citoyens sOnt remplis de reconnaissance envers lë Côtnitê et la garder nationale de Ttfllë, pour leur conduite sage et courageuse, ainsi qu'envers lâ garde de Lubersac, et d'indignation pour les auteurs des relations iflfidêlës des journaux, et pour les Baéîûoite3 et lettres de quelques particuliers de la ville de Brive;; pour jouir de la liberté que les représentants de la natioh nous ont déjà pfôôu-fée, l'Asfiêmbléê nationale doit être suppliée d'ordonner que le procès soit fait à ceux qui se Sont fendus coupables de sédition dans lé Bas-Limousin, ou qui en Ont été iês moteurs et instigateurs i sur quoi,
Lëcîurë faite de l'arrêté de la CommUnë d'IJzer-ché, lâ Commune de Châmboulivë afréte, d'imé Vôix Unanime, d'adresser â l'Assemblée nation nale ce même vœu, dont elle envoie en même temps copié â lâ ville dë Tulle ét â lâ. ville dTJzérche, ett témoignagê dé son approbation et adhésion.
Ladite délibération, adressée â l'Assêmbléé nationale, est accompagnée d'une lettré du procureur-syndic au président de l'Assemblée, où il est dit que l'amnistie demandée par les prisonniers de Tulle serait pour la province un signal de troubles, de sédition et de violation des décrets de l'Assemblée nationale, par l'impunité donnée aux scélérats qui n'ont pas craint de les enfreindre»
CHANTEIX.
Délibération de là commune générale de Chan-teix, du 25 mar^ adressée à l'Assemblée nationale.
On y rappelle toutes les expressions injurieuses employées dans la lettre des députés de Brive au n° 15 dés Annale* du sieur Mercier ; La malignité des aristocrates du Limousin, qui ont exagéré lés troubles dm pays; l'imprudence et la cruauté des cl-deftartt privilégiés, qui ont attiré sur eux les vlolenees des paysans ; le triomphe de l'aristocratie consacré par le tri* bunal prévâtal de la ville de Tulte\ l'Intérêt que ces députés veulent inspirer ponr les brigands, en disant qu'ils sont pactr la plupart des pères de famille aimés et estimés dans leurs cantons.
On y dément ces allégations, comme autant d'impostures. On y atteste que les séditieux ont attaqué avec autant de fureur les ci-devant privilégiés les plus humains, que ceuï qui pouvaient avoir abitsé, contre leurs vasseaux, de l'ancien régime féodal.
Que le nom d'aristocrate, appliqué aux cMe-vant privilégiés de la province, ne peut être employé que par des ennemis de l'ordre publié, pour noircir ceux qui s'opposent à leurs vkrten-ces ; que cettx qu'on calomnie ainsi se félicitent tous, en vrais et bons patriote», de la RévoltttiOïï qui rend fa liberté à la nation, et qu'ils onç jtfré comme tous les bons citoyens de maintenir la nouvelle Constitution.
Que c'est une atrocité de dire que le tribunal prévôtal de Tulle a consacré le triomphe de l'aristocratie, lorsqu'il n'a fait que punir des scélérats pris les armes à !â main, répondant par défi coups de fusil aux sommation» qu'on lenr
faisait de se retirer, et ayant blessé dangereusement le commandant de là marêéhâtiSsëë ët dès soldats de là garde nationale avant que ceux-ci eussent fait feu.
Enfin que c'est une imposture ré vol tan të de prétendre que les attroupements étàiëht pour là plupart formés de pères dë famille ëstiméS; lorsqu'on reconnaît, dans ceux qui ëdht pris, des gens mal famés, tenus pour tels, et capables dë tout.
La commune finit par suppllér l'Assemblée dé faire faire le procès au* moteurs ët instigàtelïrs de séditions ; que c'est le Setil môyëù d'empêcher dans la province tinê anarchie qui y compromettrait rétablissement de la Constitution et de là liberté de là nation, et ferait perdre le frùit dés sages délibérations de l'Assemblée flâtiôûàlë, pour lesquelles elle est prêté à Verser Son Sàrïg.
Elle observe enfin que les municipalités. étant désormais responsables deâ événements qui peuvent troubler chez elles la paix publique, il faut bien conserver le seul moyen qui reste d'empêcher le brigandage, l'impunité ne pouvant qu'enhardir les méchants.
COtONGÉS.
Lettre des officiers municipaux de la commune de Golonges à 1 Assemblée nationale, par laquelle ils lui témoignent sa reconnaissance pour les légitimes éloges qu'elle a bien voulu donner, par l'organe de son président* à la municipalité et à la garde nationale de tulle, à laquelle elle reconnaît devoir la paix dont la province jouit depuis deux mois.
Mais eller ajoute qu'effrayé^ des cruels effets qu'opère déjà la noire calomnie que des. députés extraodinaires de Brive ont répandue de toutes parts, et qui peui détruire la tranquillité naissante, mais non encore suffisamment affermie, elle supplie l'Assemblée d'ordonner un jugement local des personnes détenues dans les prisons de Tulle.
CONCÈZË.
Délibération de la commune de Goncèze, du E 21 mars, par laquelle, informée que certaines personnes se donnent de grands mouvements auprès de l'Assemblée nationale pour soustraire à la justice les personnes accusées de sédition, détenues dans les prisons de Tulle* elle arrête de solliciter l'Assemblée nationale de donner des ordres pour que le procès de tous les auteurs et complices de» désordres commis à Alassac, Glandier et antres lieux, leur sioit fait selon la rigueur des lois* l'indulgence ne pouvant être que dangereuse pour la sûreté publique
CORRÉZE.
Discours du procureur de la commune de Cor-rèze, et délibération de ladite commune.
On rend compte dans le discours des heureux effets de la conduite fermé et généreuse de la gardq nationale de Tulle à Favars. On y dit que des ennemis du bien publie commençaient fc persuader dans la province à Une classe d'hommes que tes atfenêats eônfre là propriété seraient im^ punis, ét que sans le sêeottrs de te milice ftatio"
nale de Tulle et d'un détachement de Royal-Navarre, envoyé par la ville de Limoges, toute la province était en danger. Ou y dénonce la lettre des députés de Brive, contenue au n° 155 du journal du sieur Mercier, intitulé -.Annales politiques, comme calomnieux envers la ville de Tulle ; enfin on y établit la nécessité de faire juger les prisonniers de Tulle, et notamment le sieur Durieux,
La délibération de la commune adopte toutes ces vues d'une voix unanime ; supplie l'Assemblée de faire instruire avec célérité le procès des auteurs et complices des désordres, et en particulier du sieur Durieux; demande satisfaction pour la ville de Tulle contre les imputations qui lui sont faites dans les Annales du sieur Mercier, et supplie enfin l'Assemblée de fixer le tribunal du département à Tulle, comme la ville qui a le plus grand nombre de sujets propres à en remplir les importantes fonctions.
ÉGLETONS.
Discours du procureur-syndic de la commune, qui lui dénonce la lettre insérée au journal du sieur Mercier, comme un libelle atroce envers la ville de Tulle, qui mérite, dit-il, et les éloges et la reconnaissance de toute la province.
Sur quoi il est arrêté par le conseil général de la commune qu'il sera fait une adresse à l'Assemblée nationale, pour la supplier de croire que c'est l'opinion générale des habitants de la province, qu'ils doivent leur salut à l'expédition faite par la milice nationale de Tulle dans les paroisses de Chanteix et de Favars, et que l'unique moyen de maintenir la tranquillité est que le procès des prisonniers de Tulle soit continué sans délai avec tout l'éclat possible, et que la peine de ceux qui seront reconnus coupables leur spit infligée sur les lieux.
L'envoi de cette délibération à la ville de Tulle est accompagné d'une lettre du maire d'Egle-tons, qui là félicite sur la bravoure et le patriotisme qu'elle a montrés en arrêtant les désordres et le pillage, et qui lui offre les secours de la ville d Egletons pour la seconder.
EYMOUTIER.
Délibération du conseil général de la commune d'Eymoutier, par laquelle, lecture faite de ladé-libération de la commune d'Uzerche, tendar. à obtenir de l'Assemblée nationale qu'on instruise de la manière la plus publique le procès des auteurs et complices des troubles et désordres qui ont eu lieu dans le Bas-Limousin : considérant que la justice et l'amour de l'ordre ont seuls dicté ladite délibération, elle y donne son entière et parfaite adhésion.
Elle arrête, en conséquence, qu'il sera fait de très respectueuses adresses à l'Assemblée nationale pour qu'elle donne des ordres de poursuivre, suivant la rigueur des lois, les coupables ou prévenus détenus dans les prisons de Tulle, et particulièrement le nommé Durieux.
FAVARS.
Dans l'assemblée de cette commune, le 28 mars, le maire commence par professer l'adhésion la plus absolue aux décrets de l'Assemblée nationale. Il peint la situation critique de la commune
de Favars lorsqu'elle vit sa paroisse assiégée par une armée de brigands, avant que la municipalité fût formée, et trop faible par elle-même pour se défendre ; il atteste qu'au milieu de ces troubles les habitants de Favars n'ont point cessé de reconnaître et de respecter les lois protectrices de toutes les propriétés (ce qui prouve qu'aucun n'avait à se plaindre des seigneurs, et ce qui dément ce qu'on a avancé, que les imprudences et les cruautés des seigneurs ont provoqué les violences des paysans.) Il rend à la maréchaussée et garde nationale de Tulle le témoignage qu'ils ont employé le courage et la prudence ; qu'ils ont vaincu en ménageant le sang. Il assure que la punition des séditieux détenus dans les prisons de Tulle peut seule empêcher les troubles de renaître, et qu'une amnistie ou pardon serait pour les ennemis de la tranquillité publique une force d'approbation donnée par l'Assemblée nationale aux désordres qui ont mis la province à deux doigts de sa perte, et un cri de ralliement pour y consommer le ravage des propriétés et faire ensanglanter les maisons.
Par délibération unanime, la commune arrête que le discours du maire sera transcrit sur les registres, et adressé à l'Assemblée nationale, comme exprimant les sentiments et les vœux de la commune de Favars.
FORZES.
Discours du procureur de la commune de Forzès, qui dénonce la lettre insérée dans le n° 155 des Annales du sieur Mercier, comme calomnieuse envers la garde nationale de Tulle, et capable d'allumer la guerre civile dans le Limousin, qui dément les diverses assertions faites par les auteurs de cette lettre : 1° en ce qu'ils assurent que les paysans n'ont pas fait feu les premiers à Favars, tandis que personne n'ignore que le lieutenant de la maréchaussée a été grièvement blessé de coups de feu en parlant aux séditieux ;
2° En ce qu'ils disent que le désordre a été le fruit de l'imprudence ou de la cruauté des ci-devant privilégiés, tandis qu'il n'y a jamais eu aucune plainte élevée contre la dame de Favars, ni contre le sieur de Lamaze, seigneur de Houssignac ; qu'il a été reconnu notamment que parmi les attroupés de Favars il n'y avait point de censitaire de la dame de Saint-Hilaire, et que les Chartreux de Glandier et tant d'autres honnêtes citoyens insultés, pillés, ont toujours eu une conduite douce et irréprochable ;
3° En ce qu'ils soutiennent que les attroupements n'ont eu pour but que de démolir les bancs des églises, tandis qu'un grand nombre de maisons ont été pillés :
4° En ce qu ils qualifient la garde nationale de Tulle d'assassins, et la journée de Favars comme le triomphe de l'aristocratie, consacré par le tribunal prévôtal de Tulle; tandis qu'en défendant sa vie avec ses biens et ceux de ses parents, amis et voisins, on mérite des éloges, et que si c'est là être aristocrate, il n'est personne qui ne doive s'empresser de passer pour tel ;
5° En ce qu'ils assurent que les séditieux sont des pères de famille aimés, estimés, de bons sujets, tandis qu'il est notoire que la plupart sont des gens sans aveux et n'ayant rien à perdre, qui donnent le nom odieux d'aristocrates non seulement aux nobles et ci-devant privilégiés, mais à tout citoyen jouissant de quelque bien-être et de quelque propriété.
Sur quoi la commune déclare les faits contenus en la lettre insérée au journal du sieur Mercier faux et calomnieux, et la conduite des citoyens de la garde nationale, du lieutenant du prévôt de la maréchaussée, digues des éloges et de la reconnaissance de la province, comme ayant arrêté les séditions et brigandage dont elle allait être le théâtre.
Elle déclare, en outre, qu'elle est indignée de l'apologie faite par les auteurs de ladite lettre, du nommé Durieux, auteur, fauteur et principal mobile des attroupements, que les députés de Brive appellent citoyen le plus zélé et le plus brave que leur ville renferme dans son sein.
Enfin elle finit par supplier l'Assemblée de presser le jugement dudit Durieux et autres prisonniers détenus aux prisons de Tulle, le salut , des honnêtes citoyens, leur vie et la sûreté publique dépendant de la plus prompte et de la plus sévere justice.
HAUTEFAGE.
Lettre de la municipalité d'Hautefage, du 15 mars, à la municipalité et à la garde nationale de Tulle, où elle les félicite des éloges que leur a donnés l'Assemblée nationale par forgane de son président. Elle peint les violences des brigands, les alarmes des citoyens, les progrès de l'insurec-tion qui menaçait d'embraser toute la province, enfin les succès des mesures prises par la garde nationale de Tulle, qu'elle loue ausôi de la modération dont elle a usé envers les coupables.
LE LONZAG.
La commune de Lonzac, assemblée le 19 mars, adresse à l'Assemblée nationale l'assurance de son adhésion respectueuse et soumise à tous ses décrets, lui renouvelle le serment de maintenir la Constitution et d'être fidèle à la nation, à la loi et au roi, et lui envoie en même temps un arrêté du même jour, dans lequel il exprime sa reconnaissance envers la ville de Tulle pour la sagesse des mesures qu'a prises le comité de cette ville, et la valenr qu'a montrée sa garde nationale, ainsi que celle de Lubereac. Elle parle avec indignation des écrits et mémoires de quelques citoyens de la ville de Brive publiés dans les journaux, et qui ont pour objet de blâmer les honnêtes citoyens de la ville de Tulle, à qui elle croit devoir la fin des troubles et le repos de la province ; elle adhère d'une voix unanime à l'arrêté de la ville d'Uzerche, et demande, comme elle, que le procès soit faitpromptement aux accusés, auteurs et complices des insurrections ; enfin elle réclame contre l'amnistie qui encouragerait de nouveaux désordres.
LA CR01SILLE.
Lettre du 21 mats, des officiers municipaux de la Croisille à la municipalité de Tulle, où ils l'assurent des dispositions de leur commune à se réunir à elle toutes les fois qu'il s'agira de maintenir l'ordre et la sûreté publique. Ils ont ignoré, disent-ils, qu'il fût question de leur rendre témoignage auprès de l'Assemblée nationale, mais ils sont persuadés de la nécessité de faire le procès au nommé Durieux et aux autres accusés détenus dans les prisons de Tulle, et ils craignent tout, si
la moindre grâce est accordée aux perturbateurs du repos public.
LA GARDE.
Le procureur de la commune, assemblée le 25 mars, rappelle les désordres qui ont affligé la provinee, la conduite ferme et généreuse des citoyens formant la garde nationale de Tulle, qui ont sauvé la province de plus grands malheurs, et la lettre écrite, au nom de l'Assemblée nationale, par son président, où l'Assemblée a rendu justice à leur zèle et applaudi à leur conduite.
Il s'étonne ensuite de la hardiesse des deux soi-disant députés extraordinaires de Brive qui ont tenté de flétrir ces estimables citoyens, par la lettre qu'ils ont insérée au n° 155 des Annales du sieur Mercier, et qui, plus est, de soustraire les séditieux et moteurs de séditions à la sévérité de la justice, ce qui porterait à la province le coup fatal. Il rappelle aux habitants combien de fois ils ont entendu répéter autour d'eux que la justice n'avait plus de force, que l'Assemblée nationale et le roi, dont on prostituait les noms sacrés, autorisaient les vexations dont on pourrait user envers les riches. Il finit par déclarer que tout est perdu si la justice ne reprend toute son activité.
Sur quoi la commune, adoptant le réquisitoire de son procureur comme très sage et très salutaire, arrête : 1° de protester de nouveau à l'As-" semblée de son respect pour ses décrets, et de sa disposition à défendre au prix de son sang la Constitution qui doit faire le bonheur de tous ;
2° De punir les coupables détracteurs de la commune et de la maréchaussée et milice de Tulle, bons citoyens, qui, après avoir exposé leur vie pour le salut public, ne doivent pas être impunément l'objet de la calomnie et de la diffamation ;
3° De rendre à la justice son activité, en ordonnant que les moteurs, instigateurs et auteurs des insurrections seront recherchés et punis selon la rigueur des lois ;
4° D'envoyer à l'Assemblée nationale copie de la présente délibération.
A la délibération est jointe une adresse exprimant les mêmes sentiments.
LA GRAULIÈRE.
Lettre et délibération de la commune de la Graulière, dans laquelle elle loue avec reconnaissance la garde nationale de Tulle, d'Uzerche et de Lubersac; attribue à leur conduite courageuse le retour de la tranquillité; elle exprime ses craintes que cette tranquillité ne soit bientôt troublée par des ennemis publics qu'elle voit en même temps comme des ennemis de la Révolution. Elle emploie les expressions les plus fortes contre ceux qui ont eu l'adresse d'exciter la pitié dans l'âme des augustes représentants de la nation, en faveur de quelques brigands dont la punition est nécessaire pour ramener l'ordre, et les taxent d'avoir employé pour cela le langage du mensonge et de la calomnie. Enfin en assurant l'Assemblée nationale d'une entière adhésion à tousses décrets, et d'une parfaite reconnaissance, elle exprime son vœu pour que les brigands détenus aux prisons de Tulle soient punis suivant toute la rigueur de la loi.
LÎMOGES.
Lettre de la municipalité de Limoges, qui offre
las secours de sa garde nationale à la ville de Tulle, pour concourir avec celle-ci au maintien de l'ordre public.
Délibération de la municipalité de la ville de Limoges, où les officiers" municipaux, rendant hommage à la conduite ferme, juste et loyale de la commune et garde nationale de la ville de Tulle, reconnaissent que c'est à cette conduite et à la sévérité employée dans cette circonstance que le haut et bas Limousjsi doivent leur tranquillité, et expriment leur vœu pour que Ja commune et la garde nationale de Tulle obtiennent auprès de I Assemblée nationale Ja Justice qui leur est due.
LUBERSAC.
Délibération de la commune de Lubersac sur le discours de son maire, dans lequel if est dit que la province doit son repos aux exemples de justice faits à Tulle j qu'elle craint qu'il ne soit bientôt troublé, si les mouvements que quelques personnes se donnent pour arracher à la punition plusieurs accusés et prévenus de crimes commis dans la province, sous le faux prétexte qu'ils sont les victimes innocentes de l'aristocratie; que la garde nationale de Tulle blâmée dans plusieurs ouvrages périodiques, dans le courage même qu'elle a montré à maintenir les décrets de l'Assemblée nationale, que violaient des troupes de brigands, a écarté de la province le pillage et les dévastations, mais que Ceè désordres vont renaître si on parvient à suspendre le cours des procédures ; suspension qui équivaudra à utie véritable impunité.
Sur cet exposé, la commune arrête d'une voix unanime, de prier et solliciter l'Assemblée patio-nale de faire instruire avec éclat et promptitude le procès de tous ceux qui sont détenus dans les prisons de Tulle; que l'opinion répandue déjà dans la province, que les coupables ne seront pas punis alarme tous les bons citoyens ; elle finit par conjurer l'Assemblée de se rappeler l'hommage d'amour, de respect et de reconnaissance qu'elle a adressé à l'Assemblée, l'adhésiou qu'elle a professée à ses décrets et son serment de maintenir la Constitution ; d'où elle conclut qu'en demandant que les coupables soient punis, elle n'exprime que Je vœu des bons patriotes qui ne veulent que l'établissement de l'ordre et la tranquillité.
MARTEL.
Délibération de Ja municipalité de la ville de Martel, eh Querçy, par laquelle, d'après un ex-> posé fait dan? le discours du maire, ët qu'elle déclaré né présenter que vérités également èènitiies et effrayantes, elle supplie l'Assamblée nationale de. donner des ordres pour que la force publique soit sans délai déployée dans les provinces du Qu.erçy( limousin et Périgprd, et qu'il soit procédé sans délai aux poursuites nécessaires contre les auteurs des troubles et désor* drës, et à l'exécution des jugements qui inter^ viendront. '
A quoi nous devons ajouter les principaux traits du discours du maire, adopté, comme on. voit, par la commune '; on y lit que la conduite également sage et ferme de la garde nationale de Tulle a épouvanté les méchants... que les exemples de justice fëftè aans la même ville ont annoncé que la loi veillait au s^lut des eitqyens--que ceux qui ont Osé calomnier ces généreux
défenseurs des propriétés n'ont répandu que des mensonges dans le narré des faits, et en désignant sous le nom odieux d'aristocrates ceux qui ont repoussé des actes de violence, et en peignant le pillage, le vol et les attroupements comme une erreur de l'esprit et les suites de vexations antérieures.
~ « Ne craignez pas, dit encore le maire de Martel, ne craignez pas, citoyens généreux, leB suites de cette calomnie ; si la défense des propriétés est un crime, nous le partageons avec vous. Si vous êtes en cela des aristocrates, nous le sommes tous avec vous; mais loin de vous regarder comme criminels, nous vous proclamons les restaurateurs de la tranquillité publique. Ce n'est pas le poignard des assassins qu'on a vu dans vos mains, c'est le glaive de la justice. Ce ne sont pas des reproches qui vous sont dus, c'est la couronne civique. »
« Témoins oculaires du mal et des effets du remède, disons à l'Assemblée nationale : des méchants avaient armé le peuple, et l'avaient entraîné dans le crime... Nous avons vu le moment d'une subversion totale; le glaive de la justice" a brillé, l'orage s'est dissipé : mais de nouveaux attentats nous menacent, si la force publique n'est déployée ; ouvrez-nous le temple de la loi, que ses ministres y prononcent ses oracles avec réclat et la promptitude que le bien public réclame hautement. »
MEYMAC
Délibération de la municipalité de Meymac, d'après un discours de son procureur syndic, le 15 mars.
Dans le discours on défère la lettre des deux députés de Brive, insérée au journal du sieur Mercier, comme ayant déguisé les faits par des faussetés patentes et des calomnies atroces contre les bons citoyens de la ville de Tulle qui pot préservé le bas Limousin et les provinces adjacentes des périls qui les menaçaient.
Sur quoi la commune» lecture faite de ladite lettre» la déclare fausse et calomnieuse, atteste que plusieurs châteaux et maisons, non seule* ment des nobles et ci-devant privilégiés» mais de bourgeois et propriétaires, ont été pillées par des troupes de plus de six cents hommes armés de fusils et autres armes; que la milice de Tulle n'a tiré à Favars qu'après le feu fait sur elle par les brigands ; que c'est une fausseté notoire avancée par les deux députés que les brigands ne s'étaient assemblés que pour se réjouir de la liberté, planter des mais, et brûler quelques bancs; que c'est une calomnie non moins révolu tante que celle des auteurs de ladite lettre, qui taxent de cruauté lé tribunal préyôtal de la ville de Tulle qui n'a condamné quelques-un? des coupables, que d'après une procédure légitime et des preuves complètes. v
Qu'elle s'adresse en oonsôqUtince à l'Assemblée nationale, pour la supplier d'ordonner instamment au tribunal de la prévôté de Tulle d'instruire le procès des coupables non encore jugés, et notamment du sieur pqrieus, qui, bien qu'ap* pelé, par les auteurs de la lettre, honnête bon citoyen et leur digne camarade, est aqcpsé, par l'opinion publique, d'être un des principaux auteurs et fauteurs desdits troubles et insurrec-» lions, Elle fi^t par adresser â i^t ville de tuile» conjointement, dit-elle, avec toutes les communes de la province, les femercîmepts les plus éffl» pressés et les témoignages de leur plus vive re?
connaissance pour le patriotisme, la prudence et le courage de sa municipalité et de sa garde nationale, à qui la province doit sa sûreté et sa tranquillité.
Il y a une autre délibération du 16, par laquelle lecture faite de la lettre de M. le président de l'Assemblée nationale à la garde natio^ nale de Tulle, arrête de consigner dans ses registres cette lettre honorable à la garde nationale de Tulle.
MEYSSAC.
Lettre des officiers municipaux de Meyssac, du 16 mars, à la municipalité de Tulle, dans laquelle ils expriment fortement leur improbation de la lettre des députés de Brive, en ce qu'elle inculpe la garde nationale de Tulle et le tribunal prévôtal, et où ils annoncent qu'ils ont écrit à l'Assemblée nationale pour déposer auprès d'elle les témoignages de tous les sentiments de leur commune pour celle de Tulle, qu'ils disent avoir sauvé la province.
NAVES.
Délibération de la commune de Naves, du 20 mars. C'est une des plus détaillées de celles qui nous sont parvenues; on y exprime d'abord la crainte de nouveaux troubles pour la province; on s'y plaint de la délation faite à l'Assemblée nationale par deux députés de Brive, de la conduite de la municipalité et garde nationale de Tulle, et de l'amnistie' demandée pour les coupables détenus dans les prisons ae Tulle ; on y dit que toute la province est indignée de cette calomnie, et alarmée d'une tentative dont le succès encouragerait le crime par l'impunité, en conduisant le peuple à confondre la licence et le désordre avec la liberté. On y observe qu'il est d'autant plus nécessaire de contenir les brigands, qu'après avoir attaqué les propriétés des seigneurs, ils se sont portés sur celles des bourgeois et qu'ils allaient bientôt se jeter sans exception sur" toutes les propriétés,
La commune de Naves rend, de l'affaire de Favars, le même compte que toutes les autres, parle avec les mêmes éloges de la conduite de la garde nationale et de la maréchaussée, et, avec ïa même reconnaissance, des heureux effets de son expédition pour le repos de la province,
Elle insiste comme les autres sur la nécessité de faire suivre le procès et la punition dé ceux qui sont détenus dans les prisons de Tulle, et notamment celui du sieur Durieux, d'après les preuves légales et la rigueur des lois.
Il en coûte, dit-elle, à notre coeur de solliciter une punition; nous solliciterions plus volontiers une amnistie, si nous pouvions nous persuader que la clémence et le pardon sont compatibles dans les circonstances actuelles avec la sûreté de la province ; mais nous ne pouvons nous dissimuler qu'une amnistie produirait dans ce moment les effets les plus funestes : les ennemis de l'ordre public séduiraient de nouveau les habitants des campagnes, à qui on persuadait, même avant la démarche des députés de Briye, que les prisonniers de Tulle n'avaient rien à craindre et seraient relâchés,
La commune finit par prier l'Assemblée nationale de rendre le calme à la province en prenant en considération la situation critique et malheureuse où elle est réduite par les premières insur-
rections, par la disette et la cherté des grains et par le fardeau des impositions.
NEUVIC.
Adresse de la commune de la ville de Neuvic, qui sollicite 1'A.ssemblée nationale de placer le chef-lieu du département dans la ville de Tulle, et qui appuie cette demande sur les services im-* portants qu'a rendus à toute la province la ville de Tulle, en réprimant les insurrections par le courage de la garde nationale et par la conduite de ses juges, qui ont instruit le procès des personnes détenues pour y avoir eu part; elle s'élève, à cette occasion, contre le discours de M. l'abbé Mulot à l'Assemblée nationale, au nom de la commune de Paris, qu'elle dit n'avoir pas été instruite des faits ; et elle demande que le procès du sieur Durieux et autres, ses co-accusés, détenus dans les prisons de Tulle, continue de s'instruire, afin que les exemples influent sur toute la province, où l'on peut craindre encore de voir les désordres se renouveler»
NONARS.
Lettre du maire et officiers municipaux de Nonars à la municipalité de Tulle, du 26 mars.
La municipalité de Nonars, nouvellement for-» mée, s'empresse de témoigner sa reconnaissance à la municipalité de Tulle, pour la conduite brave et généreuse de sa milice nationale poutre les brigands ; conduite à laquelle, selon le cri général de la province, est due la tranquillité et la sûreté dont elle jouit.
Elle adresse en même temps à la municipalité de Tulle la supplication qu'elle fait à l'Assemblée nationale de faire suivre, suivant les lois et jusqu'à jugement définitif, le procès du nommé Durieux, proclamé dans tout le BasHUmousin comme un des auteurs et instigateurs des Séditions, et dont la détention a contribué à rendre le calme à la province.
ORGNAC.
Discours du maire, dans lequel il dénonce de mauvais sujets de la province qui travaillent à perpétuer les désordres, en excusant les coupables auprès des représentants de la nation, tentative qui ne pourrait réussir sans compromettre la sûreté et la propriété de tous les citoyens : sur quoi la commune a délibéré unanimement de se réunir aux différentes communes qui l'avoir sinent, et notamment à celles d'Uzerche et de Tulle, pour demander à l'Assemblée nationale qu'elle donne incessamment des ordres pour faire instruire le procès aux moteurs et auteurs des troubles et pillages, et surtout au sieur Durieux, reconnu ppur un de ceux qui ont le plus travaillé à tromper et égarer le peyple,
PERPEAC-LE-NOIR.
Discours du maire, où il est dit que les excès commis dans la province depuis plusieurs mois ne se sont arrêtés qui par les soins d'une vertueuse confédération des municipalités zélées pour le rétablissement dg l'ordre, et pour faire respecter et observer les décrets de l'Assemblée nationale; que c'est calomnieusement que des
émissaires du comité de Brive ont répandu, à l'aide de quelques feuilles périodiques, que le Bas-Limousin n'était peuplé que d'aristocrates, et que les dévastations faites à Alassac, à Favars, à Glandier, et les incursions sur les propriétés des citoyens, n'ont été que le fruit d une honnête liberté ; de sorte qu'à les entendre il n'y aurait d'honnêtes citoyens, de patriotes zélés et d'amis du peuple, que des hommes révoltés, ennemis de tout ordre et de toute subordination, courant les campagnes, pillant les châteaux et les maisons, exigeant des contributions; que la ruine de la province est certaine et prochaine, si l'on ne prévient pas les suites de ces funestes impressions répandues par quelques membres du comité et un petit nombre d'habitants de la ville de Brive.
Sur quoi la commune arrête de supplier l'Assemblée nationale de faire instruire, sans délai et sans interruption, et avec le plus grand éclat, le procès des prisonniers détenus à Tulle, et notamment du sieur Durieux, comme prévenus d'être auteurs et participants des pillages et violences exercées à Alassac, Favars, Glandier et autres lieux, et accusés, non pas par les cris des aristocrates, comme le répandent les députés du comité de Brive, mais par la voix publique ; elle déclare que la cessation des désordres, restés longtemps impunis par l'inaction du ministère public, trop faible pour réprimer tant de violences, est due aux efforts généreux des municipalités d'Uzerche, de Vigeois, de Lubersac, et surtout à la conduite de la garde nationale de Tulle à Favars ; elle observe que cet heureux effet n'est nullement dû à la lettre circulaire adressée par le comité de Brive, aux habitants de la campagne, bien longtemps après l'action de Favars, et que les principes de cette lettre sont à la vérité ceux d'un véritable patriotisme ; mais qu'on ne peut les concilier avec les lettres incendiaires consignées dans les papiers publics par les députés du même comité de Brive dans lesquelles ils cherchent à inculper les communes de Tulle et d'Uzerche, sur la conduite qu'elles ont tenue pour ramener la tranquillité dans le pays.
P1ERREFITE.
Délibération de la commune de Pierrefite, précédée du discours de son maire, qui, après avoir exprimé le respect et la reconnaissance de la commune envers les représentants de la nation, pour leur zèle et leurs bienfaits, se plaint de voir en péril la liberté même qu'on leur doit, à la suite des excès dont la province a été le théâtre, et qu'elle craint de voir se renouveler. Il fait l'éloge de la conduite de la ville et de la justice de Tulle envers les séditieux qu'elle a condamnés. Il se plaint des papiers publics où l'on a tenté de justifier la conduite des brigands.
Sur quoi la commune arrête de représenter à l'Assemblée nationale, qu'une amnistie qu'on surprendrait d'elle sur un exposé calomnieux, deviendrait la source d'excès nouveaux et plus violents et de la supplier d'ordonner que le procès sera fait à tous les auteurs et moteurs des troubles, la punition étant le moyen le plus efficace de réprimer de pareils attentats.
PUY-D'ARNAC.
Délibération de cette commune, du 22 mars. D'après un discours du maire, où il est dit que la
commune ayant vu avec douleur les désordres de la province, craignant de les voir renaître, et trop faible pour s'en défendre par elle-même, elle croit n'avoir d'autre parti à prendre que de s'unir aux communes de Tulle et d'Uzerche dans les sages dispositions que leur patriotisme leur a fait prendre pour la tranquillité publique; qu'elle ne peut se dispenser de rendre témoignage au courage de la milice nationale de Tulle à l'affaire de Favars; qu'elle ne peut comprendre comment quelques citoyens de Brive ont osé inculper les citoyens de Tulle', et les donner comme des assassins, lorsqu'ils ont au contraire arrêté le cours des assassinats et des violences de toute espèce qui allaient désoler tout le pays; que l'exécution faite à Tulle de deux des coupables, a produit un effet salutaire; qu'il est nécessaire de poursuivre la procédure contre les autres prévenus détenus dans les prisons, et en particulier contre le sieur Durieux, qu'elle accusa d'avoir excité le peuple dès le mois de décembre, à Vegennes, où les troubles ont commencé, et d'où ils se sont portés à Puy-d'Arnac même; enfin cette commune, de concert avec toutes celles du Bas-Limousin, supplie l'Assemblée nationale d'avoir égard à sa très respectueuse représentation, en pourvoyant aux moyens les plus prompts d'assurer la tranquillité publique.
SAINT-CHAMANS ET SAINT-PARDOUX.
Délibération des communes réunies de Saint-Ghamans et de Saint-Pardoux, du 14 mars, ouverte par un discours du procureur de la commune, qui dénonce la lettre du journal du sieur Mercier, écrite par les deux députés du comité de Brive, comme contenant un faux exposé de l'affaire de Favars, des imputations injurieuses à la garde nationale de Tulle, sur lequel les deux communes arrêtent une adresse à la ville de Tulle.
Dans cette adresse, les deux communes expriment leur indignation contre la lettre des députés, comme remplie d'allégations mensongères et de faits dénaturés. Elles rendent hommage à la conduite brave et généreuse de la milice de Tulle à Favars. Elles rappellent les violences faites par les brigands, les exhortations qui leur furent faites par le lieutenant de la maréchaussée, qui.fut dangereusement blessé en leur parlant. Elles assurent que le plan des séditieux, après avoir pillé Favars, était de se porter sur Poissac, La Morguie, etc, etc. ; d'aller forcer les prisons à Tulle, et de se répandre dans le reste de la province. Elles reconnaissent qu'elles doivent à la bravoure des gardes nationales de Tulle la conservation de leurs propriétés; enfin elles demandent aux gardes nationales de Tulle de regarder la milice de leurs communes comme fraternisant avec elles, et elles invitent les tribunaux de Tulle de poursuivre le procès du sieur Durieux et des autres détenus.
SAINTE-FORTUNADE.
Cette commune, assemblée le 23 mars, traite de libelles les écrits répandus dans les journaux contre la ville de Tulle, à qui elle reconnaît devoir le maintien de l'ordre public, et pour qui elle exprime la plus grande reconnaissance, et sollicite de l'Assemblée nationale d'ordonner que le procès soit fait aux accusés détenus dans les
prisons de Tulle, et notamment au sieur Durieux ; déclarant que ce vœu est celui de tous les bons citoyens, et en particulier des cultivateurs et laboureurs, persuadés qu'une amnistie ramènerait tous les désordres.
SAINT-GE RM AIN-LES - VERGNÈS.
Cette commune s'adresse directement à l'Assemblée nationale, disant :
Que le sursis à l'exécution des jugements de Tulle a été surpris à sa sagesse; qu'on a calomnié auprès d'elle la conduite du prévôt et de son lieutenant; que les bons citoyens doivent faire leurs efforts pour la détromper.
Que la grandeur des désordres qui ont eu lieu dans la province ne peut être révoquée en doute ; qu'il est de notoriété la plus certaine que, dans la plupart des paroisses du bas Limousin, non seulement les bancs, tant des seigneurs que des bourgeois, ont été brisés ou brûlésj mais qu'on y a planté des mais portant inscription et défense de payer ni recevoir à l'avenir aucune dîme ni rente, sous peine d'être pendu.
Qu'on a fait croire au peuple qu'il n'y avait plus de justice, et que non seulement les seigneurs, mais les prêtres, les citoyens de toutes les classes aisées, les simples laboureurs et métayers ont vu leurs propriétés et leurs personnes exposées aux plus grands dangers.
La commune de Saint-Germain fait ensuite un tableau très détaillé des excès commis à Lissac, à Alassac, chez les Chartreux de Glandier, où, dit-elle, le supérieur eut plusieurs amorces brûlées sur lui, et où les religieux durent leur salut à un détachement de Royal-Na-Varre et à la milice nationale de Lubersac.
Elle atteste qu'une troupe de 400 hommes, précédée d'un tambour et d'un fifre, ayant sonné le tocsin dans l'église de Saint-Germain, a forcé plusieurs habitants, et notamment le curé et le procureur de la commune, soussignés, de se joindre à elle, par la menace de mettre le feu à leur maison, que les honnêtes gens, ainsi forcés, ne purent éviter d'aller jusqu'à Favars, qu'en se dérobant en chemin,
Elle raconte l'affaire de Favars, comme les autres relations, en rendant témoignage à la modération des citoyens de Tulle, et en a'ssu-rant que le nombre des morts a été fort exagéré, et qu il n'a pas passé trois ou quatre personnes.
Elle ajoute que les jugements rendus à Tulle paraissaient nécessaires à tous les bons citoyens, a tous les amis de la paix ; qu'ils ont prouvé à la classe ignorante et trompée du peuple que les méfaits sont encore punis, et que la justice së fait encore ; que si les désordres recommençaient, ils compromettraient la liberté même à laquelle l'Assemblée travaille avec tant d'ardeur.
Elle supplie enfin l'Asssemblée nationale d'ordonner incessamment le jugement de tous les prévenus détenus dans les prisons de Tulle et notamment celui du sieur Durieux, qui passe pour s'être trouvé dans presque tous les attroupements ; et réclame, en finissant, contre l'intervention de la commune de Paris dans cette affaire, tant à raison de ce qu'elle n'a pas pu bien connaître les faits que parce qu'elle n'a point ce droit par la Constitution. 25 mars.
SAINT-JAL.
Discours du maire de la commune de Saint-Jal, et délibération de la commune, du 21 mars.
Le discours du maire exprime d'abord la reconnaissance et le respect de la commune pour l'Assemblée nationale, et en même temps la nécessité de maintenir la paix et l'ordre pour seconder ses travaux et répondre à ses vues. On y peint ensuite les désordres dont la province a été la proie ; les dangers dont elle a été délivrée par la conduite ferme et vigoureuse des municipalités et gardes nationales de Tulle, d'Uzer-che, de Lubersac, et des maréchaussées, et l'espoir qu'elle fonde sur le jugement et la punition des coupables, pour ramener la paix.
La délibération arrête, d'une voix unanime, de nouvelles protestations de respect pour l'Assemblée nationale, de soumission à ses décrets, de zèle pour la Constitution, qu'elle fait serment de maintenir. En même temps, se réunissant d'intention et d'affection aux communes d'Uzer-che et de Tulle, auxquelles elle voue une éternelle reconnaissance pour la conduite par laquelle elles ont sauvé la province, elle supplie l'Assemblée d'ordonner que les auteurs et moteurs des désordres soient poursuivis et reçoivent le châtiment qui leur est dû, d'autant, disent-ils, que les habitants de la commune, sentant le prix de la liberté qu'ils ont recouvrée, sont indignés de la voir en danger par une licence effrénée, destructive de la société.
La délibération est envoyée à la commune de Tulle, avec une lettre de remerciements pour la municipalité et la garde nationale.
SAINT-PARDOUX-L'ENFANTIER.
Délibération du 19 mars, précédée d'un discours du maire.
L'assemblée, dit-il, est convoquée d'après la crainte de voir suspendre le jugement des prisonniers de Tulle. Il rappelle les désordres commis à Favars, à Glandier, à Alassac, à Saint-Bonnet et sur plusieurs propriétés bourgeoises : il dit que les deux exécutions de Tulle ont ramené le calme, et que les pillages recommenceront bientôt si l'on met quelque lenteur à poursuivre les criminels.
La délibération est d'après ces principes. La commune, d'une voix unanime, sollicite l'Assemblée nationale d'ordonner de faire instruire avec promptitude et éclat le procès de tous ceux qui sont détenus dans les prisons de Tulle et elle atteste à l'Assemblée que, sans les punitions qui ont été faites, la vigilance des officiers civils et militaires n'aurait pas pu empêcher de nouveaux désastres, attendu qu'on avait persuadé au peuple que ses excès demeureraient impunis.
SAIN7-MARTIN-SEPERTS.
La délibération de cette commune est la même que celle de Saint-Pardoux.
SAINTE-SOLVE.
Délibération de la commune de Sainte-Solve, du 21 mars, adressée à l'Assemblée nationale, par
laquelle, instruite que certains particuliers font leur possible pour disculper auprès de l'Assemblée nationale les personnes accusées des désordres affreux qui se sont commis dans le bas Limousin, elle supplie les augustes représentants de la nation de faire faire le procès à tous ceux qui seront reconnus auteurs, fauteurs et instigateurs de ces mêmes troubles, séditions et insurrections, et de les faire punir suivant la rigueur des lois.
SALON.
Délibération et adresse du conseil général de la commune de Salon, du 25 mars, qui n'est autre chose que le discours du maire, adopté par la commune et adressé à l'Assemblée nationale.
Le maire y rappelle les troubles et les désordres de la province, arrêtés lorsque la garde nationale et quelques troupes réglées les ontheureusement réprimés, 11 remarque que, lorsqu'on eut conduit dans les prisons de Tulle les coupables pris dans les attroupements, on répandit parmi le peuple qu'on n'oserait punir aucun des prisonniers, qu on leur donnerait au contraire des dommages et intérêts, et qu'on leur paierait leurs journées; que le supplice de deux des coupables avait désabusé le peuple et arrêté les désordres qui menaçaient de s'étendre dans toute la province.
Qu'on apprenait cependant que de soi-disant députés de l'ancien comité 4e Brive, les sieurs Serre le jeune et Paye, dans une lettre insérée aux Annales du sieur Mercier, avalent pris la défense des brigands détenus dans les prisons de Tulle, qui ont été arrêtés en attroupement et les armes à la main contre les citoyens.
Que, sans révoquer en doute les sentiments d'humanité de Tancien comité de Brive, le succès de leurs tentalives aUprès de l'Assémblée nationale pourrait causer la perte de la province.
Qu'aujourd'hui, par de nouveaux écrits et propos répandus dans la populace, on cherche à lui persuader que les condamnés sont des victimes immolées par les aristocrates, et que l'Assemblée improuve la conduite du prévôt et l'a destitué. Que si ces bruits achevaient de prendre crédit par l'amnistie que les députés de Brive osent solliciter, les attentats et les violences du peuple recommenceraient. Que, dans ces circonstances, la commune de Salon élève sa voix yers les pères de la patrie pour les supplier de faire suivre le procès pour Ses prisonniers détenus h Tuile.
ke maire observe que le vœu de sa commune ne peut être suspect, aux représentants delà nation ; que cette commune pauvre n'a ni passions â satisfaire, ni grands intérêts a ménager; que les officiers municipaux vivant avec les paysans connaissent mieux leursdlspositionsque Messieurs de l'ancien comité de Briye, etc,
Sur quoi la matière mise en délibération, et après avoir entendu plusieurs fois lecture faite à haute voix des raisons ci-dessus énoncées qu'il a trouvées conformes à la vérité, le Conseil général de la commune supplie l'Assemblée nationale d'avoir égard au susdit exposé pour le salut de la province, et ont signé, au nombre de quatorze, les officiers municipaux, notables et autres.
SEILHAC.
La commune de Seilhac, assemblée après la formation de la nouvelle municipalité, le 16 mars,
offre d'abord à l'Assemblée nationale, par l'organev de son procureur-syndic, l'hommage de son res-* pect et de sa reconnaissance pour sa justice et ia bienfaisance qu'elle a montrée envers les habitants des campagnes.
Elle loUe ensuite le patriotisme de la ville de Tulle, comme lui assurant la reconnaissance de tousles bons citoyens ; elleditque ceux qui jettent des doutes sur les bons sentiments de la ville de Tulle, et qui l'accusent d'entretenir des principes contraires à la régénération du royaume, n'enchaîneraient ainsi ses forces que pour donner aux méchants la liberté de. tout oser.
Que si cette barrière était abattue, les oitoyens seraient bientôt obligés de prendre les armes pour défendre leurs héritages.
Qu'il faut supplier l'Assemblée nationale d'ordonner qu'il sera informé, avec le plus grand soin, par le tribunal prévôtal de Tulle contre les auteurs et complices des attroupements, et que les coupables seront punis suivant les lois, et enfin de faire connaître elle-même à toute la province l'horreur et l'indignation que lui inspirent (à l'Assemblée) les attentats qu'on se permet contre les personnes et les propriétés.
SAINT-CLÉMENT.
Cette commune, assemblée le 17 mars, adhérant à la délibération et adresse de la commune de Seilhac, y ajoute des considérations importantes.
Elle supplie l'Assemblée de ne pas perdre de vue que les brigands attroupés attaquaientnon seulement les châteaux des gentilshommes, mais les maisons des bourgeois, dont plusieurs ont été pillées: où les femmes.mêmeontété exposées aux plus affreuses indignités, celles des paysans riches. et le monastère des Chartreux ; de sorte dit-elle, qu'il est évident que le principal motif des attroupements est l'ardeur du pillage ; qu'ils ont élevé des potences avec des écrlteaux menaçant de pendre ceux qui paieraient les rentes et les dîmes ; qu'ils ont rais à contribution tous les bourgeois du bourg de la Grolière, et jusqu'au curé qui est à portion congrue; qu'ils ont été jusqu'à vouloir qu'on allât réclamer les dîmes et Jés rentes déjà payées, qu'il est donc bien faux qu'ils ne s'assemblassent crue pour planter des mais et se réjouir de la liberté; que malgré la vigilance et lè courage de 1a, municipalité et de la garde nationale de TUllé, on avait eneore eu besoin, pour arrêter les suites du désordre, d'avoir recours à Limoges pour en obtenir quelque cavalerie qui pût achever de dissiper les factieux.
Qu'en conséquence de tous ces faits connus, la municipalité de Saint-Clément, en adhérant à la délibération et adresse de Seilhac, Bupplie l'Assemblée nationale de vouloir bien les prendre en considération, et ordonner que les procès commencés eontre les auteurs et complices des attroup peinants, et notamment celui du nommé Durieux, regardé dans la province comme chef de parti, seront mis à fin pardevant le prévôt de la ville de Tulle, et les coupables punis seront l'exigence des cas.
SAIN7-ÊALVADOVR,
Cette commune adhère aux délibérations et adresses de Seilhac.
Beaumont y adhère de même.
SEEVIÈBES, du
Le procureur de la commune lui dénonce la lettre des deux députés de l'ancien comité de Brive, insérée au journal du sieur Mercier, comme un écrit incendiaire, capable de faire renaître dans la province le trouble et les désordres qui ont fait gémir tous les bons citoyens, et comme contenant des calomnies atroces contre ceux à qui la province croit devoir le retour de la tranquillité publique.
Le procureur-syndic fait ensuite un tableau frappant des désordres que nous nous abstiendrons de répéter ici; il s'élève contre les apolo^ gistes de ces brigandages, qui ont porté, ait-il, la démence jusqu'à qualifier de barbares les citoyens courageux qui ont généreusement exposé leur vie pour défendre les propriétés de leurs Concitoyens.
Il observe que les ennemis de la liberté naissante voudraient bien qu'on la confondît avec une licence effrénée, bien persuadés que celle-là ne pourrait subsister longtemps avec les Scélératesses auxquelles conduirait celle-ci.
Il s'étonne que les auteurs de l'apologie du désordre et du crime, insérée au journal du sieur Mercier, se soient dits chargés d'exprimer à l'Assemblée nationale les sentiments et les vœux de la commune de Brive, et ne doute pas que tous les honnêtes gens de Brive ne s'empressent de les désavouer.
Il donne comme l'opinion générale de toute la province, l'éloge qu'il fait de la conduite de la garde nationale de Tulle, à Favars, à qui on doit la cessation des désordres et la conservation des propriétés, et il regarde comme indispensables, et commandées par la justice, les condamnations portées par le tribunal prévôtal de Tulle, qui ont détrompé le peuple de la persuasion qu'on lui avait inspirée que les pillages demeureraient impunis.
Il convient qu'une amnistie générale serait désirable, sans doute, si elle pouvait se concilier avec la sûreté publique; mais il observe qu'il faut se défendre d'une pitié meurtrière, qui, pour sauver, la vie d'un coupable, assassine mille innocents ; qu'en des temps critiques comme ceux où nous vivons, et où la propriété et la vie des meilleurs citoyens peuvent être, d'un moment à l'autre, à la merci du premier scélérat, l'indulgence et le pardon deviendraient une horrible cruauté ; qu'on ne peut donc qu'applaudir à la juste sévérité du tribunal prévotal de Tulle, si indignement calomnié par des hommes dont l'humanité semble ne s'émouvoir qu'en faveur du crime, et en qui une fausse pitié fait taire le sentiment de la jus« tice.
Il s'inscrit en faux contre ce qu'ont osé avancer les députés de Brive, que dans la ville de Tulle, pour justifier les barbaries du prévôt, on faisait courir le bruit que l'Assemblée nationale avait envoyé des ordres secrets pour presser les juge*' ments et exécuter les sentences.
A cette calomnie, dénuée d'ailleurs de toute preuve, il oppose que le tribunal prévôlal de Tulle n'avait nul besoin d'employer un moyen si vil, qu'il était suffisamment autorisé par les lettres patentes du 12 août 1786 et par la loi mar* tiale, à poursuivre les jugements contre les prévenus d'insurrection et de révolte, et à punir de mort ceux qui avaient excité l'insurrection et qui avaient été pris les armes à la main.
Il s'élève contre la violence de ces écrivains qui ont osé donner le nom odieux de perfides en-nemis du peuple, à des hommes qui n'ont été que ses vengeurs, ses défenseurs contre les brigands, qui ont assuré le bon ordre et la propriété, Bans lesquels un peuple ne peut subsister.
Il dément d'ailleurs l'imputation faite à la garde de Tulle d'avoir tiré la première sur les brigands, ainsi que ce qu'ils avancent, que leurs sentiments sont ceux de tous les bons concitoyens de la province; il exhorte ceux-ci à désavouer publiquement et hautement cette allégation.
Enfin il requiert de la municipalité qu'elle supplie l'Assemblée nationale d'ordonner que le procès soit fait avec la plus grande publicité à tous les prévenus de crimes d'insurrection, détenus dans les prisons de Tulle ; qu'elle écrive à la municipalité et garde nationale de Tulle, pour leur témoigner qu'elle improuve les inculpations intentées contre elles par les députés de Brive, et qu'elle regarde leur conduite comme digne de l'approbation de tous les bons citoyens.
Et sur tout ce que dessus la commune de Ser-vières délibérant, a ordonhé le soit fait ainsi qu'il est requis.
Nous trouvons encore parmi les pièces relatives à la commune de Servières, une lettre de la municipalité à M. le président de l'Assemblée nationale, où elle remercie l'Assemblée de la justice qu'elle a rendue à la conduite de la municipalité et de la garde nationale de Tulle, et où elle dit que la lettre de M, le président a produit de bons et salutaires effets, achevé de calmer les esprits inquiets, etc.
Cependant une lettre plus récente, et du 29 mars, du procureur de la commune, et jointe aux pièces, annonce que les affaires de Tulle et de Brive tenant le pays en suspens, les paysans semblent commencer à reprendre leur premier esprit; que les étangs d'Auriac, paroisse voisine de Servières, ont été péchés nuitamment, et qu'enfin l'absolution ou la punition des brigands détenus à Tulle, vont décider du calme ou du désordre.
SOUDAINE-LA-VINADIÈRE.
La délibération de cette commune, du 21 mars, adopte un discours fort étendu de son procureur-syndic, qui rentre dans tous ceux que nous avons déjà recueillis des désordres de la province. Rétablissement de la paix dû à la sage conduite des gardes nationales de Tulle, d'Uzerche, de Lu-bersac, du détachement de Royal-Navarre, et à l'emprisonnement et jugement de plusieurs séditieux ; plaintes vives des écrits répandus dans la province, où l'on honore les brigands du nom de bons citoyens, de frères d'armes, de martyrs du patriotisme, et victimes de la vengeance des aristocrates, Protestations de la soumission entière de la commune aux décrets de l'Assemblée nationale, à la nouvelle Constitution, à la loi et au roi. Alarmes de toute la province §ur les nouvelles qu'on ose annoncer d'une amnistié accordée aux détenus dans les prisons de Tulle, ect,
Ce discours est suivi d'une délibération unanime de la commune, qui en adopte tous les sentiments, tous les vœux, et les adresse à l'Assemblée nationale.
TREIGNAC.
Lettre dés officiers municipaux de là ville de Treignac, qui proteste de leur dévouement à la
ville de Tulle, et de la résolution où ils sont de concourir avec elle à l'entretien de la paix publique, pour laquelle la commune de Tulle a déjà fait, disent-ils, tant de choses; elle est du 16 mars.
Une délibération du 17 porte en substance que les citoyens de Tulle sont de vrais défenseurs de la patrie, qui n'ont employé que les moyens d'une juste défense, et que la condamnation des coupables a arrêté le feu de la sédition qui allait embraser la province. Que quoiqu'il en coûte à la commune de solliciter la sévérité des lois, elle croit que l'intérêt de tous efcige d'elle de manifester à l'Assemblée nationale le vœu qu'elle forme de voir continuer le procès des prisonniers détenus à Tulle, et notamment celui du sieur Durieux.
TROCHE.
Un discours de son procureur-syndic et une adresse à l'Assemblée nationale renferment, l'un et l'autre, les mêmes sentiments et les mêmes vues.
L'adresse représente, à l'Assemblée que la liberté reconquise au peuple français par les travaux des représentants, sert de prétexte aux méchants qui violent leurs sages décrets ; que le pillage de la Chartreuse de Glandier peut faire craindre que la licence ne connaisse plus rien de sacré; ces religieux ayant constamment donné l'exemple de toutes les vertus sociales et religieuses, surtout dans les années calamiteuses où ils se sont montrés riches en bonnes œuvres, et où ils se sont appauvris par d'immenses aumônes.
Que l'activité de la garde nationale de Tulle, de Lubersac et d'un détachement de cavalerie de Royal-Navarre, ainsi que la détention et le jugement de quelques coupables, faisait espérer désormais la tranquillité de la province, mais que le décret portant suspension des procédures de la juridiction prévôtale du Limousin, avait ramené toutes les inquiétudes, que les mêmes propos incendiaires qui avaient causé les premières insurrections recommençaient.
Qu'elle demande la continuation des procédures, d'après laquelle on élargira les innocents, et ceux mêmes qui ne seraient que peu coupables, mais qui conduira aussi à la condamnation et punition des auteurs et complices des désordres, seul moyen de rétablir la tranquillité publique.
TUDEIL.
Lettre des officiers municipaux de la commune de Tudeil, du 23 mars, à la municipalité de Tulle.
Us expriment leur reconnaissance pour le service rendu à la province par la garde nationale de Tulle à Favars, et le désir qu'ils ont de faire partie du département de Tulle ; et ils se réunissent, disent-ils, à la majorité de la province pour demander la punition des malfaiteurs et pour blâmer ceux qui ont cherché à inculper les généreux habitants de la ville de Tulle.
VIGEOIS.
Adresse de cette commune à l'Assemblée nationale, du 18 mars.
Cette commune y représente à l'Assemblée que le feu de la guerre des brigands aux propriétés couve encore dans la province; qu'il peut être aisément rallumé par les impostures et calomnies répandues dans les journaux dont les rédacteurs ne s'assurent pas assez de la vérité des faits qu'ils consignent dans leurs feuilles ; que c'est ainsi que des ennemis du bon ordre, sous le voile du patriotisme, ont défiguré les faits arrivés à Favars, Glandier et Alassac, en cherchant à inculper les victimes de ces brigandages et leurs défenseurs, sous le nom d'aristocrates, dont on fait aujourd'hui le même usage que celui de huguenot au temps des guerres de religion, pour rendre odieux ceux qu'on veut perdre.
Elle se plaint de la démarche de la commune de Paris, en faveur des perturbateurs du repos de la province, qu'elle espère voir rétractée.
Elle observe que les décrets de l'Assemblée nationale rendant chaque municipalité responsable des désordres qui peuvent résulter de sa négligence, elle croit remplir ce devoir en suppliant l'Assemblée de faire suivre l'instruction des procédures criminelles contre les accusés de séditions arrivées dans le Bas-Limousin, le salut de la province dépendant de la punition des coupables.
VIGNOLS.
Délibération et adresse de la commune de Vignots à l'Assemblée nationale, du 21 mars.
La commune, instruite que les moteurs et complices des désordres du Bas-Limousin ont trouvé des protecteurs de leurs excès, jugeant que l'impunité rendrait les coupables plus hardis, réclame d'une voix unanime la protection de l'Assemblée nationale, la suppliant de faire instruire, avec célérité et avec le plus grand éclat, le procès des accusés, dont la punition peut seule empêcher de nouveaux brigandages, et mettre en sûreté les honnêtes gens ; elle assure qu'en cela elle exprime un même vœu avec toutes les communes de son voisinage. ~
USSEL.
Dès le 2 février, cette commune avait adressé à la ville de Tulle une députation pour lui porter les offres de services et de secours dont elle pourrait avoir besoin dans les incursions dont on la disait menacée, et pour lui renouveler l'assurance d'une fraternelle union.
Le 16 mars, arrêté de la même commune, par lequel elle exprime sa reconnaissance pour le patriotisme signalé de la ville de Tulle, et la peine qu'elle ressent des calomnies dont on cherche à flétrir la conduite de sa garde nationale dans les insurrections du Bas-Limousin; conduite à laquelle elle croit la province redevable de son salut.
Elle observe que dans le nombre des prison--niers détenus à Tulle, il en est sans doute qui ne sont coupables que d'erreurs ou d'imprudence, mais qu'il peut y en avoir d'autres assez instruits pour découvrir leurs instigateurs, et qu'innocents ou criminels, il est à désirer que leur procès soit fait et suivi avec la plus grande authenticité : demande qu'adresse très respectueusement à l'Assemblée la commune d'Ussel. Elle supplie en même temps l'Assemblée de placer le tribunal du département dans la ville de
Tulle, qui mérite cette préférence par sa conduite et par sa situation.
UZERCHE.
La ville d'Uzerche, que l'ordre alphabétique nous a fait placer ici la dernière, est une des premières qui ait exprimé les vœux qu'on vient de voir énoncés par toutes les autres municipalités de la province, et une de celles qui s'est expliquée avec le plus de force.
Voisine des lieux où les désordres ont éclaté, elle a craint davantage les effets des relations infidèles des journaux et de la multitude de papiers qui pouvaient accréditer le crime et propager la sédition. Dans un discours à la commune, le maire observe que les exemples de justice faits à Tulle assuraient la tranquillité, en apprenant aux séditieux que la loi veillait au salut des citoyens, et que la force publique était encore assez puissante pour réprimer les attentats : mais que cette tranquillité est.en danger par l'effet de plusieurs écrits, où l'on donne comme de légères erreurs, des attroupements portant avec eux la terreur et la dévastation; où l'on représente les chefs de ces attroupements comme de bons citoyens, de braves frères d'armes, des martyrs du patriotisme ; les maux qu'ils ont causés comme une juste réparation des torts et des vexations de l'aristocratie ; des voleurs pris les armes à la main comme des opprimés, et leur cause comme celle l'humanité, delà société; en même temps qu'on ne rougit pas de donner dans ces écrits le nom d'oppresseurs et d'assassins à des citoyens paisibles, qui, menacés de voir fondre sur eux des troupes de 5 à 600 brigands armés, appellent du secours pour repousser le pillage, le meurtre et l'incendie, et parviennent à défendre leurs propriétés et leur vie.
Sur quoi la commune délibérant, et la lecture faite de la lettre de M. Serre, député de l'ancien comité de Brive, insérée dans les Annales patriotiques, et de diverses lettres de Paris annonçant le discours de M. l'abbé Mulot, président de la commune de Paris, à l'Assemblée nationale, concernant les troubles du Bas-Limousin, arrête, d'une voix unanime :
De solliciter auprès de l'Assemblée nationale la poursuite des procédures commencées contre le sieur Durieux et autres particuliers prévenus d'être instigateurs et moteurs des séditions et désordres d'Alassac, Glandier, et autres lieux et accusés, dit-elle, non par les aristocrates, mais par la voix publique.
Elle représente ensuite que la province n'a dû son salut qu'à la conduite ferme et généreuse de la garde nationale de Tulle, de Lubersac, et à un détachement de Royal-Navarre; que tout était à craindre avant les exemples faits par la justice de Tulle, parce qu'on avait persuadé au peuple qu'on n'oserait pas punir les coupables.
Qu'en pressant l'Assemblée nationale de faire faire le procès de ceux qui se sont rendus coupables des désordres du Limousin, les habitants d'Uzerche ne sont point ennemis de la nouvelle Constitution pour laquelle ils ont été des premiers à montrer la plus parfaite soumission, et et qu'ils ont juré de maintenir, ainsi que les décrets de l'Assemblée; mais qu'ils expriment le vœu iîes bons citoyens pour la tranquillité publique, vœu qui est celui de toutes les communes de la province, et qui n'est contrarié que par un certain nombre d'habitants de la seule ville de
Brive, qui seraient déjà démentis par les bons citoyens de la même ville, si ceux-ci eussent osé se montrer, et s'ils n'avaient craint des dangers véritables, en s'élevant contre les manœuvres de leurs compatriotes, etc.
C'est vainement, ajoute-t-elle, que l'ancien comité de la ville de Brive, inculpé par l'opinion publique pour avoir été un foyer de sédition, prétend se justifier en alléguant la lettre circulaire écrite en son nom aux habitants des campagnes, et dont les principes sont ceux du plus pur patriotisme, mais qu'il n'a pas pratiqués lui même, etc.
En terminant l'extrait des délibérations et adresses des villes et municipalités du Limousin, nous ne pouvons nous dispenser de présenter ici une réflexion que nos lecteurs auront faite en même temps que nous.
Quoi, diront-ils, tous les citoyens qui ont quelque part à l'administration de la province dans les municipalités auxquelles ils ont été élevés par le choix de leurs compatriotes, attestent les désordres dont elle a été le théâtre, expriment leur reconnaissance pour les secours que leur ont donnés la municipalité et la garde nationale de Tulle, assurent que c'est à elle et à la justice faite par la juridiction prévôtale qu'ils doivent leur tranquillité, se plaignent de l'interruption qu'on vient d'apporter à l'exécution de ses jugements, et demandent avec instance que la justice reprenne son activité, si l'on veut éviter le retour des brigandages ; et on pourrait balancer un moment sur le parti que doit prendre l'Assemblée; et on pourrait douter un moment, soit de la vérité des faits attestés par une telle nuée de témoins, soit de la nécessité de céder à une demande si pressante, et fondée sur de si puissants motifs ! Non, une telle incertitude ou un tel refus ne pourraient recevoir aucune explication dont un homme raisonnable et juste puisse se contenter.
Après tout, pour contrebalancer des autorités et des raisons d'un si grand poids, il en faudrait de bien puissantes; et où sont-elles?
La seule réponse qu'on puisse faire à cette question, a de quoi étonner. _
A cette multitude de témoins, à cette autorité imposante, à ces pressantes sollicitations de toutes les municipalités des villes, bourgs et paroisses du Limousin, on voit s'opposer la commune de la seule ville de Brive, et des plaintes apportées à la commune de Paris et à l'Assemblée nationale par deux députés de cette commune, qui viennent dire, et qui trouvent l'art de persuader un moment que les troubles du Limousin ont été exagérés par les aristocrates de la province; qu'on n'en peut pas craindre le retour ; que les paysans qui ont pillé sont plus égarés que coupables; qu'on en a inhumainement massacré un grand nombre qui sont morts victimes de l'aristocratie; qu'on continue de les égorger au nom de la loi, etc. ; imputations aussi fausses qu'atroces, consignées dans vingt papiers publics, imprimés soit à Paris, soit à Brive, et répaadus dans la i province avec la plus grande profusion.
Voilà ce qu'on ose opposer au témoignage, à la réclamation, aux sollicitations de cinq cents officiers municipaux ou notables de. la province ; et c'est en faveur d'une telle opposition qu'on oserait prononcer 1
Mais que parlons-nous de l'opposition de la seule commune de Brive ? Ce n'est pas même
toute la commune de Brive qui s'élève ainsi contre la province; car, contre la délibération de cette commune a réclamé la plus saine partie des citoyens de la ville de Brive, au nombre de cent vingt-huit bourgeois et ôitoyenB, parmi ceux que leur état ou leur aisance peuvent mettre à l'abri de tout soupçon de corruption ou d'injustice, et contre l'ancien comité de la ville a réclamé la nouvelle municipalité.
Citons d'abord les protestations d'une partie nombreuse des citoyens de Brive ; il y en a deux : la première, du 16 mars, signée de cent dix habitants de tous états; la seconde, en forme d'adhésion à la première , signée le 23 mars, par dix-huit nouveaux signataires.
Ces cent vingt-huit citoyens expriment leur surprise et leur indignation des inculpations atroces dont les auteurs d'une lettre insérée au journal du sieur Mercier, n° 155, signée Serre ieune et Faye, et de divers autres papiers publics, ont cherché à inculper les ci-devant privilégiés, en insinuant qu'ils pourraient être les auteurs secrets des attroupements et insurrections qui ont eu lieu dans la province.
Ils protestent contre la légalité de l'Assemblée qui a nommé les sieurs Serre et Faye pour députés à Paris, sur ce que partie d'entre eux n'a pu entrer dans la salle, qui n'était pas assez grande, et que l'antre n'a pas pu y faire entendre sa voix.
Ils font observer combien il est absurde de tëxer comme auteurs des insurrections des hommes qui en ont été les premières victimes, ainsi que plusieurs citoyens non privilégiés, riches propriétaires et laboureurs aisés.
Ils se rendent le témoignage qu'ils ont cherché à arrêter les insurrections, des leur origine, par des sollicitations réitérées, faites à l'ancien comité, pour l'engager à écrire aux habitants de la Campagne cette même lettre que tout le monde a approuvée, mais qui n'a été écrite qu'après les instructions d'Alassac et de Favars, et la capture de plusieurs séditieux (parmi lesquels se trouvait le sieur Durieux, auquel on a vu que l'ancien comité de Brive a mis un si grand intérêt).
Qu'instruits de la délibération du 11 v de la commune d'Uzerche, ainsi que de l'arrêt du 15, pris à l'hôtel de ville de Brive, pour se plaindre à l'Assemblée nationale dë la commune d'Uzer-che, et pour sou tenir la demande delà suspension des procédures contre les accusés détenus dans les prisons de Tulle, ils déclarent protester tant contre la première nomination des sieurs Serre jeune et Faye, comme députés extraordinaires, ce dernier n'étant pas même citoyen actif, que contre la délibération du 15.
Ils démentent ensuite les imputations faites dans les papiers publics aux ci-devant privilégiés et autres bons citoyens, d'avoir tiré contre Un peuple désarmé qui nefaisait aucune violence, tandis, disent-ils, qu'il est de notoriété publique que le peuple était armé, et qu'il a fait feu plusieurs rois avant qu'on cherchât à repousser la force par la force.
Ils finissent par demander que le procès contre les accusés soit continué et les auteurs et instigateurs punis suivant la rigueur des ordonnances, protestant d'ailleurs de leur soumission aux décrets de l'Assemblée nationale, en quoi ils de-* meurent unis de cœur et d'affection à tons les bons citoyens de leur commun, avec lesquels ils se sont empressés de prêter le serment civique lors de la formation de la nouvelle municipalité.
La réclamation delà nouvelle municipalité contre les imputations des deux députés de l'ancien député de Brive est dans le même esprit ; mais nous ne nous permettrons pas de l'abréger, parce qu'elle dément une partie des faits altérés par l'ancien comité de Brive.
EXTRAIT
des registres de Vhâtel de bille de brive des 17 et
M. le maire a dit : « Messieurs, je suis fâché que la place à laquelle on m'a fait l'honneur de me nommer me mette dans la triste nécessité de vous dénoncer un écrit dont la publication fait le plus grand bruit; mais mon devoir m'impose la loi de veiller, autant qu'il est en moi, à l'honneur et aux intérêts de la municipalité et de la commune.
« J'ai lu dans un journal, connu sous le nom de Joutnal de Mercier, au supplément du n° 155, une lettre signée de MM. Faye et Serre, députés extraordinaires de la commune de Brive. Je pense que si ces messieurs l'avaient signée comme particuliers, nous n'aurions rien eu à dire; mais que, signant en qualité de députés extraordinaires de la commune de Brive, ils sont censés être nos organes, ne parler qu'à notre instigation et en notre nom, ou au moins d'après nos instructions, et que tous les pays où ce journal parvient seraient fondé» à le croire. Gomme cette lettre contient des expressions qui ne paraissent pas assez modérées, je vais, Messieurs, avoir l'honneur de soumettre à votre jugement et à vos lumières celles que je regarde comme répréhensibles.
« Une pnrase dit : « Dans les paroisses où le « désordre a régné, ee désordre a été le fruit ou « de l'imprudence ou de la cruauté des ei-deyant « privilégiés. » Dans un autre endroit, on ajoute ; « Ce qu'ils n'oflt eu garde de dire, les perfides « ennemis du peuple, c'est l'attentat qu'ils ont « commis eux-mêmes, en publiant la loi mar-« tiale sans le concours ni l'aven des municipa* « lités, et en tirant, pour la mettre à exécution, « des coups de fusil sur un peuple désarmé/ « assemblé uniquement dans l'intention de brûler « les bancs d'une église.
« Ce qu'ils n'ont eu garde de dire non plus, « c'est qu'ils ont fait feu les premiers sur le « peuple en un autre endroit, sans qu'il ait été « question, en aucune manière, de la loi mar-« tiale, et qu'ils ont cherché à Pamuser par de « fausses caresses et des invitations à boire, « jusqu'au moment où ils ont été assez forts « pour l'attaquer avec plus de sûreté.
« Le triomphe de l'aristocratie est consacré de « la manière la plus effrayante par le tribunal « prévôtal de la ville de Tulle. De soixante « infortunés gui ont été traînés dans les prisons, « deux ont tféjà subi une mort ignominieuse* « d'autres ont été condamnés par contumace, « d'autres fouettés et marqués ; et notfs appre » nous que ce tribunal se prépare à renouveler « ces scènes d'horreur une fois la semaine, jus-qu'à ce qu'il n'y ait plus de victimes. »
« Je suis bien éloigné de croire que la cruauté des ei-devant privilégiés soit la cause du désordre qui a régné dans nos paroisses, puisque, d'après les procès-verbaux déposés en notre greffe, ce sont les non-privilégiés qui ont commencé par s'attrouper pour enlever les bancs des églises et
les brûler, et pour dévaster les étangs. Pouvons-nous nous permettre de hasarderle moindre récit de ce qui se passa dans Vautre endroit, dont parle cette lettre, sans connaître la vérité des faits, qui ne peut être réellement établie que par la procédure instruite à Tulle? Le pouvonsnaous même sans inculper la milice nationale de cette ville, et sans manquer de respect envers les représentants de la nation, qui ont approuvé la manière dont elle s'est comportée dans cette occasion? Pouvons-nous aussi nous permettre d'accuser MM. de la juridiction prévôtale de Tulle, contraints par leur devoir à faire des exemples nécessaires, sans lesquels la tranquillité publique ne serait peut-être pas encore rétablie, et dont l'Assemblée nationale, en ordonnant le sursis pour l'avenir, n'a point blâmé la conduite précédente? Nous ne devons pas nous dissimuler que notre province était menacée des plus grands dangers par des brigands qui avaient déjà commis bien des désordres, et que nous devons notre salut en grande partie à la prudence de ce tribunal ; ne fui témoignerons-nous notre reconnaissance que par les reproches les plus amers ? Voua êtes, Messieurs» trop justes pour être capables d'une pareille ingratitude. Nous serions cependant censés autoriser, par notre silence, le contenu de cette lettre, si nous ne la désapprouvions pas authen-tiquement.
« Je pense donc que vous ne deve# pas laisser ignorer aux communes voisines et à MM. de la juridiction prévôtale de Tulle que la lettre a été écrite à notre insu et sans notre participation, et que ledit désaveu doit être envoyé au sieur Mercier» pour le prier de l'insérer dans ses feuilles.
« Je sais bien que les auteurs de la lettre l'ont soumise à la décison de la commune; mais cette espèce de rétractation, connue de nos seuls corn patriotes, est-elle suffisante pour convaincre les lecteurs des feuilles de M. Mercier et notre province de la pureté de nos intentions? »
Sur guoi, la matière mise en délibération, il a été arrêté unanimement que la municipalité, loin de donner son adhésion aux termes injurieux que peut contenir la lettre dont il s'agit, soit contre M. le prévôt de la ville de Tulle, soit contre les ci-devant privilégiés, ou tel autre citoyen que ce soi t, désapprouve de la manière la plus formelle toutes ces expressions, et déclare n'avoir donné ni entendu donner aucun pouvoir pour insérer dans les papiers publics rien qui pût donner atteinte à la réputation d'aucun habitant de cette province; demeure en conséquence arrêté que la présente délibération sera imprimée, et que plusieurs exemplaires en seront envoyés aux municipalités voisines, et notamment à M. le prévôt et aux officiers qui l'ont assisté dans les jugements que leur sagesse a sans doute dictés. Il en sera également envoyé un exemplaire au sieur Mercier, avec prière de l'insérer dans un des numéros de son journal. Signé Salfiat, maire; Dejean, officier municipal; Maijonade, officier municipal; MaLès, officier municipal; Rebière, officier municipal; Lageneste, docteur-médecin, officier municipal; Rogemond, officier municipal.
MIALHET, secrétaire.
À cette protestation se joignent, pour îa fortifier, deux actes publics, l'un portant la démission du sieur Gerou, un des officiers municipaux présent aux assemblées de l'hôtel de ville des 15 et 16 mars, qui motive sa retraite sur les désagréments qu'il a essuyés dans ces deux séances, dont le moindre, dit-il, a été de voir que les suf-
frages n'y ont pas été libres, et que la voix des bons citoyens y a été étouFfée. Il a refusé sa signature le 15 : mais le 16, comme rédacteur, il a été forcé de signer. Il proteste que ce n'est qu en cette qualité, et qu'il a déclaré, en signant» qu'il donnerait sa démission; il ajoute que la lettre des sieurs Serre et Faye ne contient ni ses sentiments ni ceux de la plupart de ses confrères dans la municipalité, et qu'en conséquence il déclare désapprouver et être opposant a tout ce qui a été fait dans les séances des 15 et 16 mars, et donne sa démission.
Le Becond acte de ce genre, du 17 mars, est une protestation des sieurs Malés, bourgeois, et Jean-Baptiste l'Escot, procureur, tous les dgux officiers municipaux, contre tout ce qui s'est fait à l'hôtel de ville le 15 de mars, disant qu'ils n'avaient pas protesté la veille, pour ne pas exciter dans l'assemblée une fermentation à laquelle elle paraissait trop disposée. Que le 16, se trouvant présider l'assemblée, ils avaient cru devoir signer le procès-verbal en cette qualité; mais que dans ces deux assemblées il s'est passé des choses auxquelles ils n'entendent point donner leur approbation ; qu'ils n'approuvent point, notamment la lettre des sieurs serre et Faye, insérée au journal du sieur Mercier, ni la qualité que lesdits sieurs prennent dans cette lettre de députés extraordinaires de la commune; ils font à ce sujet toutes leurs protestations de fait et de droit, professant d'ailleurs les sentiments d'union et de fraternité avec toutes les communes de la province, et particulièrement celles qui.sont voisines de la ville de Brive, et de leur respect pour les décrets de l'Assemblée nationale, etc.
A ce seul exposé, et en voyant d'un côté toute une province, par l'organe de ses nouvelles municipalités, et de l'autre quelques membres de la municipalité de Brive, et une partie seulement de ses citoyens opposés sur des faits publics, nou3 ne pensons pas qu'un homme sage puisse hésiter à prononcer en faveur de la province.
Mais mettons de côté toute autorité, et discutons jusqu'aux moindres prétextes. Ces prétextes sont énoncés dans divers écrits répandus avec une extrême profusion dans la capitale et dans les provinces; lettres dans les journaux, adresses aux municipalités voisines, avis aux paysans, enfin adresse Si l'Assemblée nationale.
Nous nous bornerons à l'examen de cette dernière pièce.
Nous distinguerons dans cette adresse ce qui est relatif aux plaintes réciproques des deux villes d'Uzerche et ae Brive, et ce qui tient à l'objet principal de notre mission, le rétablissement de la justice dans toute son activité.
Il y a d'abord une observation bien importante à faire sur le premier de ces objets. La commune de Brive se plaint de la ville d'Uzerche, dénonce sa délibération à l'Assemblée,comme calomnieuse et respirant la sédition. Mais elle se trompe, elle n'en dit pas assez, ou plutôt elle dissimule un fait embarrassant pour elle. C'est toute la province du Limousin, c est .même plusieurs villes et communes du Quercy, du Périgord, de l'An-goumois, et même du Languedoc, que la ville de Brive devait accuser auprès de r Assemblée nationale, comme coupables de calomnie et de sédition, puisque toutes ou presque toutes ces villes adhèrent, ainsi qu'on l'a vu, à la délibération d'Uzerche, et que celles qui n'en font pas mention en répètent les plaintes et en .adoptent les principes. Ceci, comme on voit, peut servir à apprécier les plaintes de Brive contré tJzerche,
puisqu'elles se présentent sous un aspect bien peu favorable lorsqu'elles attaquent, non plus une seule ville, mais toute une province.
Nous observerons ensuite une circonstance bien capitale dans la question.
Cette circonstance est que ce n'est qu'en se défendant des imputations calomnieuses et incendiaires insérées dans les papiers publics par les députés de l'ancien comité de Brive, que la ville et la municipalité d'Uzerche ont inculpé ce comité.
Le maire d'Uzerche, suivi de quelques volontaires, s'était transporté à Alassac au temps du pillage, et avait employé son intervention pour sauver le château et calmer les mutins, sans y réussir, faute de moyens.. Il avait désapprouvé l'inaction de la garde nationale de Brive. La ville d'Uzerche avait loué et remercié la garde nationale de Tulle de son courage à repousser les brigands, enfin elle s'était montrée très ouvertement en faveur des mesures prises pour la tranquillité de la province, et de la vigilance et de l'activité de la justice de Tulle.
Dès lors les reproches, les calomnies répandues même dans la capitale contre les prétendus aristocrates, « qui pourraient bien être eux-mêmes les auteurs secrets des désordres qui ont attiré sur eux la vengeance du peuple par leur cruauté, qui sont de perfides ennemis du peuple, qui ont tiré des coups de fusil sur un peuple désarmé, qui ont applaudi au tribunal de Tulle, consacrant le triomphe de l'aristocratie par des scènes d'horreur, etc. » Dès lors, dis-je, tous ces reproches sont tombés sûr les habitants d'Uzerche autant que sur tous les ci-devant' privilégiés ; et quoique la municipalité ait eu surtout le bien public en vue on se plaignant des papiers incendiaires où on les insultait ainsi, leur intérêt, le besoin de se défendre s'est joint à ce motif. La commune d'Uzerche n'a donc rien fait que de bien naturel et de bien juste en s'élevant contre la lettre des sieurs Serre et Faye, et contre le comité, dont ces Messieurs paraissaient énoncer les sentiments.
Mais, dit-on, la commune d'Uzerche a dit dans sa délibération, que le comité de la ville de Brive était inculpé par l'opinion publique, comme étant un foyer où résident des incendiaires, des moteurs et instigateurs de sédition, et que ce comité n'a pas pratiqué la morale qu'il recommande dans la lettre qu'il a publiée lui-même, adressée aux habitants des campagnes.
Honorés de la députation de la ville d'Uzerche en même temps que celle de Tulle, sa réputation et ses intérêts doivent nous être chers : jusques dans la vivacité des plaintes qu'elle forme contre les mauvais citoyens qu'elle croit voir parmi les bons au sein de la ville de Brive, nous ne craignons pas de dire qu'elle est encore guidée par le patriotisme et par le zèle qu'elle a constamment montrés pour les principes de la Révolution. Nous observons que si les citoyens de la ville d'Uzerche, après s'être vus menacés d'insurrections et de pillages qui ont dévasté leurs environs, voyant répandre des ouvrages où l'on semble justifier les excès du peuple, et louer, comme de bons citoyens, des hommes que la voix publique dénonçait comme auteurs de ces mêmes désordres; si, voyant cette apologie et ces éloges dans la bouche des membres du comité et des députés de la ville de Brive, ils ont dit que le comité de cette ville était inculpé par l'opinion publique pour être un foyer où résident des incendiaires, des moteurs et des instigateurs de sédition ; ces reproches de la
ville d'Uzerche n'ont-ils pas, dans de pareilles circonstances, un degré de vraisemblance qui peut les rendre excusables même aux yeux de ceux
?[ni ne lés regarderaient pas comme véritablement Ondés ?
Enfin, puisqu'il faut le dire, ce qui justifie les plaintes de la ville d'Uzerche contre l'ancien comité, c'est la protection avouée, éclatante, qu'a donnée cet ancien comité au sieur Durieux, à cet homme prévenu par les informations et dépositions, et par une notoriété universelle, d'avoir été auteur, fauteur et participe des insurrections qui ont eu lieu en plusieurs parties de la province. Le sieur Durieux était en même temps membre de l'ancien comité, et dans les mêmes ouvrages où l'on dénonce au peuple comme ses tyrans, ses ennemis, ses assassins, ses bourreaux, des citoyens honnêtes qui défendent leur propriété, et des magistrats qui punissent ceux qui la violent, on ne rougit pas de donner à ce démagogue forcené les éloges les plus grands. On se fait gloire de l'avouer pour camarade, et comme un des plus zélés et des plus braves citoyens que la ville de Brive renferme dans son sein. Comment s'étonnerait-on que la commune d'Uzerche ait dit que le comité de Brive était inculpé par l'opinion publique pour êtreun foyer où résident des incendiaires, des moteurs et instigateurs de sédition, lorsqu'il est public que Durieux était membre de ce comité, qu'il est'prévenu gravement d'avoir été moteur et complice des insurrections, et que le comité l'appelle brave camarade, honnête homme, excellent citoyen?
Il faut d'ailleurs expliquer ce que l'on entend par avoir inculpé la ville de Brive. La ville d'Uzerche et la ville de Tulle protestent contre cette imputation. Elles n'ont entendu ni l'une ni l'autre former une pareille accusation contre toute la ville de Brive, dont elles regardent les habitants, pour la plus grande partie, comme d'aussi bons citoyens qu'aucun de ceux qu'elles renferment dans leur sein. Elles n'ont attaqué que l'ancien comité, et même seulement quelques-uns des membres de l'ancien comité, et la partie la plus tumultueuse, la moins éclairée des habitants, entraînés par quelques hommes de parti à des opinions qu'ils n'entendent pas, et à des mesures dont ils ne connaissent pas les funestes conséquences.
Et comment cela serait-il autrement, lorsqu'il est public et bien connu des habitants d'Uzerche, qu'une grande, et la saine partie des habitants de Brive et de tous états, désavouent les démarches de l'ancien comité et celles des deux députés qu'il avait envoyés à Paris, ceux-là même qui ont répandu les écrits incendiaires qui ont excité les plaintes de la ville d'Uzerche ? Elle ne se plaint donc pas de la ville de Brive, mais de son ancien comité, et des députés, et d'une portion de citoyens séduits qui ne sont pas de la ville de Brive elle ; ne calomnie donc personne.
Dans l'adresse àJ'Assemblée nationale, on cherche à faire méconnaître tant au public qu'aux habitants deBrive la'distinctionquela commune d'Uzerche n'a cessé de faire entre les bons citoyens de la ville de Brive avec lesquels elle veut se tenir unie de vue et de sentiments, des hommes violents, perturbateurs du repos public, apologistes des excès qui se sont commis, que Brive renferme aussi dans son sein.
Les rédacteurs font remarquer à l'Assemblée que la commune d'Uzerche n'a fait tomber ses noirceurs que sur une partie des citoyens de Brive,, afin de diviser la ville ; que cependant la dénonciation de la délibération d'Uzerche a été unani-
mement adoptée par tous les citoyens, et l'arrêté pour la députation pris unanimement, et que tous les citoyens, interpellés s'il était vrai que quelqu'un d'eux eût essuyé quelque danger réel, ont démenti, par leur silence, l'assertion téméraire énoncée dans la délibération d'Uzerche. »
Les rédacteurs de l'adresse sont véritablement courageux dans leurs assertions. En écrivant, ils ne pouvaient pas ignorer la protestation d'une partie considérable des citoyens de la ville de Brive, du 16 mars, contre tout ce qui S'était passé le 15, nommément contre la dénonciation de la délibération d'Uzerche, et contre l'élection des députés à l'Assemblée nationale. Ils savaient que cette protestation était signée de cent vingt-huit citoyens considérables, c'est-à-dire d'un plus grand nombre de protestants qu'il n'y a d'adhérents aujourd'hui à la délibération et à la députation. Ils connaissaient aussi la protestation et la démission du sieur Gerou et celle des sieurs Malés et l'Escot, tous trois officiers municipaux, d'après les pièces que nous avons rapportées ci-dessus; et ils osent avancer à l'Assemblée nationale que la dénonciation, que la députation ont été faites à l'unanimité! Que dire d'une telle hardiesse, démentie par des faits si publics, sinon qu'elle est vraiment inexplicable?
Quant au silence des gens interpellés dans cette même assemblée, pour déclarer si quelqu'un d'eux avait essuyé des dangers réels, il faut convenir que c'est une étrange manière de démentir la délibération d'Uzerche, en ce qu'on y dit « que si les bons citoyens avaient osé s'y montrer, et n'eussent pas couru des dangers, ils se seraient élevés contre les manœuvres de leurs compatriotes » ; c'est une preuve précisément semblable à' celle qu'on tirerait de la liberté d'un homme, sa déclaration qu'il est libre, datée de sa prison. Il est bien clair que par la raison qu'ils n'étaient pas libres ils ne pouvaient pas déclarer qu'ils ne l'étaient pas au sein de cette même assemblée qui attentait à leur liberté, et que leurs protestations du lendemain détruisent du reste tout ce qu'on veut induire de leur silence de la veille.
Les auteurs de l'adresse revenant à employer contre les citoyens d'Uzerche la dénomination d'aristocrates, devenue aujourd'hui un signal de proscription, leur reprochent d'éterniser des ressentiments et d'oublier que les paysans sont leurs frères.
Mais quel ressentiment peut-on attribuer aux citoyens d'Uzerche envers des hommes qu'ils ne connaissent pas individuellement, mais seulement comme coupables des attroupements, et complices des pillages qui ont désolé la province, et qui leur ont fait souffrir ou craindre dans leurs propriétés ? Le désir de voir punir un coupable n'est pas un ressentiment ; et quoique les paysans soient nos frères, un paysan même, devenu voleur ou assassin, n'est plus pour nous un simple paysan, et encore moins un frère.
Les habitants d'Uzerche, dont nous sommes les députés, ne peuvent non plus être fort sensibles au procédé que les rédacteurs de l'adresse veulent bien avoir pour ceux d'entre eux dont les noms sont écrits dans la délibération, en disant aux citoyens, dont elle blesse les intérêts, d'excuser des hommes que la défiance et de fausses terreurs ont égarés. Nous ne voyons pas en cela un exemple de vertu patriotique bien touchant. La vertu patriotique eût été plutôt à ne pas désigner aux habitants des campagnes, ceux dont les noms sont écrits dans la délibération, d'autant plus que tous les citoyens d'Uzerche, et, ainsi qu'on
l'a vu, toute la province, pensent à cet égard comme ceux dont les noms sont écrits dans la délibération ; quant à la défiance et aux terreurs, on a vu qu'elles ne sont point fausses ; elles ne les ont donc point égarés.
Nous passerons enfin à discuter les raisonsqu'on emploie dans l'adresse en faveur du sursis contre lequel nous réclamons au nom de toute la province.
Ons'appuied'abord Sur cette considération « que « le sursis regarde tout le royaume, et par consé-« quent des provinces où les troubles ont eu des « suites plus funestes que dans le Limousin, et « qu'il ne faut pas faire une injuste exception « pour les infortunés paysans de cette province. »
Notre réponse sera simple. Nous ignorons l'état actuel des provinces où les troubles ont été plus grands que chez nous. Il est absolument possible, quoique bien peu vraisemblable, qu'en quelques parties du royaume où les mouvements du peuple seraient apaisés depuis plus de temps, où ses dispositions seraient différentes, où il ne serait pas flatté de l'impunité, etc.; la suspension du cours de la justice produise des effets moins funestes que ceux que nous craignons chez nous; mais nous parlons de notre province et des provinces nos voisines que nous connaissons, et nous annonçons à l'Assemblée que les désordres y recommenceront si la justice ne reprend pas tout à l'heure son cours ; ce qu'on peut faire, et ce qu'on fera ailleurs bien ou mal à propos ne nous regarde pas.
« Le cœur se soulève, continuent les rédac-« teurs de l'adresse, à la vue des sentiments de « vengeance exprimés dans la délibération de « la ville d'Uzerche. Peu satisfaits du sang qui « a coulé parmi le peuple, soit à Alassac, à Fa-« vars, soit sur les échafauds, il leur faut encore « d'autres victimes, ils forment les regrets les « plus amers sur celles qui sont prêtes à leur « échapper. »
Si le cœur se soulève, c'est en lisant ces dé* clamations calomnieuses, bien plus capables d'exciter de nouveaux brigandages que de porter l'Assemblée nationale à user de clémence envers ceux qui les ont commis. On y montre les propriétaires qui se sont défendus, ou que la force publique a défendus souvent trop tard, comme des gens avides du sang du peuple. On trouve des sentiments de vengeance dans cette expression du maire, si commune dans la bouche des magistrats, la vindicte publique, comme si cette vindicte, qui est.la punition du crime par la loi, avait rien de commun avec des sentiments de vengeance sur les victimes qui sont prêtes à leur échapper. Nous demandons si cette manière de présenter les sentiments d'hommes publics n'est pas aussi criminelle que fausse ?
Les rédacteurs s'écrient ensuite, en parlant des citoyens d'Uzerche : « Et ce sont des hommes « qui vantent leurs vertus patriotiques ! »
Non, la municipalité d'Uzerche ne s'est point vantée de ses vertus patriotique»; c'est le comité de Brive qui s'est appelé le comité patriotique par excellente, et qui oppose sans cesse, dans tous ses écrits, son patriotisme à l'aristocratie d'Uzerche, et de toutes les villes et communes de la province.
Mais la commune d'Uzerche a bien autant de droits que la commune de Brive à se rendre ce témoignage.
Sans doute, les hommes qui ne demandent.que justice peuvent vanter leur patriotisme avec plus de raison que ceux qui s'opposent à ce qu'on
la rende, et les exclamations des faiseurs d'à* dresse ne leur ôteront pas ce droit. Le vrai patriotisme est inséparable de l'amour de l'ordre et de. la justice, sans lesquels il n'y a point de patrie, ou sans lesquels il est inutile d!en avoir une ) et ceux-là seuls sont mauvais patriotes qui osent défendre, justifier, flatter même les perturbateurs du repos public, les ennemis de la patrie et du peuple, en appelant peuple des brigands, et peux qui se défendent du brigandage, hommes avides du sang du peuple .
Selon les auteurs de l'adresse, «les despotes et les tyrans mettent un terme à leurs vengeances, c et on doit s'étonner de voir blâmer l'Assemblée « de suspendre l'effusion du sang d'un grand « nombre de malheureux que l'ignorance avait « séduits, i »
Ainsi la demande du cours libre de la justice, si naturelle de la part d'une province en proie à des brigandages, est assimilée aux procédés et aux sentiments des despotes et des tyrans, et appelée encore:du.nom odieux de vengeance; et l'on appelle blâme de l'Assemblée, la prière que lui adressent des citoyens qui la respectent,ude rétablir l'activité des tribunaux , qu'ils croient absolument nécessaire à l'ordre public et à leur propre sûreté 1 Cette manière de présen ter les sentiments de la ville d'Uzerche et les nôtres, et Ceux de toutes les municipalités de'la province, n'est-elle pas un cri d'insurrection jeté parmi le peuple ?
D où savent aussi les rédacteurs de l'adresse que le sursis suspend l'effusion du sang d'un grand nombre de malheureux ?
La justice de Tulle n'a pas montré qu'elle eût soif du sang; lorsque de 26 prisonniers pris dans les attroupements et les armes à la main, elle n'en a condamné que >2 à mort, et qu'elle en a relâché seize sans aucune punition. Il n'est pas vraisemblable qu'elle ait de plus grandes sévérités à exercer sur le nombre de ceux qui de-mèurent détenus. Avèc quelle justice peut-on dono annoncer que le sursis arrête l'effusion du sang d'un grand nombre de malheureux?
C'est au contraire pour épargner le sang qu'il faut que la justice reprenne son cours, afin que son interruption ne confirme pas les malfaiteurs et ceux qui peuvent se joindre à eux, dans les idées d'impunité qu'on a répandues. L'ignorance et l'erreur qu'on affecte de donner comme les seules causes des insurrections, quand elles ne seraient pas jointes à des intentions très criminelles, auront de quoi se confirmer, si elles ne sont pas détruites par une juste punition. Alors les désordres recommenceront. Alors les propriétaires et tous ceux qui ont quelque chose à perdre, forcés de se défendre, se réuniront; ils seront secondés par les gardes nationales de toutes les villes et municipalités de la province, et pour h'avoir pas voulu punir quelques malfaiteurs, c'est alors qu'on causera l'effusion du sang d'un grand nombre de malheureux. Voilà-ce que nous craignons; voilà l'horrible malheur que nous supplions l'Assemblée nationale de prévenir.
Il faudrait, èe semble, d'autres garants que l'autorité des rédacteurs de l'adresse pour répondre de la tranquillité de la province, lorsque toutes les municipalités qui la forment, ou le plus grand nombre d'entre elles, sans qu'aucune réclame au contraire, nous assurent que le Limousin est menacé de nouveaux troubles si le cours libre de la justice n'est pas rétabli. Ne faut-il pas une grande audace pour contredire ainsi
une assertion présentée à l'Assemblée nationale, par plus de soixante municipalités et communes de bourgs et de villages, sur l'état actuel de leur pays. Mais on croit, sans doute, pouvoir avancer hardiment tout ce qu'on peut mettre par écrit,
Que veut-on dire au reste, par cette prétendue ligue des villes et municipalités du Limousin, contre la ville de Brive ? si l'on appelle ligue le concert de toutes les villes, pour former une même demande à l'Assemblée, celle de rendre l'activité à la justice, qu'est-ce que cette demande a de commun avec une ligue contre la ville i de Brive ?
A la vérité, lorsqu'un petit nombre de citoyens de Brive, inquiets, turbulents, ennemis de l'ordre s'élèvent contre une demande si juste^etque les autres villes et municipalités insistent, celles-ci se trouvent en opposition avec cette partie des citoyens de Brive, qui les combattent: mais c'est un grand abus de mots que d'appeler cette opposition une ligue et une ligue contre Brive.,
Cet abus est d'autant plus grand, qu'ainsi que nous venons de le prouver par pièces, il s'en faut bien que les villes et municipalités du Limousin aient à combattre touteh ville de Brive où nous trouvons plus de cent trente i citoyens des plus connus, des plus considérables, parmi lesquels trois officiers municipaux* réclamant contre les mesures prises, par une autre partie des citoyens.
MM. les rédacteurs de l'adresse ont à la vérité la bonté de promettre aux habitants du Limousin qu'ils emploieront l'influence qu'ils ont sur les habitants des campagnes, pour leur inspirer la paix et la modération ; qu'ils leur diront combien de nouveaux troubles deviendraient nuisibles à la-chose.publique, etc.
Ces Messieurs font, ce nous semble-là, un aveu fâcheux pour leur cause : car ces offres de serr vice les montrent un peu trop comme influant sur les mouvements du peuple,' et pouvant les exciter ou les calmer à leur gré. C'est de quoi se plaint toute la province, que la fermentation a été en grande partie l'ouvrage de quelques mauvais citoyens de Brive ; nous ne disons pas que les rédacteurs de l'adresse aient!jamais pu partager ce délit : mais ils le défendent, ils le justifient, ils l'encouragent, en sollicitant l'impunité.
Au reste, la province serait très-malheureuse si l'influence de la ville de Brive était la seule ressource qu'elle eut pour inspirer aux habitants des campagnes la paix et la modération. Les villes d'Uzerche et de Tulle ont, comme la ville de Brive, écrit des lettres aux habitants des campagnes, et dans les mêmes sentiments, et à la même époque ; elles continueront d'employer ce moyen avec le même zèle : mais elles ne se dissimulent pas que les lettres les mieux faîtes ne suffisent pas sans le secours d© la force publique et de la justice, qui sont les freins nécessaires des hommes en société.
Mais la ville de Tulle a fait mieux que des lettres.Pour conserver et rétablir la tranquillité publique, elle a fourni, par des contributions volontaires, aux dépenses d'une garde nationale qu'elle a tenue sans cesse en activité, et qui s'est portée avec courage partout où elle a été appelée pour défendre efficacemeat les propriétés. Elle a acheté une grande quantité de grains, tant du royaume que de l'étranger; et èlle a distribué pendant cinq mois plus de -deux mille setiers de Wé en pain, vendu aux pauvres à deux sous la livre, quoiqu'il en coûtât plus de trois, et vendu pendant les deux mois de l'année les plus diffi-
piles à passer, du .grain à trente sous de perte dans lés marchés, qui tiennent deux fois la germaine ; enfin au moment même où nous écrivons ceci, elle est encoreoccupêed'approvisionnements qui puissent modérer les prix pour le soulagement des pauvres, que le Jbesqin conduit trop souvent an désordre : voilà ce qu'elle a fait pour la tranquillité publique, èi ce qu'elle Continuera de faire, surtout si le rétablissement du cours de la justice vient à l'appui de la bonne volonté.
Quels sont donc après tout, ces puissants moyens que le comité de Prive nous promet Remployer 1 Nous, forças aux habitants des campagnes, continuent les rédacteurs, que ce sursis n'est pas un pardon, qu'il, né fait que suspendre les jugements, et leur exécution, et quç les méchants ne aoivéntpas s'en prévaloir.
Voilà pertes une belle harangue et de grands moyens pour détourner du pillage les habitants des campagnes, Est-ce que ces moyens et beaucoup d'autres n'ont pas été déjà employés inutilement? ont-ils quelque proportion avec les effets qu'on veut produire ? est-ce en disant aux malfaiteurs ou à ceux qui ont envie de. ie devenir, que Ceux de leurs semblables, qu'on a pris en flagrant délit, et qu'on ne juge qf ne punit actuellement, seront un jovi\ et tôt ou tard, jugés et punis, qu'on les détournera du crime 1 Si cela était, tous les législateurs se seraient bien grossièrement trompes, en établissant cette maxime, que ce n'est pas tant la gravité de la peine, que la certitude et la promptitude de la punition qui sont le véritable frein du crime et la sûre garde des lois.
Nous nous sommes arrêtés sur l'adresse de la commune de Brive a l'Assemblée nationale, parce que cette pièce renferme les principales raisons alléguées par cette commune, en faveur du sursis. Nous achèverons notre tâche, en ajoutant ici quelques considérations générales à celles qu'on a vues dans tout le cours de ce mémoire, et dans les délibérations et adresses de toutes les communes de la province, pour obtenir que la justice reprenne son cours et son activité,
I, Si l'expérience en pareille matière est de quelque poids, comme le pensent tous les gens sensés, ne parle-t-elle pas bien hautement ? Y a-t-il une seule grande nation qui ait pu se passer d'établir des formes de justice, prompte, dans tous les cas d'insurrection. La dictature chez les Romains, la loi martiale en Angleterre, et chez tous les peuples l'équivalent des jugements pré-vôtaux, sous diverses formes, ont été regardés comme dés moyens nécessaires au maintien et au rétablissement de la paix publique, toutes les fois qu'elle a été menacée ou troublée par des mouvements populaires.
II. On ne peut imaginer aucune raison valable de suspendre le cours de la justice, si ce n'est d'empêcher la précipitation ou l'injustice dans les jugements. La précipitation n'a point eu lieu dans les jugements prononcés à Tulle, qui n'ont été portés qu'avec une lenteur et une maturité dont les gouvernements les plus justes, les plus doux, les plus populaires se sont souvent dispensés dans les grands dangers où les Etats se trouvent quelquefois par les insurrections. L'instruction a été régulière ; un grand nombre de témoins ont été entendus. La procédure a été publique, les accusés ont eu des conseils de leur choix. Tout reproche da précipitation dans les j jugements déjà portés, et toute crainte de ce même vice dans les jugements à venir seraient donc destitués de fondement.
Par la même Raison, le motif de prévenir des injustices 'he.pedt s'alléguer contre un tribunal régulief, nombreux, se Conformant aux règles Cohnues, procédant spus les yeux du public, et formé après tout de citoyens magistrats, qu'on inc^pèrait injustement par le seul soupçon élevé contre leur équité.
III. En demandant qu'on suive les procédures contre les prisonniers détenus aux prisons de Tullé, les communes des villes, bourgs et villages du Limousin, et des provinces adjacentes, n'ont et M peuvent avoir aucun autre intérêt que çeiui de leur tranquillité, qui s'identifie avec l'intérêt public. Elles, né peUVeht être poussées à Cette démarche par aucune passion particulière ; les accûsês ne leur sont pas connus. Elles ne les voient que comme des perturbateurs du repos pùbliçj, dont là piihition leur paraît nécessaire pour prévenir des attentats du même genre.
D'un autre c'OJé, e$ sollicitant le sursis, l'ancien comité de la ville de BriVe, a eu un intérêt très puissant) ; il a voulu sauver un de ses membres, le sieur Durieux, prévenu d'avoir été moteur et participe dans beaucoup d'insurrections, et nous avons Ue)î de phpire crue si ce citoyen de Brive n'était pas impliqué aàns la procédure, la commune ae cette ville ne Se serait pas donnée tant ^ mpUiVément pour-Obtenir qu'elle fût suspendue, éu quoi mémé ^lea été contredite par cent trente citoyeUs, dont nouS avons rapporté la proies ta-Uqq, ainsi que par la municipalité nouvelle dans sa délibération dés, m, et 27 mars. Si, depuis, cette même municipalité a adhéré en quelque sorte à ia demande du sursis, elle peut avoir eu le même motif, cçlui sauver, un 4e ses citoyens.
Cet i intérêt éUéi eàt bien naturel et serait excusable, s'il n'était pas en opposition avec celui de toute la province ; mais il n'en est pas moins vrai que c'est là un intérêt particulier opposé à un intérêt public, et que la ville de Briye peut être légitimement suspecte dans la demande qu'elle forme, lorsqu'aucun soupçon ne peut atteindre la, province entière et plusieurs villes des provinces voisines, qui demandent unanimement la punition des, coupables.
Cette différence est, comme on le voit, tout à l'avantage de la cause que nous défendons.
IV. On croit défendre efficacement le sursis en disant qu'il n'est que provisoire, et comme le disent les rédacteurs de l'adresse de Brive à l'Assemblée nationale, qu'il ne fait que suspendre les jugements et leur exécution.
Mais la futilité de cette raison est sensible, d'après le tableau que nous avons fait de l'état de la province . et des dispositions qu'on a lieu d'y craindre. On ne, peut pas se dissimuler que ce qu'on appèlle une simple suspension des jugements est et sera, aux yeux des gens des campagnes disposées à de nouvelles insurrections, une annonce du renvoi des gens qui n'auraient pas été trouvés coupables. On a proclamé leur délivrance prochaine. Les députés de Brive les donnent comme d'infortunés paysans égarés plutôt que coupables; séduits par leur ignorance; ils ne méritent doncaucune punition. Cependant, jusqu'à ce qu'ils soient jugés, il n'est pa,s possible dédire, avec quelque certitude, que les accusés détenus sont tous innocents; et s'il-se trouve parmi eux des; voleurs à force ouverte, des meurtriers, noms qu'il faut bien donner à ceux qui ont pillé les maisons, crevé les digues des étangs, etc.,. tiré sur les citoyens qui leur résistaient ; si parmi eux il ae trouve enfin des autçurs, des moteurs d'insurrections, le sursis, qui passera aux yeux du
peuple des campagnes pour l'avant-coureur du renvoi des prisonniers, sans aucune punition, n'encouragera-t-iI pas leurs imitateurs? voilà ce que toute la province craint.
Ajoutons que quand le sursis ne serait pas regardé dans nos provinces comme une reconnaissance de l'innocence des prisonniers détenus à Tulle, il serait au moins vu comme une amnistie, c'est-à-dire comme le pardon d'un crime réel.
Mais comment veut-on que nous soyons sans inquiétude sur les suites d'une indulgence pareille, lorsque nous croyons qu'elle ramènera les désordres, qu'elle compromettra tous les citoyens qui les ont réprimés, et que, pour faire grâce à quelques méchants, on hasardera la tranquillité de plusieurs provinces?
Et ceci n'est plus une conjecture, c'est un fait dont nous sommes instruits au moment où nous écrivons ceci, qu'il y a eu de nouvelles violences dans la Xaintrie, où l'on a encore rompu les digues de plusieurs étangs.
V. A notre demande, on a opposé, dans un grand nombre d'écrits, tous les lieux communs qu'on tire des mots de peuple et d'humanité, d'aristocratie et de tvraunie, et autres richesses du style déclamatoire qu'on a employées dans tous les journaux et dans les papiers dont nos adversaires ont inondé la province, et à l'aide desquels ils ont excité et entretenu des dispositions qui peuvent en troubler encore la paix.
Ainsi on a dit que nous sommes des aristocrates, que nous voulons opprimer le peuple des campagnes; que nous les réduisons à errer dans les bois sans retraite et sans nourriture, et à laisser les terres incultes par la crainte des jugements pré-vôtaux (fait controuvé et faux que nous démentons formellement); que nous demandons des bourreaux et des gibets, etc., contre des malheureux paysans qui n'ont fait que tirer quelques banesdes égliseset boire quelques bouteillesdevin.
Mais nous avons une réponse décisive à cette grande objection, tirée de notre prétendue aristocratie, c'est que parmi les municipalités, dont nous avons recueilli les délibérations, la plus nombreuse partie est des municipalités de campagnes, dont les officiers sont des hommes de campagnes; et on sait que dans nos provinces les municipalités des villes elles-mêmes son t formées presqu'en-tièrement decitoyensbourgeois, petits marchands, gens même qu'on appelle du peuple, et qu'on ne peut assurément pas regarder comme ennemis de ce même peuple dont ils font partie.
Il y a plus: parmi les réclamations Jes plus fortes en faveur de la continuation des procédures, se trouvent celles des villages mêmes, dont quelques habitants se sont rendus coupables des insurrections, et sont détenus dans les prisons de Tulle, où ont été déjà punis. L'un des deux coupables condamnés à la mort à Tulle, était un habitant de Saint-Germain-les-Vergnes. Les pillards de Glandier sont d'Orgnac; il y en a six de prisonniers ; et la commune de cette paroisse, ainsi que celle de Saint-Germain, se joignent à toutes les autres.
VI. Enfin, nous nous autoriserons d'un exemple pris dans les décisions de l'Assemblée nationale. Elle a cru devoir suspendre les procédures du prévôt de Provence, mais elle a senti qu'il fallait une force réprimante et elle l'a transférée à la sénéchaussée. En Limousin toute justice est arrêtée, les ordonnances défendent aux sénéchaux de connaître des insurrections, et les décrets de l'Assem-b ée nationale enchaînent la justice prévôtale.
Les villes et municipalités qui nous ont chargés
de présenter à l'Assemblée nationale la continua tion des procédures comme nécessaire au rétablissement de la tranquillité dans la province, ne veulent qu'une chose, un prompte justice, d'après la conviction où elles sont que l'ordre public ne peut-être rétabli que parce moyen. Nous ne pouvons penser sans effroi à la situation du Limousin et des provinces voisines. Si l'Assemblée nationale n'écoutait pas favorablement notre réclamation, l'anarchie est le moindre des maux dont nous aurions à gémir, et sans doute le silence des lois, l'inactivité des tribunaux, ne laissant aux citoyens d'autre appui contre l'oppression et la violence que la force, on verrait le sang couler de toutes parts. N'est-il pas de la sagesse, du devoir même de l'Assemblée, de prévenir de si grands malheurs?
C'est là l'objet de la très humble supplication que nous sommes chargés de présenter à nos représentants, en vertu des délibérations remises au comité des rapports. Mais dans l'intérêt de la ville de Tulle, dont nous sommes plus particulièrement les députés, nousobservons que dans la délibération du 11 mars, qui nous autorise, il est dit, au nom du conseil général de la commune et de la garde nationale, que justement indignés des inculpations diffamantes élevées contre les mesures qu'elles ont prises pour maintenir la tranquillité dans la province au moment même où la con-duiie de lagarde nationale recevait de l'Assemblée un témoignage de sa satisfaction, la plus glorieuse des récompenses, elles se croient obligées derécla-mer hautement contre les écrits calomnieux qui ont présenté faussement et leur conduite et les événements qui y ont donné lieu, et la situation actuelle de la province.
La commune donne ensuite à ses deux députés les instructions suivantes :
1° Ils doivent renouveler à l'Assemblée nationale la protestation du dévouement respectueux de la ville de Tulle, de son adhésion à ses décrets, et mettre sous ses yeux le procès-verbal de la prestation du serment civique dans lequel elle exprime ces mêmes sentiments ;
2° Ils doivent dénoncer à l'Assemblée nationale la lettre écrite au rédacteur des Annales politiques, n° 155, par les sieurs Serre Je jeune et Faye, se disant députés extraordinaires de la commune de Brive, comme incendiaire et tendant à renouveler et fomenter les insurrections, calomnieuse, remplie de faits faux, démentis par toutes les municipalités de la province et par des procès-verbaux, ce qu'ils appuyerontpar la production des pièces ;
3° Ils doivent représenter à l'Assemblée que les troubles se sont manifestés et propagés d'abord dans les environs de Brive, que le nommé Durieux, ci-devant maître de billard à Tulle, devenu membre de l'ancien comité de Brive, et que les auteurs de la lettre appellent leur brave camarade et un bon citoyen, est généralement accusé comme moteur, instigateur d'insurrections en différents endroits de la province; que les informations faites contre lui par la juridiction prévôtale, doivent fournir les preuves de'cette accusation, et que les démarches faites par l'ancien comitéde Brive, pour obtenir la liberté de cet accusé, les efforts qu'on renouvelle chaque jour pour le soustraire à la justice laissent un loucheque l'Assemblée nationale peut seule approfondir ;
4° Les deux députés doivent représenter à l'Assemblée qu'on a répandu dans le Limousin et les provinces adjacentes, que l'Assemblée et le roi aient blâmé Ja conduite de Ja gardenationale
de Tulle et celles des juges qui ont prononcé sur le sort des coupables, et que les autres détenus seraient mis en liberté; que ces bruits peuvent avoir des suites funestes à la tranquillité publique, et que dès ce moment plusieurs témoins n'osaient plus parler, de peur de retrouver bientôt les coupables libres et les séditieux innocentés ;
5° Que si la lettre des sieurs Serre et Faye, et plusieurs autres écrits publics du même genre ne sont pas flétris, cette impunité sera d'autant plus funeste que les auteurs de ces écrits coupables s'enveloppent du voile de l'humanité et de la liberté;
6° Les députés représenteront encore que l'ancien comité de Brive n'a pris d'autre mesure pour calmer les insurrections, quele voyage de sa milice nationale à Alassac, où elle n'a pas empêché le pillage de l'habitation du sieur de Lamaze, ainsi qu'il est constaté par les procès-verbaux, et que la lettre qui a été répandue en son nom, propre à produire de très bons effets, ne l'a été que lorsque latranquillité était déjà rétablie par la fermeté de la garde nationale de Tulle.
Enfin, les députés sont spécialement chargés d'obtenir pour la commune de Tulle, une réparation aussi éclatante que l'injure et la détractation, etc., etc., etc.
Nous avons déjà manifesté, à la barre de l'As-sembiée, au nom de nos commettants, l'adhésion la plus formelle à ses sages décrets, et remis la prestation du serment civique. Son indulgence et sa bonté à nous entendre nous font espérer avec confiance et avec la plus grande soumission qu'une demande aussi juste, sollicitée par toute la province, qui déclare nous devoir son salut, sera favorablement accueillie.
P. S. Pendant l'impression de notre mémoire, nous avons reçu de nouvelles délibérations de plusieurs municipalités, tant de notre province que des provinces voisines, tendant au même but, adoptant nos principes, consacrant notre mission, ou envoyant elles-mêmes des députés à l'Assemblée nationale pour en obtenir ce que nous lui demandons.
De ce nombre sont : la municipalité de Péri-gueux en Périgord, par délibération du 26 mars ;
La municipalité d'Estivaux, par délibération du 29 mars ;
La municipalité de Saint-Etienne-Laqueneste, par délibération du 25 mars ;
La municipalité de Saint-Frejeon-le-Majeur, par pélibération du 4 avril;
La municipalité de Turenne, par délibération du 28 mars ;
La municipalité de Lautrec, au diocèse de Castres en Languedoc, par délibération du 29;
La municipalité de la Guenne, par une lettre à la municipalité de Tulle, du 6 avril ;
La municipalité de Saint-Pardoux-l'Ortigier en Limousin, par délibération du 5 avril ;
La commune de Daruets, au district d'Ussel, par délibération du 28 mars.
On peut observer que parmi ces réclamations et adresses il en est de villes du Périgord, de l'Angoumois, de l'Albigeois et du Quercy ; que ces provinces où les propriétaires, tant nobles que bourgeois, sont eu grand nombre, ont le même intérêt que le nôtre.
Melon de Pradou, maire de Tulle;De Saint-Priest, major de la garde nationale, de Tulle, députés extraordinaires.
a la séance de l'assemblée nationale du
DÉLIBÉRATION DE LA COMMUNE DE SAINT-GAUDENS
relative à Vévêché de Comminges, sur la pétition des citoyens actifs (1).
L'an 1790 et le 4e jour du mois d'avril, dans l'hôtel de ville de Saint-Gaudens, ont été convoqués les citoyens actifs en corps de commune, de l'ordre et mandement du conseil général de ladite commune, en vertu de la proclamation du jour d'hier, sur la pétition desdits citoyens actifs susdits, par plus de cent cinquante, adressée au corps municipal, pour provoquer ladite assemblée à laquelle M. Tatareau, maire, conseiller et procureur du roi au sénéchal de Comminges, lieutenant en la maîtrise des eaux et forêts de Comminges, a présidé, assisté de MM. Danisan, procureur du roi au siège de ladite maîtrise; Barou; Lucauti; Cauboux ; Saint-Pé ; La Chaume Baisse et Arpajou, officiers municipaux; Me Mariande, procureur-syndic de la commune; MM. Mariande aîné; Labat ; Mezau; Barrère; Mourlon; Lafosse fils ; Sabathier ; Ber seaux ; Adoue ; Lafage ; Rougues ; Pair au ; Dufuur ; Saint-Paul; Lacroix; Bigourdan et Lapène père, tous notables ; de MM. Barthe, archiprêtre; Lefrique de Laucourt, ingénieur des ponts et chaussées; Saint-Martin, prêtre; Estremé; Adémar père, notaire royal ; Durand, artiste; Montalègre, docteur en médecine; Cauté, bourgeois; Pégot, avocat; Danisan, avocat; Lavigne; Gazave, lieutenant du premier chirurgien du roi ; Pierre Soulé; Simon Cerp; Jean-François Caubère; S. Castetx ; Pierre Char-rière; S. Picot; Mistrot; Pierre Saint-Pé; Lafosse; Montant; Ferraud; Pouiségur; Montaut père; Pey-russau; F. Chaire; Adoue, négociant; Pouiségur jeune; Adoue jeune; Gaudens; Lafosse ; Fouque; Picot; Michel Saint-Paul; Castères; Cazaubon; F. Ferraud ; Tatareau, juge-mage du sénéchal deNébou-zan, Georges Pouisségur; Guilhem Pouiségur; La-fuste; Miégeville aîne; Gaudens Laforgue; La Guilf lonie; Pouiségur cadet; Barrère, dit Bauières ; Lauf rent Lafosse; Bergougnon; Puges aîné; S. Baron; Montamat; Bartrand Four ment ; Auberdiac ; Miégeville cadet; Payrar ; S. F. Nogués ; Armelin ; Pierre Decap ; S. Barutant; Sainte-Marie; Gaudens Adoue ; François Cistac; Pujes cadet; Gar-del; Fourtines; Ané ; S. Barus ; Pouianne ; Caperan cadet; Cames cadet; Fauré cadet; Simon La Guillonie ; Guillaume Mainville; Estupux ; B. Montaut Dubois père; Adrien Despagne ; Antoine Baron; Baron cadet; S. Baron; Artigues aîné; Labatut; Res-seguiel; Lamarque; Jean DufQur ; Bernard Saint-Pé; Pierre Descomps; Saux; Boupunt; Cazessus; Caperan aîné; Ducos ; S. Mounerot; S. Suberville, avocat; S. Caperan; Gaudens ; Danissan, négociant; Fages, maître en chirurgie ; Gaudens; Dufour; Cau-bet, négociant ; Robert; Pouites, maître en chirurgie; Bernard Stupux; Fourcade; Clément Dupuy; Pierre Saint-Pé, marchaud ; Pierre Barutant, marchand ; Courties, marchand ; Estube Gaudens Ané ; Dominique Sempé; Blanchard; Pierre La Guillonie; Alexis Bigourdan ; S. Poe ; Pousson; Jeaunel Dufour; Dominique Lambert; Guillaume Rex; Lafage; Antoine Saint-Blancard; Seupenne; François Barrère, oncle; autre Dominique Saint-Pé; Etienne-Saint-Pé ; Guillaume Puisségur ; Dominique Loubet; Bernard Barrada; Simon Lavigne;
Bourdages, Coarm ; Gaudent Ferwud; François Au-berdiace; Maurice Castac; S. Dupuy; Gaudens Sempé; Chartes Adoue; Arnaud Adercef.- Si La-fosse; Jacques Paifftiû; Daniel La fosse; Cazessus; Conte: Pierre Dçdieu; Gaudens,Caz>essv(s; Bernard Archïaél; Mistrôï marchand ; Arviaud Fbùrihens ; Montalegre fils, avocat/ syndic général du pays ; Garés, maître en chirurgie; Saux, bourgeois; Pierre Bénéche ; Arnaud Manent, Pierre Four ment; Bonnemaison, négociant ; Vidal, négociant' S. Maj'eau: J. Cdmet; "mrêV, tiègociàtit; Cau,deté; Brentira Blanchard; Pierre Laforgue; J. Barthe; François Adoue; Gailhdc, maître en chirurgie ; J. Adoue; Fra'ncois Adoue ; François• AdoUè jeune; Càzes, avocat; FèUdiste; Adoue, maître ëri chirurgie ; Cazés, apbthïèàirè; Sainte-Marte, négociant; Ptùnçois Anê j Sainte-Marie,1 négociant; François Anâ: Sainte-Mahe fils, négociant; J. Mistfot; Bér1-tiard BÏânvliafd j . Gititt^umè Ferraùd•' Ùaùdeîis Cerf ; Pëindrd Pipàï); Sfaqtiéaîiië ; J.lVfafchôï; Sauné cadet; Be'r'nàra Sempè cadet; Lnpène his, avocat; BbÏIôc, garde marteau; Vevaux, ancien lifeUtenant-çolOnel ; forac, avoëat ; J. Mars; Mon-talègre père, avocat èt subdé légué; Èize, père; André Caperan; Croiâietl avocat ; Bi%e, fils; Tapi-buHn, organiste.; dè. m'BUfïnçfapiimï. avocat ; Pôûssori, sculpteur ; Alègre ]p!èrë ; polisson, doreur» Càhaupé; Alègrié,fils, négociant; dèFlô-ran, syndic de la noblesse; Garxcnn 'àe Villea} maître particulier dès eaux et forêts ; Mièfiet Shba-thier, marchand'; TerrW, marchand Poumd^eàf^ peintre; ^demà, ^beat; Joseph ville, négociant ; Purieu pèvê; Durïéu' fils, négociant ; J. Fauroux; Verdier, marchand ; Danizah, avocat; Ta ta*eau, avocat ; Blâché; Bëgnier,bç>$t-geois; Bascans, marchand; Henri'Gârcisau,.râà\-tre écrivain ; Clau^et : Dastre père, :nê$(o,ciant; ; Dastre, avocat ; Armehn cadèt; Pièriê Frèckùu.; Pardignac-, négociant; Mail^ois àe la P'eùfàde, bourgeois ;! FfL^eullhé ÇMs.ep, hékOmMl ; fflaçtifa bourgeois ; Abadiô, tâiliëùr ; Làpe'iie OpCle ; Ctyu-bous, cadet, négociant ; Caries aîné, négociant ; Piqué, négociant ; tous citoyens actifs, auxquels M. le maire a dit :
Messieurs, la nopvëlle de la réduction dés évê-cnès au nombre des départements a été a .peine répandue, que votre municipalité eh a été vivement affectée, p^tr la crainte de perdre céliii de Comminges, qui,, dans tous les temps, n'a pis mpin s contribué au bien général du pays, qu'à l'avantage particulier de cette ville. Elle né s'est pas dissimulé l'étendue du malbèur qui menace la contrée, la voyant privée d'un département que la nature semblait lui avoir réservé dans la nouvelle division du royaUme. La poàitïfyji géPgraptilbUé des lieux, le gtahd éloignement des administrations les plus rapprochées, l'impiensilè des relations. l'identité des coutumes, la conformité des habitudes avec les peuples defc différentes provinces qdi nous environnent, le lui assurâiënt, autant que la cohyenance, là communication facile des productions rêspëctivès, ;et;!îê8 lïetiâ de l'amitié et de la fraternité les plussincères ; mais par une fatalité inattendue, èëttè çbntrée en est privée et elle est exposée encoré à perdre d'autres établissements utiles qu'elle eût conservés si elle avai tobtenu ,ce départédient.
La sage prévoyance de Votfè municipalité reconnaissant les suites funestes qué la suppression de l'évèché causerait à toùtjée pays, et particulièrement à notre ville, l'avait ë'hgagëe à s assembler ; déjà elle nous avait honoré de saeenfiauee pour rédiger une adresse à l'Assemblée nationale et au roi, pour éclairer leur justice sur ïa néces-
sité dë conserver l'évèché de Comminges, lorsque vous vous étés assemblés et que vous êtes venus dans son sein déposer le sujet de vos alarmes; àussi sensible à Vos malheurs que zélée à prendre vos intérêts, elle a accédé avec êmpres-sement à Vos désirs, malgré que nous n'ayons pas encore achevé notre travail : elle a pensé que cette raisonne devait pas être un obstacle à cette réunion, parce quë tons étant animés par le même intérêt, et ayant là. même cause à défendre, vous vous éclairerez par la discussion, et vous soutiendrez même vos droits, par les secours mutuels que vous vous donnerejz; le vœu général sera d'ailleurs exprimé avec ptùs d'énergie.
Pleins de confiance dans votre prudence et dans vps iumièrés, jQOus croyons inutiles toutes réflexions qui tendraient à démontrer l'équité de vos réclamations. Vos vues pénétrantes autant que votre intérêt vous réront ™iëux sentir que nous ne saurions l'exprimer, combien il importe de tâcher de maintenir un èvêphê que son ancienneté vous rend si précieux, pour conserver tant d'établissements renfermés dans votre cité, et pour la splendeur du culte divin, le maintied de la discipline ecclésiastique, la conservation de la religion quinou3 a été transmise par.nos pères, et pour dédommager votre patrie de^ pertes qu'elle ferait, si elle n étâit un chef-lieu de' département'
, Cette conservation que vous devrez â la justice des augustes réprésentants delà nation et du restaurateur de la liberté française, qui travaillent avec tant de succès à la régénération de la France, vous inspirant pour eux des sentiments de la plus vive reconnaissance, vous:ne perdrez pas un prélat qui, par sep vertus comme ;par.ses talejatsy a les plus grands droits à votre vénération ët à votre amoiir: veuillez donc, Messieurs, profiter de tous les. instants pour adresser, avec Je respect qui leur est dû» les vœux que .tpute là contrée forme pour demeurer à jamais attachée à révêché de Comminges ; et afin de,ne plus suspendre ces sentimehts que vous brûlez d'exprimer pour cette conservation» nous allons avoir l'honneur de vous faire faire lecture de la pétition adressée au corps municipal.
La lecture en ayànt été faite par le secrétaire-greffier, et demeurant, la réquisition expresse qu'elle rénfermè, pour qu el|espittranfcrite 4ans les registres du corps de la commune, l'assemblée, ouï le procureur-syndic de la commune, a unanimement délibéré qu'elle sera transcrite k la suite de la présenté délibération, après avoir été préalablement par nous paraphée.
Après quoi M- le procureur-syndic de la commune a dit:
Messieurs, vous venez de l'entendre, nous sommes menaces de voir nos pertes se multiplier et s'accroître et nos espérances les plus légitimes s'évanouir entièrement ; nous avons été témoins dës regrets que vous ont ausés la suppression des Etats du pays de Nébouzan qui, s assemblaient dans cette ville, celle du çéhéchal et du siège de la maîtrise des eaux et forêts qui comprenait dans son ressort près de hUit.centsparoisses, enfin celle du privilège du sel dont le jVébouzan jouissait de temps immémorial et qui allégait le poids des impositions du pays : nous avons partagé avec vous Cës sentiments.
L'espoir d'un département d'administration et de justice s'offrit d'abord à nos regards, èomme un dédommagement de tant de pertes; notre patriotisme s'en contentait, quoiqu il fût au-dessous de ce que nous perdions réellement ; tout semblait
nous assurer que nôtre Ville serait choisie pour eu être le chef-lieu, comme réunissant toutes les convenances, tel fut même lé premier projet du comité de Constitution; nous nous plaisions à en recevoir l'augure et les fléllditàtiôns ; les députés de nos c'ôtttrëeS se faisaient un plaisir de l'an-nonfeer à leurs commettantsr Ces derniers sollicitaient déjà d'être ândexésà votre département dont les limites furent dès (ors désignées, mais notre espoir'diépàfut toutà côupril hé nous resta jilus que la vive douléhr d'àpprêhdlfë presque eh même temps,1 que tiotre province'avait été morcelée, qu'on avait choisi au contraire pour chef-lieu d'un département, la ville de Tarbes dont le site ne paraissait pas réunir les' Convenances nécessaires pour lui attirer cette faveur ét qU'bnTa^ vait enrichie en partie, dé nos dépouillei,: en lui annexant une portiôn de notre province contre son gré.
De (quelle Consternation fut SUiVië Cêttë nouvelle 'désastreuse 1 quelle fut 'l'agitation et ' l'ëU ferVëscetice de tant dé personnes, frustrées d'uné espérance si légitimé! quë de sdins né UouS donnàmôS*(idUs pas pour calmer leS éspritS, lëè murmurés, distins-'le, |ès menacés que produisait ouvertement là Crainte d'uné misère prodhaidè. qui se présentait dès îôrs comme Certaine et inévitable!
Un nouvel espoir puisë dans la sagesse du même décret, qui ne fixait qué par proVisioh la nouvelle division de la France, Servit à faire succéder peu à peu le bàime à l'orage. On espéra de pouvoir parvenir à renVersei- cet arrangement provisoire, par l'évidettriè et la jUStiéë des motifs consignés dans un mémoire àdrës'sé à M. le président dè l'Assemblée nationale, demeuré par une fatàlité inconcevable, sans succès comme sans réponse.
On espérait encore qu'on pourrait, du moins à la seconde législature, l'aire réformer cette division provisoire Si; àccablatttê, ët Obtenir én âttën-dant pour notre ville uh département de jdstiée.
Un nouveau coup de foudre viéttt nous anéantir. on annoncé de toutes .parts le projet, de ne éottSèrver qu'un yé^êétié,' dtir '1 tfépartehiërit: Si cette maxime était adoptée et èo'nsacbée par Un débret de l'AèSeiiibléë'natiôhaié, ëlle confondrait entièrement nos espérances'1 èt consommerait notre ruine, dès que nbus pourrions obtenir un département : èn effet nôtre perte serait incalculable sous tous les rapports.
Si nous la considérons du côté du prëlàtt nous perdrions en lUi le plus digne pàsteur qui, par ses vertus, fait autant l'ornement de l'épiscopàt, que l'objet de notre véhératiohet de nôtre amour.
Si nous la considérons du bôté du siège épis-copal, nous verrons tomber, avec l'éVêché, notre séminaire* notre chapitre et nos Collèges qU'il entraînerait danS sa chute; et de la suivraient des maux réels, auxquels il Serait d'autant plus impossible de remédier, qu'il ne serait plus possible d'obtenir auoun département.
On. nous objecterait» en effet, lorsque nous voudrions le réclamer, quë n'ayant plus d'évêque» nous ne pouvons plu3 avoir un département.
Vainement dirions-nous que notre mémoire soutenant notre réclamation antérieure, avait été envoyé, et déviait être considéré comme notre protestation conservatrice de nos justes prêtent tions ; pu ne manquerait pas de nous, opposer que L'Assemblée nationale a décrété le mars, que toutes protestations et réclamations qui pourraient avoir été insérées, lors de là signature des procès-verbaux de la division aes cantons et
des cartes remises au comité de Constitution, son t nulles et non avenues. Nous ne devons donc pas être surpris de la consternation générale qu'a produit lft nouvelle d'uti projet si sinistre à notre commune, et de la pétition que ses eltoyënèactifs ont remise pour exprimer les nouvelles, alarmes de.i entier corps de la commUnè ët dè tout le diocèse, çt le vceU général é£ èotti m^n de réunir tous leurs efforts pour écarter. .Uh dangçrv de la réalité duquel là seule possibilité ést si alarmante.
Nous ne vous retracerons pas les suites funestes qui résulteraient, pour notre commune, de la perte d'un pasteur si bienfaisant, et t^rî'a tant dë droits à la reconnaissance de ses tendres oualllès. M. le maire les a trop bien prévues ét exprimées dans sa proposition t lés citoyen^ actifs les ont expliquées avec trop d'ériergié dans; leur pétition ; il hé nous resté donc . qu'à remplir lâ tâche que rttius inspire 'le devoir dé nôtre ministère : c'est de vous exhorter à prendre, dans cés circonstances critiques, la tiélibéfàtioâ la plus sage qui concilie les intérêts dè la commune avec cette soumission1 sincère, entière et respectueuse, que nous tous et chacun de bous avons vouée à l'Assemblée nationale et à tous les décrets émanés de Sa sagesse.
Je requiers que mêS dires soient > couchés sur le registre des délibération^) et que de la délibération qui va suivre, il soit envoyé une copie à l'Assemblée nationale directement* uh double à M. le président de l'Assemblée, et un double à M. Pégot» notre député, lë priant de le communiquer aux autres1 députés dë Comminges, pour qu'ils daignent redoubler de aôlë et faire tous les efforts possibles, soit auprès de M. le président, soit auprès de tous les membres dë l'Assemblée, pour obtenir lé succès de nos demandes si bien fondées sur la justice.
Sur quoi la commune, ouï la réquisition éi-dessus, çonsidérant que les habitants des ces contrées sont prêts à Obéir au décret provisoire de l'Assemblée nationale, sanctionné par le roi» quoique dans le premier moment il ne leur ait accordé qu un district isolé, presque dénué de rapports avec le resté du département» et éloigné du chef-lieu beaucoup plus que ne le permettent ses décrets antérieurs; mais que l'Assemblée nationale, en applaudissant à leur soumission, est trop juste, pour ne pas réformer, sur leur réclamation, une disposition si contradictoire à sa volonté connue, et si contraire au bien qu'elle s'était proposée d'opérer, que cette erreur, ne pouvant qu'être l'effet de l'ignorance des localités, est trop saillante néanmoins pour n'être pas aperçue au premier coup d'oeil» et corrigée d'après la seule inspection de la carte ; puisque ie département de la Haute-Garonne* tel qu'il a été arrêté provisoirement* formerait une espèce de bapde remarquable par l'irrégularité de ses confronts, et prolongée sur le cours de la rivière pendant quarante-sept ou quarante-huit lieues, sur trois, quatre, cinq ou six de largeur seulement; et que, d'un autre côté, le département de l'AdoUr, trop voisin de celui de Pau, et trop éloigné dp celui de Toulouse, paraît n'avoirvni la superficie, ni h population, ni la contribution prescrite par les décrets de l'Assemblée nationale.
Que l'espérance de voir réformer cette disposition ne peut abandonner l'Assemblée, parce qu'elle ne bessera jamais d'avoir la confiance la plus ferme et. la plus entière dans l'équité des représentants de.là nation et du roij que consentir aujourd'hui à la suppression de l'évèchê de
Cpmminges, ce serait, pour ainsi dire, consacrer par son propre aveu cette formation bizarre et nuisible, surtout s'il était vrai, comme le bruit public l'annonce, qu'on eiit le projet de réduire le nombre des sièges épiscopaux, à celui des administrations supérieures, parce que les difficultés du rétablissement pourraient, par la suite, mettre obstacle au redressement du tort qui a été fait à ce pays, dans la disposition provisoire du département (dit de la Haute-Garonne).
Qu'elle ne doit jamais cesser de faire entendre ses remontrances sur les privations injustes que lui ferait éprouver l'ordre nouvellement établi; mais qu'il s'agit, dans ce moment, d'un intérêt bien plus grand, bien plus pressant encore pour les habitants de cette ville et de tout le diocèse, celui même de la religion, à laquelle ils sont in-violablement attachés, qui leur & été conservée par leurs pères, et qu'ils ont la volonté ferme de transmettre à leurs enfants dans toute sa pureté.
Que l'Assemblée n'entend point décider s'il existe une autorité légitime qui puisse briser sans jugement, et frapper de nullité les liens qui attachent un évêque à son diocèse; mais que quand les deux puissances, spirituelle et temporelle, se réunissaient pour voter et décréter la suppression de quelques sièges.trop rapprochés et trop multipliés dans le royaume, quand ce district aurait perdu (ce qu'on ne peut supposer) l'espoir de devenir le centre d'une administration supérieure, quand bien même il serait décrété de ne laisser subsister qu'un évêché par département, celui de Gomminges ne pourrait être assujetti à la loi commune et serait évidemment dans le cas d'une exception, puisqu'on aurait fait en sa faveur une dérogation aux sages décrets qui fixaient les rayons de chaque département à neuf lieues communes de France.
Que si l'administration temporelle peut être en partie remplacée par celle du district, la multiplicité des relations habituelles des fidèles et des ecclésiastiques avec le premier pasteur ne permet pas d'aller au loin chercher ses décisions ou ses conseils consolateurs et salutaires ; qu'éloigner ainsi les peuples de leurs évéques, ce serait les habituer à se passer de l'épiscopat même, si essentiellemeut nécessaire, et si intimement attaché à la splendeur du cuite divin, au maintien de la discipline et à la conservation de la foi catholique.
Que la seule pensée du danger qu'elle pourrait courir répandrait l'alarme parmi les habitants de ces contrées religieuses, altérerait leur confiance pour les auteurs d'un semblable projet et leur inspirerait peut-être des résolutions dangereuses pour le repos public ; que l'antiquité de celte église célèbre par la vénération des peuples et par l'affluence des étrangers qui s'y rendent à certaines solennités, atteste la nécessité et assure sa stabilité à jamais, que l'étendue de sa juridiction sur quatre cent ireute-cinq paroisses, subirait seule pour exciter et occuper le zèle d'un des premiers pasteurs de l'Eglise.
Que les trente-trois paroisses de la vallée d'Aran, en Espagne, se trouveraient, ou par leur éioignement, ou par des obstacles naturels, dans l'impossibilité d'être annexées à aucun autre diocèse français ou espagnol; que cependant il semble que rien ne pourrait légitimer l'infraction faite aux traités solennels qui assurent aux Aranais le recours à l'autorité épiscopale, dans
un pays peu éloigné du leur, et dans lequel ils ont un accès facile.
Que si dans tous les temps les prélats de Gomminges se sont fait connaître à leurs diocésains, par leur religion, leur bienfaisance et leur vigilance active et éclairée; certes, le moment serait mal choisi pour leur arracher celui qui a su augmenter leur vénération et resserrer encore, par ses vertus personnelles et ses qualités sociales, les liens qui les attachent à leur évêque.
Que le séminaire de Saint-Gaudens n'a jamais été destiné qu'à répandre l'instruction et l'édification, avec l'exemple des bonnes mœurs; qu'il serait aussi impolitique que funeste à la religion d'enlever au diocèse un établissement dont on a toujours senti et dont on reconnaît à présent plus que jamais la nécessité; que si les jeunes ecclésiastiques du Haut-Gomminges étaient appelés par leurs études dans une ville grande, riche et située comme celle de Toulouse, ils ne rapporteraient dans leur patrie qu'un dégoût marqué pour les montagnes souvent couvertes de neige, dans lesquelles le service est extrêmement pénible, et laisseraient bientôt leurs habitants sans secours spirituels, en désertant un pays âpre et sauvage, dont l'habitude peut seule rendre l'habitation possible.
Que l'Assemblée nationale, ne désirant que l'avantage et le bonheur des peuples qui se sont abandonnés avec confiance à sa sagesse, doit chercher à être éclairée sur ce qui peut y contribuer; qu'il est donc très instant, et qu'il appartient plus particulièrement à cette ville de manifester le sentiment général, en lui faisant connaître d'avance qu'une pareille suppression, loin d'être conforme à leurs vœux, contrarierait leur goût, leurs habitudes et leurs affections les plus chères; qu'elle alarmerait justement leur conscience et ne pourrait s'exécuter que par des moyens que sûrement elle n'aura jamais l'idée d'employer; considérant enfin que les divers pays qui forment ce diocèse ont consenti volontiers à faire des sacrifices de tout genre, mais qu'après tout, ils ne sont pas destinés à ne ressentir les effets de la Révolution que par la perte de leurs privilèges les plus avantageux et celle des établissements qui leur sont les plus utiles et les plus précieux.
Le corps de la commune a unanimement résolu de s'opposer, autant qu'il serait en elle, à l'extinction de l'évêché de Gomminges, de porter ses réclamations partout où besoin serait, tant pour la conservation de l'évêché et des établissements qui en dépendent que pour le succès des pétitions des citoyens actifs ci-après transcrites, et qui seront paraphées par M. le maire.
En conséquence, elle a délibéré :
1° Que M. le maire sera chargé d'envoyer au roi, à l'Assemblée nationale, à M. le président de ladite Assemblée, et à M. Pégot, notre député, à chacun, avec copie de la présente délibération, un exemplaire de l'adresse précédemment faite au nom du pays, pour solliciter dans la province un chef-lien d'administration ; les raisons qu'elle renferme démontrant plus particulièrement la nécessité de cet établissement et la conservation de cet évêché;
2° Qu'il se rendra auprès de M. l'évêque pour lui communiquer la présente délibération, le priant, au nom delà commune,de se réunir à elle et à ses diocésains pour concourir au succès de leur demande ; qu'il profitera de la circonstance, pour lui parler des sentiments de reconnaissance
d'attachement et de respect dont ils sont pénétrés pour lui.
Qu'enfin laprésente délibération, avec la pétition des citoyens actifs, seront imprimées; chargeant le bureau du corps municipal de veiller à l'exécution de la présente. Ainsi a été délibéré, et ont signé, ceux qui ont su, au registre.
Tatareau, maire.
Par mandement de M. le Maire, et d'ordre de la commune, couret, secrétaire-greffier.
PÉTITION
D'UNE PARTIE DES CITOYENS ACTIFS DE LA VILLE DE SAINT-GAUDENS, ASSEMBLÉS DANS UNE DES SALLES DES RR. PP. JACOBINS, A LA MUNICIPALITÉ ET A LA COMMUNE DE LADITE VILLE, TRANSCRITE A LA SUITE DE LA DÉLIBÉRATION, ET D'ORDRE DU CORPS DE LA COMMUNE DE LADITE VILLE.
L'an mil sept cent quatre-vingt-dix, et le deuxième jour du mois d'avril, après midi, dans la ville de Saint-Gaudens, MM. Durand, avocat ; J. Lafage, J. Saint-Pé, Pujes aîné, Pujes, cadet, Fourcaae, Barrère, Pierre Balagnu, Gaudens Fer-rand, Bize père, Louis et Bernard Stupux, Puy-ségur-Conte, George Longe, Michel Saint-Paul, Jean Resseguet, Vinsonneau, Jean Ferrand, Mistrot, Gaudens Miégeville, Charles Adoue, Menville, Dubois père, André Caperan, Gaillac, Terris, Noguies, Bernard Lafuste, Bertrand Fadeuilhe, Miégeville aîné, Estube, Larrival, Piqué, Jean Beys, Picot o.mé,Lefrigue-de-Lancourt, Jean Cazesus, François Bonpunt, Antoine Payrau, Sainte-Marie père et fils, Jean Martin, Jean Navare, Armand Adoue, Dominique Vignaux, Courties, Bourdages, Jean Ané, Jean Suberville, Jean Perbost, Gaudens Saint-Pé, Bernard Barousse, Arnaud Tardos, Jean Bordes, Jean Montamat, Casse, Léopold Petit, Durand, Gazes aîné, Cazes cadet, Cames aîné, Cames cadet, Labatut, Saux, Arnaud Fourment, Raymond Villeneuve, Jean Fauroux, GabrielPuiségur, Dominique Abadie, Garés, Pierre Saint-Pé, Camors père, Ar-tigues aîné, Caubère père et fils, Jean Blanchard, Arnaud Caperan, Barutaut, Artigues cadet, Geraud Ané, Fréchon, Sauné cadet, Michel Artigues, Jean et Gaudens Dufour, Cauhapé père et fils, Alègre père, Laurent Gardel, Landorthe, Gazave, Simon Laguillonie, Caubet, Salles, Mailbois de la Peyrade, Joseph Foussat, Joseph Coarase, Dominique Sempé, Robert, Fages, Dastre père, Vidal, Pégot, Ogier, Lahore, Pierre Cazeau, Guilhem Cestac, Jacques Couralau, Antoine Lamarque, Garceau, Bernard Montaut, Gabriel Fouque, François Sabathier, Louis Mainville, Razés, Antoine Ané, Jean Blanchard, Jean Payrau, Pierre Laguillonie, Jean Soupenne, Capdeville, Peyrussan, Jean Barus, Jean Duclos, Dunisan, Dominique Sempé, Peysset, Bertrand Decap, Adoue, Pierre Decap, Bergouignan, Joseph Mainville, Fauré, Pierre Fourment, Jean Payrau, Bernard Caudéré, Sauné aîné, Dupuis, Alègre fils, Joachim Pérès, Baron, Bonnemaison, Montalègre, médecin; Ambroise Longe, Joseph Gaperan, Archi-det, Pierre Soulé, Guilhem Puiségur, Clairet, François Auberdiac, Bernard Armelin, Jean Boué, Dierse, Bellefort, Bory, Dubois fils, Pierre Popis, Gestas, Gaudens Adoue, Boris, Bourclier aîné, Joseph Artigues, Laurent Barousse, Bertrand et Arnaud Abeille, Jean Mistrot, Bernard Mistrot, Joseph Mistrot, Georges Puiségur, Jean Cazaubon, Jean Barthe, Guilhem Vignaux, Jean Puységur,
Jean Ducasse, Jean de Castetx, Jean Vinsonneau, Saint-Martin, prêtre ; Lafosse, Gaudens Artigues, Barthélémy Riizaud, Jean Lafosse, Jean Ferand, Jean Laforgues, Bernard Savès, Jean Pajol, Louis Popis, Michel Minville, Joseph Pujol, Joseph Payrau, Dominique Puiségur, Pierre Bouche, Pierre Fouque, Michel Longé, Antoine Soulé, Jean Martin, Pierre Sempé, Louis Payrau, Bertrand Capdeville, Louis Verdier, Bernard Balada, Jean Sempé, Raymond Adoue, Gabriel Carierre, Bertrand Longe, Jean Picot, Bernard Barrère, François Cistac, Baptiste Dufour, Bernard Saux, Jean Marc, Maurice Cestac, Paul Adoue, Bertrand Martin, Peyrusson fils, Blanche, Gaudens Cazes, Bernard Martin, Bernard Saint-Pé, Jean Estube, Jean Adoue, Clouzet cadet, Gaudens Laforgue, Clouzet aîné, Sens Montaud, Dominique Bize, Baptiste Montaut, Balagua, Jacques Loubens, François Sainte-Marie, Adrien Despagne, Miégeville jeune, Villa de Garis-can, Morel, Estremé, de Belloc, Devaux, Abadie, Adema et Gertoux, tous, militaires, avocats, négociants, médecins, chirurgiens, marchands, fabricants, artisans, laboureurs et citoyens actifs de la ville de Saint-Gaudens, prenant droit des articles XXIV et LXII des lettres patentes du mois de décembre 1789 pour la constitution des municipalités, se sont réunis paisiblement et sans armes, après avoir prévenu MM. les officiers municipaux du temps et du lieu de la présente assemblée, ainsi que deson objet et avoir nommé, par acclamation, M. Saint-Martin, prêtre, pour président, un des messieurs a dit :
Messieurs, votre réunion dans ce lieu, sous la sauvegarde du pouvoir exécutif de la municipalité, a pour motif de prévenir les derniers malheurs qui menacent notre patrie. Lorsqu'elle est en péril, quand même on ne vous garantirait pas la liberté d'employer tous les moyens capables de la sauver des dangers qui la menacent, quand même on vous aurait interdit le droit de réclamer pour la conservation de la chose publique, est-il un citoyen qui doive, qui puisse se taire et rester dans l'inaction ? De tous les droits qui faisaient jadis notre bonheur, comme ils firent celui de nos pères, on ne nous laisse plus que la faculté de nous plaindre. Ne négligeons pas cette dernière et triste ressource des infortunés : mais mettons dans nos doléances et nos résolutions l'énergie et la dignité qui conviennent à des hommes libres. Notre modération, notre patience, je dirai presque notre coupable et lâche indifférence, sur le sort qu'éprouve notre patrie, ne nous ont valu jusqu'à ce jour que des disgrâces et du mépris peut-être.
Vous le savez, Messieurs, les abus du gouvernement pesaient sur nous, comme sur le reste de la nation. Nous sentions la nécessité de les retrancher. On nous a dit que nos privilèges mettraient obstacle à cette réformation; à regret, et tremblant de t'oucher à ce dépôt sacré, nous avons cependant sacrifié ces privilèges. Nous avons cédé les avantages dont nous jouissions pour l'espoir d'un bonheur imaginaire, dont nos neveux ne jouiront peut-être pas, dont nous ne jouirons jamais.
On s'est occupé de la formation des départements : la constitution politique à laquelle nous avions renoncé, donnait à tous les membres de notre ancienue confédération une correspondance directe et facile avec l'administration intérieure, et celle-ci en avait une de même nature avec le gouvernement général. Un département fixé à Saint-Gaudens pouvait nous rendre cet avantage à nous et à nos voisins. La nature, les localités,
toutes les convenances, les vœux de nos voisins désignaient notre patrie pour être le chef-lieu de cétte administration : nos représentants n'avaient pas même d'incertitude sur ce qui faisait l'objet de notre espérance, sur le prix de nos sacrifices.
Par quelle fatalité Une attente si bien fondée a-t-elle été déçue? Gomment a-t-on pu nous as-1 sujettir à chercher des remèdes aux maux qui nous affligent si souvent, dans uue ville éloignee, auprès d'administrateurs insensibles à des fléaux qui ne se font pas ressentir dans les lieux qu'ils habitent? Comment a-t-ob pu sobtoettre l'estimation de nos fortunes, l'évaluation de nos moyens, la fixation de notre contingent général dans la contribution publique, à des agents dont la voix sera prépondérante et qui seront intéressés à sou* lager leur pays, en surchargeant le nôtre dont ils ne connaissent ni la valeur, ni les forbës, et qui, sans l'industrieuse activité de ses habitants, suffirait à peine à leurs besoins dans les années lés moins calamiteuses? Comment enfin a-t-on dédaigné de ménager en nous ces peinesdé l'âme qui naissent de la privation ? Cette prétention que nous avions de ne pas cesser d'être le cbéf-liéu d'une administration supérieure, prétention que la prudence ne permettait pas de détruire sans nécessité, êût-èlle été douteuse, lorsqu'elle s'accordait avec le vœu de tous ceux qui devaient être soumis à cette administration ?
Ëh bien, Messieurè, cet événement inconcevable est cependant arrivé! En vain, il faut le répéter, la localité, le site, l'arrondissement et les décrets antérieurs qui fixaient le rayon que pouvait et devait avoir chaque département paraissaient faire une loi impérieuse d'une semblable institution en notre faveur ! En vain le comité de Constitution l'avait d'abord projeté de même 1 Bientôt après, i'opiniôn change, les considérations sont écartées, les convenances ne sont plus consultées et nos droits sont méconnus I
Des adresses, des réclamations réitéréeà ont été sans effet comme sans réponse. Notre confiance, notre patriotisme n'ont fait qtie s'àccroître par cette première disgrâce. Pour rendre notre cause aussi favorable qu'elle était juste, nous avons usé d'une générosité sans exemple peut-être ; sans consulter leurs moyens, sans être arrêtés par ty considération et les effets des fléaux qui ravagent cette municipalité depuis trois ans, qui ont absorbé toutes ses ressources et anticipé sur ses récoltes à venir; sans, dis-je, consulter leurs moyens, les seuls habitants que cette ville réunit dans son enceinte ont offert aux besoins pressants de l'Etat une contribution qui s'élève à quarante faille liwes. Cet excès de zèle, quia excité la plus noble émulation dans la contréé, loin de nous attirer les distinctions flatteuses qu'on a prodiguées à des villes dont les dons étaient bien inférieurs, cet effort de notre part a semblé avoir été méconnu.
Sommes-ùous donc comptés pour rieh dans Retendue de^Empire? Est-ce pour nous destiner à cet avilissement qu'on nous a fait renoncer à des privilèges, dont nous n'avons jamais usé que pour mieux montrer notre amopr et notre fidélité envers les souverains qui ont régné sur cette Contrée? Ah! peut-être a-t-on craint çl'étré, en considération de notre don patriotique, dans la nécessité de satisfaire à nos représentations, ou de diminuer quelque chose des privations qu'on veut encore nous faire éprouver.
11 n'est pas un de nous. Messieurs, qui ne gémisse dans son cœur s tir l'injustice qui nous a été faîte. Mate, hélaB ! Il est encore d'autres mal-
heurs à redouter I Si des bruits alarmants qui se répandent sont fondés, nous sommes menacés de (a perte de nôtre éVêché ét défe établissements qui en dépendent. Si cé projet destructeur poUvait avoir lieu, forcés de çpuHr loin de notre pays pour l'administration du temporel, il en sera ué même pour le spirituel. Ainsi, subordonnés eh tout, ët Boumis, pour tout, à un régime étranger,' nous perdqns sans retour des établissements qui sont ici la ressource la plus assurée des pauvres, qui contribuent au bonheur et à la gloire de notre patrie ! Ainsi, tandis que d'autres, enrichis de nos dépouilles, pourrpnt applaudir à la régénération de la France, nous seuls aurons à regretter,pour la première fois d'avoir repassé, par notre réunion à la couronne de France» sous les lois de cet Empire.
Mais rassurons-mous, Messieurs» ce projet destructeur* ou n'a pas été conçu, ou ne sera point réalisé ; et pour désespérer de la conservation de nos établissements, il faudrait bien peu compter sur la sensibilité de ceux qui s'occupent si péniblement du bonheur de la, nation .'ils ne verront pas, sans en être touches, nos droits, nos ipfilheùj's, et disouS»-le notre désespoir. Si une fatalité semble avoir présidé aU sort qUe nous avons éprouvé, croyons que Ces influences ne seront plus à redouter, ne nous décourageons donc point. Si nos plaintes premières sont Connues, on en sétitifa la justice, et nous pourrons, à l'avenir, obtenir ie redressement de nos griefs ; si, au contraire, nous avons été assez malheureux pour qUe nos réclamations aient, été étpufféés, nous pouvons espérer qu'enfin cette dernière franchira tous les obstacles.
Sur quoi, les voix recueillies, ii a été unanimement reconnu, en premier lieu, que la ville de Saint-Gaùdens et les -dépendances du Nébouzan dont elle était la capitale, ont éprouvé et éprouvent tous les jours, par une Révolution qui devait faire leur bonheur, des pertes si considérables, que leur ruine totale doit ^'ensuivre et les: mettre dans l'impossibilité, non seulement d'acquitter leur contribution. patriotique, et les surcharges d'impôts projetés, mais 4e satisfaire même ,a léur .part des contributions actuellement existantes.
1° Destruction (de la maîtrise, qui attirait dans cette ville, les affaires de huit cënts paroisses et une multitude d'étrangers ;
2° Destruction d'une justiçé royale, composée de cinquante-huit municipalités, ët qui cpnpâis-saient de toutes les matières Ordinaires, en première instance, tant au civil qu'au Criminel ;
3° Cessatioq du travail que les justices banne-rettes procuraient aux gens d'affaires résidant dans cette ville : ce qui, en bonifiant les émoluments de leur état, les mettait eh situation de le remplir avec délicatesse et désintéressement et augmentait l'affluènçe des étrangers ainsi que là consommation des denrées dans la ville ;
4° Suppression des États du pays et deS suites avantageuses de, cette formé d'administration, qui nous donnait le droit de ne dépendre que de nous-mêmes en matière d'impôt, et de délibérer librement de ce dont nous deyions contribuer, suivant nos forces, pour les besqiùs du. royaume ;
5° Privation du privilège du sel dont le produit tournait en moins impose pour le pays,, et nous donnait tout à la fois la facilité de satisfaire plus promptement à l'acquit des charges publiques, et les moyens d'accorder à l'Etat, dans ses besoins, des secours plus abondants ,f, ,
6° Engagement de payer une somme de beaucoup supérieure au qiiàrt dé notre revenu en don pà-
triotique, par où, le plus liquide de ce qui était nécessaireà notre subsistance, se trouve condamné par anticipation ;
7° Cessation totale du commerce des laines, de leur filature et fabrication a étoffés, d'où résulte une diminutioneffrayantedaasles revenus de tous les particuliers, qui n'existaient que par ce moyen, et une diminution infaillible et de beaucoup trop considérable dans le produit de nos octrois, dès-tinés à faciliter la levée de nos impôts, à soulager les contribuables par des moins imposés, à acquitter ces non-valeurs, et à solder les charges locales.
En second lieu, il a été unanimement reconnu que ces pertes, présages certains d'une misère excessive, d'une émigration prochaine, et tant d'autres événements funestes qu'on pourrait ajouter, sont de nature à nous faire obtenir un grand et juste dédommagement.
En conséquence, et par ces considérations, il a été résolu : 1° de représenter que te district assigné à Saint-Gaudens et ses entours, est un genre d'indemnité si modique que la ville ni le pays n'en peuvent demeurer satisfaits; que cela a été d'abord reconnu de même par nos députés réunis, par ceux des provinces voisines, qui pouvaient avoir intérêt à l'empêcher, et par ceux qui devaient en préparer la décision, que tous avaient pensé que l'institution d'un départementà Saint-Gaudens, était autant un acte dë justice qu'un acte déter-minément indiqué par les localités et les autres convenances, sans qu'on puisse assigner d'autre motif à l'opinion contraire et à l'événement qui en est réBUlté, que le triomphe des passions hu* maines sur la raison et la vérité ;
2° Il a été résolu d'insister de nouveau, èt de ne jamais cesser d'insister sur l'érection actuelle du diBtrîctdeSâint'Gâudenseudépartement, au moyen de la restitution des vigUerlës, et de quelques autres modiques retranchements à faire sur les districts qui confrontent au nôtre, et sur les trop vastes départements qui nous entourent ; de reprén senter quenëns n'avons pas moins mérité les effets de l'équité de l'Assemblée nationale que tant d'autres villes et pays, qui parleurs représentants, soit dans l'Assemblée, soit à la Suite de la même Assemblée, sont parvenus à obtenir des changements au plan convenu au comité de Constitution, quand les divisions arrêtées ont trop blessé les droits, mêmes les simples intérêts de ces villes et de ces pays; de représenter encore que si nous n'avons point donné, si nous ne donnons pas aujourd'hui plus de, consistance à nos pétitions à cet égard, par l'envoi ne députés particuliers, chargés d appuyer notré représentant à l'Assemblée, et de donner plus de poids et de crédit à ses instances, ce n'est point à notre insouciance sur le sort de ces pétitions qu'il faut l'attribuer, mais à la gêne à laquelle les fléaux de tout genre précédemment éprouvés dans ce pays et les crises de la Révolution ont réduit et les particuliers et les finances publiques ;
3° li a été résolu d'insister au moins sur l'érection du district de Saint-Gaudens en département, sans districts subordonnés, et sans autre accroissement de territoires, quant à présent et jusqu'à la prochaine législature, d'autant que, sans contrarier beaucoup le plan général par cette exception indispensable, sans porter, par cet expédient qui satisfait provisoirement à nos droits, aucun préjudice hotable à nos voisins, le plus grand avantage des administrés et la conservation de la correspondance directe avec le gouvernement général, qui hpi^s est aussi chère que nécessaire, seront l'effet du succès de cette pétition ;
4. Résolu de témoigner én tout événement Ç(Ue' sans faire la plus cruelle Violence à nos inclinations, sans trahir nos plus pressants intérêts eV ceUx de notre prospérité, nous ne pourrions consentir à là ruine totale du pays et de notre ville principalement, pâr le sacrifice dé l'évêché, du chapitré, du séminaire êt du Collège de Nèbou?an ; que ces établissements qui nous restaient, et l'espérance qui survit à toUt dans l'âme des infortunés, nous aidaient à supporter les maux que nous avons éprouvés, et l'extinction prochaine des trois maisons religieuse^, dont l'une fournissait un moyen d'éducation pour les jeunes demoiselles, et qui toutes trois, pàr leur revenu, exerçaient et payaient l'industrie dés citoyens.
Que la privation actuelle de ces établissements nous porterait à croire que notre ruine est consommée, et que si l'évêché est supprimé nous pouvons renoncer à tout espoir de département, même poUr la législature prochaine, attendu qu'on infirmera nos objections, par cette suppression même, vu la difficulté de son rétablissement et des établissements accessoires.
Que le projét d'uniformité d'administration dans toute l'étendue de l'Empire, tant pour le spirituel que pour le temporel, est une de ces idées d'ordre-et de régularité qui ne fait rien pour le bonheur général, et qui, dût-elle l'opérer, peut et doit admettre des exceptions quand la loi de la nécessité les indique.*
Que l'exception ne fut jamais plus nécessaire que dans cette circonstance où il faudrait recréer ces mêmes établissements, parce que nous ne pouvons cesser d'insister sur l'érection d'un département vers la source de la Garonne ; qu'il n'est pas possible de se refuser à nos instances, parce que les convenances le nécessiteront, et que nulle autre ville n'a des droits comme celle que nous habitons à en devenir le chef-lieu.
Que le cours de nos affaires spirituelles ne pourrait que souffrir de l'éloignement dans lequel serait placé le chef, qui doit les surveiller et les régir.
Que l'esprit de religion ne pourrait que s'affaiblir et s'éteindre parmi nous que par la privation de la splendeur du culte divin, qui serait l?effet de ladestruction d'un chapitre qui n'a pas peu d'ailleurs contribué à l'aisance des habitants de cette ville et au soulagement des malheureux qu'elle renferme ou qui l'avoisinent.
Que l'obligation où nous serions d'envoyer notre jeunesse, destinée, soit aux sciences, soit à l'état ecclésiastique, en accroissant les dépenses de cette destination dans une proportion incompatible avec nos moyens, aurait encore l'inconvénient de dégoûter nos enfants de nos mœurs, de leur ôter l'esprit de retour vers leur patrie* si différente des lieux riants, des pays agréables et riches où ils auraient passé les années de leur enfance et de leur première jeunesse ;
5° Résolu, en conséquence* que la réunion de tous nos concitoyens dans l'expression d'un même vœu, d'un même sentiment étant le moyen le plus propre à faire impression dans l'Assemblée nationale, on ira sur le champ porter la présente délibération et pétition à MM. les maire et officiers municipaux, sollliciter d'eux la convocation de tous les citoyens actifs, pour soumettre en as* semblée générale de la commune la motion etl'ar-rêté ci-dessus; de les faire lire, approuver, transcrire sur les registres des délibérations de la commune, comme un titre, un témoin, et un gage à notre postérité de notre surveillance pour ses intérêts, et demander qu'un .extrait de cette motion
et pétition, en manuscrit ou imprimé, soit envoyé à l'Assemblée nationale, afin qu'elle puisse connaître dans toute leur fidélité les vœux que nous formons, les craintes el le désespoir qui nous accablent, ainsi que les moyens qui nous paraissent seuls capables de faire changer la situation cruelle dans laquellenous ne sommes que les premiers interprètes.
Pour cet effet, après que la présente pétition a été signée par tous ceux qui ont dit savoir, çt qu'on a requis les autres de le faire, M. le président, M® 'Cazes , avocat ; Feudiste, secrétaire-greffier ; à eux joints MM. Durand, avocat ; Lefrique de Lau-court;de Monialègre, docteur en médecine; Malbois de Lapèyrade, bourgeois; Lafosse, tapissier; Dubois, maître sellier ; Caperan, maître perruquier, et Saint-Pé, conducteur des travaux publics, ont été priés de se charger de l'exécution du dernier arrêté, et de la remise du présént én original entre les mains de M. le maire et MM. les officiers municipaux.
Fait et clos à Saint-Gaudens, les jours et an que dessus.
Collationnè : Couret, secrétaire-greffier.
Du
Procès-verbal de Vassistance die VAssemblée aux cérémonies de la Fête-Dieu.
Le jeudi 3 juin 1790, jour de la Fête-Dieu, les membres de l'Assemblée nationale se sont réunis, à sept heures et demie du matin, dans la salle destinée à ses séances ordinaires.
A huit heures, M. le président, précédé des huissiers, a ouvert la marche de l'Assemblée poiir se rendre à l'Eglise paroissiale de Saint-Germain-l'Auxerrois par le passage des Feuillants, la rue Saint-Honoré et la cour du Louvre.
Dans l'église, l'Assemblée a été ainsi disposée : à la tête de la nef, du côté droit, un fauteuil et un prie-dieu, préparés à cet effet, ont été occupés par M. le président, et des deux côtés de la nef des banquettes ont été occupées par les membres de l'Assemblée.
Le roi étant ensuite arrivé, la grand'messe a été célébréè.
Après la grand'messe, la procession a défilé entre deux haies de la garde nationale de Paris.
Il a été fait uue première station a un reposoir construit au milieu de la cour du Louvre, une seconde dans la chapelle du château des Tuileries, où la procession s'est rendue1 par la rue Saint-Honoré, la rue Saint-Nicaise et le Carrousel, et une troisième dans le reposoir du Louvre, où elle est revenue par le quai des Tuileries.
Les membres de l'Assemblée nationale ont marché sur deux lignes au devant du dais, à côté et derrière; e
Derrière le dais, au milieu des deux lignes, venait le roi, et à sa droite, un peu en avant, M.-'le président, qui a occupé cette place durant la procession et les stations.
L'on est revenu dans cet ordre à l'église paroissiale, et la cérémonie étant achevée, on s'est séparé.
Séance du vendredi
, secrétaire, fait lecture du procès-verbal de la séance du mardi soir : il est adopté.
demande la permission de s'absenter.
sollicite la même autorisation. Ces congés sont accordés.
, secrétaire, fait part à l'Assemblée des adresses suivantes :
Adresse des curés et vicaires composant la congrégation de Morez-en-Montagne, au département du Jura, district et diocèse de Saint-Claude,i qui expriment leur adhésion aux décrets de l'Assemblée nationale, leur reconnaissancedubonheur qu'ils ont procuré aux Français, et qu'ils ne cesseront d'adresser au ciel les vœux les plus étendus pour le peuple français et ses sages législateurs.
Autre des vicaires et prêtres familiers de la paroisse de Saint-Romain de la ville de Saint-Claude, au département du Jura, qui, voulant manifester le patriotisme le plus sincère qui les a toujours animés, déclarent adhérer avec soumission aux ! décrets de l'Assemblée nationale, s'engagent de bon cœur à soutenir avec aèle et de tout leur pouvoir la Constitution,, et désapprouvent et condamnent toute insurrection et toute protestation contraires aux décrets de l'Assemblée^ sanctionnés' par le roi.
Autre des électeurs du district de Sain t-Claude, au département du Jura, qui, échappés aux chaînes de la plus flétrissante, féodalité, ont organisé leurs corps administratifs avec la paix et la décence qui doivent présider aux assemblées.d'un peuple!» libre et digne del'êtjre, et s'empressent d'adhérer : aux décrets de l'Assemblée nationale.
Mémoire par le corps royal des minés sur la propriété des mines et sur la création d'une école des mines:
L'Assemblée renvoie ce mémoire à son comité d'agriculture et de commerce. (Voy. ce document annexé à la séance dé ce jour.)
, secrétaire,donne ensuite lecture du procès-verbal de la séance du mercredi soir.
Lè procès-verbal est adopté.
, secrétraire. Je demaédeà l'Assemblée si elle entend qu'il soit dressé procès-verbal de son assistance aux cérémonies religieu- ' ses de la Fête-Dieu à la paroisse de Saint-Gér-main-l'Auxerrois, et si ce procès-verbal doit faire mention de tous les détails, notamment que lé clergé n'a pas reçu l'Assemblée à la porte de l'église et qu'au reposoir du Louvre et à la chapelle des Tuileries, il n'y avait pas de place marquée pour M. le président?
M. le curé de Saint-Germain-l'Auxerrois s'est excusé auprès de moi et m'a dit que l'Assemblée, étarit arrivée en avance, le clergé n'avait pu la recevoir à la porte. J'ajoute qu'aux divers reposoirs, j'ai toujours été placé à la droite du roi.
Un objet de cérémonie est peu digne de l'attention du Corps législatif; mais comme les signes représentent les choses, et que les représentants de la nation méritent, à ce titre, quelque respect, je demande qu'on charge le comité de Constitution de se concerter avec les ministres du roi pour régler le cérémonial.,
Je fais, eu outre, une motion pour qu'à.l\avenir l'encens ne soit plus présenté à personne et qu'on le réserve pour Dieu seul.
L'Assemblée décide que le comité de Constitution et le comité ecclésiastique seront chargés de régler, de concert, la place qui sera assignée à l'Assemblée dans les cérémonies.
Quant au procès-verbal dont il s'agit, il contiendra seulement le fait de l'assistance aux cérémonies de la Fête-Dieu et de la plçtce qu'a occupée le président de l'Assemblée à la droite du roi.
Vous demandez souvent la véritable cause du retard dans le recouvrement des impôts ; je vais vous en indiquer une qui demande la plus sérieuse attention. Les ci-devant privilégiés sont tenus de payer comme les autres ; mais les rôles rendus exécutoires ne sont pas exécutés. Ils refusent toujours de payer. ' Les municipalités n'osent lés attaquer, parce qu'elles perdent toutes ces affaires par devant l'élection, ainsi que cela est arrivé dans le département de l'EUre.
L'Assemblée renvoie ces observations au comité des finances, qui présentera dimanche prochain un projet de décret relatif à cet objet.
, membre du comité des finances, rend compte d'une demande de la communauté de Champlitte, afin d'être autorisée à disposer des deniers provenant de la vente par elle faite de bois communaux. Il propose un projet de décret;
(de Saint-Jean-d'Angely). Je demande que ce décret soit rendu général et que tous les caissiers qui ont des fonds appartenant à une ville soient tenus de les remettre aux municipalités, sur la réquisition, du conseil général de la commune.
Il me paraît plus convenable de faire verser les fonds dans les caisses des départements, afin qu'il v ait une garantie de conservation et de surveillance dans l'emploi.
Il serait beaucoup plus simple de faire verser les fonds dont il s'agit dans les caisses des districts.
Je m'élève contre l'obligation qu'on veut imposer, dès à présent, aùx dépositaires des fonds des communautés; à vider leurs mains; les caisses des départements et les caisses des districts n'étant pas encore établies, il n'est pas possible de rien changer à l'ancien état de choses.
Je demande que le projet de décret, soit renvoyé au comité des finances, afin d'y être examiné de nouveau.
Le renvoi est prononcé; et le comité fera son rapport dimanche prochain.
propose, au nom du comité d'agriculture, un décret conçu en ces termes :
« L'Assemblée nationale décrète que les clôtures des héritages seront respectées comme par le passé, conformément aux lois relatives aux clôtures et aux limitations du droit de parcours, qui seront maintenues èn vigueur; en conséquence, défend de troubler leS propriétaires dans la jouissance entière et exclusive dé tout ce qui croît dans leurs enclos. »
observe que les propriétés de tout genre doivent être également respectées, qu'elles soient encloses ou qu'elles ne le soient pas; que d'ailleurs il existe des lois.
L'Assemblée décide qu'elle passera à l'ordre du jour.
Le roi m'a appelé hier soir auprès de sa personne et m'a chargé de prévenir l'Assemblée nationale que Sa Majesté ira passer quelques jours à Saint-Gloud, mais que dans ce voyage, comme dans tous céUx qu'elle pourra faire , dans la belle saison, elle reviendra assez fréquemment à Paris pour que sa communication avec l'Assemblée nationale continue d'être prompte et facile.
Je dois également prévenir l'Assemblée que le ministre de la guerre demande à être entendu, à midi et demi, pour rendre compte d'un message dont il est Chargé par le roi.
L'Assemblée arrête que le ministre sera reçu à l'heure indiquée.
Vous avez autorisé vos divers comités à écrire des lettres pour faire exécuter vos décrets : le comilé des recherches a suivi cet usage. La municipalité de Rosoy n'a pas cru unie lettre suffisante : elle se propose de vendre les grains qu'elle a saisis à leur passage dans cette ville. Le comité vous propose d'ordonner à la municipalité de Rosoy de se conformer aux décrets de l'Assemblée nationale sur la libre circulation des grains, et de rendre à MM. Paulet et Gaudinot les voitures de blés qui leur appartiennent. '
Je demande le renvoi au pouvoir exécutif.
L'Assemblée le décide ainsi.
Malgré les ordres qui prohibent la sortie des armes hors du royaume; plusieurs plaintes sont parvenues à votre comité des recherches. La municipalité de Nantes vient de faire arrêter cent fusils destinés pour Genève. Le comité a cru devoir vous proposer d'autoriser la municipalité à renvoyer lés armes au directeur de la manufacture d'où e^es sortent. Au moment où les gardes nationales ne sont point armées, où elles éprouvent beaucoup de difficultés à s'armer, il est ridicule de permettre que les armes sortent du royaume.
Le mo en d'assurer la tranquillité, c'est de conserver au peuple son travail. La fabrication des armes peut être une branche d'industrie utile au royaume. Je pense donc que, loin d'en empêcher la sortie,
il faudrait empêcher, au contraire, l'entrée des armés étrangères dans le royaume.
Encore faut-il les déclarer avant de les faire parvenir aux frontières, et que les manufactures ne les fassent pas passer en contrebande*
Quand cinq à six cent mille hommes de garde nationale manquent de fusils, et que le pouvoir exécutif n'en a pas, il est bien étonnant qu'on en exporte,
(l'aîné). La discussion a déjà Dien changé de forme depuis qu'elle est établie î l'objet primitif du décret était de mettre une prohibition entre le commerce de France et l'étranger ; puis on nous à fait entendre que l'on ne demandait que la déclaration des marchandises que l'on exportât. Comment,'s'éérie-t-on, quand nos gardes nationales ne sont point armées, exporte-t-ott des fusils ? Qui Içs empêche de s'en procurer? Sans douté, $11 s'agissait d'Une Concurrence, il faudrait les préférer. Mais, dit-on encore, comment pouvons-poUs les procurer? A qui en demander? Est-Cé aux ministres? (Plusieurs membres de la partie gauche répondent: Oui,) On me répond d'une manière qui n'est pas fort régulière, que oui ; Quelle Iqi a ordonné aux ministres de fournir des armes aux dépens du Trésor public? S'il y a un décret, ils sont capables dé ne l'avoir point exécuté; mais il n'eji existe pas, (Eh bien, il en faut faire! fèçrient plusieurs membres*) L'armement des milices nationales est une dépense, % cale qui ne doit pâs peser sur le Trésor: je crois donc qu'il n'y a pas lieu à délibérer.
Empêcher la sortie dés armes hors du royaume, c'est nécessiter l'émigration des citoyens qui sont occupés à ce genre de travail.
Les marchands d'armes de Paris avalent retenu des armes à la fabrique de Char-leVille ; ils ont Cassé frauduleusement ce marché et ont préféré acheter des armes à vil prix aux Liégois, plutôt que dé les tirer de nos manufactures.
(Qn demande la question préalable,)
Je ne demande pas la question préalable, mais le renvoi au pouvoir exécutif.
(Cette proposition est adoptée.)
Votre comité des finances doit vous faire connaître le compte qui lui a été rendU de l'état actuel de la contribution patriotique* Les résultats des rôles connus jusqu'à ce jour montent à 74 millions; la ville et l'intendance de Bordeaux, composées de 43 municipalités, ont fourni 4 millions; les Ëtats de Bretagne, composés de 309 municipalités, ont fourni 2,839,000 livres ; paris a fourni- 40 millions 830,000 livres* Le total des municipalités, dont on a les rôles, est de 9,977. Qn ne peut s'empêcher de remarquer la disproportion qui se trouve entre les provinces et la ville de Paris, qui perd tant à la Révolution et qui se montre si ardente à la pfoteger. C'est une preuve du patriotisme qui a singulièrement distingué cette capitale. (On applaudit*) Tout bon Français doit sentir combien un pareil exemple est impérieux. Nous ne devons pas laisser ignorer que beaucoup de déclarations d$ provinces ont été faites à Paris, tes assemblées de département connaîtront des
difficultés qui pourront survenir. En attendant leur entière formation, nous vous proposons de charger votre comité des finances de l'examen des affaires relatives à la contribution patriotique, et de travailler, de concert avec les députés de chaque département, pour aplanir les difficultés et faciliter les déclarations, la confection des rôles et les recouvrements.
Le décret est adopté dans les termes suivants :
« L'Assemblée nationale décrète que le comité des finances sera chargé de l'examen des affaires relatives à la contribution patriotique, et qu'en attendant la formation des départements, il travaillera, de concert avec les députés des provinces, à aplanir les difficultés qui pourront s'élever à l'occasion de cette contribution, en déterminer les déclarations, faciliter la formation des rôles et accélérér leur* recouvrement : le tout, en conformité des décrets du 6 octobre 1789 et 27 mars dernier. »
, Messieurs, vous avez ordonné, il y a quelques jours, l'impression du rapport des commissaires chargés de surveiller la caisse d'escompte (Voy. Ce rapport, séance du 30 mai 1790). Ce rapport vous a été distribué. Je me conforme à vosiuteutions, en vous proposant aujourd'hui d'adopter le décret* Rien d,e plus conforme à vos principes que de rembourser à la caisse d'escompte les dépenses auxquelles elle n'était obligée que par sou patriotisme, il est inutile, je crois, dé voua faire la lecture d'un rapport que vous connaissez tous; je vais seulement vous présenter de nouveau le projet de décret :
« Art. 1er. l)'aprêis l'examen et le rapport du comité des
finances, l'Assemblée nationale décrète qu'elle autorise le premier ministre des finances à
recevoir de la caisse d'escompte son compte de clerc à maître, depuis le 1er janvier 1*790,
en ëorte qu'elle soit légitimement indemnisée des dépenses qu'elle a pu ou pourra foire pour
la distribution au numéraire, qu'elle continuera jusqu'au 1er juillet, époque à laquelle ce
servioe cessera, attendu que les billets de la caisse d'escompte seront en grande partie
échangés contre des assignats ; duquel compte, ainsi que des pièces justificatives, uU double
sera remis au comité des finances, pour être ensuite déposé aux archives dë l'Assemblée
nationale.
« ArL 2. Le premier ministre des finances est également autorisé à prendre les mesures les plus économiques, pour satisfaire au paiement des appoints du service public* »
Je demande par amendement que l'article premier finisse après Ces mots : « Seront en grande partie échapgés contre des assignats; » et qu'on y ajoute cette'disposition : « Lequel compte sera remis au Comité dés finances, pour, sur son rapport, y être statué par l'Assemblée nationale. »
Cela doit être renvoyé au comité de liquidation. L'indemnité qu'on nous propose d'accorder à la caisse d'escompte doit se monter à environ deux millions huit cent mille livres; sur une pareille dépeuse, je ne puis m'en rapporter qu'à l'Assemblée nationale. Je propose donc que la demande de la caisse d'escompte, en indemnité pour fourniture d'espèces, soit renvoyée au comité de liquidation, pour en être fait par lui un rapport le plus tôt possible
(de Saint-Jean-d'Angely) propose cette rédaction : « L'Assemblée nationaleautorise le premier ministre des finances à recevoir de clerc à maître le compte de l'administration et des dépenses delà caisse d'escompte depuis le 1er janvier 1790, pour, sur le rapport qui sera fait à l'Assemblée, être statué ce qu'il appartiendra- » La priorité est demandéopour le projet de M- de La Rochefoucauld. La priorité est accordée et l'amendement adopté. En conséquence, l'article 1er se trouve rédigé ainsi qu'il suit :
Art. 1er « D'après 1 examen et le rapport du comité des
finances, l'Assemblée nationale décrète qu'elle autorise le premier ministre des finances à
recevoir delà caisse d'escompte son compte de çlerc à maître, dë la distribution de numéraire
qu'eue a faite depuis le premier janvier 17#0, et qui sera continpéeJusqu'au premier juillet
prochain, jour auquel elle devra cesser, et des frais qu'elle aura faits pour cette
distribution, afin que ladite caisse soit indemnisée, s'il y a lieu; lequel compte ainsi
que.les pièces justificatives seront remises au comité des finances,'pour, sur son rapport, y
être statué par l'Assemblée nationale. »
, ministre de la guerre, est introduit..applaudit.)
Le ministre ayant obtenu la parole prononce le discours suivant, sur l'organisation dp Varmée et le pacte fédératif des troupes avec les gardes nationales.
Messieurs, j'a j déjà eu l'honneur de remettre à votre comité militaire le nouveau travail que le roi m'avait commandé de faire sur l'armée ; Sa Majesté m'envoie aujourd'hui vous informer des nombreux désordres dont elle apprend chaque-jour les affligeantes nouvelles.
Le corps militaire menace de tomber dans la plus turbulente anarchie. Des régiments entiers ont osé. violé à la fois le respect dû aux ordonnances, au roi, a 1 ordre, établi par vos décrets, et à des serments prêtés avec la plus imposante solennité. Forcé çar les devoirs de ma place de vous faire connaître cep excès, mon cœur se se serre quand je songe que ceux qui les ont commis, ceux contre.qui je np puis m'empêcher de vous porter les plus ameres plaintes, font partie de ces mêmes soldats que je connus jusqu'à ce jour si loyaux, si remplis (l'honneur, et et dont, pendant cinquante années, j'ai constamment vécu ie camarade et l'ami.
Quel inconcevable esprit de vertige et d'erreur les a tout à coup égarés? Tandis que vous ne cessez de travailler à établir dans tout l'Empire l'ensemble et l'uniformité ; quand le Français apprend à la fois de vous et le respect que les lois doivent aux droits de l'homme, et celui que les citoyens doivent aux lois, l'administration militaire n'offre plus que trouble, que confusion : je vois dans plué d'un corps les liens de la discipline relâchés ou brisés; les prétentions les plus inouïes affichées sans détour, les ordonnances sans force, les chefs sans autorité, la caisse militaire et les drapeaux enlevés, les ordres du roi, même, bravés hautement, les officiers méprisés, avilis, menacés chassés, quelques-uns même captifs au milieu de leur troupe, y traînant une vie précaire au sein des dégoûts et des humiliations; et, pour comble d'horreur, des commandants égorgés sous les yeux et presque dans les bras dp Jours propres soldats.
-Ces,maux sont grands, mais ne sont pas les pires que;puissent, entraîner ces insurrections militaires ; elles peuvent, tôt ou tard, menacer
la nation même, et l'intérêt de sa sûreté réclame ici votre intervention.
Le corps militaire n'est qu'un individu par rapport au corps politique, essentiellement fait pour être mû par une force unique, et toujours suivant la direction indiquée par les lois et les besoins de la patrie; tout sera perdu, si jamais il est mû par des passions individuelles; dans l'hv régularité de ses mouvements, il choquera sans cesse tout ce qui l'entoure, et souvent le corps politique lui-même. La nature des choses exige donc que jamais il n'agisse que comme instrument ; du moment où^se faisant corps délibéra-tif, il se permettra d'agir d'après ses résolutions, le gouvernement, tel qu'il soit, dégénérera bientôt eh une démocratie militaire, espèce de monstre politique qui toujours a fini par dévorer les Empires qui l'ont produit.
Qui peut, d'après cela* ne pas s'alarmer de ces conseils irréguliers, de ces comités turbulents, formés dans quelques régiments par des bas-officiers et soldats, à J'insu, ou même au mépris de leurs supérieurs, dont, au reste, la présence n'eût pu légitimer ces monstrueux comices ?
Le roi n'a cessé de donner ses ordres pour arrêter ces ,excès; mais dans une crise aussi terrible, Messieurs, votre concours devient indispensable pour prévenir les maux qui menacent l'Etat. Vous unissez à la force du pouvoir législatif celle de 1 opinion, plus puissante encore. Déployez-les en cette occasion ; que de graves et sévères principes, énoncés par le corps national, donnent aux proclamations du monarque ce oa* ractère auguste et sacré du vœu général. Qu'à votre voix Tes têtes les plus indociles se courbent sous le joug de ,la loi. Assurez l'Etat, l'honneur et peut-têtre la vie de généreux officiers, qu'on a vus, daqs ces jouçs de troubles, aussi patients, aussi modérés, aussi respectueusement soumis à vos décrets, qu'ils avaient paru, dans les dernières guerres, audacieux et fiers avec nos en-» nemis. Garantissez pour jamais l'édifice que vous venez d'élever des secousses violentes qu'il pourrait un jour éprôuver de la part du corps militaire, si les lois négligeaient d'enohaîner au-dedans son énergie et son activité. L'union de tous les cœurs, dans le respect le plus profond pour les lois, peut seiu^e affermir la Constitution. Le roi, qui s'en est déclaré le chef, est pénétré de Cette vérité. C'est avec la plus vive satisfaction qu'il a vu ceux de ses régiments qui n'ont, dans aucun instant, secoué le joug de la discipline, être, en même temps, les plus soumis à vos décrets, et toujours les plus prêts à se dévouer pour le maintien des lois et la conservation de leurs concitoyens*
Plusieurs municipalités viennent de signaler par des actes publics leur reconnaissance, leur estime et leur fraternelle amitié pour leurs garnisons respectives; c'est;à la fermeté de ces derniers corps, mais en même temps à leur modération, que ces villes ont dû leur sûreté et leur tranquillité ; ce sontleurs expressions mêmes que j'emploie, telles que je les trouve dans les diverses lettres qui constatent leur gratitude. Au reste, ces régiments, honorés des suffrages publics de leurs concitoyens, ne sont pas les seuls dont la conduite ait toujours mérité des éloges ; leur nombre est heureusement le plus grand encore ; et cette considération laisse l'espérance de pouvoir rétablir dans toute son énergie la discipline militaire. Le roi ne doute pas que l'administration, renforcée par le concours de votre autorité, ne puisse promptement arrêter le mal.
Mais il s'agit d'en prévenir à jamais le retour; et et c'est de quoi cette administration ne saurait vous répondre, tant qu'on verra les municipalités s'arroger sur les troupes un pouvoir que vos institutions ont réservé tout entier au monarque. Vous avez fixé les limites de l'autorité militaire et de l'autorité municipale : l'action que vous avez permise à cette dernière sur l'autre, est bornée au droit de requérir ; mais jamais, ni la lettre, ni l'esprit de vos décrets n'ont autorisé les communes à déposer, à juger des officiers, à commander aux soldats, à leur enlever les postes confiés à leur garde, à les arrêter dans les marches ordonnées par le roi, à prétendre, en un mot, asservir l'armée de l'Etat aux caprices de chacune des cités, ou même des bourgs qu'elle traversera. Qui mieux que vous, Messieurs, peut concevoir combien ce conflit illégal pourrait, en peu de temps, affaiblir l'obéissance militaire, énerver le pouvoir et dénaturer la Constitution.
Messieurs, le roi m'a encore chargé de vous informer qu'il a déjà autorisé un grand nombre de régiments à participer aux fédérations patriotiques auxquelles ils étaient invités, pour renou-veller le serment civique avec les milices citoyennes : Sa Majesté voulant que ses intentions soient encore plus manifestées, elle m'a ordonné d'écrire une lettre circulaire à tous les corps de l'armée, qui les leur fasse connaître d'une manière générale et uniforme.
Le roi a remarqué avec satisfaction l'esprit de dévouement à la Constitution, de respect pour la loi et d'attachement à sa personne, qui a animé toutes les fédérations ; et comme Sa Majesté y a reconnu, non un système d'associations particulières, mais une réunion des volontés de tous les Français pour la liberté et la prospérité communes, ainsi que pour le maintien de l'ordre public, elle a pensé qu'il convenait que chaque régiment prît part à ces fêtes civiques pour multiplier les rapports et resserrer les liens d'union entre les citoyens et les troupes.
(On applaudit de toutes parts.)
répond : « Monsieur,
« L'Assemblée nationale reçoit avec respect et avec confiance le message que lui a adressé un roi continuellement occupé de gouverner par la loi et de régner par la sagesse.
« L'Assemblée n'oublie pas que le ministre qui lui apporte ce message, après avoir longtemps bien mérité de la patrie par ses services militaires, a professé hautement, dans le sein de cette même Assemblée, les maximes de la Constitution et de la liberté, et depuis en a transporté l'application et la pratique que le roi a confiée à ses soins.
« L'Assemblée nationale sait que l'armée est un des objets majeurs de la Constitution, un de ceux qui méritent le plus et le plus instamment de fixer ses regards, et son comité militaire s'occupe de cet objet important, et sera prêt incessamment à soumettre les résultats de son travail aux regards de l'Assemblée.
« Elle sait que sur la force publique reposent au dedans la justice, au dehors la sûreté; elle sait que sans la discipline l'armée est nulle pour la protection extérieure, effrayante pour la tranquillité intérieure et des citoyens.
« Elle sait enfin que le titre de soldats et celui de citoyens doivent être inséparablement unis, et que celui-ià serait indigne de mourir pour la
patrie, et qui pourrait vivre parjure au serment qu'il a fait de maintenir la Constitution.
«"C'est d'après ces principes, Monsieur, que l'Assemblée nationale examinera avec la plus sérieuse attention le mémoire qu'elle vient d'entendre, et qu'elle vous invite à déposer entre mes mains. »
(M. de La Tour-du-Pin, ministre de la guerre, se retire.)
Plusieurs membres demandent la parole et font des motions.
On fait plusieurs motions. On demande que le mémoire qui vient d'être lu soit imprimé; que le comité militaire rende compte incessamment de ce mémoire et qu'il soit fait une adresse de remerciement au roi.
(L'impression du mémoire lu par M. de La Tour-du-Pin est ordonnée.)
Sous huit jours le comité militaire espère être en état de vous faire un rapport sur tout ce qui regarde l'armée et sur les objets présentés par le ministre. Je crois, en conséquence, qu'il n'est pas à propos d'obliger le comité à rendre compte du mémoire que vientde lire M. de La Tour-du-Pin, avant que nous ayons présenté un rapport général. J'adhère à la proposition de faire une adresse au roi.
Il est important de faire cesser les insurrections : le terme de huit jours est trop long. Je demande que le rapport du comité soit fait au plus tard mardi prochain, ou que du moins on nous mette à même d'opiner incessamment sur le mémoire qui vient d'être lu de la part du roi.
Le travail du comité ne peut supporter un rapport partiel. Il est fait de concert avec le conseil, et de manière que dans l'espace de vingt-quatre heures vous puissiez décréter tout ce qui concerne l'armée.
Le mémoire a pour objet d'indiquer les causes de l'insurrection des corps militaires ; ces causes sont de deux espèces : l'organisation actuelle de l'armée et ses rapports avec les municipalités. Quant à l'organisation de l'armée, il est impossible de faire un rapport partiel; quant aux relations de l'armée avec le pouvoir civil, quelques membres du comité militaire se sont réunis pour travailler avec le comité de Constitution. On pourrait renvoyer cet objet à un court délai.
J'appuie ces réflexions, car il me paraît nécessaire d'adopter des dispositions provisoires.
Il faut empêcher ces comités qui se sont formés dans les régiments et dans les ports.
Le rapport du comité militaire, au sujet des relations de l'armée avec les municipalités, est un objet de législation et de constitution absolument étranger aux incidents exprimés par le ministre. Avant ce rapport constitutionnel, il serait nécessaire de marquer la satisfaction de l'Assemblée aux régiments qui ne se sont point écartés de la discipline, et son improbation à ceux qui se sont mal conduits.
La discussion que demande le mémoire lu par le ministre de la guerre, au sujet du rétablissement de l'ordre dans l'armée, n'est pas une chose aussi simple qu'elle le paraît à quelques opinants. Quand vous direz aux municipalités et aux districts de ne pas se mêler des corps militaires, vous n'aurez rien fait, car alors l'armée conservera encore beaucoup de choses qu'il faut détruire; il y aura aussi beaucoup de choses à édifier : par exemple, croyez-vous qu'il soit permis de chasser des soldats des régiments parce qu'ils déplaisent aux chefs ? Vous avez voulu que le sort du soldat fût préférable à celui des malheureux artisans : vous n'y parviendrez qu'en prenant tous les moyens d'empêcher les injustices, et ce n'est qu'alors que vous vous opposerez efficacement aux insurrections... Il faut bien déterminer aussi des délits dont ne parlent pas les ordonnances militaires : je regarde comme un délit les propos qu'on se permet contre la Constitution. Tant que je ne verrai pas cet article à la tête des ordonnances, je dirai que rien n*est fait encore pour rétablir l'ordre dans l'armée et pour assurer par elle la tranquillité publique au dedans et la sûreté au dehors. Quant ajix applaudissements demandés pour les régiments qui ne se sont pas écartés de la discipline, et je pourrais en demander pour celui à la tête duquel je suis, que je ne commande pas et avec lequel je n'ai qu'une simple correspondance, ces applaudissements, dis-je, sont dangereux; ils mettraient la guerre dans l'armée....
Je m'oppose donc à toute motion étrangère à l'engagement sacré, pris par M. de Menou, de présenter incessamment un travail complet. L'armée verra avec reconnaissance tous les bienfaits de la Constitution dans ce plan, qui, en rendaut aux soldats tout ce que nous leur devons, fera de la force militaire le rempart de la Constitution et rassurera pour jamais sur les insurrections dont on a maintenant à se plaindre. Je demande donc qu'on passe à l'ordre du jour.
Si la proposition de passer à l'ordre du jour est de s'arrêter à ce qui a été dit par M. de Menou, je ne parleraf pas. Si l'on propose quelques décrets provisoires, je demanderai la parole pour en montrer les inconvénients.
(On demande l'ordre du jour.)
11 faut décréter la formule du serment fédératif.
(On demande avec plus d'instance l'ordre du jour.)
Rien n'est si essentiel que de passer à l'ordre du jour; mais cette demande n'est-elle pas un moyen d'écarter des motions également essentielles? L'organisation militaire est indépendante de l'état où se trouve l'armée. En me réunissant pour réclamer l'ordre du jour, j'insiste pour que le rapport du mémoire du ministre soit fait mercredi prochain.
, président du comité des finances. J'ai l'honneur d'annoncer qu'il sera fait très incessamment un rapport particulier sur les 32 deniers accordés à l'armée.
En me référant à ce qui a été dit par MM. de Noailles et de Menou, je me borne à demander que le président se retire vers le roi
pour le remercier de sa sollicitude et des mesures qu'il annonce.
Après une légère discussion sur l'époque où sera fait le rapport du comité des finances, l'Assemblée décide que ce sera le plus tôt possible.
On se dispose à mettre aux voix la proposition de M. Malouet.
Je défie M. Malouet de rédiger sa proposition de manière que ce décret puisse être exécuté, c'est-à-dire qu'il puisse concourir à rétablir la discipline et la tranquillité dans l'armée.
lit son projet de décret : « Faites une adresse à l'armée pour la rappeler à la subordination et à la discipline ; donnez des éloges aux régiments qui ont été fidèles à la loi et au roi, et témoignez la désapprobation des insurrections qui ont eu lieu dans quelques régiments. »
(L'Assemblée décide, à une très grande majorité, qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur le projet de décret de M. Malouet.)
demande à présenter quelques considérations sur l'état de Varmée (voy. ce document annexé à la séance de ce jour).
La parole lui est refusée.
résume la discussion et le décret suivant est rendu :
« L'Assemblée nationale décrète :
« 1° Que son président se retirera dans le jour par devers le roi, à l'effet de le remercier de la communication qu'il lui a fait donner de la lettre par laquelle Sa Majesté autorise la confédération des régiments des troupes de ligne avec les milices nationales ;
« 2° Qu'elle renvoie à son comité militaire les pièces relatives au message fait de la part du roi par le ministre de la guerre, pour que ce rapport soit joint au rapport général qui doit lui être fait dans le plus court délai possible, sur la constitution et l'organisation de l'armée.
« L'Assemblée nationale ordonne, én outre, l'impression du discours prononcé par le ministre de la guerre, ainsi que de la réponse qui lui a été faite par son président. »
demande un congé de quinze jours pour raison de santé ; il lui est accordé.
L'Assemblée reprend ensuite la discussion du projet de décret sur la Caisse d'escompte.
donne lecture de l'article 2, qui est ainsi conçu :
Art. 2. Le premier ministre des finances est également autorisé à prendre les mesures les plus économiques pour satisfaire au payement des appoints du service public. »
Je demande la question préalable. Prendre des mesures économiques, c'est le devoir du ministre.
Le style du comité des finances est semblable à celui des oracles de Delphes : on ne l'entend pas aisément. S'il s'agit d'argent à acheter, il faut le dire; il faut dire comment et par qui il sera acheté.
L'Assemblée a décrété que dans les payements les appoints seraient faits par le directeur. Lë gouvernement est le plus grand débiteur de l'Etat, il est soumis à ce décret. L'administration des finances doit avoir du numéraire pour le service journalier, pour le prêt des troupe&et pour le service des rentes. Dans le cas où la rentrée des impôts ne fournirait pas en. numéraire les sommes nécessaires, il faudrait bien se les procurer. Cette dêpênse est une dépense publique, et mille dépense publique ne peut être iaïte sans Tautprisatioç de l'Assemblée nàtioiialé. Voilà l ob'jët de l'article; les mesures économiques sont une condition nécessaire.
L'article est absolument inutile. Vous avez décrété que les appoints pour tous les payements seraient faits en argent ; lë ministre y est obligé comme un autre. Il est de son devoir de se procurer Varient au meilleur marche possible.
L'opinant n'a pas compris l'explication très claire donnée par M. de Montes-quiou. Ce seul danger que puisse avoir Ce décret c'est l'agiotage. Ckl achètera de l'argent avec du papier et du papier avec de l'argent. Je voudrais que le comité des finances proposât un article pour éviter ce danger. Au surplus, je donne mon consentement à l'article actuellement proposée - (L'article 2 est adopté.),
L'Assemblée nationale a fixé au 15 août l'échange des assignats contre les billets de Caisse : elle est informée que 70 millions de billets ont déjà été donnés pour des assignats. (Ou observe que ce n*est que 52 millions.) Il ftiudra pour faire cet échangé que les provinces soient soumises à des Opérations de banque. Je demande qu'il soit établi, pour les deux tiers du montant des billets de caisse, des dépôts d'assignats à Lyon, à Marseille et dans les principales villes. Cet échange se fera alors à un taux plus favorable; on empêchera qu'un grand nombre de bi Mets ne soient perdus; on favorisera la circulation des assignats.
(Cette proposition est renvoyée au comité des finances.;
, rappôfttHir dktt comité des-finances. Les tais des. convocations 4q 24.janvier 1789 ne sont point èncprê pâye| -ils ÇôniisÉent dans les réparations faites pàr lés municipalités, dans les dépenses des tenues et dans les taxations des députés. Les ouvriers solicitent leur payement: ils menacent de. poursuivre les officiers qui ont ordonné ces dépensés. Le comité des finances m'a chargé de proposer de décréter que ces payements seront provisoirement faits par les municipalités, chacune pour ce qui la concerne, et de renvoyer aux départements pour qu'il Soit définitivement fixé à la ûharge de qui tomberont ces frais, et dans quelle proportion la répartition en sera faite, soit entre les. départements, soit, entre les districts.
Voici lés dispositions que nous vous- proposons d'adopter :
«t, L^Assepoblée nationale, ÇQnsidérant .que le règlement à faire pour lé payement des différentes dépensés qui ont eu lieu, en exécution des lettres de ephvgçâtfon du 24 janvîéff78§, et à l'occasion des àssefnblées primaires, ne petit être soumis à une loi générale et uniforme, ^u il (Mit être subON donné aux circonstances de fait et de localité;
qu'il est indispensable de pourvoir incessamment au payement des réparation s, avances, fournitures, frais d'impression» de service, et autres pour lesquels les ouvriers, marchands, entrepreneurs sont en souffrance.
« A décrété et décrète, sur le rapport de son comité des finances :
« Que les dépenses faites en exécution des lettres de convocation du 24 janvier ou à l'occasion d'ioelles, pour la tenue des assemblées primaires, seront fixées et réglées par les directoires de département, qui examineront si ces dépenses étaient utiles, convenables ou nécessaires ; à la charge de qui elles doivent tomber, et dans quelle proportion elles doivent être remboursées,
« Les ordonnances de payement rendues parles directoires de département seront exécutoires, tant par provision que définitivement, si elles n'excèdent pas la somme de 300. livres ; et par provision seulement, si elles sont au-dessus de cette somme; auquel cas il eu sera référé à l'Assemblée législative, par lesdits Directoires et d'après l'avis des distrcts.
« Les ordonnances des directoires auront (autant qu'il sera possible) pour base principale les principes énoncés dans l'instruction qui leur sera envoyée avec le présent décret, saut les exceptions que l'équité ou le bien public pourraient, exiger d'eux. *
INSTRUCTIONS.
« Les réparations pour la tenue des asseat-bféee seront à la charge des villes où elles ont été faites, si elles sont S perpétuelle demeure ; soit que lesdites villes fussent tenues ou non de l'entretien et réparation des maisons et bâtiments où les ouvrages ont été faits ; si au contraire ces réparations n'ont eu qu'un objet et effet momentané, elles seront considérées comme dépenses communes à tous ceux qui, suivant la convocation, devaient en profiter.
« Si les réparations sont jugées utiles, convenables ou nécessaires, on ne doit plus alors s'attacher à considérer si elles ont été ordonnées ou non par celui qui avait vraiment pouvoir et qualité a cet effet.
« A l'égard ides honoraires des suppléants, les directoires vérifieront s'il leqr était prescrit de se rendre au lieu de l'assemblée, et dans ce cas on leur fera4compter les honoraires qui leur ont été fixés; mais s'ils n'ont point été fixés, les directoires statueront d'après les différents, mandats qui leur seront représentés.
« Le montant des sommes ordonnancées par les directoires sera réparti au marc la livre de l'imposition ordinaire de chaque communauté, sans distinction ni privilèges.
« (Juant aux, bailliages principaux et secondaires, qui font aujourd'hui partie de divers départements, féS directoires dë ces différents départements nommeront des commissaires pour régler, tant les dépenses relatives auxdites as-setnblées de hailiiâges, que celles de députations pôur Paris, versatiles ét autres lieux, et généralement toutes tes dépenses extraordinaires qui auraient rapport à cet objet. Xesdits, commissaires régleront aussi dans quelle proportion les dépenses allouées devront être- supportées par chaque département.
« Au surplus, les directoires, se conformeront à
tout ée que l'équité exigera d'eux, d'après les circonstances et les localités, *
II me Semble qitë l'Assemblée ne peut forcer les ifiutïiCipàlîtés qU'à payer les dépenses nécessaires etijohéelles de luxe ou faîtes dans le but de satisfaire l'amour-nropre de quelques individus. Pour .iie.citer qU uh exemple, je dirai que îeS dépenses faites danè le bailliage de Méfun, par M. de GoUy d'Arcy, se montent de 6 à 7,000 livres* Je conclus à . ce que les dépenses faites par des particuliers, sans le consentement des assemblé^ soleUt exceptées des sommes à payer.
Ma justification Sera bieô simple. J'âfréuni IeS trois ordres' du bailliage, et lés dépenses qui ont été faites à cette occasion n'ont eu d'àutrè objet que de donner un air plus imposant à rassemblée auguste qui 3tait convoquée. ÂU surplus, lës Ouvriers employés ont été la plupart, payés de mes deniers, et si quelques dépenses minime? restent â acquitté^, relatives à la construction des salles, c'est que l'ai cru qu'elles devaient être àla chargé de la municipalité.
Je viens appuyer l'amendement
ui a pour but de laisser à la charge des indtvi-
us les dépenses faites pàr eux. Cette disposition doit être mentionnée, dans le décret, afin d'éviter les abUËU
Le décret me semble prématuré, parce que les pouvoirs publics qUi doivent assurer son exécution ne sont pas encore constitués, Je demande l'ajournement jusqu'à là fort mation des départements.
(L'ajournement est prononcé.)
lève là séance à trois heures et demie, après, avoir indiqué la suivante pour demain, à neuf heures du. matin*
A LA SÉANCE DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE DU
Les membres du corps des mines, réunis à la Monnaie, considérant qu'il est du devoir de chacun des individus qui le composent de contribuer, de tous leurs efforts et de toutes leurs lumières, au bien général de la nation française, ont arrêté de rédiger, en commun, un Mémoire sur les deux questions suivantes et de l'adresser à l'Assemblée nationale» Les membres du corps des mines rat déclaré unanimement qu'ils saisissaient avec empressement cette occasion de témoigner leur adhésion et soumission absolue à tous les décrets de l'Assemblée nationale, sanctionnés par le roi.
Première question :
Les mines doivent-elles être déclarées propriétés nationales qu non?
Seconde question t
Les mines étant déclarées propriétés nationales, un corps et une école de mineurs sont-ils nécessaires ou nont
plan et divisiq# du* mêrriflwe.
Avant de d^cutej? la première question, nous attesterons l'existence dfs mines en France, et l'utilité: de leur exploitation ; nous définirons ce que c'est que la propriété, d'où elle peut résulter légitimement ; nous définirons aussi, avec précision, les objets connus généralement sou^ les noms de mines et de minerais. Ces définitions bien pesées et bien senties, qn connaîtra facilement s'il est juste ou injuste de réserver là propriété dès raines à la nation, ou de les abandonner aux possesseurs des terrains superficiels. Nous exanctiyerons ensuite s'il est avantageux ou non, pour la société, de faire exploiter les mines par ses agents, de les concéder en en conseryant la surveillance, ou de les abandonner aux intérêts particuliers. Nous comparerons avec irqpartialité ce qui arriverait dans chacun des deux cas. Le résumé et ie résultat de cette comparaison offriront la Solution entière de la première question. Nous passerons à l'examen de la seconde.
Utilité des mines.
Nous n'emploierons pâs un temps précieux à démontrer l'utilité de l'exploitation des mines: tout le monde sait que les substances minérales sont les matières premières ou ïes principaux agents dans tops les arts; mais il est de notre devoir de faire remarquer aux représentants de la nation que nous ne manquerons pas de mines en France, malgré le préjugé contraire trop généralement répandu. Le royaume est entouré presque de toutes parts de chaînes de montagnes qui sont de même nature que celles dorit les peuples qui nous avoisinent extraient les matières métalliques, pour lesquelles nous sommes honteusement leurs tributaires. Des prolongements de ces mêmes montagDes se montrent jusqu'au centre de la France. Les départements du Nord ét plusieurs autres encore fournissent des charbons de terre en abondance; ce combustible devient plus intéressant pour nous que les métaux les plus brillants et les plus recherchés; enfin les naturalistes et minéralogistes, qui ont parcouru là France, y ont annoncé et décrit des filons et des minerais de tputés espèces.
PREMIÈRE QUESTION PROPOSÉE.
Les mines doivent-elles être déclarées propriétés nationales qu nont
Nous définissons la propriété : le droit de l'homme de disposer d'^ne chose et d'exercer sur elle toutes ses facultés.
Toute propriété a résulté, dans son origine, ou d'un partage fait entre des hommes, ou d'un travail constamment appliqué par l'homme sur un objet, sans opposition de la part des autres.
Nous appelons mines tous les lieux desquelson extrait les matières minérales ou métalliques employées aux arts et dans le commerce. Nous appelons minerais toutes ces matières encore brutes ou non travaillées.
Les minéraux ou les métaux sont disposés ou par couches ou en filons.
Un filon ou une couche de minerais quelconque peut être considéré comme ayant rempli une scissure perpendiculaire ou inclinée dans une masse de terrain, ou comme une couche entre d'autres couches supérieures et inférieures parallèles. Les profondeurs qu'occupent ces solides sont infinies par rapport à nous. Leur épaisseur varie beaucoup. Leurs directions rapportées à la surface de la terre s'étendent presque toujours à plusieurs lieues.
D'après cette manière d'être des minerais dans l'intérieur du globe, on sent qu'il faut ouvrir le sein de la terre et s'y enfoncer profondément, po ur obtenir ces matières si nécessaires à la société.
Ces masses de richesses enfouies ne montrent quelquefois à la surface des terrains que de très légers vestiges de leur existence, vestiges qui induiraient souvent en erreur, et auxquels l'homme de l'art même ne saurait se livrer avec sécurité, sans avoir reconnu des indices multipliés sur un assez grand espace ou sur une distance assez longue. Le plus souvent et surtout pour les minerais par couches, aucune marque extérieure n'existe absolument. 11 faut avoir enlevé la terre végétale, avoir pénétré bien des couches inférieures avant d'arriver à la certitude du minerai qu'on cherchait.
Cet état naturel des choses bien entendu et bien senti, le droit de propriété sur les terrains étant le résultat d'un partage fait, ce partage a-t-il pu s'étendre sur les mines?
Représentons-nous une colonie s'établissant dans une région inhabitée jusqu'alors. Les colons peuvent faire entre eux le partage des terres; mais ils ne peuvent faire entrer dans ce partage les mines que la nature a déposées dans les profondeurs. Ils ne les connaissaient pas ; et s ils entendaient les comprendre dans les lots (les mines n'étant pas également répandues dans la masse de la terre), leur partage se trouverait par là même inégal et inexact.
En considérant la propriété des terrains comme résultant d'un travail constamment appliqué sans opposition, ce travail a-t-il pu être appliqué aux mines par l'homme isolé?
Les premiers besoins de l'homme dépendent d'objets existant à la surface de la terre. C'est là que son travail a été dirigé, c'est là qu'il doit exercer son droit de propriété.
L'homme isolé n'a pas dû, n'a pas pu extraire les matières minérales pour en faire usage. Ses efforts eussent été impuissants. 11 a fallu une réunion de combinaisons et de forces qu'il n'avait et ne pouvait appliquer seul, et qui supposent une société déjà formée et active. Ce n'est donc pas l'homme seul; mais la réunion du génie, des forces de plusieurs, mais la société enfin qui a pu extraire et élever des couches inférieures de la terre les matières métalliques, qui a pu porter à douze ou quinze cents pieds de profondeur, une somme d'activité et de force capable de résister à des pressions énormes, à des amas
de liquides qui tendent continuellement à y pénétrer avec une rapidité destructive, et aux difficultés d'y entretenir un air respirable.
Jl n'est "donc pas injuste que la propriété des mines soit distinguée de celle des terrains superficiels, puisque cette propriété n'a pu être comprise dans un partage originairement fait des surfaces, puisqu'elle n'a pu résulter pour l'homme delà direction de son travail qui n'a été appliqué qu'à cette surface, et qui n'a pu l'être à l'exploitation des mines £sans le concours de plusieurs ou de la société. "
Mais, dira-t-on, si l'homme, dans l'état de société, a pu appliquer sou travail à l'extraction des minerais, les mines exploitées par le premier occupant ne sont-elles nas pour celui-ci une propriété à juste titre? Non, sans doute; cardans la société nulle chose n'est sans maître. Ce qui n'est pas aux particuliers est à la, communauté entière; tous ses membres y ont droit également. On n'aurait donc pu exploiter des mines sans les envahir sur la société, puisque auparavant elles n'étaient pas aux particuliers qui ne les connaissaient pas. D'ailleurs, point de société, point de propriété-constante, sans lois. Les lois .d'une société ont pour but de procurer aux individus leur sûreté personnelle, celle de leur propriété appuyée sur l'ordre général, et lé plus grand avantage de tous, en subordonnant l'intérêt particulier au bien commun.
Si nous cherchions ce qui s'est pratiqué dans l'antiquité relativement aux mines, ou ce qui se pratique chez les peuples modernes, nous trouverions que partout les mines ont été et sont conservées, soit à la société indivisément, soit à la puissance qui agissait ou qui agit à sa place. Mais i'exemple des autres peuples ne serait pas une raison suffisamment déterminante aux yeux des législateurs de la France. Examinons ce qui est le plus avantageux à la société, ou d'abandonner les mines aux propriétaires des terrains superficiels, ou de s'en réserver la disposition comme vro-vriétês publiaues. Comparons ce qui arrivera dans l'un et dans l'autre cas ;le résultat de cette comparaison doit offrir une solution satisfaisante.
Supposons qu'un propriétaire de trente ou cinquante arpents de terre attaque un filon qui traverse son champ; tant que la direction de ses travaux n'excédera pas ses limites, ou qu'ils ne s'étendront pas, suivant l'inclination du filon ou de la couche des minerais, au delà des perpendiculaires à ses limites, ce propriétaire pourrait tirer parti de l'exploitation, si elle est assez productive en aussi petite masse, pour remplir des frais d'établissement de puits, usines, fourneaux s'il y a lieu, etc.; personne n'aurait droit de le troubler; mais si ce même propriétaire fait un pas hors des perpendiculaires à ses limites, alors, fût-il à cinquante toises de profondeur, et par conséquent ne pouvant nuire à la superficie, on l'arrêtera, et son voisin, qui n'aura employé ni industrie, ni numéraire aux travaux, qui même jamais n'aurait tenté une exploitation, exigera ou l'abandon des travaux, ou une part dans les profits.
Si les travaux sont abandonnés, le particulier qui exploitait y perd le fruit de ses dépenses antérieures, et la société y perd aussi sensiblement.. Si les travaux sont continués aux nouvelles conditions du propriétaire voisin, la matière extraite augmente nécessairement de prix, et il est avantageux à l'Etat d'obtenir de son sol les matières premières, au plus bas prix possible, afin de n'avoir pas à craindre l'importation, et d'avoir
à espérer au contraire l'exportation de ces matières façonnées par nos arts.
Si le propriétaire voisin de celui qui a entre-prisune exploitation, veut aussi exploiter sa portion, les frais des deux petites exploitations étant proportionnellement plus considérables que ceux qui embrasseraient les deux terrains par une seule entreprise, le prix de la matière extraite se trouve encore augmenté.
Il naîtra, entre les deux voisins, des discussions et des procès qui iront encore au détriment de la chose.
La multiplicité des petites exploitations nuira beaucoup plus aux productions de la surface que ne le ferait une grande entreprise (l).
Le particulier ne gagnera que peu à sa petite exploitation, si même il peut soutenir la dépense des travaux préliminaires, et l'Etat risquera de perdre beaucoup par le haut prix auquel seront les matières premières.
Il résultera sûrement de ces exploitations partielles, que la surface des mines sera criblée et enlevée, comme on en a déjà en France la triste expérience en plusieurs endroits, à cause de la négligence sur cette partie de la part de l'administration, quoiqu'elle en ait été instruite par les officiers des mines. Les entrepreneurs, après avoir ainsi extrait à la surface, et par là avoir rendu les exploitations bien plus difficiles, plus périlleuses et plus dispensieusespourla suite, ne se soucieraient pas de les continuer, ou ne seraient même pas en état d'en faire les frais ; il arrivera que, dans trente ans, la plupart des mines ayant été exploitées jusqu'à quarante ou cin-qante toises, seront alors abandonnées ou trop coûteuses à exploiter, et qu'il faudra recourir aux étrangers, pour nous fournir tous les minéraux et les métaux dont nous aurons besoin.
Les mines laissées aux propriétaires de fonds pourraient être profitables aux particuliers seuls qui posséderaient de suite mille ou douze cents arpents de superficie, et qui seraient en état de faire des avances pécuniaires considérables ; mais combien y a-t-il en France de particuliers dans cette position? Sera-ce précisément dans leurs terres que se découvriront les mines, et quand il s'y en trouverait ne seront-ils pas le plus souvent avides d'augmenter promptement leurs richesses en dévorant, pour ainsi dire, les minerais voisins de la surface pour abandonner bientôt le reste devenu plus coûteux à obtenir. Un petit nombre d'hommes pouvant seuls accumuler subitement de grosses fortunes, et la société qui leur en aura donné les moyens, perdra pour l'avenir, des ressources précieuses à son activité, et qu'il lui était de la première importance de conserver.
Ce qui arrivera, les mines étant réservées à la nation et exploitées ou concédées par elle.
Si l'Etat faisait exploiter les mines, ayant à employer des gens instruits, et les comptes étant rendus exactement à un comité national des mines, cela serait le plus simple, le plus avanta-
geux, et le mieux possible (1); car l'Etat aurait au moins les mêmes avantages en grand que les compagnies, pour les exploitations qui donnent un bénéfice, et, de plus, il pourrait et devrait même faire exploiter aussi les mines qui produiraient seulement la rentrée des frais; parce qu'il y aurait toujours alors une augmentation dans le commerce, et une plus grande activité entretenue (2). Mais les circonstances ne permettent pas de songer aux avances qui seraient nécessaires, cela pourrait s'établir par la suite.
Les uûnes seraient concédées; mais on les maintiendrait sous la protection de lois sagement faites, qui, en excitant et encourageant l'activité sur ce point, tiendraient à en conserver et perpétuer les ressources.
Un comité, toujours en activité, serait chargé de veiller à tout ce qui est relatif aux mines, et aussi à ce qu'on appelle Bouches à feu (3).
Il serait accordé un encouragement quelconque à tout particulier qui aurait découvert ou déclaré, le premier, la découverte d'une nouvelle mine, dès que cette découverte serait constatée utile.
On ne concéderait plus à des solliciteurs, bien souvent plus intrigants que capables, de grandes entreprises de provinces entières.
Les concessions seraient resserrées dans l'espace nécessaire à l'établissement et au soutien de grands travaux. Elles pourraient être multipliées sur une masse de minerais d'une certaine étendue : l'espèce de rivalité qui en résulterait, donnerait de l'émulation et serait utile au commerce.
Des associations se formeraient pour l'exploitation des mines, on partagerait les mises de fonds en un grand nombre de petites actions. Cette manière de former des entreprises, la plus commode aux particuliers, est aussi la plus utile à l'Etat: elle tend à diviser les profits, à conserver la similitude des fortunes (4).
Toute souscription, toute association proposée relativementaux mines,devraitavoir l'approbation du comité, qui veillerait alors à ce qu'il ne fût proposé au public que des entreprises fondées 3urdes découvertes constantes (5), et sur des combinaisons équitables d'intérêts ; ce serait le moyen d'empêcher que des gens adroits et peu délicats,
ou à une imagination exaltée, ne séduisissent des gens Crédules et ne les ruinassent.
LeS concessions ne géraient accordées qué stiï le rapport du comité dés mines.
Les discussions, la longueur des procès étant surtout très nuisibles aux entreprises d'exploitations déminés, on rédigerait avec soin un Code de lois relatives, qUi tendraient à éviter les discussions ou à abréger du moins les proCèb inévitables,
On aurait pour ^agriculteur tous [es ègârdë et toutes les déférences dues à l'art utile qu il professe. Il serait amplement indemnisé toutes les fois qu'il aurait fallu le gêner dans ia culture de la moindre partie, de son champ.
Le gouvernement dirigerait enfin sur les mines, des soins, des lumières .et une surveillance ju^te. Alors la confiance renaîtrait, de nombreuses compagnies d'exploitations se formeraient, Ce genre d'industrie acquerrait bientôt chez nous le degré de vigueur et de mouvement dont 11 est susceptible. Alors notre numéraire s'écoulera mpins. 35 millions et plus exportés annuellement pour nous fournir des métaux et des minéraux resteront bientôt,en circulation chez npus. Nous n'eU'-tretiendrons plus de bras étrangers, Nqtre popu? lation s'augmentera, les arts fleuriront davantage chez nous. L'agriculture y gagnera encore, et nous obtiendrons toutdenotre contrée, l'unedesplus té^ condes, à tous égards, et des plus heureusement situééa de l'Europe.
Résultat de la comparaison des effets que produirait l'abandon des mines auçp propriétaires particuliers, ou la réserve des ruines à lQ société comme PROPRIETES NATIONALES.
En abandonnant les inities aux propriétaires des surfaces, cet abandon serait inutile a la plupart, un très petit nombre seulement de particuliers déjà riches, augmenteraient peut-être leurs fortunes. L'Etat y perdrait, ét cette perte aurait des conséquences funestes à l'industrie, au commerce et à l'ofdré général :
Les mines étant déclarées propriétés nationales, l'Etat, ou des concessionnaires, dont les plans et les moyens d'exécution seront connus et dirigés par un comité d'hommes instrnlts et expérimentés dans l'art, exploiteront avec prudence, économie et avantage* Elles seront lucratives à un grand nombre dé particuliers. Elles fourniront et perpétueront des ressources à 4'industrié nationale, diminueront au moins, si elles n'annihilent pas l'exportation annuelle de millions de numéraire. . a
Cette Comparaison nous offre, d'un coté, l'avantage incertain de quelques riches particuliers au détrimentdu bien général; de l'autre, l'avantage public sous tous les points de vue et le profit de beaucoup de particuliers.
Nous aviops vu précédemment qu/? le droit naturel, et d'après la manière d'être des mines, la propriété n'en peut être attribuée à personne : que lorsqu'une société s'est formée les mines n'ont pu être partagées) et le résultat de notre comparaison hous démontre que lorsqu'une société sé dôpne des lois, elle doit se réserver collectivement la propriété des miheS, pour empêcher que l'on en abuse, et pour qu'en jes çpûqeçjânt, on exploite, avec le plus grand avantage possible ; les mines doivent être déclarées propriétés nationales en France.
SECONDE QUESTION
les mines étqfrt dèclàtèet 'pftfpYUïtys ïiûUôntçtes, un corps et une éçow dç Hiberné soM-ils iié'cês-faires ou non?
Si la nation françftïse déclaré lès ïpiqes propriétés nationales, c'est où pqijr les e^pjôitej' par agents, ou pour les concéder êh surveillant Ces concessions, comme l'exige le bien. p^puC.
Dans le premier cas, iifaUt dès hommes ïn'Sr truits et sûrs, en état de bien conduire Jës exploitations dans les divers départements; dans le second cas, pour surveiller lés minés Cpn£edéég a des pompaguies», jl faut encoçji dès qm^ré des mines en état d'apprécier l'utilité 4es travaux des concessionnaires, de les éclairer, 40 les qjrlger de la manière la plus1 avantageuse pour eux et pour l'État, capables. sHirJPUt^e lé^eùre a rabri des tentatives et des proposition^ insidieuses des charlatans, qui ont nui d'une q$n i §re eff*ay an te et incalculable à l'exploitation de§ mines en France.
De manière ou d'autre, oq ne peut se passer d'un comité d'administration, pour toutes }ps mines du royaume* afin de les réunir & dé faife tendre leur activité commune au bien général des arts et du commerce. Ce comité, ou jugera les opérations des officiers des mines "employé^ par l'Etat à ses exploitations» ou eqlehflfà jës rapports faits par les surveillantsconcessions, et jugera les difficultés d'après ces rapports èt les demandes des concessionnaire?.
De toutes façons, on voit qu'il est indispensable d'avoir un comité et uq corps qp miqfurs, efjpar conséquent une école dans laquelle on puisera les connaissances multipliées qu'exigg l état d'ingénieur des mines*
Qu'on ne s'effraye pas ici de l&ftépepse qpTen-traîneront un corps et une école dps niipes, il ne faut pas préjuger ce que serait pette qèpehse, par Ge que coûtait et coûte l'administration actuelle des mines..
Nous ne retracerons pas à cette auguste Assemblée les dépradations scandaleuses des ministères antérieur». Tout lui est conçu. EÏÏej a tout scruté. Puisse la France oublier bientôt, dans la prospérité, ces moments déchirants £oyr elle, où des ministres sacrifiant tout à leurs intérêt^ ou à ceux de leurs créatures, préparaient ayec Insouciance la ruine de la patrie 1
Nous observerons seulement que l'administra?-tion des mines, telle qu'elle existeijdoit être pon-sidérée sous deux divisions très distinctes. La première ou la plus riche comprend l'intendance, les bureaux, les pensionnaires, les places de faveur, etc.
La seconde partie est le corps des paiUes, composé de personnes reconnues suffisamment instruites pour être en activité directement utile aux mines. Cette partie la plus nombreuse, la plus nécessaire, ne Coûte pas à l'Etat le tierô de ce que coûte la première partie qui èst presque entièrement inutile.
vLe corps des mines a toujours réclamé contre lès abus administratifs qui avaient lieu. Il a pré' senté des moyens de les écarter. Toujours il a demandé un ppmjté, Les différent^ mémoires remis aux chefs SujCcjâs'sfrs qé œ département attesteront cette vérité, mai? un CQniité d'pfûiéièrs de mines aurait bientôt pris la supériorité pur les chefs du département, qui, ne connaissant
rien à ce qu'ils devaient diriger, y étaient parfaitement inhabiles. L'autorité arbitraire eût été affaiblie, la place d'intendant des ndirtes aurait perdil dé sa dignité ët de isdn âgr'étaèrtt. et c'était l'intendant des mines, ménié entre les mains duquel bës mémoires passaient, qui jugeait que le comité n'était pas necéfcsairë.
On était obligé de prendre quelquefois les avis des officiers des mines : alors on les consultait, on recevait, avec bonté, leurs lumières., niais individUeiiëfbent, et, pour ainsi dite, dans lë fce-cret. L'autorité arbitraire prenait aé cés aviè ce qui était convenable à sës Vùes séuletilent ; le reste était mis en oubli.
M. de la Milliêrë, iùtëiidaht dë§ tnitiés tiéjrïiis deux bu trois ans, eh k^ait trOuVé l'àdmihistra-tion dans cet état. Ce magistrat, intègrë.et frahc, mérite, par ses qualités, l'hommage du c0i*ps jles mines, mais soit incertitude de sa pari, soit que, dans ces derniers temps, les variktioqs frèrpé-tuelleë du gouvernement, ët l'ëhibâi'ras qes linânCes, ti'dssent tout ëti stagnàtioii, lë Corps des mines dont il eût rallu augmenter' l'activité poUr lë bien dés exploitations, est resté da£s la plus fâché usé inertie.
Il est aisé de démontrer cependant que Idf siJUe des ministres ont porté des regards a ehçbiirà^é-inent sur la partie des mines eh France, on n'a pas tâlfdé à ert rëàsehtir ieS heureux effets, par l'introduction d'une iiduvelle triasse de matières minérales ou métalliques, soumises aux fabrications et portées de plus ën circulation dans le Commerce. Dans les années 175.6 à 60, à 68, les minés produjsiretit annuellement de 1§ a 2Qr000 marcs d'argent, de 4 à BO'O iijilliers de cuivt'é, saps Compter les produit^ ijjinrçn&jô&l des mines .dè plomb, fér, etc.... On n'avàit pourtant ënéOrë alors èn frahge qu'un très p^tit nombre d'hopimes instruits sur cétte pârt^ (1) : pààis oh avait su les 'i^eUte eh, activité. Qùë ^efàitrce donc si on emplôydit à. Rfèsent ay&J ces mêmes hommes célèbres et ëxigtjittts, le^ Suièti instruits et plus nômbrebx, foi"plès â l'Pcble des mines et qu^n pourrait multiplier énpîtë squs peU d'années. Bientôt les 35 millioBs \î) de numéraire exporté annuellement pdbr i acjfûisitipp, dés matières minérales, oil rpétàllit(|ies» rééîeraiêpt en grande partie et peut-être, môme totalement chez fa pué,
La sbmme de 6Q,O0O livrés à lâfydeilé pourrait être bbrriëé la dépense d'iin cpfpis et d'unë ,écqle de mineurs, qui, s'ils étaient dirigés Utilement, empêcheraient l'exportation de sommes si considérables, doit être considérée comme peu de chose pour un royaume comme la France, relativement au bénéfice qu'il^èu tetiFerait.
Il est une chose, surtout, sur laquelle nous ne saurions, tyop fixer les idées, c'est que de toutes les substances, ipinérales, le charbon dé tqrre est la plUs précieuse à )a France i PaKce que ce combustible, en épârgnâpt le reste de nos forêts,
donne un feu beaucoup plus actif que le bois, et qu'il est bien plUS avantageux à employer dans presque tous les travaux en graild. Ne perdons pas de vUë qu'il est dii piiis grand intérêt bour l'Etat, pour obtenir dé ëbh sbl lefe chàtiôrës au plus bâs prix, dë les fabriqiie? kUséi atéc îë moins de frais possible. D'après fceé principes, lë çom-merce pourra enrichir le royaume. SI les Anglais ont eii cet avantage Sur ûous, c'est pàfçé que leurs mines dë charbon produisent imfliënsê-rtieiit et à pëd dë frais, c'est ènfih flarpé qUë leurs matières premièrés ne Sont pas chargées d'impôts, cômine èUeà le sobt chez npUs, fîue ce peuple itidustrïëux k pu nou§ sèutifei4 une si grande quantité de fatlftiéràire.
Le corps des mifaeS doit brésetlter ici quelques rëflexiôtts ^{ir Une iwtfé du projet dèi^pporf du comité défc financés qui est relative aUx imiiës. L'honoràbïe membré, qui a Rédige ce rapport, nous semble y avoiHrajté légêtetnëht les mlhes. M. Lebrun n'aUrait-il pas arrêté sës idéeS sur l'emploi et là nëciéséiié CoijtinUëlle liés minéraux et des métaux dahâ tous lëS arts et dahs toutes les manufacture^;ti'aui'ait-ilpàsèU Conriaissànce de la somme exportée annuellement dans l'état présent des Choses, pour nous procurer ces matières chez les autres peuplés?
On propose la réunion dU eorpé et dë l'école des mines à ceux des ponts et chaussées, la trans.-lation de la collection minéralogique de la Monnaie au cabinet du roi el ttn conserve un professeur de docimasië et de métallurgie.
Le transport de la collection minéralogique de la Monnaie au jardin du roi enlèverait du centre de la Capitale une collection précieuse pour l'étude, par le Choix des morceau* et par l'ordre que Mi Sage y a mis.
On abandonnerait» on détruirait Un établisse* ment dont la dépensé est faite* et qui est utile ol il est, pour l'éloigner en le réunissant à un autre qui est déjà surchargé. Cela ne serait pas sûrement une économie* biais plutôt un moyen d'augmenter les dépenses du jardin du roi.
Quant à la réunion du corps et de l'école à ceux des ponts et chkuâsées, il ne suffit pas de réunir les noms; il faut appliqua les individus aux choses, et nous croyons par là cette réunion impraticable pour à présent et pour l'avenir*
Pour le moment présent» les membres du corps des mines conviennent qu'ils seraient de très médiocres ingénieurs des ponts et chaussées» et ils croient, malgré la masse d'instruction et de luniière dont MM. les ingénieurs des ponts et chaussées font preuve tous les jours» malgré les monuments imposants qui attestent mur juste célébrité» qu'ils seraient aussi à leur tpur de très médiocres ingénieurs des mines.
Il suffira, pour s'en convaincre, de jeter les yeux sur le tableau comparatif des connaissances qu'il laut posséder dans chacune de cas parties.
On exige à l'école des ponts et chaussées le dessin pour la figure, l'architecture en grand et la parte. L'écriture pour les plans, les mathématiques, la coupe des piejrrçp et la construction. La physjquê, mécanique, l'hjrdranfi^ùef. La connaissance des propriétés extérieure^ dès pierres et des terres. Là dijpêté^ d^USité djes prer mières, la çbqliàissance des divers effets que peuvent produire sur lés'dernierès les variations de-sécheresse et d!httffliditér Enfin la langue latine qui fait partie de la. première éducation.
A fêcoie dp§ thihëi 9Î1 é|lge le dës^ pour torreù dë bqps él^Dgenits ne géomètre, àppiîC^-bles a la géométriè soutérraine et au niveUemënll
deux parties que l'ingénieur des mines doit posséder de manière à opérer avec la plus grande exactitude, soit pour diriger des galeries souterraines sur tel ou tel point, soit pour percer un puits qui tombe précisément sur une galerie (I). La mécanique et l'hydraulique sont aussi indispensables aux mineurs, une connaissance étendue de la physique générale et de l'histoire naturelle, et une étude très détaillée de la minéralogie, enfin la chimie, la docimasie et la métallurgie. Car, excepté les mines de charbon, quand le chef de mines a fait extraire du sein de la terre les matières métalliques, il n'a fait souvent que le plus aisé : il faut alors qu'à l'aide de la chimie et de la docimasie, il connaisse parfaitement la nature de son minerai, dans lequel sont combinées quelquefois cinq ou six substances métalliques différentes. Il faut qu'il juge d'après ses essais, la manière de le traiter en grand. C'est alors que comme métallurgiste le chef de mines a besoin de la plus saine physique et d'une vigilance assidue pour obtenir avec la plus sévère économie tout le produit possible de son minerai.
On engage les élèves des mines à l'étude des langues anglaise et allemande, parce que beaucoup d'ouvrages sur la minéralogie et la chimie sont écrits dans ces langues.
On voit combien de connaissances exigent l'état d'ingénieur des ponts et chaussées et Pétât d'ingénieur des mines. On voit surtout des connaissances distinctes et particulières à chacun d'eux. Doit-on espérer de rencontrer souvent des sujets capables de l'énergie nécessaire pour être perfectionné dans toutes ces parties? Non. Ne nous faisons point illusion. Le génie de l'homme, en dirigeant son activité sur beaucoup d'objets, ne saurait les pénétrer autant que s'il l'avait porté seulement sur un petit nombre. Dans l'état actuel des choses, il est déjà très rare, si même il n'est pas impossible de trouver dans des corps d'ingénieurs, un sujet qui possède» dans un même degré, toutes les connaissances exigées, que sera-ce donc si on confond deux corps différemment instruits, et qu'on exige l'union et la perfection de toutes leurs connaissances respectives?
Si les membres du corps des mines ne considéraient ici que leur intérêt particulier, ils devraient désirer la réunion aux ponts et chaussées, car ce corps ayant eu jusqu'ici une activité plus grande, les traitements pécuniaires y sont plus forts ; et à moins de faire une injustice criante, et de sacrifier les élèves des mines qui, depuis 7 à 8 ans, sont victimes de la versatilité des opérations du gouvernement, et qui, après avoir acquis de l'instruction, ont perdu une partie de leur fortune en attendant l'effet des promesses ministérielles, on ne pourrait les faire passer aux fionts et chaussées que comme ingénieurs, pour es uns, ou comme gradués pour les autres, suivant l'état qu'en remettrait au directeur de l'école des ponts et chaussées celui de l'école des mines.
Malgré donc les avantages qui se présenteraient naturellement dans la réunion, pour les individus du corps des mines, leur devoir, leur désir étant d'être rendus utiles, ils réclament contre ce qui leur paraît nuisible au bien général, et c'est d'après ces sentiments qu'ils réclament contre la
réunion des ingénieurs des mines aux ingénieurs des ponts et chaussées.
Tout Français sent combien il est nécessaire et indispensable de faire des réformes considérables dan3 les dépenses de l'Ëtat; mais on sent aussi que ces réformes mêmes, si elles tombaient sur des choses utiles, produiraient des effets plus fâcheux encore que toutes les dépenses passées.
Qu'on supprime donc dans l'établissement des mines tout ce qui n'y est pas en activité nécessaire, que le corps et l'école soient seuls conservés.
On aurait alors, à Paris, un comité des mines, comme on l'a proposé pour les ponts et chaussées. Ce comité serait composé :
D'un chef ;
De quatre inspecteurs;
De quatre ingénieurs.
Le professeur de chimie et docimasie de l'école des mines, et celui de métallurgie seraient toujours pris dans les membres du comité (1).
Un nombre nécessaire d'ingénieurs des mines seraient envoyés dans les départements qui en auraient demandé, et ils seraient aux frais des départements.
Ces ingénieurs départis remettraient aux assemblées de département et enverraient au comité des mines un tableau minéralogique raisonné de chaque département. Ils y indiqueraient l'état des mines et tous les moyens d'en tirer parti. Ils feraient dans le chef-lieu, tous les ans ou tous les deux ans, un cours de minéralogie et de chimie. Ces ingénieurs contribueraient de tout ce qui est en eux à l'amélioration et à la plus grande activité des mines. Ils rendraient compte aux départements et au comité des mines, contradictoirement avec les concessionnaires, des difficultés qui se seraient élevées, et mettraient tous leurs soins à ce que ces procès fussent vidés le plus promptement possible.
Il ne pourrait y avoir à l'école des mines, à Paris, plus de douze élèves gradués ; leur traitement alors serait de ......... jusqu'à ce qu'ils fussent placés dans un département.
Le chef du comité serait élu parmi les quatre premiers membres, ou inspecteurs généraux ; ceux-ci seraient pris dans les ingénieurs du comité ; les ingénieurs du comité dans les ingénieurs des départements, et les places des départements seraient données aux plus anciens gradués.
RÉSUMÉ GÉNÉRAL.
1° On ne peut pas regarder comme une injustice que les propriétaires des surfaces ne soient en même temps propriétaires des mines y
2° Il est du plus grand avantage de la nation française de se réserver les mines et de les exploiter ou d'en concéder l'exploitation à des grandes compagnies capables de ces grandes entreprises ;
3° Un corps et Une école de mineurs sont né-
cessaires pour l'exploitation et la surveillance des exploitations des mines;
4° On doit supprimer la partie de l'administration des mines qui n'est pas absolument utile. Conserver le corps et l'école, former un comité, détruire les anciennes lois sur les mines, établir un nouveau code de lois plus précises et mieux combinées pour le bien général.
Les dépenses annuelles de la nouvelle administration des mines proposée pourrait être bornée à 66,000 livres.
A LA SÉANCE DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE DU
OBSERVATIONS SUR L'ARMÉE, PAR M. ACHARD DE BONVOULOIR,
député du département de la Manche, ci-devant Cotentin (1).
Messieurs, dans un moment où tout annonce que nous allons avoir besoin de l'armée pour aéfendre les limites de l'empire, tout nous invite à prendre dans une sérieuse considération le maintien de la discipline et la position affreuse où se trouvent les officiers qui en sont le nerf.
Jamais peut-être la France n'a eu plus de besoin d'avoir de bonnes armées, et jamais ses armées, tant de terre que de mer, n'ont été dans un état plus critique.
Une armée sans discipline n'est qu'un ramassis d'hommes incapables de résistance. Occupons-nous donc de cette grande considération, afin que nos ennemis, voyant notre contenance, renoncent à des projets qu'ils n'ont peut-être fondés que sur la supposition de notre faiblesse dans un moment où les liens de la discipline militaire paraissaient avoir été brisés exprès pour nous livrer à leur discrétion. Empressons-nous de les rétablir* Si nous tardons, nous n'aurons plus réellement d'armée; nous l'aurons détruite nous-mêmes. Et si quelque partie de ce beau royaume devient la proie de nos voisins, nous devons en être responsables.
Nous pouvons avoir à combattre demain des armées aguerries, et surtout disciplinées. Il serait insensé de se flatter qu'il suffit du nombre, du courage des individus et de quelques séductions pour les vaincre. C'est l'ensemble, et non la multitude, c'est l'ordre et la tactique qui gagnent les batailles. Ce sont les batailles qui décident du sort des empires. C'est la discipline qui conserve les armées. C'est la conduite des officiers et l'obéissance des soldats qui les rendent victorieuses.
Ceux qui vous diraient le contraire, ceux qui croiraient pouvoir impunément démonter tous les ressorts de la force publique, et les rétablir à leur gré ; ceux qui vanteraient des ressources justement suspectes, comme si elles étaient éprouvées; ceux qui hasarderaient de nous laisser ainsi à découvert devant un ennemi entreprenant, et ne craindraient pas d'exposer d'aussi grands intérêts : ceux-là seraient les véritables * ennemis de la patrie, qu'ils compromettraient par malice on par ignorance, mais toujours de fait.
Cé seraient des traîtres ou des insensés également d'accord avec nos ennemis pour nous livrer sans défense. Cette discipline qui fait la force: des armées n'est point le fruit d'un moment. Elle a pour base les mœurs; elle se mûrit par l'habitude; elle dépend beaucoup de l'opinion. Ce n'est qu'à la longue qu'un officier acquiert la confiance de sa troupe ; ce n'est qu'à la longue que l'esprit de corps se forme et qu'un régiment devient bon.
Tous les jours nous entendons le récit de nouveaux attentats. Tous les jours on cite des soldats révoltés, des officiers massacrés. N'est-il pas temps d'arrêter le cours de tant de crimes Y
Tous ces excès dérivent de la même source et se perpétuent par la même cause. Des factieux les commandent, et notre indifférence les autorise. Les officiers du régiment de Beauvoisis attaqués, blessés, mis en fuite par leurs soldats ; M. de Macnemara massacré par des grenadiers ; le brave Mauduit coupé en morceaux par son propre régiment, dont les remords ne peuvent réparer la perte, et cent autres traits pareils qui nous ont été dénoncés, demeurent sans vengeance. On dirait que dans ces temps malheureux le crime seul trouve des défenseurs ; il trouve au moins des apologistes qui savent le pallier; et personne n'élève la voix pour l'ordre et la justice!... Faut-il le dire enfin? Les jury3 militaires ne trouvent pas un coupable, surtout lorsque le crime est capital.
L'Assemblée nationale fait des lois : mais' à quoi serviront-elles, si nous les laissons sans force? Non seulement on nous reproche cette inexplicable indifférence, mais on va même jusqu'à oser nous accuser de renfermer dans notre sein les instigateurs qui suscitent les peuples à les violer. C'est sans doute une calomnie. Mais de grands crimes se commettent sous nos yeux, nous les voyons, et nous ne les empêchons pas!
Des clubs, sous le faux nom d'amis d'une Constitution qu'ils renverseront par leurs excès, sollicitent publiquement les soldats à l'insubordination, à la révolte contre leurs officiers, à les chasser, à les assassiner. « Chassez vos officiers, dit-on aux sous-officiers, et vous aurez leurs places... » Et c'est à des soldats, à des hommes dont on dit qu'on cherche à relever l'existence, qu'on veut rendre dignes du nom honorable de citoyen, qu'on ose. proposer de devenir officiers en marchant sur le corps de ceux auxquels la loi leur ordonne d'obéir!
On sait que, dans une grande garnison, des soldats français ont été dire à des Suisses : « Si nous renvoyons nos officiers, renverrez-vous « les vôtres?... » Ces braves Suisses ont répondu avec indignation: « Nous?... nous serons « fidèles aux lois qui nous ordonnent de leur « obéir; » et ils ont été aussitôt renouveler à leurs officiers l'assurance de leur attachement et de leur fidélité.
Malheureux et trop braves soldats de Château-vieux, qui avez dû expier votre erreur par le supplice... que je vous plains! On avait osé vous dire qu'en vous révoltant vou3 seriez plus honorés : on vous avait peint vos officiers"comme des traîtres; vous vous êtes laissé surprendre par des imposteurs; vous avez payé votre erreur de la vie.. Mais ceux qui vous ont conduits dans cet horrible précipice, à quels tourments ne de-vraient-ils pas être dévoués. Ils sont responsables de votre sang. C'est à vos compatriotes, s'ils peuvent les connaître un jour, c'est à la France
entière à vous venger en faisant punir par un supplice bien mérité ceux qui ont été la cause de votre mort. Malheureuses victimes de leurs calculs! Ces conspirateurs qui vous ont séduits, entraînés, ont-ils eu le courage, pendant le cours de la procédure qui vous a condamnés, de venir crier aux juges, à la nation : Arrêtez ! faites grâce 1 C'est nous qui sommes les vrais coupables ; c'est nous qui avons séduit, trompé leur simplicité. Nous leur avons déguisé le crime; nous le leur avons présenté sous les apparences de l'honneur, du patriotisme; nous avons eU de la peine à nous faire entendre; ils ont résisté très longtemps : mais une fois persuadés, ils ont persévéré dans leur erreur avec un courage qui prouve ce qu'ils auraient fait pour une meilleure cause.
L'emploi qu'ils ont fait de ce courage était coupable; ils ont mérité la mort; ils l'ont subie; et cette justice nécessaire a laissé dans tous les Cœurs un sentiment profond de pitié et d'horreur...;. peut-être d'estime!....
C'est un grand exemple pour leurs compatriotes! exemple qui n'était pas nécessaire pour les rendre fidèles, mais qui servira à les rendre moins faciles à persuader. Il servira à prouver aux soldats qui veulent conserver leur honneur, qu'ils ne peuvent s'écarter un instant de l'observation de la loi sans s'exposer à se voir entraîner dans les plus grands crimes, et à mourir honteusement de la mort des lâches.
Eh bien! ces crimes se commettent encore tous les jours sous nos yeux, sans mystère comme sans obstacle.
Nous ne pouvons ignorer que dans presque toutes les garnisons il y a des cabarets où l'on paye là dépense des soldats; que l'armée est partagée en sous-officiers et soldats qu'on tient en fermentation pour les décider à se défaire de leurs officiers, et ces mêmes officiers qui voient préparer les moyens de les faire chasser par leurs sous-officiers et soldats.
Ceux qui ont suscité les crimes de Nancy sont les mêmes hommes qui suscitent ceux d'aujourd'hui. Dominateurs dans ces clubs soi-disant amis de la Constitution, c'est de ces foyers que partent les ordres et le venin qui va s'insinuer dans l'esprit et corrompre le cœur de tous les soldats; et voilà pourquoi on avait tant à cœur de les y faire aller.
Les barbares ! ils provoquent les soldats aux crimes qui sont utiles à leurs desseins secrets* pour les abandonner ensuite froidement au châtiment! Car, en dernière analyse;... on leur conseille éh secret dans les cabarets de violer les lois ile la discipline : on les enivre avec du vin préparé; on les excite par des plaisirs : on lés suborné avec de l'argent.... Mais, en public; on ést obligé de les condamner ; et ces malheureux instruments qu'on emploie finissent par être des victimes abandonnées* comme les Suisses deChâ-teauvieux, par leurs corrupteurs, qui deviennent ainsi leurs véritables bourreaux.
On va jusqu'à nous faire l'injure dë dire que quëlques-uns même de nous font usage de ces moyens Coupables; dU moins on nous accUse de les autoriser. Repoussons cette odieUSe calomnie eh faisant enfin justice; et prenant des moyens efficaces pour arrêter le cours de Ces attentats.
C'est par lé ministre de la guerre que nous devions être avertis officiellement de l'état critique où se trouvent les troupes : rendons-le res= ponsabie des insurrections qui peuvent résulter ae sa négligence;
On vous dit que les officiers manquent de patriotisme, qu'il? sont ennemis de la Constitution..... Mais qui tient ce langage ? Ceux qu ont besoin de leurs placés, qu'ils ont promisesen payement des crimes qu'ils ont achetés.....Quelle épreuve avons-nous de l'incivisme des officiers? En croirons-nous les comptes infidèles que nous avons reçus de l'affaire du régiment de Beauvoisis, comptes démentis hautement par le colonel, par les officiers et par les procès-verbaux ?
Peut-on croire que si ces sous-officiers succombent aux tentations qu'on leur offre pour remplacer leurs officiers, la patrie puisse compter davantage sur des hommes qui n'auront obtenu leurs places qu'à force de crimes? Comment ces nouveaux officiers, qui ne seront parvenus qu'en violant toutes les lois delà discipline, établiront-ils leur autorité sur leurs soldats, hier leurs camarades, et toujours leurs égaux ? Croit-on que ceux-ci ne soient pas empressés de parvenir par la même voie? Et qu'aurons-noUs à leur dire, quand ils voudront âvoir leur tour dans ce pillage et défaire ce qu'ils auront fait? Quel fond pourrons-nous faire sur Une armée corrompue, indisciplinée, dépourvue d'officiers accrédités, et ayant l'habitude du commandement? Pourra-t-ellë résiter à nos ennemis du dehors, dont les armées aguerries sont parfaitement disciplinées? N'aurOns-nous pas tout à craindre, pour notre propre liberté, d'une multitude d'hommes sans frein, sans bien, avertis par l'essai que nous leur aurions laissé faire de leurs propres forces, qu'ils peuvent tout oser? Si un ambitieux sait s'emparer de leur confiance en les associant à partager ses conquêtes, rétablir par leurs forces à son profit et à nos dépens ce régime féodal que vous vous applaudissez tant d'avoir aboli : quels dangers ne peuvent-ils pas faire courir à ceux mêmes qui les auront dégagés du frein des lois, et qui se flattent* peut-être bien légèrement, de lesavoir toujours sous leurs étendards ?..... Maisnon..... Si quelques individus sont gangrénés,le soldat français, en général, est encore pur, l'honneur fait la base de son caractère : qu'on l'abandonne à lui-même, toute son énergie sera en tribut à la gloire et à la vertu. Il est confiant, franc, loyal; il suffit de le préserver de ces hommes dangereux qui l'égarent.
La gangrène dont on cherche à vicier l'armée française prend sa source dans les déclamations des clubs soi-disant amis de la Constitution, dans les calomnies que l'on répand jusque dans cette enceinte; dans les adresses injurieuses aux officiers* dont l'Assemblée souffre la lecture sans improbation, ou au moins sans information légale; dans l'assurance que ces clubs donnent journellement aux sous-officiers, de remplacer immédiatement tous les officiers, moyen odieux de rendre ces sous-officiers, jusqu'ici les premiers coo-pérateurs des officiers dans le maintien de la discipline, leurs plus dangereux ennemis.
Ce qui vient de se passer au Mans est une preuve de l'autorité que ces clubs exercent dans les départements, en rivalité, en opposition même, aux corps administratifs, aux municipalités et aux tribunaux ; qui sont obligés de céder, je ne dis pas seulement à leur influence, mais à leur volonté absolue, bien plus active et plus forte que le pouvoir exécutif.
Le régiment ci-devant de Chartres vivait en paix sous la protection des lois* au Mans, généralement aimé et estimé de tous les citoyens, ce qui est attesté par les certificats authentiques des
corps administratifs et de la municipalité. Un mai àvait été èlévê £ la potte de l'évêque ': il est abattu pendant la nuit. On en accuse les dragons. Il n'y à aucune pre'iivé contre eux ; toutes les présomptions même les déchargent dé cette accusation ; mais les dragops Vôtit pàs votilu chasser leurs officiers ; ils concourent ensemble au maintien de la tranquillité publique ; à l'exécution des ordres de la municipalité..... Lé club Vêtit qu'ils partent, malgré le deôir dè la Municipalité et du département, sans avoir dëmatfdè loMi^ du pouvoir exécutif. Et lé 'ministre même hoiis laisse ignorer qu'il a été obligé dè déférer à la volonté du club. Ce qui s'est passé au Mans oonWe le régiment de Chartres, arrive à peu près à Limoges. Le ministre à été tybligê, sut la demande d'un club, d'en faire partir qn régiment qui était toujours demeure fidèle aux lois et S. fa disêi-pline.
Souffrirons-nouë que bès ïilubSj tès preténclus amiS de la Constitution, émpêcHfent âitisi lei&çii-tion des décrets et tiïèCôfmaissétit lès pouvoirs établis pour les faité respecter $
Déjà ces cltibs iijBtrùùfe, làtt présumant que, dans un moiâ, On enverra les lettrés de $mvo-Catioh, pour là législature qui doit ftouS remplacer. déjà ces çlubs désignent h OS §ucceSSetiïs, et ménacérit, si on eh nomment, d'autres, dé soti-lever Iç peùplë. Déjà, pu conpaît dâ'ns ies (départements ces futiirs législateurs,: c'eét ainsi qu'ils ont enyoyé des hommes qui doiVeUt rèmptir les places eçc]èsiastiqjùêS. et çêlies des trîbuiiau^ : de m^nièjrè ^Uç c èst sotivënt un hommè îhép'jiuu des électeurs qu'ils sont 'de nomnjer, parée qinl ny aurait pas de sûreté d'en ij.Ojintaer Un tàtitrei ëst^ce.là le Vtfett libré dti peuplât et pem-ob àpfrelèt irore tihe natiô'ii où dë p^eils àcteè de despbtïsMe SpÏÏt çojoàmis, et Ou lès [ois sotit Sânà ferce pour les VèpOUsàép ?
Cette puissance des ctdbâ 4 èh quelque sopte consacrée spus nos Veux, bqisque, pour être admis danâ Une plat$, il fallait auparavant avoir été initié au clup des ïàcôpiùS dje Parts.
C'est là que des évêques, dés curés ont /été recevoir leqr pouvoir et letir çoqse£atiOn ; c'est là que de? (généraux ybnjt Recevoir le bàtçti de cbmnjaôdemeht.
. lie hôtiveati gepre dë Àéspot.iéine ÏÏùi ètitrèpiréùd d'asseoir egalemêht jn&jmeè. petit âètrùilre aiiisï toute là forcé de là natip/i, et hop fëhdre là cpnquête facilp de nos VÇiSips.
On doft peut-être tymf quel^tië ç)&ptfe aux officiers français de lotir dévouement, dé leur courage, et de la vertu dont ils ont besoin' pour résister à tànt d'otitrëgés, à tant de corruptions dont on les environne; au torrent épouvantable dont tous les efforts tendent à leur faire perdre la confiance qu'ils ont méritée, et n'a-t-on pas essayé aussi de les corrompre eux-mêmes ? de les soulever contre leurs officiers Supérieurs et généraux 9 file les a-t-on pas entraînés un moment à faire des pétitions-, former des toihi tés, afin de s'autoriser de leur imprudence pour établir ceux qu'on devait faire tenir ensuite à leurs soldats contre eux-mêmes ?
Si quelques individu^ si même quelques régiments^ en petit nombre, oût ce reproche à se faire, s'ils se sont laissé égarer un moment-, bientôt ils ont senti et expié par leurs remords cette erreur passagère.
Si pqus laissons supsjstpr i'état actuel des chose^, noUS cbûtribuotifc par notre silence (car je suis loin de penser qu'aucun membre de l'Assemblée soit complice), nous contribuons à tous les
crimes qui se commettent tous les jours. Empressons notis donc de rétablir l'ordre §n faisant exécuter les lois.
Si je né préférais pas le salut de ma patrie à ce sentiment si naturel qui m'attache à plusieurs officiers du nombre de ceux que (a vertu seule retient dans un poste qui ne leur présente plus que des dégoûts et deS dangers {e! certes* cïest biéti la presque totalité \ fautais 'été le iprèmier à dire,..", àu bit vêtit conûrver dans l'aÀ'fnée les officiers tycïuéls, èt alors fi» leûr doit l'appui des lois àiibktfaèlhes iVs obéissait èt 'qûHls âèfeltâènt ; oïi on n'en vêtit m&fi èt alors IX faut fe diH frccn-cherftèiit.
Qu'ôn êfiatgtiè Wà± ôfftçieï's les hbrtBHrs de la ;positioéi oh ils sont, et dans lûquellje il 'eit barbare dè tes laisser ; et àux 'sdus^mcïèiïls et séldah, des crises 'par tesqwèls il n'est pas nécessaire qu'on le$ fassent patisêr ftohir leur faife fréhdre les places des officiers, H c'hst là le buî 'qu'yii Se propose. Donnez-leur 'leur retraite, H 'ptiuWtyëz à la récompense de leurs services passés.
Mais loin de moi là tentation 0è céder à un ïnoûvèment d'intérêt tJétsôtinèl dont ma patrie Serait là victifùe, et dont la générosité de cèS braves officiers s'indigneraitils mettent heureusement pour nous, ils mëttent ënçoré dé là 'gloire à servir une patrie qui les abandonné, à téhît tin poste périlleux. Profitons dé Cë sentiment pendant qu il subsiste,. dàné uti tnOftàétit bû nôtis àvons bèSoin dë tojutes noè fôrcëâ : cueillez encore les fruits d'un arbre dont Vous aiëk VoUlu couper les racines.
Rétablissons l'ordre et la discipline dans l'armée, ou bien, au premier_çhoc des étrangers, nous verrons tout s'écrouTèr avec rapidité : que nous servira notre Constitution, quand nos provinces seront la conquête des peuples voisins ?
J'entends dire que l'anarchie est" complète. Je pense moi qu'il p'e^t point impossible de rétablir l'ordre et la discipline, si les ClubS Céssâîènt enfin d'abreuver les soldats 4e leurs poisons ; si au lieu de les égarer pàr un faux patriotisme, on ne leur vantait que le véritable, qui est le dévouement aux lois et l'amour de l'honneur ;t si on soutenait l'autorité, àu lieu de la contrarier en tout ; si enfin, ouvrant les yeux sur l'abîMê dans lequel des factieux» des iqtrigapts, des philosophes, des ignoranufj des traîtres peuVetré, peuvent précipiter notre malheureuse patrie, nous songions sérieusement à préparer des défenses de l'espèce de celles qui décident ddçort des arnjjees, au lieu de nous amuse/ à des )ieux communs de métaphysique ; si enfin on rappelait seulement le soldat français à ses principes .paturels^si on rendait sa confiance à ses officiers ; nous trouverions encore des armées françaises. Nos grçtià-* diers sont encore de la même trempe que ceux de Denain, de Fontenoi et de fiergfyeh. Mais ces grenadiers, si justes appréciateurs dùtiqerite militaire qui ne consiste pas seule enjt 4ans la bravoure, savent si leurs officiers ne leur sont pas nécessaires, et s'il est pisé de les remplacer,
On parle d'un complot à peu près général, ^ expulser les officiers par là violenpe et flqêo^e d'en massacrer quelques-uns désignes. Ce complot n'est epcore qne dans la résolution des pppspirateurs ; il ne circulé énpore que dans )es clubs 9Ù l'on sait qu'il a été agité. Car je gui'sJpjn.dà croire les soldats de l'armée capables d'y avoir adhéré. Plusieurs régiments auxquels on a osé en i^ire des insinuations onj répondu d une manière digne dè cet honneur qui à toujourE caractérisé le sol» dat français.
L'imagination a peine à se prêter à la croyance d'un pareil projet. Mais, faut-il le dire ? déjà plusieurs événements trop constatés autorisent toutes les défiances, et accréditent des bruits qui eussent été tout à fait incroyables dans tout autre temps.
Les officiers occupent leurs places sous l'autorité de la loi. S'ils ne méritent plus sa protection, elle doit prononcer légalement leur destitution. Tant qu'elle ne l'aura pas prononcée, elle doit les protéger avec énergie. Qui de nous peut dire que ce n'est pas là notre devoir? et ne serait-ce pas méconnaître cette souveraineté de l'Assemblée nationale, dont on nous parle tous les jours, que de douter qu'elle n'en ait la possibilité comme elle en a le droit ? Nous nous rendons donc coupables si nous n'en déployons pas toute la puissance dans cette grande circonstance, avec la force nécessaire pour faire respecter les lois et y soumettre tous les militaires, depuis le premier grade jusqu'au dernier.
Je pense donc que l'Assemblée nationale doit mander le ministre de la guerre pour qu'il rende compte de l'armée et des précautions qu'il a dû prendre pour arrêter les désordres qui la détruisent : et qu'elle doit le rendre personnellement responsable des insurrections qui arrivent dans les régiments, toutes les foiB qu'il n'aurait point employé les moyens que lui donne la loi pour les prévenir : car c'est un crime égal contre la sûreté de VEtat que de démanteler ses forteresses ou de dissoudre ses armées.'
Séance du
ouvre la séance à neuf heures du matin.
, secrétaire, fait lecture du procès-verbal de la séance d'hier.
, autre secrétaire, lit le procès-verbal relatif à l'assistance de l'Assemblée à la cérémonie de la Fête-Dieu.
fait donner lecture de l'état suivant des décrets acceptés ou sanctionnés par le roi:
* 1° Le décret de l'Assemblée nationale, du 29 du mois dernier, concernant l'emprisonnement à Brest, du sieur de Martinet;
« 2° Le décret du même jour, relatif à l'émeute qui a eu lieu au marché de Tours, Je 26 mai, à 1 occasion du prix des grains ;
« 3° Le décret du 31, qui fixe définitivement à Melun l'administration du département de Seine-et-Marne;
« 4° Le décret du même jour, relatif à la détention actuelle à Valence, de trois officiers du régiment de Grenoble, artillerie, en garnison dans cette ville;
5° Le décret du premier de ce mois, concer-
« 6° Le décret du même jour, qui déclare non avenu l'arrêt rendu par le parlement de Pau, le 8 mai, contre les officiers municipaux actuels de Sauveterre, ainsi que tout ce qui s'en est ensuivi ;
« 7° Le décret du même jour, portant que les receveurs-généraux des finances et ceux des impositions de Paris fourniront, tous les mois, un état de leur recette, tant sur l'arriéré de 1789, que sur les acomptes de 1790 ;
« 8° Le décret du même jour, portant que la Caisse d'escompte fournira au Trésor public la somme de vingt millioDs eu billets assignats;
« 9° Le décret du même jour, sur les billets assignats, leur nombre, leur valeur, leur somme et leur titre;
« 10° Le décret du même jour, portant que la nouvelle municipalité de Paris, aussitôt qu'elle sera formée, fera l'examen des anciens règlements relatifs aux étaux des boucheries;
« 11® Le décret du même jour, concernant l'ancienne milice bourgeoise d'Amboise ;
« 12° Le décret du même jour, qui déclare non avenus les arrêts rendus par le parlement de Toulouse, les 11 décembre, 12 janvier et 30 mars dernier, h l'occasion du renouvellement des consuls de la ville de Mirepoix, ainsi que tout ce qui s'en est ensuivi ;
. « 13° Le décret du 2, pour protéger la libre Circulation des grains .dans le département du Cantal, et autoriser la municipalité de Murât à faire un emprunt de la somme de 24,000 livres ;
« 14° Le décret du même jour, concernant les poursuites à exercer, et les précautions à prendre contre les brigands et les imposteurs qui séduisent, trompent et soulèvent le peuple, notamment dans les départements du .Cher, de la Nièvre, de l'Allier et de la Corrèze;
« On s'occupe dans ce moment de l'expédition des lettres patentes sur ce décret, et elles seront incessamment envoyées, et spécialement dans ces quatre départements ;
« 15° Sa Majesté a donné des ordres pour l'exécution du décret du 31 mai, portant qu'il sera délivré aux députés extraordinaires de Chàtelle-rault et de toute autre ville, des expéditions en. forme des décrets sanctionnés, qui autorisent là libre circulation des grains ;
« 16° Et, enfin, a approuvé l'instruction du même jour, sur la vente des domaines nationaux.
« Signé : Champion de Cicé , Archevêque de Bordeaux.
J'ai reçu de M. le garde de& sceaux une note relative à une réclamation de l'ambassadeur d'Angleterre concernant ie collège des Écossais à Paris. J'en donne lecture :
« M. le comte de Montmorin vient de faire part à M. le garde des sceaux, d'une réclamation que lui a adressée, au nom de sa cour, M. Fitz-Gérald, ministre plénipotentiaire de Sa Majesté Britannique, près du roi, contre l'extension contingente, sur le collège des Ecossais, du décret de l'Assemblée nationale relatif à la propriété des biens ecclésiastiques.
« Signé : Champion de Cicé , Archevêque de Bordeaux. »
Suit une copie de la note de M. Fitz-Gérald, ainsi conçue :
« Le soussigné, ministre plénipotentiaire de Sa Majesté Britannique près Sa Majesté Très Chrétienne, conformément aux ordres reçus de sa cour, a l'honneur de représenter à Son Excellence M. de Montmorin, que le collège des Ecossais, à Paris, fondé premièrement, en 1325, par David, évêque de Murray, en Ecosse; secondement, en 1603, par Jacques Béthune, archevêque de Glas-gow, au même pays, doit absolument tout ce qu'il possède en France à la générosité des sujets de la Grande-Bretagne; et qu'en conséquence, les décrets de l'Assemblée nationale relatifs aux , biens ecclésiastiques ou de mainmorte, ne pouvant affecter le collège, il doit subsister tel qu'il est.
« Si des circonstances impérieuses rendaient impossible l'existence de cet établissement sur le j)ied actuel, le soussigné a ordre de demander qu'il soit permis aux administrateurs d'en vendre les biens, mobiliers et immobiliers, et de se retirer ailleurs avec le produit. Au surplus, le soussigné est autorisé à déclarer au gouvernement français, qu'un acquiescement de sa part à l'un ou à l'autre des alternatifs ci-dessus proposés, acquiescement auquel une nation généreuse et amie de l'Angleterre ne saurait se refuser, sera infiniment agréable à Sa Majesté Britannique, ainsi qu'à tout son peuple.
« Signé: le lord Robert Fitz-Gérald. » (L'Assemblée renvoiecette affaire à son comité ecclésiastique.)
, Vun des secrétaires, fait lecture d'une lettre adressée, de la part du nommé Da-zema de Lanux, à M. Ducastaing, curé de ce lieu, membre de l'Assemblée nationale, par laquelle il charge celui-ci de présenter à l'Assemblée l'hommage du serment civique de lui, de sa femme et de ses six fils, prêts, dit-il, à manier, pour le service de la patrie, l'encensoir, la charrue, la balance, l'épée et la plume.
Les prêtres de l'église métropolitaine de Saint-Sauveur de la ville d'Aix supplient l'Assemblée de ne les point oublier dans la dispensation de ses bienfaits; les dîmes étant supprimées, les chapitres étant près de l'être, ils se trouveraient réduits à la mendicité.
, archevêque d'Aix, dit que cette supplique est basée sur l'humanité et la justice, et propose de la renvoyer au comité ecclésiastique. (Ce renvoi est prononcé.)
11 est fait lecture d'une adresse de la municipalité de Bussiêres et Belmont, par laquelle cette municipalité demande la faculté de disposer d'une somme qui est due à la commune par la caisse des Domaines et Bois, pour en employer 1,800 liv. en don patriotique; et, le surplus, à divers besoins qu'elle expose.
Cette adresse est renvoyée au comité des finances, qui en fera le rapport à l'Assemblée.
, au nom du comité des finances, fait les rapports à l'Assemblée de quelques affaires particulières relatives à la ville de Grenoble, à celle de Saint-Brieuc, à celle d'Issoudun, à la commune de Bessens, district de Castel-Sarrasin, à quatre communes réunies, de Saint-Patrice, Ingrande, Saint-Michel et les Essarts, et à la ville de Brioude.
L'Assemblée rend sur ces rapports les décrets suivants :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu sou comité des finances, a décrété qu'elle autorise les officiers municipaux de la ville de Grenoble à imposer la somme de 130,000 livres, dans l'espace de dix années, pour être employée à l'acquittement des dettes énoncées au tableau joint à la délibération du conseil général de la commune, du 17 avril dernier; que cette imposition sera faite au marc la livre, soit des impositions foncières et territoriales, soit des impositions personnelles'ou autres, suivant ce qui sera réglé et arrêté par le directoire du département; et attendu que, dans l'état fourni des dettes de la commune, il en est de très urgentes, lesdits officiers municipaux demeurent, dès à présent, autorisés à emprunter à concurrence des dettes pour lesquelles ils craignent des poursuites, à la charge de faire le remboursement desdits emprunts sur le produit des impositions à recouvrer. »
« L'Assemblée nationale, vu la délibération prise par les officiers municipaux de la ville de Saint-Brieuc, le 30 avril, énonciative de celle du 19; ouï le rapport de son comité des financés, autorise lesdits officiers municipaux à imposer la somme de vingt-cinq mille livres, en quatre ans, sur tous les contribuables qui payent au-dessus de quatre*livres de capitation, pour ladite somme être employée en achats de grains, en ateliers de charité, sauf à eux à se procurer, par la voie de l'emprunt, le montant de ladite somme, jusqu'au recouvrement, à charge de rendre compte de l'emploi, notamment du produit des grains, et de se faire approuver par le district et département. »
« Vu l'adresse du conseil général de la ville d'Issoudun; ouï le rapport du comité des finances, l'Assemblée nationale autorise les officiers municipaux à un emprunt de 24,000 livres pour payer les dettes de la commune, à charge, et non autrement, que par le titre d'emprunt, le remboursement partiaire sera assigné et délégué sur les revenusdela commune, et que ledit emprunt sera approuvé par le district et département. »
« Vu la délibération prise en conseil général de la commune de Bessens, district de Castel-Sarasin ; ouï le rapport du comité des finances, l'Assemblée nationale autorise les officiers municipaux à imposer la somme de 800 livres, en deux ou quatre ans, pour soutenir leur atelier de charité, et, jusqu'au payement de ladite somme, à s'en procurer le montant par la voie d'emprunt, sauf à rendre compte. »
« Vu l'adresse commune et les délibérations prisesséparémenten conseil général par les quatre communautés réunies pour le fait dont il s'agit : Saint-PatriCe, Ingrande, Saint-Michel et les Essarts, en date des 17,19,21 avril et 9 mai dernier, l'Assemblée nationale, sur le rapport de son comité des finances, autorise ces quatre communautés à imposer la somme de 5,000 livres seulement entre les quatre, au marc la livre de leur brevet de tailles, mandement ou département de cote, pour ladite somme être employée au payement des frais faits et à faire dans le procès qu ils soutiennent au sujet de leurs landes communes ; et, pour le surplus, les renvoie à leur district et département. »
« Vu les différentes adresses de la ville de Brioude, département de la Haute-Loire, ci-devant Auvergne, les délibérations prises en conseil général les 29 avril et 26 mai dernier; ouï le rapport du comité des finances,l'Assemblée nàtionale considérant le prix excessif où les grains se trouvent portés dans ladite ville, et l'impossibilité où
soilt les Habitants de supporter actuellement un accroissement d'imposition, autorise les officiers municipaux à Un emprunt de 5,000 livres, destiné au payement des dettes de ta commune et au soulagement des pauvres, à charge de rembourser ladite somme dans quatre ans, soit par la voie du rôle, soit sur les premiers deniers libres de la commune, a
, député dé Gharottes, annonce que des porteurs de faux décrété se sont répandus dans le Charollais et à BdUrbon^Laricy et y ont excité des émeutes qui ont coûté la vie à plusieurs personnes : ils proclament la loi agraire, plantent des piquets au milieu des moissons pour appeler lés paysans au partage des propriétés et sèment l'épouvante au tour d'eux. Après cet exposé, il propose tid projet de décret qui est adopté en ces termes î
« L'Assemblée nationale décrète que la COhnais--sance, instruction et jugement én dernier ressort, des crimes, attentats, attroupements et délits commis contre lès propriétés dans là yillç de Botirbon-Lancy et, dans l'étendue de squ district, ainsi que dans, l'étendue des bàilliageâ et districts du Charollais, et de ceux, qui pourraient s'y commettre dans ta suite, sont àttribués auxdits bailliages de Bo^rbon-Lancy et dq CharolleS, chacun dans l'étendue 4e son ressort et de son district, Conformément à 1 article, 14 du décret du % de ce mois; il leur est enjoint oè, rechercher principalement, et de punir suivant toute la rigueur de la loi, les chefs des émotions populaires, les auteurs, fauteurs* instigateurs deS troubles, et de faire, sans retardation de jugement, parvenir à l'Assemblée nationale tous les renseignements et instructions de preuves qu'ils auront pu se procurer par la voie de la procédure- »
« Le présent décret sera porté dans le jour à la sanction du roi, qui sera supplié de prendre les mesures les plus promptes pour le faire parvenir, publier et exécuter dans lesdits bailliages de Boorhon-Lancy et de Charoues, et dans les communautés desdits deux districts, »
, rapporteur du comité de h marine. Vous avez jugé à propos d'augaienler la solde des troupes ; il parait convenable à votre Comité de marine d augmenter aussi la paye des matelots* en proportion graduelle, suivant leur poste et leur mérite* Voici le décret que j'ai l'honneur de vous, présenter ;
* L'Assemblée nationale, considérant que les mêmes motifs de justice qui l'ont, portée à augmenter la solde des troupes de terre exigent d'augmenter celle des gens de mer, a décrété et décrète ce qui suit :
« Art. Ier. La paye des matelots qui est actuellement
déterminée en différentes classes depuis 14 livres jusqu'à 21 livres par mois, sera portée de
15 livrés jusqu'à 24, en graduant les augmentations proportionnellement aux services et au
mérite,
« 11. La payé des officiers mariniers, qui est fixée actuellement dans les différents grades depuis 24 livrésjUsqu'à tO libres par mols seraportée de32 jusqu'à 80 livret, en obSérvànî les proportions relatives aux grades et ati nombre des oam pagnes.
« III. AU moyen de cette augmentation, il ne Sera plus question d'indemnité pour les demi-rations aUx Officiers mariniers, ni de supplément de paye pour les principaux maîtres armés sur les gros vaisseaux. »
^ous avons plus besoin d'économie que de nouvelles augmentations de dépensé. Je demande que ce projet soit imprimé, afin qu'on ait le temps d'y réfléchir mûrement avant de l'adopter.
Les Anglais otit uh tiers de pins .de forces maritimes que nous, avec une dépense égàle. u faut d'abord faire les réformes, nous verrons si nous sommes dans le cas d'accorder dés augmentations paye.
M. Lavie Se trompe lorsqu'il dit que la marine anglaise ne coûte pas plus que la nôtre. Observez qu'on lève actuellement deS matelots pour l'armement de précaution que vous avez approuvé 2 il est absolument essentiel de statuer sur le champ sur la proposition du comité de marine.
Si l'on tarde à rendre ce décret, le refus peut nuire à l'armement. Je pense bien qu'il faut de là circonspection, lorsqu'il! s'agit d'augmenter la dépense; mais il y a des objets qui ne comportent pas cette lenteur. Je maintiens donc qu'il faut porter sur-le-champ te décret; TAssemblée ne peut ttllef trop vite danales choses de justice.
(Oq demande à aller aux voix.)
NP : Je demande que te comité de marine se concerte auparavant sur cet objet avec le comité des finances.
Lapropositiaequi tient d'être faite est excellente pour l'avenir ; mais elle ne peut avoir un effet rétroactif sur un objet déjà présenté par le comité. On ne peut apporter de retard à un projet aussi juste. L'extrême disproportion qui règne en ce moment entre la marine marchande et la marine militaire détérioreabsolument nos forces maritimes. Je demande que le projet proposé par M. de Vaudreuil soit adopté srçr-l.e-çhamp.
(Le décret est mis aux voix et adopté.)
Je demande qu'à l'aVeniraucun comité ne puisse proposer de décret relatif, soit aux dépenses, soit aux réductions, sans s'être auparavant concerté avec le comité des finances.
Si ïe COmité des pensions était assujetti à présenter et à soumettre ses travaux à celui des financés, 11 aérait infiniment retardé. Je propose donc une exception ep sa faveur..
On demande à passer à l'ordre du jour.
Cette dernière proposition est adoptée.
, rapporteur du comité dès finanças, fait le rapport suivant sur la dépense de la maison du roi ou liste civile ;
Messieurs, le comité des finances Va présenter à l'Assemblée son travail sur toutes les parties de la dépense. Il faut, que les dépenses générales soient confiées à la responsabilité des agents de la nation. Celles qui sont relatives a des besoins locaux appartiennent à l'administration des départements. C'est à eux à en être les arbitres. Nous n'avons laissé au gouvernement que ce que lui seul peut feir©, et aux. citoyens ce qu'ils peuvent faire mieux que le gouvernement. Tout notre travail a été fait dans cette vue. Une nouvelle tâche nous est imposée, c'est de provoquer vos délibérations. Il a été réservé à votre comité ecclésiastique de poser les bases des dépenses au culte. Quant aux besoins personnels du roivil est de la grandeur de la nation de ne point dis-
cuter ces détails ; d'est à Sa Majesté à régler cet objet sur ses convenances et sur ses goûts. Ses vertus ne nous laissent à cràindre que la sévérité de son économie. Vous voulez que votre roi soit le plus magnifique deé rois, comme vous êtes la plus grande des nations. Vous ne voulez pas détruire Un éclat qui distidgUe là cour française. 11 faut que le riche étranger puiàse se reposer parmi nous, et qu'il finisse par s'y fixer. Nous ne voulons pas abandonner cette urbanité qui nous fit quelquefois pardonner notre servituae. Nous n'aurons plus désormais qu'Un luxe inno-ccent, puisque le revenu public ne lui servira plus d'aliment. Votre vœu est sans doute aussi que ce moD arque* que vous auriez choisi s'il ne vous avait été donné, puissè swCuper en paix du revenu de son auguste famille. Le Restaurateur de la liberté française ne sera pas soumis à des incertitudes sur les dépenses de sa maison. Je vous propose donc de décréter que Sa Majesté sera de nouveau suppliée de fixer sa dépense d'une manière qui réponde à ta majesté de son trône, à l'amour et a ta fidélité d'une grande nation.
Ce projet est d'abord adopté par acclamation et avec les plus vifs applaudissements, puis décrété dans la forme ordinaire, ainsi qui! suit :
« L'Assemblée nationale a décrété et décrète « par acclamation que son président se retirera « dans le jour par devers lé roi pour supplier Sa « Majesté de fixer elle-même sa liste civile, en « consultant moins son économie personnelle « que la dignité d'une grande nation et l'amour « de ses sujets. »
, à cette occasion, dit qu'il s'est rendu hier auprès du roi, conformément aux ordres de lJÂ.ssemblée, pour remercier Sa Majesté des dispositions qu'elle a ordonnées pour la confédération des troupes de ligne et des gardes nationales; que le.roi.l'a chargé d'assurer l'Assemblée de ia sollicitude avec laquelle Sa Majesté ne cesserait jamais de S'occuper de tout ce qui a pour objet le maintien de la paix etj de l'union, et le bonheur du peuple.
(L'Assemblée répond par des applaudissements.)
fait un second rapport sur la dépense d,e la maison des princes, frères du roi, et dit
Messieurs, nous croyons qu'il est aussi de votre dignité de voter un traitement honorable aux princes, frères du roi, ot à leurs enfants, qui doivent être regardés comme les enfants de l'Etat dont ils sont l'espoir. Nous vous proposons donc de rendre irrévocable le décret du 6 octobre, qui a fixé provisoirement leur dépense, et de décréter que la dépense de; Monsieur, frère du roi, et de Madame sera déterminée à % millions; celle de M. le comte et de la comtesse d'Artois à 2 millions ; la dépense de M. le duc d'An-goulême et de M. le duc de Berry à 700,000 livr.
L'Assemblée sera empressée sans doUte d'accorder une somme covenable aux frères de Sa Majesté ;. mais j'observe que vous aurez à ce sujet une grande question, celle des apanages- Je demande donc 1 ajournement des"sommes a accorder aux frètes du roi, jusqu'à, .ce que Cette question ait été décidée (1)..
J'appuie cet ajournement; mais, j'ai aussi à faire une observation qui me paraît indispensable. Pour que vous assuriez la marche du comité des finances, il faut absolument régler un traitement provisoire. Par le décret du 6 octobre, vous avez opéré une réduction de 400 millions, et déjà on ne payait plus que dans cette proportion. Il est do&o nécessaire que vous disiez que, provisoirement, on ne payera que dans la proportion qui vous est proposée.
(L'ajouraenaenft proposé par & le duc de La Rochefoucauld est adopté.)
fait un troisième rapport qui a pour objet la dépense des affaires étrangères Çl).
Messieurs, te comité, % déjà présenté e i'Assem-blée te rapport des dépenses relatives aux affaires étrangères : il ne peut donc qua rappeler iei le projet qu'il a proposé. Ge département a éprouvé une réduction de 600,000 livres pour l'année 1790; il en éprouvera encore une semblable pour l'année 1791. Une économie trop sévère aurait des inconvénients ; vous pourriez compromettre des secrets importants ; l'intérêt de votre prépondérance dans l'Europe serait blessé* 11 faut un certain éclat aux ambassadeurs qui doivent plaider chez l'étranger pour notre sûreté, s'attirer son amitié, faire respecter les Français, et inspirer aux nations voisines le désir de devenir nos amies. Le danger des anus en ce genre n'est rien auprès du danger de la publicité. Le comité ne se dissimule point qu'une fixation absolue serait impolitique dans ce département, où des circonstances étrangères peuvent à chaque instant nécessiter des changements de mesures et des dépenses nouvelles. Il vous propose de décréter que, provisoirement et pour l'année 1790, la dépense du département des affaires étrangères sera fixée à 6,700,000 livres, et réduite, au 1«* janvier 1791, à ta somme de 6; 300,00© livres.
Lë projet j mis aux voix, est adopté en ces termes :
Art. 1er. La dépense du département des affaires étrangères sera fixée, provisoirement et pëur l'année 1790, à la somme de 6,700,000 livr* et réduite, au l®r janvier 1791, à la somme de 6,300,000 livres.
Art. 2. Le secrétaire d'Etat du département des affaires étrangères rendra, chaque année, un compte, appuyé de pièces, justificatives, de toutes les parties de cette dépense, excepté les subsides et secours à des étrangers, du fonds destiné aux ligues Suisses et Grisons* des remboursements et indemnités, et des dépensés secrètes qui seront confiées à ia surveillance du roi et à ia probité du ministre.
passe à un quatrième rapport sur la dépense des ponts et chaussées ;
Messieurs, nous ne vous parlerons point des départements de la guerre et de la marine. C'est aux comités établis pour ces deux objets à en proposer la dépense ; et ce n'est que d'après leur fixation que nous pourrons présenter notre travail. Sans Cela, nous n'offririons que des réductions hypothétiques! et incertaines.
Nous ne parlerons pas non plus de la dépense des haras, montant à 864,000 livres, que nous
proposons de supprimer.
Nous ne pouvons pas discuter en ce moment un objet aussi important que les ponts et chaussées. C'est une grande question que de savoir si ce corps doit subsister. Les pays d'Etat ont des ingénieurs particuliers, et l'on sait qu'en cette partie l'administration des pays d'Etat vaut bien celle des pays d'élection. Je ne crois pas qu'une école soit indispensable-ment nécessaire : il y a beaucoup d'arts pour lesquels il n'existe pas d'écoles.... Je demande l'ajournement à un terme fixe, pour que nous puissions examiner d'avance et discuter ensuite»
Tous les ouvrages faits en province par la voie de l'administration ont toujours été si mal exécutés, qu'il a fallu les recommencer quelques années après... Le comité vous propose de réunir les mines aux ponts et chaussées; il ne s'est pas suffisamment instruit de ces deux objets , car il aurait vu qu'il n'y a nul rapport entre l'un et l'autre.
Avant d'entrer dans les détails que la discussion présente, il faut examiner les questions élevées par les préopinants. Y aura-t-il une école et une administration générale des ponts et chaussées ? Je ne balance pas pour l'affirmative. Il faut les connaissances les plus étendues pour les travaux des ponts, des digues et des ports. Comment aurez-vous dés sujets qui réunissent ces connaissances, si vous ne conservez pas une instruction publique ? Il doit exister des liaisons, des rapports, une marche suivie entre les opérations deS chemins, des ponts, des canaux et des ports qui n'appartiennent pas particulièrement à telle ou telle contrée, et qui ont
l'utilité générale pour objet. Comment ces travaux se feront-ils sans une direction générale ? Il y a, à la vérité, des intérêts plus locaux ; cependant, la prospérité du commerce et de l'agriculture dans tel département a une influence directe sur la prospérité de tel autre. Peut-être affecterez-vous au département le soin d'ordonner ou de surveiller tout ce qui sera relatif à leur intérêt particulier ; mais il faudra toujours lier ensemble toutes les opérations ; il faudra toujours une direction générale. Je demande donc que l'Assemblée décide préalablement qu'il y aura une école et une administration générale des ponts et chaussées.
J'ai été membre de la section des Etats du Dauphiné, chargée d'examiner les travaux des ponts et chaussées dans cette province, et je dois rendre hommage à la manière dont ils ont été exécutés. Je pense donc que l'école des ponts et chaussées doit être conservée^ mais je crois qu'il serait utile de la diviser en 'deux parties sous une administration générale : l'une serait établie à Amiens, et l'autre à Toulouse.
Chaque département enverrait deux élèves qui viendraient rapporter dans leur patrie Je fruit de léur travail.
Personne ne peut raisonnablement douter de la nécessité d'un centre d'administration des ponts et chaussées établi à Paris. Sans ce centre, il serait possible que chaque département faisant des chemins à sa manière, ces chemins ne se rencontrassent pas. Maison pourra nous présenter des projets nouveaux, pour remplacer d'une manière avantageuse 1 école des ponts et chaussées, ou lui donner une autre forme. Par exemple, quelques personnes pensèrent à réunir cet établissement au génie militaire, qui, avec des modifications, deviendrait actif pendant la paix, tandis qu'il n est utile que pendant la guerre. Au reste, nous nous écartons un peu de la marche que nous devrions suivre. On ne demande que 200,000 livres: décrétons qu'il y aura une administration générale et unique des ponts et chaussées, et passons à l'article suivant du rapport du comité.
J'appuie l'ajournement proposé, en le fixant pour la fin du travail que présente en ce moment le comité des finances. (Cet ajournement est adopté.)
fait un cinquième rapport relatif aux traitements et gages des ministres et du conseil du roi,
Messieurs, le conseil du roi est divisé en deux parties, l'administration et le contentieux. Le conseil administratif est composé de ministres d'Etat ayant département; le conseil contentieux, de ministres sans département. Les traitements des secrétaires d'Etat, de la guerre, de la marine, des affaires étrangères, du contrôleur général des finances, sont compris dans la dépense de leurs départements. Le comité ne se propose pas d'examiner la composition du conseil ; ce travail appartient au comité de constitution ; il croit cependant qu'il est inutile de conserver en même, temps et le chancelier et le garde des sceaux. Les ministres ayant département sont :
M. le chancelier................. 120,0801.
M. le garde des sceaux........... 135,000
Les secrétaires d'Etat de la maison
du roi..-.......................... 180,670 1.
Les secrétaires de la guerre...... 180,000
de la marine...... 180,000
des affaires étrangères ........... 300,000
M. de Montmorin, ministre des affaires étrangères, s'est lui-même réduit à...,....................... 180,000
Les ministres sans département sont :
MM. le cardinal de Bernis......... 20,000
de Malesherbes.............. 20,000
le maréchal de Gastries ...... 20,000
de Fourqueux (mort)........ 20,000
le duc de Nivernais.......... 20,000
le comte de la Luzerne...... 20,000
le comte de Montmorin?..... 20,000
M. de Montmorin n'a jamais rien touché en qualité de ministre d'État. Le comité a pensé que les ministres avec département devaient se contenter d'un traitement annuel de 100,000 livres; qu'il fallait cependant en assurer un plus fort au ministre des affaires étrangères, soumis à une grande représentation que la nation doit à sa propre dignité. Il a pensé que les ministres retirés ne devaient conserver aucun traitement. Il a cru qu'il convenait que le roi pût appeler à ses conseils des ministres sans département, et des magistrats pour l'éclairer de leurs lumières; mais il n'a pas pris sur lui d'en déterminer le nombre.
D'après le projet de décret qu'il va vous présen ter, les dépenses qui montaient autrefois à 1,500,000 livres se trouveront réduites à 900,000 livres. Quant au conseil contentieux, fixé par M. de Lo-ménie à 589,780 livres de dépenses, il n'existera plus : mais l'Assemblée sera juste envers des magistrats qui ont acheté par de longs services les traitements qu'ils avaient obtenus. Il y avait des traitements attachés à des commissions extraordinaires qui connaissaient de la contrebande : vous avez supprimé ces commissions et la dépense avec elles. Ainsi la réduction prévue par le comité sur les objets dont il vient de vous entretenir sera d'environ 800,000 livres; il vous propose le projet de décret suivant : « L'Assemblée nationale décrète ce qui suit : • Art. 1er. Le traitement du chef de la justice
sera de.......................... 100,0001.
« Celui du contrôleur général des finances de........................ 100,000
« Du secrétaire d'Etat de la maison
du roi............................ 100,000
« Du secrétaire de la guerre...... 100,000
« de la marine..... 100,000 « des affaires étrangères ........... 180,000
« Art. 2. Il sera assigné pour des ministres d'Etat sans département... 80,000
« A des magistrats que le roi appellera auprès de lui pour l'aider de leurs lumières.......................... 140,000
Je crois qu'avant de prendre un parti, vous devez renvoyer au comité de Constitution des questions importantes de constitution et de gouvernement. Par exemple, c'est une question de savoir s'il y aura en même temps un chancelier et un garde des sceaux ; s'il peut exister un ministre de la maison du roi, et si le chef de la maison du roi n'est pas un homme étranger à la nation? C'est encore un objet digne d'un examen sérieux, que cette dépense de 140,000 livres accordée pour des magistrats que le roi appellera auprès de sa personne : quels
sont l'utilité et l'avantage de cet objet?... Je demande donc que préalablement on renvoie au comité de Constitution.
Eloigner les objets proposés, ce n'est pas les résoudre : il faut donc examiner s'ils ont réellement des rapports constitutionnels. Le roi, chef suprême de la puissance exécutrice, doit avoir des coopérateursimmédiats; ils doivent être de son choix ; il faut décréter simplement la somme qui sera destinée aux coopérateurs nécessaires.
/e remarque 80,000 livres pour les ministres d'Etat sans département, et cela est bien ; mais aussitôt après j'aperçois 140,000 livres pour des magistrats que le roi pourra appeler dans son conseil. D'abord cette somme est très considérable; ensuite pourquoi des magistrats? Si ie roi croit nécessaire de réunir dans son conseil des citoyens instruits, il pourra aussi souvent avoir besoin des connaissances d'un négociant éclairé que des lumières d'un homme de loi. Je pense donc qu'il faut diminuer la somme indiquée et employer, dans un seul article, les ministres sans département et telles autres personnes qu'il plaira au roi d'appeler à son conseil.
(de Saint-Jean-d1Angely). En déterminant une somme quelconque pour le conseil du roi, sans en fixer la division entre les ministres, vous éviterez de préjuger des questions constitutionnelles, et de vous obliger, par un ajournement, à revenir sur des objets de finance.
Le comité ne vous propose pas des articles constitutionnels, mais de fixer la réduction de la dépense pour le 1" juillet prochain. Si vous ajourniez, il serait impossible d'effectuer la réduction que vous avez décrétée. En adoptant provisoirement les mesures qui vous sont proposées, vous n'auriez rien fait de constitutionnel ; il ne s'agit véritablement que de régler les dépenses des six derniers mois de 1790 et du service de 1791.
Il faudra examiner si l'on déterminera constitutionnellement que les ministres seront payés par l'Etat, s'il seront compris sur la liste civile, si les uns feront partie de la liste civile, les autres des dépenses, générales de l'Etat. Vous ne pouvez donc prendre un parti pour jusqu'à la fin de 1791. Il faut que le comité se borne à présenter des dépenses qui seront provisoirement fixées, jusqu'à ce que l'Assemblée ait autrement statué.
, il faut toujours changer le décret proposé, car, par exemple, vous ne conserverez pas tout à la fois le traitement de M. ie chancelier et de M. le garde des sceaux.
M. le chancelier a renoncé à ses appointements.
Le décret doit être bien simple. Il faut dire que, provisoirement et à compter du 1er juillet, les ministres ne coûteront que telle ou telle somme.
Le traitement des ministres, excepté celui du ministre des affaires étrangères, est trop considérable. Il me semble qu'il devrait ôtre fixé à 50,000 livres.
Le tr^îteppent du ministreaes affairés étranger^ est déjà portg fiaps les dépenses de ce département ; ainsi, ÏFest très jnutile de s'en occuper encore.
Tous Içs ministres seront également employés jfôM les dépends de leur département. 11 (fjigi) uniquement ici S quotité de leur traitement.
J'aypue que c'est avec étpnnemenfgue j'jçnten^S (jj're qu unë'patjoii doit obtenir de % considération par du luxe de seg jjpjnisff|$r ifnê natjqh est '.esfGptiglr" lement PF Pls publiques ét par sqp éi^porpip ppançes- iq ng prçns pas qu un tfaitefpenj, dë mille livres spit convenable, qjjanu Meq mê/pë || ' ijip geràtf que pfoylî âôirè. La nation pq^ffiiit crQjfg JtJRÇTjpteotion de l Assembliéè est de c^inger un àujssj considérable. |ie#représentants d'un grand Empire ne pe]iyent gspfêfl jf! fe ff i^nf .qp popn.aùce qui' ipur est dû qu'en poyià.nf ifé^poniig ta pfug Sévère dans toutes les pgrt jes de l'administration.
Je suis aussi persuadé que le préopinant aue le^ ministres ne doivent tirer dp la çopsidëra|iqn'gue'ue léur% vertus et (Je leprs talën^ : îeéon^ens^ue l'|tionômi.br ë|t'un devoir' pour n$us ; mais les vertus' mèmës n'e' dô'i-vept paf ê^\exa£éré%. Sans doute, il -'fout ' 'due les places sopo^a^M sans liï$e elles.Idpivent aussi l'étré sans ' parcimô'nié. Lé bécëssairè en relatif. Je pense que les appointements déterminés par votre copii^é des finances sont dans les justes mesurés» et qu'il y jurait ijrrînçônvlniènt égàl à rester en deC» ou à a 1 lé^ au. d'élâ 1 rGe qftî esf vraiment important, cîest que les éfàplôls dutnipis-tère sûijèpt dbpné's aux pTu^capablës : si leè ap-ppintëments n'étaient' pas'suffisants, |e roi 'ne Ppuifajft cfiqis^ ses ministres qtÀ°parmi les gens riches. Le traitement du miMstre de^ la fiiaiSqh dp roi ipe Paraît deypir être renvoyé à la listé civile : ainsiTéconomie sera là méme.^ë 'èonclus à*ce que la proportion présentée par le comité défc finances ne spit pas changée.
Bans le moment où vous jdiminuez lés tVâitemeùfs dé tf>us lés' fonctionnaires publïcsj oii fe' jboiàitè ëc'çlèâiâ'stf^ije Vous propose Sè1 réduire fconsfdèrâWem^ tement des eéçlé^iastiques, icèljji des ajiftistres spra-tril le 8èùi''.pdnseifvérlé 'fiensfe' qffoà rie peut donner popr- raïspri que' là ^ôdicite^d.e ge traite-^ ment éloignerait "du mî'nïstère les" gens vraiment capables. Certainement 50,000 livres'sorit1''une somme plus que suffisant^ pour fournir à upe dépense personnelle d'une marnêre très honorable.
Si {a nécessité'4e là'reprélenfàiidh esf Te prétexte dôhjt on s'appuie, j'observerai 'jjtte çjçtjp Représentation est plutôt un vice qu^uti avàhïàgé; les dîners des mipistre^ ont de grands inconvénients, les pèrsbttnës qui dînent chep'Tes ministres ne sont pas ceux qui votent avëc' le pliis ^énergie pour la liberté...
(On applaudit dans une grande partie de la jaUe.)
On est sûr d'obtenir, et on mérite des éloges dan§ q^tie Asgei^J}lée, lorsqu'on présenté des opinions inspirées par l'intérêt général et par i'économiè; mâis datis C,ë,tyè qircpnsr tance, et qu^nd on pojrjjé i'éco^Qm^lyf toutes lës parties deTàdministration,la sagesse et là raison,
qui ne perchent pas les élpges, dosent aussi se faire étendre.' Il njfi paraît qu'il" fàut éviter l'inconvénient, je n')8 fli§ pas de liyrer les places aux riches, personrie ne peu\ lç (Jesirer, mais de tomber dans 'l'ari£tôcrat}3 d^ }à richesse. Je prononce rarement ce màt\^rfsjp^rd(M; Je n'ai qu'une Qb-seryatipp à fàire : lés ministres doivent commu?' niquer ayejç ptl gr^rfid 'pppabre dë Citoyeps, les heures sont absorbées par le tfavajj, ijraut dpnc qu'ils aient une tablé. En donhapt iQQ.OOÛ livres au^ mipistresf, Il y àpra pnç.Qfq une économie de 200,000 livres. Je cours de l'JSupppe dans tûutés, e^céPte dans cplle de Turin," le traitement de$ mjnistres est supérieur à la sptnme qu'on vqijs pi^oposp d'acpprdef. (Quelques nerSQndëS PbSërypptqué cej;teàs'ser'tion n'pst point exacte pour la Qour de ^rysse.) G'è'st qoe règle générale de prpdépcie de fixer les traitemen ts dëg qfficjêr8 publics, mànièrg a nq paà fës poser à chercner dë^ dedompi^gëmepts. 'La rër dpction proppsee n(ar je c^fpitp'nie paraît fionyë? paljlé à une gfàpiJe natiqn, yp'is amdangers | ce qu'on là jrçnjjp plus (î^à discussion est fermée.)
' (L-amendemept de A}p$andre dp Lametb est rejeté.]
Il fapt dire, dans le décret, que le traitèmëtit'qùî setàljugé cônstitutionnël ne s'é*: lèvera pas au-dessys de la somme de75,.0001ivrp^, et qu'au surplus le traitement dU ministre de la maisop du r^i sera renvoyé à l'à liste civile.
(P^ssemblêe décrété qu'irn'y |i pâs lieU à délibérer, quaqt à prisenj, sur cët^i^ëndgmënt,)'-'1
Je proposg d?adopter le projet de décret'présënié'par lè comité deà financés, ën le faisant précéder par ceS jingts : f^rL'ÀSsembléè nâ-tiopa'le décrété'proViSôirècqënt, et jusqu'à ce qu'il âit él^ statué ultériëurëmé'nt sur ces robjëts, ce qui suit.»
Il faut réduire à 8,000 livrëfe M somme ae 14,1300 livres que'le comité des finafiçes propose d'as'silg^ér 'aux pèr-soribes que Ié^^ro'i^^ appellera à 'sori'^hs^il. '
(Cep deux propositions sont adoptées.)
Le décret est rendu en ces termes :
« L'Assemblée nationale décrète provisoirement, et jusqu'à ce .qu'il ait ét.é statué, ultérieurement sur ces objets, ce .qui suW :
? Art. ier Le. traitement du chancelier ou garde des sceaux chef de la jyçfice'sera de. 100,000 1.
t Celui .du çQntrÔlèpr général •desfinances;,-4e..................,... .100,1000
fi Celui du secrétaire d'Etat de lâ'
maison du roi, de.................. 1Q0,PQ0
de la guerre... i......... 100,000
y dgja. marine,................. 100,000
« des affaires étrangères ... 180,000
« Aft. 2. Il sera assigné pour les
ministres d'Etat sans jdêpàrteihënt. i. 80,000
* Pour les bersônàés que le'rôi appellera à son conseil.i»..T..'/.... 80,000
I Total......... 840,000 1.
invite l'^?senib)[ée à se retirer daps les bnrëaux'pour prqcéâèf aux sprptiijs po^r la pominaîipn d ÙP président', fie tpjs 'ifi-c'r,étires et de quinze membres d^ ' gç^ij-é des rapports.
La séance est lçvée à deux heures et dpmie. e); celle de ce soir indiquée poursixheures.
Séance du
, ex-président, remplace M. le président au fauteuil et ouvre la Séance à six heures du soir.
Un de MM. les secrétaires fait lecture des adresses et délibérations suivantes :
Adresses de félicitatiop, adhésion et dévouement des citoyens armés de la ville de Dipan, qui conjurent l'Assemblée de s'occuper de l'organisation de? gardes nationales.
Des muoigipaiitég de quarante communautés réunies au bourg de là MotherSaint-Heraye, en Poitou, qui réclament contre l'augmentation d'impôt, dont plies disent être injustement grevées par lâ commission intermédiaire de gaint-Maixent.
De3 municipalités de trente-une communautés réunies au village de Preseau, prés Vatenciennes. Elles on( fait Uh pacte fédératif contre les ennemis de la Révolution.
De la communauté de Montmacy, district de Compiègpe- Elle demande la permission d'acquérir et sp par^ger ensuite ieg biens ecclésiastiques situés dans son territoire.
Des chanoines dp chapitre de Barjolg, département du Var.
Du conseil générai de la commune ge la ville de Dax, département des Landes.
Cette ville, toujours j&lopse 4'applandir à la sagesse de l'Assemblée nationale, accepte tous ses décrets avec reconnaissance, promet de les faire exécuter avec ce contentement que donne la certitude de n'obéir qu à (tes lois faites pour le bonheur général de tout le royaume. Bile demande la conservation de son siège épiscopal, qu'elle se fait gloire de posséder depuis quatorze siècles.
Du conseil général la commune de Bourges. Il ge soumet à prendre parf, pour 3,200,000 livres daus l'aliénation des biens ecclésiastiques.
Du conseil général de la commune de Narbosne. Dans un moment où des citoyens de plusieurs villes de Languedoc, se cachait sous le voile de la religion, prennent, par intérêt particulier, des délibérations incendiaires et fanâtiqUés,il a pensé qu'il était important qu'une ville presque habitée par des ecclésiastiques fît connaître que l'intérêt général est le seul mobile de ses citoyens.
Du conseil général de la .commune de Garcas-sonne, formée ^ans le même esprit. Û y jojnt une copie de la lettre qui lui a été adressée par les dragons de Noailles, contenant l'assurance de leur parfait dévouement pour la cause commune, et leur serment civique.
L'Assemblée autorise M* le président à écrire une lettre à la municipalité et au régiment
de Noàilies, pour leur témoigner la satisfaction que donnent à l'Assemblée leur zèle, teur
patriotisme et leur harmonie.
De la g^rde nationale d^ la cprçmw^uté de Gilqnnay et de celle de Péyrus. département de l'Isèfré. ' 1 rr" " : " vl 4 " ' ! ' ' ••
Du conseil général de la cgmmjjn^ (Je |eysgel, district de Belléy. EÏre ^ pl|in| q^'uuè troupe dp ëédixjèux' empêche sqn' appnpVi^ibnpe$eqt de bïé,1 en's'ôlfpbsànt à."|a solfie gràjnÉfachef tés pu màraié dé ^antua.
Dés citoyéUs du. 'district de « B0 ^tfM M fr Lyp6", quï s^llv^t'^ç'c'forpè Pflptpp la déclaration d'ûne p'artie jjg l'À^e'pBlée^natlQhgile: 1 ' De$ Officiers'm^niclibauî: d^ ia ville d^ Ppptrà-Mou&son, cprrjep^ni ie'J)àç(e jfe fédération des bas:officiers et chàs§eùn£ diï rggimeftt ctas-seury à chëvàl de Hainaut, eVquwipf daps çefte vilje, en yéppÙM à pejpi qu'ils put rë$u':jjçp |iaà-officiers ét soldât^ dès' régime^|'s ue Nqrqjapdje ét de Be^Uçe, engaj'pi^oa Brest. Un d^Voueipeft' parfait à l^WQi^Vgil-e'p^p^titûiî^p, un aftajih^^ënt "inviolable aux aecréts dé' l'AsscmBlée patioriale, une entièrp sqppaissjqn a' I^Jqi et à la spborcjina-tiQn, |eïs sont 'ksSyffiUx, an municipalité, de cp brave rëgimgfrt. "
De la commune rfe (jriçiq]les,.en Lapgue^qp» contenant le renqiïvçljençient çju germeijt ciyique dubonsëil général ef dp la fjSgifii) 'patriptiq'fjjè, ' Deë communautés de Loiroh, au département de lja J^yeijne? département pie la
Maqçh^ piles font le 4-pn patriotique du produit des imposïtiops sur lés ci-devapt RpvifèjpefiV'
Dp la pOmmun^iujié ne |SmmMlfi ôn Lfauphiné. Elle fait hommage aia patr|pp?ng ^ on triât çur l'État, au capjtal 74§ [ivre^, 1 ' £ju conseil généra) dp jij cop^f^ijLne de M vijle (Je Bêlleyjl^Ki» Il exprime la plus vive indignation pontre la d!j]pp paptiqde
1 Assemblée nati^n^ïei'sjç 'spumef A des
bièns ecclêsi^jiqjjeg çongj^érfilîles, et fait lé don n^|j*ioti()fue .âtt'produit îqjp.q»J^oi|g 'gur jçs m» dj^pf p^ïyil^gjé^îfîd^^ep^ampa^pqq cpptri-b'utjon .d»jf quart d&| rpygnu?.
I|e la yi|i^'4ji^err^ qpl s^ sgumet 4'^Çflgérir des bipmj nâtipn^ux ppfjîp jg' gqpiqrç qg §,'0uu,p00 de livres.
Dés assembl(éesf primaire? du »can^n dp Yillje-neuyp. pr^s 4e Bofjléaiix, de .çei^l jàe j^ajjrçppjt, d^pgirtemeojt du T^rn, fie c^Jjui dg Ballpn, dép^r-|efpenjt'de la Sîjrjljg, ag cglfii gé de pelpi dp Papânplonpé, qelui de Mareun^, département de là Charen^e-Ipférieure, 'dè celui de Saint-Simon, |iépartgtnèot deTAisqe, d,e celui de BeàUjeu.
Des membres d.u distriç|; de Charly,vijle et de celui dë Cnàtèauneuf-sur-Lpire, enfin de rassemblée (les électeurs du département de Mape.
' Toutes ces assem^jéjes pxpripâent upeVjidl^ésiôri absolue'aux décrets de l'Assemblée national^. La plupart împroq.ypr^t expressément la dé|Cj|ifation d'ijine partie ^ i ^.ssemfel^e» kf fa çomurgn), de up pag ge s^pajfgp avapt d'aypir ^jçheyç 1§. Con§-titution.
î)eUx adresses de,s cjtoyepg actifs» form^Ot les assemblées primaires du cjinjton de Montpellier, dont l'une contient l'adhésion la plus. forfl^él^ aux décrets de l'Assamblée nationale, et l'autre iï$man(|e que ).a ,çit%flej[|[e ,de Hp^|pteliièr so/,t mise au nombm des citadelles Supprimées. ' XQetteadr^sSiÇ e^j; renyoy^au pomité milil#j^e.)
Délibération de 1$ .commune c^e B^sse, en Pro-Y&nce, jcpflténaut ^dftésiop aux j^éprets de l'assemblée, et émission d'sfi^ler tous Jès biens nationaux situés dans son enclave.
Soumission de la commune de Saint-Éloi, département du Pas-de-Calais, pour l'acquisition des biens nationaux situés dans son enclave.
Les soumissions des communes de Besse et de Saint-Eloi sont renvoyées au comité d'aliénation des biens ecclésiastiques.
Adresses de la ville et canton de Castelmoron-d'Albret, de la ville de Clisson, département de la Loire-Inférieure, des curés, archiprêtre et familiers de la ville de Moyrans, et des citoyens actifs des paroisses de Fresne, Pont et Vengeons, district de Mortain, réunis en assemblée primaire, contenant adhésion aux décrets de l'Assemblée et im-probation de tous actes et protestations contraires.
Délibération de la commune de Grisolles, département de la Haute-Garonne, contenant adhésion aux décrets de l'Assemblée et promesse de maintenir la Constitution.
Délibération de la commune de la ville d'An-nonay, contenant soumission d'acheter les biens nationaux situés dans l'enclave de son district.
(Cette délibération est renvoyée au comité d'aliénation.
Adresse des électeurs du district d'Issoire, qui adhèrent aux décrets de l'Assemblée nationale, et conjurent l'Assemblée de ne pas se séparer que la Constitution ne soit achevée.
Adresse des curés, vicaires et autres ecclésiastiques du district de Verneuil, département de l'Eure.)
Ces curés, vicaires et autres ecclésiastiques, considérant tous les avantages qui doivent résulter des décrets de l'Assemblée; considérant que le droit d'annoncer l'Evangile appartient à tous les ecclésiastiques, et qu'ildevient un devoir lorsque de faux apôtres veulent répandre de mauvais principes; considérant que le clergé n'a perdu le respect qu'on lui a toujours porté que par sa grande avidité, déclarent que la nouvelle Constitution va faire parvenir au plus haut degré de splendeur la religion de nos pères ; protestent contre toute réclamation, etc.; adhèrent à tous les décrets et principalement à ceux qui rendent à la nation la propriété des biens ecclésiastiques; se soumettent à tout ce que l'Assemblée ordonnera, parce que les ministres de la religion doivent toujours accepter avec respect les décrets de la Providence, et marquent du sceau de la réprobation tous les actes tendant à détruire l'heureuse influence de cette Révolution : ils déclarent, en outre, qu'ils ne cesseront de former des vœux pour la conservation du roi restaurateur de la liberté française.
Cette adresse est signée de 40 curés, au nom de tous leurs confrères.
(L'Assemblée décrète qu'il en sera fait mention honorable au procès-veroal.)
Adresse d'adhésion de l'assemblée primaire du canton de Montmirail, district de la Ferté-Ber-nard.
Pétition des communautés villageoises du district de Douai, tendant à ce qu'elles soient autorisées à verser elles-mêmes, dans la caisse du trésorier du district, le prix des dîmes, en indemnisant les fermiers actuels.
(Cette pétition est renvoyée au comité des finances.)
Soumission du conseil général de la commune de Châlons-sur-Marne, d'acquérir pour trois millions de biens nationaux de la première classe.
Soumisssion de la ville de Grenoble, d'acheter des biens nationaux pour huit millions.
Soumission de la ville de Metz, d'acheter des mêmes biens pour quinze millions.
(Ces trois soumissions sont renvoyées au comité d'aliénation des biens ecclésiastiques.)
Il est fait lecture d'une adresse de Saint-Mar-cellin, présentée par M. Brenier-Montmorand, député extraordinaire de ce bailliage, contenant acte du serment civique prêté devant les officiers municipaux par les citoyennes de toutes les classes de cette ville.
L'Assemblée ordonne l'insertion dans son procès verbal du serment civique des citoyennes de Saint-Marcellin.
Extrait des registres de la ville de Saint-Marcellin, envoyé par la municipalité à M. de Brenier-Montmorand, son député extraordinaire auprès de l'Assemblée nationale.
Le 23 mai 1790, jour de la Pentecôte, les citoyennes de la ville ae Saint-Marcellin, vêtues en robes blanches, garnies de rubans aux trois couleurs de la nation, accompagnées de leurs enfants dans le même costume, se sont rendues à l'Issue des vêpres paroissiales, sahs distinction ni préséance, à l'hôtel de la commune, pour demander d'y être admises à prêter le serment civique entre les mains des officiers municipaux. Mme de Grand-Champ, en qualité de doyenne, prenant la parole, dit :
« Messieurs,
« Dans ce moment, oCi tous les Français s'em-« pressent à l'envi de prêter le serment civique, « nous avons ressenti que nous étioos Fran-« çaises et citoyennes : c'est en celte qualité, et « comme enfants d'une même patrie, que nous « nous hâtons de venir manifester notre dévoue « ment à la chose publique, en vous priant, « Messieurs, d'être les dépositaires du serment « que nous venons prononcer de rester fidèles « à la nation qui nous protège, à la loi qui nous « défend, au roi si digne de nos hommages, « d'être inviolablement attachées à la Constitu-« tion dont s'occupent les augustes représen-« tants de la nation, et qui nous assure un « avenir des plus heureux.
« Ces sentiments sont gravés dans nos cœurs :. « notre occupation la plus chère sera de les « communiquer à nos enfants, de leur apprendre « de bonne heure à chérir leur patrie, et de « propager ainsi jusqu'aux générations les plus « reculées la soumission et le respect dus à la « loi, la reconnaisssance et l'amour que notre « auguste monarque mérite à tant de titres. » M. le maire a répondu en ces termes :
« Mesdames,
« Vous offrez à la nation le spectacle touchant « du civisme et du patriotisme ; qu'il est conso-« lant pour les amis de la Constitution, qu'il est « glorieux pour un peuple si digne de la liberté, « de voir la portion la plus chérie de la société • unir son serment aux vœux de tout un royaume, et venir attester sur l'autel de la patrie les « principes du courage et de l'énergie 1 « Bientôt votre étude familière sera puisée « dans le Code législatif, auquel travaille sans « reiâche l'Assemblée nationale; vous en consa-x crerez l'objet à l'éducation primitive de vos c dignes rejetons; nous verrons par vos soins c se perpétuer d'âge en âge les fruits précieux ( de vos utiles leçons, et la France, en acqué-( rant sa régénération, se peupler en même
« temps de citoyens dignes du nom de Français.
« La religion, les mœurs sont la règle inva-« riable des opérations du sénat auguste : quel « plus puissant motif pour encourager votre zèle « et attacher votre confiance?
Un gouvernement désormais régi par la loi, « un monarque régnant par la loi et l'amour de « son peuple, la liberté succédant au despo-« tisrae, l'homme rendu à lui-même et à sa vé-« ritable existence; quel tableau plus digne de « notre admiration et de nos hommages?
Puisse l'exemple du sermentsacré que vous al-« lez prononcer, rappeler au bercail de la Gonsti-« tution les âmes faibles et pusillanimes qui s'en « éloignent 1 Puisse cette solennelle attestation « ramener sous le drapeau national les hommes « assez pervers et assez téméraires pour oser in-
sulter au pavillon de l'honneur et de la liberté I « Les vertus qui caractérisent vos grandes âmes, « les sentiments patriotiques si bien exprimés « par l'organe respectable que vous vous êtes « choisi, vont devenir pour les uns et les autres « de puissants modèles, et vos noms inscrits « sur ce registre seront à jamais le monument « de votre gloire.
« Hâtons-nous donc de recueillir les pré-y « cieuses paroles qui vont sortir de votre propre « cœur, pour exprimer le serment civique. » Ensuite, les dames citoyennes ont prononcé, en levant la main, le serment en ces termes : •
Nous jurons d'être fidèles à la nation à la loi « et au roi, de maintenir de tout notre pouvoir « la Constitution, de la faire aimer et respecter « par nos enfants et nos neveux, et d'en faire le « principal objet de leur éducation. »
Après cette religieuse cérémonie, M. le maire a dit :
« Le voilà prononcé, ce serment auguste : son-« gez, vertueuses citoyennes, à l'étendue des « obligations qu'il renferme, et, pour nous servir « des expressions du respectable curé de Gergis, « qu'on ne se joue pas impunément de la Divi-« nité; n'oubliez jamais que l'auteur de la nature
a mis en votre pouvoir les armes les plus « puissantes pour inspirer à tous les citoyens « l'amour de la paix et cette unité de senti-« ments, si nécessaire pour le bonheur de la « chose publique. »
Il a terminé cette exhortation par avertir qu'il serait déposé à la maison commune un registre ouvert, où l'on recevrait journellement le serment des citoyennes qui s'y présenteraient.
Ensuite cette respectable assemblée de citoyennes a couronné par un trait de bienfaisance cet acte solennel de patriotisme, en donnant chacune au bureau de charité une somme en argent pour le soulagement des malheureux.
De tout quoi nous, officiers municipaux, avons dressé le procès-verbal, et les dames citoyennes, oui ont prêté le serment avec nous, ont signé à l'original. Les officiers municipaux, Berruyer, maire; Juvenet, officier municipal : Vincendon-du-Moulin, officier municipal; Robin, officier municipal; de Bissieu, officier minicipal; Buisson, procureur de la commune; Simond, secrétaire.
« Signé : BRENIER DE MONTMGRAND, député de la ville et bailliage de Saint-Marcellin.
« Pour extrait collationné : Simond, secrétaire de la municipalité. »
Paris, le
L'Assemblée renvoie encore à ses comités militaire, des recherches et des rapports, des pièces
justificatives et officielles concernant les régiments Royal-Marine et Vexin, et l'arrivée subite, de Marseille à Aix, de plusieurs milliers d'individus : ces pièces ont été remises sur le bureau par un député d'Aix, comme regardant l'affaire, et les pièces ci-devant renvoyées aux mêmes comités.
Elle renvoie aussi au comité des rapports une copie de pièces relatives à des faits arrivés au Saint-Esprit, et au comité des finances une pétition de Notre-Dame-de-1'Isle, en Auvers, relative aux impositions.
Une députation de la commune de Paris est anoncée et introduite. Elle est chargée : 1° de proposer une confédération générale des gardes nationales et des troupes réglées ; 2° de demander l'ouverture d'un canal de la Marne à Paris et de Paris à Dieppe.
, maire de Paris, prononce le dis" cours suivant (1) :
Messieurs, un nouvel ordre de choses s'élève et va régénérer toutes les parties du royaume, comme toutes les branches de l'administration. Déjà la division des provinces ne subsiste plus, cette division qui faisait en France comme autant d'Etats séparés et de peuples divers. Un grand peuple ne connaît plus que le nom de Français; c'est le nom d'un peuple libre; il n'y a plus qu'un devoir, celui de la soumission à la loi et au roi; il n'y a plus qu'un sentiment, celui de l'amour et de la fraternité. C'est sur ces bases que vont reposer et la paix et la prospérité de cet Empire. Notre union fait notre force; il est donc important pour la chose publique que cette union soit de plus eu plus étendue.
Déjà des assurances de fraternité circulent dans toutes les villes du royaume; déjà des fédérations particulières se sont établies entre les gardes nationales; la capitale a reçu de toutes parts et des gages d'amitié et des promesses de secours. La commune de Paris est empressée de rendre et ces promesses et ces témoignages d'amitié; elle a adhéré à plusieurs de ces fédérations ; elle est jalouse d'en proposer une à son tour. Toutes nos sections se sont réunies pour un même sentiment et pour un seul vœu : c'est celui d'une fédération générale de tous les départements, celui de ne plus former qu'une garde nationale animée d'un même esprit pour défendre la liberté publique, pour faire respecter les lois de l'Empire et l'autorité légitime du monarque. On admire partout te zèle, le courage et le patriotisme de la garde nationale; nous en pouvons juger ici par l'armée parisienne; on voit que c'est la vertu civique qui lui a fait prendre les armes, et en observant la composition et la tenue de ce corps qui a cru tout à coup au milieu de nous, on reconnaît un général citoyen qui commande une armée de citoyens.
La fédération de tous les corps civils et de toutes les gardes nationales du royaume doit
être faite «t jurée par des députés réunis dans une seule ville ; et si nous osons proposer
l'enceinte de nos murs pour cette auguste réunion, c'est qu'elle doit être établie sous la
protection de la loi, en présence des législateurs qui en sont la source et du meilleur des
rois qui est déposi? taire de la force publique. C'est devant vous et sous ses yeux que doit
s'opérer tout ce qui peut
Nous proposons â nos frères de venir, par amputés des districts et ié's dejîarlerhëhts,. së réunir à nôùs, dans nos murs, en nôtre présence, et d'ajouter au serment civique déjà prêté par. toqs les Français celui d'être tous inséparablement unis, de nousaimer toujours et de nous secourir, eh cas de nécessité, d'un,,,bô'Ut du rôyàumë à l'autre; et nous proposons que çettç réuni,où,qUe cette fédération générale suit jurée le 14 juillet prochain, que nous regardons tous, comme l'époque de la liberté : ce jour seradéstïné à jurer de la défendre et de la conserver,
cette liberté vous est due, Messieurs, c'est sur vos déc,rets qu'elle esf établie, ..c'est sur Va/loi 'qti'éïle reppse; nou& désirons due cette fédération générale obtienne votre suffrage; .nous demandons que vous l'honoriez dé votre présence ;.àlprs vous entendrez autour de vous répéter le cri de : Vive la loi 1 et cette loi est votre ouvrage; le roi verra un grand nômb'rë dé ses .ëïnphts.sepresser autour de lui, élever un cri defe Viye ,1e roi ! prononcé par Va liberté, et ce cri sera celui dé la France entière. -
,, président de la commune, de Pà)'is, fait ensuite leçtiire d'une adressé des citoyens de taris à tous lès Français, rédigée par MM. Bôt?r-tibonnë, Pons de Verdun èt Pastoret,.cOmmjsr saires nommés à cet effet ; elle estai,nsi conçue : « Chër's et braves amis, jamais des circonstances plus impérieuses h'pnt invité , tous . les Français à se réjomir çans un même esprit, à.se rallier avec courage autour de la lpl et favoriser de tout leur pouvoir l'établissement de la Constitution. . . -
« Dix mois sontàpeineê,coulés dçppis l'epoguë mémorable .où des, murs de là Bastille "conqnisç s'éleva un cri soudain : Français,nous sorqpiçs libres /,qù'*^u. raèqae jour un cri touchant se fasse entendre : Français, nous sommes frères l
« Oui, nous sommes frères» uous sommes libres nous avons uné patrie. : trop longtemps courbas sous le joug, nous reprenons enfin l'attitude lière d^un peuple qui reconnaît sa dignités
« tlè que nous avons tous formé, ce vœd du plus chéri des, rois, ,,nous vous proposons de i'accQmplir aujourd'hui. , , , t.,,
« Nous në, sommes plus Bretons ni Angevins-, on dit nos frères de là Bretagne.et de l'Anjou; cornrpe eux nous disons ;,Nops ne sommes plus parisiens, .tioiis,sommes tous. .Français, ,
« Vos exemples et les dernières paroles.du roi nous ont inspiré un grand dessein; vous i'adop-terez, il est digne de yous>
« Vous avez juré d'être unis.par des liens indissolubles d'une sainte fraternitéj de défehdr.e jusqu'au dernier soupir ja Constitution de l'Etat, les décrets de l'Assemblée nationale et l'autorité légitime de nos rois. Gomme vous nous avons prêté ce serment auguste ; faisons, il en est temps, faisons de ces fédérations une confédération générale.
« Qu'il sera beau le jour de l'alliance des Français! Un peuple de frères, les régénérateurs de l'Empire, un roi citoyen^ ralliés par un serment commun à l'autel de la patrie^ quel spectacle, imposant ël nouveau pour les nations !
« Nous irions aux Extrémités du royaume nous unir à vous ; mais c'est d'ans nos murs qu'habitent. nos législateurs et notre roi; la reconnaissance no us retient et nous appelle auprès d'eux ; nous leur offrirons ensemble pour prix de leurs vertus
et de leurs travaux le tableau tpqchant d'une nation rècounaisçante, ,hèUreuse.et libre. ,. « Vous serez avec nous,, bravés guerriers, nos frères d'armes et nos garnisj Vous qui nous avez donné l'exemple du çivipme et du courage, vous qui ave?, trompé les projets du despotisme et qui avez senti qûe servir la patrie c'était accomplir vos serments. .. j .
„ « Et yous^dont là présénce^nous eût,étéji chère, Français que, les mers ou d'immenses intervalles séparent de nous, vous apprendrez» en.;reeevant Fexpression de. nos , regrets,( que,' nous nous sommes rapprochés par ], pensée, ,et que . malgré lès distances vous, vous étiez placés àù milieu de nous à la fête dé la patrie. J ; „ ,tiu..a,! / ï
« C'est le l4juiilpt que nous ayons,conquis la liberté, Ce sera le 14 juillet ue nous jurerons de la conserver ; qu'au même jour, à la mêrrie heure, un cri,général) un.,c.çi unanime rëtgptisse dans toute? les parties,del'Empire,; Viv,en,t la nation, la loi.,et le roi / Que, ceJcri soit, à jamais çelui de ralliement des amis de la patrie et la terreur de ses ennemis., , it ut
, « fton, Français, la patrie* la liberté, la Constitution n'auront plus d'ennemis. Bientôt tous ces ho,mme3 qui portent encore, et semblent, chérir leurs fers s'élèveront à la hauteur de nos communes destinées j ils. aspireront à l'honneuç de voir leurs noms inscrits, dang cè.paçtë dë famille, monument de notre gloire et garant éternel de la félicité de cej Empire,.*». . . ,fl ,
La députation, demande que le cpmit'é .de .Constitution veuille bien.s'occuper de fixer le nombre des députés quj seront envoyés, dës. divers, départements. pour concourir .à ,ia.fédération. Le vœu de la commune serait que les députés fussent pris, moitié dans l'ordre civil, moitié dans la garde nationale, .et quîilj fût joint.,un officier, nn bas-officier et un soldat, ,de chaque régiment des troupes de ligne, tant de terre que de mer.
, maire.dg jp.arisy présente.immédia-tement la seconde, pétition dans.laquelle,, il.est question de. l'ouverture.d'un canal à tracer de la Marne à Paris*. et de Paris, à Dieppe*. ayant la double utilité d'occuper un grand nombre de citoyens qui manquent de travail * et de. fournir au commerce, intérieur uii moyen avantageux de circulation;
répond à la députation en ces termes,: .
Messieurs, Vous savez combien doit plaire à l'Assemblée nationale, la pétition que vous lui apportez. Une fédération ,de toutes.les parties de l'Empire, de toutes les troupes citoyennes qui se sont armées pour la défense de là liberté, ou qui ont déclaré qu'elles n'emploierai,ent jamais leurs armés à la combattre* est uné belle idée que lë patriotisme devait produire:
C'est sads doute sous les murs d'une Capitale, qui a tant Servi la cause publique* que.doit être solennellement faite cette civique et fraterdëlle union de tdus les citoyens; de tous les soldats de la liberté, de tous lés, militaires.
A l'abri |e ieurs drapeaux,- et sous la garde de leurs àrraës, Sera mise celte Constitution qui est notre ouvrage.
En présence d'un roi tjui sait apprécier le titre de roi d'une natiou libre, ils jdreront de nouveau avec lui de maintenir cette Constitution, tant, que le sentiment de la liberté èf lés lumières dê la raison existeront parmi les hommes ; et après un parti si imposant, nous verrons, avec l'anéantis-
sement des coupables espérances des malveillants, renaître partout l'union et la tranquillité qUifcfàt le bonheur public.
Vous avez, Messieurs, toiit rêurii dans votre pétition pour donner ^ êçtttejeé^éjnpjjia Intérêt dont elle est susfcejfyble\ |/époqùe a laquelle vous proposez de la fixer, tiëparâ une si grande place dans l'histoire dé,la liberté de? peuples, que le serment aé vivre libre ou mourir ne peut être prononcé en un jour,.plus mémorable,..
Ne doute? » donc ,pas,. Messieurs, de l'attention que rÀsseap,hié,e nationale va apporter à la pétition que vous lui .soumettez* >
L'Assemblée nationale voùs permet d'assister à sa séance.
Je dg^ mande le renvoi du projet de fédération au comité de Constitution, et du projet de canal au comité d'agriculture et de commerce.
; J'avoue que je ne vois pas sans respect et sans vénération la garde nationale£de Paris: m^is elle fait aujourd'hui ude fjrdpOBitin qui flëfcBàfldëde la réflexion. Je pense qu'elle doit être! fénvbyéë àui bohaitës tfèd râppfoiùs et militaire, pbur ne s'en occuper qu'après avoir présenté un tràvaii gur .l'organisation de la garde..,qationale et.,de l'ordre militaire, (tï t"6lève-'0. m^rmurs'.f J'apr prouve la fédération pour le iiiaintlén et Ja dérènâe ae la liberté française. Mais ne vôyëz-vôus aucun inconvénient dans la coalition des milices nationales, au moment où elles ne sont pas organisées? (Nouveaux murmures,) Je fais la .motion expresse que les comité^ Sôiëut chafgeè dë fifésenter dans le plus .court délai un^travail sur l'organisation des miliëes nationales, et qu'ëhsmte Flâ s'dccu-pent c|e leur fédération. Quant au projet du canal, j'appuie la motion de M. de La Rochefoucauld.
Des citoyens demandent à.së râësyfctiblfer jpdtff prêter lé serfUërit fédér'âtlf; des citdyëhé-^oîuStsj des édlilâts-Cî^ toyélië, qui n'ont jjàs Sttendli qd'ilà fttëseiifc dr a-nisés pour protéger l'Etat et maintenir1 lai Cons-titulibn; déiiiànaefat à sePéiihif''yè'itt jiirfer de tes wfâjffiœ bt delë^ Ériaifïtëhit- tôdjdtlré; Soit tjtiè VciUB dbnriiëz Vôtrè abprbMtioîi àUfc prdjëté dëià È>rëfeHtês.|)af.lëè villë'à d'AriJaé ët d'0rléariB, iîjt quë vous la dtiiiHtèl; à delui-tfUè vous koUmet àu-îblird'hhi là éti/iicdilhè de PdPiè, Udiis Bèrons egàléfiiëni èUtièfaité ; m^ls l'tiri du l'àtttre èst iri-disi)ehsable. Il ùé restera plllb (jiië la féiléf'dtidb dès troupes de ligne avec les troupes natidnâleè ! le toi l'â déjà âutorife'ê'ë: il f odBriëtët non ëèiile-ttiëHt' Son Coii^ônteménh tnài§ énédrë dëéâppiàu-uisèël^ëlits; Il 'fautjiJe Heé cé Soif la défnlil'Che des àdltiàtB-bitoyënà dë Pafi^qit aabjHéë èt qUIf é soien t adthiSâsërfetirét bïlr (lëvéfs lë roi, poUHë sUti plier dë fairë rlhëridrë tbti.teè nécëSéàiles polir Hùe cèttë ëbhfédërktibri ait ,liëii àd jbtir pto'fibse, éàiif àli Bbmi'iê dé cGdbélîtdii6il âprë1 séhtèr un Bfliet De décj-et sd? le iibinbl-é dëfe dé* pdtéB (lui clôiyentétrë ènVdyéS dàtîfe lësptotiiibeë; et suf la forihe dë lëiiP èlëctidn.
lia municipalité de Paris a attiré, par hrie pétitiôn, regards de l'Assemblée nationale sur. les.vainquenrs de là Bâ^tillë : dë|idi§ êë tetHps, lëë dfHciërsîiiu-nicipaiix ét lë inàirë oiit fâit un rëéëhsëment exaet de ce qui en existe; et-ee recensement a été renvoyé au comité des pensions. Je demande
que le, çoraité vous remette incessamment travail à, cet égara, é't .Vtiuà eïposë cè que V0tts: pouvez faire poiîr ced brâves eitô'yëtià.
rappelle la derflâttde de la conG\mune de Paris et la n^et aux voix.
L'ÀésëUiblëë tiatfô'tiàle àpproaVë ie pacte fédéra tif, prbbdsé bàf1 la Ctfftttàrinédë Paris;- étrfenVoie àu Comité de GbnstîtutidH lë rnôflé dë réfection èt lé nônlbré des dêjjlltéï qlii s'ëhont éfltôjésl dans lëfe {)r6tincëé.
La dè'iilànlïe d'tin ëàWàl. de Parié S Diépfie est ënsuitë rënvdyëè âri cttttiUé à'àgfidiiltUte.*
MM. le curé et les nialrguillléTs de Saint-Ger-mÊtin-l'Auxerrois sont admis à la bart-e; — M. le Curé ^roOOtJce le discours suivant :
iL'bommàgëqUe bous vendtisvousoffHr au nota de tdUS les fcitd^eùs dé la paroisse dë Saint-Gër-main-l'Auxerrois, est moins l'expression de leur recotinài^ânce pour l'ettiprësiemènt avec leqbel VOilB àvëz accueilli leur respectueuse invitation, qu'un sincère témoignage de leur admiration profonde.
Non, Messieurs,-jàfriàlâ dans le jèUr donsaCré spécialetaënt à bonorët l'auguste ëachement de nos aUtël§,' iâmàis spéctâclè pllis màjeBtuetiii ne fràfjpd les feg^f-ds des hàbitanté de eette vaste capitale. Les illustres représentants de la nation, unis à notre sage monarque, pour adorer le souverain afbitrë de la d&tirtée,des peuplent.des rflis : qbëllë irbpbdahtë cérémonie ! Qiiellë sublime âblënhiié! Qu'il trëus fisfulis de le dire i sa [ibmpë ël sdti édlàl éôntribùetit àqlant à l'affer-rtiisserriertt dë ùèftre fol qU'âu triomphe de la religion dë rto§ pSi'ës.
. * Là tiombrëtfSë affltiehee deâ-citoyens de tout flgë. lâ âaifite allê^rèsse çfai, enflammait Jeurs cteiirs, l'enthousiasme qui les transportait, les bbntitlttënëS ftedlaîhaMous dont l'air retentissait^ lë boti orîlré et là satisfàëtiOfl qui régnaient, par-j-toht où Voùs pas& tout annonçait la fêle du Diëb dë paii èt dë bonté «fùe nous sertionsi
« Cëttë bellë jbUrtlêë ne B'ëffàdêf a jamais de notre sOUfëhlrj ëlld Bë^a totljouiM là plus flatteuse épo-cftië dti mlhiStêrë BàitlIqUè j'ai lë bonheur dîexer-cëfr'{ elife hëtid^a dana tous lefe temps les fastes dë ia Ffatiëë et les ànoaiëè ai la religions t
« Gëttëédifîartte sdlënnitë a été couronnée par là Charité la plilB attbHdrièsâtlte j vous avez rendu à sëizë fatriillëB lë§ àutëuis dë leurs jours, détënus oti ptjnrslifvis Notif ia dette la §ltis sacrée, celle dë Tâliaitement dë leurë ehfânts. Instruits qd'ila doivent à voti'e rëligieûse bienfàiëàhce là liberté dbnt ils jdUissëlltV-ils offrent et offriront 9àns cessé aii suprêhlè, ddeflittateuf des natiorw leurs vœdl et leurs prières podr la conservation des riè^ëB dé la patrie, la prom^ië régénération et lâ prospérité de l'Empire français; *
répond 3 ... ï
Messieurs} J'Assemblée.nationale a rempli un devoir, religieux que sa piété lui.cQtaraandaitnClie est très satisfaite, des. soins que vous, vous Àtes donnés; elle,reçoit votre hommage avec djautant plus d'intérêtj .qu'il a pour organe un pasteur que ses vertus font chérir.de ceui qui. sont copQés à Jou ïsèle et, que. son civisme doit leur rendre encore plus précieux, t
Je dèinaiïde i'itti-îjressiob^de iiëudip!dpûr^j. pl.jë pëmanae e^pî^ au'att|ji(|u hohs àvonè aojine.ei
l'iieiirèux, usagé, qd'on Iri uuràîL,MI lë éiiré de Sàint-Gérmajri-l.'Anierfôis soit Chargé de dôuë
remettre la liste de toutes les familles de sa paroisse qui sont dans le même cas, afin que l'Assemblée y pourvoie.
(Cette proposition n'a pas de suite.)
Les sieurs Roussel, Prudhomme, Maubach, Par-raux, Allais et Tornèse, inventeurs d'une méthode d'écrire aussi rapidement que l'on parle, sont reçus à la barre, pour y faire bommage à l'Assemblée de leur invention. Ils font lecture d'un rapport fait par M. de Condorcet, de l'Académiè des sciences, en faveur de leur méthode, et demandent qu'il leur soit permis d'en faire l'expérience dans le sein de l'Assemblée même.
L'Assemblée ordonne que ses commissaires, chargés des dispositions pour le lieu de ses séances, indiqueront une place dans l'une des galeries, où la méthode dont il s'agit puisse être éprouvée.
L'honneur d'assister à la séance est accordé aux inventeurs, qui, au surplus, sont renvoyés au comité des rapports.
Des députés de la société polymatique se présentent à la barre, pour faire hommage à l'Assemblée de leur établissement, et le mettre sous ses auspices. L'Assemblée les accueille, et leur permet d'assister à sa séance.
député de Charolles. Messieurs, l'affaire dont je vais vous entretenir offre les plus étonnantes singularités; d'après le récit des faits vous verrez qu'elle tient absolument du délire.
Le 6 octobre dernier M. l'abbé Carion, curé d'Issy-Lévêque, sous prétexte d'établir un grenier *de subsistance pour les pauvres, a convoqué une assemblée de paroisse. La séance a commencé par la lecture d'un cahier ayant pour titre : Formation du comité et conseil d'administration de la ville et commune d'Issy-VEvêque. Ce cahier contient des lois sur la police de la ville, la réparation des prisons, l'administration de la justice, le régime des gardes nationales, les amendes et confiscations, les emprisonnements des citoyens sur le simple ordre écrit du comité, les alignements des rues et des places publiques, les corvées, le prix des grains, en un mot tout ce que l'imagination exaltée de ce pasteur a pu réunir pour enfanter une législation. Le curé, le casque en tête etl'épée au côté, allait chez tous les laboureurs s'emparer de leurs grains; eu vertu de son règlement il en fixait le prix. Ce nouveau législateur n'a point reconnu la séparation des pouvoirs , car il ordonnait, jugeait, exécutait ses propres jugements, souvent même, dit-on, il gardait l'argent et la marchandise; notaire et tabellion étaient appelés pour dresser procès-verbal deces extravagances, tin jour M. le curé partit, tambour battant, et arriva dans les grandes Bruyères ; il y rendit et fit exécuter sur le champ ses lois agraires, s'adjugea à lui-même une portion de territoire, sous le prétexte que c'était une ancienne commune. Ses prônes étaient un mélange de faits de guerre, de menaces séditieuses, d'explications de ses règlements, avec le moyen de les faire exécuter. A l'aide de ses troupes (car il en avait), il a établi et perçu des octrois, fait abattre des murs de clôture, arracher des haies. Ces fa ts sont prouvés par cinquante témoins. Il nous reste à désarmer ce redoutable curé et à nommer une autre municipalité que celle qu'il a organisée. Je demande que toutes les pièces qui attestent les faits que je viens de mettre sous vos yeux soient renvoyées au comité des rapports,
qui sera chargé de vous présenter un projet de décret sur cet objet.
Le renvoi est décrété.
, par une lettre du 30 mai, adressée à M. le président, prie l'Assemblée d'accepter sa démission de la place qu'il occupe comme député de Verdun et du Clermontois.
Madame Mouret, auteur des Annales de l'Education, et directrice du Musée des Dames, présente à l'Assemblée un ouvrage nouveau, intitulé: « le Cathéchisme du citoyen pour la jeunesse française, servant de suite à son plan d'éducation. »
L'Assemblée marque sa satisfaction par des applaudissements, et M. le président accorde, de sa part, à Madame Mouret l'honneur d'assister à la séance.
, député de Ploërmel, rend compte, au nom du comité des rapports, d'une affaire qui concerne la municipalité de la ville de Saint-Jean-de-Luz.
(l'atné) demande l'ajournement de la discussion.
L'affaire est ajournée à la séance de mardi soir 8 juin.
lève la séance à 10 heures et demie, et indique celle de demain pour onze heures du matin.
Séance du
M. le président s'étant rendu auprès du roi et n'étant pas de retour au début de la séance, est remplacé par M. l'abbé Qouttes, ex-président.
Le procès-verbal de la séance de la veille au soir est lu et adopté.
11 est fait lecture d'une adresse des curés et vicaires composant la congrégation deMorès-en-Montagne, département du Jura, district de Saint-Claude, qui, voulant donner à leurs paroissiens l'exemple d'une parfaite soumission aux décrets de l'Assemblée nationale, déclarent qu'ils y adhèrent, et s'engagent à soutenir de tout leur zèle et de tout leur pouvoir la nouvelle Constitution de l'Etat;
D'une adresse de la municipalité de Nîmes, qui annonce que la contribution patriotique de cette ville s'élevait au 28 mai 1790, à la somme de 472,770 liv. 9 s. 8 d., et qui estime que la totalité des déclarations se portera à environ 500,000 liv.;
D'une adresse du conseil général de la commune de la ville de Murât, département du Cantal, portant l'expression de son respect et de sa soumission aux décrets de l'Assemblée nationale, et de son admiration particulière pour ceux qui ordonnent la vente des domaines nationaux ; elle la supplie de recevoir sa soumission pour l'acquisition qu'elle désire en faire jusqu'à concurrence d'une somme de six cent mille livres.
Le rapport du comité militaire, joint au comité de Constitution,
L'Assemblée adopte ce changement dans l'ordre de son travail.
, au nom du comité des finances, rappelle la demande de la communauté de Ghamplitte et présente un projet de décret qui est adopté ainsi qu'il suit:
« L'Assemblée nationale, d'après le rapport de son comité des finances, a décrété et décrète :
« 1° Que le caissier et administrateur général des domaines et bois de la province de Franche-Gomté sera tenu de verser dans la caisse du receveur de Ghamplitte la somme qu'il tient en dépôt, et provenant de la dernière vente des bois de réserve de ladite ville ;
• 2° Que partie de cette somme sera employée à payer les grains que la ville a fournis aux habitants, sauf à en recouvrer le prix sur ceux qui ne seraient pas insolvables;
« 3° Que le surplus de cette somme, et les recouvrements des avances faites aux particuliers, seront aussi employés aux réparations prescrites par l'arrêt du Conseil, sous la réserve expresse d'en justifier par devant les directoires de district et de département.
« L'Assemblée nationale décrète pareillement que l'administration des domaines fera verser dans les caisses des receveurs des districts, sur les demandes qui lui en seront faites par les directoires des départements, les sommes provenues des ventes de bois des communautés qui sont actuellement en sa possession , lesquelles sommes ne seront employées par les municipalités que d'après la destination qui en sera faite par lesdits directoires de département, de l'avis du directoire de district, précédé de la délibération du conseil général des municipalités. »
propose, au nom du comité militaire,un projet de décret sur la répartition des 32 deniers accordés aux soldats par le décret du 28 février dernier. Ce décret est adopté ainsi qu'il suit:
t L'Assemblée nationale, considérant qu'il est instant que les soldats français jouissent de l'augmentation des 32 deniers qui .leur avaient été accordés par son décret du 28 février dernier, et ayant fait la répartition conformément aux principes qui dirigent les représentants de la nation, a décrété et déerète :
« Que les 32 deniers seront répartis ainsi qu'il suit :
« 1 sol 4 deniers au prêt;
« Six deniers dans la poche, dont la distribution sera faite, comme le prêt, tous les cinq jours;
« Et 10 deniers aux linge et chaussure. »
, au nom du comité des finances,^ propose un projet de décret sur les droits d'entrée perçus tant sur le territoire que renferme la ligne d'enceinte des murs de la ville de Paris que sur celui compris hors de t enceinte et qui était précédemment soumis à ces droits.
met ce projet aux voix ; il est décrété ainsi qu'il suit:
« L'Assemblée nationale a décrété et décrète qu'à compter du jour de la publication du pré-
sent décret, tout le territoire qui renferme la ligne de l'enceinte des murs de Paris sera soumis aux droits d'entrée dans cette ville; et réciproquement le territoire qui était antérieurement sujet à ces droits, et qui se trouve placé hors de l'enceinte, sera soumis au régime des impositions ou perceptions établies dans la banlieue, dont il fera désormais partie.
« Décrète, en outre, que la municipalité de Paris veillera à l'exécution des règlements précédemment rendus sur la distance à observer entre les bâtiments et les murs, et sur tous les objets relatifs à la sûreté de la perception. »
, au nom du comité des finances, demande à faire un rapport sur la répartition de l'imposition des tailles des fermiers des propriétaires ci-devant privilégiés, et dit :
Il s'élève entre les propriétaires et les fermiers des contestations sur le payement des impositions ; plusieurs baux portent pour clause que les fermiers seront assujettis aux impôts prévus et non prévus. Quelques-uns des ci-devant privilégiés prétendent, à l'abri de cette clause, qu'on ne peut point les faire payer, et que leurs fer-, miers sont chargés des nouvelles impositions. Quoique cette prétention soit évidemment injuste, et quelle n'eût pas dû s'élever, il est bon, pour arrêter toute contestation et tout procès, de prononcer un décret qui exprime les intentions de l'Assemblée nationale : il me paraîtrait pouvoir être rédigé ainsi : L'Assemblée nationale décrète que les fermiers, métayers et autres, qui sont obligés d'acquitter ces différentes impositions, continueront de les payer, à l'exception des tailles réelles et personnelles qui seront à la charge des propriétaires, ne pouvant être à celle des fermiers, métayers, etc.
La perception serait beaucoup plus assurée et sujette à bien moins d'inconvénients, si vous disiez que, pour les six .derniers mbisde 1789 et pour l'année 1790, vous ne voulez pas que les collecteurs soient obligés d'aller chercher à trente lieues ce qui leur est dû chez un ci-devant privilégié, qui pourrait n'être pas de bonne humeur.
On propose le renvoi au comité des finances.
Ce renvoi est décrété.
, président, étant rentré dans l'Assemblée, reprend le fauteuil et annonce :
« Que s'étant, d'après les ordres de l'Assemblée, retiré devers le roi, pour lui rendre compte qu'elle avait par acclamation décrété que Sa Majesté serait suppliée de fixer elle-même ^dépense de sa personne et celle de sa maison, Sa Majesté lui avait témoigné sa satisfaction, et répondu qu'elle ferait incessamment donner connaissance à l'Assemblée de ses intentions. >
annonce qu'aucun des membres portés à la présidence n'a réuni la majorité absolue des suffrages.
Le résultat du scrutin pour la nomination des secrétaires a réuni la pluralité des suffrages sur MM. de Pardieu, Dumoiichel et Gourdan qui remplacent au bureau MM. Ghabroud, Defermon et l'abbé Golaud de Là Salcette, secrétaires sortants.
, au nom du comité des finances, présente un projet de décret sur les rôles
des impositions du département de l'Eure qui est adopté en ces-terme! :.
« L'Assemblée.nationale, après avoir entendu le rapport.de son comité des finances, considérant que rien n'est pji^s urgent que là.confection des rôles et le recouvrement, ae? impositions, qu'il est nécessaire que les difficultés, élevées par quelques-uns des ci-devarit privilégiés, tant sur la cote que sur la qualité de l'içnpôt auquel ils ont été imposés au rôle d,ë la compiùnâùië où sont situés leurs bipiis, soient terminées, parie aëpàr-tementj a,décrété et décrète ce qui.suit :
« Art. 1er. Les rôles qui auront été faits parles officiers municipaux du département de i'Eure, dans les formes ordinaires et suivies jusqu'à présent, seront. piroyisOirèméiit ëiëëdtés; ët il sera sursis à totite. actidh et à l'eiécution des jil juments ëri . fhd.tiêrë; d'irnnbsifibri direct^., s!il eB avait été rendu, jusqu'à m formation d'iidlt dëpïir-tethent.
« Art. 2. Les contribuables qui se crdiront fondes à obtenir, feoit la dê'chahge ou .line ffloÔératipri.sur lëurcoté d'iiiipqéitipri, se pbdhrolhdnt par simplet rpëmoire§ dbvahf l'assëihblée administrative du dèparteraèfit, laqùèllë cohriaîtra prpVièoirèmënt, ët jusqu'à cë qu'il eri êoit àiitreinent ordonné par l'Assemblée nationale, dé toutes les diffiClilté^ qffi poUrroht s'élëtferen iiiatièrë d'itnpôt direct:
« Art. 3: Les jugements et dëcisibns de l'àssfem-blée de^dëpàrtëmént âéroiit rëndus.sans ifaié, stir papier libre, et il en Sera tenu registre. »
, au n'Ofri dii cbmitè de menaicifè', proposé, qtiëîcjiiës afticies gêrl'êraiix fofavisoirès sur la mendicité. 11 Jit :. * . , Par le décret i}ue vousl. avez reridii le 30 Hiai dernier, relativement à là thendicit^, voiis à\ez arrêté que votre comité Vohs prisentérait titi prcijet de règlement pour les maisons où doivent être détenus les mendiants qui ne se conformeraient p⧠aUx disficisilintis de ce décrët ; lë cbmité a pensé qu'il dëvàit vbbs soumettre aujourd'hui quelques articles gëtléraUx et prôvisoites. Eri conséquence, il Va lès soumettre sUccéksiVëiiient à Votre discussion.
« Art. 1er. Lâ déëlctràlibo faite eh vërtU de l'article 6 du
décret dU 30 mai deriiiëh, par Uh liieri-diant arrêté, restera déposée entre les mâihs des
officiers muhicipaUx, et cbpië dé cettë déclaration, jointe au mandement de la municipalité,
sera remise aux agents chargés de diriger les maisons où lés mendiants seront déténhs. »
Il importe aux droits sacrés de l'humanité d'ajouter à l'article; qu'il en sera également remis aux mendiants arrêtés une ëopie sur papier libre et sans frais.
Cet araënderhent est adopté.
L'article 1er dans son ensemble est rais aux voix èt adopté darts la teneur suivante :
t Art. 1er. La déclaration faite ën vertu dé l'article 6 du
décret du 30 mai, par un mendiant arrêté, restera déposée entre les mains des officiers
municipaux, et copie de cettë déclaration, jointe au manderhent de la municipalité* sera
remise aux agents chargés .de diriger, lés maisons où le mendiant sera, détenu; il en sera
aussi remis au mendiant Une copie en papier libre et sans frais. »
lit l'article 2 qui ëst adopté en ces termes :
. , « Art. ;2,, La municipalité du lieu de.détention du mendiant adressera copie de la déclaration
ci-dessus mentionnée aux officiers municipaux de son domicile, pour obtenir d'eux, et des personnes désignées dans ladite déclaration, des renseignements sur cëlui qui aura été arrêté. »
donne lecture ainsi qu'il suit de l'article 3 du projet de décret du comité :
« Art. 3. La nourriture d'un mendiant valide et détenu ne consistera que dans du pain et de la soupe. Le prix de son travail lui sërâ accordé en entier, et servira à augmenter soU bien-être. »
Il èst dit dans l'article que la totalité du prix du travail du mendiant lui sera accordée ën entier; il në faiit pas perdre de vue (jUë dans ces dépôts il y aura beaucoup de fripons, et ceséi-ait lehr rendre un mauvais Service que dë leur àccordër dë l'argébt. Je proposé dohc qde le prix de lelir travail soit déposé entre lés mains du chef du lieii pdblic, ët qu'il leur en soit tenu compté à leùr sortië. Vous pourrez aussi l'atltdriser à lëUr procurer les dou-cëiirs qUi leur Seront débëssaires.
Il ne s'agit ici jue dfeS ihëbdiants valides, c'eèt-à-dirë de cëjïx qui méritent le moins la protection de là Société. Gelhi cjui në ieUt pas travailler mérite d'être puni, et cependant bn vou§ proposé de renclré cétte clàsSë d'hdmfàéjî plus hëuréUse que celle des journaliers; puiscfti'bh vëiit leur accorder gratuitement du p'airii et de là soupe, et leur reniettrë ensuite le petit péculë qu'il& pourront gagner, jé crois qu'il,est ju^të dë dédiiire sur cette jàétite Somme ïeé frâië dë leilr nourriture ët de leiir entretien.
Il ne faudrait pas méine. aèçdrder le nécessaire à ceux qui rëfuëent dë travailler. Je proposerais volontiers dë tei placer, dans un endroit où l'eau viendrait, ët où ils seraient obligés de pomper saris cessé poUr ne pas être mouillés.
Les mendiants volontaires sont certainement une classe d'hbmtnes à charge à l'Etat. La fainéantise est un vice et non pas un crime. Il faut chercher à la coatenir. et à la corriger. Les dépôts né doivent fournir que lë nécéST saire. Il faut offrir du travail à ceux qui y sont détenus, et lorsqu'on aura prélevé sur leur travail de quoi fournir à leur subsistance* on pour-? rait leur fournir du surplus un petit pécule qui les ramènêrait dahé. la .société avec l'habitude du travail, et les moyens de s'en procurer. La manière de les encouragér au travail* c'est de leur en faire connaître les avantages. Je proposerais donc d'ajouter à l'article que lorsqu'on aurait défalqué leur dépense sur les sommes qu'ils auraient gagnées, on ferait une masse du resté qui leur serait distribuée à leur sortie.
Je suis d'avis qu'il serait convenable de diviser leur gain en trois portions, la première serait employée à leur subsistance; la secondé léUr Sëràlt distribuée toutes lés serhaih es, afili de léâ encourager aii travail ; la troisième léur Serait remise tjuàhd ils sortiraient.
il sémble qu'on rie voie que ce qui se passe à Parié : dans ma provincë, je ne sais .pas trop comment l'on .ferait ppqr diviser en trois parties cinq sqùs que gagne par jopr un ouvrier,,Jeidemapde ddnc la priorité pour l'opinion de M. de Grillon.
Plusieurs membres la demandent pour M. Mar-tineau.
A peine sortis d'bti régiihê fclti tBîites les impositions pesaient sur le péiàfii^^ du âyec la meilleure volonté du nldtidë il étdit pfëëtjlie impossible de se prfctëarer du travail, il n'est pas aisé de faire des lois justes sur cëtfcë dlëise d'hommes réduite à l'état d éplortf blé dè mêndtéitë ; je demande donc lë f'etivoi des détails au dëpài*-' tement, parce que cela déb'è'Htï âDfdltëmëfrt des localités; ou bien aux muiiieipèÉlitèè, eh kftkri-dant que les départements soient orgaiii^i ,
L'Assemblée adopte la derhièrë partie Ue celte proposition.
L article 3 est adopté danâ la tëàëlif âulVàiïfe : « Art. 3. Les règlements pour-la nourfitlii-e ët pour l'emploi du travaillés Étfëhdfarrttè fà'lidëàée-ron t remis à la décision des départements,- et çri attendant leur formation, à celiëdëMibunlHip'Kiitéâ. » L'Assemblée renvoie le rëétë dti dtoïfe't â âori comité de mendicité pour êtrëî f8MU aaiïs lë* plan général du travail qiii lui sera prfeenté,
(Voy. annexé à la séance dë bé jblïï' iè plàn dU travail du comité de ttïêhàïcité). ;
: L'Asseniblée passe à son ordre du jour qiii est la suite des décrets à porter sur toutes, les parties des dépenses publiques.
Le premier rapport du comité de Constitution est relatif (itix bouts SttpértèhrêS èt juridictions diverses.
, rapjjjjrïMr. JJjS ç&i|r| èupëfiëtlfes et les juridiçtipns ç^vef'éé^ fBfrïieHt utlè pârtlë de depèuâë' qui s'éiè^e a fjlSt 740 livjPëà jaifjoùr-d'hui la ju^ticé Hp^Herii à là nàtibh, 6hât(iié tribunal a une section de la nation : les dépenses - des tribunaux assignés aux départements et aux districts seront a là cnai^ë cfë Cës administrations ; la législation fixera seulement la masse totale des dëpfèrises de céttë natui-e. L'intëfevëiitiôn du Trésor public ne ^ferait gu'unë dobiplication inutile; les officiers du ministère ptiblic serdflt réunis à la dépense des tribunaux...... Le comité des finances propose de rendre le décret suivant :
« L'Assemblée natiditëlë à décrété et décrète ce qui suit :
« Toqtes les dépenses des cours supérieures et juridictions diversesj. cbnhues Sous le nom de gagés dit conseil, .de supplément .de. gagesy traite-merlù, gratifications, pénsioiis attachées,à certaines places, attributions particulières]indewnitébyMe-nues Jiéêessités, chauffage,, frais .de bureau,-fr.ais de làgëment, frais de concierge, francs, s&lëi, seront retrâttchées de la dépensédu Trésor pubtybà.Jbonîp-ter du jour où lë nouvel ordre judiciaire Sera établi.»
(Gë dédret est mis aux voix et adopté.)
député dë Marseille, demande à interrompre quelques moments le travail da l'Assemblée pour lui rendre compte des nouvelles àr-rivéieè de Marseille: La parole lui- est accordée.
^pssieurs, j'ai partagé, vos inquiétudes surja, ville dfi Marseille;, je rp etp-presSg de vous fâirç part, des nouvelles,,satisfaisantes apportées par pu courrier extraordinaire arrivé cette nuit» Le décret par lequel vpps pvez ordcMjUéJa suspension de la démOiitiob ciT tade|ië Saint-Nicolas est paçyéPU À M^rsejlifi le 1erde£e mois. I«a municipalité en à fôit aussitôt la proclamation. C'est avec le plus grand respect.
ayec allégresse, avec un élan patriotique que les Marseillais ont obéi., J^maii aê^rët èi Contraire aux voëùic, d'Util ^àride 'dit® ti'st été jbluâpftfttip-tëmëijt fexeçbte'la dériîolitiôn à ëfé Stir-lë-ëhàmp abaMbnneéi.feife aVait ëfê bbrdêé & 18 partié du donjbri qui regardé, là Vîllë:. r -
Au fëste; yoifci lâ letfcrMe ÎS tâaniëlfiâliie dë Mar&itlé à ref députés a Pàri^ :
« Marséille, lë1!» jtriti l7§b. « Messieurs, nous avons reçu aujourd'hui le paquet envoyé par courrier; extraqrdiflaire; par le ministre; concernant l'hoQoë.urs dû
28 mai et .le décret.de,.l'Assamblée) nationale.de la, même date, qulonéoUne la jaessjilon ,4% H-dfr molition.de la citadelle Saint-IJicQfas»' Yop yër-. rez par les, pièces, incluse^ çombieu.nous nous sonlmes hâtë.S dë faire exécuter ce^déçrej;; . ,
« Nous pouvons vous assUrér* Mêssieur^»Jjue c'est avec te plus granL respect et ja jS^raissiibn la plus complète que les braves,,et „udèlçs.Marseillais ont obéi de suite* Jls .l'ont iajtayçfi des élans de patriotisme que l'an..Ue, saurait, dé(prjre, « Nous avons trouvé les mêmes sentiments iët la même obéissance au fort Saint-Jean, donUes travaux n'étaient pas avancés comme ceux dè la citadelle. ... ïll|§ÊÊÊÊÊIÉ
L'auguste Assemblée verra ,quç,n quelles 4 que soientsés décisions, ellfe peut.touiourscompteçÂur la plus prompte obéissance de la part des fidèles Marseillais^ vrais, atnis. de, la fionstitutioju cnioi qU'eo disént ses détracteurs; qu ils.apprenneples mieux juger et qu'ils sachent qu'aucune yij|e,du royaume n'est plus soumise que Marseille/à-.tout ! ce qui émanera des représeptant&Je ia.U^tiôn. Mais, fidèles aux prinjeipeg,.nous ne. (^onna^trôns de décrets que lorsqu'ils nous Seront énpppésRevêtus des formes constitutionnelles et JlQfl^4n'ob-tempérerons pas à des ordres ministériels, tels que le certifié véritable, signé : de lequel ce ministre voulait, nous faire, regarder comme Un décret du 12 mai> une copie informe, qui était son ouvrages „ Jvl ul , 3 i,» c
« Par notre lettre de cë matin t,nçjjs yous faj-sdns part de la tranquillité qui, règne, dans kcette ville ; par ceile-ci nous pouvons vous,assurer ftye le décret que nous avons reçm bien loin de.î'alté-rer, nous garantit qu'elle se^a plus solide et plus durable, puisque l'exécution en a été si promte ét si facile.
« Nous profitons du retoUr du même Courrierj que nous faisons partir encore ce iSoir pour vous faire parvenir, le plus tôt possibleÀotrii paquet. • :
« M. de SaintrPriest sera sans doute Surprix de ne pas recevoir notre réponse mais^ d^apf ès ja délibération du conseil générai de la.com.muhë, dont nous avons expédié extrait, nous ne gavons plus correspondre avec ce ministre- ,. , , ^ « Nous afons l'honneur d^ètre avee parfaite considération, etc. »
(Cette lettre et les pièces qui y sont jointes sont renvoyées au comité dëS fl^Orw.]
L'Assemblée revient à son ordre du. jow; A Le comité des finances propose un projét de décret sur les acquits-patents.
, rapporteur. Parmi, les .grâces qui étaient accordées, il y 'en avait,sbu^ Jaî^iQnijnà-tion d'acquits-patentsi Les aptqu\U-pa ^o h t une forme solennelle ét anciénqe ae gratiticatiort, distingués de ces grâces-pbscurès que surprenait la faveur. Sully ntç voulait receyqîf dêig^ces que par des acquits:pàtents, s enregistres, à, |a Chambre des comptes. Il en existe 50 de 3,000 Ht
vres chacun, attachés à divers offices et à divers départements. Quelques-uns doivent être mis au rang de pures grâces, d'autresentrent comme partie nécessaire dans le traitement. Lecomité propose de décréter que la dénomination d'acquits-patents et les fonds destinés à leur payement seront supprimés pour l'aveDir. 11 sera pourvu à des indemnités pour ceux qui feraient partie de traitement, s'il y a lieu.
Les acquits-patents étaient donnés à des premiers officiers de cours souveraines, à des premiers commis, à des ministres. Le traitement des ministres est fixé. Les acquits-patents sont pour les premiers commis des faveurs indépendantes de leur traitement, de véritables pensions ; la seconde partie du décret est donc inutile.
Le décret du comité des finances est mis aux voix et adopté en ces termes :
« L'Assemblée nationale a décrété et décrète:
« Que les acquits-patents seront supprimés, et qu'il sera statué, d'après le rapport du comité des pensions, sur ceux qui ont été ci-devant accordés. »
Le comité présente un nouveau projet de décret sur les dépenses portées dans le compte du Trésor public sous le nom de gages et traitements.
, rapporteur. Il s'agit maintenant des gages et traitements qui font partie des dépenses fixes. Nous les avons classés sous les titres respectifs :
De dette publique:
D'exploitation de ferme et régie;
De dons et gratifications;
De pensions ;
De commerce;
De liste civile;
De police des villes et municipalités.
Nous vous proposons de renvoyer les objets de la première classe à la dette publique, et le payement aux payeurs de l'hôtel de ville; : De renvoyer au fermes et régies le payement de ceux de la seconde;
De supprimer ceux de la troisième;
De renvoyer aux pensions ceux de la quatrième ;
Au comité de commerce ceux de la cinquième;
A la liste civile ceux de la sixième;
De supprimer de la dépense publique et renvoyer aux municipalités ceux de la septième.
L'Assemblée adopte la division, le renvoi et la suppression proposés. Elle rend le décret suivant :
« L'Assemblée nationale a décrété et décrète :
« Que les objets suivants, compris dans la première classe, seront portés à la dette publique, et payés par les payeurs de l'hôtel de ville :
Dette publique.
Arquebusiers de la ville de Rouen. ...
Compagnie de la cinquantaine de la même ville. . . .... .
Lieutenant et sous-lieutenantde Bordeaux.
Courtiers de Bordeaux........
Courtiers brevetés .
Courtiers brevetés du pays bordelais. . . .
2,057
1,542
.900
19,785 6,120
1,224
5 s. 18
Courtiers étrangers
régnicoles...... 288 I.
Officiers de l'hôtel-de ville de Paris. . . Guet de la ville de
Lyon........ 3,607
Huissiers, courtiers, agents de change de
Lyon........ 5,850
Contrôleurs des titres de la vicomté de Caen et Bayeux. . . . . . 222
Contrôleurs du bétail à pied fourché. . 648 Maire perpétuel de
Bordeaux...... 7,200
Viguiers de Languedoc. ....... . 3,910
Maître des ouvrages et voyer de Touraine. 25
Premier imprimeur du roi. ....... 202
Gardes de la ville de
Narbonne...... 9,000
« Qu'elle renvoie aux fermes et régies le paiement des objets suivants compris dans la seconde classe :
Exploitation de fermes ou régie.
Gardes des salines de Salins. . . . 1,697 1. Gardes des bois de Cypressac ... 11 « Que les objets compris dans la troisième classe et détaillés ci-après, seront supprimés :
Dons, gratifications.
Arbalestriers, archers, etc.,d'Amiens 421 Trois compagnies 156 livres à chacune, retenue de 10me.
Pensions.
Astier, ancien consul à Naples . . Arnoult, contrôleur de la maison du
roi............. .
Boulée, architecte du roi. . . Cardonne, ancien caissier des amo tisse me nts. . . . . . .... . .
Case, le jeune.........
Chabrol, lieutenant à Nîmes . . Chapelier, commissaire à Saint Germain-en-Laye . . . . . . .. . Cherin, généalogiste du roi. .
M. le prince de Conti.....
Cousin, prévôt à Saint-Germain-en
Lave . . . ...........
-Croismare...........
Comtesse de Framont, pour 10 ans
Gœsmay...........
Godefroy, garde des archives de 1 Chambre des comptes de Lille . . Inspecteur de la librairie étrangère De la Romaine de Rouen . . . . Veuve Léon de Tréveret .... Lacombe, inspecteur de la maré
chaussée . . .........
Mesnard de Chousy......
Legentil...........
Touvenel..........
1,500 1.
4,000 2,000
6,000 2,000 600
400. 5,000 50,000
400 3,000 1,500 , 2,000
3,000 3,000 450 1,000
2,000 10,000 1,400 6,000
Mauduit, expérience de l'électricité, t, 200 I. De Home . . ... ... . ... 2,400 Le Blond............ 6,000
Biçheron, pour collection anatomi-
que. . .............. 3,000
Andry, traitement de la rage. , . 1,200 Ramonet, chirurgien des eaux de Bugnières. ............ 400
Intendant des eaux de Bourbon et Vichv. .............. 540
Officiers de santé des ports de Vendre et Collioure.............534
Papillon, prévôt général de'la maréchaussée de l'Ile-de-France..... 1,500
Parent, ancien premier commis.. 5,200
Demoiselle Parent............... 800
Roger, ancien commis de la caisse
des amortissements............... 600
Saint-Far, pour projets d'ouvrages à
l'Hôtel-Dieu....................... 4,000
M. de Saint-Priest, ancien intendant
de Languedoc..............20,000
Secrétaires des départements de Norman die et des Trois-Evêchés. 7/..... 5,160
Séque'ville, secrétaire à ia suite des
ambassadeurs..................... 3,000
Treilhard, ancien secrétaire du duc
de Parme...................................3,000
Vacquette de la Mairie........... 800
Voisin..................................1,200
« Qu'elle renvoie au [comité de commerce les objets de la cinquième classe, dont suit la teneur :
Commerce.
Bertrand, consul à Naples......... 4,000 1.
Boyelet, député de Bayonne........ 4,000
ChambreducommercedelaRochelle. 2,000
Députés de la Rochelle...................5,340
Gromaive de la Bapaumerie, à la
douane.....................................500
Gages d'inspecteurs divers.. ....... 1,500
Inspecteurs de la généralité de Lyon. 600
Contrôleur....................... 900
Commis divers................... 620
Puy-Abry, chargé des affaires de la marine et du commerce à Madrid— 5,500 Peintre et dessinateur à Aubusson.. 3,400
Teinturier........................ 100
Marion, député du commerce...... 4,000
« Que les objets compris dans la sixième classe seront renvoyés à la liste civile :
Courrier du cabinet......................6,900 1.
Nogaret, placets présentés au roi.. 4,000 « Que les objets de la septième classe seront supprimés de la dépense publique, et renvoyés aux municipalités. Suit le détail de ces objets :
Police des villes.
Gardes-Françaises, sûreté de la foire Saint-Germain et Saint-Laurent. . . Dix-huit sergents, et autres dons
ordinaires.............
Castelan, chargé d'inspecter les périls imminents dans Paris . . . . . Masse, chargée de tuer les chiens
errants dans Versailles.......
Mouleurs de bois, supplément. . .
2,000 1.
900
500
150 4,800
Le comité des finances propose un décret spécial pour les dépenses de police de Paris.
, rapporteur. Viennent ensuite les dépenses de la police de Paris, celles de l'illumination de Paris à Versailles, du guet et de la garde de Paris, et du pavé de cette ville. Tous ces objets sont et doivent être désormais étrangers au Trésor public, et devenir des dépenses municipales. Sans doute, la police de la première ville de France, d'une ville dont nous devons désirer de faire la première ville de l'Europe, intéressera toujours le royaume entier. C'est par l'ordre qu'on y fera régner que les étrangers y seront attirés et y verseront des richesses qu'à son tour elle répandra dans le reste de l'Empire. Sous ce point de vue, elle mérite l'intérêt des provinces, et ce ne serait point de leur part une erreur de calcul de faire des sacrifices a sa prospérité. Mais c'est en économie sur ses dépenses, et c'est en diminution sur sa contribution que Paris doit trouver des compensations du fardeau dont il sera chargé. Le comité propose de décréter ce qui suit :
Premier décret.
« A compter du l8r janvier prochain, les dépenses de police de la ville de Paris, celles de son guet et garde, celles de son pavé, de son illumination, seront retranchées du compte du Trésor public et resteront à la charge de la municipalité. »
(Ce décret est mis aux voix et adopté.)
Le comité des finances propose un autre décret spécial sur les pensions des officiers et soldats de la garde de Paris. .
, rapporteur. II y a encore une dépense de pensions pour des services dans le guet et garde de Paris. Ce n'est point une dépense municipale. Le comité croit qu'elle doit être à la charge du Trésor public. Il propose d'en renvoyer l'examen au comité des pensions.
Ce renvoi est décrété ainsi qu'il suit :
Deuxième décret.
« Les pensions accordées aux officiers et soldats de la garde de Paris sont renvoyées à l'examen du comité des pensions. »
Le comité des finances propose un troisième décret concernant la maréchaussée de VIle-de-France.
, rapporteur. La maréchaussée de l'Ile-de-France n'est point dans le département de la guerre. Autrefois elle était en charges, et ce n'est que depuis 1780 qu'elle est sur le pied militaire. Plus nombreuse, plus chère et autrement constituée que les autres, elle pourrait, sous quelques rapports, être considérée comme un établissement municipal ; mais elle tient à la discipline de l'armée, elle veille sur les soldats et sur les déserteurs, et dans une ville immense ce service exige une grande activité. Son sort doit donc être subordonné à l'organisation militaire, et cette dépendance, dont la nature et les limites ne sont pas encore fixées, ne permet au comité des finances que des vues très vagues et mai assurées. L'incertitude sur le prix futur des loyers, des subsistances et des denrées de toute espèce ajoute encore à son indétermination.
Enfla, la ferme générale rapporte aujourd'hui une partie de la dépense de cet établissement, et si la ferme générale cessât dlâtre, ou que le§ gardes nationales, les municipalités fussent, comme elles devraient sans doute l'être, chargées de protéger la perception, celte dépense ret9W? berait tout entière sur le Trésor publie-
Ainsi, le popité ne peut prononcer peu d'absolu, ni sur les économies du mogiept, ni sur les économies futures. _
Il propose le renvpi de la constitution de la maréchaussée de ,rile-rderFranoe au camite militaire.
met aux voix le projet de décret qui est adopté en ces termes :
Troisième décret,
« L'organisation de la pméchaussée de l'Ile-de-France est renvoyée àû comité militaire. »
L'Assemblée va se retirer dans ses bureaux pour 'procéder à l'élection d'un nouveau président. 5 ' La séance est levée à deux heures et demie.
à la séance de l'Assemblée nationale du
PLAN DE TRAVAIL
DU COMITÉ POUR L'EXTINCTION DE LA MENDICITÉ(1)
présenté à l'Assemblée nationale, en conformité de son décret du
L'Assemblée nationale, voulant fonder sur les bases de la liberté, de Fégalité et de la justice, une Constitution sage, qui'promette aux générations présentes et futures la vraie grandeur, la véritable prospérité nationale, eelle qui naît du bonheur de chaque individu, a di ne négliger aucun de ses devoirs.
Pénétrée de cette éternelle vérité que le soin de veiller à la subsistance du pauvre n'est, pas, pour la constitution d'un empire, un devpir moins sacré que celui de veiller à la conservation de la propriété du riche, elle a voulu qui les droits de cette classe nombreuse, dont les besoins sont plus grands que les ressources, lussent particulièrement mis sous la protection nationale.
Amie des hommes et de l'humanité, elle a voulu connaître les causes de l'indigence, pour en
diminuer les effets, en secourir les malheurs prévenir les désordres. Dans cette gran an
Les député^ formant pe comité, fiers d§ l'honorable fonction dont ils sont revêtus', répondront, au moins par leur z^lê, à la cpnA^npe dej'^s-semhlée : aucun des moyens de secourijr l'huma-; nité malheureuse et souffrante ne serphlp (JgyQir être étranger à leurs recherches; mais connaissant l'importance et l'étëpdue de Ja gpandè question qu'ils sont chargés d'approfondir, ils n'su-blieront pas qu'ils parleqt à des IggisfôteÛFS ; que des pjpsures partielles ë.t momeptaflées pp doivent pas leur être proposée^ et que la sagesse prévoyante des décrets de l'Assemblée pationale, doit embrasser l'upiversajité des malheureux et la suite des générations.
C'est ainsi qu'ils ponçpivepî îeprg devoirs-
lis idoivent, en vertu, du décret du fi mars, faire connaître à l'Assemblée la marphe qu'ils se proposent de suivre dans leur travail, lui squ-mettrè la série des décrets qu'ils projettent de présenter à ses déiibératious; ils se hlteùt d?en déférer les principales bases à son examen, certains de trouver, dans son approbation qu dans sa censure, les moyens de Remplir aveg succès la t^che précieuse dont ils. .se. ionî gloire d'être chargés.
Tout homme a droit à sa subsistance.
Cette vérité fondamentale de toute société, et qui réclame impérieusement une place dans la déclaration des Droits dg l'hftfnme, a paru au CQjpité devoir être la base de tgute loi, de tftpte institution ppljtiqqp. q^j se fifoposç d'ilteinçjre la mepdiçité. Ainsi, chaque homme ayant droit à sa subsistance, la sppîpté doit pourvoir à la subsistance de tous ceux dé ses mepabres qui ppur~ ront en manquer, èt cet te secourable assistance ne qpit pas être -rëgarflge comme pu bienfait; el(e est, sans doute, lé besoin d'un gg^pr sensible et humain,* le vœu d£ tout hpmjng qpi pense, mais elle est ïp'devôir strict" et 'jndfspeflsaple de tout homme qui n'est pas lui-même ^ps I4 pauvreté; devoir qui ne dqit point %¥ll$* ni j?ar le nom, ni par Je caractère de Taupage; eqfin, elfe est pour la' spciétjé ùn§ detlfi jîivipigble et sarréê;
Pour donner à cette vérité tpqte sa force, il fjauf reconnaître que [e trayàii est |p p)pygu fié subsistance qui doit être donné P^uyre en étaj; de travailler : que le pauvre valide que le Vice éloignerait du travail n'a {Jpoi$ qu'à cg qu'il faut strictement de sulipistance pour que Ja sot4 ciété ne se rende pas, en la lui rerusant, coupable de sa mort; qu'enfin, les pauvres, invalides, ont droit à des secours complets ; car, s'il est du devoir exact et indispensable de tout homme en société de contribuer à la subsistance de celui qui ne peut gagner sa vie, toute contribution exigée pour Get objet par la société au delà de l'inaispensable nécessaire, devient une violation de la propriété et par conséquent une injustice.
Avant de .s arrêter à auPUn plan pour éteindre la mendicité, et pour diminuer la masse des pauvres, le comité a dû rechercher quelles étaient en France les causes principales de 1-indigence.
Si l'indigence n'est autre chose que la disproportion des besoin» avec les moyens de subsister, il èn résulte qu'elle esj, éneoar la disproportion des besoins avec les moyens de travail, et qu'en-
fin elle est la disproportion de la population d'un Etat, avec les moyens que cet Etat pept employer ou qu'il emploie pour là'soulager. Ainsi, un Etat qui a plus d'hqmmës à faire vivre que de gravail à leur donner, force à l'inaction les bras qu'il laisse sans emploi, les condamne à la misère, et, par une conséquence naturelle, impose sur les bras qui travaillent, les secours que d'une ma- v nière ou d'une autre, ij faut donner à l'indigence, et qui pèsent plus où moins sur tous les indivi-vidus de la société'qui ne sont pas indigents ; ^ enfin, par une 'potiséquence aussi positive, quoique plus éloignée, l'Etat dont ' la population est dans une disproportion plus grande avec ses moyens de travail, est celui qui au mal-être intérieur qu'il éprouve, ajoute,'d'une manière plus étendue, le mal politique d'enrichir à ses dépeiis les Etats voisins, puisqu'il est obligé de recevoir d'eux les denrées que son travail; ne peut fournir.
C'est ainsi que, majgré les assertions, sanst cesse répétées depuis vingt ans," de tous les écrivains politiques qui plapent la prospérité d'un Empire dans sa plus grande population, Une population excessive, sans un grand travail et sans des productions abondantes, ' serait, au contraire, une dévorante surcharge pour un Etat, car il faudrait alors que cette excessive population partageât les bepéfîçes' de celle qui, sans'elle, eût trouvé uné subsistance suffisante; il faudrait que la même somme' de travail fût abandonnée à une plus grande'quantité'bras ; il faudrait enfin nécessairement que le prix de ce travail baissât, par la plus grande cbnciirreriçe des travailleurs, d'où résulterait une indigence complète pour ceux qui ne trouveraient pas de travail; et une subsistance incomplète pour ceux mêmes auxquels il ne serait pas refuse.
Ainsi, pour que l'augmentation de population assure le bonheur d'un Etat, il faut qu'elle marche avec l'accroissement de travail, et la France ne se trouve pas aujourd'hui dans cette proportion.
Plusieurs de ses lois, telles que celle sur la milice, encourageaient le mariage, aucune n'encourageait le travail dans sa véritable^source ; aucune ne détruisait, ni Jes ordonnancés, ni les lois de finance, ni les mœurs, ni les préjugés dp pays, qui, par une influence pertaine, donnaient aux capitaux une autre direction que celle qui devait augmenter le travail. C'est ainsi que le royaume le plus capable par son étendue, par la fertilité et là variété de son sot, par l'activité ét l'industrie de ses habitants, de nourrir avec avantage une population beaucoup plus nombreuse que celle qui le charge à présent, qui' aurait pu en accroître infiniment sa force et ses ressources, trouve aujourd'hui, dans ce grand moyen de rir chesses, une surcharge qui répand la misère ou la gêne sur une masse de quatre à cinq millions d'hommes.
La disproportion de la population de la France avec le - travail quelle* lui fournit est donc la cause première et essentielle de l'indigence; et pour particulariser énepre plu^ cette vérité, l'état de l'agriculture en France est' la cause de cette pauvreté ; car l'agriculture est la première source de richesses d'un grahçt royaifme, par les bras qu'elle emploie, par les récoltes qu'elle fournit, et par l'aliment qu'elle donne àux~mapufactures et au commerce.
L'agriculture en France, malgré l'augmentation sensible des défrichements, depuis vingt-cinq ans, est dans un tel état d'infériorité, relativement à
ce qu'elle pourrait être et à ce qu'elle est chez nos voisins, que la totalité de ses produits comparés à ceux dë l'agriculture anglaise ne sont que dans la proportion de 3 à 8 (1), quoique dans quelques-unes de nos provinces la culture soit plus active et plus profitable que dans aucune partie de l'Angleterre; nous sommes Obljgés de tirer de l'étranger pour deux cents millions de denrées de né-cêssitêpremière (2). et cependant notre sol même médiocrement cultivé pourrait, èo satisfaisant pleinement nos besoins intérieurs, verser encore à l'étranger un irnmense superflu et quadrupler ra'ctiyité dé notrpuiain-d'œuvre : enfin la cqlture en Angleterre occupe,'dans une mëpaè'étendue de surface, beaucoup plus de bras qu'en France.
Ainsi, l'agriculture, portée au degré d'activité et d'amélioration qu'elle peut avoir chez nous, aurait la plus haute influence sur l'accroissement de là richesse publique, par la plus grande massé dë trayail qu'elle fournirait et par la plus" grande consommation qui résulterait et dU plus grand nombre de travailleurs et de leur meilleur salaire.
C'est donc d'un meilleur système de?" lofs,"qui encouragerait l'agriculture, que 'l'Etat "doit se promettre la diminution de la pauvreté. Il a dçpit d'attendre cet heureux effet de la Constitution nouvelle, qui, détruisant une grande partie des causes qui jusqU'ici s'opposait à l'àmélioratiqn de cette féconde" Source de richesses, doit répandrë en France la solide prospérité qui n^ît de l'augmentation des produits," des consommations, clés manufacturés etdu commerce. '
Ainsi, la liberté civile bien établie, les distinctions humiliantes entre les classes de
citoyéns détrUites, l'égalité des droits ouvrant à tous la carrière de la gloire et de
l'utiliie publique rapprocheront les hommes que tant de raisons d'intérêt tenaient éloignés,
les attacheront a leur pays par la jouissance d'une Constitution qui les rétt-c|rà
heureux,'donneront à cette jouissance une entière sécurité et contre la forcé'et contre les
envahissements de touté espèce; enfin, créeront un esprit publicj moyen 'e plus certain,!
pour unie grande nation, de l'accroissement de seè Richesses et de leur'plus Ufile
répartition. "
Matières fabriquées pour... 1.'. r 66,Qj3è,pÔ0
An total.......... 204,284,000 liv.
Sans compter le tapac çjpi coûte, eq Amérique, 9,0p0,00p livres d'achat, çt que 1% Fratiçe gçgd.uu*ait d'unè qualité aussi Bonne.
L'inégalité des impôts supprimés, les exceptions, les privilèges, les impositions arbitraires détruites, les moyens de considération et d'activité cessant d'être concentrés dans les villes, chacun sera appelé à l'habitation de la campagne. Les finances, qu'aucun désordre ne pourra plus atteindre, ne présentant plus à l'avidité des spéculateurs un placement spécieusement avantageux de fonds, dirigeront sur les terres avec plus de sûreté, d'honneur et de profit, l'emploi des capitaux. L'argent, ramené à un plus grand intérêt, donnera les moyens de faire des avances à l'agriculture, de prêter sur les terres pour les améliorations, les défrichements, et jamais d'aucun prêt ne pourra résulter autant d'avantagesI
Plus de fonds employés donneront plus de travail, ainsi moins de "pauvres ; une masse plus grande de travail employant plus de bras diminuera la concurrence parmi les travailleurs, ainsi un salaire plus convenable pour l'ouvrier. Sa condition s'améliorera encore par le besoin mutuel qu'ont les hommes les uns des autres, dans les pays où les places sont l'effet du choix, et où, par conséquent, les riches ont intérêt à élever les salaires.
De là, plus de moyens d'aisance pour l'ouvrier, et dans le moment présent et dans l'avenir ; plus de productions utiles tirées du sol ; plus d'aliments donnés aux manufactures et au commerce ; avec plus de productions territoriales à manufacturer, plus de consommateurs aisés; ainsi, plus de placements de nos produits sur nous-mêmes ; une masse plus grande d'échanges à proposer à l'étrànger et, par conséquent, un double profit pour notre industrie de cet heureux changement de position.
De là, plus de richesses, et, par un second effet bien sensible, une certitude plus affermie de la conservation de la liberté : car, il en faut convenir, un peuple peut rarement, quand il est pauvre, connaître d'autre condition que celle de la servitude : il ne peut avoir l'enthousiasme de la liberté quand il n'a rien à défendre, quand il lutte sans cesse contre le besoin, et qu'une inégalité monstrueuse des rangs et des fortunes ne lui fait connaître, dans les lots de la vie, d'autre partage que l'abjection et l'orgueil, que la misère et le luxe.
Enfin, de meilleures mœurs : la misère est la cause la plus commune des vices et des crimes de tous genres, puisqu'elle crée des besoins dans des âmes que éducation n'a pas dirigées et à qui tous les moyens de l'enseignement le plus simple ont été refusés; car, il est juste et consolant de le dire, les hommes ne sortent pas mauvais des mains de la nature.
Ainsi donc l'agriculture, recevant nécessairement de la nouvelle Constitution une activité considérable, augmentera la masse des ressources industrielles, détruira cette funeste disposition qui existe aujourd'hui entre le travail et les travailleurs ; enfin, par ses salutaires effets, attaquera la pauvreté dans sa source.
Mais, quelque indubitable que soit cette heureuse révolution dans notre richesse intérieure, le changement des mœurs, des idées, des habitudes, le déplacement des capitaux ne pouvant s'opérer dans un instant, son influence certaine ne pourra être complète que dans un certain nombre d'années : et le fût-elle dès à présent, le nombre des familles pauvres sera considérablement diminué, mais la pauvreté ne sera pas détruite. La pauvreté est une maladie inhérente à toutes les grandes sociétés ; une bonne constitution, une
administration sage peuvent diminuer son intensité, mais rien, malheureusement, ne peut la détruire radicalement: tant de causes concourent irrésistiblement à l'entretenir ! Car, sans parler des calamités qui, rendant des villages, des villes, des cantons, des provinces entières la proie de quelque dévastation passagère, portent l'indigence dans tous les lieux qu'elles attaquent, la privation de propriété pour une grande classe d'hommes sera toujours, dans quelque constitution que ce soit, un principe nécessaire et permanent de pauvreté. La plus grande activité même de l'insdustrie, moyen certain de la prospérité d'un Empire, contribue elle-même à perpétuer ce fléau. En livrant plus de bras au travail, elle use lçs forces d'un plus grand nombre d'hommes, et fournit ainsi à la classe des pauvres. Des corps soumis aux fatigues habituelles, sans une nouriture suffisante, deviennent bientôt infirmes. Il est encore des professions qui, abrégeant lesjoursdes hommes qui s'y livrent, commencent à les frapper de misère en les réduisant à l'impuissance de travailler. Il en est enfin, et ce sont celles qui servent le luxe, qui dépendant entièrement et de la fantaisie des gens aisés et de mille circonstances qui apportent une grande variété dans le travail, mettent des villes entières dans la continuelle alternative d'une grande activité, on d'une totale inertie, et forcent leurs habitants à recourir à l'aumône. Enfin, le nombre des pauvres, toujours dans une proportion très-considérable dans les villes, reçoit dans les hivers une augmentation plus forte, selon la dureté de la saison.
Voilà les causes malheureusement nécessaires d'une pauvreté toujours existante. Elles appellent avec toute la force du droit les secours de la société, mais elles servent bien aussi de prétexte à la paresse qui cherche à les usurper. L'effet des lois sages doit être de distinguer par le traitement, le vrai du faux, en secourant la pauvreté honnête et malheureuse, et réprimant Je vice qui, pouvant faire disparaître par le travail ses besoins, s'ils existent, vient enlever la subsistance du véritable pauvre, et grossir la classe des vagabonds.
Des législateurs doivent se prémunir contre des mouvements si naturels et si doux d'une sensibilité trop facile. Ils doivent n'être que justes. Accorder des secours au delà des vrais besoins, c'est jen charger la société d'une contribution excessive ou ne soulager qu'imparfaitement l'indigence sans ressources ; les secours donnés à la pauvreté ne doivent pas devenir des primes pour la paresse, la débauche ou l'imprévoyance. On ne peut se dissimuler que si les établissements des pauvres ne spnt pas le résultat d'une législation à la fois humaine et sévère, le nombre de ceux qu'ils auront à soulager s'accroîtra à l'infini. Les aumônes qui se font en distribution dans certaines villes, dans certains monastères, nous en offrent un exemple journalier. L'Angleterre en présente un plus frappant encore ; ses établissements pour les pauvres, fondés sur les principes de prévoyance et d'humanité, n'ont pas été dirigés par cette sévérité, qui, cependant, est un caractère essentiel de la justice quand il s'agit d'ordonner des impositions. Aussi la taxe des pauvres qui, en 1680, ne s'élevait qu'à 15,000,000 de nos livres, s'élève aujourd'hui à près de 60, et donne encore à ceux qui la paient la crainte d'une augmentation dont ils voient la nécessité.
Du travail en abondance à tous ceux qui peuvent travailler, voilà ce que doit la société. Un
homme sain et robuste qui n'a que ses bras pour subsister, est pauvre ; mais il n'est pas misérable lorsque les moyens de travail lui sont fournis. Si le travail lui manque, il tombe dans la misère et de la misère au désespoir, il n'est qu'un pas, comme du désespoir au crime.
Le devoir de la société est donc de chercher à prévenir la misère, de la secourir, d'offrir du travail à ceux auxquels il est nécessaire pour vivre, de les y forcer s'ils s'y refusent, entin d'assister sans travail ceux à qui l'âge ou les infirmités ôlent tout moyen de s'y livrer.
Telle est la première division que le Comité a cru devoir faire dans son plan, et tel est le sens qu'il a donné à cet axiome politique que tout homme a droit à sa subsistance, et à cette vérité également incontestable, que la mendicité n'est un délit que pour celui qui la préfère au travail.
Ainsi, première division. Les véritables pauvres, c'est-à-dire ceux qui,sanspropriétéet sans ressources, veulent acquérirleursubsistanceparletravail; ceux auxquels l'âge ne permet pas encore ou ne permet plus de travailler; enfin ceux qui sont condamnés à une inaction durable, par la nature de leurs infirmités, ou à une inaction momentanée par des maladies passagères.
' Seconde division. Les màuvais pauvres, c'est-à-dire cèux qui, connus sous le nom de man-diants de profession et de vagabonds, se refusent à tout travail, troublent l'ordre public, sont un lléau dans la société et appelent sa juste sévé-rité.
Ces deux grandes divisions ont tracé au comité la marche qu'il devait suivre. 11 lui a paru qu'il devait considérer le pauvre dans les différents âges et dans les différentes circonstances dé la vie.
Les enfants, qui ont droit à l'assistance de la société, semblent devoir être l'objet de ses premières méditations.
De ce nombre sont les enfants naturels, fruit du libertinage ; les enfants légitimes clandestinement exposés par la misère du peuple ; enfin les enfants étrangers introduits dans le royaume.
Malgré la bienfaisante prévoyante du gouvernement qui, depuis dix ans, a donné au sort de ces malheureux enfants une attention plus sérieuse qu'ils n'avaient jamais pu en obtenir, le calcul de leur mortalité est effrayant.
Le premier soin du comité sera d'en interroger les causes, et de s'occuper des moyens de les affaiblir.
Il suivra ces êtres infortunés dans tous les instants de leur première vie. Nourriture, habitation, éducation, tous les moyens d'arracher à la misère ces malheureux qui y semblaient dévoués, de les rendre utiles à l'État, sous la tutelle de qui ils doivent être placés, seront recherchés par le comité ; il examinera si, confiés aux soins des municipalités des campagnes, ils ne pourraient pas être utilement affranchis de la chaîne qui les lie aujourd'hui à la lente servitude des hôpitaux ou ils sont préparés à l'inertie et à la mendicité.
Enfin, il examinera toutes les lois relatives à ce genre d'administration, en fera connaître les vices, y proposera des réformes ; il présentera un aperçu probable du nombre infini de ces enfants âbandounés par leurs mères ; et si les connaissances particulières qu'il acquerra dans ces intéressantes recherches peuvent lui fournir des vues nouvelles sur les moyens de le diminuer, il se hâtera de les communiquer au comité de
Constitution et se flattera d'avoir ainsi coopéré à une des lois les plus importantes sous le double rapport de politique et de morale.
Passant ensuite à la pauvreté, considérée dans l'âge viril, le comité, fidèle à ses principes, et convaincu que là pauvreté s'éteint par la propriété et se soulage par le travail, examinera s'il ne doit pas proposera l'Assemblée dessaisir la circonstance actuelle pour augmenter le nombre des propriétaires en ordonnant que la partie des biens domaniaux et ecclésiastiques dont la nation projette l'aliénation soit vendue en très petits lots, suffisants cependant pour faire vivre une famille de cultivateurs et mis ainsi à la portée d'un plus grand nombre d'acquéreurs. Il tâchera d'indiquer des mesures propres à faciliter encore ces acquisitions, sans compromettre la propriété nationale. . ,
Les défrichements, l'amélioration des communes, la plantation des bois, le déssèchement des marais, les travaux des routes, offriront sans doute les moyens de fournir utilement pour l'État un suffisant salaire à celui qui voudra travailler. Le comité examinera si indépendamment de ce3 travaux des champs et sans leur nuire, des ouvrages sédentaires ne pourraient pas être établis avec avantage,soit pour les femmes seulement, soif même pour les hommes au retour de leurs travaux champêtres, ou dans les saisons mortes pour l'agriculture. L'exemple d'une grande partie de la Normandie, de la Picardie, de la Franche-Comté et de plusieurs autres provinces de France, qui allient heureusement cette double espèce de travail, peut s'attacher à cette idée : on sait encorè que l'extension prodigieuse du commerce de laine en Angleterre, dépendant sans doute de l'excellent état de son agriculture, est due au travail des pauvres ; enfin le comité cherchera à connaître tous les moyens de combattre l'indigence par le travail.
Mais les hommes laborieux, avec constance et courage, sont sujets à des maladies passagères et à des infirmités constantes qui les privent, ou momentanément, ou pour toujours de la faculté de gagner leur vie; ils deviennent vieux.
Le comité s'occupera de présenter à l'Assemblée des vues sur la meilleure combinaison des secours qu'ils peuvent recevoir.
Il examinera si la manière d'assister les pauvres malades peut être utilement la même dans la ville et daus les campagnes.
Si dans les campagnes il ne serait pas utile d'établir des chirurgiens habiles et des sages-femmes instruites, aux soins de qui les pauvres d'un certain nombre de villages seraient confiés, de manière que ceux qui sont sans ressources soient assurés de trouver une assistance gratuite, et que les chirurgiens et les sages-femmes ne soient pas obligés dé donner les mêmes soins sans récompenses à ceux en état de les payer.
Si les Hôtels-Dieu réservés pour les villes, ne doivent pas généralement être appelés à un système commua d'administration; dans quelle proportion ils doivent être établis relativement à la population qu'ils doivent servir ; quelle plus juste mesure de malades ils doivent contenir pour réunir la plus grande probabilité de la guérison avec la plus grande économie, quels règlements bien combinés pourraient détruire les vices si multipliés dans la gestion des biens des hôpitaux, dans l'obscurité de leur comptabilité, dans le despotisme de leur administration.
Il fera connaître quels agents pourraient être employés avec plus de succès et d'économie au
service des malades. Il proposera les moyens de ramener l'Ordre par un même régime, par une même'réglé,1 par une même comptabilité, d'arrêter ainsi les déprédations ouf les erreurs dés anciennes administrations, et d'attaquer victorieusement les'abus qui se sont multipliés en foule ddns ces établissements dé bienfaisance que la saintetê dè leur institution semblait devoir en* prëserver.
Pértant ensuite ses vues sur les pauvres infirmes ou vieux,il examinera s'il n'e'st pas préférable que ceux qui peuvent avoir quelque douceur dfes soins de leur familïé, reçoivent dans leurs maisons lés secours dus par l'htatâ leurs infirmitéè; si'dés hospices simples,' dirigés sur des principes particuliers et 'conformes aux' grandes vues du bien public, nef devraient pas être établis dàns lès1 campagnes pour servir d'àsiîe aux cultivateurs, aux ouvriers dont l'âge et le. travail ont dêtruit les forces,- et qui, restant sans famille, ont besoin de toute espèce dë'secours. Enfin le comité n'oubliant pas que la véritable bienfaisance doit dans l'assistance des citoyens mal-heureux» chercher lés moyens de ménager leur délicatesse, examinera s'il ne serait paspossibie de préparer des retraites pour ceux1 qui, n'étant pas dans lâ plUs extrême misère, doivent cependant être secourus dans une partie'de leurs besoins, et pourraient dé leurs deniers contribuer à une partie1 de leurs dépenses. Pëut-être l'augmentation de salaire qui doit, ainsi qu'il a été dit, résulter,' pour les ouvriers, du nouvel ordre de choses, leur donnera-t-elle le moyen de faire daas des temps d'abôndaiice de petites économies dont il^ trouveraient'ainsi l'avantage à la fin'de leuf vie. On ne connaît pas encore en France à quel point de très petites sommes placées longtemps' d'avance ' offrent, par la combinaison réutiie déia cumulation des intérêts et de toutes les chances; dé probabilité, d'utiles ressources à ceux qui veulent sè lés ménager ; et néanmoins, il1 n'est aucun pays oU plus de fortunes soient risquées aux hasards improbables des loteries, source cependant bien reconnue de ruiné et de corruption.
Sans doute, ces établissements si communs en Hollande, et dont lâ commodité est en proportion dés mises qui les préparent, se formeront-d'eux-mêmes en France par le simple calcul des avantages qu'ils pourront produire ; mais peut-êttfe l'Assemblée jugera-t-elle qu'ils doivent être provoqués par la nation, pour la clàssé des journaliers qui, se devant ainsi à eux-mêmes la totalité oU'1 une partie de leur bien-être, seront excités, dans le courant de leur vie, à une économie qni tournera au soulagement de l'État.
Cette vue, si elfe n'est pas chimérique, peut être1 grandement utile sous plusieurs rapports, et porter une heureuse influence sur les mœurs des habitants de la campagne.
La deuxième division du travail du comité, devant avoir pour objet les mauvais pauvres, né-essitera encore une subdivision. 1° Les pauvres ayant domicile, se refusant au travail et mendiant ;
Les races entières de vagabonds qui, sans domicile, sans état, sans famille; propagent, avec des femmes qu'ils prennent'et quittent tour à tour, et avec1 des enfants que, souvent encore, ils* enlèvent dans lès villages , là plus dangereuse mendicité, réunissent tous les vices, font l'effroi des campagnes, menacent et attaquent toutes les propriétés, et sont, si l'on peut s'expri-
mer ainsi, la véritable école des scélérats et des voleurs de grands chemius.
Le moyen le plus efficace d'arrêter la première espèce de mendicité est de fixer, dans lés lieux dé leur naissance, lès pauvres qUi ont besoin d& ; secours. Le travail quUls y trouveront doit étein-; dre cette mendicité, au moins la rendre sans excuses, par conséquent répréhensible.
Le comité examinera quels moyens justes et doux peuvent être employés pour établir cet ordre; si,dàns les premiers moments de ces éta~ blissements, les pauvres seront renvoyés dans les lieux de leUr naissance, ou s'ils seront seulement contraints à choisir un domicile ; si les munidi^ palités seront obligées d'admettre,«parmi les habitants deleur paroisse, ceux qu'Un calcul d'intérêt y fixera sans aucun autre droit, et quels moyens extraordinaires pourront être fournis à. ces municipalités pour subvenir à leurs besoins,, qu'une inégale répartition des pauvres rendait quelquefois hors dé proportion avec lës vérita-blés devoirs de chaque communauté.
Si l'Assemblée, après avoir pourvu aux moyens de fournir du travail aux. pauvres> auxquels il sera nécessaire ppur subsister, porté une loi qui défende la mendicité et qui concentre les secours dus à chacun dans le lieu de sa naissance, elle devra pourvoir aux moyens qui l'y retiendront.
Le comité, cherchant à appuyer son opinion de l'expérience des nations qui ont donné le plus d'attention à la législation des pauvres, présentera à l'Assemblée dés vues sur l'établissement des maisons dé correction, sur les détails de leur j police, de leur économie, sur le genre de travail I à y introduire, sur la manière dé lier l'àméliora-! tioh du sort nés détenus à une plus grande assiduité de travail, sur les adoucissements graduels | qU'ils pourront éprouver, et selon leur caractère | connu, et selon la récidive de leur délit social.
Cés asiles, passagers pour les pauvres domici-| liés qui seront trouvés mendiant hors des lieux ; chargés-de leur subsistance, ne devront-ils pas1 ; être des maisons d'une plus longue détention ! pour les vagabonds, les gens sans aveu, ceux, , enfin dont là mendicité est un état, et qui ne peuvent plus en prendre un autre. Ne pourraient-« ils pas être employés aux traitements de certaines maladies qui semblent ne dévoir pas être .reçues aux Hôtels-Dieu? Ne pourraient-ils pas [recevoir des filles enceintes sans ressources, et' sauver ainsi à l'Etat la vie de beaucoup, de mères et de plus d'enfants encore?
Le comité présentera sur tous cés objets un travail qui, s il répond à l'idée qu'il s'en fait, pourra être, pour le royaume, d'une grande, utilité.
Mais lâ législation nouvelle doit, dans l'établissement de ces maisons de correction, éviter les inconvénients des dépôts actuels dé mendicité, et par lesquels, par exemple, les hommes dété^ nus pour cause de vagabondage, sans domicile, sans état, sans argent, étaient rejetés dans la masse de lâ société, parce qu'ils,devaient faire, plâce à d'autres, et y reportaient les mêmes dispositions et la même nécessité du vice qui lés avait fait arrêter.
Sans doute, parmi les vagabonds, il peut en exister qùe la réflexion , que la retraite, que le travail amendant, et qui pourraient rentrer dans la société utilement pour elle. On peut même assurer qu'une paternelle administration fera, pour beaucoup dé détenus? dé ces maisons dé correction, de véritables lieux, d'amélioration ; mais il ne faut pas doutér aUssi qu'il n'y en ait'
d'incorrigibles. Il faut dooc pourvoir à leur sort ultérieur, car ils ne peuvent rester toujours enfermés y il faut même que ces maisons s'en débarrassent pour pouvoir recevoir les nouveaux venus que les événements de tous les jours y amène et
Le comité' aura à examiner! s'il est un autre moyen de servir toutes ces vues que celui d'une transportation dans des contrées étrangères;, si un téi parti, soulageant les: administrations de charité d'un fardeau qu'elles ne pourront pas supporter, ne préserverait pas la société des maux qu'elle doit craindre de là communication de cette race dévouée par nécessité au vice, et s'ilsne pourront pas. présénter encore, dans l'établissement d'une colonie, un avantage important pour le royaume, sous le rapport social, politique et commercial.
Peutrêtre l'exécution de cette idée présenterait-elle encore le grand bien de faire cesser en Europe la peine du bannissement, par laquelle les Etats , chassent hors de leurs limites les hommes que lai justice a flétri, infectent de leurs vices les Etats voisins, et font ainsi un continuel échange de. la .lie de leurs habitants.
Lei comité méditera profondément cette idée* cherchera les moyens de son exécution, tant pour le lieu d'établissement , que pour les précautions qui devront le précéder excelles dont il devra être accompagné.
Enfin* il appartient au Comité de s'occuper des prisons,, et .comme lieu.où l'humanité souffrante réclame et peut recevoir; des soulagements, et comme sources elles-mêmes* de la, mendicité ; car combien d'hommes en sortent inca* pables de se livrer au travail par les infirmités qu'ils y ont. prises et par l'habitude qu'ils y ont contractée; d'une iner,tier complète.
Que les hommes enfermés dans; les prisons y soient détenus ou dans: l'intention de les ra.r mener par la retraite et .la réflexion à une meilleure conduite, ou pour servir de caution à leurs créanciers, ou pour se. présenter à l'instruction d'un procès criminel, même pour attendre l'exécution d'un jugement capital ; toujours est-il que la prison n'est, pour tous, qu'Un lieu de passage ; que la société, qui n'a besoin que de leur détention, ne veut et ne peut vouloir' qu'elle leur soit douloureuse; qu'il est dans le principe exact de la justice qu'ils éprouvent dans ces prisons toute la douceur compatible avec la nécessité et la sûreté de leur détention ; qu'enfin les lois doivent faire respecter l'humanité, même quand elles ordonnent la punition, et ne jamais souffrir qu'elle soit dégradée par un traitement avilissant.
Ces vérités serviront de guide au comité dans les projets qu'il soumettra aux délibérations de l'Assemblée, et qui doivent embrasser la salubrité des prisons, leur police, les précautions nécessaires pour éviter la contagion des vices, comme celle des maladies, et les moyens de rappeler au bien les prisonniers par les soins d-une piété éclairée, par dés conseils salutaires, par de sages consolations* par l'amour du travail.
Le comité trouvera les moyens dé remplir dignement cette partie de son travail dans le livre de l'immortel Howard, de cet Anglais célèbre à jamais par l'emploi entier qu'il a fait d'un grand génie au seul soulagement de l'humanité dans les fers; qui ne voyageant dans tous les Etats de l'Europe que pour visiter les prisons, nous a laissé la connaissance de là situation de toutes, avec les fconseils pour les-perfec-
tionner, et, des principes généraux applicables dans- toutes lés parties du monde, entia de cet homme excellent que son amour infatigable pour l'humanité a rendu l'ami, le concitoyen dé tous les hommes sensibles et pensants,- et que l'admiration , la reconnaissance et les regrets: de toute l'espèce humaine suivent dans> son tombeau.
La partie de l'éducation qui, ayant pour objet l'enfance des campagnes, a une positive influence sur l'amour du travail, et par conséquent sur les moyens d'éloigner la mendicité, apparu tiendrait encore au i comité; si faisant partie du grand ensemble de l'éducation nationale elle ne devait pas être comprise dans le travail du-Ce-mité de Constitution.
Tel est le plan que le comité, pour l'extinction' de la mendicité, a cru devoir se former de son travail ; il le complétera j en présentant à l'As*-semblée les moyens de fournir aux dépenses qu'il entraîne. L'examen quïïl a fait des taxes' pour les pauvres, et leur conséquence dans les Etats où elles sont établies, l'a pénétré de l'inconvénient d'une imposition sur' les biens oui sur les fortunes, particulièrement appliquée aw soulagement de la pauvreté. Il a la consolante' espérance qu'aucun secours nouveau ne sera; nécessaire pour remplir toutes les vues* dont» il a présenté l'esquisse, el que la réunion de la partie des biens ecclésiastiques, nommément destinés aux aumônes, des biens des hôpitaux et des hospices, des quêtes faites dans les paroisses, des sommes affectées sous l'ancien, régime aux tra>~ vaux de charité, au» secours pour les hôpitaux,, aux dépenses variahles dans les provinces, aux Enfants trouvés; enfin, de celles destinées à la destruction du vagabondage, etc., etc., fournira-une somme qui, bien administrée, suffira à tous les besoins des pauvres et remplira, dans cette partie, tous les devoirs de l'État.
Une comptabilité de ces fonds bien éclairée, dans chaque département, district et municipalité, sera le premier, le plus sûr moyen de donner à cette administration la perfection dont elle est susceptible, et cette publicité, appelant la confiance de toutes les âmes bienfaisantes, augmentera beaucoup encore, par les dons particuliers, le trésor des pauvres. La somme des charités individuellement faites est immense; elle ne pourra qu'augmenter en recevant un emploi plus complet eti plus authentiques Enfin, la nation française; si distinguée dans-tous les siècles1 par la noblesse de ses sentiments, ne sera pas; sous une Constitution heureuse et libre, moins généreuse que la nation anglaise qui, par des souscriptions volontaires et annuellement renouvelées, soutient les plus grands établissements de charité dont la seule dotation n'est qu'une1, bienfaisance qui, à la vérité* ne, se dément jamais*
L'Assemblée* nationale, par l'éxposé du plan du comité, peut, à présent juger de l'étendue de son travail. Déjà,iLrassemble tous les matériaux qui peuvent lui en faciliter l'exécution ; il avance ses recherches dans toutes les branches de ce travail ; il prend, et dans les pays étrangers et dans les différentes parties de la France, tous les renseignements dont il espère de l'utilité; il interroge les anciens administrateurs; il fouille dans les archives du gouvernement ; il sollicite : des connaissances sur les fortunes des hôpitaux,, sur les biens destinés aux pauvres et dont i'em» ploi a pu être détourné' de cette respectable destination; il observe, compare et s'éclaire de
toutes les lumières qu'il peut réunir ; il a même associé à son travail plusieurs citoyens recom-mandables par leur expérience dans diverses branches de l'administration, et par leur amour pour les pauvres (1); il invite tous les amis de l'humanité à devenir ses coopérateurs, son ouvrage appartient à tous les hommes ; déjà même plusieurs parties du travail qu'il s'est imposé avancent vers leur fin, mais il n'ose se flatter que l'universalité des renseignements indispensables pour faire un travail complet puisse lui parvenir avant la fin de cette législature; il est même disposé à penser qu'un travail de cette espèce ne peut recevoir la perfection dont il est susceptible que des Observations des assemblées de départements, et que leur approbation peut seule en assurer le succès.
Mais si le complément du travail ne peut avoir lieu qu'à la prochaine législature, toujours est-il vrai que l'ensemble des vues qui peuvent éteindre la mendicité doit recevoir, dès la session présente, l'approbation de l'Assemblée nationale; que plusieurs décrets préparatoires, et d'une grande importance, semblent devoir être prononcés incessamment, et que diverses branches essentielles de l'administration des pauvres, vicieuses aujourd'hui et incomplètes, appellent, dès à présent, la réforme et peuvent, sans nuire à l'ensemble, être rétablies dans un ordre nécessaire et essentiellement utile.
De ce nombre sont les enfants trouvés, les prisons, les maisons de correction, l'établissement des chirurgiens et sages-femmes dans les campagnes, la loi relative à la vente en petites parties aes biens domaniaux et ecclésiastiques.
Le comité se propose de les présenter à la délibération de l'Assemblée nationale quand elle voudra l'entendre.
Séance du
, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier, dimanche.
, rapporteur du comité de mendicité, demande et obtient la ptrole sur Je procès-verbal.
Messieurs, dit-il, le comité m'a chargé de vous proposer un changement dans la rédaction de
l'article 3, décrété dans la séance d'hier. Il consiste à ajouter le mot provisoirement au
texte adopté, afin que vous ne soyez point liés lorsque nous aurons à vous soumettre un plan
d'ensemble.
« Art. 3. Les règlements pour la nourriture et « pour l'emploi du produit du travail des men-« diants valides détenus seront provisoirement « remis à la décision des départements, et, en at-« tendant leur formation, à celle des municipa-« lités. »
Je propose de renvoyer tout de suite à la sanction les trois articles décrétés.
La matière n'est pas assez urgente pour cela et le comité, dont je suis membre, pense qu'il est préférable de présenter à la sanction tous les articles collectivement, lorsqu'ils auront été décrétés.
, rapporteur du comité dèS finances, dit que dans le décret rendu hier sur la demande de la communauté de Ghamplitte, la partie concernant la caisse et l'administrateur général des domaines et bois de la province dè Franche-Comté, doit subir un changement de rédaction et il propose la suivante :
« L'Assemblée nationale décrète pareillement « que tous dépositaires du prix des domaines et « bois, même les anciens receveurs généraux « des domaines et bois, supprimés en 1777, leurs « héritiers ou représentants, tant pour le quart « de réserve des communautés ecclésiastiques « que des communautés laïques, seront tenus de « verser dans les caisses des receveurs des dis-« tricts, sur les demandes qui leur en seront « faites par les directoires des départements, les « sommes provenues des ventes de bois des com-« munautéâ qui sont en leur possession, leste quelles sommes ne seront employées par les « municipalités que d'après la destination qui en « sera faite par lesdits directoires de départe-« ment, de l'avis du directoire du district, pré-« cédé de la délibération du conseil général des « municipalités. »
(Cette nouvelle rédaction est mise aux voix et décrétée.)
La ville de La Flèche, chef-lieu de district du département de la Sarthe, demandé à. acquérir pour deux millions de biens nationaux suivant le mode prescrit par les décrets de l'Assemblée nationale.
La ville de Valence fait une soumission d'acquérir pour trois millions de biens nationaux.
fait lire l'état qu'il a reçu des expéditions en parchemin des lettres patentes et proclamations sur les décrets de l'Assemblée nationale, pour être déposé dans ses archives, ainsi qu'il suit :
Expéditions en parchemin, pour être déposées dans, les archives de l'Assemblée nationale :
« 1° De lettres pateutessur le décret du 8 mai, concernant la confection des rôles des impositions en Bigorre;
« 2° Do lettres patentes sur le décret du 15, concernant l'abolition du droit de triage et la propriété des bois, pâturages, marais vacants, terres vaines et vagues;
« 3° De lettres patentes sur le décret d i 17, concernant la contribution de la somme de 3,000 livres à lever dans la ville de Saint-Yrieix;
« 4° De lettres patientes sur le décret du même jour, concernant la contribution de 6,000 livres à lever dans la ville d'Evreux; « 5° De lettres patentes sur le décret du même
jour, concernant la contribution de la somme de 1,500 livres à lever en la présente année, et de pareille somme de 1,500 livres en 1791, dans la communauté de Saint-Nicolas-de-la-Grave;
« 6° De lettres patentes sur le décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de Conflans, en Bassigny, à toucher du caissier de Neufchàteau une somme de 84 livres, et une autre de 200 livres déposées chez le receveur des domaines et bois de Nancy;
« 7° De lettres patentes sur le décret du même jour, concernant la contribution de la somme de 2,400 livres à lever dans la communauté de Se-gonzac;
; « 8° D'une proclamation sur le décret du même jour, rendu à l'occasion du meurtre commis sur la personne du sieur de Voisins, à Valence; . « 9° De lettres patentes sur le décret du même jour, portant qu'il sera imposé en la ville de Noyon une somme de 800 livres en sus de la ca-pitation, sur tous ceux cotisés au-dessous de 2 livres ;
« 10° D'une proclamation sur le décret du 18, pour le maintien du calme et de la tranquillité dans les départements du Haut et Bas-Rlrin ; i « 11° De lettres patentes sur le décret du 20, qui autorise la municipalité de Joigny à prélever la somme de 8,000 livres sur le produit de l'imposition supplétive des six derniers mois de 1789, et à vendre par anticipation une coupe ordinaire de 60 arpents de bois;
« 12° De lettres patentes sur le décret du 21, portant que les droits ci-devant établis dans la ville de Cambrai et Gambrésis, continueront d'être perçus, sans aucune exemption personnelle pour les ci-devant privilégiés ;
« 13° De lettres patentes sur le décret du 22, qui autorise une imposition de 6,000 livres, en deux ans, sur tous les contribuables de la ville d'Alby qui payent 12 livres d'imposition et au-dessus ;
« 14° De lettres patentes sur le décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de Gaen à faire un emprunt de40,000 livres;
« 15° De lettres patentes sur le décret du même jour, qui permet l'imposition en trois ans, sur les habitants de Béalmont taxés à 2 livres de capita-tion et au dessus, de 3.000 livres;
« 16 Dé lettres patentes sur le décret du 24, qui proroge jusqu'au 15 août prochain le terme fixé pour la conversion des billets de ia.Caisse d'escompte en assignats ;
« 17° De lettres patentes sur le décret du 25, concernant la confection des rôles d'imposition de la présente année, et la vérification et la rectification des inégalités, erreurs ou doubles emplois qui auraient eu lieu dans ia répartition entre les municipalités ;
« 18° D'une proclamation sur le décret du 27, qui approuve le nouveau régime provisoire .donné à la garde nationale de Meaux ;
« 19° D'une proclamation sur le décret du même jour, qui déclare nulle l'élection des officiers municipaux de Saint-Jean-d'Angely, et ordonne qu'il sera procédé à une nouvelle ;
« 20° De lettres patentes sur le décret du 28, concernant les assemblées électorales ;
« 21° D'une proclamation sur le décret du même jour, portant que les citoyens actifs de Boulogne, en Gomminges, et ceux du hameau de Li-lhette seront convoqués dans ladite ville de Boulogne, pour y élire une municipalité;
« 22° D'une proclamation sur le décret du même jour, portant que la première assemblée du département de Saône-et-Loire se tiendra provisoi- rement à Mâcon, et que les électeurs se réuniront dans un des chefs-lieux de district autre que Ghâlons et Mâcon;
« 23° D'une proclamation sur le décret du 29, concernant l'emprisonnement du sieur de Martinet, à Brest;
« 24° D'une proclamation sur le décret du même jour, qui déclare nulles les élections faites des sieurs de Franqueville, d'Ivielle et Bruneau de Beaumetz, dans l'assemblée primaire tenue à Douai, et ordonne que cette assemblée se réunira de nouveau pour procéder à de nouvelles élections;
« 25° D'une proclamation sur le décret du 31, relatif à la détention, à Valence, de trois officiers du régiment de Grenoble, artillerie;
« 26° Et enfin d'une proclamation sur le décret du 30, concernant l'ancienne milice bourgeoise de Sedan. »
Un de MM. les secrétaires fait lecture d'une note remise au bureau, et signée de M. Thibault, curé de Souppes, président du comité de vérification ; elle est conçue à peu près en ces termes : « MM. de Saint-Sauveur, évêque de Bazas, et de Piis ayant donné leur démission, les pouvoirs de MM. César et Constantin de Faucher ont été examinés par le comité de vérification et trouvés valables. »
L'Assemblée les admet à prêter, comme députés, le serment civique.
Les deux frères paraissent à ia tribune, l'un d'eux prononce la formule à haute voix : il font ensemble le serment.
Ce tableau intéressant excite les applaudissements de la majeure partie de l'Assemblée.
, député de Bazas, demande à contester l'élection de MM. de Faucher.
Cette discussion est ajournée jusqu'à l'arrivée de M.Thibault, curé de Souppes, président du comité de vérification.
, député suppléant de Meaux, dont les pou voirs ont été vérifiés, est admis en remplacement de M. d'Aguesseau, démissionnaire.
annonce que Vordre du jour appelle la suite de. la délibération sur Vorganisation du clergé. 11 rappelle que les articles l, 2 et 3 ont été adoptés dans la séance du 2 juin (1).
, rapporteur, donne lecture de l'ancien article 6, qui deviendra le 4e du décret; cet article est adopté sans discussion ainsi qu'il suit :
« Art. 4. Usera annexé au présent décret un état des évêchés éteints ou conservés, ensemble des évêchés qui seront attaches à chaque métropole. »
, rapporteur. Par vos précédents décrets vous avez décidé qu'il y aurait un évêché par département, et qu'il serait établi autant de métropoles qu'il serait jugé convenable, sans cependant en déterminer le nombre. J'ai à vous proposer un essai de division de métropole. Si vous le voulez, je le ferai imprimer et ensuite il vous sera soumis.
(Cette proposition est adoptée.)
Il y a une omission entre
Ceci est absolument nécessaire , pour, une infinité de choses q ue nous ne pouvons aller chercher chez l'évêque.
Appelez-les. doyeas ruraux, archidiacresjqu archiprêtres, peu nous im-.porte, pourvu que vous «n établissiez. Ils -sont de la plus grande utilité. Un curé est-il mort, ils .fournissent.aussitôt un desservantà. laparoisse : ils sont à portée de surveiller particulièrement les ecclésiastiques de leur canton ; ils distribuent les saintes huiles. Cette institution remonte presque au temps des. apôtres. Saint-Jérôme en,a parlé. Du temps de Charlemagne, il y en avait .partout.
,rapporteur. Dans mon premier .travail j'avais présenté cetteinstitution au comité; mais elle a été rejetée, sous prétexte qu'il fallait ..attribuer aux assemblées syndicalesce qui pouvait .être jugé de la compétence des archiprêtres.
(Onidemande le renvoi au comité ecclésiastique.)
(Ce renvoi estadopté.)
fait lecture de, l'article.7 ancien, destiné à devenir le 5e du décret.
« Article 5. Il sera procédé incessamment, et ? ! suri l'avis.de, J?é«êque et de > l'administration de j chaque département, à une nouvelle formation et j .circonscription de toutes les paroisses du! royaume et^en y procédant,,on s'attachera, à en j réduire le nombre d'après les règles qui vont être .établies. »
Je propose de mettre ces .mots : de concertiavec llévéque, au lieu de ceux-ci, sur l'avis de l'évêque, et de retrancher de dernier membre de l'article, parce qu'il pourrait prêter à lia {calomnie.
Je demande qu'on .dise expressément l'administration des districts et des départements.
présente une ; nouvelle rédaction .qui est adoptée dans les termes suivants. :
Art. 5. Il sera procédé incessamment, sur ,1'avis de l'évêque.et de lladmini&tration^es,districts. et département, à.nne nouvelle . formation et circonscription . de toutés les paroisses du royaume,et, en y procédant, le nombre et l'étendue en, seront déterminés .d'après les règles qui r vont être établies. »
, député de Bazas, dit que M. Thibault, président du .comité de .vérification des pouvoirs, est, entré,dans la salle des séances et qu'il est instant .de.prononcer sur la présence, de MM. César et.Constantin de Faucher, dans une enceinte où ils .n'ont.aucun droit de siéger.
Ces suppléants n'ont été admis que. sur une note qui n'a été ^présentée par aucun membre du comité de Vérification, c!est le cas de renvoyer cette.affaire à ce-comité.
(On fait lecture de la note remise au bureau par M. le curé de Souppes.)
Je ne crois pasque ce renvoi puisse être ordonné; il a été remis ce matin une
note qui affirme que les pouvoirs des deux suppléants sont en règle. Cette note n'a point été contestée ; elle vaut un rapport. Par un décret rendu avec une espèce déclamation, voas avez reconnu comme députés ceux qui étaient revêtus de ces pouvoirs. ; Il est impossible de remettre la matière en délibération.. (M. Le Chapelier est interrompu à, diverses reprises.) Il est de l'intérêt de l'Assemblée de ne jamais revenir surses décrets. Vous avez jugé l'élection régulière; cette régularité une fois reconnue ne peut plus être mise en question. Vous avez exécuté le décret eu admettant MM. de Faucher au serment civique.». (Il s'élève encore des murmures.) Il est certain qu'il y a un titre ; une première députation avait d'abord été formée; on proteste : une seconde députation fut nommée. Le comité a pensé que MM. de Faucher, qui composaient cette dernière, pouvaient être considérée comme suppléants. C'est' une indiscrétion que de vous proposer une rétractation du décret que vous avez porté ce matin; l'intérêt public ne demande pas que vous vous rétractiez; il exige, au contraire, que vous ne reveniez jamais sur vos décrets.
(l'aîné.) Cette affaire est extrêmement grave; si les pouvoirs n'ont pas été vérifiés, la note souscrite d'un membre du comité de vérification est un faux. Je'demande que AL de curé de Souppes ait à déclarer comment cette notese trouve signée de lui ; comment il a pu, si elle porteTrai-ment sa signature, affirmer que les pouvoirs dont il s'agit ont été vérifiés. -Voilà la seale voie que l'honneur puisse permettre ; 'demander le renvoi au comité c'est;se montrer trop insouciant pour l'honneur de l'Assemblée, intimement lié à celui de chacun de >ses membres.
Il me paraît convenable d'ajourner toute discussion jjus$u?à ee que M. le curé ide Souppes ait,pris la parole.
Il me semble qu'il n?a jamais été' plus, nécessaire de renvoyer une affaire à un comité que dans le moment où aucun membre de ce comité ne se lève pour idire que la vérification .a été faite. MM. de Faucher ont été nommés par une .partie 'des, électeurs seulement : on ne doit, reconnaître que des députés et des suppléants. MM. de Faucher ne peuvent être admis à remplacer des députés s'ils ne sont pas suppléants. Il est impossible que je croie, avec M. Le Chapelier, que. cette discussion soit peu importante : il s'agit.de la représentation nationale. .Nous ne pouvons conférer ce caractère .jle .député; ce n'est pas à nous à nommer les représentants du peuple. Les citoyens qui se présentent ..à cette Assemblée n'y peuvent être admis si le peuple ne .les a, pas choisis.
Comme membre du comité de vérification, je demande si ce comité a été convoqué.
Le comitéest composé Je soixante personnes. )Que les membres qui ont-vérifié les pouvoirs de, 'MM. de Faucher avec M. le curé de Souppes se lèveat. (Personne ne se lève;)
Je ne suis pas membre du comité de vérification, je n'ai aucune liaison avec MM. de Faucher ; ;je n'avais insisté que 'parce que 'je croyais que la vérification en avait été faite. A présent que ^personne ne se lève, le renvoi au comité me paraît très nécessaire.
M.lecuré de Souppes est criminel de lèse-nation, parce qu'il a usurpé par un faux les pouvoirs de la nation.
Je demande que la note deM. le curé de Souppes reste entra les .mains 4e MM. les secrétaires.
Cette dernièrefproposition est décrétée. VAssemblée décide que M.i le curé de Souppes! sera entendu ;avant que le renvoi au comité soit, prononcé.
Jîlle arrête également .que ; l'effet du décret démission de MM. de Faucher sera,suspendu.»
M. le curé ,de, Souppes,.qui ,s'est,,fait ireudxe .compte du débat, iinonte à la tribune.
, curé de Souppes. Il est d'usage^ que les membres du comité de vérification reçoivent les pouvoirs des suppléants. Ces pouvoirs1 sont ensuite remis à. deux ou trois membres qui, ! ,après les avoir examinés et trouvés valides, ré-.digent une note que; signe ordinairement le pré-; sident du comité pour la, présenter à l'Assemblée. Qei matin, j!aireçu,de M. Ebrard une note que j'ai signée, et un;billet;que voici; il nest; .ainsi -conçu :
(« JÀ.iie curé de iSoupdes, président du comité ,de vérification,-voudra bien signer l'avis ;que je lui envoie* iRetenu dans mon Ut,-je ne puis présenter moi-même MM. de Faucher,tdont les pou-i yoirs ont été trouvés ;on irègle. »
Je n'avais pu me, trouver au comité de vérification , étantloccupéiitousiîles jours au;;Comifté ecclésiastique ; j'ignorais si Jes pouvoirs.de MM. de ;Fauoberjavaient été vérifiés. Un s axis du rapporteur du comité m'avait été envoyé; je devaiside igigner selon l'iusage, et jeii'aiifait. Jious devons avoir, les uns dans les autres, une .entière confiance.
.-(Cette explication reçoit beaucoup d'applaudîs-i-iemonts,)
l'aîné. Les inquiétudes 'qui s'étaient élevées dans mon as prit'sur M. lecuré deSouppes ^étaient très légères; -elles sont entièrement dissipées. On ne peut attaquer sa bonne foi, mais je ne puis louer sa prudence. Quand le président d'un comité ne se trouve point à ce comité, un autre membre le remplace. M. le curé de Souppes ne pouvait signer un acte fait en son absence, i Je -demande qu'il soit sursis à' toute délibération ultérieure jusqu'à ce^que M. Ebrard| j£it,été-entendu.
Malgré la remarque très sévère du préopinant, il ne reste aucun louche sur rexplication donnée parM, le curé de Souppes. j "Je demande d'abord qiiil soit mis dans le pro-; cès-verbal que cette explication a été jugée sa-' ^isfaisante. il s'agit maintenant de savoir si le rapport a été fait au comité.'Il est sûr que -constamment un très petit nombre a été chargé des vérifications. Il ne faut pas exiger la rigueur du droit quand depuis longtemps vous y ayez renoncé. Il me paraît à propos de renvoyer au comité.
(L'Assemblée ordonne' le renvoi au comité de •vérification, et arrête qu'il sera mis sur le procès-verbal que l'explication donnée par M. le curé de*Souppes a paru satisfaisante.) (L'Assemblée revient à son ordre du jour.)
, rapporteur, reprend la lecture
des articles du projet de décret sur la constitution du clergé.
L'article 8 du projet primitif, qui deyiendça le sixième du décret, porte : ,,« Chaque église ^cathédrale sera ramenée à son état primitif et naturel d'église paroissiale, par la suppression des paroisses et .le démembrement des habitations qu'il sera jugé conve nable d'y réunir. »
Je ne sais pas) bien ce gu'on entend par l'état naturel et primitif d'église paroissiale. Il faut une église principale où Je culte se fa^se avec plus de solennité. Il est naturel qu'elle soit dans i'endroitioû siège l'évôque. je n'ignore pas l'utilité des chanoines: mais je sais que,le service divin ne sé fera jamais avec la même décence par des vicaires'distraits par une multitude d'occupations. (Il ~s'élève des murmures.) ïl-y a longtemps que je sais tout cela par cœur, et il est évident que.le culte sera mieux établi dans une cathédrale.
Je .propose une autre rédaction ainsi conçue: « Chaque église cathédrale sera en .même temps iparwissialp, et en cette qualité .elle .aura son territoire, circonscrit et déterminé. »
(La priorité .est.accordée à cette rédaction.)
Je crois qu'avant de porter cette disposition, il faut que l'Assemblée s'explique sur son intention de conserver les «églises cathédrales ; dans la rédaction; le comité les ra-menait à leurMétat (primitif de paroissiales.
On appeMe- eathédraïe l'église «dans laquelle la chaire'de l'évêque est placée,- at cela n'emporte pas la méceseité d'un -chapitpe.
La rédaction4e'M. Camus est écartée par lla question préalable.)
L'article est mis. aux voix et > décrété -en ces termes :
« Art. 6. L'église cathédrale de chaque diocèse sera ramenée àison état primitif d'être en même temps église épiscopale et église paroissiale^ par la suppression des paroisses, et le démembrement Jde9'habitaftions qu'il sera jugé convenable d'y réunir. »
fait la lecture de l'article 9 qui deviendra le 7e du décret: «La paroisse cathédrale n'aura pas d'autre pasteur immédiat que l'évê-que; les autres prêtres qui y seront établis ne seront que des vicaires. »
Il est de ;pi>incipe que le pasteur soit rapproché de ses paroissiens. Si vous adoptez l'article, le but est manqué. L'évê-que sera obligé de faire des tournées dans son diocèse ; il serait presque toujours hors de sa cure, et dans l'état actuel .des choses il est impossible d'admettre la propositionïdu comité. Je demande donc la suppression de cet article.
Je demande la division de cet article. La première partie est bonne, mais la seconde ne peut être adoptée..Dans l'état actuel des choses il faut distinguer ce qui tient à l'administration personnelle de ce qui tient à celle de la paroisse.
.adopte la division ; elle est ; décrétée. .L'article est rédigé en ces termes.
« Art. 7. La paroisse cathédrale n'aura pas d'autre pasteur que l'évêque. »
La discussion sur la seconde partie de l'ancien article 9 est ajournée ainsi que celle qui concerne l'ancien article 10, qui deviendra le 8* du décret.
fait lecture de l'ancien article 11 qui deviéndra le 9e et qui est ainsi conçu :
Il ne sera conservé qu'un seul séminaire dans chaque diocèse ; tous les autres, seront. étéints et supprimés. »
l'aîné. Il serait très imprudent de -supprimer ainsi des maisons absolument utiles à certaines provinces : la mienne surtout le verrait avec déplaisir. Je demande donc que cette question soit renvoyée au département.
Vous ne pouvez pas dire précisément qu'il n'y aura qu'un séminaire dans chaque diocèse. Je demande que l'article soit ainsi rédigé : « Il y aura dans chaque diocèse un séminaire : l'assemblée administrative de département réglera s'il est expédient d'en établir ou d'en conserver plusieurs. »
Après une discussion assez longue, l'article est décrété comme il suit :
«Art.9. Il sera conservé ou établi dans chaque diocèse un seul séminaire pour la préparation aux ordres, sans entendre rien préjuger quant à présent sur les autres maisons d'instruction et d'éducation. »
fait lecture d'une lettre de M. de La Tour-du-Pin. Ce ministre ayant examiné le marché fait pour l'entretien de 300 chevaux des trains d'artillerie, a reconnu qu'il était possible de faire sur cette dépense une économie très considérable. Il a proposé la résiliation de ce marché aux entrepreneurs, qui, loin d'y consentir, demandent une indemnité qui s'élèverait à la valeur de trois années du prix du bail, pour l'exécuter pendant toute sa durée.
M. de La Tour-du-Pin prie l'Assemblée de s'occuper de cet objet.
On ordonne le renvoi au comité militaire et au comité des finances.
donne lecture du nom des membres élus pour faire partie du comité des rapports ; ce sont :
MM. Brevet de Beaujour.
Alquier.
Leleu de la Ville-au-Bois. .
Bouchet de Touraine.
Morin.
Grenot.
Begnier.
Baillot.
Le prince de Broglie.
Merle.
De Chastenay de Lenti.
Poulain de Beauchéne.
Malès.
Muguet de Nanthou.
De Neuville.
M. l'évêque d'Autun, membre du comité de Constitution, demande la parole pour proposer, au nom du comité, divers articles concernant la fédération générale des gardes nationales et des troupes de ligne.
, évêque d'Autun. Messieurs, l'Assemblée a ordonné à son comité de Constitution de lui présenter un projet de décret relatif à ia fédération dont l'époque est fixée au 14 juil-
let. Le comité a pensé que cette fête Vraiment nationale ne pourrait se faire avec trop de solennité; qu'une telle fête, en réveillant des souvenirs glorieux, en resserrant les liens de la fraternité entre tous les citoyens, en rendant sensible à tous les yeux le patriotisme qui anime tous leà Français, achèvera de persuader aux ennemis de la Bévolution, s'il en existe encore, combien seraient vains les efforts qu'ils pourraient faire pour la détruire. Le comité pense en même temps que l'Assemblée, juge éclairé et sévère de la véritable grandeur, ne consentira pas à une magnificence ruineuse pour les peuples, et voudra sûrement présenter aux districts des idées d'économie dont ils seraient coupables de s'écarter. Il pense que l'Assemblée voudra consacrer en même temps des principes constitutionnels sur la garde nationale, afin que, dans cette ivresse patriotique, l'opinion publique ne puisse s'égarer un seul instant. — M. l'évêque d'Autun lit divers articles :
Art. ler. Le directoire de chaque district du royaume, et dans
le cas où le directoire ne serait point encore en activité, le Corps municipal du chef-lieu
de district, sera codimis par l'Assemblée nationale à l'effet de requérir les commandants de
la garde nationale d'assembler les-dites gardes nationales de leur ressort. Lesdites gardes
ainsi rassemblées choisiront six personnes sur cent, qui se réuniront au chef-lieu du
district. Cette réunion choisira un homme par deux cents dans la totalité du district : elle
le chargera de se rendre à Paris pour la fédération qui aura lieu dans cette capitale le 14
juillet.
Art. 2. Les directoires ou corps municipaux fixeront, de ;la manière la plus économique, la dépense qui sera allouée pour le voyage et pour le retour. Cette dépense sera supportée par chaque district.
Art. 3. Le roi sera supplié de donner des ordres nécessaires pour que tous les régiments de l'armée députent chacun un officier, un bas-officier et un soldat pour se réunir à la même fédération.
Une idée a été présentée au comité de Constitution par M. de Lafayette, nous l'avons adoptée; elle nous a paru contenir un principe fondamental de l'organisation des gardes nationales, que nous avons cru devoir être décrété dans un moment où toutes les gardes nationales sont invitées à se réunir. M. de Lafayette va vous exposer ses vues. Le comité a donné son assentiment au projet de décret qu'il vous présentera.
Quelque empressé que je sois de célébrer les fêtes de la liberté, et notamment les 14 et 15 juillet, j'aurais souhaité que l'époque d'une confédération générale fût moins déterminée par des souvenirs que par les progrès de nos travaux ; non que je parle ici des décrets réglementaires ou législatifs, mais de cette déclaration des droits, de cette organisation de l'ordre social, de cette distribution de l'exercice de la souveraineté qui forment essentiellement une Constitution : c'est pour elle que les Français sont armés et qu'ils se confédèrent. Puissions-nous, animés par l'idée de cette sainte réunion, nous hâter de déposer sur l'autel de la patrie un ouvrage plus complet 1 l'organisation des gardes nationales en fera partie : par elle la liberté française est garantie à jamais ; mais il ne faut pas qu'à cette grande idée d'une nation tranquille sous ses drapeaux civiques, puissent être mêlées un jour de ces combinaisons individuelles qui compromettraient l'ordre public, peut-être même la
Constitution ; jecrois qu'au moment où l'Assemblée nationale et le roi impriment aux confédérations un si grand caractère, où toutes vont se réunir par députés, il convient de poser un principe si incontestable, que je me contente de proposer le décret suivant :
« L'Assemblée nationale décrète comme principe. constitutionnel que personne ne pourra avoir le commandement des gardes nationales dans plus d'un département; elle se réserve à délibérer si ce commandement ne doit pas même être renfermé dans chaque district. »
Le comité militaire s'est occupé du décret qui vous est présenté. Il a pensé que le choix des députés des régiments aurait des inconvénients si l'on n'en déterminait pas le mode. Il croit qu'il est convenable de faire élire les officiers par les officiers, les bas-officiers par les bas-officiers, et les soldats par les soldats : mais il lui paraît que trois personnes ne suffisent pas. Les députés dek soldats pourraient être pris parmi les fusiliers; les grenadiers et les chasseurs en seraient jaloux et de là naîtrait une mésintelligence dangereuse. Le .comité propose de décréter que les compagnies des régiments seront divisées par sections et par pelotons; les sections nommeront des électeurs . qui choisiront par chaque régiment quatre soldats ou caporaux : les chasseurs et les grenadiers éliront un grenadier et un chasseur; les bas-ofticiers un bas-officier ; les officiers un officier. Dans la cavalerie, les électeurs des sections nommeront deux cavaliers, les bas-ofliciers un bas-officier, les officiers un officier.
J'ai demandé la parole : 1°pour réclamer en faveur dés troupes de la marine l'a-vautage accordé aux troupes de terre ; 2° pour observer que la proposition faite par la garde nationale, de demander aussi des députations des communes, doit être adoptée: je ne vois pas qu'il en soit question dans le projet de décret du comité de constitution. Passant à celui du comité militaire, je remarque que si les élections s'étaient faites par régiment, le rassemblement d'un régiment aurait pu donner beaucoup d'inquiétudes. Nous avons cru devoir faire faire les élections par pelotons de 30 hommes : nous avons cru nécessaire d'établir un second degré d'élection. Le nombre des députés de l'armée ne s'élèvera pas au-dessus .de 1,000 à 1,200 hommes. J'appuie donc le projet du comité militaire dans son entier.
Il faut que le décret comprenne tous les corps militaires: le corps du génie, par exemple, ainsi que le corps de la marine, est divisé. Je demande que pour tous les corps militaires divisés le ministre appelle un officier de chaque grade.
Ces fêtes peuvent être une source d'insubordination si les troupes se rassemblent pour faire des élections. Les corps mititaires ne doivent pas être des corps délibérants et envoyer des députés. Je propose, pour éviter cet inconvénient, que la députation de chaque régiment soit formée du plus ancien capitaine, du plus ancien bas-officier, du plus ancjen soldat. Il faut décréter que, dans aucun cas, les soldats ne pourront se rassembler. Vous savez ce qu'ont produit les comités permanents qui ont été formés. Toutes les fois que l'armée se portera
à ces extrémités, il n'y aura plus de royaume, plus d'Assemblée nationale, plus d'armée. Je fai: de ces réflexions une motion expresse, et je demande, pour le salut de l'armée, qu'il en soit délibéré. .8
J'appuie la motion très sage et très intéressante qui vient d'être faite. J'ai une autre considération à ajouter. Il existe un corps très important dans l'ordre public et qui ne peut être distrait de ses fonctions. Cependant,, ce corps serait mortifié s'il ne participait pas à une fête civique aussi solennelle. Je propose de décréter que, vu le petit nombre d'individus qui composent la maréchaussée et la nécessité de leur service journalier, ce corps sera autorisé à adresser des pouvoirs à la maréchaussée de Paris pour le représenter.
Il me semble que lorsqu'il s'agit d'un devoir que tous sont propres à remplir, la voie du sort est plus convenable que celle de l'élection: elle a d ailleurs l'avantage de prévenir la jalousie, les cabales et les intrigues.
J'appuie la proposition de M. le chevalier de Murinais; elle; réunit l'avantage de la facilité, de la sûreté et d'une prompte expédition. Les registres font foi quand il s'agit de faire marcher le plus ancien. Le préopinant a proposé de faire l'élection par la voie du sort; mais la vieillesse n'est-elle pas un sort de la nature ? Le respect pour la vieillesse n'a-t-il pas toujours distingué les peuples libres?
(On ferme la discussion.)
On lit l'article 1er du décret du comité de constitution.
(de Saint- Jean-d'Angely). Je crois qu'il faut mettre l'étendue de la municipalité au lieu du mot ressort. Dans beaucoup de municipalités il ne se trouvera pas cent gardes nationaux. Je demande qu'on dise si ces municipalités seront tenues de se réunir.
L'article porte un homme sur 200; il me semblerait plus convenable de déterminer les députations à six hommes par district.
, évêque d'Autun. Je réponds à cette proposition que les districts sont très inégaux.
Dix hommes par district seraient un nombre suffisant. Je demande encore, pour éviter les désordres qui pourraient se commettre à Paris, que le roi soit supplié d'ordonner qu'aucune députation ne pourra entrer dansPari3 avant le 10.
, observe que l'heure est très avancée; qu'il serait à propos de se retirer dans les bureaux pour procéder au troisième scrutin pour Vélection d'un président, qui doit se faire entre M. l'abbé Sieyès et M. Le Pelletier de Saint-Fargeau.
(La séance est levée à 4 heures moins un quart.)
Séance du
La séance est ouverte à neuf heures du matin.
, secrétaire, donne lecture du procès-verbal'de la séance d'hier, qui est adopté sans réclamation.
, président sortant; Le résultat du troisième scrutin, pour la nomination d'un nouveau président, a donné la majorité ^. M. l'abbé Sieyès (On applaudit à diverses reprises), j — Vos bontés m?ont soutenu jusqu'au' bout d'une carrière marquée par des circoDstances touchantes. Deux fois j'ai reçu la mission d'aller porter; à un monarque adoré ^expression de vos sentiments... L'heureuse-époque où vous m'avez comblé de vos bontés me rappelle ces jours honorables où vous posâtes des premiers fondements dei motpe Constitution. Nosderniers neveux en conserveront la mémoire,, et sans-doute ils ne «é-i pareronbpas de cet'événement celui quiena lej plus déterminé le cours.-La Franc€»«e représen-; tera toujours M. l'abbé Sieyès vous ouvrant la; carrière que vous parcourez si-glorieusement, et ^elle vous félicitera delà grande récompense quei vous venez d'accorder à son -génie.
prend alors le fauteuil et dit :
« Messieurs, l'honneur de présider l'Assemblée nationale est,«dans-un État libre,1 la»plus
belle-dis--tinction quiupuïsse décwer la'vie-d'un simple , 'citoyen: ce titre de gloire, vous
avez voulu le «donner à tous «-les membres de votre comité de -Constitution. Satisfaits des
bases de l'édifice social qu'il vous a présentées, vous avez voulu, par ce témoignage
éclatant de votre estime, montrer >auxyeux de la oEranoe 4e plus digne prix qu'il; soit en
ivous ide décerner aux longs et pénibles travaux dont vous avez recueilli île fruit. C'est
par une suite de cette espèce de loi que vous vous êtes-imposée, et dans laquelle vous n-avez
?voulu admettre aucune exception, que vous avez daigné penser à moi. Je dois, en ce moment,
vous en marquer ma reconnaissance; et combien ce sentiment ne doit-il pas être vif et
profond, lorsque vous me forcez de ipenser que pour m'ac-corder cette honorable distinction,
vous ave^eu i la bonté particulière d'attendre le retour d^une époque mémorable-pour tous les
amis de la régénération française, et à laquelle vous me permettez d'attacher plus d'un
intérêt. Vous me pardonnez même ce langage. 'Vous n'y voyez, j'en ssuissûr, ni un puéril
amour-propre, ni une vaine ambition de gloire, mais bien l'expression forte et spontanée,
d'une âmei livrée iout entrèrent i dans tous les 'temps à l'amour de ;iiîu liberté, de
4'égalitê ; tourmentée de toute espèce-de-servitude et d'injustice ; dont les premières
pensées ont été pour une Constitution libre,dont les dernières pensées seront encore pour
elle; pour qui tout ce qui touche au bien public devient à l'instant l'objet de ses études,
de ses méditations,' et
« Il ne m'est pas donné de fournir cette honorable carrière. La faiblesse de ma voix, celle 'de ma santé, l'impossibilité physique que je me connais, de donner une- attention soutenue à des séances aussi prolongées, aussi fréquentes que les vôtres ; vOilà;déjà' plus de-raisons qu'il n'en faut pour me garder des illusions de l'amour-propre : je. saurai donc me défendre de^vos bontés, puisque je suis sùr que mes efforts ne'tourneraient pas à votre véritable utilité. Devante -grand-but nul sacrôfice-nepeut me coûter.;Je me dirai que f s'il est glorieux de se montrer-au premier poste, il y a quelque mérite encore à-savoir le résigner,- lorsqu'il doit être mieux oecupé;par un autre; et'C^est ainsi qU'il appartient à ma'faiblesse 'de tous manifester ma reconnaissance. Quant à mon1 intérêt personnel, c'est assez de bonheur pour moi, que de pouvoir conserver éternellement le souvenir d'.avoir reçu,une.grande marque de votre estimeetde votre confiance.
« Je vous supplie, Messieurs, 'de vouloir bien vous retirer dans les bureaux après la -séance, pour l'élection d'un nouveau président. »
La faiblesse de la-TOixùi de la santé de M. l'abbé Sieyès ne peut l'empêcher deremplir la place à laquelle il est appelé parle vœude l'Assemblée. MM.Ies présidents, ses prédécesseurs,-se'feront-un devoirde le seconder et de le remplacer quand il le voudra.
J'appuie la motion de M.'Le Chapelier, et je me flatte que M. l'abbé Sièyes ne se refusera pas au voeu de l'Assemblée. (On applaudit de' toutes les partiesde la salle): '■*-'
Votre intention est- sans doute, Messieurs, de voter des remerdments à mon prédécesseur.
(Ge vœu est exprimé par'des applaudissements •unanimes.)
, membre du comité ecclésiastique. Le défaut absolud'administration des biens ecclésiastiques, dans la ville de Paris, a déterminé votre comité-à-vous-préseuter un décret très urgent. Pour ne point abuser de vos -moments,^ me contenterai de vous lelire, et si l'on y faisant quelques objections, je- vous demanderais alors la permission de vous exposer les motifs qui ont déterminé le comité.
« 'Vu la délibération du conseil municipal de la ville de Paris, et d'après le rapport du comité ecclésiastique, l'Assemblée nationale décrète que jusqu'à l'organisation des assemblées administratives, la municipalité provisoire sera chargée, relativement aux biens ci-devant ecclésiastiques,
de toutes les fonctions du directoire du district. »
Je demande qu'il soit ajouté qu'elle sera autorisée à faire faire la perception, passer tous baux, ietc-
Cet artréleine me i;paraît pas Jbien rédigé- II paraît supposer deux administra-tions^ celle de district et celle de département ; le comité pense,le contraire pour la ville de Paris. On n'établit des administrations de district que lorsque l'administration ne* peut avoir la surveillance sur tous les objets qui la composent. Je demande donc qu'il soit dit que la municipalité est autorisée à remplir provisoirement Aes fonctions de l'administration du département, par rapport aux txiens ecclésiastiques de Ja ville de Paris.
L'article est mis aux voix et adopté «ainsi qu'il suit, sauf rédaction :
« L'Assemblée nationale, a décrété ce qui suit : « Provisoirement, et jusqu'à l'époque où l'administration du département de Paris sera en activité, la municipalité actuelle de cette ville, ou ; la municipalité qui sera établie, conformément au règlement décrété par l'Assemblée nationale? est commise, relativement aux biens déclarés a la disposition de la nation par le décret du 2 novembre, et situés dans la ville déParis, pour exercer toutes les fonctions attribuées par le décret ; du 14 avril aux administrations de département ..et de district,ou à, leurs directoires. »
La discussion est reprise sur le projet de décret | concernant la fédération.
, évêque d'Autvm. Les difficultés qu'on a présentées hier sur le projetée •-décret proposé par le comité de'constitution sur la fédération, se réduisent à quatre ou cinq points qu'il faut éclaircir.
1° On a proposé que les commandants des gardes nationales les assemblassent chacune dans sa municipalité; mais, d'un côté, il-pa beaucoup de municipalités qui n'ont point-de -garde nationale, ou si peu, 'qu'il n'y aurait pas moyen d'en élire un seul pour se rendre au chef-lieu, parce qu'elles n'ont pas même quinae cm vingt hommes. D'un autre côté, il est importantque lerégimedes gardes nationales soit soumis à une organisation générale, qui les rende utiles, san3 permettre de devenir dangereuses, en -les laissant agir sans chef. Il faut préparer lesesprits à cette idée fondamentale, et cela ne-se peut pas si l'on n'indique point un centre auquel elles se réunissent. Ainsi, il faut dire, ou ôhacune dans son ressort, comme dans le projet, ou chacune dans d'étendue du territoire où. elle se trouve-établie.
2° Quelques personnes paraissent désirer que la Réputation des gardes ne se fasse paspar l'intermédiaire d'un corps électoral ; mais l'opération, sans cela, serait évidemment impossible ; car, soit-qul«n envoie tant d'hommes par cent, ou tant d'hommes par district, cette intention ne peut être remplie en députant immédiatement, •sait des municipalités,-soit des cantons. Les indications qu'on a reçues annoncent que la moitié des citoyens actifs ou environ s'est engagée dans les gardes nationales. Comme un septième-des citoyens se trouve jouir de l'activité par nos décrets, il suit qu'il y a 3,600,000 citoyens actifs en France, et par conséquent à peu1 près 1,800,000 ou 2,000,000 de gardes nationales; six par cent, que nous proposons pour les assemblées électo-
rales, donnent donc 120,000 hommes, qui, réduits dans 547 districts, fourniront pour ehacun un peu plus de 200 électeurs. Cette proportion a paru convenable pour que la députation fût imposante; l'immense inégalité de lailéputation des districts peut porter les uns à 800 électeurs et réduire les autres à 100; ce gui justifie encore plus la moyenne proportionnelle que nous avons prise. C'est de là aussi que nous avons tiré la fixation d'un homme par 200 pour la députation ; elle donnerait 10,000 hommes si tous envoyaient. Mais comme il ne faut pas y compter, «il en résulte qu'on doit compter sur 6 ou 7\000 hommes. Ce n'est pas trop, si l'on veut rendre la fêtenationale et solennelle.
3° Quelques membres ont paru préférer une députation de six hommes par district : mais, d'un côté, ce nombre rempli entièrement ne donnerait que 3,250 hommes. Le comité a pensé que ce n'est pas assez, et que d'ailleurs le nombre ne devant pas être espéré tau complet, ) il iserait encore fort inférieur. D'un autre côté, l'étendue, la population et le nombre des .gardes des distnicts sont d'une telle inégalité, qu'il en résulterait injustice, mécontentement et jalousie. Serait-il juste que le district de Bordeaux, qui possède une belle armée nationale, n'envoyât pas plus d'hommes que Je district le imoinsi«peuplé des Landes?
4* Quant aux officiers-civils, dont on a demandé aussiiune députation, le comité a: pensé qu'il est constitutionnel que tout citoyen soit;soldat, quoique stouit citoyen n'exerce pas et ne doive ;pas exercer : le commandement des gardes n'est que suspendu pour les officiers municipaux, mais ; leur'enrôlement (subsiste et doit subsister : l'état d'un peuple libre est qiwe tout;homme qui réunit les conditions puisse délibérer comme actif, et défendre la constitution et les lois comme soldat. -Appeler eeux-oi pour la fête nationale, c'est ap-! peler tous les citoyens sous leur rapport .de soldats : c'est la France armée qui va se réunir; ce ,n'est pas la France délibérante. Si l'Assemblée nationale avait distingué deux classes, elle aurait détruit l'impression de ce principe qu'il est important de propager et d'affermir; aussi tes députés de là commune, jayant entendu les vues du comité à cet égard, ont déclaré qu'ils n'insistaient plus sur cette partie de leur adresse.
5° Quant à la dépense, s'il fallait la payer tout entière sur le pied de 7 ou 8,000 hommes, et h raison de 100 lieu^i pour le voyage et 100 lieues pour le retour (terme moyen des distances), elle serait considérable, quelque économie qu'on pût y mettre. Voilà pourquoi votre comité ia cru devoir en charger chaque district pour les députés qu'il enverra. Cette mesure fera, selon toute apparence, qu'on choisira dans les districts des hommes en état de sapporler cette charge. Un double avantage en résultera. Les frais seront moindres, et il est bon d'ailleurs que les riches perdent enfin tout à fait, 'dans le spectacle d'une fête si solennelle et dans 4e serment qu'ils viendront prêter d'une manière si auguste, ce que leur fortune et les distinctions -qu'elle établit au-raient pu leur laisser de -préjugés. A l'égard des corps militaires, le comité adopte ce qui àété pro-posévll pense qu'on ne doit excepter aucun corps ; que la maréehaussée doit être Nommée : et, au surplus, il s'en rapporte pour la forme d'élection à l'avis du comité militaire.
(M. l'évêque d'Autun fait une nouvelle lecture des deux premiers articles.)
Je propose deux amende-
ments: le premier, c'est que la députation soit com-
Îtoséed'un député par chaque centaine d'hommes; e second, que la dépense pour les frais de voyage soit prise sur le Trésor public.
Dans un moment où les gardes nationales se.sont propagées à l'infini, et où les frais des députations pour l'auguste cérémonie qu'on propose peuvent devenir immenses, je demande qu'il ne soit choisi qu'un seul homme par 500.
Ce serait faire une injustice aux provinces que de leur laisser les frais de cette cérémonie; il en résulterait un privilège pour la capitale. C'est la nation qui s'assemble ; il faut que ce soit aux frais de la nation.
La délibération est instante, m faut donc s'empresser d'édaircir la question. Pour rendre la cérémonie plus auguste, il faut qu'un grand nombre de personnes viennent y assister, et ce n'est pas trop d'environ 8,000 hommes que propose le comité. La fédération qui s'est .formée sous les murs de Lyon était bien de 50,000 hommes énvironi L'anhiversairedu jour de laRévolution,du premier jour qui mérite véritablement d'être célébré dans les annales de la France, l'importance de cette fête, je ne dis pas sur la Révolution, car elle est opérée sans retour, mais sur le rétablissement de 1 ordre, méritent de l'attention. Je réponds à celui qui veut un député par municipalité qu'il ne connaît pas l'esprit du décret. Le seul point de la difficulté est celui de la dépense. 11 est bien singulier que nous ne rendions pas assez de justice au zèle de tous les soldats-citoyens. Comment se dissimuler que si l'on voulait le permettre on en verrait arriver 30 à 40,000 à Paris pour cette auguste cérémonie? Il est vrai que s'il est un moyen qui puisse être plus favoraole, on doit le prendre. Celui qu'on a proposé, de n'envoyer qu'un homme par 5G0, est inadmissible. Mais afin de détruire jusqu'aux moindres inquiétudes, je proposerai, après avoir adopté le projet du comité, d'y ajouter, par amendement, que les provinces qui seront éloignées de plus de 100 lieues de la capitale, telles que le Roussillon, ne pourront nommer qu'un député par 500. Je suis sûr que les provinces n'adhéreront pas à cet amendement.
11 ne s'agit pas ici de disputer de l'amour de la patrie, mais de prendre les moyens les moins chers possibles pour célébrer la fête du 14 juillet. Gomment voulez-vous que dans mon district on dépense,cinquante mille francs ?
(On demande à aller aux voix.)
; L'amendement de M. Démeunier est adopté el joint à l'article, qui est décrété ainsi qu'il suit :
Art. l8r. « Le directoire de chaque district du royaume, et, dans le cas où le directoire ne serait pas encore en activité, le corps municipal du chef-lieu de chaque district est commis par l'Assemblée nationale, à l'effet de requérir les commandants de toutes les gardes nationales du district d'assembler lesdiles gardes chacune dans son ressort ; lesdites gardes, ainsi assemblées, choisiront six hommes sur cent, pour se réunir au jour fixé par le directoire ou par le corps municipal requérant, dans la ville chef-lieu du district. Cette réunion de députés choisira, en présence du directoire ou du corps municipal, dans la totalité des gardes nationales du district, un homme par deux cents, qu'elle chargera de
se rendre à Paris à la fédération générale de toutes les gardes nationales du royaume, qui aura lieu le 14 juillet. Les districts éloignés de la capitale de plus de 100 lieues auront la liberté de n'envoyer qu'un député par 400.
, évêque d'Autun, donne lecture de l'article 2, qui est adopté dans les termes suivants :
« Art. 2. Le directoire de chaque district,' ou à son défaut la municipalité du chef-lieu de district, fixera, de la manière la plus économique, la dépense à allouer aux députés pour le voyage et le retour, et cette dépense sera supportée par chaque district.»
La proposition faite hier par le comité militaire se réduit, par la discussion, à des termes très simples : « Elira-t-on dans les régiments ou bien prendra-t-on les soldats à l'ancienneté de service? » Si cette dernière disposition est admise, il y a très peu de précautions à prendre. Si, au contraire, on préférait la première, le comité militaire présenterait un projet de décret pour fixer la manière dont on ferait l'élection. Je demande que la question soit décidée.
Si vous pe voulez plus de militaires, il faut élire ; l'ancienneté est faite pour récompenser le service.
J'ai à faire des observations très courtes en faveur de l'ancienneté du service. Kous avons toujours regardé comme un grand honneur de représenter le corps : jamais plus belle occasion ne s'est offerte. En appuyant donc lavis de ceux qui veulent qu'on ait égard à l'ancienneté du service, je demande que les officiers soient représentés par les capitaines. (Il s'élève des murmures.) J'entends le plus ancien officier dans chaque grade.
Le grade de capitaine est toujours accordé à la faveur. Je demande qu'on dise expressément le plus ancien officier de service.
(La question est mise aux voix, et l'Assemblée décide que les députations seront formées par rang d'ancienneté et de service.)
Le comité a pensé que la députation devait être ainsi composée : « Dans les régiments d'infanterie: un officier, un bas-officier et quatre soldats ; dans la cavalerie : un officier, un bas-officier et deux cavaliers. » Plusieurs personnes sont touchées de la difficulté qui pouvait s'élever entre les grenadiers, les chasseurs et les fusiliers. C'est une difficulté que vous avez tranchée en vous décidant en faveur de l'ancienneté. Si quatre grenadiers sont les plus anciens, ils se-» ront élus ; il en sera de même si ce sont quatre chasseurs, et de même si ce sont quatre fusiliers. Une autre difficulté qu'on élève regarde les officiers appelés très improprement officiers de fortune. Compteront-ils leur ancienneté de l'instant où ils ont été admis dans le corps comme soldats, ou du jour où ils ont été élevés au grade d'officiers ? Cette question est délicate: elle a fait de tout temps une espèce de schisme entre les officiers de fortune et les autres; je demande pardon de me servir de cette expression, mais il n'en faut pas d'autre pour me faire entendre. Dans mon opinion, l'officier de fortune joint à l'avan-
tage très grand d'être officier le très grand avantage d'avoir passé par la plus étroite étamine : il doit être entièrement confondu avec les autres officiers, car s'il n'était pas confondu il serait distingué. On dit que, dans ce cas, il n'y aura que des officiers de fortune admis à la denutation : je détruis cette inquiétude par des exemples : par exemple, dans le régiment de Piémont, ce sera le lieutenant-colonel ; dans le régiment d'Alsace, que je commande, ce sera le premier capitaine, officier très recommandable.
Je demande que les campagues soient comptées pour deux ans.
Les lieutenants généraux et maréchaux de France se trouveront très honorés d'assister à cette fédération. Je demande qu'on en fixe lé nombre.
Gomme ces MM. ne font pas corps à part, il faut laisser à leur patriotisme et à leur zèle de s'y présenter.
Je demande qu'on y admette un officier de chaque grade dans le corps du génie.
Je voudrais que ces gens ne fussent pas admis à Paris avant le 13.
Je4 demande que pour ôter toute espèce de jalousie on dise : « Seront députés le plus ancien grenadier, le plus ancien chasseur et les deux plus anciens soldats. »
Je demande si les cavaliers dragons et hussards viendront à pied ou à cheval?
Il me semble que les principes ne sont pas contestés; on peut donc les décréter. Nous n'en finirions pas si nous écoutions tous les amendements. L'un veut qu'on admette la marine, l'autre la maréchaussée, l'autre les invalides, l'autre les officiers du génie. Toutes ces demandes sont assurément dans l'intention du comité. Demain nous apporterons un article dans lequel ils serout compris. On peut toujours adopter celui que j'ai proposé, sauf la rédaction.
Comme l'importance du service de la maréchaussée et l'activité qu'il exige ne lui permettent pas d'assister à la fédération, je demande qu'elle ait la faculté d'adresser à la maréchaussée de l'Ile-de-France des pouvoirs pour l'autoriser à y adhérer à sa place.
L'amendement mis aux voix est adopté, sauf la rédaction.
On demande à aller aux voix sur la motion de M. de Noailles. — Elle est adoptée ainsi qu'il suit, sauf la rédaction :
« Chaque régiment d'infanterie députera un officier présent au corps, le plus ancien de service, les années de soldat comptées; un bas-officier présent au corps, le plus ancien de service, les années de soldat comptées; les quatre plus anciens soldats, pris indistinctement parmi les caporaux, grenadiers, chasseurs, fusiliers ou tambours-et en cas d'égalité de service, le plus ancien d'âge sera préféré. Chaque régiment de
cavalerie députera, suivant les mêmes règles, un officier, un bas-officier et deux soldats. »
Je demande que les comités militaire et de la marine ayant profité de toutes les observations qui ont été faites, se réunissent pour présenter demain un article après le procès-verbal.
On fait lecture de la motion présentée dans la dernière séance par M. de Lafayette :
Je demande que conformément à cette motion le commandement soit restreint à l'étendue d'un district.
M. de Lafayette ne sera donc plus commandant que d'un district de Paris. Je demande qu'on ajourne la motion de M. le comte de Fumel jusqu'après l'organisation des milices nationales.
(Cette proposition est adoptée.)
La motion de M. de Lafayette est décrétée en ces termes :
« L'Assemblée nationale décrète, comme principe constitutionnel, que personne ne pourra avoir un commandement de gardes nationales dans plus d'un déparlement, et 8e réserve de délibérer si ce commandement ne doit pas même être borné à l'étendue de chaque district. »
fait lecture d'une lettre de MM. les curé et-marguilliers de Saint-Germain-l'Auxerrois, par laquelle ils prient l'Assemblée nationale d'assister à la procession du Saint-Sacrement jeudi prochain.
L'Assemblée, consultée sur cette invitation, décrète qu'elle se rendra en corps à cette auguste cérémonie et qu'il y aura séance le soir à cinq heures.
L'ordre du jour est ensuite la continuation de la discussion sur l'organisation du clergé.
, rapporteur. Vous avez renvoyé hierau comitéecclésiasuque l'examen de la question de savoir s'il y aurait des archiprêtres. Le comité pense qu'il n'est pas nécessaire qu'il en soit établi par vous.
(L'Assemblée décide qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur cet objet.)
, rapporteur. Vous avez aussi ajourné hier la dernière disposition de l'article 7. Le comité ne voit pas d'obstacles à la décréter aujourd'hui. Elle est ainsi conçue : « Les autres prêtres qui y seront établis (dans les cathédrales) ne seront que ses vicaires. »
Cette disposition est adoptée et, par suite, l'article 7 se trouve ainsi rédigé :
« Art. 7 La paroisse épiscopale n'aura pas d'autre pasteur immédiat que l'évêque ; tous les prêtres qui y seront établis seront ses vicaires, et en feront les fonctions. »
, rapporteur. Il vous reste à statuer sur l'article 8 qui n'est autre que l'article 10 primitif. Il s'agit actuellement de déterminer le nombre des vicaires. Vous entendez supprimer les canonicats, les bénéfices et enfin toutes les dignités établies dans les églises cathédrales ; il est cependant nécessaire qu'il y ait dans chaque diocèse une église principale où l'appareil du culte soit plus majestueux et plus imposant. Il faut donc établir un nombre de vicaires suffisant pour officier avec dignité, et obliger en outre tous ceux
qui seront au séminaire à» assister au serviee; divin. Je demande qu'un article* soit ainsidécrété: « Dans la paroisse cathédrale dont la population comprendra plus de 100,000 âtnesy il- y; aura 1G vioairesj el! 12.seulement dans celles» où la ipot-pulation sera au-dessous de lQO,O0ûk »
Je demande que de tous ces prêtres il n'y en ait que deux qui portent le nom dé'vicaires; et'que lés-autres soient' chargés d'administrer lès sacrements, etc.
Cette distinction doit être absolument déttuite.. Jè demandé que l'article reste comme il a été'proposé.
L'article est adopté en: ces termes r
«Art. 8. Il y aura seize vicairesde l'église cathédrale» dansi les villes qui comprendront! plus de 10,000 âmes, et douze seulement dans celles où la population sera au-dessous dedO,000 âmes.»
, rapporteur. Dans la séance d'hier, vous avezr adopté rarticlé 9( (ancien article 11 du projet" de1 décret joint au rapport)1.
Je vais donner lecture de ^article 12 aticien, qui deviendra l'article 10 de votre décret.
« Art. 10. Le séminaire sera établi, autant que faire se pourra, près de l'église cathédrale, et même dans l'enceinte des. bâtiments destinés à l'habitation,de:révèque.» (Adopté®),
L'ancien article 13 étâit ainsi conçu :
« Art. 13* L'évêque aura sous lui* pour la/ conduite et l'instruction des élèves reçus dans' le séminaire, un vicaire supérieur et trois vicaires directeurs. »
Les séminaires sont su^ jets à une infinité de détails qui demandent une surveillance et, une activité continuelles». Il est bon de fôrmer les jeunes, clercs au ministère de la parole et au gouvernement des paroisses. L'expérience m'a appris que, pour remplir des foncr tions aussi importantes, quatre directeurs ne suffisent pas. Je. demande donc que l'évêque soit autorisé à en établir autant que bon lui semblera, sauf à en conférer avec le département.
Quatre personnes sont bien suffisantes pour faire le1 service dans les séminaires. Ce ne sont point des enfants à ccn+ duire; mais- des' jeunes; gens zélés, qui, s'ils avaient besoin d'être surveillés, ne seraient pasj par là même, fort propres à embrasser l'état ecclésiastique.
Après une courte discussion, l'article 13", qui devient l'article 11 du décret, est adapté en ces termes i
« Art. 11. Pour la conduite" et rinstructibh dés Jeunes clercs reçus dans le séminaire,, il y- aura un vicaire supérieur et trois, vicaires directeurs subordonnés à l'évêque.»
« Art. 1.2 (ancien art.. 14),. Les vicaires supérieurs et vicaires directeurs, seront ténus,d^assisf-ter, avec les jeunes ecclésiastiques du séminairéi,; à. tous- les officesr de la paroisse cathédrale, et d'y faire toutes les fonctions dont- l'évêque oui son premier vicaire jugeront à. propos de les- charger. »
(Get article- est adopté sans; discussions)
don»© lecturede; L'ancien article- 15 »qui devient 1er!3e dm décretu.
« Art A5. Les vicaires de l'église- caittoédrale, leB vicaires; supérieurs- et vicairesi diteotemrs' des séminaire» formeront ensemble lè conseil ordi*-naire permanentidef l'évêque, qtuii ne pourra faire aacuo'aete- d© juridiction qu'après en avoir déli* bérô avecieux, soitipour ce qui concerne l'administration de lat paroisse cathédrale ou du sémi-i naire, soit pour ce qui. regarde, lé gouvernement du diocèse. »
Le comité ecclésiastique avait d'abord adopté cet article ; mais des réflexions plus mûres l'ont porté à en demander la suppression. Le conseil de l'évêque serait une superféta-tion et une invention hors-rd'œuvrei. Ii y a d'ailleurs dans l'article une irrégularité ; il y est dit que l'évêque ne pourra faire aucun acte de juridiction qu'après en avoir délibéré avec son conseil, soit pour ce qui concerne l'administration,f etc. Permettez-moi. de vous rappeler les grand'é principes d'après Pèxpression des conci-Tés. Le conseil ne doit-avoir lieu que pour, les affaires majoris momenti : actuellement que lâ religion est beaucoup plus étendue, nous renvoyons ces affaires air synode. Cè cerait vouloir établir un troisième degré de juridiction avec le synode diocésain et métropolitain. Je propose donc la suppression de l'article en y substituant celui-ci : «>11 sera choisi par le synode diocésain, au scrutin de liste simple, parmi les prêtres qui auront été dix ans curés, ou vicaires, ou supérieurs de séminaires, quatre prêtres dont le plus ancien gouvernera, avec le conseil des trois autres, en cas d'absence ou d'empêchement de F&-Téqwe.o»
Le conseil des évêques remoaale jusqu'aux, premiers temps de l'Église; nous-en voyons piusieurs!preuves dans les ouvrages de saint Augustin et de saint Cyprienv
.l'aîné. J'ai; beaucoup de respect pour tous les saints Pères et pour M. Pabbé Gouttes; je ne puis; cependant être; de leur avis» Que saint Augustin ait répondu qu'il ne pouvait rien-laire sans l'avis de son. conseil^ e'est là une modestie, de saint; mais cela ne prouve pas qu'il fût tenu .d'avoir uni conseil.
Vous agitez une des plus importantes questions: qui vous ; aient été soumises. Le gouvernement de Jésus-Christ est un gouvernement de charité et de conseil* et non point uu gouvernement absolu. Prêt à consommer son-sacrifîcey ce divin? Maître dit à ses- apôtres r «•Les-roiset les princes des nations les gouvernent avec autorité* il n'en serai pas ainsi parmi vous; le plus petit;sera autant que le plus grand, et celui qui commande autant que celui qui sert. » Je demande qu'il soit donné un conseil à l'évêque, etbqu'en cas de dissentiment entre l'évêque et son conseil sur une affaire- importante et pressée-, l'évêque ait provisoirement voix décisive, et qu'ensuite-il en sera référé au synode.
Il esti constant que les curés ont droit de concourir au gouvernement du diocèse-: il faut dire que les quatre curés qui formeront 1© conseil de l'évêque seront choisis par les prêtres du diocèse.
[Je demande la priorité pour la.
première rédaction, ety en eas » qu'ellesoit contestée, je réclamerai la parole;
(L'Assemblée accorde la priorité à la motion de M- Martineau.
Je' demande que; du- moinsf . dans le cours de ses visites,. l'évêque puisse rendre desordonnances provisoires, sans avoir besoini de consulter son conôeilu
Je vais vousiprésenter une ré* daction nouvelle qui peut-être plaira à toutdëi monde :
« Art-13 Les vfcaires de l'église cathédrale; les vicaire supérieur et vicaires directeurs d» séminaire formeront ensemble le conseil habituel et permanent de l'évêque; qui ne pourra faire aucun acte de juridiction en ce qui concerne le gouvernement du! diocèse et du séminaire, qufaprès en avoir1 délibéré avec eux : pourra néanmoins, l'évêque, dans le cours de ses visites, rendre seul telles ordonnances'provisoires qu'il appartiendra.»
met cet article aux voix. Il' est adopté.
fait lecture de l'article coté 16, qui deviendra le 14e; il est ainsi conçu :
« Dans toutes les villes et bourgs qui ne- comprendront pas plus de 10.000 âmes, il n'y, aura qu'une seule paroisse ; les autres paroisses seront supprimées et réunies,à l'église principale. »
Quant il s'agit de supprimer des paroisses, il faut envisager ces réductions sous le rapport de la religion. Gomment vouiez^vous que sur 10,000 âmes les deux tiers assistent au service , divin dans une seule église, et il n'y en aura qu'une seule puisque vous avez supprimé les chapelles.
A force de vouloir être ééonomes nous devenons avares, et l'avarice ne vaut rien en fait de religion. Je propose de réunir cet article avec les-cinq articles suivants en un seul, qui serait rédigé en ces termes :« Il sera établi ou conservé, dans les villes, bourgs et campagnes, autant de paroisses que les besoins des fidèles pourront l'exiger, d'après l'avis des évêques et dés assemblées administratives. »
f aîne. Dans ma province et dans les ' provinces voisines, les paroisses sont très rares : aujourd'hui que vous possédez des biens ecclésiastiques, Vous ne vous occupez qu'à mettre une extrême parcimonie dans les dépenses du culte; j'appuie donc l'article présenté par le préopinant. Lorsque ceux que nous représentons ici n'ont pas manifesté leur vœu sur un objet aussi important, nous ne devons rien décréter avant de les avoir consultés.
J'observe, sur lé nouvel article proposé, qu'il faut faire une très grande différence entre les paroisses des villes et celles des campagnes. D'ans lés villes, on peut aller à l'église d'une très grande distance : je1 connais déa viïïës de 10,000 âmes où il y a dix-sept paroisses. Il est évident que plus une paroisse est considérable, mieux le service s'y fait. On demande le renvoi aux assemblées dë département : j'observe qu'il serait bien plus avantageux de se. relâcher des règles proposées par le comité, que de ren-
voyerauts départements qnr ne-feronf rien s'il» n'ont ipasvde^ règles établies*.
; Je propose de réduire* ài six" mille âmes-la population de -toutes les villes* et bourgs ioùî il n'y aura qu'une1 seule paroisse. (Cet amendement est adopté;) ; L'artioleAô1 est «ensuite1 niis aux voix-et adopté ences-termes :
« Art. 14 (ancien article 16). Dans toates les-Villes et bourgs qui ne comprendront pas plus de six mille âmes,, il n'y aura qu?uft© seule paroisse ; les autres paroisses, seront supprimées* et réunies à l'église principale. »
lit l'article suivant, qiji est. adopté sans discussion en/ces termes :
« Art. 15 ancien art.l7j. Dans les villes dont la populàtion est dë pliks de six mille âmes,, chaque
Earoisse-pourra comprendre un plus grand nom-re de paroissiens, et il en sera conservé autant que les besoins, des peuples et les localités- le démanderont. »-
, rapporteur. L'article 18 dtt projet de décret annexé au rapport est ainsi conçu :
« Toutes Jës paroisses de campagne qui ne sont pas éloignées dés villes et bourgs de plus de trois quarts de lieue y seront réunies. »
Je démandé |a suppression de cet article.
La1 demande de suppression doit être éténdue aux articles suivants du projet du comité; dont je dorme lecture:
« Art. 19' Dàns les campagnes, chaque paroisse* s'étendra en tous sens à trois quarts de lieue ou | environ. »
« Art. 22. Les règles qui viennent d'être établies pour les paroisses de campagne n'auront lieu qu'autant que la difficulté des chemins ou d'autres localités n'y mettront pas d'obstacles. * Je crois, Messieurs, qu'on doit1 mettre beaucoup de ménagement dans la suppression ' dés paroisses de campagne. Les habitants des carn-J pagnes, sont très attachés à leur église : en sup--primant une paroisse on donnerait lieu' à des I querelles entre lés villages. Il-est d'ailleurs très i difficile d'établir des règles générales que les [localités contrarieraient sans cesse. Je démande qu'on passe tout de suite à la discussion de l'article 20.
, rapporteur. Je reconnais, avec M. Camus, l'extrême sévérité des* arttclës dont on demande la suppression, et lë comité n'insiste" pas sur leur adoption.
L'Assemblée passe à l'article 20 qui est adopté, sauf rédaction en ces termes :
Art. 16 (ancien art. 20). « Lès assemblées'administratives, do concert avec l'évêque diocésain, désigneront, à la prochaine législature, les paroisses, annexes ou succursales, dë villes et de campagnes qu'il conviendra de resserrer ou d'étendre, d'établir ou de supprimér, et ils- en marqueront les arrondissements d'après ce quedemanderont les1 besoins des-peuples, la dignité du-culte et lés différentes localités.
, rapporteur, donnelecturede l'article suivant: « Art. 17 Cancien article 23). Les assemblées-
administratives et l'évêque diocésain pourront, après avoir arrêté entre eux la suppression et réunion d'une paroisse à une autre, convenir que dans les lieux écartés, et qui, pendant une partie de l'année, ne communiqueraient que difficilement avec l'église paroissiale, il sera établi ou conservé une chapelle où le curé enverra, les jours de fête et de dimanche, un vicaire pour y dire la messe et faire au peuple les instructions nécessaires. »
, rapporteur. Nous revenons à l'ancien article 21, que nous vous proposons de sanctionner ainsi qu'il suit :
« Art. 18 (ancien article 21). La réunion qui pourra se faire d'une paroisse à une autre paroisse emportera toujours la réunion des biens de la fabrique de Péglise supprimée à la fabrique de l'église à laquelle se fera la réunion.
(Cet article est mis aux voix et adopté.)
, rapporteur, fait lecture des articles suivants du projet de décret annexé à son rapport :
« Art. 24. Les suppressions et réunions mentionnées dans les précédents articles s'effectueront incessamment pour toutes les paroisses et bourgs, même pour les paroisses de campagne qui ne comprendraient pas au moins vingt familles. Mais pour toutes les autres paroisses de campagne, elles ne s'effectueront qu'à mesure des vacances par mort, démission ou autrement. »
« Art25. Les suppressions et réunions dès paroisses de campagne auront pareillement lieu dans le cas où il y aurait nécessité de reconstruire l'église ou le presbytère d'une paroisse destinée à être supprimée, ou d'y faire des réparations importantes. »
« Art. 26. Les suppressions et réunions auront encore lieu dès que la commune le requerra. »
« Art. 27. En attendant que l'évêque et les assemblées administratives aient fait l'opération dont ils sont chargés par l'article 22, et formé le tableau des paroisses qui doivent être réunies et de celles auxquelles doit se faire la réunion, il sera sursis à toute nomination aux cures. Il ne pourra y être établi qu'un desservant. »
« Art. 28- II y aura dans toutes les paroisses de ville et de campagne, au moins un vicaire ; le nombre des vicaires augmentera dans les villes, à raison de un par 2,000 habitants, et dans les campagnes à raison de un par 1,000 habitants ou environ. »
« Art. 29. Aucun établissement de second ou troisième vicaire ne pourra se faire que sur la demande du curé ou de la municipalité du lieu, de l'avis de l'assemblée administrative du département et par une ordonnance de l'évêque. »
« Art. 30. Il sera libre aux fabriques des églises cathédrales et de toutes les autres paroisses d'établir dans leurs églises autant de ministres auxiliaires qu'ils croiront devoir le faire pour la plus grande dignité du culte et que leur faculté le leur permettront. »
Les articles 24 à 30, dont vous venez d'entendre la lecture, sont en opposition avec les principes qqe vous avez consacrés dans votre séance de ce jour. Je demande le rejet ou au moins l'ajournement de ces articles.
Cette motion est adoptée et les articles 24, 25, 26 et 27 sont rejetés.
Les articles 29 et 30 sont ajournés.
, rapporteur. Je donne lecture de l'article 31 et dernier du titre Ier. Il est ainsi conçu:
« Art. 31. Tous titres et offices, autres que ceux mentionnés en la présente constitution, les dignités, canonicats, prébendes, demi-prébendes, chapelles, chapellenies, tant des églises cathédrales que des églises collégiales, les abbayes et prieurés, en règle ou en commende, et tous autres bénéfices ou prestimonies généralement quelconques, de quelque nature et sous quelque dénomination que ce soit, sont, à compter du jour de la publication du présent décret, éteints et supprimés, sans qu'il puisse jamais en être établi de semblables. »
Il faut ajouter à cet article que l'Assemblée nationale se réserve de statuer sur le patronage laïc et sur les collations làïcales. M. Durand de Maillane a préparé un rapport sur ces deux objets.
(Cet amendement est adopté.)
Il faut ajouter après ces mots : des églises collégiales, ceux-ci :■ et les chapitres de l'un èt de i'autre sexe (1).
Il faut ajouter : même les chapitres des chanoinesses nobles.
Les chapitres des chanoinesses ne sont pas des bénéfices, mais des établissements purement civils : ce sont si peu des bénéfices qu'il n'y a pas besoin du visa de l'évêque et que les abbesses peuvent se marier...
On propose de renvoyer la discussion à demain.
- L'Assemblée décide que la discussion sera immédiatement continuée.
Je viens demander que ces corps soient ouverts ; que tous les citoyens y soient admis. Ce sont des établissements infiniment précieux à conserver. Vous ne voulez faire qu'une opération sage et utile; les localités peuvent déterminer les départements à vous présenter leur vœu pour la conservation de ces corps que je crois très intéressants.
Conserver ces établissements c'est protéger le célibat et l'oisiveté, ce qui sans doute est très inconstitutionnel.
Mon amendement est adopté en ces termes par le comité : c et les chapitres nobles, réguliers ou séculiers de l'un ou de l'autre sexe, etc.»
Je demande l'éclaircissement d'un fait qui intéresse toute l'Assemblée.
Je vais établir mon amendement. Il n'est pas difficile de prouver que des établissements qui isolent de la société, qui engagent au célibat, qui ne sont ouverts qu'à une seule classe, quand il n'existe plus de classes, sont contraires à la constitution et doivent disparaître devant elle.
Ces établissements sont dotés des biens de l'Eglise : il n'en faut pas moins les supprimer.
Il serait inconcevable de laisser subsister des corps qui n'existent que sur des biens ecclésiastiques, quand ces biens appartiennent à la nation.
(On ferme la discussion.)
Je demande que l'Assemblée décrète qu'avant de statuer sur cet article, il lui sera rendu compte des adresses envoyées par les villes sur les établissements ecclésiastiques. Je demande que mon amendement soit rejeté de bonne foi par un décret, pour que l'on sache que l'Assemblée n'a pas voulu connaître le vœu des peuples.
(L'Assemblée décide qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur cette observation.)
L'amendement de M. Duquesnoy est adopté et l'article se trouve rédigé en ces termes :
« Art. 19 (ancien art. 31). Tous titres et offices autres que ceux mentionnés en la présente constitution, les chapitres, les dignités, canonicats, prébendes, demi-prébendes, chapelles, chapelle-nies, tant des églises cathédrales ou collégiales, que de tous autres chapitres réguliers ou séculiers de l'un et l'autre sexe, les abbayes et prieurés en règle ou en commende aussi de l'un et de l'autre sexe, et tous autres bénéfices ou presti-monies généralement quelconques, de quelque nature et sous quelque dénomination que ce soit, sont, à compter du jour de la publication du présent décret, éteints et supprimés, sans qu'il puisse jamais en être établi de semblables à l'avenir. »
Il est essentiel d'ajouter un article additionnel, par lequel l'Assemblée se réservera de statuer sur le sort des différents titulaires dont il est question dans cet article.
Il faut décréter sur-le-champ cette proposition, sauf rédaction, pour "ne pas laisser d'inquiétude aux titulaires.
L'Assemblée décrète ce qui suit :
« Art. 20. Il sera statué par un décret particulier, sur les bénéfices simples ou prestimonies qui sont en patronage laïc ou à collation laï-cale. »
La commune de Paris vient d'écrire à M. le président et au comité de constitution, pour renouveler la demande qu'elle avait déjà faite, que, lors de la fédération, les départements députent aussi des officiers civils. - M. Le Chapelier rappelle les motifs qui ont ce matin déterminé à rejeter cette proposition.
L'Assemblée persiste dans le décret qu'elle a rendu à ce sujet.
La séance est levée à 3 heures et renvoyée à ce soir 6 heures.
Séance du
La séance est ouverte à 6 heures du soir.
, ex-président, occupe le fauteuil par suite de l'absence de M. Sieyès, président.
, secrétaire, fait lecture de l'extrait des adresses suivantes :
Adresse de la garde nationale de la ville de Reims, portant l'expression de son respect et de sa reconnaissance; elle renouvelle le serment civique, et déclare traîtres à la patrie tous ceux qui, par des voies ouvertes ou des moyens détournés, chercheraient à nuire aux progrès de la Révolution si heureusement opérée pour le bonheur de la France.
Adresses de félicitation, adhésion et dévouement des nouvelles municipalités, des communautés de Sainte-Golombe-de-Rocquefourtès,dans le département de l'Aude, de Bousquet, district de Quillan, dans les Pyrénées, et de Villars, près Pons, en Saintonge.
Adresse des officiers municipaux, notables, et de la milice nationale de Vitrey, district de Jussex, département de la Haute-Saône; ils supplient l'Assemblée de ne pas oublier les habitants des campagnes dans la prochaine organisation des milices nationales: « car, disent-ils, leur établis-« sement provisoire a ramené l'ordre et la tran-« quillité dans ces contrées, et nous nous croirions « privés du beau droit de citoyens français, si « nous n'avions l'honneur de défendre et assurer « notre mémorable Constitution, qui, d'esclaves « que nous étions, nous a rendus des hommes « libres ».
Adresses des gardes nationales de la ville de Bourges, de celles de Sainte-Sezanne, de Poligny, département du Jura, et de celle de Besançon; elles s'élèvent avec force contre la déclaration d'une partie de l'Assemblée nationale.
Adresse des officiers municipaux de la commune de Selongey; on y lit ces paroles remarquables: « Nous déclarons qu'également amis de l'ordre,, « et ennemis de l'oppression, de quelque part « qu'elle vienne, nous accorderons à tous les « citoyens sur le sort desquels les organes de la « loi n'auront pas prononcé, l'appui et les secours » que toute âme honnête doit à l'innocence en « butte à des violences illégales ».
Adresse de la communauté de Lorlange, département de la Haute-Saône; elle se soumet d'acquérir des biens nationaux pour la somme de 1,200 livres.
Adresse de lacommunauté d'Auzay, département de la Vendée; elle fait une soumission pour le même objet, de la somme de 200,000 liv; es.
Adresse de la ville de Dol en Bretagne ; elle dénonce la protestation de l'évêque et du
chapitre de cette ville contre le décret du 13 avril dernieF concernant la religion.
Adresse de la ville de Provins, qui adhère avec une admiration respectueuse au notamment décret concernant de faire la paix et la guerre.
Adresse de la ville d'Auxerre, qui rend compte de la fédération de la garde nationale du département de l'Yonne, qui a eu lieu dans cette ville le 31 mai dernier; elle annonce.que tout s'y est passé dans le plus bel ordre, avec des démonstrations de la pîus grande cordialité et d'un dévouement absolu pour l'exécution de tous les décrets de l'Assemblée nationale.
Adresse des six municipalités composant l'annexe de Vers ; elles demandent que cette annexe soit érigée en cure.
Adresse des brigadiers et dragons du régiment de la reine, en garnison à Laon, qui expriment le plus vif désir de cimenter, par un pacte fédé-ràtif, l'union de leurs forces à celles de la garde nationale,;pour le maintien de la nouvelle Constitution, et l'entière exécution des décrets de l'Assemblée nationale sanctionnés par le roi.
Adresse de la garde nationale de Lorris, en Gtinais.
Adresse de la commune de Moissac, et de celle de Bonne vaux, en Franche-Comté.
Adresse de la municipalité de Ceaux, département de la Vienne, portant soumission, d'acquérir pour 40,000 livres de biens nationaux.
Adresses des religieux carmes et cordeliersdela ville de Tarbes ; ils offrent à l'Assemblée le premier hommage de la liberté qu'elle leur a rendué, en prêtant entre ses mains le serment civique.
Adresses des assemblées primaires des cantons deSaint-Simon,districtdeSaint-Quentm;Ghaource, département de l'AubevGhaunay, département de la Vienne; de Nérac, département de Lot-et-Garonne] de Monségur, département de la Gironde ; de Seissan ; de la ville de Montpellier; de Chesley, département de l'Aube; de la ville de Dunkerqne; de Nevian, département de l'Aude; de Marolles, département de laSarthe ; de Pellegrue en Albret ; de la ville de Condom; de Villefranehe ; d'Albigeois; de Gradignan près Rordeaux; de la ville aé Niort et des environs, département de Saône-et-Loire ; des districts de Neuville, département du Loiret, et de Gbâteauneuf-en-Thimerais.
Adresses des assemblées électorales du département de la Marne, de celui de la Haute-Marne, de celui de Saône-et-Loire, et, enfin, de celui de la Menrthe : toutes ces assemblées consacrent les premiers moments de leurexistence pour présenter à l'Assemblée l'hommage d'une adhésion respectueuse à tous ses décrets, et d'un dévouement sans bornes pour en maintenir l'exécution. La plupart improuvent expressément la déclaration d'une partie de l'Assemblée, ainsi que tous les écrits qui tendent à affaiblir le respect et la confiance dus à ses décrets; elles supplient l'Assemblée de ne pas se séparer avant d'avoir consommé le grand ouvrage de la Constitution.
Adresse des électeurs du district de Gien, portant adhésion aux décrets de l'Assemblée natie-tale acceptés ou sanctionnés par le roi ; elle improuye une protestation qui paraît revêtue de la signature de plusieurs membres de l'Assemblée nationale, et désavoue hautement ceux des députés chargés de la représentation des différents pays compris dans ce district, qui ont pu, par erreur, participer à cet acte.
Délibération des habitants de Samt-Cyr, dans le district de Chàtillon-lès-Dombes, département de l'Ain, portant adhésion et soumission respec- j
tueuse aux décrets de l'Assemblée.nationale, plus, abandon, au profit de la nation, de l'imposition des ci-devant privilégiés pour les six derniers mois de 1789.
A la suite est une déclaration du sieur Berthet, curé et maire du même lieu, portant qu'il n'a pas voulu prendre possession ni résigner un canoni-cat auquel il a été nommé dans le chapitre de Châtillon, depuis un an, pour éviter à la nation le paiement d'une pension. .
Délibération des habitants de la Perouze, dans le département de l'Ain, portant adhésion aux décrets de l'Assemblée nationale, et abandon de l'imposition des privilégiés des six derniers mois de, 1789.
Adresse de la ville de Chalençon, en Vivarais, quiim prouve la délibération des-citoyens catholiques de Nîmes.
fait lecture d'une adresse des écoliers des prêtres-de ^'Oratoire, dé Jfantes, qui font don d'une somme de 410 livres.
L'Assemblée autorise ce membre à leur écrire une lettre de satisfaction.
secrétaire, reprend la lecture des adresses ainsi qu'il suit :
Autre adresse de la municipalité de Montpellier, qui prie l'Assemblée de recevoir sa soumission pour l'acquisition de biens nationaux à sa convenance, jusqu'à la concurrence de quatre millions, avec prière de. lui permettre d'augmenter son nffre, lorsque les commissaires, qu'elle aura nommés auront découvert d'autres biens nationaux à sa convenance.
Délibération de la commune de Garcassonne, contenant sa soumission pour achat de ;biens nationaux, jusqu'à concurrence de quatre millions.
annonce qu'il â remis au comité ecclésiastiqueiune soumission de la ville de Sens, pour acquérir pour douze millions de biens nationaux, .indépendamment de sa première .-soumission, montant à huit millions.
, secrétaire, continue l'énoncé des adresses et délibérations :
Délibération de la commune^énérale de Vannes, portant soumission de deux millions quatre cent mille livres, pour l'acquisition de biens nationaux.
Adresse des commissaires du roi du département du Morbihan, par laquelle ils annoncent les transports d'allégresse qu'a excités dans l'Assemblée générale du département la proclamation du roi.
Adresse de la municipalité de Toulon, portant adhésion aux décrets de l'Assemblée nationale ; envoi d*un pacte de confédération des troupes nationales dans différents corps de eefcte ville, et des troupes réglées qui y sont en garnison; enfin, une dénonciation, de M. l'évêque de Toulon, sur le refus qu'il fait de prêter le-serment civique, et sur une lettre pastorale et un mandement par lui adressés aux religieux et religieuses de son diocèse, et contenant des principes opposés à ceux de la Constitution. A celte adresse est jointe une lettre de M. l'évêque de Toulon à la municipalité de cette ville, en date du 14 mai 1790.
L'Assemblée nationale, après avoir entendu la lecture de l'adresse et de la lettre, en ordonne le renvoi au comité des rapports.
(Adresse de ^municipalité de Beaumont-lès-Lo-magne, qui fait à la nation le dou patriotique des impositions ides ci-devant privil^iés, pour âes six derniers mois de ill89.
Autre adresse d'adhésion, > de félicitalion iie la ville deiBaulc^nev en i©ooaminges, qui offre d'acheter Dabbaye de Nifeut, avec toutes, ses (dépendances.
Adresse des maîtres écrivains de la ville»de Bordeaux, qui font don à la nation de xieux contrats au principal de 1,920 livres, formant, avec les intérêts échus, da^somme de £,136 livres.
propose d'ajourner à samedi soir, au premier ordre du jour, la discussioa du rapport des comités d'agriculture et de commerce, sur la compagnie des Indes. Cette motion est adoptée.
, wvenvbre du wmitè des'rapports,, fcdt'le 'résumé >de 'l'affaire de Saint-Jean-de-Luz, dont li a rendu compte dans la séance -de 'samedi soir, '5 juin.
!Des jeunes :gens de la Ville ont offert de 'payer une contribution égale à 'trois journées .'de travail en demandant à être admis à l'assemblée de'la ville. Ayant été refusés, ils se Jsont rendus chez un notaire et ont fait constater le refus qu'ils ont éprouvé. Ils son't ensuite revenus à l'assemblée électorale où leur présence a répandu le trouble ; une partie des citoyens actifs «'est retirée alors à l'hôtel de ville et y a formé une municipalité'. De1 leur côté, les 'dissidents ont constitué d'autres municipaux, ont organisé uhe nouvelle gardena-tionale ; puis vingt hommesarmés ont prischez eux lés membres de l'ancieime municipalité, les ont conduits à l'hôtél de ville et'les ont forcés à consentir aux nominations qui avaient été faites.
Le rapporteur termine en proposant un ,projet de décret, pour valider les premières életftions et annuler les secondes.
rend un ^compte détaillé de toute cette affaire et dit que les deux partis en présence dans la ville ont eu des torts réciproques. Il combat le projet de décret du comité et en présente un autre.
On demande la priorité pour Ile projet de Wk de MaCaye.
Cette priorité estaccordéeet le décret est rendu, sauf rédaction, dans les termes suivants :
«L'Assemblée nationale, après avoir entendu son comité >des rapports, instruite que, malgré lesiéispostltosB formelles deJson décret du' 18 «wWl dernier, rendu pour la ville 'de Saint-Jean-de-Luz en particulier, de nouvelles difficultés, de nouveaux obstacles et'de nouveaux troubles suspendent encore, dans cette ville, l'exécution des décrets constitutionnels'pour la formation desmu-nicipàlités; que même, en contravention 'à ces décrets, et malgréies oppositions des'anciens ©ifliciers municipaux,, il s'y est tenu des assemblées, et qu'on a vu y procéder à des'élections /déclare nulles et inconstitutionnelles toutes élections déjà faites ou qui pourraient l'être contre la teneur de ces*décrels, depuis le premier janvier dernier.
« Décrète Cfue, conformément à leur disposition, et particulièrement en exécution de celui du 18 avril dernier, les anciens officiers municipaux «on voqueront Rassemblée des citoyens actifs decètte viRe, pour la nomination delà nouvelle municipalité, après que les 'commissaires du département des Basses-Pyrénées, dans lequel se trouve comprise la villede Saint-ïean-de-Luz, auront formé la liste des eitoyens'aiîtifs ée Sain t-
J:ean-de-Luz, d'après les rôles des impositions directes de la capitation et des vingtièmes de ladite ville, après avoir préalablement vérifié si la > totalité* ou une partie des revenus publics et communaux (de nSatntrîeaii'de-Luz estappliquée au payement desdites impositions ; et dans le cas où la totalité ;ou uneipartie de ces revenus serait employée.à payer lesdifces impositions directes de laicapitatioin iet des viragitièœiies;-cette totalité ou cette partie des revenus publics sera répartie entre les contribuables auxdites impositions au marc la livre, et ajoutée à leurquote-rpart d'impositions pour les aider à atteindre le tribut exigé pour être citoyen actif; que la journée de travail demeurera fixée dans cette» vil le au taux qui avait été déterminé par. les officiers muaicipaux.
« Déclare qu'aux termes de .-ses précédents décrets, et notamment de celui du 7 janvier dernier,et de l'article 4 de celui du 23afévriar suivant, les anciens officiers municipaux de Saint-Jean-de-Luz sont autorisés à requérir le .secours de,la municipalité de Bayonae, ou de toute (autre municipalité voisine, ainsi que des gardes nationales et des troupes de ligne qui se trouvent dans leur territoire, pour se mettre en état d'assurer l'exécution des décrets acceptés ou sanctionnés par le roi, et opérer en conséquence dans .lai ville de Saint-Jean-de-Luz le rétablissement de Tordre, du calme et de la subordination.
« Décrète que les armes enlevées de l'hôtel de ville ,:y seront . incessamment restituées pour être,remises, d'après les ordres et sous la surveillance des officiers municipaux, aux citoyens enrôlés dans l'ancienne milice du Pays de Labour, lesquels, jusqu'à la nouvelle organisation des gardes nationales, formeront celles de, Saint-Jean-de-Luz avec les autres citoyens de la même ville qui pourront y être admis.
«Décrète queson président se retirera, sans délai, par devers le roi pour lui demander la sanction du présent décret, et le supplier en même temps de donner les ordres nécessaires, soit à ses commissaires, soit aux chefs de ses troupes ou à tous autres, pour a/ssurer aux anciens officiers municipauxde Saint-Jfean-dehLuz, tousles secours qu'ils pourront être forcés de requérir dans .l'exercice des fonctions quii leur sont confiées. »
L'ordre du ij/our appelle ensuite un irappoct du comité des recherches,, sur une arrestation d'argent ifaite à Nantua.
, rapporteur. L'affaire dont j'ai à' vous entretenir s'est trouvée, portée au comité des recherches, quoique sous aucun point de vue elle ne puisse tle concerner. Je suis cependant chargé devons eu faire lerapport. Le 8 mai dernier, les officiers municipaux dès villes de Nantua et de Ghâtillon ont arrêté-de d'argent expédié pour Genève: les barils contenaient 11,611 piastres, et 600 louis en or. La 'feuille du conducteur de la messagerie n'était pas Chargée de cette dernière somme. Le comité des recherches 'pense que les piastres doivent être remises Vi eeux qui les ont expédiées; que les 600 louis doivent être'restitués : aux négociants qui les avaient - envoyés,-sauf "le" recours contre eux en faveur des négociants qui devaient les 'recevoir; que désormais aucune ; somme d'argent monnayé ne pourra être expédiée pour le pays étranger, sans une permission contresignée du-principal ministre tle3 finances.
Je prsnds'occasion de cette affaire pour dénoncer à l'Assembféa. nationale les vexations deitodte sorte •qu'éprouvent sur les fron-
tières el notamment à Pont-de-Beauvoisin ceux qui sortent de France.
M. de Montlosier est hors de la question que vous discutez en ce moment; je l'invite à rentrer dans l'affaire particulière qui nous occupe; pour le surplus, il peut dénoncer les faits qu'il révèle au comité des rapports et lui envoyer les pièces probantes qu'il peut avoir en sa possession.
, l'aîné. Le comité nous propose un projet de décret qui contient trois parties : je propose de n'en laisser subsister que la première et je crois, en même temps, qu'il y a lieu de blâmer les municipalités qui s'arrogent le droit d'arrêter le numéraire que l'on exporte.
Il existe d'anciennes lois qui prohibent l'exportation du numéraire hors du royaume; comme ces lois n'ont pas encore été abrogées, les municipalités des frontières sont tenues de les faire exécuter.
t, le jeune. Si ces lois existent réellement encore, il faut se hâter de les abroger et de les expulser de notre arsenal judiciaire.
Je pense qu'il faut se hâter de détruire des lois aussi impolitiques que celles dont on nous révèle l'existence; leur exécution est impossible et leur effet se borne à arrêter l'essor du commerce. Comment pourrait-on solder les grains que nous achetons à l'étranger, en temps de disette, si l'on ne pouvait exporter du numéraire hors de France?
t met aux voix la division réclamée par M. Garat l'aîné. Elle est prononcée.
Les deux dernières parties sont écartées par la question préalable.
Le décret est ensuite rendu dans les termes suivants :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des recherches, décrète que les piastres et les sommes d'or et d'argent arrêtées a Châtillon le 8 mars dernier, sur la réquisition de la municipalité de Nantua, seront remises aux sieurs Pomeret fils et Cie, et autres maisons de commerce de Lyon et de Paris, qui les avaient expédiées pour Genève. »
, secrétaire, fait lecture d'une lettre de M. le curé de Saint-Germain-l'Auxer-rois, qui prévient l'Assemblée nationale que, conformément au désir du roi, la messe paroissiale sera célébrée jeudi dix, du présent mois, à dix heures précises, au lieu de neuf heures.
Le même secrétaire a fait lecture d'une note des expéditions en parchemin des lettres patentes et proclamations sur les décrets de l'Assemblée nationale, pour être déposées dans les archives de l'Assemblée :
« 1° De lettres patentes sur le décret du 21 du mois dernier, qui autorise la municipalité de Marseille à faire un emprunt de 1,500,000 livres ;
« 2° De lettres patentes sur le décret du 27, relatif à ce qui s'est passé dans l'assemblée primaire de l'Arbrêle;
« 3° De lettres patentes sur le décret du même jour, concernant les saisies et ventes de meubles contre les communautés ecclésiastiques, la remise des titres de leurs créanciers, et les procès rela-
tifs aux fonds qui ont été déclarés être à la disposition de la nation;
4° De lettres patentes sur le décret du même jour, qui défend à toutes personnes d'exiger que le prix du gain soit taxé;
5° D'une proclamation sur le décret du premier de ce mois, concernant les élections faites dans les assemblées primaires du département du Haut-Rhin;
6° Et enfin de lettres patentes sur le décret du 2, concernant les poursuites à exercer et les précautions à prendre contre les brigands et les imposteurs qui séduisent, trompent et soulèvent le peuple,-notamment dans les départements du Cher, ae la Nièvre, de l'Allier et de la Corrèze.
Paris, le
, membre du comité des rapports, rend compte d'une affaire qui concernera municipalité de Schelestadt. Plusieurs citoyens de la ville ont demandé la nullité de l'élection de la municipalité ; cette demande a eXcité la colère des officiers municipaux dont la nomination était contestée, et ils se sont livrés à des coups d'autorité répréhensibles.
Le rapporteur commence par rendre compte des irrégularités que l'on reproche dans l'élection des officiers municipaux ; il parle ensuite de l'emprisonnement illégal de deux citoyens arrêtés par les ordres des municipaux pour le seUl fait d'avoir contesté l'élection. Le rapporteur établit le bien fondé des motifs sur lesquels se fondent les réclamants ; il rappelle les principes qui condamnent la conduite répréhensible des officiers municipaux vis-à-vis des deux personnes emprisonnées; ehlin, il propose un projet de décret.
Je demande qu'il soit ajouté au décret une disposition portant que, dans la nouvelle élection qui aura lieu, les officiers municipaux coupables d'avoir attenté à la liberté des citoyens ne pourront être ni électeurs, ni éligi-bles.
Je demande que le maire soit mandé à la barre pour rendre compte de sa conduite.
(Cet amendement est adopté.) Le décret est rendu ainsi qu'il suit : « L'Assemblée nationale, après avoir entendu son comité des rapports, a déclaré irrégulière et nulle l'élection de la municipalité de Schelestadt, faite le 27 janvier dernier et jours suivants; ordonne que, dans la huitaine ae la notification du présent décret, des commissaires, nommés par rassemblée du département du Bas-Rhin, se transporteront à Schelestadt pour y convoquer l'assemblée générale des citoyens actifs, à l'effet de procéder à la formation d'une nouvelle municipalité; laquelle assemblée ne pourra être tenue que huit jours après celui où elle aura été convoquée.
« L'assemblée autorise les commissaires du département à maintenir la policede la ville et des assemblées pendant le cours des opérations et à veiller à l'exécution entière de tous ses décrets concernant les assemblées primaires, jusqu'à la nomination et installation des officiers municipaux qui seront élus. Les autorise pareillement à requérir, s'il est besoin, l'assistance des gardes nationales et troupes de ligne.
« Déclare les fonctions de maire, procureur de la commune et officiers municipaux, incompati-
bles avec le tout ou partie des fonctions de syndic, de magistrat et de secrétaire-greffier de municipalité, et que ledit syndic ou greffier ne pourra prétendre voix délibérative dans les assemblées municipales, soit pour l'administration, soit pour le contentieux.
« En ce qui concerne l'emprisonnement des sieurs Ambruchs et Furchs, l'Assemblée nationale déclare ledit emprisonnement et la procédure qui l'a suivi nuls et vexatoires ;
« Ordonne que lesdits sieurs Ambruchs et Furchs seront élargis et remis sous la sauvegarde de la loi;
« Réserve leurs droits à raison de leur détention, pour les exercer eontre qui et ainsi qu'il appartiendra ;
«Ordonne que les officiers municipaux de Sche-lestat, dont 1 élection vient d'être annulée, seront, à l'exception dés sieurs Zepfell, Fels et Maimbourg, mandés à la barre ;
« Déclare que les officiers municipaux deSche-lestat et tous autres ne peuvent priver aucun citoyen de sa liberté, si ce n'est dans les cas in-diqués par la loi, et d'après les formes qu'elle a prescrites;
« Déclare, au surplus, sur la réquisition des anciens préteur, magistrats et conseillers de Schelestadt, quejleur destitution faite, par les habitants au mois d'août dernier, ne porte aucune atteinte à l'honneur et à la réputation desdits officiers, ni aux droits qu'ils peuvent avoir à exercer: lesquels, ainsi que ceux de toutes les parties, demeurent à Cet égard respectivement réservés.
« L'Assembléé nationale charge "son président de se retirer incessamment vers le roi, pour supplier Sa Majesté de sanctionner le présent décret, et de donner les ordres nécessaires pour sa prompte et entière exécution. » . (La séance a été levée à onze heures.)
du
OPINION DE M. DUQUESNOY
sur la suppression des chapitres de femmes (1).
Lorsque, à la séance du 8 juin 1790, on allait délibérer sur l'article 31 du projet de décret du comité ecclésiastique, et prononcer la suppression de tous les établissements non conservés dansles articles précédemment décrétés, j'ai demândé que dans cette disposition on comprît formellement! les chapitres, les abbayes, les prieurés de femmes. Cet amendement a été accueilli avec un tel empressement, qu'il n'a pas été nécessaire de détailler tes motifs qui me le faisaient proposer; mais je crois devoir les exposer en très peu de mots, pour qu'ils soient connus de mes commettants.
1° L'article 31 du comité ecclésiastique était équivoque, et en portant suppression de tous les établissements non conservés, etc., il semblait comprendre les établissements de femmes. Cette équivoque ne convient en aucune manière à l'As-
semblée nationale ; elle a dû s'expliquer comme elle l'a fait toujours, avec vérité et sans détour.
2° Les chapitres de femmes sont entièrement inconstitutionnels. L'esprit de la Constitution est d'anéantir toute corporation particulière, de réunir tous les citoyens de l'Empire par des liens communs: il faut qu'en France, comme dans la nature, il n'y ait pas de classes; il faut qu'il n'y ait que des individus qui forment un tout. L'existence des chapitres est incompatible avec ces principes.
3° Rien n'est plus opposé aux premiers éléments d'une bonne organisation sociale qu'un établissement qui invite au célibat, qui le rend agréable, en attachant à ce célibat même une existence aisée et honorée.
4° Le motif que l'on donnait sous l'ancien régime, pour conserver les chapitres, pour les enrichir chaque jour, était qu'ils pouvaient servir de secours à la pauvre noblesse, car alors on faisait pour la pauvre noblesse beaucoup d'établissements dont la noblesse très riche profitait seule; mais ce motif, ou plutôt ce prétexte, n'existe plus. Il est bien reconnu aujourd'hui que l'Etat doit à tous ses membres des moyens de subsistance, c'est-à-dire du travail aux valides, des aliments à ceux qui ne peuvent pas travailler et qui n'ont pas de quoi vivre. Mais ces charges indispensables de la société peuvent sans doute être fort bien remplies sans chapitres de femmes. Il est même assez difficile de concevoir en quoi peuvent aider à les remplir les chapitres qui donnent 50,000 livres à une abbesse déjà très riche, qui assurent des prébendes à des femmes nées dans l'opulence, etc., etc.
5° On a dit que ces chapitres étaient utiles parce qu'ils faisaient vivre les villes^ les cantons où ils sont placés, et où se dépensent les revenus. Gela me paraît bien loin d'être exact.
Certainement, la suppression des maisons religieuses était, dans l'ancien ordre de choses, une opération nuisible aux lieux où existaient ces maisons. Un exemple expliquera cette idée. On a supprimé à Metz les Jésuites, les Célestins et les Antonistes. La portion de revenu que consommaient ces trois ordres, a été tirée de la ville de Metz ; elle n'y a plus été dépensée, et les impôts de cette ville n'ont pas été diminués.
Mais quand de la suppression des maisons religieuses résulte une diminution dans l'impôt, parce que leurs possessions servent à rembourser des capitaux dont l'Etat payait l'intérêt; quand ces revenus ne seront pas dépensés hors des lieux où sont situés ces biens, puisque l'acquéreur, assimilé à tous les autres propriétaires, résidera comme eux dans son champ, je ne vois pas en quoi la suppression des maisons religieuses peut être nuisible.
On a dit sans cesse, on a répété jusqu'au dégoût, que les établissements religieux, les chapitres, etc., faisaient vivre beaucoup de monde. Gela n'est pas vrai : c'est la consommation d'une telle quantité de revenus sur les lieux qui fournit des moyens de subsistance à'ceux que font travaille* lës possesseurs de ces revenus. Mais qu'importe, sous ce point de vue, qu'ils soient dépensés par un corps ou par des individus ? Ce que doivent désirer les habitants du canton, c'est que les revenus soient dépensés sur les lieux. Or, plus ils seront divisés, plus il est probable qu'ils ne seront pas dépensés au loin. Voilà ce qui n'a pas été assez senti dans tous les cantons qui ont demandé la conservation d'établissements religieux de monastères, de chapitres, etc.
On n'a pas vu que la suppression de ces établissements n'entraîne pas du tout lai privation de leurs revenus, pourle canton où ilsi sont situés; eHe leur en assure^ au contraire; la jouissance, en multipliant les possesseurs. Au reste, il n'est! aucun des raisonnements applicables aux chapitres de femmes, que l'on n'ait faits en faveurdes' maisons religieuses d'hommes, et aucun auquel on n'ait répondu.
6° Il n'est personne: qui ne sache que les chanoinesses étaient dans le principe des moiwesses; elles ont dégénéré de la simplicité respectable de leuri institution première, lorsque l'orgueil et llopulence eurent pénétré dans les cloîtres. Elles sont devenues riches, chanoinesses nobles de la même manière et par lesr mêmes causes que des moines, voués à la pauvreté, à la> simplicité,. sont devenus princes souverains. Il n'y a aucune raison qui puisse porter l'Assemblée nationale à faire pour un ordre de religietix, pour une classe quelconque de religieux, une exception contre laquelle s'élèveraient: éternellement les principe» fondamentaux de la Constitution eti le décret qui supprime les; ordres; monastiques.
7° 1J serait inconcevable que lorsque l'Assemblée nationalea mis et dû mettre à la disposition de la nation tous les biens ecclésiastiques^ uni-établissement religieux, doté1 de bien® ecclésias;-tiques, les conservât. On pourrait demander sans cesse pourquoi cet oubli desprvncipes, pourquoi4 oette exception? Il est impossible d'en donner aucun motif ; et si, comme on ne peut raisonnablement en douter; l'Assemblée nationale a fait une opération très juste et très utile-, en dé-clarant propriétés nationales les possessions ee* Glésiastiquesv et et» les employant à liquider la dette punlique, les chapitres de femmes, qui très certainement n'ont pas en leur faveur1 les ser1--vices rendus à la religion, à l'agriculture et aux lettres par plusieurs ordres religieux, ne peuvent se soustraire à une loi non moins juste que nécessaire..
Ain si j sous1 quelque rapport que l'on envisage cette question, elle est facile à décider. La suppression des chapitres de femmes est une consé^-quence nécessaire et immédiate des principes constitutiondcIs. Ces chapitres sont inutiles, ils sont nuisibles j et leur dëstruction ne peut que profiter aux habitants des cantons où ils-sont situés, puisque leurs posgessions précaires et beaucoup trop concentrées seront divisées entre un grand nombre de propriétaires perpétuels, in-commu tables, qui consommeront leurs revenus sur les lieux.
Ce* sont là des principes sur lesquels on ne eut élever des doutes sérieux ; mais il me* semble qoe l'Assemblée nationale en les appliquant dans toute leur rigueur, doit être extrêmement soigneuse de ménager les intérêts particuliers. Il me semble qu'elle doit assurer aux titulaires actuels de bénéfices ecclésiastiques, une existence qui les mette à même de tenir les engagements qu'ils ont contractés dans un temps où ils ne pouvaient ni ne devaient avoir d'incertitude sur leur sort. Ce ne sera pas faveur, ce ne sera pas indulgence, ce sera justice;
L'Assemblée nationale me paraît entièrement dans cette opinion, qui trouvera bien peu de contradicteurs parmi les vrais amis de la liberté et de la prospérité de l'Empire. Ainsi, parmi les chanoinesses actuellement dans les chapitres, plusieurs ont- fait le sacrifice de leur fortune personnelle, pour s'assurer une existence honnête, d'autres ont renoncé à des espérances con-
sidérables, toutes-ont dû compter sur la'stabilité de leur état. Il est juste de leur en assurer un équivalent, il ne faut pas qu'Une Constitution! juste et fondée sur les-premiers principes du1 droit naturel., soit une source de malheurs privés1 et d'injustices individuelles. Voilà ce que sait1, ce que sent l'Assemblée nationale; voilà ce qui la guidera, lorsqu'elle statuera sur le sort des titufe lairesï
Séance du
La séance est ouverte à 9 heures du matin.
, ex-présidentoc* cupe le fauteuil, à la place ae M. l'abbé Sieyès qui n'est pas présent.
; secrétaire, donne lecture du procès-verbal dë là séance d'hier matin.
L'Assemblée renvoie la lecture et la rédaction définitive à demain.
, autre secrétaire, lit le procès-verbal de la séance d'hier au soir.
Ce procèsrVerbal est adopté.
fait lecture d'une lettre qui lui a été écrite par le commandant du 3e bataillon de la 3e division de la garde nationale parisienne et d'une adresse de ce bataillon à l'Assemblée nationale, contenant acte de dévouement et d'obéissance à ses décrets.
L'ordre du jour est la suite de la discussion sur le décret à porter concernant la fédération générale des gardes nationales et des troupes.
Conformément à vos ordres, le comité militaire s'est assemblé. Voici la rédaction définitive des articles qu'il m'a chargé de vous soumettre :
« Tous les corps militaires, soit fie terre, soit de mer, nationaux ou étrangers, députeront à la fédération patriotique, conformément à ce qui sera réglé ci-après.
« Chaque régiment d'infanterie ou d'artillerie députera l'officier qui sera le plus ancien de service parmi ceux qui seront présents au corps, ët les quatre soldats les plus, anciens de service», présents au corps; et pris indistinctement parmi" les caporaux appointés, grenadiers, chasseurs, fusiliers, ou tambours du régiment.
« Le régiment du foi et celui des gardes suisses enverront, à raison de leur nombre, une députation double de celle fixée pour les régiments ordinaires.
« Les bataillons de chasseurs à pied députeront un officier, un bas-officier et deux chasseurs*, conformémentaux règles prescrites pour les régiments d'infanterie. .
« Le corps des ouvriers d'artillerie et celui des mineurs députeront chacun un officier, un
bas-
t Les mêmes règles ci-dessus seront observées pour tous les régiments de cavalerie, dragons, chasseurs et hussards, avec cette différence qu'ils ne députeront qu'un officier, un bas-officier et deux cavaliers seulement; lë seul régiment des carabiniers, double en nombre des régiments de cavalerie ordinaires, aura une députation doublé de ces derniers.
« Le corps royal du génie députera ïe plus ancien officier de chaque gradé; et, à égalité d'ancienneté, le rang de promotion décidera.
« La maréchaussée sera représentée par les quatre plus anciens officiers, les quatre plus anciens bas-officiers et les quatre plus anciens cavaliers du royaume.
« La compagnie de la connétablie sera représentée par le plus ancien individu de ehaquegrade d'officier, bas-officier ou cavalier.
« Par égard pour de vieux militaires qui ont bien mérité de la patrie, et qui ont acquis le droit de se livrer au repos, le corps des invalides sera représenté par les quatre plus anciens officiers, les quatre plus anciens bas-officiers et les douze plus anciens soldats retirés à l'hôtel royal des Invalides.
« Les commissaires de guerre seront représentés par un commissaire-ordonnateur, un commissaire ordinaire et un commissaire élève, le plus ancien dans chacun de ces grades.
« Le corps des maréchaux de France sera représenté par le plus ancien d'entre eux.
« Quant aux compagnies de la maison militaire du roi, de celle des frères de Sa Majesté et de tous les autres corps militaires non réunis, ils seront représentés chacun par le plus ancien de chaque grade d'officier, de bas-officier, de soldat qu de cavalier ; en cas d'égalité de service, le plus ancien d'âge aura la préférence.
« L'Assemblée nationale déclare qu'elle n'entend rien préjuger sur le rang des corps militaires ci-dessus dénommés» et même de. ceux qui ne le sont pas.
« Le roi sera supplié de donner les ordres nécessaires pour l'exécution du présent décret, »
Je crois qu'on a fait dans cet article une omission bien dangereuse. Les chefs de l'armée diront: Ehquoll cest nous qui commandons, c'est nous qui dirigeons la force militaire, et nous ne sommes point admis à la fédération 1 Je demande que lès maréchaux de France, les lieutenants généraux, les maréchaux de camp et les grades correspondants de la marine députent les deux plus anciens officiers de ces deux différents grades.
La proposition de M. Lanj,ui-nais est parfaitement conforme aux vues du comité. Nous n'avons prétendu interdire à personne l'honneur de députer à cette fédération.
(L!addition proposée par M. Lanjuinais est adoptée.)
Voici, Messieurs, le projet arrêté par le comité delà marine, dont je ne suis pas le rapporteur, mais dont je vais vous faire lecture en l'absence des membres du comité.
« Les deux plus anciens officiers de chaque grade, actuellement en service dans chacun des orts. de Brest, de Toulon et de Rochefort, seront éputés au nom du corps de la marine à. la confédération générale indiquée pour le 14 juillet.
« Chacune des divisions du corps royal des ca-nonniers-matelots, actuellement en service dans les ports de Brest, Toulon et Rochefort, députera le plus ancien des officiers, majors et sous-liea-tenants de la division, le plus ancien des basf-offi-ciers, et les quatre plus anciens des officiers-matelots.
« Les ingénieurs-constructeurs de la marine, servant dans chaque port de terre et de mer, députeront le plus ancien d'entre eux : les maîtres et officiers-mariniers, entretenus dans chaque port, députeront le plus ancien de service d'en* tre eux: et l'ancienneté sera comptée par le service de mer. »
Je demande que le plus ancien capitaine marchand de chaque port de mer soit aussi député à la fédération.
Les capitaines de navires marchands ne sont point des militaires; si vous admettiez cet article, tous les patrons de barque prétendraient être capitaines marchands. Je réclame l'ordre du jour.
Je propose, par amendement, de dire que les capitaines de la marine marchande, seront autorisés à députer à la fédération.
Il faut autoriser à députer, les capitaines des navires marchands des villes de Marseille, Bayonne, Bordeaux, la Rochelle, Nantes, Saint-Malo, Lorient, Gran ville, le Havre et DUnkerque.
Comme il ne s'agit, en fait, que de la fédération des milices nationales avec les troupes réglées, je ne comprends pas bien à quel titre les capitaines de vaisseaux marchands seraient admis à la cérémonie.
(de Saint-Jean-dAngêly.) Ea ma*-rine marchande est la pépinière où se recrute la marine militaire. Je crois donc qu'il faut dire que dans tous les ports' où il y aura amirauté les capitaines marchands députeront.
(On demande la clôture de la discussion.),
met aux voix les divers amendements et l'Assemblée nationale, rend le décret suivant :
« Tous les corps militaires, soit de terre1, soit de mer, nationaux ou étrangers, députeront à la fédération patriotique, conformément à ce qui sera réglé ci-après :
« Chaque régiment d'infanterie ou d'artillerie députera l'officier le plus ancien de service, les années de soldat comptées, parmi ceux qui seront présents au corps, le bas-officier le plus ancien de service parmi ceux qui sont présents au corps, et les quatre soldats les plus anciens de service, présents au corps, et pris indistinctement parmi les caporaux appointés, grenadiers, chasseurs, fusiliers, tambours et musiciens du régiment. I§ ,v f.
« Le régiment du roi et cel'ui des gardes suisses, à raison de leur nombre, enverront une députation double de celle fixée pour les régiments ordinaires.
« Les bataillons de chasseurs à pied députeront un officier, un bas-officier et deux chasseurs, Conformément aux règles prescrites pour les régi-' ments d'infanterie.
« Les corps des ouvriers de l'artillerie et celui des mineurs députeront chacun un officier, un bas-officier et deux soldats, comme pour les bataillons de chasseurs à pied.
« Les mêmes règles désignées ci-dessus seront observées pour tous les régiments de cavalerie, dragons, chasseurs et hussards; avec cette différence, qu'ils ne députeront qu'un officier, un bas-officier et deux cavaliers seulement. Le seul régiment des carabiniers, double en nombre des régiments de cavalerie ordinaire, aura une députation double de ces derniers.
« Le corps royal du génie députera le plus ancien officier de chaque grade; et, en cas d'égalité d'ancienneté, le rang de promotion décidera.
« La maréchaussée sera représentée par les quatre plus anciens officiers, les quatre plus anciens bas-officiers et les douze plus anciens cavaliers du royaume.
- « La compagnie de la connétablie sera représentée par le plus ancien individu de chaque grade d'officier, bas-officier et cavalier.
- « Par égard pour de vieux militaires qui ont bien mérité de la patrie, et qui ont acquis le droit de se livrer au repos, le corps des invalides sera représenté par les quatre plus anciens officiers, les quatre plus anciens bas-officiers et les douze plus anciens soldats retirés à l'hôtel royal des invalides.
« Les commissaires de guerre seront représentés par un commissair^ordonnateur, un commissaire ordinaire et un commissaire élève, le plus ancien de chacun de ces grades. -
« Le corps des lieutenants des maréchaux de France sera représenté par le plus ancien d'entre eux.
« Quant aux compagnies de la maison militaire du roi, de celle des frères de Sa Majesté et tous autres corps militaires non réunis, ils seront représentés chacun par le plus ancien de chaque grade.
« En cas d'égalité de service, le plus ancien d'âge aura la préférence.
« Les maréchaux de France, les lieutenants généraux, les maréchaux de camp et les grades correspondants de la marine députeront les deux plus anciens officiers de chacun de ces différents grades.
« L'Assemblée nationale déclare qu'elle n'entend rien préjuger sur l'existence ou le rang des corps militaires ci-dessus dénommés, et même de ceux qui ne le sont pas.
« Le roi sera supplié de donner les ordres nécessaires pour l'exécution du présent décret. »
DÉCRET CONCERNANT LA MARINE.
. « L'Assemblée nationale, sur la proposition de son comité de marine, a décrété ce qui
suit : Art. 1er. Le plus ancien des vice-amiraux et les deux plus
anciens officiers de chaque grade, actuellement en service dans chacun des ports de Brest,
Toulon et Rochefort, seront députés, au nom du corps de la marine, à la confédération
générale indiquée pour le 14 juillet. „ « Art. 2; Chacune des divisions du corps royal
deseanonniers-matelots, actuellement en service dans les ports de Brest, Toulon et Rochefort,
députera le plus ancien des officiers-majors et sous-lieutenants de la division, le plus
ancien des bas-officiers et les quatre plus anciens canon niers-matelots.
« Art. 3. Les ingénieurs-constructeurs de la marine servant dans chaque port députeront le plus ancien d'entre eux.
« Art. 4. Les maîtres de toute espèce et officiers-mariniers entretenus dans chaque port, députeront le plus ancien de service d'entre eux, et l'ancienneté sera comptée par les services de mer.
« Art. 5. Les deux plus anciens élèves et les deux plus anciens volontaires de la marine seront députés parle commandant dans chacun des ports de Brest, Toulon et Rochefort.
« Art. 6. Les commissaires généraux et ordinaires des ports et arsenaux et autres corps servant dans chacun des ports de Brest, de Toulon et Rochefort, députeront le plus ancien d'entre eux.
« Art. 7. Les capitaines de marine marchande pourront députer le plus ancien d'entre eux. »
, membre du comité de la marine, demande pour, l'accélération du travail et pour d'autres vues d'utilité, qu'il soit adjoint six autres membres à ce comité.
(Cette proposition est adoptée.)
annonce ensuite que la municipalité du Havre fait la soumission d'acheter des domaines nationaux pour quinze millions.
Votre comité militaire m'a chargé de vous rendre compte dé la situation actuelle de la ville de Montpellier, où, d'après la lettre que vous avez reçue de M. de Sain t-Priest, il avait été résolu de remettre les forts entre les mains des commandants des troupes du roi ; aussitôt que le peuple a eu connaissance du décret qui ordonne cette disposition, il voulait démolir la citadelle : la municipalité a cru que le seul moyen d'arrêter le désordre dans sa source était de confier la garde des forts aux volontaires. Au procès-verbal de la municipalité est jointe une pétition de l'assemblée primaire, pour la destruction delà citadelle de Montpellier.Voici le projet de décret que j'ai l'honneur de vous pré-, senter :
« L'Assemblée nationale décrète que son comité militaire lui présentera un état des citadelles et châteaux-forts du royaume, avec son opinion sur leur utilité ou sur leur inutilité, afin que, de concert avec le- pouvoir exécutif, elle puisse ordonner la conservation ou même l'augmentation de ceux qui seront jugés nécessaires, et la démolition de ceux qui seront inutiles; décrète, en outre, qu'elle regarde comme coupables ceux qui se porteraient à quelques excès contre les citadelles et châteaux-forts , charge son président de se retirer par devers le roi, afin de le supplier de donner des ordres pour que les gardes nationales de Montpel^ lier conservent les postes delà citadelle, conjointement avec la troupe du roi. »
Je crois qu'on ne doit point ainsi faire fléchir les grands principes. Je demande que le président se retire par devers le roi, pour le supplier de donner des ordres de faire évacuer la citadelle par les gardes nationales.
11 est absolument nécessaire d'adopter le projet du comité. Dès 1788, Sa Majesté avait ordonné de lui présenter l'état des places à conserver et de celles à démolir.
(Après une courte discussion, l'Assemblée demande à aller aux voix.)
Le projet de décret, modifié par le rapporteur, est adopté dans la teneur suivante :
« L'Assemblée nationale décrète que son comité militaire sera chargé de lui présenter incessamment un état de toutes les villes fortifiées, citadelles, forts, châteaux et autres fortifications qui existent actuellement dans le royaume, avec son opinion motivée sur l'utilité ou l'inutilité de ces différentes places; afin que, de concert avec le roi, elle puisse ordonner la conservation, les réparations, ou même l'augmentation de toutes celles qui seront jugées nécessaires pour la défense du royaume, et la démolition, vente ou abandon de toutes celles qui ne portent pas ce caractèred'utilité.
« Décrète, en outre, qu'elle regarderait comme coupables tous ceux qui, dans la ville de Montpellier ou partout ailleurs, se porteraient à quelques excès pour démolir, soit en totalité, soit en partie, les forts ou citadelles, et que son président se retirera devers le roi, pour le supplier de donner des ordres afin que les gardes nationales de Montpellier continuent de faire le service dans la citadelle, sous le commandement des officiers employés par Sa Majesté, jusqu'à ce qu'il ait été pris un parti décisif sur la conservation ou abandon de la citadelle de Montpellier. »
, membre du comité militaire, rend compte de quelques contestations survenues entre les canon niers-matelots du corps de la marine, les grenadiers et les fusiliers des régiments de Beauce et Normandie, en garnison à Brest, à l'occasion de la police des spectacles. Il propose un projet de décret qui est mis aux voix et adopté par l'Assemblée.
Suit la teneur du décret
: « L'Assemblée nationale décrète qu'elle est satisfaite du zèle pour le service, et du désintéressement que témoignent les fusiliers des régiments de Beauce, Normandie, et les canonniers-matelots du corps de la marine, ainsi que de la modération et des sentiments patriotiques des grenadiers de ces régiments; mais que, s occupant avec activité de la nouvelle organisation militaire, qui doit être également avantageuse à toutes les classes qui composent l'armée, elle juge que toutes les anciennes ordonnances de police et militaires, sur la nature et les formes du service, et notamment sur la police des spectacles, doivent être exécutées provisoirement jusqu'à ce qu'il en ait été autrement ordonné.
« Décrète, en outre, que son président se retirera devers le roi, pour supplier Sa Majesté de donner des ordres afin de maintenir l'harmonie et l'union entre les différents corps qui composent la garnison de Brest. »
, membre du comité de Constitution, donne connaissance à l'Assemblée d'une division existant dans la ville de Querhôent-de-Montoire, et occasionnée par la formation d'une seconde municipalité dans là paroisse de Saint-Oushille. Il propose un projet de décret qui est adopté comme il suit :
- « L'Assemblée nationale, après avôir entendu son comité de Constitution, déclare nulle et inconstitutionnelle la seconde municipalité formée, le 27 mai, par les habitants de la paroisse de Saint-Oushille-de-Montoire; elle ordonne que la première municipalité fera seule dans cette ville les fonctions municipales. *
, député de Crépy-en-Valois, supplie l'Assemblée de lui permettre de s'absenter
pendant quinze jours pour affaires importantes. Cette permission lui est accordée.
D'après les décrets qui ordonnent la réunion des gardes nationales dans cette ville, pour l'auguste cérémonie qui doit sanctionner notre Constitution, je crois qu'il serait juste d'accorder à tous ces députés du royaqme les tribunes destinées au public pour entendre vos séances.
(de Saint-Jean-d' Angély). Il n'est personne, même dans les tribunes, qui n'approuve la proposition qui vous est faite; c'est le vœu de la capitale entière que vous allez consacrer. Je crois donc qu'il ne faut réserver que la place des suppléants et abandonner le reste aux gardes nationales. Le décret suivant est rendu :
« L'Assemblée nationale, voulant procurer à ses membres la facilité de donner des billets de tribune aux députés extraordinaires qui se rendront à Paris pour la confédération générale, a arrêté que, du 10 au 20 juillet inclusivement, toutes les tribunes de la salle seront destinées à ces députés extraordinaires, et qu'en conséquence il sera distribué journellement aux membres de l'Assemblée des billets proportionnés au nombre des personnes qu'elles peuvent contenir. »
annonce que la municipalité de Versailles fait soumission d acquérir pour trois millions de domaines nationaux.
L'Assemblée passe;àla suite de la discussion sur la constitution civile du clergé.
, rapporteur. Je propose à l'Assemblée une nouvelle rédaction des trois articles déjà décrétés concernant les vicaires ; la répartition est basée sur la population.
L'Assemblée renvoie cet objet au comité, conformément à un décret précédent.
, rapporteur, donne lecture de 'article 1er du titre II. Cet
article est adopté, sans opposition, ainsi qu'il suit :
TITRE II.
De la manière depourvoir aux offices ecclésiastique.
« Art. 1er A compter du jour de la publication du présent
décret, on ne connaîtra qu'une seule manière de pourvoir aux évêchés et aux cures : c'est à
savoir la forme des élections. »
lit l'article 2.
Je propose un amendement à cet article et je demande que le scrutin soit fait à liste double.
Divers membres demandent la question préalable sur l'amendement.
La question préalable est prononcée et l'article est adopté en ces termes :
« Art. 2. Toutes les élections se feront par la voie du scrutin, et à la pluralité absolue des suffrages. »
, rapporteur, donne lecture de l'article 3 et dit :
Pour abréger la discussion, je préviendrai quelques-unes des objections quon pourra me faire. On me dira que tous les anciens canpns portent que les élections se' faisaient par lés métropolitains, du consentement du peuple, consensu ctericorum et pleins, et que, d'après l'article que je propose, il serait très possible qu'aucun: ecclésiastique ne concourût à la nomination del'évê-que; mais je réponds que tous les ecclésiastiques sont citoyens actifs, qu'assistant aux assemblées primaires, ils pourront assister aux assemblées électorales : il y en a même en ce moment qui viennent d'être élus maires ; ils procéderont donc à la nomination des évêques, conjointement avec le peuple. J'entends plusieurs personnes dire que cela n'est pas vrai ; que ceux qui le disent s en aillent à la bibliothèque de Saint-Germain-des-Près, ils prendront la collection des conciles, et ils y trouveront un recueil des décrets d'élections faites par le peuple et1 par le clergé. Lorsqu'il fut quesiion de substituer un apôtre à celui qui avait trahi son divin maître, ce choix ne fut pas fait par les apôtres seulement, mais par tous lés disciples. Après le martyre de saint Jacques, premier évêque de Jérusalem, tous les fidèles furent admis à nommer son successeur. Il est done évident que dans les temps où la religion était dans toute sa pureté, le peuple était admis à l'élection des évêques. Il n'y a donc point d'inconvénient à adopter le projet que je viens de vous soumettre.
, évêque de Clermont. Fidèle à mes principes, dans cette circonstance où il s'agit du plus grand,intérêt delà religion,, de l'élection de ses principaux ministres, je crois devoir renouveler la déclaration de ne pouvoir participer...... (ZJ s'élémdes murmures.).
, député d'Angers ( 1). Je ne puis qu'admirer, Messieurs, et rendre hommage au zèle vraiment apostolique dont votre comité ecclésiastique a fait preuve dans le rapport qu'il vient de remettre sous vos yeux. Dans un siècle dont l'impiété et la licence sont en quelque sorte le caractère dominant, je n'osais plus me flatter de voir renaître les vertus de l'Église primitive, les beaux jours de la religion; cependant le magnifique projet de votre comité me laisse entrevoir une aurore de bonheur, et mon cœur ose s'ouvrir encore aux douceurs de l'espérance.
Je l'ai examiné, je l'ai médité, dans le silence dès passions, ce plan si religieusement énoncé; j'ai écarté, autant qu'il a été en moi, tous les nuages dont l'intérêt^ l'amour-propre auraient pu le défigurer à mes veux : concentré, absorbé, si j'ose m'exprimer ainsi, dans l'amour du bien général, je n'ai écouté que lui, je lui ai subordonné toutes mes affections particulières. Mais hélas 1 qu'il me paraît loin encore du but qu'il se propose d'atteindre. Je n'entreprendrai pas de l'attaquer dans toutes ses dispositions : je me borne à l'article fourni à votre délibération : il est assez important pour mériter une discussion particulière. . - Cet article donne le choix des évêques aux électeurs du département : je vous l'ai déjà dit, Messieurs, j'admire bien sincèrement le zèle de votre comité; mais, dans cette occasion, je suis tenté de le croire plus ardent qu'éclairé.
D'autres temps, d'autres mœurs. Ne nous laissons pas égarer par la chimère de la perfection
;
Faut-il, Messieurs, rappeler à votre souvenir ces temps malheureux sur lesquels l'Église gémit encore, et qu'elle voudrait effacer de ses annales ; ces temps, dis-je, l'opprobre du nom chrétien, où. l'on vit des prostituées, pendant une longue suite d'années, égarer le peuple dans la capitale de l'Univers, et lui faire élever sur le premier siège de l'Église les compagnons de leurs débauches9 Voudrait-on nousrappeler à ces temps de corruption et de désordres ? Avons-nous moins de vices ou plus de vertus qu'on en avait alors? Ah l nous sommes plus éclairés sans doute; mais nos lu* mières nous ont-elles rendus meilleurs? Elles nous ont appris à donner des formes, des couleurs agréables aux vices; nous sommes plus décents, mais par là même nous ne sommes peut-être que plus corrompus ; nous sommes moins superstitieux, mais aussi beaucoup moins religieux. Est-ce dans un siècle où la soif de l'or et des plaisirs a tout dénaturé, qu'on devait nous proposer de confier à une petite partie du troupeau le choix si important de. ses premiers pasteurs? N'est-ce pas vouloir aggraver, perpétuer nos maux, et nous fermer la seule voie qui puisse nous en délivrer?
Pour nous vanter le choix des peuples, on nous cite avec complaisance les Athanase, les Ambroise; mais on passe adroitement sous silence tous ces mauvais pontifes qui, portés par un peuple séduit à la première dignité de la religion, en ont été l'opprobre et le scandale. On couvre d'un voile épais ces scènes horribles qui, plus d'une fois, firent couler le sang entre le vestibule et l'autel;
Ne nous le dissimulons pas, Messieurs, quelles que soient les bornes que votre comité a imposées au pouvoir et aux richesse® de l'épiscopat, il tentera toujours l'ambition et la cupidité des mauvais ministres. Quoi que nous puissions faire* les évêques seront toujours, par la sainteté de leur caractère, l'excellence de leur sacerdoce, la sublimité de leurs fonctions, l'étendue de leurs pouvoirs, les magistrats les plus importants dans l'ordre politique et religieux. Il est donc absolument indispensable d'établir un nouvel ordre de choses, qui ouvre la carrière aux talents, à la vertu, et la ferme constamment au vice et à l'intrigue. Or, ce nouvel ordre de choses, Messieurs, croyez-vous que votre comité l'a bien saisi, en confiant aux électeurs des départements, un choix qui doit avoir tant d'influence sur les mœurs d'une nation que vous vous proposez de régénérer ?
Quels seront eneffetcesélecteurs? Ce seront, pour l'ordinaire, des habitants; démos- campagnes,,ou tout au. plus des petites villes:et des gros bourgs où vous avez été obligés de fixer les chefs-lieux de districts : ce seront des fermiers, communément, peu capables de peser et d'apprécier les qualités, des: candidats;,, ce seront des maires de village, purement passifs, et toujours disposés à se livrer aux impressions qu'on voudra,bien leur communiquer, qui, faute de connaissances et de lumières, seront forcés à se décider et à juger sur Earole. Il se trouvera,, dans, ces assemblées, des ommes puissants qui; éblouiront par leurs richesses, des orateurs dominants qui séduiront sans peine des hommes simples, qui n'ont jamais entendu que les prônes de leur curé; et le choix des premiers-pasteurs sera abandonné à. un petit nombre d'intrigants qui auront un grand intérêt àie faire tomber sur leurs parents, ou sur leurs! créatures.
Il arrivera, comme vous l'a fait observer un prélat, dont vous admirez les talents autant que, vous respectez ses vertus (1), que, dans plusieurs de nos provinces, le grand nombre, des électeurs sera pris parmi les non-catholiques, qui peut-être se feront un plaisir cruel, d'avilir une église qu'ils rivalisent, en lui donnant de mauvais pasteurs.
On, vous a dit,. }e le sais, et on a cru répondre à,cette difficulté vraiment embarrassante (2), eni vous faisant observer qu'en France, des héréti-ues, des infidèles mêmes jouissaient du droit e présentation. Mais, de bonne foi, est-il permis-de justifier un abus par un autre? Dans un instant où on, prétend lea réformer tous, n'est-il pas-bien étonnant qu'on veuille les-établir en principes ?.
On vous a dit encore qu'on pourrait parer à-cet inconvénient, en exigeant une déclaration de catholicité de ceux qui voudraient avoir part aux élections; mais cette inquisition ne serait-elle: pas une contradiction manifeste avec vos principes? Avez-vouis le droit tyrannique de scruter les-opinions religieuses* d'un citoyen qui ne trouble pas l'ordre, quelles que soient sesopinions ? N'avez vous pasdéclaré qu'il devait jouir de toutes les prérogatives que la loi lui accorde? Ce serait une injustice, une inconséquence dont il serait affreux de soupçonner cette: auguste Assemblée. J'éloigne, Messieurs, ces.idées incohérentes, et je-reviens au fond de la question que je discute»
, Il arrivera que si les électeurs sont choisis, comme ils: le sont déjà dans la plupart de nos provinces, d'après les impressions funestes qu'on a cherché à répandre contre le clergé : il arri vera, dis-je, que cette classe, qui a l'intérêt le plus grave et le plus direct au choix de son premier pasteur, en sera exclue.
J'oserai maintenant le demander à votre comité qui nous rappelle aux grands pri ncipes, aux
for» mes antiques : serait-il juste, serait-il avantageux d'ôter au clergé un droit de
suffrage dont il a joui pendant plus de quatorze siècles, et dont il n'a.jamais abusé? Les
élections ne sont-elles pas soumises aux règles- établies par les conciles et la tradition?
Serait-il prudent d'en confier l'observation à des hommes qui les ignorent? Le vour
drez-vous, Messieurs, le souffrirez-vous, vous qui avez établi le bonheur du peuple sur le
choix libre et éclairé de ses administrateurs? Vous qui avez rendu à nos provinces celui de
leurs juges, refuserez-vous cette faveur au clergé? Les prêtres
Mais ce serait, direz-vous sans doute, ouvrir la! cairrière à l'ambition, fomenter les intrigues dans-le corps dès-pasteurs, qui, nommant eux-mêmes: àda première!dignité de la religion, voudront tous; y-parvenir, et mettront tout en œuvrepouratteindre au faîte des honneurs de leur état : maw c'est parce qu'ils auront tous cette ambition qu'eHe1 serai moins dangereuse; qu'ilsme-se laisserontpas entraîner par un mérite ordinaire. Des hommes qui peuvent tous avoir les mêmes prétentions! ne cèdent pas communément à leurs égaux, et ne donnent leur suffrage qu'à une supériorité bien reconnu®'. De cette ambition; que vous seriez; tentés de croire dangereuse, naîtra cette noble1 émulation qui est la source de tous les talents,, de toutes les vertus.-
Mais ce serait faire revivre, direz-vous encore^, cet ancien esprit, cette dangereuse influence d'un' coïps qui n'a été que trop redoutable : mais, quoi que. vous; puissiez* faire, vous ne sauriez vous refuser à la convocation des synodes, elle est essentielle au maintien de la discipline, elle entre dans' le plan de votre comité. Les synodes serontms; donc plus: dangereux, pour le corps1 politique, que les assemblées-électorales ou administratives?' A quai se réduira- leur influence, leur pouvoir? A-* se réunir peutêtre une fois tousles vingt ans, à se donroer un chef, et aux peuples un pasteur: Pouvea-vous remettre ce pouvoir en des mains plus-sûres etplus dignes de votre confiance1?
Dams nos-opinions religieuses, le drortde nom1--iïier ses pasteurs, appartient-il bien sûrement au peuple ?' Et quand il l'aurait incontestablement,, devriez-vou s le déléguer à la portion du peuple qaai vous- est indiquée par votre comité?
De tout cela, Messieurs, je conclus à ce que-l'Assemblée nationale' décrète, qu'à l'avenir, les évêques seront choisis, non par le prince exclusivement, parce qu'il nrest pas vraisemblablèp' qu'il sera toujours guidé par des ministres aussi vertueux, aussi intègres, aussi-inaccessibles1 aux passions, que celui qu'il a choisi, au'seinde celtej Assemblée (dans le nouvel ordre de choses, Mes1-sieurs, cet éloge ne pourra vous paraître ni sus* pect, ni intéressé) ; non p»r~lé peuple, toujours facile à séduire et à1 égarer; non par les électeurs' du département, qui ne doivent pas juger seui^ dans une matière qui passe leur pouvoir etleurs1 connaissances ; mais par le clergé du département, convoqué en synode, qm présentera au roi trois sujetsy par mi .lesquels il choisira. Si vous voulez vous rapprocher des formes- de l'Église primitive, vous pourrez joindre au clergéies membres de l'assemblée administrative, qui, honorés plu? particulièrement»dei la confiance du peuple, chargés de ses* plus grands intérêts-, sont plus propres à le représenter dans cette fonction.
Ce moyen, Messieurs, me paraît le plus propre à conserver la dignité dus prince, la liberté,, le bonheur du clergé, la régénération dm peuple:
Mais-si vous vouiez' Rétablir, Messieurs, cette'
régénération sur des bases inébranlables, imprimez-lui le sceau durable de la religion; faites-la aimer aux peuples, cette religion sainte; rendez ses ministres respectables : c'est en vain que vous travaillerez à les réformer, si vous ne trouvez les moyens de les faire estimer. La confiance, l'opinion peuvent seules assurer le succès de leur ministère. Si vous voulez qu'ils soient utiles, ne souffrez pas qu'on les avilisse. Qu'on n'entende donc plus au milieu de nous ces dénominations odieuses qui ont été la source de tant de désordres. Faites disparaître, condamnez aux flammes ces caricatures dégoûtantes, qui portent la corruption dans le cœur du peuple, en le familiarisant avec l'irréligion et la férocité. Si vous édifiez d'une main, ne détruisez pas de l'autre. Ce ne serait point assez pour nous d'avoir formé des ministres vertueux et zélés, si nous ne pouvions offrir à leurs instructions des peuples dociles, respectueux et soumis.
(Ce discours est applaudi d'une grande partie de la salle, è- L'Assemblée décide qu'il sera imprimé.)
Je déclare, en mon nom seulement, que j'adopte le plan proposé par M. l'abbé Jacquemart.
(1). M. l'abbé Jacquemart propose de faire nommer les évêques par les ecclésiastiques, concurremment avec les membres de l'assemblée administrative ; ceci est directement opposé aux principes de la Constitution.
. 1° Il est contraire à tous les principes que les membres des assemblées administratives choisissent les évêques;. les évêques sont des ministres du culte, ce sont des hommes chargés de fonctions publiques, relatives au culte et à la morale. Leur élection est l'exercice d'un droit politique qui appartient nécessairement à celui qui délègue les pouvoirs publics; il ne peut donc appartenir à des administrateurs qui ne peuvent exercer que des fonctions administratives et qui sont eux-mêmes des officiers élus par le peuple. C'est au peuple, c'est à lui, qui nomme les autres officiers publics, c'est à lui, en qui réside la souveraineté, qu'appartient le droit de choisir les ministres du culteet surtoutlesévêques. Le transféreràd'autres c'est attenter aux droits du souverain.. ,
2° La seconde partie de la motion, qui confère le droit d'élire aux ecclésiastiques, comme ecclésiastiques, par un privilège attaché à cette qualité, avec une influence particulière, est une attaque encore plus révoltante à la Constitution, puisque la nomination des évêques est l'exercice du droit politique; appeler les ecclésiastiques, par préférence aux autres citoyens, à cette nomination, c'est rompre l'égalité des droits politiques, qui est la base de la Constitution ; c'est donner au clergé une influence politique particulière; c'est le reconstituer en corps isolé ; c'est rouvrir la première porte aux abus qui ont résulté et qui peuvent renaître encore de ce grand abus.
On vous a dit que livrer au peuple, c'est-à-dire à l'assemblée des électeurs, le droit de
choisir les évêques, était une institution funeste dans ce siècle de lumière et de
corruption. Mais, sans m'é-tendre sur tes causes de ce qu'on appelle la corruption du siècle,
sans le comparer avec les bons
C'est dans la grande vue du bien public et de la religion qu'il faut considérer la question. 11 est facile de se convaincre que, comme citoyens et comme chrétiens, nous devons rendre grâce à M. l'abbé Jacquemart. Je ne chercherai point à capter les suffrages, à faire retentir le nom du peuple; c'est par la vé- ' rité qu'il faut opérer son plus grand bien; il ne faut pas le séduire par des illusions. On vous a développé les inconvénients qui résulteraient de l'élection des évêques, attribuée au peuple; on vous a développé combien l'ambition et les intri-guesauraientd'influencedansles assemblées populaires. Qu'on ne dise pas que vous renversez la Constitution , en accordant aux membres des assemblées, administratives la concurrence avec le clergé du diocèse : ces assemblées éliront pour le peuple, et ert son nom. On a proposé d'exclure les non-catholiques, en considérant que c'est comme fidèles que nous participons au gouvernement de | l'Église. Je demande donc que dans le cas où il y ! aurait des non-catholiques dans les assemblées de départements, elles soient autorisées à choisir, pour les remplacer, un nombre égal de citoyens catholiques, parmi les membres des assemblées de district. Je n'ai qu'un mot à ajouter : je vous supplie de faire sur cette question les réflexions les plus mûres ; de vous convaincre que la piété est utile à tous, et qu'elle ne contrarie jamais les vues d'une saine politique.
Il a été, je crois, irrésisti-' blement démontré par M. de Robespierre, qu'admettre le système de M. l'abbé Jaequemact, ce serait aller contre deux points essentiels de la Constitution. La division des pouvoirs est contraire à toute corporation dans l'État : ce système détruit la séparation des pouvoirs. Les assemblées administratives ne sont pas électorales, et cette confusion ne peut être opérée sans la destruction des bases principales. Vous rétablirez une cor-oratiort égale à celle que vous avez détruite, oyons si l'intérêt public commande cette dérogation aux principes. Qui est-ce qui a intérêt de bien choisir les ecclésiastiques? N'est-ce pas plutôt le peuple que les ministres de l'Église? Faut-il pour cela un ministre sacré? Non, sans doute. Celui qui doit être choisi pour cette place doit avoir la voix du peuple. Si le choix du sujet e3t concentré dans les ecclésiastiques, chacun croira avoir des droits à occuper la place vacante, les
1ptrigue3 se multiplieront. Les meilleures élections seront toujours faites par ceux qui n'ont aucun titre pour y prétendre. Considérez que tous les ecclésiastiques sont citoyens actifs; que beaucoup d'entre eux seront dans les assemblées primaires. Si des circonstances fâcheuses ont éloigné le peuple d'eux, ce sont peut-être eux-mêmes qui ont commencé à éloigner le peuple; mais bientôt nous aurons oublié toutes nos divisions, et nous nous rallierons autour de l'intérêt général. La Constitution vous commande d'adopter le projet du comité; l'intérêt de la religion et du peuple vous l'ordonne aussi. Je demande donc la préférence pour l'avis du comité.
(On demande que la discussion soit fermée.)
(La proposition mise aux voix est rejetée.)
, l'aîné. «Jeconclus pour le peuple, » a dit en finissant un des honorables préopinants ; et moi aussi je conclurai pour le peuple ; et moi j'aurai, je crois, avec un peu plus de justesse que le préopinant, parlé dans l'intérêt du peuple. Est-ce bien pour le peuple que cet honorable préopinant a conclu? Non : eest pour le corps que le peuple aura choisi pour nommer les membres des assemblées administratives. Autre chose est le corps électoral, autre chose est le peuple. Si le peuple lui-même pouvait intervenir dans les élections dont il s'agit, la question ne serait plus douteuse : mais le peuple ne peut intervenir en entier; il ne peut intervenir que par des délégués. L'unique question est donc de savoir quel serait pour le peuple le délégué le plus convenable. Sous ce point de vue, je ne balance point à croire que la délégation proposée par M. Jacquemart est la plus convenable. Il y a à considérer deux sortes de mérites, celui des moeurs politiques et celui des mœurs religieuses. Sous le premier rapport, les assemblées administratives présenteront le meilleur sujet, et c'est là précisément le seul rapport sous lequel il est nécessaire qu'elles interviennent.
L'autre rapport est celui des mœurs religieuses. Comment se permettre de dire que pour faire un bon choix, tous les citoyens actifs vaudront mieux que les citoyens ecclésiastiques? Eux seuls savent si leurs principes et leurs mœurs sont purs. En admettant donc ces deux divisions, vous assurerez au peuple le meilleur choix. On parle de division de pouvoirs ; eh bien ! ne sera-t-elle pas constatée entre les métropolitaines et les membres du corps administratif? On parle du danger qu'il y a d'établir l'esprit de corps ; on croit avoir tout dit quand on a faitsonDerce mot, l'esprit de corps. Si cela est, vous avez encouru le danger de l'esprit de corps par les synodes métropolitains. Je finis, en concluant pour l'adoption du projet de M. l'abbé Jacquemart.
Les deux partis qui paraissent opposés dans cette discussion, conviennent de ce principe que le peuple a droit d'élire les prélats ; ce principe décide évidemment la question pour le projet de décret du comité, parce que le peuple ayant le droit de nomination, les membres du clergé ne peuvent y coopérer que comme faisant partie du peuple et conséquem-ment par la voie de la représentation comme le surplus du peuple et non comme corporation distincte du peuple. Si les membres du clergé étaient admis à concourir à cette nomination comme membres du clergé, ils renouvelleraient l'idée de corporation; ils procéderaient individuellement comme ils ont fait dans les assem-
blées de bailliages, convoquées pour parvenir à la formation de l'Assemblée nationale, tandis que le peuple n'élirait que par des représeu'ants, même en troisième degré de représentation, si le système de M. l'abbé Jacquemart était adopté. Enfin, dans ce système, le clergé cumulerait deux pouvoirs, savoir : celui d'élection et celui d'institution. Chaque membre du clergé peut et doit coopérer à la nomination en qualité de citoyen comme tous les autres citoyens, ce qui forme un simple acte politique qui tient à ce qu'on appelle temporel; mais le clergé, qui ne peut être reconnu comme corps que dans le seul cas où il est question d'opérations canoniques, ne peut coopérer à l'élection que par la voie de l'institution qui est un acte purement spirituel. Je conclus de ces observations que le projet du comité ecclésiastique est le seul constitutionnel et qu'il doit être adopté sans aucun amendement.
L'élection doit appartenir au corps électoral et non au corps administratif. Il est bien établi que le clergé ne doit pas faire une corporation dans l'État; mais ii doit l'être aussi qu'on ne doit pas procéder à l'élection d'un supérieur de diocèse sans la participation des membres du diocèse ; les prêtres assistaient à toutes les élections dans les temps de la primitive Église. Il ne faut pas de corporation ecclésiastique, mais il faut des individus ecclésiastiques. Mon amendement est donc que l'élection des évêques se fasse dans l'assemblée électorale, où se rendront les plus anciens curés et vicaires de chaque district avec voix délibérante.
Je me,réduirai à des réflexions très courtes sur la première proposition, qui consiste à faire nommer les évêques par le corps administratif. Indépendamment des raisons prises dans notre Constitution, il en est une autre d'un intérêt politique. Les pouvoirs ne peuvent être délégués que de deux manières, ou par le peuple ou par ceux qui les ont reçus de lui avec le droit d'en déléguer les parties. L'écueil le plus dangereux que vous ayez à éviter, c'est de voir l'autorité répartie sans ordre dans des corps qui n'ont pas les mêmes pouvoirs, et c'est là ce que produirait ce premier plan. Rien n'e3t plus contradictoire avec les principes d'une bonne Constitution, que de donner à un corps particulier la faculté de se régénérer lui-même. Et certes, si les ecclésiastiques voulaient bien s'entendre, ce qu'ils ne manqueraient pas de faire, ils feraient seuls les élections. Je n'ajouterai qu'un mot sur fe plan de M. Camus, c'est que je ne vois point l'utilité de t ces vicaires et de ces curés qu'il nous propose j d'admettre aux assemblées électorales ; il y aurait [ aucontraire bien des inconvénients à les admettre. Ils pourraient y venir plutôt pour être élus que pour élire; ils pourraient mener une conduite qui n'honorerait pas toujours la religion. Le peuple, par son droit d'élire, n'influera en rien sur la puissance spirituelle. Il est bien évident que ce dernier caractère ne peut être transmis que par ceux qui l'ont déjà reçu eux-mêmes. Je conclus à -ce que le projet du comité soit adopté.
(La discussion est fermée.— La priorité est accordée à l'article proposé par le comité.)
Le peuple peut avoir beaucoup de confiance dans le corps électoral pour choisir des administrateurs, et très peu dans ce même ' corps pour élire les évêques. Je demande qu'on
ajoute ces mots à l'article:: * Par.an icorps électoral expressément choisi à /cet effet, suivant les .formes indiquées par le décret du 22 décembre. »
Je propose aussi 'en amendement ^«e dans'le nombre 'des électeurs ©n ineaîoimpreane^as leswn-Mcathdiques.
Je demahde la cpieâtion préalable sur tous lesamendemeitts.
.Tous ces amendements ne-tendent qu'à nous faire .composer sur îles .principes de Ja Constitution.
(On .applaudit vivement. — On demande à aller aux voix.) .
Je demande la -division de la question préalables II n'y a pas^de raison pour. écarter L'amendement de M. Rewbell. TCette division est adoptée.) 'L'Assemblée décide qu'il n'y a pas lieu.à délibérer sur ilamendement de M. Gatnus.
.'La première ^preuve sur celui de M. Pahbé.Grégoire est douteuse.
Je demande à lire l'article 6 du projetdu (comité, avant cpu'on fasse ia seconde épreuve. Il est,ainsiicoogu : w;JL1électi(m de l'évêque ne .pourra se faire ou êtrecommencée qu'un jour ide dimanche, dans Y église cathédrale, à l'issue de la messe paroissiale, à.laquelle seront tenus d'assister tous les électeurs. » — Vous ne pouvez.établir une sorte d'inquisition qui.iaurait pour objet de demander compté » à un homme de ses opinions religieuses. Je propose de réunir ces deux articles.
'L'Assemblée décide qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur l'amendement de M. l'abbë Grégoire.
M. Uewbell retire son amendement.-— M. Thévenot ide Maroisie te repread. — iL'Asseiaiblée l'écarté par la question préalable, iLes articles 3 et j6 du projet du comité sont dié-crétés ainsi qu'il suit :
Art. 3. « L'électron des évêques se fera dans la forme pr^crite,d'parle corps électoral indiqué dans le décret du 22 décembre 1789, pour la nomination des membres de l'assemblée de département. »
Art. 6. « L'élection de l'évêque ne pourra .se faire ou êlre commencée qu'un jour de dimanche, dansT^îïse principale rk l'issue de.la..messe paroissiale, à laquelle seront tenus d'assister tous les électeurs.»
, diépulé du Nivernais, supplie l'Assemblée, par lettre écrite au président, de lui accorder; pour la semaine prochaine un congé dont il a besoin par rapport a sa santé. Ce congé est accordé.
fait lecture d'une lettre de M. le garde dés sceaux, »et de deux ^lettres *du roi, relatives à la liste civile de Sa Majesté et au 'douaire de la reine.
.Suit la teneur denses pièces :
M. le garde des sceaux .a l'honneur dévoyer à M. le Président de'l'Assemblée nationaleia lettre
du roi ci-jointe, et la répanse de Sa Majesté à l'Assemblée. •»
Signé : Champion de Cicé, arrih. de Bordeaux.
Suit la teneur des lettres :
"LETTRE DU ROI AIJ .PRÉSIDENT.
Paris,le
Monsieur,
« Combattu entre les principes d'une sévère économie,-et ^considération des dépenses qu'exigent l'éclat du trône français, et la représentation du chef d'une grande nation, j'aurais préféré de m'en rapporter à l'Assemblée 'nationale pour qu'elle fitfâtelle-même l'état de ma maison ; mais je "cède à ses nonveWes instances, et je vous adresse laiéponse quejevousprie de lui communiquer. »
LETTRE DU ROI A L'ASSEMBLÉE NATIONALE.
« J'aurais désiré m'en rapporter entièrement à l'A-ssembïée nationale pour la détermination 'de la somme applicable aux dépenses de ma maison civile ét militaire; mais ses nouvelles instances, et les expressions qui accompagnent son vœu, m'engagent à changer de résolution. Je vais donc m'expliquer simplement avec'elle.
y»- Les dépenses connues sous le nom de maison du roi comprennent:
» 1° Les dépenses relatives à ma'persanne. à la reine, à l'éducation de mes enfants, aux maisons de mes tantes ; et'je devrai y ajouter encore incessamment l'établissement de la maison que ma sœur a droit d'attendre de moi;
« 2° Les bâtiments, le garde-meuble de îa couronne;
« 3° Enfin, ma maison militaire qui, dans -les plans communiqués à son comité militaire, ne fait point partie des dépenses de l'àrmée.
« L'ensemble de ces divers objets,'malgré les réductions qui ont eu lieu depuis mon avènement au trône, s'élevait encore à 'trente^un millions, indépendamment dMn droit d'aide sur la ville de Versailles, montant à 900,000 livres, lequel entrera désormais dans ïe revenu public, avec la diminution relative à mon séjour le plus habituel à Paris.
« Je crois que vingt-cinq millions, en y ajoutant le revenu des parcs, domaines et forêts des maisons de plaisance que je conserverai, pourront, au moyen de retranchements considérables, suffire convenablementà ces différentes dépenses.
« Quoique je comprenne ma maison militaire dans les objets dont je viens -de faire l'énnméra-tion,'je ne me suis pas encore occupé de son organisation. Je désire à cet égard, comme à tout autre, de concilier mes vues avec le nouvel ordre de choses. Je n'hésite pas à penser que le nombre de troupes destinées à la garde du roi doit être déterminé par un règlement constitutionnel ; et comme il importe à ces troupes de partager l'honneur et les dangers attachés à la défense de la patrie, elles doivent être soumise» aux règles générales de l'armée.
« D'après ces considérations, j'ai retardé l'époque à laquelle mes gardes du corps doivent 'reprendre leur serviœ j et le délai de l'organisation de ma maison militaire a d'autant moins d'-in-
convénients, que, depuis que la garde nationale fail le service auprès de moi, |e trouve en elle tout le zèle et l'attachement que je puis souhaiter; et je désire qu'elle ne soit jamais étrangère à la garde de ma personne.
« Il me serait impossible d'acquitter sur iun fonds annuel limité la dette arriérée de ma maison, dont l'Assemblée a connaissance; je désire qu'elle comprenne cet objet dans ses^plans généraux de liquidation.
« Je pense que le remboursement des charges de .ma maison et de celle de mes frères doit être ordonné, et se joindre à l'article précédent, la Constitution ayant proscrit la vénalité des charges. Cette disposition doit entrer naturellement dans les vues de l'Assemblée : elle sera ^d'autant plus juste que ceux qui se sont soumis à desisacriljces d'argent considérables pour acheter les charges, avaient Jieu de compter ;sur des grâces que le nouvel ordre de choses ne leur permet plus d'espérer.
Je fuis par l'objet qui me tient le plus à cœur.
J'ai promis par mon contrat de mariage avec la reine, que, dans le cas où je cesserais de vivre avant elle, une maison convenable lui serait conservée; elle vient de faire le sacrifice de celle qui, de tout temps, a été attribuée aux reines de France, et qui, réunie au comptant, s'élevait audelà de 4,000,000 de livres.
C'est un motif de plus pour moi de désirer que l'engagement indéterminé que j'ai pris avec elle et son auguste mère soit rendu préeis par la fixation de son douaire : il me sera doux de devoir aux:représentants'de la nation ma tranquillité sur un point qui intéresse aussi essentiellement mon bonheur.
. « Après avoir répondu au vœu de l'Assemblée nationale avec la confiance qui doit régner entre elleetmoi, j'ajouterai que jamais je ne serai en opposition avec elle pour aucune disposition relative à ma personne. Mes vrais intérêts propres seront toujours ceux du royaume; et, pourvu que la liberté et l'ordre public, ces deux sources ae la prospérité de l'État, soient assurés, ce qui ne manquerait en jouissances personnelles, je le retrouverai, et bien au delà, dans la satisfaction attachée au spectacle journalier de la félicité publique. -»
Signé: LOUIS.
Pendant la lecture la voix du président est'fréquemment couverte par des cris de : Vive le roi! et par des applaudissemen ts universels.
On propose que tous les articles que contrent la lettre du roi soient décrétés sur-le-champ.
Toute l'Assemhlée eeilève sans attendre quelle président mette la question >en délibération; ia salle retentit d'applaudissements et de cris de : Vive le roi !
L'Assemblée décide que la lettre du roi fera elle-même le décrel, et qu'on insérera seulement au bas que toutes ses dispositions ont été unanimement décrétées et par acclamation.
On propose de se rendre à l'instant même en corps chez le roi.
Il ne,s'agU,ren ce moment, que d'un arrangement pécuniaire centre la nation et le roi : nous applaudissons avec transport aux sentiments que Sa Majesté exprime; mais je crois que ce serait mal juger les convenances que d'aller en corps chez Le roi. Nous n'avons pas fait cette démarche solennelle dans des circonstances plus importantes. Je demande que M. le présideai se
retire vers le roi pour lui faire connaître la délibération de l'Assemblée et Ja manière dont cette délibération a été prise.
(Cette demande est décrétée.)
(On propose de statuer sur la demande-relative au douaire de la reine.) . 1 ^
Je propose de charger M. le président de supplier Je roi de faire connaître à 1 Assemblée à quelle somme il désire que le douaire de la reine soit fixé.
Le roi laisse assez connaître dans sa lettre qu'il désire que ce douaire soii de quatre millions par année.
Je demande que cette somme soit portée à cinq millions.
(On se dispose à mettre aux voix la proposition de M. de Menou.)
Cette motion qui tend à replacer encore sous les yeux du roi l'objet en question pst inutile. Le roi en a dit assez. Il est digne delà nation d'accorder les quatre millions-
(Une grande partie de l'Assemblée se lève et adhère paf acclamation à Cette dernière proposition.)
Qn parle pas de llhabitàtioa.
L'Assemblée délibère et décrète que le douaire de la reine est fixé à une somme annuelle de quatre millions.
On applaudit avec transport, et les cris de ; Vive le roi ! se font entendre de toutes parts.
t, au nom de l'Assemblée, prononce, sauf rédaction, le décret suivant .:
•« L'Assamblée nationale., après avoir entendu la lecture des deux lettres et messages du roi, a voté par acclamation,, et décrété à l'unanimité toutes les dispositions et demandes portées dans ledit message. Elle a de plus fixé à quatre millions le dtHiaire de là reine, et a ordonné que son pré-sident se retirera sur l'heure par devers Leurs Majestés, pour leur faire partdela détermination qu'elle vient de prendre. »
(La séance est levée à trois heures et demie et indiquée au lendemain pour cinq heures du soir, à cause de la procession du matin, à laquelle l'Assemblée a arrêté d'assister.)
Du
L'Assemblée, s'étant rendue à neuf heures du matin au lieu ordinaire de ses séances, s'est transportée, son président à la tâte, à l'église de.Sa!ai-
Germain-l'Auxerrois, et y a entendu la messe et accompagné le Saint-Sacrement, ainsi qu'elle l'avait pratiqué le jeudi précédent.
Signé : Sieyès, président ; H. de Jessé, Prieur, Royer, curé de Chavannes, Dumouchel, de Par-dieu, Gourdan, secrétaires.
Séance du
La séance n'est ouverte qu'à six heures du soir.
, ex-président, remplace au fauteuil M. l'abbé Sieyès, président, indisposé.
La séance commence par la lecture du procès-verbal de la veille.
Plusieurs membres demandent à présenter des observations sur une erreur de fait dans la rédaction des articles concernant l'élection des évêques.
L'Assemblée ordonne que la rédaction sera revue par MM. les secrétaires et que la lecture définitive sera renvoyée à demain.
, président. Messieurs, vous m'avez chargé hier de porter au roi le décret de l'Assemblée du 9 juin, sur les dépenses de sa personne et de sa maison, mais comme votre empressement à remplir les désirs de Sa Majesté ne vous a pas laisse le temps de rédiger un décret, j'en ai rendu le sens au roi en ces termes :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu la lettre et le message du roi, relatifs à la liste civile de Sa Majesté et au douaire de la reine, a voté par acclamation, et décrété à l'unanimité, toutes les dispositions et demandes portées dans ledit message. Elle a, de plus, fixé à quatre millions le douaire de la reine ; et elle ordonne que son président se retirera sur l'heure par devers Leurs Majestés, pour leur faire part de la détermination qu'elle vient de prendre. »
L'Assemblée témoigne unanimement que son président a très exactement interprété et rempli ses intentions et décide que le décret sera inséré dans la séance d'hier.
ajoute ensuite :
Hier au sortir de la séance, et conformément à vos ordres, je me suis rendu chez le roi, et j'ai fait part à Sa Majesté du décret que l'Assemblée nationale venait de rendre relativement à la liste civile et au douaire de la reine. Pressé par les circonstances, et n'ayant pas eu le temps ae préparer un discours, j'ai seulement tâché d'exprimer avec quels témoignages d'amour et de respect l'Assemblée nationale s'était empressée de consacrer et les vœux qu'avait énoncés le roi, et ceux qu'il s'était contenté d'indiquer. Sa Majesté, plus sensible au mouvement qui avait entraîné tous les-cœurs de l'Assemblée, qu'au résultat même de sa délibération, m'a répondu :
« Je suis fort touché de l'empressement que « l'Assemblée a mis à prendre la détermination
Après avoir quitté le roi, et toujours, Messieurs, conformément à vos ordres, je me suis présenté chez la reine, pour lui annoncer le décret qui la concernait ; et en référant rapidement sur l'objet de ce décret, objet propre à lui présenter des idées plus cruelles encore et plus douloureuses, s'il est possible, pour elle que pour tous les Français, je lui ai représenté l'Assemblée nationale toujours attentive à satisfaire les désirs personnels du roi, toujours heureuse de remplir, ou même de deviner les intentions d'un monarque, le plus tendre ami de son peuple. La reine, Messieurs, infiniment touchée des dispositions de l'Assemblée pour le roi et pour elle, m'a chargé avec la plus vive émotion de vous en exprimer toute sa sensibilité.
Je demande à M. le président si le décret rendu le 6 juin sur la mendicité a été envoyé à la sanction et si la sanction a été donnée. Toutes les nouvelles qui arrivent au comité des recherches de toutes les parties du royaume I démontrent que cet objet est devenu infiniment | urgent.il s'est répandu dans diverses provinces une multiplicité de brigands étrangers qui, sous le titre de mendiants, mettront bientôt la chose publique en péril, s'il n'est pourvu à leur expulsion.
M. le maire de Paris a écrit au comité ecclésiastique pour le J prier de solliciter un décret de l'Assemblée natio-I nale à l'effet de faire évacuer les deux maisons religieuses des récollets du faubourg Saint-Lau-j rent et des dominicains de la rue Saint-Jacques. I H désire que ces deux maisons soient destinées, soit à des dépôts de mendicité pour les mendiants infirmes, soit à des ateliers pour les mendiants | valides. En prenant toutes les mesures convena-j blés pour assurer les moyens de subsistance aux I religieux de ces deux maisons, voici, messieurs, le décret que le comité a l'honneur de vous proposer : L'Assemblée nationale autorise la municipalité de Paris, en exécution du décret du 20 mai sur la mendicité, à faire évacuer le couvent des récollets du faubourg Saint-Laurent, et celui des dominicains de la rue Saint-Jacques, pour être employés à servir, soit de dépôt aux mendiants infirmes, soit d'atelier de travail pour les mendiants valides.
Ce n'est pas à nous que la requête du maire de Paris doit être adressée, c'est au roi qui est chargé de faire exécuter nos décrets.
J'observe que la prise de possession pourrait devenir un appropriement et qu'il faut insérer dans le décret que l'emploi n'en sera que provisoire.
Il faut également pourvoir au sort des religieux expulsés.
Ces deux amendements sont adoptés et le décret est rendu en ces termes :
« L'Assemblée nationale autorise la municipalité de Paris, en exécution du décret du 20 mai sur la mendicité, à faire évacuer le couvent des récollets du faubourg Saint-Laurent, et celui des dominicains de la rue Saint-Jacques, pour être provisoirement employés à servir, soit de dépôt
aux mendiants infirmes, soit d'atelier de travail pour les mendiants valides.
« Elle charge de plus la municipalité de Paris de prendre sur les fonds qu'elle est autorisée à percevoir par le décret du 8 juin, pour assurer des moyens de subsistance aux religieux de ces deux maisons, soit qu'ils veuillent être transférés dans d'autres couvents de leur ordre, soit qu'ils déclarent vouloir jouir du bénéfice des décrets des 19, 20 février et 20 mars derniers. »
annonce que le roi a accordé sa sanction aux décrets des 28 mai, 8 et 9 juin.
Du
« Décret portant que la levée des matelots se fera provisoirement comme par le passé.
Du 8 juin.
« Décret qui ordonne une nouvelle convocation des citoyens actifs de Saint-Jean-de-Luz, pour la formation d'une nouvelle municipalité; ordonne, en outre, que les armes enlevées de l'hôtel de ville y seront incessamment restituées.
Dudit jour.
« Décret qui ordonne la formation d'une nouvelle municipalité à Schelestadt, déclare l'emprisonnement des sieurs Ambruchs et Furcbs illégal et vexatoire ; annule l'élection des officiers municipaux, et les mande à la barre, à l'exception des sieurs Zœpfell et Maimbourg.
Dudit jour.
« Décret qui ordonne la remise aux sieurs Pos-maret et Gie ,des piastres et des sommes d'or et d'argent qu'on avait arrêtées à Chàtillon.
Dudit jour.
« Décret qui ordonne que personne ne pourra avoir un commandement de gardes nationales dans plus d'un département.
Du 9 juin.
« Décret qui porte que les anciennes ordonnances concernant la police des spectacles seront exécutées provisoirement, et jusqu'à ce qu'il en ait été autrement ordonné; et témoigne sa satisfaction du zèle, du service et du désintéressement des régiments de Beauce, Normandie, et des canonniers-matelots du corps de la marine.
Du 8 et du 9 juin.'
« Décret qui fixe le nombre d'officiers, bas-officiers et soldats, tant des gardes nationales du royaume que des troupes de ligne, qui sera envoyé à la fédération du 14 juillet. » i
Une députation de l'assemblée électorale du département de Seine-et-Marne, ayant à sa tête M, de Vaublanc, son président, est admise à la barre.
prononce le discours suivant :
Messieurs, nous jouissons, enfin, du fruit de vos travaux; les électeurs du département de Seine-et-Marne viennent de nommer les membres de l'administration.
A peine étions-nous réunis, que toutes les voix se sont élevées pour voter une adresse à nos augustes représentants, à ceux à qui nous devons la Constitution, qui assure à jamais nos droits, ceux du monarque, notre liberté et la grandeur de la France.
Jamais, depuis que l'histoire transmet à la postérité les événements les plus mémorables, jamais les hommes n'ont vu un spectacle aussi imposant que celui dont nous avons le bonheur d'être les témoins : un Sénat auguste dicte à vingt-quatre millions d'hommes les lois que toutes les nations s'empresseront d'adopter quand elles les connaîtront.
Tandis que nous étions occupés à former les assemblées que nous devons à votre sagesse, nous avons lu avec étonnement une protestation contre un de vos décrets. Toutes les assemblées primaires ont chargé leurs électeurs d'exprimer leur indignation. Nous avons élevé la voix à l'envi les uns des autres. Un cri unanime a éclaté contre ceux qui ont osé signer une semblable protestation.
Comment ont-ils pu penser qu'ils pouvaient ainsi donner à la loi une marque publique de mépris? Certes, à moins de livrer sa patrie à ses ennemis, il est impossible à un Français de commettre un crime plus inoui que de dire : voici la loi, je la lis, et je proteste contre elle.
Est-il donc dans l'Empire un individu ou une corporation qui ose prétendre que chacun peut n'observer de la loi que ce qui s'accorde avec son intérêt, et rejeter tout ce qui paraît le blesser?
Ils ne cessent, ces mêmes hommes, de s'écrier dans leur aveuglement, que vous avez passé les pouvoirs que la nation vous a donnés, et que vous avez diminué et avili l'autorité royale. Eh ! que vous avions-nous demandé? Une constitution libre et monarchique. Qu'avez-vous fait? Vous avez assuré notre liberté ; le monarque règne sur les Français, et les Français font retentir tout l'Empire des acclamations de leur amour pour son auguste personne.
Quelle idée ont-ils doue de la grandeur royale, s'ils ne la mesurent pas sur l'élévation de ceux qui obéissent t La différence est grande entre commander à des esclaves et commander à des hommes.
Loin de nous ces idées coupables! Pénétrés de la sagesse de vos lois et du respect avec lequel nous devons les recevoir, nous les bénissons unanimement, et particulièrement les décrets sur les assignats, sur la vente des biens nationaux, et celui que l'esprit même de l'Évangile vous a dicté sur la religion. Nous jurons de répandre pour leur défense la dernière goutte de notre sang. Nous déclarons infâmes et traîtres à la patrie, tous ceux qui oseraient désobéir à vos décrets sanctionnés par le roi, ou qui se permettraient des protestations contre eux. Nous les Vouons à l'exécration de tous les bons citoyens.
Poursuivez, Messieurs, avec le même courage vos sublimes travaux. N'en détournez pas vos regards pour écouter les cris frénétiques de l'envie, la voix sordide de l'intérêt soutenu du fanatisme, les clameurs impuissantes de l'orgueil humilié, et la voix lâche de ces hommes pusillanimes à qui les mouvements généreux d'une nation libre font regretter le repos léthargique, dont les despotes savent faire jouir leurs esclaves, pour
les empScher de s'apercevoir qu'ils portent des fers.
Pour nous, nous sommes determines a vivre et mourir libres sousl'empire de la Joi. Si jamais on ose attaquer cette liberty, nous en deploierons l'etendard sacre. Nous montrerons ce que peut le courage frangais anime par l'amour de la patrie. "Vivre et mourir libres, tel est notre cri de rallie- ment.
Quwl lieu plus digne que cette enceinte de re- tentir des actions de graces que nous adressons au monarque qui s'est uni a vous pour notre honbeur ! Nous allons lui porter l hommage de notre reconnaissance. Nous allons lui dire qu'il vivra a jamais dans nos eoeurs, que nous appre- nons a nos eufants a le benir, et qu'un concert unariime d'amour et de veneration portera son nom a la derniere posterity.
(L'Assemblee ordonne l'impression du discours de M. de Vaublauc et sou adjonction au proems- verbal.)
Le comite militaire demande a presenter un projet de decret au sujet des actes d'insubordina- tion de quetques corps de I'armie.
, rapporteur. Le comite militairem'a cbar^ede vous presenter un decret pour le nHablissemeutde I'ordre dans I'ar- mee. Depuisquelquetemps des nouveJIes alfligean- tes nous sont parvenues ; le ministre de la guerre vousk'sacommuniquees:il est indispensable que lessoldats reconnaissent enlin leur devoir et vos principes. Voicile decret que vous propose le comite: « L'Assemblee nationale, instruite des desordres snrveniis dans plusieurs regiments de l'armee, et nue notammeut plusieurs regiments ont cru pou- voir forcer leurs omciers a qumer leurs corps . considerant que les enuemis de I'Etat font tou.- leurs eflorts pour s&iuire et egarer les braves militaires, et les porter a violer le serment qu'ilf ont fail a la nation, i la loi et au roi.eu leurper- suadant que le voeu de I'Assemblfie natiocale est de detruire la subordination des soldats envers leurs ofliciers, comme si cette subordination ri'e- taitpas la loi elle-m^me, comuiesi elle ne faisait pas la force de l'arm6e et I'appui de la Constitu- tion; que les desordres arrives dans I'armie ne peuvent que troubler le travail dout I'AssemblGe s'occupe sans reluche pour ameliorer le sort des soldats el fixer leur etat d'apr£s les principes de la regeneration gen6rale du royaume; voulant decouvrir & des guerriers citoyens les prejuges dans lesquelson oherchea les entrainer, declare qu'elle voit avec la plus vive douleur et le plus grand mecontentemcut les actes d'insubordina- lion qui ont eu lieu dans quelques regiments; qu'elii; atlend du patriousme francais qu'ils s'em- presseronl de recounaiire leur erreur et de ren- Irer daus leur dtvoir : arrete que son president se rctirera pardevers le roi, chef supreme de l'armee, pour le supplier de prendre les mesures les plus promptes et les plus eriicaces pour y retablir I'ordre et la subordination, et de punir avec sevdrite toule desobeissance aux lois mili- taires : declare, en outre, qu'elle regardera comme indignes de servir la patne tous corps ou soldats qui se pennettraient desormais de violer la sou- mission due aux lois et aux ofliciers cliarg^sd'en maintenir l'execution. »
(Plusieursmembresdemandent I'ordre du jour.)
L'Assemblee decide que la discussion s'ouvrira sur le rapport de M. le marquis de Crillon.
II y a, & la barre, uu oflicier qui apporte eu doa patriotique I'argent donne a ces soldats pour les seduire. Je deinande qu'il soit entendu.
(L'Assemblee ordonne que 1'officier sera en- tendu. G'est 11. de Puys^gur, colonel du regiment d'arliilerie en garnison a Strasbourg.)
prononce le discours sui- vant :
Messieurs, s'il est une recompense digne de vous etre offerte pour prix de vos nobles travaux, c'est sans doute le recit des vertusqu'ils doivent faire nultre un jour: c'est dans cette vue, Messieurs, que je prends la liberie de vous faire le r6cit ci-joint :
Le l01 de ce mois, le comme Mangin, caporal de la compagnie de Buchet, regiment de Stras- bourg, artillerfe, etait au marcbe ou il venait d'acbeter des legumes : un particulier se baisse aupres de lui, lui dit quelques mots en allemand, depose a ses piedsune bourse neuve de chamois, dans laquelle etait une somme de 24^ livres, et disparait. Ce caporal, etocne du present, regarde, et aperyoit celui qui le lui avail fait, se perdant dans la foule. Aussi(6t il se decide a porler cette bourse et a faire sa declaration au maire de Stras- bourg, des procedes duquul le regiment n'a eu qu'a se louer dans toutes les occasions. Le maire enchante de la delicatesse el du desinteressement de ce caporal, a dress6 proces-verbal du fait, et lui a dit de garder cet argent jus^u'a ce qn'assure que ce n'est poiut uu vol, il lui fasse dire d'en disposer.
Mangin est revenu ensuite u son quartier, a fait la meme declaration au commandant de son rggiment, et a depose la somme (hez le quartier- maiire-tresorier, qui lui eu a donne un recu.
Quel peut etre le but gu'on se propose *en fai- sant de pareilles geuerosites au regiment de Stras- bourg? Serail-ce pour echauffer sou civisme?... Non, sans doute, car l'on n'ignore pas qu'il l'a manifeste dans plusieurs occasions, et que son respect pour l'Assemblee nationule egale sa sou- mission pour tous ses decrets. Ge ne peut etre non plus pour augmenter son amour pour le roi, car il n'est aucun individu, depuis le chef jus- qu'au plus jeune soldat de ce regiment, qui ne versat son sang, pour lui : est-ce done pour en- gager les cauonuiers au bon ordre et au respect pour la discipline? Pas davantage, car tout le moude sait a Strasbourg qu'aucun d'eux ne veut s'y soustraire, et que collectivement ils ont pris l'lmgagemerit solennel de s'y soumettre et de la maintenir. L'on ne peut done deviner le motif d'un pareil don, mais qui n'ayant point 6te expli- que, ue peut queparaitre suspect.
Quoi qu'il eu soit, Messieurs, permettez-moi de deposer cette somme, au nom du regiment de Strasbourg, sur I'autel de la patrie: je reponds que le brave Mangin nemedesavouerapas; peut- etre n'en trouverez-vous pas la source assez pure pour la joindre aux nobles dons patriotiques; mais enfin il est des aum6nes ou d'autres usages que votre sollicitude pour le bien public peut vous dieter, et ce n'est pas la premiere lois que l'on aura fait concourir a de sages desseins les intentions les plus douteuses. Puisse, Messieurs, ce premier exemple, JjieutOt suivi sans doute par tous les braves soldats frangais, deconcerter les ennt-mis de I'ordre et de la tranquillite publique, et vous procurer un moyen de plus d'etre utiles et bienl'aisauts!
répond :
L'Assemblée nationale ne croit pas interrompre ses importants travaux pour le bonheur de la France, quand c'est pour lui donner l'heureuse occasion de rendre un hommage public à la vertu, qu'on lui fait suspendre sa délibération. Elle applaudit au désintéressement et au dévouement patriotique du sieur Mangin ; elle vous charge, Monsieur, de lui témoigner sa satisfaction, et vous choisit d'autant plus volontiers pour être son interprète en cette circonstance, qu'elle connaît votre affection pour les soldats de votre régiment, et leur affection pour vous. L'Assemblée nationale vous permet d'assister à sa séance.
(On demande l'impression du discours de M. de Puységur et de la réponse du président.)
Je demande que M. Mangin soit mis hors de rang, pour être envoyé à la fédération patriotique du 14 juillet.
Je demande l'ordre du jour, parce que le discours de M. Puységur me paraît avoir une relation intime avec le projet de décret présenté par M. de Grillon. En ordonner l'impression, ce serait en quelque sorte préjuger les torts qu'on reproche à quelques régiments. L'Assemblée ne saurait apporter trop d'attention avànt que de l'accorder. Les uns attribuent les torts des soldats à l'insubordination, les autres à des causes bien différentes, que je ne veux pas même énoncer. Je demande qu'on passe sur-le-champ à l'ordre du jour.
La motion d'imprimer le discours de M. de Puységur ne me parait pas avoir les inconvénients que le préopinant vous présente ; et la preuve, c'est que j'ai demandé la parole pour combattre le projet de décret présenté par M. le marquis de Crilion, et que j'ai demandé l'impression du discours de M. de Puységur. Je ne vois dans ce discours que l'annonce d'un acte de patriotisme. Je vois aussi que l'Alsace, qui est le foyer de toutes les aristocraties, est la partie du royaume vers laquelle les ennemis de 1 État tournent toutes leurs espérances ; c'est aussi celle vers laquelle nous devons diriger nos regards avec le plus d'attention. C'est le cas de vous dire que tous les régiments commandés par des officiers amis de la Constitution n'ont pas cessé d'être en bonne intelligence avec les bourgeois. {On applaudit dans une grande partie delà salle.) Je demande que le discours de M. dé Puységur soit imprimé, et je me réserve la parole contre le projet du comité militaire.
(L'Assemblée décrète l'impression du discours de M. de Puységur et de la réponse de M. le président.)
Votre comité militaire était instruit du fait rapporté par M. de Puységur; il l'était encore de faits arrivés dans d'autres provinces, où des soldats se sont permis de renvoyer les officiers de leurs régiments : mais puisque vous demandez des détails, demain ou après-demain, je vous les mettrai sous les yeux.
Le projet du comité militaire est le même que celui qui vous a été" Srésenté à la suite de la lettre de M. de la Tour- u-Pln. Llék ministres vous proposent de délibérer sur des effets qu'ils affectent de prendre pour les causes. La cause des soldats est celle du peuple. Recherchez la cause des mouvements populaires,
et vous Verrez que la plus grande injustice les a produits. Vous ne voulez pas qu'un soldat qui s'est élevé contre une injustice soit puni comme des corps qui ont trahi la patrie. Vous commettriez une faute très grave si, sans examen, vous décrétiez un blâme général dé tous les mouvements de l'armée, qui prennent, aux yeux du législateur, divers caractères. Je sais fort bien qu'il y a des fautes sans excuse; si on en a connaissance, qu'on les dénonce au comité des recherches ; mais qu'on n'aille pas englober toute l'armée dans un décret de blâme. Toutes les fois que les ministres ont commis des fautes, ils demandent des décrets précipités pour tâcher de les couvrir ; je me suis aperçu de cette marche, et je la dénoncerai tant que je pourrai porter la parole. Vous touchez à l'époque où l'armée va être organisée : attendons cette heureuse époque. Je dis donc qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur le décret proposé. (M. Charles de La-meth est très vivement applaudi.)
II faut attendre le résultat de la fédération générale du royaume. La division s'était mise entre les officiers et les dragons du régiment de la reine, en garnison à Laon. Les soldats avaient créé un comité permanent, et destitué des officiers qui avaient été obligés de s'absenter. La municipalité et la garde nationale de Laon ont témoigné le désir de former un pacte fédératif avec le régiment. La fédération s'est faite dimanche dernier ; la fête a été complète; et le résultat, c'est que les dragons ont ramené eux-mêmes l'officier qu'ils avaient destitué, et déclaré qu'ils voulaient lui obéir comme aux autres chefs. Le plan de fédération générale opérera sans doute le même effet dans toute l'armée. Je demande donc qu'on attende cette époque avant de proposer aucun décret.
(La partie gauche demande à grands cris l'ordre du jour.)
veut parler.
L'Assemblée décide qu'il ne sera point entendu, et renvoie le décret à un nouvel examen du comité militaire.
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion des articles du projet de décret sur la constitution civile du clergé.
, rapporteur. Dans la séance d'hier, vous avez décrété les articles 1, 2, 3 et 6. Il vous reste maintenant à statuer sur les articles 4,5,7 et suivants. Je donne lecture de l'article 4 du projet :
«Art. 4. Sur la première nouvelle que le procureur général syndic du département recevra de la vacance du siège épiscopal par mort, démission ou autrement, il en donnera avis aux procureurs-syndics des districts, à l'effet par eux de convoquer les électeurs qui auront procédé à la dernière nomination des membres de l'assemblée admini-trative ; et, en même temps, il indiquera le jour où devra se faire l'élection de l'évêque. »
demande que le terme de l'élection soit fixé de manière à ce qu'elle ne puisse être indéfiniment reculée par le procureur général syndic.
Cet amendement étant appuyé est mis aux voix et adopté. En conséquence l'article se trouve ré^ digé de la façon suivanté :
« Art. 4. Sur la première nouvelle que le procureur général syndic du département recevra
de la vacance du siège épiscopal par mort, démission ou autrement, il en donnera avis aux procureurs syndics des districts, à l'effet par eux de convoquer les électeurs qui auront procédé à la dernière nomination des membres de l'assemblée administrative; et, en même temps, il indiquera ie jour où devra se faire l'élection, laquelle sera, au plus tard, le troisième dimanche d'après la lettre d'avis qu'il écrira. »
, rapporteur. L'article 5du projet est ainsi conçu :
« Si la vacance du siège épiscopal arrivait dans l'année où doit se faire l'élection des membres de l'administration de département, l'élection de l'évêque serait différée et renvoyée à la prochaine assemblée des électeurs.
L'intérêt de la religion exige qu'un diocèse ne reste pas longtemps sans évêque ; je propose donc d'amender l'article et de dire si la vacance arrivait dans les quatre derniers mois de i?année. (Cet amendement est mis aux voix et adopté.) L'art. 5 est ensuite décrété dans la teneur suivante :
« Art. 5. Si la vacance du siège épiscopal arrivait dans les quatre derniers mois ae l'année où doit se faire l'élection des membres de l'administration de département, l'élection de l'évêque serait différée et renvoyée à la prochaine assemblée des électeurs. »
, rapporteur. L'artible 6 ayant été décrété hier, je donne lecture de l'article 7.
«Art. 7. Pour être éiigible à un évêché, il sera nécessaire d'avoir rempli les fonctions pastorales au moins pendant dix ans, soit en qualité de curé dans une paroisse, soit en qualité de vicaire de l'évêque dans la cathédrale ou dans le séminaire du diocèse. »
Je demande qu'il soit mis dans l'article, au lieu des mots « curé et vicaire » : « le prêtre qui aura servi pendant dix ans dans son diocèse avec approbation ». Je ne dois point être suspect en faisant cette proposition, car je ne parle pas pour moi.
Je demande que les anciens vicaires généraux soient admis au bénéfice de l'éligibilité. Ils ont bien mérité cet honneur en partageant les travaux de l'épiscopat.
Nous avons renversé le despotisme archiépiscopal, il faut aussi détruire le despotisme grand-vicanal. On n'admettait autrefois à ces places que de jeunes gentilshommes qui se permettaient de donner des leçons de morale à de res;-peclables curés qui avaient pour eux l'expérience et les vertus. Je demande qu'on ne mette aucune espèce de différence entre tous les vicaires.
Je demande que le temps de l'exercice des vicaires soit borné à quinze ans, au lieu de vingt.
Cet amendement est adopté, ainsi que celui de M. Camus, et le decret est rédigé en ces termes : « Art. 7. Pour être éiigible à un évêché, il sera nécessaire d'avoir rempli les fonctions ecclésiastiques dans le diocèse ou moins pendant quinze ans, soit'en qualité de curé, soit en qualité de vicaire, ou comme vicaire supérieur ou vicaire-directeur du séminaire.
La séance de demain sera ouverte à neuf heures du matin. L'ordre du jour sera la suite du rapport du comité des finances sur toutes les parties de la dépense publique.
(La séance est levée à 10 heures du soir.)
Séance du
ouvre >la séance à 9 heures du matin.
, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance du mardi matin 8 juin.
Messieurs, le travail du comité ecclésiastique me paraît incomplet, en ce qu'il dit que les assemblées administratives pourront, le cas échéant, ordonner, de concert avec l'évêque, la suppression ou réunion de certaines paroisses, mais il ne me semble pas démontré qu'elles soient autorisées à en ériger de nouvelles; pourtant l'intérêt de la religion et l'intérêt public exigent que les secours spirituels soient départis à tous les fidèles d'une manière convenable et commode; je crois que bien des villes exigeront l'érection de nouvelles paroisses, et je demande que les assemblées administratives aient la possibilité de les constituer.
L'érection de nouvelles paroisses augmentera les frais du culte et, par conséquent, les charges de l'État; voilà pourquoi le comité était opposé à de nouvelles créations.
t. Nécessité n'a pas de loi. J'espère donc que l'Assemblée n'hésitera pas à prendre les mesures convenables pour maintenir la religion dans toute sa splendeur.
(La motion est mise aux voix et décrété .)
Je viens de relire l'article 16 tel qu'il est inséré au procès-verbal, dont vous venez d'entendre la lecture; il donne pleine satisfaction à la motion de M. l'abbé Mougins de Roquefort; il n'y a pas lieu d'en modifier la rédaction, puisque le mot établir y est inséré.
Je propose à l'Assemblée d'ordonner à son comité ecclésiastique de s'occuper du traitement des personnes attachées aux collégiales ou cathédrales et qui seront déplacées, tels que musiciens et autres pourvus d'offices.
(Cette motion est adoptée.)
, député de Lille. Si vous avez été quelquefois douloureusement affectés par la conduite de plusieurs villes du midi de la France, les nouvelles que j'ai à vous apprendre des départements du nord du royaume vous donneront sans doute de la satisfaction.
l.e caractère réfléchi et mesuré des habitants de
« Nous, citoyens-soldats et soldats-citoyens, jurons sur l'autel de la patrie, en présence du Dieu des armées et sur nos armes, d'être fidèles à la nation, à la loi et au roi, de maintenir de tout notre pouvoir la Constitution acceptée par le roi, ainsi que tous les décrets de l'Assemblée nationale, sanctionnés par Sa Majesté. Nous jurons aussi de rester à jamais unis et de nous prêter réciproquement les secours qu'exige la fraternité, ainsi qu'à tous nos frères de l'Empire français, dès que nous en serons requis légalement. »
réclame contre ce qui a* été dit par M. d'Elbecq, au sujet de plusieurs villes du Midi.
Rien dans les expressions de M. d'Elbecq ne peut affliger le patriotisme des habitants de nos contrées. Je saisis cette occasion pour faire connaître à l'Assemblée un fait qu'elle n'apprendra pas sans intérêt. Sur la fin du mois dernier, le régiment de Vexin, qu'un grand nombre de vagabonds étrangers suivaient, est venu à Aix pour demander raison au régiment de Royal-Marine d'une injure qu'il disait lui avoir été faite. Les deux troupes étaient en présence ; le combat allait s'engager, lorsque M. Chérin, maire de la ville d'Aix, et commissaire du roi pour la formation des départements, se jette entre les deux régiments : ses prières sont inutiles. « Eh bien! mes amis, leur dit-il, tirez d'abord sur moi ; je ne veux pas être témoin des crimes que vous allez commettre. » Les soldats se jettent à ses pieds : il les oblige à s'embrasser; il les emmène dans la ville, et ces régiments aident les citoyens à chasser les brigands qui s'étaient répandus dans tous les quartiers, et qui commençaient à semer le désordre. Ainsi, par sou dévouement héroïque,
M. Chérin a sauvé sa patrie de toutes les horreurs du pillage. Ses concitoyens s'occupent en ce moment à lui élever un monument. Sans doute, que l'Assemblée s'empressera de lui témoigner sa satisfaction, quand le comité des rapports aura rendu compte de cet événement. {On applaudit de toutes parts.)
propose de répéter ce qu'il a dit, afin de prouver ainsi que les réclamations qui se sont élevées ne sont pas fondées.
(Ou demande à passer à l'ordre du jour.)
, membre du comité des finances, donne lecture de quinze projets de décrets d'intérêt local, qui, successivement, sont adoptés ainsi qu'il suit :
Premier décret.
« Sur le rapport de son comité des finances, l'Assemblée nationale autorise les officiers muni-paux de la ville du Mur-de-Barrès à toucher entre les mains du correspondant de l'administration provinciale de Haute-Guienne, la somme de 2,000 livres accordée à ladite ville pour la construction d'une fontaine, à charge de remplacer ladite somme suivant sa destination. Lorsqu'on travaillera à ladite fontaine, l'emploi de ces deniers sera fait conformément à 1a délibération prise en conseil général le 6 avril 1790, et notamment pour l'atelier de charité, destiué aux fouilles nécessaires à la découverte des eaux. »
Second décret.
« L'Assemblée nationale, sur le rapport de son comité des finances, ayant égard aux délibérations prises en conseil général de la ville et commune de Montpellier les 27 mars et 13 avril derniers, au consentement donné par le sous-fermier des droits de l'Equivalent, et par l'une de ses cautions, le 27 mai, autorisé les officiers municipaux de ladite ville à remplacer les droit3 perçus sur les boucheries, pour une année seulement, à compter du 24 juin courant, par une taxe personnelle, en sus du rôle de la capitation; laquelle taxe ne sera supportée que par Ceux qui payent 3 livres et au-dessus, pour cette espèce d'imposition, la classe indigente en demeurant affranchie; réservé néanmoins que la présente autorisation ne pourra rien préjuger sur la masse des impositions qui devra être supportée, à l'avenir, par la ville de Montpellier. »
Troisième décret.
« L'Assemblée nationale, sur le rapport de son comité des finances, d'après la délibération prise en conseil général de la ville de Valentine, diocèse de Comminges, le 25 avril dernier, autorise les officiers municipaux à imposer la somme de 5Q0 livres par eux empruntée pour l'établissement de vingt-quatre métiers d'étoffe, et, de plus, à retirer des mains du receveur de la province la somme de 3,383 livres 4 sols déposée en vertu de différents arrêts du conseil, laquelle somme sera employée à rétablissement de douze autres métiers pour faire subsister la classe indigente, à charge de la remplacer lors que les ouvrages auxquels elle était destinée seront exécutés. »
Quatrième décret.
« L'Assemblée nationale, sur le rapport de son comité des finances, autorise les officiers municipaux de Nègrepelisse à emprunter la somme de 2,000 livres août le remboursement sera fait sur le produit de l'imposition des privilégiés pour les six derniers mois de 1789, après la fixation et répartition qui aura lieu dans le département ; et, en cas d'insuffisance, par voie d'imposition au marc la livre sur tous les Contribuables. »
Cinquième décret.
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité des finances, d'après la délibération prise par les officiers municipaux et notables delà communauté de Catalans, le 6 avril dernier, autorise lesdits officiers municipaux à emprunter la somme de 500 livres pour subvenir au soulagëment de leurs pauvres; à charge de rembourser ladite somme en principal et en intérêts par la voie de l'imposition, dans l'espace de deux années. *
Sixième décret»
i L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité des finances, sur la délibération prise par les officiers municipaux et notables de la commune de Chaloraine, le 6 mai de l'an courant, décrète que les officiers municipaux sont autorisés à faire un emprunt de 6,000 livres pour être employé en achat de grains, et le montant en être remboursé par la vente desdits grains; à charge et condition qu'en cas de déficit, la somme nécessaire pour compléter le remboursement sera ncessamment remboursée par la voie de l'imposition, ensuite de compte rendu, et de faire approuver le mode de l'imposition par le district et département. »
Septième décret.
« L'Assemblée nationale, sur le rapport de son comité des finances, vu la délibération prise en conseil général de la ville et commune de Mire-poix, autorise les officiers municipaux à imposer la somme de 2,000 livres sur la capitation ; ladite somme à répartir sur tous ceux qui sont imposés à 4 livres et au-dessus, dans ledit rôle, pour être employée à continuer l'atelier de cha^ rité, et aux besoins urgents de la commune. »
Huitième décret,
« D'après l'adresse des habitants de Chapet, réunis aux officiers municipaux, l'Assemblée nationale, sur le rapport de son comité des finances, les autorise à un emprunt de 300 livres, pour remplacer les vases sacrés de leur église, qui ont été volés dans le courant d'avril, à charge de rembourser ladite somme sur le bénéfice de l'imposition des privilégiés, après que la division et le partage en auront été faits dans le département. ■>
Neuvième décret.
Sur le rapport du comité des finances, l'Assemblée nationale ayant égard aux motifs retracés
dans la délibération générale de la commune de Fontenay —sous-Mailly-le-Ghâteau, en date du 13 mai, autorise les officiers municipaux à faire un emprunt de 800 livres pour subvenir à leurs différents besoins, notamment au soulagement des pauvres, à charge de rembourser ladite somme sur la vente d'une partie de leur quart de réserve, si elle leur est accordée, et, à ce défaut, par la voie d'imposition ; et, en outre, à charge de faire approuver ledit emprunt par le district et département. »
Dixième décret.
« L'Assemblée nationale, sur le rapport de son comité des finances, et d'après les délibérations et adresses du conseil général de la ville et commune de Moissac, autorise les officiers municipaux à imposer la somme de 3,000 livres, au piarc la livre de la capitation, sur tous .ceux qui étaient imposés pour cqt objet à 6 livres et au-dessus, à cnarge d'employer ladite somme à occuper les pauvres valides et £ secourir ceux qui sont dans l'impuissance de travailler. >
Onzième décret.
« Sur l'adresse du conseil général de la ville de Saint-Yrieux, l'Assemblée nationale, d'après le rapport de son comité des finances, autorise les officiers municipaux à imposer la somme de 3,000 livres sur tous leurs contribuables pour continuer leur établissement de charité, à charge de pourvoir incessamment au remboursement; »
Douzième décret.
« Sur l'adresse des officiers municipaux et nor-tables de la commune de Troux, près Ohevreuse, ouï le rapport du comité des finances» l'Assemblée nationaleautorise lesdits officiers municipaux à imposer la somme de 500 livres sur tous ceux qui, dans leurs rôles, payent au-dessus de 10 livres de toutes tailles pour ladite somme être employéeau soulagement des pauvres ; et, attendu le besoin urgent, les autorise à emprunter ladite somme jusqu'au recouvrement du rôle. »
Treizième décret.
« L'Assemblée nationale, ouï le ràppôff de sou comité des finances, sur les délibérations prises en conseil général de k vil^e de Sdlfhg, ]p 20 octobre 1789 et le 30 mai 1790, autorise les pffiçiers municipaux de ladite ville à imposer la, sommé de 4,000 livres en deux ans, sur tous les habitants qui payent 4 livres et au-dessus d'impositions directes, pour parvenir au soulagement de la classe indigente, sauf auxdits officiers municipaux à se procurer ladite somme par la voie d'emprunt, à quoi ils demeurent, dès à présent, autorisés. *
Quatorzième déoret.
« Ouï le rapport du comité des finanoes, sur la délibération prise en conseil général de la commune de la ville de Chevreuse, l'Assemblée nationale autorise les officiers municipaux à ira poser la somme de 4,000 livres et par quart, dans le cours de quatre années prochaines, sur tous les contribuables qui payent au-dessus de cinq livres
de toute espèce d'impositions, pour ladite somme, ou celle qui sera procurée par un emprunt, jusqu'à^ recouvrement des rôles, être employée au soulagement des pauvres et au paiement des dettes urgentes. »
Quinzième décret.
» Ouï le rapport du comité des finances sur la délibération prise par les officiers municipaux et notables de la ville de Nontron, le 9 avril, l'Assemblée nationale autorise lesdits officiers munir cipaux à imposer dans leurs rôles la somme de 2,400 livres en prenant pour base de cette imposition le taux des vingtièmes, pour ladite somme être employée en ateliers de charité et au soulagement dçs pauvres. »
Messieurs, je viens au nom du comité de vérification des pouvoirs vous fendre compte du nouvel examen auquel il s'est livré, par ptre ordre, sur les titres que présentent MM. César et Constantin de Faucher pour établir leur qualité dedéputés, en remplacement du MM.de Saint-Sauveur évêque de Bazas, etde Piis, tous les deux démissionnaires. — Le comité a entendu les députés de la circonscription de Bazas et, après un mur examen, il a reconnu à l'unanimité que les pouvoirs de MM. de Faucher étaient insuffisants. Ën conséquence, nous vous proposons un projet de décret pour ajourner l'admission de ces deux députés.
(de Saint-Jean-d'Angely). II y a eu dans la décision de l'Assemblée une erreur de fait dans la capacité des personnes. Il n'y a pas lieu, par conséquent, de prononcer l'ajournemént, il ne reste qu'à déclarer que le décret rendu précédemment est nul et de nul effet.
On demande la priorité pour la motion de M. Regnaud, elle est accordée et le décret suivant est rendu :
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité de vérification des pouvoirs, a décrété et décrète qu'il y a eu erreur de fait dans le décret qui a admis les sieurs César et Gonstantin de Faucher en qualité de députés suppléants du Bazadais, et qu'en conséquence ledit décret sera considéré comme non avenu. »
Une société des amis de la Constitution, qui s'est formée à Tulle, se plaint, dans une adresse du 3 juin, de la lenteur des commissaires nommés par le roi pour la formation du département* Le jour de l'assemblée des électeurs1 n'est pas encore fixé ; on dit même que l'administration ne sera pas organisée avant lé mois de juillet.
L'adresse se termine ainsi:
* Daignez donc, Nosseigneurs, interposer votre autorité pour que l'assemblée des électeurs du département de la Corrèze se tienne au plus tôt. Veuillez bien considérer l'humble pétition que nous vous adressons comme une preuve de notre profond respect pour les pères de la patrie, et de l'ardent désir que nous avons de concourir de toutes nos forcés au b'6n public: »
Le Comité de constitution, dont je suis l'organe me charge de vous présenter un projet de décret.
Comme les inexactitudes qu'on vous signale dans le département aè la
Corrèze, peuvent se présenter dans d'autres provinces, je demande que le décret soit rendu général,
j'appuie la motion d'un décret général parce qu'il importe d'activer la formation des départements, mais je demande qu'il ne soit fait aucune mention des commissaires du roi en Bas-Limousin, parce que les faits qu'on vous dénonce ne sont pas prouvés.
Gomme député de la Corrèze, j'insiste pour que les commissaires soient désignés dans le décret, attendu que non seulement ils mettent des retards affectés dans les convocations, mais que même ils se permettent d'interpréter vos décrets. J'ai reçu, à cet égard, des pièces qui justifient mon dire.
Si les renseignements dont parle notre collègue lui ont été fournis par le sieur Brival, qui est en ce moment à Paris, et qui est sans doute l'instigateur de la pétition du club des amis de la Constitution de Tulle, ils méritent peu de créance.
(On demande de toute part la clôture de la discussion.) •
La clôture est prononcée et le projet du comité est adopté eii ces termes :
« L'Assemblée nationale décrète que son président se retirera vers le roi, pour le prier d'ordonner à ses commissaires pour l'établissement des assemblées administratives des départements, et notamment du département de la Corrèze, de suivre leurs opérations avec exactitude, de les accélérer le plus qu'il sera possible, en exécutant exactement les décrets, et d instruire l'Assemblée nationale de la suite de leur travail. » ?
Le comité des finances s'est occupé de la mission que vous lui avez donnée par le décret rendu sanaedi dernier, sur les indemnités à accorder aux citoyens gui ont souffert dans la Révolution, et particulièrement aux veuves et ay,x enfants des vainqueurs de la Bastille.
(On demande l'ajournement à une séance du soir.)
On perd beaucoup de temps en ajournements. Voilà un an que de braves citoyens ont prisla Bastille, sansque vous vous soyez occupés de leur sort.
Le comité demande seulement que l'Assemblée ordonne qu'il lui soit rendu compte des pertes, malheurs et dommages éprouvés par quelques citoyens à l'occasion de la Ré* volution, et que le comité propose des indemni-tés convenables à mesure que les faits seront constatés.
Le comité des pensions doit vous proposer de fixer la quotité des pensions et des gratifications qui pourront être accordées, et dè déterminer une somme pour donner des secours à ceux qui ont souffertdans la Révolution. Le ÇQr mité présentera çe travail quand l'Assemblée le trouvera convenable. 11 me parait à propos d'attendre pour prendre cet objet eu son eqtier,
Un décret général serait inutile ou dangereux. Je croyais qu'il s'agissait uniquement des vainqueurs de la Bastille. Je demande qu'il soit incessamment présenté un projet de décret sur cet objet particulier.
Le moyen le plus sûr de soulager ceux qui ont perdu dans la Révolution, c'est d'achever la Constitution, c'est d'organiser les tribunaux, l'armée et la force publique. (Le côté gauche applaudit.)
L'Assemblée ordonne que le comité des pensions présentera incessamment un projet de décret concernant les vainqueurs de la Bastille.
On demande à passer à l'ordre du jour.
, au nom du comité des finances, fait quelques observations sur les moyens qu'on pourrait employer afin de déterminer les citoyens à payer exactement la contribution patriotique. Il propose de fournir à chaque député toutes les facilités désirables pour connaître l'état de contribution de sa province. Sur sa proposition, le décret suivant est rendu :
« Tous les quinze jours, le tableau de l'état de situation de la contribution patriotique dans les départements sera affiché au comité des finances.»
, au nom du comité des finances, fait un rapport sur différentes propositions qui ont été faites à l'Assemblée nationale pour l'acquisition ou la fonte des cloches des couvents supprimés (1).
Messieurs, la suppression des couvents et des communautés religieuses a donné lieu à différentes propositions pour l'acquisition ou la fonte des cloches qui deviendront inutiles par l'exécution de vos décrets. Le comité des finances ne peut, Messieurs, se dispenser de vous rendre compte de ces propositions; il va en comparer les conditions, les avantages et les inconvénients, et vous en présenter les résultats.
MÉMOIRE DU SIEUR AUGUSTE.
Le sieur Auguste annonce qu'il a fait beaucoup d'essais pour parvenir à séparer utilement les différents métaux dont la matière des cloches est composée ; il assure qu'on n'en retirera pas pfus de 60 livres de bon cuivre par quintal, qu'il estime à 20 sols la livre, et que les 40 autres livres, déduction faite du déchet, pourront rendre 20 livres net d'une matière valant 3 sols la livre ; ce qui fait 63 livres pour la valeur des métaux que l'on peut retirer d'un cent de cloches. En évaluant les frais de fonte et de séparation à 15 liv., le quintal de matière de cloches se trouve réduit, selon lui, à la valeur de 48 livres ; mais il n'y comprend point les frais qu'il faudra faire pour descendre les cloches de leur clocher, pour les mettre en morceaux et les transporter jusqu'aux fonderies; il regarde ces frais comme incalculables et ne détermine point,par conséquent, le produit net d'un quintal de cloches.
Il évalue cependant à 40 millions au moins ce que l'État doit retirer de toute l'opération. Comme il ne motive point Son évaluation, on ne peut dire si elle est bien ou mal fondée.
M. Auguste présente d'ailleurs la fonte des cloches comme un objet d'autant plus utile à la
nation , qu'elle mettra en valeur une très grande quantité de matière qui est aujourd'hui
inutile, et qu'elle alimentera pendant plusieurs années les manufactures du royaume qui
fournissent le cuivre ouvragé à la consommation intérieure et
Mais, par une soumission qu'il a présentée, depuis, au comité des finances, il offre d'acheter et de payer, à raison de 40 livres le quintal, la matière de cloches qu'on lui délivrera, sans égard au plus ou moins de son alliage, et de n'y employer, comme bon patriote, que des ouvriers français et des combustibles du royaume; mais il ne dit point dans quels termes il paierait et n'offre point de caution pour la sûreté de ses engagements.
MÉMOIRE DE MM. MEARS ET COMPAGNIE.
MM. Mearset compagnie sont des fondeurs établis à Londres sous la raison de Chepman Mears et Compaguie. Il paraît que l'objet unique de leur commerce est d'acheter et de fondre des cloches, et qu'ils ont été attirés à Paris par l'espoir d'entreprendre cette opération sur les cloches que vous jugerez à propos de réformer.
Ils calculent que les couvents et communautés religieuses supprimés peuvent monter à 12,000 dans le royaume, et que chacune de ces maisons fournira 3 cloches dont le poids commun peut être estimé à 5 quintaux par cloche, ce qui ferait déjà 36,000 cloches à fondre, pesant ensemble 180,000 quintaux ou environ.
Ils ajoutent que, si l'Assemblée nationale jugeait à propos de réduire toutes les églises des villes à trois cloches, et celles des campagnes à deux cloches, ou si, sans les réformer en nombre, on trouvait convenable de les refondre successivement pour en réduire le poids de moitié, en leur conservant, le même son, on retirerait encore 80,000 cloches sur les 40 à 43,000 paroisses du royaume, à raison de deux cloches à réformer par paroisse, ce qui produirait 400,000 quintaux de métal à raffiner, et, en tout, près de 600,000 quintaux, dont la valeur, d'après leur estimation, rendrait 27 millions au Trésor public et fournirait 450,000 quintaux de cuivre raffiné au commerce national.
Suivant leur estime, la matière des cloches est ordinairement composée des trois quarts en cuivre et d'un quart en étain ; mais ils pensent que les cloches des couvents de mendiants et des campagnes ont été fondues avec du cuivre impur mélangé de plomb, de fer, de cuivre jaune et d'étain commun, ce qui augmentera considérablement le déchet du raffinage. Cependant, ils offrent de rendre 75 livres de bon cuivre par cent de cloches qui leur serait délivré, et regar-gardent comme illusoire l'idée de conserver une partie de l'étain qui s'y trouve, les frais, disent-ils, qu'il faudrait faire pour retirer cette portion d'étain devant balancer ou surpasser la valeur de ce métal. Ils évaluent à 18 sols la livre seule-i ment le cuivre provenant de cette opération, d'à-
près le cours ordinaire des cuivres à Marseille et dans les autres ports du royaume; ce qui, pour les 75 livres à retirer du métal de cloches fait...............67 liv. 10 s.
A déduire suivant leur calcul :
Pour frais de transport jusqu'à leur fonderie,évalués par approximation à 7 livres 10 sols du Cent. Ils demandent 2 sols par livre pour tous les frais de fonte et de raffinage, ou 10 livres du quintal, et croient enfin devoir fixer à 1 sol par livre l'indemnité de leurs avances, de l'établissement de leurs fonderies et de leur travail, ou 5 livres par cent. Ces trois articles de frais montent ensemble à. 22 liv. 10 s.
Reste de produit net, par quintal...........45 liv. »
C'est sur ce pied qu'ils offrent de rendre compte de toute l'opération, si l'on juge à propos de la faire faire par régie, et de les en charger ; soit en livrant soixante-quinze livres de hon cuivre par cent de cloches, et leur payant 22 livres 10 sols pour tous leurs frais et bénéfices ; soit en leur vendant à forfait, à raison de 45 livres le cent, toutes les cloches réformées et à réformer dans le royaume. Ils demandent, dans ce cas, qu'on leur accorde un an de terme, à compter de la livraison qui leur sera faite des cloches prêtes à embarquer ou à voiturer, et ce, à mesure de leur fabrication. Ils exigent aussi différents règlements en faveur des manufactures nationales de cuivre, à l'effet de diminuer l'introduction des cuivres étrangers, et de leur assurer, par là, la vente des cuivres qurils retireront de la fonte des cloches. Ils demandent encore qu'on exempte de droits d'entrée le charbon de terre étranger, dont ils auront besoin pour leur opération, et terminent leur mémoire par offrir de donner à Paris des cautions de toute satisfaction.
Il paraît que Mitf. Mears ont eu connaissance des propositions de M. Auguste, et qu'ils ont cherché à les combattre dans un second mémoire, intitulé : Observations des sieurs Mears et Ci6, sur les propositions du sieur Auguste.
par ces observations ils combattent d'abord l'évaluation de 20 sols par livre que M. Auguste donne à son cuivre ; n'étant pas, disent-ils, raisonnable d'espérer qu'on en tire jamais ce prix, uand les cuivres du Levant, d'Angleterre et de uède ne reviennent pas en France à 18 sols; et surtout quand on mettra dans le commerce une très grande quantité de ce métal, sans augmenter pour cela l'objet des consommations.
Ils détruisent aussi l'idée de faire servir à la fabrication du billon le métal de cloches, vu son mélange avec des métaux très moux, et destructibles par le frottement, tels que le plomb, le zinc et l'antimoine; la monnaie de billon devant au contraire n'être faite que de métaux faciles à laminer et qui frayent le moins possible.
Ils concluent par réitérer leur soumission de faire leur établissement dans le royaume, ét d'y apporter leurs capitaux, leur industrie et celle de leurs principaux ouvriers ; au moyen de quoi tous les frais et le produit de l'opératioq resteraient à la nation.
Comparaison des deux propositions.
Le sieur Auguste et les sieurs Mears s'accordent à dire que le métal de nos cloches contient beaucoup de matières étrangères qu'il faut brûler ou faire évaporer pour en retirer le cuivre pur, propre à être employé dans les arts. Tous deux vous proposent, Messieurs, de les charger de faire cette opération pour ie compte de la nation. Le sieur Auguste offre dans ce cas de rendre trente trois livres de bon cuivre par quintal de cloches, et estime le cuivre à 20 sols la livre : ce serait donc, suivant lui, 33 livres que produirait chaque quintal.
Les sieurs Mears offrent de rendre 75 livres de cuivre par quintal de cloches, au prix ci-dèssus de 20 sols la livre ; c'est une valeur de 75 livres, dont il faut soustraire 22 livres 10 sols pour les frais de transport et de fonte, et pour le bénéfice de leurs avances ; reste net, 52 liv. 2 sols à retirer d'un quintal de cloches. Leur proposition est donc plus avantageuse que celle du sieur Auguste, dans la proportion de 52 liv. 10 sols à 33 liv., ou de 19 livres 10 sols que les Anglais offrent de plus par quintal. Dans le cas où vous préféreriez, Messieurs, de vendre à forfait la matière des cloches, c'est-à-dire aux frais périls et risques des acheteurs, le sieur Auguste en offre 8 sols delà livré ou 40 livres du cent, et les sieurs Mears, 45 liv.; c'est encore 5 liv. de plus par quintal qu'ils vous proposent, ou 12 0[0 de plus que le sieur Auguste.
Résultat.
Il n'est pas douteux que la suppression des couvents et des communautés religieuses rendant toutes les cloches inutiles, il ne couvienne à la nation d'en tirer parti. Outre la valeur du métal qui entrerait dans le Trésor public, ce serait fournir au commerce et aux arts une grande, quantité de matière, que nous tirons aujourd'hui de l'étranger, en faisant sortir du royaume une masse de numéraire égale à leur valeur.
L'idée de faire fondre et raffiner le .métal des cloches pour le compte de la nation, présente beaucoup d'inconvénients, même en recevant une quantité quelconque de cuivre pur, pour un quintal de matière à fondre, parce que la nation courrait les risques de la solvabilité des acheteurs; parce qu'elle aurait à sa charge les frais de magasinage, de vente et de correspondance; et parce que les époques de rentrées seraient in-r certaines, surtout à cause des variations ordinaires du cours des cuivres, qui baisserait certainement en raison des quantités que l'on saurait être à veudre; en sorte qu'il ne serait pas même raisonnable de se flatter a'en tirer 18 sols la liyre, qui paraît être le prix moyen en France des cuivres de Marseille et d'Angleterre. Cette opé-r ration serait donc très longue, incertaine, et dès lors peu profitable à la nation.
Il est préférable de vendre à un prix et à des termes fixes, en laissant tous les frais et risques à la charge des acheteurs : s'ils en retirent un grand bénéfice, ce sera la récompense de leur travail, de leurs avances et de leur industrie : et certainement ils profiteront en travaillant pour leur compte, sur une infinité d'objets de détail qui seraient négligés ou perdus dans une régie intéressée.
Le sieur Auguste réclame alors la préférence, fondé sur sa qualité de Français, et sur l'avantage
qu'il présente de faire son établissement dans le royaume, et de n'y employer que des ouvriers du pays. Si d'ailleurs ses offres étaient égales, vous n auriez plus qu'à examiner et décider si ces avantages ne sont pas balapcés par l'offre que font des étrangers industrieux, estimés dans leur pays pour l'opération don t il s'agit, transporte^ en France leurs capitaux, ceux de leurs associés, leur industrie et celle de leurs principaux ouvriers. Le sieur Auguste est un orièvre accrédité, il est vrai, mais l'établissement des sjeurs Mears et compagnie dans le royaume sera une acquisition utile et certaine. D'ailleurs, ilà s'obligent, ainsi que le sieur Auguste, de faire en France toute l'opération; et leur intérêt seul suffît pour les porter à employer de préférence des ouvriers nationaux, qui leur coûteront moins que ceux de leur pays. D'un autre côté, ils offrent environ 12 0/0 de plus, en se chargeant de tous les frais et risques; et, pour sûreté de leurs engagements, ils se soumettent à donner dans Paris dès cautions de toute satisfaction. Voilà des motifs de considération en leur faveur.
Quant à la demande qu'ils font d'être exempts de droits d'entrée sur les charbons étrangers nécessaires à leur opération, il ne serait pas raisonnable de l'accorder. Outre que toutes ces faveurs particulières sont sujettes a des abus, et sont préjudiciables au Trésor public, nous avons dans le royaume plusieurs mines de bon charbon, à portée de rivières navigables. D'ailleurs là fonte du cuivre n'exige pas un feu plus actif que la fonte de la mine de fer. Votre comité estime donc que l'on doit employer du charbon du pays, ou payer les droits d'entrée,-si l'on préfère le charbon étranger.
On vous propose aussi, Messieurs, de réduire à trois et à deux cloches toutes les'églises des villes et des campagnes. C'est une grande question à examiner, et le comité croit qu'il Convient de la remettre à un autre temps, que vous serez toujours les maîtres de fixer. Ce serait peut-être le meilleur moyen de tirer un meilleur parti de cette idée, que d'attendre le résultat des premières fontes des autres cloches qui sont déjà réformées. Ceux à qui vous accorderez le traité, étant plus éclairés par l'expérience, seront aussi plus disposés à augmenter leurs offres. Leur travail donnera des idées à d'autres artistes, et la concurrence procurera certainement quelque avantage à la nation.
Les Bieurs Mears terminent leur mémoire par l'offre de fondre gratuitement la grande cloche de Rouen, qui est cassée, et qui pèse quarante milliers, et de la remplacer par une autre moitié pesante, et qui cependant aurait la même intensité de sou. Vous penserez sans doute, Messieurs, que cet objet ne regarde que la municipalité de Rouen, et qu'il ne doit être question aujourd'hui que de fondre les cloches réformées, poUr en faire entrer la valeur dans le Trésor national, et fournir au commerce deux métaux précieux, que nous tirerions de l'étranger.
Mais n'y a-t-it point à craindre que la matière ordinaire des cloches ne contienne une plus grande quantité de cuivre, et que le bénéfice des ëntrepreneurs ne devienne par cela même beaucoup plus considérable qu'ils ne le font entrevoir? Nous vous observerons à cet égard que le sieur Auguste, ainsi que les artistes étrangers qui se présentent, s'accordent avec l'Encyclopédie, et la collection des Arts-et-Métiers, sur l'objet principal; que la meilleure cloche est un alliage de trois livres de cuivre et d'une livre
d'étaïn, comme l'ont avancé les sieurs Mears. H ne resterait donc plus dvincertitùde que sur la question de savoir s'il sera possible ou non de retirer avec profit une partie de l'étain. Plusieurs artistes de Paris, qui ont fait des expériences suivies, assurent que c'est impraticable, à cause de la dépense énorme où entraîne cette opération ; et c'est ce que i'ppération seule, exécutée en grand sur de fortes quantités de différentes clochès, pourra déterminer : du moins c'est ainsi que le comité des finapces l'a consi-déré. Il estime qu'il cohvjeqt de faire rentrer au Trésor public la valeur des cfgches devenues inutiles par la suppression des couvents et communautés religieuses, parce que, suivant le calcul des sieurs Mears et compagnie, sur le nombre des cloches déjà réformées par les décrets, ce serait un objet de huit à neuf millions de produit assuré pour la caisse de l'extraordinaire.
Lorsqu'il s'agira de fixer la manière de payer les cloches, soit en argent comptant, soit à terme, soit en métal de cuivre provenant des-cloches, l'Assemblée nationale prendra en considération la convenance évidente, dans la circonstance actuelle, de frapper de la monnaie de cuivre, et en même temps de se procurer des feuilles de cuivre pour le doublage de nos-vaisseaux. Sous ce point de vue, elle estimera peut-être qu'il sera utile de recevoir le payement des cloches en lingots de cuivre; cette manière de s'acquitter serait probablement préférable pour ceux qui se chargeraient de la fonte des cloches, et les engagerait à en donner un prix plus avantageux pour la nation. l'Assemblée, dans cette hypothèse, prendra une détermination positive. Votre comité des finances n'aurait pas été éloigné d'accueillir la proposition de MM. Mears et compagnie; mais il lui a paru prudent, avant de rien terminer sur leurs offres, ainsi que sur celle de M. Auguste, de vous proposer le projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu « le rapport du comité des finances sur les pro-« positions qui lui ont été faites par divers « particuliers, pour la fonte ou l'acquisition des « cloches des couvents et communautés reli-« gieuses qui sont supprimés, ajourne à deux « mois toute décision à prendre sur ces propo-« sitions;et, pour leur donner la publicité conve-« nablç, elle ordonne l'impression du rapport de « son comité des finances; elle invite les artistes, « métallurgistes et fondeurs de faire des essais « sur la matière des cloches, afin d'acquérir des « connaissances plus positives, et d'établir une « plus grande concurrence, lorsque l'on jugera à « propos de faire faire l'adjudication définitive « des cloches des communautés supprimées et de « celles qui deviendront inutiles. »
met aux voix ce projet de décret. Il est adopté.
(On demande à passer à l'ordre du jour.)
M. le Président, je demande la parole avant l'ordre du jour : je hé ta tiendrai que pendant deux minutes.
(On demande encore l'ordre du jour.)
(M. de Mirabeau paraît à la tribune, au milieu des murmures tumultueux d'une partie de l'Assemblée.)
Franklin est mort... (Il se fait un profond silence.) II est ré-
tourné au sein de la Divinité, le génie qui affranchit l'Amérique et versa sur l'Europe des torrents de lumières !
Le sage que deux mondes réclament, l'homme que se disputent l'histoire des sciences et l'histoire des empires, tenait sans doute un rang bien élevé dans l'espèce humaine.
Assez longtemps les cabinets politiques ont notifié la mort de ceux qui ne furent grands que dans leur éloge funèbre; assez longtemps l'étiquette des cours a proclamé des deuils hypocrites : les nations ne doivent porter que le deuil de leurs bienfaiteurs; les représentants des nations ne doivent recommander à leurs hommages que les héros de l'humanité.
Le congrès a ordonné, dans les quatorze États de la confédération, un deuil de deux mois pour la mort de Francklin, ét l'Amérique acquitte en ce moment ce tribut de vénération et de reconnaissance pour l'un des pères de sa constitution.
Ne serait-il pas digne de vous. Messieurs, de nous unir à l'Amérique dans cet acte religieux, de participer à cet hommage rendu à la face de l'univers, et aux droits de l'homme, et au philosophe qui a le plus contribué à en propager la conquête sur toute la terre? L'antiquité eût élevé des autëls au puissant génie qui, au profit des mortels, embrassant dans sa pensée le ciel et la terre, sut dompter la foudre et les tyrans. L'Europe, éclairée et libre, doit du moins up témoignage de souvenir et de regret à l'un des plus grands hommes qui aient jamais servi la philosophie et la liberté.
Je propose qu'il soit décrété que l'Assemblée nationale portera pendant trois jours le deuil de Bemjamin Francklin.
(La partie gauche applaudit avec transport.)
se lèvent pour appuyer la proposition de M- de Mirabeau? tout le côté gauche se lève.
monte à la tribune.
On crie : Aux voix ! aux voix !
(de Tours). Je veux, non contredire la motion, mais la compléter.
Je demande que M. le président soit chargé d'écrire au congrès, pour lui témoigner la part que l'Assemblée nationale prend à la perte qu'il vient de faire.
Je demande si M. Francklin est réellement mort, et si sa mort a été notifiée à l'Assemblée nationale par le congrès?
MM. de La Rochefoucauld et de Lafayette, amis de ce grand homme, ont été instruits de sa mort. Cette triste nouvelle a été écrite à M. de La Rochefoucauld par M. Landowsne. Ainsi cette perte n'est que trop sûre ; mais j'aurai l'honneur d'observer que si, par impossible, cette nouvelle est fausse, la sollicitude qu'on montre èst de peu d'importance; car votre décret ferait peu de peine à M. Francklin.
L'Assemblée adopte par acclamation la motion de M. le comte de Mirabeau et jrend le {lécrgt suivant c
* L'Assemblée nationale décrète que ses membres porteront trois jours le deuil de Benjamin Francklin, à commencer de lundi prochain; que
le discours prononcé à cette occasion sera imprimé, et que M. le Président écrira au congrès américain au nom de l'Assemblée nationale. »
, rapporteur du comité des finances, reprend la suite de son rapport sur les différentes parties des dépenses de la dette publique.
La partie dont il s'occupe est dénommée : remises, moins*-imposé, modération et non-valeurs.
Le chapitre des remises, moins imposé, modération et non-valeurs renferme des objets qui tiennent, les uns de la bienfaisance, les autres de la justice, d'autres enfin de l'une et de l'autre, peut-être aussi de l'impuissance de l'ancienne administration.
La bienfaisance était justice rigoureuse pour certaines provinces, dans un temps où la mesure de toutes les contributions était forcée, où par conséquent il était impossible de balancer les malheurs et les prospérités des différentes parties d'une même province.
Aujourd'hui, Je fardeau également partagé pèsera moins, et les calamités particulières seront compensées sans qu'il en coûte au Trésor public.
Il faut au Trésor public une recette égale aux besoins calculés par l'économie.
Ce sera dans un excédent d'imposition que les départements trouveront les moyens de corriger leurs malheurs locaux.
Le comité a pensé qu'il fallait retrancher de la dépense toute la partie des remises, modération et décharges.
Elles montent, année commune, pour les pays d'élection et pays conquis, à.... 4,769,770 liv.
En Languedoc...............400,000
En Provence....... .....3,370
En Roussi Hop.. .............21,000
En Bretagne.............200,000
Terres adjacentes.............12,000
A la vallée de Barceloneite jusqu'en 1802.............10,000.
Sous le titre dè bienfaisanCe,il faut ranger encore en Provence : Pour le rétablissement du port
de Seine...................15,000
Pour le dessèchement des marais de Fréjus..............16,000
A des pères de famille qui se chargent d'enfants trouvés, environ.■ Tops ces articles doivent être à la charge des départements qui partagent la Provence.
D'autres articles s'évanouissent par le nouvel ordre des choses. Ce sont des compensation^ d'abonnements de vingtièmes accordés à des princes ou à des particuliers, de capitations retenues sur les gages ou traitements d'officiers civils ou militaires.
Restent quatre objets qui paraissent présenter des difficultés que le patriotisme et la justiee doivent résoudre.
Ce sont des sommes accordées au Languedo^ et à la Bretagne pour rembourser les capitaux des emprunts qu'ils font tous les dix ans pouf racheter les quatre sous pour livrede la capitation. Langùedoc, 800,Q00 livres;Bretagne, 300,000 livres. Ensemble, 1,100,000 livres. Ce rachat date, pour le Languedo,ct de 1788. Pour là Bretagne, de février 1789. Le Languedoc à pavé 3 millions. La Bretagne n'a encore payé que 2,20O,OQO |ÏV. au lieu de 4 millions convenus. En tenànt compte au Languedoc et à la Breta-
gne des intérêts des capitaux que ces provinces ont payés pour le rachat des quatre sous pour livre de la capitation, toute justice, peut-être plus que la justice, sera accomplie.
Secours accordé à la Bretagne pour concourir à l'amortissement de ses dettes, 300,000 livres.
La Bretagne n'insistera certainement pas sur ce secours.
Il faudrait justifier qu'elle a été plus chargée que les autres provinces. Elle trouvera, dans une répartition égale, dans l'économie sur les dépenses, bien au delà de ces 300,000 livres.
Enfin, quand les autres départements abandonneront les modérations qui leur étaient accordées, elle n'aura rien à réclamer pour elle-même.
Pour le don gratuit de la ville de Toulouse, dont elle a fait le rachat, 95,676 livres. Toulouse se rachetait tous les vingt ans de sa contribution, moyennant 400,000 livres ; navait annuellement 5,000 livres, et recevait 95,676 livres, au lieu de 32,000 livres qui auraient remboursé 400,000 livres en vingt ans. Ce paiement de 400,000 livres vient d'être renouvelé.
Le comité des finances propose le décret suivant:
« Art. 1er. A compter de l'époque où le nouveau système
d'imposition sera organisé, il ne sera plus accordé de décharge et modération ; et le montant
d'impositions destinées au Trésor public y sera versé sans aucune déduction.
« Art. 2. Il sera tenu compte, s'il y a lieu, aux ci-devant provinces de Languedoc et de Bretagne, et à la ville de Toulouse, des sommes qu'elles ont respectivement payées pour le rachat de quatre sous pour livre de la capitation et du don gratuit. »
(La discussion est ouverte.)
Les États de Bretagne renouvelaient tous les deux ans leur contrat avec le roi, l'abonnement de la capitation était fixé à 1,800,000 liv., à raison des diminutions convenues dans ce même contrat. Ce n'est ni à titre de bienfait, ni à titre de secours que la Bretagne ne verse pas en entier dans le Trésor public le montant de son abonnement, c'est en vertu des conditions de ce même abonnement. Le comité des finances a voulu insinuer que cela n'avait été établi que par la suite des abus de l'ancienne administration ; je le réfuterai aisément en représentant la gradation des impositions de la Bretagne, et les récla^ mations qu'elle n'a cessé de faire de ses privilèges, qui ont toujours été violés. « La Bretagne, dit le comité, n'insistera sûrement pas sur ce secours; et quand les autres départements abandonneront les modérations qui leur ont été accordées, elle n'aura rien à réclamer pour elle-même. » La Bretagne n'a rien réclamé, lorsque les provinces de gabelle ont obtenu une diminution de 20 millions, qui doit être supportée par tous les autres départements. Le comité dit aussi qu'il faudrait justifier qu'elle a été plus chargée que les autres provincès. Je conviens que si l'on considère ce que paient l'un dans l'autre les habitants de cette province, on croira qu'elle n'est pas très chargée ; mais il faut savoir que la plus petite partie de ses habitants est en état de payer des impositions. Il est certain qu'à Rennes, sur quarante mille âmes, il y a à peine cinq mille habitants soumis à la capitation. LaBretagneest chargée de dettes très considérables : il ne peut entrer dans les vues de l'Assemblée nationale de lui faire payer sa dette particulière, et de la faire entrer dans le payement de i la dette générale. Ces sommes, qu'on veut faire j
considérer comme des secours, sont destinées à l'acquittement des intérêts et des capitaux de la dette de la province. L'obliger à verser la totalité de l'abonnement dans le Trésor public, c'est l'exposer à cesser ses payements, et à faire une banqueroute avilissante. Je propose de décréter que les pays d'États continueront provisoirement à verser au Trésor public les sommes qu'ils y portaient, et à faire l'emploi des sommes qui étaient laissées à leur disposition jusqu'à la liquidation de leur dette, pour laquelle liquidation le comité des finances sera chargé de faire incessamment un rapport.
Il ne s'agit que d'une affaire d'ordre seulement : au l0r janvier prochain, les impositions seront réglées de manière à mettre tous les départements au même niveau.
L'intérêt de ma province serait qu'on adoptât la proposition de M. Deferraon; mais l'intérêt général demande qu'on établisse dès ce moment une égalité parfaite. Quant à ce que le comité a dit sur les dépenses des ports de Seine et de Fréjus, je demande le renvoi au comité de commerce et d'agriculture, afin qu'on examine si ces dépenses sont de nature à être acquittées par le Trésor public, ou si elles doivent rester à la charge des départements.
Il s'agit seulement de ne pas laisser payer par le Trésor public ces dépenses, soit qu'on les affecte sur les sommes qui sont destinées aux travaux publics, soit qu'elles restent à la charge des départements.
Le comité propose que chaque département prenne sur lui les secours à donner aux contribuables : ces secours doivent être accordés sur tes fonds communs de la grande famille ; il faut décréter qu'il y aura un fonds général destiné à ces dépenses pour tout le royaume.
Tout ceci se concilie avec le projet de décret. Vous ferez sans doute très sagement d'adopter les vues du préopinant.
, raîné. On ne parle de renvoyer au lep janvier 1791 qu'en supposant que le système des impositions sera alors établi; mais, dans tous les cas, l'état actuel des choses doit exister jusqu'à ce moment; ainsi l'on doit ajourner.
L'acte de justice que vous demandez est très facile. L'ancienne imposition doit subsister jusqu'à ce que les nouveaux impôts soient établis. Quand on nous proposait un abonnement de 1,800,000 livres, on nous disait qu'il y aurait 200,000 livres de retenue: nous ne consentions bien réellement que 160,000 livres. Ne serez-vous pas à temps, en organisant l'impôt, de dire : tel département payera telle somme? L'article est évidemment prématuré : le décréter en ce moment, c'est alarmer les provinces qui ne sauront pas qu'incessamment l'imposition sera plus également répartie. Je demande donc l'ajournement jusqu'à l'instant de l'organisation de l'impôt.
Ce qui était le plus important pour le comité des hnances, c'était de consacrer le principe de l'égalité d'impositions^ l'adopte, en mon nom, l'ajournement proposé.
(de Saint-Jean d'Angély). Avec une très simple distinction, l'Assemblée sera d'accord. Il faut séparer ce qui concerne cette année de ce, qui regarde l'année prochaine. Les pays d'États ne doivent pas payer davantage que les pays d'élections qui ont une remise, en moins imposé, de près de 5 millions. Le comité des finances propose de décréter que désormais les impositions seront également réparties. Si vous ajournez, ce comité d'impositions n'aura pas les bases nécessaires pour son travail.
L'Assemblée nationale a décrété que les impositions seront payées dans les proportions qui seront réglées: j'ai l'honneur d'observer que si l'on adoptait le projet du comité, les provinces seraient grevées; la mienne notamment retient sur son abonnement 200,000 livres dont l'emploi est destiné à des objets indispensables. Je ne réclamerai jamais les privilèges ; mais l'Artois a toujours joui dé cette diminution nécessaire ; l'en priver aujourd'hui, ce serait lui faire supporter réellement une augmentation d'imposition de 200,000 livres. Je demande donc que l'article soit ajourné.
J'adopte l'ajournement.
Le comité des finances l'adopte aussi. Le comité des impositions le désire.
(L'ajournement est décrété avec l'amendement proposé par M. de Richier.)
Un de MM. les secrétaires donne lecture d'une note de M. le garde des sceaux ainsi conçue : Le roi a sanctionné :
. 1° Le décret de l'Assemblée nationale, du 20 avril, relatif à la municipalité de Crécy, et au sieur de la Borde, lieutenant général de cette ville ;
« 2° Le décret du 2 de ce mois, qui, en approuvant le zèle des officiers royaux de la ville de l'Isle-en-Dodon, dans le Comminges, les autorise provisoirement à informer des faits de brigandage commis par les personnes qui sont détenues, ou seront traduites dans les prisons de cette ville;
« 3° Le décret du môme jour, portant que l'assemblée du département de l'Aisne se tiendra dans la ville de Laon ;
« 4° Le décret du 5, pour l'augmentation de la solde des gens de mer;
« 5° Le décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de Berrens à imposer la somme de 800 livres en deux ou quatre ans ;
• 6° Le décret du môme jour, qui autorise les officiers municipaux de la ville d'Issoudun à faire un emprunt de 24,000 livres ;
« 7° Le décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de la ville de Saint-Brieuc, à imposer la somme de 25,000 livres enquatreans, sur tous les contribuables qui payent au-dessus de 4 livres de capitation;
« 8° Le décret du mêmejour, qui autorise lés communautés de Saint-Patrice, Ingrande, Saint-Michel et des Ëssarts, à imposer la somme de 5,000 livres entre elles, au marc la livre de leur brevet dé taille;
« 9° Le décret du même four, qui autorise les officiers municipaux de la ville de Grenoble à imposer la somme de 130,000 livres dans l'espace de dix années, au marc la livre dë toutes impositions;
« 10° Le décret du même jour, qui autorise les
officiers municipaux de la ville de Brioude, département delà Haute-Loire, à faire un emprunt de 6,000 livres;
« 11° Le décret du même jour, qui attribue aux bailliages de Bourbon-Lancy et de Gharolles, la connaissance des attentats commis contre les propriétés dans l'étendue des ressorts et districts de ces deux sièges;
c 12° Le décret du 6, pour la répartition de l'augmentation de solde accordée aux soldats français ;
« 13° Le décret du même jour, portant que le territoire que renferme la ligne de l'enceinte des murs de Paris, sera soumis aux droits d'entrée;
« 14° Le décret du même jour, relatif aux rôles d'impositions faits par les officiers municipaux du département de l'Eure, et aux contribuables qui se croiront fondés à obtenir, soit la décharge, ou une modération sur leur cote d'imposition;
« 15° Le décret des 6 et 7, portant que le caissier et l'administrateur général des Domaines de la province de Franche-Comté sera tenu de verser dans la caisse du receveur de Champlite, une somme qu'il tient en dépôt, provenant d'une vente de bois, et que tous autres dépositaires du prix des domaines et bois seront pareillement tenus de verser dans les caisses des receveurs des districts les sommes provenues des ventes de bois;
« 16° Sa Majesté, sur le décret du 27 mai, relatif aux troubles arrivés à Perpignan, a donné des ordres pour faire punir les auteurs et instigateurs de ces troubles;
* 17° Et enfin, sur le décret du 31, concernant le nommé Seguy, détenu dans les prisons dePé-rigueux, Sa Majesté a aussi donné des ordres pour que cet accusé soit renvoyé et poursuivi par-devant les juges ordinaires.
Signé : Champion de Cicé, arch. de Bordeaux.
Paris, le
J'ai reçu [de M. le premier ministre des fiuances une lettre dont je donne lecture :
Monsieur le Président,
Le roi m'a ordonné de vous informer qu'il avait sanctionné le décret de l'Assemblée nationale, concernant la mendicité ; mais en applaudissant aux intentions parfaitement estimables qui l'ont dicté, et en évitant d'éloigner, par le retard de sa sanction, l'exécution de plusieurs dispositions pressantes, Sa Majesté m'a ordonné, cependant, de faire observer à l'Assemblée qu'une partie de ce décret rendra peut-être nécessaire une interprétation de sa part.
L'article 3 dit : « que tout mendiant né dans le royaume, mais non domicilié à Paris depuis six mois, et qui ne voudra pas prendre d'ouvrage, sera tenu de demander un passeport où sera indiquée la route qu'il devra suivre pour se rendre a sa municipalité. »
La phrase soulignée, et qui ne voudra pas prendre d'ouvrage, paraît entraîner l'obligation d'en accorder à toutes les personnes nées en France, torsqu'elles en demanderont. Or, une telle condition peut conduire extrêmement loin, non pas seulement sous le rapport de la dépense, objet secondaire en cette occurence, mais beaucoup plus essentiellement par les inconvénients inséparables d'un appel à Paris ou autour de Paris,
de tous ceux qui, nés en France, trouveront leur intérêt ou leur convenance à gagner vingt sous par jour, en échange d'un travail généralement connu pour facile ; et si l'on a rencontré des obstacles lorsqu'on a voulu rendre ce travail plus exact, n'est-il pas à craindre que ces difficultés ne s'accroissent avec le nombre des ouvriers ?
La nécessité imposée par le même décret d'ouvrir des travaux publics en filature ou autrement, pour les femmes et les ebfants, sans aucune distinction des personnes de Paris et des personnes arrivant de province, doit encore attirer vers la capitale un plus grand nombre d'hommes, puisque cette condition leur permettra d'amener avec eux leur famille.
L'on pourrait remarquer encore que les travaux de charité, dirigés vers les mêmes objets qui servent d'entretien aux manufactures établies dans le royaume, doivent toujours être Circonscrits dans de certaines limites, puisque, sans cette attention, ils nuiraient essentiellement à ces mêmes fabriques et arrêteraient leur exploitation.
L'obstacle le plus réel à l'abus que l'on peut faire des ateliers publics de travail, ouverts à tout le monde, c'est la fixation des salaires à un prix ùh peu au-dessous de célui qu'établit entre particuliers le cours naturel des transactions ; mais les ménagements qu'exigent les circonstances présentes ne permettent pas d'accorder exactement les dispositions de l'administration avec les vues générales du législateur.
Ce sont ces considérations et plusieurs autres que j'avais communiquées à MM. les commissaires du comité de mendicité, lorsque, la veille du jour où ils vous portèrent leur décret, ils m'en donnèrent connaissance.
Je crois devoir aussi informer l'Assemblée nationale que le roi entretient, dans ce moment, aux ateliers publics de Paris douze mille hommes, indépendamment des travaux de manufactures, pour lesquels Sa Majesté destine une somme importante par semaine, et indépendamment de la translation qui a été faite à Saint-Florentin d'un assez grand nombre d'ouvriers employés en ce moment à la confection du canal de Bourgogne. Cependant le gouvernement n'avait pas refusé d'augmenter encore les ateliers de charité; mais, de concert avec l'administration de la ville, on apportait à l'accroissement trop Considérable de ces mêmes ateliers les ménagements que diverses considérations d'ordre public pouvaient exiger.
J'ai l'honneur d'être avec respect, Monsieur le Président,
Votre très humble et très obéissant serviteur,
Necker.
Paris, le
(VAssemblée renvoie cette lettre au comité de mendicité.)
Le comité des finances reprend la suite de son rapport sur la dette publique, partie concernant les recettes générales.
, rapporteur. Là dépense de la re-cette générale monte à 7,313,166 livres.
Le comité des finances n'a pu appliquer au système actuel des recettes générales que les vues d'une économie passagère.
Leur constitution, condamnée même sous l'ancien régime, déjà une fois présent^, rélevée ensuite, doit tomber sans retard sous la forme nouvelle d'administration.
Cette idée d'un crédit intermédiaire, qui pouvait séduire dans un temps de détresse et d'illusion, ne peut plus se soutenir devant les principes, et surtout devant les lumières d'un peuple pour qui l'administration n'a plus de secrets, ni le crédit de prestiges.
Il faut que le crédit national porte sur la base invariable d'un reyenu certain, toujours égal à nos besoins, jamais égaré dans les canaux qui doivent le conduire au Trésor public.
Entre le contribuable et le Trésor public il ne doit y avoir que le collecteur gui perçoit, et le receveur qui verse dans la .caisse de l'État, ou qui paie pour la caisse de l'État.
Tout autre agent ne produirait que la stagnation des fonds, la complication des comptes, un surcroît de hasards et de dépenses.
Ajoutons à cela des fortunes nécessairement exagérées, un luxe qui corrompt ceux-mêmes qu'il blesse, une classe de serviteurs de l'État dont le moindre danger serait d'être inutile et à charge, et puis la tentation toujours renaissante d'user des anticipations, et de lier encore la fortune publique à toutes les chances des fortunes particulières.
Le comité des finances va vous présenter le tableau des frais actuels des recettes générales, indiquer les économies dont elles seraient susceptibles, si l'ordre subsistant était conservé, et enfin la forme qui lui a paru déterminer la nouvelle organisation du royaume.
Ces frais se divisent en frais de répartition, frais de perception, frais de comptabilité, frais d'administration générale.
Les frais de répartition pèsent partie sur les contribuables, partie sur le Trésor public.
Les administrations provinciales sont à la charge des provinces, si ce n'est que le Ttésor royal paie pour celles de Haute-Guyenne et de Berry, 15,700 livres.
Les gages des bureaux des finances et des élections représentent les intérêts des finaudes d'offices, et ne doivent point entrer dans les frais de répartition.
Mais les privilèges attachés Ci-devant à ces offices faisaient charges pour les contribuables.
Il est vrai que cés privilèges étaient balancés par des droits de centième denier, des droits de mutation, des droits dé marc, qui rendaient à peu près au Trésor royal ce que les privilèges prenaient sur les peuples*
Les appointements des directeurs, deâ contrôleurs des vingtièmes faisaient et font encore pour le Trésor royal une dépense de 730,000 livres.
Dans les pays d'Etats, il y a une partie des frais de répartition qui sont atissi à la charge du Trésor public.
En Languedoc.
La moitié des frais \ de vérification des i communautés,13,000 f liv.........( 13,6001.
Greffiers des Etats, \ pour frais, 600 1.. . /
En Bourgogne. I
Gratifications aux 1 } 56,5(K)
élus pour assiette. . / 9,00Q /
Gratification au tré-> i
sorier pour confec- l I
tion des rôles. ... J 30,000 T
En Provence. f
Frais de rôles de capitation.. .. . . 3,900 \
L'assiette des Communautés, dans les pays d'élection, pays conquis ét la plupart de9 pays d'Etats, est à la charge de ces communautés.
Total des frais de répartition à la charge du Trésor royal, 802,200 livres.
Les frais de perception payés par le Trésor royal consistent :
1» Dans les droits attribués aux collecteurs et préposés ;
2° Dans les taxations àùx receveurs généraux et receveurs particuliers, gratifications et droits d'exercice.
Sdr lé principal dé la taille, lèS collecteurs ont une rétribution de 6 dèniers pour livre, qui s'impose au marc la livre dé l'imposition.
Cette première rétribution est étrangère au Trésor public, et, en raison d'environ 44/732,330 liv. d'impositions directes sur les pays d'électipn et pays conquis, elle s'élève à près de 1,118,107 livres.
Une autre somme, que le comité n'a pu évaluer faute de renseignements, se perçoit sur les pays d'États.
Pour la capitation, pour lès vingtièmes, les collecteurs et préposés.ont des taxations et remises payées par le Trésor royal, nàontant, pour les pays d'élection et pays conquis, à 71,620 livres.
Il faut ajouter, pour le premier degré dè perception, les frais de contrainte, qu'il est impossible d'évaluer.
Les receveurs particuliers ont sur les impositions ordinaires et sur la capitation :
3 deniers pour livre ;
2 deniers sur les vingtièmes;
2 deniers pour livre sont destinés, sous le titre de gratifications, à ceux des receveurs particuliers qui remplissent avec exactitude leurs traités.
Enfin, un denier pour livre est affecté, sous le titre de droit d'exercice, à ceux des receveurs particuliers qui n'ont pas une recette assez considérable pour leur donner des émoluments proportionnés à leUr travail. Les taxations, les remises, les gratifications s'élèvent,, dans l'état actuel des impositions, pour les pays d'élection et pays conquis, à....... , 2,948,3301.
Le droit d'exercice à.. ... , 127,330
Dans les pays d'États, les receveurs particuliers ont du Trésor royal.. ............93,943
Total des deux premiers degrés de perception à la charge du Trésor public...........3,169,6,31.
Les receveurs généraux des finances, ainsi que les receveurs particuliers, ont -des gages qui représentent l'intérêt de la finance de leurs offices. Ces gages n'appartiennent point aux frais de perception. C'est une créance sur l'État qu'on ne peut éteindre ou diminuer que par des remboursements. La masse totale de la finance monte à 73,064,768 livres y compris les pays d'États.
Les receveurs particuliers; pris en masse, sont assujettis, par leurs traités, à verser à peu près en vingt mois la totalité de la recette de l'année.
Les receveurs généraux, pris en masse, versent en vingt mois aussi la totalité de leur recette au Trésor royal. Mais il y a entre le versement des receveurs particuliers et le versement des receveurs généraux un intervalle d'un mois.
Dans les pays d'élection et pays conquis, les taxations et remises des receveurs généraux sont de 3 deniers pour livre, etforment une somme de...........1,889,510 1.
A ce prix, ils sont garants deà receveurs particuliers, chargés des frais de bureau et de correspondance, et paient une capitation de 1,200 livres. ;
Dans les pays d'États, les frais de ce troisième degré de perception s'élèvent, pour le Trésor royal,
Des commis particuliers, dont les traitements doivént être comptés dans les frais de perception, ont..............92,004 -5,340
Ce troisième degré de perception coûte au Trésor public . . . 1,986,854
Les frais de comptabilité, dans les pays d'élection et pays conquis, sont de 448,070 livres. . . } 500,095
Dans les pays d'Etats,de 52,025 livres.
Enfin, reste l'administration générale, dont les frais s'élèvent à . 188,650
Caisse générale des recettes générales...... , . m . .' . 102,007
Total des frais de comptabilité
et d'administration....... 790,752
Total des frais de recettes générales.. . . .• . ; i . : m . . 7,465,409
Sous le titre de recettes générales, l'état des revenus ordinaires et des dépenses fixes porte un article tout à fait étranger à ce chapitre, et qui appartient à celui de la dette publique. C'est une somme assignée aux divers trésoriers des pays d'États, pour paiement des emprunts faits par les provinces pour le compte du roi* Cette somme est de. . * • • 136,000
En décomposant ainsi tous les éléments du titre des recettes générales, le comité des finances s'est proposé d'offrir des notions claires et précises et des détails nécessaires pour fixer les vues actuelles et futures de l'Assemblée nationale.
En se bornant au moment actuel, il faudrait faire disparaître de la dépense du Trésor royal les 15,700 livres pour lesquelles il entre dans les administratidns de la Haute-Guyenne et du Berry. Il n'ést paa dû plus de faveur à ces deux provinces qu'aux autres, ci. • * t . 15*700
Il faudrait encore rayer les frais de répartition que le Trésor royal supporte dans les pays d'États par cette même raison d'uniformité de régime et d'égalité dans les charges, ci....... 56,500
En faisant des vingtièmes une imposition fixe et abonnée, on ferait évanouir les appointements des directeurs et contrôleurs des vingtièmes, ci./ .• ' * ' ' • • 730,000
Mais il faudrait leur donner des retraites.
Le comité des finances ne se permettra pas de sortir des bornes actuelles de sa mission, en discutant ainsi les principes de l'imposition, et en tâchant de déterminer la manière dont les vingtièmes doivent être imposés.
Il s'en était occupé jusqu'au moment où cette lâche a été assignée à un autre comité.
Dans le premier degré de perception, on peut encore économiser les 716,020 livres de taxations attribués aux collecteurs et préposés, si la collecte s'organise autrement, si des hommes salariés par les communautés se vouent aux recouvrements, et entreprennent la recette de plusieurs communautés ' à la fois. (Ce n'est pas ici une idée simplement d'économie ; elle tient à un intérêt plus grand. Jusqu'ici les charges publiques ont été l'effroi des citoyens. C'était. pour s'en sauver, qu'ils fuyaient les campagnes, qu'ils achetaient ces charges ridicules et inutiles que la fiscalité avait trop ingénieusement multipliée^. Personne ne rentrera dansles campagnes pour être collecteur à son tour. Ce serait donc un grand moyen de prospérité, que de transformer cette charge personnelle et périodique en une profession utile).
Alors les 6 deniers suffiront aux frais de perception, et il en résultera une réduction de...... 716,-020
Au second degré, l'activité des directoires de district et de département aura l'influence la plus marquée. Ils presseront et surveilleront tout à la fois le recouvrement.
Des receveurs particuliers qui n'auront donné d autres cautions qu'une fortune connue, toujours éclairés, toujours pressés pour les versements dans la caisse publique, seront forcés de se contenter d'émoluments modérés, et jamais il n'auront ni la téntation, ni la faculté de distraire les fonds publics à leurs usages particuliers.
Le: comité a „ pen^é, que. leurs
taxations et émoluments pouvaient être réduits à 2,490,000 livres. On a supposé six districts et six receveurs par département; chaque receveur a 5,000 livres au plus d'appointements ; on peut encore ne pas mettre un receveur par district. Il faudra donner des appointements plus forts à Paris et dans les grandes villes ; il y faudra aussi quelques receveurs de plus.
Économie, ci. . .......503,146
Le troisième degré de perception n'est plus, dans ce nouvel ordre de choses, qu'un intermédiaire inutile; la suppression donne une économie de (on ne doit pas oublier que cette économie doit être diminuée du produit annuel des droits du marc d'or, de mutation, etc., que payaient les offices de receveurs généraux et de receveurs particuliers), ci. .... .1,986,854
La comptabilité pour la recette, jusqu'au versement au Trésor public, sera confiée aux directoires des départements, et il en résultera encore une réduction de dépense de.............500,095
La dépense d'administration générale doit décroître, et le comité l'a fixée par aperçu à 80,000 livres. Nouvelle économie de (y compris le bureau des états du roi). . . .108,095
Enfin, les intérêts des emprunts faits par les provinces pour le compte du roi sont les intérêts de la dette publique, et la dette publique constituée doit être toute réunie sous la même administration : tous ces intérêts doivent être payés dans la même forme, et par des trésoriers communs.
Ces trésoriers existent, ils sont payés, et ne demanderont point à être payés davantage.
Ainsi, en faisant payer à l'hôtel de ville les rentes et intérêts qu'acquittent aujourd'hui les trésoriers des provinces, on économisera encore. . .... .......136,923
4,753,888
Économies futures... 4,645,238
L'économie des bureaux de l'administration générale sera portée à un autre chapitre, et n'est ici que pour mémoire, ci. .,« . 108,630 1.
D'économies actuelles et présentes, le comité n'a pu en apercevoir que d'infiniment médiocres. Ce n'est pas au moment où les receveurs généraux et les receveurs particuliers vont être frappés d'une suppression inévitable, où leur zèle et leurs moyens sont atténués par les circonstances les plus critiques, qu'on peut les frapper encore par des réductions.
11 en résulterait le découragement, la langueur des recettes, et peut-être l'interception des revenus.
Mais, dès cette année, des départements actifs peuvent presser les perceptions, éclairer les recettes passées et retrouver dans les caisses ou des
fonds qui y séjournent, ou un vide dont l'existence fera évanouir une partie de la dette publique.
Le comité avait d'abord arrêté onze articles, mais un plus grand examen a désavoué les premiers calculs, et ii se borne à vous présenter le projet de décret suivant :
L'Assemblée nationale décrète qu'à partir de l'époque où le nouveau système d'imposition sera organisé, toutes les impositions réelles ou personnelles seront reparties, recouvrées, et versées au Trésor public, sans aucune déduction, même pour transport d'espèces. »
(Cet article est adopté.)
passe à la ferme générale et dit :
Trois grandes compagnies de finances présentaient, dans l'ancienne organisation du royaume, une masse imposante.
Balancées entre elles, toujours émules, toujours prêtes à devenir rivales, elles pouvaient éclairer l'administration par des comparaisons, et la servir par la concurrence; mais aussi elles multipliaient trop les agents de la perception, et la rendaient trop dispendieuse.
Le partage des revenus avait été fait entre ces compagnies avec autant d'intelligence et de précision qu'il pouvait l'être, d'après la nature des droits et l'analogie des perceptions.
Il faut dire à notre honneur que les financiers d'aujourd'hui sont à une distance de plusieurs siècles des financiers d'autrefois.
Les trois compagnies offrent, dans la manutention de leur régie, l'ordre, la franchise et la loyauté.
On y trouve, à la minute, le tableau non suspect des produits dans leur ensemble, dans leurs détails, avec la distinction des perceptions.
Les frais de régie y sont calculés avec précision, et les bénéfices s'y montrent sans nuage et sans obscurité.
Le comité va présenter séparément chacun de ces objets dans leur état passé, dans leur état actuel et sous les modifications dont il les a crus susceptibles.
Le bail actuel a commencé au 1er janvier 1787 et devait finir au 1er janvier 1793.
Il comprend des objets affermés et des objets en régie:
Les objets affermés sont le sel, fixé dans les grandes gabelles à .39,500,0001.
Dans les petites à .... .14,000,000
Dans les gabelles locales à. 5,060,000
Le tabac fixé à 27,000,000
Les entrées de Paris à . . . 30,000.000
39,500,0001. 14,000,000 ( 58,560,000 liv-
57,000.000
Objets affermés..... 115.560,000 liv.
Il faut déduire sur les entrées de Paris 1,200,0001., jusqu'à ce que l'enceinte soitachevée.
Les fermiers sont tenus rigoureusement de payer ce prix de bail. Leur bénéfice commence sur la vente du sel, immédiatement après les 58,560,000 liv.
Il ne commence, sur le tabac et les entrées de
Paris, qu'après que ces deux objets ont produit 61 millions.
Et de tous les bénéfices, la moitié appartient au Trésor public.
Les objets en régie sont :
Les droits de traite;
Le domaine d'Occident;
La vente du sel de salpêtre;
Les salines dans les provinces de gabelles locales;
Les sous pour livre de quelques droits appartenant ou aliénés à des particuliers.
Le produit de : tous ces objets a été calculé à 30,440,000 livres.
La ferme répond de 28,440,000 Hv. ; elle n'a de bénéfice que sur l'éxcédent des 30,440,000 liv., et le bénéfice se partage par moitié entre la ferme générale et le Trésor public.
Elle a reçu au commencement, et doit rendre à la fin du bail, en meubles et en immeubles, une valeur du 7,979,137 Hv. 3 sous 3 deniers, dont elle ne paie aucun intérêt.
Les fonds d'avance des fermiers sont de 68,640,000 liv.qui, divisées entre quarante-quatre, forment pour chacun, la somme de 1,560,000 liv.
De cette somme, 52,800,000 liv. portent 5 pour 100d'intérêt; 15,840,000liv. donnent 7pour 100, 3,748,000 liv.
Indépendamment de ces intérêts et de ces bénéfices éventuels, il était assigné à chaque place de fermier général, pour honoraires, 30,000 1. ci. . 1,320,000 liv.
La ferme a fait sur cette somme le sacrifice de 500,000
Il ne reste donc que la somme de. 820,000 . 820,000 liv.
Pour frais de bureau, à chacun
3,600 liv. ci . . 158,400
8 deniers sur les 171ers millions des objets régis. 566,666 \
10 den. sur les \ 1,004,166 ï
autres.... 437,500 j
Les frais des employés, les appointements des bureaux, enfin tous les articles de dépense qui suivent n'étaient pas autrefois au comptedu roi.
Une vanité de ministre a produit cette innovation, qui a ses dangers. On voulait montrer une grande habileté. On chargea le Trésor public d'une grande dépense pour augmenter la recette, et, grâce à cette adresse, le bail parut produire 150 millions au lieu de 148. Il faut y ajouter encore les pensions affectées sur la ferme générale. Dès 1780, une partie de ces pensions, celle qui est portée à la page 111 de l'état des revenus ordinaires et des dépenses fixes, avait été mise sur le compte du roi. Une vue très sage avait motivé ce déplacement. C'étaient des magistrats, des personnes distinguées qui avaieut ces pensions : le ministre crut qu'il fallait qu'ils les tinssent du roi, et non pas d'une compagnie; d'ailleurs, il voulait supprimer à mesure qu'elles vaqueraient; et tant qu'elles paraîtraient à la charge de la ferme, la suppression n'aurait été qu'une faveur pour la finance. Cependant elles ont été conservées ; quelques-unes sont. éteintes aujourd'hui. Les trois autres chapitres de pensions, pages 113, 114 et 115 étaient restés sur la ferme, et n'ont été portés sur le compte du roi que dans le dernier bail.
SAVOIR :
Appointements des bureau! dé l'hôtel des fermes.781,9501.
Augmentation de traitement aux employés dés bu* reaux ...300,000/1,081,9501.
Appointements des brigades pour les objets en régie Gratifications annuelles ordinaires. . . * Extraordinaires. De fin de bail. Loyers de maisons et logements de quelqûes directeurs . f -Ëtrennes, deux cent ' ciûquante-sept mille huit cent quarante liv. Cette dépense a été supprimée
Far un décret de Assemblée nationale .
Honoraires du conseil dés
fermés'; . .
Traitemen ts aux principaux employés pour tenir lieu d'une place de fermier général, dont les produits leur avaient été réservés* ^ t .
Traitements aux préposés à la descente des sels * ... -Supp iémen t aux mesureurs de sel; « . . t Gratifications au contrôleur des sels aux Sables-d'Olonne . .
Architecte et contrôleur des bâtiments des fër« mes. 4 i t . Augmentation ;M; de Forbin deSsouepahninot de ëel des salines d'Hyères, pour le service de là ferme, par arrêt du conseil du 39 août 1783. . ,
781,9501. 300,(0}
176,593 45/471
30,8001.
66*000
62,200 5,238
4,000
1/200
,081,9501.
136,3à$ 409,766
159,000
13,438
3,0C0
Frais du dompte général .
Bureau des comptes de régie.
Epices aux différentes chambres des comptes.
Il a été exigé des cautionnements: ils se divisent en cautionnements anciens, dont l'intérêt est à 4 pour 100, et cautionnements nouveaux, dont l'intérêt est à 5 pour 100 .
Le capital des anciens cautionnements est de . i . . i
Intérêts à 4 pour 100 ; i .
Cautionnements nouveaux 9 millions 166,800 L, intérêts . i .
Administration générale,- 86,9001.
Total .
26,050 12,900
15Ô;086
188,986
17,985,200 719,408
457,840
4,089,965 h
C'est sur cette mâsâé dë4,Ô89,96Shv; qii'ii faudrait opérer, si les cir'cùrtstânCés permettaient d'èûVisàêer, dans l'état actuel dès chosés, un état fi^e et permanent. Mais déjà les décrets de l'Assemblée ont présagé une gràhdé ^Itération dans là massé des impots indirects ; dés insurrections ont, presque dans toutes les provinces, diminué les produits.
Là gabéllfe n'est plus, lé, tabâC est mfenâoé de tous côtéâ, les entrées de Paris et lès traites ont éprouvé ûriê dégradation marquée.
Les feranéri gênérâiix demanderont un coînpie de clerc à maître, el les indemnités que, dans des temps plus heiH-edi, ils auraient droit d'exiger» leur pâtriotisme leur défendra même de les àt-tenare.
Ou ne peut rien retrancher sur les intérêts dés fonds d'avances.
(Jes fonds éndrihés n'appartièrifient point aux fermiers généraux; ils sont à Paris ét aux provinces. Ce n'est point par des engagements nXëè et durables qu'ils ont été obtenus, mais par des emprunts à temps, qui finissent tous les jours; et qui tous les jours se renouvellent.
Ces marchés sont soumis aux variations du numéraire et aux calculs des risques dont ia chose publique est ménacée;
On peut assurer qu'il n'est peut-être pas un fermier qui ait acheté ses fonds d'avance au prix de l'intérêt qu'il en retire.
On ne peut guère diminuerles820,000 liv., auxquelles ont été réduits leurs honoraires, par un sacrifice de 500,000 liv. Le comité a pensé qu'il ne pouvait pas en exiger d'autre. 820,000 1.
Les frais de bureau pourraient n'êtrès portés qu'à 2,400 liv., ci . 105,600
Lës huit et dix deniers sur leâ objets régis diminueront par la forcé des choses, et la perte des fermiers déviendra aussi la perte dë
A Yèporiër...........925,660*'1.
Report............ 925,600 1.
la nation. Le comité a pensé qu'on
pouvait les fixer à..... 500,000
Les appointements des bureaux de l'hôtel des fermes ...» 500,000
L'augmentation de traitements des employés peut être fixée à . 100,000
L'augmentation de traitements des brigades pour les parties régies à ......... 100,000
Les gratifications ordinaires à . 400,000 Les extraordinaires à. . . * 400,000 Les loyers des maisons èt logements de quelques directeurs ne sont susceptibles d'aucune réduction : ce soot des engagements qui doivent être sacrés pour la nation comme pour les particuliers . . 27,900
Les honoraires du conseil de la ferme à .......... . 2Q0,000
Architecté de la ferme..... 1,000
fre supplément de salaire aux mesureurs du grenier à sel 4e Paris.
Enfin, les frais du compte de la ferme générale, du bureau dejj comptes de la régie.
Les épicës des différentes chambres des comptes du royaume.
Ces trois articles ne doivent plus exister; les législatures auront un comité de comptabilité.
Enfin les frais d'administration ont été réduits par votre comité à la somme dè . . . ... . . . 100,000
Mais pette réduction sera portée au chapitre des frais d'admipisjtrît-tion générale. - .
Total de la dépense de la ferme
générale, à la charge du Trésor pu-lic . V V ... . . 125$,500
Une réforme intéressante pour : ,J...,: ;;> le public appellera l'attention dé l'Assemblée.
Les droits sur les saisies font partie des émoluments des directeurs et des contrôleurs. ÎJpe p&A reille disposition tend à faire multiplier les saisies et les vexations .
Il ne faut leur accorder de remise que sur un excédent de produit.
Réduction.......... 2,089,305
Le comité proposera-provisoirement le projet de décret suivant, dans le cas ou l'Assemblée natio-r nàle n'adopterait pas la refonte immédiate de toutes les compar gnies de finance.
L'assemblée nationale décrète ce qui suit ;
Art 1er. Les traitements des fermiers généraux demeureront fixés pour la présente année, à * . . . 820,000 Leurs frais de bureau à 2 >400
livres chacun.......... 105,600
Les remises qui leur seront faites sur les droits régis ne pourront
excéder . . . .........
Art. 2. Les appointements des bu^ reaux de l'hôtel des fermes seront
réduits à................500,000
L'augmentation de traitements des employés desdits bureaux à. 100,000
Les gratifications ordinaires à . 40,000
Les gratifications extraordinaires, à . . ........... 40,000
L'augmentation de traitement des brigades pour les objets régis, à............... 100,000
Les gratifications de fin de bail seront supprimées.
Les honoraires du conseil seront réduits à............ 20,000
Le traitement de l'architecte de la ferme..............1,000
Le traitement accordé aux principaux employas t pour leur tenir lieu d'une place supplémentaire de fermier général, sera supprimé.
Le traitement des commis préposés à la descente des sels sera supprimé.
La gratification au contrôleur des Sables-d'Olonne sera supprimée.
L'augmentation de 2 sous par minot de sel des salines d'Hyêres sera supprimée.
Les frais de Gompte de la ferme générale et des parties eh régie» les épices aux différentes chambres des comptes du royaume, seront pareillement supprimés, à compter du 1er janvier dernier.
Art. 8. Les directeurs et contrôleurs n'auront plus de remises sur le produit des saisies, mais seulement sur l'excédent des produits.
Art. 4. L'Assemblée nationale prendra en Considération la situation et les services des employés qui seront supprimés.
Jl me semble qu'on doit retrancher de l'article 1er les 105,600 livres qui regardent les frais de bureau. Ge sont des détails particuliers qu'il ne nous appartient pas d'évaluer. Je ne vois pas bon plus pourquoi on nous propose dans l'article 2 des gratifications ordinaires et extraordinaires. J'admettrai cependant, et je ne sais trop pourquoi, les gratifications ordinaires; mais quant aux gratifications extraordinaires, je demande expressément qu'elles soient retranchées de l'ar-ticie.
(Le premier amendement de M. Camus, mis aux voix, est adopté, et l'Assemblée décide que ces mots seront retranchés de l'article 1er; leurs frais de bureau à 2,400 livres chacun... 105,600livres. )
La réduction du traitement des fermiers généraux ne ipe parait pas bien suffisante, puisque le.prix de leur J>aii est réduit à moitié. Je demande que le traitement des fermiers généraux soit réduit à 660,000 livres, au lieu de 820,000 liyres auxquelles il avait été fixé par le comité.
(de Nemours). Avant tout, il fau t être juste, et il faut l'être pour tout le monde. Les fermiers généraux ont fait 1,560,000 livres de fonds, dont 1,220,600 livres ne portent que 5 0/Ô d'intérêt, et 340,000 livres seulement sont payées sur le pied de 7 0/0. II est reconnu de tous ceux qui sont instruits des affaires de finances, que très peu de fermiers généraux sont propriétaires de leurs fonds : le plus grand nombre les a empruntés ; rarement ils les ont trouvés à 5 0/0; ils les paient 5 et demi, 6 e, quelquefois plus. La plupart des fermiers généraux sont obligés de prendre sur leur salaire de quoi payer le surplus de leurs intérêts. Seloh leur bail, ils avaient l'espérance d'un profit proportionné à leurs avances; vous venez de réduire ce profit, qui est le salaire de leur travail, à 30,000 fr-
Ceux qui payent leurs fond^ à 6 0/0 n'au.
raient donc que 15,000 francs de salaire. 11 n'y a point du tout de proportion. L'amendement me parait injuste. Je demande que l'article soit adopté tel qu'il est proposé par le comité.
(L'Assemblée adopte l'amendement proposé par M. Fréteau et les quatre articles proposés par le comité.)
Divers membres présentent encore des observations.
Enfin le décret est rendu en ces termes :
« Art. 1er. Les traitements des fermiers généraux demeureront fixés, pour la présente année, à 660,000 livres.
« Les remises sur les droits régis ne pourront excéder 500,000 livres.
> Art. 2. Les appointements des bureaux de l'hôtel des fermes seront réduits à 500,000 livres.
« L'augmentation des traitements desdits bureaux, à 100,000 livres.
« Les gratifications ordinaires, 40,000 livres.
« Les gratifications extraordinaires, 40,000 liv.
« Augmentation de traitement des brigades, pour les objets régis, 100,000 livres.
« Honoraire du conseil de la ferme, 20,000 liv.
« Honoraire de l'architecte de la ferme, 1,000 liv.
Le traitement accordé aux principaux employés pour leur tenir lieu d'une place supplémentaire de fermier général, supprimé.
« Traitement des commis préposés à la descente des sels, supprimé.
« Supplément de salaire des mesureurs de sel de Paris, supprimé.
t Gratifications aux contrôleurs des Sables-d'O-lonne, supprimées.
« Augmentation des deux sols par minot de sel, des salines d'Hyères, à M. Forbin, supprimée.
« Art. 3. Les frais de compte de la ferme générale des parties régies, et les épices à différentes chambres de compte, supprimées à compter de janvier 1790.
« Art. 4. Les directeurs et contrôleurs n'auront plus de remises sur les saisies, mais seulement sur l'excédent des produits.
« Art. 5. L'Assemblée nationale prendra en considération la situation et le service des employés qui seront supprimés.
fait la motion pour que le comité des impositions présente incessamment son rapport sur la ferme du tabac.
, membre du comité d'agriculture et du commerce, requiert que M. Rœderer, rapporteur du comité des impositions, soit entendu préalablement.
L'Assemblée prend en considération les motifs allégués pour l'ajournement, et décrète que ie rapport sur la ferme générale du tabac sera ajourné après qu'on aura entendu le rapporteur du comité des impositions.
Un de MM. les secrétaires fait lecture de la lettre suivante adressée aux députés du Roussillon, par la municipalité de Perpignan: « Nous avons lu dans la Gazette nationale ou le Moniteur universel, que la société patriotique de Perpignan avait dénoncé à l'Assemblée nationale la municipalité de cette ville, pour avoir refusé de prêter le serment civique, et que cette dénonciation avait été renvoyée au comité des recherches. Nous aimons à croire que c'est à tort que cet article a été inséré. Mais, en cas que la dénonciation fût vraie, nous
supplions l'Assemblée nationale de vouloir bien nous nommer les dénonciateurs. »
invite l'Assemblée à se retirer dans ses bureaux pour procéder à la nomination de six adjoints au comité de la marine. La séance est levée à trois heures.
Séance du
La séance est ouverte à 9 heures du matin.
, ancien président, prend le fauteuil en l'absence de M. le président, et préside l'Assemblée.
, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance de la veille, qui est adopté.
, secrétaire, lit le procès-verbal de la séance du jeudi soir, 10 juin, et ajoute ensuite :
A la demande du comité ecclésiastique, je propose une modification dans la rédaction de l'article 7 du titre II sur la nouvelle organisation du clergé. Cet article ne porte plus dix ans de cure et cinq ans de vicariat, mais simplement quinze ans, soit comme vicaire, soit comme curé.
Il est bien étonnant qu'on nous propose de revenir ie lendemain sur un décret porté la veille : vous ne voulez pas donner à la législature une pareille instabilité.
, rapporteur. La proposition du comité ne tend qu'à mettre plus de clarté dans vos décrets. Pour être nommé curé, il faudra avoir été cinq ans vicaire. D'après ce calcul, la nouvelle rédaction ne vous présente rien que de très juste, et lève toute espèce de difficulté.
Un membre observe que cela n'a pas été décrété .
, rapporteur. Eh bien I je vous propose de le décréter. On pourra faire des exceptions en faveur des curés actuels, et des évêques dont les sièges vont être supprimés ; mais je demande qu'on décrète d'abord le principe que, pour être éiigible à une cure, il faudra avoir été cinq ans vicaire, ou avoir exercé telle autre fonction que l'Assemblée déterminera.
J'observe que certains curés actuels, qui ont vicarié dans un autre diocèse pendant moins de dix ans ou qui ont été nommés curés sans avoir été vicaires, se trouveraient exclus.
Je crois qu'il est équitable de décider que d'autres que les vicaires peuvent être éligibles aux Cures.
, rapporteur. Pour faire cesser ces difficultés, je propose :
« 1° De décréter le principe de la nécessité des cinq années de vicariat, en réservant d'étendre l'éligibilité à telles autres fonctions qui seraient déterminées ;
« 2° D'adopter la nouvelle rédaction de l'article, en se réservant également d'y apporter tes différentes exceptions qui seront jugéesconvenables.»
Ces deux propositions sont mises aux voix et adoptées.
L'article 7, tel qu'il se-trouve rapporté au procès-verbal, est ensuite maintenu.
, secrétaire, annonce que M. Aubry, inspecteur général des turcies et levées du royaume, membre de différentes acca-démies, fait hommage à l'Assemblée d'un ouvrage intitulé, « Mémoires sur différentes questions de la science des constructions publiques et économiques, qui ont successivement remporté les prix d'académies. »
L'Assemblée témoigne sa satisfaction de l'ouvrage qui lui est présenté ; elle applaudit au zèle de l'auteur pour l'utilité publique, et ordonne que l'ouvrage sera déposé aux archives.
dit que la parole est demandée pour plusieurs affaires particulières très instantes; il indique entre autres celle de Marseille, qui semble mériter toute l'attention de l'Assemblée.
observe qu'il est important d'attendre les députés de cette ville, qui devaient se rendre incessamment à Paris.
En conséquence, l'affaire de Marseille est ajournée à la séance de mardi soir.
, au nom du comité des finances, demande que M. Guyard soit autorisé à remplir les fonctions de trésorier dans la province de Bretagne, sous le cautionnement de la famille de M. Beaugeard, ancien trésorier de cette province, et interdit pour cause de folie.
L'Assemblée adopte le décret qui lui est proposé et qui est ainsi conçu :
« L'Assemblée nationale, sur le rapport fait au nom du comité des finances de l'interdiction prononcée contre le sieur Beaugeard, ancien trésorier de la province de Bretagne, et de la soumission des sieurs Beaugeard et le Douarain fils et gendre dudit sieur Beaugeard, de faire pa- j rachever les exercices, et remplir les fonctions du trésorier aux mêmes charges et conditions;
« Considérant qu'il est nécessaire de pourvoir à ce que la comptabilité et l'administration relatives aux impositions de cette province ne soient pas interrompues jusqu'à ce que le uou-vel ordre qui doit être déterminé pour 1791 ait lieu, a décrété ce qui suit :
« Art. 1er Le sieur Guyard, présenté par les sieurs Beaugeard
fils et le Douarain, est autorisé à remplir, sous leur cautionnement et surveillance, les
fonctions de trésorier, en se conformant aux conditions suivantes :
« Art. 2. Les commissaires intermédiaires de Rennes nommeront un inspecteur pour veiller à la manutention des deniers, à leur emploi, et à l'établissement des comptes.
« Art. 3. Il sera établi un coffre à trois clefs : l'une sera remise à l'inspecteur, l'autre au sieur Guyard, et la troisième restera au iils ou à l'un
des gendres du sieur Beaugeard. Toutes les sommes que l'on recevra seront versées dan 3 ladite caisse, et n'en pourront être tirées que par le concours des porteurs des clefs.
« Art. 4. Il sera, du jour de la nouvelle administration, établi de nouveaux registres qui seront chiffrés et numérotés par l'inspecteur.
« Art. 5. Les registres et pièces de comptabilité seront constatés par le fils, les gendres et les cautions du sieur Beaugeard, ou par les fondés de procuration spécials, par l'inspecteur et par le sieur Guyard.
« Art. 6. Le fils et les gendres du sieur Beaugeard et ses cautions feront procéder sans délai à la reddition des comptes de sa gestion ; ils seront reçus et arrêtés parles commissaires des cinq départements de Bretagne.
« Art. 7. Chaque mois il sera fait et signé par les trois porteurs de clefs un état de la recette et de la dépense : cet état sera envoyé aux commissaires intermédiaires de Rennes, et un double en sera remis au ministre des finances.
« Art. 8. Il sera pareillement fait, chaque mois, un aperçu du travail sur les comptes de l'ancienne gestion, pour être aussi envoyé aux commissaires intermédiaires de Rennes, et être remis au ministre des finances. >
, rapporteur du comité de mendicité, fait au nom des comités réunis des rapports, des recherches et de mendicité, le rapport suivant sur la lettre du premier ministre des finances.
Messieurs, les comités des rapports, des recherches et de mendicité, en vous proposant le décret sur la situation actuelle de la mendicité de Paris, après avoir établi les droits de l'homme pauvre et valide à la subsistance, par le travail, ceux du pauvre invalide à des secours gratuits, enfin ceux de la société sur le travail de l'homme indigent et valide qu'elle secourt, ont dû avoir pour objet, de remplir les vues de l'Assemblée nationale sur les circonstances qui la pressaient de rendre un décret provisoire; éloignement du danger qui menaçait la sûreté de la capitale, et dont l'annonce se renouvelait sans cesse ; protection pour Jes indigents de Paris,ou qui, nés dans le royaume, se trouvaient dans la capitale ; remède à la pauvreté par le travail ; enfin, justice à tous.
Il semble que ces vues étaient suffisamment expliquées dans le décret, pour que l'exécution en fût sans difficulté conforme à l'intention de l'Assemblée qui l'a prononcé.
Le premier ministre des finances demande aujourd'hui quelque explication, nommément sur le 3" article, et il paraît craindre que l'annonce d'un travail facile, mis à un prix trop haut, n'appelle à Paris des indigents de toutes les provinces de France, et il demande interprétation a cet article.
Les trois comités réunis croient devoir répondre que l'intention du décret étant d'éloigner de Paris les mendiants qui y sont étrangers, les moyens d'éxécutiou doivent servir ces vues; que si l'Assemblée eût indiqué le mode d'exécution, elle n'eût pu échapper aux reproches de vouloir exercer les fonctions du pouvoir exécutif, et peut-être de les gêner dans les voies qu'elle aurait prescrites.
Les trois comités croient seulementdevoir ajouter, que si au lieu de distribuer les mendiants à présent dans la capitale, dans les divers ateliers qui sont proposés en grand nombre par l'inten-
dant des travaux publies, et sur les diverses routes du ressort de ce qui était autrefois la généralité de Paris, on les entasse dans la capitale; que si au lieu de leur donner un salaire proportionné à leur travail* on le leur donne sans proportion; que si au lieu de leur présenter des travaux utiles, on leur en présente sans utilité^ et qu'encore l'homme qui se refuse à travailler, soit aussi bien payé que celui qui remplit exactement sa tâche ; que si l'annonce des secours accordés dans chaque province pour établir des ateliers, n'est pas promp-tement connue d'elles, sans doute les demandeurs de travail abonderont de toutes parts dans Paris : il s'en présentera même sans besoin comme sans envie de travailler et votre décret ne produira pas le salutaire effet que vous devez en attendre ; mais on ne peut craindre ce mode d'exécution d'une administration bienveillante et éclairée qui dispose de tous les moyens.
Quant à la trop grande abondance de filatures, en raison dés besoins des manufactures (seconde objection du premier ministre des finances), les trois comités pensent que l'Assemblée n'a rien encore à répondre à pet égard.Sonofalëtaêtéde présenter à là pauvreté Un travail utile, eh l'empêchant de mendier : si les calculs de l'administration lui foht Croire qu'un àUtre travail que celui de la filature est préférable pour les besoins du royaume, sans doute elle les prescrira, et elle se conformera ainsi à l'esprit du décret.
En conséquence, les trois comités ont l'honneUr de proposer à l'Assemblée de charger M. le président dé répondre au premier ministre des finances, que son intention était bien positivement prononcée dans son décret du 31 mai, dé faire cesser dans Paris la mendicité par le travail, m d'én éloigner les oisifs étrangers à la Capitale ét sans ressourcés; elle àttend avec confiance que l'exécution de Ce décret servira ses vues de prévoyance et de justice : que si quelqué décret provisoire; semblable à celui tendu le 10, sur la proposition du comité ecclésiastique, pour l'évâ-cuation dé deux maisons religieuses, était Uéceâr sairë, elle s'en ferait rendre Compte d'après lés demandes du ministre ou de la municipalité de Paris ; et d'âjouter que le comité des recherchés recevant sans cesse de nouveaux àvis sur le nombre prodigieux d'étrangers Bans aveu, introduits journelleméntdans le royaume, et dOnt plusieurs déclarent, de mauvais dfesseids, il est instant, pour la chose publique, que lé décret du 31 mai soit promptement publié, répandu dans les provinces et mis eh exécution.
met aux voix les propositions du comité. Elles sont adoptées.
dépose un autre rapport, dont l'Assemblée ordonne l'impression et la distribution. Il est ainsi conçu : Premier rapport du comité de mendicité. Exposé des principes généraux qui ont dirigé son travail, par M. le duc de La Rochefoueauld-Liancourt.
Messieurs, l'extinction de la mendicité est le plus important problème politique à résoudre ; mais sa solution devient un devoir pour tome nation sage et éclairée, qui, élevant une Constitution sur les bases de la justice et de la liberté, reconnaît que la classe nombreuse de ceux qui n'ont rien appelle de tous les droits de l'homme, j les regards cle la lou
Jusqu'ici cette assistance a été regardée comme ] un bienfait : elle n'est qu'un devoir; mais ce de* ' voir ne peut-être rempli que lorsque les secours
accordés par la société sont dirigés vers l'utilité générale.
Si l'on pouvait concevoir un État assez ricbe pour répandre des secours gratuits sur tous ceux de ses membres qui n'auraient pas de propriété, ! eu exerçant cette pernicieuse bienfaisance, cet État se rendrait coupable du plus grand crime politique; et si celui qui existe a le droit de dire à la société : Faites-moi vivre, la société a également le droit de lui répondre : Donne-moi ton travail
Ici se présente ce grand principe longtemps méconnu dans nos institutions sociales :
« La misère des peuples est un tort des gouvernements, »
Si l'administration d'un État n'est pas telle que le travail y soit dans la proportion des hommes qui ne peuvent vivre sans travailler, elle favorise la mendicité, le vagabondage, et se rend coupable des crimes produits par ta pauvreté sans ressource.
Si une charité indiscrète accorde avec insouciance un salaire sans travail, elle donne une prime à l'oisiveté, anéantit l'émulation et appauvrit l'Etat.
L'enfant, le vieillard, que la société doit secourir gratuitement, ne sont cependant ainsi secourus que parce qu'ils promettent 4u travail oti qu'ils, en ont donné; le malade, par un sentiment près* sant d'humanité auquel cède toute autre ponsi*? dération.
L'homme enfin qui préfère au travail la mendicité, devient dès lors coupable envers la société, et mérite sa sévérité et la répression la plus prompte.
Ces principes renferment tout le système des secours qu'un État doit à ceux de séâ membres qui'sont sans ressourcés personnelles. Us semblent d'une telle évidence, qu'ils ne peuvent être contestés; c'est leur exécution exacte que la législation doit assurer.
Aucun État encore n'a considéré les pauvres dans la Constitution. Beaucoup se sont occupés de leur procurer des secours, beaucoup ont cher? ché les principes de cette administration, quel* ques-uns en ont approché; mais dans aucun pays les lois qui l'établissent ne sont constitutionnelles. On a toujours pensé à faire la charité aux pauvres, et jamais à foire valoir les droits de l'homme pauvre sur la société, et ceux de la société sur lui. Voilà le grand devoir qu'il appar? tenait à la Constitution française de remplir, puisque aucune n'a encore autant reconnu et respecté les droits de l'homme.
C'est en acquittant ce devoir que la Constitution attachera à sa conservation cette classe nombreuse, jusqu'ici réprouvée, en apparence, par la société, et que de bonnes lois, secourant de la manière la plus utile cette classe indigente, amélioreront les moeurs par le travail, préviendront tous les vices qui naissent si nécessairement de la misère, diminueront la pauvreté, et multiplieront ainsi le nombre des véritables citoyens.
Mais cette législation qui doit s'élever dans ses différentes branches sur des bases uniformes, qui doit être toujours conséquente dans ses applications, doit faire encore partie intégrante de la Constitution. Elle doit être dans elle, c'est-à-dire, qu'elle doit être telle, que sans elle la Constitution serait imparfaite ; car., comme la classe intéressante et nombreuse qui réclame las secours de la société, est partie intégrante de cette société, la législation qui gouverne «etie classe doit faire partie nécessaire de la Constitution établie
pour celte société, autrement elle pourrait être Une belle conception de l'esprit, mais elle ne serait pas la législation adaptée à un pays gouverné par upe Constitution; dont cette législation ne serait qu'up hors-d'œuvre.
Cette législation qui a pour objet de secourir la pauvreté, doit avoir principalement en vue d'en recpercher et d'en détruire les causes. Déjà ceux de vos décrets qui ordonnent la division des biens nationaux dont vous ayez déterminé l'aliénation, à la commodité d'un plus grand nombre d'ac-qu^rçurs, qui délivrent les biens-fonds d'une foule d'assujettissements qui en éloignaient les possesseurs, qui font disparaître toute distinction dans la nature des biens, appellent à la campagne plus d'habitants et plus de fonds, augmentent le nombre des propriétaires, multiplient les moyens de travail, ét assurant le perfectionnement de l'agriculture et des manufactures, attaquent ainsi victorieusement la pauvreté dans ses sources véritables.
L'iriflueqce de votre Constitution, améliorant les'moburs, amenant l'amour du travail, aura sans doute éncôre un effet certain sur la diminution de la pauvreté; mais rien ne la peut détruire entièrement : trop de causes malheureusement se réunissent ppùr l'entretenir et la faire renaître; et l'on peut dire qu'elle trouvera, par la Révolution même, un accroissement passager qui disparaîtra bientôt sans doute, qui sera remplacé plus ou moins promptemerit par line prospérité réelle et plus étendue, mais qui n'en est pas moins un mal qu'il faut soulager.
C'est cette pauvreté sans ressource, cette pauvreté, si l'on peijt le dire, nécessaire, que la nation doit secourir dé tous les moyens que ses besoins exigeront; elle en a pris l'engagement,et cet engagement e^t sacré, il est un devoir. Mais c'est dans là législation qui doit assurer ces secours, auè la Constitution doit Chercher encore les moyens d'en diminuer la qécèssité, et d'employer à cette intention vraiment moralè. vraiment politique, ces secours eux-mènies.
La législation qui a- pour objet les secours à donner à far pauvreté, présente, il n'en fàut pas douter, de grandes difficultés.
Le législateur, continuellement placé entre la Cfaintè de né donner qu'une assistance inoôm-plète, et de laisser ai psi des malheureux, ou sans secours, où sans là masse de secours qui leur est nécessaire, et eqtre la crainte d'acGroître par une assistance trop entière le nombre de ceux qui voudraient être assistés, et par conséquent l'Oisiveté et là fainéantise, doit éviter soigneusement ces dejjx écueils, et ils se toUGhent de bien près. Insuffisance de sècours, c'est cruauté, manquement essentiel aux devoirs les plus sacrés; assistance superflue, c'est destruction des mœurs, de l'amour du travail, c'est désordre, g'est injustice enfin, puisque C'est employer des fonds publics par delà l'exacte nécessité.
La charité pouvait sortir des bornes de cette sévère précision, elle pouvait se laisser aller aux douces ipapressions de la sensibilité, de la bienfaisance, et ne considérer dans l'assistance qu'elle donnait à ce qui était, oU oe qui lui Semblait le malheur, que le bonheur de faire du bien. Tout ce qui n'est pas nécessaire avec séyéçité, est interdit à uné dation qui; dans la distribution des secours, ne doit opérer qu'un acte de justice, et qui ne doit jamais perdre de vue les suites funestes (Fune trop grande facilité.
De là ce principe sévère en apparence, mais uste et nécessaire à observer dans la législation
des secours, que l'homme secouru par la nation, et qui est à S» charge, doit cependant se trouver dans une condition moins bonne que s'il n'avait pas besoin de secours, et qu'il pût exister par ses propres ressources i principe aussi éloigné^ dans son exécution, de 1$ dureté que de la profusion, mais principe essentiellement nécessaire, et qui bien suivi est moral, politique, humain, et même bienfaisant pour la société, puisqu'il tend à lui donner de i'énergje, à lui eréer des yertus, en ne se refusant d'ailleurs à aucun de §§3 véritables besoins.
L'application de ce principe porte sur tous les détails des secours différents que la pauvreté réclame avec droit d'une nation juste, et ces détails eu fout plus connaître encore la nécessité.
Ainsi, par exemple, dans l'assistance de l'enfance abandonnée, ce devoir si sacré, et tant commandé par la nature, ce deyoir rendu au malheur sans ressource et sans tort, les services, complets sans doute, prévoyants, embrassant à ia fois, et l'existënce physique de l'enfant, et les moyens de faire de lqi un citoyen heureux et utile à l'Etat, doivent cependant être tels qu'ils n'engagent pas un grand nombre de mères à abandonner leurs enfants, à les confier à l'administration publique ; car, par là, ils provoqueraient un crime funeste à la société, et d'autant plus dangereux que la tendresse maternelle en serait l'excuse.
Dans les mqyens que doit la société au pauvre valide de subsister pav le travail, les difficultés sont plus fartes eneoré ; car si le travail lui est offert à chaque fois qu'il se présente et dans le lieu le plus prochain, et de la nature la plus facile, la société le dispense, par là, de la nécessité de chercher luirmême à s'en procurer, et lui interdit, pour ainsi dire, toute industrie; elle tombe en lui donnant ainsi du travail dans l'in-convénient qu'elle voulait éviter en se refusant aux secours gratuits, elle favorise la paresse, l'incurie, tandis qu'elle doit animer l'activité et la prévoyance; si elle ne donne que des travaux inutiles, elle fait encore le mal d'autoriser la fainéantise, car l'homme travaille mal à un ouvrage dont l'inutilité lui est démontrée, et le mal encore de dépenser sans avantage public les deniers Communs; sans doute, il se trouvera des moments où la nécessité contraindra de sortir de la rigueur exacte de ces principes ; alors «es secours seront encore un bien et un devoir ; ils vaudront toujours mieux que des secours sans travail; mais ces principes essentiels pour Les mœurs, pour l'otdre public, pour la morale d'un gouvernement n'en doivent pas moins être la règle habituellement suivie dans l'administration des secours ; c'est par cette raison que cette administration, dépendant à beaucoqp d'égards de celle qui aurait pour objet des manufactures et l'agriculture, se trouve plus particulièrement liée à celte des travaux publics t car ainsi elle a le moyen de distribuer l'ouvrage dans les temps où il est plus nécessaire de le diviser, d'en économiser la dépense toujours à l'avantage du pauvre et à celui de la société, et d'en avoir toujours à donner dans les moments où la nécessité en fait un indispensablè devoir, et que Mou doit regarder Gomme des moments de calamité-
Enfin, la vieillesse pauvre elle-MOiêrae qui, à tant de titres, appelle l'assistance de ta société, doit cependant, en étant pour-vue de l'exact nécessaire, être secourue de manière à ne pas favoriser l'imprévoyance* et par conséquent la dissipation et
la débauche des ouvriers pendant leur vie. Le principe véritable d'assistance pubilque serait mieux suivi, en préparant des retraites commodes abondamment pourvues à celui qui, par quelque économie faite pendant sa vie de travail, pourrait fournir un prix très inférieur aux avantages qu'il en tirerait, qu'en donnant même avec moins de dépense à l'homme qui n'a rien ménagé, une assistance au delà du nécessaire.
Il faut, sans cesse, répéter que celte économie dans les secours, qui est bien Plutôt une précaution morale qu'une épargne financière, ne peut jamais porter à ne pas assister le vrai besoin : c'est un devoir impérieux, c'est un devoir commandé par le droit naturel à la société, et auquel elle ne peut jamais manquer; mais ce principe d'économie doit porter à n'assister que le vrai besoin, et à faire tourner le secours au profit des mœurs et de l'utilité générale. S'il s'agissait de doubler la dépense pour secourir la misère absolue, sans doute il ne faudrait pas hésiter, mais il faudrait l'augmenter encore pour détourner et prévenir les vices et les crimes, qui n'ont aucune cause aussi certaine que la fainéantise et la débauche ; c'est en les combattant, qu'un État peut espérer de détruire la mendicité, ce fléau destructeur dé la société, ce vice d'autant plus dangereux qu'il se perpétue de race en race, qu'il se multiplie par i'exemple, ët que sa pratique est souvent plus utile au fainéant qui s'y livre, que le travail ne l'est à l'homme honDête qui s'y dévoue, comme c'est en assistant la véritable indigence, en s'oc-cupant de la prévenir, que rendant la mendicité un délit social l'Etat a seulement alors le droit de la réprimer.
Tels sont, Messieurs, les principes généraux que le comité de mendicité a cru les seuls à suivre en remplissant le grand devoir de secourir la classe indigente, et qu'il a pris en conséquence pour base du travail dont vous avez daigné ie charger; il a cru devoir faire précéder de leur exposition les différents rapports que successivement il mettra sous vos yeux. Il résultera, sans doute, de leur exacte exécution, que quelques hommes seront moins abondamment secourus qu'ils ne l'étaient par le système partiel et arbitraire, auquel cette grande législation va succéder; mais tous les malheureux recevront des secours au, plus grand avantage de la société et ces secours seront tous distribués dans des vues de justice et de morale. Sans doute encore il sera fait à ce système général le reproche de ne destiner aucune assistance aux pauvres connus généralement sous le nom de pauvres honteux; mais si on veut réfléchir que l'inégalité nécessaire de fortune, de travail et de force, opère nécessairement le besoin dans quelques individus, on sentira que l'homme honnête ne peut jamais rougir du malheur qu'il ne peut se reprocher, mais craindre toujours les effets dangereux de la misère; on reconnaîtra que la législation ne peut sans incOn-vén ien t autoriser, dans l'indigence, ce s sen timents de faiblesse, que les secours qu'elle lui attribuerait auraient des conséquences funestes à plus d'unégard au bon ordre de la société; enfin on sera convaincu que les deniers publics pour être distribués sans reproche doivent l'être avec publicité. L'exécution de ce principe pourra paraître sévère, elle affligera plus d'une fois le cœur de ceux qui en seront chargés; mais la législation d'un Empire ne peut être fondée sur des sentiments ni même sur des vertus privées, elle doit l'être sur des principes généraux, immuables, et ceux-ci sont d'une justice exacte et nécessaire et
d'une saine morale. D'ailleurs, le champ de la bienfaisance restera toujours ouvert, soit aux particuliers, soit aux associations qui voudront par des secours de supplément, augmenter le bien-être des malheureux de telle ou telle classe, de tel ou de tel pays ; la législation doit autoriser, encourager même cette généreuse libéralité ; elle est l'un des caractères essentiels de la nation française, elle ne peut qu'accroître par la Constitution nouvelle, puisque, dans tous les temps et parmi tous les peuples, l'humanité a été la plus inséparable compagne de la liberté.
Tous les points qui toucheront à la Constitution du rovaume auront été concertés avec votre comité de Constitution avant d'être soumis à votre délibération ; ceux qui tiennent aux fonds nécessaires au soulagement des malheureux seront traités avec les comités d'impositions et des finances; il en sera de même pour le système de répression de la mendicité qui, avant de vous être présenté, sera discuté avec le comité de jurisprudence, afin que la réunion de plus de lumières donne à votre comité de mendicité plus de confiance dans les projets qu'il se propose de vous soumettre dans l'ordre suivant:
1° Etat actuel de la législation du royaume relativement aux pauvres et aux mendiants;
2° Rapport sur les bases de répartition des secours dans les différents départements, districts et municipalités, de leur administration et du système général qui lie cette branche de législation et d'administration à la Constitution générale du royaume;
3° Rapport sur l'estimation des fonds à attribuer au département des secours;
4° Rapport sur les secours àdonner aux malheureux dans les différents âges et dans les différentes circonstances de la vie;
Ce mémoire qui renfermera le système général des secours, contiendra autant de sections que le système entier contiendra lui-même de branches;
5° Rapport sur les moyens de répression pour les mendiants qui refuseront le travail.
Ce mémoire réunira la question de droit et les vues d'exécution, qui, soustrayantde l'arbitraire ie délinquant, le soumet cependant avec nécessité à l'empire de la loi.
Nous ajouterons ici, Messieurs, que le plan de notre travail embrassant les hôpitaux, hospices, prisons, le comité de mendicité a espéré trouver dans les grands établissements de ces genres différents que renferme la capitale, la connaissance de pratiques utiles à suivre, ou d'abus importants à éviter. Les rapports qui ont été faits de ces visites présentent la situation de ces maisons, et l'ensemble des secours offerts dans Paris aux malheureux.
Le comité, qui en a jugé la publication utile, n'a pas voulu cependant l'ordonner sans recevoir l'approbation de l'Assemblée. (L'impression de ces documents est ordonnée.)
propose, au nom du comité de Constitution, d/ordonner que tous les corps militaires qui existent dans la ville de Caen soient tenus de s incorporer dans la milice nationale s'ils veulent continuer le servicë, et qu'il leur soit ënjoint de porter l'uniforme et la cocarde nationale, aux termes de la proclamation du roi.
On demande que ce décret soit rendu général pour tous les endroit oui! y a des gardes nationales.
En conséquence, deux décrets sont adoptés en ces termes: c L'Assemblée nationale décrète :
« 1° Que dans le courant du mois qui suivra la publication du présent décret, tous les citoyens actifs des villes, bourgs etautres lieux du royaume qui voudront conserver l'exercice des droits attachés à cette qualité, seront tenus d'inscrire leurs noms, chacun dans la section de la ville où ils seront domiciliés, ou à l'hôtel commun, sur un registre qui y sera ouvert à cet effet pour le service des gardes nationales;
c 2° Les enfants des citoyens actifs, âgés de 18 ans, s'inscriront pareillement sur le même registre; faute de quoi ils ne pourront ni porter les armes ni être employés, même en remplacement de service;
« ifi Les citoyens actifs qui, à raison de la nature de leur état, ou à cause de leur âge et infirmités, ou autres empêchements, ne pouvant servir en personne, devront se faire remplacer, ne pourront être remplacés que par ceux des citoyens actifs et de leurs enfants qui seront inscrits sur ces registres en qualité de gardes nationales;
« 4° Aucun citoyen ne pourra porter les armes, s'il n'est inscrit de la manière qui vient d'être réglée|: en conséquence, tous corps particuliers de milice bourgeoise, d'arquebusiers ou autres, sous quelque dénomination que ce soit, seront tenus de s'incorporer dans la garde nationale, sous l'uniforme de la nation, sous les mêmes drapeaux, le même régime, les mêmes officiers, le même état-major. Tout uniforme différent, toute cocarde autre que la cocarde nationale, demeurent réformés, aux termes de la proclamation du roi; les drapeaux des anciens corps et compagnies seront déposés à la voûte de l'église principale, pour y demeurer consacrés à l'union, à la concorde, à la paix. >
« L'Assemblée nationale, sur le rapport de son comité de Constitution, relatif à l'ordonnance du conseil général de la commune de Caen, en date du 19 mai dernier, et au projet de règlement provisoire proposé par ledit conseil général et par l'état-major de la même ville, conformément au décret du 30 avril dernier:
« Décrète que ladite ordonnance et ledit règlement seront provisoirement exécutés jusqu'à l'organisation définitive des gardes nationales, aux conditions suivantes :
« 1° Dans le courant du mois qui suivra la publication du présent décret, tous les citoyens actifs qui voudront conserver l'exercice des droits attachés à cette qualité, seront tenus d'inscrire leurs noms chacun dans la section de la ville où ils seront domiciliés,sur un registre qui y sera ouvert à cet effet pour le service des gardes nationales; : « 2° Lès enfants des citoyens actifs âgés de 18 ans s'inscriront pareillement sur le même registre : faute de quoi ils ne pourront ni porter les armes ni être employés, même en remplacement de service;
« 3° Les citoyens actifs qui, à raison de leur état, ou à cause de leur âge et infirmités, ou autres empêchements, ;ne pouvant servir en personne, devront se faire remplacer, ne pourront être remplacés que par ceux des citoyens actifs, ou. de leurs enfants, qui seront inscrits sur ces registres en qualité de gardes nationales.
« 4° L'état de tous les citoyens sujets au service dont il est parlé en l'article 4 du règlement, sera, à. la fin du mois, à compter du jour de la publication du présent décret, recomposé d'après les tableaux faits dans chaque section, des inscriptions qui viennent d'être ordonnées;
5° Aucun citoyen ne pourra porter les armes s'il n'est inscrit de la manière qui vient d'être
réglée ; en conséquence, tous corps particuliers de milice bourgeoise, d'arquebusiers ou autres, sous quelque dénomination que ce soit, seront tenus de s'incorporer dans la garde nationale, sous l'uniforme de la nation, sous les mêmes drapeaux, le même régime, les mêmes officiers, le même état-major. Tout uniforme différent, toute cocarde autre que la cocarde nationale, demeurent réformés. aux termes de la proclamation du roi ; les drapeaux des anciens corps et compagnies seront déposés à la voûte de l'église principale de la ville, pour y demeurer consacrés à l'union, à la concorde et à la paix. »
, rapporteur du comité des finances, présente à l'Assemblée deux projets de décrets, l'un relatif à la ville de Vezelay, l'autre à la commune de Valay, bailliage de Gray, département de la Haute-Saône.
L'Assemblée les adopte en ces termes :
« L'assemblée nationale, sur le rapport de son comité des finances, a décrété que la ville de Vezelay est autorisée à employer en atelier de charité la somme de 2,000 livres qui a été perçue sur les habitants de cette ville pour la construction d'une route, et qui est en dépôt dans la caisse - du receveur des finances de ladite ville, à la charge, par la municipalité, d'en rendre compte par devant le directoire de district et de département.
« A l'égard de la somme de 3.300 livres, perçue sur les habitants de la même ville pour le même objet, elle se pourvoira, d'après l'avis du district, pour obtenir que la destination en soit remplie. »
« L'Assemblée nationale, sur le rapport de son comité des finances, a autorisé la municipalité de la commune de Valay à employer en achat de grains la somme de 2,000 livres, qui sera prise sur le produit de la vente de son bois de réserve ; ordonne, en conséquence, que le caissier de l'administration générale des domaines et bois comptera cette somme au bureau de ladite communauté, à charge par la municipalité de justifier de l'emploi au directoire de district et de département ».
, au nom du comité de la marine et du comité des finances réunis, fait un rapport sur les dépenses pour l'armement de l'escadre, ordonné par le roi m.
Messieurs, le rapport que j'ai fait hier n'était point écrit ; j'ai eu l'honneur de vous
rendre compte verbalement des divers articles dedépense énoncés dans l'état dû ministre, qui
ne présente que des résultats approximatifs; j'ai expliqué toutcequime paraissait susceptible
d'explication. L'Assemblée, en décrétant provisoirement trois millions d'acompte sur la
dépense de l'armement, et en ordonnant l'impression du rapport, désire sans doute plus de
développement dans les détails : ainsi, en rappelant ce que j'ai dit, j'ajouterai quelques
observations relatives à celles qui ont été faites ; mais je vous prie, Messieurs, de
remarquer qu'il ne s'agit point ici de discuter le système général des dépenses de la marine
; c'est dans l'examen du régime économique, de ses principes et de ses formes, que vous
reconnaîtrez si les dépenses peuvent être réduites à un moindre terme. J'ai commencé cette
tâche dans un premier rapport, imprimé il y a six semaines; et
Aujourd'hui, Messieurs, il s'agit de vous faire connaître à quelle somme le minière de [a marine porte là dépense de l'armement ordonné par le roi, et quel sera l'ep^pM Je cette somipe. Les spjdeé, traitements des pf^ciers et gens de mer, les vivres et munitions à etnbarquer sur chaque espèce de bâtiment sont réglés par les ordonnances. Si la dépense proposée par Je ministre de la marine, et qui s'exécute déjà d'après les ordres du roi, est Conforme aux règlements, l'état qui vous a été présenté ne paraît à vos comités susceptible, dans ce moment-ci, d'aucune autre observation : car ce n'est point de ces règlements, ce n'est point du régime économique de la marine dont vous m'aviez ordonné de vdtis rendre cotnpte aujourd'hui, mais d'qn fait particulier, d'une demande de fonds, et des motifs qui la déterminent,
Ainsi, lorsqu'on a paru improuvêr l'article de dépense relatif à la table des capitaines et état-major je n'ai pas oru qvoir, quant à présent, autre chose â répondre, si ce n'est que l'état est conforme aux tarifs subsistants. — Lorsque l'Assemblée jugera à propos de les réduire, ce ne sera probobiementqu'ftprêsBVoirconipâréletFaitemeijt des officiers dés différentes marines de l'Europe, et avoir examiné s'il ne convient pas d® déterminer les cas de guerre et de paix, de relâche dans les colonies, dans les pays étrangers, qui, établissant des différences sensibles dans le prix dés denrées, en exigent aussi dans le mode de réduction.
L'état du ministre, dont vous avez ordonné l'impression, s'élève au total à la somme- de 13,782,340 i. II est divisé en doyze nripcipaux articles, sureh^cup desquels je vais Vous présenter les détails qùj peuvent être considérés éomme les éléments dés calculs que l'état pe contient qu'en masse.
Le premier, bous le titre de réparations à l'armement, monte à 150,100 1.
Il a été évalué d'après les hases que voici : Pour un vaisseau de 110 canons. 12,0001. Pour un de 80, 8000 1., et pour 2 16,000 (1) Pour un de 74, 7000 I., et pour il, 77,000 Pour une frégate portant du 18,
3000 I. et pour trois ..... 9,000 Pour une portant du 12, Ô000 L, et
pour 11 . .......... 22,000
Pour une corvette, 10001., et p. 4 4,000 Pour un aviso, 8Q0 1.. et pour 6 . 4.800 Pour une flûte. 1800 1., et pour 2 8,600 Pouf une gabare, 1850. et peu? % 2,700
151,1001.
Cette (tanse a pour objet Igs emménagements iutérieurs,clpi$uunages et uiçàFiijijtiopi;
Le second article est celui des conduites d'équipages et journalier d'armement.
Je puis, Messieurs, vous présenter un développement détaillé de cet article; et si je né me rencontré pas exactement pour la somme totale avec le rédacteur dé l'état, j'indiquerai les causes de la différence.
L'ensemble de cet article se compose de trois parties distinctes, sur chacune desquelles je vais tâcher de vous donner des notions justes:
1° La conduit?, c'est-à-dire la somme payée £ chaque homme de fper pouf ses frais de route, depuis le lieu de Sa résidence habituelle, jusqu'au port où il est erpbarqué ; èette conduite est payée à raison de 6 francs par lleuè à chaque officier marinier, et dé 4 Fran0s à chaque matelot. Comme ces marins sont levés en divers lieux plus ou moins distants du pbrt de l'armement, oh a pris pour distance moyenne 50 lieues par homtpe ; et l'usagé adopté dans le département de là marine, est de calculer, dans la dépense d'armement, la Conduite pour l'aUer et le retour, attendu qu'il ne démande point dé fonds pour la conduite au désarmement, iFs'eosuit dope qu'il faut compter sur cent liéues par homme, ce qui exige une dépense de livres pour chaque orfieiçf marinier et de 2Û livres pour chaque matelot;
2° La demi-soldé accordée à chaque homme pendant là durée du journalier; laquelle {Jurée est cpmmunémenç établie sur le piçd d'un mois;
3° La valeur des rations fourhies, aussi pendant un mois, aux hommes employés à l'armement.
Pour vous mèttre. Messieurs, complètement ep état de faire l'application dés trois données que je viéns d'avpir rhonUeUr de vous iqdiquer, je Crois devoir vous présenter un tableau qt|l VoUs fera connaître le nombre et l'espèce d'jpdlvidus qui composent les états-majors, les équipages et les garnisons deg bâtiments compris dans l'arme ment'dont il est question aujourd'hui, en distinguant ceux qui reçoivent la conduite, la demi-sofde et la ration. Voir le tableau page \89.
1° Les états-majors, les élèves et les yolotiiaires ne reçoivent ni conduite, ni demi-solde, ni rations:
2° La moitié du nombre descanonniers étant fournie par le corps royal des canonniers matelots, il n'y en a que 508 qui reçoivent la conduite çQmme matelots, àinsi que la demi-solde;
S» Les timoniers sont traités, pour leur conduite, comme les matelots ;
4° Les troupes destinées à fournir les garnisons des vaisseau! ne reçoivent point dé conduite, nop,plus qtfg'fèS mousses, les Surnuméraires et jéS valets.
Sous ces dernières dénominations, on comprend
les seconds et aides-chirurgiens, les apothicaires, les commis des munitionnaires, les bouchers, boulangers et tonneliers. Quant aux yalets, ce sont ceux des officiers : ils sont au nombre de 17 sur le vaisseau de 110 canons, et en proportion dégradative sur les bâtiments de rangs infé rieurs.
D'après ces observations préliminaires, voici de quelle manière il me paraît convenable d'établir le calcul de cet article :
1° Pour conduite de 1,446 officiers mariniers, à raison de 25 livres pour chacun.. 36,150liv.
2° Pour celle des timoniers, ca-nonniers des classes et matelots. . 187,260
3e Pour la demi-solde, pendant un mois, des pfflc|erg - mariniers, canonniers des classes, timoniers, matelots et mousses, en tout 11,864 hommes. J . . , , , . , , r . . 147,991
4° Pour le prix des rations à fournir, pendant un mois, au même nombre d'hommes, à raison de 17 sols par chaque ration. . ....... 302,532
Total................673,933 liv.
L'état adressé par le ministre présente, pour cet article , une somme de 818,100 livres, ce qui me fait présumer qu'on a compris dans ce chapitre un mois de solde entière pour le journalier, au lieu de la demi^solde seulement qu'il était autrefois d'usoge d'allouer en pareil cas. Peut-être a-t-on prévu que les circonstances actuelles pourraient faire naître des difficultés ou donnep lieu à des prétentions extraordinaires, auxquelles il était prudent de se mettre en état de pourvoir provisoirement, par le moyen d'un fonds disponible au besoin.
Le troisième article, ayant pour titre : dépérissement de la mâture, des agrès, voiles} poulies, futailles, etc., s'élève, pour les 42 bâtiments, à 145,032 livres par mois. Il me paraît, ainsi que plusieurs de ceux qui le suivent, susceptible des observations que j ai faites au premier article, c'est-à-dire quil est physiquement impossible de déterminer avec une précision mathématique la mesure de cette consommation par chaque mois. Il est aisé d'apercevoir qu'elle est plus marquée dans les derniers que dans les premiers mois d'une campagne; que des combats et des coups de vent ont une grande influence sur ce dépérissement. Il a donc fallu encore, à cet égard, substituer les leçons de l'expérience à l'instruction qu'aucune méthode sûre n'aurait pu procurer, et fixer spéculativement une dépense que nulle prévoyance ne peut calculer justement d'avance.
Au surplus, l'évaluation ne paraîtra pas exagérée, lorsqu'on fera attention qu'un an de campagne ordinaire exige souvent le renouvellement total du rechange en gréement et en voilure, ainsi que de la majeure partie des futailles, que leur position dans la cale expose à un prompt dépérissement. Les événements de la guerre et les accidents plus ou moins communs à la mer ont, à l'égard de la mâture, des causes d'altération ou même de perte totale, sur lesquelles on ne parviendrait pas encore à prendre une idée juste, en prenant pour base le taux des assurances du commerce.
Le quatrième article présente l'évaluation du
dépérissement du doublage en cuivre, Il est indiqué avec la mesure déterminée de 1|36 par mois, c'est-à-dire qu'on a estimé la durée d'un doublage à trois ans.
Il a été fait, à cet égard, ûOQ observation W0 je dois rappeler.
On a remarqué qu'à l'expiration des trois ans, le cuivre, bien qu'il ne fut plus propre à servir au doublage, conservait encore une valeur quelconque qu'il paraîtrait juste de déduire du montant du dépérissement.
Le doublage d'un vaisseau de 110 canons emploie 33,750 livres en feuilles, et 4,800 livres de clous, les unes au prix de 27 sols t» d. la livre, les autres à celui de 38 sols, ce qui 6'élève, au tqtal, à 55,526 livres, non compris la main-d'peuvre.
Le vieux cuivre (1) hors de service se vend environ 16 sols la livre; mais, à l'époque du dédoublage, le poids ne s'en trouve pas, à beaucoup près, le même, et cette altération de poids est variable comme les causes qui la produisent; en sorte qu'il est presque impossible d'établir le rapport qui existe entre le prix de revente et celui d'achat. Il est donc difficile de déterminer 1a proportion dans laquelle ce prix de revente devrait entrer en compensation dans je montant du dépérissement pour chaque mois.
Enfin, il en est de même de la dépense de construction, qui se calcule en entier sans en déduire la valeur des bois et des fers qui pourront être vendus lors de la démolition. Mais les vieux cuivres, comme les bris et fers de démolition, font partie des recettes extraordinaires de la marine, dont l'administration est comptable comme de fout autre objet de recette.
Les cinquième et sixième articles sont encore établis, d'après l'expérience, et sans qu'on eu puisse produire les détails avec précision : l'un, journées d'hôpitaux, plus-value de la viande fraîche et autres dépenses imprévues, a pour objet les secours à donner aux malades soit en cas de relâche aux colonies ou en pays étranger, soit qu'il existe à la suite de 1 armée un vaisseau-hôpital.
L'autre, consommations journalières de diverses munitions et marchandises, a pour objet le remplacement successif d'un très grand nombre d'articles autres que ceux nécessaires au gréement, équipement et armement : la nomenclature en est infiniment étendue. Mes précédentes observations sont applicables à cet article.
Les septième, huitième et neuvième articles sont déterminés d'après les dispositions des ordonnances et règlements.
Dixième article. Les appointements des aumôniers sont fixés sur le pied de 50 livres par mois pour chacun. Les ferrements des chirurgiens leur sont payés sur le pied d'un soi pour chaque homme par mois.
Un honorable membre a conclu, du rappro chement de ces deux articles disparates, que l'état
était mal rédigé et qu'il y avait confusion d'articles. S'il avait voulu faire attention à la
somme de 113 livres pour les deux objets, il aurait reconnu que les menus frais s'expriment
plus communément en masse que par articles séparés, et,
Onzième article. La solde des équipages doit être évaluée plus haut, au moyen de l'augmentation que vous avez décrétée, Messieurs, en faveur des marins. Je ne crois pas que la répartition proportionnelle en soit encore faite : je l'évalue donc provisoirement, et j'estime que cet article doit être porté à 307,847 1.
Je remarquerai ici relativement à cette augmentation de solde, que celle qui s'applique aux maîtres peut être susceptible d une nouvelle discussion, dont le résultat pourrait leur être plus avaotageux.
Le douzième et dernier article présente le mon-tantde la subsistance. 11 n'est porté qu'à 356.711 1. et devrait l'être à raison de 411,957 1., en y comprenant l'augmentation de 2 s. au prix de chaque ration de mer, laquelle augmentation forme le montant d'un article additionnel de 588,4841. pour douze mois. J'observerai que renonciation de cette dernière somme est une légère erreur de calcul, et qu'elle n'aurait dû être estimée qu'à 581,580 livres.
Cette plus-value de la ration ne me paraît pas estimée trop haut. Le prix en avait d'abord été calculé à raison de 15 s. ; — en le portant à 17 s. c'est l'augmenter de deux quinzièmes ; mais il est à observer que le blé qui coûtait, les années dernières, de 13 à 14livres le quintal, a été payé récemment plus de 18 livres, l'augmentation de prix de cette denrée est donc de deux septièmes ; mais comme elle n'est pas la seule qui entre dans la composition de la ration de mer; que le prix des salaisons, des légumes, des vins, etc., n'a pas reçu un accroissement proportionnel, on n'a évalué qu'à un septième l'augmentation de la valeur totale de la ration ; ce qui semble suffisant, mais non pas exagéré.
Il ne me reste plus, Messieurs, qu'à vous rendre compte de la somme de 200,000 livres évaluée pour le traitement, pendant un an, des officiers supérieurs qu'on a supposé devoir être employés dans l'escadre: elle est susceptible d'augmentation ou de réduction, suivant les grades et le nombre de ces officiers qui seront employés, dont on n'avait pas connaissance au moment de la rédaction du projet de dépense. Voici, au surplus, les principes d'après lesquels elle a été provisoirement calculée, et qui sont établis par le règlement du premier janvier 1786. Au vice-amiral, par mois. . . . . 4,800 1. Au lieutenant général commandanten
chef, idem..........3,600
Au lieutenant général commandant une division dans l'armée ...... 3,000
Au chef d'escadre commandant en
chef................3,000
Commaudant une division.....2,400
Au capitaine de vaisseau, commandant une escadre de six bâtiments . . 2,100
Commandant une division de six bâtiments ... ....... 1,500
On fait une évaluation estimative de cette dépense, en partant de ces différentes fixations.
Il résulte, Messieurs, de ces explications, que l'état qui vous a été présenté par le ministre expose les dépenses effectives qui ont lieu pour l'armement ordonné, d'après les règlements et tarifs subsistants : car la différence en plus que j'ai établie ci-dessus sur le calcul des demi-soldes ne peut être une erreur, soit par les motifs que j'ai supposés, soit parce qu'il est aussi possible que cet excédent soit employé en avances de nardes aux matelots au moment de leur arrivée ; et lorsqu'une dépense quelconque est tarifée par des règlements, il n'y a point d'erreur qui ne puisse être facilement aperçue et réparée ; il n'y a point de compte qui ne puisse être vérifié et rigoureusement jugé. Ainsi, Messieurs, les trois millions que vous avez décrétés provisoirement, doivent reparaître maintenant sous une forme comptable, et j'ai indiquédans mon premier rapport comment la comptabilité peut être plus simple, plus régulière, plus accélérée que par le passé. — Quant à l'économie, j'ai dit et je suis convaincu que les dépenses de la marine sont susceptibles de réduction; mais la volonté du Corps législatif, qui suffit pour réformer, pour supprimer, doit être aussi éclairée qu'elle est puissante : et comme l'économie s'applique aux dépenses relatives aux hommes et aux choses, c'est-à-dire aux agents entretenus et aux consommations, il faut, avant de réformer, connaître et déterminer le nombre d'hommes nécessaire à un service quelconque; Je traitement qu'il est juste de leur allouer, pour qu'ils trouvent dans leur état une compensation satisfaisante de leur dévouement ; il faut apprécier les consommations nécessaires et celles qu'on exagère; et il faut, pardessus toutes choses, que l'administration soit conçue et ordonnée de manière que son bon esprit et sa surveillance suppléent à l'insuffisance de ces calculs approximatifs, que des événements imprévus déconcertent, et que l'expérience seule peut rectifier. — C'est par ces considérations, Messieurs, que j'ai pensé que lorsque vous auriez fixé les principes et les bases du régime économique de la marine, de sa constitution, toutes les réductions, tous les détails et les motifs des dépenses devaient être discutés con-tradictoirement entre la direction active de ce département et votre comité, pour en être rendu compte.
Les diverses dépenses dont on a rendu compte, élèventcelle d'un vaisseau de 110 canons, par chaque mois, à ...:.. . 58,363 1.
D'un vaisseau de 80, à.....50,814
D'un vaisseau de 74, à..... 44,039
D'une frégate portant du 18, à . . 22,897
D'une, idem, portant du 12, à . . 19,537
D'une corvette, à....... 9,944
D'un aviso, à........8,014
D'une flûte, à . . ......9,348
D'une gabare, à.......7,467
tableau explicatif du renvoi de la page 186, 2e colonne.
1 vaisseau de 110 canons
2 — de 80 — , 11 — de 74 —
3 frégates portant du 18.. 11 — portant du 12.,
4 corvettes...............
6 avisos.................
2 flûtes..................
2 gabares... ............
Totaux......
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21 34 187 33 110 32 42 16 14
489
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9 14 77 12 44 12 12 4 4
138
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77 120 605 108 330 80 84 22 20
1,446
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25 O 25 «S u
62 90 462 66 210 56 62
1,016
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8 14 66 12 44 8 12 4 4
172
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600 1,006 4,444 480 1,441 248 288 96 80
8,683
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s® s £
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Q
170 260 1,100 135 385 100 60
2,210
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CA
c/2 P O S
75 120 550 78 242 56 66 22 18
1,227
tri w es
1 »
es H g *
es 9
36 54 286 51 165 44 48 22 18
724
ETAT des frais d'armement.
ÉTAT des frais d'armement de 14 vaisseaux, 14 frégates, 4 corvettes, 6 avisos,
NOMS DES PORTS pù
LES BÂTIMENTS
seront armés.
Brest..... Rochefort.
Brest.
Lorient.... Rochefort.
NOMS DES BÂTIMENTS.
Vaisseaux.
Bre^t....
Lorient. * Rochefort
Brest.... Lorient...
Brest____
Rochefort.
Le Majestueux....
L'Auguste... :.....
Les Deux-frère»..
L'América.....»...
Le Duguay-Trouin.
Le Ferme.........
Le Patriote.......
Le Superbe.......
Le Téméraire.....
110 canons 80 -
1 Le B 3 L'Ent ( Le F
74 -
Le Borée......
Entreprenant. Fougueux...
L'Orion......
Le Généreux.
14 vaisseaux.
Frégates.
( La Cybelle... 3 La Proserpine. ( L'Uranie......
>Portant du 18
Ma Fidèle.....
La Réunion....
La Danaé......
La Fine......
La Bellone.....
La Surveillante. L'Amphitrite ... L'Atalante......
/Portant du 12
( L'Ei 3{ L'AÉ ( La (
L'Embuscade...
Aglaé........
Capricieuse.
14 frégates.
Corvettes.
( La Cérès...............
3 La Fauvette ............
I Le Maréchal de Castries.
1 La Favorite.
4 corvettes.
Avisos.
La Levrette. Le Papillon. Le Goéland.
Le Cerf.....
Le Serin.... L'Espiègle...
Flûtes.
\ 2
Le Marsouin.. La Normande,
Gabares.
1 L'Espérance.
1 La Truite.
2 gabares.
NOMS DES MATIERES et
DES AUTRES DÉPENSES D'ARMEMENT.
Dépense préalable
faisant partie de celles d'armement» quelle que soit la durée des campagnes.
Réparations à l'armement.......................
Conduite de l'équipage et journalier d'armement.
Dépense courante pour un mois de campagne.
de la mâture, des agrès, voiles, poulies,
futailles..........................
Dépérissement ^ du doublage en cuivre, estimé au tiers de la valeur pour un an, et consé
quemment au 36® pour un mois.....
Journées d'hôpitaux, plus-value de la viande fraîche, et
autres dépenses imprévues...........................
Consormations journalières de diverses munitions et mar
chandises............................................
Tahw ( du capitaine..........................
lames.........\ de 1 état-major........................
Subsistance en argent des élèves et volontaires.........
Appointements des aumôniers et ferrements des chirurgiens...............................................
Solde des équipages..................................
Subsistance des équipages.............................
Traitement des officiers généraux, évalué pour un mois à
2 flûtes et 2 gabares, dont Véquipement vient d'être ordonné pat Sd Mtijéslè,
191
14 VAISSEAUX. 14 FRÉGATES. 4 CORVET- 6 AVISOS. 2 FLUTES. 2 GARA- TOTAUX.
1 de 110 canons. î de 80 canons. Il de 74 câhoiié. 3 portant du 18. Il portant du 12. TES. RES.
livres- livres. livres. livrés. livres; livres. livres. livréii livieS. livres.
12,000 47,000 l5,000 78,000 77,000 404,800 9,000 52,500 22,000 156,200 4,000 32,800 4,800 28,800 3,600 10,400 2,700 ■7(600 150.100 818)100
59,000 93,000 481,800 61,900 178,200 38,800 33,600 14,060 l(j,300 1 988,200
6,800 12,800 66,000 10,500 31,900 5,000 6*900 Ml : 2,200 145,032
1,7^0 2,530 11,946 %ffr 7,458 1,152 1,200 1,242 450 ; 29,973
3,500 5,200 26*400 4,500 13j750 2,832 3,966 750 500 61,392
2,100 1,350 1,710 270 3,584 2,700 2,700 420 18,3*26 14,850 14,850 2,810 2,748 ' 5,600 2,700 aeo 9,163 13,200 8,910 1,320 3,164 3,360 2,5?0 ; 360 2,400 ' 5,040 3,240 324 542 1,380 1,260 108 , 418 1,380 ! 4,080 108 , 42,443 46,860 38,970 5,580
103 17,074 27,026 » » 186 27,768 43,713 » » 946 130,361 198,470 » '» 201 16«902 24,677 » » 704 82,230 76,012 » >> 228 ' 10,080 10,210 » 930 1 16,974 13,363 » » 112 1 3,612 6,706 » » 108 ; 3,234 5,374 >> » 8,918 272,255 405,751 16,667
61,653 101,601 484,459 68,66S ; 214,687 38,906 4'7,î3i 18,644 14, .8$ 1,067,845
SOMMAIRE.
Les dépenses courantes, détaillées «{.dessus, moment, poiir tan mois ordinaire, a.......................1,067,845 Jiv.
A ajouter pour la dépense préalable à payêt tthe fois ............................................ yt>8,J0U
Total de la dépense dû premier P^BM** 4».
Nota. — Il sera nécessaire dfe damier sur cette stmnte de 2.036)045 livres «elle de 300,000 livres en espèce pWif là dépense des conduite et solde des équipages et appointements des officiers embarqués:
Je demande l'ajournement de la discussion jusqu'à ce que le rapport ait été imprimé. Il règne dans ce rapport une telle confusion que les bistouris s'y trouvent réunis avec les fourchettes et qu'il est indispensable d'examiner à tête reposée les objets qu'on nous présente. D'ailleurs, le comité ne propose aucun projet de décret.
Les frais de l'armement doivent être payés pour un mois puisqu'il est révolu, mais ce payement peut être fait sans approuver les dépenses actuelles. Le doublage des vaisseaux est porté à un trop haut prix et Ton doit faire des réductions sur cet objet.
Les dépenses du doublage sont très considérables parce que le cuivre reçoit de très fortes altérations par les eaux de la mer et qu'il faut le renouveler souvent. Les comités vous demandent de voter les dépenses pour deux mois.
consulte l'Assemblée qui décide que le rapporteur lui présentera demain un projet relatif à la dépense à allouer pour deux mois.
, membre du comité de liquidation, propose un décret, au nom de ce comité, qui est adopté dans les termes suivants :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de liquidation, en expliquant son décret du 8 -du mois d'avril, a autorisé lë ministre de la guerre à payer aux commissaires des guerres, prévôts, aumôniers, secrétaires, et autres personnes portées en l'état remis au comité, attachés à l'ancien régiment des gardes françaises, les quatre derniers mois de leurs appointements de l'année 1789. »
, membre adjoint du comité des finances, présente un projet de décret concernant la perception des impôts dans l'île de Corse. Il est adopté ainsi qu'il suit :
« L'Assemblée nationale, sur le rapport de son comité des finances, décrète que dans l'île de Corse, les impôts continueront d'être perçus en nature comme par le passé, jusqu'à ce qu'elle ait définitivement prononcé sur le mode de perception dans ce département. »
Je demande que, Conformément aux décisions prises hier par l'Assemblée, M. Rœderer soit entendu pour faire son rapport sur le tabac.
La décision de l'Assemblée n'a pas eu pour objet de faire rapporter, dans la séance d'aujourd'hui, l'affaire du tabac, mais d'entendre les raisons plausibles qui ont déterminé les comités d'impositioo, d'agriculture et de commerce réunis à faire demander par M. Rœderer le renvoi de ce rapport à l'époque ou le comité d'imposition sera en mesure de proposer un mode général d'impôt.
Je demande l'ajournement indéfini de cette question.
Plusieurs membres demandent à passer à l'ordre du jour sans se prononcer sur les propositions qui ont été faites, attendu que M. Rœderer n'est pas dans l'Assemblée.
(Cette motion est adoptée.)
, rapporteur du comité des finances, reprend la suite de son rapport sur toutes les parties de la dépense publique. Il s'occupe d'abord de la régie générale.
Messieurs, la régie générale embrasse les droits sur les boissons, les droits sur les cuirs, la marque des fers, la marque d'or et d'argent, les droits sur les cartes, les droits de formule, les droits sur Jes huiles, les sous pour livre des droits qui appartiennent aux villes et communautés, ou qui ont été aliénés à des particuliers, etc. Elleacom-mencé au 1er janvier 1787, et doit finir au 31 décembre 1792.Vingt-huit administrateurs ont fourni 33,600,000 liv. de fonds d'avances portant 5 pour 100 d'intérêt.
Il leur a été attribué à chacun 2,000 liv. pour droits de présence. 56,000 1.
8 deniers pour livre sur les 51 premiers millions du produit net ; 3 sous pour livre sur le produit net qui excédera cette somme première de 51 millions. Ces remises ont été fixées, par aperçu, à 1,700,000 liv. Les régisseurs ont fait sur cette
somme une remise de 140,000____ 1,560,000
Les frais de correspondance à la charge du Trésor royal furent fixés,
par abonnement, à........ 228,000
Cette fixation est arbitraire, et n'a eu pour ohjet que de balancer une déduction de pareille somme sur le bail des postes.
La correspondance de la régie des aides ne coûte guère au delà de 70 à 80,000 livres. Les étrennes furent
arrêtées à. ........... 88,000
Les frais d'administration générale s'élèvent à 29,950 livres
Total. ....... 1,932,000
Le produit brut de la régie générale, en
1787, était de ... . 58,725,331 I. 12 s. 4 d.
En 1788. ..... 56,921,751 1. 3 s. 11 d.
On n'a point encore le produit de 1789 ; on pourrait espérer en 1790, d'après le cours de la perception, et s'il n'arrivait pas de nouveaux désordres. . . 51,000,000 1.
Hais la suppression du droit sur les cuirs change le calcul.
Voici, Messieurs, les articles que le comité a l'honneur de vous proposer :
Art. Ier. Les remises allouées aux régisseurs généraux ne pourront excéder 700,000 livres, et leurs droits de présence sont supprimés.
Art. 2. Il serafait une réduction de 50,000 liv. sur les bureaux des principaux employés, provisoirement, sauf à réduire encore, s'il y a lieu, d'après le compte qui sera rendu incessamment par le comité des finances.
Art. 3. L'abonnement fait avec les fermiers des postes sera résilié à compter du jour de la publication du présent décret.
Art. 4. Le ministre des finances s'occupera d'opérer et mettre incessamment sous Jes yeux de l'Assemblée nationale les économies que la suppression des différents droits permet de faire sur les frais de perception.
combat les réductions proposées par le comité comme étant trop modiques. Un grand nombre d'objets de recette ayant été supprimés, il doit y avoir une réduction considérable de la dépense.
répond qu'on ne peut faire les réductions demandées que d'après le plan qui sera fourni par le premier ministre des finances.
met successivement aux voix les quatre articles proposés par le comité des finances.
Ils sont décrétés.
, rapporteur, passe ensuite à la dépense de la régie générale des domaines.
La régie générale des domaines a commencé au 1" janvier 1787 et doit durer six années.
Elle embrassait les domaines et bois; les droits féodaux, même ceux dépendant des domaines engagés, la recette du prix de la vente des bois des communautés et gens de mainmorte ; droits de franc-fief, d'amortissement et nouvel acquêt; droit de contrôle des actes; de centième-denier; d'insinuation; contrôle des exploits; formule; droits de greffe ; quatre deniers des ventes des meubles ; petit scel ; revenus casuels; marc d'or ; amendes de consignation et de condamnation.
Vingt-huit administrateurs ont fourni chacun 1,200,000 liv. portant intérêt à 5 0|0. Chacun d'eux avait un traitement de 45,000 liv. ; leur capitation est de 375 liv. ; ils ont un tiers dans le produit net qui excède 50 millions ; c'est sur ce tiers que les administrateurs ont remis 200,000 liv., et non sur leur traitement.
Cette régie, comme toutes celles qui datent de la même époque, présente un produit fixe exagéré. Le ministre voulait montrer un grand accroissement dans les revenus, et il les diminuait par des déductions qui ne paraissaient pas.
Il faut soustraire des 50 millions les intérêts des fonds d'avances portés ailleurs.
Le traitement........l,260,0001iv.
Les étrennes, de....... 124,323
Le loyer de l'hôtel des domaines, et d'un dépôt, maison des Minimes.
Les réparations d'entretien, évaluées à...........40,600.
Les honoraires du conseil. . .v20,000
Les frais de procédure à là charge du roi, eii . ... . . .12,700
Les pensions et gratifications que le roi jugerait à propos d'accorder, et qui excéderaient la somme des retenues ordonnées sur les appointements de quelques employés.10,000
Aux principaux employés, pour leur tenir lieu d'une place de régisseur général ........34,000
Au sieur Rasclé,res te de9,000 liv. de gratification, pour le dictionnaire des eaux et forêts. ....
Pour la législation des hypothèques. . ............3,000
Aux ingénieurs et inspecteurs généraux des domaines de la généralité de Paris . . .... . . 3,000
Gages des gardes des bois du roi. 29,610 207,675
Aux grands-maîtres des eaux et
1,744,908 liv.
Report.......... 1,744,908 liv.
forêts, un 1/2 0[0 de leurs finances, pour leur tenir lieu de journées et de vacations......
Aux maîtres particuliers, pour journées et vacations. .....
Habillement des gardes des bois du roi. . . . . . . ... . . . Ports de lettres et paquets. . . Fournitures de papier et parchemin. .............
Frais de recouvrement des
amendes............
Régie des revenus casuels. . . Régie du droit de marc d'or. . Receveurs de l'ordre de Malte . Des consignations et saisies réelles. .............
Commis du pont de Chatou . .
79,200
240,707
15,804 228,000
340,000
9,006 25,000 25,000 2,800
2,000 1,412
Total..............2,71,3837 liv.
La régie des domaines a éprouvé déjà une grande altération, et ses frais ne sauraient diminuer dans la même proportion.
Avec des perceptions affaiblies, il faut le même nombre de contrôleurs, de directeurs, de commis.
S'il entre dans les vues de l'Assemblée de conserver, en titre d'offices à finance, quelques offices ministériels ; si elle les laisse assujettis à la casua-lité, si elle les laisse soumis au droit de marc d'or, il faudra encore pour ces deux parties à peu près une égale dépense.
Le nombre des administrateurs pourrait être diminué, et alors moins de traitement; mais il faut rembourser ces énormes fonds d'avances, et il faut les rembourser de manière que l'administrateur puisse payer ses créanciers.
Douze hommes choisis, peut-être moins, conduiraient cette régie, quand elle serait encore plus compliquée. Moins de 25,000 liv. de traitement suffiraient à chacun d'eux, si on n'exigeait qu'un cautionnement modéré-
Mais, en général, il n'y a sur les employés d'autres économies à obtenir que celle qu on opérera en augmentant leur travail, et, par leur travail, les produits.
La partie du contrôle des actes sollicite une réforme ; il faut la soumettre à l'esprit de notre Constitution, etj surtout en écarter le, vice de l'arbitraire, qui jusqu'ei en a été inséparable.
Mais il en résultera nécessairement un déficit dans les produits ; et ce n'est plus aujourd'hui qu'on peut se faire illusion sur le besoin que nous avons de maintenir le revenu public.
Le timbre se présente naturellement pour remplacer les pertes du contrôle.
Ce ne sera point ce timbre désastreux et oppressif, calculé par M. dé Galonné, qu'adoptera l'Assemblée.
Elle le voudra simple, et tel qu'il ne puisse ni gêner les transactions de la société, ni peser sur le commerce.
Un tel droit de timbre ne peut s'élever au delà de 12 à 15 millions.
Ceux qui nous le présentent comme le remède unique de nos maux, qui l'appliquent au remplacement de la gabelle, au remplacement des aides, à toutes les plaies qu'éprouvent successivement les finances, n'en ont pas calculé les produits ni les inconvénients.
Plusieurs travaux avait été offerts au comité,
relatifs à l'administration générale des domaines; quelquè3-uns avaient été discutés : il a renvoyé les auteurs au comité de l'imposition, qui, liant dans un plan général toùtës les vuês particulières, pourra, jusqu'à certain point, organiser régulièrement le système de nos finances.
On dit jusqu'à certain point j car. quand à force de malheurs et de dissipation. Une natiop en est arrjvée au terme où la proportipn est rpfli-pue entré les ressources Tet res' besoins, il n'est plus 4e système vraiment régulier.
On établit des principes,,' mais il faqtà chaque inst§pt mettre les excephons 1 côté des'principes; et la Constitution' la plus ljbre.dëtis pne pareille pirconstancé/est èncoré réduite â sppf-frir qpejques restée pôntéiix dp ïa Vieille fiscalité.
L'esprit public les repousse, ces tristes rentes qui ^appellent l'anpieïipe sÊrMthrïe et Anciennes injustices.
Des inçijrrections les attaquent, eÇ la nation froissée entre l'honneur qui- Rattaché â ses engagements. et l'opinion qui s'élève contre les entraves financières, lqtte longtemps, et semble avoir perdu sa consistance et sa force.
Mais la régénération est à Ce prix. Il faut racheter par Une humiliation passagère la gloire et la vigueur de la jeunesse politiqiiè. Revenons aux calculs.
Les 1,260,000 liv. de traitement sont diminuées, dans l'état des Fevenus prdinaires et dépenses fixes, dé 200,000 liv. ; on a déjà observé que ce n'était point sur cet objet que portait la Remise faite par les administrateurs'; mais Si elle restait sur le tiers du produit net, elle serait nulle, au moins cette année et l'année derrière, puisque ce tiers, en 1788, ne s'est élevé nu?à 51,799,707 liv., et qu'en 17*89, il ne s'élèvera, par aperçu, qu'à 48,030,571 liv. ' ' r
Il faut done porter cette remise sur le traitement, et le comité a pensé que les administrateurs souscriraient sans peirçe à lq, réduction1 à 25,000 livres qui seront partagées pelon la mesure des intérêts. Economie . .... . , . 'V »
Les étrennes sont supprimées. L'hôtel appartient au domaine; le prix de 1,000,000 livres a été compensé jusqu'à concurrence, avec l'hôtel de feu M. Beaujqn, acheté par le roi, et vendu à madame la duchesse de Bourbon . .
Le dépôt de la maison des Petits-Pères, qui coûte 600 livres, peut être supprimé. Ce dépôt renferme d'anciens titres qu'il serait à propos de remettre à Jâ Bibliothèque du roi ... . . . . . .
Les réparations d'entretien, portées par évaluation à 20,000 livres ont pu s'élever là dans les premières années ; elles doivent être fixées aujourd'hui tout au plus à 10,000 liyres. . . . . . . ..
Les honoraires des conseils étaient autrefois à 10,000 livres et le comité a pensé qu'ils devaient y être reportés. ........
Les frais de procédure sont variables, et on ne peut les détermi-
560,0001. 124,323
40,000
'600
10,000
40,000
.■Bqnrt.744,923 liv
ner que spr une apnée commune qui n'existe pas énçore,
Les frais de compte peuvent disparaître en entier, et disparaîtront si l'Assemblée nationale établit un comité de comptabilité. . 142.
La gratification aux principaux employés de 84;Û00 Jivfes, à supprimer ci .... ......., . ,^4.0()P
Mais il faut, pour entretenir l'émulation, lerir assurer la perspective des places d'administrateurs, et c'est sans doute un principe que l'Assemblée adoptera pour toutes les régiest j, ,
M. Rasclé a promis le Diction^ mûre des Em% fit Forêts. 11 ne paraît, point, et peutrêtre serait-il inutile aujourd'hui ; à supprimer. 3,000
La législation des hypothèques, à suppimer, ci. « . , yr. i . 3,000
Ports de lettres et- paquets. Ce n'est ici qu?un revirement entre la régie des domaines et la ferme des postes. J3ans le fait, la correspondance de cette régie n'est qu'un pbjet de 80 à90,000 livres; mais il fallait, pour l'honneur du ministre, que le bail des postes parut s'élever à 10,800,000 livres. On imagina cet abonnement pour contenter l'intérêt des fermiers. En changeant les conditions du bail des postes, la dépense de l'administration sera réduite au moins de. .......... . . . . 138,000
Ingénieurs, inspecteurs-généraux des domaines de la généralité de Paris . ........... 29,650
La vente projetée du domaine fait évanouir cette dépénse.
Il restera des bâtiments publics ) mais ces bâtiments rentreront, ou dans la liste civile,-ou dans l'administration des municipalités, Ou dans celle des départements.
Les gardes des forêts et bois seront toujours nécessaires -; mais • • • les forêts que le roi conservera seront gardées aux dépens de la liste civile, et de là une réduction éventuelle, soit dans les gages, soit dans l'habillement. . . pour mémoire.
Les receveurs de l'ordre de Malte cessent avec les privilèges. 2,700
Ceux des consignations et saisies réelles peuvent être remplacés gratuitement par les receveurs
des districts......... . . . 2,OQO
Les grands-maîtres, les maîtres particuliers, etc., seront suppléés par les directoires de départements et de districts, et cette dépense
s'évanouira dans la dépense géné-.....
raie d'administration. . . . . » 319,937
Les frais de recouvrement des amendes ne peuvent être fixés que sur une année commune ; ils va-
A reporter..
744,923 1.
A reporter,................1,419,778 liv.
Report......... 1,419,778 liv,
Fieront dans un autre système d'administration.
Les frais de recouvrement des droits casuels et de perception du droit de marc d'or subsistent encore, quoique les produits soient presque anéantis ; puisque la v& r nalité des offices de magistrature est supprimée, puisqu'il n'existera plus de charges de finances, les droits casuels ne doivent plus affecter que les officiers ministé* riels, etc., et il est plus simple, plus économique, de rejeter en impositions annuelles et fixes ce qu'ils payaient en droits casuels, droits de mutation...... . 25,000
Le droit de marc d'or était une branche de revenu d'une perception simple et facile , mais, en supposant que le droit pût exister encore, il serait au moins borne aux provisions du petit nombre d'offiders publics qui seront conservés avec finance ; on n'y assujettira sans doute ni les magistrats, les membres des corps administratifs.
Les dons, les pensions, les gratis fications ne seront plus que des récompenses accordées au service, et qui devront l'être gratuitement} il vaut donc mieux supprimer entièrement ce revenu, et le reporter dans la masse des impôts.
Ainsi il faudra retrancher en* core de la dépense . . . . ... 28,000
Les commis du pont de Ghatou rentreront dans 1administration du département de Paris. Les droits qu'ils perçoivent devront lui être abandonnés pour l'entre^ tien. A retrancher, ci . ..... 1,422
Total. . , 1,471,2001
Le comité des finances proposera provisoirement le décret suivant, qui n'embrasse que dos économies actuellement possibles;
« L'Assemblée nationale décrète ce qui suit
« Art, 1er Les traitements des administrateurs généraux des
domainesdemeuront fixés, à compter du 1er janyier 1790, à la somme de 760,000 1. qui seront
partagées entre eux à raison de leurs intérêts respeçtiis.
« 2, k abonnement fait avec la ferme des postes, pour le port des lettres et paquet6, demeurera résilié à compter du jour de la publication du présent décret.
« 3. Les ffais de comptabilité seront supprimés à compter du janvier dernier.
* 4. La gratification de 34,900 livres accordée aux principaux employés, celle accordée au sieur Rasclé, le traitement de 3,000 livres pour la législation des hypothèques cesseront du jour de la
Sublication du présent décret, et les honoraires ..U conseil seront réduits à 10,000 livres.
« Le contrôleur général des finances mettrain-cessamment sous les yeux de l'Assemblée l'état des économies qu'il est possible d'effectuer dans les frais de régie et de perception. »
M. le rapporteur nous a dit dans ses observations que douse hommes choisis, peut-être moins, conduiraient la régie des domaines, quand elle serait encore plusjcompliquée; que moins de 25,000 livres de traitement suffiraient à Chacun d'eux, si on n'exigeait qu'un cautionnement modéré : il est évident, d'après cette observation, qu'il nous faut réduire à 450,000 livres la somme de 700,000 livres à laquelle lé comité a porté le traitement des admi-r nistrateurs des domaines ; ce qui fera environ 15 à 16,000 livres pour chacun des administrateurs. (Le côté. droit murmure ; le côté gauche applaudit,)
Le gouvernement a fait un traité avec les administrateurs qui ont donné de l'argent sous telle Ou telle condition. Remboursez-les et donnez-leur ensuite pour leur travail ce que vous jugerez convenable; n'est le seul moyen rêtra juste. (Le côté droit applaudit.)
J'observe que ce qui fait le sujet des réclamations de Al. Fréteau vient d'être accordé tout à l'heure aux régisseurs t c'est donc , au nom de l'Assemblée que je demande que lé traitement dçs administrateurs soit porté à 700,000 liv. ainsi qu'il est proposé par le comité,
Quelque soit le parti que nous ayons pris en faveur des régisseurs, cela ne préjuge rien pour les administrateurs des domaines. On peut bien changer les dispositions à mesure que la discussion s'éclaire, et ce serait peut-être le cas de demander le rapport du premier décret. On devrait bien, lorsqu'on nous fait un rapport, dévoiler tous les mystères. On ne neus a point du tout parlé des croupes sur tous les revenus des financiers et administrateurs des domaines. J'en tiens un état dans ma main, dont je puis vous donner connaissance, C'est de ces croupes qui existent dans le régime des domaines que je demande la suppression, Du reste, j'adopte la motion de M. Fréteau.
Je reçois, Messieurs, dans l'instant, une lettre dont la lecture pourra peut-être éclairer la discussion. Voici ce qu'elle contient :
« Lorsque M..... acheta sa place, on lui prêta 600,000 livres; le bailleur de fonds exigea, outre le remboursement du capital; la moitié du produit net du bénéfice, de sorte qu'il a reçu en sus de son capital plus de 600,000 livres sec. Dans l'état des choses, l'Assemblée qui a réduit si justement le produit des places à un nécessaire honnête, décrétera l'affranchissement des croupes. » Voilà, Messieurs, ce que le particulier dont je viens de vous lire la lettre serait venu vous demander lui-même, si sa santé le lui avait permis.
On confond les intérêts des mises aveo la recette et les produits. C'est le meilleur moyen de s'embrouiller, sans pouvoir prendre aucun parti. Je propose du moins d'excepter des dispositions de l'amendement de M. Fréteau les octogénaires.
M .Camus. Je ne sais pas comment la somme de 16,000 livres n'est pas suffisante aux administrateurs. Nous ne sommes plus sous le régime de l'intrigue, du luxe et de là flatterie, mais sous celui des bonnes mqeurs et de la liberté : si la t somme n'était pas suffisante, ils réduiront leur
nombre, puisque cela est très possible. [Il s'élève à droite de grands murmures, à gauche de grands applaudissements.)
Il est bien étrange qu'on vienne nous dire ici cru un financier ne peut pas se contenter de 16,000 livres, tandis qu'un capitaine d'infanterie, toujours prêt à verser son sang pour la patrie, avait moins de 2,000 livres, et savait s'en contenter.
présente une rédaction en ces termes:
« Toutes les croupes existantes sur les emplois et affaires de finances seront supprimées, à compter du 1er janvier ; le décret rendu sur les receveurs et régisseurs de la ferme générale sera rapporté.
« Le traitement des vingt-huit administrateurs des domaines sera fixé, à compter du 1er janvier dernier, à la somme totale de 450,000 livres, qui sera répartie entre eux par portion égale et individuelle. »
Ces articles, successivement mis aux voix, sont adoptés ainsi qu'il suit :
« L'Assemblée nationale décrète :
« 1° Que toutes les croupes existantes sur les emplois et affaires de finances sont supprimées à compter du premier janvier dernier ;
« 2° Que le traitement des 28 administrateurs des domaines sera fixé, à compter du premier janvier dernier, à 450,000 livres qui seront réparties entre eux par portions égales et individuelles ;
« 3° Que le décret concernant la fixation du traitement des régisseurs généraux sera rapporté è l'Assemblée. »
, au nom du comité d'imposition, demande à être entendu sur la question du tabac.
(L'Assemblée décide qu'il sera entendu.)
M. Rœderer. Il y a environ cinq semaines que M. Dupont vous ayant proposé un projet de décret sur le tabac, vous avez renvoyé cet objet au moment oh les comités d'agriculture et de commerce vous auraient fait leur rapport sur les traites et sur le reculement des barrières. Le comité d'impositions avait rédigé son travail sur l'impôt du tabac en moins de huit jours, lorsqu'il a cru devoir entendre les députés de trois grandes provinces infiniment intéressées à cette opération. L'avis a été de conserver cet impôt, qui, quoique établi sur une consommation de fantaisie, mérite cependant trois reproches importants... L'impôt du tabac est un surhaussement de prix, qui consiste à vendre 3 livres 12 sous ce qui vaut un sou. Pour assurer ce surhaussement, il a fallu établir la vente, la fabrication et la culture exclusives. Cet impôt présente encore un grand caractère d'injustice, puisqu'il exige des défenses, des inquisitions et des peines toujours disproportionnées au délit; puisque le pauvre, qui a mis tout son plaisir dans l'usage du tabac, paie autant que le riche; pourquoi cette jouissance est-elle perdue entre mille autres ? Cependant l'impôt du tabac ne nous a paru pouvoir être productif qu'avec toutes ces prohibitions. Nous avons agité la question de savoir si les provinces qui, jusqu'à ce moment, ont joui de la liberté du commerce et de la culture du tabac, doivent être assujetties à cet impôt. Nous avons été frappés de l'idée, que permettre cette espèce de culture, ce n'est point accorder un privilège, c'est reconnaître les droits I de la propriété : ce sont les autres provinces qui ont perdu cet avantage. Si la culture et le com-
mercedu tabac étaient libres dans tout le royaume, l'Alsace et la Flandre perdraient les avantages qu'elles avaient sur les autres provinces. Les provinces méridionales de France ont autrefois cultivé des tabacs, en grande abondance et d'une excellente qualité, tandis que l'Alsace, pays froid, n'en donne que d'une mauvaise qualité, et qui n'est passable qu'en le mélangeant avec du tabac de Virginie. Nous avons pensé que, quand ces considérations ne se présenteraient pas, il faudrait toujours rendre commun le sort de toutes les provinces. Actuellement que la gabelle est supprimée, si vous conservez, dans l'intérieur du royaume, des barrières et des cordons de commis pour le tabac, les frais de perception consommeront une grande partie du produit. Il est donc nécessaire de faire porter ces frais sur une masse considérable. Les établissements qui seront formés pour la perception des traites peuvent servir également pour celui de l'impôt du tabac aux frontières.
Votre but est de réaliser ces idées de grande famille, de supprimer ces cloisons de séparation qui divisent les parties d'un même Empire, et qui sont si nuisibles au commerce. D'ailleurs, vous ne pourriez jamais rétablir les gardes pour le tabac, entre la Flandre et l'Alsace et les anciennes provinces, tandis que ce rétablissement sera très facile aux frontières. La Picardie s'opposerait à ce rétablissement ; elle aurait pour elle toute la force de l'esprit de vos décrets. C'est d'après ces raisons que, croyant nécessaire de conserver l'impôt du tabac et de l'étendre à toutes les parties de la France, nous avons appelé les députés des provinces belgiques : ils nous ont annoncé qu'ils ne croiraient pas pouvoir se dispenser de s'opposer fortement à cette proposition. Ils se sont prévalus de cette grande considération, que la liberté de la culture ne peut subsister avec l'impôt, et qu'empêcher la culture, c'est violer la propriété et la liberté. Ils nous ont présenté des considérations très importantes, tirées de l'état actuel de leurs provinces, où les ennemis de- la Révolution ont formé de perfides desseins ; et il faut convenir que rien ne les seconderait mieux que d'annoncer aux peuples de ces contrées la perte d'une branche de culture aussi importante ; ce serait les exciter à la révolte, à laquelle on dit que ces provinces ne sont que trop portées. (Il s élève beaucoup de murmures.)
Monsieur le Président, je vous supplie de n'accorder à personne avant moi la faculté de relever une erreur d'expression : j'ai voulu dire à laquelle on veut porter ces provinces. Une raison qui nous engage encore à demander qu'il soit sursis au rapport que le comité doit vous faire sur le tabac, c'est que MM. les députés d'Alsace nous ont interpellés de déclarer s'il n'était pas possible que la France entière fût exempte de cet impôt, et si nous connaissions assez bien quel serait l'état des finances de l'année prochaine pour assurer que le Trésor public aurait besoin ae cette perception. Il nous a été impossible de leur répondre, même par approximation. Ils ont assuré que si c'était une vérité bien démontrée que les besoins publics l'exigeassent, ils ne ^opposeraient pas à ce qu'on votât cet impôt pour toute la France, et ils ont annoncé qu'alors on pourrait compter sur le patriotisme de leurs commettants. Les deux comités ont arrêté unanimement de vous demander qu'il soit sursis à leur rapport. (Cet ajournement est décrété. ) .v
(La séance est levée à trois heures.)
Séance du
La séance est ouverte à six heures du soir.
, secrétaire, donne lecture de l'extrait des adresses ci-après :
Adresse de la municipalité d'Épone, département de Versailles, portant adhésion à tous les décrets de l'Assemblée, et sa respectueuse reconnaissance pour tous les bienfaits que la nouvelle Constitution a déjà répandus sur la France entière, et dont se ressentent principalement les campagnes. Elle y joint le procès-verbal du serment civique, et le rôle de la contribution patriotique des habitants, qui s'élève, avec l'abandon du produit des impositions sur les ci-devant privilégiés, à la somme de 3,701 liv.
De la communauté de Lentéol, en Dauphiné, qui se glorifie à juste titre d'avoir conservé au milieu des plus grands troubles, l'ordre et la tranquillité; elle conjure avec instance l'Assemblée de ne pas réunir les petites paroisses aux grandes.
Des différents corps religieux de la ville de Limoges, qui regardent toute protestation contre les décrets de l'Assemblée nationale, concernant les biens ecclésiastiques, comme évidemment contraire à l'autorité de la nation, au maintien de la paix, et au désintéressement que commande l'Evangile. Ils déclarent qu'ils ont en horreur tous les moyens que l'orgueil, la cupidité, le fanatisme, de quelque part que ce soit, peuvent mettre en usage pour exciter des dissentions et des fureurs.
Adresse des citoyens actifs de la ville de Saint-Pons; ils supplient l'Assemblée de décréter que la religion catholique, apostolique et romaine est la religion de l'Etat, et de conserver à cette ville son évêché et sa cathédrale, ainsi que les Récolets, les murs ne renfermant pas d'autre établissement religieux.
Adresse du régiment patriotique, sous le nom de volontaires de Fumel, qui annonce que la mésintelligence qui régnait entre lui et le régiment patriotique de la commune est évanouie ; que la réunion a été faite de la manière la plus solennelle et la plus touchante ; tellement que les deux régiments ne forment qu'un seul et même corps.
Des citoyens de Bordeaux réunis sous le titre d'amis de la Constitution ; ils n'ont d'autre but que celui de se pénétrer de la sagesse des décrets de l'Assemblée nationale, et de consacrer toutes leurs forces au désir de propager l'esprit de la Révolution; ils sollicitent l'approbation de l'Assemblée.
Des volontaires de la jeunesse de Château-Thierry, qui vouent à l'exécration publique tous
Des assemblées primaires des cantons de Mor-terol, département de la Haute-Vienne, de Re-chers, de Barcelonne, département du Gers, qui demande que le siège du canton soit placé dans la ville de Saint-Mont; des Matelles, département de l'Hérault; de la Roche-de-Rion, département des Côtes-du-Nord, qui demande que cette ville soit le siège d'un tribunal de district.
Des administrateurs du district de Gex.
De l'assemblée électorale du département de la Creuse, et de celle du département du Morbihan.
Toutes ces assemblées expriment avec énergie les sentiments d'admiration, de reconnaissance et de dévouement dont elles sont pénétrées pour l'Assemblée nationale.
La plupart improuvent expressément la déclaration d'une partie de l'Assemblée, et la conjurent d'achever le grand ouvrage qu'elle a si glorieusement commencé. On lit, dans l'adresse des électeurs du département du Morbihan, ces paroles remarquables : « Continuez à resserrer ces liens « sacrés d'amour et de fidélité, qui uniront à « jamais le meilleur des rois et le plus aimant « des peuples ; assurez la félicité et la gloire de « l'Empire sur des bases inébranlables ; et les « générations présentes et futures, en lisant le « Code des Français, s'écrieront avec enthou-« siasme : quel peuple fut plus digne de donner « des lois à l'Univers? »
Adresse des commissaires du roi au département du Morbihan.
Adresse de la municipalité de Trévoux, département de l'Ain, improuvant la délibération des citoyens catholiques de la ville de Nîmes, et celle prise par quelques membres de l'Assemblée nationale, contre le décret du 13 avril dernier. Ils renouvellent à l'Assemblée nationale leur adhésion à tous ses décrets.
Adresse des maire, officiers municipaux, habitants et cultivateurs de la paroisse de Verle-quenel et Hippécourt, au département et district d'Amiens, canton de Sauf-Lieux, qui demande à être déchargée, pour la présente année 1790, des droits de champart et dîme, que le chapitre de l'église cathédrale d'Amiens avait ci-devant droit de percevoir sur ledit territoire, les suppliants faisant offre de verser à la caisse du district d'Amiens le montant de la redevance desdits droits, et ce, suivant les baux des fermiers actuels, et aux échéances y portées.
Adresse de félicitation, adhésion et dévouement de la communauté de Lauvenegen, département du Morbihan ; elle fait plusieurs pétitions.
De la communauté de Verest.
De la communauté de Curemonte, département de la Corrèze ; elle se plaint d'une augmentation d'imposition, et fait le don patriotique de la somme de 374 liv. 4 s.
De la communauté d'Égletons, contenant le serment civique des habitants ; elle supplie l'Assemblée de ne pas se faire remplacer par la seconde législature, qu'elle n'ait complété le grand œuvre de la Constitution.
Des gardes nationales des quatre départements, formant ci-devant la province de Bourgogne et pays adjacents, contenant le procès-verbal de leur confédération faite sous les murs de Dijon, le 18 du mois dernier, à l'instar de celles dont il a été rendu compte à l'Assemblée.
De la communauté de Saint-Gaudens et de la ville de Civray, en Poitou. Cette dernière envoie
la déclamation dé tous les gentilshommes de son canton, par laquelle ils acceptent aved joie tous les décrets de l'Assemblée nationale acceptés ou sanctionnés par le roi* et notamment eelUi du 13 avril dernier^ et protestent avec serment qu'ils sont prêts a répandre jusqu'à la dernièfe goutte de leur sang pour défendre là liberté nouvellement reconquise*
Se la garde nationale de Fumay* àu département des Ardennes»
Des. bas-offiGiers ët soldats du régiment du toi infanterie* en garnison à Nancy y ils fotlt le sef-taent d'être toujours unis aved leurs frères, les citoyens français, et d'être constamment soumis à leurs devoirs* que la liberté a rendus chers et sacrés à leurs yeux.
Des municipalités du canton de Maillerais* ën Poitou.
Dés Curés et autres ecclésiastiques de la Ville de Saint-Etienne en Foréz* et des paroisses Voisines, assemblées en congrégation ; ils regardent comme traîtres à la patrie, et même comme ennemis de la religidh, les auteurs et complices de tous actes contraires aux décrets de l'Assemblée* et jurent d'employer toute l'influence de leur ministère à inspire^ à leurs concitoyens le respect et la soumission que mérite, par les titreB les plus sacrés, la nouvelle Constitution.
Des officiers municipaux de la Ville de Ghâ-teau-Portieûj département des Ardennës ; ils se plaignent d'être inquiétés dans leurs fonctions.
De la commune de Doffiat ; elle dénonce Une coupe de bois faite par les Chartreux de Vàlpro-fonae. L'Assemblée a renvoyé Cette adresse âU comité ecclésiastique.
Des villes de Metret de Gap; élle§ s'élèvent avec force cbbtre lès délibérations séditieuses de quelques citoyens de Nîmes et d'UzôSi
Des élèves patriotes de la Ville dë Nyon, Contenant le procès-verbal de leur serment fédératif.
Des officiers municipaux et dë la gardé nationale de Saint*Gyr-de*-Bdurgnettf, en Reté* ils dénoncent les ecclésiastiques et la municipalité de la communauté de Rouans, où l'on ë'egt permis de publier au prône et de faire tfàhicrire sur les registre! de la municipalité* une protestation Contre les décrets de l'Assemblée nationale, touchant la vente des biens écbléâiâstiques et l'admission des non-catholiques et des juifs portugais, espagnols et Avignonais* adx débits de ci*-toyens actifs.
Des officiers municipauk de la garde nationale de la communauté de Ris» Ils dëhoûéent le ètirê de la paroisse, qui refusé de faire lecture au prône des décrets de l'Asseftiblée et dé bénir lès drapeaux de la garde nationale ; l'Assemblée â renvoyé ces deux adressés aU comité des recherches.
Des citoyens volontaires de la ville deGérèt, contenant le procès-verbal de là prestation dë leur serment civique.
Des vétérans invalides et militaires pensionnés, retirés à NancyJ ils supplient l'Assemblée de s'intéresser à leur sort.
Des enfants de la première communion dë là ville de Chaumont, Yexih Français.
Des citoyens dë la Ville dé Ldngnioh ; ils shp-plient l'Assemblée de ne pas se Séparer àVànt d'avoir aehévé la GohstitutiOn. , De la ville de Gondom.
Des gardes nationales dd département du tôt, qui ont fait un pacte fédératif pour lë Ènaintietl de la nouvelle Constitution.
De la ville de Saint-AmoUit, département dè
Seine-et-Loireç ëllé sollicite un tribunal de canton et une maréchaussée.
Des communautés de Néon et de Saint-Ay-sur-Loire.
Des communautés dé Geule, de Panouse, de Joncquière et Saint-Vincent ; elles font le don patriotique du produit des impositions sur les ci-devant privilégiés.
De la ville dë Bagndls, contenant lé procès-verbal du serment civique de la garde nationale ; elle fait une soumission de 350*01)0 liv. pour ac-
3uérir les biens ecclésiastiques situés dans son épartement; indépendamment de sa contribution patriotique * qUi s'élève à la somme de 29,000 liv. elle fait don du produit des impositions sur les ctdevarit privilégiés^
De la communauté de Marquise en Boulonnais; elle se soumet d'acquérir les biens nationaux situés- dans son territoire.
De là èommUnë de LOflgchàmp, Cbhtehatit le pacte fédératif passé entrë les militaires citOyetis du régiment dé FOÉéz én gârhiëôa à Saint^Sè'rVan, et les citoyens Militaires de la garde hàtiënale dudit lieu.
Dé la COttmuilaUté dé Lithdgûës cohtëà&flt le procê^Vërbai de formation et de prestàtodfl de serment civique de la gafdë nationale.
Du conseil général de là comrtttitië de îlrioft-ville.
DU bureau mttttidipal delà Ville dë Grenoble, èontèhànt un don pàtriotîqtie dés OUVMëfs dès miiies d'Allêmônt ; il supplie rAssedibléé d'àd*-corder Sa broteétion â uti étàblissemëttt (jfàl procure aux habitants d'Allerhont le ttetVàil et iës ressources nécessaires pour leur subsistance.
Des ëuïês de la ville de Poitiers, des membres dtiiéôifipoâéht l'église câthédr04pâroiSsialë dé 0a p, aêâ prêtres de la congrégation de SainMoseph, et dë toutes iësauirescommunautés fêguiiêres et séculières établies dkns là yillé.- tjtti, toUS, impjfotf-Vënt expressément là déclaration d'une partie dë l'Assemblée nationale, et renouvellent en mêtiie temps lé serment civique.
Des itèèetobléës primaires dès càntOitè de Cârii-bremër en Normàridië, de Méftiteur, département de laCorrèze, de la ville de Bordèàût, de Vo-dablë, d'Apreffioùt, département dë là Meuse, d'Hattdûchatel, dë là Ville de Nérâc* de celle dë COsne-èur-Loifre, dé POntgibaUd, d'Etbgëè, département de là llaime. dë Mello.
Des cinq districts dassembléès d'électeurs dè là Ville de Poitiers.
Des électeurs des caûtons d'Èjsqtielbërgttë, Hotistschdtte ét Wattèn.
De3 assemblées des êlècteut'è du district dè Montéllmàrt et de celui de Valence, département dë là Drôme, et du district de Sâint-ClaUde, département du Jurà.
DëS assemblées électorale^ du dépàrtëriient de l'Ille-ët-Vilâitte, dë delùi dëè Pyrénééâ-Ohéri-tales, de. celui d'Eure-et-Loir, et enûb déé administrateurs du département de l'Yonne.
Toutes ces assemblées consacrent les prètïlierô mOthéhts dë leur existence à présenter à l'ia-àémbléë Uationale l'hommage d'une àdhésibti absolue â ses décrété* et d'bn dévouement éàïïà bdrûes pour leur ôxéclitïôtl. Là plupart*î iiûà-prouvent formellement la déclaration d'udë partie dë l'Assëmblêe, ët la coâjurent aVèc instance de ne pas se séparer avant d'avôii* terminé lë grand ouvrage de la Constitution.
Adresse des curés de l'archiprêtré dë ROm, département de Poitiers, qui s'empressent d'assurer l'Assemblée nationale de leur entière 6ou-
mission à ses décrets, et de leur fidélité à la nation, à la loi et au roi) ils déclarent qu'ils n'entendent prendre aucune pârt à qUekfuë acte de protestation què ce soit contre ses décrets, et qu'ils y adhérent de tout leur cœur; et notamment a celui du 13 avril dernier; concernant la religion.
Adresse de la ville de Goumay-en-Bray, portant adhésion à tous les décrets de ' L'Assemblée nationale, et. l'offre patriotique d'une somme dé 2,400 livres.
Autre adresse de M; Tingaul ët autres membres du corps municipal de ia ville de Coulanges-la-Vinèuse^ qui assurent l'Assemblée nationale de leur entière adhésion à ses décrets;
Délibération et adresse dë la ville ët commune de Dieppfe,- qui exprime son hominslge ët ses remerciements sur l'attention que l'Assemblée â faite à ses justes réclamations, et applaudit au mémorable dédret qui, des mains du clergé, fait passer et rend à la nation ses ancieris domaines.
Autre adresse de la commune d'Aurillae, qui fait sa soumission pour l'acquisition des biens nationaux pour la somme de deux millions, et qui anUonee que sa contribution patriotique se monte à quarante-six mille livres.1
Adresse des curés de Clermont-Ferraudj du chapitre de Saint-Pierre, de plusieurs ecclésiastiques de la même ville, et de plusieurs Curés dti département dri Puy-de-Dôme j
La municipalité d'Àutun s'empresse de prévenir les impressions défavorables que dës calomnies consignées dans plusieurs écrits pouvaient donner sur son patriotisme ët sut? les habitants de cette ville. Dès le moment de son installation, ee corps municipal a manifesté son altachèïnent inviolable à la Constitution par un acte d'adhésion. Les officiers municipaux, renouvelant aujourd'hui l'expression des sentiments qui animent tous leUrs citoyens, prient l'Assemblée nationale de vouloir bien agréer une seconde fois l'adhésion expresse quë la ville d'Autun donne à tous ses décrets, ainsi que la protëstattiofi dë ses dispositions constantes â les exécuter ttonc-tuellement, et à en maintenir Te&êculion de tout son pouvoir, improuvant formellement toutes lès opinions qui pourraient être contraires à l'esprit de ses décrets.
Adresse des électeurs de Gravelines et dès cariions dé Berguesi Btrurbdurg ét Bunker que ; dinSi cOnçûe i
f Nosseigneurs, choisis par nos cdiiCitoyefts pour coopérer à la formation des corps administratifs que vous àVe2 créés dans votre sagesse, nos premiers regards et nos bénédictions se sont élevés sur les habiles architectes de Ces Superbes édifices du bonheur public*
* Nos ctfeufrg tressaillent dë joie à l'aspect de ces monuments éternels de ia gloire'de. là nation française, du génie et du patriotisme de ses augustes représentants.
« Hëuretfi de pouvoir faire conoaltrë, d'Une manière solennelle, notre attachement inviolable aux principes sacrés de la Constitution ef d'ei-primer les sentiments de notre adhé&iOn à tous les décrets émanés de l'Assemblée nationale et sanctionnés par lé ïdijnousjuron!S à la fdfcë du ciel et sur l'honneur du nom français de ne choisir pour membres de l'administration du département du Nord et des districts qui lë coffl-1 posent que des citoyens qui nous en paraîtront dignes par leurs vertus, leurs talents et le patriotisme le plus pur. Nous jurons aussi de dénonéer,
sans aucuns égards, tOtis cëUx qui trahâgrëssënt les lois nouvellement dédfétées ou qui se rendraient coupables de négligence en remplissant les honorables fonétlettà qui leur auraient été confiées.
« XOus jurottè ënfltf dë fâifë le sacrifice de faotre fortune ët dé fiotre Vie, s'il est nécessaire, pour affermir et rendre durables leê bases de l'àanîl" rable Constitution qui tient dé régêhéTéï Ce vaste et florissant Erfipirë.
« Puisse ce serment que nous répétons sanS Cesse, et que noûs në Violerons jamais, être gravé dans le cœur dë tous les Français et animer toutes lës âmes capables dë sentir ië prix de la liberté !»
Adresse de cinquante-cinq citoyens Militaires! de la villë dé Montiïubait ,• due leur Èèle pOur le maintien fie lâ GOitétitUtidh a rendus captifs pëfl-dâiit dii-nëtif jOilrS î ilS Saisissent lë prerfliôF fflOlfiedt de lefUr liberté rrdtir' rendre cOttiptè de la scèflë désastreuse àiriVêë à Mofitaubàn le 10 mâi,ët jureht? entre léS inainS dë i'ASSefnblêe* qti'ils sont prêts à sacrifier les restes de leur eàisfcëtiCe pduf le Maintieri dë Ses dèdrëtSi
Leuf adressé ëSfc ainsi connue :
« Nosseigneurs,- cinquarite^cinq citoyens de ia ville de Montauban, VOtiéS, dëë le premier inS* tant, au service patriotique, que leur zélé pour le maintien dë Vos dèC'rëtS a rendus CàiJtifS pendant dix-fiëUf jours, saiSiSèeflt lë premier ïflOmënt dë leur liberté pOUr VOUS rëndfé compte dë la SCèflë désâstrëUse qUi S'ëst Offerte dàhSlëUr éitê, le 10 du méiS dë mai dernier. Les détails de Cet^ journée trop méfflorable VOUS ont déjà été trahi-mis. Permettez, NossëigôetîrSi que ceux qui ont été les téihdiiis Odtilâi?ëSy ët qûi y Ont reçu des blessures doftt ils s'honorent, vous ëû fassent lë tableau fidèle. Il est une fouie de circonstances, qUi n'en sont pas ntbins vrâiès, quoiqu'elles pa^ raiSSëut incroyables et qtie nous n'avOfli pas crû devoir insérer dans nôtre récit, la rënonitdéë suppléera as&eiî à cé défaut. D'ailleurs, danà la cruelle position où nous hotis sommes vus, pou-vions-mous tout Sâisif et tout observer?
* Ni la mort de ces dignës citoyens, nos braves et chërs camarades, qui Ont péri à nos côtés, ni les dangers émitients qui ont menacé nos jours, ni l'opprobre dont on a voulu couvrir notre em-' prisonnement, ni les larmes de nos famlllëfy n'ont porté la moindre atteinte à notre patrie*' tismev Nous jUronS} dans vos mains, Nosseigneurs, que nous soififfles prêts à sacrifier les restes de notre existence pour le maintien de vos décrets. Daignez, ^tt prononçant sur les événements sinistres de notre ville, perdre entièrement de vue notre cause personnelle et ne chercher, dans Votre Sagesse, que lés inoyens dë réprimer l'audaGe et confondre les manœuvres de ceux qui, au moment même où vous assurez la prospérité del'Empire français, voudraient l'entraîner dans sa ruine.
« La dispersion de nos familles, à l'époque de notre élargissement, les dangers qui nous menaçaient dans une villë que les nous citoyens furent forcés de quitter, pour échapper au massacre, nous mettant dans l'impossibilité de nouë réunir tous, sans courir les plus grands risques; nos compagnons d'infortune chargèrent les signataires du soin d'exposer à vos yeux l'affreux tableau de nos malheur S et de manifester à ia nation entière leur soumission aux décrets de votre auguste Assemblée et leur zèle pdar On maintenir l'exécution. » e
(Cette adresse et les pièces qui y sont jointes sont renvoyées au comité des rapports.)
Adresse de la municipalité de Vierzon, ainsi conçue :
« Nosseigneurs, les officiers municipaux de la ville de Vierzon, pénétrés d'un saint respect pour les décrets de l'Assemblée nationale, n'ont pu voir qu'avec la plus vive douleur, des protestations faites contre celui qu'elle a rendu le 13 avril dernier.
Leurs concitoyens animés du même zèle, et remplis du plus pur patriotisme, en dénonçant ces protestations à leur municipalité, ont remarqué, avec le plus grand étonnement, qu'elles sont signées de presque tous les députés du département du Cher.
« Pour que ces protestations ne fassent pas sur l'esprit de quelques personnes faibles l'impression que les ennemis de la chose publique attendent, les officiers municipaux de Vierzon auront soin de faire connaître le motif qui les a dictées, et d'expliquer que ce ne sont pas les richesses immenses du clergé, mais ses vertus, qUi seraient le soutien de notre sainte religion, qui n'est certainement pas en péril, comme osent l'annoncer faussement et témérairement ceux qui ont fait ces protestations.
« La garde nationale et tous les citoyens de Vierzon, joints à la municipalité, déclarent hautement traîtres à la nation ceux qui ont souscrit ou souscriront ces protestations, ainsi que ceux qui y ont donné ou donneront leur adhésion, et les déclare, comme tels, incapables à jamais de posséder aucunes places dans les assemblées de judicature et administration.
« Tandis que ces ennemis cherchent sous un faux prétexte à soulever le peuple, toute la commune de Vierzon fait de nouveau le serment de maintenir de tout son pouvoir la nouvelle Constitution, et de verser jusqu'à la dernière goutte de son sang, pour faire exécuter les décrets de l'Assemblée nationale, dont elle éprouve déjà les salutaires effets.
« Continuez, Nosseigneurs, vos glorieux travaux : nous vous en conjurons, parce que vous avez de plus cher, pour le bien de l'Empire ; ne désemparez pas, nous vous en supplions, jusqu'à ce que vous ayez achevé la Constitution, cet édifice superbe et majestueux qui fera la gloire et le bonheur des Français.
« Nous sommes avec un profond respect, Nosseigneurs, vos très humbles et très obéissants serviteurs.
Les officiers municipaux.
Signé : Eustache, maire ; Normand de Marli-
fnan ; Mourut, curé de Vierzon ; Godemusse ;
alienne ; Grillon-Danvault ; Brumot; Godin, procureur de la commune ; Guillot, secrétaire.
L'Académie des sciences se présente à la baire et M. de Condorcet, secrétaire perpétuel, prononce le discours suivant :
« Messieurs, vous avez daigné nous associer en quelque sorte à vos nobles travaux; et, en nous permettant de concourir au succès de vos vues bienfaisantes, vous avez montré que les sages représentants d'une nation éclairée ne pouvaient méconnaître ni le prix des sciences, ni l'utilité des compagnies occupées d'en accélérer les progrès et d'en multiplier l'application.
« Depuis soc institution, l'Académie a toujours saisi et même recherché les occasions d'employer pour le bien des hommes les connaissances ac-
quises par la méditation, ou par l'étude de la nature: c'est dans son sein qu'un étranger illustre (l),àqui une théorie profonde avait révélé le moyen d'obtenir une unité de longueur naturelle et invariable, forma le premier le plan d'y rapporter toutes les mesures pour les rendre par là uniformes et inaltérables. L'Académie s'est toujours plus honorée dans ses annales d'un préjugé détruit, d'un établissement public perfectionné, d'un procédé économique ou salutaire introduit dans les arts, que d'une découverte difficile ou brillante ; et son zèle, encouragé par votre confiance, va doubler d'activité et de force. Et comment pourrions-nous oublier jamais que les premiers honneurs publics décernés par vous l'ont été à la mémoire d'un de nos confrères ? Ne nous est-il pas permis de croire que les sciences ont eu aussi quelque part à ces marques glorieuses de votre estime pour un sage qui, célèbre dans les deux mondes par de grandes découvertes, n'a jamais chéri dans f éclat de sa renommée que le moyen qu'elle lui donnait, d'appeler ses concitoyens a l'indépendance d'une voix plus imposante, et de rallier en Europe, à une si noble cause, tout ce que son génie lui avait mérité de disciples et d'admirateurs ?
« Chacun de nous, comme bomme, comme citoyen, vous doit une éternelle reconnaissance pour le bienfait d'une Constitution égale et libre; bienfait dont aucune grande nation de l'Europe n'avait encore joui ; et pour celui de cette déclaration des droits qui, enchaînant les législateurs eux-mêmes par les principes de la justice universelle, rend l'homme indépendant de l'homme, et ne soumet sa volonté qu'à l'empire de la raison.
« Mais des citoyens voués par état à la recherche delà vérité, instruits par l'expérience, et de tout ce que peuvent les lumières pour la félicité générale, et de tout ce que les préjugés y opposent d'obstacles en égarant ou en dégradant les /esprits, doivent porter plus loin leurs regards, et, sans doute, ont le droit de vous remercier au nom de l'humanité, comme au nom de la patrie.
« Ils sentent combien, en ordonnant que les hommes ne seraient plus rien par des qualités étrangères, et tout par leurs.qualités personnelles, vous avez assuré les progrès de l'espèce humaine, puisque vous avez forcé l'ambition et la vanité même à ne plus attendre les distinctions ou le pouvoir, que du talent ou deslumières; puisque le soin de fortifier sa raison, de cultiver son esprit, d'étendre ses connaissances, est devenu le seul moyen d'obtenir une considération indépendante et une supériorité réelle.
« Ils savent que vous n'avez pas moins fait pour le bonbeur des générations futures en rétablissant l'esprit humain dans son indépendance naturelle, que pour celui de la génération présente, en mettant les propriétés et la vie des hommes à l'abri des attentats du despotisme.
« Ils voient, dans les commissions dont vous les avez chargés, avec quelle profondeur de vues vous avez voulu simplifier toutes les opérations nécessaires dans les conventions, dans les échanges, dans les actions de la vie commune, de peur que l'ignorance ne rendît esclave celui que vous avez déclaré libre, et ne réduisît l'égalité prononcée par vos lois à n'être jamais qu'un vain nom.
« Pourraient-ils enfin ne pas apercevoir qu'en établissant, pour la première fois, le
système
« Ainsi, grâce à la générosité, à la pureté de vos principes, la force, l'avarice ou la séduction cesseront bientôt de contrarier, par des institutions arbitraires, la loi de la nature, qui a voulu que l'homme fût éclairé pour qu'il pût être juste, et libre pour qu'il pût être heureux.
« Ainsi, vous jouirez à la fois, et du bien que vous faites, et du bien que vous préparez, et vous achèverez votre ouvrage au milieu des bénédictions de la foule des opprimés dont vous avez brisé les fers, et des acclamations des hommes éclairés dont vous avez surpassé les espérances. »
répond :
« Au milieu des applaudissements que I votre présence inspire dans cette Assemblée, et dans le sentiment qui les accompagne, il vous est aisé sans doute, Messieurs, de dêmêler que nous savons reconnaître et que nous aimons le lien de confraternité qui, pour le bonheur de l'espèce humaine, doit toujours unir les législateurs aux philosophes et aux savants. Lorsque l'Assemblée nationale a voulu procurer à la France, et, s'il est possible, à toutes lès nations, le grand bienfait de l'uniformité des poids et mesures, elle a senti que c'était awc les deux compagnies les plus savantes de l'Europe qu'elle devait en partager l'honneur, et elle vous a invités à vouloir bien vous occuper de cet important travail. Le zèle dont vous venez de lui faire hommage montre qu'elle ne s'est point trompée dans ses espérances, comme le langage patriotique et éclairé que vous lui avez fait entendre en cette occasion prouve qu'elle aurait pu vous consulter utilement sur des travaux plus essentiels encore. L'Assemblée nationale voit avec plaisir que l'Académie des sciences ait choisi pour porter la parole en son nom des hommes accoutumés depuis longtemps à la porter avec succès au monde entier, au nom de la philosophie et des sciences, et que nous regrettons de ne point voir assis parmi nous, lorsqu'il est certain que son esprit n'est point étranger à nos délibérations. L'Assemblée vous offre d'assister à sa séance. »
Une députation des gens de maison vient déposer sur l'autel de la Patrie un don de trois mille livres émargent et d'autres effets.
L'orateur delà députation prononce le discours suivant :
« Nosseigneurs,
« Si des motifs que nous respectons, vous ont déterminés à séparer les gens de maison de la chose publique, nos cœurs sauront toujours franchir la barrière que votre sagesse a cru devoir poser entre nous et les citoyens. Nous le sentons, et notre patriotisme en est moins humilié : il est difficile de concilier l'exercice de la liberté avec le régime de la domesticité. La nécessité a établi une dépendance qu'une certaine classe d'hommes ne peut éviter; mais, nés dans le sein delà patrie, libres dans le choix de nos occupations, nous regarderons comme un moment heureux celui où nous pourrons voler à son secours. Ce serait du moins nous faire injure que de présu-
mer que l'avilissement et la dégradation des sentiments fussent toujours le partage des gens de maison. N'avons-nous pas nos parents, une patrie? Ne sommes-nous pas Français? Et quand vous préparez si glorieusement la régénération de l'Empire, pourrions-nous ne pas respecter une Constitution qui peut un jour nous protéger ? Hélas 1 sous un régime moins désastreux pour les habitants des campagnes, la moitié d'entre nous habiterait encore ses humbles foyers, cultiverait encore l'héritage de ses pères. Les riches, ayant moins de ressources, auraient eu moins de fantaisies. Les habitants des campagnes, moins pressés par l'impôt, ne seraient pas venus dans la capitale échanger leur misère contre un genre de service qui humilie l'homme beaucoup plus qu'il ne l'enrichit. Votre sagesse, Nosseigneurs, fera cesser ce genre de désordre, en rétablissant l'abondance dans les provinces, en rendant au cultivateur toute son énergie, en lui assurant l'heureux fruit de ses travaux. Puisse le ciel bénir à jamais vos courageux efforts, et procurer à la France tout le bonheur dont ce grand royaume est susceptible! Le produit de notre contribution patriotique est si fort au-dessous de nos vœux, qu'à peine nous osons vous l'offrir; mais les pères de la patrie ne savent pas mépriser les dons de ses enfants. Ah! sans doute, c'est à ce titre que vous avez daigné nous admettre au sein de la plus auguste Assemblée : ce titre si cher à des cœurs français, nous avertira sans cesse de nos devoirs envers la nation ; il nous consolera même de cette foule de désagréments qui environnent toute notre existence. »
répond :
u L'Assemblée nationale reçoit avec intérêt, avec attendrissemeut, votre offrande patriotique, et vos civiques regrets sur la suspension momentanée de vos droits politiques. Si l'Assemblé a cru devoir prononcer cette suspension, ce n'est pas que ce Corps, essentiellement composé d'amis de l'égalité, ait pu avoir l'intention de la méconnaître, cette égalité, à votre égard; mais elle a dû penser que votre sensibilité même, ou cette affection si estimable qui vous attache aux personnes à qui vous engagez vos services, pourrait exercer une influence souvent trop puissante sur vos opinions. Ne voyez donc dans les décrets de l'Assemblée qu'une sage précaution qui doit vous être avantageuse, puisqu'elle tourne à l'utilité publique : l'hommagé que vous venez de rendre à la. Constitution prouve tout à la fois que vous êtes dignes de sentir les motifs qui ont déterminé le législateur, et que votre patriotisme ne le cède à aucune autre classe de vos concitoyens. L'Assemblée vous permet d'assister à sa séance. »
(On demande et l'Assemblée ordonne l'impression des adresses de l'Académie des sciences et des gens de maison.)
Une députation des assemblées primaires des districts de Mortain, Isigny, département de la Manche, a fait don de l'imposition des ci-dèvant privilégiés pour les six derniers mois de 1789, et a annoncé que l'adresse qu'elle déposait sur le bureau, était signée par tous les citoyens actifs, notamment par les ecclésiastiques et les nobles, qui protestent d'être les plus fermes soutiens de la Constitution.
Les jeunes élèves de l'institution du Mont-Saint-Paul et une députation du district des Mathurins ont été admis à la barre, et ont assuré l'Assemblée nationale de leur soumission et de
leur entier dévouement âu ffiSintièii dè seS décrets*
Une députation des habitants colons de Tabâgo, résidant en France, est venue réclamer la justice de l'Assemblée nationale, et la prier de renvoyer au comité colonial les pièces: relatives aux troubles actuels qui existent dans cette- colonie;
J'appuie la demande des habitants deTafragoei je puis assurer l'Assemblée nationale qu èn l/87ils om montré tant déloyauté et tant, de fidélité à la France qu'ils. Ont* fourni jusqu'à mille nègres pendant plusieurs mois pour travailler â mettre la colonie,en. état de défense, et cela sans avoir été payés et dans un moment où ils avalent beaucoup a se plaindre dd ministère* wZ ] ... ' y.,i J , j
(L'Assemblée renvoie au comité colonial la demandé des habitants de Tabago.),,.:
annonce que les attroupements se sOht diSnërSés dâhs le GharOiàis et que les dégâts ont CësSe dâng Ce fjâiuia^e?ipàr ëiiitë dë l'arrestation dè nètif des principaux, meneurs.
, tnkrfibrë du Comité dèi rapports, uit rèïftàfqttër qùé dans lë décret relatif à l'affaire dé SehôlëStadt, le brocêS-Vërbaï de samedi dérnier a omis lé rùot de magistral. ;
(L'Àssèihblêe àtttôflsë l'àdditidâ de èe mot d&ns lé dèCfèt.)
, âithàrh dù càfnitë dès rafîbôHs: A la première séance de râssôcbbléë primaire de la section de Saint-Pierre d'Évreux, M. Girard fils a été accusé d'avoir dressé uûe Hsfë dë VfbM-Six eitoVehs actifs, parmi lèsotielé doivent ëtrë choisis lés atiatohë officiers niutilcipàiik. Ihterrogé sù'r ce fait, il eh Convient, et dit qu'il né l'àvait drèSSéê que pour fixer soû opinion àtir le Choix, qtiil devait faire, et qu'il në l'aVait montrée qu'à ûn seul particullër. Il observa dtië ces faits éiaiênt antérieurs â lâ formation de 1 àSSembléë primàirë. Un lugéméiit provisoire; tehdti sur çët Ihtërft)-gâtoïre, défend à M. Gifârd d'âsSiSter â I'aâ-sëhibiêè, et brdohnë trri plus amplement iilfôrhië. Sûr Cëk noîtvëllës informations, râsSëmbléë, ëtf cOHfirihânt le preinier jugement, déclare défiûi-tivettéht M. Ûifârd cdiipablé d'aVôir tfûfitreVédû à l'esprit et$ lâ lettre des décrété dë l'A^ëmbîee nationale, et le dOûdâmrief à être pHvé dès droits de Citôyeh actif pefldànt la durée dè toute Cèlte session. M{M. Chabroud présenté, aU nom du comité, uh projët dë dêçrèt, dOht 11 développe les motifs, ét dont Vôicf iéS terihes :
c L'Assemblée nationale, après a^pir ôxtt lë compte qui lui â été rë'Mu, par son comité $ëè ràpfpdittS, dû probès-verbal aè l'aàseiïiblée bri-màifë, Sëctiorf de Sâirit-Pïérfe dé la Yilfé d'Èvreuf, le 27 mai et jours suivants, et des interfogàtoîréé, information et jugemenj que l'assemblée s'est #ërmiS Cohlre je éîeui4 Girard lë JèuÛp, citoyen actif de ladite Ville, sûr dë prétendus faits dé cap-tâtion ,'dè sûffràgés, tOnfectioà ët 'distribufioh de ljstë antérieur^ â J'ouverttir.ë de laditè Assemblées, et êncorè dë la transcrit)don qn'èilë à fait fjÈtire syr lëS régistrëS de la muniCip^Ute desdits jtfgemèûtë;
« A uécMtÔ et décfëtè qu'ellë a^ndlle, quant à ce., le procès-verbal de' râsseimMéë primaire, section de Séint-Plorfe de la ville u'ÉvrëUx; déClarë le sieur Girard lë jehnë décharge dèSdits jdgemetit^ ; fait défense âùl citoyens dë, lâ dite section de Saitit'Piëlfë dé së përmëttrd âï'àVénif
dë pàrëilS fëitSj ànhUlë ën mêmë tëtnps l'ittsertiOtt faité dâhé lefe règistres dé la municipalité desdits jbgeméntS; t^dbdfle qu'elle sera bâtonhêe, ët lë présent décret transcrit à là marge.
« Au surplus, l'Assemblée ordonne quë le président Se retirera devers le roi, pour le ëuppliër de faire mettre le décret ë ëkéfcUtion. »
Je në désapprouve pas le fond du décret, parée que jë crois qrie l'âsSettlbléë prittfaire dé Saidt-Piërrë d'Évreux était incompétente et qti'ëlle né pouvait avoir une pareille juridiction; mais il më paraît également que l'Assemblée nationale fie doit point porter Un jdgeitietit et ne doit pas annuler^ parce qu'elle n'eët qae législatrice. Kllë doit së borùër à improuver la dëliflératlofl prise par rassemblée pritoairë d'Évreux;
Les règles exposées par M. Mougins de Roquefort sont vraies ; je les accepterais volontiers s'il existait des tribun àiix oû l'on pût porter ceë sortês de causes, mais il n'y ërl a point et par suite l'Assemblée nationale âë trouve dans la nécessité dë prononcer.
Sans entëndre préjuger éh tiett sur l'accusation, il me semble qtfé la cothpéfënCè dé' 1'assëmblée primaire n'est pàs contestable. G'ëfet dans l'assembFée du peuple qiie réside la pleine puissance i c'est donc là que l'ofi doit ëxar-miner toUs les faits relatifs aut élèctiotis. Qdëi est le tribunal qui connaîtra de pareils faits ? Ce né sera pas lëslUgéédrdinàirës, pdisqùë vods àVëfc dit due lës difnCultéë des mUnicipâlitêS ^eraietit portées aux âsèelnblêéB du diëtricl. Je démandè qhe l'oh reconnaisse; Cofiforméittedt âtix pttnci-1 pës, que rassemblée âvâit lé dfbit dé ! çt quë l'on entende un rapport ëui1 lé fdrid de céttë affaire t
; M. Rcèderei' viënt d'établir lâ dOC^ trinë en vertd de laqdeilë lès assemblées pri1 maiMs oht le droit incontestable dë phmohcèr sur l'eXclu^ioh dés citoyens actifs. —* Je dëihandfe l'ajoùrnëtiiéiit et le réhvoi de cettë affâirë àu comité de constitution.
(Lé renvoi ëst ordonné.)
, débuté dë Vitt,y-le:-Ffançd;iâ, dethaiidè tin congé dë Hutt jours qui' lui ëst accordé.
(de Coutances), membre du cojrïtitê dès râppdHsi Au mois de Sëntembrë dèr-nier, les hâbitadts dè ïaVillë dë JurahCod, ëh Béarn, formèrent tinë garde hationalé èodr dê" fefldreléufs ïJrOpriétéSdêvastéeS par leSnrigânds. Il fut arrêté que tons les citoyens, depuis èeiïe.àn^ jusqu'à cinquante, seraient enrégimentés, et que celui qui refuserait le service serait condamné à utië amendé dë 20 sous et mis en priédn jusqu'au payémeht. M. Mdntauiad fils encourt lë premiëf cëtte pelnë. M. Laiigar, l'un des offiCiërs muttici-pâux, së ifanspOrte chetë Ce Citoyen,qui rèfùée de bâyër rattiëndë; il èst mis en prison et retenti p'ehaant deux heurès. M. Montaulàh attaqué MMiaiigar ad pârléliehtde Nàvàrrë. Le mtihiCi-|(àlïtë ëst assemblée1, ëllë arrêté quë trdlS cOiii^ ihisSaires serorit envoyés ad |)ârleuiéht de Nàu Varre, pour ihi rap^ëler lë décret qui dëfehd quë lés onrciérS mtlnicipàux soient iûterroûSpuS dadà leurs foùctiOhS par àucuh tribunal. Lef parIerttëàlt Cdntinue SeS potirSUitési ét lèl 20 tàâi ûh âi'i'êt pâf défaut dé'clarë ùùl reriititisOflttëfhéht,! fàft
défense à M. Lâugâr d'en Ordonner dé Semblables, et le ctrfldàmhê aux dépehs.— Le cdtnité des rapports présente le projet de décret1 suivant :
« L'Assemblée nationale dédlàre lès arrêtés rendus par le parlëmebt dô Nàvarrë, contre lé sieur Ldugdr, attentatoire à l'atltorite de rÂSsêhibtêe nationale, léS casse ét annuité, et fait déienSeSà cette cour d'en rendre dé flàreils â l'avenir. LAs-semblêfe Charge Son président de 3e retire!1 par deVerd lë roi, pour le slippliër û'ordonfletf Tëxé-cution du présent décret. »
J'observë que lë projet de décret a la fonde d'uné sentencé.
^Assemblée nationale sortirait tout à fait de Son rôle en adoptant une semblable rédaction .
Je propose de substituer à gés mots : tes casse etarinnulle, et fait défenses, etç,, ceux-ci ; déclare que le parlement de Navarre n'a pu rendre ces arrêts, et que tput ce qui s'en ëst ensuivi doit être considéré comme npn-âvënu.
Cet amendement est adopté et le décret est rendu ën cés ternies ;
« L* Assemblée nationale, après avoir entendu son comité des rapports,
Déclaré que lé parlement de Navarre n'a pu rendre les arrêts des lt ayri| et 20 mai derniers cëntrë le sieur LaUgar, officier municipal a Jurançon ; lesquéls, en conséquence, sont considérés comme non-avenus, ainsi, que tout ce qui, s'en est ensuivi.
Çharge son président de së retirer par .devers le roi pçiir lé supplier de donner, des ordres popr qu'il soit fait défenses à toutes cours et tribunaui judiciaires né s'immiscer dans la connaissance des délits d'administration qui seraient imputés aux officiers municipaux, si la dénonciation de ces délits n'a été préalablement soumise aux départements, ou à leurs directoires, et si le renvoi n'en à été fait aux tribunaux par les départements, sur l'avis des districts ou de leurs directoires. »
La séahce de demain s'ouvrira à onze heures précises.
(La séance est levée à fO heures du soir.)
Séance du
ouvre la séaneë à onze hëtires dn matin.
, seerêtaiïe, fait lëCtUre du procès-verbal d'hier ad matin.
Il ne s'élève pas de réclamation.
, député de Bigûrtè, demahde Un dëtigô de douië jôurS.
, député dè Riant, soliîéitè tin congé dè tk*6iè semaines.
,député de Chátellerault, ptfë l'As-semblée de lui permettre de s'abSëntëf pouf sii semaines.
Geseongés sont accordés.
. Un de MM. les secrétaires., commence la lecture d'une adresse des juifs d'Alsace : ils se plaignent du silence du comité de Constitution chargé par l'Assemblée nationale de faire un rapport sur leur état civil. L'Assemblée interrompt la lecture de cette adresse, et en ordonne le renvoi au comité.
(de Saint-Jean-d?Angely). Il paraît une ^re^edes ci(oyensëathôUque8 ae Nîmes que l'on dit avoir été enVoyée. à l'Assemblée nationale: elle contient des qualifications injurieuses àu pacte féSératif ,dé toutes les gardes nationales, qui doit avpir lieu le 14 juillet, je rapporte ses propres expressions « C est un armement, une, vraie scission, une déclaration de guerre aux autres classes non armées ; ce projet rappelle 1 exé-crabié fédération de la Ligue. » Ge n'a pas élé saps indignation que j'ai entendu traiter ainsi un parti qui doit honorer iàht la nation française, dans un momentôu l'on , cherche a répandre des craintes sur un si Vaste projet. Je demande que l'pfi vérifie. si cètjté adresse à été ou pa* élé envoyée â l'Ass'éinblee nationale.
Leèdrditê deà recherchés est SaiSi dë ;dëtte stdrëssëj ëlle ëhtrërà dans lë rapport général des trouble^ dé NîthèS.
M. Necker Vient d'àdressér au ctimité deS financés une ,lettre qui ëst rëlâtiye
au versement en'èèpéùéè des aeHieH tàuchèk pàf lés coliecïèiiiïs êftiXfëê recèvéuh dès dehiéïs publics. 11 désire qu'il ëli soit donné connaissance â l'Assemblée nationale.
« Le 13 juin 1790; i Monsieur le Président,
« J'ai l'honneur de vous envoyer la, copie d'une .lettre que je viens d'écrire, au comité, des finances; je vous prie de vouloir bien en donner connaissance à l'Assemblée.
« Je suis avec respeqt, M. le Président^ :vetre très humble et très obéissant serviteur»
Cotiiè dët la lettre écrite pdf M. fteètier a, MM,'du èbmiië deéfifiancèè, ÛHÏ jitin'îl% (1). ' « VtjUs âVë£ soïïmis,' Messieurs, à rAâSëmfffêe tiatiohaïè, un prôjët dé décret qui àvkit pbUr bt(t d'ëf^pècfiyr qUe tés receveurs ét'Hës,'côïfecteUrs dès impôts Confondissent, dafns leur ëomptà-bilitë, le numéraire effëëtif et les billëts-asSi-gnâts. ,
'd Cëtte question à été ajournée ittdefîùihient pàr rAsséinblëe, et cependant le; décret' que avez proposé devientChaqù'é jour plUS nécessaire.
«' C'est ëfttrë lés mains des collecteurs qu'on versera le plus d'strgent effectif, pùisqu'en vënU de Votre décret du 22 avril derflierj tous lës objets ati-dëSsO'us de dëut CëntàliVreS doivent être payés eh espèces réelles.
'- ST Le Mohitëkr ûë donne «Jii'ùp éitràft de fiëûe
« Ainsi, non seulement l'Etat perdra ce que de simples agents, trafiquants des deniers effectifs de leurs recettes, auront gagné ; mais, ce qui est bien plus important, le gouvernement courra le risque de ne pas trouver, même à des prix onéreux, la quantité d'espèces réelles dont il a constamment le besoin le plus impérieux.
« L'Assemblée nationale pensera peut être que le gouvernement serait en état de prévenir, par simple voie d'administration, les abus dont je viens de parier. Mais indépendamment du peu d'autorité dont il jouit maintenant, l'on doit remarquer que des receveurs prêts à perdre leur état, et des collecteurs exerçant par contrainte une fonction passagère, ne peuvent être facilement assujetti s à des règles nouvelles. D'ailleurs, aux termes stricts du décret du 22 avril dernier, qui n'admet aucune exception, ils sont fondés à s'acquittèrenassignats, n'importe qu'ils aient fait recette ou non de cette monnaie.
« Il est donc absolument nécessaire que l'Assemblée nationale, en distinguant dans les receveurs et les collecteurs leur qualité particulière de dépositaire, leur impose l'obligation de rendre un compte exact de la consistance de leurs recouvrements, sans confondre ensemble l'argent effectif et les assignats.
« On ne peut assimiler en tous les points ces deux monnaies, puisque l'une n'est pas applicable au paiement de tous les objets au-dessous de deux cents livres.
« Le plus grand nombre de receveurs particuliers des impositions, en raison de leurs anciens rapports avec l'administration, se rendrait peut être aux simples injonctions du gouvernement ; mais ils sollicitent eux-mêmes une loi qui puisse les autoriser à exiger des collecteurs de faire leurs paiements dans la même monnaie qu'ils ont reçue. Et pour vous convaincre, par un seul exemple, de la nécessité d'uné pareille disposition, je vous adresse la copie d'un acte où vous verrez qu'un collecteur s'est fait accompagner par un huissier et deux recors pour sommer le receveur particulier de Mayenne de recevoir 8,500 livres en assignats, quoique, de son aveu, il eût reçu cette somme en argent effectif, et il s'appuie, dans cette démarche, de l'autorité même de l'Assemblée nationale.
« 11 est donc évident que, sans une nouvelle explication de la part du Corps législatif, le Trésor public ne pourrait plus faire fonds sur aucune recette en argent.
» Je vous invite donc, Messieurs, à solliciter un décret qui obvie aux inconvénients dont je Viens de vous donner connaissance ; il ne résul-
tera pas de cette loi, comme on a paru le craindre, une extraction pour Paris, de l'argent de3 provinces ; elle empêchera seulement que l'administration ne soit obligée de faire sortir le numéraire de la capitale, pour satisfaire en entier au paiement de toutes les dépenses du royaume qui doivent être effectuées en espèces effectives. Une telle nécessité ne tarderait pas à arrêter le service, et déjà de grandes difficultés se font sentir.
« On se tromperait en préjugeant qu'il suffit pour les aplanir d'avoir autorisé l'administra^ tion à faire tous les sacrifices nécessaires pour se procurer les fonds en argent que le paiement des appoints exige ; car ces appoints se montent extrêmement haut, lorsque tous les paiements au-dessous de deux cents livres en font partie, et il est à. craindre que, même avec le secours du décret que je vous prie de demander à l'Assemblée nationale, il ne faille être longtemps dans une action continuelle pour rassembler une quantité de numéraire équivalente à tous les besoins. L'envoi d'une grande quantité d'assignats dans les provinces paraît une circonstance avantageuse sous plusieurs rapports; mais le revers, c'est le paiement de tous les impôts dans cette monnaie.
« Je dois vous rappeler, Messieurs, que la caisse d'escompte devant, aux termes du décret du 4 de ce mois, discontinuer son service, à commencer du 1er juillet prochain, lé Trésor public aura besoin d'un plus grand fonds de numéraire. Cette caisse, à la vérité, n'aurait pu rendre plus longtemps les mêmes services, parce que, dans la vue sage de ne pas augmenter le prix de l'argent sur place, elle se bornait à faire venir de l'or et de l'argent des pays étrangers; opération très coûteuse, lorsqu'elle n'est pas contenue dans de justes bornes ; car, au moment où l'on extrait de ces mêmes pays étrangers une somme d'argent supérieure à leur dette envers la France, on ne peut le faire sans une contractation dans les changes, infiniment désavantageuse.
« Il en coûterait aujourd'hui plus de 10 0/0, pour avoir des espèces par ce moyen, et la ressource encore serait petite.
« Je soumets, Messieurs, toutes ces considérations à votre examen, et je ne doute point qu'elles ne vous paraissent, comme à moi, d'une très grande importance. « J'ai l'honneur d'être, etc.
, rapporteur du comité des finances, propose un projet de décret pour autoriser les habitants de Monton à emprunter 6,000 livres. Ce décret est adopté dans la teneur suivante :
« L'assemblée nationale, sur le rapport de son comité des finances, d'après la délibération prise en conseil général du bourg de Monton en Auvergne, le 30 mai dernier, autorise les officiers municipaux dudit bourg à faire un emprunt de 6,000 livres pour être employé au soulagement des pauvres et à un atelier de charité, sous la charge et condition expresses que le remboursement sera fait en quatre ans par des délégations données aux créanciers sur les revenus patrimoniaux dudit bourg, et de rendre compte de l'emploi au district et département.»
, au nom du comité de Con$-titution, dit que dans la paroisse de Saint-Claude, district de Paimbœuf, département de la Basse-Loire, les habitants abusés ont cru que les afféa-gements étaient annulés par les décrets et ont renversé les clôtures. Instruits de leur erreur, ils
ont entrepris de les relever, mais malheureusement les procureurs sont intervenus et les menacent d'une ruine prochaine. Plus de 150 pères de famille supplient l'Assemblée de les préserver de cette perte. Le comité propose un décret à ce sujet.
demande que le décret soit général au lieu d'être particulier au district de Paimbeuf.
Cet amendement est adopté.
Le décret est rendu ainsi qu'il suit, sauf rédaction :
« L'Assemblée nationale, instruite des vives poursuites judiciaires qui se font dans plusieurs lieux du royaume, et notamment dans le district de Paimbeuf, département de la Basse-Loire, à l'occasion des débats qui ont récemment eu lieu sur les terrains afféagés et les marais desséchés depuis quelques années,
« Décrète que son président se retirera vers le roi pour le prier d'ordonner que les procédures relatives aux dédommagements qui peuvent être dus à raison des dégâts sur les terrains afféagés et les marais desséchés depuis quelques années, seront suspendues : de commettre les directoires de districts pour régler lesdits dédommagements dans les différents cantons du royaume où ces dégâts ont eu lieu ; à l'effet de quoi les directoires de districts pourront, s'il est besoin, nommer, parmi leurs membres, des commissaires qui se transporteront sur les lieux, vérifieront les dégâts, apprécieront les indemnités ; et aussitôt après le paiement ce celles-ci, les procédures demeureront absolument éteintes.
« De commettre le premier juge du tribunal existant dans chaque ville de district, ou, s'il n'y en a pas, du tribunal de la ville la plus voisine pour régler sans frais les mémoires des procédures déjà faites, afin que le montant en soit réparti et payé de la même manière que les indemnités.
« L'Assemblée nationale enjoint généralement à tous les citoyens trompés, qui ont commis des dégâts, le respect pour les propriétés qui sont toutes sous la garde de la loi, sauf à eux à se pourvoir dans les tribunaux et par les voies légales, s'ils croient avoir des droits sur les prairies, les terrains afféagés et les marais desséchés.
fait une motion pour que toutes les
fermissions d'emprunt données par les décrets de Assemblée nationale soient enregistrées aux greffes des districts.
Cette motion n'est pas appuyée.
, chartreux. Pour fixer l'opinion publique sur des imprimés qui circulent dans Paris, relativement à une personne à qui on attribue des prédictions, et dans lesquels je suis no,mmé... (un demande l'ordre du jour.). (L'Assemblée décide que dom Gerle sera entendu.)
Il existe dans le Périgord une personne nommée Suzanne la Bouze ; elle a annoncé à un grand nombre de personnes la révolution présente; elle m'a communiqué, il y a onze ans, un ouvrage dans lequel elle prédisait la convocation de l'Assemblée nationale, la cessation des vœux monastiques, la réforme des abus, le rappel du clergé à sa primitive pureté, la fédération de tous les peuples de la terre, pour ne former plus qu'un peuple de frères. Ces prédic-
tions ont été communiquées dans le temps à M. l'évêque de Périgueux. L'Assemblée nationale a eu lieu, la cessation des vœux a eu lieu.... (Il s'élève des murmures.)
(L'Assemblée décide qu'elle passera à l'ordre du jour.)
Un des secrétaires fait lecture de la note suivante :
Expéditions en parchemin, pôurètre déposées dans les Archives de l'Assemblée nationale:
« 1° D'une proclamation sur un décret du 20 avril dernier, relatif à la municipalité de Crécy, et au sieur de la Borde, lieutenant général de cette ville ;
« 2° De lettres patentes sur le décret du 25 mai concernant la distribution des bois communaux en usance ;
« 3° De lettres patentes sur le décret du 28, qui autorise les officiers municipaux d'Uzerche à imposer la somme de 1,600 livres sur tous les citoyens actifs qui payent au-dessus de 10 livres de toutes tailles ;
« 4° De lettres patentes sur le décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de Chef-Boutonne à imposer la somme de 2,000 livres sur tous les contribuables qui payent 6 livres de tailles et au-dessus ;
« 5° Le lettres patentes sur un décret du même jour, qui déclare qu'il n'y a pas lieu à autoriser l'emprunt de 500 livres demandé par la ville de Marvejols, en lui laissant néanmoins la faculté de se pourvoir pour l'imposition de cette somme;
« 6° De lettres patentes sur le décret du même jour, concernant la somme de 500 livres à imposer dans la communauté d'Audierne pour le soulagement de ses pauvres;
« 7° De lettres patentes sur le décret du même jour, concernant la somme de 6,000 livres à imposer dans la ville de Salon en Provence ;
« 8° De lettres patentes sur le décret du même jour, relatif à la demande d'emprunter une somme de 1,800 livres, faite par la communauté de'Ghirac en Angoumois ;
« 9° De lettres patentes sur le décret du même jour, portant qu'il n'y a lieu d'autoriser les habitants de Lannion à faire un emprunt de 12,000livres, sauf à eux à imposer 10,000 livres en deux ou quatre années ;
« 10° De lettresfpatentes sur le décret du même jour, concernant l'imposition de la somme de 2,000 livres à lever en deux ou quatre années sur tous les contribuables de la ville de Cusset;
« 11° De lettres patentes sur le décret du même jour, concernant l'imposition de 2,400 livres à lever sur les habitants de la ville de Nontron;
« 12° De letlres.'patentes sur le décret du 29, concernant l'imposition de la somme de 1,200 livres, à faire sur les habitants du bourg de Bonnes, pour la construction de deux bateaux;
« 13° De lettres patentes sur le décret du même jour, portant qu'il sera, par les officiers municipaux de Saint-Pierre-le-Moutier, imposé la somme de 1,200 livres sur tous leurs citoyens qui ont plus de 400 livres de revenu, soit en biens-fonds, rentes, pensions ou industrie;
« 14° D'une proclamation sur le décret du même jour, relatif à l'émeute qui a eu lieu au marché de Tours, ,1e 26 mai, à l'occasion du prix des grains;
« 15° D'une proclamation sur le décret du 30,
portant que l'administration du département de Sèine-et-Marne demeurera définitivement fixée dans la ville de Melun;
« 16* D'une proclamation sur le décret du premier de ce mois, qui déclare non-avenu l'arrêt rendu par le parlement de Pau, le 8 mai, contré les officiers municipaux actuels de Sauveterre, ainsi que tout ce qui s'en est ensuivi;
« 17» D'une proclamation sur le décret du même jour, qui déclare non-avenus les arrêts rendus par le parlement de Toulouse, les il décembre. 12 janvier ej; Ù mars derniers, arpcçasiop au renouvellement des consuls de Mirepoix ;
« 18° D'une proclamation sur le décret du 2 de ce mois, portant que l'assemblée de département de l'Aisne se tiendra dans la ville de Laon;
« 19° D'une proclamation sur le décret du pre^ mier, concernant l'ancienne milice bourgeoise d'Amboise;
r 20p De lettres patentes sur le décret du 2, qui autorise provisoirement les officiers royaux de la yille de l'Isle-en-Dodon, dans le Goinminges. à informer des faits de brigandage commis par les personnes qui sont détenues, ou seront traduites dans les prisons de cettB ville;
« 21° De lettres patentes sur le déeret du même jour, qui autorise la ville de Murât, département du Gantai, à faire un emprunt de 24,000 livres ;
* 22° D'une proclamation sur le décret du même jour, qui ordonne à toutes les municipalités et aux gardes nationales du département du Cantal, de protéger la libre circulation des grains;
« 2âp Et enfin de lettres patentes sur le décret du 5, qui attribue aux bailliages de Bourbon-Lancy et de Gharolles la connaissance des attentats commis contre les propriétés, dans: l'étendue des ressorts et districts de ces deux sièges.
« PatiS) ce 13 Juin.ïf^O,, '»;
observe que la proclamation du décret relatif £ la, muqibipalité de' CrécV et au isieur de la Borde, né contient pas la dernière disposi7 tion de ce décret qui porte que le prèsjdeût dé l'Assemblée écrira a {a municipalité de Gréçy, .que l'Assemblée improute les délibérations prises par les habitants de cette ville, les 14 defie,mfire et 3 janvier derniers, par lesquelles ils ont voulu flétrir la réputation et l'honneur du sieur de la Borde; il demande que cette partie dû décret soit rétablie dans la proclamation. .
Après quelques discussions, tant pur cet article, crue sur/la sanction des décrets en général,'lé décret suivant est rendu ;
« L'Assemblée nationale décrète que les çorn-ipissaires, nommés pour, yeiller à l'ênypi 4es décrets ' de l'Assemblée, seront cpargés deçolla-tionner tous les décrets sanctionnés çq acceptés jpar lë rôi avec le texte des décrets, tel qu'il est dans lés procès-verbaux, et 4e faire à Cê sujet lëur rappprt a rÀsseiuWeeî "
présente la rgdactiop du dfcfet sur les fonds nécessaire? î?W de F es-
cadre dont Varmerqçnt y été or^o^ê pàr le rQir
Le déqret est adppté ainsi qurii suit fe
L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de ses comités des financés et de la marine sur la demande faite par le mipistre de la marine d'un fonds extraordinaire pour pourvoir aux dépenses qu'exige l'armement de quatorze vaisseaux, quatorze frégates et quatorze moindres bâtiments, ordonné par le roi. a décrété que ledit rapport et l'état énonciatif des dépenses,
présentés pâ? le ministre, seraient imprimés pour être soumis à un nopvel examen ; et néanmoins l'Assemblée a provisoirement ordonné qu'un fonds extraordinaire de trois millions, à cqmpte des dépenses dudit armement, seront mis à la disposition du ministre de la marine pour en être rendu compte dans les formesauiseront décrétées pour toutes les dépenses de la màriûe^ »
, au nom du comité â? aliénation. Le comité que vous avez établi pour la vente des domaines nationaux doit, pour remplir vos vues, faire disparaître les obstacles qui pourraient arrêter cette vente. Il existe sur ces biens différentes espèces de retraits, qui donnent à un prOT priétaïre le droit de retenir le bien vendu par son copropriétaire. Vous concevez due si vous laissiez subsister ce droit, les acquéreurs se présenteraient en beaucoup plus petit noipbre, et lés enchères diminueraient. D'après céa considérations, j'ai l'honneur de vous proposer le projet de décret suivant i
« Le retrait de bourgeoisie, d'habitation ou local, le retrait d'eclésche, le retrait de société, de commission, de fraréuseté, de convenance ou bienséance sont abolis.
« Les procès concernant lesdits retraits qui ne seront pas jugés en dernier ressort, à l'époque de la publication du présent décret, demeureront comme non-avenus, et il ne pourra être fait droit que sur les dépens qu'ils auront Occasionnés.
(de Saint-Jean-iï Angely), Il y a aussi beaucoup de retraits lignagers, et je crois que ce serait ici le cds d'en demander la suppression.
(Là proposition de M. Begnaud est ajournée à quinzaine, et le projet de décret de M. ferlin est adopté.)
, rapporteur dû comité des finances. Vos trésoriers des dons patriotiques, tpuiours dirigés par l'esprit de bienfaisance qui vous anime, se sont concertés avec les payeurs des rentes pour faire de plus forts paiements que ceux qiie vous ave» décrétés. Ils Ont le bonheur de voir qu'avec des précautions ils pourrônt payer non seulement les rentes de 100 livres, mais ejncore celles de 300 livres/à toutes lettres. Quant aux précautions à prendre, votre comité va vous les indiquer. Vous avez ordonné aux payeurs de se faire représenter les quittances d'imposition ; cela ne suffit pas et ne répond point assez aux vues d'humanité qui dirigent tous vos travaux. Beaucoup de malheureux n'ont pas été mis sur les rôles, d'autres n'ont pu acquitter leurs cotes d'impositions; d'autres, par ia Révolution, se"trouvent imposés à des sommes plus fortes; ces personnes sont donc exclues par le fait. Voici le projet de décret que nous avons l'honneur de vous proposer t
« Art. Les deniers des dons patriotiques continueront à être versés aux paiements des rentes de l'hôtel de ville de Paris : mais ils pourront être employés à l'avenir au paièment des arrérages de l'année entière 1789 des rentes de 300 livres et au-dessous* à toutes lettres.
Art. Les payeurs des rentes continueront à ëxiger la représentation des duplicata de quittance d'imposition de 6 livres et au-dessous; mais l'Assemblée nationale les autorise à payer, dans la proportion désignée au précédent article, les rentiers qui seront indiqués comme nécessiteux par les certificats des municipalités ou dis-
tricts, des curés des paroisses ou des administra-tours des hôpitaux et maisons hospitalières.
r Art. 3. Les deniers comptants des dons patriotiques seront employés, autant qu'ils pourront suffire, au paiement des rentes et appoints au-dessous de 200 livres, et quant aux rentes de 200 livres jusqu'à 300 livres, si elles sont payées en assignats, les intérêts échus à ces billets, depuis le 15 avril dernier jusqu'au paiement', Seront rptenus par les payeurs qui en compteront sur la mention qui aura été faite d© ces retenues par eux et par leurs contrôleurs sur le registre de.leurs contrôles, dovnt les payeurs fourniront des états tous lës trois"iriois aux trésbners iâes dons patriotique. (Adopté.) '
, au nom $u corfiité d'aliénation des domaines nationaux, Mfcm rapport sur les moyens les plus propres à faciliter cette aliénation' et sur les ventes aux particuliers (1). a Messieurs, le décret que vous avez rendu le 14 du mpis^ernier» et lInstruction que vous y avez jointe le 31 ; du même mois, ont déterminé les fprmes et les conditions de la vente de 400 millions de domaines nationaux, que vous aviez ordonnée les 19 et 21 décembre ae l'année dernière, que vous avez destinés aux municipalités par votre décret du 17 mars, pour être ensuite revendus par elles à des acquéreurs particuliers, et sur laquelle vous avez hypothéqué les 400 millions d'assignats-monnaie créés par votre décret du 17 avril. Vous ayez, avec raison, borné à cette somme i'étendued'une opération utilepour donner une impulsion première, mais qui complique la vente et la rend moins profitable à la nation en général. Il ne reste donG à votre comité qu'à suivre les dispositions que vous avez prescrites, et il ne manquera ni de zèle ni d'activité pour en accélérer l'exécution : il peut vous annoncer que les soumissions des municipalités excèdent déjà de beaucoup les 400 millions, et bientôt il vous demandera vos ordres sur les dispositions que pette affluence vous mettra dans la nécessité d'ordonner.
Mais, depuis le 19 décembre, plusieurs de vos décrets ont remis effectivement dans les
mains de la nation l'universalité de ses domaines, et vous en avez confié la garde aux
administrations de départements et de districts, sans statuer encore sur l'usage que vous en
feriez. Vous jugerez certainement lpur conservation moins utile à JFBtat que leur aliénation
: outre* le grand avantage d'éteindre en intérêts annuels Une somme fort supérieure au revenu
des biens que vous vendrez, vous trouverez l'avantage plus'grand encore d'augmenter la masse
générale des richesses en substituant l'intérêt personnel,toujours plus actif et plus
industrieux, à l'administration commune qui ne peut jamais le remplacer, et celui, non moins
touchant pour vous, d'appeler lin grand nombre de citoyens à la propriété, par Les facilités
que vous donnerez aux acquéreurs, tant pour la forme que pour les époques des paiements, et
par; une telle subdivision des objets dans les ventes, que le pauvre même qui voudrait
acquérir une petite propriété, puisse parvenir avec une légère avance qu'il se procurera
facilement y s'il est connu dans SOU pays pour honnête^ et en trouvant ensuite dans le
produit de son travail, et dans les récoltes
Votre comité ppnse que toutes ces vues seront remplies en appliquant aux ventes directes que les administrations de département seront char-i gées de faire aux particuliers, les mêmes pondis tions que vous avez décrétées le 14 mai pour celles où les municipalités vous serviront d'intermér diaires. Il croit donc inutile de vous remettre: sous les yeux les motifs développés dans le rapport que M. Delley-d'Agier a eu l'honneur de Vous faire, et line vous présente aux dispositions de votre décret du 14 mai d'autres changements que ceux exigés pour 'les procédés plus1 simples de ventes plus directes.
La masse des biens à mettre à la fois en vente ne doit pas effrayer, parce que, d'après les règles prescrites, les enchères ne pourront s'ouvrir que lorsque des soumissions égales aux prix d'estimation vous assureront d'en obtenir la vraie valeur par la concurrence qui s'établipa entre les acheteurs, et parce que le nombre des acheteur^ sera nécessairement fort grand. En effet, i Messieurs, la cessation presque entière des emprunts publics, le rachat des droits féodaux, et les nom-r breux remboursements que vous ferez, vont rendre nécessaire le placement des capitaux considérables dont partie est aujourd'hui cachée, et partie occupée par l'agiotage qui, ; de toutes les , manières de,l'employer, est, sans doute, la plus nuisible à l'État. Et déjà votre comité peut vous annoncer que, indépendamment des soumissions envoyées par les municipalités, il. en reçoit journellement d'un grand nombre de particuliers dont plusieurs même offrent de payer au comptant, ou dans des termes plus courts que ceux fixés par votre décret du 14 mai ; l'instruction du 31 leur indique le taux de ces paiements accélérés.
Ce n'est pourtant pas une raison pour vous proposer dans ce décret-ci des époques plus rapprochées; vous voudrez conserver aux citoyens les moins aisés les moyens que vous leur avez offerts de devenir propriétaires, et voUs ne sacrifierez pas cette grande vue politique à l'appât de voir rentrer un peu plus tôt le prix de ces biens. Il tt'èn est pas des finances d'Un grand État comme d'une fortune particulière : le possesseur de cette dernière doit toujours accélérer sa libération, parce qu'il veut jouir pendant sa vie de l'aisance qu'elle lui procurera, parce qu'il veut laisser à ses enfants une succession libre dé chargés, et parce que la brièveté de Sa carrière ne lui permet pas ces opérations lentes, mais sûres, lorsqu'elles sont l'ouvrage d'une nation toujours vivànte, et qui ne craint pas, comme le particulier, que l'in? conduite ou la prodigalité de ses héritiers leur fassent abandonner les mesures sages et bien calculées qu'il aurait prises*
Mais vous n'aurez pas même de sacrifices à faire. Les facilités que vous donnerez augmenteT ront le nombre des acheteurs, feront porter les biens à des prix plus hauts, et ceux à qui vous vendrez dans les campagnes en portions divisées, seront plus empressés de s'acquitter, et devanceront,par leurs paiements, les époques convenues beaucoup plus que de gros capitalistes, qui, spéculant sur des profits étrangers à oeux de leurnour-velle propriété, s'arrangeront toujours pounn'avoir leurs fonds libres qu'aux époques prescrites.
Votre comité a pensé que pour ces nouvelles ventes au delà des quatre cents millions, qui sont l'hypothèque spéciale des assignats-monnaie, vous admettriez certains effets en concurrence avec l'argent et avec ces assignats ; car il ne pense
pas que vous preniez le parti qui vous sera peut-être proposé, comme il l'a été dans plusieurs écrits, d'augmenter la masse de ce papier-monnaie. Sa création a été une mesure nécessaire, et le succès l'a couronnée; mais en l'adoptant, vous avez senti qu'il fallait en déterminer l'étendue d'après les besoins de la circulation, et qu'une quantité trop grande de ce numéraire fictif la surchargerait : vous le maintiendrez donc dans les bornes que vous lui avez d'abord prescrites, et vous l'éteindrez à mesure de ses rentrées, sauf à créer dans la suite, si l'utilité en était démontrée, un autre papier libre et sans intérêt, pour suppléer au numéraire métallique, et faciliter les opérations du commerce, en lui offrant un agent plus commode.
Vous emploierez donc un autre moyen pour rembourser la partie exigible de la dette publique, et, dans cette partie, vous comprendrez sûrement les dîmes inféodées que vous avez abolies, les finances des offices de judicature et autres que vous allez supprimer, et les paiements arriérés que vous allez liquider. Vous trouverez sage d'opérer ces remboursements en effets dont la forme et le taux d'intérêt ne puissent pas prêter à l'agiotage; mais vous trouverez juste de leur attacher une qualité précieuse pour ceux qui les recevront, celle de pouvoir être convertis en propriétés foncières; vous remplirez à la fois votre double vœu, d'éteindre avantageusement pour la nation une partie considérable de sa dette, et de satisfaire, une classe de créanciers qui, privés de leur état par laRévolution, trouveront, dans l'acquisition de propriétés territoriales, un nouveau genre d'occupations, que les hommes fatigués des fonctions publiques embrassent presque toujours avec plaisir, parce qu'elles ramènent à la nature, qui a toujours des charmes pour ceux qui se livrent à son étude et à ses travaux.
Il est encore une autre classe de citoyens à qui vous présenterez sans doute ce moyen de consolation : ce sont les titulaires ecclésiastiques dont vous allez fixer le traitement. Plusieurs préféreront à la rente viagère que vous leur assignerez, un capital disponible ; et, en déterminant ce capital d'après les calculs bien connus aujourd'hui des rentes viagères, vous ferez encore une bonne opération pour l'État, et vous ferez aimer la Révolution par ceux mêmes pour qui elle se présentait sous un aspect affligeant.
Vous bornerez vraisemblablement à ces dispositions votre opération actuelle, laissant à d'autres combinaisons la libération de la partie non exigible de la dette publique; vous ne pourriez pas admettre tous les effets qui la constituent à ce mêmeconcours, et, si vous faisiez un choix, il donnerait lieu peut-être à des spéculations de hausse et de baisse qui n'ont que trop déshonoré nos places de commerce; mais ces motifs de prudence ne s'opposeraient pas à une exception, pour quelques années seulement, en faveur des bordereaux de celles des rentes viagères qui seront reconnues pour les plus onéreuses à l'État; un calcul dont les éléments sont assurés détermineraitles sommes pour lesquelles ils seraient reçus, et le temps pendant lequel vous pourriez les admettre. Plusieurs des porteurs de ces bordereaux seront tentés de réaliser en fonds de terre, et chacun de ces remboursements que vous opérerez sera pour la nation un profit très véritable.
Votre comité terminera ce rapport, déjà trop long .peut-être, en vous proposant d'autoriser les administrations ou directoires de départements à receyoir. directement, ainsi que lui, les soumissions
des particuliers, et à se faire seconder par les administrations ou directoires de districts, et à entretenir une correspondance exacte et régulière avec votre comité, pendant la durée de votre session, et ensuite avec les commissaires qui leur seront substitués par les législatures, afin que la suite et les détails de cette grande et salutaire opération soient toujours sous les yeux des représentants de la nation.
Votre comité a donc l'honneur de vous proposer le décret suivant :
Projet de décret sur la vente des domaines nationaux aux particuliers.
L'Assemblée nationale, considérant que l'aliénation des domaines dans la propriété desquels la nation est rentrée, est le meilleur moyen d'éteindre une grande partie de la dette publique, d'animer l'agriculture et l'industrie, et de procurer l'accroissement de la masse générale des richesses par la division de ces biens nationaux en propriétés particulières toujours mieux administrées, et par les facilités qu'elle donne à beaucoup de citoyens de devenir propriétaires, a décrété et décrète ce qui suit :
Art. 1er Tous les domaines nationaux dont la jouissance n'aura
pas été réservée au roi; ou la conservation ordonnée par l'Assemblée nationale, pourront être
aliénés en vertu du présent décret et conformément à ses dispositions.
Art.2. Toutes les personnes qui voudront acquérir des domaines nationaux, pourront s'adresser, soit au comité de l'Assemblée nationale chargé de leur aliénation, soit à l'administration ou au directoire du département, soit même à l'administration ou au directoire du district, dans lesquels ces biens sont situés, l'Assemblée nationale réservant au département toute surveillance et toute correspondance directe avec le comité.
Art. 3. Les municipalités qui enverraient des soumissions pour'quelques objets déjà demandés par des particuliers, n'auront point droit à être préférées. Le comité enregistrera toutes les demandes des municipalités suivant l'ordre de date de leurs délibérations authentiques, et celles des particuliers suivant la date de leur réception, et il en enverra des expéditions, certifiées par un de ses secrétaires, à l'administration ou au directoire du département dans lequel ces objets sont situés.
Art. 4. Les administrations de départements formeront un état de tous les domaines nationaux, situés dans leur territoire, et procéderont incessamment à leur estimation dans les formes prescrites par les articles 3, 4, 7 et 8 du titre premier du décret du 14 mai ci-dessus mentionné.
Art. 5. Elles commenceront ces estimations par les lieux où sont situés les biens sur lesquels le comité leur aura renvoyé des soumissions, soit de municipalités, soit de particuliers, ou sur lesquels elles en auraient reçu directement, et continueront ensuite à faire estimer ceux-mêmes de ces biens pour lesquels il n'aurait été fait aucune soumission.
Art. 6. Elles auront soin, dans les estimations, de diviser les objets autant que leur nature le permettra, afin de faciliter, autant qu'il sera possible, les petites soumissions et l'accroissement du nombre des propriétaires.
Art. 7. Les administrations ou directoires de départements chargeront des experts, ou gens à ce connaissant, des estimations pour lesquelles | il sera nécessaire d'en employer, et elles com-
mettront pour surveiller ce travail, les administrations ou directoires de districts.
Art. 8. Les prix d'estimation seront déterminés d'après les dispositions des articles 3, 4,7 et 8tdu titre Ier du décret du 14 mai, ci-dessus mentionné, et serviront de base aux soumissions et aux enchères.
Art. 9. Les soumissions devront être au moins égales au prix de l'estimation, et les enchères ne seront ouvertes que lorsqu'il y aura de telles soumissions ; mais alors elles le seront nécessairement, et l'on y procédera dans les délais, dans les formes et aux conditions prescrites par les articles 1, 2, 3, 4, 5, 6, 8 et 9 du titre III du décret du 14 mai, et par l'instruction du 31 du même mois.
Art. 10. Les acquéreurs des domaines nationaux seront tenus de se conformer, pour les baux actuels de ces biens, aux dispositions de l'article 9 du titre I*r du décret du 14 mai, et aux conditions de jouissances prescrites par l'instruction du 31 du même mois, au maintien desquelles les administrations de départements et de districts, ou leurs directoires, tiendront exactement la main.
Art. 11. Les acquéreurs jouiront des franchises accordées par les articles 1 et 8 du titre Ier du décret du 14 mai, et aussi de celles accordées par l'article 11 du titre III; mais pour ces dernières, pendant l'espace de 12 années seulement, à compter du jour de la publication du présent décret.
Art. 12. Les administrations de départements ou leurs directoires adresseront le 15 de chaque mois, au comité chargé de l'aliénation des domaines nationaux pendant la présente session de l'Assemblée nationale, et, par la suite, aux commissaires qui leur seront désignés par les législatures, un état des estimations qu'elles auront fait faire et un état des ventes qui auront été commencées ou consommées dans le mois précédent, pour le tout être rendu public par la voie de l'impression.
Art. 13. Les acquéreurs feront leurs paiements aux termes convenus, soit dans la caisse de l'Extraordinaire, soit dans celles de département ou de district, qui seront chargées d'en compter au receveur de l'Extraordinaire.
Art. 14. Les paiements seront reçus en argent ou en assignats-monnaie, et dans les effets qui seront incessamment désignés par l'Assemblée nationale ; et ces divers papiers, à mesure de leur versement dans la caisse de l'Extraordinaire, seront brûlés dans les formes qui ont été ou qui seront prescrites, et par devant les commissaires qui ont été ou qui seront désignés par l'Assemblée nationale, ou par les législatures qui la suivront.
Art. 15. Les municipalités qui voudraient acquérir quelques parties de domaines nationaux pour des objets d'utilité publique, seront tenues de se pourvoir dans les formes prescrites par le décret du 14 décembre 1789, pour obtenir l'autorisation nécessaire, et seront ensuite considérées comme acquéreurs particuliers.
Art. 16. Les articles ci-annexés du décret du 14 mai et de l'instruction du 31 du même mois sur la vente de 400 millions de domaines nationaux, avec le changement des seules expressions nécessaires pour les adapter aux dispositions ci-dessus, seront censées faire partie du présent décret.
Articles du décret du 14 mai 1790, sur la vente de quatre cents millions des domaines nationaux. (Les mots changés sont en caractère italique.)
TITRE PREMIER.
Art. 2. Les particuliers qui voudront acquérir directement des domaines nationaux pourront faire leurs offres au comité, qui les renverra aux administrations ou directoires de département, pour en constater la véritable valeur, et les mettre en vente conformément au règlement qui sera incessamment donné à cet effet.
Art. 3. Le prix capital des objets portés dans les demandes sera fixé d'après le revenu net, effectif ou arbitré, mais à des deniers différents, selon l'espèce de biens actuellement en vente, qui, à cet effet, seront rangés en quatre classes.
lre classe. Les biens ruraux consistant en terres labourables,
prés, vignes, pâtis, marais salants, et les bois, bâtiments et autres objets attachés aux
fermes et métairies, et qui servent à leur exploitation.
2e classe. Les rentes et prestations en nature de toute espèce, et les droits casuels auxquels sont sujets les biens grevés de ces rentes ou prestations.
3e classe. Les rentes et prestations en argent, et les droits casuels dont sont chargés les biens sur lesquels ces rentes ou prestations sont dues.
La quatrième classe sera formée de toutes les autres espèces de biens, à l'exception des bois non compris dans la^ première classe, sur lesquels il sera statué par une loi particulière.
Art. 4. L'estimation du revenu des trois premières classes de biens sera fixée d'après les baux à ferme existants, passés ou reconnus par devant notaire, et certifiés véritables par Je serment des fermiers devant le directoire du district; et à défaut de bail de cette nature, elle sera faite d'après un rapport d'experts sous l'inspection du même directoire, déduction faite de toutes les impositions dues à raison de la propriété.
Les particuliers qui voudront acquérir seront obligés d'offrir, pour prix capital des trois pre^-mières classes, un certain nombre de fois le revenu net, d'après les proportions suivantes : Pour les biens de la première classe, vingt-deux fois le revenu net ; Pour ceux de la deuxième, vingt fois; Pour ceux de la troisième, quinze fois. Le prix des biens de la quatrième classe sera fixé d'après une estimation.
Art. 7. Les biens vendus seront francs de toutes rentes, redevances ou prestations foncières, comme aussi de tous droits de mutation, tels que quint et requint, lods et ventes, reliefs, et généralement de tous les droits seigneuriaux ou fonciers, soit fixes ou casuels, qui ont été déclarés rachetables par les décrets des 4 août 1789 et 15 mars 1790, la nation demeurant chargée du rachat desdits droits, suivant les règles prescrites, dans les cas déterminés par les décrets du 3 de ce mois : le rachat sera fait des premiers deniers provenant des reventes.
Art. 8. Seront pareillement lesdits biens affranchis de toutes dettes, rentes constituées, et hypothèques,conformément aux décrets des 15 et ; 16 avril 1790.
Dans le cas où il serait formé des oppositions, elles sont, dès à présent, déclarées nulles et
comme non-avenues, sans qu'il soit besoin que les acquéreurs obtiennent de jugement.
Art. 9. Les baux à ferme ou à loyer desdits biens qui ont été faits légitimement, et qui auront une date certaine et authentique, antérieure au 2 novembre 1789, seront exécutés selon leur forme et teneur, sang que les acquéreurs puissent expulser les fermiers, même sous l'offre des indemnités de droit et d'usage.
TITRE III.
Art. 1er. Le quinze de chaque mois, les administrations ou
directoires de département fieront afficher, dans tous les lieux accoutumés de leur
territoire, et notamment dans ceux où les biens sont situés, et dans les villes ou bourgs
chefs-lieux de district, l'état des biens qu'elles auront fait estimer dans le mois
précédent, avec énonciation du prix de l'estimation de chaque objet, et elles férçnt déposer
des exemplaires de ces états aux hôtels communs desdits lieux, pour que chacun puisse en
prendre communication ou copie, sans frais.
Art. 2. Aussitôt qu'il sera fait une offre au moins égale au prix de l'estimation, pour totalité ou partie des biens situés dans un département, l'administration dù département, ou son directoire, sera tenu de l'annoncer par des affiches dans tous les lieux où l'état des biens aura été ou dû être envoyé, et d'indiquer le lieu, le jour et l'heure auxquels les enchères seront reçues.
Art. 3. Lés adjudications seront faites dans le chef-lieu, et par devant le directoire du district de la situation des biens, à la diligence du procureur général syndic, ou d'un fondé de pouvoirs de l'administration de département, et en présence de deux commissaires de la municipalité dans le territoire de laquelle les biens sont situés; lesquels commissaires signeront les pro-cès-verbaux d'enchères et d'adjudication, avec les officiers du directoire et les parties intéressées, sans que l'absence desdits commissaires dûment avertis, de laquelle sera fait mention dans le procès-verbal, puisse arrêter l'adjudication.
Art. 4. Les enchères seront reçues publiquement; il y aura quinze jours d'intervalle entre la première et la seconde publication; et il sera procédé un mois après la seconde à l'adjudication définitive, au plus offrant et dernier enchérisseur, sans qu'il puisse y avoir ouverture, ni au tiercement, ni au doublement, ni au triplement. Les jours seront indiqués par des affiches où le montant de la dernière enchère sera mentionné.
Art. 5. Pour appeler à la propriété un plus grand nombre de citoyens, en donnant plus de facilité aux acquéreurs, les payements seront divisés en plusieurs termes.
La quotité du premier paiement sera réglée en raison de la nature des biens, plus ou moins susceptibles de dégradation.
Dans la quinzaine de l'adjudication, les acquéreurs des bois, des moulins, et des usines paieront 30 0/0 du prix de l'acquisition, à la caisse de l'Extraordinaire;
Ceux des maisons, des étangs, des fonds morts et des emplacements vacants dans les villes, 20 0/0 ;
Ceux des terres labourables, des prairies, des vignes et des bâtiments servant à leur exploitation, et des biens de la seconde et de la troisième classe, 12 0/0. Dans le cas où des biens de ces diverses na-
tures seront réunis, il en sera fait ventilation pour déterminer la somme du premier payement.
Le surplus sera divisé en douze annuités égales,, payables en 12 ans, d'année en année, et dans lesquelles sera compris l'intêrêt du capital à 5 0/0, sans retenue.
Pourront néanmoins les acquéreurs accélérer leur libération par des payements plus considérables et plus rapprochés, ou même se libérer entièrement, à quelque échéance que ce soit.
Les acquéreurs n'entreront en possession réelle qu'après avoir effectué le premier payement.
Art. 6. Les enchères seront en même temps ouvertes sur l'ensemble ou sur les parties de l'objet compris en une seule et même estimationet si, au moment de l'adjudication définitive, la somme des enchères partielles égale l'enchère faite sur la masse, les biens seront de préférence adjugés divisément.
Art, 8. A défaut de payement du premier a compte ou d'une annuité échue, il sera fait, dans le mois, à la diligence du procureur général syndic, sommation au débiteur d'effectuer son payement, avec les intérêts du jour de l'échéance; si ce dernier n'y a pas satisfait deux mois après ladite sommation, il sera procédé, sans délai, à une adjudication nouvelle, à sa folle enchère, dans les formes prescrites par les articles 3 et 4,
Art. 9. Le procureur général syndic de l'administration de département poursuivante se portera premier enchérisseur pour une somme égaie au prix de l'estimation, ou pour la valeur de ce qui restera dû, si cette valeur est inférieure aux prix de l'estimation ; il sera prélevé sur le prix dè la nouvelle adjudication le montant de ce qui se trouvera échu, avec les intérêts et les frais, et l'adjudicataire sera tenu d'acquitter, au lieu et place de l'acquéreur dépossédé, toutes les annuî^ tés à échoir.
Art. 11. Il ne sera perçu, pendant le cours de douze années,' pour aucune acquisition, adjudication, vente, subrogation, revente, cession et rétrocession de domaines nationaux, même pour les actes d'emprunts, obligations, quittances et autres frais relatifs auxdites translations de propriété, aucun autre droit que celui de contrôle, qui sera fixé à 15 sols.
Articles de l'instruction décrétée le
TITRE III.
Les adjudications définitives seront faites à la chaleur des enchères et à l'extinction des feux* On entend par feux, en matière d'adjudication, de petites bougies qu'on allume pendant les en-Chères, et qui doivent durer chacune au moins un demi-quart d'heure.
L'adjudication prononcée sur la dernière des enchères faites avant l'extinction d'un feu, sera seulement provisoire, et ne sera définitive que lorsqu'un dernier feu aura été allumé, et sera éteint sans que, pendant sa durée, il ait été fait aucune autre enchère.
Les départements et districts sont spécialement chargés de veiller à ce que les acquéreurs, jusqu'à leur entier acquittement, jouissent en bons pères de famille, des bois, étangs ou usines qu'ils auraient acquis, et n'y causent aucune dégradation.
consulte rassemblée qui ouvre immédiatement la discussion sur le projet de décret.
, évêque d?Au-tun (1). Messieurs, de tous les articles du projet de déGret que vient de vous présenter M. le duc de La Rochefoucauld, un seul m'a paru susceptible de modifications. Je vais avoir l'honneur de vous les soumettre, et je dois me hâter de vous observer qu'elles ne détruisent en rien l'ensemble du plan de M. le rapporteur.
Les dispositions de l'article auquel je m'attache sont parfaitement isolées, et cette seule considération m'a pu permettre de suspendre un instant une partie d'un décret aussi sagement combiné.
L'article 14 est conçu ainsi » « Les payements seront reous en argent ou assignats-monnaie, ou dans les effets qui seront incessamment désignés par l'Assemblée nationale; et ces divers papiers, a mesure de leur versement dans la caisse de l'Extraordinaire, seront brûlés dans les formes qui ont été ou qui seront prescrites par devant les commissaires qui ont été ou qui seront désignés par l'Assemblée nationale, ou par les législatures qui la suivront. »
Vous voyez, Messieurs, que cet article restreint à certains papiers ou effets publics la facultéd'être donnés en payements de domaines nationaux, et qu'il restera encore à l'Assemblée le soin embarrassant de faire le choix de ces papiers. J'ai craint que ce choix ne compromit l'Assemblée nationale qui doit une égale faveur à tous les créanciers publics ; j'ai craint qu'il ne s'établît, sur ce choix exclusif, des spéculations et des combinaisons qui pouvaient devenir dangereuses ; et tenant toujours aux principes que j'ai eu l'honneur de vous développer au mois d'octobre dernier, je renouvelle la proposition que je vous ai faite à cette époque, d'étendre cette faculté à tous les créanciers publics.
Avant de vous faire lecture des articles qu'il conviendrait de substituer, dans ce système,
à l'article 14 du comité, permettez-moi de vous développer les principaux motifs de cette
importante opération. Le principe en est simple et de rigueur. Les biens du débiteur sont la
propriété du créancier jusqu'à concurrence de ses créances. Les créanciers ont droit, lorsque
le débiteur aliène ses propriétés, d'exiger leur remboursement suivant la date de leurs
créances. Les biens ecclésiastiques et domaniaux étant devenus la propriété de la nation,
tous ses créanciers ont donc le droit d'en réclamer la portion représentative de leurs
créances, puisqu'il est à la fois possible et utile à la nation de les rembourser. Je dis
qu'il y ont tout droit, parce qu'il serait impossible de suivre le principe à la rigueur, et
de rembourser les créanciers de l'Etat suivant l'ancienneté de leur hypothèque; mais si l'on
ne peut favoriser exclusivement les dettes plus anciennes, du moins ne doit-on pas réserver
exclusivement les faveurs pour les dettes plus récentes, et d'autant que la dette constituée
mérite d'autant plus d'égards, qu'elle a été exigible aussi, et qu'elle a été depuis, pour la
plus grande partie, réduite à moitié des capitaux et des intérêts.
Progrès et perfection de l'agriculture.
Qui peut douter qu'il ne soit très-avantageux pour ragriculture que les campagnes soient le plus possible habitées par des propriétaires aisés? Et lorsque les administrateurs doivent être pris dan a les campagnes n'est-ce pas un nouveau motif pour y répandre des hommes à qui leur aisance et leur éducation auront donné du goût pour l'étude, de l'aptitude au travail et des lumières à répandre ? etc. etc. etc.
Economie dans l'administration.
On ne peut le dissimuler ; l'administration des domaines nationaux peut devenir un objet de sollicitude pour les départements et les districts. Des administrateurs publics fréquemment renouvelés pourront-ils bien se livrer aux soins importants et multipliés de l'administration, de l'entretien et de 1a. vente de tous ces biens, sans que ce soit au détriment de leurs autres deyoirs ? Je ne veux pas parler du danger du mélange de l'intérêt personnel avec les fonctions publiques ; mais je parle des dangers de la négligence èt du défaut de cette surveillance active et immédiate qui, même dans le propriétaire résidant et intéressé, ne lui garantit pas toujours des produits mesurés sur ses soins et ses avances.
Il y a, Messieurs, une observation essentielle à vous faire.
Les frais d'entretien et de menues réparations des 400 millions de biens nationaux que vous avez aliénés aux municipalités, seront acquittés par un bénéfice sur le produit des reventes, et même surle produit des fermages, et vous pouvez n'avoir plus d'inquiétude à cet égard ; mais vous n'avez pas encore adopté de plan général sur le moyen de pourvoir à ces frais de régie, d'entretien et de réparations pour le surplus des domaines nationaux. Je crois cet objet d'une grande importance, et surtout très propre à concourir au succès du moyen que je vous propose pour donner plus de rapidité à l'aliénation de ces biens.
Bénéfice pour le Trésor public.
Je vous prie de considérer que les domaines nationaux, tant qu'ils resteront dans la propriété collective de la nàtion, priveront le Trésor public du produit des droits de contrôle, de centième denier et autres droits qu'ils lui rendront lorsqu'ils seront livrés au commerce des ventes et aux chances des héritages. Je crois, Messieurs, que, par ce moyen, les domaines nationaux se vendront facilement au denier trente : ainsi, des domaines produisant dix millions, pourront être vendus trois cents millions fqui auront libéré la nation de quinze millions de rentes perpétuelles, ou de trente millions au moins de rentes viagères.
Ce bénéfice énorme devient encore plus sensible vis-à-vis des créanciers étrangers. Ainsi, au lieu de cinq millions, ou de dix millions en viager que leur envoyaient les payeurs des rentes et les banquiers, leurs fermiers ne leur en enverraient que trois,en supposant même que l'attrait de la propriété, réuni aux bienfaits de nptre Constitution, ne les invitât pas à profiter de la liberté qu'ils ont déjà de venir s'établir parmi nous, et n'augmentât pas ainsi la fortune publique de leur fortune et de leur industrie.
La nation n'établira aucun impôt sur les rentes publiques. Les créanciers étrangers ne sont pas même atteints par les impôts sur les consommations ou les impôts indirects, tandis que les domaines qu'ils acquerraient seraient soumis à l'impôt. Ainsi, d'une part, il en coûte des frais à la nation pour la perception de l'im-
pour la perception de l'impôt représentatif de la dette, et pour le paiement de la dette même ; de l'autre, il lui en coûtera beaucoup pour l'entretien et l'administration de ces propriétés, tandis que,dans ce mode de vente, la dimininution de la dette soulagerait à la fois la nation des frais d'administration de ses biens, de ses dettes, de ses impôts ; et, par le simple calcul de ces bénéfices, assurerait d'autant plus le gage des écclésiastiques et de tous les autres fonctionnaires publics.
Restauration du crédit public.
Le renaissance du crédit public doit aussi être accélérée par l'opération que je propose. Tant que l'intérêt de l'argent sera à un taux immodéré, l'agriculture et le commerce seront dans un état de langueur et d'inertie. La nation, dans les événements violents ou imprévus, sera condamnée encore à des emprunts onéreux , car il est simple que le propriétaire de l'argent en exige un intérêt considérable, alors que l'avilissement des créances sur l'Etat lui présente sans cesse l'occasion de placer son argent à six, sept, huit pour cent. Tout se tient dans l'économie politique. Dès le moment où Je placement d'un capital, même à constitution de rente, ne pourra produire que quatre pour cent d'intérêt, l'agriculture et le commerceemprunteront àtrois pour cent avec facilité. La faculté accordée aux créanciers de l'Etat, d'échanger leurs contrats ou autres effets productifs d'intérêt, contre des biens-fonds nationaux, doit rapidement amener ce résultat, parce qu'elle doit évidemment rétablir au pair le prix de la dette publique, attendu que les habitants des provinces qui voudront acquérir des biens nationaux, et qui ne seraient pas propriétaires de rentes ou d'offices à donner en payement, se hâteraient d'en acquérir pour profiter de la perte énorme que la plupart de ces effets éprouvent aujourd'hui ; et cette concurrence d'acheteurs relèvera en peu de temps la valeur des effets publics. Et remarquez, Messieurs, que la perte éprouvée par les créanciers de l'Etat ne tourne jamais au profit de la nation, mais qu'au contraire elle constate et prolonge son discrédit, soutient l'élévation de l'intérêt de l'argent entre particuliers, et condamne l'Etat, dans ces moments de crise, à subir, pour se procurer des ressources, une cherté exagérée.
Je comprends, Messieurs, parmi les créanciers publics pour lesquels je crois utile d'accorder la faculté d'acquérir des domaines nationaux, les rentiers viagers, et j'y trouve un double avantage. Il n'est personne aujourd'hui qui ne sache
que ces rentes, malgré le bénéfice des extinctions, coûtent à l'Etat beaucoup plus cher que nos rentes perpétuelles les plus onéreuses. Il en résulte que l'Etat tirerait le plus grand avantage de la restitution des capitaux empruntés sous cette forme, et en même temps le rentier viager, qui regretterait l'aliénation de son capital, trouverait l'agrément inespéré d'en faire un placement plus conforme à ses vues.
Dédommagement pour le clergé.
Je compte pour beaucoup, parmi les avantages de la grande opération que vous présente votre comité, le dédommagement qu'elle présente aux possesseurs d'offices de magistrature et autres, et surtout au clergé. Cet article mérite toute votre attention. M. de La Rochefoucauld l'a très bien indiqué dans son rapport ; mais il n'en est pas question dans les articles de son décret.
Les charges de magistrature, de finance et de police, tant à Paris que dans les provinces, étant supprimés, vont exiger des remboursements. Dans l'impossibilité de pourvoir à tous à la fois, les titulaires perdront et l'exercice de leurs fonctions, et la jouissance de leurs capitaux. Les remboursements qu'ils pourront se procurer en acquérant des biens nationaux, leur procure la double satisfaction d'être liquidés, et d'acquérir' des propriétés agréables autant qu'utiles, et donneront en même temps à 'la Constitution des partisans que l'intérêt personnel en éloigne.
Cette vérité se fait encore mieux sentir à gard du clergé. On doit regarder comme rente viagère disponible la partie du traitement qui sera fait aux ecclésiastiques, à titre d indemnité. Indépendamment de la dotation que vous leur attribuerez à raison de leurs fonctions, vous trouverez juste sans doute d'ajouter un excédent de traitement à ceux d'entre eux qui aujourd'hui et depuis longtemps jouissent d'un revenu plus considérable, en raison du produit actuel de leurs bénéfices. C'est, Messieurs, cet excédent de traitement, susceptible d'être considéré comme une sorte de pension ou rente viagère, auquel il serait convenable d'étendre la même faculté que vous accorderez aux autres créanciers de l'Etat.
Ce procédé utile aux finances me semble en outre propre à consoler ces ecclésiastiques sous divers rapports : et les consoler, c'est les attacher à la Constitution. N'est-ce pas en effet une consolation très réelle de voir convertir une jouissance isolée et fugitive en une propriété solide et transmissible, de pouvoir se dire à soi-même : le bienfait que j'avais reçu était à moi seul, et pendant ma vie seule ; celui que je reçois aujourd'hui est moins étendu, mais je puis en disposer en faveur de ma famille, de mes amis, en faveur de mes créanciers. L'époque de mes privations est celle du bonheur et de la fortune de ceux à qui je ne devais laisser que le souvenir stérile de mes revenus.
En effet, Messieurs, l'intérêt personnel peut bien désapprouver, dans ses regrets, des pertes ou des malheurs nécessaires ; mais il n'est personne dont la pensée, une fois affranchie de l'in-iluence de l'égoïsme, ne bénisse la plus heureuse Constitution, et ne soit pénétré de reconnaissance et de respect. Et c'est une occasion bien îrécieuse à saisir que de faire à la fois une chose juste envers les citoyens et utile pour l'administration.
Avant de me déterminer à revenir sur le sys-
tème que j'ai eu l'honneur de vous exposer, tendant à établir que tous les créanciers de l'Etat ont des droits égaux, sous des conditions différentes, et que leurs titres sont également sacrés, je n'ai cessé de chercher s'il existe d'autres moyens de rétablir le crédit, et de diminuer la dette publique.
Se servirait-on de la ressource des assignats pour faire des remboursements? En créerait-on sur-le-champ pour deux ou trois milliards, ou en créerait-on annuellement une quantité déterminée ? La première opération est impossible, et, j'oserais dire, absurde. La seconde entraînerait une foule de difficultés et de dangers. D'abord, quelle classe de créanciers préférer? si tous ont les mêmes droits, comme on ne peut en douter; si presque toutes les rentes créées ont été stipulées remboursables, telles que celles de la compagnie des Indes, les emprunts nommés d'Alsace, de la quatrième loterie royale, de cinquante millions, d'annuités, des actions des fermes, les rentes créées parles pays d'Etats, par le clergé, etc.; si toutes ces rentes sont remboursables ; si la mauvaise foi et l'impéritie des ministres ont réduit arbitrairement les valeurs des créances, ou suspendu leurs produits, comment faire une juste et impartiale application de la faculté de remboursement, et comment surtout éviter l'avilissement des créances qui seraient dédaignées, et par suite l'avilissement du crédit public? Ce qu'il importe, Messieurs, c'est démultiplier le plus possible les moyens d'acquérir les domaines nationaux, de les vendre le plus avantageusement pour la nation, de peupler les campagnes de propriétaires riches en lumières et en fortune, et susceptibles, sous ce double rapport, de perfectionner l'agriculture, d'occuper et d'instruire les habitants pauvres. Ce qu'il importe surtout aujourd'hui, c'est de diminuer l'intérêt de l'argent, de restaurer le crédit national, et enfin de conquérir même, par leur intérêt personnel, le plus grand nombre de citoyens possible à la Révolution.
C'est ce que je crois devoir résulter des articles que je vous propose de substituer à l'article 14 du projet de décret de votre comité. Quant aux autres articles de ce projet, je crois qu'ils doivent être tous adoptés sur-le-champ ; et je demande seulement que l'article 14 soit renvoyé à votre comité, pour qu'il vous rende compte de ceux que je propose d'y substituer.
Art. l*r. Lors de la vente et adjudication de3 domaines nationaux suivant les règles et procédés ci-dessus, les adjudicataires seront admis à payer le montant de leur adjudication, en donnant quittance du capital de rentes ou créances sur l'Etat, liquides et productives d'intérêts, et seront tenus tous les créanciers acquéreurs de fournir en paiement 25 pour cent en assignats.
Art. 2. Ce capital sera à raison du denier vingt pour les rentes et intérêts payés à l'hôtel de ville de Paris et au Trésor royal, et par telles autres caisses publiques.
Art. 3. Les quittances de remboursement des rentes viagères seront également reçues pour comptant ; et il sera fait un tarif pour déterminer le capital de chacune de ces rentes sur une ou plusieurs têtes, en raison de l'âge des rentiers.
Art. 4. Les traitements qui seront alloués à des ecclésiastiques, au delà de la somme afférente à leurs fonctions, participeront à la faculté accordée ci-dessus aux rentes viagères.
Art. 5. Ceux qui ont des expectatives de places
ecclésiastiques, tels aue les coadjuteurs, coadju-trices ou chanoinesses, pourvus de brevets d'adjonction, connus dans les chapitres sous le nom de Nièces, seront admis à l'évaluation de cette expectative dans un capital dont létaux éventuel sera incessamment déterminé, en partant des principes d'après lesquels la valeur des rentes sur deux têtes aura été fixée.
Art. 6. Si les personnes sur la tête desquelles auraient été assises lesdites rentes viagères, ou traitements ecclésiastiques ainsi fournis en payement, venaient à décéder dans les six mois nui suivraient leur adjudication, elle serait nulle: les biens rentreraient dans la propriété de la nation, et il serait seulement tenu compte à leurs héritiers des arrérages de rentes, ou traitements dont elles auraient joui, si elles n'eussent pas fait leur acquisition, et donné quittance de remboursement de leurs rentes.
Art. 7. Les finances d'offices de judicature, militaires ou de finances, qui sont ou seront supprimés, participeront à la faculté présentement accordée aux créances liquides sur l'Etat, et ce à mesure de la liquidation qui en sera faite, et à raison des sommes capitales pour lesquelles elles seront liquidées.
Art. 8. Outre la quittance de remboursement du capital, il sera donné par les créanciers publics qui profiteront de la faculté accordée par le présent décret, quittance du semestre des arrérages ou intérêts de leurs créances, courants lors de leur acquisition.
Art. 9. Ces quittances seront revêtues des certificats et des formalités usitées ci-devant pour les remboursements réels faits parle roi, et elles ne seront reçues en payement qu'autant qu'il ne se trouvera pas d'opposition sur le propriétaire, au paiement des arrérages ou au remboursement du capital.
Art. 10. Lors de l'adjudication ou du contrat de vente, les acquéreurs seront tenus de déclarer s'ils entendent payer en quittances de remboursement de créances publiques, et dans ce cas ils ne pourront profiler des délais pour le payement qui auraient pu être accordés comme condition de l'enchère ; mais ils seront tenus de justifier dans les trois mois, du jour de leur adjudication de la quittance qu'ils auront donnée de leurs créances publiques, et la régie et administration des domaines nationaux sera, pendant ces trois mois, réservée aux administrations de département et de district, sauf le compte des fruits, du jour de l'adjudication.
(On applaudit; on demande l'impression du discours et des articles.)
Pour ménager une ressource à la classe indigente de la société, l'Assemblée nationale pourrait réserver à sa disposition les portions des biens nationaux qui, n'étant d'aucun revenu actuel, ne seraient portées pour aucune estimation dans la vente qui serait faite des biens dont elles font partie, tels que les landes et les marais. Celte reserve étant faite en ce moment, le mode le meilleur de rendre ces biens plus utiles à la classe indigente, soit par la propriété, soit par le travail, serait en son temps soumis à la Délibération de l'Assemblée.
(L'Assemblée renvoie au comité chargé de l'aliénation des domaines nationaux les articles proposés par M. l'évêque d'Autun et l'observation de M. de Liaucourt ; elle ordonne en même temps l'impression du discours de M. l'évêque d'Autun et des articles qui le terminent.)
, au nom du comité militaire. Le comité militaire m'a chargé de faire le rapport que vous lui avez demandé sur le ré; giment de Royal-la-Marine. Ge régiment, trompé sur vos décrets, a pensé qu'en établissant lui-même son régime et son organisation, il usait de ]a liberté que vous avez rendue à tous les Français ; mais il a oublié que la lpi ne peut être faite que par des législateurs : il n'a pas senti que toute loi non abrogée doit être exécutée, et il a pris une délibération contraire aux, ordonnances» Il a cela de particulier dans sa détermination, qu'en arrêtant de se séparer de ses chefs et de ses officiers, en leur laissant vingt-quatre heures pour se retirer» le régiment Royal-la-Marine, après avoir donné des éloges à leur conduite, les recommande aux soins et à l'intérêt des représentants de la nation. Les officiers municipaux delà vilie de Lambesc ont inutilement essayé de persuader à ce régiment qu'il était trompé, et qu'il était de son honneur et de son intérêt de rentrer dans l'ordre. — Le comité militaire propose que M. le président fasse connaître aux officiers municipaux de Lambesc la satifac-tion que l'Assemblée a éprouvée dé leur conduite» et qu'il écrive au régiment de Royal-la-Marine,pour lui dire de maintenir tous les degrés de subordination, et que la députation à la fédération qui aura lieu le 14 juillet ne sera pas reçue, si ce régiment n'est rentré dans le devoir*
met aux voix le projet de décret du comité militaire qui est adopté en ces termes :
« L'Assemblée nationale décrète que M. le président fera connaître à M. le maire et aux officiers municipaux de la ville de Lambesc la satisfaction de l'Assemblée nationale sur la conduite sage et mesurée qu'ils ont tenue dans la situation pénible où ils se sont trouvés, relativement aux troubles qui ont eu lieu dans la cité;
• Ën outre, que le président écrira au régiment Royal-la-Marine pour lui prescrire de rentrer dans le devoir, et de maintenir tous les degrés de la subordination, et que la députation de ce régiment ne pourrait être reçue à la fédération nationale, s'il n'était pas composé à cette époque suivant les principes des ordonnances. »
(La séance est levée à trois heures, et indiquée au lendemain* neuf beuresr du matin.)
Séance du
La séance est ouverte à 9 heures du matin.
, eto-prêsidetiti occupe le fauteuil en l'absence de M. l'abbé Sieyês, président en fonctions.
, secrétaire, doarié lecture du procès-verbal de la séanoe du samedi 12 de ce mois, au soir.
Il ne se produit aucune réclamation.
donne lecture de la lettre suivante de M. Auguste, artiste de Paris i
Paris, le
« Monsieur le président.
« L'Assemblée nationale a entendu hier le rapport d*une proposition que j'ai faite sur les cloches qui seront supprimées* Ge serait; sans doute, un bien respectable emploi à faire de celle qui sera décomposée la première* que d'en consacrer la matière a un buste.du roi. Faite dans le principe pour rappeler à des chrétiens leurs devoirs, sous cette nouvelle ferme elle pénétrerait les citoyens des leurs, et cette destination serait encore sacrée. Ge bust,e que, comme artiste, j'ambitionne d'exécuter à mes frais, pourra être prêt, si l'Assemblée nationale tait à mon idée l'honneur de l'accueillir, pour la fédération du 14 juillet prochain. L'image d'un roi» ami des lois, placée dans un aussi grand jour sur l'autel de la patrie, y recevrait, en présence du Dieu des armées, les serments du patriotisme; auxquels se confondraient les vœux de la piété : ces deux passions énergiques et pures qui agrandissent l'homme et le soutiennent. Après la fête* mêlé à mes frères d'armes, je m'empresserais d'élever cette image chérie sur le pavois de la liberté pour la porter au temple de la nation, où elle resterait déposée ; et désormais le meilleur des pères serait présent àux yeux de ses enfanté aussi sodvent qu il a mérité de l'être à leurs cœurs.
« J'ose donc vous supplier, Monsieur le Président, de soumettre à I'Assemolée nationale ce vœu d'un artiste, soldat-citoyen, qui n'attend que ses ordres pour se livrer sans retard à un travail cher à son cœur, et d'autant mieux fait pour élever son âme, qu'elle aura daigné en agréer l'hommage.
« Je suis, avec un profond respect*
« Monsieur le Président, « Votre três-humblè et très-obéissant serviteur, « Auguste. »
Cette demande doit être accueillie; Louis XVI est toujours dans nos cœurs, mais il ne sera pas inutile de l'offrir à nos regards. Pour un semblable ouvrage, il faut un artiste parfait; et je demande que M. Moëte, membre de l'Académie de sculpture, qui le premier a donné l'exemple des expropriations volontaires, soit chargé de faire le modèle;
Il serait bien injuste de refuser à M. Auguste, qui a fait la proposition, le plaisir de l'accomplir;
On ne doit ériger de stâtues aux rois qu'après leur mort.
Louis XVI est dans nos cœurs; laissons aux courtisans ces flatteuses propositions d'ériger des statues. Je demande qu'on passe à l'ordre du jour*
(L'Assemblée décide qu'elle passera à l'ordre du jour.)
, membre du comité de Cons-titution, présente la rédaction définitive du décret concernant la cessation des poursuites judiciaires
commencées pour dégâts sur les terrains afféagés et marais desséchés.
(dette rédaction est adoptée et sera insérée dans lé procès-verbal de la SéahÇe d'hier 13 juin qui n'a pas encore été soumis à l'Assemblée.)
, secrétairet donne lecture immédiatement de ce procès-verbalj séance du dimanche 13 juin. Il est adopté.
donne également lecture : 1° d'une délibération de la municipalité de la paroisse de Boussac, au département de l'Ille-et^Vllaine, portant adhésion aux décrets de l'Assemblée nationale, et soumission d'acquérir les biens ecclésiastiques situés sur le territoire de cette municipalité ;
2° D'une adresse de l'assemblée du district de Sedan qui a été le premier organisé dans tout le royaume ;
8° D'une adresse des municipalités, des gardes nationales et de l'assemblée primaire dù canton de Barbonne, district de Sézanne^
Les adresses de Sedan et de Bàrbonhë sont ainsi conçues :
Adresse du district de Sedan.
« Nosseigneurs, l'assemblée du district de Sedan consacre avec joie ses premiers moments à s'ac* quitter du tribut le plus doux et le plus envié, de celui dhe commandent à tous lès amis de la patrie la reconnaissance et la vénération pour vos importants et glorieux travaux; elle n'en considère aucun qui ne soit dirigé vers l'ainélio-ration, le bohheur et le soulagement de l'huma* nité; tous ceux qui composenteetteassemblée ont juré individuellement et solennellement de maintenir de toutes leurs forces la Constitution et les lois que vous donnez à la France : ils répètent ici ce serment, et déclarent qu'ils sont prêts à verser jusqu'à la dernière goutte de leur Sang, plutôt que de renoncer au plus précieux dés biens : la liberté et l'égàlilé politique, que votre intrépide courage a conquises à travers mille dangers.
« Il n'est plus Ce déplorablé chaos dans lequel les peuples croupissaient misérablement, en proie à toutes les injustices, à tous les genres d'op-presSiotts votre patriotisme, eh lé faisant disparaître, a cféé pour tous les Français, pour tous les habitants de la terre, un monde nôuVeaU : bientôt la génération asservie, corrblnptie et dégradée par le despotisme, sera éteinte, et célle qui hait et Celles qui là suivront, fières et jalouses dë leurs droits, apprendront aux siècles les plUs éloignés dans l'avenir ce quë jjëut un régime que la sàgëssë ët là jiisticë ont combiné. Là seule idée du bonheur due la nouvelle Constitution prépare à nos neveux suffirait sàns doute pour faire oublier les pins longues et leâ plUs affligeantes calamités; mais ce qui doit le plus propager et soUtenir ie patriotisme dés bons citoyens, c'est que cet édifice immortel ë'élêvë et s'affermit au milieu même des agitations ët dès efforts qui tëhdeht à lë renverser.
«Ah ! puissent,Nosseigneurs,sëréaliser prompte-rdënt lëë voôUx que l'assemblée dU district dë Sëdàh et que tdUtë la Fràhée forment tôuS les jours pour la félicité publique, objet devoS pltiscoiis^ tantes ëtdë VOS piUs chères sollicitudes : cë bién, Si ardemment désiré, né peut êtrë que le fruit du plus inviolable attachement à la loi et à son
exécution, que cette assemblée à jurés, et il sera bien doux pour elle de professer des principes qui sont depuis longtemps gravés dans le cœur de tous ses membres. »
(iSuivent les signatures).
Adréise du cantoii de Batboiine.
« Nosseigneurs, les dix municipalités, lesgardes nationales et l'asSemblée primaire du canton de Barbonne, district de Sézànne, m'ont chargé dë déposer à Vos pieds l'expreSslon dë leur profond respect et l'assurance dë leur entière soumission sur l'autel du Dieu qui punit les parjures ; toUs ont promis et juré d'être fidèles à la nation, à la loi et au roi. Tous sont disposés à soutenir jusqu'à l'effusion de leUr sang la Constitution dii royaume, fruit de votre zèle et Chef-d'œuvre de la sagesse humaine. Us formeht les Vœux les plus ardents pour la réussite de vos glorieux travaux ; et, à l'exemple de la commune dë Sézanne et de Vitry-le-Français, ils regardent comme ennemis de la nation cetix qui, pàr des écrits, des complots, des protestations, cherchent à soulever les peuples. Les décrets émanés du sein de cette auguste Assemblée ont déjà éclairé les esprits, ennobli les cœurs et posé les bases d'un bonheur qui sera inébranlable et qui fera chérir vos noms dans la postérité la plus reculée. »
Signé : Camus, Àide-major de la garde nationale.
(L'Assemblée entend avec satisfaction la lecture de ces adresses.)
Les religieuses du couvent de Sainte=Ursule, de Brîançon, protestent dë leur profond respect pour tous les décrets de l'Assemblée nationale, et envoient leur inventaire, àuquel elles désireraient, disent-elles, pouvoir joindre des trésors.
L'ordre du jour est la suite de la discussion du titre ÎI du projet de décret sur la constitution civile du clergé.
les articles 1 à 71 ont été décrétés dans les séances dés 9 et 10 juin. La parole est à M. le rapporteur.
, rapporteur. L'article 8 primitif était aihsi Conçu :
« Art. 8. Les évêques dont les sièges doivent étrè suppriqiés en exécution du présent décret pdUr-roht être élus aUX éVèchès actuellement vacants, ainsi qu'à ceux qui vaqueront par là suite, ou qui doivent être érigés en quelques départements. »
Nous vous proposons de rerhpiàcëf bettë rédac-tioh par ia suivante :
« Art. 8. Lés évêquéS dont lés sièges doivent être supprimés en exécution du présent décret pourront être élus aux évêchés. actuellement Vacants, ainsi c^u'à ceux qui VaqUerbùt parla Suite, OU qui doivent être érigés en quelques départe* meots, encore qu'ils n'eUâseht pas quinze années d'exercice. »> (Cette rédaction ëSt misé aUxvoix et adoptée.)
A l'égard dès curés dont les paroisses auront été supprlihèëSén Vertu du présent décret, ii serait injuste de lie pàs leUt1 combler, comme temps d'exercice, celui qui sé éera écoule depuis la suppression de leur cure.
Je demande que les prêtres desservant les hôpitaux puissent être appelés à l'épiscopat.
Cet amendement honore l'humanité; aussi je l'appuie en demandant que non seulement ceux qui se sont voués au soulagement des malades, mais ceux qui se consacrent à l'instruction.publique, puissent être appelés à l'épiscopat.
Il y a aussi une autre classe d'ecclésiastiques qui mérite bien l'attention de l'Assemblée; ce sont les principaux des collèges; je demande qu'ils soient aussi désignés dans les cas d'exception.
Lorsqu'on fait des lois, il faut qu'elles soient applicables à tous les cas : il est possiblequ'un siège venant à vaquer, il ne se trouve dans les diocèses aucun curé qui ait exercé le ministère pendant dix ans ; je demande alors comment se pourraient faire les élections ? ,
Sans doute, ceux qui se sont consacrés à l'éducation publique méritent bien l'attention de l'Assemblée. N'exercent-ils pas une administration vraiment utile dans l'intérieur des maisons qui leur sont confiées? Parce que leurs soins se dirigent vers des enfants, sont-ils moins respectables? Je demande donc que, pour l'avenir seulement, les principaux des collèges soient éli-gibles aux évêchés, et que les professeurs de théologie le soient pour le présent et pour l'avenir: les instituteurs de vos évêques sont-ils moins digues des places que ceux qu'ils ont instruits?
En appuyant la proposition du préopinant, j'y ajouterai, par amendement : « tous les ecclésiastiques qui se sont consacrés à l'éducation publique ».
Ce n'est que par modestie que M. Dumouchel a présenté un plan qui l'excluait lui-même : c'est une raison de plus d'appuyer l'amendement de M. Prieur.
Tout le monde est d'accord sur le principe. Je demande donc que l'article soit adopté, sauf la rédaction.
Je demande que chaque partie de l'article soit successivement mise aux voix.
Un membre demande que les prédicateurs soient aussi conservés dans l'article.
On veut sans doute parler de ces missionnaires éclairés qui suivent les préceptes qu'ils enseignent et non les prédicateurs de cour.
On ne prétend pas sans doute exclure les prêtres des missions étrangères, qui, après avoir quitté ce qu'ils ont de plus cher, se sont exposés à tous les dangers pour annoncer la parole de Jésus-Christ. Qu'appel le-t-on être les descendants des apôtres? C'est prendre un bâton pour aller prêcher la foi, et exposer sa vie au milieu des infidèles. J'ai été j huit ans dans les missions, et on croira peut-être que je parle pour moi; mais je déclare que je renonce aux évêchés, parce que je suis trop vieux.
Je dois rendre justice au respectable ecclésiastique qui vient de porter la parole. Je l'ai vu dans les Indes-Orientales, où, pendant cinq années, il a souvent été mis en prison pour son zèle à soutenir et à défendre la religion chrétienne.
métaux voix les divers amendements. Ils sont adoptés.
, rapporteur. Je propose à l'Assemblée de décréter les amendements dans les termes qui suivent :
« Art. 9. Les curés et autres écclésiastiques qui, par l'effet de la nouvelle circonscription des diocèses se trouveront dans un diocèse différent de celui où ils exerçaient leurs fonctions, seront réputés les avoir exercées dans leurs nouveaux diocèses, et ils seront en conséquence éligibles, pourvu qu'ils aient d'ailleurs le temps d'exercice ci-devant exigé.
« Art. 10. Pourront aussi être élus les curés actuels qui auraient dix années d'exercice dans une cure du diocèse, encore qu'ils n'eussent pas auparavant rempli les fonctions de vicaire.
« Art. 11. Il en sera de même des curés dont les paroisses auraient été supprimées en vertu du présent décret, et il leur sera compté comme temps d'exercice celui qui se sera écoulé depuis la suppression de leurs cures.
c Art. 12. Les missionnaires, les vicaires généraux des évêques, les ecclésiastiques desservant les hôpitaux, ou chargés de l'éducation publique, seront pareillement éligibles lorsqu'ils auront rempli leurs fonctions pendant quinze ans, à compter de leur promotion au sacerdoce.
« Art. 13. Seront pareillement éligibles tous dignitaires, chanoines, et en général tous bénéficier et titulaires qui étaient obligés à résidence, ou exerçaient des fonctions ecclésiastiques, et dont les bénéfices, titres, offices ou emplois se trouvent supprimés par le présent décret, lorsqu'ils auront quinze années d'exercice comptées, comme il est dit des curés dans l'article précédent. »
(Ces articles sont décrétés.)
, rapporteur. L'article 11 du titre 2 du projet était ainsi conçu :
« Art. 11. La proclamation de l'élu se fera toujours en l'église cathédrale, en présence du peuple et de tout le clergé de l'église cathédrale et avant de commencer la messe solennelle qui sera célébrée à cet effet. »
Vos précédents décrets renden tune modification nécessaire dans la rédaction de cet article 11 qui devient le 14. Nous vous proposons le texte suivant :
« Art. 14 (ancien art. 11). La proclamation de l'élu se fera par le président de l'assemblée électorale dans l'église où l'élection aura été faite en présence du peuple et du clergé, et avant de commencer la messe solennelle qui sera célébrée à cet effet. » (Adopté.)
Les articles 15 et 16 présentés en termes nouveaux par le comité sont adoptés sans discus-. sion, ainsi qu'il suit :
« Art. 15 (ancien art. 12). Le procès-verbal de l'élection et de la proclamation sera envoyé au roi par le président de l'assemblée des électeurs, pour donner à Sa Majesté connaissance du choix qui aura été fait.
« Art. 16 (ancien art. 15). Au plus tard, dans le mois qui suivra son élection, celui qui aura été élu à un évêché se présentera en personne à son
évêque métropolitain, et, s'il a été élu pour le siège de la métropole, au plus ancien évêque de l'arrondissement avec le procès-verbal d'élection et de proclamation, et il le suppliera de lui accorder la confirmation canonique. »
, rapporteur, donne lecture de l'ancien art. 16, qui deviendra le 17e du décret.
« Art. 16. L'évêque métropolitain ne pourra refuser la confirmation canonique qu'après en avoir délibéré avec tout le clergé de sou église, et à la charge par lui de donner par écrit les raisons de son refus, signé de lui et des deux tiers au moins des membres de son conseil. »
Je demande la question préalable sur cet article : il n'est pas possible que l'évêque puisse refuser la confirmation à celui qui aura obtenu le suffrage du peuple. S'il en était autrement, vous verriez bientôt les évêques n'admettre que les ecclésiastiques qu'ils sauraient devoir perpétuer l'esprit de corps, si dangereux pour une constitution libre.
Les électeurs peuvent faire de mauvais choix; il faut bien que l'évêque et son conseil examinent le sujet. C'est le seul moyen d'exclure de l'état ecclésiastique ces hommes dont, les mœurs sont absolument contraires à l'esprit de cet état.
, curé d'Évaux. Quand l'Assemblée a refusée au roi le pouvoir de rejeter les juges qui lui étaient présentés, il est bien étonnant qu'on nous propose de donner à un évêque le droit de pouvoir contredire le suffrage du peuple. On craint, dit-on, que la cabale et l'intrigue n'agissent dans les assemblées des électeurs; je demande si elles n'auront pas bien plus d'effet dans la cour de l'évêque. Je demande donc que 1 Qveto ecclésiastique ne soit point établi par la Constitution.
Il faut que la confirmation de l'évêque soit un acte nécessaire et libre, ou hien vous confondez les deux pouvoirs, le pouvoir temporel et le pouvoir spirituel, et vous détruisez la religion.
On demande que la discussion soit fermée.) Cette proposition mise aux voix est décrétée.)
, curé du Vieux-P ouzanges. Dans la primitive Eglise on n'a jamais demandé la confirmation métropolitaine. Je demande la division de l'article, que je rédige ainsi :
« L'évêque métropolitain ne pourra refuser la confirmation canonique qui lui aura été demandée. »
(On observe que la discussion est fermée, et que la proposition de M. l'abbé Diilon est une motion et non un amendement.)
Plusieurs membres du comité ecclésiastique qui siègent dans cette partie de la salle m'observent que l'article proposé par M. Martineau n'est pas le vœu de la majorité du comité. Je demande que l'article lui soit renvoyé.
Je n'ai proposé aucun article à l'Assemblée qui n'ait auparavant été consenti par le comité, et particulièrement celui que nous discutons en ce moment.
(L'Assemblée décide qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur le renvoi au comité.)
Si vous accordez aux évêques le droit de refuser la coufirmation qui leur sera demandée, et qu'ils la refusent effectivement, il faudra bien, sans doute, procéder à une nouvelle élection. Je demande donc qu'après cette seconde élection, si le même ecclésiastique est élu, l'évêque ne puisse plus refuser la confirmation.
Ou l'Assemblée entend faire des lois pour la religion catholique, qui est celle de l'Etat, ou pour une religion qu'il lui plairait de faire. A Dieu ne plaise qu'une pareille idée soit jamais mise à exécution! Je la repousse loin i de ma pensée. L'amendement proposé ne fait que reculer la difficulté, et nous fait toucher au doigt combien il est nécessaire que la confirmation ne soit accordée que par ceux qui ont reçu de Dieu une mission expresse.
Il faut prendre bien des précautions pour que les fonctions du sacerdoce ne soient accordées qu'à des gens qui en soient vé-I ritablement dignes; mais il faut avoir soin aussi ! que jamais l'évêque ne puisse refuser la confirmation à un sujet par des prétextes frivoles. Il s'agit donc de composer avec le plus grand soin le synode; en conséquence, je demande l'ajournement de l'article jusqu'à ce que cette for mation soit achevée.
On a d'autant moins à_craindre que la confirmation des évêques soit refusée sous faux prétextes, que la voie d'appel comme d'abus sera toujours ouverte. .
(On demande la question préalable sur l'ajournement. L'Assemblée décide qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur l'ajournement.)
, curé d'Évaux. Je demande, pour l'intérêt public, que l'Assemblée mette toujours dans ses délibérations la plus grande lenteur, et qu'elle renvoie aux comités ecclésiastique et de Constitution une question qui a besoin encore d'être éclaircie. Je suis bien surpris de voir que les membres qui, quatre ou cinq fois, sont venus nous annoncer qu'ils ne prenaient aucune part aux délibérations sur tout ce qui regarde le clergé, s'élèvent en ce moment avec précipitation pour rejeter un ajournement ou un renvoi qui ont pour objet unique d'éclairer l'A^semblee sur des matières d'une grande importance.
M. Prieur demande la parole.
Ou demande à aller aux voix.
L'Assemblée décide que M. Prieur sera entendu.
Je ne conçois pas comment, lorsqu'il s'agit de déléguer aes pouvoirs importants, on peut presser ainsi la délibération. Une partie de l'Assemblée s'oppose à ce qu'on délibère; je vais justifier ma résistance personnelle. Ma religion n'est point éclairée; la discussion n'a porté jusqu'à ce moment que sur des demandes en ajournement et en renvoi au comité. L'article proposé donne à l'évêque le droit d'invalider l'élection du peuple, et l'article suivant à un synode métropolitain celui de refuser indéfiniment l'institution canonique : ou croit corriger ces dispositions en disant, dans un autre article, que l'examen du métropolitain ou du synode ne por-
tera que sur l'idonéité : il faut expliquer ce qu'on entend par l'idonéité; si elle porte sur quelque chose de civil, cet examen n'appartient pas au synode. Jamais je ne consentirai à déléguer à des eclésiastiqués le pouvoir judiciaire : il faut définir l'idonéité; il faut examiner avec soin la composition du synode métropolitain, puisqu'il peut influer sur la liberté.
Il s'agit ici de deux choses qu'on doit distinguer; Je pouvoir du métropolitain et celui du peuple. Le peuple choisit le sujet qtt'il reconnaît être le plus digne de sa confiance dans les fonctions du ministère sacré. Le supérieur ecclésiastique dit à l'élu : je vous communiqué les pouvoirs que j'ai reçus pour les exercer et pour leB transmettre. Voilà tout à la fois les principes et les faits. Que fait le supérieur ecclésiastique? Il examioe les mœurs et la doctrine du sujet. Quant à la validité de l'élection, il n'y peut rien ; quand à l'idonéité il peut tout. D'après ces principes, l'article me paraît mal rédigé. Il faut d'abord y porter la fin de l'article coté 18 dans le projet de décret; il faut ensuite donner uii remède à un refus injuste, par le recours au souverain, qui renverrait à un autre supérieur ecclésiastique. Je proposerais en Conséquence Cette rédaction : « Le métropolitain ou l'ancien évéque aura là faculté d'examiner ]'élu sur sa doctrine et sur ses mœurB. S'il le juge capable, il lui donnera l'institution canonique. S'il croit devoir refuser, les causes de sort refus seront délivrées par écrit, et signées de l'évêque et de son conseil, sauf aux parties intéressées à se pourvoir par voie d'appel comme d'abus, suivant les règles qui seront énohcées. »
Un des préo-pinantsjM. l'abbé Bourdon,que je ne connais pas, a dit qu'il ne savait pas pourquoi nous nous levions après^ avoir dit que nous ne délibérerions pas. Que nous nous opposions, que nous résistions, que nous rtous taisions ou que nous parlions, vous n'en allez pas plus vite : je crois que vous ne devez pas nous en vouloir, et qu'on ne doit pas nous inculper.
met aux voix l'article amendé par M. Camus. Il est adopté ainsi qu'il suit :
« Art. 17 (ancien art. 16). Le métropolitain ou l'ancien évêque aura la faculté d'examiner l'élu, en présence de son conseil, sur sa doctrine et ses mœurs. S'il le juge capable, il lui donnera l'institution canonique. S'il croit devoir la refuser, les causes du refus seront données par écrit* signées du métropolitain et de son conseil, sauf aux parties intéressées à se pourvoir par voie d'appel comme d'abus, ainsi qu'il sera dit ci-après. »
L'art. 18 est ensuite décrété sans discussion ainsi qu'il suit :
* Art. 18 (ancien art. 19). L'évêque à qui la confirmation sera demandée, ne pourra exiger de l'élu d'autre serment, sinon qu'il fait profession de la religion catholique, apostolique et romaine. »
, rapporteur, donne lecture de l'ancien art. 20 en cës termes .*
« Art. 20. Lé nouVel évêqUe në pourra point 8'adreSser à i'éVêque de Rome pour eh obtenir aucune confirmation ; irtais il pourra lui Écrire comme au chef Visible de l'Eglise Universelle ët én témoignage de l'unité de foi et dë la communion
qu'il est dans la résolution d'entretenir avec lui. »
Il est démontré que le pape est le véritable chef de l'Eglise, qu'il n'a pas seulement la primauté d'honneur, mais encore la primauté de juridiction : la tradition des SS. PP. et de tous les conciles œcuméniques le prouvent. Saiht lrénée dit que c'est à l'Eglisë romaine que les autres Eglises doivent s'adresser, à cause de sa primauté. Saint Athanase écrit au pape Félix : « Dieu vous a placé au haut de la forteresse sur toutes les Eglises, afin que vous veniez à notre secours. » Saint Basile mande à saint Athanase qu'il a été convenu de s'en référer à l'évêque de Rome pour que son jugement intervînt dans la rëformation de ce qui a été fait au concile pàr violence. Un concile de Carthage déclare que c'est en vertu de l'institution divine que la primauté appartient à l'évêque de Rome sur toutes les Eglises. Le conGile de Provence donne cette définition : « Le pontife romain est le chef, le père* le docteur de toutes les Eglises, sur lesquelles il a reçu un gouvernement universel. » Le concile de Bâle appelle le pape le chef et le primat de l'Eglise* le prélat et le pasteur du chrétien, le seul qui soit appelé à une plénitude dë puissance... Je conclus de tous ces faits que le pape a le pouvoir de gouverner l'Eglise entière, que ce pouvoir s'étend non-seulement sur les brebis, mais encore sur les pasteurs. En adoptant l'article proposé, vous lui refuseriez cette plénitude de puissance que lui a donnée Jésus-Cnrist, et que lui reconnaît l'Eglise.
Je demande qu'on aille aux voix ; le préopinant n'a rien dit qui "rai contraire à l'article. Je le défie de citer Ùn rail qui prouve qu'une demande a été faitë au papë pour se faire confirmer par lui.
Après quelques observations présentées par divers membres, l'article est adopté en ces termes :
« Art. 19 (ancien art. 20). Le nouvel évêque ne pourra s'adresser au pape pour en obtenir aucune confirmation ; mais il lui écrira comme au cnef Visible de l'Eglise universelle^ en témoignage de l'unité de foi et de la communion qU'il doit entretenir avec lui. »
donne lecture des anciens art. 21 et 22. Ils sont décrétés en ces termes :
« Art.20 (ancien art. 21). La consécration de l'évê-quë ne pourra se faire qUe dans sôti église Cathédrale par l'évéqUe métropolitain, Ou à son défaut par le plus ancien évéque dé l'arrondissement dë la métropole, assisté dés évêqueS des deux diocèses les plus voisins, urt jour de dimanche, nëfldant la messe paroissiale, en présence du peuple et du clergé.
« Art. 21 (ancien art. 22). Avant que la cérémonie de la consécration commence, l'élu prêtera, en présence des officiérs municipaux, du peuplé et du clergé, le serment solennel dejeiller ayec soin sur les fidèles du diocèse qui lui est donné, d'être fidèle à la nation, à la loi ët au roi, et de maintenir de toUt sbii pouvoir là Constitution dé^ crétée par l'Assemblée nationale, ët acceptée par le roi. »
annonceque l'ancien article 23, qui deviendra le 22b du décret, est aidai bbnçu :
« Art. 23. L'éVêdde aura la liberté dë cHbisir les Vicaires de sôtl église cathédrale dahs tbUt lë clergé de son diocèse, à la charge pài* lui dé ne pouvoir
prendre que des prêtres qtai auront exercé les fonctions ail saint ministère au moins pendant dix ans ; et il ne pourra les destituer que de l'avis de son conseil, et par une délibération qui y aura été prise à la majorité des yoix, en connaissance de causé. »
Les vicaires des évêques sont les mêmes que ceux des curés : je demande qu'il soit fait un seul article pour les uns et pour les autres : je Grois qu'on pourrait dire que « les évêques et les curés auront le choix libre de leurs vicaires parmi les prêtres de leur diocèse ».
Cette question est prématurée; l'article du comité doit rester tel qu'il est ; un article postérieur statue sur les vicaires des curés.
(La priorité est accordée â l'article du comité.)
, curé dé SouppeH. Il me paraît convenable que les évêques puissent destituer les vicaires de l'église cathédrale, cdmine les curés pourront destituer les leurs.
Les vicaires des évêques et ceux des curés diffèrent beaucoup par la nature de leurs fonctions. Les premiers auront, pour ainsi dire, une juridiction. S'ils avaient le courage de s'Opposer aux desseins d'un évêque, c'en serait assez pour être destitués. Un jeune vicaire, renvoyé par le caprice d'un curé, peut retrouver à se placer ; mais que deviendrait Un prêtre respectable appelé, dans un âge avancé, au conseil de l'évêque, et qui partage avec lui les sollicitudes de ses fonctions? Si vous voulez leur conserver l'avantage nécessaire de dire leur avis avec franchise, il he faut pas donner aux évêques la faculté de les destituer arbitrairement
met l'article aux voix. Il est adopté ainsi qu'il suit :...
« Art. 22 (ancien art. 23). L'évêque'aura la liberté de choisir les vicaires de son église cathédrale dans tout le clergé de son diocèse, à la charge par lui de ne pouvoir nommer que des prêtres qui auront exercé les fonctions ecclésiastiques au moins pendant dix ans; et les vicaires une fois nommés ne pourront être destitués ni par l'évêque qui les aura choisis, ni par son successeur, que de l'avis de son conseil, et par une délibération qui y aura été prise, à la pluralité des voix, en connaissance de cause* »
propose un article additionnel ainsi conçu :
« Les curés actuellement établis en aucune église cathédrale, ainsi que ceux des paroisses qui seront supprimées pohr être réunies à l'église cathédrale et en former le territoire, seront de plein droit, s'ils le demandent, les premiers vicaires de l'éVê-que, chàcUn suivant le rang de leur ancienneté. »
M. Pison du Galand. Cet article n'est pas d'une justice rigoureuse; car les curés des campagnes qui seront supprimés ont absolument les mêmes droits que cèux des villes. Vous gênez d'ailleurs le choix des évêques. Je demande la question préalable sur cet article.
Le préoplnartt n'observe pas que les curés des campagnes, dont les cures seront supprimées, recevront un traitement de votre part.
Nous allons voir pour la première fois des évêques devenus curés, et des
curés devenus vicaires. Ne serait-il pas intéressant que l'évêque se présentât aux fidèles ayant à côté de lui des prêtres respectables, chers aux citoyens qui dépendaient de la paroisse dont ils étaient précédemment les pasteurs?
L'Assemblée décide qu'il y a lieu à délibérer sur la question préalable, et l'article est adopté en ces termes :
« Art. 23. Les curés, actuellement établis en aucune église cathédrale, ainsi que ceux des paroisses qui seront supprimées pour être réunies à l'église cathédrale, et en former le territoire, seront de plein droit, s'ils le demandent, les premiers vicaires de l'évêque, chacun suivant l'ordre de leur ancienneté dans les fonctions pastorales. »
(La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.)
, député de Sarreguemines, demandé l'autorisation de s'absenter pendant huit jours pour affairés importantes.
L'Assemblée le lui permet.
dit que le résultatfdu scrutin pour la nomination des adjoints au comité de la marine a été incomplet et que six bureaux n'ont pas fourni leurs opérations.
L'Assemblée ordonne, néanmoins, la proclamation des membres élus. Ge sont :
MM. Legendre;
Poulain de Gorbion ;
Le comte de Rochegude ;
Ledean;
Defermon;
Laborde de Méréville.
L'Assemblée se rappelle que, le 1er de ce mois, elle a, par un décret, annulé les élections des assemblées primaires de Golmar. Ge décret est parvenu lorsque les électeurs du département du Haut-Rhin étalent tous réunis à Belfort, et leurs opérations déjà commencées. C'est dans cette situation que cesélecteurs envoient une adresse à l'Assemblée nationale. (On fait lecture de cette adresse.) — Ces électeurs représentent les malheurs que pourrait faire naître en ce moment l'exécution de ce décret, qui entraînerait la dissolution de leur assemblée : lis ont déjà nommé leur président, leurs scrutateurs et six administrateurs. Tous les citoyens du département du Haut-Rhin persistent dans le choix qu'ils ont fait de leurs électeurs. Une nouvelle élection occasionnerait des dépenses considérables, et ne pourrait être faite que dans le teinps précieux des récoltes; elle entraînerait de grands délais, et le peuplé est empressé de jouir des bienfaits que la Constitution lui assure, et que les administrations nouvelles doivent lui procurer. Les électeurs, s'ils se retiraient, ne pourraient rentrer avec sûreté dans leurs cantons. Le fond des lois portées pour lés élections a été rempli; les vices de forme ont été occasionnés par l'inexactitude et l'insuffisance des formulaires qui ont été remis aux assemblées primaires par les commissaires du roi. Aucun canton, aucun district ne réclame contre le résultat de Cés assemblées, Ges électeurs demandent à continuer leurs opérations, et que, sans tirer à conséquence, les assemblées primaires soient validées.'^ M. ue Broglie présente, dn la part dé la dëpUtatiôtt d'Alsace, hn projet de décret ainsi cbnçu ï
« L'Assemblée nationale, instruite que les électeurs du département du Haut-Rhin se sont rassemblés, le 6 de ce mois; que déjà six membres
étaient élus légalement, et qu'un autre scrutin était commencé, a décrété et décrète qu'elle regarde comme légales les opérations déjà faites, sans avoir égard au décret qui n'a pu arriver en Alsace que trop tard. »
L'Assemblée peut adopter cet article, sauf rédaction. On demande seulement qu'elle consacre ce principe, que tout ce qui a été fait avant la promulgation de la loi est valable, et qu'en conséquence elle valide les élections.
consulte l'Assemblée qui rend le décret suivant :
« L'Assemblée nationale, instruite par l'adresse que lui ont présentée les électeurs au département du Haut-Rhin, qu'au moment où le décret du premier de ce mois leur est parvenu, il y avait déjà six membres du département légalement élus, et que le scrutin, pour les trente autres membres du département, était déjà commencé, a décrété et décrète :
« Qu'elle autorise les électeurs du département du Haut-Rhin, rassemblés à Belfort, à continuer leurs opérations, sans pouvoir^tre arrêtés par les dispositions du décret du premier de ce mois, relatif aux assemblées primaires de ia ville de Golmar. »
(La séance est levée à trois heures et indiquée à demain, neuf heures du matin.)
Séance du
La séance est ouverte à neuf heures du matin.
, ex-président, prend le fauteuil en l'absence de M. l'abbé Sieyès, président en fonctions.
, secrétaire, donne lecture du pro-cès-verbai de la séance d'hier qui est adopté.
, secrétaire, donne lecture d'une adresse de la municipalité de la ville de Besançon et des notables qui improuvent de la manière ia plus forte l'adhésion du chapitre métropolitain de cette vi Ile aux délibérations du chapitre de l'église de Paris, des 12 et 14 avril dernier, et à la déclaration du 19, d'une partie des membres de l'Assemblée sur le décret que, dans sa sagesse, elle a prononcé le 13 du même mois, concernant la religion, et qui annonce qu'ils se sont empressés de noter cette adhésion de leur iniprobation, et de la couvrir de l'anathème public par une proclamation qu'ils ont l'honneur de mettre sous les yeux de l'Assemblée ;
Et d'une adresse des habitants de Jonsac, district de Pons, qui renouvellent leur adhésion
à toutes les opérations de l'Assemblée nationale, la prient d'approuver l'offrande qu'ils
font à la patrie de la taxe des ci-devant privilégiés pour les six
Autre adresse de la municipalité de Pons, département de la Charente-Inférieure, qui témoigne son respect pour les décrets de l'Assemblée nationale, et réclame la préférence sur la ville de Jonsac pour l'établissement judiciaire du district;
Et d'une enfin du curé de la Barthe-Isnard, au diocèse de Comminges, qui instruit l'Assemblée nationale que, dans Je dessein de prévenir la fausse interprétation des décrets de l'Assemblée, il les expliquera désormais à ses paroissiens dans l'église, en présence des officiers municipaux.
, député d'Auch, demande à s'absenter pour aller prendre les eaux.
, député de Château-Thierry, demande un congé de quinze jours pour vaquer à des affaires urgentes.
, député d'Avesnes, sollicite l'agrément de l'Assemblée pour une absence de quinze jours nécessitée par des affaires pressées.
Ces congés sout accordés.
donne la parole à un membre du comité des finances pour la présentation d'un projet de décret concernant l'hôpital général de Rouen.
Le conseil général de la commune de Rouen a fait parvenir à votre comité des finances une adresse par laquelle il demande la prorogation d'un droit dont cette ville jouit depuis 1727, et qui lui a été prorogé par des lettres patentes bien et dûment enregistrées. L'hôpital des Valides de cette ville, qui nourrit plus de deux mille quatre cents pauvres, compte parmi ses revenus le droit de pied fourché. La prorogation de ce droit doit expirer au mois de juillet prochain, et les revenus de çet hôpital vont devenir insuffisants. Le conseil général de la commune, convaincu que les citoyens pauvres et malheureux sont surtout l'objet de vos sollicitudes, demande la prorogation provisoire de ce droit, jusqu'à ce que vous ayez pourvu à la dotation de cette maison, de manière que la recette puisse égaler la dépense. Le comité, après avoir délibéré sur cette adresse, vous propose le décret suivant :
i L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des finances sur l'adresse du conseil général de ia commune de Rouen, a décrété que le droit du demi-doublement du pied fourché, établi, en 1727, en faveur dé l'hôpital général de Rouen, lequel expire au premier juillet prochain, et a déjà été prorogé successivement par divers arrêts du conseil et lettres patentes dûment enregistrés, continuera à se percevoir provisoirement, à commencer du premier juillet de la présente année, ainsi que tous les autres droits d'octroi appartenant à l'hôpital général des pauvres valides de Rouen, jusqu'à ce que, sur i'avis et les renseignements qui seront donnés par le département de la Seine-Inférieure, il soit pourvu par l'Assemblée nationale aux besoins de cet hôpital, proportionnellement à ses charges. »
met aux voix ce projet de décret.
Il est adopté.
, rapporteur du comité de Consti-
tution, présente un décret pour la fixation du 7e district du département de Saône-et-Loire. Ce projet de décret est adopté en ces termes : « L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de Constitution, décrète qu'elle confirme la délibération des électeurs du département de Saône-et-Loire, du 2 avril dernier, et que le siège de l'administration du 7e district de ce département demeure fixé en la ville de Marcigny. »
, au nom des comités de féodalité et des finances, demande la parole et dit :
M. le contrôleur générai des finances a adressé au comité de féodalité une lettre par laquelle il se plaint du défaut de perception des droits sur les bestiaux et les boissons dans la province du Hai-naut, et il attribue ce défaut à une fausse interprétation de l'article 12 du titre 11 sur les droits féodaux. Voici, en conséquence, le décret que le comité vous propose :
« L'Assemblée nationale, informée que dans quelques parties des districts du département du Nord, qui composaient ci-devant la province du Hainaut, il a été donné à l'article 12 du titre II du décret du 15 mars dernier, concernant les droits féodaux, une interprétation abusive et qui ne tendrait à rien moins qu'à faire cesser toutes les impositions indirectes dans ces. districts,
« Déclare, après avoir entendu ses comités de finances et de féodalité, que son décret du 28 janvier dernier, sanctionné par le roi, le 30 du même mois, doit être exécuté selon sa forme et teneur, et qu'il n'y a été nullement dérogé par l'article 12 du titre II de celui du 15 mars suivant ;
« Décrète, en conséquence, que, jusqu'à ce qu'il ait été établi un mode d'impositions uniforme pour tout le royaume, la ci-devant province du Hainaut demeurera assujettie aux droits qui s'y perçoivent au profit du Trésor public sur les vins', eaux-de-vie, bières, cidres, tabacs, sels,charbous de terre, bois, tuagede bestiaux, pas de penas et sur les bêtes vives, dont la retrouve se fait chaque année, et généralement à tous les droits connus sous la dénomination de cris de Mons ou Domaine du Hainaut ;
« Ordonne que, du moment où l'intendant et commissaire départi en Hainaut aura cessé ses fonctions, en conformité du décret du 22 décembre 1789, les procès-verbaux de contraventions auxdits droits seront, jusqu'à ce qu'il y ait été autrement pourvu, portés devant l'assemblée du département du Nord, ou son directoire, qui les jugera sommairement, sans frais et sans appel;
« Décharge de toute poursuite, pour raison de contraventions commises dans l'intervalle de la publication des lettres patentes du 28 mars dernier, à celle du présent décret, ceux qui, dans la quinzaine, à compter du jour où le présent décret aura été publié et affiché par la municipalité du lieu de leur résidence, acquitteront ou offriront réellement aux bureaux de la régie générale les droits par eux dus et mentionnes dans les procès-verbaux dressés à leur charge. » (Adop té.)
L'Assemblée passe à son ordre du jour, qui est la suite de la discussion des articles sur la constitution civile du clergé.
, rapporteur. L'article 24 du projet primitif, qui conserve son numéro d'ordre dans le décret que vous votez, était ainsi conçu : « Art. 24. Le vicaire supérieur et les vicaires di-
recteurs du séminaire seront nommés dans un synode, par la voix du scrutin individuel et à la pluralité absolue des suffrages. Ils ne pourront être destitués que dans un synode sur Ja plainte de l'évêque, en connaissance de cause.»
Cette rédaction ne concordant pas avec les articles décrétés, nous vous proposons un texte nouveau.
Si vous laissez aux évêques la nomination des vicaires supérieurs, vous verrez bientôt des jeunes gens sans expérience, élevés à ces places, devenir des maîtres en Israël, et se permettre de donner des leçons de morale à des ecclésiastiques vertueux et expérimentés.
Si le préopinant avait lu les articles du titre 1er, par lesquels on exige dix ans de service pour être admis à ces places, il n'aurait pas fait son observation.
Je voudrais bien savoir quel sera le sort des vicaires après la mort des évêques. Le nouvel élu parviendra à l'épiscopat avec tous les droits qu'avait son prédécesseur, c'est-à-dire qu'il pourra choisir ses vicaires. Je demande alors que deviendront les anciens vicaires ?
Il me semble qu'en disant que les vicaires ne pourront être destitués que de telle ou telle manière, on a prévenu l'inconvénient dont parle le préopinant. Mais si cette explication n'est pas suffisante, je demanderai qu'on change la rédaction de l'article 22, décrété hier, et qu'elle soit conçue en ces termes :
Après les mots : au moins pendant dix ans, on ajoutera les mots : et les vicaires une fois nommés ne pourront être destitués, ni par Vévêque qui les aura choisis, ni par son successeur, ,que sur l'avis de son conseil, etc.
L'Assemblée adopte cette addition qui sera introduite dans l'article 22 et dans le procès-verbal de la séance d'hier, lu au début de la séance. L'article 24 est ensuite adopté ainsi qu'il suit : « Art. 24. Les vicaires-supérieurs et. vicai res-directeurs du séminaire seront nommés par l'évêque et son conseil, et ne pourront être destitués que de la même manière que les vicaires de l'église cathédrale. »
, rapporteur, donne lecture de l'article 25 concernant l'élection des curés, auquel le comité n'a fait subir aucune modification.
De quoi s'agit-il ? De l'élection d'un curé, d'un officier de morale, et qui doit exercer son ministère dans l'étendue de sa paroisse seulement. Par l'article proposé, il est possible de donner à telle ou telle paroisse un curé à la nomination duquel elle n'ait pas participé, puisqu'il e3t possible qu'aucun citoyen de la paroisse n'ait été choisi pour électeur. Vous allez lui donner un prêtre qui n'aura, en aucune manière, l'agrément des habitants qu'il doit conduire, et c'est là précisément ce qui y amène le désordre. Peut-être, me dira-t-on, qu'ils ne connaissent pas les sujets : à cela je réponds qu'ils ont et leurs vicaires et celui des paroisses voisines. Je pense donc que la rigueur des principes veut que les élections sefassentdans les paroisses; mais si cette opinion pouvait rencontrer des difficultés, je demande que les citoyens actif» d'une paroisse soient autorisés à présenter deux sujets,
parmi lesquels les électeurs du district en choisiraient un.
Vous avez décrété que les électeurs du département pouvaient nommer les évêques ; je n'examinerai pas le décret en lui-même, mais je dirai que si vous attribuez aussi aux paroisses l'élection des curés, vous ferez un acte vraiment préjudiciable aux piçeurs. Nous sommes forcés de le dire : le prêtre qui fait le paieqx son état n'est pas l'homme d'aujourd'hui. On plaît à Ja multitude en l'imitant : croyez-vous qu'un vicaire, arrivant dans une paroisse, surtout si le curé était vieux, serait assez ferme pour s'élever contre les désordres, si son intérêt était de captiver les suffrages des habitants de la paroisse? Qu'on ne nous parle pas des temps de la
fijrïmitîyè Egljse ; la différence des mœurs écarte a comparaison; aujourd'hui l'on est philosophe dans l'esprit de son siècle : alors on était chrétien dans l'esprit de l'Evangile.
Après avoir rejeté les projets qui vous ont été présentés, il me reste à vous en proposer un qui peut remplir plus sagement vos vues. Il faut donner aux paroisses des prêtres édifiants, dont la conduite soit une censure continuelle des vices. Vous êtes convaincus dumalque peut faire un ecclésiastique, s'il n'est pas dans l'esprit de Dieu, -C'est d'après ces vues que je vous propose de décréter : !• quand une cure sera vacante, soit par mort, soit par démission, l'évêque du diocèse aura sep! le droit de nommer; 2° le choix de l'évêque ne pourra tomber que sur les ecclésiastiques du district où se trouve la cure vacante ; 3° le sujet élu présentera un certificat de conduite régulière, du curé et de la municipalité du lieu d'où il sortira-
Après avoir donné aux électeurs du département le droit d'élire les évêques, pouvez-vous balancer de donner aux districts le droit d'élire les curés ? Ce n'est pas sous Ce point 4e vue que j'envisagerai la question. Bn me rappelant la faveur avec laquelle vous avec accueilli ma première opinion, je la solliciterai de nouveau : je vous promets d'être court. Les inconvénients que j'ai trouvés à confier aux électeurs de département le droit d'élire les évêques se multiplient dans cette question nou? velle. Ce que j'ai dit des électeurs de département je le dirai des électeurs de district. Cç seront les fermiers riches, plus touchés de l'élégance et des formés agréables d'un vicaire que de ses vertus; ils le jugeront plutôt d'après ses complaisances, Jes petits services, l'assiduité 4e ses hommages, que d'après son exactitude à remplir ses devoirs; ce serpnt des magisters de village, des paysans dans toute la force du terme, qu'il ne sera pas difficile de corrompre. Les vicaires ne manqueront pas de fêter ce qu'il y aura de personnages importants dans l'enaroit et dans les environs. Ils iront visiter les ehâteaux et les cabanes pour accaparer les suffrages ; ils assisteront aux noces et fiùx banquets ; il faudra être bon compagnon, agréable convive: caresser celui-ci, donner de l'argent à celui-la : la popularité suppléera aux verfus, et les vicaires, stricts observateurs de leurs 4evoirs, seront encore condamnés à vieillir dans des emplois subalternes. Nous verrons bientôt en France, comme en Angleterre, les ministres de la religion devenir les vils complaisants, je ne dis pas des seigneurs, il n'y en a plus d'après vos décrets, mais des valets.
Le sacerdoce, en moins d'un demi-siècle, sera
le pire de tous les états; et voilà les moyens qu'on indique pour amener les beaux jours de la religion f Votre attachement pour le culte de vos pères me rassure ; vous rendrez aux évêques le droit de présenter les sujets. Qui peut mieux qu'eux connaître leurs talents et leurs vertus, puisque leur fonction principale est de les surveiller? Votre intention n'est pas sans doute d'ir soler les évêques de la constitution du clergé, et de les réduire à n'être plus que des idoles, dont les temples seraient bientôt abandonnés. Dans les beaux jours de l'Église, l'évêque choisissait les sujets, et le peuple ne participait à ce choix que par le témoignage de leur capacité et de leurs vertus. Si, contre mon espoir, vous leur refuse? riez ce droit, vous le confieriez du moins au syr node; le bureau municipal de la paroisse pourrait y présenter son vœu et éclairer le choix de l'assemblée. Les vicaires, assurés que leur fortune est entre les mains des curés, se piqueraient d'émulation, et vous les verriez s'avancer à grands pas dans la carrière des vertus. Il est encore un autre moyen de choisir les curés, c'est 1a voix du concours ;.c'est là le vœu principal démon cœur; o'est le meilleur moyen de remédier au danger de l'oisiveté- On ne m'accusera pas sans doute en ca moment d'abandonner le principe; si vous craignez le clergé, ne faites rien pour lui, mais faites tout pour la vertu.
, curé de Pontivy. l'admets les principes du préopinant; mais comme je crains bien qu'ils ne soient pas adoptés, je demande que réélection se fasse en présence du clergé du district; c'est un bon moyen pour arrêter les cabales.
Persuadé de la sagesse de l'article proposé par le comité, je ne ferai que de très courtes réflexions. D'après les articles qui ordonnent que les élections seront faites par le euple, il n y a plus de doute sur le principe, u'est-ce qu'un curé? C'est de tous les magistrats le plus noble ; mais enfin c'est un magistrat. Quand vous aurez réglé l'ordre judiciaire, il est bien probable que vous ne confierez pas à une ville le droit d'élire son juge : il doit én être de même du magistrat spirituel. 11 est impossible de concentrer ce choix dans les citoyens actifs d'une seule paroisse; ce serait concentrer l'émulation, et préparer peut-être de grandes divisions. L'intrigue a moins de succès dans les corps nombreux : la concurrence produit toujours les meilleurs choix. Je demande que l'article proposé par le comité soit adopté.
, cultivateur, député de Bretagne. Je démande que les curés des campagnes ne soient pris que dans les campagnes, parce que si on les choisit parmi les gens des villes, ils sont accoutumés à la richesse et au luxe; quand ils sont dans les campagnes, ils les écrasent.
Il me paraît extraordinaire de faire nommer à une cure sans participation de l'évêque. Peut-être, medira-t-on, que par les décrets précédents, l'évêque a le droit de refuser le sujet ; mais il y a des raisons qui pourraient l'engager à em-pêeher un ecclésiastique d'aller dans telle ou telle paroisse, et qui cependant ne sont pas assez fortes pour qu'il lui lui refuse l'institution canonique. Observez que l'évêque a la surveillance du diocèse, que ce n'est que pour ce motif que vous lui avez donné un conseil. Mon amendement consiste doue à dire, « que l'évêque ou quelques membres
de son conseil seront joints aux électeurs de district ».
J'avais un amendement à proposer; plus j'en ai entendu, plus je me suis aperçu gu'ils étaient inutiles, et que l'article du comité était le seul qqi dût être adopté. Je demande douç qu'on aille aux voix.
De tous les amendements proposés, la plupart ne méritent point d'examen. Tout ce qui ne présente pas l'élection du peuple n'est pas dans notre Constitution et n'a pas besoin d'être réfuté. On a présenté deux différents amendements; le premier, c'est de faire faire les élections par les habitants des paroisses; le second, d'adjoindre aux électeurs les membres de la municipalité, ou les notables du lieu dont la cure est vacante. Le comité avait bien pensé à donner aux paroisses le droit d'élire leur curé; mais le petit nombre de citoyens qui se trouvent dans quelques paroisses nous a présenté de très grands inconvénients. On dira que, quoique peu nombreux, ces citoyens ont bien le droit de choisir les officiers municipaux; mais ce chpix n'intéresse pas tant l'ordre social que celui d'un homme pour ainsi dire inamovible et directeur des mœurs publiques. Quand on a propqsé de joindre les membres de la municipalité, parce qu'il serait possible qu'on donnât à une parroisse un curé qui n'aurait eu le vœu d'aucun citoyen de cette paroisse, on n'a pas fait attention qu'elle est représentée par les électeurs qu'elle a nommés et qu'elle a chargés d'émettre son vcéu. (On demande â aller aux voix.)
Je demande la division des amendements.
(Cette division mise aux voix est rejetée.)
Tous les amendements sont écartés par la question préalable, et le décret est adopté ainsi qu'il suit ;
« Art. 25. L'élection des curés se fera dans la forme prescrite et par les électeurs indiqués dans le décret du 22 décembre 1789, pour la nomination des membres de l'assemblée administrative du district. »
, rapporteur. Voiei l'article 26 tel que vous le propose le comité :
« Art. 26. L'Assemblée des électeurs pour la nomination aux cures se formera tous les ans à l'époque de la formation des assemblées de districts, quand même il n'y aurait qu'une seule cure vacante dans le district ; à l'effet de quoi les municipalités seront tenues de donner avis au procureur-syndic du district de toutes les vacances de cures qui arriveront dans leur arrondissement par mort, démission ou autrement. »
L'intervalle qui s'écoule entre la mort d'un curé et la nomination de son successeur est ordinairement funeste aux mœurs et à lapiété des paroissiens ; je crois donc qu'il est conforme aux principes de la justice, et surtout au vœu des paroissiens, de rapprocher l'époque des nominations, D'après l'article proposé, il serait possible qu'une paroisse fût onze mois sans curé. Je demande donc qu'il en soit de la nomination des curés comme de celles des évêques, et que le procureur-syndic du district soit tenu de convoquer les électeurs sous quinzaine pour procéder à la nomination d'un curé.
Je demande que les évêques soient autorisés à envoyer des ecclésiastiques dans les paroisses où il en manquerait.
Nous avons le bonheur d'avoir dans l'Assemblée plus de cent curés, et nous ne voyons pas que leurs paroisses soient en désordre.
L'amendement de M. l'abbé Grégoire est rejeté par la question préalable.
L'article 26 proposé par le comité est ensuite adopté.
, rapporteur, donne lecture des articles 27 et 28 qui sont adoptés sans discussion.
« Art. 27. En convoquant l'Assemblée des électeurs, le procureur-syndic enverra à chaque municipalité la liste de toutes les cures auxquelles il faudra nommer.
« Art. 28, L'élection des curés se fera par scrutins séparés pour chaque çqre vacante, »
Voici un article additionnel que j'ai l'honneur de vous proposer ; « Chaque électeur, avant de mettre son scrptiq dans Je vase, fera sermept qu'il fait profession de Ja re^ ligion catholique, apostolique et romaine, et qu'en son âme et conscience il choisit celui qu'il croit le plus digne, sans avoir été déterminé par aucuns dons, promesses ou menaces. »
, rapporteur. 11 fai|t distinguer dans cet article deux parties ; la première est relative à la religion catholique, et vous l'avez déjà rejetée ; la seconde est constitutionnelle, et vous l avez déjà décrétée. Il n'y a pas d'inçop? vénient à la rappeler ici, et dans ce cas je demande la division de l'article proposé,
La division est décrétée, et l'article adopté eq ces termes.
«Art. 29. Chaque électeur, avant de mettre son bulletin dans le vase du scrutin, fera serment de ne nommer que celui qu'il aura choisi eu son âme et conscience comme le plus digne, sapa avoir été déterminé par dons, promesses, so|i|r citations ou menaces.
« Ge serment sera prêté pour l'élection des évêques comme pour celle des curés, »
, rapporteur, donne lecture de l'article 30.
« Art. 30. L'élection des curés ne pourra se faire ou être commencée qu'un jour de dimanche, dans la principale église du chef-lieu du district, à l'issue de la messe paroissiale, à laquelle tPUS les électeurs seront tenus d'assister. »
Il serait possible que le curé sur lequel serait tombé le choix des électeurs ne voq* lût point accepter ; en ce cas, faudrait-il attendre l'année suivante pour une nouvelle élection ? Pour remédier à cet inconvénient, je proposerai de dire qu'aussitôt après la vérification dp scrutin, le résultat sera communiqué aux élus, et les électeurs ne se sépareront qu'après l'acceptation.
Il serait aussi possible que plusieurs districts nommassent le même sujet • c'est pourquoi je demande le renvoi de l'addition proposée au comité, qui en fera un article sé-? paré.
(Le renvoi est adopté.)
(L'article 30 est ensuite décrété sans changement.)
lit les articles 31, 32 et 33 qui n'éprouvent aucune contestation et sont adoptés en ces termes :
« Art. 31. La proclamation des élus sera faite par le président du corps électoral dans l'église principale, avant la messe solennelle, qui sera célébrée à cet effet, et en présence du peuple et du clergé.
« Art. 32. Pour être éligible à une cure, il sera nécessaire d'avoir rempli les fonctions de vicaire dans une paroisse ou dans un hôpital, et autre maison de charité du diocèse, au moins pendant cinq ans.
« Art. 33. Les curés dont les paroisses auront été supprimées, en exécution du présent décret, pourront être élus encore qu'ils n'eussent pas cinq années d'exercice dans le diocèse. »
lit l'article 34 en ces termes :
« Pourront aussi êtres élus tous ceux qui ont été ci-dessus déclarés éligibles aux évêchés. »
Il existe un point sur lequel votre sollicitude doit s'appesantir : c'est la subordination deècurés à l'égard des vicairesdu diocèse, c'est l'obéissance des curés aux évêques diocésains: il faut qu'ils leur soient subordonnés pour ce qui regarde la bonne conduite. Ce que vous avez décrété pour les soldats envers leurs officiers, il faut le décréter aussi pour les curés envers les évêques : c'est pour cela que je vous propose d'arrêter « que les évêques auront le droit de nommer aux différents degrés de cure, et que les proportions aux bénéfices plus ou moins lucratifs leur seront absolument dévolues ».
, l'aîné. Quand une fois vous avez décrété un principe constitutionnel, quelle que soit mon opinion particulière, je m'y soumets avec respect. Vous avez décrété que les curés seraient choisis par voie d'élection, ce principe est indéfini ; il détruit la distinction des cures plus ou moins lucratives; c'est pourquoi je demande la question préalable sur la proposition de M. le chevalier de Murinais. »
Remplir son devoir n'était pas, sous l'ancien régime, un titre pour être récompensé : une foule d'ecclésiastiques respecta-tables ont été ensevelis dans les campagnes, où ils se livraient à toute l'austérité de leur ministère. Si vous leur donnez soixante mille concurrents pour l'élection aux cures, ils risqueront beaucoup de n'être pas placés. Je demande donc, pour leur donner une espèce de préférence, que les ecclésiastiques qui n'auront pas servi dans les paroisses ne puissent être élus aux cures qu'après dix années de sacerdoce.
Ils n'auront plus à redouter les grades, les courses ambitieu ses en cour de Rome : ainsi ils n'aUront plus à se plaindre.
modifie la rédaction de l'article qui est adopté ainsi qu'il suit ;
« Art. 34. Seront pareillement éligibles aux cures tous ceux qui ont été ci-dessus déclarés éjigibles aux évêchés, pourvu qu'ils aient aussi cinq années d'exei;cice. »
fait lecture des articles 35 à 43 quisonta doptés, sans discussion, ainsi qu'il suit:
« Art. 35. Celui qui aura été proclamé élu aune cure se présentera en personne à l'évêque avec Je procès-verbal de son élection et proclamation, à l'effet d'obtenir de lui l'institution canouique.
« Art. 36. L'évêque aura la faculté d'examiner l'élu, en présence de son conseil, sur sa doctrine et ses mœurs; s'il le juge capable, il lui donnera l'institution canonique; s'il croit devoir la lui refuser, les causes de son refus seront données par écrit, signées de l'évêque et de son conseil, sauf aux parties leur recours à la puissance civile, ainsi qu'il sera dit ci-après.
« Art. 37. En examinant l'élu qui lui demandera l'institution canonique, l'évêque ne pourra exiger de lui d'autre serment, sinon qu'il fait profession de la religion catholique, apostolique et romaine.
« Art. 38. Les curés élus et institués prêteront le même serment que les évêques, dans leur église, un jour de dimanche, avant la messe paroissiale, en présence des officiers municipaux du lieu, du peuple et du clergé: jusque-là ils ne pourront faire aucune fonction curiale.
« Art. 39. Il y aura, tant dans l'église cathédrale que dans chaque église paroissiale, un registre particulier sur lequel le greffier-secrétaire de la municipalité du lieu écrira sans ffais le procès-verbal de la protestation du serment de l'évêque ou du curé, et il n'y aura pas d'autre acte de prise de possession que le procès-verbal.
« Art. 40. Les évêcnés et les cures seront réputés vacants jusqu'à ce que les élus aient prêté le serment ci-dessus mentionné.
« Art. 41. Pendant la vacance du siège épisco-pal, le premier, et à son défaut, le second vicaire de l'église cathédrale remplacera l'évêque, tant pour les fonctions curiales que pour les actes de juridiction qui n'exigent pas le caractère épis-copal ; mais en tout il sera tenu de se conduire par les avis du conseil.
« Art. 42. Pendant la vacance d'une cure, l'administration de la paroisse sera confiée au premier vicaire, sauf à y établir un vicaire de plus, si ia municipalité le requiert ; et dans le cas où il n'y aurait pas de vicaire dans la paroisse, il sera établi un desservant par l'évêque. »
lit les articles 43 et 44.
« Art. 43. Chaque curé aura le droit de choisir ses vicaires, mais il ne pourra fixer son choix que sur des prêtres ordonnés pour le diocèse, ou admis dans le diocèse par l'évêque.
« Art. 44. Aucun curé ne pourra révoquer ses vicaires que pour des causes légitimes, jugées telles par l'évêque et son conseil. »
Je demande qu'on retranche du premier de ces deux articles : ou admis dans le diocèse par l'évêque.
(II. s'élève beaucoup de murmures dans la partie gauche).
Il faut faire donner l'approbation par le procureur-syndic du département.
Les prêtres parmi lesquels choisira le curé doivent être pris dans le diocèse et en fuire partie. J'insiste sur mon amendement. Il est certain que les pouvoirs du saint ministère sont conférés par l'ordination, et que l'ordination, une fois reçue, toute autre approbation est inutile
(Il s'élève de nouveaux murmures dans la partie droite) ; il faut donc qu'on ne sache ni pour quelle cause, ni pour quelle somme les évêques en France ont demandé et obtenu 1a faculté de donner des approbations ; et quand on se permet de tels murmures, on ne prévoit pas jusqu'où l'on peut être poussé. Pendant quinze siècles, il n'a point été question de l'approbation ; ce n'est qu'au seizième siècle qu'on a voulu soumettre les prêtres à des épreuves. En imposant les mains, l'évêque ordonne au prêtre de remplir ses devoirs : ces devoirs consistent à prêcher, à confesser, et on lui retient les pouvoirs nécessaires pour les remplir. Des moines mendiants avaient des privilèges pour faire toutes les fonctions du saint ministère au préjudice des légitimes pasteurs : il n'y avait d'autre moyen, pour réformer cet abus, que de rendre ces privilèges commus à tous les prêtres ; on ne le prit pas au concile de Trente. On imagina les approbations ; le texte du concile porte ces mots : Sacerdotes etiam regulares ; mais on dit qu'il y a des textes où le mot etiam ne se trouve pas. Ainsi, d'après ce concile même, les approbations ne porteraient que sur les prêtres réguliers. En effet, c'étaient des moines qui avaient donné lieu à la disposition du concile. Ce n'est point ainsi que cette disposition a été interprétée. Le Concile de Trente n'est point en usage en France ; mais on a trouvé cette discipline commode, et l'on a voulu l'introduire dans le royaume. Quelques événements arrivés à Agen ont été le premier prétexte qu'on ait saisi pour y parvenir. Le conseil du roi décida que les ecclésiastiques ne pourraient prêcber dans un diocèse sans le consentement de l'évêque. Un autre arrêt du conseil étendit ensuite un peu celte disposition : enfin, en 1695, un édit défendit à tous les prêtres séculiers et réguliers de prêcher sans le consentement de leur évêque, auquel cette loi donnait la faculté de limiter les pouvoirs, soit pour tel lieu, soit pour tel temps et de les suspendre à volonté, sans être obligé de dire les causes de son refus, sauf l'appel comme d'abus.
On voit assez combien cet édit est absurde dans ses principes et dans ses détails. Comment l'a-t-on obtenu ? Il est dit, dans le procès-verbal de l'assemblée du clergé de 1695, qu'il fut accordé un subside considérable. On ne dit pas, à la vérité, que ce fut pour obtenir l'édit, mais les circonstances peuvent le faire présumer. Cet édit fut d'abord envoyé au parlement de Paris, et contre l'usage, qui était que ces envois se fissent à tous les parlements par le garde des sceaux, le procès-verbal porte que le clergé fera faire les expéditions, et qu'après l'apposition du sceau, il se chargera de faire parvenir l'édit aux parlements. Il était naturel qu'une loi ainsi achetée produisît de mauvais effets : je ne les rappellerai pas, parce qu'ils ne sont qùe trop connus. Elle doit être anéantie, cette loi si absurde, si contraire à la religion : il faut donc parler dans l'article proposé des prêtres incorporés dans le diocèse, et ne passe servir du mot approbation.
Il est incontestable que, par l'ordination, le prêtre reçoit le droit d'exercer les fonctions sacrées, mais elle ne désigne pas les sujets sur lesquels il exercera ses pouvoirs. Autrefois, l'ordination n'était donnée que pour remplir tel emploi, le prêtre avait en même temps une juridiction. En admettant l'article, il y aurait autant d'évêques que de curés : on détrùirait la
hiérarchie ecclésiastique, que nous ne pouvons anéantir sans cesser d'être catholiques.
Un prêtre est ordonné ; il reçoit, par l'ordination, le pouvoir radical. Il lui faut une juridiction ; c'est le curé qui la lui donne.
Il y aurait un grand inconvénient à ce que le curé pût renvoyer son vicaire, ou le vicaire quitter son curé sans cause légitime. Je demande qu'on fasse à ce sujet un article additionnel.
(Après une légère discussion, l'Assemblée décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur cette proposition.)
t. Il paraîtrait nécessaire de faire un article sur les permutations, ou que du moins il fût statué sur les conditions auxquelles un curé pourrait quitter sa cure, si des raisons de santé ou des circonstances particulières la rendaient inhabitable.
(Cette observation est renvoyée au comité ecclésiastique.)
t met aux voix les articles 43 et 44, présentés par le comité. Ils sont adoptés.
, député de Cou-tances, demande et obtient un congé de quinze jours.
M. le garde des sceaux envoie à l'Assemblée une note de l'acceptation ou de la sanction du roi sur les décrets de l'Assemblée.
Le roi a accepté ou sanctionné :
1° Le décret de l'Assemblée nationale, du 28 mai, portant que la levée des matelots sera faite provisoirement comme par le passé ;
2» Le décret du 8 de ce mois, portant que les anciens officiers municipaux de la ville de Saint-Jean-de-Luz convoqueront l'assemblée des citoyens actifs de cette ville pour la nomination d'une nouvelle municipalité; et que les armes enlevées de l'hôtel de ville y seront incessamment restituées;
3° Le décret du même jour, portant que personne ne pourra avoir un commandement de gardes nationales dans plus d'un département ;
4° Le décret du même jour, relatif aux piastres et sommes d'or et d'argent arrêtées à Châtillon, le 8 mars dernier;
5° Le décret du même jour, qui déclare nulle l'élection de la municipalité de Schelestadt, faite le 27 janvier et jours suivants ; ordonne qu'il sera procédé à la formation d'une nouvelle municipalité, et déclare l'emprisonnement des sieurs Ambruster et Flichs illégal et vexatoire ;
6° Le décret, des 8 et 9 de ce mois, sur la fédération générale du royaume ;
7° Et enfin Sa Majesté a donné des ordres pour l'excution du décret du 9, relatif à la conduite des grenadiers et fusiliers des régiments de Beauce, Normandie, et des canonniers-matelots du corps de la marine ; à l'exécution provisoire des anciennes ordonnances de police et militaires, et au maintien de l'harmonie et de l'union entre les différents corps qui composent la garnison de Brest.
M. le garde de sceaux a fait faire dans ces trois derniers décrets les changements et addi-
tions décrétés par l'Assemblée nationale et dont M. le Président a bien voulu lui faire part.
Signé : Champion de Cicé, archevêque de Bordeaux.
Paris, le
lève la séance et indique celle du soir â sept heures.
Séance du
La séance est ouverte à 7 heures du soir,
, ex-président, remplace au fauteuil, M. l'abbé Sieyès, président en fonctions, qui n'est pas présent.
, secrétaire, donne lecture de plusieurs adresses :
1° Adresse de féïicitation, adhésion et dévouement de la ville dé Vitré. Elle exprime son indignation contre l'arrêté des citoyens catholiques de la ville de Nîmes, se soumet à acquérir des biens nationaux pour la somme d'un million, et demande la permission d'employer en ateliers de charité les deniers versés dans les coffres des fabriques de ses trois paroisses;
2° fies amis de la Constitution de la ville d'Amiens ;
5° Des officiers de la garde nationale de la ville de Cormicy;
4° De la communauté de Mérindol, qui exprime : . son indignation contre la délibération des ci- j toyens catholiques de la ville de Nîmes;
5° Des étudiants en physique au collège de Guienne, à Bordeaux, qui célèbrent, dans les termes les plus touchants et les plus énergiques, le i patriotisme de leur professeur ;
6° De ia municipalité dé Carlinet en QUercy, qui déuonCe les troubles qu'a excités dans l'Assemblée primaire du canton l'envoi d'une adresse aux assemblées primaires du département de Châlons, lesquels troubles ont été dissipés par le zèle et le courage de la milice citoyenne;
7° De la ville de Mannezin, qui supplie l'Assemblée de laisser finir leurs jours à deux religieux dominicains infirmes et avancés en âge, dans le couvent de Cette ville ;
8° Des officiers municipaux de Libourne, contenant le procès-verbal du serment civique prêté par les gardes nationales de cette ville et de la banlieue ;
9° De la communauté des Adjots. canton de Ruffec;
10° Dès officiers municipaux, des gardes nationales et des troupes réglées de terre et de
mer en garnison dans la ville de Toulon* qui, pour resserrer de plus en plus l'union qui
règne entre les militaires et les citoyens/ ont fait, avec ia
li? Des curés de la ville d'Issoudun et de la communauté de Segry, département de l'Indre, qui déclarent authentiquement qu'ils protestent contre tous écrits anticonstitutionnels, et notamment celui intitulé : Déclaration d'une partie ae ïAssemblée nationale ;
12® De la ville de fécamp. Elle annonce que sa contribution patriotique s'éiève à la somme oe !>0,84Q livres, qu'elle se soumet d'acquérir des biens nationaux pour la somme d'un million, et demande la permission d'imposer celle de 3,000liv. pour faire face aux besoins les plus urgents;
13° De la municipalité de Saint-Menoux, département de l'Allier. Elle se plaint d'avoir été forcée par les circonstances à taxer les grains, et elle envoie un procès-verbaî qui prouve qu'un particulier, receveur des droits d'aides, sollicite les contribuables de ne les pas payer, et dit qu'il en est chargé par le receveur des" aides mêmes;
14° De la ville du Pont-du-Château. Indépendamment de sa contribution patriotique, montant à la somme de 1,605 livres, elle fait don du produit des impositions sur les ci-devant privilégiés, montant a 1,646 liv.;
15° Des officiers municipaux de la ville de Mâçon contenant le serment civique prêté par les dames et les demoiselles de cette ville. Elles supplient l'Assemblée d'ordonner qu'il sera placé dans toutes les églises paroissiales, auprès des fonds baptismaux, un drapeau national, sous lequel l'on passera les nouveau-nés pendant que Içs parrains et marraines prononceront pour eux le serment civique ;
16ô De la ville de Riez, département des Basses-Alpes, et de la communauté de Genouillé, en Poitou- Elles s'élèvent avec force contre la déclaration d'une partie de l'Assemhlée ;
17° Des habitants patriotes de la ville de Nogaro, qui protestent de la manière la plus expresse contre une délibération prise par quelques citoyens fanatiques de cette ville, et mendiée par les ennemis de la Constitution ;
18° De la municipalité de Palinges, qui annonce les troubles excités par quelques mauvais citoyens, et heureusement dissipés par les maréchaussées et gardes nationales des environs;
19° Des bas-officiers et fusiliers invalides en garnison à Salins, Oq y lit : « La continuation de nos prières, nos armes, et même ia dernière goutte de notre sang, s'il le faut, serviront à renverser les enhemis dë la Constitution. Notre bon roi et vous, ô très illustres représentants, serez toujours gravés en nos cûeurs, surtout au saint sacrifice de la messé » ;
20° Des officiers municipaux d'Yvier, près Aubenton. Ils demandent des armes pour la milice citoyenne;
21°. De plusieurs curés et vicaires du Forez et des religieux delà ville de Saint-Etienne, qui improuvent avec force la déclaration d'une partie de l'Assemblée nationale ;
22° De la municipalité de la ville de Vienne, contenant le procès-verbal de la prestation du serment civique de la garde nationale de cette ville et de Sa garnison ;
2â° De la commune de Saint-Pourcain. Elle se soumet d'acquérir des biens nationaux pour la somme de 35XX,OÔO liv, ;
24° De la garde nationale du bourg de Baller, au Maine, qui a prêté avec solennité le serment civique;
25° De la commune dç Çires-les-Mello- Sa conr-tribution patriotique s'élève à la somme de 3,628 liv. 17 s.;
26° Adresses des assemblées primaires des cantons de Montreuil-sur^Mer, de Roquefort, de Pompignac, au département de la Gironde; de boge-Fougereuse, département de la Vendée ; de VUle-Dieu, département de la Manche; de Dora-front, département de l'Orne; de Lodeve, département de l'Hérault; de Loogueville, de Valognes, de la Mothe-SainfcHéraye, département des Deux-Sèvres ;
Des membres composant le district de Rethel, département des Ardennes, celui de Mâcon et celui de Reims, département de la Marne ;
Des assemblées électorales du département de l'Aude, du département du Tarn, du département des Côtes-du-Nord, du département de la gartbe, du département de l'Allier, et des administrateurs du département du Doubs;
Toutes ces assemblées expriment avec énergie les sentiments d'admiration, de reconnaissance et de dévouement dont elles sont pénétrées pour l'Assemblée nationale, la supplient de ne pas se faire remplacer avant d'avoir achevé le grand ouvrage de la Constitution, et désapprouvent formellement la déclaration de la minorité de l'Assemblée ;
27*. Adresse du clergé du district de Nantua; on y lit ces expressions vraiment patriotiques : « Pour nous, en renouvelant notre adhésion à tous les décrets de l'Assemblée nationale sanctionnés ou acceptés par le roi, notamment à celui du 13 avril dernier, et à tous autres concernant la vente des biens du clergé déelarés nationaux, et improuvaht toutes protestations contraires, nous jurons d'éclairer les peuples sur leurs vrais intérêts; et en leur prêchant up attachement inviolable à la pureté de la foi, nous ne cesserons de leur développer la sagesse des décrets de l'Assemblée nationale, ei de leur donner "l'exemple d'une parfaite soumission.
donne leeture d'une adresse des bas-officiers et soldats du régiment d'infanterie de la Fère : % C'est toujours, disent-ils, avec un noble enthousiasme, que nous répétons le serment d'être fidèles à la nation, à la loi et au roi que nous n'avons jamais cessé un instant d'aimer, d'être liés de cœur et de force avec les citoyens-soldats comme avec les soldats-citoyens, de n'obéir et d'employer nos armes que contre les ennemis du bien public et de la patrie, quels qu'ils soient. »
Ils annoncent qu'ils ont envoyé une adresse A l'armée française pour l'engager à s'unir à leur pacte fédératif.
La commune de la ville d'Angers, département de Maine-et-Loire, a ressenti la même douleur que tous les bons citoyens, de vojr qu'on avait tenté presque partout de gêner les peuples en cherchant à leur faire confondra la religion avec l'intérêt de ses ministres; mais elle a eu aussi la douce consolation de voir son évêque agir tout â la fois comme un ministre éclairé et comme un citoyen patriote> Aussitôt après la formation du département, ce pasteur a donné un mandement pour ordonner qu'en chantât dans toutes les églises de son diocèse un Te Deum en actions de grâces- La commune, satisfaite d'une pareille conduite, a chargé la dêputation du département de présenter à l'Assemblée nationale un exem-
plaire de ce mandement, Je vous demande la permission, Messieurs, de vous en faire la lecture.
Mandement de Monseigneur l'évêque d'Angers, qui ordonne que le Te ljeum sera chanté dans toutes les églises de son diocèse, en actions de grâces de la nomination des administrateurs du département de Maine-etrLoire (1).
Michel-François Coqet du Viviers de Lorry, par la miséricorde divine et la grâce du saint-siège apostolique, évêque d'Angers, conseiller du roi en tous ses conseils, etc. Au clergé séculier et régulier ^ et aux fidèles de notre diocèse, salut et bénédiction en notre Seigneqr Jésus-Christ.
Celui, nos très chers frères, qui du haut des deux pénètre jusqu'au fond de nos cœurs, qui y voit et dirige tout par sa puissance, a exaqçé l'humble prière que nous lui ayons adressée, en commençant par l'assemblée de vos représentants.
Nous lui demandions de répandre sur eux son divin esprit, sa sagesse et son amour du bien public; et nous venons de lui rendre, dans SOU temple, de solennelles actions de grâces, pour avoir choisi, dans sa miséricorde, des hommes sages et éclairés, qui, après l'avoir fait adorer, feront régner sa justice et sa bonté sur les rives dé la Maine et de la Loire.
Unissez, nos très çhers frères, vos cantiques aux nôtres, pour lui exprimer votre reconnaissance de ce nouveau bienfait accardé à cette province. Vous êtes les descendants de ces bons et généreux Français, qui se sont distingués dans tous les temps par leur amour pour la religion et pour la patrie, par la douceur de leurs mœurs, et cette aimable sociabilité qui les a rendus célèbre? dans tout l'univers. Vous vous êtes, jusqu'à présent, montrés les héritiers de leur caractère et de leurs vertus, vous deyez les transmettre à vos enfants, aussi purs que vous les ave? reçus de vos pères»
Graves de bonne heure dans leurs jeunes cœurs cette grande vérité, que la religion est )a seule base solide et inébranlable de la gloire et du bonheur des hommes. Faites-leur bégayer dès leur enfance les noms de Dieu, de Frère et de Patrie ; faites-leur prononcer le serment d'être fidèles à la nation, a la loi et au roi, serment qui est devenu lé cri de tout Français citoyen.
Et vous, nos coojpérateurs, chargés de l'honorable fonction de travailler avec zèle et sagesse au bonheur du troupeau qui vous est confié; ministres d'un Dieu juste et clément, unissez à la sublimité de vp$ leçons, la force irrésistible de l'exemple, Lisez souvent et méditez l'Evangile. Imitez nptfe maître et notre fondateur,
II fut, durant sa vie mortelle, compatissant pour les faibles et miséricordieux pour les pécheurs. Partout il prêcha la paix et la concorde, le pardon des injures et l'amour de ses frères. Il accomplissait la loi et donnait le premier l'exemple de la soumission aux puissances qyi gouvernaient alors la Judée. Voilà, mes frères, le chef et le modèle des vrais pasteurs.
Ses apôtres, témoins de sa vie et de sa mission, marchèrent sur ses traces, et se
répandirent
Successeurs des apôtres et des disciples du Christ, retraçons dans notre conduite la simplicité de leur vie, la sainteté de leurs mœurs, la douceur de leur zèle, la constance de leur charité ; soyons leurs imitateurs, comme ils l'ont été de Jésus-Christ; revêtons-nous de leurs vertus, que rien n'en altère la pureté, et nous verrons bientôt renaître la vénération et l'amour des premiers fidèles, pour leurs pères, leurs consolateurs et leurs bienfaiteurs. Ce peuple religieux et bon ne s'est point éloigné de nous, il reviendra toujours chercher dans notre sein les seules consolations véritables. C'est le propre de notre ministère d'être constamment honorés, respectés et chéris. Eh ! qui voudrait nous priver du pouvoir de faire du bien, d'édifier et de consoler 1 Nous serons toujours assez riches pour vivre et trop pour mourir...
Fidèles à Dieu, à la nation, à la loi et au roi ; amis de l'ordre, de la justice et la paix ; tendres et bienfaisants pour nos frères ; soumis à tout ce que la Providence ordonnera, faisons revivre les beaux jours de l'Eglise naissante, et dignes émules des fidèles de Corinthe et de Rome, nous verrons les pasteurs et le troupeau, unis des mêmes sentiments, ne faire qu'un corps et qu'une âme.
A ces causes, nous ordonnons que le Te Deum qui a été solennellement chanté jeudi dernier dans notre église cathédrale, en actions de grâces de la nomination des administrateurs du département de Maine-et-Loire, sera pareillement chanté dans toutes les églises de cette ville et du diocèse, exemptes ou non exemptes, le dimanche qui suivra immédiatement la réception de notre présent mandement, lequel sera lu et publié au prône des messes paroissiales de la ville et des campagnes, et affiché partout où besoin sera.
Donné à Angers, dans notre palais épiscopal, sous notre seing, le sceau de nos armes, et le contre-seing de notre secrétaire ordinaire, le trente mai mil sept cent quatre-vingt-dix.
M. Fr. Evêque d'Angers.
PAR MONSEIGNEUR,
Chivaille, chanoine-secrétaire.
Je demande l'impression de ce mandement, l'envoi à tous les départements et à tous les évêques.
J'appuie cette motion; c'est une bonne leçon à donner à l'épiscopat, et il en a besoin.
, évêque de Nîmes. Le mandement de M. l'évêque d'Angers me fait le plus grand plaisir ; il n'est aucun de nous qui, dans tous les temps, n'ait donné des preuves de ses bons sentiments. Quant â ceux qui veulent donner une bonne leçon à l'épiscopat, leur réflexion a parfaitement rempli leur but. Je demande qu'on passe à l'ordre du jour. (On réclame la priorité pour la motion de M. l'abbé
de la Salcette; elle lui est accordée, et la motion est décrétée.)
Le sieur l'HermiDier, maître en chirurgie, député pour la maison de la Trappe, est admis à la barre, et dit : « Nosseigneurs, honoré de la confiance des religieux de la Trappe qui ne cessent de lever les mains vers le ciel pour la prospérité des augustes représentants de la nation, je viens déposer dans le sanctuaire de la vérité les respectueux sentiments et les hommages qui leur sont inspirés par les sages dispositions que le génie de la France inspire aux pères de la patrie. Ils sont consignés ces vrais sentiments dans l'humble adresse dont je vais avoir l'honneur de faire le dépôt entre vos mains. »
répond : « L'Assemblée nationale ne peut se rappeler sans intérêt les pieux solitaires dont vous êtes l'organe : rendant justice aux motifs pieux qui les animent, elle pèsera dans sa sagesse l'objet de leur demande. L'Assemblée vous permet d'assister à sa séance. »
(Le mémoire, présenté par le député de la Trappe, est renvoyé au bureau du comité ecclésiastique.)
La garde nationale de Ghaumont, en Bassigny, envoie une députation qui, ést admise à la barre.
M. Durville, orateur de la garde nationale, prononce un discours qui mérite les applaudissements de l'Assemblée.
répond : « L'Assemblée nationale reçoit avec satisfaction l'hommage que vous lui présentez. Elle aime à entendre dans la bouche de ceux qui se sont voués à la défense de la liberté le langage du respect à la loi. C'est dans la vue de mettre les soldats-citoyens dans la possibilité de puiser à leur source les principes dont la garde nationale de Ghaumont paraît déjà pénétrée que l'Assemblée nationale a porté le décret que vous nous avez rappelé. Elle vous accorde la permission d'assister à sa séance. »
Le sieur Laborie, admis à la barre, présente l'analyse d'un temple de la Concorde, dédié à Louis XVI.
répond : « L'Assemblée nationale applaudit à votre patriotisme ; c'est une idée douce à présenter aux Français que celle de la vertu dont vous nous offrez le templç. La liberté s'acquiert par le courage, elle s'éternise par la concorde. Nous acceptons le présage que votre zèle nous présente. L'Assemblée vous permet d'assister à sa séance. »
Soumission de la ville de Mur-de-Barrès de deux millions pour acquérir des biens nationaux.
M. Petit de Goupray offre à la nation le portrait du docteur Francklin.
lui dit : « Le décret par lequel l'Assemblée nationale a prouvé que la mort d'un grand homme et d'un ami de la liberté est un sujet d'affliction pour toute nation généreuse et libre vous assure qu'elle reçoit avec satisfaction l'image respectable de l'homme qui alluma la première étincelle du feu sacré qui nous anime; elle applaudit à l'usage que votre patriotisme a fait de vos talents ; elle prise votre don patriotique à sa véritable valeur. Elle vous permet d'assister à sa séance. »
fait hommage à l'Assemblée,-au nom du sieur Hélie, citoyen de la ville de Rennes, d^ un Traité sur la morve des chevaux.
Ge traité est renvoyé aux comités de commerce et d'agriculture.
donne connaissance à l'Assemblée d'un acte de désintéressement et de bienfaisance fait par les bas-officiers et cavaliers du régiment de Royal-Picardie, cavalerie, qui ont fait distribuer aux pauvres de la ville d'Angers, que la cherté du pain rend malheureux, la somme de 662 livrés, dont les avait gratifiés l'assemblée des électeurs tenue à Angers pour la formation du département, comme preuve de leur satisfaction pour les soins constants qu'ils se sont donné pour la sûreté, la police et l'ordre extérieur du lieu des séances. L'Assemblée nationale témoigne sa satisfaction de ce trait, où elle reconnaît l'esprit du soldat français, et ordonne qu'il en sera fait mention dans son procès-verbal.
communique une délibération de la ville de Briare, qui demande l'autorisation d'établir un rôle de supplément pour faire face à des dépenses extraordinaires.
Cette affaire est renvoyée au comité des finances.
présente une adresse des juifs d'Alsace. Elle est renvoyée au comité de Constitution.
présente une délibération de l'Assemblée primaire des citoyens actifs du canton de Ganet au district de Narbonne, département de l'Aude, portant acceptation et approbation de la Constitution décrétée par l'Assemblée nationale, acceptée ou sanctionnée par le roi. Cette délibération contenant diverses pétitions relatives aux dîmes et aux droits féodaux, l'Assemblée nationale la renvoie au comité des dîmes et à celui de féodalité.
présente une adresse du présidial de la ville de Tulle, qui supplie l'Assemblée nationale de commettre un tribunal pour prononcer sur l'inculpation que le procureur du roi, au même siège, s'est permise contre les membres du présidial. Le présidial de Tulle demande pareillement que l'Assemblée commette un tribunal pour juger les prévenus détenus dans les prisons de la ville de Tulle.
L'Assemblée nationale décrète la mention de l'adresse dans son procès-verbal et le renvoi au comité des rapports.
L'ordre du jour est un rapport du comité des rapports sur l'affaire de Nîmes.
, rapporteur. Messieurs, des troubles affligeants sont survenus dans la ville de Nîmes : l'explosion qu'ils ont déjà occasionnée, leur liaison et leur rapport avec ces semences de discorde religieuse qui fermentent dans la partie méridionale de la France, vous paraîtront sans doute mériter l'attention la plus sérieuse et exiger les soins les plus efficaces. Votre comité des recherches ne vous entretiendra pas, dans ce moment, des dénonciations faites contre la municipalité de Nîmes, l'instruction sur cette partie n'ayant pas encore reçu le degré de perfection qui lui est nécessaire pour être présentée à l'Assemblée nationale. Le rapport que je vais
vous faire au nom de votre comité des rapports ne roulera que sur une délibération prise, le 20 avril dernier, par des soi-disant catholiques de Nîmes. Votre comité vous parlera aussi de la nécessité indispensable d'ordonner la preuve des faits qui lui ont été dénoncés. Ces prétendus catholiques se sont livrés publiquement à des injures réfléchies et impardonnables contre l'Assemblée nationale et le roi. Ils ont osé diffamer dans l'opinion publique les décrets des législateurs et les actes du pouvoir. Ils ont présenté le monarque comme esclave au milieu de son peuple. Non contente de se livrer à cet excès de démence, cette foule égarée a mis tout en usage pour propager le fanatisme qui l'agitait. L'acte monstrueux qui en a été le fruit a été publié, et l'on n'a pas craint de le porter jusque dans le sanctuaire des lois et jusqu'au pied du trône. C'est contre de pareils attentats que plusieurs municipalités invoquent l'autorité suprême. Arrêtons le mal lorsqu'il en est temps encore, et rendons des décisions qui dissipent les prestiges dont on tâche d'environner les peuples. C'est cette décision que sollicite votre comité. Concluez les principes de justice rigoureuse avec l'intérêt du bien public ; cherchez un moyen qui assure la punition des coupables, maintienne le respect dû à la religion, et range tous les cœurs à des sentiments de paix et de fraternité. La délibération contre laquelle vous avez à sévir vous en offre tous les moyens.
Dix des signataires se sont, en quelque sorte, proclamés les chefs de cette ligue téméraire. Ge sont eux qui sont les principaux et peut-être les seuls auteurs du délit; c'est sur eux que doit frapper directement le châtiment. Que votre jugement intimide à jamais quiconque oserait égarer ce peuple facile, mais généreux, qu'on ne précipite dans Terreur qu'en empruntant le masque des vertus qu'il idolâtre. J'ajoute ici, Messieurs, que, depuis le premier rapport, il a été remis au comité une nouvelle délibération, en date du 1er juin.
Dans cet état de choses, le comité, persuadé qu'au moment où les assemblées primaires se forment il est de votre prudence d'en écarter ces esprits dangereux qui pourraient y porter le trouble et y introduire des principes depuis longtemps proscrits, vous propose de décréter: « Que lesdits particuliers qui ont signé, comme commissaires, la- délibération des soi-disant catholiques de Nîmes, et les nouveaux signataires du 1er de ce mois, seront mandés à la barre, danstel délai qu'il vous plaira fixer, et qu'en attendant qu'ils aient obéi à votre décret ils seront privés provisoirement des droits attachés à la qualité de citoyens actifs. »
Quant au surplus, le comité recevant chaque jour un très grand nombre de pièces relativesaux troubles de la ville de Nîmes, et des pièces ne pouvant seules fixer son opinion, votre comité vous propose d'ordonner que votre président se retirera vers le roi pour le supplier de faire informer sur les faits tels qu'ils sont exposés dans le mémoire dont je vais avoir l'honneur de vous faire lecture.
Il vient d'être remis à votre comité une délibération des soi-disant catholiques d'Uzés. Comme cette délibération est une adhésion à celle de Nîmes, et qu'elle contient les mêmes principes, votre comité vous proposera de décréter que les individus qui ont signe ladite délibération soient traités comme ceux qui ont signé celle de Nîmes. Je vais actuellement vous faire lecture des faits dont la preuve est offerte; {On demande si le mâ-
moiré est signé.) Le mémoire lie l'est pas. mais il était joint à une lettre d'eûVoi qui est signée.
Il h'egt pas de la dignité dé l'Assemblée de souffrir la lecture d'une pièce anonyme. Qui voUs assurera de la Vérité defe faits qui y sont constatés ?
Si les faits êndhéês étalent soutenus par des preuves, on ne demanderait pas la preuve des faits.
(Quelques minutes se passent dans le tumulte.) L'Assemblée décide que M. le rapporteur Sera entendu jusqu'à la fin, sans être interrompu.
Faits doni la preuve est offerte : 1° Complot fait pour exclure les protestants de la municipalité, et, pour cet effet, discours iticen-diaires dans les églises.
Je né Connais point d'accusations sans accusateurs.
je demande que M. le rapporteur soit mis à l'ordre. Il ne peut rapporte!1 que dès pièces probantes, et c'est un libelle qu'il nOUs lit.
Si on continue d'empêcher la lecture, je prouverai que là pièCe doit être lue.
Assemblées nocturnes dans les péniténts et autres; distribution d'argent et de listes par des prêtres et autres personnes à eux affidées.
2* Exhortations par des prêtres et autres à des particuliers, poUr ne pas fairë leur déclaration pour la contribution patriotique, en disant qu'il n'y avait que des sots dui en faisaient ; que c'était autant de perdu; que la banqueroute était inévitable, et que les députés a l'Assemblée nationale dévoraient les revenus de l'Ëtat.
Il est bien singulier qu'on nous dise tant de sottises, et qUe nous lé souffrions.
3° Discours séditieux d'un prêtre, disant que ia contre-révolution était inévitable, et que poUr l'effectuer il fallait du sang, et qui excitait, pour cet effet» les catholiques à rechercher querelle aux protestants.
4° Sollicitations laites par un notable pour engager les femmes à s'attrouper devant l'église des Capdcins, pour supposer à l'inventaire du mobilier de la maison religieuse.
5Ô Assemblées secrètes de plusieurs légionnaires, un capitaine ayant dit qu'il était temps de faire tous les efforts possibles pour détruire l'Assemblée nàtiohale, et que, pour cet effet, il fallait employer toutes les forces.
6® Fabrication dé fourches par M. Coeffet, serrurier, par ordre de M.. Froment, capitaine de l'Une des compagnies de la légion, qui les a enfermées dans un moulin à huile.
7° Gris par des gens en cocarde blanche, devant la maison du maire, lé dimanche 2 mai; qu'ils ne quitteraient les cocardes blanches que quand elles seraient rougies du sang des protestants.
8° Ledit jour dimanche, sur le Cours, un nommé Fleury fut assomme à coups de Grosse de Fusil par des gens en cocardes blanches, les officiera municipaux présents *, le maire relève ledit Fleùrv, èt ordtnne aux valets de ville de le con-
duire en prison, laissant iëâ assaillants impunis. Lê public indigné enlève le malheureux des mains des valets de villé. Çtl s*élève de grands murmurés.)
, député à l'Assemblée natioilaîè, et maire de Nlmés, sé rend à la barré et demande ta parole.
Je dénonce le rapporteur àU comité des recherches*
demande là parole sur Une question d'ç>rdrev
L'Assemblée décide qu'il sera entendu.
Messieurs, je the serais bien gardé d'interrompre le rapporteur, si, contre toute discipline, il ne l'avait déjà été avec un acharnement qui ne peut être vaincu qu'en posant la question d'une autre manière; je.demande s'il peut y avoir quelque espèce de raison à exiger que le comité des recherches ne puisse présehtér qu'une piècesighéè lorsqu'elle n'est que l'initiative de l'information ; comme si te rapporteur était libre dans son choix, le voUs demande s'il n'aurait pàs prévariqué, s'il se réservait particulièrement telle ou telle pièce1? Je voUs demande si l'Assemblée n'est pas juge de leur validité, si lei comité n'a pas été institué pour ces sortes d informations, malheureusement si nécessaires? Les faits sont vrais ou ils sont fàUx; s'ils sont vrais, comme certaine crainte, Certaine opiniâtreté, certain tumulte nous donnent droit de le présumer, ils ne peuvent être connus qu'en laissant achever paisiblement renonciation et développer leur information! S'ils sont faux, qu'en redoute-t-on ? Quel étrange scrupule pourrait en arrêter la lecture au milieu des libelles qui nous environnent ?
Je crois rêver en entendant de pareils principes dans la tribune. .
J'espère n'être l'objet d'&ucuu rêve lorsque je demande tthe chose aussi simple que la lecture d'un rap* port commencé. Qu'il me soit permis de saisir cette occasion pour dire qu'il est impossible dé donner quelque dignité à cette Assemblée sans qu'elle ait établi une échelle des degrés de peines pour sa police intérieure. Je réclame l'exécution d'un décret sans lequel des intérêts privés donnent à cette Assemblée un air de tumulte tout k fait indigne d'elle.
(L'Assemblée décide qu'il lui sera présenté dimanche Uh ¥ïglèffte%l, dë poliôe par des commissaires nommés à cêt effet.)
lé demande la parole pour répondre à M. de Mirabeau.
Je demande qu'on rappelle à Tordre M. Duval d'Eprémesnil, qui,au mépris de nos décrets, ne porte pas le deuil de Francklin.
(Toute la partie gauche se lève et demande la continuation du rapport.)
On demande que je ne sois pas entendu ; c'est une motion ; je veux être entendu sur cette motion.
L'Assemblée décide que M. Duval d'Eprémesnil sera entendu.
Je n'abuserai pas des moments de l'Assemblée. M. de Mirabeau a réduit la question dont il s'agit à une question d'Ordre, et a prétendu qu'on devait entendre le rapport de la pièce comme étant l'initiative de l'information ; ceci est absolument contraire aux principes de la liberté et à ceux de M. de Mirabeau lui-même. L'histoire d'aucun peuple ne fournit point de pareils exemples; les délations anonymes ne peuvent être produites que pàr des fripons et acceptées que par des tyrans. M. de Mirabeau nous a parlé de libelles ; il y en a, eU effet, beaucoup qui viennent de Paris. M. de Mirabeau lui-même a été calomnié dans quelques-uns ; je lui demande s'il trouverait digne d'Uhe assemblée législative, qui alors se transforme en juge, qu'on lût dans cette assemblée toutes les horreurs calomnieuses qu'on répand coDtre lui, et qu'elles devinssent le sujet d'une délibération. Je crois aussi parler comme un homme librè. Un délateur qui voudrait en même temps servir de témoin n'aurait pas d'autre vote à prendre. II en résulte quê, cbntré les principes de la liberté et contre les principes de M. de Mirabeâu, cette forme tendrait à admettre des accusations anonymes et des dépositions mendiées. Je demande formellement que cette pièce ne soit pas lue.
En admettant les principes de M. de Mirabeau, OU ne serait pas libre môme après la prise de la Bastille.
M. Du val d'E-prémesnil n'a pas dit, ce me semble, un mot relatif à mon opinion et à la question. (De bruyants murmures se fpnt entendre de la partie droite). Si cette assertion se jugeait par les éclats dont on fait retentir cette salle, il semblerait que je n'ai parlé que d'une délation. J'atteste tout cê qui est impartial que Voici ce que j'ai dit : « Dans la sérié des pièces que présenté votre comité, il s'en trouve une qui n'est pas signée, » Cette pièce n'est pas ia dénonciation ; c'est un arrêté, une demande quelconque. (Le bruit recommence dans lapaftiè droite). Lorsqu'on parle au milieu de feux qui se croisent avec tant de rapidité, il est bien heureux dé n'avoir que des choses trèâ faciles à dire. On me demandé si les faits consignés dans la pièce dont il s'agit sont vrais, je réponds que C'est ce qu'il s'agit de déterminer par l'information ; on me dit encore : eh biêtt ! lisez-la ! Ce n'était pas la peine de m'interrompre, c'est ce que je demande depuis longtemps. Le comité des recnercbes ae peut être soumis aux formes méthodiques d'un tribunal ordinaire. La pièce est jointe à une lettre d'envoi signée ; nulle difficulté, elle doit être lue;
Il s'agit seulement/ de savoir si à là pièce était jointe à une lettre d'envoi si-» gnée.
Que le comité des recherches se rende responsable au moiDS, afin qu'on puisse le prendre à partie.
Depuis une heure on se débat pour savoir si on lira la pièce relative aux troubles très avérés de Nîmes. Le comité ne l'a point présentée comme anonyme, mais jointe à une adresse qui l'accompagnait et qui était signée. Fût-elle anonyme, on devrait encore la lire. Il y a eu de grands désordres, il s'agit d'en connaître les ins-
tigateurs. Le comité ne demande pas qu'on informe nominativement sur telle ou telle personne, mais sur tel ou tel fait. (Plusieurs membres de la partie droite s'écrient : G'est la honte de l'Assemblée nationale que ce comité des recherches !) Votre comité ne se dissimule pas qu'aux yeux de certaines personnes son existence est un délit social ; mais, quoi qu'il en soit, il remnlira son devoir. SI, par exemple, on lui donnait avis que le salut de l'Etat est en danger, et qu'il refusât de vous en donner avis, sous prétexte que les annoncés seraient anonymes, je vous le demande, ne serait-il pas criminel, ét ne le jugeriea-vous pas ainsi?
Toute la partie gauche se lève et demande à grands cris que le rapport soit continué sans interruption.
L'Assemblée le décide ainsi.
continue son rapport :
9° Le dimanche 2 mai, la compagnie du n° 31, qui avait déjeuné chez le maire, et dont la majeure partie s'était livrée à des excès sur le Cours, fut requise par le maire pour faire la gardé et la patrouille de nuit, quoique ce ne^fût pas son tour de service.
10° Le lundi 3 mai, à huit heures du matin, il y eut à l'hôtel de ville un attroupement d'environ deux cents personnes en cocardes blanches; un protestant ayant passé, ceux qui étaient au balcon, où il y avait un officier municipal, crièrent : Tue, tue / Aussitôt ceux qui se trouvaient devant la porte tombèrent sur ce particulier, qui fut sauvé par l'intrépidité du sieur Castanet, plâtrier. Le sieur Alet et le sieur François Ribe furent chassés de l'hôtel de ville en présence du maire. Dans la rue et devant la porte de l'hôtel de ville, des travailleurs disaient : « Feroiis-nous feu ? » Une femme leur observe : « Vous devriez avoir du respect pour M. le maire (il était présent) »; aussitôt celui-ci répondit: « Qu'on fasse retirer cette femme. >
11° Le même jour 3 mai, à six heures du soir, il y avait à la place des Récollets un attroupement de gens à cocârdes blanches, armés de fusils et de sabrés. Le maire et le sîeùr lie Gorn-bières, notable, précédés de deux valets dé ville, survinrent ; des coups de fusil furent tirés, des coups de sabre donnés au SieUr Mânipe fils : le maire et le notable présents se retirèrent.
12° Le lendemain, 4, les officiers municipaux se transportèrent chez lés sieurs Armand et Ma-rigdan, qui, 1a veille, avaient été assaillis à coups de pierre; ceUx-cl voulurent leur raconter Ce qui s'était passé; le maire leur dit d'un ton menaçant: « Ort ne Vous demande pas cela. »
13° Le même jour, au soir, M. le maire dit chez M. d'Augier, juge-mage, en présence de plusieurs personnes ; « Ne sait-on pas que si le maire avait reçu une égratignure, cent des plus notables et des plus rlcttes de la ville duraient été massacrés à l'instant sans qu'il en échappât un seul ? »
14d La nuit du 5 au 6, le procureur de la commune introduisit chez lui plus de deux cents hommes armés qui y passèrent la nuit.
15° Le dimanche 9 mai* un frère capucin, du couvent de Nîmes* distribua un imprimé intitulé Nouvelles de Parie, et dont un exemplaire est ici joint, à un officier municipal de la commune de Rodessan, lieu voisin de Nîmes* et à un autre particulier.
Je vais actuellement, Messieurs, vous faire lec-
ture de deux délibérations de la ville de Nîmes et de deux autres de la ville d'Uzès.
Extrait des délibérations.
Le mardi 20 avril, les citoyens catholiques de la Ville de Nîmes soussignés, assemblés dans l'église des pénitents blancs de ladite ville, ont unanimement délibéré de demander au roi et à l'Assemblée nationale :
1° Que la religion catholique, apostolique et romaine soit déclarée, par un décret solennel, la religion de l'Etat, et qu'elle jouisse seule des honneurs du culte public ;
2° Qu'il ne soit fait aucun changement dans la hiérarchie ecclésiastique, et que toutes les réformes qu'on jugera nécessaires dans les corps séculiers et réguliers ne puissent être opérées sans le concours des conciles nationaux, conformément aux lois canoniques de l'église gallicane;
3* Que l'Assemblée nationale sera suppliée d'employer toute son autorité pour faire rendre au roi le pouvoir exécutif dans toute son étendue, conformément à son décret du 23 septembre dernier, portant que le pouvoir exécutif suprême résidera exclusivement dans les mains du roi;
4° Que le roi discutera dans sa sagesse tous les décrets qu'il a sanctionnés depuis le 19 septembre dernier, et qu'il les sanctionnera de nouveau, s'il le juge nécessaire, pour qu'on ne puisse point à l'avenir attaquer la Constitution, sous quelque prétexte que ce puisse être ;
5° Que M. le président et MM. Michel, conseiller, capitaine de la compagnie n° 24 ; Vigne, négociant, capitaine de la compagnie n°30 ; Folacher, avocat, capitaine de la compagnie n° 36 ; Robin, négociant, lieutenant de la compagnie n° 36 ; Froment, avocat, capitaine de la compagnie n° 39 ; Velut, négociant, capitaine de la compagnie n° 40 ; Ribens, avocat, François Faure, marchand de bois ; Melquion aîné, négociant, capitaine de la compagnie n° 34 ; et Fernel, marchand libraire, commissaires nommés, sont chargés de faire présenter au roi une copie de cette délibération, d'en adresser une copie au président de l'Assemblée nationale, pour qu'elle daigne y avoir égard, et une troisième copie au conseil général de la commune ; étant persuadés, les délibérants, que le zèle du conseil, pour la religion et son amour pour notre auguste souverain, le porteront à y adhérer:
6° Enfin, lesdits commissaires sont autorisés à faire imprimer la présente délibération, et à en envoyer des exemplaires partout où besoin sera.
(La délibération de la ville d'Uzès contient les mêmes principes, exprimés en des termes différents.)
Autre déclaration et pétition des catholiques de Nîmes, en date du 1er juin.
« Les citoyens catholiques de Nîmes, formant la très grande majorité des habitants de ladite ville, assemblés dans l'église des Jacobins, surpris de voir élever des doutes sur leurs véritables sentiments, ont cru devoir en donner une véritable explication... Gomment pourrait-ou blâmer les citoyens de Nîmes d'avoir manifesté, à l'exemple de Châlons-sur-Marne, de tout, le pays de Gomminges, des principales villes d'Alsace, de Toulouse, d'Uzès et d'autres villes, leur attache-
ment pour la religion de leurs pères ? (M. Lavie proteste contre cette assertion pour l'Alsace ; M. Roger pour le Gomminges ; M. de Sillery pour Châlons.) Les citoyens catholiques de Nîmes déclarent et délibèrent unanimement : 1° qu'ils persistent dans leur pétition du 20 avril ; 2° qu'ils adhèrent à la déclaration d'une partie de l'Assemblée nationale, du 19 du même mois, concernant la religion; 3° qu'ils adhèrent aussi aux déclarations de Montauban,d'Alby,d'Alais, d'Uzès et des autres villes qui en ont pris de semblables ; 4° que, pour faire connaître au roi et à l'Assemblée nationale leurs véritables sentiments, qu'on a mal interprêtés, et la pureté des motifs qui ont dicté leur pétition du zO avril, la présente délibération leur sera adressée, qu'elle sera imprimée, etc. >
Vous avez entendu, Messieurs, la lecture des pièces ; elles sont bien suffisantes, et n'ont pas besoin, je crois, d'être appuyées par de nouvelles réflexions. Voici, en conséquence, le projet de décret que j'ai l'honneur de vous proposer :
« L'Assemblée nationale, sur le rapport qui lui a été fait, au nom de son comité des recherches, de deux délibérations des soi-disant catholiques de Nîmes, des 20 avril dernier et 1er de ce mois, ainsi que d'une autre délibération des soi-disant catholiques d'Uzès, en adhésion aux deux premières et en date du 2 mai dernier ; considérant que lesdites délibérations contiennent des principes dangereux et propres à exciter des troubles et des dissensions dans le royaume, a décrété et décrète que MM. Pierre-Michel Vigne, Folacher, Robin, etc., qui ont signé en qualité de président et de commissaires, seront mandés à la barre de l'Assemblée pour y rendre compte de leur conduite, et que, jusqu'à ce qu'ils aient obéi au présent décret, ils demeureront privés des droits attachés à la qualité de citoyens actifs ; 2° sur l'observation faite par le comité des recherches, qu'il lui a été remis un très grand nombre de pièces concernant les troubles de la ville de Nîmes, et qu'il est indispensable d'acquérir les preuves des faits y énoncés, circonstances et dépendances, l'Assemblée nationale a arrêté que son président se retirera sans délai par devers le roi, pour supplier Sa Majesté d'ordonner qu'il sera informé desdits faits par devant le présidial de Nîmes. »
(On demande l'ajournement à jeudi soir. Cette proposition est adoptée.)
La séance est levée à onze heures.
Séance du
La séance est ouverte à 9 heures du matin.
, ex-président, occupe le fauteuil en l'absence de M. Sieyès, président en fonctions.
L'affluence des adresses et des députations occupent presque en entier toutes les séances du soir, au détriment de questions importantes sur lesquelles vous ne trouvez pas le temps de prononcer. Je fais la motion qu'il y ait, tous les lundis, une séance extraordinaire destinée à recevoir les adresses, pétitions et députations, et qu'il n'en soit reçu aucune dans les autres séances du soir; il ne sera fait d'exception que pour la commune de Paris, attendu l'urgence des pétitions qu'elle peut avoir à nous présenter.
(Cette motion rencontre d'abord beaucoup d'approbations.)
Je rends hommage aux vues sages du préopinant; mais j'observe que, s'il y avait des séances consacrées seulement à entendre des adresses ou des félicitations, beaucoup de députés, fatigués par leurs longs travaux , ou d'une mauvaise santé, ou absorbés par les comités, se dispenseraient de paraître à ces séances, qui, bientôt, perdraient beaucoup de leur dignité par l'absence d'un très grand nombre de mem -bres.
La proposition qui vous est faite aurait pour résultat d'éloigner les adresses, les expressions du patriotisme et la connaissance de l'état des provinces; c'est pour cela qu'il est dangereux d'adopter la motion.
La motion, si elle était adoptée, ferait rester très longtemps à Paris des députés qui arrivent souvent pour des affaires pressantes et qui ont hâte de regagner leurs foyers.
Les représentants de la nation doivent attacher un grand prix à l'opinion publique; par conséquent, ils ne sauraient recevoir trop d'adhésions à leurs décrets.
J'avais pensé qu'il valait mieux faire les affaires du pays que dè respirer l'encens qu'on brûle à nos pieds; c'est pour cela que j'avais fait ma motion; je n'y insiste pas, puisqu'elle rencontre de l'opposition.
La motion a du bon, et je la reprends en la modifiant. Je demande que, dans chaque séance du soir, une heure seulement soit employée à la lecture des adresses et à la réception des pétitions et députations.
(Cette motion est adoptée.)
M. de Noailles demande à entretenir l'Assemblée de l'inexécution des décrets relatifs aux droits de terrage et de cham-jtart dans le district de Nemours.
(L'Assemblée décide que^M. de Noailles sera entendu.)
Vous avez entendu parler plusieurs fois des désordres qui régnent dans quelques parties de l'Empire. Ce n'est pas la faute des peuples, qui sont trop souvent trompés; ce n'est pas la faute des administrateurs, qui donnent tous leurs soins à l'exécution des décrets et au maintien de l'ordre public; mais c'est la faute des ministres : c'est à leur fâcheuse inertie, c'est à leur coupable ambition, c'est à leur désir de rattraper le pouvoir que vous leur avez si sagement ôté, qu'il faut attribuer
ces désordres. Ils voudraient que l'accroissement des maux fît regretter leur dangereuse puissance, afin qu'ils reprissent une autorité que vous avez si sagement détruite. Je vais vous en donner une preuve non équivoque : Vous avez, il y a près d'un mois, rendu un décret sur les droits de ter-rage et de champart. Dans le district de Nemours, dont j'ai l'honneur d'être député, ce décret était mal interprété. J'ose assurer qu'il n'est cependant pas de lieu où l'on reçoive vos décrets avec plus de joie, où on les exécute avec plus d'empressement. Nous nous sommes adressés au comité féodal, qui, par une délibération unanime, a reconnu qu'on ne pouvait pas expliquer un décret par un décret, et nous avons été forcés à faire une démarche, toujours fâcheuse pour un député, à aller trouver un ministre.
Nous avons demandé à M. le garde des sceaux une proclamation des décrets des 15 mars et 20 avril : nous avons représenté que, si elle était promptement publiée, le mal, dans sa source, serait aisément arrêté; qu'au contraire, si on différait, il pourrait être sans remède. Trois fois ce ministre nous a donné sa promesse, trois fois notre espérance a été trompée. Les députés du département avaient écrit pour indiquer le vrai sens des décrets ; ils avaient annoncé une proclamation ; les propriétaires ont envoyé des huissiers pour faire payer les droits que vos décrets avaient conservés. La proclamation du roi n'était pas arrivée. L'un des huissiers a été pendu, un autre a été assommé. Le peuple qui, même dans les excès de la fureur que lui inspire ce qu'il croit une injustice, conserve toujours une pitié, une sensibilité naturelle, a été touché; il a coupé la corde, et cet huissier a été sauvé ; l'autre est dans un état affreux. Affligés de ces événements malheureux , nous sommes retourné chez M. le garde des sceaux; nous avons renouvelé nos instances: il nous a envoyés valeter dans toutes les antichambres, en nous disant qu'il fallait un accord complet de tous les ministres pour porter rémède à ces désordres. Vous voyez si le peuple^est coupable de tous les malheurs dont le récit nous afflige.
Je dois dire, à la dépharge de M. le garde des sceaux (car, lorsque je dévoile les vérités qui l'accusent, je ne puis cacher çe qui pourrait l'excuser), je dois dire que, malgré les plaintes que nous lui avons portées ; que, malgré les lettres anthentiques que nous lui avons présentées, il a pensé qu'il fallait qu'on lui envoyât les procès-verbaux des municipalités... Je demande qu'il soit décrété que M. le président se retirera devers le roi, pour le prier de rendre sur-le-champ une proclamation qui rappelle les décrets des 15 mars et 20 avril derniers, et enjoigne de nouveau, à tous ceux à qui il appartiendra, de tenir la main à leur exécution et de donner les ordres nécessaires pour que cette proclamation soit lue au prône.
Il est impossible de prendre une délibération sans entendre M. le garde des sceaux. Je demande qu'il soit mandé sur-le-champ a la barre.
Je dois relever une erreur du comité féodal : c'est à l'Assemblée seule qu'appartient l'interprétation de ses décrets.
Vous avez décrété que le pouvoir exécutif ne pouvait faire aucune loi, mais des proclamations, pour en or-
donner et en rappeler l'exécution. Le comité féodal a répondu, â Dotre demande, que le pouvoir exécutif devait être requis de faire une proclamation qui rappelât les dispositions des décrets des 15 mars et 20 avril derniers. Nous avons sollicité cette proclamation. Je demande si les députés ne sont pas en règle, si le comité féodal n'est pas en règle, si les ministres sont en règle ?
, curé dé Souppes. Je suis du même district que M. dé Noailles. Je connais les faits qu'il vous a présentés, et j'insiste sur la proposition qui vous a été faite de mander M. le garde des sceaux à la barre. Il me semble que la proclamation demandée en ce moment devrait être générale pour tout le royaume.
Il faut lier ensemble ce qui regarde les dîmes ecclésiastiques et les droits de champart. Le Comité des dîmes a un projet de décret â vous proposer. La discussion présente pourrait être ajournée à demain.
Cette discussion a deux objets : 1° la proclamation à faire ou le décret à rendre : c'est Sur Cette partie que peut porter le renvoi ; 2° la faute du ministre : s'il est coupable, il faut le punir; pour le punir, il faut s'assurer s'il est coupable : pour s'en assurer, il faut l'entendre. On doit donc le mander à l'instant à la barre.
M. Merlin vient de nous dire que le comité des dîmes ecclésiastiques étudiait la question du champart et qu'il allait vous proposer un décret. Il en résulte que si vos décrets antérieurs doivent être changés, nous devons nous trouver heureux que la proclamation n'ait pas été faite» Je démandé l'ajournement.
(L'Assemblée ajourne cette affaire à demain.)
Le sieur Thoque, serrurier de Versailles, offre en don patriotique une serrure dont il est l'inventeur, et déjà approuvée par plusieurs académies.
L'Assemblée accepte le don patriotique.
, membre du comité des rapports, reiid compte de ce qui s'est passé à l'assemblée électorale du district provisoire de Guise. Il fait, ainsi qu'il suit, l'historique de cette affaire :
L'Assemblée nationale a décrété, le 6 février, que les électeurs du district provisoire de Guise statueraient, lors de leur première assemblée, sur la fixation du chef-lieu* et sur la réunion ou le partage, entre Gluise et Vervins, des établissements résultant de la Constitution.
Guise craignait de voir ses prétentions frustrées, car le plus grand nombre des administrés a intérêt à ce que Vervins soit le chef-iieu de l'administration.
Que fit-on? On sema des bruits capables d'éloigner de l'assemblée électorale, qui devait se tenir à Guise, tous ceux qui pouvaient voter pour Vervins, et ces menées devaient assurer par là la prépondérance des votants pour Guise.
Ces bruits firent naître des inquiétudes, et la majorité des électeurs réunis à Chauny, pour la fixation du chef-lieu de département, adressa une requête à l'Assemblée nationale, pour demander que les électeurs, au lieu de s'assembler à Guise, fussent réunis dans un lieu neutre.
Cette requête était signée de 83 électeurs sur 131 dont l'assemblée électorale devait être corn?
posée. Une seconde requête aux mêmes finsi souscrite en présence de M. le commissaire du roi, fut adressée au comité de Constitution, ainsi qu'une pétition du corps administratif du département qui sollicitait le lieu neutre.
M. de ViefviUe des Essarts, député du Ver-mandois et citoyen de la ville de Guise, s'opposa avec la plus grande chaleur à ce que l'Assemblée nationale fît droit sur la demande d'un lieu neutre : il répondit, sur sa tête, que les élec-lecteurs, quels qu'ils fussent et quelque fût leur avis, n'éprouveraient pas la moindre violence à Guise. L'Assemblée nationale rerusa le lieu neutre, et les électeurs, par respect pour le décret, se rendirent, malgré leur répugnance, malgré les craintes les plus légitimes, à l'assemblée électorale indiquée à Guise.
Le lundi 7 juin, au matin, on alla au scrutin sur la fixation du cheWieu : 70 électeurs votèrent pour Vervins, 60 seulement pour Guise ; Vervins fut proclamé chef-lieu ; il était alors midi. Dès qu'on sut que la majorité était en faveur de Vervins, et ayant que le proGès-verbaj pût être rédigé et signé, le peuple de Guise s'attroupa : les électeurs suspects d'avoir voté pour Vervins furent menacés; des victimes furent désignées, des atrocités annoncées. Le détail en a été mis sous les yeux du comité des rapports. Dès ce moment, l'assemblée électorale put être regardée comme dissoute.
Une grande partie des électeurs qui avaient voté pour Vervins disparurent; d'autres furent contraints de rester. A sept heures du soir, les officiers municipaux firent annoncer que l'assemblée pouvait se réunir. Le peu d'électeurs qui n'avaient pu s'échapper de Vervins s'y rendirent; et là, le peuple étant encore attroupé, un électeur de Guise proposa d'annuler tout ce qui s'était fait le matin. La motion ne fut point contredite, et, sans aucune réclamation, on annula la délibération du malin. Le lendemain, on délibéra de nouveau sur la fixation du chef-lieu, et, à la majorité de 72 voix contre 2» Guise fut proclamé chef-lieu. Dans la même séance^ la réunion des établissements en faveur de Guise fut arrêtée à la majorité de 72 voix contre une. On eut soin de faire insérer dans le procès-ver bal que les électeurs étaient libres. Quelle liberté que celle qui assurait à Vervins 2 suffrages sur 70.qui lui avaient été donnés la veille 1 On se disposait à nommer les membres du corps administratif et à consommer ainsi le complot qu'on avait déjà réalisé en partie, mais toute la province était en mouvement sur l'avis de ce qui s'était passé la veille. Un corps de troupe très considérable était aux portes de Guise, redemandant les électeurs qui y étaient retenus : on menaçait de la plus terrible vengeance la ville inhospitalière qui avait osé violer les droits les plus sacrés : il fallut céder. Les électeurs de Vervins eurent la permission d'aller se présenter à l'armée libératrice qui les réclamait. Le procès-verbal dés différentes séances fut enfermé dans une boîte que le président scella de son Gachet, et cette boîte fut déposée chez un notaire, à Guise. Tel est l'état des choses, . \
La province entière demande une justice éclatante ; elle l'attend avec la plus vive impatience et l'Assemblée nationale ne laissera pas impuni l'attentat dont les électeurs ont failli être victimes»
Sur le surplus, le comité propose ie décret suivant :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu
8011 comité des rapports, décrète due les électeurs Se réuniront dans la ville de Marie pour déclarer, par la voie du Scrutin, si la ville de Yervins a été choisie, lors du premier scrutin, pour être le chef-lieu du district et, en ce éâs, pour en dresser procès-ver bal, sinon pour procéder à un nouveau scrutin; ordonne que son président se retirera par devers lé roi pour le prier de faire informer contre leè auteurs, et fâuteurs des excès qui ont eu lieu dans la ville de Cuise envers les électeurs qui y étaient rassemblés. »
Je demande le fejet du projet dé décret qui vous ést Soumis, et je me>foude sur cé que les résultats du premier scrutin ne soflt Constatés par aucun procès-ver-bal. Une opération qui ne laisse pas de traces n'existe pas, d'où il suit que la seule opération valable} la seule régulière, la seule qui puisse être définitive, est celle qui est établie par un procès-Verbal éh bonne forme. Quant aux troubles dont on viëût dê parler, ils ont été fort exagérés et n'ont pas eu le caractère dé menaces contre les électeurs. Au reste, jé me borne à demander la validité des opérations électorales, et je ne m'oppose pas à ce qu'il soit informé sur les troubles, s'il y en a eu.
» Une nouvelle assemblée des électeurs me semblé inutile. Le député de Cuise n'a pas contesté les Chiffres du premier scrutin, il s'est borné à arguer ce scrutin de nullité, sous prétexte que lé procès-verbal n'en a pas été rédigé. On peut lui répondre : à qui la faute, s'il en a été ainsi ? le demande le rejet du projet de décret du comité et que le choix de Yervins comme chef-lieu de district, soit confirmé.
Gette proposition est adoptée et le décret suivant est rehdu :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu son comité desi rapports, décrète que la délibération prise le 7 juin, au matin, dans la ville de Cuise, pour fixer définitivement à Vervins le chef-lieu du district est et demeure confirmée, et que le proGès-verbal de cette délibération, dressé et signé par les président et secrétaires de l'Assemblée, sera déposé dans le lieu choisi pour placer les archives du district de Vervins, et qu'une copie en bonne forme en sera envoyée aux archives de l'Assemblée nationale ; déclare nulles les délibérations subséquentes ; ordonne que les électeurs du district se retireront dans la ville de Marie, à l'effet d'y délibérer sur la réunion ou le partage des autres établissements, sur la nomination des administrateurs du district et autres objets relatifs; Ordonne, en outre, l'Assemblée nationale que son président se retirera pardevers le rçi poUr le supplier de donner les ordres nécessaires pour l'exécution du présent décret. »
L'Assemblée passe à son ordre du jour qui est la suite de la discussion du projet de déeret sur l'organisation eivile du clergé»
La délibération va porter sur le titre Illt intitulé : Traitement des ministres de la religion.
, rapporteur, donne lecture de l'article 1er qui est ainsi
conçu :
« Art. 1er. Les ministres de la religion exerçant les premières
et les plus importantes fonctions de la société, et obligés de résider continuellement dans
le lieu du service auquel la confiance des
peuples les a appelés, seront défrayés par la nation. »
Je demande la suppression de cet article comme inutile et mal motivé. Il est inexact que le clergé remplisse la plus Importante fonction de la Société; la plus importante fonction de la société est Celle du législateur.
lit s'élève de violents murmures dés divers côtés de la salle.)
Je proposé tthe modification à l'article 1er et je demande qu'au mot : défrayés on substitue celui-ci : entretenus.
On hé doit Insérer dans un décret que ce qui est absolument nécessaire : c'est par ce motif, qué je demâhde que la phrase t exerçant les plus importantes fonctions dê la société, disparaisse de 1 article eh discussion.
j'appdie l'amendement de M. Al-quier parce que le mot entretenus indique tùiëUX que celui de défrayés l'intention de l'Assemhlée au sujet des ministres du culte.
Divers membres demandent la question préalable sur tous les amendements.
La question préalable est prononcée.
L'article 1er au comité est ensuite mis aux voix et adopté»
, rapporteur, L'article 2est ainsi conçu :
« Art. 2. Il sera fourni à chaque évêqUe et à chaque curé un logement convenable, et assigné à tous le traitement qui va être régie. »
Je propose l'amendement suivant qu'il me semble indispenSabled'introduire dans l'article 2. « A la charge par les évêques et curés $ acquitter les réparations locàtivès. »
Cette disposition est de toute justice, aussi je l'appuie.
faïné. Je crois que ce Serait Une surchage excessive pour les curés et que les réparations locatives doivent incomber aux communautés. Au reste, le comité a dû se préoccuper de la question, et il serait utile de connaître son avis,
Les réparations locatives sont de droit à la charge de f usufruitier, et il est inutile d'en faire mentlôtt dâns l'aMiClé ; mais il paraît justë de faire loger les curéâ ét lès Vicaires sous ië même toit.
, curé de Souppes. Lë Comité a sans douté entendu qUè les Vicaires Seraient logés, mais il est indispensable que cela soit formellement mentionné dans l'article*
Je proposé de décréter que les vicaires seront logés dans la même maison que les curés, parce que, de la sorte, le servioe de la paroisse sera beaucoup mieux fait.
, député de Saint-Flour. Dans ma province, plusieurs curés n'ont pas de logement affecté à leur bénéfice, et on l'acquitte en argent; vous vous jetteriez dans des dépenses énormes, si vous faisiez bâtir; laisses aux départements le soin de loger les ministres des autels; ils seront
en meilleure situation que vous pour connaître les convenances locales. Quant aux vicaires, ils . doivent se loger comme ils aviseront, avec leur traitement.
l'aîné. J'observe sur l'amendement de M. Thibault que s'il y a quelque chose qui doive rester libre parmi les hommes, c'est la cohabitation : la raison éternelle nous dit que si on la rend forcée, c'est ouvrir une source de querelles. J'adopte le logement du vicaire, sans l'asservir à une habitation commune.
Quand on est chargé de fonctions communes, il est juste, il est nécessaire et consolant pour les mœurs, d'habiter ensemble. Les curés autrefois avaient souvent des vicaires malgré eux ; il pouvait en résulter des mécontentements réciproques, mais aujourd'hui qu'ils seront de leur choix il n'y aura point de contestations: au surplus, vu l'énormité des dépenses, je serais d'avis de ne donner aucun logement aux vicaires.
Rapprocher les hommes, c'est les diviser. Il est bien étonnant qu'on veuille nous forcer de vivre sous le même toit; c'est violer le droit des gens que d'obliger quelqu'un de loger avec un autre malgré lui.
, curé d'Évaux. La discorde arrive souventpar suite d'un contact incessant, et comme il n'est nullement nécessaire que les ministres de la religion soient sous le même toit, il ne faut pas les y forcer.
(de Saint-Jean-d'Angely). Je soutiens que le logement doit être commun, car sans cela voUs agraveriez, d'une façon exagérée, les charges du peuple.
Plusieurs membres demandent la clôture de la discussion.
La clôture est prononcée.
, rapporteur. Le comité accepte une partie des amendements etrepousseles autres. En conséquence, voici la nouvelle rédaction qu'il vous propose :
« Art. 2. 11 sera fourni à chaque évêque, à chaque curé et aUx desservants des annexes et succursales un logement convenable, à la charge par eux d'y faire toutes les réparations locatives, sans eDtendre rien innover, quant à présent, à l'égard des paroisses où le logement du curé est fourni en argent,'et sauf aux départements à prendre connaissance des demandes qui seront formées par les paroisses et par les burés. Il leur sera en outre assigné à tous le traitement qui va être réglé. »
(L'article 2, ainsi modifié, est mis aux voix et adopté.)
donne lecture de l'ancien article 3 ainsi conçu :
« Art. 3. Le traitement des évêques sera, savoir:
Pour l'archevêque de Paris, de 50,000 livres;
Pour tous les autres archevêques, de 20,000 livres;
Pour tous les évêques, de 12,000 livres. »
Le comité pour se conformer à vos précédents décrets vous propose une nouvelle rédaction de cet article. J'en donne lecture :
« Art. 3. Le traitement des évêques sera : savoir, pour l'évêque de Paris, 50,000 livres; pour
les évêques des villes dont la population est de cinquante mille âmes et au-dessus, 20,000 livres, pour tous les autres évêques, 12,000 livres. »
Dans le traitement pécuniaire que le comité ecclésiastique présente, il ne s'est pas proposé d'autre objet gue d'assurer aux évêques une subsistance suffisante et modeste : en s arrêtant à ce seul point de vue, il a sans doute raison; mais il n'en est pas de même si les revenus des ministres de la religion ont une destination plus sainte et plus étendue. Comment peut-on concevoir que les ministres d'un Dieu bienfaisant, que des hommes plus particulièrement consacrés à la consolation des malheureux, au soulagement des malades, puissent remplir ces devoirs sans moyens pour procurer des secours? Il y a une étroite liaison entre la religion et la charité. L'aumône était un sacrement; elle était une des fonctions du sacerdoce; les diacres étaient institués pour la distribuer; les apôtres eux-mêmes la regardaient comme une de leurs plus importantes fonctions ; ils pensaient, ces disciples saints de notre divin maître, qu'il était impossible de la désunir de celles des ministres d'un Dieu de bonté et de bienfaisance. En vain vous dirait-on que les établissements de l'ordre public porteront des aumônes à tout ce qui est indigent, des secours à tout ce qui souffre ; mais des administrateurs civils auront-ils cette ferveur de zèle, cette abondance de charité que la religion peut seule donner? Ces hommes, que des malheurs privés, que des malheurs publics occasionnés par les circonstances présentes auraient fait tomber de l'aisance dans l'infortune, ne voudraient pas faire connaître leur détresse; ils périraient de misère et de faim, si la charité des pasteurs ne parvenait à les découvrir, si, dans les communications intimes et consolantes de la religion, leurs évêques, leurs curés ne les forçaient à accepter des secours nécessaires. Ah! si la charité était séparée de la religion, quel est l'homme sensible qui voudrait être ministre de cette religion sainte 1 quel est l'homme qui voudrait se consacrer à rechercher les malheurs des fidèles, s'il ne pouvait opposer à ces malheurs que des consolations impuissantes ; s'il ne pouvait, par des secours, adoucir les maux dont le spectacle le ferait souffrir : s'il ne pouvait, en donnant d'utiles consolations, se consoler pour ainsi dire lui-même? C'est au nom de la religion que je vous conjure de ne pas séparer la miséricorde des hommes de la miséricorde de Dieu ; dè ne pas détruire cette union si touchante de la charité et de la religion.
Si ces considérations vous frappent, vous reconnaîtrez avec moi que le traitement qu'on vous propose est au moins insuffisant pour les grandes villes. Le comité, qui présente une échelle bien graduée pour les curés, l'a totalement ou» bliée pour les évêques. L'humanité, la religion, vous sollicitent de laisser en leurs mains les moyens de secourir, de contenir cette foule de malheureux, dont l'existence dans nos villes maritimes et commerçantes peut être à chaque instant compromise par la banqueroute d'un 3eul négociant. La police qui les contenait n'est pas compatible avec votre Constitution ; il faut donc la remplacer par des moyens de bonté et de bienfaisance. A qui ces moyens seront-ils confiés, si ce n'est aux ministres de la religion ? Je le demande au peuple qui m'entend : qu'il dise si, dans un hiver désastreux, l'évêque et les curés de Paris ne sont pas venus à son secours ? Que serait-il devenu sans les aumônes déposées
entre les mains de ces ministres par les propriétaires de la capitale. Ces aumônes ont été fournies par la noblesse,, par le clergé, qui furent à cette époque les bienfaiteurs et les pères du peuple. Par quels étranges motifs les a-t-on désignés au peuple comme ses oppresseurs ? (11 s'élève beaucoup de murmures.)
Si ces grandes considérations de justice et d'humanité ne vous engagent pas à établir une différence entre le clergé des villes commerçantes et maritimes, et celui des villes méditerranéennes, j'en présenterai une autre : c'est la cherté des comestibles. Je demande aux députés de Nantes et de Marseille, si l'évêque, avec 12,000 livres, peut subsister honorablement (Le rapporteur observe que dans ces villes les évêques auront 20,000 livres); quand même il aurait 20,C00 livres, cette somme serait insuffisante ; il ne resterait rien à l'évêque pour se livrer à des œuvres de bienfaisance. Plus vous espérez que l'élection vous donnera des ecclésiastiques dignes de leur ministère, plus vous espérez ramener les évêques à l'état de la primitive Eglise, plus il est de votre devoir étroit de leur fournir abondamment de quoi exercer toutes les vertus chrétiennes, parmi lesquelles l'aumône tient un rang distingué. Certains, parla loi de la résidence, que les sommes seront employées dans les diocèses, et que l'évêque devant ses fidèles n'oserait en faire un scandaleux usage, vous doterez avec générosité les ministres du culte de la nation généreuse que vous avez l'honneur de représenter. Je conclus à ce que tous les évêques n'aient pas moins de 20,000 livres ; à ce qu'il soit donné à ceux de Lvon, Bordeaux, Marseille, Nantes, Toulouse, Rouen, 40,000 livres, et à celui de Paris, 150,000 livres ; aux curés de Paris, 10,000 livres ; à ceux des villes au-dessus de cinquante mille âmes, 6,000 livres, et à ceux des paroisses qui auront plus de trois mille communiants, 3,000 livres. J'avais pensé que, pour l'honneur de cette Assemblée, il ne fallait pas présenter des considérations fiscales ; mais je vois qu'il est nécessaire de vous faire observer que se surcroit n'excédera pas 2 millions.
J'adopte les principes du préopinant, mais j'en tire une conséquence un peu différente : on vous a parlé de religion et de charité ; saisissons l'esprit de ia religion, agrandissons les idées de charité, et nous verrons que l'article du comité ne pêche rien moins que par l'économie. L'auteur pauvre et bienfaisant de la religion a recommandé au riche de partager ses richesses avec les indigents ; il a voulu que ses ministres fussent pauvres ; il savait qu'ils seraient corrompus par les richesses ; il savait que les plus riches ne sont pas les plus généreux ; que ceux qui sont séparés des misères de l'humanité ne compatissent guère à ces misères ; que par leur luxe et par les besoins attachés à leur richesse, ils sont souvent pauvres au sein même de l'opulence. D'après ces idées, qui paraissent aussi inspirées par la raison et par la vérité, il est évident que le vrai moyen de soulager les pauvres n'est pas de remettre des sommes considérables entre les mains d'un petit nombre de ministres. Sont-ce donc là les vues du législateur ? Le législateur doit travailler à diminuer le nombre des malheureux, et pour cela il ne suffit pas de remettre des trésors entre les mains de quelques-uns, et de les charger de les répandre. Non, les législateurs ne soumettront pas la vie des hommes, le bonheur du peuple, au caprice et
,à l'arbitraire de quelques hommes ; c'est par les grandes vues de l'administration qu'ils peuvent secourir les malheureux ; c'est en réformant les lois qui outragent l'humanité, c'est en faisant que des lqis égales pour tous frappent également sur tous et protègent tous les bons citoyens sans distinction. Voilà la véritable bienfaisance qui convient à des législateurs.. = Je demande si 12,000 liv. ne suffisent pas, et bien au delà aux besoins d'un homme. Je pense qu'il serait plus conforme à la justice de réduire cette somme, et mon avis particulier est qu'on ne fasse à aucun évêque un traitement qui s'élève au-dessus de 10,000 livres.
Trop de richesse a nui à la religion ; mais aussi les prêtres ne doivent-ils pas dire comme le Sage : « Ne me donnez ni trop de pauvreté, ni trop de richesse ; donnez-moi les moyens de faire le bien. » Il faut avoir égard aux obligations que vous avez imposées aux ministres du culte. Rappelez-vous que les évêques auront des rapports avec les ministres d'un diocèse très étendu ; rappelez-vous que l'évêque sera le premier pasteur de son Eglise cathédrale, et qu'il sera obligé de répandre les secours de la charité.
Je ne veux pas parler de luxe : je le condamne, et je voudrais que l'Assemblée fit des lois pour le réprimer. Je dirai ce que l'expérience m'a appris. Si je dis à un malheureux : prenez-patience, votre Dieu a souffert, et que je ne lui donne rien, il ne m'écoutera pas. « Quand vous traiterez avec l'homme, dit l'apôtre, commencez par le secourir. » Les sommes proposées par le comité sont suffisantes pour certaines villes, insuffisantes pour d'autres. En partant du même principe, il faudrait établir une autre échelle. Je pense que le traitement ne doit pas être inférieur à 12,000 1. et supérieur à 40,000, excepté celui de l'archevêque de Paris.
Les préopinants qui ont parlé dans le sens de l'augmentation du traitement des évêques, sont tous convenus qu'il était suffisant pour une honorable existence ; mais ils ont demandé qu'on donnât aux évêques les moyens d'exercer la charité. Il me semble que cette discussion serait venue plus à propos au sujet des curés qu'à l'occasion des évêques. Elle se réduit à cette simple question : Est-il plus utile que l'Etat, par de bonnes lois, diminue le nombre des pauvres, et que l'administration secoure ceux qu'on ne pourra empêcher d'exister comme pauvres, que ae laisser aux évêques les sommes destinées à remplir un des devoirs les plus sacrés de la société ? Tout à l'heure on a objecté, en phrases très brillantes, que la religion est mise à ia charité. Voulez-vous apprécier cette objection ? Dites-moi si des curés congruistes, qui avaient 700 livres, n'étaient pas très respectés, s'ils ne rendaient pas la religion aussi consolante.... (Il s'élève des murmures a droite, et des applaudissements à gauche) ; si ce n'était pas d'eux seuls que les pauvres, les malheureux, les familles affligées recevaient des consolations et des secours ; dites-moi si c'est à eux qu'on a reproché de ne pas exercer la charité?.... Concluons de notre expérience et de ce que nous avons déjà fait, que désormais les évêques étant choisis parmi les curés, seront accoutumés à vivre de peu. Calculons qu'avec ces hommes 12 et 20,000 livres sont des sommes assez considérables pour fournir à leur subsistance et pour leur donner la faculté d'obéir à la charité, à ce senti-
ment si naturel à ceux qui sont les témoins des misères humaines. Il n'y a pas de pères de famille qui, sur 12 ou 20,000 liv. de rentes bien liquidées, ne se croie obligé à secourir beaucoup d'infortunés, On dit que l'augmentation qu'on tous propose ne coûtera que 2 millions, et vous trouvez cela peu considérable! Vous ayez raison, si vous comparez cette somme à 600 millions d'impositions; mais comparez-la aux malheurs 1 d'un village ; elle est la contribution de trois cents villages ; elle est la contribution que paie à force de sueurs, de fatigues et de travaux, un nombre immense de citoyens, tandis que les évêques, que les fonctionnaires du peuple vivraient dans une abondance irréligieuse. Je crois donc que l'avis du comité doit être adopté,
J'adopte la conclusion de M. de Qazalês ; mais, quelque traitement que l'Assemblée accorde, je la prie de se rappeler qu'à l'époque où elle a décrété que les biens du clergé seraient à la disposition de la nation, on a mis sous ses yeux les malheurs du peuple. Le comité aurait du prouver à tous les Français que vous voulez faire une meilleure distribution des aumônes; nous devrions dire qu'une partie de ces biens appartient à la religion, que l'autre est le patrimoine des pauvres. Je demande qu'avant tout on adopte le décret que je vais proposer ; « Les biens du clergé, que l'Assemblée a décrétés étra à la disposition de la nation, serviront uniquement à payer les frais du culte et de ses ministres... » (On rappelle à Vordre du jour,) Je Suis excellent patriote, et je vais le prouver; car je vais recommencer: que ferez-vous ? Vous fixerez les frais du culte et de la religion, et le reste vous le vendre?.., (Une voix dit: Oui 1) Abî vous le vendrez 1 qu'on me laisse lire mon amendement.,, (On observe que c'est une motion.) Vous avez raison, cela vaut mieux qu'un amendement. Je vais donc achever ma motion : « ainsi qu'au soulagement et à la subsistance des « pauvres dont ces biens sont le patrimoine, »
Je propose de Charger le comité des finances de présenter un projet dedécret, dont l'objet serait de mettre à la disposition des évêques, pour exercer la charité, une partie de la valeur des biens ecclésiastiques.
Plusieurs autres amendements sont encore pro^ posés, et tous sont écartés par la question préalable.
L'article 3, tel qu'il est proposé par le comité, est adopté,
donne lecture de l'article 4 ainsi conçu :
« Art. 4. Le traitement des vicaires de l'église cathédrale sera ; savoir : à Paris, pour le premier vicaire, de 8,000 livres; pour le second, de 4,000 livres; pour tous les autres, de 3,000 livres,
« Dans les villes dont la population est de 50,000 âmes et au-dessus : pour le premier vicaire, de 6,000 livres ; pour le second, de 3,000 livres ; pour tous les autres, de 2,400 livres,
« Dans les villes dont la population est de moins de 50,000 âmes : pour le premier vicaire, de. 3.000 livres; pour le second, de 2,400 livres ; pour les autres, de 2,000 livres. »
Je propose que le traitement des vicaires des églises cathédrales n'excède pas celui des curés de la ville diocésaine.
Ce n'est pas assez que les vicaires des églises cathédrales n'aient pas un traitement plus fort que celui des curés ; les deux premiers vicaires seulement auront un traitement égal au sien. Celui des autres doit être fixé en proportion diminutive de celui des deux premiers vicaires.
Je propose un traitement égal pour les vicaires des églises cathédrales et les curés et d'ajouter, eu sus du traitement, des deux plus anciens vicaires, un supplément de 300 livres.
Je suis d'avis qu'il faut admettre Une légitime supériorité dans les places ecclésiastiques et, pour la justifier, l'ancienneté d'âge proposée par M. Le Chapelier me parait convenable : j'appuie sa motion.
l'aîné. Les vicaires des églises cathédrales ayant â remplir et les fonctions curiales et celles de l'épiscopat doivent nécessairement avoir un traitement plus considérable que les curés,
, par suite des observations qui viennent d'être faites, déclare que le comité modifie sa rédaction sur les traitements.
L'article 4 est mis aux voix et adopté ainsi qu'il suit*
« Art. 4. Le traitement des vicaires des églises cathédrales sera, savoir : à Paris, pour le premier vicaire, de 6,000 livres; pour le second, de 4,000 livres; pour tous les autres vicaires, de 3,000 livres.
« Dans les villes dont la population est de 50,000 âmes et au-dessus, pour le prieur-vicaire, de 4,000 livres; pour le second, de 3,000 livres; pour tous les autres, de 2,400 livres.
« Dans les villes dont la population est de moins de 50,000 âmes : pour le prieur-vicaire, de 3,000 livres; pour le second, de 2,400livres; pour tous les autres, de 3,000 livres. »
La séance s'ouvrira demain à l'heure ordinaire, à neuf heures du matin.
(La séance est levée à trois heures.)
Séance du
La séance est ouverte à neuf heures du matin.
, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance du mardi 15 juin au matin,
, au tre secrétaire, lit le procès-verbal de la séance du soir du même jour.
Il ne se produit aucune réclamation.
, secrétaire, donne ensuite lecture d'une lettre du président du district de Saint-
Cette lecture est suivie de celle d'une pièce de vers par M. Sauvageot du Crolsi, secrétaire-commis de l'Assemblée nationale, et d'une adresse souscrite par plusieurs citoyens de Paris, toutes deux ayant pour objet de célébrer le jour mémorable où l'Assemblée des Etats généraux a été constituée et déclarée Assemblée nationale. J/Assemblée applaudit au zèle des auteurs :
Voici les vers de M. Sauvageot dd Groisi
C'est en ce jour heareux, pères de la patrie, Que le peuple français a reconquis ses droits; Les trois ordres rivaux de ta France asservie, Devenus un grand peuple à votre voix chérie, Commençaient en ce jour l'édifice des lois. Le peuple, fatigué d'une injuste puissance. Vit en vous ses soutiens, ses zélés protecteurs : Il vous nomme à grands cris les sauveurs de la France. Les noms et les travaux de ses libérateurs Seront éternisés par sa reconnaissance.
17 juin 1790.
, député de Couserans, demande un congé pour aller prendre les eaux.
, député de Cou-tances, demande la même permission et pour le même motif.
député de Marseille, sollicite, par l'entremise de M. Castellanet, une prolongation de congé que l'état de sa santé rend indispensable. ^ Ces congés sont accordés.
L'ordre du jour appellerait d'abord mn rapport du comité des dîmes ; mais comme le rapporteur, M. Chasset, est absent pour le moment, l'Assemblée va continuer la discussion du projet de décret sur la constitution civile du clergé. Les articles 1 à 4 du titre III, intitulé : traitement des ministres de la religion, ont été adoptés dans la séance d'hier.
, rapporteur, donne lecture de l'article 5 qui est ainsi conçu :
« Art. 5. Le traitement des curés sera, savoir : à Paris, de 6,000 livres.
« Dans les villes dont la population est de plus de 50,000 âmes, de 4,000 livres.
« Dans celles dont la population est de moins de 50,000 âmes, et de plus de 10,000 âmes, de 3,000 livres.
« Dans les villes et bourgs dont la population est au-dessous de 10,000 âmes, et au-dessus de 3,000 âmes, de 2,400 livres.
Dans toutes les autres villes et bourg3 dont la population est au-dessous de 3,000 âmes, de 2,000 livres.
« Dans les campagnes, pour les paroisses où il y aura plus de deux mille âmes, de 1,800 livres; pour les paroisses où il y aura moins de deux mille âmes, et plus de mille âmes, de 1,500 livres ; et pour les paroisses où il n'y aura que mille âmes ou moins, de 1,200 livres. »
, curé de Saint-Quentin. Nos désirs, s'ils s'étendent jusqu'au superflu, sont
des désirs impies et criminels..... Longtemps les curés ont été payés 300 livres, ensuite 500 livres. Ils ne pouvaient offrir d'autre consolation aux pauvres que le spectacle de leur misère..... Pesez dans votre sagesse la proposition présentée par le comité, elle vous paraîtra insuffisante pour les curés des campagnes. — M. l'abbé de Marolles fait le calcul des dépenses nécessaires d'un curé, et trouve que les gages et la nourriture de ses domestiques, que son entretien personnel, les réparations locatives, l'entretien des meubles, le paiement de l'impôt, forment une somme de 1,040 livres; il reste donc à un curé, sur la somme de 1,200 livres, 160 livres pour vivre. — M. l'abbé de Marolles réclame aussi en faveur des vicaires, et conclut à ce que le minimum des curés soit de 1,500 livres.
Après l'estime dont vous avez honoré les curés dans toutes les occasions, je ne m'attendais pas au traitement mesquin que le comité propose de leur faire. Esl-ct) donc à cela que devaient aboutir les promesses dont on nous avait flattés, le voeu des peuples, les réclamations de toutes les âmes sensibles, les efforts même de la philosophie ? Ouvrons nos cahiers, nous y trouverons la réclamation des peuples en faveur de ces hommes qui travaillent sans cesse, qui portent le poids de la chaleur et du jour, de ces hommes toujours consolateurs, toujours bienfaisants, ministres d'un Dieu miséricordieux et amis de tout homme souffrant ou égaré. Gomment oseront-ils prêcher la bienfaisance, quand ils ne pourront plus en donner l'exemple ? A quoi se borne votre générosité ? à réduire les neuf dixièmes des curés pour augmenter le reste de 200 livres. (Il s'élève'des murmures).
On parle comme si l'impôt ne. devait rien coûter aux peuples. Les curés n'ont pas chargé Monsieur de présenter leurs sentiments. Ils se sont confiés à la sagesse et à la générosité de l'Assemblée nationale, et assurément ils persistent dans leur confiance.
Le comité donne 1,500 liv. aux curés des paroisses où il y aura plus de mille âmes, et 1,200 liv. à ceux dont les paroisses ne comprendront pas ce nombre; ainsi dix âmes de plus ou de moins mettront une différence aussi considérable entre les curés. On donne 1,200 liv. à des hommes qui sont obligés de tenir maison, d'avoir un certain nombre de domestiques, pour qui l'hospitalité est un devoir rigoureux, et dont la maison doit être un centre commun. Veut-on priver de tout agrément, de toute liaison, de tout commerce, ces hommes qui sont condamnés par état à la plus affreuse solli-tude ? Le père détournera son fils d'un état aussi misérable. Qu'on ne nous dise pas que des ecclésiastiques vertueux veulent peu, parce qu'ils vivent de peu; qu'ils sont les ministres d'un Dieu pauvre : ces lâches plaisanteries seraient déplacées de la part de quelques particuliers ; elles le seraient bien davantage delà part des représentants de la nation. Vous nous rappelez a la primitive Église ; nous vous rappellerons au temps où les fidèles abandonnaient leurs biens aux ministres du culte. Vous avez voulu nous donner l'espoir du bonheur ; sans les faveurs de la fortune, je n'en conçois pas la possibilité......
(Tous les curés placés, dans la partie gauche se lèvent.)
Tous les curés désa- [ vouent ce qui vient d'être dit.
, cure de Couvignon. Nous demandons, et on ne peut nous le refuser, de consigner dans le procès-verbal notre désaveu formel.
L'expression : faveurs de la fortune a déplu; je dirai les secours de la fortune. Vous verrez par mes conclusions.....
Les conclusions ne valent rien quand les principes sont détestables.
La modeste fortune des curés peut-elle être un objet d'envie et de scandale ? Ah ! si vous pouviez entendre le peuple des campagnes, il vous dirait que les curés sont de tous les propriétaires les plus utiles, les plus généreux. Vous donnez 2,000 liv. aux curés des petites villes et des bourgs ; mais avec une population plus considérable, ils ont encore moins de peine que les curés des campagnes ; leurs paroissiens sont plus rassemblés dans un espace moins étendu. Si le comité a été déterminé par la cherté des denrées, je dirai qu'il est faux, évidemment faux, qu'on vive à meilleur marché dans les campagnes ; le curé tire sa subsistance des villes et des bourgs, et il doit ajouter au prix des denrées celui du transport. La maison du curé est, dans les villages, la seule maison où un
galant homme puisse descendre..... Je conclus à
ce qu'à l'exemple de l'empereur Joseph, auquel il serait honteux que la nation française le cédât en générosité, les curés n'aient pas moins dè de 1,500 livres, et qu'ils soient augmentés quand la cherté des subsistances et les circonstances l'exigeront.
Plusieurs curés demandent que la discussion soit fermée. Elle est fermée.
Quand la discussion se serait prolongée, nous n'aurions jamais eu fini, I parce qu'il y a des variétés sans nombre. Dans quelques provinces, les curés auront assez de 1,200 livres ; dans d'autres cette somme sera insuffisante. Si, comme je n'en doute pas, vous donnez aux curés une partie de leur traitement en biens-fonds, ils vivront sur leur traitement et encore sur l'exploitation. Cependant, dans tous les cas, en assignant aux curés au moins 1,500 livres, ils auront la vie et le vêtement, et non la fortune.
J'adopte l'amendement de M. l'abbé Gouttes. Je demande que quelque augmentation soit allouée aux curés dont les paroisses seront disséminées; j'observe que je ne suis pas dans ce cas. Je demande aussi qu'on renv.oie au comité ecclésiastique l'examen du sort des dix ou douze curés établis dans le pays de la Saussarderie, et qui, en vertu du traité de Riswick, sont payés par la France.
Je ne me propose ni de faire des réclamations, ni de combattre celles qui ont été faites contre l'article proposé; je demanderai seulement qu'on termine le dernier paragraphe de cet article à ces mots : « pour les curés des paroisses où il y aura moins de deux mille âmes, 1,500 livres. » De cette manière, vous aurez trouvé un milieu entre un traite- I ment trop chétif et un traitement excessif. '
, cultivateur, député de Bretagne. Je demande que les curés soient à 1,200 livres, que les paroisses paient leurs curés et leurs vicaires, et que sur-le-champ on s'occupe de la division des paroisses.
Loin de croire ce traitement insuffisant, je pense qu'on devrait restreindre celui des curés des villes. Dansles villes dont la population est de plus de cinquante mille âmes, je le porterais à 3,000 livres ; dans celles dont la population est moindre de cinquante mille âmes, à 2,000 livres. Dans les villes etbourgs dont la population est au-dessous de dix mille âmes et au-dessus de trois mille, de 1,800 livres; dans toutes les autres au-dessus de mille âmes, 1,500 Uvres; dans celles au-dessous, 1,200 livres. 11 ne faut pas qu'il y ait trop de disproportion entre les différents fonctionnaires publics; il ne faut pas que les ministres du culte soient payés de manière a nous faire retomber dans l'inconvénient d'une vocation pour l'état ecclésiastique décidée par le plus ou le moins d'avantages qu'il présenterait.
On veut éviter la disproportion entre les différents fonctionnaires publics ; mais un officier de justice, mais le membre d'un directoire a d'ailleurs de la fortune qu'il peut augmenter par des moyens qui sont interdits aux curés. J'adopte l'article du comité, avec l'amendement de M. Goupil.
Si le minimum du traitement des curés est fixé à 1,500 livres, les curés exigeront pour leur dotation une somme de 70 millions. C'est d'ailleurs ici une chose jugée; vous avez dit que le traitement des curés ne serait pasmoiu-dre de 1,500 livres.
l'aîné. Tout ceci n'est que calcul de finance. Ces calculs mériteraient quelque considération, si la nation devait fournir à ces dépenses ; mais les fidèles y avaient fourni, et la nation a tiré ces fonds à elle. Ce n'est donc pas du plus pur des trésors de l'Etat que les traitements des curés seront payés. A vrai dire, la nation ne dépense rien ici; elle ne fait que dispenser une partie de ce qui était destiné à ce service. Il faut conserver ce souvenir de justice, devant lequel disparaissent les calculs de finance. En donnant même 1,500 livres, comme vous avez supprimé le casuel, vous ne ferez pas aux curés un sort plus heureux que quand ils étaient à portion congrue.
(On ferme la discussion sur l'article et sur les amendements.)
11 faut décréter les dépenses annuelles, voter 1,600 livres par tête de pasteur, en accorder la distribution aux départements, de manière que le plus fort traitement ne dépasse pas 1,800 livres, et que le plus faible ne soit pas inférieur à 1,200 livres.
L'amendement de M. l'abbé Gouttes, consistant à fixer le minimum du traitement des curés à 1,500 livres, est attaqué par la question préalable.
L'Assemblée décide qu'il y a lieu à délibérer.
Si j'ai demandé uneaugr mentation, c'est parce que nous serons tous soumis aux impositions.
Vous voulez augmenter de 900 li-
vres la portion congrue; vous ne songez donc pas que c'est le peuple qui doit la payer?
On dit que les curés ne pourront pas vivre décemment avec 1,200 livres. Eh! que sommes-nous doue pour qu'on nous tienne un semblable langage? Les curés ne sont-ils pas les fils de petits bourgeois des villes et des bourgs? et la somme de 1,200livres ne sera-t-elle pas pour eux une fortune?
(On met aux voix l'amendement de M. l'abbé Gouttes. Cet amendement est rejeté.) (La priorité est accordée à l'article du comité.)
Plusieurs membres réclament une nouvelle lecture.
, rapporteur, fait cette lecture, et l'article 5 est décrété dans la teneur suivante : « Art. 5. Le traitement des curés sera, savoir: à Paris, de 6,000 liv.
« Dans les villes dont la population est de cinquante mille âmes et plus, de 4,000 liv.
« Dans celles dont la population est de moins de cinquante mille âmes, et de plus de dix mille âmes, de 3,000 liv.
« Dans les villes et bourgs dont la population n'est que de dix mille âmes, et au-dessus de trois mille âmes, de 2,400 liv.
« Dans toutes les autres villes, et dans les bourgs et villages, lorsque la paroisse offrira une population de trois mille âmes et au-dessous, jusqu'à deux mille cinq cents âmes, de 2,000 liv.; lorsqu'elle en offrira une de deux mille cinq cents jusqu'à deux mille, de 1,800 liv.; lorsqu'elle en offrira une de moins de deux mille âmes, et de plus de mille, de 1,500 liv.; et lorsqu'elle en offrira une de mille âmes et au-dessous, de 1,200 liv. »
, membre du comité des dîmes, demande et obtient la parole pour faire le rapport suivant sur des pétitions relatives au paiement et à la perception des dîmes et champarts (1):
Messieurs, plusieurs provinces ont adressé à l'Assemblée nationale des pétitions tendant principalement à avoir la faculté de payer la dîme en argent, au lieu de l'acquitter en nature; il y en a : Du département du Nord :
3 contenant les réclamations de 71 paroisses.
De celui du Pas-de-Calais, de l'Artois :
1 seule, signée de 53 maires. . . 53 8 de celui de la Somme. ... 14 3 de celui de l'Oise......3
2 de celui du Gers......2
2 de celui du Gard......2
2 de celui de la Charente ... 2
1 de celui de la Gharente-lnfér. 1
1 de celui de l'Hérault. .... 1
1 de celui des Bouches-du-Rhône 1
1 de Celui de la Haute-Loire. . 1
1 de celui de la Marne .... 1
1 de celui de lllle-et-Vilaine. . 1
27* 153
Les 153 municipalités qui vous font cette demande, Messieurs, protestent de la plus
parfaite soumission à vos décrets ; elles prononcent la plus ferme adhésion à toutes les
résolutions de l'Assemblée, et lui rendent les actions de grâces les plus sincères et les
plus étendues. Mais elles ne dissimulent pas que le désir qu'elles sont
Votre comité n'a appris qu'avec la plus grande douleur ces événements ; cependant, ce n'est pas ce qui l'a décidé à examiner les pétitions en elles-mêmes, c'est la justice ou l'illégitimité des demandes, les avantages et les inconvénients de la décision que beaucoup de députés extraordinaires sollicitent, ainsi que plusieurs honorables membres de cette Assemblée, qui l'ont déterminé à vous en faire le rapport, pour que vous en donniez une digne de toute votre sagesse.
S'il s'agissait de savoir s'il faut décréter que les redevables de la dîme seront obligés de la pa"yer en argent, au lieu de l'acquitter en nature, la question serait bientôt résolue: vous ne décideriez sûrement pas, Messieurs, à les assujettir à cette contrainte. On demande seulement que vous y autorisiez ceux qui en auront la volonté. Ainsi» c'est un décret facultatif que l'on sollicite de votre justice.
En ce sens, rien n'est plus favorable, au premier aperçu, qu'une réclamation de ce genre ; elle semble, au premier coup d'oeil, d'autant moins susceptible de difficulté qu'aux vues de bienfaisance que vous avez, Messieurs, manifestées avec tant d'éclat pour l'agriculture, le premier, le plus utile des arts, aux soulagements que vous avez accordés, et que vous devez encore à une classe de citoyens si foulés jusqu'au moment de la Révolution, et si dignes de la protection des gouvernements ; les municipalités joignant des moyens certains, non seulement pour assurer au Trésor public tout ce qui doit lui revenir sur la contribution des dîmes, mais encore pour rendre indemnes les décimateurs ou leurs fermiers.
Le plan qu'elles présentent pour y parvenir paraît simple en lui-même.
Elles offrent d'abord de faire leurs soumissions de payer au Trésor public, ou aux propriétaires particuliers, ia valeur intrinsèque de la dîme, sur le pied du bail, ou suivant l'estimation, s'il n'y en a point ; elles ajoutent le cautionnement solidaire de quatre, des huit plus haut cotisés. Elles offrent d'en payer le montant en deux termes: le premier, au 1er octobre, le second, au 1" janvier prochain : voilà, pour la sûreté du Trésor public et des propriétaires.
A l'égard des fermiers, elles consentent de leur donner une indemnité d'un quart ou du tiers d'une année du prix de leur bail, ou de la valeur de la dîme.
Elles demandent ensuite à répartir le montant du tout sur chaque redevable, au prorata de la valeur de la dîme qu'il payerait en nature, et elles laissent à chacun la faculté de se libérer en nature, s'il ne veut payer en argent ; auquel cas, ceux qui feront cette option n'entreront pour rien dans la répartition.
Pour assurer qu'une exacte justice sera rendue aux redevables dans la répartition, elles disent qu'elles préposeront un nombre de personnes
suffisant pour constater par écrit la qualité et la quantité des récoltes de chacun, après que ces préposés auront préalablement prêté serment.
La plupart des pétitions portent également sur les champarts. Les municipalités demandent qu'on leur accorde, pour ce genre de redevance, même faculté que pour la dîme ; elles exposent qu'étant l'un et l'autre de la même nature, devant être perçus de la même manière, Souvent par le même fermier, il n'y a aucune raison de leur refuser, pour les champarts, la justice qu'elles réclament pour les dîmes.
Ët ce qu'elles demandent est d'autant plus juste que, d'après leurs offres de satisfaire à tout ce qui peut être dû au Trésor public, ou aux ayants droit, il y aurait, disent-elles, de la dureté de le leur refuser. Pendant bien des années, les cultivateurs ont éprouvé les intempéries des saisons : si on joint à la médiocrité des récoltes qu'ils ont faites la surcharge des impôts, surtout celui de la dîme, qui leur enlevait un sixième, un quart des fruits de leurs travaux, on sera convaincu qu'ils n'ont pas toujours eu lè strict nécessaire pour fournir à leur subsistance. Les décrets du 4 août, en les soulageant pour l'avenir de ce fardeau, leur ont laissé l'espérance d'en être déchargés dès la présente année ; en conséquence, ils se sont livrés à des travaux au-dessus de leurs forces, ils ont mis tout leur avoir à défricher, à ensemencer, à engraisser leurs terres, dont ils ont eu l'espoir d'avoir les fruits dans leur intégrité. S'ils se sont trompés dans leurs vues, du moins comme la providence leur a ménagé une très abondante récolte, qu'on les laisse se dédommager en ne payant la dîme qu'en argent, sous les conditions auxquelles ils se soumettent.
Au surplus, le gain dont ils se flattent n'est pris sur personne ; il consiste, d'une part, dans les pailles qu'ils retiendront, dont ils ont le plus grand besoin, et que les fermiers, ne pouvant toutes employer, transportent souvent hors de leurs paroisses ; d'autre part, ce qui leur sera le plus profitable, c'est qu'ils feront eux-mêmes les frais de la perception. Ne donnant que le produit net de la dîme au Trésor public ou aux décima-teurs, ils gagneront, à la sueur de leur front, ce que les percepteurs pourront dépenser pour la levée de la dîme. Le plan que les municipalités proposent est tout à la fois juste, facile dans son exécution, sûr pour les intérêts du Trésor public ou des autres ayants-droit ; il est encore propre à ne faire payer aux redevables que ce que chacun devra ; en un mot, il leurest favorable sans nuire à personne : il y aurait donc non seulement dé l'injustice, mais encore un extrême dureté de refuser de statuer sur leurs pétitions.
Ces raisons ont d'abord frappé votre comité : il avait même comme adopté le plan qui est offert pour opérer un soulagement que semblent si ardemment désirer tant de citoyens au sort desquels l'Assemblée s'est intéressée si vivement. Ce qui l'avait, en quelque manière, décidé , c'est surtout les représentations et les pressantes sollicitations des députés extraordinaires qu'il a entendus plusieurs fois. Mais, dans le calme de la réflexion, il a trouvé des inconvénients extrêmement graves.
Si le plan présenté paraît simple en lui-même, il pourrait être la source, dans son exécution, d'une multitude de procès : on y trouve au moins beaucoup de difficultés dans les détails.
D'abord, pour régler la forme que chaque municipalité doit offrir, l'opération sera simple en se fixant sur le prix du bail. Mais, s'il n'y en a
pas, le travail commencera à se compliquer. Il faudra nécessairement uneestiniation par experts. Elle ne pourra être faite qu'avec les directoires des districts, et déjà quels embarras n'auront pas les administrateurs, qui vont d'ailleurs être surchargés d'affaires dans le commencement de leur activité?
En second lieu, il est des paroisses dont la dîme est perçue par plusieurs décimateurs, dont les uns l'ont affermée, et les autres l'exploitent eux-mêmes. Ainsi, dans la même paroisse, pour unë partie, on prendra le prix du bail, et, pour l'autre, il faudra une estimation pour fixer le montant de la soumission de la municipalité.
En troisième lieu, il est des dîmeries qui couvrent quelquefois quatre, cinq, six, huit, dix paroisses ; la dîme, d'ailleurs, peut être affermée par un même bail avec des biens-fonds ou d'autres droits pour un seul prix, sans distinction. Si le bail ne comprend que la dlme à percevoir sur plusieurs paroisses, il faudra une opération d'experts pour assigner à chacune ce qu'elle doit supporter du prix du bail. Dans le cas où l'on y aurait joint des biens-fonds ou d'autres droits* le travail des experts sera encore plus compliqué.
En quatrième lieu, après avoir réglé,d'une manière quelconque, la somme que devra payer chaque municipalité, il faudra s'occuper des fermiers. Ils ont droite par leur bail, de percevoir la dîme en nature ; ils ont dû y compter d'après vos décrets qui ne l'ont aboli qu'à partir de 1791. On ne peut lés exproprier sans les indemniser* et l'indemnité doit être d'autant plus forte que la récolte s'annonce comme très abondante. Outre leur indemnité , la municipalité sera tenue de payer la cote d'imposition qui leur a été ouverte, à raison de la dîme.
Si la dîme est exploitée par les décimateurs qui soient dans cet usage, comme ils ont compté de le suivre cette année, que même ils y ont été assujettis par vos décrets, ils ont dû faire les préparatifs nécessaires à la perception en nature, il faudra les indemniser de leurs dépenses. Comment régler cette indemnité ? Pour le faire avec justice, une estimation sera indispensable. La municipalité sera aussi obligée d'acquitter la cote d'impositions qui leur aura été faite à raison de la dîme ; et Comme cette cote, ainsi que celle des fermiers, aura été faite sans distinction, tant à raison dé la dlmè qUe par rapport aux autres biens que ceux-ci ont affermés, ou que les premiers font valoir eux-mêmes, il faudra encore Une estimation.
En cinquième lieu, si on dôhoe la facUlté de payer en argent la dîme ecclésiastlqUe, comment fera-t-on pour celle Inféodée ?0ti sait que souvent une paroisse est partagée entré un décima-teur ecclésiastique et un décitnàteur laïc. Ordôn-nera-t-on que, dans la même paroisse, le premier la percevra en argent, et le second en nature ? Les redevables pourront-ils s'accoutumer à cette différence ? ne seront-ils pas naturellement portés à la payer toute en argent ou toute en nature ? D'un autre côté, l'Assemblée aurait-elle le droit de priver le décimateur laïc de cette partie de sa propriété qui lui donne celui de la percevoir en nature ?
En sixième lieu, on demande pour le champart ce qu'on sollicite pour la dlme. Il est bien vrai que si on permet d'acquitter la dîme en argent, on ne peut guère se dispenser d'en faire autant pour le champart. Mettre de la différence dans la perception de ces deux redevances, ce serait
fournir un prétexte aux redevables de se plaindre. Les raisons qui les distingùedt Sont toutes métaphysiques, et l'intérêt personnel empêchera toujours qu'elles ne soient senties par les redevables : cependant, on ne peut tolérer, même pour une seule année, la perception des châm-parts en argent, ni pour les champarts nationaux, ni pour ceux qui appartiennent à des particuliers. Quant à ceux-ci, ce serait attaquer leurs proprie-tés. Pour tous, il faut remarquer que les décrets sur les droits féodaux en ont ordonné la perception en nature jusqu'au rachat. Si l'Assemblée se relâchait en ce point de ia rigueur des règles, elle exposerait la nation et les particuliers propriétaires à perdre ce droit si important. On sait, en effet, quelle est la répugnance qu'on apporte à l'acquittement de cette redevance qui n'a pas été, comme la dîme, supprimée sans indemnité. Si une fois on abandonne une partie du droit, on peut craindre de perdre le tout, parce que, quand une fois on à Composé ce genre ae droit,d'encore en encore on peut le réduire â rien.
En septième lieu, après avoir pourvu à la sûreté de la perception pour le Trésor public, et pour les propriétaires particuliers, après avoir rassuré les fermiers» et ceux des déCimateùrs qui font valoir, il faut s'occuper des intérêts de la municipalité* ainsi que ceux des quatre blus haut cotisés qui avanceront leur argent, et encore plus de ceux des redevables que l'Assemblée doit essentiellement mettre à l'abri de toute vexation.
On propose d'autoriser ceux-ci à payer aux premiers en nature ou en argent ; à coup sûr les embarras de ia municipalité 3eront inextricables outre les opérations préalables pour déterminer la somme qu'elle se soumettra de payer, il faudra des estimations partielles, soit pour la répartir sur ceux qui payeront ën argent, soit pour défalquer le contingent de ceux qui, payant en nature, ne seront pas tenus d'entrer dans la répartition. Quelle source féconde de procès particuliers 1 et à qui les donnér à juger T Aux districts,aux départements? Pourrez-vous, Messieurs, transformer ainsi des administrateurs en juges? Si vous ne le pouvez pas, il faudra aller aux tribunaux. Dieu sait quel mal il en peut résulter pour lés redevables que l'Assembiée doit protéger constamment.
On dit qu'en établissant un nombre suffisant de préposés pour constater la quantité, et la qualité des récoltes de chaqdë contribuable, on parviendra facilement et à ia répartition et à la défalcation dont il s'agit. D'abord il faudra toujours Une estimation ou arbitraire, ou à l'amiable, ou juridique. Ensuite, c'est établir uue inquisition aussi gênante et plus gênante que la perception de la dîme en nature. En laissant celle-ci sur son champ, le redevable est quitte de tout. En souffrant la visite dés préposés, pour constater sa récolte, il sera exposé â être molesté, à étre.re-tardé de ses travaux : l'humeur peut s'ètt mêler, des qUérelles peuvent naître, et, de là, d'autres procès. Cet expédient, outre son insuffisance, présente plus d'inconvénients, et pour la municipalité et pour les redevables, que ia perception en nature.
Le tout bien balancé, si la faculté de payer la dîme en argent offre quelques bénéfices aux redevables, si elle présente à l'Assemblée une occasion de leur donner quelques soulagements, elle est accompagnée de tant de difficultés, elle les expose à tant de procès et de dépenses, que ce serait lèur rendre un mauvais service que d avoir égard à leurs pétitions.
Il est vrai, Messieurs, qu'il se présente une considération de grâudë importance pour les admettre. Des mouvements s'annoncent dans les provinces ; l'horizon semble se charger ; une coalition paraît se former, et quelques zélés citoyens appréhendent qu'il n'en soit de la dîme comme de la gabelle, pour laquelle on a d'abord refusé l'abonnement dé quelques provinces, qu'ensuite on a perdu entièrement, et qu'on a fini par remplacer avec Uhe autre contribution.
Sans doute, il est du devoir des représentants de la nation de maintenir de tout leur pouvoir ses revenus, surtout celui qu'on attend cette année de la dîme et qui est si étendu. Mais, d'un Côté, il faut Considérër que le trouble he s'àn* nonce qué dans uri très petit nombre de paroisses ; que celles qui ont fait des pétitions ne se présentent qu'avéc soumission ; qu'en les éclairant sur leurs propres intérêts, elles resteront dans les borriës de la raison. En totalité, on d'en connaît que cept-cinquahte-trois. Quand on eu supposerait le aoUblë ou lë triple dâns les mêmes desseihs, cela ne ferait tout au plus qUe trois ou quatre Cents. Ce në serait pas la majorité du royaume, Ce ne serait pas même celle des provinces dont elles dépendent.
De là, il faut croire que lë trouble, s'il devait y en avoir,ne serait que dans un point du royaume, ce dui ne serait pas très à craindre. VoUs devez d'ailleurs. Messieurs, compter Sur la raison du peuple français. Si la gabelle a été anéaritië, sa destruction est arrivée à la suite d'un excès de vexations qui avait irrité les peuples et qui n'ont jamais été portées jUsqUe-là pour la dîme. G'était un moment dë délire, podr ainsi dire, où toUs les ressorts dU gouvernement étaient détendus. Maintenant il y a des municipalités qui Conduisent les peuples, il rie faut que les éclairer.
11 suffira de faire, pour tous les départements, ce qù*on fait pour le leur MM. les députés de celui de Seine-et-Marne. Ils ont écrit en Corps à leurs commettants une lettre, dans laquelle ils leur représentent tous les incotiVéûiehts, tonte l'injustice qui seraient résultés de l'admission d'une pétition Semblable à celles dont votre comité a l'honneur de vous rendre compte. Après être entrés dans les plus grands détails pour les convaincre, oh y trouve vers la fin ces paroles bien remarquables :
« L'Assemblée nationale voit l'ensemble des besoins oublies, des droits et des moyens de ia nation. Elle pedt mieux juger qu'aucun particulier et qu'aucune communauté, de ce qui est utile et possible ; et comme le salut du royaume ne peut être opéré que par l'union ét le bon ordre, tous les boUs français doivent â ia patrie d'exécuter les décisions rendues poUr le plus grand bien de tous.
« Ils ont tous prêté le seraient d'être fidèles à la Constitution, à 1a nation, à la loi et au roi ; ils sont devenus par là un peuple nouveau, dont le caractère, également sage et noble, sera le respect le plus inviolable pour la loi. Il n'y a pins d'autorité arbitraire : ainsi la loi doit être, après Dieu, l'objet de la vénération ét dte l'obéissance de tous.
C'est ainsi, Messieurs, qu'on bëut répondre aux pétitions que Votre comité â l'hdnhëUr de Vous présenter, et on ne doit nas douter que tous les bons Citoyens rie soient contents, s'il existait quelques mai intentionnés qui voulussent prétexter le refus d'accorder la faculté de payer la dîme en argent,au lieu de lapayer en nature, pour susciter des troubles, des insurrections et rendre nulle la contribution, ce serait, sans doute, un
très grand mal ; mais, d'une part, il y aurait un moyen de recouvrer les pertes qui en résulteraient. Les paroisses où l'on refuserait de la dîme mériteraient d'être taxées au double de la valeur, et on pourrait le faire dans un an, dans deux ou dans trois.
D'autre part, les représentants de la nation ne doivent point être intimidés par ces espèces de menaces; ils doivent supposer qu'il n'y a aucun Français qui ne se rende à la raison ; et dussent les insurgés venir entourer l'Assemblée, les représentants de la nation seraient inébranlables dans les résolutions qu'ils auraient prises, fondées sur la raison, la justice et le bien public. S'ils se laissaient aller à la moindre condescendance en pareil cas, tout serait perdu ; les ennemis de la patrie les conduiraient d'un relâchement à un autre relâchement, et bientôt l'Etat se dissoudrait.
Ce ne sont pas là les maximes qu'enseignait et que pratiquait ce grand homme dont cette Assemblée possède le portrait, et aux mânes duquel elle a donné des larmes; de ce grand philosophe qui, après s'être approprié les phénomènes célestes, a tant agrandi la science des gouvernements, en créant la liberté dans une vaste contrée soumise à l'esclavage ; ce n'était pas là ses principes. S'il mettait une grande douceur à dicter des lois à son pays, il n'était pas moins ferme pour les faire exécuter, et son exemple peut être proposé à cette Assemblée.
Telles ont été, Messieurs, les raisons que votre comité a trouvées contre les pétitions dont il a l'honneur de vous rendre compte. Elles l'ont arrêté dans sa résolution, il n'a osé prendre un parti dans une occurrence aussi délicate ; et comme, soit en adoptant les pétitions, soit en les rejetant, il est nécessaire de rendre un décret de détail; avant que de vous en présenter un projet, il a cru devoir se borner à soumettre à votre délibération cette question principale :
Accordera-t-on aux redevables de la dîme la faculté de la payer en argent, ou resteront-ils strictement obligés de l'acquitter en nature ?
Voilà, Messieurs, ce que votre comité vous propose de décréter préalablement dans cette séance, et demain il vous présentera un projet de décret de détail, dans le sens de celui que vous aurez rendu. (On demande à aller aux voix.)
monte à la tribune.
L'Assemblée décide que personne ne sera entendu sur le fond de la question.
Cette rédaction est présentée : « L'Assemblée nationale décrète qu'en conformité de l'article 3 des décrets des 14 et 20 avril dernier, les dîmes et champarts continueront, pour celte année, d'être payés en nature. »
Je propose, en amendement, de dire : « la dîme pour cette année, et les cham-parts jusqu'au rachat. »
11 y a des dîmes payées en argent ; il faut ajouter : « sans rien innover pour celles qui étaient payées en argent. »
présente une rédaction ainsi conçue : « Les dîmes, pour la présente année, seront payées en la manière accoutumée, et les cham-parts seront perçus jusqu'au rachat. »
Il faut dire que,
sur la proposition faite par plusieurs municipalités de changer le mode de perception de la dîme, l'Assemblée a décidé qu'il n'y a pas lieu à délibérer. J'ajouterai que c'est le moment de prier le roi d'ordonner d'exécuter les décrets que le pouvoir exécutif n'èxécute pas assez fidèlement. Si les peuples sortent une fois des bornes, vous ne les y ferez plus rentrer. Il faut qu'ils respectent les lois. Après tout ce que l'Assemblée nationale a fait pour eux, je pense qu'on ne saurait trop appuyer sur la responsabilité des ministres et des municipalités.
Je ne crois pas qu'on puisse dire qu'il n'y a pas lieu à délibérer, et je pense qu'il faut ordonner positivement que le payement des dîmes se fera, pour cette année» comme par le passé.
Il me paraît inconcevable que quand le peuple adresse des pétitions à ses représentants, on puisse dire qu'il n'y a pas lieu à délibérer. 11 y a toujours lieu à délibérer sur les demandes du peuple, sauf à les rejeter si son bonheur l'exige.
Je vous ai annoncé que le^comité présenterait demain un projet de décret de détail. Ce projet contiendra la résolution que vous prendrez sur la question. Le décret suivant est rendu, sauf rédaction : « L'Assemblée nationale, ouï son comité des dîmes, décrète : 1° que les dîmes, pour la présente année, seront payées en la manière accoutumée ; 2° que les droits de champarts seront perçus jusqu'à leur rachat. »
L'Assemblée revient à la suite de la discussion sur la constitution civile du clergé.
, rapporteur, propose un article additionnel qui prendrait place après l'article 5 du titre III, qui vient d'être adopté. Cet article nouveau porte :
t Le traitement qui vient d'être assigné aux curés de campagnes sera augmenté de 400 livres pour les paroisses dont le clocher ne sera pas à plus d'une lieue des barrières de Paris, et de 200 livres pour les paroisses qui sont à la même distance des villes dont la population est de cinquante mille âmes et plus. »
(Cet article, est écarté par la question préalable.)
On fait lecture de l'article 6. Art. 6. Le traitement des vicaires sera, savoir : à Paris, pour le premier vicaire, de 2,400 livres ; pour le second, de 1,500 livres ; et pour tous les autres de 1,000 livres.
« Dans les villes où la population est de cinquante mille âmes et au-dessus, pour le premier vicaire, de 1,200 livres; pour le second, de 1,000 livres, et pour tous les autres de 800 livres.
« Dans toutes les autres villes et bourgs, de 800 livres pour les deux premiers vicaires, et de 700 livres pour tous les autres.
« Dans toutes les paroisses de campagne, de 700 livres pour chaque vicaire. »
Il me semble que les traitements des premiers et des derniers vicaires offrent une contradiction choquante; ou l'un aura du superflu, ou l'autre n'aura pas le nécessaire. Ou peut, en adoptant une autre proportion, éviter de donner trop aux uns et trop peu aux autres.
Je demande que l'on donne 2,000 livres au premier vicaire, 1,800 livres au second, et 1,400 livres aux autres.
Les deux premiers vicaires étaient jusqu'à présent les seuls dont le traitement fût considérable. Les autres prêtres, sous le nom d'habitués, n'avaient que 3 ou 400 livres; votre comité leur accorde 100 pistoles ; je ne crois pas qu'ils aient lieu de se plaindre.
Je suis aussi surpris que M. l'abbé Grégoire de la disproportion de 100 pistoles à 2,400 livres ; la différence est prodigieuse : je dis prodigieuse, parce que, dans une ville, 1,000 livres ne suffisent pas pour vivre décemment. Je conclus à ce que le moindre traitement soit fixé à 1,400 livres.
Je demande la question préalable sur tous les amendements. 11 semble que plus l'on accorde, plus l'on demande. J'ai été pendant dix ans vicaire à 250 livres, et vous voyez que je n'en suis pas plus maigre.
(La discussion est fermée.)
Les amendements sont rejetés, et l'article 6 est adopté ainsi qu'il suit:
« Art. 6. Le traitement des vicaires sera, savoir : à Paris, pour le premier vicaire, de 2,400 livres; pour le second, de 1,500 livres; et pour tous les autres, de 1,000 livres.
« Dans les villes dont la population est de cinquante mille âmes et au-dessus, pour ie premier vicaire, de 1,200 livres; pour le second, de 1,000 livres; et pour tous les autres, de 800 livres.
« Dans toutes les autres villes et bourgs où la population sera de plus de trois mille âmes, de 800 livres pour les deux premiers vicaires, et de 700 livres pour tous les autres.
« Dans toutes les autres paroisses de villes, de bourgs et de villages, de 700 livres pour chaque vicaire. »
, député de Mende, demande à interrompre l'ordre du jour pour appeler l'attention de l'Assemblée sur un point de cumul que ses décrets n'ont pas encore prévu. 11 dit (1):
Messieurs, j'ai l'honneur de demander la parole pour faire observer à l'Assemblée qu'il me
semble qu'elle n'arrête pas assez son attention particulière, ni ses scrupules ordinaires,
sur les permissions d'absence que M. le président demande quelquefois pour les honorables
membres qui l'en prient. Je fonde, Messieurs, mes observations et mes sollicitations pour que
vous vous y attachiez un instant, dans les propres scrupules et dans la sagesse de vos
décrets mêmes, pour tout ce qui peut regarder votre intérêt personnel; car, jusqu'à présent,
vous vous êtes interdit, par ces décrets, toutes sortes d'avantages individuels ; et certes,
ce n'est pas sans jalousie et sans envie que vos ennemis, détracteurs de vos principes et de
votre constante fermeté à consolider et à achever le bonheur des Français, ont été forcés de
vous admirer dans les plus petites précautions que vous avez prises pour seconder et
manifester la pureté de votre désintéressement. Mais, cependant il vous en est échappé une
trop essentielle,
Leur réclamation donc, l'esprit de vos précédents décrets et le refus que, considérativement, MM. du comité de Constitution ont fait de décider ma proposition, quoiqu'une grande partie l'ait approuvée et m'ait engagé de vous la faire, me forcent de vous observer que vous manquâtes la précaution d'ajouter, lorsque vous décrétâtes, le 14 du mois passé, qu'aucun de vos membres ne pourrait assister, comme électeur, dans les assemblées des districts de département, ce qui ne décidait pas si un de vos membres pourrait être éiigible ou ne pas l'être; mais, ce qui cependant, pouvait laisser préjuger qu'ils l'étaient: vous manquâtes, dis-je, d'ajouter dans le cas de l'éligibilité, que vous aurez sans doute entendu laisser, comme je le crois, aux membres de l'Assemblée,qu'au moins ceux qui seraient choisis par leurs concitoyens, pour maire, administrateur, ou procureur-syndic, ne pourraient quitter l'Assemblée, sous prétexte que ce soit, pour en aller remplir ies fonctions, qu'après l'option qu'ils auraient faite.
En effet, Messieurs, de ce défaut d'explication et de précaution de votre part, ne peut-il pas résulter de grands inconvénients? N'en est-il pas même résulté qui occupent dans ce moment votre sollicitude? Et nese trouve-t-il pas une contradiction manifeste entre l'esprit de vos décrets et la liberté, qu'en cas d'éligibilité, vous laissiez s'accumuler sur vos têtes plusieurs fonctions, incompatibles les unes avec les autres, au préjudice de vos représentés, qui manqueraient nécessairement de l'être dans quelques-unes des parties où ils ont le droit de l'être ? Non, Messieurs, ce n'est pas votre intention, et vous allez sans doute y pourvoir.
Il est vrai qu'avec les sentiments qui enflamment les membres de l'Assemblée, vous pouviez vous dispenser de leur faire une loi des devoirs de l'incompatibilité de leurs fonctions, avec celle de toute autre place à laquelle la confiance de leurs concitoyens les appellerait ; car il en est plusieurs qui, honorés du choix de leurs concitoyens dans des places de nouvelles municipalités ou d'administration, se la sont faite à eux-mêmes et n'ont pas cru devoir s'y rendre de peur d'être forcés de s'immiscer dans leurs fonctions, pour ne pas compromettre le caractère de l'inviolabilité du représentant de la nation avec la responsabilité de l'administrateur et de l'officier public.
D'autres, en ce cas, en ont prévenu l'Assemblée qui, presque dans tous les cas, par son refus, a manifesté son intention, sans rendre de décret positif; mais d'autres ont pu ne pas le faire et après la nouvelle qu'ils ont reçue de leur nomination à la place de procureur-syndic, demander des permissions simples à l'Assemblée, sans la prévenir des motifs, comme d'ordinaire l'ont fait en pareil cas, tous les membres qui les ont de-
mandées, et partir avec, ou sans le projet de commencer leurs fonctions, ainsi qu'avec l'intention de revenir ou de ne pas revenir à l'Assemblée.
C'est donc pour détruire et déterminer cette incertitude, que j'ai l'honneur de vous proposer d'ordonner l'option, en cas que les membres élus dans leurs départements veuillent s'absenter par intervalle de l'Assemblée, pour s'y rendre, qu'ils aient ou n'aient pas l'intention de remplir leurs fonctions, car il est impossible que, même en ne voulant pas en remplir, l'on ne s'y immisce point et l'on n'ait pas une influence, qui souvent pourrait être contraire aux vues de l'Assemblée, et de l'étendre même sur ceux qui s'y seraient déjà rendus et qui ne rejoindraient pas l'Assemblée à l'expiration de leur congé, afin que, s'ils optent en faveur de leurs nouvelles élections, ils puissent être remplacées par leurs suppléants, quand ils en ont, par exemple, ainsi qu'en a mon département. Je puis même certifier à l'Assemblée que leurs sentiments et leurs principes sont dignes de mériter place au milieu d'elle.
Si je m'élève contre le silence, sans doute involontaire, et le défaut d'option des membres qui sont partis, qu'il me soit permis de déclarer ici le cas que je fais du talent et du mérite de ceux que je connais, pour les places auxquelles leurs concitoyens viennent de les nommer : et que ceux qui penseraient que j'ai le dessein de les attaquer personnellement, reçoivent ici la déclaration que je fais du contraire, mais celle que je ferai toujours de renoncer à tout intérêt personnel et considératif pour celui de tous mes concitoyens, au nom desquels je réclame, Messieurs, et fonde les motifs du décret qui je vais avoir l'honneur de vous soumettre pour les mettre dans le cas d'être représentés partout où ils ont droit dè l'être, sans interruption ni crainte d'accumulation de pouvoirs sur une même tête.
Projet de décret.
L'Assemblée nationale décrète que tous ceux de ses membres qui auraient pu ou pourraient être élus dans les nouvelles administrations et municipalités de leurs départements, ne pourront quitter l'Assemblée pour se rendre dans l'étendue du territoire de leur département, sous quelque prétexte que ce soit, sans avoir préalablement fixé leur choix sur l'une des places qu'ils voudront conserver, notamment de celle de représentant de la nation ; pour qu'en cas de démission de celle-ci, ils puissent être remplacés par leurs suppléants, s'ils en ont,et que ceux qui pourraient être partis depuis leur nomination, et qui ne se rendraient pas à l'expiration de leur congé à l'Assemblée, seront tenus de faire l'option sur la première notification du présent décret, qui leur sera faite ou par la municipalité de leur domicile, ou par les commissaires du roi nommés pour la formation du département.
consulte l'Assemblée qui renvoie ce projet de décret au comité de Constitution.
La suite de la discussion sur la constitution civile du clergé est reprise.
, rapporteur, lit l'article 7 ;
« Art. 7. te synode du diocèse réglera tous les ans les dépenses nécessaires dq séminaire, tant pour le traitement des vicaires supérieurs et vicaires directeurs que pour les frais d'éducation des jeunes clercs qui y seropt élevés, de panière cependant que la dépense totale ne puisse pas excéder, pour Paris, la somme de 30,00Q liyrés, et pour chaque autre diocèse, celle l&OOO livres; et tous les ans le cqmpte en sera rèpdu à l'administration de département. »
Valné. Sur quelle base est fondée cette énorme distinction pour la ville de Paris ? Est-ce sur la population ? il n'est pas de diocèse dans lequel elle ne soit aussi étendue* Est-ce sur la cherté des subsistances t c'est encore une base fausse ; par exemple, si Bordeaux continue d'être diocèse métropolitain, ies subsistances y seront beaucoup plus chères qu'à Paris.
Je demande l'ajournement de l'article, parce que l'on ne connaît pas assez les divers objets qui y ont rapport. Les dépenses seront bien moins considérables dans les séminaires où il y a beaucoup de bourses que dans ceux où il n'y en a pas. Les coqseryera-t-on, ou ne les conservera-t -on pas ? Il faut que le comité nous présente d'abord ses vues sur cet objet. J'insiste donc sur l'ajournement.
(L'ajournement est adopté.)
lit l'article S qui porte :
« Art. 8. Tous les vingt ans, le traitement des ministres de la religion, tel qu'il vient d'être fixé, pourra recevoir une nouvelle augmeptation en raison de l'augmentation du prix des denrées. >
Cet article est absolument inutile; je conviens que les principes qu'il renferme sont justes ; à mesure que le renchérissement des denrées rendra insuffisant les traitements des curés, il faudra déterminer une augmentation. Mais je ne|vojs pas qu'il soit possible de déterminer cette époque ; d'ailleurs, l'article n'étant pas constitutionnel, il est du ressort des législatures. L'utilité de nous renfermer strictement dans ce qui nous appartient est un motif suffisant pour nous déterminer à rejeter l'article.
(L'article est écarté par la question préalable,)
Les deux articles suivants sont mis ensemble à la discussion.
v Art. 9. Les assemblées administratives feront faire une estimation des biens-fonds qui dépendent de chaque curé, et la jouissance en sera laissée aux curés, jusqu'à concurrence du quart de leur traitement, et en déduction des sommes qui doivent leur être payées.
« Art. 10. Dans les paroisses de campagne, où les curés n'ont point de biens-fonds, ou n'en ont pas dans la proportion qui vient d'êtrê fixée, s'jl s'y trouve des domaines nationaux, il en sera délivré aux curés, d'après l'estimation qui en sera faite, toujours jusqu'à concurrence et eq déduction du quart de leur traitement. »
, député de Dol. Je demande que le traitement des curés soit payé la moitié en biens-fonds.
Ceci est tout à là fois, et dans l'intérêt de la nation, et dans l'intention des curés ; il faut que les pasteurs aient une oc?
cupation. Il n'y a personne qui, s'il se donne la peine de réfléchir, n'aperçoive qu'en dotant le curé moitié en biens-fonds, il en sera plus sédentaire, il en veillera plus exactement à ses intérêts ; il trouvera de quoi payer les gages des serviteurs qu'il sera obligé d'entretenir. Quelques précautions que vous preniez, les biens ne pourront jamais être mieux mis en valeur que par les curés. Personne ne connaît mieux qu'eux l'agriculture; la Société d'agriculture n'a jamais reçu de meilleurs mémoires que ceux rédigés par les curés.
Si vous adoptez l'article qui vous est proposé, vous laisserez entre les mains des ecclésiastique pour plu's de 400 millions de biens-fonds. Il est impossible que les curés puissent suivre l'exploitation; ce travail demande des soins continuels et journaliers qui distrairaient nécessairement les pasteurs .de leurs fonctions. De deux choses l'une, lorsqu'on voudrait chercher un curé travaillant à la campagne, pour aller voir un malade, ou il faudrait qu'il abandonnât son champ, ou qu'il abandonnât son malade. S'ils ont envie de s'occuper, ils le peuvent de mille manières. Je pense qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur les deux articles proposés parle comité.
J'appuie la question préalable . demandée par M. d'André. Dans l'état actuel des choses, il y a un grand nombre de curés qui ne sont pas dotés en biens-fonds, et ce ne sont pas les moins respectables. L'estimation que l'on serait obligé de faire donnerait lieu à une foule de prévarications ; lorsqu'une municipalité voudrait favoriser un curé', on lui donnerait pour 300 livres ce qui produirait 4,5 et même600 livres. Les fonds que vous seriez obligés de fournir se-. raient ceux dont il vous serait le plus facile de vous défaire. Vous seriez obligés de donner au moins le tiers de toutes les possessions actuelles du clergé : vous n'auriez plus de quoi faire face à vos assignats. Je conclus à ce que vous adoptiez la question préalable sur les deux articles.
(La discussion est fermée. — La question préalable sur les deux articles est mise aux voix. — Deux épreuves successives paraissent douteuses : on réclame l'appel nominal.)
Avant de délibérer, l'Assemblée veut sans doute être conséquente; elle a décidé que le clergé ne pouvait être possesseur de biens-fonds.
(On insiste sur l'appel nominal.)
observe qu'il y a une séance du soir, et que-l'heure est avancée.
L'Assemblée remet au lendemain l'appel nominal sur la question préalable.
La séance est leyée à trois heures et demie.
Séance du
La séance est ouverte à six heures du soir.
, ex-président, occupe le fauteuil à la place de M. l'abbé Sieyès, président en fonctions, qui est absent
, secrétaire, fait lecture des adresses ainsi qu'il suit :
1° Adresse de la garde nationale de la ville de Tarascon, qui exprime à l'Assemblée sa vive reconnaissance sur ce quelle a daigné approuver son zèle pour rétablir l'ordre et la subordination chez les dragons de Lorraine.
2° Adresse de la garde nationale de Cette, qui fait une description de la cérémonie de confédération qu'elle vient 4e contracter avec le régiment dè Médoc, eh garnison dans cette ville, contre les ennemis de la Constitution.
3° De la ville de Flprac, qui s'élève avec force contre les citoyens catholiques de la ville de Nîmes.
4° De la ville de Féverac-le-Château, qui improuve la déclaration d'une partie de 1 Assemblée nationale.
5° De la communauté de CQnnpzonls, département de l'Aude ; elle se plaint d'une injuste inégalité dans la répartition de ses impôts.
6° Des curés et vicaires composant la congrégation ecclésiastique du Grandvaux, dans le département du Jura, qui prêtent, entre les mains de l'Assemblée, le serment civique.
7° D'une société de citoyens de la ville de Saint-Pol, en Artois.
8° De la ville de Bergerac, qui demande l'établissement d'un tribunal pour connaître des matières de commerce. Elle annonce que l'universalité des habitants vient de créer une banque où les assignats seront reçus et échangés de quelle somme qu'ils soient.
09° Des habitants de la yi|le de Sancerre, qui ont solennellement prêté le serment civique.
10° Des officiers municipaux et de la garde nationale de la communauté d'Allement, département de la Marne.
11° De la communauté de Berzieiix, département de Ghâlons-sur-Marne. Elle a fait le don patriotique de la somme de 840 livres.
12° Adresses de la communauté de Saint-Heve-rieu eu Nivernais, qui se soumet d'acquérir tous les biens dépendants de son prieuré ; de celle de Villers-Bretoneux, qui offre d'acquérir les dOr-raaines nationaux situés dans son territoire, évalués à 11,844 livres ; de celle de Saint-Martin, département du Calvados, qui fait une soumission de 30,000 livres ; de la ville de Briare, qui fait une soumission de 100,000 livres; enfin des bourgs de Frevent, de Rollepot et de Gercamp, réunis au département du Pas-de-Calais, qui offrent d'acquérir tous les biens dépendants de l'abbaye de Gercamp.
13° De la communauté de Broyés, département
14° De l'assemblée du district de Gharleville, qui consacre ses premiers moments à offrir à l'Assemblée nationale l'hommage de sa reconnaissance pour ses pénibles travaux, et de son admiration pour le décret concernant le droit de la paix et de la guerre, et la déclaration que la nation française n'attentera à la propriété et à la liberté d'aucun peuple : « Il n'y a qu'un instant, disent ces administrateurs, que nous touchions au pays ennemi ; mais nous pouvons espérer que ces odieuses barrières, qui séparent les nations, tomberont un jour, et leur chute et le bonheur des humains seront votre ouvrage. »"
15° Des officiers municipaux de la ville de Montauban, contenant le procès-verbal dressé à l'occasion de la liberté rendue par le peuple aux prisonniers détenus depuis la malheureuse journée du 10 mai ; la garde nationale de cette ville a prêté entre leurs mains le serment civique : « Nos principes, dit cette garde dans son adresse, q\ioi qu'en disent nos ennemis, ne sont pas équivoques : n'en doutez pas, Nosseigneurs, il n'est aucun de nous qui ne sacrifiât sa vie pour défendre sa liberté et le succès d'une Révolution qui la lui assure. »
16° De la ville du Faouet, en Rretagne, qui sollicite un tribunal de district.
17° De la ville de Valognes, contenant le procès-verbal du serment civique de la garde nationale, auquel se sont réunis les étudiants du collège de cette ville. Elle s'élève avec force contre la délibération des citoyens catholiques de Nîmes, et la déclaration d'une partie de l'Assemblée.
18° Des communautés de Poizat, département de l'Allier, d'Aubergenville, de Lignère-la-Ca-relles etd'Avrilly, département deSaône-et-Loire. Elles font le don patriotique du produit des impositions sur les ci-devant privilégiés.
19° De la communauté de Junas, du département du Gard. Elle supplie l'Assemblée de lui permettre de payer la dîme en argent.
20° Des officiers municipaux du bourg de Ru-migny, en Thiérache.
21° Des gardes nationales de la ville de Sept-Fonds et de celle de firive. Cette dernière exprime son indignation contre la déclaration d'une partie de l'Assemblée.
22° De la municipalité de Jonchery-sur-Vesle, qui annonce que les gardes nationales de toutes les communautés voisines se sont réunies audit lieu, sur le bruit qu'une troupe de brigands ravageait les campagnes; que ce bruit se trouvant faux, elles ont profité de leur réunion pour faire un pacte fédératif contre les ennemis de la Constitution et les perturbateurs du repos public.
23" Des gardes nationales des départements du Puy-de-Dôme, du Cantal, de la Haute-Loire, de la ville de Limoges et du bataillon des chasseurs d'Auvergne, qui ont formé une confédération dans la ville de Clermont-Ferrand, le 15 du mois dernier, à l'instar de celles dont il a été rendu compte à l'Assemblée.
24* Adresse des gardes nationales fédérées au camp de Lyon, contenant vingt-deux pages de signatures des principaux officiers.
25° Adresses des assemblées primaires des can-tons de Saint-Claud, en Angoumois, de Gisors, de Pouilly, département de la Nièvre, d'une des sections du canton de la ville de Gosne-sur-Loire.
Des électeurs du district de Cusset, de celui de Nemours et de celui de Chaumont, en Bassigny.
Toutes ces assemblées consacrent les premiers
moments de leur existence à présenter à l'Assemblée l'hommage d'une adhésion absolue à tous ses décrets et d'un dévouement sans bornes pour leur exécution.
Les électeurs du district dè Cusset annoncent qu'il s'était élevé des troubles considérables dans le département de l'Allier; que le3 malheureux habitants des campagnes, séduits par des insinuations étrangères, croyaient obéir aux lois, alors même qu'ils les violaient : mais que l'ordre et la tranquillité ont été rétablis aussitôt qu'ils ont eu connaissance du décret du 27 mai, qui défend les taxes de grains; qu'ils ne cherchent plus qu'à réparer les violences exercées envers les propriétaires, et gémissent d'avoir affligé le cœur des représentants de la nation.
26°. Adresse du conseil général de la commune de Ruffec, contenant l'expression la plus énergique de sa reconnaissance pour les travaux de l'Assemblée, de l'adhésion la plus respectueuse à ses décrets, et de la plus vive indignation contre ceux qui ont osé se permettre des protestations contre le décret du 13 avril dernier. Les citoyens de Ruffec déclarent qu'ils les regardent comme des traîtres à la patrie, à la loi et au roi; et indignes du titre de citoyens.
27°. Délibération du conseil général de la commune de la ville de Lyon, du 9 juin, par laquelle le conseil général a arrêté que, fidèle au serment civique qu'il a prêté, il est et demeure inviolable-ment attaché à tous les décrets de l'Assemblée nationale, et notamment à celui du 13 avril, qu'il reconnaît pour être le seul qu'il convient de pro-concer sur notre sainte religion catholique, apostolique et romaine, d'après les exemples de charité, de paix et de tolérance que nous a donnés son divin auteur; qu'engagé par son serment à défendre la Constitution de tout son pouvoir, il voue à l'infamie, regarde comme parjures et traîtres à la patrie tous ceux qui protesteront contre les décrets de l'Assemblée nationale ; invite les dépositaires du pouvoir exécutif à poursuivre comme perturbateurs du repos et de la félicité publics, et comme criminels de lèse-nation, tous ceux qui,affectant un zèle hypocrite pour la religion, abuseraient de la chaire de vérité et du saint ministère qui leur est confié pour égarer les âmes faibles, et les soulever contre les sages décrets des représentants de la nation ; arrête en outre que l'extrait du présent arrêté sera incessamment adressé à l'Assemblée nationale par Messieurs composant le bureau municipal.
28° Adresse de la commune du Havre, qui supplie l'Assemblée nationale de décréter que ses réclamations seront présentées à l'assemblée générale des électeurs du département de la Seine-Inférieure, comme celles des villes de Fécamp, Eu et Au maie.
29° Adresse du chapitre de Saint-Rambert-sur-Loire, qui s'empresse de rendre hommage aux décrets de l'Assemblée nationale, et notamment à celui du 13 avril dernier.
30° Adresse des citoyens actifs réunis à Saint-André-d'Ecbaufour, portant adhésion de reconnaissance ; ils applaudissent à la déclaration des droits, aux lois sur les municipalités, aux décrets qui les ont affranchis de la féodalité, de la gabelle; ils supplient l'Assemblée de continuer ses travaux et de les achever.
31° Adresse de la ville d'Aix, par laquelle la municipalité loue la conduite du régiment de Lyonnais en garnison dans cette ville, et en particulier celle de M. de Fezensac, colonel de ce régiment.
32° Adresse des citoyens de la ville d'Aix réunis en cercle patriotique, et voués par leur établissement au maintien de la Constitution.
33° Adresse de Saint-Jean-lès-Orléans, département du Loir, qui contient adhésion à tous les décrets de l'Assemblée nationale; on y lit ces expressions bien pratiotiques : « Vous applaudir, vous garder et vous défendre, c'est le premier de nos devoirs. »
34° Adresse du sieur de Lion du Jarry, qui supplie l'Assemblée nationale de vouloir bien mettre la manufacture de glaces, établie à Rouelle, sous la sauvegarde de la nation, de la loi, de la protéger, et Ijri faire une avance de 100,000 livres, en assurant que, si la restauration de cette manufacture n avait pas lieu, faute dé secours, une branche de commerce si importante serait perdue, les bâtiments tomberaient, les ouvriers seraient sans ressource, et ils seraient forcés d'aller chercher des travaux chez l'étranger; au lieu que le sieur du Jarry les loge gratis à Rouelle avec leurs femmes et leurs enfants, et qu'il a le plus grand intérêt de les y conserver.
35® Adresse des officiers municipaux de la ville de Sainte-Foi, du 6 juin, qui se félicitent d'être les organes de leurs concitoyens, pour offrir à l'Assemblée nationale le tribut de leurs hommages. Cette adresse contient aussi d'adhésion la plus formelle aux décrets de l'Assemblée nationale, notamment à celui du 13 avril, et une invitation pressante de continuer ses glorieux travaux.
36° Adresse de la garde nationale de Maidière, département de la Meurthe, district de Pont-à-Mousson, qui contient adhésion à tous les décrets de l'Assemblée nationale, et serment de les observer et de les faire observer aux dépens de lqur vie.
37° Adresse de la ville de Beaucaire, qui improuve formellement les principes développés dans les délibérations d'Uzès, Nîmes et Alais, réitérant son adhésion à tous les décrets de l'Assemblée nationale, sanctionnés ou acceptés par le roi, dévouant à l'exécration publique, et déclarant traîtres à la patrie, indignes du nom Français, tous ceux qui, par leurs écrits, leurs assemblées, leurs protestations et leurs actions, chercheraient à affaiblir la confiance due aux augustes représentants de la nation, et l'obéissance à leurs décrets.
38° Adresse de l'assemblée électorale du dis-trict de Dijon, département de la Côte-d'Or, qui manifeste toute l'horreur que leur a inspirée la conduite de ceux qui ont protesté contre le décret qui, rendant les biens de l'Eglise à leur véritable destination, va faire disparaître ce déficit immense qui allait mettre le comble à la misère du peuple français.
39° Adresse des électeurs du département du Puy-de-Dôme, qui s'empressent de présenter à l'Assemblée l'hommage de leur reconnaissance et leur adhésion à ses décrets.
, membre du comité militaire, propose au nom des comité militaire et de la marine réunis, une addition au décret rendu pour la fédération nationale. Cette addition est lue et adoptée. L'Assemblée en ordonne la transcription dans son procès-verbal ainsi qu'il suit :
1° Les régiments en garnison dans les colonies françaises ne pouvant pas envoyer une députation directe, députeront pour chaque régiment le
plus ancien officier, le plus ancien bas-officier et les deux plus anciens caporaux, grenadiers, chasseurs et soldats, présentement en France.
2° Le régiment d'artillerie des colonies députera comme les régiments d'artillerie en garnison en France.
3° Le bataillon auxiliaire des colonies, en garnison à Lorient et au Port-Louis, députera de la manière prescrite pour tous les corps de l'armée.
4e Le port de Lorient députera comme ceux de Brest, Toulon et Rochefort.
5° Les matelots députeront les deux plus anciens matelots par port de roi, et un pour chacun des autres ports.
6" Les ingénieurs-géographes militaires députeront le plus ancien d'entre eux.
7° Les commissaires ordinaires et écrivains des colonies députeront dans la proportion des ports et arsenaux de marine.
8° Les lieutenants de roi, majors, aides-majors et sous-aides-majors de places députeront le plus ancien d'entre eux.
/9° Enfin, les chirurgiens et aumôniers des corps députeront le plus ancien d'entre eux.
Signé : Noailles; Rostaing, président du comité militaire; le marquis de Crillon; J. de Menôu; Bureaux de Pusy; le marquis de Thiboutot; le marquis de Vaudreuil, président du comité de marine; Nompare de Champagny, secrétaire du comité de marine.
Les surnuméraires dans les bureaux de la ferme, admis à la barre, présentent un mémoire où ils exposent les motifs qui les ont déterminés à apporter, devant le tribunal de la nation assemblée, leurs réclamations et leurs prières. L'Assemblée nationale renvoie le mémoire au comité des finances, et M. le président accorde la séance aux surnuméraires, en les assurant de l'esprit de justice qui anime et dirige les opérations de l'Assemblée nationale.
donne lecture d'une sentence de police, rendue par les maire et officiers municipaux de Tout, le 9 juin, qui condamne à être lacéré et brûlé un libelle incendiaire, intitulé: Avis important à la véritable armée française ; ordonne un plus ample informé contre les personnes soupçonnées d'être les auteurs, imprimeurs ou distributeurs de cet écrit. (On applaudit au patriotisme des officiers municipaux de Toul.)
, député de Marseille, fait part à l'Assemblée que les assemblées primaires d'Aubagne ont pris, le 4 de ce mois, une délibération portant qu'ensuite de la réserve qui lui avait été laissée par un décret de l'Assemblée, d'opter entre le district d'Aix ou celui de Marseille, elle opte provisoirement pour le district de Marseille, sans préjudice de sa réclamation faite à l'Assemblée pour avoir une administration de district; il demande qu'il soit décrété que la ville d'Aubagne fasse provisoirement partie du district de Marseille, et renvoie le surplus à son comité de la division du royaume.
(L'Assemblée nationale décrète que la ville d'Aubagne fera partie du district de Marseille, et renvoie le surplus de la délibération de l'Assemblée d'Aubagne à son comité de ia division du royaume.)
La municipalité d'Harileur, admise à la barre, offre en don patriotique le remboursement de la finance des offices municipaux, les gages arriérés de ces offices et le montant du rôle de supplé-
ment des ci-devadt privilégiés, pour les six derniers mois de 1789; èlle demande qu'il soit retranché 4e la somme de 3,877 livres 4 sols 3 deniers, montant du don patriotique, celle de 870 livres 13 sols 7 deniers, a quoi a été évaluée la contribution patriotique des biens communaux, et qu'il soit fourni à cette ville quittance de sa contribution patriotique.
répond, et l'Assemblée ayant applaudi la municipalité d'Harfleur et accepté son don patriotique, ses députés sont admis à la séance.
, député de Privas, donne lecture d'une adresse imprimée des électeurs du département de l'Ardéche à l'Assemblée nationale. On y lit ? « Il nous serait impossible de vous dissimuler l'étonnement et la douleur que nous a causés la protestation de la minorité de votre Assemblée ; nous l'improuvons cette protestation funeste, qui ne tendait à rien moins qu'à vous séparer, et à exposer l'Etat à tous les désordres de l'anarchie. »
demande que la commune de Carlepont, district de Noyon, soit autorisée à recevoir du sieur Formillier la somme de 6,352 livres 1 s. 4 d. restant de celle de 7,898 livres 12 s. 4 d. revenant à ladite commune.
Cette demande est renvoyée au comité des finances.
, secrétaire, donne lecture d'un mémoire de la municipalité de Villeneuve-lès-Béziers, ayant pour objet l'administration des dîmes pour la présente année : l'Assemblée nationale applaudit à la sagesse des mesures prises par cette municipalité, et les approuve.
L'Assemblée nationale autorise M. de la Roque à témoigner à là ville de Bergerac ia satisfaction avec laquelle elle a vu que le patriotisme des citoyens de cétte ville les a engagés à établir une banque, où les assignats de toute valeur seront échangés avec du numéraire effectif ; elle l'autorise de plus à assurer cette ville qu'elle prendra en considération la demande qu elle fait d'un tribunal (1)*
, député de Soissons, demande un congé pour aller aux eaux.
, archevêque de Bourges, député du Berry, demande la permission de s'absenter également pour, aller aux eaux.
demande l'autorisation d'aller en Corse pendant six semaines.
Ges congés sont accordés.
, maire de Paris, demande à donner lecture d'un mémoire et adresse de la ville de Paris sur Valiénation et la vente des biens nationaux. (Voyez ce mémoire annexé à la séance de ce jour.)
L'Assemblée pressée de passer à son ordre du jour ordonne que le mémoire sera imprimé,
distribué à domicile et que le comité d'aliénation en rendra compte au premier jour.
Vous savez quelle à été l'indignation universelle contre la délibération des prétendus catholiques de Nîmes; on doit s'étonner surtout qu'ils en aient pris une seconde, et que toutes deux aient pu trouver des défenseurs dans l'Assemblée nationale. Que renferme la première délibération? Des injures contre l'Assemblée nationale et le roi, le dessein de porter atteinte à la Constitution. Que demande-t-oh ? Le rétablissement plein et entier de l'autorité royale. Que signifie cette demande, si ce n'est le rétablissement de l'ancien régime et le retour des anciens abus? Et quel est le moment que choisissent les soi-disant catholiques de Nîmes ? (Dites les catholiques ! s'écrie la partie droite.) Je dois dire., avec votre comité des recherches, les soi-disant catholiques ; d'abord parce que nous ne devons point réconnaître d'assemblée politique sou$ le nom d'assemblée de catholiques, nous ne connaissons que des assemblées de citoyens ; et parce qu'ensuite ce serait faire aux catholiques de la ville de Nîmes une injure qu'ils né méritent pas, que de croire qu'ils sont tous complices d'une démarche aussi coupable. Quel moment, dis-je, choisit-on pour demander le rétablissement de l'autorité royale? Celui où on l'a arrachée des mains dès ministres pour la remettre entre celles du monarque ; celui où l'Assemblée nationale, rén fermant cette autorité dans dé justes bornes, lui donne cependant toute sa latitude. On demande la réforme des décrets. Eh 1 pourquoi cette réforme?Toutn'annonce-t—il pas qu'ils sont la déclaration de la- volonté générale ? ( Non 1 s'écrient M. le marquis de Folleville et autres membres de la partie droite.) On demande la révision des décrets. Etquel estle but de cette revision? De faire croire que le roi et l'Assemblée nationale ne sont pas libres à Paris. Jusqu'au tumulte de cette Assemblée, jusqu'aux opinions qu'on y profère, tout annonce la liberté de l'Assemmée nationale. (Légers murmuresSi on avait pu en douter, les murmures qui s'élèvent sur une proposition si simple, les efforts que l'on fait pour favoriser une délibération absolument contraire à vos décrets, ne prouvent-ils pas assez cette liberté? (Les murmures recommencent dans la partie droite.) Gomment ! à l'approche d'une fédération universelle, au moment où les députés de toutes les provinces du royaume vont former une alliance au nom de tous ies Français armés pour la défense de la Constitution ; quand nous voudrions la voir achever, ou du moins pouvoir mettre sous leurs yeux tous ies décrets constitutionnels, oh emploie deux séances à discuter, à peser, quoi? là délibération d'une poignée de citoyens qui vient s'élever contre la volonté na-tionalé ! Je vous demande pardon si j'ai dit une poignée de citoyens ; non, ils ne sont pas citoyens. (On applaudit dans une très grande partie de la salle et dans toutes les tribunes.) Non, ils ne méritent pas ce titre glorieux, ceux qui opposent un intérêt pàrticulier à l'intérêt public, cjui ne savent pas distinguer l'esclavage d'une juste obéissance à la loi. Eh 1 que dit cètte délibération? elle tend à semer le trouble et la discorde, à opérer une scission ; et cependant au momént même où l'Assemblée nationale, le roi et tous les bons citoyens nè forment plus qu'un seul corps, il se trouve encore des membres de l'assemblée nationale qui osent soutenir
cette délibération. (Oui 1 s'écrie-t-on dans la partie droite.) Par intérêt pour la chose publique, pour ceux-même qui sont les auteurs de la délibération, on ne doit pas vous en entretenir plus longtemps. Votre comité s'est borné à demander que tous ceux qui ont signé soient mandés à la barre. S'ils peuvent motiver leurs démarches, vous leur fournissez tous les moyens de défense ; si, comme on a tout lieu de le croire, elle est aussi coupable que ridicule, vous serez toujours à même de les juger. Il s'est commis des assassinats dans la ville de Nîmes ; qu'a fait votre comité ? il a pensé qu'on devait informer sur ces attentats ; qu'il était nécessaire d'en chercher les auteurs, parce que l'Assemblée nationale doit rétablir l'ordre, malgré les efforts des ennemis du bien public. J'appuie donc l'avis du comité, je l'appuie pour l'intérêt général, qui sollicité tous vos moments. Je vous supplie de ne pas vouslivrer au talentillusoiredequelques personnes qui disent que c'est pour prouver la liberté des opinions que je demande qu'on n'entende aucun orateur. Je ne demande pas qu'on aille aux voix sur l'avis du comité ; mais je supplie qu'on n'emploie pas en verbiage un temps précieux pour la patrie : c'est le jour de l'anniversaire de la Constitution en Assemblée nationale, où l'on devrait rougir d'appuyer des délibérations tendant à détruire la Constitution. Je demande que le projet du comité soit adopté sans désemparer.
(1). Messieurs, quatre mille citoyens actifs sont accusés ; permettez qu'il s'en présente un (2) pour les défendre. Je n'entreprendrai point l'apologie des sentiments et des écrits que vous paraissez improuver ; c'est par vos lois et vos principes que je défendrai les citoyens de Nîmes et d'Uzès, que je répondrai au préopinant et au comité des recherches- Des imputations vagues, mais imposantes, leur ont été prodiguées. On vous a annoncé des crimes, des crimes de lèse-nation et le corps de délit qu'on vous présente consiste en deux adresses dont les erreurs mêmes manifesteraient encore l'effroi du crime, l'amour de l'ordre, le respect pour une Constitution libre pour l'Assemblée nationale et la fidélité au roi.
Ce sont des écrits qu'on vous dénonce, lorsque la liberté d'écrire et de publier ses
pensées se trouve consacrée par vos lois, lorsque la licence la plus effrénée en abuse avec
impunité. — Ce sont des assemblées de citoyens qu'on vous dénonce, lorsque la Constitution en
établit le droit.
Un honorable membre vint hier au secours de votre comité des recherches, et vous assura qu'il ne pourrait exister, qu'il ne pourrait être utile, s'il était soumis aux formes juridiques et qu'il faut bien qu'il ait la liberté d admettre pour l'initiative d'une information un avis quelconque, même anonyme. — Mais je réponds à l'honorable membre quilne s'agit point ici de recherches secrètes que peut se permettre le comité sur uu avis quelconque ; que nous avons entendu dans cette tribune une dénonciation publique, une diffamation dirigée sans titre et sans preuve contre des citoyens accusés d'un autre délit : car ils sont cités à votre tribunal pour une adresse ; et avant qu'ils puissent la défendre, avant qu'aucune voix puisse s'élever en leur faveur, on les accable de soupçons odieux, on les présente comme des conspirateurs fanatiques, comme de vils assassins. Etait-ce là le droit ou l'obligation de votre comité des recherches ? Sont-ce là les principes de la Constitution et les prémices delà liberté ?
Je ne sais ce qui résultera des informations commencées à Nîmes sur les troubles qui y ont eu lieu, mais je sais que des relations calomnieuses ont élé publiées, même aujourd'hui, même à votre porte ; que plusieurs faits qui les démentent sont déjà constatés, que les auteurs des troubles seront très probablement découverts ; que tout est tranquille maintenant ; que les assemblées primaires, les élections, se sont faites paisiblement. En attendant qu'on en sache davantage, je déclare hautement que je regarde comme vraiment criminels ceux qui, sous prétexte de religion, ou sous tout autre prétexte, fomentent des divisions entre les citoyens et préparent des malheurs publics par des passions et des intérêts privés. Mais, certes, je ne reconnais point ce caractère inique dans les adresses des citoyens catholiques ae Nîmes et d'Uzès. — Et en écartant de ces écrits les faits et les présomptions qu'on veut injustement en rapprocher, je les jugerai, Messieurs, par vos propres maximes. La Constitution ayant pour base essentielle la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, c'est dans ces principes que vous devez puiser la règle de vos jugements ; si dans les faits qui vous sont dénoncés, les conditions essentielles de la liberté publique et individuelle sont violées, si la soumission due aux lois est attaquée, vous avez un attentat à venger. — S'il ne s'y rencontre aucun de ces caractères, si la conduite des citoyens qu'on vous dénonce n'a point troublé l'ordre public ; si leurs paroles et leurs écrits ne
sont que l'expression libre de leur pensée sans actes séditieux,sans excitation qui les provoque; s'ils n'ont fait qu'user du droit de pétition, quel qu'en soit l'objet, ils sont alors, Messieurs, dans les termes de la constitution d'un peuple libre ; et pourvu qu'ils parlent avec respect du Corps législatif, qu'ils obéissent à ses décrets, ils ont sans doute le droit de dire ce qu'ils en pensent, ce qu'ils désiraient d'y avoir ajouté ou retranché ; et tel est, Messieurs, le caractère de l'adresse des citoyens de Nîmes.
Qu'est-ce, en effet, que le droit de pétition ? Ne consisterait-il qu'à vous adresser des hommages, ou n'est-ce pas plutôt le droit qu'a tout citoyen de remontrer le tort qu'il souffre ou qu'il croit souffrir d'un acte du gouvernement ; d'un acte du Corps législatif, droit sacré et naturel, dont les despotes n'empêchent pas toujours l'exercice, et dont ils n'oseraient jamais contester le principe?
Je le répète encore, je suis loin de penser, Messieurs, que ce soit une chose louable ou légitime que les démonstrations inconsidérées d'un zèle religieux lorsqu'elles appellent la résistance aux lois, lorsqu'elles les présentent comme impies. Loin de nous, ces temps malheureux ou le fanatisme tonnant dans les cités,ne rassemblait les citoyens que pour les armer les uns contre les autres ! Mais qui peut oser, sans frémir des suites de cetle calomoie, assurer que ce sont là les coupables intentions des catholiques de Nîmes ? Quoi 1 ceux qui exposent leur sentiment dans les formes légales, quand il y aurait erreur ou exagération dans leurs sentiments, ceux qui remontrent, qui supplient, doivent-ils être confondus sous la dénomination flétrissante de mauvais citoyens, d'ennemis de la Constitution?
Si vous reconnaissez, Messieurs, à la nation le droit de s'expliquer définitivement sur la Constitution, il faut bien lui en laisser les moyens ; car vous ne pouvez connaître le vœu général que par l'émission des vœux particuliers ; et si les adhésions que vous recevez des différentes parties du royaume vous paraissent une douce récompense de vos travaux, c'est sans doute parce que vous les jugez libres et volontairement exprimées. Car, si elles n'étaient qu'une formule obligée, arrachée par la crainte, commandée par la force, elles seraient indignes de vous. — Mais si ies adhésions sont libres, les remontrances doivent l'être ; et puisque la liberté est véritablement l'heureuse condition dans laquelle nous devons vivre, chaque citoyen peut, sans crainte et sans péril, se présenter devant vous et vous dire : j'obéis à la loi que vous avez faite, mais j'en désire une autre.
Telle a été, Messieurs, la conduite et le langage des citoyens catholiques de Nîmes, sauf quelques expressions que je n'approuve pas. — Je ne pense pas que le décret, contre lequel ils ont le plus réclamé, ait mis la religion en péril; elle y serait sans doute, si nos lois n'assurent une protection inviolable à l'Eglise, une existence honorable au clergé I — Mais, j'ai plus d'une fois partagé leur effroi sur les excès, les désordres, les violences dont ils se plaignent ; je désire avec eux le rétablissement d'une autorité tutélaire, et s'il est de bons citoyens qui dissimulent à cet égard leur véritable opinion, je suis du nombre de ceux qui ne craindront pas de la manifester.
Sous quel rapport les citoyens de Nîmes et d'Uzès pourraient-ils donc être inculpés par le Corps législatif ? Ont-ils résisté à la loi? Ont-ils provoqué quelqu'insurrection? Ont-ils attenté
aux droits, à la sûreté de leurs concitoyens non catholiques? Ils n'ont rien fait de tout cela; et quand on les accuse sans preuve, on les calomnie avec audace; ce sont leurs adresses qui nous sont dénoncées ; et, premièrement, la forme textuelle et littérale de ces actes, ainsi que le droit de pétition, sont conformes à la Constitution, et si cela n'était pas, nous sommes loin de la liberté à laquelle nous prétendons tous. —Nous sommes dans les fers.
Mais le droit de pétition n'existe que pour re -montrer, demander et se plaindre. Il est donc impossible qu'un tel acte ne présente des observations, des maximes contraires à celui contre lequel on réclame; et ce serait retomber dans le cercle le plus vicieux, car ce serait celui de la tyrannie, que de considérer les réclamants comme ennemis de la Constitution, lorsqu'en obéissant provisoirement à la loi, ils se plaignent de ses dispositions.
En vain leur supposerait-on le projet de susciter, par une démarche légale, de plus vives oppositions : les actions seules, les faits positifs sont soumis à votre jugement ; et, dans ce cas-ci, le fait est une adresse qu'on ne peut, qu'on ne doit pas juger par les effets présumés, mais par les faits et les principes qu'elle contient,par le droit qu'ont ou n'ont pas les citoyens de présenter des adresses.
Or, le droit est incontestable, et il suffit de lire l'adresse pour être convaiucu qu'elle n'est autre chose que l'exercice de ce droit. Car il est permis aux citoyens de désirer, de croire que tels et tels décrets ont besoin de révision; s'ils le croyaient tous, si c'était là ie vœu de la nation, il s'exécuterait sans difficulté; si,au contraire, quelques particuliers, quelques villes seulement sont dans cette opinion,que vous importe 1 Tant que la grande pluralité des adhésions sera si fort au-dessus du nombre des réclamations, il arrivera dans le royaume ce qui se voit dans l'Assemblée, la minorité obéira à la majorité qui forme l'opinion publique. Mais quel funeste principe, quel renversement de tous les principes, que cette maxime de proscription contre les opinions et les vœux contraires à l'esprit d'un de vos décrets? Quoi, Messieurs, ne voudra-t-on jamais employer l'unique moyen de rallier à la Constitution ceux qui paraissent s'en éloigner ? Les Français n'ont ni la dureté, ni la grossièreté du peuple juif, auquel il fallut donner des lois au milieu de la foudre et des éclairs. Je ne connais que deux ennemis nécessaires de la Constitution, c'est la licence et l'anarchie.
Je demande au préopinant l'explication du mot nécessaires.
Ce mot ne rend pas ma pensée ; j'ai voulu dire que la Constitution serait exposée à des maux inévitables tant qu'il y aurait licence et anarchie.
Tous ceux qu'on y présume les plus opposés, ne le sont sûrement pas au repos, au bonheur, à la vraie liberté ; car il n'est pas de malade qui ne désire passionnément de recouvrer la santé : guérissez donc les malades, Messieurs, et ne les condamnez pas; laissons un libre cours aux adresses de remontrance, comme à celles d'adhésion; sévissons contre l'insurrection, contre les séditieux, mais non contre les intentions qui peuventjêtre innocentées ; ne parlons plus d'ennemis et d'inimitié, en parlaut de nos concitoyens, et que la confédération générale qui se prépare
soit celle d'une paix et d'une bienveillance uni- I verselles.
Avant que vous l'eussiez décrétée, Messieurs, les citoyens de Nîmes et d'Uzès avaient le droit d'improuver cette disposition, et j'étais de leur avis; car, la Pologne, qui nous a donné le premier exemple de ces confédérations, nous retrace aussi les déplorables suites qu'elles peuventavoir si la sagesse et le véritable amour de la patrie n'en dirigeaient les mouvements.
Les citoyens de Nîmes expriment nettement leurs principes dans un seul paragraphe qui répond à toutes les inculpations. Ce n'est point disent-ils, l'absurde projet ïopérer une contre-révolution, c'est le désir de consommer la Révolu-lion, de sortir de cette anarchie qui menace la patrie d'une combustion générale; de consolider la Constitution, d'ôter tout prétexte d'y porter atteinte, de hâter le moment où la France reconnaissante pourra jouir des bienfaits de l'Assemblée nationale qui a dicté leur adresse.
Messieurs, si les suffrages étaient pris au scrutin dans toute la France, peut-être vous verriez de tels sentiments hautement proclamés : il n'est point d'homme vertueux et sensé qui ne désire un terme à notre agitation, un terme à la licence, un retour sincère à l'ordre et à la paix. — Ne confondez point de tels hommes avec les partisans du despotisme, car c'est le despotisme le plus redoutable qu'ils repoussent; ne les confondez point avec les partisans des abus, car ce sont les crimes et les abus qui les effraient. Donnez-leur la paix, la sûreté, la liberté, et vous verrez s'ils sont ennemis de la Constitution, et si une telle Constitution peut avoir desennemis; je conclus qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur le projet de décret du comité des recherches.
(On demande que la discussion soit fermée.)
Plusieurs membres de la partie droite demandent à parler sur la motion de fermer la discussion.
On doit accorder la parole aux défenseurs des coupables, pour l'avantage de la discusssion.
La motion de fermer la discussion a été faite; elle est appuyée. Je demande qu'on aille aux voix.
(L'Assemblée décide que la discussion sera continuée.)
, évêque de Nîmes (1). Messieurs, vous voudrez bien entendre, avec quelque bienveillance, les motifs puissants de justification qui s'élèvent en faveur des citoyens catholiques de Nîmes et d'Uzès (2) : le double titre d'évêque et de concitoyen, m'impose le devoir cher et sacré de vous les exposer dans toute leur force.
Non, Messieurs, la délibération et les adresses au roi et à l'Assemblée nationale, qui y
sont jointes, que votre comité des recherches vous a dénoncées comme séditieuses,
anticonstitutionnelles, offensantes pour l'Assemblée nationale et pour le roi, ne méritent
aucune de ces flétrissantes qualifications.
Est-ce ainsi que parleraient des ennemis de la Constitution, des hommes assez téméraires, pour oser s'attaquer en quelque sorte à l'Assemblée nationale et au roil C'est le langage d'enfants dociles et reconnaissants, mais francs et sincères, qui se plaignent à un bon père de quelques ordres qui leur paraissent rigoureux, toujours prêts à lui obéir, s'ils ne peuvent obtenir de lui de les modifier. Non, le respect et la soumission dus à la loi ne peuvent être altérés, ni affaiblis dans les esprits des peuples, par celte confiance filiale, cette noble franchise avec laquelle ils exposent aux pères de la patrie et au monarque les inconvénients qu'ils croient apercevoir dans la loi à laquelle ils se soumettent.
Eh 1 quoi, Messieurs, serait-ce devant vous, serait-ce devant les défenseurs nés de la liberté, qu'on oserait soutenir cette servile doctrine, que 1 obéissance due à vos décrets gêne la liberté de la pensée sur les avantages ou les désavantages qui peuvent en résulter pour le bonheur public, unique but des lois ? La liberté de la pensée; seule capable de donner aux lois la perfection qu'elles n'auraient pas d'abord atteinte ; la liberté de la pensée qui s'allie si bien au mérite de l'obéissance et de la soumission et qui lui ajoute même un si grand prix? Non, Messieurs, vous n'en ferez pas un crime aux citoyens catholiques de Nîmes; on n'a pas craint de les peindre à vos yeux comme des ennemis de la Constitution, parce que les premiers, peut-être, ils ont osé faire usage devant vous de cette noble et franche liberté delà pensée, le premier droit de l'homme et du citoyen. Leur démarche généreuse est un hommage de plus rendu à cette Constitution qui les y autorise, les changements même qu'ils y désirent, qu'ils y provoquent - près de vous par leurs vœux, prouvent qu'ils y placent leur bon-
heur, tes vrais ennemis de la Constitution sont ceux qui veulent tout détruire avec Une joie barbare; ses vrais amis sont ceux-là seuls gui cherchent à adoucir les formes d'une destruction nécessaire.
Comment donc, Messieurs, et c'est ici un second chef d'inculpation, comment l'envoi fait aux municipalités du royaume pourra-t-il vous paraître coupable? 11 l'a paru à votre comité des recherches; mais la nature des fonctions pénibles et douloureuses sans doute pour lui-même, que vous lui avez confiées, lui permet des craintes, des méfiances, des soupçons, que rejette votre autorité confiante et paternelle.
1° Ce n'est pas une mesure, une démarche nouvelle pour les citoyens de Nîmes d'envoyer leurs délibérations importantes a toutes les municipalités. Dés l'instant où le gouvernement, en 1788, invita tous les Français à lui communiquer avec confiànce ieùrs recherches et leurs vues, sur tout ce qui pouvait intéresser le bien général dans la future et prochaine tenue de l'Assemblée de la nation, les citoyens de Nîmes, animés déjà du même zèle, ont envoyé dans toute la France un grand nombre de délibérations où respirent les principes de la plus pure liberté. Ainsi nulle affectation, nulle nouveauté dans l'envoi de celle-ci ; et par quel étrange oubli des principes ose-t-on vous, le dénoncer comme une tentative capable d'exciter une coalition funeste contre l'exécution de Vos décrets?
De tous les moyens propres à remplir le devoir indispensable pour tout citoyen de communiquer à la patrie entière Une opinion qu'il croit importante pour le bien généralx en est-il un plus simple, moins dangereux, moins propre à exalter l'esprit des peuples, que de S'adresser aux municipalités, Chargées par état du soin d'éclairer et de diriger les opinions de leurs concitoyens? Si ce moyen de Communiquer sa pensée sur les lois, sans s'écarter des termes du respect qui leur est dù, si ce moyen peut être soupçonné de tendre à une coalition coupable contre leur exécution, malheur, à voUs, Messieurs, malheur aux législateurs qui resteraient à jamais privés des lumières et des connaissances des bons citoyens 1 Quels dangers en effet peut-on redouter de cette libre CommuniCàtioh, qui ne soit infiniment au-dessous des avantages qui en résultent? Si les objections, les doutes, les craintes élevés contre la loi, sont reietés par l'opinion publique, là loi est bonne, elle est au gré de la nation» elle subsiste ; si, au coiitràire, l'opinion publique l'adopte, le vœu national est de même exprimé, et tout ce que vous déBirez, Messieurs, tout ce que peut désirer le Corps dépositaire de l'autorité législative d'un peuple libre, c'est de connaître le vœû national ; et si tel n'avait pas été, Messieurs, le plus ardent et le plus ferme de vos désirs, pourquoi ces moments précieux consacrés par vous, chaque jour, à la lecture de ces adresses nombreuses d'adhésion et de félicitation, qui n'excitent parmi vous, de si vifs àpplaUdiëséments, que parce qu'elles votiB semblent être l'expression du vœu des peuples? Accueillerez-Vous avec moins de bonté celles de ces adresses, dans lesquelles, avec Une respectueuse confiance, d'autres portions des peuples vous exposent leurs doutes, vous font parvenir des représentations sages et réservées, sur les lois que vous leur donnez, Peut-être ce langage noble et fier de la liberté, qui doute, qui raisonne, mais qui obéit, à-t-ii plus de droit à Vous plaire, vous hoUore-t-il davantage que la soumission la plus aVeUgle?
Cette communication mutuelle des peuples au législateur et des peuples entre eux est un des principes les plus nécessaires à la conservation dp la liberté nationale, à i'émission libre et franche de l'opinion publique. Les citoyens catholiques de Nîmes pouvaient donp, ils devaient, sur des objets qui paraissaient d'un si grand intérêt, communiquer librement à tous les Français ce§ mêmes idées, ces mêmes pétitions respectueuses, qu'ils ont cru devoir adresser à l'Assemblée nationale et au roi. La voie la plus naturelle, la plus légale ponr parveriir au peUpie était l'envoi aui corps administratifs, aux municipalités,et certes, ce n'est pas cette Voie si simple que prennent les intrigants qui veulent vraiment exciter du trouble et soulever l'esprit des peuples contre la soumission due à l'autorité légitime ; ils ont des correspondances sécrètes et coupables, ils ont mille moyens de séduction qui échappent à la vigilance des magistrats et dont leô effets ne sauraient se calculer.
Les municipalités auxquelles lescitoyens catholiques de Nîmes ont envoyé leur délibération, avaient sans doute le droit d'en juger ses opinions, de les adopter oU de les rejeter, selon qu'elles leur paraissaient bien ou mal fondées, plusieurs Ont usé de ce droit avec rigueur; je suis loin de leur en faire reproche, mais qu elles àient osé s'ériger en juges des intentions et des personnes, qu'elles aient, osé vous les dénoncer avec les qualifications les plus injurieuses,telles qu'un tribunal compétent, après un mûr examen, aurait balancé à les prononcer contre les auteurs des écrits les plus incendiaires, c'est pour moi, je l'avouerai, le sujet de l'étohnement et; des reproches les mieux fondés contre l'Injustice et la précipitation de Ces municipalités Une réponse douce, fraternelle, modérée, pour réfuter ce qu'elles trouvaient de répréhensible dans la délibération des Citoyens catholiques de Nîmës, ne les eût-elle pas plus sûrement ramenés aux vrais principes, s'ils s'en étaient écartés, que tant de fiel et de colère? De quel droit prêviëhnëht-elle, avec tant de rigueur, le jugement qu'il vous appartenait à vous seul de porter ? Ët qui hoUs répond que le vœu de ces officiers municipaux soit vraiment celui de leur commune, dont trop souvent nous les avons vus s'écarter.
Certes, sous l'empire de là liberté, elles conserveraient bien encore l'attitude et le langage de la servitude, ces municipalités adulatrices, si ârdeh-tes à blâmer quiconque ne flatte pas comme elles; elles calomnieraient biétt ëlles-mêmes l'esprit et les intentions de l'Assemblée nationale, si elles pensaient qu'on ne peut lui plaire qu'en la flattant, en s'interdisânt sur tout ce qui émane d'elle, jusqu'au droit dè la pensée 1
Pénétrés d'une Bien plus haute idée, et de vos devoirs, Messieurs, et de vous-mêmès, lës citoyens catholiques de Nîmes, après s'être mêlés, comme toUs lës autres français, à ce concert unanime de louangesët de soumissions, dont rëtentitsans cesse cette tribune, lorsqu'ils viennent, avec respect, vous parler le langage de la liberté, ne vous en paraîtront que plus soumis et plus fidèles.
Avec UUe marche ët des intentions si pures, comment auraient-ils à se disculper ëncore d'avoir contribué, parleur délibération, à échauffer les esprits, et exciter les troublés qui ont eu malheureusement lieu à Nîmes, les 2 et 3 mai dernier?
Comment une détûarche irréprochable en elle-même aurait-elle pu produire de si grands maux? Malheur à ceux qUi auraient ènvëhiihé les meil-
leures intentions, la faute n'en pourrait être imputée qu'à eux seuls ; l'unique cause apparente ae l'émeute de Nîmes est l'agression de quelques bas-offlciers et soldats du régiment de Guienne qui tentèrent d'arracher à des citoyens les cocardes blanches qu'ils portaient. Or, ces cocardes blanches n'avaient pas été prises à Nîmes, comme on a tenté de vous le persuader insidieusement, à l'époque de la délibération des citoyens catholiques. M. le baron de Marguerites vous l'a déjà dit, Messieurs, dès le mois de novembre 1788. Elles avaient été prises par tous les citoyens de Nîmes, comme le signal delà liberté ; elles avaient continué, comme celles aux couleurs de la nation, à en- être le signé parmi eux ; un grand nombre ne les avait jamais quittées.
La délibération des citoyens catholiques de Nîmes n'a donc pas même été le prétexte de l'émeute. Les procès-verbaux qui ont été dressés, et ta procédure qui s'instruit, nous révèlent quels en ont été les véritables causes et les auteurs.
Mais à ce sujet, qu'il me soit permis de vous assurer que les craintes qu'on ûe cesse de vous inspirer, de voir le fanatisme religieux se renouveler dans nos contrées, sont,en général, presque toutes sans fondement,ou,du moins fort exagérées; les soupçons qu'on ose jeter sur le clergé, plus odieux et plus calomnieux encore.
Quels que soient les différents sentiments de crainte ou d'espérance, pour ia prospérité de leurs croyances diverses, que les circonstances présentes pourront faire naître parmi les citoyens de Nîmes, j'ose vous l'assurer, avec une satisfaction d'autant plus douce, que peut-être les soins et les vertus de mes prédécesseurs, dont je me suis efforcé de suivre les traces, y ont plus contribué que toute autre cause ; telle est l'ancienne, heureUSe et fraternelle union qui règne entre le plus grand nombre de nos citoyens, catholiques ou non catholiques, qu'à moins de mouvements étrangers et perndeâ, qu'on ne peut supposer, je ne crois pas qu'il soit possible que les haines religieuses viennent désormais agiter et soulever la masse entière du peuple de Nîmes.
Je me plais à lui rendre devant vous cet honorable témoignage. Unis entre eux par les mêmes i vertus sociales, tous les citoyens, quelle que soit leur religion, sont également unis par les sentiments d'une estime et d'une affection mutuelles, que le cœur de leur évêque surtout leur voue à tous sans réserve.
Quelques hommes inquiets ont pu déjà, et pourront peut-être encore couvrir leurs intrigues ambitieuses par ces soupçons vagues et alarmants de fanatisme et de superstition, dont eux seuls sont les auteurs ; mais ils n'entraîneront dans leurs complots qu'une portion bien faible d'un peuple ami de la paix, vous avez vu, Messieurs, avec quelle facilité, à la voix de la raison, de la patrie, et de magistrats adorés, elle y a été rétablie, lorsqu'un instant de séduction, entièrement étrangère aux idées religieuses, et plus encore à la délibération des citoyens catholiques de Nîmes, l'y a vue troublée.
Je ne crains donc plus, Messieurs, que vous adoptiez les conclusions rigoureuses dé Votre comité, nique vous vouliez porter dë nouvelles alarmes dans le sein d'une ville, déjà profondément affligée d'avoir vu son maire et ses officiers municipaux gravement èt témérairement inculpés à vos yeux. Cette portion, la plus nombreuse de son peuple, dont on avait pareillement cherché à vous faire suspecter les intentions, vous pa-
raîtra aussi fidèle et soumise, qu'elle est franche et sincère dans l'expression de ses vcëux.
Vous parût-elle repréhensiblë, vous regarderiez votre seule improbation comme la plus grande des peines ; mais priver des droits de citoyens actifs, même provisoirement, mais mander à là barre les officiers que ces assemblées se sont choisis, appeler à grands frais près de vous, dëS extrémités delà France, des citoyens presque tous, peu aisés, leur faire porter à eux seuls, en Votre présence, tout le poids de votre indignation, tandis qu'ils n'ont commis d'autre crime que d'avoir rempli lès ordres dont ils étaient chargés, et qu'ils ne croyaient point coupables, c'est une rigueur, je dirais presque une injustice que l'Àsseinbléê nationale n'aura pas à se reprocher.
J'ai l'honneur de vous proposer, eh conséquëncë, le projet de décret suivant:» L'Assemblée nationale, aprè sa voir pris lecture des délibérations dés citoyens catholiques de Nîmes, formant la très grande majorité des habitants de ladite Ville, ët celle des catholiques d'Uzès, ouï son comité des recherches qui les lui a dénoncées ;
« Considérant que dans ladite délibération, et dans les adresses au roi qui y sont jointes, les citoyens catholiques de Nîmes et d'Uzès ne s]é-cartent en rien des termes du respect et de l'obéissance dus aux décrets de l'Assemblée nationale, sanctionnés par le roi, déclare qu'il n*ya lieu à délibérer sur ladite dénonciation. »
Plusieurs membres demandent la clôture de la discussion.
met aux voix la clôture. La clôture est prononcée.
l'aîné. Je demande qu'on retire de l'article la disposition qui inflige une peine à ceux qui ont signé les délibérations.
Ma qualité de maire de Nîmes m'interdit presque toute es* pèce de réflexions sur le décret proposé. Je déclarerai seulement que, malgré ies calomnies et les fausses relations qu'on a répandues, il n'y a qu'un seul homme qui ait péri de la suite de Bes blessures. L'instruction et le temps nous découvriront les Véritables auteurs des troubles. Je demande seulement que l'on ne cumUle paS dans le même décret le mandement à la barre et l'ordre d'informer^ afin de ne pas interdire le droit de déposer à des citoyens qui peuvent éclaircir l'affaire.
On a fait deux amendements au décret proposé; par le premier on demande que les signataires mandés à la barre ne soient pas privés des droits de citoyens actifs ; par le second, on demande la division du décret. Quant au premier. s'il est possible de priver quelques personnes des droits de citoyens actifs, c'est lorsqu'elles sont évidemment dans un état d'insurrection coti-tre la Constitution. Que résulte-t-il des droits de citoyens actifs, si ce n'est la faculté d'exercer les fonctions de la Constitution ? Je demande si dës fonctions de cette nature peuvent être confiées à des hommes au moment ou ils réclameut contre la Constitution,au moment oû ils redoublent d'efforts pour la troubler et où ces efforts se manifestent d'une manière positive ? Il est évident que le même abus de confiance qu'ont usurpée les auteurs de la délibération pour y faire adhérer quelques citoyens, les porterait aux places d'administration, et leur fournirait ainsi les
moyens de porter le trouble dans toutes les parties* du royaume. On a posé, pour soutenir la division, un motif qui tombe par le fait : soit que l'Assemblée dise en un seul décretce que renferme le projet du comité, soit qu'elle le dise en deux articles, on ne pourra pas moins les rapprocher l'un de l'autre et en déduire les mêmes conclusions. Je demande donc la question préalable sur les amendements proposés.
(Tous les amendements sont rejetés par la question préalable.)
Le décret suivant est rendu :
« 1° L'Assemblée nationale, sur le rapport qui lui a été fait au nom de son comité des recherches, de deux délibérations de quelques particuliers se disant les citoyens catholiques de Nîmes, des 20 avril dernier et 1er de ce mois, ainsi que d'une autre délibération de quelques particuliers d'Uzès, se disant les citoyens catholiques d'Uzès, en adhésion à celle du 20 avril, et en date du 2 mai dernier.
« Considérant que lesdites délibérations contiennent des principes dangereux et propres à exciter des troubles et des dissensions dans le royaume, a décrété et décrête que les sieurs La-pierre, Michel, Vigne, Folacher, Robin, Froment, Velut, François Fauve, Ribens, Melquiou aîné, et Fernel, qui ont signé, en qualité de président et de commissaires, la première de ces délibérations; les sieurs de Gueydon, baron de la Reivauglade et Gaussard, qui ont signé la seconde en qualité de président et de commissaires; enfin, les sieurs baron de Fontavèches, d'Entraigues de Cabanne, Lairac, Bovie et Puget,qui, aussi en qualité depré-sident et de commissaires, ont signé celle des particuliers, se disant les citoyens catholiques d'Uzès, en date du 2 mai, seront mandés à labarrede l'Assemblée, pour y rendre compte de leur conduite, et que provisoirement ils seront privés des droits attachés à la qualité de citoyens actifs ;
«2° Sur l'observation faite par le comité des recherches qui lui a été remis un grand nombre de pièces concernant des troubles arrivés dans la ville de Nîmes, et qu'il est indispensable d'acquérir la preuve des faits qui y sont dénoncés, circonstances et dépendances, l'Assemblée nationale arrête que son président se retirera sans délai par devers le roi pour supplier Sa Majesté d'ordonner qu'il sera informé desdits faits par devant le présidial de Nîmes. »
M. Camus demande la parole pour donner connaissance de dépêches par lesquelles les Avigno-nais demandent leur réunion à la France.
Le jour de l'anniversaire de la Constitution en Assemblée nationale doit être consacré par un grand événement. Pénétrés d'admiration et de respect pour les décrets de l'Assemblée nationale, les Avignonais ont unanimement délibéré de se réunir à la France. Voici la lettre qui constate ce que je viens de vous annoncer:
Lettre écrite par MM. les officiers municipaux d'Avignon, envoyée par un courrier extraordinaire, à MM. Camus et Bouche, députés à l'Assemblée nationale, et arrivée le jeudi 17 juin, à huit heures du matin.
« Messieurs, vous avez été informés dans le temps, par M. Raphel, l'un de nous, des événe-nements qui se sont succédé rapidement dans
notre ville : il nous a communiqué vos réponses, et les offres obligeantes de service que vous lui avez faites pour la ville d'Avignon. Le moment est venu, Messieurs, de les accepter. Jeudi, 10 du courant, notre villea été le théâtre du plus grand désordre. Les aristocrates, déployant toutes leurs forces, ont fait feu de toutes parts. Maîtres de l'hôtel de ville et de quatre pièces de canon, ils criaient : Vive Varistocratie ! Plus de trente personnes, honnêtes citoyens, bons patriotes, ont été les victimes de leurzèleetde leur patriotisme ; le peuple a marché contre eux avec intrépidité ; et les cruels assassins, dispersés, ont cherché leur salut dans la fuite. Quatre de ces scélérats ont été arrêtés et sacrifiés par un peuple justement indigné et horriblement assassiné : deux de leurs chefs ont été de ce nombre. La municipalité a fait vainement tous ses efforts pour l'empêcher. Vingt-deux ont été arrêtés; et, sans les gardes nationales d'Orange, Courtheson, Jonquières, Ba-gnols, le Pont-Saint-Esprit, Château-Renard et autres lieux, accourues à notre secours, ils auraient été infailliblement sacrifiés. Leurs efforts généreux,et la confiance que le peuple avignonais a dans les Français, ses alliés, ont arrêté sa vengeance. Messieurs d'Orange ont consenti à se charger de la garde des prisonniers, pour leur propre sûreté, et ils seront traduits aujourd'hui dans leur ville. Le calme est à peu près rétabli ; mais, pour le rassurer entièrement, les gardes nationales de France ont bien voulu consentir à nous laisser pour quelques jours une partie de leur détachement. Avant-hier 11, les districts s'assemblèrent pour délibérer sur leur position. La réunion a été délibérée unanimement. Les armes deFrance ontété substituées avec pompe à celles duSaint-Siège.Un Te Deum doit être chanté aujourd'hui à cette occasion. Depuis lors la joie la pi us vive a succédé au désespoir, etnos ruesne cessent de retentir des cris de Vivent la nation, la loi et le roi !
« Nous prévenons M. le président de l'Assem-semblée de cet événement. Le même courrier, dépêché en diligence, doit vous remettre la présente. Quatre députés ont été nommés pour se rendre sur-le-champ à Paris, auprès de l'Assemblée, pour obtenir son acceptation. Nous vous prions, Messieurs, d'appuyer nos vœux de tout votre crédit ; vous rendrez à notre patrie le service le plus signalé. Sans cette réunion, notre ville serait perdue sans ressource. Les Français sont trop généreux pour refuser un peuple qui a fait anciennement partie de la nation française et qui lui est toujours resté uni par ses vœux et ses sentiments. Cette position est certainement bien faite pour intéresser votre générosité.
« Raphel, Couls, Peytier, Blanc, Richard, officiers municipaux. »
propose un projet de décret qui est adopté ainsi qu'il suit :
« L'Assemblée nationale décrète que son président se retirera demain devers le roi, pour lui communiquer la lettre des officiers municipaux de la ville d'Avignon. »
, secrétaire, donne lecture de la lettre suivante des officiers municipaux de Perpignan, relative aux troubles de cette ville :
« Du
« Nosseigneurs, la ville de Perpignan est dans les plus cruelles alarmes ; chefs de la commune,
nous avions protégé M. le vicomte de Mirabeau, colonel du régiment de Touraine. M. le Marquis d'Aguylar, notre maire, l'avait reçu chez lui, et lui avait donné asile et hospitalité. Le régiment avait demandé, obtenu et porté ses drapeaux et sa caisse dans la même maison. Ce lieu était sacré. Pour calmer le régiment, M. le maire avait répondu du dépôt; mais il avait eu la bonne foi de laisser ces drapeaux dans un cabinet attenant à ia chambre de M. de Mirabeau, sous la sauvegarde de l'honneur de cet officier. Ce dépôt a été violé, Nosseigneurs. M. de Mirabeau, invité hier par la municipalité qui voyait que le retour de la tranquillité publique dépendait de son départ, a quitté aujourd'hui notre ville à cinq heures du matin. Sur les dix heures, le régiment est venu prendre ses enseignes ; mais quelle a été sa surprise lorsqu'il les a vues dénaturées? Les cravates ont manqué. Le régiment s'est plaint, il en a demandé raison à notre respectable maire, qui, rempli d'honneur, blanchi dans le service de la patrie, n'a pu qu'accuser M. de Mirabeau, qui en avait été le détenteur, de les avoir emportées. Rien n'a pu calmer ce régiment; ni nos plus vives remontrances, ni les pressantes exhortations de M. deGholet, commandant; ni les ordres donnés dans l'instant de courir après M. de Mirabeau, ni les courriers expédiés dans l'iustant pour réclamer l'assistance et le secours de toutes les municipalités de la route, au nom de la nation, de ia loi et du roi, pour arrêter cet officier, l'obliger à rendre au porteur les cravates enlevées ; rien n'a pu délivrer notre maire. Le régiment entier, sous les armes, l'a conduit chez lui et mené à ia citadelle, où il a été détenu en ôtage sous la plus forte garde. En vain plusieurs de nos concitoyens, les officiers du régiment de Touraine, ceux de la garde nationale, se sont présentés pour prendre sa place; ces offres généreuses n'ont pas été acceptées. Toute la ville est dans le plus affreux désespoir; indignés du procédé de M. le vicomte de Mirabeau, violateur des droits les plus sacrés de l'hospitalité et d'un dépôt aussi précieux, nous ne répondons pas des suites, s'il est arrêté et conduit dans notre ville. Gardiens des lois, nous exposerons cependant, s'il le faut, nos vies pour le sauver du danger, jusqu'à ce que, convaincu légalement, il subisse la peine qu'il mérite ; mais, s'il n'est point arrêté... si le dépôt n'est pas réintégré, nous sommes dans les plus grandes appréhensions pour la vie de notre chef. Nous déposons, Nosseigneurs, nos alarmes dans votre sein ; il n'est rien qui nous coûte pour apaiser un régiment cruellement outragé par son chef ; mais nous osons espérer de votre tendre sollicitude pour le rétablissement de l'ordre que vous vous empresserez, Nosseigneurs, de procurer sans délai, par la sagesse de vos décrets, à une ville désolée, la paix qu'elle a lieu d'attendre des augustes représentants de la nation.
« Les officiers municipaux de Perpignan. »
, député de Perpignan. Le courrier qui nous apportait dés dépêches a trouvé M. le vicomte de Mirabeau à Castelnaudary. Ce courrier a présenté à la municipalité de cette ville une réquisition de celle de Perpignan en vertu de laquelle M. de Mirabeau a été arrêté ; l'ouverture de ses malles a été faite en sa présence : les cravates s'y sont trouvées ; sur quoi la municipalité de CasteJnaudary a écrit à celle de Perpignan pour annoncer qu'elle garderait M. de Mirabeau
et les cravates jusqu'à ce qu'elle eût reçu les ordres de l'Assemblée nationale.
Je vous propose, en conséquence, le projet de décret suivant : « L'Assemblee décrète que son président se retirera par devers le roi, pour le prier d'ordonner : 1° que le maire soit remis en liberté; 2° que les soldats du régiment de Touraine reprendront leurs postes ; 3° que les officiers municipaux de Castelnaudary renverront sur-le-champ au régiment de Touraine les cravates de leurs drapeaux ; 4° que M. le vicomte de Mirabeau sera détenu sous bonne garde jusqu'à ce qu'il en ait été autrement ordonné par l'Assemblée nationale. »
Les récits qui viennent de vous être faits sont probablement exagérés : s'ils étaient exacts, M. le vicomte de Mirabeau serait inexcusable. J'observe seulement à l'Assemblée que c'est le roi qui donne les drapeaux aux régiments, mais que les cravates viennent des colonels. Je ne prétends pas pour cela excuser ni alléger les torts de l'accusé, s'il en a réellement. J'adopte donc en partie le projet de décret, mais je vous représente en même temps que si vous appelez M. de Mirabeau, il n'y a pas de doute qu'il ne vienne vous exposer sa conduite. J'en réponds, s'il le faut : il ne se dérobera pas à votre jugement. Je le subirai à sa place, s'il y manque. Il a peut-être commis une imprudence, mais il n'a certainement pas manqué à l'honneur. Qui pourrait en douter ici ? Les cravates lui appartenaient. S'il a cru qu'en sa qualité de chef elles étaient plus spécialement confiées à sa garde, il a été dans l'erreur. Je propose que l'Assemblée ordonne à la municipalité de Castelnaudary de remettre M. le vicomte de Mirabeau en liberté, quand il aura reconnu que les cravates trouvées dans sa malle étaient celles du régiment de Touraine, et quand il aura donné sa parole d'honneur de venir se présenter à l'Assemblée.
Le devoir du législateur est d'écarter loute prévention contre les absents. L'acte de M. de Mirabeau est plutôt le trait d'une tête exaltée que d'un malintentionné, et je n'aurai garde de le condamner d'avance.
Vous ne pouvez adopter aujourd'hui que la première partie du décret qu'on vous propose, puisque la lettre de la municipalité de Perpignan ne fait mention que de la détention du maire. Ce n'est donc pas le cas d'examiner si M. de Mirabeau viendra oui ou non vous rendre compte de sa conduite. Je dirai seulement qu'il me semble que l'Assemblée n'a pas de sommations à faire, mais des décrets à porter, et que ce n'est point au nom de l'honneur, mais au nom de la raison, qu'elle doit agir et proscrire toutes ces idées chevaleresques des temps héroïques.
L'Assemblée ferme la discussion et rend le décret suivant :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu la lecture de la lettre des officiers municipaux de la ville de Perpignan, du 13 du présent mois, a décrété et décrète que son président se retirera incessamment devers le roi, pour le supplier de donner ses ordres, afin que le maire de la ville de Perpignan, actuellement retenu à la citadelle, soit mis en liberté sans retard. »
lève la séance à minuit et demi.
Adresse de la municipalité de la ville de Paris sur l'aliénation et la vente des biens ecclésiastiques et domaniaux (1).
Messieurs, les officiers municipaux de la ville de Paris se trouvent dans une position infiniment délicate, et sur laquelle ils croient devoir recourir à votre sagesse.
Le 17 mars dernier, l'Assemblée nationale a décrété :
« 1° Que les biens domaniaux et ecclésias-« tiques, dont elle a précédemment ordonné la « vente, par son décret du 19 décembre, jusqu'à « concurrence de 400 millions, seront incessam-« ment vendus et aliéDés à la municipalité de « Paris et aux municipalités du royaume aux-« quelles il pourrait convenir d'en faire l'acqui-« sition ;
« 2° Qu'il sera nommé, à cet effet, par l'Assem-« blée nationale, douze commissaires pris dans « toute l'Assemblée, pour aviser, contradictoire-u ment avec les membres élus par la municipalité « de Paris, au choix et à l'estimation desdits « biens, jusqu'à concurrence de 200 millions, de-« mandés par ladite municipalité; que l'aliéna-« tion définitive desdits 200 millions de biens « sera faite aux clauses et conditions qui seront « définitivement arrêtées, et, en outre, etc. »
Il paraît résulter de ces décrets, Messieurs, et de tous ceux que vous avez portés sur cette matière, que l'Assemblée nationale a voulu rendre les municipalités du royaume les instruments nécessaires et immédiats de celte importante opération ; et la formule de soumission que vous venez de décréter pour toutes semble en offrir une nouvelle preuve.
Cependant, Messieurs, les sections de la capitale ont nommé des électeurs qui, tous réunis, ont choisi douze commissaires pour traiter, avec ceux de l'Assemblée nationale, de toutes les conditions préliminaires à l'acquisition proposée par la ville de Paris-
Les officiers municipaux, toujours animés du désir de conserver la concorde et l'union dans la commune, ont alors cru devoir s'abstenir de nommer des commissaires, et ils ont laissé agir ceux des sections, qui, aux termes de leurs pouvoirs, ne doivent s'occuper que des opérations prépara- . toires, ainsi qu'ils viennent de le reconnaître eux-mêmes, en rendant compte de leurs travaux à leurs commettants.
Mais, Messieurs, à la suite de ce compte, et après avoir annoncé que leurs pouvoirs étaient épuisés, ces commissaires ont dit qu'iZ était nécessaire d'en donner de nouveaux pour mettre la dernière main à l'œuvre; et, le 5 juio, ies soixante
sections ont été convoquées, avec invitation de donner à ces mêmes commissaires toutes les autorisations dont ils avaient besoin pour consommer l'opération et à l'effet de réaliser la proposition faite par la ville de Paris.
Ces pouvoirs ont été accordés par la majorité des sections.
Cependant, Messieurs, il est un fait qui a pu produire quelque incertitude dans l'esprit de plusieurs personnes, et notre devoir est de le placer sous vos yeux.
On lit, dans l'Instruction pour lavente des biens domaniaux, que vous avez décrétée, le 14 mai . « Quant à la commune de Paris, dont la muni-« cipalité n'est pas formée, les experts seront « nommés, l'un par les commissaires des sec « tions, l'autre par l'Assemblée nationale, etc. » Cette phrase, Messieurs, qui contient sans doute un vice de rédaction, a peut-être fait croire à quelques personnes que l'Assemblée nationale ne reconnaissait point la municipalité actuelle. Mais cette erreur ne peut exister que pour ceux qui ne savent pas qu'après avoir permis à cette même municipalité de vous présenter, le 10 mars dernier, lin projet d'aliénation des biens domaniaux i et ecclésiastiques, l'Assemblée nationale a dit, dans son décret du 17 du même mois : « qu'il « serait vendu et aliéné pour 200millions de biens « à la municipalité de Paris, et que les commis-« saires de l'Assemblée nationale aviseraient, « contradictoirement avec ies membres élus par « ladite municipalité, au choix et à l'estimation « desdits biens, etc. ».
Enfin, Messieurs, si, malgré le texte formel de vos décrets, quelqu'un avait pu douter encore que l'existence de la municipalité actuelle ne fût avouée et reconnue par l'Assemblée nationale, tous ses doutes auraient été détruits par votre décret du 8 de ce mois, où vous avez dit : « que « la municipalité actuelle ou la municipalité qui « sera établie conformément au règlement dé-« crété par l'Assemblée nationale, est autorisée « à remplir provisoirement, par rapport aux biens « ecclésiastiques situés dans ses murs, les fonc-« tions attachées aux administrations de départi tements et de districts ou à leurs directoires » .
Vous voyez. Messieurs, par cet exposé, que si la municipalité provisoire consulte la lettre et l'esprit de vos décrets, elle doit s'occuper de toutes les opérations relatives à l'acquisition proposée par la ville de Paris ;
Que si elle consulte au contraire le vœu de la majorité des sections, elle doit s'en abstenir et laisser agir leurs commissaires.
La municipalité craint, d'un côté, qu'en s'abs-tenant de cette opération importante et délicate, on ne lui reproche un jour l'oubli de vos décrets, et qu'on ne s'en fasse un prétexte contre la légalité de l'acquisition.
O'un autre côté, la municipalité se trouverait heureuse de ne porter aucun obstacle aux dispositions et aux vœux de ses commettants.
Dans cette position, Messieurs, elle vient vous exposer les faits, vous présenter avec confiance ses inquiétudes, ses embarras, et vous supplier de lui tracer ses devoirs.
Prononcez, Messieurs; et quelle que soit votre décision, elle remplira tous ies désirs de la municipalité.
Signé : Bailly, maire ;
Daugy, président ;
De Joly, membre et secrétaire du conseil de ville.
Délibération des citoyens catholiques de la, ville dfVzès (1).
L'an 1790, et le dimanche deuxième jour du mois de mai, les citoyens catholiques de la ville d'Uzès, assemblés dans l'église des RR. PP. capucins de ladite ville, après en avoir donné avis à MM. les maire et officiers municipaux, selon la forme prescrite par les décrets de l'Assemblée nationale du 14 décembre 1789, présidée par messire de Rossel, chevalier, baron de Fonta-rèches, lieutenant des maréchaux de France, capitaine en premier de la compagnie n° 20 de la légion d'Uzès;
Considérant que des Français et des catholiques ne peuvent rester étrangers à la discussion des grands intérêts que l'Assemblée nationale vient de soumettre à son examen ; que les lois ne devant être que l'expression de la volonté générale des peuples, il n'est aucun citoyen qui n'ait le droit de déclarer ses vœux sur lepr objet;
Considérant que la religion, offrant a la vertu un fondement inébranlable, au vice le frein le plus puissant, aux lois les moyens d'exécution les plus sûrs, elle est la base la plus solide des empires ;
Qu'il importe essentiellement à tous les gouverneurs de maintenir la force de ce ressort, et que rien ne saurait autant en affaiblir l'action sur l'esprit des peuples que des témoignages d'indifférence sur les principes et les formes du culte sans lequel il ne peut exister de religion; que, convaincus de cette vérité, (es plus grands législateurs lièrent toujours à l'ordre public les cérémonies religieuses, et qu'elles ont fait dans les Empires les plus célèbres une partie nécessaire de la constitution de l'Etat;
Que si les lois n'ont aucune autorité sur les consciences, elles exercent l'inspection la plus légitime sur les actes qui en manifestent les sentiments; qu'en n'imposant aucune contrainte sur les opinions, en n'exigeant auouu témoignage qui les contrarie; en appelant sans distinction de religion tous les membres quelconques de la société à la participation commune de ses avantages, elles satisfont pleinement à tous les droits de l'homme et du citoyen; mais que ces droits pe sauraient mettre obstacle à l'établissement d'un ordre public uniforme, ni autoriser à le troubler quand il est établi ;
Considérant que c'est sous les lois de la religion catholique, la seule véritable que l'Empire français a vu pendant quatorze siècles se former, s'accroître et s'affermir sa grandeur et sa puissance; qu'il n'est point de religion dont les principes posent avec plus de sagesse les bornes de la dépendance et ae la liberté, et s'allient mieux avec la modération monarchique; que la suppression projetée dans le nombre de ses ministres ies plus nécessaires menace, surtout dans ces contrées, la stabilité de cette religion sainte; et quand, dans un moment où tant d'intérêts divers se liguent pour attaquer ses prérogatives, il de-r vient d'un devoir impérieux de les consacrer par une délibération solennelle ;
Considérant encore que les circonstances qui ont déterminé ie séjour du roi à Paris, et les chan-
gements frappants qu'offrent les entours de ce prince, en son nouveau genre de vie, inspirentyà une multitude de citoyens la crainte véritable ou simulée que la sanction qu'il donne aux décrets de l'Assemblée nationale ne soit pas l'expression d'une volonté parfaitement libre, et peuvent leur fournir des motifs ou des prétextes de ne pas reconnaître dans ces décrets les caractères sacrés de la loi ;
Considérant enfin que l'Assemblée nationale elle-même a besoin de s'environner de tout l'appareil de la force militaire pour se mettre à couvert des orages que les passions excitent autour d'elle; que ces précautions annoncent le danger; que leur insuffisance à l'égard de quelques-uns de ses membres le prouve avec certitude; pt que l'apparence seule de la contrainte pour l'Assemblée législative est faite pour glacer d'effroi les peuples, qui ne doivent recevoir des lois que de ia sagesse et de la liberté ;
Adhérant aux pétitions déjà faites par les citoyens catholiques des villes de Nîmes et Alais, pour he former sur ces objets importants qu'un même vœu avec eux, et lui donner plus d'efficacité,
Ont unanimement délibéré :
1° De demander à l'Assemblée nationale et au roi, que la religion catholique, apostolique et romaine soit déclarée par un décret solennel être la religion dé l'Etat, et jouisse seule des honneurs du culte public;
2° De persister plus fort dans la demande qu'ils ont déjà faite de la conservation du siège épis-copal et du chapitre cathédral de la ville d'Uzès, aiusi que de tous les établissements religieux qui s'y trouvent formés ; et de ne pas cesser de solliciter le succès de cette demande, dont les motifs particuliers et pressants ont été développés dans une première adresse faite à l'Assemblée nationale ;
3° De demander que nul changement ne soit fait dans l'organisation du cierge Sans le concours de la puissance ecclésiastique, conformément aux lois du royaume ;
4° De réclamer pour le roi la plénitude ët l'exercice du pouvoir exécutif suprême ;
5° Pe supplier |e roi et l'Assemblée nationale, pour faire cesser les inquiétudes des bons citoyens et ies prétextes des ennemins de la Constitution, de transporter leur séjour hors de Paris et dans telle autre ville du royaume qu'il leur plaira de choisir, et là, de reviser dans leur sagesse les décrets sanctionnés OU acceptés depuis le & octobre dernier;
6° Que M. le président et messire d'Ëntraigues, chevalier, seigneur de Cabanne, capitaine eu second de la compagnie n° 20, MM. Laissac, avocat au parlement de Paris, juge^mage en la sénéchaussée d'Uzès ; Borie, notaire royal, lieutenant en premier de la compagnie n* 17, et Pugeî, marchand de bas, lieutenant de la compagnie n° 3, commissaires nommés, sont chargés d'adresser une copie de la présente délibération, signée d'eux, à M. le président de l'Assemblée nationale, pour en être donné connaissance à cette Assemblée ; d'en faire présenter une pareille copie au roi, d'en déposer i'original en forme dans les archives de la vjlje, et que des exemplaires, imprimés de ladite délibération seront envoyés aux principales villes de la province et du royaume, dans la persuasion que, partageant les mêmes sentiments, elles adhéreront aux mêmes vœux ;
Et ont, les sachant écrire, signé.
Adresse des citoyens catholiques de la ville d'Uzès et adhésion de la municipalité de ladite ville -pour demander la conservation du siège épiscor pal et des autres établissements ecclésiastiques.
Du
Les citoyens catholiques d'Uzès, assemblés sous le bon plaisir et de l'agrément de MM. les maire et officiers municipaux, dans la chapelle St-Lau-rent de ladite ville, en aussi grand nombre que le lieu a pu le permettre,
Considérant que les régénérateurs d'un empire chrétien ne peuvent manquer d'écouter avec une pieuse attention les supplications religieuses de tout ce qui vit sous l'étendard de la croix ;
Que la suppression annoncée de deux évêchés dans le département d'Uzès, Alais et Nîmes, doit faire craindre également, à chacune de ces trois villes, la perte de son siège épiscopal ;
Que celles de Nîmes et d'Alais ont déjà manifesté leurs sollicitudes chrétiennes et leurs saints désirs à cet égard ;
Que la ville d'Uzès ne saurait, dans un silence impie, rester seule indifférente, en apparence, à un événement duquel dépendent à la fois le bonheur spirituel de ses habitants et sa prospérité politique ;
Que, comme Nîmes et Alais, elle renferme dans son sein, à concurrence environ du tiers" de sa population, des citoyens dont la croyance erronée nécessite la fréquence des exemples habituels et locaux dont l'Etre suprême peut se servir pour les ramener à son Eglise, ainsi que des instructions capables de les éclairer sur le vice de leurs principes en matière de foi ;
Que par une fatalité qui tient à la faiblesse humaine, ces instructions, ces exemples, font plus d'impression lorsqu'ils partent d'une personne constituée en dignité, lors surtout qu'ils sont plus rapprochés de ceux auxquels ils doivent profiter;
Que tout ressort s'énerve en s'éloignant du point de sa détente, comme la lumière s'affaiblit a une certaine distance de son foyer ;
Que si cette vérité sentie, lorsque le diocèse d'Alais fut pris sur celui de Nîmes, parut un motif pressant, seul capable de déterminer ce démembrement, elle veille aujourd'hui pour la conservation d'une église cathédrale dans les villes où il s'est établi deux cultes : le génie créateur et le génie conservateur ont l'un et l'autre le même principe, le même but ;
Que la présence d'un prélat et d'un chapitre ca-thédral est d'une nécessité sensible dans les villes ainsi mi-parties, soit pour raffermir dans la foi les catholiques, et maintenir l'Eglise romaine dans la prééminence à la religion du prince ; soit pour exciter la ferveur des ames chancelantes, toujours tentées de préférer un culte dont la pratique facile et commode se prête à leur répugnance pour l'acte le plus humiliant à la fois, et Je plus consolant de notre religion ; soit enfin pour tempérer le zèle des pasteurs en sous-ordre, plus propre, s'il était porté à l'excès, à aigrir les esprits qu'à les concilier ;
Que la nécessité d'avoir de sages médiateurs sur un point aussi délicat devient encore plus pressante depuis que l'opinion, même religieuse, a été déclarée libre, pourvu qu'elle ne soit
pas manifestée de manière à troubler l'ordre public. Le sage a besoin de toute sa prudence, de toute sa réflexion, pour déterminer le point où cette manifestation doit s'arrêter, et pour saisir les moyens possibles de la contenir dans de justes bornes ;
Que la ville d'Uzès, une fois sans évêché, ne peut manquer de devenir bientôt le libre théâtre de l'erreur, au grand scandale de la religion,dont le lien sacré unit encore plus les Français à leur roi très chrétien ;
Que si l'objet de la création d'un siège épiscopal à Alais fut d'y maintenir la foi contre les attaques de l'hérésie, la suppression de celui d'Uzès doit nécessairement opérer le triomphe de l'erreur dans cette ville, si l'on ne prend soin d'y conserver dans tout son éclat le flambeau de la foi ;
Que les prêtres séculiers et réguliers manquent dans cette ville, loin d'y abonder, puisque M. l'évêque, le chapitre, les deux curés et six religieux y sont les seuls ministres évangéliques ;
Que chaque paroisse y a son église particulière, et néanmoins vaste ; que l'église cathédrale est uniquement affectée au chapitre et au service du chœur. Par où la réunion des deux paroisses n'y exigera pas une construction nouvelle, il y aura au contraire une église de reste ;
Qu'il n'y a que deux couvents de religieux, l'un des PP. Capucins, l'autre des Mineurs conventuels, constamment occupés à distribuer Jes secours spirituels, et une seule maison religieuse essentiellement nécessaire pour l'éducation chrétienne des jeunes personnes du sexe ;
Que si, dans les villages, quoique divisés par le culte de leurs habitants, on est forcé de se contenter de la présence d'un curé, on ne peut en dire autant des villes, centre de réunion ordinaire des grands vices, et dont la population rend la surveillance des pasteurs en sous-ordre infructueuse pour la plupart ;
Qu'indépendamment de ces pieuses considérations, la ville d'Uzès, n'ayant ni commerce ni fabrique, ne serait plus qu un gros lieu dans lequel l'hérésie trouverait un abri, et que, n'y ayant pas de maisons riches dont la fortune, refluant sur l'ouvrier et l'artisan, puisse venir au secours du peuple souffrant, la suppression de l'évêché et du chapitre cathédral priverait la ville de son unique ressource dans des temps de misère et de calamité ;
Que l'ancienneté de l'établissement du siège épiscopal d'Uzès semble lui mériter quelques égards, puisque les historiographes les plus dignes de foi attestent que Constantin a été le premier évêque d'Uzès dont on ait connu le nom ; que l'on trouve encore, dans une église de cette ville, un monument qui dépose que la religion chrétienne y existait avant même que Constantin en eût permis le libre exercice dans les Gaules.
Que le diocèse, composé de deux cent quinze paroises, exige, par son étendue, et par les difficultés des chemins, tout le temps que le prélat peut prendre pour en faire la visite ;
Que la bonne qualité des grains d'Uzès, attirant aux marchés qui s'y tiennent deux fois par semaine les habitants des villes ét des villages voisins, ils y traitent à la fois de leurs affaires spirituelles et temporelles, et que la partie la plus intéressante du peuple de cette contrée n'a aucune relation avec Nîmes, non plus qu'avec Alais, où l'on n'arrive qu'après cinq ou six heures de marche, par un chemin pénible et dangereux, sans aucun abri, sans aucun espoir de secours ;
Que la ville est redevable à son évêque et son
chapitre de la fondation et dotation d'un hôpital, d'une maison de providence, des écoles d'instruction chrétienne et de tous les établissements publics, sources intarissables et nécessaires de secours de toute espèce ;
Qu'à ces motifs de religion d'intérêt public, de politique et de reconnaissance, les citoyens d'Uzès se voient dans l'heureuse obligation de joindre leur vœu général pour la conservation d'un prélat dont le caractère doux, le cœur bienfaisant et l'esprit conciliant ont si puissamment contribué à la réunion des citoyens des deux cuites.
Que ce troupeau, par la manière dont il est environné, ne peut se passer de la surveillance d'un premier pasteur local ; que dans un royaume chrétien, le sacerdoce et l'empire se prêtent secours et assistance; que les lys furent toujours les remparts de la croix, et que d'aussi puissantes considérations, présentées avec un respect mêlé de confiance, sont un hommage dû à la religion et aux vertus des augustes représentants d'une nation chrétienne :
Ont unanimement délibéré d'adresser à Nos seigneurs de l'Assemblée nationale, protectrice de la foi, les vœux de la catholicité d'Uzès, pour la conservation du siège épiscopal, ainsi que des trois maisons religieuses de l un et de l'autre sexe, avec prière d'augmenter le nombre des religieux, s il est possible, comme tendant à accroître l'édification publique, et améliorer l'état sprirituel des fidèles;
Délibéré, en outre, que la présente adresse sera déposée pendant six jours chez M. Delafont, notaire d'Uzès, à l'effet par tous les citoyens, tant de la ville que du dehors, qui ne sont pas présents, d'en prendre connaissance et d'y adhérer librement, suivant l'inspiration de leur zèle pour la gloire de la chrétienté; passé lequel délai, elle sera présentée à MM. les officiers municipaux, avec prière d'y mettre leur attache, et de l'envoyer à nos dits seigneurs, suppliés de concilier, s'il se peut, en aucune manière, les vues générales de l'assemblée, avec le vœu particulier d'une ville, qui, grâce à la sagesse des décrets sur lesquels va reposer à jamais la félicité publique, n'ayant plus sujet de s'alarmer que sur ce qui maintient la religion dans son enceinte, a cru devoir manifester ses craintes et ses devoirs au corps respectable des législateurs, toujours ambitieux de connaître les vœux des peuples, parce qu'ils sont toujours prêts à les seconder autant qu'il est en eux. Et ont tous les délibérants signé, à l'exception, toutefois, des illettrés, formant le plus grand nombre.
Signé : dAmpmartin, commandant pour le roi à Uzés, etc., et suivent huit pages de signatures.
Adhésion de la municipalité de la ville d'Uzès.
Nous, maire et officiers municipaux de la ville d'Uzès, applaudissant aux vœux manifestés dans l'adresse ci-dessus, joignons nos sollicitations les plus pressantes à celles des citoyens qui l'ont signée, et dont les sentiments sont ceux: d'un peuple nombreux qui les exprime dans ce moment par l'organe de ses magistrats. De quels justes regrets ne serait-il pas en effet pénétré, s'il voyait transporté dans des lieux plus favorisés le siège épiscopal établi dans ses murs depuis quatorze siècles, et tous les avantages politiques et religieux attachés à sa possession.
Nous ne dirons point qu'en diminuant le nombre des premiers pasteurs de l'Eglise, en étendant le devoir de leur sollicitude sur des pays plus vastes et des peuples plus nombreux, on affaiblit nécessairement l'influence de leur zèle, toujours d'autant moins sensible qu'elle est plus divisée, et qu'on les rend étranger eux-mêmes aux fidèles confiés à leur surveillance.
Ces considérations générales ont été pesées, sans doute, dans la sagesse de l'Assemblée de la nation : nous ne dirons pas non plus que s'il était irrévocablement décrété de supprimer deux des trois évêchés de Nîmes, Alais et Uzès, la ville d'Uzès serait de ces trois villes la plus centrale, et celle, par conséquent, d'où le siège épiscopal atteindrait avec plus de facilité aux différentes extrémités des trois diocèses réunis; que, dans le même cas, celui d'Uzès, égal en étendue aux deux autres, semblerait devoir obtenir de les réunir à lui, plutôt que d'être réuni à eux. De pareilles considérations présenteraient une apparence de concurrence et de rivalité qui n'est point dans nos sentiments et dans nos principes ; mais nous ^observerons avec les diocèses voisins, que ceux d'Uzès et d'Alais sont presque tout entiers placés dans les montagnes ; qu'il résulte de cette position que leur population est extrêmement divisée, éparse, et occupe une très vaste étendue de terrain ; que si on les compare aux autres diocèses du royaume, d'après le nombre de leurs paroisses, ils ne paraîtront pas au-dessus de la grandeur ordinaire; mais que, si on compare leur surface, si l'on a égard à la distance des paroisses, entre elles, si l'on considère la difficulté de l'assiette du plus grand nombre, on reconnaîtra que ces diocèses sont hors de la règle commune et méritent des exceptions. Nous dirons que s'il importe autant au bien de l'Etat qu'à celui de la religion que le culte dominant conserve non seulement une supériorité d'opinion et de protection, mais une supériorité réelle et effective, fondée sur celle des forces et du nombre, de peur qu'une sorte d'égalité et de balancement ne fît naître une source perpétuelle de lutte et d'oppositions, il devient singulièrement essentiel, dans un pays doni le tiers est peuplé de calvinistes, de conserver les sièges épiscopaux, qui sont, en quelque manière, des centres de réunion, des signes de ralliement rappelant sans cesse ceux qui s'égarent, attachant plus fortement ceux qui restent fidèles.
Nous dirons surtout, et nous répéterons avec l'adresse ci-dessus, que la ville d'Uzès, éloignée des grandes routes, sans manufacture importante, sans commerce, sans production même, car son territoire resserré n'offre partout qu'un sol stérile et ingrat, trouvait dans la consommation d'une partie des revenus de l'évêché,dans celle des revenus du chapitre cathédral, dans le secours que la misère obtenait de la piété des titulaires, des ressources que sa position rendait précieuses; que si on les enlève, cette ville, perdant déjà l'avantage qu'elle avait d'être chef d'un district, triple en importance de celui qui doit lui rester, verra sensiblement décroître le peu de consistance qu'elle avait obtenu, et n'aura pas même la consolation de voir ses pertes particulières tourner au profit du bien public.
Nous dirons, enfin, qu'en reconnaissant la vérité des observations faites dans l'adresse au sujet des maisons religieuses qui sont dans cette ville, on peut y ajouter que la plus considérable d'entre elles, celle des Capucins, a été fondée par le duc d'Uzès; que tout ce qu'elle possède lui
a été donné par eux, avec la clause de réversibilité en cas d'extinction : qu'ainsi, la nation ne pouvant rien gagner en ia supprimant, l'intérêt général, uni à celui de la ville d'Uzès, semble devoir indiquer cette maison pour être une de celles où l'on pourrait recueillir les religieux forcés d'abandonner les maisons supprimées.
Puissent ces différentes considérations obtenir quelques faveurs auprès de l'auguste Assemblée, sous les yeux de laquelle elles seront mises ; et puisse-t-elle voir elle-même, avec indulgence, les sentiments qui les lui ont dictées, et que nous rendent plus chères encore les actives vertus du digne pasteur qui, depuis les premiers moments de sonépiscopât, n'a pas cessé d'acquérir des droitB à notre reconnaissance et à notre amour I
Signé : tîiinquelague, et tous les autres officiers municipaux.
Discours prononcé par M. le maire avant le serment civiaue qui a été prêté par la légion d'Uzès sur l'Esplanade, le 2 mai 17a0.
Messieurs, uh grand objet nous rassemble. Votre toi,.les augustes représentants de la nation demandent de vons une consécration plus spéciale à la patrie^ et vous allez remplir leurs vœux ; Vous allez jurer, en présence de vos concitoyens, dans les mains de vos magistrats, d'être fidèles à la nation, à la loi et au roi. A la nation, parce que c'est d'elle qu'émanent tous les pouvoirs ; à la loi parce qu'elle est la gardienne de la liberté ; au roi, parce que vous êtes Français. Ahl que de sentiments et de souvenirs ce titre doit réveiller! Français, en adorant la liberté, en rendant hommage aux défenseurs intrépides, n'oublions jamais que notreroien fut parmi nous le restaurateur; n'oublions jamais qu'au milieu des orages et des calamités qui en ont marqué le retournes larmes de ce bon prince n'ont coulé que sur son peuple : vous allez jurer encore, Messieurs , de maintenir de tout votre pouvoir la Constitution du royaume, et de prêtermain forte à l'exécution des ordres de justice, et à celle des décrets de l'Assemblée nationale, acceptés et sanctionnés par le roi; mais ce devoir de votre part doit être dirigé dans son exercice et c'est sur la réquisition des corps administratifs et municipaux qu'il doit être rempli.
Dans vos mains est la force, dans les leurs le droit d'en régler l'usage ; de l'aliiance seule de ces deUx pouvoirs peut naître l'ordré public. Puisse cette alliance heureuse être à jamais indissoluble! puisse le ciel, sensible aux vœux de tant de bons citoyens réunis, nous rendre enfin le calme et le bonheur ! Nous ne pouvons l'attendre que de la concorde; abjurons donc ici tout sentiment contraire, et profitant de l'auguste cérémonie qui nous rassemblé, scellons avec transport le pacte d'une union inaltérable, et quë désormais nos bouches ne fassent plus entendre que le nom sacré d'amis et de frères.
Adresse des citoyens catholiques de Montauban à MM. de l'Assemblée nationale sur le décret
tendu le
Nosseigneurs, les catholiques de Montauban, formant la très grande majorité de cette ville, ont l'honneur de vous présenter leurs respectueuses observations.
Les décrets concernant le clergé menacent' la religion d'une destruction prochaine ; l'éducation des ministres des autels est longue, coûteuse et pénible. Les obligations que le ministre leur impose les séparent, pour ainsi dire, de la société, et si cet état ne leur présente pas la perspective du bien-être, à l'abri des événements, quels sont les pères de famille qui feront donner à leurs enfants uhe éducation relative aux mystères des autels ? Déjà l'effet en est si sensible que les maisons destinées à cette sorte d'éducation en font la pénible observation.
Le clergé, exproprié de ses biens, ne çeut compter, pour sa subsistance, que sur le Trésor public ; mais ce trésor méritera-t-il toujours la confiance, qui s'altère dans les Etats les plus florissants ; le culte de la religion doit-il être exposé à des vicissitudes, qui tendent à l'anéantir?
La subsistance des ministres avait des biens-fonds pour hypothèque, et c'est la seule qui soit à l'abri des événements; la religion et le culte, qui en est inséparable, doivent avoir la base la plus solide possible : des législateurs sages et religieux ne doivent-ils pas craindre de l'ébranler ?
L'Assemblée nationale vient de créer des assignats, elle leur donne des biens-fonds pour hypothèque; elle porte son attention plus loin, elle leur accorde un intérêt considérable pour prime. L'Assemblée pense donc que les opérations de l'Etat ont besoin d'une solidarité qui ranime et conserve la confiance. La promesse de faire payer au clergé un traitement par le Trésor public est bien éloignée d'avoir des bases aussi sûres. Comment cette promesse pourra-t-elle obtenir assez de confiance, pour déterminer à embrasser un état, qui, par les fonctions qu'il prescrit, inhibe d'autre profession ? et dans le moment où vous accordez aux créanciers de l'Etat une solidarité que vous jugez nécessaire, pour-riez-vous l'enlever au culte public d'une reli-gion, reconnue depuis quatorze siècles comme étant la religion de l'Etat ?
Les évêques, leB curés, les vicaires, les chanoines des cathédrales, les ecclésiastiques qui se livrent à la chaire, ou à l'éducation publique, sont aussi nécessaires à la religion qu'à la patrie; les catholiques de Montauban pensent que la suppression de ces établissements dans leur ville porte un coup mortel à l'une et à l'autre ; et le double serment qui leur prescrit de mourir poUr leur foi et d'obéir aux lois de l'Etat concernant le clergé trouble leur conscience. La morale et la politique se réunissent donc pour demander la conservation du clergé, et une hypothèque sur des biens-fonds pour son traitement. Dans ce plan, le clergé verrait encore, avec intérêt, la possibilité de venir au secours de l'Etat.
L'Assemblée nationale a observé que la dette de l'Etat s'élevait au plus à cinq ou six ans de revenu, tandis que celle de l'Angleterre, rivale
de la France, s'élève à une hauteur qui surpasse la valeur des trois royaumes. L'Angleterre prospère, elle craindrait de blesser les droits sacres de la propriété en dépouillant le clergé, elle craindrait le reproche des nations, si elle recourait à ce moyen, inconnu jusqu'à nos jours. La France voudrait-elle reconnaître chez sa rivale une supériorité dé génie en moyens politiques danS des circonstances bien moins embarrassantes ?
Le sort des religieux n'intéresse pas moins lé culte public; ils suppléent à la pénurie des ecclésiastiques, qui se fait sentir depuis longtemps. Que de moyens pour rendre les ordres religieux aussi utiles à l'Etat qu'à l'Eglise ! est-ce donc en politique comme en morale, qui se consacrent à faire respecter les lois" de l'Eglise et de l'Etat, n'est pas infiniment précieuses ?
Les coUvénts de femmes sont un asile pour la vertu et pour la piété ; C'est une ressource précieuse pour l'éducation dés personnes de leur Sexe, et puisqu'il est impie de dire que c'est offenser la nature que dè vouer à Dieu sa liberté, pourquoi la réclamer en faveur d'ordres religieux qui ne la réclament pas eux-mêmes?
Le peuple nè connaît que le Dieu qu'il adore et le pain qui le nourrit; lun est aussi nécessaire que l'autre ; les malheurs qui l'accablent s'accU-mule'nt sur sa tête, et dans te moment où l'Impôt direct s'accroît dans une progression étoh-pante, il Voit Saper dans ses fondements la rer ligion qui peut seule le consoler.
Signé : P.-B. de Sainte-Foy, comte Dercq, président ; de Molières, G. Malartic La Grotelle, Çhesteil, l'abbé de Mondésir, Bouillac, commissaire; Delbreil, adjoint; Mouisset, France, G. Garrigues* David Claret, secrétaire ; Faure, Foillac, Sarrat, commissaire ; de Raismes, Çouderc, le chevalier Darassus de l'Isle, commissaire; Gouttes, commissaire ; Lamolmairie, commissaire ; Gerlie aîné.
À Nosseigneurs de l'Assemblée nationale»
Nosseigneurs, les catholiques de Montauban, formant la très grande majorité des citoyens de cette ville, ont l'honneur de vous représenter qu'ils ont été pénétrés de la plus vive douleur, en apprenant que vous aviez prononcé qu'il n'y avait lieu à délibérer sur la proposition du décret que la religion catholique était la religion de l'Etat. 5
Il n'y a que dés raisons du plus grand poids qui aient pu déterminer les représentants de la nation à ne point délibérer sur un décret qui aurait comblé dejoie tant de millions de citoyens. Pénétrés de confiance pour les pères dë la patrie, nous attendrons, avec la plus grande sollicitude, l'époque heureuse où les difficultés qui pourront s'opposer à un pareil décret étant applanies, vous jugerez, Nosseigneurs, dans votre sagesse, convenable d'accorder à la religion catholique une distinction qui lui est due à tant de titres, et qui lui estessentiellement inhérente,puisqué c'est celle de la très grande majorité de la nation. Cette religion divine est, depuis quatorze siècles, celle de l'Etat; et la France lui doit beaucoup, même relativement à sa prospérité temporelle. Nosseigneurs, la prééminence que les citoyens de Montauban demandent pour la foi catholique, ne tend point à atténuer les décrets qui ont été rendus en faveur des non catholiques, et nous
avons applaudi en voyant la patrie les rendre susceptibles de ses bienfaits. Le décret que nous sollicitons en faveur de la foi catholique est poor lui assurer celte protection spéciale, cette stabilité, cette prééminence, qui est due à une reli" gion qui peut être considérée comme Celle de toute la nation, eu égard à la très grande majorité des Français qui la professent.
Nous prendrons la liberté de vous représenter, Nosseigneurs, que les nations les plus libres et les plos tolérantes ont eu une religion nationale ; et dans combien d'occasions la religion nationale ne fut-elle pas de la plus grande utilité aux anciennes républiques? C'est surtout dans les gouvernements où le peuple a le plus d'influence que la religion nationale est la plus nécessaire ; il faut dans ces gouvernements que la religion acquière sur les hommes d'autant plus de force et d'action, que la force publique et coactive semble perdre davantage de son ressort.
La majorité des citoyens de Montauban espère, Nosseigneurs, que* vous voudrez bien accueillir avec bonté leurs supplications, et décerner le titre glorieux de religion nationale à la foi catholique, qui éclaire cet Empire de ses lumières depuis quatorze, siècles ; qui a été constamment la religion de l'État, qui est celle de presque toute la Frànce, et dont les principes, pleins de douceur, d'humanité et de charité, s'accordent si fort avec l'esprit d'égalité qui respire ! dans vos décrets. Ce sera, Nosseigneurs, un nouveau bienfait ajouté à ceux que nous prépare la Constitution que vous élevez pour le bonheur de la patrie.
Pour copie conforme à Voriginal:
D'Elbreil, adjoint général du Comité.
L'an mil, etc. Un des messieurs a dit que les justes craintes qui avaient affecté différents corps ecclésiastiques en faveur de la religion, dans ces circonstances douloureuses où cette religion divine était menacée des plus grandes pertes, devaient faire une loi au chapitre de Montauban de donner son adhésion aux nombreuses adresses de ces corps ; que les plaies qui affligent l'Eglise étaient trop nrofondes pour que le silence de oeux qui sont consacrés par état aux fonctions saintes ne parût un crime aux yeux d'un peuple qui avait déjà prévenu par ses pieuses démarches la manifestation des vœux du sanctuaire ; qu'il était temps de parler le langage des prêtres du Dieu vivant, et de porter aux pieds d'un trône dont la religion consacra la gloire et étendit la puissance, les réclamations du sacerdoce humilié; qu'en rappelant au fils aîné de l'Eglise, à un roi très chrétien, dont les vertus et la foi avaient signalé le règne ; qu'en lui rappelant le vœu solennel qu'il fit au jour de sa consécration, de maintenir la foi ne nos pères, et de protéger l'Eglise dé Jésus-Christ, c'était assurer le succès de nos demandes auprès de ce religieux monarque, il a prié le chapitre de délibérer sur les propositions suivantes :
1° D'adresser au roi, comme protecteur-né de la religion catholique* unelettre qui renferme et la vive expression de nos alarmes et le vœu du chapitre pour le maintien de cette religion et de tous ses privilèges ;
2* S'adhérer aux réclamations de la plupart des corps ecclésiastiques du royaume, et notamment à celle de l'Eglise de Paris, à qui il sera envoyé une copie particulière de la présente de-libération et de la lettre au roi, avec prière de vouloir bien compter l'Eglise de Montauban au nombre de celles dont elle a reçu l'adhésion et exprimé le vœu ; comme aussi d'adhérer, dans tout son contenu, à la généreuse protestation d'un grand nombre de membres de l'Assemblée nationale en faveur de la religion catholique ;
3° D'envoyer une copie de » la présente délibération et de la lettre au roi, à monseigneur l'évêque.
Ces propositions mises aux voix, ont étéunani-mement adoptées. Et ont signé : L. Dupin de Saint-André, doyen; Domingon, grand archidiacre ; Corne, précenteur ; Drapier, chanoine ; Bonnafous; Labrugade-Saint-Maurice, chanoine; Verdier de Port-de-Guy, théologal; Lalbenque, chanoine; Debosque primus, chanoine, syndic général ; Cornac, chanoine; Debosque secundus, chanoine ; Ladoux, chanoine ; Roger, prêtre, prébendé syndic; Pacaud, prêtre, prébendé syndic.
Lettre au roi-
Sire, le chapitre de votre église cathé -drale de Montauban ose déposer dans le sein de Votre Majesté, les alarmes qu'il partage avec tous les sujets catholiques de votre Empire, et les justes réclamations dont le plus saint des devoirs lui fait la loi.
Quand la nation en deuil frémit aux dangers qui menacent la religion de nos pères, quand votre peuple, sire, étonné des atteintes qu'on porte à la foi, vient en foule dans nos temples implorer le secours du ciel, pour le maintien de cette religion divine ; quand vos fidèles sujets, sire, vous nomment de concert le défenseur et le protecteur du sanctuaire, serions-nous les derniers à élever nos voix, à intéresser votre piété aux disgrâces qui semblent nous être préparées ? Non, sire, les ministres d'une religion qui vous est chère à tant de titres ne craignent point de vous appeler leur consolateur et leur appui.
une respectueuse confiance dans les travaux de nos représentants a pu quelque temps suspendre les mouvements de notre zèle. Dépositaires ae nos sentiments, organes de nos volontés, les membres de l'Assemblée nationale nous promirent, sur la foi du serment, de protéger celle de de nos pères, de respecter ses droits, de oonsacrer ses antiques prérogatives ; et nos autels furent les témoins et les garants de leurs promesses : aujourd'hui, sire, que, par la plus étonnante fatalité, nos espérances sont déçues ; aujourd'hui que, par des motifs bien difficiles à concevoir, on semble craindre d'accorder à une religion respectée dans les Gaules, avant même l'établissement de la monarchie, une prérogative dont le titre se perd dans la nuit des temps ; nous osons, sire, recourir à votre justice ; nous osons intéresser votre puissance et les engagements que vous prîtes avec le dieu qui vous a fait régner, à la cause de ce dieu dont on ébranle les autels, à celle d'un peuple religieux et tremblant pour sa foi, à celle de votre propre gloire.
Quelle religion, sire, mérita mieux que celle de vos fidèles sujets, un culte exclusif et constant ? Par elle, victorieux des ennemis de l'Em-
pire, Clovis assura les fondements d'un trône dont l'Europe admira tant de fois l'éclat et redouta la puissance. C'est elle qui immortalisa les triomphes de Charlemagne, de Philippe-Auguste, de Saint-Louis et de Louis XIV, et ses maximes ont fait d'une nation barbare et guerrière le peuple le plus religieux, le plus doux et le plus fidèle à ses rois. N'est-il pas à craindre, en affaiblissant les lieux qui nous attachent à la foi, d'étouffer le germe de tant de biens ?
Nous vous en conjurons, sire, au nom de Dieu dont nous sommes les ministres, et dont vous êtes l'imagesurlaterre,nous vousen conjurons prenez la défense de cette religion si chère à votre peuple, si respectée par vos augustes aïeux, et dans laquelle les prêtres de l'Eternel doivent aujourd'hui mettre toute leur confiance; qu'après avoir pesé dans leur sagesse les puissants motifs qui nous animent, les représentants de la nation, déterminés par ces motifs et l'intérêt précieux que le fils aîné de l'Eglise prend au maintien d'une religion qui fut depuis tant de siècles celle des Français, consacrent à jamais l'exercice dont elle ne saurait avouer le partage, lui rendent son premier éclat et assurent ses droits, qu'ils ne redoutent point de porter atteinte, par une déclaration aussi juste, aux lois nouvelles qu'ils méditent pour le bonheur de l'Empire.
C'est, nous osons l'assurer, d'une démarche aussi conforme aux vœux de vos fidèles sujets, sine, que dépend le bonheur et la gloire de l'Etat. Une expérience de quatorze siècles est la preuve de cette vérité. La religion des Français rendit cette nation la première de l'Europe ; en affaiblissant son éclat, ne serions-nous pas exposés à perdre nos vertus ?
Nous craindrions, sire, de trahir et nos devoirs et notre ministère, si nous gardions plus longtemps le silence sur un objet si digne de vous fixer. Les alarmes d'un peuple religieux, ses plaintes douloureuses, ajoutent à nos vives sollicitudes pour le dépôt de la foi qui nous fut confié.
Tarissez, sire, tarissez nos larmes, rassurez des sujets effrayés par les atteintes portées à leur religion ! Que parmi tant de vertus qui distin-guentvotre majesté,et qui font l'orgueil des Français, l'Eglise de Jésus-Christ se glorifie surtout de celle qui vous rendra son proteccteur et son ange tutélaire, dans les jours de sa douleur I
Daignez, sire, recevoir avec cette bonté qui vous est si naturelle, nos justes réclamations, l'hommage de nos vœux pour la prospérité de vos jours et celui du très profond respect avec lequel nous sommes, sire, de Votre Majesté, les très humbles et très obéissants serviteurs et fidèles sujets.
Les dignitaires, chanoines, chapitre et bénéfi-ciers de l'église cathédrale de Montauban. Montauban, ce 10 mai 1790.
Séance du
La séance est ouverte à onze heures du matin.
, ancien président, occupe le fauteuil en l'absence de M. l'abbé Sieyès, président en fonctions.
présente, au nom de la municipalité de la paroisse de Roquefort, en Provence, dont il annonce que les intérêts lui sopt cbers à plus d'un titre, une adresse de dévouement et de respect, de reconnaissance et d'adhésion à tous les décrets rendus par l'Assemblée nationale, et notamment à celui concernant la vente des hiens nationaux. Elle offre d'acquérir tous ceux qui sont enclavés dans l'étendue de son territoire.
Cette demande est renvoyée au comité d'aliénation des domaines nationaux.
, secrétaire, donne lecture de Vadresse des curés des environs de Villeneuve-d'À-genais, département de Lot-et-Garonne. Elle est ainsi conçue :
Nosseigneurs, jusqu'ici en applaudissant à vos décrets, en participant de cœur et d'esprit aux pénibles travaux, aux continuelles sollicitudes que vous coûte la régénération de l'Empire, nous nous sommes contentés de faire des vœux pour le succès de vos opérations importantes. Plus d'une fois, lorsque la discorde, toujours ennemie du bien public, faisait tous ses efforts pour tenir séparés trois états dont le bonheur des peuples demandait, depuis si longtemps, la réunion; lorsque l'affreux despotisme, trop faible pour résister à la. force, employait tour à tour les menaces et les artifices, pour étayer son Empire chancelant; lorsque enfin des hommes intéressés à l'ancien régime suscitaient obstacles sur obstacles, difficultés sur difficultés, pour empêcher la liberté d'éclore ou pour l'étouffer dans son berceau ; plus d'une fois, disons-nous, nous avons demandé à l'être suprême de protéger les têtes précieuses dont il se servait pour opérer une si heureuse révolution.
Mais, dans ce moment, où l'intérêt privé toujours occupé de lui seul, va, pour se défendre, prendre dans la religion des .moyens qu'elle désavoue; dans ce moment où la partie mécontente se trouble, s'agite, pour éluder le sacrifice que demande l'expiation des erreurs de nos pères, la dignité pastorale, la confiance des peuples, le bien public, la religion même, nous portent, Nosseigneurs, à faire nos preuves de désintéressement et de patriotisme par cette déclaration solennelle.
Nous recevons tous vos décrets avec la plus grande soumission. Citoyens et Pasteurs, nous
tiendrons d'une main l'Evangile et de l'autre la Constitution : et puisant tour à tour dans
ces deux sources les vrais principes des mœurs chrétiennes et civiques, nous enseignerons nos
peuples à rendre à Dieu ce qu'ils doivent à Dieu, et à la patrie ce qu'ils doivent à la
patrie. La perte de nos dîmes et de nos champs ne sera rien pour nous qu'une
Signé :
Pagauel, curé, électeur du canton dePujols. Bruyère, curé de Sainte-Foy de Pujols. Nantou, curéde Penne, archiprêtre de Villeneuve, électeur de Penne. Pons, curé de Saint-Cyprien. Guibert, curé. Bley, curé.
Labié, curé de Soubiroux. Paute, curé du Temple. Gardet de Bordeneuve, curé de Saint-Just. Géraud, curé du Laurier. Barret, curé de Sambas et maire. Gapiel, curé de Saint-Sulpice de Rive-Lede. Sère, curé de Gastelneau. Castels, curé du port de Penne. Tancogne, curé de Pinel. ûelberg, curé de Saint-Hilaire-de-Roger. Lassiverie, curé de Saint-Paul-le-Vieux. Paillé, curé de Collonges et procureur de la commune de Pujols. Jaubert, curé de Sainte-Colombe. Roux, curé d'Hautefage Bounel, curé de Sainte-Quiterie. Laumont, curé de Frespech, Saint-Clair et Sainte-Foy.
Beaufort, curé de Saint-Sulpice-Rive-Lot. Boissière, curé. Lacrosse, curé.
Fauché, curé de Saint-Pierre de Gourbiac. Moyzan, curé de Mailhe. Gabones, curé de Sainte-Livrade. Argenton, curé de Saint-Antoine et Foutiron. Vaissière, curé de Rouets, canton de Pujols. (Cette adresse reçoit les applaudissements de l'Assemblée.)
, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de l'arrestation de M. le vicomte ae Mirabeau par la municipalité de Castelnaudary, qui déclare ne retenir ce député qu'à la requête de celle de Perpignan et pour sa sûreté personnelle, en attendant les ordres de l'Assemblée nationale.
lit ensuite le récit envoyé par M. le vicomte de Mirabeau lui-même, des faits qui ont précédé son arrestation : Le compte rendu de sa conduite et des moyens l'il n'a cessé de prendre pour ramener le régiment de Touraine à la subordination est ainsi conçu :
Relation de ce qui s'est passé à Perpignan, depuis la soirée du 7 juin jusqu'au 11 du même
mois,relativement au régiment de Touraine. Compte rendu par M. le vicomte de Mirabeau,
colonel dudit régiment, et certifié véritable par lui (1).
Plusieurs officiers du régiment de Touraibe, informés par l'arrivée d'un de ces messieurs, sont venus au-devant de moi. J'ai fait monter M. d'Iver-say, lieutenant-colonel du régiment de Touraine, dans ma voiture, et je suis descendu avec lui à l'hôtel des Ambassadeurs, auberge de Perpignan. Beaucoup de soldats m'ont suivi ; m'avant reconnu, ils ont crié à ma porte : Voilà notre père ! Mais à ces cris redoublés se mêlaient des imprécations contre des officiers absents depuis la première insurrection, ce qui m'a empêché de répondre aux témoignages de satisfaction que paraissaient me donner ces soldats.
Informé de l'état des choses et du lieu où s'étaient retirés MM. de la Peyrousé et de Montalem-bert, deux officiers que l'etfervescence avail forcés de s'éloigner, mon premier soin fut de leur écrire de se rendre à portée de la ville. Mon plan était à peu près conçu, j'en donnerai plus bas l'explication. Je fis partir un exprès pour le Mont-Louis où étaient ces messieurs, M. le comte d'Urre, troisième officier absent, étant trop éloigné pour le faire venir.
J'ai été souper à l'auberge de M. d'Iversay, où la musique du régiment est venu me donner une sérénade : mon cœur était navré et peu disposé conséquemment à apprécier cette marque d'intérêt. Je remerciai cependant les musiciens, et je cherchai à saisir l'espoir que MM. les officiers du régiment me donnèrent de revoir bientôt renaître le calme, qui, depuis quelques jours, paraissait plus prochain.
Le lendemain matin, j'ai reçu la visite de MM. les officiers du régiment de Touraine avec lesquels j'ai causé des malheurs que nous avions à déplorer, depuis le moment où leurs soldats s'étaient soustraits à la discipline, des causes de cette insurrection extraordinaire, et des moyens d'y remédier.
Les adjudants sont venus me demander des ordres; celui qui avait été placé par les soldats m'a dit, les larmes aux yeux, qu'il était désespéré de ne pas tenir son grade de ses supérieurs, et qu'il serait enchanté de le rendre à celui qui en avait été injustement destitué. J'ui loué ses dispositions; et lui ai promis de prendre de lui le soin particulier que méritait ses services et la conduite louable qu'il avait tenue dans les circonstances épineuses où il venait de se trouver.
J'ai reçu une demi-heure après, la visité de MM. les officiers du régiment de Vermandois ; et en les félicitant, au nom du roi, et du miuistre qui m'avait remis l'ordre de le faire, Sur la bonne conduite de leur régiment, j'ai rempli mon devoir, qui paraissait pénible par la comparaison.
J'avais rendez-vous à dix heures et demie chez
M. de Chollet, commandant de la province : je m'y suis rendu avec M. le chevalier d'Iversay. J'ai remis à M. de Chollet la lettre dont le ministre m'avait chargé pour lui. Je lui ai communiqué celle qui contenait les ordres du roi, et lui ai rendu compte delà démarche que j'avais faite pour le retour des officiers absents ; je lui ai parlé de mon plan, qui consistait à demander à la municipalité de vouloir bien assister à la prestation du serment militaire que je me proposais de faire pour me conformer au décret de l'Assemblée na-nalionale, sanctionné parle roi qui le prescrivait; à le faire ensuite prêter de nouveau au régiment, et à profiter de cette occasion pour dire aux soldats : Vous venez de jurer d'être fidèles à la nation, à la loi et au roi, et de vous conformer aux règles de la discipline militaire. Je ne veux pas examiner si vous avez été fidèles au même serment déjà prêté par vous l'année dernière. Je viens même vous offrir, de lapart du roi, l'oubli de tout ce qui s'est passé; sa bonté veut bien ne voir que votre repentir ; fidèles à votre serment, vous allez exécuter ses ordres, dont on va vous faire lecture', (on aurait lu la lettre du roi) et je devais ensuite ordonner aux officiers, qui auraient été à portée de l'esplanade, de rentrer à leurs compagnies; j'aurais réintégré l'adjudant dans son poste, et aurais fait défiler le régiment; s'il y avait eu du murmure ou de l'insurrection, j'aurais dit que ceux qui ne veulent pas obéir aux ordres du roi sortent du rang, et je les aurais congédiés, heureux d'être débarrassé des soldats rebelles et parjures. J'observai au général que ce plan avait lé double avantage de porter sur un devoir agréable à la municipalité et aU peuple. La prestation de mon serment devait disposer favorablement les esprits, et rendre témoin de ce qui pouvait se passer la municipalité qui le requérait; et, de son côté, le général donnerait sur-le-champ des ordres nécessaires. Le général approuva mon plan, m'observa seulement qu'il serait peut être prudent que cela se passât dans le quartier : je reconnus la solidité de son observation.
Je sortis de chez lui pour me rendre chez M. le marquis d'Aguiiard, maire, auquel je fis part de la lettre du roi et de mon plan; il parut aussi l'approuver, et me dit qu'il ferait part à la municipalité du désir que j'avais de prêter le serment militaire; je lui répondis que j'aurais l'honneur d'écrire à cet égard à MM. les officiers municipaux. J'allai dîner chez M. le chevalier d'Iversay, d'où je me rendis chez moi ; j'y reçus d'abord une visite de quarante ou cinquante bourgeois de mon quartier, artisans et personnes de toutes les classes ; un menuisier, âgé de quatre-vingts ans, portait la parole; ils me comblèrent d'honnêtetés; à peine furent-ils sortis, que MM. les officiers de la garde nationale vinrent, en fort grand nombre, leur major à leur tête, pour me faire une visite de corps, à laquelle succédèrent celles de beaucoup de citoyens, les députations d'un club ou d'une loge de franc-maçonnerie; je fus convaincu que je devais toutes ces marques d'honnêteté à ma qualité de représentant delà nation; et plusieurs d'entre ceux qui avaient porté la parole m'avaient confirmé dans cette opiriion.
Je sortis et ne rentrai chez moi que pour souper: plusieurs officiers de mon régiment et mes compagnons de voyage me faisaient l'honneur de souper i liez moi, Une sérénade £e fit entendre., elle moiita, c'était une partie de MM. les soldats-citoyens, qui portaient trente torches, escortant soixante musiciens, suivis d'un peuple immense; les cris de : Vive le vicomte de Mirabeau me per-
mirent à peine de faire entendre le témoignage de ma reconnaissance; on fit donner de la liqueur, on porta la santé du roi, et ce fut pour moi un moment de jouissance bien réelle ; les musiciens et ceux qui les conduisaient prirent congé de moi et coururent toute la ville.
Le lendemain matin, j'ai reçu un grand nombre de visites; celles du clergé, des chapitres, des curés et de différents officiers et particuliers de la ville, et je sortis pour rendre celles que j'avais reçues la veille; plusieurs officiers de la garde nationale refusèrent, devant moi, mes billets de visite, disant qu'ils n'étaient point venus chez moi ; je répondis que j'avais fait ce que j'avais cru devoir faire : on verra bientôt que ce fait mérite d'être relaté. Je ne me présentai point à mon quartier ; partout où je rencontrai des soldats, ils me saluaient avec respect, et j'augurais bien de la réussite de mon projet; j'allai dîner chez le premier lieutenant du corps. À quatre heures, je reçus une lettre des officiers auxquels j'avais écrit; ils me mandaient qu'ils arriveraient le soir même ; dès lors j'écrivis à la municipalité la lettre ci-jointe (1) : j'en reçus la réponse annexée (2). Je donnai les ordres nécessaires, après avoir pris ceux du général, pour que mon régiment prit les armes le lendemain, à huit heures du matin, et j'envoyai M. de la Porte au devant des officiers pour les conduire au lieu désigné pour leur retraite, jusqu'au moment où nous devions avoir besoin d'eux; j'avais aussi fait avertir l'adjudant; tout paraissait annoncer le succès de notre entreprise; M. le chevalier d'Iversay vint m'avertir que plusieurs de MM. les capitaines l'avaient prévenu que les soldats seraient surtout récalcitrants à la réception de l'adjudant; je savais que l'adjudant destitué était un sujet fort mauvais, d'après les rapports qui m'en avaient été faits, et qui l'accusaient même d'avoir été le premier auteur des insurrections; je promis qu'il ne resterait que très-peu de jours, et j'autorisai ces messieurs à le promettre, non en mon nom, parce que je ne voulais pas compromettre l'autorité, mais comme le tenant de moi dans la conversation.
Je m'endormis, heureux du succès que tout semblait devoir me faire prévoir : à quatre heures du matin, je fus réveillé par M. de la Porte, qui vint m'avertir que les officiers n'étaient point arrivés, que n'ayant pu trouver des chevaux à Monlbreu ni à Villefranche, ils ne pouvaient arriver que le soir.
Je fus inquiet du retard ; convaincu que la célérité seule pouvait assurer la réussite de mon projet, j'envoyai chercher l'adjudant. Je donnai Contre-ordre, le prétexte de la pluie me servit; la municipalité devant sortir, plusieurs de MM. les officiers vinrent chez moi, deux y restèrent et étaient auprès de mon lit, sur lequel j'étais couché, à sept heures et demie, lorsque ma porte fut ouverte avec fracas par l'adjudant et une troupe de soldats qui parlaient tous à la fois: je leur dis que ce n'était pas ainsi qu'on entrait chez un chef, et leur ordonnai de sortir, ce qu'ils firent.
Je passai un pantalon et une redingote, et, entrant dans le salon, j'ordonnai qu'on fit
entrer une députation des soldats qui étaient à ma porte au nombre de cinq cents ; il en
monta quinze ou vingt ; un grenadier porta la parole et me dit :
Je descendis avec sept officiers ; les soldats se rangèrent à mon arrivée, je leur répétai ce que j'avais dit à leurs camarades, et j'ajoutai : Je vous ordonne, soldats, au nom du serment que vous avez fait à la nation, à la loi et au roi, de vous rendre à votre quartier, où vous recevrez mes ordres ; ce n'est point au milieu d'une rue et par une insurrection que Vous obtiendrez de moi une réponse : obéissez. Des cris presque unanimes dirent non; toujours calme, je répétai une seconde fois le même ordre : on me répondit encore non ; j'eus beau dire que je n'étais pas accoutumé à obéir à mes subordonnés, qu'ils pouvaient me casser, mais non me faire plier, les non furent toujours répétés. Un appointé de la compagnie de Vau-bersay sortit du rang, s'avança vers moi, et me dit : Nous savons que vous voulez faire rentrer au régiment les gens qui ont voulu nous faire du mal, mais f..., ils n'y rentreront pas. Ces propos étaient accompagnés de gestes menaçants et dangereux ; un des officiers qui étaient près de moi m'avertit que d'autres ramassaient des pierres; alors je fis un pas en arrière, je dis : A moi, messieurs les officiers ; je tirai mon épée, et la portant en l'air comme pour faire un commandement, je criai: Obéissez, soldats, à la voix de votre chef. Au mouvement que nous fîmes pour mettre l'épée à la main, les soldats se jetèrent les uns sur les autres des deux côtés de la rue, plusieurs tombèrent et d'autres crièrent: Aux armes, et coururent à leur quartier. Quelques coquins ont prétendu avoir été blessés par moi ; je donne ma parole que la chose est de toute fausseté : et si assurément j'eusse eu l'intention de punir l'insolence de l'appointé qui m'avait manqué, je ne l'aurais pas gratifié, plusieurs citoyens étant auprès de moi ; deux officiers de la garde nationale, entre autres, ont rendu le témoignage authentique de la vérité du fait.
Au départ des soldats, je proposai aux officiers de nous rendre chez M. le marquis d'Aguilard, maire, pour le prévenir de ce qui se passait, et de là mon intention était de me rendre chez le commandant de la province et au quartier. M. le maire assembla la municipalité, et requit le général, qui Se rendit chez lui après avoir donné les ordres nécessaires. MM. les officiers municipaux, le général et tous les officiers me demandèrent en grâce de ne pas sortir de chez M. le marquis d'Aguilard; je ne me rendis qu'à l'imposante considération du danger où j'allais mettre les citoyens. Je savais que lés soldats disaient hautement qu'ils voulaient me tuer; j'étais convaincu qu'ils ne l'oseraient point; ma conscience ne me reprochait rien ; j'avais toute ma vie tout fait pour eux, et je ne les croyais pas encore parvenus à l'oubli de tous leurs devoirs et à la scélératesse la plus atroce.
Le régiment de Touraine se rendit sans ordre,
battant la charge, à la place de la Loge. Les compagnies de la citadelle l'avaient rejoint. Ils avaient iait sur-le-champ des dispositions telles, qu'il est impossible de ne pas y reconnaître une combinaison d'idées et de projets. Un piquet alla s'emparer de l'avancée de la citadelle, un autre, des canons de la forteresse qui donnent sur la ville. Une garde fut placée à chaque poste, un détachement alla à la poste aux chevaux. Quelques-uns enfoncèrent des caisses à cartouches qu'ils prirent dans le magasin de la citadelle, et le reste se mit en bataille sur la place après avoir été enlever de chez moi les drapeaux et la caisse.
La garde nationale prenait les armes, et le régiment de Vermandois se rassemblait; plusieurs officiers du régiment de Touraine se rendirent à leur compagnie pour s'efforcer de ramener les esprits. Les officiers municipaux et le général se rendirent sur la place; je ne puis rapporter ici ce qu'ils me dirent à leur retour : ils demandèrent d'abord que les drapeaux et les caisses fussent portés chez le maire, qui venait de me donner un logement dans son hôtel; cela fut exécuté, et un détachement, fort en ordre, apporta les drapeaux dans la chambre qui m'était destinée. Je fus tranquille; j'étais à ma place, et je jurai dès Jors de ne plus laisser ces enseignes honorables entre les mains de soldats rebelles ; ils placèrent à la porte Ja garde des drapeaux et rejoignirent la troupe. Les officiers municipaux et le commandant de la province la haranguèrent pendant longtemps; ils paraissaient, dans chaque compagnie, disposés à rentrer dans le devoir; mais à peine était-on éloigné d'eux, que poussés par des instigations étrangères et par des bourgeois qui couraient derrière les rangs, tandis que le général passait devant le front, ils criaient non, dès qu'il était passé. On obtint cependant qu'ils retourneraient à leur quartier. Plusieurs compagnies de la garde nationale faisaient face à l'hôtel du maire, le régiment de Vermandois occupait le devant de ce même hôtel; les soldats de Touraine, en retournant au quartier, passèrent près de la compagnie de Maillac, qui, sous les armes, cria : Vive Touraine! et fut imitée par la compagnie voisine. Celle d'Astros, les autres compagnies, le régiment de Vermandois, parurent indignés que ceux qui avaient pris les erreurs pour le maintien de l'ordre applaudissent à l'insurrection qui les avait fait rassembler; ils crièrent : Vive la garde nationale ! qui répliqua : vive Vermandois ! et il est impossible de ne pas avoir été frappé de la contenance de ce brave régiment, qui ne formait pas la huitième partie de celui de Touraine, parce que tous les détachements de la province étaient, en ce moment, fournis par lui. Toutes les compagnies volontaires, excepté les deux ci-dessus citées, que J'on paraissait accuser hautement d'avoir conseillé, les soldats de Touraine, de les avoir fait boire, et de leur avoir même distribué des cartouches, se présentèrent avec une assurance et un courage qu'on aurait à peine attendu du corps le plus ancien et le plus fidèle.
Les mutins rendus à leur quartier, MM. les officiers municipaux et le commandant revinrent chez M. le maire, ainsi que la plus grande partie des officiers de la garnison : là, se tint une espèce de conseil, quelques avis furent ouverts : voici quel fut le mien, qu'on eut la bonté d'adopter unanimement : Se rendre au quartier, lire aux soldats la lettre qui contenait les ordres du roi, demander ensuite ceux qui voulaient y obéir, et offrir aux autres cartouches blanches, décompte et licenciement. Le général et ses officiers muni-
cipaux se rendirent au quartier; on décida que je ne devais point y aller, et je résistai moins, parce qu'accompagné de ces messieurs, ma sûreté ne paraissait pas compromise, et que je faisais par conséquent un beaucoup moindre sacrifice que la première fois. J'attendis leur retour avec impatience, et j'appris, avec une douleur difficile à exprimer, que les exhortations paternelles de M. le marquis d'Aguilard, la bonté, la patience et la fermeté de M. de Ghollet, n'avaient rien pu obtenir de ces mutins; qu'ils avaient osé sortir tous du rang à l'interpellation qui leur avait été faite pour en tirer tous ceux qui refusaient d'obéir aux ordres du roi ; qu'ils avaient tour à tour fait des réponses contradictoires, ce qui décelait une noirceur dans les projets et un dérangement dans les têtes qui devaient faire tout craindre ; que plusieurs avaient prétendu que la lettre était fausse et fabriquée à Perpignan; j'en fis faire sur-le-champ des copies: elles furent collationnées et certifiées conformes a l'original par MM. les officiers municipaux, et je les envoyai au quartier, où plusieurs soldats avaient paru désirer les voir et en avoir une connaissance plus exacte que celle qu'on pouvait en prendre sur une simple lecture. Quant au licenciement, personne n'avait voulu accepter de cartouches.
La nouvelle vint bientôt que lessoldats rebelles voulaient venir reprendre leurs drapeaux. J'en avertis M. le maire; et, sur ma demande, il requit M. de Chollet. Le régiment de Vermandois repritles armes, et deux compagnies, ainsi que deux de la garde nationale se rendirent à l'hôtel du maire. La fermentation devient plus forte parmi les soldats de Touraine ; ils enfoncèrent encore des caisses à cartouches à la citadelle, et se préparaient à venir charger le régiment de Vermandois, lorsque M. le maire, sur cette nouvelle, eut la prudence de le faire rentrer à son quartier, ce qui calma les esprits ; ils vinrent cependant, au nombre de cent cinquante, pour garder leur drapeau. M. le marquis d'Aguilard descendit, parla à ces soldats avec fermeté; son âge, sa place, et, plus encore, son imposante dignité personnelle, les déterminèrent à se retirer.
Une heure après, je crus devoir sortir, j'avais été averti qu'on imaginait que ma retraite était ma seule sauvegarde; je sortis avec quelques officiers ; je fis un tour de rempart ; je fus salué respectueusement par tous les soldats, suivi par beaucoup de peuple ; les sentinelles me présentèrent les armes, et tout paraissait calme ; le désir de me montrer encore plus isolé au milieu de ces gens-là, me détermina à entrer dans une maison où j'avais été les deux jours précédents, et d'où jesortis pour me rendre chez M. d'Aguilard, avec M. de Faure seul : même respect. Je passai sur la place où était une grande partie du régiment. Lessoldats se levèrent pour me saluer. Rentré chez moi, je dis à M. le chevalier d'Iver-say, qui me pressait d'accorder quelque chose au désir du calme, que, déjà déterminé à ne jamais plus rien accorder, j'accorderais tout ce que je pourrais au désir, non de sauver des soldats aussi coupables, mais de brèves et bons officiers, prêts à perdre le fruit de leurs services; et voici quel fut mon dernier mot : on jugera si je ne cédais pas tout ce que je pouvais : Vancien adjudant, qui paraît être la principale pierre d'achoppement, m'a fait dire qu'il ne' voulait pas reparaître, on n'en entendra donc plus parler ; celui qui a été nommé par les soldais assistera à la prestation de mon serment civique, comme sergent-major dans la compagnie de laquelle on
l'a tiré, et je vous donne ma parole que je le recevrai-' demain à la parade ; quant au retour des officiers à leur compagnie, je ne céderai pas sur ce point. M. le chevalier dlversay et plusieurs officiers partirent pour le quartier, mais ils revinrent bientôt me dire qu'il n'y avait aucun espoir de voir exécuter mes ordres.
Vers les neuf heures et demie, il vint une cinquantaine d'hommes armés pour renforcer la garde des drapeaux. M. le marquis d'Aguilard vint encore à bout de les faire retourner à leur caserne; personne ne manqua à l'appel. Je fus un peu étonné en rentrant dans ma chambre, pour prendre quelque repos, d'y trouver plusieurs officiers du régiment, plusieurs de celui de Vermandois, deux de Vexin et un grand nombre d'officiers étrangers, qui voulurent absolument passer la nuit avec moi; je leur témoignai ma sensibilité, mais j'eus beau les rassurer sur leurs inquiétudes dont j'étais l'objet, ils insistèrent, et le sentiment dè la reconnaissance, si doux à éprouver, vint soulager les déchirements auxquels mon âme était en proie.
Le 11 au matin, on vint me dire qne les choses étaient toujours dans le même état : le sergent-major et le fourrier des grenadiers se présentèrent et me remirent un état de cinq grenadiers qui demandaient des cartouches de licenciement : je donnai des ordres pour qu'elles fussent délivrées, et qu'on donnât même trois sols par lieue à ceux qui n'auraient pas à leur masse de quoi se conduire chez eux ; les soldats furent informés qu'on expédiait ces cartouches, ils coururent au bureau, s'en emparèrent, mirent en prison le sergent-major, le fourrier et huit ou dix grenadiers, disant que le régiment avait refusé la veille, d'une voix unanime, les cartouches, et que les grenadiers, après les avoir mis dans la nasse (ce sont leurs expressions), voulaient les y laisser. Deux heures après, un détachement armé vint se présenter chez M. le maire, qui descendit pour savoir la cause de cette nouvelle injure: les soldats dirent qu'ils cherchaient M. d'Espe-nan, capitaine des grenadiers. M. le marquis d'Aguilard leur représenta encore une fois tous leurs torts, et finit par leur jurer que M. d'Es-prenan n'était pas chez lui. Ils se retirèrent, allèrent à l'auberge du lieutement-colonel ; et malgré les réclamations du citoyen chez lequel ils entraient à main armée, ils fouillèrent la maison et même la salle où mangeaient ces messieurs ; ils allèrent de là chez M. de Maison-Rouge, trésorier de la guerre, où on avait dit qu'il était; et ne le trouvant pas, ils allèrent au quartier de Saint-Martin, occupé par le régiment Vermandois, où s'était réfugié cet officier, qui ignorait les raisons pour lesquelles ces forcenés s'acharnaient à le poursuivre. M. des Innocents, lieutenant-colonel de ce régiment, leur parla avec fermeté, et ils s'en retournèrent se contentant de renforcer le poste de la porte Saint-Martin et de consigner M. d'Espenan à tous les postes. M. d'Es-penan requit la sauvegarde de la municipalité, qui se rendit avec le commandant au quartier ; on dit à M. d'Espenan qu'il était sous la sauvegarde de la loi, et on lui laissa le choix du lieu où il voulait se retirer; il demanda à sortir de la ville, la municipalité l'escorta jusqu'en dehors de la porte, et là il monta à cheval ; on remarquera, sans doute, que personne ne lui parla du chef d'accusation intenté contre lui, que tout le monde ignorait.
Dans le moment où l'on favorisait son départ, le fourrier des grenadiers, détenu et interrogé, le '
chargeait; il disait qu'il avait reçu de l'argent de lui, pour soulever les esprits; les soldats tenaient une espèce de conseil de guerre, au milieu de leur quartier; ils interrogeaient les grenadiers détenus, les confrontaient avec le fourrier, leur demandaient des explications relatives à la lettre qui m'avait été écrite dans le mois de mai sur mon aventure du 13 avril; les interrogeaient sur ce qui les avait engagés à demander leur congé, et les ayant déclarés innocents, ils les ont renvoyés à leur chambre, renvoyant le fourrier seul en prison; ils avaient cependant désarmé la compagnie de grenadiers, mais ils lui rendirent ses armes peu d'heures après : quatre fourriers furent envoyés à la municipalité, dès qu'ils apprirent le départ de M. d'Espenan, pour demander la raison (disaient-ils) de son évasion : ils présentèrent la pétition annexée n° 1 ; la municipalité leur dit qu'elle leur rendrait réponse le lendemain; on trouvera réponse ci-jointe n° 2. A six heures du soir vinrent chez moi l'adjudant et un sergent-major, de la part du régiment, m'inviter a me rendre au quartier; j'envoyai chercher M. d'Iver-say, et je me préparai à partir malgré les avis multipliés qui me venaient de toutes parts, qu'on m'attendait au quartier pour m'assassiner. M. de Chollet arriva au moment où j'allais partir ; il me dit des choses infiniment fortes pour me dissuader d'aller au quartier ; et comme j'insistais, il finit par me dire que d'après la certitude où il était que ma vie était menacée, il m'ordonnait de rester où j'étais ; après lui avoir fait toutes sortes d'objections, je lui ai répondu que je savais obéir ; M. d'Iversay a été au quartier porter cette nouvelle ; et nous avons appris que la forme de l'invitation des compagnies du quartier à celle de la citadelle avait été conçue en ces termes : Les compagnies de la citadelle sont priées d'assister au spectacle qu'on se prépare à leur donner au quartier.
A l'heure de l'appel, il n'a manqué personne ; les soldats ont remis en prison les grenadiers qui avaient été relâchés. Ce matin, 13, les choses étaient dans le même état ; ils ont mis en prison deux soldats, qui la nuit avaient couru les compagnies et avaient soutenu que j'étais au moins aussi coupable que les officiers absents, et que je ne devais pas les commander ; ils ont renvoyé les fourriers à la municipalité, pour chercher sa réponse relative à l'éloignement de M. d'Espenan ; ils ont consigné tout le monde au quartier, et ont accusé M. de la Porte, lieutenant, d'avoir tenu, en présence de M. le maire et chez lui, des propos contre les soldats du régiment, et d'avoir dit que si les officiers et bas-officiers étaient d'accord, ils auraient bien tôt mis le reste à la raison. M. d'Iversay, que la municipalité a fait prier de passer chez lui, a dit : que M. de la Porte était absent, mais qu'il reparaîtrait et se présenterait sûrement avec la confiance d'un homme injustement accusé, puisque M. le maire niait le propos. Plusieurs officiers du régiment sont entrés chez moi, les capitaines m'ont prié de donner un ordre qui rassurât les soldats sur les suites de leurs insurrections dans le cas où ils rentreraient dans le devoir; j'ai cédé à leurs instances et j'ai délivré l'ordre annexé : j'en ai attendu l'effet.
J'ai appris, deux heures après, que les soldats avaient député l'adjudant à la citadelle pour chercher de nouvelles cartouches, de manière à en donner 15 de plus par homme. Les deux adjudants sont venus chez moi, ils m'ont encore parlé de retourner au quartier. Je leur ai dit que j'at-
tendais l'exécution de mon ordre, et les ai congédiés.
Le général et le maire m'ont engagé à partir, croyant, disaient-ils, que ma présence pouvait devenir dangereuse à la tranquillité des citoyens. Ce motif, qui a toujours été d'un grand poids sur mon âme, n'a pu me déterminer, et j'ai attendu la réponse que le régiment avait dit devoir faire à mon ordre.
M. d'Iversay est venu me dire que les soldats l'avaient Sommé, et à son défaut, M. deChollet, de prendre les drapeaux chez eux, qu'ils avaient tous refusé, l'ai répondu que tant que je vivrais, on n'enlèverait pas les drapeaux de chez moi : on m'assura qu'ils ne les prendraient pas.
J'étais à table lorsque j'ai reçu la réponse annexée, portée par trois Caporaux (1). J'ai frémi d'indignation, mais j'ai songé au lieu où j'étais, et je me suis contenté de dire : c'est bon, sortez ! Je n'ajouterai aucunes réflexions, elles seraient trop cruelles.
Dans ce moment, voyant que ma présence ne pouvait plus être d'aucune utilité, ayant reçu ia réquisition de la municipalité ci-jointe, je me suis déterminé à abandonner à leur destinée des soldats rebelles et parjures, contre lesquels j'ai offert mes forces personnelles à 1a municipalité, en proposant de m établir volontaire dans une des compagnies de la garde nationale. Ne pouvant servir ici la chose publique, je retourne à mon poste de représentant de la nation. Je donnerai à l'Assemblée nationale ce que j'ai pu recueillir de détails sur les moteurs des troubles et sur ceux qui aiguisent, à deux cents lieUes d'eux, des poignards contre ceux qui diffèrent avec eux d'opinion.
Je n'avais apporté à Perpignan que la qualité de citoyen et celle de colonel du régiment de Touraine. Ma première démarche a été de demander à prêter le serment militaire, celui d'être fidèle à la nation, à la loi et au roi. Une gazette fabriquée à Pont-Saint-Esprit m'a dénoncé sous le titre de contre-révolutionnaire, et les échos et les gens malintentionnés l'ont répété aux soldats. Les malheureux demandaient cependant ia tête de l'homme qui les a comblés de biens, qui a été blessé à leur tête, qui prenait soin de leur gloire, et qui faisait quatre cents lieues pour en être le garant.
Le théâtre change, mais les objets sont les mêmes ; partout je trouve des poignards et des assassins, mais partout je porterai courage, fidélité à mon Dieu, à mou roi et à mon devoir ; il vaut mieux mourir que de craindre la mort ; il est des moments où c'est un espoir que de l'attendre.
Signé : le vicomte de Mirabeau.
Copie de la lettre écrite par M. le vicomte de Mirabeau, colonel au régiment de Touraine, à MM. les maire et officiers municipaux de la ville de Perpignan.
Messieurs, je désire remplir à mon arrivée à la tête du corps que j'ai l'honneur de
commander, le devoir que me prescrit le décret de l'Assemblée nationale, et sanctionné par le
roi relativement au serment militaire ; comme c'est en Votre présence que ce serment doit
être prêté, je vous prie de vouloir bien m'indiquer l'heure de la journée
Membre de l'Assemblée nationale, je dois donner l'exemple de la soumission pour son décret. J'espèré que vous verrez dans cette démarche, Messieurs, le zèle qui doit animer tout bon Français et le désir de donner au régiment de Touraine, l'exemple du dévouement pour l'ordre, que je suis chargé de rétablir et de maintenir.
J'ai l'honneur d'être avec respect, Messieurs, votre très humble et très obéissant serviteur.
Lë vicomte de Mirabeau.
Perpignan, ce
Collationné sur l'original déposé à la maison commune de Perpignan. Signé : Jaume.
Copie d'une adresse des officiers du régiment de Touraine, à la municipalité de Perpignan, le onzième juin 1790,
A MM. les officiers municipaux de la ville de Perpignan,
Messieurs, nous, bas-officiets, députés du régiment de Touraine, pénétrés d'un sentiment patriotique, avons l'honneur, de nous présenter à vos augustes personnes, pour vous prier de nous dévoiler le motif qui vous a engagés à favoriser l'évasion de M. d'fispenan, capitaine des grenadiers de notre régiment, qui est accusé, par des grenadiers détenus en prison* pour être le moteur primitif des insurrections survenues dans le régiment depuis le 20 mai ; nous n'en voulions qu'une justification personnelle devant lui, afin de pouvoir discerner les innocents d'avec les coupables, ce qui aurait été une satisfaction sensible à nos cœurs patriotiques.
Nous avons l'honneur d'être très respectueusement, Messieurs, vos très humbles et très soumis serviteurs,
Les bas-officiers, caporaux et soldats du régiment de Touraine*
Remis à la municipalité par nous soussignés, le 11 juin 1790, à six heures du soir.
Sauveton, fusilier, député du régiment. DutriEux, fusilier, député du régiment. Croupeac, député du régiment. Vauderaureser.
Collationné sur toriginal déposé dans les archives de lu maison commune de Perpignan, le 12 Juin 1790- Sigpé • JÀÛJp;.
Copie de la réponse d$ la municipalité de Perpignan, à l'adresse des bas-officiers du régiment de Touraine,
La municipalité n'a pU voir sans étonnement que les députés du régiment de Touraine se sont présentés sans autorité de leurs chefs pour demander une explication sur la protection qu'elle a accordée à un officier de ce régiment, qu'elle a su poursuivi de maison en maison par des soldats armés et jusques dans un quartier où il s'était mis à l'abri des dangers dont il se voyait menacé ; c'est de cë dernier asile qu'il a réclamé
es secours de la municipalité, dont le devoir est de veiller à l'ordre public et à la sûreté des citoyens qui ne peuvent être arrêtés ni détenus sans observer les formes prescrites par là loi ; les officiers de la garnison ne sont pas moins citoyens que les autres, les soldats le sont aussi. La municipalité doit protection et secours à tous, contre les entreprises de quiconque attente à leur liberté civile ; c'est ce qu'a fait et dû faire la municipalité envers M. d'Espenan.
Les députés du régiment de Touraine n'auraient pas dû supposer que la municipalité eût voulu favoriser une évasion; elle voit avec peine qu'ils se soient permis une supposition si peu conforme à sa dignité et à ses sentiments; et elle ne peut, en finissant, que renouveler son vif désir de voir rétablir et cimenter à jamais dans le régiment de Touraine, la discipline et ia subordination si nécessaires au maintien de l'ordre et de la sûreté publique, dont l'infraction ne peut par conséquent se concilier avec l'amour de la patrie, et qui seules peuvent donner un nouveau prix à la réputation de courage et d'honneur que ce régiment a si bien méritée.
Coliationnée sur l'original. Signé ; Jaume.
Du mémoire présenté par M. le vicomte de Mirabeau, colonel du régiment de Touraine, à la municipalité de Perpignan, a été extrait ce qui suit :
Je vous ordonne, soldats, au nom du serment que vous avez fait à la nation, à la loi et au roi, de vous rendre à votre quartier, vous y recevrez mes ordres ; ce n'est pas au milieu d'une rue et par une insurrection que vous obtiendrez de moi une réponse : obéissez. Des cris presque unanimes dirent non. Toujours calme, je répétai une seconde fois le même ordre, on me répondit encore non. J'eus beau dire que je n'étais pas accoutumé à obéir à mes subordonnés, qu'ils pouvaient me casser, mais pas me faire plier ; les non furent toujours répétés. Un appointé de ia compagnie de Vaubercey sortit du rang, s'avança vers moi et me dit : Nous savons que vous voulez faire rentrer au régiment les gens qui ont voulu nous faire du mal, mais f...., ils n'y rentreront pas. Ces propos étaient accompagnés de gestes dangereux et menaçants ; un des officiers qui étaient près de moi, m avertit que d'autres ramassaient des pierres, alors je fis un pas en arrière, je dis : A moi MM. les officiers. Je tirai mon épée, et la portant en l'air, je criai : Obéissez, soldats, à la voix de votre chef. Au mouvement que nous fimes pour mettre l'épée à la main, les soldats se jetèrent les uns sur les autres des deux côtés de la rue, plusieurs tombèrent et d'autres crièrent : Aux armes ! ils coururent à leur quartier où ils furent prendre les armes.
Nous, Jacques Gavit, Pouilhari, maître perruquier; Antoine Gommeilan, négociant ; Joseph Lobes, bourgeois; Vincent Gamuzat, passementier; Jean Torreilles, sellier ; Jacques-Philippe Neger, garçon perruquier; Paul Ris, tailleur; Dominique Gazai, avocat ; Jean Ghepe, tailleur et Pierre La Forest; tous domiciliés dans cette ville de Perpignan, après avoir pris lecture de l'écrit ci-dessus, attestons et affirmons le contenu en celui véritable, pour l'avoir vu et entendu : et nous dits Chepe et Gommeilan, attestons de plus avoir entendu que plusieurs grenadiers criaient (en parlant de M. le vicomte de Mirabeau) point de vive, il est f.... pour venir ici, ajoutant : il faut qu'il
vienne, c'est ici la tête, et il est f.... pour cela ; ce qu'ils ont répété plusieurs fois.
Nous tous susdits attestons, en outre, que lorsque M. le vicomte de Mirabeau tira son épée, ainsi que MM. les officiers qui étaient avec lui, ils ne blessèrent, ni ne la portèrent contre personne; en témoins de quoi avons donné la présente attestation que nous avons signée, à Perpignan, le douze juin 1790, — Ghepe. Gommeilan. Torreilles. G.-J. Pouilharie. Paul Rio. PhilippeMeger. V. Gamuzat. Laforest. Joseph Lobet, Gazai. Signé à l'original qui est au pouvoir de M. le vicomte de Mirabeau.
Nous, maire et officiers municipaux de la ville de Perpignan, certifions à tous ceux qu'il appartiendra, que les seings ci-desus apposés sont véritables, et que les personnes qui ont donné et signé le certificat sont connues de nous, et que foi peut y être ajoutée, en témoins de quoi, nous avons donné ces présentes auxquelles nous avons fait apposer les sceau et armes de la ville, et fait contresigner par le secrétaire-greffier de la commune. À Perpignan, le 12 juin 1790. Signé : d'Aguilard, maire; Cuit, Vaudricourt, Gagasiga, Mapottq, Pons. — Par la municipalité : Jaume, secrétaire.
Ainsi est à l'original duquel le présent a été extrait, par nous secrétaire-greffier de la municipalité de Gastelnau-dary, à la réquisition de M. le vicomte de Mirabeau, membre de l'Assmblée nationale, lequel a de suite retiré ledit original, en foi de quoi nous sommes soussignés, à Gastel-naudary, le 14 juin 1790; et nous avons apposé les sceau et armes de la vile. Signé : Boyer, secrétaire-greffier.
Paris, ce 31 mai 1790.
Copie de la lettre de M. la Tour-du-Pin, à M. le vicomte de Mirabeau^
En mettant sous les yeux du roi, Monsieur, le compte qui m'a été rendu de l'insurrection à laquelle s'est livré Je régiment de Touraine, je n'ai pas laissé ignorer à Sa Majesté l'intention où vous êtes de demander à l'Assemblée nationale, dont vous êtes membre, la permission de vous absenter, afin de vous rendre à votre régiment, et d'y employer vos efforts pour y rétablir l'ordre et la subordination. Le roi a vu avec satisfaction la preuve du zèle que vous vous disposez à donner, et Sa Majesté approuve que vous vous rendiez au régiment de Touraine aussitôt que vous aurez obtenu l'agrément de l'Assemblée nationale.
Il est sans doute inutile de vous recommander, Monsieur, d'apporter la plus grande prudence, pour connaître, avant tout, les causés d'une insurrection aussi extraordinaire dans un corps distingué autant par sa bonne conduite que par sa valeur contre les ennemis de la patrie ; vous pourrez à cet égard, s'il est nécessaire, vous concerter avec MM. les officiers municipaux, pour en obtenir les renseignements qu'ils pourront vous procurer, et vous aviserez, avec le commandant de la place, à tous les moyens que la raison, la patience, et cependant la fermeté, indiqueront de mettre en usage pour ramener ce régiment à la discipline, d'après ia connaissance que vous aurez pu prendre des véritables causes de son insurrection.
Je ne puis penser que le régiment de Touraine ne s'empresse de revenir aux principes de subordination, qui seuls font la force et la gloire des corps militaires, et sont la vraie sauvegarde de
la sûreté des citoyens. Sans doute, que ce corps déjà rougi d'avoir pu s'en écarter, au mépris du serment solennel qu'il a prêté de rester fidèle à la nation, au roi, à la loi et aux règles de la discipline militaire. Mais quelques heureux effets qu'aient pu produire son repentir, le roi ne pourra le croire durable que lorsque les officiers que l'effervescence a forcés de s'absenter, seront rentrés à leurs compagnies, et que l'adjudant et les bas-officiers du régiment, qui ont été injustement destitués par les soldats, seront remis à leur place; c'est à obtenir cette marque d'un retour sincère que Sa Majesté vous ordonne d'employer tous vos soins. J'écris à M. de Chollet, pour qu'il vous seconde de tous les moyens que l'autorité de sa place pourra lui faire employer.
J'ai l'honneur d'être très parfaitement, Monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur.
Signé : La Tour-du-Pin.
Les pièces importantes qui viennent de vous être communiquées ne peuvent être jugées sur une simple lecture ; je demande donc qu'on ajourne à jour fixe pour statuer sur la proposition faite hier par M. de Gazalès, concernant les faits particuliers à M. le vicomte de Mirabeau.
Plusieurs membres réclament l'impression des pièces et le renvoi aux comités des rapports et militaire.
On demande le renvoi au comité des rapports : cette mesure est insuffisante. Si l'Assemblée était plus instruite, je réclamerais de sa justice ce que j'attends de sa seule humanité. Existe-il un seul représentant delà nation qui puisse consentir à laisser un de ses collègues dans les plus grands dangers? lien est deux auxquels M. le vicomte de Mirabeau est exposé. L'Assemblée peut y pourvoir. L'opinion publique de la capitale est égarée par des libelles qu'on proclame de toutes parts, et que voilà. En ce moment même, ils disent que M. le vicomte de Mirabeau a donné ordre de faire feu sur le peuple ; c'est une calomnie infâme. Ils disent qu'il y a eu. a Perpignan un combat de cinq heures, et que douze cents personnes y ont perdu la vie ; rien n'est plus faux. Ces libelles se sont répandus dans tout le royaume, et sont destinés à faire assassiner M. le vicomte de Mirabeau sur la route. Vous connaissez l'esprit du peuple, et si vous aimez le peuple, vous devez lui épargner des erreurs et des crimes qui déshonoreraient la nation...
(On entend ces mots partir du côté gauche : Allons donc! Tout le côté droit se lève, et demande que celui qui a prononcé ces paroles soit rappelé à l'ordre.)
Les représentants de la nation sont les arbitres suprêmes de l'opinion publique, et l'opinion publique est en ce moment la seule force qui puisse contenir le peuple. Ces libelles qui, dans Paris, sont à peine dignes du mépris des honnêtes gens, sont à cent lieues de la capitale des arrêts de mort. Laisseriez-vous en paix ces misérables iibellistes, qui calculent le fruit de leurs crimes par les maux qu'ils doivent produire? Je demande un décret qui démente ces calomnies; je ne demande pas que vous préjugiez de rien, mais que la fausseté des faits soit démontrée, soit certifiée par vous. Il faut dire
qu'il est faux que M. le vicomte de Mirabeau ait fait tirer sur le peuple; qu'il est faux qu'il ait soutenu un combat ; que des citoyens de Perpignan aient été tués. Je ne vous dirai pas qu'il s'agit d'un Français, d'un représentant de la nation ; quand il s'agirait d'un étranger, d'un coupable, vous ne devez pas le livrer à la fureur du peuple. Je dirai que je plaide la cause de mon ami ; c'est au moment où il est calomnié de la manière la plus odieuse, c'est au moment où ses ennemis se préparent à lui susciter des assassins à chaque pas, que je déclare que M. le vicomte de Mirabeau est mon ami. Ce sentiment, que les âmes honnêtes apprécient toujours, suffit pour justifier ma demande. Mais je ne réclame que votre justice. Rendez un décret qui fasse connaître les faits, qui certifie la fausseté de ceux qu'on proclame de toutes parts, qui mette M. le vicomte de Mirabeau sous la sauvegarde de l'Assemblée nationale. Par là vous imposerez aux calomniateurs, vous sauverez un de vos collègues ; mais si ma demande est mal reçue, je me reprocherai d'avoir involontairement contribué a un grand crime qui se prépare ; vous livrerez volontairement M. le vicomte de Mirabeau au peuple, vous l'abandonnerez volontairement aux poignards.
Le parti que l'Assemblée doit prendre est infiniment simple. Il faut mettre M. le vicomte de Mirabeau sous la sauvegarde de l'Assemblée nationale; ce point n'est contesté par personne. Il y a un autre moyen très simple, c'est de faire imprimer la lettre de la municipalité de Perpignan : on verra qu'il n'y a eu personne de tué, et qu'il n'y a pas eu de combat.
Nous partageons tous la sollicitude qu'inspire la situation de M. le vicomte de Mirabeau : s'il y a quelque incertitude, c'est seulement sur les moyens de pourvoir à sa sûreté. Le premier est d'arrêter les libelles dans lesquels, comme l'a très bien observé M. l'abbé Maury, la vérité est altérée, les calomnies les plus infâmes insérées. On les arrêtera en imprimant la lettre de la municipalité de Perpignan. Quant à la sûreté de M. le vicomte de Mirabeau, nous ne pouvons la mettre sous la sauvegarde de l'Assemblée; tous les citoyens sont sous la sauvegarde de la loi : mais nous pouvons inviter les mucipalités à employer tous les moyens pour empêcher qu'il n'arrive rien, en quelque manière que ce soit, à M. le vicomte de Mirabeau; il faut en même temps dire que toutes les pièces sont renvoyées au comité des rapports, pour qu'il en soit incessamment rendu compte à l'Assemblée.
J'entre dans les vues de M. l'abbé Maury, et je vous supplie de désavouer par le même décret les odieuses calomnies publiées contre la religion de l'Assemblée, pour bouleverser le royaume.
. (On demande la question préalable et l'ajournement sur cette proposition. — M. Goupil consent à cet ajournement.)
Il est dangereux d'adopter la question préalable et l'ajournement quand les libelles les plus affreux sont répandus avec profusion.— M. Moreau fait lecture de quelques fragments d'un de ces libelles.
Non seulement il est dangereux
de proposer la question préalable sur ces libelles ; mais quand ils sont si atroces, il faut sévir : je demande donc qu'il soit ordonné au procureur du roi du Châtelet d'informer contre les auteurs, colporteurs et distributeurs des libelles où l'on accuse, soit que l'accusé se nomme, soit que l'accusé ne se nomme pas. Je dénonce les Révolutions de France et de Brabant.
(Plusieurs personnes du côté gauche disent : dénoncez donc la Lanterne magique, les Actes des Apôtres, la Déclaration du Clergé.)
Quoiqu'il n'y ait pas de loi promulguée, et que celle qu'on vous a proposée soit ajournée, il n'en est pas moins vrai qu'il est impossible qu'une nation existe dans un état d'hostilité atroce des hommes les uns contre les autres. Cet état est celui où il est permis à tous d'attaquer l'honneur de tous les citoyens, de tels ou tels représentants, d'attaquer ies personnes les plus augustes, qui doivent être l'objet de notre amour et de tous nos respects. Je demande que ma proposition soit mise aux voix (1).
Divers membres demandent à aller aux voix sur la motion de M. Muguet de Nanthou.
Je demande que1 non seulement il soit donné des ordres à toutes les municipalités de veiller à sa sûreté, mais encore à sa liberté... Le principe est établi; M. de Mirabeau est placé, par le décret, sous la sauvegarde de la loi ; en demandant l'addition du mot liberté, on ne sort pas de ce principe : nécessairement tout citoyen qui est sous la sauvegarde de la loi, ne peut être arrêté au mépris de cette loi : or, rien ne peut autoriser l'arrestation de M. le vicomte de Mirabeau... (lia, dit-on, dans la partie gauche, été arrêté en flagrant délit, et sur la clameur publique.) Si sa personne est sous la sauvegarde delà loi, sa liberté est sous la même sauvegarde.
L'Assemblée ne peut rien statuer sur la liberté de M. de Mirabeau relie sait seulement qu'il y a un vol, un enlèvement de cravates des drapeaux d'un régiment; si le coupable est arrêté, la loi prononcera.
Le décret met M. le vicomte de Mirabeau sous la sauvegarde de la loi : si sa liberté n'y est pas comprise, il est sous la sauvegarde de son geôlier.
présente une nouvelle rédaction, qui est adoptée en ces termes :
« L'Assemblée nationale décrète :
« 1° Que les pièces relatives à M. de Mirabeau, le jeune, colonel du régiment de Touraine, seront renvoyées aux comités des rapports et militaire réunis ;
« 2° Que la lettre de la municipalité de Perpignan, en date du 13 du présent mois, sera imprimée;
« 3° Que son président se retirera dans le jour par devers le roi, pour supplier Sa Majesté de donner les ordres nécessaires pour procurer la sûreté de M. de Mirabeau. »
L'Assemblée va passer à son ordre du jour qui est la suite de la discussion sur l'organisation civile du clergé. Titre III. Je relis les articles 9 et 10 qui ont été discutés dans la séance d'hier, mais sur lesquels il n'a pas été émis de vote.
« Art. 9. Les assemblées administratives feront faire une estimation des biens-fonds qui dépendent de chaque cure, et la jouissance en sera laissée aux curé6, jusqu'à concurrence du quart de leur traitement, et en déduction des sommes qui doivent leur être payées.
« Art. 10. Dans les paroisses des campagnes où les cures n'ont pas de biens-fonds, ou n'en ont pas dans la proportion qui vient d'être fixée, s'il s'y trouve des domaines nationaux, il en sera délivré aux curés, d'après l'estimation qui en sera faite, toujours jusqu'à concurrence, et en déduction du quart de leur traitement. »
, rapporteur. Messieurs, le comité ecclésiastique s'inspirant des objections qui ont été présentées hier, sur les articles 9 et 10, m'a chargé de vous proposer de leur substituer un article unique, qui serait ainsi conçu :
« Dans toutes les paroisses de campagne où il y a des fonds de terre attachés à la cure, il en sera laissé au curé un arpent, le plus près de son habitation, pour lui tenir lieu de jardin et verger. »
Cet article est en contradiction formelle avec les précédents décrets qui portent qu'à l'avenir le clergé ne pourra posséder aucuns biens-fonds. J'en demande le rejet.
Les décrets n'ont jamais dit que lés curés n'auront ni jardin ni verger, et l'arpent de terre qu'on vous propose de leur laisser, dans les immenses possessions qu'ils abandonnent pour le sâlut commun, n'entamera en rien le principe que vous avez posé.
Les abus s'introduisent par des brèches plus petites que celles qu'on nous propose de faire à nos principes. Je demande la question préalable sur les deux anciens articles,ainsi que sur l'article nouveau du comité.
consulte l'Assemblée qui décide qu'il n'y a lieu à délibérer sur les articles 9 et 10 et sur l'article nouveau.
, député TArmagnac, demande uu congé pour cause de maladie.
, député de Belfort, prie l'Assemblée de lui permettre de s'absenter pour motif de santé.
, député de Péronne, sollicite uu congé de quinze jours nécessité par des circonstances malheureuses où il se trouve.
Ces congés sont accordés.
L'ordre du jour est la discussion du projet de décret du comité des dîmes sur des pétitions relatives à la perception de la dîme, des champarts et autres redevances foncières payables en nature.
, rapporteur, annonce que, conformément aux intentions manifestées par l'Assemblée dans la séance d'hier au matin, le comité
des dîmes a rédigé le projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale, sur le rapport qui lui a été fait par son comité des dîmes de plusieurs pétitions tendant à ce que les redevables eussent la faculté de les payer en argént la présente année, au lieu de les acquitter en nature; instruite pareillement que, dans quelques endroits, un petit nombre de redevables, sans doute égarés par des gens malintentionnés, se disposaient à refuser de les payer, même à s'opposer à la perception ; instruite encore que quelques béné-liciers, corps ou communautés, ne se disposaient point à les percevoir, e( ne donnaient pas les soins nécessaires aux biens qu'ils sont provisoirement chargés de régir ; a décrété et décrète ce qui suit :
* Art. !»'Tous les redevables de la dîme, tant ecclésiastique qu'inféodée seront tenus, conformément à l'article 3 du décret des 14 et 20 avril dernier, de la payer, la présente année seulement, à qui- de droit, en la manière accoutumée; c'est-à-dire en nature et à la quantité d'usage, sauf l'exécution des abonnements en argent, constatés par titres, ou volontairement faits.
« Art.2. Les redevables des champarts, terrages, arrages, agriers, complans, et de toutes autres redevances payables en nature, qui n'ont pas été supprimées sans indemnité, seront égàlement tenus de les payer la présente année et les suivantes, jusqu'au rachat, en la manière accoutumée, c'est-à-dire en nature, et à la quotité d'usage, sauf l'exécution des abonnements contractés par titres, ou volontairement faits, conformément aux décrets sur les droits féodaux, des 15 mars et
3 mai derniers.
«Art. 3. Nul ne pourra, sous prétexte de litige, refuser le payement de la dîme accoutumée d'être payée, ou des champarts, terrages, agriers» complans ou autres redevances de cette espèce, aussi accoutumées d'être payées, et énoncées dans l'article 2 dudit décret du 15' mars dernier, sauf à ceux qui se trouveront en contestations, à les faire juger : ce qu'ils ne pourront faire, quant aux dîmes et champarts nationaux, que contra-dictoirement avec le procureur-syndic du district ; et en cas qu'il soit décidé que ces droits, par eux payés, n'étaient pas dus, ils leur Seront restitués.
«Art. 4. Ceux qui n'auraient pas payé la dîme eu les champartsl'année dernière pourront être actionnés, lors même qu'il n'y aurait pas eu de demande formée dans l'année.
« Art. 5. Défenses sont faites à toutes personues quelconques de porter aucun trouble à la perception de la dîme et des champarts, soit par des écrits, soit par des discours, des menaces, voies de faits ou autrement, à peine d'être poursuivies, comme perturbateurs du repos public. Êù cas d'attroupement, pour empêcher ladite perception, il y aura lieu de mettre à exécution les articles 3,
4 et 5 du décret du 23 février dernier, concernant la sûreté des personnes, celle des propriétés et la perception des impôts ; et les municipalités seront tenues de remplir les obligations qui leur sont imposées par lesdits articles, sous les peines y portées.
Art.6. Les municipalités seront tenues de surveiller, soit la perception des dîmes, soit l'administration des biens nationaux, chacune dans son territoire. En conséquence, dans le cas où dès bénéficiera, corps ou communautés ne pourraient exploiter tes dîmes et les autres biens qui ne sont pas affermés, ou négligeraient de le faire, elles seront tenues de les régir; ou de les donner
à bail pour la présente année, et de rendre compte des produits au directoire du district : elle pe pourront cependant empêcher l'exécution d'au* cun bail à ferme, sous prétexte qu'il ne doit commencer à courir que de la présente année.
«Art, 7. En cas de dégradation et d'enlèvement d'effets mobiliers, bestiaux et denrées, les municipalités en dresseront procès-verbal et én feront leur rapport au directoire du district, pour être fait telles poursujtes qu'il appartiendra.
« Art. 8. Aucuns bénéficiera, corps, communautés séculières et régulières de l'un et de l'autre sexe, fabriques, hôpitaux, maisons de charité, ou autres établissements publics né pourront refuser de faire la déclaration de leurs biens, prescrite par le décret du 13 novembre dernier, ni s'opposer à l'exécution de l'article 12 du décret des 14 et 20 avril suivants, qui ordonne l'inventaire de leur mobilier sous quelque prétexte que ce soit ; et dans le cas où les districts ne seraient pas formés, les municipalités sont autorisées à y pro -céder jusqu'à ce qu'ils lé soient. L'ordre de Malte demeuré seul excepté de la disposition concernant l'inventaire, mais chacun des membres qui la composent sera tenu de donner sa déclaration des biens dont il jouit en Franee, conformément audit décret du 13 novembre dernier .
« Art.9. Sera le présent décret présenté sans délai à la sanction du roi, et Sa Majesté sera suppliée de donner les ordres convenables pour sa plus prompte exécution. Le rapport du comité sera imprimé, et les membres de l'Assemblée sont invités de l'envoyer avec le présent décret à leurs commettants, sans délai.
(de Saint-Jean-d'Angely) propose de retrancher du décret tout ce qui concerne l'ordre de Malte afin de ne rien préjuger à son égard.
, ourê de Souppes, fait observer que les peuples ne se sont refusés à payer les champarts que parce qu'on n'avait pu leur représenter ie titre primordial qu'ils se croyaient en droit d'exiger des propriétaires ; il demande que le décret exempte formellement les propriétaires delà présentation de ce titre primordial.
déclare que le décret du 15 mars stipule nettement cette clause, puisqu'il y est dit que deux reconnaissances énonciatives d'une troisième suffisent pour faire valoir ce droit. Il est donc inutile d'introduire dans le décret une clause qui ne servirait à rien.
La discussion est fermée.
Le décret est easuite adopté dans son ensemble et sans changement.
fait dov,ner Içctiire, ainsi qu'il suit, d'une lettre et d'un rapport qui lui ont été adressés par premier ministre dos finances r
«Bi e
« Monsieur le Président,
« J'avais demandé à tous les receveurs particuliers des pays d'élection et des pays conquis, au nombre de 211, de m'adresser l'état de leurs recouvrements sur l'exereiee 1790 et l'ayant reçu de leur part presque en entier, j'en ai fait faire le dépouillement et je l'ai résumé dans un tableau que j'ai l'honneur d'adresser 4 rassemblée. Les receveurs lui enverront dorénavant directement la
suite de ces renseignements, parce que l'Assemblée a jugé à propos d'adopter cette forme.
« J'ai l honneur d'être avec respect, Monsieur le Président, votre, etc. »
Rapport envoyé a l'Assemblée nationale parle premier ministre des finances pour demander que la caisse d'escompte soit autorisée à verser pou,r trente millions de billets au Trésor royal. ^
Le
Messieurs, le comité des finances demandera aujourd'hui ou demain à l'Assemblée nationale l'autorisation nécessaire pour faire verger au Trésor public un flouyeaq secours en billets de la caisse-d'escompte portant promesse de fournir en remplacement des assignats ; et comme aux diverses époques où de pareilles réquisitions ont été faites, on a montré, dans l'Assemblée nationale? une sorte de surprisé, je crois convenable de lui présenter à l'avance, quelques réflexions sur ce sujet.
Le tableau des regsoures et des besoins de l'État, peudant le cours des hpit derniers mois de cette année, a fait connaître que la totalité des 400 millions de billets-assignats devenait nécessaire? et PQttr s'acquitter envers la caisse d'escompte des 170 millions qui lui sont dus? et pour rembourser les anticipations, et pour payer dans le cours de cette année deux semestre? des rentes sur l'HOtel-aë-Ville/ét pour satifaire aux dépenses extraordinaires, et pour subvenir enfin à l'excédent de,s dépenses fixes, sur les revenus fixes, tant que le niveau ne sera pas entièrement rétabli.
Si donc les 400 millions de billets-assignats sont indispensables pour satisfaire aux divers besoins de : l'année* il est évident que, chaque mois et chaque jour» il faut pouvoir disposer d'une portion de ces billets, et tant qu'ils ne sont pas faits on s$ trouve dans la nécessité d'y suppléer par des promesses d'en fournir.
Ce n'est donc pas un prêt qui a été demandé à la caisse d'escompte, lorsqu'à trois reprises différentes ellp/a été autorisée par vos décrets à délivrer chaque fois, au Trésor public, pour vingt millions de pareilles promesses ^ elle n'est intervenue dans cette affaire que par sa signature, et l'on a préféré la sienne à toute autre, parce qu'elle était pins. connue-
Ces promesses de la caisse d'escompte, une fois considérées comme les assignats mêmes, la demande qui vous en est faite, au nom du Trésor public, ne paraîtrait susceptible d'objections, qu'autant que cette demande surpasserait les besoins réels, ou gu mois» ou de la semaine, selon que vous jugeriez à propos de diviser la délivrai-son de ces promesses ; or, votre comité des finances est en état de vous éclairer parfaitement sur ce point, puisque toutes les semaines il reçoit le bordereau des recettes et des dépenses du Trésor public.
L'Assemblée nationale peut, d'ailleurs, juger elle-même, par un compte d'application bien simple, qu'une demande chaque mois de 20 à 30 millions d'assignats est parfaitement naturelle.
il fallait, selon l'état spéculatif des recettes et des dépenses des huit derniers mois de cette année, 38Q millions d'assignats pour établir l'équilibre entre les Unes et les autres.
Déduisant de eette somme 170 millions destinés à l'acquittement de la créance de la caisse d'escompte,
Reste à disposer, pour les autres besoin? du Trésor public, 210 millions.
Laquelle somme* divisée par huit mois, à commencer du Ie* mai dernier, fait 26,250 livres par mois.
Or, depuis cette époque du tar mai, jusqu'à ce jour, il y a eu 40 millions de ces promesses d'assignats remis au Trésor public, ce qui n'excède pas la proportion de 26 millions par mois.
Cependant, il ne serait pas extraordinaire que le Trésor public eût besoin d'une plusjforte somme d'assignats dans ces premiers mois que dans les derniers de l'année \ car, ni lés recettes ni les dépenses ne sont partagées également entre tous ces mois- Les dépenses ne le sont Pas parce qu'on ne se ressentira que successivement des économies déterminées par vos décrets ; les recettes ne le sont pas non plus, parce que, d^ns cet instant, ii n'y a qu'une très modique somme versée au Trésor public pour la contribution patriotique, et parce que les recouvrements de l'imposition destinée au remplacement delà gabelle, des droits sur les cuirs, sur l'amidon, les huiles et les fers, ne peuvent être mis en action qu'au moment ou vous aurez fixé la répartition de cette imposition entre les divers départements ; ce qui n est pas encore effectué.
Lors de la dernière demande de 2Q millions, qui vous a été faite pour le secours du Trésor public, l'Assemblée nationale a paru croire que la cause de ce besoin provenait, en grande partie, du retard de paiement des impositions directes, et vous avez décrété que les receveurs dés tailles vous adresseraient le bordereau de. leurs recouvrements.
Perqaettes-moi de vous observer. Messieurs, que le retard du paiement des impositions directes ne fait point partie des besoins de cette année ; car Qn a passé les impositions en plein dans l'aperçu de finance qui vous a été présenté pour les huit derniers mois de l'année, et l'on a dû le faire, puisque les receveurs généraux, à peu d'exceptions prés, ont satisfait jusqu'à présent aux engagements qu'ils avaient pris avec le Trésor public pour le paiement, à tant p^r mois, du montant de la taille, des vingtièmes et de la capitation.
Les besoins d'un secours extraordinaire en assignats» pour les huit derniers mqis de f année, qérive dope de toute antre cause j et pour vous montrer çétte vérité d'un coup d'oeil, il me suffi* ra de citer quatre articles gui, à eux seuls, indiquent un besoin extraordinaire de 32 millions par mois.
Ces quatre articles, sont :
Les anticipations à rembourser, objet par mois de près de i1 mil lioUSi
Les aqtrea dépenses extraordinaires, composées de plusieurs articles détaillés dans le tableau spéculatif des huit derniers mois de cette année, forment, par mois, un objet de 7 millions.
Le fonds, applicable aux rentes sur l'Hôtel-de-Ville pour l'acquit de deux semestres d'ici à la fin de l'année, occasionnera, par mois, une dépense extraordinaire, d'environ sept millions.
La diminution du produit des impôts indirects, compte fait des recouvrements à espérer cette année de l'imposition établie en remplacement de la gabelle, du droit sur les cuirs, etc., forme un vide, par mois, d'environ 7 millions. I 11 n y a, pour suppléer à ces divers besoins ; extraordinaires» en articles remarquables, que ! les assignats et la contribution patriotique ; mais 1 le produit de cette dernière ressource ne peutêtre
évalué qu'à 5 ou 6 millions par mois, à compter du 1" mai jusqu'au 31 décembre.
Vous ne serez donc pas surpris, Messieurs, si chaque mois, chaque jour, il faut un secours en assignats, et si, en attendant leur confection, il est nécessaire de faire usage de billets de la caisse d'escompte, portant promesse de fournir ces mêmes assignats.
Tous les papiers qu'exige la fabrication des 400 millions sont maintenant à Paris, ou arrivent journellement, l'impression va commencer; le travail du graveur, destiné à revêtir les assignats de l'empreinte du roi, touche à son terme; les personnes qui doivent signer ces billets sont nommées : ainsi, selon toute apparence, avant trois semaines, il y aura une première distribution de ces assignats ; et l'on ne peut rien ajouter au zèle actif des membres du comité des finances qui se sont chargés de veiller sur tous les détails d'une opération si importante.
Je l'avais bien prédit : — eh 1 que je connais le renard 1
(On rit.)
Je demande que tous les vendredis on nous donne connaissance du bordereau de situation du Trésor royal; que le premier vendredi de chaque mois on mette sous nos yeux l'état de la recette et de la dépense générale, et des assignats employés. J'observe que si les assignats sont mis en circulation progressivement et non en masse, il en résultera, sur les intérêts, une économie de 7 à 800,000 livres.
J'ajoute qu'il est impossible de rester dans le désordre où nous sommes : on ne nous présente pas en recette les recouvrements à faire sur les impositions des années passées.
, rapporteur du comité des finances. Le premier ministre des finances a remis hier ce mémoire au comité : la somme de 30 millions, qui est demandée n'est point un emprunt additionnel ; mais c'est un emploi des assignats suivant la destination que vous leur avez donnée. Le comité des finances vous propose le projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale décrète que les administrateurs de la caisse d'escompte seront autorisés à remettre au Trésor public une somme de 30 millions en billets delà caisse, portant promesse d'assignats, lesquels seront échangés avec des assignats-monnaie lors de leur émission. »
Je ne m'élèverai pas contre l'anticipation d'assignats demandée ; je sais que le service de l'année exige des dépenses auxquelles le Trésor public ne peut suffire. Pour vous fixer sur un objet non moins important, je répéterai ce que j'ai dit, que jamais aucune question de finance n'a été traitée dans son universalité. Il est temps enfin, après quatorze mois, que les députés puissent présenter à la France la situation de ses affaires. Daignez considérer que la marche que l'on présente toujours est partielle et bornée. S'agit-il de dépense, on nous offre non des états, mais un aperçu ; s'agit-il de rentrée de fonds, on nous apporte la recette du dernier mois. Jusqu'à
{irésent, le ministre n'avait correspondu qu'avec a Chambre des comptes ; cette forme ministérielle a mis hors de la voie qui doit nous être ouverte. Il semblerait qu'un compte fût impossible à rendre; il semblerait que le premier ministre des finances, qui a bien le temps de faire des bro-
chures contre des particuliers, contre moi par exemple, ne puisse pas se livrer à ce travail : puisque la multitude de ses opérations ne l'empêche pas de s'occuper de ces détails, il trouverait bien le temps, malgré sa mauvaise santé, de nous donner des instructions précises sur nos finances. Je propose donc qu'il soit tenu de nous présenter, dans le plus court délai, trois mémoires particuliers de calculs : le premier renfermera l'état de la recette, le second celui de la dépense et le troisième celui de la dette ; on ne reçoit pas, on ne paye pas, on ne doit pas au hasard ; ces calculs doivent donc être faciles, ils doivent donc être faits. Vous voyez que ces trois comptes sont les flambeaux qui doivent répandre la lumière sur les finances, jusque-là nous ne pourrons faire un pas dans cette carrière. Si nous ne connaissons pas l'état de la recette, comment établir les impôts directs et indirects ? Sî vous ne connaissez pas la dépense, vous ne pouvez prescrire les économies. Tant que vous ne connaîtrez pas la dette, les finances seront toujours un dédale impénétrable dans lequel vous ne pourrez rien apercevoir. La route que je vous propose est celle de la simplicité, de la vérité, de la loyauté : vous ne jugerez plus par des estimations vagues. Si l'on vous eût dit, au commencement de 1 année, que la dépense extraordinaire de cette année devait monter à 389 millions, on vous aurait épouvantés : mais on vous a dit qu'on a 11 millions d'excédent, parce qu'on a à manger 400 millions d'assignats. (Il s'élève des murmures.)
Quand je dis que les dépenses extraordinaires sont de 389 millions, je ne dis pas qu'on les gaspille : je sais bien que c'est pour rembourser la caisse d'escompte, les anticipations, les semestres arriérés des rentes ; mais, sans attaquer la légitimité de cet emploi, j'observe qu'il serait digne de l'attention de l'Assemblée de considérer que l'extinction de la créance de la caisse d'escompte et des anticipations va engloutir une ressource que vous ne pourrez pas toujours avoir. Vous êtes appelés non seulement à rétablir l'ordre dans les finances, mais encore à l'assurer pour toujours. Sans être juge des lumières des membres de l'Assemblée nationale, j'assure que je me suis occupé avec soin des finances, et qu'il m'a été impossible d'en connaître l'état : ce n'est cependant que lorsque vous l'aurez connu que vous pourrez statuer définitivement. Je demande donc que le premier ministre des finances soit tenu de nous présenter, dans lë plus court délai, trois états certifiés par lui : l'un de la recette, l'autre de la dépense, et le dernier de la dette.
(Ce discours est vivement applaudi.)
L'Assemblée ajourne à demain la motion de M. l'abbé Maury.
La séance est levée à trois heures un quart.
Motion de M. Malouet contre les libellistes (1).
J'ai demandé qu'il soit donné ordre au procu-
reur du roi d'informer contre les calomniateurs anonymes, contre les auteurs connus et les colporteurs d'écrits calomnieux ; j'ai dénoncé particulièrement à l'Assemblée nationale l'auteur des révolutions de France et de Brabant; j'ai exposé les motifs de cette dénonciation ; je veux les développer de nouveau, car je n'abandonne point ma motion ; et en attendant que l'Assemblée veuille bien s'en occuper, j'invite ceux de mes collègues qui voudront bien se joindre à moi, à provoquer le ministère public qui serait coupable de se taire si les lois elles-mêmes et les tribunaux ne sont pas impuissants contre tant d'audace et d'atrocité. Or, c'est ce qu'il faut découvrir à la nation, afin qu'elle ne se doute pas de l'impuissance des lois et de l'audace des hommes corrompus.
Il n'est personne qui ne sache avec qu'elle indignité le roi et la reine sont traités par l'auteur des révolutions de France et de Brabant, cet homme de sang qui s'honore du titre de procureur général de la lanterne ! Si je ne répète point ici ses expressions, si je ne les ai pas citées dans la tribune, c'est pour ne point la profaner; c'était pour ne point exposer la majesté royale à un nouvel outrage ; car c'en eût été un que de ne pas la venger sur-le-champ.
Hier et avant-hier on a publié à grands cris dans toutes les rues : Conspiration des catholiques de Nîmes ; relation d'assassinats commis par eux ; et on lisait, en effet, dans les imprimés des faits, des détails horribles que le pauvre dans sa chaumière transmet aujourd'hui à ses enfants, que l'artisan raconte à son voisin. On devait juger le soir les catholiques de Nîmes.
Et les misérables qui publient ces horreurs, qui lès répandent dans tout le royaume savent bien que lout était paisible à Nîmes.
Ce matin, nous avons entendu crier aux Tuileries : Vol fait par M. le vicomte de Mirabeau. On lisait qu'il avait fait tirer sur le peuple, qu'il y avait eu douze cents hommes de tués, etc.
C'est ainsi qu'on a fait assassiner MM. de Voisins, de Beauffet, et tant d'autres. C'est en épouvantant le peuple, en l'irritant, en dépravant ses mœurs, que des scélérats veulent le former à leur image afin qu'il y ait impunité pour tous ; et , dans tous les partis, dans tous les systèmes, d'infâmes libelles se publient chaque jour, mais avec cette différence que ceux dirigés contre ce qu'on appelle des aristocrates sont aes arrêts de mort parce que toutes les haines, tous les soupçons au peuple n'ont aujourd'hui d'autre aliment. Malheureux ! qui vous assure que demain il n'en sera pas autrement ? Vous parlez de liberté ! c'est celle des tigres et des lions déchaînés dont vous nous donnez l'affreux spectacle. Et quelle société put jamais subsister dans cet état de guerre atroce ? Depuis la découverte de l'imprimerie, depuis que des milliers d'hommes se sont réunis dans une même enceinte sous le titre de concitoyens, jamais on avait entendu ces proclamations effrayantes de calomnies meurtrières qui se renouvellent tous les jours dans Paris, à la porte des magistrats, dans les places publiques: on diffame les représentants de la nation, les princes, les ministres ; et dans l'Assemblée même nous entendons, de nos bancs, crier dans les tribunes : calotins, aristocrates, mauvais citoyens.
Gomment se peut-il que les magistrats se taisent sur tous ces crimes, et que le Corps législatif soit insensible à une dégradation aussi effrayante des mœurs publiques ? On nous parle de régénération 1 Et que pourrons-nous régénérer, si nous
laissons attaquer le corps politique jusque dans les sources de sa vie ?
Que serait-ce si les diffamations, les libelles, les accusations calomnieuses étaient tolérées comme moyens de révolution, de même que l'incendie des châteaux, et les violences exercées contre les prêtres et les nobles ? Mais alors'je dis qu'il est impossible aux amis les plus ardents de la liberté pourvu qu'ils soient vertueux, d'être les coopérateurs d'une révolution qui s'exécute par de tels moyens ; il n'est point d'âme honnête qui puisse composer avec le crime, qui en souffre l'approche, qui s'en permette l'emploi même pour arriver au bien. Citoyens, ouvrez-do ne les yeux ! Quelle horreur n éprouveriez-vous pas pour un brigand qui, posté sur un grand chemin, égorgerait les voyageurs qui viennent du Nord, et prêcherait la liberté, l'amour de la patrie à ceux qui viennent du Midil Tels sont les libel-listes, les calomniateurs à gages, et ce tas de séditieux qui se disent amis du peuple, vengeurs du peuple, et que vous devez considérer comme vos plus dangereux ennemis.
Citoyens 1 celui qui en accuse un autre hors de la présence du juge, et qui se cache, est un infâme ; mais celui qui calomnie en se nommant qui calomnie avec audace, avec impunité, qui vous excite à la haine, à l'effusion du sang, qui prodigue ses outrages aux personnes les plus augustes ; celui-là vous avertit que tout vous manque à la fois et les lois et les mœurs, qu'il est seul libre au milieu de vous et que vous ne l'êtes pas d'échapper à ses fureurs. Voulez-vous, au contraire, connaître un véritable ami du peuple ? Descendez dans votre conscience ; rappelez-vous les douces, émotions qu'excitent en vous la pitié, la bienfaisance, le respect pour la vertu, pour les droits d'autrui, l'indulgence pour les erreurs : c'est à ces. traits touchants que sont marqués les discours et les actions des vrais amis du peuple, les seuls auxquels il devrait être permis de parler de ses droits et de ses devoirs.
Mais les méchants, les hommes corrompus qui distribuent des poisons et des poignards, qui vous disent : pei'sccutezj massacrez, en vous parlant de patrie et de liberté l Ah ! détournez vos regards de ces êtres malfaisants et de leurs œuvres d'iniquité ; que vos oreilles se ferment à leurs paroles impies ; appelez, éveillez le magistrat qui sommeille, et qui vous doit protection contre cette invasion du crime dans vos cités, dans vos foyers ; accusez le magistrat s'il chancelle, s'il balance à faire son devoir ; soyez libres enfin en méritant de l'être. Je sais tout ce que l'on dit gravement pour différer une loi pénale sur la licence de la presse ; mais quoi I les outrages, les atrocités qu'elle produit aujourd'hui, ne peuvent-iis être réprimés que par une nouvelle loi ? N'existe-t-il pas de code des délits et des peines? Le calomniateur, le séditieux, l'assassin, n'auraient-ils plus de frein?
Quant à la nouvelle loi, je n'en dirai qu'un mot ; il n'est point d'injustice et de tyrannie contre lesquelles un citoyen n'ait le droit de réclamer librement; il n'est point d'écrit qui puisse être censuré, lorsqu'il n'offense pas un tiers. Voilà la liberté qu'il nous importe de conserver. Mais il n'est point d'atteinte portée aux lois, aux mœurs publiques, à l'honneur, à la sûreté d'un citoyen, que la société tout entière ne soit intéressée à venger.
Je persiste dans ma dénonciation.
MALOUET.
Pi S» -— Si, parmi tant de libellâtes, je n'ai dénoncé que le sieur Camille Desmoulins, c'est parce qu'en montant à la tribune un de mes collègues m'a montré son dernier numéro. lEen est beaucoup d'autres aussi coupables et je n'ai point à me plaindre ae celui-ci. ïl n'a jamais parlé de moi qu'avec éloges ; car, de la part de tels hommes, les injures sont des éloges.
ministre de la marine (1).
Nota. Dans la séance du
(J. M. etBi L.)
PREMIER CHEF DE DÉNONGIATIONT
Refus obstiné de lèttrés de convocation à la colonie de Saint-Domingue.
Dès le mois d'avril 1788, Saint-Domingue, averti des dispositions annoncées par le roi de convoquer bientôt les Etats généraux de son royaume, avait éprouvé un mouvement qui ne tarda pas à se propager dans toute la colonie. De bons citoyens s'assemblèrent) illioitement peut-être, mais non illégalement* Ils firent des réflexions sages sur leur position. Ces réflexions circulèrent ; des comités se formèrent, ils s'accrurent; enfin, presque tous les propriétaires de la colonie réclamant l'union de leurs CompatriotéB résidant en France, leur adressèrent des mémoires, des doléances et des pouvoirs très étendus, à l'effet de nommer des commissaires qui pussent s'occuper efficacement de solliciter le souvenir du monarque,.et des lettres de convocation pour la session des États généraux qui devaient prochainement s'ouvrir.
Les coions résidant en France, animés d'un enthousiasme patriotique, se coalisèrent avec Geux qui résidaient à. Saint-Domingue. Un grand nombre de ceux de Paris, de tous les ports et de toutes les provinces, se réunirent eh.personne ou par adhéèion, et élurent neuf commissaires, tous propriétaires dans ia colonie, auxquels ils donnèrent, pour instruction principale, celle de procurer à Saint-Domingue une ad mission solennelle dans cette assemblée si désirée, d'où devait sortir la liberté et Je bonheur de la France .Vous jugerez. Messieurs, si nous avons rempli notre mission; mais vous n'imagineriez jamais les obstacles renaissant sous
* (1) Le Moniteur s'est borné à mentionner cette dénonciation «an» eu insérer le texte,
. nos pas, dont il nous a fallu sans cesse triompher
I pour parvenir jusqu'à vous. Cependant nous
I n'avions qu'un seul contradicteur, qu'un seul ennemi, le ministre de la marine; lui, par état, notre protecteur; notre soutien, notre .appui. Ët remarquez pourtant, Messieurs, combien il est essentiel que je vous prouve que toutes ses démarches Rendaient à nous fermer le sàdctuaire de la vérité ; car, si je parviens à vous le démontrer) il sera clair alors* ou qu'il avait conçu le projet de conserver sur nous son tyrànnicjue empire, et de régner seul parle despotisme au milieu d'une nation libre désormais, ou qu'il craignait que nos voix ne se fissent entendre et ne révélassent des secrets qu'il lui importait de cacher. Eh bien ! Messieurs, je vais vous prouver jusqu'à l'évidence cette proposition importante. Le 4 décembre 17^8, nous nous présentâmes au ministre de la marine avec des pouvoirs revêtus de plus de quatre mille signatures de toutes les parties de l'île et détourés les provinces de France. Il ne voulut ni les are ni même se prêter à regarder lés signatures.
Nous lui remimes une lettre pour Sa Majesté et une pohr luis toutes deux explicatives du vœu de nos commettants, celui d'être appelés aux Etats généraux, et pas autre chose; il les lut, se récria, dit qu'il était trop tard, et nous remit à quinzaine.
Nous fûmes exacts; il.nous assura qu'il avait remis notre lettre à Sa Majesté, qu'il , en avait fait le rapport à son conseil le il du même mois, ét que le conseil avait prononcé. Quo%> s il vousplaii, Monsieur le comtel-^C'est, Messieurs, ce que vous ne saurez jamais. Le roi me l'aidé fendu ; c'est le secret de l'Etat. Ge n'était pas ie secret de l'Etat: le.roi ne l'avait pas défendu ; mais le fait est que nôus ne l'avons jamais su, et que nous l'ignorons encore. Avec de semblables décisions, un ministre demeure maître de ia campagne, et un royaume entier reste dans les fers du despotisme. Nouvelles lettres de notre part au roi et à tous les ministres. Toutes sont renvoyées à M. le comte de La Luzerne, et le secret de l'Etat, qui veille autour de lui, empêche l'espérance même de transpirer jusqu'à nous»
Deux mois se passent dans cette anxiété. Lee notables sont assemblés, et tout aussitôt les colons se présentent devant eUx avec ieurs pouvoirs, leurs, instructions et leur ignorance sur le secret de l'Etat. Une liste de questions avait été envoyée aux notables par le conseil du roi. Peu sans doute étaient aussi importantes que celles dont nous demandions la solution; .elle n'avait point été omise sans dessein. Cependant elle parut d'une telle conséquence à tous les présidents des bureaux, qu'ils Voulurent tous la traiter, qu'ils nous l'écrivirent, et qu'ils s'en occupèrent. Une défense ministérielle vint enchaîner leur patriotisme, et nous empêcher de découvrir le secret de l'ûtat.
Ainsi renvoyés de toutes parts au ministre, et toujours repoussés par ie ministre, au moment où la liberté surgissait de toutes parts, nous fûmes les derniers jouets du despotisme ; et si M. le comte de La Luaerne fut coupable de n'avoir point appelé les colons français, comme les Gorses, à l'assemblée de la grande famille, il fut plus coupable d'avoir repoussé le vœu bien prononcé de Saint-Domingue,lorsquequatremille propriétaires le faisaient entendre, et qu'il ne lui était pas possible, dans sa conscience, de douter de l'évidente majorité de ce vœu contre lequel l'intrigue n'avait pas encore soulevé un seul opposant. Enfin, il fut plus coupable encore d'avoir suscité contre
les justes et patriotiques demandes des colons, les ministres ses collègues, le conseil du roi et les notables; d'avoir étouffé les voix plaintives d'un peuple malheureux; de lui avoir soigneusement fermé toutes les avenues du trône ; de l'avoir placé dans la dure alternative, ou de ployer la tête sous le joug, ou de la relever par une insurrection qui pouvait avoir des suites dangereuses, et de n'avoir eu d'autres motifs de tant d'oppositions, que le désir de conserver dans les deux mondes un empire tvrannique, absolu, arbitraire, auquel je conviens qu'il est pénible de renoncer quand on en a fait le principe de son cœur et l'habitude de sa vie*
Pour prouver, Messieurs, combien le vœu des colons était énergique et combien sa vérification était facile, je ne puis miéux faire que de laisser mes commettants eux-mêmes se servir, en votre présence, des mêmes expressions qu'ils ont adressées tant de fois à M. de La Mardelle, procureur général; à M, de Marbois, l'intendant, et par notre organe et leurs écrits, à M. le comte de La Luzerne, ministre, qui nous a toujours écoutés, mais qui n'a jamais voulu nous entendre.
Les pièces originales vous seront communiquées en nature, et vous seront lues par extrait quand voUs l'ordonnerez. — Signé : Ghabanon, Courrejolles, Regnaud, Laborie, Rouvray, Magal-lon, le comte de Marmey, de Villeblanche, Coche-rel, de Thebaudière, le comte O'Gorman, le marquis de Perrigny et de Goqy d'Arey.
Collationné et cërlifié la présente copie conforme à l'original déposé au secrétariat du comité des rapports, délivré par noue, député, secrétaire dudit comité, cejourd'hui. Signé : Anthoine.
SECOND CHEF DE DÉNONCIATION.
Obstacle mis dans la colonie à la nomination de ses députés aux Etats généraux.
Tandis que le ministre de la marine nous fermait toutes les avenues du trône, considérons ce qui se passait dans son cabinet, et les fils qu'il faisait jouer depuis le mois de septembre 1788, jusqu'au moment de la Révolution. Le roi venait de lui donner pour successeur au gouvernement général de Saint-Domingue M. le marquis duC.*. Ce dernier emporta des instructions qu'il nous montrera, sans doute, et qui présenteront quelque intérêt aux commissaires que vous chargerez d'en faire l'examen ; je ne les ai pas vues, mais à en juger par les faits, elles étaient un peu despotiques : vous allez, Messieurs, les apprécier à l'instant. M. du C..*.* débarque à Saint-Domingue, le 24 décembre 1788, prévenu par M. de La Luzerne, et est accueilli par l'intendantMarbois; sans lui donner le temps de se reconnaître, ni de rien connaître, ce perfide collègue lui fait signer, le surlendemain, 26, une ordonnance qui n'était rien moins que la violation la plus évidente de tous les droits des citoyens et des nations, et qui devait le perdre dans l'esprit de la contrée qu'il allait gouverner, s'il n'eût bientôt reconnu son erreur, et prouvé, par sa conduite, qu'il n'était réellement pas coupable.
Le but de Cette ordonnance était, sous prétexte de condescendre au vœu des habitants, d'en rendre la manifestation impossible, et de contrarier d'autant plus efficacement les assemblées coloniales que le ministre craignait tant, et surtout les élections des députés dont l'admission parais-
sait si redoutable à ceux qui avaient de fortes raisons de ne pas laisser passer la vérité dans le continent.
Vous la verrez, Messieurs, cette ordonnance remarquable; elie permettait aux colons d'exprimer leurs, vœux pour ou contre une représentation aux États généraux ; et pour donner à cette déclaration toute la latitude possible, des requêtes écrites devaient être adressées aux administrateurs; cinq personnes seulement pouvaient signer chaque requête, la signature d'une sixième rendait nul le vœu des cinq autres. Plusieurs autres nullités devenaient autant de fins de non-recevoir; et comme ces manifestations libres se passaient par écrit et sous cachet, toute la colonie aurait souscrit ces requêtes quinaires, que les administrateurs auraient pu dire qu'ils n'en avaient pas reçu douze.
Malgré tous les soins que l'intendant se donna pour faire prévaloir son système, il eut bien de la peine à obtenir un résultat et encore ce résultat fut-il absolument contre son vœu.
Que fit-il? Muni du pouvoir législatif dont il était l'organe, soutenu dé pouvoir exécutif qui résidait dans la main du gouverneur, enfin, aidé du pouvoir judiciaire que dirigeait son procureur général, le sieur de Là M..., il imagina d'intimider, par l'abus de ce dernier, ceux qui n'avaient point été effrayés par l'exercice des deux autres. Le procureur général, le ministère public chargé de poursuivre les crimes pour conserver la vertu, menaça de dénoncer au tribunal souverain tous ceux "qui avaient émis un vœu Contraire aux vues de la Cour, de décréter lés coupables, de les faire arrêter, de les embarquer pour le continent, enfin de les traiter comme des scélérats, parce qu'ils avaient senti qu'ils étaient des hommes ; mais ce qui est le comble de la démence, c'est que, dans son aristocratique fureur, ce digne magistrat fut tenté de dénoncer aussi les neuf commissaires nommés pér les colons de France, en vertu des pouvoirs des habitants de la colonie : cette menace indiscrètement ébruitée, sauva une grande imprudence au sieur de La M.... ; il vit que cette violence ne prendrait pas, et il nous garda ses bonnes intentions pour une occasion prochaine.
informés de cette disposition vexatoire, qui n'aurait excité que notre mépris si elle n'eût pas compromis la liberté de nos compatriotes résidant dans l'île, noUs en portâmes plainte formelle à M. de La Luzerne. Loin d'improUver, il approuva, et noUs confirma ainsi dans l'opinion douloureuse que les tyrans de Saint-Dominique n'étaient que les agents de ses ordres arbitraires!
Cependant, nos députés furent nommés : revêtus des pouvoirs d'une grande colonie* chargés de ses griefs, ils s'embarquèrent à la vue et aux applaudissements de tout un peuple { mais ce succès fut dû tout entier à leur patriotisme, à leur énergie, et M. de La Luzerne n'en fut pas moins coupable d'avoir choisi des agents malfaiteurs, et de leur avoir donné des instructions de despotisme et de rigueur. Il fut plus coupable d'avoir employé ou secondé de petits moyens pour faire un grand mal à un peuple fidèle, qui se jetait tout entier entre les bras d'un souverain chéri qu'on dérobait aux empressements de ses sujets ; enfin, il fut plus coupable encore, après avoir connu, malgré lui et jusqu'à l'évidence, le vœu clairement manifesté de trois grandes provinces, de l'avoir soigneusement caché à notre bon roi, et d'avoir ainsi compromis jusqu'à son cœur, puisque, placé pour ainsi dire sûr les confins des doux hémisphères,
tandis que sa bienfaisance paternelle tendait une main paternelle à ses enfants du continent, M. de La Luzerne l'excitait à repousser impitoyablement, de l'autre main, ses enfants de l'Amérique et de l'Asie.
Pour vous prouver, Messieurs, combien d'astuces ont été employées contre nous,et à quel point des refus réitérés ont ulcéré la colonie, nous vous soumettons, suivant notre usage, et d'après des pièces originales, les œuvres du ministre et les plaintes de nos commettants.
Signé : Chabanon, Reynaud, Rouvray, Gourre-jolles, lechevalier de Marmey, Magallon.Laborie, de Villeblanche, Cocherel, le comte O'Gorman, de Thebaudière, le marquis de Perrigny, de Gouy d'Arcy.
Collationné et certifié la présente copie conforme à l'original déposé au secrétariat du comité des rapports, délivré par nous, député, secrétaire dudit comité, cejourd'hui. Signé : Anthoine.
TROISIÈME CHEF DE DÉNONCIATION.
Etat enlevé à un citoyen estimable pour couvrir de ses dépouilles son calomniateur.
En 1874, le sieur B..., médecin du roi au Cap, citoyen généralement estimé pour ses lumières et respecté pour sa probité, passa en France pour quelques affaires. Lors de son départ, les administrateurs donnèrent sa place, par intérim, à un sieur A..., leur protégé.
B... revint en 1786 et reprend sa. place ; ce procédé déplut fort au sieur A... et à son protecteur. Quelque temps après, la femme du sieur B..., non commune en biens avec son mari, achète le magasin de l'apothicaire du roi ; aussitôt A... se démasque, il dénonce auministre, en France, une incompatibilité révoltante entre deux places aussi disparates que celle d'apothicaire et de médecin : le ministre, qui ne veut pas décider entre Rome et Carthage, renvoie le mémoire aux administrateurs. Ces derniers, comme de juste, veulent s'éclairer, et, pour recevoir des instructions impartiales, M. de La Luzerne et son collègue chargent de cette mission le sieur A..., c'est-à-dire le compétiteur de B... : A... fait son rapport, et l'assaisonne de calomnies atroces contre B... et un autre citoyen dont le crédit ne pouvait nuire à ses vues. Sur ce rapport, au moins bien suspect, les administrateurs forcent B... à donner sa démission, et disposent, par intérim, de sa place en faveur du sieur A... ; B... obéit à la force, mais, à l'instant même, il se pourvoit au tribunal supérieur du Cap, et, de concert avec le citoyen lésé comme lui, ils demandent une réparation éclatante. La Cour souveraine prononceen sa faveur, et le sieur A... est condamné comme calomniateur. Ce jugement devait être une mauvaise recommandation pour obtenir d'un ministre la confirmation d'une place accordée par intérim ; mais, sur ces entrefaites, M. le comte de La Luzerne est appelé lui-même au ministère : en y entrant, il n'oublie pas ses créatures ; il fait casser, par un arrêt du conseil, l'arrêt si juste du tribunal souverain, et, oubliant qu'un arrêt du conseil ne lave pas un homme entaché, il consomme la spoliation du sieur B..., et, comme ministre et comme dispensateur suprême, il nomme définitivement A... à la place de médecin du roi, j
qu'il lui avait déjà conférée deux fois, par intérim, comme gouverneur.
Ainsi, dans cette affaire, M. de La Luzerne est coupable d'avoir, pour s'éclairer, consulté une des parties; il est plus coupable d'avoir abuséde l'autorité ministérielle pour sanctionner l'abus qu'il avait fait de son autorité comme gouverneur ; enfin il est plus coupable encore d'avoir, sans accusation, sans décrets, sans preuves, sans jugement, enlevé son état à un citoyen qui, depuis vingt-cinq ans, l'exerçait sans reproche ; d'avoir donné un désagrément injuste à un tribunal qui avait eu la force de n'écouter que son devoir, et d'avoir récompensé un calomniateur des dépouilles de l'innocent. Ce fait, Messieurs, est attesté par toute la colonie, prouvé par les registres du conseil supérieur du Cap, par ceux du conseil d'Etat, et par d'autres pièces qui vous seront présentées.
Signé : Chabanon, Courrejolles, Rouvray, Labo-rie, Magallon, de Thebaudière, Reynaud, le chevalier de Marmey, de Villeblanche, Cocherel, le comte O'Gorman, le marquis de Perrigny, et Gouy d'Arcy.
Collationné et certifié la présente copie conforme à l'original déposé au secrétariat du comité des rapports, délivré par nous député, secrétaire dudit comité, cejourd'hui. Signé: Anthoine.
QUATRIÈME CHEF DE DÉNONCIATION.
Citoyens vendus àun aventurier pour les puissances étrangères.
Vers les commencements de l'année 1787, un de ces hommes entreprenants, astucieux, déterminés, qui s'introduisent partout parce qu'ils sont sans pudeur, et qui tentent tout parce qu'ils n'ont rien à perdre, arriva à Saint-Domingue, et s'établit au Port-au-Prince; il s'appelait Vidal.
Je ne vous rapporterai pas, Messieurs, les motifs de cet homme, ni les détails de sa négociation; un voile épais a couvert des conférences très secrètes, et l'enquête que vous ordonnerez pourra seule percer ce mystère d'iniquité; tout ce que je puis vous exposer, ce sont les résultats. Vidal parut avoir obtenu en peu de temps la confiance intime de M. le gouverneur. Ce n'étaient qu'entrevues secrètes, que conférences dont le but était ignoré, et pendant qu'elles avaient lieu, il sembla que la police avait redoublé de rigueur.
La moindre rixe entre les citoyens, le plus léger soupçon d'ivresse était puni par une incarcération à laquelle on ne prit pas d'abord garde, mais qui s'expliqua facilement après l'événement. Quel fut l'étonnement de tous les habitants, lorsqu'au mois de mars 1787, après bien des entrevues de Vidal et de M. de La Luzerne, les prisons s'ouvrirent, et qu'on en vit processionnel-lement sortir, à plusieurs reprises, quatre à cinq cents hommes blancs, marchant deux à deux, enchaînés, serrés par des menottes, et s'avançant tristement vers le port; plusieurs embarcations les attendaient; le fidèle Vidal ne les abandonna pas, et la petite flotiile fit voile pour Carthagène, Porto-Bello,; etc.
Elle jeta l'ancre auprès d'un fort situé dans la rade de l'une de ces possessions espagnoles, et nos cinq cents hommes blancs y furent débarqués. Quant à Vidal, il se rendit à terre, vit les
chefs espagnols, traita avec eux, termina ses affaires, et ne reparut plus. Peu après son départ, un détachement de troupes espagnoles fut introduit dans le fort, et la baïonnette au bout du fusil détermina, en peu de moments, nos cinq cents blancs sans armes à arborer la cocarde rougeetàs'engagerlibrementauserviced'Espagne.
Comme pourtant leur bonne volonté n'était pas encore éprouvée, on les pria de se soumettre à la précaution des menottes, et, sous une escorte convenable, on les conduisit ainsi, Messieurs, jusqu'à Quito, capitale du royaume de ce nom; là on leur ôta leurs chaînes, et on les incorpora avec les troupes qui gardent le pays.
Plusieurs étaient morts en chemin, de fatigue et de misère-, d'autres, pressés de ce besoin naturel par lequel l'homme s'élance vers la liberté, tentèrent de s'échapper de Quito, et désertèrent. On en arrêta beaucoup, qui, suivant la loi, furent envoyés aux mines; mais un petit nombre d'entre eux échappa aux recherches, et côtoyant les bords des Amazones ou de l'Orénoque, ils descendirent au milien de mille périls jusqu'à la Guyane et à Cayenne, d'où plusieurs sont revenus à Saint-Domingue.
C'est à ces victimes du despotisme que l'on doit le récit que vous venez d'entendre ; il est possible d'en révoquer en doute l'exactitude, mais il restera toujours un fait notoire et bien grave que je ne me suis pas permis de citer sans témoignage : c'est l'embarquement de quatre à cinq cents blancs privés de leur liberté, et chargés de chaînes sans jugements. Quels étaient-ils? où allaient-ils? M. de La Luzerne satisfera sans doute a ces questions: mais quand il rejetterait cette exécution arbitraire sur quelque ordre inhumain, iî fut coupable de ne s'être pas généreusement refusé à en être l'instrument; il fut coupable, s'il n'avait point d'ordre, d'avoir abusé de son autorité suprême pour se laisser aller aux insinuations criminelles d'un aventurier méprisable dont il devenait le complice; il fut plus coupable encore d'avoir dévoué à un bannissement éternel, et l'on peut dire à la mort, des Français réfugiés près de lui, sous la sauvegarde du droit des gens que son devoir lui prescrivait de faire juger s'ils étaient criminels, ou de ne pas punir s'ils étaient innocents.
Mille témoins nous ont dénoncé ce fait, dont la notoriété a soulevé l'indignation publique.
Signé : Chabanon, Laborie, Reynaud, Gourrejol-les,Rouvray, Magallon, le chevalier de Marmey, de Thébaudière, de Viileblanche, Gocherel, le comte O'Gorman, de Gouy d'Arcy.
Coiiationné et certifié la présente copie conforme à l'original déposé au secrétariat du comité des rapports, délivré par nous, député, secrétaire dudit comité, cejourd'hui. Signé : Anthoine.
CINQUIÈME CHEF DE DÉNONCIATION.
Arrêtement scandaleux d'un citoyen innocent et jugement arbitraire ét injuste.
Un ancien officier, qui, depuis plus de trente ans, servait le roi avec distinction en qualité d'ingénieur; qui, formé par de longues études, avait consacré une partie de ses loisirs à celle des finances; qui, chargé de plusieurs négociations importantes dans cette partie, avait été dans toutes couronné du succès; qui, dans la circonstance la plus critique de la dernière guerre, avait
su procurer à l'armée française trois millions de l'argent d'Espagne, sans lesquels l'armée, dénuée de tout, manquait absolument la belle et importante opération de New-York, sans laquelle l'Amâ-rique ne serait peut-être pas indépendante; qui aussi brave que bon calculateur, avait payé de sa personne, et conquis à la nation les îles tur-aues, près Saint-Domingue;.ce brave officier retiré du service, affranchi de tout assujettissement, désormais citoyen paisible, avait acquis un terrain au Cap sur lequel il imagina de construire cinq maisons, dont ies loyers devaient augmenter sa fortune et dédommager ses enfants ae celle que ses pères avaient sacrifiée au service de l'état.
Les bons et loyaux services qui lui avaient valu l'estime de toute la colonie n'avaient pu lui mériter les bonnes grâces du sieur Jauvin, commissai reordonnateur et créature de l'intendant Marbois, lequel s'était déclaré avec indécence l'instituteur de M. de La Luzerne qui le trouvait bon : cet agent subalterne laissa avancer la construction de ces cinq maisons, et quand le propriétaire eut versé dans cette bâtisse des fonds considérables ou pris des engagements importants.le sieur Jauvin lui fit signifier d'avoir à retirer ses ouvriers d'un terrain qui appartenait au roi.
M. de La Luzerne nomma des experts à la réquisition du plaignant, et comprit dans cette nomination le sieur Jauvin ; ies pièces et les plans furentmissousleursyeux,etaprès sévère examen, il se trouva, non pas que le citoyen avait usurpé sur le terrain du roi, mais que le sieur Jauvin, au nom du roi, avait empiété de soixante pieds sur le terrain du citoyen.
Cette découverte bien constatée mortifia singulièrement le sieur Jauvin, et dans le combat qui se livra dans sa conscience entre l'aveu d'une fausse imputation et la morgue de sa place, il s'oublia au point d'injurier cruellement, par uu démenti formel, un ancien officier auquel il aurait pu, sans se dégrader, faire quelques excuses.
L'offensé eut le mérite bien rare de la modération ; il ne se permit ni un geste, ni un propos ; mais il écrivit sur l'heure à M. de La Luzerne, pour le prier de lui faire faire une réparation convenable. Ce général ne se crut pas permis de prononcer, sans en référer à l'intendant son conseil. Mais l'honneur outragé ne compose pas avec lui-même; l'offensé insista auprès du général, et le général peu habitué à cette récidive, donna l'ordre, bien imprudent sans doute, d'arrêter le plaignant. Des grenadiers, commandés pour cette exécution tyrannique, vinrent en plein jour saisir, au milieu de ses ouvriers, un citoyen paisible, sur ce terrain même dont son seul crime était d'avoir prouvé, par ses titres, qu'il avait la propriété. Traîné au fort Picolet, une prison l'y attendait; il y entra avec son innocence, et au bout de cinq jours il en sortit avec tranquillité, pour être conduit avec scandale à bord d'une frégate qui le transporta à quatre-vingts lieues de chez lui, au Port-au-Prince, résidence des tyrans de ce malheureux pays.
En débarquant, une garde et des officiers-majors vinrent le recevoir, et le conduisirent avec appareil au palais du gouverneur. Un conseil de guerre était assemblé, et le vice-roi s'en était à lui-même réservé la présidence.
, Là parut comme un criminel, pour être jugé militairement, un officier citoyen qui s'était plaint d'avoir reçu une offense grave, et qui avait instamment réclamé la punition de l'agresseur. Cette scène, digne des nababs de l'Inde, s'ouvrit à huit
heures du matin, et dura jusqu'à une heure après midi» entre le prétendu coupable et les juges. Oh passa cinq heures entières à chercher un crime, et le soupçon d'une faute légère même ne se trouva pas; les six Officiers que le gouverneur s'était adjoints pour former ce tribunal extraordinaire rougissaient du rôle auquel on les avait associés ; les yéux baissés, n'osant ouvrir là bouche, ils attendaient avec embarras le dénouement. Le voici, Messieurs : M. le président du conseil» Mi le gouverneur» sans faire un tour d'opinions, sans prendre les voix, se lève* déclare que lé conseil de guerre est fini, et que l'accusé gardera pendant trois jours les arrêts !
Trois jours les arrêts! et c'était pour lui ordonner les arrêts» qu'on avait arraché de ses foyers avec éclat» qu'on avait enlevé à des affaires les plus intéressantes pour sa fortune, à des constructions commencées» qu'on avait resserré dans une prison, qu'on avait embarqué avec scahdalëi qu'on avait exposé dix jours aux dangers de la mer ét à sës incommodités, et qu'on avait fait comparaître» sans accusation, devant un tribunal imposant, un ancien serviteur du roi, un citoyen chéri» un homme estimé de tous ses compatriotes, pour lui dire : Vous n'aurez ni réparation ni justice.
Ainsi dans cet abus révoltant d'autorité, dont plusieurs témoins s'assoient parmi nous, et dont le plaignant lui-même a obtenu, pour y siéger, lë suffrage de ses compatriotes, M. de La Luzerne fut coupable d'avoir obstinément nommé pour arbitre un homme suspect et récusé; il fut plus Coupable de n'avoir pas osé punir une injure dans le favori de son favori, quand l'honneur exigeait cette satisfaction, et que la modération la réclamait de sa justice; il fut plus coupable encbre d'avoir attenté avec éclat à la liberté d'un citoyen, d'avoir mis sa vië en danger, sa fortune en péril» son innocence en doute; de lui avoir, avec opi«-niâtreté, refusé toute satisfaction de là part de son agresseUr» et de l'avoir» par un arrêiement arbitraire* puni très injustement; puisqu'en définitive, le tribunal arbitraire lui-même n'a pas trouvé matière à la plus légère punition.
Voilà mon récit, Messieurs; M. le chevalier de député de Saint-Domingue à l'Assem-
blée nationale» à qui nos armées d'Amérique ont dû un jour leur salut et leurs succès» est la victime que je viens de citer* Nob collègues en ont été les témoins, la correspondance dés parties en est la preuve* NoUs là soumettons à l'examen de vos commissaires. Signé :
Chabanon, Magalldn, Gôurrejolles» de ïhebaù-dière, Reynaud» de Villèblanche» Goeherel* La-borie» le comte 0 Gorman» fiouvray, le marquis de Perrigny» le chevalier de Marmey, et de Gouy d'Àrey>
Collationné et certifié la présente copie con* forme à l'original déposé au secrétariat du comité des rapports, délivré par nous* député, secrétaire ' dudit comité, ce jourd'hul. Signé i Anthoine,
SIXIÈME CHEF DË DÉNONCIATION.
Réunion désastreuse des conseils supérieurs dè Saint-Domingue.
M. le comte de La Luzerne,, lieutenant général des armées du roi nommé par le roi au gouvernement général de Saint-Domingue, est arrivé au
Port-au-Prince au mois d'avril de l'année 1786. Ses services précédents, les différents emplois qu'il aVait remplis, etle genre connu de Ses études favorites, n'avaient pas jusque-là dirigé son attention vers les intérêts commerciaux de la métropole et de nos colonies, vers les connaissances administratives de ces îles précieuses et éloignées, dont le régime ne nous prêsen te qu'un petit nombre d'analogies avec le système du gouvernement continental.
M. de La Luzerne voulant acquérir çe qdi iui manquait sur ce point, et connaître parfaitement toutes les parties d'uné contrée qui a deux cent cinquante liéues de côte* partit du Port-au-Prince au mois de décembre 1788; c'est-à-dire huit mois seulement après son arrivée, et sê rehdit au Caj3, la ville la plus intéressante dé la colonie et le siégé de son Commercé; il y demeura six jours ét retourna de suite au Port-au-Prince, dbht il ne fut pas absent quinzé joUrâ.
Quelques temps après, il toUrha ses pas vers lë sud dé la cplônié. G'ést là partie la plus délaissée jusqu'Ici, la moins prospère, là moins peuplée, ja moins avâncée èn culture ; belle enfin qui présente le plus d'âccroissemepts possibles et le pl.Us d'espoir de richesse. Cë voyage ne fut pas tout à fait Si long que le précédent, ét ces deux tournées de quinze jours, dëng une lie immense, furent les seules que fit le gouverneur pendant les vingt mois que dura son administration. Il ést vrai qu'ùnëopéràtion importante au ministère, méditée dès longtemps dans lë cabinet, redoutée dès longtemps par la colonie et à,laquelle elle rapporte tous les maux qui l'àccàblënt, occupa vivement M, de Là Luzerne, et dut Absorber beaucoup de ses moments. Nous allons vous offrir Un tabîëàu rac-doUrCi dé Ce désastreux événement.
Quelques années après l'époque ou Saint-Domingue se donna à Louis-le-Grand, ce prince, qui voyait dans la prospérité de cet établissement, la prospérité future de son royaume, voulut accorder à ses nouveaux sujets le plus grand des bienfaits sans doute : la justice qui peut seule maintenir la paix entre les membres, du corps social, ou terminer leurs différends II choisit pour la leur rendre des habitants intègres, qui se firent, en 1685, un honneur d'être les modèles d'un système judiciaire, à la pureté duquel vos décrets viennent de rappeler le nôtre. Ces pa-r triarch.es de la grande famille coloniale se firent un devoir de rendre gratuitement la justice, et ils ne voulurent recevoir du monarque que la patente honorable qui ies constituait en cour souveraine* Ce, tribunal établi d'abord au Petit-Goave, ensuite à Léogane, et depuis transféré au Port-au-Prince, fut pendant seize ans je seul,corps de magistrature supérieure de la colonie. Sa population peu considérable encore, la simplicité des affaires, la bonne foi des habitants, n'excédaient point les forces de leurs magistrats dont le zèle était â tOute épreuve.
Mais en 1701, les augmentations rapides qu'avait déjà éprbUVèës Salnl-Dbmingcte, ses Succès, son accrùissëmeht prodigieux, une 8faite de défrichements qui, dus à l'infatigable activité des colons, avaient fécondé plus de deux Cents lieues de côtëj multipliant les rapports» compliquant un peu les affaires, en étendant le nombre, il devint impossible au tribunal patriarcal de suffire aux besoins de tous les habitants ; et Louis XIV, pour rapprocher la justice dés justiciables qui s'étaient fort étendbs, établit au Cap Français un autre conseil supérieur sous le même mode que celui
qui jugeait au 'Port-au-Prince, et lui traça son ressort.
Ces deux cours rendirent constamment et gratuitement la justice jusqu'en 1766. Voici, Messieurs, le premier pas du despotisme vers nos contrées, alors trop heureuses. Leur prospérité croissante ayant peuplé une troisième province, les habitants firent des démarches pour obtenir l'érection d'un troisième conseil supérieur. Tandis qu'ils sollicitaient cette faveur utile* un sieur La M......
homme perdu de réputation dans la colonie, osa, par cupidité, engager M. le général de Castries a supprimer le conseil supérieur du Cap, à le réunir à celui du Port-au-Prince, afin que la place de procureur général de ce conseil inique lui valût le double et au delà de ce qu'elle lui rapportait. Il lui représenta que la colonie n'ayant plus qu'une seule cour souveraine, et cette cour siégeant dans la résidence ordinaire des administrateurs, il s'établirait bientôt entre elle et eux une liaison qui mettrait en peu de temps tous les colons dans une dépendance absolue du gouverneur.
11 l'assura que l'intérêt des habitants exigeait cette mesure, que moins il y aurait de tribunaux, moins il y aurait de procès; et par une de ces disparates qui semblaient alors indiquées en France, tandis que le chef de la magistrature, sous prétexte de rapprocher la justice des justiciables, créait dans le continent une multitude de grands bailliages, le ministre de la marine éteignait pour ainsi dire à Saint-Domingue le flambeau de la justice* en éloignant tellement les justiciables de son sanctuaire* que la plupart ne pouvaient y parvenir qu'après une route pénible et dangereuse de plus de quatre-vingts lieues.
M. de La Luzerne, prévenu de ce projet avant son départ, aurait pu en détourner l'exécution, si depuis le mois d'avril 1786, époque de son arrivée, jusqu'au mois de juillet 1787, époque de la suppression, il eût écouté le vœu des habitants» voulu s'occuper sérieusement de leurs intérêts, et si désabusant le ministre en i'éclairant» il lui eût fait sentir les dangers d'une disposition qui allait porter la désolation dans la colonie. En dépit du silence criminel qu'il garda sur un objet d e cette importance, M. le maréchal de Castries recueillit apparemment quelques doutes sur ce point ; car malgré la fermeté de son caractère, malgré les instigations pressantes du sieur La M..., qui ne le quittait pas, il craignit, au moment de signer l'ordre, de mettre le trouble à Saint-Domingue ; et» par une espèce de pressentiment de ce qui devait arriver, il envoya à M. de La Luzerne un ordre particulier de suspendre la cassation du conseil du Cap, si la réunion comportait de grands inconvénients. Ces inconvénients incalculables étaient dans toutes les bouches, dans tous les cœurs, sur tous les visages; et pourtant l'ordre particulier envoyé par la prudence» fut célé par l'opiniâtreté, et pourtant l'édit despotique de la cour n'en fut pas moins exécuté, malgré le deuil universel des habitants à qui l'on enlevait leurs magistrats, pour les transférer à soixante lieues de leur résidence, et par leur réunion en un seul conseil, mettre le sceau au malheur de la colonie.
Ainsi, dans cette circonstance majeure, dont les pièces justificatives vous montreront, Messieurs, toute l'importance» M. de La Luzerne fut coupable de n'avoir pas prévenu un ordre dangereux; il fut plus coupable de l'avoir exécuté» ayant pu s'y soustraire ; il fut plus coupable encore, ne s'y étant pas soustrait, d'en avoir,
depuis son avènement au ministère, maintenu avec opiniâtreté lés meurtrières dispositions.
Signé: de Gouy d'Àrcy, Chabanon, Magallon, Courréjolles, le chevalier de Mârmev, de VilltJ-blanche, Cocherël, le comte O^Gorman", le marquis de Perrigny, ReynâUd, RùUVray, de Thebaudière, Laboriè.
Collationnê et certifié la présente copie conforme à l'originâl déposé àu secrétariat du Comité des rapports, délivré par nous, député, Secrétaire dudit comité, Cejourd'hùi. Signé : Antoine.
SEPTIÈME CHEF DE DÉNONCIATION.
Grand chemin du Câp ; mensonge public ; corvées arbitraires; dépenses énormes et inutiles»
Lorsque le précédent ministre de la marine adopta, pour notre malheur, le projet désastreux delà réunion des conseils, il ne s'était pas donné le loisir d'en peser toutes les conséquences, mais dans l'intervalle de temps qui s'écoula entre la détermination du gouvernement et l'exécution du plan, frappé de quelques objections que de bons esprits eurrnit le courage de lui présenter, il commença, comme j'ai eu le bonheur de vous le dire, à avoir quelques doutes, sur la possibilité du succès- On lui dit entre autres : le Cap est la ville la plus florissante de la colonie, le siège du commerce, celle où il se fait le plus d'affaires, celle par conséquent où les discussions entre l'acheteur et le vendeur doivent être plus fréquentes. Gomment voulez-vous que tous ses habitants quittent leurs manufactures et leur com-merce» pour aller plaider à quatre-vingts lieues de distance? Quatre-vingts lieues, dit peut-être le ministre, ne sont pas un obstacle à citer en poste ; c'est l'affaire de deux jours. Mais, répliqua l'observateur, vous jugez Saint-Domingue, comme la France, et vous ignorez, sans doute* qu'il n'y a point de grands chemins à Saint-Domingue ; que iarouteduGap au Port-au-Prince est coupée de montagnes à pic, de rivières sans ponts» de fleuves dangereux, de torrents rapides; que le pavé y est inconnu, que le sable est calciné, que le climat est brûlant, qu'il n'y a ni poste, ni relais, ni voitures publiques, ni auberges ; que l'on ne peut voyager qu'à cheval, et qu'à cheval il est peu d'hommes qui puissent soutenir l'ardeur d'un soleil brûlant qu'aucun nuage ne tempère ; qu'ainsi le voyage par terre, souvent mortel* est presque impossible aux Européens. Je conviens qu'on peut aller par mer » mais outre que la route est bien plus longue, les écueils sont si multipliés le long des côtes que la prudence ne permet pas de confier à des risques imminents, des titres précieux, des pièces originales, dont la perte serait irréparable; et les bâtiments du.cabotage sont si incommodes, que ceux même qui bravent tout, y regardent à deux fois, lorsqu'il s'agit, pour aller voir un avocat, ou solliciter un rapporteur, de se livrer au perfide élément pendant six semaines; car il arrive souvent que la traversée du Gap au Port-au-Prince, est de quinze jours, et que le retour est d'un mois;
Cette observation était sans réplique, et il n'y a pas de doute qu'elle influa beaucoup sur le parti que prit le ministre d'envoyer à M. de La Luzerne cet ordre particulier qui l'autorisait à suspendre, si les inconvénients lui paraissaient trop graves. Que fit-il, Messieurs, de concert avec ce malheureux La M> n ; n qui avait ourdi toute
cette trame, et avec le sieur de Marbois, intendant, qui jouera un rôle fâcheux dans ce mémoire? Il se crut assuré de lever tous les scrupules du ministre, en lui certifiant que de superbes chemins amèneraient de toutes parts avec facilité les justiciables dans le temple de la justice. M. le maréchal de Castries ne put résister à ce motif déterminant; il n'était pas dans son âme de soupçonner qu'il pût exister entre trois de ses créatures, une coalition criminelle, dont le seul but fût de le flatter, de l'abuser, et de le sacrifier à leur intérêt personnel. Il envoya donc l'édit qui devait frapper le coup fatal; mais comme s'il avait prévu que cette loi provoquée aurait un jour des suites funestes, il eut soin de déposer dans l'acte même sa justification,future, et il ne manqua pas d'insérer dans le préambule, pour principal motif de la réunion des conseils, la belle communication des chemins, c'est-à-dire que dans un acte public, revêtu du sceau royal, et censé émané du souverain en personne, trois agents payés par lui pour l'éclairer, le trompaient sciemment, et sous l'égide de l'éloignement ou de la faveur, publiaient sans pudeur un mensonge avéré, un faux matériel, bien propre à compromettre le nom sacré du souverain, si un peuple entier, témoin de l'imposture, n'en avait, dans sa justice, hautement nommé les auteurs.
Pour procurer cette belle communication qui n'existait pas, M. de La Luzerne commença par demander des corvées aux habitants riverains. Ils y prêtèrent leurs forces épuisées ; il en exigea de ceux qui demeuraient au loin; ils envoyaient avec une extrême répugnance des nègres à dix, quinze et vingt lieues de chez eux, au grand détriment de leurs manufactures, et de la santé de leurs ateliers. Bientôt des ordres de rigueur furent promulgués, bientôt on les exécuta avec bien plus de rigueur encore : tandis que le gouvernement en France supprimait la corvée, le gouverneur à Saint-Domingue établissait la corvée ; mais la corvée fut insuffisante, parce que les ingénieurs de France n'avaient pas prévu tous les obstacles appartenant au sol de Saint-Domingue : alors, Messieurs, on eut recours à la caisse publique. Le gouvernement et l'intendant ouvrirent ce canal par où s'écoule la substance des peuples. L'opiniâtreté employa pour se justifier des hommes que le discernement aurait pu appliquer à des établissements utiles; partout les administrateurs forcèrent de moyens, partout la nature se rit de leurs efforts.Enfin, Messieurs, la réunion désastreuse des conseils a été publiée il y a trois ans. Le chemin dont la beauté l'excusait én quelque sorte, a été commencé il y a trente-trois mois; mais la réunion a été consommée en vingt-quatre heures, et le chemin n'est pas fait au bout de trois ans. Mais la réunion n'a coûté qu'un édit au despotisme et des larmes au peuple, et le chemin a coûté des sueurs aux malheureux, des hommes à la colonie, et deux millions à la caisse.
Ainsi, dans ce fait grave dont vous allez connaître toute la vérité, M. de La Luzerne fut coupable d'avoir trompé le ministre, en lui fournissant comme un fait un moyen matériellement faux; il fut plus coupable de vouloir justifier son assertion par des moyens destructeurs de l'humanité ; il fut plus coupable encore d'avoir, depuis son avènement au ministère, persisté avec opiniâtreté dans des dispositions si pernicieuses pour l'intérêt général et à jamais inutiles.
Voilà notre récit, Messieurs; permettez à nos commettants d'en. sanctionner la scrupuleuse
exactitude par la présentation des pièces justificatives que nous allons vous soumettre.
Signé : Chabanon, Gourrejolles, Laborie, RoU-vray, Reynaud, Magallon, de Villebranche, Gocherel, le chevalier deMarmey, de Thebaudière, le comte O'Gorman, le marquis de Perrigny, de Gouy d'Arcy.
Collationné et certifié la présente copie conforme à l'original déposé au secrétariat du comité des rapports, délivre par nous, député, secrétaire dudit comité, cejourd'hui. Signé : Anthoine.
HUITIÈME CHEF DE DÉNONCIATION.
Démission arrachée injustement à un magistrat septuagénaire, doyen du conseil.
Lors de- la désastreuse réunion des deux conseils souverains de Saint-Domingue, en 1787; M. de S..., magistrat septuagénaire, doyen du conseil, éclairé par une expérience de quarante années dans les affaires publiques, et récompensé par l'estime générale de toute la colonie, sollicita et obtint des administrateurs la permission de rester au Gap, pour raison de santé.
Ge loisir si mérité par un juge qui, depuis quaranteans, n'avait pas demandé un seul congé, fut encore troublé par ce désir de se rendre utile, qui devient un besoin pour ceùx qui l'ont toujours
été à leurs concitoyens. Le sieur de S..... fut
chargé, avec deux de ses collègues, de présider à l'inventaire du greffe du Gap. Tandis qu'il y donnait tous ses soins, le greffier s'enfuit avec la caisse, dans laquelle il pouvait y avoir pour 100.000 livres de dépôts.
Cet événement, naturel de la part d'un coupable infidèle, semblait ne devoir pas donner matière à des soupçons outrageants; mais comme si le vœu le plus cher des deux administrateurs eût été de trouver des coupables parmi les bons habitants de la colonie, certains, par leur place, de l'impunité, MM. de La Luzerne et de Marbois se permirent d'accuser M. de S..., d'avoir coopéré à ce criminel enlèvement.
Ge respectacle magistrat, père de six enfants, tous revêtus de places et de décorations honorables, aïeul d'un grand nombre de petits enfants dont il était l'exemple, environné de l'estime de la colonie, n'avait qu'une manière digne de lui de repousser cette atroce accusation ; il se dénonça lui-même à sa compagnie déjà réunie au conseil du Port-au-Prince, à sa compagnie résidant à soixante lieues de chez lui, à sa compagnie, présidée par ses deux adversaires, les deux délateurs, ses deux accusateurs, MM. de La Luzerne et de Marbois.
Dans cette assemblée, quelque pressée qu'elle fût entre le devoir et l'autorité, se manifesta une indignation générale contre ceux qui s'étaient crus assez puissants pour porter impunément atteinte à l'honneur d'un septuagénaire, qui jamais ne s'était écarté de la voie de l'honneur.
Les deux administrateurs redoutant un jugement qui allait les couvrir de honte, eurent l'adresse bien tardive de prévenir, par une rétractation formelle, l'examen d'une calomnie qu'il n'était pas de leur intérêt de laisser approfondir.
Un arrêt solennel et unanime de la cour vint rendre à l'innocent tout son éclat, au mérite tout
son lustre, à la vieillesse toute la vénération qui lui est due.
Le rapporteur fut chargé par toute la compagnie d'écrire à leur doyen une lettre remplie de ces témoignagnes d'intérêt, de respect et d'amitié, qui seuls pouvaient guérir la blessure que la calomnie avait osé lui faire.
Déjà ce digne magistrat avait recouvré le repos si nécessaire à ses derniers jours; déjà M. de La Luzerne, parti pour la France, venait d'être élevé au ministère, lorsque immédiatement après les premières dépêches reçues de ce nouveau ministre, l'intendant de Marbois, souverain en son absence écrivit à M. de S..., au nom du roi, pour lui ordonner de se rendre au Port-au-Prince sans délai, ou d'envoyer sa démission.
Cet ordre conçu dans ces termes qui annoncent le malheur du mécontentement était évidemment la punition de cette rédaction publique à laquelle 1 honneur outragé avait forcé MM. de La Luzerne et de Marbois.
Cet ordre était au nom du roi, et pourtant la justice et la bonté du roi ne pouvaient avouer l'ordre inhumain d'exposer un septuagénaire malade, à entreprendre une route longue et impraticable.
Que fit cet infortuné vieillard? Il écrivit la lettre la mieux raisonnée et la plus respectueuse, et il conjura les deux administrateurs, au nom de leur propre honneur, à ne pas persister de le déshonorer.
Mais vaine instance : la victime était marquée ; le complot médité depuis six mois était irrévocable, le coup était porté ; le tyrannique intendant, fort de l'appui du ministre, répondit par un ordre absolu de donner sa démission, sous peine d'être à l'instant même saisi, arrêté et embarqué de force pour le continent.
Ainsi, parce que ce septuagénaire malade ne pouvait pas faire soixante lieues, on le menaçait de lui en faire faire deux mille, c'est-à-dire qu'on l'envoyait à la mort.
Encore nécessaire à sa famille, il n'hésita pas entre ses jours et son état ; il envoya la démission qu'on lui arrachait, pour prix d'un demi-siècle de service, et la colonie perdit le doyen et l'exemple de ses magistrats.
Ainsi, Messieurs, dans cette coalition monstrueuse de despotisme, de vengeance, de calomnie, M. de La Luzerne fut coupable d'avoir, sans preuve aucune, accusé d'un crime affreux, un magistrat intègre; il fut coupable de n'avoir pas confirmé dans son cœur la rétractation généreuse qu'avait prononcée sa bouche, et d'avoir écouté un ressentiment qui devait diriger le premier acte de sa toute puissance contre l'inho-cence reconnue; enfin, il fut plus coupable encore d'avoir consommé son noir projet, en arrachant son état, sans dédommagement ni retraite, sous peine de l'exil et de la mort, à un septuagénaire entouré d'une nombreuse postérité, et environné de l'amour de tout un peuple.
Cette cause particulière nous est spécialement recommandée par nos commettants ; ils ont recueilli le mérite et la vertu éconduits par le ministre : leurs suffrages ont placé à la tête du comité colonial de la partie du Nord, M. de Saint-Martin ; eux-mêmes ont dérobé à sa modération les preuves des vexations inouies dont il a été l'objet ; et tout à l'heure l'assemblée provinciale du Nord vient, à l'unanimité des voix, de le nommer président du conseil supérieur du Gap, que les vœux des habitants de cette contrée ont enfin rétabli.
Signé: Cliabanon, Courrejolles, Laborie, Rey-naud, Rouvray, Magallon, le chevalier deMarmey, Gocherel, le comte O'Gorman, le marquis de Per-rigny et de Gouy d'Arcy.
Collationné par nous, secrétaire du comité des rapports de l'Assemblée nationale, conforme à la copie étant au comité, le 1er mai 1790. Signé : Anthoine.
NEUVIÈME CHEF DE DÉNONCIATION.
Exaction publique, poursuite tyrannique envers un père de famille innocent, et suites cruelles de ce traitement barbare.
Parmi divers traits odieux de fiscalité, nous en choisissons un, Messieurs, qui est venu mettre le sceau à la haine que l'on portait à l'intendant. Quant à M. de La Luzerne, il n'a pas tardé, d'abord par son silence, et ensuite par une approbation bien coupable, à étendre sur lui-même la tâche dont s'était couvert le sieur de Marbois : ceci, Messieurs, demande toute votre attention.
Lorsque Saint-Domingue se donna à la France, ce fut sous la clause bien expresse de recevoir du souverain une protection gratuite, et de ne payer aucun autre impôt que celui qui provenait naturellement de la prohibition du commerce.
Lorsque- Saint-Domingue, pour donner une preuve de patriotisme, offrit à Louis XIV, dans ses malheurs, de se charger ëlle-même dès frais de la protection de la France, ces frais ne se montaient qu'à cent mille écus, et ce fut sous la clause bien expresse que les habitants répartiraient cette imposition volontaire entre eux comme bon leur semblerait, et pour un temps limité.
Voilà deux lois fondamentales de la colonie, que tous nos souverains ont reconnues et respectées, et que le roi a sanctionnées lui-même en 1775, lorsque dans l'article 34 de son ordonnance sur le gouvernement civil de Saint-Domingue, il défend expressément toute levée de deniers, sans uriè délibération préalable des habitants.
Je dois observer ici que cet octroi gratuit de 300,000 livres, accordé à Louis XIV, s'étant insensiblement accru jusqu'à la somme annuelle de cinq millions, qui en produisent plus de dix dans la perception, le peuple généreux qui donnait des marques si éclatantes de son dévouement à la métropole avait dû s'attendre que les administrateurs qu'elle, lui envoyait, loin de chercheriàjaugmenter ce fardeau patriotique, auraient des ordres précis d'en alléger le poids, en conservant au moins précieusement le droit acquis aux habitants de répartir eux-mêmes entre eux cet impôt volontaire.
Outre les différents prélèvements qui composaient ce produit annuel, se trouvait la recette des droits curiaux qui servaient à l'entretien des ministres des autels, èt la recette des droits des suppliciés, qui payait les maréchaussées et autres objets relatifs à la sûreté publique. Ces deux caisses étaient distinctes, et elles étaient alimentées par une cotisation fixée depuis longtemps à trente sous par chaque tête de nègres. Le 27 février 1787, M. François de Neufchâteau, procureur général du conseil supérieur du Cap, encore existant, conclut à ce que, vu l'état brillant de ces caisses, la cotisation fût modérée à vingt sous au lieu de trente. Un an a près, en mars 1788, sans
cause, sans motif, sans besoin, il plaît à MM. de Vincent et de Marbois de réunir ces deux caisses, de porter l'imposition à un écu par tête de nègres, c'est-à-dire d'en tripler la quotité, de s'en rendre, les administrateurs souverains, d'annoncer une augmentation pour l'année suivante, et de donner ainsi tacitemedt au conseil le droit d'imposer arbitrairement à l'avenir tous les habitants de la colonie, au gré de la cupidité ou de l'ineptie des administrateurs en chef et des ministres.
Ainsi, par une singularité que vous aurez pu, Messieurs, observer plusieurs fois dans les faits contenus dans ce mémoire, tandis que les parlements, en France, effrayés de l'abîme que le génie du lise avait ouvert sous nos pas, abrogeaient le droit d'imposer que nos souverains avaient usurpé, et renonçaient à ces enregistrements dont ils reconnaissaient les abus ; un ministre du roi, comme s'il eût voulu conserver au despotisme un trône en Amérique pour le dédommager de celui qu'il allait perdre en Europe, cherchait à établir dans cet hémisphère l'aristocratie parlementaire et la bureaucratie fiscale» que le vœu de ses anciens habitants et le droit dés gens semblaient ep préserver à jamais.
Le ministre et l'intendant avaient bien prévu les difficultés qu'entraînerait la recette de la nouvelle imposition. Us en avaient chargé les mar-guilliers des paroisses, citoyens notables, et les avaient rendus responsables des recettes qu'ils nè feraient pas.
Le sieur de La ?..propriétaire-planteur, négociant, père de famille, honoré de l'estime de sés concitoyens, nommé par leurs suffrages marguillier de la paroisse de la ville du Çap, reçut fordre de collecter le nouvel impôt arbitraire établi par le ministre et par l'intendant, son organe. Il essaya en vain de faire sa collecte, mais personne ne voulant payer, il écrivit au receveur général des droits municipaux la lettre la plus mesurée, la plus honnête, par laquelle il le priait de désigner un autre receveur qpi serait plus heureux que lui.
Sur cette lettre, dénonciation du sieur de La F.,, au procureur général La M..., cpnçlusjpng rigoureuses dù ministère public, et sur ses conclurions adoptées, arrêt de la epur qui décrète d'ajoumepaent personnel cet excellent citoyen ; ordonne que sQn procès lpi sera fait et parfait, que ses biens seront saisis, garnison établie chez lui, ses meubles exécutés et sa personpe arrêtée, si dans le délai de l'ordonnance 11 ne paye pas à lui seul la somme entière imposée sur toute la Ville du Cap.
Cet arrêt est mis en exécution uu dimanche, malgré le texte de la loi, et avec une publicité et un scandale qui ajoutent encore aux rigueurs de ses dispositions. Tout est saisi au Cap c\\ez ce négociant respectable, aux risques cle lui faire perdre spn crédit. La commune s'assemble et offre aux exécuteurs une garantie dé dix millions ; elle est refusée ; ils se transportent à l'habitation du sieur de La F... ; on je trouve alité et sérieusement malade ; mais les ordres portaient sans doute de ue respecter ni la religion ni l'humanité. On l'arrache inhumainement des bras de sa femme et de ses enfants, on l'entraîne sans ménagement jusqu'au Cap, et là, malgré les cri» de tous les habitants, maigre les remontrances respectueuses et fortes que la Chambre de commerce juge à propos d'adresser aux commandants, ou lui fait Verser de force dans la caisse municipale la somme imposée. Il satisfait ; mais le décret fatal était lancé, il fallait le purger en-
core. Pour éviter la prison dont il était menacé, il est contraint, en dépit d'une fièvre ardente, de se faire transporter, sous un ciel brûlant, au Port-au-Prince, à soixante lieues de chez lui. Il comparaît par devant le rapporteur de la cour, et lui démontre à son grand étonuement et sans réplir que, non seulement que la perception de ces nouveaux droits est absolument indépendante de la charge de marguillier, et contraire à l'esprit et à la lettre des ordonnances du roi, mais encore qu'il n'est marguillier ou collecteur que pour l'année 1787 ; que l'on est presque à la fin de 1788, puisqu'il s'agissait d'un impôt créé en 1788, collective en 1788 ; que l'on s'est trompé cruellement vis-à-vis de lui, et que cette méprise étrange peut avoir des suites bien funestes. Hélas! il ne disait que trop vrai. Il revient chez lui par cette route pénible, fatigante, que les administrateurs représentaient comme si belle, et qui est un dès fléaux de la colonie. Il nous trace le tableau déchirant des atroeités dont une autorité exagérée et des lois abusives l'ont rendu victime, nous conjure de dénoncer ces actions tyranniques au roi, à la nation, signe de sa main avec les autres commissaires élus par la paroisse du Gap les pouvoirs nécessaires pour parvenir à ce but, nous somme de venger sa patrie, et meurt.
A l'instant toute la ville est en deuil ; tous les habitants, comme dans une calamité publique, se cherchent, se rapprochent, et la maison du malheureux La F... devient le rendez-vous de toutes ces âmes émues et le théâtre de la scène la plus touchante. Dans cette consternation générale, dans ce moment de contraction universelle où tous les cœurs serrés avaient besoin d'épancher leur douleur, un citoyen patriote, un' ancien serviteur du roi, offieier général dans ses armées, et justement honoré de l'estime de la colonie, qui depuis lui a accordé ses suffrages en le nommant l'un de ses députés à l'Assemblée nationale, M. le marquis de nouvray prend la plume: en plaçant un papier sur le cercueil même de cet infortuné collègue, décrit, sous'la diotée de tous les cœurs, aux commandants particuliers du Cap, une lettre couverte d'un grand nombre de signatures, que toute la ville voulait signer, et qui n'exprime que littéralement les sentiments d'exécration dont les excès du despotisme avaient rempli toutes les âmes.
Après cette satisfaction aux mânes de la victime immolée, tout le cortège se rendit à l'église, là, en présence d'une foule immense de peuple qui honorait de ses larmes celui qui avait su mériter son estime et ses regrets, M. le marquis de Rouvray s'avançant noblement vers les représentants des administrateurs, leur remit à eux-mêmes une minute de l'adresse funèbre qui exprimait si bien le sentiment général, et que je transcris ici sur l'original que j'ai dans mes mains, littéralement conformé au duplicata qui a été envoyé à M. le comte de La Luzerne.
, 5 Pans, Uéglise (lu Cm, sur le çercuçil de y. de M. F—
» Ge
« Messieurs,
« C'est sur la tombe d'un des plus honnêtes * prppriétaires^plantenrs de cette dépendance, « d'un négociant des plus considérés de cette » ville, d'un citoyen moissonné à l'âge de trente-« quatre ans, d'un père de famille laissant des « enfants en bas âge, d'un époux tendre et adoré « d'une femme intéressante ; c'est sur la tombe
« de M. de La F...., victime nouvelle de la réunion « homicide des deux conseils de Saint-Domingue, « que nous vous faisons part de nos regrets et « de notre terreur, en mêlant notre voix aux « gémissements, aux cris de la veuve et des or-« phelins qui demandent vengeance à Dieu et « aux hommes. Le désespoir de cette dépen-« dance est au comble, Messieurs ; vous avez, « comme nous, devant les yeux, l'effet terrible « de tous les changements oppresseurs qui ont « été la suite de la réunion des conseils au « Port-au-Prince.
« Plusieurs pères de famille, épuisés comme « M. de La F... par les fatigues du voyage, ont « perdu la vie, soit au Port-au-Prince, soit dans « les routes, soit à leur retour dans leurs loyers. « Un autre trait l'a frappé d'un coup de mort ; « c'est l'appareil vraiment scandaleux qui a été « employé contre lui sous lës formes perfides « d'exécution judiciaire ; et déjà les autres mar-« guilliers de cette dépendance sont aussi me-« nacés du même sort, s'ils n'obéissent aveu-« glément à ces lois combinées entre l'adminis-« tration et les conseils réunis au Port-au-Prince ; « à ces lois qui font verser dans une caisse « étrangère nos contributions volontaires desli-« nées à l'entretien de nos églises, de leurs mi-« nistres, et à la décence du culte divin dans « nos paroisses.
« Nous vous sommons donc, Messieurs, par « tout ce que vous devez à la colonie, particuliè-« rement à cette dépendance, de faire parvenir à « MM. les administrateurs l'affreux spectacle « dont vous êtes témoins ; nous chargeons leur « conscience et la vôtre de tous les désastres que « continuera de produire la réunion des deux « conseils et leur incorporation avec l adminis^ « tration, Nous sommons les administrateurs « mêmes de faire savoir au meilleur (les rois « qu'on l'a trompé, qu'on a trompé ses minis-« très, qu'on a eu intérêt de le3 tromper.
« Nos cœurs sont remplis de douleur, d'afflic-« tion et de terreur ; nous sommes au désespoir, « Messieurs. »
Dois-je m'astreindre ici, Messieurs, à la forme ordinaire que j'ai adoptée? dois-je vous récapituler ici les délits dont M. de La Luzerne est coupable ? Hélas 1 les détails horribles que vous ve-nez d'entendre, sont les crimes de son intendant et de son procureur général ; la protection spéciale accordée par lui à ces deux vampires de la colonie lui est personnelle. Le sieur de Marbois fut coupable d'avoir, au mépris des lois fondamentales de la colonie, osé promulguer une imposition qu'elle n'avait pas décrétée ; il fut bien plus coupable d'avoir ordonné la réunion des caisses, comme il avait exécuté la réunion des conseils ; il fut plus coupable encore d'avoir dénoncé sans motifs, et fait décréter sans sujet un citoyen qu'il n'avait pas le droit de rendre responsable d'une recette illégalement établie ; enfin, il fut singulièrement coupable d'avoir, par une intention criminelle, ou par inadvertance inexcusable, dirigé tous les traits de son despotisme contre celui qui n'était plus comptable.
Quant à M. de La Luzerne, alors ministre, il fut coupable de tous ces faits, puisqu'il en a autorisé plusieurs, et qu'étant instruit des autres par la clameur publique et par les représentants eux-mêmes de la colonie, qui les lui ont plusieurs fois officiellement dénoncés, non seulement il n'a pas eu égard à nos justes griefs, non seulement il n'a pas ordonné de réparer le mal déjà fait, non seulement il n'a pas puni les instiga-
teurs de tant de forfaits, mais il les a approuvés par son silence, ou encouragés par ses correspondances, ou récompensés par des témoignages honorables, dont l'existence, Messieurs, devrait vous paraître une fable, si dans un des chefs de dénonciation qui va suivre, je n'étais à même d'en mettre la preuve écrite sous les yeux de l'Assemblée; alors, Messieurs, nous déposerons sur le bureau toutes celles qui ont trait à la perte du malheureux La F...., notre compatriote, notre commettant,et le client de la colonie tout entière.
Signé: Chabanon, Reynaud, Laborie, Courre-jolles, Rouvray, Magallon, le chevalier de Marmey, de Thebaudière, de Villeblanche, Cocherel, le marquis de Perrigny, le comte O'Gorman et de Gouy d'Arcy.
Collationné et certifié la présente copie conforme à l'original déposé au secrétariat du comité des rapports, délivré par nous, député, secrétaire dudit comité, cejourd'hui. Signé : Anthoine.
DIXIÈME CHEF DE DÉNONCIATION.
Réunions tyranniques au domaine du roi et concessions frauduleuses.
C'est sans doute avec horreur, Messieurs, que vous avez vu, dans le cours des dénonciations qui précèdent, les infortunés colons de Saint-Domingue, victimes du plus outrageant despotisme, privés, sans motife, sans jugements, de leur liberté individuelle, être encore contraints de risquer sans cesse leur existence dans des routes pénibles qui en ont vu périr un grand nombre. Le ministre et l'intendant qui s'étaient fait un jeu cruel de compromettre la liberté, la vie même des peuples, n'avaient plus qu'un pas à faire pour achever le tableau.
Nos propriétés seules, aux impôts arbitraires, aux concessions près, semblaient être restées intactes, Vous allez voir, Messieurs, comment les administrateurs de Saint-Domingue sont parvenus à nous en ravir le fonds-
Louis XIV n'eut pas plutôt pris sous sa protection ce second royaume, qu'il chargea ses délégués d'en diviser les terres et de les concéder à des cultivateurs patriotes qui osassent les défricher, braver les influences d'un climat alors bien dangereux, et féconder ces contrées lointaines. Ces concessions auraient trompé le vœu du prince, si des lois sages n'avaient surveillé l'exécution politique de ses intentions.
Quoique ces concessions si profitables à l'Etat, n'eussent aucune analogie avec les aliénations dont on a fait tant d'abus dans le confinent, quoique celles-ci fussent un sacrifice arraché par la faveur à la substance du peuple, tandis que celles-là étaient une semence de prospérité pour la métropole, cependant le gouvernement imposa des obligations fort raisonnables aux concessionnaires- La contenance de chaque concession fut limitée; l'obligation de cultiver fut imposée; la défense de vendre, avant d'avoir commencé un établissement, fut intimée à la cupidité, qui n'aurait vu dans la cession multipliée de ces terres qu'un aliment à l'agiotage, sans aucun profit pour la métropole. Ainsi, sous peine de réunion au domaine du roi, il fallait, dans le cours de la première année, avoir opéré des défrichements, avant-coureurs d'une récolte prochaine- C'est à ces lois, dictées par la plus sage politique," que Saint-Domingue dut des accroisse-
ments rapides et c'est à leur observation, modifiée par la prudence, que l'on peut attribuer le degré de splendeur qui lui dqnne aujourd'hui tant d'importance dans la balance du commerce européen.
Mais depuis plusieurs années, depuis environ quinze ans, les choses ont bien changé de face dans ces précieuses contrées. L'indigo, plante vorace et d'une culture facile, à laquelle les premiers planteurs avaient confié d'abord le soin d'absorber les sels trop substantiels dont ce riche sol était pénétré, avait préparé les terres à recevoir le dépôt de ce roseau balsamique, la plus parfaite de toutes les productions végétales qui nous donne le sucre. Déjà toutes les plaines couvertes de cannes, semblaient avoir rempli les intentions du législateur et avoir fermé tout accès aux spéculations de l'industrie.
Cependant cette industrie accoutumée à triompher de tous les obstacles, après avoir promené les regards sur ces plaines couronnées de sucre, et contemplé avec satisfaction son ouvrage, leva les yeux sur ces montagnes élevées dont les bois épais ou des lianes rampantes ombragent la cime, elle chercha la culture qui pouvait convenir à ce local, et bientôt les forêts antiques et le cacao peu productif, cédèrent peu à peu la place à cet arbrisseau précieux qui nous donne le café.
Tandis qu'elle s'appliquait à en recueillir les avantages, une découverte fâcheuse vint contrebalancer dos succès; on s'aperçut que le café comme l'indigo épuisaient prodigieusement la terre, et que jamais peut-être elle ne pourrait reproduire'le même plant.
Cette observation fut bientôt suivie d'une foule de demandes en concessions. Heureusement que les forces des colons, que leurs moyens aratoires étâient au-dessus de leur zèle : s'ils eussent pu défricher tout ce qui leur avait été concédé, le café serait tombé sans doute à un prix très bas qui n'aurait pas dédommagé des frais de culture, et dans dix à douze ans rEurope et l'Amérique auraient été soudaine nient privées d'une boisson devenue presque un besoin, et cet inconvénient n'eût pas été le dernier.
Quand on connaît nos colonies, quand on a parcouru cet autre monde, on sait que dans ces pays où l'on trouve- beaucoup de torrents et fort peu de rivières, où l'on découvre des bois immenses et pas un seul canal de navigation, la seule manière de défricher, est d'appliquer le feu à la destruction des forêts anciennes comme le monde.
On sait aussi que, dans ces climats brûlants, la vie ne serait pas supportable, si l'air n'était quelquefois rafraîchi par des pluies bienfaisantes. Or, détruire les forêts, ces conducteurs que la nature a si sagement établis entre les nuages et nous, ce serait nous soustraire à sa bienfaisance et nous priver à jamais de ces rosées célestes auxquelles seules une terre calcinée doit sa prodigieuse fécondité.
De ces connaissances nécessaires pour juger, Messieurs, le cas qui vous est soumis, il résulte qu'un ministre qui, sans considérer la différence des époques et les changements que Je temps apporte à toutes les institutions humaines, prétendrait se référer servilement aux lois du siècle dernier et les faire observer aujourd'hui avec rigueur, serait un très mauvais politique, qui servirait très mal sa nation et la province particulièrement confiée à ses soins.
Cette erreur serait moins excusable dans un naturaliste profond, dans un chimiste consommé
pour qui les détails physiques que j'ai eu l'honneur de vous offrir, sont des éléments familiers.
Elle serait, j'ose le dire, impardonnable, si ce ministre et ses sous-ordres avaient devant les yeux des exemples que l'expérience de leurs prédécesseurs se serait plu à leur présenter. Or, M. le comte de La Luzerne se trouve dans ce cas, le moins graciable de tous ; il était sur les lieux, il connaissait le sol ou devait le connaître, il pouvait ou devait consulter les hahitants. Tous les journaux de la colonie lui auraient appris, à chaque page, que les administrateurs qui l'avaient précédé avaient tous senti que pour ne pas ruiner les propriétaires actuels de caféteries, que pour ne pas rendre cette source de richesses nulle dans la main des commerçants, que pour ne pas occasionner tout d'un coup à l'univers une privation qu'une abondance momentanée rendrait encore plus sensible, que pour ne pas exposer, par une fausse démarche, le sort de toutes les sucreries et l'existence même des habitants, en risquant de changer totalement le climat par la destruction subite et universelle des forêts, il fallait employer désormais avec une extrême modération la loi sur lès réunions; qu'il fallait bénir l'heureuse impossibilité où se trouvaient plusieurs colons d'étendre dans cé moment une culture précieuse au delà des besoins de la consommation ; qu'il fallait économiser, pour la postérité, le peu de terre qui restait à défricher dans les montagnes ; qu'il ne fallait pas incendier en un jour tous ces bois debout dont la rareté augmente sans cesse, et dont la conservation importe tant à la salubrité du climat ; qu'il fallait enfin ne pas braver l'expérience et qu'il était sage d'imiter des administrateurs qui, déterminés par les motifs qui viennent d'être développés, n'avaient pas, depuis dix ans, prononcé vingt réunions par chaque année.
Après vous avoir prouvé que le système immodéré des réunions ne tendait à rien moins qu'à consommer publiquement le malheur de la colonie, je vais vous montrer une concussion véritable dans les actes tyranniques exercés par M. de Marbois, et sanctionnés par M. de La Luzerne.
Il y a eu tyrannie, si les propriétés ont été arrachées aux citoyens avec injustice; il y a eu concussion, si lès tyrans ou leurs sous-ordres ont trouvé dans ces larcins publics ou des avantages personnels, ou le plaisir de la vengeance, eu le moyen fhnestè d'énerver la liberté et de perpétuer le despotisme.
Vous aVez vu que, depuis plusieurs années, il n'y avait presque plus de réunions à Saint-Domingue. Le sieur de Marbois est nommé à l'intendance de ce malheureux pays, et forme le projet d'en bouleverser tous les usages, d'en changer toutes les lois, d'en modifier à sa guise la constitution. Pour parvenir à ce but, quel moyen de succès? Commander avec hauteur ne suffit pas, il faut se faire des créatures; il faut donc devenir riche et donner beaucoup : mais on ne peut devenir riche en peu de temps, et donner beaucoup sans prendre ; il prit donc au moins pour donner, mais il eut soin de couvrir ses exactions odieuses du voile respectable de la loi. y'. ':- y. ' :'
Déjà, de concert avec M. de La Luzerne, il avait réuni les conseils souverains, et vous en avez vu les abus ; déjà il avait réuni toutes les caisses, et vous en avez déploré les fâcheux effet* ; il ne lui restait plus qu'à réunir au domaine les
propriétés les plus sacrées, et vous allez voir et tous les maux qui découlèrent de cette fatale opération, et à quel dessein elle avait été résolue.
M. l'Intendant se fit informer exactement de toutes les terres qui n'étaieat point établies, et un beau jour, ses commis, ses secrétaires et autres agents affidés présentèrent, à M. l'intendant, requêtes en réunion de plusieurs de ces terrains. Ces requêtes ne peuvent être appointées sans la permission du gouverneur; cette formalité n'était point un obstacle entre amis; M. de La Luzerne donna les permissions, et les réunions furent prononcées. Voilà donc des propriétaires indigents, de pauvres pères de famille, des veuves, des orphelins dépouillés; mais aussi voilà le domaine du roi enrichi de toutes ces propriétés. Quelles richesses, Messieurs, des propriétés incultes, et qui, suivant la loi, doivent être concédées à un nouveau maître sans aucune rétribution 1 Vous sentez que l'enrichissement de l'Etat ne pouvait être la vue de l'agiotage du sieur de Marbois, car jusque-là il n'y avait que du mal de fait, et de profit pour personne.
Il faut vous dire que les ordonnances et l'usage accordent aux poursuivants en réunions la préférence pour la nouvelle concession à faire de ces terres réunies : or, les poursuivants étaient les créatures des administrateurs; donc les créatures des administrateurs furent très légalement gratifiées de ces terrains enlevés et réunis. , Nantis de ces terres incultes, il fallait, au terme de la loi, les établir dans l'année, et ne pas les vendre que l'établissement ne fût fait. Sur ces deux points embarrassants, les administrateurs interprétèrent la loi, et permirent en premier lieu de pas établir les terrains; en second lieu, de les vendre sans être établis.
On sent déjà toute l'utilité de ce nouveau commerce, qui n'offrait aucun risque, et présentait des bénéfices certains : de si heureux commencements encouragèrent puissamment tous les subalternes et bien d'autres à se mettre sur les rangs des courtisans de M. le gouverneur et de M. l'intendant. Bientôt ils furent accablés de demandes; bientôt les gazettes et les.affiches de la colonie furent souillées de ces nombreuses annonces : la cupidité une fois éveillée ne s'endort pas facilement; d'abord on demandait pour soi, ensuite on demanda pour vendre. Un mortel heureux qui avait obtenu quatre concessions en vendait trois pour établir la quatrième, et la spoliation de quatre citoyens composait la fortune d'un favori de l'administration.
C'est ainsi qu'un secrétaire intime de M. de Marbois, par une activité sans exemple et une avidité inextinguible, parvint à réunir dans ses mains seize concessions à la fois, digne récompense de plus de cent spoliations dont lui seul avait été l'infatigable agent.
Cet oubli de toute pudeur avait élevé un cri universel d'indignation dans toute la colonie : plusieurs habitants, à la convenance desquels se trouvaient des biens véritablement négligés, voyant avec quelle facilité les réunions se prononçaient, et craignant d'être prévenus par les furets de l'intendant, formèrent en leur nom personnel des demandes en réunion de ces terrains incultes : de crainte d'être dépouillé, on devenait spoliateur. Jusque-là les poursuivants avaient aussi toujours obtenu la concession nouvelle ; ainsi ces habitants n'eurent pas la moindre inquiétude du succès, et crurent qu'il suffirait de poursuivre pour être sûrs de l'investiture dé-
sirée. Us firent donc et les poursuites et les frais considérables qui y sont relatifs ; les jugements furent favorables, et les réunions prononcées ; mais quanti ils se présentèrent pour recueillir le fruit ae leur découverte et de leurs démarches, ils apprirent, avec autant de surprise que de douleur, qu'un favori des administrateurs avait été l'être prédestiné qui, sans peines ni soins, avait obtenu les objets de leur convoitise.
Un de ces citoyens éconduits, le sieur Rousseau de la Gautraye, habitant depuis vingt ans à Cavaillon, partie du sud, père d'une nombreuse famille, avait songé, pour l'établir, à profiter des circonstances favorables ; il venait de faire prononcer la réunion d'un terrain de quinze cents pas carrés appartenant à la dame Noguez; il en demande aussitôt la concession, point de réponse. Il se rend au Port-au-Prince, s'adresse directement à M. de La Luzerne et de Marbois, et apprend que le sieur Wante, secrétaire particulier de l'intendant, ce concessionnaire universel que j'ai déjà cité, vient d'être gratifié de ce terrain qui lui était si précieux : il ne cache pas son mécontentement, la douleur qu'il éprouve de Voir passer ce sol à sa convenance entre les mains d'un homme chargé de dettes et couvert de bienfaits. Le sieur Wante n'était pas cruel; il fait proposer au sieur Rousseau de lui céder cette terre dont il avait envie, et ne lui demande que quarante mille livres pour ce sacrifice. On peut juger de là que le métier était bon : aussi un des sous-ordres du bureau du sieur Wante, encouragé par la brillante fortune de son patron, écrit-il au sieur Torrez son ami, qu'il va tâcher de marcher sur ses traces, et de gagner comme lui, s'il est possible en une seule année, trois cent mille livres sur le commerce des réunions.
Ce brigandage, source inépuisable de fortune pour soi ou ses protégés, ce brigandage, objet de scandale et de corruption, se continue publiquement sans pudeur sous les yeux de M. de La Luzerne ; et pendant tout le temps qu'il fut gouverneur, Saint-Domingue était aux abois, le désespoir dans tous les cœurs, lorsque heureusement M. le marquis du Chilleau débarqua dans la colonie.
Sa délicatesse lui inspira une méfiance involontaire contre cette opération usitée; sa politique lui en découvrit les abus, et sa fermeté lui près-crivitdenepas se laisser entamer sur ce point; il refusa toute permission, et ce trait d'honnêteté, qui lui valut l'amour de Saint-Domingue, fut, dit-on, le principe de sa disgrâce. Un seul homme avait suspendu les calamités dont deux hommes seuls avaient été les instruments; sa perte fut jurée, son rappel ordonné : alors le sieur de Marbois redevenu souverain, et par conséquent despote, reprend ses anciens errements, le trafic honteux et lucratif des réunions recommence. xM. de Peynier obtient la place de M. du Chilleau, mais on ne l'avait pas nommé son successeur pour être le contradicteur de l'intendant, il se montre au contraire son complaisant, il ne s'oppose point à ce désastreux commerce qui fait gémir toute la colonie, pour enrichir quelques favoris ou quelques fripons ; el ces scandaleuses opérations, M. de La Luzerne en a été le témoin, M. de La Luzerne en fait la continuation ; M. de La Luzerne ne les proscrit pas. Qu'il nous montre la correspondance de M. du Chilleau; qu'il nous laisse jeter les yeux sur l'effroyable tableau que lui fait de tant d'attentats ce vertueux gouverneur, et qu'il convienne qu'après avoir fait le malheur de la colonie de Saint-Domingue, un de
èes agents affidés, soû procureur général La M... a pensé consommer sa ruine en abrogeant le règlement sage par lequel un concessionnaire qui, au désir dè son titre, avait rempli les formalités d'usage et formé uti établissement sur son terrain. ne pouvait plus étrè troublé par un cou-* cessionnaire, même plus ancien, qui avait laissé déchoir Son titre ; qu'il convienne enfin qu'après avoir faille malheur de la coloqie, il a voulu consommer sa ruiné en autorisant la continuation de ces réunions perfides au domaine du roi, prétexte de tant d'injustices et de tant de maux.
Ainsi dans ce Cnef de dénonciation de la plus grande importance sous un rapport politique, de la plus cruelle connivence sous un point de vue moral, quatre individus chargés spécialement par le monarque du bonheur et du salut d'une contrée utile et éloignée, un procureur général, un intendant, un gouverneur,un ministre (M. de La Luzerne jouant lui seul ces derniers rôles), se sont rendus collectivement coupables:
D'impéfitiç envers les,deux mondes, en risquant de faire disparaître sous peu d'années de tous les marchés européens Cette graine recherchée à laquelle nous devons une boisson salutaire;
D'impéritle envers Saint-Domingue, en risquant de la priver tout à Coup des ressources que lui présentent ses forêts, et de provoquer dans son climat un changement aussi dangereux pour les manufactures qu'insalubre pour les habitants.
Ils se sont rendus coupables de tyrannie eii vers les pères de famille indigents, én prêtant une extension rigoureuse à une loi que, vu le changement des temps, la prudence devait restreindre;
Dé concussion envers tous les Côlons, en leur enlevant leurs Mens, comme vous verrez, pour investir de leurs dépouilles, si ce n'est eux-mêmes, au moins leurs favoris, et par là rétrécir le domaine de la liberté, en étendant les con-quêteS du despotisme ;
Enfin, d'un crime public envers la nation, en attaquant ouvertement l'un des précieux apanages de l'homme, sa propriété, pour prostituer le produit 'de ces larcins à l'entretien d un agiotage honteux, d'un commerce ififâme, d'un brigandage scandaleux, indigne de tous les temps de ia loyauté française, ét si contraire aux principes actuels de la nation magnanime qui marche avec tant de majesté vers la régénération et la liberté^
Tous les faits que je viens d'avoir l'honneur de vous citer, Messieurs^ ne sont que la quintessence des nombreux mémoires qui nous ont été adressés sur Cet important sujet par nos commettants. Veuilles bien, Messieurs, parcourir avec nous ces Originaux intéressants.
Signé :
Çnabanon, Laborie, Êeynaud, RoiiVray, le marquis de Perrigny, le. cbevâlier de Marmey, Co-Cnërel, le comte Q'Gorman,;Magalion, Courrejolies, de Thebaudière, de Villeblanche, de GoUy d'Arcy.
Collationné à l'original déposé au comité des rapports de l'Assemblée nationale'par nous, secrétaire dudit Comité. A Paris, lë 29 avril 1790. Signé : Anthoine.
ONZIÈME CHEF DÈ DÉNONCIATION.
Disette de farinés. Insouciance crimihellë du ministre
Quelque désir qu'on ait, Messieurs, d'excuser M. de La Luzerne, il ést impossible de Croire qu'il ait jamais ignoré que, de toutes les portions a'Uîi
vaste empire; celle qui a le plus de droits à la certitude de Ses subsistances, c'est une colonie qui ne produit point l'aliment de première nécessité* et qui, située au milieu des eaux, à deux Cents lieues de la métropole, pôurrait périr dans les angoisses du désespoir, par l'oubli coupable, fût-Il même involontaire, d'Un ministre négligent.
M. de La Luzertion'a pas dû ignorer non plus que les intempéries désastreuses de l'année 1788 avaient diminué l'abondance des farines, et avaient laissé sur Cette denrée si nécessaire des inquiétudes qui devaient naturellement resserrer la quotité des exportations. Dans cette circonstance, seS regards devaient se tourner avec intérêt vers Saint-Domingue et vers nos ports de France; et si ces derniers ne se trouvaient pas à même de fournir abondamment aux besoins de la colonie, les champs de l'Amérique nous présentaient des ressources dont la prohibition nous interdisait pourtant l'usage, jusqu'à ce qu'il plût à la puissance exécutive de verser sur nous lës trésors de ses guêrëts.
Cependant la disette avait commencé à se faire sentir à Saint-Domingue, et le ministre, uniquement occupé à Versailles à nous interdire l'entrée des États généraux, n'avait pas encore songé à donner aucuh des ordres qui devaient nous procurer efficacement des subsistances.
M. lé marquis du Chilleau y pourvut le 30 mars, par une ordonnance sagë, qui ouvrait aux navires étrangers les trois principaux ports de la colonie. M. de Marbois, qui n'était pas encore en guerre ouverte avec le gouverneur, së prêta à cette mesure, mais elle fut infructueuse. Les armateurs des Etats-Unis në pouvant point, aux termes dé nos lois prohibitives,(charger en retour leurs bâtiments des denrées dë nos manufactures, emportaient le peu de numéraire que nous avions, nous. faisaient ainsi un tort irréparable, se retiraient mécontents et ne revenaient plus. La disette reparut donc, et avec elle la nécessité d'un moyen plus efficace. Le seul qu'il y eût à prendre fut proposé en plein conseil par M. du Chilleau : c'était d'ouvrir les dix ports d'amirauté, et dè permettre à nos voisins de charger des sucres et des cafés en retour de leurs farines. L'intendant s'y opposa ouvertement; il plaida avec force la cause de la prohibition, contre le salut de la Colonie ; ses discours, Imprimés par son ordre dans les galettes, vont être mis sous vos y eu*. Voiis y lirez la condamnation formelle de M. de La Luzerne, que la forde de la Vérité arrachait au sietir de Marbois, sans qu'il s'en doutât. « Pour-« quoi, disait-il en substance, présenter de nou-« vëlles facilités â l'introduction des farines ? Je « conviens qu'elles sorit rares, mais cette rareté « ne peut pas ddrer ; elle dOit nous faire présume mer au contraire que les mers sOnt couvertes a de bâtiments bordelais qui cinglent vers nos «.ports, et quoique l'on n'en ait point d'avis ;« certain, la meilleure preuve que l'on puisse en « offrir, c'est la Vigilance Connue du ministre de « la marine. 11 sait notre position ; il connaît notre « détresse : assis au Conseil d'Etat, il a sous les « yeux toutes les ressources du royaume, et dans « les mains les moyens de les diriger vers nous. « Peut-on supposer qu'il nous laissât én péril « sans avis, sans ordre, sans pouvoir dé veiller « par nous-mêmes à nos pressants besoins? »
Et tandis qu'il parlait ainsi, te ministre ne songeait point à nous; il n'écrivait ni à Bordeaux, ni à Philadelphie, iii à Saint-Domingue; il voyait l'inquiétude sur les subsistances'augmenter chaque jour en France, et il n'en Concevait aucune
Sur l'état critique où nous étions ; il voyait la disette ou le resserrement des grains préparer ici des révolutions de la plus haute importance, et il ne songeait pas que la môme cause pouvait produire sous le tropique les mêmes effets : enfin, il se rendait coupable ici de cette haute négligence dont son favori se faisait à Saint-Domingue un argument contre le gouverneur prévoyant qui voulait nous sauver. Le croiriez?vous, Messieurs? Du 5 juillet au 20 septembre, il n'est pas entré un seul navire de France dans les ports de Saint-Domingue.
Qu'arriva-t-il ? c'est que M. du Chilleau signa seul l'ordonnance, et qu'à ce dévouement généreux noo8 dûmes, nous, notre salut ; lui, sa disgrâce.
Bientôt les Américains entrèrent dans nos ports ; l'abondance semblait devoir amener une diminution dans le prix de la denrée, lorsque la colonie vit, à son grand étonnement, le sieur de Marbois entretenir la cherté en âChetaht par préférence une grande quantité de farines : c'était, disait-il, pour lès troupes... Jusque là leur subsistance était expédiée dé France en droiture, et, par conséquent, n'était point prélevée sur Içs besoins des colons ; mais depuis la rareté des grains en France, non seulement M. de La Luzerne n'avait pas pourvu à nos besoins, mais il avait eu la cruauté de nous charger, dans notre disette, de pourvoir à ceux de nos garnisons. Nous ignorions ce nouveau malheur ; non seulement il contribua à soutenir le haut prix des farines, mais il ouvrit la porte aux plus dangereux abus. L'intendant, sous prétexte d'acheter pour la troupe, fut soupçonné d'accaparer pour le compte du gouvernement. Ce soupçon se changea presque en certitude, quand on vit affiché, dans un nouveau moment de détresse, que le gouvernement vendrait pour 120 livres ên détail, ce qu'on avait pu se procurer à 80 livres en gros. Le souvenir des biscuits gâtés se retraça douloureusement dans toutes les têtes. On Observa que le sieur de Marbois avait chez son beau-père, à Philadelphie, des magasins de farines qu il avait proposé de transporter dans la colônié ; et de cette masse de remarques sur un monopole dont la rareté d'Un aliment nécessaire acdréditait le bruit, et dont la négligence du ministre avait été la première cause, il résulta que M. de La Luzerne fut trouvé coupable de n'avoir pas surveillé un objet aussi important que la subsistance d'une colonie immense, spécialement confiée à ses soins; plus coupable d'avoir sévi contre l'administrateur généreux qui avait appliqué si à propos le remède au mal; enfin, plus coupable encore de n'avoir pas prévenu en temps utile ses çoopérateurs, à Saint-Domingue, de l'état de pénurie où se trouvait le royaume, de n'avoir pas même approvisionné les troupes dans le moment où la disette se faisait ressentir à tous les habitants, et d'avoir autorisé ou toléré de la part de i'intendant, des accaparements inutiles dans l'abondance, odieux dans la disette, et qui, dans des circonstances critiques, deviennent tôt ou tard le prétexte fâcheux des insurrections les plus dangereuses.
Ce que je viens, Messieurs, d'avoir l'honneur de vous exposer, n'est point un récit; ce sont les plaintes de nos commettants dont nous ne sommes que les organes, et nous avons en main toutes les pièces originales et justificatives à l'appui.
Signé : Chabanon ; Laborie; Rouvray ; Reynaud ; Courrejolles ; Magallon ; le chevalier de Marmey ; de Thebaudière; de "Villeblanche ; Cocherel; le
comte O'Gorman; le marquis de Perrigny, et de Gouy d'Arcy.
Gollationné par nous secrétaire du comité des rapports de l'Assemblée nationale, le 1er mai 1790. Signé : Anthoine.
DOUZIÈME CHEF DE DÉNONCIATION.
Maintenue opiniâtre d'un intendant proscrit ; rappel soudain d'un gouverneur cher à la colonie.
Vous n'avez point oublié, Messieurs, qu'en octobre 4788, le nouveau ministre de la marine avait eu pour successeur, dans le gouvernement générai de Saint-Domingue, M. le marquis du Chilleau. Le roi, Un peu malgré son ministre, avait fait de ce poste important, la digne récompense du vainqueur de la Dominique, qui, après avoir conquis cette île dans la dernière guerre, s'y était fait adorer en la gouvernant jusqu'à la paix.
Ge général, parti avec des instructions ministérielles que nous avions lieu de craindre, avait pris terre au Port-au-Prince dàhs les derniers jours de cette même année 1788.
L'intendant essaya de circonvenir le nouveau général et de l'affilier à ses principes; mais ce dernier, dès qu'il eût reconnu le terrain, remercia son guide, c'est-à-dire qu'il ne voulut plus de bandeau : franc, loyal, vertueux, il ne voulut voir que par ses yeux, commander par sa raison, gouverner par la loi. Cette manière d'être était Incompatible avec Celle du sieùr de Marbois ; de là des différends dans leurs opinions, dè là des aigreurs dans leurs discussions, de là de l'humeur dans leurs dispositions respectives, de là enfin une opposition publique et soutenue dans leurs actions, et un éloignement qui finit par rendre tout rapprochement inutile.
Un exemple frappant Vient à l'appui de cette assertion. La disette se fait sentir â Saint-Domingue : M. du Chilleau et son collègue ouvrirent, aux termes des ordonnancés, les trois ports d'entrepôt aux farines américaines, et attendirent de cette mesure le retour de l'abondance. Mais l'abondance ne revint pas, pârce que les Américains n'avaient pas liberté d'exporter de ces ports, en payement de leurs farines, dès denrées coloniales. Le gouverneur Voyant que lé mal ne cédait point au remède jugea le remède insuffisant ; et convaincu que le salut du peuple est la loi suprême, et que toutes les prohibitions doivent tomber devant le besoin impérieux de conserver son existence, il proposa une seconde ordonnance, par laquelle il ouvrait aux farines étrangères tous les ports d'amirauté, et permet* tait aux navires qui les importeraient de se charger en retour des denrées de nos manufactures. Cette ordonnance devait être lë salut de la colonie ; l'intendant s'y opposa de toutes ses forces, et finit par refuser hautement de la signer.
Le gouverneur jugea froidement le résultat de ce refus ; il ne se dissimula pas qu'il fallait se perdre ou perdre la colonie. Il ïrhésita pas, il Signa seul l'ordonnance, il la porta au conseil Souverain de la colonie ; et cette cour, électrisée par lé dévouement patriotique du Decius français, osa, en présence de l'intendant lui-même, enregistrer unanimement cette ordonnance si nécessaire, et lui donner ainsi publicité et force de loi. La colonie fut sauvée ; mais on dit que
l'audacieux intendant eut assez de confiance dans l'aveuglement du ministre, pour lui mander qu'il fallait qu'il optât entre M. du Ghilleau et lui.
Ici, Messieurs, je dois vous supplier de bien observer les époques. Cette lettre et cette menace de l'intendant arrivèrent à Versailles le 29 juin, c'est-à-dire six jours après le 23, et quatorze jours avant celui de la Révolution. Le même bâtiment nous apporta des lettres de nos commettants et des ordres précis sur la conduite que nous avions à tenir.
La députation de Saint-Domingue se transporta tout entière chez M. le comte de La Luzerne, pour lui dénoncer la perfidie de l'intendant, et exalter auprès de lui la magnanimité du gouverneur. De grandes vérités lurent dévoilées dans deux conférences successives, et M. de La Luzerne n'en nierait pas une seule phrase, puisque nous étions dix témoins. Toutes deux se terminèrent par la demande expresse de notre part du rappel de M. de Marbois, et d'une approbation formelle de la conduite de M. du Chilleau.
Voici la réponse du ministre après la dernière entrevue : « Je ne puis me dispenser, Messieurs, « de donner une petite réprimande à M. du Chil-« J» au, parce qu'il a manqué aux formes; mais je « vais rappeler sur-le-champ M. de Marbois , « puisqu'il paraît que la colonie le désire. »
Ces propres termes de M. de La Luzerne furent transmis par nous le même jour à nos commettants. Quelle fut notre surprise, lorsqu'au milieu des secousses violentes qui agitaient la cour, le conseil, l'Assemblée nationale à Paris, et toute la Fiance, nous apprîmes que M. le marquis du Chilleau avait été rappelé secrètement, que son successeur avait été nommé secrètement, qu'il était parti très brusquement, que déjà il était sous voile, que, par conséquent, le ministre nous avait trompés indignement, qu'il avait craint que lAssemblée nationale n'éclairât la religion du roi; et nous vîmes alors clairement que, dans ces jours de fermentation et de désordre, où quelques conseillers coupables étaient parvenus à élever, entre le monarque et la vérité, un mur d'erreurs et de mensonges, M. de La Luzerne, par une connivence criminelle avec les ennemis de la patrie, s'était réservé le soin de maintenir dans nos possessions d'outre-mer le despotisme odieux que la franchise américaine voulait uénoncer à la nation.
Et remarquez, Messieurs, quelle importance le ministre de la marine attachait à ce secret ! Son insouciance habituelle fit place, en cette occasion, à la vigilance la plus active ; il craignit que l'expéditionnaire des patentes de gouverneur général ne laissât transpirer cette disposition, et ne fit point expédier le brevet; il craignit que l'armement d'une frégate pour Saint-Domingue ne donnât quelques soupçons: il envoya l'ordre à Brest d'armer une frégate pour l'Inde, de l'approvisionner pour l'Inde, et de l'expédier pour l'Inde avec la personne de M. de Peynier. Il ne pouvait pas ignorer que cette destination simulée pour les régions les plus lointaines coûterait en pure perte à l'Etat 60 à 80,000 francs, plus ou moins, au delà d'un frét pour nos colonies ; mais dans cette crise violente qui devait décider de l'esclavage ou de la liberté française, dans ces moments désastreux où leconseil,au milieu de la paix, prenait contre la nation toutes les précautions que des hostilités étrangères auraient pu seules justifier, qu'était-ce que 100,000 liv. même prises sur le Trésor public, pour conserver à un
ministre, auquel il n'en coûtait rien, un empire absolu que rien alors ne semblait plus détruire?
Nous sommes donc fondés à conclure que, dans cejchef capital, M. de La Luzerne fut coupable de n'avoir pas voulu, dans une correspondance très claire, dont nous avons vu une partie, distinguer les calomnies de 1 intendant de la loyautédugou verneur; d'avoir sacrifié M.du Ghilleau, vertueux et chéri, au sieur de Marbois, prévenu et détesté; qu'il fut plus coupable, lors des plaintes graves et sans répliques que nous lui portâmes contre l'intendant, de nous avoir formellement promis son rappel, lorsqu'il était bien loin de le rappeler ; de nous avoir dit de lui-même que notre gouverneur général ayant péché contre la forme,
11 ne pouvait se dispenser de lui faire une légère réprimande, lorsque l'ordre de son injuste rappel était déjà parti ; qu'il fut bien plus coupable, puisque ce délit-là, Messieurs, appartient tout entier à la nation, d'avoir, entre le 23 juin et le
12 juillet, disposé avec despotisme du sort entier des colonies, et fait courir à la France le hasard d'une insurrection que le patriotisme aurait réprouvée, mais qui, dans les premiers moments d'une fermentation toujours dangereuse, pouvait nous faire perdre la plus importante de ces possessions si précieuses pour la métropole.
Enfin, qu'il fut plus coupable encorede ne s'être prêté à ces manœuvres criminelles qu'avec une parfaite connaissance de leur culpabilité ; jusqu'au milieu de la paix, il les obombrait du manteau mystérieux du silence et les couvrait d'un voile dont leTrésor public faisait les frais.
Après ce récit, Messieurs, c'est à nos commettants eux-mêmes à vous prouver par les pièces originales qui sont entre nos mains, que le gouverneur était chéri, que l'intendant était honni, que le rappel de M. du Chilleau a été injuste, que le départ de M. de Peynier a été secret, et que son arrivée à Saint-Domingue, à la place d'un général adoré, a été l'étincelle d'une insurrection qui nous a fait trembler sur le sort de cette immense contrée, et dont vos sages décrets ont pu seuls arrêter les suites incalculables.
Signé : Chabanon, Reynaud, Laborie, Courre-jolles, Rouvray, Magallon, de Thebaudière, le chevalier de Marmey, de Villebranche, le comte O'Gorman, Cocherel, le marquis de Perrigny, et de Gouy d'Arcy.
Collationné et certifié la présente copie conforme à l'original déposé au secrétariat du comité des rapports, délivré par nous, député, secrétaire dudil comité, cejourd'hui. Sign : Anthoine.
TREIZIÈME CHEF DE DÉNONCIATION.
Lettre d'approbation dictée au roi, en faveur de l'intendant coupable.
M. le comte de La Luzerne, en cédant le l®r juillet dernier, Messieurs, comme nous avons eu l'honneur de vous le dire, à la demande que faisait l'intendant Marbois de rappeler le vertueux gouverneur avec lequel des principes diamétralement opposés ne lui permettaient plus de partager le commandement de Saint-Domingue, M. de La Luzerne, dis-je, ne s'était pas dissimulé la hardiesse de cette décision purement ministérielle, dans un moment où la France attentive à la voix de ses représentants, semblait ne vouloir plus obéir qu à des décrets nationaux sanctionnés par le souverain.
Cependant, il osa fabriquer dans ce jour désas-
treux deux arrêts du conseil, dont M. de Peynier fut porteur. L'un d'eux, suivant l'usage, cassait et annulait les ordonnances rendues par M. duChil-leau, quoique la colonie leur fut redevable de son salut; et l'autre, en prorogeant inutilement une prime considérable en faveur de la traite des noirs, offrait, à la vérité, un bénéfice aux armateurs négriers, mais pouvait coûter plus d'un million à l'Etat : la nation, sans être exigeante, aurait pu désirer d'être consultée sur ce point.
Ces deux arrêts si contraires au vœu manifesté à Saint-Domingue n'étant propres qu'à satisfaire M. de Marbois, qui les avait provoqués, et non à concilier en faveur de leur exécution une obéissance que les vexations inouïes de cet intendant n'avaient que trop affaiblie, M. de La Luzerne tourmenté sans doute également par le désir de servir son favori et par l'inquiétude d'une responsabilité certaine, si la nation triomphait du despotisme, imagina un moyen tout nouveau et qu'il eut l'aveuglement de croire infaillible pour mettre le despotisme lui-même à l'abri des recherches de la nation, en le plaçant plus immédiatement sous l'égide de l'autorité royale. Il écrivit, comme ministre, à M. de Marbois, une lettre dans laquelle il lui donnait ses ordres et lui traçait sa conduite ; et comme s'il eût craint, dans sa conscience, que les colons ne crussent plus à ces prétendus ordres du souverain, dont les ministres abusaient depuis si longtemps pour consacrer le malheur de la colonie, il osa, par un renversement bien étrange, au lieu d'ordonner au nom du roi, et de certifier par son seing la vérité de la signature royale, il osa, dis-je, déterminer son roi à certifier que son ministre n'était pour cette fois que l'organe fidèle de ses intentions, et ne trompait point ses sujets; et saisissant cette occasion précieuse d'annuler, d'un trait de plume, tous ces griefs effrayants que la colonie entière reprochait à son favori, même de sanctionner authentiquement tous les actes tyranniques de son administration, il abusa de l'empire que lui donnait sa place sur un monarque qui, quelles que soient ses propres lumières, ne peut pas étendre ses regards bienfaisants sur toutes les parties de sa domination dans les deux Indes, et il ne rougit point del'engageràécrire de sa propre main, au bas de sa propre lettre, à l'intendant Marbois, ce que Louis XIV n'écrivit jamais peut-être à Colbert :
« C'est par mon ordre exprès que M. de La « Luzerne vous écrit : continuez vos fonctions et « à m'être aussi utile que vous me l'avez été jus-« qu'ici ; vous pouvez être sûr de mon approba-« tion, de mon estime, et compter sur mes bontés.
« Signé : Louis.
« Versailles, 1er juillet 1789. »
Que de réflexions, Messieurs, l'analyse de ces quatre lignes royales ne présentent-elles pas aux législateurs de la France I
C'est par mon ordre exprès que M. de La Luzerne vous écrit. Ainsi donc, dans ces contrées éloignées, situées à deux mille lieues du trône, où l'authenticité des ordres du souverain est bien plus nécessaire que dans le continent, toutes les fois que le monarque n'écrira pas de sa main quelques phrases entières au bas de chaque ordre donné, sa signature royale, si révérée jadis, ne produira plus d'autre effet que de paraître au peuple un moyen subreptice que le ministre aura mis en œuvre pour le tromper.
Continuez à remplir vos fonctions : mais personne ne les disputait, et cette autorisation, sug-
gérée coupablement, n'a pu avoir, dans l'esprit de l'instigateur, d'autre sens déterminé que celui-ci : Si le peuple, justement soulevé contre vos prévarications, voulait, dans son désespoir, vous expulser de la colonie, dites-lui, et montrez-lui, de la main du roi, qu'il veut lui-même que vous continuiez à remplir vos fonctions.
Et à m'être aussi utile que vous me l'avez été jusqu'ici. Ah 1 que les rois sont à plaindre, puisque le meilleur de tous peut être abusé à ce point 1 Et aussi utile... Marbois... utile 1 J'avais cru jusqu'ici que, parmi les agents du pouvoir exécutif, ceux-là seuls étaient des serviteurs vraiment utiles, qui, pénétrés des intentions pures du souverain, et gouvernant par la loi, associaient saus cesse, dans tous les cœurs et dans toutes les bouches, le nom du roi aux expressions de la reconnaissance et de l'amour des peuples; mais ceux qui, substituant leurs passions particulières à celles d'un monarque qui n'en a d'autres que de faire le bonheur de ses sujets, n'emploient son nom sacré qu'à autoriser leurs malversations, couvrir leurs bévues ou récompenser leurs flatteurs, et qui finiraient par lui aliéner le cœur de ses peuples, s'il était possible à des Français de cesser d'aimer leur roi, ceux-là, non, sans doute, ne lui sont point utiles; je dis plus, ce sont les plus dangereux ennemis du trône, puisque toutes leurs actions tendent à avilir l'autorité dont le maintien est si nécessaire à l'ordre public.
Vous pouvez être sûr de mon approbation, de mon estime, et compter sur mes bontés. Est-il bien possible que ce soit à un sieur de Marbois que M. de La Luzerne ait fait adresser, par le premier souverain de l'Europe, ces paroles honorables qui mettraient le sceau de l'immortalité à la réputation d'un de ces hommes de génie et de vertu qui ont de temps en temps paru sur la surface du globe? Ahl quand notre excellent roi les traçait, avec complaisance, de sa propre main, il croyait qu'elles étaient la récompense de grands services, et il n'avait garde de penser qu'elles étaient destinées à couvrir de grandes fautes et à consacrer de grands délits; il ignorait qu'un jour, cet écrit rémunérateur viendrait se placer entre le coupable et la justice de la nation ; il ignorait que, lorsque la colonie entière dénoncerait au tribunal national des opérations désastreuses, des assertions évidemment fausses, des abus inouis d'autorité, des trafics honteux, des intrigues criminelles, des traits incroyables d'inhumanité, des exactions tyranniques, des dénis de justice révoltants, des oppressions cruelles, des calomnies atroces, des forfaitures prouvées, des jugements pervers, des concussions démontrées, erihn tous les délits dont le sieur de Marbois est d'autant plus coupable, qu'il a eu constamment l'adresse de s'associer pour complice le gouverneur, son collègue, ou le ministre, son supérieur, cet intendant serait à même de dire à tous les colons soulevés contre lui : Apaisez vos cris, et retirez-vous sans espoir de réparations ; toutes vos dénonciations sont des mensonges, puisque le roi a approuvé toutes mes actions, puisque le roi m'a accordé toute son estime, puisque le roi m'a promis toutes ses bontés.
C'est ainsi que le despotisme flottant entre l'espérance et la crainte, en renversant tous les principes, mettait l'autorité royale aux prises avec la puissance nationale, et, compromettant l'une et l'autre, lésait également toutes deux.
C'est ainsi que des expressions royales qui, depuis l'établissement de la monarchie, traversaient les mers pour la première fois peut-être sans altération; qui, pour la première fois
peut-être, avaient été fidèlement transmises aux habitants d'un autre hémisphère, au lieu de ne leur peindre que des sentiments de bienfaisance et d'appeler Tâïlégresse publique, la bénédiction de toutes les provinces et ia reconnaissance de tous les cœurs, altérées dans leurs sources par le souffle ministériel, produisirent des effets tout contraires et bien fâchçux, triomphe insultant du despotique intendant qni fil, à son détrompe, publier dans toutes les villes cette lettre si flat-r teuse de son roi; mépris plus insultant de sa part pour ses nombreux ennemis, douleur unanime, désespoir universel, insurrection générale et préparatifs de la scène la plus tragique dont l'exécution allait suivre, Bi la fuite précipitée du coupable n'eût épargné à la colonie une catastrophe sanglante.
Ainsi, tandis que le ministre engageait le toi à écrire de sa propre main à un administrateur : je vous approuve, je vous estime, je vous aime, les peuples, qui pe se trompent pas sur leurs persécuteurs, s'écriaient unanimemept : nous vous blâmons, nous Vous méprisons, nous vous détestons. Ainsi, M. de La Luzerne fut coupable d'avoir saisi un moment de trouble pour faire secrètement, dans son département, des dispositions extrêmement importantes sous les yeux de l'Assemblée nationale, sans la consulter, et contre le vœu formel des députés de Saint-Domingue; il fut plus coupable, sentant, comme il Je faisait, le danger de ces dispositions, d'avoir, à quelque prix que ce fût; tenté d'en maintenir l'exécution èntière ; il fut encore plus coupable d'avoir èssayé, pour échapper â la responsabilité qui l'attendait , un moyen absolument inusité, qui ne tend à rien moips qu'à mettre l'opinion au roi en contradiction avec le jugement des peuples ; enfin, en inspirant au monarque de tracer de sa main royale le témoignée le plus honorable en faveur d'un homme vraiment indigne de ses bontés, il s'est rendu véritablement coupable ét;envers la nation dont il voulait enchaîner la justice, et envers la majesté souveraine dont il a compromis les droits.
Ces réflexions, Messieurs, n'ont point échappé à nos commettante eux-mêmes. Ce sont eux qui nous ont expressément chargés de vous les transmettre; et de dénoncer ^l'Assemblée nationale ces abus et leurs sentiments. Nous vous supplierons d'examiner les pièces originales de la mission qu'ils nous ont donnée à cet égard.
Signé : Chabanon, ReynaUd, Courrëjolïes, La-borië, Magalloh, de Thebaudière, Rouvray, le chevalier de Marmey, le marquis de Perrigny, Gouy d'Arcy, de Villeblanche, Cocherel, le comte O'Gorman.
Gollationné et certifié la présente copie conforme à l'original déposé au secrétariat du comité des rapports. Délivré par nous député, secrétaire dudit comité, ce jourd'hui. Signé : Anthoine.
QUATORZIÈME PIÈCÇ COMMUNIQUÉE.
Extrait des registres des délibérations de l'assena Hée provinciale de la partie du nord de Sai/nt-Domingue.
tàe la séance du vendredi 22 janvier 1790, a été extrait cè qui suit :
Sur làReprésentation faite à l'assemblée ; d'une feuille imprimée, in titillée : Instructions (l'un propriétaire de biens situas fi Saint-Domin-
gue, résidant en .France, au porteur de sa procuration ; 2® d'une autre feuille imprimée contenant procuration d'un propriétaire colon, résidant en France, à son représentant à Saint-Domingue, relativement à la convocation et tenue ! des assemblées paroissiales, provinciales et coloniales; 3° d'un manuscrit contenant protestation par la chambre de commerce de Nantes contre une motion projetée par M. de Mirabeau, pour la suppression de.la traite des noirs; lecture faite de toute ces pièces, et sur l'avis donné par l'assemblée provinciale de l'Ouest, qu'un sieur de Saint-Germain est chargé d'une quantité considérable de ces imprimés pour les distribuer, et les faire passer sans doute aux divers fondés de procurations ; il a été remarqué que si les deux premières de ces pièces ne sont pas l'ouvrage de M. de La Luzerne, elles sont du moins trop conformes aux principes qu'il a toujours manifestés, et à ses vues particulières, pour pouvoir douter qu'elles ne soient le fruit de ses impulsions.
Que la recommandation consignée dans la pre-1 mière de ces pièces, de faire en sorte que le ! gouvernement conserve une grande force décèle bien l'esprit qui l'a dirigée; que la crainte qui y est annoncée qu'on n'ait déjà secoué le joug, jointe au désir qu'il ne soit opéré aucun changement s'accordent bien avec la demande que ce ministre a faite à l'Assemblée nationale de laisser subsister provisoirement le régime de Saint-Domingue tel qu'il était.
Qu'il est notoire que ce "n'a été que par les manœuvres sourdes de quelques hommes vendus au ministre, qu'il s'est forme à Paris une corporation de plusieurs colons à la tête desquels se trouvent ces hommes pervers et corrompus dont I le principal but a été de traverser la députation j de Saint-Domingue à l'Assemblée nationale ; que c'est par des insinuations perfides et mensongères qu'ils sont parvenus à fasciner les yeux de ces colons an point de leur faire adopter un plan qui, s'il était exécuté, non seulement ramènerait la colonie dans les fers des tyrans qui l'on constamment opprimée, mais même en opérerait bientôt la ruine totale.
Qu'en effet, U est inconcevable que ces colons se soient laissés induire à donner Ordre à leurs représentants d'acquiescer aux folles demandes des gens de couleur, dont l'accomplissement ne tendrait à rien moins qu'à supprimer la ligne de démarcation d'entré eux et les blancs ; ce qui, dans le système politique de la colonie, et sous tous les rapports, peut être regardé comme le renversement de tous principes constitutionnels.
Que cette révolution, si elle pouvait âvoir lieu, entraînerait certainement la perte de la colonie et la destruction des individus qui la composent; et qqe, pour en avoir conçu ou adopté l'idée, il faut être mal intentionné ou tombé en démence; qu'à la vérité les auteurs de ce projet n'en doivent 1 approbation des colons de 1 hOtel de Massiac qu'à l'ignorance absolue où sont la plupart d'entre eux, de tput ce qui peut concerner la colonie de Saint-Domingue, et les intérêts dont ils y ont hérité, ou à la sottise et à là conduite des autres.
Que ies habitants de Saint-Domingue n ont pas besoin de tuteur pour décider de ce qui leur convient ; qu'il est conséquemment bien inutile que des convulsionnaires se creusent ia tête pour enfanter des monstres ; que tous les systèmes concernant l'esclavage des noirs ou l'état des I affranchis n'intéressent et ne peuvent intéresser ' que la colpnie, tant qu'ils ne blesseront pas ses
rapports avec la métropole ; que c'est donc à la Colonie seule qu'appartient le droit de faire des changements à l'état actuel des choses, s'il y en avait quelques-uns à apporter.
Qu'il convient de déclarer à ces convulslon-naires que la colonie est très déterminée à n'admettre en ce genre ou en tout autre aucunes innovations que celles que l'assemblée eplonlale, différemment composée et organisée suivant lè mode et la lettre particulière du ministre, pourra trouver utiles.
' Qu'il n'est point à craindre jue l'Assemblée accueille la motion de M. de Mirabeau tendant à la prohibition de la traité des noirs, que la nation n'abandonnera pas ainsi une partie d'elle-même qui fait consister sa gloire et son bonheur dans les liens étroits qui les unissent ; qu'elle ne forcera pas ses frères, ses enfants, seâ alliés enfin, à recourir à des étrangers pour en Obtenir des moyens qu'ils regretteraient infiniment de ne plus teqir de la mère-patrie.
Qu'il devient pourtant nécessaire de dissiper, s'il est possible, les tentatives que les ennemis de la nation ne cessent de faire contre une colonie dont on ne peut compromettre l'existence sans compromettre scelle de la métropole; que tous ces ouvrages insensés, des projets pernicieux et incendiaires, travaillent cette contrée depuis trop longtemps; que, si elle a été assez heureuse pour éviter, jusqu à ce jour, tous les dangers dont on l'a environnée, ses représentants ne doivent pas ralentir leur vigilance pour prévenir les suites des troubles et des inquiétudes que ses ennemis cherchent à y introduire.
Par toutes ces considérations, et après en avoir mûrement délibéré, l'Assemblée déclare nuls et de nul effet toutes procurations et tons pouvoirs limités et impératif? adressés par les cotons résidant en France à leurs représentants dans cette colonie, concernant la convocation et tenue des assemblées paroissialesprovinciales et coloniales, et tout ce qui peut y être relatif ; fait défense auxdits représentants d'en faire aucun usage ; défend pareillement à toutes personnel. de quelque qualité et condition qu'elles soient, de distribuer aucune'dë ces procurations ou pouvoirs, ainsi que les instructions qui les accompagnent, et, à tous officiers publics, d'en recevoir le dé-pôt, le tout sous telles peines qu'il appartiendra, n'autorisant, quant à ce, que les pouvoirs généraux et illimités.
; Ordonne à tous propriétaires de la province du Nord actuellement en France, et notamment ceux qui composent lë conciliabule de l'hôtel Massiac, de se rendre en cette colonie dans ie délai de huit ïnols, pour partager le péril commun dônt elle est menacée et pôur l'aider de leurs lumières, ou d'envoyer, dans le même délai, a leurs fondés dé procuration, des pouvoirs illimités, dans lesquels Ils Seront ténus d'insérer leur renonciation formelle à se mêler directemént ou indirectement des intérêts de la colonie, et à s'assbmbler, pour cet effet, soit audit hôtel ou ailleurs que dans la colonie même ; .et ce, sous peine de Confiscation, au profit de là province, de leurs revenus, et sous telles autres peines ultérieures qu'il appartiendra.
Enioin't néanmoins aux députés de la province du Nord de rester auprès de l'Assemblée nationale, pour recevoir les instructions ou ordres que la colonie sèra dans lë cas de léur faire passer.
Proteste contre toutes motions qui pourraient être faites concernant le régime et la constitution
particulière de la colonie; déclare que.c'est aux seules assemblées provinciales et coloniales qu'appartient l'une et l'autre. „ , y
Et attendu qu'il est constant çme le comte de La .Luzerne est l'ennemi juré de la colonie, qu'il a toujours cherché à lui nuire par tous les moyen? possibles, l'assemblée le dénonce à l'Assemblée nationale comme coupable d'avoir abusé de la confiance que le roi lui avait accordée» en opérant, conjointement avec ies sieurs L. .. et Barbé de Marbois, la réunion des conseils de Saint-Domingue, malgré qu'ils eussent la liberté et l'ordre de ne pas l'opérer si elle était nuisibje.
D'avoir, contre sa conscience et son devoir, soutenu cet ouvrage v dont il a savouré les effets funestes.
D'avoir, avec le sieur de Marbois? vexé les colons, et notamment ceux de cette dépendance, dans toutes les parties de l'adtninistratio;n, et plus particulièrement dans celle des financés, ayant poussé cette vexation jusqu'à ôter aux colons de fa province du Nord la disposition de leurs cotisations et droits de fabrique, destinés à là desséfte des cures.. ' V-'' ', 'ïi
D'avoir ensuite, quand il a été ministre, secondé les vexations, les injustices, les rapines et les caprices du sieur de Marbois, avec une ponctualité et une promptitude dont il n'y a jamais eu d'exemple. i , ,
D'avoir refusé de donner des ofdres pour faire arrêter les siéurs M..... et G.,,.., àccusés de s'être embarqués avec des milliers de fusils, pour tenter une insurrection dans Ja çôlonle,
D'avoir pareillement refusé dp s'opposer à l'embarquement des écrits et estampes déstiqés à faire naître les plus grands désordres, produire un bouleversement total dans la colonie et faire courir des risques presque certains à la sûreté individuelle de tous ses habitants.
D'avoir fait les plus grands efforts pour empêcher l'admission des députés de Saint-Domingue à l'Assemblée nationale-,, ( 'à t » D'avoir favorisé et de favoriser encore les démarches des gens de couleur, pour obtenir Ije succès d'une demande dont il Sait bien que le résultat serait l'anéantissement de la colonie.
D'avoir, enfin, affecté de ne pas envoyer 1'prdre pour la prestation de serment des troupes, qui nfa été faite, au Port-au-Prince,, que le 15 de çe mois, et quand le.général s'y est vu forcé, ,Dé-fendi en conséquence, à toutes personne8 » de quelque qualité, condition et état qu'elles soient, de correspondre en aucune manière avec ledit sieur comte de La LUzernë, à peiné d'être réputées traîtres à la patrie ett comme telles, poursuiyie's et punies suivant là rigueur des ordonnance?-,
Ordonne que le présent sera enregistré SU Conseil général du Gap et juridictions de sa dépendance; qu'il sera imprimé et affiché partout o(i besoin §era, et qii'il ëh sera envoyé des exemplaires aux assemblées provinciales c|ès partie^ de l'Ouest et dh Sud, à tous les comités de la Correspondance, dans toutes les colonies françaises ët dans tous les ports de mer, ainsi que dans les pri,ncipaies villes de France. •
Signé : Bacon de la Chevalerie, président ; > . Geanty, secrétaire. Gollationné : Sourbieu, secrétaire;
Larche vêque^Thibault, président >
Plu? ba,s écrit : . ; , ,
Imprimé par ordre de l'assemblée provinciale du Nord, ne varietur.
Signé : le comte de Gouy, fondé de pouvoirs de la députation.
Collationné à l'original déposé au comité des rapports de l'Assemblée nationale, par nous, secrétaire dudit comité, à Paris, le 29 avril 1790.
Signé : Anthoine.
QUINZIÈME PIÈCE COMMUNIQUÉE.
Lettres adressées aux députés de Saint-Domingue.
An Cap, le
Une grande révolution s'est opérée dans la colonie comme en France. La verge tyrannique des administrateurs de cette belle et infortunée colonie a été mise en éclat, et l'autorité ministérielle, entée sur le trône, a fait parmi nous à la suprême loi le salut, c'est-à-dire la volonté du peuple.
Vous avez appris, Messieurs, les mouvements qu'a excités dans toute la colonie la secousse donnée à la métropole par l'esprit régénérateur. Ces mouvements ont été aussi mesurés que leur principe était noble, et une gloire impérissable pour la colonie sera d'avoir su être libre sans effusion de sang. Une seule victime a été immolée à la sûreté publique; cet exemple nécessaire a montré tout à la fois notre justice, notre force et notre modération.
C'est dans la province de l'Ouest, et comme au eantre de la colonie, que s'est fait cet exemple, et c'est du sein de notre province que sont éclos et que se sont propagés les germes de l'heureuse régénération dont nous sommes prêts à recueillir les fruits.
Ces germes précieux, d'abord fécondés par le comité qui s'était formé au Cap depuis dix-huit mois, et qui a, le premier, appris aux colons de se réunir, ont enfin reçu d'une fermentation générale le développement qui leur était nécessaire pour produire le nouvel ordre de choses auquel tendaient depuis si longtemps les vœux de tous ceux qui habitent la colonie.
Sur les ruines d'un comité qui avait rempli sa destination, en préparant les esprits, et qui ne pouvait répondre à de plus hautes destinées, s'est élevée, dans cette partie de la colonie, la première colonie provinciale ; et aussitôt on a vu ce que pouvaient, pour le bonheur d'un peuple, les lumières réunies de ses représentants, lorsque la liberté la plus parfaite préside à leur choix comme à leurs opérations.
Un même serment a bientôt uni tous les citoyens entre eux, et les a tous confondus dans un seul sentiment, celui du patriotisme. Tous les
Î>ouvoirs se sont peu à peu ralliés à leur centre ; a sûreté publique a été raffermie par des mesures qui ont prévenu tous les troubles; les abus ont été éclairés de toutes parts, et plusieurs ont déjà subi une réforme salutaire; le désordre des finances a cessé avec l'émigration des fonds publics hors de la province; les milices, dont l'établissement a été un objet de rébellion dans cette colonie, parce que c'était un moyen de plus d'oppression dans la main du gouvernement, sont devenues un objet d'ardeur universelle, parce que le patriotisme leur a donné son nom comme son empreinte; enfin, la justice suprême, qu'un complot odieux avait bannie de cette province, pour l'enchaîner dans le repaire du despotisme, a été rappelée dans son sanctuaire par le vœu général des justiciables d'un conseil qui
n'avait cessé d'être plus vivement regretté à mesure que l'arbitraire des administrateurs pesait plus fortement sur la liberté, l'honneur et la fortune des colons. Ce vœu, qui est le cri du besoin, et qu'on ne saurait contrarier sans crime, a pressé les représentants d'une province vivement irritée d'un arrêt insolent et incendiaire, rendu par le conseil supérieur du Port-au-Prince, de faire cesser, enfin, la réunion frauduleuse et despotique de deux tribunaux, dont l'association forcée n'a donné, jusqu'ici, que la ruine ou la mort des plaideurs, l'enrichissement des juges et la servitude de tous.
Telles sont, Messieurs, les opérations de l'assemblée provinciale du Nord : leur vigueur vous annonce l'énergie qui règne dans cette province, et leur sagesse vous prouve en même temps que cette énergie n'est pas l'effet d'un mouvement tumultueux et passager, mais qu'elle a pour cause la résolution froide et ferme de secouer à jamais un joug qui n'a que trop longtemps courbé des têtes fièreset ennemies, désormais irréconciliables, non pas d'une autorité légitime, c'est-à-dire fondéesur lesdroitsimprescriptiblesetinaltérables des sociétés, mais de cette autorité égoïste, insultante, et tôt ou tard révoltante, qui veut soumettre tout un peuple au caprice de quelques hommes, ou qui cherche à étendre les lois au delà de leur sphère naturelle, au delà des bornes qui leur sont circonscrites par les divers rapports des sociétés entre elles, et par leurs intérêts généraux et particuliers.
L'assemblée provinciale du Nord vous charge, Messieurs, de présenter incessamment à l'Assemblée nationale et au roi le tableau de ses opérations, et d'en demander la sanction. Cette sanction doit porter nommément : 1 sur la formation même de l'assemblée, comme assemblée provinciale, sauf le mode ultérieur qui sera déterminé pour son organisation dans la prochaine assemblée coloniale ; 2° sur la transformation des milices, telles qu'elles étaient ci-devant établies, en milices patriotiques, uniquement sous la dépendance de la province dont les pouvoirs résideut dans son assemblée provinciale ; et 3° sur le rétablissement du conseil supérieur du Cap, que l'assemblée provinciale du Nord n'a fait que remettre en exercice, ce tribunal n'ayant jamais été supprimé, mais simplement réuni, d'une réunion qui s'est opérée contre toute vérité, contre toute justice,contre toute règle, contre tout droit, contre toute raison.
Les arrêtés relatifs à ces trois objets demandent, Messieurs, une sanction pure et simple, parce que ces trois objets sont essentiels à la sûreté et à la félicité de cette province ; le refus de leur sanction entraînerait les plus grands maux, et on peut en juger par les transports d'allégresse qui ont éclaté ici dans les mémorables journées du 6 et du 11 de ce mois. Vous en avez les relations ci-jointes.
Il convient aussi, Messieurs, que les pouvoirs de l'assemblée provinciale du Nord, tels qu'ils sont exposés dans ses arrêtés et dans les autres actes émanés d'elle, soient formellement reconnus, parce qu'il est impossible de ne pas s'en rapporter, pour ce qui est des vrais intérêts, aussi éloignée de la mère-patrie que l'est Saint-Domingue, aux représentants que cette province s'est elle-même choisis, et qui, êiant sur les lieux, sont plus à même incontestablement de connaître ce qui lui est avantageux ou nuisible.
La conduite, soit de M. de La Luzerne, soit des adm inistrateurs, soit du conseil supérieur qualifié
de Saint-Domingue, ne justifie que trop, Messieurs, la nécessité où nous avons été et où nous sommes encore de nous administrer nous-mêmes.
M. de La Luzerne a plus que perdu notre confiance, il est notre ennemi; tyran d'autant plus dangereux, qu'il semble n'être venu à Saint-Domingue que pour nous nuire d'une manière plus efficace par la présomption mensongère qu'élève en faveur de ses connaissances le séjour qu'il a fait dans cette colonie. On ne le voit occupé que du soin de la pressurer, de la tourmenter et delà retenir plus fortement que jamais sous l'empire du despotisme ministériel, lorsque toutes les provinces du royaume ont eu le bonheur de s'en affranchir. Il ne se borne pas là, et il pousse sa perfidie jusqu'à favoriser sous main les insurrections d'une caste qui tient tout des bienfaits de ses anciens maîtres, et à flatter bassement, dans sa correspondance avec elle, des espérances dont l'accomplissement ne serait rien moins que la subversion totale de la colonie.
Il était temps que ce tyran fût démasqué, confondu et puni. Après l'avoir dénoncé au public, nous le dénonçons à l'Assemblée nationale; et comme elle est juste, elle nous en fera justice. Nous avons tous applaudi à la dénonciation que vous en avez déjà faite par la bouche de M. Gouy d'Arcy. Notre arrêté pris à cette occasion, et que nous vous enverrons très-incessamment, vient à l'appui de cet acte de courage ; et loin que vous deviez reculer, nous vous donnons charge expresse de poursuivre vigoureusement cette dénonciation : les preuves ne vous manqueront pas.
Vous en avez une surtout des plus victorieuses dans le manquement qu'il a commis, en n'envoyant pas au gouverneur de cette colonie l'ordre de faire prêter aux troupes et milices le serment décrété par l'Assemblée nationale le 10 août dernier. Ce défaut d'ordre n'excuse pas sans doute M. de Peynier, qui ne pouvait jamais se compromettre, en prenant sur lui de faire un acte qu'il savait être conforme aux intentions du roi lui-même, puisqu'il n'ignorait pas que le décret de l'Assemblée nationale, du 10 août, avait été sanctionné par Sa Majesté, et envoyé dans toutes les provinces. Mais tout coupable et tout suspect que se soit rendu M. de Peynier, par sa négligence et son refus de faire prêter le serment décrété par l'Assemblée nationale, refus qui durerait encore s'il n'avait été forcé de se rendre au vœu de l'assemblée provinciale de l'Ouest, il n'en est pas moins vrai que c'est le défaut d'ordre, de la part de M. de La Luzerne, qui a été le motif ou le prétexte dont M. de Peynier a cherché à colorer sa conduite. Qui sait même si ce gouverneur n'avait pas des défenses secrètes de faire prêter un serment si contraire aux vues despotiques dJune administration qui a toujours mis dans le militaire sa force et son appui, poar nous subjuguer et nous vexer?
Nous sommes à jamais soulevés contre cette infâme administration, où tous les pouvoirs se réunissent pour faire respecter les volontés arbitraires de deux hommes dont tous les subordonnés se regardent comme les aveugles instruments, et qui ne se considèrent eux-mêmes que comme les agents purement passifs d'un ministre qui gouverne seul sous l'autorité empruntée du monarque perpétuellement surpris, dont la confiance est d'autant plus exposée à l'abus qu'on peut en faire, qu'il est plus honnête.
Il faut qu'un aussi mauvais ordre de choses
cède à un nouveau; que les lumières de notre siècle tendent à l'introduire partout, et qui est peut-être encore plus nécessaire dans une colonie, qui ne peut prospérer qu'autant que ceux qui en forment la population la plus précieuse jouiront d'une plus grande somme d'égalité et de liberté, pour les dédommager d'une plus grande somme de travaux et de risques de toute espèce, dont la métropole retire en dernier résultat tous les avantages.
Loin donc que nous soyons disposés à souffrir qu'on laisse à un gouvernement oppresseur la force dont il a si longtemps abusé, nous avons au contraire résolu de le réduire aux bornes que le droit naturel et des gens lui prescrivent ; et nous ne vous cachons pas, Messieurs, que ce qui a achevé de nous indigner contre la con luite des colons qui s'assemblent à l'hôtel de Massiac, c'est principalement leur opposition à nos principes sur ce point, laquelle éclate, non seulement dans le mode qu'ils se sont ingérés de donner au ministre pour la convocation d'une assemblée générale de la colonie, mais encore certaines instructions imprimées, envoyées ici à un très grand nombre de fondés de procuration, et qui ne peuvent partir que de leur conciliabule.
Aussi l'assemblée provinciale du Nord vient-elle de prendre un arrêté pour les obliger, ainsi que tous les autres colons qui se trouvent en France, dese rendreincessammentdansla colonie, ou de cesser absolument des assemblées tout au moins inutiles, et d'envoyer à leurs fondés de procuration des pouvoirs illimités pour voter dans les assemblées paroissiales, provinciales et coloniales, sur les intérêts généraux de ce pays, si tant est qu'il soit décidé que des colons absents peuvent transmettre de pareils pouvoirs à leurs représentants, en laissant aux Américains qui sont en France l'alternative de venir ou de cesser leurs assemblées, et d'envoyer des pouvoirs indéfinis. Nous les traitons en frères; s'ils s'obstinaient à vouloir nous faire 1a loi, nous serions forcés à les traiter en ennemis. C'est être ennemi de la colonie, que de l'abandonner, sans excuse légitime, dans la position critique où elle se trouve; c'est être bien plus son ennemi, que de prétendre la faire passer de l'odieux despotisme des ministres, sous l'orgueilleuse aristocratie des riches.
Au reste, Messieurs, quoique l'assemblée provinciale du Nord désapprouve les traverses que l'hôtel de Massiac a apportées à votre députation, elle ne trouverait pas moins mauvais que vous prissiez le moins du monde sur vous de rien proposer à l'Assemblée nationale touchant la constitution de la colonie, ou qui tendît à donner une atteinte quelconque à ses privilèges, d'autant plus qu'elle est tout à fait hors des termes dans lesquels se trouvent les autres provinces du royaume; con tentez-vous de veiller pour elle, et attendez ses ordres sur quoi que ce soit. La voilà sur le point de s'assembler ; elle fera elle-même sa constitution, et alors elle vous fera parvenir les nouveaux pouvoirs et les nouvelles instructions dont l'état actuel dés choses vous fait un devoir indispensable.
Surtout, Messieurs, veuillez mettre plus d'activité dans votre correspondance avec nous. 11 est affreux que nous n'apprenions que par les papiers publics, ou par des lettres particulières, ce dont vous deviez être les premiers à nous instruire. Il ne faut pas vous dissimuler que cette insouciance de votre part peut amener un refroidissement dans la confiance dont vos conci-
toyens tous ont honorés, et qu'il vous est d'autant plus nécessaire de la justifier dans ces circonstances, que le conciliabule de l'hôtel de Mas-siac et ses adhérents, font tous leurs efforts pour vous noircir auprès de la colonie-
Nous avons l'honneur d'être avec les sentiments de l'attachement le plus cordial et de la fraternité la plus intime, Messieurs et chers compatriotes, vos très humbles, etc.
Les membres de Vassemblée provinciale de Saint-Domingue ;
Signé : LarchevÈQUJS-Thibàud, président.
p.-S. — Nous vous avons adressé le primata de cette lettre par le navire YAstrée, du Havre, capitaine Poupel, sous le couvert du président de l'Assemblée nationale. Ce navire a mis à la voile le 30 janvier.
Ce Ie* février 1790, ne varietur. Signé : le comte de Gouv, fondé des pouvoirs de la députation.
Collationné et certifié la présente copie conforme à l'original déposé au secrétariat du comité des rapports. Délivré par nous, député, secrétaire dudit comité, cejourd'hui. Signé : Anthoine.
« Paris, le
« Monsieur le Président, « J'ai l'honneur de vous envoyer un exemplaire de ma réponse à la dénonciation faite contre moi. Lorsque j'ai commencé à m'occuper de ce travail, je ne projetais point de le faire imprimer; mais les chefs d'accusation sont si nombreux, l'affaire est si compliquée, et le rapport en sera nécessairement si long, que l'attention la plus suivie ne pourrait suffire à ceux qui n'auraient point une connaissance préalable des bases de ce rapport. J'ai cru, Monsieur, que j'avais le droit, et qu'il était même de mon devoir d'éclairer la justice de chacun de Messieurs les députés, puisque c'est par eux tous que je doiB être jugé.
« J'ai l'honneur d'être « avec un sincère attachement, « Monsieur, « votre très humble et très obéissant serviteur, « La Luzerne. »
avant-propos.
Dénoncé aux représentants de la nation, j'ai cru devoir présenter à chacun d'eux ma défense appuyée de pièces justificatives.
Ces pièces sont peu nombreuses, mais elles suffisent.
Je me suis volontairement abstenu de produire beaucoup de témoignages que j'aurais pu invoquer.
Des actes authentiques, des pièces qui ont été imprimées et publiées, soit en France, soit dans
la colonie, à une époque où l'on ne présumait pas qu'elles serviraient à ma défense, m'ont paru mériter un (out autre degré de foi que des lettres de particuliers, écrites d'une autre partie du monde ; lettres qu'on m'aurait peut-être reproché d'avoir sollicitées, et que, dans l'amertume de la critique, on aurait pu même suspecter d'antidaté ou de contrefaçon. Un temps fort long se serait écoulé avant que j'eusse pu dissiper de tels soupçons; il n'est pas àisé de constater la vérité à une aussi grande distance ; et, dans une affaire de la nature de celle-ci, on ne peut être trop en garde contre les pièces qu'on produit soi-même.
Celles sur lesquelles j'appuie principalement ma justification, sont les édits, les ordonnancés, les règlements et les arrêts ; j'en cite un très grand nombre, je ne les ai point fait réimprimer, ils sont connus ; ils ne peuvent être altérés, ils ont une date certaine ; On les trouve dans le recueil des lois de Saint-Domingue, publié par M. Mo-reau de Saint-Merry, en six volumes in-4°.
Le papiers publics de la colonie constatent aussi la fausseté de plusieurs imputations qui m'ont été faites. J'ai indiqué, dans une note, que ces journaux sont exactement envoyés à là bibliothèque du roi, où l'on peut les consulter.
Je n'avais point eu d'abord le projet de faire imprimer et d'insérer dans mon mémoire les quinze pièces qui m'ont été communiquées, et qui contiennent les chefs de dénonciation.
Quel qu'en soit le syle, comme je désire surtout faire discerner la vérité et en faciliter le plus scrupuleux examen, mon vœu personnel eût été de présenter les dénonciations avéc ma défense : je regrettais que chaque membre de l'Assemblée nationale ne pût pas avoir en même temps sous les yeux le reproche et la réponse ; mais des motifs de délicatesse me retenaient, je voulais ne blesser celle de qui ce soit.
Ma discrétion serait aujourd'hui superflue, les dénonciations vont être publiques, puisque M. de Gouy d'Arcy a annoncé dans le supplément au Journal de Paris, du 14 juin 1790 n° 39, qu'elles étaient sous presse. Je joins donc au mémoire qui les réfute, les quinze pièces produites par les dénonciateurs, telles quelles m'ont été délivrées le Ie® mai, après avoir été collattonnées et signées par celui de MM. les députés qui est secrétaire du comité des rapports.
Cette addition retardera de quelques jours l'envoi du mémoire; le 18 de ce mois, lorsque je l'ai signé et envoyé en manuscrit au comité des rapports, il était déjà presque entièrement imprimé. Il en a résulté qu'on n'a pu se conformer a un décret postérieur de l'Assemblée nationale, èt les noms propres se trouveront précédés des titres qu'il était d'usage d'y annexer.
MÉMOIRE.
Des députés de Saint-Domihgue ont crû pouvoir me dénoncer sous le double rapport d'ancien gouverneur de cette île, et de ministre de la marine. J'avais, sans doute, le droit d'exiger^ avant de répondre à la communication de leurs
Ereuves (a), d'exâminer si la loi de la reSponsa-ilité nouvellement portée, peut avoir un effet
rétroactif à mon égard, mais cette marche était trop lente pour moi. L'innocence ne doit pas rester soupçonnée, l'idée d'une dénonciation m'importune, ie vais au devant du combat que l'ôn veut me livrer.
Les exemples de ministres cités au tribunal de la nation, lors même qu'ils sont honorés de la confiance de leur roi, sont rares; mais l'homme juste qui a soumis toutes ses actions au tribunal de sa conscience, qui n'a rien ordonné qu'il ne crût devoir l'être, qui ne s'est servi d'une autorité légitime que pour maintenir la tranquillité publique, qui a respecté l'humanité, qui en a défendu les droits sacrés jusque dans 1 individu le plus obscur, est supérieur à tous les événements. Il répond à qui l'interroge, et sans rien révéler de ce que l'intérêt sacré de la nation lui ordonne de tenir secret, il trouve dans le résultat même de sou administration, de quoi justifier les principes qui l'ont dirigée.
Je sens combien serait délicate la position où je me trouve, sous un règne où l'on ne se serait assujetti à d'autres règles qu'à celles qu'auraient indiquées les circonstances, où une sombre politique aurait jeté un voile mystérieux sur les moyens qu'on aurait employés, où le grand mot d'intérêt de l'Etat aurait tout permis et étouffé les réclamations les mieux fondées; maïs que peut avoir à rçdouter le ministre d'un roi juste par caractërb,J confiant par principes, qui n'a jamais voulu régner que par la loi et qui rejette tout ce qu'elle im prouve? Le développement de l'administration du ministre est nécessairement alors l'éloge du monarque qu'il sert, tout ce qu'il a fait de bien appartient a celui dont il a exécuté les prdres, et la publicité qu'il donne à sa justification, ajoute encore à la haute opinion que la nation entière s'était formée de la sagesse du prince qui la gouverne^
Pénétré de ces vérités, j'y trouve, je l'avoue, un grand adoucissement à la peine que m'a causée d'abord une dénonciation exprimée dans les termes les plus offensants, publiée avec affectation, répandue dans toute la France avec profusion, envoyée dans les deux Indes avant qu'on m'en eût donné une connaissance légaie. La calomnie a cet avantage qu'elle s'empare des esprits, qu'elle a, pour s'y établir, tout le temps que 1 innocence emploie à rassembler ses preuves. Mais quelque redoutable qu'en soient les effets, j'ai osé espérer que mes concitoyens ne méjugeraient pas sans m'entendre; je me suis flatté qu'ils ne croiraient pas, sur la foi d'un petit nombre de personnes, qu'un homme qui s'est toujours montré jaloux de l'estime publique, qui se l'est proposée comme ie prix honorable de ses travaux, qu'on n'avait jamais accusé d'être l'apôtre du despotisme, fût devénu tout-à-Coup l'oppresseur du faible, l'aveugle agent du pouvoir arbitraire et le fléau de la colonie dont le gouvernement lui était confié. J'ose croire encore qu'ils sentiront combien le combat est inégal entre ceux qui ont pu méditer leur dénonciation à loisir et un ministre qui se doit tout entier à la chose publique, qui n'a que peu d'instants dont il puisse disposer pour lui-même et qui, depuis plus de deux ans, est éloigné de 1,800 lieues de la colonie où repose la majeure partie des actes utiles à sa défense.
La dénonciation faite contre moi à l'Assemblée nationale et renvoyée par elle au comité des rapports , a treize chefs différents : treize personnes l'ont signée, mais, parmi elles, je sais distinguer mes vrais accusateurs. Il en est qui,
après m'a voir lu, regretteront d'avoir trop facilement cédé à des impressions étrangères; je vais mettre l'Assemblée nationale et le public à portée de prendre une juste opinion des autres.
Chacun de ces chefs portant sur un fait diffé^ rent, exige une discussion particulière. Je les traiterai donc séparément, je me permettrai seulement de rassembler sous un même paragraphe ceux qui me paraîtront avoir une grande analogie entre eux. J'abrégerai par ce moyen ma défense et je tiendrai moins longtemps suspendue l'attention des amis de la vérité, qui prendront intérêt à ma justification.
PREMIER CHEF DE DÉNONCIATION
Refus obstiné de lettres de convocation 4 la colonie de Saint-Domingue.
SECOND CHEF-
Obstacle mis dans la colonie A la nomination de ses députés aux États généraux.
RÉPONSE-
Jamais peut-être on n'agita dans un État européen de question plus grande par son objet, plus importante par ses effets, que celle de l'admission des représentants des colonies à l'Assemblée de la nation.
Que d'intérêts à ménager, que de rapports à calculer, que d'inconvénients à prévoir! différences dans le climat, dans les productions, dans les individus même : au premier aperçp, ne devait-on pas croire que la nature et la politique étaient d'acçprd pour écarter de l'Assemblée nationale les colonies à qui un régime particulier est absolument nécessaire ?
D'un autre côté, peut-on oublier que le commerce des colonies équivaut presque au quart de notre commerce extérieur ? Quelle province possède autant de richesses qu'en renferme l'Ile de Saint-Domingue? Quelle influence ses productions n'ont-elles pas sur tous les marchés de l'Burope? Quelle ressource ne nous offrent-elles pas pour acquitter notre dette envers les nations voisines?
Ceux qui habitent cette contrée sont nos frères. Il n'en est pas un seul qui n'ait conservé l'esprit de retour, que son cœur ne porte sans cesse vers la mère-patrie. S'ils désirent des richesses, c'est pour en jouir un jour au milieu de leurs concitoyens. Ils envient au dol qu'ils cultivent, jusqu'aux moments que l'intérêt de leur fortune les oblige de lui donner.
Telles furent les idées qui se présentèrent à mon esprit, quand je vis naître l'importante question de l'admissibilité des députés des colonies à l'Assemblée nationale. Je n'étais pas assez présomptueux pour entreprendre de la résoudre. Je me formai dès Ce moment un plan de conduite, gui seul convenait à ma position ; j'écoutai tout, je rendis compte de tout au roi; je rapportai à son çonsejl ce qu'il m'ordonna de lui faire connaître.
Çette observation doit précéder toute espèce de réponse de ma part. Les dénonciations ne pourraient m'atteindre, qu'autant qu'on prouverait que c'est moi personnellement qui ai refusé des lettres de convocation à la colonie, et mis des pbstacles à la nominatioq de ses députés.
Le récit de ce qui s'est passé, suffira à cet égard pour rendre ma justification complète.
Le 4 septembre 1788, neuf propriétaires d'habitations dans l'île de Saint-Domingue, qui résidaient ou se trouvaient alors en France, me remirent deux lettres ; l'une était destinée pour le roi, l'autre m'était adressée; toutes deux portaient la date du 31 août 1788. Ces propriétaires s'étaient attribué dans celle qu'ils m'écrivaient, la qualité de commissaires de la colonie. Ils m'assuraient qu'un acte signé de quatre mille habitants, les autorisait à prendre ce titre; ils offraient de me communiquer cet acte. Je le refusai, désirant prendre à cet égard les ordres de Sa Majesté.
Je remis le même jour les deux lettres au roi. Sa Majesté sentit l'importance de la question proposée ; elle m'ordonna d'en faire le rapport au conseil d'Etat, d'y discuter : 1° s'il convenait de considérer les neuf propriétaires comme réellement commissaires et fondés des pouvoirs de la colonie entière; 2° si l'on devait autoriser Saint-Domingue à envoyer des députés à l'assemblée des Etats généraux. Elle approuva spécialement le refus que j'avais fait de recevoir l'acte qu'on avait offert de me communiquer avant de lui en avoir référé. Elle m'ordonna enfin de persister dans le plan de conduite que j'avais d'abord adopté.
Les ordres du roi à cet égard étaient fondés sur des motifs de prudence et de sagesse qu'il est aisé de pénétrer. Un tel acte n'avait aucun caractère d'authencité ; rien ne garantissait la vérité des signatures dont il était revêtu ; la vérification ne pouvait en être faite qu'à dix-huit cents lieues de la capitale. On n'avait reçu à cette époque aucun avis des administrateurs, qui indiquât la tenue d'assemblées particulières dont ces signatures et cet acte eussent été le résultat. La prudence exigeait donc qu'on se tînt au moins sur ia réserve.
En effet, il était dans l'ordre des choses possibles que cet acte ne fût pas le fruit d'une délibération régulière, et qu'on eût envoyé de Saint-Domingue des signatures mendiées. Dans le doute, n'était-il pas du plus grand danger de donner une pleine confiance à cet écrit ? Pouvait- j on y voir le vœu réel et réfléchi de la colonie sur les plus grands intérêts qu'elle eût jamais discutés ?
Les propriétaires qui se présentaient comme fondés de procuration de leurs concitoyens n'ignoraient pas les formalités auxquelles étaient assujettis tous les actes de ce genre envoyés des colonies. Les particuliers et les corps, tels que les chambres d'agriculture, les conseils supérieurs, les assemblées coloniales, lorsqu'elles étaient formées, et même leurs comités intermédiaires, avaient .droit d'adresser directement'au roi leurs, demandes et leurs représentations ; mais ils étaient obligés d'en donner aussitôt copie aux administratëurs de la colonie, ,qui en rendaient compte,. Cette formalité, n'était pas seulement utile, elle était nécessaire ; car, quoique les signatures des. membres de ces corps pussent, être conuues, iil était possible anssi qu'on eût tenté de les contrefaire! et comment, à une si grande distance,, se garantir des falsifications ? comment déconcerter les projets fondés sur de faux avis, si l'on se dispensait, de les soumettre à cette épreuve ? L'acte qu'on offrait de me communiquer ne pouvait la soutenir, quoique la règle qui l'y astreignait n'admît aucune espèce d'exception ; c'était un premier motif pour ne pas lui .donner une entière croyance. D'ailleurs, une itiée simple autant que juste se
présentait à l'esprit de quiconque connaissait la population de Saint-Domingue. Cette île renferme plus de vingt-cinq mille citoyens majeurs et domiciliés. Cette assertion sera justifiée par le dénombrement qui précédera les assemblées primaires. Ainsi, en supposant certain tout ce qu'alléguaient les neuf propriétaires, en admettant que leurs pouvoirs fussent le résultat d'une délibération prise par quatre mille habitants, il était évident qu'une grande partie des citoyens, ou n'avaient pas été appelés, ou avaient été d'un avis contraire à celui des signataires.
Il ne faut donc pas s'étonner qu'on ait pensé au conseil d'Etat, lorsque la question y fut discutée, que sur la foi d'une pièce aussi peu régulière, le roi ne devait pas regarder les neuf propriétaires comme fondés de la procuration de tous les habitants de Saint-Domingue. Les véritables intérêts de cette colonie y furent consultes ; on Craignit avec raison de les compromettre, si l'on attribuait le droit de les soutenir ou d'en disposer, à neuf personnes qui ne prouvaient nullement que Ce pouvoir leur eût été conféré par la colonie elle-même. C'est par ce motif de justice et de bienveillance pour la colonie que Sa Majesté se détermina à me défendre de correspondre par écrit avec les neuf colons, et me. prescrivit de ne rien faire qui pût paraître une reconnaissance même indirecte de leurs prétentions.
Quelque convaincu que je dusse* être à cette époque de l'illégalité de leurs démarches, je n'en représentai pas moins le 11 septembre, dans mon rapport à Sa Majesté et à son conseil d'Etat, que la question était de la plus haute importance; je fis sentir qu'il convenait, pour le bien de nos possessions éloignées, de prévoir que Saint-Domingue ou toute autre colonie pouvaient la présenter sous une forme qui la rendrait digne de toute l'attention du gouvernement. Je croyais convenable de l'approfondir et de la décider, sinon définitivement, au moins d'une manière provisoire.
L'Assemblée nationale s'est récemment déterminée à adopter, comme le fit alors le conseil du roi, le premier principe que j'y établis. Je soutins que la mère-patrie devait regarder toutes les colonies comme ses enfants : que si de tout temps elle avait désiré leur donner un régime aussi analogue à celui de la métropole, que la différence du climat, des productions et du commerce le permettait, assurément cette uniformité ne devait jamais être plus marquée que quand il s'agissait d'envoyer des représentants à l'Assemblée d'une nation dont elles étaient membres.
Gomme il n'existait en France aucune loi, aucun exemple sur cette matière, la dernière convocation des Etats généraux étant fort antérieure à l'époque de la splendeur et de la prospérité de nos colonies, il me parut convenable de consulter les lois et les usages des peuples voisins.
Je parcourus successivement les gouvernements monarchiques et ceux dans lesquels prévaut l'esprit républicain. Je trouvai que ni l'Espagne, ni le Portugal, ni l'Angleterre, ni la Hollande (ce sont les seules puissances européennes qui aient de vastes possessions dans les autres parties du monde) n'admettaient de députés des colonies aux Assemblées de la nation convoquées dans la mère-patrie.
J'ajoutai que ce n'était pas néanmoins sur cet , exemple universel et sur cette espèce de droit
public de tous les peuples, que devait être fondée la décision du roi ; qu'il était de sa justice et de son amour pour ses sujets de ne se déterminer que par des considérations d'utilité générale et de convenance réciproque.
Assurément les colons devaient être réputés les meilleurs juges de ce qui importait à leurs propres intérêts; c'était donc eux que, sur ce point, il était équitable de consulter.
Jusqu'à cette époque, aucun habitant de nos possessions éloignées n'avait fait connaître son opinion à cet égard. On remarquera même que, dès le mois de juillet 1787, le parlement de Paris avait demandé la convocation des États généraux, que le roi avait annoncé le 15 novembre de la même année, qu'il accéderait à ce vœu devenu celui de la nation ; que les remontrances du parlement, que la détermination même du roi devaient avoir été connues des assemblées coloniales de la Martinique, de la Guadeloupe, de Tabago, dont les séances n'avaient cessé qu'au 1er janvier, au 10 du même mois et au 14 février 1788; et cependant ni ces assemblées, ni les comités intermédiaires, ni les chambres d'agriculture de Saint-Domingue, n'avaient encore paru souhaiter que les , colonies françaises fussent représentées aux États généraux.
On ne peut contester que ce silence absolu n'ait duré jusqu'au mois de septembre 1788. Comment le mi et son conseil devaient-ils l'interpréter? était il possible de ne pas en conclure, ou que les colonies éloignées ne désiraient pas être représentées par des députés aux États généraux, ou au moins qu'elles n'avaient pas encore suffisamment réfléchi sur le parti qu'il leur convenait de prendre dans une affaire de si haute importance pour elles?
Le désir d'être réputées parties intégrantes de la métropole, malgré la distance qui les en séparait, avait pu être balancé chez elles par de puissantes considérations, dans le moment surtout où le nombre des députations allait être fixé par le roi, eu égard à la population. Il était assez naturel que ces colonies craignissent de n'être pas suffisamment représentées. Le nombre des hommes libres aux Iles du Vent et sous le Vent est si peu considérable, qu'il n'eût pas donné droit à toutes nos colonies occidentales d'envoyer plus de quatre députés à l'Assemblée. Saint-Domingue, la plus florissante d'entr'elles, n'aurait pas été autorisé à avoir seul ce nombre de représentants; car cent mille individus, de tout âge et de tout sexe, étaient alors le nombre requis pour obtenir une députation entière, et le territoire qui nous appartient dans cette île ne renferme pas cinquante mille êtres libres.
Il eût donc fallu, ou que le roi qui était obligé d'établir cette fixation provisoire, accordât une faveur particulière aux colonies, et alors c'était risquer d'exciter, par cette exception, les réclamations de toutes les provinces, ou que les colonies ne se regardassent pas comme suffisamment représentées, eu égard à leur territoire et à leur richesse.
On pouvait d'autant plus présumer que ces considérations avaient fait préférer aux colonies le parti du silence, qu'elles avaient l'exemple encore récent des provinces de l'Amérique septentrionale, qui avaient paru peu jalouses d'eu-voyer des députés au parlement d'Angleterre, lorsque l'on tentait auprès d'elles ce moyen de conciliation. Elles avaient encore celui des Antilles anglaises qui ne désireraient nullement d'avoir au parlement de la mère-patrie un petit
nombre de députés dont la voix y serait étouffée, tandis qu'elles trouvent un appui continuel dans la réclamation extérieure et plus puissante des riches planteurs qui habitent Londres, ou qui y viennent fréquemment.
Il serait trop long de passer en revue toutes les considérations qui, à l'époque du 11 septembre 1788, pouvaient faire présumer que les colonies elles-mêmes étaient au moins incertaines sur le parti qu'elles devaient prendre, et rien assurément n'autorisait le conseil du roi à les prévenir.
D'autres difficultés s'élevaient contre l'admission des députés coloniaux aux Etats du royaume, qui devaient incessamment s'ouvrir.
La distinction des ordres existait alors, et quoiqu'il soit superflu de discuter maintenant ce qui a été nécessairement agité sur cet objet au conseil du roi en septembre 1788, il est aisé de sentir que, relativement au clergé surtout, qui dans les colonies n'a que très peu de propriétés et n'est composé que de curés nécessaires au culte, presque tous engagés daus les ordres religieux, les députations coloniales ne pouvaient facilement être assimilées à celles des bailliages du royaume.
Le temps et les distances mettaient encore de nouveaux obstacles à l'admission des députés des colonies. Il importe de se rappeler que le roi n'avait pas conçu, à l'époque du 11 septembre 1788, le projet d'assembler les notables et cependant la convocation des États généraux avait été déjà annoncée comme devant avoir lieu au mois de janvier suivant. Or, combien la tenue des États généraux n'eût-elle pas été retardée, s'il eût fallu y admettre les députés des colonies? car alors il était indispensable de prendre un temps suffisant pour envoyer les lettres de convocation; il fallait donner aux propriétaires qui résidaient ou se trouvaient en France, le loisir de repasser sur leurs habitations, ou d'envoyer des pouvoirs à leurs gérants. Il fallait accorder aux assemblées primaires le temps de former leurs cahiers, aux assemblées coloniales celui de se réunir et de rédiger le cahier général de la colonie; enfin aux députés élus, celui de traverser les mers. Les députés des colonies occidentales n'auraient certainement pu se rendre en Europe avant dix mois, et l'on ne pouvait refuser le double de ternes à ceux de nos possessions situées au delà du cap de Bonne-Espérance.
Qu'eût-on pensé d'un aussi long retard ?
Enfin, dans cette discussion importante, les colonies n'étaient pas les seules parties intéressées dont on eût à prendre l'opinion. Le roi pouvait-il, sans le consentement des États généraux, dont la convocation était prochaine, appeler au milieu d'eux les représentants de contrées si différentes et si éloignées de la métropole? Quels troubles, quelles dissensions entre ies colonies et la mère-patrie n'eût pas excités une décision prématurée sur un point aussi délicat? que serait-il arrivé si les ûtats généraux n'eussent pas approuvé le parti qui avait été pris, s'ils se fussent plaints d'une innovation qui ne pouvait être légitimée par l'exemple d'aucune nation et dont par cela seul les suites pouvaient être infiniment fâcheuses ?
J'oserai donc dire que la résolution prise par le roi et par son couséil le 11 septembre 1788, après la plus mûre délibération, était fondée en principes. Ce ne fut pas sans des motifs puissants que Sa Majesté décida alors que les colonies n'eu-verraient pas de députés à la prochaine convo-
cation; mais que si les États généraux, d'accord avec les colonies, pensaient que celles-ci dussent avoir des députés, on réglerait le nombre de représentants qu'elles y enverraient à l'avenir*
Je n'ai donc point obstinément refusé d'envoyer des lettres de convocation à la colonie de Saint-Domingue; j'ai Boumis au conseil du roi une question nouvelle de la plus haute importance. Le roi l'a décidée dans sa sagesse. Je n'ai ni repoussé lé vœu des propriétaires, ni suscité contre les demandes patriotiques des colons, les ministres et U conseil de Sa Majesté.
Accessible en tout temps, à toute heure, aux colons qui se sont présentés chez moi, je les ai toujours écoutés, et je crois les avoir entendus.
Je viens de mettre au grand jour la conduite que j'ai tenue : je l'ai crue celle d'un Français jaloux de la gloire de sa patrie; elle m'a paru convenir an citoyen comme au ministre du roi.
Aî»je mis des obstacles à la nomination des députés de la colonie ?
Cette dénonciation semble appuyée sur trois faits principaux.
Les instructions données à M. du G.-. qui me remplaçait dans le gouvernement de Saint-Domingue.
L'ordonnance que ce gouverneur fit publier dans la colonie.
L'intervention du ministère de M. de La M..., procureur général au Port-au-Prince.
Quant aux instructions remises à M. le marquis du G.», je dirai avec vérité qu'il en reçut peu qui différassent de Celles qui avaient été données à ses prédécesseurs; le roi d'ailleurs consent qu'elles soient produites. Il était impossible de prévoir quand il partit de France eu quel état il trouverait la colonie. C'était donc à sa prudence qu'on devait s'en remettre. Les circonstances déterminèrent sans doute le parti qu'il a pris. Aucun ministre n'eût pu tenter raisonnablement de lui tracer le plan qu'il devait suivre.
Ce qui s'est passé dans la colonie à l'arrivée du marquis du G... n'est pas difficile à justifier (1)
Il rendit une ordonnance le 26 décembre 1788, de concert avec l'intendant ; elle prouve que ni l'un ni l'autre n'étaient encore informés dé la fé-solution prise au conseil d'État, de convoquer en 1789 une assemblée coloniale. Voie! ce qui y avait donné lieu.
Plusieurs imprimés avaient été envoyés dans l'île; oh les avait présentés comme l'ouvrage d'Une commission chargée par la colonie de solliciter l'admission de ses députés aux États généraux. Ou se plaint dans le préambule de cette ordonnance, de ce qu'on avait fait cirouler clandestinement un mémoire, de ce qu'on sollicitait de toutes parts des signatures, comme pour couvrir, par cettë Opération tardive, l'irfégUlaritô des actes émanés de là commission prétendue; on y annonce que Si plusieurs habitants avaient donné leurs signatures librement et volontairement, d'autreB avaient cédé à des sollicitations, que même un très grand nombre avait refusé de signer. OU y relate ensuite une requête dans laquelle plusieurs COloUs témoignaient leurs in~ quiétudes Sut l'avenir ; si jamais il pouvait dépendre d'un nombre d'individus quelcônque, d'a-dtbsSer à deux mille lieues des représentations à Sa Majesté, Au titith des colons en général, de leur Supposer des vues, des désirs qu'ils n'auraient pas manifestés, de solliciter pour eux de prétendus
avantages auxquels leur éloignement et la différence de régime ne leur permettaient pas d'aspirer.
Je le répète, ce préambule d'une ordonnance publiée à Saint-Domingue, peut donner une idée juste de l'état d'incertitude où était alors la colonie.
Quant aux dispositions que renfermait celte ordonnance, elles tendaient toutes à connaître le vœu des habitants, pour en rendre compte à Sa Majesté* Je n'examinerai pas si le mode qu'on avait indiqué était le plus convenable, mais je suis convaincu que l'intention était pure, qu'en ne rassemblant sur une même feuille qu'un certain nombre de signatures, on avait voulu connaître mieux la volonté de chaque individu, épargner des déplacements toujours coûteux aux colons, et prévenir les inconvénients de trop nombreuses assemblées, beaucoup plus grands dans les colonies qu'en Europe.
En vain on accuse les administrateurs d'avoir désiré que le vœu des habitants leur fût adressé pour en soustraire la connaissance. Ils avaient annoncé, au contraire, que toutes les lettres qui leur seraient écrites, seraient déposées au secrétariat public des deux chambres d'agriculture. Elles l'ont été en effet ; tout citoyen a pu vérifier si son vœu y était réellement consigné, et s'il ne l'y trouvait pas, accuser les administrateurs de l'avoir supprimé.
D'après les premières dispositions, l'article IV « qui défendait, conformément aux règlements « de Sa Majesté, toute assemblée illicite, sous « peine contre ceux qui y assisteraient d'être « poursuivis suivant la rigueur des ordonnances », ne me présentait plus que des précautions sages, prises contre les insurrections dans une île où le moindre événement peut en occasionner d'irrémédiables.
Le dernier fait articulé dans la dénoheiation que je discute, m'est absolument étranger. J'ignore ce qui a pu provoquer le ministère du procureur général au Port-au-Prince; on ne croira pas légèrement et sur une simple assertion qu'il I ait menacé de traduire dans les tribunaux judi-| ciaires tous ceux qui manifesteraient un vœu j contraire à celui de la cour, encore moins qu'il I ait, voulu les décréter, les envoyer en France; j qu'il les ait traités de scélérats, parce qu'ils avaient senti qu'ils étaient des hommes. L'énergie de ce style ne rend pas l'imputation plus invraisem-blable. Il y aurait eu de la folie à un magistrat de prendre* dans de pareils motifs, le texte de ses dénonciations judiciaires.
Mais, dit»on, il fut tenté de dénoncer les neuf commissaires nommés par leurs concitoyens, pour soutenir en France les droits de la colonie.
Il fut tenté 1 il ne l'a donc pas fait, ét l'on veut me rendre responsable de l'intention qu'on prête à autrui?
On assure m'en avoir porté des plaintes et que loin d'improuver* j'ai approuvé la conduite de M. de La M...
Je ne pouvais, sur une semblable présomption d'intention ni l'approuver, ni l'improuver, et je n'ai fait ni l'un ni l'autre*
J'ai répondu à ces deux Chefs de dénonciation : se oroit-on en droit d'en exiger davantage ? Je dirai qu'exact a suivre les décisions du roi que je croyais équitables* qui me paraissaient tendre évidemment à conserver les droits de l'Assemblée nationale et ceux de la colonie, non seulement je ne regardais point comme valables les pouvoirs dont les commissaires de Saint-Domingue
assuraient être pourvus, mais que je croyais prudent de ne rien faire dont ils pussent s'autoriser pour écrire au delà des mers que leur mission était reconnue par le ministre. Je me livre aux reproches que peuvent m'attirer de quelques personnes les soins que j'ai pris des intérêts de la colonie, et les moyens que j'ai employés pour qu'elle ne fût point induite en erreur.
Mes doutes sur la question en elle-même et sur l'authenticité de pouvoirs qui, dansftous les cas, enssent été conférés sans qu'on eût observé les formes, trouvent leur excuse dans ceux qu'a témoignés l'Assemblée nationale elle-même ; elle a flotté pendant deux mois entre l'admission et la non-admission des représentants de cette colonie. Peut-on faire un crime à Un ministre de n'avoir pas voulu trancher une difficulté sur laquelle l'Assemblée nationale a été si longtemps incertaine, et qu'il appartenait à elle Seule de décider ?
TROISIÈME CHEF DE DÉNONCIATION.
État enléVé à un citoyen estimable, pour couvrir son calomniateur de ses dépouilles.
RÉPONSE,
Je ne puis m'empêcher de le dire, ce chef d'accusation n'est qu'un tissu de faits faux etcon-trouvés.
11 n'est point de lois dont l'observation importe plus à l'humanité que celles qui ne permettent point à la même personne de cdmuler les fonctions de médecin et d'apothicaire. Les médicaments que vend l'une doivent être soumis à l'inspection de l'autre; et cette espèce de contrôle légal garantit au malade qu'il ne sera commis aucune erreur dans une matière où elles sont irréparables.
Les statuts de l'université de Paris ne permettent l'entrée des écoles de médecine qu'à ceux qui ont renoncé formellement à débiter les remèdes en qualité d'apothicaires.
La cumulation de ces deux fonctions serait beaucoup plus dangereuse encore dans les colonies que dans cette capitale. Le médecin du roi est établi par plusieurs ordonnances, notamment par celle du 30 avril 1764, inspecteur de tous les médicaments destinés pour les hôpitaux et embarqués dans les navires. D'autres lui donnent conjointement avec l'apothicaire du roi, la police sur les productions de la nature, et les objets de commerce qui appartiennent à la médecine.
L'article VII de l'ordonnance du 3 novembre 1780 défend à tout apothicaire et marchand droguiste de s'établir dans aucun lieu que ce soit de la colonie, sans avoir été examiné par le médecin, le chirurgien, l'apothicaire du roi, et deux docteurs en médecine, en présence d'un commissaire nommé par ie conseil supérieur, et du procureur général.
S'il était arrivé que lé médecin du roi, au Cap, eût par cupidité cherché à cumuler dans sa personne les titres incompatibles de médecin et d'apothicaire ; qu'il eût, à l'aide d'un prête-nom, vendu les drogues qu'en qualité de médecin il ordonnait pour lés malades; qu'il eût été tout à la fois le marchand et l'inspeeteur des médicaments qui étaient destinés aux hôpitaux et à nos flottes, sa contravention à des règlements salutaires ne serait-elle pas évidente? n'aurait-il pas mérité
d'être privé de toutes ses places, pour en avoir méconnu les devoirs ?
Si les administrateurs de la colonie, au lieu de l'en déclarer déchu, lui avaient seulement imposé la nécessité d'opter entre l'une ou l'autre, n'auraient-ils pas à se reprocher un excès d'indulgence, loin d'avoir mérité qu'on les accuse d'une injuste sévérité ?
Enfin, si l'homme qui avait tenté d'allier à la profession de médecin le commerce lucratif de pharmacie, forcé de choisir entre l'un et l'autre, avait préféré le dernier, ne justifierait-il pas les inquiétudes qu'avait fait concevoir cette réunion en sa personne de fonctions et d'états incompatibles ? croirait-on qu'on l'eût dépouillé, parce qu'on aurait donné à un autre celui des titres qu'il aurait dédaigné ?
Ces hypothèses se sont réalisées dans la personne et dans la conduite du sieur B..., qui fournit aujourd'hui un chef de dénonciation contre moi.
Le sieur B.»., médecin du roi au Cap-Français, épousa en 1781 une veuve, propriétaire d'un magasin de pharmacie considérable. Il continua, quoique médecin du roi, ce commerce sous un autre nom jusqu'en 1785, qu'il passa en France et vendit son fonds.
Son absence nécessitait la nomination d'un médecin par intérim ; ce fut du sieur Artaud que firent choix les administrateurs qui m'ont précédé dans la colonie. Je n'étais point gouverneur général quand le sieur B..«4 passa en France; je n'y ai été reçu en cette qualité que le 27 avril 1786. Ce rapprochement de dates prouve l'inexactitude d'un fait articulé dans la dénonciation. On y annonce qu'au départ du sieur B...., les administrateurs donnèrent sa place par intérim au sieur Artaud, sans dire que je n'étais pas du nombre de ces administrateurs. L'on ajoute que le sieur B.*.., à son retour, reprit sa place au grand regret du sieur Artaud et de son protecteur (qualité qu'on m'attribue), ce qui donne à penser que c'était de moi que le sieur Artaud avait tenu sa nomination intermédiaire.
Je ne cherche point à approfondir quel fut l'objet du procès qui s'éleva entre le sieur B.... et l'acquéreur de son fonds de pharmacie ; mais il est prouvé, par d&5 actes authentiques, que ia femme du Sieur B«.» acquit les 1er et 6 mars 1786, deux fonds de pharmacie; l'un moyennant (a) 250,000 liv. du sieur Lartignon, l'autre pour 176, 150 liv. d'Un sieur Saussay, apothicaire brévelé du roi.
On a grand soin d'observer dans les dénonciations, quë la dame B.... n'était point commune en biens avec son mari. Pourquoi cache-t-on que, dans l'un et l'autre de ces traités, le sieur
B____se porta caution de sa femme, et son obligé
solidaire ? On assure même qu'on a produit au conseil du Gap, plusieurs billets destinés à effectuer le paiement du prix de ces acquisitions, ët que, dans ces billets solidaires, le sieur B.... s'exprimait en ces termes : Pour raison de la vente qui nous a été faite.
Ces deux établissements furent mis soUs des
noms supposés. Les commis qu'il y proposa, furent intéressés pour un tiers dans les bénéfices. Il procura à l'un d'eux ie titre d'apothicaire du roi par intérim. Il conserva à la maison de commerce qu'il avait acquise du sieur Saussay, apothicaire de Sa Majesté, le nom de son ancien propriétaire, et se ménagea, par cette double prévoyance, tous les marchés que le sieur Saussay avait faits avec le gouvernement pour le compte du roi.
Cette contravention aux ordonnances indisposait le public, soit à raison des inconvénients qu'elle renfermait, soit à cause des bénéfices énormes qu'elle pouvait procurer à son auteur.
Un jeune maître en pharmacie, appelé le sieur Albert, qui avait été employé pendant quelque temps dans les magasins dû sieur B..., découvrit la fraude, envoya un mémoire en France, et demanda la place d'apothicaire du roi.
M. le maréchal de Castries était alors ministre de la marine ; il me renvoya le mémoire comme gouverneur de Saint-Domingue. Je pris^ avec l'intendant de la colonie, tous les renseignements que je crus nécessaires. Le sieur Artaud, nommé par mes prédécesseurs, médecin parintérim, quand le sieur B... était- en France, fut celui sur lequel on jeta les yeux pour vérifier les faits. La confiance que lui avaient accordée les anciens gouverneurs,. sa probité, ses talents reconnus, furent les seules recommandations qu'il employa auprès de moi.
Le sieur Artaud fit toutes les recherches convenables aux circonstances ; il crut même devoir, sous la foi du secret, communiquer au sieur Albert quelques-unes de ses observations, et lui en laisser copie. On verra bientôt ce qui est résulté de cette confidence : quoi qu'il en soit, le sieur Artaud découvrit les traités de 1786, cautionnés parle sieur B...,et rapporta des preuves sans réplique du commerce de pharmacie que celui-ci faisait depuis 1781, sous les noms interposés de ses deux commis.
La loi toujours sévère aurait eu peine à excuser la contra\ention du sieur B... Nous fûmes, l'intendant de la colonie et moi, plus indulgents qu'elle ; nous nous bornâmes à exiger qu'il optât entre l'un des deux titres : son choix fut prompt, il abdiqua la place de médecin du roi, et ne fut plus qu'apothicaire.
Ainsi vaqua la place de médecin du roi : Les services continuels que le sieur Artaud rendait à la colonie, la bonne réputation qu'il conservait au milieu de ses envieux, la confiance que lui avaient accordée nos prédécesseurs, nous déterminèrent à lui confier le titre de médecin du roi par intérim ; et le sieur Albert, qui désirait la place d'apothicaire, ne put l'obtenir puisque le sieur B... la conservait.
Le sieur Albert oubliant quelque temps après la foi due au secret que le sieur Artaud lui avait confiée, en lui donnant une copie des observations qu'il nous avait fait parvenir, remit cette copie même à un autre médecin, des mains duquel elle passa dans celles du sieur B..., qui en fit la base d'une plainte en diffamation contre le sieur Artaud. Le premier juge reçut la plainte; on informa. Le sieur Albert et deux autres témoins furent entendus. On décréta le sieur Artaud d'assigné pour être ouï; il subit interrogatoire, et fut renvoyé à l'audience. Ii appela de la sentence au conseil supérieur du Gap; mais le dépôt fait au greffe par le sieur Albert des observations du sieur Artaud, suscita bientôt à l'accusé un nouvel adversaire. M... avocat, aujourd'hui membre de la dépu-
tation de Saint-Domingue, et l'un des signataires du chef de dénonciation auquel je réponds, apprend qu'il est dit dans ces observations,-qu'il s'est fait accorder par le sieur Saussay, son beau-frère, un intérêt dans son commerce "de pharmacie, pour avoir déterminé M. Bongard, alors intendant de la colonie, à donner au sieur Saussay, l'entreprise des fournitures de tous les médicaments nécessaires à la marine. Il rend plainte contre M. Artaud ; celui-ci appelle. On joint les deux plaintes, et le conseil du Gap évoquant le principal, ordonnequelesobservationsdusieurAr-taud seront supprimées comme injurieuses et calomnieuses tant au sieur B... qu'à M...; le condamne à faire une réparation d'honneur à l'un et à l'autre, en présence de quatre personnes à leur choix, et leur permet de faire imprimer et afficher l'arrêt au nombre de deux cents exemplaires.
Le sieur Artaud s'est pourvu en cassation contre ce jugement. Il présentait comme un vice de l'orme qui emporte avec lui la cassation des jugements en matière criminelle, le défaut de mention de la lecture des charges et informations ; il se plaignait d'un mal jugé évident. Il n'avait point diffamé le sieur B..., quand il avait remis de confiance au sieur Albert la copie des observations qu'il se proposait de nous envoyer; elles ne pouvaient par elle-même former un corps de délit. Il avait obéi aux ordres qui lui avaient été donnés ; il n'avait été que le vérificateur de faits que l'option faite par le sieur B..., rendait certains. Ces motifs déterminèrent le roi à prononcer en son conseil des dépêches, la cassation de l'arrêt du conseil du Cap-Français.
Cet arrêt de cassation, rendu sur la requête du sieur Artaud, est susceptible d'opposition; il y a plus de deux ans qu'il est connu et aucune des parties n'a cru devoir s'en plaindre.
Le récit que je viens de faire, et qui est appuyé de pièces authentiques, mettra l'Assemblée nationale à portée de juger du degré de confiance qu'elle doit donner aux dénonciations accumulées contre moi ; il n'est pas un fait attesté dans celle-ci qui ne soit controuvé.
Il est faux qu'en 1785 je protégeasse Je sieur Artaud, médecin au Gap, puisque je ne le connaissais^ point alors, et que je n'y suis arrivé qu'en
Il est faux que le sieur Artaud fût le compétiteur du sieur B..., quand nous le chargeâmes de vérifier des faits dénoncés par le sieur Albert, puisqu'on ignorait que le sieur B... préférerait à la place de médecin du roi, celle d'apothicaire.
Il est faux que j'aie forcé le sieur B... à donner sa démission de la place de médecin, puisqu'il a été le maître, en l'optant, de la conserver.
Il est faux que le sieur B... ait obéi à la force en se démettant de sa place, puisque encore une fois le choix lui en a été déféré.
Il est faux qu'il se soit pourvu contre cette prétendue violence au conseil du Cap, puisqu'il n'y a eu aucune violence d'exercice, etque sa plainte n'avait pour objet que de faire supprimer des expressions qu'il croyait injurieuses.
Il est faux que j'aie conféré deux fois au sieur Artaud, par intérim, la place de médecin du roi, puisque j'étais très étranger à la colonie, et que j'habitais en France quand il obtint la première foiscette placede laconfiancede mon prédécesseur.
Enfin, il est faux qnq j'aie revêtu le calomniateur des dépouilles de l'innocent, puisque d'un côté le sieur B... convenait d'avoir cumulé le
commerce de pharmacie avec la profession de médecin du roi, et que, de l'autre, le sieur Artaud n'a été nommé qu'après l'option volontaire du sieur B...
Mais, dût le mensonge envenimer encore les dénonciations qu'il a fabriquées, je dirai qu'en nommant le sieur Artaud, médecin du roi par intérim, j'ai voulu donner un médecin à la colonie et non une place au sieur Artaud. Je n'abandonnerai pas, parce qu'on m'attaque injustement, un homme instruit, vertueux, et qui a été longtemps utile à sa patrie. Je n'ai écouté en le choisissant que la voix de la justice ; alors il était heureux : je lui dois l'appui de mon témoignage quand il est poursuivi par l'infortune.
On ne pourrait, sans être ému, entendre le récit des outrages qu'on lui a faits, les dangers qu'il vient de courir, les humiliations qu'il a dévorées. Echappé avec peine à la fureur de ses ennemis, il n'a trouvé de salut que dans la fuite.
Cet acharnement dont le sieur Artaud a failli être victime, est dû au seul soupçon qu'il était complice d'une prétendue motion imputée à M. Mo-reau de Saint-Merry, son beau-frère, alors en France; et M. Moreau de Saint-Merry a soutenu et prouvé à ses compatriotes qu'il n'avait jamais élevé la motion qu'on lui prête : moyen assuré en effet de mettre l'homme le plus innocent en défaut, que de l'accuser à Paris de faits dont on sait que les preuves sont à Saint-Domingue, et de porter à Saint-Domingue des accusations qui seraient démenties à Paris par la seule notoriété publique. Mais c'est assez d'avoir rendu compte ae ce qui s'est passé; je m'interdis toutes réflexions ; je n'ai eu pour objet que de démontrer mon innocence.
QUATRIÈME CHEF DE DÉNONCIATION.
Citoyens vendus à un aventurier pour les puissances étrangères.
RÉPONSE.
Quelle idée cette dénonciation présente ! Moi, Français, j'aurais souffert que mes concitoyens fussent vendus ! moi, j'aurais permis qu'on dégradât l'humanité au point de rendre mes compatriotes l'objet d'un trafic honteux ! moi, gouverneur pour le roi d'une de nos plus importantes colonies, i'aurais fait passer une partie de ses habitants à des puissances étrangères !
Quel tissu de faussetés 1 Heureusement la fable qu'on a imaginée pour faire la base de cette dénonciation, est mal ourdie ; l'invraisemblance y perce de toutes parts-
Analysons-la avant d'y répondre.
« Le sieur Vidal, homme entreprenant, et à qui j'ai, dit-on, témoigné confiance, a enlevé, au mois de mars 1781, cinq cents hommes des prisons du Port-au-Prince. On les a vus sortir marchant deux à deux, enchaînés, serrés par des menottes, s'avançant tristement vers le port, d'où ils ont fait voile pour Carthagène et Porto-Bello.
« Arrivés sur les côtes d'Espagne, ces infortunés ont été contraints de s'engager au service de cette puissance étrangère.
« On les a fait partir pour Quito, et ils ont été incorporés dans les troupes qui gardent ce pays.
« Plusieurs de ceux qui n'ont pas péri, ont lui cet horrible esclavage en côtoyant les bords de
la rivière des Amazones ; ils sont descendus jusqu'à la Guyane et à Guyenne, et de là ils sont repassés à Saint-Domingue. » Tel est le roman. Voici la vérité.
Le sieur Vidal, négociant et armateur à Saint-Domingue, faisait, dès 1786, des voyages à la côte espagnole. Les administrateurs de Saint-Domingue ont ordre de favoriser ce commerce avantageux pour la colonie et utile même aux ma-faclures établies dans le royaume.
Ge particulier m'apporta des lettres du vice-roi de Garthagène. Dans ces lettres le vice-roi me priait de permettre l'acquisition à Saint-Domingue et le transport à Garthagène, de poudre et de fusils dont il avait besoin.
Je rendis compte au roi de la demande qui m'avait été faite, et que j'avais accueillie : Sa Majesté m'approuva. J'avais fait délivrer au sieur Vidal des armes et de la poudre, et la caisse publique a reçu le prix entier de tout ce qu'il avait emporté.
Le sieur Vidal me représenta que le vice-roi avait besoin de recrues pour les régiments qui étaient à ses ordres. Je ne lui permis rien ; mais je ne pouvais empêcher ceux qui seraient tentés de passer à la côte espagnole, de prendre avec lui les arrangements qu'ils jugeraient à propos.
Je n'ai eu avec cet armateur aucunes relations particulières ; deux fois seulement il a été invité a dîner au gouvernement. Il ne m'a point entretenu longuement ; les objets qu'il avait à traiter n'étaient pas susceptibles de grande discussion. Je me rappelle seulement qu'un de ses coassociés lui ayant intenté un procès au moment où il se disposait à partir pour Garthagène, j'ai demandé qu'on en accélérât le jugement. Je savais que le vice-roi avait intérêt à son prompt retour et qu'il attendait mes réponses aux lettres qu'il m'avait écrites. G'est la seule marque d'intérêt que je lui ai donnée.
Il existe à Saint-Domingue et dans les bureaux du gouvernement des minutes des lettres que j'ai écrites au vice-roi de Garthagène ; on peut les consulter. Ma correspondance, d'accord avec ma conduite, n'a jamais eu pour objet que le plus grand avantage de la colonie.
Plusieurs fois le sieur Vidal m'a rapporté du continent espagnol des couples d'animaux utiles et qui manquent à Saint-Domingue, quoique indigènes d'un climat semblable ; je les ai envoyés à la Gonave, île voisine et inhabitée, afiu qu ils pussent y multiplier et être ensuite facilement importés dans 1 lie de Saint-Domingue, où il serait à souhaiter qu'on pût les naturaliser.
Je le chargeai, peu de temps avant mon départ, de faire vérifier dans les bois voisins de Garthagène, si l'on n'y trouverait pas le quinquina ; je désirais qu'il en rapportât des graines et du plant; je lui demandai aussi de la vanille et quelques autres arbres ou plantes utiles. Je l'avais adressé à un botaniste nommé, autant qu'il m'est possible de me le rappeler, le docteur Mutis, que le le roi d'Espagne entretient dans cette partie de ses Etats. J'ignore quel a été le succès de ses recherches, mais les conférences que j'ai eues avec lui n'ont pas eu d'autre objet.
J'ai exposé avec vérité tout ce que je sais de relatif au sieur Vidal; ce qu'on lui impute me paraît hors de toute vraisemblance.
Je dois d'abord observer que dans l'expédition qui m'a été délivrée, par ordre de l'Assemblée nationale, de ce chef de dénonciation, on porte une fois à cinq mille le nombre des hommes em-
barqués par le sieui* Vidal ; mais la dernière mention qui en est faite, les fixe à cinq ceDts : ces nombres sont en chiffres; il est possible qu'on ait ajouté ou retranché un zéro. Ail Surplus, que l'imputation qui m'est faite porte sur cinq mille oïl sur cinq cents, elle est également invraisemblable, également fausse.
Eh effet, c'est des prisons dujPort-au-Prince qu'on a vu, dit-on > sortir ce nombre prodigieux de prisonniers; mais fait-on attention que les prisons ne peuvent contenir hi Cinq mille ni cinq cents personnes; qu'elles étaient alors si pfeu spacieuses qu'on s'oecupe en ce moment d'en construire de plus vastes?
Cinq mille blancs sont la neuvième partie des personnes libres de Saint-Domingue : cinq Cents même sont un nombre imposant, et qu'on n'eût pas vu sortir de l'île sans que leur départ eût fait sensation. Cependant depuiis trois aiis que le fait se serait passé, personne u'en a parlé; c'est pour la première fois qu'on s'en occupe.
Quelle flotte attendait cette armée ? Deux bâtiments qui ne passaient pas cent cinquante tonneaux chacun, et qui n'auraient pas contenu deux cents hommes, quand on ne leur aurait donné d'autre cargaison que les vivres nécessaires au voyage.
D'où a-t-on rassemblé ce nombre prodigieux de prisonniers, qui n'ont changé dè climats que pour recevoir de nouveaux fers"?
On a cfeerché à résoudre ce problème, eh insinuant que, depuis.l'arrivée de M. Vidal, la police semblait redoubler de rigueur; que la moindre rixe, le moindre soupçon d'ivresse étaient punïè de prison.
lais ces hommes innocents ét emprisonnés se fussent-ils donc laisses embarquer pour des côtes étrangèresans réclamer? Lés férs,dont on prétend qu'ilsétaient chargés, n'auraient pu étoûffet leurs ptointes ; èïles n^en seraient dévenues que plus touchantes; un cri général d'indignation Se serait éfcevé contre l'administration entière, sûr-tout dans un pays où tous les blancs sont respectés, où l'intérêt commun veutcpfils lë Soient Cependant ces prétendus prisonniers n'ont pas réclamé ; on ne trouve aucune requête présentée par eux dans les tribunaux qui leur ont toujours été ouverts; le public n'a'manifesté riison mécontentement ni sa Surprise " les registres des prisons existent, qu'on les censuMe, je suis certain qu'ils ne présenteront pas à cette époque iïù certadn nombre de prisonniers pïcfs considérable que dans lés autres temps. • l C'en est trop pour prouver ÎMrivraisemblariée des faits, 5e Vais 'en démontrer là fausseté.
Aucun vaisseau né mouille dans lès ports *de Saint-Èomiirgue, que l'en n'inscrive à l'amirauté la quantité ldê Ednhé&ux qu'il peut porter -; ie demande qu'on vérifie sur lés registres le uOaroreët la contenahfce, des bâtiments du sieur Vidal.
Auoun capitaine ne peut mettre à la voïte sans quelles rSïe^dëson 'équipage nesdietît visés, ins-CTits !au 'bûreaù des «laSses, 'et ^déposés àu greffe de ramiraaté;^je demande jùe ces rôles Soient compulsés ikm'doft 7 'avoir noté de quel pays étaient lës hommes qin ont traité avec !le sieur Vidal; on y trouvera probablemesMajOrcainS, des Minorcains, dés italiens, des Maltais -et autres géûS'âe mer êtrangeiss à ^a'Trarace/attrrés t Saint-Domingue oarl'^spoirdhm meilleur sort que celui qu'ils éprouvaient ttrins létir pavs, tm deb^qUés sur'cette c6te dans -le cours id'une plus longue navigation, quMls avaient projetée et qu'ilsonttn-tejrrompue.
Il est des hommes ennemis du repos, qui errent dè climats en climats ; que l'amour de la nouveauté agité sans cës^e; qui iôih du vrai né trouvent, eu quelque endroit qu'ils aillent, rien de ce qu'ils avaient espéré. Le sieur Vidal a pu eh rassembler à Saint-Doniiri^ttë, je ne pouvais m^y opposer. i
Il en est d'autres que leurs dettes ét fimpuissance de ies payer a privé de leur liberté. Les ordonnancés relatives à la Polo nie, obligeât le gouverneur général, lorsqu'il eu est requis par le créancier, de faire retenir prisohniérs cetix contre qui les tribUnaùx ont pronoûbé des condamna*, tiott pàr corps. Il est ppssibié que Quelques-uns de ces débiteurs aient bbteiju du siçUr Vidal de quoi paver lés sommes modiques qu'ils devaient, et se soieht embarqués avec lui. Quels moyens, quelles raisons àvais-je de les en empêcher?
je n'ai, comme gouverneur de Baint-Domingue, ni disposé des habitants de la colonie, par des traités honteux, indighes de moi et de tout bon Français, ni donné lés ma|hs & (les enrôlements nuisibles â i'îhtérèt de l'Etat. le seïais éxposé aujourd'hui à des reproches plus mérités, s!, genàni la liberté naturelle qu'a tout homme d'aller chercher son bien-être op. il croit pouvoir ie trouver, j*avaisemj)êché dés étrangers, oû même des habitants de Saint-ûpmiûgUB qui jugeaient à propos de tenter une meilleure fortune avec le sieur Vidal, dé passer dans dés pays ou ils espéraient trouver des avantages Plus grands que ceux dont ils jcruis&lent datts la côîoûle.
Le départ febuleùt de cette iêgîôU enchaînée, à fait naître l'idée d'un voyagé et d'un retour plus fabuleux encore. On à entrepris dé persuader que l'Espagne qui aurait pu facilement envoyer cette peuplade imaginaire de Porto-Bello à Panama par terre, et de Panama sur des navires, à tel point qu'elle auraiî voulu des côtes du royaume de Quito, du Pérou, du Chili même, leur a fait prendre une route, je ne dirai pas inusitée* mais presquè impraticable.
Quand on sè prêterait un instant à l'illusion, quand on supposerait qu'à travers tant de dangers, sans moyens, sans ressources, ils auraient triomphé de tous les obstacles que la nature opposait à leur marche, et seraient arrivés à Quito, on trctira difficilement que ceux d'entre eux qui, pressés, dit-on, dù besoin de la liberté, sè sont élancés Vers elle, aient suivi furtivement les bords dè là rivière dès Amazones, qu'en Iacôftoyant ils soiept desçsi&acUïsjusqu'à lafiuyaûe et à Cayèûnè, et soient revenus à Saint-uomin-gue.
Ce n'est pas dans line dénonciation que le merveilleux doit trouver place. ïout en matière aussi gravé doitêtre soumis lt l'êpréuve de la loi ; la vérité sévere met sûr la même ligne finVrai-semblable et le faux: et lès faits que fou m'im--pute ont l'un et Tau'ïre de ces caractères.
ife n'ai rien permis au siehf Vidal, qui Tût contraire aux droits $è rhumanitè -et â i intérêt de l'État. Je n'ai point Su que le sieur Vidal se fût lui-même rien permis de réprébensible 4 Saint-Domingue. Voilà tpuî ce dont jé dois répondre : sa Conduite au delà des mers, dans un pajs qtii n'est pas soumis à la domination française, n'était point assujettie à mon inspection, et elle ne le Serait pas même à antre uepsûre.
CINQUIÈME CHEF DË DENONCIATION,
Arrêtement scandaleux d'un citoyen innocent. Jugement arbitraire et injuste.
RÉPONSE.
Tout juge est sous la, protection de là loi. L'ordonnance donnée aux États deBlois ne permet de prendre un juge à partie que quand il s'est laissé corrompre, quand son jugement est le fruit de la haine capitale qu'il portait à la partie condamnée, ou de l'extrême faveur qu'il a accordée, contre droit et justice, à celui dont les demandés ont été accueillies, Le juge n'est point responsable des erreurs de l'esprit; on ne peut lui reprocher que les vices du cœur. Je pourrait me renfermer dans ces principes, qui son.t la sauvegarde de quiconque est chargé du pénible Emploi de juger ses. semblables.
Mais cette défense, quelque régulière qu'elle soit en la forme, ne remplirait pas 1 objet que je me suis proposé. Je vais donc dire, puisqu'on m'y force, ce qui m'a détermmé à donner des ordres peuE que M.*** fût arrêté; je vais rendre compte des motifs d'unedécision que l'on qualifie d'injuste et d'arbitraire.
M. de Ëarbazan, commandant la station des forces navales à Saint-Domingue, se plaignit, en 1787, de ce qu'on élevait des bâtiments sur un terrain qu'il jugeait avoir été remblayé aux frais du roi, et conquis sur la mer. Ce terrain était précieux ; on projetait d y établir des magasins nécessaires au service de 1a marine.
Le voyer dressa un procès-verbal, leJH Janvier 4787, dans lequel il constatait que M-*** faisait élever une case en bois, et à étage Sur un emplacement où il ne devait bâtir qu'après en avoir reçules alignements, idnt pour conformer au plan de la mile du Cap, que pour justifier de sa propriété.
M.de Vincent, commandant en second, et M. Jau-vin, commissaire-ordonnateur, a qui te procès-verbal fut communiqué* rendirent «ne ordonnance» et défendirent provisoirement à. IL *; de continuer fa construction de son bâtiment jusqu'à ce qu'il en çût été autrement ordonné, et sauf à lui à justifier p^r devant eux de la propriété du terçain que couvrait le bâtiment.
Cette ordonnance fut signifie à 5L^*.fe.26;jaa--vier 4787*:
Deux jours après, ie voyer de la ville du Cap constata, par un second procès-verbar^ que M.***, sans égard a Vordonnance qui tu,i avait été notifiée la surveille, continuait ?élever son tâtï-ment, qu'il amif fait monter des pws de Sois et toute la charpente. de la case, de manière, qu'elle était prête à recevoir la couverture, tant tes travaux avaient été précipités.
Les sieurs de Vincent et Jauvin se contentèrent d'ordonné* que ce second preeès-uerbal serait notifié h M.***, avec sommation d'exécuter t'o^dontianae qui lui avait été précédemment signifiée. Le voyer reçut des ordres exprès de veiller à l'exécution de cette ordonnance, et de rendre compte journellement de ee qui se passerait.
Cette seconde ordonnance fut signifiée iSkT*. le 29 janvier 1787-
Le six mars» troisième procèsrverbal du voyer. D constatait que M.*** faisait élever un second, bâtiment en bois sur le terrain dont la propriété
Itli était contestée par le toi, qu'il Joignait t second oâlitiient du pïerhiet qu'il lui avait Si défendu dé contitiuet.
Il s'agissait dë côUnaltrë quels étaient les droits de M. et ceux du rdi. M. Jàiivih, dbfhmissaire-ordondàteur, së transporta dbtic le 16 février sur lé tëW-àin fcontëhtiëui âtec M. dé là Plaignë, commandant particulier; M. de Bpisfôtèt, directeur gênerai des fortiflcàtidh& ; M. de Ghâtèau-vieux, ingénieur en Cher : M. Massot, capitaine de port; Le voyél* dë la Villë du Cap; m.*** lui-même, et deux experts, dont l'un avait été nommé par lui, ët l'autre l'avait été pour le roi.
M. Jauvin s'était fnUhi d'un plan dressé par feu M. Rabié, ingénieur en chef de là colonie, d'après lequel il soutenait que le roi aVait acqtois,, ëh 1783, le terrain même Sut* lëqttel M.*** aVait dommeucé dë bâtir, II së pronosàlt d'Opérer sur dë. plan; mâis M.*** s'y Opposa, ët rioutidt qu'il avait rettils à l'administration un anftë plan fait par M. Pôiiaft, ingénieur de la èolé/tltë.
A cettë dssertiod (Suivant M.***) M. Jaiivin répliqtià : Cela est fau±. Au ddntràire, M. JaUvin soutint ({ne, faisant sës efforts pour convaincre M.*** que le plan du sieur Rabié était celui sûr lequel on avait acquis pour le roi, en 1783, et M.**' paraissant douter de là vérité de cë plan, il lui répondit :Jfoii, monsieur, ie plan de M. Rabié n'est pdè fttux. Cet ingénieur esibitiït. On ne dWa pas que le plan a été fait depuis.
Quelles qu'aient été les expressions qu'a employées M- JaUViB, M.***1 en parut à l'instant peu offensé d'a^ès les différents renseignements qui ont été bris ;. ceux (fui lui sont ïèS frius fàvOrabfeé, aittùOnÇrat qtt'il répohdit â M. Jâutin i It est bien étonnant àicè vous doiittêï de cè que foi l'hantteur de Vous dire, mais venons à attire àpéfation.
dtf continua ëd effet l'ottëtàtiôn, éî lorsqu'elle fut fîhië, M. JatfVitf, et tous detrx qdi avaient été présents au tofsé dù terrain, àcc5bWpctènêrèht II.*** jusque chez fui entrèrent dâùs fe màison Où if faisait sà résiaefldè habitfrèTïe' : ifs1 y restèrent quelques moments, en sortirent avec lui, ét ne s'en séparereût que devant le magasin du rtîi.
. 0euxjours s'ëcoûJfërent sanî quëM.***1 témoignât à M. Jàuvïn le moindre ,médontetite(îneni! cfè ce qui s'était passé le 16 février 17#7 au matin; maïs le îo (et non pas svx t heure, comme lè porte la* (fênonaàtmh). M.*** iù écrivît au Càjyihô lettré, où ilàccû'saiï d'abord m. JauVîn d'avôir agi aVoc tant de passion «- qu'il semblait l'attaquer plutôt en partie înÊéresêéè qiTeû, jùg& tranquille et honnête qui cherche là Vérité ».
Il passait ensuite au récit ie la scènë' dû îo février, et u me la rendait en? c'es; fermes :
J'ai remis autrefois, disais-je, à M. JaUvin un plan fîguralif clé fempïàcèmeitt qùe£âi vendu ah roi-
«. Cela estf. fàux, rêffïcjaè âùssîtqt ce M. Jauvin. Vous sentez, mon générai, ce qtfuri démenti de cette espèce a dû produke sur une âme coiùme la mienne.- Je nèvous dSs&mUlerai pàs qu'Un mouvement eoUvufei'f,. siflvi f un ffofa àmeglacer les màins; en a été te Premier' effet! : hëureûsement cela n'a produit, à fa suite de ce premi'er moment que, le. bonheur de- me contenir' ètf homme stupéfait ;i jë, niai» cëpehdant pil nr'ëmpêcher de faire sentir â c'é m. Jauvin l'indiscrétion insultante à Un pareil propô'é.........---------- «.....
« Je vous demandé donc, moù général, que Mî. Jauvin,au milieu do douze officiers supérieurs où Chevaliers de SiaiûfcLduis de fa gàrnisetf, soit
tenu de me demander pardon, et je le lui accorderai, vu son physique débile, et la supériorité que j'aurais nécessairement sur lui. Cette leçon pourra lui apprendre à ne mettre ni outrage ni injustice dans la portion d'autorité sous laquelle il est affaissé. Les pouvoirs de juge du point d'honneur sont entre vos mains seules, mon général. Je suis homme de guerre; les commissaires de la marine ont la prétention de l'être : ainsi vous seul êtes notre juge à tous deux.
« J'attends donc cette justice de votre part, sans quoi il paraîtra que le démenti qui m'a été donné est une affaire pour laquelle il me serait loisible d'employer les moyens dont un homme outragé pourrait user. » Je répondis à M*" :
« Vous m'obligez, Monsieur, à remplir des fonctions importantes, mais très délicates : je vais prendre, comme vous le désirez, des informations sur ce qui vous a choqué. Je vous défends très expressément d'user de voies de fait.
« Il m'est encore permis de me conduire paternellement dans cette affaire : je crois vous rendre le service le plus essentiel en vous ouvrant les yeux.....................................
« La dénégation des faits est de l'essence des procès ; elle ne peut y être regardée comme une insulte. Qui que ce soit des assistants n'a vu comme vous, n'a interprété de même..................
« Lorsque M. Jauvin a nié qu'un plan eût été remis à l'administration, il ne défendait pas, comme vous, ses propres intérêts, mais ceux d'un tiers, ceux du roi. C'est un magistrat âgé, vénérable, c'est le commissaire ordonnateur, le représentant de l'intendant dans la partie du Nord : il exerçait des fonctions publiques; il remplissait son devoir, en exigeant qu'un titre important fût produit. C'est par votre lettre seule que je suis instruit; c'est ellè qui dépose de ces faits et qui m'inspire toutes ces réflexions. Je vous prie de les peser vous-même.
« Votre meilleur ami ne vous écrirait pas au trement que je le fais. 11 est à craindre que votre vivacité ne vous égare ; tous mes efforts tendeDt à empêcher un brave militaire qui a bien mérité de sa patrie de se perdre lui-même. »
M. Jauvin n'avait été instruit qu'indirectement des plaintes que M.*** portait contre lui. II m'écrivit du Cap le 22, et sa lettre ne me parvint qu'après que j'eus fait la réponse dont je viens de donner l'analyse. Il niait formellement avoir eu Vintention de donner, ni avoir donné un démenti à M.***. Il ajoutait : « Incapable d'insulter un enfant, tranquille, uni dans ma façon d'être zélé pour les devoirs qu'on m'impose ou que je me suis imposés, je réclame votre justice dans une circonstance qui intéresse ma tranquillité; elle ne peut diminuer l'estime que vous avez bien voulu me témoigner; je n'ai pas cessé de la mériter. »
La description que M. Jauvin faisait ici de son caractère, répondait parfaitement à l'opinion qu'en ont conçue tous ses concitoyens. Magistrat sexagénaire, ses cheveux blancs ajoutent encore à la vénération qu'inspirent ses services et ses vertus. Il me tardait de savoir qu'une affaire dont il s'affectait, qui jetait l'alarme dans toute sa famille, fût terminée. La lettre que je reçus de M.***, datée du Cap, du 25 février 1787, me laissa peu d'espérances d'y réussir.-Après m'a-voir assuré que son intention n'avait jamais été d'employer aucune voie de fait (et il en avait pris
l'engagement le 20 février au Cap, dans un écrit qu'il remit à M. de la Plaigne), il me marquait : « La chose est trop sérieuse, mon général, pour croire que vous ne nommiez pas une commission à ce sujet. Les lois pénales, établies par le tribunal des maréchaux de France, sur le démenti, entraîneraient certainement M. Jauvin à de bien plus forts désagréments que la réparation que je réclame. •
Le même jour 25 février, date de cette lettre peu conciliante de M***, M. Jauvin lui en écrivait une qui ôtait tout prétexte à la moindre plainte.
M. Jauvin y assurait d'abord n'avoir eu connaissance de la plainte portée contre lui que le mercredi 21 au soir, cinq jours après le fait qui y avait donné lieu : « Ma surprise, ajoutait-il, a été telle, que je n'en suis pas encore revenu. »
« Si dans la chaleur d'un débat inévitable entre l'ordonnateur qui soutient d'une part les intérêts du roi, et les soutient avec d'autant plus de fermeté, qu'il s'y croit autorisé par des pièces dont il est muni, et vous,Monsieur, de l'autre, qui défendez vos droits avec chaleur, parce que vous prétendez qu'il y a erreur dans une de ces pièces, et croyez en avoir remis d'autres ; si, dis-je, dans cette discussion, il y a eu quelques mots louches, mal prononcés, mal interprétés, qui aient pu vous faire de la peine, je vous prie
de croire que c'est contre mon intention..... Je
vous réitère que je n'en ai eu aucune de vous dire personnellement quelque chose qui pût vous choquer. J'aurais été le premier à vous offrir toutes les satisfactions que vous auriez pu désirer, à l'instant même et devant toute l'assemblée, si je vous avais dit^quelque chose d'offensant. »
Il est peu d'offenses en effet, que n'efface une explication aussi complète. M/" ne la trouva cependant point satisfaisante : on en peut juger par la réponse qu'il lui adressa.
« Une rétractation, Monsieur, lorsqu'elle est bien claire et généreuse, procure plus d'honneur â celui qui le fait qu'à celui qui la reçoit. Tous les discours de votre lettre tournent autour de la chose essentielle. On y voit clairement combattre deux passions, dont rune attire virtuellement au centre, et l'autre répuise.
« Mais comme je ne veux pas que ma conscience me reproche la faiblesse de passer ainsi une insulte qui aurait pu me perdre, vous ne devez pas trouver mauvais de me voir résolu à mettre en œuvre tous les moyens pacifiques de l'effacer de mon cœur.
« Les bienséances attachées aux usages ne sont que l'écorce de l'honnêteté; ne trouvez donc pas mauvais, je le répète, que je me refuse à une complaisance trop voisine de la lâcheté.
« La régularité de mes actions sera toujours fondée sur les sentiments intérieurs de mon âme.
« J'éviterai de parler ici de l'horrible affaire que vous eussiez fait éclater, qui nous aurait perdus l'un et l'autre, si je n'avais su maîtriser la violence de tous mes sens révoltés, dont l'effet s'est manifesté aux yeux et aux oreilles de tous les assistants, quand il n'en produisait aucun sur vous. Je dois donc me taire, et il serait difficile d'en parler sans scandale.
Rétractez-vous, Monsieur, dans les formes prescrites par la franchise, je dirai plus, par 'honneur.
« Votre devoir consiste à ne rien faire qui ne porte avec soi le type de la justice, et souvenez-vous surtout que l'honnêteté d'un homme en placc
consiste autant dans les expressions dont il doit se servir, que dans la pureté de ses mœurs, et la décence de son maintien.
« Tels sont, Monsieur, mes principes : Les circonstances ni les craintes ne sont pas faites pour me faire chanceler, elles servent au contraire d'aliment à mon honneur. »
Tel fut le fruit de mes représentations, voilà ce que produisirent les démarches des personnes recommandables que j'avais chargées de s'entremettre pour pacifier les esprits, et terminer des débats sans objet.
Instruit de l'envoi de cette lettre, dont M. Jau-vin m'avait fait passer la copie, j'écrivis encore à M***, le 28 février 1787.
« J'ai reçu, Monsieur, lui disais-je, une lettre de M. Jauvin, par laquelle il m'assure qu'il n'est sorti de sa bouche aucune parole choquante pour nous. 11 est en vérité superflu d'ajouter qu'il n'a pas eu le moindre projet de vous offenser, car il vous est impossible d'avoir un doute à cet égard; mais j'ai chargé le commandant pour le roi de vous le dire, ce" qui assurément doit vous suffire. D'après les lettres que je vous ai précédemment écrites, je crois tout fini........»
Je devais, en effet, croire ce débat terminé; mais les avis que je reçus le 4 mars, d'une dès personnes que j'avais chargées de négocier une réconciliation parfaite entre M... et M. Jauvin, me jetèrent dans les plus vives alarmes. Je ne nommerai point cette personne; la nature de l'affaire que l'on me force de rappeler justifie mon silence. Elle m'assurait avoir été obligée de contenir M. Jauvin qui, à la réception de la lettre de M..., voulait aller lui offrir la réparation qu'il semblait exiger. Elle ajoutait : je les veille l'un et Vautre pour éviter les événements.
La juridiction du tribunal de Messieurs les maréchaux de France, était exercée à Saint-Do-mingue, par le gouverneur de la colonie, M... le reconnaissait dans sa lettre du 18 février. Les pouvoirs déjugés du point d'honneur, y disait-il, sont entre vos mains seules, mon général, ainsi vous seul êtes notre juge à tous deux. J'usai donc de l'autorité que la loi me confiait. J'y fus déterminé par la crainte des suites que pouvait avoir une affaire à laquelle M..., en assurant qu'il n'userait point de voie de fait, désirait évidemment donner de l'éclat. Prévenu des dispositions dans lesquelles étaient les esprits, devais-je attendre qu'un magistrat dont les forces n'étaient que trop épuisées par de longs travaux, s'engageât dans un combat singulier pour une expression qu'il était même incertain qu'il eût employée? et quand il s'en serait servi, n'avait-il pas donné à M... toute la satisfaction que l'homme le plus susceptible pouvait exiger ? Enfin dans quelle circonstance lui serait-elle échappée cette expression? quand il faisait les fonctions de ministre de la justice, quand il soutenait les intérêts de l'Etat^ dans une de ces discussions litigieuses, qui ne naissent que quand les parties sont contraires en faits. J'écrivis donc à M..., le 8 mars 1787, et je le prévins que j'avais ordonné de l'arrêter. Il le fut, en effet, et resta au fort Picolet pendant quatre jours, jusqu'au départ du premier bâtiment qui fit voile pour le Port-au-Prince.
Le même jour que j'envoyais du Port-au-Prince, cet ordre rigoureux peut-être, mais devenu indispensable, M... m'annonçait, dans une lettre datée du Gap, des sentiments pacifiques auxquels il manquait d'avoir été plutôt exprimés.
M.»; devait être en mer quand je reçus sa lettre*
L'affaire avait éclaté ; sa longue résistance devenue publique exigeait une marque d'improba-tion. Je résolus donc dès ce moment de faire assembler aussitôt son arrivée, M. Coustard, commandant en second de la partie de l'Ouest ; M. de Loppinot, commandant particulier par intérim de la ville du Port-au-Prince; M. le marquis de Grippière, brigadier d'infanterie, colonel du régiment du Port-au-Prince, et M. Mollerat, major de ce régiment. Je crus qu'il convenait d'interroger M... en leur présence, quoique j'eusse seul, à Saint-Domingue, l'exercice de la juridiction qui appartenait parmi nous à Messieurs les maréchaux de France, et de prononcer un jugement dont la lettre tardive que j'avais reçue modérerait cependant les dispositions.
J'ai suivi exactement cette marche, et le 26 mars 1787, j'ai décidé, comme juge du point d'honneur, « que si le vendredi 16 février 1787, « M. Jauvin (encore que son devoir l'obligeât de « combattre cette assertion de M..., qu'il avait « remis à l'administration un plan de M. Poliart), « avait dit : cela est faux, je le désapprouvais de « s'être servi de ces termes, et lui défendais d'em-« ployer désormais de pareilles expressions. »
J'ajoutai : « Ma censure, à cet égard, n'est que « conditionnelle, le fait me paraissant au moins « très douteux ; car les informations qui attes-« tent que ces mots ont été prononcés, et celles « qui les démentent, sont absolument égales en « nombre et du même poids. Mais, soit que le « commissaire ordonnateur ait ou non ce tort « qui tient à la forme, je loue hautement sa pro-« bité rigide et son zèle pour les intérêts du roi, c qui lui étaient confiés. Il les eût trahis, s'il « n'eût pas opposé la dénégation la plus précise « à un fait non seulement dénué de preuves « mais absolument improbable.
« En supposant que M... ait eu réellement à se plaindre d'un mot échappé, je décide que « toute la satisfaction qu'il pourrait désirer, lui « a été donnée par ma lettre du 28 février, par « la déclaration que j'ai chargé le commandant « pour le roi, de lui faire, et par la lettre très « polie que M. Jauvin lui a spontanément écrite. « Ainsi non seulement je défends à M... d'user « d'aucune voie de fait, mais si la présente af-c faire a la moindre suite, sous quelque prétexte « et de quelque manière que ce soit, je l'en « rendrai personnellement responsable. Je m'abs-« tiens. de prononcer sur toute la conduite qu'a « tenue M..., et parce que je lui ai verbalement « fait sentir combien je l'improuvais, et parce « que son acquiescement du 8 mars à ma décision « quoique tardif, a été volontaire; mais si dé-« sormais aucune affaire où il aura intérêt, de-« vient affaire d'honneur, j'ordonne qu'on le fasse sur-le-champ arrêter, et qu'on m'en rende « compte, afin qu'il soit conduit en France.
« Comme, en examinant ces 4eux questions, « il s'est trouvé des preuves claires et judiciai-« rement constatées de la désobéissance for-« melle et répétée de M... aux ordonnances pro-« visoires qui ont été sagement rendues par les « représentants des administrateurs, il est dû « exemple, et M... gardera les arrêts pendant « trois jours au fort de l'Ilet. »
Je me suis fait un devoir de rendre le compte le plus exact des circonstances qui ont nécessité ce jugement. Je demande à l'Assemblée nationale de les peser dans sa sagesse, de ne point perdre de vue l'âge du sieur Jauvin, les fonctions qu'il exerçait, le silence qu'a gardé, pendant deux jours* Mi.i sur une phrase que lui seul a regardée
çommp pffensante, et le peu de sensation qu'elle avait produite sur tous peux qui accpmpagnaient les deux parties.
Je la supplie de suivre la conduite sage et modérée du sieur Jauvin, de mettre en opposition la lettre qu'il a écrite à M... et la réponse qu'il a reçue.
Qu'elle daigne remonter au principe de cette affaire, elle n'y trouvera qu'une discussion d'intérêts pécuniaires, où l'honneur ne pouvait être en rien compromis. Elle verra dans M. Jauvin, le magistrat préposé pour défendre les intérêts de l'Etat; à ce litre, il était sous la sauvegarde Immédiate de la loi. Appeler à son épée, à défaut de moyens, c'est substituer la force au bon droit. Ces exemples fâcheux étaient fréquents, quand le roi me nomma au gouvernement de la colonie. J'en ai représenté le danger au ministre, je lui ai demandé la permission de rappeler aux vrais principes de l'équité et de l'honneur ceux qui voudraient les méconnaître. La publicité que j'ai pris soin de donner à mes sentiments sur ce point a tenu lieu d'exemple; et, pendant près de deux ans que le gouvernement de l'île Saint-Domingue m'a été confié, on ne citera due trois personnes contre qui j'aie été forcé d user du pouvoir que me donnait Ja loi. Ces trois personnes sont M... mis pour trois jours aux arrêts, et deux particuliers envoyés en France pour des faits plus graves.
Des représentations, des défenses ou verbales ou par écrits, ont, dans plusieurs occasions, conservé à la justice topte son autorité, en empêchant les parties de se la faire elles-mêmes.
Je nie résume.
J'ai, comme exerçant la juridiction dp MM. les maréchaux de France, ordonné à M... de garder l>!3 arrêts pendant trois jours.
Je n'ai point en cela excédé les bornes de mes [jpuvoirs,
J'ai jugé en mon âme et conscience: l'équité et l'intérêt public exigeaient un exemple; il était essentiel au bon ordre que j'étais chargé de maintenir dans la colonie.
C'est avec regret que je me suis vu forcé de priver M... de sa liberté, pendant quelques jours avant de le juger.
Mais dès que je le citais au trij)ppal, je devais m'assurer de sa personne ; c'était le seul moyep d'éviter des rencontres périlleuses qu| n'étaient
Sue trop probables et dont il était dé mon devoir e prévenir les effets.
SIXIÈME ÇHE? D'ACCUSATION.
Réunion dèsçistrewe des conseils supérieurs de Saint-Domingue.
SEPTIÈME CHEF,
Gfand, chemin dn Qap ; mensonge public ; corvées çifbitaires ; dépenses énormes ç,t inutiles.
RÉPONSE.
La réunion du conseil établie au Cap Français ^ cpiui tli? Port-au-Prince est la base des sixième et sèpt|ème cfiefs de dénonciation, Jtlçg dfQoacijiteurs décident que la réunion de
ces conseils est (a) désastreuse et que j'y ai eu une très grande part ; ils m'imputent :
1° De n'avoir pas prévu l ordre dangereux qui consommé cç^te réi^nipn ;
2° D'avoir exécuté ce,t ordre qu,and je pouvais m'u soitstraife ;
3° D'en avoir, depuis mon entrée dans le ministère maintenu (tveç opiniâtreté les meurtrières dispositions,
La difficulté des communications entre le Cap-Français et le Pprt-au-Prince devait, suivant eux, écarter à jamais toute idée de réunion des deux çqnseils ; mais comme il existe aujourd'hui un grand chemin et une communication libre même pour les voitures, qui remédient à cet inconvénient, i|g ont tiré de la confection de ce chemin dè noqvèàux chefs d'accusation contre moi. Ils me reprochent :
1° D'avoir trompé le ministre, en lui fournissant comme motif un fait matériellement faux ;
2° D'avoir voulu justifier mon assertion par des moyens dççtrytçteV'Vî de, l'humanisé.
uest ainsi que jes treize dénonciations principales se subdivisent en une multitude de petites dénonciations particulières.
Ils m'imputent dope de n'avoir pas prévenu la réunion des depx conseils du Cap Français et du Port-au-prince !
Mais ils auraient dû faire précéder cette accusation de la preuve que j'avais eu le pouvoir d'empêcher cette réunion; car, en supposant qu'elle fût désastreuse, ils nè pourraient me reprocher de ne m'y être pas opposé qu'autant que j'aurais pu je faire. Or, qqelfe preuve ont-ils que j'ai ep cette possibilité? sur quoi se fondent-ils quand ils attestent (b) dans leur dénonciation, que j'étais prévequ de ce' projet avant de me rendre à Saint-Domingue ? Je déclare formellement que le ministre ne
m'avait donné aucune coinrqunication de l'édit de réunion avant mon départ de France pour les colonies. Je déclare avec non moius de vérité que je n'en ai eu connaissance que par l'ouverture du paquet qui renfermait cet édit, avec l'ordre exprès de le faire enregistrer.
Je suis parti de France en décembre 1795, pour me rendre à Saint-Domingue, dont le gouvernement venait de m'être confié, L'édit de réunion fui apporté, avec cinq autres Iqis, en mai 1787, par un bâtiment du roi sur lequel étaient MM. de La M.., et M... ; il y avait dope quinze mois que j'avais quitté la France quand l'édit de réunion m'est arrivé. Dans un espace de temps aussi long, le ïqinistre a pu réaliser un projet qu'il n'avajt peut-être pas conçu quand j'ai pris congé de lui ou du moins auquel il pouvait n'avoir pas définitivement arrêté ses idées avant mon départ,
M. M... observe dans un mémoire qu'il vient de publier que M. le maréchal de Gastries, ministre de la mariner le consulta le octobre 1786 sur le projet des nouvelles lois, quant à la forme seulement qu'on devait leur donner. G es lois n'étaient donc alors qu'en projet, et déjà il s'était écoulé dix mois depuis mon départ de France.
Ce serait à ceux qui me dénoncent à tout prouver; ils ne prouvent, rien, et je trouve dans des faits constants et d'une date invariable, des preuves qu'on peut appeler oqnvaincantes de la fausseté de leur dénonciation.
Sont-ils mieux fondés à me reprocher d'avoir fait exécuter l'édit de réunion, quand je pouvais m'y soustraire ? j
J'étais gouverneur pour le roi ; les lois que l'on m'envoyait contenaient le mandat impératif pour moi de les faire enregistrer : l'obéissance était mon premier devoir, mais j'avais une trop juste idée de la droiture des sentiments de M. le maréchal de Gastries, l'équité du roi m'était trop connue pour que je me fusse tu, si Ton m'avait consulté, comme rassurent les dénonciateurs, sur les inconvénients que pourraient entraîner quelques-unes de ces lois nouvelles, et sur les réformes dont elles étaient susceptibles. Je les aurais certaine? ment examinées si l'on ne me les eût préalablement communiquées, et j'aurais franchement in-* diqué les changements et les corrections que requérait, selon'moi, cette espèoe décodé, dont l'ensemble cependant m'a paru devoir produire des effets utiles au peuple. Je fus donc d'avis au conseil supérieur, qu'on enregistrât, et néanmoins qu'on adressât des remontrances au roi :- telle avait été l'opinion unanime des membres qui y siégeaient. On ne peut aujourd'hui révoquer en doute cette circonstance dont toute la colonie fut alors instruite.
M. le marécha} de Gastries avait prévu la plus forte objection que l'on pût faire contre l'édit qui réunissait les conseils ; il la réfutait d'une manière satisfaisante, et qui n'a pas même epeore été combattue.
« Cette réunion, disait M. le maréchal de Cas-i tries, dans sa lettre du 4 février 1787, pouvant être désavantageuse dans les matières de peu
« d'importance, il y a été remédié par une amplia» « tion de pouvoirs accordés aux vingt sénéchaus-« sées et amirautés de l'île, pour juger en der-« nier regsort jusqu'à la concurrence de 6,000 « livres tournois, »
Cette ampliation, en effet, accélérait la décision de toutes les causes qui intéressent la classe du pauvre. De plus grands intérêts ne pouvant s'agiter qu'entre gens riches, on devait prendre en moin- «
dre considération les frais de déplacement et de voyages.
Je n'ai point mis à l'enregistrement de ces lois, une précipitation qui puisse faire présumer que j'aie coopéré à leur rédaction. L'édit de réunion des deux conseils n'a été scellé qu'en janvier
1787. Le vaisseau qui l'a apporté a mis à la voile le 32 février; il a relâché aux Iles du Vent, et n'est arrivé à Saint-Domingue que le 2 mai. Les magistrats du Gap ont eu plus d'un mois pour se rendre au Port-au-Prince, et Je il juin l'enregistrement a été ordonné. J'ai été d'avis d'adresser des remontrances au roi, et l'imputation que l'on me fait d'avoir, depuis que j]a>i été appelé au ministère, maintenu àvec opiniâtreté les meurtrières dispositions de l'édit de réunion, me met à portée de prouver au public que je me suis toujours occupé des moyens de corriger les défauts que j'avais remarqués dans les lois que j'ai été Chargé, comme gouverneur, de faire enregistrer.
Je fus nommé, en septembee 17&7, ministre de la marine; je n'en fus instruit qu'ep novembre-Déjà le conseil supérieur avait arrêté à Saint-Domingue, dans une séance où j'assistai, les chefs sur lesquels les remontrances devaient porter ; mais ces remontrances n'étaient point encore rédigées, Je recommandai, en quittant la colonie, de hâter le travail, et je me félicitai de pouvoir, comme ministre, solliciter auprès du roi des réformes que comme gouverneur de Saint-Domingue j'avais cru convenables; et même nécessaires.
Je ne reçus ces remontrances à Versailles, qu'en avril. 1788; elles étaient «olumineuses j elles exigeaient un lopg examen. J'en accusai la réception, le 17 avril 1788, aux officiers du conseil, en les assurant que j'en rendrais compte au coi, et que je leur ferais connaître ses intentions.
J'employai près de deux mois à consulter et à méditer sur une affaire d'aussi haute importance. Je présentai mon opinion au roi, et Sa Majesté m'ayaut donné ses ordres, j'écrivis, le 8 juillet
1788, aux administrateurs de la colonie, une lettre qui devait être et qui a été enregistrée au conseil supérieur de Saint-Domingue, J'y disais, au nom du roi :
« Sa Majesté est dans l'intention de maintenir « la réunion qu'elle a ordonnée des deux conseils. « L'intérêt des justiciables exige qu'il n'existe « dans la colonie qu'une seule coUr souyeraine « de justice, et qu'une même jurisprudence.
x Le zèle du conseil supérieur n'en est pas « moins louable. Il a servi à éclairer Sa Majesté « sur les inconvénients réels, quoique momen-c tanéset locaux, qui résultent de la réunionnes « deux cours; elle a résolu de les faire cesser.
« fille a été spécialement frappée, pour le hon-9 heur de ses sujets, des dangers d'un incendie « qui pourrait consumer toutes les archives i rasait semblées au Port-au-Prince, et de la difficulté 9 qu'éprouvent les plaideurs lorsqu'ils veulent 9 s'y rendre par terre de la partie septentrionale. « de l'île.
« Le roi vous commande d'accélérer la cons-« truction des canaux et des fqpfôines qui doi-9 vent distribuer l'eau dans tous les quartiers de* « la ville où siège le conseil; d'accélérer aussi « celle de la grande route que vous avez fait ré-« comment traeer à travers' là chaîne des mon-^ « tagnes qui séjparéntle çom^anle0ent*âe l'Ofrest ^Jf^^M dU ffOrd,' /épe (Jjqptl « ne Mue?, aij^qi qu'fV vpus sg'r% jw^infehfêl « travaux utiles et même nécessaires dont le corn-
« mencement est dû à votre amour du bien « public et à votre prévoyance (1). »
En rapportant ce fragment de ma lettre, n'ac-créditai-je pas la dénonciation qui a été faite contre moi? J'annonçais à la colonie l'intention où était le roi de maintenir la réunion qu'il avait ordonnée des deux conseils ; j'attestais qu'il était de l'intérêt des justiciables qu'il n'existât à Saint-Domingue qu'une seule cour souveraine de justice, qu'une même jurisprudence, et ce sont précisément-là les délits qu'on m'impute.
Je pourrais sans doute opposer à mes dénoncia-ciateurs les ordres exprès du roi, que j'ai dû exécuter comme son ministre, et un mot ferait disparaître la dénonciation, puisqu'elle remonte à une époque où la responsabilité n'était point encore établie ; mais j'avouerai, avec la franchise et la fermeté qui conviennent à mon caractère (dût mon aveu profiter à mes adversaires), que j'ai regardé la réunion des conseils comme pouvant devenir utile aux habitants de la colonie.
11 serait étrange, sans doute, qu'on voulût ériger en principe que la multiplicité des tribunaux supérieurs est avantageuse en soi. Oublions, s'il est possible, ce que ces établissements coûtent à la chose publique; n'ayons point égard aux individus qu'ils enlèvent à la classe vraiment utile des citoyens qui multiplient par leurs travaux les productions de la terre, ou les répandent également par le commerce dans toutes les contrées de l'univers ; fixons seulement nos regards sur la diversité de jurisprudence qui s'établit dans des tribunaux supérieurs, égaux entre eux en autorité.
Les lois ne sont jamais tellement parfaites qu'elles embrassent tous les cas, qu'elles s'adaptent d'elles-mêmes aux espèces qui se présentent à décider. Les circonstances de fait laissent un vaste champ à l'arbitrage du juge; de là naît dans chaque tribunal une espèce drhabitude de juger certaines causes, habitude qui varie suivant les lieux, suivant les temps, et qui exige de la part de ceux que des intérêts différents y conduisent, une étude plus difficile que ne serait celle de la loi même.
Je pensais et je pense encore que l'unité du tribunal supérieur était le seul moyen de parer à cet inconvénient, beaucoup plus grand qu'on ne croit. Saint-Domingue semblait inviter à la réunion de ses conseils par l'uniformité de sa coutume, par celle de ses productions : l'étendue de son sol et sa population n'y mettaient point d'obstacles insurmontables.
Le Port-au-Prince, placé au centre de la colonie, était le siège naturel de ce tribunal unique. La partie de Saint-Domingue qui appartient à la France, n'a pas plus de superficie que la province de firetagne ; les deux extrémités de son territoire ne sont pas à plus de soixante-dix lieues de la ville du Port-au-Prince ; sa population ne s'élève pas à plus de cinquante mille êtres libres, de tout âge, de tout sexe, de toute couleur : et si l'on en retranche les femmes en puissance de
maris et les enfants, on trouvera à peine trente-cinq mille individus capables d'ester en jugement.
Sur la surface de cette île sont répandus vingt tribunaux anciennement établis sous le titre de sénéchaussées et d'amirautés. Un édit envoyé en même temps que celui qui réunissait les deux conseils, donnait une ampliation de pouvoirs à ces tribunaux de première instance ; il les rendait compétents pour juger en dernier ressort jusqu'à six mille livres, argent de France, et augmentait le nombre des juges qui devaient y rendre la justice.
Des précautions aussi sages ne rapprochaient pas seulement la justice du justiciable; mais quiconque obéirait à la loi, devait être assuré que la loi ne serait point inutile pour lui ; il trouvait une expédition plus prompte et moins coûteuse.
Le recours au conseil supérieur ne pouvait plus avoir lieu que dans les causes d'un intérêt majeur; et alors la fortune dont jouiraient ceux entre qui elles naîtraient, ferait compter pour moins l'obligation d'aller solliciter un jugement définitif à une distance de vingt, de trente, de cinquante lieues pour la presque totalité des habitants ; de soixante ou de soixante-dix lieues pour quelques-uns seulement qui se sont fixés aux extrémités de la colonie.
Contre des motifs si puissants de réunir les deux conseils, on pouvait objecter ]e dànger de rassembler toutes les minutes dans un seul greffe et dans une ville autrefois exposée à de fréquents incendies; mais j'avais prisdes précautions sûres pour les prévenir. Un vaste réservoir nouvellement et solidement construit tient pour ainsi dire suspendue sur la ville une masse d'eau immense et offre des secours assurés contre le feu. Cinq fontaines établies dans les différents quartiers coulentsans interruption.il existe suffisamment de tuyaux dans les magasins pour en construire deux autres ; elles seraient achevées maintenant, si la disette de'fonds qui depuis les derniers troubles se fait sentir à Saint-Domingue n'eût obligé de suspendre des travaux qui touchaient pour ainsi dire à leur fin.
Les montagnes escarpées qui s'élèvent entre le nord et l'ouest de Saint-Domingue, la difficulté des communications mettaient encore des obstacles à la réunion des deux conseils; mais je dois observer d'abord que le trajet par mer de l'un à l'autre de ces ports est rarement dangereux. Les vents y sont réglés, l'hivernage redoutable aux autres Antilles est presque inconnu entre le Gap et le Port-au-Prince : les traversées n'y sont pas longues. Quelques nâtiments ont échoué à la pointe de la Gonave pour s'en être approchés trop près; mais j'ai fait lever et graver une carte exacte des côles de cette île, et j'ai averti par ce moyen les navigateurs des écueils qu'ils devaient fuir.
J'ajouterai qu'au mois de juillet 1788, date de ma lettre, je savais qu'en janvier de la même année il avait été ouvert une grande route qui communiquait du Port-au-Prince auCap-Français. On travaillait à cette route importante avec une telle ardeur, qu'en dix-neuf mois elle a été achevée. Les montagnes ont été coupées, les ravines comblées, les descentes rendues faciles. La pënte la plus rapide n'excède pas aujourd'hui trois pouces et demi par toise : on doit y avoir établi des voitures publiques. Une ordonnance rendue par MM. du G... et de Marbois le 28 mai 1789, enregistrée au conseil supérieur de Saint-Domingue, en a déterminé le départ et l'arrivée; elle
a fixé le prix des places pour les différents endroits ou elle passe.
L'aurait-on cru? de ce chemin même qne j'ose appeler un des plus grands bienfaits dont la bonté du roi ait pu gratifier Saint-Domingue, on a tiré un nouveau chef de dénonciation contre moi. On le subdivise comme on a fait du premier, en dénonciations particulières, présentées sous les noms effrayants de mensonge public, corvées arbitraires, persévérance opiniâtre dans dispositions pernicieuses.
J'ai, si l'on en croit la dénonciation, trompé M. le maréchal de Castries en lui présentant comme une route praticable, celle qui n'était pas encore ouverte ; je me suis, par là, rendu coupable d'un mensonge public.
Mais pouvais-je présenter à M. le maréchal de Castries, alors ministre de la marine, comme un moyen propre à déterminer la réunion des deux conseils du Gap et du Port-au-Prince, la communication ouverte par terre entre ces deux villes, quand j'ignorais même que cette réunion des conseils fut projetée ?
Ce n'est point avec moi que le ministre a préparé l'édit qui l'ordonne, je n'en ai été instruit qu'en mai 1787. Si l'on a annoncé dans lè préambule de cet édit que des chemins commodes et sûrs faisaient dès lors communiquer entre elles toutes les parties de la colonie, cette erreur ne doit pas être imputée à celui qui était séparé de dix-huit cents lieues du rédacteur de la loi ; je n'y ai aucune part, et si j'eusse été consulté, je n'eusse certainement pas fait l'éloge d'un chemin dont, avant la date de l'édit, j'avais connu moi-même les difficultés et le danger.
Comment s'est-on permis, sans avoir vérifié les faits, de m'imputer un mensonge public? Le ministre qui m'a précédé dans le département de la marine a pu être induit en erreur, mais il ne l'a pas été par moi. Je n'avais aucun motif pour lui donner des éclaircissements sur un fait qui me paraissait devoir lui être indifférent : il ne m'avait point communiqué son projet, et il m'était impossible de pénétrer sa pensée.
Pour procurer à la colonie cette communication, j'ai, dit-on, demandé des corvées aux habitants riverains ; j'en ai exigé de ceux qui demeuraient au loin ; et tandis qu'en France on supprimait la corvée, je la créais à Saint-Domingue. Ce chemin a coûté des sueurs aux malheureux, des hommes à la colonie et deux millions à la caisse publique.
Gomme les inculpations se pressent sous la plume de mes dénonciateurs, quel moyen de leur échapper ? Que pourrait-on faire qui ne leur déplût? Ils blâment la rénnion des Conseils; ils se plaignent des barrières que la nature a mises entre les habitants des différentes contrées de Saint-Domingue. Ils n'osent condamner ouvertement les grands chemins, mais ils ne veulent pas qu'on les fasse par corvées, et trouvent mauvais qu'ils soient faits à prix d'argent.
Personne ne niera que la facilité des communications ne soit une source de richesses. La sûreté publique, le transport des denrées sollicitaient depuis longtemps, pour Saint-Domigue, l'ouverture d'une route, qui unît pour jamais entre elles les principales villes qui s'y sont formées ; mais la confection des chemins exige de grands travaux : de tout temps la corvée était établie dans la colonie ; elle avait acquis une existence légale par des ordonnances enregistrées aux deux conseils, en juin 1776 et novembre 1781. Tant que ces lois n'étaient pas révoquées* on
pouvait commander la corvée ; le chemin aurait été ouvert, formé, perfectionné par ce moyen, qu'il ne fournirait aucun prétexte à dénonciation.
Enfin, on n'à commencé à travailler au chemin qu'en janvier 1788, et j'avais quitté la colonie dès le mois de novembre 1787 pour repasser en France. Quels reproches fondés peut-on donc me faire, comme gouverneur, sur l'emploi de ces corvées ?
Gomme ministre, je déclare qu'il m'a été assuré qu'on les avait seulement employés à tracer et à baliser la route, ouvrages peu pénibles et de courte durée. Les remblais et déblais, les charrois de matériaux, tous les autres travaux ont été faits à prix d'argent. Les régiments du Gap et du Port-au-Prince y ont travaillé; la caisse publique a fourni à toutes les dépenses, au moyen de l'ordre qu'on avait rétabli dans les finances ; et cet ordre était tel qu'au 28 octobre dernier, il restait au Trésor 1,200,000 livres, non compris 1Q0,000 écus destinés à la construction d'un pont sur l'Àrti bonite. Ces travaux profitables à la colonie en général, n'ont été nuisibles à aucun individu ou particulier. Les registres des deux régiments qui y ont été employés, constatent que les maladies étaient moins fréquentes parmi les soldats qui travaillaient à ce chemin que parmi ceux qui vivaient renfermés dans leurs casernes. Enfin, personne jusqu'à présent ne s'était plaint qu'on eût fatigué ses bestiaux, harassé ses nègres pour perfectionner une route qui, depuis longtemps» était l'objet des vœux de tous les colons.
Plusieurs des faits que je cite peuvent être vérifiés dans les Comptes que l'intendant de la colonie a rendus au mois de juillet des années 1788 et 1789; on n'a, jusqu'à ce jour, élevé contre ces comptes aucune objection solide ou même spécieuse; plusieurs colons estimables qui, n'ayant aucune faveur à attendre dé l'intendant, n'étaient mûs que par le seul amourde la vérité, y ont applaudi.
M. le marquis de GOuy d'Àrcy, l'un de mes dénonciateurs, récuserait-il le témoignage du sieur Chailleau son proche parent ; du sieur Lebon, commandant de milices, tous deux habitant à Plaisance ? ils sont placés au centre des travaux que le chemin du Cap au Port-au-Prince a nécessités.
Mais je vais citer une pièce authentique, contre laquelle qui que ce soit ne s'est élevé, et qui prouve qu'on a avancé un fait dénué de toute .vérité, en assurant que ces ouvrages ont été faits par corvée. Qu'on lise le préambule de l'ordonnance rendue le 28 mai 1789, par MM. du G...., et de Marbois. Personne depuis ce jour n'a pu douter que ce Chemin n'ait été ouvert par les ordres et aux frais de Sa Majesté (1). '
Dùis-je encore me disculpér de cette persévé-' rance opiniâtre dont le reproche termine le second chef de ces deux premières dénonciations ?
Je pourrais dire qu'il n'appartient qu'à un caractère faible de changer au gré des circonstances ; j'avouerai cependant qu'il en est de tellement impérieuses, que l'homme le plus ferme doit y céder. Un grand nombre d'habitants de Saint-Domingué désiraient le rétablissement du conseil du Gap. J'ai cru devoir le proposer, et dans une lettre que j'ai adressée le 15 mars dernier à M. Thouret, président du comité, chargé dt présenter à l'Assemblée nationale un projet
de décret et d'instructions pour la nouvelle constitution des colonies, j'ai expressément énoncé qu'il serait très désirable de satisfaire la partie au Nord sur le rétablissement d'une cour de justice, rétablissement qu'elle désire avec ardeur.
Je croii en avoir dit assez pour ma défense. Je terminerai cette discussion, déjà trop étendue, ep observant qu'au premier octobre 1879, les tri-, bunaux de Saint-Domingue n'étaient en retard sur aucune affaire contentieuse. La justice y était rendue à l'instant même où les parties venaient la demander, et pendant plus d'un siècle on s'y était plaint d'upe lenteur dans soq administra" tion, qui équivalait presque à un déni absolu»
Je n'ai pas la prétention d'avoir fait le mieux possible, mais j avais le désir du bien, et j'ai mis a l'opérer toute l'énergie doqt je me sentais capable. J'aurai rempli mon objet dans cette partie de ma défense, mes concitoyens en sont convaincus.
HUITIEME CHEF DE DÉNONCIATION.
Démission arrachée injustement à un magistrat septuagénaire, doyen du conseil.
RÉPONSE.
Ce chef de dénonciation semblait ne devoir renfermer qu'un seul genre de laits, cependant on en a pris occasion pour parler d'un jugement qu'obtint M. de S-.- pour m-imputer une accusation qui n'a été intentée contre ce magistrat ni par moi, ni par aucun autre-
Ces différents faits tiennent à la réunion des deux conseils.
Le roi av«tït déterminé qu'il n'y aurait plus qu'un conséii supérieur à Saint-Domingue. Le Port-au-Prince étant le ebef-lieu de la colonie, c'était dans cette ville que le nouveau conseil de-» vait tenir ses séances ; il deyenait donc indispensable d'y transférer les minutes du greffe du Gap. après en avoir constaté l'état.
M. fie S..., conseiller au Cap-Français et un autre de MM> ses confrères furent nommés commissaires par le conseil de Saint-Domingue, ^ l'effet de procéder à cet inventaire.
Les greffe sont, à Saint-Domingue, le dépôt public où se versent les sommes dont la justice croit devoir s'assurer. en attendant le jugement définitif des causes portées devant elle. Le greffier du conseil du Cap avait en dépôt à ce titre plus de cent mille livres, argent des colonies. * ^e premier soin des commissaires devait être de constater l'état des dépôts; ils négligèrent cette opération importante. Qu'arriva-t-il ? Soit que le désordre régnât depuis longtemps dans la caisse, soit que ïé greffier eût conçu le projet de s'approprier les fonds qui y avaient été versés, il s'emparqua sur un bâtiment américain et disparut.
On se peint aisément l'effet que produisit la nouvelle de sqn départ. Les créanciers de ceux qq'on avait contraint de déposer, virent avec douleur échapper le gage de leur créance; chacun se livra à ses conjectures. On se demandait pourquoi les commissaires ne s'étaient pas assurés d'abord de la caisse ; on les taxait de négligence; on remarquait que la fuite du greffier avait été annoncée par dés indices qu'on n'eût pas dû négliger. Jusque-là fastueux, facile, trop obligeant peut-être, on l'av4t vu tqpt à coup vendre ses
meubles, disposer de ses nègres, convertir ses effets en argent ; que fallait-il de plus pour le rendre suspect et provoquer la vigilance des commissaires?
Dans ces sortes de conjonctures, celui qui souffre, acquiert pour ainsi dire le droit d'être injuste dans ses soupçons; il s'attache aux moindres circonstances, il saisit jusqu'aux plus légers rapports; ses erreurs doivent être traitées avec indulgence.
Le procès fut instruit, et le greffier contumax fut condamné à la peine capitale qu'il avait encourue*
Quel prétexte peut-on trouver dans ces faits pour m'inculperî Gomment se permet-on de m'ap-peler {'adversaire, l'accusateur, le délateur de M. de S.../
Où est donc l'accusation que j'ai portée contre lui? Dans quel tribunal a-t-elle été suivie? Les pièces du procès fait au greffier fjïgitif existent, je les invoque; ce $pnt des témoins qu'on ne peut m'enlever et qui s'élèvent contre l'imputation qu'on a osé me faire,
Non, je n'ai point porté d'açcpsatipn contre M. de S... ; il n'est rien émané de moi qui en ait le caractère. 0p a trompé l'Assemblée nationale, lorsqu'en pàrlarit dè la disparution des dépôts du greffe, on n'a pàs craint dé dire uJtf» de La Luzerne et M. de Marbois se permirent éÇaccuser M, de S... d'avoir coopéré â ce çrimifiel enlèvement
J'ai pu, sans doute, lui témoigner, comme au plus aqpien des pommiésaires préposés à la confection de l'inventaire, combien était fâcheuse pour la chose publique la dispatujiion 4u greffier dépositaire et l'enlèvement des dépôts. La perte en elle-même était considérable. Quels reproches n'étaient pas fondés à faire'pejix qpi avaient été condamnes à déposer et ceux qui attendaient la décision de la justice pour retirer du greffe lés fonds qu'us prétendaient jejir pppartenif?
Combien cette Perte devenait plus fâcheuse, quand des magistrats auraient pq la prévenir, quand ils auraient dû yeillér sans cesse sur le dépositaire, qui np pouvait leur refuser ses comptes à la moindre réquisition de ]pur parti
Quels reproches ne1 mfir|tàiènt pas les cqîpfnis-sairêSj pour n'avoir pas apposé les scelles. sur la caiksë loré de la réception de l'arrêt qui lés commettait à la confection de l'inventaire du greffe? Qomrnent se ppnsôler devoir laissé Celui qui y était préposé disposer de tous sès effets, véfjdre ses meubles et ses esclaves, soustraire à la justice les premiers gages qui se présentaient âelie? Quelle coqfiàncé assoupie qqè celle gm n'e§t mulée ni par des préparatifs aussi aiarmarif& ni pâr le cri du public, qui ne vqyait qu'aVep inquiétude, depuis longï^nyis, les dépensés auxquelles se livrait ce dépositaire!
J'ai pu, j'ai dû, sans doute, représenter tous les effets d'une pareille négligence; j'ai dûdirequp plus les magistrats q^t de drpits au respect du public, moins ils doivent s'exposer | sa censure, qu'ils pè peuvept commettre dé fautes iégèreq, que lès regards des plaideur sont pénétrants et que la peine du rpagistrat jnattentif est la perte de la confiance de CQqx que la loi a placés dans le ressort de sa juridiction.
J'ai dû enfin hâter la confection de l'inventaire, le transport au Port-au-Prince des minutes qu'il importait au publiG d'y voir rassemblées, et ne pas souffrir que ces opérations retardassent plus longtemps le jugement des procès que la réunion des conseils avait suspendus.
Voilà sur quoi a porté fpa correspondance avec M. de S..,. Les minutes pn reposent dans la colonie; je ne les ai pojpt apportées avec moi, qu'on les consulte: elles sont beaucoup plus au pouvoir de mes dénonciateurs qu'au mjep î mais je ne hasarde rien en assurant qu'on n y trouvera aucune trace de ressentiment contre M. de S,.. Je l'avais peu vu au Gap, et ses longs sepyipes parlaient en sa faveur.
Aussi lorsque sa délicatesse, alarmée par les bruits qui s'étaient répandus, le porta à se dénoncer à sa compagnie, j'applaudis le premier à l'arrêté où pette cqmpagmp. dont j'étais membre, consigna is témoignage de Ja reconnaissance due aux services qu'il avait rendus,
J'ai répondu à la première partie de la dénonciation; je vais examiner la seconde; elle prend son texte dans la démission de M. de S,Quelques observations préliminaires SUF la composition du consejl établi à Saint-Domingue doivent précéder ïpa justification.
La réunion des conseils du Gap et du Port-au~ Prince était prpnpnpée ; c'était au Port-au-Prince que devait être usé (j prépayant le siège du tribunal souverain de là colonie. Il importait donc aux habitants du Çap et à tous peux de l'ancien ressort de cq conseil, que leurs magistrats vinssent, le p]us tôt possible, prendre place avec ceux dont ils devenaient les collègues. Instruits de la jurisprudence de leur siège, c'pût été pour les justiciables un point qe tranquillité que de penser qu'ils les retrouveraient pour juges. Déjà préparés sur les différentes affaires qqi leur avaient été distribuées, ils devaient épargner aux parties les longueurs d'un nouveau travail-
A ce motif, suffisant pour liâter l'arrivée au Port-au-Prince des membres de l'ancien ponseil du Cap-Français, s'en joignait un beaucoup plus puissant encore : c'était d'usure? le seryiqe du tribunal, service d'autant plus important que ce tribunal était unique- te premier, le plus saint des devoirs d'un spuyerain est d'administrer la justice à ses sujets Le rpi y à pourvu â Sainte Domingue en créant Un conseil composé de vingt juges ; il a rendu les tribunaux moins coûteux en supprimant les épices ; il a procuré aux magistrats l'existence honorable qu'ils doivent avoir en leur donnant; des appointements suffisants.
Tout magistrat doit être exact à ses devoirs ; et si Je seul amour du bien nous a fourni tant d'exemples de citoyens zélés qui oublient pe que leur grande fortune leur offre de jouissances, pour se consacrer tPUt entiers à l'étude des lois, quelle exactitude ne doit-pn pas exiger de ceux qui reçoivent le prix du temps qu'ils consacrent à des fonctions tout à la fois lucratives et honorables?
Dans des compagnies peu nombreuses, l'assiduité est plus qu un devoir-, elle est d'une nécessité absolue ; aussi en a-t-ii été fait une loi impérieuse à tons ips membres du conseil de Saint* pomingue- t'artjple 19 de l'ordonnance de 1787 défend aux douze conseillers et aux quatre assesseurs hrévetés, de prendre plus d'un mois de çongé par an, et il ne veut pas que plus d'un d'entre eux en puisse profiter en même temps-
^'article de la même ordonnance prescrit à tout officier, ayant séance au conseil supérieur, j'y assister le premier octobre, jour de la rentrée, nonobstant tout congé qu'il aurait pu obtenir, ta mercuriale s'y fait jqyp même; la vie privée et publique de. chacun est soumise i la censure. On exige que les membres du conseil donnent l'exem- j pie de l'exactitude à remplir leurs engagements ; I
qn y regarde comme un crime impardonnable le moindre abus de l'autorité dqnt ils sont dépositaires. Le gouverneur et l'intendant ne sont pas affranchis de la Ipi générale} ils doivent recevoir les avertissements, les injonctions même dont le tribunal assemblé les a jugés susceptibles.
Gouverneur général, je n'ai jamais pjpprcbé à me soustraire à cette loi ; devenu ministre, j'ai dù en maintenir l'exécution.
Je le devais d'autant plus que le nombre des juges n'est jamais complet, dans quelque tribunal que ce «oit, et moins à Saint-Domingue que partout ailleurs. Les maladies y sont fréquentes ; les voyages en France y sont quelquefois nécessaires, En 1789, quatre des magistrats du conseil de Saint-Domingue y étaient venus pour cause de santé; un autre y avait été appelé par des travaux relatifs à la législation delà colonie; un sixième, emporté parle torrent de ses affaires personnelles, ne faisait que de courtes apparitions au Port-au-Prince, Un assesseur n'avait voix délibérative qu'en cas de partage d'opinions. L® nombre des vocaux se trouvait donc réduit à treize, et pouvait être diminué par les maladies ou les accidents qui menapent sans pesse l'humanité.
Dans une pareille position, n'était-il pas d'un devoir indispensable de rappeler au Port-au-Prince tous les magistrats qui composaient le conseil, de les mettre tous en activité? I intérêt du public l'exigeait, qelui des membres du conseil le demandait. Toutes les affaires s'instruisent par écrit à Saint-Domingue ; elles se jugent par rapports ; elles sont eu très grand nombre. Un des membres ne peqt être absent sans surcharge pour les autres. L'inexactitude dèé magistrats serait à Saint-Dominque le plus grand de tous les vices dans l'administration dé la jiisticè.
Dans un parèil état de choses, lé repos,, j'en conviens, est presque impossible ; l'intérêt général l'emporte sur toute espèce de considérations particulières. Les services passés doivent être récompensés, mais ils ne peuvent autoriser à laisser vacante une place qui doit continuellement être remplie»
J'ai dft donner et j'ai donné en effet les ordres les plus précis à tous les membres du conseil de se rendre au tribunal auquel ils appartenaient Ces ordres, émanés du foi lui-ipême, ont été notifiés à M. de S...,comme à d'autres membres du conseil, M. de S... a prétexté sa mauvaise santé et est resté au Gap,
Plusieurs mois se sont écoulés; les affaires s'accumulaient, l'administration de la justipe languissait : j'ai, de la part du rai, renouvelé les ordres. M. de S... répugnait à s'éloigner du Gap pù ses biens et sa famille le retenaient; d'autres magistrats imitaient Sqn exemple. Je ne pouvais faire céder [ intérêt général à des considérations particulières; j'ai dit et dû dire qu'il fallait venir remplir sa place ou l'abdiquer.
Cet ordre, qui était jU^Oi ne portaiMl que sur M. de S*....? non, et j ai l'avantage, dans la circonstance, de pouvoir prouver qqe mes le$Fes étaient toujours relatives à ceux membres du conseil, au nombre de deux ou trpis, qui remplissaient aybc peu d'assiduité leurs fonctions.
Cet ordre, a-t-il été précipité? non, et M. (Je S,., entre- autres est reste revêtu de son titre pendant quinge mois; il a touché pendant tout ce temps ses appointements sans avoir paru qne seule fqis au cqn^eil, Ne serais'je pas reprehen-' sible, si j'avais toléré un aPUS aussi nuisible au service public et à 1 administration 4e la justice ?
Mais M. de S... est septuagénaire, il a servi cinquante ans sa patrie.
Oui, sans doute, l'État lui doit une récompense honorable; mais il rie peut permettre qu'il soit présenté à la colonie comme un des vingt juges qui doivent prononcer sur le sort de ses habitants, et que jamais il ne paraisse au tribunal. Un vrai magistrat s'offenserait d'une pareille tolérance, elle serait infiniment préjudiciable au public. Quelque vénérable que soit un vieillard courbé sous le faix de ses longs travaux, M. de S... eût acquis de plus grands droits encore à la reconnaissance de ses concitoyens s'il avait montré moins de répugnance à opter entre l'exercice ou l'abdication volontaire de ses fonctions. Mais un moment d'erreur n'efface point aux yeux d'un roi juste la fidélité et les travaux de beaucoup d'années. Sa Majesté accepta la démission de M. de S...; mais elle permit d'annoncer qu'elle se proposait de lui donner des témoignages de la satisfaction qu'elle avait de ses anciens services, en lui accordant dés lettres d'honoraire s'il les demandait.
Ces offres que je me suis alors félicité de pouvoir lui faire, les expressions qui les accompagnaient, doivent éloigner tout soupçon de ressentiment de ma part, je n'en avais conçu aucun. J'ai rendu justice a M. de S... quand il s'est acquitté de sés devoirs ; je lui ai, comme à tout autre, enjoint, au nom du roi, de les remplir quand il a paru les oublier.
NEUVIÈME CHEF DE DÉNONCIATION
Exaction publique ; poursuite tyrannique envers un père de famille innocent, et suites cruelles de ce traitement barbare.
RÉPONSE.
La dénonciation que j^analyse en ce moment porte, de l'aveu même de mes adversaires, sur des faits qui me sont étrangers; ils ne l'ont imaginée qu'a cause de la protection spéciale que j'ai, disent-ils, accordée à ceux qui, suivant eux, ont de graves reproches à se faire.
Le décret d'ajournement personnel décerné contre le sieur de La F..., son voyage au Port-au-Prince, son retour au Gap, sa mort survenue peu de temps après, voilà les bases de la dénonciation.
Certainement je suis absolument étranger à tous ces faits.
Suivant la dénonciation même, c'est à la fin de 1788 que M. de La F... a été décrété d'ajournement personnel par le coriseil de Saint-Domingue, et j'ai quitté la colonie en novembre 1787. Je n'ai donc pu, ni comme gouverneur, ni comme membre du conseil, avoir la plus légère influence sur le décret prononcé.
Eloigné de 1,800 lieues de Saint-Domingue, il m'était impossible, comme ministre, de dispenser M. de La Fi.;1 d'un voyage que sa santé pouvait, à ce que l'on assure, difficilement supporter, ni d'arrêter l'exécution d'un jugement dont physiquement je ne pouvais avoir la môindre connaissance. " Quand Ce décr'ét et le voyage qui" l'a suivi auraient causé la maladie de M. de La F..., ce qui ne paraît nullement prouvé, on ne pourrait jamais, je ne disipas me l'imputer, mais y trouver un prétexte au plus léger reproche. D'abord, il n'aurait pas été en mort pouvoir d'interrompre le
cours de la justice. On ne peut employer que les voies de droit contre les jugements des tribunaux souverains, et ces voies de droit, le ministre ne peut les suppléer ; il faut que les parties elles-mêmes y aient recours.
La veuve et lés héritiers de M. de La F... ne se sont pas encore plaints; il paraît même que la procédure du Port-au Prince n'avait pas été suivie, puisque M. de La F... était retourné chez lui, et qu'il est mort au milieu de sa famille. Assurément le temps qui s'est écoulé entre le décret et sa mort, ne permettait pas que je fusse instruit des poursuites faites contre lui, ni que j'en adoucisse les effets. Le silence des parties intéressées (en supposant même que j'eusse pu connaître les circonstances de cette affaire, et qu'elles eussent été aussi graves qu'on l'annonce) aurait arrêté nécessairement les meilleures dispositions où j'aurais été.
Ici ma défense est complète, on ne peut se le dissimuler ; mais dois-je souffrir qu'on me soupçonne d'avoir laissé subsister une loi abusive et qu'on la qualifie d'exaction publique qui a donné lieu à des poursuites tyranniques, et qui a eu des suites cruelles?
Je vais donc dire ce qu'est cette loi; on reconnaîtra bientôt que le roi n'a point dû l'abolir, et que ceux qui y contrevenaient, s'exposaient aux poursuites de la justice ; mais les détails de ces poursuites et leurs effets me sont étrangers, les tribunaux ne sont même saisis d'aucune réclamation ài cet égard.
Indépendamment de l'octroi qui est fixé à Saint-Domingue, et que les habitants, accordent au roi, on perçoit dans cette colonie, des droits nommés municipaux ; ces droits sont destinés à payer la solde de la maréchaussée, les frais de police, l'achat des terrains et des corps-de-garde, le loyer et l'entretien de ces bâtiments dont l'État n'est pas propriétaire. C'est aussi sur ces droits qu'on prélève de quoi rembourser aux habitants le prix de leurs esclaves comdamnés au dernier supplice, et que l'on paye les pensions des curés et vicaires.
C'est au conseil supérieur que sont confiées la perception, la garde, la disposition du produit de ces droits municipaux; les receveurs sont nommés par le conseil, et c'est à lui seul que les' comptes sont rendus.
Ce droit se perçoit par forme de capitation, et cette capitation, levée par tête de nègres, est plus ou moins forte, suivant l'état où se trouve la caisse à la fin de chaque année, et eu égard aussi aux besoins de l'année suivante. Le conseil supérieur la fixe seul; le ministre n'y a aucune influence; elle a été de 30 sous tournois pour 1789..
Les marguilliers sont, dans la colonie de Saint-Domingue, les collecteurs-nés de cette capitation. La loi leur alloue trois pour cent de la recette, à condition qu'ils feront les deniers bons, et qu'ils en seront responsables en leur propre et privé nom. Cette rétribution dont ils ne profitent même point ordinairement, ne les indemnise pas de la perte qu'ils éprouvent sur leur collecte aussi les places de marguilliers sont-elles onéreuses et regardées comme des charges publiques.
La destination de ces fonds, plus encore que la crainte qu'on n'en abuse, provoque la vigilance du conseil, et lui fait tenir la main à ce qu'ils soient versés à l'époque marquée dans la caisse qui doit les recevoir.
M. deLa F... marguillier, a été décrété d'ajour-
nement personnel : je n'ai point cherché à pénétrer les motifs du décret ; encore une fois j'étais à 1,800 lieues de Saint-Domingue. La levée de cet impôt ne regarde en rien l'administration ; je n'ai donc pu ni approuver ni improuver ce qui s'est fait à cet égard.
Quiconque a une idée de la législation de Saint-Domingue, sait que depuis 1766, les conseils supérieurs ont seuls statué sur tout ce qui concerne la caisse municipale.
Les assemblées coloniales, tenues en juin et juillet 1764, joignirent la perception de cette ca-pitation à celle de l'octroi. Le roi et les administrateurs, en son nom, se trouvèrent chargés de la recette et de l'emploi de ces revenus, mais Sa Majesté, par l'ordonnance du 1er février 1766, confia de nouveau aux conseils supérieurs le droit qui était rentré dans ses mains, et eux seuls, depuis vingt-quatre ans, se sont occupés de tout ce qui concerne les caisses municipales.
L'administration des fonds qui y entrent et leur distribution n'étaient pas uniformes dans toute la colonie. Dans le ressort du Port-au-Prince il n'y avait qu'un seul receveur, une seule caisse pour tous les objets que j'ai indiqués plus haut.
Dans la partie du Nord, au contraire, les pensions des ministres du culte n'étaient point payées sur la. caisse municipale. Ces pensions étaient inégales : chaque paroisse fournissait aux besoins de son curé, mais par des délibérations que le conseil supérieur pouvait réformer.
Après la réunion des deux conseils du Gap et du Port-au-Prince, celui connu depuis, sous le nom de Conseil de Saint-Domingue, ordonna, par un arrêt du 13 mars 1788, la réunion des deux caisses en une seule. Il sentait combien il était désirable que les pensions des curés et vicaires fussent établies sur des bases uniformes ; mais il crut qu'une disposition de ce genre, qui tenait à la police générale de la colonie, ne pouvait émaner que des administrateurs, et ceux-ci rendirent, le 5 mai 1788, une ordonnance qui régla ces pensions à 2,000 livres pour les curés, et à 600 livres pour les vicaires.
Depuis cette époque, le conseil supérieur, par un arrêt de règlement du 5 février 1789, étendit à la classe indigente des habitants du Nord, une immunité dont elle jouissait depuis longtemps dans les parties de l'Ouest et du Sud ; il affranchit de tout paiement de droits municipaux ceux qui ne résidant ni dans les" villes m dans les bourgs, ne posséderaient que quatre esclaves ou un moindre nombre.
Est-ce à ces lois qu'on me reproche d'avoir applaudi ? elles étaient sages; elles tendaient au soulagement de l'humanité ; elles étaient conformes aux anciens règlements; elles établissaient une uniformité vraiment désirable entre toutes les parties d'une colonie florissante. Ceux qui les mettaient en vigueur méritaient bien de leur patrie; je le crois encore, et il parait absurde de prétendre que les magistrats et les administrateurs qui les ont rendues, aient été mûs par d'autres considérations que par le zèle et l'amour du bien public.
Je devais ces éclaircissements à ceux mêmes qui me dénoncent ,• mais je ne puis présumer qu'ils insistent davantage sur des imputations dont je suis séparé pâr tout l'espace que la nature a mis entre l'Europe et Saint-Domingue.
DIXIÈME CHEF DE DÉNONCIATION.
Réunions tyranniques au domaine du roi, et . concessions frauduleuses.
RÉPONSE.
Le sol de Saint-Domingue, au moment où une portion de cette île est entrée sous la domination française, a été regardé comme faisant partie du domaine de l'État. La fertilité de la terre provoquait l'industrie du cultivateur et ne trompait jamais ses espérances. Nos rois ont offert de concéder gratuitement ce sol à quiconque Voudrait le mettre en culture ; mais pour entrenir les habitants dans une activité utile à la colonie, ils ont imposé pour condition expresse déboutes les concessions, que les terrains pourraient être réunis au domaine, toutes les fois que le concessionnaire ne mettrait pas sa terre en valeur dans un temps marqué, ou qu'après l'avoir défrichée, il cesserait de la cultiver. Il existe une multitude d'ordonnances et de déclarations de nos rois, qui déterminent les cas où les réunions doivent être prononcées, et les formalités auxquelles elles sont assujetties (a). Les trois premiers articles de la déclaration du roi, du 17 juillet 1743, donnent des idées justes de ce qu'on doit entendre par concessions et réunions.
I.
« Les gouverneurs, lieutenants généraux pour « nous, et les intendants des colonies,' conti-« nueront de faire conjointement les concessions « de terres aux habitants qui seront dans le cas « d'en obtenir pour les faire valoir, et leur en « expédieront les lettres, aux clauses et condi-« tions ordinaires et accoutumées.
II.
« Ils procéderont pareillement (b) à la réunion « à notre domaine des terres qui devront être « réunies, ét ce à la diligence de nos procureurs « des juridictions ordinaires, dans le ressort des-• quelles lesdites terres seront situées."
III.
« Ils ne pourront reconcéder les' terres qui « auront été une fois concédéés, quoiqu'ellessoien t « dans le cas d'être réunies qu'après que la réu-« nion en aura été prononcée, àpeine de nullité « des nouvelles concessions et sans préjudice de « la réunion, laquelle pourra toujours être pour-« suivie contre les premiers concessionnaires. »
Ainsi les concessions sont l'aliénation d'un terrain, faite en vertu de la loi par le gouverneur général et par l'intendant; aliénation qui transmet la propriété du sol désigné à un habitant quelconque, sous la condition expresse que, dans un temps marqué, il le mettra en valeur et continuera de le cultiver.
Les réunions sont le retour au domaine de ce terrain cédé, faute par le concessionnaire d'avoir mis sa terre en valeur dans le temps marqué ou d'en avoir continué la culture.
L'objet des lqis publias pur cette matière est d'entretenir une émulation désirable entre les colons et d'empêcher, autaftt qu'il est possible, les anciens concessionnaires de laisser leurs terres incultes.
Les auteurs du chef de dénonciation auquel je réponds en ce moment ne blâment point ces lois; ils avouent, au contraire, que le gouvernement avait imposé des obligations foti raisonnables aux concessionnaires ; mais ils prétendent que désormais les réunions et les concessions pourraient nuire à notre commerce de café, parla trop grande
Îuantité qu'on en cultiverait, et à la (a) salubrité e l'air de Saint-Domingue, parce qu'elles entraîneraient les destructions des forêts qui v attirent les nuages et y provoquent les pluies. Enfin, ils àiièguept que, depuis vingt ans, mes prédécesseurs n'avaient pas prononcé vingt réunions par année, et ils me reprochent de p «tyoir pas suivi leur exemple t
Je Vais répondre à ces premiers Chefs de la dénonciation; je repousserai ensuite l'attaque de mes adversaires sur l'abus qu'ils prétendent que j'ai fait de la faculté qui m'était accordée, conjointement avec l'intendant de la colonie, de prononcer des réunions et de faire des concessions nouvelles.
Les dénonciateurs mettent d'abord en avant une proposition qui, sans doute, paraîtra très extraordinaire.
c Un ministre, disent-ils, qui, sans considérer « la différence des époques et les changements « que le temps apporte à toutes les institutions « humaines, prétendrait se référer servilement « aux lois du siècle dernier, et les faire observer « aujourd'hui avec rigueur, serait Un très mau-« vais poiitiqué qui servirait mât sa nation ét « particulièrement la province confiée à ses « soins. »
J'interrogerai à mon tour ceux qui me dénoncent; je leur demanderai s'ils se contenteraient d'une justification de ma part qui serait appuyée sur un pareil principe. Je suppose que je me fusse écarté des dispositions des ordonnances, et que, cité comme je le suis aujourd'hui, posasse dire i II est vrai nue fax enfreint la loi, mais f aurais été mauvais administrateur si j'eusse voulu faire observer $ei%vilev\ent celle du sQçle dernier. Un ministre doit fflnsidérer lu. différence des époques et les changements que le temps apparie à toutes les in&iitutians. humaines. l'ai servi ma patrie en yn!élevant au-dessus d'une loi qui m'a paru mauvaise et jç né suis pas qtu lié pdr àelle.s qui QVaient vieilli* Avec quelle force, ayeç quel avantage mes
dénonciateurs ne réclameraient-ils pas en faveur des principes 1 Gomme ils soutiendraient que le temps, loin d'altérer le respect qu'on leur doit, ajoute encore à leur autorité? Quand tout s'incline au nom seul de la loi, un ministre est dénoncé pour s'être fidèlement conformé à celles qui existent depuis plus de Cent années et que d'autres lois successives ont maintenues dans toute leur Vigueur!
Gomment me disculperais-je d'avoir trahi sciemment mon devoir, si j'eusse refusé de concéder les terres qui étaient demandées au gouvernement pour la première fois, lorsque ces concessions sont spécialement ordonnées par toutes les lois de la colonie? Le règlement du 1er avril 1783, titre IJÎ, art, 4, n'oblige Ceux qui veulent obtenir des terrains propres à être mis en culture qu'à se munir d'un certificat de l'arpenteur de la paroisse dans l'étendue de laquelle ce terrain est situé, à lé faire publier pendant trois dimanches consécutifs, éù la forme ordinaire, à l'issue de la messe paroissiale et à le taire visiter par le Comtnandant du quartier.
La publication avertit ceux qui pourraient y avoir des droits.
Le visa du commandant du quartier est poUr les administrateurs de la colonie un garant que la Concession peut être faite sans aucun inconvénient pour le public, èt que le défrichement ne nuira pas à la conservation des eaux. Ce commandant, toujours pris parmi les propriétaires, est intéressé personnellement à ne point laisser tarir les sources qui fertilisent son canton.
Je n'ai tait aucune concession sans avoir vérifié si Ces formalités avaient été remplies : que peut-pn exiger de plus t J'aurais été injuste si, m'opposant au vœu de là loi, j'eusse refusé des concessions nouvelles qui he portaient préjudice à aucun citoyen, et qui ne pouvaient exciter de légitimes réclamations.
Kl eèt une considération de bien plus haute importance, qui, suivant les auteurs de ta dénonciation, devait empêcher qu'on ne fit des concessions. On s'était aperçu que le café et tir* digo épuisaient prodigieusement la terre^ tl fallait bénir l'heureuse impossibilité où se trouvaient plusieurs colons d*étendre une culture précieuse au delà, des besoins des consommateurs. Si tes concessionnaires avaient pu défricher tout ce qui leur avait été concède, le café serait tombé à un priap si bas qu'il n'aurait pas dédommagé des frais de Culture. ; aussi, les administrateurs Qui m'avaient précédé, n'avaieni-ils pas prononcé vingt réunions par année*.
Je réponds d'abord à. cette dernière partie de l'objection, que j'ai été gouverneur général en 1786 et 1787. L'année 1785 est donc celle qui a précédé mou administration, et l'année 1788, celle qui l'a suivie.
11 a été impriB&é en 1789, âu Port-au-Prince, il a été répanlu avec profusion dans la Colonie entière, un tableau que je produis, des réunions poursuivies et prononcées pendant les années 1785, 1786, 1787 et 178&
Personne jusqu'à ce jour n'a douté de l'exactitude dé ceftè pièce authentique • elle est revêtue de l'attestation du greffier, homme public, et dont l'intégrité est connue.
En 178&, il y a eu sojxaate-dix-sept réunions poursuivies,, soixante-cinq ont été prononcées ; et en 1786 il n'y a eu que vingt-six réunions poursuivies, et vingt-trois de prononcées.
Rapprochons maintenant du résultat des deux
années qu'a duré mon administration, celui des deux années qui l'ont précédée et suivie.
En 1786 et 1787 il y a eu cent treize réunions poursuivies, et cent deux prononcées.
En 1785 et 1788 il y a eu cent quatre-vingts réunions poursuivies, et cent trente-trois de prononcées.
Je présente les faits et je m'abstiens de toutes réflexions.
Je demande, en second lieu, s'il serait d'une sage politique de restreindre volontairement la culture du café et d'empêcher son accroissement dans la colonie, par la seule raison qu'en le multipliant, il baisserait de prix? Les nègres deviendront plus chers, parce qu'on en emploiera davantage ; les propriétaires des sucreries (tels que sont onze des treize signatures delà dénonciation que je réfute), contraints d'acheter continuellement des recrues de noirs dont leurs ateliers ont besoin, verront augmenter leurs frais d'exploitation : cela peut être, mais le public aura le café à meilleur compte, et l'intérêt général doit toujours l'emporter sur l'intérét particulier.
On ajoute que cette plante épuisant la terre, il est à craindre que l'univers n'éprouve tout à coup une privation, qu'une abondance momentanée ne ferait que rendre plus sensible.
Ces inquiétudes pourraient avoir quelque apparence de fondement, si Saint-Domingue était la Eeule contrée qui produisît du café, comme les îles hollandaises sont les seules qui, jusqu'à présent, aient donné des épiceries en abondance; mais plusieurs autres îles et Je continent de l'Amérique offrent d'immenses terrains propres à cette culture; les nations voisines s'y livreront avec ardeur, dès que nous commencerons à nous ralentir, et que nous ne pourrons plus fournir
Ainsi, en six années, le produit d'une seule branche de commerce s'est élevée de 33,429,750 livres à 92,003,850 livres, c'est-à-dire qu'il a presque triplé, et ie café? loin de diminuer de valeur, a continuellement augmenté. En 1783, il était à quinze sous la livre; eu 1784, à dix-sept sous; en 1785, à vingt sous; en 1786, à vingt-deux sous; en 4787, à vingt-six sous; en 1788, à vingt-sept sous. Cet exposé fidèle prouve, comme je l'ai déjà avancé, que l'abondance de cette denrée n'en fait pas toujours baisser le prix.
Tels ont été les effets des réunions et des concessions qui m'attirent aujourd'hui ie reproche d'une déférenee servi le aux lois du dernier siècle ; comme si les réunions ex les concessions n'étaient pas des moyens assurés d'entretenir l'activité du cultivateur, comme si cette activité n'était
aux demandes des consommateurs. Déjà même les Hollandais et les Espagnols ont obtenu des succès qui stimulent l'industrie et l'activité de nos cultivateurs.
Supposons pour un instant qu'on eût refpsé depuis longtemps des concessions, qu'on eût rejeté les poursuites en réunion, qu on eût mis des entraves à la culture des cafés dans nos colonies; qu'en serait-il arrivé? Les anciens propriétaires dont les habitations sont en plein rapport, auraient peut-être marché à plus grands pas vers la fortune; la denrée aurait augmenté de prix, les nègres auraient diminué de valeur ; mais bientôt l'étranger aurait été averti par son intérêt personnel, il se serait emparé d'une branche de commerce que nous aurions négligée ; et si nous tentions de nous en ressaisir, nos efforts seraient impuissants, le plus diligent ayant tout l'avantage en matière de commerce et de culture.
Un gouvernement sagte et éclairé ne refuse jamais de faire produire à la terre tout ce qu'elle peut donner ; il s'efforce, au contraire, de procurer toutes les facilités qui dépendent de lui, à ceux que l'amour des richesses attire dans ses colonies. S'il diminue par là les profits des anciens cultivateurs, il en enrichit de nouveaux ; le nombre des consommateurs s'augmente en raison de ce qu'on leur procure dès jouissances plus faciles et moins coûteuses.
Il est une manière sûre de juger des effets que produisent les réunions et les concessions ; c est de considérer la progression des cafés (a) pfpr duits par la colonie, et du nombre des nègres qui y ont été importés. Les tableaux suivants présentent les résultats de l'importation des nègres et de leur prix, de l'exportation des cafés et de leur valeur.
pas une source inépuisable de richesses pour la nation.
L'agrandissement des villes marche nécessaire* ment du même pas que la culture du sol. Le Port-au-Prince s'est accru d'un tiers dans l'espace de quatre années; on a vu se former des quais immenses, s'élever des maisons vastes, où il n'y avait autrefois que des marais malsains ; les constructions ont été facilitées par la réunion des terrains abandonnés ; cent vingt années d'expérience ont prouvé la nécessité d'y avoir recours, Le gouvernement n'a pu se méprendre pendant un si long espace de temps sur ses véritables intérêts, et le résultat de ses opérations ne laisse aucune place à des critiques légitimes.
Je n'ai encore rempli qu'une partie de la tâche
(a) PRIX
NEGRES PRODUIT CAFÉS des
ANNÉES importés et des ANNÉES ventes dans
vendus. ventes, vendog. !a colonie.
1783............... 9,370 25,0-25 21,762 27,648 '30,839 29,506 livres 15,650,000 43,602,000 43,634,000 54,420,000 60,563,000 61,936,000 1783,.................. livres , 44,573,000 52,885,000 57.368,000 1 52,180,000 70,003,000 68,151,000 livres 33,429,750 44,951,250 57,368,000 57,398,000 91,003,900 92,003,850
1784.................... 1784.......>.............
1785.......... 1785.......L............
1786..............
1787................ 1787.......^ ..... 1......
1788................... 1788.....................
que m'ont imposée mes infatigables dénonciateurs.
« Après avoir démontré, disent-ils, que les réu-« nions ne tendaient à rien moins qu'à consom-« mer la ruine entière de la colonie, ils veulent « prouver qu'elles ont été une source de tyrannie « et de concussions: de tyrannie, si les proprié-« taires ont été dépouillés ; de concussions, si les « tyrans ou leurs sous-ordres ont trouvé dans ces « larcins publics, ou des avantages personnels, « ou le plaisir de la vengeance. »
Qui ne croirait, d'après une pareille dénonciation, que le pouvoir de réunion est concentré dans la personne des administrateurs, qu'ils peuvent arbitrairement les prononcer, qu'elles ne sont assujetties à aucune forme; cependant (et ceux qui m'inculpent ne l'ignorent point), c'est à la poursuite du procureur du roi du lieu où l'objet à réunir est situé que s'instruit la procédure en réunion; c'est devant le juge que cette procédure est portée; son avis et les conclusions du procureur du roi sont envoyés au greffier du tribunal-terrier. Jusqu'au mois de juin 1787, ce tribunal a pris connaissance de toutes les affaires qu'avaient instruites, comme je viens de l'exposer, les tribunaux ordinaires ; et il est notoire que les administrateurs ne prononcèrent de réunions, avant cette époque, qu'assistés de trois magistrats du conseil supérieur, membres comme eux du (a) tribunal-terrier.
Ge tribunal fut supprimé par l'ordonnance du 21 janvier 1787, enregistrée au mois de juin suivant, et la même loi attribua aux administrateurs seuls la connaissance exclusive de toutes les réunions au domaine et des contestations relatives à la distribution et à l'usage des eaux. Je reconnus encore plus à cette époque, ainsi que l'intendant de la colonie, la nécessité d'établir les règles les plus précises sur la forme de procéder en cette matière. Nous y pourvûmes par un règlement que nous rendîmes conjointement le 10
(c) Pendant l'administration de M. d6 Marbois et pendant la mienne, plusieurs ordonnances enregistrées au conseil supérieur ont donné aux gazettes coloniales un genre d'utilité que n'ont point nos journaux ; elles donnent une publicité certaine à plusieurs actes judiciaires, et préviennent les inconvénients qui naissent souvent dans nos tribunaux du défaut de notification de ces mêmes actes. Il en résulte de grands avantages pour le public; tout poursuivant en réunion doit y faire
novembre 1787, peu de jours avant mon départ de la colonie. L'état des réunions poursuivies et accueillies en 1788 est le plus sûr garant que je puisse donner de son utilité et de la faveur accordée aux propriétaires sur lesquels les demandes en réunion étaient formées (b). Il y eut cette année cent quatre demandes en réunion, et cinquante-trois réunions seulement furent accordées aux poursuivants ou à des étrangers. Jamais autant de poursuivants n'avaient succombé ; l'omission de la moindre formalité suffisait pour les éconduire. Les registres des,greffes des juridictions que j'ose invoquer, et qui sont ouverts à tout le monde, prouveront de plus que cinquante-trois demandes en réunion, qui ont été adoptées, ne trouvèrent pour ainsi dire point de contradicteurs. Il s'agissait de terres entièrement abandonnées ; la réunion était la seule voie que la loi eût ouverte pour les faire rentrer dans le commerce et les rendre à la culture.
La jurisprudence du tribunal-terrier, pendant que j'en ai été le cbef, a toujours adouci ce que le texte des règlements avait de sévère. On ne s'y écartait de l'avis du juge et des conclusions du procureur du roi, que pour être plus favorable qu'ils ne l'avaient été eux-mêmes aux propriétaires attaqués; et quoique la loi exige impérieusement qu'on mette en culture un tiers de terrain dans la première année, à peine de donner ouverture à la réunion, jamais cette loi n'a été appliquée d'une manière rigoureuse. Il a toujours suffi, pour faire succomber le poursuivant, que le propriétaire eût placé un petit nombre de nègres sur la concession et qu'il eût commencé à la cultiver.
Il y a plus; j'ai maintenu avec exactitude l'exécution du règlement des administrateurs, rendu le 6 décembre 1785, qui, pour éviter les surprises et donner la plus grande publicité aux demandes en réunion, ordonnait que l'on désignerait dans trois (c) gazettes les abonnements
imprimer sa demande, et ne peut la soustraire à la connaissance de tous les citoyens qu'elle intéresse. Le particulier qui veut s'éloigner de la colonie est obligé d'y notifier son départ à ses créanciers, etc. La loi punirait sévèrement les rédacteurs des feuilles américaines, s'ils osaient être infidèles; aussi les gazettes de Saint-Domingue méritent-elles foi sur tout ce qui concerne la partie française de cette île. On peut même les regarder presque comme des pièces légales; c'est
Tout déni de justice eût été comme dans les autres tribunaux, une prévarication : il ne m'était point permis de rejeter de prime-abord une requête en poursuite de réunion ; j'étais tenu de la juger.
(b) CONCESSIONS CONCESSIONS
NOMBRE RÉUNIONS RENDUES accordées ACCORDÉES
ANNÉES. DÉBOUTÉS.
des aux
POURSUITES. PRONONCÉES. PROPRIÉTAIRES aux à
POURSUIVANTS. d'autres.
1785........................... 77 65 12 S 33 27
1786........................... 26 23 3 3 15 5
1787........................... 87 79 8 11 61 7
1788........................... 107 68 36 15 42 11
Totaux en 4 années....... 294 235 59 34 151 50
du terrain dont la réunion était poursuivie, le quartier où il était situé et le nom du propriétaire.
Ce règlement de MM. deCoustard et de Marbois ordonne que les mêmes poursuites seront inscrites sur un tableau placé en évidence dans la salle d'audience de chaque juridiction. Cette formalité a depuis été remplie avec exactitude; elle a été regardée comme la sauvegarde de la tranquillité publique; elle n'a trouvé d'improbateurs que dans ceux à qui auparavant le secret des poursuites était profitable.
Sans doute, la concession, une fois accordée, doit être conservée au concessionnaire; mais elle ne lui a été faite que pour qu'il mît le terrain en valeur; il doit en être privé s'il le néglige. Sans les réunions, plusieurs quartiers, aujourd'hui d'un produit immense, seraient encore couverts de bois; au lieu de cinquante mille individus libres que l'on compte à Saint-Domingue, la colonie stérile et presque déserte serait divisée entre douze et quinze cents colons incapables d'en cultiver la vingtième partie. Le Bou-cassin et l'Arcaye, quartiers si florissants, ont été dans la main a'un seul particulier ; alors ils étaient incultes. Les réunions et les concessions ont fertilisé cette partie de l'île, en proportionnant l'étendue des propriétés aux facultés des concessionnaires.
Mais quelque utiles que soient les réunions en général, quelque exactitude qu'on apporte à l'observation des formes qui doivent les précéder, il faut convenir cependant qu'elles couvriraient des abus vraiment répréhensibles, si elles laissaient aux administrateurs la faculté d'en gratifier leurs parents ou leurs amis aux dépens des propriétaires; si la même personne pouvait en réunir plusieurs, et en faire un trafic honteux ; si enfin ces réunions n'étaient qu'un moyen de mettre les anciens concessionnaires à contribution.
Or, dit-on, tout cela est arrivé. « Le sieur « Wante, secrétaire particulier (a) de l'intendant, « est parvenu par une activité sans exemple, et « une avidité inextinguible à réunir dans ses « mains seize concessions à la fois, digne récom-« pense de plus de cent spoliations dont il avait « été l'infatigable agent. »
On a imprimé, comme je l'ai dit, à Saint-Domingue un état des réunions poursuivies; cet état est certifié et signé par le sieur Sentout (1), greffier du tribunal. Il a été publié dans toute la colonie au mois d'avril 1789, et personne ne lui a reproché la moindre inexactitude.
C'est cet état que j'invoque; on y lit à la page 4 : « Le 27 décembre 1786, il a été réuni un « terrain pour hatte et corail, c'est-à-dire pour « élever des bestiaux, au quartier Saint-Louis, à « la poursuite de M. de la Gautraye; le procureur « du roi avait conclu la réunion, et il a été « donné à M. Wante. »
Cette concession qu'a obtenue le sieur Wante aurait pu être faite à tout autre, mais il méritait de l'obtenir par les services qu'il a rendus.
Quel droit exclusif prétend-on que le sieur de la Gautraye ait eu sur ce terrain? Il avait appartenu à la dame Noguez; le sieur de la Gautraye en poursuivait la réunion au domaine, sous prétexte de non-culture, et il en demandait la concession à son profit. La loi laissait aux administrateurs la faculté de le concéder à qui bon leur semblait. Le tribunal-terrier a prononcé la réunion, parce que Je terrain était effectivement inculte; ies administrateurs ont concédé au sieur Wante, parce qu'il s'en était rendu digne par ses travaux. Toutes les propriétés des habitants de nos îles, sont fondées sur des titres semblables, et il n'y a pas eu beaucoup de faveurs de ce genre accordées à des services aussi réels.
Quant aux quinze autres concessions prétendues accumulées sur la tête du sieur Wante,elles sont évidemment chimériques ; le tableau de toutes les réunions prononcées depuis 1785 jusqu'au 1er janvier 1789, est imprimé, il est certifié du greffier ; qu'on le parcoure, on n'y trouvera pas une seule de ces concessions imaginaires.
Dira-t-on que le sieur Wante les a obtenues sous des noms supposés ? le contraire peut être aisément vérifié, puisque le greffier, qui a rédigé l'état des réunions a ordre de donner tous les éclaircissements quipourraient lui être demandés, et de ne refuser la communication d'aucun acte, d'aucune pièce, d'aucun registre à qui que ce puisse être.
Ne trouve-t-on point ces preuves suffisantes ? Eh bien, que l'on consulte les greffes des juridictions où les réunions ont été poursuivies; les noms des poursuivants, des témoins, des parties y sont nécessairement inscrits.
Enfin, les terrains qui sont l'objet de ces quinze concessions doivent être connus; qu'on les découvre, qu'on les indique. Cent carreaux ou trois cent cinquante arpents de terre, mesure de Paris, ne peuvent être ignorés dans la colonie ; et si la même personne possédait quinze fois cette étendue, serait-il possible que ce fut à l'insu de tous les habitants ?
Qu'on dise où sont situées ces concessions: il est intolérable que sans avoir rien vérifié on m'accuse ; qu'on parle de quinze concessions sans les désigner, de quinze individus spoliés sans en nommer un seul.
En vain la dénonciation est terminée par cette formule ordinaire à mes dénonciateurs : Tous ces faits sont la quintessence de nombreux mémoires qui ont été adressés à ce sujet. J'atteste qu'on ne m'en a communiqué aucun.
Je ne relèverai point les inculpations qui sont personnelles au sieur Wante, telle que la demande de quarante mille livres qu'il a faite, dit-on, au sieur de la Gautraye, pour lui céder la concession dont il s'agit. La fausseté démontrée de beaucoup d'autres faits ne permet pas de croire celui-ci qui, d'ailleurs, est invraisemblable : on n'aurait pu espérer d'obtenir un prix aussi considérable d'un terrain absolument inculte; et si le sieur Wante y avait déjà formé des établissements (a),
il avait acquis, comtne tout concessionnaire, le droit d'en exiger le prix ; d'ailleurs, j'ignore ce qui s'est passé à cet égard, et je n'ai point à répondre à ce qui m'est absolument étranger.
Qu'on juge maintenant si en matière de réunions et de concessions, Comme en toutes autres, j'ai mérité les reproches graves, quoique vaguement énoncés, d'avoir toléré sous ttiés yeux un brigandage, objet de scandale et de corruption
Mais voici un chef d'accusation d'un tout autre genre.
A en croire mes adversaires, « Un de mes « agents affidés, M. le procureur général, a pènsé « consommer la ruine de la colonie, en abrogeant « le règlement par lequel un concessionnaire « qui avait rempli les formalités d'usage et formé « un établissement sur son terrain, ne pouvait « plus, être troublé par un concessionnaire même « plus ancien, qui aurait négligé de faire un usage « de son titre. >*
Dans la vérité, ce magistrat crut utile k la colonie, après que les deux conseils furent réunis, d'assujettir au même principe tout ce qui tenait à l'ordre public ; il pensa que le conseil de Saint-Domingue pouvait statuer sur les réformes qii'il croyait juste de faire à d'anciens règlements. L'opinion du procureur général semblait, en quelque sorte, être autorisée par des exemples antérieurs. Il s'agissait d'introduire dans la partie du nord, une jurisprudence généralement suivie dans celle de l'ouest et du sud. Le conseil supérieur de Saint-Domingue partagea l'erreur du procureur général, recueillit son réquisitoire, et rendit, le 19, novembre 1787, .un arrêt de règlement dont on n'aperçut pas, au premier moment, l'irrégularité et les inconvénients ; mais quelque temps après, MM de Vincent et de Marbois m'adressèrent des observations sur cet arrêt : des magistrats du conseil en reconnurent les vices ; la chambre d'agriculture du Gap réclama, et Sa Majesté cassa ce jugement par Un arrêt de son conseil, rendu sur mon rapport, le 31 janvier 1789. Il a été enregistré au conseil Supérieur de Saint-Domingue le 19 mai de la même année (1). Mes dénonciateurs ont omis de faire mention à l'Assemblée nationale de cette dernière circonstance.
Il est évident que je n'ai pu ni prendre part à la décision du conseil supérieur de Saint-Domingue, ni provoquer le réquisitoire du procureur général qu'on appelle mon agent afflaé ; j'avais quitté la colonie dès le 13 novembre 1787, et j'en étais déjà éloigné le 19 du même mois, date certaine de l'arrêt de règlement qu'on me reproché ; il y a plus : lorsqu'il m'a été connu, j'en ai proposé au roi la cassation; c'est moi qui ai envoyé dans la colonie l'arrêt qui l'a prononcée ; è'est moi qui ai ordonné, de la part de Sa Majesté, qu'on l'y fit enregistrer.
A l'appui de cette assertion, je ne produirai qu'une pièce, mais elle ne souffre point de réplique ; c'est l'enregistrement de l'arrêt de cassation.
Je pourrais, sans doute, me plaindre de la manière dont les faits les plus certains sont dénaturés dans la dénonciation présentée contre moi à l'Assemblée nationale ; mais il me suffît d'avoir
démontré la fausseté des imputations qui me sont faites.
ONZIEME CHEF DE DÉNONCIATION.
Disette de farines. Insouciance criminelle du ministre.
DOUZIEME CHEF DE DÉNONCIATION.
Rappel soudain d'un gouverneur cher à la colonie.
maintenue opiniâtre d'un intendant proscrit.
TREIZIÈME CHEF DE DÉNONCIATION.
Lettre d'approbation dictée au roi en faveur de l'intendant coupable.
RÉPONSE.
Je réûniS tes trois chefs d'accusation sous le même paragraphe, parce que mes dénonciateurs les ont fait dériver de la même cause.
Suivant eux, là colonie éprouvait l'année dernière une disette effrayante, et je ne l'ai pas secourue^
Suivant eux, M. le marquis du G..., gouverneur général ae Saint-Domingue, y a admis le» farines étrangères dans tous les ports d'amirauté, et son rappel a été la peine de l'ordonnance qu'il a rendue à cet effet.
Suivant eux, M. de Marbois, intendant, s'était au contraire opposé à l'ouverture des ports d'amirauté ardemment demandée par les colons. J'ai approuvé ses refus, et c'est pour l'en récompenser que je lui ai procuré un témoignage signalé de la satisfaction que le roi ressentait de ses services.
Ges assertions sont plus que hasardées : on a dénaturé les faits ; l'intention de confondre le» époques s'y manifeste partout ; le désir de me nuire n'a pas permis qu'on respectât même la vraisemblance. Je vais rétablir la vérité outragée sur mille faits. Je prouverai que Saint-Domingue n'a pas éprouvé de disette, tandis qu'en France nous étions menacés de la famine ;
Que je n'ai pas cessé un seul instant de veille; à la subsistance de cette vaste colonie;
Que l'ordonnance de Mj le marquis du G..., qui v ouvrait aux farines étrangères tous les ports d'amirauté, ne pouvait pas même être connue en France quand il a été rappelé-,
Qu'on, doit attribuer le parti que le roi avait pris de révoquer ce gouverneur général à une ordonnance antérieure, et évidemment nuisible à l'une des branches de commerce les plus utiles au royaume;
Que M. le marquis du G... avait devancé son rappel, en quittant de lui-même Saint-Domingue, sans permission du roi;
Qu'enfin lés services que Fintendant avait rendus et l'intérêt même d« la colonie ont déterminé Sa Majesté à honorer ce magistrat en lui donnant des preuves directes de sa confiance ét dé soft estime.
SECTION PREMIÈRE-
Les auteurs de la dénonciation auraient-ils donc
oublié que la question qu'ils renouvéllent aujourd'hui a été discutée l'année dernière entre eux et lés députés dë^ villes' maritimes du rojfattmè? qtfëflè Se trouvé parfaitement traitée dans le rapport qtué M. Gîllet de La Jacquéminière, député à FAssembléè ùâtiOûale, d publié au nota de la section dù comité d'agriculture et de cofft-merce? Ce rapport a été imprimé chea Bàudoûiri, et il peut être consulté par ttttis lès membres de' l'Assemblée nationale.
Lè mauvais succès qu'ont eu les plaintes élevées alorS par MM. les députés de Saint-Domifl-gue les a contraints de s'en désisteril aurait dû m'épargner une dénonciation démentie par des pièces authentiques et qui n'a pïttS d'autre objet que de mè nuire ; mais puisque ceui de MM. les députés de Saint-Domingue qui se sont rendus mes dénonciateurs veulent renouveler des assertions déjà détruites, je vais de npùveau prouvèr que cette colonie n'a pas ressenti la disette que rtotts éprouvions l'année dernière ; que j'ai fait, comme ministre, tout ce qui était en mon pouvoir pour lui assurer les subsistances qui lui sont nécessaires, èt que je l'ai fait avec suceês.
Les rapports de commerce qui Unissent Sàiût-Domingue à la France ont pour base an échange' excluait de nos denrées contre lès productions aè cette possession éloignée.
C'est de là Fiance qu'elle Reçoit habituellement lès farines! destinées a la nourriture des blancs et de quelques nègres qùi eh Consomment; c'est à la France qu'elle vend 1e sucre, le café, le cotdn, l'Indigo et les autres productions de son sol fertile. On ne peut porter atteinte à ces lois sans affaiblir les liens qui attachent à nous les habitants de cette riche centrée?.
Le régime commercial dont je viens de parler impose des devoirs à la métropole ; elle est obligée de pourvoir à la subsistance des colons, et sa prévoyance pour eux a fait indiquer d'avance les moyens de remplacer Ce qu'elle ne leàr enverrait pas. 11 existe dans l'Ile de Saint-Domingue trois ports connus sous le nom de ports d'entrepôts; ce sont ceux de Port-ad-Prince, du Cap-Français et des Gayes. Les navires étrangers peuvent y apporter diverses denrées, nfais il est défendu aux colons de leur en payer le prix autrement qu'en argent, en marchandises importées de la métropole, ou en sirops et tafias.
Jamais ces ports n'ont été ouverts infructueusement aux farines étrangères. Le continent de l'Amérique produit beaucoup plus de blé que n'en consomment les habitantsils ont toujours un grand intéïêt dèVenuré la surabondance de cette denrée à ceux qui les payent en argent^ en marchandises vetftfèS de lËuropè, ou en sirops et tafias5 dôht ils manquent. On nè frêût pas meme blâmer les administrateurs de permettre que les substances soient achetées avec du sucre ou du café, pourvu que ce ne soit que quand lès besoins sont extraordinaires; et en prenant tés plus grandes précautions pour prêvènit les abus. j Lè goûvern'èui1 èt l'intendant dê Saint-Domingue à étaient point astreints à recourir au roi pour obtenir la permission d'ouvrir aux farines étrangères ces ports d'entrepôt. Il importait aux habitants de la colonie que les adtùiBfistrateurs eussent le pouvoir d'appeler eux-mêmes ' ces secours aussitôt qu'ils les jugeraient Indispensables . Le gohyêrrièmènt ,ét l'Intendant ont donc toujours eu (mais conjointement et non séparément) lé' droit de rendre des ordonnances provisoires et d'autoriser, en cas de disette, les bâti-
ments étrangers à verser dans les ports d'entrepôt les farines qu'appèlait le besoin. M. du C..., de Concert avec M. de Marbois, avait rendu, une ordonnance, le 30 inars 178y, qui ouvrait ces trois ports. Examinons si lés farines étrangères et celles qui ont éféw envoyées de France ont pu laisser la moindre inquiétude sur la subsistance des colons.
Ce n'est pas sur le nombre d'individus qui existent à Saint-Domingue qu'il faut calculer l'approvisionnement en farines de cette colonie; les seuls Européensquiy sont établis, en font un usage journalier. La patate, l'igname, la banane, la racine de cpou caraïbe, productions naturelles du pays, dont la récolte ne manque jamais dans tous les quartiers à la fois, suffisent à la subsistance de presque tous les nègres ët gens de couleur, libres ou esclaves, c'est-à-dire àUx neuf dixièmes des individus qui peuplent l'île.
Si l'on joint à ces fruits le rify ie thaïs et les légumes de toutes espècès, dont l'importation est toujours permise au commerce étranger, on concevra sans peine que l'approvisionnement de §aint-:Domingue, en farines, n'excède pas 12,500 barils de 180 livres pesant par mois, ou 150,000 barils du même poids par année; car, sur le relevé fait des farines entrées à Saint-Domingue, depuis 1784 jusqu'en 1788 inclusivement, il est prouvé que l'importation n'a été que de 750,000 barils, ce qui donne 150,000 barils pour la consommation moyenne pendant chacune de ces cinq années*
Recherchons maintenant combien de barils de farine sont entrés dans les ports de Saint-Domingue dans les neuf premiers mois de 1789. Je ne m'Occuperai pas des trois derniers/ non que la colonie ait manqué de farines pendant ,ce temps, mais parce que les états qui ont pu m'être adressés depuis ce^te époque ne me sont point parvenus; les gazettes prouvent,' au reste, que le pain a continué à y être à bas prix.
Les différents mouvements des ports de France, dont fêtais informé, et les rapports venus de la colonie même, m'assuraient quë, jusqu'au mois d'avril 1789, elle trouverait, dans les envois qui lui seraient faits ou dans les magasins déjà approvisionnés, de quoi pourvoir à ses besoins; et, en effet, elle n'a pas manqué.
Un relevé de divers états ou registres fidèles et authentiques constate que, dans les mois d'avril, mai, juin et juillet y il est entré dans les ; ports de Saint-Domingue 54,348 barils de farines, i tant françaises qu'étrangères. Il n'en fallait que 50,000, à raison de 12,500 barils par mois, pour alimenter la colonie pendantce temps. Il est donc impossible qu'elle ait i jusqu'à cette époque, éprouvé ou même pu craindre la famine.
Des lettres postérieures, en date des 24 , et 28 août, m'ont appris qu'il restait alors 10,000 barils de farine chez les divers négociants de la seule ville du Gap.
Inutilement on tenterait de jeter du doute sur ces faits ; ils ont pour garant le rapport de M. de La Jacqueminièré, imprimé vers la fin de l'année dernière.
« On n'a point perdu de vue », disait ce membre de l'Assemblée nationale, « que la demande des « députés de l'île ne s'élève provisoirement qu'à tf 150,000 barils par an, ce qui [fait 12,500 barils « paf mois. Or, il résulte, de l'état joint à « la lettre des deux administrateurs de. l'île, eu « date du 28 août, qu'il est entré dans les {torts, « pendant les quatre mois d'avril, mai, juin et « juillet, 54,348 barils de farines tant françaises
« qu'étrangères, ce qui donne un excédent de « 4,348 barils. Si, à cet excédent, on joint le « montant des expéditions qui ont été faites dans « nos ports seulement depuis cette époque, et « qui étaient de 7,400 barils au commencement « de septembre, on sera convaincu que si, dans « l'état constant des choses, le barit de farine « a valu, à Saint-Domingue, 120 à 140 livres, ce « qui n'est pas tout à fait le double de la valeur « ordinaire, du moins l'île a été suffisamment « approvisionnée jusques et au delà de l'époque « à laquelle les députés de Saint-Domingue an-« nonçaient la disette comme extrême.
« A la vérité, cet état ne cadre point avec ce-
« lui de M. du C.....; mais, pour se déterminer
« en faveur de celui qu'ont envoyé conjointe-« ment les deux administrateurs de l'île, le co-« mité a pensé que les raisons par lesquelles le « commerce a combattu l'exactitude des états
« fournis par M. de G.....étaient sans réplique,
« et il a été convaincu que celui qui se trouvait « joint à la lettre commune des deux adminis-« trateurs actuels, et d'une date postérieure, comportait avec lui des probabilités bien plus « fortes que les premières, fournies par l'ancien « administrateur seul.
« Une considération est encore venue à l'ap-« pui de ces motifs; elle a paru, au comité, dé-« terminante en faveur de l'exactitude de l'état « envoyé par MM. de Peynier et de Marbois: « c'est qu'il résulte de l'extrait des déclarations « des exportations pour Saint-Domingue, faites « dans les ports du royaume, que, pendant les « mêmes quatre mois, il en a été déclaré à cette « destination 24,446 barils, quantité bien appro-« chante de celle de 24,677 annoncée par l'état « des deux administrateurs. Ce rapport entre des « relevés faits à Saint-Domingue d'une part, et « dans nos ports de l'autre, non combinés entre « eux, a paru au comité porter jusqu'à l'évi-« dence la démonstration des faits attestés par le « cornmprce et le ministre.
« Quant aux farines étrangères annoncées « dans l'état, et formant avec celles de France « la quantité de 54,348 barils, nous n'avons eu « aucun moyen d'en vérifier la quantité, mais « la vérité reconnue de la première partie, reia-« tivement aux farines françaises, nous a paru « une bien forte présomption de son exactitude « sur les farines étrangères.
« Ainsi, il nous a semblé prouvé que M. du C... « avait été induit en erreur par les états qu'il a « fournis, que ceux de MM. de Peynier et de « Marbois étaient parfaitement exacts; d'où il « résulte que pendant les mois d'avril, mai, « juin et juillet, l'île a été suffisamment appro-« visionnée de farines, qu'il y en avait à cette « époque un excédent qui, avec les envois faits « depuis par la métropole seule, a dû suffire à « l'approvisionnement du mois suivant. »
J'ai cru ne pouvoir présenter à l'Assemblée Dationale des preuves plus dignes de sa confiance, que celles qui avaient été vérifiées une première fois par ses ordres. Mais le rapport de M. de La Jacqueminière, rédigé et imprimé en 1789, n'a pu constater que ia quantité de farines entrées à Saint-Domingue jusqu'à la fin du mois de juillet de la même année. Je joindrai donc l'état que les administrateurs m'ont envoyé Je 24 octobre dernier des farines entrées dans les ports de la colonie. On y verra que, depuis le 1er août jusqu'au 20 octobre, la colonie avait reçu 48,871 barils, qu'il en existait en nature, au 24 oc tobre, 23,872 barils, quantité suffisante pour as-
surer, pendant six semaines, la subsistance(1) de la colonie ; qu'on en attendait incessamment 41,850 barils qui, à raison de 12,500 par mois, tranquillisaient pleinement Saint-Domingue sur sa subsistance pendant cinq mois entiers.
Enfin, il est aisé de prouver que Saint-Domingue a reçu en 1789, 20,000 barils de farines de plus qu'il n'en avait reçu en 1788, année où personne ne s'est plaint, où personne n'a craint de manquer.
Je serais assurément dispensé de me justifier du rpproche d'insouciance, après avoir prouvé que la colonie était pourvue. Ma correspondance avec les administrateurs, le compte exact qu'ils me rendaient de l'état des subsistances, les éclaircissements que je me suis procurés, les ordres que j'ai donnés, tout justifie d'ailleurs les soins que j'ai pris; mais puisqu'enfin on m'accuse d'insouciance, je dirai que sans cesse occupé de prévenir les besoins d'une colonie précieuse, je crus devoir proposer au roi de prendre une précaution surabondante et inusitée. Il fut donné ordre à un bâtiment destiné en 1789 pour nos colonies occidentales, de toucher à l'Amérique septentrionale, et d'y remettre une lettre circulaire adressée à nos consuls, lettre dans laquelle Sa Majesté les chargeait d'exciter les négociants des Etats-Unis à faire passer des farines, soit aux Iles-du-Vent, soit à Saint-Domingue. Il leur était enjoint de faire insérer cette invitation dans les papiers publics; tous l'ont fait, et j'offre de produire leurs réponses.
Plusieurs de ces lettres constatent que les négociants se refusaient à cette spéculation, parce que les capitaines marchands, nouvellement arrivés de Saint-Domingue, y avaient laissé les farines abondantes et a un prix modéré.
Saint-Domingue en effet n'a point éprouvé de disette pendant l'année 1789. Les farines françaises, et même les farines étrangères y ont été un peu plus chères (a) que les années précédentes. Eh! qui ne se fût estimé heureux en France, de pouvoir, à l'aide d'une légère augmentation de prix, assurer sa subsistance? Les farines étaient bonnes à Saint-Domingue, elles n'y ont jamais manqué; la mère-patrie a-t-elleeules mêmes avantages?
Mais comment se contenir dans les bornes d'une juste modération, quand on lit dans la dénonciation que je réfute, l'assertion suivante :
« Du 5 juillet au 20 septembre, il n'est pas en-« tré un seul navire de France dans les ports de « Saint-Domingue. »
Je ne puis le dire en termes trop précis, le fait est notoirement faux.
Je produis la liste de quarante-sept navires venant de France, entrés dans les ports de Saint-
Domingue pendant cet intervalle de temps (1), et je ne conprends pas dans ce nombre les vaisseaux négriers.
J'invoque à l'appui de ce que j'avance, les papiers publics deia colonie, où est annoncée l'arrivée de tous les bâtiments, avec l'indication du lieu de leur départ : les navires, les capitaines y sont nommés ; Ips dates du départ et de l'arrivée sont énoncées. Ces gazettes ont été imprimées en 1789 ; on ne m'y préparait pas des réponses à une dénonciation qu'il n'était pas alors possible de prévoir.
Les registres de nos ports d'où les bâtiments sont partis, les journaux des capitaines qui les ont montés, offriront des preuves surabondantes à ceux qui pourraient encore en désirer.
Je ne laisserai pas même à mes dénonciateurs la ressource de dire que pendant ces soixante-dix jours, il n'a mouillé dans les ports de la colonie aucun bâtiment français chargé de farines: car les états que je produis constatent que, dans le seul mois d'août, il y est entré sur nos navires 4,201 barils de farines françaises (a).
La colonie n'a donc point manqué de subsistances, et elle n'a pas cessé un seul instant d'être l'objet de mes soins les plus assidus.
SECTION II.
J'ai été, jusqu'à présent, soutenu dans la carrière pénible que j'ai parcourue par le sentiment intime d'une vie honnête et d'une conduite pure ; à chaque ligne que je traçais, il me semblait voir entre moi et la calomnie s'élever la vérité, étayée d'une foule de preuves qui me servaient d'égide.
Mais enfin les dénonciateurs qui me poursuivent ont eu l'art de m'imposer le devoir le plus affligeant pour moi. Un militaire distingué, que je n'ai jamais cessé d'estimer, M. le marquis du C..., dont je fus dans ma jeunesse l'ami et le compagnon d'armes, a été, pendant mon ministère, nommé au gouvernement général des îles Sous-le-Vent, et il a depuis été rappelé.
On exige que je me justifie de cette révocation ; on me place dans la cruelle alternative ou de trahir, en me taisant, mon devoir envers la nation qui m'interroge, envers le roi qui m'honore de sa confiance, envers les ministres qui ont assisté au conseil dans lequel ce rappel a été déterminé, ou d'entrer dans des détails qui affligent ma sensibilité. On espère rendre accusateurs, l'un de l'autre, deux nommes qui se considèrent et qui ne peuvent se donner réciproquement que des témoignages honorables, même sur les points où ils diffèrent d'opinions. Je me vois contraint à exposer les erreurs d'un brave et loyal militaire qui, comme administrateur, s'est écarté
réellement de ses devoirs, mais par un zèle immodéré, je pourrais dire aveugle, pour ce qu'il croyait être le bien public. Doit-on même lui imputer ces erreurs excusables par leur motif? n'est-il pas très probable que des conseils perfides ont égaré ce gouverneur, à qui la colonie de Saint-Domingue, où il n'a passé que six mois, ne pouvait être suffisamment connue lorsqu'on l'a porté à y introduire les plus grands changements?
J'entre en matière, et me hâte de me délivrer d'une tâche, dirai-je importune? Ce mot est faible et exprime peu ce qu'il m'en coûte pour discuter un tel sujet.
De quel droit d'abord mes dénonciateurs me reprochent-ils le rappel de M. le marquis du C.... ?
Pourquoi supposent-ils qu'il a été nommé malgré moi gouverneur de Saint-Domingue?
Pourquoi soutiennent-ils que le rappel de cet officier général eut pour cause l'ordonnance qui ouvrait aux farines étrangères tous les ports d'amirauté de la colonie?
Pourquoi, après avoir cherché sans cesse à induire en erreur sur les époques et sur les faits, couvrent-ils d'un air de mystère des conjectures qui blessent ouvertement la vérité?
Ce n'est point malgré moi que M. le marquis du G.... a été nommé au gouvernement de Saint-Domingue; il avait douze concurrents; j'ai mis leurs demandes et la sienne (1) sous les yeux du roi : leurs services et leurs talents faisaient regretter à Sa Majesté de n'avoir point alors de récompenses à offrir à chacun d'eux; mais son choix ne pouvait tomber que sur uu seul. J'eus l'honneur d'exposer au roi les motifs qui me semblaient devoir le fixer sur M. le marquis du G..., et ce fut d'après mon avis motivé, que Sa Majesté se détermina à le préférer. Ces faits sont constants; M. le marquis du C.... lui-même ne peut les ignorer. C'est donc pour avoir occasion de m'im-puter, avec quelque vraisemblance, son rappel, qu'on suppose mal à propos que je m'étais opposé à sa nomination.
Ce n'est pas non plus sans des motifs cachés qu'on a attribué ce rappel à l'ordonnance que rendit M. le marquis du G...., pour ouvrir aux étrangers tous les ports d'amirauté de la colonie, pour y attirer des farines dont il craignait de manquer. On a espéré, en alléguant cette cause de son retour en France, exciter l'indignation publique; on s'est flatté qu'on donnerait, par un tel artifice, quelque poids à la dénonciation qui est faite contre moi: mais la fausseté de cette assertion va être pleinement démontrée, et l'on verra, non sans éton-nement, que, dans une multitude de faits énoncés pour l'appuyer, il ne s'en trouve pas un seul qui ne soit contraire à la vérité.
Ce fut le 28 juin 1789, que sur des nouvelles apportées de Saint-Domingue par M. le chevalier de laTourette, lieutenant de vaisseau commandant la Levrette, qui en avait appareillé le 15 mai, que le roi rappela M. le marquis du C...., et me chargea de proposer à M. le comte de Peynier, le gouvernement des îles sous-le-Vent. 11 était à Paris, je lui fis part des intentions du roi; il accepta, et fut nommé le 30 juin.
Pour qu'on pût attribuer le rappel de M. le marquis du G...., à l'ordonnance qui ouvrait tous les ports d'amirauté aux navires étrangers, il aurait fallu au moins qu'il eût été possible d'avoir connaissance de cette ordonnance à Versailles avant
le 27 juin; or, elle n'a été enregistrée (1) que le 29 mai au Conseil supérieur du Port-au-Prince. Je la présente dans une forme authentique : ce n'était certainement pas M. le chevalier de la Tou-rette qui l'avait apportée, puisqu'il av^it mis à la voile le 15 mai du Port-au-Prince, où l'arrêt d'enregistrement n'a été rendu que quatorze jours après.
Dira-t-on qu'on a envoyé cette ordonnance par un autre navire ? quel est-il ? qu'on le nomme : il n'en est point venu alors avec Gette rapidité qui tiendrait du prodige ; les mouvements de nos ports, recueillis avec exactitude, peuvent être consultés, et déposeront contre ce fait chimérique.
Supposons, contre toute vérité, qu'on eût fait passer l'ordonnance par un bâtiment expédié à l'instant même qu'elle a été enregistrée ; il eût été impossible encore qu'elle fût parvenue le 27 juin à Versailles, car on n'expédie point un bâtiment chargé de dépêches pour les ports de la Manche, mer où l'on ne peut quelquefois pénétrer que très difficilement ; et dans quelque autre port de l'Europe qu'il eût mouillé, l'officier chargé des dépêches ne serait point venu de ce port en moins de quatre jours à Versailles* k f
Il faudrait donc supposer que le nayire serait arrivé dans le port le ^3 ] uin ; mais aucun bâtiment ne passe en yingt-£inq jours du Port-au-Prince en France, à moins d'être poussé par une tempête continuelle, dont on tient note dans les journaux de mer; les traversées très courtes sont de trente jours; communément, elles sont de quarante jours, souvent de deux mois, On n'a cité dans le temps, et on ne saurait citer aujourd'hui aucun navire qui ait, à cette époque encore voisine de nous, fait une semblable diligence; on l'aurait d'autant plus remarquée qu'elle est absolument improbable, etil seraitaisé d'en administrer despreuves.
Quelle influence ce fait n'a-t-il pas sur le chef de dénonciation auquel je réponds ? Il n'est pas possible que l'ordonnance enregistrée le 29 mai au Port-au-Prince, et qui ouvrait aux farines étrangères tous les ports d'amirauté, ait déterminé (a), le 28 juin, à Versailles, le rappel de M. le marquis du C..il n'était pas plus possible que MM. les députés de Saint-Domingue eussent reçu des lettres de leurs commettants par la Levrette que commandait M. le chevalier de la Tourette, ni par aucune voie, et qu'ils eussent été chargés par eux de me voir, soil pour me témoigner leur satisfaction de la conduite tenue par M. le marquis du G... qui avait rendu cette ordonnance, soit pour demander le rappel de l'intendant de la colonie, qui avait refusé de la signer; et quoiqu'on ait déclaré dans la dénonciation que je ne nierais pas une seule phrase des deux conférences qu'eut avec moi à ce sujet la députation de Saint-Domingue tout entière, parce qu'ils étaient dix témoins, je dirai que
MM. les députés ont erré certainement sur les dates, ce qui est très possible aujourd'hui, et qu'ils n'ont eu de conférence (a) avec moi ni le 29 juin, ni le 30, sur l'ordonnance rendue le 29 mai au Port-au-Prince, puisque la nouvelle ne leur en était pas arrivée, je dirai plus, puisqu'elle n'avait pas pu leur parvenir.
J'ajouterai qu'il est physiquement impossible que M- le comte de Peynier ait été porteur, comme le soutiennent mes dénonciateurs, de l'arrêt du conseil qui cassait et annulait l'ordonnance rendue par M. le marquis du G..., le 29 mai, puisque M. le comte de Peynier était en rade à Brest, le 13 juillet, qu'il passa le Goulet le 18, et que l'arrêt du conseil qui a cassé l'ordonnance du 29 mai ne fut rendu que le 23 juillet, à Versailles.
Je dirai que MM. les députés de Saint-Domingue, qui ont signé la dénonciation contre moi (1), étaient d'autant moins fondés à exagérer le préjudice que la cassation de cette ordonnance avait causé à la colonie, qu'il est de fait et notoire que l'arrêt de cessation n'y est arriyé qu'après le 1er octobre, terme marqué par (b) l'ordonnance même de M. duC... pour la clôture des ports d'amirauté. J'avais retardé l'envoi de cet arrêt de cassation, afin de ne pas enlever aux habitants de la colonie les avantages qu'ils avaient espérés et pour ne pas exposer les étrangers qui, sur la foi de l'ordonnance, auraient envoyé des farines dans les ports d'amirauté, à souffrir de leur erreur. Enfin je dirai que MM. les députés de Saint-Domingue savaient positivement et depuis longtemps, à l'époque où j'ai été dénoncé, que l'ordonnance du 29 mai, qui ouvrait les ports d'amirauté aux farines étrangères, n'avait pas été la cause du rappel dé M, le marquis du G..., puisque non seulement je le leur avais exposé verbalement (1), mais que le 11 août 1789 je
leur avaig mandé, de la manière la plus précise, les vrais motifs du mécontentement de Sa Majesté* Ma lettre fait partie des pièces justificatives jointes à ce mémoire.
Ii est donc démontré jusqu'à l'évidence que la révocation de M. le marquis du G... n'a point été et n'a pas pu être occasionnée par l'ordonnance qu'il avait rendue le 29 mai : avec ce fait tombent et s'écroulent toutes les inductions de mes dénonciateurs et leurs vains efforts pour faire croire que j'ai voulu livrer Saint-Domingue au fiéau de la famine, dont il à été préservé par mes soins et par ceux des administrateurs.
Mais je me vois contraint à révéler la cause de ce rappel ; je le ferai, le roi me l'a permis : on ne verra dans la décision de Sa Majesté rien que de juste ; dans la conduite du gouverneur général, rien que d'bonnête ; dans la mienne, rien que ne dût faire le ministre de Sa Majestés
La traite des nègres destinés pour Saint-Do*-mingue est accordée aux Français exclusivement à toutes autres nations ; la vente qu'en font chaque année nos armateurs monte à 40,000,000de livres tournois. Ge résultat suffit pour faire sentir toute l'importance de cette branche de corn* merce
M. le marquis du G... rendit seul et fit enregistrer, le 11 mai 1789, une ordonnance (1) qui contenait diverses dispositions, mais qui entre autres associait les négociants étrangers aux nôtres, dans la traite des nègres destinés pour le sud de là colonie.
G'est cette ordonnance que nos adversaires s'efforcent en vain de faire confondre avec celle du 29 mai ; c'est cette première ordonnance* dis-je, que m'apporta le chevalier de la Tourette, ayant fait voile le 15 mai du Port-au-Prince, arrivé à Brest le 21 juin, parti pour Versailles le 22, et rendu à la cour le
G'est cette ordonnance dont les suites me parurent d'une telle importance, que je montai chêt le roi à l'instant même pour lui en faire part. Sa Majesté m'ordonna d'en conférer le soir àVec les autres ministres, et de préparer mon rapport pour le Conseil d'Etat qui devait être tenu le lendemain.
Le rappel de M. le marquis du C... y fut arrêté le 28 juin.
Ge gouverneur général était contrevenu formellement à ses instructions ; il avait excédé les pouvoirs que Sa Majesté lui avait confiés ; il avait, dans une matière où il n'était autorisé à faire de règlement que conjointement avec l'intendant, aboli de sa seule autorité l'effet de nos lois commerciales pendant cinq ans entiers, imposé des taxes nouvelles, et moaéré Celles qui étaient établies sur diverses importations, exemple bien dangereux. Il avait, relativement à un objet qui n'était point urgent, refusé d'attendre l'approba^ tion de Sa Majesté, comme le lui proposait le coadministrateur. Le seul motif qu'on pût alléguer en faveur de son ordonnance, portait sur une base fausse, et il serait facile de constater que dans les (à) quatre juridictions où l'ordonnance de M. du G... permettait aux étrangers d'importer des noirs, le nombre des esclaves s'était proportionnellement beaucoup plus augmenté depuis huit années que dans les six autres sénéchaussées, quoique ces dernières fussent proportionnellement plus considérables. Il était à
Craindre que la faculté accordée ne s'étendît fort au delà de la partie du sud, qu'elle ne fournît au commerce interlope les moyens d'importer non seulement des noirs, mais beaucoup de denrées prohibées dans l'ouest et dans le nord dé la colonie ; enfin, pouvait-on prévoir sans regret qtïe les étrangers s'enrichiraient dé nos pertes, qu'ils seraient autorisés à enlever les productions coloniales qui n'avaient dû jusqu'alors se verser que daqs Jes ports de France ; qu'ils nous enlèveraient une partie de ces échanges doublement avantageuses, qui non seulement rendent la balance du commerce favorable pour nous, entretiennent notre marine marchande et multiplient nos navigateurs, mais vivifient pour àinsi dire l'intérieur même du royaumè, en procurant de remploi et des débouchés à nos manufactures, en fournissant des ,o]biiets de travail et des moyens de subsistance à plusieurs millions de Français ?
Si la résolution que prit le fol dans cette circonstance pouvait avoir besoin d'être justifiée, je citerais les réclamations qu'élevèrent bientôt les chambres de commerce de presque toutes nos villes maritimes, de Bordeaux, de Nantes, de Saint-Malb, de ROUen, dû Havre, de Dunkerque, de la Rochelle, de Bayônne, de Marseille, qui, à la première nouvelle de l'ordonnance enregistrée le 11 mai, prévirent toute l'étendue des pertes dont elles étaient menacées.
Si presque toutes lés Chambres de commerce de nosi villes maritimes ont élevé des plaintes contre la conduite de M. le marquis du C..., si plusieurs d'entre elles ont demandé son rappel, s'il est évident qu'il a transgressé Ses instructions et outrepassé ses pouvoirs, je m'en rapporte a tout homme impartial : aurait-on pu se dispenser de faire droit sur leur juste demande ? Peut-oU reprocher au conseil du roi d'avoir prévenu leur réquisition dans une circonstance aussi intérêt santé pour l'Etat ? Est-Il un seul habitant de nôs provinces maritimes ou intérieures quitte S'ëtOttnè de me voir cité devant l'Assemblée de la nation, pour avoir coopéré à ce qu'exigeaient le salut de nos manufactures, là conservation et l'accroisse* ment de notre navigation, et la prospérité du èommerCe nâtiottal ?
Je n'ai à me disculper ni du silence que j'âi gardé, ni dés moyens que j'ai employés pour faire exécuter, avec autâtit d'exactitude que_ de célérité, les ordres que le roi me dOnnalè 2o jtiin ; ils étaient équitables, et ii les avait méditas dâns la sagesse de son conseil. Les circonstances exigeaient ce qu'il a fait ; j'eusse été inexcusable de révéler à des particuliers ce que l'Assemblée nationale n'exigera probablement pas que je discuté même aujourd'hui : il s'agit dés faits qui con-*
cernent l'ancien gouverneur général, et non des motifs pour lesquels le roi a fait partir avec secret et promptitude un dès militaires les plus distingués de la marine, M. le comte de Peynier, qui a si bien secondé M. le Bailli de Suffren dans l'Inde, et y a eu tant de part au succès de nos armées.
Mais pourquoi m'occuper si longtemps du rappel de M. le marquis du C...? Saint-Domingue sait que ce n'est point à la décision du roi qu'il faut imputer le départ de ce procureur général ; on ne l'ignore pas en France, et cependant, à en croire la dénonciation, l'ordre de rappel aurait arraché du milieu de la colonie son consolateur et son appui. Il me serait aisé de prouver que, dès le 20 juin, huit jours avant la tenue du Conseil d'Ëtat où ce rappel fut décidé, M. le marquis du C... confiait à un bâtiment la lettre où il m'annonçait son retour. Il est parti, en effet, de la colonie le 10 juillet, dans un temps où il était impossible qu'il eût connaissance de la révocation de ses pouvoirs, et de ce qui avait été décidé douze jours auparavant à Versailles.
M. le marquis du G... a donc quitté le commandement militaire qui lui était confié : il l'a abandonné sans congé, sans permission quelconque, et avant d'avoir été relevé.
On exige la vérité ; j'ai rendu compte des faits ; Sa Majesté m'ordonne même d'ajouter qu'elle a été justement mécontente de ce que les lois coloniales ont été transgressées par l'ordonnance du 11 mai 1789, de ce que les lois militaires ont été violées par le départ d'un chef qui, dans des circonstances critiques, est revenu, sans son autorisation, d'une possession éloignée où il commandait.
11 est enfin accompli, il l'est dans toute son étendue, le devoir rigoureux que vous avez su m'imposer : vous m'avez contraint de rendre publiques les causes du rappel de M. le marquis du C...; mais je persiste à dire que si quelques-unes de ses actions publiques ont encouru la censure du roi et de son conseil, ces actions même avaient pour éxcuse un désir ardent du bien. Tout ce qu'il a fait porte l'empreinte de la franchise et de la loyauté de son caractère, qui lui permettaient rarement de croire qu'on voulût le tromper, et lui faisaient écouter avec avidité les conseils de ceux qui lui proposaient (peut-être insidieusement) des projets spécieux pour augmenter la prospérité de la colonie.
Au milieu, des imputations hasardées, des dénonciations téméraires qu'on dirige contre moi, j'entrevois un reproche mal articulé. J'ai, dit-on, six jours après le 23 juin, et quatorze jours avant celui de la Révolution, disposé avec despotisme du sort entier des colonies.
Moi, disposer avec despotisme du sort de» colonies! D'où peut-on tirer cette induction ? J'ai rapporté au conseil du 28 juin les lettres qui m'arrivaient de Saint-Domingue ; j'ai rendu compte de l'ordonnance émanée de M. le marquis du C...; là s'est borné mon ministère : quel appareil dans la dénonciation d'un fait qui ne devait pas même être relevé!
Mes adversaires veulent-ils faire entendre qu'il y a eu des relations entre le rappel de M. le marquis du C..., dont la date certaine est du 28 juin, et les événements arrivés en France le 14 juillet? Mais qui pouvait les prévoir dès le 28 juin; et oublie-t-on qu'au Conseil d'Etat de ce même jour, où le rappel de M. le marquis du Ç... fut arrête, siégeaient seulement les quatre ministres dont l'Assemblée nationale approuva peu de temps après la conduite ?
Enfin, puisqu'on me réduit à parler de celle que j'ai tenue dans ces circonstances délicates, je dirai que, chargé de porter à un ministre en qui la nation avait placé sa confiance, l'ordre de s'éloigner du royaume, je me permis de faire au roi les représentations les plus pressantes sur la mission qu'il me donnait. Sa Majesté les entendit avec intérêt, elle persista néanmoins. J'obéis; mais devenu libre, quand j'eus rempli mon devoir avec fidélité, je portai ma démission. Sa Majesté témoigna beaucoup de répugnance à l'accepter. Elle m'ordonna bientôt après de revenir près d'elle. Les expressions de sa bonté touchante resteront à jamais gravées dans mon cœur; c'était sur le témoignage de l'Assemblée nationale qu'elle me pressait dé reprendre une place que j'avais volontairement abdiquée.
Je suis entré dans tous les détails que la critique la plus sévère pourrait exiger de moi; mais enfin, si du rappel de M. le marquis de C... on veut induire que, comme homme public, je n'ai rien omis pour conserver dans leùr intégrité les rapports essentiels de commerce et d'intérêt qui doivent unir à jamais la France à Saint-Domingue, je m'abandonne à la censure, et je ne chercherai point à écarter un reproche que je me fais honneur d'avoir mérité.
SECTION III.
Après avoir dénoncé le rappel soudain d'un gouverneur cher à la colonie, on m'impute la maintenue opiniâtre d'un intendant proscrit ; on m'attribue une lettre d'approbation, dictée4 dit-on, au roi, en faveur de cet intendant coupable.
L'ordre des dates, très nécessaire à rétablir, veut que j'explique d'abord dans quelles circonstances la lettre a été écrite.
Lorsque l'ordonnance du 11 mai 1789 fut portée au conseil supérieur de Saint-Domingue, M. de Marbois, qui y était contraire, s'efforça d'en faire du moins différer l'enregistrement que le gouverneur requérait. Les mêmes motifs qui avaient porté Sa Majesté à improuver l'ordonnance et le gouverneur dont elle était l'ouvrage, devaient faire.obtenir à l'intendant qui s'y était opposé, un témoignage de satisfaction. Je mis sous les yeux du roi, dès que l'eus reçu, le discours motivé que M. de Marbois avait tenu au conseil supérieur de Saint-Domingue, discours consigné dans les registres de cette cour de justice. Le roi m'ordonna d'en donner connaissance au Conseil d'Etat, et on le trouvera au nombre des pièces justificatives de ce mémoire (1). Sa Majesté y remarqua le respect religieux que doit avoir tout administrateur pour les lois dont il est spécialement chargé de maintenir l'exécution; elle fut encore plus convaincue du préjudice que porteraient au commerce du royaume, aux manufactures que ce commerce alimente, et à ia colonie elle-même, l'admission des nègres de traite étrangère dans la partie du sud, l'ouverture des ports peu surveillés, qui avaient été jusqu'alors fermés à toutes .les autres nations, et te versement des productions coloniales dans les pays jaloux de notre prospérité ; elle sentit qu'elle ne pouvait employer personne plus en état de prévenir les effets d'une ordonnance impolitique et illégale que l'intendant qui l'avait combattue avec autant de force, de raison, que de fermeté de caractère.
Je fus donc chargé d'écrire à M. de Marbois pour lui témoigner la satifaction que Sa Majesté ressentait de ses services, et pour l'engager à les lui continuer; car cet administrateur avait précédemment demandé et obtenu un congé pour revenir en France; il avait été impossible de résister aux motifs dont il avait appuyé ses instances. Depuis vingt ans, M. de Marbois servait sa patrie avec zèle; il en avait passé dix entiers loin d'elle et au delà des mers, soit dan s l'Amérique septentrionale, soit à Saint-Domingue; la mort de son père, des affaires relatives à ses intérêts privés, sa santé même, lui faisaient désir ardemment de revenir dans ses foyers.
Il était à craindre qu'il ne hâtât son retour. Je m'empressai de lui écrire; et après l'avoir informé de la cassation de l'ordonnance du 11 mai, du rappel de M. le marquis du G...., du départ de M. le comte de Peynier, j'ajoutais dans ma lettre du 3 juillet 1789 : « L'intention de Sa Ma-« jesté est que, dans les circonstances présentes, « vous ne quittiez point une colonie que vous « avez si bien administrée, et où vous pouvez « lui rendre les services les plus importants. Je « suis persuadé que vous n'hésiterez point à lui « témoigner votre dévouement. L'exhortation « même que je vous fais de la part de Sa Majesté « doit être regardée comme une nouvelle marque « de la confiance qu'elle a en vous. »
J'eus l'honneur de présenter au roi cette lettre qu'il m'avait ordonné de lui apporter. Il la fit lire dans son conseil, l'approuva; et la nécessité de conserver à Saint-Domingue un homme qui en connaissait parfaitement le régime, surtout au moment où l'on y faisait passer un gouverneur nouveau, détermina Sa Majesté à lui donner directement des preuves de la confiance dont elle l'honorait.
Voici les propres mots que le roi daigna écrire de sa main :
« C'est par mon ordre exprès que M. de La Luzerne vous écrit. Continuez à remplir vos fonctions et à m'être aussi utile que vous l'avez été jusqu'ici. Vous pouvez être sûr de mon approbation, de mon estime, et compter sur mes bontés. »
Je ne suivrai point mes dénonciateurs dans la paraphrase peu respectueuse que renferme le treizième chef de leur étonnante dénonciation. Sa Majesté est seule juge de ce qu'elle a fait; et quand l'amour qu'elle porte à son peuple, quand le désir de conserver dans la colonie un serviteur fidèle et utile à la chose publique l'auraient engagé à s'écarter, dans la circonstance, de ce qu on appelait autrefois des formes d'usage ou de convenance, est-ce aujourd'hui qu'on doit s'en plaindre? un monarque en est-il moins grand pour se communiquer quelquefois à des sujets zélés pour le bien de leur patrie?
Je passe au reproche de maintenue opiniâtre d'un intendant proscrit.
Ce fut le vendredi 24 juillet 1789, et non le 29 juin précédent, que, pour la première fois, MM. Jes députés de Saint-Domingue me demandèrent verbalement le rappel de M. de Marbois. Us n'exhibèrent aucune pièce qui constatât que cet administrateur fût coupable, ou que la mission de l'accuser au conseil du roi leur eût été donnée par la colonie. J'ai donc eu de puissants motifs pour exiger qu'ils m'envoyassent leurs réclamations par écrit. Je reçus d'eux, le 29 juillet, une lettre commençant par ces termes :
« Vous nous avez demandé de vous présenter par écrit les réclamations, objets de la conférence
que nous avons eue avec vous, vendredi (a) soir ; elles se réduisent aux points suivants...
« Le rappel immédiat de l'intendant de Marbois justement abhorré de Saint-Domingue qui, depuis trois ans, sollicite vivement et vainement son rappel. »
Je rapporterai les différentes demandes de MM. les députés au conseil du roi le 9 août dernier, et je leur adressai ma réponse le 11 du même mois ; j'v disais sur l'article qui concernait M. de Marbois :
« La justice du roi ne lui permet pas de donner des marques de mécontentement à M. de Marbois sur des inculpations qui jusqu'ici ne sont appuyées d'aucune preuve; le roi a néanmoins cherché les moyens d'accéder à votre vœu. Cet intendant a demandé depuis longtemps la faculté de s'éloigner de là colonie; non seulement la permission lui en a été accordée, mais je viens d'écrire de la part de Sa Majesté à M. le comte de Peynier et à lui, pour le déterminer à en faire usage aussitôt qu'il recevra ma lettre : le désir que vous avez de voir cesser son administration sera satisfait, sans que l'équité du roi se trouve compromise. »
J'avais écrit, en effet, la veille, à M. de Marbois; je l'avais engagé à profiter du congé qu'il avait antérieurement obtenu. Ma lettre lui est parvenue le 18 octobre; il a annoncé son départ pour le 28 du mêmé mois, et le bâtiment qui l'a ramené en Europe se trouvant prêt, il a mis à la voile dès le 2.6. Peut-on montrer plus de ponctualité? Tous ces faits sont connus des dénonciateurs; comment ont-ils pu dire que j'avais maintenu opiniâtrement dans sa place un intendant coupable et proscrit, tandis que j'ai concouru à accélérer, autant qu'il était possible, le retour de M. de Marbois en Europe, sans m'écarter cependant des principes de justice qui seront toujours dans le
cœur de Sa Majesté, et je puis l'ajouter, dans le mien.
Qu'on ne croie pas cependant que les inculpations qu'on s'est permises contre M, de Marbois soient appuyées de la moindre preuve : mais je crois de mon devoir de le considérer sous ses rapports d'homme public, et de présenter les résultats de sou administration.
Faire rendre la justice et administrer les finances sont les principales fonctions de l'intendant d'une colonie.
Avant que M. de Marbofs les exerçât à Saint-Domingue, on s'y plaignait de la longueur des procès, et de 1 art qu'on employait pour les éternise^.
Et à l'ouverture des vacances du mois de juillet dernier, nulle affaire n'était arriérée.
Le conseil du roi était jadis souvent occupé des demandes en cassation formées contre les arrêts des conseils de la colonie.
Et elles sont moins nombreuses depuis que M. de Marbois a rempli la place de président du conseil de Saint-Domingue ; très rarement on s'est pourvu contre les ordonnances qu'il a rendues pendant quatre années d'une administration où les réformes ont ère nécessaires et multipliées-
Saint-Domingqe s*était endetté, avant son arrivée, de onmillions.
Ët sous son administration, cette colonie s'est entièrement libérée ; on ne réclamait, quand il est parti pour la France, qu'une seule créance litigieuse de 500*000 livres. Tout se payait oomptant, quelquefois d'avance; et il y avait plus d'un million en réserve dans les caisses publiques.
Il n'avait cependant été exigé aucun nouvel impôt au profit du roi, aucun des anciens n'avait été augmenté, et le droit sur les boucheries avait même été supprimé; La colonie ne coûtait plus rien à la métropole, et se suffisait pour ainsi dire à elle-même ; elle vendait avantageusement ses denrées, et les retours qu'elle recevait ajoutaient annuellement à son opulence.
Jamais on ne m'avait adressé aucune plainte étayée de preuves contre M. de Marbois; qu'on juge si Je conseil du roiadû accueillir des accusations qui en étaient absolument dénuées. Pouvais-je me dispenser de répondre, le 11 août 1789, à MM. les députés qui demandaient le rappel de cet intendant, que'la justice du foi ne permettait pas que Sa Majesté donnât à M- Marbois des marques de mécontentement sur des inculpations qui n'avaient été jusque-là appuyées daucunes preuves?
Il n'y eût point eu d'opiniâtreté à le maintenir, il eût été injuste de le révoquer; j'ai pris le seul parti qui, dans la circonstance, pouvait concilier des intérêts contraires, sans blesser l'équité, M. dé Marbois, qui de désirait lui-même que de repasser en Europe, y est revenu, et je n'en suis pas moins dénoncé pour l'avoir opiniâtrement maintenu dans la colonie.
QUATORZIÈME PIÈCE COMMUNIQUÉE,
Délibération prise par les habitants de la partie du nord, le
QUINZIÈME PIÈCÊ COMMUNIQUÉE.
Lettre ordonnée par rassemblée de la partie du nord, à MM. les députés de Saint-pomingue le
RÉPONSE.
Le comité des rapports, en me faisant remettre copie des treize chefs dé dénonciation auxquels je viens de répondre, y a joint celle d'une délibération nrise par les habitants de la partie du nord, le 24 janvier dernier, et celle d'une lettre adressée par cette même assemblée (a) à Messieurs les députés de Saint-Domingue lé 9 février suivant.
Les rédacteurs de la lettré s'y réfèrent à la délibération qui l'a précédée; é'est donc dé cette délibération seulement que je dois m'occuper, c'est aux faits qui y sont allégués que je dois répondre.
J'y remarque, à la simple lecture, que l'assemblée de la partie du nord de la colonie, n'autorise la dénonciation qui a été faite contre moi d'une manière positive que relativement à la réunion des deux conseils aU Cap et du Port-au-Prince, et à celle des caisses municipales. Ellese plaint, sur ce second chef, de Ce que les deux ressorts ont été soumis au même régime, quant aux droits curiaux etau traitement des ministres du culte; mais je ne trouve dans cette pièce rien qui ait trait à onze autres chefs qui ont cependant formé autant de chapitres particuliers dans la masse des treize dénonciations portées contre moi,
Mais je remarque de plus, dans cette délibération des habitants de la partie du nord, six autres chefs de dénonciation très-articulés, et que les dénonciateurs de France ont néanmoins jugé à propos de ne point énoncer.
Je leur demande si cette délibération du 24 janvier dernier est le seul pouvoir en vertu duquel ils agissent, ou s'ils en ont d'autres? Dans le dernier cas, pourquoi les dénonciateurs ne les ont-ils pas communiqués? Je me sujs montré d'une manière assez franche pour avoir ie droit de les faire expliquer sur ce point. Il paraîtra étranger sans doute que, quand on attend de moi des réponses, on m'ait caché jusqu'au titre qu'on a pour me les demander.
Si la délibération du 24 juin 1790 est la véritable et la seule procurationaoht soient munis mes adversaires, je les interpelle de déclarer pourquoi ils y ajoutent, et pourquoi ils en retranchent? Tout mandataire doit se renfermer dans les bornes de son mandat ; sans autorité par lui-même, il ne peut exercer que celle qui lui a été déléguée par autrui.
Ces questions pourraient paraître pressantes à mes adversaires ; je veux encore prendre sur moi le soin d'y répondre.
Les onze faits dont oa a imaginé en France de faire des chefs de dénonciation sont tels, qu'il n'est pas même venu à l'idée des habitants de la colonie qu'ils pussent être l'objet d'un reproche. Ma conduite y est connue; mon zèle pour le bien général y a été applaudi ; mes efforts y ont été encouragés par les suffrages de ceux mêmes qui me poursuivent aujourd'hui; ils m'ont donné des assurances de leur estime : j'en conserve le témoignage dans la lettre qu'ils m'écrivirent le 31 août 1788, huit mois après mon entrée dans le ministère ; elle commence par ces mots :
« Les colpns de Saint-Domingue qui n'ont pu « se consoler de vous voir quitter le gouveme-« ment de leur île qu'en vous voyant siéger au « conseil, comme ministre de la marine, viennent « aujourd'hui avec cette confiance que vos bonnes « intentions leur ont inspirée, etc. »
je lis au bas dè cette lettre les noms de M- le marquis de Gouy d'Arcy, de M-le comte de Key-naud, de M, le marquis de Perrigny, de six autres propriétaires d'habitations à Saint-Domingue, et ils m'écrivaient Comme étant les commissaires de la colonie.
Les onze chefs d'accusation ne sont donc point l'ouvrage de la colonie ; elle les ignore, (/adhésion de quelques-uns de ses habitants, qu'on tentera sans doute d'obtenir, sera tardive; j'en ai pour garant son Silence actuel qui les dément. Je dois donc ne les attribuer qu'à I'ani-mosité particulière d'une partie des dénonciateurs. Dans plusieurs de eés Chefs, on ne traite que d'intérêts ou de griefs privés; et ce qui ne paraîtra pas peu étoonant, plusieurs de ces griefs sont uniquement relatifs à des députés qui n'ont pas hésité à les signer, et à en faire des dénonciations présentées au nom de la colonie (a).
Ces onze chefs de création nouvelle, traitent de faits qu'on présumait pe pouvoir être que difficilement vérifiés èn France. A-t-on cru par cette raison qu'il y aurait peu d'inconvénient de les hasarder ici; que les réponses se feraient attendre, ét que la dénonciation y gagnerait d'autant?
Ces six faits relatés dans la délibération de l'assemblée du nord, en daté dû 24 janvier dernier, étalent au contraire de nature pouvoir être facilement écjaircis en France par des actes authentiques. La seule notoriété suffirait pour m'en disculper, et confondre aussitôt mes dénonciateurs. Est-ce par cette considération qu'ils se gardent bien de me les objecter en Europe, et de les revêtir de leurs treize signatures ? ÏJ est évident que ces six reproches ont été conçus en France, qu'on avait trouvé moyen de les faire éclore en Amérique, et qu'on a soin de m'imputer dans Chacune de ces déux parties du monde ce qui ne peut être vérifié que dans l'autre.
Certes, i[ est temps qu'Où nie fasse connaître mes vrais dénonciateurs, et que je sache jusqu'où peuvent aller leurs inculpations. Ma justification ne restera pas incomplète : je ne veux aucune grâce, l'homme pur n'en a pas besoin. Je soumets à l'Assemblée nationale les eix chefs qu'on s'est abstenu de signer, et je me dénonce moi-même.
Je ne rappellerai point ici ce qu'en répondant aux treize premiers chefë ' de dénonciatjon, j'ai ait sur la réunion des conseils ou sur l'uniformité du régime de la colonie. Quant au traitement des ministres du culte et à l'administration d'une
caisse soumise à la seule inspection du conseil supérieur de Saint-Domingue, je prie qu'on se reporte aux différents chapitres où j'ai dissipé ces reproches ; je ne m'occupe plus que de ceux qui sont énoncés dans la délibération de l'assemblée provinciale du nord, du 24 janvier dernier, qui n ont pas été adoptés et signés par mes dénonciateurs qui se disent néanmoins ses mandataires.
PRENUER REPRICHE.
1er fait. Je n'ai point, dit-on, envoyé à Saint-Domingue le
décret ae l Assemblée nationale, qui ordonne aux troupes de prêter le nouveau serment en
présence des officiers municipaux.
RÉPONSE.
Il était dans l'intention de l'Assemblée nationale que tous ses décrets ne fussent pas indistinctement envoyés aux colonies. Le memoire qui lui fut adressé par les ministres, le 27 octobre 1789. et qu'elle peut aisément se faire représenter, constate que je désirais avoir des éclaircissements sur ce point pour me conformer à ses principes.
L'Assemblée a délibéré depuis sur les colonies, et, par son décret du 8 mars, elle a annoncé qu'elle n'avait jamais entendu les comprendre dans la Constitution qu'elle a décrétée pour le royaume.
Qu'ai-je donc à me reprocher? Je me suis tenu dans une sage réserve. Je n'ai certainement envoyé aucun ordre qui pût, ni sur le serment des troupes, ni surtout autre point, arrêter l'exécu-cution des décrets de l'Assemblée. J'ai attendu, comme je ie devais, qu'elle décidât elle-même ce qu'elle jugerait convenir à des possessions si différentes de la métropole. A quels reproches ne me serais-je pas exposé de la part descolonseux-mêmes, si j'eusse pris sur moi de faire passer à Saint-Domingue plusieurs de ces décrets qu'elle a jugés n'être pas applicables aux colonies?
Le mémoire des ministres, le décret de l'Assemblée, tout me justifie auprès d'elle, et la colonie ne me croit répréhensible que parce qu'on a eu grand soin de lui cacher quels étaient les véritables devoirs du ministre.
On soustrait à sa connaissance ce qui concerne ses plus grands intérêts ; les lettres des particuliers, celles même que j'écris de la part du roi aux administrateurs, y sont interceptées. Je me suis plaint de cet abus et de plusieurs autres, dans ma dépêche en date du 10 avril, adressée à U, le comte de Peypier. Je demande qu'on donne une grande attention à cette pièce importante (1) et qui est une sorte d'appel à la vérité.
Le reproche qu'on m'a fait dans la partie du nord ne peut donc tomber sur moi, et u ne s'adresse véritablement qu'à ceux qui ont empêché la vérité de s'y faire connaître.
DEUXIÈME REPROCHE.
2e fait. — îai fait les plus grands efforts pour arrêter
l'admission des députés de Saint-Domingue à l'Assemblée nationale.
RÉPONSE.
On a pu inspirer cette idée à ceux qui habitent
à dix-huit cents lieues de la métropole; mais ce chef de reproche est un de ceux que nos adversaires se sont prudemment abstenus d'adopter et de revêtir de leurs signatures, parce qu'il aurait difficilement été admis par l'Assemblée nationale. Qui mieux qu'elle peut savoir si j'ai fait près de ses membres aucune démarche pous empêcher l'admission des députés de Saint-Domingue? Je supplée au silence des représentants de la partie du nord; je présente à l'Assemblée nationale un chef de dénonciation, sur lequel, sans autre examen, elle peut à l'instant même prononcer.
Les députés de Saint-Domingue se disaient fondes de pouvoirs et légitimement élus. Le roi et son conseil ont cru ne devoir pas préjuger une question douteuse, et sur laquelle il n'appartenait qu'à l'Assemblée nationale de statuer; ils n'ont jamais fait connaître leur opinion. Pourquoi veut-on interpréter leur silence? Pourquoi cher-che-t-on àfaire suspecter les motifs les pluspurs? La conduite du gouvernement a eu pour objet de donner une juste marque de déférence à l'Assemblée nationale, et de réserver tous ses droits ; elle prouve de plus la sollicitude scrupuleuse et paternelle de Sa Majesté, pour les intérêts de la colonie.
IIIe REPROCHE
3e fait. — J'ai favorisé et je favorise encore les gens de
couleur.
RÉPONSE.
La haine est ingénieuse et vient d'inventer un moyen nouveau pour me nuire au delà des mers.
On a recours à l'artifice pour exciter l'indignation de la colonie, contre un ministre qui en aété le gouverneur. La mémoire de son administration l'y protégeait, et il n'était pas facile de l'inculper près d'elle avec succès. On a tenté, mais inutilement, de le rendre par un seul mot odieux à la contrée dont il avait bien mérité, et de faire ajouter foi à tout ce que la calomnie tâcherait
désormais d'y répandre contre lui.....Ilprotège,
a-t-on dit, les gens de couleur (a).
Quelle est cette prétendue faveur que je leur accorde?
Est-ce en France qu'elle s'est manifestée, comme on veut le persuader aux colons qui résident à Saint-Domingue ?
En ce cas, je somme mes dénonciateurs d'en administrer des preuves à l'Assemblée nationale, et de remplir à cet égard le vœu de leurs commettants. ,
Dira-t-on réciproquement à Paris, que c'est en Amérique que je protège les hommes de couleur libres?
J'invoque la colonie ; elle m'a vu juste tandis que je la gouvernais : j'ai acquis alors le droit de demander qu'elle le soit aujourd'hui envers moi.
QUATRIÈME REPROCHE .
4e fait. — J'ai refusé de m'opposer à rembarquement d'écrits et
d'estampes destinés à faire naître les plus grands désordres dans la colonie, courir des
risques presque certains à la sûreté individuelle de tous ses habitants.
RÉPONSE.
Je connais les funestes effets d'écrits et d'estampes incendiaires; mais comment, dans les circonstances présentes, empêcher qu'il n'en soit envoyé dans les colonies?
Mes dénonciateurs se sontdiscrètement abstenus d'appuyer en France ce reproche, car on y sait que je n'ai aucun moyen de police et de surveillance; je ne songe pas même à arrêter les écrits qu'on distribue contre moi (a) ; je n'ignore cependant pas qu'ils s'envoient et que les signes les plus respectables ont servi de passeports à la calomnie.
Pourquoi ceux qui m'ont accusé auprès de la colonie, de ne point mettre d'opposition à l'envoi des écrits et estampes qui peuvent justement l'alarmer, lui ont-ils laissé ignorer ce que je viens d'exposer, et se sont-ils plu à me faire imputer par elle des abus que je ne puis empêcher ?
CINQUIÈME REPROCHE.
5e fait. — J'ai refusé de donner des ordres pour faire arrêter les sieurs M... et G... accusés de s'être embarqués avec des millions de fusils pour tenter une insurrection dans la colonie.
RÉPONSE.
Rendre compte de ce qui s'est passé, c'est écarter un reproche que je n'ai certainement pas mérité.
MM. les députés de Saint-Domingue m'écrivirent le 4 août 1789, et m'envoyèrent un mémoire en forme de dénonciation, signé de M... l'un d'eux; ils demandaient que je prévinsse un envoi d'armes destinées pour Saint-Domingue. On me donnait le signalement de deux hommes; on m'indiquait leurs noms; ou accusait un club considérable de Paris de desseins coupables, et déjà, disait-on, mis en partie à exécution : on demandait enfin qu'aucun esclave ou homme de couleur, alors en France, ne pût repasser dans la colonie.
Je ne publierai point la dénonciation, pour ne pas faire soupçonner injustement un grand nombre de citoyens qu'on accusait de projets dont il n'existait aucune trace. J'ajouterai seulement que les connaissances
qui étaient particulières à plus d'un membre du conseil, influèrent sur la résolution qu'on y prit.
Les mêmes faits avaient été dénoncés, onze ou douze jours auparavant, à un autre ministre et à moi, par un particulier qui mettait un grand prix à la révélation d'un complot imaginaire et que tout a démenti depuis.
Quelques recherches qu'on ait fait faire alors dans nos ports, où, disait-on, les armes qu'on devait embarquer étaient rassemblées, on n'a pu y en découvrir. L'existence des deux individus dont on donnait le signalement est restée même très douteuse ; les noms qu'on leur attribuait convenaient à tant de personnes, qu'ils n'en désignaient aucune; en un mot, nul indice n'a confirmé depuis un rapport que des vues d'intérêt personnel paraissaient dès lors avoir suggéré. On présuma que ce même particulier voyant que les ministres, au lieu d'ajouter foi à la fable qu'il leur avait racontée, prenaient des informations, espéra qu'on la croirait ailleurs sans examen, qu'il alla jeter à dessein des craintes, et donna lieu à la dénonciation qui me fut envoyée par MM. les députés de Saint-Domingue. . Quoi qu'il en soit, le couseil du roi assemblé le 5 août, pensa que sur des allégations aussi peu vraisemblables, on ne devait point autoriser des actes illégaux ; mais je ne négligeai aucune des précautions que la prudence exige en pareil cas. Je fis part de la décision à MM. les députés de Saint-Djmingue, par une lettre datée du 7 août 1789. Le même jour j'écrivis à M. le comte de Peynier, et en iui envoyant la dénonciation, je lui marquais que l'objet était d'une si grande importance, qu'il méritait toute son attention, toute sa surveillance (1). Je l'engageais à prendre toutes les mesures possibles pour prévenir et déconcerter jusqu'à la moindre tentative de soulèvement.
Peut-on blâmer cette conduite? n'était-il pas plus sage d'observer en silence et de prendre secrètement des précautions, que d'inspirer des alarmes mal fondées à tous les habitants de Saint-Domingue, et de causer un mal réel par le seul effroi d'une insurrection imaginaire?
SIXIÈME REPROCHE.
6e fait.—Les colons qui s'assemblent à l'hôtel de Massiac,
m'ont donné un mode de convocation d'assemblée générale de la colonie.
RÉPONSE.
On a tenté de persuader à l'assemblée de la partie du nord, que j'étais l'instigateur de celles que tiennent à Pans plusieurs de MM. les colons qui y résident. On a ajouté que je les avais excités à traverser les desgeins de MM. les députés de la colonie.
Ce fait absurde est de la même nature que les cinq autres, facile à détruire à Paris, mais susceptible d'avoir été cru à Saint-Domingue.
Je n'ai eu de correspondance avec MM. les colons réunis à Paris, que relativement à une seule affaire; mais comme ils ont été consultés alors par le conseil du roi, conjointement avec MM. ies députés de Saint-Domingue, et qu'ils ont été du même avis qu'eux, il me paraît in-
croyable qu'on ait persuadé à Saint-Domingue qu'ils les avaient traversés dans leurs projets.
J'entrerai à cet égard dans quelques détail*,.
Il avait été arrêté en 1788, au Conseil d'État, qu'il se tiendrait en octobre 1789, àSaint-Domin-gue, une assemblée coloniale. On se proposait de connaître le vœu de cette colonie, de savoir si elle désirait envoyer ,des représentants à une convocation future des États généraux.
Cette assemblée aurait eu lieu ; on l'aurait chargée de proposer au roi et à l'Assemblée nationale, la nouvelle Constitution que la colonie aurait cru lui convenir, si ies députés de Saint-Domingue eux-mêmes ne s'y étaient opposés par la lettre qu'ils m'écrivirent le 29 juillet 1789.
Ils changèrent cependant d'avis à quelques égards, et ma réponse en date du 11 août, prouve qu'avant que leur demande fût portée au conseil, ils ta) m'avaient témoigné désirer que le roi ne décidât rien sans retour.
MM. les députés extraordinaires des places maritimes, apprenant qu'on sollicitait la convocation d'une assemblée coloniale à Saint-Domingue, m'écrivirent ies 18 et 26 août, et présentèrent diverses observations relatives aux intérêts du commerce national.
Je leur mandai que cette assemblée coloniale devait être convoquée dans un mode purement électif, qu'elle ne serait que consultative, que le roi lui donnerait seulement le droit de proposer à Sa Majesté et à l'Assemblée nationale, ce qu'elle croirait convenable à l'intérêt de la colonie, soit relativement à son régime intérieur, soit relativement à ses rapports avec la métropole. J'ajoutai que les avantages ou les inconvénients qui pouvaient résulter d'une telle assemblée, paraissaient ne concerner en aucune manière les places de commerce.
On lit cependant lecture des lettres qu'ils m'avaient écrites aux deux Conseils d'Étatdu25 et du 27 septembre, où la demande d'une assemblée coloniale, la nature des pouvoirs à lui donner et le mode de sa convocation furent fort discutés.
Mais, dès le 30 août, presque tous les propriétaires d'habitations à Saint-Domingue, qui résidaient ou se trouvaient à Paris, se réunirent et adressèrent une lettre au roi.
Elle était revêtue de beaucoup de signatures.
Je fis mon rapport le même jour au conseil
d'Etat. 06 considéra cjUe le rùt dé désirant que donner à l'assemblée demandée, le mode dé convocation et d'organisation qui coflviendrait le mieux et serait le plus agréable â là colonie, il était naturel et avantageux, pour lé Connaître, d'entetidfe Un grànd nombre de propriétaires.
Sa Majesté ordonna donc qu'il se tiendrait chei M. le garde des sceaux, le 1er septembre, un comité où tous les ministres assisteraient. Je fus changé d'iUViter messieurs lés députés dè Sàint-DOmingue â S7 tfouver, et Messieurs les colOùs réunis a j erivoyer des commissaires. .Plusieurs aVis sur le mode de convocation et d'Organisation furent ouverts et discutés dans' cette conférence ; àuCuû ne fût unanimenient adopté, mais OU convint quë messieurs lès ColonS et messieurs les députés traiteraient dè nouveau ehsèiùble lés flfêmés objets, et que lorsqu'ils Seraient d'àccord sur tous les points, ils m'enverraient leur vceu commun.
Je reçtrêên effet, ïeS 16 et 18 Septembre, de messieurs les colons ét de Messieurs les député^, deux projets de règlement parfaitement semblables. J'en rendis compte,comme je l'ai annoncé, aux déùi CoùsèilS d'Etat des 25 et Tl septembre où cette question fut fort agitée. Lé roi décida que leS administrateurs convoqueraient une assemblée c'oïo'ùiâïéilé projet d'ordonnance qûllé devaient rendre â cet effet fut arrêté. On fixa les poUVôîrs dè' éètte assemblée, d'après ce qUi avait été mandé à Messieurs les députés de Sàint-Domingue, le 11 août, ét â ceui des Villes maritimes de commerce, le 19 du même mois. Quant au fùôdè aè Convocation, d'éiéctfOn, d'orgànîsà-tion, on se coû'foruïà scrupuleusement à ce qui avait été proposé Tés 16 et 18 septembre, tant par MéssîéUrS les députés (a) de Saint-Domingue, que par Messieurs les colons réunis.
Je n|ài point correspondu sur d'autres objets avec lés propriétaires, d'habitations qui se sont assemblés alors à Paris. Je ne conçois pas qu'on lésaitaCc'ùsésà Saiôt-DOmingue d'avoir entretenu avec moi des liaisons nuisibles aux intérêts dé leurs concitoyens* Ils m'ont paru au contraire, (dàùs la seule affairé que /aie traitée avec eux, ef dont ie Vféus dé parler), discuter àvéc la plus grande loyauté, et chercher en bons citoyens ce qui pourrait contribuer à la tranquillité et à là prospérité dé la Colonie.
fài pàrcOûru tous les chéfs' de dénonciation portés eontre moi ; je n'en ai éludé aucun ; j'ai fait ressortir ceux qu'on semblait vouloir taire : la vérité à présidé à ma défense 'y je là remets au tribunal à qui je raî promise. Ma confiance en sa justice me laisse dans la plus parfaite sécurité. Gouverneur de Saint-Domingue, j'ai désiré
faire prospérer là colonie. Ministre, je n'ai jamais abUsé de l'autorité qui m'était coûfiée. Je xié pouvais Servir mon roi, qU'en méritant bien de rtia patrie1 : je me livre à là Cénsirfè comme administrateur et comme citoyen. Lés dénonciations d'effrayent point l'homme qui toute sa vie a marché d'un pas ferme dans le sentier de l'honneur.
Paris, ce
Signé : La Luzerne.
PIÈGES JUSfÏFlGATÏVES
des faits énoncés dans le mémoire de m. le comte de la luzerne, ministre et secrétaire d'Etat de la marine.
N0 t.
ORDONNANCE de Messieurs les ADMINISTRATEURS.
Extrait des registres du conseil supérieur de Saint-Domingue.
Marie-Charles, marquis Du Ghilleau, maréchal des camps et armées du roi, commandeur de l'Ordre royal et militaire de Saint-Louis, gouver-neur-lieutenant-général des îles françaises de l'Amérique sous-le-Vent, et inspecteur général de troupes^ artillerie, milices et fortifications ;
Et François Barbe de Marbois, conseiller du roi en ses conséils ei en son parlement jde Metz, intendant de justice, police, finances, de la guerre et de la marine desdites îles.
Divers imprimés ont été .répandus avec profusion et publiés éomme l'ouvrage d'une commission chargée par là colonie de .solliciter l'admission de ses députés aux Etats généraux ; l'assurance avec laquelle ces écrits ont exprimé,, comme le vœu public, des opinions individuelles sur des. questions du plus Vaste intérêt, a d'abord donné lieu aux habitants eux-mêmes de douter si de pareils ppuyoirs n'étaient pas émanés de quelques uns d'en tre eux, et si l'on n'en avait pas. fait usage pour induire en erreur des personnes recommandables? par leur ran£ et leurs lumières; mais bientôt on a fait circuler clandestinement un mémoire,- pour lequel on sollicité de toutes parts des signatures, comme pour couvrir, par cette opération tardive,: l'irrégularité des actes émanés de la prétendue commission. Nous avons su que plusieurs habitants avaient donné leurs signatures librement ét volontairement, que d'autres l'avaient accordée à des prières et des éolfîéitàtions, ét eiffia $U'ûu très gtéùd hotobre àvàient réftïjê dé Signer. PlûSfèurs de ces derniers sêsofri eùx-ttêmes àdre^ës à noùs, poift UOÙS éxprîctfeMà ^rpfïôe'qûe léuf Càosàiènît cés mouvemerits, ê't rio us fri'Vîtér à ïéur Mre connaître la volonté de Sa Majesté. Une réquêté reVêtÛé d'un grand nombre dé signàturés, notts est pàr-Vénue :' les habitants y fortifient dés Vœux poûr que le ealrhe dôtit la colonie jouît, n'è soit point troublé; ils té&fôî^néùt leurs alarmes sur les tnaux auxquels étie êeraitési posée, « s'il pouvait dépendrê uuû nombre d'individus qùelconq'ue, d'àdréSsér à deux nfrilie lieues déS représentations â Sa Majesté, a'tf boni dès Colôhs ; dè leur supposer des VUéS, des désirs qu'ils n'ont pà's manifestés; de solliciter pour eux de prétendus avantages, auxquels leur éloignement et la différence de régime leur interdit d'aspirer* et qui pourraient même leur devenir funestes ; de s'adresser ensuite
à des avocats, pour en obtenir Que consultation sur une question purement politique, et qui n'est pas de leur ressort ; d'influer, par une voie aussi irréguliêre, sur l'opinion publique, et de mettre, pour ainsi dire, le sort d'une immense colonie à la discrétion de quatre jurisconsultes qui ne la connaissent pas, et qui n'ont pas même pris soin de s'informer si ceux qui leur demandaient une décision, avaient mission, caractère et pouvoir pour agir au nom des vingt-cinq mille citoyens libres qui composent cette colonie. >»
D'un autre côté, la chambre d'agriculture du Gap a arrêté des représentations au ministre pour demander que la colonie soit autorisée à envoyer des députés aux Etats généraux ; elle nous a depuis, et ensuite d'un autre arrêté en date du 5 de ce mois, fait une adresse, afin qu'il nous plût de donner sur-le-champ les ordres nécessaires dans toutes les paroisses de la colonie, pour qu'il fût incessamment et au même jour, tenu des assemblées, à l'effet, s'il était trouvé convenable, de nommer des commissaires-électeurs, lesquels Seraient autorisés et tenus de se trouver à d'autres assemblées qui Seraient pareillement indiquées à bref délai, pour y porter le vœu de leurs paroisses.
Les expressions de ces arrêtés et requêtes, et de nombre de lettres qui nous ont été adressées, nous ont suffisamment prouvé combien les habitants de la colonie étaient partagés dans leurs sentiments sur la question importante de la représentation aux Etats généraux du royaume. Nous avons dû prévenir les suites de cette diversité d'avis -f mais nous avons pensé en même temps que cette question ne dëvait point être déterminée par notre opinion particulière, et que si, d'un côté, nous avions les plus puissants motifs de désirer que notre conduite? comme administrateurs, fût examinéepar Sa Majesté environnée de ses Etats généraux ; si nous devions le lui demander, ainsi que nous le faisons, comme ia récompense la plus honorable de nos travaux, comme une justice, et en même temps comme une grâce distinguée} d'un autre côté, une partie nombreuse de ia colonie pensait que la représentation des colons aux Etats généraux devait faire la matière de l'examen le plus réfléchi, et pour nous servir des expressions d'une des requêtes qui nous ont été adressées, que cette question devait être jugée par Sa Majesté "elle-même, tenant les grandes assises de son royaume, et que si elle était décidée pour l'affirmative,» la durée de l'assemblée, ou les ajournements, pourraient présenter un moyen de faire jouir la colonie des avantages de l'admission.
Dans ces circonstances, nous avons dû chercher en point d'appui que ne pouvaient nous offrir les opinions contradictoires et incertaines qui notts sont parvenues. Nous l'avons trouvé dans les instructions qui nous ont été données par Sa Majesté elle-même. C'est dans ce monument précieux de sa bonté, qu'à la suite des ordres les plus propres à manifester la sollicitude tendre et paternelle dont elle est animée pour ses sujets de Saint-Domingue, elle a dicté et signé de sa main les paroles sflivantes, qui deviendraient bientôt notre condamnation, si elles n'étaient pas la règle constante de nôtre conduite : Si la distance des lieuck, si la nature dés chcfseS exigent que les pôuvoirs des sieurs marquis Du Chilleau et de Marbois soient étendus, c'est un dépôt sdcrê, confié à leur prudence, ét dont le plus legef abus serait un délit. Vn principe qu'ils rie doivent jamais oublier, c'est que-lé gouvernement doit être modéré,
sage et bienfaisant, mais sage avec fermeté; que l'autorité est établie pôur le bonheur de tous et non pour la satisfaction dé ceux qui en sont dépositaires, et que c'est surtout aux colonies qu'il est vrai dé dire qu'elle n'est jamais plus 'puissante que quand elle est chérie etrespectée. Signé : Louis ; et plus bas: La Luzerne.
Que ces expressions touchantes de la volonté du souverain ne cessent jamais d'être notre loi! A ces causes, en conséquence des pouvoirs à nous confiés, nous avons ordonné et ordonnons ce qui suit :
Art. Ie»* Attendu que les intentions de Sa Majesté, relativement, soit à l'admission des députés des colonies aux Etats généraux du royaame, soit à la forme dans laquelle il conviendrait de recueillir les vœux et sentiments des colons sur cet objet important, ne nous sont point encore connues, et qu'il peut néanmoins être utile qu'elle soit instruite des désirs et des espérances de la majorité desdits colons, nous les autorisons et nous les invitons même à nous exposer leurs demandes par lettres ou par requêtes qui nous seront adressées dés différents lieux de la colonie, sans qu'elles puissent cependant être signées par plus de cinq personnes, faute de quoi elles seront rejetées comme nulles.
Art. 2. Lesdites lettres ou requêtes contiendront en fin de chacune d'icelles, les demandes ou les sentiments de ceux qui les auront signées, soit pour l'admission, soit pour la non-admission, soit enfin pour s'en rapporter à Sa Majesté, et la supplier ae faire connaître sa volonté. Chaque signature sera sûivie de la mention de ïâ paroisse, du domicile, de l'habitation, du génré de culture, ou de îâ profession de celui qui aura signé, à faute de quoi Sa signature ne serâ comptée ; il sera ensuite formé des états sommaires de toutes les signatares suivant fos trois classes indiquées au commencement du présént article, et il sera loisible à tous les habitants de consulter lesdits états, ainsi que fes pièces à l'appui, â l'effet dè' quoi, le tout, dans le mois de janvieï, séra par nous envoyé aux secrétariats des chambres d'â-gricultufe, pour y deûïeû'rer en dépôt : et if sera dans ledit mois statué par nous ce qu'au: cas appartiendra.
Art. 3. Les lettres et reqùêtes qiïî vous ont été adressées jusqu'à ce, jour, touchant l'admission des députés de la colonie aux Etats généraux, nie seront point comprises dans lesdits états sommaires; mais Ceux qui les ont signées pourront nous én fâirè parvenil1 de nouvelles. JjéclâroOS nuls et de nul effet toutes requêtes, mémoires ou écrits quelconques, qui auraient pu être où seraient clandestinement présentés aux habitants, pour être par eux signés, et né seront comptées les signatures obtenue^ sur lesdits écrits, mais seront considérées comme surprises; èt en conséquence tenues pour non-avenues.
Art. 4. Défendons, conformément aux lois et règlements de Sa Majesté, toute assemblée illicite, sous peine d'être, ceux qui y assisteront, poursuivis suivant la rigueur des ordonnances.
Prions MM. les Officiers du conseil supérieur de Saint-Domingue, d'enregistreif la présente ordonnance, et mandons à ceux des juridictions de tenir ia main à son exécution.
Sera la présente enregistrée au greffé dé l'intendance.
Donnée au Port-au-Prince, sous le sceau de nos armes, et le contreseing de nos secrétaires, le Vingt-Six du mois de décembre mil sept cent quatre-vingt-huit. Signé: Du Cfiîllteâû et ae Mar-
bois. Et plus bas, par M. le général, signé : Bonhomme; par M. l'intendant, signé: Marchant.
Enregistré au greffe de l'intendance des îles françaises de l'Amérique sous-le-Vent, le vingt-sept décembre mit sept cent quatre-vingt-huit. Signé: Sentout, greffier en chef.
Enregistrée a été la présente ordonnance au greffe du conseil supérieur de Saint-Domingue, ouï et ce requérant le. procureur général du roi, pour être exécutée selon la forme et teneur, imprimée, lue, publiée et affichée partout où besoin sera, et copies collation nées d'icelle envoyées dans les sénéchaussées du ressort, pour y être pareillement lues, publiées et registrées, avec injonction aux substituts dudit procureur générai du roi de tenir la main à son exécution et d'en certifier la cour au mois, au désir de l'arrêt de ce jour.
Donné au Port-au-Prince, en conseil, le vingt-neuf décembre mil sept cent quatre-vingt-huit.
Signé: Duvernon, greffier-commissaire; collationné, Signé : Dubeuf, greffier-commissaire.
N° II.
Copie d'une lettre imprimée des administrateurs à tous les officiers civils, militaires et d'administration.
Port-au-Prince, le 31 décembre 1788.
Nous présumons, Monsieur, que vous avez eu connaissance de divers écrits relatifs à l'admission ou à la non-ad mission des représentants de la colonie aux Etats généraux. Ils ont donné lieu à plusieurs requêtes et mémoires, où les colons se sont exprimés diversement, suivant leurs dispositions et leurs opinions particulières. Les uns nous ont demandé d'assembler la colonie, et de donner à cette assemblée une Constitution dont ils nous ont eux-mêmes proposé le plan et les détails. Les autres ont observé que notre autorité ne s'étendait pas jusqu'à l'exercice de cet acte, le plus important de la puissance souveraine; que d'ailleurs on ne pouvait, en vertu du vœu d'une partie des colons, dont la proportion au tout est inconnue, convoquer une assemblée, où les uns se rendraient parce qu'elle serait la suite de leur demande, et dont les autres s'abstiendraient, parce qu'ils la regarderaient comme illégale, et qu'ainsi elle ne pourrait offrir dans ses résultats que les vœux de ceux qui l'auraient demandée." Dans ces circonstances, nous avons jugé à propos de rendre l'ordonnance dont nous joignons ici un exemplaire. NOus n'avons pas voulu y exprimer notre sentiment particulier sur cette importante question. Nous avons pensé qu'en attendant les ordres de S. M. que nous avons déjà sollicités, nous devions nous borner à recevoir les demandes des habitants, et que notre autorité ne devait être mise en action que pour parvenir à connaître leur vœu libre et patriotique. C'est dans cette vue que nous vous
S rions de vouloir bien vous abstenir, comme of-
cier de Sa Majesté, de tout ce qui paraîtrait tendre à influer sur les opinions. Nous désirons cependant que, comme habitant propriétaire, si vous l'êtes, vous vouliez bien nous faire connaître votre sentiment, dans la forme indiquée par votre ordonnance.
Les adresses, requêtes et lettres qui nous sont parvenues concourent généralement à demander célérité. Nous pensons nous-mêmes qu'il convient
d'user de toute celle que les conjonctures permettent. Nous vous prions de faire connaître aux habitants que nous désirons qu'ils nous fassent parvenir leurs lettres ou requêtes aussitôt qu'il leur sera possible. Nous avons aussi ordonné quê tous ceux qui signeront feront mention des noms de leurs paroisses, domiciles, habitations, professions, etc. Cette précaution est indispensable pour prévenir l'abus des signatures qui pourraient être données par des personnes qui n'ont pas droit de voter dans cette circonstance.
Nous avons l'honneur, d'être avec un parfait attachement, Monsieur, vos très humbles et très obéissants serviteurs. Signé : Du Chilleau et de Marbois.
Cette lettre imprimée du gouvernement général et de l'intendant à tous les officiers civils, militaires et d'administration en leur envoyant l'ordonnance du 26 décembre 1788, m'a été adressée de Saint-Domingue.
La Luzerne.
N° III.
ordonnance concernant la communication ouverte pour les voitures par les quartiers des Gonaïves, de Plaisance et du Limbé et un établissement de voitures de poste pour les voyageurs.
Du
Extrait des registres du conseil supérieur de Saint-Domingue.
Marie-Charles, marquis Du Chilleau, maréchal des camps et armées du roi, commandeur de l'ordre royal et militaire de Saint-Louis, gouverneur-lieutenant-général des îles françaises de l'Amérique sous-le-Vent, et inspecteur général des troupes, artillerie, milices et fortifications ;
Et François Barbé de Marbois, conseiller du roi en ses conseils et en son parlement de Metz, intendant de justice, . police, finances, de la guerre et de la marine des dites îles.
Depuis longtemps la colonie désirait une communication pour les voitures entre le Gap et toutes les parties qui sont au sud de celte grande ville. Des défilés souvent impraticables, des dangers multipliés rebutaient les voyageurs ; et plusieurs, forcés par la nécessité de leurs affaires, n'évitaient les périls d'un voyage par terre qu'en s'exposant à ceux de la mer. L'administration, longtemps arrêtée par des obstacles en apparence insurmontables, a enfin recueilli des notions plus certaines, et sur le rapport qui en a été fait à Sa Majesté, elle a ordonné que la communication serait ouverte à ses frais. Cette grande entreprise, après un an et demi de travaux, touche à sa fin. Des pentes égales et faciles ont pris la place, ou des précipices, ou des rochers; elles parcourent les sinuosités des montagnes, et franchissent les abîmes des plus profondes ravines. Déjà plusieurs habitants ont vu, s'élever par ces travaux, la và-leur de leurs propriétés ; ils profitent du chemin royal pour l'exportation de leurs denrées, et pour faire apporter dans leurs habitations tout ce dont elles ont besoin. Il reste encore à faciliter la correspondance de l'administration et des habitants à assurer aux voyageurs des moyens peu dispendieux de se transporter d'une extrémité de la colonie à l'autre quand leurs affaires l'exigent, et enfin à soulager les colons eux-mêmes, pour lesquels l'affluence des voyageurs souvent
inconnus, deviendrait une surchage et finirait par détruire1'hospiràlité qui est une des vertus particulières aux habitants de Saint-Domingue. Les établissements à former pour cet effet doivent être régis par règles fixes dont ni le public, ni l'entrepreneur ne puissent s'écarter. A ces causes et en vertu des pouvoirs à nous donnés, nous avons ordonné et ordonnons ce qui suit:
Art. 1er. Il sera établi à compter du 16 août prochain, des carrioles solidement faites, montées sur deux roues, et attelées de trois chevaux ou plus s'il est nécessaire pour transporter les lettres ou paquets ordinaires de la poste, aux jours et heures indiquées par le règlement du 8 juillet 1783. Lesdites carrioles pourront aussi transporter deux voyageurs et leurs valises ou portemanteaux, du poids de quinze livres, du Port-au-Prince au Gap et'Iieux qui sont sur la route du Port-au-Prince à Léogane, et en retour desdits lieux au Port-au-Prince.
Art. 2. Le prix sera pour chaque voyageur et sa valise du poids de quinze livres :
Savoir :
Du Port-au-Prince au Gap..........396 1.
Du Port-au-Prince à Saint-Marc . . 198
Du Port-au-Prince à Léogane ... 66
Et dans le cas où les voyageurs conviendraient de s'arrêter à des lieux intermédiaires, le prix de chaque place sera réglé à raison de huit livres cinq sous par lieue.
Dans le cas où, par la suite, l'entrepreneur voudrait établir une carriole du Port-au-Prince au Petit-Goave, le prix de chaque place sera de396 livres.
Le prix des places desdits lieux au Port-au-Prince sera le même.
Art. 3. Dans le cas oùil y aurait possibilité d'arranger une place derrière la carriole pour le transport d'un ou de deux valets, le prix sera pour chaque valet, pour le voyage, d'un sixième du prix qui sera payé par le maître.
Art. 4. Le voyageur qui voudra se rendre directement du Port-au-Prince au Cap, et réciproquement, sera inscrit et préféré à celui qui ne voudra se rendre qu'à Saint-Marc, et la préférence sera de la même manière, toujours accordée à celui qui voudra se rendre au lieu le plus éloigné.
Art. 5. Les voyageurs se feront inscrire sur le registre qui sera tenu à cet effet aux bureaux des postes du Port-au-Prince, de Saint-Marc, du Gap et de Léogane; ils s'assureront ainsi de leurs places ; ils payeront en même temps moitié du prix, dont il leur sera donné reçu, contenant en outre le jour et l'heure du départ, et ils payeront l'autre moitié au moment du départ. Ceux qui, après avoir retenu une place, ne se présenteront point à l'heure fixée, perdront la somme qu'ils auront payée.
Art. 6. Les voyageurs, de quelque qualité et condition qu'ils soient ne pourront, sous aucun prétexte, arrêter ni retarder la course, et dans le cas où ils prétendraient le faire, autorisons le postillon à lairê route, et à se rendre à l'heure accoutumée à la direction prochaine, et le prix payé par le voyageur sera acquis à la ferme, sans qu'il puisse répéter aucune diminution : il sera néanmoins, sur la déclaration du postillon, dressé, par le plus prochain directeur, procès-verbal sommaire de l'absence du voyageur, et de l'endroit^ où il aura quitté la voiture.
Art 7. Les entrepreneurs de courses seront tenus d'avoir, à la distance au plus de cinq lieues, des relais en bon état, et toujours prêts à faire route aux heures indiquées pour le passage à faire des courriers.
Art. 8. Tous les postillons attachés au service des postes et desdiles voitures, porteront une veste uniforme de drap bleu, à parements et revers rouges, et auront une plaque aux armes du roi, attachée à l'avant-bras gauche.
Art. 9. Les directeurs, commis, entrepreneurs de courses et leurs employés,, continueront de jouir de tous les privilèges à eux accordés par les règlements concernant tés postes de la colonie, et seront sous la protection immédiate de nous et denosreprésentantsdanschaque quartier, lesquels veilleront à ce que les postillons n'éprouvent aucun mauvais traitement de la part des voyageurs.
Art. 10. Si quelque voyageur voulait, pour la sûreté de sa personne ou de ses effets, se faire escorter par la maréchaussée, il en fera la demande au commandant ou major pour le roi, dans le quartier, ou à l'officier qui le représentera. 11 sera loisible audit officier de l'accorder, bien entendu que ladite escorte ne retardera aucunement le départ du courrier, à l'heure indiquée; et sera le prix de ladite escorte payé d'avance au taux de l'ordonnance, et ainsi qu'il sera arrêté par l'officier qui l'aura commandée.
Art. 11. Si les voyageurs voulaient porter avec eux, outre leur valise du poids de quinze livres, des paquets de papier, d'étoffes, de toile, ou des espèces d'or et d'argent, dont ils auraient chargé le registre de la poste, ils en payeront 'e port suivant la taxe du règlement, en outre du prix de leur place ci-dessus fixé, et iesdits paquets extraordinaires ne pourront, dans tous les cas, peser ensemble plus de quinze livres pour un seul des deux voyageurs.
Art. 12. S'il arrivait que les mauvais temps, les débordements des rivières et autres accidents ne permissent pas à la carriole de passer, l'admi nistrateur des postes prendra ses mesures pour que les dépêches parviennènt, comme ci-devant, par des animaux de charge, et fera en sorte que ia correspondance n'éprouve jamais de retard. Dans le cas même où quelque force majeure ou accident empêcherait la carriole de faire route, il serait fait au voyageur une diminution 3ur le prix de sa place proportionnée au chemin qui resterait à faire pour arriver à sa destination.
Art. 13. Seront, les entrepreneurs des courses dénoncés à nous et à nos représentants, dans les cas d'inexécution de leur traité avec l'administration des postes, lorsqu'ils exigeront une prompte décision, sauf à être reqvoyés devant les juges, pour être poursuivis/suiVant l'exigence des cas, pour les dommages causés par leurs employés, du fait desquels ils demeureront civilement garants et responsables. L'administrateur desdites postes sera également poursuivi, par les mêmes voies, dans le cas où il ne remplirait pas ses obligations envers Iesdits entrepreneurs.
Sera la présente enregistrée au greffe de l'intendance. Prions Messieurs les officiers du conseil supérieur de Saint-Domingue de la faire enregistrer en leur greffe, et mandons à ceux des juridictions de tenir la main à son exécution.
Dounée au Port-au-Prince, sous le sceau de nos armes, et le contreseing de nos secrétaires, le 28 mai 1789. Signé : Du Ghilleau, de Marbois.
Par M. (e gouverneur général, signé ; Bonhomme. Par M. l'intendant, signé : Simon.
Enregistrée au greffe de l'intendance des îles françaises de l'Amérique sous-rlerVent, au Port-au-Prince, le premier juin 1789. Signé t Sentout.
Registrée & été la présente ordonnance au greffe du conseil supérieur de 'Saint-Domingue, ouï et ce requérant le prpeureur générai dû roi, pour être exécutée selon sa forme et teneur; imprimée, publié? et affichée partout où besoin
sera, et copies collationnées d'icplle envoyées dans les sénéchaussées du ressort, pour y être pareillement lues, publiées, registrées et affichées. Enjoint aux substitut? dudif procureur géqéral d'y tenir la main, e! d'en eerUfieî; la cour au mois.
Donpé au Port-au-Prince, en çoqsfiil, le premier juin 1789. Signé : de Marhois et Fougerop. Çol-lationné, Bonvallet.
AVIS ADMINISTRA TION.
AVIS D'ADMINISTRATION.
Le règlement de MM. de Goutard et de Marbois, et du tribunal-terrier du Ç décembre 1785, a eu pour objet d'obvier par la publicité aux abus auxquels pouvaient donner lieu les poursuites qui se font pour parvenir à la réunion des terrains, souvent sans que lès propriétaires en aient connaissance. Pour remplir, de la manière la plus complète, les" vœux de ce règlement, il convient (Je publier les tableaux de toutes les réunions poursuivies depuis qu'jl a été rendu jpsgu'au premipr janvier 1789, et même celui des réunions poursuivies en 1785. Ces tableau^ sont certifiés du greffier, et |1 a reçu ordre de donner tous les éclaircissements qui pourraient lui être demandés à ce sujet, et de ae refuser la communication d?aucuns registres, actes ou pièces.
Les noms imprimés dans la dernière colonne en caractères italiques sont ceux des personnes auxquelles l'administration a concédé des terrains réunis, quoiqu'elles ne fussent ni poursuivants ni ancieps concessionnaires. Tous les autres ont été conservés ou rpndus aux anciens concessionnaires, oq accordés aux poursuivants.
ETAT
des réunions poursuivies à Saint-Domingue, et sur lesquelles est intervenu jugement pendant les années 1785, 1786, 17§7 et 1788.
QUARTIERS où sont situés les
TERRAIN S
poursuivis
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NOMS des premiers
CONCESSIONNAIRES.
ANNÉE 1785.
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MM. Constant.
Fourcaud et Cartau. De Roynes.
Cousin. V? Destrée. Richard. Lavardin.
In. Franç. Toussin.
Inconnus.
Inconnus.
Dame Dorlie et D11»
Gaillard. Minejirs Jfonrcajjd. Bernon. "
Denis Landais.
fionin.
MiUot.
Inconnus.
Raymond Dias.
Fou^'érôh.
Couder.
Bpileau.
Berger.
Lës habitants de ri vière du Boiicassin, La Motte.
Dumireau et peboju-
~'siac.
Mënny.
Dupin et Pruilbn. Inconnus.
Françoise Blanchard, Martin Duhyg. Longpré, Veuve LefeJbvre. Veuve Cha^seriau. Cadeto. Latoumel. Barand.
NQMS des
POURSUIVANTS.
. NOMS des nouveaux
CONCESSIONNAIRES .
Ml|f.
Moudion c)e Baupré, Vilmain.
Derai, Marporèlps et
Martin.' ' Huïin.
Martip Delebrun. Àugér. Caillau. Spuchejt.
Delamotte de Borgard.
Fouchy.
Delon.
CJieyaly.
OiivierToupletry.
Bacon.
Labadie.
Duperier. Sejournet. Frère Débonnaire. Dame Veilon! * Lijzian. ' Alabrée. Dupin. Debaiiyernet.
Fronty. Dngy.
Delincourt et Boubée.
Mûron.
Delincourt.
Labruyère. Cadon. Jonca. 'Longuet. Dupont Dubreull. Dumarais delaVallette Menard. Duclos.
Le poùrsuivant. Fourcaud.
Les enfants 4e M* de
Boy nés. ' Conixin'. ' Le pOùraiivant.
Le poursuivant.
Le poursuivant. Truitié de Vaucrey. Le poursuivant.
Pecalbert Fran. Grey et Lalande de Grey Longuet de Montplai-sir.
Pecalbert et Nicolas YrïgnètT: -
Le poursuivant. B acquêt. La'poursuivante. Le poursuivant. Lë poursuivant.
Le poursuivant. Frqntin et Gimbal.
Les poursuivants. Paouilhac et. Sentout. La Motte du Thiers et les sîèirs et de-moiselle Galanp. Lé poursuivant. ' Id.
De ,Ronseray.
Le poursuivant.
Id. De Boyrie. Gensac.
QUARTIERS où sont situés les TERRAINS poursuivis en réunion. NATURE de l'immeuble CONCLUSIONS DU PROCUREUR DU ROI. DATES DES JUGEMENTS DÉFINITIFS. RÉUNIONS PRONONCÉES. DÉBOUTÉS, rendus où conservés aux PROPRIÉTAIRES NOMS des premiers CONCESSIONNAIRES. NOMS des POURSUIVANTS.
MM. MM.
Port-au-Prince. Hat. et cor. Pour. 9 juill. Réuni. Perre. Cauvin.
Id. Culture. Id. Id. Id. Veuve Steinder. Milia.rd Delatour.
Id. Emplacem. Id. 16 juin. Id. Rendu. Sanitte Bataille. Pilliard.
Jérémie........ Culture. Id. Id. Id. Inconnus. La nommée Leveraux.
Port-au-Prince. Hat. et cor. Id. 9 sept. Id. Denis. Fleury.
Petit-Goave.... Culture. Id. 16 sept. Débouté Colas du Boos. Gourdet.
Saint-Marc..... Id. Id. 29 oct. Id. Savarin. Lavaine.
Id. Hat. et cor. Id. Id. Id. Rouanais. Joly de Wernay.
Jérémie........ Id. Id. Id. Id. Inconnus. Le Roux.
Port-au-Prince. Emplacem. Id. 18 nov. Id. Boulet. Jamet Labarte.
Id. Id. Id. Id. Id. Rendu. Bauduy. Pierre-Paul dit Du-
I a nommée Basile. pont.
Saint-Marc..... Culture. Id. Id. Id. Ledran..
Saint-Louis.... Id. Id. Id. Id. Id. Délavai. Robert.
Saint-Marc..... Id. Id. Id. Id. Muset. Luc Bernard.
Jérémie........ Hat. et cor. Id. 23 nov. Id. D11® de Francheville. Pinaqui.
Port-au-Prince. Id. Id. Id. Id. Les héritiers Futaine. Dalmais.
Id Culture. Id. Id. Id. Sigogne. Turlex.
Jérémie....... Hat. et cor. Id. Id. Id. Guibert fils. Bardoux Dubillon.
Port-au-Prince. Emplacem. Id. Id- Id. Héritiers Albert. Louvel.
Id. Hat- et cor. Conire Id. Débouté Id. Leriche. Gardey.
Les Cayes . ,. Emplacem. Pour. Id. Id. Id. Moulinier. Bleck.
Foi t-Dauphin. . Culture. Id. Id. Id. Id. Mousignat. AVnrlock.
Id Id. Id. Id. Id. Charles Avon. Gérard aîné.
Saint-Marc,.. Emplacem. Id. 2 déc. Id. La nommée Virmon- Debourcel, en sa qua-
tois. lité.
Culture. Contre Id. Id. L'abbé Leclair. Piveteau.
Jérémie........ Id. Pour. Id. Id. Inconnus. Bavard.
Saint-Marc,. . Id. Id. 6 déc. Id. Charles Rouanais. La feu.
Id...... Id. Id. Id. Id. Savarin. Desportes.
Port-au-Prince. Hat. et cor. Pour. Id. Id. Rivoire. Dubois.
Id. Id. Contre Id. Id. Le nommé Garnier. Jeanne Lahut.
Jérémie........ Id. Id. Id. Id. Desquirols de laNoze Le Duc.
Port-au-Prince. Culture. Pour. Id. Id. Marquis de Sabran. Caineau.
Id. Id. Id. Id. Id. Vaubadon. Severac.
Id. Id. Contre Id. Id. Soisson. Edmond Cavalier.
Les Cayes...... Emplacem. Id. Id. Id. Héritiers Guerpin. Guerpin.
Id. .... Id. Id. Id. Id. Héritiers Floch. Salabery.
Fort-Dauphin... Id. Id. Id. Id. Allard. Gassan.
Jérémie........ Cul. 2 terr. Id. 16 déc. Id. Dousset et Bernard. Veyrier.
Port-au-Prince. Culture. Id. Id. Id. Wingan. Davaux.
Jérémie........ Id. Id. Id. Id. Inconnus. Chamoulaneau.
Id......... Id. Id. Id. Id. Id. Lambert.
NOMS des nouveaux concessionnaires.
MM. Le poursuivant. Peraereau jeune Sanitte Bataille. Raymond Martin. Le poursuivant.
Le poursuivant. Chevalier de Cusson. La C"e de Sédière. Le poursuivant. Bauduy.
Le poursuivant. Délavai. Le poursuivant. Fadeville. De Lacroix. Robert. Chev. de Si-Georges. Godin de Fillettes.
Le poursuivant.
Id. Riboux.
Le poursuivant. Id. Id.
Broua, Mul. lib.
Chev. delà Cardonie î/lenard. Peraube.
Le poursuivant. Id. Id.
Veyrier, Chambellan Le poursuivant. Captat.
Le poursuivant.
aux
Nous, soussigné, greffier du tribunal d'administration, certifions que l'état ci-dessus est exact et conforme ,x registres du greffe, et qu'il contient le détail de toutes les réunions poursuivies pendant l'année 1785.
Au Port-au-Prince, le 14 avril 1789.
Signé: Sentout. .....
ANNEE 1786.
MM. MM.
Saint-Louis.... Hat. et cor. Contre 14 janv. Rendu. D'Armagnac. Fadéville.
Jéremie........ Culture. Pour. 18 fév. Inconnu. Brullé.
Port-au-Prince. Emplacem. Id. Id. Barbier. Teissier, M. L.
Jérémie........ Hat. et cor. Id. Id. Inconnus. Berteau fils.
Saint-Marc..... Culture. Id. Id. Crube, M. L. Brisson.
Hat. et cor. Id. 10 avril. Réuni. Chevremont. Barbé.
Port-au-Prince. Culture. Id. Id. Id. Guenette. Mercerou.
Jérémie........ Hat. et cor. Id. Id. Id. Inconnus. D"* Grille.
Id......... Id. Id. Id. Id. Labadie. Lascaris de Jauna
Jacmel......... Culture. Id. Id. d. Laterrade. Dame Campagnol.
Port-au-Prince. Id. Contre Id. Débouté. Gateau, N. L. Rouzier.
Jérémie........ Id. Id. 3 juill. Id. Veuve Plinque. Capet.
Petit-Goave.... Hat. et cor. Pour. Id. Id. Rendu. Rigaud. Denau, Borie, etc.
Port-au-Prince. 5 emplace- Id. 6 oct. Id. Duliepvre et autres. Mozard.
ments. J
MM
Le poursuivant. Id. Id. Idv
Loppes jeune et D11* Loppes, dame Par deau. Roberjot Lartigue. La poursuivante. A concéder. La poursuivante.
de Ronseray, Dillon, L'Estrade-Delatre et le poursuivant 2 pour la maréchaussée; 1 à M. Laeaze de Sarta,l à M. le chevalier de Bour-nonville et 1 au poursuivant.
09 tZ) M
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QUARTIERS © H •M O et Cfi
où sont situés NATURE 55 ta Se O bî ï « « 2 — * 3 NOMS NOMS NOMS
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TERRAINS de sa » H H cc A. s S t" S ° -u O u S des premiers des des nouveaux
poursuivis w » SO _ ce
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en l'immeuble ug o O concessionnaires. poursuivants. corckssionnair is.
réunion. 9 « ut a a K & •W se 73 (3 4> t_
MM. MM. MM.
Port-au-Prince. Emplacem Pour. 20 oct. Réuni. Carré. Getin. Le poursuivant.
Id. Id. Id. Id. Id. Veuve Cataglone. Cariole. Réservé pour être
donné à la Providence, lorsque S. M. lui aura accordé
Desnier. des lettres patentes
Petit-Goave.... Culture Id. Id. Id. Poliard, M. L. De Laumoy.
Jérémie........ Id. Id. 4 nov. Id. Dame Dannoi. Dame Loppinot. La poursuivante.
Petit-Goave.... Hat. et cor. Id. 13 nov. Id. Rendu à la Dame Ballet. Paulnier jeune. Vicomtesse d'IIallet d'Haller.
famille. Girard.
Jérémie........ Id. Id. 27 déc. Id. Berrier. Viet.
Les Cayes...... Emplacem Culture. Id. Id. Id. Veuve Blech. Peyre. Le poursuivant.
Port-au-Prince. Id. Id. Id. Dame Blonard. Dussert. Id.
Petit-Goave.... Id. Id. Id. Id. Guillaume Viart. Martel. Id.
PoYt-au-Priuce. Id. ld. Id. Id. D11* Bonnard. Daché. Id.
Id. Hat. et cor. Id. Id. Id. Noailles. Duchatellier. Id.
Saint-Louis.... Id. Id. Id. Id. Mare. de la Gauteraye, Wante.
Nous, soussigné, greffier du tribunal d'administration, certifions que l'état ci-dessus est exact et conforme aux registres du greffe, et qu'il contient le détail de toutes les réunions poursuivies pendant Vannée 1786.
Au Port-au-Prince, le 14 avril 1789.
Signé : SentOdt.
ANNÉE 1787.
MM. MM.
Jérémie........ Culture. Pour. 12 fév. Réuni. Chauveaux. Lassalle.
Petit-Goave.... Emplacem. Id. Id. Id. Inconnus. Lamustière, etc.
Les Cayes..... Emplacem. Id. 26 fév.; Id. La vielle. Cupidon, N. L.
Petit-Goave.... Culture. Id. Id. Id. Lafllotie. Cascaux. .
Jérémie........ Id. Id. Id. Id. Philibert. Marchand.
Port-au-Prince. Id. Id. Id. Id. Joly et Prince. Baudin.
Jérémie.....!... Id. Id. b mars. Id. Dlle Fourcaud. Foucaud.
Id........ Hat. et cor. Id. Id. ld. Legrand et autres. Boisselot.
Les Cayes..... Emplacem. Id. Id. Id. Taverne. Domergue.
Jérémie........ Id. id. 19 mars. Id. Piffard. Veuve Augelot.
Port- au-Prince. Culture. Id. 24 avril. Id. Rendu. Challes. Menard.
Port-de-Paix... Id. Id. Id. Id. de Larochette. Gueydou.
Jérémie........ Hat. et cor. Id. Id. Id. Dame Joublot. Robert dé Malherbe.
Culture. Id. Id. Id. Soulard. Belune, Qne. L.
Id........ Hat. eleor. ld. Id. Id. Derenty. Decouagne.
Id........ Emplacem. Id.. 30 avril. Id. Lacoste. Dlle Goton S'-Louis.
Id........ Culture. Contre 14 mars. Débouté. Inconnus. Boucher.
Saint-Marc..... Id. Pour. 28 août. Par. Lavincendière. Decoutures.
Id. ..... Id. ld. Id. Id. rend. de Voofoin. Dodart.
Id. ., , Id. Id. Id. Id. Doiné. Choppin.
Petit-Goave,... Id. Id. Id. Id. Ramié. Barran.
Id..... Hat. et cor. ld. Id. Id. Goriolis. Pasquier.
Port-au-Prince. Id. Id. 31 août. Id. Planté. Louis.
Id. Emplacem. Id. Id. Id. Veuve Alexandre. Godin fils.
Id. Id. Id. Id. Id. Veuve Alexandre. Dattel.
Id. Hat. et cor. Id. Id.. Id. Dlle Solleillet. Simon Drouillet.
Jérémie.......; Culture. Id. 7 sept. • Id. Cicogne. Villarson.
Port-de-Paix... Id. Id. lu. Id. Lafond. Marsan.
Port-au-Prince. Id. Id. Id. Id. Louis. Guillaume et Carriés.
Jérémie ....... Hat. et cor. Id. ld. ld. J. B. Gérard. Gérard.
Saint-Louis.... Id. Id. 14 sept. Id. Michel. Dumoulin.
Port-au-Prince. Culture. Id. Id. id. Le roi. Gabarrocbe et Navare.
Jérémie........ Jd. Id. Id. Id. Nau. Desbordes.
Les Cayes..... id. Id. Id. Id. Maurepas. Mousnier frères.
Port-au-Prince. Id. ld. Id. Id. Ratreville. Ponci.
Fort-Dauphin... Id. Id. Id. Id. Duluc et Martin. Dame de Sparre.
Port-au-Prince. Emplacem. Id. 28 sept. Id. Deponthieu. Hervé.
Les Cayes..... Id. Contre Id. Débouté. Inconnus. Saint-Val.
Saint-Marc .,,, Id. Id. 5 oct. Id. Héritiers Rivière. Boissard.
Jacmel......... Hat. et cor. Pour. Id. Id. Rendu à Regnard. Tavel.
îa famille.
MM.
Le poursuivant. Delaf«nd et la fabrique du Petit-Goave. Le poursuivant. Id. Id. Id. Id. Id. Id.
La poursuivante. Héritiers Challes. Le poursuivant. Poursuivants, Bonhomme Borie et demoiselle Laumoy. La poursuivante. Bonhomme. La poursuivante.
Le poursuivant et
Hrs. Cebert. Le poursuivant. Id. Id. Id. Id. Id. Id. Id. Id. Id.
Les poursuivants. Le poursuivant. Id.
Les poursuivants. Le poursuivant. Les poursuivants. Le poursuivant. La poursuivante. Le poursuivant.
Constant et Regaard de Barentin.
QUARTIERS où sont srtûés les
T ERRA INS
poursuivis étl réunion.
Petit-Goavé, Saiût-Marb, . Saint-Louis.
Jérémie.....
Saint-Marè.....
Id. ......
PdVf-âu-PnnBé. Petit-Goav'e....
Id.....
Port-au-Prince.
Id.
Saint-Marc.... i.
Jérémie...... ..
Port-au-Princè. Id.
Petit-Goave.... Port-au-Prince.
Id.
Jérémie.......
Port-au-Prince
. Id. Saint-Marc.;;.
Jérémie.......
Port-au-Prince Id. Id.
Port-de-Paix.. Jactael.......;
Pott-de-PaiXit Saint-Marc., it Port-aU-Prince Port-de-Paix. i
Le Cap......ïl
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Port-de Paix v t Le Cap..... a Jérémie.... >.i
Port-de-Paix. Jacmel;.. .i. ; Saint-Marbi » i
Port-au-Pridce Saint-Louis...
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Les Cayes.....
Port-de-Paix.. Idt
Le Cap..'.i..
NATURE de
l'imtoeublè
Culture. Id. Ëmplacem.
liât, et cor.
Clilture.
Id. Hat. et cor. Id. Id. Ëmplacem.
Hat. et cor.
Culture.
Id. Ëmplacem. Culture.
Id. Hat. et cor.
Culture. Id. Id. Id. H. Id. Id. Id. Id. Id. Id. Id. Ëmplacem. Culture, îd. Id. Id. Id. Id. Hat. et cor.
Ëmplacem. ■ Culture Hat. etcbr.
..Culture. Hat1, et cor.
id. Ëmplacem. Hat. et cor. Culture. Id.
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Id. Id. Id. Id. Id. Id.
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Id. Id, Id. Id. Id; Id. Id. Id. Id. Id. Idt Id. Id. Id. Id. Id. Id. Pour. Id.. Id.
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Id. Id. Id. Id. Id. 7 déc.
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Rendu. Id.
Débouté,
Rendu; Id.
Débouté.
Débouté.
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Rendu;
Id. Id. Débouté;
NOMS
dés premiers
CONCESSIONNAIRES.
MM. Aune Dubignon. Décharron, Héritiers CaSsignol.
Guivolets et Mors.
Lamartinièrei
Lbiinier frères.
Môféau.
Gulllaud'eau.
Durègé.
Léfrane.
D^oy.
Vërat. Petit.
V'éuve Alexandré. Doucet et Latramblaî. Christianne. Thomassin.
Leroi.
Raynaud.
Barré de Renti.
Téderne.
Bizotton.
Capdeville.
LeréboUr.
Bernard.
Allémand.
Remis.
Thuret.
Lassalle.
Héritiers Rivière.
Hervé.
Titél.
Gâzac.
NOsués.
Faribaut.
Ballot.
Tliezau.
Gitard. Basque. VëUve Doucét.
Bremond. Dame Balet.
Motet.
Guérrepid.
Giroust.
Girbust.
Sdffre.
NOMS éfes
POlïlkStWlNTfc.
MM. OÈthmàs. Cwfcmel. Fereirei
Montagnac.
Duchèné.
Tlittrih.
Lenain.
Nadan-
Cdi-pentier.
Duhimain.
Langevin. Bourdon. PréVost.
Faugèré et Moireau. Mouillé.
Vitri et Cussac.
Servin. Elie.
Marie Catherine.
Lemaire.
Bèrgètt.
Charpentier.
Mathieu.
Larrotjue.
Flenois;
Morentille.
Gatechair.
Maillhol.
Dame Bocozel.
Lafoiid.
Buon.
Cortegér.
Sicârd.
Ourst .
MaUni de Jatighù Vidal.
Prudhoinme.
Gault.
Bresson.
Bournonville. Leissenne.
Daumont..
Clémendoti
Larrieu.
Laporte.
Grosliet.
NOMS des Q'oUteatit
CONCESSIONNAIRES.
MM. Lë polirsuiVant; Id.
Pour la maréchaus-séè.
Le poursuivant et
Hésse. Màngeot: Le poursuivait. Id;
Dame Labat. Le poursuivant. Lefranc de Sïiiit-
ulde. PoutsttiVint ét Dfe'
massieh 'u LepourshiVant; Dezersts. . Le pourstilVâiit. Les poursuivants.
Dufour, Mahé, HlïÀllle'h et les |»buï§ttiVàHtSj Le poursuivant. Id.
La poursuivante. Le poursuivant. Birotton de la Mette Capdeville. Le poursuivant. Id. Id. Id. Idi Id.
Id. ..Ids Desquiron-Le poursuivant. Id. Id.
tfeyère et le poursuivant.
D tt four et veute
Doucet. Le poursuivant. Vicomtesse d'Hallet
de Haller. . Le poursuivant i Id..
Héritiers Girottst. Héritiers Giroust.
Nous, soussigné, greffier du tribuiial d'administration, certifions que l'état ci-dessus est èxact et informé aux registres du greffe, et qu'il contient le dêtàll de toutes les iréuniohs poursuivies pendant Vannée i787.
Au Port-au-Prince, le ià dvril 1789. Slgiïé: SE&Tou'h
ANNEE 1788.
Port-ku-frihiië. Cdlture. ^Ôiir.
rdf ld. Id.
i BaratfàïïëS . . Id. Id.
Le Ca$ Ëmplacem. Id.
Saint-Marc..... Culture. Id.
Pbfr-aii-^fiiléé. Hàt. et cor. Contre
iLe Cap ........ Culture. Id.
Jérémie........ Id. Pour.
lâ ,févr.
îf; îd. Id.
îd. Id. 20 févr.
Béuni. Id. Id. Id. Id.
Id.
Déboute Id.
MM.
Coiffé. Gollio. Laroche. Veuve Pompée. Cocquièife.
Barré. Inconnii. Régmond.
mM.
Philippe.
Bérard.
Salvandon.
Bureau.
Rinjgel.
fiastagnet.
Papin.
Turbé.
MM. Le poursuivàiit.
Id.
ia. ,
Le pou rsUi Vint Angomard.
Le poursuivant.
ët
QUARTIERS où sont situés les poursuivis ë£i réunion. NATURE de l'immeublé conclusions; DU PROCUREUR DU ROI. DATES DES JUGEMENTS DÉFINITIFS. RÉUNIONS PRONONCÉES. DÉBOUTÉS, rendus: ou conservés aux PHOPRliTÀIRES. NOMS des premiers CONCESSlOkNAihRS. noMs dés POURSUIVANTS. fidMâ dei nouveaux CORCESSIO^NAIRES.
Hat. et cor. mm. Mm. MM. _
Jéréinié........ Pour, 20 fèvf. Réuni. Rançon. Bardes. LaéOmbë fils, et de-
moiselle Jauvin,
M. Lacombe aux
droits du pour-
suivant, mort.
Petit-GoaVè ...i Id. contre 8 mars. Débouté. Désaignes. Decusson.
Port-au-Prince. Ëihplacem. Id. 7 avril. Id. Caradeux àtné. Dùéartry èt Colot.
Fort-Dauphin.. Culture. Pour. Id. Id. DUgué. Dejoie fils. Le poursuivant.
Port-àù-Princë. Id. Id. t4! Id. Retidù. Dupressoir. Brachét. Trigant.
Id. Hat. et cor. Id. ld: Id. de ValidirëUil. de KeHdgUèn; Cottinèâù et lés pro-
id. Culture. Id. 25 avril. Débouté. Duclâir. Douzarbrcs. priétaires.;
ta. Id. Id. ; ld. Id. SoufQon. Thomas. Lé poursuivant.
Id. Emplacem. Id. ; d. Id. Pygtiy. Dôuault. Id.
L'Ârcàhayé..... Id. Id. : d. Id. yictoire. Jànnet. Id.
Port- au-Prince. Culture. Id. : 1» ld. Id. ld. Blré. Berli. Id.
Pprt-dè-Pàix... Id. Contré Deré. Sàuvalle.
Jérémie...:.... H&t.etcor. Pour; S mai. Id. Hellein; Gharriter. Deichampt.
Saint-Marc f.... Id. Id. Id, Id. x Rendu; de woofouih. Dupitton. Le poursuivant; '
Port-au-Prince. Culture. Id. Id. Villeneuve. Sermensan. Le poursuivant
ld. Hat. et cor. Id. I? Id. Fleury. Trigaut. Id.
Id. Emplacem. Contre 4> Débouté. Caradeux aîné. Destimonville.
Petit-Goavé.... Hat. et cor, Id. d- Id. pameFondouzè. Boé.
Port-au-Prince. Cillture. Id. 10, dj il. Masseau. Cordelle.
Id. Emplacem, Pour. juin. Id. Amblard. balinais. Le poursuivant.
Les Cayes. Culture. Id. fdi Id. Lëscamôutièr. Dàndasm'tt.
Port-aji-Prince. Id. Id. Id, Id. Destrés. Lucinet.
Saint-Marc..... Id. Id. Id: 14- Mauger. Gamotis.
Port-au-Prince. Id. Contre Id. Id. Vaumelon. Lamarré.
Jcrémie........ Hat. et cor. Pour. ... Id , Id. Blanchet. Grélau frères.
Port-au-Prince. Culture. Id. 20 juin. Id. Elie. La Croix. Le poursuivant.
Id. Id. Id. W: Id. Daubusson. Dfbuillard: Poney.
Saint-Marc..... Êmplacem. Contre ld; Id: Conte. Gubriole.
Jérémie........ Hat. et cor. Id. Id: Id. Dubroca. Lamberck. Le poursuivant et
Id. Cappeau.
Port-au-Prince. Id. Id. Id. Noailles. Michaud. Le poursuivant et
Vaubandon.
Id. Culture. Id. Id. Id. Rendu. Cazeau. Doyen. Ra^nos, acquéreur.
Les Cayes.. .. Emplacem. Id. Id: Dèhojité. Abadit. . Desalsogne.
Petit-Goàvè.... Culturé. Id. ; d. Id. Rigand. L'dty.
Les Cëyéfc...... Emplacem. id. d. id. BardoU. Tttirac.
Le Cap........ Culture. Id. Id. Id. Id. Bigaud. Dubuis.
Id. Pour. 1er juil. Marie-Thérèse. Bonnel. Le poursuivant.
Id......... Hat. et cor. Id; ld. Id. Favre Baunoy. Loppinot. Le chevalier de Lop-
pinot, Loppinot de
Reauport, et Lop-
pinot de là Fré-
dillière.
Port-au-Prince. Culture. Id. Id. Id. Lafentan. Poinsinet. A concéder.
Petit-Goave____ Emplacem. Id. Id. Id. Boyer. Feneyrols. Le poursuivant.
Les Cayes..... Id; . Id. Id: Id: Horne. Brun. Id.
Id. , t Hat. et cor. Contre Id. Id. Rendu. Godère fils. Duvivier. Coustard.
Petit-Goàve.... Cultitre. Pour. Id. ADànd. Jean-Joseph. Sauvage.
Emplacem. Contre Id: Débouté. Comte dé Sédiêrë: DdpUii dé Vklbbis.
Hat. et cor. Polir. 19 juil. Id. Tartard: Boubée, neveux: Lé poursuivant.
Id. ... . Culture. Id. Id. Id. Sauvé. Tarjet, av • ld-« M
Id. , ... Id. jd. Id. Id. Rendu. Bizottort. Duvergèr. Bizotton de la Motte.
Rat. et cor. Id. Id. Id. Corneau ét Dubois. Dalbbût. bécùighè et Ht lard-
Saint-Marc..... Culture. Id. Id. Id. Bardet et autres. Ardouin. une •
Id. Id. Contre Id. Débouté. V® Feuvre. Rivalleau.
Id: fa. Id; Id. Marthe Dumairie. Dubuc. MM. èt D "a* de
Port-au-Prince.. Hat. et cor. Pour. 1er sent; Id: Beauvaist Parage.
Santo-Domingo.
Saint-Marc..... Culture. Id. d. Id. Boudet. Robin. Le poursuivant.
Jérémie........ Id. Id. ! d. Id. Ludrè. Crèst>y. Id.
Id. ........ Id. Idi idi Id. Lacombe. Perton. Id.
Id. Idi Id. Id. Lerant. Brizard Ducroc. Lacoste, lieutenant
Àubert. en preinier.
Jéifétiiié;...; Id; Id; id. J.â.f.d Nulle. Blarichet.
Petit-Goave.... Id. Contre Id. Débouté. Ransanne. Lajeunle.
Port au-Prince. Emplacem. Pour. Id, Id, ,ld. Guillaume. Lamothe. Le poursuivant.
Jacmel........ Hat. et cor. Contre Id. Marthe Mandat. Beaunier.
Id. Id. Id. Id. Berlie. Bdhvàlét.
Petit-Goâve...: Culture. Pour: Id: Id: Rendu. Claverie. Nombret. Clàtètié.
Jérémie....____ Hat. et cor. Contre Id. Débouté. Percin de la Coinche. Chabrier.
Jacmel......... CultUre, Pour. Id. Id. Seignette. Tuzçt. Le poursuivant.
Id.......... Hât ët cor. Id. 15 sept; Id. Rendu. Eulalie, dite Birdis. Brisard Ducroq. Eulalie Ràrdis.
Port-aU-PHnfce; Qultliret Contre Id. Débouté. Faure. Declusé.
Id. Id. Pour. Id. Id. Boiteau. Gilbert. Conig Hanoi
QUARTIERS où sent situés les
terrains
poursuivis
en réunion.
Port-au-Prince
Jacmel........
Port-an-Prince
Jacmel.....
Port-au-Prince. Petit-Goave... Saint-Marc
Saint-Marc.....
Jacmel.........
Pelit-Goave.... Port-au-Prince .
Jacmel........
Id. .........
Port-au-Prince.. Jérémie .......
Id. Id.
Port-au-Prince. Fort-Dauphin..
Jacmel........
Saint-Marc....
Le Cap........
Jacmel........
Id.........
Id.........
Id.........
Le Cap........
Port-au-Prince. Id.
Le Cap........
Jérémie...;...,
NATURE de
l'immeuble
Culture. Id. Id. Id. Id. Id. Id.
Id. Id. Id. Hat. et cor. Culture. Id. Id. Id.
Id. Id.
Id. Emplacem. Culture. Hat et cor.
Culture. Hat. et cor. Culture. Id. Id.
Id.
Id. Id. Id. Id.
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Contre Pour. Contre
Id. Pour. Id. Id.
Contre Pour. Id. Id. Id. Id. Id. Id.
Id. Id.
Id. Id. Id. Contre Id. Id. Ici. Pour. Gontre
Pour.
Id. Id.
Id. Id.
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15 sept. Id. Id. Id. Id. Id. 15 oct.
Id. Id. 14 nov. Id. Id. 2 déc. Id. Id.
Id. Id.
Id. Id. Id. Id. 8 déc. Id. Id. Id. Id.
Id.
Id. Id.
Id. Id.
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Réuni, Id. Id.
Id. Id. Id.
Id. Id. Id.
Id.
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Id. Id.
Id. Id. Id. Id.
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Id. Id.
Id. Id.
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Déboute.
Rendu.
Débouté. Rendu. Débouté. Id.
Rendu. Id.
Débouté. Id. Id. Id.
Id.
Rendu.
Id. Id.
NOMS des premiers
concessionnaires.
MM. Badau. Moulmain. Brémond.
Le Pont du Fortin.
Vérot.
Dugué.
Charpentier.
De Lonchamp. Limage. Dame Robert. Michel Honneur. Simonet. Joiivet. Livanols. Darmanac.
Dame Pineau. Vincent.
Namur.
Dubois.
Mathurin.
Régnier.
De la Chapelle.
Raudoin.
Corre.
Légal.
Demoiselle Thuret.
Roué aîné. Digneron.
Demoiselle Digneron.
Dabadie, L.M. Olivier Honnet.
NOMS des
poursuivants.
MM. Ville. Reaudoin. Badau. Galestrel. Lamarque. Manguillot. Bonhomme.
Reveilhac. De la Vilotte. Bourenne. Letripier, Mise L. Simonet. Couppé. Lattes. Béraud.
Worfoin. Masie-
Salaignac.
Bérard.
Leroi.
Brindeau.
Drouchet.
vignol.
Fontarive.
Olivier.
Flasseur.
Castera.
Toussaint. Valiée.
Désaa. Sarrasin.
NOMS des nouveaux
concessionnaires .
MM. Le poursuivant. Descar et Sigalon.
Le poursuivant. Manguillot.
Lefebvre, représentant l'ancien concessionnaire.
Sauvage.
Mineurs Robert.
La poursuivant*!.
La mineure Poujo.
Le poursuivant.
Les sieurs et demoiselles Belance, p. Woosoin.
Le poursuivant.
Id.
Id.
Le poursuivant.
Lagreulit frère, acquéreur.
Les enfants des sieurs et dame Digneron.
A concéder.
Le poursuivant.
Nous, soussigné, greffier du tribunal d'administration, certifions que l'état ci-dessus est exact et conforme aux registres du greffe, et qu'il contient le détail de toutes les réunions poursuivies pendant l'année 1788.
Au Port-au-Prince, le 14 avril 1789. Signé: Sentout.
No Y.
Règlement de MM. les administrateurs, concernant la manière de procéder sur les affaires dont la connaissance leur est réservée par l'article II de l'ordonnance du roi, du 21 janvier 1787, portant suppression du tribunal terrier.
César-Henri, comte de La Luzerne, lieutenant général des armées du roi, son gouverneur-lieutenant général des îles françaises de l'Amérique sous-le-Vent, et inspecteur général des troupes, artillerie, milices et fortifications desdites îles;
Et François Barbé de Marbois, conseiller du roi en ses conseils et en son parlement de Metz, intendant de justice, police, finances de la guerre et delà maison des dites îles.
Sa Majesté ayant, par son ordonnance du 21 du mois de janvier dernier, supprimé le tribunal terrier, elle nous a, en même temps, attribué la connaissance de toutes les demandes nées et à naître en réunion de terrain à son domaine, ainsi que de toutes les contestations relatives à
la distribution et à l'usage des eaux ; elle a auss i ordonné qu'il serait procédé sur lesdites matières, conformément à ce qui est prescrit par sa déclaration du 17 juillet 1743. Mais comme indépendamment des formes de procéder établies par ladite déclaration, le tribunal qui vient d'être supprimé en observait plusieurs, qui, sans être dispendieuses ou longues, avaient l'avantage d'offrir une plus grande sûreté pour les parties; nous avons jugé convenable d'en prescrire l'observation, ainsi que celles de quelques autres formalités essentielles dans les procédures en réunion.
A ces causes, jusqu'à ce qu'il en ait été autrement ordonné par Sa Majesté, nous avons provisoirement statué et ordonné, statuons et ordonnons ce qui suit:
Art. 1er. Toutes les demandes qui seront de nature à êtres
portées devant nous, seront formées par requêtes; et s'il s'agit d'obtenir la permission de
poursuivre un terrain en réunion, Je demandeur sera tenu de joindre à sa requête une
expédition en forme du titre de concession, dont il voudra poursuivre la réunion.
SECTION PREMIÈRE.
Réunions.
Art. 2. Surles requêtes des demandes en réunion, il sera par nous donné acte de^ia demande, et ordonné qu'elle sera poursuivie à la requête du procureur du roi ; les procureurs du roi, sur la simple remise qu'il leur sera faite d'une requête ainsi répondue, et sans qu'il soit besoin d'autre ordonnance de nous, poursuivront la réunion par devant les juges des lieux, que nous commettons par le présent règlement, à l'effet de faire faire par devant eux tous actes d'instruction quelconques.
Ne pourront néanmoins les procureurs du roi, commencer aucune procédure que dans le délai prescrit par l'article 3 du règlement du tribunal terrier, du 6 décembre 1785, concernant les réunions.
Art. 3. Cet appointement sera censé contenir permission tant au procureur du roi qu'au défendeur à la réunion, d'informer respectivement de l'établissement ou du non établissement du terrain dont il sera question ; et l'ancien concessionnaire ou ses ayants cause, ne seront assignés pour voir ordonner l'enquête.
Art. 4. Ne pourront les procureurs du roi, sous quelque prétexte que ce soit, se dispenser de faire faire enquête ou visite des lieux selon l'exigence des cas ; et ce quand même l'ancien concessionnaire ou ses ayants-cause avoueraient le défaut d'établissement sur le terrain poursuivi en réunion.
Art. 5. Enjoignons aux procureurs du roi de faire faire l'enquête ou la visite des lieux dans le délai de quinzaine, après l'expiration de celui d'un mois prescrit par l'article 3 du règlement du tribunal terrier, du 6 décembre 1785, concernant les réunions: et si le défendeur à la réunion veut faire faire enquête, il sera tenu de la faire dans la quinzaine, à compter du jour où il aura été assigné, pour être présent à la prestation du serment des témoins, que le procureur du roi voudra faire entendre; passé lequel délai, il ne sera plus reçu à faire faire enquête. Pourra néanmoins ledit délai de quinzaine être prorogé par nous, en connaissance de cause, sur la demande qui nous en sera faite par le défendeur à la réunion.
Art. 6. Lès procureurs du roi se conformeront entièrement pour les enquêtes, dans les affaires en réunion, aux formalités prescrites par le titre 22 de l'ordonnance de 1667 ; et notamment aux dispositions de l'article 27 du même titre; et dans le cas ou par l'omission de quelque formalité prescrite par l'ordonnance, l'enquête sera déclarée nuile, elle sera recommencée aux frais des dits procureurs du roi, si la nullité est de leur fait, ou aux frais du juge qui aura fait l'enquête, si 1a nullité est du fait au juge.
Art. 7. Si, après l'expiration des délais donnés par l'ordonnance de 1667, pour fournir reproches contre les témoins entendus, le défendeur à la réunionne demande pas copie de l'enquête, alors le procureur du roi prendra ses conclusions par écrit, elles fera signifier au défendeur à la réunion, lequel aura, pour y fournir réponse et prendre aussi ses conclusions, le délai de huitaine accordé dans les appointements à écrire et produire par l'article 12 du titre II de l'ordonnance de 1667.
Art. 8. Si le défenseur à la réunion, dans la huitaine après l'expiration des délais pour fournir reproches, demande copie de l'enquête, le procu-
reur du roi la lui fera signifier, et en même temps ses conclusions; et le défendeur aura en ce cas, comme dans celui qui est énoncé en l'article précédent, un dé'ai de huitaine pour répondre et prendre aussi ses conclusions.
Art. 9. Ledit délai de huitaine pour répondre aux conclusions du procureur du roi étant expiré, soit que le défendeur à la réunion ait répondu ou non, le procureur du roi remettra au greffe de la juridiction la procédure, et le greffier en fera alors un état sommaire, duquel il sera donné copie au défendeur à la réunion, avec sommation de produire sous trois jours.
Art. 10. Après l'expiration du dit délai de trois jours, le greffier de la juridiction, soit que le défendeur à la réunion ait produit ou non, enverra toutes les pièces produites en son greffe à celui de l'intendance, et il joindra à la procédure en réunion les trois affiches qui auront dû être déposées en son greffe par le demandeur en réunion.
Art. 11. Toute permission par nous accordée, de poursuivre un terrain en réunion, sera censée périmée dans trois mois, à compter de la date, s'il n'a été fait aucune poursuite par celui à qui elle aura été accordée ;, et toute autre personne pourra nous demander une nouvelle permission de poursuivre le même terrain en réunion, en rapportant préalablement un cërtificat du greffier de la juridiction, qu'il n'a été fait aucune poursuite dans le délai de trois mois, par celui qui la première permission aura été accordée.
SECTION SECONDE.
Contestations relatives à la distribution ou à
l'usage des eaux.
Art. 12. Dans toutes les demandes concernant la distribution ou l'usage des eaux, la requête du demandeur sera répondue par ces mots : Aetë de la demande, ce qui aura le même effet que peut avoir une sentence d'appointement dans les tribunaux ordinaires ; et sur ce simple acte de demande, la contestation sera censée renvoyée par devant les juges des lieux, que nous commettons par le présent règlement, à l'effet de faire tous actes d'instruction quelconques, de recevoir les demandes incidentes des parties, de rendre tous les jugements préparatoires, et de les faire exécuter nonobstant oppositions quelconques, sans néanmoins que l'exécution de leursdits jugements préparatoires puisse être opposée aux parties comme tin de non-recevoir, lorsqu'elles auront protesté ou fait leurs réserves en les exécutant.
Art. 13. Défendons aux parties de nous adresser leurs écrits de conclusions, de répliques et autres, qui doivent faire partie de leur production, sous la forme de requête, comme plusieurs particuliers faisaient ci-devant, pour obtenir de nous 1a permission de les faire signifier. Leur ordonnons de se faire signifier respectivement tous les écrits dont elles voudront faire usage dans chaque instance, et les juges des lieux n'auront aucun égard dans leurs avis aux écrits qui n'auraient pas été signifiés.
Art. 14. Les parties se conformeront pour les délais de produire aux dispositions de l'ordonnance de 1667; elles produiront toutes leurs pièces au greffe de la juridiction des lieux : et dans le mois après l'expiration des délais fcour produire, le procureur du roi donnera ses conclusions, et le juge des lieux, son avis sur les
pièces et procédures qui se trouveront produites ; lesdites conclusions et lesdits avis seront remis cachetés,àii greffe, ét le greffier lés ëriverrà avec les pî-odëdiîres aù greffe tté l'ititendatiCié.
Art. 15. Ohdonnons au surplus que les edits, déclarations ët règlements du roi, Conceftiânt tant les rétltiiôds que là distribution et. ruSagé dés eaiii, et notamment le règlement du tribunal térrier du 6 défcembré 1785,.çondèrnaht les réii-nions, seront exécutés sélon leur forme ët teneur dans todt ce à quoi il n'est fibitit dérogé par lës dispositions du présënt.
Sera le présent règlëméht éhrégistré au greffe de Tinteddaiicé, imprithê et copiés, dûineiit col-lationnées d'jcëltii, envoyées dans toutes lès jiiri-dictiohs'uë la fcoloriié pour idèlui f être enregistré ët afndhé â là diligèncë.dës procureurs aii roi, qui seront tëntis de veiller à son ëxécu-tion. %
Donné au Port-au-Pfince, àoùë lé sceaii dé nos àrmës, ët le contreseing de nos secrétaires, lë 10 iiovëmbre 1787.
Signé : La LuZéIinE; ët plué bas, par M. lé général Cappéau.
, Pareillemënt signé: De Marbois ; et plus bas, M. retendant Maté; et scellé dë .deux cachets en cire roùgë. Enregistrée au greffe de l'interi-dandë des îles françaises de 1 Amérique sous-lë-Vent, âu Port-àu-Princë, lë 4 décèmbré 1787.
Signé: SÊNTOUt.
N° VI.
ARRÊT DU CONSEIL D'ËTAÏ DU ROI CONCERNANT LES CONCESSIONS.
Extrait des rëgiUrëè du Cohkeil ïupérieut de Sairl t-DomingUe.
(Elirait des registres du conseil d'Etat.)
Le roi s'étant fait représenter eh, son conseil deux arrêts eh forme dë règlement, l'un dii conseil supérieur, du Cap, du 20juin 1776, l'autre du conseil supérieur de Saint-Ûomingue, du 19 novembre 178,7,. concernant les concëssioqs qui auraient été faites d un mèche terrain à différentes personnes : vu aussi la déclaration du roi, du 17 juillet 1743, sur le fait .desdites concessions, ensemble le formulaire ordinaire d ibelles, et M diverses lois qui peuvent y être relatives, ainsi que la lettre des administrateurs eh chef de Saint-Domingue, au secrétaire d'État, ayant le départément de là marine, et des colonies, ën date du 21 août dernier, pièces et réclamations jointes. Sa Majesté a reconnu qu'un zélé louable avait porté ies officiérs desdits ponseils supérieurs à statuer, chacun eh droit soi, et par forme de règlement, qudiqùë d'une manière entièrement contradicfoirë, sur là validité des titres d'une concëssion faite à différentes per-sonnés d'un mèmë terrain; mais elle n'a pu se dissimuler en même temps que ce3 deux tribunaux avaient également outrepassé lëhrs pouvoirs, en proriôriçont sur des objets dë législation et d'ordre public, siir lësquels il leur est interdit de faire dés rêglèménts ; qiië le conseil supériëur de Saint-Domingue n'avait pas le droit dë révénir sur un arrêt du conseil supérieur du Gap, auquel ii est substitué, pour ce qui composait l'aîicièn ressort de cë dernier, sous prétexte
d'opposition de la part du ministère public, à l'exécution dudit arrêt ; tandis que le procureur général avait été entendu hors d'icelui : considérant cependant qu'il importe à la tranquillité des cultivateurs de Saint-Domingue, de fixer le véritable sens de la déclaration du foi, du 17 juillet 1743, elle a jugé à propos d'expliquer ses intëntiôns relàtiVement aux concessions d'un même terrain, qui, par inadvertance^, auraient été ci-devant faites, ou lé seraient à l'avenir, à différentes personnes; à quoi voulaht pourvoir ; ouï le rapport et tout considéré : le roi étant ën son consei^, à cassé et annulé, càsse et annuelle, comme îricompéteinment rendus, lesdits arrêts, en forme de règlement, des conseils supérieurs du Cap ët de Saint-Domingue, des 20 juin 1787 ; fait défènsë audit conseil supérieur de Saint-Domingiië d'én rendré de semblables, et lui enjoint de se conformer à la disposition tant des| articles 45,.46 de l'ordonnance du roi, du premier février 1*766, que dë l'article 25 de l'ordonnance du 22 mai 1775, çoncernànt le gouvernement civil de la cdlonie; à peine, eii cas de contravention, 4e nullité et cassation : ordonne Sa Majesté que là déclaration du roi, du 17 juillet 1743, et routés autres, auxquelles il n'aurait pas été dérogé, touchant les concessions de terrains, ensemble les conditions ët pièces énoncées dans les titres mêmes desdites concessions, seront exécutées selon leur formé et teneur ; interprétant, en tarit que besoin serait, là disposition de. l'article 3,dé ladite déclaration dii roi, du 17 juillet 1743, ait et déclare qu'il h*y a lieu à la réunion au domaine en cas de non culture, dans les termës prescrits par les règlements, qu'autant quë la ^concession aurait été consommée, et là propriété transférée par iin arpentage fait sans opposition, lequel vaut prise de possession, conformément aux titres dé concession même ; et que daps le concours de deux concessionnaires d un même terràin, celui qui aura fait arpenter le premier, ou provoqué légalement l'arpentage, sera maintenu, quand même son titre serait d une date postérieure * au pré-judice du concessionnaire plus ancien qui sera déclaré déchu, faute de possession prisé, ou reprise, dans ies formes ae droit ; déroge à tous règlements où àrrêts à ce contraire, et ordonne que le présent arrêt sera enregistré ati greffe du conseil supérieur de Saint-Domingiië, lu, publié, imprimé et affiché partout où besdin sera dans ladite colonie. Enjoint aux goiiverpeuf général et intendant d'y tenir la main. Fait au conseil d'iitat du roj, Sa Majesté y étant, tenu à Versaillës, lé 31 janvier 1789.
Signé : La Luzerne.
Registré a été le présent arrêt du conseil d'État au greffe du consëil supérietir de Saint-Dominghe, ouï et cë rêquêrâht, lë prôbhrëhr gétiérâl du roi, pour être exééiitê selclfl ëà forme et teneur, imprimé, Iti, pliblié ët affiché partout oû besoin sera, et copie§ cOllationnéés d'icelui, envoyées dans les sénéëhàdsséës dii ressort, pour y être pareil le raëtît lues, pdbliéës, registréës ét affichées; enjoint aux substituts dtidit procutàhr gériëi-àl du roi d'y tenir 1U lliaih, ët d'ën déHifief la cohf ail mois;
Donné a(i PëM-âuiPrinbe, ën consëil, le 19 niai 1789:
Signé : ÈoNVALLET.
VIL
Aperçu dès subsistances existant dans là colonie â Pépô'ijUê dii 1" SéiôBfê 1789.
On est fondé à croire, d'après les ^perçus, fournis à l'administration, qu'à l'époque du 31 juillet, il restait des. subsistances en farine, pour plus d'un mois, ce qui est égal à une quantité dé..........;..................... 15.0Wbalrils
Les importations, pendant les mois suivants, sont comme ci-après :
i antit ( Farines françaises.:.....,;........ 4.201 barils. 1
| d» étrangères................ 17.691 j
çpntpmhrp 5 Fslrinei françaises..: î :. i......— 1.487 )
septembre. j do étrangères. ;.:;..;........ 17.910 {
Octobre, 2tJ premiers joùrs. Farines étrangères.................j...
Les consommations évaluées à 15.000 barils par mois, pendant deux mois et vingt jours s'élèvent à.............;....,.........................i.......;...
Reste à consommer une quantité de 23.871 barils
qui assurent la consommation pendant plus de six semaines. Les permissions délivrées en septembre {iôur l'importation des farines éttattgèresi portent l'introduction
à espérer en oetobre à.....i';.....:.;::.;:....;...........;................................................17.950
Celles délivrées pendant les vingt prërtiiérs jours d'octbbré; la portent 23.900
65.721 barils.
Vu et certifié par nous, intendant à Saint-Domingue, Port-au-Prince, le 22 octobré 1789.
signé : de Marbois.
VIII.
ÉTAT des navires partis des ports de France pour Saint-Domingue, et arrivés dans cette colonie depuis le 5 juillet jusqu'au 20 septembre 1789. Extrait des mouvements des ports, insérés dans les gazettes de là colonic.
N. B. — On n'a point fait mention des bâtiments négriers. MOUVEMENTS DES PORTS DE L'OUEST ET DU SUD.
NUMÉROS dis gazettes. NtlMS fiÉS BATlMfeNTS. JOUR du dèpaftt de France. LIEU du départ de France. JOUR de l'Arrivée. LIEU DE L'ARRIVÉE.
N« bé: N* 60. N° 62. N° 64. N* 66; • & 68. i N° 70. N° 7J. N" 74. Là dame tieliegbhdfe... . 1 La Sophie............... La. Bonnë-Réncontt'e...... L'Ad&thb......:.......... 1 L'Ami....fi.,...'. Le Maréchal aë Duras.... L'Arbonite............... Lë. Vigilant...........: :. La Jeune Amazone....... L'Éole................... La Suzette...:,:.:j;...... La Plaine du Fond....... Le Saint-Marc............. L'OptlmiSiiife.......:..... L'Aiihablè Lilly. i.. ; ; :.. ; La leunè Désirée........ Le Nëièr.............;.. L'Aglails................. La Mihértfe.............. Le Solitte...;l;:t...:;.;, 41 mai. 2 mai. \% mai. 20. mai. 20 mai. 17 iiiai. 17 mai. n 20 mai. 5 Mai. 10 mat. » 7 mai. 7 avril. » 8 mai 10 juin. 20 mai. 20 mai. 21 juin. 7 juillet. 13 juin. 4 juillet. 26 juin: 7 juillet. y> . Havre. Bordeaux: Id. • id. Nantes. Bordeaux. Id. Id. Nantes. Havre: Bordeaux. Marseille.., Dunkerque. Bbrdeaux. Id. Nantes. Havre. , Id. Marseille Bbrdeaux. Id. Id. Id. Id. Havre. Bordeaux: 6 juillet. Id. 8 juillet. Id. Id. Id. 6 juillet; 5 juillet. 6 juillet. 15 juillet: 33 juillet. 22 juillet. 18 juillet. 25 juillet. 28 juillet. 3 juillet 5 août. 7 juillet 10 août. Id. . 13 août. » 23 août. , 5) 22 août. ~4 jhillet. Port-la-Ptince. Id. Jd. Id. Id; Id. Jacmel. Saint-Marc, avoir touché ail Cap. Saint-Marc. Jafcmel, touché â la Martinique. Port-au-Prince. Saint~M?rc, avoir touché au Cap. St-Louis, avoir touché à Jacmel. JaCmel et Sâiht-Louis. St-Louis, touché à la Martinique. Saint-Marc, touché au Cap. Port-àu-Prince. Id. Id. touché au Cap. Port-au-Prince. Id. Id: Id. Saint-Louis. Id. Aux Cajes.
Total : Vingt six navires arrivés dans les ports de l'Ouest et du Sud, du 6 juillet au 20 septembre.
20.900 7.574
48.871
63.871 barils
NUMÉROS des
GAZETTES.
N° 44. N* 45. N° 50.
N» 51.
N° 52. N° 54. N° 55. N° 57,
N° 59.
N° 60. N° 61. N° 68.
NOMS DES BATIMENTS.
La Reine du Nord.
Le Grand-Duc de Toscane
Les Deux Amis..........
L'Aimable Magdeleine.....
L'Éclair .i...............
Les Quatres Frères.......
L'Actif...................
Le Destin................
La Fleur de Laurier......
La Bonne Mère...........
Le Pygmalion............
La Mere de Famille......
Le Comte de Valence....
L'Aimable Victoire .......
Le Triton.......,,».....,.
L'Espoir de la Mer.......
La Française désirée.....
j La Jeune Aline...........
j L'Autriche...............
I La Providence............
( Le Fidèle................
( Les Trois Amis..........
JOUR du
DÉPART
de France.
mars.
23 mai. 18 mai. 10 juin.
1 juin. 12 juin. 3 juin. 18 juin. 10 juin.
24 juin. 23 juin.
26 juin. 29 juin. 29 juin. 9 juillet.
27 juin. 4 juillet.
9 juillet. 20 juillet.
10 juillet. 25 juillet.
3 août.
LIEU du
départ
de France.
Saint-Malo.
Bordeaux. Marsejlle. Bordeaux. Marseille. Nantes. Dieppe. Marseille. Bordeaux. Marseille. Bordeaux.
Havre. Bordeaux. Id. Id.
Dunkerque. Bordeaux. Marseille. Id. Id. Id. Nantes.
Total 21 bâtiments arrivés dans lès ports du Nord.
26 — — de l'Ouest et du Sud.
JOUR de
l'arrivée.
7 juillet.
14 juillet; 14 juillet. 29 juillet. 31 juillet. 31 juillet. l«r août.
1er août. 2 août. 6 août. 12 août. 12 août. 14 août. 22 août. 24 août.
28 août.
29 août.
2 septembre. 2 septembre. 5 septembre. 18 septembre. 21 septembre.
LIEU DE L'ARRIVEE.
Cap. Il avait touché aux îles du
Vent. Cap. Id. Id. Id. Id. Id. Id. Id. Id. Id. Id. Id. Id. Id. Id. Id. Id. Id. Id. Id. Id.
Total général 47 bâtiments arrivés des ports de France de Saint-Domingue, depuis le 5 juillet jusqu'au 20 septembre 1789. Dans ce nombre ne sont point compris les navires négriers.
Vu et trouvé conforme aux mouvements des ports de Saint-Domingue, insérés dans les gazettes
de la colonie. A Paris, le 15 juin 1790.
La Luzerne.
N° IX.
Copie du mémoire présenté au roi par M. le comte de La Luzerne et approuvé par Sa Majesté le 7 mars 1788.
Plusieurs officiers généraux, soit de vos armées navales, soit de vos armées de terre, et même quelques brigadiers demandent à Votre Majesté la place de gouverneur générai de l'île de Saint-Domingue.
J'ai l'honneur d'en mettre la liste sous ses yeux.
M.....................................
M.......................................
M....... .................................
M.....................................:....
M. le marquis Du Chilleau, maréchal de camp.
M....................;.................... .
M...........-^Vïv:^;.... :....:... .......
M...........;...............................
M............;...... ................... ...
M........................................
M............................................
Deux brigadiers se sont aussi présentés.
M.....................................
M......................................
Parmi ces nombreux concurrents, je regarde M. le marquis Du Chilleau comme le plus digne
que Votre Majesté lui confie un emploi aussi important. Il a servi avec distinction aux îles du Vent pendant la dernière guerre, soit comme brigadier, soit comme maréchal de camp. Il y a été pendant quatre ans chargé du commandement de la Dominique, et on n'a pu qu'applaudir soit à son administration civile, soit aux mesures prises pour la défense de cette île nouvellement conq uise. C'est par ces motifs que je propose à Votre Majesté de lui donner le gouvernement général de Saint-Domingue..
Au bas est écrit de la main du roi : Bon.
Pour copie, La Luzerne.
• N° X.
Ordonnance concernant Vintroduction des farines étrangères dans, les ports d'entrepôts de la partie française de Vile Saint-Domingue. Du 27 mai 1789.
(Extrait des registres du conseil supérieur de Saint-Domingue).
L'ordonnance que nous avons rendue le 31 mars 1789, enregistrée au conseil supérieur de Saint-
Domingue le premier avril suivant, portant permission d'introduire des farines étrangères, introduction que nous avions ordonnée d'après les nouvelles alarmantes que nous avions reçues sur l'impossibilité qu'il fut fait de France les envois accoutumés de subsistances, d'après la destruction presque totale des productions du royaume, Occasionnée par un ni ver des plus rigoureux, et d'après les primes par lesquelles, Sa Majesté encourageait l'importation des farines dans le royaume, qui ne permettaient point de douter qu'elle n'eût voulu prévenir les calamités de la disette doiit.il était menacé, et qu'il ne fût impossible au commerce national de faire pour la colonie des chargements suffisants à ses besoins.
Cette ordonnance rendue sur lesjnaux que la situation de lamétropolédevait nous faire cfàindré, n'a pas entièrement rempli les vues dout; nous nous étions flattés. Il ne s'est introduit qu'une très petite quantité de farines, et le prix du pain n'a éprouvé qu'une diminution peu sensible, encore même ne, s'est-pllé fait sentir que dans les trois villes principales ; leurs points intermédiaires ayant été privés de ces secours, sont réduits à une détresse fâcheuse.
Ce défaut d'importation,:d'après les différents rapports des armateurs des bâtiments étrangers, provient de ce que ces mêmes bâtiments né peuvent se remplir par des denréès cplOniâïès de )a valeur dés farines qu'ils peuvent importer, et de ce régime prohibitif résultent deux effets absolument "contraires à la colonie i le premier,,jje la laisser dépourvue du principat objet, qui peut la faire subsister, et le second; de la priveraupeu de numéraire qu'elle peut, posséder ; les étrangers, ne pouvant pas former leur chargement en toute espèce de denrées, emportent en. argent une grande partie dës fariaes importées. •
Ces maux exigeant un remède prompt et efficace, une prorogation de délai à notre ordonnance du 31 mars et un échange en'denrées nous paraissant les mesures les plus propres pour réparer les inconvénients reconnus; à ces causes, et en vertu des pouvoirs à nous donnés, nous, général et intendant, avons ordonné et ordonnons ce qui suit:
Art. 1er. A compter du jour de l'enregistrement de la présente ordonnance; la permission d'importer des farines et du biscuit, accordée par l'ordonnance du 31 mars et dont le terme doit expier le 30 inclus de juin prochain, conti- ; nuera d'avoir lieu jusqu'au lar octobre Suivant j exclusivement.
Art. 2. Permettons aux armateurs, propriétaires et capitaines de navires étrangers de se charger en denrées de la colonie pour le montant seulement des farines qu'ils y importeront.
Art. 3.c Cette disposition de l'article 2, n'avant pas lieu par notre ordonnance;du 31 mars 1789, commencera à avoir son effet, relativement à j cette même ordonnance, de l'époque de l'enregistrement de la présente-
Art. 4. Les bâtiments étrangers seront assujettis au paiement des droits locaux, et*ils'payeront en outre le droit d'occident pour les denrées qu'ils exporteront, et tel que les bâtiments français le payent en France pour les denrées coloniales qu'ils y importent.
Art. 5. Les droits qui seront perçus en vertu de l'article 4 le seront provisoirement, èt jusqu'à ce qu'il en soit autrement ordonné par nous, par les receveurs des octrois, qui seront tenus de verser tous les mois les sommes qui en résulte-
ront entre les mains du receveur municipal de la colonie.
Art. 6. Les capitaines des bâtiments étrangers, aussitôt qu'ils seront mouillés dans un des ports d'amirautés, feront leur déclaration des farines dont ils seront chargés, premièrement aux greffes des amirautés, et ensuite chez nos représéntants ; et lors de leur départ desdits ports, iis feront pareillement une nouvelle déclaration des marchandises coloniales qu'ils exporteront, d'après lesquelles il sera ordonné des visites à bord desdits bâtiments, soit par les sièges d'amirauté, soit par nos représentants, afin de s'assurer de la fidélité de ces déclarations; et, dans le cas de contravention ou de fraude de la part desdits capitaines, les bâtiments séront dénoncés aux amirautés pour y être condamnés à la confiscation, ainsi que leurs cargaisons au profit de Sa Majesté.
Art. 7. Dans les lieux où il y . a des bureaux d'entrepôt établis, les capitaines seront assujettis à une troisième déclaration, et les commis de ces bureaux pourront faire à bord desdits bâtiments des visites et dès dénonciations, s'il y a lieu, ainsi qu'il est prescrit à l'article
Art. 8. Séront, au surplus, exécutées les dispositions de notre ordonnance, en date du 31 mars 1789,'en cè qui n'y est point dérogé par la pré-Sente; h'entèndons pareillement contrevenir à aucune des dispositions de celle eh date du 9 mai 1789, enregistrée au conseil supérieur de Saint-Domihghë'le 11 do même mois, qui sortiront leur plein et!entier effet, à' l'exception seulement de ce qui est prësdrit? par l'article 3 dé la présente.
Sera la! présenté ordonnance enregistrée au greffe dé l'intendance.
Prions messieurs les officiers du conseil supérieur de Saint-Domingue de la faire enregistrer en leur greffe, imprimer et afficher partout où besoin sera, et mandons à ceux des juridictions de leur ressort de tenir la mainà son exécution.
Donné au Port-au-Prince, sousle sceau de nos armes et le contreseing de notre secrétaire, le 27 mai 1789.
Signé : Du cffllleau.
Par M.j lë général, signé : Bonhomme.
Enregistrée au grelfè'de l'intendance des îles françaises de l'Amérique-sous ^ le-Vent, le 27 mai 1789.
Signé : Sentout.
Registrée a été la présente ordonnancé au greffe du conséil supérieur de Sai'nt-DOraiague, ce requérant ,lç procureur général du roi, pour êtré exécutée suivant sa forme et teneur, imprimée, publiée et affichée partout où besoin sera, et copies collationnées d'ocelle envoyées dans les sénéchaussées et amirautés de la colonie, pour y être pareillement registrées, lues, publiées et affichées. Enjoint aux substituts dudit procureur général d'y tenir la main et d'en certifier la co ur au mois.
Donné au Port-au-Prince, en conseil, le 29 mai 1789. Signé : Fougeron et de Lamahdèlle de Grandmaison.
Collationné : Bonvallet.
N° XL
Arrêt du conseil du roi, portant cassation d'une ordonnance de M. le marquis Du Chilleau, gouverneur, lieutenant général de Saint-Domingue,
du 27 mai derniçr, conçernqr\t l'introduction
des farines étrangères.
a 23 juillet 1769. des registres du conseil d'Etat.)
Le roi s'étant fait représenter, en sop cpnseil, une ordonnance rendue le 27 niai dernier, sous le nom des administrateurs de Saint-Domingue, signée seulement par Ip marquis Du Chilleau, gouverneur général, rggistree au conseil supérieur de la colppié, le ?9 du même mois, portant prorogation jusqu'au premier octpbre prqcf^in, de |a permission d'importer du biscuit et i|es farines étrangères, accordée par ^ne ordonnance antérieure du 31 mars, enregistrée audit conseil supérieur le premier avril; Sa Majesté aurait reconnu, qu'indépendamment de la prorogation du terme quo les circonstances pouvaient rendre nécessaires, ladite Qrdopnançe du 27 p^ai dernier contient la permission d'impprfeér ies fanpes et biscuits étrangers, dans tous les ports d'amirauté, et d'en exporter ies deprée^ coloniales pour la valeur desditeg farines et biscuits,'an préjtidipe des lois prohibitives et des dispositions, tant de l'arrêt du conseil du 3Q août 1784, que ge & dépêche du 13 novembre suivant, pa^ laquelle, de l'ordre de Sa Majesté, le secrétaire drJSt^ jde la marine avait adressé cirpulairement ledit arrêt aux administrateurs des colpaie§. A quoi voulant pourvoir : ouï le rapport ; ie rpi ètynt fa sôftfànr seil, a cassé et annulé ladite ordonnance du 27 mai dernier, en ce qu'elle auto^e l'jmpfirta-tion du biscuit et des farines étrangères pans tous ies ports d'amirauté de Sainj.-Dpmingqji, et qu'elle permet l'exportation a l'étranger des denrées coloniales, qui pourront être données en paiement. Ordonne Sa Majesté qn§ les dits cq-mestibles ne pourront être introduits? jusqu'au premier octobre prochain, par tous bàtimênfs français ou étrangers, que par trois PÂrfs trepôt, et qu'il ne pourra, àrcette occasion, être exporté à 1 étranger d'autres denrées et marchandises que celles mentionnées en l'article 3 de l'arrêt du conseil du 3Q ào%t 1784, lequel sera au surplus exécuté selon Sâ forme et teneur. Sera le présent arrêt enregistré au greffe dijj conseil supérieur de Saint-Domingue, lu, publié, imprimé et affiché partout où besoin sera.
Fait an conseil d'Etat du roi, Sa Majesté y étant, tenu à'ygwfc?» lé g *
Signé : Jjà. JLuzE^E .
WM-,
Copie de la lettre de MM, les députés de Styfap-
Domingue à M. le comte de La Lnzerue.
Monsieur le comte,
Vous nous avez demandé de ypug orienter par écrit les réclamation!. g^tà ii^MmjMFence que nous avons eu l'honneUf d'avoir avéc vous vendredi soir elles se réduisent aux points suivants :
1° Le rétablissement de M. le marquis Du Chilleau dans sa place de gouverneur de Saint-Domingue, suivant le vipn de ses habitants ;
2° Le rappel immédiat de l'intendant de Marbois, jugtément abhorré de Saint-Domingue, qui depuis
trois ans sollicite vivement et vainement son retour;
3° Lé rptopr de M, de peynier, par la frégate qpi portera, sans délai, les .ohjrpg dp rétablissement de M. Du Chilleau e{ du rappel du sieur de BÎJarbois ;
4° L'introduption pep4aut deux ans des farines par l'étranger, dans tous les ports d npjirauté, attendu la disette f)$s blés dans l'intérienr du royajïme Ji Ja pfeMç ffg^ BRfjgr tyGPW-njes ;
5° Suspension absolue fiç toute assemhl^ .coloniale, parce guye, queijfî qu^n Sfp fi^r gapisation, la colpnje'np veut et ne doit la îgpir que des décrets J jyaww»œ§ naïîpuale j
0* p'aspupapcç ppsitjyè qu'aiiçune Innovatjon reia^yé à]lad.mini^F^ipn OU tout autre0 p&jej;, ne 'ser^ fa||è. même ''provi^oirémçnt» b Sa}n(-ftomipgue. sans je ponSb^ur^ pes repr'§ jetants;
7° fi'prdre aux chefs d^^nre^q^ du dénartç-
jDpnf pt t tous a^r^j(fftnvrif §ux dîêpute^sans
Mfffcqlté ni î^serve. to^s fçs fê la fnarï^p il ^ pofjr qnnipniés^pt y p^ser tpus
les renseignements dont jls auront besoin gijr lps op|g{naux, jiont copiep Jeur seront (|é|ivrées, à la première réquisition ;
T^otre Yppositiôû' à l'introduction de toute flappnaie npûye|ïe^ et'nqtammënt' d'udè petite ijaonnaië de cuivré frappée pour' Saint-Dpmihgué
çg gue cètte !(içrpïerè serait ub impôt réel pour la colonie, qUi. èn PUre'perte poùr elle^ ne profiterait èn rien à la métro pôle.
tv Éi^f^P adhésion formelle ap décret di^ rassemblée natiô^le? d!u 17 juin dériver, par .lpquértbute imppsit'îou est abolie'de ce jp^Er. coïpmté illégale et seiiJèmeqt provisoirement continuée pepdant la sesèiôn1 âctuelfé dés États généraux.
Voilà, Monsieur le comte, les réclamations et déclarations sur lesquelles nous attendons |a réponse satisfaisante qïïè vous nous avez promisé.
"Nous avons l'honneUr d'êtré, avec un sincère et parfait attachement, Monsieur le ëomte, vos trèf iïumblès jet très obéissants'serviteurs, ' Les 'députés "de Saint-Domingue.
Signe : Reynaud, le marquis Perngqy, barphe-vêque-Thibaud, Fitz-Gerald, le marquis de Gouy d'Arsy, de Thébaudière, secrétaire général de la députation.
yersailleg. au bureau de la députation de Saint-Domingue, rue (fAnjou, ^, le 29 jujlïeyi78^. ''
N° XIII.
ÇqjiiefLe Iq réfiq^e fa M-le comte de Luzerne a MM. les députés de Saint-mminhuè, en date
mïïMfPm
Les affaires nombreuses dont le conseil d'Etat est occupé, n'ont pas permis, Messieurs, que j'y fisse» avant le 9 de m mois, le rapport des demandes contenues, soit dans la lettre que vous avez adressée au roi le 29 juillet dernier, et dans les réflexions très respectueuses faites par les habitants de la partie du sud 4e Saint-Domingue qui y étaient jointes, soit ga9$ l'extrait de? registres de la chambra d agriculture du jCjap, en date du 5 juin Ï789, soit enfin dans la dépêche que vous m'avez égrïte £ n^i-m$mé.
Sa Majesté n'a pas ern qifjl fût de sa justice
de révoquer la nomination qu'elle a faite de M. le pointe de Peynier, officier général de ses armées n^yalep, universellement estimé et qui'a servi avec la plus grande distinction\ surtout dans la dernière guerre. Elle s'ëtaif déciîféé à rappeler M. lé marquis Du QMllëau après ùne mûrë délibération prise dans sop "conseif d'Etat, le 28 jqin dernier, relativement à une ordonnancé qu'il avait rendue seul, pour Pintroduction dès nègres de traité étrangère dans la partie du sud, en quoi il 'avait qpn seulement'outrepassé ses pouvoirs, mais |1 avait interverti essentiellement les lois commerciales et les rapports qui existènt depuis pj jUfs 4'un derqj-§iecîe piitrè la métropole et lés colonies.
M. le nçiarquis Du Chilleau, d'ailleurs, revient en France; il ni'a mandé |e 2t) jijm qu'il s'embarquerait vers le 10 ou 1$ de millet. Sfc Majesté ne peut approuver qu'il ait quifté, surtout (fans des Circonstances aussi critiqu^.' la colôqie'dopt le gouvernement lui avait été confié^ sans congé, sans permission, et ayanf feievè.
2° La justice du rqi ne lui permet pas davantage de donner dés marquès de mécontentement à M. de Marbois, sur des inculpations qui né sont jusqu'ici appuyées d'aucune preuve- Le foi a néanmoins cherché les moyens d'accéder â votre vœu ; cet intendant a demandé depuis longtemps la faculté de s'éloigner de la colonie. Pîon seulement la permission lui a été accordée; mais je viens d'écrire, dë la part de Sa Majesté, à M. le comte de Peynier et à lui, pour le déterminer à en faire usage aussitôt qu'il rpcèvra ma lettre ; et le désir que vous avez de vpir cesser son administration sera satisfit, sans que l'équipé du roi se trouve compromise.
3° Sa Majesté a consenti à la suspension que vous avez demandée de toute assemblée coloniale, parCe que, quelle qu'en puisse être l'organisation, la colonie ne peut et ne doit la tenir que des décrets de l'Assemblée nationale.
J'ai prévenu néanmoins le roi et son conseil que, depuis votre lettre écrite, vous m'aviez verbalement témoigné que vous lui demanderiez peut-être une assemblée extrordinaire, provisoire, composée d'une manière purement élective, qui, ne Statuant et n'innovant sur rien, lui proposerait, ainsi qu'à l'Assemblée nationale, ce qui paraîtrait être dë l'intérêt de la colonie. J?ai ajouté que cette réquête, si vous y insistiez, méritait, surtout dans les circonstances actuelles, d'être accueillie. ; 4° Vous avez demandé l'assurance positive qu'aucune innovation relative à l'administration, ou à tout autre objet, ne sera faite, même provisoirement, à Saint-Domingue, sans le concours de ses représentants.
Le roi a décidé que cette assurance devait vou3 être donnée. Il a pensé que c'était à l'Assemblée nationale, qui a admis les députés de Saint-Domingue, à déterminer quelles innovations doivent avoir lieu dans le régime de cette colonie, et que jusqu'à ce qu'elle ait examiné cette question si importante le régime doit rester et être maintenu tel qu'il a été de tout temps, ou du moins depuis la paix dernière.
5° Vous iavez sollicité rjntrojduction, pendant deux ans, des farines de traite étrangère dans tous les ports d'amirauté, attendu la disette des blés dans ^'intérieur du royauïÀe,et la défense d'en faire pàsser de nos ports dans les Cotoniès.
Cette question a été déç/dée absolument par les mêmes principes qiue la précédante, une permission aussi longue,/'ouverture aux étrangers d'une
aussi grande quantité de ports, changeraient absolument les rapports de la métropole avec la colonie. C'est à l'Assemblée nationale qu'il cqn-vient que vous adressiez une telle demande.
Quant aux facilités provisoires à accorder pour un espace de temps plus ou moins long, en cas de guerre, de disette ou d'autres fléaux, les administrateurs ont pouvoir et sont dans l'usage de promulguer les règlements nécessaires. Il serait contre l'intérêt de }a colonie même qu'elfe fût; dans les cas Urgents,obligée dé recourir au roi. Elle aurait éprouvé de grands malheurs avantqu'ileût été possible d'y apporter remède; et la faculté de lui procurer des secours urgents et indispensables, doit résider dans des administrateurs qui n'en soient pas séparés par une aussi grande distance.
6° Le roi avait été instruit que la colonie de Saint-Domingue éprouvait la plus grande disette de menue monnaie, que les escalins valant quinze sous argent des colonies, ou dix sous argent de France,' y étaient devenus très rares. On avait pensé qu'il serait commode à tous les habitants et spécialement utile à la classe la plus indigente dp peuple, qu'il circulât des pièces de moindre valeur pour solder les appoints; car le manque absolu de cë moyen gêne le commerce, et provoque l'augmentation des denrées de première nécessité.
Telles étaient les considérations par lesquelles Sa Majesté s'était proposé de répandre dans toute la colonie de Saint-Domingue cent mille écus en espèce de billion, valant deux sous six deniers argent des colonies. Mais d?après votre réclamation et celle de la chambre d agriculture du Gap, Sa Majesté a consenti qu'il n'en fût pas envoyé.
7° L'intention de Sa Majesté est qu'il soit remis à la disposition de l'Assemblée nationale, de ses bureaux ou comités, tous les papiers qui pourront lëur fournir des renseignements. Si quelqu'un de Messieurs les députés en désire de particuliers, il pourra écrire au ministre, qui lui procurera tous les éclaircissements par lui souhaités, lui fera délivrer les copies collationnées qu'il demandera, et fera-exhiber les titres originaux, dans le cas Où l'on voudrait vérifier l'exactitude desdites copies.
8° L'adhésion formelle que vous déclarez au décret national du 17 juin dernier par lequel toute imposition est abolie de ce jour, comme illégale, et seulement provisoirement continuée pendant la session actuelle des Etats généraux: cette adhésion, dis-je, est de droit.
Cj'est à l'Assemblée nationale qu'il appartient de fixer elle-même les impositions qui seront dorénavant payées par la Colonie de Saint-Domingue, dpnt elle a admis les représentants.
Mais Comme les taxes publiques ont toujours été octroyées à Saint-Domingue par une assemblée coloniale, si l'Assemblée nationale jugeait à propos que la quotité et la nature des impôts y fussent éneore fixées de même (et il serait possible que la disparité des revenus coloniaux à ceux de la métropole lui fît adopter ce parti), il deviendrait nécessaire, pour subvenir aux besoins du service, que ladite Assemblée nationale décrétât la continuation des mêmes impositions pendant le tepaps nécessaire pour convoquer à une àussi grande distance une assemblée coloniale, d'après l'organisation nouvelle qu'il paraîtra convenable de lui donner.
le désire, Messieurs, que ces décisions du roi et le consentement qu'il a donné à plusieurs de vos demandes, pujssé vous être agréable. Je me fais un plaisir de vous les annoncer, et vous prie
d'être persuadés de l'attachement sincère avec lequel, etc.
N° XIV.
ORDONNANCE
concernant la liberté du commerce pour la partie du Sud de Saint-Domingue.
Du
(Extrait des registres du conseil supérieur de Saint-Domingue.)
La tournée que M. le gouverneur général vient de faire dans la partie du Sud, l'ayant mis à portée de connaître par lui même l'état dans lequel elle se trouve réduite, ainsi que le seul moyen efficace pour la porter au degré de splendeur dont elle est susceptible; il a reconnu que la prime de deux cents livres accordée par l'arrêt du conseil d'Etat du roi, en date du 25 septembre 1786, dont l'expiration aura lieu le premier août prochain, par chaque tête de noirs introduits, loin de devenir un motif d'encouragement, a à peine suffi au remplacement de ceux que les maladies et la désertion enlèvent annuellement, qu'elle n'a pu engager le commerce de France à donner à ses spéculations l'activité que l'on espérait : que ce commerce exige que ses cargaisons soient rigoureusement payées en argent, ou les y vendre à vingt-cinq ou trente pour cent plus cher, s'il est payé en denrées, et qu'en continuant à lui livrer exclusivement la partie du sud, elle sera toujours languissante, sans numéraire et ne pourra jamais tirer de son sein les richesses qu'elle possède.
Que, d'un autre côté, cette partie aussi belle que celle du Nord et de l'Ouest, n'a besoin pour se développer et devenir aussi fertile qu'elle, que d'une force qui lui manque ; qu'en augmentant ses ateliers par une introduction de noirs, cette terre deviendra productive comme toutes celles des autres quartiers ; qu'il rentrera une somme considérable au roi, par les droits qui seront perçus pour les denrées importées et exportées; que les habitants augmenteront leur fortune, qu'ils sortiront de leur malheureux état, se libéreront et acquèreont jeu même temps de l'aisance, et leur tranquillité; que le commerce national truuvera les moyens de s'étendre parlasuitedans cetle partie et de se remplir des sommes qu'elle peut lui redevoir.
Toutes ces considérations mûrement réfléchies, le vœu unanime des habitants sur une introduction libre de noirs, l'intime confiance où nous sommes qu'elle opérera le meilleur effet, que le commerce de France ne fera pour un temps, que cesser ses opérations, pour leur donner ensuite plus d'activité et de consistance, et qu'enfin la partie du Sud va faire sortir de son sein des richesses immenses, dont le roi, les habitants et le commerce tireront les plus grands avantages ; nous général et intendant, en vertu des pouvoirs à nous confiés, et sous le bon plaisir de Sa Majesté, avons provisoirement statué, ordonné, statuons et ordonnons ce qui suit ; savoir:
Art. l«r. A compter du premier août 1789, jusqu'au 1er août 1794, les bâtiments étrangers, du port de soixante tonneaux et au-dessus, seront admis dans les ports de Jérémie, les Gayes et Jacmel, avec les noirs, farines, bois de toute
espèce, de charbon de terre, les animaux et bestiaux vivants de toute nature, les salaisons de bœufs, de porcs, de morues et de poissons, riz, maïs, légumes, cuirs verts en poil ou tannés, pelleteries, résines et goudron, et pourront y décharger et commercer lesdites marchandises.
Toute la partie du Sud profitera de l'introduction des nègres, et autres objets détaillés dans l'article ci-dessus, jusques et y compris les paroisses de Saint-Michel du Fond-des-i\ègres, d'Aquin, de Baynet, de Jacmel et des Gayes de Jacmel. Les habitants des susdistes paroisses pourront, ainsi que ceux des paroisses de l'Anse-à-Veau du petit trou des Baradaires, de Jérémie, du Cap-Dame-Marie, de Tiburon, des Cotteaux, Torbek, des Cayes, Cavaillon et Saint-Louis, se pourvoir de nègres et autres objets mentionnés dans l'article premier, qui arriveront dans les trois ports d'entrepôts de Jérémie, des Gayes et de Jacmel, à la charge de se conformer aux dispositions de la présente ordonnance, sur le transport des nègres dans les autres quartiers et sous les peines y portées, dont sera fait mention ci-après.
Art. 3. Les armateurs français, soit du royaume, soit des îles et colonies françaises, qui voudront concourir à l'introduction des objets indiqués dans l'article premier, y seront pareillement admis. .
Art. 4. Le paiement des nègres et autres objets qui seront vendus par les étrangers aux habitants de la partie du Sud, compris dans la ligne• de démarcation, pourra se faire en sucre, ou autres denrées de la colonie.
Art. 5. Toutes les marchandises, dont l'importation et l'exportation sont permises à l'étranger, par les articles premier et quatre dans les susdits trois ports d'entrepôt, seront soumises aux droits locaux établis, et payeront en outre 1 0/0 de leur valeur, à l'exception des noirs qui ne payeront point ce dernier droit de 1 0/0, et aussi à l'exception du droit d'entrée sur la morue et le poisson salé, qui sera réduit à trois livres par quintal.
Art. 6. Les bâtiments étrangers payeront pour tout droit d'entrée dans lesdits ports, quarante-cinq livres pour chaque tête de noirs qu'ils y apporteront.
Art. 7. Les bâtiments étrangers seront assujettis au payement du droit d'occident pour les ../ marchandises qu'ils exporteront de la partie indiquée par l'article 2, et tel que les bâtiments français le payent en France pour les denrées coloniales qu'ils y importent.
Art. 8. Tout bâtiment étranger sortant des trois ports d'entrepôt, sans avoir payé les droits ci-dessus mentionnés dans les trois précédents articles, et qui sera pris par les bâtiments de Sa Majesté, ou autres commis à cet effet, sera conduit dans un des ports d'amirauté, pour y être dénoncé, et condamné à la confiscation, et à une amende de trois mille livres tournois.
Art. 9. Les bâtiments français, soit du royaume, soit des îles et colonies françaises, payeront pour l'importation des marchandises désignées dans l'article 1er lesdroits locaux établis. Ils ne payeront aucun droit d'entrée pour les nègres, ni le droit d'occident qu'ils sont dans le cas de payer en Europe.
Art. 10. Tout bâtiment étranger, pris, débarquant des nègres et autres objets, dans d'autres lieux de la colonie, que ceux désignés dans l'article 1er sera confisqué et condamné à une amende de 10,000 livres, argent de la colonie.
Art. 11. Pour assurer l'effet des amendes mentionnées dans les articles 8 et 10, tout capitaine de bâtiment étranger sera tenu d'avoir un correspondant français, a son arrivée dans un des ports d'entrepôt désignés dans l'article 1er, qui soit dans le cas de le cautionner pour cet objet, lequel cautionnement s'éteindra de plein droit après le départ du bâtiment du port où il aura fourni ladite caution.
Art. 12. Tout nègre provenant de l'introduction appartenant aux navires étrangers, et qui sera pris hors des limites établies par l'article 2, sera confisqué au profit du roi. Pour cet effet, les capitaines des bâtiments étrangers seront obligés, dans le délai de dix jours, à compter du jour de leur arrivée dans un des ports d'entrepôt, de faire étamper tous les nègres de leurs cargaisons des trois lettres lisibles J. P. S. et si, dans le susdit délai, lesdits nègres ne sont point étampés, ils seront pareillement confisqués au profit du roi.
Art. 13. Tout nègre provenant de l'introduction, qui sera trouvé hors des limites établies par l'article 2, chez des habitants, autres que ceux dénommés audit article, et à eux appartenant, sera confisqué au profit du roi, et le propriétaire condamné, par corps, à une amende de 1,500 livres applicable aux hôpitaux de la Providence, du Port-au-Prince et du Cap.
Art- 14. Tout bâtiment étranger, arrivé dans un des trois ports d'entrepôt, pourra en repartir avant l'expiration de huit jours, avec des nouvelles expéditions pour un autre des susdits ports d'entrepôt désignés dans la présente ordonnance.
Art. 15. Il sera établi dans chacun desdits ports d'entrepôt, un nombre suffisant de commis, pour recevoir les déclarations des cargaisons, qui seront faites par les capitaines, lesquelles déclarations ils enregistreront sur un registre qui sera tenu à cet effet. Ils veilleront encore à l'exécution des dispositions des articles 5, 6, 7 et 12, et ne délivreront de permis de sortir du port, qu'après qu'ils se seront assurés qu'elles ont été remplies.
Art. 16. Les capitaines des navires étrangers, outre les déclarations qu'ils feront aux commis des bureaux d'entrepôt, les feront pareillement au greffe de l'amirauté; ils rempliront d'ailleurs toutes les formalités d'ordonnance, représenteront leurs connaissements et chartes parties.
Art. 17. Le produit des amendes et confiscations prononcées par les articles 8 et 10, sera attribué, moitié au roi, moitié aux commis qui auront provoqué la saisie, si le délit a lieu dans les ports d'entrepôt. Au contraire, si les navires pris en fraude, l'ont été par les vaisseaux et bâtiments de Sa Majesté, la totalité dudit produit appartiendra au commandant, état-major et équipages preneurs, sauf la réduction, dans tous les cas, des frais de justice, des droits de l'amiral et des invalides. Lorsqu'il y aura des dénonciateurs, un tiers du même produit sera prélevé à leur profit. ' Art, 18. Faisons très expresses inhibitions et défenses à tous Français des îles sous-le-Vent, de prêter leur nom à des francisations simulées dé bâtiments étrangers, sous peine de 3,000 livres d'amende, applicables aux hôpitaux de la Providence, du Port-au-Prince et du Cap, sans préjudice de la confiscation dudit bâtiment ordonnée par les divers règlements intervenus sur le fait de la navigation. Enjoignons aux procureurs de Sa Majesté ès sièges des amirautés, de faire à ce sujet toutes poursuites et diligences contre les contrevenants, à peine d'en répondre.
Art. 19. Seront, au surplus, exécutées les dispositions des lettres patentes du mois d'octobre 1827,
Ve SÉRIE. T. XVI.
et des ordonnances et règlements subséquents, concernant le commerce étranger dans les îles et colonies françaises, en ce qui n'y est pas dérogé par la présente ordonnance, qui sera enregistrée au greffe de l'intendance, imprimée, publiée et affichée partout où besoin sera.
Prions MM. les officiers du conseil supérieur de Saint-Domingue de la faire pareillement enregistrer en leur greffe, imprimer et afficher partout où besoin sera, et mandons à ceux des juridictions de leur ressort de tenir la main à son exécution.
Donné au Port-au-Prince, sous le sceau de nos armes et le contreseing de notre secrétaire, le 9 mai 1789.
Signé : Du CHILLEAU.
Par M. le général :
Signé : BONHOMME.
Enregistré au greffe de l'intendance des îles françaises de l'Amérique sous-le-Vent.
Au Port-au-Prince, le
Signé : SENTOUT.
Registrée a été la présente ordonnauce au greffe du conseil supérieur de Saint-Domingue, ouï et ce requérant le procureur général du roi, pour être exécutée selon la forme et teneur, imprimée, publiée et affichée partout où besoin sera, et copies collationnées d'icelle envoyées dans les sénéchaussées et amirautés du ressort, pour y être pareillement lues, publiées, registrées et affichées; enjoint aux substituts du procureur du roi d'y tenir la main et d'en certifier la cour au mois, suivant l'arrêt de ce jour.
Fait au Port-au-Prince, en conseil, le 11 mai 1789.
Signé : BONVALLET.
N° XV.
ARRÊT DU CONSEIL D'ÉTAT DU ROI,
qui casse et annule une ordonnance du gouverneur général de Saint-Domingue, du 9 mai dernier, laquelle accordait aux étrangers la liberté du commerce pour la partie sud de Saint-Domingue.
Du
(Extrait des registres du conseil d'État.)
Le roi s'étant fait représenter une ordonnance du gouverneur général de Saint-Domingue, en date du 9 mai dernier, portant permission aux navires étrangers d'introduire dans les ports des Cayes, Jérémie et Jacmel, à compter du 1er août prochain, pendant cinq années consécutives, des noirs, farines et autres objets dont profitera toute la partie du sud, et dont le payement pourra se faire en sucre ou autres denrées de la colonie; Sa Majesté a reconnu que cette ordonnance est tout à la fois incompétente, irrégulière et préjudiciable au commerce de France. Elle est incompétente, non seulement par le défaut de pouvoir de la part de l'administrateur qui l'a rendue, mais encore par la défense que lui en faisaient ses pouvoirs même, consignés et dans ses instructions, et dans les ordonnances concernant le gouvernement civil, et dans les règlements intervenus sur le fait du commerce étranger. Elle est irrégu-
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lière comme émanée de l'autorité du gouvernement général seul, tandis qu'elle a pour objet un des points les plus importants de l'administration commune entre lui et l'intendant coadministra-teur de la colonie. Enfin elle est préjudiciable aux intérêts du commerce national, puisqu'elle le repousse réellement de la partie du sud, quoiqu'elle paraisse l'y admettre en concurrence avec l'étranger, contre les prix duquel il lui serait impossible de lutter.
Indépendamment de ces vices frappants, ladite ordonnance renferme encore des dispositions dont le contre-coup serait funeste à la métropole, soit par la liberté qu'elle ouvre d'une exportation illimitée de denrées coloniales au dehors, soit par l'impuissance des moyens qu'elle emploie, pour empêcher que les deux autres parties de la colonie ne participent en fraude^ l'introduction ou à l'exportation étrangère. Les tableaux d'accroissement qui ont été mis sous les yeux de Sa Majesté, constatent d'ailleurs qu'il n'y avait pas de prétexte pour ouvrir aussi subitement de nouveaux ports aux nègres et aux denrées de traite étrangère. Le nombre des esclaves a considérablement augmenté dans la partie du sud, et pendant la guerre, et depuis l'époque de la paix. Il s'y est accru plus sensiblement encore par l'effet de la prime de deux cents livres par tête de noirs d'introduction française, établie par 1,'arrêt du conseil de Sa Majesté, du 25 septembre 1786. Quant aux farines, si la disette qui s'est fait ressentir en France, depuis quelques mois, était un motif légitime, pour admettre, momentanément à Saint-Domingue, les farines américaines, déjà les administrateurs y avaient pourvu, et Sa Majesté avait approuvé la plus grande partie des dispositions proyisoires qu'ils.avaient faites à cet égard; mais aucune considération ne devait porter le gouverneur général des îlessous-le-Vent, à étendre cette faculté jusqu'au terme de cinq années. Il ne pourrait donc résulter d'un règlement si contraire aux principes constitutifs des colonies, que des pertes inappréciables pour les places du commerce du royaume. Sa Majesté leur doit protection etencouragement, ainsi qu'aux cultivateurs des établissements coloniaux, et c'est en maintenant entre eux un juste équilibre de faveurs et d'appui, qu'elle cherchera, toujours à assurer leurs intérêts respectifs. A quoi voulant pourvoir: ouï le rapport et tout considéré, le roi, étant en son conseil, a cassé et annulé l'ordonnance du gouverneur général de Saint-Domingue, du 9 mai dernier; fait défenses à tous administrateurs en chef d'en rendre de semblables à l'avenir: ordonne que les lettres patentes de i727, l'arrêt du 30 août 1784 et tous autres règlements de Sa Majesté, concernant le commerce national ou étranger, continueront d'être exécutés suivant leur forme et teneur, et aux peines y portées, jusqu'à ce qu'autrement il en ait été ordonné par Sa Majesté, si le cas y échet. Autorise cependant les gouverneur général et intendant de Saint-Domingue à fixer un délai, lequel ne pourra excéder trois mois au plus, à compter de la date de l'enregistrement du présent arrêt, pour l'admission des bâtiments étrangers dans les ports désignés en ladite ordonnance du 9 mai dernier, afin de ne pas constituer en perte ceux d'entre les armateurs étrangers qui se seraient livrés aux spéculations permises par ladite ordonnance; enjoignant, au surplus, tant auxdits administrateurs en chef, qu'à tous leurs subordonnés militaires et civils, de veiller, avec leplus de soins, précautions et sévérité possibles, a ce qu'il ne
soit pas abusé de la tolérance de Sa Majesté à ce sujet. Sera le présent arrêt enregistré au greffe du conseil supérieur de Saint-Domingue, lu, publié, imprimé et affiché partout où besoin sera. Fait au conseil d'État du roi, Sa Majesté y étant, tenu à Versailles le 2 juillet mil sept cent quatre-vingt-neuf.
Signé : La Luzeane.
N° XVI.
Avis motivé de M. Karbé de Marbois, intendant, à la séance du 11 mai 1789 du conseil supérieur de Saint-Domingue, enregistré sur sa demande.
Aujourd'hui, onze mai mil sept cent quatre-vingt neuf, la cour étant en séance, et délibérant sur le nouveau régime proposé par M. le gouverneur général, pour l'admission des étrangers dans la partie du sud de la colonie,
M. de Marbois, intendant, premier président, a dit :
Messieurs,
Le maintien, l'exécution des lois de Sa Majesté, relatives à la colonie de Saint-Domingue, est spécialement confié aux administrateurs. Les lettres patentes du mois d'octobre 1727 leur font un devoir de les garder et conserver, et attribuent même une juridiction encore plus particulière à l'intendant en matière de commerce étranger. Mes instructions, et nombre de lettres ministérielles, contiennent les mêmes dispositions. C'est donc par une suite de l'obéissance que je dois à la loi et au roi, que j'ai déclaré qu'il m'est impossible de concourir à l'acte qui vous est présenté; il est contraire à une multitude de lois positives, émanées de Sa Majesté, auxquelles il m'est interdit, de la manière la plus expresse, de déroger. Nous pouvons faire des règlements ; mais je, ne pense pas que nous puissions faire des lois: il est constant que nous ne pouvons changer celles du souverain, et tout ce que nous ferions à cet égard serait radicalement nul. Les constitutions coloniales sont sous vos yeux, et j'en cite les dispositions.
« Les gouverneur, lieutenant général et inten-« dant, veilleront à ce qu'il ne soit fait aucun commerce étranger, soit par l'entremise des sujets « de Sa Majesté ou de ceux des autres nations; leur « enjoint au surplus, Sa Majesté, de veiller à ,1'ob-« servation des règlements sur le fait du com-« merce, et à tout ce qui pourra l'augmenter, et de « leur donner avis sur-ler-champ de tout ce qu'ils «■ jugeront devoir y être réformé ou fait pour le «, bien et l'avantage de la colonie, à l'effet d'y «.être par elle pourvu ainsi qu'il appartiendra ». (Ordonnance du 1er février 1766.) « Ne pourront « néanmoins lesdits gouverneur, lieutenant « général et intendant, faire aucun règlement de « police contraire aux dispositions des édits, « déclarations, règlements émanés de Sa Majesté, « et enregistrés aux conseils supérieurs, sauf à « proposer à Sa Majesté les changements qui leur « paraîtront nécessaires, pour y être par elle « pourvu ainsi qu'elle avisera bon être » (Ordonnance du 22 mai 1775).
Cet acte est, d'ailleurs, incomplet, puisqu'il est l'ouvrage d'un seul administrateur, et que, par son objet, il appartient éminemment aux pouvoirs communs.
359 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PJ RLE
Je pourrais, je devrais peut-être m'arrêter ici, Messieurs, et me borner à avoir prouvé que nous n'avons pas le pouvoir de détruire ainsi, et dans un instant l'ouvrage de trois rois, de leurs sages conseils, et les travaux de plus d'un siècle. Mais, puisque les considérations politiques ont paru influer sur l'opinion de quelques-uns de vous, l'espoir de répandre un nouveau jour sur cette question me détermine à vous faire connaître mes principes concernant le régime prohibitif, et sur cette matière en général. Vous m'avez vu, pendant trois ans et demi, actif à la poursuite des contraventions du commerce étranger, et les déférer, sans aucun ménagement, à la justice dont vous êtes les ministres. Eh bien, Messieurs, j'abhorre du fond de mon cœur ces principes exclusifs, ces jalousies, ces rivalités nationales; et je suis fermement persuadé que la liberté du commerce et la communication universelle de tous les peuples du monde sont les moyens les plus assurés de procurer le bien général, et de faire atteindre toutes les nations de l'univers au plus haut point de prospérité auquel leur génie, le climat et le sol qu'elles habitent leur permettent d'aspirer. Mais les nations se surpassent réciproquement les unes les autres dans quelques branches de commerce ou d'industrie ; et si nos colonies peuvent recevoir chaque article des peuples qui pieuvent le donner au plus bas prix, sans que, de leur côté, ils soient tenus, ou sans même qu'ils aient la liberté de venir prendre chez nous ceux que nous sommes en état de leur livrer à meilleur compte, il est manifeste que le poids que Ja France mettra dans la balance du commerce des colonies se réduira à ce qu'elle peut leur fournir exclusivement, parce qu'il n'y aura que son sol qui le produise. H y a surtout des nations qui s isolent, par leurs maximes, de toutes celles de l'univers; des nations en possession de toutes les jouissances qui peuvent résulter de ce système. Elles sont encore bien éloignées de reconnaître que l'introduction de la liberté donnerait un nouveau développement à tous les avantages dont elles ne jouissent aujourd'hui que par un état violent, et qui ne peuvent leur être ôtés, parce que les fruits de leur usurpation les mettent en état de protéger leur usurpation même. Je les vois, attentives à nos erreurs, à nos moindres fautes, prêtes à en profiter aussitôt, et je ne puis envisager qu'avec la plus vive inquiétude, les suites funestes qu'aurait la mesure qui vous est proposée, si jamais elle était adoptée. Un régime prohibitif sévère leur assure exclusivement tous les bénéfices du sol de leurs colonies, et elles viendraient encore recueillir ceux de nos possessions. On verrait s'élever chez elles de nouvelles raffineries, des manufactures de toutes espèces, avec tous les avantages assurés à ceux qui, ayant porté au plus haut point l'industrie, et tous les instruments des arts mécaniques, y réuniront abondamment les matières premières que ces manufactures emploient.
Celles du royaume, au contraire, tomberont successivement; et nos artisans passeront en foule dans les pays qui leur offriront des salaires. La navigation de ces nations rivales s'éteDdra aux dépens de la nôtre; nos matelots, sans emploi, iront peut-être leur en demander : et, puisqu'il s'agit de livrer, pendant cinq années, cette colonie à l'étranger, que vous tous, quiètes bons Français, que celui qui a soutenu ce caractère avec taut d'éclat et de gloire pendant la dernière guerre, songent h ce qui peut arriver pendant cinq ans. La justice et ta modération assises sur
le trône, semblent nous présager une longue paix. Mais, si elle éprouvait quelque interruption, comment la colonie, comment les provinces maritimes, comment celles même de l'intérieur, seraient-elles protégées contre une invasion, si nous sommes sans marine? J'ai dit qu'il s'agissait de livrer, pendant cinq ans, la colonie aux étrangers. En effet, jamais on ne me persuadera que Pacte proposé ne doive finir par embrasser la colonie entière, et que l'on puisse empêcher efficacement les ports non libres de porter les denrées coloniales dans les ports de la partie ouverte à l'étranger, qui les exportera sans difficulté. Je ne dis rien des embarras que pourra éprouver la perception du revenu colonial, et de l'impossibi-iité d'empêcher les fraudes du commerce étranger. Il exportera impunément le double ou le triple des denrées qu'il aura déclarées, et il ne payera que moitié ou le tiers des droits ; il n'y aurait aucun moyen d£constater la fraude, puisque les vérificatious, au déchargement, ne pourront avoir lieu chez les étrangers comme elles ont lieu dans le royaume.
Mais cet objet, quelque grand qu'il soit, me parait exigu quand il s'agit d'une crise nationale.
Restreignons-nous dans les termes mêmes de Pacte proposé. Dix juridictions composent la colonie; et le ressort de quatre doit être, avec les deux tiers d'un cinquième, livré aux étrangers.
Heureuses les nations de l'univers, si, par une révolution imprévue,les barrières qui les séparent tombent toutes au même instant! et si chacune d'elles, entrant dans la carrière, pouvaient, dégagées d'entraves, y combattre avec toutes leurs forces, et y déployer toutes leurs ressources! La France n'aurait rien à redouter de cette lutte nationale. Mais, en attendant cette époque fortunée, que de maux menacent le peuple, qui, le premier, renversera les obstacles que la jalousie et l'égoïsme national ont autrefois posés ! Seul généreux, seul libéral, il donnera continuellement, sans jamais recevoir, et sera bientôt réduit à l'impuissance de défendre même les débris de son ancienne prospérité. Que dirait-on de l'habitant d'une grande ville, qui, seul, animé de sentiments d'hospitalité et de confiance, admettrait dans sa maison tous les étrangers indistinctement, ordonnerait que toutes les portes fussent ouvertes nuit et jour aux premiers venus? Croyez-vous, Messieurs, qu'à la longue il ne réduisit pas sa famille à la misère? Vainement dira-t on que ces étrangers feront valoir son sol et ses possessions; rien n'est aussi douteux. Et qu'importe, d'ailleurs, à sa famille si, pendant cinq années, ces étrangers doivent en consommer tous les produits, et la précipiter dans un état de misère dont elle ne se relèvera plus?
Poussons plus loin l'examen d'un sujet aussi grave, et lié par tant de rapports aux plus vastes intérêts de la nation.
Le régime actuel subsiste depuis un grand nombre d'années, en vertu de lois solennellement promulguées; elles sont la parole sacrée du souverain; il a dit à ses sujets: la colonie de Saint-Domingue sera unie au royaume par toutes sortes de liens, et spécialement par ceux du commerce, et le marché où s'approvisionnera cette colonie, celui où elle pourra faire ses ventes, sera toute la France même. Nos rois ont depuis adopté des maximes plus libérales, et tandis que les Anglais refusent l'entrée de leurs colonies à tous ceux dont ils redoutent la concurrence, trois ports d'entrepôt ont été ouverts aux étrangers à Saint-Domingue, et sept à huit cents de leurs vaisseaux
y arrivent annuellement : mais cette activité étonnante laisse encore aux nationaux les moissons les plus abondantes ; ceux-ci, sur la foi des lois coloniales auxquelles le législateur seul peut porter la main, forment leurs spéculations, et si elles sont infructueuses, fussent-elles même ruineuses, ils ne peuvent s'en prendre qu'à leur im-péritie, ou à des événements supérieurs qui ont déconcerté les combinaisons de leur prudence. Mais rappelons-nous que quatre-vingt-dix-mille esclaves ont été introduits depuis trois ans par le commerce de France dans cette colonie, et il est vraisemblable que le nombre importé cette année ne sera pas moindre que les précédentes ; qu'un armateur de Nantes, plein de confiance dans la constitution donnée auxl colonies, certain qu'elle ne peut être changée sans qu'il ait été averti d'avance par le souverain lui-même qui en a posé les fondements, que cet armateur, dis-je, rempli d'une confiance trompeuse, expédie en ce moment un vaisseau pour traiter àla côte d'Afrique, d'où il se rendra, ou aux Gaves, ou à Jacmel ou a Jérémie. Il a été instruit par ses correspondants des prix auxquels il pourra vendre sa cargaison, et du prix probable des denrées coloniales qu'il chargera en retour ; mais il arrive en août ou septembre prochain, et une révolution inattendue le frappe soudainement. Il trouve la .marchandise diminuée de vingt à vingt-cinq pour cent par l'affluence detoutes les nations admises à la concurrence ; et, d'un autre côté, les denrées coloniales ont éprouvé, par la même cause, une augmentation proportionnée; il perdra donc vingt à vingt-cinq pour cent sur les envois, et autant sur les retards ; il est ruiné et sa famille, ses associés, ceux qui lui ont prêté des fonds pour des entreprises sagement conçues, partagent son infortune. Celui-ci avait préparé des expéditions de là même nature :ses magasins sont remplis, et les marchandises sont sur le point d'être portées sur le vaisseau qui les attend. La nouvelle fatale arrive, et il s'arrête tout à coup, également sûr de sa ruine, soit qu'il expédie, soit qu'il n'expédie point. Un autre, lié par une suite d'affaires anciennes, s'attend à parcourir avec ses débiteurs dans la colonie, ce cercle qui consiste à recevoir le payement d'une dette, tandis que les mêmes habitants en contractent de nouvelles avec lui ; mais la chaîne va être rompue, si des étrangers prennent sa place. Et non seulement il n,e pourra, sans de grandes difficultés, faire acquitter les anciennes dettes, mais il sera encore embarrassé de sa cargaison, et il ne pourra la Vendre qu'à très grande perte. Qui indemnisera ces malheureux de ce désastre imprévu? Sera-ce la nation ? Ah 1 ne troublons point par l'opération qui nous est proposée, celle des hommes sages qui s'occupent en ce moment à guérir les maux de l'Etat. Gardons-nous d'un changement qui tend à faire passer chez l'étranger les capitaux du royaume, et à diminuer les moyens que la nation pourra avoir de supporter les charges que peut-être elle s'impose présentement. Les rapports de Saint-Domingue avec l'agriculture, les manufactures, la navigation et le commerce du royaume, sont si multipliés, qu'il n'est pas une seule de ses provinces qui ne sentît le contre-coup de l'admission des étrangers ; elles le sentiront, par la cessation d'une partie de leur commerce d'exportation ; elles le sentiront, par l'augmentation du
?rix detoutes les denréesqui seconsommentdans intérieur du royaume ; elles le sentiront encore longtemps après l'expiration des cinq années, parceque les étrangers, créanciers de la colonie
à cette époque, pour de grandes sommes, ne quitteront pas aisément prise, et prolongeront de fait leur privilège, par l'impuissance où ils tiendront les habitants de reprendre leurs liaisons avec leurs compatriotes.
Mais, tandis que mes inquiétudes paraissent se porter vers la métropole, la partie même de, la colonie qu'il s'agit de favoriser ne doit-elle pas plutôt en être l'objet ? Qui m'assurera que le commerce national ne suspendra pas tout à coup ses expéditions, et que, d'un autre côté, les étrangers, ne voyant point dans l'acte proposé les caractères d'une loi solennelle et permanente, craignant une révocation immédiate d'un régime passager, n'oseront hasarder des expéditions dont l'issue pourrait ièur être funeste? Il arriverait de la sorte que cette partie, subitement fréquentée, aussi subitement abandonnée, éprouverait des révolutions convulsives qui ne cesseraient que longtemps après que la règle aurait repris son empire. Ah! ne touchons qu'avec précaution et respect à ce que le temps a consacré ; et si le temps même a rendu les changements nécessaires, apportons-y une circonspection qui surpasse, s'il se peut, les règles de la prudence ordinaire ; que ces changements s'opèrent sans secousses, sans bouleverse»- les lois établies, sans contrarier ce qui se fait, peut-être, en ce moment dans le royaume. Eh, Messieurs ! où en serions-nous, et dans quelle confusion la colonie ne serait-elle pas plongée, si l'acte présenté, une fois enregistré, il arrivait de France une loi émanée du souverain, revêtue de toutes les formes que la constitution exige, et qui contînt des dispositions contraires à celles de l'établissement proposé 1 Les Français et les étrangers d'Europe se régleraient d'après le régime proscrit par cette nouvelle loi,par laquelle le seul véritable législateur aurait fait connaître sa volonté; ils s'expédieraient en conséquence, et ils trouveraient une autre loi, un autre régime en arrivant dans la colonie. Quelle sera alors votre règle dans les procès en contravention ? Dans ceux entre les parties? Sera-ce la loi du souverain? Sera-ce l'acte qui vous est proposé? L'une permet, l'autre continuera de défendre ; ce qui est un délit dans l'une, sera approuvé par l'autre : les peines prononcées seront également différentes. A quelle mesure vous arrêterez-vous 1 PeUt-être suis-je coupable en paraissant douter.
Et si, en septembre ou octobre, il survient un arrêt du conseil de Sa Majesté, qui casse tout ce qui aurait été fait, comment rétablir l'ancien état des choses, sans préjudice d'une multitude d'individus compromis par les changements ? Les navigateurs seront longtemps incertains du parti à prendre, et ne sauront où se porter. L'entreprise de l'administration leur causera un effroi, que le temps seul pourra faire cesser. Je ne parle pas de la chute des villes du Gap et de Port-au-Prince aux dépens desquelles Jérémie, Jacmel, vont devenir des entrepôts importants. Je ne parle pas de la perte qui suivra nécessairement le déplacement des individus et des capitaux, lorsque la volonté du souverain aura été manifestée. Enfin, je ne puis, à la suite d'aussi grands intérêts, parler du sort des commis et employés de toute espèce, qu'exigerait le nouveau régime, et que la réforme laissera sans état.
Avant de terminer, j'ouvre l'acte qui vous est en ce moment présenté. Arrêtons-nous aux expressions qui le terminent : Maintient l'exécution des lettres-patentes d'octobreXTZl, en ce qui n'y est pas dérogé par cette ordonnance. Croyez-vous, Messieurs, qu'il puisse dépendre
de nous de déroger ainsi à une loi aussi solennelle? Sans doute, mon opinion en cette matière n'est que le résultat isolé de mes connaissances individuelles ; mais elles sont appuyées sur tant de lois, que je ne puis les abandonner sans violer mon devoir. J'en suis tellement persuadé, que je ne pourrais considérer l'acte dont il s'agit comme valide, même après l'enregistrement, et je ne cesserais pas, pour cela, de prendre pour règle les lois de Sa Majesté. Je propose donc de nouveau à M. le gouverneur général, s'il persiste à demander qu'on enregistre, je lui propose de renvoyer l'exécution de cet acte au premier octobre prochain : ndps aurons de la sorte le temps de recevoir des instructions, et les maux que je crains pourront encore être prévenus.
Signé : de Marbois, et -porté sur les registres du conseil supérieur de Saint-Domingue, à la suite de l'arrêt d'enregistrement de l'acte intitulé: Ordonnance de M. le gouverneur général, concernant la liberté du commerce pour la partie du sud de Saint-Domingue.
XVII.
Copie de la lettre de M. le comte de la lùzerne à M. le Président du comité des rapports.
Du
J'ai reçu, Monsieur, les copies des dénonciations que Messieurs les députés des colonies ont faites contre moi. J'ai vu les treize, chefs d'accusation qu'elles renferment. Aucun n'est appuyé de preuves, et l'on s'est contenté d'annoncer vaguement sur presque tous, qu'on produirait des pièces justificatives, sans même fixer le terme où cette production serait entière.
Les faits allégués sont pour la plupart d'une fausseté si frappante, que je puis prendre dès ce moment l'engagement formel de confondre la calomnie. Mais, plus je désire présenter à la nation ma justification complète, plus il m'importe de connaître qu'elles sont les prétendues preuves qu'ont promis mes accusateurs. Les principes établis par l'Assemblée nationale prouvent assurément qu'il n'est pas dans ses intentions qu'il m'en soit refusé copie.
Je yous prie donc, Monsieur, d'ordonner qu'il me soit envoyé des expéditions authentiques de tout ce qui est et sera produit contre moi. Permettez même que j'insiste pour que cette remise n'éprouve aucun retard. La conscience de soi-même qui fait la force de l'homme honnête, ne le dispense pas, quand il est accusé, d'instruire le public des motifs de sa sécurité. Il me tarde de paraître à son tribunal, et je ne le puis d'une manière satisfaisante pour lui et pour moi, si je ne connais les preuves que l'on m'oppose. On a pu depuis cinq mois entiers les rassembler à loisir. Quant à moi, je n'aurai que peu d'instants à donner à ma défense, et ce qui la retardera le plus est le vague des inculpations auxquelles je suis forcé de répondre.
J'ai l'honneur d'être avec un attachement sincère, Monsieur, votre, etc.
XVIII.
Copie de la réponse du président du comité desrapports, à M. le comte de La Luzerne, ministre et secrétaire d'Etat de la marine.
Paris, le
Le comité des rapports, Monsieur le comte, sous les yeux duquel j'ai mis la lettre que vous rn'avez fait l'honneur de m'écrire le cinq de ce mois, m'a autorisé à vous faire remettre, conformément à votre demande, des expéditions authentiques de tout ce qui sera produit relativement aux dénonciations faitès contre vous, par MM. les députés des colonies: j'ai en conséquence donné les ordres nécessaires, et je tiendrai la main à ce qu'ils soient exécutés. Je suis avec un parfait attachement, Monsieur le comte, votre très humble et très obéissant serviteur.
Signé : de La Cour d'Ambésieux, président.
W XIX.
Lettre de M. le comte de La Luzerne, ministre de la marine à M. le comte de Peynier, gouverneur général des ilessous-le-Vent.
Paris, le
Chargé, Monsieur le comte, de vous transmettre la proclamation qui contient le décret concernant les colonies, et l'instruction qui y est jointe, je vous fais passer aussi la lettre du roi à ses sujets des îles sous-le-Vent.
Je vous recommande de donner sur-le-champ la plus grande publicité à ces pièces, de prendre soin qu'elles soient imprimées sans délai, et répandues aussitôt dans chaque partie de Votre gouvernement, de les faire insérer dans les papiers publics, en exprimant qu'elles y paraissent en vertu d'ordres du gouvernement, et qu'elles sont authentiques.
Je regarde, en effet, comme de la plus haute importance pour le bonheur de la colonie et pour celui de la métropole, que les vues paternelles de Sa Majesté, que les dispositions équitables et bienfaisantes ae l'Assemblée nationale, soient connues de tous les citoyens, et le soient promp-tement.
Puissent, dans cette île florissante que vous gouvernez, des députés, éclairés et zélés pour lé bien public,,se rassembler d'ici à peu de temps, et seconder des intentions qui ne tendent qu'à la rendre heureuse.
Tel a été toujours mon vœu. Vous le trouverez exprimé à chaque ligne dans la série entière de mâ correspondance avec vous. J'ai pensé, je pense encore que le calme né sera rendu d'une manière permanente à la colonie, que sa prospérité et sa tranquillité ne peuvent être assurées que par la réunion de ses représentants, et par l'effet de leurs délibérations.
Personne ne sait mieux que moi qu'on doit tout attendre du grand nombre de citoyens honnêtes, vertueux et'bien intentionnés qui peuplent l'île de Saint-Domingue; mais il est impossible qu'il ne se trouve dans cette contrée, comme dans tous les pays de l'univers, quelques sujets trop justement suspects, impatients du frein des lois, ardents à susciter des troubles,
avides d'en profiter, intéressés à les perpétuer, et fort indifférents sur le choix des moyens, parce que tous leurs projets tendent à dissoudre les liens de l'ordre social, et qu'ils n'ont l'espoir de prospérer eux-mêmes que par le maineur public.
Quoiqu'en petit nombre, ils peuvent, à raison de leur activité, et soit par l'effroi qu'ils inspirent aux hommes de bien, soit par l'erreur où ils les introduisent, et par la défiance qu'ils savent insidieusement exciter en disséminant de fausses rumeurs ; ils peuvent, dis-je, empêcher que la tranquillité publique ne renaisse, qu'un régime salutaire ne s'établisse, et que la concorde, l'amour du bien général ne rallient tous les citoyens vertueux.
A ces intrigues coupables il ne faut opposer d'égide que la vérité. Que la plus grande publicité soit promptement donnée aux intentions du roi, aux principes de son conseil, aux vues de l'Assemblée nationale; que tous les colons lisent et jugent eux-mêmes en connaissance de cause. Il restera prouvé, jusqu'à l'évidence, qu'on ne désire dans la métropole que leur bonheur, et que le gouvernement n'a omis aucun moyen pour l'effectuer.
Cette publicité est d'autant plus essentielle, qu'il paraît qu'on s'est permis à Saint-Domingue, pour égarer les esprits, de falsifier des pièces importantes, et qu'on est parvenu même à empêcher que ce qui était notoire dans le royaume entier, ne fût connu dans cette île.
Votre lettre du 24 octobre dernier, m'a appris qu'on vous a fait passer comme de moi une dépêche que je ne vous ai jamais écrite, et qui pouvait entraîner les plus funestes conséquences. On doit assurément applaudir à la prudence que vous avez eue de n'y ajouter aucune foi, et je vous invite à être encore en garde contre de semblables embûches.
Il est plus délicat que je m'explique sur l'interception des lettres, parce que je puis aujourd'hui paraître personnellement intéressé à m'élever contre cette mesure immorale, contraire aux principes de l'Assemblée nationale, et funeste à la colonie même.
Quoiqu'on ait cherché à colorer un tel usage de prétextes spécieux, on ne Ta réellement introduit que dans l'espoir de surprendre des dépêches dont la publication pourrait rendre le gouvernement odieux, ou du moins le compromettre, Il en a résulté, au contraire, des témoignages nombreux de la sollicitude de Sa Majesté, pour le bonheur de ses sujets, et du zèle de son ministre à remplir ses vues bienfaisantes. Ceux qui se sont permis les violations que je cite, et que je m'abstiens de caractériser, se sont donc trouvés réduits, pour s'en disculper eux-mêmes, à supprimer une partie des lettres interceptées, à en défigurer d'autres, à interpréter le reste. Ils ont à la vérité du droit abusif qu'ils s'étaient attribué, un autre genre de succès dont ils s'applaudissent peut-être, mais qui n'a pas été moins préjudiciable à leurs concitoyens. Il est aisé de discerner que quelque hommes ont soustrait à la colonie entière la connaissance de ce qui se passait en Europe, de ce qui y concernait ses plus grands intérêts; que la facilité de l'abuser leur a été assurée, et qu'il a dépendu d'eux d'y fermer tout accès à la vérité, en opposant une barrière impénétrable aux avis et aux détails multipliés qui y seraient parvenus sans cesse de la mère-patrie.
Voici, au reste, ce que j'ai répondu sur cet
objet à MM. les oolons résidant à Paris, qui m'en avaient écrit :
« Sans doute, Messieurs, il a résulté des malheurs publics et privés; il peut en résulter de plus grands encore, du genre de recherches qui existe à Saint-Domingue, de la saisie, de l'ouverture et de la publication non seulement du commerce épistolaire des particuliers, mais des dépêches même les plus secrètes, adressées par le ministre, en vertu des ordres du roi, aux administrateurs et autres agents du pouvoir exécutif.
« Je m'en afflige pour le bien ae l'Etat ; mais il s'en faut beaucoup que j'en sois affligé pour moi-même. Certes, je suis loin de craindre què la plus intime de mes pensées soit surprise et divulguée. Il naîtra de cette interception même (qui paraît continuer) une accumulation des preuves les plus fortes que je puisse désirer ; il se trouvera révélé que toutes mes intentions, même secrètes, n'ont été dirigées que vers l'avantage de ma patrie, et surtout vers le bonheur de la colonie que j'ai précédemment administrée.
« Je ne m'occuperai pas même à réfuter le commentaire qu'on a apposé à ma correspondance en l'imprimant. Le texte seul de mes dépêches s'élève assez contre les inductions fausses qu'on a voulu tirer contre les interprétations évidemment forcées qu'on a cherché en vain à y donner. Je m'eu rapporte à un arbitre qui, depuis cinquante-trois ans, ne m'a jamais trompé, une conscience pure; je me repose sur le temps, qui ramène enfin irrésistiblement tous les humains à des jugements équitables; j'en appelle à cette colonie même, que j'ai gouvernée, qui m'est si chère, etc. »
Oui, Messieurs, je l'ai toujours pensé, et je le dirai aujourd'hui plus hautement encore, qu'on cesse de ravir à la colonie qui va s'assembler les moyens d'être instruite de ce qui tient à ses propres intérêts, et je ne suis assurément pas inquiet de son opinion sur ce qui me concerne personnellement.
J'en ai été gouverneur général pendant un peu plus de dix-huit mois : la suppression de l'impôt sur les boucheries, accordée par le roi d'après la demande des administrateurs; des grands chemins, des ponts, des fontaines, des palais de justice, d'autres ouvrages d'utilité publique, construits ou commencés, un tarif pour modérer les frais de procédure : voilà à peu près les seules innovations qui soient émanées de moi.
Toutes les pièces nécessaires pour constater ce qui s'est passé pendant ce laps ae temps à Saint-Domingue s'y trouvent encore rassemblées. Je demande qu'on y recherche jusqu'aux moindres traces des faits qui peuvent constater mes principes; il n'en sortira que des preuves multipliées de mon zèle pour le maintien de l'ordre et de3 lois, de mon exactitude scrupuleuse à les respecter moi-même et à ne m'en écarter jamais.
Qu'on examine avec plus de soin encore, s'il est pousible, mon administration comme secrétaire d'Etat depuis les derniers jours de 1787; qu'on vérifie si, pendant l'année suivante, époque singulièrement remarquable à cet égard, ou même postérieurement, il a été envoyé un ordre illégal dans les colonies; si un seul acte d'autorité y a été prescrit par moi : que tous les registres soient compulsés. J'invite tout citoyen qui croira pouvoir se plaindre à élever la voix et, à produire des preuves. Le résultat de cette perquisition frappera, j'ose le prédire, tout homme impartial ; il s'étonnera qu'on ait précisément cité comme l'époque du despotisme ministériel le temps où
la colonie entière en a été le plus préservée et où elle n'a obéi qu'aux lois; qu'on ait indiqué comme le théâtre du pouvoir arbitraire celle des parties de la monarchie où, depuis plusieurs années, il a été exercé le moins d'actes qui portent ce caractère.
Je désirerais, de plus, que tous les habitants de Saint-Domingue eussent été témoins du premier usage que j'ai fait de la brochure imprimée au Cap, et où mes lettres sur la convocation d'une assemblée coloniale ont été publiées avec des notes d'improbation. J'ai présenté au roi cette espèce d'inculpation ; je l'ai envoyée à l'Assemblée nationale : je me conduirai de même envers les colons; je me bornerai à leur dire, sans y joindre une réflexion : Lisez, pesez et jugez.
Mais comment est-il possible qu'on- ait réussi à leur soustraire la connaissance de plusieurs faits importants pour eux-mêmes et notoires depuis très longtemps dans tout le royaume? que dis-je?.». de pièces même imprimées et auten-thiques, qui ont circulé en France et qui paraissent évidemment n'avoir pu trouver accès dans la colonie qu'elles intéressent le plus.
Il vous avait été annoncé, vous le savez, dès l'année 1788, qu'une assemblée coloniale serait convoquée en 1789, au mois d'octobre.
MM. les députés de Saint-Domingue en furent instruits et en demandèrent la suspension par leur lettre du 29 juillet dernier.
Je vous envoie copiefpou&s pièces jointes,n°\.) de l'article de leur dépêche, relatif à cet objet, et de la réponse que je leur adressai d'après la délibération du conseil d'Etat, et les décisions qui y furent réhdues le 9 août.
Les termes de cette réponse ne sont point équivoques. Il y a été très positivement énoncé que le roi était disposé à autoriser dans l'île de Saint-Domingue (si les député insistaient pour l'obtenir) la convocation d'une autre assemblée composée d'une manière purement élective, mais extraordinaire, provisoire, qui né statuant et tiinnovant sur rien, proposerait à Sa Majesté, ainsi qu'à l'Assemblée nationale, tout ce qui paraîtrait être avantageux à la colonie.
Telle a été la base invariable des résolutions du roi et du conseil d'Etat, où la nouvelle demande dont il s'agit a été plus d'une fois portée et discutée. Sa Majesté permit d'ailleurs, soit à Messieurs les Réputés, soit à Messieurs les colons résidant à Paris, de proposer à son conseil le modè d'organisation ét de composition de cette assemblée qu'ils jugeraient le plus Convenable, le gouvernement n'ayant sur ce point d'autre désir que pouvoir conjecturer le vœu de la colonie' même, et d'y accéder.
Comment Saint-Domingue igndre-t-il que Messieurs les députés et Messieurs les colons résidant à Paris, assistèrent le premier septembre à un Comité solennel de tous les ministres, où ce mode fut longtemps et contradictOirement agité?
A-t-on pu dissimuler que sur tout qui concerné Ce mode, le projet d'ordonnance pour la convocation d une assemblée coloniale que Sa Majesté a bien voulu autoriser, projet que te voiis ai fait passer dès le mois de septembre dernieir, est, je ne dis pas fidèlement, mais littéralement même conforme aux dernières propositions qui furent adressées au conseil d'Etat, et par les députés et par les colons qui s'étaient enfin concertés et n'avaient plus qu'un vœu t
On doit, sans doute, s'étonner que des faits de ce genre et aussi constatés, soient restés jusqu'à ce jour ignorés de la colonie ; qu'on ne lui ait point
transmis la connaissance des demandes faites par ses propres députés, des réponses qu'ils ont reçues d'après les décisions du roi et de son conseil. Mais il paraît plus incroyable encore que le mémoire (voyez pièces jointes, n° II) adressé par les ministres à l'Assemblée nationale, le 27 octobre (mémoire qui établit les mêmes principes, mais qui d'ailleurs a été imprimé et répandu avec profusion dans le royaume entier), n'ait pu pénétrer dans l'île de Saint-Domingne. Des hommes dignes de foi me l'ont néanmoins assuré, et je ne trouve pas en effet dans les gazettes coloniales, qu'il en ait été fait même une simple mention.
Il importe que les pièces qUe je viens de citer soient connues dans la colonie que vous administrez; il importe qu'elle soit instruite, que le roi, dès le mois de septembre, avait consenti à tout ce qu'il pouvait réellement lui accorder sans le concours de l'Assemblée nationale; il importe qu'on y apprenne que l'Assemblée nationale elle-même avait été consultée sur l'envoi de ses décrets dans nos possessions éloignées, et qu'on lui avait peint l'inconvénient d'y promulguer plusieurs de ses décisions, qui, tendant à assurer le bonheur et la liberté des Français, produiraient peut-être néanmoins une révolution funeste dans les pays où l'esclavage est établi.
Qu'on connaisse donc enfin, Monsieur, qu'elle a été la sollicitude touchante du roi pour ses colonies; que celle de Saint-Domingue surtout n'ignore plus les soins qui avaient été pris pour lui fournir les moyens de proposer à l'Assemblée nationale, ainsi qu'au monarque, lès changements de régime qu'elle croirait désirables. Si elle eût profite de ce bienfait, elle én recueillerait déjà les friiits ; les demandes adressées à la métropole y seraient parvenues, y auraient été accueillies et peut-être depuis longtemps le calme lui serait rendu, un ordre nouveau y régnerait. On doit, sans doute, regretter que les mesures inspirées à Sa Majesté par sa prévoyance paternelle, ne servent, pour ainsi dire, qu'à l'attester, et soient d'ailleurs restées sans effet. Il est difficile de concevoir par quel art on est parvenu à inspirer aux citoyens de Saint-Domingue, une défiance peu raisonnable contre le gouvernement, qui n'avait évidemment d'autre vue que de favoriser la convocation de représentants librement élus par la colonie, et dé lui procurer l'avantage de discuter elle-même ses intérêts.
On peut donc avoir quelqués motifs de craindre aujourd'hui que ceux qui ont déjà réussi à rendre suspecte la convocation autorisée par le roi, n'usent des mêmes suggestions: qu'ils ne cherchent encore à séduire, pour ainsi dire, l'opinion publique, pour prévenir pareillement les effets salutaires que doivent produire les décrets de l'Assemblée nationale, et pour empêcher une seconde fois la réunion si désirable des représentants de toutes les parties de la colonie.
Cette considération, je vous l'avoue, m'avait fait yivement désirer que la proclamation du roi vous fût beaucoup plus tôt envoyée. Je regardais comme très utile que les résolutions de l'Assemblée pussent vous parvenir avant qu'elles fussent même présumées au delà des mers, avant que des esprits mal intentionnés pussent en avoir acquis connaissance, et s'être efforcés de leur donner d'avance une fausse interprétation. Deux bâtiments, destinés à les porter, sont armés depuis un mois dans le port de Brest. J'ai écrit plusieurs fois, soit au président de l'Assemblée nationale, soit au comité chargé de rédiger et de lui présenter l'instruction :
mais les lenteurs indispensablement attachées aux délibérations des corps nombreux, les occupations importantes et multipliées qui prennent tous les momentsdesreprésentantsdelanation, ont trompé mon espoir.
Il faut y remédier, Monsieur le comte, autant qu'il dépend de nous. Ne perdez pas un instant, dès la réception de mes dépêches, pour faire imprimer, pour répandre, comme je vous l'ai déjà indiqué, tout ce qui émane du roi et de l'Assemblée nationale, et pour en constater l'authenticité. Je vous demande personnellement et avec la plus vive instance, de donner la même publicité à cette lettre et aux deux pièces qui y sont jointes. Cette publicité est l'arme la plus victorieuse que l'honneur puisse opposer aux armes viles qu'emploient la malveillance et la délation.
Communiquez d'ail leurs à quiconque le désirera ma correspondance entière, soit avec vous, soit avec nos prédécesseurs. Les pièces existent. Que les faits parlent eux-mêmes, mais qu'ils soient connus, mon vœu sera rempli. Les scrutateurs les plus sévères, et même les moins impartiaux, se trouveront forcés de reconnaître, et que les intentions du roi ont toujours été paternelles, et que celles de son ministre n'ont jamais cessé d'avoir pour objet le bien de la colonie.
Les bornes d'une lettre m'empêchent d'entrer avec vous dans d'autres détails du même genre, mais qui ne m'ont pas été pareillement confirmés. • On dit que l'artifice a été poussé jusqu'à vouloir faire soupçonner aux colons que le gouvernement avait cherché à favoriser une commotion sur laquelle je sens même qu'il serait dangereux de m'expliquer, puisque je vous prie de rendre ma dépêche publique. Ces fables absurdes, et mille autres débitées peut-être au delà de l'Océan, par
quelques hommes intéressés à la confusion générale et à la dissolution de l'ordre social, méritent-elles qu'on s'occupe sérieusement à les refuter ? Je vous le répète, pour dissiper ces nuages, faites luire l'éclat de la vérité. Qu'on s'indigne enfin du voile qui l'a trop longtempscou verte; que la colonie le déchire elle-même ; qu'elle sonde les fondements des allégations improbables qui y ont été répandues. Il lui sera démontré, par ses propres recherches, que l'unique vue du gouvernement, en attendant qu'un autre ordre de choses s'établisse, a été de contenir les humains, quels qu'ils fussent, sous l'empire des lois et des usages qui les avaient antérieurement régis. Elle sentira qu'il n'a pu être assez insensé pour désirer ie désordre universel et la subversion des règles. Quedis-je? il n'a pas dissimulé qu'il eût voulu au contraire, pour le bonheur et pour la tranquillité des colonies,.que l'ancien régime y pût subsister jusqu'à ce que, de concert avec la métropole,elles eussent elles-mêmes posé les bases de la nouvelle constitution qu'elles jugeront devoir leur être la plus avantageuse.
Dans les circonstances, présentes, il m'a paru utile, Monsieur le comte, que je m'expliquasse aussi franchement avec vous sur les principes qui ont dirigé Sa Majesté et sur ceux de son conseil. On y a constamment applaudi à la circonspection, à la sagesse et au patriotisme qui ont caractérisé votre conduite.
Le roi en a senti le prix et m'ordonne de vous en témoigner sa satisfaction. Permettez qu'aux éloges qui vous sont dus, je joigne personnellement les assurances de l'estime et de l'attachement sincère avec lesquels j'ai l'honneur d'être, Monsieur le comte, votre très humble et très obéissant serviteur.
Pour copie : La Luzerne.
Extrait de la lettre de MM. les députés de Saint - Domingue au ministre de la marine, en date du 29 juillet 1789.
N°I-Ils demandent suspension absolue de toute assemblée colo-niale, parce que, quelle qu'en puisse être l'organisation, la colonie ne veut et ne doit la tenir que des décrets de l'Assemblée nationale.
L'assurance positive qu'aucune innovation relative à l'administration ou à tout autre objet ne sera faite, même provisoirement à Saint-Domingue, sans le concours de ses représentants.
Pour copie : La Luzerne.
Extrait de la réponse du ministre, en date du 11 août 1789, d'après les décisions du conseil d'Etat du 9 du même mois.
Sa Majesté a consenti à la suspension que vous avez demandée de toute assemblée coloniale, parce que, quelle qu'en puisse être l'organisation, la colonie ne veut et ne doit la tenir que des décrets dé l'Assemblée nationale.
J'ai prévenu, néanmoins, le roi et son conseil, que, depuis votre lettre écrite, vous m'aviez verbalement témoigné que vous lui demanderiez peut-être une assemblée extraordinaire provisoire composée d'une manière purement élective, qui, ne statuant et n'innovant sur rien, lui proposerait, ainsi qu'à l'Assemblée nationale, ce qui paraîtrait être de l'intérêt de la colonie. J'ai ajouté que cette requête, si vous y insistiez, méritait, surtout dans les circonstances actuelles, d'être accueillie.
Vous avez demandé l'assurance positive qu'aucune innovation relative à l'administration ou à tout autre objet ne sera faite, même provisoirement, à Saint-Domingue, sans le concours de ses représentants.
Le roi a décidé que cette assurance devait vous être donnée ; il a pensé que c'était à l'Assemblée nationale, qui a admis les députés de Saint-Domingue, à déterminer quelles innovations doivent avoir lieu dans le régime de cette colonie et que, jusqu'à ce qu'elle ait examiné cette question si importante, le régime doit rester et être maintenu tel qu'il a été de tout temps, ou du moins depuis la paix dernière.
Pour copie : La Luzerne
n n.
Mémoire adressé par les ministres du roi à VAssemblée nationale, le
Les ministres du roi ont exposé à l'Assemblée nationale, le 14 octobre, leurs doutes sur quelques articles qu'elle a décrétés; le même motif, leur attachement à ses principes, leur impose de nouveau la nécessité de recourir à elle et de lui demander des éclaircissements sur ce qui concerne les colonies.
Plusieurs îles florissantes et de vastes possessions continentales appartiennent à la France dans les trois autres parties de l'univers.
Leur climat, leurs productions, l'état civil, et jusqu'à l'espèce physique du plus grand nombre des hommes qui peuplent et cultivent nos colonies, les rendent absolument dissemblables de la métropole.
Leur organisation intérieure, les lois qui les régissent, le genre de leurs besoins, leurs rapports commerciaux, soit avec les nations étrangères, soit avec les négociants du royaume, l'administration de leur police, celle de leurs finances, le mode et la nature des impositions qu'elles supportent établissent encore des disparités frappantes entre elles et les provinces européennes île la France.
La plupart de ces différences tiennent à la nature même et à l'essence des choses; rien ne peut les changer : toutes les nations de l'Europe l'ont senti ; toutes regardent leurs possessions éloignées comme des Etats distincts et dépendants de la métropole; toutes ont été contraintes à leur donner d'autres lois que celles de la mère-patrie, en cherchant à les y assimiler, autant qu'il serait possible, par les formes du gouvernement et par l'analogie de la législation.
Ces considérations ont fait présumer au roi que l'Assemblée nationale s'occuperait séparément d'une portion de la monarchie, aussi importante et aussi dissemblable de ses autres parties; il avait résolu qu'il n'y serait fait ni toléré d'innovation en aucune manière, jusqu'à ce que l'Assemblée nationale eût spécialement décrété le régime et les lois qui seront jugés convenir à ces contrées. Telle a été la réponse que le ministre de la marine a rendue par ses ordres, le 11 août dernier, à plusieurs des demandes qu'avaient présentées MM. les députés de Saint-Domingue.
Depuis cette époque, l'Assemblée nationale a rendu beaucoup de décrets, et ils ont été envoyés, ou vont l'être, dans toutes les provinces du royaume : doivent-ils être transmis et exécutés de même dans les colonies, quoique l'Assemblée nationale ne l'ait point exprimé, et que leurs députés ne l'aient point requis?
On croit nécessaire de faire observer à l'Assemblée nationale, que plusieurs de ses décisions qui tendent à assurer le bonheur et la liberté des français, ne seraient pas sans danger, qu'elles produiraient peut-être une révolution subite et funeste dans des pays où les dix onzièmes des humains, en cessant d'être esclaves, resteraient dénués de toute propriété et de tout moyen de subsistance, que 1 exécution de divers autres décrets serait, dans l'état présent des choses, absolument impraticable, parce qu'il n'existe aux colonies aucune municipalité ou corporation; les citoyens qui s'y trouvent disséminés sur des habitations non seulement séparées, mais assez éloi-
gnées les unes des autres, ne pourraient même qu'en fort peu de lieux se réunir pour tenir des assemblées permanentes, et vaquer aux détails journaliers d'une administration municipale.
Il est une foule d'autres réflexions qui tiennent, pour ainsi dire, à la localité, et qu'on pourrait également soumettre à l'Assemblée nationale. Elle est priée de peser dans sa sagesse cette question de la plus naute importance, et de faire connaître quelles ont été ses intentions.
2° Ces contrées séparées de la métropole par de grandes distances, exigent encore plus que les provinces du royaume, qu'il soit pourvu aux objets d'utilité publique et urgents, par des règlements provisoires. Le rôi a reconnu depuis longtemps qu'il ne pouvait exercer par lui-même ce pouvoir ; des lois anciennes et revêtues de toutes les formes judiciaires, l'ont conféré aux deux administrateurs.
Dans quelque main qu'on crût devoir le placer désormais, il importe qu'il réside au sein de la colonie même; et il serait du plus grand danger que l'exercice en restât un seul instant entièrement suspendu.
Entre beaucoup de raisons qui pourraient être allégués à l'appui de cette assertion, on se bornera à exposer quelques-unes de celles qui sont les plus puissantes, et qui dérivent de la disparité même des colonies aux provinces du royaume. Des fléaux imprévus, et dont en France on se forme à peine une idée, des tremblements de terre, des ouragans, ravagent trop fréquemment,, et en peu d'instants, ces riches contrées; elles ont été plus d'une fois menacées de la guerre, et même attaquées par l'ennemi, avant qu'on fût instruit en Europe de leur danger. Il paraît indispensable que des remèdes prompts puissent toujours être apportés à des maux urgents, qu'il existe des moyens d'établir l'ordre en ces moments critiques, d'appeler les secours nécessaires, de subvenir aux besoins, ou de pourvoir à la sûreté des citoyens et des esclaves. Il serait funeste aux colonies et à la métropole elle-même, que qui que ce soit ne fût autorisé à rendre sur-le-champ les règlements provisoires que nécessitent de telles circonstances.
3° Quant à l'ordre judiciaire, les appels des jugements du tribunal terrier supprimé en 1787, et ceux des ordonnances rendues par les administrateurs, devaient être portés au conseil du roi; beaucoup de causes de ce genre y sont pendantes en ce moment, mais on pense que les décrets de l'Assemblée nationale autorisent provisoirement le conseil de Sa Majesté à connaître de ces affaires contentieuses.
Pour copie : La Luzerne.
XX.
Extrait d'une lettre de M. le commandeur de Glandèves, commandant de la marine à Toulon, à M. le comte de La Luzerne, en date du 10 mai 1790.
Monseigneur, Messieurs les lieutenants et sous-lieutenants de vaisseau ont reçu de très gros paquets timbrés Assemblée nationale, contenant plusieurs exemplaires : 1° du n° 116 du Journal de Paris ; 2° d'une feuille intitulée : la Raison finit toujours par avoir raison; 3° d'une autre feuille intitulée: Opinion de M. le marquis de Gouy d'Arsy,- député
de Saint-Domingue, prononcée à VAssemblée nationale le 28 mars 1790.
Tous ces écrits vous sont sans doute connus; ils n'ont point été répandus, quoique messieurs les officiers soient invités à les rendre publics par un billet anonyme renfermé dans chaque paquet. Je puis vous assurer, Monseigneur, que rien ne pourra jamais porter aucun membre à changer ses dispositions à votre égard, ni diminuer le zèle pour le service du roi.
Pour copie : La Luzerne.
Nô XXI.
Copie d'une lettre de M. le comte de La Luzerne à MM. les députés de Saint-Domingue, en date du 7 août 1789.
J'ai rendu compte au roi, en son conseil d'Etat, Messieurs, de la lettre que vous m'avez fait l'honneur de m'adresser le 4 du courant, tendant à ce qu'il soit pris des précautions de surveillance et de sûreté rélativement à l'avis que vous a
transmis M. de....., l'un d'entre vous, des trames
ourdies contre la tranquillité et la fidélité de la colonie de Saint-Domingue.
Il a été décidé qu'on ne pouvait, dans les circonstances présentes, enjoindre d'arrêter les deux personnes désignées, ni défendre l'introduction des livres et brochures qui circulent depuis quelque temps, ni même s'opposer au retour des noirs libres ou esclaves de la colonie, attendu que ces voies d'autorité pourraient encourir la censure générale, quelle que fût l'importance des motifs qui y auraient donné lieu, dans un temps surtout où la nation a les yeux ouverts sur tout ce qui ne porterait pas le caractère de la légalité.
Mais en même temps, Sa Majesté m'a chargé d'envoyer à M. le comte de Peynier, gouverneur général de Saint-Domingue, les dénonciations
de M. de...... afin qu'il veille de très près les
deux particuliers suspects et signalés dans cette dénonciation, et qu'il ne néglige aucun des moyens justes et légaux qu'il sera possible d'employer, pour prévenir les troubles que l'on voudrait exciter dans son gouvernement. Je lui fais passer les ordres les plus précis à ce sujet, et je connais trop son zèle pour ne pas être assuré d'avancede l'efficacité ainsi que de la sagesse de ses mesures. Je joins copie de ma dépêche à ce gouverneur général.
J'ai l'honneur d'être avec un sincère attachement, Messieurs, votre, etc.
Pour copie: La Luzerne N° XXII.
Copie de la lettre écrite par M. lé ôômte de La
Luzerne à M. le comté de Peynier, en date du
7 août 1789.
Le roi, Monsieur, et le conseil d'Etat de Sa Majesté, me chargent de vous faire passer la dénonciation ci-jointe de l'un de Messieurs les députés à l'Assemblée nationale, sur des projets dangereux contre la colonie, dont sont violemment soupçonnés les deux particuliers désignés et signalés dans la dénonciation dont il s'agit.
S'il y avaiteu quelque commencement de preuve positive à l'appui de cette suspiGion, le gouver-
nement aurait donné ou vous donnerait des ordres pour faire arrêter les agents d'un complot aussi punissable. Mais du moins l'objet est d'une si grave importance, qu'il , mérite toute votre attention, toute votre surveillance, et les précautions les plus assurées, pour prévenir et déconcerter jusqu'à la moindre tentative de soulèvement. Je connais votre zèle, et en même temps votre sagesse. Je me repose également sur l'une et sur l'autre, et je vous annonce d'avance que le roi approuvera tout ce que vous aurez cru devoir faire en agissant d'après ce double mobile. Je vous prie de m'instruire promptement, et à mesure de vos recherches, de ce que vous aurez appris, en un mot de tout ce qui pourra concourir à éclairer et tranquilliser sur l'objet des alarmes de Messieurs les députés.
J'ai l'honneur d'être, eto.
Pour copie : La Luzerne
N° XXIIi.
Copie de la lettre de MM. les députés de Saint-Domingue à M. le comte de La Luzerne, en date du 18 septembre 1789.
Monsieur le comte, Les députés de Saint-Domingue ont l'honneur de vous envoyer le règlement provisoire sur la convocation d'une assemblée coloniale à Saint-Domingue, avec les faibles changements qui sont convenus entre MM. les colons de Paris et la députation ; nous vous prions, Monsieur le comte, de vouloir bien nous en procurer la prompte exécution ; la sûreté de la colonie exigeant qu'elle prenne toutes les mesures nécessaires pour le maintien de l'ordre, que les circonstances actuelles pourraient altérer.
Nous sommes avec respect, Monsieur le comte, vos très humbles ët très obéissants serviteurs.
Signé : Les députés de Saint-Domingue ; Le Gar-deur de Tilly ; le marquis de Perrigny; DuVal-Monville ; Bodkin Fitz-Gérald ; Magallon ; de Villeblanche ; le comte O'Gorman, président; le chevalier de Marmé, secrétaire.
Pour copie : La Luzerne.
xxiv.
Règlement provisoire sur la convocation d'une assemblée coloniale à Saint-Domingue.
Sa Majesté, écoutant le vœu des habitants de Saint-Domingue, pour obtenir la Convocation d'assemblées complètes et régulières, pour délibérer librement dans toute l'étendue de la colonie, à l'effet de pourvoir au maintien de l'ordre, de prévenir les troubles, d'assurer à tous les habitants une tranquillité justement désirable, et de les mettre, par ce moyen, à portée de veiller eux-mêmes à leurs propres intérêts, a ordonné et ordonne Ce qui suit :
Art. Ie'. Aussitôt après la réception de la présente ordonnance, les général et intendant la feront enregistrer au conseil, et l'enverront incessamment aux marguilliers -de toutes les paroisses de la colonie.
Art. 2. La présente ordonnance sera, SUr-lé-champ, insérée dans la feuille périodique de la colonie.
Art. 3. Le premier dimanche qui suivra la réception de ladite ordonnance par le marguillier, il sera tenu de la faire publier au prône, à sou de trompe ou de tambour, afficher partout où besoin sera, eu la manière accoutumée, pour lui donner la plus grande publicité dans, toute l'étendue de la paroisse, afin qu'aucun de ceux qu'elle concerne n'en prétende cause d'ignorance.
Art. 4. L'assemblée de chaque paroisse se formera à la huitaine du jour où elle aura été annoncée au prône, publiée et affichée : elle se tiendra au presbytère ou à l'église.
Art. 5. Les dernières assemblées se formeront en la manière accoutumée, et ceux qui, jusqu'ici, ont eu le droit d'y assister, s'y rendront.
Art. 6. L'assemblée se nommera par la voie du scrutin, et non autrement, un président et un secrétaire à la pluralité des voix.
Art. 7. L'assemblée paroissiale, ainsi organisée, fera le choix, aussi par la voie du scrutin et non autrement, de six électeurs. Il sera nécessaire que chaque électeur réunisse plus de la moitié des suffrages de l'assemblée.
Art. 8. Nul ne pourra être élu en qualité d'électeur, s'il n'est propriétaire planteur, ayant un bien en culture, avec vingt nègres recensés, ou une propriété foncière équivalente à cent mille livres.
Art. 9. Toutes personnes absentes ou non de la colonie, ayant droit de voter dans lesdites assemblées, pourra s'y faire représenter par un fondé de pouvoir ad hoc, et néanmoins, si elle n'a pas envoyé son fondé de pouvoir ad hoc, son fondé de procuration ordinaire pourra le représenter.
Art. 10. Tout propriétaire, porteur de procurations, n'aura qu'une voix, outre la sienne, quel que soit le nombre de procurations dont il sera porteur, et tout procureur fondé qui n'aura pas ae propriété n'aura qu'une voix, quel que soit le nombre de procurations dont il sera changé.
Art. 11. Le propriétaire de plusieurs habitations situées dans la même paroisse, ne pourra néanmoins y prétendre à plus d'une voix.
Art. 12. Les électeurs nommés seront tenus d'accepter on de refuser : au cas d'acceptation, ils prêteront serment de bien et fidèlement remplir leur mission ; au cas de refus, il sera procédé à une nouvelle nomination. Un extraitdu procès-verbal sera délivré à chaque électeur.
Art. 13. Chaque assemblée se prorogera, pour former les cahiers d'instructions qu'elle voudra remettre à ses électeurs, et elle sera tenue de les clore dans la quinzaine ; les électeurs se transporteront, munis de leurs cahiers, au chef-lieu de leurs sénéchaussées.
Art. 14. Les instructions auront pour objet tout ce qui concerne l'intérêt public en général, celui de chaque sénéchaussée, et chaque paroisse en particulier, sous quelque rapport que ce soit.
Art. 15. Les électeurs se rendront dans la huitaine du jour de leur nomination, au chef-lieu de leur sénéchaussée, et ils nommeront un président et un secrétaire par la voie du scrutin, après quoi ils feront, dans la quinzaine, la réduction de leurs cahiers en un seul, et nommeront entre eux, par scrutin, des députés dans le nombre prescrit dans l'article ci-après.
Art. 16. Afin de donner une égale représentation aux trois parties, du nord, dé l'ouest et du sud, la sénéchaussée du Gap nommera huit députés, celle du Fort-Dauphin huit, celle du Port-de-Paix huit, celle du Port-au-Prince huit, celle de
Saint-Marc huit, celle de Jacmel huit, celle des Cayes six,celle du Petit-Goave six, celle de Saint-Louis six, celle de Jérémie six.
Art. 17. Les députés nommés se rendrontau Port-au-Prince, capitale de la colonie ; là ils formeront une assemblée générale, et s'occuperont des intérêts de la colonie.
Art. 18. L'assemblée ouverte, elle s'occupera de la nomination d'un président, d'un vice-président, et de tel nombre de secrétaires qu'elle jugera convenable, au scrutin et non autrement.
Art. 19. L'assemblée vérifiera les pouvoirs des députés et jugera de leur validité.
Signé: le marquis de Perrigny, Duval-Monville, Gocherel, Laborie, Bodkin Fitz-Gérald, Courre-jolles, Le Gardeur de Tillv, Gérard, le chevalier de Marmé, secrétaire, et président ea l'absence de M. le comte O'Gorman, Magallon, de Ville-blanche.
Pour copie : La Luzerne.
PRÉSIDENCE DE M. L'ABBÉ SIEYÈE.
Séance du
La séance est ouverte à 9 heures du matin.
, secrétaire, fait lecture du procès-verbal de la séance du 16 juin. Il est adopté.
, autre secrétaire, lit le procès-ver-bal de la séance du 17 juin au matin.
, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance du même jour, au soir.
Ces deux procès-verbaux n'éprouvent pas de contradiction.
,secrétaire, lit ensuite le procès-verbal de la séance d'hier* 18juin.
l'interrompt à l'endroit où est rapporté le décret rendu hier au sujet de M. le vicomte de Mirabeau.
Je demande la permission d'établir, soit par la tradition de cette Assemblée,soit par le
vice de cette rédaction, que le décret relatif à M. de Mirabeau le jeune n'a pas été rendu
tel qu'il vient d'être lu. Il n'est pas possible que l'Assemblée ait oublié que l'un de ses
plus célèbres décrets, dans les circonstances qui ont ouvert l'Assemblée nationale, est celui
qui établit l'inviolabilité de ses membres. Il n'est pas possible que l'Assemblée ait oublié
qu'indépendamment de la sauvegarde de la loi, les députés de l'Assemblée nationale ont encore
la sauvegarde de leur caractère. L'Assemblée n'a pas pu charger le pouvoir exécutif de la
sûreté d'un de ses membres; elle n'a pas pu placer M. de Mirabeau le jeune entre le double
danger d'une escorte et de son délaissement: elle n'a pu
J'appuie de tout mon pouvoir le décret proposé par M. de Mirabeau l'aîné; mais, en qualité de secrétaire, je dois me justifier et assurer que le décret relatif à M. de Mirabeau le jeune a été adopté par l'Assemblée dans les termes que je viens de rapporter. Quant au fond du décret, si la sollicitude d'un frère n'est pas encore rassurée, l'intérêt qu'il inspire, les principes qu'ils rappellent doivent nous faire franchir tout espace, et je dois passer sur l'inconvénient de réformer un de nos décrets; je crois que la proposition de M. le comte de Mirabeau doit être adoptée.
La proposition de M. le comte de Mirabeau est décrétée en ces termes :
«L'Assemblée rappelle aux municipalités le décret qui a prononce l'inviolabilité de ses membres et décrète que M. de Mirabeau le jeune viendra immédiatement rendre compte de sa conduite. »
Le procès-verbal est ensuite adopté.
, secrétaire, donne lecture d'une lettre des officiers municipaux de Perpignan qui annoncent la mise en liberté du maire de cette ville. Elle est ainsi conçue t
« Du
« Messieurs,
M. le marquis d'Àguilar, notre maire, nous a été rendu cejourd'hui à cinq heures de l'après-midi. Dès l'instant que le régiment de Touraine a eu avis des détachements de son corps, que les cravates de ses drapeaux lui étaient apportées avec sûreté, une députation est venue à onze heures et demie du matin à la maison commune, nous apprendre que, quoique ce précieux dépôt ne fût pas pas encore rendu, le corps ne voulait point prolonger la captivité de M.d'Aguilar, et qu'il désirait le conduire chez lui en triomphe. La fête a été très brillante, et encore plus sentimentale. La municipalité, accompagnée de la troupe nationale, a reçu au bout du premier pont de la citadelle son chef, soutenu par les deux commandants des régiments de Touraine et de Verman-dois, marchant à la tête de ces deux corps. Ah ! qu'il était beau de voir ce respectable vieillard s'attendrir à la vue de nos concitoyens, qui accouraient partout en foule, le comblaient de bénédictions, et versaient comme nous des larmes de joie et de tendresse ! Non, jamais spectacle n'a été plus délicieux. Les officiers, tous les soldats mêlaient leurs pleurs, leurs cris d'allégresse avec ceux de nos habitants ; et le bruit des nombreuses décharges d'artillerie annonçaient à la ville et aux campagnes l'heureuse délivrance, le triomphe du citoyen vertueux, qui avait mieux aimé
engager sa parole et se livrer lui-même, que sa patrie à aucun danger.
« Nous attendons demain, Messieurs, l'arrivée des drapeaux. Nos frères de Castelnaudary les accompagnent; ils nous les rendront: ils ont été nos libérateurs en arrêtant M. de Mirabeau qu'ils détiendront, jusqu'à la réception des ordres de l'Assemblée auguste de la nation. Nous espérons que la tranquillité renaîtra bientôt dans notre ville. Tout nous semble présager cette félicité.
« Nous sommes avec le plus profond respect, « Messieurs,
«Vos très humbles et très obéissants serviteurs, « Les officiers municipaux de Perpignan. »
(L'Assemblée ordonne l'impression de cette lettre et son renvoi aux comités des rapports et militaire.)
, secrétaire, donne lecture de la lettre suivante adressée à M. le président par M.Necker :
« Monsieur le Président,
«Le roi, à qui j'ai rendu compte d'une lettre des officiers municipaux de la ville de Gex, m'a ordonné d'en donner connaissance à l'Assemblée nationale; elle y verra qu'une précieuse assistance, fournie par la République de Genève, vient de préserver ie pays de Gex de la plus affreuse détresse ; elle verra pareillement que, malgré l'excessive cherté du blé dans le petit territoire de Genève, les magistrats de cette république, en délivrant 1,400 quintaux de blé au pays de Gex, ont simplement demandé la restitution de la même quantité quelques mois après la récolte ; enfin l'Assemblée nationale apercevra par cette conduite.de Messieurs de Genève, qu'ils s'obstinent à vouloir s'unir d'intérêt et d'affection aux circonstances pénibles de la France et qu'ils ne sont point découragés, par la délibération qui les a rejetés, lors-qu'avec tant d'empressement ils désiraient de s'associer à notre contribution patriotique.
« J'ai l'honneur d'être, etc. »
Lettre de MM. les officiers municipaux de Gex à M. le premier ministre des finances.
« Monsieur,
« Nous ne pouvons nous dispenser de vous faire connaître la situation affreuse où nous nous trouvons relativement aux subsistances; le blé est tout à coup monté au prix le plus haut et est devenu d'une rareté extrême ; le peuple des villes de Bresse et de Bugey s'est opposé à tous achats dans leurs marchés et au transport de tout envoi des grains destinés pour nous ; pendant deux semaines la circulation a été absolument interrompue du côté du Bugey et nous n'avons dû l'extraction de la plus: petite quantité de grains du côté de Saint-Claude, qu'aux mesures pleines de zèle et de sagesse employées par la municipalité de cette ville, pour réprimer deux insurrections auxquelles le peuple s'est livré les 22 et 24du mois dernier; la municipalité d'Orgelet a aussi fait les meilleures dispositions et montré beaucoup de fermeté pour l'exécution des décrets sur la libre circulation des grains ; des circonstances aussi critiques nous ont rappelé le souvenir des bienfaits de la République de Genève, qui, en 1770 et cette année dernière, nous avait fait sentir les effets de son amitié généreuse en pareille occasion ; elle a bien voulu à l'instant
nous accorder ses bons offices et prêter au pays, à la forme des convenances ci-jointes, la quantité de 750 coupes, soit 800 quintaux de blé, et nous pouvons assurer quesans ce prompt secours, nous aurions été réduits aux extrémités de la famine ; nous ne pouvons rendre à la République assez de reconnaissance d'un service aussi essentiel et nous désirerions bien que Sa Majesté lui en marquât sa satisfaction.
« P.-S. — Depuis notre lettre écrite, nous apprenons que la République de Genève veut bien accorder encore au pays 600 quintaux de blé ; c'est un nouveau motif de gratitude de notre part çnvers cet Etat voisin. »
annonce que les Génevois ont également fourni des secours et un prêt de 600 quintaux de blé à la ville de Sain^Claude, qui se trouvait dans une extrême disette. Il demande que ces actes de générosité soient mentionnés dans le procès-verbal.
Cette proposition est adoptée, et l'Assemblée décrète :
« Qu'il sera fait des remerciements à la République de Genève, et que M. le premier ministre des finances sera chargé de les lui faire parvenir. »
, député d'Aix. L'Assemblée nationale, par un de ses décrets relatifs à la division du royaume, a laissé à la ville d'Aubagne la faculté d'opter entre le district d'Aix et celui de Marseille. Cette ville, oubliant que cette faculté devait avoir un effet définitif, a pourtant osé délibérer qu'elle optait pour le district de Marseille, bien entendu que cette décision ne serait que provisoire.
Cette délibération étant contraire aux décrets de l'Assemblée, je demande qu'elle soit retranchée du procès-verbal du 17 de ce mois, que le mot provisoire soit rayé de votre décret, et, qu'il soit ait simplement :
« L'Assemblée nationale décrète que la ville d'Aubagne fera partie du district de Marseille. »
(Cette modification est miseaux voix et adoptée.)
La commune de Gemenos, qui avait le choix du district auquel elle voudrait se rattacher, s'est prononcée pour Aix. Je demande que les pièces relatives à cette affaire soient renvoyées au comité de Constitution.
(Le renvoi est prononcé.)
M. Couvreu de Nesberg, président des conseils municipaux de la ville de Vevay, canton de Berne, en Suisse, prie l'Assemblée nationale d'agréer sa déclaration et sa soumission de la somme de trois mille livres qu'il présente comme sa contribution patriotique, à raison des fonds mobiliers qu'il possède en France, comme un hommage de ses sentiments et une faible preuve de ses vifs désirs pour la prospérité de cet Empire. L'Assemblée reçoit avec satisfaction l'expression de ses sentiments et son offre, et elle ordonne qu'il en sera fait mention honorable dans son procès-verbal.
M. Houdon, sculpteur, prie l'Assemblée d'accepter le don des bustes de Washington et de Franklin l'Assemblée reçoit ces nouveaux témoignages de ses talents et de son patriotisme, et charge son président de lui en témoigner sa satisfaction.
M. Dupré fait don à l'Assemblée de deux médailles en bronze représentant Benjamin Franklin.
M. Bory, membre de l'académie des sciences, fait hommage de la suite de son travail sur l'administration de la marine et des colonies ; cet hommage, ainsi que les précédents, sont reçus d'elle avec bienveillance.
présente une adresse de la municipalité de la ville de Saint-Flour, capitale du haut pays d'Auvergne, et une délibération du conseil général de cette municipalité, en date du 28 mai dernier, portant protestation de respect et réitération d'adhésion aux décrets de l'Assemblée nationale sanctionnés par le roi, et soumission d'acquérir des biens nationaux pour deux millions.
expose qu'il a précédemment rendu compte à l'Assemblée nationale, dans la séance du jeudi 10 de ce mois, de la fédération du régiment des dragons de la reine, en garnison-à Laon, avec la garde nationale de cette ville le 6 de ce mois, et des heureux effets de cette union ; que le récit fait dans différents journaux des détails dans lesquels il est entré, tend à l'inculper auprès de ce régiment, tandis qu'ils ont obtenu de l'Assemblée nationale elle-même des marques non équivoques d'applaudissement, et excite sa réclamation ; qu'il lui a même été écrit de la part de ce régiment, pour le prier d'être, auprès de l'Assemblée, l'interprète des véritables sentiments dont il n'a cessé d'être animé et dont il a été lui-même le témoin, ainsi que de sa soumission à la loi et à l'exacte subordination qu'elle exige, et de son entière adhésion aux décrets de l'Assemblée; il prie l'Assemblée nationale de se rappeler ces faits, et d'ordonner qu'il soit fait une mention honorable dans le procès-verbal de ce jour des sentiments vraiment patriotiques qui animent ce régiment.
(Gette motion est miseaux voix et décrétée.)
On passe à l'ordre du jour, qui est la discussion sur la demande faite la veille à l'Assemblée par M. le premier ministre des finances, pour autoriser la Caisse d'escompte à verser pour trente millions de billets au Trésor royal.
, rapporteur. Vous avez entendu, Messieurs, la lecture du mémoire de M. Necker ; votre comité des finances en avait reçu copie. Il ne faut pas Regarder comme un emprunt la somme demandée pour le service du Trésor public, mais comme un acompte des assignats que l'Assemblée a décrété devoir lui être remis. Personne ne se dissimule les besoins perpétuels du Trésor public.Il résulte des états remis que la dépense est de deux millions par jour ; si vous le voulez, on vous en rendra compte.
Il faut accorder les trente millions qu'on vous demande ; mais il faut prendre des précautions pour savoir à quoi on les emploie : ce serait être mauvais citoyen que de refuser ce qui est nécessaire ; mais ce serait être mandataire infidèle que de ne pas justifier la réalité de leur acquit. D'après cela, j'aurai l'honneur de vous proposer diverses formes que je crois nécessaires. Ue n'est pas pour la première fois que nous de-
mandons des renseignements, et cependant jamais on ne nous ait autre chose, sinon qu'il faut de l'argent. Nous avons toujours accordé avec confiance, et cela venait de ce que, dans l'art des finances, nous ne pouvions saisir le véritable point de la difficulté. On ne nous présentait jamais que des aperçus, et, dans ces aperçus, on n'apercevait rien. Il se trouve des erreurs frappantes entre ces aperçus et les bordereaux.
Si on vous avait donné les détails, vous connaîtriez des payements qui peut-être n'auraient pas dû être faits. Par exemple on a payé au trésorier de M. le comte d'Artois, dans les premiers jours de mai, 12,000 livres; le 11 mai, 45,000 1. le 17, 60,000 livres, et le 19, 100,000 livres. Vous en auriez été d'autant plus surpris, que le premier ministre n'en a pas parlé. Un autre point, c'est de justifier la réalité de l'acquit et des dépenses. On vous présente un remboursement de 26 millions d'anticipations. Je voudrais que les détails fussent mis sous vos yeux. J'ai la preuve qu'en 1788 on créa des emprunts pour rembourser les anticipations ; cependant on n'en remboursa point. Nous pouvons avoir individuellement la plus grande confiance, mais nous devons compte à nos mandataires. Tous les états que nous avons sont par aperçus ; on nous dit tant pour "la recette, tant pour la dépense, dont un déficit de tant. Ce n'est pas là ce que doit savoir un propriétaire; nous sommes les propriétaires, et nous voulons que nos intendants nous rendent un compte plus exact de nos affaires.
On a beau rappeler les anciens usages ; c'est aux agents de la nation à se conformer aux nouveaux. Sous le ministère de Golbert, on observait une assez bonne méthode. On faisait les comptes par exercice, n existe des registres qu'on présentait tous les mois à Louis XÏV, et qu'il arrêtait de sa main. Le même ordre s'est encore observé au commencement du règne de Louis XV. Alors il a cessé, et on ne dressait plus des états que lorsque l'année était expirée : on appelait cela les rôles de l'année ; ils s'arrêtaient au conseil du roi. Mais ce qui a causé tout le désordre, c'est que les états de la dépense d'une année n'étaient arrêtés quelquefois que douze ans après, sous un nouveau ministère: ainsi, pour justifier des dépenses de l'année 1784, il fallait attendre que l'année 1788 fût écoulée. Voilà le désordre qui régnait dans les finances ; et cependant on crie anathème contre quiconque ne veut pas que les finances soient faciles à connaître. Voici le projet de décret que j'ai l'honneur de vous proposer :
« L'Assemblée nationale décrète que la Caisse d'escompte remettra, sans délai, au premier ministre des finances, la somme de 30 millions en ses billets; que l'administrateur du Trésor royal représentera l'état au vrai des dépenses de 1789; qu'il sera aussi présenté, le mois prochain, l'état de l'acquit et des dépenses des 30 millions ; que dorénavant il ne pourra être présenté aucune demande de fonds, sans y joindre le détail des objets auxquels ils sont destinés;,enfin, que le premier ministre des finances fera imprimer lè rapport certifié véritable des vérifications qu'il aura faites, pour être soumis aux membres de cette Assemblée. »
Au premier aperçu, j'adopte les dispositions du projet de décret de M. Camus, et je suis persuadé que le comité des finances l'adoptera aussi. Ce comité1 avait écrit au premier ministre des finances, afin qu'il lui remît l'état précis des dépenses à partir des premiers mois 1789. M» Necker nous a répondu
qu'il avait fait part de notre vœu à M. Dufrêne; qu'il se livrait à un travail excessif, et qu'il s'occupait d'un état plus général et plus complet que ceux qu'il avait présentés jusqu'alors. M. Dufrêne nous a aussi écrit qu'il lui était impossible de rien ajouter à son zèle ; que son travail était retardé, parce que les commis ne pouvaient se servir des registres que lorsqu'ils n'étaient pas utiles pour le service public; il nous a promis de nous présenter son travail vers le 15 du mois prochain. M. I*abbé Maury s'est plaint hier de ne pouvoir prendre aucune notion sur l'état des finances. Après l'extrait raisonné que nous venons de présenter à l'Assemblée, de pareilles réclamations ne devraient point avoir lieu : c'est le cas de dire qu'il n'y a pas de pires sourds que ceux qui ne veulent pas entendre. Pour ne pas mettre à la délibération une précipitation dont on pourrait avoir lieu de se repentir, je demande que le projet de décret de M. Camus soit renvoyé au comité des finances, pour vous être présenté lundi prochain.
Nous ne connaissons encore que. trois comptes rendus sur les finances, l'un de M. de Galonné, l'autre de l'archevêque de Sens, et le treizième de M. Dufrêne, et aucun ne nous fait connaître l'état de nos affaires. J'ai demandé un plan général des finances. Je pense que le public entend comme moi, par un plan de finances, un com p te exact des re ven u s de l'Etat, et des moyen s de remplacer les impôts désastreux qui pesaient sur le peuple. Il faut en effet que ce compte présente les états détaillés des dépenses extraordinaires, des engagements et des dettes arriérées; ce doit être enfin un bilan exact de la fortune publique; et Si de la comparaison des recettes et des dépenses il résulte un déficit, on doit chercher des ressources pour le couvrir. Telle est l'idée que je me suis faite d'un plan général des finances; et c'est pourquoi je reproche à M. Necker de ne nous en avoir point remis. Il prétend avoir rempli cet objet. Je vous rappellerai tous les mémoires de M. Necker; on y voit qu'il a oublié au mois de mars ce qu'il avait dit au mois de décembre, et au mois de décembre ce qu'iL avait dit à l'ouverture des Etats généraux. Mais puisqu'il croit avoir donné un plan général desfinances, jé vais répliquer; et, comme je citerai ses écrits, on verra que je n'ai intention de nuire à personne. Je demanderai dans quelle intention on présenta le premier compte qui n'offrait qu'une copie de celui de M. l'archevêque de Sens ? Oh y plaça toutes les dépenses qui devaient être retranchées, qui l'ont été depuis par l'Assemblée nationale, et dont la somme s'étève à 50 millions, mais on oublia les dettes arriérées montant à .80 millions. M. Necker n'en a pas dit un seul mot. On oublia la caisse d'amortissement qui s'élève à 30 millions. Le tableau présenté renferme donc trois erreurs. La première de 80 millions une fois payés; la seconde de 30 millions de dépenses payables chaque année; la troisième de 50 millions que l'Etat perd, puisqu'il aurait pu les gagner : on y compte encore comme revenu le produit entier de la gabelle, formant une somme de 60 millions. Cependant tous les cahiers demandaient la suppression de cet impôt : on ne pouvait donc pas en porter l'évaluation dans, la classe des recettes. Eh! quel moyen vous présenta-t-on pour couvrir le déficit ? Une longue liste de moyens exagérés et illusoires, (ici M. l'abbé Maury fait l'énumération de toutes les ressources présentées par le premier ministre des finances, dans son discours aux Etats généraux). M. Necker les a trouvés bien mauvais,
puisqu'il ne les a pas reproduits depuis. le demande votre attention, Messieurs, pour un article de 500 millions dont je ne trouve nulle trace dans les mémoires de M. Necker. On a dit que les dépenses extraordinaires pour l'année 1789 montaient à 105 millions ; mais on n'a pas dit qu'elles s'élevaient à une somme égale pour les années suivantes. Je le répète, ceci mérite une très grande attention, puisque le total de ces dépenses monte à 600 millions. (Il s'élève des murmures.) J'en ai le tableau calculé jusqu'en 1759.
Les moyens à prendre pour acquitter une dette qui ne renaîtra pas, et ceux qu'on doit employer pour une dette qui se reproduira tous les ans pendant soixante années, sont bien différents. M. Necker vous a bien présenté des ressources pour la première; mais je ne trouve nulle part dans ses ouvrages des traces de celles qu'il emploierait pour anéantir la seconde, et un agioteur habile gagnerait 100 millions sur la dette de l'Ëtat en la liquidant, sans qu'on pût le convaincre d'avoir fait une friponnerie. Un compte général des finances est donc nécessaire et urgent pour faire connaître la masse de la dette et de l'impôt. Je crois que malgré les connaissances que nous a données M. Necker, il nous en reste encore de grandes et d'importantes à désirer; celles que nous avons reçues ne peuvent suffire.
Je crois qu'on nous a laissé ignorer la véritable dette de l'Etat, et surtout celle des dépenses très ordinaires qui doivent être faites pendant soixante ans. Je dis très ordinaires, car je ne peux concevoir comment on place dans la classe des dépenses extraordinaires celles qu'il sera indispensable de faire pendant soixante ans encore. 11 faut donc que nous connaissions au plus tôt et la durée et le montant des charges que nous devons acquitter.
Je crois avoir prouvé qu'il n'a point encore été remis de plan général de finances. Je crois avoir prouvé que dans celui qui vous a été remis il y avait des erreurs très considérables : je crois avoir prouvé que l'on a mis à tort dans la classe des dépenses extraordinaires celles qui doivent être encore à la charge de l'Etat pendant soixante ans. Voilà quelles étaient mes raisons de revenir à la charge, et de demander un plan général de finances. Je demande donc qu'aujourd'hui on charge le premier ministre des finances de remettre incessamment un compte détaillé des recettes, des dépenses et de la dette de l'Etat. (Des applaudissements se font entendre de toute part).
(On demande l'impression du discours de M.l'abbé Maury, et l'on propose qu'il le remette à l'instant sur le bureau, tel qu'il l'a lu. — On s'aperçoit alors qu'il vient de quitter la salle).
Pour remplir le vœu de l'Assemblée, j'ai envoyé dire à M. l'abbé Maury qu'on demandait la remise de son discours : il a répondu qu'il se chargeait de le faire imprimer lui-même.
Je demande l'apport du discours, ou la rétractation du décret.
Vous ne pouvez obliger l'orateur qui vient de parler à déposer sondiscours, si telle n'est pas sa volonté.
Non l Mais si le discours dont l'impression a été ordonnée par l'Assemblée n'est pas déposé tout de suite, elle est autorisée à rapporter son décret et elle doit même ne pas y persister, parce qu'il pourrait arriver que l'auteur «
d'un discours y fît des additions ou des changements qui la compromettraient. L'Assemblée ne peut décréter que le discours qu'elle a entendu et non celui qui est encore à faire.
consulte l'Assemblée qui décide que le décret d'impression du discours de M. l'abbé Maury est rapporté.
Si nous n'avions que les comptes de M. Necker, nous ne pourrions prendre aucune connaissance exacte de l'état des finances. Le compte de 1781 ne nous présente aucune idée neuve ; il n'a d'autre avantage que celui de Ja publicité.
Dans le compte présenté aux notables en 1788, il plaça, dans la classe des dépenses extraordinaires, celles dont a parlé M. l'abbé Maury ; et puisque M. l'abbé Maury s'en étonne, on doit en dire la raison: c'est que quoiqu'on doive faire pendant soixante ans une dépense quelconque, elle n'en est pas moins extraordinaire, puisqu'elle ne peut être mise dans la classe ordinaire des dettes. Nous sommes occupés à apurer tous les comptes; il nous manque ceux de l'arriéré dans les diverses dépenses; il fallait les attendre jusqu'à ce moment. M. l'abbé Maury n'a fait que vous rapport ter une conversation qui a été tenue hier dans une. section du comité des finances. M. Rœderer y disait : « Nous avons assez attendu, nous sommes sûrs de pouvoir faire face à nos engagements; il faut maintenant forcer la barrière. Le temps viendra où vous connaîtrez la dette de l'Etat; vous ordonnerez aux créanciers de paraître, s'ils ne veulent renoncer à leurs créances, et chaque département fera une confession générale de sa dette... » Je crois que l'on peut attendre à lundi, et renvoyer à ce jour le projet de décret de M. Camus.
Je suis d'avis que le projet de M. Camus doit être renvoyé au comité des finances pour y être examiné et modifié de concert avec i'auteur, mais en même temps la première partie doit être décrétée.
Je consens à la division demandée, mais à condition que la partie ajournée sera renvoyée à la séance de lundi prochain.
Ces diverses propositions sont adoptées. Le décret suivant est ensuite rendu :
« La Caisse d'escompte remettra, sans délai, au premier ministre des finances, la somme de 30 millions en ses billets. »
Je demande que le département de l'Ain, actuellement en activité, soit autorisé à procéder à. l'assiette des impositions dudit département et que cette attribution soit retirée aux officiers des finances et à ceux des élections de Bourg et Bellay. Je demande encore qu'il soit enjoint aux officiers desdites élections et aux anciens administrateurs des provinces comprises dans le nouveau département de donner à l'assemblée générale départementale les renseignements nécessaires pour parvenir à l'assiette des impositions pour la présente année 1790.
M. Populus termine en présentant un projet de décret.
(de Saint-Jean-d'Angely). Je propose de renvoyer cette affaire au comité des finances.
Il faut faire un décret général
et non un décret particulier au département de l'Ain.
(Ces diverses propositions sont adoptées.)
Vordre du jour est la suite de la discussion sur toutes les parties des dépenses publiques.
, rapporteur. Dans votre séance du 12 juin, vous avez déjà décrété sur la régie générale des domaines l'article_ler, qui fixe à 450,0001. le traitement des administrateurs généraux des domaines; mais il reste d'autres articles et je vais en donner lecture :
« Art. 2. L'abonnement fait avec la ferme des postes, pour le port des lettres et paquets, demeurera résilié à compter du jour de la publication du présent décret.
« Art. 3. Les frais de comptabilité seront supprimés à compter du premier janvier dernier.
« Art. 4. La gratification de 34,000 livres accordée aux principaux employés, celle accordée au sieur Rasclé, le traitement de 3,000 livres pour la législation des hypothèques, cesseront du jour de fa publication du présent décret, et les honoraires du conseil seront réduits à 10,000 livres. »
(Les articles 2, 3 et 4 sont successivement adoptés sans discussion.)
lit l'article 5; il est ainsi conçu :« Le contrôleur général des finances mettra incessamment sous les yeux de l'Assemblée l'état des économies qu'il est possible d'effectuer dans les frais de régie et de perception. »
Le directeur des domaines de Rouen a 60,000 livres; le moindre des directeurs de province a 20,000 livres.
Vous avez décrété une diminution considérable dans la régie des domaines ; et l'on vous propose de faire mettre incessamment sous vos yeux l'état des économies qu'il est possible d'effectuer dans les frais de régie et de perception. Il se présente ici une question : Diminuera-t-on le traitement de chaque employé', à proportion dé ja réduction totale, ou diminuera-t-on le nombre des commis ? J'observe d'abord qu'il y a un grand nombre de commis inutiles, dont le traitement est beaucoup trop considérable ; c'est sur ceux-là surtout que doit porter la réduction. Il faut pour cela que vous puissiez déterminer le nombre des places inutiles, afin de prévenir l'injustice de conserver les traitements de faveur en supprimant des emplois occupés par des sujets qui se sont avancés en travaillant utilement pour la chose publique. Je demande que M. le président du comité des finances soit tenu d'écrire à M. le premier ministre des finances, pour lui demander de faire faire, dans le courant de la semaine prochaine, des états signés et certifiés des différents employés, tant au bureau de Paris que dans les provinces, avec les noms de chacun, les émoluments qu'ils ont reçus dans les trois dernières années, et les parties sur lesquelles ces émoluments ont été payés; enfin, la réductiou qu'il croit convenable de faire en raison de la suppression de la gabelle, etc. Je demande en même temps que ces détails soient imprimés et remis à chacun des membres de l'Assemblée.
(de Saint-Jean-d'Angely). Cette motion, infiniment intéressante, parait s'étendre sur toutes les régies; mais, dans ce moment, il s'agit de prendre des dispositions provisoires, Il
y a des disproportions sensibles entre le traitement que vous avez fait aux administrateurs généraux et ceux que reçoivent actuellement les directeurs de province. Si l'on peut se plaindre avec raison de la quotité excessive de ceux-ci, il n'en est pas de même à l'égard des employés subalternes ; les contrôleurs des campagnes ont des appointements aussi faibles que ceux des directeurs sont prodigieux. Ces contrôleurs ne peuvent plus faire les fonctions de notaire, puisque vous avez déclaré ces fonctions incompatibles avec les emplois qu'ils exercent. Il ne faut donc pas toucher à leurs traitements, mais dire que les réductions sur les directeurs seront faites de manière que le minimum soit de 6,000 livres, et le maximum de 10,000 livres.
Ce minimum me paraît beaucoup trop fort; le traitement fixe d'un grand nombre de directeurs ne s'élève pas à cette somme. L'abus véritable, et qui porte le produit de ces places à 40.000 livres et plus, c'est qu'ils font valoir sur la place l'argent de leur recette. Sans doute l'Assemblée exigera du premier ministre des finances qu'il prenne des précautions à cet égard. Je pense que le minimum doit être de 3,000 livres, et le maximum de 6,000 livres.
Il faut d'abord demander l'état des employés, ainsi que l'a proposé M. Hernoux; sans cela la réduction qu'on vous propose pourrait être très*, peu utile.
L'ajournement de la fixation du traitement des directeurs est arrêté.
La motion de M. Hernoux est décrétée ainsi qu'il suit :
« Le premier ministre des finances sera tenu de faire fournir dans la semaine, au comité des finances, les états des emplois existant dans les bureaux de la ferme, de la régie et de l'administration des domaines, du traitement dont jouit chaque commis depuis trois ans, et de celui qu'il convient de leur accorder pour la présente année; lesquels états seront imprimés et envoyés au domicile des différents membres de l'Assemblée. >
, rapporteur. Vous avez ordonné le rapport du décret par lequel vous aviez fixé, le 12 juin, le traitement des régisseurs généraux à 700,000 livres. Le comité des finances m'a chargé d'insister sur cet article. Les régisseurs empruntaient pour faire leurs avances; ils recevaient les intérêts à raison de 5 pour 100, et, comme ils empruntaient pour le gouvernement, ils étaient forcés à le faire au même taux. Il est des réductions plus dangereuses que la prodigalité. La forme des régies changera dans quelques mois. Des réductions humiliantes produisent le découragement; l'Etat est mal servi ; des maîtres avares ne trouveront jamais des serviteurs économes et zélés ; les régisseurs généraux avaient 1,700,0001. ils se sont réduits à 700,000 livres; vous ne pouvez pas exiger de leur patriotisme un sacrifice encore plus excessif. Le comité pense donc que le décret que vous avez rendu doit .être maintenu.
Des administrateurs m'ont écrit pour déclarer que quand le bien de l'Etat exigerait qu'ils fussent traités d'une manière moins avantageuse, leur zèle ne serait point ralenti. Ces administrateurs sont M.Deyniau et MM. de La Borde père et fils, d'Auch . M. de La Borde fils,
qui m'a écrit en son nom et au nom de sod père, j est présent; il ne me désavoue pas. (L'Assemblée | applaudit. M. de La Borde fils, placé à la tribune des députés extraordinaires, se retire pour se soustraire à ces témoignages flatteurs.)
Je demande que le nom de ces administrateurs soit inséré dans le procès-verbal. Les actes de désintéressement sont assez rares pour que nous nous empressions de prendre acte de ceux qui parviennent à notre connaissance,
M. de La Bordé père est, depuis très longtemps, chargé de l'emploi dans lequel il a montré autant de zèle que de désintéressement. Il a élevé les produits de 6,000 livres à 300,000 livres, et il demande d'être traité sans aucun bénéfice, si l'Assemblée le croit nécessaire pour les besoins du Trésor public. Le comité a imprimé, dans trois endroits de son rapport, que si on réunissait la régie et les domaines, trente personnes feraient à l'aise le travail de ces administrations, et il y a vingt-huit administrateurs et vingt-huit régisseurs.
L'article 1er de votre décret du 12 juin concernant la régie générale est ainsi conçu :
« Les remises allouées aux régisseurs généraux « ne pourront excéder 700,000 livres et leurs « droits de présence sont supprimés. »
L'amendement consiste à réduire la somme de 700.000 livres à 450,000 livres.
L'amendement est mis aux voix et adopté. En conséquence l'article se trouve ainsi rédigé ;
« Art. fe Les remises allouées aux régisseurs généraux ne pourront excéder 450,000 livres et leurs droits de présence sont supprimés.
, rapporteur, -donne lecture de quatre articles concernant Vadministration des postes, qui sont décrétés, sans discussion, ainsi qu'il suit :
* « Art. 1er. Les gages attribués aux maîtres des courriers seront rayés du compte de la dépense publique.
« Art. 2. Les gages des maîtres de postes, créés par édit de 1715, et qui ne sont pas appliqués au service des malles, et les indemnités qui leur étaient accordées, sont supprimés, à compter de la date du décret qui a fixé leurs indemnités pour la suppression de leurs privilèges.
« Art. 3. La dépense du travail secret, la place et les appointements de l'inspecteur général des postes sont pareillement supprimés.
« Art. 4. Il sera statué sur le traitement de l'intendant des postes et sur le conseil des postes, après le rapport'qui sera fait incessamment sur le régime de cette partie; et cependant l'intendant des postes et le conseil des postes continueront leurs fonctions comme par le passé. »
,député de Lyon, demande une prolongation de congé, pour le rétablissement de sa santé. Elle lui est accordée.
propose de donner à l'Assemblée des nouvelles de l état actuel de la ville d'Avignon. Il fait lecture d'une lettre datée du 13 de ce mois, et qui lui a été adressée. — « Nous avons beaucoup de grâces à rendre à vos compatriotes, qui sont actuellement les nôtres ; ils
ont tout abandonné pour voler à notre secours. Les gardes nationales de Château-Renard, Orange, Saint-Esprit, Rochebrune, sont venues avec leurs officiers municipaux: nous avons été obligés d'envoyer des courriers jusqu'à Marseille, pour arrêter l'empressement des autres villes. Vos maire3 et vos troupes ont arrêté les malheurs qui étaient prêts à arriver. Tous les prêtres auraient été pendus, si nos bons voisins n'eussent contenu la juste fureur du peuple. Les coupables ont été pris en flagrant délit; ils seront tous jugés par des juges d'Orange ; on va les transporter dans les prisons de cette ville: les coupables sont au nombre de deux mille.
« Nous avons été au moment d'un carnage épouvantable ; on ne se connaissait plus ; on faisait feu de toutes parts, des fenêtres et des toits des maisons. La poltronnerie des aristocrates nous a bien servis ; je dis la poltronnerie, car tout homme qui s'aime à l'excès, ou qui n'aime que lui, est un poltron. Ils ont fui devant des hommes qui avançaient sur eux, sans munitions et malgré le feu qu'on faisait de toutes parts. En deux heures tous nos ennemis ont été dissipés* Il n'y a que huit citoyens blessés, mais beaucoup d'habits et de chapeaux ont été percés par des balles. Nous sommes enfin bien récompensés de tant de maux ; le peuple a ouvert les yeux. Le 12, tous les districts ont délibéré de se réunir au peuple français; les armes de France ont été placées partout; celles du pape ont élé enlevées avec décence. On vient dech anter un Te Deum sur la place du Palais, au bruit du canon et en présence de soixante mille gardes nationales : les officiers et les soldats se sont embrassés, et ont prêté, avec le peuple, le serment d'être fidèles à la nation française, à la loi et au roi, et de verser jusqu'à la dernière goutte de leur sang pour maintenir vos décrets. La ville d'Orange nous a laissé trois cents hommes. Nos députés vont partir. »
Cette lecture donne lieu à des applaudissements et à des murmures.
M. de Cazalès monte à la tribune.
On demande l'ordre du jour.
Mais, Messieurs, il est impossible qu'on souffre la lecture de lettres écrites par des sujets qui, à tort ou à droit, sont en insurrection contre un souverain.
ûn décide de passer à l'ordre du jour, et l'Assemblée se retire dans les bureaux pour procéder à l'élection du président et des trois secré-; taires.
La séance est levée à trois heures moins un quart.
Séance du samedi
La séance est ouverte à six heures du soir.
, ex-président, occupe
, secrétaire, donne lecture des adresses suivantes :
Adresse de félicitation, remerciement et adhésion des religieux de l'abbaye chef d'ordre de Prémontré.
. Adresse des curé et officiers municipaux de la communauté de Bazelac, département de la Creuse, présentée par M. Periot, son député extraordinaire ; ils demandent la suppression de la succursale de la chapelle Barioux, pour être réunie à leur paroisse.
Adresses de la municipalité et de la garde nationale de Villers-la-Montagne, département de la Moselle, et de celle de la communauté de Saulce-Ghampenoise.
Des municipalités de Saint-Aubin et de Grand-Nançois, département de la Meuse ; elles demandent des fusils pour leur milice citoyenne ;
Du comité militaire de la ville d'Auch ; il fait hommage, à l'Assemblée du projet d'un pacte fé-dératif, autorisé par la municipalité, auquel sont invitées les gardes nationales du département du Cher, et qui doit avoir lieu immédiatement après la tenue de l'assemblée électorale. La ville d'Auch a fait la soumission d'acheter pour un million de biens nationaux.
De plusieurs curés et vicaires du district de Montbrison, en Forez, département de Saône-et-Loire, et de ceux du district du Monflanquin, département de Lot-et-Garonne, qui protestent de vivre et mourir inviolablement attachés à la Constitution française, fondée surles principes éternels de la justice et de la vérité, et jurent d'avance une soumission respectueuse à tous les •décrets que l'Assemblée voudra rendre ;
De la communauté de Saint-Geniez, en Rouer-gue, et de la garde nationale de Rochefort, qui s'élèvent avec force contre la délibération des citoyens catholiques de Nîmes, et la déclaration d'une partie de l'Assemblée;
De la municipalité de la ville d'Aire, qui se soumet d'acquérir des biens nationaux pour la somme de 2,000,000 liv.;
De la ville de Metz, qui fait une soumission de 15,000,000, et de la communauté du Vigan, qui fait une soumission de 30,000 liv. ;
De la ville d'Esme et de la communauté de Bonnières, au département du Pas-de-Calais, qui font le don patriotique du produit des impositions sur les ci-devant privilégiés. La ville d'Ësme sollicite un tribunal de district, et la communauté de Bonnières rend compte de la conduite qu'elle a tenue sur les déprédations commises dans les bois enclavés dans son territoire ;
De la nouvelle municipalité du village de Mol-tifao en Corse ;
Des amis de la Constitution et de la garde nationale de Marvejols, département de la Lozère, qui expriment leur indignation contre la déclaration d'une partie de l'Assemblée, et la délibération des citoyens catholiques de Nîmes ;
Des gardes nationales du département des Hautes-Alpes, contenant le procès-verbal de leur confédération pour le maintien de la Constitution, faite à la plaine des Grottes, près la ville d'Embrun. Elles réclament une suffisante quantité d'armes pour le plus grand nombre de ses membres.
Des citoyens-militaires et militaires-citoyens des départements du Nord, du Pas-de-Calais et de
la Somme, qui se sont réunis, le 3 du présent mois, dans la ville de Lille, au nombre de douze mille hommes, représentant plus de cent mille hommes armés, et ont fait un pacte fédératif pour l'entière exécution des décrets de l'Assemblée nationale ;
Des gardes nationales et des troupes réglées en garnison dans la ville d'Arras, qui ont solennellement prêté le serment civique. L'évêque de cette ville, le chapitre de l'église cathédrale et le clergé des paroisses se sont rendus procession-nellement au lieu de la cérémonie, et ont prêté le même serment.
Adresses des gardes nationales du Hainaut, réunies et fédérées dans les murs de la ville de Valenciennes, les 30 et 31 mai dernier;
Des gardes nationales du département de la Moselle,et de ceux qui l'entourent, réunies et fédérées à Metz le 4 mai dernier ;
Des assmblées primaires des cantons du Teil-leul, de la Roehe-sur-Yon, de Sivry-sur-Meuse, et de Ducé, département de la Manche ;
Des assemblées électorales des districts de Se-mur en Auxois, et deSaint-Quentiu ;
Des administrateurs des districts de Lounans, de Belley, de Soissoas et de Nantua;
Des assemblées électorales du département des Vosges, du département du Gard, du département du Loir-et-Gner, et de l'assemblée administrative du département de la Haute-Saône.
Toutes ces assemblées consacrent les premiers moments de leur existence à présenter à l'Assemblée nationale l'hommage d'une adhésion absolue à tous ses décrets, et d'un dévouement sans bornes, pour en procurer ou en maintenir l'exécution.
Adresse de la municipalité de Ghâtel, département des Ardennes, district de Grandpré, qui exprime son adhésion à tous les décrets de l'Assemblée nationale, et qui ajoute à sa contribution patriotique, déjà considérable pour sa paroisse, une somme de 600 livres, qui a été déposée à la caisse des dons patriotiques;
De l'assemblée électorale du district de Dijon, département de la Côte-d'Or.
La municipalité de Brinnon a fait déposer au comité des aliénations sa soumission d'acquérir tous les biens nationaux situés sur son territoire, et désignés dans ladite soumission, évalués à un million.
Adresse de la municipalité de Tarascon, qui fait sa soumission d'acquérir pour deux millions de biens nationaux.
Adresse de MM. les officiers présents au corps des carabiniers.
L'Assemblée décrète que M. le Président sera chargé de leur écrire, et de leur témoigner sa satisfaction sur leur patriotisme.
Je vais avoir l'honneur de vous faire lecture d'un discours prononcé et déposé à la municipalité de la ville du Saint-Esprit, en Languedoc, par les bas-officiers, caporaux et chasseurs du bataillon du Roussilion, le 5 juiu 1790 :
« Messieurs, nous venons vous faire connaître que M. de Gnantrenne, notre chef, nous a fait lecture du pacte fédératif de la garnison de Rennes ave la milice nationale. Nous vous avons déjà, sous la conduite de nos chefs, fait connaître nos sentiments, auxquels il ne reste rien à ajouter. Daignez, messieurs, nous donner une nouvelle preuve de vos bontés, en nous permettant de faire éclater en votre présence notre dévoue*
ment à la patrie, et notre attachement pour des chefs et des officiers qui le méritent par les principes de justice et d'humanité qui les caractérisent. Nous vous prions de faire parvenir aux représentants de la nation l'expression de nos sentiments, ainsi que ceux de notre chef et de nos officiers. »
Cette lettre prouve assez, Messieurs, que si quelques régiments se sont égarés, ceux qui sont commandés par des chefs aussi distingués et aussi méritants que M. de Chantrenne sont toujours restés fidèles et soumis. Cette lettre était adressée à M. Dubois de Crancé; mais comme il est cousin-germain de M. de Chantrenne, il a voulu me laisser le plaisir de la lire moi-même. Je demande que M. le président soit autorisé à écrire à M. de Chantrenne pour lui témoigner la satisfaction de TAsâemblée sur le patriotisme de son corps, et sur le sien en particulier.
La proposition de M. de Noailles est adoptée en ces termes :
« L'Assemblée nationale a décrété et décrète que M. le Président sera chargé d'écrire au bataillon de Roussillon, pour lui témoigner son extrême satisfaction pour son patriotisme, pour son intelligence avec la municipalié et la garde nationale, et pour son respect envers ses chefs. »
Une députation des vainqueurs de la Bastille est admise à la barre et supplie l'Assemblée de vouloir bien prendre en considération les services qu'ils ont rendus à la patrie.
Plusieurs membres réclament la parole. Elle est donnée à M. Camus, organe du comité des pensions.
, rapporteur du comité des pensions. Vous avez chargé votre comité des pensions de vous présenter, les moyens d'acquitter ce que vous devez aux vainqueurs de la Bastille. Si quelquefois nous avons paru porter un œil sévère sur toutes les anciennes attributions de grâces, c'est que nous savions bien que la plupart n'étaient pas méritées; mais, lorsqu'une action noble et généreuse s'est passée sous nos yeux, nous montrerons aussi que nous savons la récompenser. Les Etats généraux étaient convoqués. Ce rassemblement des députés de toute la France avait déjà effrayé les tyrans; il ne restait qu'un moyen pour détruire le grand œuvre qui allait s'opérer, c'était la force des armes. Rappelez-vous avec quelle terreur nous apprîmes que les promenades de la capitale avaient été souillées de sang! De braves citoyens se réunissent à la maison commune, l'amour de la patrie les rend tous soldats ; ils arrêtent d'aller demander qu'on .remette sous la garde des citoyens de Paris l'odieuse citadelle qui menaçait leur liberté et insultait à leur patriotisme. Leur proposition est dédaignée; ils prennent les armes, et dans le même instant la citadelle est en leur pouvoir. Cette nouvelle excite la plus vive admiration : cependant ces braves citoyens sont restés jusqu'à ce moment sans récompense. C'est la nation qui en réclame une pour eux aujourd'hui : leurs pertes et leurs blessures ne sont rien, pourvu qu'ils puissent jouir de l'honneur d'avoir sauvé leur patrie. Le comité s'est fait rendre un compte exact pour s'assurer du nom des vrais vainqueurs de la Bastille. Ils ont demandé qu'il fût nommé des commissaires pour désigner ceux à qui appartient l'honneur de la victoire. Divers projets ont été présentés à votre comité, mais ils
ne lui ont pas paru pouvoir se concilier. II est bien persuadé que, de quelque manière que vous les récompensiez, ces braves citoyens seront toujours contents. Voici donc le projet de décret que votre comité de pensions a l'honneur de vous présenter :
« L'Assemblée nationale, frappée d'une juste admiration pour l'héroïque intrépidité des vainqueurs de/la Bastille, et voulant leur donner, au nom de la nation, un témoignage public de la reconnaissance qui est due à ceux qui ont exposé et sacrifié leur vie pour secouer le joug de l'esclavage et rendre leur patrie libre;
« Décrète qu'il sera fourni, aux dépens du Trésor public, à chacun des vainqueurs de la Bastille en état de porter les armes, un habit et un armement complets, suivant l'uniforme de la nation ; que sur le canon du fusil, ainsi que sur la lame du sabre il sera gravé l'écusson de la nation, avec la mention que ces armes ont été données par la nation à tel, vainqueur de la Bastille, et que sur l'habit, il sera appliqué, soit sur le bras gauche, soit à côté du revers gauche, une cou-ronue murale; qu'il sera expédié à chacun desdits vainqueurs de la Bastille un brevet honorable, pour exprimer leur service et la reconnaissance de la nation, et que, dans tous les actes qu'ils passeront il leur sera permis de prendre le titre de vainqueurs de la Bastille;
« Les vainqueurs de la Bastille en état de porter les armes feront tous partie des gardes nationales du royaume; ils serviront dans la garde nationale de Paris ; le rang qu'ils doivent y tenir sera réglé lors de l'organisation des gardes nationales.
« Un brevet honorable sera également expédié aux vainqueurs de la Bastille qui ne sont pas en état de porter les armes, aux veuves et aux enfants de ceux qui sont décédés, comme monument public de la reconnaissance et de l'honneur dû à tous ceux qui ont fait triompher la liberté sur le despotisme.
« Lors de la fête solennelle de la confédération du 14 juillet prochain, il sera désigné pour les vainqueurs de la Bastille une place honorable où la France puisse jouir du spectacle de la réunion des premiers conquérants de la liberté.
« L'Assemblée nationale se réserve de prendre en considération l'état de ceux des vainqueurs de la Bastille auxquels la nation doit des gratifications pécuniaires, et elle les leur distribuera aussitôt qu'elle aura fixé les règles d'après lesquelles ces gratifications doivent être accordées à ceux qui ont fait de généreux sacrifices pour la défense des droits et de la liberté de leurs concitoyens.
« Le tableau remis par les vainqueurs de la Bastille, contenant leur nom et celui des commissaires Choisis parmi les représentants de la commune qui ont présidé à leurs opérations et qui sont compris dans le présent décret avec les vainqueurs, sera déposé aux Archives de la nation , pour y conserver à perpétuité la mémoire de leur nom, et pour servir ae base à la distribution des récompenses honorables et des gratifications qui leur sout assurées par le présent décret. »
(Ce décret est adopté par acclamation.)
Les députés de la. garde nationale de Chartres sont admis à. la barre et présentent l'adresse saivante :
« Messieurs, « Des hommes libres, des citoyens soldat» vien-
lient, au nom d'une fédération nombreuse, qui s'est réunie, le 9 de ce mois, sous les murs de Chartres, capitale du département d'Eure-et-Loir, vous offrir l'hommage solennel de leur respect, de leur admiration, de leur reconnaissance et de leur entier dévouement.
« Vous êtes les créateurs de la liberté française, c'est à nous d'en être les défenseurs. Nous l'avons juré sur l'autel sacré de la patrie; nous verserons jusqu'à la dernière goutte de notre sang pour le maintien des lois que nous a données votre sagesse. S'il est encore des téméraires dont la voix impie ose attaquer vos décrets; si des brigands ou leurs alliés naturels, les fauteurs des désordres et des abus, veulent nous replonger dans la servitude et l'anarchie, ils trouveront dans les milices confédérées des âmes fières, des bras vigoureux, des soldats intrépides et tout ce qu'on peut attendre d'une coalition fondée sur le besoin d'être libre et cimentée par les liens de la fraternité.
. « La nature avait créé tous les hommes égaux ; il était réservé à la Constitution française de les rendre tous frères. Egalité, liberté, fraternité, voilà, Messieurs, l'abrégé de vos travaux et de vos bienfaits.
« Nous en sentons le prix. Avec quel enthousiasme nous avons exprimé, en présence de nos concitoyens et de nos frères,'les transports de notre zèle et de notre gratitude!
« Quel spectacle offrait cette armée citoyenne représentant près de trente-neuf mille hommes, dont la devise était et doit être à jamais : La Liberté ou la Mortl
« Le lieu inspirait à chacun de nous des réflexions patriotiques et morales, inconnues aux siècles de la superstition et de l'ignorance*
« Dans la même plaine où nous avons érigé des autels à la patrie, à la raison et à la liberté, nos pères s'égorgèrent, il y a deux cents ans et plus, pour des opinions religieuses. — Pénétrés de cet esprit de sagesse, de charité et de tolérance qui fait le caractère distinctif de la vraie religion, nous avons juré, à la face du ciel et de la terre, de ne point souffrir que l'homme fût attaqué dans ses droits ou inquiété dans ses opinions.
« Les braves et loyaux dragons du colonel-général, dont un de vos honorables membres est le chef, sont accourus s'unir au même serment. Combien nous aurions été satisfaits de voir à leur tête ce citoyen patriote et guerrier, si digne de l'honneur de les commander !
« Des volontaires parisiens, brûlant du saint amour de la patrie, ont voulu participer à cette mémorable journée. Partout où retentit le cri de la liberté, la capitale de l'Empire français doit avoir des réprésentants.
« A cette expression simple, mais fidèle de nos sentiments et de nos dispositions, permettez, Messieurs, que nous joignions une demande conforme au vœu de toute la France et digne de votre sollicitude.
« Nos commettants nous ont spécialement chargés de proposer à votre sagesse de vous occuper prochainement de l'organisation définitive des gardes nationales. La discipline provisoire sous laquelle nous vivons est sujette a trop d'inconvénients pour ne pas désirer qu'une loi uniforme ! et précise établisse parmi nous un service plus régulier, plus actif et plus utile. — Apprenez à l'Europe, ou, pour mieux dire, à l'Univers entier, que tout Français peut être à la fois citoyen et soldat*
« D'après les sages décrets que vous avez déjà rendus sur l'organisation des différents pouvoirs, quels règlements pleins de justesse et de génie n'avons-nous pas lieu d'attendre?
« Prenez, Messieurs, cet objet en considération, et souffrez que nous déposions en yos mains l'acte par lequel nous nous sommes engagés de vivre ou de mourir fidèles à la nation, à la loi et au roi. »
Une députation de la garde nationale de Tours est ensuite admise à la barre et présente une adresse ainsi conçue :
« Nosseigneurs, « Le spectacle imposant que donne à la France le peuple immense qui l'habite, son union, son caractère décidé, son amour pour la liberté, son enthousiasme parfait pour une jouissance si douce et dans les principes de la nature, la prospérité générale, qui sera incessamment le fruit de vos travaux sublimes, de votre sagesse et de vos lumières ; nos droits primitifs recouvrés, toute servitude anéantie, la plus parfaite égalité rétablie, le Français redevenu homme, enfin : voilà, Nosseigneurs , les motifs puissants qui décident l'hommage respectueux des représentants de plus de quarante mille citoyens réunis solennellement dans les murs de Tours, pour consacrer à jamais la plénitude de leur reconnaissance et mettre sous la sauvegarde de leurs bras armés l'exécution de vos décrets sanctionnés ou acceptés par le roi.
i « La constitution du royaume sera constamment défendue; nous en avons fait le serment le plus authentique. En jurant d'être fidèles à la nation, nous nous sommes engagés de surveiller sans cesse ses ennemis déjà terrassés; en jurant d'être fidèles à la loi, nous avons unanimement promis de donner les premiers; par notre soumission, l'exemple sensible que la loi souscrite par un peuple libre, créée par ses augustes représentants, est le premier fondement de la félicité d'un vaste empire régénéré par vous; en jurant, enfin, d'être fidèles au roi, nous avons rempli le plus sacré de nos devoirs ; et l'hommage sincère de notre amour, confondu avec le vôtre, est sans doute pour vous, Nosseigneurs, le témoignage le plus flatteur et le plus digne de vous prouver la pureté des sentiments patriotiques que nous avons voués unanimement aux pères ae la patrie. « Nous sommes, avec le plus parfait respect,
« Nosseigneurs,
« Vos très humbles et très obéissants serviteurs,
« Les soldats citoyens de l'armée confédérée à Tours.
« Signé : Esnault, président de l'assemblée fédérative;
Le chevalier de Monhoudou, secrétaire ;
Veau-Delaunay, secrétaire. »
répond aux deux députations :
« Messieurs, c'est à la réunion de tous les hommes qui savent apprécier la liberté que la France devra sa Constitution.
« Partout les vrais citoyens, se transformant en soldats, ont trouvé les moyens d'allier la force à la sagesse pour opérer la Révolution;
partout ce peuple, que, naguères, on croyait si léger, que les autres nations, en rendant justice à son amabilité, croyaient si peu susceptible d'énergie, ce peuple, dis-je, a prouvé que la liberté conduit avec elle toutes les vertus, tandis que l'esclavage est inséparable de tous les vices. Appuyée de votre patriotisme, l'Assemblée nationale continuera ses travaux. Elle en verra bientôt le terme ; et c'est alors seulement qu'elle croira avoir acquis quelques droits à la reconnaissance des Français. Qu'il me soit permis de me glorifier d'être aujourd'hui l'interprète des sentiments de l'Assemblée nationale auprès des compatriotes qui m'ont honoré de leur confiance. L'Assemblée vous permet d'assister à sa séance. »
Une députation d'étrangers tels que :
Arabes, Américains,
Caldéens, Indiens,
Prussiens, . Syriens,
Polonais, Brabançons, •
Anglais, Liégeois,
Suisses, Avignonais,
.Allemands, Génevois,
Hollandais, Sardes,
Suédois, Grisons,
Italiens, Siciliens, Espagnols,
Sont admis à la barre et viennent solliciter la faveur d'assister à la fédération.
, l'un d'eux, portant la parole dit :
Messieurs, le faisceau imposant de tous les drapeaux de l'empire français qui vont se déployer le 14 juillet dans le champ de Mars, dans ces mêmes lieux où Julien foula tous les préjugés, où Gharlemagne s'environna de toutes les vertus, cette solennité civique ne sera pas seulement la fête des Français mais encore la fête du genre humain. La trompette qui sonna la résurrection d'un grand peuple a retenti aux quatre coins du monde, et les chants d'allégresse d'un chœur de 25,000,000 d'hommes libres ont réveillé des peuples ensevelis dans un long esclavage. La sagesse de vos décrets, Messieurs, l'union des enfants de la France, ce tableau ravissant donne des soucis amers aux despotes, et de justes espérances aux nations asservies.
A nous aussi il est venu une grande pensée, et oserions-nous dire qu'elle sera le complément de la grande journée nationale! Un nombre d'étrangers de toutes les contrées de la terre demandent à se ranger au milieu du champ de Mars; et le bonnet de la liberté, qu'ils élèveront avec transport, sera le gage de la délivrance prochaine de leurs malheureux concitoyens. Les triomphateurs de Rome se plaisaient à traîner les peuples vaincus liés à leurs chars; et vous, Messieurs, par le plus honorable des contrastes, vous verrez dans votre cortège des hommes libres dont la patrie est dans les fers, dont la patrie sera libre un jour par l'influence de votre courage inébranlable et de vos lois philosophiques. Nos vœux et nos hommages seront des liens qui nous attacheront à vos chars de triomphe.
Jamais ambassade ne fut plus sacrée; nos lettres de créance ne sont pas tracées sur le parchemin, mais notre misson est gravée en chiffres ineffaçables dans le cœur de tous les hommes ; et, grâce aux auteurs de la Déclaration des droits, ces
chiffres ne seront plus inintelligibles aux tyrans.
Vous avez reconnu authentiquement, Messieurs, que la souveraineté réside dans le peuple : or le peuple est partout sous le joug de dictateurs qui se disent souverains, en dépit ae vos principes. On usurpe la dictature, mais la souveraineté est inviolable; et les ambassadeurs des tyrans ne pourraient honorer votre fête auguste, comme la plupart d'entre nous dont la mission est avouée tacitement par nos compatriotes, par des souverains opprimés.
Quelle leçon pour les despotes ! quelle consolation pour les peuples infortunés, quand nous leur apprendrons que la première nation de l'Europe, en rassemblant ses bannières, nous a donné le signal du bonheur de la France et des deux mondes!
Nous attendrons, Messieurs, dans un respectueux silence, le résultat de vos délibérations sur la pétition que nous dicte l'enthousiasme de la liberté universelle.
(Ge discours est signé de M. de Cloots, prussien, et de trente-cinq des commissaires du comité des étrangers).
répond :
« Messieurs, vous venez prouver aujourd'hui à l'Univers entier que les progrès que fait une nation dans la philosophie et dans la connaissance des droits de l'homme, appartiennent également à toutes les autres nations. Il est dans les fastes du monde des époques qui influent sur le bonheur ou le malheur de toutes les parties du globe ; et la France ose aujourd'hui se flatter que l'exemple qu'elle vient de donner sera suivi par les peuples qui, sachant apprécier la liberté, apprendront aux monarques que leur véritable grandeur consiste à commander à des hommes libres, et à faire exécuter les lois; et qu'ils ne peuvent être heureux qu'en faisant le bonheur de ceux qui les ont choisis pour les gouverner,
« Oui, Messieurs, la France s'honorera en vous admettant à la fête civique dont l'Assemblée nationale vient d'ordonner les préparatifs; mais, pour prix de ce bienfait, elle se croit en droit d'exiger de vous un témoignage éclatant de reconnaissance.
« Après l'auguste cérémonie* retournez dans les lieux qui vous ont vu naître ; dites à vos monarques, dites à vos administrateurs, quelques noms qu'ils puissent porter, que s'ils sont jaloux de faire passer leur mémoire à la postérité la plus reculée, dites-leur qu'ils n'ont qu'à suivre l'exemple de Louis XVI, le restaurateur de la liberté française.
« L'Assemblée nationale vous invite d'assister à la séance. »
exprime ensuite les sentiments de respect et d'admiration que lui inspire une Constitution destinée à faire le bonheur de l'Univers.
répond :
« Monsieur, c'est l'Arabie qui jadis a donné à l'Europe des leçons de philosophie ; c'est elle qui, ayant conservé le dépôt des sciences exactes, a répandu dans le reste du monde les connaissances sublimes de toutes les parties des mathématiques.
« Aujourd'hui, la France, voulant acquitter la dette de l'Europe, vous donne des leçons de liberté, et vous exhorte à les propager dans votre patrie. »
Des citoyens réunis de toutes les parties du monde viennent vous offrir le plus-bel hommage que vous puissiez jamais recevoir pour prix de vos travaux ; je fais la motion que leur demande soit accueillie par acclamation, et leur discours imprimé avec la réponse du président. — Cette proposition est adoptée à l'unanimité.
J'appuie, Messieurs, la proposition qui vous est faite en faveur de ces généreux étrangers, et qui, sans doute, n'éprouvera pas de difficulté. Mais j'ai à vous présenter une autre idée; le jour où les députés de toutes les provinces se rassembleront pour jurer cette Constitution, qui promet à tous les Français la liberté et l'égalité, ne doit pas rappeler à quelques-unes d'elles des idées d'humiliation et de servitude. Les figures représentant quatre provinces, dont les députés ont toujours été comptés dans cette Assemblée parmi les plus fermes appuis des droits de la nation, sont enchaînées, comme les images de peuples tributaires, aux pieds de;la statue de Louis XIV : souffrirons-nous, Messieurs, que les citoyens qui viendront jurer la Constitution pour ces généreuses provinces aient les yeux frappés d'un spectacle que des hommes libres ne peuvent supporter ? Ces monuments de l'orgueil ne peuvent subsister sous le règne de l'égalité. Elevez des statues aux princes qui ont bien mérité de leur pays ; cou-sacrez-eo une à la mémoire du restaurateur de la liberté ; mais empressez-vous de détruire des emblèmes qui dégradent la dignité de l'homme et qui doivent blesser des concitoyens que nous honorons et que nous chérissons."
Je fais la motion que les quatre figures enchaînées qui sont au bas de la statue de Louis XIV, à la place des Victoires, soient enlevées avant le 14 de juillet.
J'adhère à cette motion comme Franc-Comtois ; depuis longtemps elle était écrite dans mon cœur et dans celui de tous mes compatriotes, qui ont toujours abhorré l'esclavage.
Plusieurs membres de la partie droite demandent l'ajournement.
, député de Villefrànche-de-Rouergue. C'est aujourd'hui le tombeau de la vanité. Je demande qu'il soit fait défense à toutes personnes de prendre les qualités de comte, baron, marquis, etc.
J'appuie la première proposition du préopinant ; les titres qu'il vous invite à détruire blessent l'égalité qui forme la base de notre Constitution ; ils dérivent du régime féodal que vous avez anéanti; ils ne sauraient donc subsister sans une absurde inconséquence : il doit être défendu à tous les citoyens de prendre, dans leurs actes, les titres de pair, duc, comte, marquis, etc. J'appuie également sa seconde proposition; la noblesse héréditaire choque la raison ét blesse la véritable liberté ; il n'est point d'égalité politique, il n'est point d'émulation pour la vertu là où des citovens ont une autre dignité que celle qui est attachée aux fonctions qui leur sont confiées, une autre gloire que celle qu'ils doivent à leurs actions. Il doit donc être également défendu de prendre, dans les actes, le titre de noble. Quant à ceux qui, dans le langage, ou dans leurs lettres, affecte-
raient de conserver encore ces distinctions puériles, l'opinion les en punira en les notant parmi ceux qui méconnaissent encore notre heureuse révolution.
Cette motion est tellement nécessaire, que je ne crois pas qu'elle ait besoin d'être appuyée ; mais si elle en a besoin, j'annonce que je m'y joins de tout mon cœur.
Je ne sais ce qui résultera de la délibération ; mais ma mission est de m'y opposer de tout mon pouvoir. Le jour où notre patriotisme a été le plus spécialement consacré, à la fameuse époque du 4 août, cette motion fut présentée. On nous a dit qu'on était trop heureux de pouvoir établir des récompenses de cette nature. Comment récompenser quelqu'un dont le nom peu connu obtint des lettres en ces termes? « Un tel fait noble et comte pour avoir sauvé l'État, à telle heure. » Il resta avec ce titre, qui a servi de fortune à toute sa famille.
Au lieu de dire : « a été fait noble », on dira, « a sauvé l'État, à telle heure».
Qu'il me soit permis de dire que j'étais depuis longtemps tellement pénétré de toutes ces idées, que j'avais tracé d'avance des articles qui comprennent les divers objets qui vous occupent. Je vous demande permission, Messieurs, de vous en faire la lecture : « Les titres de duc et pair, comte, vicomte, baron, marquis, chevalier, et tout autre titre attaché aux terres ci-devant féodales et seigneuriales, sont abolis et ne pourront jamais être rétablis. — Tous titres honorifiques héréditaires sont abolis, et toutes lois qui ont pour objet les distinctions héréditaires sont abrogées. — Ceux qui, contrevenant aux dispositions ci-dessus énoncées, prendront, en quelque acte public ou privé, des titres abolis, seront condamnés à 1,000 livres d'amende, et seront rayés, pendant un an, de la liste des citoyens actifs. — Toute loi, ordonnance, titre, règlement, charte defondation, en un mot, toutes dispositions suivantjlesquelles desjassocia-tions et congrégations qui étaient réservées à certaines personnes et à certains titres, sont abolis. — Toute qualification de nosseigneurs et mes-seigneurs sont abolis, sauf l'exception qui sera déterminée ci-après. — Ceux qui adresseront, soit à l'Assemblée nationale, au conseil du roi, soit à quelque tribunal ou assemblée administrative, ne pourrontleur donner d'autre appellation que celle de messieurs. — Le titre de monseigneur ne pourra être donné à personne, de quelque état et de quelque rang qu'elle soit, saut l'exception des princes du sang. »
Je demande à faire une observation sur cette exception. Dans un pays libre, il n'y a que des citoyens et des officiers publics. Je sais qu'il faut une grande énergie à la magistrature héréditaire du roi. Mais pourquoi vouloir donner le titre de prince à des hommes qui ne sont, à mes yeux, que des citoyens actifs, lorsqu'ils se trouvenL avoir les conditions prescrites à cet égard ?
J'ai toujours été dans ces sentiments; je fais un grand cas de l'égalité ; mais pour traiter une aussi grande question, il faut une séance du matin. Je demande
l'ajournement jusqu'à lundi à midi. (Il s'élève des murmures dans la partie gauche.) Vous voulez détruire les distinctions des. nobles, et il y aura toujours celle des banquiers et des usuriers, qui auront des 200,000 écus de rente.
Il me semble que l'Assemblée ne doit pas s'arrêter longtemps à des dispositions qui dérivent de votre Constitution. Anéantissons ces vains titres, enfants frivoles de l'orgueil et de la vanité. Ne reconnaissons de distinctions que celles des vertus. Dit-on le marquis Franklin, le comte Washington, le baron Fox? On dit Benjamin Franklin, Fox, Washington. Ces noms n'ont pas besoin de qualification pour qu'on les retienne; on ne les prononce jamais sans admiration. J'appuie donc de toutes mes forces les diverses propositions qui ont été faites. Je demande en outre que désormais l'encens soit réservé à la Divinité. Je supplierai aussi l'Assemblée d'arrêter ses regards sur une classe de citoyens jusqu'à présent avilie, et je demanderai qu'à l'avenir on ne porte plus de livrée..
Je ne viens point ici faire l'hommage des titres de comte et de marquis; je n'ai jamais pris ces noms, quoique j'aie possédé quelques ci-devant comtés et marquisats. Au moment où on vous demande des articles qui soient le complément de votre constitution, je crois qu'il est bon d'ordonner que chaque citoyen ne pourra porter d'autre nom que celui de sa famille, et non point celui d'une terre. Je vous demande la permission' de signer ma motion, Louis-Michel Lepelletier.
Je demande que ceux qui, depuis cent ans, ont usurpé les titres des anciennes familles, soient tenus de reprendre leurs noms primitifs, et que les membres de cette Assemblée qui sont dans ce cas commencent par donner 1 exemple.
(On demande que la discussion soit fermée.)
Dans la multitude des questions qui sont soumises à votre discussion, je ne sais sur quel objet particulier je dois fixer mes regards. On a proposé de faire ôter de la statue de Louis le Grand tous les emblèmes de l'esclavage ; d'autres ont demandé l'anéantissement des dignités sociales et le retour à l'égalité la plus absolue ; chacun de ces objets est digne d'un examen particulier, et je ne refuserai d'en discuter aucun. Vous devez rendre hommage à la mémoire de Louis le Grand, qui n'a pas ordonné ce monument de vanité. J'entends dire qu'il a soutenu une guerre pour le conserver; je réponds que cela est faux. La guerre de Hollande, dont on veut sans doute parler ici, a été occasionnée par l'injure faite à une médaille de ce roi, et le monument de la place des Victoires a été ordonné par le maréchal de la Feuillade, qui a prodigué à Louis le Grand les témoignages de la plus ser-vile adulation; encore n'en est-il pas l'inventeur; la place de Médicis en a donné la première idée. Mais puisqu'on veut détruire tout ce qui sent l'esclavage, les regards du patriotisme ne doivent-ils pas se porter sur la statue de Henri IV, dont quelques-unes de^ inscriptions sont uniquement à la louange du cardinal de Richelieu? (On applaudit.) Il a aussi à ses pieds des esclaves enchaînés ; mais ce sont des emblèmes qui représentent les vices; les amis de la liberté n'en sont point offensés.
Je crois qu'il ne faut pas toucher à la statue de Louis XIV. La philosophie doit consacrer ce monument pour montrer à la postérité comment on flattait les rois. Il fut trop flatté pendant sa vie, mais trop méconnu après sa mort. C'est un roi qui n'avait peut-être pas autant de grandeur dans le génie que dans le caractère; mais il est toujours digne du nom de Grand, puisqu'il a agrandi son pays. Quand vous érigerez des monuments, vous ferez voir la différence qu'il y a du xvu® au xvm« siècle. Vous leur donnerez un but moral qui élèvera l'âme des rois. Mais il ne faut pas pour cela dégrader aux yeux du peuple des rois ensevelis dans la tombe, et porter ainsi de terribles atteintes à la majesté royale. Quant à la question du retour aux noms propres,\elle est juste. Un savant moraliste disait qu'en France on ne reconnaissait plus ni les hommes à leur nom, ni les femmes à leur visage. Votre patriotisme s'élève contre ces abus de la vanité, et vous êtes dignes d'éloge; mais il ne faut pas passer le but. Ce ne sont pas le3 noms qu'il faut condamner, mais les usurpateurs de noms. Ceci ne porte point d'atteinte à notre liberté. Les Romains connaissaient des ordres de chevaliers, et les Romains se connaissaient en liberté. Je sais bien qu'à l'avenir on ne s'informera pas de ce qu'ont été les hommes, mais de ce qu'ils auront fait. Un auteur avait bien raison quand il a dit que la première question d'un peuple donnait une idée de la philosophie de la nation. Parlez de quelqu'un en Allemagne, on vous demandé s'il entre au chapitre; en France, quelle place il occupe à la cour; en Espagne, S'il est grand de la première classe; en Angleterre, on vous demande quel homme c'est. Sans doute que cette manière d'exister par soi-même est bien la meilleure.
En France, la noblesse est constitutionnelle ; s'il n'y a plus de noblesse, il n'y a plus de monarchie. Cette question est donc assez importante pour être traitée dans une séance du matin. Je sais bien que, dans la nuit du 4 août, plusieurs articles constitutionnels ont été arrêtés; les sacrifices patriotiques se sont multipliés à l'infini; mais ce n'est pas toujours au milieu de cet enthousiasme qu'on prend les meilleures délibérations. Ne pourrait-on pas dire à ceux qui demandent avec acharnement toutes ces innovations ce que quelqu'un répondit à un philosophe orgueilleux : Tu foules à tes pieds le faste, mais avec plus de faste encore. — Quant à ia question des livrées, un domestique n'est ni plus malheureux, ni plus avili, pour avoir tel ou tel habit sur le corps. Personne n'ignore que cet usage remonte jusqu'à l'institution des armoiries et des croisades ; et, qu'excepté certaines familles, pas même M. le maire de Paris n'a droit d'avoir une livrée. C'est donc l'institution de la noblesse que vous attaquez dans son principe. Je demande que si on veut traiter cette question, elle soit ajournée à une séance du matin.
Je ne sais, Messieurs, si c'est le talent très remarquable du préopinant ou mon infériorité, que je sens mieux que tout autre, qui m'empêche de songer à le réfuter. Mais il me semble que j'ai un motif aussi vrai, plus étendu et plus déterminant dans mon profond respect pour l'Assemblée nationale, pour cette déclaration des droits qui l'a tant honorée et qui, malgré toute l'éloquence de M. l'abbé Maury, efface de notre code constitutionnel toute institution de noblesse : c'est l'ardeur avec laquelle je m'associerai toujours à ces grands et éternels principes
qu'elle n'a cessé de professer, de consacrer et de propager par ses exemples et par ses décrets. Je me Bornerai donc à une chose plus simple et plus utile que de réfuter M. l'abbé Maury. Je lui fournirai au contraire une nouvelle proposition à réfuter. Je ne suis pas bien sûr qu'elle ait échappé à la justice des préopinants; car, lorsqu'un pareil sujet a été traité pendant quelques instants dans une assemblée telle crue l'Assemblée nationale, Celui qui a eu le malheur d'y être arrivé quelques minutes trop tard doit craindre de trouver le champ complètement moissonné. Si la vaine ostentation des livrées a excité le zèle d'un des préopioants, je demande que, dans ce jour de l'anéantissement général des distinctions antisociales qui, quelque vaines, quelque puériles qu'elles puissent être, contrarient vos principes, l'Assemblée n'épargne pas une des marques qui rappellent le plus le système féodal et l'esprit chevaleresque; que toutes les armes et armoiries soient abolies ; que tous les Français ne portent plus désormais que les mêmes enseigDes, celles de la liberté, lesquelles seront désormais fondues avec celles de la France.
Je réclame l'exécution des décrets de l'Assemblée nationale, qui disent qu'on ne peut porter de décrets constitutionnels dans une séance du soir.
Je demande qu'on juge sans désemparer.
Après quelques observations, nous serons tous d'accord. Il ne s'agit point d'un nouvel article constitutionnel, ipais d'un décret réglementaire, suite de la Constitution. Nous ne voudrions point perdre à ces objets les séances du matin, destinées à la Constitution, tandis que nous ne faisons ici qu'en déduire une conséquence nécessaire.
demande la parole. — On observe qu'il quitte la tribune. — Quelques instants se passent dans le tumulte.
Après les réflexions qui ont été faites par plusieurs personnes, je me borne à demander la destruction de tous les emblèmes de la servitude, tels que ceux qui sont aux pieds de la statue de Louis XIV, à la place des Victoires, et qu'ils soient remplacée par d'autres qui rappellent les principaux événements de notre heureuse révolution. On peut décréter le principe, sauf la rédaction.
Quelque parti que l'on adopte, soit qu'on détruise tout à fait les emblèmes de la servitude, soit qu'on leur en substitue d'autres qui n'offensent pas les regards, il faut bien prendre garde qu'avec les emblèmes on ne veuille en même temps détruire les édifices. Je demande donc que cette exécution soit confiée à des gens de l'art, et qu'en attendant on mette spécialement ces emblèmes sous la sauvegarde de la loi.
profère quelques paroles que le tumulte empêche de recueillir.
J'appuie la motion de M. Alexandre de Lameth ; mais je ne suis pas comme lui de l'avis de substituer aux figures de la place des Victoires des inscriptions qui rappellent les
événements de notre Révolution. Je demande qu'on y mette les attributs des arts qui ont fleuri sous le règne de Louis XIV.
Je demande que ces monuments soient conservés soigneusement pour servir de modèles à nos artistes.
11 n'est pas plus permisde falsifier des monuments quedes chartes. Si l'Assemblée ordonne qu'il soit détaché quelques parties de celui de la place des Victoires, je demande qu'il soit dressé procès-verbal de l'exécution de ce décret.
Je demande la question préalable sur les amendements, et qu'on décrète le principe, sauf les remplacements.
Dans le moment où nous sommes, les rois n'ont plus de querelles particulières. Je demande que la légende, qui est empreinte sur les canons, ultima ratio regum, soit effacée.
Comme l'on me paraît embarrassé pour savoir ce que l'on mettra à la place des emblèmes de servitude qui doivent être détruits, étant fils d'un réfugié, je demande qu'on y mette la révocation de l'édit de Nantes.
(Tous les amendements sont rejetés par la question préalable, et la motion de M. Alexandre de Lameth est adoptée, sauf la rédaction.)
Je vais vous proposer, sur la seconde motion, un projet de rédaction qui me paraît renfermer toutes les propositions qui ont été faites. « L'Assemblée nationale, considérant que la noblesse héréditaire, née de la féodalité, ne peut subsister dans un Etat libre dont la Constitution est fondée sur l'égalité des droits, décrète que la noblesse héréditaire est pour toujours abolie en France; qu'en conséquence les titres de marquis, comte, prince, vicomte, duc, vidame, baron, chevalier, messire, écuyer, noble, et tous autres titres semblables, ne seront pris par qui que ce soit, ni donnés à personne : que tous les citoyens ne pourront prendre que le vrai nom de leur famille et leur nom patroni-mique ; que personne ne pourra porter ni faire porter de livrée, ni avoir d'armoiries; que l'encens ne sera brûlé dans les temples qu'en l'honneur de la Divinité, et ne sera offert à qui que ce soit; que les titres de monseigneur et de messeigneurs ne seront donnés à aucun individu, ni à aucun corps. »
(On demande l'ajournement. — Cette proposition, mise aux voix, est rejetée à une grande majorité.)
Je demande par amendement....
Un gentilhomme ne propose pas d'amendement.
Je demande par amendement que la faculté de porter trois lleurs de lis en champ d'azur soit continuée au roi des Français, pour servir de marque caractéristique aux pièces sur lesquelles il fera apposer le sceau national.
La lecture du projet de décret prouve à chaque ligne, à chaque mot, combien il a besoin d'être amendé. On dit que
la noblesse est née de la féodalité : c'est une extrême ignorance. La noblesse existait deux cents ans avant les fiefs.... (Il s'élève des murmures. On interrompt en disant : Lisez Mably.) Je dis que la noblesse a existé dans le royaume avant les fiefs. Avant la conquête du royaume par les Francs, la noblesse héréditaire existait chez les Gaulois. Lisez les Commentaires de César, vous y verrez les noms des premiers Gaulois déjà
célèbres dans la nation par leur noblesse.....Je
dis et je supplie ceux qui doivent me réfuter de m'entendre... César dit qu'il a toujours battu l'infanterie des Gaulois, mais jamais leur cavalerie, parce que la noblesse ne servait que dans.la cavalerie... L'ordre de la chevalerie existait dans les Gaules ; s'il n'eût pas existé, les Romains l'auraient établi, parce que les chevaliers étaient distingués à Rome des patriciens et des plébéiens... Je suis dans la question quand je prouve que l'Assemblée se déshonorerait eu avançant dans son décret des faits inexacts, la question de l'institution de la noblesse... (On demande à aller aux voix.) Je dis qu'il n'est peut-être pas sage de détruire sans discussion une institution aussi
ancienne que la monarchie..... (On observe que
la discussion ne peut être recommencée.)
Je défie M. l'abbé Maury de prouver qu'avant 850, lors de l'affaiblissement d'une race de nos rois, il y ait eu un ordre en France. Quand les Francs sont venus en France, ils étaient tous égaux : ils ont rendus les Gaulois égaux et non esclaves.
Je déclare non seulement ne pouvoir adhérer à la délibération qui pourrait se prendre... (On interrompt par des murmures.)
Je crois devoir vous inviter à des précautions de prudence dans le cas où ce décret passerait à l'affirmative; ce que je suis loin de présumer. Un décret rendu avec l'activité de celui-éi se répandra promptement, et les peuples l'adopteront avec la même chaleur : votre intention n est; sûrement pas, quel que soit le décret que vous jugerez convenable de rendre, d'exciter le peuple à des mouvements d'effervescence dont vous auriez à gémir ; or, daignez ob-sérver que, dans Je moment où vous décréterez la destruction des attributs de la statue d'un de nos rois, dans le moment où vous croirez devoir décréter l'abolition de la noblesse héréditaire, la proscription des livrées et des armoiries, le peuple pourrait s'autoriser de votre décret. Prenez garde qu'il n'aille porter une main effervescente sur les armoiries qui décorent les châteaux, les églises, les tombeaux. Je vous prie de considérer combien il est essentiel d'établir des règles d'après lesquelles votre décret sera exécuté; car vous ne voudrez pas que votre décret porte partout le désordre et j'oserai le dire, puisqu'il est question d'églises et de tombeaux, le sacrilège. Je vous supplie de prendre en considération, en sérieuse considération, l'observation que j'ai l'honneur de vous soumettre. Vos décrets ne doivent jamais s'exécuter par la violence du peuple, mais par des formes légales. Il faut se garder d'exalter la chaleur populaire dont nous avons tant souffert : c'est elle, j'ose le dire, qui a déshonoré une Révolution... (Il s'élève beaucoup de murmures.) une Révolution qui ne doit exister que par l'ordre; le désordre l'anéantirait... Je ne puis m'empêcher de marquer mon étonnement des mouvements
qu'exaltent une observation si sage; je ne puis revenir de mon étonnenient, de ce que d'honorables membres se permettent de dire autour de moi : « Il faut que cela soit... » (Quelques membres, placés auprès de la tribune, font entendre ces mots : « On n'a pas dit cela. ») Je voulais proposer que le comité de Constitution fût chargé de rédiger, dans mes vues, un article que la brièveté du temps ne nous permet pas de présenter.
Il est nécessaire d'ajouter au projet de décret la prohibition des titres d'altesse, ae grandeur, d'excellence et d'éminence.
J'adhère à toutes les vues qui sont présentées, et je regarde le décret proposé comme tellement attaché à la Révolution, que la principale disposition, la suppression de la noblesse héréditaire, est en toutes lettres dans le procès-verbal de la nuit du 4 août, mais je crois devoir aussi appuyer la réflexion pleine de prudence faite par M. ae Virieu. Le respect dfl aux tombeaux et aux lieux saints n'est pas la seule considération qui doive déterminer à faire un amendement au décret; c'est en vertu d'une réflexion plus touchante que je demande qu'il soit ajouté une disposition particulière à l'abolition des livrées. Si vous ne fixez pas l'époque de l'exécution du décret, vous pouvez vous attendre à de très grands inconvénients... (L'orateur est interrompu par les murmures de la partie droite et les applaudissements de la partie gauche). 11 peut arriver qu'une foule de citoyens, car les hommes de livrée sont des citoyens, s'ils ne sont pas des citoyens actifs, ils le deviendront ; il se pourrait qu'ils fussent insultés, si ceux qui nourrissent des citoyens utiles n'avaient pas le temps de leur faire faire des habits différents ; il faut laisser un délai raisonnable, qui paraît devoir être d'un mois. (On demande que le délai soit fixé de ce jour au 14 juillet.) J'adopte cette proposition. Je demande aussi que l'exécution de la disposition qui concerne les armoiries ne soit fixée à aucun temps. Je propose donc un amendement en ces termes : « sans que, sous prétexte du présent décret, aucun citoyen puisse se permettre d'attenter aux monuments placés dans les temples, ni à la décoration d'aucun lieu public ni privé, et sans que les dispositions relatives aux livrées et armoiries puissent être suivies ni exigées par qui que ce soit, avant le 14 juillet pour la ville de Paris, et avant trois mois pour les provinces» .
En 1789, c'est pour la première fois que la noblesse d'Alsace a eu l'avantage et l'honneur de se réunir à la noblesse française, mes commettants m'ont dit : Rendez-vous à cette auguste Assemblée ; mais par votre présence n'autorisez rien qui soit contraire à notre honneur et à nos droits. Je les connais sujets soumis, ils verseraient tout leur sang pour leur roi ; je les connais; ils me désavoueraient, ils me trouveraient indigne de reparaître devant eux, si j'avais par ma présence autorisé cette délibération par laquelle ils pourraient se regarder comme grevés. Je me retire, donc, la douleur dans l'âme ; et, l'on doit bien m'en croire, j'irai dire à mes commettants: Soyez soumis à toutes les lois de l'Assemblée nationale : ils seront soumis ; mais ils sauront qu'ils vivent avec le sang avec lequel ils sont nés, et que,rien ne saurait les empêcher de vivre et de mourir gentilshommes.
Dans les dernières guerres de Ha-
novre, il y avait quarante mille Alsaciens qui servaient le roi, et parmi ces quarante mille hommes il y avait cinquante gentilshommes.
La mission qui m'a été donnée étant contraire à l'issue probable de votre délibération.....
On demande à aller aux voix. — MM. le marquis d'Ambly, le marquis de Digoine du Palais, le président de Grosbois, le comte d'Egmont et beaucoup de membres de la partie droite s'élancent à la tribune. — On demande à aller aux voix. —1 MM. les marquis d'Ambly, de Digoine, etc., parlent avec chaleur, lèvent là main droite, la dirigent vers le président. — Les propositions de MM. Le Chapelier, Lanjuinais et Fréteau sont mises en délibération.
MM. de Grosbois, de Digoine, d'Ambly veulent encore se faire entendre, les applaudissements des spectateurs couvrent leurs voix.
met aux voix le décret, dont les parties ont déjà été votées successivement. 11 est adopté en ces termes, sauf rédaction :
« L'Assemblée nationale décrète que la noblesse héréditaire est pour toujours abolie ; qu'en conséquence, les titres de prince, de duc, de comte, de marquis, vicomte, vidame, baron, chevalier, messire, écuyer, noble, et tous antres titres semblables, ne seront ni pris par qui que ce soit, ni donnés à personne;
« Qu'aucun citoyen français ne pourra prendre que le vrai nom de sa famille ;
« Qu'il ne pourra non plus porter ni faire porter de livrée, ni avoir d'armoiries;
« Que l'encens ne sera brûlé, dans les temples, que pour honorer la Divinité, et ne sera offert à qui que ce soit ;
« Que les titres de monseigneur et de messei-gneurs ne seront donnés ni à aucun corps, ni à aucun individu, ainsi que les titres d'excellence, d'altesse, d'éminence, de grandeur :
« Sans que, sous prétexte du présent décret, aucun citoyen puisse se permettre d'attenter aux monuments dans les temples, aux chartes, titres et autres renseignements intéressant les familles ou les propriétés, ni aux décorations d'aucuns lieux publics ou particuliers, et sans que l'exécution des dispositions relatives aux livrées et aux armes placées sur les voitures, puisse être suivie ni exigée par qui que ce soit, avant le 14 juillet pour les citoyens vivant à Paris, et avant trois mois pour ceux qui habitent les provinces. »
Une députation de citoyens de Paris est introduite dans VAssemblée. Elle lui fait hommage d'un monument qu'elle se propose de placer dans le jeu de paume ae Versailles, où l'Assemblée nationale a prêté, le 20 juin 1789, le serment mémorable de ne pas se séparer que la Constitution ne fût achevée.
L'orateur de la députation donne lecture de l'adresse suivante : i
Messieurs,
« Trois habitants des Alpes, réunis sur les bords du iac des Quatre-Gantons, jurèrent deren-dre la Suisse libre. Leurs noms sont gravés sur des rochers ; leurs vertus sont devenues la leçon des siècles ; et le lieu où leur serment immortel est écrit est encore aujourd'hui le point de ralliement, et l'objet de la vénération de tous les peuples libres.
« Des Français ont fait graver sur le bronze le
serment que leurs représentants ont prêté dans le jeu de Paume : ils le présentent à l'Assemblée nationale comme une offrande faite aux peuples et aux siècles. Demain, l'anniversaire du jour où il a été prononcé, ils le porteront religieusement et le placeront dans le lieu que vos vertus ont consacré.
Paris, ce
Signé : C. . Lefebvre ; Bnrguburn ; Guerin ; Viaud de Belaire, avocat au parlement ; Poulle-not, député à la commune ; Bertaud, chirurgien-major de la garde nationale ; Beaulieu; Jacob; Gillet; femme Gillet ; Marne ; Ladainte ; A.-L. Grand maison ; Frestel ; J.-P. Gilly, volontaire d'Angers ; le Gocq de Cauville, secrétaire-commis des archives de l'Assemblée nationale ; Dufour de Saint-Pathus ; Chajor; Brival; Lanthenas; Boy ; Lefèbvre-Desnoett ; Mejan Duluc ; Vanmes-lelacombe; L. Comtreau; Qtcher; Hugonen, député de la garde nationale de Montpellier ; Lan-glois, contrôleur des rentes ; Tbailaud; l'abbé Leroy; F. Duplay; J. Duplay ; V. Duplay ; Marguerite Duplay;E. Duplay ; Dantig;Monet; Houillon ; Lad-miral; l'abbé Joseph ; G. Romme; l'abbé Anaclet ; Sponville; Ollivier fils ; Royer ; Mellet; Clerot; Ursule Gàveaut ; femme Guerin ; Souberbielle, chirurgien-major des volontaires de la Bastille ; J. Rodur ; Lafosse ; Honorine de Serrierres ; Jacques ;Goqueau; Aubin-, Laquiante; Petit ; Vriare; Hermil; Beaublé ; Benoît; Pascal ; Dujardin, Combert; Joubert ; Cellier; Menneville ; Lesnier, député suppléant de Bordeaux ; Gâcher ; Bousso-gne ; de Merard Saint-Just ; Lacretelle le jeune ; Benoît ; de Lalande ; Renaudin ; Laurent, avocat, major delà Bazoche ; R.Duhameau, architecte,soldat citoyen du bataillon des Filles Saint-Thomas ; Mouchet; G.Desmoulins; Brongniar fils; Gilet, sous-lieutenant de la garde nationale parisienne ; Isaac Albarenga ; Naudet, comédien français, capitaine de grenadiers ; Boulognet; Mouchet de la Combe, lieutenant de grenadiers ; Elie, capitaine du centre de Saint-Jean-en-Grève ; Gouraudin de La-houe, député du département de Maine-et-l'Oise.
répond :
« L'Assemblée nationale avait promis solennellement, l'année dernière, de ne pas se séparer, que la Constitution ne fût entièrement décrétée : ce serment, elle l'a tenu, et elle le tiendra ; je le renouvelle ici en son nom.
« Vous ne nous devez nul remerciaient, Messieurs : l'Assemblée nationale n'a rempli que des devoirs ; mais c'est à vous, c'est aux citoyens de Paris : que dis-je? c'est à tous les Français qu'elle doit son existence, et à l'opinion publique sa force. Soutenue par l'énergie et le courage qui animent la majeure partie des habitants du royaume, elle triomphera de tous ses ennemis, et verra bientôt le terme de ses opérations. Son but sera rempli : la France sera heureuse, et le monument que vous allez élever sera l'autel autour duquel se rallieront tous les amis de la liberté.
« L'Assembl,ée vous permet d'assister à sa séance. »
, député de Dijon, s'approche de la tribune et dit qu'il donne sa démission.
annonce que le résultat du scrutin pour Vélection du président n'a donné à personne la majorité absolue, MM, Lepelletier (ci-
devant de Saint-Fargeau) ; Bonnay (ci-devant le marquis de) ; Treilhard ; Riquetti l'aîné (ci-devant le comte de Mirabeau) ont réuni le plus grand nombre de suffrages.
MM. Del ley (ci-devant deDelley d'Agier), Populus et Robespierre sont nommés secrétaires cement de MM. l'abbé Royer, de Jessé et Prieur, dont les pouvoirs sont expirés.
(La séance est levée à onze heures au milieu des applaudissements et des cris d'allégresse.)
a la séance de l'assemblée nationale du
Protestations diverses contre le décret portant abolition de lanoblésse (1).
protestation du coht£ d'àlençon.
(Extrait du cahier de la noblesse.)
Déclare la noblesse de Toul et pays Toulois que ne formant de vœu que pour la prospérité de l'État et le soulagement du peuple, elle renonce à tous privilèges pécuniaires, etc., se réservant les prérogatives inhérentes à son ordre, comme tenant essentiel lement à la constitution de la monarchie, etc.
Je soussigné, député susdit, déclare que, n'ayant pu faire entendre mes réclamations à la séance du 19 juin, ni les faire recevoir à celle du jour suivant, je proteste contre le décret rendu sur la noblesse le 19 juin 1790, dont je déposerai l'acte chez un officier public, à raison du refus de le recevoir par l'Assemblée, et ce pour m'acquitter envers mes commettants, et me conformer à leur mandat, tant sur cet objet, et ses suites, que sur ceux essentiellement dépendants de la puissance spirituelle, et conformément à la déclaration de M. l'Evêque de Clermont, du 9 juillet 1790, à laquelle je donne mon adhésion.
A Paris, le
Signé ; le comte d'alençon, député de la noblesse de Toul.
protestation de m. burignot de varennes.
Le soussigné, député de la noblesse du bailliage de Ghàlon-sur-Saône, considérant qu'il ne peut exister de constitution sans le maintien des propriétés; que de toutes les propriétés, la plus précieuse est la noblesse héréditaire, que ce n'est qu'en perdant l'honneur qu'on est légitimement dépossédé, qu'aucun équivalent ne peut la remplacer: considérant enfin que l'Assemblée nationale n'a souffert dans ses procès-verbaux, aucune mention des protestations faites à sa tribune, le 19 juin au soir contre le décret qui supprime la noblesse héréditaire (protestations auxquelles il avait hautement adhéré), déclare qu'il proteste de nouveau contre ce décret, tant en son nom qu'en celui de ses commettants; demandant que la pré-
sente protestation soit déposée aux archives de l'Assemblée nationale.
Signé : burignot de varennes.
Nota. — Cette protestation a été adressée au président de l'Assemblée nationale, qui a refusé de la lui communiquer.
Adhésion du chevalier de Rully.
N'ayant pas encore pris ma place à l'Assemblée nationale, à l'époque du 19 juin, je n'ai pris aucune part au décret rendu ledit jour, mais je déclare que j'adhère aux principes ci-dessus énoncés par mon collègue, que je joins ma signature à sa protestation, et que je regarde ledit décret comme nul et non-avenu.
Signé : le chevalier de rully, député de Châlon-sur-Saône.
déclaration de m. le vicomte du hautoy.
Extrait du cahier de la noblesse du bailliage de Pont-à-Mousson, en Lorraine.
« Art. 38... Sa Majesté sera suppliée très « humblement de confirmer la promesse qui a été « faite aux deux duchés (de Lorraine et Barrois), « par le roi son auguste prédécesseur, de les con-« server dans tous les privilèges, prérogatives et « immunités qui leur avaient été assurés irré-« vocablement par le traité conclu à Vienne, le « 28 août 1736. »
Extrait de ce traité.
« Art. 14... Subsisteront et seront maintenus... « les privilèges de l'Église, de la noblesse et du « tiers état, les annobiissements, graduations et « concessions d'honneur faites par les ducs de « Lorraine».
Jesoussigné, député de la noblesse du bailliage de Pont-à-Mousson, déclare qu'ayant été chargé expressément, .par l'article 7 des pouvoirs qui m'ont été donnés, de veiller à ce qu'il ne soit attenté en aucune manière aux, droits sacrés et immuables de la propriété, je ne pourrais, sans me rendre indigne de la confiance de mes commettants, aquiescer, par mon silence, à la violation de la plus précieuse de leurs propriétés, celle de leur état politique, de leurs prérogatives honorifiques. Si le sacrifice de cette propriété pouvait concourir au bien de la patrie, autorisé par le même article à consentir a tous ceux que ce bien commun de tous les citoyens peut exiger, je n'aurais aucune réclamation à faire contre ie décret rendu à la séahce lu soir du samedi 19 de ce mois : connaissant toute l'étendue de la générosité de la noblesse lorraine, assuré de n'en être pas désavoué, je n'aurais été retenu par aucune considération d'intérêts particuliers.
Mais l'abolition de la noblesse, des titres, des dignités, des armoiries, des livrées, etc., peut-elle concourir au bien de la patrie? La noblesse a toujours été le plus ferme appui du trône : si cet appui était seulement ébranlé, le trône et la monarchie s'écrouleraient bientôt, et la France serait ensevelie sous leurs ruines. Son nom, autrefois si célèbre, ne rappellerait plus que l'anéantissement du plus beau royaume de l'univers. Le
déeret du 19 de ce mois, loin d'être utile, porte donc une atteinte mortelle à la monarchie, et par conséquent à la Constitution. Il viole l'une des conditions du traité par lequel les duchés de Lorraine et de Bar ont été cédés à la France, et probablement des traités équivalents faits avec la plupart des autres provinces : ces traités étant des obligations synallagmatiques, ne peuvent être détruits que du consentement des représentants des parties qui ont contracté. Je ne pourrais donc donner mon acquiescement à un décret qui attaque l'une des bases du droit publicde ma province, sans sortir des bornes de mes pouvoirs, et mériter les justes reproches de mes commettants; et si j'avais assisté à la séance du 19 soir, je n'aurais pas manqué de m'opposer de toutes mes forces, ainsi que l'ont fait beaucoup d'autres députés, à la motion faite contre la noblesse; motion incidente, amenée par une députation aussi inattendue que singulière. Cette matière était assez importante pour être discutée au moins dans une séance du matin, et annoncée d'avance conformément au règlement de l'Assemblée nationale-, Le décret dont il s'agit n'est par conséquent qu'une surprise; il n'a aucun des caractères d'une mûre délibération. Il est même contradictoire à l'esprit et à la lettre de l'article premier de la déclaration des droits de l'homme, qui, en reconnaissant que les hommes sont égaux en droits, ne dit pas un mot de l'égalité des conditions, qui n'est qu'une chimère philosophique. Il contredit plus particulièrement encore l'article, 14 des décrets des 4, 6, 8 et 11 août 1789, Les sacrifices énormes, faits précipitamment dans la nuit du 4, et ratifiés par ces décrets, avaient sans doute paru suffisants a la majorité de l'Assemblée: elle ne pensait pas alors que la noblesse dût encore y ajouter celui de ses prérogatives honorifiques : elle a voulu au contraire qu'elle pût les conserver et en jouir, même dans le cas où, suivant les lois anciennes, la jouissance en était suspendue; puisqu'elle a décrété que nulle profession utile n'emportera dérogeance. Cette disposition est détruite par le décret du 19 juin, au mépris du règlement, qui porte qu'un décret ne pourra être Changé, ni abrogé par la législature qui l'aura rendu.
Par toutes ces considérations, je pense que ce décret est nul, et qu'il ne peut être exécuté, notamment dans la province de Lorraine. En conséquence, je proteste formellement contre ce décret comme nuisible au bien de l'Etat, et comme contraire, non seulement au voeu de mes commettants, exprimé dans les instructions qui m'ont été remises, mais encore au droit public des duchés de Lorraine et Barrois. Fait a Paris, le 23 juin 1790.
Signé : le vicomte du hautoy.
protestation du comte françois d'escars.
Mes commettants, en m'envoyant aux États libres et généraux du royaume de France, ne croyaient pas qu'il y eût de puissance humaine qui pût les empêcher de transmettre à leurs descendants la qualité de gentilhomme, qu'ils n'avaient reçue que de Dieu. Ils étaient et ils sont encore prêts à verser leur sang pour le salut de la patrie : mais il n'ont certainement pas cru et ne croiront jamais que le sacrifice de leur noblesse soit une chose nécessaire. En conséquence, je déclare en leur nom et au mien propre, à l'Assemblée nationale et à la France entière que je
n'ai pris aucune part aux décrets rendus dans la séance du soir, du 19 juin, concernant l'abolition et la suppression de la noblesse française, et que je proteste formellement et de la manière la plus authentique contre lesdits décrets. Je supplie l'Assemblée nationale d'ordonner que la présente protestation soit annexée au procès-verbal, et qu'il m'en soit délivré acte, pour justifier ma conduite vis-à-vis de mes commettants.
A Paris, le
Signé : françois d'escars, député de la noblesse de la sénéchaussée de Châtellerault.
protestation du marquis de foucault-lar-dimal1e.
Lorsque l'Assemblée nationale, le 4 février dernier, a exigé de moi le serment solennel de maintenir la. Constitution de tout mon pouvoir, je l'ai fait, ce serment, avec la franchise que j'avais également droit d'attendre des représentants de la nation entre les mains desquels je le prêtais. Il s'agissait alors de reconnaître des principes conservateurs des propriétés, des principes constitutionnels du développement desquels, disait-on, dépendrait et la majesté du trône, et le bonheur des peuples ; la noblesse l'a fait avec confiance. Il s'agissait de ratifier l'abolition de tous les privilèges pécuniaires ; cette abolition n'était pas un triomphe remporté sur la noblesse; ce n'était pas un sacrifice exigé d'elle, c'était plutôt un don de sa part qui avait précédé même ia tenue des étals généraux. Elle n'a pas hésité : c'est avec joie qu'elle a consenti. Depuis longtemps générosité et noblesse sont synonimes dans la langue française. Pouvais-je donc penser que cette même Assemblée, dans une seule soirée, contradiçtoirement avec ses règlements de police, ses décrets, ses principes, anéantirait la propriété la plus sacrée pour tout gentilhomme, la seule partie de succession que nous ayons reçue intacte de nos pères ruinés, pour la plupart, au service de l'Etat; la seule qui ait pu s'augmenter entre nos mains, que nous voulons transmettre à notre postérité en toute pureté, accrue de nos propres services, au nombre desquels cette réclamation sera Comptée un jour ? Qui l'aurait cru, on a osé envelopper même les princes du sang dans cette humiliante dégradation! Je déclare à tous mes concitoyens que mon serment ne s'étend pas jusqu'à ce décret ; que je proteste contre une loi inutile au bonheur du peuple, outrageante pour la noblesse en général, pour celle en particulier de la province qui m'a confié ses intérêts et dont le plus cher a toujours été de conserver l'honneur d'avoir fourni de tout temps le plus grand nombre d'officiers dans les armées, comme l'espérance de les fournir encore. Je proteste contre une loi qui, suivant l'expression, peut-être inexacte, mais si energique d'un généreux maréchal de France, d'un magnanime duc et pair, tendrait à nous démonarchiser (1).
Signé : le marquis de foucauld-lardimalie.
Paris ce
Cette protestation a été envoyée à M. le Pré-
(1) Ce mot est de fea M. le maréchal de Brissac.
sident de l'Assemblée nationale, avec la lettre ci-après :
Monsieur le Président, J'ai l'honneur de vous prier de donner connaissance à l'Assemblée nationale de la protestation que j'ai déjà faite verbalement à la tribune, sur le décret rendu dans la séance du soir du 19 de ce mois, qui prononce l'anéantissement et l'abolition de la noblesse française, comme si la chose était possible. Je réclame, au nom de mes commettants et au mien, contre un acte contraire au véritable intérêt du peuple et de l'Etat, et qui ne tend qu'à priver les gentilshommes du royaume d'une propriété indestructible, imprescriptible et inaliénable.
Je renouvelle aujourd'hui ma protestation par écrit, et je supplie l'Assemblée nationale de m'en donner acte.
Je suis avec rèspect,
Monsieur le Président, Votre, etc.
Signé : le marquis de foucàuld-lardimalie.
Paris, le 22 juin.
réponse de m. le président.
Monsieur,
J'ai l'honneur de vous renvoyer ci-inclus le paquet que vous m'avez adressé : je ne peux en donner connaissance à l'Assemblée.
Je suis avec un inviolable attachement, Monsieur, Votre, etc.
Signé : a. c. le pelletier.
protestation du duc d'havré et croï.
Je soussigné, député de la noblesse du bailliage d'Amiens à l'Assemblée nationale, déclare que m'étant trouvé absent lors de la séance du 19 juin 1790, dans laquelle les objets qui y ont été traités n'étaient pas à l'ordre du jour, je n'ai pu joindre mes réclamations à celles de MM. les députés de la noblesse-
Chargé par mes commettants de renoncer, pour l'avantage de leurs concitoyens, aux privilèges pécuniaires, mais de soutenir aux Etats généraux du royaume leurs autres droits, et m'étant toujours opposé, autant qu'il était en mon pouvoir, aux décrets qui pouvaient leur être contraires, je n'aurais pas manqué de manifester mon opinion dans une circonstance aussi majeure : j'aurais rappelé l'article de mon mandat, qui porte l'engagement, de la part des membres de la noblesse du bailliage, de ne revendiquer que les droits sacrés de la propriété, comme aussi seulement les privilèges honorifiques inhérents à leur personne et. à leur ordre, dont la conservation intéresse également tout l'Etat; parce qu'étant essentiellement liés à la monarchie, on ne pourrait les attaquer sans porter atteinte à sa constitution; il n'eût pas été en leur pouvoir de m'autoriser à renoncer à des avantages qu'ils tiennent de la nature, et qui, par cela seul, ne sont pas dans la sphère des choses soumises aux lois humaines, ni a des titres et des distinctions honorifiques et héréditaires, qui, en leur rappelant sans cesse les services rendus par leurs pères à la patrie, sont des garants perpétuels, qu'eux et
leurs descendants seront toujours animés du même zèle pour la nation à laquelle cette' suppression, loin d'être utile, pourrait même être nuisible.
Je déclare que je n'ai pris ni n'aurais jamais pu prendre aucune part à ladite délibération, et, attendu l'impossibilité que la présente réclamation soit annexée aux procès-verbaux de l'Assemblée nationale, je crois devoir la déposer en original dans un dépôt public, tant pour l'acquit de ma propre conscience que pour ma décharge vis-à-vis de mes commettants.
A Paris, ce
Le duc d'havré ét de croï.
lettre a mes commettants, par de laroque.
Messieurs,
Au bout de ma carrière politique, il est de mon devoir de vous rendre compte de l'usage que j'ai fait des pouvoirs que vous m'avez conhés.
Quand il s'est présenté des questions qu'il ne vous avait pas été possible de prévoir, je n'ai consulté que l'intérêt général, l'expérience de tous les siècles, l'équité naturelle et Ja raison.
C'est en prenant de tels guides que je me suis opposé à la création d'un papier-monnaie, au décret sur les gens de couleur, etc.
Mais, dans tous les cas que vous avez prévus, j'ose vous affirmer qu'intimement convaincu qu'aucune puissance numaine n'avait le droit d'annuler mes serments, je ne me suis jamais écarté ni de l'esprit, ni de la lettré du mandat dont j'étais le dépositaire, et auquel j'avais juré d'être fidèle.
En conséquence de vos ordres, j'ai consenti l'abandon des privilèges purement pécuniaires de la noblesse, et j'ai constamment défendu l'autel, le trône et toutes les propriétés. C'est dans le même esprit que j'ai réclamé contre la réunion des ordres, contre les décrets de la nuit du .4 août et contre celui du 19 juin.
Par une suite naturelle de ces principes, j'ai donné mon adhésion et ma signature au compte rendu sur le rapport relatif aux journées des 5 et 6 octobre, et à la déclaration dite des 290.
Je laisse aux sophistes le soin d'embellir leurs mensonges; quant à moi, je mets ma gloire à vous écrire avec simplicité, parce que la vérité n'a pas besoin d'ornement.
J'ai l'honneur d'être, etc.
Signé : laroque, député, en 1789, par la noblesse du Périgord aux Etats généraux de France.
protestation de m. de pleurre.
Le mandat et les pouvoirs qu'a reçus de ses commettants le député de la noblesse du bailliage de Sézanne, soussigné, et qu'il leur a juré, sur la foi du serment, d'observer religieusement, lui prescrivant de maintenir et faire reconnaître les prérogatives de rang, d'honneur et de dignité appartenant à la noblesse, il ne peut perdre de vue un.engagement aussi solennel, et sa conscience le presse impérieusement de déclarer, au moment où l'Assemblée vient de décréter l'abolition de la noblesse héréditaire; que s'il eût pu se faire entendre à cette séance d'hier soir 19 juin, il eût respectueusement représenté à l'As-
semblée nationale que le décret est incompatible :
1° Avec l'article 6 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, et le onzième de ceux décrétés la nuit du 4 août, dont les dispositions constitutionnelles, et par cela même irrévocables, supposent nécessairement l'existence de la noblesse dans le royaume, puisqu'autrement, ils seraient sans application et vides de sens;
2° Avec le dernier article de la dite déclaration des droits, qui consacre l'inviolabilité des propriétés, qu'il n'en est pas de plus sacrée et de plus précieuse à des gentilshommes français qu'un état, qui les a toujours portés à l'honneur, en leur rappelant les vertus de leurs aïeux, et le sacrifice qu'ils ont constamment fait de leur vie et de leur fortune à la défense de la patrie.
Enfin, qu'il aurait insisté à supplier l'Assemblée nationale de lui donner acte de son opposition formelle à une décision d'autant plus inconstitutionnelle qu'elle a été prise à une séance du soir, sans aucune des formes prescrites par des décrets antérieurs et le règlement en matière de constitution, et qui, loin d'être utile à l'Etat, lui serait funeste, si, contrastant avec Iesdits précédents décrets, elle pouvait néanmoins avoir un effet rétroactif et porter atteinte à la noblesse existante. D'après ces considérations, le soussigné ne peut adhérer au décret du 19 juin et proteste, pour ses commettants, contre toute interprétation ou induction que l'on en voudrait tirer à leur préjudice.
Et attendu que l'Assemblée nationale a refusé de recevoir aucune déclaration et donner acte, le soussigné croit de son devoir de rendre la présente authentique pour manifester sa fidélité à ses mandats.
A Paris, ce
Signé : depleurre, député de la noblesse du bailliage de Sczanne.
protestation de m. le comte de montroissier.
Je, soussigné, député de la sénéchaussée de Glermont-Ferrand, en Auvergne, déclare n'avoir pris aucune part au décret rendu dans la séance du soir du 19 juin, opposé en tous points au mandat de mes commettants, auquel j'ai juré d'être fidèle ; j'aurais fait entendre ma voix et ma réclamation le jour même à la tribune, si le tumulte et la confusion qui régnaient dans l'Assemblée m'eussent laissé la possibilité de me faire entendre. Je proteste donc de ne pouvoir adhérer à ce décret, qui enlève à la noblesse française sa propriété la plus chère, celle qu'aucune puissance ne peut lui ravir, celle qui a fait la gloire de la monarchie depuis quatorze siècles, la noblesse n'ayant jamais hésité à faire le sacrifice de ses biens et de sa vie pour soutenir le trône, lorsqu'on a tenté de l'ébranler. C'est donc pour satisfaire à ma conscience, à mon honneur, à la voix de mes ancêtres, à la postérité et aux ordres de mes commettants, que j'ai déposé, dans cet écrit, chez un officier public, les sentiments qui m'ont toujours animé et que je professerai jusqu'à mon dernier soupir.
Paris, le
Signé : Philippe , comte de Montrois-sier, député de la noblesse} de Clermont-Ferrand, en Auvergne.
compte rendu par le marquis d'estourmel a ses commettants, le 30 juin 1790.
Messieurs, lorsque vous m'avez confié l'honorable mission de représenter la noblesse du Cambré-sis au États-généraux, où elle n'avait jamais siégé, le Cambrésis n'étant réuni à la France que depuis 1677, vous ne doutiez pas que la volonté du roi, en convoquant, après cent soixante-quinze ans d'interruption , les États généraux de son royaume, ne fût d'établir la plus justerépartition des impôts, en conservant des égards à cette partie de la noblesse qui cultive elle-même ses champs, et qui souvent, après avoir supporté les fatigues de la guerre, après avoir servi le roi dans ses armées, vient encore servir l'Etat, en donnant Vexemple d'une vie simple et laborieuse, et honorant par ses occupations les travaux et l'agriculture (1).
Vous saviez que son intention était de conserver les prérogatives seigneuriales et honorifiques qui, distinguant les deux premiers ordres dans leurs propriétés et dans leurs personnes, sont une propriété aussi respectable qu'une autre, d'autant que plusieurs d'entre elles tiennent à l'essence de la monarchie (2).
Vous aviez envisagé que le sacrifice de tout intérêt pécuniaire et la soumission à la répartition la plus égale des impositions devaient être la base des instructions que vous me donniez; et vous m'aviez chargé de me borner à demander la conservation et le maintien des constitutions et privilèges de la province stipulés et jurés par nos rois (3).
Jaloux de répondre à votre confiance et de prouver que j'en étais digne, tant à ceux d'entre vous, Messieurs, qui jusque-là avaient été exclusivement appelés à l'administration de la province, qu'à ceux qui, par un ancien usage, confirmé par un règlement fait par le roi en 1786, s'en trouvaient exclus, et qui cependant avaient (sur mes observations) retiré du cahier l'article qu'ils avaient proposé, pour que dorénavant, tous les nobles fussent admis à l'assemblée générale des États de la province ; je n'ai laissé échapper aucune occasion de faire consigner dans l'Assemblée des représentants de la nation les vœux que vous m'avez chargé d'y transmettre.
L'article 6 de votre cahier me prescrivant de demander que, dans toutes les délibérations, les voix fussent comptées par ordre et non par tête, j'en ai fait la déclaration le 2 juillet 1789, la noblesse étant réunie et elle est consignée dans le procès-verbal des séances de la chambre de la noblesse (4).
J'ai en même temps supplié le roi de vous faire assembler pour avoir l'émission de votre vœu sur la conduite que je devais tenir relativement à la vérification des pouvoirs.
Vous m'avez, par votre déclaration du 14 juillet, autorisé à faire vérifier, aussitôt que faire se pourrait, mes pouvoirs, conformément au vœu national, pour que rien ne retardât les vues salutaires du roi, et à opiner par tête, tant et aussi longtemps que les trois ordres seraient réunis, et que le bien de VEtat le demanderait ; vous avez ordonné que la copie de cette délibération fût envoyée aux députés tant du clergé que du tiers état de la province du Cambrésis.
Par une délibération du même jour, après avoir pris en considération les articles 18, 19, 20, 21, 22 et 23 de la déclaration du roi du 23 juin 1789, concernant la tenue des États généraux, par lesquels Sa Majesté remet auxdits Etats généraux de lui faire connaître les dispositions de justice et de sagesse qu'il est convenable d'adopter pour établir un ordre fixe dans l'administration des provinces, vous avez arrêté, que le seigneur-roi serait très humblement supplié, lorsqu'il serait question de statuer sur le régime et la constitution des Etats de Cambrai et du Cambrésis, d'assembler la noblesse desdites ville et province, dans la forme qu'elle l'avait été par la lettre du roi du 27 avril 1789, pour la convocation aux Etats généraux du royaume, pour donner à Sa Majesté les mémoires nécessaires à ce sujet; qu' en conséquence, je ne pourrais donner aucun vœu, n'ayant ni pouvoir, ni mission à cet égard.
Fidèle à transmettre les intentions que vous m'aviez chargé d'exprimer, je n'ai pris part à la séance du mardi 4 août au soir 1789, qu'en annonçant que les trois ordres de 1 a province du Cambrésis, soumis dans tous les temps à une contribution aux impôts, entièrement égale entre eux, ne pouvaient qu'acquiescer de nouveau aux vues de justice de l'Assemblée, relativement à cette égale répartition (1), sous la réserve des serments et mandats.
Dans la séance du lundi au soir du 12 octobre 1789, j'ai dénoncé, de concert avec mes collègues, une lettre supposée, signée l'Abbé Renoux, et datée de Cambrai, contenant une offre de 300,000 livres, provenant de la veDte d'une partie des biens de l'Aumône-jonart, plus, une rente de vingt mille francs ; et j'ai mis sous les yeux de l'Assemblée le désaveu formel de M. Renoux, et celui de M. l'archevêque de Cambrai, consignés dans deux lettres qui m'étaient adressées.
L'Assemblée a décrété que les députés du Cambrésis seraient autorisés à retirer la lettre supposée, sous récépissé (2).
Dans la séance du samedi 31 octobre 1789, où il était question de délibérer sur la propriété des biens ecclésiastiques, j'ai proposé que la question fût ajournée jusqu'après l'organisation des assemblées provinciales ; je croyais et je crois encore qu'il était indispensable d'avoir le vœu des provinces sur une disposition aussi importante, et que l'Assemblée nationale ayant décrété,
qu'elle ne voulait plus reconnaître d'ordres (1) et que les provinces ne pouvaient plus s'assembler, suivant l'ancienne forme (2), il fallait attendre qu'elles pussent être représentées par une assemblée légalement formée, telle que celle des départements, où les citoyens de toutes les classes concourraient à exprimer un vœu unanime (3).
Le 2 novembre, lorsqu'il fût proposé de décréter que les biens ecclésiastiques seraient à la disposition de la nation, j'ai demandé qu'il y fût ajouté : sous la surveillance et l'instruction des provinces (4).
J'ai proposé, le 9 novembre, un amendement concernant la nomination aux abbayes régulières des provinces belges, dont l'objet était de maintenir une forme très avantageuse au Cambrésis, puisqu'il est démontré que les abbés réguliers consomment dans la province les revenus qu'ils en tirent; cet amendement, qui m'était prescrit par l'article 2 de vos instructions, a été rejeté (5j.
Dans la séance du jeudi 10 décembre, j'ai réclamé, d'après l'article 7 de votre cahier, une exception à l'abolition des droits de nomination des places de municipalité en faveur de M. l'archevêque de Cambrai, qui est en position de nommer la moitié des échevins de Cambrai. L'Assemblée n'a eu aucun égard à cette réclamation (6).
J'ai déclaré, le 15 janvier 1790, lors de la lecture du décret final sur la formation des départements, que j'étais chargé (7) de demander la conservation de l'administration de la province ; l'Assemblée n'a eu aucun égard à une pareille réclamation.
Pénétré du principe que la capitulation accordée par Louis XIV à Cambrai et au Cambrésis, le 25 avril 1667, était la base de l'article 7 de votre cahier et ne pouvant obtenir la confirmation des articles 34, 47 et 48 (8) de ladite capitulation, j'ai cru devoir me conformer à la réclamation qui m'était adressée et à mes collègues, par les anciens officiers municipaux de Cambrai.
J'ai demandé, dans la séance du mardi 19 janvier au soir 1790, que le mode de remboursement des officiers municipaux de Cambrai fût
décrété, pour que les officiers, qui se trouvaient déjthus de leurs fonctions par le décret du 28 décembre 1789, qui constitue les nouvelles municipalités, île languissent pas après le remboursement de leurs finances. L'ajournement a été proposé et décrété (1).
Dans la séance du 12 février 1790, où il avait été arrêté que l'Assemblée ne se séparerait pas le lendemain sans avoir porté un décret sur la question conçue en ces termes:
Les ordres religieux seront-ils abolis ?
Y aura-t-ii des exceptions ?
J'ai déclaré que j'étais chargé de demander (2) qu'à la mutation des abbés réguliers de la province dans laquelle la commende n'a pas lieu, les pensions sur les abbayes fussent appliquées, par préférence, aux ecclésiastiques du Cambrésis, et que, dans aucun cas, la commende ne pût être introduite dans cette province, même en faveur des cardinaux (3).
J'ai demandé, le 10 mars 1790, conformément aux articles 30 et 32 de votre cahier, qu'aux articles déjà décrétés en faveur de la liberté du commerce, il en fût ajouté deux ; l'un général, pour ordonner que les marchés fussent libres, de manière qu'on pût, lorsqu'on aurait porté des grains, les remporter s'ils n'étaient pas vendus ; l'autre particulier, pour que les négociants et les bateliers de la province pussent charger toute espèce de marchandises à Condé et même dans les Pays-Bas, sans être soumis à aucun péage pour la navigation sur les rivières et les canaux ae ces provinces (4). Cette réclamation a été renvoyée au comité du commerce.
L'Assemblée nationale ayant décrété, le 17 mars, que les biens domaniaux et ecclésiastiques dont la vente a été décrétée le 19 décembre jusqu'à la concurrence de 400 millions, fussent incessamment vendus à la municipalité de Paris et aux autres municipalités du royaume auxquelles il pouvait convenir d'en faire l'acquisition ; il a été proposé, par amendement, d'ajouter, après le mot municipalitésy ces mots : dûment autorisées par les départements. J'ai demandé qu'il fût ajouté, le tout, sous la surveillance et d'après les instructions des assemblées de département, conformément au décret dut novembre, L'Assemblée s'est refusée à adopter l'un et l'autre (5).
Touché des difficultés locales que l'application du décret du 28 décembre éprouve dans le Cambrésis, relativement aux clauses voulues par la coutume, j'ai demandé, dans la séance du 18 mars, que le comité de Constitution fût chargé de présenter un projet de décret, qui levât ces difficultés ; l'Assemblée l'a ordonné (6). Depuis je n'en ai pas sollicité la présentation, parce que j'ai été instruit que deux des anciens échevins à Cambrai, et dans le Cambrésis les anciens mayeurs et gens de loi, recevaient les œuvres de loi.
J'ai exposé, dans la séance du 9 avril, que plusieurs municipalités s'opposaien t à ce que lés seigneurs-voyers ne fisseot abattre et enlever les
arbres plantés le long des chemins, sur les places publiques d'Egards etWarechaix; et comme cet objet était important, surtout dans les provinces qui manquent de bois, telles que le Cambrésis et la Picardie ; j'ai demandé que les comités d'agriculture et de féodalité se concertassent ensemble pour proposer, sous huitaine, un décret, ce qui a été ordonné (1). Je n'ai pas insisté depuis, pour que le projet de décret fût soumis à l'Assemblée ; j'ai pensé que, pour le mo-* ment, la délibération du comité de féodalité du 20 mars 1790, était suffisante pour arrêter les désordres.
Dan s la séance du 12 avril, d'après l'article 7 de vos instructions, j'ai fait lecture de l'article premier de la capitulation de Cambrai, par lequel il était demandé que la foi catholique, apostolique et romaine, soit regardée, observée et maintenue dans toute l'étendue delà ville, banlieue, pays de Cambrésis, terres y enclavées, et les autres lieux du diocèse, sans y permettre, en aucune manière, la liberté de conscience et prêche, soit secrète ou publique, ni aucune construction de temple: et ae la réponse de Louis XIV, qui accordait ie contenu en cet article, comme il a été fait à Lille et dans les autres places conquises par Sa Majesté en Flandre.
J'ai consigné, à la fin de mon opinion, que mon voeu, tant en votre nom, qu'au mien, était que la religion catholique, apostolique et romaine, fût la religion dominante de l'Etat (2) ; on m'a refusé d'insérer cette déclaration dans le procès-verbal, et on y a exprimé simplement, que des membres avaient demandé la réserve des traités faits dans les différentes parties du royaume où il existe des non catholiques (3).
Le 14 avril, lorsqu'il fût proposé de décréter que la totalité des biens ecclésiastiques serait mise en vente, j'ai encore renouvelé ma demande de la surveillance et instruction des provinces, en appuyant la proposition faite qu'il fût délivré aux assemblées de département deux cents millions de biens-fonds au delà des quatre cents dont l'aliénation avait été décrétée les 19 et 21 décembre 1789. Cette proposition a été rejetée el le procès-verbal porte simplement que l'Assemblée a décidé qu'il n'y avait lieu à délibérer sur divers amendements (4). |
Convaincu, d'aprèsles articles 10,11 et 19 de vos instructions, que votre vœu était que les Etats généraux pourvussent, suivant leur sagesse et leur prudence, aux moyens extraordinaires auxquels ies circonstances d'une guerre imprévue forceraient à recourir, j'avais pensé qu'il était de la dignité de la monarchie française, que le roi eût le droit de faire la paix et la guerre avec le concours de la nation, sans laquelle il ne pouvait continuer la guerre, puisque d'elle ou de ses représentants
dépendaient les subsides pour la faire, et que les fonds faits pour l'entretien des troupes de terre et de mer, sur le pied de paix, étaient constamment insuffisants pour le pied de guerre ; c'est ce qui a déterminé l'opinion que j'ai prononcée dans la séance du 22 mai 1790.
Persuadé que la perception de tous les impôts dans la forme sous laquelle ils sont perçus doit subsister jusqu'à l'organisation de ceux qui y seront substitués par un décret de l'Assemblée na-tionalej j'ai rédigé, avec mes collègues, une lettre circulaire qui a été envoyée à toutes les municipalités, tant du Gambrésis que des villages qui se trouvent cédés aux districts voisins.
Cette lettre n'ayant pas arrêté les pétitions de quelques citoyens de Cambrai, j'ai adhéré au décret rendu le 21 mai 1790.
La proposition faite à la séance du samedi 19 juin au soir, de décréter que la noblesse n'était plus héréditaire, m'a paru l'infraction la plus forte à la propriété et à l'article 19 de la capitulation de Cambrai (1). s ;; m
J'ai, en conséquence, remis au président une déclaration signée de moi, contenant que la noblesse du Cambrésis, sacrifiant tout intérêt pécuniaire et se soumettant volontiers à la répartition la plus égale des impositions, se bornait à demander la conservation et le maintien des constitutions et privilèges de la province stipulés et jurés par nos rois.
J'avais demandé la parole pour établir qu'en Cambrésis les titres assis sur des terres sont, ou des titres de coutume, ou des titres d'érection accordés par les rois d'Espagne; qu'il y a aussi des titres personnels accordés aux familles sans être assis sur la glèbe, transmissibles des pères aux enfants par des diplômes émanés des souverains, registrés ou vérifiés par les tribunaux; je n'ai pu obtenir d'être écouté : on a refusé d'insérer ma réclamation dans le procès*-verbal.
Dans cette circonstance je me suis dit, que s'il n'est pas toujours possible de faire tout le bien qu'on veut, il est au moins du devoir d'une âme honnête d'empêcher le mal de se propager ; en conséquence, intimement convaincu qu'il n'est pas au pouvoir de l'Assemblée nationale d'annihiler la noblesse, dont les sentiments pour la monarchie sont encore plus indélébiles que ses titres ; la noblesse, dont la plus ancienne comme la plus belle des prérogatives est de verser son sang pour la défense du roi et de la patrie ; la noblesse, qui, de toutes les propriétés, est l'héritage le plus précieux et le dépôt le plus sacré qu'on ait pu recevoir de ses aïeux, à la charge honorable de le transmettre immuablement à ses descendants ; la noblesse, que je regarde comme une avance faite par la patrie sur la parole des ancêtres, jusqu'à ce qu'on soit en état de faire honneur à ses garants, j'en dépose entre vos mains ma déclaration et c'est sous votre sauvegarde et sous celle de la loyauté française, que je déclare n'avoir pu prendre et n'avoir pas pris part au décret concernant l'abolition et la suppression de la noblesse.
Telle a été, Messieurs, ma conduite jusqu'à ce jour ; fidèle à mon mandat, qui pour moi est l'unique loi, je ne me suis pas permis de l'interpréter, parce qu'il n'entrera jamais dans mes principes de penser que des mandataires puissent outrepasser la volonté de leurs commettants. Un gentilhomme ne connaît que l'honneur et son serment* J'ai écouté la voix de l'un ; j'ai rempli, autant qu'il était en moi, ce que me prescrivait l'autre; je continuerai à suivre la même conduite, et je vous renouvelle ici, Messieurs, que je ne balancerai en aucune occasion à faire connaître votre vœu et à me conformer à vos instructions.
Signé : le marquis d'estourmel, député de la noblesse du Cambrésis.
déclaration du comte de mazancour.
Extrait du cahier de la noblesse du bailliage de Villers-Cotterets.
« L'ordre du clergé et de la noblesse se ré-« servent expressément les honneurs, droits et « prééminences qui leur appartiennent, d'après « la Constitution de la monarchie et des lois de « l'Etat, et qui sont dans leurs mains une pro-« priété aussi inattaquable que toutes les autres « propriétés des sujets du roi ; l'ordre du tiers, « de son côté, reconnaissant à cet égard la jus-« tice des réclamations de la noblesse, se borne « à demander la suppression totale des privilèges « pécuniaires et l'égalité la plus absolue dans la « répartition des impôts. »
Je, soussigné, député de la noblesse du bailliage de Villers-Cotterets, déclare n'avoir pris aucune part aux décrets rendus dans la séance du soir du 1-9 juin dernier, comme étant directement opposés aux mandats de mes commettants, auxquels j'ai juré d'être fidèle, aux décrets précédemment rendus, portant que nulle profession utile n'emportera dérogeance, et au règlement de l'Assemblée nationale, qui veut qu'aucun point constitutionnel ne soit délibéré ni décidé dans les séances du soir ;
Considérant que l'arrêté pris par la majorité qui s'était réunie le 19 juin au soir, ne pût avoir son effet sans détruire les bases de la monarchie qui ont toujours reposé sur la conservation de la noblesse; que de toutes les propriétés c'est la plus inattaquable, puisqu'elle a été transmise avec le sang, comme la plus juste récompense des services glorieux et signalés; qu'après avoir fait l'abandon de tous ses privilèges pécuniaires, la noblesse française ne peut faire le sacrifice d'une propriété inutile à l'intérêt général, et qui, au lieu de peser sur les autres classes de citoyens, est au contraire un motif d'émulation qui les porte aux grandes actions dont cette distinction honorable a été le prix ;
Considérant que ies cahiers rédigés par les communes de France, lors de l'élection des députés, énonce généralement leur vœu sur la conservation de l'hérédité de la noblesse, parce qu'en effet la transmission de cette propriété sacrée repose sur le même principe qui a rendu la couronne de France héréditaire,
Je déclare expressément, pour la conservation des droits de la noblesse, que j'ai fait la présente déclaration comme le témoignage de ma fidélité aux mandats de mes commettants, et d'un sen-
timent de justice qui doit animer tous les hommes de bien, dignes d'être libres.
Signé : le comte de mazancodr, député de la noblesse de Villers-Cotterèts.
Paris, le
Du
Monsieur le Président,
J'ai l'honneur de vous adresser ma déclaration sur le décret du 19 de ce mois ; je vous prie d'en vouloir bien faire faire la lecture à l'Assemblée nationale ; j'ai droit d'attendre et d'exiger même de sa justice qu'elle sera insérée dans le procès-verbal.
Déclaration.
En ma qualité de député âux Etats généraux par la noblesse de la sénéchaussée d'Auvergne, j'ai toujours droit de m'opposer aux décrets de l'Assemblée nationale contraires à mes cahiers. Si j'ai attendu jusqu'à ce moment à protester contre celui du 19 de ce mois, c'est que je croyais que mes confrères, qui sont encore à l'Assemblée, auraient manifesté leur protestation ; mais leur silence m'a décidé à faire cette déclaration, et plus encore l'opinion de celui de mes confrères qui était lié par les mêmes pouvoirs que moi, et qui néanmoins assiste toujours aux séances, et a non seulement approuvé hautement le décret contre la noblesse, mais a renchéri sur ceux qui l'avaient proposé, en demandant que les princes du sang et les frères du roi fussent privés des titres qu'ils tiennent de Dieu et des lois. Je déclare donc, comme membre de la noblesse française, et particuiièremen t comme représentan t de celle d'Auvergne, que tant qu'il n'a été question dans les décrets de l'Assemblée nationale que de la spoliation de leurs propriétés, ces députés se sont contentés de faire individuellement quelques réserves pour leurs commettants, étant prêts à se soumettre au vœu commun de la nation lorsqu'il sera manifesté dans une nouvelle législature. Ils ne se sont réunis que pour la défense de la religion de leurs pères et les droits du trdne.
Dans ce moment, où l'Assemblée nationale a cru pouvoir, par un décret, anéantir la noblesse française, il est du devoir de chaque député de faire connaître à ceux qui paraissent l'avoir oublié que son existence a fondé et soutenu le royaume, que c'est l'intérêt le plus cher du peuple français, qui cessera d'être franc dès qu'il aura perdu ses vrais soutiens, que la France cesserait d'être monarchie, si l'on pouvait anéantir la noblesse ; car où il n'y a pas de nobles, il n'y a point de roi; et au gouvernement paternel du monarque, l'Assemblee substitue l'aristocratie la plus dangereuse; ce mot, qui a servi de ralliement pour persécuter les royalistes, est le nom qu'elle a mérité. Je déclare donc attentatoire à la liberté du peuple français le décret qui voudrait le priver de sa noblesse: plusieurs d'entre eux ont contribué de leur sang a la gloire du péuple, et sont prêts à le répandre en entier pour défendre sa liberté et sa sûreté. C'est à ce même peuple, non égaré, mais éclairé, qu'ils en appellent pour soutenir leurs droits, leurs intérêts sont communs.
Comme c'est avec son épée que la noblesse a acquis ses titres, c'est avec cette même épée qu'elle les soutiendra contre les ennemis de l'Etat, et ce sera toujours avec empressement qu'elle admettra parmi elle ceux qui, par des services en tout genre rendus à la patrie, auront mérité de devenir les défenseurs du roi et du peuple. L'honneur français est le garant de nos titres.
Signé : laqueuille, député de la noblesse de la sénéchaussée d'Auvergne.
Réponse du président de l'Assemblée nationale. Monsieur,
J'ai l'honneur de vous renvoyer chez vous le paquet que vous m'aviez adressé. Je ne peux pas en rendre compte à l'Assemblée.
Je suis avec un inviolable attachement, Monsieur, Votre très humble et très obéissant
serviteur.
Signé: l. m. le pelletier.
protestation du vicomte de mirabeau.
Je suis né gentilhomme, ma famille ne devait cette prérogative, ni aux rois de France, ni à la nation française, elle l'avait apportée, il y a cinquante ans, de Florence, à une époque où la plus grande partie de la noblesse de ce pays fut obligée de s'expatrier à la suite d'une révolution (1) ; cette noblesse avait été naturalisée par les services de mes ancêtres. J'espérais ne pas dégéné rer et mourir gentilhomme; il a plu au Corps législatif français de décréter que je ne l'étais plus; le roi a sanctionné le décret, je dois y être soumis, mais je ne puis sacrifier au nom ae mes commettants leur propriété la plus chère, celle de leurs titres et de leur noblesse héréditaire; absent de l'Assemblée, je n'ai pu la défendre, je croirais manquer à mon mandat, à mon devoir, à l'honneur, et au serment que j'ai prêté entre leurs mains, si je ne protestais contre le décret qui anéantit la noblesse, prix des services renaus par leurs aïeux à la même patrie qui les dépouille aujourd'hui.
On m'assure que l'Assemblée nationnale ne reçoit aucune protestation, je dépose donc celle-ci dans les seules archives qui lui soient ouvertes et qui lui conviennent, dans le cœur de tout chevalier français, caractère que je crois indélébile, malgré tous les décrets.
Paris, le 26 juin.
Signé : andré-boniface-louis , comte de riquetti, vicomte de Mirabeau, député de la noblesse des sénéchaussées de Limoges et de Saint-Yriex, aux Etats libres et généraux du royaume, chevalier de l'ordre royal et militaire de Saint-Louis, chevalier d'honneur de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem, membre de la société des Cin-cinnatides Etats-Unis d'Amérique, colonel du régi-ment de Touraine, infanterie, au service dè Sa Majesté très-chrétienne.
Opinion de M. Necker, relativement au décret de VAssemblée nationalè concernant les titres, les noms et les armoiries.
On répand que j'ai opiné dans le conseil contre l'acceptation du décret de l'Assemblée nationale, relatif aux titres, aux noms et aux armoiries. Je dois faire connaître la simple vérité. J'ai été d'avis, et avec beaucoup d'insistance, je l'avoue, que le roi, avant d'accepter le décret, envoyât des observations à l'Assemblée nationale ; et comme je ne craindrai jamais la publicité de mes actions et de mes pensées, je profite de la permission du roi, en faisant imprimer ces observations, telles que j'en avais donné le projet ; et je m'y détermine d'autant plus volontiers, que l'Assemblée nationale vient de charger son comité de Constitution de lui proposer quelques explications sur ce même décret.
J'ai été d'avis encore que les observations fussent accompagnées d'une lettre du roi, qui aurait exprimé la disposition de Sa Majesté à s'en rapporter aux lumières de l'Assemblée nationale ; et comme cette lettre faisait partie de mon opinion, on en trouvera le projet à la suite des observations. Je puis m'être trompé, et je dois le croire, puisque mon avis n'a point été adopté ; mais j'aime beaucoup mieux mettre à portée de juger clairement de mon erreur, si j'en ai commis une, que de laisser subsister un sujet vague de reproche, lequel, à la faveur de la malignité, s'étendrait chaque jour par de fausses interprétations. Je suis sûr de la pureté de mes intentions, jele suis également de mon attachement à la Constitution et aux vrais intérêts du peuple, et ces sentiments, qui font ma confiance, m'inviteront toujours à la plus parfaite franchise.
Necker.
projet d'observations.
Lorsque le bien général l'exige, on est souvent obligé d'imposer des sacrifices à une classe particulière de citoyens ; cependant, même à ce prix, on ne doit le faire qu'avec ménagement et circonspection, tant il est dangereux d'enfreindre, en aucun point, les droits que donne la possession et de porter quelque atteinte aux règles ordinaires de la justice.
Si telle est la rigueur des principes qui régissent l'ordre social, on ne doit pas, à plus forte raison, ordonner des privations dont il ne résulte aucun avantage réel pour personne.
Lorsqu'une des portions de la société a perdu les privilèges dont elle jouissait dans la répartition des impôts, lorsque l'étendue de ses revenus a réglé la mesure de sa contribution aux charges publiques, ces nouvelles dispositions, en portant préjudice à quelques-uns, ont favorisé le grand nombre.
Lorsqu'on a ordonné l'abolition de la partie des droits féodaux qui consistait en une sorte de servage, et qui assujettissait à des obligations pénibles ou humiliantes la classe la plus nombreuse des citoyens, l'avantage du peuple est encore devenu le résultat des privations particulières.
Lorsque la carrière des charges et des emplois a été ouverte à tous les Français, la nation a gagné, sans doute, à la destruction des barrières qui bornaient ses espérances et son ambition, et qui circonscrivaient, dans un ordre particulier
de la société, des prérogatives utiles et les occupations les plus enviées.
Enfin, lorsqu'en écartant toutes les distinctions, les habitants du royaume ont été appelés à concourir ensemble à la formation des assemblées nationales et législatives, une participation égaie au plus précieux des droits politiques a pris la place des anciennes disparités, et les regrets des uns ont été balancés par la satisfaction universelle des citoyens de l'Empire.
C'est donc avec juste raison que ces diverses institutions ont été considérées comme des lois populaires et patriotiques.
En est-il de même du décret relatif aux titres, aux noms et aux armoiries? 11 faut, pour en juger, examiner si le peuple, cette nombreuse partie de la nation, a quelque intérêt aux dispositions de la nouvelle loi. On ne l'aperçoit point ; car ce n'est pas lui qui peut être jaloux des gradations honorifiques, établies au milieu des sections delà société avec lesquelles il n'a point de relations habituelles. Tous ceux en si grand nombre qui dévouent de quelques manière leur travail ou leur industrie au service des propriétaires, n'ont aucun intérêt à recevoir un salaire d'un simple particulier, plutôt que d'un homme décoré d'un titre ou de quelque autre distinction. Probablement même, si l'on consultait leur sentiment intérieur et leurs opinions irréfléchies, l'on trouveraitquedansl'étatoù les a placés la fortune, et ne pouvant changer la nature de leurs fonctions sociales, loin d'être blessés par l'éclat des personnes auxquelles ils consacrent leurs travaux, ils se plaisent souvent à en recevoir le reflet.
C'est uniquement dans les relations particulières et sociales de la vie, que les plus petites distinctions affectent la vanité de ceux qui en sont les simples spectateurs : mais le peuple ne partage point ce sentiment, car il ne sort point de son cercle ; il ne le désire jamais, et il nuirait à son bonheur, s'il avait cette prétention.
Quelle est donc la portion de la société appelée à jouir de la suppression de toutes les dénominations honorifiques ? c'est uniquement celle qui, par sa fortune ou par son éducation, se trouve à peu de distance des hommes en possession des autres genres de distinction. Elle sera peut-être un moment satisfaite, si les petites sommités, qui blessent encore sa vue, sont absolument détruites; mais pour un si léger soulagement, tout en opinion, pour un bienfait si circonscrit, pour un bienfait indifférent aux sages, est-il juste de priver une classe nombreuse de citoyens des distinctions honorifiques qui forment une partie de leur héritage, et dont la perte doit leur être plus pénible que celle des avantages pécuniaires dont ils avaient la possession? Ne suffit-il pas d'avoir exigé d'eux tous les sacrifices profitables au peuple ? Est-il généreux, est-il équitable d'en demander encore d'autres; et le3 difficultés du temps présent, dont l'ensemble est bien grand, ne doivent-elles pas engager à diminuer, autant qu'il est raisonnablement possible, les points de griefs ou les causes d'irritation?
On peutcependant sans inconvénient, et même avec les plus justes motifs, interdire la mention d'aucun titre dans toutes les assemblées nationales ou municipales ; l'égalité y est nécessaire, même dans les apparences ; tant il importe que l'ascendant dans ces assemblées ne soit jamais réservé qu'à la simple raison et à la confiance qu'inspirent le patriotisme et les vertus.
Il serait bien encore d'interdire toute qualifica-
lion honorifique sur le registre des citoyens actifs, afin de rappeler aux Français, dès le commencement de leur carrière, que, devenus égaux devant la loi, ils seront tous également soutenus dans les efforts qu'ils feront pour servir la patrie, et que c'est du titre de citoyen dont ils doivent surtout se rendre dignes : mais poursuivre ensuite les distinctions jusque dans les actes particuliers et jusque dans l'intérieur de la vie civile, c'est au premier coup d'œil une rigueur inutile. On ne pourrait veiller à l'exécution d'une pareille loi dans le commerce de la société, sans une inquisition absolument contraire aux principes de la liberté. On obligerait plus facilement à s'y conformer dans la teneur des actes particuliers, puisque les officiers publics, chargés de la rédaction de ces actes, pourraient être rendus garants de l'exécution de la loi; mais aurait-on le droit d'empêcher qu'une partie contractante, après avoir déclaré son nom patronymique, n'ajoutât qu'il est fils ou descendant de tel noble de race, ou de tel qui, à telle époque, était également qualifié? cependant par cette simple filiation, les distinctions qu'on veut éteindre seraient constamment entretenues. Qu'on s'en fie d'ailleurs à l'industrieuse vanité, du soin de se replier de toutes les manières nécessaires pour entretenir les souvenirs qui la flattent. Les grands, dans un royaume voisin de la France, se tutoyent entre eux, et ils n'ont jamais avec d'autres la même familiarité : comment donc apporter un obstacle à toutes les distinctions, lorsque les formes destinées à exprimer des égards et le respect peuvent eilèfe-mêmes servir à manifester un sentiment de supériorité, et qu'ainsi tant de moyens divers suffisent en des mains habiles pour conserver les gradations établies par une longue habitude ?
La véritable manière de faire tomber le prix de tous les hochets de la vanité, ce n'est pas de les proscrire avec inquiétude; on y réussit mieux ëh les considérant avec calme et indifférence; on y réussit mieux en portant simplement toute son estime vers les talents, les vertus et les services de tout genre rendus à la chose publique.
Ce n'est jamais par une loi que l'on peut détruire les antiques opinions dans un royaume aussi vaste que la France; ces opinions sont l'ouvrage du temps, et le temps seul peut les détruire : tous les grands changements ont besoin d'être préparés. Un noble sentiment, une ardeur généreuse inspirent le désir de ramener les hommes à toute la simplicité des premiers principes; mais de nouvelles mœurs, de nouvelles vertus seraient peut-être nécessaires pour réussir selon ses vœux dans une pareille entreprise.
On doit présenter un autre genre de considération ; il importe au peuple, qui vit de la distribution des richesses et du travail ordonné par les propriétaires, que l'on n'impose pas à une classe nombreuse de citoyens des privations inutiles, car ces privations pourraient les engager à chercher dans d'autres pays la jouissance des avantages qu'ils tiennent de leur naissance, comme on voit les hommes d'une grande fortune s'éloigner des contrées où les lois somptuaires les empêchent de faire usage de toute l'étendue de leurs revenus.
On est en doute sur l'interprétation qu'on doit donner à l'article du décret de l'Assemblée nationale, qui supprime la noblesse héréditaire. L'Assemblée a-t-elle supposé -qu'il pourrait y avoir, à l'avenir, de nouveaux titres de noblesse, lesquels ne seraient point transmissibles? Une pareille idée, fort simple et praticable, n'exige-
rait en ce moment aucun éclaircissement; mais, si l'article est applicable aux personnes qui sont actuellement en possession de la noblesse, on ne comprend pas comment aucun décret, aucune loi pourrait empêcher que cette prérogative ne fût héréditaire; car la noblesse est, par son essence, transmissibledepèreen fils, à moins qu'une dégradation flétrissante n'arrête cette succession dans son cours.
Les prérogatives attachées à la noblesse peuvent bien être rendues nulles dans un pays, par la volonté du législateur; mais ses décrets ne sauraient anéantir la valeur d'opinions, comme ils ne peuvent pas non plus étendre leur influence au delà des frontières de l'Empire : ainsi les titres qui constituent la noblesse, ces titres encore en honneur chez les autres nations, seront toujours un bien dont l'hérédité paraîtra précieuse ; et cette hérédité, considérée d'une manière générale, aucune autorité ne peut la détruire ; et le consentement, l'autorité même des pères, ne pourraient ôter à leurs enfants un droit qui est a eux dès le moment de leur naissance.
L'obligation prescrite à tous les citoyens de prendre leur nom primitif paraît encore un sacrifice inutile imposé à une classe nombreuse de la société. C'est un sacrifice, parce que plusieurs de ces noms primitifs sont entièrement oubliés, et qu'il importe à plusieurs familles de paraître dans le monde avec le nom auquel s'est attaché le souvenir des services de leurs ancêtres; et il serait rigoureux, sans aucune utilité pour personne, de les obliger à renoncer à un genre de satisfaction dont la valeur doit être entretenue pour l'avantage même de la société. On trouverait juste et louable le désir qu'aurait une famille estimable de changer de nom, si l'un de ses membres l'avait souillé par un attentat contre la patrie. Le même principe doit expliquer l'intérêt que peuvent avoir beaucoup de maisons à conserver les dénominations sous lesquelles on les a vues paraître avec honneur dans les annales de l'histoire. De tels sentiments sont naturels, et ils entrent avantageusement dans le mécanisme moral de tous les systèmes politiques.
La confusion, inséparable ae ces changements de noms, relativement aux actes de partage et à toutes les transactions qui s'enchaînent les unes aux autres, présente encore une considération digne de l'attention de l'Assemblée générale.
Les observations qu'on a présentées, ea parlant des noms et des titres, s'appliquent de même à la proscription des armoiries. On aperçoit seulement que, devenues presque libres depuis longtemps, il y a d'autant moins de motifs pour en ordonner la suppression. Rien n'est certainement plus indifférent au peuple que l'existence de ces armoiries; cependant, leur suppression peut facilement se lier dans son esprit à d'autres idées, et devenir ainsi un motif ou un prétexte pour s'élever contre ceux qui se détacheraient lentement de ces distinctions inhérentes, les unes aux vieilles pierres de leurs châteaux, et les autres aux antiques marbres qui couvrent la cendre de leurs ancêtres. Il est des temps où la sagesse, où la simple bonté, peut-être, invitent à n'ordonner aucune disposition, aucun mouvement qui ne soient essentiellement nécessaires.
Les livrées sont successivement devenues aussi libres que les armoiries ; leur proscription, néanmoins, serait, entre tous les retranchements-de distinctions extérieures, le seul qui pourrait être agréable à une portion du peuple, en supposant encore que la classe de citoyens vouée par choix
à l'état de domesticité, attache quelque intérêt à ce changement; mais il occasionnera le désœuvrement d'un grand nombre d'ouvriers adonnés à la fabrication des galons et des rubans qui composent ces livrées. Les principales manufactures en ce genre sont à Paris, et les consommations certaines qu'offrait la capitale avaient mis en état d'étendre ces établissements au degré nécessaire pour entretenir un assez grand commerce extérieur.
On croit devoir terminer les observations contenues dans ce mémoire par une réflexion générale : c'est qu'en poursuivant, dans les plus petits détails, tous les signes de distinction, on court peut-être le risque d'égarer le peuple sur le véritable sens de ce mot : égalité, qui ne peut jamais signifier, chez une nation civilisée et dans une société déjà subsistante, égalité de rang ou de propriété. La diversité des travaux et des fonctions, les différences de fortune et d'éducation, l'émulation, l'industrie, ia gradation des talents et des connaissances, toutes ces disparités productrices du mouvement social entraînent inévitablement des inégalités extérieures, et le seul but du législateur est, en imitation de la nature, de les réunir toutes vers un bonheur égal, quoique différent dans ses formes et dans ses développements.
Tout s'unit, tout s'enchaîne dans la vaste étendue des combinaisons sociales, et souvent les genres de supériorité qui paraissent un abus aux premiers regards de la philosophie sont essentiellement utiles pour servir de protection aux différentes lois de subordination, à ces lois qu'il est si nécessaire de défendre, et qu'on attaquerait avec tant de moyens, si l'habitude et l'imagination cessaient jamais de leur servir d'appui.
Projet pour la lettre du roi.
Le décret de l'Assemblée nationale concernant les titres, les noms et les armoiries, afflige, avec de justes motifs, une classe nombreuse de la société, sans procurer aucun avantage au peuple; et comme, malgré son importance, il a été adopté dans une seule séance, ces diverses considérations m'ont déterminé à communiquer à l'Assemblée nationale quelques observations à ce sujet. Je lui demande de les examiner, et, si elle persiste en tous Jes points dans son opinion, j'accepterai le décret et par déférence pour les lumières de l'Assemblée nationale, et parce que j'attache un grand prix à maintenir entre elle et moi une parfaite harmonie.
Séance du
La séance est ouverte à onze heures du matin.
, ex-président, occupe le fauteuil en l'absence de M. l'abbé Sieyès, président en fonctions.
, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier au soir.
Plusieurs membres demandent la parole.
Je demande que la mention de la démission de M. de Lévis, député de Dijon, soit retirée du procès-verbal, parce que cette démission n'a pas été donnée avec maturité, et je propose en même temps qu'il soit fait de nouvelles listes des membres de l'Assemblée nationale, dans lesquelles chacun sera dénommé conformément au décret d'hier.
(Ces propositions sont adoptées.)
J'observe que l'époque de la fédération du 14 juillet est peut-être trop rapprochée, que les voitures ne seront pas repeintes, que le décret d'hier pourrait faire croire au peuple qu'il entraîne la destruction des titres, et que, dans un moment de chaleur, il pourrait se porter à des excès ; cependant, il faut considérer que ces titres sont précieux pour les généalogies, qu'ils sont nécessaires à la conservation des propriétés, et, par tous ces motifs, je demande le renvoi au comité de Constitution.
Le renvoi est inutile, et il suffit d'ajouter après ces mots : « sans que, sous pré-« texte du présent décret, aucun citoyen puisse « se permettre d'attenter aux monuments placés « dans les temples», ceux-ci : aux chartes, titres, et autres renseignements intéressant les familles ou les propriétés, ni aux décorations d'anciens lieux publics ou particuliers.
(Cette addition est adoptée et sera insérée dans le procès-verbal qui vieDt d'être lu.)
Le procès-verbal est adopté.
, archevêque et député de Reims, demande un congé pour aller aux eaux.
Ce congé est accordé.
Il est, dans le département dont j'ai l'honneur d'être le représentant, plusieurs villages auxquels les ci-devant seigneurs ont voulu donner leur nom ; les habitants ont résisté; mais des arrêts du conseil, en blâmant cette résistance légitime, ont consacré les prétentions orgueilleuses des seigneurs. Je suis Chargé de demander un décret qui rende à ces villages le nom qu'ils n'auraient pas dû cesser de porter.
Cette motion est adoptée en ces termes :
« L'Assemblée nationale décrète que les villes, bourgs, villages et paroisses auxquels les ci-dè-vant seigneurs ont donné leurs noms de famille, sont autorisés à reprendre leurs noms anciens. »
Mes commettants m'avaient défendu de faire scission avec les Etats généraux ; en conséquence, je me suis réuni à l'Assemblée nationale dès que j'ai reconnu qu'élle formait les Etats généraux. Mes commettants m'ont recommandé en même temps de m'opposer à tout co qui porterait atteinte à leur état civil. Je ne pouvais m'attendre à ce qui s'est passé hier. J'étais au comité des.finauces, et je m'étonne qu'on n'ait pas averti les membres qui se trouvaient alors dans les différents comités. L'Assemblée ne reçoit pas les protestations ; je n'en fais pas une en ce moment, mais... (On demande à passer à l'ordre dû jour.)
annonce qu'il a reçu et renvoyé au comité des rapports des paquets arrivés de Soissons et de Saint-Jean-d'Angely.
Le comité est invité à en rendre compte à l'Assemblée dans le plus court délai possible.
M. Lemoine-Lenoir fait hommage à l'Assemblée d'un ouvrage sur la force du dedans et celle du dehors ou Nouvelle organisation de l'armée française.
Cet ouvrage est accompagné de la lettre suivante :
« Messeigneurs,
« Permettez qu'en ma qualité de Français, j'aie l'honneur de déposer, dans le sein des pères de la patrie, le fruit de mon expérience et de mes travaux, en prenant la liberté de vous prier d'agréer un exemplaire du petit ouvrage sur la force du dedans et celle du dehors, ou sur une nouvelle organisation de l'armée française. Guidé par vos immortels décrets, je n'ai cherché qu'à m'élever à leur hauteur, heureux si je puis, par mon opinion, être utile à la patrie que vous m'avez donnée en fondant les bases de sa grandeur, et ce faible essai sera encore votre ouvrage.
« Je suis avec le respect le plus profond et l'admiration la plus haute, Messeigneurs, votre très humble et très obéissant serviteur.
« Lemoine-Lenoir, chevalier de Saint-Louis, capitaine de cavalerie, commandant de la milice nationale de Mareuil en Champagne. »
Lorsque vous ordonnâtes que l'on vous rendit compte en détail, toutes les semaines, de l'état de la contribution patriotique, qu'on en imprimât les états et qu'on les exposât dans cette salle, vous eûtes sans doute un double but, celui de connaître toujours le montant de cette contribution et celui d'exciter le patriotisme : mais vous n'avez atteint ni l'un ni l'autre, si ce tableau n'est pas exact. Or, il ne l'est pas, et je vais vous le prouver. En effet, la contribution patriotique de la ville de Lille n'y est portée que pour une somme de 237,000 liv., tandis que le dernier état envoyé passait 900,000 liv., et que dans ce moment-ci elle est peut-être à un million. Certes, Messieurs, l'erreur est considérable, puisqu'elle est de plus de 700,000 liv. pour une ville seulement. Si je pouvais penser que, par une erreur de ce genre, on se proposât d'affaiblir à vos yeux les sentiments patriotiques d'une ville qui en a si souvent donné des preuves éclatantes, je m'élèverais avec force contre cet injuste dessein, et tâcherais d'en découvrir les auteurs pour vous les dénoncer. Mais s'il se trouve de pareilles fautes dans les autres articles du tableau, et si elles ne proviennent que de la négligence des commis, je me contente alors d'en demander le redressement.
MM. Clément, père et fils, de la ville de Lille, font don d'une somme de 300 livres.
L'ordre du jour est un rapport du comité chargé de la rédaction d'articles additionnels au règlement pour la police intérieure de rAssemblée.
, rapporteur{1). Mes-
Ne pensez pas, Messieurs, qu'un défaut de zèle ait jusqu'ici causé le silence de vos commis-missaires.
Le travail est fait depuis longtemps; mais, nous vous l'avouerons, nous ne pouvions nous déterminer à en occuper vos séances, ou du moins, nous ne voulions le faire que sur vos ordres les plus exprès; et vous sentez, Messieurs, quels ont été nos motifs. Vous connaissez le vœu de tous les vrais amis de la liberté, de tous les hommes qui regardent vos travaux comme les premières, les plus utiles leçons qui aient été données au monde. Les nations attentives en observent les progrès, en attendent la fin avec autant de respect que d'impatience. Combien il est cruel de vous arrêter un seul instant dans une carrière aussi vaste, par des idées réglementaires, par des articles de discipline?
Une seconde raison fut encore sur nous bien puissante. Le règlement que vous suivez, depuis un an, nous l'avons soigneusement étudié, profondément médité; et nous en avons trouvé presque toutes les dispositions d'une grande sagesse.
Ët quand tous les jours, témoins de vos succès (disons-le même, puisque c'est notre pensée), de la rapidité comme de la sublimité de vos travaux, nous les voyons, dans des moments, suspendus, entravés par quelques débats orageux, devions-nous en chercher la cause dans l'imperfection de votre règlement? Non, Messieurs, vous l'avez dit aux Français, et vous l'avez dit avec raison : ce qui eût étonné l'univers, et peut-être honoré fort peu le caractère des Français, c'est que de violents orages n'ussent pas accompagné cette lutte peu préparée entre tous les préjugés et tous les principes, ce brisement subit de toutes les erreurs.
Nous oserons donc, en quelque sorte, nous applaudir de la religieuse circonspection avec laquelle nous respections le cours de vos travaux. Si aujourd'hui, nous vous présentons nos conceptions, quelque faibles qu'elles soient, du moins nous vous les offrirons sous les plus heureux auspices.
Nous touchons au moment de voir enfiu la liberté donner aux Français le bonheur qu'un peuple éclairé ne peut tenir que d'elle.
Déjà ceux qui n'avaient que de fausses idées sur la meilleure organisation sociale, commencent à reconnaître que la constitution d'aucun peuple de la terre n'en a plus approché que la vôtre. Déjà les ennemis de cette constitution calomnient un peu moins, quedis-jel bientôt ils béniront les principes par lesquels vous avez rendu à l'homme sa dignité, aux mœurs, à la religion, au trône, ses seuls et véritables appuis.
Déjà, des amis, des voisins placés au milieu de vous, mais privés du bonheur qu'ils ont connu de vous appartenir, demandent, comme le plus grand des bienfaits que vous les adoptiez pour vos concitoyens, pour vos frères. De toutes les parties du globe les peuples vous apportent les actions de grâces, les bénédictions de l'humanité entière. Quelle sublime réponse aux détracteurs vils ou pervers de votre Constitution.
Enfin, Messieurs, c'est bien moins d'articles additionnels à votre règlement que nous avons besoin, que de patience, que de sang-froid, tan-
tôt pour nous entendre paisiblement les uns les autres, tantôt pour savoir sacrifier uu mot auquel on attache quelque importance, mais qui devient réellement nuisible lorsqu'il retarde d'un instant le bonheur de la France. Mais vous l'avez ordonné, et vos commissaires vont obéir.
Deux principes nous ont dirigé dans la théorie des articles que nous vous proposerons.
L'Assemblée nationale ne peut jamais cesser un instant d'être l'arbitre suprême de l'expression de ses volontés ; et le président (qui n'en est que l'organe nécessaire) d'y être, en quelque sorte, plus religieusement soumis que tout autre.
Vous devez donc peu craindre que le citoyen, appelé pour quinze jours à l'honneur inestimable de prononcer vos décrets, conçoive jamais la coupable pensée de les enfreindre ou de les altérer.
Une conséquence plus directe est que le vœu prononcé, les ordres exprimés par le président sont, pour chacun de nous, ceux de l'Assemblée nationale, jusqu'à ce que, suivant ses formes et ses règles, elle ait manifesté une volonté contraire. Le premier de nos devoirs est donc toujours de commencer par y déférer.
Le second principe est celui que vous avez si heureusement démontré à la France; savoir, que l'Assemblée nationale est essentiellement active, et que, par conséquent^les ressorts en doivent être tels que jamais son action ne puisse être un seul instant interrompue ou ralentie.
Ceci, Messieurs, vous rappelle une vérité trop bien prouvée par l'expérience, que la vertu a elle-même ses dangers; que le meilleur citoyen est quelquefois entraîné, par son patriotisme, au delà du but qu'il se propose; en d'autres termes, qu'il faut malheureusement des peines qui l'avertissent des mesures qu'il doit garder, des bornes dont il ne doit jamais sortir.
En abandonner absolument l'usage à la sagesse, à la prudence du président, serait sans doute le ressort le plus prompt, le plus comprimant, le plus efficace.
Mais la main qui en serait dépositaire n'en serait-elle pas effrayée elle-même, et cette arme ne deviendrait-elle pas, en ce moment, inutile ? 4 L'Assemblée, d'ailleurs, ne peut jamais se dé-* pouiller de sa suprême puissance. Le rapprochement de ces deux principes nous a forcés, Messieurs, à distinguer les peines qui peuvent être prononcées par le président seul, et celles qui exigeront l'expression de la volonté générale de l'Assemblée.
Voici les articles que nous vous proposons.:
Art. 1er. Le président usera, avec autant de fermeté que de sagesse, de toute l'étendue du pouvoir qui lui est confié par le règlement et par les articles qui suivent.
Art,. 2. Aucun des membres deTAsssemblée ne se placera auprès du siège du président, du bureau des secrétaires, ni dans le milieu de la salle.
Les places des trésoriers ne seront remplies que par eux, -et celles de la barre, par les personnes seules auxquelles l'Assemblée l'aura permis.
Art. 3. La tribune ne sera occupée que par l'opinant. Aucun des membres de l'Assemblée, et surtout ceux placés sur les bancs voisins de la tribune ne pourront lui adresser la parole. Les opinions de quelque étendue y seront toujours prononcées. Les membres ne pourront proposer, ae leur place, que de très simples et courtes observations ; et ils. passeront à la tribune lorsqu'ils
ne seront pas suffisamment entendus et que le président les y invitera.
Art. 4. Le président est expressément chargé de veiller à ce que personne ne parle sans en avoir obtenu de lui la parole, et à ce que jamais plusieurs membres ne la prennent à la fois.
Art.5.Lorsque plusieurs membres demanderont la parole, le président l'accordera à celui qui la lui aura demandée le premier. Il fera faire une liste des autres par un secrétaire, qui les appellera ensuite suivant l'ordre de leur inscription. La liste n'aura d'effet que pour une seule séance, et les opinants parleront alternativement pour et contre.
Art, 6. Si une réclamation s'élève sur la décision du président, concernant l'ordre de la parole, ou sur la liste, l'Assemblée prononcera.
Art. 7. Nul ne doit être interrompu quand il parle, si ce n'est dans les cas suivants :
1® Si l'opinant s'écarte dé la question, le président l'y rappellera;
2° Si quelque membre juge faux les faits exposés par l'opinant, il pourra facilement se lever pour demander à prouver l'inexactitude des faits. Lorsque l'opinion sera finie, s'il se permet une plus longue interruption, il sera rappelé à l'ordre;
3° Si l'opinant s'écarte du respect dû à l'Assemblée ou au président, ou s'il se livre à des personnalités, le président le rappellera à l'ordre.
Art. 8. La sonnette du président sera toujours le signal du silence pour toute l'Assemblée, même pour l'opinant, qui ne reprendra la parole que lorsque le président la lui aura rendue. Tout membre qui n'aura point obéi à ce signal, sera rappelé à l'ordre par le président, au nom de l'Assemblée.
Art. 9. Le président observera, dans le rappel à l'ordre, la gradation qui va être expliquée.
Il rappellera à l'ordre tous ceux qui, par inattention ou de quelque manière que ce soit, troubleraient la séance. Ce simple rappel à l'ordre ne sera pas regardé comme une peine.
Art. 10. Si le premier avertissement ne suffit pas pour faire rentrer dans l'ordre le membre auquel il aura été fait, le président, en le désignant par son nom, lui dira ; M.....,.au nom de
l'Assemblée, et pour la seconde fois, je vous rappelle à l'ordre.
Art. 11. Si les deux premières interpellations ne ramènent point à l'ordre le membre qui s'en est écarté, le président lui dira : M...... je vous
rappelle pour la troisième fois à l'ordre, et j'ordonne, au nom de l'Assemblée, que votre nom sera inscrit au procès-verbal.
Art. 12. S'il arrivait qu'un membre ne cédât point aux trois premières interpellations, le pré; sident ordonnera que son nom soit inscrit aii procès-verbal avec censure.
Art. 13. Si après cette inscription au procès-verbal, et la censure prononcéeylç même membre persiste à ne pas rentrer dans l'ordre, l'Assemblée pourra lui ordonner de se retirer et lui défendre de rentrer pendant le reste de la séance. Cette motion étant faite et appuyée par dix membres, le président sera tenu de la mettrd aux voix. Si elle est adoptée, le membre obéira sur-le-champ au décret.
Art. 14. Si.le même membre oppose, soit ce jour, soit un autre, une nouvelle résistance au décret de l'Assemblée, la peine de la prison pour 24 heures, ou pour un temps plus long,s
«pourra être prononcée contre lui. i Si la motion en est faite et appuyée par 20 mem-
bres, elle sera nécessairement mise aux voix, et le président sera tenu de prendre les moyens qui sont en son pouvoir pour faire exécuter le décret (1).
Art. 15. Tout membre qui ayant été rappelé à l'ordre, s'y sera mis aussitôt, pourra demander et obtenir la parole pour se justifier avec modération et décence.
Art. 16. Aucun membre ne pourra en rappeler personnellement un autre à l'ordre, mais seulement requérir le président de le faire. Le président sera tenu de mettre aux voix toute motion tendant à un rappel à l'ordre, lorsqu'elle sera appuyée par quatre membres de l'Assemblée (2).
Art. 17. S'il s'élève dans l'Assemblée un tumulte que la voix ni la sonnette du président n'aient pu calmer, le président se couvrira; ce signal sera, pour tous les membres de l'Assemblée, un avertissement solennel qu'il n'est plus permis à aucun d'eux de parler; que la cnose publique souffre, et que tout membre qui continuerait de parler ou d'entretenir le tumulte, manque essentiellement au devoir d'un bon citoyen.
Le président ne se découvrira que lorsque le calme sera rétabli. Alors il interpellera un ou plusieurs des membres, auteurs du trouble, de déclarer leurs motifs : la parole sera accordée à celui qui en aura été le moteur ou l'occasion; aussitôt qu'il aura été entendu pour sa justification, le président consultera l'Assemblée, soit sur la justification du membre inculpé, soit sur es peines à infliger.
Art. 18. Les députés à l'Assemblée nationale peuvent seuls se placer dans l'intérieur de la
salle. Tout étranger, qui s'y serait introduit, sera tenu de se retirer aux premiers ordres
qui lui
Art. 19. Il sera prononcé par l'Assemblée contre les étrangers, placés aux galeries ou ailleurs, qui troubleraient la séance, ou qui manqueraient à l'Assemblée, des peines proportionnées à leurs délits. La prison pour un temps plus ou moins long, mais déterminé, sera la peine la plus grave.
Plusieurs membres demandent l'impression du rapport et l'ajournement de la discussion après la distribution. L'ajournement est rejeté.
Je propose de rédiger ainsi l'article 1er. « Le président usera avec politesse et modération, etc... »
Gomme il n'est pas possible de supposer que le président de l'Assemblée nationale de France n'usera pas de son autorité avec politesse, je demande la question préalable sur l'amendement.
Je demande l'insertion d'un article additionnel après l'article 6, portant qu'aucune discussion ne pourra être fermée qu'après que deux opinants pour et deux opinants contre auront été entendus.
Je fais une autre proposition additionnelle : c'est que, lorsqu'une discussion aura été ouverte, on ne puisse décréter que la question sera décidée sans désemparer, dans la même séance. Mon but est d'éviter les surprises, de quelque part qu'elles viennent.
Rien n'est plus important que de marcher à grands pas au terme de la Constitution ; les amendements proposés pourraient embarrasser la marche de nos travaux, et j'en demande le rejet.
Il faut pourtant que la lumière se fasse et vous ne pouvez clore un débat avant de l'avoir ouvert. Comme l'article proposé par M. de fionnay sauvegarde le droit de discussion, je suis d'avis de le décréter.
Je viens vous représenter que si quatre orateurs pouvaient être entendus dans les discussions, vous n'aboutiriez à rien, parce qu'il y a dans l'Assemblée des membres assez féconds pour discuter trois ou quatre heures sur un objet insignifiant. Calculez le nombre des séances qui seraient, perdues de la sorte.
(L'amendement de M. dè Bonnay est rejeté-.)
Plusieurs membres proposent ensuite diverses modifications de rédaction qui sont adoptées.
met aux voix les articles 1 à 6 qui sont décrétés en ces termes :
« Art. 1er. Le président usera avec autant de fermeté que de sagesse, de toute l'étendue du pouvoir qui lui est confié par le règlement et par les articles qui suivent :
Art. 2. Aucun des membres de l'Assemblée ne se placera auprès du siège du président, du bu-
reau des secrétaires, ni dans le milieu de la salle; et les places des trésoriers ne seront jamais remplies que par eux. La barre ne sera occupée que par les personnes auxquelles l'Assemblée aura permis de s'y placer.
« Art. 3. La tribune ne sera occupée que par l'opinant; aucun des membres placés sur les bancs voisins ne pourra lui adresser la parole. Les membres de l'Assemblée pourront proposer de simples observations de leurs places, mais ils passeront à la tribune lorsque le président les y invitera.
Art. 4. Le présidentestexpressémentchargéde veiller à ce que personne ne parle sans avoir obtenu de lui la parole, et à ce que jamais plusieurs membres ne la prennent à la fois.
Art. 5. Lorsque plusieurs membres demanderont la parole, le président l'accordera à celui qui la lui aura demandée le premier. Il fera faire une liste des autres par un secrétaire qui les appellera ensuite suivant l'ordre de leur inscription ; la liste sera double; elle n'aura d'effet que pour une seule séance, et les opinants parleront alternativement pour et contre.
« Art. 6. Si une réclamation s'élevait sur la décision du président concernant l'ordre de la parole, ou sur la liste, l'Assemblée prononcera. »
La suite de la discussion est renvoyée à une séance ultérieure.
, suppléant de M. Lezay-Marnésia, démissionnaire, dont les pouvoirs ont été vérifiés et trouvés en règle, est admis comme député d'Aval.
propose d'excepter les ambassadeurs et les étrangers de la disposition qui prohibe l'usage des livrées et des armoiries.
, député de Nemours. Je prie l'Assemblée d'observer que le décret rendu hier ne peut concerner les ambassadeurs et le s étrangers. Si cette disposition les renfermait, elle entraînerait beaucoup d'inconvénients qui frappent sans doute tous les esprits, et que je crois inutile de développer.
La proposition de M. Martineau est adoptée en ces termes :
« Ne sont compris dans la disposition du présent décret tous les étrangers, lesquels pourront conserver en France leurs livrées et leurs armoiries. »
Je demande que ceux qui portent un nom en vertu d'un acte, don, cession ou autre contrat, soient obligés de le quitter pour prendre celui qu'ils portaient anciennement.
Le décret est porté, il faut l'exécuter. Rien n'est plus naturel que de s'appeler Jacques, François ou Paul. Qui est-ce qui perdra à cela? Personne, si ce n'est les usurpateurs de noms.
On demande la question préalable sur la motion de M. Bouche.
L'Assemblée décide qu'il n'y a pas lieu à délibérer.
, secrétaire. Dans la séance d'hier soir, vous avez adopté, sauf rédaction, sur la proposition de M. Alexandre de Lameth, un décret concernant les quatre ligures enchaînées qui se trouvent au pied delastatuede LouisXIV. Ce décret a besoin de la sanction définitive dé
l'Assemblée. L'auteur de la motion propose une rédaction ainsi conçue :
« L'Assemblée nationale considérant qu'à l'approche du grand jour qui va réunir les citoyens de toutes les parties de la France pour la fédération générale, il importe à la gloire de la nation de ne laisser subsister aucun monument qui rappelle des idées d'esclavage, offensantes pour les provinces réunies au royaume ; qu'il est de la dignité d'un peuple libre de ne consacrer que des actions qu'il ait lui-même jugées et reconnues grandes et utiles,
« A décrété et décrète que les quatre figures enchaînées au pied de la statue de Louis XIV, à la place des Victoires, seront enlevées avant le 14 juillet prochain, et que le présent décret, après avoir reçu la sanction au roi, sera envoyé à la municipalité de Paris, pour en suivre 1 exécution. »
(Ce décret est adopté.)
donne lecture d'une note de M. le garde des sceaux, qui annonce que le roi a donné sa sanction ou acceptation aux décrets suivants :
« Le roi a donné sa sanction ou son acceptation :
c 1° Au décret de l'Assemblée nationale du 8 de ce mois, qui commet, provisoirement la municipalité de Paris à l'exercice de toutes les fonctions attribuées par le décret du 14 avril, que le roi a sanctionné, aux administrations de département et de district, ou à leur directoire ;
« 2° Au décret du 9, relatif aux citadelles, forts, châteaux et autres fortifications qui existent actuellement dans le royaume, et singulièrement à la citadelle de Montpellier;
« 3° Au décret du 10, qui autorise la municipalité de Paris à faire évacuer le couvent des récollets du faubourg Saint-Laurent, et celui des dominicains de la rue Saint-Jacques, pour être provisoirement employés à servir, soit de dépôt aux mendiants infirmes, soit d'atelier de travail pour les mendiants valides ;
« 4° Au décret du 11, pour la suite et l'accélération des opérations des commissaires du roi chargés de l'établissement des assemblées administratives des départements, et notamment du département de la Corrèze;
« 5° Au décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de la ville de Montrond à imposer dans leurs rôles la somme de 2,400 livres, en prenant pour base de cette imposition le taux des vingtièmes ;
« 6° Au décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de la ville de Salins à imposer la somme de 4,000 livres, en deux ans, sur tous les habitants quipayent4 livres et au-dessus d'impositions directes;
« 7e Au décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de la ville de Chevreuse à imposer la somme de 4,000 livres, et par quart, dans le cours de 4 années prochaines, sur tous les contribuables qui payent au-dessus de 5 livres de toute espèce d'impositions ;
« 8° Au décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de Saint-Yrieux à imposer la somme de 3,000 livres sur tous leurs contribuables ;
« 9° Au décret du même jour, qui autorise les of&lciers municipaux de la ville de Moissac 1 à imposer la somme de 3,000 livres, au marc la
livre de la capitation, sur tous ceux qui étaient imposés pour cet objet à 6 livres et au-dessus ;
« 10° Au décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de Fontenay-sous-Mailly-le-Ghâteau à faire un emprunt de 800 livres ;
« 11° Au décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de la ville de Mur-de-Barrès à toucher entre les mains du correspondant de l'administration provinciale de haute-Guienne, la somme de 2,000 livres pour la construction d'une fontaine ;
« 12° Au décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de la ville de Montpellier à remplacer les droits perçus sur les boucheries, pour une année seulement, par une taxe personnelle en sus du rôle de la capitation ;
« 13° Au décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de Chalvrames à faire un emprunt de 6,000 livres ;
« 14° Au décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de Chapet, district de Saint-Germain-en-Laye, à faire un emprunt de 300 livres ;
« 15° Au décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de Négrépelisse à faire un emprunt de 2,000 livres ;
« 16° Au décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de d'Éscatalens, district de Castel-Sarrasin en Languedoc, à faire un emprunt de 500 livres ï
« 17° Au décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de Mirepoix à imposer la somme de 2,000 livres sur la capitation ;
« 18° Au décret du même jour qui autorise les officiers municipaux de Troux près Chevreuse, à imposer la somme de 500 livres sur tous ceux qui, dans leurs rôles, payent au-dessus de 10 liv. de toutes tailles ;
« 19° Au décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de Valentine, diocèse de Comminges, à imposer la somme de 500 liv., et à retirer des mains du receveur de la province la somme de 3,383 liv. 4 sols, déposée en vertu d'arrêts du conseil ;
« 20° Au décret du 12, qui autorise le sieur Guyard, présenté par le sieur Beaugeard fils et le sieur Douarain, à remplir, sous leur cautionnement et surveillance, les fonctions de trésorier de la province de Bretagne ;
« 21° Au décret du même jour, portant qu'une ordonnance du conseil général de la commune de Caen, et un règlement proposé par ce conseil général et par l'état-major de la garde nationale de la même ville, seront provisoirement exécutés jusqu'à l'organisation définitive des gardes nationales, aux conditions énoncées dans ledit décret ;
« 22° Au décret du même jour, portant que tous les citoyens actifs qui voudront conserver l'exercice des droits attachés à cette qualité seront tenus d'inscrire leurs noms sur un registre qui sera ouvert à cet effet pour le service des gardes nationales ;
« 23° Au décret du même jour, qui autorise la ville de Vezelay à employer en atelier de charité la somme de 2,000 livres, qui a été perçue sur les habitants de cette ville pour la construction d'une route ;
« 24 Au décret du même jour, qui autorise la municipalité de la commune de Valay, dépar-
tement de la Haute-Saône, à employer en achats de grains la somme de 2,000 livres ;
« 25° Au décret du même jour, portant que, dans lUe de Corse, les impôts continueront d'être perçus en nature comme par le passé, jusqu'à ce qu'il ait été prononcé sur le mode de perception dans ce département ;
« 26° Au décret du 13, portant que les deniers des dons patriotiques continueront à être versés aux payeurs des rentes de l'Hôtel-de-Ville de Paris, et détermine les payements auxquels ils pourront être employés ;
« 27° Au décret du même Jour, qui autorise les officiers municipaux du Bourg-de-Mouton, en Auvergne, à faire un emprunt de 6,000 livres ;
« 28° Au décret du même jour, qui abolit les retraits de bourgeoisie, d'habitation ou local, d'éclesche, de société, frareuseté, convenance ou bienséance, et porte que les procès non jugés concernant ces retraits demeureront comme non-avenus ;
« 29° Au décret du 14, pour la suspension des procédures relatives aux dédommagements dus a raison des dégâts sur les terrains afféagés et marais desséchés, et commettre les directoires de district pour régler ces dédommagements ;
« 30° Au décret du même jour, qui autorise les électeurs du département du Haut-Rhin à continuer leurs opérations, nonobstant le décret du premier de ce-mois, relatif aux assemblées primaires de Golmar ;
« 31° Au décret du 15, portant que le siège de l'administration du septième district du département de Saône-et-Loire, demeure fixé en la ville de Marcigny ;
» 32° Au décret du même jour, portant que le droit du demi-doublement du pied fourchu, établi en faveur de l'hôpital général de Rouen, ainsi que tous autres droits d'octroi, appartenant à cet hôpital, Continueront à être perçus provisoirement ;
» 33° Au décret du même jour, qui déclare que le décret du 28 janvier dernier, sanctionné par le roi, doit être exécuté selon sa forme et teneur ; qu'il n'y a été nullement dérogé par l'article \% du titre II de celui du 15 mars, et porte que la ci-devant province du Hainaut demeurera assujettie aux droits qui s'y perçoivent au profit du Trésor public ;
« 34° Au décret du 17, concernant le maire de la ville de Perpignan ;
c 35° Au décret du même jour, pour la dépu-tation à la fédération générale des gardes nationales et des troupes du royaume de quelques corps qui n'ont pas été compris dans le décret des 8 et 9;
« 36° Au décret du 18, concernant M. de Mirabeau le jeune ;
« 37° Enfin, Sa Majesté a donné des ordres pour l'exécution de deux autres décrets des 12 et 13 de ce mois :
« L'un autorise le ministre de la guerre à payer aux commissaires des guerres, prévôts aumôniers, secrétaires et autres personnes attachées à l'ancien régiment des' gardes françaises, les quatre derniers mois et leurs appointements de 1789;
Et l'autre, porte qu'il sera délivré au ministre de la marine la somme de 3 millions, acompte sur les dépenses destinées au service de la ma-
rine, pour être employée aux dépenses qu'exige l'armement extraordinaire ordonné par le roi. »
Signé : Champion be Cicé,
archevêque de bordeaux.
Paris, le
M. le Président. L'Assemblée va se retirer dans ses bureaux pour procéder à la nomination de son président. La séance est levée à trois heures.
Séance du
La séance est ouverte à 9 heures du matin.
, admis dans la séance en remplacement d'hier de M. Lezay-Marnésia, démissionnaire, prête son serment civique.
, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier qui est adopté.
, secrétaire, lit le procès-verbal-de la séance du 18 juin au matin.
Après quelques observations faites sur la rédaction du refus de M. l'abbé Maury de déposer sur le bureau le discours prononcé par lui, ce procès-verbal est également adopté sans changement.
, rapporteur du comité des finances, propose une addition aux quatre articles, adoptés dans la séance du 19, concernant la régie des postes.
Cette addition est décrétée ainsi qu'il suit :
« Il sera statué sur le traitement de l'intendant des postes, et sur le conseil des postes, après le rapport qui sera fait samedi prochain sur le régime de cette partie; et cependant l'intendant des postes et le conseil des postes continueront leurs fonctions comme par le passé. »
annonce que M. Le Pelletier de Saint-Fargeau a obtenu la majorité requise pour être président, et il l'invite à occuper immédiatement le fauteuil.
en remplaçant M. l'abbé Sieyès au fauteuil, dit :
«* Messieurs, j'ai fait à peine quelques pas dans ma carrière, et déjà vous avez daigné m'accorder la plus belle récompense de toute la vie d'un bon citoyen.
« Présider l'Assemblée nationale, succéder à M. l'abbé Sieyès, c'est un double honneur fort au-dessus de mon âge, de mon talent et de mes espérances.
« Vos bontés, en m'y appelant, m'imposent de grands devoirs; et, si j'ose le dire, il me
semble
(L'Assemblée vote ensuite des remerciements à M. l'abbé Sieyès.)
, député de Dijon. Les citoyens actifs de Dijon, ensuite l'administration du département, vous ont présenté une pétition pour demander qu'il fût apporté remède au défaut d'administration de la justice dans le département de la Côte-d'Or. Ce n'est pas mauvaise volonté de la part des magistrats, c'est une impossibilité physique. La Chambre des vacations est composée d'un président, dont le père, octogénaire, est depuis trois mois à la dernières extrémité. Ce magistrat donne tous ses soins et tous son temps à son père, et l'on ne peut lui en faire un crime. Trois autres sont passés dans l'étranger; à cela il n'y a pas encore de remède : l'on ne guérit pas de la peur. Deux conseillers-clercs ne peuvent pas être juges en matière criminelle. Ainsi il reste sept juges, dont le plus ancien n'a pas vingt-sept ans. Depuis le Ier mars, ce tribunal est sans activité; les prisons regorgent d'accusés. Les députés du ressort du parlement de Dijon se sont assemblés pour aviser au moyen d'établir un autre tribunal a l'instar de celui de Rennes. Ils ont vu M. le garde des sceaux, qui approuve ces dispositions, et qui en rendra compte au roi : ce tribunal sera composé, ainsi que celui de Rennes, de juges et jurisconsultes pris dans chacun des présidiaux du ressort; le plus anciennement admis au serment d'avocat présidera. La cour supérieure provisoire tiendra ses séances tous les jours, même pendant les fêtes de palais qui ne sont pas gardées par l'Eglise : les gens du roi continueront à faire les fonctions du ministère public, etc., etc. (Suivent d'autres dispositions absolument calquées sur celles du décret relatif au parlement de Rennes.)
Je demande qu'on ajoute à la disposition qui règle la compétence de ce tribunal, qu'il sera autorisé à admettre les gradués au serment d'avocat.
Il y a dans ce tribunal quelques membres qui n'ont pas refusé de continuer leur service; il y aurait de l'injustice à les traiter comme ceux du parlement de Rennes, qui avaient désobéi aux décrets. Je demande qu'il soit fait une exception pour les membres qui sont restés à Dijon.
Tous les tribunaux Sont dans une espèce d'agonie, et on ne doit pas attendre beaucoup d'un agonisant. Dans ma province, il y a aussi des tribunaux qui refusent de rendre la justice. Je demande qu'il soit décrété qu'on s'occupera incessamment de l'organisation de la justice.
line faut pas nous llatter que les nouveaux tribunaux soient en exercice avant deux ou trois mois; puisqu'il faut le dire, ce n'est pas que les magistrats de Dijon ne puissent pas rendre la justice, c'est qu'ils ne veulent pas.
M. le garde des sceaux leur a écrit dix lettres pour les engager à reprendre leurs fonctions, et ils n'en ont rien fait.M. d'André,dont la perspicacité est connue, aurait dû rendre plus de justice à mon honnêteté.
La cour provisoire établie en Bretagne a rendu les plus grands services, et le peuple bénit chaque jour le décret par lequel vous l'avez créée : j'appuie donc la proposition de M. Arnoult.
Dans ma province, qui est du ressort du parlement de Dijon, nous avons un droit particulier et des usages qui ne sont pas même écrits. Je demande, et ma proposition est si juste que M. Arnoult nes'y opposera vraisemblablement pas, que le présidial de Bourg fournisse quatre juges.
Tous les bailliages pourraient réclamer la même disposition : chacunases usages particuliers; les jurisconsultes de Dijon connais-sentces usages, et présenterontà la cour provisoire les instructions nécessaires. Nous n'avons point envie d'accorder de prérogatives sans nécessité. Je demande donc la question préalable sur l'amendement de M. Populus.
Cet amendement est rejeté, celui de M. Brillât est décrété, et le décret proposé par M. Arnoult adopté en ces termes :
L'Assemblée nationale, instruitede la cessation de l'exercice de la justice souveraine dans le ressort du parlement de Dijon, a décrété et décrète ce qui suit:
« Art. 1er. Il sera incessamment, et sans délai, composé un tribunal provisoire àDijon, pour remplacer la chambre des vacations du parlement de cette ville; auquel effet, il sera pris deux juges de chacun des présidiaux du ressort, deux de la sénéchaussée de Trévoux, deux jurisconsultes parmi ceux du barreau de Dijon, un jurisconsulte de chaque ville où les présidiaux sont établis, et un jurisconsulte de la ville de Trévoux. Lesdits membres se réuniront et se mettront en activité le plus tôt possible, et commenceront sans délai l'exercice de leurs fonctions. En cas de refus ou d'absence de partie d'entre eux, ils appelleront provisoirement et à leurs choix des avocats pour assesseurs. Ils se diviseront en deux chambres, dont l'une connaîtra de toutes les matières civiles, même de celles d'eaux et forêts, à quelques sommes qu'elles puissent monter ; l'autre des matières criminelles : lesdites chambres seront présidées par le plus anciennement admis au serment d'avocat, et le même ordre d'ancienneté réglera la préséance entre eux.
« Art. 2. Si parmi les officiers du parlement il s'en trouve qui désirent conserver leurs fonctions, ils seront tenus de le déclarer avant la composition du tribunal provisoire; auquel cas ils ne recevront pas l'honoraire qui sera ci-après fixé,leurs gages leur en tenant lieu, et il sera pris d'autant moins de juriconsultes dans les présidiaux.
« Art. 3. La cour supérieure provisoire ainsi formée tiendra ses séances tous les jours, même pendant ceux des fêtes de palais, et sans aucunes vacances. Elle recevra les licenciés en droit au serment d'avocat.
« Art. 4. Les gens du roi rempliront les fonctions ordinaires du ministère public, tant à l'audience qu'à la chambre du conseil : en cas d'absence ou d'empêchement, lesdites fonctions seront remplies par les substituts du procureur général du roi.
« Art. 5. Les greffiers, huissiers et autres officiers ministériels attachés au parlement de Bourgogne, continueront leurs fonctions auprès de ladite cour supérieure provisoire.
« Art. 6. Les ci-devant juges composant le parlement de Bourgogne remettront au greffe, dans
i huit jours après l'entrée en exercice de ladite I cour, les procès et pièces qu'ils peuvent avoir; et, [ faute à eux de le faire, ils seront poursuivis à cet [ effet à la requête du procureur général du roi ou de l'un des substituts, et condamnés aux dommages et intérêts des parties.
« Art. 7; Leshonoraires des juges appelés à composer la cour supérieure provisoire seront de 12 livres par jour, à compter, pour ceux des villes du ressort autres que Dijon, du jour de leur départ, et pour ceux de Dijon, du jour de leur entrée en fonctions. Autorise les receveurs des départements du ressort à payer chaque mois lesdits honoraires sur un mandat du président, signé du procureur général ou de l'un de ses substituts : en conséquence, lesdits juges ne percevront aucuns droits ni épices, sous quelque dénomination que ce soit. Les substituts, greffiers et autres officiers ministériels n'étant point compris dans la fixation des honoraires, continueront de recevoir les émoluments qui leur seront attribués par le titre de leurs offices ou par les règlements.
« Art. 8. L'Assemblée nationale charge son président de porter le présent décret dans le jour à la sanction du roi. »
, rapporteur du comité des dîmes. Je vais avoir l'honneur de vous proposer d'ajouter deux articles additionnels audécret du 18 juin : concernant les dîmes et champarts. Ils sont ainsi conçus :
« L'Assemblée nationale, instruite qu'il s'élève des difficultés sur la jouissance des bénéficiers, corps et communautés étrangers, des biens qu'ils possèdent en France* décrète ce qui suit :
« Art. 1er. Les bénéficiers, corps et communautés'étrangers, ainsi que les propriétaires laïcs des dîmes inféodées, également étrangers, continueront de jouir, la présente année, comme par le passé, des biens et dîmes qu'ils possèdent en France : en conséquence, les assemblées administratives, de même que les municipalités, s'abstiendront, à l'égard des biens et dîmes, de toute administration ou régie prescrite par les précé-dents décrets. L'Assemblée nationale déclare n ulles et comme non-avenues, toutes délibérations prises par les municipalités, qui seraient contraires à la teneur tant du présent décret, que de ceux des 14 et 20 avril dernier, et 18 de ce mois.
« Art. 2. Quant aux dîmes et biens possédés dans l'étranger par des bénéficiers, corps et communautés français, ceux qui sont en usage de les fairé valoir par eux-mêmes continueront de les exploiter la présente année, à la charge de rendre compte des produits aux directoires des districts où se trouvera le manoir du bénéfice, ou. le chef-lieu de l'établissement ; sinon les mêmes directoires, et,, en attendant qu'ils soient formés, les municipalités des chefs-lieux des districts feront ladite exploitation.
« Lesdits directoires ou municipalités feront pareillement la recette des prix de ferme de ceux des biens en question qui sont affermés; ils en acquitteront les dépenses; le tout par eux-mêmes ou par des préposés qu'ils pourront établir où bon leur semblera.
« Seront tenus les bénificiers, corps et communautés français, de faire aux directoires des districts, ou aux municipalités des chefs-lieux de ceux qui ne seront pas formés, la déclaration des biens, dîmes et droits qu'ils possèdent dans l'étranger.
« Le roi sera supplié de se concerter avec les puissances étrangères pour l'entière exécution du
présent décret, qui sera présenté sans délai à la sanction de Sa Majesté. »
(Ces articles ,sont mis aux voix et adoptés sans discussion.)
, rapporteur du comité des finances, propose un projet de décret concernant l'hôpital de la ville ae Bourges, qui est adopté ainsi qu'il suit :
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité des finances, sur les délibérations prises par les administrateurs du bureau de l'hôpital de Bourges, les 17 décembre 1789 et 1er juin 1790 ; lesdites délibérations confirmées et approuvées par les officiers municipaux de ladite ville, autorise Iesdits administrateurs à faire l'emprunt d'une somme de 30,000 livres, qui sera acquittée par les deniers à provenir des 60,000 livres léguées audit hôpital par feu M. Phelippeau, archevêque de Bourges, lequel legs demeurera spécialement affecté et délégué audit remboursement, à charge d'éteindre, par ce nouvel emprunt, ceux de 12,000 livres et 6,000 livres, déjà faits en vertu des délibérations ci-dessus énoncées.
Un membre demande et obtient la parole pour rendre compte des troubles près de s élever entre les habitants de la vallée d'Aran et ceux de Gomminges.
, député de Gomminges. La discorde se répand entre une province de France et une province d'Espagne. La vallée d'Aran menacé le Gomminges d'une incursion; ces Espagnols se préparent à venir les armes à la main, pour y chercher des denrées de première nécessité. J'ai déjà exposé quelle était la position géographique de la vallée d'Aran : elle est séparée de l'Espagne par une chaîne de montagnes impraticables ; cette vallée est attachée au Gomminges depuis plusieurs siècles par des sentiments de paix et de fraternité. Depuis les décrets qui défendentl'expor-tation des grains, les habitants du Gomminges, fidèles observateurs de vos décrets, ont cessé d'eu fournir à la vallée d'Aran. Dans les années les plus fertiles, cette contrée, si elle était abandonnée à elle-même, serait privée de subsistances. Dans ce moment-ci} elle est dans une affreuse misère, et la famine oblige ses habitants à venir enlever de3 grains sur une terre étrangère. Si vous le voulez, je vais vous faire lecture d'une adresse des membres composant le bureau intermédiaire du pays du Gomminges. (Gette lecture est faite.)'
On demande la lecture du décret.
le lit : « L'Assemblée nationale, après avoir entendu la lecture d'une adresse des membres composant le bureau intermédiaire du pays de Gomminges, a décrété et décrète que les habitants de la vallée d'Aran continueront de s'approvisionner dans le Gomminges de grains et autres denrées nécessaires à leur subsistance, et que l'exportation sera libre de l'une à l'autre des deux provinces. »
Je demande que l'on mette provisoirement, parce que cette province quine trouve pas actuellement le chemin de l'Espagne, le trouverait bien dans un autre temps.
Je demande qu'il soit ajouté par amendement que l'assemblée administrative sera chargée de surveiller l'exportation de manière que, sous prétexte de l'approvisionnement de la vallée d'Aran, il ne soit point fait d'enlèvement
capable de faire manquer les grains nécessaires au Gomminges.
L'amendement de M. Fréteau et l'article de M. Roger sont successivement décrétés.
Le décret est rendu ainsi qu'il suit :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu la lecture d'une adresse des membres composant le bureau intermédiaire du pays de Comminges, a décrété et décrète que les habitants de la vallée d'Aran continueront provisoirement de s'approvisionner, dans le Gomminges, de grains et autres denrées nécessaires à leur subsistance, et que l'exportation et l'importation sera libre de l'une à l'autre de ces deux contrées.
« Elle charge, en outre, l'assemblée administrative de surveiller ladite exportation, de manière que, sous prétexte de l'approvisionnement de la vallée d'Aran, il ne soit point fait d'enlèvement capable de faire manquer les grains nécessaires au Gomminges. »
présente la rédaction du décret qu'il avait proposé dans la séance de samedi 19 juin pour obtenir de nouveaux états du ministre des finances.
Le décret est adopté sans opposition dans les termes ci-dessous :
« L'Assemblée nationale a décrété et décrète;
« 1° Que le premier ministre des finances remettra, le 15 juillet prochain au plus tard, le compte détaillé des recettes et dépenses du Trésor public, depuis le premier mai 1789, jusqu'au premier mai de l'année présente ;
« 2° Qu'il sera remis dans la huitaine un état détaillé et précis des dépenses auxquelles sont destinés tant les 30 millions accordés par le décret du 19 de ce mois, que les revenus provenant des autres recettes, et, dans le cours du mois prochain, l'état détaillé de l'emploi desdites sommes.
« 3° Qu'il en sera usé de même, de mois en mois, jusqu'à ce que l'Assemblée nationale ail déterminé le nouvel ordre qu'elle se propose d'établir dans la comptabilité du Trésor public et qu'en conséquence, lorsqu'il sera fait une demande de fonds, l'état des dépenses auxquelles ils seront destinés sera joint à la demande;
« 4® Qu'il sera remis tous les mois au comité des finances un relevé, article par article, du registre des ordonnances qui sont expédiées chaque semaine, et du registre journal du bureau du grand comptant ;
« 5° Que le comité des finances sera tenu de faire imprimer le rapport sommaire des états qui auront été fournis à ses commissaires, et des vérifications qu'ils auront faites, pour être distribués chaque mois aux membres de l'Assemblée. »
, évêque de Laon, député de Ver-mandois, demande un congé de six semaines, pour motif de santé.
, député de Soûle, sollicite l'autorisation de s'absenter pouraffaires et pour un temps indéfini.
Ges congés sont accordés.
L'Assemblée passe à son ordre du jour qui est la suite de la discussion sur les articles concernan t la constitution civile du clergé.
Dans la séance du 18 juin, l'Assemblée a rejeté les articles 9 et 10 du titre M du projet de décret; l'article 8 a été rejeté dans la séance du 17 juin ; l'article 7 a été ajourné
le môme jour, et le dernier article adopté est le 6e. M. le rapporteur a la parole.
, rapporteur, donne lecture de l'article 11 ainsi conçu:
« Art. 11. Le traitement en argent des ministres de la religion leur sera payé d'avance de trois mois en trois mois, par le trésorier du district, à peine d'y être contraint par corps, après une simple sommation ; et dans le cas où l'évêque, curé ou vicaire viendrait à mourir ou à donner sa démission avant la lin du quartier, il ne pourra être exercé contre lui ni contre ses héritiers aucune répétition. »
Cet article est mis aux voix et adopté sans discussion, ainsi que l'article 12 ci-dessous:
« Art. 12. Pendant la vacance des évêchés, des cures et de tous offices ecclésiastiques payés par la nation, les fruits du traitement qui y est attaché, seront versés ou resteront dans la caisse du district pour subvenir aux dépenses dont il va être parié.
, rapporteur, donne lecture des articles 13 et 14 concernant la dotation des vieux prêtres.
(M. Pous demande et obtient la parole sur ces articles.)
, curé de Mazamet, député de Toulouse^ 1). Messiéuis, un mandat précis et fortement exprimé, que j'avais reçu des mains de mes commettants, me faisait un devoir de solliciter auprès de vous l'amélioration des curés à portion congrue. Jaloux d'exécuter un ordre si conforme à mes intentions, je n'eusse pas manqué de le remplir avec fidélité, si votre sagesse Savait prévenu ma demande, en décrétant que dans les dispositions à faire pour subvenir à Ventretien des ministres de la religion, il ne pourra être assuré à la dotation d'aucune cure moins de douze cents livres par année, non compris le logement et les jardins en dépendant. D'après un arrêté si raisonnable, je pense que ma mission sur cet objet est entièrement consommée.
Mais les vœux de mes commettants ne finissent pas là. J'ai à vous demander uu honoraire
pour MM. les vicaires. Je sais et je n'ignore pas qu'il entre dans vos vues de leur assigner
un traitement plus fort que celui dont ils jouissent actuellement. Vous voulez bannir pour
jamais tout motif de plainte, et faire cesser les éternelles mais vaines réclamations de ces
respectables confrères auxquels nous ne pouvions offrir nous-mêmes, en leur payant leur
dotation, trop faible pour eux, et néanmoins écrasante pour nous, que de stériles regrets.
Mais permettez, Messieurs, que je vous demande si leur pension future ne se montera qu'à la
moitié de celles des curés les moins partagés? J'ai entendu, dans notre tribune, un jeune
prélat, dont la générosité envers la nationne peut être suspecte, assigner aux vicaires, pour
leur portion congrue,la somme de 600 livres. 11 tient sans doute à l'antique méthode, si
constamment suivie jusqu'à nos jours, de ne donner à cette classe laborieuse des ministres
des autels qu'une demi-portion de l'honoraire accordé aux plus pauvres titulaires, comme si
cette terrible proportion arithmétique était une base assurée pour calculer l'étendue des
besoins.Non,Messieurs,
D'ailleurs, Messieurs, considérez que l'état de vicaire ne sera plus le même après la nouvelle organisation de la hiérarchie ecclésiastique. Jusqu'ici, salariés d'une manière indécente, ils ont eu, pour la plupart des ressources de famille, parce que l'espoir d'un placement plus fortuné engageait les parents à joindre aux sacrifices d'une longue éducation celui d'un secours de quelques années. Pour ceux qui vivaient sans aucun moyen, je tais, par respect pour la religion, le détail triste et déchirant de leur dégoûtant ménage. Les vicaires avaient encore le faible, mais utile secours d'un casuel que vous avez heureusement supprimé I L'attente fondée d'une cure ou d'un autre bénéfice quelconque soutenait de plus leur espérance, et leur position transitoire les engageait à regarder les premières années de leur ministère comme un noviciat, à la vérité rigoureux, mais qui devait bientôt se terminer par une profession plus aisée. Mais aujourd'hui où les titres de bénéfices vont devenir beaucoup plus rares par les suppressions des collégiales, par celles des bénéfices sans fonctions, par la réduction du nombre des cathédrales, et peut-être même par celle des canonicats qui composeront à l'avenir ces chapitres échappés a vos destructions économiques ; aujourd'hui, où l'espoir des résignations est absolument éteint, ou le casuel n'existera plus, trouveront-ils chez leurs parents les mêmes facilités? Est-il juste qu'ils doivent y avoir recours, lorsque de longues études auront absorbé plus que leur patrimoine, et qu'occupés des fonctions les plus sacrées et les plus nécessaires à la société, ils ne travailleront, ilsnevéil-leront, ils ne s'épuiseront que pour elle et pour son bonheur? Oui, Messieurs, j'estime que dans la suite l'état de vicaire sera presque un état fixe ou qui ne changera qu'après bien des années; il me paraît donc infiniment raisonnable de l'envisager sous ce point de vue et d'y joindre en conséquence un traitement qui en soutienne la dignité, qui en adoucisse les rigueurs, et qui soit, pour des familles honnêtes, un véhicule suffisant pour engager leurs enfants à se tourner vers le saint ministère. Ce ne serait donc point la pension de 600 livres que je voudrais que l'on leur assignât. Trop modique pour fournir aux aliments, aux frais d'un vestiaire décent, aux gages et à la nourriture d'un domestique, à l'entretien d'un mobilier, vous laisseriez encore ces hommes que vous aimez et dont vous êtes les patrons dans un véritable état de détresse, et vos intentions bienfaisantes manqueraient leur but, si vous déterminiez à cette somme l'honoraire qui leur est dû. Je voudrais donc que la portion congrue de MM. les vicaires se montât au moins à 800 livres, sans y comprendre le logement et le jardin pour ceux qui vivent dans ies annexes, et que cette portion fût absolument libre de toute imposition quelconque.
Au reste, la plupart de vous et de vos commettants y avez un prochain intérêt, intérêt qui devient presque général par le nombre d'individus sur lequel il frappe. Car, dans une famille nombreuse, ce qui tourmente l'amour paternel est
ordinairement le sort futur d'une descendance qu'on aime. Or, quelle ressource aura désormais la masse des citoyens, après la destruction de presque tous les monastères et d'un nombre immense de bénéfices? De tous les anciens débouchés, on n'aura à l'avenir que le sacerdoce, et, dans le sacerdoce, l'espoir le plus assuré, le plus immédiat, doit être la situation du vicaire, profession qui sera, comme je l'ai déjà dit, ou à vie ou à terme fort prolongé. Je puis donc avancer que le sort des vicaires est, pour ainsi dire, le vôtre, celui des personnes que vous représentez dans ce moment. Vous vous devez donc à vous-mêmes, vous devez à vos constituants de ne pas doter avec trop de parcimonie cette classe d'hommes qui doit sortir du sein de votre famille et qui seule peut recueillir le fruit de vos sacrifices.
Je sais qu'il existe un moyen d'adoucir, en espérance, le sort des vicaires et de rendre leur fixation plus prompte et plus facile : c'est d'ériger en cures toutes les annexes auxquelles il sera possible de donner cinq cents paroissiens. Une puissance voisine qui essaya les premiers coups de son autorité par détruire un grand nombre de monastères et d'abbayes* multiplia prodigieusement les cures, parce qu'elle jugea les nouvelles érections nécessaires pour le bien du ministre, pour l'instruction des peuples et pour unir, par des liens de paternité, le fonctionnaire évangélique avec les fidèles qu'il devait gouverner. C'est, en effet, un avantage réel d'attacher le prêtre qui travaille à une église particulière. S'il est amovible, il se regarde toujours comme étranger; le peuple ne se lie à lui que d'une manière précaire, et le bien ne se fait alors qu'à demi. Vous pèserez, Messieurs, avec maturité, cette considération, et j'ose croire que, dans votre résolution finale, vous vous déterminerez pour le parti le plus utile à la religion et à la chose commune.
J'ai à vous demander, Messieurs, une pension pour ces mêmes vicaires, lorsqu'accablés de travail et d'années, ils seront obligés d'abandonner le ministère. A la fin de leur course, il est juste qu'ils aient de quoi fournir aux besoins de première nécessité. Mais, pour avoir ce nécessaire, il est indispensable de le leur assigner.
J'ai à vous demander une dotation pour les prêtres actuellement sans fonctions qui ne peuvent, à cause de leurs infirmités, continuer a se livrer au travail pénible des paroisses. Us sont aussi bien dignes de votre sollicitude, et j'ose avec confiance les mettre sous la garde de votre humanité, parce que je sais que vous voulez être les pères de tous les souffrants.
J'ai à vous demander de pourvoir encore, par des appointements raisonnables, à la subsistance des curés qui, après un terme donné ou une infirmité durable et reconnue, quitteront leur bénéfice-cure. L'espoir d'un canonicat qu'on paraît leur réserver pour leur service de retraite est une ressource à peu près illusoire. Il est vraisemblable qu'il n'y aura qu'une cathédrale dans chaque département et peut-être peu de canoni-cats dans chaque cathédrale; et comment, avec un si faible moyen, certainement chimérique pour les individus frappés d'une maladie habituelle, comment tant ae pasteurs usés poUrront-ils s'assurer des aliments? Ne seront-ils pas réduits à la plus funeste alternative ou de Conserver un bénéfice qu'ils ne pourront desservir, ou 4e terminer, dans une cruelle et honteuse indw
gence ; une vie dont les beaux jours n'auront coulé que pour le bonheur de leurs frères ?
Enfin, j'ai à vous demander de porter vos regards sur le^sort des anciens curés qu'un grand âge ou des infirmités ont forcés d'abandonner leurs paroisses sous la réserve de la pension du tiers ae leur précédent revenu. Vous savez que cette pension a tous les caractères de la légitimité, puisqu'elle a été créée sous l'empire des lois en vigueur, pour cause bien Raisonnable et par la volonté d'une puissance qui seule réglait, il y a peu de jours, la forme de nos contrats. Ces prêtres décrépits ou malades sont nos frères, nos concitoyens; nous tenons à plusieurs par les liens du sang et de l'amitié ; ils ont bien mérité de la patrie, à laquelle ils ont sacrifié toutes leurs forces physiques et morales ; et cependant, ils tremblent, ils gémissent, parce qu'ils ne savent où s'adresser pour obtenir un absolu nécessaire. Sans doute, vous ne les abandonnerez pas ; mais, en attendant vos dispositions ultérieures, qui pourvoira à leurs besoins? qui soignera leur respectable caducité ? Le torrent de vos immenses occupations vous entraîne vers des objets certainement de la plus haute importance ; mais leurs résignataires, dont les dîmes sont supprimées, ne paieront plus, parce qu'ils ignorent s'ils en jouiront encore; les moyens les plus indispensables leur manqueront; en un mot, ils souffriront de toutes les manières, et la génération à laquelle vous travaillez sans relâche et avec tant de courage ne sera, pour ces infortunés vénérables, qu'une masse d'amertumes et le germe d'une mort infaillible et cruelle.
Ah 1 Messieurs, vous voulez être justes, vous voulez faire des heureux, vous voulez que le glorieux récit de vos travaux passe à la postérité avec le cri des bénédictions de la génération ac-actuelle : Venez donc promptement au secours de ces victimes du temps, de ces pasteurs honorables; si vous tardez encore un peu, vous ne pourrez plus les secourir, le tombeau les fera disparaître à vos yeux, et les ennemis de votre gloire se prévaudront peut-être de cet abandon apparent pour jeter une maligne défaveur sur le brillant de vos grandes opérations. Oui, Messieurs, parmi les secousses qui agitent tous les Etats, toutes les fortunes, ces vieillards infortunés tournent leur regard vers vous ; et cette Assemblée auguste, d'où est partie la foudre qui les a frappés, est, au milieu de l'orage, le seul ange tutélaire qu'ils invoquent.
Voilà, Messieurs, quelques pétitions que j'ai osé vous faire pour in'acquitter d'une commis-^ sion qui m'était chère infiniment. J'en ai senti toute la justice, et je me suis flatté que, législateurs équitables et impassibles, Vous les jugerez avec la même droiture qui me les a inspirées.
Trop de larmes ont déjà coulé depuis l'ouverture de nos séances; trop d'immenses débris nous environnent de toutes parts. Dissipons les inquiétudes, faisons naître enfin l'aurore des beaux jours de cet Empire; réédifions avec une grande sagesse, et apprenons à nos détracteurs et aux hommes timides que si des maux nécessaires ont dû précéder nos incalculables travaux, des biens, des grands biens, propres à tous, communs à tous, en seront infailliblement le précieux résultat.
(Oû demande à aller aux voix.)
met aux voix les articles 13 et 14, qui sont décrétés en ces termes :
«krU 13. Les curés qui, à cause de leur grand
âge ou de leurs infirmités, ne pourraient plus vaquer à leurs fonctions, en donneront avis au directoire du département, qui, sur les instructions de la municipalité du lieu et de l'assemblée administrative du district, laissera à leur choix, s'il y a lieu, ou de prendre un vicaire de plus, lequel sera payé par la nation sur le même pied que les autres vicaires, ou de se retirer avec une pension égale au traitement qui aurait été fourni au vicaire.
« Art. 14. Pourront aussi les vicaires, supérieurs des séminaires et autres exerçant des fonctions publiques, âgés ou infirmes, en faisant constater leur état de la manière qui vient d'être prescrite, se retirer avec une pension de la valeur du traitement dont ils jouissaient, pourvu qu'il n'excède pas la somme de 800 livres. >
Je demande qu'après vingt-cinq ans d'exercice, un ecclésiastique soit autorisé à se retirer avec une pension égale à la place qu'il abandonne.
Cet article ne doit pas être adopté ; un ecclésiastique ne doit quitter ses fonctions que lorsqu'il lui est absolument impossible de les continuer; j'augure trop bien des ministres de la religion pour croire que cet article puisse entrer dans leurs vues.
Je ne puis qu'applaudir aux vues bienfaisantes de M. l'abbé Grégoire. 11 est juste d'assurer une existence honnête aux ministres du culte, mais nous devons prendre garde aussi que les frais ne deviennent trop onéreux pour le peuple. C'est pour cela que je crois qu'il n'y a rien à ajouter aux vues sages du comité, qui a uni tout ce que l'humanité réclame en faveur de la vieillesse à ce que la prudence prescrit.
(L'article proposé par M. l'abbé Grégoire est écarté par la question préalable.)
Je demanderais un article correctionnel. Votre intention est-elle d'accorder une pension à un ecclésiastique qui, fait prêtre à vingt-cinq ans, déclarerait au bout de trois mois ne pouvoir continuer son ministère?
Si un militaire reçoit un coup de feu à la première campagne, on lui donne les invalides, comme s'il avait cinquante ans de services.
Je demande que les desservants et les prêtres qui servent dans les hôpitaux jouissent des mêmes avantages que les curés et les vicaires, s'ils deviennent infirmes.
Ceci est de toute justice, et je vais en joindre la disposition à l'article qui vient d'être décrété.
L'article 14, avec l'adjonction des mots « aumôniers des hôpitaux, » après vicaires, est de nouveau mis aux voix et adopté.
M. Martineau lit l'article 15, qui est adopté en ces termes :
« Art. 15. La fixation qui vient d'être faite du traitement des ministres de la religion, aura lieu à compter du jour de la promulgation du présent décret, mais seulement pour ceux qui seront pourvus par la suite d'offices ecclésiastiques; à
l'égard des titulaires actuels, soit ceux dont les ofnces ou emplois sont supprimés, soit ceux dont les titres sont conservés, leur traitement sera fixé par un décret particulier. »
lit l'article 16 et ajoute :
Le comité avait d'abord donné à cet article une beaucoup plus grande extension ; il portait que « les évêques, les curés, ni les vicaires ne pourraient demander ni recevoir aucune contribution, dons ou honoraires, sous quelque prétexte ou dénomination que ce soit ; » mais nous avons réfléchi qu'on demanderait des obit, libéra, et le tout pour rien. Tout le monde voudrait qu'à l'enterrement d'un parent on célébrât trois messes sur le corps, un service à la huitaine et un annuel, etc.
Il est impossible de renfermer dans un seul article tous les détails qu'il serait nécessaire d'exprimer ici; il faut pour cela connaître les usages des provinces. Je demande demande donc qu'il soit ajouté à l'article, qu'il sera fait un règlement particulier, et je me ré-serve de donner alors toutes les notions qui me sont particulières.
, curé de Souppes. Il est absolument nécessaire de s'expliquer; sans cela, on vous dirait que les fonctions d'évêque se réduisent à l'ordination, et celles des curés à dire la messe les dimanches et les fêtes.
Je demande que l'article soit adopté tel qu'il a été proposé par le comité. Quant aux difficultés, votre comité s'en occupera. Nous n'obligerons pas un curé à se lever à quatre heures pour célébrer un mariage. Si, par une complaisance très innocente, il voulait le faire, on ne l'empêcherait pas de recevoir quelques bons.
L'article du comité est adopté en ces termes :
« Art. 16. Au moyen du traitement qui leur est assuré par la présente Constitution, les évêques, les curés et leurs vicaires exerceront gratuitement toutes les fonctions épiscopales et curiales. »
, rapporteur. Le rejet de plusieurs articles du titre III rendra nécessaire une modification dans le numérotage des articles. L'Assemblée est maintenant appelée à délibérer sur le titre IV et dernier du projet de décret que nous lui. avons proposé.
L'article 1er est lu, mis aux voix et adopté sans discussion, ainsi qu'il suit :
TITRE IV.
Le la loi de la résidence.
« Art. 1er. La loi de la résidence sera religieusement observée, et tous ceux qui seront revêtus d'un office ou emploi ecclésiastique y seront soumis sans aucune exception ni distinction. »
lit les articles 2, 3 et 4 ci-dessous :
« Art. 2. Aucun évêque ne pourra s'absenter chaque année pendant plus de quinze jours consécutifs hors de son diocèse que dans le cas d'une véritable nécessité et avec 1 agrément du directoire du département dans lequel son siège sera établi.
« Art. 3- Ne pourront pareillement les curés et
les vicaires s'absenter du lieu de leurs fonctions^ au delà du terme qui vient d'être fixé, que pour des raisons graves ; et, même en ce cas, seront tenus les curés d'obtenir l'agrément tant de leur évêque que du directoire de leur district, les vicaires la permission de leur curé.
« Art 4. Si un évêque ou un curé s'écartait de la loi de larésidence, lamunicipalitédu lieu en donnerait avis au procureur général syndic du département, qui l'avertirait par écrit de rentrer dans son devoir, et, après la seconde monition, le poursuivrait pour le faire déclarer déchu de son traitement pour tout le temps de son absence.
Je demande queJes évêques et les curés soient obligés de remplir leurs fonctions par eux-mêmes ; pasce oves tuas, est-il dit dans l'Evangile. M. Beaumont, archevêque de Paris, voulait que je fisse mes fonctions à la quinzaine, c'ést-à-dire tour à tour avec mon vicaire.
L'Assemblée nous regarde sans doute comme des fonctionnaires publics; je demande à quel fonctionnaire elle imposera un joug aussi pesant que celui auquel elle veut nous soumettre aujourd'hui?
Les lois canoniques l'ordonnent.
Les articles 2, 3 et 4 sont mis aux voix et adoptés*
, rapporteur, donne lecture de l'art. 5 en ces termes :
« Art. 5. Ni les évêques, ni les curés ne pourront accepter des charges, emplois ou Commissions qui les obligeraient à s éloigner de leur diocèse ou de leur paroisse, et ceux qui en seraient actuellement pourvus seront tenus de faire leur option dans le délai de trois mois, à compter de la notification, qui leur en sera faite par le procureur général syndic de leur département, sinon et après l'expiration de ce délai, ieur office sera réputé vacant ; il leur sera donné un successeur en la forme ci-dessus prescrite. Ne sont néanmoins comprises, dans les présentes dispositions, les fonctions publiques auxquelles ils pourront être appelés comme citoyens actifs, par le vœu de leurs coùcitoyens. »
Le mot de fonctions publiques me paraît d'une signification trop étendue. Je demande qu'il soit dit, les fonctions d'administrateurs de districts et de départements, et celles de députés aux législatures.
Les ecclésiastiques eux-mêmes ne demandent pas à être admis à toutes les fonctions publiques : on sent bien, par exemple, qu'ils n'iront pas proclamer là loi martiale, et commander de faire feu sur leurs paroissiens. Je demande donc qu'ils soient expressément exclus des fonctions de maire et d'officier municipal.
La disposition proposée par M. Populus ne peut pas porter sur les titulaires de bénéfices supprimés.
L'Assemblée a décrété que les ecclésiastiques étaient citoyens actifs; on ne peut pas déroger au principe.
(ci-devant comte). Si
l'Assemblée veut être conséquente, elle a décrété que la même personne ne pourrait exercer deux fonctions à la fois. Je demande donc que ceux des membres de l'Assemblée qui sont dans ce cas soient tenus d'opter sur-le-champ.
Je demande, par sous amendement, que les élections faites soient valables ; on ne peut trop prendre de précautions pour conserver la paix ; et ce serait donner aux ennemis du bien public l'occasion de troubler l'ordre, que de convoquer de nouvelles assemblées primaires pour révoquer des choix faits par le peuple. Je demande que votre décret n'ait pas un effet rétroactif.
Nous discutons ici une question d'incompatibilité, et non d'exclusion; il faut donc prouver que les ecclésiastiques ne peuvent en même temps exercer les fpnctions curiales et les fonctions administratives. Si nous n'avons pas tiré du clergé tout le parti que nous devions en attendre, c'est qu'il avait à soutenir des intérêts particuliers ; mais comme aujourd'hui tous les intérêts sont confondus, il ne faut point exclure ceux qui se trouveraient dans le chef-lieu des districts.
Là question qu'on traite est une grande question politique. On présente deux systèmes : l'un d'admettre les ecclésiastiques à toutes les fonctions civiles et politiques ; l'autre, de les exclure des fonctions politiques, comme moyen d'éluder l'influence qu'ont nécessairement sur les peuples ceux qui dirigent les consciences. Le parti moyen renferme tous les avantages ; il faut les exclure des fonctions permanentes, et les admettre à celles qui sont bornées dans uu espace de temps connu.
propose ainsi la rédaction de la dernière partie de l'article 5 : « Ne sont point néanmoins comprises dans la présente disposition les fonctions auxquelles ils auraient été ou pourraient être appelés par leurs concitoyens, non plus que celles de membres du conseil de district et de département et de députés aux législatures, auxquelles ils pouraient être appelés par la suite. »
consulte l'Assemblée qui adopte l'article 5 et le renvoie au comité ecclésiastique pour la rédaction.
Le comité avait proposé un article 6 et dernier. 11 croit devoir le retirer comme inutile.
, évêque de Lydda. La comité vous a proposé un sixième article ainsi conçu : « Le roi sera supplié de prendre toutes les mesures qui seront jugées nécessaires pour assurer la pleine et entière exécution du présent décret. » J'insiste sur cet article, afin qu'on y ajoute ces mots: par les voies canoniques, en même temps que par les voies civiles. Voici mes raisons. Il serait heureux, pour que la Constitution se terminât sans que la paix si désirable fût altérée, que rien ne portât atteinte à la consistance si nécessaire à une Constitution. L'article 4 du titre Ier est d'une exécution très embarrassante ; il porte qu'aucun citoyen, pour quelque cause que ce soit, ne pourra recourir à uu évêque ou métropolitain, dont le siège serait établi sous la domination d'une puis-
sance étrangère... Songez que les parties du royaume qui se trouvent d'un diocèse étranger ne peuvent être dans un chômage de juridiction spirituelle ; c'est sur ce motif que, par une intention vraiment pure, et qui ne se dirige qu'à la complète exécution de vos décrets, je demande un article 6, dans lequel il serait dit: que le roi sera supplié de prendre toutes les mesures qui seront jugées nécessaires par les voies canoniques, pour 1 exécution du présent décret, et que jusque-là l'article 4 du titre Ier restera en suspens.
Je demande la question préalable coDtre cette proposition. Il est facile de faire sentir qu'elle n est point admissible. Quand un décret est rendu, qu'il est sanctionné, le roi est obligé de le faire exécuter. Il est donc inutile de dire qu'il prendra toutes les mesures nécessaires pour l'exécution. Cette proposition est dangereuse, parce qu'elle tendrait à faire croire qu'il y a des difficultés dans l'exécution d'un décret aussi facile à exécuter que tout autre. (On demande que la discussion soit fermée.)
Il faut que cette affaire soit profondément discutée. (On réclame l'ordre du jour.)
Puisqu'on n'est pas libre, puisqu'on veut éteindre la confiance, je remets tout le mal qui peut en arriver sur la tête de ceux qui veulent que ce mal arrive.
(L'Assemblée décide qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur l'article 6.)
M. Perreney (ci-devant de Gros-Bois) envoie une protestation contre le décret rendu dans la séance de samedi. L'Assemblée, par des murmures presque unanimes, montre qu'elle n'en veut pas entendre la lecture.
La députation de Nîmes m'a chargé de vous lire l'extrait de diverses lettres arrivées de cette ville. Le 4 de ce mois, il se passa quelques désordres devant les portes du palais, où le corps électoral était assemblé. La municipalité demanda à ce corps quel secours il voulait ; ce corps s'en rapporta à la municipalité et aux commissaires du roi. Des patrouilles furent ordonnées et faites par les dragons et parle régiment de Guienne. Le lendemain, les compagnies qui portaient ci-devant des cocardes blanches, et qui depuis ont arboré des houpes rouges, voulurent faire ces patrouilles. La municipalité s'adressa aux commissaires du roi, dont l'opinion fut contraire à la volonté de ces compagnies ; cependant la municipalité défendit au régiment de Guienne et aux dragons de continuer les patrouilles. Le 13, les compagnies de Froment, Melchion et des Combes, officiers municipaux ou notables, attaquèrent des dragons démontés,, dont l'un fut tué et volé. Les citoyens se réunirent aux dragons ; les agresseurs voulurent attaquer les citoyens : le désordre fut très considérable. Les commissaires du roi demandèrent que la loi martiale fut publiée, et que le régiment de Guienne marchât. Ce ne fut que deux heures après que les publications furent faites. Le régiment de Guienne ne fut pas commandé, et les patriotes furent repôussés. Le 14, les assaillants recommencèrent le désordre ; ils se cachèrent dans leurs maisons, desquelles ils tiraient sur les citoyens ; enfin, ils se réfugièrent
dans une tour attenant à la maison de M. Froment : ils s'y fortifièrent et placèrent des pierriers qui paraissaient préparés de longue main.
Le 15, le régiment de Guienne vint au bas de cette tour ; on se disposait à des conciliations, on n'attaquait point; mais, soit trahison, soit imprudence, les agresseurs firent feu sur les patriotes. Le régiment de Guienne ne put alors être arrêté : la tour fut forcée et beaucoup de personnes tuées. Le lendemain, les agresseurs, retirés dans un couvent, tirèrent sur les patriotes ; ils furent encore forcés, et le combat recommença ; les patriotes restèrent maîtres du couvent. Le nombre des personnes tuées dans ces différentes affaires s'élève à quatre-vingts. Parmi les morts se trouvent plusieurs capucins.—Des courriers ont été envoyés pour arrêter les gardes nationales des villes voisines qui venaient au secours deNîmes,—M. Vidal, procureur syndic de la commune, etM. Laurent, officier municipal, ont été ar rêtés.—On a désarmé les agresseurs ; on a trouvé chez quelques-uns des munitions, et chez d'autres plus d'armes qu'ils ne pouvaient en avoir besoin. — La ville de Nîmes désirerait que le roi témoignât sa satisfaction aux commissaires pour la formation du département du Gard, et qu'il leur conservât leurs pouvoirs jusqu'au rétablissement du calme. C'est aussi le vœu de la députation. Nous n'avons pas d'autres projets de décret à vous présenter.
, maire de Nîmes. J'avais entendu dire qu'il était arrivé de malheureux événements à Nîmes; je n'ai reçu aucune lettre de messieurs les officiers municipaux; j'en ai reçu seulement d'un endroit qui n'est pas Nîmes, mais qui est peu éloigné de cette ville. On m'annonce que plusieurs personnes sont mortes. N'ayant pas ae lettres officielles, je suis allé chez M. de Saint-Priest ; il m'a fait voir une lettre d'une ville voisine. Je prie l'Assemblée d'attendre que le comité des recherches aie fait un rapport, ou que j'aie reçu des nouvelles. (Il s'élève beaucoup de murmures.) J'appuie la demande faite, de supplier le roi de continuer les pouvoirs des commissaires. C'est le vœu de tous bons citoyens.
Monsieur le maire de Nîmes n'a pas reçu de lettre de messieurs les officiers municipaux, ses collègues : cela n'est pas extraordinaire; ils ont tous pris la fuite.
Les malheureux événements de Nîmes ne prouvent que trop la nécessité des mesures que l'Assemblée oationale avait déjà été engagée à prendre, et qu'elle aurait adoptées, si elle avait eu moins d'indulgence. En ce moment, on vous propose seulement de donner des pouvoirs plus étendus aux commissaires du roi. La municipalité, par une conduite au moins équivoque, a peu mérité la confiance des citoyens et la vôtre. Je demande que la disposition des forces militaires, tant des troupes de ligne que des gardes nationales, pour la tranquillité publique, ci-devant aux mains des officiers muncipaux, soit confiée aux commissaires du roi par un acte de l'Assemblée nationale.
Adopter cette disposition, ce serait dire que l'Assemblée nationale nomme les commandants des forces militaires : ce serait faire une insulte au roi. Je demande qu'il ne soit pas du tout question de cela, ni que le nom de la municipalité soit prononcé dans le décret.
, évêque de Nîmes. Je ne parais un instant dans cette tribune que pour témoigner à l'Assemblée nationale la profonde douleur dont je suis pénétré. Le désir le plus sincère de voir rétablir l'ordre et le calme dans la ville de Nîmes me fait adhérer à la proposition de donner aux commissaires tous les pouvoirs nécessaires pour faire renaître la paix. Je ne me permets qu'une seule réflexion : elle porte sur l'imputation faite aux officiers municipaux d'avoir fui. Sans doute, ils auraient commis une grande lâcheté, mais rien n'annonce dans l'extrait qu'on vous a lu qu'ils s'en soient rendus coupables. Je prie l'Assemblée de suspendre son jugement contre ces officiers.
(ci-devant comté). La motion de M. Barnave a évidemment pour but d'ôter aux officiers municipaux une partie des prérogatives que la Constitution a attachées à leurs places. Je dis que les lois destinées à réprimer les passions des hommes, les événements et la violence ne doivent pas céder à l'influence des passions et des événements, qui ont trop d'influence dans une assemblée délibérante, quand elle est unique. Je dis qu'il faut attendre des détails authentiques, et ne pas prononcer une flétrissure provisoire contre des officiers qui doivent être présumés innocents jusqu'à ce que le délit soit constaté. Je demande donc que jamais l'Assemblée ne prononce ainsi, non seulement sur les officiers municipaux de Nîmes, mais sur toutes personnes. Je demande que, fidèles à la raison que vous avez consacrée, vous ne vous permettiez pas un semblable préjugement. J'ai cette opinion de la justice qui est dans vos cœurs que vous ne ferez pas cette injustice effroyable, contraire à la raison et à la justice immuable que vous avez professées. Je demande le renvoi au comité des rapports, qui ferait sur-le-champ le dépouillement des pièces.
Il faut statuer d'abord sur la première partie, qui concerne seulement la prière à faire au roi de conserver les pouvoirs des commissaires du département. Quand l'Assemblée sera positivement instruite des faits, elle statuera sur la seconde.
(ci-devant duc). La division proposée tend à établir deux pouvoirs à Nîmes. Ën supposant que la fuite des officiers municipaux ne soit pas vraie, il est au moins certain que quelques-uns d'entre eux sont arrêtés. (On demande, du côté droit, si cela est vrai.) Quand cette nouvelle encore ne serait pas vraie, il n'en est pas moins vrai qu'il y a des troupes à Nîmes, et que les officiers municipaux n'ont pas rempli le devoir de vous en prévenir. J'adopte en Son entier la proposition de M. Barnave, et je demande qu'on aille aux voix dans l'instant.
(On ferme la discussion.)
(On fait lecture du projet de décret de M. Barnave.)
, évêque de Nîmes. Je demande la division, et je l'appuierai sur ce qu'il n'est pas certain que les officiers municipaux de Nîmes soient en fuite, et sur ce qu'en publiant la loi martiale ils ont rempli en partie leurs fonctions. Il est possible qu'après des événements funestes ils se soient absentés pour une demi-journée, pour un jour; i) est possible qu'ils soient retenus dans leurs maisons.
demande que les pièces soient remises sur le bureau.
porte au bureau l'extrait dont il a fait lecture.
La pièce sur laquelle nous délibérons n'est pas parfaitement authentique. On ne peut rendre aussi légèrement un décret contre une municipalité ou contre un corps quelconque. Que celui qui a fait une motion contre la municipalité de Nîmes la signe et soit responsable.
Je ne crois pas que la pièce [lue doive seule faire la base de votre délibération; mais un fait avéré, c'est que nous n'avons pas reçu de nouvelles de la municipalité de Nîmes.La meilleure excuse de cet oubli, c'est qu'elle est en fuite; si elle n'était pas en fuite, elle serait coupable.
(La division est rejetée.)
Le projet de tous les membres de l'Assemblée nationale est de rétablir le calme partout où il est troublé. J'en connais un moyen facile, et j'en fais l'objet d'un amendement. Plusieurs opinants ont parlé de justice, de patriotisme; ils peuvent, en ce moment, donner une preuve signalée de l'un et de l'autre : qu'ils rétractent la déclaration qu'ils ont signée, et qu'ils n'ignorent pas être la cause de tous ces malheurs. (On applaudit dans la plus grande partie de la salle.)
On peut un moment se laisser entraîner dans l'erreur. La proposition que j'ai l'honneur de faire aux honorables membres les couvrirait de gloire aux yeux de toute la France. (La partie droite jette de grands cris.) C'est par cette démarche qu'ils acquerront des droits à la reconnaissance publique. Tel est l'amendement que je propose, en adoptant le projet de décret.
(ci-devant comte). J'appuie très sincèrement la motion de M. le baron de Meuou..... (On rappelle à l'ordre.) Que l'Assemblée révoque son décret et déclare la religion catholique la religion de l'Etat : elle se couvrira de gloire. (La partie droite applaudit).
L'amendement que j'ai proposé n'est point un amendement, c'est une simple considération.
M. de Montlosier (ci-devant comte). Et moi, je déclare que ma motion est une motion, et non une considération. Je demande qu'on en délibère. (Cette motion est fortement appuyée par le côté droit). :
(On demande vivement la clôture de la discussion.)
met la clôture aux voix ; elle est prononcée.
Le projet de décret de M. Barnave est ensuite adopté ainsi qu'il suit :
« L'Assemblée nationale décrète que son président se retirera sur-le-champ devers le roi, pour le supplier de continuer les pouvoirs de ses commissaires préposés à l'établissement des assemblées administratives, dans le département du Gard, et de les charger expressément du maintien de la tranquillité publique dans la ville de Nîmes et les environs ; décrète, en conséquence,
que la disposition des forces militaires qui pourront y être employées, et la faculté de requérir les troupes réglées et les gardes nationales, seront remises entre leurs mains, la municipalité de Nîmes demeurant privée de cette partie de ses fonctions, jusqu'à ce qu'il en ait été autrement ordonné. »
lève la séance à 4 heures.
Séance du
La séance est ouverte à 9 heures du matin.
, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier.
Je demande que l'article 14 du titre III du décret sur l'organisation du clergé qui porte qu'il sera donné 800 livres de pension à un vicaire, soit renvoyé au comité pour y être rédigé d'une façon clâir^ précise et qui ne prête pas à l'arbitraire. En effet, cet article, dans sa teneur actuelle, peut mettre dans un temps fort court, peut-être dans 12 ou 15 ans, plus de dix mille pensions de 800 livres à la charge de l'État. Il suffira pour cela, d'un peu de complaisance de la part de MM. les médecins qui délivreront des certificats de maladie et d'un peu de fainéantise de la part de MM. les vicaires qui ne tarderont pas à recouvrer une santé parfaite.
J'appuie d'autant plus les réflexions de M. Bouche que le comité des pensions a été unanimement d'avis de vous proposer de n'accorder aucune pension qu'après 10 an3 de services et, dans ce cas, de ne donner aux pensionnaires que le quart de leur traitement.
, rapporteur. Vous avez décrété l'article 14 et cet article doit être maintenu sans modification. En effet, la confiance qui est due aux municipalités et aux administrations de département et de district, chargées de l'exécution ae l'article, repousse toutes les appréhensions. Quant à la fainéantise, elle ne se suppose pas dans un corps qui a toujours fait preuve de zèle et de dévouement.
consulte l'Assemblée qui adopte le procès-verbal sans changement.
M. Martineau, rapporteur du comité ecclé-siastique. Dans la séance d'hier, vous avez adopté l'article 5 du titre IV du projet de décret sur la constitution civile du clergé, sous ia condition d'une nouvelle rédaction. Pour déférer aux ordres de l'Assemblée, et pour rendre plus intelligibles les dispositions que renferme l'article décrété, votre comité a été obligé de le diviser en trois articles dont je vais vous donner lecture.
« Art. 5. Les évêques, les curés et les vicaires
« Art. 6. Les évêques, les curés et vicaires pourront, comme citoyens actifs, assister aux assemblées primaires et électorales, y être nommés électeurs, députés aux législatures, élus membres du conseil générai de la commune, et du conseil des administrations des districts et des départements ; mais leurs fonctions sont déclarées incompatibles avec celles de maire et autres officiers municipaux, et des membres des direcloires de district et de département ; et s'ils étaient nommés, ils seraient tenus de faire leur option.
« Art. 7. L'incompatibilité mentionnée dans l'article 6 n'aura effet que pour l'avenir; et si aucuns évêques, curés ou vicaires ont été appelés, par le vœu de leurs concitoyens, aux offices de maire et autres officiers municipaux, ou d'administrateurs de district et de département, ils pourront continuer d'en exercer les fonctions. ».
met aux voix les trois articles destinés à remplacer l'article 5. Ils sont décrétés.
fait hommage au nom de M. Chariot, citoyen de Paris, d'un buste de Jean-Jacques Rousseau et d'un exemplaire du contrat social.
L'Assemblée accepte cet hommage et arrête crue la lettre écrite par M. Chariot à M. Barrère de Vieuzac sera insérée dans son procès-verbal. Elle est ainsi conçue :
Paris, le
« Monsieur,
« J'ai applaudi, comme tous les amis de la liberté, à l'hommage rendu au milieu de l'Assemblée nationale à Franklin et à Washington, par l'offrande de leurs bustes, faite par un artiste célèbre. Je porterai mon hommage aux augustes représentants de la nation, eh leur offrant le buste du citoyen de Genève, si vous voulez bien le faire agréer à l'Assemblée nationale. Je dépose à côté du buste de Rousseau un ouvrage dont elle applique tous les jours les principes au bonheur de la France et bientôt du genre humain : c'est en présence des auteurs de la Constitution que le contrat social doit être posé sur l'autel de la patrie.
« J'ai l'honneur d'être avec un très profond respect,
« Monsieur, « Votre très humble et très obéissant « serviteur.
« Signé : Chariot, huissier, commissaire-« priseur. »
, rapporteur du comité de constitution, présente deux décrets qui sont adoptés sans réclamation en ces termes ;
premier décret.
« L'Assemblée nationale confirme la délibération du corps électoral de Maine-et-Loire, et décrète que la ville d'Angers demeurera définitivement le siège de son administration. »
deuxième décret.
« L'Assemblée nationale confirme la délibération du corps électoral du département de la Haute-Marne, et décrète que la ville de Chau-mont demeurera définitivement le siège de son administration. ?
, député de Gom-minges et Nêbouzan, demande, par une lettre adressée à M. le Président, un congé pour cause de maladie attestée par deux certificats de médecins.
Le congé est accordé.
, curé de Souppes. Je demande que tous tes députés absents soient privés de leurs appointements.
, laboureur breton. Je suis de quatre-vingts lieues ; si je m'en vais, je demande de n'être pas payé et il doit en être de même pour tous les autres députés. Il est indigne de payer des hommes qui vont dans les provinces quand ils devraient être ici.
Je demande que les absents reçoivent leur traitement puisqu'ils ne sont partis que sur l'autorisation de l'Assemblée, sauf a statuer pour l'avenir.
Je demande l'ordre du jour sur la proposition.
(Apres deux épreuves, l'Assemblée décide qu'il y a lieu à délibérer.)
Je demande le renvoi au comité chargé du règlement de police de l'Assemblée.
, laboureur. Les provinces n'attendent pas que nous allions nous promener. On va se promener pour cabaler contre la Constitution; voyez si nous voulons les payer pour ce beau service. (Applaudissements prolongés).
J'insiste pour que la proposition qui vous est faite n'ait aucun effet rétroactif, si elle est adoptée.
met aux voix la question principale qui est décrétée en ces termes :
« L'Assemblée nationale a décrété et décrète que tous ses membres qui, jusqu'à ce jour, se 6ont absentés, et qui, à l'avenir, feront des absences, sont et seront privés de leur indemnité, et cela, pendant tout le temps de leur absence. »
annonce qu'il vient de recevoir une lettre du corps représentatif du comté Venaissin, à laquelle est jointe une adresse pour l'Assemblée nationale.
On demande la lecture des pièces (1).
« Monsieur le Président,
« L'Assemblée représentative du comté Venaissin a désiré de rendre un hommage immédiat à l'Assemblée nationale de France; elle a voté en conséquence, dans une de ses séances, l'adresse que l'ai l'honneur de vous faire parvenir, et qu'elle vous prie de vouloir bien lui présenter.
« A l'instant même où elle s'occupait d'exprimer son respect et sa reconnaissance pour votre auguste Assemblée et qu'elle s'abandonnait à la joie de penser que son tribut serait favorablement accueilli, une douleur amère et venue tout à coup l'arracher à ces sentiments délicieux. La ville d'Avignon est livrée en ce moment à toutes les horreurs des divisions. Les nouvelles qui se succèdent sont toutes alarmantes et les dernières nous assurent que le peuple s'est malheureusement porté à des exécutions sanglantes. Cette ville n est point représentée ici, puisqu'elle forme seule un état séparé du vôtre ; mais elle vous est unie par tous les autres liens, et l'Assemblée va s'occuper des moyens d'interposer sa médiation, pour y rétablir le calme.
c Je suis, Monsieur le Président, votre très humble, etc.
« de Gérende, président. »
Plusieurs membres demandent l'ordre du jour, et que l'adresse ne soit pas lue.
Vous avez ordonné la lecture; maintenant vous ne pouvez pas revenir, car cette pièce est un écrit de souverain à souverain.
L'adresse est lue. Elle est ainsi conçue :
A l'Assemblée nationale.
« Messieurs,
« C'est par l'organe de ses députés librement élus, et constitués depuis peu de jours en Assemblée représentative, que le comté Venaissin vient porter à l'auguste Assemblée nationale de France ce tribut unanime.
« Nous remplissons, Messieurs, un des vœux les plus ardents de nos commettants, en nous empressant de vous féliciter du succès glorieux de vos travaux, et de vous exprimer d'une manière solennelle le respect profond et la vive reconnaissance d'un peuple que son heureuse position fait participer à la prospérité d'un empire que vous avez régénéré. Entourés de la France, liés aux Français par des rapports intimes et journaliers, parlant la même langue, ayant les mêmes mœurs, les mêmes opinions, ne faisant, pour ainsi dire, qu'un même peuple avec eux, il est nécessaire que nous soyons gouvernés par les mêmes lois.
« Cette nécessité, qui existera toujours pour un peuple que sa position rend essentiellement dépendant d'un autre, a toujours été sentie par notre administration. Elle avait déjà réclamé des réformes, sollicitées par le besoin sans cesse renaissant de cette conformité, et dans des temps même où les souverains pontifes nous comblaient de bienfaits, nous avions mêlé des plaintes aux bénédictions que notre reconnaissance leur prodiguait.
« Mais ces changements pouvaient-ils opérer notre bonheur, dans un temps où il n'existait encore aucune limite fixe entre les pouvoirs cons-
titutifs de la monarchie française? où son code ne présentait qu'un assemblage confus de lois incohérentes ou barbares, et son régime qu'une masse informe d'abus et de préjugés? En adoptant les lois françaises, notre constitution n'eût donc fait que changer de vices.
« Il vous était réservé, Messieurs, d'instruire les nations et de propager une lumière qui, en dissipant les ténèbres dont elles étaient enveloppées depuis tant de siècles, réintégrât l'homme dans ses premiers droits. Il vous était réservé de renverser tous les vieux monuments de l'ignorance et de la corruption et d'élever sur les ruines un édifice sublime, appuyé sur les bases immuables de la raison et ae la nature. Il appartenait, enfin, à un prince vertueux et éclairé, à Louis XVI, le roi et le père des Français, à celui que vous avez, à si juste titre, proclamé le restaurateur de la liberté, de sentir toute la gloire de commander à une nation libre, de concourir avec les représentants de son peuple à la destruction de toutes les causes des maux politiques, à rétablissement d'un nouvel ordre de choses, à la fondation d'un nouvel Empire.
« Nous avons vu ce grand ouvrage s'avancer avec une majesté qui nous a frappés d'admiration. L'instinct généreux de la liberté s'est rallumé dans nos cœurs et nous avons tourné vers ce bien inestimable tous nos vœux, toutes nos espérances : jaloux de nous unir plus étroitement encore à une nation qui venait de rejeter loin d'elle le joug oppressif des abus et de rentrer dans toute la plénitude de ses droits. Ge désir brûlant a engendré en nous le noble courage de l'imiter et de devenir plus particulièrement ses frères, en nous appropriant ses nouvelles lois.
« G'est d'après ces motifs que nous venons d'adopter la Constitution française et tous les décrets de l'Assemblée nationale de France, compatibles avec notre localité et avec le respect dû au souverain.
« Oui, Messieurs, l'adoption des lois françaises, d'où va dépendre une partie de notre bonheur, ne saurait néanmoins porter la moindre atteinte au respect et à la fidélité inviolable que nous conserverons jusqu'au dernier soupir à notre bienfaisant monarque. Attachés à son gouvernement par des liens que nos cœurs rendront toujours indissolubles, rien ne saurait altérer nos sentiments pour sa personne sacrée : ils reposent sur des bases inébranlables, notre consentement libre, la modération et la générosité de nos princes, et l'amour qui est le juste prix d'un si grand bienfait. Rien né saurait nous délier du serment que nous avons si souvent répété, de vouloir vivre et mourir sous son empire. Serment que nous venons de renouveler d'une manière encore plus authentique, puisqu'il est émané du vœu unanime de nos commettants, exprimé dans nos mandats ; serment, enfin, que nous venons de lui offrir, comme ies prémices de nos travaux/comme l'élément nécessaire de notre bonheur. Qu'il soit connu de l'univers entier, ce serment auguste! Puisse-t-il dissiper à jamais les nuages que de perfides calomniateurs ont tâché de répandre sur cette fidélité pure, qui ne saurait être obscurcie, que les orages de ces derniers temps n'ont fait que raffermir de plus en plus et qui (s'il est permis de juger de nos descendants par nous-mêmes), ne finira qu'avec les empires.
« Qu'il est consolant pour nous, qu'il est glorieux pour vous, Messieurs, de songer qu'en invoquant les principes éternels de la vérité et de
la justice, nous ne répétons que vob propres principes, nous n'invoquons que vos propres décrets 1 Nous ne cherchons point à dissimuler et nous vous l'avouons avec cette loyauté franche que vous inspirez : il est vrai que les premiers bruits qui se sont répandus parmi nous des prétentions formées sur le comté Venaissin, et mises sous vos yeux par des membres distingués de votre auguste Assemblée, ont pu effrayer un peuple naturellement idolâtre de ses princes, et jaloux surtout, en cela, de vous ressembler ; mais s'il a pu se livrer un instant à des soupçons injustes, ils ont été bientôt dissipés; s'il a pu concevoir des défiances injurieuses, il a été pleinement rassuré en lisant dans vos décrets sur la Corse le principe et l'appui de sa sûreté.
« Quelle crainte pourrait désormais inspirer une nation puissante, à la vérité, mais qui vient de déclarer solennellement qu'elle renonce à toute espèce de conquête et qu'elle n'emploiera jamais ses forces contre la liberté d'aucun peuple? Ah plutôt ! quelle confiance sans réserve et sans borne ne doit -elle pas attendre, nous ne dirons pas d'un peuple qu'elle protège et qu'elle vivifie dans son sein, mais de tous les habitants de l'univers, de tous les vrais amis du bonheur et de la liberté des hommes ?
« Il serait difficile, Messieurs, de vous exprimer l'enthousiasme et les transports de joie, d'admiration et de reconnaissance qu'a excités dans notre province la lecture de ce décret, capable d'éterniser seul vos travaux et fait pour mériter l'hommage de tous les peuples de la terre. Recevez-le, cet hommage, Messieurs : c'est la récompense seule digne de vous, digne de vos noms immortels; mais distinguez surtout, dans ce concert sublime de louanges et de bénédictions, la voix du peuple qui doit vous être plus particulièrement cher, puisqu'il a trouvé place au milieu de vous et que son sort doit toujours dépendre du vôtre-, d'un peuple qui, quoique paisible et agricole, n'a pas laissé perdre l'heureuse semence ae la liberté que votre exemple a jetée dans son cœur; d'un peuple qui n'a jamais oublié la noblesse de son origine et qui s'est montré l'ami de cette révolution mémorable qui va fix.er à jamais les brillantes destinées de la France; d'un peuple enfin que votre nation généreuse et ses augustes monarques n'ont pas dédaigné de s'associer en quelque sorte, en lui accordant le titre de regnicole. Ge titre, Messieurs, fut de tous . temps celui de sa gloire ; c'est presque le titre de Français et vous venez de le lui rendre encore plus cher en l'illustrant.
« Plus forts de la justice des principes qui vous dirigent que de la légitimité de ses droits, qui reposent sur la foi des traités les plus solennels, il compte sur la conservation de ce titre précieux ; il compte aussi sur les suites de cette protection, dont il a reçu dans tous les temps les marques les plus signalées.
« Vous pouvez, Messieurs, lui faire ressentir dès aujourd'hui les effets salutaires de cette protection, en détruisant les entraves qui gênent nos liaisons commerciales avec les Français et qui nous appauvrissent en énervant notre industrie. G'est un bienfait vraiment digne de votre nation et qui couronnera tous les autres : daignez, Messieurs, nous le confirmer par un traité qui nous en assure la garantie et qui conserve tous les droits respectifs. Nous venons de multiplier le rapport qui déjà nous unissaient à vous. Achevez, Messieurs, votre ouvrage ; qu'il n'existe pas plus de différence entre nos territoires qu'il
n'en existera dorénavant entre nos mœurs et nos lois.
« Ah ! qu'il nous soit permis de nous livrer un instant à la joie que produit en nous une aussi douce espérance et d'anticiper ainsi sur les biens qu'offre à nos regards cette perspective délicieuse. Oui, tous les vœux seront accomplis; vous avancerez avec un courage majestueux dans la grande carrière que vos génies vous ont ouverte. La plus grande partie de l'espace est déjà parcourue. Quels obstacles pourraient désormais être opposés à votre marche ? Votre constance les a tous dissipés. Non, vous ne tromperez point l'attente des peuples amis de la liberté, qui depuis longtemps n'ont les yeux fixés que sur vous; ils sont impatients de pouvoir vous offrir la palme qui vous est due, un amour aussi grand que vos bienfaits et aussi durable que vos travaux. »
De gérende, président.
Raphel, Martinet, secrétaires.
, curé d'Evaux. Quand cette adresse aura été légitimée par le consentement du pape, nous pourrons nous occuper de sa demande.
Les habitants sont maîtres de reconnaître pour souverain qui ils voudront. Je demande que leur adresse soit envoyée au roi comme celle d'Avignon.
Je demande le renvoi de l'adresse au comité de Constitution.
J'appuie le renvoi aux comités de Constitution et des domaines, et je demande que ces deux comités soient autorisés à s'informer du ministre des affaires étrangères s'il n'existe point un accord entre la cour de Rome et celle de France.
J'appuie cette proposition d'autant plus volontiers que, lorsque je me suis retiré à Saint-Cloud pour porter au roi l'adresse d'Avignon, la première question que m'ont faite les ministres a été de s'informer s'il y avait quelque chose de relatif au comtat Venaissin.
Il est important que MM. Bouche et Camus déposent les lettres qu ils ont annoncé avoir reçues de ce pays, afin que l'Assemblée nationale et le roi examinent cette correspondance.
(L'Assemblée décrète que l'adresse sera présentée au roi et remise aux comités des domaines et de Constitution, qui seront autorisés à prendre tous les éclaircissements qu'ils jugeront nécessaires.)
L'Assemblée passe à son ordre du jour qui est la discussion du rapport du comité ecclésiastique sur le traitement du clergé actuel (1).
, rapporteur. Jevousdemande la permission, avant toute discussion, de résumer brièvement le
rapport qui vous a été présenté par votre comité. Le travail que nous mettons aujourd'hui
sous
Tous les bruits parvenus à votre comité nous annoncent que les plus fortes attaques auront pour objet le maximum des évêques. On vous proposera de rejeter cette fixation comme trop modique; on combattra pour eux avec chaleur, tandis qu'une foule d'ecclésiastiques, auxquels il ne nous a pas été permis d'accorder un traitement suffisant, ne trouveront pas de défenseurs. 30,000 livres pour un célibataire, dont les fonctions sont incompatibles avec le luxe, nous ont cependant paru suffisantes pour un évêque. On vous parlera de leurs dettes, qui exigent nécessairement de l'indulgence, des dépenses auxquelles ils étaient nécessités. Les curés sont aussi obligés à des dépenses plus considérables que celles des évêques, en proportion de leurs revenus. Ils sont toujours à côté du pauvre et du malheureux ; ils sont obligés de rendre mille soins qui Ue peuvent atteindre le faste de l'épiscopat. Qu'on mette à part l'intérêt personnel, et je suis persuadé qu'il ne se trouvera pas d'homme impartial qui n'avoue que l'ordre de choses que nous proposons esl'beaucoup plus juste et plus capable de faire respecter les ministres de la religion. Le comité a fait imprimer un rapport qui vous a été distribué, dans lequel il a développé toutes les bases de son plan. Il est inutile, je crois, de vous les rappeler ; je vais vous lire les articles du projet de décret.
« Art. Ie*. A compter du 1er janvier 1790, le traitement des archevêques et évêques en fonction est fixé ainsi qu'il suit, savoir :
« Les archevêques et évêques, dont tous les revenus n'excèdent pas 15,000 livres, n'éprouveront aucune réduction.
« Ceux dont les revenus excèdent cette somme auront 15,000 livres, plus la moitié de l'excédent,
sans que le tout puisse aller au delà de 30,000 1. et par exception l'archevêque de Paris aura 75,000 livres. Lesdits archevêques et évêques continueront à jouir dans leurs villes épiscopales des bâtiments à leur usage et des jardins y attenant.»
J'ai donné mon assentiment au décret qui déclare que les biens ecclésiastiques appartiennent à la nation. J'ai encore voté, comme la majorité de l'Assemblée nationale, pour que le maniement des fonds soit ôté aux titulaires, parce que je n'ai rien vu dans tout cela qui fût contraire à la justice ; mais j'ai toujours pensé que les titulaires avaient droit de conserver la portion de leurs revenus qui n'était pas évidemment destinée à un autre emploi. D'après cela, je n'ai pas cru que vous puissiez suivre les mêmes bases pour le clergé actuel que pour le clergé futur. Les titulaires ont des droits à la jouissance de leurs biens, mais ces droits leur imposent des obligations. Si la nation veut s'en charger, elle a le droit de prélever les sommes nécessaires pour les remplir. J'admettrai sans discussion les bases du comité, et je ne contesterai point ses calculs, mais je demanderai d'après quels principes il a cru devoir fixer le maximum ?
Je ne parlerai pas pour les évêques seulement, je parle pour tous les titulaires, pour tous ceux qui avaient des jouissances viagères. Si vous dites è un titulaire qui a 45,000 livres : la portion à déduire sur cette somme est de 15,000 livres, vous serez réduit à 30,000 livres, il n'y a pas d'injustice à cela. Mais comment dire à celui qui a 1D0,000 livres, qu'on lui en prend 70,000 livres, et comment accorder cette déduction disproportionnée avec les principes de justice? S'il fallait ajouter des considérations, je dirais que les titulaires actuels Ont des dettes auxquelles ils ont été nécessités. Les jeunes ecclésiastiques, par exemple, ont fait les dépenses de leurs bulles et ont été obligés à des sacrifices pour subvenir à la non-jouissance de la première année de leur nomination; et pour vous donner des exemples d'un autre genre, je vous dirai que M. l'archevêque de Paris a emprunté 60,000 livres l'année dernière pour le soulagement des pauvres. M. l'évêque d'Auch a emprunté une somme assez considérable pour le même objet.
Je demande s'il a eu tort, si ceux qui lui ont prêté ont eu tort de le faire. Voudriez-vous que ceux qui ont éprouvé ces actes de charité éprouvassent une banqueroute? Mais on me dira qu'ils ont eu tort de prêter ; qu'ils savaient bien qu'on n'a plus de recours sur un ecclésiastique après sa mort. Eh bien! que répondriez-vous aux créanciers qui vous diraient : Nous avons voulu courir des dangers ; nous avons calculé les probabilités, mais nous savions que le traitement des ecclésiastiques leur était assuré pendant leur vie. Je cherche ce qu'on pourrait alléguer en faveur du maximum fixé par le comité. « Déjà les dépenses sont très considérables ; la nation ne peut en faire davantage. » Il faut être économe, mais la justice avant tout. Je demande donc que le minimum soit adopté, et que les titulaires actuels jouissent de la moitié de leurs revenus au-dessus de ce minimum.
Je vais d'abord vous présenter mon projet de décret qui tiendra lieu de préambule. « L'Assemblée nationale décrète que le tiers du revenu sera donné aux évêques qui ont plus de 15,000 livres, aux curés qui auront plus de 3,000 livres, lesquels conserveront leur traite-
ment, sauf à prendre les quatre ou même les cinq sixièmes aux titulaires qui auraient plus de 50,000 écus de rente. > Je vais actuellement vous développer les motifs de ce décret. Faire une autre réduction que celle que je propose, ce serait ou rendre un jugement ou donner un effet rétroactif à la loi, et l'Assemblée n'a ni l'un ni l'autre de ces pouvoirs. En déduisant le tiers, j'ai parlé le langage d'une justice rigoureuse. Les lois sont des conventions que les contractants peuvent détruire, mais les actes de la vie privée, faits sur la foi des lois existantes, auxquelles ils sont conformes, sont sacrés. Sans cela la législature dirait : non seulement je ne veux pas que telle chose subsiste, mais je veux qu'elle n'ait pas existé. Il est évident qu'ainsi toutes les législatures seraient à la merci de la dernière. Les anciennes lois consacrent la validité des bénéfices et des revenus ecclésiastiques : c'est sur cette foi que nombre d'ecclésiastiques, par une fausse vocation, je le confesse, ont embrassé leur état, ont passé une partie de leiir jeunesse à des études longues et pénibles, qui ne peuvent leur servir à remplir aucune fonction sociale. A tous ces motifs ne peut-on pas encore ajouter cette séparation éternelle de cette moitié de l'espèce humaine....? (Plusieurs membres se mettent à rire.)
Je sais quelles épigrammes depuis longtemps émoussées on peut aiguiser sur cette matière; mais à la tribune il faut parler le langage des législateurs. On ne peut donner un effet rétroactif à la loi ; nulle puissance n'a pu, ou du moins n'a encore voulu les relever du voeu du célibat : vous ne pouvez pas détruire tous les avantages qu'ils ont trouvés en compensation. Ne dèvrait-on pas un dédommagement au jeune ecclésiastique qui ne fait qu'entrer dans les ordres, au vieillard pour qui toute réduction serait un coup mortel? Vous avez cru que la vieillesse était sacrée jusque dans ses habitudes et cette infirmité morale qui se joint à toutes ies espèces de décrépitude. Le projet du comité est une injustice envers les créanciers des prélats, une injustice envers les prélats Charitables et une cruauté pour lës vieillards qui ne peuvent changer leurs habitudes. Je demande donc que ce projet soit rejeté.
(1). Je répondrai en peu de mots aux motifs allégués par les préopinants, pour assurer aux évêques un traitement plus considérable que celui qui est proposé par le comité. Le résultat du projet du comité donne aux évêques à peu près 30,000 livres de revenus, et on trouver ce traitement insuffisant. Voilà la question.
On a commencé par prétendre que vous n'aviez point le droit de toucher à la jouissance des titulaires ecclésiastiques, que vos décrets ne pouvaient avoir, contre eux, un effet rétroactif.
A-t-on donc oublié que les ecclésiastiques ne peuvent être considérés que comme des
fonctionnaires publics, salariés par la nation ? que vous les avez toujours considérés comme
tels, et qu'il est impossible de contester à la nation le droit de régler dans tous les
temps, ces salaires? que vous n'avez vous-mêmes rien fait autre chose, jusqu'ici, qu'exercer
ce droit, soit en supprimant une foule d'offices publics, soit en réduisant les salaires de
ceux qui les remplissent ? Gomment cette objection
On a iavoqué, en faveur des évêques, la munificence, la générosité d'une grande nation.
Quelle est donc la générosité qui convient à une nationgrande ou petite et à ses représentants? Elle doit embrasser, sans doute, l'universalité des citoyens ; elle doit avoir surtout pour objet la classe la plus nombreuse et la plus infortunée ; elle ne consiste pas à s'attendrir exclusivement sur le sort de quelques individus condamnés à recevoir un traitement de 30,000livres de rentes: pour moi, je la réclame au nom de la justice et de la raison, pour la multitude innombrable de nos concitoyens dépouillés par tant d'abus ; pour les pères de famille qui ne peuvent nourrir les nombreux citoyens qu'ils ont donnés à la patrie; pour la foule des ecclésiastiques pauvres qui ont vieilli dans les travaux d'un ministère actif et n'en ont recueilli que les infirmités et la misère, dont les touchantes réclamations retentissent tous les jours à vos oreilles. Vous avez à choisir entre eux et les évêques. Soyez généreux comme des législateurs, comme les représentants du peuple et non comme des hommes froids et frivoles qui ne savent accorder leur intérêt qu'aux prétendues pertes de ceux qui mesurent leurs droits sur leurs anciennes usurpations, sur leurs besoins factices et dévorants et qui refusent leurcompas-sion aux véritables misères de l'humanité.
On vous a parlé des dettes des ecclésiastiques comme du principal motif qui devait exciter la générosité qu'on vous recommande. Je pourrais répondre d'abord que les dettes contractées par des évêques ne peuvent rien changer aux principes qui dirigent, dans la main du législateur, la dispensation des biens nationaux. Ces principes sont le plus grand but de la nation et surtout l'intérêt de la portion de la société la plus maltraitée par les abus et par la monstrueuse disproportion des fortunes. Mais, pour réfuter cette objection plus en détail, j'ajoute que je ne puis consentir à supposer que la pluralité des évêques aient oublié la modestie et les vertus qui convenaient à leur caractère, au point de contracter des dettes énormes avec un revenu supérieur aux besoins les plus étendus. Si quelques-uns ont fourni une pareille preuve du danger des richesses, ce ne sera plus une raison à vos yeux de leur prodiguer les trésors de la nation et la subsistance des malheureux. J'ajoute encore que 30,000 livres et l'économie peuvent suffire aux payement des dettes. Je conclus pour le plan du comité ecclésiastique.
Je ne me dissimule point la défaveur qui attend un orateur qu'un intérêt personnel attache à la cause qu'il soutient, et que ce même intérêt décrédite auprès des hommes qu'il cherche à persuader ; mais je n'écouterai pas une crainte qui paraîtrait confondre des législateurs avec des hommes ordinaires. Je ne cache point mon intérêt privé derrière un intérêt public ; mais un intérêt public se lie lui-même à mon intérêt privé ; mais un intérêt privé, s'il vous paraît légitime, doit prendre à vos yeux le
caractère d'un intérêt public. Je suis un de ces titulaires ecclésiastiques dont vous avez déclaré le bien à la disposition de la nation. S'ils lui sont vraiment nécessaires, il ne me restera qu'un regret, celui d'en avoir joui trop longtemps, Permettez que je vous parle non en qualité de membre du clergé, mais dans une qualité dont je suis bien plus digue, dans celle de citoyen. Sous ce point de vue seulement, je vous offre nos droits, nos offres et nos motifs. L'Assemblée jugera si ces droits sont réels, si ces offres sont raisonnables, si ces motifs sont plausibles ; et, quel que soit son décret, il sera ma dernière pensée. J'ose interroger ici tous les citoyens de toutes les cités : quelle est la raison de la possession ? C'est le droit. Quel est le signe du droit ? C'est le titre. Quel est le garant du titre ? C'est la loi. Je puis donc l'invoquer, cette loi, comme à tous, celte divinité conservatrice de toutes les propriétés. C'est elle qui veut qu'elles soient ce qu'elles sont ; c'est elle qui veille au repos du monde, et qui donne à chacun la sécurité, pour prix du respect qu'elle exige de tous; enfin, c'est elle qui vous a gardés chacun, et qui doit me garder comme mère, ou vous abandonner comme moi. L'intérêt de l'Etat, vous a-t-on dit souvent, est la suprême loi ; quel est le vrai sens de cette maxime ? Elle signifie que toutes les fois qu'on peut hésiter, l'intérêt de l'Etat doit décider ; elle ordonne à tous les citoyens de mépriser leurs intérêts, mais non pas la justice. Les arguments, si victorieusement employés contre les réguliers, ne peuvent avoir le même succès contre les titulaires. Le clergé régulier, une fois dissous, vous montre des hommes sans titres et des biens sans possesseurs. Le clergé séculier, au contraire, dissous comme l'autre, réduit comme l'autre à ses éléments indivisibles, vous montre des biens possédés et des citoyens qui les possèdent. Mon projet n'est point de rejeter indistinctement tous les plans qui ont pu vous être soumis pour la réduction des traitements des titulaires, mais plutôt de choisir parmi ces plans, et d'en extraire un qui, sans être moins utile pour l'Etat, soit moins cruel pour les particuliers ; car j'aime à penser que ces deux conditions ne seront jamais incompatibles.
J'adopterai donc, à certains égards et avec certaines modifications, le mode d'indemnité qui vous a été indiqué par votre comité ; mais l'Assemblée approuvera-t-eile ce terme fixe, ce maximum auquel une fois parvenu, on tranche toutes les difficultés en supprimant tous les calculs. Adoptera-t-elle cette manière capricieuse de trancher dans le vif, qui fait penser au lit sanglant sur lequel Procuste étendait et mutilait ses victimes ? Consentira-t-elle à un arrêt qui déclare que celui de nous qui était riche hier sera demain banqueroutier ? Enfin ne craindra-t-elle point que ce retour subit et forcé du clergé actuel à l'état de la primitive Eglise ne rappelle moins les vertus que cette primitive Eglise a montrées, que la persécution qu'elle a essuyée ? Ecoutez plutôt avec bienveillance d'autres conseils, plus d'accord avec vos principes de justice. Commencez par fixer sur tous les bénéfices considérables une somme déterminée et un principal honnête à l'entretien du bénéficier ; au delà de cette somme, établissez unesurimposition, qui laisse au bénéficier le moyen de subvenir aux dépenses de l'exploitation, annoncez en même temps aux bénéficiera qui se retireront une indemnité à peu près égale au tiers du bénéfice réduit; laissez-nous une ombre de liberté que le despotisme lui-même hésiterait à refuser, l'option dans une alternative
nécessaire; alors nous n'aurons été traités ni en coupables, ni en esclaves, ni en ennemis, et nous ne serons point bannis sans pitié de cette portion de terre dont la nation nous avait garanti la jouissance jusqu'à la fin de nos jours. Pourquoi la nation ne nous prendrait-elle pas pour des fermiers, dont le bail se terminerait avec la vie ? Hélas 1 de tous les baux, un bail à vie est souvent le plus court I...
Tout dépenddu mouvement que vous imprimerez à la vaste machine ; écartez donc tous les obstacles, adoucissez tous les frottements ; faites plus encore, et changez les résistances même en forces motrices. On ne manquera pas d'élever des difficoU tés au sujet de tantde remboursements à faire à la même époque. Mais rien ne vous empêche de les effectuer sur-le-champ en assignats, que vous multiplierez sans danger pour un si utile objet; par ce moyen vous laisserez à beaucoup d'hommes, justement alarmés pour leur honneur, la possibilité de remplir des engagements peut-être sacrés ; vous leur épargnerez des inquiétudes toujours renaissantes sur l'instabilité des choses humaines dont ils sont un si frappant exemple. Mais nos droits, fussent-ils, s'il est possible, plus évidents qu'ils ne le sont, bous rougirions encore d'avoir compté, d'avoir négocié, j'ai presque dit marchandé avec la patrie, pour des jouissances personnelles, qui sans doute importent moins à beaucoup d'entre nous que la prospérité publique. Vous le savez, nos concitoyens, partageant notre sécurité, avaient mis aussi leur confiance dans ces titres incontestables sur lesquels nos droits sont fondés. Quand la nation voudrait nous blâmer de nos dettes, pourrait-elle en punir nos créanciers ? Je ne parle pas ici pour les créanciers du clergé, que vous avez placés sous la sauvegarde de la loyauté française; je parle pour nos créanciers particuliers, pour les miens, par exemple; ne leur suffirait-il pas d'évaluer les chances ae la vie? devaient-ils calculer les chances de la loi ? Pourquoi avez-votts des dettes? nous diront nos accusateurs.
Vous exposerai-je des dépenses d'amélioration, de réparations, de reconstructions d'églises et de bâtiments ruraux? Non, je vous intéresserai davantage en tournant vos regards versdes fondations utiles, vers des maisons d'instruction gratuite, vers des hospices secourables, ouverts à la vieillesse, aux infirmités ou au repentir, vers des hôpitaux enrichis des dons et souvent d'emprunts inconsidérés peut-être; mais la charilé croit toujours placer à un plus haut intérêt qu'elle n'emprunte. Mais les dettes doivent-elles donc être saintes pour être sacrées? Nous n'en devons compte qu'à nos créanciers, et la nation leur doit compte de nos biens. On l'a dit dans cette tribune : l'honneur est plus cher au Français que la vie; et vous nous condamneriez à le perdre ! Essayera-t-on de nous consoler par l'infâme privilège de ne pas payer nos dettes. Je jure ici que nous n'en voulons point; notre dernier meuble, notre dernier écu est à nos créanciers... Il existe encore pour les hommes d'église d'autres créanciers véritablement privilégiés ; ce sont les pauvres. Gardons-nous de dessécher les anciens canaux, jusqu'à ce que les nouveaux aient été creusés, et que leur lit affermi ne laisse aucun doute sur leur utilité. Songez qu'on risque, en frappant sur un riche, de frapper sur un pauvre. Le luxe des prélats, contre lequel on a tant déclamé, n'est inutile qu'à ceux qui en jouissent ; il est nécessaire à ceux qui le servent. Si la vanité s'est cachée souvent sous des dehors ver-
tueux, croyez que la vertu s'est quelquefois cachée sous ie dehors du faste. Pourquoi ne pas suivre un bon conseil, celui d'un sage dont la maxime était : Rien de trop. Pourquoi ne pas suivre un bon exemple, celui de la nature, qui change tout, qui perfectionne tout sans jamais rien détruire?Eh quoi! la patrie ne serait-elle pas satisfaite d'un sacrifice dont nulle histoire n'offre d'exemple ? Et repoussera-t-elle des citoyens qui offrent plus a leurs concitoyens que des vainqueurs n'oseraient exiger ? Voici le projet de décret que j'ai l'honneur de vous proposer : Art. Ier. Il sera libre aux titulaires des biens ecclésiastiques de conserver ou de remettre les biens de leurs bénéfices, dans le cas et suivant les conditions qui sont énoncées dans la suite du présent décret.
II. Un titulaire de plusieurs bénéfices ne pourra conserver que la gestion d'un seul bénéfice à son choix, sous la seule dénomination de fermier des biens nationaux, et pour les autres bénéfices il recevra l'indemnité qui sera fixée proportionnellement à leur valeûf.
III. Les biens conservés par les anciens titulaires seront chargés : 1° de toutes les impositions civiles ; 2e d'Une imposition extraordinaire appelée cens national, et proportionnée à la valeur reconnue desdits biens, lorsqu'ils excéderont le revenu de 1,500 liv.
Ceux de 1,500 liv. jusqu'à 3,000 liv. paieront un vingtième ;
Ceux de 3,000 liv. jusqu'à 6,000 liv., deux vingtièmes;
Ceux depuis 6,000 jusqu'à 12,000 liv., trois vingtièmes ;
Ceux depuis 12,000 jusqu'à 24,000 liv., quatre vingtièmes ;
Ceux depuis 24,000 jusqu'à 50,000 liv. cinq vingtièmes;
Ceux depuis 50,000 liv. indéfiniment, six vingtièmes.
IV. Un titulaire qui abandonnera un bénéfice dont le produit net n'excédera pas 1,500 liv., toutes impositions civiles acquittées, recevra pour indemnité une rente viagère équivalente au produit dudit bénéfice.
V. Les titulaires dont le revenu net excédera 1,500 liv. recevront : 1° 1,500 liv.; 2° la,moitié du reste de leur revenu.
VI. Les évêques actuellement en fonction payeront une redevance extraordinaire égale au cinquième du revenu de leur siège; et quant à leurs autres bénéfices, ils seront assimilés aux autres bénéficiers.
VII. Lesévéques supprimés recevront la moitié du revenu de leurs évêchés.
VIII. Les évêques qui se retireront volontairement conserveront le tiers du revenu actuel de leur évêché.
IX. Les curés dont le revenu ne s'élèvera point à 1,200 liv., recevront annuellement le complément de cette somme.
X. Les curés dont le revenu net excédera 1,500 liv. seront assujettis à la contribution extraordinaire, telle qu'elle est réglée pour les titulaires qui conserveront la gestion de leurs bénéfices.
XI. Il sera compté à chaque titulaire indemnisé le capital de la rente a laquelle il pourra prétendre, et ce capital sera délivré en assignats, sauf à en ordonner à cet effet une nouvelle fabrication.
XII. L'a proportion de ce capital à la rente sera fixée d'après l'âge du titulaire indemnisé, dans
l'ordre ci-après. Il sera compté aux titulaires au-dessous de quarante-cinq ans la somme totale de douze payements réunis de leurs indemnités annuelles ;
A ceux depuis quarante-cinq ans jusqu'à soixante, onze payements ;
A ceux depuis soixante jusqu'à soixante-quinze, dix payements ;
A ceux depuis soixante-quinze indéfiniment, neuf payements.
XIII. Pour faciliter aux titulaires indemnisés l'emploi de leurs capitaux, il sera ouvert un emprunt public, où ils pourront placer lesdits capitaux entiers ou eu partie en rente viagère sur la nation, au même taux qu'ils les auront reçus proportionnellement à leur âge.
XIV. Il sera libre aussi aux mêmes titulaires de retirer sur-le-champ telle partie de leurs bénéfices qui leur conviendra, et dans ces traités ils obtiendront une remise d'un tiers sur le prix de l'estimation de la maison bénéficiai avec ses dépendances, et d'un vingtième sur ie prix de la totalité du reste de l'acqJfcition, à charge néanmoins de reverser le montant de cette remise dans les coffres publics, au ©as où l'acquisition serait revendue dans l'espace de cinq ans.
XV. Ces différentes dispositions auront leur effet à dater du 1er juillet 1790.
Le comité a pris des mesures pour accorder un traitement honorable aux ministres nécessaires du culte. Après avoir calculé la masse des biens avec les charges qui y sont attachées, on verra qu'il n'a pu faire plus. Trente-cinq mille curés, vingt mille vicaires, deux cent-huit maisons d'éducation, sept cent vingt-six abbés, quatre-vingt-trois évêques, les pensions des religieux et religieuses, etc., voilà ce qui absorbe tous les revenus. Ici vous demanderez pourquoi nous avons proposé des traitements aussi considérables avec des fonds qui l'étaient si peu? Le comité a fait plusieurs observations : 1° il y a une très grande quantité de biens-fonds qui n'entrent pas dans la masse productive des revenus ; 2° des bois très considérables. Ces deux objets sont assez forts pour fournir aux assignats et aux dettes du clergé ; 3° les dîmes ne sont remplacées que pour 5 millions, et elles coûtaient davantage au peuple ; 4° le clergé avait un ca-suel dont le peuple est soulagé -, 5° la nation fera de grands bénéfices sur les extinctions peu éloignées. 11 est possible que les revenus des biens ecclésiastiques ne soient pas suffisants. Les augmentations sur les portions congrues, les traitements des vicaires, les pensions des religieuses forment une somme de 30,400,000 liv. Voilà la raisou qui nous a obligés à diminuer de beaucoup les traitements des ecclésiastiques, de ceux surtout qui ont de gros revenus. La nation a promis le nécessaire à ceux qui travaillent ; nous nous proposons de donner du superflu à ceux qui ne font rien.
(On demande que la discussion soit fermée.)
(de Nemours). Le préopinant n'a opposé à des motifs de raison et de justice que des calculs. Le comité lui-même est convenu qu'il serait digne de'vous d'être justes et généreux. On n'a regardé les ecclésiastiques que comme purement salariés; ils l'étaient en ce sens qu'ils remplissaient des fonctions publiques; c'étaient des propriétaires. Ceux qui n'avaient pas de fonc- I tiens étaient également propriétaires. Cette pro- I
priété est usufruitière; mais elle n'est pas moins sacrée que si elle était héréditaire. Vous devez prendre sur cet usufruit la masse des impositions, l'entretien des cultes, celui des pauvres, celui des édifices; vous n'avez pas le droit de prendre davantage. Rien ne vous appartient sur les bénéfices qui ne suffisent qu'à l'entretien des titulaires; vous ne devez donc pas diminuer le sort des curés. M. Treilhard a dit que le comité craignait de manquer de finances : quand cela serait, cela ne devrait pas vous arrêter; une augmentation de dépense annuelle, pendant quelques années seulement, qui vous donnerait un capital de 2 milliards, serait une très bonne opération. Vous n'êtes pas dans le danger par lequel on vient de chercher à émouvoir votre humanité, votre justice et votre bienfaisance. Le comité a dit qu'il n'avait pas de renseignements certains : en effet, son guide a été un livre intitulé : la France ecclésiastique, dont l'autorité, comme on l'a déjà dit dans cette tribune, peut équivaloir à celle de YAlmanach de Liège. Le comité n'a serré la mesure que dans la crainte d'un déficit ; mais il ne serait pas très considérable. L'échelle pourrait être mieux graduée et présenter la diminution du maximum à mesure qu'on s'élèverait à la somme des besoins du propriétaire. Les ecclésiastiques qui ont employé leur argent et celui de leur famille à payer des bulles, à former leurs établissements, sont dans un âge très avancé. Si on prend une moyenne proportionnelle de traitement qui soit de 6,000 livres, la somme totale sera de 2,600,000 livres ; si cette moyenne proportionnelle est de 10,000 livres, ce qu'on ne peut supposer, le total sera de 4,000,000. Je demande à votre dignité nationale si, quand vous rentrez dans 2 milliards de capitaux qui vont vous élever à une grande prospérité, 4 millions de livres de rentes viagères sur des têtes très âgées doivent arrêter les représentants d'une nation telle que la nôtre? Je finis en vous invitant à demander à M. Thouret les proportions qu'il a calculées.
Je demande, avant de profiter 4e l'usage de la parole qui m'est accordée, à entendre le plan de M. Thouret.
(M. Thouret ne se trouve pas dans l'Assemblée.)
On a dit presque tout ce que je voulais dire. J'avais d'abord à remarquer que le rapport du comité manquait de calculs. M. Treilhard a présenté tous ceux qu'on pouvait désirer; mais je ne puis être arrêté par des calculs. Une nation ne doit consulter que la justice; et je tiens une nation comme détruite, quand elle a cessé d'être juste. Lorsqu'on vous a proposé de réduire les traitements du clergé futur, on a fait une proposition très sage et très raisonnable : Quand l'honneur d'être utile à la patrie sera apprécié, il faudra attacher un bien petit salaire au devoir et à l'honneur de la servir. Ce n'est pas sur cette base que nous pouvons travailler en ce moment. Je ne vous propose pas d'être généreux; il n'est pas permis à une nation qui a 5 milliards de dettes et qui supporte 500 millions d'impôts de se livrer aux mouvements de la générosité ; elle ne peut qu'être juste; mais vous seriez indignes de représenter le peuple français, si vous décrétiez une injustice en son nom. Le premier principe de justice est qu'une loi ne peut avoir un effet rétroactif : c'est à l'abri de la loi que le3 titulaires ont traité avec l'Etat; ils ont fait pour ainsi dire un contrat synallag-
matique. Je m'attends à tous les murmures, aux sarcasmes, aux risées par lesquels on a déjà a& cueilli UDe considération importante; ils ont renoncé aux plus douces affections de la nature; ils ont renoncé à prononcer le nom d'époux et de père... {Il s'élève des murmures.)
Si je suis interrompu quand je profère cette grande vérité, je suis certain qu'au milieu d'une Assemblée législative ce n'est pas l'immoralité qui m'interrompt. Ils avaient aussi renoncé, je le sais, à posséder des richesses. La loi qui leur a permis n'en posséder était vicieuse; mais elle existait. Le vice de la loi ne peut être reproché à l'homme; l'homme ne peut être victime de la loi. Le titulaire à qui la loi avait permis de posséder plusieurs bénéfices considérables avait deux copropriétaires : le pauvre, celui dont la propriété a toujours été la plus sacrée pour vous, et le service des fabriques, ainsi que les autres dépenses du culte. Il est juste de séparer les propriétés indivises et de faire .la part de chacun. C'est en suivant ce principe d'équité que je crois permis de diviser les propriétés des titulaires en trois parts. La troisième est absolument à eux. Il attaque ensuite deux objections. On a dit que, s'il était permis d'envahir la moitié d'une propriété, il était permis également de s'emparer de la totalité. Il y a une très grande différence entre dépouiller un propriétaire ou faire le partage entre lui et ses copropriétaires. Une autre objection plus forte a occupé les amis du bien : ils sont révoltés d'avoir vu des hommes accumuler des richesses et en faire souvent un emploi peu estimable; ils croient remplir un devoir étroit en détruisant ce scandale. Ce scandale subsistera encore, lorsque vous aurez diminué des deux tiers le revenu des titulaires.
Il est énorme cet inconvénient, je l'avoue, et je n'y connais pas de remède ; la loi a un bandeau, pour exprimer qu'elle ne voit qu'en masse le bien qu'elle fait; elle ne s'occupe que de l'intérêt général; elle ne considère pas les maux particuliers etles inconvénients qui tiennent à 1a nature des choses humaines. De même, quand vous avez eu à réformer d'énormes abus, à réintégrer l'homme dans ses droits véritables, vous avez oublié les infortunes et les disgrâces particulières; vous avez frappé sur les individus, vous avez réduit des familles à la plus affreuse
misère, vous l'avez fait avec justice.......Et vous
craindriez de laisser quelques richesses sur la tête d'un petit nombre de vieillards? Non, vous ne croirez pas cesser d'être justes en fermant les yeux sur quelques faveurs exagérées. Je me réfère à l'opinion de M. Rœderer, en me réservant de revenir à celle de M. Thouret, si elle est plus conforme à mes principes.
parait à la tribune.
Il est d'usage d'entendre un orateur pour et un orateur contre le plan du comité ; je demande si M. Thouret parle pour.
Je vais faire une proposition qui n'a pas encore été faite.
(L'Assemblée est consultée et décide que M.Thou-ret sera entendu.)
Je vais exposer sommairement pourquoi je n'adopte pas les deux opinions qui ont été présentées. Il était juste de développer avec énergie les principes, lorsqu'il s'agissait de la corporation qu'on appelait clergé, et de ses
droits politiques et civils; alors, et quand il a fallu appliquer ces principes, j'ai joint tous mes efforts aux vôtres. Maintenant que ces intérêts sont à l'abri et que cette importante partie est assurée, nous n'avons plus à frapper sur des êtres abstraits et insensibles, tels que des corps moraux, mais il s'agit d'individus.
Hommes que nous sommes tous, l'humanité réclame non seulement un droit étroit à raison du nécessaire, mais des condescendances à raison des faiblesses communes, des habitudes, des jouissances. C'est ici que chacun de nous doit se dire : « Homo sum, et nihil humanum a me alie-num puto. » Il se présente d'autres considérations : Les hommes sur lesquels vous avez à prononcer sont des titulaires, et ce titre rappelle qu'ils ont dû compter sur l'existence de leurs bénéficès et sur la jouissance de leurs revenus. Quand la nation, rentrant dans ses droits, a détruit les bénéfices, si nous frappions sans réserve, nous porterions trop loin la rigueur. Je ; citerai un adage très philosophique : « Summum jus, summa injuria. » C'est ici que l'équité doit prévaloir sur la justice. Le comité propose une réduction telle, qu'aucun titulaire n'aurait pas plus de 30,000 livres. Gette réduction n'est ni raisonnable , ni conforme aux principes mêmes du comité.
Dans ces principes, il faudrait que le décrois-sement du revenu fût dans une progression relative aux jouissances. Je propose, dans cette vue, un tableau progressif suivant :
POUR LES ÉVÊQUES.
Chaque évêque aura 15,000 livres pour taux commun.
La moitié de ce qu'il a au-dessus de 15,000 livres, jusqu'à ce qu'il ait atteint un traitement de 30,000 livres, ce qui suppose 45,000 livres de revenu actuel.
Le tiers de ce qu'il a au-dessus de 45,000 livres, jusqu'à ce qu'il ait 45,000 livres de traitement, ce qui suppose un revenu de 90,000 livres.
Le quart de ce ju'il a au-dessus de 90,000 livres, jusqu'à ce qu'il ait un traitement de 60,000 livres, ce qui suppose 150,000 livres de revenu.
Le cinquième de ce qu'il possède au-dessus de 150,000 livres, jusqu'à ce qu'il ait atteint un traitement de 75,000 livres, ce qui suppose un revenu de 225,000 livres.
Le sixième de ce qu'il possède au-dessus de 225,000 livres, jusqu à ce qu'il ait atteint un traitement de 90,000 livres, ce qui suppose un revenu de 315,000 livres.
Le septième de ce qu'il possède au-dessus de 315,000livres, jusqu'à ce qu'il ait atteint un trai-ment de 105,000 livres, ce qui suppose un revenu actuel de 420,000 livres.
Le huitième de ce qu'il possède au-dessus de 420,000 livres, jusqu'à ce qu'il ait atteint un traitement de 120,000 livres, ce qui suppose un revenu actuel de 540,000 livres.
Le neuvième de ce qu'il possède au-dessus de 540,000 livres, jusqu'à ce qu'il ait atteint un traitement de 135,000 livres, ce qui suppose un revenu actuel de 675,000 livres.
Le dixième de ce qu'il possède au delà de 675,000 livres, jusqu'à ce qu'il ait atteint un
traitement de 150,000 livres, ce qui suppose un revenu de 825^000 livres (1).
Chaque titulaire de bénéfice simple aura 1,0001. pour taux commun.
La moitié de ce qu'ils ont de plus, jusqu'à ce que le traitement soit de 6,000 livres, ce qui suppose 11,000 livres de revenu.
Le tiers de ce qu'ils possèdent au-dessus, jusqu'à ce qu'ils aient atteint 12,000 livres de traitement, ce qui suppose 29,000 livres de revenu.
Le quart de ce qu'ils possèdent au-dessus de 29,000 livres, jusqu'à ce qu'ils aient atteint 18,000 livres de traitement, ce qui suppose 23,000 livres de revenu.
Le cinquième de ce qu'ils possèdent au-dessus de 53,000 livres, jusqu'à ce qu'ils aient atteint 24,000 livres de traitement, ce qui suppose 83,000 livres de revenu.
Le sixième de ce qu'ils possèdent au-dessus de 83,000 livres, jusqu'à ce qu'ils aient atteint un traitement de 30,000 livres, ce qui suppose un revenu de 119,000 livres.
Le septième de ce qu'ils possèdent au-dessus de 119,000 livres, jusqu'à ce qu'ils aient atteint un traitement de 47,000 livres, ce qui suppose un revenu de 161,000 livres.
Le huitième de ce qu'ils possèdent au-dessus de 161,000 livres, jusqu'à ce que le traitement soit de 42,000 livres, ce qui suppose un revenu de 209,000 livres.
Le neuvième de ce qu'ils possèdent au-dessus de 209,000 livres, jusqu'à ce que le traitement soit de 48,000 livres, ce qui suppose un revenu de 263,000 livres.
Le dixième de ce qu'ils possèdent au-dessus de 263,000 livres, jusqu à ce que le traitement soit de 54,000 livres, ce qui suppose un revenu de 323,000 livres.
Le onzième de ce qu'ils possèdent au-dessUs de 223,000 livres, jusqu'à ce que le traitement soit de 60,000 livres, ce qui suppose 389,000 livres de revenu (1).
J'ajoute une condition qui fait essentiellement partie de ma proposition ; elle a pour objet d'écarter l'erreur dans l'évaluation de revenus. Cette évaluation serait fixée sur les déclarations données par les bénéficiers, de manière que personne ne pourrait se plaindre ; chacun deviendrait son propre juge, et serait traité selon ses œuvres. Quant à ceux qui n'auraient point fait de déclaration, quoiqu'on pût ne leur rien accorder, ils seraient traités selon le taux des moindres bénéfices.
renvoie à demain la suite de la discussion.
La séance est levée à trois heures.
Séance du
La séance est ouverte à six heures du soir.
, secrétaire, lit les extraits des adresses suivantes : Adresse du tiers état du pays de Liège, dans laquelle on lit :
« La nation qui a donné à l'Europe entière un si grand exemple de courage, de justice et de patriotisme ; qui a révélé aux peuples le secret de leur puissance et la science de leurs droits imprescriptibles, verra sans doute avec intérêt la situation où nous nous trouvons. Les Liégeois réclamaient depuis huit mois contre la puissance la plus injuste ; ils viennent de briser leurs chaînes, et sans doute ce spectacle est digne des Français. Nous ne craignons pas de vous distraire de vos grands travaux en vous suppliant d'arrêter un moment vos regards sur l'histoire de notre révolution. L'exposé dont nous avons l'honneur de vous adresser l'hommage montrera la légitimité de notre cause; il montrera toute l'injustice de l'évêque, que ni l'exemple de Louis XVI, ni la connaissance des lois sages que vous venez de rendre, n'ont pu retenir dans les bornes d'un pouvoir équitable... Un de vos derniers décrets a excité toute notre admiration. Les Français vont jouir d'une liberté soumise aux lois qu'ils ont créées, et désormais ils ne feront plus de conquêtes que par leurs lumières et par leur exemple. »
Adresse de renouvellement d'adhésion et dévouement de la garde nationale de la ville de Montauban : elle rend compte de sa conduite depuis le 10 mai dernier.
Adresse des receveurs des décimes de la province de Languedoc, qui adhèrent avec respect aux décrets qui opèrent leur suppression. Us supplient l'Assemblée de prendre leur sort en considération.
Adresse de félicitation, remerciement et adhésion des citoyens de Cernay-lès-Reims.
Adresse de la municipalité de Saint-Quentin : elle annonce que sa contribution patriotique s'élève à la somme de 265,340 livres.
Adresses des citoyens actifs du lieu de Gemenos, département des Bouches-du-Rhône; de Chap-de-Beaufort, département du Puy-de-Dôme, et des manufacturiers de la ville de Reims.
Adresse de la garde nationale de la ville de Bergues, qui a fait bénir ses drapeaux et prêté le serment civique.
Adresse de la communauté de Le Canet, près Le Luc en Provence, qui exprime son indignation contre la délibération des citoyens catholiques de Nîmes, et la déclaration d'une partie de l'Assemblée.
Adresse de la communauté de Portets, près Bordeaux, et de celle de Saint-Forjeux, département de Rhône-et-Loire. Cette dernière dénonce comme dangereuse la protestation de M. Ber-gasse contre les assignats.
Adresse des curés et vicaires du canton et de
Adresses des gardes nationales de Jusainville, district de Pont-à-Mousson, et de la communauté d'Arconsat, district de Thiers.
Adresse de la municipalité de l'Isle-Jourdain, en Poitou, et d'un sixième district de Poitiers, qui accède à l'adresse des cinq autres de la même ville à l'Assemblée nationale.
Adresses de la société des amis de la Constitution, formée dans la ville de Saint-Etienne, en Forez, et de l'Assemblée patriotique du district de Cambrai, au département du Nord.
Adresse des gardes nationales du département d'Eure-et-Loir, fédérées sous les murs de Chartres, le 9 de ce mois.
Adresses des gardes nationales du district de Challans et des villes de Nantes, Machecoul et les Sables-d'Olonne, fédérées à Challans, le 13 février dernier.
Adresse des gardes nationales du Haut-Embru-nois, réunies dans la plaine appartenant à Saint-Crépin et Eygliers, le 6 du présent mois.
Adresses des municipalités de la ville de Ber-gues, qui se soumet d'acquérir pour un million de biens nationaux ; de la ville de Saint-Claude, au département du Jura, qui fait une soumission de 400,000 liv. ; de la ville de Taras-con, qui fait une soumission de deux millions ; de la ville de Caen, qui fait une soumission de dix millions; enfin, de la ville de Bouchain, au département du Nord, qui fait une soumission de cinq millions.
Adresse de la municipalité de la ville de Chau-mont, chef-lieu du département de la Haute-Marne : elle annonce qu'elle a célébré le 17 juin la constitution de l'Assemblée en Assemblée nationale, par une fête patriotique à laquelle ont assisté tous les citoyens et les volontaires de la garde nationale ; elle félicite en même temps M. l'abbé Sieyès sur son élévation à la dignité de président, à une époque aussi glorieuse.
Adresse des volontaires de la garde nationale de Bapaume, contenant le procès-verbal de fédération faite entre eux, les troupes de ligne de leur garnison et leurs cantons.
Adresses de la garde nationale de Perrieux et de la commune de la ville d'Ambert, qui fait une soumission de 500,000 liv. pour l'acquisition des biens nationaux situés dans l'étendue de son district, et improuve formellement la lettre circulaire et l'opinion des citoyens catholiques de Nîmes. Elle annonce qu'elle s'est incorporée dans la société patriotique formée par la garde nationale, sous le titre des vrais amis de la Constitution.
Adresses des municipalités de la ville de Tours, en Vimeu, du bourg de Sainte-Colombe-lès-Vienne, de Mezirieu, département de Rhône-et-Loire, de Chambœuf et de Vichel, canton de Neuilly-Saint-Front : elles font le don patriotique du produit des impositions sur les ci-devant privilégiés.
Aucun des habitants de la commune de Vichel n'a d'autre propriété que sa chaumière et un petit jardin.
Adresses des assemblées primaires des cantons de Cajare, département du Lot; de la ville.de Miradoux; de Cahuzac, district de Lauzun ; de la ville de Dol et de la ville d'Arles.
L'assemblée primaire du canton de la Yille de
Dol dénonce la protestation de son évêque et de son chapitre contre ies décrets de l'Assemblée, et demande que cette ville soit' le siège d'un tribunal de district.
Celle de la ville d'Arles a arrêté « de recom-« mander à la commisération publique et à la « surveillance éclairée des bons Français les « esprits égarés ou même les cœurs avilis, qui « préfèrent sincèrement le faux au vrai, les pri-« vilèges à l'égalité, la servitude à la liberté, l'usage au droit, l'abus au principe, et le vieux « combat de ces mille autorités, toutes usurpées, « toutes indéfinies, toutes oppressives, à cette « Constitution si désirée, premier fruit de l'unique « et véritable pouvoir. » Elle offre d'acquérir des biens nationaux pour la somme de 1,800,000 1.
Adresses de l'assemblée électorale du district de Montluçon, des administrateurs du district de Vesoul, de celui de Saint-Aignan et de celui de Dijon.
Adresses des assemblées électorales du département du Finistère, du département des Deux-Sèvres, du département du Calvados, à laquelle est jointe l'adhésion des régiments infanterie d'Aunis et Lorraine; des administrateurs du département de la Côte-d'Or et de celui de la Loire-Inférieure.
Toutes ces assemblées consacrent les premiers moments de leur existence à présenter à l'Assemblée nationale l'hommage d'une adhésion absolue à tous ses décrets, et d'un dévouement sans bornes pour leur exécution; la plupart désapprouvent expressément la déclaration d'une partie de l'Assemblée, et la conjurent de ne pas se séparer avant d'avoir achevé ie grand ouvrage de la Constitution, qu'elle a si glorieusement commencé.
Adresse des feuillants, des récollets et des carmes établis à Tulle, contenant l'hommage de leur respect, et l'adhésion la plus parfaite aux décrets de l'Assemblée nationale; ils demandent qu'elle pourvoie au plus tôt à leur sort.
Délibération de la ville de Saint-Brienne, portant soumission d'acheter tous les biens nationaux qui se trouvent dans son arrondissement.
Adresse du département des Vosges.
Adresse des corps municipaux et des gardes nationales de dix-buit paroisses de campagne, département de la Vendée, rassemblés le 30 mai 1790, au lieu de Fougeray, près Saint-Fulgent.
Un membre a lu une adresse de la garde nationale de Narbonne, qui excite les applaudissements de l'Assemblée.
fait part d'une adresse du commerce du département d'Ille-et-Vilaine, dont l'objet est de raire connaître l'utilité générale des canaux de navigation intérieurs, entrepris pour joindre la Mayenne et la Rance à la Vilaine et établir une navigation toujours sûre et commode, depuis Angers et au-dessus, à Saint-Malo, par Laval, Vitré, Rennes et Dinan, et de Rennes à l'Océan par Redon.
Il demande que cette adresse soit renvoyée au comité d'agriculture et de commerce, pour qu'il en rende compte à l'Assemblée, et que la continuation des travaux soit ordonnée.
On propose par amendement le renvoi de cette adresse au comité des finances : cet amendement est discuté; la question préalable est demandée et mise aux voix. Il est décrété qu'il n'y a pas lieu à délibérer.
On met ensuite aux voix la motion principale, et l'Assemblée la décrète.
, curé d'Evaux. Messieurs, la cure de Chatelus, située dans le département de la Creuse, étant devenue vacante et le collecteur ecclésiastique de ce bénéfice ne résidant pas sur les lieux, les paroissiens se sont crus autorisés à élire leur curé.
J'ai encore à vous entretenir d'une seconde affaire. Depuis la formation des gardes nationales dans la ville d'Evaux, plusieurs jeunes gens ont fait une compagnie particulière; ils ont nommé des officiers, et, malgré la sommation qu'on leur fait de se conformer au règlement du 19 mars, arrêté par la ville entière, pour l'organisation de la garde nationale, ils persistent. Je demande que, pour arrêter les troubles qui menacent la ville d'Evaux, l'Assemblée nationale décrète que tous les citoyens se conformeront à la délibération prise le 19 mars dernier, et enjoigne à la municipalité de mettre tout en usage pour en maintenir l'éxécution.
Il y a un décret général rendu sur cette matière ; je propose qu'on l'envoie à la municipalité d'Evaux, pour être exécuté dans tout son entier.
Plusieurs membres réclament l'ordre du jour.
Cette proposition est adoptée.
Plusieurs députations sont admises et entendues à la barre.
Des députés de la municipalité et de la garde nationale d'Issy présentent à l'Assemblée l'expression de leur patriotisme et de leur attachement à ses principes.
répond :
« Messieurs, la commune d'Issy habile aux portes de la capitale. Dans le beau jour de la Révolution française, c'est sur vous qu'a lui le premier rayon de la liberté, et vos cœurs se sont facilement échauffés de ce feu divin.
« L'Assemblée nationale voit avec intérêt les sentiments de patriotisme exprimés dans votre adresse.
Elle vous permet d'assister à sa séance. »
Les administrateurs du département de VAisne lisent Vadresse suivante dont l'insertion au procès-verbal est ordonnée :
« Messieurs, depuis que le peuple Français, par un assentiment général, a remis à cette convention nationale l'exercice de la souveraineté, les devoirs les plus sacrés et les plus pénibles vous ont été imposés. Vos lumières et votre patriotisme se sont soutenus à la hauteur de votre caractère; votre génie s'est montré supérieur à celui des législateurs de tous les siècles. Cette Révolution, semblable à celles qui ont agité tous les peuples fatigués de la tyrannie, étonne et frappe d'admiration celui qui pense qu'elle s'est opérée tout à coup chez une nation composée de vingt-quatre millions d'hommes. Dans l'histoire, les grands Etats ne sont connus que par les conquêtes des princes, ou la domination de quelques villes qui offraient le contraste hideux de la liberté pour les uns, et de l'esclavage pour les autres. En France, dans l'espace d'une année, l'esprit public a réuni toutes les parties de ce vaste Empire; vous avez donné le signal et l'exemple t tous les Français vous ont suivis.
Il n'est plus temps, Messieurs, de dire que cette Révolution n'est célèbre que par des ruines : cette vaine clameur des ennemis de la Constitution n'a jamais inquiété l'homme sage, témoin de vos méditations sur les lois et les institutions qui nous convenaient : elle est maintenant étouffée par la voix d'un peuple entier qui vient d'organiser les corps'administratifs des départements.
« Les membres de l'assemblée administrative du département de l'Aisne ont cru devoir vous féliciter sur ce nouveau triomphe; ils viennent déposer dans ie temple de la patrie le tribut de reconnaissance dû à vos immenses travaux et à votre fermeté inébranlable.
« Après avoir voté des adresses aux représentants de la nation ; au roi dont les vertus civiques vous sont connues; aux communes du département de l'Aisne, pour ies inviter à goûter les bienfaits de 1a liberté et à déjouer les intrigues des antipatriotes, en renonçant à la violence pour y substituer des démarches paisibles et légales; enfin, aux corps administratifs de tous les départements du royaume, pour les inviter à une correspondance'habituelle qui conservera l'unité dans l'administration, et l'unité dans les sentiments; tous les membres de l'assemblée administrative, entraînés pour l'amour de la liberté, et croyant déjà toucher au jour heureux et à jamais mémorable, indiqué pour une fédération universelle, se sont écriés : Nous mourrons libres, nous mourrons fidèles à la nation; à la loi et au roi : nous le jurons 1
« Nous sommes avec un profond respect et avec une adhésion parfaite, Messieurs,
« Vos très humbles et très obéissants serviteurs,
Les administrateurs du département de l'Aisne. Signé : laurent, président; malin ; beffroy ; mo-r1c0urt ; bertrand ; de crouy ; rivoire, pHeur-
curé de Gandelus ; dejomalou ; richard ; de
visme-valery ; perin de touly; quinette; ance-
loT l'aîné; loysel; guilliot-,j. borel; binant; plomion; dufresne; prud'homme; fouquet; war-nier;DUpré; lelarge ; soyer; granaier; blin de la chaussée, procureur général syndic du-
creux ; colliette ; ancelot ; flamand; redrien-
court; vuiguer ; debatz, secrétaire.
répond :
« Messieurs, c'est principalement sur les vertus civiques et sur les lumières des assemblées de départements, que l'Assemblée nationale a fondé ses espérances de voir opérer le bonheur de la France.
« L'adresse qu'elle vient d'entendre lui annonce combien vous êtes pénétrés de l'esprit de ses décrets.
c Un amour invincible de la liberté, le respect de la loi, une affection fidèle pour un roi citoyen ; justice et modération envers tous: telles sont aujourd'hui les vertus, tels sont les devoirs du peuple français.
« L'Assemblée nationale agrée avec satisfaction votre hommage.
« Elle vous invite d'assister à sa séance. »
Les habitants de la partie de la banlieue de Paris, renfermée dans la ligne marquée par la nouvelle enceinte, offrent à l'Assemblée l'hommage de leur soumission à ses décrets, et notamment à celui du 6 de ce mois, auquel ils ont déclaré adhérer avec empressement, quoiqu'il leur
coûte les deux tiers du produit et de la valeur de leurs propriétés. Ils dénoncent à l'Assemblée un arrêt de la cour des aides du 18 de ce mois, et des visites faites dans leurs maisons en vertu de cet arrêt, contre la disposition du décret de l'Assemblée nationale. Ils renouvellent à la barre le serment patriotique.
répond :
Messieurs,lorsauel'Assemblée nationale s'occupe sans relâche du nonheur commun des Français, elle regrette toujours les sacrifices particuliers que semble exiger 1 intérêt général.
« Elle prendra en grande considération la réclamation que vous lui adressez : sa justice lui en fait un devoir ; son humanité lui fait désirer que votre demande soit juste.
« Elle applaudit, au surplus, à la soumission et au dévouement que vous lui exprimez, et elle vqus permet d'assister à sa séance. »
Les chapelains, clers et marguilliers de la Sainte-Chapelle présentent à l'Assemblée une adhésion contenant le témoignage de leurs sentiments, et une demande relative à leur traitement, qui est renvoyée au comité ecclésiastique.
répond :
Messieurs, l'établissement de la Sainte-Chapelle rappelle un souvenir intéressant, celui d'un roi également recommandable par sa piété et par son amour poUrson peuple.
« Il brisa les premiers anneaux dé la servitude de nos pères. •
« Louis XVI fut l'heureux restaurateur de la liberté française.
« L'Assemblée nationale prendra en considération l'objet de votre adresse.
« Elle vous permet d'assister à sa séance. »
Je demande qu'il y ait demain soir une séance extraordinaire pour l'affaire du commerce de l'Inde.
(Cette motion est décrétée.)
La paroisse de Loché, district de Preuilly, département d'Indre-et-Loire, fait l'abandon des impositions des ci-devant privilégiés, pour les six derniers mois 1789, montant à la somme de 953 livres 15 sols.
Le comité de Constitution demande à être entendu pour faire un rapport sur la nouvelle division des sections de la ville de Paris.
(L'Assemblée décide que le rapport sera fait.)
, rapporteur du comité' de Constitution (1). Messieurs, le règlement pour l'organisation de
la municipalité de Paris ordonne, article 6 du titre premier, que cette capitale sera, par
rapport à la municipalité, divisée en quarante-huit parties sous le nom de sections,
lesquelles seront égalisées, autant qu'il sera possible, relativement au nombre de citoyens
actifs. L'article 34 du titre IV de ce règlement autorise, en exécution de l'article
ci-dessus, les commissaires adjoints à votre comité de Constitution à tracer cette division
nouvelle, après avoir entendu les commissaires de la municipalité provisoire, et ceux des
soixante districts
Votre comité s'est occupé avec zèle de cette opération importante ; et, pour assurer son succès, il a consulté les commissaires de la commune, ainsi que ceux des soixante divisions anciennes, connues sous le nom de districts.
Une première base se présentait pour cette opération : c'était celle que la nature a formée et qui offre une grande division de la capitale de l'Empire français en trois parties : l'une méridionale, qui comprend trente-un mille sept cent quatre-vingt-douze citoyens actifs; la seconde, du nord-ouest, qui en renferme trente deux mille six cent quarante-sept; et enfin celle du nord-est, dans laquelle on en compte trente trois mille six cent quatre-vingt-douze; ce qui forme pour le total, en citoyens actifs, le nombre de quatre-vingt dix-sept mille six cent trente-un, répartis à peu près également dans ces trois grandes divisions.
Ce dénombrement de citoyens actifs qui a dû servir de base à la division en sections, n'est pas sans doute aussi complet qu'il le sera pour la seconde formation des assemblées de chaque section; les rôles des impositions n'ont pu donner des renseignements très exacts, tant parce que la date de ces rôles remonte à deux années, que parce que les parties extra muros, réunies à la ville par la circonscription actuelle, lui ont acquis une masse de citoyens dont il n'a pas été facile de se procurer l'énumération entière. D'ailleurs, l'état des contribuables est loin de la perfection que lui donnera le civisme des Parisiens, lorsque se propageant utilement dans toutes les classes, il fera ambitionner à tous les individus l'honneur de subvenir à la chose publique.
Les commissaires de la commune et ceux de ses districts, en adoptant provisoirement cette énumération, avaient d'abord proposé quinze sections dans la partie méridionale, seize dans la partie du nord-ouest, dix sept dans celle du nord-est.
Mais, par le résultat des opérations préparées dans cette Assemblée, et adoptées par votre comité, la partie méridionale a été divisée en quatorze sections, celle de la partie de nord-ouest en dix-huit, et celle du nord en seize, formant en tout les quarante-huit sections que vous avez décrétées. Cette combinaison,qui paraîtrait d'abord peu conforme au principe fondamental que vous avez indiqué pour leur formation, a réuni la très grande majorité des anciennes divisions; cinquante-deux districts l'ont admise : elle a donc pour premier avantage cet accord, pour ainsi dire général, que l'Assemblée nationale a désiré dans les opérations partielles de la division du royaume; elle maintient un très grand nombre d'anciennes sections qu'il eût été imprudent de rompre, pour établir une égalité numérique entre les citoyens actifs. Cette opération n'eût pu se faire qu'en nuisant à l'harmonie que vous désirez de voir régner dans la première effervescence des élections. Celle qui vous est proposée marie les sections trop faibles d'une manière avantageuse pour l'exécution de vos décrets, quant à la représentation et quant au maintien de la police : rapports importants que vos commissaires ont surtout considérés dans leur travail; ils ont cru ne devoir point morceler les anciennes divisions pour le frivole avantage d'atteindre à un
but de perfection dans le dessein du plan ou dans la répartition des citoyens actifs, qui, en paraissant très proportionnel à l'œil et à l'esprit, aurait bientôt mérité votre désapprobation par le mécontentement général qu'il eût produit.
Vos commissaires ont donc vu avec ce plaisir que donne l'amour de l'ordre, l'assentiment presque général de la commune et des districts à la division qu'ils ont adoptée; ils ont extrait tous les mémoires qui leur ont été présentés sur les détails de l'exécution ; et quelque minutieux que leur parussent la plus grande partie de ces détails, ils ont concilié toutes les difficultés qui leur ont paru mériter d'être pesées.
Mais il est des demandes, Messieurs, que votre comité croit devoir vous exposer : ce sont celles que forment les districts des Enfants-Rouges, des Blancs-Manteaux, de Saint-Severin, des Petits-Augustins, qu'il a fallu supprimer. Toutes ces élections vous supplient à peu près, parles mêmes moyens, de les préférer à celles que l'on con-servej et au moins elles proposent, pour conditions, d'être réunies à tel district plutôt qu'à tel autre.
Par exemple, la section des Enfants-Rouges demande d'être entièrement réunie à celle des pères de Nazareth, et de n'être pas répartie dans celles des capucins du Marais: mais cette réunion rendrait la section des pères de Nazareth trop considérable; et la disposition qui partage ce district entre les deux sections voisines, établit pour chacune une proportion aussi juste qu'il a été possible de la juger, sur les bases qui nous ont été soumises, et nous avons pensé que ce partage était nécessaire à l'une et à l'autre. Les moyens dans lesquels des citoyens du district des Enfants-Rouges mettent le plus de confiance et qu'ils tirent de la division actuelle de la milice nationale de Paris, quoique dignes d'éloges, parce qu'ils ont pour priucipe leur union et l'attachement si louable de la confraternité, n'ont pas pu déterminer vos commissaires à admettre une demande qui ne leur présentait pas des motifs supérieur à ceux qui ont déterminé la division.
La section des Blancs-Manteaux soutient qu'il est plus utile de la maintenir que celle de Saint-Jean-en-Grève, dont elle demande la suppression; elle emploie encore l'existence du Mont-de-Piété, près duquel il importe qu'il y ait toujours une vigilance active et particulière des officiers de police et des troupes qui puissent défendre cet établissement des effervescences populaires.
Il a paru à votre comité que l'on ne pouvait pas comparer les motifs d'utilité dont est l'objet la section de Saint-Jean-en-Grève, avec celle d'en former une dans l'emplacement des Blancs-Manteaux. Celui de la section de Saint-Jean-en-Grève exige une surveillance directe et continuelle, pour y maintenir l'ordre qu'y trouble trop souvent l'affluence du peuple et la grande population des rues qui en dépendent: elle est de seize mille âmes ; et cette partie est trop souvent le théâtre de toute espèce d'excès, pour eu partager le territoire avec les sections voisines déjà trop fortes. La partie des Blancs-Manteaux n'offre aucun de ces inconvénients; et c'est avec regret que vos commissaires n'ont pu accéder à une pétition qui contrarierait le bien général: quant au Mont-de-Piété, la section dans laquelle cet établissement se trouve, veillera sans difficulté sur toutes les entreprises que l'on pourrait craindre, s'il survenait des troubles populaires.
Le district de Saint-Severin ne pouvait être maintenu ; ses citoyens l'ont bien senti, puisqu'ils
se sont restreints à demander que leur section ne fût pas divisée, et que la cité n'en formât qu'une ; mais l'intérêt public s'oppose à ce que la cité ne fasse qu'une seule section, qui serait beaucoup plus forte, et qui réunirait, pour ainsi dire, le double de la population active des autres sections.
Les moyens qu'emploie celle des Petis-Augus-tins ont été discutés en présence des commissaires de ia commune et des districts ; ils ont exposé qu'il était convenable, et à l'administration et à la police, et enfin au meilleur ordre du plan général, que la partie méridionale perdit une section, pour être reportée à la partie septentrionale où le peuple abonde davantage, où il faut que les sections soient moins étendues et les moyens de surveillance plus multipliés. Votre comité a jugé ces motifs très sages et les a adoptés.
Un grand nombre de citoyens des sections nouvelles ont demandé à vos commissaires de nouvelles dénominations pour chacune d'elles :
1° Par la raison que plusieurs des noms actuellement en usage sont ceux des chefs-lieux où les citoyens se rassemblent, et que ces chefs-lieux sont hors du territoire de.ces sections;
2P Parce que ces dénominations dérivent!d'établissements dont le plus grand nombre ne subsis-> tera plus par l'exécution de vos décrets, et le nouvel ordre de choses qu'ils vont établir ;
3° Enfin, les districts réunis désireraient conserver leur nom, et ne point prendre ceux des sections auxquelles ils sont unis.
Votre comité, Messieurs, a tenté de donner aux quarante-huit sections que vous avez décrétées les noms propres des hommes célèbres qui ont honoré la capitale, afin de séparer, s'il est permis de parler ainsi, l'espèce d'oubli des lieux qu'ils ont habités, de ceux où reposent leurs cendres ; souvenirs précieux, qu'il faut rappeler aux générations dont ils ont tant mérité, afin qu'elles mêmes multiplient aussi les moyens d'honorer les citoyens utiles, et pour qu'elles substituent aux ridicules dénominations de nos rues, de nos places, dont beaucoup offrent des images obscènes, les noms des hommes qui auront bien mérité de la patrie (1).
Mais, Messieurs, les difficultés se sont accumulées, et forcés de renoncer à ce plan, vos commissaires se sont fixés aux dénominations tirées des places, des fontaines, des monuments publics bien connus, et deux ou trois fois seulement des grandes rues, là où il n'existait aucun objet plus remarquable.
Gomme les divisions que vous avez décrétées, Messieurs, existeront pour l'exercice de la police, vos commissaires ont pris toutes les précautions qui étaient en leur pouvoir, pour que rien ne gêne, quant aux points territoriaux, l'exécution des règlements que vous décréterez pour le maintien de l'ordre dans la capitale, et il a détaillé, avec toute l'attention possible, les limites des sections actuelles, pour que leur convocation n'éprouve aucune difficulté.
Nous croyons devoir terminer ce rapport par rendre compte à l'Assemblée des facilités que
Je demande que le projet de décret proposé par le comité de Constitution soit adopté immédiatement*
consulte l'Assemblée* et le décret est rendu, sans discussion, en ces termes : « L'Assemblée nationale, conformément à l'article 6 du titre premier du règlement général pour la municipalité de Paris, décrète la division ae cette ville en quarante-huit sections, telle qu'elle est tracée et énoncée dans le plan et le procès^verbal joints au présent décret; elle ordonne de déposer aux archives de l'Assemblée et au greffe de l'HôteUde^ Ville un exemplaire de ce plan et de ce procès^verbal, signé des commissaires adjoints du comité de Constitution.
« Le roi sera supplié de donner les ordres nécessaires pour que les opérations préalables aux .élections soient terminées au plus tard le 4 juillet, et que les élections commencent le lendemain. »
jLNota* Les lettres patentes du roi* du 27 juin 1790* sur le décret de l'Assemblée nationale* concernant la municipalité de Paris, ont été joints au procès-verbel du 22 juin* A notre tour, nous les insérons à la suite, de la séance de ce jour*)
, rapporteurk La Commune de Montmartre a formé deux municipalités distinctes, dont l'une se trouvé comprise dans l'enceinte des murs qui circonscrivent le territoire de la commune fie Paris* Le comité de Constitution vous propose de déclarer fjUe cette dernière doit cêâsef d'exister.
L'Assemblée doit décréter
1 que la Commune de Montmartre prendra part à la nouvelle dlvision.de la ville de PariB et qu'elle sera tehue de se conformer aux décrets fendus à cet égard.
Cette motion est adoptée en Ces termes t
« L'Assemblée nationale décrète que la municipalité formée par les citoyens delà commune de Montmartre, habitant la partie de terrain qui se trouve aujourd'hui du ressort de la municipa* lité de Paris, sera regardée comme non^-avënue, et que ces citoyens feront désormais partie de la commune de la capitale* >'
L'ordre du jôur et ensuite là discussion de l'afu faire de Barbentart&i
L'affaire de Bar* bentafie consiste en une arrestation de blés que l'on exportait à Avignon, malgré la défense faite d'envoyer des marchandises de cette espèce dans les pays étrangers. Je demande que le rapport de cette affaire soit ajourné.
(L'ajournement est prononcé.)
annonce que la commune de Ghaumont-en-Bassigny fait l'offre d'acheter pour 2,000*000 de biens nationaux.
Cette soumission est renvoyée au comité d'aliénation.
Je demande que le rapport de la dénonciation faite par les Officiers municipaux de Nogent-le-Rotrou contre les officiers de l'élection de la même ville, au sujet de l'inexécution des rôles des impositions directes, soit fait demain au commencement de la séance.
(Cette motion est adoptée.)
appelle ensuite plusieurs autres affaires qui sont à l'ordre du jour.
Les rapporteurs sont absents*
demande que régulièrement l'ordre de travail pour le lendemain Soit affiché la veille au matin et que le nom des rapporteurs soit inscrit à côté des affaires à rapporter*
Cette motion est adoptée*
fait uné autre motion qui est adoptée en ces termes :
« L'Assemblée nationale décrète JUe les affaires qui doivent être traitées aux séances du soir sui-1 vront l'ordre dans lequel elles seront inscrites dans le cahier du président* et qu'oh ne pourra changer leur ordre chronologique que par un décret de l'Assemblée* suivant l'exigence du cas* »
dit que le Sénéchal de RouergUe a rendu un jugement contre la municipalité dé Saint-Hippolyte pour le remplacement provisoire d'Un banc d'un habitant de Cette paroisse. Il demande que cette affaire soit renvoyée au comité des rapports.
Le renvoi est ordonne.
Les six cdrpâ des marchands de la ville de Paris présentent une pétition relative aux juridictions consulaires.
Cette pétition est renvoyée aux cdfllitéd de commerce et de Constitution.
lêvé la séaùce â neuf heures du soir.
DU
Ltttret patentes du roi, sur le décret de tAssemblée
nationale concernant la municipalité de Paris.
Du 27 juin 1790 Dui.iti etc*
Louis, par la grâce de Dieu et par la loi constitutionnelle de l'Etat, roi des Français* à tous présents et & venir, salut. L'Assemblée nationale a décrété, les 3» 6, 7* 10, 14, 15, 19 et 21 mai 1790, et nous voulons et ordonnons ce qui suit :
TIRE PRRMIER.
Àrt. Ie'. L'ancienne municipalité de là ville de Paris, et tous les offices qui en dépendaient; la municipalité provisoire, subsistant à l'Hôtel-dè-Ville, ou dans les sections dë la capitale, connues aujourd'hui sous le nom de districts, sont supprimées etabolies,et néanmoins la municipalité provisoire et les autres personnes en exercice éonunue-ront leurs fonctions jusqu'à leur remplaCemënti
Art: 2. Les finances des offices supprimés seront liquidées ei remboursées ; savoir : des deniers communs de, ia ville, s'il est justifié que ces npàncës aient été versées dans sa caisse; et par lë Trésor public,,s'il est justifié qu'elles aient été payées au roi.u
Art» 3. La Cdmmiine ou la municipalité de Paris sera renfermée dans l'enceinte des nouveaux murs : mais les boulevards que l'on construit en dehors de ces murs serorlt soumis à l'administration municipale.
Art. 4. Les décrets rendus par l'Assemblée nationale, le 14 décembre, et postérieurement, concernant les municipalités, seront exécutés dans ]a Ville de Paris, à l'exception des dispositions, auxquelles il aura été dérogé par les articles suivants ; et les articles de ces décrets contenant leb dispositions auxquelles il n'aura pas été dérogé seront rapportés à la fin du présent règlement et en feront partie»
Artï 5. La municipalité sertt compoâéè d'Un maire* dé seize àdmininiStràteurS, dont lëà fonctions seront déterminées au titré sëcotid 5 dé tfenté-dëui membres dû Consëil, de quatre-Vingt-seize notàbles, d'un procureur dé là commune de deux substituts, qui serohtsès adjOihtsj et éxerteroht ses fonctions à. son défaut.
Art. 6; Lft ville de Paris sera divisée^ar rapport à sa muhicipàlité, en quarante^huit parties, sous le tibm de séé fions, qu'Oh tâchera d'égaliser* autant qu'il sera possible, relativement au notnbre des Citoyens actifs. . Àrt. t. Ces quarante-huit sections he pourront êtrë regardées que Comme des sections de la commune.
Àrt. 8. Elles formeront autant d'a&semblées primaires, lorsqù il s'agira de choisir les électeurs qui devront concourir à la nomination des membres de l'administration du département de Paris, ou à là nomination des députés qde .ee département doit envoyer à l'Assembléè nationale.
Àrt. 9. Les citoyens actifs ne pourront se rassembler par métiers, professions ou corporations, ni se faire représenter ; ils se réuniront sans aucune distinction, et ne pourront donner leurs
voix que dans la section dont ils feront partie à l'époque des élections. .
Art. 10» Si une seGtion offre plus de 900 citoyens aciifs présents, èllè se formera ep dèux assemblées, qui nommeront chacune ieiirs officiers) mais qui, après avoir dépouUjét séparément le scrutin de l'une et dë l'autre division, se .réuni* ront par commissaires, pour n envoyer qu'un réJ sultaf à l'Efâtel-de-Vilie. ,
Art. 11. Les assemblées des quarante-huit sections seront indiquées pour le même jour et à la même heure. On ne s'y oécupera d auçune autre affaire que ^es élections et des prestations du serment civique. Gës assemblées se continueront aussi a là même heure, les jours suivants, sans interruption ; mais un scrutin commencé se terminera sans désemparer, j.
Art. 12. Les quarante-huit sections së conipr-: meront aux articles du décret, sur les pssemplées administratives, concërhànt les qualités neçesr saires pour pxercer les droits dë citoyen actif et pour être ëligibie.
Art. Les parents et alîiéâ au degré de père et de fils, de beau-père et de gendre, de frère et de beau-frère, d'oncle et de neveU* ne pourront en même temps être membres du corps muni* ci pal : s'ils ont été nommés dans le même scrutin, celui qui aura le plus grand nombre de Voix demeurera éiii ; et, jen cas d'égalité de voix, On préférera le pliijs âgé : s'ils n'put pas été élus dans le même scrutid, l'élection du dernier ne sera point comptée ; èt si celui-ci à été nommé au troisième tour de scrhtîn, il Sera remplacé par le .citoyen qui, dans ce même tour, avait le plus de. voix après lui.
Art. 14. L'éïèbtien des deux substituts du proa cureur de la oommune se fera àu scrutin j dans la forme qui sera déterminée au titre suivabt.
Art. l&i PoUr l'élection du maire et du procureur de la commune, chacune des qUarante-huit sections de l'assemblée générale des citoyens actifs fera parvenir à l'Hôtel-de-Viile le recensement de son scrutin particulier t ce recensement cou-tiëndra la mention dU nombre des votants dont l'assemblée aura été composée* et celle du ndtn-1 bre de suffrages qUe ehaqué candidat aura réunis en sa faveur ; le résultat de tous ces recensements sera formé à l'Hôtel-de-Viile.
Art. 16. Les scrutins des diverses sedtidns seront recensés à l'Hôtel-de-Ville le plus promptement qu'il sera possible ; en sorte que les scrutins Ultérieurs, s'ils se trouvent nécessaires, puissent commencer dès le lendemain.
Art.- 17. GHàCune des qUafànte-hdifc Sections enVerra à l'Hôlel-de«Ville un Commissàire pottr assister au rebënéettieht des divers scrutins.
Art: 18. La nothihation des qUàrahte-hUit mëdi' bres du corpâ thUUicipàl et des quatre-vingt-seiië notables se fera toujours au scrutin; mais la population dë Paris exigeant unë formé de scrutin particulière, cette forme sëra déterinitiéë dans lë titre suivant*
Art. 49. Aprêfc les éiëctiôhs. les Citôyëné aijtifs ne poUrrtîht hi fëster Ussemblè^ fil S asééthbl§r de nouveau ëtt Corps dè edminune, sahà unè codh vocàtiod ordonnée par lë corps mutiifilpâl, lequel ne poUrra là refuser dahs les câè 4U1 ^ëroht dë-termldês att titré IV. ' ' ,
Art. 20. Les quàtre-Vingt-âëizë hdtâblës formeront, avec le maire et les dUafanté-hUit rhëihbrës du corps municipal, le conèëii général de la commune, lequel éèra appelé pdUr les àfrairëS importantes, conformément à l'article 54 du dêCtet du
14 décembre, et de plus dans les cas que fixeront les articles suivants.
Art. 21. La municipalité de Paris aura un secrétaire-greffier, un trésorier et deux secrétaires-greffiers adjoints, un garde des archives et un bibliothécaire, qui prêteront serment de remplir fidèlement leurs fonctions. Le conseil général de la commune les nommera dans la forme qui sera déterminée au titre II, et chacun d'eux, après avoir été entendu, pourra être changé, lorsque le conseil général, convoqué à cet effet, l'aura jugé convenable, à la majorité des voix.
Art. 22. Le corps municipal sera divisé en conseil et en bureau : le titre suivant déterminera le nombre des départements du bureau, qui pourra varier lorsque les circonstances l'exigeront.
Art. 23. Le maire et les seize administrateurs composeront le bureau.
Art. 24. Les trente-deux autres membres composeront le conseil municipal.
Art. 25. Le conseil général de la commune élira, à la pluralité absolue des voix et au scrutin individuel, les seize administrateurs parmi les quarante-huit membres du corps municipal, non compris le maire ; l'élection se terminera au troisième tour de scrutin en cette occasion, ainsi que dans toutes autres.
Art. 26. L'assemblée pour les élections des seize administrateurs se tiendra le surlendemain de la proclamation du maire et des quarante-huit autres membres du corps municipal, et cette élection se fera dans l'ordre qui sera prescrit au titre III.
Art. 27. Le conseil municipal s'assemblera au moins une fois tous les quinze jours, et commencera par vérifier les comptes des divers départements du bureau, lorsqu il y aura lieu. Les membres du bureau auront voix délibérative avec ceux du ponseil, excepté lorsqu'il s'agira des comptes de l'un des départements.
Art. 28. Le corps municipal s'assemblera ex-traordinairement lorsque les circonstances l'exigeront, et que la convocation sera demandée, soit par le maire seul, soit par la majorité des administrateurs, soit par la moitié des membres du conseil; et, dans tous les cas, la convocation sera faite parle maire.
Art. 29. Outre le droit de convoquèr le corps municipal, le maire aura encore celui de convoquer le conseil général de la commune lorsqu'il le jugera nécessaire.
Art. 30. Le corps municipal nommera, parmi les membres du conseil, un vice-président qui n'aura d'autres fonctions que de tenir les assemblées du corps municipal ou du conseil général de la commune en l'absence du maire ; et, en cas d'absence du maire et du vice-président, le doyen d'âge des membres présents présidera les assemblées.
Art. 31. La présence des deux tiers au moins des membres du conseil sera nécessaire pour recevoir les comptes de la gestion du maire et des administrateurs, du maniement des deniers du trésorier; et la présence au moins de la moitié, plus un, des membres du corps municipal sera nécessaire pour prendre les autres délibérations. Mais si, dans un cas urgent, on ne pouvait rassembler la moitié, plus un, des membres du cops municipal, on y appellerait des notables, selon l'ordre de leur élection.
Art. 32. Les convocations du conseil général de la commune seront faites au nom du maire et du corps municipal. Art. 33. Les membres du conseil général de la
commune, réunis au nombre de quarante-huit au moins, pourront requérir la convocation de ce conseil, lorsqu'ils la croiront nécessaire, et le corps municipal ni le maire ne pourront s'y refuser.
Art. 34. Lors du renouvellement annuel, les officiers municipaux et les notables sortiront au nombre de soixante-douze, déduction faite de celui des morts ; de manière qu'on ait à remplacer la moitié des administrateurs, la moitié,des membres du conseil et la moitié des notables.
Art. 35. Les substituts du procureur de la commune resteront en place deux ans, et pourront être réélus , pour deux autres années. Ils ne pourront l'être dans les élections suivantes, pour les mêmes places , qu'après l'expiration de deux années.
Art. 36. Le procureur de la commune et ses substituts sortiront de place alternativement, le procureur une année, et les substituts une autre année.
Art. 37. L'année de la sortie du procureur de la commune ne sera pas la même que celle de la sortie du maire : à cet effet, si le procureur de la commune, nommé à la première élection, n'est pas réélu, il n'exercera que pendant un an, non compris le temps qui s'écoulera avant cèlui de l'époque fixe des élections ordinaires.
Art. 38. Les membres du corps municipal, ceux du conseil général, le procureur de la commune et ses substituts ne pourront être révoqués ; mais ils pourront être destitués pour forfaiture jugée.
Art. 39. Les places de maire, de procureur de la commune et de ses substituts, de membres du corps municipal ou du conseil général, de secrétaire-greffier, de trésorier, de garde des archives, de bibliothécaire et d'adjoints du secrétaire-greffier seront incompatibles; en conséquence, ceux qui étant pourvus d'une de ces places, seront élus à une autre, et seront tenus d'opter.
Art. 40. Les membres du corps municipal, durant leur exercice, ne pourront être membres de l'administration du département de Paris; et s'ils sont élus membres de cette administration, ils seront tenus d'opter.
Art. 41. En cas de vacance de la place de maire, par mort, ou par une cause quelconque autre que la démission, le corps municipal sera tenu, dans le délai de trois jours, de convoquer les quarante-huit sections pour procéder au remplacement. Mais si l'époque de l'élection, ordinaire ne se trouve éloignée que de deux mois, le conseil général de la commune nommera un des officiers municipaux pourTemplir les fonctions de.maire par intérim.
Art. 42. En cas de vacance de la place de maire par démission, le corps municipal sera tenu, dans le délaide trois jours, de convoquer les quarante-huit sections pour procéder au remplacement.
Art. 43. Si la place de procureur de la commune vient à vaquer à une époque éloignée de moins de six mois de l'élection ordinaire, le premier des substituts en fera les fonctions ; si elle vaque à une époque éloignée de plus de six mois de l'élection ordinaire, on procédera à une nouvelle élection, ainsi que dans le pénultième article.
Art. 44. Si la place de l'un des substituts vient à vaquer, on ne la remplira qu'à l'époque des élections.
Art. 45. Si les places des deux substituts viennent à vaquer, on ne les remplira que dans le cas où l'époque des élections serait éloignée de plus de deux mois. Ce cas excepté, le conseil
général pourra commettre une ou deux personnes chargées d'en exercer provisoirement les fonctions.
Art. 46. En cas d'absence ou de maladie de l'un des adminsitrateurs, ses fonctions seront remplies par un de ses collègues, attaché au même département.
Art. 47. Les places de notables qui viendront à vaquer ne seront remplies qu'à l'époque de l'élection annuelle pour les renouvellements ordinaires.
Art. 48. Les notables prêteront, après leur nomination, le serment ordonné par l'article 48 du décret du 14 décembre.
Art. 49. La municipalité ne pourra, sous peine de nullité de ses actes, s'approprier les fonctions attribuées par la Constitution, ou par les décrets des assemblées législatives, à l'administration du département de Paris.
Art. 50. Elle aura deux espèces de fonctions à remplir : les unes, propres au pouvoir municipal ; les autres, propres à l'administration générale de l'Etat, qui les délègue aux municipalités.
Art. 51, Les fonctions propres au pouvoir municipal, qu'elle exercera sous la surveillance et l'inspection de l'administration du département de Paris, seront ;
1° De régir les biens et revenus communs de la ville;
2° De régler et d'acquitter les dépenses locales qui doivent être payées des deniers communs ;
3° De diriger et faire exécuter les travaux publics qui sont à la charge de la Ville ;
4° D'administrer les établissements appartenant à la commune, ou entretenus de ses deniers;
5° D'ordonner tout ce qui a rapport à la voirie;
6° De faire jouir les habitants des avantages d'une bonne police, notamment de la propreté, de la salubrité, de la sûreté et de la tranquillité dans les rues, lieux et édifices publics.
Art. 52. Parmi les fonctions propres à l'administration générale, la municipalité de la capitale pourra avoir, par délégation et sous l'autorité de l'administration- du département de Paris :
1° La direction de tous les travaux publics, dans le ressort de la municipalité, qui ne seront pas à la charge de la Ville ;
2° La direction des établissements publics qui n'appartiennent pas à la commune, ou qui ne sont pas entretenus de ses deniers ;
3° La surveillance et l'agence nécessaires à la conservation des propriété nationales;
4° L'inspection directe des travaux de réparation ou reconstruction des églises, presbytères et autres objets relatifs au service du culte.
Art. 53. Les fonctions propres au pouvoir municipal et celles que la municipalité exercera par délégation seront divisées en plusieurs départements qu'indiquera provisoirement le titre 111.
Art. 54. Il y aura toujours une force militaire en activité, sous le nom de"garde nationale parisienne. La municipalité, pour l'exercice de ses fonctions propres ou déléguées, pourra non seulement employer cette force conformément au décret qui interviendra sur l'organisation des gardes nationales du royaume, mais requérir le secours des autres forces publiques, ainsi que le réglera la'Constitution. '
Art. 55. L'exercice du contentieux de la police, des subsistances, approvisionnements et
autres objets de la municipalité, sera réglé par la suite.
Art. 56. Les délibérations et arrêtés sur les objets mentionnés en l'article 54 du décret du 14 décembre, qui n'émaneront pas du conseil général assemblé, seront nuls, et ne pourront être exécutés.
Art. 57. La municipalité sera entièrement subordonnée à l'administration du département de Paris pour ce qui concerne les fonctions qu'elle aura à exercer par délégation de l'administration générale.
Art. 58. Quant à l'exercice des fonctions propres au pouvoir municipal, toutes les délibérations pour lesquelles la convocation du conseil général de la commune est nécessaire ne pourront être exécutées qu'avec l'approbation de l'administration ou du directoire du aépartement de Paris.
Art. 59. Tous les comptes delà régie, du maire et des administrateurs, après avoir été reçus par le conseil municipal, et vérifiés tous les six mois par le conseil général, seront définitivement arrêtés par l'administration ou le directoire du département de Paris.
Art. 60. Les citoyens actifs ont le droit de se réunir paisiblement et sans armes en assemblées particulières, pour rédiger des adresses et pétitions, soit au corps municipal, soit à l'administration du département de Paris, soit au Corps législatif, soit au roi, sous la condition de donner aux officiers municipaux connaissance du temps et du lieu de ces assemblées et de ne pouvoir députer que vingt citoyens actifs pour apporter et présenter les adresses et pétitions.
TITRE H.
Art. 1er. L'assemblée de chacune des quarante-huit sections commencera par l'appel nominal des citoyens actifs, d'après les titres qu'ils auront présentés en entrant.
Art. 2. S'il s'élève des difficultés sur l'admission d'un citoyen, sa section en jugera : un citoyen exclu par le jugement de la section sera tenu de s'éloigner, sauf à faire reconnaître ses titres pour les élections suivantes, par l'administration du département, à qui la connaissance définitive en demeure attribuée.
Art. 3. Les citoyens actifs désigneront les personnes dans leurs bulletins, de manière à éviter toute équivoque ; et un bulletin sera rejeté, si, faute de désignation suffisante entre le père et le fils, entre les frères et autres personnes de même nom, l'assemblée juge qu'il y a incertitude sur les personnes désignées.
Art. 4. Le recensement général à l'Hôtel-de-Ville des scrutins des quarante-huit sections sera fait par huit citoyens tirés au sort, dont quatre seront pris parmi les membres du corps municipal, et quatre parmi les commissaires des diverses sections.
Art. 5. Après l'élection du maire et du procureur de la commune, dont la forme est déterminée au titre premier, les deux substituts adjoints seront élus par les quarante-huit sections au scrutin de liste simple, mais ensemble et à la pluralité relative, laquelle sera au moins du quart des votants.
Art. 6. Si le premier scrutin ne donne à personne la pluralité du quart des suffrages, on procédera à un second, dans lequel chacun écrira encore deux noms sur son bulletin.
Art. 7. Si aucun citoyen n'obtient la pluralité du quart des suffrages, on procédera à un troisième et dernier scrutin : dans ce dernier scrutin, on ne pourra choisir que parmi les quatre per-? sonnes qui auront eu le plus de voix au scrutin précèdent ; on écrira deuk nomssur les bulletins-, et les deux citoyens qui obtiendront le plus de suffragès seront nommés substituts du procureur de la commune.
Art. Si au premier scrutin un des citoyens a obtenu la pluralité du quart des suffrages, et accepté, on n'écrira plus qu'un nom au Becond scrutin ; et au troisième, on choisira entre les deux citoyens qui auront eu le plus de voix.
Art. 9."Lors de la première formation de la municipalité, chacune des quarante-huit sections élira parmi les citoyens éligibles de la section seulement, trois membres destinés à faire partie du corps municipal, ou du conseil général de la commune.
Art. 10. L'élection se fera au scrutin individuel et à la pluralité absolue des suffrages.
Art 11. Si au premier scrutiu la pluralité absolue n'est pas acquise, il sera procédé à un second: si le second scrutin ne fournit pas non plus la pluralité absolue, il sera procédé à un troisième, entre les deux citoyens seulement qui auront eu le plus de voix au second.
Art. 12. Eh cas d'égalité de suffrages au second et au troisième scrutin, entre plusieurs citoyens ayant le nombre de voix exigé, la préférence sera accordée à l'âge.
Art. 13. Les nominations étant faites dans les quarante-huit sections, il sera envoyé, par chacune d'elles, à l'Hôtel-de*Ville, un extrait du procès-verbal contenant les noms des trois citoyens élus.
Art. 14. Il sera dressé une liste des cent quarante-quatre citoyens ainsi nommés ; cette liste dèsigpaqt leurs demeures et qualités sera imprimée, affichée et envoyée dans les quarante-huit sections.
Art. i5. Les sections serqqt tenues de s'assembler le lendemain de cet envoi, et elles procéderont à la lecture de la liste imprimée, à l'effet d'accepter la nomination des citoyens qui y seront compris, ou de s'y refuser i on recueillera les voix par assis et levé, et sans aucune discussion» sur chacuqe des 144 personnes comprises dans la liste : mais upe section individu-^ elle ne soumettra point à cette épreuve les trois qu'elle aura nommés,
Art, 16„ Les résultats de la présentation de la liste dans chaque section seront envoyés à l'Hôtelrde-Ville; et les citoyens qui n'auront pas été acceptés par la moitié des sections plus une seront retranchés de la liste sans autre information,
Art. 17. Les sections respectives procéderont, dèg le lendemain de l'avis qui leur pn aura été donné par le corps municipal, au remplacement des membres retranchés dé la première liste.
Art. 18. Les noms des citoyens ainsi élus en remplacement seront envoyés dans les sections pour y être acceptés pu refusés dans le jour, de la même manière que tes premiers.
Art, 19. La liste des cent quarante.-quatre élus étant définitivement arrêtée, les quaFante-rhuit sections procéderont de la manière suivante à l'élection des quarante-huit membres du cprps municipal,
Art, EQt te scrutin se fera en chaque section par bulletins de liste de dix noms choisis parmi ceux de la liste imprimée,
Art. 21. Les bulletins qui contiendront plu« ou moins de dix noms, ou des noms qui ne seraient pas compris dans la liste imprimée, serqnt rejetés.
Art. 22. Le résultat du scrutin 4e chaque section sera envoyé à l Hôtel-de=-ville; et cey$ qui, après le recensement général, se trouveront avoir la pluralité du qqart des suffrages, seront membres du corps municipal.
Art. $3. Pour cpmpléter le nombre 4e$ quar rante-hiïit membres du corps municipal, fiopime aussi dans le cas où aucun citoyen n'aurait eu une pluralité relative du quart dés suffrages, il sera procédé dans les quarante-huit sections à un second scrutin.
Art. 24. Ce scrutin sera fait, ainsi que Je précédent, par bulletins de liste de di$ noms choisis parmi les noms de la liste imprimée, moins ceux qui se trouveront élus par le précèdent scrutin.
Art. 25. Tous ceux qui, par l'événement de ce second scrutin, réuniront une pluralité relative du quart des suffrages, seront membres du corps municipal.
Art. 20. Si le nombre des quarante-huit membres n'est pas rempli, ou si le second scrutin n'a donné à personne la pluralité du quart des suffrages, il sera procédé dans les quarante-huit sections à un dernier scrutin.
Art. 27. Ce dernier scrutin sera fait également par liste de dix noms choisis papmi les noms 4e la liste imprimée, iqpins ceux qui auront été élus,
Art. 28. La simple pluralité des suffrages sera suffisante à ce dernier scrutin; et ceux qui, par le recensement général, l'auront obtenue, seront membres du corps municipal, jusqu'à concurrence des quarante-huit membres dont il doit être formé.
Art. 29- En cas de refus d'un ou de plusieurs piloyens élus aux deux premiers scrutins, il en sera usé comme slls n'avaient pas eu la plura? lité requise pour l'élection, et leurs noms ne concourront pas dans les scrutins suivants.
Art. 30. Si lin ou plusieurs citoyens élus au dernier scrutin ne veulent point accepter, ils se? ront remplacés par ceux qui suivront dans l'or-r dre des voix ou de l'âge.
Art, 31. Les citoyens compris sur la liste imprimée, qui n'auroqt pas été élus membres du corps municipal, ou qui auront refusé, resteront membres 4u conseil général, en qualité de notables.
Art. 32. Dans les scrutins ppur l'élection des seize administrateurs dont il est parlé à l'article 25 . du titre premier, on commencera par nommer les administrateurs au département des subsistances; on passera ensuite à l'élection des administrateurs au département de la police, et ainsi successivement, jusqu'à l'élection des administrateurs au département des travaux publics, conformément à la division qui sera indiquée au titre trois.
Art. 33. Le secrétaire-greffier, le trésorier, les adjoints du secrétaire-greffier, ie garde des archives et le bibliothécaire seront élus par le Gonseil général de la commune, parmi les cir toyens éligibles de Paris ; leur élection se fera scrutin individuel et à la pluralité absolue des suffrages, mais sur chaque bulletin qn écrira deux nems-
Art.. jJ4. On suivra, pour ces divers scrutins, les règles établies aux articles U et 12 ci-dessus.
Art. 35. Le maire, président de l'assemblée, aura droit de suffrage pour les élections.
Art. 36. Les premières élections seront faites aussitôt que la division de la ville de Paris en quarante-huit sections sera terminée.
Art. 37. Les assemblées des quarante-huit sections seront convoquées à cet effet au nom du maire en exercice et de ta municipalité provisoire.
Art. 38. Toutes les opérations attribuées au corps municipal, relativement aux élections, appartiendront, pour cétte première fois, au maire et aux soixante administrateurs actuels.
Art. 39. L'assemblée de chacune des quarante-huit sections sera ouverte par qu de ces administrateurs, qui exposera l'objet de la convocation, et dont les fonctions cesseront après l'élection d'un président et d'un secrétaire.
Art. 40. Les comptables actuels, soit de gestion, soit de finances, rendront leurs comptes définitifs au nouveau corps municipal ; ces comptes seront revus et vérifiés parle conseil général.
Art. 41. Ils seront de plus imprimés; et tout citoyen actif pourra en prendre communication, ainsi que des pièces justificatives, au greffe de la ville, sans se déplacer et sans frais.
Art. 42. Le premier renouvellement des membres du corps municipal, de3 notables, ou autres per-sonnes attachées à la municipalité, se fera le dimanche d'après la Saint-Martin 1791, et le sort déterminera ceux qui sortiront : on combinera les tirages de manière à ce qu'il sorte au moins une, et à ce qu'il ne sorte pas plus de deux des trois personnes nommées par chaque section.
Art. 43. Pour l'exécution de l'article 34 du titre premier, les sections, lors des renouvellements annuels, pommeront alternativement un ou deux des soixante-dou^e citoyens qui doivent entrer dans (e corps municipal, ou le conseil général de la commune.
TITRE III.
Art. lar. Le maire sera le maître de la municipalité, président du bureau et du corps municipal, ainsi que du conseil général de la commune, et il aura voix délibérative dans toutes les as'r semblées.
Art. 2. Il aura la surveillance et l'inspection de toutes les parties de l'administration confiées aux seize administrateurs.
Art. 3. Indépendamment des assemblées que le bureau tiendra trois fois par semaine, ainsi qu'il sera dit à l'aFticle 20, le maire pourra convoquer les administrateurs toutes les fois qu'il le jugera conyenable,
Art. 4. Si les délibérations du bureau, ou les ordres d'un administrateur ou d'un département, lui paraissent contraires au bien général, il pourra en suspendre l'effet ; mais il sera tenu de le déclarer aussitôt, et de convoquer dans les 24 heures, selon la nature de l'affaire, ou le bureau, ou le corps municipal, ou le conseil général de la commute,
Art. 5. En cas d'égalité de suffrages , dans une délibération du bureau, il aura la voix prépondérante; mais ceux qui seront d'un avis contraire au sien pourront porter l'affaire au corps muni^ cipal.
Art. 6. Toutes les délibérations du bureau, dq cofps municipal, ainsi que du eonseil général de la commune, seront munies de sa signature ou de son visa ; si les ordres d'un administrateur ou d'un département 6ont destinés à devenir'publics, il y apposera également son visa ou sa signature.
Art. 7. Il apposera aussi son visa à tout mandat sur la caisse, donné par les adpainistpateijrB.
Art. 8. Le maire aura le droit, toutes les fois qu'il le jugera convenable pour les intérêts de la commune, de porter au conseil général, dont toutes les séances seront publiques, les délibérations du corps municipal.
Art. 9. Il sera établi sous sa direction un bureau de renvoi, dont la formation lui appartiendra.
Art. 10. Les requêtes oq mémoires adressés à la municipalité seront enregistrés aq bureau de renvoi; chaque citoyen aura le droit d'e$iger que l'enregistrement soit fait en sa présence, et de se faire délivrer le numéro de l'enregistrement.
Art. 11. Le précis des réponse^, décisions ou délibérations qui interviendront sur les requêtes ou mémoires ci-dessus, sera nQ$é à côté oU à la suite de l'enregistrement.
Art. 12. Chaque délibération sera intitulée, selon sa nature,du nom du maire et du corps municipal, ou du conseil général de la commune.
Art. 13. Les convocations ordonnées par le conseil municipal et par le oonseil général seront faites au nom du maire et en celui du corps ou du coqseil qui les aura ordonnées.
Art. 14. Les brevets ou commissions donnés par le conseil général,ou par le corps munioipal,seront signés par le maire ; il ne pourra refuser son visa sur les nominations qui ne dépendront pas de lui.
Art. 15. Il aura en sa garde les sceaux de la ville, et les fera apposer, sans frais, à tous les aqtes oà ils seront nécessaires.
Art. 16. La première place, dans les cérémonies publiques de la Vil|é,lui appartiendra»,il sera à la tête de toutes les députations : une délibération du corps municipal désignera les emplois dont il aura la présentation.
Art. 17. Le conseil général de a commune pourra donner les commissions qu'il jugera nécessaires, et déterminer les eas Où les employés seront tenus de fournir des cautions.
Art, 18. Le travail du bureau sera divisé en elnq départements i 1° eelui des subsistances j 2° celui delà police; 3° célui du domaine et des finances} 4° eelui des établissements publics de la ville de Paris ; et enfin celUi des travaux publies. Le corps municipal fixera les attribution^ et nombre des administrateurs de chacun de ces départements.
Art. 19. Le bureau pourra concerter directement avec les ministres du roi les moyens de pourvoir aux subsistances et approvisionnements nécessaires à la capitale.
Art. 20. Il s'assemblera trois fois par semaine, e| on y rapportera toutes les affair-ôs, de manière que le maire et chacun des administrateurs puissent connaître et éclairer les différentes parties de l'administration.
Art, 21. Les décisions du bureau se prendront à la pluralité des voix, et le greffier en tiendra registré.
Art. 22. Les administrateurs se partageront les détails de leur département respectif; mais aucun d'eux ne pourra donner un mandat sur la caisse, sans le faire signer par un second administrateur; précaution independantè du visa du maire, dont on a parlé à l'article 7.
Art. 23. Tops ces mandats seront de plus enregistrés au département du domaine, qui enregis-e trera également toutes les dépenses arrêtées pap le corps municipal,' ou par le conseil général de la commune.
Art. 24. Le eorps municipal statuera sur le» difficultés qui pourront s'élever entre les dépais
tements divers, touchant leurs fonctions et attributions respectives.
Art. 25. Les règlements particuliers, nécessaires pour l'exercice des fonctions de3 divers départements, et pour le régime des différentes parties de la municipalité attribuées à chacun de ces départements, seront dressés par le corps municipal, et confirmés par le conseil général de la commune.
Art. 26. En l'absence du maire, chacun des administrateurs présidera alternativement les assemblées du bureau.
Art. 27. Les administrateurs n'auront aucun maniement de deniers en recettes et en dépenses. Les dépenses seront acquittées par le trésorier.
Art. 28. Les dépenses courantes de chaque département seront ordonnées par les administrateurs respectifs. Celles de la police, des subsistances, des établissements et des travaux publics, seront contrôlées par le département du domaine. Celles du département du domaine seront contrôlées par le maire, et inscrites dans un registre qui restera à la mairie : les unes et les autres seront acquittées par le trésorier. Les dépenses plus considérables ou extraordinaires seront ordonnées parle corps municipal, ou par le conseil général, dans les cas qui lui devront être soumis : les mandats en seront délivrés, conformément aux délibérations, par les administrateurs dont elles regarderont le département; elles seront aussi enregistrées dans la huitaine au département du domaine, et acquittées par le trésorier.
Art. 29. Le maire et les administrateurs feront au conseil municipal, tous les deux mois, l'exposé sommaire de leur administration.
Art. 30. Chacun d'eux rendra aussi son compte définitif tous les ans, conformément à l'article 59 du titre premier.
Art. 31. Les administrateurs seront astreints en tout temps à donner connaissance de leurs opérations au maire, au corps municipal, ou au conseil général de la commune, lorsqu'ils en seront requis. Us donneront aussi, ou feront donner au procureur de la commune, ou à ses substituts, toutes les instructions qu'ils auront demandées.
Art. 32. Le procureur de la commune aura toujours le droit de requérir du secrétaire-greffier, de ses adjoints ou du garde des archives, les instructions, renseignements ou copies de pièces qu'il pourra désirer. Les substituts, lorsqu'ils exerceront ses fonctions, jouiront du même droit.
Art. 33. Les quarante-huit sections, avant de
J)rocéder à la première élection des membres de a municipalité, détermineront, sur la proposition de la municipalité provisoire, le traitement du maire et les indemnités à accorder aux administrateurs, au procureur de la commune et à ses deux substituts ; elles détermineront aussi, sur la même proposition, le traitement du secrétaire-greffier et ae ses deux adjoints, du garde des archives et du bibliothécaire.
Art. 34. Le nombre et les appointements des commis ou employés dans les diverses parties de l'administration municipale, au secrétariat, aux archives et à la bibliothèque, seront déterminés par des délibérations particulières du corps municipal, et confirmés par le conseil général de la commune, d'après les renseignements qui seront fournis par le maire, les administrateurs, le secrétaire-greffier ou ses adjoints.
Art. 35. Si les administrateurs ou les personnes ayant un traitement annuel, font des voyages pour les affaires particulières de la ville, leurs
dépenses de voyage seulement leur seront remboursées.
Art. 36. En cas de voyage des notables pour commissions particulières de la ville,, leurs dépenses de voyage leur seront également remboursées. On leur accordera, en outre, une indemnité raisonnable, qui sera fixée par le corps municipal, et confirmée par le conseil général.
Art. 37. Le maire, les administrateurs, les conseillers et les notables, le procureur de la commune, ses substituts, le secrétaire-greffier et ses adjoints, et toutes autres personnes attachées au corps municipal ou au conseil général de la commune, ne pourront établir aucun droit de réception, ni recevoir de qui que ce soit, directement ou indirectement, ni étrennes, ni vin-de-ville, ni présents; ils ne pourront non plus être intéressés à aucune des fournitures relatives à la municipalité de Paris.
Art. 38. Le procureur de la commune et ses substituts auront séance, sans voix délibérative, à toutes les assemblées du bureau, du corps municipal ou du conseil général. Nul rapport ne sera fait au corps municipal ou au conseil général, qu'après que l'affaire aura été communiquée au procureur de la commune, ou, à son défaut, à l'un de ses substituts; et nulle délibération ne sera prise sur les rapports, sans avoir entendu celui d'entr'eux à qui J'affaire aura été communiquée. Le procureur de la commune ou ses substituts seront tenus de donner leur avis dans le délai qui aura été déterminé par le corps municipal.
Art. 39. Avant de rapporter une affaire au conseil général, on la communiquera sommairement au maire : s'il ne se présente point, on procédera à la délibération malgré son absence.
Art. 40. Le secrétaire-greffier et ses adjoints tiendront la plume dans les assemblées du bureau, du corps municipal et du conseil général; ils rédigeront les procès-verbaux et délibérations, et ils en signeront les extraits ou expéditions, sans frais ; ils veilleront aux impressions, affiches et envois ; ils délivreront et contresigneront, aussi sans frais, les brevets donnés par le conseil général, parle corps municipal, ou par le maire; et ils feront d'ailleurs toules les fonctions du secrétariat et du greffe.
Art. 41. Le trésorier ifournira un cautionnement dont la somme sera réglée par le conseil général.
Art. 42. Son traitement et ses frais de bureau seront aussi réglés par le même conseil.
Art. 43. Le corps municipal fera tous les mois, et plus souvent, s'il est jugé utile, la vérification de la caisse. Le trésorier présentera tous les jours son état de situation ; il fournira aussi au corps municipal, à l'expiration de chaque année, un bordereau général de ses recettes et dépenses ; il présentera de plus au corps municipal, dans les trois premiers mois de l'année suivante, ses comptes appuyés de pièces justificatives, lesquels devront être arrêtés dans les trois mois suivants.
Art. 44. Outre la publicité et l'impression des recettes et dépenses, ordonnée? par l'article 58 et l'article 59 du décret du 14 décembre, le conseil général pourra vérifier l'état de la caisse et les comptes au trésorier, tant que celui-ci n'aura pas obtenu sa décharge définitive.
Art. 45. L'arrêté de l'administration ou du directoire du département de Paris opérera seul la décharge définitive des comptables.
TITRE IV.
Art. Ier. L'assemblée des quarante-huit sections devra être convoquée par le corps municipal, lorsque le vœu de huit sections, résultant de la majorité des voix, dans une assemblée de chaqne section, composée de cent citoyens actifs au moins, et convoquée par le président des commissaires de la section, se sera réuni pour la demander.
Le président des commissaires d'une section sera tenu de convoquer la section, lorsque cinquante citoyens actifs se réuniront pour la demander.
Art. 2. Lorsque l'assemblée des quarante-huit sections aura lieu, un membre du corps municipal ou un des notables pourra assister à l'assemblée de chacune des sections, mais sans pouvoir la présider, et sans que son absence puisse la différer.
Art. 3. Il y aura, dans chacune des quarante-huit sections un commissaire de police toujours en activité, et dont les fonctions relatives à la municipalité seront déterminées par les articles suivants.
Art. 4. Chacune des quarante-huit sections aura en outre seize commissaires, sous le nom de commissaires de section, qui exerceront dans leur arrondissement, sous l'autorité du corps municipal et du conseil général de la commune, les fonctions suivantes :
Art. 5. Les seize commissaires de section seront chargés de surveiller et de seconder au besoin le commissaire de police.
Art. 6. Ils seront tenus de veiller à l'exécution des ordonnances, arrêtés ou délibérations, sans y apporter aucun obstacle ni retard : le commissaire de police aura séance et voix consultative à leurs assemblées.
Art. 7. Ils donneront aux administrateurs, au corps municipal et au conseil général, ainsi qu'au maire, au procureur de la commune et à ses substituts, tous les éclaircissements, instructions et avis qui leur seront demandés.
Art. 8. Ils nommeront entre eux un président, et se réuniront tous les huit jours, et, en outre, toutes les fois que des circonstances extraordinaires l'exigeront.
Art. 9. L'un d'eux restera, à tour de rôle, vingt-quatre heures dans sa maison, afin que le commissaire de police et les citoyens de la section puissent recourir à lui en cas de besoin ; le commissaire de service sera de plus chargé de répondre aux demandes et représentations qui pourront être faites.
Art. 10. Les jeunes citoyens de la section, parvenus à l'âge de vingt-un ans, après s'être fait inscrire chez le commissaire de police, porteront leur certificat d'inscription chez le commissaire de section qui se trouvera de service, et leur indiquera l'époque de la prestation de leur serment.
Art. 11. Les commissaires de section pourront être chargés par l'administration du département de Paris de la répartition des impôts dans leurs sections respectives. .
Art. 12. Les commissaires de police seront élus pour deux ans, et pourront être réélus autant de fois que leur section ,1e jugera convenable : le premier remplacement, s'il a lieu, ne pourra se faire qu'à la Saint-Martin 1792; le conseil
général de la commune fixera la somme de leur traitement.
Art. 13. Chaque commissaire de police aura sous ses ordres un secrétaire-greffier de police, dont le conseil général de la commune fixera aussi le traitement.
Art. 14. Les personnes domiciliées, arrêtées en flagrant délit dans l'arrondissement d'une section, seront conduites chez le commissaire de police. Celui-ci pourra, avec la signature de l'un des commissaires de section, envoyer dans une maison d'arrêt les personnes ainsi arrêtées, lesquelles seront entendues dans les vingt-quatre heures, conformément à ce qui sera réglé par la suite.
Art. 15. Les personnes non domiciliées, arrêtées dans l'arrondissement d'une section, seront conduites chez le commissaire de police: si elles sont prévenues d'un désordre grave ou d'un délit, celui-ci pourra les envoyer dans une maison d'arrêt où elles seront- interrogées dans les vingt-quatre heures, et remises en liberté, ou, selon la gravité des circonstances, livrées à la justice ordinaire, ou condamnées par le tribunal de police qui sera établi.
Art. 16. Le commissaire de police, en cas de vols ou d'autres crimes, gardera par devers lui les effets volés et les pièces de conviction, pour les remettre aux juges. Dans tous les cas, ii dressera procès-verbal des pièces et des faits, et il tiendra registre du tout ; il en instruira de plus le département de police et le commissaire de section qui se trouvera de service.
Art. 17. Hors les cas de flagrant délit, la municipalité ne pourra ordonner l'arrestation de qui que ce soit, que dans les cas et de la manière qui seront déterminés dans le règlement de police.
Art. 18. Le commissaire de police rendra compte au maire, ainsi que l'ordonnera celui-ci.
Art. 19. Le commissaire de police rendra tous les soirs, au commissaire de section qui sera de service, un compte sommaire et par écrit des événements de la journée.
Art. 20. Le secrétaire-greffier tiendra la plume aux assemblées du comité ; il dressera les procès-verbaux lorsqu'il en sera requis par les commissaires ; il sera chargé de faire les expéditions, les extraits et les envois à qui il appartiendra ; il sera aussi chargé de la tenue ae tous les registres nécessaires aux fonctions du comité et du commissaire de police.
Art. 21. Les appointements du secrétaire-gref-fier seront acquittés des deniers communs de la ville.
Art. 22. Il sera procédé à l'élection des seize commissaires de section, du commissaire de police et du secrétaire greffier, par les assemblées de chaque section, immédiatement après les élections des membres du corps municipal et du conseil général de la commune.
Art. 23. L'élection du commissaire de police se fera au scrutin et à la pluralité absolue des suffrages, mais par bulletin de deux noms : si le premier ou le second tour de scrutin ne donne pas cette pluralité absolue, on procédera à un troisième et dernier, dans lequel on n'écrira qu'un nom ; les voix ne pourrout porter que sur l'un des deux citoyens qui en auront obtenu le plus grand nombre au second scrutin.
Art. 24. Le commissaire de police et le secrétaire-greffier ne pourront être choisis que parmi les citoyens éligibles de la section, et ils seront tenus d'y résider.
Art. 25. L'éleGtion du secrétaire-greffier se fera au scrutin par bulletin de deux noms, et à la pluralité relative, laquelle sera au moins du quart des suffrages.
Art. 26. Les seize commissaires de section seront choisis parmi les citoyens éligibles de la section, au scrutin, par bulletin de liste de six noms.
Art. 27. Ceux qui, par le dépouillement du scrutin, se trouveront réunir la pluralité relative du tiers au moins des suffrages, seront déclarés commissaires.
Art. 28. Pour le nombre des commissaires restant à nommer, comme aussi dans le cas où aucun citoyen n'aurait eu la pluralité du tiers des voix, il sera procédé à un second scrutin par bulletin de liste de six noms ; et ceux qui, par le dépouillement de ce scrutin, réuniront la pluralité relative du tiers au moins des voix, seront déclarés commissaires.
Art. 29. Si le nombre des seize commissaires n'est pas encore rempli, ou si aucun citoyen ne se trouve élu, il sera procédé à un dernier scrutin, par le bulletin de liste de six noms, et à la simple pluralité relative des suffrages : ceux qui l'obtiendront seront déclarés élus jusqu'à concurrence des seize commissaires à nommer.
Art. 30. Si un citoyen nommé commissaire au troisième tour refuse, il sera remplacé par le concurrent qui, dans ce même tour de scrutin, aura eu le plus de voix après lui : si un citoyen nommé commissaire dans les deux premiers scrutins refuse après la dissolution de l'assemblée, il sera remplacé par celui qui, dans les divers scrutins, aura eu le plus de voix. Les commissaires de section, en cas de mort ou de démission dans le cours de l'année, seront remplacés, jusqu'à l'époque ordinaire des élections, par ceux des citoyens qui auront eu le plus de voix après eux ; et pour exécuter ces deux dispositions, on conservera les résultats des scrutins.
Art. 31. L'exercice des fonctions de commissaire de police sera incompatible avec celles delà garde nationale.
Art. 32. Les commissaires de section, le commissaire de police et son secrétaire-greffier prêteront serment, entre les mains du président de l'assemblée de la section, de bien et de fidèlement remplir leurs devoirs.
Art. 83. La moitié des commissaires de section sortira chaque année. La première sortie se fera par la voie du sort; elle n?aura lieu qu'à l'époque des élections ordinaires, en 1791 ) et, pour la première fois, le temps qui s'écoulera entre l'époque de leur élection et l'époque fixe des élections ordinaires ne sera point compté.
Art. 34. Les élections des secrétaires-greffiers se renouvelleront tous les deux ans, et l'époque en sera fixée de façon à alterner avec celle de l'élection des commissaires de police.
TITRÉ V.
Décrets généraux sur les municipalités du royaume, que Varticle du titre premier déclare applicables d la ville de Paris, et ordonne de rapporter à la fin du règlement de la municipalité de la capitale.
Art. 1er. Les officiers et membres des municipalités actuelles seront remplacés par voie d'élection.
Art. 2. Les droits de présentation, nomination ou confirmation, et les droits de présidence ou de présence aux assemblées municipales, prétendus ou exercés comme attachés à la possession de certaines terres, aux fonctions de commandant de province ou de ville, aux évêchés ou archevêchés, et généralement à tel autre titre que ce puisse être, sont abolis.
Art. 3. Tous les citoyens actifs de chaque ville, bourg, paroisse ou communauté, pourront concourir à l'élection des membres du corps municipal.
Art. 4. Les asemblées des citoyens actifs seront convoquées par le corps municipal, huit jours avant celui où elles devront avoir lieu. La séance sera ouverte en présence d'un citoyen chargé par le corp§ municipal d'expliquer l'objet de la convocation.
Art. 5. Chaque assemblée procédera, dès qu'elle sera formée, à la nomination d'un président et d'un secrétaire : il ne faudra poqr cette nomination que la simple pluralité relative des suffrages, en un seul scrutin recueilli pt dépouillé par les trois plus anciens d'âge.
Art. 6. Chaque assemblée nommera ensuite, à la pluralité relative des suffrages, trois scrutateurs qui seront chargés d'ouvrir les scrutins subséquents, de les dépouiller, de conipter les voix et de proclamer les résultats. Ces trois scrutateurs seront nommés par un seul scrutin recueilli et dépouillé, comme le précédent, parles trois plus anciens d'âge.
Art. 7. Les conditions de l'éligibilité pour les administrations municipales seront les mêmes que pour les administrations de département et de district.
Art. 8. Les officiers municipaux et les notables ne pourront être nommés que parmi les citoyens éligibles de la commune.
Art. 9. Les citoyens qui occupent des places de judicature ne peuvent être en même temps membres des corps municipaux.
Art. 10. Ceux qui sont chargés delà perception des impôts indirects, tant que ces impôts subsisteront, ne peuvent être admis en même temps aux fonctions municipales.
Art. 11. Les maires seront toujours élus à la pluralité absolue des voix. Si le premier scrutin ne donne pas cette pluralité, il sera procédé à un second: si celui-ci ne la donne point encore, il sera procédé à un troisième, dans lequel le choix ne pourra plus se faire qu'entre les deux citoyens qui auront réuni le plus de vojx aux scrutins précédents : enfin, s'il y avait égalité de suffrages entre eux à ce troisième scrutin, le plus âgé serait préféré.
Art. 12. Il y aura, dans chaque municipalité, un procureur de la commune, sans voix délibé-^ rative. Il sera chargé de défendre les intérêts et de poursuivre les affaires de la communauté.
Art. 13. Le procureur de la commune sera nommé par les citoyens actifs, au scrutin et à la pluralité absolue des suffrages, dans la forme et selon les règles prescrites pour l'élection du maire.
Art. 14. Le bureau sera chargé de tous les soins de l'exécution, et borné à la simple régie.
Art. 15. Toutes les délibérations nécessaires à l'exercice des fonctions du corps municipal seront prises dans l'assemblée des membres du conseil et du bureau réunis, à l'exception des délibérations relatives à l'arrêté des comptes, qui seront prises par le conseil seul.
Art. 16. Les officiers municipaux et les nota->
bles seront élus pour deux ans, et renouvelés par moitié chaque année".
Art. 17. Le maire restera en exercice pendant deux ans ; il ppqrra être féélu pour deux autres annéès; mais ensuite il né sera permis de l'élire de nqiiyeaq qu'après un intervalle de deux ans.
Art. 1g, L,e procureur de la commune conservera sa place pendant deux ans, et pourra èg^r lement être réélu pour deux autres années.
Art. 19, Les assemblées d'électjon nopr les renouvellements annuels se tiendront, dans tout le royaume, le dimanche d'aprè3 la Saint-M^tin, sur la convocation des officiers municipaux.
Art. 20. Avant d'entrer en exercice, lë maire et les autres membres du corps municipal, le procureur de la commune et son substitut, s'il y en a pn, prêteront le serment de maintenir de tout leur pouvoir la constitution du royaume, d'être fidèles â m» nation, à là loi et au rpi, et de bien remplir leurs fonctions. Ce serment sera prêté, à la prpchaiqe élection, devant la commune, et devant le corps municipal aux élections suivantes.
Art 21. Le maire et les autres membres du corps milftiPipai, le procureur de la commune et son substitut he pourront exercer eu même temps ces fonctions et celles de la garde nationale.
Art. 22. Le conseil général de la commune, composé tant des: membres du tforps municipal que des notables, sera convoqué toutes les fois que l'administration municipale le jugera convenable ; elle ne pourra se dispenser de le convoquer, lorsqu'il s'agira de délibérer :
Sur des acquisitions ou aliénations d'immeur-bles ;
SUr des imppaitjons extraordinaires pour dépenses locales ;
Sur des emprunts;
Sur des travaux à entreprendre ;
Sur l'emploi du pri$ des ventes, des remboursements ou des recouvrements ;
Sur Jps procès à intenter;
Même sur les procès à soutenir, (Jaqs le cas où ïe 'ïpnfi du droit sera contesté.
Art.'23, Dans toutes les villes au-dessus de quatre mille âmes, les comptes de l'administration municipale en recettes et dépenses seront imprimes cbaque année.
Art. 24. Dans toutes les communautés, sans distinction, les citoyens actifs pourront prendre, au greffe de la municipalité, sans déplacer et sans frais, communication des comptes, des pièces justificatives et des délibérations du corps munjpipa(> toutes les fois qu'ils le requerront.
Art, $5. Si qq citoyen croit être personnellement Jésé par quelque acte du corps municipal, il pourra pxROser ses sujets de plainte à l'admi-nistratioq, ou au directoire de département, qui y fer§ drqit, îjprés avoir vérifié les faits.
Art- 26, Tout eitoyen actif pourra signer et présenter contre les officiers municipaux la dénonciation des délits d'administration dont il prétendra qu'ils se seront rendus coupables ; mais avant de porter cette dénonciation dans les tribunaux, il sera tenu de la soumettre à l'administration, ou au directoire du département, qui, après avoir examine les faits, renverra la dénonciation, s'il y a lieu, à ceux qui devront en connaître.
Art. 27. Nul citoyen ne pourra exercer en même temps, dans la même ville ou éommu-
nauté, les fonctions municipales et les foqçtiqns militaires.
Art. 28. Aux prochaines éleetipns, {orscroe les assemblées primaires des citoyens actifs dë chaque canton, où les assemblées particulières de chaque communauté, auront été formées, èt aussitôt après que le président et le secrétaire Auront été nommés," if sëj*Q, avant de procéder à aucune autre électjpn, prêté par le présideqt et Je sécrélaire, en présence de l'assemblée, et ensuite par les membres de l?Àssémbléej entre lés mains du président, le serment « de maintenir de tout leur pouvoir là constitution du royaume, d'être fidèles à la nation, à la loi et. au roi, de choisir en leur âme ët conscience les plus dignes, dé la confiaqpë publiqùe? et de remplir avec zèle et courage les foqetiohs civiles et politiques qui pourront lëur être confiées «. Ceux qui refuseront de prêter ce serment seront incapables d'élire ou d être élus.
Art. ^9. Jusqu'à l'époque pq l'Assemblée q^tip-nale aura déterminé par ses décréta l'organisation définitive des milices et des gardes natioqaies, les citoyens qui remplissent " âcti^e}lèpiè||t 'le? fonctions d'officiers ou dé soldats d^ps les gardes nationales^ mêqae cepx qui se sont formés sous la dénomination de Volontaires, prêteront par provision, et aussitôt après que les municipalités seront établies, entre les mains du m^ire et des officiers municipaux, en présence de commune assëmbléè^ le serment d'être fidèles & la nation, à la loi et au roi ; de maintenir de tout leur pouvoir, sur la réquisition des corps administratifs et municipaUx, la constitution du royaume, et dë prêtër pareillement, sur les mêmes réquisitions, mainfôrte à l'exécution des bFdonuane.es de justice, et à celles des décrets de l'Assemblée nationale acceptés ou sanctionnés par le roi.
Art. 30. Lorsque le maire et les officiers municipaux seront en fonction, ils pqrterpnt pour marque distmctive par-dessus leur hâbit, et en baudrier, une écharpe aux trois couleurs de la nation : bleu, rouge et blanc, attachée d'un nœud et ornée d'une frange couleur d'or pour le maire, blanche pour les officiers municipaux, et violettè pour le procureur de la commune.
Les raqgs sont ainsi réglés :
Art 31. Le maire, puis les officiers municipaux, seloq l'ordre des tours de scrutin où ils auront été nommés, et dans le même tour, selon le nombre des suffrages qu'ils auront obtenus; enfin, le procureur de la commune, et ses substituts que suivront les greffiers ettrésoriers.Quant aux notables, ils n'pnt de rang que dans les séances du conseil général; ils y siegpfPHt à la suite cjq corps municipal, selon fe nombre des suffrages donnés à chacun d'eux ; en ç^ts d'égalité, le pas appartient aux plus âgés.
Art- 32. Cet ordre sera qbseryé même d^qs les cérémonies religieuses^ immédiatement à la suite dq clergé j cepeq^ant, la préséance attribuée aÛX officiers municipaux sqr les autres çprps pe leur confère aucun des anciens droits Soporifiques dans les églises.
Art. 33." La condition du domicile de fait, exigée pour l'exercice des droits dè citoyen actif, dans une assemblée de commune oU dans une assemblée primaire, n'emporte qqe l'obligation d'avoir dans le lieu, ou dans le cantqn, uîie habitation depuis un an, et de déolaper qu'on q'e^erce les mêmes droits dans aueun autre endroit.
Art. 34. Ne seropf réputés 4omestjques ou serviteurs à gages, les intendants ou pégisseùps.'lès
ci-devant feudistes, les secrétaires, les charretiers ou mal ires-valets de labour, employés par les propriétaires, fermiers ou métayers, s'ils réunissent d'ailleurs les autres conditions exigées.
Mandons et ordonnons à tous les tribunaux et municipalité de Paris, que les présentes ils fassent transcrire sur leurs registres, lire, publier, afficher et exécuter dans leurs ressorts respectifs, ainsi que le décret du 21 mai, le procès-verbal de la division de la ville de Paris en 48 sections, et le décret du 22 de ce mois, dont La teneur suit lesdites présentes : En foi de quoi nous avons signé et fait contre-signer ces dites présentes, auxquelles nous avons fait apposer le sceau de l'Etat. A Paris, le vingt-septième jour du mois de juin, l'an de grâce 1790, et de notre règne le dix-septième. Signé : LOUIS. Par le roi, Guignard. Fwa ; l'Archevêque de Bordeaux.
Du
L'Assemblée nationale, en exécution de l'article 6 du titre premier du règlement pour la municipalité delà capitale, autorise les commissaires adjoints au comité de Constitution, à tracer la division de la ville de Paris en quarante-huit sections, après avoir entendu les commissaires de la municipalité et les commissaires des soixante districts actuels, et les charge de rendre compte à l'Assemblée des difficultés qui pourront survenir.
Les commissaires adjoints signeront deux exemplaires du plan de la ville de Paris, divisée en quarante-huit sections, et du procès-verbal de division : l'un des exemplaires sera déposé aux archives de i'As3emblée nationale, et l'autre sera envoyé au greffe de l'Hôtel-de-Ville.
Décret du
L'Assemblée nationale, conformément à l'article 6 du titre premier du règlement général pour la municipalité de Paris, décrète la division de cette ville en quarante-huit sections, telle qu'elle est tracée et énoncée dans le plan et le procès-verbal joints au présent décret. Elle ordonne de déposer aux archives de l'Assemblée et au greffe de l'Hôtel-de-Ville, un exemplaire de ce plan et de ce procès-verbal, signé des commissaires adjoints au comité de Constitution.
Le roi sera supplié de donner les ordres nécessaires pour que les opérations préalables aux élections soient terminées au plus tard le 4 juillet, et que les élections commencent le lendemain.
Les commissaires adjoints au comité de Constitution, autorisés par 1 article 34 du décret de l'Assemblée nationale de l'organisation de la municipalité de Paris des 3 mai et jours suivants, à tracer la division de cette ville en quarante-huit sections, après avoir entendu les commissaires de la municipalité provisoire et ceux des soixante districts actuels;
Vu les procès-verbaux des séances de l'assemblée des députés de la commune et des commissaires nommés par l'universalité des districts des 6,12 et 14 juin ; ensemble les mémoires et les délibérations présentées au comité de Constitution, au nombre de soixante-dix pièces, déposées aux archives de l'Assemblée nationale, ont
arrêté et tracé cette division avec les dénominations des nouvelles sections, ainsi qu'il suit :
SECTION DES TUILERIES.
Limites de cette section.
La rue Saint-Honoré, à droite, depuis la rue Royale jusqu'à la rue Froid-Manteau; la rue Froid-Manteau, à droite de la rue Saint-Honoré, à la rivière ; le bord de la rivière jusqu'au pont de Louis XVI ; le côté droit de la place Louis XV ; la rue Royale, à droite, jusqu'à la rue Saint-Honoré.
Intérieur.
La rue Saint-Florentin, les Tuileries, la place du Carrousel, les rues du Dauphin, de l'Echelle, Saint-Louis, au Carrousel, Saint-Nicaise, des Orties, du Doyenné, Saint-Thomas-du-Louvre, la partie de la place du Palais-Royal, à droite, en allant à la rue de Chartres, depuis le coin de la rue Saint Honoré jusques y compris le Château-d'Eau, au coin de la rue Froid-Manteau : les rues de Chartres, de Rohan, etc. ; et généralement toutes Jes rues, culs-de-sacs et places enclavées dans cette limite.
SECTION DES CHAMPS-ÉLYSÉES.
Limites de cette section.
La rue du Faubourg-du-Roule et du Faubourg-Saint-Honoré, à droite, depuis la barrière, jusqu'à la rue Royale ; la rue Royale à droite, la traverse de la place Louis XV jusqu'à la rivière ; le bord de l'eau, jusqu'à la barrière des Bons-Hommes ; les murs jusqu'à la barrière du Roule.
Intérieur.
Chaillot, le Cours-la-Reine, les Champs-Elysées, les rues de Berri, du Cimetière, d'Angoulême, rues Neuve-du-Colisée, du Cotisée, Neuve-du-Ponthiéu, Rousselet, de Marigny, des Champs-Elysées, et généralement toutes les rues, culs-de-sacs ou places enclavées dans cette limite.
SECTION DU ROULE.
Limites de cette section.
Les rues du Faubourg-du-Roule et du Faubourg-Saint-Honoré, à gauche, en prenant de la barrière jusqu'à la rue de la Madeleine ; la rue de la Madeleine, à gauche, de l'Arcade, à gauche ; de la Pologne, à gauche : rue Saint-Lazare, à gauche, depuis la rue de la Pologne jusqu'à la rue de Clichy ; la rue de Clichy, à gauche, jusqu'à la barrière ; les murs depuis la barrière du Roule jusqu'à la barrière de Clichy.
Intérieur.
Les rues de Chartres, de Monceaux, de Cour-celles, de là Nouvelle-Pépinière, de la.Pépinière, des Rochers, partie de celle Saint-Lazare, les rues Verte, de Miroménil, Roquépine, Neuve-Sainte-Croix, des Saussayes, de la Ville-l'Evêque, d'As-
torg, d'Anjou, Quatremer, de Duras, du Marché-d'Agnesseau, de Suresne, etc. ; et généralement toutes les rues, culs-de-sacs, places enclavées dans cette limite.
SECTION DU PALAIS-ROYAL.
Limites de cette section.
La rue Saint-flonoré, à gauche, depuis la place Vendôme jusqu à la rue des Bons-Enfants ; la rue des Bons-Enfants à gauche, la rue Neuve-des-Bons-Enfants, à gauche, jusqu'à larueNeuve-des-Petits-Champs ; la rue. Neuve-des-Petits-Champs jusqu'à la place Vendôme; la place Vendôme, à gauche, jusqu'à la rue Saint-Honoré.
Intérieur.
Les rues de la Sourdière, Neuve-Saint-Roch, d'Argenteuil, des Moineaux, l'Évêque, des Orties, Clos-Georgeot, des Moulins, Royale, Ventadour, Thérèse, du Hasard, Villedot, Sainte-Anne, Tra-versière ; la rue de Richelieu, des deux côtés, depuis la rue Saint-Honoré jusqu'à la rue Neu ve-des-Petits Champs ; le Palais-Royal et les rues de son pourtour, et généralement toutes les rues, culs-de-sacs, places, etc., enclavés dans cette limite.
SECTION DE LA PLACE VENDÔME.
Limites de cette section.
La rue de la Madeleine, à droite, en partant de la rue Saint-Honoré; la rue de l'Arcade, à droite ; la rue de la Pologne, à droite; la rue Saint-Lazare, à droite depuis la rue de la Pologne jusqu'à la rue de la Ghaussée-d'Antin ; la Chaussée-d'Antin, à droite, jusqu'au boulevard ; la rue de Louis-le-Grand, à droite, depuis le boulevard jusqu'à la rue Neuve-des-Petits-Champs : la rue Neuve-des-Petits-Champs, depuis la rue de Louis-le-Grand, à droite, jusqu'à la place Vendôme ; la place Vendôme, à droite, jusqu'à la rue Saint-Honoré ; la rue Saint-Honoré, à droite de la place Vendôme, à la rue de la Madeleine.
Intérieur.
Les rues Neuve-des-Capucins, Sainte-Croix, de l'Egout, Neuve-des-Mathurins, de la Ferme, Thi-roux, Caumartin, Trudaine, Boudreau, Basse-du-Rempart, le Boulevard, les rues de Luxembourg, des Capucines, etc. ; et généralément toutes les rues, Guls-de-sacs, places, etc., qui sont enclavés dans cette limite.
SECTION DE LA BIBLIOTHÈQUE.
Limites de cette section.
La rue Neuve-des-Petits-Champs, à gauche, depuis la rue de Louis-le-Grand jusqu'à la rue Vivienne ; la rue Vivienne, à gauche, jusqu'à la rue des Filles-Saint-Thomas, la rue des Filles-Saint-Thomas, à gauche, depuis la rue Vivienne
i'usqu'à la rue Notre-Dame-des-Victoires ; la rue lotre-Dame-des-Victoires, à gauche, depuis la rue des Filles-Saint-Thomas jusqu'à la rue Mont-
martre ; la rue Montmartre, à gauche, depuis la rue Notre-Dame-des-Victoires jusqu'au boulevard Montmartre ; le boulevard, à gauche de la rue Montmartre, à la rue Louis-l«-Grand ; la rue de Louis-le-Grand, à gauche, jusqu'à la rue Neuve-des-Petit-Champs.
Intérieur.
Les rues d'Antin, de Gaillon, Saint-Anne, Chabanois, de Richelieu, Golbert, des Filles-Saint-Thomas, Feydeau, Saint-Marc, Neuve-Saint-Marc, d'Amboise, de Favart, de Marivaux, delà Comédie, de Ménars, Neuve-Saint-Augustin, de Louvois, de Grammont,deChoiseul, de la Michodière, etc.., et généralement toutes les rues, culs-de-facs, places, etc. enclavés dans cette limite.
SECTION DE LA GRANGE-BATELIÈRE.
Limites de cette section.
La rue de Clichy, à gauche de la barrière, à la rue Saint-Lazare ; la rue de la Ghaussée-d'Antin, à gauche depuis la rue de Clichy jusqu'au boulevard, le boulevard, à gauche de la Ghaussée-d'Antin, à la rue Montmartre, rue du Faubourg-Montmartre et rue des Martyrs, à gauche, jusqu'à la barrière ; les murs de la barrière Montmartre à ceUe de Clichy.
Intérieur.
Les rues Blanche, de la Rochefoucauld ; rue Royale, ruelle Baudin, rues Saint-Georges, des Porcherons, des Trois-Frères, Taitbout, d'Artois, le Pelletier, Grange-Batelière, Ghaussat, Chante-Reine, de Provence, etc. ; et généralement toutes les rues, culs-de-sacs, places, etc. enclavés dans cette limite.
SECTION DU LOUVRE.
Limites de cette section.
Le bord de l'eau depuis le premier guichet du Louvre jusqu'au Pont-au-Cbange ; la rue de la Jouaillerie, à gauche, en enclavant les boucheries ; la rue Saint-Denis, à gauche, jusqu'à la rue Perrin-Gasselin ; laruePerrin-Gassehn, à gauche ; la rue du Chevalierrdu-Guet, à gauche, jusqu'à la rue des Lavandières ; la rue des Lavandières, à gauche, jusqu'à la rue des Mauvaises-Paroles; la rue des Deux-Boules, des deux côtés ainsi que le bout de la rue Bertiu-Pôirée, la rue Bétizy à gauche ; la rue des Fossés-Saint-Germain, à gauche, jusqu'au bâtinient du Louvre : le corps du bâtiment du Louvre, à droite, sert de limite jusqu'à la rue de Beauvais : la rue de Beauvais, à gauche, jusqu'à la rue Froid-Manteau : la rue Froid-Manteau, à gauche, depuis la rue de Beauvais jusqu'à la rivière.
Intérieur.
Le Vieux-Louvre, les rues du Petit-Bourbon, partie de celle de l'Arbre-sec, le quai et place de l'Ecole, la Samaritaine, le quai de la Mégisserie, Je cloître Saint-Germain-l'Auxerrois, les rues des Prêtres, Baillet, de la Monnaie, la place des Trois-
Maries, les rues Boucher, Thibautodé, et généra-leniëtlt tbutëS lés l'hes, ctils-dë-saës, places, ëtd. enclaVés dans fcettë limite.
SÉGÏION DE L'ORÀTDLRË!
Limites de cette section.
La rue Saint-Honoré, à droite, depuis la rue Froid-^Manteau jusqu'à la rue des Déchargeurs: la rue des Déchargeurs, à droite jusqu'à la rue des Fourreurs : la rue des Fourreurs, à droite, jusqu'à la .rue des Lavandières ; la rue Ses Lavandières, à droite* jusqu'à Ja rue des Mauvaises-Paroles ; la rue des Mauvaises-Paroles» à droite et à gauche ; la rue Bétigy, à droite ; la rue des Fossés-Saint-Germain, à droite, jusqu'à la colop-nade du Louvre; les murs au Louvre jusqju'à la rue de Beauvais : la rue de Beauvais, à droite, jusqu'à la fhë Froid-Manteau ; là riië FrOid-Man-teau, à droite, depuis la rue de Beauvais jusqu'à celle Saint-Hehorés
Intérieur i
Lëfe fiiès Jettn^SaititDènis, dtt Chantre, Champ* flebri; du Coif; du LouvPe, d'AttgiVilliërs, des Poiilies, BailleUl; partie dë ëëllë de l'Arbfë-sec» du Rëillé; Tifecliapë, dëfe Botirdohnais, des Dé-^ chargeurs, des deux fcôlés, depuis la rue des Fourreurs jusqu'à celle des Mauvài&és-Parolesj etc. ; et généralement toutes les rues, culs-de-sacs, places, etc. enclavés dans cette limite.
SECTION DE LA HATLE AU BLÉ.
Liinitès de cette ièètibh.
La riië dés Bons-Ënfahts ët ftëuVèfdëÔ-Bohs-Enfànts, à "droitê, dëpbis là riië feàint-Hohdfé jusqu'à la rue Neuve-des-Petits-Champs ; la rue de là Feuillade, à droite, jusqu'à la place des Victoires, la place des Victoires, à droite de la rue de la Feuillade, à la rue Croix-des-Petits-Champs ; Ja rue Croix-des-Petit6-Gbamçs, à droite, jusqu'à la rue Coquilière; la rue Coquil 1ère, à droite, jusqu'à la rue du Four, la rue du Four, à droite, jusq^à là rué Saint-Honoré J la fue Saint-Honoré, à droite, depuis là ïttë ail Fotir, jusqu'à la riië des Bons-Enfants.
Intérieur ï
Lës rtiès Baillif; delà Vrilliêt-ë, Groix-des-Pe-' tité-Champs, dil Boiiloi; du Péliëàn, dë Grehelle, d'Orlëaùg, dës Dëux"-Ectis; Babile, de Varenne, de Vâtihe, Oblih; dë SurUhëi Merciëf) là Nou-vellë-Hallë, etc. ; ët généralement toutes les rUe§,. titils-dë-sàcs, places,- ëtbi enclavés dans cette iimlte.
SECTION DES POSTES.
Limites de cette section.
La rue Saint-Honoré, à gauche, depuis la rue du FoUi* JUSt[U'à la rue dë là Tonnellerie ; lâruede la Tdhhëllerië, à gàuôhe; jusqu'à la rué de la Fro-magertë | le bqUt dé la rue de la Fromagerie; à gailchë, jusqu'à là Mie GOititesSe^-d'ArtOis ; leë
rues Comtesse-d'Artois et Montorgueil, à gauche, jusqu'au pâssâ^e dUBaumdil: là rue Mohfrtiartrë; à gâucne, depuis le passage dii Sàudlôii JUschl'â la rUë de là JUSsienhë ; les rues dë la Jussiéflhë et Coq-Héron, và gauche de la rUë Mdhtihartre à la rue Coquillière ; la rue Coquilière, à gauche, jusqu'à la rue du Four ; la rue du Four, à gauche, jusqu'à la rue Saint-Honoré.
Intérieur.
Lës i-ueS VeMëtet, Plâtrièrë» du Jour, Traînée^ TiqUettitthë; des ProUVaires,dëë Dëtifc^Eetts, de la Fâyettë ëtô.$ et généralement, tôutëfe lëô rue8> culs-dô-sacs, places, etc. enclavés dans cette limites
SECTION DE LA PLACE DE LOUIS XIV.
Limites de cette section.
Là ruë Neuye^deà-Pëtits^tlhâmps, ft gauchë* dëptiis la rue Vivienne jusqu'à la rué de la Feuillade ; la rhé dé la Feuillade, à gauche, jusqu'à la place Victoire ; lë pourtour de la place Vlc^ toirë, à gauche» depuis la rUë de la Fëuillade jusqu'à la rUe Gf,oiX-dès-Pëtitsi€!hamps; la rUë CroiX-dës-Petits-Champ9, à gauche» de la placé Victoire à la rue Coquilière j la rue Coquilière, à gauche, jusqu'à la rue Coq-Héron J la rue Coq-Héron et de la Jussienne, à gauche, jusqu'à la rue Moqtmartre; la rue Montmartre, à gauche, jusqu'à là rUe frôtrë-Dâmé-aë§-Victoires ; la rue Notre-Dame-des-Victoires, à gauche, jusqu'à la rue JoqUelet; la rue des Fil les-Saint-Thomas, à gauche»jusqu'à la rue Vivienne ; la rue Viviënile, a gauche» jusqu'à la rue Neuve-des-Petits^-Ghamps;
intérieur.
Rue îfotre'-Dame-des-Victoires, des dent côtés* jupqu^à là rue Joquejet ; les rues Joquelet, Saint-Pierrë, du Mail, des Fossés-Montmartre, des Vieux-Augustins, Soly., Pagevin, Petit-Reposoir, des Petits-P^res, la place des Victoires et les rues qui y aboutissent}, ët généralement toutes les rues, culs-de-sacs* places, etc. enclavés dans cette limite.
SECTION DE LA FONTAINE MONTMORENCY.
Limites de êeite section.
Le boulevard, à droite, depuis la.rue Mont-* martre jusqu'à la rue Poissonnière $ ia rue Pois-1 sionnère et celle du Petit-Ce rreau, à droite; jusqu'au passage du Saumon; le passage du Saumon, des deux côtés; la rue Montmartre, à droite, depuis le passage du Saumon, jusqu'au boulevard.
inUHeùf :
Lë8 rueë duSëhtier', Sâihf-Fiàcrë, des Jëùhetir's, Sâiht-Roch, dU Croissant, Saltlt-Jôseph, dû Chenet, partië dë la rue de Gléry; Ûépiitë Jà rtië Montmartre jusqu'à celle dû Petit-tiârtëaù | lô£ rues NeUve-Saint-EUstachë; du Botit-du-MOhdë; etë. ; et gériéraletneflè toutëd leè Piles, tiuls-dë* sacs i places, ëtct ëhclavës dahS cette limité.
SECTION DË BONNE * ftOUVÉtLË.
Limités de dette section.
Le bdtilëvàrd, à di-oite, de ià rue Poissidonière à la riië Saint-Denis ; la rue Saint-Denis, à droite, jusqu'à là me Thévënot; là riiè Thévënot à droite, juSqU à ià rue du Petit-Carreàu ; les rues du Petit-Carreau et Poissonnière, a droitë, jusqu'au boulevard.
Intérieur;
Les îdes de la Luné, Beaufregàrd èt toutes celles qui y abOtitiSsebt ; paf-tié de la fuë de Cléry, depuis la ruë du Petit-Carreau justjti'ad boulevard; les rues de Bodrbori, Saint-Claude, Sainte-Foy, Saibt-Philippe4des,Fillës-Uiêd,la Halle à la mafêe, ëtc. ; ët gêhëraièmëht toutes le& rues, culs-de-sacs, places, etc. eticlàVés dans cette limite.
SECTION DÛ PONCÈAÛ.
Limites de cette section.
Le boulevard à droite dè la pdîftë Saiîit-DôHls à îapoHë SainfcMartin ; la rue Samt-Màrtid, à droite, jusqu'à la rlie aul Oul-S; la l'uë aux Oul-s, à droite* jusqu'à la rde Saint-Denis : la rue Sàint-DëtliSi a droitë, jusqu'au bolilevafd;
Intérieur.
Les rues Sainte-Apolline, Neuve-Saint-Denis, des Egouts, de la Longue-Allée* du Ponceau, Gue-rin-Boisseau, Greneta, du Grand et du Petit-Hurleur, Bourg-l'Abbé, l'Enclos-de-la-Trinité, etc. ; et généralement toutes les rues, Guls-de-sacsj places, etoj enclavés dans cette limite*
SECTiON DE MAUCONSEIL.
Limites de cette section.
La rue Thévënot, à droite de la rue Montorgueil à la rue Saint-Denis ; la rue Saint-Denis, à droite de la rue Thévënot à la rue de la Chanvrerie ; la rue de la Chanvrerie, à droite ; et en continuant toujours à..droite, les petits Piliers jusqu'à la rue de la Fromagerie ; depuis le coin des petits Piliers, en remontant à droite la rue Comtesse-d'Artois ; rue Montorgueil, à droite* en remontant jusqu'à la rue Thévënot.
Intérieur.
Les rdes Saint-SâuveUr, Beaurepaire, du Rehârd, Tire-Boudin, des Deux-Portes, Pâvee, du Pëtit-Lyoti, Fraûçoisë, MaUçonseil, Verdelet, de la TrUandërié, Rêàlë, Pëtiië-Truanderie, ëtc.; et généralement toutes lës rués, culé-dé-sacs, places, etc. êhclâVéé dans cëttë limite.
SECTfOS tiu MARCHÉ DES IftfïOCENTS.
Limités dè ëétié seCtiori.
La l'île Saint-Denis, à droitë, depuis la rue de
la Chanvrerie jusqu'à la rue PerriniGasselin ; la rue Perfin-Gasselin» à droite ; la place du.Gheva-lier-du-Guet, à droite ; la rue au Ghevaiier-du-Guet* à droite, jusqu'à la rue dest Lavandières j la rue des Lavandières, à droite, jusqu'à la rue de la Tableterie; la rue des Fourreurs, à droite ; partie de ia tuëdës DêChâfgelit's; adttJitê, depuis ia rue des Fourreurs jusqu'à la rue de la Ferronnerie ; rue Saiht-Honoré (Ou dé là Chausseterie) à droite, depuis la rue de la Ferronnerie jusqu'à la rue de la Tonnellerie; rue dë la Tohnellërlëj à droite, jusqu'à la ruë de la Fromagerie $ la hallë) sans y comprendre les petits Piliers, à gauche, en allant à la l'Ue de la Chanvrerlë ; là i*Ue de la Ghanvrerie, à droite, en allant à la rue Saint-Denisj
Intérieur.
Les rues de la Frothâgërlè, de la Cordonnerie, de la Friperie, de la Poterie» des Prêcheurs, de la Gossonnerie, aux Fers, le marché dës Inwn cents ; les rues, de la Ferronnerie, Courtalon, la Tableterie, Vieiile-Harangerie, du Ghevalier-du-Guet, la place du Ghevaiier-du-Guet, la place Sainte-Opportune, etc.; et généralement toutes les rues, culs-de-sacs, places, etc. enclavés dans cette limite.
SECTION DES LOMBARDS* Limites de cette section.
La rue Saint:Martin, à droite) depuis la rue aux Ours, jusqu'à la rue Saint-Jacques-la-Boucherie ; là rue Saint-Jacques-la-Boucherie, â droite* jusqu'à la rue Saint-Denis ; ia rue Saint-Denis, à .droite, jusqu'à la rue aux Ours • la rue aux Ours, à droite de la rueSaint-Dëniâ â la rue Saint-Martin.
ïntérieurt
Les rues Salie-au-Comte, Quincampoix, de Venise, Aubri-Boucher, Trousse-Vache, Oignard, des Trois-Maures, des CinqrDiamants, des Lombards, de la VieilIë-Mohhaie, dë la Heaumerie, Mariveau, des Ecrivains, d'Avignon, etc.; et généralement toutes les rues, ëdls-de-sacs, places, etc. enclavés dans cette limite.
SECTION DËS ARCIS.
Limités dé cette sèctiont
Là rue dë la Jouailierie, à droite , du pdnt aU Change à la rue Saint-Jacques-la-Boucherie ; la rue Saint-Jacques-la-Boucherie, à droite, jusqu'à la ruePlanche-Mibray; la rue des Arcis, à droite, jusqu'à la rue dé la Verrerie ; la rtië dë la Verrerie, à droite, jusqu'à la rue du Coq ; là ilie dti Coq* à droite, jusqu'à la rhë dè la Tixèrândérie j la rue de la Tifcef&tiderie, à droite; jlièqu'â là rue du Mouton ; la rtië du MdUtôft ët dé stiltë la place de Grèves â drbitë juâqu'â la rivière: lë bord de la riviêrë, depdis la pladë dé QfëVe JUS* qu'au pont au Change.
intérieur.
Le quai dé Gêvrés, quai Pelletier, les rues de la vieille place aux Veaux, de la Tannerie, de la
Vannerie, delà Coutellerie, Planche-Mibray, Jean-Pain-Mollet, Saint-Bon, de la Poterie, des Coquilles, etc.; et généralement toutes les rues, places, culs-de-sacs, etc. enclavés dans cette limite.
SECTION DU FAOBOURG-MONTMARTRE.
Limites de cette section.
La rue Poissonnière et celle Sainte-Anne, à gauche, depuis le boulevard jusqu'à la barrière ; les murs depuis la barrière Sainte-Anne jusqu'à la barrière Montmartre ; la rue des Martyrs et celle du Faubourg-Montmartre, à gauche,"depuis la barrière jusqu'au boulevard; le boulevard, à gauche, de la porte Montmartre à la rue Poissonnière.
Intérieur.
La rue de Rochechouart, de la Tour-d'Auvergne, de Belle-Fonds, de Coquenard, de Montholon, d'Enfer, le passage de la Grille, rue Bergère, etc.; et généralement toutes les rues, culs-de-sacs, places, etc. enclavés dans cette limite.
SECTION Dp LA RUE POISSONNIÈRE.
Limites de cette section.
La rue Poissonnière et celle Sainte-Anne, à droite, jusqu'à la barrière ; les murs de la barrière Sainte-Anne à la barrière Saint-Denis ; la rue du Faubourg-Saint-Denis, à droite, jusqu'à la porte Saint-Denis; le boulevard, à droite, jusqu'à la rue Poissonnière.
Intérieur.
Les rues de Paradis, des Petites-Ecuries du roi, d'Enghien, de la Michodière, Martel, etc.; et généralement toutes les rues, culs-de-sacs, places, etc. enclavés dans cette limite.
SECTION DE BONDY.
Limites de cette section.
La rue du Faubourg-Saint-Martin, à droite, depuis le boulevard jusqu'à la barrière Saint-Martin ; les murs de la barrière Saint-Martin à celle du Temple ; la rue du Fauhourg-du-Temple, à droite, jusqu'au boulevard ; le boulevard à droite de la rue du Faubourg-du-Temple, à la porte Saint-Martin.
Intérieur.
Les rues des. Morts, Saint-Maur, des Moulins, Saint-Louis, rues de l'flôpital-Saint-Louis, des Récollets, de Carême-Prenant, Saint-Ange, Gau-court, Grange-âux-Belles, des Vinaigriers, des Marais-Saint-Martin , Gilbert, Janson, Saint-Nicolas, de Lancry, de Bondy, etc. ; et généralement toutes les rues, culs-de-sacs, placés, etc. enclavés dans cette limite.,
SECTION DU TEMPLE.
Limites de cette section.
La rue du Faubourg-du-Temple, à gauche, de-
puis la barrière jusqu'au boulevard, et de suite la rue du Temple, à gauche, jusqu'à la rue de la Corderie ; les rues de la Corderie et de Bretagne, à gauche, jusqu'à la rue des Filles-du-Calvaire ; la rue des Filles-du-Calvaire, à gauche, jusqu'au boulevard, et de suite la rue de Ménilmontant et celle de la Roulette, à gauche, jusqu'à la barrière ; les murs de la barrière de Ménilmontant à celle de Belleville.
Intérieur.
Les rues du Chemin-Saint-Denis, Blanche, des Fontaines-au-Roi, dès Trois-Bornes, de la Folie-Mirecourt, du GrandPrieuré-de-Malthe, des Fossés-du-Temple,de la ToUr, d'AngouIême, de Crussôl;, le boulevard des deux côtés, les rues de Vendôme, Beaujolais, Forez, Chariot, Saintonge, Normandie, de Boucherat, l'enclos du Temple, la maison des Pères Nazareth, comme chef-lieu, etc.; et généralement toutes les rués,_ culs-de-sacs, places, etc. enclavés dans cette limite.
SECTION DE POPINCOURT.
Limites de cette section.
La rue de Ménilmontant et celle de la Roulette, à droite, depuis le boulevard jusqu'à la barrière de Ménilmontant ; les murs depuis la barrière de Ménilmontant, jusqu'à la barrière de C baronne ; la rue de Charonne, à droite, depuis la barrière jusqu'à la rue de Lape ; les rues de Lape, et d'Aval à droite, jusqu'au boulevard ; le boulevard, à droite, jusqu'à la rue de Ménilmontant.
Intérieur.
Les rues du Bas-Popincourt, de Popiucourt, Saint-Sébastien, Amelot, Saint-Sabin, de la Gon-trescarpe, de la Roquette, de Basfroy, du Chemin-Vert, des Amandiers, de. la Folie-Renaud, des Rats, des Murs-de-la-Roquette, de la Muette, cul-de-sac de la Roquette, etc.; et généralement toutes les rues, culs-de sacs, places, etc. enclavés dans cette limite.
SECTION DE LA RUE DE MONTREUIL.
Limites de cette section.
Les rues d'Aval, de Lape et de Charonne, à droite, depuis le boulevard jusqu'à la barrière de Charonne ; les murs jusqu'à là barrière- du Trône ; la rue du Faubourg-Saint-Antoine, à droite, depuis la barrière du Trône jusqu'au boulevard; le boulevard, à droite, depuis la porte Saint-Antoine jusqu'à la rue d'Aval.
Intérieur.
La partie de la rue Amelot, depuis la rue d'Aval jusqu'à la rue Saint-Antoine ; les rues Sainte-Marguerite, Saint-Bérnârd, de Mon treuil,, des Boulets et du Trône," le cul-de-sac Saint-Bernard, etc. ; et généralement toutes les rues, places, etc. enclavées dans cette limite.
SECTION DES QUINZE-VINGTS.
Limites de cette section.
La rue du Faubourg-Saint-Antoine, à droite, depuis la rue des Fossés-Saint-Antoine jusqu'à la
barrière du Trône ; les murs, depuis la barrière du Trône jusqu'à la barrière de la Râpée ; le bord de la rivière, depuis la Râpée jusqu'à la rue des Fossés-Saint-Antoine ; la rue des Fossés-Saint-Antoioe borde cette limite de ce côté, et elle n'est point de cette section.
Intérieur.
Les rues de Picpus, des Balets, de Mont-galet, de Reuilly, de Charenton, la Grande-Pinte, de Bercy, de Rambouillet, de la Râpée, des Charbonniers, des Chantiers, des Anglaises, Moreau, dv. Fumier, de la Planchette, Saint-Nicolas, Tra-versière, Trouvée, Cotte, le Noir, d'Aligre, le marché Saint-Martin, les rues de Beauvau, etc. ; et généralement toutes les rues, culs-de-sacs, places, etc., enclavés dans cette limite.
SECTION DES GRAVILLIERS. Limites de cette section.
Le boulevard, à droite de la porte Saint-Martin à la porte du Temple ; la rue du Temple, à droite du boulevard à la rue Chapon ; les rues Chapon et du Cimetière-Saint-Nicolas, à droite de la rue du Temple à la rue Saint-Martin : la rue Saint-Martin à droite, depuis la rue du Cimetière-Saint-Nicolas jusqu'au boulevard.
Intérieur.
Les rues Meslée, Neuve-Saint-Martin, Notre-Dame-de-Nazareth , du Vertbois, Neuve-Saint-Laurent, de la Croix, des Fontaines, Phelipeaux, des Vertus, de Rome, Aumaire, Jean-Robert, des Gravilliers, etc. ; et généralement toutes les rues, culs-de-sacs, places, etc. enclavés dans cette limite.
SECTION DU FAUBOURG SAINT-DENIS.
Limites de cette section.
La rue du Faubourg-Saint-Denis, à droite, du boulevard à la barrière ; les murs de la barrière Saint-Denis à la barrière Saint-Martin; la rue du Faubouçg-Saint-Martin, à droite, de la barrière au boulevard; le boulevard, à droite, de la porte Saint-Martin à la porte Saint-Denis.
Intérieur.
La foire Saint-Laurent, les rues Saint-Laurent, Saint-Jean, Neuve-d'Orléans, etc.; et généralement toutes les rues, culs-de-sacs, places, etc. enclavés dans cette limite.
SECTION DE LA RUE BEAUBOURG.
Les rues du Cimetière-Saint-Nicolas et Cbapon, à droite de la rue Saint-Martin à la rue Sainte-Avoye : les rues Sainte-Avoye et Bar-du-Bec, à droite, de la rue Chapon à la rue de la Verrerie; la rue de la Verrerie, à droite, depuis la rue Bar-du-Bec jusqu'à la rue Saint-Martin ; la rue Saint-Martin, à droite, depuis Saint-Merri jusqu'à la rue du Cimetière-Saint-Nicolas.
Intérieur.
Les rues de Montmorency, Grenier-Saint-Lazare, Michel-le-Comte, du Mort, des Petits-Champs, des Ménéiriers, des Etuves, Geoffroy-l'Angevin, Cor-roirerie, Maubuée, Simon-le-Franc, Neuve-Saint-Merri, Taille-Pain, Brisemiche, du Renard, du Poirier, Beaubourg, partie de celle Transnonain, jusqu'à la rue Chapon, et généralement toutes les rues, culs-de-sacs, places, etc. enclavés dans cette limite.
SECTION DES ENFANTS-ROUGES.
Limites de cette section.
Les rues Sainte-Avoye et du Temple, à droite, depuis la rue Sainte-Croix-de-la-Bretonnerie, jusqu'à la rue de la Corderie : les rues de la Gor-derie et de Bretagne, à droite, jusqu'à la vieille rue du Temple ; la vieille rue du Temple, à droite, de la rue de Bretagne à la rue Sainte-Croix-de-la-Bretonnerie; la rue Sainte-Croix-de-la-Bretonnerie à droite, jusqu'à la rue Sainte-Avoye.
Intérieur.
Les rues du Plâtre, des Blancs-Manteaux, de l'Homme-Armé, du Puits, des Singes, du Chaume, de Paradis, de Soubise, de Brac, des Vieilles-Audriettes, des Quatre-Fils, du Perche, d'Orléans, des Oiseaux, du Grand-Chantier, Pastourel, d'Anjou, de Poitou, de Limoges, de la Marche, de Berri, de Beauce, Porte-foin, etc. ; et généralement toutes les rues, culs-de-sacs, places, etc. enclavés dans cette limite.
SECTION DU ROI-DE-SICILE.
Limites cette section.
La rue du Coq, à droite, depuis la rue de la Tixeranderie jusqu'à la rue de là Verrerie; la rue de la Verrerie, à droite, depuis la rue du Coq jusqu'à la rue Bar-du-Bec ; la rue Bar-d u-Bec, à droite, jusqu'à la rue Sainte-Croix-de-la-Bretonnerie ; la rue Sainte-Croix-de-la-Bretonnerie, jusqu'à la vieille rue du Temple; la vieille rue du Temple, à droite, depuis la rue Sainte-Croix-de-la-Bretonnerie, jusqu'à la rue des Francs-Bourgeois; la rue des Francs-Bourgeois et la rue Neuve-Sainte-Catherine, à droite, jusqu'à la rue Culture-Sainte-Catherine ; la rue Culture-Sainte-Catherine à droite, depuis la rue Neuve-Sainte-Catherine, jusqu'à la rue Saint-Antoine ; la rue Saint-Antoine à droite, depuis la rue Culture-Sainte-Catherine jusqu'à la rue de la Tixeranderie; la rue Tixeranderie, à droite, jusqu'à la rue du Coq.
Intérieur.
Les rues des Deux-Portes, des Mauvais-Garçons, le Gimetière-Saint-Jean, les rues de Berry, Cloche-Perche, Tirou, de la Verrerie, des deux côtés, depuis la rue du Coq au Cimetière-Saint-Jean; les rues du Roi-de-Sicile, Pavée, des Rosiers, des Juifs, des Ecouffes, Bourtibourg, de Moussi, des Billettes, etc.; et généralement toutes les rues, culs-de-sacs, places, etc., enclavés dans cette limite.
SECTION DE L'HOTEL-DE-VILLE.
Limites de cette section,
. La rue des Nonaindières, à gauche, du pont Marie à la rue Saint-Antoine ; la rue Saint-Antoine à gauche, jusqu'à la rue de la Tixerandërië ; la rue de la Tixeranderie, à gauche, jusqu'à la rue du Mouton; la rue du Mouton, à gauche, et la place de Grève, à gauche, jusqu'à la rivière ; le bord de là rivière depuis ia Grève jusqu'au pont Marie.
Intérieur.
Les rues de. Joui, de la Mortellerie, quai des Ormes, le Port-au-Blé, les rues des Martroi, de là Levrette,. le Long-Pont, des Barres, Grepier-sur-l'Ëàù, Geoffrpi-l'Asnier, du Pourtour, du Monceau, du Pet-aû- Diable, l'Hôtel-de-Ville, etc.; et généralement toutes les rues, culs-de-sacs, places etc.,'. enclavés dans cette limite.
SECTION DE LA PLACE-ROYALE.
Limite cette section.
La rue duiTemple et celle des Filles-du-Galvaire, à droite, à prendre de la rue des Francs-Bourgeois jusqu'au boulevard ; le boulevard, à-droite, depuis là ruë dés Filiès-du-Galvaîrè jusqu'à la porte Saiht-Antoine ; la rue Saint-Antoinë à droite, depuis là porte Saint-Antoine jusqu'à la rue Gul-ture-Sainie-Gatherine ; la rue Guliùre-Sainte-Çatherinë, à droite, jusqu'à la rue Neuvè-Sainte-Cathèripe ; la rue Neuve-Sainte-Gatherine ét des Francs-Bo'tirgéois, à droite, à prendre de la rue Culture-Sain te-Gatherine jusqu'à la rUe du Temple.
Intérieur.
Les rues de l'Ôsèillé, dU Pont-aux-Choux, Saint-Louis, de l'Egout, Royale, place Royale ; les rues Guémertée, des Tournelles, Jean-Beàu-Sire, de la Mule, du Foin, des Minimes, Nëuve-Saint-Gilles, Saint-Gillès, deà Douze-Poftes, du HaHay, Saint-Claude, Saint-François, dît Roi doré, Sàint-Gemis, Sàint-Anastase, Culturë-Saint-Gèrvaiâ, de la Perle, Barbeltë, dii Parc-Royal, Payenne, des Trois-Pavillons,de Tofigini, etc.; et généralement toutes les ruêà, CUlS-de-saCs, places enclavées dans cette limite.
SECTION DE L'ARSENAL.
Limites de céttk section:
La rue des Fossés-Saint-Àntoine entière, depuis la rivière jusqu'à la rué du Faubourg Saint-Antoine, la place de la Bastille, à gauche jusqu'à la rue Saint-Antoine ; la rue Saint-Antoine, a gauche, jusqu'à la rue des Nonaindières; la rue des Nonaindières, à, gauche, jusqu'au pont Marier le quai Saint-Paul, lé port Saîm-Paul, lë quai de rArsènal, lé long de la ritièfë, jusqu'à la rtiëdeâ Fossés-Saint-Aùtoinë.
Intérieur.
Les rues des Prêtres, Percée, Saint-Paul, des Barres, du Figuier, du Fauconnier, de l'Etoile
des Jardins, des Lions, Neuve-Saint-Paul, des Trois-Pistolets, Gérard-Boquet, Beautreillié, dti Petit-Musc, de la Cerisaie, le quài des Cêlestiiiè. les cours de l'Arsenal, les maisons qui sê trouvent situées dans l'île Louviérs, etc. ; et généralement toutes les rues, culs-de-sacs, places, ëtc., enclavés dans cette limite.
SECTION DÈ L'ÎLE.
Limites de cette section.
La limite de cette section est située dans son île, et comprend toutes les rues, quais, etc. qui s'y trouvent.
SECTION DE NOTRE-DAME.
Limites de cette section.
La rue de la Barillerie, à droite, du pont Saint-Michel au pont au Change ; plie est ensuite bornée au nord, à l'est et au sud, par la rivière.
Intérieur:
Le Marché-Neuf, les rues de la Calandre, Saint-Eloi, aux Fèves, de la Draperie, de la Pelletërie, du Marché-Paîu, de la JuiVerie, de la Lanterné, du Haut-Moulin, des Marmouzets, de la LicOrne, Saint-Christophe, Notre-Dame, des Ursins, Saint-Landry, d'Enfer, le.cloître Notre-Dame, etc. ; et généralement toutes les rues, culs-de-sacs, places, etc., enclavés dans cette limite.
SËëTION D'HENKI IV.
Limites de cette section.
Le pont Saint-Michel, à droite, depuis la rûe de la Bouderie à prendre au Cagnard. Idem, à gauche, les maisons qui sont sur le pont seulement ; la rue de la Barillerie, à gauche, du pont Saint-Michel au pont au Change; bornée au nord, à l'ouest et au sud, par la rivière.
lntérièûr:
Le quai de l'Horloge, la place Dauphin^, la rue du Harlay, le quai des Orfèvres, la rue Saint-Lùuis, la rue Sainte-Anne, Iës cours dU Palais, lé Palais, et généralement toutes les rues, places, culs-de-sacs, etc. qui se trouvent enclavés dans cette limite.
SECTION DÉS INVALIDES.
Limites de cette section.
Le bord delà riviere depuis la; barrière jusqu'au pont de Louis XVI ; la rue de Bourgogne, à droite, depuis le pont de Louis XVI jusqu'à la rue de Varenne ; le bout de la rue de Varenne, à droite, depuis la rue de Bourgogne jusqu'au boulevard ; le boulevard, à droite, depuis la rue1 de Varenne jusqu'à la rue de Sèvres ; le côté dé la rue de Sèvres, à droite, depuis le boulevard jusqu'à la barrière ; les murs depuis la barrièrè de Sèvres jusqu'à la rivière.
Intérieur.
Le Gros-Caillou, le Château-de-Grenelle* l'Beole-Militaire, les Invalides, l'extrémité des rues de Grenelle* de l'Université et de St-Dominique* etc.; ainsi que toutes les rues, places> etc enclavées dabs cette limite.
SECTION DE LA FONTA1NE-GRENELLE.
Limites de cette section.
le bbrd de la rivière, du Pont de Louis XVI à lâ ruë dëstSaints-Pères : la rue dès Sàiiits-Pêres, à droitë, jusqu'à la rdë de Grerielle : la rue de Grënellè, à droite, deptiis la rue des Saints-Pères jusqu'à la rue de Bourgdgnë : la rUé de Bourgogne, à droite, jusqu'à la rivière.
Intérieur i
Les rues de Bourbon* de l'Université* de Saint-Domihique, à prendre de la rue de Bourgogne à la rue des Saints-Pères ; la rue du Bac, depuis ia rue de Grenelle jusqu'au Pont-Royal ; les rues de Bellechasse, de Poitiers, de Verneuil, de Beaune, Sainte-Marïè, Saint-Guillaume, des Rosiers, etc. ; et généralement toutes les rues, places, culs-de-sacè, etc. énclàvés dàhë cette limité;
SECTION DES QUATRE-NATIONS.
Limités dé cette section.
La rue dè^ Saint^Pèl-és; à droite, jusqu'au quai des Théatins : les quais des Théatins, des Quatre-Nations et de Çonti, depuis la rue des Saints-Pères jusqti'àù Poût-NëUi : les rues Ddtiphine et des Fossés-Saint-Germaip, à droite du Pont-Neuf, à la rue des' Boucheries ; là rue dès Boucheries à droite ; la rue du Pour à droite ; la Croix-Rouge, à drtiite, jusqu'à la rue deë Saints-Pères.
Intérieur.
Les rUes des Petits-AUgustins, de Seipe, Maza-rine, dès Marais, Guénégaud, deNevers, deBuci, des Mâuvais-Garçons, Jaeob, du Colombier, des DeUX^Anges, Saint-Benoît, Bourbon-ie-Château, de l'Ëchaudé, Sainte-Marguerite; dès Ciseaux, de l'Egout, Taranne* du Sabot, du Dragon, du Sépulcre* petite ruéTaranne, l'enclos de ia Foire Saint-Germain; etc.; et généralement toutes les rues, culs-de-sacs, places, etc. enclavés dans cette limite.
SECTION DU THÉATRE-FRANQAIS.
Limites de cette section.
Les rues de Condé, des Fossés-Saint-Germâin et DaUpiliinë; à droite* depuis la rlle de Vaugirard jtisqti'âU Pdbt-Setif î le quai des Augustins, du Pont-Neuf à la ruè du Hurepoix ; la rue du fld-repoiX des dëux Côtés ; la placé du Ppnt-Sàirit* Michèl à droite, là rue de la Bouderie et là rue dë la Harpe; à droite, jusqu'à la place Saint-Michel ; lë côté fié la place saint-Michel, à droitë; en re+-tour sÉùr la rtië des Francs-Bourgeois, aussi à
droite ; la rue de Vaugirard, à droite, jusqu'à la rue de Condé.
Intérieur.
Leë rues dës Augustins i Christine, Savoie, Pavée j GÎMe-^Oœurj dê l'Hirondelle; St.-André-des^Arts, Cdur-du-Commerce; rués de l'Eperon, du Paon; du Jardinet, Mignon, des Poitevinsi du Cimetière-St.-André, Hautefeuille, des Corde-liers; Mâcon* Perbée* Poupée, Serpente, des Deux-Portes, Pierre-Sarrasin, de Touraine, de l'Observance, des Fossés-Monsieur-le^Princë, des Francs* Bourgeois, de Condé, du Théâtre-Français ; le Théâtre-Français et les rues qui y aboutissent, etc. ; et généralement, toutes les rues, culs-de-sacs, places, etc. ënclavés dànâ cette liinite.
SECTION DE LA CROIX - ROUGE.
Limités dè cette section i
La rue d^ vaugirardi à gauche, depuis. là jbar* rièrejusgiï'a là tu^e, du Regard; la r^è' jài£iRéT gard, à gauche, jrisqU'àia rue.dU Cliërghe-%aij la riië qu Cnërche-Midi, à gaucHç, jusqu'à là Croix-Rouge; la CroixTRotige, à gà^Gnê, juéqii'à la ruë aë Grenelle ;, ia, ruë deGrenélle, a gauchç, ] iiS-qu'à là rue de Bourgogne; là rue dé Bourgogne, à pauche, jusqu'à la rue de Vàrënne ; lâ rud dè Yarenne, à gauche, depuis la rue de Bourgogne jusqu'au boulevard ; le bdulevard, à gauche, depuis la rue de Varenne jusqu'à la rue de Sèvres ; la rde de Sèvres, à gauche,. depuis le boulevard jusqu'à la bârrière 5 , les murs depuis la barrière du Sèvres.jusqu'à belle de Vaugirard.
intérieur.
Les rues dè Yarehne, de la Planche;, de la Chaise; partie de celle du Bac, de la rue de Grenelle à la rue de. Sèvres ; les ruçs Hillerin-Bertin, de Babylone, Plumet, ae Monsieur, Rousselet, Traverse, des Brodeurs, de Sèvres, Barouillère, Saint-Romaid, S&int-Màiit', Sâint-PIacide, du Petit-Baç, des Vieilles-Tuileries, du Petit-Vau-j»irârd, de Bagnéux, dë Ravel; ëtc: ; ët généralement toUtes lès rues; tdlë-dë-sacs, places etc. ëtlclàvés dans cette limite.
SECTION rlu LUXEMBOURG./ Limités de bette êèétiom
La rue de tâugirard, a gaubhe, déduis la hie dés Francs-rBpiirgëoiê jusqu'à, la rtië de Condé ; la rUe de Cdhdéj a gauche, jusqu'à tii. rue des Boucheries,; la rué des Boucheries, & jjtâuctte.i là rue du Fçur,. à gauche, jjù,s|u'à'la Groix^R^^è -, partie 4e l,a plaçë. d,é là, Croix-RoUge, à àducnë, jusqu'à ia fûé au.Qnerche-llidi ; là rUé ftqGuërche-llidi, à gauche, jusqu'à ia rue du Regard; ld, rUe du Regard, à gauche ; là riie dë Yayg;rard, à gauche, depuis là rue du Regard jiis^u^"là barrière; les nouveaux murs, depuis la barrière de Vaugirard jusque derrière l'Institut de l'Oratoire, de la aliant aboutir au mur des Chartreux ; le mur dès Chartreux, jusqu'à .celui du Luxembourg; Pintérietir du Luxembourg.
Intérieur.
Les rues du Cœur-Volant, des Quatre-Vents, la Foire Saint-Germain; les rues Princesse, Guisarde, des Cannettes, de Tournon, Garancière, du Petit-Bourbon, des Aveugles, Palatine, du Ca-nivet, des Fossoyeurs, Ferou, du Vieux-Colom-bier, Pot-de-Fer, Cassette, Garpentier, Mezière, flonoré-Ghevalier, de Vaugirard, des deux côtés, depuis la rue de Coudé jusqu'à la rue du Regard ; Notre-Dame-des-Champs, du Montparnasse, le cul-de-sac Notre-Dame-des-Ghamps ; et généralement toutes les rues, culs-de-sacs, places, etc., enclavés dans cette limite.
SECTION DES THERMES-DE-JULIEN.
Limites de cette section.
La rue de la Boucherie, à gauche ; rue de la Harpe, à gauche, jusqu'à la place Saint-Michel ; partie de la rue des Francs-Bourgeois, à droite ; au coin de la rue de Vaugirard à la place Saint-Michel ; la placé Saint-Michel, à droite ; la rue d'Enfer, des deux côtés, jusqu'à la rue Saint-Dominique ; la rue Saint-Dominique, à gauche, jusqu'à la rue Saint-Jacques; la rue Saint-Jac-
?ues, à gauche ; de la rue Saint-Dominique au etit-Pont ; la rue de la Huchette, des deux côtés, jusqu'à la rue de la Bouderie.
Intérieur.
Les rues Zacharie, Saint-Severin, des Prêtres, de la Parcheminerie, Boutebrie, du Foin, des Mathurins, des Maçons, de la Sorbonne, le Cloître Saint-Benoît, rue Richelieu, place de la Sorbonne, les rues des Poirées, des Cordiers, de Gluny, passage des Jacobins, rue Hyacinthe, Saint-Thomas, etc. ; et généralement toutes les rues, culs-de-sacs, places, etc. enclavés dans cette limite.
SECTION DE SAINTE - GENEVIÈVE.
Limites de cette section.
La rue du Petit-Pont, à gauche; du Petit-Pont à la rue Galande ; la rue Saint-Jacques, à gauche, jusqu'à la rue des Fossés-Sain t-Jacques ; la rue des J?ossés-Saint-Jacques, à gauche : l'Estrapade, à gauche ; rue Contrescarpe, à gauche ; la rue Bordet, à gauche, depuis la rue Contrescarpe jusqu'à la rue Glopin ; la rue Glopin, à gauche, jusqu'à la rue d'Arras; la rue d'Arras, à gauche, jusqu'à la rue Traversine ; la rue Traversine, à gauche, jusqu'à la rue Saint-Nicolas; la rue Saint-Nicolas, à gauche, jusqu'à ia rue Saint% Victor ; la rue Saint-Victor, des deux côtés, depuis la rue Saint-Nicolas jusqu'à la rue deBièvre; la rue de Bièvre, des deux côtés, jusqu'à la rue des Grands-Degrés ; la rue des Grands-Degrés, des deux côtés, prenant du côté droit à la pompe, et de l'autre côté à la rue des Bernardins, jusqu'à la rue de la Bûcherie ; la rue de la Bùcherie, des deux côtés, jusqu'au Petit-Pont.
Intérieur.
Les rues Saint-Julien-le-Pauvre, du Fouare, des Rats, Jacinthe, d'Amboise, Perdue, Galande,
la place Maubert, les rues du Plâtre, des Anglais, des Lavandières, des Noyers, Saint-Jean-de-Beau-vais, des Carmes, de la Montagne-Sainte-Gene-viève, Judas, Mont-Saint-Hilaire, Charretière, des Sept-Voies, desAmandiers,des Chiens, deRheims, Fromentel, Saint-Etienne-des-Grès, la place Sainte-Geneviève, rue de Fourcy, etc. ; et généralement toutes les rues, culs-de-facs, places, etc. enclavés dans cette limite.
SECTION DE L'OBSERVATOIRE.
La rue d'Enfer des deux côtés, depuis la rue Saint-Dominique, à la barrière; l'enclos des Chartreux ; les murs ; depuis les derrières de l'Institut de l'Oratoire jusqu'à la barrière de la rue de l'Oursine; la rue de l'Oursine, à gauche, depuis la barrière jusqu'à la rue Mouffetard ; la rue Mouffetard, à gauche, jusqu'à la rue Contrescarpe; la rue Contrescarpe, à gauche; la rue de la Vieille-Estrapade, à gauche; l'Estrapade, à gauche; la rue des Fossés-Saint-Jacques, à gauche ; la rue du Faubourg-Saint-Jacques, à gauche, jusqu'à la rue Saint-Dominique; la rue Saint-Dominique, à gauche, jusqu'à la rue d'Enfer.
Intérieur.
Les rues du Faubourg-Sain t-Jacques, de la Bourbe, Maillet, Longue-Avoine, de Biron, de la Santé, des Bourguignons, des Charbonniers, des Lyonnais, de l'Arbalète, Neuve-Sainte-Geneviève, des Postes, du Cheval-Vert, des Poules, du Puits-qui-parle, de la ruePot-de-Fér, l'Observatoire, etc., et généralement toutes les rues, culs-de-sacs, places, etc., enclavés dans cette limite.
SECTION DU JARDIN DES PLANTES.
Limites de cette section.
Le bord de la rivière, depuis le boulevard de l'Hôpital jusqu'à la pompe du quai de la Tour-nelle; la rue des Bernardins, des deux côtés; la rue Saint-Nicolas, à gauche; la rue Traversine, à gauche, jusqu'à la rue d'Arras ; la rue d'Arras, à gauche, jusqu'à la rue Clopin ; la rue Glopin, à gauche, jusqu'à la rue Bordet ; la rue Bordet et Mouffetard, jusqu'à la rue de l'Epée-de-Bois ; la rue de l'Epée-de-Bois, à gauche; la rue du Noir, à gauche., jusqu'à la rue Françoise, les rues Françoise et du Puits-de-l'Hermite, à gauche, jusqu'à la rue du Battoir; la rue du Battoir, à gauche, jusqu'à la rue d'Orléans ; la rue d'Orléans, à gauche, jusqu'à la rue du Jardin- du-Roi ; la rue du Jardin-du-Roi, à gauche, depuis la rue d'Orléans, jusqu'à la rue de Buffon ; la rue de Buffon, à gauche, jusqu'au boulevard, le bout du boulevard, à gauche, jusqu'à la rivière.
Intérieur.
Les quais delà Tournelle, de Saint-Bernard; le Jardin du Roi, les rues de Seine, du Jardin-du-Roi, du Battoir, Copeaux, partie de celle de la Clef, Tripelet, Gracieuse, Neuve-Saint-Médard, Neuve-Saint-Etienue, de la Doctrine-Chrétienne, des Fossés-Saint-Victor, des Boulangers, du Fau-bourg-Saint-Victor, Saint-Victor, du Mûrier, du Paon, du Bon-Puits, de Versailles, des Fossés-
Saint-Bernard, le cloître des Bernardins, la place aux Veaux, etc., et généralement toutes les rues, culs-de-sacs, places, etc., enclavés dans cette limite.
section des gobelins.
Limites de cette section.
Le bord de la rivière, depuis la barrière de l'Hôpital jusqu'au boulevard ; le bout du boulevard, à gauche, jusqu'à la rue de Buffon; la rue de Buffon, à gauche, jusqu'à la rue du Jardin-du-Roi ; la rue du Jardin-du-Boi, à gauche, jusqu'à la rue d'Orléans; la rue d'Orléans, à gâuche, jusqu'à la rue du Battoir ; la rue du Battoir, à gauche, jusqu'à la rue du Puits-de-PHermite; les rues du Puits-de-l'Hermite et Françoise, à gauche, jusqu'à la rue du Noir; la rue du Noir, à gauche, jusqu'à la rue de l'Epée-de-Bois; la rue de l'Epée-de-Bois, à gauche, jusqu'à la rue Mouffetard; la rue Mouffetard, à gauche, jusqu'à la rue de Lour-cine, la rue de Lourcine, à gauche, jusqu'à la barrière ; les murs depuis la barrière de Lourcine jusqu'à la barrière de l'Hôpital.
Intérieur.
Les rues de la Fontaine, partie de celle de la Clef, du Noir, Neuve-d'Orléans, de l'Orangerie, du Gril, Censier, du Pont-aux-Biches, du Fer-à-Moulin, de la Muette, Poliveau, du Marché, du Gros-Caillou, des Fossés-Saint-Marcel, Voie-Creuse, du Banquier, Reine-Blanche, des Francs-Bour-geois, desHauts-Fossés-Saint-Marcel, Fer-à-Moulin, de Scipion, Mouffetard, des Trois-Couronnes, Saint-Hippolyte, des Gobelins, Croulebarbe, du Champ-ae-l'Alouette, des Anglais, de la Barrière, les Gobelins, le Marché aux chevaux, l'Hôpital, etc., et généralement toutes les rues, culs-de-sacs, places, etc. enclavés dans cette limite.
Fait au comité de Constitution, le 21 juin 1790. Signé: du Pont, J. X. Bureaux, Gossin, Aubry du Bochet, Pinteville.
Vu par le roi les susdits décret et procès-verbal, Sa Majesté a ordonné et ordonne qu'ils seront exécutés suivant leur forme et teneur. Fait à Paris, le vingt-septième jour de juin 1790.
Signé : LOUIS. Et plus bas, par le roi : Gui-gnard.
Séance du
La séance est ouverte à neuf heures du matin.
, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier au matin.
, député de Reims. Je me suis ab-
, député de Soûle. J'ai obtenu un congé à Versailles, parce que j'étais dans un état de faiblesse extrême; j'ai fait 220 lieues pour aller retrouver la santé dans mon pays natal, et mes frais de voyage seuls sont montés à 1,200 livres. Je demande que ceux qui se sont absentés pour cause de maladie et sur certificat de médecin soient exceptés des rigueurs du décret que vous avez rendu hier.
J'appuie les observations du préopinant, parce qu'elles sont de toute justice, et je vous propose un projet de décret en conséquence.
Plusieurs membres font observer que les malades ne sont pas compris dans le décret.
D'autres membres présentent des amendements.
On demande, d'autre part, l'ordre du jour.
consulte l'Assemblée qui adopte le procès-verbal et passe à l'ordre du jour.
, au nom des comités des rapports et de Constitution, rend compte de Y affaire survenue à Nogent-le-Rotrou, entre la municipalité et les officiers d'élection, au sujet de la confection des rôles d'impositions pour la présente année. Il propose un projet de décret qui est adopté dans les termes suivants :
« L'Assemblée nationale; après avoir ouï le compte qui lui a été rendu par ses comités des finances et des rapports réunis, a décrété et décrète qu'elle autorise, nonobstant tous jugements et ordonnances à ce contraires, les administrateurs ou le directoire du district de Nogent-le-Rotrou, à rendre exécutoires les rôles d'impositions de la présente année, faits par les officiers municipaux de ladite ville, et à répartir le fort desdits rôles, ou l'excédent qui s'y trouve, à la décharge des plus pauvres contribuables, en constatant les ratures par un procès-verbal où elles seront rapportées et détaillées.
« Au surplus, l'Assemblée déclare qu'elle est satisfaite du zèle que les officiers municipaux de Nogent-le-Rotrou ont mis à accélérer la confection des rôles et le recouvrement des impositions, et qu'elle n'a pas vu sans peine dans le jugement des officiers de l'élection de ladite ville du 8 de ce mois, des expressions tendant à enlever aux officiers municipaux la considération qui leur appartient comme représentant le peuple, et ayant sa confiance; qu'elle les improuve, et ordonne à tous les citoyens de garder auxdits officiers municipaux le respect qui leur est dù. »
, rapporteur du comité des finances, rend compte des besoins de plusieurs villes et communautés, et propose de les autoriser à faire des emprunts ou des rôles de contributions pour subvenir à leurs dépenses.
Les projets de décrets proposés par M. Vernier sont adoptés, sans discussion, ainsi qu'il suit :
« L'Assemblée nationale, d'après le rapport de son comité des finances et la délibération du conseil général de la commune d'Angers, autorise les officiers municipaux de ladite ville à faire un
emprunt de 40,000 livres pour continuer ses ateliers dè charité, à charge et condition expresse d'en faire le remboursement (jans hiiif ans sur les revenus de ladite ville, et, à défaut dé deniers libres, par la voie d'imposition, au marc laIiVré sur tous ceux qui payent 10 Jivres pt aurdessus, de toutes impositions; à peine, par lès officiers municipaux en exercice, de denjèurer responsables des remboursements auxquels ils n'auraient pas pourvu dans lp temps prescrit; le tout à là charge de rendre compte. ' »
« L'assemblée nationale, sur le rapport de son comité des financés, autorise les officiers municipaux du bourg d'Arsay, 'département du Jttrâ, en Franche-Comté, à imposer la somme de 800 livres sur tous ceux qui payent 4 livres, et au-dessus, d'impositjons principales, "pour ladite somme être employée, en conformité de la délibération prise en conseil général, à nourrir jusqu'à la r^cçlte les pauyres dont la commune a bien voulu se pharger ; et jusqu'au recouvrement à faire de l'imposition accordée, ils demeurent apaisés à l'emprunt des deniers libres qui se trouvent d^ns la caisse de charité des pauvres malades du' bourg. »
« L'Assamblée nationale, après avoir entendu lp rapporf de son comité des finances, autorise les bfhëiers municipaux de Scey-sur-Saône et Neuvelle-lès-Scey à emprunter la somme de 3,QQ0 livres, dont le remboursement sera fait sur le Rrjx à provenir dé la véntë dé leur quart de réserve/ si elle leqr est accordée, et, à ce' défaut, par la voie ç|'ifhppsition? à charge d'employer ladite sommé conformément à la''" délibération prise en conseil général (è 6 mai, tant à acquitter îe prix des blés par eux achetés, qu'au soulagement de leurs pauvres, à chargé de rendre compté. » ' '
« SUr le rapport de son comité des finances, l'Afseinblée naiionalp autorise les officiers municipaux fè làMcommÙpé de Favaud à imposer la sommé de 1,200 ,;iiyre,slM'en''|roiS. ans, sur tous leurs çoâtqpuableS qui payent 4 livres et au-dcssns, de toutes espèces'1 d'iibpoëîtibns,' pour ladite somme être employée à bcé'upér les journaliers a des ouvrages d'ùtilifp publique, ndtam-îbept à là réparation des èhémins dégradés^ sauf à eux'à se procurer là somme ci-dèssusjôu partie d'icefle, par volé d'emprùnf:, dans l'attenté du recouvrement des râles; à qqpi'ils' sérônt dès à présent àùtorisès, en conformité de ïa! délibération prisé en conseil général,'le'6 mai dernier. » " '" « Sûr 1g rapport du Co'mité des finances, PAs-sembïée nationale' autorise lès officiérs mpnici-papx des ' Sàbles-d'Qlonhé, ' depafaémèh t1 de Vendée, à imppsër la somme de 10,000 livres en cinq aps^ sur toiis ceux qui payent dans léprs rôles au-dessus dé 6 livres de toùtès impositions çljrèc^s, pjmr ladite somrhé'^trfelèmpldyée a entretenir |eurs ateliers de charité, au squlàgeinent ae ïeuirs 'paUvres ef au payement dés 'èpttés 'urgentes de la cômmunè, sâiif àuxdits'officiérs mpnicipapx à se procurer ladite somme, qji partie" à'ïcèlïê,' parla VCjie de rèïppruût' jUsqprau re-Couv^èmëP.t dps » Quoi ils demeurent dès à {irésent autpr|sês : le tcjùt à charge cPen rendre compte. » ! , ' ^ * * \
« L'As^mblée nationale, le rapport dé son comité dps financëé "considérant1 îa'prjyàjiôn totale* qu'eprquVè> 'la vlllê de GHérbgurg â^ns sés rpvenus par l'abolition dti' droit srçr '{§§ |els, âu-îprise les offlpiêrs municipaux, en conformité de là délibération prise en CQUseîf général, If l'2'ihiU, à lëVer pendant une année,'a coBàmêncèr dtfjôùr
«de la publication du présent décret, trois deniers par pot de cidre, six deniers par pot de vin, douze deniers par pot d'eau-de-vie qui entreront dans ladite ville pour y être consommés : tout ce qui n'est qu'en transit ne sera pas sujet au droit. »
« Sur la délibération prise en Conseil général de la ville et commune de Briare, le 13 juin courant, l'Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité des finances, autorise les officiers municipaux de ladite ville à imposer en1 supplément de rôle, la somme de 2961. 5 s. à raison d'un sol six deniers pour livré dés impositions principàlés, à l'effet d-acquitter les dettes urgentes et les charges de ladite ville, ainsi qup de rendre compte. »
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité dès finances, sur l'adressé et la délibération des maire, officiers municipaux et notables de la ville et communauté de Lysving, district dë Lille, département du Nord, autorise lés officiers municipaux à emprunter la somme de 5,000 florins, en billets de change à douze usances, à charge et condition expresses d'imposer chaque année, pendant cinq an?, le cinquième du principal et de l'intérêt ; de telle sorte que, les éinq années expirées, l'emprunt demeure absolument acquitté; le tout, à charge de rendre compte. »
« Ouï le rapport du comité des finances sur la délibération et l'adresse des habitants de Saint-Flour, chef-dieu du département du Cantal, l'As-seippîéé nationale autorise les officiel munjpi-paûx de ladite ville à faire un empri^j; de 12,000 livrés seulement pour ai&er & l'apnrqvi-•sjqnpement 9e lepr marché jusqu'à là récolte^ et à faire ba|ssec le prix du pain pour la cl^sp in-digénfe ; spr le surplus dp la (lemanclp Renvoie au district et département. »
« UAssemblée nationàlè, ouï le rapport dp soj^ comité des fipancès, autorise les officiers municipaux de la commune de Baron, département de Senlis, à ge faire, remettre la somme dé 2,000 livres sur celle de 4,430 livres, ën dépôt dans la caisse des fonds de l'Hôtel-Dieu, pour ladite somme être employée à des travaux de charité, à la charge de la remplacer, si ie besoin des pauvres infirmes et malades l'exigeait ; le tout conformément à là délibération du conseil général de la commune, et au consentement donné par quatrë des cinq administrateurs de i'Hôtèl-Dieu, sous rdblîgation dë rendre compte. »
« Sur le rapport du comité des finances, l'Assemblée nationale autorisé les officiers Municipaux de la ville de Muret à imposer la sômm'e de 2,000 livres en quatre ou cinq ans, à raison de 500 livres par chaque année, sur tous ceux qui payent dans leurs rôles 6 livres et au-dessus, de toutes tailles ; pour la dite somme être employée à continuer des travaux de charité, sauf auxdits officiers municipaux à se procurer ladite somme, pp partie d'jcelle, par vpip d'emprunt, s'ils ie jugent nécessaire à la continuation de leurs ateliers ; à quqi il sont dès à présent autorisés; le tout, à charge de rendre compte. »
propose un projet de décret ainsi conçu :
1 « L Assemblée1 nationale autorise M. Dufresne, administrateur du Trésor Public,' à payer aux entrepreneur^ de la manufactura des cuirs anglais,' établie à Porit-Audemer, la somme de 10,000 livres restant de celle de 150,000 livres qui leur avait été promise pour encouragement en 1788, Iprs de son établissement et qu'elle dëvait rendre
parftellejqqent, à raison de 10,000 livres par année, à commencer en 1797. »
(1/Assemblée renvoie cette proposition au comjté des $nances.) "
L'ordre du jour est la suite de Iq, discussion du p'ojet de décret sur le traitement du clergé actuel. La délibération sur l'article 1er commencée hier à été continuée à la séance d'aujourd'hui-
, rapporteur. Si j'ai bien entendu les honorables membres qui n'ont pas trouvé que le iràitément accordé aux ecclésiastiques par le comité fût assez considérable, j'attribue Ces craintes à leurs sollicitudes pour les bénéttciers endettés, je vous annonce'40nc que le comité proposera un article additionnel pour déclarer ia somme qui restera insaisissable dans le traitement des ecclésiastiques.
Vos décrets précédents sur J'aiiénation des biens ecclésiastiques, la diminution dans le traitement de plusieurs fonctionnaires publics, répondènt assez à ceux qui semblent encore douter sj on peut porter quelques atteintes à la jouissance usufruitière des titulaires. Vous seriez dans la plus stricte justice en allouait au clergé actqel une somme égale à celle du clergé futur, Peux plans vous ont été proposés, un par le comité, et l'autre par M. Tbqpr,et. Je ne pense pas que le maximum doive être le même pour l'évêque qui, strict pbserva-teur de la loi, s'est borné 4 son évêché, et poUr celpi qqi aep outre sollicité des abbayes. Je proposerais, en coqséquenpe, de donner 40,000 livres pour le maximum à ceux qui n'ont pas d'abbaye, et 35,000 livres pour ceux qui en avaient ; 1Q,Q00 livres à tous lès abbés septuagénaires ; 8,0QQ livres pour les sexagénaires,et 3,000 livres pour les abbés de Saint-Ruf et autres ordres. Jè peqse aussi que, jusqu'à une nouvelle doctrine, lès pfiefs d'ordres réguliers doivent être assimilés aux! autres abbés commandataires.
Thouret, qui accorde 60,000 livres aux évêques, leur suppose sans doute 150,000 livres de revenqSj et il prppqse de prendre pour base là déclaration des titulaires. Je proposerais Une nàsè sur laquelle vous ne devez pas craindre l'exagération, c'èst-à-diré la déclaration pour là contribution pafriotiqUe, èt de regarder'0ceux qui n'ont pas fait cette déclaration comme n'ayant ppint 4Q0 livres dé reveqqs.
(1). Messieurs, dès considérations nombreuses, toutes puisées dans mpn respect pour l'Assemblée nationale, pt l'attachement que tqqthop^flè yraï-ment probe doit conserver pour ses propres opinions, jusqu'à ce qu'il cesse de les croirp Vr^iès, m'ont fait une loi du silence dans la discussion de tous les points relatifs au principe aflgpté par le Corps constituant, le 2 novembre flerqjer.
Aujourd'hui qu'il né s'agit éyidémmen|; dè statuer que sur le Sprt d'up grand nqiflbre
d'inqi-r vidUs, et de consulter sur la somme dé leur tristement, la justice et l'humanité, je
crqjs pppojr et dpvqjr parler sur une question dont les éléments me sont connus, fiont les
$ouné£8 spqt cflpstantes,' et qui peut ^e réspq^e par des
Je n'ai point à parler sur ces décrets, mais Messieurs, dans celui que vous allez repurç sqr le sort du titulaire, il s'agit dg passer 4e l'àqcieij état au nouyél ordre, sans qn déchirement 'trop fort ; il faut, ce me semble, nous avouer» $vec Ip rapporteur de votre comité ecclésiastique, que nos travaux actuels portent Vempreinte de la destruction ; et cette image, toujours affligeante, altère fortement Véclat du bien qu'elle couvre. ""
Pénétré de cette vérité qu'il avoue, yqtre comité à dû, sans douté, ou vous présenter pour les titulaires un traitement convenable, ou vous demqp-trer invinciblement que la lof |mpérieqse dés circonstances vous empêchait f accorder. Je considérerai son travai| sous ces deui ppints de vue. Je me permettrai ensuite de vpqs présenter les idées que j'oppose à son projet, et içs calculs qui démontrent que ces idées ne sont point inexécutables.
Le comité présente-t-il un traitement convenable ? Première question.
Je. pourrais sans doute Vous dire, avec votre comité : Si les ecclésiastiques du clergé futur sont des hommes nouveaux et doivent trouver dans le traitement qui va leur être assigné, ce qui suffira aux vrais besoins, il n'en est pas M même des titulaires actuels; ils' ont connu lés avantages que donnent les richesses, ils ont vu naître autour d'eux les besoins factices'g^elfej entraînant, ils y seront pncore fissujefUs1: tfy q-t-ïl pas une Sorte de justice fy usèf. d'^nd^igénçe à'leur ègardt a leur fixer un soft qui puisse. \çuv conserver les jouissances qui m leur sonf rns xi(ÎQfreusemènt interdites (1)'? "Cette considéràfjoq, Messieurs? dont votre comité assure qu'il' s'est pénétré, aurait dû le conduire à dès résultas (lu|erei}ts ;.ît aurait sans dèu'^e pu penser qp'^ pioins d'être ce qu'il appelle un bornée nouyeàj^ ' le titulaire d'un bénéfice très considérable dau§ l çrdrp ac-tuei, i^e trouvera pas dans le mqxim,uift' qu'il lui àssigpéj toutes les jouissance^ qui ne lui pas rigoureusement Vqtërdités.
Mais, Messieurs, jp ne me pénètre point CQmmg vQtre corqjfé, de la considération m*écédènte, pi je pr^qte contpeçoii plap un motif plus pqiss sant sans doute, parce 'qu'il estpujsé dans Ift justice plus exaçte.
Avant le 2 novembre derqier, chaque titulaire, comptable envers sa conscience et envers sa
cqqsr çience'spule, jouissait de son bénéfice sous la sauvegarde |pi n'uijlîque, etqe lpide
l'Etat ; apfès avoir acquitte les charges, le pepélicier sim-
Je soutiens que le titulaire d'un bénéfice de soixante mille livres de rente, qui a consacré par an vingt mille francs pour la dépense du culte public, dans l'étendue de son bénéfice, et l'acquittement de ses charges, quia donné vingt mille francs par an aux pauvres, dont le soulagement était son premier devoir, a pu et dû, dans l'ancien état, consacrer à ses dépenses personnelles, à ses œuvres de miséricorde ou à des établissements utiles de son choix, les vingt mille livres restant, s'il s'est présenté un établissement utile qui exigeât une somme de soixante mille francs ; ce titulaire, pour qui les deux premières portions de son revenu étaient sacrées, qui était lui-même dans un âge où les probabilités de vie sont encore longues, a pu sansaoute trouver un homme qui, calculant sur cette probabilité, connaissant la chance de mort qui annulait sa créance, a pu sans doute lui prêter la somme nécessaire, et s'associer ainsi a l'œuvre utile qu'il consommait par cette anticipation de revenus.
Eh bien, Messieurs, dans cette hypothèse, votre comité réduit à six mille livres le titulaire dont je parte : s'il est honnête, ou que son créancier use ae ses droits, ce titulaire est réduit à la mendicité, pour qu'au bout de dix ans, s'il les vit, son créancier soit payé ; et cependant, Messieurs, ni l'un ni l'autre n'ont eu tort, tous deux ont agi sagement, avec bonne foi, sous la sauvegarde de la foi publique; et voilà l'objection que votre comité ecclésiastique croit avoir refutée victorieusement, lorsqu'il dit : De telles hypothèses ne doivent point diriger vos résolutions si des bénéficiers ont contracté des dettes, il faut penser qu'elles ne sont pas considérables ; et, dans ce cas, le traitement que vous leur attribuerez, fournira facilement aux hommes sages et économes les moyens de les acquitter.
Sans doute, vous ne trouverez pas cette obj ection résolue, vous pèserez dans votre sagesse, et l'hypothèse que je viens de vous présenter, et celle sans doute non moins commune de tous les ouvriers pères de famille, fournisseurs ou entrepreneurs, à qui la connaissance de la fortune des titulaires a permis ou de faire une année d'avancé ou du moins de n'arrêter leurs factures qu'à la fin de chaque année, et qui, par votre décret, se trouveraient, à l'égard de quelques ti-
tulaires, soit imprudents, soit coupables, n'avoir plus que 6000 livres pour gages d'une fourniture ae cent mille francs. Vous aurez égard à ce motif dans les réductions que vous croirez indispensables ; et vous sentirez avec moi que la ruine d'un grand nombre de familles, que le désespoir des individus, la violation des engagements sacrés et légaux, ne peuvent jamais être les éléments dont se compose la prospérité publique.
Je conclus que votre comité ecclésiastique n'ayant point eu dans la fixation du sort des titulaires actuels, les égards que lui commandaient les considérations morales, ne vous a présenté, pour eux, qu'un traitement insuffisant, et n'a point rempli votre but. Voyons maintenant, Messieurs, s'il vous adémontré rigoureusement qu'un traitement plus convenable était décidément impossible par la qature des circonstances. Et, d'abord, je vous demanderai si vous avez consulté ces circonstances, lorsque forts d'une seule vérité, l'existence et la loyauté de la nation française, vous avez consacré cette dette encore inconnue, cette dette dont le traitement des titulaires, quelque somptueux qu'on le suppose, ne serait pas encore un des éléments les moins purs.
Quels sont, en effet, les éléments de cette dette? Quelques capitaux véritablement fournis, les traitements arriérés, mais surtout des masses énormes d'intérêts accumulés, et toujours calculés, d'une part sur l'incertitude du payement et sur l'avidité du prêteur. — Et certes, le créancier de ce genre est placé dans une hypothèse bien différente de celle qui a établi les calculs.
Il s'est dit, il a dû se dire : Je ne serai peut-être jamais payé, il faut que je combine mon prêt de manière que, par la succession de mes opérations, je sois plus que couvert de mes fonds, avant même qu'on me les ait payés.
Et vous, Messieurs, vous avez dit à ce créancier : Nous te payerons et nous laissons subsister ta combinaison financière, comme quand tu ne croyais pas être payé. Et qu'on ne prétende pas que vous avez fait une imprudence. Vous vouliez alors être libres, et vous saviez qu'il fallait commencer par être justes; vous vouliez faire aimer cette Révolution à laquelle vous aviez attaché votre gloire; vous n'étiez pas encore à ce point de prospérité où la voix de la justice paraît moins impérieuse, et où ceux mêmes qui la réclament n'osent plus employer que les accents de la prière.
Cette grande puissance, écueil des rois et des peuples, n'eu doit pas être un pour votre sagesse ; vous ne devez pas oublier que vous ne serez forts que tant que vous serez justes ; que si l'œuvre sainte de la liberté que vous avez entreprise ne peut pas même être anéantie par vos fautes, votre gloire personnelle serait du moins flétrie par une véritable iniquité.
Vous ne perdrez pas de vue ces principes; je ne croirai jamais que vous les avez perdus de vue, et je n'aurai point à vos yeux le tort d'employer des supplications pour vous rappeler des devoirs.
Et cependant, Messieurs, cet empire des circonstances, qui ne devrait pas vous arrêter, votre comité ecclésiastique ne l'a point établi sur des raisonnements irrésistibles. Les calculs ne pourraient, sans doute, se composer que de bases bien positives et d'éléments incontestables ; il fallait certainement vous dire : les biens nationaux montent à tant ; les charges dont vous les avez grevés montent à tant ; les titulaires sont en tel nombre, il ne peut leur être partagé que
tant ; alors, vous eussiez eu à décider si ce partage se ferait au marc la livre de leurs anciens revenus, ou si vous suivriez la méthode que le comité ecclésiastique a cru devoir préférer à ce moyen si naturel. — Votre comité, cependant, après avoir dit en général que les biens du clergé rapportent 170 millions, que le traitement des bénéficiers actuels s'élèvera à 140 : que la nation ne retiendra que 30 millions pour les frais du culte, les charités publiques et les impositions, après avoir ajouté plus loin qu'il pourra, si cela devient nécessaire, vous prouver par des calculs la vérité de ses propositions, ajoute enfin : les revenus que le clergé remet à la nation ne sont pas assez considérables pour permettre une maximum plus élevé. — Vous me pardonnerez, sans doute, Messieurs, de n'avoir trouvé, ni dans ce peu de mots, ni dans des calculs que l'on annonce sans les avoir encore donnés, des preuves suffisantes et victorieuses, desquelles on ne pourrait cependant pas encore déduire la nécessité d'être durs et iniques envers les titulaires actuels.
Persuadé, Messieurs, qu'il existait un moyen de traiter avec moins de rigueur les ecclésiastiques actuels, j'ai cherché les calculs qui pouvaient me fournir quelques données; je vais vous'les soumettre avec confiance, et je vous priedem'accor-der de l'attention; vous devez avoir le désir d'apercevoir la possibilité de ce dont vous sentez la justice.
Voici, Messieurs, la manière dont j'ai posé le problème dont j'ai cherché la solution. Je me suis demandé d'abord quelle est la somme d'indemnité que les titulaires peuvent attendre de la justice de la nation ? J'ai cherché ensuite à découvrir quelle est la somme qui demeurera libre après avoir prélevé, sur les biens déclarés nationaux, les dépenses dont ils sont chargés. J'ai enfin rapproché ces deux résultats, et c'est sur leur rapprochement que j'établis les mesures que je vous propose de décréter, pour connaître la somme et le genre d'indemnité qui peut être dû aux titulaires.
J'examine d'abord le genre de leurs revenus, et les charges dont ils étaient légitimement grevés.
Les revenus ecclésiastiques consistent en biens-fonds et en dîmes ; mais ni l*un ni l'autre n'étaient à leur absolue disposition ; chargés justement de la dépense du culte, du soulagement des pauvres, ils ne pouvaient sans doute se soustraire à l'acquittement de ces charges, elles tombaient également sur la dîme et sur les biens-fonds ; mais la dîme était, de plus, assujettie à une charge particulière et spéciale, l'acquittement des portions congrues et de toutes les augmentations dont les portions congrues étaient vraiment susceptibles. Voilà, Messieurs, les charges qu'il est d'abord essentiel de prélever sur les revenus ecclésiastiques, et il est incontestable que cet objet prélevé n'est, de sa nature, susceptible d'aucune sorte d'indemnité, puisqu'il n'a jamais dû faire partie de la jouissance du titulaire ; pour opérer ce prélèvement, je raisonne et calcule ainsi : les biens du clergé forment une masse de revenus évalués, par votre comité lui-même, à deux cents
millions, ci........... 200.000.000 fr.
La charge spéciale de la dîme composée :
1° Du traitement des curés de campagne, au nombre de trente-trois mille cinq cent vingt-neuf, à 1,200 fr. ; quarante millions deux cent trente-quatre mille huit cents liv., ci. .... 40.234.800
Du payement de quatre mille cinq cents annexes, a sept cents livres, trois millions cent cinquante mille livres, ci......... 3.150.000
Du traitement de neuf mille autres vicaires, à sept cents livres, trois millions, ci........ 3.000.000
Forme un total de cinquante-deUx millions six cent quatre-vingt-quatre mille huit cents livres, ci...................... 52.684.800
Cet objet, qui n'est évidemment pas susceptible d'indemnité, étant retranché des deux cents millions ci-dessus, réduit d'abord cette somme à celle de cent quarante-sept millions trois cent quinze millé deux cents
livres, ci..................... 147.315.200
Vous avez porté à une nouvelle augmentation le sort de plusieurs curés ; prenons pour terme moyen six mille curés portés de dix-huit cents à quatre mille livres, c'est un excédant de deux mille deux cents livres, qui forment un total de treize millions six cent mille
livres, ci..................... 13.600.000
J'établis que cette charge doit être encore prélevée sur les revenus des titulaires, et je l'ôte du reliquat précédent, ce qui réduit encore la somme susceptible d'indemnité, à cent vingt-six millions sept cent quinze mille deux cents livres, ci.... 126.715.200
Les religieux et religieuses, dont vous avez fixé le sort, présentent encore une masse de quarante-cinq millions cinq cent mille livres qui n'est susceptible de l'indemnité dont il s'agit; je la retranche du dernier reliquat, et je la réduis ainsi à la somme de quatre-
vingts millions, ci............ 80.000.000
Il existe pour à peu près dix-huit cent mille livres de bénéfices vacants ; ils ne sont point susceptibles d'indemnité, je retranche encore cette somme de la précédente, et j'ai soixante-dix-neuf millions quatre cent quinze mille deux cents livres de revenus, sur lesquels il me paraît nécessaire et juste de raire encore un dernier prélèvement.
J'ai dit que le soulagement des pauvres et les frais du culte étaient une charge légitime des revenus ecclésiastiques : vous avez vu, Messieurs, que les précédentes réductions, la plupart relatives au culte, diminueraient déjà de plus de trois cinquièmes les revenus des titulaires : eh bien, Messieurs, je consacre encore au soulagement des pauvres et au supplément des frais du culte, la moitié de la somme restante, et je doute
que l'homme le plus sévère puisse me trouver généreux lorsque je réduis eu définitive, à une somme de quarante millions, la somme susceptible d'indemnités sur les deux cents millions dé r'êvenus dont jouissaient paisiblement les titulaires actuels.
Je crpisavojrétabli, Messieurs, d'après dès aperçus exacts, quelle est la véritable sqmmp d'indemnités que lés ecclésiastiques ont un droit incontestable d'exiger de votre justice. Examinons maintenant quelles sont les ressources que vous présentent pour y subvenir les biens déclarés natiopaux.
Le revenu des ecclésiastiques en biens-fonds est estime par votre comité ecclésiastique à soixante et dix millions, ç|f,..
Et j'observe que, dans cette évaluation, on conyient que l'on pourrait facilement porter à cent millions ce qu'on pe yep( compter que pour soixante-dix. En supprimant la dîme, oij voqs a proposé de la remplacer par un impôt de cent trente mil-, lions, et l'on vous a dit qu'il y avait trois millions de hépéfice pour les contribuais dans le nouvel ordre de cljbseS) ci....
Partant de ces données, nous avons; commé je l'ai dit2 un revenu de deux cents millions, ci.
Examinons maintenant lés charges dont est grevé ce revenu.
Vous avez décrété un prélèvement de quatre cenf&' milljdh's sur les biens nationaux ; mais dans leur masse est compris le fonds des aqcjens doïnainës de la couronne, et ce fopds, je l'estime sans exagérer â cènt vingt millions, ce qui réduit à cféux cent quatre-vingt à' millions lq fonds à prendre sur les'b'ièns ecclésiastiques.
Deux cent quatr^-yingt^ millions au denier vin^t fpfyt uq revenu de quatorze miljions, ci,
Je les retranche f|es deux cqpts millions ci-dessus,! il reste Cent quatre-vingt-six milliôns, ci..'
Les dettes du cjerg§, cppaie corps, montent d'après 'votre comité à onze millions, ci,, ..
Je retranche cette Sommé dé la précédente, il ' reste ' Çeqt soixante et quinze raillions> ci.
Les frais du culte. d'après les propositions de voire cpmité| sans tenir compte des modifi-cations peu importantes que; vous leur avez faitps, présentent:
1° Pour les évêques : un million deux cent mille livres, ci,.
40.000.000
70,000.000
|3Q,Û0p.000 200.000.000
}4,0QQ,00Q 186,000,QQQ
it,pop,ppq
175,000,P00
1.20Û,ÛÛ0
2" Pour les curés de campagne, vingt-deux millions trois
cent mille livres, ci........... 22,300,000
3? Pour les vicaires, vingt-deux millions neuf cent mille
livres, ci....................» 22,900,000
4° Pour les curés des villes, six millions huit cent mille
livres, ci..................... 6,800,000
Pour l'entretien des bâti- " ments et frais du culte, douze
millions, ci.................. 12,000,000
6° Pour les hôpitaux, collèges, séminaires, etc., douze millions, ci..................... 12,000,000
Total soixante et dix-sept mil* lions deux cent mille livres, ci. 77,200,000
Je retranche encore cette somme de mon dernier reliquat: il me reste quatre-vingt dix-sept millions huit cent mille livres,
ci........................... 97,800,000
Sur cette somme, j'ai encore à prélever pour le moment une charge viagère, qui décroîtra nécessairement et s'éteindra dans peu d'années; je la porte cependant dans le calcul comme une charge constante, c'est le traitement décrété pour les religieux et religieuses. Si Tes calculs du comité sont exacts, je puis porter quinze mille religieux à huit cents francs, et trente mille religieuses à six cents, ce qui me donne un total de trente millions, ci.... 30,000,000
Je retranche cette somme de mqn dernier résultat, et il me reste soixante-sept millions huit
cent mille livres, ci........... 67,800,000
C'est sur cette dernière somme, restée libre après ies charges déduites, qu?il n'est sans doute permis d'établie l'indemnité, que j'ai prouvé ne devoir être qu'un objet de quarante millions. — Il restera encore entré les mains de la nation française un revpnu de vingt-sept millions huit cent mille livres, et la perspective de l'extinction des trente millions de renies viagères accordés aux religieux des deux sexes.
Voilà, Messieurs, le résultat satisfaisant auquel m'ont conduit d'une part les données établies par votre comité ecclésiastique, et l'examen des principes sur lesquels pouvaient s'établir les indemnités qui sont dues aux titulaires dépossédés.
11 ne me reste plus qu'à fixer le mode de répartition juste et convenable, qui doit être mis èn usage, pour que les titulaires ne trouvant pas Unp nouvelle rigueur dans l'opération rigoureuse à laquelle ils vont se soumettre.
Cette répartition sera naturellement fixée par les mêmes principes qui m'ont guidé dans l'éva»-luation de l'indemnité dont il s'agit, et je vous en présenterai le mode dans le projet de décret qui terminera mon opinion.
Mais, Messieurs, avant de finir, permettez que je vous présente encore quelques considérations puissantes : Je vous ai prouvé que vous pouviez, dans le moment, traiter avec justice les titulaires actuels ; j'ai appuyé de calculs les proportions que j'ai faites; en bien, quand toutes mes preuves seraient incomplètes, quand tous
mes calculs seraient inexacts, votre obligation étroite ne cesserait pas d'être la même ; la justicè né vous dirait pas avec moins d'empire, avec moins drévidence : laissez aux hommes que la loi et la bonne foi publique défendaient, la somme de jouissance et d'usufruit que la loi leur permettait de conserver ; laissez à des créanciers qui ont prêté sous l'égide de la loi et de la bonne loi publique, le'gage sur lequel ils ont eu droit de compter, le gage qui leur appartient, et que la force et l'iniquité peuvent seules leur enleVér, en consommant leur ruine. Le poids de cette Considération ne peut être affaibli par aqcunautrp : c'est le créancier, c'est lé créancier légitime que vpus ne pbuvéz pas spolièr ; c'est lë débiteur, et le débiteur de boprië foi que vous ne pouvez pâs rendre insolvablë par sa faute, est un homme infâme. L'homme insolvable par le crime d'un autre a le droit éternel de rejeter sur lui l'infamie de sa faillite. On se résoud à là misère, oh sacrifie facilement les jouissances du luxe et de'la vanité, mais le droit de payer ses dettes et les dettes que l'oh a pu faire légitimement, on ne le perd qu eq maudissant l'opprësseur qui nous l'arrache ; oh environne cette violence de tous les cris du désespoir et de là haine; et ce désespoir est juste ët cètte haiqë est juste ; ét certes, vous ne voudrez pas créer dé tels ennemis à votre régénération ; vous hé youdrez pâs placèr cès ennemis dans le cœur de l'homme Vertueux, en faisant des victimes. — Ej; quels hommes vous proposait-on de réduire à ces affreuses extrémités ?
Jë ne vous rappellerai pas que Iës ministres des autels ont, en général, des droits acquis à la reconnaissance des peuples ; que les prêtres français, malgré les nombreux abus dont les plus sages étaient les premiers à gémir, sont cependant ét onf constammèrit étéj par leur doctrine et les mœprs, le clergé le plus recomandable de l'Europe; mais je vous rappellerai qu'à cette époque, qu'il m'est peut-être permis de me retracer avec satisfaction, et dont un jour, qui s'approche, ramènera l'anniversaire, lorsque des citoyens dë l'ordre de la noblesse vinrent immoler leurs préjugés et leur existence politique sur l'autel de la patrie, nous le trouvâmes environné de là majorité, de ce clergé qui avait dé-vancè nos pas, qui, invité par vous,' au nom du Dieu de paix, à terminer de funestes discussions, est venu d'abord reconnaître les principes qui l'anéadtïssaièht comme Ordre, et qui, successivement conduit de sacrifices en sacrifices, n'a sans doute pas mérité que le dernier de tous fût celui de son honneur, et la déclaration d'une faillite aussi honteuse que désespérante, àussi désespérante qu'inutile.
Étéz-vous d'onp un homme ou un roi, pour ne pouvoir faire entrer le temps comme élément dans l'exécution de vos projets ? Qu'un despote se hâte de faire, qu'il fasse avec violence, qu'il sacrifie les hommes du jour, la justice du moment, à ce qu'il croit bien pour les générations futures, je l'excuse ; il est seul, il est homme, il est mortel, il sq hâtp d'exécuter pe qui ne le serait point, si la mort venait à le surprendre; mais yousl une nation! une nation libre et éclairéèl rién ne vous prescrit unë telle précipà-tion. N'àvez-vous vous pàs des forces immenses ? les siècles â venir ne vous appartiennent-ils pas comme celui-ci pour l'exécution d'un projet utile et juste? Pourquoi donc des déchirements, des violences, des injustipes ? Tôus ces moyens sont indigUes de vqus, et rien pé vous les commande. " 1
Je conclus, en vous présentant un projet de décret, dans lequel, guidé par cette considération puissante," et më renfermant toutefois dans la latitude de moyens de financé, avoués par votre comité'ecclésiastique, je Vous propose uù mode d'emploi d'indemnité, qui assuré aiix titulaires actuels ce quï leur appartient de droit, étîëur facilite lé payement de leurs dettes légitimes, par un moyen simple, conformé à la plus exacte justièe. 'et qui ne présente à la nation aucun surcroît de charge à supporter* " ' v - ■
L'Assemblée nationale considérant que les titulaires actuels des bénéfices dont les revenus se trouvent réduits ou supprimés par la nouvelle organisation ont le droit d'obtenir dè là justice Uhe indemnité proportionnée à la partie dé cëâ revenus, qu'àucUne charge spéciale "né grevait ;
Considérant que la répartition-dfe cette îndém-nité doit être de manière à ce qUë chaque individu ait une indemnité prpportiOUnéë à ce dont il jouissait légitimement; r'
Considérant énfin qu'il est de la justice de la nation française de faciliter aux titulaires àcfuels les moyens d'acquitter ies déttè's qu'ils ont pu légitimement contracter. A décrété et décrète cë qui suit: Art. 1er. Il ne sera donné aux titulaires déci-mateurs aucune indemnité dé la portion de lëù^s rëvënus, équivalent à l'augmentation actuéllë de la portion congrue des curés ët vicaires dés nâ-roisses, dans lesquelles lëurs dîmes sôht perçues, dans lë Cas où cette augmentation n'excéderai^ pas les deux tiers de leur reVénu. '
Art. 2. Il àerafixé aùx (|écimâtèurs une indemnité relative à la portion dè léUrs revénùs'ën dîmes excédant l'augmentation actuelle, rappelée dans l'article premier.
[ Art. 3. Dans lé Cas où la charge de l'apgmenta-tion, rappelée dans l'article 'premier, absorberait plus que les deux tiers dû reveriu de tout gepre d'un titulaire, son indemnité sera fixée ft va-; leur d'un tierk dé ce rèvënu.'
Art, 4. Là parti^ dps réVënus en dîrpëS, dont l'indemnité a été fixée par lès articles précédents, sera ajoutée aux revenus en biens-fonds de chaque titulaire, et le tout sera soumis aux clauses et conditions fixéés par les articles suivants.
Art. 5. Il sera donné au titulaire de bénéfice simple une penàipn yiagèré' équivalente aux quatre dixièmes dé son revenu, déterniiilê d'après l'artjçle 4, jusqu'à l%e de45àns, ù'në pension équivalente àux cinq dixièmeS jusqu'à 55 ans ; et Uhe pension dés six'dixièmes'apfès 55 ans révolus.
Art. Leé archevêques, évêques et curés auront une pension vmgèrp,' équivalente aux cinq dixièmégi 'dë leurs- rëVenus, déte|'injné3 d'aprèsl'ârticje jp
Art. Y. 'ïîééf pensions viagères cirde^us énoq-cées pourront être remboursées, ! soit èn assignats, soi( en jùeqs n^tiopaux ; lps remboursements séront ' fixés jusqu'à 45 ans, "d^srç proportion de hu^t pour c£nt, depuis 45; ans jusqu'à 55, dàiis celle (Je dix pour cént, pt dépuis 55 dans celle douze pour cent.
, député de Castras. Il y a peut-être de la témérité dp nia part à mqnter à cette trl| bunç apr^s M. de Glérmqpt, pour soutenir un avis toqt à fait qifférënt du siep. Je ne yjenâ point prendre ici riptèr^t de quelques individus, je viens ^éfepdre la caji&e du ^eUnk. J'ai eUténâtl invoqiier l'indùlgeiice et les lois pour aès nommes
à qui vous avez accordé 30,000 livres de revenu. L'excédent serait une violation manifeste de vos principes : ce que le préopinant appelle un acte de justice, je l'appellerai moi un acte d'injustice et un oubli de tous nos devoirs. Il existe une première loi canonique ; je ne citerai ni saint Chrysostome,ni saint Paul, ni saint Bernard: je ne les connais pas ; mais je connais bien cette loi, que nul ne peut posséder plus d'un bénéfice, cette loi sage, d'après laquelle un ecclésiastique ne peut jouir que d'un tiers net de son revenu : et cependant qui aurait pu assouvir l'insatiable avidité d'un seul de nos titulaires ? Ils se seraient emparés des biens ecclésiastiques des trois royaumes. Quel est le bénéficier qui les aurait refusés ? S'il est de bonne foi, qu'il me réponde ; de pareils abus ne se prescrivent pas contre la loi. Après les grands coups que vous avez portés, qui vous empêche de prononcer ? Je vous en supplie, au nom de l'habitant des campagnes, jusqu'ici malheureux et méprisé. En réduisant les évêques à 30,000 livres, vous leur accorderez bien au delà du nécessaire, vous ferez exécuter les lois trop longtemps oubliées. Eh 1 quels sont donc leurs titres, pour venir ici réclamer des préférences ? Où sont donc leurs preuves de patriotisme, pour nous disposer à des sacrifices en leur faveur? Leurs noms sont-ils sur la liste des contributions patriotiques ? Ont-ils, par des mandements pacifiques, préparé le peuple à la plus belle des révolutions qui se soit jamais opérée ? Pour vous donner une preuve de leur esprit, vous rappel-lerai-je ces assemblées de prélats délibérant sur le sort du clergé de second ordre, accordant 700 livres aux curés, 300 livres aux vicaires, et se retirant, disaient-ils, le cœur navré de ne pouvoir accorder davantage : 30,000 livres ne les contentent pas; ils réclament la justice. Quel est le général d'armée qui ne s'en contenterait pas ? Où est le citoyen vertueux à qui cette somme ne suffirait pas pour entretenir lui et une nombreuse famille ? J'appuie le projet du comité, et je demande par amendement que les curés dont le traitement n'excédera pas 3,000 livres en jouissent en entier.
Il ne s'agit pas de s'emparer des biens ecclésiastiques, mais d'en faire une^ nouvelle distribution. Le clergé lui-même disait que la répartition de ses biens était inexacte. Comment la changer, si ce n'était en diminuant les revenus de ceux qui possèdent trop? Il ne s'agit uniquement que de cette opération. Voilà le total du revenu du clergé; faisons-en une nouvelle distribution. L'opération me paraît simple. Vous avez présenté un maximum pour le clergé futur ; je le prends pour le minimum du traitement actuel, et en suivant une proportion graduelle personne n'aura à se plaindre. (Les murmures empêchent d'entendre la voix de l'opinant pendant le reste de son opinion).
Parmi le grand nombre d'orateurs qui ont parlé dans cette question, tous sont convenus que le droit qu'ont les titulaires de jouir des bénéfices qu'ils possèdent est une véritable propriété. (Plusieurs membres de la partie gauche s'écrient qu'on n'est pas convenu de cela.) S'il existait deux espèces de propriétés devant la loi, s'il existait des propriétés privilégiées, celles des titulaires devraient être du nombre ; leurs jouissances reposent sur toutes les conventions nationales, suivant les règles et les formes établies ; mais, comme [on vous l'a dit, à charge
onéreuse, à la charge de se lier à un état auquel ils ne peuvent plus renoncer. Si, sous prétexte que quelques-uns ont une fortune excessive, on pouvait composer avec les propriétés, si on adaptait à toutes les matières les principes d'égalité, on irait jusqu'à demander la loi agraire et la subversion de tous les liens politiques. Les titulaires ont le droit de propriété aux jouissances usufruitières qui leur ont été accordées, et toute espèce d'ultimatum est incompatible avec ces principes. Je conclus en adoptant l'opinion de M. Thouret, en ôtant l'ultimatum.
Je dois remettre sous vos yeux la position dans laquelle s'est trouvé le comité. Rappelez-vous le décret qui assigne un traitement aux religieux, dont quelques-uns étaient sans revenu ; rappelez-vous que l'état des religieuses n'est point encore fixé ; que vous vous proposez d'augmenter le traitement des vicaires ; que vous vous chargez de l'entretien des pauvres. La seule opération qui était soumise à votre comité, c'était un nouveau partage, par lequel on ôtait le superflu aux uns, pour donner le nécessaire aux autres. On vous a proposé une répartition proportionnelle aux ricoesses des titulaires. Eh bien ! je suppose que vous ayez à partager entre deux individus, dont l'un aurait 500,000 livres et l'autre 2,000 livres ; en déduisant les deux tiers qui ne leur appartiennent point, vous laissez au premier beaucoup trop, et le dernier n'a pas le nécessaire. Je fais cette simple réflexion, pour vous montrer dans les plans proposés l'impossibilité de l'exécution, et les vues sages qui ont guidé le comité.
Il vient d'arriver de Perpignan une lettre des officiers du régiment de Tou-raine, et un procès-verbal au sujet de l'enlèvement des cravates de leurs drapeaux. Un de MM. les secrétaires va en faire lecture.
, secrétaire, lit ces deux pièces.
« Nosseigneurs, le corps des officiers du régiment de Touraine, indigné de l'enlèvement de ses drapeaux par M. le vicomte de Mirabeau, supplie l'Assemblée nationale de lui rendre prompte justice, et nous certifions que le procès-verbal ci-joint est véritable,
« Nous sommes avec un profond respect, Nosseigneurs, vos très humbles et très obéissants serviteurs.
« A Perpignan, le 13 juin 1790.
« Signé : Le chevalier d'Iversav, de Chariot, Pontavie, Larroux, Meyvière, d'Artois, La Caudelle, Gorvey, Martin, Baudreuil, de Châteaugaillard, Du Belloy, Hainaud, Thorème, le vicomte de Bonne, de Préchâteau, Chéron, Patel, de Bonne, Serre, de Pontoux, Jory. »
« procès-verbal du 11 juin
rédigé à 11 heures du matin, en la maison du sieur d'Aguilar, maire dé la ville de Perpignan, par les officiers, adjudants, bas-officiers 'Caporaux et soldats du régiment de Touraine,
« La compagnie des grenadiers, MM. Patel et Martin, officiers, et M. Serre, porte-drapeau, à leur tête, d'après l'ordre du sieur d'Iversay, s'étant
rendus dans la maison du sieur d'Aguilar, maire de la ville, pour reprendre les drapeaux qu'on lui avait confiés, ont vu, avec le dernier désespoir, qu'il ne restait plus à ces témoignages de leur valeur, absolument que les bâtons dégradés et dépouillés de leurs cravates, et quelques vestiges que l'on a trouvés dans l'endroit où ils reposaient, preuve évidente de la rage de celui qui les avait ainsi mutilés. On leur a déclaré que la Chambre, à côté de laquelle était le cabinet où les drapeaux reposaient, avait été la chambre où avait demeuré M. le vicomte de Mirabeau, depuis qu'il s'était retiré dans la maison du 6ieur d'Aguilar.
« En foi de quoi, nous avons dressé le présent procès-verbal en la maison susdite, ce 11 juin à onze heures du matin, l'année 1790, et ont signé :
« Le chevalier d'Iversay; de Chariot; de Tho-rème; Baudreuil; de Précbâteau; Patel; Serre, porte-drapeau; Lubin,sergent-major; Dutrieux, fourrier ; Meyvière : d'Artois, le jeune, caporal ; Beson, appointé ; About, secrétaire ; de Château-gaillard, de Bonne; Lalandelle; Pontavie; Du Belloy ; d'Aguilar, maire; le baron d'Aguilar; Martin ; le comte de Montagne ; Cholet, lieutenant du roi ; le chevalier Du Vivier ; le vicomte de Bonne ; Chéron ; le chevalier de Pontoux et de Reuvent.
« Pour copie conforme à l'original, resté en mains du commandant du corps.
« Le chevalier d'Iversay. »
(Ces deux pièces sont renvoyées aux comités des rapports et militaire déjà saisis de l'affaire.)
L'Assemblée reprend la suite de la discussion sur l'article lor au décret concernant le traitement du clergé actuel.
Des difficultés assez considérables se présentent sur les opinions respectives : lorsqu'on dit que c'est assez de 30,000 livres pour un homme, on est sûr de réunir tous les suffrages; mais ce n'est pas par ces considérations qu'il faut se décider. Il y en a d'autres, fondées sur la plus stricte justice, qui jamais n'a été repoussée dans l'Assemblée. On associe pour ce traitement celui qui a 40,000 livres et celui qui en a 500,000, parce que, dit-on, on ne doit accorder aux ecclésiastiques que le nécessaire. On se trompe. (Il s'élève des murmures dans la partie gauche.) Il était établi légalement que les titulaires avaient le droit de jouir du tiers du revenu, n'importe la somme à laquelle il se montait. (Les murmures continuent.) S'il fallait parler jurisprudence, je pourrais citer des circonstances où l'on a prouvé l'incompatibilité de certains bénéfices : donc il y en avait de compatibles. Cherchons une opinion plus sage que celle qui va presque jusqu'à autoriser les ecclésiastiques à ne pas payer leurs dettes, à ruiner des pères de famille et des ouvriers industrieux par une économie hors de saison, qui ne s'apercevra presque pas dans la masse des biens ecclésiastiques. Si vous craignez tant que les ecclésiastiques en abusent, décrétez positivement que les fonds que vous leur accorderez seront destinés à payer leurs créanciers. J'adopte la motion de M. Thouret, en y faisant deux amendements.
Le premier consiste à s'arrêter dans le tableau de la réduction progressive au cinquième degré de l'échelle, de sorte que le taux le plus élevé du traitement soit de 75,000 livres.
Le second est que la dotation des abbés et de
tous autres ecclésiastiques ne s'élève pas au-dessus de 24,000 livres. Je présenterai encore un autre amendement : ce serait qu'au-dessus des 12,000 livres pour les évêques, et de 1,000 livres pour les autres bénéficiers, le reste de leurs revenus fût saisissable par leurs créanciers. Voici les avantages que je me promets de ces amendements. Les créanciers conserveront la même espérance que lorsque les titulaires restaient maîtres de leurs bénéfices. Je prends le taux le plus haut parce que ce sont les ecclésiastiques les plus riches qui ont le plus de dettes. Les créanciers n'espéraient pasqu'un bénéficier mît de côté, pour les payer, une somme de 60,000 livres. Regret-terez-vous que ceux qui ont fait des économies continuelles jouissent sur leurs vieux ans d'une somme un peu plus considérable et quitte de toutes dettes ? Enfin, je soutiens que l'augmentation qui se trouverait faite sur la proposition du comité ne monterait pas, pour la première année, à 7 ou 800,000 livres. Le comité lui-même a reconnu la nécessité de traiter favorablement les vieillards. Ajoutez qu'il y a des bénéficiers titulaires depuis un an, qui n'ont pas encore touché de quoi payer le prix de leur bulle et l'établissement de leur ménage. Il paraît de toute justice de payer leurs dettes, si on les prive de leurs revenus. Vous savez aussi que plusieurs bénéficiers ont emprunté sur leurs menses en vertu de lettres patentes ; toutes ces dépenses doivent être à la charge de la nation... (Il s'élève beaucoup de murmures.)
Si le désordre qui règne dans l'Assemblée Continue, je déclare que je serai obligé de lever la séance.
Je dis d'abord que l'échelle proposée par M. Thouret est plus juste que toutes les propositions qui vous ont été faites; je dis ensuite qu'elle coûtera beaucoup moins. Eu suivant l'échelle proportionnelle, vous ne traiterez guère mieux les titulaires qu'en adoptant l'avis du comité. Dans l'uné et l'autre, la proportion est la même jusqu'à 45,000 livres, puisque le maximum du comité est de 30,000 livres. Calculez ensuite l'augmentation que propose M. Thouret, et vous verrez s'il vous en coûtera beaucoup pour être justes...
(On demande à aller aux voix.)
Témoin de la misère de nos provinces, chargé de la faire connaître ici, je dois payer cette dette aussi sacrée que celles sur lesquelles on veut vous intéresser. Quoi 1 vous accorderez à des titulaires inutiles des sommes énormes, et ils iront insulter à la misère, en dévorant dans le faste des sommes énormes, à côté d'un malheureux qui n'aura pas 24 sous de rente! Je demande, au nom de la patrie, qu'on mette aux voix l'avis du comité.
(Une partie du côté gauche de l'Assemblée se lève pour appuyer cette demande. L'Assemblée délibère, et la discussion est fermée à une grande majorité.) :
La priorité est demandée successivement pour le plan du comité, et pour la motion de M. Thouret, amendée par M. Le Chapelier.
(ci-devant l'abbé de Barmont). J'ai demandé la parole sur la priorité, et, je ne prétends pas en cela user de subterfuge pour faire un discours que j'aurais eu le droit de présenter, puisqu'en parlant pour les
titulaires aucun intérêt personnel ne m'anime; car je n'ai pas un Seul bénéfice. Jëdéthande donc la priorité potfr ,1a motion de M. Thouret, amendée par M. Le Chapelier; les motifs de ma déci+ sion sont simples* le comité est en contradiction avec lui-même et avec ses membres? il â parti* culièrement insisté sur. ce que lès circonstances ne permetterit pas... (On observé que Vopinant rentre dans la discussion.) Mes calculs seront simples; j'observerai d'abord quetoutës les fois qu'on a traité de finances, les biens ecclésiastiques ont été présentés eomme immenses* et que quand il s'agit de salarier les titulaires (c'est ainsi qu'on s'exprime), ces biens se trouvent peU considérables* et ne suffisent pas aux besoins. Si les calculs du comité ne sont pas exacts, j'adopte l'opinion de M. Thouret j et ses calculs ne sont, pas exacts, si je prouve par l'opinion même des membres.i. (On observe que la discussion est fermée, et Vopinant quitté la tribùke.)
(Qn lit l'article du comité et la motion de M. Thouret* amendée par Mi Le Chapelier.)
On demande que je lise la motion que j'ai proposée: Le maximum des évêques sera borné a 60,000 livres, celui des abbés à 24,000 livreë. Au-dessus de 6*000 livres, lë traitement des abbês sera réduit à moitié:
(11 s'élève quelques discussions sur la manière de poser la question de priorité.)
Il n'est pas question de priorité; ce que propose M. Thouret n est qu'une correction à l'article du comité, c'est-à-dirè tih amendement j et non pas Une motion.
demande qu'on aille aux voix sur l'amendement.
Je n'avais le projet de porter la parole que pour accélérer la délibération* en demandant qu'on allât aux voix; je ne vois dans tout ceci qu'une véritable difficulté* celle de payer les créanciers; elle m'avait déterminé à demander la priorité pour la motitln de Mj Thouret.
(On demande de pltis fort à allet* aux voix. — On réclamé dë nouveau la priorité pour l'avis du comité;)
M. Chasset tous â dit le thot décisif. La priorité ne peut jamais être présentée que quand il y a concours entre deux projets de décret; et il n'y a concours qùe quand On présente une Série d'articles correspondants : ici, vous n'avez que dés. amendements. On appelle amendement tout ce cjui tend à ajouter ou à retrancher à une disposition particUliêfei La disposition particulière était de fixe!1 lë maximum dés évêques : on propose un mode de détermination pour ce maximum, c'est un amendement. Je demande, conformément au règlement; que l'amendement soit mis aux Voix avant la motion;
Vous ne pouvez délibérer autrement qu'en accordant la priorité au comité. La priorité est une faveur; or, c'est au projet.de votre comité quë cette faveur ëst due. Pour déterminer à laquelle des deux motions appartient la priorité* examinotis les différences cfui se trouvent entre elles : celle de M. Thouret fâtorisé line centaine.d'individus opulents* l'autre favorise le peuple. Un autre motif d'un grand poids* c'est la comparaison que le comité a faite entre l'état des
finances et lëS biens ecclésiastiques; ce h'est qu'en adoptant l'avis dd comité que vous pourrez faire face à des engagements immenses. On se dispose à mettre aux vbix la priorité. MM. Cazalès et Malouet demandent qu'on délibère d'abord sur la motion de M. Thouret, amendée par M. Le Ghapeliër, et considérée comme amendement.
La proposition de M. Thouret n'est ni un amendement ni une motion; c'est un piège tendu à l'Àsàëmbléej
La nouvelle question tne paraît être celle-ci. La proposition de M. Thouret est-elle un amendement ou une motion ? Je vais accorder la parole sur cette question j
II .s'élève de grands murmures. te On demande à aller aUx voix sur la priorité; tfiç Après de longues agitations, Une partie de l'Assemblée demande que la séance soit levée, puisqu'il est impossible de délibérer.
L'Assemblée, consultée, déclare qhe la proposition de M. Thourët est une motion i
La priorité, mise aux voix, est accordée â l'article du comité.
observe qu'il doit y àVoir une séance ce soir* et propose que la délibération soit remise, à demain; L'Assemblée décide qu'elle sera continuée.
Je propose de fixer le maximum des évêques à 15,000 livres, et de terminer l'article par ces mots : et de leurs jardins.
Il faut dire : « situés dans la ville et dans les faubourgs».
Jë rédigerais ainsi Cet amendement i « Dès bâtiments et des jardins à leur usage, situés dans là ville épiscopale. * (Cet amendement est adopté.)
Il me semblé copvenable d'ajouter à l'article cette disposition î « Et quant aU surplus du revenu desdits évêques, il sera versë dans la caisse des départements, pour être appliqué au payement des créanciers desdits évêques* les créances étant justifiées par des titres authentiques, à dater du 2 novembre dernier.»
(L'Assëmbléè décide qu'il n'y âpas lieu à délit bérer sUr cet amendement; On se prépare à mettre aux voix l'article du comité.)
réclame là proposition de M. Thouret comme amendement; et les amende-1 mentsqui ont été faits sur cette motion.
Il s'élève de grands iqurmuresi On observé que l'Assemblée a décidé que cette proposition était une motion, et que la priorité a été accordée à l'article du comité.
L'Assemblée décide qu'elle ira aux vbix sur l'article du comité;
Cet article est décrété avec l'amendement rédigé par M. Mârtirieau. Le. décret est conçu ën ces ternies î «Art. If... A compter du 1er janvier 1791; le traitement de tous les évêques en fonctions ëst fixé ainsi qu'il suit* savoir :
« Ceux dopt tous les reveilus ecclésiastiques; sans exceptiori, n'excèdent pas 12$00 livres* n'éprouveront aucune MdttGtion s « Ceux dont les revends excèdent cëttë somme,
auront 12,000 livres, plus la moitié de l'èxcédent, sans que le tout puisse aller au delà de 30,000 livres; celui de Paris seul aura 75 mille livres.
« Ils continueront à jouir des bâtiments et jardins à leur usage, situés dans la ville épiscopale. »
Le service de la poste aux lettres est dans un grand désordre, et je demande que l'Assemblée s'occupe incessamment de son organisation. (Voy. annexée à la séance de ce jour Vopinion de M. d'Harambure sur le service de la poste.)
Cette motion n'est pas appuyée:
La séance extraordinaire qui avait été indiquée pour ce soir ne pourra avoir lieu, à cause de la longueur de la séance du matin.
(La séance est levée à cinq heures du soir.)
A LA SÉANCE DE L'ASSEiffiLÉE NAÎlbNÀLE DU
Opinion de M: d'Harambure sur le rapport fait au comité des finances, par M. de Biron, sur le service de la poste aux lettres; des messageries et de la poste aux chevaux; prononcée au comité des finances le 23 juin 1790 (1).
Messieurs, d'après le rapport qui vous a été fait sur les différentes propositions concernant les services de la poste aux chevaux, de la poste aux lettres et des messageries, il faut être convaincu, comme je le suis, de la bonté et de l'utilité du service que propose M. Alary, pour oser entreprendre de vous en faire sentir tous les avantages, et détruire les craintes et les difficultés qu'on vous a présentées sur son exécution et sur la sûreté du service;
Jè vais en peu de mots, Messieurs, vous développer lés avantagés que j'ai trouvés dans son plan polir le public, le coramërce et le Trésor national, et voûs démontrer là possibilité et la sûteté d'un tel service.
Le public y trouvera la certitude d'être servi promptement, commodément, et à beaucoup moins ae frais que par le passé, la plus grande libèrté sur la manière dont il voudra voyager et faire transporter ses effets.
Le commerce : une célérité inappréciable dans le transport de ses marchandises, et un quart de diminution sur les frais ; nulle gêne, nui embarras sur les moyens qu'il croira plus utiles à ses intérêts pour la circulation de ses marchandises.
Le Trésor national y trouvera la certitude d'un prix de bail de douze cent mille livres pour les messageries ; l'augmentation d'un million sur le produit actuel de la poste aux lettres, une économie de douze cent mille livres sur l'administration de la poste aux chevaux; le transport gratuit de tous les fonds publics au Trésor national, et des paquets concernant ladite caisse. Tous ces avantages présentant une amélioration
dans les revenus de l'État de plus de quatre millions.
Il en est un; Messieurs, dont je uésifë auç l'importance ne vous soit jamais connue, c^st celui d'une guerre ; il n'est pas ijm de nous qqi nesaclje les frais énormes qu'occasionnent les transports des vivres et munitions de guerre pour se mettrq en état d'entrer en campagne, et ceux qu'exigent le service de l'armée. Àveç, le secours d'une compagnie propriétaire dé dix-rlmit a vipgt, millë chevaux, la nation sera constamment en état de prévenir son ennemi et pourra^.avec ,fce secours, faire avec vingtmille homnies, ce qu'elle né ferait pas avec trente .mille*.
L'économie qui en résulterait pour les dépenses serait immense.
Je crois, Messieurs, que dë tels moyens sont faits pour mériter votre attention, et qu'il est de votre sagesse de ne pas prononcer à cet égard sans le plus grand examen.
Je sens comme vous, Messieurs, l'importance de cette entreprise ; plus je l'examine, plus je la trouve digne d'une grande nation qui s'occupe de vivifier toutes les branches de son administration ; et je suis bien éloigné d'y trouver des obstacles qu'on vous a présentés dans son exécution, et encore moins la crainte de l'interruption d'un tel service. •
Je ne vois dans son exécution d'autre difficulté que celle tiii filacëtnent des rélaia de quatre en quatre lieues. Si on était astreint à. les mettre tous à cette distàtifeé, jè regarderais lèË fehOSe comme impraticable dans le moment présent; mais comme il est possible,. d'après ce qu'il dit dans ses mémoires, de lui donner une latitude de trois à cinq lieues, cette difficulté me paraît dénixée. de.fondement ; attendu qu'il n'est pas possible qu'orne trouve dans cette distance un local propre à y établir un relai.
Le reste tient absolument au moyen des. fonds, et je n'ai aucun doute sur pet objet, lorsque, vous aurez reconnu la bonté et l'utilité dé ce plan, et qu'il ne s'agira, pour l'adopter,, qqe. de, la certitude que les fonds nécessaires, pour pién monter cet établissement, existent* Vous devez sentir, Messieurs, combien le moment présent est peu favorable pour que des capitalistes veuillèptjç montrer dans une affaire qui présente à peux qui ne la connaissent, pas, dans ses détails, de,s fopds immenses, quand le succès en est plus qu'incér-tain, d'après, l'opinion générale.,,
L'Assemblée a décrété, sur vptrf rapport, qu'jl serait accordé aux maîtres de poste une indemnité de dix écus par cheval, pour leur ,tenir lieu des privilèges dont ils jouissaient ; elié a rempli aîèu;r égardla condition qui les liait à ce service public : commë ils ont le droit, par Jeur breyçtj de le quitter en avertissant six mois d'avance,, la nation doit avoir celui de les destituer, à cette épbque, sans injustice, en exigeant d'eux ,de le ëqntinuef, pendant six mois> sans interruption, ei avec la même activité.
Cet intervalle étant plus que suffisant pour assurer le service d'un passage à l'autre^ cette transition .me paraît peu susceptible,vd'iqcon-: vénients d'après les avantages qu'il procure aux maîtres de posté qui voudront prendre la direction de leurs relais, et le sort qu'il assure à tous les postillons.
Parvenu à ce point, je ne vpis que la certitude d'un beau service, et l'impossibilité .qge la chaîne en soit interrompue, attendu que l'intérêt de la compàgnië qu'il entreprendra lui prescritla nécessité ae le tenir toujours dans la plus grande acti-
vité. J'ai toujours été ennemi de toutes les compagnies, persuadé qu'il n'en existait pas qui ne lussent au détriment du peuple ou de l'État. Celle-ci, au contraire, ne peut faire son bien qu'en faisant celui de l'un ou de l'autre.
Les ressources sont telles que s'il arrivait un événement qui détruisît tous les chevaux d'un ou plusieurs relais de suite, elle pourrait, dans vingt-quatre heures, les rétablir,*et suppléer, dans l'instant au besoin du service, s'il en était nécessaire. Je ne vois par la même possibilité dans le système actuel ; au contraire, je n'y vois que la ruine d'un ou plusieurs particuliers et la chaîne du service interrompue pendant fort longtemps.
Persuadé, Messieurs, que la réunion de ces trois services ne peut qu'opérer le bien de l'Etat, du public et du commerce, j'ai cru qu'il était de mon devoir de vous en faire connaître tous les avantages, et de vous engager à peser, dans votre prudence et vos lumières, les motifs qui doivent vous déterminer à en présenter l'adoption ou le refus à l'Assemblée.
Séance du
La séance est ouverte à onze heures du matin.
, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance de mardi soir 22 juin. Il est adopté.
, autre secrétaire, lit le procès-verbal de la séance d'hier, 23 juin.
,au nom du comité ecclésiastique, demande que dans l'article 1er du décret concernant le traitement du clergé actuel, le mot métropolitain soit substitué à celui d'archevêque.
Ce changement est ordonné.
Le procès-verbal est ensuite adopté.
Un membre demande que' l'affaire du commerce de l'Inde soit irrévocablement fixée à la séance de samedi soir.
Cette proposition est adoptée sans réclamation.
fait au nom de là ville de Vailly-sur-Aisne, district de Soissons, la soumission d'acquérir des biens domaniaux, situés dans son territoire, jusqu'à concurrence d'un million.
Cette soumission est renvoyée au comité d'aliénation.
, rapporteur du comité de Constitution. La municipalité de Saint-Jean-d'Angely et le
directoire de district ne sont point encore formés. La convocation des gardes nationales pour
le 14 juillet ne pourra être faite si l'on ne donne à cet égard des pouvoirs aux commissaires
du roi. Les anciens corps établis dans cette ville ne sont pas réunis à la garde na-
« L'Assemblée nationale, considérant qu'il n'est pas apparent que la formation du directoire du district de Saint-Jean-d'Angely soit terminée à la fin de ce mois ; que la formation de la nouvelle municipalité de cette ville, prescrite par le décret du 27 mai dernier, ne semble. pas non plus pouvoir être terminée à cette époque; ouï son comité de Constitution, décrète que les commissaires du roi pour l'établissément des corps administratifs du département et des districts de la Charente-Inférieure, sont autorisés collectivement, ou l'un d'entre eux, à ordonner les convocations prescrites par le décret des 8 et 9 de ce mois, relativement aux députés des gardes nationales qui doivent se rendre à la Confédération générale qui aura lieu à Paris, le 14 juillet.
« Le roi sera supplié d'enjoindre à ses commissaires de veiller dans la ville de Saint-Jean-d'Angely à l'exécution du décret du 12 de ce mois, qui ordonne la réunion en un seur corps, sous le nom de gardes nationales, des gardes citoyennes connues jusqu'à présent sous le nom de milices bourgeoises, volontaires, chasseurs, canonniers, et sous toute autre dénomination.
« L'Assemblée nationale déclare qu'elle a entendu, par son décret du 12 de ce mois, relatif à la réunion en un seul corps, sous la dénomination de gardes nationales, et sous le même uniforme, comprendre non seulement les anciens corps de milices bourgeoises, mais même les volontaires, et autres compagnies qui, sous des dénominations différentes, se sont formées depuis et avant le mois de juillet 1789.
« Elle décrète, en conséquence, que, pour la Fédération du 14 juillet, il ne pourra être fait aucune députation séparée de ces anciennes compagnies qui ne subsistent plus, étant désormais réunies sous le nom de gardes nationales. » (Ce décret est adopté.)
, rapporteur. Nous avons à vous dénoncer une erreur commise par l'assemblée du département d'Eure-et-Loir. Dès le commencement, elle s'est arrogée, par la forme de ses délibérations, le pouvoir législatif; cette erreur, commise par de bons citoyens, n'en est que plus funeste. Par une délibération intitulée décret, l'Assemblée met un particulier sous la sauvegarde de la loi et du département ; elle ordonne de former des gardes nationales, etc.
Le comité propose de décréter que nul corps administratif ne peut employer, pour ses arrêtés, l'expression de décret, mais celle de délibération ; qu'il peut seulement rappeler que tous les citoyens sont sous la sauvegarde des lois, et que jamais il ne doit faire de dispositions relatives aux gardes nationales.
Le projet de décret du comité de Constitution est mis aux voix et adopté ainsi qu'il suit :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de Constitution et la lecture d'un arrêté pris par l'administration du département d'Eure-et-Loir,
« Décrète que nul corps administratif ne pourra employer, dans l'intitulé et dans le dispositif de ses délibérations, l'expression de décret, consacrée aux actes du Corps législatif; qu'il doit employer le terme de délibération ; « Qu'il ne pourra également prononcer qu'il
met les personnes et les biens de tels ou tels particuliers sous la sauvegarde de la loi et du département, parce que les unes et les autres y sont nécessairement ; qu'il pourra seulement rappeler que les personnes et les propriétés sont sous la garde des lois;
« Que s'il est du devoir des corps administratifs et municipaux de veiller au maintien de la tranquillité publique, et de requérir dans les cas de nécessité le secours de la force armée, ils ne peuvent faire aucunes dispositions législatives, relativement aux gardes nationales. »
L'Assemblée passe à son ordre du jour qui est la suite de ta discussion sur le traitement au clergé actuel. L'article premier du décret a seul été adopté.
, rapporteur, lit l'article 2 ainsi conçu :
Art. 2. Les évêques qui, par la suppression effective de leur siège, resteront sans fonctions, auront pour pension de retraite les deux tiers du traitement ci-dessus ; il en sera de même de ceux qui, sans être supprimés, jugeraient à propos de se démettre. »
Il est juste que les évêques supprimés jouissent d'un traitement; mais il n'en est pas de même de ceux qui, par mauvaise volonté, quitteraient leur poste.
, de Toulon. Je suppose que soixante évêques se coalisent pour ne pas faire le service, il en résulterait un surcroît de dépenses de 400,000 livres. Il est de notre prudence de prévenir cet inconvénient. Je propose cet amendement : « Quant à ceux qui, étant conservés, jugeront à propos de se démettre, leur traitement sera réduit à 12,000 livres.
Il faut dire la vérité rondement : je ne sais pas pourquoi on accorderait un traitement à des hommes qui jetteraient du trouble dans la société. Voici mon amendement : Et ceux qui, ayant été conservés, jugeraient à propos de se démettre n'auront rien. »
L'Assemblée nationale ne peut se livrer â de pareilles idées, et en faire la base d'un décret. On ne doit pas présumer le mal : la crainte que ies évêques n'abandonnent leur poste par des motifs peu honnêtes est chimérique. Il n'y a pas lieu à délibérer sur les amendements proposés.
, le jeune, député de Beauvais. Les motifs de ceux des préopinants qui demandent la réduction des traitements ne portent pas sur les évêques, qui, par des raisons de sauté et après de longs services, ne se croient plus en état de remplir des fonctions pénibles. Or, voici la réflexion que j'oppose à leurs propositions. Un évêque qui verrait avec chagrin les réductions que la justice et l'intérêt public ont nécessitées ; un évêque que l'intérêt personnel pourrait affecter à ce point serait dangereux dans son poste : s'il se retirait, par qui serait-il remplacé ? Par un prélat choisi dans la classe respectable des pasteurs ; par un prélat qui verrait dans son élévation un bienfait de la loi. Je ne crois pas qu'il y ait quelque inconvénient à accorder 12,000 livres aux évêques qui voudraient se démettre : on ne saurait trop favoriser leur retraite.,
(On ferme la discussion sur l'article.)
Je demande par amendement de décréter que chaque prélat qui se retirera ne conservera pour retraite que le prix excédant le traitement de son successeur et je propose d'étendre cette disposition aux curés.
Je pose une question à l'auteur de l'amendement. Quel sera le sort réservé aux évêques qui n'auraient que 12,000 livres et qui cependant seraient dans l'impossibilité de continuer les devoirs de leur charge ?
Il est de la prudence de l'Assemblée de prévoir le cas où tous les évêques se retireraient, ce qui ruinerait 1e royaume.
La seconde partie de l'article 2 tend seulement à donner des pensions à des ©f* liciers retirés. Je demande donc la division. La première partie doit être votée tout de suite ; la seconde sera ajournée et renvoyée au comité des pensions.
Cette motion est mise aux voix et adoptée.
L'article 2 est ensuite décrété ainsi qu'il suit :
« Art. 2. Tous les évêques qui, par la suppression effective de leurs sièges, resteront sans fonctions, auront pour pension de retraite les deux tiers du traitement ci-dessus. »
Le comité militaire demande à interrompre l'ordre du jour pour un rapport très instant sur Vaugmentation de solde des troupes, décrétée par V Assemblée nationale,les 28 février et 6 de ce mois.
L'Assemblée décide que le comité sera entendu.
, rapporteur du comité militaire.
Il s'est élevé quelques difficultés sur les décrets du 28 février et du 6 juin. Plusieurs régiments jouissaient déjà, les uns de 2, les autres de 12 deniers de haute paye ; ils étaient des corps privilégiés. Votre intention a sans doute été de faire disparaître toute espèce de distinction dans l'armée, et d'imputer cet excédant de solde sur les 32 deniers accordés à l'armée française. Les invalides détachés étaient moins bien traités que les fantassins. Votre comité a pensé qu'ils devaient y être entièrement assimilés. Dans la répartition provisoire des 32 deniers, il a été fait une masse pour quatre onces de pain d'augmentation. La répartition définitive ne met rien en augmentation dans la masse de la boulangerie ; il est naturel que les troupes payent cet excédent sur les 32 deniers. Les Suisses ont reçu le même excédent ; ils ne participent pas à l'augmentation de solde. La répartition provisoire leur a donné cet avantage qu ils ne devaient pas recevoir. Le comité ne pense pas qu'il faille faire rendre à des soldats quelques onces de pain qu'ils ont reçues chaque jour pendant deux mois. C'est sur ces différents objets que porte le. projet de décret que je suis chargé de vous présenter : « L'Assemblée nationale, voulant prévenir les fausses interprétations des décrets des 28 février et 6 juin, concernant l'augmentation de paye décrétée en faveur des soldats français, déclare qu'en décrétant l'augmentation de 32 deniers, son intention n'a pas été d'ajouter d'avantage aux corps privilégiés, mais d'élever au même taux les corps de la même armée, et de rendre meilleur le sort de toutes les armes ; elle décrète ce qui suit :
« 1" Tous les corps de l'infanterie française, al-
lemande, irlandaise, liégeoise, jouiront de la même paye que la cavalerie ; et les régiments de dragons, chasseurs et hussards jouiront de la même paye ;
« 2° Au moyen de l'augmentation qui a été décrétée, la paye de l'infanterie sera de 136 liv. 17 s. 6 d. année commune, ou de 7 s. 6 d. par jour, dont 5 s. 10 d. d'ordinaire, 1 s. 2 d. pour la masse de linge et chaussure, dont il sera rendu compte à chaque homme, et les autres 6 d. laissés à la disposition du soldat, le tout sans préjudice de la haute paye attribuée aux grenadiers, tambours, majors, sergents, etc.
« 3° Les compagnies d'invalides détachées seront assimilées à l'infanterie.
« 4° La paye des carabiniers et de la cavalerie sera de 161 liv. 4 s. 6 d. année commune, 8 s. 10 d. par jour, dont 6 s. à l'ordinaire, 2 s. 4 d. à la masse, et 6d. à la disposition du soldat, sans préjudice de la haute paye, etc.
« 5° La paye des dragons, hussards, chasseurs sera de 155 liv. année commune, et de 8 s. 6 d. par jour, etc.
« 6° La paye des canonniers apprentis sera de 146 liv. année commune, et de 8 s. par jour, etc. f 7° La paye des ouvriers apprentis sera de 206 1. année commune, et 9 s. 4 d. par jour, etc.
« 8° La paye des mineurs sera de 164 liv. 5 s. par année commune, et de 9 s. par jour, etc.
« 9° Indépendamment des différentes payes, les cavaliers, dragons, hussards, chasseurs et soldats seront habillés et équipés, comme ils étaient, sur la masse.
« 10° Ils auront vingt-quatre onces de pain par jour, sur la masse de laquelle aucun décompte ne sera fait aux soldats.
« 11° Il sera prélevé 5 d. pour fournir provisoirement quatre onces de pain, jusqu'au 1er juillet prochain.
c 12° Le pain fourni aux Suisses depuis le 1er mai sera passé en compte comme dépense extraordinaire. >
Je croyais que le comité aurait détruit un abus intolérable. Les dragons, les chasseurs et les hussards doivent être assimilés à la cavalerie ; ils font une dépense plus considérable, puisqu'ils font tout à la fois celle de la cavalerie et celle de l'infanterie. Je demande que le comité militaire présente les motifs qui l'ont déterminé à conserver cette différence de paye.
Je demande que toutes les troupes à cheval aient un traitement égal et qu'il en soit ainsi de l'infanterie.
Le décret que nous vous proposons est essentiellement provisoire et n'est en réalité qu'un décret de comptabilité en attendant que vous ayez statué sur l'organisation de l'armée.
Plusieurs membres présentent encore quelques courtes observations.
met ensuite le décret aux voix. Il est adopté dans la rédaction suivante :
« L'Assemblée nationale, voulant prévenir les fausses interprétations qu'on pourrait donner à ses décrets des 28 février dernier et 6 du présent mois, concernant l'augmentation de paye décrétée en faveur des soldats français, et parer en même temps aux difficultés qui pourraient naître des dispositions provisoirement prescrites à cet égard par la circulaire que le ministre de la guerre a
adressée aux régiments le 20 avril dernier; après avoir entendu le rapport de son comité militaire, a déclaré et déclare qu'en décrétant une augmentation de paye de 32 deniers, son intention n'a point été d'ajouter aux avantages des corps ci-devant privilégiés ; mais qu'elle a voulu : 1° sans faire éprouver à ceux-ci aucune diminution sur leur ancienne paye, élever aux mêmes taux celle des corps de la même arme qui étaient moins favorisés ; 2° en partant de ce niveau, rendre meilleure la condition de toutes les troupes, et fixer un traitement uniforme pour chaque espèce d'armes.
a En conséquence, L'Assemblée nationale a décrété et décrète :
» 1° Qu'en attendant qu'il ait été statué sur l'organisation de l'armée et sur l'admission des troupes étrangères au service de France, tous les corps d'infanterie française, allemande, irlandaise et liégeoise, qui sont actuellement à la solde de l'Etat, jouiront de la même paye ; qu'il n'y en aura qu'une pour tous les régiments de cavalerie, et que celle des dragons, chasseurs et hussards, sera la même;
« 2° Qu'au moyen de l'augmentation de trente-deux deniers, décrétée le 28 février dernier, la paye de tous les fantassins, sans distinction, sera de 136 livres 17 sols 6 deniers par chaque année commune, et de 137 livres 5 sols par année bissextile, faisant 7 sols 6 deniers par jour, dont 5 sols 4 deniers seront affectés à l'ordinaire,
1 sol 8 deniers à la masse de linge et chaussure, de laquelle il sera rendu compte exactement à chaque homme, et les autres 6 deniers laissés à la disposition du soldat ; le tout sans préjudice des hautes payes attribuées aux grenadiers, tambours, musiciens, appointés, caporaux et sous-officiers, dont ils jouiront comme du passé];
c 3° Que les compagnies d'invalides, détachées dans les villes et châteaux, et y faisant le même service que l'infanterie, lui seront exactement assimilées pour leur paye et traitement, à compter du premier mois de mai dernier;
« 4° Que la paye des cavaliers et carabiniers, sans distinction, sera de 161 livres 4 sols 2 deniers par année commune,et de 161 livres 13 sols par année bissextile, faisant 8 sols 10 den. par jours, dont 6 sols seront affectés à l'ordinaire,
2 sols 4 deniers à la masse de linge et chaussure, de laquelle il sera rendu compte exactement à chaque homme, et les autres 6 deniers laissés à la libre disposition du cavalier ; le tout sans préjudice des hautes payes attribuées aux trompettes, appointés, maître maréchal, maître sellier, brigadiers et sous-officiers, dont ils jouiront comme du passé ;
« 5° Que la paye des dragons, chasseurs et hussards sera de 155 livres 2 sols 6 deniers par année commune, de 155 livres 11 sols par année bissextile, faisant 8 s. 6 den. par jour, dont 5 s. 8 deniers seront affectés à l'ordinaire, 2 sols 4 deniers à la masse de linge et chaussure, de laquelle il sera rendu compte exactement à chaque homme, et ies autres 6 deniers laissés à la libre disposition du dragon, chasseur ou hussard ; le tout sans préjudice des hautes payes attribuées aux trompettes, appointés, maître maréchal et maître sellier, brigadiers et sous-officiers, dont ils jouiront comme du passé ;
« 6° Que la paye des canonniers apprentis sera de 146 livres par année commune, et de 146 liv. 8 sols par année bissextile, faisant 8 sols par jour, dont 5 s. 8 d. seront affectés à l'ordinaire, 1 s. 10 d» à la masse de linge et chaussure, delà**
quelle il sera rendu compte exactement à chaque homme, et les autres 6 d. laissés à la libre disposition du canonnier; le tout sans préjudice des hautes payes attribuées aux artificiers, canon-niers de première et seconde classe, tambours, appointés, caporaux et sous-officiers, dont ils jouiront comme du passé;
« 7° Que la paye des ouvriers-apprentis sera de 206 1. 16 s. 8 d. par année commune, et de 2071. 8 s. par année bissextile, faisant 11 s. 4 d. par jour, dont 9 s. seront affectés à l'ordinaire, 1 s. 10 d. à la masse de linge et chaussure, dont il sera rendu compte exactement à chaque homme, et les autres 6 deniers laissés à la libre disposition de l'ouvrier; le tout sans préjudice des hautes payes attribuées aux seconds ouvriers, maîtres ouvriers, appointés, caporaux et sous-officiers, dont ils jouiront comme du passé; sans préjudice aussi des 6 deniers par jour que les tambours ont de moins que les ouvriers, et qui diminueront d'autant ce que les tambours doivent mettre à l'ordinaire;
« 8° Que la paye des mineurs sera de 164 livres 5 sols par année commune, et de 164 liv. 14 sols par année bissextile, faisant 9 sois par jour, dont 6 sols 8 deniers seront affectés à l'ordinaire, 1 sol 10 deniers à ia masse de linge et chaussure, de laquelle il sera tenu compte exactement à chaque homme, et les autres 6 deniers laissés à la libre disposition du mineur; le tout sans préjudice des hautes payes attribuées aux tambours, mineurs de première classe, appointés, caporaux et sous-officiers, dont ils jouiront comme du passé;
« 9° Qu'indépendamment des différentes payes déterminées par les articles précédents, les soldats, cavaliers, dragons, chasseurs, hussards, canonniers, ouvriers et mineurs seront habillés et équipés sur ia masse établie pour cet objet, et recevront, en outre, lorsqu'ils seront présents aux drapeaux ou détachés pour le service, une ration de 24 onces de pain par jour, aussi sur la masse établie pour cet objet, de laquelle masse, non plus que celle de l'habillement, ou générale, ni de celles d'hôpital, lits, bois et lumières, et effets de campements, il ne sera fait aucun décompte au soldat dans aucune arme, non plus que de la masse de fourrage dans les troupes à cheval;
« 10° Que les différentes payes ci-dessus fixées devant avoir lieu à dater du premier mai dernier, le décompte en sera fait depuis ce jour, à la charge d'un prélèvement de 5 deniers par jour sur chaque soldat, cavalier, dragon, chasseur, hussard, canonnier, ouvrier et mineur, qui aura reçu la fourniture provisoire de 4 onces de pain de plus que la ration ordinaire ;
« U° Que cette fourniture provisoire continuera jusqu'au dernier de ce mois iuclusivement ; qu'elle cessera au premier juillet prochain, ainsi que le prélèvement de 5 den. ; et qu'à compter ae ce jour premier juillet prochain, jusqu'à ce qu'il en ait été autrement ordonné, les articles 1, 2, 3, 4, 5, 6,7, 8 et 9 du présent décret, qui déterminent la paye de chaque arme, auront leur pleine et entière exécution;
12° Que le prix des 4 onces de pain de plus que les Suisses ont reçu depuis le premier mai dernier, et qu'ils continueront à recevoir seulement jusqu'au dernier de ce mois inclusivement, sera passé en compte sur le pied de 5 deniers, comme dépense extraordinaire;
« Qu'enfin, dans le plus court délai, le président se retirera vers le roi, pour le supplier de donner sa sanction au présent décret, et les ordres nécessaires pour sa prompte exécution. »
J'ai eu l'honneur de voir ce matin trois députés d'Avignon. Ils demandent à être reçus à la barre samedi prochain, à la séance du soir.
Ces députés n'ont peut-être pas de pouvoirs.
Ils m'ont dit avoir été nommés par tous les districts d'Avignon.
Ge sont alors les députés d'un peuple qui ne nous appartient pas; ils ne sont pas Français et c'est àu pouvoir exécutif à recevoir leurs lettres de créances.
L'affaire d'Avignon a été renvoyée aux comités des domaines et de Constitution ; je demande que les députés ne présentent leurs lettres de créances que lorsque les deux comités auront fait leur rapport.
11 n'y a point d'inconvénient à entendre les individus qui se disent députés d'Avignon ; on leur dira de remettre leur pétition sur le bureau, et que l'Assemblée en délibérera.
prend le vœu de l'Assemblée qui décide que les trois députés seront admis à la barre.
, député de Toulouse. La députation de Languedoc m'a chargé d'exposer à l'Assemblée qu'elle vient de recevoir une nouvelle affligeante. M. de Toulouse-Lautrec a été arrêté à Toulouse, en vertu d'un décret de prise de corps décerné par la municipalité. Aussitôt que cette municipalité a été assurée que M. de Lautrec est revêtu de ia qualité de député, elle a expédié un courrier extraordinaire qui nous a apporté l'extrait de la procédure. Nous proposons de renvoyer ces pièces au comité des recherches, pour vous en faire le rapport demain matin, à l'ouverture de la séance. J'ai l'honneur d'observer que la qualité de l'accusé, la gravité de l'accusation, l'inquiétude du peuple de Toulouse et des municipalités voisines doivent vous engager à une très grande célérité.
(Le renvoi au comité des recherches est ordonné.)
On reprend la discussion sur le traitement du clergé actuel.
,v rapporteur. Il y a encore des évêques connus sous le nom d'évêques in partibus ; le comité propose, à leur égard, un article additionnel :
« Les évêques in partibus conserveront le traitement dont il jouissent actuellement, pourvu qu'il n'excède pas 12,000 livres. »
Les évêques in partibus n'ont pas de traitement fixe. Il y en a deux espèces : 1° les suffragants d'un diocèse ; ils sont destinés à aider les évêques ; 2° ceux qui n'ont qu'un titre, qu'une décoration. Nous avons vu aux affaires étrangères un commis qui était ecclésiastique ; il ne crut pas de sa dignité de rester simple clerc, et il se fit nommer évêque in partibus. Je ne crois pas qu'il soit nécessaire de payer ces évêques ; ils n'ont point de fonctions ; ils ne doivent pas avoir de traitement. Je pense qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur l'article additionnel.
(ci-devant de Barmond). Au lieu du premier commis des affaires étrangères, M. Camus aurait pu citer les évêques d'Abracha et de Babylone, qui, tous deux, sont allés dans leur diocèse, et y ont exercé les fonctions de missionnaires. Celui d'Abracha a souffert le martyre. Lorsqu'on oublie de leur rendre justice, un ecclésiastique doit parler de leurs services et de leurs vertus. Fixons leur traitement, non d'après leur place, mais d'après l'utilité dont ils sont et les services qu'ils ont rendus. Je pense qu'on doit leur accorder, comme aux évêques supprimés, 12,000 livres, et la moitié de l'excédent jusqu'à 20,000 livres.
L'évêque de Triboniste a passé trente ans en Amérique ; il rend depuis dix ans des services dans le diocèse de Reims : il est de toute justice de le récompenser. Je demande que le minimum soit réglé à 10,000 livres.
Les préopinants vous ont cité deux ou trois exemples particuliers pour lesquels la loi ne doit pas être faite. Je n'ai pas parlé des missionnaires ; vous vous occuperez d'eux; mais ce n'est pas en qualité d'évêques qu'ils sont utiles. J'insiste sur la question préalable.
(L'Assemblée décide qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur l'article additionnel)."
L'article 3 est mis à la discussion : « A compter, du ler
janvier 1791, le traitement des curés de tout le royaume sera conforme à celui fixé par le
décret de l'Assemblée nationale sur la nouvelle organisation du clergé, en faveur de ceux qui
seront pourvus à l'avenir. A l'égard de ceux dont le revenu ecclésiastique actuel est plus
considérable, ils jouiront encore de la moitié de l'excédent dudit revenu, sans néanmoins que
le tout puisse aller au delà de 6,000 livres. »
Avant de proposer une addition que je crois convenable, souffrez que je rappelle à votre souvenir que c'est aujourd'hui l'aniversaire d'une époque mémorable, du jour où la majorité du clergé s'étant déjà réunie dans l'église Saint-Louis, vint le 24 de juin s'identifier avec l'Assemblée nationale. Il est glorieux pour les curés de s'être montrés citoyens dans un moment où le courage était aussi nécessaire que le patriotisme. Il est beureux pour les curés, que le jour du premier anniversaire de'cet événe-( ment leur présente l'occasion de prouver leur désintéressement. Nous déclarons, aucun curé patriote ne me désavouera, que le traitement que vous nous accorderez, quel qu'il soit, ne sera jamais au-dessous de nos désirs.
L'Assemblée nationale regrette de ne pouvoir nous faire un traitement plus avantageux. « Mais, a dit le comité, si elle laissait plus aux béné-ficiers, elle contracterait une charge trop onéreuse pour remplir ses engagements envers la religion et les pauvres, ce qu'assurément les défenseurs du clergé n'ont garde de prétendre. » Voilà notre devoir. L'Assemblée trouve ainsi le moyen de nous faire jouir de la félicité du peuple, et nous ne sommes privés que de la douceur du sacrifice. Après cette déclaration, je prie l'Assemblée d'accorder aux curés ce qu'elle a accordé aux évêques, et je propose un amendement conçu en ces termes : « Les curés titulaires actuels continueront à jouir des bâtiments à leur usage et des jardins situés dans le chef-lieu de leur paroisse. > Je suis d'autant plus désintéressé, que je ne me trouve pas dans le cas de
l'amendement. On sait que dans plusieurs villes les jardins du curé ne sont point attenants à la cure. Peut-être les curés ne seraient-ils pas traités d'une manière plus favorable, si cette disposition était confiée aux municipalités. Plusieurs ont été maltraités dans des assemblées primaires ; ils en ont même été chassés ; ils ont été rappelés et défendus par des non-catholiques. Nous nous empressons de rendre hommage à ces bons citoyens.
On applaudit dans une grande partie de la salle.
Beaucoup de membres du côté gauche se lèvent et demandent à aller aux voix sur cet amendement.
Cet amendement est décrété à une grande majorité ainsi qu'il suit :
« Les curés titulaires actuels continueront de jouir des bâtiments à leur usage et des jardins situés dans le chef-lieu de leur paroisse. »
L'article commence par ces mots : A compter du 1er janvier 1791. Dans l'article 14 du décret sur le clergé futur, il est dit que les nouveaux titulaires jouiront du traitement qui leur est accprdé à datér de la publication du présent décret. Il me paraît convenable d'insérer la même disposition dans l'article qui voiis est présenté.
Gela ne regarde que les nouveaux curés qui pourront être nommés, et qui, en effet, jouiront à dater de la publication du présent décret.
Ainsi, une paroisse qui aurait un nouveau curé, ne payerait plus de casuel, tandis que les paroisses voisines en payeraient encore. Il faut supprimer le casuel dès ce moment, et mettre : « A compter de la publication des présentes, le traitement de tous les curés du royaume, etc. »
(Cet amendement est renvoyé au comité.)
Le renvoi de cet amendement emporte celui des articles 4, 5 et 6.
(Le renvoi est adopté.)
L'article 3 est ensuite décrété en ces termes :
« Art. 3. Tous les curés actuels auront le traitement qui est fixé par le décret général sur l'organisation du clergé; et s'ils ne voulaient pas s'en contenter,il leur sera fourni un traitement: 1° de 1,200 livres; 2° de la moitié de l'excédent de leurs revenus ecclésiastiques actuels, pourvu que le tout ne s'élève pas à plus de 6,000 livres.
« Les curés titulaires actuels continueront de jouir des bâtiments à leur usage, et des jardins situés dans le chef-lieu de leur paroisse. »
Les articles 4, 5 et 6 ayant été renvoyés au comité ecclésiastique, on passe à l'article 7, qui porte :
Art. 7. Les abbés, prieurs, commendataires, dignitaires, chanoines, prébendés, semi-prében-dés, chapelains, officiers ecclésiastiques des chapitres supprimés, et tous autres bénéficiers généralement quelconques, dont les revenus ecclésiastiques n'excèdent pas 1,000 livres, n'éprouveront aucune réduction.
« Ceux dont les revenus excèdent ladite somme auront : 1° 1,000 livres; 2° la moitié du surplus, sans que le tout puisse aller au delà de la somme de 6,000 livres. »
11 est nécessaire de
déterminer d'abord la quotité des prébendes. Il est des chapitres où les nouveaux venus n'ont rien, et où ils travaillent longtemps pour l'expectative qui leur est offerte. Je demande que cette partie de l'article soit renvoyée au comité, ou que du moins la portion qui revient aux chanoines ne puisse pas être inférieure à la somme de 8,000 livres. Je demande aussi que, pour tous les titulaires septuagénaires, dont le titre des bénéfices est énoncé dans les articles 7 et 8, le maximum soit porté jusqu'à 9,000 livres, et que ceux dont la prébenbe nè s'élève pas au-dessus de 2,400 livres n'éprouvent pas de réduction.
(ci-devant comté de). J'appuie les amendements de M. Delley, et particulièrement celui qui est relatif aux titulaires âgés. Les motifs qui déterminent à diminuer la jouissance des titulaires consistent à éviter une trop forte charge au Trésor public; mais dans le calcul général des probabilités, la vie d'un bénéficier n'est pas de plus de trente-cinq années. Si l'on réfléchit que la plupart de ceux dont le traitement était considérable ne sont parvenus à leurs bénéfices que dans un âge très avancé, on verra que bientôt le Trésor public serait soulagé de cette charge. Je demande que le minimum soit de 3,000 livres, et le maximum de 6,000 livres au-dessous de cinquante ans ; de 8,000 au-dessus de cet âge, et de 10,000 livres au-dessus de soixante-dix ans.
Vous avez assigné aux religieux rentés, parvenus à l'âge de soixante-dix ans, une somme de 1,200 livres. Je demande que le minimun fixé dans l'article soit porté à 1,200livres. L'amendement de M. de Delley, relativement à l'expectative des chanoines me paraît juste ; j'en demande le renvoi au comité.
Je vous prie d'avoir égard à une considération que je vais vous soumettre. Plusieurs chanoines ont bâti ou réparé leurs maisons ; il me paraît convenable de leur en réserver la jouissance.
Je demande quel'on fasse une réserve pour les titulaires actuels, dont les revenus ne sont pas réglés ou sont en litige.
, député de Forcalquier. Il tient à la gloire de l'Assemblée nationale d'être juste, même dans tous les détails. La générosité a été de tout temps l'apanage de la nation française. A la suite du décret rendu le 5 janvier, sur les bé-néticiers absents du royaume, on a excepté les bénéficiers étrangers ; je viens demander que la diminution du traitement soit adoucie en faveur des bénéficiers étrangers. Toujours juste et sévère envers ses membres, une nation libre peut être quelquefois libérale envers les individus qui lui sont étrangers. Ils ne pourraient trouver une compensation dans l'honorable avantage d'être utile à la patrie... Je ne vous propose rien en faveur des bénéficiers à charge d'âmes. Voici quel est mon amendement : « Les étrangers que la reconnaissance ou l'amitié de la France a gratifiés de bénéfices non à charge d'âmes ne seront pas troublés dans leur jouissance. Le maximum de leur traitement sera de 20,000 livres, et ils seront tenus de verser le surplus dans la caisse des biens nationaux. »
, le jeune.L'Aseemblee nationale
est pénétrée des devoirs que lui impose une sévère économie; mais des considérations justes ne peuvent pas lui être étrangères. Je crois qu'on regarderait comme une injustice de traiter celui qui a 200,000 livres comme celui qui en a 11,000. C'est ce qui résulterait de la règle qui a été établie. Je propose d'accorder le tiers de ce qui excédera 11,000 livres, avec la condition que le maximum ne pourra s'élever au-dessus de 12,000 livres.
Je m'estimerai bien heureux si, dans cette foule d'amendements, vous acceptez celui que je vais vous proposer. Il consiste à excepter les évêques qui se sont démis et ont conservé un bénéfice, et ceux qui ont refusé des évêchés : on en compte à peine dix ou douze dans le royaume.
(de Toulon). Toutes ces générosités doivent porter sur le peuple : nous ne devons pas être généreux à ses dépens. Je demande la question préalable sur tous ces amendements.
La division est demandée sur la question préalable.
La question préalable est demandée sur la division.
L'Assemblée décide qu'il n'y a pas lieu à diviser et à délibérer sur tous les amendements.
L'article 7 est décrété sans aucun changement.
La séance est'levée à quatre heures moins un quart.
Séance du
La séance est ouverte à neuf heures du matin.
, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la veille.
J'ai une observation à présenter à propos de l'art. 7 du décret concernant le traitement du clergé actuel. L'Assemblée a enveloppé dans la suppression des bénéfices les bénéficiers de l'un et de l'autre sexe qui n'étaient point liés par des vœux ; elle doit donc, par une suite nécessaire, donner aux uns et aux autres par un traitement fixé par l'indemnité des titulaires ; en conséquence, je propose d'ajouter après le mot abbés celui d'abbesses, après le mot chanoines celui de chanoinesses.
(Cette motion est renvoyée au comité ecclésiastique.)
Je demande également qu'il soit statué à bref délai sur le traitement à faire aux serviteurs ecclésiastiques des chapitres.
Divers membres demandent le renvoi de cette motion au comité ecclésiastique.
(Le renvoi est prononcé.)
Le procès-verbal est ensuite adopté.
, organe du comité des rapports*. Les officiers municipaux de Riom ont été nommés le 7 février. Les citoyens réunis au mois d'avril pour établir la garde nationale se sont formés en assemblée délibérante et ont nommé une nouvelle municipalité.
Le comité des rapports, pour mettre uu terme à l'anarchie qui résulte d'un tel état de choses, vous propose le décret suivant :
« L'Assemblée nationale, après avoir ouï son comité des rapports, a décrété et décrète que nonobstant toute nomination d'officiers municipaux qui serait prétendue avoir été faite dans la ville de Riom, depuis et au préjudice de celle constatée par les procès-verbaux du 7 février dernier et jours suivants, celle-ci sera exécutée suivant sa forme et teneur : enjoint à la commune de reconnaître les officiers municipaux nommés dans lesdits procès-verbaux, et défend à toutes personnes de les troubler dans l'exercice de leurs fonctions, sauf les voies de droit, s'il y a lieu, contre cette nomination. »
(Ce décret est mis aux voix et adopté.)
, député de Châteauneuf'en Thi-merais, demande à l'Assemblée la permission de s'absenter.
, évêque et député de Montpellier, adresse une demande semblable.
Ces deux congés sont accordés.
, secrétaire, annonce que la ville de Lyon offre d'acquérir pour vingt millions de domaines nationaux.
Cette soumission est renvoyée au comité d'aliénation.
fait lecture d'une délibération des officiers municipaux de Vienne, contenant dénonciation de l'envoi fait par les soi-disant catholiques de Nîmes, de leur déclaration du premier de ce mois, aux syndics des corporations.
, rapporteur du comité des finances. La ville de Lyon est dans un état très inquiétant: elle s'est adressée à l'Assemblée nationale pour obtenir des secours. En 1788,1e déficit était de 36,493 liv. : sa dette en capital est de 32,000,000 de livres cette dette a été formée parles dons gratuits que demandaient les ministres, et qu'on était obligé de les supplier d'accepter. Le revenu de la ville est formé par des octrois sur les soies, qui rapportaient 2,200,000 liv. Le produit de cette perception a essuyé cette année une très grande diminution. Les circonstances ont forcé la ville de Lyon à des dépenses considérables: elle est créancière de l'Etat d'une somme de 2,000,000 de liv. en deux contrats qui ne produisent que 100,000 liv. d'intérêt net. La ville de Lyon demande: 1° que ces contrats lui soient remboursés, non à raison des intérêts, mais à raison du capital ; 2° que ses dettes soient déclarées dettes de la nation.
Le comité ayant fait connaître qu'il serait impossible d'accorder aucune de ces demandes, la ville de Lyon sollicite la permission d'emprunter 5 millions, pour payer au mois de juillet l'intérêt de ses capitaux, et de prendre 600,000 livres sur les deniers publics. Le comité, après avoir apprécié ces demandes,1 propose de les accueillir.
La situation des finances de la ville de Lyon était améliorée depuis quelques
années : sa dette est ce qu'elle était il y a longtemps. Le gouvernement l'avait chargée de percevoir des octrois sur les soies ; elle a éprouvé un déficit sur cet objet. Le trésorier de la ville de Lyon a avancé 1,400,000 liv. : il vient de donner sa démission ; il faut les rembourser. La destruction des barrières a occasionné sur l'octroi une perte de 600,000 liv. C'est pour ces deux objets que l'emprunt de 2,000,000 de livres est nécessaire.
Le décret proposé par M. Vernier, au nom du comité des finances, est adopté en ces termes :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des finances, voulant donner à la ville de Lyon un témoignage particulier qu'elle prend à la prospérité de ses manufactures, de son commerce et de son crédit, autorise les officiers municipaux de ladite ville à faire un emprunt de deux millions, soit en France, soit à l'étranger, aux conditions les plus favorables qu'ils trouveront convenir, sous la condition expresse de pourvoir à ce que le remboursement de ladite somme soit fait dans dix ans, à commencer de 1791, en acquittant chaque année un dixième du capital et des intérêts, ou par une économie sur les revenus de la commune, ou par la voie de l'imposition additionnelle ; et à défaut, par les administrateurs et officiers municipaux, d'avoir pourvu audit remboursement annuel, ils en demeureront responsables ; et, au surplus, à charge de rendre compte de l'emploi. »
Je dois faire part à l'Assemblée d'une lettre qui m'a été adressée par M. d'Au-busson de La Feuillade qui réclame comme une propriété de famille les quatre esclaves de bronze enchaînés, placés aux pieds de la statue de Louis XIV, place des Victoires, et dont l'enlèvement a été ordonné par l'Assemblée.
La lettre de M. d'Aubusson de La Feuillade se termine ainsi :
« J'ai trop d'années et trop peu de talents pour me flatter de pouvoir être aujourd'hui un citoyen utile ; mais je puis, du moins, me flatter avec justice d'être Je doyen le plus zélé et le plus sincère des amis delà Constitution. »
(Cette lettre est renvoyée au comité des domaines.)
, rapporteur du comité de Constitution, donne lecture du projet de décret suivant qui est adopté sans discussion :
« L'Assemblée nationale décrète que l'élection des juges consuls, dans toutes les villes où ils sont établis, se fera provisoirement comme ci-devant, jusqu'à l'organisation de l'ordre judiciaire. »
, député de Paris, rapporteur du comité d'aliénation. Votre comité a reçu deux adresses, l'une de la municipalité de Paris, l'autre des 60 districts. Toutes les deux sont relatives à l'aliénation des biens nationaux et c'est pour répondre aux vœux qui nous sont manifestés que nous vous proposons le décret suivant:
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu le compte qui lui a été rendu par le comité qu'elle a chargé de l'aliénation des domaines nationaux, des adresses de la municipalité provisoire et des députés des soixante sections de la ville de Paris ; et rendant justice aux sentiments patriotiques exprimés dans ces adresses,
« Autorise son comité à continuer de traiter
avec les commissaires nommés par les soixante sections, et munis de leurs pouvoirs, pour la vente des domaines nationaux dont ils ont donné ou donneront la désignation, et pour toutes les opérations relatives à cette vente ; et ce, jusques au moment où la nouvelle municipalité aura été élue, conformément aux décrets de l'Assemblée : se réservant l'Assemblée nationale de statuer incessamment sur les formes qui devront être suivies pour les reventes de ceux de ces domaines qui auront été acquis, au nom de la commune de Paris, par ses commissaires. »
(Ce projet de décret est mis aux voix et adopté.)
L'ordre du jour est maintenant la discussion du projet de décret proposé par le comité d'aliénation sur la vente des domaines nationaux aux particuliers (1).
, député de Paris, rapporteur. Nous vous avons présenté un projet de décret sur la vente des domaines nationaux aux particuliers. M. l'évêque d'Autun a présenté une série d'articles pour remplacer l'article 14. Nous nous sommes réunis à une section du comité des finances pour examiner ces articles ; et nous vous en rendrons compte dans une huitaine de jours. Nous recevons sans cesse des soumissions de particuliers. Il faut prendre un parti sur les demandes qui sont faites ; c'est l'objet des articles qui vont être soumis à votre discussion. L'esprit de ce décret est de mettre le plus de citoyens possible à portée d'acquérir des domaines nationaux, et d'obtenir un meilleur prix par une plus grande concurrence.
Je donne lecture de l'article 1er : « L'Assemblée nationale,
considérant que l'aliénation des domaines nationaux est le meilleur moyen d'éteindre une
grande partie de la dette publique, d'animer l'agriculture et l'industrie, et de procurer
l'accroissement de la masse générale des richesses par la division de ces biens nationaux en
propriétés particulières, toujours mieux administrées, et par les facilités qu'elle donne à
beaucoup de citoyens de devenir propriétaires, a décrété et décrète ce qui suit :
« Art. 1er. Tous les domaines nationaux dont la jouissance
n'aura pas été réservée au roi, ou la conservation ordonnée par l'Assemblée nationale, ou qui
ne feront pas partie des 400 millions qui seront incessamment vendus aux municipalités, en
exécution du décret du 14 mai de la présente année, pourront être aliénés en vertu du présent
décret, et conformément à ses dispositions. »
Cet article est inadmissible : on ignore les biens qui seront réservés. Les particuliers ne peuvent pas faire de soumissions. On excepte aussi les 400 millions des municipalités; mais qui pourra distinguer ces biens? Les deux exceptions rendent le décret inutile. Il faut ajourner cet article à bref délai, et ne faire qu'un seul et unique décret sur le payement des biens nationaux et sur ceux de ces biens qui ne sont pas compris dans la vente ordonnée.
Je demande l'ajournement dans un autre sens que M. Martineau. Vous avez décrété une vente
de 400 millions seulement. Aujour-
Par l'article 2 du décret du 14 mai vous nous avez chargés de recevoir les soumissions des particuliers; elles sont arrivées ; votre comité vous demande aujourd'hui ce qu'il doit en faire ?
Outre les rapports sous lesquels MM. Martineau et Rewbell vous ont montré que le décret proposé était prématuré, j'en vois un autre que j'ai l'honneur de proposer à l'Assemblée : le rapporteur vous a dit qu'il proposait de statuer sur tous les articles du décret à l'exception de l'article 14 par lequel il doit être prononcé sur les valeurs à admettre en payement; et moi je demande que le décret soit ajourné jusqu'à ce que l'article 14 ait été rédigé, ae manière à ce que toutes les valeurs à admettre en payement soient parfaitement définies. Dans ce nombre, je pense que vous admettrez au premier degré les dîmes inféodées. L'affinité de ces propriétés avec les biens nationaux, le respect pour la déclaration des droits de l'homme si éloquemment invoqués par M.Barrère et Le Chapelier, lorsque ce sujet fut traité, ont été sentis ae manière à me persuader que l'indemnité préalable et équivalente, due aux propriétaires des dîmes inféodées, seront admis en concurrence avec les autres valeurs. Je demande donc que l'évaluation et liquidation de ces propriétés soient faites par les départements qui, peu occupés aujourd'hui, peuvent se livrer à ce soin sur la réquisition des particuliers qui se présenteront à cet effet, et que le projet de décret soit ajourné au moment où la fixation de ces valeurs sera déterminée pour être rapportée avant lui ou ensemble.
,Beaucoup de particuliers, m'envoyant des offres, ont proposé de payer en argent, ou dans des termes très courts. Notre silence laisserait un très grand embarras dans leurs affaires. Il faut leur répondre, et dire si leurs offres seront admises ou rejetées. On ne peut donc ajourner. Je propose d'ajouter à la fin de l'article, ces mots : « L'Assemblée nationale réservant aux assignats-monnaie leur hypothèque spéciale. »
(de Moulins). Je suis du nombre de ceux qui ont fait des soumissions : j'en ai présenté pour un grand nombre de particuliers ; il est nécessaire que je sache si elles seront acceptées.
J'ai l'honneur d'être député par votre comité des finances au comité d'aliénation. J'ai reçu deux avis par lesquels on m'annonçait que le travàil.de ce comité était remis à demain. Je vais vous faire hommage de mes réflexions. L'opération qu'on vous propose est le chef-d'œuvre de l'agiotage, et jamais les agioteurs n'ont formé de projets plus funestes. Je vais vous révéler leur secret. Les agioteurs de Paris sont en possession de j gouverner|Ie royaume et l'administration des finances. Ils sont ruinés quand leseffetssont au pair. Que leur faut-il? Que les effets haussent ou baissent, sans cela ils ne peuvent faire.de spéculation.
Les effets n'ont pas baissé depuis un mois, et les agioteurs sont à l'aumône. Ils trouvent cette position fort incommode: M. l'évêque d'Autun vous a présenté un projet qui mérite d'être loué à jamais dans la rue Vivienne. Je n'ai pas l'honneur d'être confident de M. l'évêque d'Autun, et cependant je vais vous dire tous ses secrets. Je vous demande pardon si, dans cette discussion, le nom de M. l'évêque d'Autun est si souvent prononcé, mais je parle d'un plan proposé par lui et imprimé sous son nom....
(On observe que ce n'est pas là l'ordre du jour. M. de La Rochefoucauld se présente pour demander la parole. M. l'abbé Maury le pousse hors de la tribune par les épaules.... Il s'élève de grands mouvements.)
demande la parole.
On élève une question incidente, en disant que l'opinant n'est pas dans l'ordre du jour : M. Alquier demande la parole, je la lui accorde.
M. le président/je ne puis la lui donner.
J'ai à demander que l'opinant soit rappelé à l'ordre.
On demande la parole sur les propositions du préopinant.
Plusieurs voix : Et sur ses actions !
II y a une accusation à former contre M. l'abbé Maury : qu'il écoute son accusateur; il répondra ensuite.
Je supplie l'Assemblée de m'écouter avec la plus grande attention et la plus grande sévérité. J'ai dit que la proposition de mettre en vente tous les biens nationaux était une invention atroce de l'agiotage. Les agioteurs voyaient toutes leurs opérations dans une stagnation qui est pour eux la mort ; ils ont dit : si nous mettons tous les biens nationaux en vente, il arrivera que les assignats, qui ne perdent que 3 0/0, ne vaudront pas plus que les autres effets, ou que ces effets vaudront autant que les assignats. Ge serait une belle proie pour ceux qui ont une grande quantité de ces effets en portefeuille : voilà ce qu'ils ont voulu : il s'agit d'examiner si c'est cela que vousdevez vouloir. Pourquoi les assignats ont-ils une grande vaieur?G'est qu'ils sont hypothéqués sur des biens connus et liquides. Dès le moment où tousles effets publics pourront être reçus comme les assignats, les assignats rentreront dans la classe des effets publics, et alors ilsÎierdront 10 0/0, même avant leur émission. Si tous es effets publics qui portent 5 0/0 d'intérêt sont reçus comme les assignats, ou ils monteront au taux de ceux-ci, ou ceux-ci descendront à la valeur de ceux-là. Ge calcul des agioteurs est très impatriotique. Votre comité die liquidation ne vous a pas encore fait connaître l'étendue de la dette publique. Plusieurs membres de ce comité m'ont communiqué le résultat de leurs travaux. On vous fera incessamment un rapport qui vous prouvera que la dette publiquese monte à 7 milliards.....(Il s'élève des murmures.) Je parle de ce que j'ai appris par le comité de liquidation.
Plusieurs voix : Vous n'en êtes pas 1
(de Bigorre). Voilà un membre du
comité qui demande à démentir M. l'abbé Maury.
, membre du comité de liquidation, se présente à la tribune. M. l'abbé Maury ne veut pas la lui céder.
Une partie de l'Assemblée insiste pour que M. Biaille de Germon soit entendu.
Permettez-moi de dire ce que je sais et de qui je le sais ; je ne prétends pas être cru sur ma parole.
(de Moulins). C'est l'assertion la plus odieuse, la plus incendiaire! M. l'abbé Maury veut anéantir la confiance. Je demande que le membre du comité de liquidation qui veut le démentir soit entendu.
(Quelques moments s'écoulent dans une grande agitation.) ;
M. le Président, on demande que vous consultiez l'Assemblée pour savoir si l'on entendra le comité, quand il est de son devoir de donner un démenti à M. l'abbé Maury. Je vous somme de mettre cette demande aux voix.....On ne peut souffrir que la tribunesoit impunément souillée par d'aussi dangereuses! mpostures.
Beaucoup de membres du comité de liquidation se présentent à la tribune.
M. l'abbé Maury les repousse.
L'Assemblée décide que le comité de liquidation sera entendu.
Après une longue résistance, M. l'abbé Maury quitte la tribune.
J'ai eu d'autant plus lieu d'être surpris de l'assertion de M. l'abbé Maury, que j'ai été secrétaire du comité de liquidation depuis sa formation, et qu'il y a quinze jours que j'ai l'honneur de le présider. J'ai assidûment assisté à toutes ses séances, et je ne crois pas qu'un seul de ses membres ait dit, ait pu dire ce que M. l'abbé Maury suppose. Nous avons une partie des états de la marine et des états du département de la guerre : des affaires particulières ont employé notre temps. Nous nous occupons à préparer un projet de décret pour assurer l'ordre dans notre travail. Je demande que M. l'abbé Maury nomme la personne qui lui a dit ce qu'il a avancé. Nous ne pouvons pas savoir qu'elle est l'étendue de la dette de l'Etat, puisque nous n'avons pas d'autres pièces que celles dont je viens de vous parler.
L'interruption qu'on m'a fait éprouver n'aurait pas été très nécessaire si on m'avait fait l'honneur de m'écouter. J'ai dit qu'un membre du comité....
Plusieurs voix : Vous avez dit plusieurs membres.
(de Bigorre). M. l'abbé Maury a dit qu'il parlait au nom du comité.
M. Dupont dit une imposture. (Le soulèvement est général dans la partie gauche de VAssemblée).
C'est en nous respectant nous-mêmes que nous conserverons le respect dû à cette Assemblée. Je demande qu'on veuille bien rentrer dans le calme et la tranquillité qui nous conviennent.
Je rétablis un fait. Je n'ai *amais dit que je partais au nom du comité de iquidation. J'ai dit une vérité assez triste ; je dois rétablir les faits. J'ai demandé que l'universalité de la dette fût reconnue ; car si sur 2 milliards de biens nationaux il y avait pour 3 milliards de dettes, les créanciers de ce troisième milliard se trouveraient dans une situation très désagréable. Voilà le raisonnement hypothétique que je présente. M. le baron de Batz, rapporteur du comité de liquidation, m'a dit qu'il entrevoyait que la dette pouvait s'élever à 7 milliards... (Il s'élève de grands murmures.) Il ne s'agit pas de huer ; il faut gémir... Je n'étais pas seul quand il me l'a dit... Il m'a dit que, d'après l'aperçu, il croyait que la dette pourrait s'élever à 7 " milliards.....
Je demande la parole. Il est question de citer un fait.
Vous voyez que j'articule avec précision les faits.
Il est absolument important de relever ces faits.
Vous serez entendu après l'opinant.
J'argumente donc et de l'obscurité, et de l'immensité de la dette, pour m'élever contre le projet de laisser sans hypothèque une partie des créanciers de l'Ëtat, et favoriser les agioteurs en dépouillant ces créanciers d'un gage qui devrait appartenir à tous. Outre cette hypothèque, les frais du culte sont fondés sur les biens nationaux.
L'agiotage veut encore livrer le culte à l'incertitude des événements futurs, et enlever aux ministres l'hypothèque à laquelle ils ont droit.
Les provinces ne peuvent s'attendre à voir arracher de leur sein un bien que vous avez réservé au culte.—En vous proposant d'aliéner tous les biens nationaux, on ne vous propose autre chose que de les livrer au gaspillage et aux agioteurs. Les étrangers mériteraient une considération très particulière. 11 est question de rembourser les rentes viagères, et l'on vous dit... (On observe que ce ri est pas là l'ordre du jour.) Voici le sophisme fait par le comité de liquidation. Je dois le dénoncer aux bons citoyens. Nous réduirons leurs créances à & 0/0, au lieu de 10, et nous leur donnerons un capital à raison de 5 0/0. Les rentiers viagers sont de deux espèces : les uns, honnêtes citoyens, ont confié à l'État le fruit de leur labeur ; ils méritent toute faveur. Ils ont parié avec le gouvernement, c'est-à-dire qu'ils ont imposé et reçu cette condition : « Si je vis l'année prochaine, vous me donnerez la somme de tant. > Les rentiers étrangers n'ont pas joué ainsi; ce n'est plus un pari. Les rentes des Génevois sont sur trente têtes ; il est prouvé qu'elles seront payées pendant quarante-deux ans et demi. Ces rentiers ont inventé, à votre grand préjudice, une manièrede recevoir sept fois leur capital ; ces hommes que vous pouvez rembourser par annuités en dix ans, on vous propose de ies rembourser avec vos capitaux. Vous ne permettrez pas les usures que le premier ministre des finances a favorisées. On Veut que ces hommes s'emparent de vos biens, et que vous leur donniez plus d'une de vos provinces. Je demande si les représentants de la nation doivent
protéger les usuriers de la ville de Genève ; je demande si l'histoire du monde offre l'exemple d'une nation qui ait rempli d'une manière plus illusoire ses traités avec nous.
On craint que les représentants de la nation ne détruisent tous ces contrats de trente têtes. Je demande si nous mériterions la reconnaissance de la nation, en abandonnant des biens immenses à des étrangers, au lieu-de les rembourser en annuités avec l'intérêt de ces biens? Il faut déchirer leurs contrats, il faut user de sévérité ; c'est du bien du peuple confié à votre garde qu'il s'agit. Sur 105 millions de rente viagère, il n'y en a pas 10 en France ; dans dix ans vous pouvez être libéré avec les étrangers. On vous trompe; et quand un représentant de la nation a le courage de vous le dire, on l'écoute avec prévention.
En applaudissant aux détails qui terminent l'opinion du préopinant, je me crois obligé, comme membre du comité de liquidation, à dénier un fait : je ne prétends pas dire que M. de Batz ne l'ai pas dit à M. l'abbé Maury, mais je crois que M. de Batz n'étant du comité que depuis huit jours, et n'étant chargé que d'un projet do règlement, il sait moins que les anciens membres ce qui s'est passé à ce comité ; je les interpelle tous de dire s'ils connaissent le montant de la dette. Autant il serait nécessaire de faire connaître la profondeur de la plaie des finances, autant il serait dangereux de venir, dans de mauvaises vues, donner des inquiétudes aux créanciers de l'Etat. Je pense qu'on ne doit rien conclure de ce qu'a pu aire M. de Batz.
Le comité de liquidation s'est chargé de l'arriéré des départements : comment pourrait-il connaître la dette de l'Etat ?
Je vois toujours avec la plus grande peine qu'on vienne jeter dans cette tribune des cloutes sur la dette publique. Je ne m'attendais pas à cette discussion, et je n'ai pas à la main les états de la dette, que toute l'Europe connaît. J'appuie l'observation de M. Gouttes, et je remarque avec lui qu'il est bien extraordinaire que l'on cite le comité de liquidation quand il s'agit de la dette publique ; ce comité n'est chargé que de la liquidation de la dette arriérée des départements, et cet objet ne monte pas à 150 millions. Le comité des finances a publié un tableau de la dette et des arrérages, dans un volume in-4°, qui a été distribué à tous les membres. Il faut distinguer la dette publique en dette constituée et en dette non constituée. La dette constituée est de deux natures : les rentes perpétuelles et les rentes viagères. Les rentes perpétuelles s'élèvent à 60 millions d'intérêt, ce qui forme un capital de 1 milliard 200 millions. Les rentes viagères sont de 105 millions, les extinctions de cette année les réduisent à 100 millions, ce qui forme un capital de 1 milliard. La dette constituée, sur laquelle nous proposerons un plan de liquidation, est de 2 milliard? au plus, y compris les effets suspendus, les offices qui seront supprimés, les finances qu'il faudra rembourser, et les assignats. Ainsi la dette exigible est de 2 milliards ; les biens domaniaux suffiront donc pour la payer. Quant à la dette constituée, il n'en est pas question én ce moment ; je n'ai voulu que rassurer l'Assemblée, qu'on cherchait à tromper par des assertions au moins très extraordinaires. Le comité est prêt à vous rendre compte de la
dette ; il a été imprimé un aperçu très étendu; rien n'appuie donc de semblables terreurs.
Je ne discuterai pas le plan de libération que vient de proposer M. l'aboé Maury. J'observerai seulement qu'il me paraît difficile que les intérêts de 2 milliards de biens puissent éteindre 7 milliards de capitaux dans l'espace de dix ans...
Je n'ai pas dit cela ; j'ai parlé des rentes des Suisses et des Génevois.
J'observe seulement que dans tout le discours de M. l'abbé Maury il n'y a pas un mot de la question qu'il s'agit de traiter. Votre comité de liquidation a annoncé qu'il se concerterait avec le comité des finances sur les articles présentés par M. l'évêque d'Autun. Il vous propose aujourd'hui, un décret qui le mette en état d'exécuter les ordres que vous lui avez donnés sur la vente des domaines nationaux aux particuliers.
Lorsqu'on vient ici chercher à répandre tant de craintes, tant d'inquiétudes, il vaudrait mieux dire tout bonnement qu'on voudrait que les biens nationaux ne fussent pas vendus, parce qu'on espère les reprendre. Je viens à l'objet réel de la délibération, et je rappelle seulement qu'un grand nombre de particuliers a envoyé des soumissions ; que ces particuliers ne veulent pas laisser leurs fonds morts, et qu'ils demandent si on recevra leurs offres. Il est impossible de ne pas leur répondre ; il faut donc aller aux voix sur l'article proposé. Cet article n'influe pas sur les biens qui sont mis en vente.
(On ferme la discussion.)
Je demande qu'on fixe un délai très court pour déterminer quelles seront les valeurs admises.
J'adopte cette proposition ; mais je remarque qu'elle ne peut faire partie de l'article, et qu'elle doit former un décret particulier.
Je crois indispensable de décréter dès ce moment que les portèurs des créances exigibles et des assignats seront admis de préférence aux porteurs des créances constituées. Ces derniers ont pour gage les biens de toute la nation.
(La proposition de M. Malouet est ajournée.)
J'ai proposé un amendement qui consiste à déterminer la nature des objets dont l'Assemblée entend ordonner la conservation . Je pense qu'il faut ajouter à l'article : « à l'exception des objets réservés au roi, et des forêts ».
L'article est décrété, avec l'amendement de M. Martineau, à une grande majorité. Il est ainsi conçu :
« L'Assemblée nationale, considérant que l'aliénation des domaines nationaux est le meilleur moyen d'éteindre une grande partie de la dette publique, d'animer l'agriculture et l'industrie, et de procurer l'accroissement de la masse générale des richesses, par la division de ces biens et propriétés particulières, toujours mieux administrées, et par les facilités qu'elle donne àbeau-
coup de citoyens de devenir propriétaires, a décrété et décrète ce qui suit :
« Tous les domaines nationaux, autres que ceux dont la jouissance aura été réservée au roi, et les forêts sur lesquelles il sera statué par un décret particulier, pourront être aliénés en vertu du présent décret, et conformément à ses dispositions; l'Assemblée nationale réservant aux assignats-monnaie leur hypothèque spéciale. »
Vous avez renvoyé à la séance de ce jour le rapport sur l'affaire de M. de Toulouse-Lautrec, arrêté à Toulouse. Le comité des recherches est prêt à être entendu et je donne la parole à son rapporteur.
, rapporteur (1 j. Messieurs, le 17 de ce mois, le procureur du roi, en la sénéchaussée de Toulouse, informé par la rumeur publique, ainsi que le porte son réquisitoire, que des étrangers qui se tenaient, depuis quelque temps, tantôt à Toulouse, tantôtà la campagne, se donnaient en secret toutes sortes de mouvements pour provoquer une insurrection, et compromettre de la manière la plus dangereuse, tant la nouvelle Constitution que la tranquillité publique qui en dépend essentiellement, et qu'ils portaient leurs menées, jusqu'à capter, par des offres d'argent, les esprits de la plupart des légionnaires, pour renforcer le parti qu'ils se flattaient déjà d'avoir à leur solde, dans la vue de s'opposer, à main armée, à la fédération qui devait avoir lieu à Toulouse, le 4 du mois prochain, et, par ce moyen, ramener les choses à l'état où elles étaient avant la nouvelle Constitution : le procureur du roi rendit plainte de ces faits et requit l'information par devant la municipalité de Toulouse.
Le même jour, 17, l'information fut permise ; trois témoins assignés et entendus.
De ces trois témoins, deux (le sieur Guitard, chasseur de la légion de Saint-Pierre, et
Jean-Marc Clément, grenadier de la légion de la Daurade) déposèrent uniformément que s'étant
rendus ce jouu-îà même au château de Blagnac, chez le sieur Dutrey, Clément demanda à être
introduit dans l'appartement de M. de Lautrec, sous les ordres duquel il avait servi dans le
régiment de Condé, dragons, dont M. de Lautrec était alors colonel ; que tous deux furent
parfaitement bien accueillis ; que la conversation s'étant engagée sur l'état des légions
toulousaines, et sur la fédération projetée le 4 juillet. M. de Lautrec leur avait dit à
cette occasion qu'elle était ruineuse pour le peuple réduit à la mendicité par l'enlèvement
des biens du clergé et la suppression des privilèges de la noblesse, qui seuls pouvaient le
faire vivre ; qu'en conséquence, il fallait empêcher cette fédération ; que M. Douziech,
général de la garde nationale de Toulouse était un drôle; que si l'on voulait le nommer lui,
sieur de Lautrec, il irait habiter Toulouse et renoncerait au voyage de Barêges. Guitard lui
ayant dit qu'il l'avait vu à Montauban où il avait eu du désagrément, à cause du sieur de La
Force avec lequel il était, M. de Lautrec répondit qu'il s'était en effet trouvé à Montauban,
dans le moment des troubles qui ont désolé cette ville ; mais qu'il y était resté très peu de
temps, à cause des désagré-
Votre comité a l'honneur de vous observer que Clément, différent en ce seul point de Guitard, expose qu'ils imaginèrent que ce particulier était le duc d'Aumont.
Le sieur Guéry, marchand épicier, dépose que le 16 au soir, un particulier, qu'on lui dit être M. de Lautrec, s'étant arrêté devant sa maison, pour attendre une voiture qui devait venir le prendre, il lui avait proposé d'entrer dans sa boutique, pour attendre plus commodément :que ce particulier lia conversation avec lui, au sujet de quelques soldats de la légion de la Dalbade qui passèrent en ce moment. M. de Lautrec ayant demandé de quelle légion ils étaient, le sieur Guéry le lui dit, et M. de Lautrec lui demanda, d'un ton de dérision, si ce n'était pas la légion Carotte. Le sieur Guéry ayant répondu aux questions successives de M. de Lautrec qu'ils étaient de la légion de la Dalbade et qu'elle était composée de 2,000 hommes, au nombre desquels il. y en avait 1,700 sur qui l'on pouvait compter, M. de Lautrec témoigna la plus grande surprise. Ge dernier ayant demandé le nom du général et ayant appris que c'était M. Douricels, il ajouta que l'on aurait dû choisir un ancien militaire, tel que M. de Gambon.
Sur ces faits, exactement copiés de l'information, le procureur du roi requit de ia municipalité un décret de prise de corps contre M. de Lautrec. Ce décret fut lancé le 17 au soir. Le 18 au matin, un détachement de la garde nationale se porta à une certaine distance du château de Blagnac, et M. de Lautrec s'était déjà rendu prisonnier, lorsque le décret lui fut notifié ; il fut de là transféré dans les prisons de Toulouse, où il fut écroué.
La municipalité avait remis l'interrogatoire au lendemain 19, mais M. de Lautrec ayantdemandé qu'il fût fait sans retard, on y procéda le jour même.
L'accusé, sous la réserve de ses droits, privilèges et exceptions, tant au fond, qu'en sa qualité de député à l'Assemblée nationale, répondant aux interpellations qui lui furent faites, déclara qu'il était arrivé de Castres, le jeudi 10 de ce mois, à sept heures du soir, au château de Blagnac ; qu'il s'était retiré de l'Assemblée nationale, tant pour raison de santé que pour affaires, en vertu d'un congé daté du 15 mars ; que pendant son séjour à Blagnac, il était venu deux fois à Toulouse, pour faire visite à la dame d'Avessens et aux sieurs de Boisfranc, de Montgasin, d'Escouloubre et du Barrv ; qu'il dîna chez ce dernier ; que dans son voyage, il s'était fait porter à la place du Pont-Neuf, pour y attendre la voiture du sieur Dutrey, qui devait venir l'y trouver ; que, sur l'invitation d'un marchand épicier, il était entré dans sa boutique pour y attendre plus commodément. Ici, sauf le ton de dérision, qu'il n'avoue pas, en parlant de la légion de la Dalbade, il rapporte les faits tels exactement que vous les avez entendus dans la déposition du sieur Guéry.
Pour ne rien omettre, Messieurs, de tout ce qui peut tendre à la justification de M. de Lautrec, je vais avoir l'honneur de vous lire la suite de l'interrogatoire. (On lit cette pièce.)
M. de Lautrec, comme vous venez de le voir, ayant demandé le nom de son dénonciateur, le procureur du roi lui fit notifier, le même jour, la déclaration que je vais avoir l'honneur ae vous lire. (Le rapporteur lit cette pièce.)
M. de Lautrec ayant également réclamé, dans l'interrogatoire, sa qualité de membre de l'Assemblée nationale, la municipalité, par respect pour le caractère de l'accusé, crut devoir suspendre l'exécution, et vous fit, Messieurs, l'adresse que voici :
« Monsieur le Président, notre zèle pour le maintien de la tranquillité publique nous a obligé de faire informer sur la plainte du procureur du roi, à raison de mouvements secrets qu'on faisait à Toulouse et dans les environs, pour exciter des troubles dont les suites auraient pu devenir funestes : les informations ont chargé M. le comte de Lautrec ; nous ignorions qu'il eut l'honneur d'être membre de l'auguste Assemblée que vous présidez. Nous l'avons, en conséquence, décrété, et ce n'est que lors de son interrogatoire qu'il a déclaré sa qualité eu nous exhibant un congé du mois de mars; après l'avoir interrogé, nous avons reconnu que notre ministère prenait fin. Il restera désormais sous la sauvegarde de la loi et à la disposition de l'Assemblée nationale, dont nous attendons les ordres pour le renvoyer au tribunal qu'elle daignera nous indiquer. La nature du délit dont il est prévenu vous sera connue par l'extrait de l'ancienne procédure que nous avons l'honneur de vous envoyer. Veuillez, Monsieur le Président, nous instruire le plus tôt possible de la résolution qui sera prise sur ce point, à laquelle nous nous empresserons de nous conformer. Le traitement qui est fait au prisonnier répond, autant qu'il est en nous, à la dignité de sa personne. Comme membre de l'Assemblée de la nation, il est dans un appartement de l'hôtel de ville, gardé nuit et jour par un piquet de nos légions patriotiques, entre les mains desquelles il s'est lui-même constitué prisonnier, et qui l'ont conduit, sans tumulte, à la maison commune.
« Nous sommes, etc.
« Signé:Bertrand aîné,officier municipal, d'A-dhémar, Malpel, Bragoure, Raimond Lucaritcas-taing, Pcarol, Bellomaire, Vignoltes, Boubée, officiers municipaux. »
M. de Lantrec y en joignit une autre que je vais avoir l'honneur de vous lire :
« Monsieur le Président, il m'arrive un malheur bien imprévu; j'étais en chemin pour me rendre à Barèges. J'ai été pour passer trois jours à Bla-gnac, chez M. Dutrey. Les débordements de la Garonne et les orages continuels m'y ont fait rester, persuadé que ces pluies étaient de la neige à Barèges, et que la qualité des eaux était moins bonne lorsqu'il pleuvait. J'ai donc resté huit jours à Blagnac, et j'avais fait demander mercredi des chevaux au maître de poste, pour partir vendredi matin. J'ai été dîner deux fois à Toulouse, pendant mon séjour.
« Je suis fermement persuadé que je n'y ai vu personne de suspect dans les trois ou quatre visites que j'ai faites dans mes deux voyages. J'ai donné dans mon interrogatoire le nom des maisons où j'ai été. Je n'ai parlé à personne dans les rues, j'ai pour témoins de ce que j'avance mes porteurs. Il n'y a pas, je crois, un légionnaire dans pas une des maisons où j'ai été. Il en est venu deux à Blagnac, dont un a été dragon dans le régiment de Gondé, dont j'ai été colonel ; et l'autre m'a dit avoir servi dans le régiment de Gondé, infanterie. Je n'ai pas d'abord reconnu celui qui a servi dans mon ancien régiment; il m'a dit son nom, et j'ai cru m'en rappeler. J'ai causé avec eux, à peu près une demi-heure ; nous eûmes deux témoins une partie du temps; cependant ces malheureux ont déposé que je leur avais dit que je soldais 600 hommes et que je voudrais en avoir encore 200, le tout de la milice nationale deToulouse.ilest bon de vous observer que je n'ai pas parlé à d'autres légionnaires. Cependant, sur les dépositions de ces deux malheureux, on a cherché à m'arrêter. Le lendemain de mon entrevue avec eux, on investit à deux ou trois cents pas la maison de M. Dutrey, qui envoya prier le commandant de se donner la peine devenir, ce qu'il fit avec un autre colonel: M.Dutrey se promenait dans sa cour où ces messieurs le joignirent ; je sortis, je les vis ensemble et je fus au devant d'eux.
« Je demandai au colonel si c'était moi qu'ils cherchaient, étant seul étranger dans le château. Le colonel me répondit que oui, je me constituai dès ce moment-là son prisonnier, d'après le décret qu'il m'assurait être lancé contre moi, et je lui dis que je lui donnais ma parole d'honneur que je ne me sauverais pas. Je fus fort libre pendant trois heures que nous restâmes encore au château : MM. les colonels s'en allant à leur troupe, n'ayant aucune espèce de reproches à me faire, je ne pensai pas un seul instant à me sauver.
« On m'a conduit à la maison commune de Toulouse, où l'on me signifia le décret lancé contre moi; l'on me lut les dépositions des deux hommes, j'avoue que je fus indigné de faussetés aussi atroces : enfin ils disent que je leur montrai un filet plein d'or, et que je le leur mis dans la main, en les engageant à chercher ces 200 hommes. Il me sera aisé de prouver par ma conduite que je suis ennemi de toute contre-révolution ; que j'ai habité la campagne où je n'ai pas vu du tout de monde; j'ai évité de recevoir la noblesse du pays, pour qu'on ne pût jeter aucun soupçon sur ma manière de vivre. Je demanderai qu'on fasse ouïr nombre d'habitants de Blagnac, pour qu'ils disent s'ils m'ont vu parler à personne, et si j'en suis sorti plus de deux fois que je suis allé à Toulouse et dont je suis toujours revenu de bonne heure. Je demanderai
aussi que les légionnaires de Toulouse soient ouïs, pour savoir si je leur ai parlé ou fait parler et si j'ai dônné de l'argent à quelqu'un ; j'aurais cru que les bonnes raisons de mon interrogatoire et la notoriété des faits auraient pu engager la municipalité à connaître du fait de mon élargissement, pour qu'en exécution du congé que j'ai obtenu de l'Assemblée nationale, je pusse aller prendre les eaux de Barèges. J'aurais offert de me présenter quand on l'aurait ordonné, et j'aurais donné caution bonne et valable à ce sujet. MM. les officiers municipaux ont pensé qu'ils ne doivent pas le prendre sur eux.
« Je m'adresse donc à vous, Monsieur le Président, pour solliciter les bontés et la justice de l'Assemblée nationale; j'en attends l'effet avec confiance.
« J'ai l'honneur d'être, Monsieur le Président,
« Votre très humble et très, etc.
« Signé : le comte de Toulouse-Lautrec. »
Si vous aviez à juger, Messieurs, continue le rapporteur, comme tribunal, l'accusation portée contre M. de Lautrec, il faudrait, sans doute, examiner, dans l'état actuel delà procédure, si,malgré la déclaration du procureur du roi, qui n'avait rendu plainte que sur la rumeur publique, la conformité des faits contenus dans cette plainte, avec les dépositions des sieurs Guitard et Clément, ne peut pas les faire présumer des dénonciateurs; si la considération du court séjour de M. de Lautrec au château de Blagnac, et ses visites rares à Toulouse ne rendent pas invraisemblable le projet d'une conspiration; si, enfin, la démarche des sieurs Guitard et Clément, auprès de M. de Lautrec, sans motif apparent, ne répandent pas de grands nuages sur la vérité des faits par eux avancés dans l'information; vous auriez à examiner aussi si les vraisemblances, les probabilités qui militent en faveur de l'accusé, enfin son désaveu formel des faits les plus concluants peuvent et, jusqu'à quel point, balancer le témoignage uniforme des deux témoins non encore reprochés jusque-là, dignes de foi, et qui, d'après les lois existantes, complètent la preuve des faits imputés à l'accusé.
Mais votre comité a pensé, Messieurs, que cette discussion vous était étrangère. Votre pouvoir, quelque grand qu'il soit, se réduit à faire les lois, à en déterminer le sens; leur application appartient essentiellement aux juges.
Ainsi, quelque intérêt que présente cette affaire, et par la nature du délit, et par le genre des preuves, et par le caractère auguste de l'accusé, il vous convient- de tracer la route ; le juge seul peut la parcourir. Les faits justificatifs de l'accusé, ses moyens de récusation, sont pour lui des voies légales d'établir son innocence : c'est la loi et non le législateur qui doit prononcer.
M. de Lautrec est membre de cette Assemblée. M. de Lautrec est accusé d'un délit grave. De ces deux faits naissent ces deux questions :
Jusqu'où s'étend l'inviolabilité d'un représentant de la nation ?
Quel tribunal doit le poursuivre et le juger ?
La brièveté du temps n'a pas permis à votre comité de vous présenter, sur la première de ces questions, les développements dont elle est susceptible; il aura seulement l'honneur de vous observer que si l'empire des circonstances, l'intérêt social même ont sagement fait établir, que, libres de tous soins, dégagés de toutes craintes, les élus du peuple, les législateurs d'un grand empire, pourraient, sous la protection spéciale et
immédiate de la nation qui les a honorés de sa confiance, se livrer à toute l'activité de leur zèle, à toute l'énergie de leur patriotisme : que si cette nation les a couverts de l'inviolabilité comme d'une égide redoutable, contre les sourdes manœuvres de l'injustice et de la vengeance des méchants, elle leur a aussi imposé des devoirs sacrés; elle leur a dit : je me repose sur vous du soin de mon bonheur et de ma gloire, reposez-vous sur moi du soin de votre sûreté : distinguez-vous des autres citoyens par un respect plus plofond pour les lois, comme je vous distingue par une surveillance attentive pour votre conservation. C'est à ce prix, c'est à ce prix seul que vous serez dignes d'une telle faveur; mais si, oubliant vos engagements, vous employez contre moi les armes que je vous ai données pour me défendre, je ne vous regarde plus que comme des perfides et des traîtres, et je vous retire mes bienfaits; je vous livre à toutes les vengeances des lois que vous avez méprisées. Enfants ingrats et coupables, vous ne méritez plus que ma colère. C'est à vous, Messieurs, qui êtes chargés d'exprimer la volonté nationale, qu'il appartient de prononcer ce jugement; il ne déclare pas l'accusé coupable, il ne le punit pas, il lui reste encore, pour se justifier, toutes les ressources de la loi ; il le rend à sa conscience avec son innocence ou ses forfaits. C'est des crimes des hommes et non des atteintes de la loi que Ja nation doit garantir ses mandataires.
Enfin, Messieurs, quel tribunal doit poursuivre et juger M. de Lautrec ?
Un décret très récent semblait, à cet égard, tracer à votre comité la marche qu'il avait à suivre. Mais la différence très remarquable des circonstances en mérite une dans son opinion. Ici il y a accusation légale, procédure commencée, décret lancé, là il n'y a rien de tout cela. Dans l'affaire présente, d'une part, la facilité pour les juges de suivre les informations et d'acquérir la preuve du délit, s'il existe ; de l'autre, la facilité pour l'accusé d'établir la preuve des faits justificatifs. L'intérêt de la nation, celui de l'accusé, tout semble vous faire une loi de confier à la municipalité de Toulouse la suite de l'instruction.
Quant au jugement, votre comité a cru qu'il ne convenait pas de diviser l'attribution que vous avez précédemment faite au Chàtelet, du jugement des crimes de lèse-nation. Ainsi, d'accord avec tous vos décrets, dans cette chaîne d'événements, fruits trop Ordinaires des révolutions, vous confieriez l'instruction du procès aux juges qui l'ont commencé? Vous en réserverez le jugement à la cour nationale provisoire que vous avez établie.
Votre comité a donc l'honneur de vous proposer le projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale décrète que M. de Lautrec, légalement prévenu d'un délit, ne doit pas jouir de la garantie de l'inviolabilité, charge son président de se retirer par devers le roi, pour le supplier d'ordonner que l'information commencée par la municipalité de Toulouse sera par elle continuée jusqu'à jugement définitif exclusivement ; pour le tout être ensuite envoyé au Chàtelet. » (Ce projet de décret est mis à la discussion.)
(ci-devant marquis). Je ne m'attendais pas à être obligé de justifier un ancien ami, avec lequel j'ai servi pendant cinquante ans, qui a donné des preuves de loyauté en toutes occasions, et qui est incapable de sourdes menées. Par qui est-il accusé ? par deux hommes gui viennent le chercher dans un château; et
c'est pour cela qu'on arrête un député, un vieux militaire qui a quinze blessures sur le corps! Gomment peut-on croire que M. de Lautrec, qui est militaire, puisse aller offrir de l'argent? En a-t-il d'abord? M. de Lautrec offre de l'argent à deux hommes qu'il ne connaît pas ; il leur fait des confidences : cela tombe-t-il sous le bon sens ? Un écolier de dix-huit ans se comporterait - il ainsi ?
Un vieux militaire ne peut vouloir tenter un projet de contre-révolution, ce qui est impossible, et je ne sais même pas comment on peut le soupçonner dans une Assemblée pleine de lumières comme celle-ci. Il n'en connaît qu'un qu'il croit reconnaître, et il lui tient une conversation fort longue. Vous connaissez Lautrec : il n'est pas long dans ses discours. S'il arrivait un courrier extraordinaire, qui nous annonce que M. de Lautrec est à la tête de quinze cents gentilshommes ou autres, je dirais : oui, cela se peut. Mais des menées sourdes... Lautrec !. . cela n'est pas possible. Je n'ai plus qu'un mot à dire : quand Lautrec est parti, il vous a dit « : Soyez tranquilles ; je vais chez moi, et vous pouvez être surs que je dirais du bien même du côté gauche. » Souvenez-vous de cela ; Lautrec est infirme, vous lé savez tous; il ne peut pas marcher : il va aux eaux; il en a besoin. Je vous le demande, je la demande cette grâce, de tout mon cœur ; qu'il aille aux eaux, et je me constitue prisonnier.
(Ge discours est à chaque phrase interrompu par les applaudissements universels de l'Assemblée.)
(ci-devant duc de Liancourt). Deux témoins s'accordent pour dire que M. de Lautrec a proposé de l'argent à des légionnaires pour opérer une révolution. Des dépositions uniformes ont pu produirequelque effet; mais si l'on considère que M. de Lautrec a passé deux mois à Castres, dans un moment où les ennemis de la Révolution cherchaient à y attirer des troubles ; qu'il n'a point été accusé, et qu;au contraire, dans les lettres de la municipalité, il a toujours été parlé de lui avec éloge; que retiré dans une de ses terres, il n'a voulu communiquer avec aucune des personnes que la Révolution pouvait avoir affligées, parce qu'il pensait qu'un député devait s'éloigner de tous les lieux où il pourrait entendre quelques allégations contre la Constitution et l'Assemblée nationale ; si l'on considère que de Blagnac il ne s'est rendu que deux fois à Toulouse ; que les deux témoins sont allés d'eux-mêmes dans le château ; que le procureur du roi déclare qu'il n'y a aucun dénonciateur, et qu'il n'a rendu plainte que sur le bruit public, tandis que, dès le même jour, les témoins arrivant de Blagnac sont entendus, il est bien plus naturel de croire que M. de Lautrec est la victime d'un complot tramé contre lui. Quand M. de Lautrec, comme l'a dit le respectable préopinant, a assuré qu'il ne dirait rien contre l'Assemblée ; quand il m'a fait l'honneur de m'écrire qu'il regardait comme un fou quiconque tenterait une contre-révolution, on ne peut douter de son innocence. On a dit, avec raison, que l'inviolabilité n'a pas pour objet de soustraire un député à la loi, mais à tout acte de violence, à tout complot, à toute intrigue. Si un député se retire chez lui, on lui suscite deux faux témoins, qui sont faciles à trouver, pour le faire arrêter et pour l'éloigner longtemps de son poste. Sans doute, le plus beau moment d'un innocent est celui où il est accusé; mais vous ne pouvez pas laisser la disposition
de son sort à des juges entre les maios desquels il ne serait pas sans danger. — Je propose de mander sur-le-champ M. de Lautrec, afin qu'après avoir été entendu l'Assemblée statue sur l'instruction de cette affaire.
l'aîné. Vous croirez aisément que je ne chercherai point à vous intéresser en faveur de M. de Lautrec; que pourrai-je ajouter au discours simple, touchant et sublime de son compagnon de gloire et d'armes depuis soixante ans ? J'affaiblirais l'impression qu'il a faite sur vos esprits. Je rends hommage au principe présenté au nom du comité des recherches; je crois que notre inviolabilité se borne à ce que nous faisons dans cette Assemblée ; ailleurs, si nous avons le malheur de devenir criminels, nous tombons sous l'autorité de la loi : il serait indigne de la hauteur de notre caractère de chercher à donner plus d'étendue à l'inviolabilité que nous avons prononcée. Nous ne pouvons soustraire M. de Lautrec à la procédure commencée contre lui ; mais devons-nous laisser un denos membres entre les mains des officiers qui pnt commencé à instruire cette procédure9 Je ne crois pas. Je dois ici présenter quelques idées ; je voudrais que toutes les municipalités se montrassent dignes d'exercer ies pouvoirs dont vous les avez investies : mais lorsque je considère la conduite du procureur du roi et de la municipalité de Toulouse, mon esprit et ma raison ne peuvent pas voir ce vœu s'exaucer. Pouvez-vous ajouter foi à la lettre par laquelle ils disent qu'ils ne connaissaient pas M. de Lautrec pour un député à l'Assemblée nationale? Ils n'avaient pas besoin de cette assertion négative? ils ont, d'après vos décrets, le droit de commencer la procédure ; mais il est impossible qu'on ne sache pas à Toulouse que M. de Lautrec est député a l'Assemblée nationale. Le procureur du roi dit que c'est sur la rumeur publique qu'il a porté sa plainte. A cet égard, la procédure même va convaincre le procureur du roi d'une fausseté manifeste. Une rumeur publique suppose dans uu ville beaucoup de citoyens instruits par ouï-dire ou autrement; et cependant, si vous exceptez les deux soldats et le citoyen dans la boutique duquel M. de Lautrec s'est arrêté, nul autre témoin n'a parlé dans cette information. (Plusieurs voix s'élèvent et disent : Mais l'information est à peine commencée 1)
D'après cette observation seule, la preuve me paraît évidemment acquise et aussi claire que la lumière du jour en plein midi, que la plainte n'a été. provoquée que par la déclaration des deux soldats en sortant de leur conversation avec M. de Lautrec. Ils arrivent aujourd'hui, et le même jour survient la plainte du procureur du roi. Si ce n'est pas là une démonstration que la plainte a été portée sur la déclaration des deux soldats, jamais il n'y en aura dans aucune espèce de procédure : cela posé, je vois deux dénonciateurs dans ces deux soldats, deux témoins uniques dans la procédure ; et comme ce rôle ne peut se joindre avec celui de dénonciateur, je vois une procédure absolument dénuée de preuves et de toute ombre d'indices, une procédure calomnieuse, commencée par un complot manifestement criminel ; et cependant, sur cette procédure, où il n'y a de témoins que le dénonciateur, survient un décret de prise de corps qui frappe un citoyen, un représentant de la nation. Si vous daignez fixer un instant votre attention sur ces dispositions, vous devez être frappés de leur grossières invraisemblances. Quoi ! ce serait à deux incon-
nus que M. de Lautrec irait confier un projet de contre-révolution 1 présenter une bourse de louis qu'ils refusent, et après leur refus il commencerait encore à les entretenir de son projet 1 Non, jamais déposition n'a plus outragé la vraisemblance. Que ferons-nous donc ? L'abandonnerons-nous, M. de Lautrec, aux rigueurs de la loi, le laisserons-nous entre les mains des juges qui n'ont pas suivi cette loi, et qui malgré moi-même me paraissent suspects ? Mais, me dira-t-on, il y a cependant une uniformité de dépositions; c'est cette uniformité qui, aux yeux de la raison et de la loi, a toujours été un indice de fausseté et de préparation. (Il s'élève des murmures; M. de Vi-rieu s'écrie : On ne peut interrompre un orateur dans une cause de cette nature. Res sacra miser !)
La raison de mon assertion est simple ; il est impossible qu'on rende compte d'un fait de la même manière et avec les mêmes expressions. 11 est donc vrai que la procédure porte un caractère d'injustice, et qut les témoins sont reconnus d'avance comme dénonciateurs, comme imposteurs. Je maintiens que, quoique nous ne puissions nous attribuer le pouvoir judiciaire, nous pouvons faire ce que nous avons déjà fait, sus- Êendre les officiers municipaux présumés coupa-les, et les priver des droits de citoyen actif, s'ils sont reconnus prévaricateurs. Je suis donc d'avis, Messieurs, que le roi soit supplié d'ordonner aux officiers municipaux d'envoyer ici la procédure de M. de Lautrec, pour ladite procédure être continuée par devant le Châtelet ; d'accorder la liberté provisoire de l'accusé, afin qu'il se rende à l'Assemblée nationale à la suite de la procédure.
Je viens invoquer en faveur de M. de Lautrec, ou plutôt des représentants de la nation, les premiers principes du droit public, sur lesquels repose la liberté et l'intérêt national. Je n'examinerai pas les indices qui ont pu déterminer à lancer un décret contre M. de Lautrec. Il est impossible, sans renoncer à toutes les règles d'une bonne constitution, sans renverser l'édifice de la liberté publique, de supposer qu'un tribunal quelconque puisse, sans avis préalable des représentants de la nation, décréter et juger un député. Qu'est-ce que l'inviolabilité ? Ce n'est point un privilège, et cependant c'est quelque chose de plus que le droit commun des autres citoyens. 11 est de principe qu'aucune puissance ne doit s'élever au-dessus du corps représentatif de la nation ; qu'aucun corps ne peut décider des destinées des représentants.... Mais, dira-t-on, s'ils sont coupables, ils doivent être punis. Oui, sans doute ; il faut réduire la question à ce point : Peut-il exister un tribunal qui puisse déclarer coupables les représentants de la nation ? Si l'on répond affirmativement, il est évident que ce tribunal sera l'arbitre de leur destinée. S'il ne peut décider de leur sort sans forme de procès, il le pourra avec des formes et par des jugements iniques ; et l'inviolabilité détruite, l'indépendance de3 représentants de la nation n'existe plus..."(Il s'élève des murmures.)
Il n'y a pas d'Assemblée nationale, si ces principes sont faux.
Pour que les représentants de la nation jouissent de l'inviolabilité, il faut qu'ils ne puissent être attaqués par aucun pou*" voir particulier ; aucune décision ne peut les
frapper si elle ne vient d'un pouvoir égal à eux, et il n'y a point de pouvoir de cette nature. Il existe un pouvoir supérieur aux représentants de la nation, c'est la nation elle-même. Si elle pouvait se rassembler en corps, elle serait leur véritable juge... Si vous ne consacrez ces principes, vous rendez le Corps législatif dépendant d'un pouvoir inférieur, qui, pour le dissoudre, n'aurait qu'à décréter chacun de ses membres. Il peut le réduire à la nullité, et toutes ces idées si vraies, si grandes, d'indépendance et de liberté, ne sont plus que des chimères. Je conclus à ce qu'il soit déclaré qu'aucun représentant de la nation ne peut être poursuivi dans un tribunal, à moins qu'il ne soit intervenu uu acte du Corps législatif qui déclare qu'il y a lieu à accusation.
Le préopinant a exposé des principes incontestables, et sans lesquels il n'y a plus de liberté individuelle pour les membres'de cette Assemblée. La seule chose qui ait pu jeter un moment de trouble dans la délibération, c'est qu'on a pu soupçonner l'intention de faire juger le délit par les représentants de la nation. La conclusion de M. Robespierre a écarté cette idée. L'Assemblée, qui a le droit de décider s'il y a lieu à accusation, ne juge pas ; et si sa décision est affirmative, elle dépouille l'accusé de son inviolabilité, et autorise les tribunaux à le poursuivre. 11 vous appartient en ce moment de suspendre la procédure, de demander que M. de Lautrec se présente devant vous; il a le droit d'être entendu : s'il n'y a pas lieu à accusation, la procédure cessera ; s'il y a lieu à accusation, elle sera continuée, et vous indiquerez le tribunal.
, député de Toulouse. Plusieurs honorables membres ont entendu avec surprise que le procureur du roi ait rendu plainte à la municipalité, et que les officiers municipaux aient informé et décrété. Ceci tient à une localité que je dois vous faire connaître. L'Assemblée nationale a décrété que, jusqu'à l'organisation de l'ordre judiciaire, la justice serait rendue suivant l'ancien régime. C'est en vertu de ce décret que la justice criminelle est rendue à Toulouse par la nouvelle municipalité, comme elle l'était par l'ancienne, d'après un privilège particulier, et que le procureur du roi exerce les fonctions du ministère public. Je ne me présente pas pour appuyer l'accusation intentée contre M. de Lautrec; mais puisqu'on a inculpé gravement les officiers municipaux, qu'il me soit permis de faire quelques observations. La ville de Toulouse a été très agitée pendant trois ou quatre mois, et surtout depuis l'établissement de la nouvelle municipalité. Placée entre Nîmes et Montauban, sa situation était assez inquiétante.
Les officiers municipaux ont travaillé jour et nuit, et je ne crains pas de dire que de toutes les municipalités, il n'en n'est pas qui ait montré plus de zèle et de courage. Sans compromettre, non seulement la vie, mais le temps d'un seul citoyen, elle est parvenue à réunir toutes les classes. De huit légions qui forment la garde nationale, une seule était égarée; la municipalité a été assez heureuse pour l'éclairer, et cette section a demandé à être incorporée avec les autres, et à députer comme elles à la confédération du 14 juillet ; nous venons d'en recevoir la nouvelle. Les officiers municipaux ont rompu toutes les mesures des ennemis du bien public, en arrêtant, dès le principe, les manœuvres et les complots. Ils ont commencé trois ou quatre procédu-
res ; et quand le danger a été passé, il n'ont pas cru devoir y donner des suites... Je demande s'ils pouvaient refuser d'instruire sur la plainte du procureur du roi; s'ils pouvaient refuser de décréter M. de Lautrec ? Ils ne connaissaient pas sa qualité de représentant de la nation. M. de Lautrec est député de Castres, et non de Toulouse, comme on a paru vouloir l'insinuer ; les officiers municipaux croyaient, avec toute la province, que M. de Lautrec avait donné sa démission, puisque depuis les premiers jours de mars on le voyait dans le département. Ils pouvaient croire d'ailleurs, d'après le texte même de vos décrets, que l'inviolabilité des députés n'était point absolue ; si je m'en souviens bien, le décret excepte les délits qui pourraient troubler l'ordre public.
Cependant, dès le moment où les officiers municipaux ont connu légalement la qualité de M. de Lautrec, ils ont arrêté la procédure. 11 y a un grand nombre de témoins ; ils n'en ont entendu que trois, et ont expédié un courrier extraordinaire pour demander les ordres de l'Assemblée nationale. Quand ils se sont ainsi conduits, ils reçoivent pour récompense de leur zèle et de leur patriotisme une inculpation de la part de l'Assemblée nationale... (On applaudit dans une grande partie de la salle ; et ces mots plusieurs fois répétés se font entendre : Non, non, ils ne sont point inculpés!) Un honorable membre n'a-t—il pas dit que les officiers municipaux étaient indignes de la confiance de l'Assemblée nationale, ainsi que de celle de l'accusé? N'a-t-il pas dit que la procédure était un complot, et, dans la mémo opinion, les instigateurs de ce complot ne sont-ils pas les officiers municipaux ? Je n'en dirai pas davantage; je m'en rapporte uniquement a la sagesse et à la justice de l'Assemblée sur la détermination qu'elle prendra.
(La discussion est suspendue.)
M. le maire de Paris se présente, et demande à être introduit à la barre avec une députation des vainqueurs de la Bastille; il annonce que l'objet de cette députation est très pressant.
,maire de Paris. Les braves citoyens qui se sont distingués à la prise de la Bastille, et que vous aviez comblés d'honneurs, instruits que le décret rendu à leur égard excite des réclamations, se sont assemblés ce matin ; ils ont pris un arrêté dont je vous prie d'entendre la lecture. Je demande de l'indulgence pour une rédaction qui a été très précipitée. Je dois observer que dans cette assemblée nombreuse j'ai trouvé autant de patriotes que d'individus ; que le dévouement inviolable à la Constitution, le respect pour l'Assemblée nationale et le désir de la paix y étaient unanimes.
Un des membres de la députation fait lecture de l'arrêté des vainqueurs de ia Bastille : il est ainsi conçu :
« Les vainqueurs de la Bastille, reconnus dans les procès-verbaux de vérification faits de l'autorité de la commune et déposés aux archives de la nation, convoqués en assemblée générale dans l'église des Quinze-Vingts, et présidés par M. le maire, assistés de leurs commissaires, instruits que le décret par lequel la première Assemblée nationale a récompensé leurs services sert d'instrument à l'aristocratie expirante pour chercher à souffler le feu de la guerre civile et à animer
les uns contre les autres les conquérents de la liberté, c'est-à-dire la garde nationale de Paris et les ci-devant gardes françaises, contre leurs frères d'armes et concitoyens ; les vainqueurs de la Bastille, tropglorieuxdéjàdeceque le 14 juillet, le jour où ils ont pris la Bastille, a été choisi par l'Assemblée natiouale pour l'époque de la liberté conquise et de la fédération générale de toute la grande famille; considérant que l'honneur est dans l'action du 14 juillet,bien plus que dansles récompenses ; qu'ils sont assez honorés d'avoir su les mériter, pour pouvoir se passer de distinctions qui n'ajouteraient rien à leur patriotisme, et que le sacrifice qu'ils vont faire doit rétablir la tranquillité publique ; considérant que si l'Assemblée nationale doit faire respecter ses décrets, et ne peut souffrir qu'il y soit dérogé, les vainqueurs de la Bastille seuls peuvent consentir à ce qu'il soit porté atteinte à celui qui leur a été accordé : ont unanimement arrêté de charger M. le maire et leurs commissaires de porter à l'Assemblée nationale la déclaration solennelle qu'ils font de renoncer, si l'intérêt de la Constitution l'exige, à tous les honneurs dont ils ont été couverts par le décret du 19 de ce mois, notamment à une place distinguée parmi leurs frères d'armes, lors de la fédération du 14 juillet et lors de la formation des gardes nationales, ce à quoi ils avaient déjà solennellement chargé leurs commissaires de renoncer, et à quoi ceux-ci avaient renoncé en leur nom le jour même du décret. Ils sont bien sûrs que l'on n'accusera pas les vainqueurs de la Bastille de faire cette démarche par la crainte de menaces : le reste de leur sang, qui n'a point coulé sur les murs de la Bastille, ils étaient prêts, s'il l'eût fallu, à le répandre pour le maintien des décrets.
» Le vrai sentiment de la gloire et du bien public l'a emporté dans leurs âmes, déjà exercées à tout sacrifice pour la patrie ; et l'on dira : ceux qui ont pris la Bastille l'ont prise pour établir la Constitution; ils ont été.comblés d'honneurs.nationaux ; ils ont su y renoncer pour le maintien de la Constitution, et ce dernier coup abattra la dernière tête de l'hydre. Et à la fin de la délibération, l'un d'eux, M. Hulin, a détaché son ruban et la médaille accordée par la commune aux ci-devant gardes-françaises, et qui lui avait été donnée : il a annoncé qu'il allait la reporter au comité de MM. les gardes, en déclarant que s'il faisait cette démarche, ce n'était pas qu'il ne fût très honoré de porter une marque de patriotisme, mais qu'il ne voulait point une distinction qui n'éiait pas commune à ses frères d'armes, lorsqu'ils renonçaient aux leurs. Au même instant, M. Léonard Bourdon, l'un des commissaires, a fait le recueil de tous les rubans des vainqueurs de la Bastille, dont ils vont faire hommage sur l'autel de la patrie. »
(Ces rubans sont présentés par ce commissaire.)
Déposer par amour pour la paix publique les palmes de la victoire, c'est un honneur plus beau, plus louchant que de les avoir méritées ; c'est un sacrifice digne des vainqueurs de la Bastille. Le courage et le civisme ne seront jamais séparés dans vos cœurs ; ils seront toujours vos titres à la gloire. L'Assemblée nationale va prendre en considération votre arrêté ; elle ne peut qu'être touchée des sentiments que vous y développez. L'Assemblée vous engage à assister à sa séance.
Ce n'est pas seulement à l'amour
de la paix, le premier de nos besoins, c'est aussi à l'amour de l'égalité, le premier de nos devoirs, que les vainqueurs de la Bastille viennent de faire un noble sacrifice. L'Amérique, qui leur a tracé leur démarche, nous trace aussi le parti que nous devons prendre. L'Amérique avait voulu resserrer par des liens d'une union fraternelle les citoyens qui avaient défendu la patrie avec le plus de succès et de gloire : mais bientôt les chevaliers de Cincinnatus reconnurent que cet ordre chevaleresque introduisait de l'inégalité parmi leurs concitoyens, et ils l'abdiquèrent. L'Amérique a reçu ce sacrifice. Semblables à ces premiers défenseurs de la liberté, les vainqueurs de la Bastille viennent présenter à l'Assemblée nationale un sacrifice de même nature : il me semble devoir être accepté par elle. Je demande que la partie du décret qui accorde des distinctions particulières aux vainqueurs de la Bastille soit rapportée.
Je demande qu'il soit fait une mention honorable dans le procès-verbal, et qu'on passe à l'ordre du jour.
(ci-devant de Saint-Méry). Si j'avais pu méconnaître ceux que j'ai admirés le 14 juillet, je les aurais bien reconuus à leur langage. Ils ne veulent recevoir de la patrie d'autre honneur que celui de la servir encore. Je demande nue l'Assemblée nationale leur donne acte de 1 abandon qu'ils viennent de faire, et témoigne sa satisfaction des sentiments qui les a conduits à cette démarche.,
Les vainqueurs de la Bastille viennent de nous donner un grand exemple ; il doit être suivi; en conséquence, je demande que le roi soit supplié dè détruire tous les ordres... (Il s'élève beaucoup de murmures.) Je n'ai pas prétendu dire qu'il n'en existât pas... (Les murmures redoublent.)
Je demande qu'on passe à l'ordre du jour. On ne peut pas faire une semblable motion.
Je voulais demander qu'il fût créé, à la place des ordres anciens, un ordre national qui serait conféré par le roi...
(On passe à l'ordre du jour.)
La proposition de M. Moreau est adoptée, et le décret est rendu comme il suit :
« L'Assemblée nationale, touchée du noble patriotisme des braves citoyens qui ont contribué à la prise de la Bastille le 14 juillet, accepte leur renonciation aux distinctions qui leur avaient été accordées par lé décret du 19 de ce mois. Elle décrète, de plus, qu'il sera fait, dans le procès-verbal, une mention honorable de leur généreux sacrifice. »
L'Assemblée revient à la suite de la discussion sur l'affaire de M. de Tou-louse-Lautrec.
, député de Tours. Je demande que les comités de Constitution et des recherches soient chargés de présenter demain matin un projet de décret sur les principes de l'inviolabilité des députés et sur l'affaire de M. de Lautrec.
L'Assemblée rend un décret conforme à cette proposition.
La séance est levée à quatre heures moins un quart.
Séance du
La séance est ouverte à neuf heures du matin.
, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier.
le jeune, (ci-devant comte): Je demande que dans le procès-ver bal, aux mots ont contribué à la prise de la Bastille, on substitue ceux-ci : ont pris la Bastille.
(L'Assemblée adopte le procès-verbal avec cette substitution.)
, membre du comité de Constitution, demande que le décret rendu le 24 juin sur un arrêté pris par l'assemblée administrative du départemeut d'Eure-et-Loir, soit généralisé, et qu'en conséquence les mots suivants : à la lecture d'un arrêté pris par l'administration du département d'Eure-et-Loir, soient supprimés.
Cette suppression est décrétée.
propose ensuite un projet de décret qui est adopté, sans discussion, ainsi qu'il suit : i
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport du comité de Constitution, confirmant le vœu des électeurs du département de l'Yonne, donné en vertu du décret du 27 janvier dernier, a décrété et décrète que ia ville de Saint-Florentin demeurera définitivement le chef-lieu de son district. »
,rapporteur du comité des finances, propose deux décrets concernant l'un la ville de Fécamp, l'autre la ville de Beauvais, qui sont adoptés en ces termes :
PREMIER DÉCRET.
« L'Assemblée nationale, sur le rapport de son comité des finances, a décrété et décrète que les officiers municipaux de la ville de Fécamp sont autorisés à répartir au marc la livre sur les contribuables qui payent au delà de trois livres d'imposition, une somme de 3,$00 livres sur le rôle de cette année, à la charge d'en rendre compte par devant le directoire de district et de département. »
SECOND DÉCRET.
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des finances, décrète que les droits d'aides, tels qu'ils ont été ci-devant perçus à Beauvais sur les bestiaux, les jours de franc-marché, continueront de l'être sur le même pied sur les bestiaux vendus et destinés pour ladite ville, faubourgs et autres lieux sujets en dépendant ;
« Et qu'à l'égard des ventes faites à toutes personnes étrangères auxdits lieux sujets,
elles seront exemptes de tous droits généralement quelconr
« L'Assemblée nationale recommande à la municipalité de maintenir le régime et la police établie de tout temps dans les francs-marchés dudit Beauvais, et d'avoir la plus grande surveillance pour le maintièn des exercices de tous les autres droits d'aides, et la suite de leurs recouvrements. »
, le Douai. Votre comité de Constitution est instruit qu'il se trouve dans l'assemblée électorale ou département du Nord, sur onze cents électeurs, soixante qui, attachés à l'ancien régime, se proposent de faire des protestations; ce ne sont pointlde pareils projets que nous redoutons, mais nous craignons la fureur du peuple contre ces gens qai substituent partout leur intérêt particulier au bien de la patrie. Les commissaires, chargés de Veiller à ce que dans les assemblées il ne soit riea introduit d'étranger à l'élection, craignent quei'esprit de chicane ne traverse leurs fonctions; ei conséquence, votre comité propose de déclare* que les commissaires nommés par le roi, pourila formation des assemblées administratives, serait chargés de tenir la main à la pleine et entière exécution des décrets qui les concernent, et noumment à celui du 28 mai dernier.
LAssemblée a recours à ces expédients, parce qu'elle enfreint elle-même ses décrets. Elle a reçu à h barre les électeurs de Melun, parce qu'ils lui faisaient des compliments, et elle ne veut pas écbuter ceux qui disent la vérité.
Je demande que M. Folleville soit rappelé à l'ordre, et j'observe que ce n'est point içi une disposition particulière que je propose, niais seulement une autorisation spéciale de faire exécuter vos précédents décrets. / Le décret proposé par M. Merlin est adopté en Ces termes :
« L'Assemblée nationale déclare que les com-tnissaires nommés par le roi pour la formation des assemblées administratives du département du Nord sont chargés de tenir la main, lors des assemblées électorales, à la pleine et entière exécution des différents décrets qui les concernent, /notamment de celui du 28 mai dernier. »
, rapporteur du comité de Constitu tion. Vous avez renvoyé à votre comité, de Constitution une pétition de la ville du Havre tendant à faire décréter par l'Assemblée nationale que les électeurs du département de la Seine-Inférieure seraient consultés sur la fixation du chef-lieu d» l'administration du district de Montivilliers. Le, comité est d'avis qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur cette demande , parce que la division du royaume a été faite avec maturité, que les diverses prétentions ont été examinées impartialement, et que ce serait remettre en question vos décrets antérieurs.
(Après quelques courtes observations présentées par divers membres, l'Assemblée décide qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur la pétition de la ville du Havre.)
, au nom du comité des finances, rend compte des difficultés survenues dans le département de l'Ain sur la confection des rôles des : impositions. Il propose un projet de décret qui eèt ' adopté en ces termes :
« L'Assemblée nationale, sur le rapport de son comité des finances, décrète :
« 1° Qu'à la diligence de le ppocureup général syndic du département qç J'4!P, il sera incessamment demandé aux officiers des éjections de Bourg et B'elïèy. ensemble MM. lesknciens administrateurs des provinces de Bès^e, Bombes, Biigey et Gex, un état des rôles iesupplémept, faits sur ies ci-devant privilégiés p|ur les six derniers mois de 1789, et un bordereau des sommes portées par Jesdits r.ôlçs d'ipaposijiqns, ensemble Une listé pour les communauté! qui n'ont p^s encore fait prpcéder à la confection desdits rôles de supplément ;
« 2° Que la liste des communautés dont les rôles de supplément ne çont pas encdrt faits sera adressée aùx'districts dont dépendent Jesdites communautés, pour, par lesdifs districjs, faire procéder, le plus tôt qu'il sera possible/ jauxdits rôles de supplément qui lepr serqnt empite renvoyés par les Synctips et peréquatenrs, pjfur être vérifiés et rendus exécutoires par lesdits districts ;
« 3° Qu'il sera toujours fait/trois originaux de ces rôles, dont l'un sera renâs aux pollecteurs, l'autre restera aux archives di district,,et le troisième sera p^r lui envoyé au/département;
« 4° Que pour la confection de ces rôles, les municipalités et les collecteurs de 1789 se conformeront à la proclainatioi du roi du 24 novembre de la même année, repue à ce sujet ;
Qn'jl sera incessamment déterminé de quelle jnanièrp pp prçpédpra à jàss jette et département des impositions de la présente année, ordonnées par |{es lettres patentes du 21 lévrier, et ce, sans le concours des députés du bureau des finances èt des officiers'des élections de Bourg et Bejley, et de tous autres qui avaieat coutume d'y assister ;
« Continueront néanmoins les juges d'élection de Bourg et Belley dfexercer leurs fonctions et d'en percevoir les émoluments jusqu'à ce qu'il y j ait été autrement pourvu;
« 7o En ce qui coacerne les commissaires départis, les intendants, leurs subdélégués, leurs fonctions cesseront entièrement pour toutes les parties d'administration, du moment où lés directoires de département et de district seront en activité, soit que lesdites fonctions aient été exprimées ou non dans l'article 2 du décret du mois de janvier 1790, concernant les fonctions des asseni-blées administratives; de telle sorte que, conformément à Particle 9, section III dudit décret, il n'y ait aucun intermédiaire entre les administrations de département et le pouvoir exécutif;
« 8o Au surplus, l'Assemblée nationale déclare le présent décret commun $ tous lés départements et districts dU royaume. »
, organe du comité des finances, donne ensuité lecture d'une délibération du dé-artement de la Haute-Saône^ et propose un décret ui est adopté dâns les termes suivants :
« L'Assembléë'hâtionale, suf fe rapport de son comité des finances, approuve la délibération et les mesures prises parle conseil d'administration dp département de la Haute-Saône, pour subvenir à la disette extrême dés grains et au soulagement de la classe indigente ; ordonné, en conséquence, que ladite délibération, en date du 15 juin, sera exécutée dans tout son contenu. »
,rapporteur du comité de Constitutionpans'J'àncien régime, les professeurs, maître^ et principaux des collèges ne payaient ni décimes, ni impositions; leUrs appointements
étaient si modiques, qu'ils se trouvaient dans l'impossibilité de le faire ; cppame ils ne peuvent actuellement représenter leurs quittances d'imposition directe, on leur fait des difficultés pour les admettre à'exèrcër les droits de citoyens actifs. Votre comité de Constitution vpus propose de décréter que, pour cette année séùlemenÈ, la quittance de contribution patriotique doit tenir lieu d'imposition directe aux professeurs, maîtres et principaux des collèges, s'ils réunissent d'ailleurs les qualités requises.
. Ce décret est ainsi rendu
« L'Assembiée nationale déclare que, pour les élections de cette année seulement, la quittance de |a contribution patriotique doit tenir lieu d'imr position directe aux maîtres, professeurs et prinr cipaux des collèges de Paris, lesquels pourront exercer les droits de citoyens actifs, s'ils réunissent d'ailleurs les conditions requises, v
fait ensuite Je rapport de l'affaire de M. de Toulouse-Lautrec, renvoyée hier aux comités réunis de Constitution et des recherches : Vos comités des recherches et de Constitution ont examiné avec soin le parti que devait prendre l'Assemblée nationale sur la question qu'elle a traitée hier relativement à l'inviolabilité de ses membres. On a paru désirer que le traité renfermât trois dispositions : la première, qui rappelât l'indépendance et l'inviolabilité des députés ; ia seconde, particulière à M. de Lautrec ; et enfin, l'approbation de la conduite de la municipalité de Toulouse. Nous avons remarqué que, clans ce moment, il était impossible de développer eu détail les principes de l'inviolabilité; il tient à deux points importants, la loi sur les jurés en matière criminelle, et l'établissement d'une haute cour nationale, devant laquelle serait renvoyé Je membre déclaré jugeable.
Votre comité a pensé qu'il fallait décréter seulement que, jusqu'à cet établissement, aucun membre de la législature ne pourrait être déprété d'ajournement personnel ou de prise de cprps, que lorsqu'après le vu de la/plainte, l'Assemblée aurait décidé s'il y a lieu à l'accusation. Ces dispositions sont importantes, non seulement pour la dignité et l'indépendance de vos membres, mais encore pour qu'il ne survienne pas d'interruption dans les travaux» Voici Je projet de décret qu'ont l'honneur $e vops squmpttre yos cqpntés des recherches et de Constitution :
« L'Assemblée nationale, se réservant de statuer en détail sur les ippyehs constitutionnels d'assurer la liberté et l'indépendance des membres de la législature, déclare que ," jusqu'à rétablissement des jurés én màtière criminelle, les députés à l'Assemblée nationale ne pourront être décrétés de prise de corps ou d'ajournement personnel que lorsque, sur le vu de l'information et des pièces de conviction, l'Assemblée aura décidé qu'il y a Jieu à accusation : eu conséquence, l'Assemblée déclaré non avenu le #cret prononce le 17 contre M. de ^autrèc, un de ses mpmbres; lui enjoint de venir à l'Assemblée rendre compte de sa conduite ; et après l'avoir enf-jendu, après avoir examiné l'instruction, elle décidera s'il y a lipu à accusation; et, en cas que cela spit ainsi décidé," elle désignera le tribunal par devant lequel l'affaire doit être portée. Son président est chargé ge faire connaître à la munipipalité de Tpulouçp que son zèle patriotique à obtenu l'ap-probation de l'Assemblée. »
Je ne dirai rien sur les principes
que cgptjent le prqjet du coipjté ; je rappellerai seplepi|ent deqx circonstances particulières qqj p^pritent de l'attention. La prpmièré est celle ou ijn député trouverait l'qrcjre gy|)lic : alors, ja main-mise, que les Roipains apppl^^ent custodia libéra, dqit être autorisée. C'est ce qpi sert de sûreté à Ja personne prêtée, et qui protège la tranquijjjte publique. La secppde, qqe n'a pp.^ prévue yotre comité, est pelle où qp ipémbrpesj; absent sans congé : alors il renonce ^ SQfl paraçV tère ; il n'est plqs revêtu dp l'iqvjqfanilité.' Je prqpqse donc de déqqnper clairement cette disposition, ët dp dipe : « séfonfpbmp^aaos l'article les députés absents ayec la permission du Corps législatif «.
La main-mise dqit aYPic Heu en toqtë circonstance : tqus les membres d'upe natiqn libre ont droit de s'opposé? au désordre, fj'est poqr cetpL qu'un membre de l'Assemblée nationale, s'il était surpris en flagrant délit, serçjt valablement arrêté* D^PS temRS jnêmp où dés indiyi^qs et des porRa privilégiés se préparaient l'impunité après le prime, le droit de [pain-mise était ep yigueur. L^ fameuse déclaration de 1145 l'atteste assez, pûisquellp porte que la rqain-mjse aura lieu même à l'égard des ecclésiastiques, nonobstant Ipqr dignité, du mpinënt où il y aura flagrant délit. Il faut dqpc ajouter à l'article proposé par (e cpmité : « sauf les dispositions des loi s sur les cas de flagrant délit ». L'intérêt social exige aussi que l'information soit continue statu quo. Il fgut bien que les témpjns puisent être représentés l^pppsé, et pptftqiniept lps prqpès-vpfbau?: constatant le déljt. Vous ne ferez pas à ja société tqrt d'interrompre une instruction ppmmencép. Je peg^rpe ce principe comme ^pssi nécessaire que celui de l'inviolabilité.
Il me semble que ces principes sont suffisamment énqncés par ce décret. Qu^nd on dit qu'uq membre deTAsseip-blée iialiqnale ne peut être décrété de prisé de corps ou d'ajournement personnel, qù'apparavant la procédure n'ait été cotpnpiûrçuée 3 1 Assemblée nationale, pt qu'elle §it jugé s'il y a lieu $ accusation, pela suppose qu'pn peut commencer une information; cela nè retranche rien dq drqit icppntestable d'arrêter en flagrant d^lit ; tqptes ces règles sqnt respectées par le comité, qui qp les détruit pas» Si cependant op ne ies ployait pas assez expliquées, il n'y a point d'inconyépiént à le dire d'qpie manière plus positive. Rejativerqèpt à l'atpeudement RrQppsé par M. d Apuré, je ne crois pas qu'un membre 4e l'Assemblée nationale soit déchq de son caractère pour s'être absenté sans permission- S'il egt éloigné, p'est sa faute" ; son inviolabilité a été consacrée pour je peuple et non po'uc toi. Je dema^4e donP 'a question ppé^ble §ur l'amendement de M. d'André.
(La discussion est fermée.)
D'après les diverses observations qui viennent d'être faitps, jevops pr^entp, Messieurs, la rédaction suivante qui, je't'èsRpre, satisfera tout le monde :
« L'Assemblée nationale, se réservant de statuer en détail sur les moyens constitutiQpnels d'assurer l'indépendance et la liberté des membres de la législature, dépiare que jusqu'à l'établissement des jurés eu matière criminelle, et d'HRe haute cour nationale, les députés, dans lé C£$ 4e flagrant délit, pourront être arrêtés conformément aux anciennes ordonnances ; qu'qn peut ipéfpe,
excepté dans les pas désignés par le décret du 23 juin, faire' des informations ét rècevoïr des plaintes contre eux, mais que néanmoins tout jugement sera suspppdij jpsqu'à ce qye, sqp le vu de l'iufqffnatiqn et des pièces" qppqnyiction, l'As-semblge git déplde qq'il y a IiéU ft'àcgqs^ipq j p$ conséquence, l'As semblée dèclàrQ CQRiipe ijPP ayenq le déçpetde prjsp de cqrps decepiié' le, 17 contre M. dë'Lçi^trpç, un de'gçg papml}fes : pourront cependant lits jugés continuer rinrormation ; ppjpjpt | M- dp liautrec de yçpir renflpp cempte de s|i çopdpîtë ^ U'Assepiblée. qui, anrps Tayfiir entendu et ex^FfWé l'ipstructlon. d&mm S^l Y^ lieu à accusation 1 ët, en éë cas, elle désignera le tribunal par devant leçmej il do|t ê|re traduit. §Pn président est chargé de faire pqnnâît're a la mûpi-pipatyté de TdulQUje que son $èje Mpripxifluê a obtenu l'approbaticrç de I'^ssem^e; »
Je combats l'amendement par lequel l'Assemblée autoriserait à faire dès informations. Chacun reconnaît l'inviqlabilit^ dp§ membres de l'Assemblée nationalé, qu-ori pëpt vérita-blënaent'àppeïpr lé privilège''du peuple; mais ce privilège devient illustfté. si vous accordez à un tribunal quelconque le iroit de prendrê desi iqfor-mations. Je suppose, paV exemple,' qu'un tribunal malveillant ait pris désinformations spprètes, et cjùë cent membres de l-Awemblée nationale soient prêt3 à être décrétés'; je vous lë démande, qui voudrait dans la suite 'êtredéputé? L?Âssëmblée doit être, ainsi que tous le» individus qui la com-posèqt, à l'abri de tptttë SMintè : je" ne préténds pas'pour cela leur assurer impunité ; j'oée croire que personne n'en a besoin\ '
(Cette opinion est plusieurs fois interrompre par des ipurrnures.) :
Je demande la suppression de la cornière disposition de l'article.
Plusieurs membres demandent la parole.
D'autres membres réclament la clôture.
La clêturp est prqpoppée et le decrèt es| pendu ainsi suit :
«IL'Assemblée nationale se réserve de statuer en dëtgilsur jes mqyèOS éonstitUtiqnnejs d'§ssurer rinijëpepdqppe ët ja liberté dés mecpbrés dii Corps ieg[sl^t|f ; q^plare que, jpsqu'à l'étaljjjpSenàeot' {je déla' jql spr les jurés m^tiére priqiiqeHej les députés a i'Asserabléë patioqâ|e p'puypnt, aa|r|9 lès ca$ de flagr^pt délit» être arrê|és, ppùfprmeinent aux ordonnances; qq'on peqt mênqp, éxcépté les cas ipdiqués pâp le depret du 23 jpin 1^9,' rece-vp'ir fies plaintes eî faire des inform^tiops ëpntpe euj, mais qu'ils pé peuvent êtrë décréié^ par àu-ciîqs juges avant que le Çorps légisjatif, pt|r je vu des informatigns ët des 'piëcpg de dqnvictiqu. ifit dépidé qq'il y a liea à l'^ccusàtipn.
« Ep conséquence, regardant connue non ayenu le décret prpnpnp^ (e fjç cemois contre 4e Laqj,rpc, l'un dg ses'membres, lui'énjOint de venir repdre Cqmpte jfe Sa conduite à'l'A^ejqbl'ee nationalé, qui, après' l'av'flip jenteddu. et ayojr exapiiné rinstcup|ipp cpinmencpë, laquëtle' pourra être Contipuée» noqp^tànt I^l liberté rèqdUe à M. de Lautrec, qéciaèpa s'il y â lieu à racpusatipn, et, d§ns le C^S pù raccqsation dey rai t êtr^uivië, désignera le ïribunàl.
M. lë président est chargé de fairp pppnaître à la municipalité de Toulouse, que son zèle patriotique a obtenu l'approbation de l'Assemblée.»
,cféjfuté de Châtelle-
rault, sollicite de l'Assemblée un congé de quinze jours.
Je demande que votre comité de police soit chargé de vous présenter un règlement sur les cas ùù il sera permis de s'absenter.
On demande l'ordre du jour, e| l'Assemblée décide qu'elle y passera immédiatement.
Je demande la question préalable sur le congé sollicité, si on ne veut point entendre les observations de divers membres.
Il y a bien quatre cents membres absents : si vous continuez d'accorder des congés aussi légèrement, vous serez bientôt réduits à la moitié, ou au tiers/ Je demande donc qu'il n'en soit plus accordé sans des motifs véritablement légitimes.
L'Assemblées décidé qu'elle passerait à l'ordre du jour ; il ne faut donc point revenir contre ce décret, miis remettre la demande du congé à un autre jour/
(Cette proposition est adoptée.)
L'ordre du jour est un rapport du comité, de la marine sur les principes constitutionnels de la. narine.
, rapporteur (1). Messieurs, la force publique a deux branches ; l'une de terre, l'autre de mer. Vous avez/déjà décrété les principes constitutionnels de la force de terre, et la nation s'est empressée d'applaudir aux bases quejvous avez consacrées. Elles conservent à chaque citoyen le droit de concourrir selon ses talents à la défense commune; elles alimentent l'émulàtion qui naît du libre exercice de ce droit; elles assurent enfin aux véritables amis de la liberté une organisation de votre armée, tellement combinée avec la constitution de l'Etat, que les ennemis seuls de la chose publique seront dans le cas de craindre le développement de vos forces de terre.
La force maritime, devenue la plus importante, depuis que l'art de la navigation a soumis en quelque sorte les autres parties du monde à ljEu-rope, attend aussi de vous une constitution nouvelle. Il est temps de réformer tout ce que l'antienne présente de vicieux, et de diriger vers le plus grand avantage de la nation les moyens et les ressources immenses qu'elle possède.
L'Angleterre et la Hollande avaient déjà une marine formidable, et se disputaient l'empire des mers, quand Louis XIV, jaloux de tous les genres de gloire, songea à devenir aussi une puissance maritime. On s'étonne encore de la rapidité avec laquelle il créa des ports, des arseneaux, des flottes, un corps nombreux d'excellents officiers, et surtout une administration aussi utile qu'économique. Bientôt ses escadres couvrirent les deux mers, et le pavillon français obtint partout des succès et des hommages.
Colhert vivait alors : ce grand homme qui aurait été digne de la confiance d'un peuple
libre, avait osé, sous le règne de la vanité, employer le mérite plutôt que le rang. Il avait
su persuader à Louis XIV qu'il fallait composer sa marine militaire de tout ce qui se
distinguerait dans
Golbert laissait à son fils un grand exemple à suivre, des mémoires excellents sur la marine, mais il ne lui laissa pas son génie. M. de Sei-gnelai, avec moins de profondeur que Golbert, manquait encore de cette sévérité de principes qui ne fait acception de choses ni de personnes, et qui résiste invinciblement à tout ce qui peut contrarier le bien public. Au lieu d'appeler à la marine guerrière tous les jeunesgens qui annonçaient pour cet art difficile une vocation décidée, il donna l'exclusion à tous ceux qui n'avaient pas l'avantage d'être nés gentilshommes. Au lieu de séparer absolument la partie économique de la partie militaire, il crut tout assurer en combinant les deux fonctions, en faisant coopérer au même but les officiers des deux corps et en les rendant en quelque sorte inspecteurs les uns des autres.Telles furent les erreurs deM. de Seignelai ; et malheureusement il les consacra dans l'ordonnance-de 1689 ; ordonnance admirable d'ailleurs dans ses autres principes et dans tous ses détails.
C'est en partie à ces vices de constitution que l'on doit attribuer les malheurs et les dépenses de la marine militaire. Détruite presque aussitôt que créée,si Duguay-Trouin quin'avait pas été élevé par elle, vint rappeler pendant quelques instants les beaux jours de Tourville ; si les le Tanduaire, les la Galissonnière, soutinrent ensuite avec tant de gloire l'honneur du pavillon français: si cent combats de vaisseau à vaisseau montrèrent à l'Europe ce que pourrait la France avec une marine bien constituée, le patriotisme n'a pas moins à déplorer soixante ans de faiblesse et de revers, la perte de plusieurs possessions importantes, le mauvais emploi de la contribution des peuples, et surtout à chaque guerre la ruine entière de notre commerce.
En consultant ainsi l'histoire des temps, et rapprochant des ordonnances de la marine française et anglaise les différents effets qu'elles ont produits, votre comité, Messieurs, s'est pénétré de la nécessité d'établir de nouveaux principes. Facilité dans son travail par le décret que vous avez rendu le 28 février dernier, sur la constitution de la force de terre, il s'est approprié tous les articles de ce décret si important, qui lui ont paru convenir à la constitution de la force de mer. Ce qu'il a ajouté ou modifié n'est que la conséquence nécessaire de la différence qui existe entre l'une et l'autre force. ;
C'est ainsi, Messieurs, qu'après avoir unanimement adopté le principe que le roi est le chef suprême de l'armée;
L'attribution aux législateurs, de la fixation des dépenses ;
Le droit de chaque citoyen à tous les emplois ;
La conservation du domicile, malgré les absences nécessités par le service;
La récompense civique accordée à quiconque aura servi sans reproche pendant un temps déterminée;
Le serment annuel du 14 juillet, époque si chère aux véritables patriotes ;
Enfin, après avoir adopté l'énonciation des objets sur lesquels il appartiendra à chaque législature de statuer;
Votre comité, Messieurs, s'est occupé avec la plus sévère attention du complément des principes qui peuvent constituer la marine française, de manière qu'elle tende, dans toutes ses parties, au plus grand bien de la nation.
Il a pensé d'abord qu'il était d'une grande importance de déterminer la destination de l'armée navale, et de prévenir par là des maux que d'antiques préjugés ont si souvent occasionnés. Avant la guerre dernière, c'était une opinion presque générale que nos vaisseaux devaient combattre pour l'honneur du pavillon, et non pour des marchands. Aujourd'hui que la jalousie du commerce commence à dominer tous les peuples, et à les éclairer sur leurs véritables intérêts ; aujourd'hui que votre Constitution même doit ouvrir à la navigation et à l'industrie nationales une plus vaste carrière ; aujourd'hui que les seules fonctions utiles seront les seules honorables, il convient de prévenir à jamais le retour d'une erreur aussi funeste, en décrétant le principe que les forces navales sont essentiellement destinées à protéger la marine marchande et les possessions qui la vivifient.
Votre comité n'a quitté les intérêts du commerce que pour approfondir une question bien plus intéressante, et surtout plus chère à vos cœurs. Il s'agissait de savoir si l'armée navale pourrait jamais fournir des moyens d'attenter à la liberté française. Après un examen et une discussion dignes d'un tel sujet, votre comité a reconnu que l'action des forces maritimes n'étant jamais qu'extérieure, il suffisait, pour rassurer sur tous les points lés amis de la Révolution, d'exiger le concours des deux pouvoirs, toutes les fois qu'il serait question d'appeler ou de transporter dans nos ports des forces étrangères.
La suppression de toute distinction, excepté celle des grades, parmi les officiers civils et militaires de la marine, ne pouvait pas devenir le sujet d'une discussion : et l'on peut en dire autant de la destitution de ces mêmes officiers, qui ne doit être opérée que par un jugement légal. L'une est la conséquence de la déclaration des droits de l'homme, l'autre une précaution efficace contre la faveur, la séduction, ou la vengeance. Mais ce qui a mérité une attention particulière de-votre comité, c'est la fixation du temps où vous pourrez accorder le droit de citoyen actif aux services des hommes de mer, et l'âge auquel ce temps commencera à courir.
Le décret, du 28 février dernier, exigeant des troupes de terre seize ans de service consécutifs et sans reproches, il était tout simple d'exiger les mêmes conditions des hommes classés qui servent dans les ports, mais soixante-douze mois de campagne ont paru un terme suffisant pour obtenir la même récompense.
Quant à l'âge auquel l'État doit commencer à tenir compte de cette espèce de service, votre comité a cru devoir le fixer à dix-huit ans. C'est à cet âge que le matelot est classé, et par conséquent, ce n'est qu'à cet âge qu'il peut être forcé de servir sur les armées navales. Alors seulement son service devient méritoire, parce qu'il cesse d'être volontaire. Alors, il fait a la patrie le sacrifice de la rétribution plus considérable qui lui serait accordée sur les vaisseaux marchands. Ce n'est donc qu'à cette époque que commencent les services dont l'Etat doit lui tenir
compte, et pour lesquels il a droit d'attendre un dédommagement.
C'est, Messieurs, par de tels principes que votre marine doit reprendre le rang qui lui appartient, et qu'elle ne pouvait obtenir que sous ie règne de U liberté. Le crédit, la faveur, les privilèges n'ayant plus les moyens de rebuter ou d'étouffer les talents, vous verrez s'élever sous vos yeux une foule de navigateurs dignes d'illustrer leur patrie. Le célèbre Pitt a pu dire autrefois que a France était un corps vigoureux et puissapt qu'il fallait toujours tenir à l'agonie ; il a pu se conduire d'après ce principe, parce qu'il combtait sur les obstacles qui s'opposaient au développement de nos moyens. Mais aujourd'hui quetvous avez repris toute l'énergie d'un peuple libre, il faudra que la politique change ; et si l'on ne respecte pas votre modération quand vous renoncez à toute guerre offensive, à tout projèt de conquête, il faudra bien qu'on respecte Iefforces que vous serez en état de déployer contré des prétentions injustes.
Nous vous présentons le projet de décret suivant :
PROJET DE DÉCRET.
a L'Assemblée nationale, ayant entendu le rapport de son comité de la marine, a décrété et décrète, comme articles constitutionnels, les articles suivants :
« Art. 1er Le roi est le chef suprême de l'armée navale.
« Art. 2. L'armée navale est essentiellement destinée à défendre la patrie con tre les ennemis extérieurs, et particulièrement à protéger le commerce maritime et les possessions nationales dans les différentes parties du globe.
« Art. 3. Il ne peut être appelé dans les ports français ni employé au service de l'Etat aucunes forces navales étrangères, sans un acte du Corps législatif, sanctionné par le roi.
«Art.4.1lne peut être employé sur les vaisseaux, ni transporté par lesdits vaisseaux dans les ports du royaume et des colonies, aucun corps ou détachement de troupes étrangères, si ces troupes n'ont été admises au service de la nation par un décret du Corps législatif, et sanctionné par le roi.
« Art. 5. Les sommes nécessaires à l'entretien de l'armée navale, des ports et arsenaux, et autres dépenses civiles ou militaires du département de la marine, seront fixées par les législatures.
« Arl. 6. Tous les citoyens sont également admissibles aux emplois civils et militaires de la marine, et les législatures ni le pouvoir exécutif ne peuvent, ni directement ni indirectement, porter aucune atteinte à ce droit.
« Art. 7. Il n'y aura d'autre distinction entre les officiers civils ou militaires de la marine, que celle des grades, et tous seront susceptibles d'avancement selon les règles qui seront déterminées.
« Art. 8. Toute persotfhe attachée au service civil ou militaire de la marine conserve son domicile, nonobstant les obstacles nécessités par son service, et peut exercer les fonctions de citoyen actif, s'il a d'ailleurs les qualités exigées par les décrets de l'Assemblée nationale.
« Art. 9. Tout militaire ou homme de mer qui, depuis l'âge de dix-huit ans, aura servi sans reproche pendant 72 mois sur les vaisseaux de guerre, ou dans les grands ports l'espace de 16
ans, jbUîrà de là pléùitlidë des droits de çitbyëh actif, et sera dispensé des conditions relatives à là propriété et à la contribution.
«Art- 10. CbàqUe âniiëë, lë 14 juillet; il SeRà pretë iildiVidbëliemënt dans lefe jgRahds jjortSj par toutes les péRsonnes attachées au service civil ët militaire dé ia mariné, en préséncë des of-ftfciërs mlihicipaux ët des citoyens Rassemblés, le fcëRmënt dtjl suit, sâvôir : j
à PàR lës officiels civile et militaires : dë Rester fidèles à iâ nation, à là loi, ati roi et à la coiisti-tutWa décbétéë par i'Assémniée Aatibriàle et acceptée jpà? Sa Màjésté ; dë prêter màih-forte requise par les corps àdmitii'étràtiS ët lés officiers civils bti municipahx, et de n'employer jàrhàis ceux qui sôht sous leurs Ordres contre aucun ci-toyen, si ce n'est sur cëtte réquisition, laquelle sera toujours lue aux troupes à.ssénlblées ; de fairé respecter ië paViiioil français, et dë protéger, de la thanièrë là pi ils efficace, le commerbë maritime;
« Et pat les homihës dfe niërfet àutres ëmployés àu service dé la marine, entre les mains de leurs officiers, d'être fidèles à la/nation, à la loi, au roi et à la Constitution ; de ^abandonner jamais les vaisseaux sur lesquels ils seront employés, et d'obéir à leurs chefs ave la plus exacte subordination. /
« Les formules de ces serments seront lues à haute Voix par l'officier-commandant dans le pOrt, lequel jurera ië premier et recevrà le serment que chaque officier, et ensuite chaque homme de meR prononcera, en levant la inàiù et disant : je le jure.
« Art. il. A chaquë aimemetit,, et au motnent de la revue à bord, le /cbmmarnlàht dé chaque vaisseau fërâ le serment, et le iëra répéter par l'êtat-mëjor et Pêduipage, dahs lës tërines énoncés par l'article brëçédêht.
« Art. 12. Lë ministre a^ant lé dèpàRtëmeht ae la ihàRlhë, ët touâ les agents Civile et militaire^ qUëignu'ils solëht, Sdbt sdjëts à la RekpofiSabiiite, dans les cas et dé la diahiëré qUi ébnt od ëëRobt déterminés pal* ia Goti&titutibn,
» Aft. 13. Aucun binCiët militaire de là marine në pourra être destitué de Sôd ém§idi, sahs le jUgêmënt d'un cohëëli dë gueRRë. et aucun bffil ftier bivii éans 1 avis d'un cdtisëii d'àdàiinistrai tion.
« Art. 14. Il n'y aura d'autres règlements et tiRdoflhànces sur lë fait de là tharine? quë les Êlécrëts dë rAssëfhblëë natiohale, éàtictldUhés par le Roi ; sàllf lëé ^Réclamations t(uë poUrrà faire lë bbUvOir exécutif, pour RappëlëR bti oR-donnër l'observation dès JoiS et ën dévêlfjpper lës détàiiê. ... . ^
« A chaquë législàturë appartient le pouvoir de statuer :
« 1° Sur les sommés à fixër atiiiUëllëmëht ptmR l'ëiitRetiëh dë 1 armée OaValë, des ports oU arsenaux, ët âlitr'es dépënsës ëoiiëêRfiànt le dëpàRte-fnent dë ia maRihé ët dès cdlbniëê;
« SUr lë" ftombrë dés Vàissëàtix dont l'àrméë navale sera composée , -,
i 3ë SUR lë nombRe d'officiérs de dhàqdë grade ët d'nbihniés dë mer à êntfetëiiiR floûr le èerVice de la fltftfë ; , 4 , 4
« 4° SuR là fôrmàtiotf dès éqtiipageS; «' t6 SuR là èbldë de dnàç(ue grade ; « 6° SUR lëê reglëà d'àditlissiùn au éërvice ët d'àtahdëmënt dans les gfàaèé;
« 7à Eùfin, sflr les lois Rè'Iatives aux délits et àiix frëinë.g iûilitàirêté, êt sur l'OrgâMgâtidtf dès ôtfn&ttls dë gUéfrë et OanfiriiStrâtiffû, »
demande là parole.
Est-ce pour combattre le décret?
C'est uniquement pour donner quelques explications : je ies ferai imprimer et je renonce à la parole. (Voy. les réflexions de M. Peilerin.de La Buxière annexées à ia séance de ce jour»)
relit les quinze articles du décret. Ils sont successivement mis aux voix et adoptés sans discussion.
Plusieurs membres réciament l'impression et l'envoi du rapport à domicile. (Cette motion est adoptée:)
, député de Nemours. M. Em-mery, dans la réunion tenue hier au comité militaire, a présenté des considérations très importantes qui devraient être soumises aux méditations de tous ceux qui s'occupent de l'armée» Le comité demande si le travail de M. Emmery doit être imprimé et envoyé à domicile.,
L'Assemblée ordonne que les Considérations sur Varmée présentées par M. Èmméiry au comité militaire seront imprimées et jointes àii proçès-verbal dé ià séahee de be jour. (Voy. plus loin ce document.)
anhonce que les députés de Nîmes viennent de remettré sUr lë bureau UU paquet qui contient le Rapport dès événements qui se sont pàssés dernièrement dans là viilè de Nimes.
L'Assèmbléë décide qu'ii en sëRà fait lecture à la séance du soir.
, du nom du comité aes finances, présenté un nouvëàu tableau de la situation ae la contribution patriotique, arrêté au 24 juin présent mois.
Il croit devoir faire remarquer pàrticuliére-ment .que Monsieur, frèrë du roi, a fait Une contribution de 500,000 livrés pour le quàrt dë son revend. Il fait ensUité observer qUé plusieurs villes n4y résëntent point encore une contribution égale celle que leurs députés ont annoncée; mais quë le ministre ne peut former ce tàbleaU qUe d'après les bordereaux reçus.
Le montant de ces bordereaux présente aujourd'hui un total de 89,935,588 livres 4 sois, quoiqu'il n'y ait encore que 10,983 municipalités qUi se.soient.mises en règle.
La quotité des municipalités que présente une province comparée à celles d'une aUtRè province, met plus à portée de jugeR de lëUR eihpressë-; ment patriotique, quë )a somme à laquelle s'élève là ëbntrlblJtion : 1,994 rdanicij^âiitêà bnt déjà fourbi leurs boR'dëRéàtix dàiis là Chàiiipagtiè ; tandis qu'il, ëst des provinces renfermant 4,000 mdtiicipalltés qUi n en bréèentent qlië 208 ayant ib'dRni fëlir bbraèReàu Ou aperçu.'
demande i'imjiR'è^Sion jè cet éfat qui fàit honnetir à là pFovidcë de Chàmpàgûe.
L'Im^rëàSlôii est ordonnée.
L'tjRdre dii jtfhr ëàt là èUité
de la discussion du projet de décret îûV M ventes des domaines nationaux aux particûlieri.
L'article 1er a été adopté dans la séance d'hier.
, député de Paris, rapporteuri donne lecture de l'article 2 aiùsi conçu :
« Art. 2. Toutes les personnes tjni voudront acquérir dès domaines nationaux, pourront s'adresser soit au comité de l'Assemblée nationdle chargé de leur aliénation, soit à l'administration ou au directoire du département, soit même à l'administration ou au directoire du district, dans lesquels ces biens sont situés, l'Assemblée nationale réservant au département touté surveillahce, et toute correspondance avec le comité* pour la suite des opérations.
Je viens faire une motion qui se rattache à l'article 2; c'est celle d'adjoindre au comité d'aliénation autant de membres nouveaux qu'il y a de départements, aux fins d'avoir toutes les connaissances locales et nécessaires aux soumissions,pour les achats des biens nationaux. Les travaux du comité recevraient de cette adjonctioh une activité utile.
L'accroissementde83 membres qu'oh prbpose de donner àu comité d'aliénation, aurait ce résultai de créer 83 rapporteurs spéciaux pour 83 départements. Or, èh calculant d'après les 'probabilités humaines, il peut arriver que ces rapporteurs uniques aient dës parents, des ainis qu'ils soient portés à favoriser, biën involontairement sâns doute, mais au détriment de la nation, je démandë, par ces motifs,, lë rejet dë l'amendement.
, député du Berry. J'appuie les cbiicltisions dli prédpihant. Vous sàvëz d'ailleurs combien il serait difficile dë rassembler un comité composé en totalité de 95 membres; Cette aug-men tation ne ferait que retarder les opérations ; les 83 commissaires riduvëâtix në feraient que surcharger ët ëmbârrassër la machihé sâns nën ajouter à sa vitesse. Le zèle et l'ardeur suffisent quant à présent au comité, ët dès qu'il eh sërà besoin vous pouvez être certains cjh'il Vous demandera un surcroît de mëhibres.
L'Assemblée consultée rejette l'amendement.
L'àrticle 2 est ensuite mis aux voix ët adopté.
Les articles 3 à 12 sont lus, mis aux Voix et adoptés, sans oppositiôd ainsi qu'il suit
« Art. 3. Les municipalités qui enverraient des sonmisfeions pour quelques Objets déjà dëhiandés pâr des particuliers, n'auront point droit à être préférées. Le comité enregistrera toutes les demandes des municipalités suivant l'ordrë de date de leurs délibérations authentiques, et bélleë des particuliers suivant la date de leur réception, ét il en enverra des fexpéditidiis, certifiées par un de ses secrétaires, à l'administration ou au directoire du département dans lequel ces Objets sont situés.
Art. 4 (réuni à l'anciën article 7). Lés administrations ou directoires de département formeront un état de totis lëS domaines natiOhàUx situés dans leur territoire, ët procéderont incessamment à léur estimation tiah.s lés formes présentés jaar lës articles 3, 4, 7 ët $ dii titre I8* du décrët du 14 ihai ci-desshs mentionné ët par l'instruction du 31 mai. Elles commettront pour surveiller cë travail lës âdmihiëtlrdtiôûs Ou directoires de district^.
« AH. 5. fellès coriiméncerdfit cés' éêtirbàtions par les iiêtix où sont situés les biëiis sdf. lesquels le fcomitèiëUr aUrà rënvfiyé des solindissionê, soit dê municipalités, Soit de particuliers, dd sur lesquels ëllës 8h auraient l*ëçu diredtefuen{, ët cdntiniiërorit ensuite à faire estimer deqx-memës de ces biens pour lesquels il n'atirâit été fait aucune soumission.
« Art. 6. Éiles auront soin, dans les estimations, de diviser les objets autant que leur nature le permettra, àiin de faciliter, autant qu'il sera possible, les petites soumissions, et l'accroissement du nombrè despropriétaires.
« Art. 7. Les prix d estimation seront déterminés d'après les dispositions des articles 3, 4, 7 et 8 du titre Ier du décret du 14 mai ci-dessus mentionné, et servirent de base aux soumissions et aUx enchères.
« Art. 8. Les soumissions devront êthe au moins égales au prix de l'estimation, et les enchères ne seront ouvertes flue lorspU'il y abfa ftë telles soumissions ; mai s alors elles ié seront nécessairement, et l'on y procédera dans lës délais* dans les formes et aux oouditions présentes par lës articles 1, 2* 4, 5* 6,8 et 9 du titre III dh décret du 14 mai, et pat l'instruotion dUBl dtimêmë mois;
« Art. 9. Les acquéreurs des domaines nationaux seront tenus île se conformer, pour les baux, actuels de ces biens, auX dispositions de l'ârtiele 9 du titre 1®P ou décret du 14 mai} et aux conditions de jouissances prescrites par l'instruis tioh du 31 du même mois, au maintien desquelles les administrations de départements et de dis* tricts, ou leurs directoires* tiendront exactement la main.
« Art. 10; Les acquéreurs jouiront des fran-u chises accordées pdr les articles 7 et 8 du titre Ie' du décret du 14 mai, et aiissi de celles accordées par l'article 11 du titre III ; mais pour ces dpr-nièrësj pendant l'espàcë de cihq âhhêës seulement* à compter du jour de la publication dd présent décret.
Art. 11. LëS âdmihistratiorik de dépàftetfient ou leurs diredthireâ adresseront, le 15 de Ghattuè mois, àU edihité chargé dë l'aiiénàtidn des dd-maines nationaux pendant la présente session dé l'Assemblée nâtidhatej ët; pàl* la suite, âtix commissaires qui leur seront déslgnéà par le'è législatures, Un état des eâtimàtlbttë qu'elles ail» ront fait faire, et tin état des VëhteS tilii auront été commencées ou consommées tiâhs le moiS . précédent, pour le tout être rëhdli ptibliC pâr là voie de l'impression*
« Art. 12» Lés àcquérëlil's fërbfit lèlfrs jpà^ê-mërits aux termes Convenus, &ôit fl'àûê la caiéëô dë l'extraordihairë, soit dans belleà dë diêtrltth qui Seront cbargêéà d'ëii bompter âu tèétetfetir de l extriàbrdinaire. »
, ïàppbrttèUr, propose l'ajournemehÉ de l'àrtiéle 14 qui était devë* nu le 13 par suite de là réunion fcti Un feëul den articles 4 et 7.
Gét ajournement est pronoticê-.
Les articles 15 efe 18 devenus là et 14 sôtit ensuite décrétés ainsi qu'il suit :
« Art. 13-. Les municipalités (jui Voudraiëht aCt[ùé-rir quelques parties dé domaines tiàtiohatix poti? des objets d'utilité publique, serbnt tendes dëSè pourvoir dans les formes prescrites nar le .décret dù 14 déëehabre 1789, pour, obtenir Pàùtôrisatibn dêbèssàlfè, êt Sërôht ëûsiiité cbhsidèreës comme 1 acquéreurs particuliefé.
« Art. 14. Les articles ci-annexés du décret du 14 mai et de l'instruction du 31 du même mois sur la vente de 400 millions de domaines nationaux, avec le changement des seules expressions nécessaires pour les adapter aux dispositions ci-dessus, seront censés foire partie du présent décret. »
, rapporteur. Messieurs, il me reste à vous donner lecture des articles du décret du 14 mai 1790, ^ur la vente de quatre cents millions de domaines nationaux relatés dans les articles que vous venez de décréter. Des changements d'expressions sont nécessaires pour mettre les deux décréts en harmonie et en concordance, et il en est œ même de l'instruction.
(L'Assemblée adopte les changements proposés. Elle arrête qu'il feront partie des décrets sur les ventes des domaines nationaux Aux particuliers).
Quelques-uns de vos décrets sont mal interprétés. Dans, le département des Ardennes, nul propriétaire né peut faire de regains, parce qu'on prétend qu'ils appartiennent indistinctement à tout le monile. Je vous propose de rendre le décret suivant : 7
«L'Assemblée, instruite que, par une fausse interprétation de ses décrets/ les citoyens du département des Ardennes ont/cru que tous les prés étaient soumis à la vaine pâture après l'enlèvement des premières herbes; rappelle qu'elle n'a rien prétendu innover aàx anciennes ordonnances à ce sujet, et que les propriétaires des prés entourés de fossés, ou qui, sans être clos, sont possédés à deux ou plusieurs herbes, cpnti-nueront à jouir du droit de récoltes des trois ou quatre herbes, comme par le passé ; le tout sans innover aux règles et usages des différentes provinces. »
La réclamation dont M. d'Ambly s'est fait l'organe n'est pas la seule qui se soit produite. Les abus que certaines communautés se permettent sur la vaine pâture ont besoin d'être arrêtés, et c'est pour ce motif que je demande à l'Assemblée de rendre le décret suivant} qui serait général à tout le royaume.
« L'Assemblée nationale, instruite que plusieurs personnes, par une fausse interprétation de ses décrets, prétendent que tous les prés indistinctement doivent être soumis à la vaine pâture immédiatement après l'enlèvement de la première herbe, déclare qu'elle n'a rien innové aux dispositions coutumieres, règlements et usages antérieurs, relatifs à la défense des prés ; en conséquence, décrète que tous propriétaires de prés, clos, ou qui, sans être clos, étaient ci-devant possédés à deux ou plusieurs herbes, continueront de jouir, conformément aux lois, règlements et usages observés dans chaque lieu, du droit de couper et récolter les secondes, troisièmes ou quatrièmes herbes, ainsi qu'ils ont fait par le passé: fait défense à toutes personnes de troubler Iesdits propriétaires de prés dans leur possession et jouissance, le tout sans rien innover aux usages des pays où la vaine pâture n'a pas lieu.
» Décrète, eu outre, que la. lecture du présent décret sera faite au prône dans toutes les paroisses. » (Adopté.)
L'ordre du jour est la suite de la discussion sur le projet de décret relatif au traitement du clergé actuel.
, rapporteur. Dans la séance du 24 juin, vous avez renvoyé à votre comité ecclésiastique un amendement de M. Camus à l'article 3 que vous avez décrété et les art. 4, 5 et 6. Je vais donner lecture des articles nouveaux que nous vous demandons de sanctionner.
(M. l'abbé Expilly, que ia faiblesse de son organe empêche d'être entendu, est remplacé dans sa fonction de rapporteur par M. Chasset, autre membre du comité ecclésiastique.)
lit les art. 4, 5, 6, 7 et 8, qui sont adoptés, ainsi qu'il suit, après de très courtes observations :
o Art. 4. Le traitement des vicaires actuels sera le même que celui fixé par le décret général sur la nouvelle organisation du clergé.
« Art. 5. Au moyen des traitemens fixés par les précédents articles tant en faveur des évêques que des curés et vicaires, la suppression du casuel, ainsi que des prestations de ce genre, qui se perçoivent sous le nom de mesure, par-feu, ménage, moissons, passion, ou sous telle autre dénomination, aura lieu à compter du premier janvier 1791; jusqu'à cette époque, ils continueront de le percevoir.
« Les droits attribués aux fabriques continueront d'être payés, même après ladite époque, suivant les tarifs et règlements.
« Art. 6. Les traitements qui viennent d'être déterminés pour les curés et vicaires auront lieu à, compter du premier janvier 1791.
« Art. 7. En ce qui concerne ia présente année, les curés auront, outre leur casuel, savoir : ceux dont le revenu excède 1,200 livres : 1° ladite somme de 1,200 liv,; 2° la moitié de l'excédent, pourvu que le tout n'aille pas à plus de 6,000 liv.
« A l'égard de ceux dont le revenu est inférieur à 1,200 livres, ladite somme leur sera payée, savoir, ce qu'ils recevaient comme par le passé, et le surplus sera compté dans les six premiers mois de 1791 par les receveurs des districts.
« Art. 8. Les vicaires des villes, outre leur casuel, jouiront de la somme accoutumée de leur être payée. Ceux des campagnes auront aussi, outre leur casuel, la somme de 700 liv. qui leur sera payée de la manière portée par l'article 7 ci-dessus. »
Un membre demande à présenter un article additionnel concernant les, fabriques et qui serait inséré après l'article 5 ci-dessus.
répond que le comité s'occupe d'un rapport tant sur les fabriques existantes que sur celles à établir.
L'article additionnel proposé est renvoyé au comité.
donne lecture d'un article 9 ainsi conçu :
« Dans les chapitres dont les statuts accordent aux jeunes chanoines de moindres émoluments qu'aux anciens, ou ne leur en accordent aucuns qu'après un certain temps, la masse du revenu du corps serait divisée en autant de parties qu'il y a d'individus, en observant les distinctions établies entre les dignitaires et les simples chanoines. Leurs traitements seront ensuite fixés et déterminés d'après les bases de l'article 8.
En adoptant cet article, vous dérogeriez à vos principes ; c'est d'après les
jouissances que vous avez établi la proportion des traitements. Il arrive souvent que les jeunes chanoines ont des bénéfices et sont plus riches que les anciens : ceux-ci doivent-ils supporter un partage par lequel ils seraient évidemment lésés ? Je demande que cet article soit rejeté, sauf au comité à présenter un autre moyen ; celui-ci est évidemment contraire à la justice.
Il serait juste de laisser aux chanoines actuels ce qu'ils ont, et aux jeunes chanoines l'expectative de succéder aux anciens. A l'égard de l'observation que plusieurs ont déjà des bénéfices, il n'y a rien de plus simple. On peut dire que si le chanoine qui succède a un autre traitement, il ne succédera qu'à la condition de se départir du premier.
réclame les mêmes dispositions en faveur des cbanoinesses nièces.
Il y aura un article particulier pour cet objet.
Le comité avait imaginé un autre article que celui qu'il vous a proposé ; voici comme il l'avait conçu : «Dans les chapitres dont les statuts admettent des chanoines expectants, ces derniers auront le traitement accordé aux chanoines en place, lorsque le temps où ils auraient pu l'obtenir sera arrivé. »
Le rapporteur n'a pas parfaitement saisi la question, puisqu'il ne s'agit, dans le nouvel article qu'il propose, que des chanoines expectants, et qu'on parle des chanoines dont les revenus sont inégaux. On pourrait leur accorder un traitement égal aux deux tiers du minimum; il serait de 666 liv. 13 s. 4 d.
Prendre en considération l'expec- i tative, ce serait ne pas faire une bonne loi fran- j çaise. Nous avons des lois qui défendent les pla- i ces de chanoines expectants. Quant à la proposi- j tion de M. de Delley, je ne crois pas qu'on puisse j l'adopter ; notre intentiou est de laisser à ceux j qui ont quelque chose, et non de donner à ceux qui n'ont rien.
, évêque de Clermont. Il est des chanoines connus sous le nom de chanoines coad-juteurs; ils font les mêmes fonctions que les chanoines : il y en a qui les exercent depuis j vingt ans; il me semble très juste d'assurer leur ! expectative.
présente une nouvelle rédaction. Elle j obtient la priorité sur l'article du comité et est décrétée en ces termes :
« Art. 9. Dans les chapitres où les revenus com- j muns sont inégalement répartis, de manière que j les prébendes augmentent à raison de l'ancien- j neté, ainsi que dans les chapitres où les revenus j communs sont partagés en prébendes, inégales, auxquelles on parvient successivement par option ou par ancienneté, le sort de chaque chanoine sera déterminé sur le pied de ce dont il jouit actu- j ellement ; mais lorsqu'un des anciens chanoines mourra, son traitement passera au plus ancien j des chanoines dont le traitement se trouvera infé- I rieur, et ainsi successivement, de sorte que le traitement qui était le moindre sera le seul qui cessera.
« La faculté de parvenir à un ^traitement plus
considérable n'aura lieu qu'en faveur des chanoines qui seront engagés dans les ordres sacrés. »
Les motions suivantes relatives : 1° aux coad-juteurs;2° aux prébendes préceptoriales pour l'éducation de la jeunesse, sont renvoyées au comité ecclésiastique.
, secrétaire, fait lecture d'une lettre datée deiSchelestadt, et écrite par M. Henri Berg, maire de cette ville. En voici la substance : « Le décret quô votre auguste Assemblée a rendu, le 10 de ce.mois, en ordonnant aux officiers municipaux de celte ville de se rendre à la barre de l'Assemblée nationale, a produit ici un très grand effet : des lettres qu'on a répandues annoncent que. nous serons condamnés au dernier supplice. Quoi qu'il en soi\, nous nous rendrons au décret des augustes législateurs, pour justifier entièrement notre conduite. JJous observons cependant que la plupart des officiers municipaux sont très vieux, et ont à veiller à leurs récoltes. Je me présenterai seul, si l'auguste Assemblée le permet, et je prouverai que nous sommes de bons citoyens. »
L'Assemblée décide qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur cette lettre.
La séance est levée à trois heures un quart.
Séance du
i La séance est ouverte à six heures du soir.
, secrétaire, fait la lecture des adresses, ainsi qu'il suit :
Adresse des électeurs de l'assemblée générale du département du Morbihan, en Bretagne, par laquelle, après avoir rendu l'hommage le plus éclatant au patriotisme éclairé de M. l'évêque de Vannes, ils demandent que le siège épiscopal de Vannes, chef-lieu de leur département, soit érigé en siège métropolitain pour les évêchés de Bretagne.
Adresses de félicitation, adhésion de dévouement de la communauté de Saint-Glar; elle demande un tribunal de justice, un état-major et un hôpital du canton ;
De la communauté de Pavilhac, au département du Gers ; elle supplie l'Assemblée de réduire sa dîme au même taux que celle du reste de l'JJrapire;
Des communautés de Pimonin, département du Jura; de Mesterieu, département de la Gironde, de Grives et de la Chapelle ;
Des citoyens ecclésiastiques et nobles du canton des Gastelmoron, département de la Gironde, et de deux curés, l'un maire et l'autre procureur de la commune de Gironde, qui désapprouvent fomellement la déclaration d'une partie de IAssemblée, et déclarent traîtres à la nation tous ceux qui ont signé ou signeront toute protestation contre un seul des décrets de l'Assemblée.
Adresses des gardes nationales des dix-sept municipalités du canton de Maurs, des villes de
De la municipalité de Saint-Germaio-d'Entre-vaUX, dépârtëmëdt dë l'ÀUièl*, tttll dëribrièè line coupe (le cent ëifitjùante-fiëiif grOs chênes, faite par lë ciirë de bëttë pârotàsë;
Dë la coihmilnë dë GàrtrëttëS; pièS Mëllin, qui së SoUrdet d'acquérir dës biëhs naiiohatix pour là somme dë 11,500 liVres;
Dë là coriimuhatité de Gârtigriy,jkil dépâfteifiënt dë la Sommé; qui, ihdépéhdambjeht dë ëa cëri-tribUtioh patriotique qui s'élèvë a là sommé dë 978 llvrë^ fait dbn du produit flës impositions sur lës bi-dëvailt privilégiés;
Dë la tfiilnicipalité de Gihrods eh Albhët, ët dë cëllë d'ÂUàuehj près Màrseillë, Mi font le même ddh patriotique ; lâ première fsut ufië sbumissiort de 400,000 livres pdlir acquérir/ des biens nationaux ; et là derniëte s'ëngagêl de faii-é l'abqui-sition dè tous les biens nationaux situés dans son territoire;
Dë là ,ville dë Mont-dë-Rfàrsan, qui s'élève avec force contre la déclaration d'une partie de l'Assemblée;
Des officiers municipaux et habitants de la paroisse de Lasselle, département d'Indre-et-Loire; ils supplient avec instanee l'Assemblée d'améliorer le sort dès ciirës ;
De la ^arde nationale de Nancy, qui a arrêté de porter, pendant trois jours, le dëiiil de Benjamin Franklin,;
Dès assemblées primaires dès cantons dé Boùr-goin, département de l'Isère; de Montaiguet, département dë l'Alliërj d'Ardëntëj département de l'Indre: de la ville, de Mirande, et de la pre-mièrë sëction dti cahtën dë Royë; département de la Somme;
DëS élebtéiirs du dlstrifet fie Saint-^Brieuc ; de celui dë Salihs ët dés administrateurs du district de Ghàtillëh-lëz-Dombëâ ;
Dës assemblées électorales du département du Lot-et-Garonhe et ttU département dès HâUtes-Pyrénéesj
Tëtites ces assemblées consâcrëht lës premiers moments de leur existence à présenter à l'Assehl-bléé nationalë l'hommage d'hne adhésion absolue à ses décrets, ët d'un dévouement sans bdfnes pour leur exécutiëh ; ëlles la supplient dë poursuivre jusqu'à sa perfection lë grand fcéUvre de la Constitution.
Adrëssë des bUréS et des vicaires de l'archi-prêtré dë Nantûâ, district du département de l'Ain; qui s'empressent d'assurer l'Assemblée nationalë dë leiir soumission respectueuse à toUs ses décréts, imprëlivaht tbute protëstdtion ou déclaration cOntrairé; ils déclarent qu'ils Cbntinueront de prêcher publiqhément cëttë soumission à léurs paroissiens autant par leurs paroles que par leur exemple, ët qu'ils né Cesseront d'adresser au Ciël de ferventes pHèrëS poUr qu'il continue dë donner au Corps législatif le ëouragé et les lumières dont il a besoin pont1 cëilduirë à sa përféCtiëtt lë grand ouvrage de la GonstitutiOb au^Uel il a travaillé jusqu'à prësënt âvëc tant de sagesse; dé gloire et de succès;
Adrësse de là cbihmunaUté dë Sâint-Etiënne-d'Arribelabo.urt, qui.déclare qu'elle a en horreur le schisme des membres de la minorité de i'Assemblée; ainsi ^uë lé fati&tiamë dë quëlqfctèë ha-
' bitants dë NîmeSi ellë fait don à la nation de^ impositions dès Six dërnierS mois dë 1789, dès ci-devâfit privilégiés, et fait soumission d'acquérir dës biens natioriaux situés tlâns Ion têr^itbif'é; pour la somrhe dé 200,000 livres; ellë ahnoricë fyielës soldats du régiment d'Angdumois, Voulant tirer vèngeancë de l'insulte que leurs Catharàdës ont reçue aux envirdns dë BaVodrië tièâ ëiiitjlbyës aux fermes, ont abattu les bureaux et dispersé les employés tant à Bàyonne qu'au Sâint-BSprit; que lâ populace s'étant jointe à eux, il n'y a plus dans ëes cantons ni corps de garde, ni commis; ni livres de régië.
Adrësse d'adhésion et dévouement dé la municipalité de Ris; elle dénonce le refus du curé de la paroisse de lire au prône les décrets de l'Assemblée nationale;
De la commune d'Amboise et de celle de Saint-Rambert, qui. s'élève avec forcë.contre la déclaration d'une partie de l'Assemblée ;
Des commissaires du roi au département des Pyrënéès-Ôriëhtales, qui annoncent qu'ils ont heureusement terminé les fonctions dont ils avaient été honorés ;
DU èlub dès amië de lâ Cohstittitibh, iofmë à Gbnimërcy; départeitieht de ld Mèiisé, et de là cëiiimunauté duPdrt-Saint-Pèrë;
De la municipalité de Ricëys, qui âhhbncë que Sa contribution jjâtriotiquë se trouve, mbiiter: par les soins et l'ëxemple de son ëdfcé; à là sbmmë de 16,265 livres;
Du président de l'assemblée électorale du département de lâ Iîaute-Mârnë; c}bi âhriBhfce tjue lës écoliers du Collège de Ghàumont ën BasSigriy ont prêté le éërmënt civique efitre lés mains dë l'assemblée, ët otit fait jë doh patriotiqUë de la Sorhme dé 16 livrësl2 SÔlS;
Dès, marchandé drafiierë, tbiliërs ët (iuiilcâil-Jers dë la fille d'HyërëS, qui foht ôffraMë à là patrie de six années d'arrérages des gages des offices d'ififcpectèurs et contrôleurs créës dânk lëur corps ;
Des officiërs municipaux d'Orange ët de GOUr-thézoh, qui rehdént compte à l'Asséinblée de là part qu'ils ont eue aiix événements dë la ^illë d^A-Vignon, dës 11, 12 ët 13 du présent ihois;
Des officiërs muriicipàux des communes de la première division du canton de Jaillac, qui annoncent que tout s'est passé dans les assemblées priniàirës de cô càntën avec lin ordbë ët une union admirablës ;
Dés officiers ihuhieipàùx de la Villë dé Blan-zaë; qui font lé plus grahd éloge de leiir pasteut1, ël lë rëcommaildent à la biënVeillànce dë i'Às-i semblée ;
Des officiers municipaux de ville de Montau-bân, qui rendent compté dë leurs démarchés et ftëfe mesurés qui les dirigent sàds céssë vëhs lé retour parfait de l'ordre, l'afiëhnissemeiit de là paix et la tranquillité de leurs bOncito^ens ; ils joignéht à lëur adresse une tiéfciâration ët profession t)àtriotiquê deâ habitants dè cette ville, dàhâ laquelle on lit : » qu'ils gémissent tous égaie lementsUr les malheureuses dissensions qui ont « troublé la paix de leUr cité, ët que pour rendre «solide lé fcalihe qui vient d'y être rétabli, ils « fe'appUiënt, dès ce moment, sur lès lois consti-« tUtionëlles dont la siniplè ët exacte observance « ramène au même but de la félicité tiitblique, ët « rélinit darts leé mêmes sentiments toUS les j « enfants de la patriè » ;
Des gârdës nationales des villeé de Sàint-Jeàtt-i de-Luz, de Gondom et de Seissan, qui ont itéhëti-1 Vëlë àvëc transport lë sërmëht civique •
Des communautés dé ChàufibUF, dépârtëment de Versailles, de Barbevllte près Bayeux, ët dë la ville de Montlhéry, qui.font le don patriotique du produit dés impositions sur les ci-devant privilégiés : la ville, de Montlhéry offre, en outre, la somme de 8,610 liv. pour sa contribution patriotique; « , .
De ld ville ,de Vjllefranche en Rouergue* de celle de Gormieyj et de ia communauté de Mon-treuil ; , ,
Des citoyens actifs de la commune de Paillies, qui se plaignent d'avoir été calomniés auprès de rAssëihblëé lorsqu'bn lëS a accUsés d'àVoir troublé l'ordre public; ité protestent qu'ils tie pér-dront jamais l'occasion de faire éclater leur zèle ët Ifeur fiitrioiisliië ;
Des ofliciërà fiidhicipaux dë \A ville dë Gharlë-mont et des Deux-Givets, contenant le procès-verbal de fédéj-àtibti ëhtrë les téginiëhts ué Dauphin et uë tlhdrtrës itifàntërië; ëti garnison à Giyet, les gardes nationales de Gharïemont, de Glvét-Sàirit-Hilkil'e, dë GiVét-ftbtt-ë-Dérilë ëè du village de Ghooz, faite sur la bampagrtë dë Givët-Saiot-Hilaire, le 3 du présent mois,f avec la plus grahdë solennité; cëttë adresse bohHëht l'adhésion la plus complète aux décrets de l'Assemblée hatidnale ëâriètibnhés pàr lerbi;t ët fàit connaître qu'uh grand nothbré dë patriëlës bRbançdhs venus dë lëur camp sittié sur la ftve gauche de là Meusë, âiinë dëmi-îiëUe 8ous GiVet, brit assisté à cette àugUsté céi-émdnie ;
Des gardés nationales dë dix-huit communautés limitrciphèS du dëjJartetaënt dé la Veddëèj fédérés lé 30 mai dernier, ail lieu de Fbugéfàyy près Saint-Fulgent ;
Des officiers thunici|)âùx ët habitants de Bélvës en Périgord, qui déclarent àVoir appris âVec aiitàtifc de surfJriïië quë d'ihdighation l'àcfcdsàlibn fdrmée contre la noblesse et les curés du, Périgord, d'aVoir excité l1 insurrection dëâ pàysànâ dë la prpvince ils rëhdeht lës témoignages lès plus eclatànls ou patHoliSlUè de ce3 fcitoyetié ;
Des inbnici|Jalités de plusieurs villes et Commdnàdtës, qui se soUmëttënt d'acquérir des biens nationaux ; savoir :
Là iliuhiciijàlité de Viëllëbridude pbtif 14,000 liVrës
Gëliè dë Nëhilly-ëàint-ltybnt, flotir 200,000 livreS ; J
Gellë dë Vaiily-stir-Àisrië, pdilr 1,000,000 de livrés ;
.Gëlleri dë Sàlheùc, de Mârsangy, dë Rbquë-Brhs-sanrie ët aë Barcelonnette, tous les biëns situés dans ledr tëlritolrë, à tjdelclUé sdmmë qu'ils puissent se fJdKtër ;
l)es bnànoitieS de l'église cdllëgiale et paroissiale dë Saiht-Paùl-de-Lyôn, des chrës et vicaif-ëâ de l'ahchiprëtré dë Fèufrs-en-Foréà, et de l'archi-prèirë dë GtiaMiëu, diocèse ,tlë Mâëdh, qùi to'ûs adherëtit àVec unë .àdmiratjdn rëspëctuetise à tous les Séferëts dë l'A§sëMbiéè tiàtiûnàlë. et notamment â cedi cohcerîiàrit lëS biens ci-devànt ecblMàStictileS,, ët là ëbnstït|;tidi} dû blérgé.; lës qiirés et vicairëS s'ëngâgërit d'ëmployër toute i'inflùence de lëur ministère pour ëh àssuret* rexëciitiôh.
Lettré dë M. RiVerieux dë Jarlà^, colonel dd régimënt. aë Mêlé, ârtillërie, ëh garnisdn à Bësan-çcirt, cbhtëridnt uéiix discours dans leSquèls sdrit cbtisigbés lës Sèdtimëhts Civiques et militaire^ qui anirtjënt également lës dfficiers, bas-officiers èt st?ldât8 dë Cë régiment.
Adfésses dëâ â§seinbléejl drihiàirë^ dëg clihtbfiS dë là Hafê, ail Pttité, Plëtdt, FEéÉtyi dë tifildÉF
JÉMEfi'i'ÂlfcfeS. [26 jttlH 179fc] 475
tiëir, départëtilênt dé l'Ortie ; dëfe Lëëhêi; dêpâr1 téniënt de làDbrdogrte; d'Bvrdfi; dépàftémëht dë la Màyënhé;' dë la Ybdltë-Chillâb: distriët dë Bribunë ët d'BpiHetiii; dëpârtémérit. ail Gfiër;
Dés aSsëmbléés électorales dùp uistlrict dë la FlèbHë, du district dë.Diè, dë Ceux d'AricenlS; de Paihtibœuf, dë Làfcnbàlie; d'EstàmpeSj dë Fellëtin; dé Chdlët; d'Àtibéhàs. de Bar^lë-fldc ët fctëâ âdrfii-niStl-atëiirs dd district d'Aùtdfl;
Dès assëmblées électorales dii départëtiiëht dë RhÔnë-et-Lbirè, du dé^àftëîiiéht a'ïndj'ë-ët-Lbire; du aë^artéiiieilt dë la VieUné èt du dépar-tementde la Meuse.
Tbutes cés assemblées préâëfltëht à l'ASsertibléë l'hommage d'unë adhésion absolue àdx dëcrëts de l'Assembléei nationale, et d'dn dêvouemèht sans borne pbbr leur entière ëxécutioh ; lès électeurs du distHctlde Gholet demandent l'établissement d'uh tribunal dé district, d'un tribunal dë commerce} ët d'upe maisdn d'éducatioh dans cette villë.
Adresse des dragons durégimënt de Lorraine) en garnison à TaftSCbo:
Délibératidtl du tonseil général de lâ commune dë la villë de Bouri? en Brë^sé, département dë l'Ain 5 ce cohsëil anuoticé qu'il saisit toujours toutes lës occasions dë prouVer à l'Assemblée tiâtionàle sa reconnaissance, Son dévouement et son entièrè adhésioft à ses sages décrets ; il improuve la protestation ou déclaration dëqttëlquës députés à l'Assemblée nationale contre le décret du 13 avril dernier ; il ajoute que c'est av,ec la plus grande douleur qu'il a vu que quelques députés de sa province se sont permis de .signer cet écrit; enfin, il,donne pouvoir aux députés du département de l'Ain de présenter .à l'Assemblée nationale la soumission qu'il fait d'acheter des biens nationaux jusqu'à ia concurrence de 2 à 3 millions.
Autre délibération contenant procès-verbal dii directoire du district de Gfiarlevillei par lequel il est attesté que le chapitre de l'église collégiale de Saiht-Pierre-de-Mezières lui a envoyé une Réputation qui a manifesté, au nom, de ce chapitre, son respëct pour les lois nationales,, son dévouement à tous les décrets rendus par i'Às-semblée nationale, qu'il regarde comme des monuments de sagesse et dë patriotisme. La députation a demandé acte au district, de la déclamation qu'elle faisait au nom de son chapitre^ ët le district lui en a donné acte:
Adresse de la paroisse d'Everly, district de Provins, département de Seine-et-Marne ; elle renferme la soumission d'aeheter, des biens nationaux pour line sommé aë 32,000 livrés.
Soumission delà . municipalité d'Anziii.près Valenciërines,. départément du Nord^ district et canton dè Valencieunes, d'acheter les biëiis nationaux désignés dans sa soumission.
Une àepùtaiiôn du départèmehi de l Yonne est admise à la barre.
L'orateur dê ia députation prononce ie discours suivant :
MëSsiëurS;
En ëfitràbt tlahs cë sénat àiigiistë pour vôitë y offrir rHbmrtiagë aé tio§ ^ëSfièctS, nbuë Sbmines moins trpiiblés par la présence des représentants de là nàtidti t|ùe iodche^ _dë là,vertu dëâ sâ§es 4ui rhâmtëdl. Gé èràtid glRêçtâéiè, âudjlël fioiis avtiïtë i'hdflhëllf d'êirë adthlS, est ëricb'fë blus cher à la pensée qu'imposant aux yeux.. Tout f porte dans l'àme une idaprëâsioit ae gbàiiaèilr (fui
annonce les législateurs qu'on y vient révérer ; c'est dans ce temple que se préparent les destinées de la France ; votre voix s'y fait entendre, et le monarque que nous chérissons s'y est uni à vous, Messieurs, pour former ces salutaires décrets que la renommée publie pour l'instruction de l'Univers. Vous y avez rappelé l'homme à sa première origine ; et l'ordre des conditious, rétabli sur les lois de la nature, y fait goûter le bonheur du premier âge. Le vrai mérite ne sera plus éclipsé par l'homme puissant; vous avez brisé l'idole de la faveur ; et les vertus seules sont les degrés qui élèvent à l'estime publique ; ce sont là, Messieurs, dans l'ordre social, des prodiges qui commandent l'admiration.
Mais rendre à l'homme ses droits primitifs, le faire jouir de sa liberté, soutenir l'Empire penchant à sa ruine, et s'occuper Continuellement de ses besoins journaliers, défruire tous les abus, maintenir la paix au sein de la France; porter sur les frontières des regards vigilants ; repousser avec fermeté la guerre et ses fléaux dans ces contrées où règne encore la volonté sans lois ; travailler constamment au rétablissement du crédit, qui renaîtra bientôt avec le regret d'avoir disparu : ce sont, Messieurs, de ces bienfaits précieux à l'humanité, qu'on ne peut recevoir sans émotion et sans être pénétré de la plus vive reconnaissance. Daignez agréer, Messieurs, l'hommage de la nôtre.
Tous les administrateurs du département de l'Yonne, que nous avons l'avantage de représenter, éprouvent les mêmes sentiments. Leur premier devoir a été de vous en adresser l'expression, et nous sommes venus vous en renouveler l'assurance la plus sincère.
Ils attendent avec impatience que vous leur donniez des règles de conduite dans l'application qu'ils ont à faire des principes de votre sagesse et de votre justice: j'ai dit avec impatience, parce que c'est alors que les peuples jouiront véritablement du fruit de vos travaux, pour l'établissement de cette belle et heureuse Constitution, que toutes les nations étonnées admirent, et qui nous conduira à l'immortalité.
répond ;
Le département de l'Yonne, l'un des premiers organisés, a l'avantage d'avoir fait luire aux yeux des peuples l'aurore consolatrice de ces administrations destinées à adoucir leurs maux, et à effacer jusqu'aux cicatrices douloureuses des chaînes dont ils étaient accablés.
Déjà l'Assemblée nationale a distingué honorablement l'hommage de vos concitoyens et l'adresse que lui ont envoyée vos électeurs.
Exempt de toute espèce de désordres, votre département a eu le bonheur de conserver la tranquillité la plus désirable, et la liberté est née sans efforts dans vos heureuses contrées.
Versez-y. Messieurs, de nouveaux bienfaits par la sagesse, par la popularité, par la fraternité de votre administration;
L'Assemblée nationale a jeté par ses travaux les germes du bonheur public : elle vous les confie ; vos mains sauront les rendre féconds.
Veuillez, Messieurs, assister à sa séance.
demande l'impression et l'insertion au procès-verbal du discours de la députation de l'Yonne et de la réponse du président.
Cette motion est adoptée.
J'ai reçu de M. de Mirabeau le jeune, la lettre suivante :
« Monsieur le Président,
« Il y a 72 heures que j'ai reçu l'ordre de me rendre à l'Assemblée et j'accours de 200 lieues. J'espère lui prouver que je n'ai pas cessé d'être digne de siéger dans son sein. Si elle veut m'entend re ce soir, je suis prêt à paraître. Si elle veut attendre à demain, je pourrai réparer, en attendant, 13 nuits d'insomnie.
« J'ai l'honneur d'être, etc. »
L'Assemblée décide que M. de Mirabeau le jeune sera entendu demain.
annonce que la députation de la ville d!Avignon demande à être admise.
Quelques membres demandent qu'elle soit admise dans l'Assemblée et non à la barre.
D'autre membres estiment qu'elle doit paraître à la barre seulement.
présente les observations qui suivent:
Si vous recevez les députés à la barre vous les regarderez comme députés nationaux. C'est en raisonnant dans le système de ceux qui s'y opposent que je crois que vous devez mettre de la différence entre les députés de la nation et les députés extraordinaires. C'est un état souverain qui vous envoie des ambassadeurs. Ce n'est pas d'après le plus ou le moins d'étendue de la ville d'Avignon que vous devez fixer l'honneur que vous ferez à ses députés. Je demande qu'ils soient admis dans l'Assemblée.
(Cette motion est mise aux voix et adoptée.)
donne ensuite lecture de la réponse qu'il se propose de faire aux députés. Les termes en sont approuvés par l'Assemblée.
Les députés sont introduits dans la salle.
L'un d eux prononce un discours dont voici la substance :
« Députés par un peuple libre, indépendant et souverain, ce n'est pas en vain que nous venons jurer une fidélité inviolable à la nation française... Nous ne vous rappellerons pas ici en I détail toutes les opérations glorieuses qui ont assuré l'immortalité de vos travaux : assez d'orateurs vous ont déjà présenté le lableau de la prospérité de la nation française. Nous ne vous offrirons point des conjectures vagues : c'est par des faits que nous parlons ; et si ce langage n'est pas le plus pompeux, il est au moins le plus sincère... En se réunissant à la nation française, le peuple d'Avignon a sans doute prouvé son admiration pour elle. Oui, nous osons le prédire, et peut-être le temps n'en est pas éloigné, le peuple français donnera des lois à l'univers entier, et toutes les nations viendront se réunir à lui, pour ne plus faire de tous les hommes que des amis et des frères. Le peuple avignonnais a voulu être le premier. Placé au milieu de la France, ayant les mêmes mœurs, le même langage, nous avons voulu avoir les mêmes lois... Il est temps, avons-nous dit, que nous cessions de porter la peine du crime que nous n'avons pas commis... A peine avez-vous déclaré que tous les hommes sont libres, que nous avons voulu l'être. Nos municipalités se sont organisées d'après les lois établies par vos décrets, et nous étions déjà constitués lorsque
des brefs incendiaires et tyranniques, lancés par le Vatican, sont venus frapper d'anathème la Constitution française... (L'orateur fait le tableau des dispositions préparées sourdement à Avignon pour tenter une contre-révolution en France.)
Des hommes armés parurent tout à coup au milieu de la ville : bientôt, pressés de toutes parts, ils abandonnèrent le champ de bataille. Le sang pur des citoyens patriotes fut confondu avec celui des assassins qu'on avait suscités contre nous: — Nos alliés volèrent enfin à notre secours ; et s'ils n'ont pu nous garantir entièrement des coups qui nous étaient portés, ils sont du moins parvenus à empêcher la punition prématurée de quelques coupables, et à nous rendre la paix. Le lendemain de ces scènes de satfg et de carnage, les citoyens actifs de tous les districts de la ville d'Avignon s'assemblèrent légalement. C'est dans cette assemblée que le peuple, considérant qu'il ne pouvait être heureux, et libre que par la Constitution française, déclara qu'il se réunissait à la France, qu'il supprimait les armes du pape, qu'il y substituait celles du roi de France, et qu'il députait vers lui pour lui témoigner le respect et la fidélité que lui vouaient les Avignonnais. Vous connaissez nos droits : les délibérations de tout le peuple avignonnais. Vous connaissez nos motifs : notre roi veut être despote, et nous ne voulons plus être esclaves. La France est libre; nous ne pouvons le devenir que par elle, et nous nous jetons dans ses bras. (Des applaudissements réitérés interrompent l'orateur.) Vous accepterez sans doute un peuple qui vous appartenait autrefois, un peuple enfin qui a versé son sang pour le maintien de vos décrets. — Nous remettons sur le bureau les délibérations de la ville et de l'Etat d'Avignon. »
L'Assemblée nationale prendra en très grande considération l'objet de votre mission. Il est glorieux pour elle d'avoir inspiré aux citoyens d'Avignon le vœu que vous venez d'exprimer. Quel que soit le résultat de la délibération, la nation française sera toujours flattée de votre affection et de votre confiance.
Une députation de l'administration du département ae Seine-et-Oise, dont le chef-lieu est à Versailles, est introduite à la barre. Elle présente des témoignages d'adhésion, de respect et d'admiration pour toutes les opérations de l'Assemblée nationale; elle blâme avec chaleur toutes les tentatives des ennemis du bien public. « Si nous n'étions persuadés, dit l'orateur, que le temps les amènera au repentir, nous les dévouerions à l'exécration et à 1 infamie, comme nous y dévouons d'avance tous ceux qui, par leurs discours ou par leurs écrits, ont cherché à égarer les peuples... »
L'orateur est interrompu par les agitations et les cris de la partie droite. — Au milieu de ce tumulte et des applaudissements de la partie gauche, on n'entend que ces mots prononcés par M. de Foucault : « Retournez à votre département 1 »
monte à la tribune. — Une grande partie de l'Assemblée manifeste le vœu de ne pas l'entendre— Les membres du côté droit quittent leurs sièges, se répandent dans la salle, s'agitent et s'écrient.
se couvre. — La partie gauche garde subitement le plus grand silence. — Le
désordre continue dans la partie droite. — Les membres qui s'y trouvent placés crient à l'indécence et se couvrent à leur tour. — Peu à peu le désordre cesse : la partie droite devient silencieuse.
se découvre.
Le tumulte et les murmures auxquels viennentde se livrer plusieurs membres ont été si grands, si affligeants, que j'ai cru devoir suspendre le cours des délibérations de l'Assemblée. le la supplie, au nom de la décence, au nom de sa propre dignité et du bien public, de rentrer dans l'ordre. Je n'ai point interrompu l'orateur de la députation, parce qu'il me semble que si les expressions d'un discours paraissent dignes de reproches, les plaintes des membres de l'Assemblé^ ne doivent être présentées qu'après le discours.....i (Il s'élève beaucoup de murmures dans la partie, droite.) Un grand tumulte vient d'interrompre Vntre président; que l'Assemblée le juge elle-même. M. Malouet demande la parole. Je prie l'Assemblée de prononcer sur cette demande.
L'Assemblée décide que M. Malouet ne sera point entendu (Voy. sa motion annexée à la séance).
L'orateur de la députation continue; il demande les instructions qui sont nécessaires pour l'exécution complète des décrets.
L'Assemblée nationale est sensible à l'expression de votre patriotisme...
Plusieurs voix du côté droit : Gela n'est pas vrail
L'Assemblée nationale est sensible à l'expression d« votre patriotisme... (La partie gauche applaudit à plusieurs reprises.) Elle regarde les assemblées de département comme le plus ferme appui de la Constitution : elle s'occupe en ce moment de l'instruction que vous désirez. Votre zèle est un sûr garant du succès avec lequel vous allez parcourir la carrière qui s'ouvre devaut vous.
L'Assemblée ordonne l'impression de l'adresse du département de Seine-et-Oise et de la réponse du président.
En voici le texte complet :
Adresse du département de Seine-et-Oise (1).
Messieurs, l'assemblée administrative du département de la Seine-et-Oise n'a pas été plutôt organisée, que le premier vœu qu'elle a formé a été celui de vous offrir ses hommages, de vous assurer de son zèle et de son adhésion respectueuse à tous vos décrets.
C'est à regret, Messieurs, qu'elle s'est vue contrainte de différer jusqu'à ce jour un si juste tribut de ses sentiments.
Oui, Messieurs, telle est notre vénération pour nos législateurs et pour les oracles sacrés
qui sortent de ce temple de la patrie, que chacun de nous n'a pu voir qu'avec un sentiment
d'indignation quelques personnes égarés par le fanatisme oser faire entendre des réclamations
et publier des protestations séditieuses contre des lois -qui font le bonheur de la France.
Si nous
Déjà pour Jes exécuter nous avons ouvert la carrière dp"'nos travaux, de ces travaux qui doivent faire refleurir nos ' campagnes qu'avaient desséchées le despotisme,' et la tyrânnie des capitaineries sous laquelle notre département gêïnissàit depuis" si longtemps. Mais pour pénétrer plus avant dans Cette carrière, pour lâ parcourir dfuri pas ferme et assuré^ nous vous Supplions, Messieurs, dé voqloir bien 'communiquer au p|us tôf les instruptions" qui doivent diriger rassemblée administaative dans ses opérations.
"L'àmoùrdu bien public doqt elle est animée» le désir ardent qu'elle a de propager et d'affermir la Constitution, lui font attepdre avec impatience lè moment où elle pourra fournir dans toute son étendue la carrière que vous devez lui tracer, et où elle pourj^ prouver à l'Assemblée nationale et à to'uté la France, le patriotisme qui enflamme le cœur de tous les administrateurs.
Réponse de M. le Président.
L'AsseqibJêe nationale est §eq^ible aqx expressions dé vp|re patriotisme.
Elle ' regarde lés assemblées de département pqmqje les plps fprpjes appuis de 1$ Constitution.
Elle s'occupe de vous préparer les instructions néce^ifeg pour yps travaux, et e||e appl^udjt à 1,4 jugte impatience que'vous iuTîëîPQign§?.
Yfluç pesire? de ?qîr piîYiiF prfiiflptefpeîif der vaqt VOUS la carrière cirque à laquelle vous êtes.ehypyés-
Votre zèle pst un sftr garant du succès avec lequel vpus saurez 1@, papcqurir.
L'Assemblée nationale vous èngage d'assister à sa séance.
Une députation de la basoche éfe fîari& est introduite à la barré. L'orateur de la députatipp prononce le discours suiya°t (1):
Messieurs,
Défendre la patrie, obéir aux lois que vous lui faites, tels ont été et seront toujours nos devoirs les plus chers et les plus sacrés.
$ous les drapeaux de la basoche nous avons fail tous nos efforts pour servir la cause commune ; gi npus y spmmes parvenus, potre propre satisfaction suffit à notre récompense.
I^ais, Messieurs, lorsque vos sages décrets rappellent tous lès ftpipqiés à l'union pt à cette doqpe fraternité, qù| peuvent seules faire le bonheur 4es nations, nous ne pouypns plus marcher sous lés enseignés particulières, if faut, ppur ci? inenter le RftPte sopial, pour ponserYer le fpu du patripti^e, abandonner toutes ces anciennes înstilptipps du régime féodal, il faut se réunir au? draRèswx de Ja patrie, ne se Parer que des copieurs qu'èlie a adoptées, et ewfip ne faire qu'un peuple île frères et cl'amis.
C'ést par 1 acpor4 4e YPS principes avec la rai-sop, Messieurs, que yous avez décrété la
réunion
Déjà ils ont rèfl^S à leurs fp^npç de la g$rde nationale, les arènes meurtrières qu'ils avaient conquises en assaillant les murs $u despotisme.
Déjà ils qnt déposé daqs lé temple uè l'Eternel et près £e jPhifippe-le-Éel, les arapeap?:"qu'i|s tenaient' de flpq institution.
Énljo, ppur dërpier "acfe (le lejjr pornoratjpq, ils Vi'enqeq|, fftqs ÇÇ Sénat aHgystej fetpojgnef leiir puissance à la M et Jpur§ fggpegfà dignes représentais de 1$ nation ; ilg sjennent les assurer de leur cépuipty 3t)X bataillons de |à capitale ; et (me, si legr ancien uqifQnpe leur fii( précieux, celui dopt ils sont reyètus }p leur sera epporç davantage, puisqu'il est pejpi de natioq, et qp'i| |èqr rappellera saqs cesse' l'esprit et' }a sagesse qe votre décret.
jes çlrcipe^ux de ! patrie, qy|}lmn[ toutes ces chimériques distinctions, |ps pindeyant yor loptairgs de ba'spcne n'aprônf glug'd'autre tâci^e k remplir que d'ob$j*r à yp^j ipis1 ét dg }es l'aire r'espèp.ter, èt, sous ]ep pp de leur général, de mpriter |'am|tié des bons cj}'pyen§ pt des bravés militaires de la garde nqiioq^e, ^u^qg'eîs ils onf le Jjonlieur d'être réunis.
répond : Messieurs,
Le patriotisme était dans vos cœurs, et ¥0us venez encore d'adopter les couleurs que le patriotisme semble affectionner davantage.
Vous avez voulu qu'aucun signe extérieur ne pût vous distinguer de ces gardes citoyennes, avec lesquelles un sentiment commun vous confond par une heureuse alliance.
Concourez avec elles à la sûreté de tous, à la paix publique ; vous serez par là les appuis de la Constitution.
Placé au milieu de vous,Messieurs, dqnsl?exeKr cice de mes anciennes fonctions, je m?e§time heureux d'être auprès dp l'Assemblée nationale le garant de vos sentiments, et de pouvoir lui dire avec quel zèle et quels transports civiques vos cœurs s'indignaient contre les Uerniers coups du despôtjsme, et vos bràs mêmes s'armaient pour eq repousser les efforts.
Divers membres demandent l'impression du discours de la basoche ét de la réponse de M. le Président.
Gette impression est ordonnée.
Trois députatians sont introduites à la harxe : Celle du régiment fie Touraine infanterie, actuellement en garnison dans la ville de Perpignan; celle de la municipalité de Perpignan; celle des gardes nationales de la même ville.
Le sieur Aboul, député du régiment de Touraine présente un exposé justificatif de là conduite du régiment depuis le 19 mai jusqu'au 11 juin 1790. Cet exposé est ainsi conçu (1) :
Messieurs, '
La nation n'est que trop informée des Roubles qui agitent lé régimént de Touraine ; nous
crovOns'dé hotre devoir dé lui âdresSer' nos griefs et notre justification. Les faits seroùt
êx-
Faits.
L^ fraternité et l'union ont toujours régné entre le régiment de Touraipe ét les volontaires dë Perpigp^n ; et nous nous empressons de leur rendre la justice, qulls n'ont jamais évité l'occasion de nous en dqpqer les témoignages les plus sincères.
Lp 19 mai, quelques grenadiers et quelques bourgeoisie fencontrept, se réqpispeqt et rentrent gaiement et s^ns tumulte, précédés d'un tambour qu'ils avaient fait appeler.
. Cet ^cçord, qui, sans contredit, rpcpplit le vqbu de la pàtion, pduvaifril désobliger personne t Gépèndant trois officiers (les sieurs dp fylontalem-bert, la Ppyrouze, et comte fl'Urrej prétendent s'opposer â cette réunion, dont les milicés ftrçnr çaises ont déjà donné tant jl'exepqple^ ; et sans egftfg pqwr les citqyepsqui npus accompagnaient, ils1 s'jécriènt : Vous pou? déshonorez/— mus nous croyons honorés. Voilà notre réponse- Ils s'épbaqfr fent, ils joignent les termes )e's plus inspltanis aux gestes les plus violents ; ils s'arment, gt coqtre qui? ppptre des citoyens qu'ils auraient dû défendre, et ponfre djes soldats iqu| les avaient fen4uSf }ÏQUS lçùjr représentons ^pdérpment que noys n'avons p$s mérité de fpls excès : fis insistent. Malgré la proqaesse faite aux bourgeois, le tambour ëst mis en prison. Le nommé Maréchal, adjqdant, se chargé de |'expcuiion de leurs ordres.
Ce dernier, lorsque nous gémissipps spus un jpug de fer, s'était acquis, par de longues vexations, l'exécration de tout le corps : depuis longtemps ulcérés, nous le déclarons, unanimement, indigne d'occuper une place dont il avait si longtemps abusé. '
Pénétrés du même esprit de justice, nous portons nos regards sur un homme connu par de longs services, qui sut toujours concilier ses devoirs et l'amour du soldat. Notre choix est âgrëé, ét }e sieur Rochefort est reçfi ^ la tête du régiment par le sieur d'Iversay, commandant.
Il nous restait un ftu'tre devoir à rerriplir. Trois officiers s'étaient armés contre nous ; mais nous n'étions poin t accoutumés à la haine de nos chefs; et quels que fussent leurs torts, nous les avions oubliés- Nous leur offrons la réconciliation la plus sincère. Ils nous répondent pncore une fois l'épéè à la main : mais respectant en eux Jp parac-tère qui lès environne, nous pops retirqns. Après de tels pxcès, pouvaient-ils vivre parmi nous? Ils partent d'eu^-ni^mes, et se sëparepf 4'jjn corps qu'ils avaiént deux fois outragé.
Jusqu'au 22 mai, tout se réduisit à quelques fêtes.'Le service n'en souffrit point, et nqiis affectâmes de remplir nos devoirs plus scrupuleusement que jamïais.
Tout est dans l'ordre jusqu'au 3 juin. Le sjeur de Mirabeau arrive. Tput changé ge lace. II mande les bas-officiers ; if les accable des reproches les plus injustes^ Vous êtes 60, leur dit-jl, et vous n avez pu résister au régiment ! Moi seul j'ai repoussé 700 hommes à Paris. Etait-il questiqj} 4e résistance de la part desbas-qfficiers ? Ils &'ë£àjent joints à nous.
Le lendemain, nous sommes commandés pour prendre Jes arqqeg en gpanjie ténue. Gontre-orfjrp.
Quelque? grenadiéfs ét ^efjx soldats de chaque compagnie goiif députés au^fès de jjg. de Mjrabeap>
Ils |'inyit§nt respectueusement à se rendre au qqartier^1 pour quelques ' repr|5septatjqp§ qu'ils avaient a lui faire. —r Despèndçq, fit je vç,us suis. Voilà sa féponse. Il qpscénd jusquà porté sans chapeau, sans veste, muni cçpepfjflpt de son êpée et accompagné âe six qfhciefs. et là, il s'écrie d'une voix effrayante : De par le fcit, soldats, retirez-vous, ou je vous déclare rebelles / — la régirent de Touraine r\ç fut jamais rebiél\e! Tel tyt le cri unanime.
Mais qUe| est potrp étqnnemejjt : il fopd sur nous l'épée 4 'a main- Six Qfficipfs qui l'acpom-r pagnaient et qu'il avait apostésj sans doute, le suiyput, l'un arfp£ de pistolets, les ^res 4e leurs épées. Trois hqmqjes sont blessés. La plus juste indignation s'^mparè des esprits : Aux qrynès, s'écrjp-tron, aux qriftfa7 Jes ci|pyens, 4nssi iadjgqés qUe nous, pous applaudissent.
Qq'oij nPH^ P^Weîfe iipe j des pitqyeps s'assimilent et s'unissept à poqs. Trois dé nos officiers vieqnept fondre sur nous. Une première tentative ne Ipur suffit pas ; jls récjfii-vent.
Notre polonel arriye ; pous lui portpng respectueusement nos représentations; et il nops égorge! M- de Mirabeau portera-t-il partout ses fureurs et ses injustices ? A-t-il fait le sprment ae s'^rmef contre tous les enfants 4e la patrie?
Qu'il ne se glorifie pas de notre retraij-p ! elle pous a plus hopprés qqp lui. Il aura une reproche éternel à se faire, et nous n'aurqps pas le regrpt cruel d'ayoir trempé nos mains daps le sang d'un représentant de la nation et de notre colonel.
Djr§.-t-ii qyp l'iyresse 3 pu quplqup part à notre démarque : |e résultat de riqtre conduite le 4é~ mentira' Pourrait-t-il pn difp autant ?
Mais reprenons les faits, fpus nous| portons armés, ef dans lé plus grand prure, sur |a pfip-cipale place de Perpignan. Nous transportons nos drapeaux chez le maire de la vi{le. Le sieqr de Mirabéaù s'y était retiré. Noqs y laissons la garde p'rdinaire. P$r ijne affectation dont il n'est poipt d'exempiè, le lieu qù rpposent nos drapeaux est investi par deux cegfs bpmmesjju fégjmént 4e Vermandois. A-trqp jamais quï dire qup |ps drapeaux d'un régiment gîpqt été gftf.4^ Rar tPS soldats d'un aùtref Âvpbs-hous jamais eu besoin de personne ppur les cppseryer ? N'avpns-nous pas prodigue notre sang pour les défendre? Mais expliquons ce prpcédé. J\|. de Mir^beap, qui pprtè l'incendie partqut, crdyaif gtâblir l'ànimogiip et la désunion entre les deux corps. La conduite de nos frèrés de Vermandoi? pp rëpond^ | sg's vues sanguinaires. A. potpé ^pprpchèj i|§' ^'p rgtj-rent, indignés de là "surprise qu'9p'le])r g fait^.
M. clê Cholet, lieutenant de roi, ^rviequ et nous explique que M. de Mir^pàu est pprj,eûr d'ordres dii roi, qui nous enjoig'nepf fle ["ecèyqif les trois officiers qui se sont bannis eux-memés, et le nornmjê Maréchal rpqjpjgcé par Ip sieur Rochefort.
Voilà donc votre mission expliquée, M. de Mirabeau I Vous venez, l'épée à Ja main, pous qrdon-ner de recevoir dps officier^ qui se §ont retirés, pour s'être arnïés jîqptrè ptjus, et en yertû 4'or" dres pg mî^wtre. Les opdres ministériels 4qiygii|-jls être meurtriers f
Propre fèpqhs^ f?|t §imple; pe a'est point 4aqs une rue et l'épée a la iqajn qu'on miipe |es qrdrps du roi : p^p pela sppl, ils sont recus^ble^; et leUr objet, comparé à la manière deles presëh-ter, nous impose la loi de les refuser.
Rendus au quartier, seconde tentative de M. de Cholet
Voulez-vous être fidèles au roi, nous dit-on?
N'avons-nous pas juré d'être fidèles à la nation, à la Constitution et au roi 1
Il n'est pas question de la nation, nous dit-on.
Il est question de la nation, répondons-nous : ces trois pouvoirs sont inhérents et inséparables.
Offre de la somme de mille écus aux conditions susdites.
Cette offre est trop injurieuse pour qu'on la relève. Des moyens aussi bas n'ont jamais déterminé le régiment de Touraine. A-t-on pu croire qu'on obtiendrait notre désistement à prix d'argent?
Dernière tentative de M. de Cholet : Que ceux qui veulent leurs cartouches se portent en avant. — Serment dè notre part ne nous désunir jamais.
Le fourrier des grenadiers est soupçonné de s'être laissé corrompre à prix d'argent ; d'avoir séduit huit grenadiers. Ils sont arrêtés et ils subiront, sans doute, la peine due à des traîtres, si l'on parvient à les convaincre.
Mais quelle interprétation peut-on donner à de pareilles offres? Nous savons les évaluer. Elles couvrent le dessein perfide de débander, de ruiner l'armée et de rendre au despotisme le pouvoir que l'aveuglement lui laissa trop longtemps et que la raison lui a ravi. En vain l'aristocratie nous assiège; en vain elle nous enveloppe : nous saurons déjouer ses menées insidieuses, et rien ne nous forcera à enfreindre le serment que nous fîmes à la patrie.
Et vpus, braves concitoyens! vous donnerez à notre justification et à nos motifs tout le poids dont ils sont susceptibles. Vous ne refuserez point à la vérité le témoignage qu'elle implore. Votre assentiment doit convaincre l'auguste Assemblée, à qui nous adressons nos griefs, que la rébellion et l'esprit de parti n'entrent pour rien dans le cruel devoir que nous remplissons aujourd'hui.
Tel est, Messieurs, l'exposé fidèle de nos griefs : c'est dans votre sein paternel que le brave régiment de Touraine verse ses douleurs. Devait-il s'attendre à de pareils excès de la part de ceux dont il fit si longtemps la gloire? Notre reproche n'est pas général. Il est encore des officiers qui conservent des droits éternels à notre amour et à notre respect; mais ils voient nos peines, et ils se taisent! leur cœur est-il moins ulcéré que le nôtre?
Nous sommes devenus, en quelque sorte, les objets de votre prédilection. Vous nous avez sauvés du joug dont le. despotisme nous accabla si longtemps : le verrons-nous remplacé par un joug plus cruel encore? nous verrons-nous frappés par la main qui devrait concourir avec vous à notre bonheur ?
Signé ; les bas-officiers, grenadiers, fusiliers, etABOUL, député.
, député de la commune de Perpignan, prononce ensuite le discours qui suit (1):
Messieurs,
L'adresse que je viens de lire n'est que la bien faible expression des sentiments que vos
pénibles travaux ont gravés dans tous les cœurs des citoyens de Perpignan. Tous les jours ils
se disent, comme le reste des Français : Si nos fers sont brisés, si les droits de l'homme
sont reconnus, si nous goûtons les douceurs d'avoir une patrie, si tous les jours nous nous y
attachons plus
Eh ! comment ce cri de reconnaissance n'au-rait-il pas retenti d'un bout de la France à l'autre, dans le temps que vos décrets ont étonné l'univers attentif, dans le temps que des citoyens de toutes les nations sont venus vous payer, par leurs applaudissements, le tribut le plus mérité !
Qu'il est doux pour moi, Messieurs, d'être dans ce moment l'organe d'un peuple que vous avez rendu libre, et qui, fier de sa dignité, sent tout le prix de ce qUe vous avez fait pour lui ! Qu'il est doux pour moi d'exprimer son effusion, de pouvoir vous dire que sa reconnaissance se perpétuera d'âge en âge, que nous la transmettrons â nos derniers neveux, et qu'elle fera encore votre gloire dans le temps où vous n'existerez que par la sagesse de vos lois et par le souvenir de vos vertus.
Je suis porteur encore d'un verbal delà municipalité de Perpignan, approuvé par la commune, où sont constatés les faits relatifs à l'affaire du régiment de Touraine avec son colonel, et d'une nouvelle adresse qui annonce la délivrance de son ihaire et l'espoir d'une paix prochaine.
Je n'ai rien à ajouter, Messieurs, au détail des faits consignés dans ce verbal : la seule réflexion que je puisse me permettre, c'est d'observer combien il eût été utile que M. de Mirabeau se fût parfaitement concerté avec les officiers, municipaux: comme lui, ils auraient reconnu toute l'importance de maintenir la discipline et la'subordination dans les corps militaires ; mais, comme eux, il aurait senti combien il était dangereux de heurter de front l'opinion commune, de vouloir rétablira force ouverte un adjudant dont il était public, dont il savait lui-même que le régiment avait de trop justes raisons de se plaindre.
Comme eux, il aurait senti de quelle conséquence il était d'épuiser, dans des circonstances aussi critiques, les moyens de douceur et de persuasion.
Comme eux, il aurait prévu les suites funestes que pouvait produire une démarche qui n'aurait pas été mûrement réfléchie.
Comme eux, enfin, il aurait senti combien l'enlèvement des cravates des drapeaux, dont le maire avait répondu sur 3a tête, pouvait compromettre sa sûreté personnelle et la tranquillité publique.
Lorsque ce respectable vieillard, qui, après avoir servi la patrie dans les combats, se plaît à la servir encore par ses conseils, fut conduit à la citadelle, ce fut un coup de foudre pour les citoyens; mais le régiment avait été outragé, les cravates de ses drapeaux manquaient, il ne voyait plus ces signes de gloire qu'il avait tant de fois défendus au prix de son sang; il y allait de son honneur : pouvait-on attendre que des soldats français, calmes et tranquilles, écoutassent alors la voix de la raison?
Cependant le régiment de Touraine, même dans les premiers accès de sa fureur, n'a pas manqué aux égards dûs à l'âge et aux vertus civiles et militaires de notre maire, et il lui a rendu la liberté dès qu'il a su qu'il allait revoir ses drapeaux. 2 .
Je n'ai pas été, Messieurs, le témoin oculaire des honneurs qu'on lui a rendus; mais les milices citoyennes de Castelnaudary, de Carcassonne et Narbonne, et des endroits circonvoisins, confondues avec la garde nationale de Perpignan et avec les régiments de Touraine et de Verman-
dois, les soldats-citoyens, les citoyens-soldats, tous attendris, tous versant des larmes de joie, poussant tous des cris d'allégresse, célébrant à i'envi le triomphe de la vertu ; ou ma propre sensibilité me trompe, ou les traits de ce tableau doivent intéresser des cœurs français.
Je ne répondrais pas, Messieurs, à la confiance dont mes concitoyèns m'ont honoré, si, en finissant, je n'exprimais à ce Sénat auguste le vif intérêt que le régiment de Touraine leur a inspiré. Daignez, Messieurs, agréer cet intérêt; la commune de Perpignan vous en conjure, par les services que ce régiment a rendus à l'Etat, par la valeur qu'il a montrée dans toutes les occasions contre les ennemis du nom français ; elle vous en conjure par l'attachement inviolable qu'il a marqué pour la Constitution ; elle vous en conjure, enfin, au nom de la patrie qui trouvera dans les soldats de ce régiment des citoyens toujours prêts à mourir pour elle.
, médecin, député de la garde nationale de Perpignan, dit ensuite (1) :
Messieurs,
Je suis chargé de la part du corps des officiers des volontaires citoyens de Perpignan de vous porter le tribut de son admiration et de sa reconnaissance ; je suis encore chargé, Messieurs, de rendre le témoignage Je plus authentique du patriotisme, de la bonne conduite, des vertus civiles et militaires des régiments de Touraine et de Vermandois, pendant 1e long espace de temps qu'ils ont été en garnison dans notre ville : nos cœurs sont pénétrés de la manière dont ces vertueux militaires se sont constamment conduits envers nous ; et ce sentiment, que la garde nationale me charge de manifester, est partagé par toute la ville, et par tout ce qui fut autrefois province de Roussillon. On vous présentera, Messieurs, un tableau où le désordre, l'insurbordination, l'infraction à la règle paraîtront sous des couleurs qui inculperaient le brave régiment' de Touraine et terniraient sa gloire : mais pour apprécier ces mouvements et les motifs qui les ont déterminés, il est important de vous faire connaître tout ce qui les a précédés.
Le régiment de Touraine a été témoin, pendant plus d'une année, du terrible choc des
opinions de notre ville ; il a vu les bons citoyens ne pouvant d'abord élever qu'une voix
faible, odieusement persécutés, calomniés, victimes des manœuvres les plus perfides : il a vu
une assemblée patriotique contre laquelle on armait indignement le fanatisme civil et
religieux ; il a vu des protestations indécentes contre vos sages décrets, dont deux mille
exemplaires étaient déjà prêts et ont été saisis : il a vu les préparatifs de ce jour qui
devaient répondre et coopérer avec les journées futaies de Nîmes et de Montauban : il a été
témoin de la manière dont les bons citoyens . ont prévenu cet attentat en dissipant
l'assemblée qui devait le commencer: ce régiment, entin, a distingué les bons d'avec les
mauvais : il a résisté avec intrépidité aux caresses, aux insinuations; il fallait bien que
le cœur de ces braves soldats s'armât de défiance. Ils n'ignoraient pas que le royaume voisin
était plein de fugitifs, de gens dangereux ; tout donnait l'éveil au patriotisme: enfin,
Touraine voit les mêmes personnes, dont il connaissait et désapprouvait les principes, être
Soldat et citoyen français, je ne parlerai jamais au'en faveur de la subordination, et j'en donnerai l'exemple ; mais quand ce devoir est en opposition avec le devoir plus sacré de l'attachement à la Constitution, quand le soldat est placé entre son supérieur et la patrie, quel nom donnerons-nous à la désobéissance ? Je mejrappelle,Messieurs, le jour où elle fut une vertu : nous lui dûmes notre salut et celui de l'Empire.
Nous recommandons à votre partiotisme, des guerriers qui n'ont cédé qu'à l'impulsion de ce sentiment : conservez à la France des défenseurs pleins d'honneur et de courage... conservez-leur des drapeaux qu'ils n'abandonnèrent jamais, et que la victoire couronna partout... Ah ! si vous aviez vu Touraine au moment où il venait de les perdre, je n'aurais pas besoin de vous parler en sa faveur ! que son désespoir était beau 1 On voyait des soldats courant au hasard dans les rues de notre malheureuse ville ; les larmes inondaient leur visage ; ils déchiraient leur honorable vêtement; le célèbre Thurel, le plus ancien soldat de France, à la tête des vétérans, montrant à mes concitoyens son triple médaillon, leur redemandait des enseignes qu'il avait suivies pendant quatre-vingts ans sous trois rois victorieux. Nous qui avons été ies témoins de ce spectacle attendrissant à la fois et terrible, nous venons vous demander de ne pas nous séparer de nos frères, de nos amis de Touraine et de Vermandois : nous vous le demandons par vos vertus civiques et par le droit que nous donne nos efforts pour les imiter... Placés aux bornes de ce vaste Empire, perpétuant un sang jadis étranger, conservant des habitudes et un langage qui ne sont pas les vôtres, votre feu nous a pénétrés, et vous n'avez pas de meilleurs frères : la fidélité des Français du département des Pyrénées-Orientales sera immuable comme les montagnes au pied desquelles ils habitent, qui sont les limites du royaume superbe dont vous venez d'assurer les hautes destinées.
répond aux trois députations :
L'Assemblée nationale prendra en considération les plaintes, les réclamations et les faits dont vous venez de lui présenter les détails.
Divers membres demandent l'impression des discours des députés de Perpignan.
Cette impression est ordonnée.
L'Assemblée décrète ensuite que les pièces déposées sUr le bureau par les trois députations seront remises aux comités militaire et des rapports pour en être rendu compte à l'Assemblée.
,secrétaire, fait ensuite lec*
ture du Récit des événements arrivés à Nîmes les 13, 14, 15, 16 et 17 juin 1790, envoyé par l'administration du département du Gara (i). Ce récit est ainsi conçu :
L'Assemblée électorale du département du Gard a terminé ses opérations au milieu des horreurs d'une guerre sanglante à laquelle la ville de Nîmes a eu le malheur d'être en proie pendant plusieurs jours. Des événements qui, malheureusement, n'avaient pas assez fixé son attention, avaient été les précurseurs de cette explosion funeste, qui a mis en péril les patriotes et qui a coûté la vie à un grand nombre de citoyens.
i)ès sa première séance, l'Assemblée électorale se vit environnée de légionnaires à pouf rouge, les mêmes qui, à l'époque des 2 et 3 mai, furent accusés d'avoir mis la cocarde blanche ; ils insultèrent et menacèrent deux électeurs, et leur affluence autour du lieu de l'assemblée obligea de doubler la garde et d'accroître les précautions.
Leurs attroupements étaient surtout dissipés par les patrouilles à cheval des dragons volontaires, qui concouraient efficacement, avec le régiment de Guyenne, à maintenir la tranquillité. Le service des dragons excita la jalousie des légionnaires à pouf rouge ; ils se portèrent à des menaces et demandèrent plusieurs fois avec clameurs que les dragons cessassent de faire des patrouilles. Un attroupement prémédité, qui fut annoncé et excité dans tous les carrefours par un de ces légionnaires, nécessita la présence des officiers municipaux et fut contenu par leurs exhortations.
Ces magistrats crurent devoir céder aux mouvements de ces légionnaires que l'impunité enhardissait ; ils changèrent le service que les commissaires du roi avaient requis et que l'assemblée électorale avait approuvé; ils ordonnèrent aux dragons de cesser leurs patrouilles et de rester à leur poste de l'évèché au nombre de vingt.
Instruite de ces changements, l'assemblée électorale témoigna sa satisfaction aux dragons, pour le service qu'ils avaient fait jusqu'alors, et ne s'occupa point du surplus.
Le dimanehe 13, à six heures du soir, les dragons qui étaient peu nombreux à l'évèché, y furent menacés, insultés et attaqués par des légionnaires à pouf rouge, qui voulaient les chasser de leur poste; mais soutenus de quelques autres légionnaires qui furent envoyés à leur secours, de l'hôtel de ville où ils étaient de garde, les dragons se défendirent. Ce fut le signal d'une explosion terrible, d'une guerre générale entre deux parties de la légion. On courut aux armes, et l'on se fusilla dès ce moment dans les divers quartiers de la ville et des faubourgs.
Les commissaires du roi se rendent à l'hôtel de ville pour demander la loi martiale et le
service du régiment de Guyenne. Plusieurs soldats à pouf rouge, avec quelques-uns de leurs
chefs, se retirent dans une tour attenante au rempart, et adossée à la maison du sieur
Froment, l'un de leurs capitaines ; d'autres s'emparent de toutes les avenuès de ce poste; de
là, ils font feu sur les citoyens et sur les légionnaires qui soutenaient la proclamation de
la loi martiale ; ils dispersent cette escorte et s'emparent du drapeau rouge qu'ils
emportent dans la tour ; ils repous-
Les désordres continuent dans la ville, on tire des coups de fusil, soit'de la tour, soit des fenêtres de plusieurs maisons et dans les rues. Plusieurs citoyens périssent ; un grand nombre d'électeurs sont insultés et poursuivis par ces légionnaires à pouf rouge, maîtres de presque toutes les avenues ; deux sont blessés par ces mêmes légionnaires, l'un d'un coup de baïonnette, l'autre de plusieurs coups de sabre.
Le régiment de Guyenne, impatient de défendre les bons citoyens, prend les armes, il se met en bataille deyant les casernes, réuni à deux ou trois cents légionnaires patriotes. Ces braves soldats n'agirent point, n'étant pas requis ; mais la compagnie des grenadiers escorta à leurs demeures quelques électeurs, qui, dès le commencement de Taffaire, s'étaient réfugiés vers le quartier. Il fut fait des patrouilles pendant la nuit. La plupart des citoyens, hommes, femmes et enfants, n'osèrent point se retirer dans leurs maisons.
La nouvelle de ce désastre se répandit rapidement pendant la nuit dans les environs de Nîmes. Le lundi, dansla matinée, arrivent successivement les troupes nationales du voisinage, mal armées, sans munition et sans ordre ; elles se rassemblent à l'esplanade.
Cependant les électeurs continuent leurs séances sous la garde d'un détachement du régiment de Guyenne, et délibèrent de ne point se séparer.
Les gardes nationales sont attaquées par des soldats à pouf rouge; et du couvent des Capucins qui domine l'esplanade où elles étaient postées, on tire sur elles plusieurs coups de fusil ; elles sont repoussées et dispersées. Mais leurs forces s'accroissent par l'arrivée de nouvelles troupes venues au secours de leurs électeurs ; elles se rallient, le couvent des Capucins est forcé, ceux qui avaient tiré sur l'esplanade sont massacrés, des religieux périssent dans cette attaque, et Jes perquisitions que l'on fait dans le couvent deviennent pour quelques bandits une occasion de pillage (1).
D'autres légionnaires à pouf rouge, qui s'étaient introduits dans les arènes, tirent sur les soldats de Guyenne, commis à la garde du corps électoral ; ceux-ci entrent dans les arènes et tuent ceux qui les occupaient, qui n'y étaient qu'en très petit nombre.
Cinq officiers municipaux seulement se rendent à l'hôtel de Ville. La dispersion du corps municipal, son insuffisance dans cette crise terrible, le peu de confiance qu'il obtient des citoyens, et le péril imminent de la chose publique obligent l'assemblée électorale, sur le rapport que viennent lui faire les commissaires du roi, à nommer un comité pour diriger les opérations instantes, veiller à la subsistance des troupes accourues à la défense des électeurs, et sauver la ville des derniers malheurs qui la menacent.
Toute cette journée, les légionnaires à pouf
La nuit se passe sous les armes et sans effusion de sang.
Le lendemain mardi, il arrive encore des secours de tous côtés, même d'au delà (du département, de Ganges et de Montpellier. Toutes ces troupes réunies se portent à plus de douze mille hommes. Ces généreux citoyens viennent défendre la Constitution et leurs frères ; ceux qui avaient servi la veille commencent à se retirer.
Ce jour il n'y a plus d'attaque réglée, mais les rues ne sont point sûres ; les légionnaires à pouf rouge tirent encore des coups de fusil par les fenêtres ; les troupes nationales se livrent à la fureur ; plusieurs maisons suspectes sont forcées et pillées ; d'honnêtes citoyens souffrent également de ces désordres. On poursuit les poufs rouges ; on les immole partout où on les rencontre ; les instances réitérées, les efforts constants du comité électoral, des commissaires du roi, des chefs de gardes nationales et des bons citoyens arrêtent ces meurtres ; et l'on emprisonne tous oeux qui sont soupçonnés d'avoir participé au complot que le courage des bons citoyens a déconcerté
La municipalité reste dispersée; quelques-uns de ses membres seulement continuent leurs fonctions. L'assemblée électorale se rend en corps sur les places publiques, pour y exhorter les citoyens et les gardes nationales à la modération et à la paix.
Dans ce même temps, on tire un coup de fusil d'un cabaret qui était le rendez-vous des poufs rouges, et qui se trouve voisin du lieu où s'assemblaient les électeurs. Aussitôt cette maison est forcée : elle réeélait un dépôt de poudre et des gens cachés; le cabaretier est massacré. Un malveillant se glisse jusque dans le palais et delà tire sur l'armée nationale postée à l'esplanade.
L'assemblée électorale poursuit ses scrutins avec courage, conservant plus des deux tiers de ses membres. Deux électeurs de la ville de Nîmes, l'un procureur de la commune, l'autre officier municipal, viennent se mettre sous sa sauvegarde, et sortent du palais pendant la nuit.
Le mercredi matin, la légion nîmoise, privée depuis longtemps de son état-major, ie crée de nouveau en présence de toute l'armée auxiliaire et du régiment de Guyenne ; il se forme une fédération entre toutes ces troupes; le serment est prêté solennellement en présence du corps électoral, et le président proclame l'état-major de l'armée fédérée. L'ordre tenait peu à peu et les esprits sont moins échauffés.
Instruits que les malveillants s'empressaient
Déjà le désarmement des compagnies suspectes s'était opéré en partie ; des légionnaires séduits et dispersés dans les campagnes offrent de rendre leurs armes, ou ils sont forcés par les municipalités voisines. D'autres, réduits à la fureur et au désespoir, exercent dans les campagnes toutes les cruautés des brigands et massacrent des citoyens.
Cependant la tranquillité commence à renaître dans la ville. Des troupes nationales qui venaient du côté de Remoulin donnent une fausse alarme ; on apprend qu'elles marchaient au secours des patriotes et qu'elles se sont retirées, lorsqu'elles ont su qu'ils avaient des forces suffisantes ; cinq d'entre eux se rendent jusqu'à Nîmes, et reçoivent, au sein de l'assemblée administrative, 1 assurance du retour de la paix, et les témoignages d'une vive reconnaissance.
Enfin, les membres du corps administratif, qui s'étaient provisoirement constitués, se séparent pour s'occuper de l'organisation des districts ; mais ne voulant pas abandonner la chose publique, ils croient devoir nommer un comité chargé de veiller au retour du bon ordre, de concert avec le reste de la municipalité et l'état-major de l'armée fédérée. Le district de Nîmes ayant terminé ses élections, nomme un comité pareil, et chacun s'efforce de réparer les malheurs qui ont affligé cette ville infortunée.
, évêque et député de Nîmes, demande que les pièces dont la lecture vient d'être faite soient renvoyées aux comités des recherches et des rapports pour en rendre compte à l'Assemblée.
Cette motion est mise aux voix et adoptée.
ajourne l'Assemblée à demain, onze heures du matin.
La séance est levée à dix heures du soir.
A LA SÉANCE DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE DU
PREMIÈRE ANNEXE.
RÉFLEXIONS SUR LES PRINCIPAUX ARTICLES CONSTITUTIONNELS DE LA MARINE, PAR M. PELLERIN DE LA BUXIÈRE, DÉPUTÉ D'ORLÉANS (1).
Observations préliminaires.
N'ayant pour but que de traiter des bases de la constitution de la marine, je n'ai pas cru devoir examiner tous les détails de l'organisation de l'armée navale (ce qui était au-dessus de mes forces) ; mais qu'il me soit permis de soumettre aux lumières de l'Assemblée et au jugement du comité de la marine quelques vues qui pourront peut-être contribuer à faire tirer un meilleur parti des dépenses que la nation est disposée à faire pour la formation de l'armée navale : voici en peu de mots mes observations.
De tout temps on a commis en France de grandes fautes dans l'emploi de nos armements ; presque toujours nous avons armé nos flottes et nos vaisseaux de guerre pour le3 faire rester en rade, ou on s'est contenté de les faire aller jusqu'à nos colonies, et de les faire revenir aussitôt. Leurs plus longues stations dans nos colonies ont été de quelques mois ; encore les ont-ils presque entièrement passés dans les rades. Les Anglais, au contraire, laisse leurs escadres et leurs vaisseaux en station pendant trois ans dans leurs établissements éloignés, et tirent ainsi parti de leurs dépenses d'armements, au lieu que nous nous épuisons en frais d'armements et de désarmements, et que nous perdons en outre l'emploi de nos matelots. En France, on arme à grands frais une flotte pour en faire une armée d'observation ; elle reste en rade, et ne sert ni à protéger nos vaisseaux de commerce ni à nuire au commerce ennemi, pas même à l'inquiéter ; de façon que nos flottes ne servent en général ni à l'offensive ni à la défensive.
Dans ces derniers [temps, on a fait des armements très dispendieux pour des objets aussi peu utiles ; on a armé des flottes à grands frais pour tenter des conquêtes au loin, lesquelles n'ont pas toujours réussi, ou qu'il a fallu rendre à la paix ; de façon qu'une flotte au lieu de servir, suivant son institution, à convoyer spécialement les vaisseaux du commerce, ne les a convoyés que par occasion, et a été armée à grands frais pour escorter des vaisseaux de transport destinés ainsi que les flottes à tenter des conquêtes ou hasardeuses ou inutiles. Une réflexion qu'il ne faut faut pas perdre de vue, c'est que nos vaisseaux de guerre ont pour premier objet, comme je le prouverai, la protection de notre commerce, et pour second objet, suivant le système adopté par l'Europe, de nuire à la prospérité du commerce des puissances ennemies; ce qui établit la nécessité des croisières en forces égales.
Nous pourrions, ce me semble, employer plus utilement nos matériaux de construction ; nous avons, ainsi que les Anglais, construit une grande
quantité de vaisseaux de 100 canons; on sait quelle immense quantité de bois il faut pour construire ces vastes machines, que d'agrès, de voilures, de canons il faut pour les armer, que d'hommes sont nécessaires à les faire mouvoir. Un vaisseau de ce rang coûte pour sa construction, son armement, son équipement, le double d'un vaisseau ordinaire. Il s'use plus vite, il est exposé à toucher ; il est d'un service infiniment moins utile, ne servant que dans les grandes flottes, et sa perte est un objet très considérable.
Nous faisons encore, suivant moi, d'autres fautes en construction ; nous construisons beaucoup de frégates de 36 canons, et très peu de vaisseaux de 50 et de 54 canons, les plus utiles de tous. Il faut, pour la construction d'une grande frégate, la même quantité de bois à peu près que pour un vaisseau de 50, puisque ces frégates ont en largeur et en longueur à peu près ies mêmes proportionsque ces vaisseaux, et puisque, portant du canon de 18, elles doivent avoir le même échantillon. Il leur faut aussi les mêmes agrès, la même mâture, la même voilure et la même quantité d'hommes ; ainsi leur armement est aussi cher, et il ne peut pas être aussi utile, puisqu'elles ne peuvent pas prêter le côté à un vaisseau de ligne, comme le vaisseau de 50 canons. Il est bon à ce sujet de se rappeler que dans un des combats livrés dans la baie de Chesapeak, le Romulus, prise anglaise de 44 canons, placé en seconde ligne, empêcha un des plus gros vaisseaux de la flotte anglaise de percer notre ligne; que si la frégate commandée par M. de Mortemart au combat du 12 avril 1782, eut été un vaisseau de 50 canons, elle eut pu sauver le Glorieux à la remorque, et empêcher les Anglais de couper notre ligne. Il est donc certain que nous devons avoir beaucoup moins degrandesfrégatesetplus de vaisseaux de 50 que nous pourrions équiper avec la même quantité d'hommes que ces grandes frégates , car, en général, nous accumulons trop d'hommes sur nos vaisseaux. Il en résulte que vu la même quantité d'hommes, nous armons un huitième de vaisseau de moins ; que nos équipages sont plus exposés dans un combat, étant placés en plus grand nombre sur les mêmes espaces donnés, et sont logés d'une manière plus malsaine: il serait peut-être à cet effet nécessaire de faire nos manœuvres moins lourdes et moins volumineuses.
J'observerai encore que notre corps d'officiers et nos étals-majors surtout sont trop nombreux; que j'ai été frappé, à la lecture d'un aperçu des dépenses de la marine, présenté par le comité des finances, de voir qu'il y avait une somme énorme employée pour le corps des officiers et des états-majors ; une somme considérable pour les officiers de l'administration; un article de dépense considérable pour les bureaux de la marine, et que, dans cet aperçu du comité, on ne proposait de retranchements et d'économie marquée que sur les constructions et les armements, de manière que le principal objet était absorbé par les accessoires.
On sait que tandis qu'en dépensant 40 millions, nous avons à peine de quoi construire quelques vaisseaux et armer quelques frégates ou corvettes, les Anglais accordent une somme considérable pour leurs constructions, et en employent une très forte pour mettre chaque année, en temps de paix, une partie de leurs vaisseaux en commission, de manière qu'ils font naviguer chaque année un grand nombre de vaisseaux et de frégates, et qu'ils en ont un très grand nombre
préparé à être armé sur-le-champ, et à mettre en mer en très peu de temps. Cependant les dépenses de leur marine ne s'élève guère plus haut que celle de la nôtre.
Réflexions sur les principaux articles constitutionnels de la marine.
Le travail est la source de toutes les reproductions, et conséquemraent de toutes les richesses. Le premier des travaux est celui de l'agriculture ; celui de l'industrie est .après, le plus intéressant : tous deux se divisent en plusieurs genres, et fournissent une infinité d'objets d'échange qui forment l'aliment du commerce intérieur et extérieur. Ceux dont s'empare le commerce intérieur doivent circuler dans toutes les parties de l'Europe avec une grande facilité, ce qui entraîne la nécessité de faire des lois qui détruisent toutes les entraves mises au commerce, et qui favorisent la libre et prompte circulation des objets d'échange entre les divers habitants du royaume. Le transport des marchandises par terre exige la perfection des routes, leur communication entre elles ; la confection des canaux, leur communication entre eux et avec les rivières ; une administration vigilante et éclairée doit porter ses vues sur tous les moyens de faciliter les transports par terre de tous les objets d'échange. Elle doit également veiller à lever tous les obstacles que des droits, effets funestes de la féodalité et de la fiscalité, avaient mis à la circulation. Ces mêmes moyens doivent favoriser nos échanges par terre avec tous les peuples qui nous avoisinent.
Les produits de notre agriculture et de notre industrie qui doivent être exportés par mer, appartiennent au commerce maritime.
Lorsqu'une nation possède une grande étendue de côtes et beauconp de ports, lorsque les mers qui l'environnent lui procurent une prompte et facile communication avec des peuples nombreux, soit au nord, soit au midi, soit au couchant ; lorsqu'elle est située de manière à être, pour ainsi dire, le centre et l'entrepôt du commerce maritime de l'Europe, cette nation est destinée à avoir un commerce maritime considérable et une navigation importante,surtout si elle possède d'ailleurs les produits d'agriculture et d'industrie les plus précieux, si elle est favorisée par le cours de fleuves et de rivières qui arrosent les provinces et navigables dans tout leur cours depuis leur source jusqu'à leur embouchure. La France possède tous ces avantages : elle a la Manche au nord ; la mer, dans cette partie, environne ses côtes depuis le Pas-de-Calais où elle communi-queavec celle du Nord et la Baltique, jusqu'au cap d'Ouessant, où elle se joint à la mer Atlantique. Plusieurs grandes rivières qui traversent les provinces septentrionales de France ont leur embouchure dans cette mer : la Seine, la Somme sont de ce nombre. La Seine communique par des canaux (1) avec la Loire, la Méditerranée et les ports de l'Océan. Les provinces situées vers la Manche sont extrêmement fertiles, ont des ports nombreux et commodes, des routes ouvertes de toutes parts, et des manufactures en très grand nombre.
Les côtes de France s'étendent depuis Ouessant
jusqu'à celles d'Espagne. La Vilaine, la Loire, la Charente, la Garonne et plusieurs des rivières qui versent leurs eaux dans celle-ci, qui ont leur embouchure à la mer, sont navigables, communiquent entre elles par des canaux ou par des routes et traversent des provinces également fer tiles : cette mer que l'on peut dire appartenir à la France, lui procure des communications avec tout l'univers, et c'est sur cette mer que sont situés plusieurs des plus beaux ports de France ; enfin le royaume a sur la Méditerranée une grande étendue de côtes et de ports situés de manière à être le centre de la navigation qui se fait sur cette mer. Le Rhône, un des plus grands fleuves de l'Europe, arrose de ce côté ses provinces.
J'ai avancé que la France possédait des objets d'échange extrêmement précieux : tels sont ses eaux-de-vie, ses vins, ses vinaigres, son sel, ses huiles, ses fruits, son safran ; et comme elle a plus souvent du superflu que des besoins en blés, on peut dire qu'elle en peut souvent exporter. On peut joindre à ces objets principaux tous les autres produits de son sol et de son industrie ; la France est donc destinée à être commerçante. Le caractère actif et le génie industrieux et entreprenant de ses habitants ne sont pas compatibles avec un commerce passif ; il doit donc avoir une grande activité, et il faut qu'à cet effet sa navigation soit extrêmement protégée.
Le commerce maritime doit être protégé de plusieurs manières. Il doit être le plus libre qu'il soit possible, et débarrassé de plusieurs entraves; il doit en outre obtenir des encouragements ; enfin il doit être défendu dans toutes les circonstances où des puissances, jalouses et rivales, voudraient lui porter atteinte. L'obligation de défendre le commerce maritime contre toute entreprise hostile nécessite la formation et l'entretien d'une forte armée. On peut appeler cette force l'armée navale ou la flotte.
La nécessité d'une puissance navale étant démontrée, comment doit-elle être formée? Il se présente à cet égard plusieurs sujets de réflexions. Les forces navales d'un Empire doivent, être dans le rapport de l'étendue de son commerce, et plus encore dans le rapport des forces des puissances qui peuvent le jalouser. Ainsi, la France ayant pour voisine et pour rivale l'Angleterre, dont les forces navales sont formidables, elle doit renoncer à avoir une armée navale, ou en avoir une capable de faire tête à celle de l'Angleterre: si l'Empire ne faisait que des efforts insuffisants, il ne pourrait pas parvenir à se mesurer en tout temps d'une manière avantageuse avec l'Angleterre. Sa flotte étant moins forte eu vaisseaux, moins bien armée, moins bien exercée, ses efforts alors seraient ruineux et plus propres à causer des malheurs à son commerce qu'à le soutenir ; elle perdrait le fruit de ses armements, elle exposerait sans cesse son commerce, dont les pertes retomberaient sur l'agriculture et l'industrie, ce qui leur porterait le coup le plus funeste, ainsi qu'à la prospérité nationale. Plus les efforts se répéteraient, plus les pertes se multiplieraient, et l'on verrait avec douleur les finances s'épuiser inutilement: l'on aurait à regretter les pertes du Trésor, celles des hommes de mer, des vaisseaux, des richesses particulières; et le travail, cette source de la prospérité publique, serait dans le plus grand découragement.
La France est donc obligée, par la nature des choses, et par ce que lui commandent impérieusement l'intérêt de sa navigation, celui de son
agriculture et de sou industrie, de se fôrmer et d'entretenir des forces navales suffisantes et indépendantes de toute alliance, et capables de faire tête à celles de la puissance la plus redoutable.
Il faut à cet effet des arsenaux, des vaisseaux, des hommes de mer. Les arsenaux placés sur la mer de Biscaye, ou l'Océan, sont en état de contenir toutes les forces navales nécessaires à la France ; elle se crée un port dans la Manche. Si ses efforts n'avaient pas à cet effet tout ie succès désiré, elle a d'autres ports dans cette mer, d'un abord peut-être moins facile, mais propres à être fortifiés. Les arsenaux de la France sont donc en^élat de recevoir toutes les forces qu'elle voudra avoir.
Si on considère le nombre de ses vaisseaux, on est obligé d'avouer qu'elle est, sur ce point, très inférieure à l'Angleterre; mais la France possédant de vastes forêts, pouvant encore se procurer des bois par ses objets d'échange, ayant des matières de fonte à sa disposition, riche en chanvre, pouvant se procurer celui qui pourrait lui manquer, elle peut promptement porter sa flotte au même degré de force que celle de l'Angleterre.
Les hommes de mer ne lui manquent point ; sa navigation emploie une très grande quantité de matelots. Cette navigation se divise en cabotage, en pêche, en voyages de long cours. Le cabotage de la Méditerranée est très étendu, et la liberté accordée à 6on commerce doit l'étendre encore. Le cabotage de la mer de Biscaye et de ia Manche est aussi très animé, et celui de la Manche, un peu encouragé, peut s'étendre jusque dans la mer du Nord et dans la Baltique. Mais au moins, si nous ne pouvons faire le commerce des puissances du Nord, il faut 'faire en sorte qu'elles ne puissent pas faire le nôtre. La pêche des côtes est active ; mais les grandes pêches, il faut l'avouer, sont négligées, et l'administration doit porter un œil vigilant vers cet objet ; telle est la pêche de la morue et celle de la baleine (1). La .pêche exige la construction et l'armement de beaucoup de navires, premier objet de travail ; elle emploie un grand nombre d'hommes, elle consomme beaucoup de sel et d'eau de-vie, premiers produits de notre sol et de notre in dus trie: la France doit donc encourager la pêche, comme une des sources de sa prospérité.
Nos voyages de long cours emploient aussi une grande quantité de matelots. Plus le commerce sera libre, plus il s'ouvrira de nouvelles routes, et l'on peut espérer que l'on ne tardera pas à voir résulter d'heureux effets de la liberté accordée au commerce de l'Inde.
On voit donc que le cabotage sur une étendué de côtes considérable, une pêche active sur nos côtes, sur le banc de Terre-Neuve et dans les mers où se pêche la baleine, nos voyages de long cours, sont suffisants pour nous fournir le nombre d'hommes nécessaires dans le besoin.
De tout temps l'amour du pillage a conduit les hommes vers les lieux où du butin les attirait; des hordes de Barbares se sont rassemblées pour attaquer avec succès les voyageurs, enlever leurs marchandises; les pirates, dans le même dessein, ont infesté les mers ; les caravanes sont encore attaquées et les Barbaresques courent sans cesse
(1) C'est ce dont il faudrait s'occuper, d'autant mieux que cette navigation est très propre à former des matelots plus promptement qu'une autre.
la Méditerranée pour attaquer les vaisseaux, s'emparent des marchandises et livrent les hommes à l'esclavage. Ainsi, cet usage ancien et barbare subsiste encore, et les peuples de la Barbarie ne connaissent guère d'autre manière de faire le commerce. Réprimés par des puissances qui ont des forces navales, il attaquent habituellement celles qui n'en ont pas de suffisantes pour leur en imposer ; et lorsque par des traités conclus avec quelque puissance, et presque toujours achetés, ils cessent de les inquiéter, bientôt ils en attaquent quelque autre. Ces pirates si incommodes, si formidables pour les puissances qui n'ont pas de forces capables de les contenir, ne concertent pointj leurs attaques, n'ayant que des vaisseaux d'une force inférieure, n'ayant point d'autre système de faire la guerre que d'infester les mers, d'attaquer les bâtiments marchands, de s'en emparer et de fuir avec leur proie, sont, comme je l'ai dit, aisés à réprimer, pour les grandes puissances qui les poursuivent sur mer, et sont quelquefois obligées d'insulter leurs ports, et par des armements extraordinaires portent la désolation dans leurs villes, les poursuivent jusque dans leurs retraites, et leur rendent en un jour tout les maux qu'ils causent par leurs courses répétées.
Mais ce qui, pour les peuples qu'on appelleBar-bares, n'est qu'un brigandage est devenu pour les peuples policés de l'Europe un système de guerre très approfondi. On a fait de la capture des vaisseaux marchands et des malheurs du commerce et de l'agriculture une espèce de droit public : les puissances armées les unes contre les autres ont attaqué en tous lieux leurs possessions publiques et privées; elles ont transmis le droit de la guerre à ceux de leurs sujets qui oseraient braver les forces ennemies, et voudraient attaquer leurs vaisseaux marchands, et infester leurs côtes ; l'amour du pillage a fait braver les saisons et les écueils. On s'introduit dans les rades, on choisit souvent le temps où les mers sont le moins tenables pour établir ses croisières, et pour attendre le paisible navigateur qui rapporte dans sa patrie le fruit de ses travaux et de son industrie, et souvent toutes ses richesses. Ce droit barbare de la guerre ne s'est pas étendu jusqu'à condamner à l'esclavage le malheureux qui perd sa fortune; mais il est conduit dans les prisons les plus malsaines, et à la perte de ses biens il joint encore, pendant un temps souvent trop prolongé, celle de "sa liberté.
Les puissances commerçantes sont donc obligées a'avoir des forces capables de défendre leurs possessions et de protéger leur commerce ; car elles doivent renoncer à la navigation, et par conséquent à tout commerce maritime, si elles ne peuvent pas le défendre.
En France, l'obligation de protéger le commerce n'a pas toujours été regardée comme un principe dont on ne devait pas s'écarter. Les malheurs qu'elle éprouva dans ses convois, pendant la guerre de 1743, ne firent point varier le ministère d'alors dans ce système de protection. Il employa constamment le peu de forces navales qui restaient à ia France à la protection du commerce. Mais dans la guerre qui dura depuis 1756 jusqu'en 1762, le commerce fut absolument abandonné, et il ne fut point donné de convois : la marine royale ne se crut destinée qu'à combattre les vaisseaux de guerre ennemis, mais après le combat de M. de la Galissonnière, cette guerre malheureuse n'offre que quelques combats particuliers, qui honorèrent ceux qui les
soutinrent; et l'on peut dire que la marine royale, ayant oublié les vrais principes de son institution et ses premiers devoirs perdit dans cette guerre beaucoup de cette réputation de valeur qu'elle avait acquise. Au commencement de la guerre de 1778, trompée par ce faux système qui prévalait encore, le ministère fit des fautes funestes au commerce, il refusa sous les prétextes les plus absurdes des vaisseaux pour aller rassembler les navires répandus dans nos colonies; et, par une complication de fautes, aux premiers avis des hostilités, on mit dans les ports des colonies un embargo sur les navires : on les retint plusieurs mois, on donna le temps aux ennemis d'armer, d'accourir et d'infester les mers; alors on se contenta d'escorter quelques-uns de nos vaisseaux à une très petite distance des côtes des colonies ; on les livra ainsi à tous les dangers de la guerre. Le ministère négligea même d'armer des vaisseaux pour protéger leur rentrée dans les ports de France, de manière qu'ils furent tous pris,ou en partant des colonies, ou en rentrant dans les ports du royaume; et on fit en hommes, en vaisseaux et en marchandises, des pertes incalculables. Pendant la durée de cette guerre, quelques convois ont été donnés, mais partiellement, et presque toujours pour les seuls ports très fréquentés, et surtout pour escorter les vaisseaux de transport destinés à Papprovision-nement des flottes, et l'on peut dire que ce grand principe, que la force navale est instituée pour la protection du commerce, fut encore oublié; ou peu reconnu.
Les idées à ce sujet étaient si interverties, qu'un vaisseau du roi, arrivant dans un port ou dans une rade, employait les chaloupes des navires marchands à faire son eau, son bois, leurs charpentiers et leurs calfats à ses carènes, et que le commerce avili éprouvait toutes les espèces de vexations.
Je n'insisterai pas sur ce funeste oubli des principes et sur ses fâcheuses conséquences : mais qu'il me soit permis d'insister sur ces mêmes principes comme sur des vérités incontestables, et qui doivent nous servir de règle.
La force navale d'un Empire est formée pour protéger le commerce en temps de paix et le défendre en temps de guerre : ainsi donc, tous les armements doivent avoir pour but de protéger et de défendre le commerce maritime; et le premier devoir d'un officier de la flotte est de tout sacrifier pour secourir et sauver le plus petit vaisseau marchand. Les Anglais et les Hollandais connaissent et observent rigoureusement ces grands principes. Prisonnier sur un vaisseau anglais dans la Méditerranée, j'ai vu le capitaine s'écarter de sa route pour mettre un vaisseau marchand dans un port d'Espagne, et occupé à rassembler tous les vaisseaux marchands anglais répandus dans tous les ports d'Espagne, pour les conduire à Gibraltar. Passager sur un navire marchand hollandais, j'ai vu une frégate hollandaise, sous le convoi de laquelle était une flotte dont notre navire faisait partie, s'exposer dans un coup de vent pour nous conserver sous son convoi, nous rejoindre après une dispersion totale de la flotte, allumer ses feux et faire les plus grands efforts pour nous conserver encore dans le fort de la tempête; et après nous avoir rejoints pour la seconde fois, porter sa première attention à savoir si nous avions besoin de quelques secours.
J'ai établi comme priucipe incontestable que l'armée navale est instituée pour protéger et dé-
fendre le commerce : il s'agit maintenant de savoir comment cette armée sera formée, c'est-à-dire si elle le sera par l'enrôlement volontaire ou par la conscription?
On peut dire que, lorsqu'un homme se destine à la pêche, à la navigation sur les rivières, à celle du cabotage et des voyages de long cours, il s'enrôle dans l'état de matelot et d'homme de mer; et pendant qu'il sert sur les navires marchands, on peut le considérer comme un soldat engagé qui n'a pas encore rejoint ses drapeaux, ou qui est en semestre; enfin comme un homme voué, au besoin, au service de l'Etat dans la profession qu'il a embrassée.En effet,commeon ne peut en général prendre les matelots pour la flotte que parmi les hommes qui naviguent ou qui pèchent, on peut dire qu'un homme qui a pris cette profession a contracté avec l'Etat l'obligation tacite, de le servir lorsqu'il en serait requis : on peut donc regarder comme attaché par un enrôlement volontaire au service de la flotte tout homme de mer qui a été inscrit sur le rôle des classes. Par exemple, un homme qui se destine à l'état de matelot, commence par être mousse ou novice, et gagne moins qu'un matelot formé. Lorsqu'il a fait un ou plusieurs voyages, il acquiert le titre de matelot; il est payé en cette qualité.
Lorsqu'il est sur un vaisseau du commerce, pour justifier sa qualité, il faut qu'il ait été inscrit plusieurs fois sur les rôles d'équipage, et placé ainsi sur le rôle de diverses classes des gens de mer : alors son enrôlement a lieu, son engagement est contracté avec l'Etat; on en peut dire autant d'un maître charpentier, d'un maître calfat, d'un maître voilier.
D'après ce principe qui me paraît juste, tout homme employé à la pêche, au cabotage, ou à toute autre navigation depuis une ou plusieurs années, appartient, dans le besoin, à l'armée navale. Si ce principe n'était pas adopté, il faudrait renoncer à la possibilité ae former une flotte, ou elle ne serait composée que de novices, de quelques officiers mariniers attachés en tout temps au service des vaisseaux de guerre, et d'officiers de grades supérieurs : il faudrait donc renoncer aux moyens d'avoir une armée navale et de protéger la navigation; et la navigation ne pouvant être protégée, le commerce en souffrirait ; il serait sans cesse exposé à supporter des pertes, à languir, à s'anéantir; et ces mêmes hommes si intéressés à ce que le commerce fleurisse, ne trouveraient bientôt plus d'occupation. Ainsi donc, leur classification est un engagement contracté envers l'Etat pour leur propre avantage. Cette loi rigoureuse ne peut point être éludée en faveur d'aucun individu, car on compte en tout à peu près soixante-douze mille matelots; il en faut en temps de guerre quarante mille au moins chaque année pour le service de la flotte, et si on n'avait pas le droit de les faire marcher, on ne pourrait point l'armer (1).
L'enrôlement des gens de mer existe donc pendant tout le temps qu'ils naviguent et servent, soit à la pêche, soit au cabotage, soit dans les voyages de long cours.
Mais comment les matelots doivent-ils leur service à la flotte? Il paraît juste de les appeler
à leur tour pour ce service, et c'est au moment de l'appel que l'enrôlement qui a lieu d'abord devient pour eux une sorte de conscription, de manière qu'on peut dire qu'un bomme de mer s'est enrôlé volontairement pour sa profession, et que son enrôlement le soumet à une conscription dans tous les cas où l'Etat a besoin de ses services (f).
Cependant, les principes qui forment notre Constitution exigent que l'on mette à cette conscription tous les adoucissements possibles. Premièrement, ii est juste que chaque matelot ne soit appelé qu'à son tour. Secondement, qu'il ne serve sur la flotte qu'un certain temps. Troisièmement, qu'il reçoive une récompense en se rendant à bord du vaisseau de guerre; cette prime serait de deux à trois louis pour un matelot appelé à son tour pour le service, et double pour tout matelot qui se présenterait de bonne volonté. C'est ainsi que les Anglais, pour adoucir ce que la presse a d'odieux, ont soin d'engager au service de leur flotte tous les matelots, soit nationaux, soit étrangers, en leur accordant une récompense considérable pour leur enrôlement volontaire.
J'ai dit qu'il était juste qu'un matelot ne dût son service sur la flotte que pour un temps, et je pense qu'il devrait être libre pendant un ou deux ans après trois années de service consécutives. 11 conviendrait enfin que tout matelot qui aurait servi pendant six années de service se retirât avec une paye quelconque qui lui serait conservée toute sa vie, et pût à son tour, en reprenant son service sur les vaisseaux de guerre, parvenir aux grades d'officiers mariniers, et même aux grades supérieurs, lorsqu'il aurait donné des preuves de valeur, de capacité et de bonne conduite, d'après les témoignages de tous les officiers de tout grade avec lesquels il aurait servi.
Cet espoir des récompenses militaires est le moyen le plus sûr de se procurer les meilleurs matelots, et il fait disparaître tout ce que le service obligé peut avoir d'inconvénients.
Ainsi, un matelot qui a suivi sa profession pendant un ou deux ans, ou pendant deux voyages, est un homme classé, et qui est censé avoir formé un engagement volontaire et devoir, au besoin, un service à l'Etat, pendant tout le temps qu'il navigue; en temps de guerre, ce matelot doit servir à tour de rôle et pendant un têmps limité. S'il devient vétéran au service, il est à la paye de l'Etat, à la paye simple lorsqu'il ne sert point, et à la paye entière lorsqu'il sert. Enfin, par l'ancienneté et l'importance de ses services, il a droit de parvenir aux grades militaires.
J'ai fait voir que le travail étant la source de la reproduction des richesses, l'agriculture et l'industrie devaient être encouragées. Qu'à cet effet, ii fallait faciliter tous les moyens d'échange et la libre circulation à l'intérieur, l'exportation à l'extérieur du superflu de notre agriculture et de notre industrie. J'ai dit que c'était le commerce qui s'occupait des moyens de l'exportation; que le commerce maritime était spécialement destiné à exporter le superflu des produits d'une nation et à vérifier son travail. J'ai ajouté qu'une nation qui possédait parmi les pro-
duits de son sol des objets précieux et abondants d'échange, et à qui son industrie en fournissait d'également intéressants, qui avait, par ses ports, communication avec toutes les mers de l'Europe et de l'univers, était destinée à être une nation commerçante. J'ai fait connaître que la France possédait ies objets d'échange les plus précieux, et qu'elle possédait une vaste étendue de côtes et de ports situés sur trois mers. J'ai dit encore que le commerce maritime, pour prospérer, a besoin d'être protégé en temps de paix et défendu en temps de guerre, que l'obligation de défendre et de protéger le commerce et la navigation entraînait la nécessité d'avoir une armée navale. J'ai avancé qu'il était inutile à une puissance maritime d'avoir une armée navale si elle ne pouvait pas l'avoir égale à celle de la puissance maritime la plus formidable de l'Europe. J'ai ajouté que l'immensité des forêts du royaume, une masse considérable de métal de fonte en ce moment à sa disposition, des récoltes abondantes en chanvre, la facilité de se procurer par des échanges ce qui pourrait lui manquer de cette matière, la mettrait en état d'avoir une flotte comparable à celle de l'Angleterre. J'ai prouvé que la force navale étant instituée pour la prospérité du commerce maritime, les vaisseaux de guerre, au lieu d'imposer des corvées aux vaisseaux marchands, soit dans les ports, soit à la mer, leur devaient secours et protection en toute occasion ; que de là dérivait la nécessité des convois en toute circonstance un peu dangereuse.
J'ai tâché de prouver que la classification était un enrôlement volontaire; qu'un matelot enrôlé devait être considéré comme un soldat en semestre, ou comme celui qui n'avait pas encore rejoint ses drapeaux; que la classification et l'enrôlement entraînaient 1a nécessité du service sur la flotte, par la conscription en temps de guerre. J'ai établi les règles par lesquelles cette loi pouvait être adoucie.
D'après ces vues, je propose les articles constitutionnels suivants:
ARTICLES CONSTITUTIONNELS DE LA MARINE.
Art. 1er. Le roi sera le chef suprême de l'armée navale de
France.
Art. 2. Les forces navales de France doivent être égales à celles de la puissance la plus considérable de l'Europe.
Art. 3. Les forces navales seront divisées en diverses escadres, suivant les formes de division qui seront proposées par le comité de marine, ou suivant celles adoptées et suivies à présent.
Art. 4. Ces forces seront placées de manière à se trouver le plus à portée de faire tête aux puissances rivales.
Art. 5. Les vaisseaux de guerre, frégates ou corvettes seront spécialement, et avant tout autre service, employés à la protection du commerce, soit en paix, soit en guerre.
Art. 6. A la mer, les vaisseaux de guerre seront obligés d'accorder tout secours aux vaisseaux du commerce, lorsqu'ils en seront requis.
Art. 7. A la première menace de guerre, il sera armé des vaisseaux, frégates et corvettes en nombre suffisant pour donner convoi aux vaisseaux partant pour l'Inde, pour nos colonies ou pour les ports étrangers, ou aux bâtiments destinés aux cabotage et à ceux destinés à la pêche.
Art. 8. Il sera également armé des vaisseaux
de guerre, frégates ou corvettes, pour écarter de nos côtes les vaisseaux ennemis.
Art. 9. Il sera armé des vaisseaux destinés à ramener dans nos ports les navires du commerce revenant de l'Inde, des colonies ou de la pêche, ou pour rester en station, pendant un temps qui sera déterminé, dans l'Inde, dans les colonies et dans les parages où se fait la pêche.
Art. 10. Le service qui sera le plus glorieux pour un officier de la marine royale, aux yeux ae la nation, sera celui des convois donnés aux vaisseaux du commerce, ainsi que les combats soutenus pour les défendre.
Art. 11. Dans les cas de guerre entre d'autres puissances, il sera armé des forces suffisantes pour faire respecter le pavillon français et protéger le commerce contre toutes les entreprises des puissances belligérantes.
Il sera, chaque année, en temps de paix, mis en commission une partie des vaisseaux de guerre, qui, à cet effet, seront radoubés, carénés, gréés et armés en partie. Quelques-uns d'entre eux, plusieurs frégates et corvettes, seront armés complètement et envoyés en diverses stations.
Art. 12. Chaque législature fixera tous les ans les dépenses du département de la marine.
Art. 13. Tout homme qui sera inscrit sur des rôles d'équipages pendant deux voyages consécutifs, ou pendant deux ans de pêche ou de cabotage, sera censé enrôlé, et classé en conséquence, et, au besoin, il devra un service sur la flotte pendant trois années consécutives, et ce service sera dû à tour de rôle.
Art. 14. Lorsqu'un matelot sera appelé à son tour pour le service, il aura, par forme d'engagement, une prime qui sera fixée par les législatures, et s il sert de bonne volonté avant son tour de rôle ou pendant un second terme de trois ans consécutifs, il aura une prime double; cette prime n'aura plus lieu lorsqu'il sera à la paye.
Art. 15. Tout homme entrant au service de la flotte, soit comme novice, soit comme soldat, aura une prime par forme d'enrôlement, et ne sera à la paye qu'après 9 années de service.
Art. 16. Un matelot qui aura servi sur la flotte pendant six années consécutives, aura, en se retirant, la paye simple ou demi-paye pendant sa vie, et il pourra en continuant son service sur les vaisseaux de guerre, parvenir à son rang à tous les grades militaires, d'après les certificats de bonne conduite, de valeur et de capacité qui lui seront donnés par les officiers de/ vaisseaux sur lesquels il aura servi, et après avoir soutenu les examens qui seront ordonnés.
Art. 17. Nul officier ne pourra être cassé et exclus du service que par le jugement d'un conseil de guerre ; nul officier marinier, nul matelot canonnier ne pourra être dégradé que par le jugement d'un conseil de guerre assemblé, et suivant les formes qui seront prescrites.
Art. 18. Un matelot qui aura commis des fautes légères sera puni par un simple retranchement de ration ; s'il a commis des fautes graves et prévues par le code de marine, il sera puni après avoir été jugé par un conseil de guerre assemblé sur le vaisseau: s'il a commis des fautes capitales, il sera mis aux fers et jugé au premier port de France où le vaisseau touchera, suivant les formes qui seront prescrites.
Art.' 19. Désormais, il n'y aura plus d'élèves de la marine : tout homme qui voudra suivre la carrière du service sur les vaisseaux de guerre le fera en qualité de volontaire; il lui faudra sept années efieçtives de service de mer et de
navigation sur les vaisseaux de guerre en cette qualité pour être fait lieutenant, après les examens préalablement subis.
Art. 20. Tout capitaine de vaisseau marchand qui aura servi trois ans en qualité de volontaire sur les vaisseaux de guerre, et qui aura fait en outre six campagnes de voyages de long cours sur mer, en qualité de Capitaihe, pourra servir sur les vaisseaux de guerre en qualité de lieutenant, et prendra rang du jour de sou admission.
Art. 21. Les voyages de pêche au banc de Terre-Neuve ou de pêche de la baleine seront réputés voyages de long cours, ainsi qu'une caravane de mer de deux années dans la Méditerranée, pendant 18 mois consécutifs ; sera réputée aussi voyage de long cours une croisière de six mois au moins sur un corsaire.
Art. 22. Des actions éclatantes de valeur, consignées dans les journaux des vaisseaux sur lesquels un homme de mer aura servi, et sur les registres de service tenus par les membres de la division à laquelle il appartiendra, le feront placer au premier rang dans toutes les promotions qui auront lieu, et lui serviront pour obtenir de préférence le commandement des vaisseaux, frégates ou corvettes, ou pour obtenir d'autres.commissions honorables.
Art. 23. Sa Majesté donnera le commandement des vaisseaux de tous les rangs; elle choisira parmi deux officiers qui lui seront présentés par le conseil de la division à laquelle ils appartiendront. Le choix des officiers pour le commandement des escadres ou des flottes sera à la volonté du roi, c'est-à-dire que le roi fera la promotion des officiers généraux, et dans ceux-ci préférera ceux qu'il jugera les plus dignes de commander; et sera réputé escadre un armement composé de plus de deux vaisseaux de ligne.
Art. 24. Un capitaine ne pourra point abandonner son vaisseau s'il est en péril; et dans le cas où il sera en feu, échoué ou coulant bas d'eau, il en sortira le dernier, après avoir fait constater, dans un procès-verbal signé des officiers, qu'il est impossible de sauver le vaisseau.
Art. 25. Un capitaine ne pourra amener le pavillon que lorsqu'il aura perdu tous ses agrès, ses mâts, la plus grande partie de son équipage, ou lorsque le vaisseau coulera bas d'eau.
Art. 26. Dans les cas indiqués par les articles 22 et 23, un capitaine, à son arrivée, sera obligé de subir un conseil de guerre qui jugera suivant les formes qui seront prescrites.
Art. 27. un lieutenant des vaisseaux de guerre pourra, pendant la paix, commander les vaisseaux du commerce ; mais lorsqu'il sera promu au rang de capitaine, il ne pourra servir que sur ies vaisseaux de guerre.
Art. 28. Nul commandant de vaisseaux de guerre n'aura de table pour tous les officiers de son bord, il ne sera tenu d'avoir à sa table que son second capitaine ; il pourra seulement, s'il le veut, recevoir a sa table un officier servant sur son vaisseau, et ce, chacun à son tour.
Art. 29. Un pilote pourra parvenir au grade de lieutenant, après sept années de service ; un officier marinier pourra également être promu au grade d'officier après sept années de service en cette qualité, et après avoir préalablement subi les examens, et sur les certificats de valeur et de bonne conduite donnés par les officiers de tout grade de la division à laquelle il appartiendra.
Observations sur le rapport fait à l'Assemblée nationale et sur le décret pour la marine,
du
Ce décret a été reçu avec un empressement proportionné à l'impatience de ceux qui l'attendaient. Quelque respect que j'aie pour les décrets dont l'exécution est toujours obligatoire, cependant je demande la permission de proposer quelques doutes sur le3 articles 6, 7, 12 et 13. Ces doutes seront précédés d'observations sur le rapport lui-même ; il est fait, sans doute, avec beaucoup d'art et beaucoup d'esprit, mais il renferme des propositions hasardées et des inexactitudes sur lesquelles je donnerai quelques réflexions.
1° On y représente Colbert comme digne de la confiance d'un peuple libre, et son fils Seignelay comme ayant mis ae côté le mérite pour ne favoriser que les gentilshommes. J'ai peine à croire ue l'Assemblée nationale regarde comme digne e sa confiance un ministre qui, dans une dépêche écrite à un gouverneur au Canada, et lue a la tribune par le comte de Clermont-Tonnerre, mandait qu'iZ fallait empêcher que plusieurs citoyens ne se réunissent pour faire des demandes quelconques, parce que cela pourrait faire naître l'idée d une convocation des Etats généraux, dont Louis XIV ne voulait pas entendre parler.
Je crois avoir prouvé dans mes différents mémoires, partie première, page 6 et page 54 de la suite, que le régime administratif de la marine, établi par Colbert, était non seulement impopulaire, mais très despotique : c'est cependant a ce régime qu'on veut nous ramener.
La mort a surpris Colbert, sans doute, puisqu'il est mort à cinquante-neuf ans, après une maladie de sept jours, mais il avait été contrôleur général pendant vingt ans et ministre de la marine pendant douze. Ainsi, il faut distinguer les différentes époques du ministère de Golbert, et ne lui attribuer les établissements relatifs à la marine que depuis 1671, alors qu'il remplaça Lyonne ; à cette époque, il y avait déjà dans ce corps des gentilshommes des gens de la plus haute qualité.
En 1661, il n'y avait qu'un vaisseau de 70 canons, deux de 60, deux de 54, deux de 48, deux de 46, deux de 44 et sept frégates de 30.
Mais en 1667, l'armée navale était déjà de trois vaisseaux de 80 canons, un de 72, huit de 70, un de 66, un de 64, cinq de 60, cinq de 56, deux de 52, trois de 50, deux de 48, cinq de 46, neuf de 44, trois de 42, trois de 40, sept de 38, deux de 36, deux de 34, cinq de 30, deux de 24. L'augmentation des vaisseaux devenant progressive, celle des officiers le fut à proportion ; la plupart de ceux-ci furent choisis dans l'ordre de Malte ; cet ordre ne pouvant pas fournir tout le supplément d'officiers, Colbert, chargé en 1671 de ce département, en appela de Hollande ; il en appela du commerce, et sans doute il donna la préférence au mérite.
Exemple frappant d'un homme élevé au ministère à cause de se3 talents, il était intéressé à justifier le choix de son maître par ceux qu'il faisait lui-même ; je ne sais si le commerce de
France put fournir alors beaucoup de sujets, car en 1691, c'est-à-dire huit ans après la mort de cet homme, dont le ministère avait été si favorable aux arts, aux manufactures et au commerce, il n'y avait dans tous les ports de France que 745 navires de commerce, 2,835 barques, 1,138 chaloupes, 3,492 bateaux, total : 8,310 bâtiments de commerce, tant grands que petits. Cet état est tiré d'un registre manuscrit que j'ai, des dépenses de la marine des années 1661 et suivantes, jus-ques et y compris 11664; on y trouve, sur une feuille volante, l'état de la marine de France en 1661, comparé à celui des années 1686,1687,1688, 1689, 1690 ; le même registre contient la liste des vaisseaux armés et des officiers avec leurs apostilles, pour les années 1666, 1667 et 1668 : en les parcourant, on voit beaucoup de noms nobles alors.
En 1662, on voit sur le même état 20,135 livres de dépenses pour les gardes-marines, ils ne reparaissent plus dans les états postérieurs ; ils n'ont été établis en compagnie qu'en 1682, un an avant sa mort. Je suis entré dans ces détails pour faire voir que, sous Colbert et avant lui, les gentilshommes avaient la principale part au service de la mer.
Le rapporteur sépare le ministère de Seignelay de celui de Golbert, je pense que c'est à tort : le même esprit y a heureusement présidé. Imitons la postérité, elle est juste : elle a mis ces deux ministres à leur place ; Seignelay avait de grands talents, mais la gloire de son père a si fort obscurci la sienne qu'on ne le cite presque jamais. L'ordonnance de 1689, compilée par ses soins, et celle de 1681, portent l'une et l'autre le nom de Golbert.
Gardons-nous de donner à ce dernier un patriotisme que rien ne dénote avoir été dans son cœur ; personne n'a mieux servi le despotisme.
Ami de l'ordre et même de l'économie, il ne l'était pas de la forme juciciaire: vindicatif, non seulement il poursuivait Fouquet, mais il le faisait poursuivre par un homme qu'il s'était attaché.
N'attribuons point à Seignelay /es malheurs et les dépenses de la marine ; il n'en a vu que la gloire, et le combat de la Hogue, auquel il a peu survécu, ne l'avait pas obscurcie.
Les malheurs suivants de la marine ont eu son infériorité pour cause, et ses dépenses sont dues à l'impéritie de ses administrateurs de tous les genres.
La marine, régie par la dynastie des Pheli-peaux, a insensiblement perdu tout son éclat.
Le combat de Malaga a été la dernière époque où elle ait paru avec son ancien brillant, et si Duguay-Trouin n'avait pas été introduit dans son sein, ses fastes n'offriraient rien qui pût consoler de ses disgrâces.
L'auteur du rapport assure qu'ayant la dernière guerre, c'était une opinion presque générale que les vaisseaux devaient se battre plutôt pour l'honneur du pavillon français que pour soutenir le commerce maritime. Je peux assurer que rien n'est moins exact que cette assertion.
L'auteur ignore sans doute que la guerre de 1744 n'a été si malheureuse que parce que les vaisseaux de guerre français avaient ordre d'escorter ceux du commerce. Voyez mon mémoire sur le système à suivre dans une guerre purement maritime avec l'Angleterre.
L'ennemi, averti fort exactement et longtemps à l'avance du départ de nos flottes, croisait sur la route et les rencontrait toujours.
Les commandants français mettaient en panne pour faire défiler tous les vaisseaux de commerce ; ils ne faisaient route qu'après avoir vu passer le moins bon voilier.
Dans cette position, ils étaient joints par un ennemi supérieur ; ils rendaient un combat inégal, dont la fin ne pouvait être que malheureuse.
Telle a été, en 1747, la cause de la prise de l'escadre aux ordres de la Jonquière, par l'amiral Anson, et du combat de l'escadre commandée par l'Etenduere, contre l'amiral Hawke; cette journée fut glorieuse et funeste. Le Tonnant, commandé par le général, manqua de succomber, malgré son feu prodigieux , et les Anglais, fatigués d'un combat long et sanglant, furent obligés de l'abandonner.
Le comte de Vaudreuil, que son poste avait jusque-là fixé à la tête de l'escadre française, vira de bord, passa entre son général et un vaisseau anglais, dont il *eçut la bordée, jeta une amarre au Tonnant, le remorqua et l'emmena à Brest.
Si la modestie de son fils, aujourd'hui lieutenant général des armées navales, président du comité de marine, ne lui a pas permis de rappeler une action aussi honorable à la mémoire de son père, je ne peux me dispenser de citer ce combat comme une suite du principe avoué, adopté et pratiqué de tous les temps par la marine, que les vaisseaux de guerre doivent se sacrifier pour ceux qu'ils escortent.
Des huit vaisseaux, qui composaient l'escadre dont je parle, six furent pris, mais toute la flotte composée de 240 voiles, arriva saine et sauve à sa destination, sous l'escorte d'une frégate commandée par d'Essonville; il est donc prouvé, qu'avant la dernière guerre, on se battait à outrance pour soutenir le commerce maritime.
Ainsi, l'armée navale de France a toujours regardé comme un de ses plus saints devoirs celui de protéger le commerce maritime et les possessions territoriales.
A présent, je demande ce que peut avoir de répréhensible ce propos ordinaire qu'on se battait pour l'honneur du pavillon français : 1° se battre pour l'honneur est une expression chevaleresque, si on veut, mais qui ne peut qu'honorer ceux dont elle est la devise; 2° un vaisseau n'est-il pas la patrie du marin, tant qu'il y est embarqué? Se battre pour l'honneur de son pavillon, n'est-ce pas se battre pour l'honneur de la patrie? Les marins seuls avaient donc une patrie, tandis que les autres soupiraient pour en avoir une. Cette expression se battre pour l'honneur du pavillon français est donc très patriotique, et beaucoup plus nationale qu'elle ne le paraît aux yeux de ceux qui la critiquent.
Personne, je pense, ne trouvera mes réflexions déplacées; elles ont pour base la vérité à laquelle je n'ai rien prêté d'étranger.
Je viens aux doutes que fait naître à mes yeux le décret lu, mis aux voix et adopté sans discussion le 26 juin.
Doutes et questions sur les articles 6, 7, 12, 13 de ce décret.
« Art. 6. Tous les citoyens sont également « admissibles aux emplois civils et militaires de « ia marine, et les législateurs ni le pouvoir exé-« cutif ne pourront directement ni indirectement « porter atteinte à ce décret.
« Art. 7. Il n'y aura de distinction entre les « officiers civils et militaires que celles des « grades, eC ils seront tous susceptibles d'avance-« ment selon les règles qui seront déterminées.
« Art. 12. Le ministre de la marine et tous les « agents, tant civils que militaires, seront res-« ponsables selon les règles et les cas qui seront « déterminés.
« Art. 13. Aucun officier militaire ne pourra « être destitué que par le jugement d'un conseil « de guerre, ni aucun officier civil, que d'après' « l'avis d'un conseil d'administration. »
J'observerai d'abord que l'Assemblée nationale n'a pas décrété l'existence des deux corps, l'un sous le nom d'officiers civils ; l'autre sous celui d'officiers militaires ; si elle l'avait fait, je respecterais le décret, et je garderais le silence. Mais comme cette importante question n'a pas été discutée, je demande la permission de présenter quelques doutes sur cette matière.
Je compare ce décret avec celui du 21 mars 1790, concernant l'armée. Dans celui-ci, il n'est point du tout question d'officiers civils. L'armée de terre n'en a donc pas besoin ; mais sont-ils nécessaires pour l'armée navale ? Je crois avoir prouvé le contraire dans mes Mémoires sur l'administration de la marine et des colonies.
D'après cette observation, je prends la liberté d'établir mes doutes : 1° Est-il constitutionnel d'avoir dans l'Empire un corps administratif quelconque perpétuel, dont les membres ne puissent être ni changés ni révoqués?
Tous les corps chargés de l'administration dans les municipalités, les districts et les départements, sont élus pour un temps seulement. Les magistrats même sont amovibles.
2° Si par l'article 7, il n'y a d'autre distinction entre les officiers civils et militaires que celle de leurs grades, ils ont donc les mêmes fonctions, car jusqu'à présent les fonctions différentes ont distingué les corps, comme les grades ont distingué les individus des mêmes corps.
3° Est-il constitutionnel de donner à aucun secrétaire d'État quelconque, pour l'aider dans ses fonctions administratives, un corps dont il ne pourra changer ni destituer les membres s'il en est mécontent?
Le roi est le chef snprême de l'armée navale, c'est-à-dire de la marine armée et à la mer. Mais il est aussi l'administrateur de cette même marine désarmée et renfermée dans [les ports. Les arsenaux où sont logés tous les agrès, tous les canons, toutes les munitions sont dans sa dépendance.
C'est autant pour régir cette marine désarmée que pour donner des ordres à la marine armée, qu'il nomme un agent de son pouvoir sous le nom de secrétaire d'Etat ; ce ministre devenu responsable a deux fonctions différentes à remplir ; la première, de disposer tout pour l'armement des vaisseaux ; la seconde, de les faire commander et de les envoyer à la mer.
Par la première, il ordonne à tous ses subordonnés, en son propre nom, de faire toutes les recettes et les préparatifs nécessaires à l'armement.
Par la seconde, il n'ordonne pas en son nom, mais il parle au nom du roi : il transmet aux militaires les ordres de Sa Majesté, soit pour prendre le commandement des vaisseaux, soit pour mettre à la voile et exécuter pendant la campagne les instructions qu'il leur adresse. C'est alors que toutes ses dépêches doivent être signées du roi et contre-signées par lui.
Voilà donc deux formes différentes d'écrire, l'une aux administrateurs, parlant en son nom ; l'autre aux militaires, au nom du roi.
Tous les délégués en administration sont donc à ses ordres directement, sans en excepter les militaires qui deviennent officiers civils dans les différents détails dont ils se chargent, comme les commandants, les directeurs généraux et particuliers des ports, les directeurs de l'artillerie, des constructions, etc. Ils doivent donc être amovibles au gré du secrétaire d'Etat, et destitués de leurs fonctions civiles, s'il juge qu'ils ne les remplissent pas bien.
J'ouvre la liste de la marine et j'y vois dès les premières pages vingt membres, soit du conseil de marine, soit du comité d'administration, dont six maîtres des requêtes, des officiers généraux de terre, de mer, des capitaines de vaisseaux.
J'y vois des commandants en chef en second des ports, des directeurs d'artillerie, un directeur général des constructions, des ingénieurs-constructeurs et sous-constructeurs, l'inspecteur général et l'intendant des classes, tous les officiers militaires et civils attachés à ce régime, quatre intendants de la marine, sept commissaires généraux, huit contrôleurs de la marine, vingt-sept commissaires, sept commissaires surnuméraires, quatre sous-contrôleurs, neu^ gardes-magasins, deux sous-gardes-magasins.
Les premiers commis ne sont point compris dans cette liste ; mais quelle prodigieuse quantité d'officiers civils, depuis ceux qui composent le conseil de la marine, le comité de l'administration jusqu'au dernier syndic des classes? Je ne parle point de ceux qui sont employés dans les colonies, je m'en rapporte à leurs habitants pour s'en débarrasser.
Je le demande : tous ces officiers civils sont donc indestituables sans l'avis du conseil d'administration, et cependant leur chef véritable, le secrétaire d'Etat, qui leur donne des ordres en son nom, qui est responsable, comptable à la nation, ce chef est amovible à la volonté du roi. Son sort me paraît plus fâcheux que celui de ses subalternes. Si on me demande pourquoi les officiers civils seraient, pour cette partie, amovibles à la volonté du secrétaire d'Etat, et qu'en môme temps les officiers militaires ne peuvent être destitués que par le jugement d'un conseil de guerre, je répondrai que le ministre répond non-seulement des ordres qu'il donne, concernant l'administration, mais même de leur exécution, parce que les moyens sont dans ses mains, et que dès lors ses délégués ne sont responsables, qu'à lui.
Il n'en est pas de même des militaires. Le ministre est responsable des ordres qu'il leur donne et ceux-ci répondent de leur exécution, parce que les moyens d'exécution dépendent d'eux et non du ministre, qui n'a pas pu les leur prescrire. Ils doivent donc être responsables de leur conduite vis-à-vis de la nation.
Au reste, mon plan d'administration n'est point sujet à cette distinction, puisque je n'y emploie que peu d'agents, et tous pris parmi les agents nécessaires.
Dans mon registre manuscrit en l'année 1669, on ne trouve point d'intendants, mais quatre commissaires généraux et treize commissaires ordinaires.
4° N'est-il point impolitique de créer constitu-tionnellement deux corps qui renouvelleront les débats scandaleux qui ont existé si longtemps ?
Je suppose que l'Assemblée nationale supprime tous les corps de la marine actuels, qu'elle con-
gédie tous les officiers qui y sont employés, et qu'elle les remplace par deux corps sous le nom de civil et militaire, composés d'individus nouveaux, choisis dans l'élite des gens les plus instruits, les mieux disposés à bien vivre ensemble. Qu'arrivera-t-il ? Tous ces citoyens, parvenus à leurs destinations, commenceront par se constituer, conformément au décret de l'Assemblée nationale, ils se partageront leurs fonctions respectives, selon leurs grades et les corps dont ils sont membres. Dans un établissement mixte, comme celui-ci, est-il possible de tirer une ligne de démarcation, dont personne ne puisse franchir les bornes ? Chacun y mettra sans doute du sien d'abord, mais on ne tardera pas à s'ennuyer d'une gêne perpétuelle et réciproque : la bonne intelligence cessera, et ces nouveaux officiers civils et militaires feront comme les anciens, ils auront leurs prétentions et leurs querelles. Il n'y a qu'une seule hypothèse dans laquelle les fonctions des deux corps seraient parfaitement séparées. C'est celle où les officiers civils armeraient les vaisseaux et les mettraient en rade; là, les.militaires en prendraient le commandement : mais quels seront les militaires assez confiants pour commander des vaisseaux à l'armement desquels ils n'auront pas présidé? et quels seraient les administrateurs assez intrépides, pour se charger des événements, comme fit Arnoux,. intendant de Toulon, qui prit sur lui d'envoyer à la mer des vaisseaux commandés par le chevalier de Tour-ville ?
Tout officier commandant un bâtiment du roi en signe l'inventaire : par là il reconnaît ia bonté de tout ce qu'il renferme ; et, dès lors, il est responsable de toutes les consommations. Peut-on çxiger qu'il remplisse cette formalité sans avoir vérifié parlai ou par ses subalternes l'état qu'il a signé ?
Ce commandant est de plus responsable de l'exécution des ordres qu'il a reçus du roi : autre genre de responsabilité qui n'a jusqu'à présent presque jamais eu d'autre juge que la volonté arbitraire du ministre.
Quelque chose qu'on fasse, s'il y a deux corps, leurs fonctions seront mixtes, excepté celle des fonds dont les militaires ne doivent jamais être Chargés.
L'Assemblée nationale a détruit tous les corps, elle a changé le nom des provinces pour en détruire l'esprit ; renfermera-t-elle dans une enceinte aussi resserrée que l'est celle d'un port ou d'un arsenal, deux corps sans cesse en regard vis-à-vis l'un de l'autre, et se détestant dès leur origine ?
Fera-t-elle embarquer dans un vaisseau un citoyen à prétention qui se croira destiné à inspecter et même à ordonner ou à défendre les consommations, tandis que son emploi véritable n'est que de les constater ?
N'est-il pas certain que les intendants prétendent régler les consommations différentes ? (Voy. les différents mémoires publiés depuis peu sur cet objet).
5° Les intendants de province sont tous supprimés, la marine sera-t-elle le seul corps où on les conservera?
6° Enfin, n'est-il pas plus constitutionnel, plus politique et moins dispendieux de n'employer pour l'administration que les agents déjà nécessaires ? Ge sont les militaires.
On ne peut faire de recettes ni de consommation sans leur avis motivé, et même sans leur signature.
N'est-il pas naturel de s'en rapporter à eux pour ces mêmes consommations ? lis auront l'intérêt le plus vif à les faire, suivant la méthode la plus économique et la plus utile.
Voyez pour la responsabilité et la comptabilité les règles que j'ai établies dans mes reflexions sur le rapport d'un des membres du comité de marine, pages 54 et suivantes de la suite des mémoires. L'auteur de ces doutes a-t-il tort de désirer que l'importante question de deux corps distincts dans la marine soit discutée dans une assemblée nombreuse?
On propose de faire un nouveau Code pénal: rien de mieux sans doute que de proportionner les peines aux délits et d'abroger des lois ennemies de l'humanité; cependant ne serait-il pas plus expédient de prendre pour cette opération tout le temps nécessaire, de ne rien précipiter, et de rendre un décret provisoire qui ordonnât d'observer les anciennesordonnances, comme on a fait sur le régime des classes? D'ailleurs ne serait-il pas sage de ne faire ce Code qu'après avoir achevé la Constitution, car il me paraît qu'avant de prescrire des peines, il faut imposer des devoirs.
On distinguera, sans doute, les délits civils, c'est-à-dire contre l'administration, des délits militaires ; ceux-ci sont fort graves, surtout quand ils sont un manque de subordination, et je conçois que, vu leur importance et leur rareté, ils doivent être jugés par un conseil de guerre.
Si les autres peuvent être plus fréquents, ils sont aussi moins graves : faudra-t-ii toujours demander son avis à un conseil d'administration? et le secrétaire d'Etat ne devra-t-il pas avoir la police intérieure sur tous les officiers civils qui sont, à proprement parler, membres du corps dont il est le chef?
Ce n'est point assez de décerner des peines contre les délits: il faut aussi fixer les récompenses, et cette détermination n'est peut-être pas trop aisée.
Heureuse jeunesse I vous entrez dans le monde sous les auspices les plus favorables, je vous en félicite. Tous vos pas seront marqués par la loi dans la carrière que vous embrasserez, vous n'avez pas eu la peine de conquérir la liberté, vous n'aurez que celle de la conserver. Vous ne ramperez point sous l'empire d'un ministre ignorant etaltier; remplissez bien vos devoirs, vous en aurez la récompense sans être obligé de la solliciter dans l'antichambre de ce ministre ou d'un autre personnage moins élevé en dignité, mais tout aussi important ; soyez citoyen, servez bien la patrie, vous n'aurez pas à jouer le triste rôle de solliciteur; les grâces viendront au devant de vous; est-il un sort plus agréable? Dans votre jeunesse vous n'essuierez pas d'injustice, oh ne vous promettra pas une grâce sans vous la donner, on n'en éludera pas l'accomplissement. Vous n'aurez donc pas dans votre vieillesse la douleur de vous entendre dire que votre demande est surannée, qu'il y a prescription, Téponse digne de ministres façonnés par le dispotisme et élevés par lui aux postes qu'ils occupent. Peut-il jamais y avoir de prescription contre une dette légitime ? Non, sans doute, 1 ancienneté de son titre la rend encore plus sacrée; la prescription ne peut s'exercer que contre une possession injuste qu'on ne saurait faire cesser trop tôt, mais une récompense, une décoration promise pour dédommagement d'une injustice commise envers un individu quelconque doit être accordée aussitôt qu'elle est réclamée. Puisse le Code pénal, qu'on promet, être accompagné du tarif des récompenses ! c'est
le plus beau présent que les législateurs puissent faire, dans leur sagesse, à la marine.
C'est pour la guerre qu'on a besoin d'une armée, il faut donc créer l'armée uniquement en vue de la guerre.
Les militaires estiment que ni 140 ni 150,000 hommes ne suffiraient en temps de guerre ; ils pensent qu'il en faudrait au moins 200,000, c'est donc Une armée de 200,000 hommes au moins qu'il est nécessaire de créer.
Si l'on tenait constamment sous les armes deux centmille hommesaumoins, onferait unedépense excessive et ruineuse pour l'Etat.
Si l'on ne tenait pas constamment sous les armes un grand nombre d'hommes, on n'autfait pour la guerre ni soldats exercés, ni officiers instruits.
Il faut donc avoir, même pendant ]a paix, des troupes constamment sous les armes ; mais leur nombre doit être exactement proportionné au besoin de l'instruction.
Les corps actifs et continuellement exercés pendant la paix doivent être à la fois le séminaire de l'armée, et des cadres préparés pour recevoir au moment de la guerre une grande partie des soldats qui ne sont pas habituellement sons les armes.
Nous avons à notre solde 10 à 11,000 fantassins suisse3, et à peu prés autant de fantassins allemands, irlandais et liégeois.
Les Suisses sont à conserver, par beaucoup de considérations, seulement on doit chercher à rendre les conditions de leur traité moins onéreuses à l'Etat, ce qui n'est peut-être pas extrêmement difficile.
Il convient aussi de conserver 5 à 6,000 étrangers, pour recevoir à la guerre les déserteurs ennemis, qu'il n'est plus possible d'admettre dans les corps nationaux.
Si nous conservons à notre solde 10 à 11,000 Suisses, 5 à 6,000 étrangers, nous n'avons plus besoin de lever chez nous que 184,000 hommes, pour avoir une armée forte de 200 ,OUO.
L'infanterie doit être plus nombreuse que la cavalerie, et celle-ci plus nombreuse encore que l'artillerie. La première chose à faire est d'établir la juste proportion entre ces trois armes, et de l'établir en vue de la guerre, sur une masse de 200,000 hommes.
Cette masse étant fixée, on connaîtra combien, dans 184,000 nationaux, nous devons avoir.de fantassins, d'hommes de cheval et de soldats d'artillerie.
Il s'agira de déterminer ensuite combien, dans chacune de ces trois armes, on tiendra d'hommes constamment en activité, en observant qu'il en faut moins dans l'arme qui exige le moins d'instruction, qu'il en faut davantage dans les armes où 1 instrucion est plus difficile et plus longue.
C'est aux militaires à prononcer, je leur présente deux problèmes à résoudre.
1° Sur 200,000 hommes, combien aura-t-on d'infanterie, de cavalerie et d'artillerie ?
2» Combien, dans chaque arme, tiendra-t-on d'hommes constamment en activité, pour remplir l'objet de l'instruction ?
Je dirai sur cela mon idée tout entière, en avertissant que je la subordonne à la détermination précise des gens de l'art.
Sur 200,000 hommes, supposons qu'il en falle environ 150,000 pour l'infanterie, de 36 à 40 pour la cavalerie, et 10,000 pour l'artillerie. J'estime que les quatre cinquièmes des hommes d'artillerie et les deux tiers des hommes de cheval devraient être constamment en activité, mais que ce serait assez du tiers de Pinfanterie, ou de la moitié au plus.
Ainsi l'armée active serait composée, pendant la paix :
de 8,000 hommes d'artillerie,
de 24,000 de cavalerie,
de 68,000 d'infanterie.
En tout de 100,000 hommes.
Des 68,000 hommes d'infanterie, il y aurait à déduire 16,000 Suisses ou autres étrangers.
Il resterait 52,000 nationaux.
La réserve serait donc :
de 2,000 hommes pourl'artil.
de 12,000. pour la cavalerie,
de 86,000 pour l'infanterie.
En tout de . . . 100,000 hommes.
La maison du roi augmenterait la masse des troupes actives, sans augmentation de dépense pour le département de la guerre, parce que celle ae la maison du roi se prend sur la liste civile.
Il y a d'assez grands dangers pour la liberté, à tenir 100,000 hommes constamment sous les armes, sans qu'il faille augmenter ce nombre lorsqu'il n'y a pas de nécessité absolue.
Il n'y a plus besoin d'avoir autant de troupes en activité pendant la paix, puisque le service sera moins considérable et moins fatiguant; vous supprimerez beaucoup de places, et dans celles qui seront conservées, les garnisons n'auront plus à garder les récoltes de l'état-major, et ne seront plus chargées de la police intérieure.
Le surcroît de dépense à faire pour tenir sous les armes au delà de 100,000 hommes, ne pourrait donc être justifié que par la nécessité d'assurer l'instruction de 100,000; mais je propose uu moyen d'éviter ce surcroît de dépense, et de rendre néanmoins les auxiliaires parfaitement propres au service, dès que la guerre mettra dans Je cas de les rassembler.
Des hommes qui ne seraient reçus à s'engager en qualité d'auxiliaires qu'après avoir servi six ans dans l'armée active, et qui, tous les ans, répéteraient, pendant un mois, les leçons que ce long noviciat leur aurait rendues très familières, vaudraient à peu près autant que les autres troupes, et seraient bientôt en état de manœuvrer à côté d'elles, lorsqu'il y aurait nécessité de les réunir. Tout le monde en est convenu.
J'exigerais donc des auxiliaires qu'ils eussent servi six ans dans un corps actif ; celui-là seul qui en sortirait avec un congé honorable, serait admis à contracter un nouvel engagement de six ans comme auxiliaire, il n'aurait alors d'autres obligations que ' celle d'un mois de service, par année, pendant la paix, et celle de marcher en cas de guerre.
Il serait libre à l'auxiliaire de rentrer dans un corps actif quand ii le jugerait à propos, ou de contracter successivement de nouveaux engagements en qualité d'auxiliaire : maître de toutes ses actions, libre comme un autre citoyen, l'auxiliaire ne serait soumis à l'autorité militaire que pendant le rassemblement.
Il y aurait, dans chaque département, un quartier d'assemblée pour tous les auxiliaires domiciliés ou résidant dans l'étendue du département (1).
En un mot, l'auxiliaire serait un soldat formé à la discipline, instruit, éprouvé, auquel on donnerait une plus grande liberté : on doit ce soulagement à ceux qui se destinent à suivre une carrière longue et pénible, dans le cours de laquelle il est juste de leur présenterdes facilités, des encouragements de tout genre, et dont il faut marquer le terme par une bonne et honorable retraite.
Un auxiliaire avec la demi-solde pendant onze mois, solde entière pendant celui de rassemblement, moitié de la masse générale pour son habillement, et un douzième de chacune des autres masses, en raison de l'activité de son service pendant un douzième de l'année, reviendrait a 96 liv. 19 sols 2 den. pour l'infanterie, et à 117 liv. 19 sols 2 den. pour la cavalerie.
Un fantassin sous les armes coûte 251 liv.
Un cavalier non monté revient à 285 livres, terme moyen entre la cavalerie, les dragons, les chasseurs et ies hussards.
Le cheval est un objet à part de 343 liv. l'un dans l'autre.
Vous voyez que le rapport entre la dépense à faire pour un soldat actif et celle à faire pour un auxiliaire, esta peu prés de 27 à 70 dans l'infanterie, de 27 à 67 dans la cavalerie, c'est-à-dire que l'entretien de 70 fantassins auxiliaires ne coûtera pas plus que celui de 27 fantassins actifs ; et qu'avec ce qu'il en coûte pour 27, cavaliers actifs, on en aura pour 67 auxiliaires.'
Ce système offre donc une grande économie d'argent, avec une augmentation considérable de force.
Economie d'argent; la dépense pour 200,000 hommes serait inférieure à celle qu'on propose pour 150,000.
Augmentation de force ; car 150,000 hommes ne suffiraient pas au moment de la guerre, et 200,000 hommes suffiraient, 200,000 hommes façonnés à la discipline, exercés, instruits, éprouvés, tels qu'on les aurait d'après mon pian.
Une armée de 150,000 nommes absorbant 84 millions, ne dispenserait pas de lever 50,000 hommes au premier signal de guerre; mais ces 50,000 recrues seraient incapables de bien servir avant un long apprentissage ; quels qu'ils fussent, leur enrôlement coûterait beaucoup ; leur habillement, leur équipement feraient un nouvel objet de dépense; et prenez garde que celles qui se font au moment de la guerre sont toujours plus grevantes. Il n'est pas question de dire qu'on évitera les frais d'enrôlement par un tirage de milice ; on n'en veut plus; le peuple ne s'y soumettra jamais. L'Assemblée nationale, eu
ordonnant la recherche des moyens par lesquels on pourrait augmenter l'armée pendant la guerre, a imposé pour condition expresse la suppression du tirage de la, mi lice.
Quand il serait permis de recourir à cet odieux moyen, il y aurait de l'inhumanité à ne pas le rendre inutile par l'adoption d'un plan qui, n'offrît-il que cet unique avantage, serait encore très précieux.
On dira qu'avec 150,000 hommes sous les armes, on peut avoir 50,000 auxiliaires; mais je prie qu'on ne perde pas de vue que -150,000 hommes sous les armes absorberont les 84 millions destinés à la guerre et vraisemblablement les dépasseront: il faudra donc un nouveau fonds pour l'entretien de 50,000 auxiliaires. Vous pouvez tout ce qui est bon, utile, nécessaire, vous le pouvez avec moins de 84 millions; ils suffiront et au delà pour entretenir 200,000 hommes prêts à marcher au premier signal. Pourquoi consacreriez-vous au même objet une somme plus forte, sans autre avantage que celui d'avoir constamment sous les armes 50,000 hommes de plus pour menacer davantage notre liberté ?
On doit employer, dans l'armée active, plus d'officiers que n en exige le nombre de soldats de cette armée; car il faut toujours voir le moment de la guerre, où l'on sera dans le cas : 1° d'augmenter les compagnies, par l'incorporation d'une grande partie des auxiliaires; 2° de former quelques nouveaux corps du surplus des -auxiliaires qui ne seront pas incorporés. C'est encore aux gens de l'art à fixer, sous ce point de vue, le nombre des officiers à employer.
Les sous-lieutenants feraient, dans ce gradé, leur noviciat, leur apprentissage du commandement ; ils resteraient à leur corps ; ils n'auraient que des congés de grâce peu fréquents et pour un temps très court ; ies sous-lieutenants sont de très jeunes gens qu'aucuns soins essentiels n'appellent chez eux.
Les lieutenants et les capiaines, plus avancés en âge, ont, pour la plupart, des propriétés, des affaires domestiques, il est juste qu'ils puissent s'en occuper utilement, et qu'on leur do.nne la faculté de présider quelquefois à leurs récoltes, de suivre leurs affaires dans tous les mois de l'année ; comme ils auraient acquis une longue habitude de leur métier, il n'y aurait pas d'inconvénient à permettre que le capitaine et le lieutenant pussent prendre alternativement un congé d'un an.
L'année de congé ne serait pas perdue pour l'instruction de l'officier qui en jouirait, il serait obligé de se trouver au rassemblement des auxiliaires de son département ; les officiers en congé les exerceraient, les commanderaient pendant un mois, sous les ordres de celui d'entre eux que son grade et son ancienneté appelleraient à remplir ies fonctions de chef.
J'augmenterais les appointements des capitaines et des lieutenants ; mais lorsqu'ils prendraient leur congé, ils ne toucheraient que les treize vingt-quatrièmes de leur traitement ; c'est-à-dire que le mois de rassemblement serait payé plein, et que les onze autres ne le serait qu'à moitié ; 1 officier, quand il est chez lui, a infiniment moins de dépense à faire que lorsqu'il est à son corps. Un capitaine d'infanterie de 1" classe a maintenant 2,400 1., je lui en donnerais 3,000 1., pour l'année qu'il passerait au régiment, et 1,625 1. pour celle qu'il passerait chez lui. Au fond ce traitement serait plus avantageux à l'officier et coûterait moins au Trésor public, puisque
l'année commune ne reviendrait qu'à 2,312 livres 10 s.
On aurait de la sorte tout ce qu'il faut d'officiers pour la guerre, sans surcharge pendant la paix, et sans rien ôter à l'instruction.
Ici je m'arrête. Oa me demande comment je me procurerai deux cent mille hommes, si j'attends, pour les enrôler, leur détermination volontaire, et par quels moyens je parviendrai à faire naître et à fixer leur vocation.
Je sens bien qu'avant d'aller plus loin je dois répondre à cette importante question.
Dans un royaume tel que la France, on ne manquera jamais de soldats, lorsqu'ils seront assurés d'être traités comme des hommes et des Français doivent l'être; lorsque la discipline ne sera ni minutieuse, ni avilissante, ni cruelle; lorsqu'on aura plus d'égards qu'on n'en a eu, depuis trente ans, à l'esprit et au caractère de la nation ; lorsqu'on sera fermement persuadé que le soldat n'est pas moins sensible à l'honneur que l'officier, et qu'on peut employer aussi efficacement ce ressort sur l'un que sur l'autre; lorsque nos troupes ne seront plus fatiguées , accablées, tourmentées par l'instabilité des lois qui les régissent, par l'inutilité de leçons qu'elles doivent oublier aussitôt qu'elles les ont apprises, et par ces fastueuses parades où j'ai vu le caprice et la vanité des chefs se jouer si cruellement des forces et'de la santé des hommes, pour honorer l'apparition d'un voyageur, souvent pour satisfaire la curiosité d'une femme.
Nous aurons plus de soldats que nous ne pourrons en admettre, lorsque dans leurs relations avec eux, les chefs n'affecteront plus, au mépris de la raison et de la loi, le Ton, le geste, l'expression d'un maître qui commande a ses esclaves ; mais qu'ils annonceront par leurs discours et leur conduite qu'ils se regardent comme les compagnons, les protecteurs, les pères de ceux auxquels ils ont l'honneur de commander au nom de la patrie.
On parle, sans cesse, de la'nécessité de l'instruction pour les officiers. Oui, sans doute, il faut les instruire, non seulement dans l'art des évolutions et des manœuvres, ce qui suffirait, si elles s'exécutaient par des machines, mais dans l'art de gouverner les hommes qu'ils sont chargés de conduire, et qu'ils doivent rendre aussi heureux que leur situation le permet. Que ies officiers connaissent toute l'étendue de leurs obligations à cet égard; qu'ils les mettent au rang de leurs premiers devoirs ; qu'ils les pratiquent avec bonté ; qu'ils n'imaginent pas être quittes envers l'humanité, pour avoir strictement, sèchement accompli la lettre des ordonnances ; les sujets de mécontentements, de souffrances, de dépit, de désespoir, serbnt plus rares parmi ies soldats ; ils auront plus de motifs d'attachement à leur état, ils sera sûrement plus recherché.
Désormais, le soldat sera mieux payé, mieux nourri, et probablement mieux vêtu. Rien ne lui manquera, ni en santé,* ni en maladie : ses besoins physiques satisfaits, ses forces appréciées et sajgement ménagées, il reste encore beaucoup à faire pour lui. Portez une grande attention sur son moral; faites en 3orte qu'il ne soit ni chagriné, sans raison, ni humilié sans nécessité : qu'au contraire, on le traite avec douceur, et qu'on lui marque de l'intérêt et des égards; qu'on ne dissimule pas ses fautes, mais qu'on remarque aussi le bien qu'il fait; qu'il n'éprouve aucune injustice, ou du moins qu'on ne lui en refuse pas la
réparation, ce serait l'infaillible moyen de rendre la subordination odieuse, insupportable. La maxime que les chefs n'ont jamais tort n'est pas seulement fausse, elle est pernicieuse ; ses effets sont lents, mais certains et toujours funestes.
Si vous laissez au soldat toute la portion de sa liberté, dont le sacrifice n'est pas nécessaire au bien du service, si vous ne souffrez pas dans les corps d'hommes tarés? dont l'association avilit l'homme d'honneur, si les caporaux et sergents cassés ne rentrent pas dans les rangs, et que leur punition ne dégénère pas en outrage cruel pour le soldat ; si vous placez sur sa route des récompenses honorables et pécuniaires ; si vous offrez celles-ci aux moins intelligents ; si vous donnez à ceux qui le sont davantage la certitude d'arriver aux places de sous-officiers, et qu'un certain nombre d'emplois, réservés aux plus dignes, leur ouvre la porte aux plus grands honneurs de l'armée, vous aurez bientôt des soldats à choisir; et si vous établissez un tel ordre de choses qu'il soit possible à un bon sujet, parfaitement instruit, de se retirer chez lui, en abandonnant une partie de la solde, sans que cette facilité, qui devient une première récompense, lui ôte les moyens d'en obtenir une plus grande, sans qu'elle lui fasse perdre aucun des avantages qui l'attendent à la fin de sa carrière, et qui doivent être exactement proportionnés à la nature et à la durée de ses services, je le demande : comment manqueriez-vous de soldats? à présent surtout que les cloîtres sont fermés ; que les séminaires et les études des gens de pratique seront bien moins peuplés ; à présent qu'on supprime tant de ministres de la justice; qu'on réforme tant de commis, d'écrivains, d'employés de toute espèce ; à présent que la Constitution a rendu soldats tous les citoyens, que les exercices militaires vont entrer dans l'éducation nationale, comme un moyen de liberté, et que, jusqu'à nos jeux civiques, périodiquement célébrés avec tout l'appareil et la pompe militaire, vont contribuer si puissamment à entretenir, à développer les inclinations guerrières d'une jeunesse naturellement ardente et remplie de courage.
J'avoue que, si les changements qu'on va faire dans l'armee se réduisaient à déterminer le nombre des régiments, des bataillons, des escadrons et des compagnies, celui des officiers, sous-officiers et soldats, les dispositions qu'on adopterait, à cet égard, fussent-elles excellentes en elles-mêmes, ne rempliraient ni mon objet, ni, je crois, l'attente générale, et ne faciliteraient pas non plus le recrutement de l'armée. Mais je m'imagine qu'on s'élèvera à de plus hautes conceptions.
L'attention due à ce que j'appelle l'organisation mécaniquéde l'armée ne détournera pas de celle qu'on doit essentiellement à la partie morale. Dans cette régénération, dont la France entière attend son bonheur, celle de l'armée ne restera pas incomplète. Les soldats qui la composent nous intéressent à plus d'un titre ; ils sont nos concitoyens, nos frères. Ils sont de plus nos défenseurs. Toujours entraînés par d'anciens pré-- jugés, par de vieilles habitudes, ne distinguerions-nous encore cette fois que les chefs et les officiers? La masse de l'armée disparaîtrait-elle à nos yeux, derrière ceux qui la commandent et qui la conduisent î le mérite de ceux-ci, la considération de leurs services nous ferait-elle oublier les instruments de leurs succès et de leur gloire? Ou croirions-nous avoir assez fait pour Te soldat, parce que nous avons commencé à
réparer la longue et cruelle injustice qu'on lui avait fait éprouver sur la fixation de la solde ? ïl est impossible de s'arrêter à ces pensées. Puisque vous voulez une bonne armée, vous voudrez de bons soldats et vous vous occuperez beaucoup des moyens qui peuvent sûrement vous en procurer de tels. Ceux qui manœuvrent avec une inconcevable précision, sous le bâton et la verge de fer, peuvent être d'admirables automates, mais ne sont pas précisément de bons soldats : nous voulons des nommes courageux, forts, pa-tiens, sobres, obéissants, fidèles, affectionnés; des hommes qui, avec ces qualités, aiment leur état, et qui en soient fiers. Or, on ne peut être fiers que d'un état qui honore celui qui en fait profession. On ne peut aimer que l'état où l'on trouve de justes compensations, sinon des dangers auxquels il expose, au moins des peines et des fatigues dont il est nécessairement accompagné.
Je le comprends à merveille ; sous l'ancien régime, il eût été impossible de réunir par le moyen des enrôlements volontaires deux cent mille hommes d'une bonne espèce : la condition du soldat était alors si déplorable, qu'on était réduit à faire ressource des déserteurs étrangers, à ouvrir un asile dans les régiments à la jeunesse indocile, qui fuyait le couroux mérité de ses parents, à employer mille moyens de séduction pour se procurer des recrues ; on était persuadé qu'une disciplineexcessivement rigoureuse pouvait seule contenir de semblables soldats; elle produisait réellement cet effet sur quelques-uns, mais ce frein toujours impuissant pour les très mauvais sujets, devenait un supplice pour les bons. Ceux-là secouaient le joug, les autres le supportaient avec une secrète horreur, en attendant qu'il leur fût possible de s'en affranchir. A combien d'honnêtes soldats n'ai-je pas entendu dire qu'ils eussent mieux aimé mendier leur pain que de renouveler leur engagement? On enveloppait le soldat de tous les liens par lesquels on retient l'enfance; on le chargeait de toutes les chaînes dont on accable l'esclave. Les devoirs de son état pesaient encore moins sur lui que ses obligations étrangères au service; il ne pouvait aller, venir, s'asseoir, manger, se coucher, sans éprouver le tourment de la contrainte.
Le temps est arrivé de renoncer à cette méthode ; profitez de tous les avantages que vous donnent et le nouvel état de choses qui s'établit, et les progrès des lumières, et la destruction des préjugés et le développement de l'esprit public, pour recomposer l'armée, pour la constituer sur de meilleurs principes, plus analogues à la nature de l'homme et au caractère particulier du français. Faites du métier de soldat un état. Ren-dez-le non seulement supportable, mais bon, solide, honorable ; écartez-en tout ce qui détournait de l'embrasser, tout ce qui dégoûtait de le suivre ; instituez une discipline qui n'ait pour objet que le bien immédiat du service : elle peut être très sévère sous ce rapport, sans dégrader l'homme qui s'y soumettra ; que les punitions soient proportionnées aux fautes, mais que les peines infamantes et afflictives, qui sont de véritables supplices, soient réservées pour les crimes légalement prouvés ; qu'en entrant dans sa carrière, qu'à chaque pas qu'il y fera, le soldat soit environné d'objets d'émulation, et qu'il voie le terme de ses services marqué par de tels avantages que la crainte la plus forte sur son àme, soit cette de perdre son état et d'être congédié avant
l'époque fixée pour la retraite : alors les citoyens ne verront plus dans l'armée, vers laquelle un penchant naturel attire notre jeunesse, qu'une ressource honnête et de beaucoup préférable à la plupart de celles que nous venons de lui ôter. Alors les jeunes gens s'empresseront à demander du service, et s'estimeront heureux d'en obtenir. Les parents, loin de craindre, comme autrefois, une vocation à laquelle ils s'opposaient de toutesieurs forces, etqu'ils regardaient comme un malheur domestique, seront les premiers à destiner au métier des armes des enfants qu'ils pourront regarder comme placés, dès qu'ils seront admis dans un corps.
Mon plan tient à ces conditions, et ces conditions sont elles-mêmes subordonnées aux déterminations qui seront prises sur les règles d'admission des officiers et d'avancement dans les grades : je sens la nécessité de donner à ceux qui se feront soldats les plus grands motifs de confiance dans leurs chefs. Tout à l'heure on exigeait des preuves de celui qui sollicitait un emploi dans l'armée, et moi aussi, je désire qu'on en fasse, mais de celles que la raison avoue et qu'elle semble même prescrire impérieusement.
De quel droit ce jeune homme aspire-t-il à l'honneur de commander, sans avoir prouvé qu'il en est digne ? A défaut d'actions personnelles qu'il ne peut encore citer, à défaut de l'expérience qu'il ne peut encore avoir acquise, comment ose-t-il se produire, et comment osez-vous l'admettre, s'il ne vous fournit pas quelques motifs capables de justifier aux yeux du public et des soldats la préférence que vous allez lui donner ?
La bonne éducation qu'il aura reçue doit être le premier garant de votre choix. Les bases de l'amélioration du sort des soldats ne seront jamais solidement posées que dans l'éducation des jeunes gens destinés à devenir officiers. Je ne demande pas qu'on en fasse des savants; ils ont plus besoin d'intelligence que de science ; mais je demande que des livres élémentaires, faits exprès, mettent à leur portée les grands principes de la morale et de la justice, sur lesquels sont établis les droits de l'homme ; qu'on leur fasse connaître qu'entre le supérieur et le subordonné, la Constitution et les lois déterminent des devoirs réciproques, également sacrés de part et d'autre ; et qu'on leur apprenne de quel intérêt il sera pour eux-mêmes de remplir scrupuleusement leurs devoirs; que les études de ces jeunes gens aient principalement pour but de développer en eux le germe des vertus civiles et sociales, comme celui des vertus militaires, et que les leçons de leurs maîtres tendent encore plus à former leur cœur que leur esprit. Je demande que tout aspirant au grade d'officier prouve, dans un examen public, qu'aux notions élémentaires des sciences, qui sont le fruit de l'éducation la plus commune, il joint la connaissance des principes qui doivent le diriger dans l'exercice du pouvoir qu'il s'agit de lui conférer, pouvoir en vertu duquel il aura tant d'influence sur le bonheur ou le malheur des nombreux individus qui passeront sous ses ordres dans une longue suite d'années.
Je demande que ce premier examen ne décide que de la possibilité de l'admission au grade d'officier; car il y a très loin de la théorie des principes à leur pratique habituelle ; que celui qui aura satisfait à l'examen, serve au moins un an comme soldat, et qu'après ce noviciat de ri-
gueur, il subisse, dans un conseil composé de tous les officiers du régiment, un scrutin d'épreuve qui porte singulièrement sur son caractère et sa conduite ; que s'il est jugé digne d'être fait officier, il exerce pendant trois mois les fonctions de caporal, pendant trois autres mois celles de sergent, et qu'il ne puisse entrer en possession de son emploi qu'à l'âge de 18 ans.
Je prévois que ces mesures ne conviendront pas à tout le monde, et que l'intérêt personnel sera fécond en objections plus spécieuses que solides ; cela me paraît naturel ; le crédit, la faveur et l'intrigue auraient moins de prise sur les places ; elles seraient plus ordinairement dévolues au mérite. Mais osera-t-on soutenir que les emplois militaires, à la différence de tous les autres, sont institués pour l'utilité particulière de ceux auxquels on les donne, qu'il faut cousulter davantage l'intérêt personnel que l'intérêt public, et qu'enfin l'armée sera moins bonne lorsque le choix des officiers sera plus épuré?
Plus on aura été attentif à bien choisir les officiers, plus on aura de sujet de confiance en eux, ils seront vraisemblablement en état, à mesuré qu'ils monteront en grade, de remplir des fonctions plus importantes; ainsi plus de prétexte aux passe-droits; le sous-lieutenant deviendrait à son tour lieutenant et successivement capitaine, sans que cet ordre pût jamais être interverti au préjudice de personne, et sous quelque prétexte que ce fût, sauf la récompense légitime due à des actions militaires d'un grand éclat ou d'une haute importance.
Il est à désirer que l'on suive imperturbablement le même ordre jusqu'au grade de colonel inclusivement, se serait le plus sûr moyen de faire régner l'union et la concorde dans les régiments, et d'y entretenir cet esprit de famille qui fait, pendant la paix, le bonheur des officiers et des soldats, et qui accroît à la guerre l'énergie de leur courage et de leur dévouement pour la gloire de leurs drapeaux.
Mais une objection se présente : on n'aura donc que de vieux maréchaux de camp, des lieutenants généraux encore plus vieux, et l'on ne pourra plus parvenir au commandement des armées que l'orsqu'on sera tout à fait hors d'état d'en soutenir les fatigues.
Ma réponse est simple: le roi pourrait élever à son choix des capitaines au grade de lieutenants colonels, et des lieutenants colonels au grade de colonel. Ces officiers, choisis hors ligne, entreraient dans l'état-major de l'armée, qui serait composé d'autant d'officiers supérieurs que d'officiers généraux. Ceux-ci auraient chacun leur adjudant, il y aurait autant de colonels-adjudants que de lieutenants généraux, autant de lieute-nants-colonels-adjudants que de maréchaux de camp. L'adjudant apprendrait son métier sous les ordres du général auquel il serait attaché. S'il ne s'agit que d'offrir un objet d'émulation aux talents, de récompenser un mérite rare, et de ne point ralentir la marche rapide de l'homme de génie, on trouvera, dans la sage dispensation des places d'adjudants, tout ce qu'il faut de moyens pour atteindre au but de leur création.
Les colonels-adjudants rouleraient avec les colonels des régiments, pour la promotion au grade de maréchal de camp, au delà duquel il me paraîtrait convenable que tout fût laissé au choix du chef suprême de l'armée.
Ainsi l'on ne courrait pas les risques de manquer de généraux, ou de n'avoir pour généraux que des vieillards incapables de supporter les fatigues
du commandement; mais on ne verrait plu3 à la tête des régiments que des gens sages et expérimentés, d'autant plus capables de le3 bien conduire, qu'ils les connaîtraient mieux. L'autorité du grade serait alors soutenue par tout ce qui peut la rendre respectable et imposante, l'âge et les services; alors la subordination, aussi nécessaire et plus difficile à maintenir parmi les officiers que parmi les soldats, régnerait avec cette douceur et cette supériorité d'empire qui caractérisent les lois de la nature. A la tête d'un corps d'officiers qu'il aurait, pour ainsi dire, vu naître, environné de vieux soldats, ses plus anciens compagnons d'armes, un colonel offrirait vraiment l'image d'un père : ses conseils, ses leçons, ses réprimandes, plus docilement écoutées, mieux reçues, humilieraient moins, produiraient plus d'effet et le dispenseraient souvent de la nécessité de recourir aux punitions. Lui résisterait-on lorsqu'il parlerait de ia gloire du régiment et des moyens de 1a conserver et de l'augmenter ? Comme il exalterait les âmes 1 comme il échaufferait les courages, lorsqu'il rappellerait les actions passées, et qu'en l'écoutant on croirait encore entendre et voir tous ceux dont il lierait l'honorable souvenir à l'existence actuelle du corps.
J'en suis convaincu -, le froid égoïsme, plus dangereux dans l'armée que partout ailleurs, et qui peut-être y règne davantage depuis trente ans, ne sera jamais détruit que par ce moyen ; il resserre, il affermit les véritables et solides liens qui doivent unir les soldats aux chefs et les chefs entre eux; lui seul peut rapprocher leurs intérêts, et rendre leur honneur solidaire, prévenir les écarts de- l'ambition, les intrigues qu'elle occasionne, les injustices qu'elle produit et les désordres qu'elle entraîne. Tels ont été les effets inévitables de ces intrusions, qui, en altérant les principes des corps en ont changé l'esprit, en ont banni ia confiance et y ont introduit la jalousie, la délation, les haines affreuses; les soldats en ont été les victimes, et sans que cela paraisse évidentà des yeux inattentifs, ils le seront toujours de ce vice capital, tant qu'il subsistera, parce qu'il est impossible que le mécontentement, l'humeur des officiers ne rejaillissent pas sur leurs subordonnés d'une manière plus ou moins sensible.
Ce serait, je crois, une très bonne idée et dont vous ne m'avez pas paru vous éloigner, lorsque je la proposai une première fois, que celle d'établir les appointements et les retraites des officiers généraux, supérieurs et autres, ainsi que ceux des sous-officiers sur une échelle de proportion, dont la solde et la retraite du soldat seraient les bases; vous donneriez un grand motif de confiance aux plus faibles, en liant de la sorte leurs intérêts à ceux des plus forts ; vous préviendriez les augmentations, les diminutions arbitraires, injustes, toujours sollicitées, souvent arrachées par le crédit et ia faveur.
Mais surtout il me paraît indispensable, pour avoir désormais une armée bien composée, pour mettre à profit toutes nos ressources en ce genre, de laisser aux capitaines le recrutement de leurs compagnies. Je ne dis pas propriété, car des hommes ne peuvent pas devenir la propriété d'un autre homme ; mais je dis le droit de choisir ceux qui voudront s'attacher à eux; le soin de veiller spécialement à leur bien-être, et la liberté de choisir les agents immédiats de leur autorité dans la compagnie : je regarde cette mesure comme la plus importante de toutes, parce qu'elle aura l'influence la plus grande et la plus directe sur la
facilité du recrutement; je crains que, sans elle, vous n'ayez que des serfs et point de soldats.
Aujourd'hui des recrues arrivent au régiment, on les distribue dans les sections dont il est composé, chacune porte le nom d'un capitaine, mais ce n'est presque que sous ce rapport, qu'on peut l'appeler sa compagnie. S'il en est établi le surveillant, comme les autres officiers et sous-officiers, il n'a pas plus qu'eux d'intérêt personne] à cette surveillance ; qu'importe au capitaine qu'un homme soit mécontent ou malade, qu'il déserte ou qu'il meure : cet homme lui est étranger, indifférent, il ne connaît ni son individu, ni son pays, ni sa famille; c'est une pièce de la machine dont il est chargé de diriger les mouvements ; si cette pièce manque, on y en substituera une autre; cela lui est égal.
Le capitaine peut, à la vérité, reprendre, punir, tourmenter un soldat, mais non pas lui faire le plus petit bien : cet heureux pouvoir lui est ôté, et ce n'est pas . que personne soit jaloux de ce pouvoir, c'est parce qu'il est indifférent à tout le monde. Le capitaine n'est pas même le maître d'éviter à sa compagnie quantité de désagréments intérieurs; car n'ayant pas la nomination des officiers subalternes, les colonels ayant la principale part à leur choix, il arrive que ces officiers subalternes, plus rapprochés du soldat, vivant avec lui, épient sans cesse ses actions, trouvent dans ses démarches les plus indifférentes mille prétextes de Je vexer, et s'en saisissent avec d'autant plus d'empressement qu'ils font par là preuve d'exactitude et de zèle, et qu'il leur est beaucoup plus avantageux de se faire valoir par ce moyen auprès d'un colonel qui peut tout, que de seconder avec moins d'éclat les bonnes intentions d'un capitaine qui ne peut rien.
Tant que le régime subsistera, n'en doutons point, les enrôlements seront, pour la plupart, beaucoup moins l'effet de la volonté que de la séduction. Croyez-vous qu'on ne sache pas dans nos villes et dans nos campagnes qu'aujourd'hui l'officier qui engage n'est pas le maître de faire respecter la première condition de l'engagement, et que, tel qui s'était déterminé par l'espoir de servir sous tel capitaine, avec tel officier, non seulement n'est pas entré dans la compagnie, mais même a été cédé à un autre régiment ; croyez-vous qu'il soit égal à celui qui s'enrôle de rester sous les ordres du chef qu'il connaissait et qu'il s'était choisi ou de passer sous le commandement d'un autre, comme un esclave revendu par son premier maître; croyez-vous même qu'on trouve une si grande différence entre l'esclave et le soldat, quand on voit que vous estampillez l'un et l'autre, et qu'on aperçoit sur ia poitrine du soldat de recrue cette marque que vous l'obligez à porter, pour avertir que ce n'est pas un homme sûr, et qu'il faut le resserrer et l'observer de plus près; croyez-vous que ces ignominieuses précautions ne deviennent pas plus nécessaires par l'usage que vous en faites, et qui n'est propre qu'à écarter, à dégoûter, à repousser les bons sujets ? Croyez-vous que né honnête, aimant le métier des armes, le considérant comme une ressource honorable dans ma pauvreté, je n'ai pas pour m'engager un motif de plus, lorsque je trouve un capitaine de ma ville, de mon village, qui connaît ma famille, dont ma famille est connue, qui aura mille raisons de me bien traiter, qui pourra m'avancer, me distinguer si je mérite de l'être, et qui, s'il est dur ou injuste envers moi, se perdra de réputation dans son canton et se privera lui-même de sa première et
plus grande ressource, pour le recrutement de sa compagnie? Donnez-le donc aux capitaines, rendez-leur la principale direction de leurs compagnies, mettez sous la sauvegarde de leur intérêt personnel le soin des hommes qu'ils commandent ; et, puisque l'obéissance passive est de l'essence du militaire, placez, du moins, à côté du despote, le plus puissant modérateur qu'il soit possible de donner à ses volontés et à ses actions.
Je n'ai pas le dessein de faire d'une compagnie une entreprise, ni d'un capitaine un homme de finance. Je ne veux pas qu'il ait rien à gagner, rien à perdre sur l'administration de la troupe ; mais je désire qu'il trouve dans sa bonne et sage administration un nouveau moyen d'assurer le recrutement dont je le charge, et dont les soldats lui rendront les soins plus faciles, s'il s'occupe sérieusement de leur bien-être.
Je pense que, désormais, il faut bien se garder de payer un homme qui s'enrôle. Il faut lui présenter une perspective utile, honorable, et lui garantir cette juste récompense de ses travaux; mais il faut qu'avant de l'obtenir il en ait mérité le prix. N'achetez donc pas son dévouement au service de la patrie, il serait trop suspect; ne traitez point un brave soldat comme un vil mercenaire, et n'assimilez pas le plus respectable des engagements au plus honteux des trafics.
Laissez à celui qui s'est enrôlé la liberté de se retirer dans les trois premiers mois, en remboursant au corps ce qu'il lui aura coûté jusqu'à sa sortie, et en payant de plus 60 liv. au profit de la masse des retraites ; il n'est pas mal que la légèreté, l'inconstance de la jeunesse soient rendues, en quelque sorte, tributaires de la longanimité et de la persévérance des vétérans. Que trois mois après son entrée dans le corps, un soldat ne puisse plus se retirer qu'à deux conditions : la première, de payer au corps ce qu'il lui aura coûté pendant les trois premiers mois, et 60 liv. au delà au profit de la masse des retraites ; la seconde, de mettre à sa place un auxiliaire qui consente à achever le temps de son service.
L'homme qui quitte les drapeaux avant terme, sans avoir obtenu de congé, doit être averti de rejoindre, par trois sommations juridiques, faites de mois en mois, selon les formes qui seront prescrites. S'il rejoint dans le délai des sommations, il ne sera puni que pour avoir manqué à la discipline, et la peine qu'on lui imposera ne pourra être ni affiictive ni infamante; maiss'ilne rejoint pas dans le temps marqué, il sera déclaré incapable de remplir aucune fonction ecclésiastique, civile et militaire, déchu pour jamais de la qualité de citoyen actif, indigne de porter le nom de Français. Le jugement à intervenir contre luile déclarera simplement déserteur sans prononcer rien de plus, pour que, désormais, ce nom devienne l'équivalent de celui d'infâme, qu'il excite une plus grande horreur, et qu'il réveille lui seul toutes les idées qu'on arrache à ce dernier mot.
C'est une excellente mesure que celle adoptée par l'article 7 du décret du 28 février, qui assure au soldat, après seize ans de service sans interruption et sans reproche, la plénitude des droits de citoyen actif, en le dispeusant des conditions relatives à la propriété et à la contribution. Cette mesure produira d'autant plus d'effet que vous réduirez à six ans la durée des engagements ; car alors le soldat qui aura servi douze ans sera vraisemblablement déterminé à un troisième engagement de six années, pour atteindre, au mi-
lieu de cette troisième course, la récompense qui lui est offerte ; et lorsqu'un soldat a rempli trois engagements, il est bien plus disposé à en contracter un quatrième, et à pousser sa carrière aussi loin qu'elle peut s'étendre.
On est dans l'intention de réserver aux sous-officiers le cinquième des emplois qui viendront à vaquer : c'est encore un très honorable et très puissant motif d'encouragement, très capable de retenir sous les drapeaux les meilleurs sujets, et de leur faire ambitionner les places de sous-officiers. Ils travailleront avec d'autant plus d'ardeur à les mériter, qu'elles seront un degré nécessaire pour monter à de plus grands honneurs, et que désormais rien ne pourra plus faire obstacle à l'avancement du brave soldat que son mérite aura élevé au grade d'officier.
La plaque ou le signe quelconque dont sera décoré le soldat vétéran doit être compté parmi les moyens d'émulation les plus efficaces. Mais il faut pour cela qu'elle soit honorée comme elle doit l'être, beaucoup plus qu'elle ne l'a été jusqu'ici. Je voudrais qu'on ne l'obtînt qu'après cinq engagements faits, et à la charge, par ceux qui seraient encore en état de servir, d'en contracter un sixième. La plaque attesterait donc trente ans honorablement consacrés à la défense de l'Etat ; elle attesterait de plus la sainte résolution d'y consacrer le reste de ses forces. Je voudrais que les généraux et les officiers en fussent décorés comme le soldat, et aux mêmes conditions, sanS quoi elle n'aurait plus le même attrait, ou plu-r tôt elle n'en n'aurait aucun pour les hommes qui ont quelque élévation d'âme; elle ne serait plus à leurs yeux qu'un symbole d'inégalité : loin de pouvoir remplir l'objet qu'on se propose ici, elle ne ferait que le contrarier.
L'article des récompenses pécuniaires est d'une grande importance. On doit les considérer d'abord comme un encouragement dû à ceux qui ne peuvent pas en obtenir d'une autre espèce, et ensuite comme un moyen de repos qu'il est juste d'assurer à tous ceux qui sont arrivés au terme d'une carrière si longue et si périlleuse.
Tout soldat n'est pas propre à devenir officier, ni même sous-officier, il n'en est ni moins brave ni moins affectionné; mais la nature ne l'a pas doué des qualités qu'exige la surveillance confiée aux sous-officiers. Si un homme est grand et sage, il peut obtenir une haute paye en entrant dans les grenadiers, mais s'il n'est que sage, il n'a rien à prétendre de sa persévérence, avant l'époque très éloignée de sa retraite. C'est un grand inconvénient auquel on rémédierait en donnant un haute paye de 3 deniers par jour à ceux qui en contracteraient un second engagement dans l'armée active, de 6 deniers à ceux qui en contracteraient un troisième, de 9 deniers a ceux qui passeraient au quatrième, et d'un sol à ceux qui iraient jusqu'au cinquième engagement. La dépense quecela occasionnerait, restreinte à l'armée active, ne s'élèverait de longtemps à 500,000 livres par année, et ne pourrait jamais excéder un million. Les économies résultant du système de l'armée auxiliaire rendraient cette dépense insensible; elle serait couverte par les frais d'enrôlement et de rengagement que je supiprime, et par ceux qu'entraînent aujourd'hui la poursuite, le jugement et la punition des déserteurs.
 l'égard des soldats auxiliaires, ce n'est point par des hautes payes qu'on doit tes attacher à leur état ; il y a d'autres moyens. Il faut réserver à ceux qui auront fait deux engagements en cette qualité les places de la maréchaussée ou
de la garde prévôtale à pied et à cheval, celles de gardes des forêts nationales ; celles de gardes des frontières, pour le maintien des droits de traite; en unmot, toutes les placesde caserniers, éclusiers gardes-magasins, et autres de cette espèce, qui seront dans le cas d'être conservées ou établies dans les villes de guerre. Il est vrai que la plupart de ces places devant être remplies pendant fa guerre, les auxiliaires qui les auront obtenues n'iront pas ; mais remarquez que ce sera toujours un grand moyen d'attirer des auxiliaires, quand il faudra l'avoir été au moins douze ans, et par conséquent en avoir servi dix-huit pour être susceptible de ces places; elles deviendront ainsi la retraite de quantité d'anciens soldats avant qu'ils aient acquis la vétérance, et ce seront des frais de moins pour l'Etat.
Après cinq engagements, dont un seul aurait été fait nécessairement dans l'armée active, et les quatre autres auraient pu l'être indifféremment soit dans l'armée active, soit dans l'armée auxiliaire, le soldat qui se retirerait aurait, proportionnellement à la nature de ses services, 10 sols par jour, s'il avait rempli ses cinq engagements dans 1 armée active ; 9 sols, s'il n'y en avait rempli que quatre; 8 sols, s'il n'y en avait rempli que trois; 7 sols, s'il n'y en avait rempli que deux, et 6 sols, s'il n'y avait fait que son noviciat : chaque campagne de guerre ajouterait 6 den. par jour a cette retraite.
Quoique le moment d'en jouir fût arrivé après cinq engagements successifs, toutefois ce ne serait pas encore là le dernier terme des récompenses militaires. Le vétéran qui contracterait un sixième engagement recevrait la plaque au moment même ; et après ce sixième engagement fait, il aurait, outre un habillement complet, qui lui serait fourni comme aux troupes actives, une pension proportionnée à la somme de sa retraite, et qui l'augmenterait de moitié en sus : je veux dire que si sa retraite était de 10 sols par jour, elle serait portée à 15 sols.
Le ministre a, m'a-t-on dit, un plan d'après lequel il s'est assuré de pouvoir donner centécus de retraite à un soldat qui se retirerait après 32 ans de service. Il serait très aisé d'accommoder ce plan au système que je propose ; la masse de la dépense n'en serait pas augmentée ; au contraire, elle en deviendrait un peu moins considérable; mais elle serait distribuée avec plus d'avantage pour l'Etat.
Quantité de vétérans qui n'ont pas de famille, ni de propriété, pourraient former plusieurs compagnies sédentaires préposées à la garde des forts et châteaux, comme le sont maintenant les compagnies détachées d'invalides : il serait très convenable, très utile d'en placer dans les grandes garnisons, pour y servir à la fois d'exemple et d'encouragement aux soldats. Toutes les compagnies détachées d'invalides rentreraient dans le corps des vétérans qui serait établi à leur place et en feraient le premier fonds : ceux-ci, sans éprouver de véritables fatigues, aideraient au service des garnisons et soulageraient d'autant les troupes actives : ces braves gens, ces vieux soldats jouiraient plus avantageusement de leur retraite en continuant à vivre en commun, en conservant toutes leurs habitudes. A proprement parler, les services qu'ils continueraient a rendre ne coûteraient plus rien à l'Etat ; et les millions appliqués aujourd'hui au payement de beaucoup de soldes, de demi-soldes et de gratifications inutiles rentreraient avant peu dans lamasse des retraites. Ou ramènerait l'hôtel des Invalides à sa pre-
mière véritable destination, on n'y recevrait que des soldats que leurs infirmités, la maladie ou la caducité de l'âge rendent incapables d'aucun travail, d'aucun service, et qui, n'ayant pas les moyens de se procurer les secours nécessaires à leur position, doivent naturellement les trouver dans cet asile.
Il est, je crois, superflu de dire que c'est surtout aux veuves et aux malheureux enfants des soldats tués à la guerre, ou morts des suites immédiates des leurs blessures, que l'Etat doit des secours plus strictement nécessaires, et aussi bien mérités que ceux qu'on a presque exclusivement accordés jusquici aux veuves et aux enfants des officiers, et quelquefois avec si peu de mesure ; aux veuves et aux enfants des gens de cour.
Une école de soldats est nécessaire dans chaque département et deviendra précieuse sous plus d'un rapport. Ce qu'il en coûtera pour arracher des enfants à la misère, à l'oisiveté et à l'habitude de tous les vices qu'elle entraîne, ne formera pas un objet de dépense considérable et qu'on puisse regretter, lorsqu'elle contribuera d'ailleurs à former une classe d'hommes infiniment utiles.
Tout enfant mâle et bien constitué, n'ayant ni parents, ni bien, serait reçu à l'école du département entre 8 et 15 ans, sur la présentation de sa municipalité. Tout enfant mâle et bien constitué, ayant des parents pauvres, y Serait également reçu entre 8 et 15 ans, sur la demande de ses parents et l'attestation de leur pauvreté, certifiée par les officiers municipaux de leur résidence. On y recevrait aussi tout enfant mâle et bien constitué de militaires, présenté par son père ou par sa mère ; et enfin tout jeune homme entre 15 et 18 ans, qui, n'ayant ni parents ni fortune, s'y présenterait de lui-même.
Un sergent retiré commanderait l'école et aurait, outre sa retraite, quatre ou cinq cents livres d'appointements ; un caporal vétéran en état de montrer à lire, et à qui l'on donnerait cinquante écus, serait préposé à la conduite de 12 ou 15 élèves ; un vicaire de la paroisse sur laquelle serait située l'école, aurait cent écus pour faire le catéchisme. On tâcherait de monter dans ces écoles des manufactures à l'usage des troupes ; les élèves en sortiraient à l'âge où on peut être soldat, c'est-à-dire à dix-huit ans, et ils acquitteraient les avances qu'ils auraient reçus de l'Etat, par six ans de service dans l'armée active.
Si l'on fait attention que les départements doivent pourvoir à la subsistance de leurs pauvres, singulièrement à celle des enfants abandonnés, et que les communautés ne vont plus avoir la charge affreuse des milices,, on ne trouvera pas que ce soit leur en imposer une extraordinaire que de les obliger à former de semblables écoles, dont on ne tardera pas à tirer tous les moyens de les soutenir, pour peu que les administrateurs secondent, par leur intelligence et leur bonne volonté, la sagesse des règlements qu'il faudra donner à ces écoles.
Je ne développe rien ; je serais trop long. J'indique, je présente des idées générales auxquelles il faut de grands développements : on aurait tort de s'arrêter à des objections partielles, qu'il sera temps de prévoir et d'apprécier, lorsqu'on s'occupera des moyens d'exécution.
Je ferai seulement remarquer que, si l'on réduisait actuellement l'armée active à cent mille hommes, l'armée auxiliaire profiterait immédiatement d'une grande partie de la réforme, et
qu'en admettant, d'ici à 3 ou 4 mois tous ceux qui ont servi dans les troupes de ligne pendant 8 ans, à s'enrôler dans l'armée auxiliaire, elle ne resterait pas longtemps au-dessous du complet ; mais j'exigerais qu'à la suite, et après cette première formation, il n'y eût plus d'interruption de service, c'est-à-dire que les cinq engagements fussent continus dans l'une ou l'autre armée, pour qu'on pût avoir droit à la retraite.
Si l'on craint d'être bientôt dans le cas de soutenir une guerre, je dirai que je trouve dans cette crainte même un nouveau motif pour tenir aux principales idées que je viens d'exposer ; je dirai qu'il faut se hâter d'ouvrir un débouché honorable dans l'armée active, à tant de jeunes gens qui ont si bien servi la patrie depuis un an dans le corps des gardes nationales, et qui ne demanderont pas mieux que de continuer leurs services, s'ils les voient annoblis, encouragés, récompensés par les moyens que je propose ; je dirai qu'il faut se hâter de créer l'armée auxiliaire pour l'avoir prête au besoin; mais je dirai aussi que, sous le prétexte douteux d'une guerre prochaine, il ne faut pas faire une dépense inutile, et manquer la régénération de l'armée en adoptant un plan de circonstances au lieu d'un plan général. Je dirai encore que le plan général s'adopterait à l'urgence du moment dès qu'elle serait notoire, puisqu'enfin nous aurions aussitôt, en officiers et en soldats, tout ce que nous estimons qu'il en faut pour le temps de la guerre.
Deux cent mille hommes en état de servir dès qu'on serait daus le cas de les réunir, pourraient entrer immédiatement en campagne, si cela était nécessaire ; on n'aurait pas besoin des troupes soldées pour garder les places que l'armée laisserait derrière elle ; ces places seraient confiées aux gardes nationales qui les habitent, et leur service, s'il devenait trop fatigant, pourrait être partagé, à leur réquisition, par des détachements des départements voisins. Si des malheurs extraordinaires amenaient des besoins de même nature, en s'adressant de la part du Corps législatif et du roi aux gardes nationales, en demandant à chaque canton, qui, vraisemblablement, formera une même compagnie, qu'il fournisse un certain nombre de volontaires, doute-t-on de l'empressement de notre jeunesse à s'offrir d'elle-même et à solliciter une glorieuse préférence ? Pour moi, je n'en doute pas ; je crois à la bravoure éternelle du Français ; je crois plus que jamais à la bravoure et au patriotisme du Français devenu libre et citoyen ; il ne cessera pas d'aimer la gloire, parce qu'avec plus de motifs de chérir sa patrie, il aura un plus grand intérêt à la défendre.
L'obligation très éloigné de fournir de la part des gardes nationales, des volontaires, pour renforcer l'armée de ligne, sera le point de contact entre ces deux corps, qu'il faut autant se garder de confondre, que de rendre tout à fait étrangers l'un à l'autre. On ne doit les tenir ni trop rapprochés ni à trop de distance, mais il est, je crois, à propos qu'il y ait tendance au rapprochement sans aucun mélange.
Telles sont les idées que j'ai dû présenter au comité, pour remplir la tâche qui m'est imposée par l'honorable confiance que je partage avec vous. Le désir du bien m'a fait dire ce que je crois propre à l'opérer ; mais je ne présume pas assez de mes lumières pour ne pas craindre de m'être souvent trompé. Cependant, vous m'avez autorisé à penser que quelques-unes de mes vues pourraient être utiles, puisque dçjà vous m'avez
paru disposés à en adopter plusieurs, celle, entre autres, qui est relative à la formation de l'armée auxiliaire, et que je regarde comme fondamentale. Je remercie M. de Noailles de lui avoir donné une place dans son plan ; mais qu'il me soit permis de le dire, je pense que, dans ce plan, mon idée ne produit pas tout l'effet que j'en attends ; M. de Noailles laisse trop de monde constamment sous les armes ; il force à un surcroît de dépense pour l'entretien de ses auxiliaires ; il ôte les ressources qu'on trouverait dans une grande diminution de la dépense ordinaire, pour établir les écoles, pour donner des hautes paye» aux anciens soldats, et pour procurer un meilleur sort aux vétérans, sans surcharger le Trésor national. Je prie M. de Noailles, je prie le comité de chercher, de saisir les moyens de conserver ces derniers avantages. J'insiste pour qu'on restreigne la dépense autant qu'on le pourra, et pour qu'on réduise au taux de la plus stricte nécessité, le nombre d'hommes qui doit rester sous les armes pendant la paix. Dans mon système, on le peut sans aucun danger. Je crois cela démontré. Il me l'est aussi que la liberté courra d'autant plus de risques que l'armée active sera plus considérable.
Le comité militaire, après avoir entendu la lecture du mémoire de M. Emmery, a arrêté qu'il serait imprimé et distribué.
Signé: Rostaing, président. Alexandre lameth. Noailles. J. X. Bureaux. Jacques de Menou. Thi-boutot. Dubois de Crancé. Balb-Crillon. Wimp-ffen.
Nota. Ce mémoire a été lu au comité militaire le 26 juin. On en a demandé une seconde lecture, qui a eu lieu le 27. Eclairé par la discussion qui a suivi, j'ai souscrit à plusieurs amendements. On a cru qu'il convenait d'arrêter des bases; j'ai proposé les articles suivants. Le comité a pris sur chacun la détermination qui est à la suite. Ces articles et leurs apostilles ont été rédigés le 28. Je devais leur donner une meilleure forme, et les transcrire pour qu'on les signât le lendemain ; mais le lendemain je n'ai pu me rendre le soir au comité. Le surlendemain, en y arrivant, j'ai vu qu'on travaillait sur d'autres errements ; j'ai entendu qu'il était question de tenir sous les armes au moins cent cinquante mille hommes, qui coûteraientau delà de84 millions. On m'a dit que le comité était d'accord avec le ministre, j'ai pensé que c'était pour le plus grand bien, et je me suis tu.
DÉTERMINATION
DU COMITÉ MILITAIRE SUR LES ARTICLES PROPOSÉS
Articles proposés par M. Emmery.
L'armée, sans y comprendre la maison du roi, les vétérans ni les élèves, sera composée de 200,000 soldats tant actifs qu'auxiliaires, qui seront répartis dans l'infanterie, la cavalerie et l'artillerie, dans la proportion qui va être fixée.«r* (Bon.)
120,000 de ces soldats seront constamment sous les armes ; savoir : 28,000 dans la cavalerie, 84,000 dans l'infanterie, et 8,000 dans l'artillerie. La réserve sera de 12,000 pour ia cavalerie, et de 68,000 tant pour l'infanterie que pour l'artililerie. — (Bon.)
Nul ne sera admis à s'engager pour auxiliaire,
s'il n'a servi six ans dans l'armée active, et s'il n'en rapporte un congé honorable. — (Bon.)
Les soldats auxiliaires seront obligés non seulement à marcher au moment où la guerre sera déclarée, mais encore à servir un mois chaque année pendant la paix. — (Bon.)
Us seront habillés et jouiront de la demi-solde entière pendant le mois de rassemblement. — (Bon.)
Le nombre des officiers et sous-officiers qui seront attachés à l'armée active sera proportionné au nombre des soldats qui seront dans le cas d'être rassemblés au moment de la déclaration de guerre. — (Bon.)
Il sera fait, dans les vues indiquées par le mémoire, des livres élémentaires pour servir à l'éducation des jeunes gens qui se destineront à devenir officiers; et avant de pouvoir être admis, ils subiront un examen public, dans les formes qui seront déterminées. — (Bon en combinant cette disposition avec une autre précédemment approuvée sur cet objet.) (1)
Aucun sujet ne pourra être admis qu'il n'ait satisfait à cet examen, et qu'après y avoir satisfait, il n'ait servi un an comme soldat, dans un corps de l'armée active. — (Bon, idem.)
Les sujets admis après cet examen, et qui auront servi comme soldat pendant une année, seront soumis à un scrutin d'épreuve, dans un conseil composé de tous les officiers présents au régiment, et ce scrutin décidera de leur réception définitive, — (Bon, idem.)
Ceux à qui le scrutin sera favorable feront pendant six mois les fonctions de caporal et de sergent, et ne pourront exercer celles d'officiers avant d'avoir atteint leur dix-huitème année, — (Bon, idem,)
L'ordre d'ancienneté sera invariablement gardé, pour monter du grade de sous-lieutenant à celui de lieutenant, et de celui-ci au grade de capitaine, sauf les récompenses légitimement dues à des actions militaires d'un grand éclat, ou d'une haute importance. — (Bon.)
Les places d'officiers supérieurs des régiments seront données deux fois à l'ancienneté dans le même régiment, et la troisième fois au choix du roi, sur tous les capitaines de l'armée pour l'emploi de lieutenant-colonel; et sur tous les lieutenants-colonels de l'armée, pour l'emploi de colonel; toujours dans la même armée. — s(Bon.)
Les capitaines auront le recrutement et l'administration de leur compagnie, avec le choix de leurs sous-officiers, conformément aux règles qui seront établies : on aura l'attention d'éloigner de ce régime toute possibilité de pertes et de bénéfices pécuniaires pour les capitaines. — (Bon à reproduire.) (2)
Les appointements des généraux, officiers supérieurs et autres, ainsi que la solde des sous-officiers, et les retraites des uns et des autres,
seront établis sur des principes fixes, et sur la base des soldes et retraites des soldats, dans les différentes armes. — (Bon.)
11 sera fait des règlements de discipline pour assurer la subordination, l'exactitude et la régularité du service ; et par lesquels on exigera du soldat que le sacrifice de la portion de sa liberté qui est nécessaire pour le bien immédiat de ce même service. — (Bon.)
Cette discipline sera très sévère, sans être minutieuse, avilissante ni cruelle. Les peines afflic-tives et infamantes ne pourront jamais être infligées comme punition militaire. — (Bon.)
Les engagements du soldat ne seront faits que pour six ans; et au moyen des avantages qui lui seront assurés dans le cours et à la fin de sa carrière, il ne sera plus mis de prix à son engagement ni à son rengagement. — (Bon.)
Aucun homme taré ne sera reçu à l'honneur de servir en qualité de soldat. Les sous-officiers qui auront mérité la casse seront renvoyés. — (Bon.)
Le cinquième des emplois militaires sera réservé à des soldats devenus sous-officiers. Et dans ce cas, ils seront absolument assimilés pour leur traitement et leur avancement à tous les autres officiers. — (Bon.)
Personne ne sera engagé dans l'armée active qu'à 18 ans faits. Celui qui se sera engagé pourra se retirer dans les trois premiers mois, en remboursant tout ce qu'il aura çoùté, et en 'payant au par de là 60 livres pour la masse des retraites. — (Bon.)
Celui qui, après les trois premiers mois, aura ratifié son engagement en restant sous les drapeaux, ne pourra plus les quitter qu'en remboursant tout ce qu'il aura coûté pendant les trois premiers mois, et 60 livres au delà, et de plus en mettant à sa place un auxiliaire pour achever le temps de son service. — (Bon.)
Celui qui quittera sans congé, sera sommé de rejoindre par trois sommations faites de mois en mois, dans les formes qui seront prescrites. S'il rejoint dans le délai marqué, sa punitiou ne pourra excéder la plus grande à infliger pour contravention à la discipline. S'il ne rejoint pas, son procès lui sera fait et il sera juridiquement déclaré Déserteur, ce qui emportera déchéance à jamais de la qualité de citoyen actif, celle du titre de Français et la plus grande note de lâcheté et d'infamie, qu'un homme puisse encourir parmi nous. 11 n'y aura ni grâce particulière, ni amnistie générale pour ce crime. — (Bon.)
Celui qui contractera uu second engagement dans l'armée active aura trois den. de haute paye ; 6 den. s'il en contracte un troisième ; 9 den. s'il passe au quatrième; et 1 s. s'il va jusqu'au cinquième engagement. — (Bon.)
Les auxiliaires seront les maîtres de rentrer dans l'armée active, quand ils le jugeront à propos, ou de contracter successivement de nouveaux engagements comme auxiliaires. Ils ne seront soumis aux règles et à l'autorité militaire que pendant le mois du rassemblement, et jouiront les onzç autres mois de toute la liberté qu'ont les autres citoyens. (Bon.)
Les places de maréchaussée à pied et à cheval, celles de gardes des forêts nationales, celles de gardes des frontières, pour le maintien des droits de traites et tous les emplois qui dépendent de l'administration militaire dans les villes, tels que caserniers, éclusiérs, consignes, gardes-magasins du roi, et ne seront donnés qu'à des soldats qui
auront fait au moins deux engagements comme auxiliaires. — (Bon.)
Après cinq engagements révolus soit dans l'armée active, soit dans l'armée auxiliaire, tout soldat pourra prendre sa retraite, qui sera pour lors de 10 sols par jour pour celui qui aura fait cinq engagements dans l'armée active ; de 9 sols pour celui qui n'y eu aura fait que quatre ; de 8 sols pour celui qui n'y en aura fait que trois ; de 7 sols pour celui n'y en aura fait que deux ; et de 8 sols pour celui qui qui n'y en aura fait qu'un seul. (Aarranger avec M. deWimpffen) (1).
Une décoration militaire sera instituée pour les officiers et les soldats qui auront bien servi la patrie pendant trente ans et qui se retireront hors d'état de la servir ; mais à la condition, que s'ils ont encore la force, ils continueront leurs services.
Ainsi cette décoration sera donnée aux soldats qui contracteront un sixième engagement, à la fin duquel ils seront assurés de moitié en sus de la retraite qui leur était acquise après le cinquième engagement, outre un habillemet complet qui leur sera fourni comme aux soldats en activité.
Il sera formé, au lieu des compagnies détachées d'invalides, des compagnies de vétérans qui auront des garnisons sédentaires, non seulement dans les petits forts et châteaux, mais en général dans les villes de guerre, où ces braves gens serviront d'exemple et d'encouragement. L'hôtel des invalides sera ramenée à sa première destination pour les véritables invalides. — (Bon.)
Il sera établi par chaque département une école de soldats destinés être la pépinière de l'armée, suivant les idées exposées dans le mémoire. — (Bon.)
Si des besoins extraordinaires exigent un surcroît des moyens, la législature et le roi demanderont des volontaires à chaque compagnie de gardes nationales. —- (Bon.)
Itérative motion de M. Malonet, contre les adresses injurieuses aux membres du Corps législatif (2).
J'ai demandé la parole avec instance, on me l'a refusée. Voici ce que je voulais dire.
Messieurs, j'avais pensé que le jour même où vous avez plus solennellement consacré l'inviolabilité des députés, ne serait pas marqué par de nouveaux outrages à leur caractère, par des nouveaux attentats à leur sûreté. C'est devant vous, c'est à la barre de cette Assemblée, qu'une succession d'adresses voue à Vexécration publique trois cents représentants de Ja nation, pour avoir signé une déclaration de leur vœu sur la religion catholique. Puisqu'il n'existe point d'asile
contre une telle persécution ; puisque je n'ai pu, malgré mes instances réitérées, obtenir la permission de vous en démontrer l'injustice et le danger : c'est à l'histoire, c'est à la postérité que je la dénonce.
Quelle que soit votre opinion, Messieurs, sur cette célèbre déclaration, de quelque improbation que vous la jugiez susceptible, les principes de la Constitution, de la liberté, de la paix publique sont également violés par les insultes et les menaces dont vous laissez accabler en votre présence trois cents représentants de la nation. -
S'ils sont coupables, vous avez le droit déqualifier Je délit et d'en ordonner le jugement; mais dans l'instruction même d'un procès criminel, il est une sauvegarde pour l'accusé qui le met à l'abri des insultes du juge et des voies de fait de l'accusateur.
Cependant, par une violation inouïe du droit des gens, du droit public et positif de toutes les nations, c'est dans le sanctuaire des lois, c'est aux législateurs mêmes que s'adressent les plus, flétrissantes injures et une proscription solennelle; c'est par l'organe de son président que le Corps législatif accueille un tel outrage et y applaudit.
J'avoue, Messieurs, que je ne peux m'accou-tumer au spectacle douloureux que me présente l'Assemblée nationale, lorsqu'au milieu d'une foule immense d'auditeurs, un étranger admis à la barre se croit assuré d'avance de la protection de cinq cents membres du Corps législatif, pourvu qu'il en insulte trois cents. — Et si la France se tait sur un tel scandale ne craignez-vous pas, Messieurs, que l'Europe entière qui nous entend, qui nous regarde, n'en soit épouvantée?
Ne craignez-vous pas que la liberté, ainsi calomniée, ne soit présentée aux peuples asservis sous les couleurs de la tyrannie?
A quel signe, en effet, puis-je me croire libre, si, sans jugement préalable, je peux être déclaré traître à la patrie et dénoncé sous cette qualification à mes concitoyens, au Corps législatif? Je suis libre, dites-vous, et des adresses plus cruelles que des lettres de cachet viennent poursuivre dans vôtre sein mes collègues, et vous applaudissez, au lieu de les protéger ou de les juger !
Vous voulez que je me croie libre, et trois cents députés siégeant à vos côtés sont condamnés à l'infamie par un harangueur qui assigne les rangs parmi vous, et appelle les uns traîtres et les autres augustes! et vous applaudissez, et les tribunes applaudissent, et à la suite de cette humiliation, vos trois cents collègues vont, comme vous, décider du sort de la France! Et telle est la Constitution d'un peuple libre!
Ah ! Messieurs, c'est l'absence de toute constitution. Jamais Tibère ne permit à ses délateurs de venir en sa présence insulter le sénat romain: il faisait accuser les sénateurs, mais il leur laissait le choix du supplice. Prononcez une loi contre les déclarations d'opinions ; que l'on sache ce qui est permis, ce qui est défendu ; mais ne livrez point le droit terrible d'anatbème et de proscription à la fureur de tous ceux qui voudront l'exercer; ne nous livrez point au droit du plus fort. Souvenez-vous, Messieurs, que vous avez été envoyés pour rétablir l'empire des lois, et non pour le détruire.
Or, c'est renverser par la base l'édifice de la Constitution, et de tout autre système législatif, que de consacrer, par vos applaudissements, la ! violation des. principes; et cest violer tous les I principes que d'applaudir aux outrages et aux
proscriptions, quelles que soient les victimes. Mais dans ce cas-ci, Messieurs, c'est plus encore, c'est attenter à votre propre sûreté autant qu'à votre dignité, que de permettre cet attentat contre vos collègues; et pour nous montrer la profondeur de l'abîme qu'on creuse ainsi sous vos pas, permettez-moi quelques observations, effrayantes, sans doute, mais dont vous reconnaîtrez la justesse.
S'il se présentait un homme à la barre qui vous dit : « Je viens vous demander un décret qui chasse de l'Assemblée trois cents députés, et les livre à la fureur du peuple comme traîtres à la patrie. » — Vous frémiriez, sans doute, et vous ne prononceriez pas le décret. Qé bien, Messieurs, toutes ces adresses le prononcent et vous le permettez.
Mais la licence des adresses une fois légitimée, voici leurs terribles conséquences :
Indépendamment des trois cents députés si souvent proclamés traîtres à la patrie, il en est plus de cent autres qui, sans avoir signé la déclaration, se trouvent souvent dans ia minorité, et je suis du nombre. Or, ceux-ci ont eu fréquemment leur part dans les adresses qui déclarent mauvais citoyens les partisans de telle ou telle opinion. Ainsi voilà quatre cents députés diffamés, jugés et condamnés par les adresses.
Ce n'est pas tout, le caractère de la licence est d'aller toujours en avant, et il était aisé de prévoir qu'aussitôt qu'un seul député serait impunément livré aux fureurs de la calomnie, elle s'élancerait jusque sur la majorité ; ainsi nous avons vu, dans la question du droit de la guerre et de la pais, d'affreux libelles comprendre dans la liste des mauvais citoyens les quatre cinquièmes de l'Assemblée nationale; et j'ai entendu une foule immense employer les menaces et les expréssions des adresses : la conséquence évidente de ce système de proscription est donc que tous les membres de l'Assemblée nationale peuvent être alternativement proclamés à la barre traîtres à la patrie.
Peut-être, Messieurs, m'objectera-t-on que ce cruel signalement n'a jamais été donné en votre présence qu'à ceux des députés qui ont signé la déclaration, qu'ainsi ma supposition de l'outrage fait solennellement à l'universalité du corps législatif est sans fondement, puisque la majorité ne peut-être soupçonnée de s'élever contre les décrets qu'elle a faits.
Je réponds que, dans ce cas-ci, la condition de la minorité est inévitablement commune à la majorité. Cette condition est d'être outragés avec impunité pour un fait particulier. Or, d'autres faits, d'autre circonstances peuvent diviser et subdiviser la majorité de telle manière qu'un certain nombre de ses membres diffamés, avec la même impunité, et ajoutés à ceux qui le sont journellement à la grande satisfaction des spectateurs, forme les trois ou quatre cinquièmes de l'Assemblée nationale, outragée alors de son propre aveu en majorité, et avec l'applaudissement des tribunes.
Maintenant, Messieurs, je demande quelle sera la magistrature respectée en France, si la vôtre ne l'est pas, et ce que peuvent devenir les lois, lorsque les législateurs sont avilis ?
Dira-t-on encore qu'il ne s'agit ici que des im-probateurs de votre décret? jugez-les, Messieurs; que chaque citoyen ait le droit de les improuver aussi, mais non celui de les insulter devant vous et avec votre permission. Car l'égalité de droits étant commune à tous, celui d'insulte, si c'en est
un, devient commun à tous, et la qualification de traître à la patrie s'attache nécessairement à tous les partis, a toutes les opinions. Voilà l'affreuse conséquence de cette indignité, l'état de guerre entre les citoyens, le mépris de vos fonctions, de votre caractère, de votre autorité, la liberté réduite au droit du plus fort, c'est-à-dire à la tyrannie.
Et quand on connaît la filiation de ces adresses menaçantes, quand on sait comment elles sont suggérées, combien les bons citoyens, les hommes vertueux de tous les pays sont éloignés de ce caractère d'injure et de proscription ; que partout et toujours il est celui des hommes vains et violents qui séduisent et intimident les faibles, et qui s'exercent dans les clubs à dominer dans les assemblées; alors, Messieurs, que peut-on conclure de ces déclamations ; qu'y a-t-il de commun entre l'opinion publique, si imposante dans ses effets, et les formules d'anathème qui se transmettent d'adresses en adresses, avec la même expression ? Certes, les citoyens useraient de leur droit et avec la dignité qui leur appartient, en disant simplement : nous n'adhérons point à telle déclaration, nous la jugeons inutile ; mais ils en useraient aussi en vous disant respectueusement qu'elle est conforme à leur vœu ; et comme il ne manquerait à ce vœu pour être respecté que d'être celui du plus grand nombre, il ne peut être criminel pour être le vœu de quelques-uns.
Je conclus, Messieurs, que la lecture des adresses injurieuses aux membres du Corps législatif, et les applaudissements qu'elles obtiennent, sont un scandale qu'il est temps de faire cesser. Que l'oppression de la minorité de l'Assemblée légitimerait toute espèce de protestation ; que lorsque les règles de la justice sont violées pour quelques-uns, la tyrannie peut s'étendre sur tous, et que le droit de vouer à Y exécration publique des citoyens sans les juger est celui d'éteindre, dans tous les cœurs, tout sentiment de liberté, de justice et d'humanité.
Réplique de M. de Mirabeau le jeune à la ré-ponse qui lui a été faite au nom du régiment de Touraine, par les nommés Sauve ton, fourrier, et About, fusilier, se disant députés dudit régiment; et par les sieurs Vergés, officier municipal; Mailhat, Siau et autres membres de la garde nationale dePerpignan, s'en disant autorisés(i).
Accoutumé depuis deux mois aux outrages que la calomnie, l'ingratitude, l'insubordination ont fait vomir contre moi à des soldats parjures, rebelles à l'autorité du roi, à celles de leurs chefs et de leurs officiers, je m'attendais bien à trouver dans leur réponse des injures, mais je croyais aussi y rencontrer quelques faits justificatifs, et j'avoue que cette pièce que j'ai sous les yeux ne m'eût pas semblé même exiger une réplique de ma part, si je n'y avais trouvé jointes les diatribes de M. Vergés, au nom d'une municipalité qui le désavouerait si elle était libre, et celles de quelques officiers de la garde nationale de Perpignan, dont deux, MM. Mailhat et Siau, sont regardés comme les auteurs de tous les troubles arrivés à Perpignan, et dont l'un, M. Mailhat a été cité à la
municipalité comme ayant offert de l'argent à un de mes soldats, qu'on a été obligé de faire partir, parce qu'il l'avait dénoncé. C'est vers eux, principalement, que je dois diriger ma réplique, après avoir prouvé aux soldats que mes preuves restent entières, que mes prétendues contradictions sont aussi fausses que les leurs sont manifestes ; c'est une bien extraordinaire lutte que celle que j'entreprends aujourd'hui; car si un bienfait reproché ne semblait devenir une injure, je pourrais prouver qu'il n'est pas un des individus qui s'établissent aujourd'hui mes adversaires pour qui je n'aie fait beaucoup et auquel je n'aie rendu quelques services : l'ingratitude fut toujours le premier échelon du crime.
Les lettres que j'ai fait imprimer comme pièces justificatives, et dont les originaux sont déposés au comité des rapports (1), prouvent, d'une manière incontestable, les détails de la première insurrection du 20 mai. La proscription des trois officiers que les soldats qualifient de jeunes gens, et dont l'un, M. de Montalembert, est premier lieutenant ; et a perdu un œil au combat de M. de Grasse, en 1782, la destitution de M. l'adjudant ; la violence faite au lieutenant-colonel, etc., les soldats prétendus députés pallient ces fautes, ou du moins veulent les pallier; mais tout homme impartial retrouvera dans leur réponse les faits au même état où je les ai présentés.
La preuve faite sur les lieux de la manière dont je me comportai vis-à-vis des cinq cents soldats rebelles, aveu précieux de la part des prétendus députés qui, à la barre etdansleur imprimé, se sont contenté de dire : quelques grenadiers et deux soldats par compagnie, ce qui réduisait les cinq cents hommes à 25 ou 30, cette preuve, dis-je, signée par des citoyens honnêtes, et qu'il est si faux de dire éloignés d'habitation du quartier où la scène s'est passée, que l'un est le maître de la maison devant laquelle elle a eu lieu, cette preuve reste entière. La municipalité a rendu un témoignage honorable à l'honnêteté de ces dix citoyens, qn'aujourd'hui ou voudrait flétrir aux yeux du public.
La prétendue contradiction que relève la réponse et quelle prétend trouver entre ce que j'ai dit de l'enlèvement des drapeaux et la manière dont j'ai établi ensuite qu'ils avaient été portés en ordre chez le maire, est un raisonnement d'une mauvaise foi évidente ; j'ai dit que les soldats sans ordre, sans chefs, sans officiers, étaient venus violer un asile sacré, la chambre de leur colonel, et en enlever la caisse et les drapeaux; j'ai dit que c'était un crime, je le répète; s'il reste impuni, il ne faut plus croire à la justice, il ne faut plus croire à l'ordre ; et parce que je rends ensuite justice à la manière dont ces drapeaux, enlevés à main armée, furent réintégrés une heure après dans la chambre que le maire m'avait donnée, je suis en contradiction avec moi-même : cette manière de raisonner ne convaincra sans doute personne.
Les soldats prétendent avoir exigé une respon-sion du maire; et ils avouent, en même temps, le droit incontestable que j'avais d'être déposi-
taire de ces drapeaux pour lesquels ils demandent un autre répondant.
Ils établissent que je n'ai pu connaître un homme qui, dans une rue, me présenta le poing eous la figure; ils prétendent justifier leur réponse insubordonnée à l'ordre le plus mesuré et le plus sage.
Ils font un dilemme assez plaisant sur la manière dont ils ont pu être payés, et en prennent acte pour dire que le sacrifice de la fortune d'un particulier pour une si belle cause mériterait la reconnaissance de la patrie; ils accusent M. de Ghollet, leur respectable et trop bon général.
Ils assurent, et M. le municipal affirme aussi, que M. d'Aguilar a attesté que je savais qu'il avait répondu des drapeaux, et j'ai deux lettres de ce respectable vieillard, où il me mande qu'il est bien convaincu que je l'ignorais, l'aurais-je souffert ? La réponse est simple pour ceux de qui je suis connu.
On relève comme extraordinaire mon étonne-ment de ce qu'on a admis à la barre des soldats rebelles; je crois qu'il est assez motivé, cet éton-nement, il l'est du moins pour tous les gens honnêtes.
Ils me défient de montrer la signature d'un ancien officier ; on a vu deux lettres de M. d'Iversay, lieutenant-colonel, et une de M. d'Espenan, capitaine de grenadiers; il n'y avait que sept capitaines au corps lorsque j'y suis arrivé, et j'ai appris, sans surprise, que beaucoup de ceux qui avaient rejoint depuis l'événement avaient été de l'avis de M. d'Espenan ; un d'eux a adhéré à la lettre de MM. les lieutenants, ils calomnient ces derniers, et j'ose affirmer (on me rendra la justice de me croire), que je n'ai pas vu d'exemple d'une si héroïque valeur, que celle de ces messieurs, dans les occasions épineuses qui ont accompagné mon séjour à Perpignan.
Les soldats prétendus députés finissent par dire : Ou les drapeaux d'un corps sont des emblèmes vains et frivoles dont on peut se jouer impunément, ou Vinjure dont nous demandons la réparation ne peut demeurer impunie.
Et moi je dis : Ou les drapeaux d'un corps sont des emblèmes vains et frivoles dont on veut se jouer impunément, ou des soldats qui les ont enlevés à main armée de chez leur colonel, qui ont refusé obéissance au roi, à leur général, aux ordres intimés par la municipalité même, qui ont emprisonné le maire, auquel il doivent obéir, qui l'ont maltraité, menacé, qui sont partis sans ordres, qui ont nommé un prétendu comité pour juger, emprisonner leurs officiers et leurs camarades, qui ont intimé des ordres à leurs chefs, sont indignes de rester sous ces honorables enseignes, et doivent être jugés rebelles et condamnés selon la rigueur des ordonnances.
Un conseil de guerre doit les juger, et non le département des Pyrénées-Orientales, que ces soldats insubordonnés tiennent sous leur dépendance, et sous le canon de la citadelle de Perpignan, dont ils se sont rendus maîtres.
Voilà pour les soldats.
Et vous, Monsieur Vergés, qui avez été si modéré à la barre de cette Assemblée, qui aviez ordre de vos commettants de l'être, quoi qu'ils vous eussent député dans un moment de crise, vous cherchez à atténuer la force de la lettre qui m'a été écrite par la municipalité dont vous êtes membre. Expliquez donc aussi la signature de cette municipalité, apposée à ma relation, dans laquelle les insurrections, antécédentes à mon arrivée, sont consignées. Cette relation a été en-
voyée à la maison commune, y a été lue par le T procureur de la Commune, et signée par vous et I par tous vos collègues ; expliquez cette nouvelle contradiction. Vous me faites parler sans doute beaucoup mieux que je n'ai fait, mais vous ne faites que broder le canevas que je m'étais promis de remplir moi-même, lorsque j'avais demandé à prêter mon serment comme le constate ma lettre à la municipalité et sa réponse.
Cette inconséquence, qui vous fait condamner aujourd'hui une conduite que vous aviez approuvée, me paraît d'autant plus extraordinaire que vous n'êtes plus ici sous la coulevrine de la citadelle de Perpignan, et je crois celle de vos compagnons de voyage moins dangereuse. Vous exprimez à l'Assemblée, dites vous, le juste intérêt que le régiment de Touraine a inspiré à la ville de Perpignan, vous avez voulu dire le juste effroi, monsieur Vergés, soyez conséquent ; soyez juste, soyez vrai, soyez tel qu'on vous avait dépeint à moi, et j'en appellerai de M. Vergés ému à M. Vergés calme.
Pour vous, Messieurs Mailhat et Siau, car je ne connais pas Ceux de vos collègues qui on t joint leurs signatures aux vôtres, je vous répondrai à vous, M. Mailhat, que vous dont la compagnie a applaudi le régiment de Touraine, au moment où il demandait la tête de son chef, et où il refusait d'obéir aux ordres du roi, fait constaté par ma relation et signé d'une grande partie des citoyens de Perpignan, vous dont la compagnie leur fournissait des balles et les enivrait, comme peuvent le certifier tous ceux qui habitaient la maison de M. d'Aguilar, dont les fenêtres donnent sur votre corps de garde ; vous qui avez offert une poignée d'argent au nommé Montpellier, musicien de mon régiment, qu'il a refusée, fait qu'il a dénoncé à la municipalité ; vous.......vous imaginez pouvoir obtenir quelque croyance à deux cent vingt lieues d'une ville où vous êtes trop connu pour en avoir aucune.
Et vous, Monsieur Siau, qui avez déjà dénoncé faussement à l'Assemblée nationale l'ancienne municipalité de Perpignan, qui fûtes obligé de fuir avec vos complices jusqu'en Espagne, qui désavouâtes ensuite votre propre signature, vous qui, le long de votre route, avez semé contre moi des calomnies atroces dont j'ai recueilli les effets, vous qui, en Pologne, à Bârcelonne, et dans tous les pays du monde vous êtes agité sans succès et qui n'avez pu en recueillir qu'au sein du club prétendu patriotique de Perpignan, imaginez-vous que des pièces gratées, raturées, des signatures fausses, etc., etc., ne seront pas dénoncées par moi, lorsqu'on les produira, quoiqu'on m'en refuse communication? Non, vous he l'avez pas espéré; mais vous avez compté que l'esprit de parti vous servirait, cela peut et doit être, mais quel fruit recueillerez-vous de vos calomnies? La vérité se découvrira, et il est des genres de blessures oh la cicatrice même, qui toujours reste, devient une marque honorable : celle-ci est du nombre.
Séance du
La séance est ouverte à onze heures du matin.
, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier au matin.
Vous avez adopté hier, comme article 9 du décret sur le traitement du clergé actuel, une rédaction qui vous a été proposée par M. Camus et dont toutes les dispositions n'ont peut-être pas été bien réfléchies : je demande qu'avant l'adoption du procès-verbal on supprime la deuxième partie de l'article qui est ainsi conçue : « La faculté de parvenir à un traitement* plus considérable n'aura lieu qu'en faveur des chanoines qui seront engagés dans les ordres sacrés. » Cette disposition porterait atteinte à des droits existants et c'est par un motif de justice que j'en propose la suppression.
La disposition n'est pas injuste, puisqu'elle ne touche pas à la possession actuelle; elle se borne à disposer pour l'avenir. Les chanoines qui ne seraient pas engagés dans les ordres sacrés sont assurément moins méritants que les autres.
Quelques membres demandent l'ajournement.
D'autres membres réclament la question préalable sur l'ajournement.
L'Assemblée, consultée sur l'amendement, déclare qu'il n'y a pas lieu à délibérer.
La rédaction de l'article est ensuite maintenue.
Un de MM. les secrétaires donne lecture :
D'uné adresse des syndics des maîtres menuisiers, cordonniers et tailleurs de la ville de Vienne, qui dénoncent à l'Assemblée nationale la dernière déclaration des soi-disant catholiques de la ville de Nîmes, prient l'Assemblée de ramener à leur devoir, par la douceur, ceux qui ont été trompés; mais s'il est parmi eux des citoyens qui résistent au cri de la patrie, ils font le serment d'employer ia force et les armes pour ramener à leur devoir ces citoyens rebelles ;
D'une délibération et procès-verbal de la commune de Vaissac en Quercy, au département du Lot, sur la prestation du serment civique et proclamation de la loi martiale.
, député de Nemours. Je n'étais pas hier matin à l'Assemblée lorsque le décret sur les principes constitutifs de la marine a été rendu, L'article 14 de ce décret porte :
« Il n'y aura d'autres règlements et ordonnances sur le fait de la marine, que les décrets de l'Assemblée nationale sanctionnés par le roi, sauf les proclamations que pourra faire le pouvoir exécutif, pour rappeler ou ordonner l'observation des lois et en développer les détails. » '
Je crois que cet article a besoin d'une revision, qu'on doit distinguer les règlements et
les ordon-
(Cette proposition est adoptée.)
Vous avez rendu un décret concernant les dragons du régiment de Lorraine, qui avaient cassé plusieurs de leurs officiers. Us vous avaient adressé une lettre conçue en ces termes : « Si les dragons du régiment de Lorraine ont commis une erreur dans leur conduite, ils osent vous faire observer que vous voudrez bien n'y trouver qu'un excès de zèle. Pénétrés des sentiments que l'bonneur leur a toujours inspirés, ils sont tous résignés à suivre vos intentions, et ils attendent avec patience les ordres que vou3 voudrez bien leur prescrire pour l'avantage de la nation, de la loi et du roi; leur dévouement est sans bornes. » Aussitôt que votre décret est parvenu aux dragons de Lorraine, ils ont rappele et reçu leurs officiers de la manière' la plus satisfaisante. J'ai l'bonneur de présenter le projet de décret suivant : « L'Assemblée nationale décrète que M. le président écrira au régiment de Lorraine, que l'Assemblée nationale voit avec plaisir qu'il a reconnu son erreur; qu'elle rappelle ce régiment à la subordination qu'il doit a ses chefs ; que son zèle pour le service lui assurera la bienveillance de la nation, comme il en a toujours mérité l'estime. »
(Ce projet de décret est. adopté.)
Je dois vous apprendre que j'ai reçu de M. de La Force une lettre datée de Bagnères, le 13 juin : elle constate que M. de La Force était à Bordeaux lors des troubles de Montauban. Des certificats authentiques constatent également que Mmas de La Force n'ont point assisté, comme on l'a dit, à une messe du Saint-Esprit le jour où ces troubles ont éclaté.
expose que, depuis le mois de janvier, cinquante-six décrets importants ne sont pas encore sanctionnés ; il se plaint avec chaleur de cette lenteur et de cette inexactitude.
Plusieurs membres demandent que M. Bouche soit adjoint aux commissaires chargés de suivre l'acceptation et la sanction des décrets. Cette proposition est sur-le-champ décrétée.
Messieurs, la perception du droit de contrôle, du droit d'insinuation, formant un revenu de près de 14 millions, se percevait pour la moitié à peu près, d'après les qualités.
Vous avez anéanti toutes celles de la ci-devant noblesse. Il est donc impossible aux percepteurs de retenir tous les droits imposés sur les actes, à raison de ces qualités.
Le Trésor public va subir une perte proportionnée aux délais que vous apporterez à fixer un mode de remplacement.
Je fais donc la motion que le comité des domaines soit chargé de faire, sous huit jours, un rapport des moyens à employer pour prévenir ce nouveau déficit dans les revenus nationaux.
, député de Paris. Je crois que cet objet n'est pas du ressort du comité des domaines, mais bien de celui d'impositions.
(de Reims) pense que la création d'un nouveau comité serait convenable.
Le travail du
comité dont on demande la formation entrerait dans le système de la contribution publique que le comité d'impositions soumettra incessamment au jugement de l'Assemblée. Il me semble que, provisoirement du moins, ta motion de M. de Delley doit être renvoyée au comité d'impositions seul, ou aux comités réunis d'impositionsetdes finances.
Il me semble que le comité des domaines ne doit pas rester étranger à cette affaire.
(L'Assemblée ordonne le renvoi de la motion aux trois comités des domaines, finances et impositions.)
, député de Troyes, demande un congé.
, député de Châtelle-rault, réitère sa précédente demande de congé.
Je renouvelle l'observation que j'ai déjà faite, qu'il est impossible d'accorder des congés sans en connaître les motifs.
(de Toulon). Je supplie M. Dubois et M. François d'Escars de ne pas prendre pour leur compte ce que j'ai à dire sur ces congés un peu trop multipliés, et qui jettent l'épouvante dans mon âme... Je n'ai pas l'honneur de connaître ces honorables membres; je crois qu'ils sont incapables d'abuser de leurs congés, et j'en fais la profession avec la plus grande sincérité... mais je crois qu'il doit m'être permis, à moi, à qui on a interdit la parole lorsque j'ai voulu parler hier contre l'inviolabilité des membres de cette Assemblée hors le département de Paris, de vous présenter, en peu de mots, les considérations qui me déterminent à m'opposer aujourd'hui aux congés. Je vous demande si un représentant de la nation peut quitter son poste, s'enfoncer dans les provinces, y jeter la division et le trouble, se mettre à la tête d'un parti, y commettre des délits tant privés que publics, rester inviolable et fouler aux pieds toutes les lois, sur l'absurde fondement qu'il est député à l'Assemblée nationale? C'est cependant ce que vous avez décrété hier en termes formels, et c'est ce qui est cause que je demande qu'il ne soit accordé de congé, sous aucun prétexte, d'ici au 14 juillet; et je le demande pour l'intérêt de ceux qui pourraient être soupçonnés, comme pour l'intérêt de ceux qui pourraient devenir coupables. Je le demande, en rappelant votre situation actuelle, en vous disant de faire le recensement des ennemis que vous avez rendus inviolables, et qui peuvent être répandus dans les diverses provinces de l'Empire, en vous observant que la journée du 14 vous amènera quatre cent mille étrangers dans les murs de Paris... que plus d'un million d'hommes seront rassemblés pour cette cérémonie, que vous avez de quoi trembler des suites que pourraient produire les seules idées, vraies ou fausses, que nos ennemis enrôlent de mauvais citoyens. Ne calculons pas notre situation personnelle : dans la position où nous sommes, tous les bons citoyens savent que la Constitution se terminera, ou que nous y périrons ; mais songeons que ies habitants de Paris sont nos coopérateurs et nos frères, et que par notre imprudence nous ne devons pas compromettre le sort d'une ville immense, qui nous apporte tant de secours et nous donne tant de consolations. Je persiste à demander qu'on mette
aux voix qu'il ne sera accordé aucun congé d'ici au 14 juillet, et que le décret rendu hier, abstraction faite de l'affaire de M. de Lautrec, pour laquelle il a été rendu, ne sera exécutoire que dans l'étendue du département où l'Assemblée nationale tiendra ses séances...
Je juge de la faconde penser des autres par la mienne ; et cependant je pense bien autrement que le préopinant. Je ne crois pas qu'il y ait parmi nous des hommes capables de s'en aller chez eux pour y causer du désordre. Nous avons tous fait un serment, et il n'est pas un de nous qui soit capable de ne le pas tenir. Qu'est-ce que ces craintes pusillanimes qu'on présente sans cesse ? Quels sont nos ennemis? Où sont-ils? Je ne les crains point... Ceux qui demandent des congés ne les demandent que pour pouvoir se trouver ici au 14. J'aurais toutes les affaires du monde, que, d'après ce qui vient d'être dit, je ne partirais pas, parce qu'il n'y a point de péril. Le sentiment de la frayeur ne me convient pas... (Il s'élève un feu de murmure^. Je vois que vous ayez la même tranquillité que moi : en conséquence, je demande la question préalable.
Je ne croyais pas que ma demande pourrait former la matière d'une délibération; je ne m'éloigne que parce que Mm* d'Escars, grosse de sept mois et indisposée, m'appelle auprès d'elle. Je ne vais d'ailleurs qu'à vingt-cinq lieues d'ici, et ce n'est que par égard pour l'Assemblée que j'ai demandé un congé dont je savais bien pouvoir me passer. Si l'on imprimait sur le caractère de représentant de la nation le caractère de l'esclavage, je déclare que je supplierais l'Assemblée d'accepter dans l'instant ma démission.
(L'Assemblée décide de passer à l'ordre du jour.)
, rapporteur du comité des pensions, présente un projet de décret en le faisant précéder des considérations suivantes (1) :
Il est nécessaire de définir le sort des pensionnaires dont les émoluments, dons ou gratifications ont été provisoirement réduits à 3,00(1 livres pour tous les citoyens et à 12,000 livres pour les vieillards, jusqu'au 1er janvier 1790 et à partir de cette époque ont tous été suspendus.
Une bonne constitution et une bonne administration des finances doivent être inséparables, parce qu'elles se soutiennent l'une l'autre; il faut donc veiller sur nos finances aussi attentivement que sur la Constitution. Le décret du 4 janvier dernier a deux parties : la réduction d'abord ; la suspension ensuite. Il faut statuer définitivement aujourd'hui sur l'un et l'autre objet. Les lois ne peuvent avoir d'effet rétroactif; et par conséquent, en réduisant, on n'a pas pu vouloir réduire irrévocablement.
Toutes les rentes, dons, gratifications annuelles, échues avant le 1er janvier 1790, seront payées en leur entier ; mais à compter de cette époque, toutes seront suspendues, même pour l'échéance, jusqu'à ce qu'il ait été fait à l'Assemblée un rapport général.
Le comité sollicite quelques exceptions au nom de l'humanité et de la piété :
Pour les pensions sur les économats, attribuées aux nouveaux convertis, montant^ la somme de 104,350 livres distribuées en 907 parties ;
Pour celles aussi sur les économats, attribuées aux employés de la Régie, au nombre de onze, eu réduisant la quote-part à 1,000 livres ;
Pour celles attribuées en aumônes aux pauvres. Des familles ruinées par le système de Law ont demandé l'assistance du gouvernement et ont obtenu ces pensions ;
Enfin pour celles provenant d'un don patriotique du clergé, de la somme de un million que le le roi a pris sur sa tête et qu'il distribue en une rente viagère de 120,000 livres aux 240 plus malheureux, choisis entre les veuves et enfants des matelots.
Je demande que l'exception soit étendue aux septuagénaires qui eux n'ont pas le temps d'attendre.
(Cette motion est ajournée.)
On pourrait, dès à présent, décréter l'exception pour les octogénaires ou bien, si l'Assemblée l'aime mieux, renvoyer la discussion sur cet objet à vendredi prochain.
(L'ajournement à vendredi est prononcé.)
Le projet de décret du comité des pensions est ensuite mis aux voix et adopté ainsi qu'il suit :
L'Assemblée nationale, après avoir entendu son comité des pensions, décrète ce qui suit :
« Art. 1er. Tous les pensionnaires, sans exception, sur quelque
caisse que leur payement ait été originairement assigné, toucheront les arrérages de leurs
pensions, échus, soit pour année entière, soit pour portion d'année, jusqu'au 31 décembre
1789, et le payement leur en sera fait sans retard ni discontinuation, sous les retenues
établies par les règlements.
« Art. 2. La suspension ordonnée par l'article 2 du décret des 4 et 5 janvier dernier, sanctionné par le roi le 14 du même mois, du payement de toutes pensions, traitements conservés, dons et gratifications annuelles, est prorogée jusqu'à cé que par l'Assemblée nationale, en statuant sur le rapport qui lui sera fait incessamment par son comité des pensions, il en ait été autrement ordonné.
« Art. 3. Les pensions accordées aux familles d'Assas, de Chambors, et au sieur colonel Lukner ainsi que les pensions de 600 liv. et au-dessous, sont exceptées de cette prorogation, et seront payées à leur échéance pour les six premiers mois de l'année 1790.
« Art. 4. Sont pareillement exceptées les pensions assignées sur les économats aux ci-devant jésuites, aux nouveaux convertis, et aux anciens employés à la régie des économats, au nombre de onze; lesquelles seront payées, savoir : celles des ci-devant jésuites et celles des nouveaux convertis, en leur entier; et celles des anciens employés, pour les six premiers mois de l'année 1790, et jusqu'à la concurrence seulement de 1,000 livres ; pour l'année entière, à l'égard de celles qui excèdent ladite somme de 1,000 liv.
« Art. 5. Continueront aussi d'être acquittées les aumônes ordinaires distribuées sur les fonds des économats, ainsi que les pensions alimentaires qui se payent à des religieuses dont les maisons ont été supprimées, sur les fonds destinés au soulagement des communautés religieuses.
« Art. 6. Les veuves et les enfants des matelots qui se trouvent en tour de remplacement, seront inscrits sur les rôles de distribution des 120,000 livres appartenant pour cet objet à la marine, au lieu et place de ceux qui sont décédés en 1789, au nombre de Cent six. »
, rapporteur du comité de commerce et Tagriculture rend compte d'une pétition des forains de Beaucaire qui demandent la conservation du privilège de cette ville et le maintien du privilège de sa foire.
Il faut alors étendre cette conservation à tous les marchés qui possèdent des privilèges semblables.
Le décret et l'amendement sont adoptés, sauf rédaction, en ces termes:
« L'Assemblée nationale, considérant que la franchise accordée aux foires franches est plutôt rune faveur pour le commerce du royaume, qu'un 'privilège particulier à une ville, a décrété :
« Qu'il ne serait rien innové, quant à présent, à ce qui concerne les foires franches; qu'elles continueraient avec les mêmes exemptions de droits que par le passé ;
« Que les anciennes ordonnances rendues pour le maintien du bon ordre et de la police seront exécutées selon leur forme et teneur, et particulièrement que le tribunal que la commune de Beaucaire établissait pour juger en première instance les contestations, continuerait ses fonctions comme par le passé, en se conformant, au surplus, aux décrets ae l'Assemblée nationale. »
Un de MM. les secrétaires fait lecture d'une lettre de MM. les officiers municipaux de la ville de Nîmes, qui, après avoir rendu compte des derniers événements arrivés dans cette ville, annoncent à l'Assemblée l'intention où ils sont de donner leur démission.
, évêque de Nîmes. Je n'entreprendrai point une discussion sur la lettre des officiers municipaux ; mais je me réunis à eux pour vous peindre la situation malheureuse de plusieurs familles. Il y a dans la ville de Nîmes beaucoup de manufactures. Les ouvriers ont perdu plusieurs des négociants qui les faisaient travailler : ils ont besoin de secours extraordinaires. Dans l'intervalle qui s'écoulera entre la démission de la municipalité actuelle et la formation de la nouvelle, de qui pourront-ils obtenir ces secours? Je propose de charger ies commissaires du roi au département du Gard, et messieurs du comité permanent de Nîmes, de pourvoir promptement,et parles moyens les plus efficaces, au soulagement de ces malheureux.
Il est juste d'adopter cette proposition, mais il faut que le décret porte en même temps que les dommages seront payés par ceux qui les ont causés.
Je demande qu'ils soient payés par les trois mille deux cents personnes qui ont signé la délibération.
Plusieurs membres réclament l'ordre du jour et l'Assemblée décide qu'elle y passera.
M. de Mirabeau le jeune m'annonce qu'il est prêt à paraître à l'Assemblée
conformément au décret qui le lui ordonne (1).
Je demande si M. de Mirabeau le jeune doit paraître à la barre ou à la tribune.
Un membre ne peut être dépouillé de son caractère, toutes les fois qu'il n'est pas convaincu du délit dont on l'accuse. Je pense que M. le vicomte de Mirabeau doit être entendu à sa place.
Vaîné. S'il ne s'agissait que de l'amour-propre individuel de mon frère, je ne prendrais pas ia parole ; mais vous l'avez mandé pour vous rendre compte de sa conduite ; vous n'avez pas dit qu'il paraîtrait à la barre ; vous avez voulu l'entendre ; vous ne pouvez pas, sans l'avoir entendu, déclarer ou'il est jugeable; et tout membre qui n'est pas déclaré jugeable doit continuer à jouir de tous ses droits dans cette Assemblée. Je me rappelle une circonstance qu'il ne sera pas inutile de citer, et je la citerai avec d'autant plus de confiance qu'elle est honorable pour celui qu'elle concerne. M. Malouet, ayant été inculpé, voulut, par une délicatesse très louable, être entendu à labarre; l'Assemblée décréta qu'il parlerait à la tribune. Il me semble que cet exemple décide la question.
(On applaudit. — M. de Mirabeau le jeune entre; il monte à la tribune.)
fait lecture du décret par lequel l'Assemblée a ordonné à M. de Mirabeau le jeune de venir rendre compte de sa conduite.
le jeune. J'étais à deux cents lieues d'ici lorsque ce décret m'a été notifié. Je me suis
empressé d'obéir, et je pense avoir prouvé, par la célérité que j'ai mise dans mon retour,
mon respect pour les ordres de l'Assemblée. La calomnie m'a précédé : elle a vomi contre moi
des libelles affreux, elle m'accompagne, elle me poursuivra encore pour dénaturer les faits
dont la vérité sera ma justification. La calomnie me suivra partout. Hier encore, à Ecouen,
on a voulu m'arrêter, et, sans le secours des officiers municipaux, j'aurais peut-être été la
victime de la fureur du peuple. Cependant, j'en ai fait l'expérience, il est aussitôt
désabusé que trompé. A Castelnaudary, le même peuple qui, le 14, me couchait en joue et
demandait ma tête, est venu, le 22, se presser avec joie autour de moi ; il criait: « Il a sa
grâce, nous en sommes bien aises; il a l'air d'un bon homme. » Si quelquefois ma voix
s'affaiblit, si je ne suis pas les faits dans leur ordre, je prie l'Assemblée d'y suppléer
par son silence et par son attention. Voici la quatorzième nuit que je passe sans me coucher.
Je demande la permission de faire une observation préliminaire. On a voulu établir un rapport
entre mon opinion dans cette Assemblée et ma conduite au dehors. Je donne ma parole d'honneur
que je n'ai parlé qu'avec respect de l'Assemblée et des décrets rendus par elle et
sanctionnés par le roi. Si quelqu'un avait l'audace de dire le contraire, je lui donne
d'avance le démenti le plus formel ; la preuve viendra après. Je prie ceux de mes collègues
qui sont aussi journalistes de me traiter avec justice. J'imagine qu'on ne me reproche rien
d'antérieur aux circonstances qui m'amènent en
« Monsieur, la démarche que vous venez de faire, en joignant votre régiment au moment où vous avez appris son indiscipline, est une nouvelle preuve de votre zèle connu pour le service du roi. Vos soldats, égarés par une fatalité dont nous ignorons la cause, n'ont cédé ni à vos soins ni à ceux de M. de Chollet, commandant de la province, qui s'est uni à la municipalité pour les faire rentrer dans leur devoir. Leur opiniâtre résistance à se soumettre met notre ville dans la position la plus alarmante; vous en sentez assez les conséquences, Monsieur le vicomte, pour penser avec nous que, dans des circonstances aussi orageuses, le parti le plus sage est d'aller vous-même exposer à l'Assemblée nationale et mettre sous les yeux du roi les faits dont vous avez été témoin. Nous ne doutons pas que l'Assemblée nationale et le roi ne rendent la même justice que nous à la conduite que vous avez tenue pour remplir l'objet de votre mission.
» Les officiers municipaux de Perpignan. »
Si, depuis, la municipalité a tenu un autre langage, cette prévarication ne peut être l'effet que de la crainte qu'on lui aura inspirée. Il faut parler maintenant de l'enlèvement des cravates des drapeaux et du mode de cet enlèvement. Je suis loin de nier ce fait; mes motifs m'ont paru louables, et je les regarderai comme tels jusqu'à ce qu'ils aient été jugés coupables. Il existait dans le régiment de Touraine six cents hommes sortis de toutes les règles de la discipline et du devoir, et trois cents soldats honnêtes qui versaient des larmes de sang. Je sentais que ces hommes n'oseraient jamais montrer leur respect pour la discipline militaire, tant qu'ils seraient sous le couteau de leurs camarades insubordonnés. Je suis porteur d'un procès-verbal joint à une enquête; ces pièces authentiques répondront aux violences qu'on me reproche d'avoir exercées envers les soldats, à l'accusation d'avoir versé leur sang. Que le lendemain on se soit rétracté, cela ne prou- j vera rien ; c'est par la force, c'est par le glaive qu'on aura obtenu cette rétractation.... Quel a été mon plan? Vous avez eu connaissance des ordres que j'avais reçus du roi ; voici la lettre que m'a adressée M. de la Tour-du-Pin, en date de Paris, le 31 mai :
« En mettant sous les yeux du roi, Monsieur, le compte qui m'a été rendu de l'insurrection à laquelle s'est livré le régiment de Touraine, je n'ai pas laissé ignorer à Sa Majesté l'intention où vous êtes de demander à l'Assemblée nationale, dont vous êtes membre, la permission de vous absenter, afin devous rendre à votre régiment et d'y employer vos efforts pour rétablir l'ordre et la subordination. Le roi a vu avec satisfaction la preuve du zèle que vous vous disposez à donner, et Sa Majesté approuve que vous vous rendiez au régiment de Touraine aussitôt que vous aurez obtenu l'agrément de l'Assemblée nationale. Il est sans doute inutile de vous recommander, Monsieur, d'apporter la plus grande prudence pour connaître, avant tout, les causes d'une insurrection aussi extraordinaire dans un corps distingué autant par la bonne conduite que par sa valeur contre les ennemis de la patrie; vous pouvez à cet égard, s'il est nécessaire, vous concerter avec I MM. les officiers municipaux, pour en obtenir les 1
renseignements qu'ils pourront vous procurer, et vous aviserez avec le commandant de la place à tous les moyens que la raison, la patience et cependant la fermeté indiqueront de mettre en usage pour ramener ce régiment à la discipline, d'après la connaissance que vous aurez pu prendre des véritables causes de son insurrection. Je ne puis douter que le régiment de Touraine ne s'empresse de revenir aux principes de subordination qui seuls font la force et la gloire des corps militaires, et sont la vraie sauvegarde de la sûreté des citoyens. Sans doute que ce corps a déjà rougi d'avoir pu s'en écarter, au mépris du serment solennel qu'il a prêté de rester fidèle à la nation, au roi, à la loi et aux régies de la discipline militaire. Mais quelques heureux effets qu'ait pu produire son repentir, le roi ne pourra le croire durable que lorsque les officiers que l'effervescence a forcés de s'absenter seront rentrés dans leurs compagnies, et que l'adjudant et les bas officiers du régiment qui ont été injustement destitués par les soldats seront remis à leur place. C'est à obtenir cette marque d'un retour sincère, qne Sa Majesté vous ordonne d'employer tous vo3 soins. J'écris à M. de Chollet pour qu'il vous seconde de tous ies moyens que l'autorité de sa place pourra lui faire employer. »
Je me suis concerté, ainsi que l'ordonnait cette lettre, avec les officiers municipaux, pour aviser aux moyens de rétablir la subordination et de découvrir la cause de tant de désordres ; je crois tenir le fil de tous les troubles qui se sont propagés d'Antibes à Dunkerque, de Perpignan à Strasbourg; je suis prêta compléter un corps de preuves, et je pourrai, sous peu de jours, vous dire quels sont ies gens qui ont payé les troupes pour les soulever. Je me suis donc concerté avec la municipalité pour l'exécution des ordres du roi. Ma première démarche a été d'écrire aux officiers municipaux, pour leur demander l'instant où je pourrais prêter le serment en leur présence. Ma lettre était ainsi conçue; elle est datée du9 juin:
« Messieurs, je désire remplir à mon arrivée, à la tête du corps que j'ai l'honneur de commander, le devoir que me prescrit le décret rendu par l'Assemblée nationale et sanctionné par le roi, relativement au serment militaire. Gomme c'est en votre présence que ce serment doit être prêté, je vous prie de vouloir bien m'indiquer l'heure de la journée de demain qui pourra vous convenir, pour qué je fasse prendre les armes au régiment de Touraine. Vous voudrez bien aussi m'indiquer le lieu qui vous sera le plus commode; je désirerais que la matinée vous convînt. Membre de i'Assemblée nationale, je dois donner l'exemple de la soumission pour ses décrets; j'espère que vous verrez dans cette démarche, Messieurs, le zèiequi doit animer tout bon Français et le désir de donner au régiment de Touraine l'exemple du dévouement pour l'ordre, que je suis chargé d'y rétablir et d y maintenir. »
MM. les officiers municipaux me donnèrent jour pour le lendemain. Les trois officiers qui avaient été forcés à se retirer étaient à quinze lieues ; ils manquèrent de chevaux pour leur retour, et ne purent arriver à temps. Je donnai contre-ordre au régiment qui devait s'assembler : voici quel était mon plan. J'aurais prêté le serment militaire prescrit parles décrets de l'Assemblée nationale; je l'aurais fait prêter ensuite de nouveau au régiment, et j'aurais profité de cette occasion pour dire aux soldats : « Vous venez de jurer d'être « fidèles à la nation, à la loi et au roi, et de vous « conformer aux règles de la discipline militaire.
« Je ne veux pas examiner si vous avez été fidè-« les au même serment, déjà prêté par vous « l'aonée dernière ; je viens même vous offrir, de « la part du roi, l'oubli de tout ce qui s'est passé; « sa bonté veut bieu ne voir que votre repentir : « fidèles à votre serment, vous allez exécuter ses « ordres, dont on va vous faire la lecture. » On aurait lu la lettre du roi. Je devais ensuite ordonner aux officiers qui auraient été à portée de l'esplanade de rentrer dans leurs compagnies; j'aurais réintégré l'adjudant dans son poste, et j'aurais fait déhier le régiment. S'il y avait eu du murmure ou de l'insurrection, j'aurais dit : « Que « ceux qui ne veulent pas obéir aux ordres du « roi sortent des rangs ! » Le contre-ordre ayant été doDné, le régiment ne prit pas les armes. Le lendemain, à sept heures et demie, ma porte fut ouverte avec fracas par l'adjudant et par une troupe de soldats qui parlaient tous à la fois. Je leur dis que ce n'était pas ainsi qu'on entrait chez un chef, et leur ordonnai de sortir, ce qu'ils firent. Je passai un pantalon, j'ordonnai qu'on fît entrer une députation des soldats, qui étaient à ma porte au nombre de cinq cents. Il en monta quinze ou vingt; un grenadier porta la parole, et me dit : « Mon colonel, on nous a dit que vous « aviez ordonné à Rochefort de quitter ses épau-« lettes d'adjudant, et que vous vouliez faire reu-« trer Maréchal? » -4f « Soldats, répondis-je, ce « n'est pas en foule et sans ordre que vous devez « interroger votre chef ; rendez-vous, calmes et « tranquilles, à votre quartier ; je vous y porterai « les ordres du roi et les miens : j'y serai dans « un quart d'heure. » Les députés me répondirent « que j'avais raison, qu'ils allaient s'y rendre, « qu'ils m'avaient toujours obéi et qu'ils m'obéi-« raient encore. » A peine étaient-ils descendus, qu'on vint me dire que les soldats ne voulaient point suivre l'avis des premiers; qu'ils avaient demandé « que je descendisse, et que j'étais bien « f.....pour cela ». Je descendis avec sept officiers; les soldats se rangèrent à mon arrivée. Je leur répétai ce que j'avais dit à leurs camarades, et j'ajoutai (ceci est l'extrait d'un mémoire que je présentai à la municipalité de Perpignan) : « Je vous ordonne, soldats, au nom du serment que vous avez fait à la nation, à la loi et au roi, de vous rendre à votre quartier, et vous y recevrez mes ordres ; ce n'est pas au milieu d'une rue, et par une insurrection, que vous obtiendrez de moi une réponse : obéissez ! » Des cris presque una-. nimes dirent non! Toujours calme, je répétai une seconde fois le même ordre; on me répondit encore non/ J'eus beau dire que je n'étais pas accoutumé à obéir à mes subordonnés ; qu'ils pouvaient me casser, mais non pas me faire plier, les non furent toujours répétés. Un appointé de la compagnie de Vaubercy sortit du rang, s'avança vers moi, et me dit : « Nous savons que vous vou-« lez faire rentrer au régiment les gens qui ont « voulu nous faire du mal; mais f.....! ils n'y » rentreront pas. » Ces propos étaient accompagnés de gestes dangereux et menaçants; un des officiers qui étaient près de moi m'avertit que d'autres ramassaient des pierres. Alors je fis un pas en arrière ; je dis : « A moi, Messieurs les of-« liciers ! » Je tirai mon épée, et, la portant en l'air, je criai : « Obéissez, soldats , à la voix de « votre chefl » Au mouvement que nous fîmes pour mettre l'épée à la main, les soldats se jetèrent les uns sur les autres des deux cOtés de la rue ; plusieurs tombèrent, et d'autres crièrent aux armes; ils coururent à leur quartier, où ils furent prendre ies armes. »
Ces faits sont attestés comme il suit :
« Nous, Jacques Gavit; Ponilhari, maître perruquier ; Antoine Commellan, négociant ; Joseph Lobes, bourgeois; Vincent Cormuzat, passementier; Jean Torreilles, sellier; Jacques-Philippe Mager, garçon perruquier : Paul Ris, tailleur ; Dominique Cazal, avoeat;Jean Ghepe, tailleur; et Pierre Laforêt, tous domiciliés dans cette ville de Perpignan, après avoir pris lecture de l'écrit ci-dessus, attestons et affirmons le contenu en icelui véritable, pour l'avoir vu et entendu ; et nousdits Ghepe et Commellan attestons de plus avoir entendu que plusieurs grenadiers criaient (en parlant de M. le vicomte de Mirabeau) : « Point de vive! il est f.....pour venir ici! » ajoutant : « Il « faut qu'il vienne; c'est ici la tête, et il est f..... « pour cela I » ce qu'ils ont répété plusieurs fois. — Nous tous susdits attestons en outre que, lorsque M. le vicomte de Mirabeau tira son épée, ainsi que MM. les officiers qui étaient avec lui, ils ne blessèrent, ni la portèrent contre personne; en témoins de quoi nous avons donné la présente attestation, que nous avons signée. « A Perpignan, le 12 juin 1790.
« Chepe, Commellan, Toreille, G.-J. Ponilhari Paul Ris, Philippe Meger, I'. Camusat, Laforêt, Joseph Lobes, Cazal.
« Signé à l'original qui est au pouvoir de M. le vicomte de Mirabeau : Nous, maire et officiers municipaux de la ville de Perpignan, certifions à tous qu'il appartiendra que les seings ci-dessus apposés sont véritables, etc.
a Signé: d'Aguilar, maire; Cult et « Vaudricour, etc. »
On vous a dit que j'avais versé le sang des soldats : vous voyez combien cette calomnie est odieuse. Mais on ne vous a pas parlé de huit cents soldats criminels qui enfoncent les portes de leur colonel, enlèvent les drapeaux et la caisse militaire!... Ët ils ont été admis à la barre de l'Assemblée I Je ne rappelle pa3 qu'on leur a accordé la séance. Messieurs, je vous demande pardon.....Le désordre était à son comble; le désir de sauver un régiment avec lequel je sers depuis dix ans m'inspira des moyens de douceur et de conciliation que je mis en usage. Tout fut inutile... Je fis un calcul bien simple : trois cents soldats honnêtes, des officiers courageux et respectables avaient respecté leur devoir; il fallait conserver au roi ce noyau précieux d'un régiment qui s'était si souvent couvert de gloire, qui toujours avait été sans reproche. J'imaginai de porter les cravates des drapeaux au roi; je lui aurais dit : « Sire, envoyez les cravates dans une ville éloignée; appelez-y les soldats qui sont restés fidèles; ils viendront se réunir autour de leurs drapeaux... » Ce projet était celui d'un homme d'honneur.....
Le commandant avait obtenu que les drapeaux seraient portés, non chez le maire, je ne l'aurais pas souffert, mais dans ma chambre : je logeais alors chez M. d'Aguilar. On vous a ait qu'ils étaient dans un cabinet, c'est une fausseté; on vous a dit que les drapeaux étaient à la garde de M. d'Aguilar. Il faut qu'un colonel soit jugé avant que de lui enlever les drapeaux... M. d'Aguilar m'a si peu dit qu'il en était responsable, que les officiers qui se trouvaient souvent auprès de moi m'ont vu six fois, quand on venait chez moi en armes prendre le drapeau blanc, leur donner les autres en disant : « Il faut mourir. »0n a fait une singulière contradiction;
011 a dit d'abord que M. d'Aguilar était responsable des drapeaux qu'il gardait; on a dit ensuite que je les avais fait garder par le régiment de Vermandois. J'en avais le droit : M. d'Aguilar n'en était donc pas responsable... (Il s'élève quelques murmures.)
Je rappellerai le mot sublime d'un de mes collègues : « Si vous êtes mes adversaires, levez-vous et sortez ; si vous êtes mes juges 1 silence, écoutez-moi... » J'abandonnerai ce moyen, si vous le voulez; assurément, il est surabondant. Je le répète, nul que le colonel ne pouvait avoir la garde des drapeaux; ils étaient dans ma chambre. Je donne ma parole que M. d'Aguilar ne m'a jamais dit qu'il en répondît. Mes soldats ont bien pensé que je ne les rendrais pas; on a dit qu'on avait trouvé les cravates dans mes malles : cela est faux; elles étaient là... sur ma poitrine; on n'aurait pu les avoir qu'en me tuant. On a pris le bon moyen pour les obtenir. La sûreté d'un citoyen étaitcompromise,du citoyen que je respecte le plus ; je les ai données avant même de m'être fait représenter à Gastelnaudary la réquisition de la municipalité de Perpignan Quant à l'enlèvement de ces cravates, je l'ai fait par des motifs que je croirai bons tant qu'on ne m'aura pas prouvé qu'ils sont coupables. Quant au mode de l'enlèvement, je n'ai point violé l'hospitalité ; j'ai cru faire une action louable en sauvant le noyau du régiment coupable. Je suis innocent : je crois mon innocence démontrée ; je crois que les preuves relatives à la manière dont mon régiment a été travaillé, payé, soldé, serviront encore à compléter ma justification. Cependant, comme je veux que mon innocence soit authehtiquement connue, je serais fâché que l'inviolabilité que vous avez prononcée empêchât de me juger, je demande les seuls juges qui puissent me convenir; je demande un conseil de guerre pour juger le régiment et moi. C'est là que je porterai le calme de l'innocence, le courage qui la suit, et qui, je l'espère, ne m'abandonnera jamais. (On entend quelques applaudissements; il s'élève ensuite quelques murmures qui ne paraissent pas être d'improbation. — M. de Mirabeau le jeune quitte la tribune. — Il y reparaît un moment.) — On me fait ici un reproche : je serais au désespoir qu'on m'accusât d'avoir pris ud ton menaçant dans ma justification. (On entend dans plusieurs partie de la salle, ce mot : Non, non!)
L'Assemblée renvoie la justification de M. de Mirabeau le jeune au comité des rapports réuni avec le comité militaire.
La séance est levée à trois heures et demie.
a la séance de l'assemblée nationale du
Nota. Nous avons conservé, p. 509, à cause de son caractère mouvementé, la version du Moniteur relative au compte rendu fait par M. de Mirabeau le jeune sur l'affaire de Perpignan ; mais comme le Moniteur est fort incomplet, nous avons pensé qu'il y avait lieu et qu'on nous saurait gré de reproduire ce compte rendu in extenso.
Monsieur le Président et Messieurs, J'étais à deux cents lieues, il y a trois jours, lorsque votre décret m'est parvenu. Je désire que mon empressement à me rendre à vos ordres vous prouve le désir que j'ai de soumettre ma conduite à votre jugement. Il était d'autaut plus vif ce désir, que la calomuie m'a précédé ici, et a vomi contre moi une foule de libelles atroces, dont j'ai trouvé un exemplaire à chacune des postes de ma route, que la calomnie m'a accompagné, m'a environné de dangers depuis mon départ de Gastelnaudary, qu'hier encore, sans la présence d'esprit et la fermeté d'un officier municipal, j'aurais peut-être été la victime, à Etampes, d'une effervescence populaire (1). La calomnie dénaturera ces faits, et me suivra jusque dans mes moyens de défense, je m'y attends. Je n'apporte ici d'autres armes pour la combattre que le témoignage de ma conscience, le flambeau de la vérité, et un courage qui ne m'abandonnera jamais. Qu'aurais-je à redouter? Vous êtes mes juges, vous devez être justes, vous le serez : quant au peuple, je viens de faire l'heureuse expérience qu'il est aussi facilement désabusé que trompé. Celui de Gastelnaudary, qui, le quatorze, jour de mon arrestation, me couchait en joue, au moment où je me présentais à la fenêtre, désirant lui prouver que ma contenance et mon maintien n'étaient pas ceux d'un coupable, ce même peuple qui demandait avec acharnement, à cette époque, ma tête, et dont la férocité me rendait un hommage, en disant qu'il fallait me fusiller et non me prendre, n\'a témoigné par des cris de joie, le 22 du même mois, jour où votre décret lui a été connu, l'intérêt qu'il prenait à ma délivrance; mes gardes même, sont venus en foule me complimenter. J'avais passé neuf jours au milieu de ce peuple, il avait été à même de juger si j'étais un monstre capable des crimes les plus horribles. Les paysans, dont j'entendais à peine l'idiome, interprétant à leur manière votre décret, s'écriaient : Nous sommes bien aises qu'il ait sa grâce, car il a l'air d'un bon homme.
Je me contenterai d'ajouter une simple observation préalable, pour laquelle je demande votre attention, que je serai dans le cas de réclamer souvent aujourd'hui, d'après la faiblesse de mon organe, qui tient à une grande lassitude, et à une extrêmement longue insomnie. Cette observation porte sur la mauvaise intention qu'on a
manifestée en voulant établir un rapport entre mes opinions politiques, ma position dans la minorité de l'Assemblée nationale, et ce qui s'est passé depuis mon départ de Paris. Je donne ici hautement ma parole d'honneur, qne si j'ai eu occasfon de parler, depuis cette époque, de l'Assemblée nationale et de ses décrets, j'en ai parlé avec la soumission qui leur est due, lorsqu'ils sont sanctionnés par le roi. Si quelqu'un ose articuler un fait contraire, je lui donne d'avance le démenti le plus formel, la preuve viendra ensuite
Je saisirai aussi cette occasion pour prier ceux de mes collègues qui joignent à cette qualité celle de journalistes, de mettre plus d'impartialité à me juger qu'ils n'en ont mis à rendre compte de ma conduite, qu'ils ne pouvaient connaître.
Venons à ma justification.
Il me semble qu'on m'accuse de deux prétendus délits. Le premier est l'enlèvement des cravates des drapeaux du régiment de Touraine. Le second est le mode de cet enlèvement. J'imagine que ma conduite antécédente à ce dernier événement n'a besoin d'aucune autre apologie que de la lecture de la lettre que m'a fait l'honneur de m'écrire ia municipalité de Perpignan, six heures avant mon départ; elle contraste un peu avec l'adresse qui vous a été présentée hier, et qui semble approuver la conduite du régiment de Touraine.
Vous ferez facilement les réflexions qui doivent être la suite ,de la comparaison de ces deux pièces.
Côpie de la lettré écrite à M. le vicomte de Mirabeau par la municipalité de Perpignan, en
date du
Monsieur le vicomte,
La démarche que vous venez de faire en joignant votre régiment, au moment où vous avez appris son indiscipline, est une nouvelle preuve dè votre zèle connu pour le service du roi. Vos soldats, égarés par une fatalité dont nous ignorons la cause, n'ont cédé ni à vos soins, ni à ceux de M. de Ghollet, commandant de la province, qui s'est uni à la municipalité pour les foire rentrer dans le devoir. Leur opiniâtre résistance à se soumettre met notre ville dans ïa position la plHs alarmante : vous en sentez assez les conséquences, Monsieur le vicomte, pour penser avec nous que, dans les circonstances aussi orageuses, le parti le plus1 sage est d'aller vous-même exposer à l'Assemblée Nationale, et mettre sous les yeux du roi, les faits dont vous avez été témoin. Nous ne doutons pas que l'Assemblée nationale et le roi ne rendent la même justice que nous à la conduite que vous avez tenue pour remplir l'objet de votre mission.
Nous avons l'honneur d'être, avec les sentiments les plus respectueux,
Vos très humbles et très obéissants serviteurs.
Les officiers municipaux de Perpignan.
D'Aguilar, maire-, vaudrigourt, officier municipal-, Càgarsiga; PojvïSy F. Mussotty, signés à l'original.
Et au dos est écrit, ou à l'enveloppe :
A Monsieur, Monsieur lé vicomte de Mirabeau, colonel du régiment de Touraine, à Perpignan. Collationné |par nous, secrétaire-greffier de la
municipalité de Castelnaudary, sur l'original à nous représenté, et de suite retiré par M. le vicomte de . Mirabeau : A Castelnaudary, le 15 juin 1790, et nous avons signé, et avons apposé les sceau et armes de la ville.
Signé : Boyer, secrétaire-greffier.
Le premier des prétendus délits dont je suis accusé ne sera pas désavoué par moi, je crois même devoir vous prévenir que j'ai cru faire une action louable en enlevant les cravates des drapeaux du régiment de Touraine j et jusqu'à ce. que mes motifs, que j'aurai l'honneur de vous expliquer, soient jugés coupables, j'avoue que je ne puis m'empêcher de les croire louables.
Je ne sais si en vous lisant, Messieurs, le procès-verbal que j'ai eu l'honneur de vous adresser de ce qui s'est passé à Perpignan, on vous a dit que les signatures des officiers municipaux, de la garde nationale et d'un grand nombre de citoyens de la ville de Perpignan constataient l'authenticité de cette pièce et des faits qui y étaient contenus; jedoia d'autant plus en douter, que mes amis eux-mêmes, en livrant à l'impression ce détail, ont omis cette précaution essentielle : cela doit changer à vos yeux la nature de cette pièce, sur laquelle on a cherché à vous faire naître des doutes injurieux à ceux qui en ont certifié la vérité, et j'aurài si souvent besoin, dans le cours de cette discussion, d'inyo-qtaer cette1 pièce essentielle, que je dois chercher à lui rendre la confiance qui lui est due.
J'ai fait un calcul bien simple, et qui, je suppose, aurait été Celui de tout homme d'honneur. Je savais, à n'en pouvoir douter, que le régiment de Touraine était composé dé Six cents mutins, qui avaient donné les preuves, comme je vais le démontrer tout à Fheure, qu'il était impossible de compter sur un retour, peut-être déjà trop longtemps attendu; et de trois cents hommes honnêtes, mais faibles, qui versaient des larmes de sang sur tout ce qui se passait, dont plusieurs m'avaient fait part de la situation cruelle dans laquelle ils se trouvaient et qui n'avaient pas Pëttergie nécessaire pour calculer qu'un petit nombre de gens honnêtes et fidèles à leur serment comme à l'honnetir, nè doivent pas plus Craindre que compter des soldats rebelles et parjures. Il s'agissait de prendre-les hommes tels qu'ils étaient, et non de les calculer tels qu'ils devaient être.
Je plaignais le sort de ces braves gens, celui du corps des officiers, qui jusque-là s'était parfaitement bien comporté, et d'après les idées nécessaires de la discipline qui devaient exister dans la'tête et dans l'âme d'un militaire qui sert depuis vingt ans, et qui a calculé que l'ordre militaire sort de l'ordre naturel et essentiel des sociétés, et que sans subordination il ne peut exister d'armée ; j'imaginai que le meilleur moyen de conserver à la nation et au roi le noyau d'un régiment bon jusqu'au moment où des suggestions étrangères l'ont égaré, travaillé, trompé, était de porter au roi les Cravates ; de le supplier de les envoyer dans une grande garnison, à Lille, Metz où Strasbourg, de donner ordre aux soldats fidèles, aux gens par congé, et aux corps d'officiers de les joindre; les mutins n'auraient pas osé s'y rendre, on eut pu d'ailleurs ea expulser, et ils n'auraient pas imposé la loi, ce qui existait à Perpignan, comme j'avais eu lieu de m'en convaincre. On verra dans ce plan le désir de Servir particulièrement les officiers, en n'ex-
posant que moi seul; vous jugerez, Messieurs, si j'ai dû être étonné de voir un de ces officiers se présenter avec des soldats, à la barre de cette Assemblée, pour donner plus de poids, par sa présence, aux diatribes que s'y est permis contre moi un soldat rebelle;mais il y a longtemps que je suis convaincu qu'il y aurait une jouissance trop réelle à faire le bien, si l'on ne rencontrait des ingrats. La Providence n'a pas voulu nous départir une jouissance morale dans toute sa pureté.
Je ne parlerai pas de l'admission au sein de l'Assemblée de ce même soldat rebelle (1)... Poursuivons :
Il ne sera pas difficile, sans doute, de vous prouver que le régiment de Touraine était dans une insurrection portée à son comble, et qui ne laissait aucun espoir de retour : c'est ce que je vais faire. Il ne me le sera pas davantage de vous démontrer que j'avais annoncé la démarche que l'on blâme; mais cette preuve appartient au second délit prétendu qui m'est imputé.
Je vais d'abord vous faire connaître, Messieurs, les ordres du roi, dont j'étais porteur.
Copie de la lettre de M. La Tour-du-Pin, à M. le vicomte de Mirabeau.
Paris, le
(Ce document a déjà été inséré dans la séance du 18 juin.)
Tels étaient les devoirs que j'avais à remplir en arrivant à Perpignan, examinons si j'ai fait ce que j'ai dû : une lecture attentive du procès-verbal qui a été livré à l'impression ne laisserait aucun doute : rappelons les principaux faits qui y sont insérés. Je me suis non seulement concerté avec la municipalité, selon l'instruction qui m'avait été donnée pour découvrir les promoteurs de l'insurrection qui avait eu lieu, mais je lui ai même communiqué mon plan relatif à l'exécution des ordres du roi, après avoir rempli mon premier devoir, qui était d'obtenir l'approbation du commandant delà province; ce plan, qui consistait à demander à prêter mon serment militaire, devait être agréable à la municipalité et au peuple. Il me mettait à même de rappeler aux soldats celui qu'ils avaient fait d'être fidèles à la nation, à la loi et au roi, et de se conformer aux règles de la discipline militaire : je leur aurais déclaré alors quels étaient les ordres du roi, relatifs à la rentrée des officiers et de l'adjudant; je leur aurais dit que comme chef suprême de l'armée, ses ordres devaient être exécutés, et j'avais tout lieu de croire qu'ils le seraient; en cas de refus ou d'insurrection, j'avais pour témoin de notre conduite réciproque la municipalité qui pouvait requérir le commandant de la province, et ce dernier qui pouvait déployer la force nécessaire pour maintenir Ja discipline et l'ordre ; voyant mon plan approuvé de ceux qui me paraissaient devoir y coopérer utilement, j'écrivis à la municipalité de vous faire la lecture, elle vous prouvera que j'étais loin de m'ex-
primer et d'agir dans le sens des intentions que la calomnie a voulu me prêter.
Copie de la lettre écrite par M. le vicomte de Mirabeau, colonel au régiment de Touraine, à MM. les maire et officiers municipaux de la ville de Perpignan.
(Ce document a déjà été inséré dans la séance du 18 juin).
Réponse des maire et officiers municipaux à la lettre précédente.
Monsieur le vicomte,
La municipalité, instruite par la lettre que vous lui faites l'honneur de lui écrire, se fait un devoir de concourir au désir que vous lui témoignez de prêter, à la tête du corps que vous commandez, le serment militaire prescrit par le décret de l'Assemblée nationale, sanctionné par le roi; elle vous laisse le choix du lieu où vous jugerez à propos de rassembler votre régiment pour cette cérémonie, à laquelle la municipalité assistera, ainsi qu'il est prescrit par le même décret.
Ce sera pour demain, à huit heures du matin, si cela vous convient ; vous voudrez bien faire avertir une demi-heure avant la municipalité, qui se trouvera réunie dans la maison commune pour se rendre au lieu indiqué.
Nous avons l'honneur d'être avec respect, Monsieur,
Vos très humbles et très obéissants serviteurs,
Les maire et les officiers municipaux. Signé : d'aguilar, maire-, cult, vaudricourt, verger, cagarsiga, mussotty, pons.
Pour copie certifiée véritable, signé : jaume, secrétaire.
Je donnai ordre qu'on prît les armes le lendemain, à huit heures : le retard des officiers me força à contremander mes ordres ; j'étais au lit lorsque soixante soldats entrèrent dans ma chambre ; je leur demandai si c'était ainsi qu'on se présentait chez un chef et leur ordonnai de sortir, ce qu'ils firent. Je passai un pantalon et une redingote, et, entrant dans le salon, j'ordonnai qu'on fît entrer une députation des soldats qui étaient à ma porte au nombre de cinq cents. Il en monte quinze ou vingt ; un grenadier porta la parole, et me dit : Mon colonel, on. nous a dit que vous aviez ordonné à Rochefort de quitter ses épaulettes d'adjudant, et que vous vouliez faire rentrer Maréchal.—Soldats, répondis-je, ce n'est pas en foule et sans ordre que vous devez interroger votre chef; rendez-vous calmes et tranquilles à votre quartier, je vous y porterai les ordres du roi et les miens, j'y serai dans un quart d'heure. Les députés me répondirent que j'avais raison, qu'ils allaient s'y rendre, qu'ils m'avaient toujours obéi et qu'ils m'obéiraient encore. A peine étaient-ils descendus qu'on vint me dire que les soldats ne voulait point suivre l'avis de leurs députés, qu'ils avaient demandé que je descendisse et qu'ils disaient que j'étais bien f....pour cela. Je descendis avec sept officiers, les soldats se rangèrent à mon arrivée, je leur répétai ce que j'avais dit à leurs camarades, et j'ajoutai : Je vous ordonne, soldats, au nom du serment que vous avez fait à la nation, à la loi et au roi, de vous rendre à votre quartier
où vous recevrez mes ordres ; ce ri est pas au milieu d'une rue et par une insurrection que vous obtien-drezdemoi une réponse: obéissez!Des crispresque unanimes dirent non! Toujours calme, je répétai une seconde fois le même ordre : on me répondit encore non! J'eus beau dire que je n'étais pas accoutumé à obéir à mes subordonnés, qu'ils pouvaient me casser, mais non me faire plier, les non furent toujours répétés. Un appointé de la compagnie de Vaubercey sortit du rang, s'avança vers moi, et dit : Nous savons que vous voulez faire rentrer au régiment les gueux qui ont voulu nous faire du mal,.mais f.... ils ny rentreront pas. Ces propos étaient accompagnés de gestes menaçants et dangeureux ; un des officiers qui étaient près de moi m'avertit que d'autres ramassaient des pierres ; alors je fis un pas en arrière, je dis : A moi, Messieurs les officiers-, je tirai alors mon épée, et la portant en l'air comme pour faire un commandement, je criai : Obéissez, soldats, à la voix de votre chef. Au mouvement que nous fîmes pour mettre l'épéeà la main, les soldats se jetèrent les uns sur les autres des deux côtés de la rue ; plusieurs tombèrent et crièrent aux armes, et coururent à leur quartier. Quelques hommes ont prétendu avoirété blessés par moi: je donne mu parole que la chose est de toute fausseté, et si assurément j'eusse eu l'intention de punir l'insolence de l'appointé qui m'avait manqué, je ne l'aurais pas égratigné ; plusieurs citoyens étaient auprès de moi ; deux officiers de la garde nationale, entre autres, ont rendu le témoignage authentique de la vérité du fait.
Je vais avoir l'honneur de vous donner connaissance d'une espèce d'enquête qui a été faite sur cet objet, et qui ne peut assurément laisser aucun doute.
Du mémoire présenté par M. le vicomte de Mirabeau, colonel du régiment de Touraine, à la municipalité de la ville de Perpignan, a été extrait ce qui suit :
(Ce document a déjà été inséré dans la séance du 18 juin).
Poursuivons : Au départ des soldats, je proposai aux officiers de nous rendre chez M. le marquis d'Aguilar, maire, pour le prévenir de ce qui se passait ; et de là, mon intention était de me rendre chez le commandant de la province et au quartier. M. le maire assembla la municipalité et requit le général, qui se rendit chez lui après avoir donné les ordres nécessaires ; MM. les officiers municipaux, le général et tous les officiers me demandèrent en grâce de ne pas sortir de chez le marquis d'Aguilar, je ne me rendis qu'à l'importante considération du danger où j'allais mettre les citoyens. Je savais que les soldats disaient hautement qu'ils voulaient me tuer : j'étais convaincu qu'ils ne l'oseraient point: ma conscience ne me reprochait rien, j'avais toute ma vie tout fait pour eux, et je ne les croyais pas encore parvenus à l'oubli de tous leurs devoirs et à la scélératesse la plus atroce.
Le régiment de Touraine se rendit sans ordre, battant la charge, à la place de la Loge, les compagnies de la citadelle l'avaient rejoint, lis avaient fait sur-le-champ des dispositions telles qu'il est impossible de ne pa3 y reconnaître une combinaison d'idées et de projets. Un piquet alla s'emparer de l'avancée de la citadelle, un autre, des canons de cette forteresse qui donne sur la
ville; une garde fut placée à chaque poste, un détachement alla à la poste aux chevaux, quelques-uns enfoncèrent des caisses à cartouches qu'ils prirent dans les magasins de la citadelle et le reste se mit en bataille sur la place après avoir été enlever de chez moi les drapeaux et la caisse.
C'est ici le lieu de vous marquer mon étonne-ment, Messieurs, de ce qu'en vous présentant comme un crime atroce l'enlèvement des cravates, oo ne vous a pas parlé de ce premier enlèvement véritablement criminel, fait par huit cents hommes armés qui ont enfoncé ma porte, ont arraché de leur asile sacré, de la chambre de leur colonel, les drapeaux et la caisse militaires ; et ce sont les députés des auteurs d'un crime aussi constaté et aussi atroce que vous avez admis à votre barre pour vomir des injures atroces contre leur colonel ; non, ce Crime ne peut rester impuni, s'il reste encore quelque idée d'ordre et de discipline dans l'armée française; et j'ose avancer qu'il n'en existe plus, si on ferme les yeux sur un désordre dè cette nature.
Mais je m'aperçois, Messieurs, que je ne fais que copier le procès-verbal déjà connu de vous. Vous y verrez constaté le refus d'obéir aux ordres du roi, portés au quartier par le commandant de la province et la municipalité seuls, parce que le premier avait exigé que je ne les y accompagnasse pas, et que je sais obéir. Vous y verrez des soldats sortir tous du rang au moment où on invite ceux qui ne veulent pas obéir aux ordres du roi à s'en éloigner, y rester tous lorsqu'on fait la contre-épreuve, refuser leur licenciement, et persister dans leur rébellion qui vous paraîtra sans doute bien avérée et soutenue, puisque comme le dit la municipalité, ils n'avaient cédé ni à mes soins ni à ceux de M. de Chollet, commandant de la province, qui s'est uni à la municipalité pour les faire rentrer dans leur devoir. ]
J'ai passé deux jours entiers dans l'état de désespoir qui était la suite de toutes ces horreurs; et voici l'ordre que j'ai donné la veille de mon départ. Je désire que l'Assemblée y reconnaisse le désir de retour à l'ordre qui caractérisait encore cette dernière démarche :
Ordre de M. le vicomte de Mirabeau aux soldats du régiment de Touraine, le
Pressé par mon devoir, je ne puis suspendre davantage le compte que je dois à l'Assemblée nationale et au roi, de ma conduite et de celle du régiment de Touraine; je donne ma parole qu'aucun n'a encore été rendu ni par le commandant, ni par la municipalité, ni par moi. Le désir de sauver un régimeût avec lequel je sers depuis onze ans a pu seul m'engager à suspendre l'exercice d'un devoir. On m'engage à faire un dernier effort, et je m'estimerais heureux s'il pouvait réussir.
Je demande donc que les prisonniers arrêtés par les soldats soient remis entre les mains de la municipalité pour être jugés par les tribunaux. Je désire plus que personne qu'on connaisse les moteurs des troubles qui nous agitent; je suivrai assurément avec force leur conviction et leur punition.
Si le régiment rentre dans l'ordre et demeure soumis à la discipline, qu'il remette les cartouches qu'il a enlevées, qu'il soit fidèle au serment qu'il a prêté : je donne ma parole (et les soldats me connaissent assez pour la croire sacrée) que je
ferai mes efforts pour conserver à la nation et au roi des soldats repentants de leurs égarements sur lesquels je jetterai un voile.
La réponse doit m'être rendue sous peu d'heures, je désire que les soldats du régiment de Touraine reconnaissent le dernier cri de la voix qui tant de fois a eu de l'empire sur leurs âmes. Qu'il s'en élève un seul qui ait à se plaindre de moi, que le calomniateur qui a prétendu avoir été blessé par moi ose le soutenir devant moi.
Que le soldat calme interroge sa conscience, qu'il me juge, je n'ai jamais récusé le jugement d'un homme honnête et froid.
Signé : le vicomte de Mirabeau.
Réponse.
« Les bas-officiers, caporaux, grenadiers, chasseurs et soldats du régiment de Touraine, ont l'honneur de répondre à M. le vicomte de Mirabeau que le désordre n'a jamais régné dans le régiment de Touraine. Les prisonniers qu'ils tiennent ne sortiront point de leurs mains, ils ne se sépareront point des cartouches dont ils sont munis. Lescitoyensn'ontaucunecrainte àcetégard. Il n'appartenait qu'à M. de Mirabeau de soutenir qu'il n'avait blessé personne. Le témoignage public le démentira : trois hommes ont été blessés; ils le lui prouveront, quand il le jugera à propos.
Signé: les bas-officiers, caporaux, grenadiers, chasseurs du régiment de Touraine.
Je ne donnerai aucune qualification à cette réponse qui me fut apportée par un sergent, un caporal et un soldat députés, c'est la dernière période de l'insubordination... Je suis parti le lendemain.
Ils s'agit actuellement de repousser l'accusation qui a le plus affligé mon âme, je veux dire le second défit prétendu qui a été soumis à votre jugement ; jusqu'ici j'avais été accusé de tenir beaucoup trop aux idées et aux préjugés chevaleresques, aujourd'hui on prétend prouver que j'ai violé la plus sainte des règles que prescrivait la loyauté de l'ancienne chevalerie ; mes ennemis l'ont avancé, les échos de la calomnie l'ont répété ; mais j'avoue que je crois pouvoir assurer que ceux-mêmes qui l'ont dit ne l'ont pas cru; il s'agit de le prouver, et cela me sera facile.
On a prétendu d'abord que les drapeaux du régiment de Touraine avaient été portés chez le maire qui m'avait donné un asile et où j'étais resté caché. Premièrement, le logement que M. le marquis d'Aguilar m'avait offert n'avait été un asile que parce que le commandant de la province avait exigé que i'y restasse, et que je sais obéir. En second lieu, le jour même de l'insurrection, peu d'heures après celle où les soldats rebelles avait demandé ma tête, j'étais sorti de cette prétendue retraite, je m'étais promené au milieu de cette soldatesque effrénée, j'avais fait le tour du rempart et je n'étais rentré que le soir, ce qui prouve que je n'avais pas assurément le besoin, ou du moins le désir de rester caché.
Les drapeaux avaient été portés, il est vrai, chez M. le maire, mais c'était parce que j'y avais un logement. Ceux qui connaissent les lois militaires savent que le colonel seul peut être le dépositaire et le gardien des drapeaux de son régiment ; et ceux de qui je suis connu, n'imagineront pas sans doute que j'eusse souffert qu'un autre remplît mes devoirs.
On vous a avancé un fait faux, en vous disant que ces drapeaux n'étaient pas dans ma
chambre ; on m'a vu plusieurs fois et M. le maire lui-même le certifiera, prendre ces drapeaux, déclarer que je mourrais en les défendant, et mettre même à cette protestation une vivacité que quelques personnes ont blâmée.
On prétend soutenir que ce maire avait répondu des drapeaux ; le pouvait-il? Et s'il l'eût fait, les soldats seraient-ils venus quatre fois dans les deux jours pour les enlever à main armée? Veuillez remarquer une contradiction manifeste entre cette assertion et ce qui vous a été dit par les soldats relativemement au détachement du régiment de Vermandois qui a été commandé, disent-ils, par moi et par le maire pour garder leurs drapeaux. Il suffit de connaître les règles militaires pour savoir que je n'avais aucun droit de commander les soldats de Vermandois, et quant à M. le maire, s'il eût répondu des drapeaux aux soldats de Touraine, il ne devait rien craindre de leur part, et il pouvait aisément se débarrasser de leurs visites importunes en leur remettant le dépôt confié. Etait-ce contre moi qu'il appelait ces soldats étrangers? Cela ne peut pas se supposer.
(Icisesont élevés quelques murmures dans l Assemblée, on ne voyait pas sans doute cette contradiction aussi manifeste que je le supposais ; je crois que si on eût bien voulu m?entendre jusqu'à la fin, on eût été plus indulgent.)
Il est possible, Messieurs, que quelques-uns de mes moyens paraissent insuffisants, mais je crois en avoir surabondance et pouvoir en abandonner quelques-uns sans nuire à ma cause.
La vérité est que M. le marquis d'Aguilar ne m'a jamais dit qu'il eût répondu de mes drapeaux, je lui aurais représenté qu'il ne le pouvait pas. Je suis bien certain qu'il n'a pu, ni vous dire, ni charger qui ce soit de vous annoncer qu'il m'en eût averti, je connais trop sa loyauté pour l'avoir pu penser un instant, et il me semble que, pour établir que j'ai violé les lois de l'hospitalité, il faudrait prouver que j'étais instruit de la parole qu'il avait engagée.
Mes soldats ont bien pensé que je ne les rendrais, ces cravates, qu'à la considération puissante de ne pas laisser plus longtemps compromis un vieillard respectable qu'ils avaient l'infamie de rendre responsable d'un prétendu délit qu'il n'avait pas été en son pouvoir d'empêcher : on vous a dit, Messieurs, qu'on avait trouvé les cravates dans mes malles, cela est faux, elles étaient là... sur ma poitrine, et je doute qu'un mortel pût se flatter de les en tirer, moi vivant -, on a pris le bon moyen pour les obtenir, la sûreté d'un citoyen était compromise, celle du citoyen que je respecte le plus, je les ai données sur la lettre honnête et pressante de M. le marquis d'Aguilar ; je les ai données avant même qu'on m'eût présenté aucune réquisition.
Je me résume, Messieurs. Je crois avoir rendu un compte exact de ma conduite, je crois avoir développé les motifs qui m'ont déterminé, et je le répète, Messieurs, je les croirai bons ces motifs tant qu'ils n'auront pas été jugés coupables ; quant au mode de l'enlèvement des cravates, je n'ai point violé l'hospitalité, je crois l'avoir prouvé, j'ai cru faire une action louable en sauvant le noyau d'un régiment coupable, je suis innocent, je crois mon innocence démontrée, je crois que les preuves relatives à la manière dont le régiment de Touraine a été travaillé, payé, soldé, serviront encore à ma justification et j'espère, sous peu de jours, Messieurs, vous offrir à cet égard des preuves légales et peut-être même le fil de la trame qui a fait éclore, depuis Stras-
bourg jusqu'à Antibes, depuis Dunkerque jusqu'à Perpignan, des insurrections dans presque tous les régiments de l'armée; c'est peut-être parce qu'on n'ignorait pas que je le tenais, ce fil important, qu'on a semé tant d'obstacles sur ma route ; mais je les ai surmontés et je servirai encore de mon mieux, dans cette occasion, ma patrie et mon roi.
Quoique mon innocence me paraisse démontrée, je veux qu'elle soit authentique et connue de l'Europe entière, je n'ai regardé l'inviolabilité que vous avez rappelé à mon égard que comme une égide à l'aide de laquelle je pourrais m'assurer un jugement. Je serais bien fâché qu'on prétendîtluidonnerplus d'étendue, jedemandeles seuls juges qui puissent me convenir, je demande un conseil de guerre pour juger le régiment de Touraine et moi ; c'est là que je porterai le calme de l'innocence, le courage qui la suit, et qui, j'ose me flatter, ne m'abandonnera jamais.
A.-B.-L. Mirabeau.
P.-S. Je n'ai eu aucune communication des adresses présentées par les députés extraordinaires de Perpignan et mes soldats rebelles ; en attendant que j'y réponde, ce que je ferai sous peu de jours, je crois devoir joindre ici les comptes qui m'ont été rendus de la première insurrection qui a eu lieu dans mon régiment et due les soldats députés voudraient au moins publier, ne pouvant les nier; les faits ont été dénaturés par les soldats: ces comptes sont signés des officiers qu'ils concernent et du premier lieutenant du corps ; on m'assure que, depuis, plusieurs officiers ont été proscrits, pendant mon séjour ; le capitaine des grenadiers ne dut son salut qu'a la protection de la municipalité dont on respectait encore l'autorité; on verra dans les pièces justificatives l'adresse des soldats à la municipalité, relativement à cette affaire et sa réponse.
Je ne répondrai point à l'adresse de la municipalité : ce qu'elle a fait dans tout*ceci, comparé et rapproché, établira sans doute la différence qui existe entre des actes passés librement et ceux arrachés par la force et l'atrocité, auxquelles on n'oppose que l'honnêteté et la faiblesse.
pièces justificatives.
Copie de la lettre écrite par M. le chevalier de la Porte, à M. le vicomte ae Mirabeau, en
date du
Monsieur le vicomte,
Etant le premier des lieutenants qui se trouvent au corps, j'ai l'honneur de vous adresser, en cette qualité, le procès-verbal que j'ai fait du malheureux événement qui nous consterne ; la connaissance que vous avez de tous les officiers qui ont l'honneur d'être sous vos ordres ne vous laissera aucun doute, j'espère, sur la pureté de la conduite de nos camarades ; mais nous avons cru, Monsieur le vicomte, devoir vous envoyer le rapport fidèle pour vous faciliter les moyens de contre-balancer l'exposé calomnieux que nos soldats égarés font passer à l'Assemblée nationale.
Tous les lieutenants et sous-lieutenants m'autorisent aussi à vous donner leur parole d'honneur, qu'à quelque extrémité qu'on se porte avec eux, ils ne quitteront les drapeaux, dans ces douloureuses circonstances, que lorsque le corps sera entièrement dissous, et alors nous vous
prierons d'être auprès du roi l'organe des sentiments qui nous dévouent à mourir pour Sa "Majesté, et de la prier de nous faciliter de nouveaux moyens de remplir le voeu si cher à nos cœurs.
Je suis avec respect, etc.
Signé : le chevalier de la PoRte.
P.-S. J'apprends que les grenadiers sont en nombre à la poste ; comme je crains qu'ils n'attentent aux lettres qui vous concernènt, je mets celle-ci sous le couvert de M. le vicomte de Bonne.
Procès-verbal de ce qui s'est passé dans le régiment de Touraine, en garnison à Perpignan, les 19, 20, 21,22, 23, 24 et 25 mai 1790, dressé par le premier lieutenant et signé de lui.
Les officiers du régiment de Touraine, instruits depuis quelque temps que des êtres gagés cherchaient à faire oublier à leurs soldats ies devoirs qui les assujettissent à la discipline, avaient redoublé d'efforts et de zèle pour les y maintenir ; ils osaient espérer que le succès couronnerait leurs soins, et qu'ils pourraient conserver au roi une troupe, jusqu'à ce jour constamment soumise à ses ordonnances : mais le 19 mai au soir, le sieur Maréchal, adjudant, ayant condamné à la prison un tambour, qui, au mépris de la défense qui en avait été faite, avait battu la farandole dans la ville, les grenadiers réclamèrent contre cette punition; (e sieur Maréchal eut la faiblesse de condescendre à cette demande, et l'imprudence de manquer, un moment après, à sa promesse, en faisant subir à ce tambour la peine qu il venait de rétracter. Les grenadiers s'attroupèrent et disaient hautement qu'ils allaient faire sortir cet homme, lorsque MM. de Montalembert, chevalier de la Peyrouse et comte d'Urre, arrivant au quartier pour l'appel, leur représentèrent les conséquences d'un aussi grand manquement de subordination, en observant que* dans tous les grades, on se rendait criminel lorsqu'on s'opposait à l'ordre d'un de ses supérieurs. Un grenadier s'approchant alors de M. de Montalembert lui dit: «G'est moi qui veux que cet homme sorte, et ii sortira. » — « Il ne sortira pas » répondit M. de Montalembert, «vous êtes un séditeux, rendez-vous à ia salle de discipline.» Un second grenadier, nommé Pradine, ayant répliqué: «II n'ira pas », M. de la Peyrousé le prit au collet et lui dit : «Màrchez en prison. » — Ce colloque, très bruyant, avait rassemblé une très grande quantité de soldats, qui tous réclamèrent à la fois contre l'ordre donné par ces deux officiers ; et plusieurs s'oublièrent au point de tenter d'àrracher de force les grenadiers punis. M. le comte d'Urre s'en apercevant, tira son épée pour les écarter,y parvint, et ces deux grenadiers furent remis à des sergents pour être conduits en prison. Ge fut ainsi que se termina cette première insurrection. Le lendemain, de grand matin, les grenadiers se transportèrent chez M. le chevalier d'Iversay, commandant le régiment, et lui demandèrent la punition des trois officiers dont ils disaient avoir à se plaindre. Ce chef leur dit qu'il ne pouvait leur donner de réponse décisive avant d'avoir constaté la véracité de leur rapport. Peu satisfaits de cette marche prudente et juste, au lieu d'avoir recours à leur général, ils s'adressèrent à M. le marquis d'Aguilar, maire de la ville, qui leur répondit que ses fonctions ne s'éten-
daient point à la discipline militaire de laquelle ils s'écartaient; il les engagea à rentrer dans l'ordre et leur représenta le tort qu'ils se faisaient en se mutinant. Tant de raison produisit tout autre effet que celui qu'il était permis d'en attendre. Un grenadier s'écria : Nous ne voulons plus de l'ordonnance qui condamne à mort le soldat qui porte la main sur un officier. Fût-il jamais de propos plus séditieux ! Sortis de chez M. le maire, ils se rallièrent aux compagnies du quartier Saint-Jacques, forcèrent la musique à les accompagner, et coururent la ville en proférant les injures les plus fortes contre leurs| officiers, et jurant d'avoir les têtes de ceux qui étaient l'objet de leur fureur. Ils montèrent ensuite à la citadelle et emmenèrent les trois compagnies en garnison dans ce fort. Les amis du bien public gémissaient, et quoiqu'il y eût en cette ville dix-sept compagnies de volontaires, on n'a vu que la compagnie de Mailhat, à l'exemple de son capitaine, se rallier aux soldats rebelles, cherchant à exciter et animer les esprits par un étendard porté par un volontaire de ia même compagnie, sur lequel on lisait ces mots : Vivent Touraine, Vermandois et les bons patriotes !
Animés par cet étendard, persuadés du succès qu'il paraissait promettre, on se transporta au quartier Saint-Martin pour engager le régiment de Vermandois à partager le scandale qu'ils donnaient à la ville, mais celui-ci, plein de ses obligations, resta inébranlable, et toutes les tentatives que l'on fit sur lui furent vaines, quoique déjà M. Siau aîné, négociant, se fût réndu, de grand matin, au quartier, pour les préparer et leur tendre des pièges. Les dangers que couraient MM; de Montalembert, chevalier de la Peyrouse, et comte d'Urre, nous déterminèrent à leur donner le conseil de se soustraire aux recherches qu'on faisait de leurs personnes jusque dans leurs maisons, et ils partirent pour Mont-Louis.
A une heure après-midi, les soldats rentrèrent au quartier, cassèrent l'adjudant Maréchal, et après lui avoir arraché ses épaulettes, ils proclamèrent à sa place le nommé Roche fort, sergent-major, à la louange duquel on doit dire qu'il réclama contre l'illégalité de sa nomination. Le reste du jour se passa à boire, à courir et à effrayer la ville par des cris horribles. Le soir, il se rendirent tous à l'appel, mais quelques compagnies sortirent ensuite pour aller souper dans des cabarets, où elles passèrent le reste de la nuit. Le lendemain, moins de courses, moins de bruit, mais les orgies et les propos les plus séditieux continuèrent. Ils nomnèrent quelques bas-officiers et exigèrent qu'on les reçût; ils furent, ainsi que la veille, exacts à l'appel du soir.
Nous pensions enfin voir l'ordre renaître et notre espoir n'aurait pas été vain, si quelques soldats marseillais et nouvellement arrivés n'avaient fait jouer tous les ressorts pour entretenir l'insubordination. Un d'entre eux, surtout, s'est permis de dire hautement: Je ferai bien volontiers le sacrifice de mes jours, si je puis procurer la liberté au régiment de Touraine. Ce propos lui mérita, de la part des rebelles, les plus grands applaudissements, et des larmes de rage furent l'expression de sa reconnaissance. Depuis, au lieu de rentrer dans le devoir et de reconnaître l'erreur qui les avait séduits, au lieu de demander le rappel des trois officiers proscrits, pour avoir eu le courage de résister avec ce zèle et cette fermeté nécessaires dans tous les temps et surtout dans des circonstances aussi orageuses, nous voyons ces mêmes soldats écrire un mémoire pour tâcher
de donner des torts à des officiers dont la conduite devrait leur mériter des éloges, et porter même les choses au dernier excès, en forçant les bas-officiers à signer, au péril de leur vie, des plaintes que leur cœur désavoue, et qu'ils n'ont signées que pour éviter une nouvelle insurrection, d'après le consentement de leurs chefs.
Signé : le chevalier de la Porte.
Perpignan, ce
Exposé des faits qui ont précédé le départ de MM. de Montalembert, de la Peyrouse et d'Urre, officiers au régiment de Touraine.
Nous étions sur la place de la Loge, à Perpignan, le 19 mai, lorsque nous vîmes venir, vers les sept heures du soir, une farandole composée de bourgeois de la compagnie dite de Taslu et de grenadiers de Touraine. Ceux-ci avaient troqué de chapeaux avec les compagnies bourgeoises, plusieurs même avaient changé d'habits ; ils faisaient un vacarme épouvantable et ne cessaient de crier : vive la nation. Ils disaient aussi beaucoup d'autres choses que nous ne pouvions pas entendre. A huit heures et demie du soir, nous nous rendîmes au quartier Saint-Jacques pour faire l'appel de nos compagnies, et nous trouvâmes devant le quartier M. de Pontoux, officier du même régiment, entouré d'une foule de soldats, parmi lesquels les grenadiers de la farandole. Nous étant informés du motif de leur attroupement, M. Maréchal, adjudant, apprit à M. de Montalembert qu'il venait de mettre en prison le nommé La Plume, tambour de ia compagnie de Thorenc, pour avoir battu la farandole, malgré la défense expresse de M. d'iversay. Nous lui dîmes qu'il avait bien fait : sur cette réponse, un grenadier, nommé Mathieu (à ce que nous croyons), dit à M. de la Peyrouse, qui lui représentait que ce n'était pas à des soldats à vouloir juger la conduite de leurs supé-sieurs: Eh bien, il n'ira pas en prison, M. de la Peyrouse saisit aussitôt cet homme au collet et lui dit: Vous irez donc vous-même. Le grenadier fit une légère résistance, mais le nommé Pradine, prenant Mathieu par le bras, et l'entraînant vers luiy se mit à crier de toutes ses forces : Il n'ira pas, en conjurant ses camarades de venir même à son secours. Nous entendîmes en effet, de touscô-tés, il n'ira pas. M. d'Urre, qui se trouvait à côté de M. de la Peyrouse, prit aussi Mathieu au collet : celui-ci levant alors le bras, et lui adressant un geste meoaçant, lui dit : Ne me colletez pas, mon lieutenant '..... autrement..... M. d'Urre tira alors son épée pour empêcher le grenadier d'effectuer ses menaces: il n'en fit cependant aucun usage. Plusieurs sergents accoururent au bruit; le nommé Rochefort, entre autres, voulut mener le nommé Pradine en prison : la colère et la rage égaraient celui-ci; il refusa constamment d'y aller, et vomit mille injures contre M. de la Peyrouse, en l'accusant d'avoir mis l'épée à la main contre lui (On notera que M. d'Urre, seul, avait tiré son épée). Pendant ce temps-là, on faisait le rou-. lement pour l'appel; les soldats qui nous entouraient se séparèrent d'assez bonne grâce et furent à leurs compagnies respectives, mais nous ne pûmes jamais réussir à faire mettre en prison les deux factieux. M. de Montalembert allait faire l'appel de sa compagnie, il se trouvait à hauteur de celle des grenadiers, lorsqu'il rencontra M. d'iversay à qui il dit : Monsieur les grenadiers se compor tent bien mal; il lui fit réponse : c'est bon, c'est bon, ;
et il s'en alla ; M. delà Peyrouse le rencontra aussi vis-à-vis le corps de garde du quartier, et lui dit avec l'émotion qu'il devait naturellement éprouver : Monsieur, les grenadiers se conduisent dHune manière bien indigne, et.....Il allait continuer, lorsque M. d'Iversay le quitta brusquement et le laissa sans réponse. L'appel se fit assez tranquillement; après lequel, des cris tumultueux et multipliés retentirent dans tout le quartier, ce qui fit dire à M. de Moutalembert, en adressant la parole à plusieurs grenadiers, qu'il était surpris de voir que leur compagnie, qui devait donner l'exemple de la subordination, fût la première à donner celui du désordre. Un caporal de cette compagnie, nommé La Forest, releva le propos et le trouva fort mauvais. M. de Montalembert lui répondit qu'il n'ayait entendu désigner personne, puisqu'il avait parlé v en général, et que sûrement, s'il avait un choix à faire, il trouverait parmi eux nombre de braves gens; que cependant ils avaient toujours le plus grand tort de ne pas empêcher les mauvais sujets as faire des sottises ; et après plusieurs remontrances très-vives, il se retira, bien résolu de porter ses plaintes à M. d'Iversay.
M. d'Urre fit aussi l'appel de sa compagnie ; dès qu'il eut fini, il leur témoigna la satisfaction qu'il ressentait de ce qu'aucun d'eux ne s'était trouvé à la farandole, il les exhorta à se conduire aussi bien que par le passé, et leur recommanda l'exactitude à leurs devoirs et l'obéissance à leurs officiers. Il leur dit qu'il n'ignorait pas qu'on cherchait à les corrompre à force d'argent, mais qu'il savait aussi que plusieurs d'entre eux l'avaient généreusement refusé- Un nommé Ca-pelain lui répondit à cela: Nous serons toujours soumis à nos officiers I si nous voulions de l'argent nous en aurions à l'instant; on n'attend pas même que nous en demandions, et tous les jours on nous fait des offres. Moi, qui vous parle, j'en ai refusé aujourd'hui, ainsi-que plusieurs de mes camarades. Je vous le répète, mon lieutenant, tous les jours on nous offre de. l'argent ou on nous presse d'en accepter, mais nous pensons trop bien pour nous conduire ainsi, et nous obéirons toujours à nos officiers ; pourvu (ajouta un autre) qu'ils ne nous commandent rien d'injuste. M. d'Urre en se retirant leur dit que les officiers en étaient incapables. Il trouva devant le quartier MM. de la Peyrouse et de Montalembert ; nous nous retirâmes ensemble et fûmes à notre auberge. Nous racontâmes à nos camarades ce qui venait de nous arriver : ils en furent aussi indignés que surpris ; nous nous donnâmes rendez-vous pour le lendemain, résolus de demander à M. d'Iversay le renvoi des deux grenadiers avec cartouche jaune, persuadés que c'était le seul moyen d'arrêter l'insurrection.
Le lendemain, 20 du courant, nous nous rendîmes chez M. de la Porte, un de nos camarades ; il nous avait promis de nous accompagner chez M. d'Iversay ; nous allions sortir pour nous y rendre, lorsqu'un bruit que nous entendîmes dans la rue nous fit mettre à la fenêtre; nous vîmes beaucoup de grenadiers de Touraine qui se rendaient en foule chez M. le marquis d'Aguilar, maire de Perpignan. Nous résolûmes, avant d'aller chez M. d'Iversay, d'attendre les suites de l'aventure. M. de la Porte, reconnaissant parmi les délinquants le nommé Gautrau, grenadier, le fit monter et lui demanda ce dont il s'agissait. Mon lieutenant, lui répondit celui-ci, je ne vous cache pas que nous avons été chez M. d'Iversay pour demander la cassation de M. d'Urre et la punition de MM. de Montalembert et de la Peyrouse; on ne
nous a pas répondu d'une manière satisfaisante, et nous allons chez le maire pour l'obtenir à quelque prix que ce soit. Et s'adressant à M. de Montalembert, il lui dit : Vous avez hier au soir insulté toute la compagnie des grenadiers en leur disant qu'ils étaient les seuls qui se conduisaient mal. La réponse de M. de Montalembert fut qu'il ne se dédirait'que lorsqu'ils donneraient un meilleur exemple. Cet homme nous parla longtemps, et après plusieurs discours trop longs à rapporter: Vous êtes bien heureux d'être en vie aujourd'hui, nous dit-il ; si les grenadiers contre lesquels M. d'Urre a tiré l'épée avaient eu leur sabre, c'en était fait de vous. Nous lui répondîmes que nous étions déterminés à tout, et que rien au monde ne nous empêcherait de faire notre devoir. Nous l'engeâmes à rentrer dans l'ordre et à ne pas se mêler d'une affaire qui pouvait avoir des suites très sérieuses; il s'en fut en nous disant que, si cela dépendait de lui, il ramènerait volontiers ses camarades à leurs devoirs, mais qu'il serait infailliblement massacré s'il donnait le moindre signe d'improbation; résolus d'attendre la fin de l'insurrection, nous sortîmes et fûmes au jardin de Mailly ; nous y étions depuis quelques minutes, et nous nous préparions à aller au quartier à onze heures, pour y remplir notre devoir d'officiers de semaine, lorsque nous vîmes venir à nous deux jeunes gens de la ville qui dirent à M. de Montalembert que M. d'Iversay le cherchait. Nous sortîmes du jardin pour aller chez lui lui rendre compte de ce que nous avions vu et des raisons qui avaient retardé notre visite. Nous étions sur le batardeau qui communique des Blanqueries à la porte Notre-Dame, lorsque nous entendîmes le bruit d'une nouvelle farandole: nous ne la jugeâmes pas loin de vous. M. de la Peyrouse dit aux deux autres de se presser d'arriver; aussitôt les deux jeunes gens qui nous avaient trouvés au jardin, et qui avaient pris le devant se retournèrent brusquement vers nous et nous dirent de reculer au plus vite: nous balancions, mais ils , nous conjurèrent, les larmes aux yeux, de nous en aller. Ils nous dirent que la farandole s'avan -çait, qu'on nous demandait à grands cris, et que sûrement nous deviendrions les victimes de leurs fureurs. Nous balancions encore, mais leurs instances l'emportèrent et nous enfilâmes à la hâte le chemin couvert qui conduit aux Capucins. A peine avions-nous fait quelques pas que nous entendîmes les huées des prisonniers du Castillet . qui nous désignaient à ceux-ci qui étaient sur le pont ; à peine ceux-ci nous eurent-ils aperçus, qu'ils poussèrent de grands cris, et nous les vîmes se presser de nous joindre ; nous doublâmes le pas et bientôt nous les eûmes perdus de vue; et pour prévenir les désordres que pouvait occasionner notre rentrée par une autre porte, nous nous décidâmes à prendre le chemin de Mont-Louis, où nous arrivâmes le lendemain.
Nous garantissons la vérité des faits ci-dessus. Fait au Mont-Louis, le 24 mai 1790.
Signé : le chevalier de Montalembert, le chevalier de La Peyrouse et le comte d'Urre.
.-S. Nous avons appris par des relations dignes dé foi que le jour de notre départ, et à la suite de la farandole, les soldats de Touraine coururent toute la ville en criànt : Au diable les officiers. Us engagèrent le lieutenant-colonel et plusieurs de leurs officiers à courir la ville avec eux. Ils firent environ 580 livres de dépense, par compagnie, et obtinrent du lieutenant-colonel de casser le sièur Maréchal, adjudant, d'en nommer
un autre à sa place et de faire une nomination de bas-officiers à leur choix; ils restèrent toute la nuit dehors. Le lendemain, de retour au quartier, MM. d'Iversay et de Chariot, présents un bourgeois entra et dit "au tambour, d'un ton impératif: Rappelez. Il fut ponctuellement obéi ; le régiment se rassembla aussitôt et le bourgeois le mena courir la ville et les cabarets. On vit, dit-on, des habitants leur serrer affectueusement la main et les encourager au désordre par des applaudissements réitérés.
Copie d'une adresse des bas-officiers du régiment de Touraine à la municipalité de
Perpignan, remise le
A MM. les officiers municipaux de la ville de Perpignan.
(Ce document a déjà été inséré dans la séance du 18 juin.)
Copie de la réponse de la municipalité de Perpignan, à l'adresse des bas-officiers au régiment de Touraine.
(Ce document a déjà été inséré dans la séance du 18 juin).
Copie de la lettre éerite à M. le vicomte de Mirabeau par M, le chevalier d'Iversay, lieutenant-colonel du régiment de Touraine,
A Perpignan, le 22 mai 1790.
Je suis on ne peut plus peiné dè vous rendre compte de l'insurrection arrivée à votre régiment jeudi dernier. Mercredi au soir, à l'appel, MM. de Montalembert, de la Peyrouse et d'Urre, ces trois officiers étant au quartier, un tambour devant la porte battait la farandole pour faire danser les grenadiers et les bourgeois : comme cette batterie était défendue, Maréchal condamna ce tambour à quinze jours de prison et le mit à la salle de discipline, malgré que ces bourgeois l'avaient forcé à battre et lui demandaient de le faire sortir : voyant les grenadiers ivres, il n'aurait dû punir ce tambour que le lendemain matin ; mais malheureusement, c'est que cet adjudant était ivre lui-môme, ce qui lui arrivait souvent. Ces officiers voulurent faire rentrer les grenadiers, et M. d'Urre leur reprocha de changer de chapeau avec les bourgeois, ce qui déplut aux uns et aux autres, et il mit l'épée à la main, en portant la pointe sur la poitrine d'un grenadier; les autres menacèrent de tirer la leur : ce n'était pas là le moment, étant ivres; il fallait attendre le l'ende-main pour les punir. Heureusement des bas-officiers retirèrent le grenadier et d'autres les officiers. J'arrivai un moment après pour voir faire l'appel; le roulement se faisait, je vis bien des bourgeois, je fis fermer la porte du quartier sans me douter de rien. Je vis M. de la Peyrouse, qui me dit en entrant au corps de garde : les grenadiers se conduisent bien mal, et M. de Montalembert, dans la cour dit : il faut de la fermeté, sans ouoi on ne fera rien, tout le monde se trouva à 1 appel, je n'y vis point M. d'Urre ; et les deux autres sortirent. Ces messieurs ne m'ont rendu compte de rien ; l'adjudant qui était ivre me dit i qu'il avait puni le tambour qui avait battu la farandole; n'ayant point été instruit, je fus fort
surpris le lendemain matin, jeudi, de voir entrer chez moi huit grenadiers pour me demander justice de ces trois officiers, dont deux n'avaient tiré leur épée qu'un peu du fourreau, et le troisième (M. d'Urre) l'avait portée sur la poitrine d'un grenadier. Ils me demandèrent la sortie du tambour, que je refusai; ils me dirent que puisque je ne le voulais pas, ils ne me la demanderaient plus, mais qu'ils espéraient justice des officiers; je leur dis que je la leur rendrais, que ne sachant pas l'affaire, j'allais m'en instruire ; et je fus pour ordonner les arrêts à M. d'Urre, que je ne trouvai pas. Ayant pris des informations, j'en fus rendre compte à M. de Chollet, qui me dit de mettre M. d'Urre en prison et les deux autres aux arrêts. Je fus le dire au maire, M. le marquis d'Aguilar, ayant su que des bourgeois et quelques grenadiers lui avaient porté des plaintes. Vers les dix heures, on vint me dire que les bourgeois et quelques grenadiers avaient engagé le sergent de garde, qui était le sieur Favier, d'ouvrir la porte de la salle de discipline, avaient pris le tambour et couraient la ville en battant la farandole; ils furent au quartier, arrachèrent l'épaulette de Maréchal, disant qu'ils ne voulaient plus le reconnaître, en ayant été maltraités ; et sans M. Patel, qui s'est bien conduit, qui se trouve au quartier, ils l'auraient assommé1; ils portèrent son épaulette au sieur Rochefort, sergent-major et bon sujet, le forcèrent de la prendre et le reçurent, assurant qu'il serait reçu dans la journée : excepté quelques caporaux et tous les bas-officiers, généralement tout votre régiment, Monsieur le vicomte, y était. Ils furent faire sortir aussi tous les soldats ae la salle de discipline de la citadelle : ie commandant le permit; ils vinrent tous me chercher chez moi ; ne m'y ayant pas trouvé, ils sont venus à mon auberge, et ne m'ont pas laissé dîner; j'ai reçu deux députations pour recevoir tout de suite l'adjudant qu'ils ont choisi; je m'en suis débarrassé en leur assurant que j'allais vous le demander, ne pouvant rien faire sans vos ordres : ils sont venus une troisième fois, disant que les adjudants étaient à la nomination du commandant du corps; je voulais du moins écrire à M. le marquis de Ponsals, il me fut impossible de leur faire entendre raison : MM de Chariot, Baudreuille, de Bonne, Gourcy et Pre-chateau, qui se sont donnés beaucoup de peine aussi, n'oht pu y réussir ; M. d'Espenan n'y a pas paru à cause de sa lettre des grenadiers, ils m'engagèrent à aller sur la place de la Loge parler au régiment qui y était assemblé : ils m'entourèrent, me serrant de fort près, m'assurant que je ne sortirais point que je n'eusse reçu Rochefort adjudant; je restai près d'une demi-heure à m'en défendre, assurant que je ne le pouvais pas sans un ordre de mes chefs; on parla de M. de Chollet, je leur dis que j'allais lui en rendre compte, espérant gagner du temps et qu'ils* se disperseraient, mais ils n'ont jamais voulu me quitter; je suis cependant entré seul dans la chambre du général, qui m'a dit d'aller recevoir cet adjudant ; j'ai exécuté ses ordres, ce qui a ramené le calme, et les trois officiers ayant appris les menaces de ces gens-là, qui, à ce qu on dit, ont couru après eux, ils sont partis heureusement je ne sais où ils ont été; les grenadiers, chasseurs et soldats m'avaient promis que ce serait fini à la retraite, mais ils ont recommencé le lendemain vendredi; ayant appris qu'ils voulaient chasser Guyot, sergent de Courcy, je lui ai donné une permission; ils m'ont envoyé demander de remplacer Bertrand, sergent-major, qui est mort chez
lui; ils ont fait recevoir Lubin, qui est bon sujet; il était fourrier. Autre députation : un sergent et un caporal sont venus me demander un sergent-major dans Garapan; je leur ai répondu que n'ayant pas rentré dans l'ordre, le jeudi au soir, comme ils me l'avaient promis, je ne redonnerais plus d'ordres; ils sont revenus avec un sergent: j'ai tenu bon. J'ai été à midi faire défiler la garde, j'ai trouvé cette compagnie armée, baïonnette au fusil. Après la parade, ils sont venus m'entourer avec leurs armes, pour me demander toujours un sergent-major; ils m'ont dit qu'ils le voulaient; je leur ai répondu, M. Patel y étant pour la parade et moi : Messieurs, je ne le veux pas ; et quelque chose que vous fassiez je vous donne ma parole que je n'y consentirai pas, j'y suis décidé, c'est mon dernier mot ; dites-le a vos camarades; il faut que le régiment rentre tout dans l'ordre ce soir, sans cela vous n'obtiendrez jamais rien de moi. Ils ont changé de ton et m'ont laissé Sortir, et il n'a point été reçu. Les grenadiers, le vendredi, ne voulaient point sortir : les soldats les y ont forcés, disant que c'étaient eux qui étaient cause de tout cela et qu'ils voulaient qu'ils sortissent, voulant se divertir encore aujourd'hui.
Les grenadiers y ont consenti à condition qu'on ne ferait aucun hruit dans la ville, plus de farandole, de laisser les caisses et de rentrer tous exactement à l'appel, ce qu'ils ont fait; cfue celui qui ferait quelque chose contre l'ordre ils se chargeraient de le bien punir. J'ai été à l'appel, Monsieur le vicomte, tout le monde y était et, quoique ivres, ils tenaient de bons propos et tout a été très tranquille.
Ce matin, j'ai été encore au quartier : ils m'ont entouré pour me dire qu'ils étaient très fâchés de m'avoir donné tant de chagrin, que je ne méritais pas, mais qu'ils répareraient leurs torts par leur bonne conduite, qu'ils m'en donnaient leur parole. Je leur ai répondu que j'y comptais si fort, que tout était oublié pour tout le monde, que je ne demanderais de punition pour aucun, mais que ceux qui, dans la suite, se mettraient dans le cas, seraient punis sévèrement; ils ont été contents, car il y en avait beaucoup qui, pour éviter d'être punis, voulaient déserter, entre autres vingt-deux grenadiers ; ils ont mené hier dîner avec eux MM.Patel, Serre, Martin et Château-Gaillard. J'espère, dans quelques jours, lorsque les esprits seront plus tranquilles, tâcher de les engager à me demander le rappel de ces trois officiers. Morel, fourrier, est sergent-major dans Campan ; La Raque, qui déplaît, a demandé son congé comme gentilhomme. J ai fait partir Montpellier, musicien, qu'on voulait assommer, parcequ'il a prouvé que le sieur Mailhat, frère de celui qui a une compagnie ici, lui a, offert une poignée d'é-cus ; il a été mandé à la municipalité. Le bruit court, et c'est très vraisemblable, que la monnaie ou associés avait ordre de donner de l'argent au régiment de Touraine, et la majeure partie ne tient pas à cet appas séducteur. Quelle position, Monsieur le vicomte 1 je suis au désespoir et dans les transes de voir renouveler ces scènes qui m'affligent on ne peut davantage. Ces enragés ont dit qu'ils voulaient avoir la masse noire des morts, ils m'assassineront plutôt que de laisser enfoncer la caisse, on doit s'attendre à tout des gens gagnés et séduits pour le mal. On est persuadé qu'on a envoyé des gens et de l'argent, pour faire eette insurrection, à votre régiment, et Vermandois n'a pas bougé, mais il, perd dans ce mois-ci plus de trente hommes de désertion :
plût au ciel que les vôtres eussent préféré ce parti avant ce malheureux événement 1 De Larche et Lestrade ont été faits sergent. M. de la Porte est sorti pour un mois ; j'ai reçu des congés pour MM. deVaubercey, de Montlezun et du Ghambon. Que je suis malheureux de me trouver au régiment dans une circonstance aussi désagréable 1 que faire, que devenir? Il faut attendre du temps. MM. Patel et Garrot ont reçu de M. Bouzols l'avis que leur croix de Saint-Louis leur était accordée : du moins qu'il y ait quelques individus de contents si je ne le suis pas.
J'ai l'honneur d'être, etc.
Signé : le chevalier d'iversay.
P. S. On m'a dit qu'ils écrivaient à l'Assemblée nationale.
Lettre de M. le chevalier d'iversay, lieutenant-colonel du régiment de Touraine, à M. le vicomte de Mirabeau, écrite de Perpignan, en date du 26 mai.
Monsieur,
J'ai l'honneur de vous rendre compte qu'hier matin les deux adjudants et trois sergents-majors sont venus me dire que les grenadiers, chasseurs et soldats avaient signifié aux bas-officiers de signer une lettre qu'ils écrivaient à l'Assemblée nationale pour se justifier de leur insurrection, où il y a en tête : Nous, bas-officiers, grenadiers, chasseurs et soldats demandons que M. de Montalembert, de la Peyrouse et d'Urre, èt le sieur Maréchal, adjudant, ne viennent plus au régiment. Je leur répondis qu'ils devaient voir le contenu de la lettre; qu'ils n'étaient point compris dans l'insurrection, ayant rendu compte à notre inspecteur et colonel que les bas-officiers, au contraire, s'étaient très bien conduits, ayant cherché à apaiser le désordre et que je mandais encore qu'ils n'y étaient pour rien. Ils me firent entendre que s'ils ne signaient, il arriverait encore une forte insurrection. Je leur dis : Le corps des bas-officiers du régiment étant bien composé, prudent et sage, ils doivent voir ce qu'ils ont à faire. J'en rendis compte à M. de Chollet, qui me dit que pour éviter un plus grand mal, s'ils étaient forcés à Signer, on pourrait protester contre, c'est ce que ce général m'a dit qu'il ferait aujourd'hui en rendant compte au ministre. A deux heures après midi, Gheneaux et deux sergents-majors viennent à notre auberge, MM. de Chariot, Baudreille, de Bonne, de Gourcy, de Prechâteau y étaient avec moi ; ils nous dirent qu'ils voulaient absolument les forcer à signer une chose à laquelle ils n'avaient point participé et qu'ils n'y Voulaient pas consentir. Notre avis fut que s'ils n'étaient contraints de céder à la force, on pouvait protester contre, et ce qui prouve qu'en effet, Monsieur le vicomte, les soldats en étaient prévenus, c'est qu'en sortant de l'auberge, je trouvai chez moi six Soldats (nos messieurs étaient avec moi) qui mé demandèrent des permissions pour s'absenter, ne voulant point passer dans cette bagarre. Je les engageai à rester, ayant besoin de bons sujets pour donner le bon exemplè et contenir les autres. Quelque temps après, Gheneaux vient chez moi» y trouve MM. de Chariot et de Bonne et nous dit que les bas-officiers avaient signé cette affreuse lettre; mais qu'il n'avait pas voulu la signer, qu'il ne la signerait jamais, qu'il avait entendu dire et qu'il était bien sûr qu'il serait assassiné, qu'il aimait
mieux mourir .. Nous avons eu toutes les peines du monde à déterminer ce brave homme, pour l'intérêt du corps, à signer, restant seul, pour éviter un malheur, lui assurant que nous certifierions que ce n'est qu'à notre considération qu'il a signé ; il mérite nos bontés et je le recommande aux vôtres, Monsieur le vicomte. M. de Chollet, à qui j'ai eu l'honneur de rendre compte, à dix heures du soir, en a été enchanté, et m'a promis que dans le compte qu'il rendra aujourd'hui au ministre de la protestation des bas-officiers de votre régiment, qu'il lui faisait pour eux, il y mettrait une note particulière pour Gheneaux• Trois grenadiers, dont deux des environs de Marseille, m'ont demandé un congé : je le leur ai accordé. J'espère que cette absence mettra la tranquillité. Le nommé Blois, grenadier, vint dimanche se jeter à mes genoux pour avoir une permission de s'absenter, que je lui ai accordée, disant que les grenadiers voulaient le pendre, parce qu'il avait reçu une bouteille pleine de tabac de M. d'Espe-nan, son capitaine. Cet officier, ayant aussi appris qu'il était menacé, a envoyé demander à M. de Chollet un passe-port qu'il lui a envoyé, et il est parti. MM. de Montalembert, de la Pèyrouse et d'Urre sont au Mont-Louis : ces officiers qui ont toujours servi avec distinction méritent les bontés de Sa Majesté et les vôtres, Monsieur le vicomte, je vous les recommande et vous demande en grâce de ne pas vous en rapporter à cette lettre que les bas-officiers de votre régiment ont été forcés de signer, car ils désirent beaucoup, ainsi que noUs, leur rappel aU corps ; ce sont des camarades que nous aimons.
J'ai l'honneur de vous rendre compte que le sergent-major de Gôurcv m'a rendu compte, ce matin, au rapport, qu'un soldat de sa compagnie, rentrant hier après midi à la chàmbre, dit : On assure que les bas-officiers ne veulent pas signer notre lettre, s'ils ne la signent pas : il faut les assassiner et nous les assassinerons. Ce misérable, en sortant, fut dans un cabaret, il y prit un crucifix, le mit à ses pieds, marcha dessus et y pissa ; si on le trouve, j'ai ordonné qu'on le mît au cachot : j'espère qu'il aura déserté, il n'a rien dans son sac. Il vient aussi de déserter trois mauvais sujets et séditieux des chasseurs : Joubert, Morel et d'Artois ; je viens de chasser avec des cartouches jaunes, cinq mauvais sujets : Fontaine et Mardochée, des chasseurs ; Pilet, de Bonne, Batz et Boudart, de Chariot; ce dernier voulait tuer, assassiner son capitaine ; il a dit devant témoin, qu'il voulait avoir la gloire de tuer ce vieux b......-là
On m'a mandé du 16, de Paris, qu'on était fort inquietde votre régiment, qu'on savait qu'il avait été envoyé une grosse somme d'argent pour corrompre les soldats et demandé l'issue d'une insurrection qu'on craint qui arrivera.
J'ai l'honneur d'être avec un respectueux attachement,
Monsieur le vicomte, Votre, etc.
Signé : le chevalier d'Iversay.
Nota. — Toutes ces pièces sont déposées en original au comité des rapports ; quant aux faits relatés dans le compte rendu, ils sont tous constatés par le procès-verbal déjà imprimé et signé de la municipalité, des officiers de la garde nationale et de plusieurs citoyens.
Réponse du régiment de Touraine à la relation et au compte rendu par M. Riquetti le jeune (ci devant vicomte de Mirabeau), à VAssemblée nationale (1).
Nous nous sommes fait un devoir, dans notre adresse à l'Assemblée nationale, de ne rien alléguer que de vrai et dont les preuves fussent irrécusables; c'est dans cet esprit que nous allons répondre aux assertions de M. Riquetti le jeune.
Il convient qu'à son arrivée' à Perpignan, il n'eut qu'à se louer de l'accueil du régiment. Un colonel, dont le désir eût été de ramener l'ordre, si l'on s'en fût écarté, aurait profité de ces heureuses dispositions; mais examinons par sa conduite si c'était bien là son but.
Nous avons dit dans ia même adresse, et nous avons offert de prouver que trois officiers s'étaient armés contre nous, pour nous être unis à des ci-, toyens dont nous recevions tous les jours des témoignages d'amitié et de patriotisme; mais quelque injuste que fut ce procédé, nous n'avons point exigé leur retraite, nous avons tout fait pour les conserver ; la preuve la plus légère de. repentir nous eût fait oublier- cet acte, tout violent qu'il était; c'est donc abuser des termes, que de qualifier leur départ d'insurrection de notre part.
Mais, nous dit M. Riquetti le jeune, vous avez arraché les épaulettes. d'adjudant au nommé Maréchal: voilà donc à quoi se borne toute notre insubordination prétendue; mais ce Maréchal, déjà abhorré par une suite d'actions outrageantes pour le régiment, venait en ce moment exécuter avec fureur des commissions qui étaient elles-mêmes une insurrection contre les décrets dé l'Assemblée nationale ; il venait servir la rage aristocratique de trois individus qui faisaient un crime aux soldats d'avoir resserré les liens d'une fraternité qui fait la sûreté de l'empire ; mais de son aveu, ce Maréchal était le plus mauvais sujet du corps ; nous avions fait le serment de n'en souffrir aucun; dans un mois, nous en avions rejeté cent. Son but était donc de rétablir ùn homme qu'il connaissait dangereux : qu'il ne nous dise pas que ce n'était point à nous à nous rendre justice(nous l'avions en vain demandée) que c'était un homme versé dans l'art militaire (pour être bon soldat, il faut être, bon citoyen). M. Riquetti le jeune a reconnu depuis le danger de réintégrer cet homme, il y a renoncé, en sorte que sa présence à Perpignan devenait inutile; et que ses inconséquences et ses projets désastreux ont failli la rendre funeste.
Mais comparons ce qu'il a fait à ce qu'il aurait dû faire; les ordres du ministre à la manière dont il les a présentés, ses procédés aux nôtres, et qu'on décide si ses vues étaient de rétablir l'ordre, ou de semer la sédition dans la ville de Perpignan.
Voici les termes du ministre : « Il est sans « doute inutile de vous recommander, Monsieur, « d'apporter la plus grande prudence pour con-* naître, avant tout, les causes d'une insurrection « aussi extraordinaire, dans un corps distingué « autant par sa conduite que par sa valeur contre « les ennemi^ de la patrie, etc. » Il était inutile,
sans doute, de lui recommander la plus grande prudence, puisqu'il ne voulait employer que des moyens absolument opposés à sa mission.
Si M. Riquetti le jeune eût voulu agir dans les vues du ministre, qu'elle était la marche qu'il devait suivre? C'était à la tête du corps armé qu'il devait intimer les ordres du roi. Nous ne pouvions que nous y conformer, puisque nous n'avions point rejeté les officiers dont il demandait le retour ; notre résistance ne pouvait tomber que sur Maréchal, et nous nous serions bornés à des représentations à cet égard.
Le ministre lui avait-il ordonné de venir, l'épée à la main, escorté de six officiers, dont l'un était armé de pistolets, lorsque nous l'invitions respectueusement à se rendre au quartier, nous déclarer rebelles? Rebelles 1 à quoi? Est-ce aux ordres du ministre ? Nous n'en étions point informés. Est-ce par unp suite de ces mêmes ordres qu'il blesse trois hommes qui n'étaient point armés ? Eu vain il nie ce fait; il n'a plus de droit que nous à la confiance publique. Qu'il s'en réfère comme nous à la preuve que nous h'avons cessé d'offrir ; mais elle est toute acquise, puisque les trois hommes blessés ont exhibé leurs blessures dans le moment au général, dont le témoignage ne peut être suspect.
Mais il nous explique son motif; il tire son épée et la porte en l'air, comme pour faire un commandement. Un commandement! dans une rue,|à des hommes sans armes, lorsqu'ils offraient de les suivre. Est-ce pour faire un commandement qu'il blesse trois hommes ; qu'il se fait accompagner de six officiers armés dont l'un est muni de pistolets : est-ce là l'appareil du commandement ; est-ce-là la contenance d'un officier qui veut se faire obéir?
A l'entendre, il était eD danger; on l'avait averti que les soldats ramassaient des pierres. Un appointé delà compagnie de Vaubercey était sorti du rang et lui avait dit : « Nous savons que vous « voulez faire rentrer au régiment les gueux « qui ont voulu nous faire du mal, mais f... ils « n'y rentreront pas. »
On l'avait averti que les soldats ramassaient des pierres. Si notre dessein eût été de nous venger de lui, avions-nous besoin de recourir à des pierres ? Nous étions 500 hommes: quoiqu'il se fût vanté d'avoir repoussé 700 hommes à Paris, pouvait-il croire qu'il aurait aussi bon parti de nous?
Un appointé de la compagnie deVaubercey l'avait insulté. Gomment! dans la rue la plus étroite de Perpignan,-obstruée de toutes parts, au milieu du trouble qu'il cause, il distingue la voix qui l'insulte ! Ou M. de Mirabeau est bien pénétrant, ou il est bien faux. Et dix témoins ont attesté ce fait ! mais la séduction est évidente. Par quelle fatalité dix hommes qui habitent un quartier éloigné, qui sont tous d'une compagnie de garde nationale qui affecte des principes anticonstitutionnels, ceux-mêmes qui portaient les flambeaux à la fête nocturne qu'on avait donnée à M. Riquetti, la veille,. ont-ils pu se rencontrer, entendre et voir ce qu'ils attestent, lorsque ia multitude des soldats qui se pressaient, se culbutaient, de l'aveu de notre adversaire, rendait la rue inabordable? Nous croyons qu'il suffit de leur opposer, sur ce fait, l'attestation de plus de cent citoyens de la société des amis de la Constitution, dont les signatures existent au comité des rapports.
M. Riquetti nous transporte de ce fait, et toujours avec autant de vérité, à celui de l'enlève-.-
ment prétendu, fait par nous, des drapeaux dans la maison qu'il habitait alors à Perpignan. Nous ne ferons que rapporter les termes des deux actes qu'il a adressés à l'Assemblée nationale : les contradictions évidentes qu'on y rencontre de toutes parts ne pourront pas laisser de doute sur la fausseté de ses allégations.
Dans sa relation en date du 11 du mois de juin, il dit, page 15 : « Les officiers municipaux deman-« dèrent que les drapeaux et la caisse fussent « portés chez le maire, qui venait de me donner « un logement dans son hôtel. Gela fut exécuté, « et un détachement fort en ordre apporta les « drapeaux dans la chambre qui m'était desti-« née. »
Comparons les termes de ce premier acte à ceux de son compte rendu à l'Assemblée ; on y lit, page 29 : « C'est ici le lieu de vous marquer mon étonne-« ment, Messieurs, de ce qu'en vous présen-« tant comme un crime atroce l'enlèvement des « cravates, on ne vous a pas parlé de ce premier « enlèvement, véritablement criminel, fait par « 800 hommes armés, qui ont enfoncé ma porte, « ont arrachérde leur asile sacré, de la chambre « de leur colonel, les drapeaux et la caisse « militaire. » Aussi inconséquent dans ses raisonnements que dans ses actions, comment pourrait-il s'accorder avec la vérité ? Il ne peut se concilier avec lui-même. Nous ne l'imiterons point et nous nous ferons toujours un devoir de ramener les faits au point de vérité dont nous.ne nous sommes jamais écartés.
Nous n'étions pas sans défiance au sujet de nos drapeaux; les desseins de M. Riquetti n'avaient pas été environnés de tout le mystère possible ; son projet de licenciennent nous était parvenu; en fallait-il davantage pour justifier nos craintes déjà réveillées par les voies de fait qu'il venait d'exercer contre nous? Sa retraite chez le maire nous offrait un prétexte plausible d'y transférer nos drapeaux, et nous le saisîmes avec d'autant plus de raison, que, sans dépouiller M. Riquetti le jeune du droit qu'il avait d'en être le dépositaire, ils se trouvaient placés dans un lieu de sauvegarde, dans Un asile sacré qui eût été respecté par tout autre que notre adversaire. La responsion que nous avions exigée du maire était la suite naturelle de nos craintes : qu'on décide si elles étaient fondées.
« Quelques-uns (dit M. Riquetti) enfoncèrent « des caisses à cartouches qu'ils prirent dans le « magasin de la citadelle. » Ce fait est vrai, les accessoires sont faux. Nous n'avons point enfoncé de caisse; la violence devenait inutile, puique nous n'avons point éprouvé de résistance et qu'on ne fit aucune difficulté de nous les donner. Les motifs de cette démarche n'étaient que trop fondés. M. Riquetti avait offert de se mettre à la tête des troupes nationales de Perpignan et du régiment de Vermandois pour marcher contre son régiment. C'est un fait dont il convient dans sa relation du 7 au 11 juin. (Et nous vous observons que cet officier avait été fêté, dès son arrivée à Perpignan, et ;avant qu'il ne ce décidât à insulter son régiment.) Ajoutons ce procédé à ses violences subséquentes : en fallait-il davantage pour exciter et nos précautions et nos craintes? Il fait plus, il demande et obtient deux cents hommes de Vermandois pour garder nos drapeaux, et l'on nous accuse d'insurrection ! N'avait-on pas tout fait pour nous y porter? Au milieu des affronts et des violences dont on nous accable de toutes parts, nous respectons encore ceux qui ne respectent rien.
Vexés par trois ofticiers qui s'arment contre nous, frappés, blessés par notre colonel, nous voyons le lieu où reposent nos drapeaux investi par deux cents hommes d'un autre corps, dont on surprend la bonne foi. Nous n'ignorons pas l'offre inouie que fait M. Riquetti de se mettre à la tête des gardes nationales et de nos frères de Vermandois pour nous égorger. La sédition se prépare de tous côtés; cependant ses vues meurtrières échouent, et nous faisons librement le sacrifice de notre injure à la tranquillité publique et à la sûreté de nos concitoyens, et on nous accuse d'insurrection !
Mais suivons M. Riquetti dans tous les membres de sa narration. Il dit, page 37 de son compte rendu, que les preuves relatives à la manière dont le régiment de Touraine a été travaillé, payé, soldé, serviront encore à compléter sa justification.
Ici se présente une distinction fort simple; nous avons été soldés par les amis ou par les ennnemis de la Révolution.
Dans le premier cas, si c'est par les amis de la Révolution, ce reproche ne pourrait tomber que sur nous, dont le patriotisme ne devait pas être stimulé par les motifs qu'on nous suppose; mais toujours est-il vrai que celui qui ferait le sacrifice de sa fortune pour une si belle cause mériterait la reconnaissance de sa patrie.
Dans le deuxième cas, si c'est par les ennemis de la Révolution que nous avons été soldés, on conviendra que nous avons bien mal desservi leur argent.
Nous avons été soldés, nous qui avions rejeté avec dédain l'offre que nous fit M. de Ghollet, d'une somme considérable. A-t-on pu croire que notre dévouement, que notre patriotisme tenaient à des moyens aussi bas? Au reste, nous défions M. de Mirabeau de fournir les preuves de ce fait.
Il est vrai qu'au départ de Maréchal nous nous sommes abandonnés à la joie, parce que la ruine des tyrans doit opérer naturellement la joie et la félicité publiques; mais cet argent fut pris sur notre compte : la preuve en est facile.
M. Riquetti va nous donner bientôt le fil de la trame qui a fait éclore depuis Strasbourg jusqu'à Antibes, depuis Dunkerque jusqu'à Perpignan, des insurrections dans presque tous les régiments de P'armée; nous le tenons comme lui, ce fil. C'est que depuis Strasbourg jusqu'à Antibes, depuis Dunkerque jusqu'à Perpignan, il existe des aristocrates; c'est que l'attachement des régiments à la Constitution les a toujours contrariés; c'est que ces régiments ont été constamment persécutés par les ennemis de la Révolution.
M. Riquetti le jeune sé récrie beaucoup sur la réponse du régiment à son ordre du 12 juin. L'analyse que nous allons faire de chaque membre de cette réponse doit en établir la justification.
Les soldats de Touraine ont l'honneur de répondre à M. de Mirabeau que jamais le désordre n'a régné dans le régiment : En effet, il n'existait d'autre désordre que celui que les inconséquences avaient forcé.
Les prisonniers qu'ils tiennent ne sortiront pas de leurs mains. Cette réponse était la conséquence naturelle de sa demande. En voici les termes : « Je demande que les prisonniers arrêtés « par ces soldats soient remis entre les mains de « îa municipalité, pour être jugés par les tribunaux. » Tout le crime des soldats que nous te-
nions, était de s'être laissés séduire par M. Riquetti le jeune, et d'avoir accepté le licenciement qu'il n'avait pas eu le droit de leur offrir; ce n'était point à eux à les poursuivre, pourquoi les faire juger par les tribunaux? Leur délit était purement militaire, c'était à un tribunal militaire, c'était à un conseil de guerre à en connaître.
Ils ne se désempareront point des cartouches dont ils sont munis. Cette précaution n'était que trop fondée. Fallait-il lui donner les moyens de nous égorger plus facilement? ne s'était-il pas armé? n'avait-il pas offert de marcher contre nous ?
Les citoyens n'ont aucune crainte à cet égard: eh! que pouvaient-ils craindre? nous n'avons pas même employé les cartouches contre nos ennemis.
Il n'appartenait qu'à M. de Mirabeau de soutenir qu'il n'avait blessé personne; le témoignage public le démentira, trois hommes ont été blessés; ils le lui prouveront quand il le jugera à propos. Il s'est bien gardé d'accepter cette offre, il voulait éviter tout éclaircissement sur ce fait. Nous l'avons offert sur les lieux, et nous l'offrons encore.
Ici se présente un nouvel ordre de choses; nous avions été éprouvés par tous les genres de vexations imaginables : victimes de l'inconsidé-ration d'un chef, qui, dans la dépravation de son esprit, s'était tout permis contre nous, il ne nous restait qu'un affront à essuyer, et il ne nous l'a point épargné.
M. Riquetti nous fait avertir qu'il se rendra le dimanche 13 juin, à 7 heures du matin, dans les chambres; nous consentons encore à le voir; , mais que nous étions loin de pénétrer ses vuesl [ Aussi confiant qu'il était perfide, nous l'attendons, nous affectons de ne point nous écarter. A sept heures et demie nous sommes avertis qu'il était parti depuis cinq heures.
Il était dans l'ordre de transporter nos drapeaux chez M. d'iversay, qui, à son défaut, restait chargé du commandement du corps ; nous prenons l'ordre pour dix heures. La compagnie des grenadiers se dispose à les accompagner et l'oh se rend dans l'appartement où ils avaient été déposés; mais nos drapeaux n'existaient plus. Nous n'entreprendrons point de peindre notre désespoir, notre déchirement, à la vue des bâtons de nos drapeaux dépouillés de leurs cravates, de leurs cordons, quelques fragments qui restaient encore arrachés, la gaîne qui les enveloppait lacérée : les vieux soldats les cherchent en vain. Nous les avions longtemps garantis de la fureur des ennemis, mais nous ne pûmes les préserver de la rage des ennemis de la patrie. NoUs les aurions perdus d'une manière moins cruelle dans un combat, c'était le droit de la guerre; nous serions morts en les défendant; mais quelles armes pouvions-nous opposer à la perfidie?
Quel est l'auteur de ce crime? G'est un colonel, c'est un représentant de la nation, et il prétend justifier Cet acte.
Il Voulait sauver le noyau d'un régiment coupable, et de quel crime? Si nous eussions répondu à ses vues, il ne nous accuserait pas.
Il prive un régiment de ses bases, de ses fondements ; il l'expose à toutes les horreurs de l'oisiveté, du déshonneur, et il voulait ramener l'ordre! Celui qui aurait conçu le projet d'incendier une ville, en eût-il fait davantage ? Il voulait, dit-il, nous licencier. Quel est l'homme qui
pourrait s'arroger ce droit? Nous appartenons à fa nation, il n'y a que la nation qui puisse nous licencier.
Ajoutons le mode de cet enlèvement. Il n'ignorait pas que M. d'Aguilar, qui ;lui avait donné un asile, avait répondu de nos drapeaux; c'est un fait attesté par ce dernier. Sans respect pour les cheveux blancs, pour les vertus de celui qui le comble de bien faits, il viole les droits de l'hospitalité : il s'éloigne furtivement de la maison de sou hôte et le laisse accablé du soupçon honteux d'avoir trempé dans ce larcin.
M. Riquetti le jeune s'étonne : 1° que l'Assemblée ait admis à sa barre les députés du régiment de Touraine. Nous sommes citoyens, nous sommes patriotes, nous l'avons prouvé, et le temps est venu où tous les citoyens peuvent se faire entendre;
2° Que nos officiers se soient joints à nous. Nos drapeaux ne sont-ils pas les leurs? S'ils eussent mis moins de cbaleur à les défendre, ils seraient indignes de nous commander.
Il ne peut pas se dissimuler qu'ils n'ont eu aucune part à ses démarches. Qu'il nous oppose une seule signature des anciens officiers du corps. S'il en a arraché à la faiblesse de quelques jeunes gens, c'est qu'ils sont imbus de ses principes.
Tout se réduit à la preuve de tous les faits que nous avons allégués. Elle ne peut s'acquérir, cette preuve, que sur les lieux. Le directoire du département des Pyrénées-Orientales peut l'établir. Nous ne craignons pas de le dire : ou les drapeaux d'un corps sont des emblèmes vains et frivoles, dont on peut se jouer impunément, ou l'injure, dont nous demandons la réparation, ne peut demeurer impunie.
Nous supplions donc l'Assemblée nationale d'ordonner que l'administration du département des Pyrénées-Orientales informe sur les lieux des faits dont nous venons de lui donner l'assurance ; c'est d'après cette enquête que l'auguste Assemblée pourra prononcer sur une cause qui e3t enveloppée de contradictions, qu'il est essentiel d'éclaircir, et qui, en voiiant la vérité des faits, en dérobe aussi l'importance; c'est en recherchant tout le tissu d'un plan dont l'enlèvement des drapeaux ne fait partie que parce que ce plan n'a pas pu réussir : c'est, dis-je, en recherchant tout ce tissu, que l'auguste Assemblée se convaincra que la conduite du régiment de Touraine, loin d'être une insurrection, a été la sauvegarde d'une ville, d'une province, et peut-être de l'Empire.
Signé : Sauveton, fourrier des chasseurs; About, fusilier.
Observations de M. Vergés, officier municipal de la commune de Perpignan*
Avant l'arrivée de M. Riquetti le jeune à Perpignan, cette ville était paisible et tranquille : le régiment de Touraine ne s'était permis jusque-là, ue des mouvements de joie et d'allégresse, effet e la liberté naissante et de l'attachement à la nouvelle Constitution dont il n'était pas surprenant que des soldats français sentissent tout le prix.
Mais M. Riquetti n'eut pas plutôt joint son régiment, que i agitation des citoyens et l'inquiétude des soldats nous firent concevoir les plus vives alarmes : si au lieu de se borner à écrire aux officiers municipaux pour leur demander
seulement l'instant où il pourrait prêter le serment civique en leur présence, il avait pris le parti tout a la fois sage et honnête de se rendre dans la maison commune, s'il leur avait dit : je veux prendre tous vos renseignements, concerter avec vous toutes mes démarches, profiter de tous les conseils que vos places et les localités vous mettent à même de me donner; au lieu de vouloir ramener les soldats, dès les premiers instants, par la force, l'autorité ; s'il avait parlé à leur cœur, s'il leur avait dit : je suis votre chef, mais je suis votre ami, vous aviez à vous plaindre de l'adjudant, ma justice vous en fera raison ; sur tout le reste j'écouterai vos plaintes, et vous me trouverez toujours occupé de votre bonheur;
S'il leur avait dit : Soldats, vous avez juré de maintenir la Constitution, je vais renouveler lè même serment en votre présence; mais cette Constitution ne peut s'affermir sans la discipline et la subordination; vous êtes Français, vous êtes citoyens, il y va de votre honneur, il y va de la patrie : si M. Riquetti eût tenu cette conduite, ah I qu'il nous eût épargné de soucis et de peines !
M. Riquetti avait manqué son but; et on ne pouvait cependant pas lui faire abandonner ses projets : qu'on se représente la situation des officiers municipaux, l'obstination de M. Riquetti pouvait avoir les suites lés plus funestes : pouvaient-ils balancer un instant, quand il s'agissait de la tranquillité publique et ne devaient-ils pas s'estimer neureux de la rétablir par une lettre qu'ils savaient devoir déterminer le départ de M. Riquetti?
C'est parce qu'on regarda ce départ comme le signal de la paix qu'elle fut écrite : je l'ai ouï dire avant et après aux officiers municipaux qui l'ont signée.
Il n'y a qu'à bien peser ces circonstances pour concilier les démarches de la municipalité ae Perpignan depuis le départ de M. Riquetti avec celles qui l'ont précédée.
Les espérances dont elle s'était flattée furent malheureusement déçues; M. Riquetti emporte les cravates des drapeaux; le soldat justement indigné s'en prend au maire qui en avait répondu sur sa tête : oui, répondu sur sa tête : c'est un fait public et notoire à Perpignan; comment M. Riquetti, qui y avait plus d'intérêt qu'un autre, a-t -il pu l'ignorer ?
Le régiment de Touraine n'a pas plus tôt vu ses cravates, que l'allégresse et la joie ont succédé à la tristesse et au deuil : cette ville, désolée depuis quelques jours, n'a présenté pendant une semaine entière que le spectacle attendrissant d'un peuple de frères, célébrant à l'enVi, par des fêtes continuelles, leur union et leur bonheur; et elle a prouvé, par là; d?unemanière non équivoque, qu'elle n'avait céclé ni à la force, ni à la terreur en me chargeant d'exprimer à l'Assemblée nationale le juste intérêt que le régiment de Touraine lui a inspiré à tant de titres.
Signé : VERfiÈS.
Nous, députés dè la garde nationale du district de Perpignan, département des Pyrénées-Orientales, au pacte fédératif du 14"juillet, ayant lu un imprimé; justificatif de la conduite de M. de Mirabeau, colonel du régiment de Touraine, et nous étant assurés que cet imprimé ne contient que ce qui a été avancé par cet officier,
devant l'Assemblée nationale, et ce qui a été remis par lui au comité des rapports,
Etonnés des assertions contenues dans cet écrit; convaincus, par la connaissance que nous avons des faits, que la plup art d'entre elles sont contraires ;à la vérité;
Considérant que, d'après la mémoire de M. de Mirabeau, on pourrait croire :
1° Que la promenade du régiment de Touraine avec quelques gardes nationales, cet épanche-ment patriotique des 19 et 21 mai, aurait été un mouvement séditieux et alarmant;
2° Que les citoyens de Perpignan s'en seraient indignés ;
3° Qu'il n'y aurait eu qu'une seule compagnie de volontaires qui s'y serait mêlée;
4° Que l'arrivée du sieur de Mirabeau et sa conduite à Perpignan auraient obtenu l'approbation du plus grand nombre des citoyens ;
5° Que des personnes, nommées dans cet écrit, qui sont des braves gens, qui jouissent de l'estime générale et à qui elle est due, ne seraient que des hommes dangeureux:
6° Que toutes ces fausses allégations enfin seraient appuyées de certificats valables.
Nous donnons, à cet effet, le témoignage le plus authentique que la conduite du régiment de Touraine a été irréprochable dans le long séjour que le régiment a fait dans cette ville;
Que c'est à son patriotisme, à son attachement à la Constitution que nous devons notre repos, et que nous avons évité les plus grands malheurs .
Que ses promenades, sous le non de farandoles, n'étaient ni séditieuses ni alarmantes, mais au contraire faisaient la consolation des gens de bien, par l'accord qu'elles manifestaient entre les soldats des troupes de ligne et ceux de la garde nationale;
Que ceux qui ont cherché à inculper cette démarche, à en faire punir les auteurs, ne peuvent être que les ennemis du bien public et de la Constitution;
Que l'arrivée de M. de Mirabeau a été du plus funeste présage, d'abord par les mouvements et une espèce d'air de défi que prenait le parti anticonstitutionnel, et ensuite par les démarches ouvertes de ce parti envers celui qu'il paraissait regarder comme son chef;
Que le présage funeste n'a été que trop réalisé par la manière dont le colonel s'est présenté en offrant de se mettre à la tête de la garde nationale (comme il l'avoue lui-même);
Par les emportements de ce colonel envers un régiment dont il connaissait la sensibilité et qu'il fallait porter à la résistance pour pouvoir le combattre;
Par l'ordre obtenu de faire garder les drapeaux de Touraine, longtemps après qu'ils étaient déposés chez le maire par un très fort détachement de Vermandois et par deux compagnies des gardes nationales.
Enfin, par la dernière démarche de ce colonel qui, déchirant ses drapeaux dont les lambeaux ont été trouvés sur l'escalier de M. le maire et sont entre les mains de MM. les députés de Touraine, emporte avec lui les cordons et lès cravates et abandonne au désespoir d'un régiment indignemeutoffensé, un maire qui avait répondu de ce dépôt sacré, et toute une ville que M. de Mirabeau comptait très sûrement avoir mis, par là, dans la nécessité d'en venir aux prises avec son régiment.
Nous attestons enfin, que les citoyens qu'il désigne et qu'il inculpe, sont précisément, ceux
qui jouissent de l'estime de toute la ville, ceux qui n'ont cessé de le mériter, et ceux à qui la patrie doit le plus dans les circonstances actuelles, comme il appert par l'attestation ci-jointe de l'assemblée du département et de la municipalité.
Nous déclarons nous référer au rapport qui a été fait à l'Assemblée nationale de cette affaire, par le club patriotique de Perpignan, par la société des patriotes, par les députés extraordinaires des gardes nationales, par le député de la municipalité, et enfin par MM. les députés du régiment de Touraine; rapport qui comprend l'avis de presque toute la ville; ce qui ne saurait balancer un certificat furtif, dont les signatures évidemment mendiées, puisqu'elles portent en partie sur un dire négatif, peuvent et doivent être recusées à tant de titres.
Voilà des faits que nous attestons et que nous signons, et comme dans une affaire aussi majeure, et qui a menacé d'une manière si marquée J a paix du royaume et l'affermissement de la Constitution, rien ne doit être négligé ; comme il est des choses qui, quoique claires et presque évidentes, ne peuvent être avancées, défaut de preuves formelles. Gomme cette preuve formelle est facile à obtenir, nous supplions l'Assemblée nationale d'ordonner à l'administration du département des Pyrénées-Orientales, qui est en activité, de faire une enquête qui puisse éclair-cir les faits, et mettre l'Assemblée à même de porter son jugement.
A Paris, juillet 1790.
Signé : Mailhat, capitaine, député au pacte fédé-ratif; EstÈVE, lieutenant député au pacte fédératif; Gùiter, capitaine, député au pacte fédératif; Artus, sergent, député au pacte fédératif; Siau, fusilier, député au pacte fédératif; Terrats fusilier, député au pacte fédératif.
Réplique de M. de Mirabeau le jeune à la réponse qui lui a été faite, au nom du régiment de Touraine, par les nommés Sauveton, fourrier, et Arout, fusilier, se disant députés dudit régiment et par les sieurs Vergés, officier municipal, Mailhat, Siau et autres membres de la garde nationale de Perpignan, s'en disant autorisés.
Accoutumé depuis deux mois aux outrages que la calomnie, l'ingratitude, l'insubordination ont fait vomir contre moi à des soldats parjures, rebelles à l'autorité du roi, à celle de leurs chefs et de leurs officiers, je m'attendais bien à trouver dans leur réponse, des injures, mais je croyais aussi y rencontrer quelques faits justificatifs, et j'avoue que cette pièce que j'ai sous les yeux ne m'eût pas semblé même exiger une réplique dé ma part, si je n'y avais trouvé jointes les diatribes de M. Vergés, au nom d|une municipalité qui le désavouerait si elle était libre, et celles de quelques officiers de la garde nationale, de Perpignan, dont deux, MM. Mailhat et Siau, sont regardés comme les auteurs de tous les troubles qui sont arrivés à Perpignan, et dont l'un, M. Mailhat, a été cité à la municipalité comme ayant offert de l'argent à un de mes soldats, qu'on a été obligé de faire partir parce qu'il l'avait dénoncé; c'est vers eux principalement que je dois diriger ma réplique après avoir prouvé aux soldats que mes preuves restent entières, que mes prétendues contradictions sont
aussi fausses que les leurs sont manifestés ; c'est une bien extraordinaire lutte que celle que j'entreprends aujourd'hui, car si un bienfait reproché ne semblait devenir une injure, je pourrais prouver qu'il n'est pas un des individus qui s'établissent aujourd'hui mes adversaires pour qui je n'aie fait beaucoup et auquel je n'aie rendu quelques services : l'ingratitude fut toujours le premier échelon du crime.
Les lettres que j'ai fait imprimer comme pièces justificatives et dont les originaux sont déposés au comité des rapports (1) prouvent d'une manière incontestable les détails de la première insurrection du 20 mai, la proscription des trois officiers que les soldats qualifient de jeunes gens et dont l'un, M. de Montalembert, est premier lieutenant, et a perdu un œil au combat de M. de la Grasse, en 1782; la destitution de l'adjudant; la violence faite au lieutenant-colonel, etc ; les soldats prétendus députés pallient ces fautes ou du moins veulent les pallier; mais tout homme impartial retrouvera dans leur réponse les faits au même état où je les ai présentés.
La preuve faite sur les lieux de la manière dont je me comportai vis-à-vis des cinq cents soldats rebelles, aveu précieux de la part des prétendus députés qui, a la barre etdansleur imprimé, se sont contenté de dire : quelques grenadiers et deux soldats par compagnie, ce qui réduisait les cinq cents hommes à 25 ou 30, cette preuve, dis-je, signée par des citoyens honnêtes, et qu'il est si faux de dire éloignés d'habitation du quartier où la scène s'est passée, que l'un est le maître de la maison devant laquelle elle a eu lieu, cette preuve reste entière. La municipalité a rendu un témoignage honorable à l'honnêteté de ces dix citoyens, qu'aujourd'hui on voudrait flétrir aux yeux du public.
La prétendue contradiction que relève la réponse et qu'elle prétend trouver entre ce que j'ai dit de l'enlèvement des drapeaux et la manière dont j'ai établi ensuite qu'ils avaient été portés en ordre chez le maire, est un raisonnement d'une mauvaise foi évidente ; j'ai dit que les soldats, sans ordre, sans chef, sans officiers, étaient venus violer un asile sacré, la chambre de leur colonel, et en enlever la caisse et les drapeaux; j'ai dit que c'était un crime; je le répète, s'il reste impuni il ne faut plus croire à la justice, il nè faut plus croire à l'ordre ; et parce que je rends ensuite justice à la manière dont ces drapeaux enlevés, à main armée, furent rétintégrés une heure après dans la chambre que le maire m'avait donnée, je suis en contradiction avec moi-même ! Cette manière de raisonner ne convaincra sans doute personne.
Les soldats prétendent avoir exigé une respon-sion du maire ; et ils avouent en même temps le droit incontestable que j'avais d'être dépositaire de ces drapeaux pour lesquels il demandaient un autre répondant.
Ils établissent que je n'ai pu connaître un hommëqui, dans une rue, me présenta le poing sous la figure; ils prétendent justifier leur réponse insubordonnée à l'ordre le plus mesuré et le plus sage.
Ils font, un dilemme assez plaisant sur la ma-
nière dont ils ont pu être payés, et en prenant acte pour dire que le sacrifice de la fortune d'un particulier pour une si belle cause mériterait la reconnaissance de la patrie, ils accusent M. de Chollet, leur respectable et trop bon général.
Ils assurent, et M. le municipal affirme aussi, que M. d'Aguilar a attesté que je savais qu'il avait répondu des drapeaux, et j'ai deux lettres de ce respectable vieillard, où il me mande qu'il est bien convaincu que je l'ignorais ; l'aurais-je souffert? La réponse est simple pour ceux de qui je suis connu.
On relève comme extraordinaire mon étonne-ment de ce qu'on a admis à la barre des soldats rebelles ; je crois qu'il est assez motivé cet éton-nement: il l'est du moins pour les gens honnêtes.
Ils me défient de montrer la signature d'un ancien officier ; on a vu deux lettres de M. d'Iversay, lieutenant-colonel, et une de M. d'Espenan, capitaine des grenadiers; il n'y avait que sept capitaines au corps lorsque j'y suis arrivé, et j'ai appris, sans surprise, que beaucoup de ceux qui avaient rejoint depuis l'événement avaient été du sentiment de M. d'Espenan ; un d'eux a adhéré à la lettre de MM. les lieutenants, ils calomnient ces derniers, et j'ose affirmer (on me rendra la justice de me croire) que je n'ai pas vu d'exemple d'une aussi héroïque valeur, que celles de ces . messieurs, dans , les occasions épineuses qui ont accompagné mon séjour à Perpignan.
Les soldats prétendus députés finissent par dire: Ou les drapeaux d'un corps sont des emblèmes vains et frivoles dont on peut se jouer impunément, ou l'injure dont nous demandons la réparation ne peut demeurer impunie.
Et moi je dis : Ou lès drapeaux d'un corps sont des emblèmes vains et frivoles dont on ne peut se jouer impunément, ou des soldats qui les ont enlevés à main armée de chez leur colonel, qui ont refusé obéissance au roi, à leur général, aux ordres intimés par la municipalité même, qui ont emprisonné le maire, auquel ils devaient obéir, qui l'ont maltraité, menacé, qui sont partis sans ordres, qui ont nommé un prétendu comité pour juger, emprisonner leurs officiers et leurs camarades, qui ont intimé des ordres à leurs chefs, sont indignes de rester sous ces honorables enseignes, et doivent être jugés rebelles et condamnés selon la rigueur des ordonnances.
Un conseil de guerre doit les juger et non le département des Pyrénées-Orientales que ces soldats insubordonnés tiennent sous leur dépen-dance, et sous le canon de la citadelle de Perpignan, dont ils se sont rendus maîtres.
Voilà pour les soldats.
Et vous, M. Vergés, qui avez été si modéré à la barre de l'Assemblée, qui aviez ordre de vos commettants de l'être, quoiqu'ils vous eussent député dans un moment de crise, vous cherchez à atténuer la force de la lettre qui m'a été écrite parla municipalité dont vous êtes membre: expliquez donc aussi les signatures de cette même municipalité, apposées à ma relation dans laquelle les insurrections, antécédentes à mon arrivée, sont consignées. Cette relation a été envoyée à la maison commune, y a été lue par le procureur de la commune, et signée par vous et tous vos collègues; expliquez cette nouvelle,contradiction. Vous me faites parler sans doute beaucoup mieux que jen'ai fait, mais vous nefaites que broder le canevas que je m'étais promis de remplir moi-même,' lorsque j'avais demandé à prêter mon serment, comme le constatent ma lettre à la municipalité, et sa réponse.
Cette inconséquence, qui vous fait condamner aujourd'hui une conduite que vous aviez approuvée, me paraît d'autant plus extraordinaire que vous n'êtes plus ici sous la couleuvrine de la citadelle de Perpignan, et je crois celle de vos compagnons de voyage moins dangereuse: vous exprimez à l'Assemblée, dites-vous, le junte intérêt que le régiment de Touraine a inspiré à la ville de Perpignan : vous avez voulu dire le juste effroi, M. Vergés, soyez conséquent, soyez juste, soyez vrai, soyez tel qu'on vous avait dépeint à moi, et j'en appellerai de M. Vergés ému à M. de Vergés calme.
Pour vous, MM. Mailhat et Siau, car je ne connais pas ceux de vos collègues qui ont joint leurs signatures aux vôtres, je vous répondrai à vous, M. Mailhat, que vous dont la compagnie a applaudi le régiment de Touraine, au moment où il demandait la tête de son chef, et où il refusait d'obéir aux ordres du roi, fait constaté par ma relation et signé d'une grande partie des citoyens de Perpignan, vous dont la compagnie leur fournissait des balles et les enivrait, comme peuvent fe certifier tous ceux qui habitaient la maison de M. d'Aguilar dont les fenêtres donnent sur votre corps de garde ; Vous qui avez offert une poignée d'argent au nommé Montpellier, musicien de mon régiment, qu'il a refusée, fait qu'il a dénoncé à la municipalité: vous... vous imaginez pouvoir obtenir quelque croyance à deux cent vingt lieues d'une ville où vous êtes trop connu pour en avoir aucune F
Et vous M. Siau qui avez déjà dénoncé faussement à l'Assemblée nationale l'ancienne municipalité de Perpignan, qui fûtes obligé de fuir avec vos complices, jusqu'en Espagne, qui désavouâtes ensuite votre propre signature, vous qui, le long de votre roule, avez semé côntre moi des calomnies atroces dont j'ai recueilli les effets, vous qui, en Pologne, à Barcelonne; et dans tous les pays du monde vous êtes agité sans succès, et qui n avez pu en recueillir qu'au sein du club prétendu patriotique de Perpignan, imaginez-vous que des pièces grattées, raturées, des signatures fausses, etc., etc., ne seront pas dénoncées par moi, lorsqu'on l'es produira, quoiqu'on m'en refuse communication ? Non, vous ne l'avez pas espéré, mais Vous avez compté que l'esprit de parti vous servirait, cela peut et doit être; mais quel fruit re-cueillèrez-vous de vos calomnies ? La vérité se découvrira, et !i| est des genres de blessures où la cicatrice même, qui toujours reste, devient une marque honorable : celle-ci est du nombrei
Mirabeau le jeune.
Séance du
La séance est ouverte à neuf heures du matin.
donne lecture d'une lettre de la municipalité de Die en Daupbiné, contenant une pétition
de nombreux citoyens de
Cette pétition est renvoyée au comité ecclésiastique.
, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier. Il est adopté sans réclamation.
dépose sur le bureau une délibération du conseil général de la commune de Mont-de-Marsan, portant soumission d'acquérir des domaines nationaux, jusqu'à concurrence d'un million, dans le département des Landes.
annonce que la ville de Saint-Claude fait également soumission d'acquérir les domaines nationaux situés dans l'étendue de son district, jusqu'à concurrence de 400,000 livres, somme à laquelle ils peuvent se monter.
ter fait lecture d'une adresse de la seconde division des assemblées primaires du canton d'Armentières, composée des citoyens actifs des municipalités de Fritinghien, Houpe-lines et Erguinghem-sur-la-Lys„ Primesque, Ca-pingbem et Gnelde-de-la-Moite, portant soumission aux décrets de l'Assemblée nationale, et contenant diverses pétitions relatives à l'armement des citoyens enrôlés dans les gardes nationales, au soulagement des pauvres, à l'établissement des impôts et autres objets d'administration.
Cette adresse est renvoyée au comité de commerce et d'agriculture.
dénonce à l'Assemblée l'illégalité de l'élection des maire et officiers municipaux de la commune de Bretoncelles au Perche et propose le projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale, instruite que les maire et officiers municipaux delà paroisse deBerton-celles au Perche, nommés d'une manière illégale et contraire à ses précédents décrets et règlements, agissent néanmoins en vertu de leur nomination, au mépris de ses décrets, au mépris d'une décision de; son comité de Constitution, et d'une lettre de son président, qui lui ont été adressées depuis; qu'ils troublent la paix et la tranquillité qui doivent toujours régner entre de bons citoyens; que, par une suite de leur désobéissance, les impôts ne sont point perçus dans ladite paroisse, et voulant ramener lesd'its soi-disant officiers à l'ordre, et aeeélérer la perception retardée desditfr impôts, a décrété ét décrète :
1°. Qu'à la réquisition du syndic OU autres anciens officiers de la municipalité de Bretoncelles, tous les citoyens actifs seront de nouveau, et lë plus rôt possible, invités à s'assembler, pour nommer, dans les formes prescrites, les maire et officiers de leur' municipalité;
2°' Que les officiers nommés procéderont de suite à la confection, de leur rôle d'impositions';
3° Qu'en cas de besoin ou par précaution, lès-dits syndics ou anciens officiers pourront requérir l'assistance des milices bourgeoises, ou maréchaussées voisines, pour maintenir le bon ordre pendant l'assemblée.
(L'Assemblée renvoie cë projet au comité de Constitution, à charge d'en faire son rapport demain.)
Parmi les corps militaires qui doivent assister à la fédération du 14 juillet, vous n'avez pas compris les aDcienues milices des provinces. Quoiqu'elles ne fassent point un corps dans ce moment, elles sont obligées de se rassembler au premier son de la caisse ; si des circonstances malheureuses nous amenaient la guerre, elles sont toujours prêtes à voler au secours de la patrie. Je vous propose donc de décréter que les plus anciens officiers de bataillon de garnison viendront à la fédération générale.
(Cette proposition est renvoyée au comité militaire, chargé d'en rendre compte à la séance du lendemain.)
fait part à l'Assemblée d'une adresse au conseil général de la commune de la ville de Grasse, qui improuve formellement la délibération par laquelle le chapitre de cette ville se joint aux protestations de celui de Paris.
J'ai reçu de M. de La Luzerne, ministre de la marine, la lettre suivante :
« Monsieur le Président,
« J'ai l'honneur de vous remettre un paquet que vient de m'adresser pour vous M. Gammelin, vice-consul de France à Palerme, en m'annon-çant qu'il contient le procès-verbal de la contribution et dons patriotiques faits tant par lui que par les Français résidant en cette ville, ainsi que trois lettres de change, montant ensemble à 3,991 livres.
« J'ai l'honneur d'être avec respect, etc.
« Signé : La Luzerne. »
L'Assemblée ordonne que les lettres de change seront remises au comité des. dons patriotiques et les autres pièces au comité des finances.
J'ai appris, Messieurs, que M. de La Vauguyon, notre ancien ambassadeur auprès de la cour d'Espagne, avait écrit à M.""une lettre, par laquelle il témoignait combien il est surpris qu'on l'ait pu calomnier auprès du roi, qui vient de lui ordonner de s'absenter. Il assure que, loin d'avoir excité la cour de Madrid à la guerre, il a fait des démarches pour la paix, et que, par ses soins, l'Espagne a fait passer en France 2 millions de piastres. Par cette lettre, M. de La Vauguyon annonce qu'il a écrit à M. de Montmorin, pour le prier d'instruire l'Assemblée nationale de sa correspondance, afin qu'elle puisse juger de sa conduite. Peut-être serait-ce le cas de demander Ja communication de cette lettre.
(L'Assemblée décide qu'elle passera à l'ordre du jour.)
donne lecture d'une lettre de la municipalité du bourg d'Argenteuil, portant que pour célébrer l'anniversaire du serment prêté par l'Assemblée nationale le 20 juin de l'année dernière, au jeu de Paume de Versailles, cette municipalité a fait chanter solennellement le Te Deum, le 20 de ce mois.
Cette lettre contient des éloges du clergé, de la garde nationale et des citoyens du bourg.
L'Assemblée en entend la lecture avec intérêt, et ordonne qu'il en soit fait une mention honorable dans le procès-verbal, et que M. le Président soit chargé d'écrire à la municipalité et à la garde nationale.
fait lecture d'une lettre des officiers municipaux de la ville de Dax, portant entre autres choses, que le conseil général de la commune de cette ville a délibéré de faire sa soumission d'acquérir des biens nationaux jusqu'à concurrence de 1,500,000 livres.
Elle contient, de plus, le détail des mesures qu'ils ont prises pour prévenir les abus de la contrebande. A cette lettre est joint un exemplaire de l'ordonnance que les officiers municipaux ont rendue, à cet effet, le 17 de ce mois.
(L'Assemblée entend la lecture de ces deux pièces avec satisfaction.)
Vous avez entendu l'adresse du comtat Venaissin. Les députés se sont rendus ce matin chez moi, et m'ont assuré qu'ils avaient fait dans leur adresse une omission importante, dont ils voulaient instruire l'Assemblée nationale. Dans cette adresse, ils ont juré fidélité à leur souverain ; ils voulaient dire à leur souverain pontife, et non pas ce que l'on entend en France d'après la nouvelle Constitution.
, rapporteur du comité des finances. Les chanoines de Saint-Quentin et de Farcy ont été imposés à la taille pour 1790 êt sont poursuivis en payement. Pour juger du mérite de cette action,'il s'agit de savoir si les impositions sont payées en avance ou non. Or, vous avez reconnu par votre décret sur l'imposition des ci-devant prévilégiés, pour les six derniers mois de 1789, que les impôts étaient payés d'avance. En effet, la récolte étant l'hypothèque de l'impôt, c'est sur la récolte qu'il est censé se percevoir. Les'bénéficiers ne jouissant plus de leurs bénéfices en 1790, ils ne peuvent être inquiétés pour les redevances de cette année.
D'après ces considérations, le comité des finances vous propose d'adopter le décret suivant:
L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des finances sur les contestations qui s'élèvent chaque jour à raison du payement des impositions de 1789 et 1790, principalement à l'égard des ecclésiastiques et bénéficiers, désirant les terminer et les prévenir, a décrété et décrète que les impositions de 1789 seront payées par ceux qui ont fait la récolte de ladite année; que celles de 1790 seront acquittées par ceux qui jouiront en l'année présente, sans entendre préjudicier aux usages locaux, ou aux clauses des baux qui concernent les fermiers entrants et sortants ; déclare, en conséquence, que les impositions assises sur les biens domaniaux ou ecclésiastiques affermés, seront payées par les fermiers, soit à leur propre décharge, soit en déduction du prix des baux, et sauf à recouvrer, s'il y a lieu ; et à l'égard des biens qui étaient exploités par les ecclésiastiques, les impositions en seront acquittées par ceux qui sont chargés de les régir, pour être ensuite allouées dans le compte des revenus.
(Ce décret est mis aux voix et adopté.)
, rapporteur. Vous avez renvoyé à votre comité des finances, une réclamation de la manufacture des cuirs de Pont-Audemer. D'accord avec le comité de commerce, nous vous proposons le décret suivant :
« L'Assemblée nationale, sur le rapport de son comité des finances, ordonne que la somme de 10,000 liv. qui reste due à l'entrepreneur de la fabrique de cuirs anglais de Pont-Audemer,
sur celle de 150,000 liv. qui lui avait été promise pour encouragement, sera incessamment acquittée sur les deniers du Trésor public.
(Ce décret est mis aux voix et adopté.)
La garde nationale de Bordeaux adresse à l'Assemblée nationale un rapport exact du voyage d'un de ses détachements à Moissac. On annonce qu'il contient des faits importants. — L'Assemblée décide qu'il en sera fait lecture à une séance du soir.
M. Thouret, rapporteur du comité de Constitution, a la parole pour faire un rapport sur la manière de mettre les nouveaux corps administratifs en activité.
, rapporteur (1). Messieurs, l'intérêt public demande que les corps administratifs des départements et des districts soient mis eu activité, puisque du moment de leur formation ils deviennent les seuls instruments capables de servir à l'action du gouvernement ; mais il importe de ne leur donner en ces premiers moments que l'espèce d'activité à laquelle ils peuvent suffire, et dont ils sont en état de remplir efficacement l'objet.
Cette considération conduit à examiner si c'est en assemblées générales ou de conseil, qui, suivant le décret constitutionnel, dureraient six semaines, que les corps administratifs doivent être mis d'abord en activité ; ou, si c'est simplement en directoires, jusqu'à une époque peu reculée que Vous fixeriez par votre décret, mais qui serait suffisante pour le rassemblement des pièces et des connaissances relatives à chaque département, sans lesquelles les assemblées de conseil ne peuvent pas utilement délibérer.
Si nous jetons un coup d'œil sur les fonctions que les corps administratifs ont à remplir en 1790, nous trouvons qu'entrant en exercice au milieu de l'année, ils ont à suivre l'exécution des dispositions qui ont été faites suivant l'ancien régime pour le service de cette année,; qu'ils ont aussi à exécuter plusieurs dispositions nouvelles résultant des décrets de l'Assemblée nationale ; qu'ils ont enfin à recueillir tous les renseignements, à préparer tous les matériaux qui leur seront nécessaires pour établir le service de 1791, sur les bases uniformes de la Constitution. Ils ne peuvent donc s'occuper en ce moment que d'objets qui sont ou de simple exécution pour le restant de l'exercice de 1790, ou de simple préparation pour celui de 1791.
En principe, ces fonctions appartiennent aux directoires, et non aux conseils ou assemblées générales. Lorsque vous avez divisé les corps administratifs en deux sections, vous avez statué qUe les fonctions des conseils seraient d'ordonner tout ce qui en est en quelque sorte réglementaire pour le service de l'année suivante, de déterminer les travaux et les dépenses générales du département, et de recevoir les comptes du directoire. Vous avez arrêté, en même temps, que les directoires seraient toujours en activité, soit pour la préparation des opérations futures, soit pour l'exécution de celles qui auraient été ordonnées, soit pour l'expédition de toutes les. affaires de détail.
Dans le moment actuel, les corps administratifs n'ont aucune partie de leurs fonctions
qu'ils
Si, de la nalure des fonctions à remplir dans ces premiers instants, nous passons à la position des corps administratifs, nous les voyons, non seulement dénués de matières qui puissent les occuper en assemblées de conseil, mais encore privés des papiers et des instructions qui leur seraient nécessaires pour prendre des résolutions éclairées, soit sur les intérêts généraux, soit sur les affaires particulières de leur département.
Le premier pas à faire est sans doute que les nouveaux administrateurs se fassent remettre par les anciens toutes les pièces, états et renseignements relatifs à leur département ; mais cette remise, quelque célérité qu'on y apporte, exigera un temps assez considérable, à cause des précautions dont elle doit être accompagnée. Les précédents administrateurs ne pourront pas se dessaisir sur-le-champ des pièces dont ils auront besoin pour établir leurs comptes ; il faudra donc attendre qu'ils en aient fait ou des copies ou des extraits; il faudra qu'il soit dressé des inventaires des autres pièces dont ils pourront effectuer la remise; et quand un département se trouvera composé de territoires détachés du ressort de plusieurs administrations anciennes, il sera nécessaire de tirer des pièces qui étaient communes à la généralité de chaque administration ancienne, des extraits partiels relatifs aux différentes parties de territoire qui en ont été distraites. Le soin de ces détails minutieux et lents ne peut pas convenir à des assemblées générales; et il serait également intolérable, ou de faire délibérer les administrateurs en conseil avant que ces opérations fussent consommées, ou de les tenir réunis infructueusement pendant qu'elles s'exécuteront.
Il en est de même des préparatifs qui seront à faire pour reconnaître la consistance de chaque département, et pour établir sa situation, tant par rapport aux impositions, que relativement aux travaux publics, et à tous les objets de dépenses locales. Il est indispensable de former en chaque département un état général de toutes les municipalités dont il est composé, de vérifier et d'énoncer pour chaque municipalité quelle est sa population active, et quel est le montant de ses impositions. Il faut un pareil tableau des routes du département, avec désignation de l'état dans lequel elles se trouvent, et de la situation de tous les différents travaux autorisés sur les fonds de 1790. Sans les notions de cette seconde espèce, dont les objets se diversifient beaucoup, les conseils administratifs ne peuvent pas délibérer; et il y d'autant moins lieu à les tenir assemblés avant que ces notions
soient recueillies, qu'ils sont moins propres que les directoires à les rassembler avec promptitude.
Que seraient donc en ce moment les membres des corps administratifs réunis pendant un mois ou six semaines en assemblées générales 1 Privés de connaissances personnelles, et des renseignements qui pourraient leur en fournir, manquant tout à la fois et d'objets de délibération, et de règles pour diriger leurs résolutions, ils tomberaient ou dans l'ennui de l'inaction, ou dans l'embarras des difficultés qu'ils ne pourraient pas vaincre, ou dans le désagrément de prendre des arrêtés dont il deviendrait impossible d'autoriser l'exécution. 11 serait très fâcheux de dégoûter ainsi les nouveaux administrateurs ; et lorsque le salut de la cbose publique est attaché au succès de leurs travaux, il ne faut pas que leurs premiers essais soient exposés à un discrédit dout les ennemis de la Constitution ne manqueraient pas de se prévaloir. Ajoutons cette circonstance que le plus grand nombre d'entre eux est pris dans la classe des cultivateurs à qui l'approche d'une abondante récolte ne permet pas de rester longtemps assemblés, sans nuire à leur intérêt personnel, intimement lié en cette partie à l'intérêt public.
Des motifs si frappants, l'impossibilité certaine, et déjà sentie par plusieurs des administrateurs élus, d'opérer utilement en assemblées générales dans ces premiers moments, les exemples que nous avons eus des méprises dans lesquelles ces assemblées peuvent tomber, et l'importance d'entretenir cependant le mouvement de l'administration générale, qui ne pourrait pas s'arrêter sans les plus fâcheux inconvénients, toutes ces'raisous nous ont portés à vous proposer le seul parti qui peut tout concilier. H consiste à ce que les membres des corps administratifs élus, et ceux qui vont l'être successivement, s'assemblent d'abord pour s'organiser en nommant leur président, leur secrétaire, et les membres des directoires ; qu'ils terminent là cette assemblée, qui ne sera regardée que comme préliminaire ; que leurs directoires entrent aussitôt en activité, et que l'ouverture de la première session des conseils soit fixée au 15 septembre prochain pour la totalité des districts, et au premier octobre suivant pour la totalité des départements.
Pendant l'intervalle, les directoires s'occuperont, avec plus d'efficacité que les assemblées générales ne pourraient le faire, du soin de rassembler tous les renseignements sur les intérêts, les besoins et l'état des affaires du département; et ils se mettront en état d'en présenter le tableau aux prochaines assemblées des conseils.
Ils se livreront à tous les détails d'exécution pour la continuation du service de 1790, pour l'accélération du recouvrement des impositions, pour la Surveillance des travaux publics autorisés et adjugés, pour l'expédition des différents objets de dépenses locales, et pour le jugement des demandes des contribuables en décharge ou modération.
Ils veilleront enfin, en se conformant aux instructions qui leur seront envoyées, à l'exécution des différentes parties d'administration qui leur sont confiées par vos décrets, telles que la décision des difficultés survenues dans la formation et l'organisation des municipalités, les opérations prescrites par votre décret du 25 mai dernier, pour constater les inégalités et doubles emplois dans le dernier département des impositions or-
dinaires entre les communautés, et les opérations relatives tant à l'administration qu'à la vente des [ biens nationaux.
A ce moyeD, le temps qui serait perdu par l'infructueuse session des conseils, sera plus avantageusement employé par les directoires à des opérations qu'eux seuls peuvent bien faire ; savoir, d'une part, aux détails de préparation, indispensables pour mettre les conseils en utile activité; et, d'autre part, aux détails d'exécution nécessaires pour que le service de l'année présente n'éprouve aucuqe suspension.
Les administrations de 83 départements viendront ensuite, toutes en même temps, et à une époque plus favorable au succès de leurs travaux, tenir leur première session générale en conseil. Elles trouveront alors tous les renseignements recueillis, toutes les matières disposées ; et elles seront toutes également en état de répondre par un mouvement uniforme à l'impulsion qui leur sera donnée simultanément.
Enfin, les membres de ces administrations, la plupart intéressés aux importants travaux de la moisson prête à s'ouvrir, n'auront point été mis à la fâcheuse épreuve, ou d'abandonner leur plus précieux intérêt pour rester attachés sans fruit à des séances prématurées, ou de nuire au service public, s'ils voulaient non seulement s'y livrer sans connaissances suffisantes, mais encore le précipiter pour être plus tôt rendu aux soins de leur récolte.
Il s'agit de décider pour longtemps du sort, de l'influence et du crédit des corps administratifs. Tout dépend pour eux et pour l'intérêt public de la manière dont ils vont se montrer ;; et leur considération, à laquelle est attachée pour beaucoup leur utilité future, tient tout entière à la confiance qu'ils doivent inspirer par leur conduite. Ceux qui ont osé désirer et espérer que les administrations ne se formeraient pas, désirent, espèrent et annoncent maintenant qu'elles ne rempliront pas l'objet de leur institution, qu'elles n'opéreront pas, ou qu'elles opéreront mal. Cet échec , qui serait si funeste au succès de la Constitution, pourrait aisément arriver, si les nouveaux administrateurs n'étaient pas dirigés dans ces commencements difficiles avec la plus grande prudence, et surveillés avec la plus sérieuse attention ; mais que l'intelligence et la circonspection guident leurs premiers travaux, alors ils ne tarderont pas à combler toutes les espérances des bons citoyens. Disons le mot : l'organisation des Corps administratifs n'est, jusqu'à présent, qu'une grande et belle spéculation : mais rien n'est fait si les avantages que la nation en attend ne se réalisent pas ; et, pour les produire, il faut, en ce moment, beaucoup de sagesse et d'esprit de conduite.
L'expérience a déjà démontré les bons effets du parti que le comité vous propose. Lors de l'établissement des assemblées provinciales, elles tinrent au mois d'août une séance préliminaire, dans laquelle elles se bornèrent à établir leurs commissions intermédiaires : elles ne se rassemblèrent que trois mois après; et ce fut le travail préparé par les commissaires et par les procureurs syndics, dans cet intervalle, qui mit l'assemblée générale subséquente^ en état de délibérer avec facilité et utilité.
Voici le décret que j'ai l'honneur de proposer :
PROJET DE DÉCRET.
L'Assemblée nationale, après avoir entendu son
comité de Constitution, a décrété et décrète ce qui suit :
« Art. 1er. Les membres déjà nommés, et ceux qui vont l'être
successivement pour composer les administrations de département et de district, tiendront
incessamment une première assemblée dans laquelle ils nommeront leur président, leur
secrétaire, et les membres du directoire.
« Art. 2. Dans les anciennes provinces qui avaient une administration commune, les membres des nouveaux corps administratifs nommeront aussi les commissaires qui seront chargés de la liquidation des affaires générales, aux termes du dernier article du décret du 22 décembre dernier sur la constitution des assemblées administratives.
« Art. 3. Ces nominations étant faites, les membres des administrations de département et de district se sépareront pour se réunirtousen session de conseil, à la même époque, qui sera, pour cette fois, celle du 15 septembre prochain pour toutes les administrations de district, et celle du premier octobre pour toutes les administrations de département.
« Art. 4. Les directoires de département s'occuperont, pendant cet intervalle, dese faire remettre les papiers et renseignements relatifs au département, d'en faire l'examen, pour être en état d'en présenter les résultats généraux à la prochaine assemblée du conseil, et de distribuer à chaque directoire de district ceux qui pourront les concerner.
« Art. 5. Ils feront former un état ou tableau de toutes les municipalités dont leur département est composé, avec indication, tant du montant de la population active, que de celui des impositions de chaque municipalité.
«Art. 6. Ils feront dresser également un tableau des routes de leur département, avec désignation de l'état dans lequel elles se trouvent, et de la situation, tant des ouvrages d'art, que de ceux ci-devant dits de corvée, qui sont autorisés et mis en confection sur des fonds de 1790.
« Art. 7. Ils suivront les dispositions faites pour l'emploi, tant de ces fonds, que de ceux destinés aux ateliers de charité et autres secours de bienfaisance, aux frais d'administration, et autres dépenses qui concernent la généralité du département pour l'année 1790.
«Art. 8. Ils veilleront, suivant l'instruction qui leur sera envoyée, à ce que tous les rôles, tant des impositions ordinaires, que ceux de supplément sur les ci-devant privilégiés, et ceux de la contribution patriotique, soient incessamment achevés, vérifiés et mis en recouvrement.
« Art. 9. Ils exécuteront la disposition du décret de l'Assemblée nationale du 25 mai dernier, pour constater les inégalités, erreurs ou doubles emplois qui peuvent avoir eu lieu dans le dernier département des impositions ordinaires entre les municipalités.
« Art. 10. Ils examineront et jugeront les requêtes des contribuables, en décharge, ou réduction, ou remise, ou modération.
« Art. 11. Ils s'occuperont aussi des demandes relatives aux reconstructions et réparations d'églises ou de presbytères, et aux autres objets de dépenses locales, soit pour faire exécuter les dépenses déjà autorisées, soit pour vérifier, accorder ou refuser celles sur lesquelles il n'a pas encore été prononcé.
« Art. 12. Ils vérifieront et termineront, conformément aux décrets constitutionnels, toutes j les demandes relatives à la formation, organisation et réunion des municipalités.
« Art. 13. Ils se conformeront aux instructions qui leur seront données sur tout ce qui concerne l'administration et la vente des biens nationaux.
« Art. 14. Et généralement les directoires des départements feront, tant par eux-mêmes que par l'entremise des directoires de districts qui leur sont subordonnés, tout ce qui sera nécessaire et pourra leur être prescrit, soit pour la continuation du service de 1790, soit pour l'exécution des décrets déjà rendus et sanctionnés, et de ceux qui pourront l'être dans le cours de la présente session.
« Art. 12. Le présent décret sera présenté incessamment à la sanction du roi, qui sera supplié de l'envoyer sans délai à ses commissaires dans les départements, pour être notifié par eux aux membres élus pour composer les corps administratifs. »
Plusieurs membres demandent à aller aux voix sur l'ensemble- du décret.
Je propose un amendement à l'article 3, et je demande que l'Assemblée générale du conseil ait lieu dans la saison où les cultivateurs sont maîtres de leur temps, et j'indique le 1er novembre comme une époque favorable.
Votre comité a pensé qu'on ne pouvait trop rapprocher le terme des sessions du conseil sans nuire à l'unité du décret, ni trop éloigner ce terme sans nuire à l'instance des travaux qu'auront alors les assemblées du conseil. Il vous demande de maintenir les dates du 15 septembre et du 1er octobre.
L'amendement de M. de Delley-d'Agier est rejeté.
Le projet de décret est ensuite adopté sans modifications.
{Voy. annexé à la séance de ce jour un Mémoire sur les impressions à ordonner par les corps administratifs et sur l'envoi des décrets aux municipalités).
L'ordre du jour est la suite de la discussion du décret sur le traitement du clergé actuel.
M. Chasset continue à remplacer M. l'abbé Expilly dans la fonction de rapporteur.
, rapporteur. Je dois rappeler à l'Assemblée l'état actuel du travail sur le décret relatif au traitement du clergé actuel. L'article Ier a été adopté dans la séance du 23 juin; les articles 2, 3 et 7 ont été décrétés le lendemain; enfin le 26 juin, l'Assemblée, en remplacement des articles 4, 5, 6 et d'un amendement renvoyés au comité, a adopté de nouveaux articles désignés provisoirement 4 à 9, ce qui porte à dix le total des articles décrétés à cette heure.
Le comité me charge de vous proposer encore plusieurs articles additionnels à son projet imprimé (1).
Le premiér de ces articles qui deviendrait le onzième de ceux décrétés est ainsi conçu :
« Art. 11. Dans les chapitres où par les statuts ou l'Usage les prébendes des nouveaux
chanoines sont, pendant un temps déterminé, partagées en tout ou en partie entre les anciens
chanoines, on n'aura aucun égard à cet usage, et le
(Cet article est mis aux voix et adopté.)
lit les autres articles additionnels.
Le deuxième de ces articles a pour objet de pourvoir au traitement des ecclésiastiques engagés dans les ordres sacrés et attachés aux chapitres sous le nom d'habitués et autres dénominations et qui ne sont pas pourvus en titre de bénéfice.
On a distingué parmi les ecclésiastiques, ceux qui avaient des bénéfices de ceux qui n'en avaient pas, et l'on a pourvu au traitement des premiers : pour les autres, il faut ordonner que les différentes églises du royaume soient chargées de remettre des états de tous ceux qui sont attachés à leur service, ainsi que des honoraires ou gages, afin que la nation puisse statuer en connaissance de cause et allouer un traitement proportionnel à celui qu'avaient ci-devant ces fonctionnaires ecclésiastiques. Il doit être procédé, à cet égard, par une loi générale.
Le comité a à peu près devancé cette proposition par un de ses articles qui accorde un traitement aux musiciens, organistes et autres personnes attachées au service des églises cathédrales et collégiales.
Voici sommairement les motifs qui ont .déterminé le comité à traiter les ecclésiastiques habitués engagés dans les ordres sacrés comme les bénéficiers. Il les a déduits des principes de la primitive Eglise, qui n'accorde le titre de bénéficiers qu'aux ecclésiastiques qui remplissent ies fonctions de leur ministère ; et si ces habitués des églises n'ayant ni administration, ni garde de titres, se sont trouvés peu à peu voués à un sort très incertain, cela ne peut être qu'un abus : en conséquence, je demande que le traitement très modique proposé par le comité soit adopté.
Avant de consentir à l'adoption du projet du comité, je demande à être instruit du nombre de millions que cette dépense coûtera eu plus à la nation.
Plusieurs membres demandent le renvoi au comité de tous les articles additionnels.
La demande de renvoi est motivée par ce fait que l'Assemblée n'aurait pas eu connaissance antérieure des dispositions proposées ; c'est là. une erreur, puisque les propositions ne sont qu'une conséquence d'amendements renvoyés au comité. Je demande donc que les articles soient décrétés sous le bénéfice des deux amendements suivants : 1° d'accorder aux personnes attachées au service de l'église un traitement conditionnel et proportionné au temps de leur service; 2° de décréter que le traitement ne sera pas plus élevé que celui des religieux man-diants.
Divers membres proposent l'ajournement.
A quelle date l'ajournement?
Une voix; Indéfiniment.
Vous voulez donc vouer à la misère et à la mendicité plusieurs pères de famille servant dans les églises cathédrales et collégiales ?Que ceux qui ont cette odieuse pensée se fassent connaître.
On demande l'impression des articles additionnels et l'ajournement à huitaine.
Cette motion est adoptée.
Nous revenons aux articles du projet de décret imprimé.à la suite du rapport de M. l'abbé Expilly. Je donne lecture de l'article 8 qui deviendrait le 12e:
« Art. 8. Les abbés réguliers perpétuels et les chefs d'ordre inamovibles jouiront, savoir : ceux dont les maisons ont en revenu 10,000 livres au moins, d'une somme de 2,000 livres, et ceux dont la maison a un revenu plus considérable, du cinquième de l'excédent, sans que le tout puisse aller au delà de 6,000 livres. »
propose l'amendement suivant :
« Que les bénéficiers réguliers ne vivant pas en communauté, dont les revenus ecclésiastiques sont au-dessus du traitement fixé par les décrets de l'Assemblée à l'égard des ordres religieux, reçoivent la moitié du surplus de leurs revenus, sans que le tout puisse aller au delà de la somme de trois mille livres ; et qu'à l'égard des abbés, le traitement puisse aller jusques à six mille livres, en suivant les mêmes règles. »
(Cet amendement est renvoyé au comité ecclésiastique.)
(de Nemours). Il n'y a rien de moins convenable que de présenter à cette Assemblée deux poids et deux mesures, et de faire pencher la balance du côté de ceux qui méritent le moins de faveur. Vous avez décrété, que les abbés commendataires auraient :
1° 1,000 liv. ; 29 la moitié de l'excédent, si les revenus vont au delà. Pourquoi le comité pro-pose4-il aujourd'hui, à l'égard des abbés réguliers, une réduction de la moitié au tiers? Cela me paraît injuste. Il he doit point y avoir de différence ; et s'il y en avait, ce devrait être en faveur des réguliers. On vous dit que ce sont des moines, cela est vrai; mais ces abbés commendataires sont des mangeurs de moines. Je demande que l'article soit amendé, ainsi qu'il suit :
« Que les abbés réguliers perpétuels, et les généraux, chefs d'ordre, aussi perpétuels, dont les revenus n'excèdent pas deux mille livres, aient au moins deux mille livres et la moitié du surplus, qui ne pourra néanmoins excéder huit mille livres pour les abbés réguliers,et dix mille livres pour les généraux, chefs d'ordre.»
(L'amendement est rejeté.)
propose, par un autre amendement :
« D'accorder au directeur principal et perpétuel de l'école royale et militaire de Sorèze, un traitement pareil à celui des abbés réguliers perpétuels et des chefs d'ordre perpétuels ».
Cet amendement est renvoyé au comité ecclésiastique.
Divers membres présentent encore quelques courtes observations.
L'article est ensuite décrété dans les termes suivants :
« Art. 12 (ancien art. 8). Les abbés réguliers
perpétuels et les cbefs d'ordre inamovibles jouiront, savoir : ceux dont les maisons ont en revenu 10,000 livres, d'une somme de 2,000 livres, et ceux dont la maison a un revenu plus considérable, du tiers de l'excédent, sans que le tout puisse aller au delà de 6,000 livres. »
L'article 9 du projet porte :
« Art. 9. Les abbés réguliers triennaux et les chefs d'ordre amovibles jouiront d'uu traitement de quinze cents livres. »
, ie ne vois pas pourquoi on ferait à ceux qui n'ont été qu'un moment quelque chose dans leur ordre, un sort différent des autres religieux. Je demande que les abbés triennaux et les chefs d'ordre amovibles n'aient pas un traitement plus fort que celui des religieux non mendiants.
J'appuie la motion de notre collègue, parce qu'on vous propose d'accorder une faveur non méritée en vous demandant de voter l'article 9.
D'après les préopinants, les religieux dignitaires dont il est question n'auraient rendu aucun service. C'est une erreur qui doit être relevée, quelle que soit la décision à intervenir.
Le comité n'a présenté l'article que pour se conformer à vos précédents décrets, qui portent qu'il sera accordé aux abbés réguliers et généraux d'ordre un traitement plus fort que celui des autres religieux.
On demande la question préalable sur l'article 9.
La question préalable est mise aux voix et prononcée.
, rapporteur. Voici la teneur de l'article 10 du projet.
« Art. 10. Après le décès des titulaires, les coad-juteurs entreront en jouissance d'un traitement, à raison du produit particulier du bénéfice, lequel traitement sera fixé à la moitié de ceux décrétés par les articles précédents. Dans le cas néanmoins où les coadjuteurs auraient d'ailleurs, à raison d'autres pensions ou bénéfices, un traite-tement actuel égal à celui ci-dessus, ils n'auront plus rien à prétendre. »
Je demande qu'il soit présenté un article spécial pour les coadjuteurs et je réclame en leur faveur le droit qu'ils ont à l'épisco-pat. J'observe qu'en France il n'y en a que trois : ceux de Sens, d'Alby et de Troyes. Je propose de leur allouer au moins un traitement de 10,000 1.
, Je propose l'ajournement et le renvoi au comité ecclésiastique.
€ette proposition est rejetée.
J'observe qu'il y a en France des évéques suffragants de Bâle et de Trêves qui sont de vrais titulaires, et qu'il convient de leur assurer un traitement particulier.
Il y a des évêques et archevêques qui ont donné leur démission, tels que ceux de Vienne, d'Embrun, de Grenoble. Il me parait juste de leur assurer un traitement convenable.
Je crois qu'il est facile de concilier les réclamations qui viennent de se faire jour, les intentions du comité ecclésiastique et les intentions de l'Assemblée elle-même, par un nouvel article qui serait ainsi conçu :
« Art. 13 (nouveau).Les évêques qui se sontancien-nement démis, les coadjuteurs des évêques, les évêques suffragants de Trêves et de Bâle, résidant en France, conserveront un traitement annuel de 10,000 livres, soit comme titulaires d'anciens bénéfices dont ils étaient pourvus, soit comme pensionnaires.
« Dans le cas oùilsne jouiraient pas actuellement de cette somme, soit en pension, soit en bénéfices, leur traitement demeurera tel qu'il est.
« Leur traitement comme coadjuteur cessera lorsqu'ils auront un titre effectif. »
(Cet article est mis aux voix et adopté.)
présente une nouvelle rédaction de l'art. 10. Elle est mise aux voix et adoptée ainsi qu'il suit :
« Art. 14 (ancien art. 10). Après le décès des titulaires des bénéfices supprimés, les coadjuteurs entreront en jouissance d'un traitement à raison du produit particulier du bénéfice, lequel traite-mentsera fixé à la moitié de ceuxdécrétés par les articles précédents.
« Dans le cas néanmoins où les coadjuteurs auraient d'ailleurs, à raison d'autres bénéfices ou pensions, un traitement actuel, égal à celui ci-dessus, ils n'auront plus rien à prétendre ; et s'il est inférieur, il sera augmenté jusqu' à concurrence de la moitié des traitements décrétés par les précédents articles.
, rapporteur. L'article 11 du projet imprimé est ainsi conçu:
« Art. 11. — Il pourra d'ailleurs être accordé, sur les demandes des départements, un traitement plus considérable que ceux fixés par lés articles précédents, aux titulaires à qui leur âge et leurs infirmités rendraient cette augmentation nécessaire, ainsi qu'à ceux qui en seraient jugés dignes, à cause des services qu'ils auraient rendus à l'Eglise ou à l'Etat. »
Lorsque le clergé formait un corps redoutable, il dictait des lois : voyez aujourd'hui quels moyens on met en usage pour le rétablir dans son ancienne splendeur 1 Je demande si son traitement n'est pas excessif ou porté à une juste valeur. Votre intention n'est pas sans doute de tripler la dépense du clergé. J'appuie donc la question préalable sur l'article proposé. — L'Assemblée est consultée sur la question préalable. — L'épreuve paraît douteuse.
Je réclame un instant votre attention. (Une grande partie de la gauche de l'Assemblée demande à aller aux voix. )
On ne voudra jamais croire qu'on ait interrompu l'opinant lorsqu'il réclamait en faveur des vieillards, (M. Démeunier est interrompu par des murmures).
Jedemande à parler contre la question préalable. Je vous rappelle d'abord que lorsque les Gaulois, nos ancêtres... (Nouveaux murmures.) Sans faire aucune citation, et dégagé de tout intérêt personnel, car je n'ai aucun bénéfice dans ma famille, je réclame pour les curés et les évêques ce que vous avez fait pour
les religieux et les militaires au-dessus de soixante-dix ans, ou bien il me paraît nécessaire de constater l'impossibilité où l'on est de le faire.
Je m'oppose à l'article proposé. Si on a des largesses à faire, je les réclame pour ciDq millions d'hommes qui n'ont pas de pain.
On demande la division de l'article proposé. — On réclame la question préalable sur la division. — L'Assemblée décide qu'il y a lieu à délibérer.
J'invoque la justice de l'Assemblée en faveur des ecclésiastiques qui ont vieilli dans le ministère, et qui, à la suite d'une longue carrière, n'ont recueilli de leurs longs travaux que des infirmités. Ils ont aussi pour eux le titre d'ecclésiastique et quelque chose de plus, l'indigence. Je demande la question préalable sur l'article proposé, et que l'Assemblée déclare qu'elle pourvoira à la subsistance des ecclésiastiques de soixante-dix ans qui n'ont ni pensions ni bénéfices.
Permettez à un jeune homme de réclamer en faveur de la vieillesse : c'est un bel exemple à donner que d'apprendre à la respecter. Je ne pense pas qu'il faille adopter l'article proposé, mais seulement améliorer, proportionnellement à leur âge, le sort de ceux dont le traitement sera au-dessous de 3,000 liv.
(On demande la priorité pour la motion de M. Robespierre.)
Plusieurs membres réclament de nouveau la question préalable sur tous les amendements.
La question préalable est mise aux voix et adoptée.
et d'autres membres renouvellent la demande de la question préalable sur l'article 11 proposé par le comité.
L'Assemblée, consultée, rejette l'article 11 du projet imprimé.
, curé de Saint-Clément, dont les pouvoirs ont été vérifiés et reconnus réguliers, est admis à remplacer M. l'abbé Bastien, député de Toul et Vie, démissionnaire.
M. Chatrian se présente à la tribune et prête le serment civique.
, secrétaire, lit deux notes adressées à M. le président, par M. le garde des sceaux, relatives aux décrets sanctionnés ou acceptés par le roi.
Expéditions en parchemin pour être déposées dans les Archives de VAssemblée nationale :
« 1° D'une proclamation sur le décret du 23 avril, concernant la coupe du quart de réserve des bois de l'abbaye de Saint-Ouen de Rouen ;
« 2° D'une proclamation sur le décret du 9 mai, relatif à la signature des assignats ;
« 3° D'une proclamation sur ie décret du 20 du même mois, portant qu'à l'avenir il ne sera reçu dans les galères de France aucune personne condamnée par des jugements étrangers;
« 4° De lettres patentes sur le décret du 14 mai, pour la vente de quatre cents millions de domaines nationaux;
« 5° De lettres patentes sur le décret du 30, concernant les mendiants ;
« 6° De lettres patentes sur le décret du 31, relatif à l'instruction pour la vente des quatre cents millions de domaines nationaux;
« 7° D'une proclamation sur le décret du premier de ce mois, concernant la forme, la valeur et le nombre des assignats ;
« 8° De lettres patentes sur le décret du 5, qui autorise les officiers municipaux de Bessens, district de Castelsarrazin, à imposer la somme de 800 livres en deux ou quatre ans;
« 9° De lettres patentes sur le décret du même jour, qui autorise les communautés de Saint-Patrice, Ingrande, Saint-Michel et des Essarts, à imposer la somme de 5,000 liv. entre elles, au marc la livre de leur brevet de taille ;
« 10° De lettres patentes sur le décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de la ville d'Issoudun à faire un emprunt de 24,000 liv.;
« 11° De lettres patentes sur le décret du même jour, qui autorise les officiera municipaux de là ville ae Saint-Brieuc à imposer la somme de 25,000 liv. en quatre ans, sur tous les contribuables qui payent au-dessus de 4 livres de capitation;
« 12° De lettres patentes sur le décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de la ville de Grenoble à imposer la Somme de 130,000 livres dans l'espace de 10 années, au marc la livre de toutes impositions;
« 13° De lettres patentes sur le décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de Brioude, département de Haute-Loire, à faire un emprunt de è,000 livres ;
«14° De lettres patentes sur le décret du 6, qui renvoie provisoirement aux assemblées de département la connaissance des contestations et difficultés qui pourraient s'élever en matière d'impôt direct ;
« 15° De lettres patentes sur le décret du même jour, portant que le territoire- que renferme la ligne de l'enceinte des murs de Paris sera soumis aux droits d'entrée;
« 16° De lettres patentes sur le décret du 8, qui commet provisoirement la municipalité de la ville de Paris à l'exercice de toutes les fonctions attribuées aux administrations de département et de district, ou à leur directoire.
« 17° D'une proclamation sur le décret du même jour, qui déclare nulle l'élection de municipalité de Schelestadt, faite le 27 janvier et jours suivants; ordonne qu'il sera procédé à la formation d'une nouvelle municipalité, et déclare l'emprisonnement des sieurs Ambruster et Furchs illégal et vexatoire;
« 18° D'une proclamation sur le décret du même jour, portant que les anciens officiers municipaux de Saint-Jean-de-Luz convoqueront l'assemblée des citoyens actifs de cette ville, pour la nomination d'une nouvelle municipalité : et que les armes enlevées de l'hôtel de ville y seront incessamment restituées ;
« 19° De lettres patentes sur le décret du 10, pour autoriser la municipalité de Paris à faire évacuer le couvent des Récollets du faubourg Saint-Laurent, et celui des Dominicains de la rue Saint-Jacques, pour être provisoirement employés à servir, soit de dépôts aux mendiants infirmes, soit d'ateliers de charité ;
« 20° D'une proclamation sur le décret des 8 et 9, relatif à la fédération générale des gardes nationales et des troupes du royaume ;
« 21° De lettres patentes sur le décret du 12, qui autorise le sieur Guyard à remplir les fonctions de trésorier de la province de Bretagne,
sous le cautionnement des sieurs Beaugeard et le Douarin, fils et gendre ;
« 22° D'une proclamation sur le décret du 14, qui autorise les électeurs du département du
Haut-Rhin à continuer leurs opérations, nonobstant le décret du 1er de ce mois, relatif aux assemblées primaires de Golmar;
« 23° De lettres patentes sur le décret du 15, portant que le droit du demi-doublement du pied fourchu, établi en faveur de l'hôpital général de Rouen, ainsi que tous autres droits appartenant à cet hôpital continueront à être perçus provisoirement ;
« 24° D'une proclamation sur le décret du même jour, portant que le siège de l'administration du septième district du département de Saône-et-Loire, demeure fixé en la ville de Marcigny ;
« 25" D'une proclamation sur le décret du 17, concernant le maire de la ville de Perpignan ;
« 26° D'une proclamation sur le décret du même jour, qui règle de cpielle manière certains corps seront représentés à la fédération patriotique;
« 27° D'une proclamation sur le décret du 18, concernant M. de Mirabeau le jeune ;
« 28* Et enfin, d'une proclamation sur le décret du 21, pour continuer le pouvoir des commissaires du roi préposés à l'établissement des assemblées administratives dans le département du Gard, les charger expressément du maintien de la tranquillité publique dans la ville de Nîmes et les environs, et, en conséquence, remettre en leurs mains la disposition des forces militaires.
Paris, le
« Le roi a donné sa sanction ou son acceptation:
« 1° Au décret de l'Assemblée nationale des 3, 5, 6, 7,10,14, 15,19 et 21 mai sur l'organisation de la municipalité de Paris;
« 2» Au décret du 16 de ce mois, qui fixe définitivement à Vervins le chef-lieu du district de Guise ; confirme la délibération prise en ladite ville le 7 juin; déclare nulle les délibérations subséquentes, et ordonne que les électeurs du district se retireront dans la ville de Marie, à l'effet d'y délibérer sur la réunion ou le partage des autres établissements;
« 3° Au décret du 17, pour mander à la barre de l'Assemblée différents particuliers de Nîmes et d'Uzès, qui ont signé des délibérations contenant des principes dangereux et propres à exciter des troubles ; et pour qu'il soit informé de ceux arrivés dans la villë de Nîmes ;
« 4° Décret du 18, concernant les dîmes ;
« 5° Au décret du 19, portant que la Caisse d'escompte remettra au premier ^ministre des finances la somme de trente millions en ses billets ;
« 6° Au décret du 20, qui autorise les villes, bourgs, villages et paroisses, auxquels les ci-devant seigneurs ont donné leurs noms de famille, à reprendre leurs noms anciens ;
« 7° Au décret du même jour, portant que les quatre figures enchaînées au pied de la statue de Louis XIV, à la place des Victoires, seront enlevées;
« 8° Au décret du 21, pour continuer les pouvoirs aux commissaires de Sa Majesté, préposés à l'établissement des assemblées administratives dans le département du Gard; les charger expressément du maintien de la tranquillité publique dans la ville de Nîmes et les environs, et remettre en conséquence entre leurs mains la disposition des forces militaires;
« 9° Au décret du même jour, portant établissement d'une cour supérieure provisoire à Dijon;
« 10° Au décret du même jour, portant que les habitants de la vallée d'Aram continueront provisoirement de s'approvisionner dans le Comminges de grains et autres denrées ;
« 11° Au décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de la ville de Bourges à faire un emprunt de 30,000 livres ;
« 12° Au décret du même jour, portant que les bénéficiers, corps et communautés étrangers continueront de jouir la présente année, comme par le passé, des biens et dîmes qu'ils possèdent en France ; et qu'à l'égard des dîmes et biens possédés dans l'étranger par les bénéficiers et communautés français, ceux qui sont en usage de les faire valoir par eux-mêmes continueront de les faire exploiter cette année, à charge de rendre compte;
« 13° Au décret du 22, portant que la municipalité formée à Montmartre, par les habitants qui se trouvent aujourd'hui du ressort de la municipalité de Paris, sera regardée comme non-avenue, et que ces citoyens feront désormais partie de la commune de capitale ;
« 14° Au décret du même jour, portant que la ville de Ghaumont demeurera définitivement le siège de l'administration du département de la Haute-Marne ;
« 15° Au décret du même jour, portant que la ville d'Angers demeurera définitivement le siège de l'administration du département de Maine-et-Loire;
« 16° Au décret du 23, qui autorise les administrateurs, ou le directoire du district de Nogent le-Rotrou, à rendre exécutoires les rôles d'imposition de la présente année ;
« 17° Au décret du 24, portant que les commissaires du roi pour l'établissement des corps administratifs du département et des districts ae la Charente-Inférieure sont autorisés à ordonner les convocations prescrites, relativement aux députés des gardes nationales, qui doivent se rendre à la confédération générale qui aura lieu le 14 juillet ;
« 18° Au décret du même jour, portant que nul corps administratif ne pourra employer dans l'intitulé et dans le dispositif de ses délibérations l'expression de décret, et qu'il ne pourra également prononcer qu'il met les personnes et les biens de tels ou tels particuliers sous la sauvegarde de la loi et du département;
« 19° Au décret du 19, qui abolit la noblesse héréditaire, et porte que les titres de prince, de duc, de comte, marquis, vicomte, vidame, baron, chevalier et autres titres semblables, ne seront pris par qui que ce soit, ni donnés à personne;
«20° Au décret du 25, qui autorise le comité de l'Assemblée nationale, chargé de l'aliénation dés domainés nationaux, à continuer de traiter avec les commissaires nommés par les soixante sections de Paris, pour la vente desdits domaines ;
« 21° Au décret du 26, qui déclare que les commissaires nommés par le roi pour la formation des assemblées administratives du département du Nord sont chargés de tenir la main, lors des assemblées électorales, à l'exécution des décrets qui les concernent ;
« 22° Au décret du même jour, qui déclare que les députés à l'Assemblée^ nationale peuvent, dans le cas de flagrant délit, être arrêtés
conformément aux ordonnances, et en regardant comme non avenu le décret prononcé contre M. de Lautrec, lui enjoint de venir rendre compte de sa conduite ;
«23° Et enfin, au décret du même iour, interprétatif des décrets concernant les prés soumis à ia vaine pâture. »
Signé : f Champion oe Gicé, Archevêque de Bordeaux
Paris, le
, député de Caux, demande l'autorisation de s'absenter pendant un mois.
, député de Saint-Flour, fait une demande semblable, également pour un mois.
Ces congés sont accordés.
Plusieurs membres proposent de faire ce soir une séance extraordinaire pour s'occuper de l'affaire du commerce au delà du Cap de Bonne-Espérance.
Cette motion est adoptée.
Sur la proposition de M. Le Chapelier, l'Assemblée décide que son comité de Constitution lui présentera des articles tendant à prévenir les désordres qui pourraient survenir tant par rapport aux livrées que par rapport aux armoiries.
La séance est levée à trois heures.
Séance du
La séance est ouverte à six heures du soir.
, secrétaire, donne lecture des adresses suivantes :
Adresse de la communauté de Palladru, qui offre à l'État, en excédant de son don patriotique, la somme de 457 liv. 17 sols.
Adresses des officiers municipaux et habitants de la ville de Montargis et de celle d'Auxerre, qui s'élèvent avec force contre la déclaration d'une partie de l'Assemblée.
Adresse de la municipalité de Grignan, qui annonce que la contribution patriotique des habitants s'élève à la somme de 8,000 livres, quoique presque tous soient indigents : elle se soumet -d'acquérir les biens possédés par le chapitre collégial de cette ville, dans son territoire.
Adresse des communautés de Sainte-Gauburge-sur-Bille et de Viroflay, près Versailles. Cette dernière demande la permission de faire un emprunt de 600 livres pour subvenir à de pressants besoins.
Adresses des religieux cordeliers des couvents de Doullens, Mailly, Roye et Péronne, qui
déclarent que, malgré les efforts des ennemis du bien public, ils adhèrent de tout leur cœur
à tous les décrets de l'Assemblée nationale, et notamment à celui qui, ôtant au clergé ses
Adresses des gardes nationales de la ville de Fécainp et des citoyens de la ville d'Haguenau, nouvellement incorporés dans la garde nationale de cette ville, qui ont solennellement prêté le serment civique.
Adresses des assemblées primaires du canton de Bussière, département de la Dordogne, de la seconde section du canton de Miradoux.
Adresses des assemblées électorales du district de la campagne de Lyon, du district de Dinan, du district de Josselin, du district de Bagnêres et du district de Strasbourg.
Adresses des électeurs ou département de la Gironde et du département du Bas-Rbin.
Toutes ces assemblées adhèrent, avec une respectueuse reconnaissance, aux décrets de l'Assemblée nationale, et la conjurent de ne pas se séparer avant d'avoir terminé le grand ouvrage de la Constitution qu'elle a si glorieusement commencé.
Adresse de l'armée confédérée du Rhin, assemblée à Strasbourg le 22 du présent mois de juin, et formée par les gardes nationales de plusieurs départements, unies fraternellement aux troupes de ligne de la garnison de cette ville. « C'est, « disent-elles, sur l'autel de la patrie, au milieu « d'un peuple immense, professant différents « cultes, mais réuni pour la liberté, que nous « avons juré obéissance pour tous les décrets « de l'Assemblée nationale, et haine implacable « pour les traîtres qui chercheraient à tromper « le peuple et à le soulever contre ces mêmes « décrets acceptés ou sanctionnés par le roi. »
Adresse de 400 citoyennes de la même ville, qui, le jour de la fédération énoncée ci-dessus, prêtèrent avec transport, sur l'autel de la patrie, le serment d'instruire leurs enfants à chérir et maintenir de tout leur pouvoir la Constitution.
Adresse de la ville de Crécy en Brie ; elle fait soumission d'acquérir des biens nationaux pour la somme de deux millions.
Acte patriotique des jeunes citoyens de Saint-Marcelhn, âgés depuis 10 jusqu'à 14 ans, constitués en une troupe séparée de gardes nationales, de l'agrément de leurs parents, et avec l'autorisation de la municipalité, qui ont fait bénir un drapeau aux couleurs de la nation, portant pour devise : La valeur n'attend pas le nombre des années, et ont prononcé le serment suivant : « Nous jurons, en présence de l'Être suprême, « d'être fidèles à la nation, à la loi et au roi, « d'écouter avec respect et docilité les instruc-« tions qui nous expliqueront la Constitution du « royaume, et que nous ne cesserons d'étudier « et mettre en pratique comme les premiers de-« voirs de l'homme et du citoyen. »
Cette cérémonie s'est faite dans ï'église des RR. PP. Carmes. Le P. Vallier, religieux et préfet du collège, a fait à ces jeunes élèves une exhortation touchante, dont l'objet principal est de faire chérir et respecter une sage Constitution qui promet incessamment la plus heureuse régénération de l'Empire français.
La ville de Saint-Marcellin, profondément pénétrée des principes de la Constitution, voudrait pouvoir en électriser tous ses citoyens, la leur faire sucer avec le lait dans la plus tendre enfance.
Délibération de la municipalité de cette ville, portant soumission d'acheter tous les biens na-
tionaux enclavés dans son territoire -et dans celui de quarante-huit autres communes exprimées dans sa délibération, déposée au comité de J'aliénation des biens nationaux, le 25 juin 1790, en quoi que ces biens puissent consister, même les dépendances des cnefs-lieux de ces biens, en quelque lieu qu'elles soient situées ; le tout aux termes des décrets de l'Assemblée nationale, avec promesse de faire une soumission détaillée et spécifiée de chaque objet, lorsqu'on aura connaissance que la vente en sera ordonnée.
La ville de Saint-Marcellin ne perdra aucune occasion de témoigner son dévouement à l'Assemblée nationale.
Adresse de la municipalité de Saint-Martin-d'Amblois, qui fait sa soumission d'acheter tous les biens nationaux situés dans son territoire.
Adresse d'adhésion de la nouvelle municipalité et du conseil général de la commune de Saint-Laurent-de-la-Salanque, au département des Pyrénées-Orientales.
Cette commune, composée de pauvres pêcheurs, demande la suppression d'un droit sur le poisson que ses habitants portent dans la ville de Perpignan.
Adresse de la ville de Bléneau, chef-lieu de canton du district de Saint-Fargeau, département de l'Yonne, dans laquelle cette municipalité exprime sa reconnaissance et son admiration pour les décrets de l'Assemblée nationale ; elle déclare qu'elle a voté la construction d'un pont auquel elle donne le nom de Pont de la Liberté. Elle supplie l'Assemblée de vouloir bien agréer que ce pont soit construit sous ses auspices, et que la première pierre soit posée en son nom, avec une inscription, laquelle sera réitérée sur une pyramide placée au milieu, et destinée à recevoir l'affiche des décrets nationaux sanctionnés par le roi. L'Assemblée a applaudi au zèle de la municipalité de Bléneau, et a ordonné qu'il soit fait une mention honorable de son adresse dans le procès-verbal.
Adresse et délibération de la municipalité d'O-mizy, district de Saint-Quentin, qui fait don de l'imposition des ci-devant privilégiés pour les six derniers mois 1789, montant à la somme de 348 livres 18 sols.
Un membre a donné lecture d'une adresse des 'officiers de la garde nationale de la ville de Bayonne ; l'Assemblée a témoigné sa satisfaction des sentiments patriotiques qu'elle renferme, et a ordonné l'insertion de la phrase suivante dans le procès-verbal.
« A l'époque horrible où la France, enivrée de « fanatisme, déchira son propre sein, les Bayon-« nais s'illustrèrent par le refus d'obéir à l'ordre « de tremper leurs mains dans le sang de leurs « concitoyens ; nous ne démeptirons point les « sentiments de nos ancêtres. »
Le distinct des Cordeliers envoie un extrait du registre de ses délibérations pour demander que rien ne soit changé dans les districts de Paris jusqu'au 30 juillet (1).
Cette délibération est ainsi conçue :
Dans une assemblée du district de ce jour, un citoyen a remis sur le bureau une
proclamation imprimée au nom du maire et de la municipalité provisoire de Paris, en date du
27 juin. L'objet de cette pièce est de contraindre tous les citoyens actifs, aux termes, y
est-il dit, des décrets de erjuillet,
pour se former en sections et procéder, suivant le nouveau mode, à tout ce qui concerne la
création de la municipalité future, de manière à avoir consommé tous les préliminaires avant
le 4 juillet, et à pouvoir commencer les élections le 5 préfixe, dans toutes ies sections, à
sept heures précises du matin.
L'assemblée, sans déroger au respect profond que lui inspire tout ce qui lui est notifié au nom de l'Assemblée nationale, sans aller contre la soumission inaltérable qu'elle a juré à tous les décrets qui en émanent, n'a pu s'empêcher cependant d'être vivement affectée, effrayée même de cette précipitation. Tout concourt à justifier sa surprise et ses inquiétudes.
La nomination des représentants de la commune, la formation d'une municipalité dans cette vaste capitale, est devenue, surtout depuis l'immensité de pouvoir attribuée à ce corps, une opération bien importante. Le droit d'y concourir est un des plus précieux privilèges de chaque citoyen. La vérification des titres qui donnent ce droit ne peut être exécutée avec trop de ménagement, et les choix qui en constateront l'exercice ne peuvent être trop réfléchis. Gomment procéder à l'une ou aux autres, avec la maturité nécessaire, dans l'intervalle presque ridiculementcourt où l'on entasse tout à la fois un million d'hommes et un million d'opérations ?
Et dans quelles circonstances? Quand, d'une part, tous les esprits sont occupés et même tous les bras ; quand tous les cœurs sont remplis de l'approche d'une fête mémorable, que l'on peut regarder comme la base et la sanction de toutes les espèces de droit; quand il n'y a point de famille qui ne s'agite pour recevoir des amis, des hôtes, des frères que la liberté réunit dans la patrie commune; quand, d'un côté, la foule immense qui va s'y accumuler exige une surveillance plus suivie que jamais, et des mains familiarisées avec l'habitude des détails qui la rendent utile; c'est alors qu'on nous invite tout à la fois à nous livrer aux scrutins assujettissants qui doivent nous donner des chefs, des représentants, et à changer une administration qui, sans doute, ne doit pas être éternelle, mais dont la prolongation n'a aucune sorte d'inconvénient, ou plutôt devient indispensable.
On ne peut guère douter, si le plan consigné dans la proclamation a lieu, que la première idée qui frappera tous les citoyens éclairés ne soit celle de la nécessité de cette continuation. Serait-ce donc là le but secret des titulaires actuels, qui ne dissimulent, d'ailleurs, ni leurs prétentions, ni leurs espérances? Préféreraient-ils de surprendre, d'arracher ainsi les suffrages de leurs concitoyens par la vue du danger qu'-il y aurait à leur donner des successeurs, plutôt que de les devoir à un choix volontaire, à une élection réfléchie et non commandée par les circonstances?
L'assemblée convaincue, par les raisons ci-dessus déduites et d'autres encore que le temps ne permet pas de développer, que la continuation des officiers municipaux actuels est indispensable, autant que le travail nécessaire pour leur nommer des successeurs est impossible, croit donc devoir :
1° Inviter tous les districts à se réunir avec ellè pour supplier l'Assemblée nationale de vouloir bien, par une interprétation particulière en faveur de la commune de Paris, suspendre, en tant que besoin serait, l'exécution de son décret du 22 juin,
et statuer qu'il ne sera rien innové jusqu'au 30 juillet prochain, dans l'état actuel, tant de la municipalité provisoire de Paris que dans celui de ses districts ; ce qui sera motivé surtout par l'approche de la fête du 14 juillet, par le danger de rien chaDger dans l'administration de la police, dans celle des gardes, des corps de garde, des divisions de la milice nationale;
2° Elle croit devoir engager les cinquante-neuf autres districts, non seulement à adhérer au présent arrêté, mais à suspendre, jusqu'à la décision de l'Assemblée nationale, toute espèce de démarche de leur part, qui pourrait tendre à altérer leur institution actuelle et à compromettre l'union que les conjonctures rendent indispensable pour la sûreté de Paris, pour celle de l'Assemblée nationale, et, par conséquent, en quelque sorte, de la France entière, qui va sous peu de jours être confiée à leur sauvegarde. Qui sera plus propre à maintenir le bon ordre d'une municipalité neuve, désunie, du moins non encore unie, timide par le défaut d'habitude, aidée ou plutôt embarrassée par quarante-huit sections également inhabiles par la même raison, également réduites en tous sens à leur apprentissage, ou d'une administration qui n'a pas peut-être mérité en tout l'approbation publique, mais qui a du moins l'usage et l'exercice habituel des moyens capables de la justifier: soutenue par soixante corporations dont tous les membres se connaissent; qui ont toutes leurs divisions formées, leurs postes assignés, leur régime consolidé par une année d'expérience et de succès?
Enfin, le vœu de l'assemblée est qu'il n'y ait aucune innovation dans cette capitale jusqu'au 30 juillet ; la fête du 14 n'est-elle pas seule une nouveauté suffisante pour absorber toutes les attentions, comme pour réunir tous les suffrages ?
Signé : Danton, président. Paré, vice-président. D'Eglantine, Pierre-J. Duplain, Laforgue, secrétaires.
, député du département du Gard, représente à l'Assemblée que, dans le nombre des pièces relatives aux troubles survenus dans la ville de Nîmes, et qui ont été lues dans la séance de samedi au soir, il se trouve une lettre du président du corps électoral, écrite par ordre exprès de cette assemblée, et qui, par la nature et l'importance des demandes qu'elle contient, paraît devoir mériter l'attention de l'Assemblée et contribuer efficacement au maintien de l'ordre et de la paix dans la ville de Nîmes.
Il observe qu'après avoir rendu, dans cette lettre, à M. Ghabaud, lieutenant-colonel au corps royal du génie ; à M. d'Aubry, capitaine au corps royal d'artillerie; à M. de Jonquières, capitaine au régiment de Champagne, le juste tribut d'éloges dû à leur expérience dans l'art militaire, et surtout à leur dévouement généreux pour la défense des citoyens patriotes de Nîmes, le corps électoral a expressément chargé son président d'écrire à l'Assemblée nationale, pour la supplier de vouloir solliciter auprès du roi un congé illimité pour MM. Aubry et de Jonquières. .Le corps électoral exprime en faveur de M. Chabaud un vœu plus particulier ; et rappelant quarante-quatre ans de service de cet officier dans l'ancienne province de Languedoc, il désirait que le roi voulût le conserver et le fixer dans la ville de Nîmes, où son séjour et sa personne deviennent absolu-
1 ment nécessaires pour y maintenir la paix et la concorde.
La même lettre offre le témoignage le plus authentique des services signalés rendus par le régiment de Guyenne ; elle annonce que le corps électoral, pour reconnaître le patriotisme distingué de ces soldats-citoyens, avait décerné une mé-dailleàdeux d'entre eux, croyant par là satisfaire à la justice et à ia reconnaissance qu'il doit à tout le régiment.
Le même député observe encore que les électeurs du département, jaloux de marcher sur les traces des représentants de la nation, et se rappelant leurs principes et leur conduite dans la mémorable journée du 20 juin de l'année dernière, ont regardé comme un devoir sacré pour eux de ne pas discontinuer leurs séances, malgré les troubles et les périls dont ils étaient environnés ; et qu'ils avaient fait le serment, auquel ils ont été fidèles, de ne pas se séparer qu'ils n'eussent terminé toutes leurs opérations.
, après cet exposé, propose le décret suivant, qui est adopté par l'Assemblée :
« L'Assemblée nationale décrète que la lettre de M. Vigier-Sarrazin, président de l'assemblée électorale du département du Gard pendant la tenue de ses séances, en date du 19 du présent mois, sera insérée dans le procès-verbal; que M. le président sera chargé de la mettre inçessament sous les yeux du roi, et de supplier Sa Majesté de prendre en considération le vœu qu'elle exprime en faveur de M. Ghabaud, lieutenant-colonel au corps royal du génie, en le fixant, si elle le juge à propos, dans la ville de Nîmes, et en accordant un congé illimité à M. d'Aubry, capitaine au corps royal d'artillerie, et à M. de Jonquières, capitaine au régiment de Champagne.
« L'Assemblée nationale décrète que son président sera chargé d'écrire à M. Vigier, président du corps électoral pendant la tenue de ses séances, pour lui témoigner la satisfaction de l'Assemblée sur la fermeté qu'ont montrée les électeurs, en ne se séparant point pendant tout le temps que les troubles ont régné à Nîmes, et enjjcoutribuant de tout leur pouvoir auâ rétablissement de la paix dans cette ville. »
Suit la teneur de la lettre de M. Vigier-Sarrazin, président de l'assemblée électorale :
« Monsieur le Président,
« L'assemblée électorale du département du Gard aconsomméses élections; elle l'a fait avec ce calme que lui inspirait sa dignité. Quoique menacée, insultée, excédée dans la personUede plusieurs de ses électeurs ; quoique environnée elle-même des horreurs des combats, elle a toujours continué ses séances ; elle l'a même fait tout un jour sans interruption; et fière de pouvoir imiter l'auguste Assemblée que vous présidez, elle a donné à ses voisins l'exemple de la fermeté qu'elle avait reçu des représentants de la nation. J'ai l'honneur de mettre sous vos yeux le récit fidèle des événements qui ont affligé cette ville pendant quelques jours. C'est d'après eux et pour en prévenir de nouveaux, que l'assemblée électorale a concouru à la formation d'un état-major qui devait diriger l'armée patriote venue au secours des bons citoyens.
« M. d'Aubry, capitaine d'artillerie, a été nommé général, et en même temps colonel de la légion nîmoise. Ce brave officier, par son expérience dans l'art militaire, et surtout par son dévouement généreux à la défense de la ville, a réuni
tous les suffrages. Nous avons besoin de ses services, et l'assemblée électorale m'a expressément chargé, dans son procès-verbal, de vous écrire, Monsieur le Président, pour intéresser l'Assemblée nationale en sa faveur, et obtenir, pour lui, du roi, un congé illimité. Le procès-verbal manifeste le même vœu de l'assemblée électorale pour M. Chabaud de la Tour, et M. de Jonquières du Saint-Esprit : l'un et l'autre ont été nommés administrateurs du département. Le premier, lieutenant-colonel de génie, actuellement en exercice dans l'ancienne province du Languedoc, offre à nos yeux, non seulement un officier distingué par ses talents militaires, et par un service continu de quarante-quatre ans, mais encore un administrateur éclairé, et d'une utilité reconnue pour ce département : il est essentiel, dans la circonstance présente, qu'il soit conservé et fixé dans cette ville. Le second, capitaine au régiment de Champagne, en fixant notre attention, a nécessité l'intercession de l'assemblée électorale pour obtenir un congé illimité. Je m'acquitte d'autant plus volontiers, Monsieur le Président, de ce devoir qui m'a été imposé, qu'il est flatteur pour moi de pouvoir contribuer à conserver à cette ville et au département de bons citoyens, distingués depuis longtemps par leurs vertïis et leur patriotisme. En parlant de patriotisme, je ne puis me dispenser, Monsieur le Président, de présenter l'Assemblée nationale celui du régiment de Guyenne; il a éclaté, dans cette occasion, de la manière la plus distinguée et la plus satisfaisante pour les amis de la Constitution. Le corps électoral, en décernant une médaille à deux soldats de ce régiment, a cru satisfaire tout à la fois à sa justice et à sa reconnaissance. Les circonstances malheureuses me forcent encore de retarder l'envoi d'un extrait du procès-verbal de l'assemblée ; je m'acquitterai au premier jour de ce nouveau devoir, qui m'est imposé par les décrets. »
Je suis avec respect,
Monsieur le Président,
Votre très humble et très obéissant serviteur,
Signé : Vigier-Sarrazïn, président, de l'assemblée électorale.
Nimes, le
Adresse de la ville de Dieppe, ainsi conçue (1): Messieurs,
La municipalité de Dieppe a l'honneur de dénoncer à votre auguste Assemblée l'atroce et mensongère inculpation faite contre elle, dans un imprimé qui circule sous le titre de Nouvelle déclaration et pétition des catholiques de Nîmes, en date du premier juin.
Sur les principes de l'heureuse Révolution, la profession de foi de la fidèle commune de Dieppe est trop pure, est trop constante, est trop connue, pour devenir jamais ambiguë ou chancelante.
Si notre inviolable attachement à la nation, à la loi, au roi, à la religion, a pu nous laisser quelques désirs, nous les trouvons comblés de jour en jour, Messieurs, au delà de toute espérance, par vos immenses et sublimes travaux.
Attachés à la nation, que vous rendez une famille de frères, nous partageons les transports de l'éternelle reconnaissance qu'elle vous doit à chaque heure, pour toutes vos sollicitudes qui lui sont autant de bienfaits signalés.
Attachés à la loi, nous embrassons dans vos
Attachés au modèle des rois, qui ne fut jamais plus roi qu'en devenant roi libre, roi citoyen, et roi assez généraux pour briser ce sceptre de fer sous lequel le souverain n'était lui-même que le premier esclave de son royaume, notre amour envers la personne sacrée, cet amour déjà gravé dans nos cœurs par le bon Henri, s'enflamme plus que jamais par l'impression du concours de ses vœux, réunis aux vôtres pour la prospérité de la France.
Attachés fermement à la religion catholique, apostolique et romaine, notre vénération pour le culte divin, redouble à la vue de la trop nécessaire réforme que vous opérez, Messieurs, dans cette opulence tyrannique, scandaleuse et insultante, dans ce despotisme clérical, dans cette monstrueuse dépravation des mœurs, et dans ce gouffre de pieux abus dont l'hypocrisie, aujourd'hui plus que jamais, couvre d'opprobre l'Evangile et l'autel.
De là, Messieurs, la juste confiance et l'enthousiasme avec lesquels nous n'avons cessé d'aimer dans tous les temps à vous réitérer l'expression de notre ardente reconnaissance et de notre respectueuse admiration.
Sur la fin d'avril dernier, les accès convulsifs de l'aristocratie expirante tentaient le soulèvement de nos campagnes du pays de Caux.
La province entière se trouvait par là menacée d'une insurrection générale.
La circulation des grains arbitrairement interceptée; nos halles rendues désertes; les laboureurs à la discrétion d'un peuple aveugle ; la disette aggravée par de sourdes insinuations : tel était l'excès affreux de nos maux.
Le remède ne devait pas sans doute se trouver dans l'inaction du pouvoir exécutif.
En reconnaissant vous êtes redevables, dès lors, de l'avoir constitué, Messieurs, et, de la plus heureuse constitution, le premier sentiment de notre gratitude devait nous porter à vous supplier d'en assurer la plus prompte action, pour empêcher que livresse de notre liberté nouvelle ne servît les projets sinistres des ennemis de la Révolution.
A peine les cri3 de notre douleur ont-ils pénétré le sanctuaire de votre sénat auguste, que nous avons été secourus ; la consternation a fait place au repos et à notre attendrissement.
Aussi, n'y a-t—il que ces implacables ennemis du salut de la France qui, sous le masque de notre religion qu'ils profanent, puissent prendre prétexte de nos plus purs hommages envers vous, Messieurs, pour, en associant le vœu formé par la ville de Dieppe sur l'active exécution de vos décrets, le confondre avec l'horrible système que leur dicte leur fanatisme incendiaire.
C'est ainsi qu'ils cherchent à attiser le feu de la révolte.
Heureusement que les adresses successives que nous avons eu l'honneur de vous faire agréer ; que les procès-verbaux de votre illustre Assemblée qui attestent nos vœux; que l'esprit de notre administration, nourri de vos maximes, sontpour notre civisme un insurmontable rempart!
Ce ne serait rien ajouter aux preuves de nos sentiments, que de les faire valoir par l'adhésion exprimée par le conseil général de notre commune dès le trois mai dernier, répétée dans notre adresse du cinq de ce mois, et notre soumission d'acquérir, en conséquence, des biens nationaux, jusqu'à concurrence d'un capital de cinq millions.
C'est donc devant votre auguste Assemblée, c'est à la face de l'univers, que nous prenons acte de notre plus haute improbation, et de notre protestation la plus formelle contre les délibérations, déclarations ou pétitions des soi-disant catholiques de Nîmes.
Improbation et protestation fondées sur la fausse, sur l'insidieuse association ou citation de nos sentiments, puisque l'esprit et la lettre en ont été dénaturés.
Improbation et protestation fondées sur ce que de pareilles délibérations déclarations, ou pétitions, sont calomnieuses, tendent à la révolte et sont attentatoires au respect dû aux solennels décrets sanctionnés ou acceptés parle roi, ainsi qu'aux vues personnelles et aux volontés expresses que le monarque ne cesse de manifester à son bon peuple.
Nous vous les dénonçons, ces actes, Messieurs, comme autant de libelles et d'actes parjures.
En même temps que nous vous supplions, Messieurs, de rendre justice au patriotisme de nos concitoyens en accueillant cette adresse, nous en faisons passer un double à la municipalité de Nîmes, pour qu'elle n'en ignore, et pour nous valoir tout ce que de droit à son égard.
Forts de notre conscience, encouragés par vos généreux travaux, il ne nous reste donc de vœux à former que celui de sacrifier jusqu'à la dernière goutte de notre sang pour leur progrès, et pour assurer avec vous le bonheur de notre patrie.
Puissions-nous à ce prix être honorés d'une bienveillance qui nous est acquise, si vous l'accordez à notre improbation ouverte de tous principes anticonstitutionels, à notre très inviolable attachement, et à notre très profond respect.
Signé : les officiers municipaux de la ville de Dieppe; et Rolland, procureur de la commune.
(L'Assemblée nationale applaudit à cette adresse et en ordonne l'impression.)
Adresse des représentants des Beaux-Arts, ainsi conçue (1) :
Messieurs, ce n'était pas assez pour vous d'avoir rapproché l'homme de l'homme, et proscrit toutes les distinctions qui ne tiennent ni aux talents ni aux vertus personnelles ; vous avez voulu, dans la même séance, voir cesser l'injure faite aux nations.
Quelques artistes de cette capitale, membres de l'académie de peinture, maintenant réunis pour un sujet intéressant, qu'ils auront bientôt l'honneur de vous soumettre, ont partagé l'admiration générale pour les fameux décrets du dix-neuf de ce mois ; mais ils ont tremblé pour les chefs-d'œuvre de l'art, sortis de la main de Desjardins.
Ils prennent aujourd'hui la liberté de vous proposer, Messieurs, un moyen de conserver les quatre figures dépendant du monument de la place des Victoires, et de rendre éternelle et publique la réparation que vous faites aux peuples que représentent ces statues.
Ce serait de faire construire, dans un endroit remarquable de la ville, un socle carré,
autour duquel on placerait les figures, mais sans chaînes, ni aucun des accessoires
flétrissants qui les accompagnent. Le socle porterait deux tables d'airain ; sur l'une,
serait gravé votre décret mémo-
Si nous étions assez heureux pour que celte auguste Assemblée se rendît à nos vœux, les sculpteurs qui présentent cette adresse avec nous offrent leurs talents pour diriger gratuitement l'ouvrage.
Nous sommes avec un profond respect, Messieurs,
Vos très humbles et très obéissants serviteurs,
David, Restout, Jullien, Robin, Echard, Mas- SARD, BEOAVÀLLET, BOUlLLARD, HENRIQUEZ, WUITT le fils, Monnot, Giroust, Huet, Pasquier, secrétaire.
répond : Les représentants de la nation accueillent avec un vif intérêt les représentants des Beaux-Arts.
La liberté prête aux Beaux-Arts une nouvelle flamme ; mais ceux-ci réchauffent aussi le génie de la liberté. C'est à des sujets nationaux que vous consacrerez vos talents ; par là vous saurez expier les antiques erreurs de la flatterie.
Messieurs, les monuments de Louis XIV offrent en tout genre de parfaits modèles; mais vous les égalerez; et, dans l'histoire des Beaux-Arts, le siècle d'une grande nation ne le cédera pas au siècle d'un grand roh
Un membre demande et obtient la parole sur la pétition de ces artistes, et fait la motion qu'on enlève seulement les chaînes et les attributs de l'esclavage dont sont chargées les quatre figures ui sont aux pieds du monument de la place des ictoires, et que, par ce moyen, on laisse en place les quatre figures.
observe qu'en vain on enlèverait les attributs d'esclavage et les chaînes dont il s'agit, puisqu'on n'enlèverait pas en même temps l'attitude humiliante et l'air abattu de ces mêmes statues ; ce qui, alors, ne remplirait point l'intention du décret ; il demande que, sans s'arrêter à la motion, on passe à l'ordre du jour.
L'Assemblée décrète qu'on passera à l'ordre du jour.
L'Assemblée ordonne l'impression de l'adresse des représentants des Beaux-Arts et permet à la députation d'assister à sa séance.
Des artistes, peintres de décors, sont introduits à la barre, et offrent, comme don patriotique, de faire gratuitement, pour la fête fédéra-tive, une partie des travaux relatifs à leur état.
repond que l'Assemblée prendra leur demande en considération, et ajoute que l'Assemblée leur permet d'assister à sa séance.
annonce qu'une députation du département de l'Aube demande à être introduite.
Les députés sont admis, et l'un d'eux pro-nooce le discours suivant (1) ;
« Messieurs, le département de l'Aube vient d'être formé, et l'a été sans trouble, avec la
tranquillité, la réunion des esprits qui conviennent à des Français, à des frères ; mais
avant de se séparer, les électeurs et les membres élus regardent comme un devoir impérieux de
verser
« Nous adhérons avec la reconnaissance la plus vive aux lois sages que vous avez faites pour le bonheur des Français. Parmi ces lois bienfaisantes, il faut placer au premier rang celles qui ont ordonné une nouvelle division du royaume, et la formation des assemblées de département. L'administration intérieure ne sera plus confiée qu'à des hommes choisis par une élection libre. Ainsi nous ne verrons plus ces satrapes insolents gouverner nos provinces désolées, et les travaux pénibles des respectables habitants des campagnes n'alimenteront plus le luxe et les plaisirs de ces tyrans subalternes.
« Messieurs, en applaudissant au décret rendu le 13 avril dernier, relativement à notre sainte religion, nous désapprouvons formellement la protestation insidieuse faite contre ce décret. Nous sommes inviolablement attachés à la religion de nos pères ; mais nous ne confondrons jamais le respect dû à la divinité avec l'intérêt de ses ministres.
« Nous partageons ces sentiments avec tous les Français, et nous faisons vœu de les défendre jusqu'à notre dernier soupir. »
répond :
« Messieurs, c'est une grande satisfaction pour l'Assemblée nationale de voir couronner ses travaux par les suffrages et l'approbation des Français.
« L'esprit public, l'amour de la liberté, le respect de la loi, ces sentiments sublimes pro-' fondément gravés dans tous les cœurs, pouvaient seuls donner à l'Assemblée nationale la force qui lui a été nécessaire; seuls encore ils peuvent étayer son ouvrage.
« Les nouvelles et bienfaisantes administrations, choisies par le peuple, placées près du peuple, lui feront sentir chaque jour les bienfaits de la Constitution française.
« Messieurs, le patriotisme exprimé dans votre adresse ne laisse point de doutes à l'Assemblée nationale sur votre zèle et vos succès.
« Vous remplissez une belle et touchante mission, celle de porter Je bonheur jusque sous l'humble toit du simple habitant des campagnes.
« L'Assemblée vous permet d'assister à sa séance. »
(L'Assemblée ordonne l'impression de l'adresse du département de l'Aube.)
(de Toulon), au nom du comité des rapports. Des dévastations commiâes dans les forets qui sont la dépendance des abbayes de Flines, de Pecquencourt et de Marchiennes, en Flandre, ont excité la vigilance et la sollicitude de cette dernière.ville; elle a fait des efforts inouis pour faire respecter les propriétés que que vous avez mises sous leur sauvegarde particulière : un seul citoyen, M. de Saint-Aldegonde-Noircasme, soutient presque à ses frais une dépense énorme depuis plus de cinq mois, pour conserver cette partie de possessions nationales, et le patriotisme des habitants de Marchiennes seconde, d'une manière digne d'admiration, les efforts de ce digne citoyen.
Vous avez rendu divers décrets concernant les biens ecclésiastiques, les 2, 17 et 27 novembre,
11 décembre et 11 mars ; celui en date du 2 novembre met tous les biens des abbayes et maisons religieuses à la disposition de la nation; celui du 11 décembre 1789 commet les gardes nationales et tous les corps administratifs pour leur conservation.
Malgré les dispositionsc ormelles de ces deux décrets, l'abbé de Marchiennes non seulement n'a pas discontinué ses coupes dans les forêts, mais il semble que ses agents aient voulu écarter la surveillance des gardiens patriotes qui avaient juré d'en être les conservateurs ; mais la garde nationale, aussi inflexible dans ses principes qu'infatigable dans ses recherches, a prouvé que les Français libres, à qui la Constitution donne la garde des lois et la surveillance des propriétés nationales, sont dignes de cette grande confiance; et les habitants de Marchiennes, vivant en Flandre, où l'on croyait trouver le siège de la superstition et du fanatisme, ont prouvé à la nation qu'ils étaient aussi dignes de la liberté que nous, et que leurs vieilles habitudes n'avaient fait que renfoncer leur patriotisme.
Cette municipalité a envoyé à votre comité des rapports treize procès-verbaux plus ou moins importants.
Nulle pièce, parmi celles qui lui ont été adressées, n'annonce que les adjudications des bois coupés soient antérieures au décret du 2 novembre 1789 : toutes les coupes sont donc illégales, et la conduite de la municipalité et de la garde nationale est justifiée par vos décrets. Les arbres qui ont été coupés n'étaient point mûrs : il y a donc, dans la conduite de l'abbé de Marchiennes ou de ses agents, contravention aux lois anciennes et aux lois modernes, et il serait incroyable qu'on tolérât, dans le nouveau régime, | ce qui était défendu par l'ancien.
Il était du devoir des municipalités et de la garde nationale d'empêcher un pareil désordre : elles l'ont entrepris avec courage et se sont conduites âvec sagesse ; elles ont arrêté ces dévastations; elles ont suspendu les coupes; elles ont posé des gardes lorsqu'elles y ont été déterminées par la quantité des bois coupés, par leur importance et par la multiplicité des moyens qu'on à employés pour les enlever : toutes les saisies ont été constatées par des procès-verbaux. La conduite de la garde nationale a été régulière, modérée et généreuse ; elle n'a employé d'autre voie que celle de dénoncer les contraventions à l'Assemblée nationale.
C'est après avoir pris connaissance de tous ces faits, que votre comité des rapports vous propose le décret suivant :
« L'Assemblée nationale, approuvant le zèle de la municipalité et de la garde nationale de Marchiennes, renvoie aux juges qui en doivent connaître, aux termes de son décret du 18 mars dernier, les réclamations qui lui ont été adressées par ladite municipalité et ladite garde nationale, au sujet des abattis et ventes des bois mentionnés dans les procès-verbaux des 2 et 8 janvier, 22 et 26 février, premier mars, 1er, 9, 10,17 et 30 avril ; 1er, 5 et 8 mai derniers;
« Enjoint spécialement aux officiers municipaux de Marchiennes, de Pecquencourt, de Flines, et autres lieux circonvoisins, de tenir la main aux poursuites dont ils sont chargés par le dernier décret. *> (Adopté.)
remplace au fauteuil M. le Président, qui s'absente pour se rendre chez le roi.»
L'ordre du jour est un rapport du comité de commerce et d'agriculture sur le commerce au delà du Cap de Bonne-Espérance ou commerce de Vlnde (1).
, rapporteur. Messieurs, vous avez décrété, le 3 avril, que le commerce au delà du Gap de Bonne-Espérance est libre à tous les français, et vous avez chargé votre comité d'agriculture et de commerce d'examiner, de concert avec celui des impositions, les articles qui doivent en fixer le régime. C'est le résultat de leur travail que j'ai l'honneur de vous présenter.
La plupart des marchandises qui composent les retours de ce commerce étant destinées à la consommation du luxe, offrent à l'impôt une matière convenable. A cette considération nous en joindrons une autre encore plus importante; c'est la faveur qui est due à nos manufactures. , Celles de l'Inde doivent à des circonstances locales des avantages dont il est important, soit de prévenir l'effet par des prohibitions, soit du moins de le balancer par de forts droits d'entrée. Les manufactures sont, après l'agriculture, ' l'emploi du capital le plus avantageux à l'Etat. Tout ce que leurs travaux ajoutent de valèur à la matière première, se partageant en profits et en salaires, est pour le corps de la nation un accroissement de revenu. Lorsque la concurrence étrangère réduit à l'inaction une de nos manufactures, ses entrepreneurs perdent au moins cette portion de leur capital qui était employée en ateliers et en instruments de travail, et cette perte est une diminution du capital national. Un grand nombre d'individus devaient à cette manufacture tous leurs moyens de subsistance ; et que deviendront-ils, si le travail auquel ils sont habitués, le seul auquel ils soient propres, vient à leur manquer? antre cés deux inconvénients, celui d'interdire ou de faire payer un peu plus cher quelques objets dont la jouissance n'est pas essentielle au bonheur, et celui de compromettre l'existence des ouvriers que l'industrie nationale fait subsister, il n'y a pas à balancer. Mais si, en adoptant ces mesures, on ne prenait pas en même temps toutes les précautions convenables pour rendre la fraude, sinon impossible, du moins très difficile, on manquerait le but que l'on se propose ; on favoriserait la cupidité qui se laisse tenter par les gains d'un commerce illicite, et l'on serait injuste envers lés citoyens honnêtes qui regardent, avec raison, toute espèce de fraude comme une transgression coupable aux lois de leur pays.
Au surplus, ce que ces précautions ont de plus gênant pour le commercé au delà du Cap de Bonne-Espérance, nous ne vous le proposerons que comme une mesure provisoire et qui deviendra moins nécessaire, à proportion que, sous un régime plus favorable à la prospérité publique, notre industrie se sera perfectionnée. Vous n'oublierez pas, Messieurs, que l'expérience de ces dernières années ne nous a que trop appris combien il est imprudent de mettre l'industrie nationale aux prises avec l'industrie étrangère, avant qu'elle soit en état de combattre à armes égales.
C'est d'après ces principes qu'a été rédigé le décret que nous vous proposons, et dont les
dispositions les rapportent à quatre points princi-
Des armements.
Il n'y a aucun inconvénient, et, par conséquent, il est juste de laisser au commerce, au delà du Gap de Bonne-Espérance, la liberté de faire les armements dans tous les ports ouverts à notre commerce avec nos colonies d'Amérique. Il a paru juste encore d'accorder la franchise des droits d'entrée sur quelques objets tirés de l'étranger, et qui font ordinairement partie des cargaisons. Les motifs qui ont fait imposer ces droits sur ces marchandises, lorsqu'elles sont destinées pour la consommation intérieure, n'existent plus, lorsqu'il s'agit d'un commerce où nous avons des rivaux : et l'effet de ces droits serait de priver nos armateurs d'un moyen d'échange avantageux. Mais il nous a paru que la restitution de ces droits, au moment de l'embarquement, avait moins d'inconvénients que leur exemption à l'entrée du royaume. Nous vous proposerons encore d'accorder aux cuivres de fabrication nationale, lorsqu'ils seront expédiés pour l'Inde, une prime équivalente aux droits que les cuivres bruts payent à l'entrée du royaume. Cette fabrication mérite des encouragements, et celui que nous'proposons est moins une prime que ce que les Anglais appellent un drawback,e t doit être regardé plutôt comme un acte de justice, que comme une faveur.
Des retours.
Votre comité vous a proposé d'ordonner provisoirement que les retours continueraient d'être faits au port de Lorient. Quelques personnes ont cru voir dans cette disposition une faveur particulière accordée à cette ville et contraire à vos principes. Nous persistons à penser que c'est une mesure digne de votre sagesse.
Cette disposition, qui ne peut être gênante que pour les armateurs, leur est néanmoins convenable, en ce que, par la réunion des acheteurs, elle leur procure une vente assurée. Elle est surtout convenable aux acheteurs, à qui la réunion des retours dans un seul port donne ies moyens de compléter leurs assortiments, de régler les prix d'après la proportion connue entre la demande et les quantités mises en vente, et enfin de faire leurs achats par eux-mêmes, avantage inappréciable lorsqu'il s'agit de marchandises qui, sous la même dénomination, offrent dans les qualités des différences sensibles. Mais ces raisons de convenances, d'après lesquelles le commerce pourrait se déterminer librement à préférer le port de Lorient, ne vous sembleraient peut-être pas suffisantes pour lui en imposer l'obligation, si vous n'étiez déterminés par un motif plus décisif ; l'impossibilité d'assurer, par un autre moyeu, la perception des droits, de ces droits qui sont la sauvegarde de nos manufactures.
Il serait dangereux que les retours pussent se faire à Marseille, si, comme il y a lieu de le croire vous vous déterminez à conserver la franchise de son port. La plupart des autres ports du royaume offrent au versement frauduleux des
marchandises les plus grandes facilités. Les vaisseaux destinés pour Nantes et Bordeaux ont à parcourir un trajet considérable de rivières. Le grand nombre de bâtiments qui se trouvent dans ces ports force les employés d'y partager leur surveillance. Ces employés manqueraient d'ailleurs, pour juger de la sincérité des déclarations, de cette expérience si difficile à acquérir, et si essentielle lorsque les droits se perçoivent sur la valeur. Les ventes publiques, cet unique moyen de constater régulièrement cette valeur, seraient impossibles, si les retours pouvaient se faire dans différents ports, parce que plusieurs ventes concourraient en même temps, parce que nulle n'offrirait peut-être un assortiment complet, et parce que l'objet de chacune ne serait pas suffisant pour déterminer les acheteurs à se déplacer. Ainsi, l'abus des évaluations trop faibles, ce moyen de fraude qui, depuis le traité de commerce avec l'Angleterre, a occasionné tant de plaintes et auquel on a vainement cherché le remède, serait inévitable pour les marchandises de l'Inde.
Le port de Lorient a des avantages qui lui sont propres : les vaisseaux qui se présentent pour y entrer sont aperçus à plusieurs lieues en mer. Ils doivent passer sous l'île de Groix, résidence d'un poste d'employés, chargés de les signaler et de se rendre immédiatement à bord pour empêcher les versements. La surveillance des employés n'est pas partagée dans ce port; et les recensements dans les magasins y sont faciles. On peut, quand on le voudra, éviter qu'il en soit soustrait aucune marchandise, et y assurer plus qu'ailleurs l'embarquement de celles qui sont destinées à être réexportées. Enfin, cette ville offre un mouillage sûr, des magasins vastes, à l'abri des incendies, et des personnes habituées au bénéficiement des marchandises de l'Inde. A ces raisons nous joindrons l'opinion des députés extraordinaires du commerce et des manufactures, qui ont été consultés et qui, s'ils n'avaient pas pensé que cette disposition fût utile, ne l'auraient pas adoptée. Mais en décrétant que les retours se feront provisoirement à Lorient, il paraît convenable que vous adoptiez deux autres dispositions : l'une, que les capitaines et les autres personnes qui auront des marchandises chargées sur les bâtiments en retours seront tenues d'en signer un état et de le remettre aux employés, qui se transporteront à bord ; l'autre, que les ventes continueront d'être publiques. Vous pourrez ne pas comprendre dans cette disposition les marchan-• dises dont les droits ne se perçoivent pas sur la valeur ; mais nous ne pensons pas que vous deviez adopter une proposition qui a été faite à votre comité, et qui consiste à permettre aux bâtiments qui viennent des îles de France et de Bourbon, et qui ne sont chargés que des productions de ces îles, de faire leurs retours dans les ports ouverts au commerce de nos autres colonies : ce serait ouvrir ces ports à l'introduction furtive des marchandises fabriquées de l'Inde, car il n'y aurait pas un seul de ces bâtiments qui n'en rapportât.
Des marchandises prohibées qui ne seront reçues qu'en entrepôt.
Il n'a été permis jusqu'à présent au commerce de l'Inde d'importer les étoffes de soie et les toiles peintes et imprimées qu'à charge de la réexportation; mais personne n'ignore que cette réexportation a presque toujours été fictive, et que ces
marchandises sont restées dans le royaume. Il parait donc plus convenable d'en proscrire l'importation que d'avoir à en surveiller la destination.
La porcelaine dorée et de couleur est trop nuisible à nos fabriques en ce genre, pour que l'importation en soit permise plus longtemps.
Il n'en est pas ainsi des guinées bleues et des toiles rayées et à carreaux ; leur emploi dans le commerce d'Afrique exige qu'elles soient reçues en entrepôt, du moins provisoirement, soit pour cette destination, soit pour celle de l'étranger.
Des droits que les marchandises payeront.
Nous diviserons en sept classes les marchandises qui pourront être importées par le commerce au delà du Cap de Bonne-Èspérance :
1° Les matières premières dont l'importation est utile à nos manufactures, et que nous vous proposons d'affranchir de toute espèce de droits ;
2° Les gommes et les drogueries qui ne paieraient que la moitié des droits qui seront imposés par le tarif général sur les mêmes espèces venant de l'étranger, et les thés qui n'acquitteraient qu'un droit unique de 15 livres par quintal, la grande variété dans le prix rendant très embarrassante la perception d'un droit proportionné à leur valeur ;
3° Les épiceries qui payeraient un droit de 18 0/0 de la valeur, à l'exception des poivres dont le pauvre consomme autant que le riche, et sur lesquels le droit serait modéré à 9 livres du quintal. Le café Moka payerait 40 livres, le sucre candi 100 livres du quintal ;
4° Les ouvrages vernis et les cotons filés, acquitteraient les droits d'entrée, à raison de 10 0/0 de la valeur. La porcelaine bleue et blanche, utile pour servir de lest, n'acquitterait que 10 livres par quintal ;
5° Les marchandises blanches. La compagnie des Indes payait des droits trop faibles sur ces marchandises. Leur importation, qui s'est beaucoup accrue depuis quelques années, doit être découragée, si l'on veut ranimer nos manufactures. Les fabricants anglais, malgré la supériorité de leur industrie sur celles des nôtres, sont eux-mêmes effrayés de la concurrence des Indiens, et ils font les plus vives réclamations pour que la compagnie d'Angleterre cesse d'importer ces marchandises.
Ces droits étaient de 37 livres 18 s. du quintal sur les toiles, les basins, etc., et de 3 1/4 0/0 de la valeur sur les mousselines.
Nous vous proposons d'assujettir toutes ces marchandises à un double droit; l'un proportionné à la valeur, l'autre au poids. L'effet de ce dernier droit serait de diminuer l'importation des marchandises moins fines, c'est-à-dire de celles qui se rapprochant des qualités que nous fabriquons le plus, nuisent davantage à notre industrie. Le droit proportionné à la valeur serait de 3 0/0 sur les toiles de cotons unies, de 3 0/0 sur les autres marchandises blanches. Le droit proportionné au poids, serait par quintal, de 50 livres sur les toiles de coton unies ; ae 80 livres sur les basins, et sur le linge de table et de lit ; de 150 livres sur les mouchoirs blancs à bordure et sur les mouchoirs à carreaux; de 200 livres sur les mousselines unies ou rayées; de 300livres
sur les mousselines brodées : les nankins payeraient 10 s. par pièce;
6° Les denrées des îles de France et de Bourbon. Il a paru convenable de les traiter comme celles de nos colonies d'Amérique;
7° Les marchandises non dénommées dans le tarif. Elles seront assujetties aux mêmes droits d'entrée et aux prohibitions portées dans le tarif général.
Il se présente une question sur le traitement qui doit être fait aux marchandises qui seront réexportées, soit pour le commerce d'Afrique, soit pouf l'étranger. Il nous a paru que les premières doivent être exemptes de droits, mais qu'il était juste que les tissus de coton qui seront déclarés pour l'exportation à l'étranger, soient assujettis au droit de 3 et de 5 0/0 mis sur la valeur. L'arrêt du conseil du 6 septembre 1767, qui avait établi le droit d'induit sur toutes marchandises de l'Inde, quelle que fût leur destination ultérieure, a eu son exécution jusqu'à celui du 25 août 1784. Depuis cet arrêt, qui a exempté de ce droit les marchandises destinées à être réexportées, ces exportations n'ont pas augmenté. Cela provient, non pas de ce qu'un droit de 5 0/0 ne peut pas nuire à la réexportation, si elle était réelle, mais de ce que, dans le fait, ces réexportations ont presque toujours été fictives. Elles devaient l'être, car nous ne pouvons pas entrer en concurrence avec les Anglais, dans les marchés étrangers. C'est une raison déterminante pour laisser subsister un droit dont l'exemption ne servirait qu'à exciter à la frâude, et qui, si cette fraudé ne peut pas être empêchée, diminuera du moins le tort que ces marchandises, restées dans le royaume, feront à nos manufactures.
De quelques dispositions relatives à la compagnie des Indes.
En décrétant que le commerce, au delà du Cap de Bonne-Espérance, est libre à tous les Français, vous avez prorionéé que l'association Cofinue sous le nom de Compagnie dés Indes n'avait pas de privilège. Bile n'a donc pas le droit dé réclamer des concessions, ijùi sont une conséquence de ce privilège, et' qui, si la jouissance lui en était conservée,, devraient en être regardées comme une prolongation, puisqu'il en résulterait pour elle des avantagés dont les âutres armateurs seraient privés. Ainsi, nous pensons que les magasins de Lorient, propriété nationale, doivent être communs à tous les retours du commerce de l'Inde : qu'à partir du 3 avril dernier, date de votre décret, cette association doit cesser de jouir de la moitié du produit des droits sur les toiles peintes et sur leS toiles de coton étrangères, ainsi que de la portion qui lui avait été accordée sur les saisies de ces toiles et des mousselines; que toutes les contestations qui se sont élevées entre cètfce compagnie et les particuliers, relativement à l'exercice ae ce privilège, doivent être anéanties; et qu'enfiil, ses retours doivent être assujettis, comme ceux des autres armateurs, aux droits que vous allez établir. Cependant, nous avons considéré que le drèit de 3 0/0 sur les toiles de coton unies, et de 5 0/0 sur les autres marchandises blanches, est destiné à remplacer le droit d'induit dont cette compagnie avait obtenu l'exemption ; qu'elle y a compté lorS de ses expéditions, et que vous concilierez ce que l'équité semble vous demander avec ce qu'exige la nécessité d'établir la concurrence, en bornant la jouissance de cette
exemption aux marchandises que la compagnie des Indes fera vendre jusqu'au 1er janvier 1792.
Nous avons eu constamment en vue l'intérêt de nos manufactures, et principalement celui des manufactures de coton que le commerce de l'Inde touche de plus près qu'aucun autre. Les circonstances actuelles recommandeht particulièrement ces dernières à la protection nationale. La concurrence des Indiens n'est pas la seule dont elles aient éprouvé les fïmeStes effets : notre marché s'es t trouvé surchargé de marchandises étrangères, tandis que la consommation a diminué, soit pâr la cherté des comestibles, soit par les suites de la Révolution. Un grand nombre d'ouvriers ont été privés tout à coup de leurs travaux Ordinaires, et cette cause demisère aété ajoutée à tant d'autres. Il est important de relever lë courage de nos fabricants, et de ranimer une branche d'industrie qui, à l'aide de quelques encouragements, peut devenir Une des sources les plus fécondés dé la richesse nationale. Un membre de cette Assemblée vous a proposé d'appliquer à cet encouragement le produit des droits sur le commerce de l'Inde, et vous avez applaudi à cette proposition. En effet, quel emploi plus juste des tributs que nous imposons sur l'industrie étrangère, que de les faire tourner au profit de la nôtre? Votre comité d'agriculture et de commercé s'est occupé de la recherche des moyens les plus convenables pour rendre cet encouragement vraiment utile, et il vous demandera incessamment la permission de vous soumettre ses vUës sûr cet objet important.
Voici, Messieurs, le projet de décret que votre comité a l'honneur de vous proposer :
Projet de déûret sur le corhmerce au delà du Cap de Bonne-Espérance.
Art. 1er. Les armements pour le commerce àu delà du Cap dé
Bonne-Espérance pourront se faire dans tous Jfes ports ouverts, au eomméree des colonies
françaises de l'Amérique; ils jouiront des mêmes immunités, et ils seront assujettis aux
mênies charges.
Art, 2, Les fers en barres et en verges, les aciers, le plomb, les cuivres bruts, àiiisi que les ancres et grapins, tirés de l'étranger pour le commèrce au delà du Cap de Bonne-Espérance, et qui sont actuellement exempts de droits, seront assujettis à ceux d'èntréedu nouveàu tarif: mais cës droits seront restitués en justifiant de l'embarquement desdits fers, aciers, plombs, Cuivres, àncresét gra-pins pour ladite destination. LeS cuivres qui sortiront dû royaume, pour la même destination, après y avoir reçu une main-d'œuvre, jouiront d'une prime de 6 livres par quintal.
Art. 3. Il sëra permis ae'faire venir dë 'l'étranger la poudre à tirer nécessaire auxditS armements, à la charge d'acquitter sur cette poudre un droit de 5 livres par quintal, èt de l'entreposer jusqu'à son départ sous la clef du régisseur des poudres.
Art. 4. Les retours et désarmements ne pourront avoir lieu provisoirement que dans le seul port de Lorient ; eten cas de relâché et dé déchàrge forcés dans un autre port du royaumè, cé dont il devra être justifié, les marchaôdisès du chargement seront déposées dans un magasin, sous la garde des préposés de la régie des traites, d'où elles seront transportées par mer à Lorient par acquit à caution.
Art. 5. Pour prévenir, les versements des mar-
chandises provenant dudit commerce, qui pourraient être faits,à l'arrivée, et même avant l'entrée dans le port de Lorient, il sera eovoyé en mer au devant des vaisseaux, tel nombre d'employés des fermes qu'il sera jugé convenable, auxquels employés, les capitaines de vaisseaux, subrécargùes, officiers, passagers, ou tous autres, seront tenus de remettre, à la première réquisition, un double signé d'eux, de la déclaration prescrite par l'article ci-après.
Art, 6. Les capitaines seront tenus de donner au bureau des traites du port de Lorient, dans les 24 heures de leur arrivée, une déclaration du nombre de balles, ballots, caisses et futailles composant leur chargement; d'indiquer leurs marques, numéros ou adresses, et les espèces de marchandises qu'ils contiendront.
Art. 7. Les marchandises ne seront déchargées que devant le pérystile où est placé le bureau de rinde, et elles seront mises de suite dans les magasins accoutumés, qui seront communs à tous les armateurs.
Art. 8. Les propriétaires ou cosignataires des marchandises ainsi entreposées seront tenus d'en donner, dans les six semaines de l'entrepôt, une déclaration détaillée par espèce et quantité. Les-dites déclarations contiendront le poids, pour celles qui acquitteront au poids, et encore le nombre de pièces, pour celles qui devront payer les droits à la pièce ou à la valeur ; et seront lesdites déclarations sujettes aux vérifications prescrites par le décret qui sera rendu sur les droits de traites, et aux peines encourues en cas de fraude.
Art. 9. Après la vérification desdites marchandises, 'celles dont la consommation dans le royaume sera prohibée seront mises dans un magasin particulier dont les préposés de la douane auront une clef.
Art. 10. Poiir concilier la sûreté de la régie avec les facilités qu'exigent le bénéficiement et le transport des marchandises d'un magasin à l'autre, il sera apposé aux grilles extérieures desdits magasins des cadenas dont les clefs seront remises aux préposés de la régie qui seront tenus de se rendre aux heures accoutumées pour l'ouverture et la fermeture desdites grilles.
Art. 11. Les marchandises ne pourront entrer dans les magasins qui leur seront affectés, ni en sortir que par la porte du pérystile faisant face au quai où se trouve le bureau. Celles qui sortiront desdits magasins seront accompagnées d'expéditions, et vérifiées.
Art. 12. Les propriétaires ou cosignataires desdites marchandises jouiront du bénéfice d'entrepôt jusqu'au moment de la vente, sans préjudice de l'entrepôt qui sera énoncé en l'article ci-après.
Art- 13, II' sera expressément défendu d'apporter sur les bâtiments employés audit commerce, des toiles peintes et imprimées, des étoffes ou autres tissus dans lesquels il entrera de la soie, ainsi que de la porcelaine de couleur et dorée : ladite prohibition n'aura cependant pas lieu pour les bâtiments qui feront partie des ports du royaume avant la promulgation du présent décret.
Art. 14. Les guinées bleues et les toiles rayées ou à carreaux provenant dudit commerce, pourront être importées ; mais à la charge du renvoi à l'étranger, ou d'être employées au commerce d'Afrique.
Art. 15. Les marchandises qui seront vendues jouiront d'un nouvel ent/epôt qui sera d'une
année pour les marchandises permises, et de deux années pour celles prohibées. Le délai dudit entrepôt commencera a courir du jour de la vente. Ce délai expiré, les marchandises permises seront sujettes aux droits, et celles prohibées qui ne seront pas déclarées pour le commerce d'Afrique, devront être renvoyées à l'étranger.
Art. 16. Les transports et cessions qui auront lieu entre les adjudicataires et cessionnaires durant ou après la vente, se feront par écrit; et les cédants demeureront responsables des marchandises, jusqu'à ce que les cessionnaires s'en soient chargés sur le registre de nouvel entrepôt.
Art. 17. Les adjudicataires et leurs cessionnaires pourront faire passer par continuation d'entrepôt, dans tous les ports ouverts au commerce des colonies, les marchandises qui seront destinées pour le commerce d'Afrique, à Ja charge d'en déclarer au bureau de Lorient les quantités et qualités, même le nombre de pièces, de faire plomber les caisses, balles et ballots, et d'y prendre des acquits-à-caution, qui seront représentés au bureau de la destination. Après la vérification, la soumission d'entrepôt sera signée sur le registre à ce destiné, pour le temps qui restera à expirer dudit entrepôt, pendant lequel les marchandises seront toujours sous la clef des préposés de la régie.
Art. 18. Si aucune desdites marchandises, ou toute autre provenant dudit commerce, devait être chargée dans la rivière de Nantes, à la destination étrangère, elle pourrait être versée de bord à bord sur les vaisseaux en chargement à Nantes, Couëron ou Paimbœuf, en présence des préposés de la régie, à la charge que la déclaration en sera préalablement faite à Lorient ; que les balles et ballots seront expédiés de ce port, sous plombs et par acquit-à-caution, et représentés aux commis des bureaux de Nantes, Couëron ou Paimbœuf, qui feront la vérification des plombs et la reconnaissance du nombre des caisses et ballots ; et dans le cas où les plombs seraient altérés ou rompus, les préposés de la régie pourront faire la visite des marchandises en présence des capitaines et maîtres des vaisseaux, ou eux dûment appelés : il sera dressé procès-verbal de cette visite, et en cas de fraude, les marchandises seront saisies et confisquées, et les capitaines condamnés à l'amende.
Art. 19. Les guinées bleues, les toiles rayées et à carreaux, provenant dudit commerce, ne pourront être exportées à l'étranger que par mer; elles ne jouiront du transit par terre, qu'autant qu'elles seront destinées pour le commerce d'Afrique; et, dans ce cas, elles seront expédiées sous plombs, et par acquit-à-caution qui énoncera non seulement le poids desdites toiles, le nombre des balles ou ballots, mais encore le nombre des pièces.
Art. 20. Les marchandises, autres que celles désignées dans l'article ci-dessus, pourront passer à l'étranger, soit par mer, soit par terre, en remplissant les formalités qui seront prescrites pour l'exportation des denrées coloniales.
Art. 21. Les droits fixés par le tarif annexé au présent décret seront payés à la sortie des marchandises de l'entrepôt de Lorient, les marchandises déclarées pour les colonies françaises de l'Amérique seront traitées comme celles destinées à la consommation du royaume.
Art. 22. Les marchandises comprises dans l'article 5 du tarif, quelle que soit leur destination ; les toiles rayées et à carreaux, et les guinées
bleues, apparnant à l'association connue sous le nom de Compagnie des Indes, et qui sont actuellement dans les magasins de Lorient, ou qui arriveront pour son compte par les bâtiments qu'elle a expédiés des ports de France, antérieurement au décret du 3 avril dernier, jouiront de l'exemption des droits de trois ou cinq pour cent établis par les articles 5 et 8 du tarif; mais cette exemption n'aura lieu que pour les ventes qu'elle fera avant le premier janvier 1792.
Art, 23. Les droits acquittés sur les thés qui auront été déclarés dans les entrepôts de Calais, Boulogne, Saint-Valery-sur-Somme, Fécamp, Dieppe, Cherbourg, Granville, Saint-Malo, Mor-laix et Roscoff, seront remboursés en justifiant de leur exportation en la manière accoutumée.
Art. 24. Le commerce ne sera assujetti à faire des ventes publiques que pour les marchandises blanches, les toiles rayées et à carreaux, les gui-nées bleues, et les autres marchandises assujetties à un droit sur la valeur ; et ces ventes, qui ne pourront pas être ouvertes plus de deux fois l'année, seront indiquées par des affiches contenant les quantités et qualités de marchandises qui devront être vendues : à l'égard des autres marchandises, le commerce pourra en disposer par vente particulière, ou de toute autre manière qu'il jugera convenable, à la charge d'acquitter, à la sortie de l'entrepôt de Lorient, les droits qui seront dus.
Art. 25. Les droits qui devront être payés à la valeur seront acquittés par les acheteurs sur le prix de l'adjudication : à cet effet, deux préposés de la régie des traites assisteront aux ventes, tiendront un registre où ils inscriront les noms des adjudicataires et les marchandises dont ils deviendront propriétaires. Lesdits préposés feront ensuite faire auxdits adjudicataires, sur le registre d'entrepôt, la soumission d'acquitter, dans le terme prescrit, les droits qui seront dus.
Art. 26. 11 sera apposé, par les préposés des droits de traites à Lorient, concurremment avec 'les préposés qui seront choisis par le commerce, des plombs et bulletins aux deux extrémités de chaque pièce de mousseline, toiles de coton blanches, basins, mouchoirs, nankins et autres tissus connus sous la dénomination de marchandises blanches. Lesdits préposés tiendront respectivement un registre de compte ouvert pour le plombage, à l'effet de quoi, les plombs, matrices et empreintes servant à former lesdits plombs et bulletins, lesquels seront fournis par la régie, à compter du 1er juillet de cette année, seront déposés sous les clefs, tant des préposés de la régie que de ceux du commerce ; et chaque bulletin dont le prix, avec celui du plomb, est fixé à un sol, sera signé, tant par un préposé de l'administration des droits ae traites à Lorient, que par un préposé du commerce.
Art. 27. Les marchandises blanches destinées pour l'étranger ne pourront y passer, qu'après avoir été dépouillées par les préposés de la régie, de leurs plombs et bulletins. Au moyen de quoi, toute marchandise de même nature qui sera présentée à l'entrée du royaume, sera traitée comme étrangère, lors même qu'elle serait revêtue desdits plombs et bulletins.
Art. 28. A dater du 3 avril dernier, l'association, connue sous ie nom de Compagnie des Indes, cessera-de jouir de la portion des droits perçus sur les toiles de coton et sur les toiles peintes étrangères, qui lui avait été accordée par l'arrêt de son établissement, et des parts qui lut étaient
réservées sur le produit des saisies desdites toiles et des mousselines étrangères.
Art-29. Tous procès intentés par ladite association, à l'occasion des marchandises provenant du commerce au delà du Gap de Bonne-Espérance et apportées à Lorient, demeurent éteints.
Art. 30. Les dispositions des décrets qui seront rendus, tant sur le fait des droits de traites que sur le commerce des colonies françaises, seront exécutées dans les cas non prévus par le présent décret, et pour lesquels il n'y est pas dérogé.
Projet de tarif des droits qui seront perçus sur les marchandises provenant du commerce
français au delà du Cap de Bonne-Espérance, à compter du er juillet 1790
Matières premières. .
Art. 1er. Cotons en laine et en graine, bourre de soie, noix de
galle, bois de teinture et de marqueterie, étain de Malack, salpêtre, toutenague, cauris,
perles fines, rotins, dents d'éléphants, écaille, nacre brut ou coquilles de nacre, exempts
de droits.
Soie écrue de Nankin, et soie de bengale, 6 sols par livre.
Soie à coudre, 30 sols par livre.
Coton filé, dix pour cent de la valeur.
Drogueries.
Art. 2. Aloès, ambré gris, anis étoilé, assa fœ-tida, benjoin, borax, cachou, camphre, encens, èsquine, galbanum, gomme arabique, gomme amoniaque, gomme copale, gomme gutte, gomme laque, noix vomique, rhubarbe, rose de Provins, sagou et tamarin ; la moitié des droits d'entrée du tarif général.
Épiceries.
Art. 3. Poivre, 9 liv. par quintal.
Thé, 15 liv. par quintal.
Canelle de Chine, 20 liv. par quintal.
Girofle et muscade, le tiers des droits du tarif général.
Café moka, 40 liv. par quintal.
SUcre candi, 60 liv. par quintal.
Marchandises diverses.
Art. 4. Joncs ou cannes non montés, bambous, filières de nacre, encre de Chine, écrans, cabarets, plateaux, éventails et autres ouvrages vernis, dix pour cent de la valeur.
Porcelaine de couleur et dorée, prohibée ; porcelaine bleue et blanche, 10 liv. par quintal.
Marchandises blanches.
Art. 5. Toiles de cotons unies, trois pour cent de la valeur, et 50 liv. par quintal.
Basins, linge de table et de lit, cinq pour cent : de 1a valeur, et 80 liv. par quintal.
Mouchoirs de coton rayés ou à carreaux, et mouchoirs blancs à bordure de couleur, cinq pour cent de la valeur et 120 liv. du quintal.
Toiles de Nankin, 12 sols par pièce de 4 à 5 aunes.
Celles d'un aunage supérieur, comme toiles de coton unies.
Mousseline unie, rayée ou quadrillée, cinq pour cent de la valeur, et 200 liv. par quintal.
Mousseline brodée, cinq pour cent de la valeur, et 300 liv. par quintal.
Denrées des Mes de France et de Bourbon, accompagnées des certificats d'origine donnés par les administrateurs aesdites colonies.
Art. 6. Sucre brut, comme sucre de Cayenne. Café, comme café de la Martinique. Ihdigo, canelle, girofle et muscade, comme ceux des colonies.
Art. 7. Marchandises non dénommées dans le présent tarif, soumises à l'entrée, aux droits et prohibitions portées par le tarif général.
Marchandises déclarées pour Vétranger.
Art. 8. Coton en laine et en graine, les droits du tarif général.
Toiles de coton unies, 3 pour cent de la valeur.
Ëasin, linge de table, mouphoirs et mousselines, 5 pour cent de la valeur.
Toile de Nankin, 6 sols par pièce de 4 à 5 aunes.
Celles d'un aunage supérieur comme toiles de coton unies.
Toiles rayées et à carreaux et guinées bleues, cinq pour cent de la valeur.
Marchandises et denrées non comprises dans le présent article, et dans les articles 1, 2, 3 et 4, déclarées pour l'étranger, exemptes.
Marchandises déclarées pour le commerce d'Afrique.
Art. 9. Toiles rayées et à carreaux et guinées bleues, exemptes, à la charge de suivre leur destination.
Toiles de coton unies, destinées à l'impression pour être employées au même commerce, payeront trois pour cent de la valeur à la sortie de l'entrepôt, sauf la restitution dudit droit, lorsqu'il sera justifié que ces toiles, après avoir été imprimées, auront été embarquées pour la côte d'Afrique.
Plusieurs orateurs demandent à être entendus. M. Paul Nairac a la parole dans l'ordre des inscriptions.
, député de Bordeaux (1). Messieurs, vous avez décrété, le 3 avril, que le commerce au delà
du Cap de Bonne-Espérance était libre. J'ose penser que rien ne sera moins libre que ce
commerce, si vous l'assujettissez à ces formalités rigoureuses et à ces droits excessifs que
votre comité d'agriculture et de commerce vous propose, dans la vue d'assurer la perception
des droits nécessaires et de favoriser certaines manufactures du royaume. Je sais bien,
Messieurs, que la liberté du commerce n'est pas une faculté accordée aux négociants de faire
ce
Sans contredit, Messieurs, il faut accueillir, encourager les manufactures dans un grand royaume comme la France; mais il faut soigneusement éviter de se méprendre dans les moyens. i Il faut éviter de paralyser une branche de commerce importante, d'affliger et de dégoûter ceux qui mettent leur industrie à la rendre plus importante encore, d'accorder des préférences à quelques villes à cause de quelques manufactures. Il faut savoir tout concilier; il faut avoir à la fois des manufactures florissantes et un grand commerce extérieur, et ne pas abandonner aux autres nations un commerce ae plus de 60 millions que nous pouvons ajouter à celui que nous faisons déjà. Jetez les yeux sur l'Angleterre : son commerce de l'Inde est immense. Il produit annuellement plus de 80 millions de retours. Il fournit presque toutes les nations de l'Europe; il fournit à ses propres besoins, et cependant les manufactures n'y languissent pas. On ne connaît rien de plus florissant, rien de plus parfait que les manufactures de coton de Manchester. Le traité de commerce les favorise ; mais elles étaient très brillantes avant ce traité, les immenses retours de l'Inde ne les avaient pas réduites à l'inaction. Vous me parlez de l'immense population de la France; vous me dites qu'elle a beaucoup de bras à employer, beaucoup de productions à offrir à l'industrie,.je le sais, et je pense comme vous ; mais comme l'effet du commerce est de revêtir un corps politique de toute la force qu'il est capable de recevoir, ce n'est qu'en étendant votre commerce extérieur que vous y parviendrez. Si votre commerce intérieur ne peut pas employer tous les bras oisifs, le commerce extérieur y suppléera. S'il n'a pas besoin d'y suppléer ; si les manufactures suffisent à ce grand œuvre, le commerce extérieur appellera des bras étrangers ; et, par la force de ces deux leviers, vous élèverez la France au plus haut degré de richesse, de population et de puissance.
Evitons donc, Messieurs, les systèmes qui n'embrassent qu'un seul objet, et qui tendent par là même à resserrer les limites de notre commerce. Que l'on consulte l'histoire des anciens peuples commerçants, et l'on y verra que ceux chez les-
quels ou tenait les principaux marchés, et surtout ceux des marchandises de luxe, out été les plus florissants et les plus riches. L'influence de la liberté s'étendra d'ailleurs sur ce vaste empire. Notre agriculture va devenir florissante, ses productions se multiplieront; elles offriront plus de matières à l'industrie et aux arts; elles rendront les échanges plus nécessaires, et c'est à nous, Messieurs, à creuser d'avance les canaux par lesquels ces sources de richesse et de puissance doivent couler. Il n'est point ici question, au surplus, d'un nouvel ordre de choses; d'introduire en France des marchandises qui y soient inconnues, d'y exciter des goûts pour des objets qui n'ont pas encore été offerts à nos besoins ou à notre luxe, et d'arrêter, par là, le succès de nos manufactures. Le commerce de l'Inde subsiste depuis cent vingt ans, et depuis cent vingt ans les manufactures de coton ont reçu des accroissements infiniment plus rapides, infiniment plus considérables que le commerce de l'Inde; ce qui prouve qu'il n'est pas nuisible et encore moins destructeur de ces manufactures: et que l'on ne s'abuse point, lorsque les habitudes sont formées, lorsque les marchandises de l'Inde sont devenues nécessaires à nos besoins réels et à nos besoins de luxe; ce n'est pas des entraves, par des droits équivalents à une prohibition que l'on peut en empêcher la consommation. On éveille tout au plus, par ce moyen, la contrebande ; on excite les introductions frauduleuses, et l'on place le négociant français entre des concurrents étrangers qui peuvent vendre à plus bas prix que lui, et des consommateurs nationaux qui ne veulent pas acheter plus cher. D'où il résultera, Messieurs, que notre commerce de l'Inde ne pourra plus se soutenir, et que celui des étrangers s'aeeroîtra de la perte du nôtre. Aussi, Messieurs, avant de vous proposer d'assujettir le commerce de l'Inde à tant de formalités et de le surcharger de droits aussi excessifs, je crois que votre comité aurait dû vous faire connaître : 1* s'il avait calculé l'influence de ce commerce sur nos manufactures y. 2° s'il était assuré que nos manufactures pussent parvenir au degré de perfection nécessaire pour remplacer les mousselines et les toiles de l'Inde; 3° quel temps il fallait accorder pour commencer ce remplacement ou pour l'effectuer en entier; 4° si le prix de notre main-d'œuvre, si les matières premières, si notre climat ne seraient pas un obstacle éternel à cette perfection nécessaire dans la fabrication des mousselines et autres toiles de coton ; si leur prix pouvait être réglé à un prix équivalent à celui qu'elles valent chez les autres nations de l'Europe qui commercent dans l'Inde, et par conséquent à celui auquel la contrebande pourra les introduire dans le royaume ; 5° si lorsque l'importation des cotons en laine de nos colonies, dont la valeur n'excède pas douze millions de livres par an, ne suffit pas déjà à l'entretien de nos manufactures de coton, on est sûr de trouver en Europe des matières premières en quantité suffisante pour une nouvelle fabrication de 30 à 40 millions par an, nécessaire au remplacement de toutes les toiles et mousselines des Indes; 6° si, comme je le crois démontré, l'Europe ne reçoit pas assez de coton des colonies et du Levant, pour alimenter ses manufactures anciennes et nouvelles, il est possible, sans recourir aux marchandises fabriquées dans l'Inde, de pourvoir à tous les besoins réels et de luxe; 7° s il n'est pas d'autre moyen d'encourager nos manufactures de coton que celui d'éteindre, dans sa naissance, une branche de com-
merce maritime, tellement importante, qu'elle doit nécessairement faire entrer en France une partie de ces richesses qui élèvent si haut la puissance de l'Angleterre, richesses assurées pour nous, parce qu'elles seront la suite nécessaire d'un commerce libre, exercé par des hommes industrieux, économes, accoatuùiés à vaincre les obstacles, et dont les efforts renverseront un jour ces compagnies fondées sur le monopole. Je demande encore si votre comité a calculé les progrès successifs du commerce de l'Inde, et ce qu'il est possible qu'il ajoute un jour à la balance de notre commerce ; ce que la position de la ville de Marseille peut lui donner d'étendue, en devenant, pour le Levant, le marché général des marchandises de l'Inde, comme Venise l'avait été avant la découverte du cap de Bonne-Espérance; 8° enfin, si, pour favoriser les manufactures de coton, on ne nuit pas à notre navigation, à notre navigation, à nos productions et à nos autres manufactures, en restreignant tellement le commerce de l'Inde, que nos draps, nos raz-de-castor, nos étamines, nos toiles à voiles, nos fers, nos vins, nos eaux-de-vie, les glaces, les verres et une, infinité d'objets de luxe, ne soient privés d'une consommation qiie le commerce libre doit étendre, et dont les bénéfices des manufactures de toiles dé coton n'offriront pas la compensation.
Si notre comité n'a pas fait ces calculs ; s'il n'a envisagé la question du commerce de l'Inde que dans ses seuls rapports avec sa manufacture de Coton, je dis, Messieurs, qu'il s'est trompé, que ses vues ne sont pas assez étendues, et qu'elles ne suffisent pas à beaucoup près pour vous faire prononcer l'espèce d'interdiction qu'il vous pror pose. On ne devait jamais perdre de vue les principes généraux, lorsqu'on a traité cette question importante, ni chercher à la faire décider pat des exceptions particulières. Ces manufactures de coton ne sont pas tes seules dignes de nos regards; et s'il était vrai que leur activité pût être un peu troublée par les marchandises de l'Inde, cette activité peut se retrouver autant et plus dans d'autres branches de commerce. N'est-il pas d'ailleurs un principe de commerce certain, c est qtie la quantité excessive de ce qu'un pays agriculteur et commerçant peut recevoir produit la quantité excessive cfe ce qu'il peut envoyer à Son tour? Les choses seront en équilibre,comme si l'importation et l'exportation étaient modérées. Cette espèce d'enflure produira à l'État mille avantages. Il y aura plus de consommations, plus de choses superflues, plus d'hommes à employer, plus de moyens d'acquérir de la puissance. A ce principe, on pourrait joindre une observation qui est applicable à toutes les manufactures du royaume, ét qui semble prouver, à leur l'égard, l'utilité du commerce de l'Inde.
L'effet de Fa découverte de l'Amérique fut de lier à l'Europe l'Asie. L'Amérique fournit les métaux, dont l'Europe fait la matière principale de son commerce avec l'Inde. Ces métaux ne sont eux-mêmes que les produits de notre agriculture et de notre industrie. N'ayant point de commerce avec l'Inde, nous n'emploierons plus de métaux, et en n'employant plus de métaux, nous n'aurons plus de marchandises à échanger en Amérique ; et nos manufactures perdront, lorsqu'on se persuade qu'elles pourront gagner : ainsi dans un grand Empire comme la France, où tout se tient et forme, pour les individus, une chaîne universelle, où l'équilibre doit y être maintenu par lç contre-poids, la chaîne sera rompue, l'équilibre
cessera, tout sera renversé, car tout est lié dans le commerce comme dans le mçnde physique. Le comité s'est donc écarté, Messieurs, des principes qui régissent le commerce, lorsqu'il vous a professé de vous appesantir sur celui de l'Inde, et de le charger ae chaînes pour favoriser les seules manufactures de coton. Si vous adoptiez son système, vous anéantiriez le commerce -, et j'ose croire que vous feriez une grande faute ; car vous ne pouvez point avoir encore de garant du succès des manufactures auxquelles on vous propose de le sacrifier. Il est des Etats qui n'ont point d'établissements dans l'Inde, et qui ont le plus grand intérêt d'élever, dans leur sein, des manufactures capables de les délivrer du tribut qu'ils sont forcés de payer aux autres nations. Ils en ont vainement tenté l'établissement. Les efforts de l'Angleterre n'ont pas eu plus de succès, et l'on a vu ceux du même genre échouer à Rouen. La Suisse, favorisée par le bas prix de la main-d'œuvre, n'est pas parvenue à ce degré de supériorité qu'il faut atteindre pour prétendre au remplacement des mousselines de l'Inde. Il est des avantages réservés à chaque pays, et dont la nature a fait une sage distribution ; c'est en vain qu'on cherche à la contredire dans sa marche. L'Indien doit à son climat, à ses matières premières, à sa frugalité, à sa constance dans l'état de ses pères, à une main-d'œuvre payée trois pu quatre sous par jour, la perfection de ses filatures, les belles productions de ses métiers, et l'avantage de pouvoir les vendre à très bas prix. Le Français doit à son activité, à son intelligence, à son goût pour les arts, aux modèles qu'ils lui offrent et aux dispositions d'un peuple toujours prêt à les encourager, ces talents utiles et agréables que l'on veut imiter, et que l'on n'acquiert point ailleurs. En France, on possède une teinture écarlate, une manufacture de tapisseries des Gobelins, que toutes les rivalités n'ont pu atteindre. Il est donc indispensable que chaque peuple soit livré à la direction la plus naturelle de son génie et de-ses talents ; que l'on fasse des mousselines dans l'Inde, et que l'on ne sacrifie point en France aux essais incertains de l'imitation une branche aussi importante du commerce.
Golbert a créé les manufactures en France. On lui a reproché de les avoir trop favorisées et de leur avoir sacrifié l'agriculture. Ces reproches appartiennent heureusement à des temps d'ignorance ; il appartient au nôtre de louer ses vues et de les suivre. Ce Golbert, père des manufactures, l'était aussi de la compagnie des Indes. Il désirait le succès des manufactures de tous les genres, et ne craignit point cependant de nuire à celles de coton, en les exposant à la concurrence des marchandises de l'Inde. Ces manufactures ont prospéré; le commerce de l'Inde a été souvent anéanti : le sort, les progrès de ces manufactures ont donc été indépendants du commerce de l'Inde. Ge fait est si positif, Messieurs, que, si le traitéde commerce avec l'Angleterre n'avait eu pour base que l'introduction, dans le royaume, des marchandises de l'Inde, toutes nos manufactures seraient à présent ce qu'elles étaient avant ce traité, parce que les toiles de coton de la compagnie anglaise n'auraient remplacé que d'autres toiles de coton, venues directement par notre commerce ; que des toiles n'auraient excité aucun goût nouveau, et que leur consommation aurait été toujours en raison des besoins réels.
Ce serait donc sans succès que l'on enchaîne-^ rait le commerce de J'Inde ; qu'on l'accablerait de droits équivalents à une prohibition, dans l'espé-
rance de rétablir et même de faire prospérer nos manufactures de coton. Il est bien plus sûr de tendre à ce but par des encouragements. L'Angleterre ne connaît que ce moyen ; il est de notre sagesse, comme de notre intérêt, d'imiier son exemple. C'est ainsi que l'on excite l'émulation, que l'on double, que l'on triple son industrie. Ge n'est point par des prohibitions qu'on l'encourage, car empêcher un laboureur d'amender son champ, parce que le champ d'un autre laboureur manque d'engrais, c'est condamner les deux champs à la stérilité.
. Un honorable membre a déjà proposé d'employer en encouragement pour les manufactures ae coton le produit de l'induit de cinq pour cent. Cette proposition doit être adoptée ; mais je crois devoir ajouter ici qu'un encouragement plus nécessaire pour nos manufactures, c'est la suppression des franchises de Bayonne et de Dunkerque. Elles nuisent infiniment à notre industrie. Les colonies et l'intérieur du royaume sont inondés, par ces deux ports, de marchandises étrangères. Il vaut certainement mieux détruire de pareils abus que de faire le sacrifice du commerce de l'Inde.
Mais en conservant ce commerce de l'Inde, il faut bien se garder de penser qu'il puisse exister avec les exceptions, les formalités, les droits excessifs, dont votre comité le surcharge. Je m'élève surtout, de toute ma force, contre la proposition de faire tous les retours exclusivement dans le port de Lorient. Je la crois contraire à votre décret du 3 avril, à la propriété du négociant et à l'intérêt public. Votre comité soutient son opinion en vous disant, Messieurs, que cette disposition n'est gênante que pour les armateurs, qu'elle leur est d'ailleurs utile ; que, sans elle, il est impossible d'assurer, par un autre moyen, la perception des droits, parce que la plupart de nos ports offrent des facilités aux versements frauduleux des marchandises, ce que celui de Lorient empêche, à cause de 1 île de Groais, où il y a un poste d'employés.
Ces inconvénients fussent-ils réels, Messieurs, il y en aurait un plus grand encore à faire revivre le privilège des villes, et à ne faire que des dispositions qui seraient gênantes pour le commerce des autres ports. Que l'on n'oublie jamais que, sans liberté et protection, le commerce ne peut subsister. Il suit tous les lieux où on l'opprime.
Si votre comité prouve que cette disposition tient à l'intérêt public, je me range à son avis ; mais je vois ici le contraire.
L'intérêt public ne veut jamais que l'on assujettisse, deux fois par an, les négociants d'un autre port de quitter, sans nécessité, leurs affaires. L'intérêt public ne gagne pas à un déplacement qui dérange le cours des affaires du négociant, qui le constitue dans une perte de temps, dans des dépenses qui diminuent les avantages de son commerce, ou qui tendent à l'avantage exclusif d'une seule ville. L'intérêt pnblic n'exige pas qu'un navire armé à Bordeaux, aille déposer son chargement à Lorient; qu'il fasse ensuite un second armement, et soit exposé, en pure perte, à de nouveaux frais, à de nouveaux risques pour rentrer dans le port de Bordeaux. L'intérêt public n'exige pas qu'un négociant, pressé par ses engagements de réaliser tout de suite le prix de ses marchandises, doive être assujetti d'attendre deux époques fixes, de six mois, dans chaque année, pour en faire la vente. L'intérêt public ne trouve aucun avantage à gêner les opérations du négociant, à se croire plus éclairé que lui sur ses pro-
près intérêts, à supposer qu'une vente publique lui est plus utile qu'un vente privée. Je doute qu'il convienne à des législateurs d'entrer dans le secret des opérations du commerce, ni de régler, par une loi générale, ses transactions particulières.
Sans doute, comme je l'ai déjà observé, Messieurs, il est nécessaire de soumettre les négociants et le commerce à une police ; mais cette police a des bornes, et, sous prétexte du bon ordre, elle ne doit pas tyranniser le négociant. Vous établirez des droits sur le commerce de l'Inde, il faut qu'il soient exactement acquittés. Vous voudrez proscrire la fraude, il faut qu'elle soit proscrite. Vous voudrez que vos négociants respectent les propriétés, la liberté, le commerce des autres peuples, qu'ils ne se permettent rien qui puisse troubler la bonne harmonie. Vous voudrez que la bonne foi soit l'âme du commerce, qu'elle distingue partout le nom français : rien de plus juste, rien de plus digne de votre sagesse. Mais, Messieurs, lorsque vous avez dit que le commerce au delà du cap de Bonne-Espérance est libre, que vous aurez dit aux négociants : Armez vos vaisseaux, répandez les fruits de notre industrie, déployez sur toutes les mers l'étendard de notre liberté, et ouvrez de nouvelles sour ces de richesses et de puissance à votre patrie... Direz-vous ensuite à ces négociants : Vous avez satisfait à ce que la nation désirait de vous, et vous aviez lieu de compter de jouir en liberté du fruit de vos travaux ; mais un nouvel ordre de choses se présente : votre commerce n'est plus libre; ployez en rentrant dans nos ports cet étendard de la liberté, que nous vous avons engagé d'aller exposer aux regards de tous les peuples, et pliez ici sous le joug des lois fiscales : on nous a dit que le négociant français n'était pas citoyen, que c'était un étranger au milieu de la nation, qu'il fallait l'assujettir par des formes rigoureuses, par des retardements dans ses opérations et par des dégoûts.
Est-ce là de la liberté, Messieurs ? est-ce ainsi que vous avez voulu l'établir? Pensez-vous qu'elle puisse naître, se propager, et que, sous un pareil joug, le commerce puisse prospérer?
Mais on vous a prévenus qu'il était nécessaire que les retours des Indes fussent tous faits par le port de Lorient pour assurer la perception des droits; que dans les autres ports il était mille moyens de s'y soustraire, impossible de prévenir les versements frauduleux.
Impossible!... Non, il n'est pas plus impossible de prévenir ces versements frauduleux dans le commerce de l'Inde que daos tous les autres commerces maritimes; car faites bien attention, Messieurs, que si l'opinion de votre comité était fondée, il s'ensuivrait que, pour assurer la perception de tous les droits, il faudrait assujettir aussi tous les navires revenant de l'Amérique, tous ceux du Nord et du Sud, qui abordent en France, à se rendre dans un seul port; car il est aussi facile de supposer des versements frauduleux par cette voie, que celle du commerce de l'Inde. Le moyen d'empêcher les uns, servira à empêcher les autres, et plus sûrement que le port de Groais ne saurait le faire car je vous atteste, Messieurs, que ce poste est le plus favorable du royaume aux versements frauduleux. 11 est occupé par des hommes qui veillent sans cesse sur les signaux de la mer, et qui volent au devant des navires qui paraissent sur la côte, pour en enlever les marchandises
que l'on veut soustraire aux droits du roi ou aux recherches d'un armateur (1).
On peut, après cela, vanter la garantie du poste de Groais, contre les versements frauduleux. Vous saurez, Messieurs, apprécier cette garantie, et vous ne la regarderez pas comme suffisante pour vous déterminer d'ordonner que les retours de l'Inde soient exclusivement à Lorient dans la vue d'assurer le recouvrement des droits. Il est des moyens plus sûrs pour y parvenir. On pourra les faire connaître à votre comité. Ces moyens se concilieront avec l'intérêt public, avec l'intérêt particulier du commerce, sans rétablir les privilèges, sans créer des entraves, et sans s'écarter de la protection, et de la liberté nécessaire, due et réclamée par le commerce.
C'est dans ces principes que j'ai dressé le projet de décret que je vais avoir l'honneur de vous proposer.
PROJET DE DÉCRET POUR L'INDE.
Art. 1er. Les armements pour le commerce au-delà du Cap de
Bonne-Espérance pourront se faire dans tous les ports de France, ouverts au commerce des îles
françaises de l'Amérique. Ils jouiront des mêmes immunités.
Art. 2. Les fers en barres et en verges, les aciers, les plombs, les cuivres bruts et ouvrés, les ancres et grapins, tirés de l'étranger pour le commerce au delà du cap de Bonne-Espérance, recevront le remboursement des droits auxquels ils auront été assujettis à l'entrée, en justifiant de leur embarquement pour ladite destination.
Art. 3. 11 sera permis de faire venir de l'étranger de la poudre à tirer, nécessaire auxdits armements, à la charge de payer un droit de 5 0/0, et de l'entreposer jusqu'à l'embarquement sous la clef du fermier.
Art. 4. Les retours et désarmements des vaisseaux dudit commerce pourront se faire dans tous les ports de France indistinctement, de la même manière que les retours des colonies de l'Amérique.
Art. 5. Pour prévenir les versements frauduleux dans les ports et rivières, de marchandises
de l'Inde, le comité d'agriculture et de commerce se concertera avec les chambres de commerce
des ports du royaume, des employés de la régie des fermes, afin de déterminer la manière la
plus simple, laplus sûre, de prévenir lesditsversements frauduleux, et de la rendre
compatible avec sa
Art. 6. Les capitaines de Davires seront tenus de déclarer, dans les 24 heures après leur arrivée, la quantité et l'espèce de marchandises dont leurs navires se trouveraient chargés, d'indiquer les marques, les numéros les adresses des balles, ballots, caisses et futailles.
Art. 7. Le propriétaire ou le consignataire des marchandises sera obligé de représenter, dans huitaine après là déclaration du capitaine, au préposé de la régie générale, les factures originales aesdites marchandises, et d'en remettre des copies certifiées! par lui conformes aux originaux, sans être tenu néanmoins d'y faire mention de leur prix d'achat, lesdites factures ne devant servir qu'à constater les quantités et espèces, pour les assujettir aux droits du tarif et aux formalités qui seront-ci après désignés.
Art. 8. Le propriétaire, ou le consignataire des marchandises feront deux déclarations : l'une des marchandises qu'ils voudront mettre en entrepôt sous la clef du fermier, en exemption de droit ; l'autre de celles qu'ils voudront livrer à la consommation du royaume en payement des droits, et qui, par cela même, ne seront point sujettes à l'entrepôt. A l'égard de toutes les toiles bleues et toiles propres au commerce d'Afrique, elles seront nécessairement sujettes à l'entrepôt, et ne pourront en sortir que pour ladite destination, ou pour être exportées dans l'étranger.
Art. y.. Pour concilier la perception des droits avec la liberté du commerce, et pour simplifier les formalités de cette perception, il sera fait un tarif de l'évaluation de chaque marchandise d'au delà le Cap de Bonne-Espérance, spécifiées par espèce, et marquées, à l'instar du tarif pratiqué pour les retours des colonies de l'Amérique. Pour cet effet, tous les six mois les chambres de commerce des ports de France enverront au bureau de commerce à Paris un état du prix-courant de chaque espèce die marchandises de l'Inde dans leurs ports, réglé sur celui des ventes du commerce, certifiées par six courtiers ou autres agents desdites ventes, et sur ces états le bureau de commerce, de concert avec la régie générale, en fera une évaluation uniforme, pour servir de règle dans la perception des droits, sans que le propriétaire puisse être assujetti à aucune estimation arbitraire, ni à des opérations gênantes et nuisibles à son commerce.
Art. 10. Un mois après la déclaration du capitaine, les propriétaires et les cosignataires des marchandises seront obligés d'en acquitter les droits; et, pour 1a sûreté desdits droits, les préposés aux fermes seront autorisés de prendre les sûretés qui leur paraîtront convenables, de la même manière qu'il leur est permis pour les retours des colonies.
Art. 11. Les marchandises prohibées, dont l'importation sera permise, seront, comme par le passé, entreposées sous la clef du fermier, et assujetties aux mêmes formalités.
Art. 12. Les étoffes de soie de Chine, les porcelaines de couleur, les étoffes tissués de soie, ainsi que les toiles peintes, sont expressément prohibées.
Art, 13. Les toiles bleues, toiles à carreaux et autres propres au commerce d'Afrique, et toute marchandise prohibée, sujette à l'entrepôt, ne seront exportées à l'étranger que par mer; mais les toiles bleues et toiles destinées pour l'Afrique pourront être expédiées par terre, sous plomb et avec les formalités d'usage.
Art. 14. Les marchandises, autres que celles dé-
signées dans l'article précédent, pourront passer, par terre et par mer, a l'étranger, en remplissant ies mêmes formalités qui sont prescrites pour l'exportation des denrées coloniales.
Art. 15. Les marchandises comprises dans l'article 5 du tarif, quelle que soit leur destination, les toiles rayées et à carreaux, et les toiles bleues, appartenant à l'association connue sous; le nom de Compagnie des Indes, et qui sont actuellement dans les magasins de Lorient, ou qui arriveront pour son compte, par les bâtiments qu'elle a expédiés des ports de France, antérieurement au décret du 3 avril dernier, ne seront assujetties à d'autres droits qu'à ceux qu'elles payaient avant ledit décret ; mais, au cas que ces droits soient plus forts, par le nouveau tarif, l'exemption ci-dessus n'aura lieu que jusqu'au premier janvier 1792.
Art. 16. II sera permis à tous les propriétaires et cosignataires des marchandises de l'Inde de les vendre, soit en vente publique, soit en vente privée, et de faire ces ventes à telles époques et de la manière qui leur conviendra le mieux.
Art. 17. A. dater du 3 avril dernier, l'association connue sous le nom de Compagnie; des Indes, cessera de jouir de la portion des droits perçus sur les toiles de coton et sur les toiles peintes étrangères, qui lui avait été accordée par l'arrêt de son établissement, et des parts qui lui étaient réservées sur le produit des saisies des toiles et mousselines étrangères.
Art. 18. Tous procès intentés par ladite associ-tion, à l'occasion des marchandises provenant du commerce au delà du Cap de Bonne-Espérance, et apportées à Lorient, demeurent éteints.
Art. 19. Il sera perçu un droit de cinq pour cent, connu sous le nom d'induit, sur la valeur de toutes les marchandises provenant du commerce au delà du Gap de Bonne-Espérance. Indépendamment; des autres droits mentionnés dans le tarif, l'association, connue sous le nom de Compagnie des Indes payera ce droit de cinq pour cent, sur tous ses retours, à compter du premier janvier 1792.
Art. 20. Les magasins et les établissements du port de Lorient, qui appartiennent à 1a nation, et qui ne seront point nécessaires à la Marine ou à un service public, seront cédés au commerce, à titre de location.
Art. 21. Le produit du droit de l'induit de cinq pour cent sera spécialement employé à l'encouragement des manufactures de coton, sous la surveillance de l'Assemblée nationale.
Art. 22. Les dispositions des décrets qui seront rendus tant sur le fait des droits de traites que sur le commerce des colonies françaises, seront exécutées, dans les cas non prévus par le présent décret, et pour lesquels il n'y est pas dérogé.
OBSERVATIONS SUR LE TARIF.
Art. 1er Exemption entière des droits sur les soies de Nankin
et du Bengale, comme nécessaires pour nos manufactures de gaze, et pour encourager le
commerce direct, et prévenir le versement frauduleux des soies de la Compagnie anglaise.
Art. 2. Réduction des droits sur la canelle venant de Chine directement, ou de l'Ile-de-France, à raison de 10 livres par quintal, au lieu de 20 livres.
Idem. Sur le poivre, de 9 livres à 5 livres par quintal.
Ces deux objets sont nécessaires à notre consommation ; le dernier l'est surtout à celle du peuple, et l'intérêt général veut qu'en encourageant un commerce direct nous nous affranchissions du tribut que nous payons aux étrangers.
Art. 5. Les droits sur les marchandises blanches doivent rester sur le même pied que la compagnie des Iqdes les paye actuellement, parce qu'en les augmentant, on ouvre la porte à la contrebande.
Art. 7. Il faut absolument prononcer l'exemption de tout droit à l'exportation des marchandises de l'Inde dans l'étranger, comme le seul moyen de favoriser ces exportations.
Les productions territoriales des îles de France et de Bourbon, doivent rester assujetties aux mêmes droits que ci-devant.
Les cotons filés, soit dans l'Inde, soit aux îles de France et de Bourbon, doivent être admis en exemption de droit comme nécessaires à remplacer l'insuffisance des cotons en laines.
(L'Assemblée ordonne l'impression du discours de M. Paul Nairac.)
Le comité d'agriculture et de commerce a cru devoir consulter le comité d'impositions, pour savoir si les retours de l'Inde peuvent se faire avec avantage pour les perceptions du fisc dans tous les ports du royaume, ou dans le port unique de Lorient. Cette question intéressante fait essentiellement partie ae celle qui vous est soumise sur le commerce de l'Inde en général. Elle se réduit à ces termes : «Peut-on
Erévenir la fraude sans le privilège de Lorient ? »
e n'est pas ici le procès des ports contre Lorient ; c'est celui du négoce des ports contre les manufactures nationales. Ce n'est pas le procès de la liberté contre le monopole; c'est peut-être le procès du négoce de l'Inde, d'un négoce tendant lui-même au monopole, contre le commerce de nos fabriques; c'est peut être aussi contre le Trésor public et le commerce honnête. A ne considérer le port de Lorient que comme un port privilégié, il suffirait de suivre les principes que vous avez établis ; mais, sans la franchise unique de Lorient, on ne peut empêcher les retours frauduleux. Trois considérations puissantes invitent à prendre des moyens rigoureux pour les prévenir. Premièrement, il est important à l'intérêt public d'éviter la fraude. Le Trésor national attend de grandes ressources du commerce de l'Inde. Nous avons des manufactures de coton naissantes, mais déjà florissantes ; des manufactures de soie les plus belles de l'Europe, des manufactures de porcelaines ; et aucune d'elles ne peut soutenir la concurrence avec les marchandises de l'Inde. Le coton se file dans l'Inde avec la plus grande supériorité : toutes les circonstances de l'art et de ia nature assurent aux Indiens cette qualité supérieure que nous ne pourrons jamais atteindre. Seconde considération. L'immensité des bénéfices dans le commerce de l'Inde est un attrait puissant pour faire un commerce frauduleux. Le tarif de l'Inde étant plus sévère que le tarif commun, il y a plus à gagner à la fraude. Plus cet attrait et ces avantages seront | considérables, plus les moyens de réprimer la fraude doivent être rigoureux. La troisième considération sollicite encore cette rigueur ; c'est la facilité de la fraude : cette extrême facilité vient surtout de ce que les marchandises de l'Inde, sous un très petit volume, renferment une grande valeur.
Si tous les ports sont ouverts aux retours de
l'Inde, la fraude est inévitable ; la police nécessaire pour l'empêcher devient presque impossible., . Quel sera donc le port unique dans lequel l'intérêt, des fabriques nationales et celui du fisc exigent que se fassent les retours? La situation particulière de Marseille, et surtout ses grands privilèges... (On interrompt par des murmures.) Elle a le commerce exclusif du Levant. .. En vertu d'une déclaration de 1669, les marchandises du Levant payent un droit de 20 pour 100 dans tous les ports, excepté à Marseille ; c'est bien là un privilège exclusif... Ge n'est donc point à la ville de Marseille, si particulièrement privilégiée, à réclamer les principes de l'égalité. La police est difficile à faire à Nantes et à Bordeaux, à cause de la grande quantité des rivières qui rendent la surveillance presque impossible. jDans le port de Lorient, la surveillance des employés n'est pas partagée ; les recensements sont faciles dans les magasins... Les avantages qu'offre l'article 25, pour la suite dè la perception proportionnelle, ne peuvent être accordés au commerce de l'Inde qu'autant qu'il y a entrepôt ; et les avantages de l'article 21, qui donnent crédit de l'imposition jusqu'à la sortie de( l'entrepôt, ne peuvent être accordés qu'à Lorient. — (M. Rœderer appuie l'opinion qu'il présente du vœu du commerce; et, pour faire connaître ce vœu, il lit des délibérations de plusieurs villes maritimes.)
l'aîné (1), Messieurs, la question qui s'élève au sujet des retours de l'Inde est sans doute de la plus grande importance; mais la discussion a de quoi étonner ceux qui trouvent cette question déjà déeidée par l'un de vos décrets. L'Assemblée nationale a prononcé que le commerce de l'Inde serait libre pour tous les Français; et ce décret a été sanctionné.
Quel est le sens de cette loi? Ou elle est inintelligible, sans objet, sans application, ou elle assure la liberté du commerce de l'Inde à tous les ports du royaume, comme elle l'a rendue à tous les Français.
L'Assemblée nationale n'a point fixé le siège du commerce de l'Inde dans un lieu plutôt que dans un autre; elle l'a abandonné à la liberté, c'est-à-dire aux seules lois que prescrivent la nature de ce commerce et la police générale du royaume : chaque commerçant peut en calculer les effets; il les observe, ou s'en écarte, selon qu'il est plus ou moins habile, plus ou moins instruit ; car, en quoi peut consister la véritable science du commerce, si ce n'est pas à suivre les indications que lui montre la nature des choses?
Je ne conçois donc pas comment on a proposé d'assujettir ies commerçants de l'Inde à faire
leurs retours dans un port plutôt que dans un autre. Les mots gêne et liberté ne sont
synonymes dans aucune langue. Ge n'est point après avoir aboli les privilèges que la loi
pourrait créer des privilégiés. Tous les avantages locaux, résultant d'un entrepôt exclusif,
ne seraient-ils pas le domaine particulier des seuls habitants du lieu où il serait
renfermé? Ces habitants ne seraient-ils pas de véritables privilégiés ? Si la nature a créé
de semblables exclusions, celles -là sont respectables, celles-là naissent de la variété
qu'elle a mise dans ses
Comment la question a-t-elle été posée? Comment doit-elle l'être? On ne saurait demander à l'Assemblée nationale d'assujettir les retours de l'Inde à être déposés dans un seul port, sans lui proposer de se contredire elle-même, sans supposer qu'elle ne s'est pas entendue, lorsqu'elle a prononcé que le commerce de l'Inde serait libre pour tous tes Français.
Il serait moins déraisonnable de lui demander la révocation de son décret, pour le remplacer par celui-ci : Le commerce de l'Inde sera libre pour tous les Français qui voudront faire débarquer les retours dje l'Inde dans le port qui sera prescrit pour ce débarquement.
Alors F Assemblée nationale raisonnera comme ceux qui ont recréé la Compagnie des Indes ; ils ont dit : Le commerce de l'Inde sera libre pour tous ceux qui voudront le faire, en s1 associant à la Compagnie des Indes. Alors ceux qui auront rétabli cette compagnie auront peut-être été les plus sages, si la nécessité d'un seul port leur était démontrée.
Tout change, en effet, dès qu'il s'agit d'une restriction aussi importante. Pourquoi veut-on fixer un entrepôt exclusif ? Afin que lés marchandises de l'Inde s'y vendent d'une manière plus uniforme. Développez ce motif : êtes-vous Certains que la fixation du lieu à laquelle on se déterminerait pour un plus grand bien, n'entraînerait pas la nécessité de réunir les ventes dans la main d'un seul vendeur? a-t-on examiné la question sous ce point de vue? a-t-on dit : il n'y aura qu'un lieu de débarquement ; voyons si cette restriction n'en entraîne pas d'autres? Pour peu que, dans cet examen, Ion trouve qu'un seul vendeur en Europe serait plus convenable à la chose publique, n'arrive-rait-il point qu'on rentrerait par cela même dans la convenance d'un seul acheteur aux Indes; et qu'ainsi, la prétendue nécessité d'un seul port, uniquement fondée sur l'uniformité, obligerait à revenir au privilège exclusif d'une compagnie? M. de Galonné n'aurait pas tenté de la rétablir, si, avant M, en rendant la liberté au commerce de l'Inde, on n'avait pas assujetti les commerçants à déposer les retours dans le port de Lorient.
Ce ne sont point là de vains raisonnements. Tout est à recommencer si l'Assemblée nationale met en doute la question du lieu où débarqueront désormais les vaisseaux revenant de l'Inde.
Les lois d'égalité et de liberté proscrivent toute espèce de régime exclusif, à moins qu'un grand intérêt public n'exige impérieusement le contraire : voilà le principe. Qu'allégue-t-on pour le combattre?
On propose, comme des considérations sérieuses, ces trois motifs : les convenances des vendeurs et des acheteurs, l'intérêt des manufactures du royaume, la facilité de la perception des droits.
Je voudrais d'abord que l'on me dît quel est celui de ces motifs qui ne serait pas plus fort
pour faire renaître le privilège exclusif de la Compagnie des Indes ?
On assure que l'intérêt des vendeurs et des acheteurs exige la réunion des marchandises de l'Inde pour présenter aux vendeurs plus d'avantages, aux acheteurs plus de convenances. Je réponds que lorsque l'intérêt de tous exige évidemment que tous s'astreignent à la même combinaison, à la même mesure, il n'est pas nécessaire de la déterminer par une loi. S'il est des individus à qui cette mesure ne convient pas ; si de nouvelles circonstances changent l'état des Choses et indiquent un autre cours aux spéculations, comment, et en vertu de quel principe, le droit qui appartient à l'homme de disposer à son gré de sa propriété pourrait-il être enchaîné?
Si ce droit a dû être dans tous les temps respecté, serait-il violé par une Assemblée qui a lutté contre les exceptions de tous les genres, qui a détruit tous les privilèges, qui a restitué toutes les propriétés que le despotisme ou une fausse politique avaient usurpées ? Il serait aussi contraire aux droits de l'homme, ou plutôt aux droits du citoyen, de gêner les spéculations d'un commerce permis, que .de mettre des entraves aux transactions sociales. 11 serait aussi absurde de forcer le vendeur d'exposer sa marchandise dans tel marché plutôt que dans tel autre, sous le prétexte des convenances publiques ou particulières, qu'il le serait de soumettre la culture de nos champs au même procédé, ou de nous forcer à vendre nos denrées territoriales dans tel marché déterminé. Ne dirait-on pas, pour justifier ces lois de police, que des rapports plus utiles, que des approvisionnements mieux combinés prescrivent cette gêne en faveur de l'utilité publique? Heureusement le temps de ces calculs empiriques a disparu; on sait aujourd'hui que toutes ces modifications ne sont que la violation des principes. Laissez faire; laissez passer : voilà, en deux mots, le seul code raisonnable du commerce.
Mais est-il vrai que l'intérêt des vendeurs et des acheteurs soit de réunir les marchandises dans un seul lieu? Je ne connais qu'un seul intérêt pour les vendeurs, c'est de bien vendre; et pour les acheteurs, d'acheter à bas prix : d'où il suit que si la détermination d'un port exclusif exige des dépenses plus fortes, des frais plus considérables, par cela seul l'intérêt des uns et des autres est violé.
Or, supposons que le port de Lorient fût le seul où les retours de l'Inde devraient aboutir, comment les armateurs de la Méditerranée ne seraient-ils pas forcés de renoncer au commerce de l'Asie ? Leur éloîgnement du port de Lorient ne les soumettrait-il pas à des dépenses, à de3 dangers qui les empêcheraient de soutenir la concurrence des ports de l'Océan ? Gomment un armateur de Cette, de Toulon, de Marseille pourrait-il jouir de la liberté du commerce, si, après avoir fait décharger son navire à Lorient, il était ; obligé de le faire revenir, sans fret, dans son port d'armement; d'essuyer une navigation de deux mois, inutile, dangereuse et dispendieuse, et de le réexpédier, après cette surcharge de dépenses et de périls ? Gomment ce même armateur pourrait-il se décider, chaque année, à quitter ses foyers, à traverser tout le royaume pour aller disposer de sa propriété et surveiller ses ventes V Le régime exclusif ne convient donc pas } aux vendeurs; et comment conviendrait-il mieux aux acheteurs, puisque l'excès des dépenses des
uns doit toujours être en partie supporté par les autres ?
Personne n'ignore d'ailleurs que la réunion des marchandises de l'Inde, dans le seul port de Lorient, en concentre la vente dans quelques maisons opulentes, qui peuvent couvrir leurs dépenses par l'étendue de leurs spéculations, tandis que ces mêmes dépenses écartent presque tous les marchands du royaume.
Ce n'est pas tout : le commerce de l'Inde est tel que les pertes excèdent les bénéfices, si les navires qui apportent des marchandises pour notre consommation n'en apportent pas aussi pour les besoins de l'étranger. Je n'ai pas besoin de le prouver à ceux qui ont la moindre connaissance de ce commerce; mais la réunion des retours dans un seul port est évidemment un obstacle à la réexpédition des mêmes marchandises pour tous les ports de l'Europe. Ce n'est pas en indiquant un seul point d'arrivée qu'on rendra plus faciles, qu'on multipliera les diverses routes par lesquelles l'excédent de nos marchandises de l'Inde doit être distribué à nos voisins. Ce n'est pas du port de Lorient que le négociant de la Méditerranée réexpédiera pour le Levant et pour l'Italie. Vous nécessitez donc, par un port exclusif, ce commerce interlope que le privilège de la compagnie des Indes avait introduit : vous forcez les armateurs de la Méditerranée à armer leurs vaisseaux dans tes ports étrangers, et à faire partager ainsi, sans péril, à nos voisins, tous nos avantages.
On a dit qu'un des inconvénients du commerce de l'Inde est d'importer, pour notre consommation, des marchandises manufacturées, au préjudice de nos fabriques, d'exporter le numéraire nécessaire à ces mêmes fabriques; et l'on prétend * que cet inconvénient sera beaucoup moindre, si les retours de l'Inde sont concentrés à Lorient.
C'est précisément la conséquence opposée qu'il est facile de démontrer. De tous les ports du royaume, ceux de la Méditerranée ont le plus de moyens d'économiser le numéraire dans les exportations, et d'employer plus de marchandises d'importation dans nos échanges avec l'étranger. Les denrées de nos provinces méridionales, les étoffes du Languedoc, sont des objets d'échange qui réussissent parfaitement dans l'Inde, et qui suppléent le numéraire. D'un autre côté, les besoins de l'Italie, de l'Espagne et du Levant offrent dans la Méditerranée une consommation des retours de l'Inde, que ni le port de Lorient, ni aucuns de ceux du Ponent ne pourraient s'attribuer; et cette consommation est d'autant plus avantageuse, qu'elle se convertit, soit en argent, ce qui remplace le numéraire porté dans l'Inde, soit en matières premières, ce qui devient une nouvelle source de commerce.
Ces faits sont indubitables, les conséquences en sont évidentes. Si vous craignez la concurrence des marchandises de l'Inde pour vos manufactures ; si vous voulez en diminuer l'effet, ne prenez-vous pas un moyen contraire à votre propre but, lorsque vous concentrez les retours de l'Inde dans un seul port, puisque un seul port est moins favorable aux exportations de l'excédent des marchandises de l'Inde ?
La ressemblance entre les effets du privilège exclusif de la Compagnie des Indes et ceux du privilège exclusif d'un seul port se fait encore ici remarquer par rapport au commerce interlope. Les négociants français de la Méditerranée, qui ont des relations en Asie, ont fait jusqu'à présent leurs expéditions par les ports d'Italie; et les
peuples de la Méditerranée sont habitués à consommer, à recevoir directement les marchandises de l'Inde. Il arrivera donc nécessairement, si nous ne plaçons pas un entrepôt des mêmes marchandises à leur voisinage, ou qu'ils pourvoiront eux-mêmes à leurs besoins, en suivant la route que nous leur avons indiquée, ou que leur consommation sera beaucoup moindre, s'ils ne reçoivent ces marchandises que par la voie de Lorient, puisque ce transport sera plus coûteux et plus difficile : ou plutôt qu'ils les recevront des compagnies étrangères introduites ainsi par nos fautes, dans les seuls approvisionnements que la nature des choses les forçait de nous abandonner.
Enfin, on veut retenir les marchandises dans un seul port, relativement aux droits du fisc, pour rendre la surveillance plus facile et diminuer les moyens de contrebande.
D'abord, si par surveillance on entend l'activité inquiète du régime des prohibitions, je ne vois plus ni commerce, ni liberté de commerce. Je ne veux pas que l'on renonce à faire, des droits fiscaux sur les retours de l'Inde, une branche de revenu public ; mais je ne conçois pas qu'il faille, pour y parvenir, violer la liberté, la sacrifier à deg inquiétudes; je ne conçois pas qu'il faille blesser la justice qui est due à chaque armateur et à chaque port, tandis que les droits de fisc peuvent être partout assurés par les plus simples précautions, par les plus modiques dépenses.
Jugeons-en par l'exemple même des ports francs ; car si le revenu public peut être assuré dans ces ports, à plus forte raison pourra-t-il l'être daus tous les autres. Marseille, par exemple, quoique port franc, fait le commerce des colonies. Là, cesse sa franchise : l'exercice fiscal s'y fait comme partout ailleurs; il s'y fait avec succès : et pourquoi craindrait-on pour les retours de l'Inde des inconvénients qu'on n'éprouve pas pour les retours des colonies, qui certainement sont une branche de revenus plus féconde pour le Trésor public? Si les droits sont payés, dans un cas, pourquoi ne le seraient-ils pas dans l'autre ? Si l'on peut prévenir la contrebande, même dans un port franc, comment la crainte de la contrebande serait-elle une objection contre la liberté du commerce ? Gomment, d'ailleurs, ces inconvénients ne seraient-ils pas plus à redouter en bornant les retours de l'Inde à un seul port qui n'a d'autres ressources que des consommations intérieures? Sera-t-on plus porté à faire la contrebande dans les ports qui peuvent se débarrasser de l'excédent des marcnandises par de grandes fournitures au dehors ?
Au reste, Messieurs, l'objection que je combats porte sur un principe évidemment faux, dont le redressement va nous conduire à un résultat entièrement opposé.
On a reconnu depuis longtemps, en Angleterre, comme chez nous, que les désavantages du commerce de l'Inde ne peuvent être compensés, pour une nation, qu'autant qu'elle rapporte en Europe un grand excédent de marchandises, pour en faire un objet d'exportation. On a également reconnu que cette exportation ne peut se faire avec succès qu'en exceptant de tout droit la portion de ces marchandises qui, n'étant placées dans les ports qu'en entrepôt, doit bientôt prendre une autre direction : et comme en Angleterre les droits sur les retours de l'Inde forment une partie du revenu public, on avait soumis au payement provisoire des droits, pour éviter la contre-
bande, les marchandises même que le négociant se proposait de réexpédier. Hé bien ! Messieurs, l'expérience a appris aux Anglais que ces précautions n'étaient qu'une gêne ruineuse. Ce payement provisoire des droits écrasait le commerce, consommait inutilement une partie du numéraire de l'armateur. L'Angleterre a renoncé à l'exiger; et, à cet égard, le port de Londres est regardé aujourd'hui comme un port franc.
Or, Messieurs, appliquez cette théorie à la France, et voyez-en les conséquences. S'il est indispensable qu'une partie des marchandises de l'Inde,destinées à être réexpédiées pour l'étranger, ne payent aucun droit dans quelques ports, cette distinction peut-elle être mieux faite que dans les ports francs ? Et, dès lors, s'il était vrai que les retours de l'Inde dussent être bornés à quelques ports, d'après le prétendu système de prohibition dont on nous parle, ne sont-ce pas les trois ports francs du royaume qu'il faudrait préférer à tous les autres?
Je vais traiter, en peu de mots, ce second point de vue; mais je vous prie d'observer qu'il se concilie parfaitement dans mon système avec la liberté des retours de l'Inde dans tous les ports. Il suffit qu'il y ait des ports francs sur nos côtes, pout que l'armateur qui voudra réexpédier une partie de ses marchandises à l'étranger, et qui préférera le régime des ports francs à celui des entrepôts, fasse conduire dans ceux-là son navire.
La liberté absolue du commerce de l'Inde dans tous les ports fournira sans doute un plus grand excédent de marchandises ; aussi cette liberté forme-t-elle la première partie de mon système: mais en supposant que l'on doive borner les retours de l'Inde à un seul port, ou à un nombre limité de ports, vous rendrez ce commerce dangereux pour les armateurs, si vous les astreignez à débarquer leur retours dans un port non franc. Il faut alors que ce commerce supporte des droits : moyen sûr d'éloigner les étrangers; il faut alors que l'armateur calcule ses retours pour une consommation limitée ; cette obligation s'arrange assez mal avec des achats en concurrence dans un pays séparé de la France par des milliers de lieues ; et c'est ce que n'ont pas manqué de faire valoir les partisans du commerce exclusif de la Compagnie des Indes.
Dans le système des ports exclusifs, il faut donc que le lieu qui jouira seul du droit de recevoir lés retours de l'Inde soit un port franc ; et c'est ce que l'on peut démontrer par les motifs qui ont fait établir une telle franchise. Quels seraient ces motifs, si ce n'est les obstacles que les impositions intérieures et les formalités lis-cales mettent au commerce extérieur? Et pour quel commerce ces obstacles seraient-ils plus à craindre que pour celui de l'Inde, qui, plus que tout autre, ne peut se soutenir que par la réexportation, et dont il importe d'enlever sans cesse la surabondance, en offrant un débouché facile au concours des étrangers? Alors ce commerce sera libre. Adopter d'autres mesures serait inviter les armateurs à l'entreprendre avec la certitude de se ruiner.
Quels seraient dans un tel système les ports francs, privilégiés ? La réponse est dictée par la même raison qui a nécessité l'affranchissement. Ce seraient les ports où se réunissent, et la plus grande commodité pour les consommations intérieures, et les avantages les plus propres à attirer les acheteurs étrangers, ou à faciliter les envois hors du royaume. Si la loi fait des ports
francs, c'est la nature qui les indique ; c'est elle qui détermine notre choix.
Les convenances qui nécessitent ces franchises locales, par lesquelles il a fallu remédier à notre ignorance ou à nos préjugés en matière d'impôts ; ces convenances ont conduit à les multiplier, et les mêmes motifs nous forceraient d'admettre plusieurs ports francs pour lé commerce de l'Inde ! Ce serait à chaque commerçant à préférer celui dans lequel ses marchandises devraient arriver. Un de ces ports obtiendrait-il la préférence sur tous les autres ? C'est, sans doute, parce qu'il serait plus favorable ; et, sous ce rapport, comment le législateur pourrait-il s'en enquérir ? Les éléments de cette faveur, peuvent-ils être l'objet d'une loi?
Ne l'oubliez jamais, Messieurs, vous avez reconnu que la liberté consiste à faire tout ee qui ne nuit pas aux autres ; que Vexercice des droits^ naturels de l'homme n'a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la société la jouissance des mêmes droits. Cette théorie n'est pas seulement applicable à l'état social ; elle doit former aussi le code de votre industrie, le code de votre commerce.
En suivant ainsi les conséquences naturelles du système d'un port exclusif, vous voyez qu'il est impossible de tenir un milieu raisonnable entre la liberté indéfinie et une gêne absolue ; chacun de ces systèmes a ses lois; les milieux n'en ont aucune. Ce sont des faiblesses et voilà tout : si vous vouiez gêner, il faut embrasser dans vos gênes tout ce qui en est susceptible ; les gênes peuvent être des erreurs, mais c'est incontestablement une absurdité que de ne pas les établir de manière à sauver les contradictions.
Dira-ton qu'un nombre limité de ports francs est déjà une gêne ? Mais ceci tient à la police générale du royaume. Dans les arrangements politiques, on a mis les impositions avant tout, et l'on traite encore de chimères les idées simples qui concilieraient les avances sociales avec la liberté et la franchise de toutes les productions. Il faut donc se conformer à cet ordre, bon ou mauvais, qui, au lieu d'assortir les impositions aux maximes générales du commerce et de l'industrie, a voulu plier celles-ci aux impositions. Il en a résulté des ports francs, des lieux privilégiés que la fiscalité respecte : c'est le dépôt naturel, le domicile des marchandises étrangères. Cela n'empêche pas que les commerçants ne fassent aborder et décharger leurs vaisseaux dans les ports non privilégiés, si quelque spéculation particulière les y invite.
Ainsi, tout s'arrange le moins mal possible. En laissant au décret de l'Assemblée nationale toute sa latitude, le commerce de l'Inde sera libre pour tous les Français, c'est-à-dire que cette liberté ne sera modifiée que par les résultats nécessaires du système des impositions. La puissance législative dit aux commerçants de l'Inde : « Nous « avons besoin d'impôts ; nous croyons que les « marchandises de l'Inde doivent en fournir une « partie. Pour les percevoir, il faut des barrières ; « cependant, ne voulant prohiber ni l'entrée ni « la sortie des marchandises étrangères, nous « avons senti qu'il fallait des points où elles pus-« sent arriver, et prendre de là une nouvelle di-« rection, sans être gênées par les impôts et les « formalités de la perception. Nous avons établi « ces points, et nous les avons placés partout où « les égards que nous devons au commerce étrange ger peuvent le permettre. Faites maintenant « comme vous jugerez à propos : c'est aux loca-« lités à diriger vos spéculations. »
L'objection que plusieurs ports nuisent plutôt qu'ils ne favorisent le commerce de l'Inde, n'en est pas une. Outre qu'elle est mal placée dans la bouche de ceux qui prétendent avec raison que le c ommerce des Grandes-Indes est désavantageux au commerce, les commerçants sont les seuls juges de ce qui est favorable ou défavorable à leurs spéculations : c'est affaire de circonstances, et la meilleure loi à cet égard est celle de gêner le moins possible.
D'ailleurs, nous pouvons regarder comme certain que notre commerce des Grandes-Indes est dans l'enfance. On n'est point commerçant sous le régime des privilèges exclusifs. Les chaînes tombent : qui peut dire où la France portera le commerce des Grandes-Indes, si tous ses ports lui sont ouverts, si nous savons, dès à présent, entrer dans une grande carrière avec tous nos avantages naturels et acquis ? Que ceux qui parlent pour un entrepôt exclusif oublient qu'il y a une révolution, que la France est maintenant uu Etat libre : ce n'est pas du moins à l'Assemblée nationale à l'oublier.
Mais il faut favoriser les manufactures indigènes. Veut-on tout faire ? cela même est une prétention contraire au commerce. Elle suppose qu'on arrivera au point de n'avoir plus que l'or à recevoir des étrangers, ce qui réaliserait rapidement l'instructif apologue de l'infortuné Tantale, ou plutôt ce qui rappelle la fable du stupide Midas, cet ingénieux emblème de nos prétendus grands hommes en finance.
On ne doit pas tout faire, lors même qu'on en aurait le moyen. Il faut donc laisser à la liberté le soin d'appliquer elle-même l'industrie aux localités; il faut leur laisser le combat entre elles, car c'est à elles qu'appartiennent les victoires les plus sûres, ou plutôt ce partage heureux des productions de l'art qui, s'assortissant à celui des productions du sol, est un moyen paisible d'alliance entre tous les peuples. Ge n'est pas tant de richesses que nous avons besoin, que ae mouvements qui développent nos facultés. La liberté nous rend cet utile service. Elle attache à ces développements des .jouissances et des avantages que nous perdons par les contraintes qu'on s'impose toujours à soi-même, lorsqu'on veut les imposer aux autres. Que si cette politique est trop simple pour nos grands administrateurs, qu'ils observent du moins que rien ne favorise autant l'industrie que la concurrence. Quand on ne peut
Eas lutter d'une manière, on lutte de l'autre.
orsque les Anglais ont senti le désavantage du prix de leur main-d'œuvre, ils ont eu recours à des machines, à des perfectionnements, à des procédés ingénieux. On eût fait comme eux, si l'on ne se fût pas fié aux prohibitions, et l'avantage du prix de la main-d'œuvre serait resté à la France, parce qu'il tient au sol.
Depuis le traité de commerce, on peut déjà reconnaître dans plusieurs objets que la libre concurrence ne tarde pas à aevenir un régime plus fécond que les prohibitions.
Ainsi, lors même qu'en amoncelant les retours de l'Inde dans un seul port, on prétendrait favoriser les manufactures indigènes, on se tromperait encore. L'imitation n'est excitée que par la présence continuelle et multipliée de l'objet qu'il est avantageux d'imiter; et cette présence, qui féconde l'imagination, est plus rare, agit sur moins d'individus, à proportion que le commerce est plus entravé.
Vous voyez, Messieurs, quelles sont les conséquences du système que je vous propose. Je vous
ai montré d'abord que les Véritables principes nous forçaient d'accorder, ou plutôt de laisser à tous les 'ports la liberté de recevoir les retours de l'Inde. J'ai prouvé que si l'on voulait suivre le système des ports exclusifs, le véritable résultat d'un tel système nous forcerait à préférer des ports francs aux autres ports ; mais j'ai fait remarquer en même temps que la conservation de plusieurs ports francs, nécessaires au commerce de l'Inde, se conciliait parfaitement avec la liberté indéfinie, accordée à tous les ports. Il me reste encore à prouver, pour ceux qui persistent à soutenir qu'il ne faut qu'un seul port dans le royaume pour y concentrer les retours de l'Inde, il me reste à prouver, contre l'étrange disposition de votre comité d'agriculture et de commerce, que pour l'intérêt du royaume, 1e port de Marseille, dans le système d'un entrepôt exclusif, devrait l'emporter sur tous les autres par sa position qu'il est permis d'envièr, mais que la loi, moins Irorte que la nature, ne peut lui oter.
J'ai déjà montré que de tous les ports du royaume ceux de la Méditerranée ont le'plus de moyens d'économiser le numéraire dans les exportations, d'écarter les compagnies étrangères, qui fréquentent d'autres parages, et approvisionnent d'autres nations, et d'employer plus de marchandises d'importation dans nos échanges avec l'étranger.
Il est encore d'autres avantages. De tous les pays du monde, la Turquie est celui qui consomme le plus de marchandises de l'Inde ; c'est par la mer Rouge, par le golfe Persiquéet par des caravanes, que l'Empire ottoman s'approvisionne de tout ce dont il a besoin. La nécessité ouvrit ce3 routes avant la découverte de la navigation par le Gap de Bonne-Espérance ; l'habitude stupide les fait conserver à un peuple routinier»
Cependant, plusieurs négociants très habiles ont considéré qu'il serait tout à la fois plur sûr et plus économique d'approvisionner la Turquie par la route du Cap de Bonne-Espérance. On a fait le parallèle des deux spéculations ; on a calculé les dangers et les dépenses des deux méthodes : on a démontré que sans apprécier ies périls de la navigation sur la mer Rouge, les pillages des hordes d'Arabes, les viplences qu'éprouvent souvent les caravanes et lés révolutions fréquentes qui agitent les pays qu'elles sont obligées de traverser, il y aurait une différence de plus de cinquante pour cent, dans lés frais,; à l'avantage dé la route du Cap.
On a encore prouvé que le transport par les caravanes est nuisibles aux marchandises, parce qu'elles sont exposées à l'air pendant trop longtemps. Ces observations oht été mises plusieurs fois sous les yeux du ministère : et si le crédit de la Compagnie exclusive des Indes, n'y avait apporté des obstacles invincibles, la ville de Marseille aurait obtenu depuis bien des années la liberté de recevoir directement les retours de l'Inde dans son port, et de les faire passer de là à Gonstantinople.
Voilà, Mesieurs, une nouvelle et grande carrière que Marseille seule peut ouvrir au commerce. Si eette spéculation a été dédaignée par le despotisme, c'est à la liberté à l'adopter. 11 suffirait de placer l'entrepôt des marchandises de l'iode dans le voisinage de la Turquie, pour procurer à Marseille, et par céla même aû royaume, la fourniture exclusive de ces marchandises dans tout l'Empire ottoman. Une source immense de nouvelles spéculations serait le résultat de cette nouvelle conquête.
Mais l'Assemblée nationale a-t-elle besoin de ce motif pour savoir que Marseille est la capitale du commerce de l'Italie, du Levant et de toute la Méditerranée, c'est-à-dire d'une partie du globe où ce seul port peut faire le commerce de l'Inde ? Qui ignore que ce port du midi et de l'orient de la France a des avantages à reconquérir sur les ports d'Italie; que ces avantages lui ont été ravis par les meurtres de la fiscalité, et que la liberté doit les lui rendre avec usure ? Qui ignore que ce port est plus propre qu'aucun autre à lutter utilement, sur une plus grande partie de points, contre la concurrence de l'Angleterre? Ce port est le seul où le commerce n'a pu être déplacé par les vicissitudes des siècles ; il est irrévocablement marqué au doigt de la nature ; et si la France ne devait avoir qu'un port de mer, les temps indiquent Marseille.
Marseille est le seul port du royaume qui puisse empêcher l'Italie soit de faire le commerce de l'Inde, soit d'en profiter. Trois vaisseaux expédiés de Marseille pour l'Inde, sous pavillon toscan, sont revenus à Livourne, sur la fin de l'année dernière ; une cargaison y a déjà été vendue, les deux autres s'y vendent dans ce moment : dans huit séances ies Italiens ont acheté pour seize cent mille livres; tous ces achats sont destinés pour le Levant, pour l'Italie, peut-être même pour la France.
Un autre navire, parti de Marseille sous pavillon savoyard, a apporté de Surate une cargaison de coton, qu'il a vendue à Villefranche, pour Gênés, et nous avons été privés de ce3 matières premières.
C'est ainsi que les prohibitions les plus absurdes forcent les Marseillais à porter aux Italiens ce que les Italiens viendraient acheter à Marseille ; c'est ainsi qu'on enseigne, à Livourne et à Ville-franche, à faire le commerce des grandes Indes, et que, pour quelques misérables calculs de fiscalité, on se laisse enlever des trésors. Quand finiront ces honteuses erreurs? quand aura-t-on, en financés, des calculateurs politiques, des esprits libéraux qui sachent comparer ce qu'un peu de contrebande enlèverait à un bureau des fermes ou de la régie, avec les pertes que la richesse nationale, vraie source du fisc, fera toujours, lorsque les commerçants seront dans l'alternative de renoncer à leurs conceptions, ou d'en partager le bénéfice avec des villes étrangères, qui n'en jouiraient pas, sans ces fautes du gouvernement?
Je pourrais donc dire à ceux qui veulent un entrepôt exclusif : Indiquez un port du royaume qui soit plus propre que celui de Marseille à devenir l'entrepôt des retours des Indes, à les distribuer dans une plus grande partie du globe, à se procurer des échanges qu'il faut porter dans l'Inde, à profiter de ceux qu'il faut recevoir des étrangers, à lutter contre les Anglais, là où notre position nous permet d'avoir sur eux de véritables avantages, à lutter contre toutes les compagnies étrangères, succès que le port de Lorient ne peut obtenir, parce qu'il est trop rapproché de ces compagnies et des marchés où s'établirait la concurrence. Mais comme je ne veux pas de système exclusif, que ma vie entière a été et sera destinée à combattre, je me borne à dire : Marseille est un port franc; Marseille est un grand dépôt de commerce : par quelle bizarrerie, pouvant armer des Vaisseaux pour les Indes Orientales, lui interdirait-on d'en recevoir les retours dans son port? Serait-ce parce que ses retours y trouveraient des débouchés faciles et avantageux ? Il faut dônc que les villes de France
se déclarent la guerre entre elles; qu'associées pour la liberté, elles s'en disputent les bienfaits !
Hâtez-vous, Messieurs, de solliciter la fin de ces méprises, en décrétant :
Ou que les retours de l'Inde pourront être portés dans tous les ports;
Ou qu'il n'y a pas lieu à délibérer, attendu votre précédent décret sur la liberté du commerce de l'Inde.
(L'Assemblée ordonne l'impression du discours de M. de Mirabeau.)
Une réclamation du canton de Bâle, au sujet de biens qu'il possède en Alsace, est renvoyée au comité féodal.
La séance est levée à dix heures du soir.
a la séance de l'assemblée nationale du
Mémoire sur les impressions à ordonner par les corps administratifs, et sur l'envoi des décrets aux municipalités.
VAssemblée nationale va établir, dans les qua-tre-vingt-trois départements, uniformité d'administration.
Cette vue si sage amène à la nécessité de n'user que des mêmes moyens d'exécution : ainsi, mêmes registres pour toutes les administrations dans l'étendue de l'Empire. S'il existe quelque différence, elle ne consistera que dans les changements de noms des districts et des départements.
De là résulte l'extrême facilité d'obtenir, dans la masse totale des impressions communes à toutes les administrations, une économie, une célérité et une utilité dignes de fixer l'attention d'administrateurs sages et prudents et celle même des représentants de la nation.
Économie.
Les planches d'un registre, d'un tableau, ou de tel autre objet, une fois établies, peuvent être communes à tous les corps administratifs.
Elles le peuvent d'autant plus facilement, que le nombre de ces registres est ordinairement peu considérable pour chaque administration. Ainsi, facilité dans l'exécution, économie importante dans la main-d'œuvre, d'autant plus chère que le nombre d'exemplaires dont elle est le résultat est peu considérable.
Il est telle planche de tableau qui ne peut s'établir à moins de quatre louis.
Ainsi, il est incontestable que si chaque département fait imprimer, par exemple, un registre dont la planche revienne à ,72 livres* il en coûtera pour 1 établissement de quatre-vingt-trois planches semblables, 5.976 livres, au lieu que si la planche est commune aux quatre-vingt-trois départements, chaque administration n'aura à payer pour son quatre-vingt-troisième que 17 sols 2 deniers.
Il est tel registre qui coûterait 150 livres, isolément imprimé, qui ne reviendra pas au tiers, si l'impression est commune à toutes les administrations.
Et comme, en général, les registres seront peu considérables pour chaque administration, il en résulte une économie immense. On acquiert aussi une célérité précieuse pour l'unité d'action, en ce que toutes les administrations se trouvent servies à la fois.
L'ordre une fois établi, ce travail, quel qu'il soit, peut être réduit aux termes les plus simples et procurer l'économie du temps et des avances.
Il est inutile de s'appesantir sur les calculs. Qui ne concevra facilement que pour peu qu'il existe des impressions de cette nature, la dépense des planches se trouve réduite de 1,992 livres à 24 livres, et de 24 livres à 5 sols 10 deniers pour chaque département?
C'est particulièrement sur l'impression des décrets que ce calcul peut porter avec succès, puisqu'à une économie bien plus considérable, encore que celle dont on vient de parler, se réunissent plusieurs autres avantages qu'il est aisé d'apprécier : ceux de la certitude à tout moment de l'envoi des décrets; la célérité de ces envois, et l'utilité évidente qui résulterait du mode d'impression que je vais proposer.
Pour l'économie, trois moyens de l'effectuer :
1° En réduisant pour les municipalités le format in-4° à l'in-8°, ce qui diminue le papier de moitié, en supposant l'impression de chaque décret faite isolément.
En effet, que l'impression d'une demi-feuille in-4°, tirée à 500 revienne, composition et tirage, à............................ 11 liV. 15 s. i d.
Le papier, dix mains (la rame à 12 liv. 10 sols, prix de Paris). 6 5
Total.......18
La demi-feuille in-4° réduite à un quart in-8°, formant également quatre pages d'impression, reviendra pour la main-d'œuvre
à.............. 9 1.12 s.6 d. ) 12
Papier, 5 mains, à 3 2 »
14 s. 6
Voilà donc une économie de.. 5 5 6 opérée uniquement par le changement de format.
2° En faisant, par exemple, un tirage commun aux 83 départements pour toutes les municipalités, au nombre de 41,500, ou environ, on opérera une autre économie; en voici la raison :
Le nombre de 500 exemplaires tirés isolément, revient à 2 livres 10 sols; le mille ne coûte que 3 liv. 10 sols ; ainsi, pour imprimer deux fois 500, on débourse deux fois 50 sols, tandis qu'on ne débourse que 3 liv. 10 sols pour tirer 1,000 à la fois.
Voilà donc une économie de 30 sols par mille dans les déboursés de l'imprimeur, qui en opère une de 2 livres 12 sols 6 deniers pour celui qui fait imprimer. Mais si vous faites deux [compositions d'un décret qui n'aura que 4 pages, vous réduirez le prix du tirage de 41,500, à moitié; car il n'en coûte pas plus pour tirer 8 pages que 4.
3° Enfin, une dernière économie, et c'est la plus considérable, c'est l'impression en corps de volumes, sans blanc et sans intervalle.
Outre l'utilité particulière de l'impression des décrets en corps de volumes, et dont je parlerai à l'article utilité, je ne crains pas d'avancer qu'on obtiendra, dans la dépense ci-dessus détaillée, la réduction d'un tiers sur le papier, qui se trouve absolument perdu sans nécessité, et dans la main-d'œuvre, puisque les pages blanches se payent comme si elles étaient ouvrées.
Dans un calcul fait sur 200 décrets isolément imprimés sur une demi-feuille in-4°, 13 seule dépense a été réduite à près de 300,000 livres.
Autre économie.d'environ moitié à obtenir sur les décrets en placard.
Si l'on retranche ensuite la dépense très inutile du papier blanc, si mal à propos prodigué, à quelle simplicité ne réduit-on pas ce travail, outre la réduction de plus d'un tiers sur la dépense déjà diminuée de la manière qu'on l'a ci-dessus détaillé.
Célérité dans.l'impression et l'expédition.
Et, en effet, le temps employé à l'arrangement des pages blanches, l'espace qu'elles occupent dans les planches à imprimer, outre la dépense, est entièrement perdu, car si au lieç de ces pages blanches il existait un autre décret, il est constant qu'on en imprimerait deux à la fois au lieu d'un.
Pour l'expédition, la célérité est aisée à apercevoir.
Il est clair que si les décrets sont envoyés aux corps administratifs, en même' temps que ceux qui leur seront adressés par le ministre de la justice, cette célérité d'expédition est incontestable, puisqu'à l'instant même de l'arrivée des décrets, le procureur général syndic pourra faire son expédition aux districts de son ressort, puisqu'il n'aura d'autre soin à se donner que celui de faire remplir, par un de ses commis, la date de la transcription de la mention de cette même transcription sur les registres de son département, mention qui doit'se trouver tout imprimée à la fin de chacun des décrets. Il n'a donc pas l'embarras de penser à cette impression et de l'attendre plusieurs jours pour faire ses envois.
Le procureur-syndic du district n'aura, pour les municipalités de son arrondissement, que cette même formalité à remplir, avant de faire son expédition.
Ce peu de mots suffit pour faire sentir l'évidence de cette célérité.
Unité de la réunion des décrets en corps de volumes•
Il ne suffit que d'exposer cette utilité, pour la faire apercevoir.
L'économie ;
La célérité dans les envois, dont la multiplicité se trouve réduite, et le service général extrêmement simplifié.
Enfin, la connaissance exacte des décrets que l'on rend ainsi plus aisée.
Il est bien certain que l'envoi isolé des décrets ne produit que confusion et que désordre; c'est un chaos inestricable à débrouiller pour tout fonctionnaire public : le but pour lequel ils sont envoyés se trouve donc manqué totalement ;
Que dans une pareille collection de décrets isolément imprimés, le fonctionnaire public ne peut s'assurer, en aucune manière, si cette collection est complète, rien à cet égard ne pouvant lui en donner la certitude;
Que faute de bien connaître la loi , elle demeure sans exécution, ou qu'elle est faussement appliquée;
Ou bien que cette confusion donne lieu à une foule d'incertitudes : de là, des demandes en .interprétations, en décisions, en consultations; des prétextes de se soustraire à l'exécution de la loi :
un temps précieux se perd, et de ces retards résulte un vrai dommage pour la chose publique.
Un moyen simple, capable de parer à tous ces inconvénients, ne peut donc manquer d'être favorablement accueilli.
Ce moyen, je m'empresse de le proposer, c'est l'impression des décrets en corps de volumes, à la fin de chacun desquels sera placée une table des matières bien faite.
Ainsi, le fonctionnaire public aura une collection complète, dans laquelle il lui sera aisé de trouver à ['instant le décret, l'article du décret, de l'exacte connaissance duquel il lui importera de s'àssUrér, pour eh faire l'application.
Ainsi, il ne consumera pas un temps précieux dans des recherches pénibles et rebutantes parce que, le plus souvent, elles sont infructueuses.
Ainsi, l'interruption des pages lui fera connaître tout d'un cbup s'il existe une lacune dans ses envois.
Ainsi, les demandes en consultation deviennent moins fréquentes.
Ainsi, les prétextes d'éluder la loi s'évanouissent.
Enfin, le but dçs représentants de la nation se trouve ainsi parfaitement rempli èt avec plus d'économie, plus de célérité et d'exactitude. La loi envoyée en même temps dans toutes les parties de l'Empire, facilement connue, est aussi bien appliquée que promptement exécutée.
Moyens d'exécution.
§ Ier.
De Vimptession des registres, tableaux et autres objets dont Vuiàae sefa commun à tous les corps administratifs au royaume, et des décrets pour toutes les municipalités.
Article 1er. Toutes les impressions communes aux corps
administratifs du royaume,, et deé décrets pour tontes les municipalités, seront faites par
le même imprimeur.
Art. 2. Le traité des impressions ci-dessus mentionnées sera passé par deux commissaires que lé roi Sera prié dé nommer â cet effet en présence et de l'agrément de deux commissaires nommés par le Corps législatif.
Ce traité ne pourra être définitivement arrêté que par un décret de l'Assemblée nationale, sanctionné par le roi.
Art. 3. Les commiséaires du roi dresseront Un tarif des frais d'impression et d'êxpëdition, et ledit tarif annexé au traité ci-dessus mentionné dont il sera remis deux'expéditions, savoir: une aux Archives nationales, et l'autre à l'administration dés financés, ne pourra jamais, et sous aucun prétexte, être charigê que par un décfet du Corps législatif.
Art. 4. Le ministre de la justice sera tenu de remettre à l'imprimeur chargé de cette impression, une copie en forme et dûment collationnée de chacuh des décrets de l'Assemblée nationale, au fur1 et à mesure qu'ils seront acceptés oU sanctionnés.
Art. 5. Les décrets èéfont imprimés dans le ( format in-86, caractère moyen, dit cicérà, et par demi-feuille de huit pages, sans aucuns blancs ni lacunes, et de telle manière que les chiffres de toutes les pages se suivent pour un nombre de feuilles suffisantes à la formation d'un Volume. 1
Art. 6. Les épreuves des décrets Seront visées et paraphées par une personne commise à cet effet par le ministre de la justice.
Art. 7. L'imprimeur sera tenu de donner, pour chaque volume de vingt feuilles, une table rai-sonnée des matières de tous les décrets contenus dans ledit volume, et il ne lui sera tenu compte que des frais d'impression. Ceux de la formation de ladite table des matières resteront à sa charge.
Art. 8. Les commissaires du Corps législatif, les commissaires du comité chargé de surveiller l'envoi des décrets, les inspecteurs de l'imprimerie et les commissaires du roi sont chargés spécialement de surveiller l'impression et l'envoi des décrets dans les départements, et ils demeurent autorisés par le présent décret à demander compte à l'imprimeur, toutes les fois qu'ils le jugeront à propos, de tout ce qui pourra intéresser le service public dans l'une et 1 autre de ces parties. Les membres du Corps législatif ci-dessus désignés nomiûeront un d'entre eux qui, concurremment avec Un des commissaires du roi, séront plus particulièrement chargés de cette surveillance.
t II.
De Venvoi des impressions communes aux corps administratifs, et des décrets pour les municipalités.
Art. Ier. Les impressions communes aux départements et autres
-corps administratifs leur seront expédiées par la diligence, dès qu'elles seront exécutées.
La ferme des messageries sera tenue de faire ledit service, qui sera une des charges de son
bail.
Art. 2. Les décrets destinés aux municipalités seront successivement envoyés, au fur et à mesure de leur acceptation ou sanction, aux directoires de départements, pour lesquels ce sera le jour du départ des lettres. Le roi sera prié de donner les ordres .convenables au directoire de la poste, pour que ce service (qui sera une des charges du bail de la ferme des postes) soit régulièrement et exactement fait.
Art. 3. Les paquets adressés auxdits directoires seront scellés d'un sceau dont un double sera remis aux Archives nationales.
Art. 4. L'imprimeur sera tenu de certifier le comité chargé de surveiller l'envoi des décrets, et le ministre de la justice, desdits envois aux quatre-vingt-trois directoires de départements; et, pour y parvenir, il adressera à l'un et à l'autre un récépissé de Chacun des envois, signé par l'inspecteur général des postes, qui sera commis à cet effet.
Art. 5. Ledit récépissé sera fait suivant le modèle annexé aU présent décret.
§ III-
Du mode et du terme des paiements des impressions.
Art. 1er. Tous les trois mois, l'imprimeur présentera aux
commissaires du roi son compte, appuyé des pièces justificatives au soutien.
Art. 2. Ces pièces justificatives Seront, pour les impressions communes aux quatre-vingt-trois départements, lès ordres et Récépissés des procureurs généraUX-syndics, et pour les décrets :
1° Les récépissés dé l'inspecteur général des postes ;
2° Les récépissés desdits décrets que les procureurs généraux syndics seront tenus d'envoyer à la fin de chaque mois à l'imprimeur, pour le soutien du compte ci-dessus énoncé.
Art. 3. Les commissaires du roi arrêteront Iesdits comptes; mais il ne pourra être fait à l'imprimeur aucun paiement au Trésor public, qu'il n'ait été ordonné par les commissaires du roi, de l'agrément et sur le visa des commissaires du Corps législatif, et que Iesdits comptes ne soient signés par les commissaires du roi qui parapheront aussi les pièces justificatives desdits comptes, dont le dépôt sera fait aux Archives nationales.
Art. 4. II sera expédié, par l'imprimeur, et à ses frais, aux administrations des quatre-vingt-trois départements, un double imprimé du compte qu'il aura remis aux commissaires du roi, lequel .compte sera certifié par l'administrateur des finances avoir été arrêté par Iesdits commissaires du roi, visé par les commissaires du Corps législatif et payé par lui de l'ordonnance desdits commissaires du roi.
Art. 5. Chaque directoire de département demeure autorisé par ledit décret à imposer, sur les contribuables de son ressort, la somme qui aura été payée, en son acquit, par le Trésor public, ainsi de la manière qu'il, a été ci-dessus exprimé.
Modèle de récépissé à donner par l'inspecteur général des postes.
Courrier de
Envoyé par au bureau du départ de
l'administration générale des postes les paquets ci-dessous énoncés.
Paquets pour les directoires des départements ci-dessous dénommés.
Département d
Composé des districts suivants :
District de contenant municipalités
District de
Total des municipalités pour le
Département d municipalités
Département d etc.
(Comme ci-dessus.)
« Je soussigné, inspecteur général des postes, « commis à cet effet, reconnais avoir reçu de «M. les envois ci-dessus mentionnés qui « seront expédiés par le courrier de « A Paris» ce
Séanee du
La séance est ouverte à 9 heures du matin.
, secrétaire, donne lecture du
lit une adresse de la garde nationale d'Abbeville, qui exprime son adhésion et son obéissance à tous les décrets de l'Assemblée nationale acceptés ou sanctionnés par le roi.
prévient l'Assemblée qu'il a reçu un paquet dans lequel se trouvent le cordon de Saint-Michel ainsi que les lettres qui confèrent la noblesse à M. Brianciau, pour services rendus. Ce citoyen déclare qu'il ne veut les recevoir que de la main de la nation.
Plusieurs membres réclament vivement l'ordre du jour sur une pareille proposition.
L'AsSemblée passe à l'ordre du jour.
, secrétaire, annonce une adresse des officiers municipaux de Villeneuve-de-Berg, département de J'Ardèche, qui envoient une ordonnance qu'ils ont cru devoir rendre pour empêcher que les troubles qui se sont élevés dans la ville de Nîmes ne vinssent troubler la paix qui règne dans leur canton, et ils assurent l'Assemblée que le but de cette ordonnance est de maintenir la Constitution, l'activité des citoyens sans les alarmer, et d'éviter que l'insurrection ne fît des progrès.
M. Picq, arpenteur à Clamecy, fait hommage d'un ouvrage intitulé : Manière abrégée d'arpenter et de mesurer toutes lignes et hauteurs inaccessibles ; l'Assemblée agrée cet hommage.
Le comité de Constitution demande à1 faire un rapport sur l'organisation des archives nationales. Si l'Assemblée ne s'y oppose pas, je donne ia parole au rapporteur.
, rapporteur (1). Messieurs, par un décret du 19 mai dernier, l'Assemblée nationale, sur le rapport qui lui était fait alors au nom des commissaires du comité de Constitution, de celui des finances, des inspecteurs de bureau et de l'archiviste, a ordonné que, par suite dé l'exécution d'un décret précédent, du 19' février, les comités de Constitution, des finances, les inspecteurs des bureaux et l'archiviste lui présenteraient Un plan général dè tout Ce qui concerne l'organisation des archives nationales, leur sûreté, leur local, et le traitement des personnes qui doivent y être employées, pour être statué par l'Assemblée sur le'rapport qui lui serait fait.
Vos commissaires vous soumettent, Messieurs, ce projets d'organisation. Il ne comprend rien encore de ce que vous jugerez à propos de déterminer sur le nombre et le fraitement des secrétaires-commis actuellement au service de l'Assemblée. Cette portion de police de ses bureaux sera l'objet d'un travail et d'un rapport particulier.
En ce moment, vous n'avez à juger, et nous n'avons été chargés de vous présenter que le
plan de l'organisation des Archives nationales. Le projet de decret explique suffisamment la
manière dont nous en avons conçu l'exécution. Il est inutile de vous faire perdre des moments
trop précieux à entendre deux fois les mêmes
Vos commissaires ont pensé que l'archiviste devait être perpétuel. Des fonctions de ce genre ne doivent être que les fonctions d'un seul, le changement de dépositaire amènerait bientôt la confusion et la perte du dépôt. Nous avons vu, par l'ordre qui y règne, que vous n'aviez pu le remettre eD des mains qui en fussent plus dignes ; et M. Camus, l'un des premiers secrétaires de l'Assemblée nationale, à l'époque de sa constitution, méritait d'en être le premier archiviste.
On a senti la nécessité d'attacher aux archives un ingénieur instruit des opérations delà division du royaume, non seulement pour ce qui concerne cette sublime conception, mais encore pour les plans de cadastres, de navigation, et autres objets semblables dont les législatures seront obligées de s'occuper, n faut pour cela un homme de l'art, que l'Assemblée nationale et les législatures qui suivront puissent consulter avec confiance; cette confiance ne peut être méritée que par un homme entièrement, absolument dévoué à la chose, par devoir, et qui lui soit propre par l'expérience. L'ingénieur que le comité de Constitution a employé pour la division du royaume a montré, avec beaucoup de zèle, de désintéressement, une grandeintelligence : et vos commissaires n'ont cru pouvoir mieux servir votre amour du bien public que de vous le proposer à ce titre.
Enfin, vos commissaires, Messieurs, se sont conformés à vos vues d'économie et d'ordre dans la détermination des dépenses fixes de la conservation des archives, et singulièrement dans le traitement de l'archiviste, ainsi que de l'ingénieur, en proportionnant néanmoins avec l'importance de ces places l'assiduité constante qu'elles exigent et la dignité nationale.
Quant aux dépenses extraordinaires, la publicité que vous ordonnerez de l'état qui en sera fait chaque année et la distribution qui s'en fera à chacun des membres des législatures empêcheront tout abus à cet égard. Voici sur le tout, Messieurs, le projet de décret que vos commissaires ont l'honneur de vous proposer.
Projet de décret
concernant les archives nationales, leur état, leur sûreté, l'état et le traitement des personnes préposées et attachées à leur garde.
Art. 1er. Les archives nationales sont le dépôt de tous les
actes qui établissent la Constitution du royaume, son droit public, ses lois et sa
distribution en départements.
Art. 2. Tous les actes mentionnés dans l'article précédent seront réunis dans un dépôt unique, sous la garde de l'archiviste national, qui sera responsable des pièces confiées à ses soins.
Art. 3. L'archiviste déjà nommé par l'Assemblée et ses successeurs seront perpétuels. En
cas de vacance de cette place, il y sera pourvu, soit par l'Assemblée nationale, soit par les législatures suivantes. La nomination sera faite au scrutin, et il faudra, pour être nommé, réunir la majorité des voix. En cas de plaintes graves, l'archiviste pourra être destitué par une délibération prise pareillement au scrutin et à la majorité des voix. , Art. 4. Indépendamment de l'archiviste, l'Assemblée nationale nommera, pour le temps de ses séances, et chaque législature nommera également, pour le temps de sa durée, deux commissaires pris dans son sein, lesquels prendront connaissance de l'état des archives, rendront compte à l'Assemblée de l'état dans lequel elles seront, et s'instruiront de l'ordre qui y sera gardé, de manière qu'ils puissent remplacer momentanément l'archiviste, en cas de maladie ou d'autre empêchement; auquel cas ils signeront les expéditions des actes.
Art. 5. Le roi pourra nommer un commissaire chargé de veiller, concurremment avec ceux de l'Assemblée nationale, à la sûreté et à la conservation des archives.
Art. 6. L'archiviste sera tenu d'habiter dans le lieu même où les archives seront établies ; il ne pourra s'en absenter que pour cause importante, et après en avoir donné avis aux commissaires. Il ne pourra accepter aucun autre emploi ni place, la députation à l'Assemblée nationale exceptée.
Art. 7. L'ingénieur qui a travaillé sous les yeux du comité de Constitution pour la division du royaume demeurera attaché aux archives nationales. A son défaut il sera remplacé par un ingénieur nommé par l'Assemblée, pour faire tous les travaux relatifs aux plans et cartes qui seront déposés aux archives, en ce qui concerne la division du royaume et les projets de cadastre.
Art. 8. Le nombre des commis aux archives sera provisoirement de quatre personnes nommées et révocables par l'archiviste. Ils auront le titre de secrétaires-commis. L'un des quatre sera employé à travailler avec l'archiviste à l'enregistrement, au classement et à la communication des actes déposés dans les archives.
Les trois autres travailleront aux répertoires et feront les expéditions des actes qui seront demandées par l'Assemblée ou par ses comités.
Dans le cas d'un travail extraordinaire, l'archiviste pourra, de concert avec les commissaires, prendre le nombre de copistes qui seront nécessaires, et qui se retireront aussitôt qu'un travail forcé n'exigera plus leur présence.
L'ingénieur proposera à l'archiviste et aux commissaires les dessinateurs ou commis dont il pourra avoir besoin.
Art. 9. Les expéditions qui seront délivrées des actes déposés aux archives seront signées par l'archiviste, scellées d'un sceau qui y sera appliqué et qui portera pour type : La nation, la loi et le roi. Pour légende : Archives nationales de France. Les expéditions délivrées en cette forme seront authentiques et feront pleine foi en jugement et ailleurs.
Art. 10. Le traitement de l'archiviste sera de 6,000 livres par année, hors le temps où il sera membre de l'Assemblée nationale. Le traitement de l'ingénieur sera de 4,000 liv. Celui du secrétaire-commis attaché particulièrement à l'intérieur du travail sera de 2,400 liv.; celui de chacun des trois autres secrétaires sera de 1,800 liv.
Art. 11. Il sera incessamment, et au plus tard dans le délai de trois mois, indiqué par l'archiviste les deux commissaires aux archives, et par deux des membres du comité des finances et de Constitution, un local où les archives nationales puissent être établies avec sûreté et étendue suffisante.
Art. 12. Les salles des archives, les bureaux et cabinets seront meublés et fournis aux dépens du Trésor public; mais il ne sera rien fourni aux dépens du Trésor public, soit en meubles, soit en objets de consommation dans le logement de l'archiviste : il ne pourra même y être rien transporté des objets délivrés au service des archives.
Art. 13. Lorsque les archives seront établies dans le local qui leur sera destiné, il y sera attaché un garçon de bureau aux gages de 600 livres, un frotteur chargé du nettoyage des salles et bureaux, du port du bois et autres ouvrages de peine, aux gages de 500 livres ; et, si le local l'exige, un portier aux mêmes gages de 500 livres.
Art. 14. Les archives seront ouvertes, pour répondre aux demandes du public, trois jours de la semaine, depuis neuf heures du matin jusqu'à deux heures, et depuis cinq heures après midi jusqu'à neuf heures. Mais on ne pourra entrer dans les salles et cabinets de dépôt que pendant le jour; jamais il n'y sera porté ni feu, ni lumière.
Art. 15. Il sera tenu aux archives des registres et des répertoires de toutes ies pièces qui y seront déposées. Les registres, cotés et paraphés par chaque feuillet, seront destinés à enregistrer jour par jour les pièces qui entreront aux archives; ils serviront d'inventaire, et ce sera d'après ces registres que l'archiviste rendra compte des pièces qui lui seront confiées.
Les commissaires auront soin de les inspecter tous les mois, pour s'assurer s'ils sont tenus en règle. Ils pourront, d'ailleurs, se faire ouvrir les archives pour les visiter à tels jour et heure que bon leur semblera. Les répertoires destinés à la recherche des pièces seront au nombre de trois, servant, l'un de table chronologique, l'autre de table nominale, le troisième de table des matières.
Art. 16. L'archiviste veillera à ce que les pièces qui concernent les travaux desdifférents bureaux et comités soient remises aux archives à mesure que les travaux desdits bureaux et comités cesseront, ou que ledites pièces n'y seront plus nécessaires.
Art. 7. Les actes et pièces déposés aux archives ne pourront être emportés hors des archives qu'en vertu d'un décret exprès de l'Assemblée nationale.
Art. 18. Les payements pour les traitements ordinaires seront faits sur le simple mandat de l'archiviste : les payements pour les fournitures et dépenses extraordinaires seront faits sur des états arrêtés par l'archiviste et ies commissaires ; mais tous les payements s'acquitteront directement au Trésor public, entre les mains et sur la quittance des personnes auxquelles ils seront dûs : de manière qu'en aucun cas, et sous aucun prétexte, l'archiviste et les personnes attachées aux archives ne puissent toucher d'autres deniers que ceux de leur traitement personnel.
Art. 19. Tous les ans, à l'ouverture de la séance de la législature, l'archiviste fera imprimer et distribuer à chacun des membres de la législature l'état des dépenses faites pour les archives, pendant le cours de l'année, ensemble une feuille indicative des pièces déposées aux ar-
cbives et de leur distribution générale, afin de faciliter les demandes de ceux qui auront besoin de les consulter, et afin aussi que l'on puisse s'assurer du maintien et du progrès de rordre dans la distribution et la conservation de ce dépôt.
Plusieurs membres demandent l'impression du rapport et l'ajournement à dimanche.
Je prie l'Assemblée de vouloir bien me permettre de me démettre en ce moment de la place d'archiviste qu'elle a bien voulu me confier ; je me charge de surveiller, jusqu'à une nouvelle nomination, le dépôt qui m'a été confié. Lorsque vous aurez fixé votre choix, si je suis honoré de vos suffrages, alors je m'applaudirai de ce nouveau témoignage de votre confiance. Si je ne suis pas nommé, je me ferai un véritable plaisir d'instruire celui qui aura été honoré de votre choix ; mais, dans tous les cas, les considérations personnelles ne doivent point influer. On ne peut jamais fléchir devant les principes, et je donne ma démission .
Vaîné. Je me permettrai de m'élever contre la réclamation de M. Camus, et je demande que le plan et les articles soient décrétés tels qu'ils ont été lus.
{L'Assemblée ordonne l'impression et l'ajournement à dimanche prochain.)
(ci-devant marquis). Les officiers et les commissaires des chasses demandent à avoir des représentants à la fédération générale.— (L'Assemblée accueille cette demande.)
, évêque et député de Saintes, demande un congé de quinze jours pour affaires pressées.
Ce congé est accordé.
Le comité des finances demande à rendre compte des réclamations qui lui sont adressées sur la circulation actuelle des billets de caisse qui représentent les assignats. Je donne la parole au rapporteur.
Par l'article 16 de votre décret concernant les assignats, le trésorier de l'extraordinaire est autorisé à endosser les billets de caisse d'escompte, en y inscrivant la promesse d'être convertis eu assignats. De semblables billets expédiés pour la province ne sont pas parvenus à leur destination. Il est vrai que les paquets égarés n'avaient point été chargés à la poste; c'est un fait qu'il n'est pas inutile de remarquer. Les propriétaires ont indiqué les numéros des billets et leur endossement. Cependant il s'élève quelque doute sur la validité de leur réclamation. Votre comité des finances a pensé que des billets qui doivent être endossés par ceux qui les font circuler en province sont comparables aux lettres de change. Dans cette opinion, et pour tranquilliser le commerce, votre comité des finances vous propose le décret suivant :
« L'Assemblée nationale décrète que les oppositions qui seront ou auront été faites aux mains du trésorier de l'extraordinaire, ou en celles de tout autre qu'il appartiendra, à l'échange, contre des assignats, des billets de la Caisse d'escompte transmis dans ies provinces, pour lesquels les formalités ordonnées par l'article 16 du décret
des 16 et 17 avril auront été remplies, et dont les numéros et les endossements auront été indiqués, produiront l'effetd'en empêcher l'échange, jusqu'à ce qu'il en ait été ordonné autrement par les tribunaux qui doivent en connaître. »
(Ge projet de décret est mis aux voix et adopté.)
J'ai déjà proposé à l'Assemblée nationale d'ordonner l'établissement de bureaux en province pour échanger les assignats. Je renouvelle ma proposition, et je demande que l'Assemblée nationale décrète que l'émission des assignats étant très prochaine, il lui soit rendu compte par son comité des finances de la motion que j'ai faite pour que l'Assemblée nationale veuille bien statuer ce qu'il appartiendra.
Là création que demande M. de Folleville présente beaucoup d'inconvénients et n'offre pas d'avantages sérieux. Tous les moments de l'Assemblée se trouvent pris actuellement par les questions urgentes qui concernent les ports, les messageries, etc. Le comité estime donc qu'on ne pourra satisfaire à la demande de l'orateur que lorsque ces questions seront vidées.
, autre rapporteur du comité des finances, rend compte à l'Assemblée de ia nécessité de reconstruire, dans les départements de VAisne et de l'Oise, les écluses de Voyaux et de Sempigny, parce qu'il est du plus grand avantage pour l'Etat, l'agriculture et ie commerce, d'entretenir libre la communication par canaux qui existe entre la Somme et l'Oise.
Un membre demande l'ajournement sous prétexte que les travaux interrompraient la navigation.
Les écluses qu'on vous propose de reconstruire ne servent pas depuis six mois; le commerce est forcément interrompu ; je demande que le décret soit adopté afin de remédier à bref délai à une situation aussi préjudiciable.
Il y a une extrême urgence à aviser, parce que tout retard est une cause de dégradations nouvelles et un chômage forcé nuisible à tous les intérêts. Le comité des finances m'a chargé d'insister pour que le décret qu'il vous propose soit adopté sans plus attendre.
consulte l'Assemblée qui adopte le décret en ces termes :
« L'Assemblée nationale, sur le rapport de son comité des finances, considérant qu'il est du plus grand avantage pour l'Etat, l'agriculture et le commerce, d'entretenir la libre circulation du canal de Picardie ou de Croisât, a décrété et dé-crctc •
« l6 Que l'écluse de Voyaux, près de Liez, placé sur le canal Croisât, qui communique de la Somme à l'Oise, sera incessamment reconstruite, conformément au devis dressé par le sieur Laurent de Lionne, directeur dudit canal, sous l'inspection du directoire du département de l'Aisne;
« 2° Qu'il sera procédé incessamment, tant au parachèvement qu'à l'élargissement de l'écluse de Sempigny-sur-Oise; ladite écluse destinée à éviter le ressaut des bateaux dans cette partie, et conformément au devis qui sera dressé par le même directeur, sous l'inspection du département de l'Oise, dont dépend ladite écluse.
« 3° Les fonds nécessaires auxdits ouvrages seront fournis provisoirement par les receveurs des départements de l'Aisne et de l'Oise, chacun par moitié; sauf à statuer ultérieurement par qui ia dépense sera définitivement supportée, soit par le Trésor public, soit par lesdits départements, sauf aussi à régler dans quelles proportions lesdits départements y contribueront, s'il y a lieu. Les deniers seront fournis au fur et à mesure des ouvrages ou des termes qui seront pris avec les adjudicataires, ensuite des enchères faites en la forme ordinaire. »
, rapporteur du comité d'aliénation. Messieurs, dans vos séances des 25 et 26 de ce mois, vous avez rendu un décret en quatorze articles, sur la vente des domaines nationaux aux particuliers. Ce décret, après examen nouveau de votre comité, se trouve incomplet. Je suis chargé de vous soumettre huit articles nouveaux qui répondent à autant de questions qui nous ont été faites concernant l'application de vos décrets et en particulier celui du 14 mai.
donne lecture des articles.
Divers membres présentent quelques courtes observations.
Les articles sont ensuite mis aux voix et adoptés ainsi qu'il suit :
« Art. 15. Seront communs tant au présent décret qu'à celui du 14 mai dernier, les articles suivants :
« Art. 16. Les baux d'après lesquels l'article 4 du titre Ier du décret du 14 mai dernier détermine l'estimation des revenus des trois classes de biens y mentionnés, doivent être entendus des sous-baux ou sous-fermes, lorsqu'il en existe : en conséquence, le revenu d'un bien affermé par un bail général, mais qui est sous-fermé, ne pourra être estimé que d'après le prix du sous-bail.
« Art. 17. Le défaut de prestation du serment imposé aux fermiers par le même article, ne pourra pas empêcher de prendre leurs baux ou sous-baux pour base des estimations, lorsque ayant été requis par acte de se rendre à jour indiqué par devant les directoires de districts pour prêter le serment, ils ne s'y seront pas rendus ; mais, dans ce cas, les fermiers réfractaires seront déclarés, par le juge ordinaire, à la poursuite et diligence des procureurs-syndics de districts, déchus de leurs baux ou sous-baux.
« Art. 18. Le revenu des biens affermés par baux emphytéotiques, ou baux à vie, ne pourra pas être déterminé par le prix de ces baux, mais seulement d'après une estimation par experts.
« Art. 19. Seront, au surplus, les baux emphytéotiques et les baux à vie, censés compris dans la disposition de l'article 9 du titre 1er dudit décret; mais les baux emphytéotiques ne seront réputés avoir été faits légitimement que lorsqu'ils auront été précédés et revêtus des so-lemnités qui auraient été requises pour l'aliénation des biens que ces actes ont pour objet.
« Art. 20. Tout notaire, tabellion, garde-note, greffier ou autre dépositaire public ; comme aussi tout bénéficier, agent ou receveur de bénéficier; tout supérieur, membre, secrétaire ou receveur de chapitre ou monastère; ensemble tout administrateur ou fermier, qui, en étant requis par un simple acte, soit à la requête d'une municipalité, soit à la requête d'un particulier, refusera de communiquer un bail de biens nationaux existant en sa possession ou sous sa garde, sera, à la poursuite et diligence du procureur-syndic du
district de sa résidence, condamné par le juge ordinaire à une amende de vingt-cinq livres; cette amende sera doublée en cas de récidive, et elle ne pourra être remise ni modérée en aucun cas. Si le procureur-syndic de district en négligeait la poursuite ou le recouvrement, il en demeurerait personnellement garant, et serait poursuivi comme tel par le procureur général du département.
« Art. 21. Il sera payé au notaire, tabellion garde-note ou autre dépositaire public, pour la simple communication d'un bail, dix sous, et dix sous en sus lorsqu'on en tirera des notes ou des extraits, sauf à suivre, pour l'expédition en forme qu'on voudra se faire délivrer, le taux réglé par l'usage, ou convenu de gré à gré.
« Art. 22. S'il existait des lieux où les assemblées de districts ne fussent pas encore en activité lors de la publication du présent décret, les municipalités des chefs-lieux de districts pourraient les suppléer dans toutes les fonctions à elles attribuées, tant par le présent décret que par celui du 14 mai dernier; et lorsqu'il s'agira d'acquisitions à faire par une municipalité, dans le district dont elle est chef-lieu, ces fonctions pourront être remplies par la municipalité du chef-lieu du district le plus voisin, qui n'aurait pas fait de soumission pour acquérir. »
Modèle de soumission à souscrire par les particuliers qui veulent acquérir des domaines nationaux.
Déparlement de Disctrict de Canton de Municipalité de
Je soussigné déclare être dans l'intention de faire l'acquisition des domaines notionaux dont la désignation suit :
(Suivra la teneur des domaines nationaux qu'on veut acquérir, avec indication de la date et du prix des baux.)
Lesquels biens sont affermés ou loués par un bail (ou des baux) authentique passé devant notaires à... le... fou les) et sont constatés être d'un produit annuel de
Pour parvenir à l'acquistion desdits biens, je me soumets à en payer de la manière déterminée par la disposition des décrets et instructions de l'Assemblée nationale des 14 et 31 mai, 3 et 29 juin derniers ; et quant à ceux des biens ci-dessus qui ne sont pas affermés, et dont le décret ordonne que le produit annuel sera évalué par des experts pour en fixer le capital, je consens à le payer également conformément à l'évaluation qui sera faite par experts; à l'effet de laquelle estimation, je déclare choisir pour expert la (ou les) personne de que j'autorise à y procéder conjointement avec l'expert ou les experts qui seront nommés par le directoire du district, et consens à en passer par l'estimation du tiers expert qui, en cas de partage, sera nommé par le département ou son directoire.
En conséquence, je me soumets à payer à la caisse de l'extraordinaire ou à celle du
district qui sera préposée d'abord lors de l'acquisition, 1 acompte déterminé par ies
décrets, suivant la nature des biens, et ensuite le surplus du prix de l'acquisition dans le
terme de douze années (1),
Vos décrets sur la vente des domaines nationaux ont été rendus à plusieurs reprises et ont même subi des modifications qui nécessitent un certain travail pour se rendre compte de vos intentions. Je demande donc queues décrets soient revus avec soin par votre comité, qu'ils soient imprimés de nouveau, précédés du rapport de M. de La Rochefoucauld et qu'ils soient annexés au procès-verbal de la séance de ce jour, lorsqu'ils auront reçu la sanction du roi.
(Cette proposition est adoptée.)
L'ordre du jour est la suite de la discussion du projet de décret sur le traitement du clergé actuel.
M. Chasset continue à remplacer M. l'abbé Ex-pilly dans la fonction de rapporteur.
donne lecture de l'article 15 ainsi conçu :
« Art. 15. Seront communes, tant au présent décret, qu'à celui du 14 mai dernier, les interprétations et dispositions suivantes. »
(Cet article est mis aux voix et adopté.)
J'invite M. le rapporteur à donner lecture des articles suivants dans l'ordre proposé par le comité.
, rapporteur, lit l'article 12 du rapport de M. l'abbé Expilly, qui deviendra le 16* du décret.
Je propose de dire que les dispositions de cet article ne s'appliqueront qu'aux ecclésiastiques engagés dans les ordres sacrés.
Si cet amendement devait être adopté, je proposerais une exception en faveur des résignations.
Si vous entriez dans la voie des exceptions, vous entreriez dans celle des injustices. Je demande la question préalable sur l'amendement.
(La question préalable est adoptée.)
L'article est ensuite décrété en ces termes :
« Art. 16. Les ecclésiastiques qui n'ont d'autres revenus ecclésiastiques que des pensions sur bénéfices, continueront d'en jouir, pourvu qu'elles n'excèdent pas 1,000 livres; et si elles excèdent ladite somme, ils jouiront : 1° de 1,000 livres, 2° de la moitié de l'excédent pourvu que le tout n'aille pas au delà de 3,000 livres. »
donne lecture de l'ancien article 13, en ces termes :
« Art. 13. Le traitement des supérieurs et professeurs de séminaires est et demeure provisoirement fixé à la somme de 1,500 livres, dans les villes dont la population est de cent mille âmes et au-dessus, et de 1,200 livres dans les autres. »
, député des Basses-Alpes (t). Messieurs, la mesure que le comité vous propose, me paraît inadmissible; elle contrarie trop ouvertement je ne dis pas les principes de cette générosité qui vous a quelquefois distingués, mais ceux de cette justice rigoureuse, dont vous n'avez jamais voulu vous écarter.
Un traitement est dû à ceux qui ont guidé vos premiers pas dans la carrière des sciences, des belles-lettres, de la morale, et j'ose dire de la liberté ; il s'agit, en un mot, de vos maîtres, de vos instituteurs. Voudriez-vous les traiter moins bien que cette foule d'êtres inutiles, qui ne firent jamais rien pour la patrie, et qui soufflent aujourd'hui, dans les départements, le feu de la discorde, et prêchent la désobéissance aux lois ?
Considérez-vous, Messieurs, que vous allez prononcer sur le sort de l'Oratoire, de ce corps qui fut toujours composé de citoyens, et qui produisit souvent des philosophes ? Il ne connut jamais l'intrigue; il ne l'employa jamais pour acquérir de grandes richesses; toujours il a combattu les ennemis de la patrie; vous avez répété ce qu'il disait, depuis un siècle, contre les lettres de cachet et les invasions de la cour de Rome. Massillon s'était nourri de l'esprit de l'Oratoire lorsqu'il parlait aux rois votre langage. Mallebranche, du Marsais, Lami étaient aussi de l'Oratoire. Mais pourquoi yous rappeler tous les grands hommes qu'il produisit? Vous les connaissez, et ce n'est pas à votre reconnaissance seule, à votre admiration que je veux parler : j'implore aussi votre justice.
Suivez-moi dans les détails d'un calcul, qui heureusement n'est pas long, vous serez convaincus que vous ne pouvez pas adopter le plan du comité, sans mériter le juste reproche de faire une spéculation honteuse sur les biens de l'Oratoire. Je ne parle pas des autres congrégations : je connais peu leurs biens; mais on m'a assuré que mes observations ne leur seraient par étrangères.
L'Oratoire a soixante-dix maisons en France, presque toutes dans de grandes villes, et, par leur destination, au centre de ces villes; des immeubles la plupart considérables sont attachés à ces maisons. C'est les apprécier bien peu que de les évaluer à cent mille livres l'une dans l'autre : cette évaluation donne cependant un capital de sept millions.
L'Oratoire compte environ six cent soixante-quinze membres qui ont droit à un traitement ; accordez celui que le comité vous propose, et vous aurez un bénéfice exorbitant, que vous devez rejeter, parce qu'il serait fait sur le nécessaire de citoyens utiles, dont vous rompez les habitudes les" plus chères, dont vous détruisez l'existence politique.
Mais quelle methode substituer à celle du comité? En est-il une qui puisse concilier l'intérêt particulier des membres de l'Oratoire avec l'intérêt général et bien entendu de la nation ? Je le crois.
Vous devez assigner des pensions; mais ces pensions ne doivent pas être les mêmes pour tous
les individus : tous n'ont pas rendu les mêmes services ; tous n'ont pas les mêmes besoins,
les mêmes moyens, le même état. Les uns sont jeunes et libres, d'autres, déjà courbés sous le
poids de l'âge, sont enchaînés par le sacerdoce,
Le nombre de ces frères dans l'Oratoire est de soixante-quinze environ. Je donnerais une gratification une fois payée à ceux qui ne sont pas reçus frères depuis dix ans, et j'assignerais aux autres une rente viagère de 20 livres par chaque année de service, en fixant un maximum à 500 livres.
Viennent ensuite les supérieurs, économes, professeurs, en un mot les Pères de l'Oratoire ; ils sont au nombre de six cents.
Je les divise en quatre classes :
1° Ceux qui ont moins de cinq ans de congrégation ;
2° Ceux qui ont depuis cinq jusqu'à dix ans ;
3° Ceux qui ont depuis dix jusqu'à vingt ;
4° Ceux qui ont plus de vingt ans.
Je ne propose aucun traitement pour les membres de la première classe. On a quelquefois comparé l'Oratoire au tonneau des Danaïdes. Les jeunes gens qui forment cette classe étaient l'eau qui entrait et sortait bientôt après, pour se répandre dans tous les états, dans toutes les professions de la société. Il faut les considérer bien plus comme des écoliers qui venaient compléter, perfectionner leurs études, que comme des maîtres voués déjà au pénible métier de l'éducation publique : il ne leur est rien dû.
La seconde classe obtiendra une gratification une fois pavée : c'est aussi le projet du comité.
La troisième aura 35 livres par chaque année de service en rente viagère, c est-à-dire depuis 350 livres jusqu'à 700 livres.
La quatrième classe aura 40 livres par chaque année, c'est-à-dire, depuis 800 livres jusqu'à 1,200 livres ; somme à laquelle je fixe le maximum.
Il reste à vous mettre sous les yeux un aperçu de la dépense d'après cette méthode.
75 Frères. 20 ayant moins de dix ans de service, n'auront qu'une gratification.
55 auront en rente viagère, et d'après un terme moyen de 250 livres chacun. . .......... 13,750 75
600 Pères. iOO ayant moins de cinq ans de congrégation n'auront rien.
100 n'ayant pas dix ans n'auront qu'une gratification.
300 depuis dix ans jusqu'à vingt ans, auront tout au plus l'un dans l'autre 450 liv. ; la dépense serait de . . ....... 135.000
100 auront le maximum de
1,200 liv., ci ..... 120,000
6ÔÔ" ,_\
Total des pensions viagères..... 268.750 1.
Je ne parle pas des gratifications : vous n'en donnerez qu'à cent vingt personnes environ, la somme ne peut pas être considérable.
Veuillez bien vous rappeler à présent que l'Oratoire laisse à votre disposition un capital de sept millions. Pourriez-vous hésiter à accorder à
ses membres moins de trois cents mille livres de rente, que le temps diminue chaque jour? Vous trouverez, j'espère, que le traitement que je propose est encore au-dessous de celui que l'humanité, la justice et la reconnaissance sollicitent.
Vous vous honoreriez en appliquant à ma méthode une augmentation dont elle est susceptible, et que vous pouvez décréter sans aucune surcharge pour les finances de l'Etat.
Statuez ensuite que tous les membres des ci-devant congrégations, qui obtiendront des places auxquelles est attaché un traitement public, né conserveront que la moitié de leur pension, vous diminuerez, par cette disposition, la dépense ; car presque tous les oratoriens sont disposés à seconder vos efforts, à propager vos principes, à consacrer leurs talents et leur vie au service de la patrie.
Je demande l'ajournement de l'article 13 jusqu'à l'époque où l'Assemblée s'occupera des établissements pour l'éducation de la jeunesse.
Je ne m'oppose pas à l'ajournement.
(L'ajournement est prononcé.)
L'article 14 du projet, qui deviendra l'article 17 du décret, est ainsi conçu :
« Art. 14. Pour parvenir _à fixer les divers traitements réglés par les articles précédents, chaque titulaire dressera, d'après les baux actuellement existants, pour les objets tenus à bail ou à ferme, et d'après les comptes de régie et exploitation pour les autres objets, un état de tous les revenus écclésiastiques dont il jouit, ainsi que des charges dont il est &revé ; ledit état sera communiqué aux municipalités des lieux où ces biens sont situés, pour être contredit ou approuvé, et le directoire du département dans lequel se trouve le chef-lieu du bénéfice donnera sa décision, après avoir pris l'avis du directoire de district. »
ajoute : Les motifs du comité, en présentant cet article, sont fondés sur l'impossibilité de procéder à une estimation exacte, soit précisément d'après les baux, soit même d'après les déclarations des titulaires qui, étant trop faibles ou trop forts, ne pourraient servir de base à la justice de l'Assemblée.
Je propose que pour procéder à l'estimation, on prenne le revenu des titulaires pendant dix années et qu'on forme, de cette façon, une année moyenne.
Vous n'arriverez à la vérité approximative des revenus qu'en prenant quatorze années, dont vous retrancherez les deux plus faibles et les deux plus fortes.
J'estime qu'en adoptant les amendements proposés, vous seriez dans le plus grand embarras pour le traitement des différents bénéfices, et qu'il convient tout simplement d'adopter l'article du comité.
Je demande, à propos de cet article et du suivant, quel sera le sort des curés qui pourront être supprimés dans les villes et dont le revenu ne consiste qu'en casucl?
Gomme il n'y aura pas de curé supprimé, la supposition n'a pas d'objet.
J'insiste sur ma question, et je demande qu'elle soit renvoyée au comité.
(Ce renvoi est ordonné.)
Plusieurs membres rappellent l'amendement proposé par M. l'abbé Gouttes.
D'autres membres demandent la question préalable qui est mise aux voix et prononcée.
On demande une nouvelle lecture de l'article qui est enfin adopté ainsi qu'il suit :
« Art. 17. Pour parvenir à fixer les divers traitements réglés par les articles précédents, chaque titulaire dressera, d'après les baux en entier actuellement existants, pour les objets tenus à bail ou ferme, et d'après les comptes de régie et exploitation pour les autres objets, un état estimatif de tous les revenus ecclésiastiques dont il jouit, ainsi que des charges dont il est grevé ; ledit état sera communiqué aux municipalités des lieux où les biens sont situés, pour être contredit ou approuvé ; et le directoire du département dans lequel se trouve le chef-lieu du bénéfice, donnera sa décision, après avoir pris l'avis du directoire des districts.
M. Chasset, rapporteur, donne lecture de l'article 15 du projet qui deviendra le 18e du décret. Il est adopté ainsi qu'il suit :
« Art. 18. Seront compris dans la masse des revenus ecclésiastiques, dont Jouit chaque corps ou chaque individu, les pensions sur bénéfices, les dîmes, les dépôts qui formaient l'unique dotation des archidiacres et archiprêtres ; mais le casuel, ainsi que le produit des droits supprimés sans indemnité, ne pourra y entrer. »
, rapporteur. L'article 16 du projet, qui deviendra le 19e du décret, est ainsi conçu :
« Art. 16. Les charges réelles ordinaires, celles des impositions de la présente année, des portions congrues, y compris leur augmentation, ainsi que des pensions dont le titulaire est grevé à l'égard des chapitres, celles des bas-chœurs, des musiciens, seront déduites sur ladite masse ; le traitement sera ensuite fixé sur ce qui restera, d'après la proportion réglée par les articles précédents. »
Le désir de l'Assemblée est d'être juste, et elle manquerait certainement son but, si elle adoptait l'article tel qu'il lui est présenté. Il porte que les charges réelles ordinaires, celles des impositions sur le pied de la présente année, des portions congruçs, y compris leur augmentation, seront déduites sur la masse du revenu et que le traitement sera ensuite fixé sur ce qui restera. Je ne veux faire sur cet article que trois observations bien simples et que je crois frappantes. La première est que la dotation des congrues ayant été fixée par vos décrets à 1,200 livres, il arrivera très fréquemment que des décimaleurs ayant payé cette dotation, ainsi augmentée, se trouveront n'avoir presque rien de revenu net : revenu qui essuiera encore des réductions proportionnelles, réglées dans les articles précédents. Cet article leur est-si prodigieusement défavorable, qu'on ne peut pas même y placer comme amendement que, lorsque toutes ces déductions faites, le revenu qui leur restera n'excédera pas le maximum que vous avez établi, ce revenu leur sera laissé en entier; car
il doit arriver que beaucoup de décimateurs, après avoir payé les congrues à 1,200 livres, quelques-unes à un taux plus élevé, ainsi que vous les avez établies pour les grandes villes, se trouveront posséder précisément n'en, ou même moins que rien, et ce n'est sûrement pas, Messieurs, votre intention. La seconde objection est qu'il y a ici manifestement un double emploi; car pourquoi auriez-vous supprimé une partie du revenu des ecclésiastiques dont les biens excédaient une honnête médiocrité? C'est certainement pour être en état d'augmenter le salaire des ministres de la religion les plus journalièrement utiles ; c'est pour augmenter celui des curés jusqu'à la somme de 1,200 livres et au delà, et voilà que votre comité, par la disposition de son article, fait payer une seconde fois à celui qui avait ses revenus en dîmes, cette augmentation de congrues, puisqu'il ne règle son traitement sur les bases assignées pour tous les autres titulaires, qu'après la défalcation de ces congrues avec leur augmentation. La troisième observation est que les principes de la raison, ceux de la justice et ceux de l'Assemblée la conduisent invinciblement à établir une égalité de sollicitude de sa part et de traitement pécuniaire, envers tous ceux qui, acquittant un même service public, une, fonction honorable, ont droit à une entière égalité de récompense. Or, voyez, Messieurs, la différence barbare qui serait établie dans le sort de-deux ministres des autels, dont le revenu précédent aurait été, je le suppose, pour chacun, de 12,000 livres de rente, et dont l'un maintenant, pour avoir été fortuitement doté en propriété foncière, se trouverait conserver la moitié de son revenu, tandis que l'autre, coupable du seul malheur de l'avoir été en dîmes, se trouverait réduit à rien, ou du moins à la plus hideuse pauvreté.
D'après ces considérations, je demande que l'article soit amendé et qu'au lieu de ces mots : des portions congrues y compris leur augmentation, il soit substitué ceux-ci : des portions congrues, non compris leur augmentation.
Je trouve qu'il serait injuste de faire payer aux résiguataires les pensions qu'ils ont accordées à leurs résignants, ce serait les priver réellement d'une partie de leur revenu. On doit observer, d'ailleurs, que l'on ne résigne surtout les bénéfices de cure que lorsqu'on est très avancé en âge ou incapable, par infirmité, de remplir lès fonctions curiales. Le résignataire, en accordant la pension aux curés retirés, a calculé les chances de l'événement ; il pouvait cesser à chaque instant d'être grevé du paiement de la pension qu'il a accordée et par la disposition de votre décret, vous lui imposez cette charge pour toujours.
le jeune. J'appuie l'amendement de M. de Jessé,- parce qu'adopter l'article du comité c'est réduire plusieurs décimateurs à la misère.
Je combats l'amendement de M. de Jessé,parce que, quand même la nation n'aurait pas pris l'administration des biens ecclésiastiques et se serait bornée à augmenter les portions congrues, les possesseurs des dîmes en auraient été nécessairement grevés dès le moment même de l'augmentation. Je conclus à l'adoption de ^'article du comité.
(On demande à aller aux voix.)
Plusieurs membres demandent la question préalable.
On revient à l'amendement de M. de Delley-d'Agier.
, curé de Souppes. Il n'est pas juste de faire supporter aux bénéficiers, chargés anciennement de payer Tes portions congrues, le surcroît de dotation que la justice avait accordé aux congruistes. Je suis d'autant mieux fondé à me récrier contre cette disposition que je connais des bénéficiers qui, n'ont que 2,400 livres de revenu et qui sont tenus de payer deux portions congrues ce qui, dans l'ancien régime, faisait une charge de 1,400 livres. Si ces bénéficiers sont obligés de payer en sus 500 livres à chaque congruiste, leur bénéficiée devient nul pour eux et ils sont réduits à zéro. Je demande que l'article du comité soit rédigé de façon à ce que les résignataires ne soient pas spoliés entièrement.
Vous avez repoussé l'amendement de M. de Jessé et vous repousserez celui de M. de Delley-d'Agier, parce que ce serait rompre toutes les mesures de votre comité et dépasser de plusde 10 à 12 millions l'équilibre qu'il aétabli entre les dépenses nécessitées par les frais du culte et l'entretien des ministres et les revenus ecclésiastiques. Vous seriez donc obligés d'imposer d'autant les peuples, ce qui ne peut être dans l'intention de l'Assemblée.
On demande la question préalable sur Cet amendement.
Après plusieurs épreuves il est rejeté.
, curé d'Ernêe. Je propose d'ajouter à l'articLe la disposition suivante : « Après la mort des pensionnaires, la moitié de la pension retournera aux titulaires, pourvu qu'elle n'excède pas le maximum décrété. »
M. Chasset. Cet amendement, comme les précédents, aurait pour résultat de rejeter sur le peuple une part des charges que nous avons voulu faire supporter aux seuls décimateurs. Si vous voulez agir autrement, vous en êtes les maîtres, mais le devoir du comité était de vous avertir.
On passe au vote.
Quatre épreuves successives ont lieu sans donner de majorité décisive. On allait procéder à l'appel nominal lorsqu'une dernière épreuve fait rejeter l'amendement.
Je propose d'insérer dans l'article une disposition par laquelle seraient déduites de la dite masse les frais du bas-chœur et musiciens, et les frais du culte divin, lorsque les chapitres en seront chargés.
Cet amendement est adopté.
L'article 16, qui devient l'article 19 du décret, est ensuite mis aux voix et adopté ainsi qu'il suit:
« Art. 19. Les charges réelles ordinaires, les portions congrues, y compris leur augmentation, ainsi que les pensions dont le titulaire est grevé; et, à l'égard des chapitres, les frais du bas-chœur et musiciens, et les frais du culte divin, lorsque les chapitres en seront chargés, seront déduites sur ladite masse ; le traitement sera ensuite fixé sur ce qui restera, d'après les portions réglées par les articles précédents. »
, membre de l'Assemblée et
gouverneur de Tabago. J'ai reçu des nouvelles bien alarmantes d'Amérique; je sors de chez M. de La Luzerne, qui les a reçues comme moi, et qui m'a dit que je pouvais en rendre compte à 1 Assemblée, parce qu'elles étaient certaines. — Extrait de la lettre adressée à M. Dillon, datée du vaisseau du roi Y Illustre : « Le second bataillon du régiment de la Guadeloupe s'est révolté contre ses officiers: le capitaine commandant a été forcé de fuir dans un bateau : le feu a pris à la ville de Tabago et l'a réduite en cendres. Les volontaires nationaux (c'est ainsi qu'on nomme quelques personnes qui ont pris les armes sans autorisatiou), aecusent les soldats d'avoir causé ce désastre. Les soldats, à leur tour, accusent les volontaires. Ge bataillon revient en France sur des vaisseaux marchands. Nous espérons que le régiment de la Martinique se comportera toujours aussi bien qu'il a fait jusqu'à présent. »
M. Arthur Dillon continue. Ges habitants ont eu anciennement des guerres intestines avec leurs esclaves ; aujourd'hui, il y a à Tabago près de 20,000 noirs contre 350 blancs. J'implore la justice de l'Assemblée, qui sans doute ne se refusera pas à leur accorder des secours en vivres, en munitions et en armes. Je demande aussi qu'il soit ourvu au sort des révoltés, quand ils seront en rance.
(L'affaire est renvoyée au comité des rapports, chargé d'en rendre compte le plus tôt possible.)
Une députation de la ville de Versailles est admise à la barre.
La place de commandant en chef de cette ville étant vacante par la démission de M. de Lafayette, en conformité des décrets de l'Assemblée nationale, le commandant en second a invité la troupe à procéder à une nouvelle nomination. Les scrutins ayant été portés à la maison commune pour procéder au dépouillement, diverses pétitions sont survenues, par lesquelles tous les citoyens demandent à concourir à celte nomination.
Le conseil générai de la commune a cru qu'il était de la prudence de suspendre l'élection, et nous avons été chargés de nous retirer par devant l'Assemblée nationale, pour la prier de décider si l'élection peut être faite par tous les citoyens indistinctement; si le commandant peut être choisi hors des citoyens actifs de notre ville ; si, ayant des fonctions incompatibles, il ne serait pas tenu d'opter. L'esprit de paix et de fraternité que la ville de Versailles est jalouse de conserver, est la cause de notre empressement à vous soumettre cette discussion.
L'Assemblée nationale applaudira aux mesures que vous avez prises; elle prendra vos demandes en considération.
La pétition est renvoyée au comité de constitution.
(La séance est levée à deux heures et demie.)
DU
TEXTE DÉFINITIF DU DÉCRET
rendu les 25, 26 et 29 juin 1790, sanctionné par le roi le 7 juillet suivant, sur la vente des domaines nationaux aux particuliers, précédé du rapport fait à VAssemblée nationale par M. de La Rochefoucauld, député de Paris. (Imprimé par ordre de l'Assemblée nationale et annexé au procès-verbal de la séance du 29 juin.)
RAPPORT.
Messieurs,
Le décret que vous avez rendu le 14 du mois dernier, et l'instruction que vous avez jointe le 31 du même mois, ont déterminé les formes et les conditions de la vente de 400 millions de domaines nationaux, que vous aviez ordonnée les 19 et 21 décembre de l'année dernière, que vous avez destinés aux municipalités par votre décret du 17 mars, pour être ensuite revendus par elles à des acquéreurs particuliers, et sur laquelle vous avez hypothéqué les 400 millions d'assignats-monnaie, créés par votre décret du 17 avril. Vous avez, avec raison, borné à cette somme l'étendue d'une opération utile pour donner une impulsion première, mais qui complique la vente, et la rend moins profitable à la nation en général. Il ne reste donc à votre comité qu'à suivre les dispositions que vous avez prescrites, et il ne manquera ni de zèle ni d'activité pour en accélérer 1 exécution: il peut vous annoncer que les soumissions des municipalités excèdent déjà de beaucoup les 400 millions, et bientôt il vous demandera vos ordres sur les dispositions que cette af-fluence vous mettra dans la nécessité d'ordonner.
Mais, depuis le 19 décembre, plusieurs de vos décrets ont remis effectivement dans les mains de la nation l'univèrsalité de ses domaines, et vous en avez confié la garde aux administrations de départements etde districts, sans statuer encore sur l'usage que vous en feriez. Vous jugerez certainement leur conservation moins utile à l'État que leur aliénation; outre le grand avantage d'éteindre en intérêts annuels une somme fort supérieure au revenu des biens que vous vendrez, vous trouverez l'avantage plus grand encore d'augmenter la masse générale des richesses en substituant l'intérêt personnel, toujours plus actif et plus industrieux, à l'administration commune qui ne peut jamais le remplacer, et celui non moins touchant pour vous, d'appeler un grand nombre de citoyens à la propriété, par les facilités que vous donnerez aux acquéreurs, tant pour la forme que pour les époques des paiements, et par une telle subdivision des objets dans les ventes, que le pauvre même qui voudrait acquérir une petite propriété, puisse parvenir avec une légère avance qu'il se procurera facilement, s'il est connu dans son pays pour honnête, et en trouvant ensuite dans le produit de son travail, et dans les récoltes de cette même propriété, les moyens d'acquitter en peu d'années le prix de son acquisition.
Votre comité pense que toutes ces vues seront remplies en appliquant aux ventes directes que
les administrations de départements seront chargées de faire aux particuliers les mêmes conditions que vous avez décrétées le 14 mai pour celles où les municipalités vous serviront d'intermédiaires. 11 croit donc inutile de vous remettre sous les yeux les motifs développés dans le rapport que M. Delley d'Agier a eu l'honneur de vous faire, et il ne vous présente aux dispositions de votre décret du 14 mai d'autres changements que ceux exigés pour les procédés plus simples de ventes plus directes.
La masse des biens à mettre à la fois en vente ne doit pas effrayer, parce que, d'après les règles
Îirescrites, les enchères ne pourront s'ouvrir que orsque des soumissions égales au prix d'estimation vous assureront d'en obtenir la vraie valeur par la concurrence qui s'établira entre les acheteurs, et parce que le nombre des acheteurs sera nécessairement fort ^rand. En effet, Messieurs, la cessation presque entière des emprunts publics, le rachat des droits féodaux, et les nombreux remboursements que vous ferez, vont rendre nécessaire Je placement de capitaux considérables, dont partie est aujourd'hui cachée, et partie oc-cupée'par l'agiotage, qui, de toutes les manières de l'employer, est sans doute la plus nuisible à l'Etat. Et déjà votre comité peut vous annoncer qu'indépendamment des soumissions envoyées par les municipalités, il en reçoit journellement d'un grand nombre de particuliers, dont plusieurs mêmes offrent de payer au comptant, ou dans des termes plus courts que ceux fixés par votre décret du 14 mai ; l'instruction du 31 leur indique le taux de ces payements accélérés.
Ce n'est pourtant pas une raison pour vous proposer dans ce décret-ci des époques plus rapprochées ; vous voudrez conserver aux citoyens les moins aisés les moyens que vous leur avez offerts de devenir propriétaires, et vous ne sacrifierez pas cette grande vue politique à l'appât de voir rentrer un peu plus tôt le prix de ces biens. Il n'en est pas des finances d'un grand Etat comme d'une-fortune particulière: le possesseur de cette dernière doit toujours accélérer sa libération, parce qu'il veut jouir pendant sa vie de l'aisance qu'elle lui procurera, parce qu'il veut laisser à ses enfants une succession libre de charges, et parce que la brièveté de sa carrière ne lui permet pas ces opérations lentes, mais sûres lorsqu'elles sont l'ouvrage d'une nation toujours vivante, et qui ne craint pas, comme le particulier, que l'inconduite ou la prodigalité de ses héritiers leur fassent abandonner les mesures sages et bien calculées qu'il aurait prises.
Mais vous n'aurez pas même de sacrifices à faire. Les facilités que vous donnerez augmenteront le nombre des acheteurs, feront porter les biens à des prix plus hauts, et ceux à qui vous vendrez dans les campagnes en portions divisées seront plus empressés de s'acquitter, et devanceront par leurs payements les époques convenues beaucoup plus que de gros capitalistes qui, spéculant sur des profits étrangers à ceux de leur nouvelle propriété, s'arrangeront toujours pour n'avoir leurs fonds libres qu'aux époques prescrites.
Votre comité a pensé que pour ces nouvelles ventes au delà des 400 millions, qui sont l'hypothèque spéciale des assignats-monnaie, vous admettriez d'autres effets en concurrence avec l'argent et avec ces assignats, car il ne pense pas que vous preniez le parti qui vous sera peut-être proposé, comme il la.été dans plusieurs écrits, d'augmenter la masse de ce papier-monnaie. Sa création a été une mesure nécessaire, et le succès l'a
couronnée; mais en l'adoptant, vous avez senti qu'il fallait en déterminer l'étendue d'après les besoins de la circulation, et qu'une quantité trop grande de ce numéraire fictif la surchargerait : vous le maintiendrez dans les bornes que vous lui avez d'abord prescrites, et vous i'éteindrez à mesure de ses rentrées, sauf à créer dans la suite, si l'utilité en était démontrée, un autre papier libre et sans intérêt, pour suppléer au numéraire métallique et faciliter les opérations du commerce, en lui offrant un agent plus commode.
Vous emploierez donc un autre moyen pour rembourser la partie exigible de la dette publique, et dans cette partie, vous comprendrez sûrement les dîmes inféodées que vous avez abolies, les finances des offices de judicature et autres, que vous allez supprimer, et les payements arriérés que vous allez liquider. Vous trouverez sage d'opérer ces remboursements en effets dont la forme et le taux d'intérêt ne puissent pas prêter à l'agiotage; mais vous trouverez juste de leur attacher une qualité précieuse pour ceux qui les recevront, celle de pouvoir être convertis en propriétés foncières : vous remplirez à la fois votre double vœu, d'éteindre avantageusement pour la nation une partie considérable de sa dette et de satisfaire une classe de créanciers qui, privés de leur étal par la Révolution, trouveront dan s l'acquisition de propriétés territoriales un nouveau genre d'occupations que les hommes fatigués des fonctions publiques embrassent presque toujours avec plaisir, parce qu'elles ramènent à la nature, qui a toujours des charmes pour ceux qui se livrent à son étude et à ses travaux.
Il est encore une autre classe de citoyens à qui vous présenterez sans doute ce moyen de consolation : ce sont les titulaires ecclésiastiques dont vous allez fixer le traitement. Plusieurs préféreront à la rente viagère que vous leur assignerez un capital disponible; et, en déterminant ce capital d'après les calculs bien connus aujourd'hui des rentes viagères, vous ferez encore une bonne opération pour l'Etat, et vous ferez aimer la Révolution par ceux mêmes pour qui elle se présentait sous un aspect affligeant.
Vous admettrez sûrement aussi les rentiers viagers qui voudraient acquérir des domaines nationaux, à donner en payement leurs bordereaux et leurs titres de créances suivant un tarif qui déterminerait les sommes pour lesquelles ils seraient reçus, à raison de leur taux d'intérêt, et de leurs diverses chances; plusieurs de ces créanciers seront tentés de réaliser en fonds de terre ; et chacun de ces remboursements que vous opérerez sera pour la nation un profit très véritable.
Votre comité ne développera pas aujourd'hui ces aperçus d'une manière plus étendue (1), et
il terminera ce rapport, déjà trop long peut-être, en vçus proposant d'autoriser les administrations ou directoires de départements à recevoir directement, ainsi que lui, les soumissions des particuliers ; à se faire seconder par les administrations ou directoires de districts, et à entretenir une correspondance exacte et régulière avec votre comité
f tendant la durée de votre session, et ensuite avec es commissaires qui leur seront substitués par les législatures, alin que les progrès et les détails de cette grande et salutaire opération soient toujours sous les yeux des représentants de la nation.
DÉCRET
de VAssemblée nationale, des 25, 26 et 29 juin 1790.
L'Assemblée nationale, considérant que l'aliénation des domaines nationaux est le meilleur moyen d'éteindre une grande partie de la dette publique, d'animer l'agriculture et l'industrie, et de procurer l'accroissement de la masse générale des richesses, par la division de ces biens nationaux en propriétés particulières toujours mieux administrées, et par les facilités qu'elle donne à beaucoup de citoyens de devenir proprétaires, a décrété et décrète ce qui suit :
Art. 1er. Tous les domaines nationaux, autres que ceux dout la
jouissance aura été réservée au roi, et les forêts sur lesquelles il sera statué par un
décret particulier, pourront être aliénés en vertu du présent décret et conformément à ses
dispositions, l'Assemblée nationale réservant aux assignats-monnaie leur hypothèque spéciale.
Art. 2. Toutes les personnes qui voudront acquérir des domaines nationaux, pourront s'adresser soit au comité de l'Assemblée nationale chargé de leur aliénation, soit à l'administration ou au directoire du département, soit même à l'administration ou au directoire du district, dans lesquels ces biens sont situés, l'Assemblée nationale reservant au département toute surveillance et toute correspondance directe avec le comité pour ia suite des opérations.
Art. 3. Les municipalités qui enverraient des soumissions pour quelques objets déjà demandés par des particuliers, n'auront point droit à êlre préférées. Le comité enregistrera toutes les demandes des municipalités suivant l'ordre de la date de leurs délibérations authentiques, et celles des particuliers suivant la date de leur réception, et il enverra des expéditions, certifiées par un de ses secrétaires, à l'administration ou au directoire du département dans lequel ces objets sont situés.
Art. 4. Les administrations ou directoires de départements formeront un état de tous les domaines nationaux situés dans leur territoire, et procéderont incessamment à leur estimation dans les formes prescrites par les articles 3, 4, 1 et 8 du titre premier du décret du 14 mai ci-dessus mentionné, et par l'instruction du 31 mai. Elles commettront pour surveiller ce travail les administrations ou directoires de districts.
Art. 5. Elles commenceront ces estimations par les lieux où sont situés les biens, sur lesquels le comité leur aura renvoyé des soumissions, soit de
municipalités, soit de particuliers, ou sur lesquels elles en auraient reçu directement, et continueront ensuite à faire estimer ceux mêmes de ces biens pour lesquels il n'aurait été fait aucune soumission.
Art. 6. Elles auront soin, dans les estimations, de diviser les objets, autant que leur nature le permettra, afin de faciliter autant qu'il sera possible les petites soumissions et l'accroissement du nombre des propriétaires.
Art. 7. Les prix d'estimation seront déterminés, d'après les dispositions des articles 3, 4, 7 et 8 du titre premier du décret du 14 mai, ci-dessus mentionné, et serviront de base aux soumissions et aux enchères.
Art. 8. Les soumissions devront être au moins égales au prix de l'estimation, et les enchères ne seront ouvertes que lorsqu'il y aura de telles soumissions ; mais alors elles le seront nécessairement, et l'on y procédera dans les délais, dans les formes et aux conditions prescrites par les articles 1. 2, 3, 4, 5, 6, 8 et 9 du titre III du décret du 14 mai, et par l'instruction du 31 du même mois.
Art. 9. Les acquéreurs des domaines nationaux seront tenus de se conformer, pour les baux actuel s de ces biens, aux dispositions de l'article 9 du titre premier du décret du 14 mai, et aux conditions de jouissances prescrites par l'instruction du 31 du même mois, au maintien desquelles les administrations de départements et de districts, ou leurs directoires, tiendront exactement la main.
Art. 10. Les acquéreurs jouiront des franchises accordées par les articles 7 et 8 du titre premier du décret du 14 mai, et aussi de celles accordées par l'article 7 du titre III; mais pour ces dernières, pendant l'espace de cinq années seulement, à compter du jour de la publication du présent décret.
Art. 11. Les administrations de départements ou leurs directoires adresseront, le 15 de chaque mois, au comité chargé de l'aliénation des domaines nationaux pendant la présente session de l'Assemblée nationale, et, par la suite, aux commissaires qui leur seront désignés par les législatures, un état des estimations qu'elles auront fait faire, des ventes qui auront été commencées ou consommées dans le mois précédent, pour le tout être rendu public par la voie de l'impression.
Art. 12. Les acquéreurs feront leurs payements, aux termes convenus, soit dans la caisse de l'extraordinaire, soitdans celles de districts,qui seront chargées d'en compter au receveur de l'extraordinaire.
Art. 13. Les municipalités qui voudraient acquérir quelques parties de domaines nationaux pour des objets d'utilité publique, seront tenues de se pourvoir dans les formes prescrites par le décret du 14 décembre 1789, pour obtenir l'autorisation nécessaire, et seront ensuite considérées comme acquéreurs particuliers.
Art. 14. Les articles ci-annexés du décret du 14 mai et de l'instruction du 31 du même mois sur la vente de 400 millions de domaines nationaux, avec le changement des seules expressions nécessaires pour les adapter aux dispositions ci-dessus, seront censés faire partie du présent décret. -
Art. 15. Seront communs tant au présent décret qu'à celui du 14 mai dernier les articles suivants.
Art. 16. Les baux, d'après lesquels l'article 4 du titre premier du décret du 14 mai dernier,
détermine l'estimation des revenus des trois classes de biens y mentionné?, doivent être entendus des sous-baux, ou sous-fermes, lorsqu'il en existe ; en conséquence, le revenu d'un bien affermé par un bail général, mais qui est sous-fermé, ne pourra être estimé que d'après le prix du sous-bail.
Art. 17. Le défaut de prestation du serment imposé aux fermiers par le même article ne pourra pas empêcher de prendre leurs baux ou sous-baux pour base des estimations, lorsque ayant été requis par acte, de se rendre à jour indiqué par devant les directoires des districts pour prêter ce serment, ils ne s'y seront pas rendus : mais, dans ce cas, les fermiers réfractaires seront déclarés, par le juge ordinaire, à la poursuite et diligence des procureurs-syndics de districts, déchus de leurs baux ou sous-baux.
Art. 18. Le revenu des biens affermés par baux emphytéotiques, ou baux à vie, ne pourra pas être déterminé par le prix de ces baux, mais seulement d'après une estimation par experts.
Art. 19. Seront, au surplus, les baux emphytéotiques et les baux à vie censés compris dans la disposition de l'article 9 du titre Ier du dit décret; mais les baux emphytéotiques ne seront réputés avoir été faits légitimement, que lorsqu'ils auront été précédés et revêtus des formalités qui auraient été requises pour l'aliénation des biens que ces actes ont pour objet.
Art. 20. Tout notaire, tabellion, garde-note, greffier ou autre dépositaire public ; comme aussi tout bénéficier, agent, ou receveur de bénéficier, tout supérieur, membre, secrétaire, ou receveur de chapitre ou monastère, ensemble tout administrateur ou fermier, qui, en étant requis par un simple acte, soit à la requête d'une municipalité, soit à la requête d'un particulier, refusera de communiquer un bail de biens nationaux, existant en sa possession ou sous sa garde, sera, à la poursuite et diligence du procureur-syndic du district de sa résidence, condamné par le juge ordinaire aune amende de 25 livres ; cette amende sera doublée en cas de récidive, et elle ne pourra être remise, ni modérée en aucun cas. Si le procureur-syndic de district en négligeait la poursuite ou le recouvrement, il en demeurerait personnellement garant, et serait poursuivi comme tel par le procureur général syndic du département.
Art. 21. Il sera payé au notaire-tabellion, garde-note, ou autre dépositaire public, pour la simple communication d'un bail,dix sols, et dix sols en sus lorsqu'on en tirera des notes ou des extraits, sauf à suivre, pour les expéditions en forme qu'on voudra se faire délivrer, le taux réglé par l'usage, ou convenu de gré à gré.
Art. 22. S'il existait des lieux où les assemblées de districts ne fussent pas encore en activité, lors de la publication du présent décret, les municipalités des chefs-lieux de districts pourraient les suppléer dans toutes les fonctions à elles attribuées tant par le présent décret, que par celui du 14 mai dernier ; et lorsqu'il s'agira d'acquisitions à faire par une municipalité dans le district dont elle est chef-lieu, ces fonctions pourraient être remplies par la municipalité du chef-lieu du district le plus voisin qui n'aurait pas fait de soumission pour acquérir.
Articles du décret du
TITRE" PREMIER.
Art. 2. Les particuliers qui voudront acquérir directement des domaines nationaux, pourront faire leurs offres au comité, qui les renverra aux administrations ou directoires de départements, pour en constater la véritable valeur, et les mettre en vente conformément au règlement qui sera incessamment donné à cet effet.
Art. 3. Le prix des objets portés dans les demandes sera fixé d'après le revenu net, effectif ou arbitré, mais à des deniers différents, selon l'espèce de biens actuellement en vente, qui, à cet effet, seront rangés en quatre classes.
Première classe. Les biens ruraux consistant en terres labourables, prés, vignes, pâtis, marais salants, et les bois, bâtiments et autres objets attachés, aux fermes et métairies, et qui servent à leur exploitation.
Deuxième classe. Les rentes et prestations en nature de toute espèce, et les droits casuels auxquels sont sujets les biens grevés de cés rentes ou prestations.
Troisième classe. Les rentes et prestations en argent, et les droits casuels dont sont chargés les biens sur lesquels ces rentes ou prestations sont dues.
La quatrième classe sera formée de toutes les autres espèces de biens, à l'exception des bois non compris dans la première classe, sur lesquels il sera statué par une loi particulière.
Art. 3. L'estimation du revenu des trois premières classes de biens sera fixée d'après les baux à ferme existants, passés ou reconnus par devant notaire, et certifiés véritables par le serment des fermiers devant le directoire du district; et à défaut de bail de cette nature, elle sera faite d'après un rapport d'experts sous l'inspection du même directoire, déduction faite de toutes les impositions dues à raison de la propriété.
Les particuliers qui voudront acquérir seront obligés d'offrir, pour prix capital des trois premières classes, un certain nombre de fois le revenu net, d'après les proportions suivantes :
Pour les biens de la première classe, vingt-deux fois le revenu net ; Pour ceux de la deuxième, vingt fois; Pour ceux de la troisième, quinze fois. Le prix des biens de la quatrième classe sera fixé d'après une estimation.
Art. 7. Les biens vendus seront francs de toutes rentes, redevances ou prestations foncières, comme aussi de tous droits de mutation, tels que quint et requint, lods et ventes, reliefs, et généralement de tous les droits seigneuriaux ou fonciers, soit fixes, ou casuels, qui ont été déclarés rachetables par les décrets des 4 août 1789, et 15 mars 1790, la nation demeurant chargée du rachat desdits droits, suivant les règles prescrites, dans les cas déterminés par les décrets du 3 de ce mois : le rachat sera fait des premiers deniers provenant des reventes.
Art. 8. Seront pareillement lesdits biens affranchis de toutes dettes, rentes constituées et hypothèques, conformément aux décrets des 15 et 16 avril 1790. Dans le cas où il serait formé des oppositions,
elles sont dès à présent déclarées nulles et comme non-avenues, sans qu'il soit besoin que les acquéreurs obtiennent de jugement.
Art. 9. Les baux à ferme ou à loyer desdits biens, qui ont été faits légitimement et qui auront une date certaine et authentique, antérieure au 2 novembre 1789, seront exécutés selon leur forme et teneur, sans que les acquéreurs puissent expulser les fermiers, même sous l'offre des indemnités de droit et d'usage.
TITRE TROISIÈME.
Arl. 1er. Le quinze de chaque mois, les administrations ou
directoires de départements feront afficher, dans tous les lieux accoutumés de leur
territoire, et notamment dans ceux où les biens sont situés, et dans les villes ou bourgs,
chefs-lieux de district, fêtât des biens qu'elles auront fait estimer dans le mois précèdent,
avec énonciation du prix de l'estimation de chaque objet, et elles feront déposer des
exemplaires de ces états aux hôtels communs desdits lieux, pour que chacun puisse en prendre
communication ou copie,sans trais.
Art. 2. Aussitôt qu'il sera fait une offre au moins égale au prix de l'estimation, pour totalité ou pour partie des biens situés dans un département, l'administration de département ou son directoire seront tenus de l'annoncer par des affiches dans tous les lieux où l'état des biens aura été ou dû être envoyé, et d'indiquer le lieu, le jour et l'heure auxquels les enchères seront reçues.
Art. 3. Les adjudications seront faites dans le chef-lieu, et par devant le directoire du district de la situation des biens, à la diligence du procureur général syndic, ou d'un fondé de pouvoirs de l'administration de département, et en présence de deux commissaires de la municipalité dans le territoire de laquelle les biens sont situés ; lesquels commissaires signeront les procès-verbaux d'enchères et d'adjudication, avec les officiers du directoire et les parties intéressées, sans que l'absence desdits commissaires dûment avertis, de laquelle sera fait mention dans le procès-verbal, puisse arrêter l'adjudication.
Art. 4. Les enchères seront reçues publiquement; il y aura quinze jours d'intervalle entre la première et la seconde publication ; et il sera procédé un mois après la seconde à l'adjudication définitive, au plus offrant et dernier enchérisseur, sans qu'il puisse y avoir ouverture, ni au tierce-ment, ni au doublement, ni au triplement. Les jours seront indiqués par des affiches où le montant de la dernière enchère sera mentionné.
Art. 5. Pour appeler à la propriété un plus grand nombre de citoyens, en. donnant plus de facilité aux acquéreurs, les payements seront divisés en plusieurs termes. ,
La quotité du premier payement sera réglée en raison de la nature des biens plus ou moins susceptibles de dégradation.
Dans la quinzaine de l'adjudication, les acquéreurs des bois, des moulins et des usines paieront trente pour cent du prix de l'acquisition, à la caisse de l'extraordinaire;
Ceux des maisons, des étangs, des fonds morts et des emplacements vacants dans lès villes, vingt pour cent;
Ceux des terres labourables, des prairies, des vignes et des bâtiments servant à leur exploitation, et des biens de la seconde et de la troisième classe, douze pour cent.
Dans le cas où des biens de ces diverses natures seront réunis, il en sera fait ventilation pour déterminer la somme du premier payement.
Le surplus sera divisé en douze annuités égales, payables en douze ans, d'année en année, dans lesquelles sera compris l'intérêt du capital a cinq pour cent, sans retenue.
Pourront néanmoins les acquéreurs accélérer leur libération par des payements plus considérables et plus rapprochés, ou même se libérer entièrement, à quelque échéance que ce soit.
Les acquéreurs n'entreront en possession réelle qu'après avoir effectué le premier payement.
Art. 6. Les enchères seront en même temps ouvertes sur l'ensemble ou sur les parties de l'objet compris en une seule et même estimation ; et si, au moment de l'adjudication définitive, la somme des enchères partielles égale l'enchère faite sur la masse, les biens seront de préférence adjugés divisément.
Art. 8. A défaut de payement du premier acompte ou d'une annuité échue, il sera fait, dans le mois, à la diligence du procureur général syndic, sommation au débiteur d'effectuer son payement, avec les intérêts du jour de l'échéance ; et si ce dernier n'y a pas satisfait deux mois après ladite sommation, il sera procédé, sans délai, à une adjudication nouvelle, à sa folle enchère, dans les formes prescrites par les articles 3 et 4.
Art.9. Le procureur général syndic de l'administration de département poursuivante se portera premier enchérisseur pour une somme égale au prix de l'estimation, ou pour la valeur de ce qui restera dû, si cette valeur est inférieure au prix de l'estimation; il sera prélevé sur le prix de la nouvelle adjudication le montant de ce qui se trouvera échu, avec les intérêts et les frais, et l'adjudicataire sera tenu d'aquitter, au lieu et place de l'acquéreur dépossédé, toutes les annuités à écheoir.
Art. 11. Il ne sera perçu, pendant le cours de cinq années, pour aucune acquisition, adjudication, vente, subrogation, revente, cession et rétrocession de domaines nationaux, même pour les actes d'emprunts, obligations, quittances et autres frais relatifs auxdites translations de propriété, aucun autre droit que celui de contrôle, qui sera fixé à 15 sols.
Articles de l'instruction décrétée le
TITRE PREMIER.
Les experts seront nommés l'un par le particulier qui voudra acquérir, l'autre par l'assemblée ou le directoire du district, et le tiers expert, en en cas de partage, par le département ou son directoire.
Toutes personnes pourront être admises aux fonctions d'experts, il suffira qu'elles en aient été jugées capables et choisies par les parties intéressées.
TITRE III. ,
Les adjudications définitives seront faites à la chaleur des enchères et â l'extinction des feux.
On entend par feux, en matière d'adjudication, de petites bougies qu'on allume pendant les enchères, et qui doivent durer chacun au moins un demi-quart d'heure.
L'adjudication prononcée sur la dernière des enchères faites avant l'extinction d'un feu, sera seulement provisoire, et ne sera définitive que lorsqu'un dernier feu aura été allumé et se sera éteint sans que, pendant sa durée, il ait été fait aucune autre enchère.
Les départements et districts sont spécialement chargés de veiller à ce que les acquéreurs, jusqu'à leur entier acquittement, jouissent en bons pères de famille des bois, étangs ou usines qu'ils auraient acquis, et n'y causent aucune dégradation.
Modèle de soumission à souscrire par les particuliers qui veulent acquérir des domaines nationaux.
Département de District de Canton de Municipalité de Je soussigné Demeurant à déclare être dans l'intention de faire l'acquisition des domaines nationaux dont la désignation suit :
(Suivra la teneur des domaines nationaux qu'on veut acquérir avec indication de la date et du prix des baux, des noms des anciens titulaires ou propriétaires, et de leurs fermiers ou locataires.)
Lesquels biens sont affermés, ou loués par un bail (ou des baux) authentique passé
devant notaires à le (ouïes) et sont constatés être d'un produit annuel de(l).
Pour parvenir à l'acquisition desdits biens, je me soumets à en payer le prix de la manière déterminée par la disposition des décrets et instructions de l'Assemblée nationale, des 14 et 31 mai, 25, 26 et 29 juin derniers ; et quant à ceux des biens ci-dessus qui ne sont pas affermés, et dont le décret ordonne que le produit annuel sera évalué par des experts, pour en fixer le capital, je consens à le payer également, conformément à l'évaluation qui sera faite par experts, à l'effet de laquelle estimation je déclare choisir pour expert la (ou les) personne de
que j'autorise à y procéder conjointement avec l'expert ou les experts qui seront nommés par le directoire du district, et consens à en passer par l'estimation du tiers-expert qui, en cas de partage, sera nommé par le département ou son directoire.
En conséquence, je me soumets à payer à la caisse de l'extraordinaire ou à celle du district qui sera préposée, d'abord lors de l'acquisition, l'acompte déterminé par les décrets suivant la nature des biens, et ensuite le surplus du prix de l'acquisition dans le terme de douze années (2),
le tout suivant les dispositions desdits décrets : promettant au surplus m'y conformer absolument pour ma jouissance, jusqu'à l'entier acquittement du prix de mon acquisition.
Fait à le (1).
Les lettres et papiers doivent être adressés à MM. du comité chargé de l'aliénation des domaines nationaux, place Vendôme, n°, 9 à Paris.
Nota. Les particuliers qui ont déjà formé des demandes, sont invités à envoyer, sans délai, soit au comité chargé de l'aliénation des domaines nationaux, soit à l'administration ou au directoire du département, soit même à l'administration ou au directoire du district, une nouvelle soumission dans la forme ci-jointe; leur première soumission enregistrée au comité servira néanmoins à constater, par l'ordre de la date, la priorité, dans le cas de concours.
note.
Le comité ayant reçu un grand nombre d'observations sur les tableaux d'annuités, annexés à l'instruction du 31 mai, a fait vérifier avec soin, non seulement les calculs qui avaient été faits d'après les tables les plus exactes, mais les tables elles-mêmes ; il a fait vérifier de même les calculs qui lui ont été envoyés, dont beaucoup sont erronés, parce que leurs auteurs ont négligé quelques éléments nécessaires, ou n'ont pas observé certaines conditions, comme de fixer l'époque des remboursements un an avant l'échéance de l'annuité que l'on veut rembourser, afin d'éviter les fractions d'années dans le calcul des intérêts. Quelques-uns de ces auteurs ont aussi calculé avec plus de décimales que l'on n'en avait employé pour former les tableaux annexés à l'instruction du 31 mai; mais l'exactitude moins grande de ces derniers, n'est pas d'un vingt-quatre millième, c'est-à-dire n'est pas d'un sol sur 2,400 liv., excepté pour l'annuité de 11 liv. 5 s. 7 d. qui, avec six décimales serait de 11 liv. 5 s. 7 d. 68/100 de denier. Cette inexactitude se trouvera, tantôt au profit 3e la nation, tantôt à celui de l'acquéreur, et plus souvent au profit de ce dernier, ce qui a paru juste ; l'erreur même dans aucun autre cas ne s'élève pas à plus d'un sol sur 2,400 livres.
La vérification a donné pour résultat quelques erreurs très faibles, dont plusieurs sont des fautes d'impression ; voici la note des corrections.
Premier tableau. 87 liv. 2 s. 4 d.
Second tableau. 772 liv. 2 s. 5 d. 710 15 10 354 12 2
Corrections. 87 liv. 2 s.5 d
5 d.
772 liv. 3 s; 710 15 8 354 11 11
5 d.
Le comité croit devoir, en conséquence, faire réimprimer ici l'instruction avec les tableaux corrigés et quelques changements dans le discours, pour le rendre aussi clair qu'il est possible dans des matières qui exigent la connaissance de principes de calculs peu difficiles, mais que tout le monde n'a pas.
Instruction pour le payement des annuités et leur remboursement.
L'Assemblée nationale a autorisé les acquéreurs de domaines nationaux à ne payer comptant qu'une partie du prix, à condition qu'ils acquitteraient le reste en douze payements égaux, faits d'année en année; le premier payement devant avoir lieu un an après le jour de l'adjudication.
L'acquéreur devant payer l'intérêt de la somme dont il reste débiteur, les douze payements égaux doivent être déterminés de manière que chacun de ces payements renferme d'abord l'intérêt qui est dû, et de plus une partie du capital. Le taux de cet intérêt est fixé à 5 0/0 sans retenue.
L'on sait qu'on appelle, en général, annuités, des payements égaux, destinés à répartir également, sur un certain nombre d'années, l'acquittement d'un capital et de ses intérêts.
D'après cette vue, l'Assemblée nationale a converti la portion du prix que l'acquéreur ne paye pas comptant en une annuité payable pendant douze années, l'intérêt à 5 0/0 s'y trouvant compris.
Pour 100 livres de capital avec l'intérêt sur ce pied, l'annuité est de 11 liv. 5 s. 7 d. : ainsi un acquéreur doit, par an, autant de fois 11 liv. 5 s. 7 d. qu'il lui restera de fois de 100 livres à payer.
L'Assemblée nationale voulant de plus donner aux acquéreurs la facilité de se libérer quand ils le désirent, a décrété qu'ils pourraient rembourser leurs annuités à volonté, mais seulement un an avant l'époque de chaque échéance, afin d'éviter les fractions d'année dans le calcul des intérêts.
Premier exemple.
Le tableau ci-dessous montre quelle somme le débiteur d'une annuité de 11 liv. 5 s. 7 d. qui correspond à un capital de 100 livres, doit payer suivant le nombre d'années de cette annuité qu'il veut rembourser, en partant d'une année avant l'échéance.
Ainsi le débiteur de cette annuité (de 11 liv. 5 s. 7 d.) voulant la rembourser, dès la première échéance, c'est-à-dire ayant encore à la payer pendant douze années, doit rembourser une somme de 100 livres.
Premier tableau relatif au premier exemple.
Pour le remboursement des douze échéances d'une annuité de 11 liv. 5 s.
7 d............100 1. » s. »d.
Pour onze années............93 14 3
Pour dix années. ...... 87 2 5
Pour neuf années . . ; . . . 80 3 11
Pour huit anées. ...... 72 18 5
Pour sept années............65 5 9
Pour six années. ...... 57 5" 4
Pour cinq années ...... 48 17 »
Pour quatre années . . , . , 40 » 2
Pour trois années...... 30 14 6
Pour deux années . . ; * . . 20 19 7
Pour une année....... 10 14 11
Le détail des éléments de ce calcul serait trop long à insérer ; chacun pourra en vérifier ou faire vérifier l'exactitude d'après les tables.
En jetant les yeux sur ce tableau, chaque acquéreur voit, suivant le nombre d'années qu'il veut rembourser, quelle somme il doit payer chaque annuité de 11 liv. 5 s. 7 d. ; il doit payer autant de fois cette somme qu'il devait payer de fois une annuité de 11 liv. 5 s. 7 d., ou, ce qui revient au même, qu'il lui restait à payer de fois 100 livres sur le prix de son acquisition.
Comme il peut être commode aux acquéreurs, et qu'ils peuvent préférer de payer une annuité d'une somme exprimée en nombre rond, comme de 100 livres, par exemple ; et que, dans ce cas, il est convenable qu'ils connaissent précisément la somme dont ils s'acquitteront en capital, en se soumettant au payement d'une annuité de 100 livres, la table suivante présentera cette indication, ainsi que celle des sommes qu'un acquéreur devra payer, lorsqu'il voudra également rembourser une annuité de 100 livres.
La somme présentée par une annuité de 100 livres (laquelle comprend le capital et l'intérêt) est de 886 liv. 6 s. 5 d.
Ainsi, un acquéreur acquittera, sur le prix de son acquisition, autant de fois la somme de 886 liv. 6 s. 5 d., qu'il se sera soumisjà payer d'annuités de 100 livres.
Et lorsque le débiteur d'une annuité de 100 livres voudra la rembourser, il aura à payer les sommes indiquées par la table suivante, d'après le nombre d'années poUr lequel il s'agira de la rembourser.
Second tableau•
Un an avant la première échéance, c'est-à-dire aussitôt après l'acquisition, il faut payer : . Pour les douze années .... 8861. 6 s. 5 d.
Pour onze années...... 830 12 10
Pour dix années....... 772 3 5
Pour neuf années ...... 710 15 8
Pour huit années...... 646 6 5
Pour sept années...... 578 12 8
Pour six années....... 507 11 5
Pour cinq années ...... 432 10 10
Pour quatre années ...... 354 11 11
Pour trois années...... 272 6 5
Pour deux années......185 18 10
Pour une année....... 95 4 8
Par le moyen de ces deux tableaux, et de l'observation qu'une annuité de 11 liv. 5 s. 7 d: répond à 100 livres de capital, et 886 liv. 6 s. 7 d. de capital, à une annuité de 100 livres, on n'aura besoin que de calculs très simples pour appliquer à chaque acquisition particulière les clauses du décret.
Séance du
, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance du lundi 28 juin au matin.
Je demande que l'article premier du décret qui tend à mettre en activité les assemblées administratives, article dont vous venez d'èntendre la lecture dans le procès-verbal du 28 juin, soit terminé par cette phrase : Après avoir prêté le serment civique.
Je propose d'ajouter à la fin de l'article 6 du même décret, ces mots : « Ils feront dresser pareillement un tableau des ports de mer, des rivières navigables et caBaux de leur département, avec désignation de l'état dans lequel ils se trouvent, et de la situation des ouvrages d'art pour les parties dont la dépense est à la charge des administrateurs.
(L'Assemblée adopte ces deux additions.)
Il est fait quelques observations sur la rédaction de l'article concernant les suffragants résidant eh France, des évêques de Trêves et de Bàle, etc.
remarque qu'un amendement fait par lui, sur les évêques qui s'étaient précédemment démis, et qui avait été renvoyé aux comités écclésiastiques et des pensions réunis, se trouve jugé par l'article, .tandis qu'il exigéait une plus longue discussion.
(Sur celte observation, on demande à passer à l'ordre d u jour, * et l'Assemblée décrète qu'elle passera à l'ordre du jour.)
demande qu'on fasse droit sur le sort d© l'évêque - de Babylone, ainsi qu'il l'a déjà proposé.......
L'Assemblée décrète le -renvoi de cette demande au comité des pensions.
Le procès-verbal de la séance du 28 juin au matin est ensuite adopté.
, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier.
Je demande que le décret sur la reconstruction des écluses du canal de Crozat soit porté sans délai à la sanction.
(Lé procès-verbal est adopté.)
fait ensuite lecture d'une proclamation des officiers municipaux de la ville du Pont-Saint-Esprit, relative aux troubles de Nîmes. La voici :
Du
« Sur le réquisitoire de M. Darasse, procureur de la commune, qui a exposé que les troubles
qui ont régné à Nîmes ont été mal interprétés par les citoyens; que la religion et la
diversité des opinions religieuses n'ont pas occasionné les dits troubles, mais bien les
ennemis de la Révolution;
« Et, en conséquence, voulant répondre à la confiance publique, ordonne que tout bon citoyen sera tenu de lui dénoncer toutes les personnes, soit de la ville, soit étrangères qui tiendraient des propos séditieux, pour qu'elles soient livrées à toute la sévérité des lois, les membres qui le composent étant dans la ferme résolution de soutenir, au péril de leur vie, l'autorité qui leur a été confiée par l'auguste Assemblée nationale, et qu'ils emploieront avec prudence, pour le maintien de la paix et du bon ordre ; et arrête que la présente proclamation sera imprimée, publiée et affichée, et qu'extrait en forme sera envoyé à l'Assemblée nationale, et des exemplaires dans toutes les municipalités de notre district.
« Signé : Laramée, maire; Tronc, Barrière, de Belgaric, Legrand, chevalier de Saint-Louis ; Raoux, Allard, Marel, Roman, officiers municipaux; Darasse, président de la commune; Dau-rand, secrétaire-greffier. »
(ci-devant le baron), député de Dourdan, envoie sa démission pour raison de santé. Dans la lettre qu'il écrit au président, il rend compte de sa conduite publique. Il déclare n'avoir jamais été d'aucun parti, n'avoir assisté à aucune conférence à la cour ni chez les ministres, n'avoir signé aucune protestation et n'avoir jamais pris conseil dans ses votes que de sa raison et de sa conscience.il rend compte ensuite de l'usage patriotique qu'il a fait de la partie de son traitement qui a excédé la:dépense.
(La lecture de cette lettre est entendue avec satisfaction par l'Assemblée.)
, au nom du comité de Constitution, rend compte de la pétition présentée la veille à VAssemblée par la municipalité de Versailles au sujet du commandement en chef de la garde nationale de cette ville et dit : Les diverses questions sur lesquelles le conseil général de la commune de Versailles vous a consultés, ont été traitées dans votre comité : elles lui ont paru liées avec celles qu'il agite sur l'organisation définitive des milices nationales ; et comme il ne veut point vous présenter de principes prématurés, il a cru que le moyen le plus propre pour conserver la paix et arrêter la fermentation des esprits, relativement aux divers objets de la pétition, était de surseoir à la nomination d'un commandant général dans la ville de Versailles, jusqu'à l'organisation définitive des gardes nationales. En conséquence, votre comité a l'honneur de vous présenter le projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale, sur l'adresse présentée par le maire, au nom du conseil général de la commune de Versailles, au sujet de l'élection d'un commandant en chef, commencée par la garde nationale;.
« Considérant que .la garde de Versailles* reconnaît actuellement, un commandant, et que la nominatioo d'un, commandant en chef est superflue, pour le pende temps qui doit s'écouler jusqu'à l'époque de l'organisation définitive des gardes nationales; ...
« Qu'elle donne, lieu à diverses réclamations, tant d'un grand nombre de citoyens actifs de cette ville, que des .officiers municipaux; quo
les opinions sont partagées sur les principes relatifs, tant à l'éligibilité des sujets, qu'à la qualité des électeurs et à la forme des élections; de sorte qu'il n'en peut résulter que des divisions capables d'altérer la paix si importante à maintenir :
« Décrète qu'il sera sursis à toute nomination de commandant en chef dans la ville de Versailles, jusqu'après le décret constitutionnel qui sera donné incessamment sur l'organisation définitive des gardes nationales. »
(Ce projet de décret est adopté.)
J'ai reçu de M. Lambert une lettre et un mémoire sur la difficulté qu'opposent certaines villes de Picardie à la perception des droits d'aides. ( Voy. ce document annexé à la séance de ce jour).
Cette affaire est renvoyée au comité des finances.
Vordre du jour est la suite de la discussion du projet de décret sur le traitement du clergé actuel.
continue à remplacer M. l'abbé Expilly, rapporteur, à qui la faiblesse de sa voix ne permet pas d'être entendu.
L'article 17 du projet de M. l'abbé Expilly, qui deviendra l'article 20, est ainsi conçu :
« Art. 17. La réduction qui sera faite, à raison de l'augmentation des portions congrues, ne pourra néanmoins opérer la diminution du titulaire actuel au-dessous du minimum fixé pour chaque espèce de bénéfice. Excepté toutefois à l'égard des bénéfices simples et qui n'étaient pas sujets à résidence, dont les titulaires pourront être réduits à la somme de 500 livres. »
Je demande la suppression de la dernière partie de l'article, afin de mettre en concordance toutes les parties de votre décret.
Le comité allait vous le proposer lorsque son rapporteur a été interrompu.
met l'article aux voix : il est adopté en ces termes :
« Art. 20. La réduction qui sera faite à raison de l'augmentation des portions congrues ne pourra néanmoins opérer la diminution des traitements des titulaires actuels au-dessous du minimum fixé pour chaque espèce de bénéfice. »
donne lecture des articles 18 et 19 du projet de décret, destinés à devenir les articles 21 et 22 du décret définitif.
« Art. 18. Dans les chapitres où il était d'usage de faire acheter des maisons canoniales aux titulaires, ceux qui justifieront les avoir payées continueront d'en jouir pendant leur vie, et en conséquence, le produit desdites maisons n'entrera pour rien dans la fixation du produit des bénéfices.
« Àrt. 19. Tous les titulaires des bénéfices supprimés qui justifieront avoir construit à leurs frais la maison d'habitation continueront de jouir de ladite maison pendant leur vie, et ils ne seront tenus, ainsi que tous les autres écclésiastiques, que des réparations locatives, à raison des bâtiments . de leurs bénéfices qui leur sont conservés. »
Je propose d'ajouter par amende-
ment, sans que les dispositions des présents articles puissent s'étendre aux maisons canoniales achetées par des particuliers, ou maisons étrangères ».
Cet article est appuyé, etre produit sous diverses formes par MM. Ëontemps, Mougins, Goupilleau et plusieurs autres membres.
Tous les préopinants conviennent que l'article est juste, mais qu'il n'est pas assez étendu, c'est-à-dire qu'il n'a pas pourvu à tous les cas, La comité a eu connaissance d'une partie de ces usages, mais ils lui ont paru abusifs ; il n'a pas conçu que des étrangers puissent acquérir un droit sur une propriété, par la seule volonté d'un chapitre. Je propose donc de décréter l'article sur-le-champ, et, à l'égard des amendements, de les renvoyer au comité ecclésiastique, qui les discutera et en fera le rapport.
Je demande l'ajournement de l'article et des amendements.
Je m'oppose formellement à l'ajournement. Les discussions sur ce qui concerne le clergé ont absorbé un temps assez considérable. Nous avons encore l'ordre judiciaire, les gardes nationales, les troupes de ligue; il est nécessaire que l'Assemblée s'occupe de ces objets importants. Je demande qu'on prenne un parti sur les deux articles.
L'ajournement est mis aux voix, et deux épreuves successives paraissent douteuses.
Je demande la parole. (On observe que la délibération est commencée.)
L'Assemblée décide que M. Camus sera entendu.
Je demande la question préalable sur les deux articles, et voici mes raisons : Vous avez décrété le sort des titulaires, mais vous n'avez pas décrété qu'ils auraient la jouissance d'une maison en sus de leurs bénéfices. Que font les usages ?1ls ne prescrivent jamais contre la justice. Voici ce qui est juste : Si un ecclésiastique a acheté une maison, s'il y a fait des réparations considérables, il est juste qu'il soit indemnisé ; mais il n'est pas dit que l'indemnité doive être la jouissance de la maison. Je persiste donc à demander la question préalable.
Plusieurs de cesmaisonscanonia-lesont toujours été dans le commerce, avec la seule restriction de ne pouvoir les vendrequ'àdes chanoines. Celui qui possédait est doue bien fondé à s'attendre à jouir. Pouvez-vous, avec quelque -apparence de justice, le chasser de chez lui? Laissez-le donc tranquille dans sa possession légitime, ou du moins faites estimer sa maison par des experts, et accordez-lui une juste indemnité.
Il faut distinguer quatre espèces de maisons canoniales et ranger dans la quatrième classe celles qui, construites sur un terrain exempt de servitude féodale par la disposition du fondateur, ont donné lieu à l'exercice d'un droit de retrait, mais ont passédaa3 le commerce à titre de propriété et ont été achetées par les aînés des héritiers des morts ; je demande que cette espèce soit exceptée du décret ou que le prix en soit réservé aux propriétaires actuels.
Les observations que vient de
présenter le préopinant sont parfaitement fondées et l'article ne doit pas comprendre les maisons canoniales defemmes. Dans le département de l'Ain il y a deux chapitres dont les maisons canoniales ont été bâties aux dépens des familles qui y ont placé leurs filles. Pour conserver cette propriété légale, je demande le renvoi de tous les amendements au comité.
, rapporteur. Je propose à l'Assemblée une nouvelle rédaction qui me paraît de nature à concilier toutes les opinions. La voici :
« Les maisons servant de logements aux titulaires n'entreront point en considération dans la composition de la masse de leurs revenus : pourront néanmoins ceux qui auront des droits particuliers à prétendre sur lesdites maisons, demander une indemnité, laquelle leur sera accordée, s'il y a lieu, sur l'avis des directoires des départements et des districts. »
Dans toutes les questions de propriété, il y a quelque.imprudence à procéder par voie d'amendement ou de rédaction improvisée. Je demande l'ajournement et le renvoi au comité.
(L'ajournement et le renvoi au comité sont mis aux voix et décrétés.)
(ci-devant marquis) et de Lafare, évêque de Nancy, demandent la permission de s'absenter pour quelque temps.
Je demande qu'au jour qu'il plaira à l'Assemblée de fixer, on fasse un appel nominal, que la liste des absents soit imprimée et envoyée dans les provinces, afin que l'on sache comment l'Assèmblée est organisée.
Gela est d'autant plus important, qu'on répand dans le public que beaucoup de membres s'absentent par poltronnerie.
(ci-devant duc). J'ai demandé à m'absenter -, je prie le préopinant de venir me dire à moi-même s'il m'accuse de poltronnerie.
(ci-devant marquis). Nous demandons que M. Rewbel soit censuré.
(L'Assemblée décide que l'ordre du jour sera continué.)
(en s'avançant vers M. Rewbel): Est-ce vous, Monsieur, qui accusez les membres de l'Assemblée nationale de poltronnerie ?...
(L'incident n'a pas de suite.)
VAssemblée reprend la suite de la discussion du décret sur le traitement du clergé actuel.
Je vais donner lecture de l'article 20 du plan qui vous a été proposé par M. l'abbé Expilly. Cet article deviendra le 21°. Le numérotage sera changé ultérieurement, si l'ordre de vos décrets rend cette modification nécessaire (1).
« Art. 21. Les titulaires qui, par le décret du 20 avril dernier, sont autorisés a
continuer, pour la présente année seulement, la régie et l'exploitation de leurs biens,
retiendront par leurs mains
(Cet article est mis aux voix et adopté.)
, rapporteur. L'article 21 du plan de M. l'abbé Expilly, qui deviendra le 22e, est ainsi conçu :
« Art. 21. A dater du premier janvier 1791, les traitements seront payés de trois mois en trois mois, savoir aux archevêques et évêques, par le receveur de leur district, aux curés et vicaires, par le receveur ou collecteur de leur municipalité, et à tous les autres titulaires, par le receveur du district dans lequel ils fixeront leur domicile; et seront les quittances de tous lesdits bénéfices allouées pour comptant aux receveurs qui les auront payés.
Le clergé actuel ne doit pas être dans une position plus défavorable que le clergé futur. Or, vous accordez à celui-ci un traitement par avance : pourquoi avoir deux poids et deux mesures ? Je demande que le traitement soit payé d'avance.
Ceux qui veulent qu'on paye d'avance n'ont sans doute pas examiné si on était en état de payer. Il faut que la nation ait fait le recouvrement de ses fonds, pour pouvoir payer tous ceux qu'elle emploie à son service. Je demande donc la question préalable sur l'amendement.
Je ferai remarquer à l'Assemble que les bénéfices actuels sont toujours en jouissance. Leur sort n'est donc pas le même que celui des titulaires futurs.
Votre comité a pensé qu'on ne devait pas payer d'avance aucun fonctionnaire actuel ecclésiastique parla raison que vient d'exposer succinctement M. Tronchet. Tout ce qui pourrait, en effet, engager à faire ces avances, ce serait particulièrement la position des curés à portion congrue et celle des vicaires ; mais observez qu'on a augmenté le traitement des uns et des autres dès cette année. Cet augmentation les dédommage et au delà du payement par avance et laisse plus de latitude à la nation pour le recouvrement des fonds nécessaires à ses payements. Nous vous proposons d'ailleurs de décréter l'article avec la modification suivante :
« Art. 22. A dater du 1er janvier 1791, les traitements seront payés de trois mois en trois mois, savoir : aux évêques, curés et vicaires, par le receveur de leur district, et à tous les autres titulaires, par le receveur de celui dans lequel ils fixeront leur domicile ; et seront les quittances de tous lesdits bénéficiers allouées pour comptant aux receveurs qui auront payé. » (Adopté.)
Vous avez renvoyé à l'examen de votre comité ecclésiastiques divers amendements présentés pendant la discussion. Je viens vous soumettre quatre articles additionnels qui nous paraissent nécessaires pour donner satisfaction à des droits légitimes.
Le premier de ces articles concerne le traitement des ecclésiastiques et des laïques qui sont attachés à des églises. En effet, si un habitué dans les ordres, un laïque, un organiste, un mu-
sicien est parvenu à un grand âge et qu'il soit dans l'impossibilité de faire autre chose, ce n'est pas certainement l'intention de l'Assemblée de l'abandonner ; il faut lui procurer un sort quelconque. Nous avons cru nous conformer aux principes reconnus de l'Assemblée, à l'humanité et à la justice, en vous proposant d'adopter ce qui suit :
« Art. 23. Il pourra être accordé, sur l'avis des directoires de département et de district, aux ecclésiastiques, qui sans être pourvus de titres, sont attachés à des chapitres, sous le nom d'habitués perpétuels, ainsi qu'aux officiers laïques, organistes, musiciens et autres personnes employées pour le service du culte divin, et aux gagés des églises et chapitres réguliers et séculiers, un traitement soit en gratification, soit en pension, suivant le temps et la nature de leurs services, et eu égard à leur âge et à leurs infirmités : les appointements ou traitements accordés ! à chacun leur seront payés la présente année. »
(de Saint-Jean d'Angely). Je réclame votre justice en faveur des ecclésiastiques qui étaient attachés aux évêques en qualité de secrétaires : ceux qui n'avaient que le traitement accordé par les évêques, vont se trouver absolument dénués de secours, car les évêques ne pourront plus les garder. Il y en a peut-être douze ou quinze. Je crois qu'il est de la justice de leur fixer un traitement, jusqu'à ce qu'ils aient une autre place.
Il faut aussi assigner un traitement à tous les sacristains, enfants de chœur, sonneurs, etc.;-c'est le meilleur moyen de priver la nation de toutes ses ressources.
On peut imposer aux intéressés l'obligation de continuer leurs services si on en a besoin.
Les critiques que soulève l'article ne sauraient prévaloir devant vous contre la justice. Plusieurs ecclésiastiques ont passé leur jeunesse attachés à des chapitres, dans l'attente d'un bénéfice; cet usage est suivi au chapitre de Lyon; enlin la suppression du casuel prive de tout moyen d'existence des personnes qui n'en avaient point d'autre. (On demande à aller aux voix.) L'article est adopté en ces termes : « Art. 23, Il pourra être accordé, sur l'avis des directoires de département et de district, aux ecclésiastiques qui, sans être pourvus de titres, sont attachés à des chapitres sous le nom d'habitués ou sous, toute autre dénomination, ainsi qu'aux officiers laïcs, organistes, musiciens et autres personnes employées au service divin, aux gagés desdits chapitres séculiers et réguliers, un traitement, soit en gratification, soit en pension, suivant le temps et la nature de leurs services, et eu égard à leur âge et leurs infirmités : les appointements ou traitements ci-devant accordés à chacun leur seront payés la présente année. »
Le second article additionnel est ainsi conçu :
« Art. 24. Tous ceux qui seront pourvus dans la suite d'offices ou emplois cesseront, dès ce moment, de jouir du traitement à eux accordé par les précédents décrets ; et dans le cas où ils se trouveraient de nouveau sans office ou emploi,
ils reprendraient la jouissance de leur traitement. »
Messieurs, si vous adoptiez l'article tel qu'il vous est proposé, vous favoriseriez la paresse. Je demande si un religieux à qui vous accordez, par exemple, un traitement de 900 livres, sans rien faire, ira prendre un vicariat où il aura moins qu'eu ne faisant rien ?
L'observation de M. Martineau est parfaitement juste. Je demande qu'au cas où un régulier prendrait de l'emploi dans le ministère, il ne puisse avoir moins que sa pension.
Je suis d'avis de conserver aux moines non la moitié, mais le tiers de leur traitement. Quant à la disposition qui porte : et s'il se trouve de nouveau sans emploi, il reprendra la jouissance de son traitement, j'en demande la suppression parce que s'il arrive que vous ayez affaire à un homme sans morale et sans mœurs, l'Assemblée ne peut consentir à gager éternellement le vice.
Un homme pareil serait poursuivi en justice réglée et déclaré déchu de tous ses droits. L'objection est donc sans valeur.
L'article a besoin d'être modifié parce que les personnes à qui l'Assemblée accorde un traitement n'oseraient prendre de l'emploi, si elles couraient risque d'être privées de ce traitement. -
insiste pour l'adoption de son amendement. L'amendement est adopté et l'article est décrété j dans les termes suivants :
« Art. 24. Tous ceux auxquels il est accordé des traitements en pension de retraite, qui dans la suite seraient pourvus d'office ou emploi pour le service divin, ne conserveront que 1e tiers du traitement qui leur est accordé par ie présent décret, et ils jouiront de le totalité de celui attribué à la place dont ils rempliront les fonctions : dans le cas où ils se trouveraient de nouveau sans office ou emploi du même genre, ils reprendraient la jouissance de leur pension de retraite. »
donne lecture des deux derniers articles additionnels. Ils sont décrétés sans discussion ainsi qu'il suit :
« Art. 25. La moitié de la somme formant le minimum du traitement attribué à chaque classe d'ecclésiastiques, tant en activité que sans fonctions, sera insaisissable.
« Art. 26. Les administrations de département et de district prendront la régie des bâtiments et édifices qui leur a été confiée par les décrets des 14 et 20 avril dernier, dans l'état où ils se trouveront. En conséquence, les bénéficiers actuels, maisons, corps et communautés ne seront inquiétés en aucune manière, à raison des réparations qu'ils auraient dû faire; et, pour l'avenir, ceux qui conserveront la jouissance des bâtiments attachés à leur bénéfice seront tenus de toutes les réparations locatives seulement, »
, rapporteur, dit que l'Assemblée aura à s'occuper maintenant de la partie relative aux patronages laïques.
annonce qu'une députation
du district de Versailles demande à être admise à la barre afin de réclamer contre la conduite de la municipalité de Versailles qui est venue la veille soumettre à l'Assemblée l'élection d'un commandant général de la garde nationale.
La députation est introduite.
L'autorité de l'administration des districts est -méconnu, dit-elle; vous devez la défendre; vos décrets sont violés, vous devez les venger : la garde nationale est outragée, vous devez la protéger. M. de Lafayette ayant donné sa démission rde commandant en cbef de la garde nationale de Versailles, on a procédé, avec ordre et en suivant les règlements, à une élection pour lui donner un successeur. Les scrutins étaient.faits dans toutes les compagnies; il s'agissait de leur dépouillement, lorsque la municipalité a réclamé et proposé de faire faire l'élection par les sections. L'administration de district, instruite de la contestation à laquelle cette réclamation donnait lieu, l'a renvoyée au département, qui s'en trouve en ce moment saisi. Cette conduite était la seule que vos décrets autorisassent... Un règlement, fait de concert entre la garde nationale et la municipalité, porte que le commandant en en chef, le commandant second et le major-général seront nommés dans les compagnies. Un de vos décrets a ordonné que tout ce qui concerne les gardçs nationales restera dans le même état, jusqu'à leur organisation : on s'est encore écarté de ce décret. Vous avez aussi ordonné que les municipalités auraient recours aux assemblées administratives : leur autorité a été méconnue. .Que deviendra la Constitution, si ces assemblées soiit avilies au moment qu'elles sont formées? Que ferez-vous, si quarante mille municipalités correspondent directement avec vous ?
Plusieurs membres demandent que le décret rendu le matin soit lu à la députation.
Cette lecture est faite.
Il est sans doute dans l'intention de l'Assemblée nationale de juger en connaissance de cause une affaire de cette importance. Toutes les parties n'ont point été entendues... On peut changer un décret rendu sur une affaire particulière, et qui n'est réellement qu'une simple décision : on le peut, surtout quand il a été obtenu sur un faux exposé... (Des murmures interrompent Vopinant.) Il faut indiquer une autre séance pour juger, après avoir'entendu toutes les parties. (Les murmures recommencent.) J'insiste, parce qu'à la surprise qui a été faite à votre religion, se joignent des considérations très importantes. Les réclamations ne se sont élevées qu'au moment où l'on allait nommer la personne élue. On reconnaît ici l'intrigue et les passions particulières.
(de Saint-Jean drAngely). Je ne sais rien qui annonce dans la municipalité de Versailles des passions particulières. Ce motif ne devrait pas vous déterminer, quand ces passions seraient connues, à plus forte raison quand elles ne le sont pas. Je crois que le décret de ce matin est suffisant. Il ne statue ni sur les demandes de la municipalité de Versailles, ni sur les atteintes que l'assemblée de district expose avoir été faites à ses droits et à ceux de la garde nationale. 11 donne aux passions le temps de s'éteindre, et assure la tranquillité publique. Le commandant en second est'digne de la confiance de Ja garde nationale et de celle de tous les citoyens.
Il me semble que c'est le cas de passer à l'ordre du jour.
à la députation :
L'Assemblée nationale prendra en considération la pétition du district ae Versailles : elle vous permet d'assister à sa séance.
rend compte, au nom du comité des rapports, de Vaffaire de la colonie de Tabago.
Je viens, au nom de votre comité, vous présenter un projet de décret relatif à l'affaire de l'île de Tabago. L'article 3 exige une observation préalable. Cet article porte que les lois anglaises continueront à être exécutées comme par le passé. Lors de la conquête de cette île, les lois anglaises furent provisoirement conservées. Les ministres n'ayant pris aucune mesure à cet égard, les habitants de la colonie ont demandé à attendre la constitution que devait leur donner l'Assemblée nationale.
Voici le projet de décret :
« L'Assemblée nationale, sur le compte qui lui a été rendu par son comité des rapports des malheurs arrivés à Tabago par l'incendie totale du Port-Louis, et de la situation désastreuse où se trouve cette colonie, décrète : 1° que son président se retirera par devers le roi, pour le supplier de donner ses ordres pour faire les armements, et prendre les mesures nécessaires pour la sûreté et la subsistance des colonies; 2° Sa Majesté sera suppliée de faire faireun état exactdes pertes essuyées dans l'incendie du Port-Louis, afin que l'Assemblée puisse prendre en considération les secours à donner à cette colonie; 3° L'Assemblée décrète que les lois anglaises actuellement existantes à Tabago continueront à être observées, jusqu'à ce qu'il en ait été autrement ordonné, quand l'assemblée coloniale légalement constituée aura transmis le vœu de la colonie, conformément aux décrets des 8 et 28 mars dernier ; 4° Attendu que sous l'ancien régime, tous les habitants formaient une garde bourgeoise, l'assemblée coloniale est autorisée à supprimer toutes compagnies de volontaires, et à ordonner à chaque volontaire de se retirer dans la compagnie de la garde nationale de la paroisse de sa résidence; enfin, Sa Majesté sera suppliée d'ordonner toutes les mesures nécessaires pour découvrir et faire punir les auteurs et instigateurs des troubles, et d'en prévenir de pareils à l'avenir.
Je ne puis me dispenser d'observer qu'aucun membre ne connaît assez les faits pour se décider dans une occurrence aussi importante. Je prie l'Assemblée de considérer quelles pourraient être les conséquences d'un décret par lequel le pouvoir exécutif serait indéfiniment autorisé à faire un armement pour secourir une colonie dont vous ne connaissez pas l'état. (Il s'élève beaucoup de murmures. — On demande à aller aux voix). Si cette considération ne vous touche pas, si vous ne voulez pas réfléchir sur les intentions du gouvernement dans nos relations extérieures, si vous ne voulez pas qu'on puisse impunément faire une guerre étrangère, si vou3 ne voulez pas que je vous dise que ce ne sera point par une proposition directe qu'on cherchera à engager la guerre, mais par des pro-positionset des démarches détournées, dont l'effet sera d'autant plus sûr qu'il sera éloigné; si vous
pe voulez pas que je vous dise que personne ne connaît l'état de cette colonie ; que ce que vous en savez, vous ne l'avez appris que par l'assertion d'un ministre et d'un seul de vos membres, n'examinez pas, prenez un parti sur la proposition des ministres ; croyez-les sur parole, et décrétez la guerre et ia servitude.
Les armements dont se plaint M. Robespierre consistent en un bâtiment marchand portant 300 hommes.
(ci-devant d'Eprémesnil). Si M. Robespierre doute des faits, je vous propose de l'envoyer pour commissaire à Tabago, afin de les vérifier.
Il n'y a pas de milieu ; il faut entendre avec patience les membres de cette Assemblée, ou s'exposer à tous les dangers dont j'ai parlé. Je ne sais si les mesures proposées sont déterminées par les besoins de Tabago ou par des menées ourdies par les ministres pour Occasionner la guerre. Nous avons pour garant des faits une lettre du ministre et l'assertion d'un de nos collègues. Jamais nos décrets ne doivent être rendus sur des assertions isolées et appuyées sur des assertions ministérielles. Nos inquiétudes sont d'autant mieux fondées, qu'on n'a pas laissé au comité le temps d'éclaircir les fkits. D'après ce qui m'est dit en ce moment par les députés des colonies, je demande le renvoi du projet de décret au comité colonial.
MM. de Reynaud et de Gouy, députés de Saint-Domingue, appuient la proposition du renvoi au comité colonial.
Si les craintes qui s'élèvent quelquefois contre les ministres sont fondées, ce n est pas aujourd'hui. Comment peut-on savoir un événement arrivé à deux mille lieues, si ce n'est par le ministre de la marine? M. de La Luzerne a fait remettre au comité un compte des faits, signé de lui et rendu par un commandant de la marine. J'ai reçu ce matin une lettre de MM. Labermoudière et compagnie, de Dunkerque, par laquelle ils me mandent que le navire ia Thérèse, arrivé le 27 dans ce port, a apporté la nouvelle de l'incendie du Port-Louis. Je propose, pour tranquilliser sur l'armement, qu'il soit dit dans l'article premier que trois cents hommes seront transportés sur uu bâtiment marchand, qui portera en même temps des armes et dès vivres. Les armes que je demande sont trois cents fusils pour les habitants, qui, au nombre de trois cent cinquante, sont entourés de seize mille noirs sortant à peine d'une insurrection qui a duré huit années.
(On fait une lecture du projet de décret avec ce changement.)
(On demande à aller aux voix.)
Je propose l'ajournement à samedi, et le renvoi au comité des rapports et au comité colonial réunis.
(On demande encore à aller aux voix.)
On ne suit point dans ce décret la marche constitutionnelle. Il faut supplier le roi de mettre l'Assemblée à même de délibérer, en faisant connaître, par ia voie des ministres, les secours qui seront nécessaires.
Le décret dont il s'agit est très important. La France ne veut pas la guerre ;
on n'accorderait pas indéterminément un arme-meisent et un envoi de troupes sans donner de l'inquiétude aux cabinets étrangers. Depuis que vous avez rendu sur la guerre un décret qui sera à jamais célèbre, il ne s'est point encore présenté l'occasion d'une délibération qui y eût quelques rapports. Je demande que pour consolider la maxime de la responsabilité, et consacrer la marche que les ministres doivent suivre en pareil cas, il soit décrété que le président se retirera par devers le roi, pour prier Sa Majesté d'or-donnner aux ministres de notifier officiellement l'état de Tabago ; ensuite le comité présentera un projet de décret.
Cette proposition est adoptée en ces termes :
« L'Assemblée nationale décrète que son président se retirera dans le jour devers le roi, pour le supplier d'ordonner au ministre de la marine de commmuniquer officiellement à l'Assemblée les renseignements qu'il a reçus de Tabago, et le nombre des troupes et la quotité des secours qu'il juge nécessaires pour cette colonie. »
{ci-devant le vicomte. ) Quelques lettres particulières avaient laissédps doutes sur la soumission du régiment Royal-Marine. Une lettre du maire d'Uzès affirme que cp régiment est rentré dans l'ordre, qu'il a rappelé ses officiers, et qu'il est pénétré de reconnaissance pour la lettre que M. le président lui a écrite au nom de l'Assemblée nationale.
(La séance est levée à quatre heures.)
a la séance de l'assemblée nationale du
Lettre du contrôleur général des finances sur la situation des perceptions de la Régie générale des aides dans les villes des ci-devant généralités d'Amiens et de Soissons (1). -
lettre du controleur général.
Du
Monsieur le Président.
La Picardie est une des provinces du royaume où l'esprit d'insurrection s'est le plus manifesté. J'avais espéré que les décrets de l'Assemblée nationale, sanctionnés par le roi, rendus successivement pour le maintien des impôts indirects, y opéreraient le rétablissement des perceptions de la Régie générale des aides ; mais, loin d'y obtenir la soumission due aux décrets de l'Assemblée nationale et aux ordres du roi, le mal se propage, et si les exercices et visites des employés sont encore soufferts dans quelques lieux, les droits qu'ils constatent ne peuvent pas être recouvrés. Les employés manquent d'une protection suffisante : des municipalités ont de la bonne volonté sans force, d'autres craignent de se rendre odieuses en protégeant les perceptions. Dans beaucoup d'endroits, les municipalités ou les gardes nationales sont composées en grande partie de redevables, et c'est vainement qu'on sollicite d'eux
secours ou main-forte. Il est cependant bien nécessaire de ne pas laisser ainsi les perceptions à la discrétion des redevables; indépendamment de ce qu'il en résulte que le Trésor public est privé d'une branche importante de revenu, et que l'ordre devient d'autant plus difficile à rétablir dans les finances, il est bien essentiel de ne pas paraître fermer les yeux sur un genre d'insubordination qui a pour but de se soustraire aux impôts, car l'exemple en est très contagieux. J'ai fait faire, Monsieur le Président, un relevé qui présente l'état d'insurrection de la Picardie et du Soissonnais, formant aujourd'hui une partie des départements de la Somme, de l'Aisne et du Pas-de-Calais. J'ai pensé qu'il devait être soumis à l'attention de l'Assemblée nationale, et qu'il la déterminerait à chercher dans sa sagesse un parti capable d'assurer le payement des impôts indirects. J'ai l'honneur de vousenvoyercerelevé ; ie vous prie, Monsieur le Président, de vouloir bien le mettre sous les yeux de l'Assemblée nationale.
Je suis avec respect, Monsieur le Président,
Votre très humble et très obéissant serviteur.
lambert.
RELEVÉ DE LA SITUATION DES PERCEPTIONS DE LA RÉGIE GÉNÉRALE DES AIDES.
Département de la Somme.
Ville de Péronne.
Le 18 juillet 1789, les bureaux de la ferme générale ont été pillés : depuis cette époque, les employés de la régie générale ont été obligés de cesser les exercices.
Le 19 octobre, envoi par le ministre des finances à la municipalité, de la déclaration du roi, du 27 septembre précédent, portant sanction du décret de l'Assemblée nationale du 23 du même mois concernant la perception des impôts, etc., et recommandé particulièrement à cette municipalité de veiller au maintien de la perception des droits d'aides.
Le 28 octobre, réponse de la municipalité ; elle mande que dans l'alternative de montrer une autorité qui n'eût pas été respectée, ou d'en suspendre l'exercice jusqu'à des moments plus calmes, elle a chosi le dernier parti.
A cette réponse est jointe une copie d'une délibération du corps municipal, de la veille; on y voit la menace faite par des billets burinés, dans le cas où les employés reprendraient les exercices, de vouer leurs propriétés au pillage et leurs personnes au meurtre. On y voit aussi que les cabaretiers et aubergistes se refusent à souffrir les exercices, sur le fondement que le décret de l'Assemblée nationale, du 23 septembre, a défendu aux employés les visites domiciliaires : on y voit encore qu'ils ont dit avoir adressé un mémoire à l'Assemblée nationale.
Le 25 novembre, nouvelle lettre du ministre des finances à la municipalité; elle explique que c'est relativement à la gabelle que l'Assemblée nationale a défendu les visites domiciliaires, et que les exercices des employés des aides, abso- j lument nécessaires pour conserver les droits j d'aides, doivent continuer de se faire autant que i subsisteront ces droits; et elle invite la munici- j palité à éclairer les cabaretiers et aubergistes sur I leurs obligations. Cette lettre n'a produit aucun ' effet.
Depuis, le préposé de la régie générale a fait, à différentes fois, des démarches auprès de la municipalité pour parvenir à rétablir les exercices ; il n'a pas pu obtenir d'elle qu'elle mandât les redevables les plus obstinés pour les amener à s'y soumettre. La municipalité s'est renfermée à dire qu'elle ne devait que main-forte.
Au mois de mars 1790, les brasseurs, cabaretiers et autres redevables ne voulaient consentir au rétablissement des perceptions, qu'à condition qu'il leur serait fait remise de tous droits depuis le mois de juillet 1789, et ils ont adressé un mémoire dans cette vue à l'Assemblée nationale.
Au commencement du mois de mai 1790, il a été envoyé un avis aux redevables pour qu'ils eussent à payer les débets sur les droits d'aides, conformément au décret de l'Assemblée nationale du 22 mars précédent, sanctionné par le roi. Les brasseurs ont répondu par une signification suivant laquelle ils attendent qu'il ait été statué sur leur adresse à l'Assemblée nationale, laquelle a été renvoyée du comité des rapports à celui des finances. Le ministre des finances a envoyé copie de cette signification, le 2 juin 1790, à M. le marquis d'Estournel, en lui observant qu'il serait bien à désirer que l'Assemblée nationale statuât sur l'adresse des brasseurs (1).
Dans toute l'étendue de la direction des aides de Péronne, il n'y a ni exercices ni perceptions. Lors des insurrections du mois de juillet 1789, les registres et expéditions de plusieurs bureaux de campagne, dépendant de la Régie des aides, ont été brûlés ou emportés.
Ville de Roye.
. Les exercices sont interrompus dans cette ville depuis le 18 juillet 1789 ; les buralistes ont été obligés d'ôter leurs tableaux, et les employés ont été menacés par des placards.
Le préposé de la Régie a obtenu du comité permanent des proclamations, mais elles ont été sans effet.
Le 22 octobre 1789, le ministre des finances a envoyé au comité permanent la déclaration du roi, du 27 septembre, sur le décret de l'Assemblée nationale du 23 septembre, concernant la perception des impôts, etc.
Le 7 novembre, les cabaretiers et aubergistes ont annoncé au comité permanent assemblé qu'ils ne souffriraient plus les exercices ; et pour eu être affranchis, ils ont offert 24 livres aux entrées de chaque pièce de vin, et 5 livres par chaque pièce de bière ou de cidre.
Le 12 décembre, lettre du ministre des finances au comité permanent, sur la résistance des habitants de Roye au rétablisement des exercices et des perceptions.
Le 19 décembre, réponse du comité permanent, accompagnée d'une délibération de la surveille, qui annonce que les cabaretiers et aubergistes, à l'exception de trois, persistent dans la résolution de ne plus souffrir les exercices.
Le 25 décembre, nouvelle lettre du ministre des finances au comité permanent qui l'excite à
redoubler de soins et d'efforts pour opérer le rétablissement des perceptions.
Les cabaretiers et aubergistes se sont adressés à l'Assemblée nationale pour obtenir un abonnement des droits ; le comité des rapports les a prévenus que leur demande avait été renvoyée au comité des finances.
Le 20 février 1790, ils ont écrit à l'Assemblée nationale que, mieux instruits, ils renonçaient à leur demande d'abonnement, et demandaient définitivement la suppression des droits d'aides, dont la charge illégale est contraire au décret du 7 octobre 1789, qui veut que toutes les contributions et charges publiques soient supportées par tous les citoyens et propriétaires en raison de leurs biens et facultés. On remarque dans leur lettre cette phrase : Nous périrons avant de nous plier à nourrir du fruit ae nos travaux Voisiveté révoltante dè ces vampires du peuple.
Le 7 mars, le sieur Babeuf a prononcé devant la municipalité un discours tendant à exciter les esprits contre les droits d'aides, et à faire op-oser la force à la force qui tenterait de réta-lir ces droits. On remarque dans ce discours, entre autres maximes, celle-ci: Que si toute l'Assemblée nationale était oppressive, il faudrait résister contre elle à Voppression : que c'est un des droits de l'homme.... que c'est au peuple, seul, qu'appartient le veto. Le ministre des finances a envoyé, le 3 avril 1790, une copie de ce discours à M. le procureur général de la cour des aides de Paris ; en vertu d'un décret de prise de corps, prononcé par la cour des aides, le sieur Babeuf a été arrêté et amené dans les prisons de la Conciergerie à Paris.
La municipalité de Roye, pensant que l'arrestation du sieur Babeuf pouvait être une circonstance favorable au rétablissement des exercices etdes perceptions, a convoqué, le 24 mai 1790, les cabaretiers et aubergistes. Les opposants, représentés par deux d'entre eux, ont seulement offert une somme pour tenir lieu des droits de leur débit, et d'envoyer cette somme à l'Assemblée nationale. La municipalité n'a pas ordonné la reprise des exercices, craignant de compromettre son autorité, et d'exposer les commis. Le maire, en envoyant copie de la délibération prise à ce sujet, a mandé, le 25 mai, que ce n'était pas de la part des cabaretiers qu'il y avait à craindre, mais de la part du peuple, et qu'il n'y avait pas à espérer que le détachement de cavalerie qui est à Roye, se prêtât à seconder les commis.
Le 29 mai, le ministre des finances a écrit au maire, afin d'engager lui et la municipalité à faire tout ce qui dépendrait d'eux pour ramener les contribuables à la soumission due aux décrets de l'Assemblée nationale, sanctionnés par le roi.
Il n'y a ni perceptions ni exercices dans un grand nombre de paroisses de la Direction des aides de Roye.
Ville de Doullens.
Le 16 août 1789, la maison du directeur des aides a été pillée, les registres brûlés, et lui obligé de fuir ; deux des auteurs de l'insurrection ont été arrêtés et conduits dans les prisons d'Amiens, pour y être jugés prévôtalement.
Les officiers municipaux ont sollicité 1a grâce des coupables, en représentant qu'ils pouvaient être des citoyens aveuglés, déçus, entraînés, victimes des souffles empoisonnés du moment.
Le 22 octobre 1789, le ministre des finances,
envoyant aux officiers municipaux la déclaration du roi, du 28 septembre, sur le décret de l'Assemblée nationale, du 23 du même mois, concernant les impôts, leur a marqué, relativement à la demande de la grâce des coupables, qu'elle ne pourrait être mise sous les yeux du roi que lorsque les exercices et les perceptions auraient été rétablis à Doullens, et que le directeur aurait été dédommagé des pertes qu'il avait subies.
Le 6 novembre, les officiers municipaux ont annoncé que le rétablissement des droits était opéré dans leur ville.
Il a été envoyé un autre directeur à Doullens.
Le 17 janvier 1790, une vingtaine d'hommes s'étaient réunis pour aller piller la maison du nouveau directeur, mais leur projet n'a pas été effectué.
L'ancien directeur n'a pas été dédommagé de ses pertes.
Le service se fait toujours fort mal, tant dans la ville que dans les départements de la campagne, et les recouvrements y sont absolument nuls; les redevables paraissent déterminés à ne payer que lorsqu'ils auront reçu réponse à un mémoire qu'ils ont présenté à l'Assemblée nationale.
Ville de Corbie.
Les bouchers, les débitants de boissons, un brasseur refusant de se soumettre aux déclarations et aux exercices, la municipalité les a mandés le 25 mars 1790 : ils avaient promis soumission, mais tous, à l'exception de trois, persistent à s'y refuser ; le brasseur, qui est officier municipal, est un des moins soumis aux décrets de l'Assemblée nationale.
Ville de Saint-Valery-sur-Somme.
Le 3 mai 1790, les employés de la régie générale ont voulu saisir chez le nommé Gransiu, ca-baretier, une pièce de cidre entrée en fraude; mais une émeute, excitée par ce cabaretier, les a obligés d'aller requérir l'assistance de la municipalité, pour opérer cette saisie. La municipalité a employé un long temps à délibérer, pendant lequel la pièce de cidre a été spoliée; depuis, la fraude se commet impunément par l'introduction des cidres, des viandes et des bois, sans déclaration. La plupart des officiers municipaux montrent des dispositions peu favorables aux perceptions.
Ville de Montdidier.
Après le carême dernier, là majeure partie des bouchers de cette ville a cessé de faire des déclarations : le directeur des aides a eu recours à la municipalité qui les a fait venir pour leur enjoindre de payer les droits et de souffrir les visites des employés. Ayant encore fait des massacres sans déclarations, la municipalité les a mandés de nouveau le 9 avril; ils ont alors annoncé leur résolution de ne plus payer aucuns droits. Quelques-uns ayant d'ailleurs dit qu'ils n'avaient pas fait de massacres, le maire voulut envoyer le sergent de ville pour vérifier ce qui en était : un des bouchers s'est jeté à la porte de la salle pour s'opposer à la sortie du sergent de ville, en ajoutant que personne n'entrerait chez lui ; il est' ensuite sorti avec plusieurs autres. Les
officiers municipaux sans confiance dans la garde nationale de cette ville, se sont bornés à verbaliser contre ces bouchers, dans l'intention alors d'adresser leur procès-verbal à l'Assemblée nationale (1).
Le 23 avril 1790, il s'est tenu une assemblée des cabaretiers de cette ville, en conséquence d'une lettre et d'une pétition imprimée (ie discours du sieur Babeuf), qui leur avaient été adressées de Roye. La pétition a été signée dans cette assemblée par la moitié à peu près des cabaretiers; depuis, plusieurs ont montré de l'opposition aux services; définitivement ils s'y sont soumis, mais ils n'en sont pas plus disposés à acquitter les droits et il ne se fait aucun recouvrement.
Bourg d'Airaines.
Depuis le mois d'octobre 1789, les exercices ne se font plus dans ce bourg ; on impute au curé du lieu, M. l'abbé Marduel, qui en est aujourd'hui le maire, le conseil de ue les plus souffrir.
^a nuit du 18 au 19 janvier 1790, des malfaiteurs ont forcé la maison du buraliste et enlevé ses registres. On assure que sur l'observation Mte à M. l'abbé Marduel qu'il en était resté quelques-uns, il répondit : Tant pis, il fallait tout prendre.
Le 17 février, la maison du receveur a été assaillie, ses effets pillés et lui obligé de fuir : M. l'abbé Marduel est encore soupçonné d'avoir excité cette insurrection.
Le 22 mars, le directeur des aides a envoyé les employés du département d'Airaines en ce bourg pour y reprendre les exercices, et lés a chargés d'une lettre pour M. l'abbé Marduel. En sortant de chez le curé, ils ont essuyé des huées, reçu des coups de pierres, et ont été obligés de fuir. M. l'abbé Marduel a écrit le même jour au directeur la lettre suivante :
« Monsieur, l'apparition de vos préposés a mis « le trouble dans le bourg : la tranquillité pu-« blique ne saurait être rétablie tant que l'Assem-« blée nationale n'aura rien statué de plus « particulier relativement à l'exercice dans la « campagne; jusque-là ce serait s'exposer que de « l'entreprendre. »
Le 27 mars, le ministre de la guerre, sur la demande du ministre des finances, a envoyé les ordres du roi à M. le comte de Puységur, pour faire passer un détachement des troupes de ligne à Airaines, dans la vue d'v protéger le rétablissement des exercices; M. 1 abbé Marduel a réussi à empêcher l'arrivée de ce détachement. En sa qualité de maire, il a convoqué les officiers municipaux qui, par une délibération du 5 avril, ont déclaré que l'arrivée du détachement ne pourrait être que prématurée et dangereuse. Le même jour, il a mandé au subdélégué d'Abbeville, qu'il avait envoyé la veille à M. le président de 1 Assemblée nationale les ordres que ce subdélégué lui avait fait passer, en lui demandant s'ils n'étaient pas trop précipités. Dans cet état de choses, l'envoi du détachement a été suspendu jusqu'à la réquisition formelle de la municipalité d'Airaines; depuis, les employés n'ont pu reparaître dans ce bourg. L'insubordination qui
règne à Airaines s'étend dans les arrondisse-ments voisins de ce département.
Mareuil.
Le 26 février 1790, quatre commis, accompagnées de six fusiliers du régiment de Berwick, se sont transportés chez un cabaretier. à Mareuil, près Abbeville, pour vérifier ses boissons; le peuple s'e3t attroupé, on a sonné le tocsin au village de Coubert, voisin de Mareuil; tous ies paysans des paroisses de Coubert, Villers et Le Sellier, armés de faux, bâtons, etc., sont accourus; les commis et soldats, assaillis, ont été obligés de fuir, les registres ont été pris et déchirés.
L'élection d'Abbeville a informé de cet attroupement.
Ville de Ham.
Les exercices ne se font plus chez les cabaretiers et détaillants de cette ville ; deux délibérations de la municipalité, des 5 et 19 mars 1790, constatent l'opposition de ces redevables qui s'autorisent de la conduite de ceux des villes voisines-
Des lettres anonymes, des libelles ont été répandus, tant dans cette ville que dans la campagne, pour exciter les redevables contre les perceptions et les percepteurs. Un marchand de chansons y est venu du dehors et y a cbanté la suppression des aides sans que la municipalité s'y opposât : les commis des aides le trouvèrent devant leur porte, au moment qu'ils rentraient chez eux; ils furent honnis par ie peuple, et ils ont remarqué que le maire de Ham regardait fort tranquillement, à travers les vitres d'une fenêtre de son cabinet, ce qui se passait.
Le 18 avril 1790, les soldats de la garde nationale de la ville de Ham, en prêtant le serment civique à la suite d'une invitation qui leur avait été faite par les officiers municipaux de favoriser les perceptions et de prêter main-forte aux percepteurs, ont déclaré à haute voix qu'ils s'opposeraient de toutes leurs forces aux perceptions des droits de traites, du tabac et des aides; qu'ils ne voulaient plus entendre parler ni de gardes, ni de commis ; les officiers municipaux ont promis d'en faire mention dans leur procès-verbal.
Le 30 avril, le ministre des finances, informé de cette circonstance, a écrit anx officiers municipaux, pour recommander à leur zèle le rétablissement' des perceptions : les officiers municipaux ont, en conséquence de cette lettre, fait assembler les cabaretiers, bouchers et autres redevables de droits d'aides, et leur ont représenté de se soumettre aux décrets de l'Assemblée nationale, sanctionnés par le roi, et de payer les impôts conservés suivant la forme prescrite; mais ces redevables assemblés ont tous, à l'exception de deux cabaretiers et de trois bouchers qui se sont soumis purement et simplement, déclaré que le mode oppressif de l'exercice des commis leur était trop onéreux pour qu'ils se décidassent à le souffrir ; que d'ailleurs ils étaient informés que dans les villes voisines, et encore plus particulièrement dans les campagnes, les cabaretiers et autres n'étaient pas disposés à consentir l'exercice des commis; et que quand les autres villes feraient leur soumission, soit d'une manière, soit d'une autre, d'exécuter les décrets, ils s'empresseraient de montrer la même
obéissance. Les officiers municipaux ont dressé procès-verbal de ces réponses et l'ont envoyé à M. le contrôleur général.
Ville d'Amiens.
Vers la fin du mois d'avril 1790, les brasseurs de Péronne ont adressé à ceux d'Amiens la pétition du sieur Babeuf, dont il a été parlé ci-dessus, avec des lettres d'invitation de se joindre à eux. Cet envoi n'a produit aucun effet par les soins du directeur des aides. Les cabaretiers de Péronne et de Roye ont adressé la même pétition à ceux d'Amiens, avec de pareilles lettres d'invitation; les cabaretiers d'Amiens se sont assemblés à ce sujet; le directeur a su détourner une partie des principaux de se réunir aux autres.
Les derniers avis portent que les commis éprouvent les plus grandes difficultés pour maintenir les exercices chez les cabaretiers : que les ventes sans déclarations augmentent journellement, soit en cidre, soit en eau-de-vie, saas qu'il soit possible de s'y opposer, et que les cabaretiers menacent sans cesse de suivre cet exemple, et se regardent comme dupes de payer des droits dont le plus grand nombre s'affranchit.
Département de VAisne.
Ville de Saint-Quentin.
L'insurrection qui a eu lieu au mois de juillet 1789, dans la ville.de Saint-Quentin, dirigée d'abord contre les employés de la ferme générale que le peuple a chassés, et dont il a détruit les bureaux, s'est étendue à la régie générale des aides. Tant dans la ville que dans la campagne, les redevables ont refusé les visites des employés de la régie; la vie des commis a été menacée; ils ont été obligés de s'abstenir de toute espèce d'apparition chez les débitants de boissons pendant plusieurs mois. Le directeur a réussi à calmer les esprits jusqu'à un certain point, et est parvenu à rétablir les commis dans leurs fonctions à Saint-Quentin; tous ies redevables, à l'exception de huit cabaretiers, se sont soumis aux exercices, mais tous ont persisté dans la résolution de ne point payer.
Il n'a pas été possible de rétablir les exercices dans la campagne.
Le 21 mai 1790, des brigands, au nombre de quatre à cinq cents, ont pillé la maison du neveu au directeur des fermes à Saint-Quentin ; le lendemain ils ont pillé plusieurs maisons : la milice nationale s'est montrée pour arrêter ce brigandage, mais elle a été obligée de se retirer. On assure qu'enhardis par ce succès ils avaient formé le complot de pendre le directeur des fermes et le receveur général des aides, de piller la maison du directeur des aides, de brûler tous les papiers de la régie et d'assassiner tous les commis ; il est venu du secours du dehors, tant en troupes réglées qu'en milice nationale; ce complot est par là resté sans exécution : vingt de ces brigands ont été arrêtés.
Le 28 mai, le ministre des finances informé de ce nouveau désordre, et instruit que le secours en troupes réglées, envoyé à Saint-Quentin, ne consistait que dans un détachement de quarante dragons qui devait retourner à sa garnison, et que la municipalité s'était adressée au ministre,
de la guerre pour avoir un détachement plus considérable, en a fait aussi la demande au ministre de la guerre. Suivant la réponse de ce ministre du 5 juin, il a été provisoirement donné des ordres pour que le détachement de quarante dragons ne quittât pas Saint-Quentin.
Une lettre du 13 juin annonce que le peuple meuace sourdement de forcer les prisons et d'enlever les vingt prisonniers arrêtés à la suite de la dernière insurrection.
Cette même lettre annonce que le bruit court dans la province que le sieur Babeuf, de Roye, a des défenseurs à l'Assemblée nationale, et qu'il sera mis en liberté avant peu.
Ville de Soissons.
Les officiers municipaux ont fait publier une proclamation pour le payement des débets sur les droits d'aides dans les trois mois d'avril, mai et juin, conformément au décret de l'Assemblée nationale, sanctionné par le roi : aucun cabaretier n'est venu payer. La municipalité s'est proposé de mander les redevables ; on n'est pas encore informé de ce qui s'est passé ultérieurement.
Les électeurs, qui ont été à Ghauny pour le département, ont annoncé dans toutes les campagnes qu'on ne payait aucuns droits à Ghauny ni dans la Picardie, et ont, par leurs discours, animé les redevables contre les commis. On ne paye point les droits.
Ville de Guise.
Les cabaretiers et aubergistes de Péronne ont envoyé à ceux de Guise, vers la fin du mois d'avril 1790, la pétition du sieur Babeuf dont il a été parlé ci-dessus, avec une lettre d'invitation de se joindre à eux ; il y a eu une assemblée des cabaretiers à ce sujet.
Vers le même temps un marchand de chansons a paru dans cette ville, s'est annoncé au son du tambour, et a chanté la suppression des aides; il a été de village en village en faire autant, et il paraît qu'il n'a trouvé d'obstacles eu aucun endroit de la part des municipalités.
Il est à craindre que les commis ne cessent tout à coup leurs exercices, étant menacés de toutes parts d'être chassés ou assommés.
Les recouvrements sont à peu près nuls, tant dans la ville que dans les départements de campagne, où d'ailleurs les exercices sont presqu'en-tièrement interrompus. L'huissier, porteur des commandements, a essuyé des menaces des redevables ; on cite le maire de la paroisse de la Vacresse, qui est un cabaretier, lequel lui a enjoint de défendre aux commis de paraître.
Le 20 avril 1790, la municipalité de Guise a, sur la demande du directeur des aides, pris une délibération pour inviter les redevables à acquitter fidèlement les droits, et l'a fait publier et afficher; le mêmejour le contrôleur des aides a été insulté par les femmes qui disaient hautement dans les rues qu'on ne payerait pas, qu'on se moquait des ordonnances, et que martin-bâton marcherait.
D'après la disposition des esprits, le directeur estime qu'on ne pourrait tenter des saisies-exécutions, sans exciter une insurrection.
Ville de Noyon.
Le directeur des aides désespère de pouvoir
maintenir le service dans cette ville; les refus d'exercices s'y multiplient de pins en plus, sans qu'on puisse "s'y opposer ; les redevables disent que, si on en avait le droit, on aurait fait cesser la résistance qui a lieu généralement dans les directions de Péronne et de Roye. La municipalité agit loyalement, mais il paraît qu'il n'y a point de secours à attendre de ]a garde nationale, et qu'elle favorise la fraude. Les clefs des portes de la ville sont remises le 3oir au corps de garde ; on est assuré que la nuit du 27 au 28 avril, quatre bœufs ont été introduits dans la ville, la garde ayant ouvert la porte sans la participation du portier ordinaire, et-sans qu'il ait été prévenu, ni le receveur de la porte. Les bouchers ont été mandés à l'hôtel de ville; ils s'y sont autorisés de la conduite dés redevables de Péronne, Roye, etc., etont refusé de se soumettre aux exercices, promettant seulement d'acquitter .fidèlement les droits aux entrées.
La pétition du sieur Babeuf, dont il est parlé ci-dessus, a été envoyée également à Noyon, avec les mêmes invitations.
Le marchand de la chanson contre les droits d'aides s'est présenté à Noyon ; les officiers municipaux lui ont refusé la permission de la chanter et distribuer dans cette ville.
Le service est également près de cesser entièrement dans les paroisses circonvoisines. Celles de Queby et de Mancourt déclarent hautement qu'au moindre signal elles auraient plus de quarante communautés qui voleraient à leur secours, si on voulait se présenter pour exiger des droits.
Ville de la Fère.
Le 12 mai 1790, jour du marché-franc qui se tient chaque mois en cette ville, les employés se sont présentés pour percevoir les droits sur la vente des bestiaux : ils étaient accompagnés d'un détachement de troupes réglées: mais les soldats disaient à demi-voix aux marchands pressés defaire les déclarations et d'acquitter les droits : N'en faites rien, n'ayez pas peur. L'insurrection a été générale, et il n'a pas été possible de percevoir les droits ; il a été dressé procès-verbal d,e cette insurrection : les noms des séditieux sont rapportés dans le procès-verbal.
Depuis, les redevables ont tenu une assemblée, dans laquelle ils sont convenus de ne plus souffrir ni exercices, ni commis; les trois quarts des cabaretiers ne souffrent plus les exercices, et ils excitent les redevables de la banlieue à en faire autant, même à tuer les commis, s'ils osaient se présenter dans les paroisses : le receveur de la régie à la Fère est journellement menacé d'être assommé.
L'esprit de révolte et d'insurrection du peuple de la Fère l'a porté à menacer la vie du maire ; ce fut à l'occasion d'un convoi de neuf cents se-tiers de blé, passant le 16 mai 1790 par la Fère, et destiné pour Nancy, que le peuple avait arrêté nonobstant les passe-ports de ia municipalité de Nancy, dont les voituriers étaient porteurs. Le maire fut d'avis de faire escorter ce convoi jusqu'à Laon ; l'avis des autres municipaux et de la commune fut de le déposer à l'arsenal : le peuple entra en fureur à cette occasion contre le maire; le 18 mai il a donné sa démission et la commune lui a nommé un successeur (1).
Paroisse de Landisaye.
Le 30 avril 1790, les employés des aides s'étaient mis en disposition d'arrêter dans la paroisse de Landisaye des bières qui venaient du Cambrésis, et qui se versaient en fraude dans la direction de Marie ; ils avaient appelé les officiers municipaux qui se prêtaient de bonne grâce à les secourir, mais malgré la municipalité, malgré la moitié des paroissiens qui la secondait, l'autre moitié a favorisé les fraudeurs et fait spolier la fraude : un des officiers municipaux a été blessé à la main. Les employés ont dressé procès-verbal de cette rébellion, mais ils n'ont pu y dénommer les rebelles; les officiers municipaux, craignant pour eux-mêmes, ont refusé de les faire connaître.
DÉPARTEMENT DU PAS-DE-CALAIS.
Ville de Montreuil-sur-Mer.
Au.mois d'août 1789, les employés de la ferme générale ont été renvoyés de cette ville; depuis cette époque, les droits de la régie générale ont éprouvé une fraude considérable dans la ville et dans toute la direction.
La municipalité, sans se refuser précisément à donner secours aux employés de la régie, avait dit que, pour donner des forces, il fallait savoir s'il y avait nécessité, et en justifier.
Le ministre des finances lui a écrit le 30 avril 1790, pour l'exciter à protéger les percepteurs et les perceptions ; elle a pris une délibération par laquelle elle a chargé le commandant de donner les ordres et les forces nécessaires, et a dit au directeur des aides qu'elle ne pouvait pas faire davantage. Le directeur a demandé les forces au commandant, qui a répondu que, loin d'espérer du secours de la garde nationale, elle se tournerait contre les employés; qu'il fallait des troupes étrangères, qu'il en avait demandé plusieurs fois à M. de Puységur, et que M. de Puységur avait répondu que cela n'était pas possible.
OBSERVATIONS GÉNÉRALES.
On aurait ajouté beaucoup à ces détails, si l'on avait entrepris de faire connaître l'effet de l'insubordination des chefs-lieux sur les paroisses qui les environnent ; les campagnes, comme les villes, ont proscrit les employés de la régie générale, ou se sont au moins refusées au payement des droits.
Il résulte de cet état de choses une perte considérable pour le Trésor public. Les produits constatés dans les généralités d'Amiens et de Soissons ont monté pendant les dix mois du 1er juillet 1789 au 30 avril 1790, à 2,364,000 liv.; ils sont inférieurs aux produits des mêmes mois de 1788 et 1789, de 1,581,000 livres, et il est à observer que sur les 2,364,000 livres de produits
constatés, il en reste à recouvrer environ les deux tiers qui seront définitivement perdus, s'il n'est pas pris promptement des mesures qui assurent les moyens d'en suivre le recouvrement.
Ce sont les villes de Péronne, Saint-Quentin et Roye, qui sont le foyer de l'insurrection. C'est de Péronne et de Roye qu'est sortie la pétition du sieur Babeuf contre les aides ; elle a été répandue jusques dans les campagnes ; il s'en envoyait deux exemplaires, principalement aux cabaretiers et aubergistes, en les invitant à en conserver^ un, et à adresser l'autre à M..., député à l'Assemblée nationale, après l'avoir fait revêtir du plus grand nombre de signatures possible.
Pour remédier efficacement au mal, il semble nécessaire de l'attaquer dans sa source, et par conséquent de s'attacher principalement à rétablir les exercices et les perceptions dans les villes de Péronne, Saint-Quentin et Roye. Si l'on peut y parvenir, il y a lieu d'espérer que l'on obtiendra facilement le retour à la soumission de la part des redevables des autres lieux : beaucoup ont été entraînés par l'exemple, l'exemple les ramènera.
Séance du er juillet
1790
La séance est ouverte à neuf heures du matin.
, rapporteur du comité des finances. Le 30 mai dernier, vous avez autorisé la ville de Montbrison à contracter un emprunt de 8,000 livres pour achat de grains nécessaires à la subsistance des personnes indigentes de la commune et établissement d'un atelier de charité. Cent cinquante habitants ont formé, par le ministère de procureurs, opposition à l'exécution du décret, et le maire et les officiers municipaux ont cru devoir donner leur démission. Le comité des finances n'a vu dans ces oppositions que des chicanes et aucune raison plausible. Les 150 habitants, dont plusieurs ne sont pas même citoyens actifs, affirment qu'ils ont pourvu aux besoins des pauvres, mais ils ne le prouvent pas; ils soutiennent que le conseil général n'a pas le droit de faire des demandes d emprunt, sans le concours de tous les citoyens. Ces principes étant faux et de la plus dangereuse conséquence, nous vous proposons le décret suivant :
« L'Assemblée nationale s'étant fait rendre compte, par son comité des finances, de
l'opposition formée par des particuliers de la ville de Montbrison, à l'emprunt décrété le 30
mai dernier; des actes relatifs à ladite opposition, des motifs qui ont déterminé les
officiers municipaux à donner leur démission, déclare que le décret rendu le 30 mai pour la
ville de Montbrison sera exécuté selon sa forme et teneur; invite les officiers municipaux de
cette ville à continuer leurs fonctions avec le zèle qu'ils ont apporté jusqu'ici dans
l'administration qui leur a été confiée. » (Le décret est adopté.)
, secrétaire, donhe lecture d'une lettre de M. de Clermont-Tonnerre, commandant de la garde nationale de Corbeil, et de deux autres lettres écrites à M. de Clermont-Tonnerre par les administrateurs du district.
M. de Clermont-Tonnerre rend compte qu'il revenait de Corbeil, pour reprendre sa place de membre de l'Assemblée nationale, lorsque des députés des gardes nationales de trois communes, au nombre desquelles se trouve celle de Ris, l'ont prévenu qu'elles voulaient s'affilier avec la garde nationale de Corbeil, chef-lieu de leur district et qu'elles le priaient d'assister à la cérémonie. M, de Clermont y a consenti pourvu qu'il n'y eût pas d'opposition. Sur ces entrefaites, le sieur Raby, maire de Ris, qui s'opposait à la démarche, sous prétexte que les gardes nationales ne doivent rien faire que de concert avee leur municipalité, avait été remontré, insulté et frappé de coups de bâton par quelques gardes nationaux et s était sauvé dans une maison voisine. Aussitôt M. de Clermont y court, délivre le maire et réussit à rétablir le calme et l'union.
Tout paraissait tranquille, lorsque, le même soir, les partisans du sieur Raby ont assassiné le sieur Moutier, vieillard de 74 ans. Le brigadier de la maréchaussée de Ris dit que la municipalité ne fait aucune poursuite.
M. de Clermont-Tonnerre ajoute qu'en sa qualité de commandant de la garde nationale de Corbeil, il se croit obligé de rester sur les lieux pour employer toute son influence au maintien du bon ordre.
On demande le renvoi des pièces au comité des rapports.
fait remarquer que le comité est saisi depuis longtemps d'une affaire relative à l'organisation de la municipalité de Ris. Il demande que les deux affaires soient rapportées incessamment.
Ces propositions sont adoptées.
, secrétaire, commence la lecture du procès-verbal de la séance d'hier. Ge procès-verbal, ne rendant pas un compte exact de la séance, est ajourné pour que la rédaction en soit révisée.
, évêque ffOléron. Un de vos plus chers désirs étant de venir au secours des malheureux, je vais vous mettre sous les yeux la situation déplorable des régions méridionales du royaume. Des inondations excessives ont causé dans ce pays d'affreux dégâts : les rivières, en se creusant de nouveaux lits, ont enlevé pour plus de 200,000 livres de biens-fonds, détruit des moulins, renversé des maisons, et fait périr un grand nombre de familles. Les malheureux qui restent dans ces contrées se trouvent dans l'impossibilité non seulement de payer leurs impositions, mais même de pourvoir à leur subsistance. Tous ces faits ne sont que trop avérés.
Nos malheureux riverains m'ont écrit à ce sujet des lettres déchirantes : vous êtes devenus leur unique refuge et leur seule espérance; daignez prendre leur sort en considération. Ils m'ont chargé de vous exposer leur infortune pour la rendre plus touchante. Il est de mon devoir de vous faire considérer que nulle part on ne s'est montré plus ami de la Révolution : la contribution patriotique de la ville d'Oléron seulement s'élève à 100,000 livres, quoique le commerce soit ruiné,
et que nous n'ayons plus que des pauvres. Je ne doute pas que votre sagesse ne vous fasse trouver de promptes ressources. Eu conséquence, je vous proposerai d'ordonner que tous ceux dont les directoires de département et de district au-root constaté les pertes, seront dispensés, pour ]a présente année, des impositions et de la contribution patriotique; et qu'afin de procurer le soulagement des pauvres de la dernière classe, les curés toucheront, dès cette année, leur entier traitement de 1,200 livres.
Voici le projet de décret que j'ai l'honneur de soumettre à l'Assemblée nationale :
« L'Assemblée nationale, informée par les députés du Béarn et du pays de Soûle, des dégâts immenses causés dans ce pays par d'excessives inondations, telles qu'on n'en avait jamais éprouvé de pareilles ; et instruite par les mêmes députés de l'impossibilité où ce désastre met les malheureux riverains de payer leurs impositions, et notamment leur contribution patriotique, dont le terme est à présent exigible, a décrété et décrète: 1° que ceux dont le directoire du département aura constaté les pertes seront, à proportion d'icelles, déchargés ou de la totalité, ou d'une partie de leurs impositions de cette année, ainsi que de leur contribution patriotique ; 2° qu'afin que les pauvres les plus nécessiteux puissent être secourus par leurs pasteurs, ceux-ci recevront, cette année même, leur entier traitement de 1,200 liv., l'Assemblée nationale dérogeant, à leur égard, au décret qui porte que le supplément de congrue des curés ne leur sera payé que dans les six premiers mois de 1791. »
(L'Assemblée ordonne le renvoi de ce projet de décret au comité des finances.)
, archevêque d'Aix, demande la permission de s'absenter pour six semaines, après la fédération du 14 juillet.
Ce congé est accordé.
demande que l'Assemblée rende un décret pour terminer une difficulté qui a surgi dans la municipalité de Lorme, dans les environs de Belesme. Il se plaint, en même temps, de n'avoir pas trouvé au comité de Constitution les pièces de cette affaire.
Un de vos décrets renvoie aux départements la connaissance de tout ce qui concerne la formation des municipalités. Quoique votre comité ait déjà renvoyé douze mille cahiers qui lui ont été remis sur cette matière, il lui en reste encore soixante mille. Depuis la division du royaume en 83 départements, on a fait une égal nombre de carions dans lesquels on travaille à classer toutes les pièces qui ont été remises; le préopinant n'a pu trouver ce qu'il cherchait parce qu'il n'y avait pas d'ordre aans le bureau du comité, mais bientôt toutes les pièces seront classées et il trouvera dans le carton de son département les pièces qu'il veut consulter.
Vordre du jour est la discussion du projet de décret présenté par le comité ecclésiastique sur les fondations et patronages laïques (1).
présente dans les
Messieurs, les matières du rapport sur les fondations et patronages laïques ne sont pas plus difficiles que les autres à éclaircir et à comprendre ; elles ont toutes leurs principes, et l'Assemblée nationale, dont les décrets sont et doivent être fondés en raison, impose à ses comités l'obligation de ne lui en proposer aucun qui ne soit, autant qu'il se peut, évidemment juste.
Notre premier rapport imprimé, et déjà communiqué à tous MM. les députés, aura sans doute suffi, aux yeux du plus grand nombre, pour justifier ies décrets dont il présente le projet ; mais n'ayant pu qu'indiquer les principes de la loi, qui ne sont pas la loi même sur laquelle l'Assemblée nationale doit ici fonder la sienne, s'agissanl d'ailleurs d'un sujet qui, par l'inlérêt personnel, rend nos moyens moins heureux, et la conviction plus difficile, au jugement des patrons et collateurs qu'elle blesse, nous avons cru convenable, et même nécessaire, de donner à notre premier rapport une suite, où, parles principes mêmes du droit et de la pratique, nous portions sa défense jusqu'à la démonstration; c'est tout l'objet de ce second travail. En justifiant ainsi pleinement le projet du comité, nous abrégerons la discussion, parce qu'on n'aura plus à faire ou l'on ferait en vain des questions qui trouvent d'avance leurs réponses et leurs solutions dans les maximes et les décisions que nous allons exposer, sans trop nous appesantir sur leurs preuves:
1° Les auteurs remarquent d'abord que le premier exemple des patronages est dans la fondation d'un évêque. La distinction entre les patronages laïques et ecclésiastiques est moderne ; elle est, suivant M. d'Héricourt, du treizième siècle.
2° Les uns et les autres n'ont et ne doivent avoir pour unique objet que la plus grande gloire de Dieu et le soulagement des pauvres ; et, en effet, telle que soit une fondation religieuse, telles que soient ses conditions et sa forme, ou fait injure au fondateur, si on suppose des vues ou des intentions différentes.
3° Non seulement les canons, mais les lois du royaume défendent aux patrons de toucher aux biens de leurs patronages. Ces lois sont même très anciennes, puisqu'elles remontent jusqu'aux capitulaires (2).
Le droit de présentation, qui a été accordé par l'église aux patrons et à leurs héritiers, est de sa nature spirituel ; c'est M. Fleury lui-même qui nous l'apprend, en parlant de l'aliénation du patronage (3) : « Le patronage, dit-il, suit l'aliénation de la terre dont il est un accessoire, mais il ne peut être vendu séparément, parce que c'est un droit spirituel... Il ajoute, le patron doit la protection à l'Eglise, ce qui se réduit à présent à veiller à la conservation de ses droits. Le patron ecclésiastique se peut faire rendre comte du temporel ; le patron laïque n'a qué la voie d'avertir l'évêque pour empêcher la dissipation . Le même auteur ajoute encore : que le patronage se perd quand le titre du bénéfice est éteint. »
4° Telles sont, en abrégé les règles concernant les patronages en général : c'en est une
aussi que le patronage ne donne absolument que le droit de présenter au bénéfice ; et il est
tout nou-
De là donc les pleines collations accordées à des laïques pour des bénéfices qui, comme tous les autres bénéfices, avaient été décrétés et spi-ritualisés par les évêques; ceux-ci n'ont pas même, refusé cette collation pour des cures : et c'est alors encore que s'est introduit la maxime que toute fondation, toute dotation, où la construction, emporterait le patronage de droit sans aucune réserve : enfin, ne pouvant permettre la vente séparée d'un patronage, comme chose spirituelle, on l'a permise avec la glèbe, d'où sont venues la distinction des patronages réels et personnels, l'hérédité de ce dernier, et tous les honorifiques des seigneurs eux-mêmes, avec la préséance dans les églises; ce qui a toujours offensé la modestie et l'égalité chrétiennes.
5° Cependant, si excessives qu'aient été ces complaisances en faveur des patrons, les choses n'ont jamais été jusqu'à renverser les règles ecclésiastiques, jusqu'à rendre les patrons maîtres des biens de leurs patronages : ils en ont eu l'inspection, ils ont eu la collation même des bénéfices de leur fondation : mais ces bénéfices une fois spiritualisés par l'Eglise, rien n'a pu les changer, moins encore un simple droit de plus dans la forme des provisions.
Tout ce que cela a pu produire, c'est d'avoir rendu les collateurs laïcs indépendants des supérieurs ecclésiastiques dans leurs collations; et c'est dans ce sens que Dumoulin a dit, de ces bénéfices à pleine collation laïque, qu'ils formaient une possession purement temporelle ; que les collateurs n'avaient à cet égard aucun supérieur, et qu'ils pouvaient disposer de leurs droits par donation entre-vifs : c'est ce que cet auteur a dit dans son commentaire sur la règle de infirmis, n° 417, sur quoi Louet et Vaillant l'ont repris, et de manière à nous donner de Ces bénéfices à collation laïcale, la juste idée que chacun doit en avoir.
Sed ex verbis Molinœi, n" 417, canonicatus et alia bénéficia adpuram Régis {et laicorum), colla-tionern spectantia, magis secularia et profana bénéficia quant ecclesiastica dici, nonnullos in er-rorem induxerunt.
Ce ne sont point, dit M. Louet, des bénéfices qui soient différents des autres ; ils sont sujets, relativement au titulaire, aux règles et aux constitutions ecclésiastiques ; il faut les exprimer : ils produisent l'incompatibilité, la réplétion, la simonie, la prescription ; ils sont enfin soumis à toutes les charges ecclésiastiques : hœc bénéficia censenda sunt vere ecclesiastica.
Ce sont les propres termes de Vaillant, et qui ont fait dire au nouvel éditeur des lois ecclésiastiques de M. d'fléricourt, que le sentiment de Dumoulin n'avait point trouvé de sectateurs.
Nous voyons en effet que tout ce que l'opinion de Dumoulin a produit de particulier à l'égard
de ces bénéfices de collation laïque, c'est que les collateurs ecclésiastiques n'ont pu s'en mêler, pas même par dévolu, ni dévolution ; il y a là-dessus deux arrêts remarquables du parlement de Paris (1675, 1697, dates assez modernes), rapportés dans Augeard et le Journal du Palais.
Mais ces arrêts ne préjugent absolument rien, si ce n'est pour la collation, c'est-à-dire pour la forme des provisions que les collateurs laïcs sont en droit d'accorder pour ces bénéfices dans une entière indépendance des supérieurs ecclésiastiques ; encore même si ce sont des cures ou des bénéfices à charge d'âmes, il faut joindre à la provision la mission canonique, ou l'institution autorisable de l'évêque ; cela est établi par les coutumes mêmes (1), et était devenu d'un usage absolument nécessaire, depuis que nos rois s'en étaient fait une loi pour eux-mêmes, par l'édit de 1682 sur la Régale : et, à ce sujet, Messieurs, il est bon de faire ici deux observations importantes :
1° La première, que dans les plaidoiries sur les arrêts dont j'ai parlé, il était établi et convenu, tant par les avocats des parties,que parles gens du roi, que les bénéfices à collation laïque, comme les bénéfices à simple patronage qui ne donne que la présentation, étaient nécessairement spiritualisés par le décret de l'évêque, ou bien ce n'était que de simples services à l'entière volonté des seigneurs qui les payaient ; en sorte qu'il y avait une très-grande différence entre ces bénéfices et ceux qui sont ou qui étaient à la pleine collation du roi. Le roi, disent les mêmes jurisconsultes, avait par lui même, par le droit particulier de son caractère sacré, et comme ecclésiastique, le droit de fonder des bénéfices sans l'interposition de l'autorité ecclésiastique ; et cependant, Messieurs, vous le savez, nous sommes tous témoins de la générosité vraiment royale avec laquelle notre monarque a sacrifié tous ses droits, dans la disposition des bénéfices et de la police ecclésiastique, à la liberté de la nation, au bon ordre et à la régénération des premières et plus pures règles en cette matière.
Eh 1 qui donc d'entre ces sujets, et clercs, et laïques, dont aucun ne peut se flatter
d'avoir autant de droits qu'en avait Sa Majesté (eh 1 quels droits? ils sont d'une bien autre
importance^ que ceux des patrons .et collateurs particuliers 1 ); qui donc d'entre ceux-ci,
après l'exemple du monarque, oserait, je ne dis pas seulement, 11m-prouver, mais ne pas se
faire un mérite de le suivre? Que si quelqu'un d'eux alléguait que nos rois n'ayant jamais
cessé de ne faire qu'un avec la nation, n'avaient pas les biens de leurs fondations en
propriété, comme les particuliers fondateurs, on ne saurait trop nier qu'ils n'eussent, par
leur propre personne, des droits d'une autre nature, et bien plus favorables que ceux de ces
particuliers, sur les choses ecclésiastiques, et principalement sur le choix des premiers
ministres de l'Eglise ; et voilà néanmoins que Louis XVI les abandonne sans retour, au bien
de la religion et au salut de l'Etat; voilà que, par un patriotisme supérieur même, si je
puis le dire, a celui dont on se fait honneur dans cette Assemblée même, Louis XVI se plaît à
faire tous les sacrifices nécessaires au bonheur et à la liberté de son peuple; il lui laisse
sans regret le choix de ses officiers municipaux, de ses juges, de ses pasteurs ; il consent
à la perte de ses riches nomi-
Eh 1 qui donc, encore une fois, qui d'entre ce qu'on appelle patron, soit à présention, soit à la collation laïque, se refuserait, après cet exemple, à des privations que la justice même exige a'eux; car, Messieurs, ce n'est point, je le répète, à l'égard des collateurs laïques une injustice qu'on leur fait, en comprenant, dans les biens qui sont à la disposition de la nation, les biens des bénéfices de leur collation.
Ces bénéfices ont été, tout comme les autres, spiritualisés, et si cela n'était, ce ne serait plus que des places, des prestimonies purement profanes et libres ; ce serait des services stipendiés, pour ainsi parler, du jouraujour,etremplisouacquittés par tel ou tel autre prêtre qu'il plaît au fondateur, ou à ses héritiers de choisir et d'employer à cette œuvre : mais ce ne serait point des bénéfices, e'est-à-dire des titres perpétuels avec offices et revenus ecclésiastiques, ce qui forme proprement les bénéfices, et qu'il est au pouvoir de la nation de réformer et d'éteindré en disposant des biens qui en dépendent, de telle manière cependant que pourvoyant, dans les termes des décrets de l'Assemblée nationale, aux services comme aux charges du bénéfice supprimé, les fondateurs ou leurs héritiers n'aient aucune juste plainte à faire. -
Chacun sait que par l'édit de 1695,- les évêques sont autorisés à régler l'exécution des fondations dans leurs visites. Sans doute que si les patrons en général étaien t considérés comme les maîtres des biens attachés aux fondations, cette ordonnance ies aurait appelés aux arrangements et aux changements qu'elle permet aux évêques de faire à ces fondations, et néanmoins l'édit de 1695 n'y appelle que les officiers des lieux ? C'est la remarque de tous ceux qui ont écrit sur ce fameux règlement, l'ouvrage du clergé, contre lequel il ne parait pas que jamais en apcun temps, en aucun cas, et sous aucun prétexte, les patrons et collateurs laïques aient fait valoir des droits de propriété sur les biens de leurs patronages; ils ont pu, ils ont dû en empêcher l'aliénation et les protéger, mais jamais pour leur profit particulier, parce que leur droit de présentation ou de collation n'est qu'un droit spirituel de sa nature, et purement facultatif dans son exercice.
7° C'est une maxime dans le droit ecclésiastique qu'une fondation peut être révoquéejusqu'à son homologation, c'est-à-dire jusqu'au décret ecclésiastique ; elle n'est considérée jusqu'alors que comme un simple projet, mais il est établi aussi qu'elle est irrévocable après l'homologation de sorte que les bénéfices à collation laïque ayant été ainsi fondés avec homologation et décret ecclésiastiques, leurs biens ne sont plus et ne peuvent plus être à la disposition des fondateurs ou de leurs héritiers. Leurs dons ont été acceptés, et dès lors ils sont devenus irrévocables, quels que soient les événements dont ils ont été suivis, surtout quand laloi même les autorise ; et certes, . on ne contestera pas à l'Assemblée nationale le pouvoir de procéder à des réformes utiles et nécessaires au bien de la religion et de l'Etat: ce ne sont point ici des usurpateurs, des intrus qui s'emparent ou dévastent les biens du patronage ou de la fondation laïques ; alors seulement les fondateurs ou leurs héritiers auraient un juste droit de réclamation : mais il n'y a rien de pareil,
et peut-être quejeeombats vainement d'avance des obstacles qu'on se ferait tort de mettre aux articles que le comité ecclésiastique propose à l'Assemblée de décréter.
8° C'est une autre maxime en France, attestée singulièrement par ceux qui ont écrit sur les libertés de l'Eglise gallicane, que les commutations des fondations et les nouvelles applications des legs pieux, appartiennent aux magistrats séculiers, qui, dans un pareil cas, n'ont besoin de recourir aux évêques que pour se concerter avec eux et suivre les ordonnances que ces changements les obligent de faire relativement aux services spirituels qui y sont attachés. La raison qu'en donne M. Dupuy est que les fondations n'étant et ne pouvant être faites que par des testaments et des contrats, qui sont des actes purement civils, ce n'est que par la loi civile qu'on en peut régler l'exécution ou la changer, ue là venait la compétence des parlements en cette matière ; de là, par conséquent, et avec bien plus de raison et de convenance, la compétence de l'Assemblée nationale pour décréter ce qui lui est proposé.
9° Nous avons déjà répondu, dans notre rapport imprimé, aux objections communes sur la foi des contrats, des promesses et des conditions dans les donations publiques et particulières, ecclésiastiques et civiles; nous n'y reviendrons pas, mais nous répondrons ici, et d'une manière un peu moins générale, à la question qui nous a été faite de divers endroits, touchant les services des messes dans les châteaux, à défaut desquels certains patrons, ou les maîtres de ces châteaux, se proposent, dit-on, de retenir les biens de ces fondations, si on les prive du service qui y est attaché.
D'abord, sur cette question, il y a une première distinction à faire entre ces sortes de services particuliers qu'il ne faut pas confondre.
Ou ce sont des services qui tiennent à un titre de bénéfices, ou ce sont des services libres non fondés par l'autorité de l'Eglise, et dans la forme dont nous avons parlé dans notre premier rapport.
Si la messer qui se dit dans un château n'est qu'un service que les seigneurs aient établi pour leur commodité avec la simple permission de l'évêque, et auquel néanmoins il y ait des biens attachés, ce n'est alors qu'un oratoire domestique, d'un établissement tout profane qui n'a rien attribué à l'Eglise sur les biens qui en dépendent.
Mais si, pour la stabilité et la perpétuité de ce service, on a procédé à son établissement dans la forme solennelle d'un décret ecclésiastique qui l'ait érigé en titre de bénéfice, dont le seigneur ou patron ait la présentation, ou même la pleine collation, c'est alors un bénéfice comme tous les autres bénéfices, avec office et revenus ecclésiastiques, que les seuls ecclésiastiques sont capables de posséder et d'èxercer.
Il faut doncque ce bénéfice, ce service de messes, érigé en bénéfice, et possédé par un chapelain qu'on ne peut plus révoquer, subisse le sort de tous les autres bénéfices que l'Assemblée nationale a trouvé bon de supprimer par son décret du 13 de ce mois, et que les biens qui en dépendent soient compris dans le nombre de ceux que le décret du 2 novembre 1789 a déclarés être à la disposition de la nation.
Dans l'autre supposition, c'est-à-dire si le service ne se fait qu'en vertu d'une simple permission de l'évêque qui a autorisé le seigneur ou le maître du château d'avoir un autel domestique
dans sa maison, pour pouvoir y faire célébrer la messe, ne s'agissant plus alors de bénéfice, ni de titre ecclésiastique, dont le patron ait la présentation ou la collation, la nation n'a pas plus à y voir que l'Eglise elle-même ; mais il, dépend entièrement de l'évêque de révoquer, ou de permettre la continuation de ce service, lequel ne s'est jamais accordé dans l'Eglise à des particuliers, que sous certaines réserves pour les droits de l'Eglise paroissiale, et les devoirs de chaque paroissien envers elle : l'on peut dire même que si un pareil service ne profite pas aux pauvres habitants voisins du château éloigné de la paroisse, le seigneur à qui rarement manquent les voitures, ferait mieux, et pour lui-même et pour les autres ,que son exemple édifierait, d'aller trouver Dieu dans son temple, au lieu de le faire venir chez lui; car voici comme Agobard, archevêque de Lyon, parle de ces services dans les châteaux : qui dômes ticos sacerdotes a suis episcopis accipiunt pro suis capellis et oratoriis, ut eorum occasione deserant ecclesias, majoris ordinis sacer dotes (puta parochos) sermones et officia publica... impiam illam esse temporis sui consuetudinem, ex qua inter earum capellarum clericos pudenda oritur ignorantia, et quodilli nobiles sensim a ver a eccle-sia recedant. Tract, de Privil. et Jur. Sacerd.
Il est vrai cependant que cet usage prend son origine de l'exemple même de Constantin, qui avait ae pareils autels dans son palais, et même dans ses armées, ce qui a été suivi par nos rois et imité par les seigneurs, à qui certainement on ne peut en faire un reproche, mais qui se rendaient répré-hensibles si, sans égard pour la distinction que nous venons de faire, ils s'appropriaient des biens qui ne leur appartiennent point. Les départements s'entendront avec les évêques diocésains pour tous les différents services attachés aux bénéfices éteints ; ils prendront le parti, ou de supprimer, ou de réduire, ou de conserver tout ce que le bon ordre, la justice et le bien public leur prescriront à cet égard. L'Assemblée nationale n'a sur cette matière que des règles générales à fixer, d'après lesquelles les départements doivent agir dans l'esprit des dispositions qu'elles renferment ; et c'est précisément ce que le comité ecclésiastique propose à l'Assemblée de décréter.
La question des services dans les châteaux n'est pas la seule qui nous ait été faite depuis l'impression de notre rapport ; et comme i) importe beaucoup de gagner du temps dans nos discussions, nous avons cru devoir y répondre dans cette suite d'imprimé, également destinée à accélérer et à éclairer les délibérations de l'Assemblée nationale.
On nous a dit, d'une part, que notre rapport n'a pas tracé distinctement la ligne de démarcation entre les bénéfices en patronage et collation ecclésiastique, et les bénéfices en patronage et collation laïcale. Le même nous a dit, que les pertes des patrons et coliateurs laïques pourraient être compensées par des nominations à des bourses dans les nouveaux collèges ou séminaires; d'autres ont représenté, qu'en certains pays, on tenait extrêmement à des fondations paroissiales où presque toutes les familles du lieu étaient intéressées. Quelques-uns ont défendu leurs bénéfices héréditaires, comme affectés inviolablement à la parenté du fondateur; et enfin, diverses églises ont réclamé leur conservation, mais singulièrement la Sainte-Chapelle de Vincennes, fondée par Charges V, et uniquement destinée à prier Dieu pour nos rois et reines, vivants et morts«
A la première objection qui tombe sur mon rapport, je réponds que dans ce rapport, dont le comité a bien voulu me confier la rédaction, je n'ai pas dû traiter cette matière dans une forme scbolastique. Je n'ai pas dû m'y attacher aux divisions grammaticales; mais il m'a paru qu'il était et plus convenable et plus court de raisonner par les principes mêmes, que par leur définition ou par leurs conséquences. Croyant être parvenu par ce moyen à démontrer que, tant les bénéfices qu'on appelle en patronage ou à pleine collation laïcale, et que les autres en patronage et collation ecclésiastique, sont de même nature dans leurs titres, et que la différence ne se rencontre que dans la forme de leurs provisions.
Et en effet, ou ces bénéfices, tels qu'ils soient, ont été formés par l'église elle-même, ou elle ne s'est point mêlée de leur fondation. Dans le premier cas, ce sont nécessairement des titres ecclésiastiques; dans l'autre, ce sont des établissements purement profanes, formés au gré des fondateurs à qui il aura plu d'y former, sous le bon plaisir de l'évêque diocésain, des places, non point ecclésiastiques, mais pour des fonctions ecclésiastiques, ce qui n'est nullement un bénéfice : nous l'avons assez dit.
Ainsi la règle que nous avons proposée présente la seule bonne distinction à faire; elle forme elle seule cette ligne de démarcation que l'on demande, et il n'a pas été permis d'en tracer . une autre entre ce qu'on appelle bénéfice et ce qui ne l'est pas, quoiqu'il en porte le nom.
Les bénéfices en patronage et collation iaïcales ont-ils été fondés, érigés, et dotés même sous l'autorité et par i'autorité même de l'église? Ils sont dès lors vrais titres ecclésiastiques; ils sont bénéfices dans leur origine et de leur nature, quoique leur patronage, leur collation même, aient été accordés à leurs fondateurs [et à leurs héritiers. Voilà encore une fois le principe, la règle générale, et la seule d'après laquelle le comité ecclésiastique a arrêté et dû arrêter les articles qu'il propose à l'Assemblée de décréter. L'Assemblée les pèsera dans sa sagesse, et l'on ose espérer de ses lumières et de sa justice qu'elle les adoptera, parce que le comité ecclésiastique n'a fait que suivre, dans ses décisions, la raison même et 1a doctrine des auteurs les plus instruits en ces matières.
Ces auteurs ne mettent quelque différence qu'entre les bénéfices à simple patronage laïque et les bénéfices à pleine collation laïcale, et cette différence ne tombe point sur le titre même de ces deux espèces de bénéfices, parce que les uns et les autres ont été également spiritualisés dans leurs fondations par i'autorité de l'Eglise ; elle n'est que dans la manière d'y pourvoir.
Le collateur ecclésiastique, c'est-à-dire l'évêque ou l'ordinaire peut toujours conférer le hélice à patronage laïque, même dans les quatre mois ; sa collation sera sans doute nulle, si le patron use de son droit dans ce même délai ; mais si le patron laisse passer les quatre mois sans présenter un sujet à l'évêque, le collataire de celui-ci sera maintenu; ce qui prouve que l'évêque n'est point étranger aux provisions mêmes du bénéfice en patronage laïque.
Mais il en est autrement à l'égard des bénéfices à pleine collation laïcale. Jamais, dans aucun cas, l'évêque, ni même aucun supérieur ecclésiastique n'a dû participer à cette collation, pas même après les six mois qui, suivant le concile de Latran, donnent ouverture à la dévolution
de toutes collations de bénéfices : les arrêts de 1674 et 1697, l'ont ainsi jugé; et tout récemment un autre du grand conseil, en 1744, a jugé de plus que_la collation de l'évêque ou du supérieur ecclésiastique est nulle, lors même que le collateur laïque l'a consentie sans l'avoir faite. La raison qu'on en donne est que le collateur laïque n'ayant sa pleine collation qu'à cause de la temporalité de sa fondation, la puissance ecclésiastique n'a ou ne doit avoir aucune action sur elle.
Cette raison est-elle suffisante, est-elle même bien concluante à l'égard d'une temporalité liée à la spiritualité? Elle me paraît avoir été la seule bonne à donner dans un temps où tout ce que le régime féodal avait produit d'extraordinaire ne paraissait que naturel et légitime; car du moment qu'il est reconuu que l'Eglise elle-même a érigé le bénéfice ; du moment que lâ fondation des chapitres dont les prébendes sont à la pleine collation laïcale, a été reçue, homologuée, décrétée par l'autorité ecclésiastique; du moment enfin que le bénéfice ne "peut être conféré par le fondateur laïque, qu'à un clerc, lequel seul peut jouir de ses revenus, à raison de l'office spirituel dont il s'acquitte, beneficium propter officium, ce n'est plus dès lors une pure temporalité, encore moins lorsquè ce bénéfice, tout conféré qu'il est pleinement par un laïque, est mis au rang de tous les autres bénéfices ecclésiastiques, pour tous les effets ecclésiastiques que ceux-ci produisent, comme pour l'expression, pour l'incompatibilité, pour la réplétion, pour la simonie, etc. '
Dans ces circonstances, tout ce que le comité ecclésiastique a pu faire de mieux, et de plus conforme aux règles et à la nature même des choses, a été de comprendre, dans ses réformes et dans ses suppressions, les bénéfices en patronage et à collation laïcale, comme les autres, parce que s'ils diffèrent entre eux dans la forme des provisions, ils sont absolument les mêmes dans leur consécration, dans la forme primitive de leur érection ecclésiastique, par laquelle il leur a été imprimé un caractère commun de religion, que la manière différente d'y pourvoir n'a ni détruit, ni effacé; en sorte que, par là même, le patron, non plus que le collateur laïque, n'ayant aucun droit ni sur le titre même du bénéfice," ni sur les biens qui en dépendent, ils n'ont d'autres sacrifices à faire, dans leur suppression, que celui de leur collation.
Qu'on juge, d'après ces explications, si dans les principes de l'Assemblée nationale, si dans l'esprit de sa constitution qui va droit au bien général, sans s'arrêter, ou sans pouvoir s'arrêter au mal particulier qu'elfe fait inévitablement, et avec regret ; qu'on juge, si elle doit, après l'abolition du régime féodal, après l'abolition des justices seigneuriales et de tous leurs honorifiques, fournir en indemnité des bourses de collèges, de séminaires, pour des nominations ecclésiastiques que l'esprit féodal avait fait accorder à de simples laïques, contre toutes les lois de l'Eglise ; car rien n'est plus sévèrement défendu par les Canons. Je ne parle pas ici des simples patronages dont l'origine est plus aucienne et plus générale dans l'Eglise, mais des pleines collations laïcales, dont la faveur extraordinaire, déjà condamnée par les lois de l'Eglise, ne saurait aujourd'hui former un titre contre elle-même, pour en exiger une indemnité.
Cet exemple d'ailleurs, que rien ne justifierait, aurait de la conséquence pour les patrons mêmes : quoique leur simple présentation ne donne que le droit à la chose, et non le droit dans la chose,
comme fait la collation, jus ad rem et non in re, peut-être voudraient-ils s autoriser des prétentions des collateurs laïques à une indemnité, pour en élever de pareilles ; et certainement les unes sont aussi peu fondées que les autres : car à l'égard même des collateurs laïques, il est bon d'apprendre que tous les biens attachés aux bénéfices dont ils ont la pleine collation, ne sont pas tous du propre patrimoine du fondateur. Ces églises possèdent, comme les autres, des dîmes ecclésiastiques, des obits, des biens enfin étrangers à leur première dotation, laquelle encore peut n'avoir été qu'une restitution, ou directe, ou indirecte, soit de dîmes, soit d'autres biens, à l'Eglise et aux pauvres ; et comment alors fournir une indemnité avec justice, pour Un simple droit de collation?
D'autre part, nous l'avons dit, qui d'entre ces collations peut avoir en cette partie autant de droits qu'en avait le roi? et cependant Sa Majesté ne paraît que satisfaite de ce que la nation a pris sur elle-même le choix des ministres ecclésiastiques dont elle avait ci-devant et le patronage et la pleine collation.
Ce serait donc une demande aussi peu décente que juste, que celle d'une indemnité pour une réforme qui, dans le temps présent, tient au bien général et au salut de l'Etat. Nous avons dit là-dessus tout ce que nous devions dire, dans notre premier rapport, et nous n'y reviendrons pas.
Quant aux réclamations que fait une autre sorte d'intérêt privé dans les cantons où les pères de famille s'étaient ménagé un établissement commode pour leurs enfants, par le moyen de ces places ecclésiastiques de filleuls, agrégés, commu-nalistes, etc. dans les paroisses, le principe en est très vicieux, si les effets en sont profitables aux descendants des fondateurs. La religion certainement n'y gagne rien, et je n'ai besoin, pour le prouver, que de renvoyer à tous les procès que de pareils établissements ont occasionnés entre les curés et ces prêtres agrégés dans leurs paroisses. C'est une source de divisions, de rivalités et de gêne, surtout dans les fonctions curiales. Les plaintes, à cet égard, sont communes dans toutes les églises où se rencontrent de pareils établissements, et il n'est pas de preuve moins équivoque d'un abus, ainsi que de la nécessité d'y remédier, que quand la voix qui le dénonce est universelle; ce qui doit certainement s'appliquer à presque tous les abus que nos décrets font disparaître. Cependant, comme le comité ecclésiastique, tout en condamnant ces établissements, a laissé aux départements le soin de concerter avec l'évêque diocésain les moyens de remplacement pour les services utiles à la religion ou aux mœurs, on doit juger qu'il n'a voulu que justifier, et en principes et en droit, la suppression qu'il propose, et qui est par elle-même aussi nécessaire qu'aucune autre au nouvel ordre établi, dans la partie ecclésiastique, par notre salutaire Constitution.
L'Assemblée jugera encore, dans sa sagesse et sur un rapport particulier de son comité de Constitution, s'il entre dan^ le plan de ses régénérations de laisser subsister, après l'anéantissement de toutes les supériorités féodales et pécuniaires, après celles des titres etdes dignités, enfin après l'abolition de tous les droits individuels à la chose publique, les droits de nomination à des bourses, comme aussi si ces bourses elles-mêmes peuvent compatir avec le nouvel esprit de liberté, d'égalité et d'émulation générales et communes; si désormais les talents auront besoin d'être cherchés , ou prévenus, ou soldés par la nation; si enfin ils
auront besoin d'être encouragés par d'autres récompenses que par les élections que notre Constitution promet et assure au patriotisme et au vrai mérite dans toutes les classes de citoyens.
C'est tout ce que je me permets de dire sur cette question, dont le comité ecclésiastique ne s'est point occupé; je ne la rappelle qu'en réponse ou en réfutation de l'indemnité proposée pour des collateurs laïques, qui peut-être n'y pensent pas ou y penseraient en vain.
Il me reste à dire un mot des patronages familiers qu'on a osé représenter comme un patrimoine que la nation devait respecter. Gomme si, indépendamment des principes qui donnent de ces bénéfices héréditaires une bien autre idée, il avait jamais été permis ou bien édifiant qu'il se fit dans l'Ëglise des placements ou des affaires d'intérêt en spéculation et dans la forme de pareils bénéfices, c'est-à-dire dans une forme qui, en dégradant les ministres et le ministère dans l'Église, affectât si bien la possession à une race, que jusqu'à son entière extinction, et même après, ni l'Eglise, ni la nation elle-même ne pût jamais y toucher.
Après ce que nous venons de dire des pleines collations laïcales, il n'est certainement pas nécessaire d'y rien ajouter pour faire sentir l'injustice, je dirais presque le ridicule de la demande' de ces patrons à simple présentation, pour leurs familles; ce qui n'empêche pas que ceux d'entre eux qui, dans leur situation, auraient des droits aux secours de leurs patronages, ne puissent et ne doivent les faire valoir avec succès auprès des départements, qui sauront toujours les distinguer de ceux qui provoqueraient leur bienfaisance saùs aucun titre.
Quant à la Sainte-Chapelle de Vincennes, dont la fondation n'a eu pour~objet que de faire prier continuellement Noire-Seigneur pour nos rois et leur auguste famille, c'est un article déjà préjugé, non seulement par le projet de sa suppression, et de celle de toutes les Saintes-Chapelles du roi, antérieur à l'Assemblée nationale, mais encore par tous les autres abandons de Sa Majesté, et dont nous avons cru pouvoir proposer l'exemple aux collateurs particuliers.
Si ia Sainte-Chapelle de Vincennes a été, comme l'on dit, dotee des épargnes de Charles V, ce qui ne pouvait être qu'un bien national, comme tous les autres biens de la couronne; si elle a été fondée pour faire prier Dieu pour les rois et reines morts et vivants, rien de plus convenable dans l'esprit des articles à décréter, que de remplacer cette fondation et son objet, par la chapelle que le roi régnant et ses successeurs auront toujours ia faculté de se donner comme leurs ancêtres, et de doter sur le fonds inaltérable de la liste civiles Ce sera même là l'occasion et le moyen d'introduire tout naturellement une réforme très utile, et je dirais même, très-nécessaire dans l'état et les fonctions des chapelains employés au service de cette chapelle, cligne par elle-même d'être auprès de nos rois très chrétiens le modèle de toutes les autres.
Post-scriptum.
Tout ce qui vient d'être lu était sous la presse lorsqu'il m'est parvenu des observations imprimées sur mon rapport par un homme d'Eglise modéré; ce dernier mot est remarquable: il annonce un caractère de douceur auquel le comité ecclésiastique doit, sans doute, Je sacrifice que
l'auteur lui a fait des éruptions de son ressentiment; car, par ce qui est dit dans une seule note, on juge à peu près de ce que l'homme d'Eglise modéré avait envie de dire : « Etrange « aveuglement de la haine ! pour rendre les « ecclésiastiques odieux, on accuse le clergé de « tous les âges; on le représente comme un as-« semblage de fourbes et de malhonnêtes gens « qui ont abusé de la simplicité des fondateurs ; « s'agit-il ensuite des droits des fondateurs, on « oppose à ceux-ci les restrictions de leurs « bienfaits, on se plaint de ce qu'ils n'ont pas « donné, comme dans les bons temps, sans ré-« serve et sans mesure. Dans l'ivresse de vos « vengeances philosophiques, soyez donc au « moins d'accord avec vous-mêmes! pour nous, « injustement chargés de l'iniquité supposée de « tant de siècles, notre courage est dans la rési-« gnation et dans la patience : nous savons que « la justice exacte ne réside pas sur la terre ; « puissions-nous être les seuls qui ne l'aient pas • rencontrée! »
C'est ainsi que notre homme d'Eglise modéré s'exprime d'une manière très immodérée, et qu'il se trompe aussi lourdement dans cette même note, où il s'est soulagé d'une petite portion de sa bile.
Elle est faite précisément, cette note, à l'endroit où le rédacteur du rapport n'a parlé et voulu parler que de l'humilité chrétienne qui accompagnait les dons abondants des donateurs et fondateurs dans les bons temps de VEglise, c'est-à-dire dans ces premiers temps où la main gauche ne savait pas ce que la droite donnait. Les ecclésiastiques ne sont là absolument pour rien, et je n'ai entendu parler que des fidèles dont l'esprit n'avait pas été alors gâté par tous les nouveaux usages fastueux et intéressés de la féodalité.
D'autre part, l'histoire des Deconfés est assez connue, et certainement quoique elle soit entrée nécessairement dans les preuves du rédacteur, il l'a traitée d'une manière si légère et si rapide, que les ecclésiastiques raisonnables, dont aucun n'ignore cette histoire et ses détails, doivent lui savoir gré de sa réserve.
Et voilà pour les injures; à l'égard des moyens, ils sont à peu près de la même force, et il suffit pour toute réfutation de renvoyer M. l'observateur à cette suite de rapport qui avait comme prévenu les cris de son intérêt personnel, le seul qu'on oppose et qu'on puisse opposer à notre Constitution, fondée dans toutes ses parties sur des bases et des principes de bien public au-dessus des déclarations particulières, et bien plus, au-dessus de celles qui, comme les observations de notre homme d'Église modéré, n'ont rien que de vague, d'injurieux et de mai fondé.
La conclusion générale de tout ce rapport dans ses deux parties est donc telle qu'on doit en réduire la matière à trois objets distincts :
1° Les bénéfices à la présentation ou collation laïcale;
2° Les charges spirituelles attachées à ces bénéfices;
3° Les chapelles domestiques, non spiritualisées et où se font des services libres, tant de la part de ceux qui les font, que de la part de ceux qui les payent.
Les bénéfices à la présentation ou collation des patrons laïques doivent être nécessairement supprimés, dès qu'ils sont bénéfices à titre perpétuel; et leurs titulaires ou possesseurs ecclésiastiques doivent être traités comme les autres bénéficiers
selon leur classe, sans priver même de ce traitement les agrégés à place fixe dans les pa -roisses.
Les charges spirituelles de ces bénéfices, c'est-à-dire les services religieux, tels que des messes ou autres offices ou fonctions sacerdotales, en tels ou tels lieux, en tel ou tel temps, ou même de simples prières de la part des ecclésiastiques titulaires, doivent être, ou continuées, ou réduites, ou compensées selon qu'il sera jugé plus convenable par les évêques diocésains, sur les instructions et demandes des assemblées administratives, ainsi que des patrons eux-mêmes. Il en doit être de même de toutes fondations particulières dont l'exécution peut intéresser les familles, mais qui ayant été reçues par l'Eglise et décrétées par elle, sont hors de leur patrimoine.
Quant aux chapelles ou oratoires privés et clos dont le service est tout libre, ou bien les services religieux, non homologués ou décrétés par l'Eglise, c'est la seule exception que les règles canoniques et les décrets de l'Assemblée nationale nous aient permis de faire en faveur des citoyens qui, dans ce cas, ne sont ni patrons ni colla-teurs.
Reste à observer que, depuis l'impression de notre premier rapport, l'Assemblée nationale a rendu deux décrets, l'un portant suppression de tous bénéfices, hors les évêchés et les curés qu'elle a soumis aux élections; et l'autre portant obligation à tous corps et particuliers, possesseurs de biens ecclésiastiques, d'en faire leurs déclarations, sans excepter l'ordre de Malte ; cela a dérangé beaucoup la forme de notre premier projet, et il a fallu le corriger et remplacer par celui qui suit:
PROJET DE DÉCRET.
Art. 1er L'Assemblée nationale décrète que son décret du 2
novembre dernier, par lequel tous les biens ecclésiastiques ont été mis à la disposition de
la nation, comprend, parmi ces biens, tous ceux qui dépendent des bénéfices, églises et
chapelles, dont le titre ou la fondation a été spi-ritualisée par l'autorité épiscopale, ou
qui serraient devenus d'un usage général, public et libre, quoique la présentation de leurs
titulaires ecclésiastiques, ou même la pleine collation; ait été accordée à leurs fondateurs
et à leurs héritiers ou autres.
Art. 2. La disposition de l'article précédent s'applique également à toutes fondations consacrées par la même autorité de l'Eglise, quels gué soient les services religieux qu'elles aient imposés et de quelques clauses et conditions dont elles aient été accompagnées, même de celle qui
Îiorterait la révocation des choses données, dans e cas prévu des suppressions ou changements décrétés par l'Assemblée nationale, n'exceptant le présent décret que les fondations non spiri-tualisées et laïcales, justifiées telles par titre et possession.
Art. 3. En conséquence, l'Assemblée nationale décrète que tous bénéfices, places, chapelles, prébendes, canonicats, dignités, chapitres et autres établissements ecclésiastiques, pour l'un et l'autre sexe, qui sont à la présentation, nomination ou collation, soit du roi, soit de particuliers, patrons ou collateurs, sont et demeurent supprimés, à l'exception des bénéfices-cures, lesquels seront, à l'avenir, exempts de la prô-
sentation ou collation de patrons et autres, pour être soumis à l'élection dans la forme commune et générale des élections à toutes les cures du royaume.
Art. 4. Les biens des bénéfices en patronage laïque ou à pleine collation laïcale dont la sup-pressien vient d'être décrétée, seront administrés, comme tous les autres biens ecclésiastiques, aux termes des décrets des 14 ef 20 avril dernier, sauf aux patrons et collateurs laïcs qui prétendront se trouver dans une exception particulière, de produire leurs titres et leurs actes possessoires aux assemblées administratives qui les jugeront d'après les règles tracées par le présent décret.
Art. 5. L'Assemblée nationale décrète qu'en exécution tant des précédents articles que de tous les autres qui forment constitutionnellement une représentation nouvelle du clergé, les assemblées de départements et de districts respectivement se concerteront avec les évêques diocésains, et même, le cas échéant, avec les patrons et collateurs laïques, pour l'acquittement des charges spirituelles, fondées et attachées aux biens dont l'administration a été confiée auxdites assemblées, à quoi il sera procédé de telle manière que l'on conserve des charges et fondations toutes celles dont l'acquittement ou l'exécution tourne évidemment au plus grand bien de la religion, des mœurs et de la nation.
Art. 6. Les titulaires et possesseurs actuels des bénéfices et autres établissements supprimés dans les termes de l'arcle 3 ci-dessus, et parmi lesquels sont compris les filleuls et agrégés à place inamovible dans les paroisses, auront le même traitement qui a été acordé par l'Assemblée nationale aux autres titulaires dont les bénéfices à patronage ou collation ecclésiatique sont déjà supprimés, chacun selon la classe de son bénéfice ou de sa place, et le montant de ses revenus ecclésiatiques.
Avant de passer à la discussion, je demande que M. Durand de Maillane donne lecture du rapport dont vous n'avez entendu aujourd'hui que la suite.
Ce rapport à été distribué depuis assez longtemps pour que tous les députés en aient pris connaissance. Je demande qu'on passe à la discussion afin de ne pas perdre un temps précieux.
donne une nouvelle lecture de l'article 1er.
Votre décret du 2 novembre et autres subséquents ayant ordonné la vente des biens ecclésiastiques, il est important de déterminer les signes auxquels ces biens pourront être reconnus, Ge n'est pas par leur application au service religieux qu'on peut décider qu'ils sont ecclésiastiques. Ils sont laïcs, quand la dotation a été faite sans le concours de l'Eglise. Dans ce cas, le propriétaire peut toujours disposer du revenu, puisque seul il a droit de nommer au bénéfice, puisque le droit commun a interdit aux écclésiastiques le pouvoir de substituer quelqu'un à la place de celui que le propriétaire a nommé. Il était d'usage, j'en conviens, de faire intervenir l'autorité ecclésiastique, non seulement dans les fondations purement laïcales* mais même dans les pactes de famille, dans ies transactions. N'est-ce pas faire un acte de propriété,
que de nommer des desservants sans le concours et la participation de l'Eglise? En prenant pour exemple l'institution des chapelles dans différents châteaux, peut-on douter que le fondateur ait eu l'intention de se procurer, à lui et à sa famille, la faculté désister au service divin? D'après ces réflexions, voici le projet de décret que j'ai l'honneur de vous soumettre : « L'Assemblée nationale déclare que son décret du 2 novembre dernier, par lequel tous les biens ecclésiastiques ont été mis à la disposition de la nation, ne comprend par ceux qui dépendent des fondations en pleine collation laïque. »
Lorsque vous avez décrété les biens ecclésiastiques à la disposition de la nation, vous avez différé de prononcer sur les fondations laïques, non pas parce que vous croyiez qu'elles dussent être exceptées, mais parce que vous vouliez qu'elles soient discutées séparément. Il est vppu ce temps où l'on doit traiter cette question plus importante par son objet que par ses difficultés. Le projet qui vous a été présenté par votre comité me paraît reposer tout à la fois sur les bases de la prudence et de la justice. Pour établir moq opinion, permettez que je fixe votre attention sur l'origine des patronages. Us étaient inconnus dans les premiers siècles de l'Eglise ; mais iorsque la discipline, qui en faisait la gloire, commença à s'affaiblir, les ministres ne se regardèrent plus comme étrangers aux soinsJ temporels, et les titres de bénéfices furent recherchés. Bientôt le droit de présenter le sujet à l'évêque diocésain fut accordé au fondateur, et cet abus finit par devenir transmissible de père en fils. J'avoue que tant que les règles de l'élection ont été méconnues, les inconvénients n'ont pas été bien graves; car le choix des uns n'était pas plus dangereux que celui des autres. Il s'agit ici de fondations acceptées par l'Eglise, et non de fondations domestiques. La nation n'a aucun droit sur celles qu'un décret de l'Eglise n'a pas acceptées. Les patronages et collationsi laïques peuvent être envisagés sous trois points de vue : l'administration des biens, la manière de pourvoir aux bénéfices, et la clause des fondations. A l'instant où le peuple sera saisi du droit de nommer ses ministres, où le peuple redemande la pureté de l'ancienne discipline, il est constant que les patronages et les collations laïques ne peuvent être réclamés. G'est un usage contraire à l'ordre public. Il est sensible que tous les bénéfices ne doivent être remplis que de la même manière. Ici s'appliquent les principes consacrés par le décret du 2 novembre.
Le titulaire ne peut pas plus être propriétaire que les autres; c'est toujours à la décharge de ia nation que les fondations ont été faites : il n'y a aucun prétexte pour les soustraire à l'exécution de vos décrets. En disposant des biens, la nation reste grevée des charges : il n'y a rien de plus juste. Aussi le comité a-t-il eu soin de vous proposer un article qui porte cette disposition. L'éducation publique, le soin des pauvres, rien ne sera négligé; jamais l'intention des fondateurs n'aura été. plus respectée qu'elle le sera dans l'avenir; elle a été outragée lorsque les revenus passaient dans les mains de commenda-taires inutiles, lorsqu'ils étaient dévorés par des titulaires oisifs qui affichaient partout le scandale et le faste. Vous aurez suivi l'intention des fondateurs, lorsque vous aurez salarié honnêtement des ecclésiastiques respectables, dont chaque jour sera marqué par de nouveaux services. On
remplit l'intention littérale du fondateur, quand cela est possible. Fixez vos regards sur ces anciennes fondations, et voyez si elles sont utiles. Elles étaient appliquées à des ordres militaires, pour combattre des infidèles que nous devons laisser en paix ; à des établissements pour guérir des maladies dont le nom est inconnu; à des religieux inutiles, que vous avez détruits, Qu'avez-Vous fait ?
Une foule de malheureux ecclésiastiques languissaient dans la misère et vous les avez soustraits à la misère. Des ateliers de charité, établis pour des personnes de tout sexe, vont offrir aux pauvres des moyens de subsister avec aisance; et certes, l'intention des fondateurs est respectée. Le fondateur a voulu ce qui était bon alors; il a voulu que sa fondation fût perpétuelle, parce qu'il a jugé qu'elle serait toujours également utile. C'est cette intention principale qu'il ne faut pas perdre de vue: celui qui a fondé une église a voulu honorer la divinité, et pour être plus sûr du sujet, il s'en est réservé la nomination; mais si la fondation est devenue inutile et le titulaire un objet de scandale, supprimez la fondation, et vous remplissez évidemment l'intention du fondateur. On oppose aussi des clauses de réversion : quelques fondateurs ont prévu le cas où leurs établissements devaient cesser d'être utiles, et ils ont voulu alors qu'ils cessassent d'exister ; mais, sans doute, ils n'ont pas voulu prévoir celui où les représentants de la nation assemblés pour établir un nouvel ordre de choses, se mettraient à la place du fondateur, et appliqueraient leurs libéralités pour le plus grand bien de l'état et de la religion. Supprimez les établissements inutiles, et dotez le3 ministres utiles : vous avez rempli l'intention des fondateurs. Vous faites en un instant plus de bien qu'ils n'en ont fait en plusieurs siècles. Qu'on ne m'oppose pas des clauses inutiles, qu'on ne cher* çhe point à éluder les principes, sous prétexte que le fondateur se plaint au bout de dix siècles que la fondation n'est pas remplie.
Je demande que le projet de décret du comité soit mis aux voix.
Le rapport de votre comité ecclésiastique sur les patronages laïques offre sans doute des vues dignes de compléter son travail sur l'organisation du clergé. Les principes en sont justes et tiennent à l'intérêt général ; mais toute justice trop rigoureuse devient quelquefois une injustice, et le bien lui-même, pour s'opérer et se soutenir, ne doit-il pas souvent se garder de paraître extrême ?
- En adoptant plusieurs bases du rapport, je crois que l'une d'elles ne porte pas sur un fondement solide; en admettant ses résultats, je pense que l'un d'eux mérite une plus grande extension, et que sans elle il nuirait à un grand nombre de citoyens sans servir beaucoup à l'utilité publique; je veux parler des prébendes familières et des simples commissions de messes.
Lorsque l'Assemblée a ordonné la suppression de plusieurs bénéfices, lorsqu'elle a réglé la forme de l'administration des autres, un premier aperçii émané de sa justice, le premier sentiment de la raison, et c'est toujours celui-là qu'il faut écouter» lui fit formellement distinguer les patronages laïques, et depuis elle a renvoyé sa décision sur cet objet à un examen particulier; mais dans ces patronages de fondation laïcale, il en est de plusieurs genres; votre décision ne peut donc être la l même pour tous. Plusieurs diffèrent dans leurs
but, dans leur objet, on ne peut donc les placer dans le même rang; plusieurs enfin offrent diverses conditions dans la donation, un hommage plus du moins entier à l'Eglise; ils ne peuvent donc lui appartenir tous au même tilre et se trouver confondus dans une même disposition.
Je sais que l'article 2 du projet de décret qui vous est présenté excepte de sa disposition les fondations non spiritualisées et laïcales, justifiées par titre et par cession ; mais cette exception est insuffisante, ou du moins ne porte pas avec elle la juste application qu'elle doit avoir.
En effet, le rapport ne paraît pas avoir assez évidemment distingué dans les bénéfices de patronage laïque ceux qui donnent tout àla fois à l'Eglise la propriété et l'usufruit des immeubles qui forment le bénéfice de ceux dont on a offert le simple hommage, accepté par l'évêque, mais dont l'usufruit éventuel est conservé aux familles. Votre sagesse, Messieurs, est sans doute bien éloignée de les céder à l'Etat au détriment des droits des particuliers.
Que l'on distingue donc ces deux sortes de patronage; ils méritent toute votre attention. Plus de cent mille familles dans le royaume, et surtout ma province entière, sont attentives à votre décision, et sont rassurées par votre justice.
Les bénéfices de patronage laïque qui confèrent tout à la fois à l'Eglise la propriété, l'usufruit et l'usage, qui ne conservent aux collateursque l'honorifique droit de collation, acceptés par l'évêque et spiritualisés par son autorité, sont devenus dès lors d'un usage général, public et libre. Ceux qui en sont pourvus doivent d'ordinaire être clercs. Les patrons n'ont que le droit de faire agréer le prêtre de leur choix au supérieur ecclésiastique. Ces bénéfices furent évidemmen t destinés par 1 a bienfaisance religieuse au culte national et à l'entretien de ses ministres ; aussi, dès que la nation se charge des dépenses de ce culte sacré, de l'entretien des ministres dont elle a jugé la conservation utile, ces biens, ces patronages tombent nécessairement dans sa disposition. Tels sont les canonicats de beaucoup ne collégiales; tels sont en particulier tous ceux du chapitre de Montbrison, capitale de la province que je représente :une foule d'abbayes,de prieurés, de i hapellennies perpétuelles se classent dans cette division ; c'est à ces bénéfices que le principe sur lequel est fondé le rapport, res uni-versitati, resnullius, est applicable : Jes immeubles consacrés au bien général n'appartiennent plus à personne, ils n'appartiennent qu'à la grande famille; ils ne peuvent servir que de liens a cette charité fraternelle entre tous les citoyens, et qui est le plus digue hommage à celui qui régit invisi-blement les empires et leurs nombreux habitants; ils servent, pour ainsi dire, de pacte d'union entre la terre et le ciel, entre l'homme et Dieu.
Ce principe ne peut plus s'appliquer à une autre espèce de patronage laï iue, à celle qui n'a pas consacré à la religion une propriété entière, c'est-à-dire un domaiue direct, utile et complet, par Ja confusion de cette propriété avec l'usufruit et l'usage. Par le titre de fondation de ces bénéfices, le patron primitif, en faisant don à l'Eglise d'un immeuble, en a réservé aux siens l'usufruit et la jouissance éventuelle. Telles sont les prébendes familières en commissions de messes, et quelques chapeilenies particulières. Gesontplutôtde simples rentes foncières établies par les fondateurs sur quelqu'une de leurs propriétés, que de véritables bénéfices. Ces prébendes, ces chapelles doivent être possédées préférablement par les clercs de la famille. Ce sont des ressources utiles que des
hommes pieux et opulents ont trouvées dans leurs fortune immobilière, pour aider à la fois le culte public, sans priver leurs descendants d'une jouissance légitime. Ces bénéfices reposent donc privativement sur les clercs de leur descendance, sur leurs arrière-petits-neveux, sur leurs enfants ou sur les fils de leurs enfants, filiation précieuse qui attaché l'homme bienfaisant d'un côté à son créateur, de l'autreaux soins desa postérité; fondation généreuse, qui apprend à des fils à bénir, au pied des autels, et le Dieu qu'ils servent, et i'ancêtre respectable qui a pris soin de leur état, de leur bonheur. Comment, Messieurs, pourriez-vous confondre avec les autres bénéfices une propriété dont on s'est réservé cet usufruit, un don auquel le fondateur attacha une condition, sans laquelle il n'eût pas été généreux? Gomment arracher une jouissance qui est la ressource des familles nombreuses, des familles pauvres, des familles de toutes les classes, une jouissance enfin d'autant plus chère, d'autant plus sacrée, qu'elle est héréditaire, et qu'elle fut transmissible comme le gage de la piété et de la sollicitude paternelle ?
-Voyons enfin, Messieurs, quels sont les patronages laïques qui, outre l'usufruit éventuel conservé aux familles, leurenaccordentencorel'usage fréquent et presque habituel? Ici paraît une institution utile, multipliée dans ma province, et qui y a produit, dans les rangs les plus obscurs, des hommes éclairés, et par conséquent de véritables citoyens. Lefondateur, en faisant hommage à l'Eglise de l'objet de sa fondation, en le consacrant à des messesou à d'autres religieuses attributions, n'a pas oublié que du moins il devait, avant tout, à ses enfants, à ses petits-enfants, les bienfaits de l'éducation. Il a prévu les cas où ses fils en auraient d'autres, où ils pourraient consacrer les revenus de la prébende, de la chapelle à cette juste destination ; où il serait prudent de détourner ces revenus des objets pieux pour satisfaire à un autre plus légitime. Plusieurs prébendes dans le Forez, et sans doute dans plusieurs autres provinces, laissent, par leur tilre d'élection, la faculté aux collateurs, qui ont des enfants en bas âge, d'en appliquer le produit à les faire élever, sauf à la majorité de ces derniers, s'ils ne veulent pas être prêtres, de les concéder à un autre. Ces fondations eurent ainsi le but le plus touchant.
JÛes hommes favorisés de la fortune, voyant de toutes parts les biens s'amonceler et disparaître dans les maisons, une alternative continuelle de richesses et de pauvreté dans les familles, cherchèrent à mettre leurs descendants à l'abri de ces affligeants revers ; ils voulurent du moins leur ouvrir un port dans le naufrage, et ce port fut une bonne éducation : ils pensèrent avec raison que si les biens ne donnent pas à l'homme plus de patriotisme, de couiage et de grandeur d'âme, c'est l'éducation seule qui lui apprend à sacrifier son intérêt propre à l'intérêt public, qui le rend citoyen, juste, ami éclairé de l'ordre, et utile à ses semblables ; que c'est l'éducation qui constitue le bonheur de ceux qui l'environnent et le sien propre. Eu appliquant avec transport des champs fertiles à ces fondations respectables, ils offrirent l'image que, si leurs travaux constants avaient pu les fertiliser, l'éducation à son tour devait cultiver l'homme et lui faire produire de généreux fruits; fondations heureuses qui devinrent de nobles apanages des biens moraux, des vertus et de tous les bienfaits dont l'instruction nous fait j jouir; substitutions plus respectables qu'aucune 1 autre, qui s'étendent sur les besoins de l'esprit,
et que les fondateurs ont rendu inattaquables par )a bienfaisance qui les a déterminées; et en les plaçant sous la garde de leur propre utilité, elles m'ont rappelé souvent ces établissements orientaux qui, au milieu d'une plage aride et sablo-neuse, ont fixé un hospice consolant pour les voyageurs. Sur leur seuil est écrit d'ordinaire : Passant, souviens-toi que la vie elle-même n'est qu'un passage. Ainsi, au milieu de l'ignorance et d'incultes esprits, des patrons bienfaisants établirent des hospices de lumières et d'instruction dans leurs propres foyers ; et si la vie n'est qu'un passage, ils en rendirent du moins à leurs descendants le court trajet et plus doux el plus tranquille.
Oui, Messieurs, ces intentions généreuses ont été remplies; les familles sont devenues pauvres; elles restent du moins éclairées. Souvent le père dénué de biens sourit aux progrès de ses fils; ces progrès sont pour lui des garants d'un retour à la fortune et d'un soulagement certain dans ses vieux jours. Pourrait-on lui ôter cet espoir consolateur, en mettant sa prébende dans la disposition de l'Etat; il faudrait donc lui enlever ses enfants ; il faudrait plus : en lui étant les moyens de les en lever, il faudrait donc, commeà Lacédémone, que l'Eiat se chargeât de l'éducation des en fants des citoyens. Non. Messieurs, si ces fondations ne peuvent être conservées dans le régime futur de l'organisation du clergé, vous saurez les rendre à leur institution primitive : elles doivent être restituées aux familles après la mort de leurs titulaires. Ces familles payeront à la municipalité du lieu les frais du service dont ces prébendes se trouvent chargées. Ces frais, ces rentes foncières acquitteront d'autant les dépenses nécessaires à l'entretien des utiles pasteurs des campagnes, En rendant ainsi les simples prébendes familières aux collateurs, vous procurerez à l'Etat deux grands avantagés: le premier, c'est que ces biens, vendus à des cultivateurs qui travailleront pour eux-mêmes, deviendront plus féconds, et que l'agriculture générale s'enrichira de cette prospérité; le second, c'est qu'en obligeant plus le patron à faire ses enfants prêtres pour en jouir, vous ne donnerez à la religion que des ministres dont la vocation sera pure, et par conséquent digne d'elle. D'un autre côté, en restituant aux pères les fonds mis sous la garde de l'Eglise, et sur lesquels repose l'éducation de leur famille, ils en emploieront les fruits à apprendre à leurs enfants à maintenir la Constitution, à bénir vos décrets et à les défendre jusqu'à la mort.
(ci-devant de Vieuzac) (1). Messieurs, c'est en rendant hommage aux grands principes
politiquesque vous avez établis en cette matière que je viens attaquer l'opinion trop vague
et trop générale de votre comité ecclésiastique. Vous avez posé une grande base, le jour oh
vous avez dit à la nation et à l'Eglise : il n'y aura plus de bénéfices. Ce genre
d'institutions, soumise à une immensité litigieuse de lois et de règlements, devait
disparaître devant cette grande vérité : il n'y aura plus en France que des ministres utiles
et des fonctionnaires publics. Cette conception législative est grande, Messieurs, elle
honore ce siècle, mais c'est aux bénéfices ecclésiastiques appartenant à l'Eglise que vous
devez
Dans un moment où les hommes connaissent leurs droits, ils ne peuvent être conduitsque par des lois justes; ils ne peuvent obéir qu'à la justice des nations, qui ne doit jamais être différente de celle des particuliers.
Plusieurs objets se présentent à votre discussion : les patronages laïques embrassent les bénéfices-cures, des bénéfices simples, des chapelles et des prestimonies : les collations laïcales attestent les mêmes genres de titres et d'établissements.
Je commence par les patrons. Quant aux cures, soit qu'elles appartiennent à des patrons ou à des collateurs laïques, ce patronage et cette collation doivent disparaître devant le grand intérêt national. Il n'est plus possible qu'un particulier donne des fonctions politiques. Ces magistrats religieux, dénommés curés, ne peuvent être donnés à l'Église par des individus. Aussi je pense, avec vous, qu'un particulier n'a pu acquérir ni prescrire contre la nation le droit de conférer des pouvoirs publics. Il est temps que la nation retire des mains des patrons un pouvoir politique et moral, aussi important que celui des pasteurs. Il n'appartient qu'au peuple; et c'est un droit inaliénable, dont la nation reprend l'exercice.
Je me plais d'autant plus, Messieurs, à publier ce principe, que je suis moi-même patron de plusieurs cures dans les Pyrénées, et j'ose croire qu'aucun possesseur de ce même droit, dans le royaume, ne démentira ni mes principes, ni mon opinion sur ce point.
Je pense que la nation peut disposer de tout ce qui a reçu l'empreinte de l'autorité ecclésiastique, soit dans le patronage laïque, soit dans la collation laïcale ; mais quant aux chapelles et prestimonies, à ces bénéfices simples, qui ont eu pour objet un service particulier, une famille individuelle, une éducation, une commission de messe, c'est autre chose. Je vois la grande loi de la propriété entre l'Assemblée nationale et ies patrons laïques; je vois la grande autorité des fondations particulières des établissements de famille, qui se soutient par la plus sacrée des lois, la propriété.
Ici se présente la collation laïcale qu'il ne faut pas confondre avec le patronage, car ils n'ont autre chose de commun, si ce n'est que le choix du titulaire ecclésiastique est également confié à des laïques. Mais il y a une grandé différence, c'est que le patron laïque présente au collateur ecclésiastique qui confère, et que le collateur choisit et confère seul. Le patron donne une disposition à être pourvu, le collateur laïquedonne le titre et les provisions. En un mot, le pourvu, par le collateur, ne tient rien à l'Eglise.
La collation laïque ne se défère dans aucun ordre qui approche de la hiérarchie, ou qui tient aux dernières règle canoniques. La possession de la terre suffit pour conférer. D'ailleurs les coutumes de Lorraine et de Nivernais disposent du droit de collation comme d'un droit patrimonial. La collation laïque n'a jamais reconnu la juridiction ecclésiastique, concernant le titre de cette espèce particulière de bénéfices. Les juges royaux connaissent du possessoire el du pétitoire de ce genre. Voilà donc des propriétés particulières auxquelles vous ne pouvez attenter, ou du moins sans indemnité ; car votre déclaration des droits est l'arme que vous avez remise aux citoyens pour se prémunir contre les injustices du légis-
lateur lui-même, s'il pouvait jamais en commettre.
Mais il n'en est pas de ihême pour la collation immense du roi. Cette collation laïque est à la disposition de la nation, soit celle qu'il a Jure eoronœ, soit celle comme étant aux droits des fondateurs particuliers.
Ainsi je me borne à demander une exception
Ïiour ce qui n'est pas bénéfice ecclésiatique dans e patronage laïque et à ce qui est de la collation laïque dans les mains des particuliers. le finirai par invoquer votre humanité et votre justice pour les patrons indigents, à qui la loi canonique et la jurisprudence des cours adjugeaient la jouissance du tiers des biens et revenu des biens auxquels ils nommaient. Il est digne de vous de consacrer cette jurisprudence bienfaisante, et je l'invoque plus particulièrement pour quelquefe patrons pauvres, que je sais jouir, dans ce moment, de ce modique secours.
J'ai demandé la parole, parce que l'article 1er me paraît
renfermer des choses infiniment distinctes ; le patronage laïque et le titre de pleine
collation laïcale. Dans la pleine collation laïcale, le propriétaire ne donne point ses biens
; ils ne sortent pas de la main de ses représentants; on n'a pas besoin de la provision de
l'Église, au lieu que, dans le patronage laïque, un sujet ne peut être nommé sans
l'intervention de l'évêque. Beaucoup de titulaires ont, par ignorance, laissé dénaturer leurs
titres. Votre décret ne peut s'étendre qu'aux bénéfices à patronages laïcaux; le reste est
toujours dans la possession de la famille du donataire. On a dit ensuite que le décret
s'étendait à tous les biens qui seraient devenus d'usage général : cette disposition est une
matière à procès. Un propriétaire a une chapelle dans l'enceinte de son château ; si c'est un
homme dur, elle ne servira qu'à sa propre commodité, et elle sera interdite à tout le monde.
Si au contraire il veut procurer l'aisance des habitants du lieu,il aura ouvert sa chapelle à
tout le monde, et l'on viendra lui dire : elle est d'un usage public, elle nous appartient
comme à vous. Il est donc indispensable de retrancher de l'article cette disposition. Je
demande qu'il soit fait des articles relatifs au patronage familier et à l'éducation des
enfants.
, député de Lyon, fin demandant la conservation des patronages laïques, je ne consulte point mon intérêt personnel, parce que quoique titulaire d'un bénéfice de ce genre, je l'abandonnerai volontiers, si l'intérêt delà patrie l'exige, Jë désirerais que l'Assemblée nationale décrétât que son décret du 2 novembre në s'étend pas jusqu'aux fondations spiritualisées.
, député de Saint-Jean-d' Angely. D'après les réflexions des préopinants, il me reste peu de vœux à former, et je me borne à demander que les dispositions concernant les collations la'icales et lë patronage familier, ainsi que les biens particuliers de l'ordre de Malte soient ajournées.
, député du Berry. Toute dotation faite à l'Eglise dépouille nécessa rement le fondateur, et dans tous les cas où il est dépouillé, la nation est propriétaire des biens. Le donataire a tellement perdu ses droits à la propriété, que si au bout de six mois il Va pas fait sa nomination, un autre peut nommer à sa place i Je demande doue que le premier article soit décrété.
Je me bornerai à quelques observations infiniment simples. Votre Comité a distingué les. biens possédés à titre de bénéfices formant des biens ecclésiastiques, et par conséquent des biens nationaux, et les fondations qui n'ont point été érigées en titre de bénéfice. Je ferai une distinction plus simple : celle de l'objet du fondateur. Il a eu en vue l'utilité publique ou son utilité privée. Dans le premier cas, il est clair que ce sont des biens nationaux : dans le second, c'est la propriété du particulier. Un propriétaire a établi dans son château (actuellement son habitation) une chapelle ; que cette chapelle ait été érigée en titre de bénéfice ou non, la fondation n'a pas changé; il l'a fait pour l'intérêt unique de sa famille. En Normandie, il y a des cures de collation laïcale. N'est-il pas de l'intérêt général que les sujets y soient nommés par la voie d'élection comme pour les autres cures ? Si les titulaires ont un traitement, n'est-il pas juste que leurs biens soient déclarés nationaux ? l'intérêt public en fait une loi. En conséquence, je crois qu'il faut déclarer que les chapelles et chapitres claustraux seront retranchés des dispositions du 2 novembre.
C'est pour la première fois que j'entends dire que les collateurs ou patrons soient propriétaires des biens de la dotation. IL y a des lois expresses qui leur défendent d'y toucher. Dans tous les cas, votre comité vous a proposé ses vues ; il s'en rapportera à votre sagesse.
(On demande à aller aux voix.)
Plusieurs membres demandent que MM. Camus et Martineau présentent des articles qui répondent aux vues qu'ils ont développées.
L'Assemblée décide qu'en attendant cette rédaction, l'ordre du jour sera interrompu.
, secrétaire, donne lecture des pièces suivantes :
Lettre de M. Làpierre, chevalier de Saint-louis.
Monsieur le Président,
Je vous supplie de vouloir bien mettresousles yeux de l'Assemblée nationale la déclaration ci-jointe, contenant ma rétractation de la délibération prise le 20avril, dansl'église des pénitents, par les citovens catholiques de Nîmes, que fai eu le malheur de présider; dé laquelle rétractation l'acte a été passé chez un notaire.
Je suis avec le plus profond respeot, etc*
A Nîmes, le 20 juin 1790.
Signé : LApierre.
L'acte de rétractation est daté du 19 juin 1790, passé devant M* d'Arthac, notaire.
Lettre des citoyens d'Uzès.
Monsieur le Président, Les papiers publics nous font craindre un décret qui nous condamne à rendre compte de notre conduite, comme président et commissaires chargés de l'envoi de la délibération prise par les catholiques de cette ville le 2 du mois dernier. « ....
Entièrement soumis aux décrets de l'Assemblée nationale, nous sommes prêts à obéir à tout
ce qu'elle exigera de nous, et noUB nous empresserions de venir porter à ses pieds l'hommage de notre profond respect et de notre entière soumission, Si nous ne trouvions dans l'extrême modicité de notre fortune un obstacle à nos désirs. Tous pères de famille, à peine trouvons-nous, dans nos efforts et notre industrie, de quoi suffire à notre subsistance et â celle de nos enfants; comment nous procurerions-nous les moyens de faire un voyage aussi long et aussi dispendieux? Tous nos concitoyens attesteront, s'il le faut, notre impuissance à cet égard.
Si la délibération du 2 mai contient des dispositions que l'Assemblée nationale juge répréhen-sibles, nous. la supplions d'avoir égard à la pureté de notihè intention et de croire qu'on ne peut pas avoir des vues plus droites* un respect plus profond pour ses décrets et un dévouement plus absolu au maintien de la Constitution et des lois qu'elle a décrétées. Nous avons manifesté ces sentiments par une adhésion solennelle à une délibération prise par notre municipalité, qui les développe et les consacre.
Nous joignons ici un extrait de cette délibération, avec une expédition au pied de notre adhésion, et noUs conjurons l'Assemblée de recevoir avec bonté nos efcCUses et nos regrets. . Nous sbmmes avec lè plus profond respect, Monsieur lé Président, vos très humbles et très obéissants serviteurs.
Uzès, le 22 juin 1790.
Signé : Rossel de Fohtarèches, d'Entraigues de Cabanes, de Lafont, Layrac.
(L'Assemblée ordonne que les lettres de M. La-pierre et dés citoyens a'Uzès seront remises à son comité des recherches.)
Lettre de la Chambre de commerce de Marseille
annonçait un don patriotique des Français
résidant à Àlep.
Monsieur le Président,
Nous nous empressons de présenter à l'Assemblée nationale le don patriotique de la nation française établie à Alep ; il est consigné dans la lettre que tous les Français résidant dans cette échelle ont écrite à notre Chambre ; dans celle qui nous a été adressée, particulièrement par le sieur Michel, vieillard septuagénaire sans fortune, et qui dépose sur l'autel de la patrie une partie des secours qu'il reçoit de ses compatriotes ; enfin, dans celle que les dames françaises ont adressées au conseil et que cet officier nous a fait parvenir.
Nous ne rendrions qu'imparfaitement les sentiments qui sont manifestés dans ces différentes pièces, si nous vous en laissions ignorer les expressions. Nous avons l'honneur, en conséquence, M. le Président, de vous en remettre ci-joint des copies. Il est bien doux et bien flatteur pour notre Chambre de transmettre aux dignes représentants de la nation les témoignages de l'amour, de l'attachement et du respect dont les Français ne cessent jamais d'être pénétrés pour leur patrie et pour leur roi, danB quelque partie du monde qu'ils habitent.
Nous Bommes avec respect, Monsieur le Président, vos très humbles et très obéissants serviteurs,
Le maire et députés du commerce de Marseille.
Signé : Grimaud, Rauband, Rolland, Dolier,
Jucard, Gimon, Colliers, Jeimody, Irence, Ch. Salle> P.-Ant. Martin.
Marseille, le 23 juin 1790. • Les lettres de change, en valeur de 10,500 livres, annoncées comme don patriotique de la nation française établie à Alep, sont à l'instant remises à MM. les trésoriers des dons patriotiques.
fait donner lecture d'une lettre écrite à Sa Majesté par les colons de l'île de Tabago ; d'une autre lettre adressée à M. le président par six des membres colons, qui témoignent leur surprise de ce qUe l'on a élevé des doutes sur les événements malheureux de l'île t enfin, d'une troisième lettre, toujours adressée à M* le prési* dent, par M. de La Luzerne, ministre de la marine; Toutes ces pièces sont relatives à l'incendie qui a consumé la ville du Port-Louis, et aux tristes événements qui ont affligé la eolonie de Tabago1
, membre du comité des rapports. Je vous ai proposé de vous hâter, de prendre un parti relatif aux troubles et à l'incendie du Port-Louis. Voici le décret que j'ai l'honneur de vous proposer :
« L'Assemblée nationale, sur le compte qui lui a été rendu des troubles de l'île de Tabago et de l'incendie du Port-Louis, a décrété qu'il y serait incessamment envoyé 300 hommes de troupes* pour remplacer le bataillon de la Guadeloupe, 300 fusils, autant de sabres et de baïonnettes, 400 barils de farine et 600 de viande salée. Ordonne, en conséquence, que son président se retirera par devers le roi, pour le supplier d'ordonner l'exécution du présent décret* et faire punir les auteurs des troubles qui ont occasionné l incendie du Port* Louis. »
Toutes ces dispositions sont du ressort du pouvoir exécutif, et je demande qu'elles lui soient envoyées.
11 est étonnant qu'on s'élève contre la détermination détaillée proposée à l'Assem -blée. On ne considère pas que c'est le ministère lui-même qui vous y invite.
(ci-devant de Saint-Méry). Il y a une grande agitation dans les colonies. Les colons n'ont pas une confiance bien absolue dans le ministère. Je crois qu'il est important que ces détails même soient réglés par le Corps législatif.
, député de Beauvais. Le décret qu'on vous propose est évidemment contraire à la Constitution ; il établit la confusion des pouvoirs. Déterminer le nombre d'hommes, ce serait empiéter sur le pouvoir exécutif. Je demande donc qu'on s'en tienne à supplier le roi d'ordonner les mesures pour le rétablissement de l'ordre dans l'île de Tabago;
, député de Saint-Domingue. NouS avons reçu des lettres des Iles-sous-le-Vent, dont il parait important de vous donner connaissance; l'une d'elles est écrite à bord de la frégate du roi la Vestale^ dans la rade du Port-au-Prince. «**-Gette lettre annonce une insurrection du régiment d'artillerie fen garnison dans cette ville contre ses officiers. Les canonniers avaient menacé de mettre le feu aux poudrières et au magasin à poudre : par les soins de la municipalité et de la garde nationale, tous les effets funestes que pouvait avoir cette révolte ont été prévenus : les canonhiers,
entourés dans le parc d'artillerie, ont été faits prisonniers et désarmés. Les soldats ont dénoncé dix instigateurs de la révolte ; deux ont été pendus, un a été renvoyé et sept condamnés aux galères. Le corps a demandé ses officiers, et prié instamment qu'on renvoyât en France les mauvais sujets, qui sont tous des recrues nouvellement arrivées. — M. de Gouy fait lecture d'une autre lettre, écrite du Cap. — Nous apprenons qu'au Port-au-Prince on s'est décidé à renvoyer deux cents soldats de recrue. Tranquilles sur ce point, nous tombons dans de nouvelles inquiétudes; ies gens de couleur ont formé une conspiration; deux d'entre eux ont été arrêtés ; ils étaient munis d'un serment qu'ils faisaient signer, et qui portait l'engagement de se battre et défendre jusqu'à extinction. La conspiration s'étend sur toute la dépendance du Cap, et a particulièrement la ville pour objet... L'Assemblée coloniale se forme; on en conçoit de grandes espérances... On dit qu'il y a des troubles a la Martinique.
Plusieurs voix : Parlez de Tabago.
Ces événements prouvent combien nous avons raison en demandant, au mois de juillet dernier, qu'il ne fût point envoyé de recrues dans les Iles-sous-le-Vent. Ainsi il y a deux décrets à rendre, l'un pour Tabago et l'autre pour Saint-Domingue. Tabago demande des vivres et des moyens de défense. J'approuve le décret qui vous est proposé; mais j'observe qu'il serait inconstitutionnel de fixer le nombre des troupes à y envoyer. Si ce nombre était insuffisant, le ministre vous dirait : c'est vous qui l'avez déterminé; s'il était assez considérable pour donner des inquiétudes aux colonies et aux puissances étrangères, le ministre vous dirait encore : c'est vous qui l'avez déterminé. C'est au pouvoir exécutif qu'il appartient de saisir le milieu qu'il faut prendre. Lorsque vous aurez rendu un décret dans ce sens, nous écrirons aux Iles-sous-le-Vent pour annoncer qu'elles ne doivent prendre aucune inquiétude de ces dispositions. Quant à Saint-Domingue. .. (On observe qu'il n'est pas question de Saint-Domingue, et M. de Gouy termine son opinion.)
Des habitants de Tabago sont ici, il faut les entendre avant de statuer.
Le moyen que vous aurez à prendre me paraît susceptible d'une grande évidence. Je ne crois pas que vous puissiez déterminer la quotité des secours et des forces à envoyer à Tabago ; je ne crois pas que le pouvoir exécutif seul puisse déterminer la proportion de ces forces et la mesure de ces secours; car, lors de circonstances plus importantes, vous vous trouveriez dans une situation où le désordre que cette faculté accordée indéfiniment aux ministres appellerait sur le royaume, serait irrémédiable, la responsabilité très difficile, et presque toujours illusoire : il faut déterminer la mesure de force et de moyens qui pourra être attribuée à tel ou tel département; mais puisque cette mesure n'est pas fixée, il me paraît convenable, à défaut d'un décret antérieur, de prendre un parti que les circonstances même indiquent. Je propose un projet de décret conçu en ces termés :
« L'Assemblée nationale, délibérant sur la lettre écrite à son président par le ministre de la marine, appuyant la pétition des habitants de la ville de Tabago, décrète que son président se retirera,
sans délai, par devers le roi, pour le supplier de faire passer à Tabago les moyens de subsistance et de défense demandés par les habitants de cette lie, dans la pétition qu'ils lui ont adressée. »
Le projet de M. Barnave reçoit de nombreux applaudissements.
Il est mis aux voix et adopté.
dit qu'il vient de recevoir une lettre et un mémoire de M. le premier ministre des finances.
Ces pièces sont renvoyées au comité des finances pour en rendre compte.
L'Assemblée reprend la suite de la discussion du projet de décret sur les fondations et patronages laïques.
donne lecture de l'amendement proposé par MM. Camus et Martineau. Il tend à faire décréter :
« 1° Que les bénéfices en patronage laïque et ceux des établissements de pleine collation laï-cale qui sont actuellement destinés à un se rvice public, sont soumis à toutes les dispositions des décrets concernant les bénéfices de pleine collation, ou de patronage ecclésiastique ; , « 2° Que les chapelles fondées et desservies dans i'intérieur des maisons particulières, encore qu'elles eussent été érigées en titre de bénéfices, et les établissements de pleine collation laïcale qui ont conservé leur destination domestique et privée, sont exceptés de la disposition de l'article précédent ;
« 3° Qu'il sera statué, d'après l'avis des départements, sur le sort et l'emploi de toutes les fondations faites pour l'éducation et le soulagement des pauvres parents des fondateurs. »
Je demande la priorité pour l'avis du comité. Un bénéfice est un établissement public; c'est pour cela que les bénéfices à collation laïcale seront compris dans ie décret du 2 novembre. Or, je prétends qu'un bénéfice est établi par le public dans quelque lieu que ce soit. La destination du bénéfice ne dépend pas du lieu, mais de l'objet pour lequel il est formé. La seule exception qu'on pût admettre serait celle qui porterait sur des fondations non érigées en bénéfices... Tout Ce qui est d'un usage général et libre est à la disposition de la nation.
Je propose, en conséquence, de décréter :
« 1° Que l'Assemblée nationale déclare que son décret du 2 novembre dernier, par lequel tous les biens ecclésiastiques ont été mis à la disposition de la nation, comprend tous ceux qui dépendent des bénéfices, églises et chapelles dont la fondation a été érigée en titre perpétuel de bénéfice, ou qui seront devenus d'un usage générai, public et libre, quoique la présentation des titulaires, ou mêmela pleine collation, ait été accordée aux fondateurs et à leurs héritiers ou autres ;
« 2° Que la disposition de l'article précédent s'applique également à toutes fondations consacrées par la même autorité de l'Eglise, quels que soient les services religieux qu'elles aient imposés, et de quelques clauses et conditions qu'elles aient été accompagnées, même de celles qui porteraient la révocation des choses données, dans le cas prévu des suppressions ou changements décrétés par l'Assemblée nationale ; l'Assemblée n'entendant excepter que les fondations non érigées en titre de bénéfice, ou qui ne seraient pas devenues d'un usage général, public
et libre, ainsi que celles dont les fondateurs auraient appliqué les revenus à l'éducation de leurs descendants. »
(ci-devant comte). Ces bénéfices ne sont autre chose que l'attribution faite par un particulier, pour assurer à lui et à ses descendants un service particulier. Ce bénéfice n'a été établi ni pour ni par la nation. Si l'Assemblée détruisait ce service, la dotation devrait revenir aux représentants du propriétaire. Cette dotation n'est autre chose qu'une pension laïque... Je crois que nul n'a le droit de s'approprier ces fondations, et qu'elles doivent perpétuellement sortir du plein et entier effet de la volonté du fondateur.
On demande la priorité pour l'amendement de M. Camus.
La priorité est accordée.
Il est bien difficile d'improviser une rédaction de cette importance au milieu de l'agitation d'une Assemblée aussi nombreuse. Je demande l'ajournement à demain, afin que le comité ecclésiastique puisse nous présenter une nouvelle rédaction.
Cet ajournement est prononcé.
La séance est levée à trois heures et demie.
Séance du er 1790, au soir
La séance est ouverte à six heures du soir.
, secrétaire, donne lecture de l'extrait des adresses dont la teneur suit :
Adresses des officiers municipaux des villes de Rouen et de Chartres, qui s'élèvent avec force contre la déclaration d'une partie de l'Assemblée, dénoncent les protestations du chapitre de leur église cathédrale contre les décrets de l'Assemblée, et rendent compte des précautions qu'ils ont prises pour détruire l'influence qu'elles pouvaient avoir sur l'esprit du peuple ;
Des frères des écoles chrétiennes de France, qui cohjurent l'Assemblée par les motifs les plus pressants de conserver leur institut : « Quel que soit le sort qui nous est réservé, nous nous y soumettrons sans murmure, contents de donner ainsi à notre patrie les preuves de ce dévouement dont nous avons toujours fait profession, et qu'elle a droit d'attendre de tous les bons citoyens » ;
Des détachements des gardes nationales de Bagnols, Saint-Esprit, Orange, Courtezon, Jonquières, Pioienc, le Thor et Château-Renard, actuellement en garnison à Avignon, qui supplient l'Assemblée d'approuver leur conduite, et d'accepter la réunion de la ville d'Avignon à la France.
Du sieur Authouard, procureur du roi au Vigan, département du Gard, qui s'engage à exercer gratuitement ses fonctions;
Des curés et vicaires de l'archiprêtré de Bour-goin, au département de l'Isère, qui
s'engagent, avec serment, d'employer toute l'influence de
Du conseil général de la commune de Fumay, département des Ardennes, qui fait le don patriotique du produit des impositions sur les ci-devant priviligiés ;
Des municipalités et des gardes nationales de la ville de Seyssel, et de celle de Lorme, qui déclarent ennemis de la patrie tous ceux qui oseraient, par des protestations contraires au vœu de la majorité de l'Assemblée, se déclarer les ennemis d'une Révolution qui doit à la fois opérer le bonheur des particuliers et la prospérité de l'Etat ;
De sieur François de Rose, ancien lieutenant de cavalerie au régiment Royal-Champagne, cidevant comte de Rose, issu d'une des plus anciennes familles nobles du royaume, qui fait hommage à I l'Assemblée de ses titres de noblesse ; Agé de soixante-douze ans accomplis, le corps cicatrisé de blessures, le titre, dit-il, d'honnête homme sera jusqu'à mon dernier soupir le seul que j'ose porter avec la tête haute, en me disant l'ami, le j frère et l'égal de tout bon Français ; »
Des municipalités de Florensac et Saint-Seine-sur-Vingeanne, . qui se soumettent d'acquérir les biens nationaux situés dans leur territoire;
De la municipalité de Terrebasse-sous-l'Anjou, et de celle du bourg d'Essonne: cette dernière annonce que sa contribution patriotique s'élève à la somme de 8,170 livres.
De la garde nationale de Varennes-sous-Mont-soreau quia fait le serment solennel de combattre jusqu'à son dernier soupir les ennemis de la Révolution ;
Des officiers municipaux de la ville de Taras-con, qui annoncent que la garde nationale et le régiment des dragons de Lorraine, en garnison dans cette ville, se sont empressés de se confé-dérer le 13 du mois dernier : sans rappeler des insurrections auxquelles ce régiment s'était livré par un excès de zèle mal entendu, ils attestent qu'il est entièrement dévoué au bien public. Ils rendent en même temps hommage aux qualités militaires et patriotiques de M. de Gibert, lieutenant-colonel et commandant actuel de ce régiment ;
Des assemblées primaires des cantons du Langon, département de la Vendée; de la ville de Mussidan, de Beaurepaire, département de l'Isère ; deNeuvic, département de la Dordogne ;
Des assemblées électorales du district de Gail-lac, du district d'Aibi, du district de Roanne, du district de Lannion, du district de Sarrebourg, du district de Pontarlier, du district de Villefranche, de celui de Savenay, des électeurs du département de la Charente-Inférieure, enfin des administrateurs du district d'Orléans.
Je fais remarquer à l'Assemblée qu'il est peu convenable que le duc d'Orléans envoie une adresse et ne se présente pas lui-même.
M. l'abbé Maury a mal compris, il s'agit de la ville et non du duc d'Orléans.
Toutes ces assemblées expriment avec énergie une adhésion absolue aux décrets de l'Assemblée, improuvent expressément la déclaration de la minorité, et ia conjurent de ne passe séparer avant
d'avoir terminé la Constitution. On lit dans l'adresse des administrateurs du district d'Orléans ces paroles remarquables : « Nous nous garderons, Messieurs, de ranger parmi les ennemis de la nation ceux de nos concitoyens qui, se croyant les victimes de tant de réformes salutaires, laisseraient échapper quelques plaintes, ou seraient tardifs à mêler leurs voix aux cris de l'allégresse publique. S'ils n'étaient nos ennemis, loin de les aigrir en les vouant à la baine du peuple, il faudrait encore les consoler et leur tendre la main, parce qu'ils sont malheureux et sans défense ; mais le nouvel ordre de choses qui vient d'éclore, en leur offrant des dédommagements et la perspective ravissante du bonheur public, adoucira par degrés l'amertume de leurs sacrificee et leur inspirera des sentiments plus généreux. C'est à nous, Messieurs, c'est à toutes lés personnes honorées de la confiance du peuple, à employer contre eux les armes de la persuasion et à les reconquérir pour la patrie. »
L'adresse d'Orléans est en tous cas de fort mauvais goût.
Je demande qu'il soit fait au pro-cès-verbai une mention honorable de l'adresse de Tarascon.
Cette demande est décrétée.
Le régiment Royal-la-Marine, qui est entré dans l'ordre et a rappelé ses officiers aussitôt qu'il a eu connaissance du décret de l'Assemblée nationale, eh voie Une adresse de soumission.
Le régiment dé La Reine-Dragons présente, par une pétition, ses vues sur l'organisation de l'armée.
demande et l'Assemblée ordonne le renvoi des deux adresses au comité militaire.
La ville de Saint-Sauveur-le-Vicomte fait don de l'imposition des ci-devant privilégiés pour les six derniers mois de 1789.
Adresse de la ville de Carcassonne qui s'exprime avec force contre la délibération des citoyens catholiques de Nîmes.
Adresse d'adhésion des Curés et vicaires de l'archiprêtré de Bressieux et de ceux du canton de Barbonne* qui assurent l'Assemblée de tout leur zèle pour la Constitution, et de leur soumission à tous ses décrets.
, membre du comité de Constitution, lit une adresse des administrateurs du département de ia Marne remplie d'expressions de patriotisme. Ils demandent que l'Assemblée fixe à Chàlons-sur-Marne lé chef-lieu de leur départements
présente, sur cette réclamation, un projet de décret qui est adopté ainsi qu'il suit :
« L'Assemblée nationale décrète, de l'avis de son comité de Constitution, qqe conformément à la délibération des électeurs du département de la Marne, l'assemblée de ce département est fixée dans la ville de Châlons-sur-Marne. »
donne lecture d'une adresse des étudiants en droit de l'université de la ville d'Angers, qui font hommage à l'Assemblée d'un projet de thèse qu'ils se proposent de soutenir sur les décrets constitu- l
tionnels relatifs aux droits imprescriptibles de l'homme.
Il est décrété qu'il en sera fait mention honorable dans le procès-verbal, et que le projet de thèse sera déposé aux archives.
Un chanoinede la Sainte-Chapelle prononce un discours à la barre, par lequel il fait hommage à l'Assemblée d'un ouvrage de sa composition, sur les monuments de la Sainte-Chapelle, pour être déposé aux archives : l'Assemblée agrée cet hommage.
Une députation des arquebusiers de la ville est admise à la barre ; elle y expose l'état des pertes qu'elle a essuyées par les circonstances et les événements du mois ae juillet dernier, qui avaient amené la nécessité de prendre des armes dans leur magasin.
L'Assemblée décrète le renvoi de leur pétition au comité des finances.
Une députation de la section de la bibliothèque, ci-devant des Filles-Saint-Thomas, est admise à la barre ; elle y lit une adresse tendant : 1° à ce que tous les ambassadeurs, envoyés, consuls, résidants, ministres, et tous autres employés près des cours étrangères, soient tenus d'envoyer d'ici au 14 juillet, par écrit et signé, leur serment civique; '
2° Que personne à l'avenir ne puisse être employé dans ces sortes de places, s'il n'a justifié d'avoir prêté le serment civique ;
3° Que tous les Français absents du royaume soient tenus de se présenter dàriS un délai fixé, chez l'ambassadeur, ou tout autre chargé de fonctions publiques, pour y prêter leur sermeht.
(On demande le renvoi de l'adresse au comité de Constitution.)
La proposition est bonne, mais j'ob8erve qu'il n'y a que les membres de cette Assemblée qui puissent faire des motions. Pour lever toute difficulté je reproduis la motioti en mon nom personnel et j'en demande le renvoi au comité de Constitution.
(Le renvoi est prononcé-)
Je dois informer l'Assemblée qu'une députation de plusieurs sections de Paris demande à être entendue à la barre et qu'elle a pour mission de proposer que le jour de Véleo tion de la municipalité fixé au 4 juillet soit changé et reporté au 1er août.
Je crois qu'aucune proposition de modification à Un décret ne peut être faite par des étrangers, et j'ajoute d'ailleurs que le vçeU des citoyens de Paris ne peut être exprimé que par la majorité des sections.
La demande des citoyens de PârlS a déjà été soumise à votre comité de Constitution et je viens en son nom vous proposer de reculet* l'époque des élections du 4 au 20 juillet.
Je demande à présenter une observation. Aucun décret n'empêche autufr citoyen qui n'est pas mëmbre de la législature de former une pétition. J'ajoute qu'on ne peut déefc der sur elle qu'autant qu'on l'aura entendue. C'est par ce motif que je propose d'admettre à la barre les envoyés des sections de Paris.
La députation est admise et dit :
« Messieurs, « La section de Saint-Etienne-du-Mont s'étant
assemblée hier, a reçu la lettre dé M. le maire, qui désire que les opérations préalables à l'élec-tion des officiers municipaux soient commencées le premier juillet, finies le 4, et que le 5 la nomination du maire se fiasse dans toutes les sections de la capitale. Effrayée des travaux immenses, et de l'agitation indispensable, qui sera encore accélérée par la promptitude de 1 exécution, elle a reconnu que le,temps manquait à son zèle, et que ces élections, qui exigent la sage lenteur de la prudence, seraient nécessairement précipitées et imparfaites.
« Telle est l'étendue et l'importance des opérations préalables, que quidze jours du travail le plus assidu ne suffiraient pas pour les exécuter conformément à vos sages décrets.
« D'abord il faut, suivant l'article 33 du titre III de votre décret concernant la municipalité de Paris, que les quarante-huit sections, avant de procéder à la première élection, déterminent le traitement du maire, les indemnités à accorder aux administrateurs, au procureur de la commune, à ses substituts; le traitement du secrétaire-greffier, de ses deux adjoints, du garde des archives et du bibliothécaire.
« Il faut que les soixante districts, avant de se Béparer pour se mêler et se réduire en quarante-huit sections, assurent leurs comptes, dettes honorables et sacrées» faites pour secourir l'indigent et conquérir ou conserver la liberté: l'honneur leur en fait le plus impérieux des devoirs.
« Il faut que les citoyens connaissent vos sages décrets, règles invariables de leur conduite, pour ne point errer dads un choix si difficile. Ces décrets ne sont publics qhe d'aujourd'hui, et ne peuvent être connus que d'un très petit nombre.
« 11 faut dresser le tableau de 97,000 citoyens actifs; et la très grande partie de ces citoyens, n'ayant pu se procurer une Connaissance exacte de vos décrets, ne s'est pas encore fait enregistrer.
« Quand toutes ces opérations seront terminées, les plus faibles calculs portent à sept jours les seules élections du maire et du procureur de la commune. Votre intention, Messieurs, n'est pas de priver de leurs droits aux élections, une foule de bobs Citoyens et de braves soldats qui ont bien mérité de la chose publique. Cependant arrivent de toutes les parties de la France des soldats patriotes, pour jurer sur l'autel de la patrie de vivre libres ou de mourir. Si leurs compagnons d'armes sont occupés à leurs élections, qui volerà au-devant d'eux, qui les accueillera? qui remplira à ledr égard les devoirs si doux d'une fraternelle hospitalité? Et tant de citoyens qui travaillent jour et nuit aux apprêts de cette superbe fête, et tant d'autres qui la dirigent (distinction flatteuse qu'ils doivent à leurs talents, à leur patriotisme), ils seront donc forcés, ou de renoncer à ces devoirs pressants* ou bien à leurs droits d'élection* le plus beau que leur assure la Constitution ; à ce droit que depuis un an ils ont acheté par tant de sueurs, de travaux et de sacrifices 1
« Daignez ajouter à ces motifs l'intérêt impérieux de la sûreté publique. Jamais la police de cette immense capitale n'a exigé plus d'activité et d'habileté que dans les circonstances présentes. Si la voix des citoyens nommait de nouveaux officiers municipaux, quel danger de remettre à dës mains novices des fonctions qui exigeront au 14 juillet l'expérience la pius consommée? Quel inconvénient de charger de là direction de cette fête politique et solennelle des
hommes qui n'auraient peut-être pas les mêmes vues ni les mêmes idées ?
« Pour ne rien dire de plus, il serait à craindre que l'on ne vît point régner la concorde, si nécessaire dans des circonstances si délicates: le corps, municipal provisoire convient mieux pour le mo-merit qu'un corps mélangé.
Les mêmes considérations exigent que tous les citoyens de chacune des sections restent dans le même centre de relation et de fraternité, sans en être séparés avant la fin du mois de juillet ; tous se connaissant, se rendront de bons offices, et se prêteraient un mutuel secours avec plus de promptitude et de facilité.
« Daignez observër encore que les citoyens des sections supprimées, et ceux qui sont répartis sur un sol, et pour ainsi dire dans une patrie étrangère, dont ils ignorent même le nom des habitants, se plaignent de n'avoir pas un jour pour connaître les citoyens sur qui pourraient tomber leurs choix, et de perdre ainsi leurs droits aux élections qu'ils seront obligés de faire au hasard* ou d'après des impulsions étrangères.
« Réunissez, Messieurs, l'impossibilité presque absolue de faire avant le 14 juillet, ni les opérations préalables aux élections, ni les élections mêmes ; réunissez l'agitation des esprits, inséparable des élections ; les mécontentements, les prétentions anéanties ; les souvenirs de tant d'hommes froissés par la Révolution; ët vous pèserez dans votre sagesse s'il ne serait pas plus convenable de remettre les élections pour la municipalité de Paris, après la solennité de la fédération.
« Quelque chose que vous décidiez, Messieurs* toujours soumis, prêts à ajouter les nuits aux jours, non seulement pour obéir à vos décrets, mais encore pour ne pas dépasser l'instant que vous aurez fixé, vous trouverez toujours dans nos coeurs les sentiments qui vous sont dus* l'admiration* le respect et l'obéissance. »
EXTRAITS DES DÉLIBÉRATIONS;
Âssèmblêe générale
« L'Assemblée générale convoquée en là ma*-nière ordinaire, délibérant sur les inconvénients d'une trop grande précipitation à procéder à la formation des assemblées primaires, annoncée pour jeudi prochain, 1er juillet, â arrêté de nont-tner des commissaires à l'effet de rédiger uhè adresse à l'Assemblée nationale, pour en obtenir un décret qui recule jusqu'après la fédération générale des gardes nationales de tout l'Empire, l'ouverture des assemblées primaires, annoncée pour le Ie* juillet prochain : a arrêté, en outre, qu'il sera envoyé sur-le-champ des députés dans les 59 autres sections, pour les prévenir du vœti du district et leur faire l'invitation d'y adhérer. »
Assemblée générale du
« Lecture faite du projet d'adresse à l'Assemblée nationale, rédigé par les commissaires nommés en la séance d'hieri, l'assemblée a arrêté à l'unanimité qu'elle adoptait ladite adresse, et qu'expédition en serait portée sur-le-champ à l'Assemblée nationale, par MM. Cousin, Delatouche, Turquet et l'abbé Champagne* députés à cet effet, pour la supplier de prendre eu ia plus haute considération ladite adresse» et de rendre un décret
qui recule en tel temps plus éloigDé que sa sagesse lui suggérera les assemblées primaires des sections annoncées pour le 1er juillet prochain ».
Signé : Foissi, président ; Brouillynet, secrétaire.
Vous venez d'entendre la pétition des citoyens de Paris, et vous sentez tous combien elle est fondée en raison. Sans doute, vous concevez difficilement comment il est possible qu'on ait choisi le moment actuel pour faire faire les élections de Paris. Tout le monde sait que l'époque des élections est, dans tous les pays, un instant de fermentation, et ne peut manquer d'en exciter dans une ville aussi considérable que Paris. D'après cette observation, comment a-t-on pu choisir, pour une opération si importante, le moment de la fédération générale ? Comment a-t-on pu choisir une époque qui, réunissant dans la capitale un grand nombre d'étrangers, rendra la police beaucoup plus difficile à entretenir? D'ailleurs, vous savez tous que des bruits répandus, je ne sais à quelle intention, mais sans doute par les ennemis de la chose publique; que des annonces de désordres et de troubles pour le 14 juillet ont déjà éloigné un grand nombre de citoyens de la capitale. Si l'on veut augmenter ce nombre, si l'on veut donner quelque probabilité à ces bruits affligeants, on n'a qu'à persister dans le projet de faire procéder aux élections dans une circonstance aussi délicate. Mais vous qui désirez le calme, qui ne voulez pas voir troubler une fête aussi touchante, vous repousserez tous ces aliments de fermentation et de trouble. C'est dans cette persuasion que j'ai l'honneur de vous proposer de décréter que ies opérations relatives aux élections n'auront lieu qu'au 1er d'août.
Je crois nécessaire de renvoyer les élections au mois d'août, quoique les frayeurs pusillanimes qu'on veut donner sur le 14 juillet me paraissent dénuées de fondement ; mais pour rassurer les citoyens de Paris, sur les dangers de cette époque, je déclare à toute la nation et à la capitale que M. le duc d'Orléans et moi nous y serons. (Ce sarcasme excite des rumeurs.)
J'appuie la proposition de M. Alexandre de Lameth, déjà fortement recommandée par le vœu connu de la grande majorité des sections de la capitale. Je ne proposerai qu'un seul amendement, qui a pour objet de faciliter les opérations. Il consiste à autoriser les citoyens à se présenter dans les sections pour faire reconnaître leur qualité de citoyens actifs.
(La question préalable est demandée sur cet amendement. L'Assemblée décide qu'il n'y a pas lieu à délibérer.)
J'appuie la proposition du comité de Constitution; mais je pense que l'objet qu'il se propose serait également rempli, en fixant l'époque des élections au 25 juillet.
J'adopte ce changement.
L'Assemblée délibère et rend le décret sui- vant :
« L'Assemblée nationale décrète que, vu les circonstances, le roi sera supplié de donner les ordres nécessaires pour que les opérations prescrites par les décrets de la division de Paris, du 22 juin, ne commencent qu'au 25 juillet.
M. de Goulmiers demande la parole pour une motion.
La parole lui est accordée.
{ci-devant abbé d'Abbecourt). Messieurs, les différents événements malheureux que l'on veut attribuer à la déclaration faite par une partie des membres de cette Assemblée ont vivement affligé mon fyne.
Je demande la parole. C'est dans l'intérêt de l'orateur qui vient rétracter un de ses actes ; c'est pour ne pas affliger cette âme sensible outre mesure.
M. de Coulmiers a obtenu la parole pour une motion et je dois la lui maintenir.
poursuit :
La délicatesse des circonstances où se trouvaient les membres du clergé, dont vous régliez le traitement, nous imposait le silence le plus absolu. D'une part, vous aviez à balancer les intérêts d'une grande nation avec ceux de collègues qui doivent être précieux : d'autre part, la crainte que, par un soupçon aussi injuste qu'injurieux, on attribuât à des vues d'intérêt une démarche qui ne doit avoir pour base que le vœu le plus pur pour le bonheur et la tranquillité publics.
Ces différentes positions rendaient toutes nos démarches infiniment délicates. Néanmoins, effrayé des malheurs journaliers que l'on continue d'attribuer à la déclaration signée par une partie des membres de cette Assemblée, à laquelle j'ai cru devoir rne réunir ;
Quoique je ne puisse me persuader, et que je sois sûr qu'aucun de nous ait eu l'intention perverse de distribuer cet écrit, dans l'espérance et avec le projet atroce d'allumer le flambeau du fanatisme, et de fomenter des guerres de religion;
Persuadé que j'étais alors, que cette déclaration ne pouvait ni ne devait être regardée que comme une simple profession de foi :
Je suis convaincu, comme je l'ai toujours été, que toute déclaration dont on se servirait pour exciter des troubles et la discorde dans le royaume, pour persécuter les non-catholiques romains, serait préjudiciable à la religion que nous professons, dont la pureté de la morale est aussi douce que persuasive; qu'en général, ce n'est pas par des écrits, mais par le bon exemple, avec les armes de la patience et de la modération, que nous devons ramener nos frères, quand nous les croyons égarés.
Que l'on cesse donc de nous soupçonner, de soulfler le feu de la discorde contre eux ; nous devons, au contraire, les chérir, les défendre comme nos concitoyens et nos amis : la religion, l'bumanité nous l'ordonnent.
Telle est la manière de servir le Dieu de paix que nous adorons : agir autrement, ce serait dégrader la religion que nous professons.
J'ai fait l'examen le plus sévère de cette déclaration dont je ne prétends pas faire l'apologie, mais vous déclarer, Messieurs, avec toute la sincérité dont nous devons être tous animés, et dans l'intime persuasion que notre devoir le plus rigoureux étant de concilier les intérêts delà religion avec les avantages de la paix et de l'union, si désirables pour le maintien de la constitution autour de laquelle nous devons tous nous réunir,
et à laquelle nous avons juré fidélité, que, puisque l'opinion publique et presque générale, croit reconnaître dans cette déclaration une critique de vos décrets, sans être les esclaves de cette même opinion, nous devons la respecter. Notre devoir est d'y céder; elle est l'expression du vœu de nos commettants, dont nous ne sommes que les délégués.
Nous devons d'autant volontiers abandonner un vœu particulier, pour nous réunir au vœu général, que cette déclaration devient maintenant inutile, puisque nous avons tous reconnu de la manière la plus solennelle et la plus authentique la religion catholique pour la religion nationale.
Je vous demande, Messieurs, si, depuis que l'Assemblée nationale s'est occupée tant de l'organisation que du traitement du clergé; si depuis que, par un article du décret du 2 juin, elle a adopté l'amendement que j'ai eu l'honneur de lui proposer, tendant à reconnaître l'unité de la foi et la communion avec le chef visible de l'Eglise de Rome; je vous demande dis-je, Messieurs, si ce n'est pas là une vraie déclaration, la plus formelle et la plus authentique, des principes de l'Assemblée sur la religion, et à laquelle nous devons tous nous réunir? Maintenant donc, la déclaration isolée ne servirait, depuis cette époque, qu'à calomnier les principes de l'Assemblée. C'est un crime dont aucun de nous ne doit se rendre coupable. Je demande, en conséquence, acte à l'Asstmblée de ma profession de foi, ainsi que de mon désistement de mon adhésion à la déclaration de la minorité de l'Assemblée, qui, dans mon opinion, devient absolument inutile.
Je n'ai jamais demandé de confidence, cependant le préopinant m'en a fait une hier... Je me tais... Qu'il sonde sa conscience.
Je ne sais ce que c'est que cette confidence, et je supplie M. de Foucault d'en faire part à l'Assemblée.
Par respect pour l'Assemblée, je ne le dirai pas... Il paraît qu'on ne m'entend point... Je suis prêt à répondre en tout temps à ia provocation de M. l'abbé.
(Ce débat n'a pas de suite et s'éteint devant l'indifférence de l'Assemblée).
M. Rewbell demande la parole sur l'ordre du jour.
Lorsque vous prenez des précautions pour la tranquillité publique, en commémoration de la prise de la Bastille, la cour des aides en prend d'une autre nature: elle poursuit un grand nombre de citoyens qui sont coupables d'avoir étendu l'esprit de la révolution de la Bastille et des Invalides aux barrières. Cent décrets ont été lancés : celte affaire est la troisième à l'ordre du jour, je demande qu'on s'en occupe sur-le-champ.
consulte l'Assemblée sur la priorité demandée en faveur de l'affaire des procédures suivies en la cour des aides de Paris contre les individus qui ont brûlé les barrières. La priorité est accordée.
, au nom, du comité des rapports. On a hier donné connaissance au comité des
rapports d'une procédure criminelle, instruite par la cour des aides de Paris, contre les individus qui ont pillé et brûlé les barrières. Beaucoup de citoyens sont décrétés, plusieurs sont arrêtés. La commune de Montmartre réclame un grenadier et sa femme emprisonnés en vertu d'un de ces décrets. Le 24 février dernier, le procureur général de la cour des aides a rendu sa plainte, sans avoir aucun dénonciateur. Il est intervenu, le 26 février, uu arrêt qui lui permet d'informer. L'information, commencée le 29 mar3, a été dose le 29 avril : quatre-vingt-deux témoins ont été entendus, soixante-dix sont pris parmi les employés Le 10 mai, il a été décerné quatre-vingts décrets de prise de corps, onze d'ajournement personnel et trois dè soit ouï, contre des citoyens de Paris. Le même jour, réquisitoire du procureur général en addition d'information. Depuis cette époque, onze particuliers ont été arrêtés, presque tous de nuit; savoir : cinq le 16 juin dernier, et six le 18 du même mois. La procédure a été suivie publiquement contre ces onze détenus. Le 30 mai, les officiers de l'élection, considérant que leurs audiences étaient devenues très tumultueuses, que l'affluence du peuple était inquiétante, qu'on avait entendu des menaces de nature à donner de justes alarmes, avaient délibéré de surseoir jusqu'à ce qu'il eût été rendu compte à l'Assemblée nationale de l'état de la procédure... Votre comité a fait plusieurs observations qu'il est important de mettre sous vos yeux. Il a remarqué :
1° Le retard affecté de la cour des aides, qui a attendu huit mois avant de commencer ses poursuites ;
2° La concurrence des décrets avec l'époque du 10 mai, où tant de ressorts avaient été mis en mouvement pour opérer une contre-révolution ;
3° La qualité des témoins, qui, pour la plupart, ont, comme employés des fermes, un intérêt marqué dans cette affaire ;
4° Le nombre des décrets, qui devait être plus considérable sans les craintes que la disposition du peuple donnait, et qui ont déterminé à suspendre la marche de la procédure, Si elle était continuée au moment delà fédération, elle pourrait jeter de la défaveur sur un tribunal dont la confiance publique n'est déjà que trop éloignée. A l'instant de l'anniversaire de cette époque mémorable, il faut jeter un voile sur le passé. Rappelez-vous la fermentatiou qui régnait dans la capitale; rappelez-vous que le besoin d'être libre agitait un peuple nombreux; il ne considérait les employés que comme les agents de perceptions arbitraires, de vexations dont il avait été trop longtemps la victime. Il a détruit les monuments fastueux que l'imbécile prodigalité d'un ministre coupable semblait avoir élevés pourinsulter à sa misère; il a brûlé les barrières, mais de la même main il a pris la Bastille et assuré la liberté. Sans doute, il put se mêler à cette action des intérêts personnels, mais ils furent en petit nombre, mais ces intérêts profitèrent de l'enthousiasme qu'excitaient l'amour et l'espoir de la liberté. Si vous pensez que la procédure doit être continuée, la loi frappera plutôt sur des citoyens entraînés que sur des coupables; si vous autorisez ces poursuites pour Pans, ordonnez-les pour tout le royaume, car dans tout le. royaume on a brûlé des barrières... Les juges alors, loin d'être des protecteurs, ne seraient plus que des ennemis. Ces juges veulent-ils donc ne laisser après eux aucuns regrets?
Veulenl-ils avant leur destruction venger l'ancien régime ? Le 14 juillet qui sera un jour de fête et de bonheur pour tous les citoyens français, serait-il pour quelques-uns un jour de deuil et de larmes?... Il faut, dans ces circonstances, voiler la statue de la loi... Le 22 mars, l'Assemblée a ordonné le rétablissement des barrières, sans ordonner en même temps la poursuite des coupables. Ge silence du Corps législatif aurait dû servir de règle aux tribunaux. Le comité des rapports propose le projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale, considérant que la procédure criminelle commencée par la cour des aides de Paris et renvoyée à l'élection de cette ville, ayant pour but de poursuivre les auteurs des incendies des barrières, qui a eu lieu dans le mois de juillet 1789, pourrait jeter des alarmes, non seulement dans Ja capitale, mais encore dans tous les départements où de pareilles procédures pourraient être faites; que l'insurrection du 14 juillet ne doit laisser d'autre souvenir que celui de la liberté conquise, que d'ailleurs, si quelques excès de la nature de, ceux dont le procureur du roi a rendu plainte se sont mêlés aux mouvements d'un peuple qui recouvrait ses droits, et qui, dans toute autre circonstance, seraient sévèrement punis, sont tellement liés aux événements qui les accompagnent, que ce serait s'exposer à confondre l'innocent et le coupable que de vouloir en poursuivre les auteurs, a décrété et décrète ;
« Que la procédure criminelle commencée le 24 février dernier, à la réquisition tdu procureur général de la Gour des aides de Paris, concernant l'incendie des barrières, au mois de juillet de 1789, et renvoyée en l'élection» demeurera comme non-avenue; que défenses seront faites, tant à ladite cour qu'aux officiers de l'élection, d'y donner aucune suite; que les personnes arrêtées en vertu de décrets rendus dans cette procédure, et non prévenues d'autres délits, seront mises en liberté ; et que le président se retirera devers le roi, pour le supplier de donner les ordres nécessaires pour l'exécution du présent décret. »
Il est aussi contraire à mes principes qu'à mon caractère de solliciter la sévérité de l'Assemblée nationale contre une portion égarée de mes concitoyens; mais je sais que l'impunité est opposée au bon ordre. Je demande donc que l'on m'écoute sans prévention; ma conclusion ne sera peut-être pas très opposée aux principes du comité. Les impôts indirects sont une partie essentielle du revenu public. La ville de Paris paye un huitième des impôts indirets du royaume, c'est-à-dire 70 millions... 70 millions... 70 millions au moins. {Il s'élève des murmures). On m'a mal entendu, je répète...
Plusieurs membres : Aux voix 1
poursuit :
Je me renferme dans la motion faite sur la forme du décret que vous avez à rendre. J'examine d'abord si la conclusion du comité est exacte*... Ne vous laissez pas aveugler par des préventions personnelles.
Il est de principe chez tous les peuples, et dans toutes les lois raisonnables, de suspendre l'exécution d'un jugement; jamais nulle part on n'a encore suspendu l'instruction d'un procès. Vous n'ignorez pas que dans notre jurisprudence .criminelle aucun citoyen ne peut requérir
même :1a punition d'un coupable, et que la loi a réservé à l'homme public le droit de poursuivre un délit public.
Les états généraux de Paris, d'Orléans, de Blois ont ordonné au procureur général de la cour des aides de requérir l'exécution des lois sur l'impôt, toutes les fois qu'elles ont été violées. Or, de quoi s'agit-il ici? Il s'agit d'un délit public, que le procureur général est obligé de poursuivre, sous peine de forfaiture. Quand même vous considéreriez l'Assemblée comme substituée au conseil privé, à ce conseil où l'on examinait si les jugements rendus par les divers tribunaux de justice étaient conformes aux lois et aux ordonnances, je vous rappellerai qu'il n'était pas au pouvoir du conseil privé d'arrêter l'instruction d'un procès. Jusqu'à ce moment, le conseil privé a été chargé de recevoir des requêtes en cassation et de casser les jugements. Aussi a-t-il été défini par uu grand magistrat, par M. d'Aguesseau, le garde du corps de la lot ; c'est-à-dire que tous les citoyens français venaient réclamer de lui qu'il remît la loi en vigueur lorsqu'elle avait été méconnue. Ce n'estdonc pas la suspension de l'instruction d'un procès que l'on peut vous demander, mais l'anéantissement d'un jugement... Le législateur peut accorder une grâce, mais il ne peut pas autoriser l'impunité ; et ce serait l'autoriser que d'interrompre une procédure. Ce qu'on vous propose n'est donc point légal ; dans cette occasion, je me crois obligé de faire une réparation publique aux habitants de Paris, que l'on confond avec des brigands qui ont incendié les barrières. C'est pour intéresser votre patriotisme que ii'on confond deux décrets différents; d'une part, ce sont les barrières que l'on vous présente ; de l'autre, c'est la Bastille et lesprisonsd'Etat,etc... Vousavez rendu un décret pour faire reconstruire ces barrières ; en avez-vous rendu pour faire réconstruire la Bastille I On vous propose d'aller aux voix... Il est démontré que mon obstination à soutenir la justice excite des rumeurs dans l'Assemblée» Je dis que les hommes qui, sous prétexte de la liberté, n'ont cédé qu'à des mouvements d'intérêt personnel; que des hommes qui, pour être libres, ont causé l'anarchie et le désordre, n'ont point de droit à votre indulgence. Jls vous intéressent, je le conçois ; je partage cet intérêt. Mais comme législateur, c'est déshonorer la liberté, que de la voir dans de pareils excès. C'est déshonorer la liberté que de confondre les véritables défenseurs, les représentants de la nation, avec les auteurs du désordre et de l'anarchie. Je dis donc que le procureùr général était obligé de poursuivre ceux qui ont brûlé ies barrières ; je dis que la perquisition du coupable et que la punition de ce crimepublic intéressent la capitale, puisqu'elle paye 70 millions en impôts indirects. Il est donc impossible de couvrir du voile de l'impunité une insurrection criminelle. Vous pouvez faire grâce, mais empêcher la loi de prononcer une peine, ce serait un abus coupable. Or, ce n'est point une grâce, que l'on vous demande, C'est donc l'impunité que l'on vous prûT pose de décréter, et vous ne le pouvez pas, vous ne le devez pas... Il n'est certainement ni dans l'intention, ni dans les principes de 1 Assemblée, de prononcer un jugement d'impunité? Vous pouvez accorder une grâce, la solliciter, Mais dans ce moment, le coupable n'est pas convaincu ; le magistrat chargé du ministère public poursuit l'instruction du délit ; il remplit un devoir que vous devez protéger. — Je conclus,
et je demande que l'instruction soit poursuivie, en ordonnant toutefois que le jugement ne pourra être exécuté sans que préalablement l'Assemblée nationale n'en ait eu connaissance.
M. l'abbé Maury excelle dans l'art d'égarer l'opinion. Pour le moment je me borne à rappeler un arrêt de la cour des aides, rendu le 28 mai, qui assujettit les citoyens nouvellement enclos dans les barrières à payer le gros et le détail pour les vingtièmes.
L'opinant a été mal renseigné, car le fait qu'il avance est inexact. La cour des aides mérite au contraire toute confiance.
La discussion est close et le décret suivant est rendu :
«L'Assemblée nationale, ayant entendu son comité des rapports, décrète que la procédure criminelle commencée le 24 février dernier, sur la réquisition du procureur général de la cour des aides de Paris, concernant l'incendie des barrières, au mois de juillet 1789, et renvoyée à l'élection, demeurera comme non avenue; que défenses seront faites, tant à ladite cour des aides qu'aux officiers de l'élection, d'y donner aucune suite ; que les personnes arrêtées ensuite des décrets rendus dans cette procédure, et non prévenues dans d'autres délits, seront mises en liberté, et que le président se retirera par devers le roi, pour supplier Sa Majesté de donner les ordres nécessaires pour l'exécution du présent décret.
Les deux Fribourgeoisqui étaient retenus sur les galères de France et dont un décret de l'Assemblée a ordonné l'élargissement demandent à être reçus à la barre.
Une opposition marquée à cette demande se manifeste.
M. Robespierre demande la parole en faveur des Fribourgeois.
obtient la parole et dit: Messieurs, il est inutile de vous représenter que les deux forçats qui demandent à être admis à la barre ne sont libres que par votre décret qui ordonne l'élargissement des forçats étrangers et que par conséquent ils sont sous le sceau du crime qui les a fait mettre aux galères. Mais ce qui n'est pas indifférent, c'est de vous faire observer que les ordonnances du roi, qui ne sont point annulées, défendent aux forçats sortis des galères d'approcher de la capitale et du lieu où réside Sa Majesté, à plus de dix lieues de distance; que par conséquent les forçats sont infrac-teurs de la loi ; je demande donc qu'ils ne soient point admis et qu'on passe à l'ordre du jour,
Cette proposition est mise aux voix et pres-qu'unanimement adoptée.
La séance est levée à dix heures du soir.
Séance du vendredi
La séance est ouverte à neuf heures du matin.
, secrétaire, présente une rédaction plus étendue du procès-verbal de la séance du mercredi 30 juin.
réclame contre la teneur du second article additionnel (art. 24) relatif au traitement du clergé actuel qui ne rend pas axactç-ment l'intention de l'Assemblée.
, rapporteur, dit que le rédacteur du procès-verbal s'est borné à transcrire le texte même de l'article tel qu'il a été décrété par l'Assemblée et qu'il n'y a pas lieu de le modifier.
M. le Président met le procès-verbal aux voix, Il est adopté sans changement.
propose, avant de passer à l'ordre du jour» d'ajouter à l'article 26 du décret aur le traitement du clergé actuel, une disposition particulière par laquelle tous procès actuellement existants relativement aux réparations à faire aux bâtiments ecclésiastiques seraient anéantis.
rappelle que l'Assemblée a décidé que tout article additionnel sur la matière serait renvoyé au comité ecclésiastique- Il demande, en conséquence, l'ordre du jour qui est prononcé.
, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance du jeudi matin 1er juillet.
Il est adopté.
M, l'abbé Grégoire demande la parole pour une motion sur les lettres de cachet. (Mouvement de surprise.)
Je crois nécessaire de vous dénoncer des abus qui ne vous sont pas connus. Malgré vos soins il existe encore des Français embastillés, en pays étranger, en vertu d'ordres arbitraires émanés de l'ancien mi nistère français. Il yen a, dit-on, encore dans le Wurtemberg, à Sprandau, à Stettin, en Poméranie. J'ai une requête pour l'Assemblée, envoyée de cette derrière ville par un Français. Voici sa lettre, queje tiens; je vais vous en lire des passages.
« ..........* Je suis un homme timbré ou je
ne le suis pas. Dans le premier cas, pourquoi me fait-on une pension dont je ne dois jouir que chez l'étranger? Pourquoi pas dans ma patrie? N'y a-t-on pas des petites maisons et des médecins assez habiles pour rétablir un cerveau dérangé? Si je ne le suis pas, pourquoi m'éloigne-t-on de ma patrie ? Me défend-on d'écrire et de parler à qui que ce soit? Ou je suis un fourbe, un scélérat, qui s'est rendu coupable des plus grands crimes; ou je ne suis rien de tout cela. Dans le premier cas est-il naturel de faire une pension à un tel homme? Pourquoi ne pas le faire ramener en France pour le punir comme il le mérite et servir d'exemple? Dira-t-on que c'est pour ménager l'honneur de la famille? un fourbe, un imposteur ne déshonore jamais une famille dont il n'est pas, et en fût-il cent fois, les fautes sont personnelles, S'il n'est pas tel, pourquoi ne pas le laisser jouir des droits de l'homme ? 0 Sire l ô mes augustes compatriotes, serai-je donc le seul qui ne participera pas aux sacrifices que vous avez faits pour rendre vos sujets, vos compatriotes heureuxI Non, sans doute, jugez-moi,
condamnez-moi, faites-moi mourir sur un écha-faud, si je le mérite, ou rendez-moi à ma patrie, si vous m'en trouvez digne; c'est tout ce que je souhaite et désire ardemment, avec la plus profonde vénération, Sire, et à vous, augustes membres de l'Assemblée nationale, le très soumis sujet.
« Alex. G...
« A Stettin, le 24 avril 1790, au fort de Prusse. »
poursuit ; Au moment où nous venons de conquérir la liberté, étendons ce bienfait à tous nos frères innocents. Je demande que le comité des lettres de cachet soit chargé de prendre des renseignements sur cet objet, au bureau des affaires étrangères, pour en rendre compte, s'il est possible, avant la fédération du 14 juillet.
(Cette motion est adoptée.)
Le comité des finances demande à rendre compte d'une réclamation formée par le commissaire des guerres résidant à Toul, contre ladite ville.
, rapporteur. La ville de Toul a payé jusqu'ici, au commissaire des guerres, qui réside dans son sein, une somme de 400 livres pour son logement. Elle refuse au sieur de l'Epi-neau, commissaire des guerres actuel, de solder cette dette obligatoire pour les années de 1788 et 1789. Votre comité des finances, ayant reconnu le bien fondé de la réclamation du sieur de l'Epineau, vous propose un décret en conséquence.
Je suis surpris qu'on veuille prononcer d'une manière aussi sommaire sur une affaire qui concerne les officiers municipaux et les intérêts de la ville de Toul. C'est sur une délibération de la municipalité qui refuse le crédit qu'on vous propose de décider sans examen comme sans enquête, alors que votre comité ne possède même pas un texte de ladite délibération, puisqu'elle a été refusée par la municipalité. Il n'y a pas lieu en ce moment d'examiner si la municipalité était en droit de refuser copie de ses délibérations, mais si en fait elle a refusé cette communication. Or, la chose est constante: sur quel document le comité peut-il dont justifier le décret qu'il vous a proposé? Je demande que l'affaire soit renvoyée ou à l'assemblée administrative, ou au directoire du département dans lequel la ville de Toul est située.
J'ai dans ma main deux lettres qui prouvent que la municipalité de Toul est suffisamment instruite et qu'elle n'élève de mauvaises chicanes que pour ne pas remplir ses obligations.
Je demande l'ajournement jusqu'à plus ample information.
M. le Président met l'ajournement aux voix, qui est repoussé.
Le projet de décret est ensuite adopté ainsi qu'il suit :
« L'Assemblée nationale, sur le rapport de son comité des finances, décrète que les 400 livres payées jusqu'ici par la ville de Toul au sieur de l'Epineau, commissaire des guerres, pour logement, seront encore acquittées pour les arriérés de 1788 et 1789. »
, au nom du comité des pensions, fait un compte rendu des travaux du comité et des règles générales à établir pour les pensions.
, président du comité des pensions. L'Assemblée nationale a remis à aujourd'hui le rapport du comité des pensions sur quelques objets importants.
Je vous présenterai des vues générales sur le plan de travail. Le comité a cherché à découvrir les abus; le mal était grand, il ne se le dissimulait pas; pour le guérir, il fallait en connaître toute l'étendue, quel était l'état des pensions, quelles étaient les règles- d'après lesquelles elles étaient accordées, quels étaient les abus dans cette partie; tel est le travail auquel il a dû se livrer. Il a vu des lois multipliées qu'il n'a pas craint d'étudier dans tous leur détail, parce que tout ce qui a été accordé contre les lois doit être anéanti. Il vous sera bien libre de faire des grâces, mais on n'aura pas le droit de faire des réclamations relativement aux abus; vous devez en avoir été elfrayés; il n'est pas de fraudes qu'on n'ait employées, de cabales qu'on n'ait mis en mouvement, de ressorts qu'on n'ait fait agir pour spolier le Trésor public. La même personne réunissait sur sa tête une multitude de pensions à prendre sur différentes caisses, et toujours ces grâces étaient accordées à ceux qui les méritaient le moins. De vieux militaires, qui avaient versé leur sang pour la patrie, restaient sans récompenses. Un soldat, après avoir fait prisonnier le général ennemi, reçut en récompense 200 livres de pension; un canonnier, criblé de coups au combat que livra la Belle- Poule, reçut 6 livres par mois; les intrigants et les courtisans obtenaient tout, tandis que ceux qui avaient des titres légitimes restaient dénués de toute espèce de secours. Ce n'était pas là le seul abus; une multitude de titres étaient accumulés sur la même tête, c'est ce qui fait que cette dépense monte à 30 millions, quoiqu'elle n'ait été évaluée qu'à 28 par le compte qui vous en a été rendu ; et si ont y joint les grâces et gratifications, nous trouvons une somme de 58 millions. Cette somme vous paraît bien considérable; mais vous cesserez d'être surpris, lorsque vous apprendrez que la même personne recevait une somme égale sous treize titres différents. Vous verrez, par exemple, sur l'état des pensions des personnes attachées à la reine, tant en pensions, autant en traitement, autant en bougies blanches, autant en bougies jaunes, etc. Les objets que nous avons calculés ne comprennent pas encore tous les dons et gratifications ; on avait donné des portions de contrat sur des emprunts. Rappelez-vous l'édit de création de rente à 4 et demi pour cent pour un capital de 160 millions, à l'effet de rembourser les anticipations; la vérité est que ces anticipations n'ont pas été acquittées, mais qu'on s'est servi de ce capital pour donner de l'argent à qui bon semblait. Cet emprunt se trouve aujourd'hui porté à 211 millions, et il n'est pas encore fermé. Demandez où a passé cet argent? il est impossible d'en reconnaître aucune trace. Il est encore un autre article sur lequel il ne nous a pas été possible de nous procurer des renseignements; nous savons qu'il existait des titres de prêts faits à quelques particuliers et que ces prêts n'ont pas toujours été rendus très exactement. Un particulier est débiteur de 200,000 francs, le terme de l'échéance est arrivé, il ne peut payer; il offre de donner 10,000 livres par année, sans intérêt jusqu'au remooursement total. Ce petit calcul
n'est pas tout à fait au profit du Trésor public.
Nous avons pensé qu'il était de notre devoir de connaître tous ces mystères. Le 9 mars nous écrivîmes à M. Duruet, pour lui demander ces titres ; il nous répondit qu'il allait y faire travailler. Diverses lettres ont été successivement écrites depuis cette époque, et nous avons toujours eu pour réponse que ce travail, extrêmement difficile, exigeait beaucoup de temps ; nous attendons toujours l'état que nous avons demandé. Ou cet état existe, ou il n'existe pas. S'il existe, comment est-il possible que nous n'en ayons pas eu communication ? S'il n'existe pas, peut-on bien concevoir qu'il y ait une administration où l'on ne sait pas à qui l'on a prêté ? (Plusieurs membres demandent que M. Duruet soit mandé à la barre.) Il a fallu d'abord considérer les pensions en général, et détermioer ensuite le parti à prendre pour l'avenir, par rapport aux pensions existantes. Votre comité a longtemps balancé pour savoir si les pensions seraient jugées d'après les lois actuelles, ou s'il ne serait pas plus avantageux de les anéantir toutes, pour les recréer. Nous nous sommes fait cette objection que les lois ne doivent point avoir un effet rétroactif; mais ensuite il a fallu s'armer de raideur dans l'application du principe : toute pension assignée sur un bon du ministre, toute pension assignée sur une autre caisse que le trésor royal a dû être anéantie. D'après les lois existantes, elle a dû être enregistrée à la chambre des co/nptes. En suivant ces principes, nulle ne pourrait soutenir un examen rigoureux: il faudrait décharger le Trésor public des pensions accordées pour les services rendus au roi. La liste civile doit suffire à cette dépense. Veut-on considérer l'intérêt des pensionnaires en masse ? Un examen les réduirait au-dessous de 10 millions, et ils auraient moins que ce que vous leur accorderez.
C'est ce qui nous a déterminés à proposer l'anéantissement total des pensions. Qu'on ne s'effraie pas cependant; en même temps qu'on en demandera la suppression, on vous proposera d'en créer pour 10 millions, et ceux qui les auront méritées n'auront point à soutenir le concours des gens injustement récompensés. A l'égard de ceux qui n'ont aucuns titres, il ne faut pas porter le découragement dans leurs âmes : il faut leur appliquer un fonds de 4 millions, qui subira une diminution graduelle. Une classe qui doit aussi fixer voire attention, c'est celle des vieillards. Les nations libres leur ont toujours rendu un hommage particulier ; ils n'ont pas { paru insensibles à cette belle Révolution qui vient de régénérer notre Empire ; ils ont voulu que la mort les saisît dans un costume militaire... Tous ceux qui ont bien mérité de la patrie en seront récompensés; le scandale disparaîtra, et cependant la nation indulgente secourera ceux qu'une justice trop rigoureuse aurait privés de toute espèce de secours... Il ne faut faire nulle exception à la règle générale, il ne faut accorder aucune grâce qu'après vos décrets ; autrement la réforme ne s'établirait jamais. Vous verrez que les pensions ne doivent être données qu'à raison des services et de l'âge, et proportionnellement aux appointements de ceux à qui elles ont été accordées. C'est d'après ces vues que nous aurons l'honneur de vous proposer de supprimer:
1° Les pensions existantes ou qui auraient pu être accordées depuis ;
2° De supprimer les gouvernements des provinces et des châteaux, qui n'exigent pas de
résidence: ils sont dans l'ordre militaire ce que les abbés étaient dans l'ordre ecclésiastique, c'est-à-dire qu'ils ne servent à rien. La réversibilité des pensions sur les descendants de celui auquel elles avaient été accordées nous a paru aussi devoir être supprimée. Nous proposerons une exception en faveur des octogénaires, et quatre millions en faveur de ceux qui jouissaient contre les lois; en leur accordant ces gratifications, on leur a rendu de bien mauvais services ; ils ont perdu l'habitude du travail ; des femmes se sont retirées dans des couvents, et elles périraient de faim et de misère, si vous leur refusiez des secours. Les lois n'ont pas d'effet rétroactif, et pour cela on a tiré le voile sur le passé, afin de ne plus songer qu'au présent. Je laisse à mon collègue M. Fréteau de vous faire un rapport sur les principes et sur les règles générales de cette matière, et àM. Palasne de Ghampeaux, de vous présenter un projet de décret.
(M. Fréteau et M. Palasne ne se trouvent pas dans la salle.)
, président du comité, continue :
Avant de statuer sur les pensions, il est indispensable de considérer d'abord quelle est la nature des récompenses que la nation doit accorder aux services ; il en est de deux sortes, les unes honorifiques, les àutres pécuniaires. Il serait à souhaiter que tous pussent se contenter de l'honneur, la plus belle récompense d'un homme libre. 11 est deux classes de récompenses pécuniaires : les pensions et les gratifications; de là résultent plusieurs règles relativement aux grâces accordées aux citoyens qui ont bien mérité de la patrie. Ce n'est pas pour un service rendu à un individu que quelqu'un doit être récompensé ; il faut avoir servi la chose publique pour obtenir une pension sur le Trésor public. Chacun est obligé de faire sur soi-même des retranchements pour subvenir à cette dépense ; c'est par cette raison qu'on doit en être économe, quelquefois même avare ; de sorte que le citoyen ne voie pas le fruit de ses sueurs consumé par la débauche. Nous avons pensé qu'il fallait fixer un maximum pour les pensions... En diverses circonstances, une médaille, ou toute autre marque de distinction, nous a paru une récompense suffisante ; par exemple, un officier se distingue dans une bataille, son cheval périt sous lui, la nation lui fera présent d'un cheval de bataille. A-t-il perdu son armure en combattant vigoureusement, la nation lui en donnera une. L'argent avilit l'âme et porte à faire croire que tout peut s'évaluer au prix de l'or. Si la veuve d'un brave officier est dans la misère, vous lui accorderez aussi des secours, mais sans survivance et sans réversibilité. La publicité des grâces nous a semblé également nécessaire ; elle réunit l'avantage d'instruire le peuple du nombre des bons citoyens; elle excite l'émulation. Voici le projet de décret que le comité a l'honneur de vous proposer.
M. Camus fait lecture d'un projet de décret en 26 articles. (Voyez ce projet de décret à la tin du second rapport du comité des pensions, annexé à la séance de ce jour.)
D'après ce plan, vous ménagerez tous les ans 40 millions sur les finances de l'État.
(Le discours improvisé de M. Camus reçoit de nombreuses marques d'assentiment).
Les trois rapports dont je viens de
vous présenter une courte analyse ont été adoptés par votre comité dans ses séances des 17 juin dernier et 1er juillet.
L'Assemblée ordonne l'impression et la distribution de ces rapports. ( Voy. ces pièces annexées à la séance de ce jour).
Le comité militaire est tout prêt à vous faire un rapport sur les récompenses à accorder aux militaires qui auront bien mérité de la patrie. Je vous supplie de l'entendre avant de fixer votre opinion sur les rapports déposés par M. Camus.
Le comité de la marine se trouve dans la même situation que le comité militaire et vous demande d'entendre son rapport afin de concerter des dispositions communes avec le comité des pensions.
, président du comité des pensions. Le comité dont j'ai été l'organe, s'est borné aujourd'hui à des principes généraux. Les comités militaire et de la marine ne pourront donc présenter leur travail d'une façon utile que lors de l'établissement des règles particulières pour les diverses catégories de pensions.
M. Félix de Ifimpffen, membre de comités des pensions et militaire demande la parole pour un rapport sur les pensions des officiers.
prend le vœu de l'Assemblée qui décide que le rapport sera entendu.
, rapporteur (1). Messieurs, je'suis chargé de vous présenter un projet de loi pour régler les récompenses que méritent des citoyens, qui, en se dévouant entièrement à la défense dè la patrie, se soumettent aux privations les plus sensibles, s'éloignent des objets les plus chèrs, se séparent de toutes les douceurs de la vie pour se porter là où l'intérêt de la société les envoie, et qui font profession de braver les périls, ia douleur et la mort partout où la chose publique en danger appelle leur courage et leurs talents à son secours; mais je dois vous observer, Messieurs, qu'il résulte des devoirs de cet état, qu'un pensionnaire militaire ne peut être assimilé à aucun autre, qu'autant qu'on lui tiendra compte des misères et des souffrances, compagnes inséparables de la guerre, et des changements continuels de climats et de régime, qui altèrent les tempéraments les plus vigoureux, et attaquent tellement la santé du soldat, qu il est pour liii .des jours qu'on pourrait évaluer à des années d'une vie paisible.
Mais avant de vous exposer ce projet de loi, qu'il me soit permis, Messieurs, de déclarer que je pense, avec vous, que l'état de défenseur de Ja patrie est une trop belle condition, pour ne voir que du métal dans ce que la société doit aux pensionnaires, compris dans la section de travail qui m'est tombée en partage.
Je crois que, dans un gouvernement libre, l'estime de la nation est la première, comme la plus flatteuse récompense que recherche quiconque est digne d'y porter le titre de citoyen.
Une pension doit, à la vérité, être suffisante pour fournir aux besoins physiques et à
l'exis-
Plus la nature des services rendus à une société est héroïque ou sublime, moins cette société peut les récompenser avec de l'or; car, s'il était même possible que la nation pût payer au militaire le prix des siens, je démande où sont les trésors qui suffiraient pour nous acquitter envers ces génies philosophes, dont les écrits forment le fleuve de lumières par lequel nous sommes arrivés aux jours de la liberté, en franchissant des siècles d'esclavage l
Je ne vous fatiguerai point, Messieurs, de tous les ennuyeux calculs qu'il m'a fallu faire pour découvrir une base d'où je pus partir.
Peut être eût-il été nécessaire de commencer par fixer votre attention sur l'état actuel des pensions militaires, et vous montrer l'état de passage qui doit nous conduire à l'état permanent que nous avons à vous proposer, et qui est l'objet de ce rapport.
Mais peut être aussi vous suffira-t-il, en ce moment, d'être prévenus que les sommes qui seront déterminées par le projet de décret que nous avons à vous proposer n'arriveront à leur terme que par les extinctions successives dont il sera parlé, lorsqu'il vous plaira de m'ordonner de vous faire le rapport de l'état actuel et de l'état de passage.
Ne devant cependant pas soumettre à vos délibérations un travail en finance, sans vous dire sur quoi il est appuyé, il ne dépend pas (Je moi de vous épargner entièrement l'ennui attaché à l'exposition des détails d'une matière sèche de sa nature.
Je vous dirai donc que les recherches et les observations que j'ai laites, les contrôles et les registres que j'ai compulsés, m'ont appris :
1° Qu'il mourait, année commune, un vingt-troisième des sous-officiers et soldats retirés; et un vingt-six à un vingt-septième des officiers retirés ;
2° Qu'il disparaît, année commune^ dessus les contrôles de l'armée, part mort, désertion, ou congés absolus, un douzième des soldats; pt dessus le tableau de l'armée, par démission ou par mort, un soixantième des officiers de tous grades qui sont en position de mériter (es grâces dont il s'agit.
L'amélioration du sort de l'armée y diminuera immanquablement la mutation, que j'estime ne dévoir plus monter, quant aux soldats, qu'à un vingtième ; et rester la même, quant aux officiers.
Le fonds de l'armée, présumée de cent quarante mille hommes, non compris les officiers, devrait, d'après le calcul de la mutation du vingtième, se trouver reqpuvelé tous les vingt ans, et il ne devrait jamais s'y rencontrer de soldats à pensionner.
Mais mes recherches, d'accord avec l'expérience que j'avais déjà, démontrent que la mutation est forte dans la queue de l'armée, et faible dans la tête, c'est-à-dire qu'elle roule aux cinq septièmes sur les soldats qui n'ont pas plus de vingt ans de service, et qu'elle diminue eut proportion de leur ancienneté.
De sorte qu'on peut supposer, avec fondement, d'après le principe du compte à tenir des campagnes de guerre, des embarquements et des garnisons hors de l'Europe, que dorénavant il se trouvera toujours, dans l'armée, dix mille hommes
qui auront depuis trente ans jusqu'à cinquante années de service; trente mille qui en auront depuis seize jusqu'à tren te ; et cent mille qui en auront seize et au-dessous.
Nous sommes également fondés à supposer que sept à huit cents vétérans prendront leur retraite tous les ans, qui, obtenant l'un dans l'autre 300 liv. de pension, nécessitent annuellement une somme disponible de 225,000 livres.
La mortalité parmi ces pensionnaires est d'un vingt-deux à un vingt-troisième. Multipliant donc par vingt-trois la somme disponible, nous trouvons qu'il doit être affecté à ces pensions un fonds de 5,175,000 livres.
Le nombre des officiers de tous grades, susceptibles de mériter des pensions de retraite, est d'environ neuf mille.
La mutation étant chez eux d'un soixantième, et le soixantième de neuf mille étant cent cinquante, il s'efface, année commune, cent cinquante officiers sur le tableau 4e l'armée; ce qui donne, en trente ans, quatre mille cinq cents officiers qui ont disparu sans retraite.
En reste donc quatre mille cinq cents qui prennent leur retraite dans 1e cours de trente ans. Ge qui donne cent cinquante officiers à pensionner tous les ans.
Evaluant les retraites, l'une dans l'autre, à 1,500 liv., il faut que les extinctions nous fournissent tous les ans iine somme disponible de 225,000 livres.
Or, les extinctions sont, comme pous l'avons dit, d'un vingt-six à un vingt-septième.
Multipliant donc 225,000 par vingt-sept, il résulte qu'il doit être affecté aux pensions des offlcjers qe tous grades un fonds de 6,075,000 liv.
J'ignore par quel capripe la mort, qui d'ordinaire se rit de nos distinctions politiques, semble cependant s'y être associée pour ménager MM. les officiers généraux, dont la mutation ne passe pas le trente-troisième.
Par suite de temps, ce corps, aujourd'hui si nombreux, ne devra plus être composé que d'officiers généraux en activité et d'officiers généraux retirés.
Ainsi, après que vous aurez réglé le sprt de ceux qui existent actuellement, qui se partagent une sotpme de 9,771,600 livres 10 sols, et sur laquelle je vous proposerai de faire une économie de six millions, il suffira d'affecter un fonds annuel de 500,000 liv. aux retraites des officiers généraux, lorsqu'ils se trouveront réduits au nombre nécessaire pour le service de l'armée.
Le comité a cru qu'aucune pension de retraite ne devait être accordée qu'après trente-cioq années de services; et que tenant compte des embarquements, des garnisons hors de l'Europe, et des campagnes de guerre, il fallait exiger que des trente-cinq années il y en eût au moins trente d'effectives. De sorte que ce ne serait qu'après trepte années de services effectives qu'un militaire serait admis à compter ses embarquements, ses garnisons hors de l'Europe, et ses campagnes de guerre, à raisqfl (de six mois en sus pour chaque année d'embarquement pu de garnison hors dê l'Europe, et d'une année en sus pour chaque campagne de guerre.
Connaissant, Messieurs, vos principes et vo3 sentiments, le comité a porté une attention particulière sur celui qui est chargé du plus pesant fardeau de ia guerre, sur celui que tant de gens élevés en grade, n'opt, jusqu'à ce jôpr, considéré gue sous le rapport de leur ambition person-
nelle ; sur le soldat enfin, et sur ceux des officiers parvenus par ce grade. C'est du soldat, en un mot, que votre comité s'est le plus essentiellement occupé, c'est pour lui seul qu'il vous propose une exception fondée sur ses besoins, fondée sur la justice, et encore sur votre désir de manifester à l'armée l'estime et la reconnaissance que mérite sa conduite patriotique.
Votre comité a jugé qu'à la première époque où un soldat avait mérité de se reposer, il devait jouir de sa solde entière, dopt la modicité n'est pas au-dessus des besoins de première nécessité ; et que, si ses facultés et sa volonté le retenaient plus longtemps sous les drapeaux, il fallait ajouter à cette solde la portion de la masse générale affectée à son habillement, et le total des masses de l'hôpital, de bois, lumière et lits militaires.
Le total de ces masses, divisé en quinze par ties égales, formeront un supplément, dont il touchera autant de parties qu'il aura servi d'années au delà de trente-cioq.
Le comité a modifié ce principe proportionné-ment aux hautes-payes des sous-officiers et caporaux, et aux appointements des sous-lieutenants, lieutenants et capitaines des dernières classes, qui, après trente-cinq ans de services, ne peuvent encore se trouver aussi reculés que parce qu'ils ont débuté par le grade de soldat.
11 ajoute, auprès des sous-officiers et caporaux, la moitié de leur haute-paye; l'autre moitié de leur haute-paye est portée aux masses pour former les quinze parties de supplément.
A l'égard des sous-lieutenants et lieutenants, il leur laisse la moitié de leurs appointements après trente-cinq années de services, et l'autre moitié esj; divisée en quinze parties pour le supplément.
Quant aux capitaines, il a fixé le maximum de ce grade à 2,400 livres pour toutes les classes de capitaines, par le motif exposé ci-dessus. Ainsi, tout capitaine qui se retirera après trente-cinq ans 4e services recevra dope, non pas la moitié de ses appointements, mais seulement les deux cinquièmes ; les trois autres cinquièmes, divisés en quinze parties, forment le supplément de ce grade.
Cette règle des deux cinquièmes pour principal, et des trois autres cinquièmes en supplément, est commune à tous les grades subséquents.
Si l'on demandait maintenant pourquoi le comité militaire a reculé de cinq ans l'époque proposée par le comité des pensions, sur la sévérité duquel il paraissait (difficile de renchérir, nous répondrions que c'est parce qu'on tient compte au militaire d'une nature de services qui lui est particulière; que cette faveur compense la sévérité, et que c'est ainsi que combine la justice.
Partant des principes qui viennent de vous être exposés, le comité a l'honneur de vous soumettre le projet de décret suivant :
projet UE décret.
Le juste dédommagement que méritent les citoyens qui ont couru la carrière des armes, ne devant jamais être soumis à une estime arbitraire, et considérant, d'une part, les années qui, en s'accumulant, minent en silence les forces et les facultés de l'homme, et, d'autre part, les misères et les fatigues de la guerre, qui doublent l'action du temps, et voulant compenser les unes par les autres, l'Assemblée nationale décrète ce qui suit :
Art. 1er. Aucun militaire ne pourra obtenir de pension de
retraite qu'après trente-cinq années de services, dont au moins trente d'effectives, et dans
des grades actifs, auxquels sont attachés des fonctions nécessaires.
Art. 2. Sunt exceptés de cette règle ceux qui, dans l'exercice de leurs fonctions, auraient reçu des blessures ou contracté des infirmités qui les mettraient hors d'état de continuer à servir.
Art. 3. La plus forte pension dont un militaire sera susceptible ne pourra lui être accordée qu'après cinquante années de services.
Mais chaque année d'embarquement, chaque année de garnison hors de l'Europe, en temps de paix, comptera pour dix-huit mois de service ordinaire, et chaque campagne de guerre, n'importe dans quel grade et en quel lieu, équivaudra a deux années de service ordinaire.
Art. 4. Tout cavalier : dragon, hussard, grenadier, chasseur, soldat, qui voudra se retirer à l'époque déterminée par l'article 1er, recevra sa solde entière, y compris les masses de boulangerie, de linge et chaussure.
Il sera formé, en outre, un total des différentes» masses affectées à son entretien, savoir : 14 livres de la masse générale pour son habillement, 15 livres de la masse des hôpitaux, 9 livres de la masse de bois et lumière, et enfin 6 livres pour son lit} lequel total sera divisé en quinze parties égales, dont il en recevra autant qu il aura servi d'années au delà de l'époque à laquelle il était déjà le maître de se retirer. * Les sous-officiers, brigadiers et caporaux recevront également la solde ordinaire, et ensuite la moitié de la haute-paye de leur grade; l'autre moitié sera fondue dans les masses désign es ci-dessus, pour former le supplément à raison des années qu'ils auront servi au delà de trente-cinq.
Art. 5. Les sous-lieutenants et lieutenants recevront la moitié des appointements de leur grade, l'autre moitié formera le supplément.
Art. 6. 11 n'y aura qu'une Classe de capitaines pour les retraites, et le maximum de la retraite de ce grade est fixé à 2,400 livres, dont celui qui se retirera recevra les deux cinquièmes, faisant 960 livres; les trois autres cinquièmes formeront le supplément.
Art. 7. Il n'y aura également qu'une classe de lieutenants-colonels pour les retraites, et le maximum delà retraite de ce grade est fixé à 4,000 livres, dont celui qui se retirera recevra les deux cinquièmes, faisant 1,600 livres, les trois autres cinquièmes formeront le supplément.
Art. 8. La même règle aura lieu pour tous les grades supérieurs, et ies retraites de ces grades sont fixées ainsi qu'il suit :
Colonel........................ 6,000 liv.
Maréchal de camp.............. 8,000
Lieutenant général........'..........12,000
Maréchal dé France..........................24,000
Art. 9. Il sera affecté aux retraites des officiers de tous grades, jusqu'au colonel inclusivement, une somme de 6 millions.
Quant à la somme qui pourra être allouée aux ofticiers généraux, actuellement existants, elle sera réduite par les extinctions successives jusqu'à 500,000 livres, reconnue suffisante pour fournir aux retraites des officiers généraux, lorsque leur nombre n'excédera plus celui qu'exige ie service de l'armée.
Maintenant, Messieurs, nous devons vous soumettre les moyens d'arriver au nouvel ordre que nous vous avons proposé d'établir.
Pour y procéder avec méthode, il faut mettre sous vos yeux l'état actuel des choses.
Mais si le sujet des pensions en général fournit abondamment à la satyre, si la malignité humaine trouve à s'y repaître avec une espèce de justice, il offre aussi un intérêt aux sentiments les plus dignes de vous, quand il se présente sous l'image de ces guerriers qui ont enduré la misère des camps, couru les hasards des combats, et versé leur sang, pour, en repoussant les enbemis loin des frontières, maintenir la paix dans l'intérieur du royaume, et vous conserver dans vos paisibles jouissances.
Parmi les dépenses extraordinaires du département de la guerre, se trouve un article de 5 millions affectés aux invalides, tant de l'hôtel que des compagnies détachées, et aux soldes et demi-soldes des sous-officiers et soldats retirés.
Je crois avoir prouvé que 5,175,000 livres suffiraient pour les retraites des sous-ofticiers et soldats, en les traitant mieux qu'ils ne l'ont été jusqu'à présent. Mais comme, dans de semblables calculs, la parfaite exactitude est impossible, parce qu'ils sont mêlés de probabilités, nous partirons des 5 millions dont nous venons de parler, pour proposer d'allouer un million aux invalides, qu'on tirerait de Paris pour les établir dans une province qui leur conviendrait mieux que la capitale, où les plaça un monarque fastueux.
Ajoutons à l'économie qui résulterait de cette translation celle qui naîtrait de la défense d'admettre à l'hôtel d'autres vétérans que des mutilés et des septuagénaires.
Si ce projet était adopté, la caisse du département de la guerre verserait 4 millions dans celle des pensions, et le ministre de ce département ne serait alors plus comptable que du cinquième million affecté aux invalides.
Alors aussi le fonds des 5 millions affecté aux retraites pour les sous-officiers et soldats serait réduit à 4 millions, puisque l'hôtel des invalides entrerait pour un cinquième dans cette dépense générale.
L'on m'objectera peut-être que l'entretien deà compagnies détachées exige un autre fonds de 12 à 15 cent mille francs.
Cependant l'on aurait de la peine à démontrer la nécessité de ces compagnies détachées, et que les châteaux et les forts qu'elles occupent ne peuvent être gardés par les troupes des garnisons voisines ; si même ces forts et ces châteaux ne jouissent pas déjà depuis des siècles d'une existence abusive et ouéreuse.
Mais M. Dubois de Crancé étant chargé de vous faire un rapport sur cet objet, je n'étendrai pas plus loin mes réflexions.
1er
Les pensions des officiers de tous grades, y compris les brigadiers des armées du roi, dont le grade est supprimé, montent à 6,162,061 livres.
Le grand nombre des pensionnaires, qui partagent cette somme, ne permet pas de faire sur eux un travail individ uel ; et si cette impossibilité inspire du regret, il ne vient pas des abus dont cette classe a été favorisée, où l'on ne trouve que des officiers supérieurs qu'on pourrait soupçonner de n'avoir pas restés inconnus à la cour.
Mais en réduisant la plus forte de ces pensions à 3,000 livres, l'on couperait les abus d'un seul trait, et il en résulterait un bénéfice de 995,557 liv.
Reste donc à payer, pour les pensions des officiers de tous granes, 5,166,504 liv.
Car ce ne serait qu'avec la douleur la plus vive que je verrais supprimer, ou seulement diminuer les pensions des officiers particuliers, actuellement encore en activité, et qu'ils n'ont obte-tenues qu'à litre de talents distingués, ou d'un zèle extraordinaire, on de blessures, ou de services remarquables à la guerre ; et quelques-uns, mais un très petit nombre, pour les services de leurs pères qui ont marqué dans l'armée.
§2.
Ici, Messieurs, commence le scandale. C'est des pensions de MM. les officiers généraux que je vais parler.
Cependant, pour être juste sans cruauté, nous ne devons pas confondre les temps passés avec les temps à venir ; les principes et les mœurs d'une nation libre avec les préjugés et les usages d'une nation esclave. Nous ne devons pas dispenser le blâme et le mépris, abstraction faite d'un gouvernement qui forçait, pour ainsi dire, certaines personnes à être telles que nous les avons trouvées. C'est à ce gouvernement qu'il faut attribuer ce qu'on reproche, avec trop d'amertume, à ces personnes entraînées parle torrent des opinions d'alors, vers la source de la considération que procurait la richesse et la faveur, lorsqu'on n'en connaissait guère d'autre.
MM. les maréchaux de France» lieutenants généraux, et maréchaux de camp, touchent ensemble, tant en pension sur le trésor royal et l'ordre de Saint-Louis, qu'en traitements conservés et gouvernements, une somme de 9,771,600 livres 10 sols.
Une somme aussi considérable, répartie entre 11 maréchaux de France, 202 lieutenants généraux, et 644 maréchaux de camp (1), pour ne rien faire, ferait penser qu'il étouffent sous les lauriers, si l'on ignorait que ce n'est pas seulement avec des lauriers que de nos militaires ont su fixer l'attention de la fortune.
Oui, si l'on ne rencontrait, parmi ceux qui sont traités avec munificence, que des noms qui ont illustré nos armes, les noms des héros de Ber-gues, de Corbach, de Sondershaussem, Closter-camp ; si l'on n'y voyait que de ces généraux dont les succès, en Amérique, ont avancé les beaux jours qui suivront notre Révolution, et de ces vieux maréchaux de France criblés de blessures, mutilés, et que vous saurez sûrement distinguer , la pensée s'arrêterait avec satisfaction sur cette liste, qui ne réveillerait que de glorieux souvenirs, chers à l'estime et à la reconnaissance.
Après avoir parlé de nos plus illustres généraux, je dois recommander à votre attention ceux qui ont conquis leurs grades par plus de trente années de services, par plusieurs guerres, et huit, dix, douze campagnes.
Ces officiers généraux, dits de fortune, ont tous, ou presque tous, passé par le grade de
lieutenant-colonel, soit qu'ils l'aient exercé à la tête d'un régiment, soit qu'ils en aient
obtenu le brevet pour des services distinguésà la guerre.
Ces officiers généraux, qui he forment pas, à beaucoup près, le plus grand nombre, ne jouissent pas chacun, l'un dans l'autre, de plus de cinq mille livres en pensions ou traitemenes conservés; et ce n'est qu'à la moitié de leurs appointements qu*ont été tarifés, par l'ordonnance de 1780, les colonels des régiments étrangers qui seraient promus au grade de maréchal de camp, et qui, jusqu'à l'époque de cette ordonnance, conservaient, quoique maréchaux de camp, le commandement de leur régiment, auquel ils n'étaient parvenus que par des services actifs et non interrompus.
C'est à vous, Messieurs, à décider si ce qui a été accordé aux uns par la loi, et aux autres par un usage qui avait force de loi, doit être confondu avec ce qui a été distribué arbitrairement, pour, en ne prenant que le grade pour base, faire à tous un sort uniforme.
La classe la plus nombreuse et la mieux traitée est composée de ceux que leur naissance portait de droit et de fait aux honneurs et à la fortune, et qui n'a pas moins fourni des généraux dont la nation se glorifie, et qui peuvent, en quelque sorte, la consoler des préférences remportées par les gens de la cour sur des hommes de mérite qui n'en étaient point.
Combien de fois l'armée n'a-t-elle pas vu préférer aux officiers les plus expérimentés des jeunes gens qui, n'ayant pas encore usé les souliers de l'école, apparaissaient à la tête des brigades et des divisions, avec les mêmes idées qui avaient fait le tourment de leur régiment ? Si donc aujourd'hui ces préférences étaient encore un titre pour être mieux traités, vous suivriez, au pied de la lettre, les errements de la cour, où une grâce obtenue devenait un argument victorieux contre l'opposition qu'éprouvait une nouvelle demande.
L'on demandait d'abord d'être employé. Ensuite une inspection, parce qu'on avait été employé. Bientôt un gouvernement, parce qu'on était inspecteur ; et puis une décoration honorifique et lucrative, parce qu'on était gouverneur, Et « de parce que en parce que», l'on arrivait à des soixante mille livres de bienfaits du roi pour des hauts faits de l'esplanade et d'autres services équivalents ; tandis que l'officier général, parvenu à travers le feu de la guerre, était au rebut, végétait avec quatre ou cinq mille francs, sans doute suffisants à ses besoins réels, mais qui l'humiliaient par la comparaison.
Mais le moyen de réparer ces injustices ! Gomment distinguer le fruit de l'intrigue d'avec celui des services rendus à la patrie ? Gomment sortir de ce dédale ? Le voici, ce me semble :
1° Respecter toute pension obtenue pendant la guerre, à titre de blessures ou de services distingués à la guerre, pourvu qu'elle ne passât pas mille écus; si elle était au-desssus, elle serait réduite à cette somme ; à moins que l'officier général n'eût commandé une armée en chef ; en ce cas, elle pourrait être du double; et jamais une semblable pension ne serait suspendue ou précomptée ;
2° Déclarer que la nation ne voulant dorénavant payer que ceux qui la servent actuellement, et ceux qui, I ayant servie, ont mériié de se reposer; elle ne reconnaît que des officiers généraux en activité et des officiers généraux retirés.
Qu'en conséquence, ceux des officiers généraux actuellement pensionnés, et qui voudraient renoncer à entrer en activité, présenteraient les titres de leurs services au minisire du département dè la guerre, qui, après vérification faite, leur expédierait leur brevet de pension de retraite, conformément à ce qui a été réglé par le tarif et lé décret concernant les retraites militaires, sans autre addition que celle exprimée ci-dessus, relativement aux pensions accordées à titre de blessures ou de services distingués à la guerre, et obtenues pendant la guerre.
La dépense de ce dernier objet ne doit pas monter à plus de 300,000 livres, et j'évalue les retraites qui pourraient être demandées et accordées à 3,400,000 livres; ce qui réduirait les 9,771,600 livres 10 s., que se partagent MM. les les officiers généraux, à 3,700,000, et donnerait un bénéfice actuel de 6,071,600 livres 10 s.
Mais nous vous prierons. Messieurs, de laisser 400,000 livres à la disposition du roi, afin de le mettre à même de remplir les engagements que lui et le roi son prédécesseur ont pris, engagements que nous ne pouvons rompre sans affliger le prince que nous chérissons.
Si l'amour que vous portez à ce roi, et les sentiments de justice et d'humanité qui dictent vos oracles pouvaient cesser un instant de parler à vos cœurs, je me permettrai de vous rappeler, Messieurs, que la nature, imperturbable dans ses principes, toujours immuable dans sa marche, au moral comme au physique, punit les excès en tous genres; et que celui qui veut pouvoir beaucoup et longtemps, doit, être ménagé de ses forces, et n'en user qu'avec discrétion.
Les engagements dont je parle sont de différentes espèces. Le roi a pris des engagements avec certains colonels-propriétaires qui doivent être dédommagés des pertes que leur occasionne le nouveau régime que vous établissez.
Le roi doit remplir, envers d'autre3 étrangers, les conditions exprimées par ses ordonnances, et qui ont été le gage de leur entrée à notre service. . Ni le roi, ni vous, Messieurs, ne pouvez abandonner les descendants du maréchal de Lowen-dal. Ce maréchal n'est pas arrivé chez nous en aventurier. Il était au service de Russie ; il était général en chef, gouverneur d'une province, grand-maître de l'artillerie, Colonel-propriétaire d'un régiment de cuirassiers, son nom était déjà célèbre dans toute l'Europe, particulièrement par la conquête de la Finlande, quand Louis XV l'attira en France, le mit à la tête d'une armée avec laquelle il prit Gand, Oudenarde, Qstende, Ni eu-port et soh château, l'Ecluse, le Sas de Gand, Isendich, PhiJippine, Mastrich. et enfin l'imprenable Berg-op-zoom; victoire dont l'éclat semble avoir éclipsé celui de toutes ses précédentes conquêtes et qui a réellement lié les noms de Lo-wendal et de Berg-op-zoom, qu'ils sont devenus inséparable à la pensée.
Ce grand homme, en quittant tout pour s'attacher à la France, n'a pas vécu assez longtemps Pour jouir de ce qu'elle eût fait pour lui. Mais il a laissé trois enfants et neuf petits-enfants, que les lois de rigueur sur les pensions réduiraient à ïâ mendicité, si vous rejetiez ma proposition d'accorder à chacun des enfants une somme de 200,000 livres, faisant un total de 600.000 livres, qui vbus acquittera de ce que la nation doit à la postérité de ce grand honime.
Il est encorë de mon devoir, Messieurs, de vous Rendre compte que l'impératrice, par excellence, cette souveraine du Nord, dont les institutions
marquées au coin dji plus sublime génie, me paraissent avoir toutés .poUr but de sevrer sa nation de l'esclavage; que l'impératrice des Russies, enfin, a chargé M. le baron de Grimme de demander la conservation d'une pension de 5,500 livres, accordée à M. et Mm0 du Roux, en faveur de leur mariage, lors de notre traité de commerce avec la Russie. Les mariés ont été dotés, delà part de l'impératrice, par 60,000 livres; de la part du roi, par ia pension dont il s'agit.
Ce n'est que d'après la connaissance de ces faits et d'autres trop longs à rapporter que nous avons osé vous proposer d'allouer au roi une somme annuelle, pour satisfaire à ces différentes obligations, sans déroger par des exceptions aux lois générales que vous aurez décrétées.
Cependant, en songeant combien le sentiment de la perte est plus vif que celui delà jouissance, et à la manière* dont se sont faites les promotions sous l'ancien régime, votre humanité ne vous permettra pas de dépouiller entièrement nombre d'officiers généraux qui n'ont pas acquis les titres exigés par Je décret précédent, et vous vous déterminerez peut-être, Messieurs, pour un parti plus doux qu'il me reste à vous proposer.
Ce serait de décréter qué, quelle que soit la somme dont chaque officier général jouit actuellement, en pension, en traitements conservés, ou en gouvernement, elle sera réduite, savoir :
Pour le maréchal de camp, à .... 4,000 liv.
Pour le lieutenant général, à....* 6,000
Pour le maréchal de France, à... 24,000
Et par les relevés que j'ai faits, il se trouve que cette opération serait d'une économie égale à la première.
J'ajouterai même que, ne connaissant pas positivement les services de chaque officier général, la première opération est fondée sur une approximation dont je ne saurais garantir la justesse, aU lieu qUe lâ dernière l'est sur un relevé exact.
Dans la supposition que vous ne me trouverez ni trop sévère, ni trop généreux, je dis :
Le corps de3 officiers généraux coûte..,
9,771,600 liv. 10 sols.
Il ne coûtera plué que 3,713,364
Le bénéfice est dortc dë 6,058,236 10
Ajoutant à ce bénéfice les 995,557 livres, provenant de l'opération faite sur les pensions des officiers de tous grades, vous trouverez un bénéfice de 7,053,793 livres 10 sols sur les pensions militaires; personne n'aura de superflu, mais aussi personne ne sera réduit au désespoir.
Je vous observerai de plus, Messieurs, qu'il y aura encore un bénéfice éventuel de 3,213,364 livres 10 sols, lorsque le nombre d'officiers généraux sera réduit au terme convenable; et que je suis même autorisé à vous prévenir que le ministre de la guerre doit vous présenter un projet de retraite, par lequel cette énorme masse de pensions de plus de vingt millions (1) se réduira à sept, en faisant un sort magnifique à tous ceux qui auront bien servi. Ce projet est actuellement à l'Académie des sciences, et les nouvelles qu'on en a sont des plus satisfaisantes.
Je passe au projet de décret.
PROJET DE DÉCRET.
L'Assemblée nationale, constamment occupée
Art. 1er. La plus forte pension des officiers de tous grades, jusqu'à et y compris les brigadiers des armées du roi, sera réduite à 3,000 livres et ces pensions leur seront dorénavant payées sans retenue quelconque.
Art. 2. Quelles que soient les pensions dont jouissent actuellement MM. les maréchaux de France, lieutenants généraux et maréchaux de camp, tant en pensions sur le Trésor royal et l'ordre de Saint-Louis, qu'en traitements conservés ou gouvernements, elles seront réduites, savoir :
Pour le maréchal de France, à ... 24,000 liv.
le lieutenant général, à..... 6,000
le maréchal de camp, à..,.. 4,000
Art. 3. il sera néâb moins conservé en sus du tarif ci-dessus énoncé, à ceux des officiers de tous grades, maréchaux de camp, lieutenants généraux et maréchaux de France, qui auraient obtenu des pensions pour raison de blessures ou services distingués à la guerre, savoir :
A l'officier de tout grade...... 1,000 livres.
Au maréchal de camp..................2,000
Au lieutenant général....... ;. 3,000
Au maréchal de France ............6,000
Mais, pour jouir de cétte addition de pension, il devra être constaté qu'ils l'ont obtenue pendant la durée de la guerre, ou au moins dans la même année où la paix a été signée.
Art. 4. La masse des pensions allouées aux officiers généraux devant être réduite successivement à lâ somme de 500,000 livres, il ne pourra être disposé des extinctions annuelles que jusqu'à la concurrence de 20,000 livres.
Art. 5. Il sera en outre alloué au roi une somme annuelle de 400,000 livres, dont Sa Majesté disposera pour remplir des engagements qu'elle a pris, et pour dédommager des officiers généraux qui auraient éprouvé des réductions trop sensibles.
Les extinctions provenant de cette somme allouée au roi seront au bénéfice de ia nation, et il ne pourra en être disposé.
Conclusion.
L'on trouvera petit-être extraordinaire que j'aie réduit les retraites des officiers généraux à la moitié du tarif proposé pour l'avenir.
Voici ma réponse :
Jadis, la récompense des officiers généraux consistait en commanderies de l'ordre de Saint-Louis et en gouvernements, mais jadis nous avions infiniment moins d'officiers généraux.
J'ai donc cru devoir borner la somme à partager entre eux à la somme ci-devant affectée aux commanderies et aux gouvernements, qu'on peut comparer aux bénéfices sans charges d'âme, que nous avons également abolis i
Si, par la nouvelle et plus égale répartition que je fais des revenus de ces bénéfices, nous sommes un peu moins bien traités que MM. les bénéficiers ecclésiastiques, nous nous consolerons par la pensée que la patrie fait pour nous ceqtiésa situation lui permet.
Plusieurs membres demandent la fixation d'uhe
date pour la discussion des projets dé décret qui viennent d'être présentés, tant par M. Camus que par M. de Wimpffen.
L'Assemblée renvoie la discussion à vendredi prochain.
t annonce qtie l'ordre du jour est la suite de la discussion du projet concernant les fondations et patronages laïques.
, rapporteur. Conformément à votre délibération d'hier, le comité ecclésiastique s'est rassemblé pour présenter une nouvelle rédaction d'articles. M. Camus a eu la bonté de s'y rendre, et à la suite d'une discussion prolongée fort avant dans la nuit, les articles suivants ont été arrêtés :
« Art. ler. Tous bénéfices à patronage laïc sont soumis à
toutes les dispositions des décrets concernant les bénéfices de pleine collation ou
patronages ecclésiastiques.
«Art. 2. Sont pareillement compris auxdites dispositions les titres de fondation de pleine collation laïcale, excepté les chapelles actuellement desservies dans l'enceinte des maisons particulières, par un chapelain, à la seule disposition des propriétaires.
«Art. 3. Le contenu des articles précédents aura lieu, nonobstant toute clause, même de réversion apposée dans les actes de fondation.
« Art. 4. Les fondations de messe et autres services, acquittés présentement dans les églises paroissiales, par les prêtres qui y sont attachés et qui ne sont point pourvus en titre de bénéfice, continueront provisoirement à être acquittés et payés comme par le passé ; sans néanmoins que dans les églises où il est établi des sociétés de prêtres, pour l'acquit,des fondations, sous le titre de familiers ou autres, ceux d'entre eux qui viendraient à mourir ou à se retirer puissent être remplacés.
Art. 5. Les fondations faites pour subvenir à l'éducation des pauvres et des parents de fondateurs continueront d'être exécutées, conformément aux dispositions écrites dans le titre des fondations ; et à l'égard d'autres fondations pieuses, les parties intéressées présenteront leurs mémoires aux assemblées de département, pour, sur leur avis et celui de l'évêque diocésain, être statué par le Corps législatif sur leur conservation ou leur remplacements »
(L'article 1er est mis à la délibération.)
Je demande une exception en faveur des fondateurs vivants, qui doivent être autorisés à rentrer dans leurs biens, attendu que leurs intentions n'étant pas développées par eux-mêmes, l'Assemblée ne peut pas les interpréter comme ceux des fondateurs décédés.
Je propose d'étendre à l'article lep l'exception portée en l'article 2.
On demande la question préalable uur ces deux amendements. Elle est prononcée.
L'article est ensuite mis aux voix et adopté en ces termes :
« Art. 1er. Tous bénéfices en patronage laïque sont soumis à toutes les dispositions des décrets concernant les bénéfices de pleine collation OU de patronage ecclésiastique. »
, rapporteur, relit l'article 2.
Oa confond trop ce qui appartient au culte public et ce qui tient aux fondations particulières et, sous ce rapport, je remarque dans le travail de M. Durand de Mail-lanedes principes contraires à toutes les idées de justice qui ont été établies jusqu'à présent. Je demande la question préalable sur l'article 2.
Au lieu de un chapelain, il faut dire des chapelains, s'il en existe plusieurs, et ne pas le3 réduire à un seul parce que le motif de conservation est le même pour tous. J'observe encore que la collation laïcale ne peut pas être considérée comme appartenant à l'Eglise, ni par conséquent à la nation.
(On demande la question préalable.)
Je demande la division en vous faisant remarquer que, dans votre dernière séance, le comité a lui-même excepté certaines fondations.
(La division est refusée et la question préalable adoptée.)
Je propose d'ajouter à la suite du mot chapelain ceux-ci et tous dessellants.
Cet amendement est juste, aussi je modifie la rédaction de l'article qui serait ainsi conçue : chapelain ou desservant.
L'article 2 ainsi amendé est mis aux voix et adopté en ces termes :
« Art. 2. Sont pareillement compris auxdites dispositions tous titres et fondations de pleine collation laïcale, excepté les chapelles actuellement desservies dans l'enceinte des maisons particulières, par un chapelain ou desservant, à la seule disposition du propriétaire. »
, rapporteur, donne lecture de l'article 3. Il est adopté sans contestation ainsi qu'il suit :
« Art. 3. Le contenu dans les articles précédents aura lieu, nonobstant toutes clauses, même de réversion, apposées dans les actes de fondation ».
lit l'article 4.
Plusieurs membres (du côté droit) : Aux voix, aux voix 1
J'ai un amendement à proposer. C'est d'ajouter dans l'article le mot: curés.
Cette addition est acceptée et l'article est ainsi décrété :
« Art. 4. Les fondations de messes et autres services, acquittés présentement dans les églises paroissiales, par les curés et par les prêtres qui y sont attachés sans être pourvus de leurs places en titre perpétuel de bénéfice, continueront provisoirement à être acquittés et payés comme par le passé; sans néanmoins que dans les églises où il est établi des sociétés de prêtres non pourvus en titre perpétuel de bénéfice, et connus sous les divers noms de filleuls, agrégés, familiers, communalistes, mi-partistes, chapelains, ou autres, ceux d'entre eux qui viendront à mourir ou à se retirer, puissent être remplacés ».
, rapporteur, donne lecture de l'article & et dernier.
Je demande à l'Assemblée la conservation d'une fondation en faveur de la vieillesse faite dans la paroisse de Saint-André-des-Arts, par un ancien évêque de Toulon.
Cet objet ne se trouve pas compris dans le décret qui vous est soumis. Par conséquent, il n'y a pas lieu à délibérer en ce moment sur la proposition du préopinant.
Il me semble qu'après le mot éducation il y aurait lieu d'ajouter et aux besoins des parents des fondateurs.
Ne serait-il pas équitable d'ajouter après ces mots : parties intéressées, céux-ci : « et les patrons pauvres » afin qu'ils puissent être maintenus dans la jouissance d'une partie des biens du bénéfice dont ils avaient le patronage ou des pensions représentatives f
Je demande la question préalable sur les amendements.
Je fais remarquer à M. de Landine et à M. Barrére que ce qu'ils demandent est renfermé dans l'expression générale de parties intéressées et que ces patrons pauvres pourront se pourvoir devant les assemblées de département.
Les amendements sont rejetés.
L'article 5 est adopté ainsi qu'il suit :
« Art. 5. Les fondations faites pour subvenir à l'éducatioa des parents des fondateurs, continueront d'être exécutées conformément aux dispositions écrites dans les titres de fondation ; et à l'égard de toutes autres fondations pieuses, les parties intéressées présenteront leurs mémoires aux assemblées de département, pour, sur leur avis et celui de l'évêque diocésain, être statué par le Corps législatif sur leur conservation ou leur remplacement. »
Un membre propose un article additionnel en faveur des prébendés.
Je prie l'Assemblée de rendre un décret relatif à l'extinction des procès relatifs aux titres de fondation, de patronage et de collation laïque.
Je demande qu'il soit fait un article additionnel sur les fondations destinées à l'éducation, non seulement des enfants des parents des fondateurs, mais encore des pauvres orphelins.
(Ces diverses motions sont renvoyées au comité ecclésiastique.)
, député de Belfort, demande un passe port pour se rendre dans sa province où il est appelé par ses affaires.
Je fais la motion expresse qu'il soit défendu à tous les membres de l'Assemblée nationale de s'absenter pendant le mois de juillet. Les députés zélés, les bons citoyens ne doivent quitter l'Assemblée que quand ils sont morts.
Je renouvelle la motion que j'ai déjà faite d'un appel nominal. Il faut connaître ceux qui demeurent véritablement attachés à l'Assemblée nationale.
(On applaudit dans une grande partie de la salle.)
(ci-devant marquis). Beaucoup de membres ont demandé des congés ; on a déjà fait des motions pour qu'il n'en fût plus accordé; j'ai dit alors que ce n'était pas là la façon de mener l'Assemblée : c'est par l'honneur qu'elle se conduit.
Je pense aussi que l'honneur doit, être le principal mobile des représentants de la nation ; mais comment le concilier avec l'infraction du serment de ne quitter l'Assemblée que quand la Constitution sera faite ? comment le concilier avec l'oubli du plus saint des devoirs celui de votre honneur et conscience dans cette assemblée ? Comment ne se rappelle-t-on pas que le premier principe de l'honneur est de rester au poste oû la confiance publique nous a placés ; et pour me servir de l'expression ne M. Bouche, de ne la quitter qu'après la mort ? Il importe que la nation connaisse ceux qui, fidèles à leurs devoirs, n'ont pas cessé de s'occuper des intérêts du peuple. Je demande, en conséquence, qu'on fasse dimanche un appel nominal.
Je demande si le préopinant ne s'est pas lui-même absenté pour aller annoncer à M. Necker les détails de la Révolution ? Il faut passer à l'ordre du jour.
(L'Assemblée décide qu'on délibérera sur la proposition de M. Lucas.)
fait lecture de la motion ainsi conçue :
« L'Assemblée nationale décrète qu'il sera fait dimanche un appel nominal, afin de connaître le nombre des absents. »
Il n'est pas instant de rendre ce décret; plusieurs membres sont absents par congé, d'autres ont donné leur démission. Il serait dangereux qu'on interprétât.... (Une voix s'élève, qui dit : eh bien !) Dans ce cas, il n'y a plus qu'à piller, brûler, renverser....
(Toute la partie droite se lève et se répand | confusément dans la salle, en demandant qui est-ce qui a dit) : eh bien ?
(ci-devant d'Eprémesnil). Je demande que celui qui a tenu ce propos soit indiqué par ses voisins.
(Après quelque temps de tumulte, le Président parvient à se faire entendre).
L'auteur de la motion m'avertit que, puisqu'elle peut avoir de funestes conséquences, il s'empresse de la retirer.
(ci-devant marquis). Je crois que, vu la chaleur d'une partie de l'Assemblée, le meilleur moyen de l'apaiser c'est de lui faire voir que cette chaleur vient d'un malentendu. Je puis attester que le mot eh bien ! a été prononcé avant que M. de Foucault eût terminé sa phrase.
, A présent que vous avez entendu un impartial, faites-moi le plaisir d'entendre un aristocrate.
Gomme la différence de principes, que j'avoue très fort, ne peut faire de différence dans la manière de voir, quand il s'agit d'un fait, je pense aussi que le mot eh bien ! n'a été prononcé qu'après la première partie de la phrase de M. de Foucault. Il me semble toujours que ce mot renferme des intentions coupables.
Quand M. de Foucault a dit qu'il était dangereux qu'on interprétât mal.....
Plusieurs voix : On n'a pas dit cela !
Puisque le membre qui a tenu ce propos ne l'avoue pas, il serait indigne de l'Assemblée de s'en occuper davantage ; il ne reste pas de doute au public qui nous entend de l'improbation que donne l'Assemblée à une pareille expression : quoique absolument opposé à l'appel nominal, indigne de la majesté du Corps législatif, qui pourrait mêler quelque chose de désagréable à une fête qui n'est que le ralliement du patriotisme, je suis donc d'avis que la motion de M. Lucas soit mise aux voix, et qu'elle soit rejetée.
On demande la question préalable sur la motion et sur ce qui a pu être décidé depuis.
L'Assemblée décide qu'il n'y a pas lieu à délibérer.
La séance est levée à trois heures.
A LA SÉANCE DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE DU
Premier rapport du comité [des pensions (1).
Les réclamations s'élèvent depuis longtemps et de toutes parts contre la libéralité aveugle et prodigue qui épuise le Trésor public. Des ordres exprès ont élé donnés par la plupart des assemblées primaires à leurs représentants, de porter un œil attentif et sévère sur tant de grâces prodiguées sans discernement. L'Assemblée nationale a dû prendre en considération l'importante réforme des pensions et des autres dons de tout genre qui seraient abusifs.
Dès le mois d'août 1789, l'Assemblée nationale décréta que « sur le compte qui lui serait rendu de l'éiat des pensions, grâces et traitements, elle s'occuperait de concert avec le roi, de la suppression de celles qui n'auraient pas été méritées et de la réduction de celles qui seraient excessives : sauf à déterminer pour l'avenir une somme dont le roi pourra disposer pour cet objet. »
Les 4 et 5 janvier, l'Assemblée a porté, sur le même sujet des pensions, un décret dont les dispositions sont distribuées en cinq articles.
Le premier ordonne la continuation du payement de tous arrérages échus au 1er janvier dernier, de pensions, traitements conservés, dons et gratifications annuelles, qui n'excéderont pas la somme de 3,000 livres ; le payement provisoire de 3,000 livres sur ceux des mêmes objets qui excéderaient cette somme. 11 porte une exception en faveur des septuagénaires; ceux-ci seront payés de ce qui leur a été accordé pour pension, quand il excéderait 3,000 livres, pourvu qu'il n'excède pas 12,000 livres; 3ur les pensions qui seraient supérieures à cette somme, il n'y aura qu'un payement provisoire de 12,000 livres.
L'artifelë 2 stispènd, jusqu'ati 1er juillet prochain le payement de tout don, pension, gratification, dont l'échéance serait postérieure au 1er janvier 1790; et il ordonne qu'à l'époque du Ier juillet le payement n'en sera fait que conformément aux décrets qui auront été prononcés par l'Assemblée.
Le troisième article établit un comité, que l'Assemblée charge de lui présenter un plan, d'après lequel les pensions, traitements, dons, gratifications actuèllement existantes devront être réduites, supprimées ou augmentées, et de lui proposer les règles d'après lesquelles les pensions devront être accordées à l'avenir.
Deux autres articles, dans le même décret, ont pour objet de suspendre, à l'égard des Français absents du royaume, la perception de leurs pensions et des fruits de leurs bénéfices.
Le troisième article, qui a été rapporté, forme le titre, la mission et la règle du devoir du comité. L'Assemblée l'a chargé de lui présenter un plan pour la réduction, suppression, augmentation des pensions existantes, et un corps de lois pour la concession des pensions qui seront accordées à l'avenir.
Lorsque le comité a voulu exécuter ces ordres, il a senti qu'il ne proposerait que des plans imparfaits pour opérer sur les pensions existantes, s'il ne connaissait pas dans un grand détail leur état actuel, lës différentes clasëes dans lesquelles elles pouvaient être rângéëâ, les motifs d'après lesquels elles avaient été accordées, les sommes auxquelles les grâces pécuniaires montaient, et la manière dont elles étaient réparties. 11 a senti que, pour l'avenir, il ne présenterait que des bases arbitraires, inutiles, incomplètes, s'ilneles établissait pas sur une connaissance entière des abus passés, qui désigneraient les abus à prévenir.
Et comme il étaît impossible que le comité remplît avéc succès les vues de l'Assemblée, sans connaître les faits d'après lesquels il avait à former ses idées, il serait impossible aussi que l'Assemblée jugeât si les vues qui lui sont proposées sont sages et suffisantes, saDs avoir les mêmes notions sur les faits ; mais il y a "cette différence entre le travail que le comité a dû faire, et le résultat qu'il doit offrir, que le comité a dû suivre, dans toutes leurs ramifications, les sentiers que la cupidité se fraie pour échapper aux lois d'une sage distribution des grâces, et d'une prudente économie des fonds publics : il a dû porter ses regards sur tout ce qu'on lui dénonçait comme suspect ; au lieu que l'Assemblée ne doit fixer sa vue que sur le résultat des recherches de son comité. Ce ne sont pas les détails des abus qu'il faut décrire; il suffit d'en montrer l'ensemble et de citer quelques exemples frappants, qui, tantôt par leur importance, tantôt par leur singularité incroyable, démontrent la nécessité des réformes et des règles qui seront proposées à l'Assemblée.
Ces observations indiquent deux parties bien distinctes dans le travail du comité : la connaissance des faits, et la proposition des règles.
Les règles sont relatives, les unes aUx pensions existantes qui sont à confirmer, à réduire, àsup-primer ou a augmenter ; les autres aux pensions à accorder à l'avenir. Les règles se subdivisent, d'ailleurs, eu égard à la nature des dons qui peuvent être, ou des gratifications passagères et momentanées, ou des dons accordés pour la vie, et qu'on désigne plus particulièrement sous le nom de pensions et de traitements; eu égard aussi aux personnes et aux services qu'on récompense :
services militaires, services Civils, décôutertes utiles aux arts, célébrité dans les sciences.
En reprenant toutes ces divisions, successivement, le comité des pensions se propose de pré-sënlér à l'Assemblée :
1° Des vues générales sur les grâces qui s'accordent à quelque titre que ce soit, sur les caisses publiques, et sur les règles établies, à différentes époques, pour prévenir les abus dont leUr concession est susceptible ; abus qui, malheureusement, ont été presque toujours plus forts que ies règles qu'on leur opposait.
2° Des principes propres à servir de base à des règles nouvelles, supérieures enfin aux abus dont l'èxpérience découvre la multiplicité et les formes diverses.
Ces règles générales seront présentées à la délibération, par articles de décrets à prononcer.
3° Un troisième rapport développera les vues particulières aux pensions à accorder pour le service dans les armées de terre, et les décrets à prononcer d'après ces vues.
4° Un quatrième, les vues particulières aux pensions que mérite le service de mer, et les décrets relatifs à cette classe de pensions.
5° Un cinquième, les vues et les décrets propres aux pensions à accorder pour récompenser les services rendus dans des emplois civils.
6° Un sixième, les vues et les décrets relatifs aux pensions que les savants et artistes peuvent mériter.
7° Enfin, dans un dernier rapport, on proposera ce qui est à faire par rapport aux pensions actuellement existantes.
La combinaison de la sévérité des règles justes, avec l'indulgence, que les fautes passées exigent, formera la base de cette partie du travail du comité.
Ainsi, l'Assemblée nationale, après avoir acquis, par les faits qui lui seront présentés, une connaissance exacte de la partie d'administration qu'elle doit régler; après avoir reconnu, par la comparaison qu'elle en fera avec les principes dont elle est pénétrée, la solidité des bases qui lui seront proposées, fixera d'une manière invariable des règles, telles que les abus ne pourront se perpétuer ni même s'introduire : et elle jugera jusqu'à quel point elle peut s'écarter des règles pour ne pas réduire au désespoir des personnes dont l'existence fragile ne résisterait pas à l'action rigoureuse des principes vrais, mais austères.
Vues générales sur les grâces qui s'accordent sur les caisses publiques. Abus dont elles sont susceptibles.
Efforts inutiles faits pour les réprimer : leur progression successive. État actuel de la somme et de la distribution des grâces pécuniaires^ Abus de l'état actuel : réflexions sur les causes de ces abus.
PREMIER
Des grâces qui s'accordent sur les caisses publiques, et des abus dont elles sont susceptibles.
La société doit des récompenses à ceux qui lui sacrifient ou leurs talents, ou leur fortune^ ou leur viei L'honneur, qui est le résultat du témoignage public de l'approbation donnée à une belle action* est, sans contredit, la première et la plus grande récompense que la société puisse accorder
à ses membres. Que ne peut-il être la récompense unique ! Mais l'homme est sujet à des besoins journaliers; et l'un des effets du sentiment qui honore une personne étant de désirer et de procurer sa conservation, la juste reconnaissance que les belles actions inspirent, doit porter à mettre celui qui en est l'auteur, au-dessus des embarras du soin d'une subsistance difficile et précaire. D'un autre côté, le dévouement d'un citoyen pour sa patrie entraîne souvent des pertes et des dépenses dont il est juste de le dédommager sur les fonds publics.
De là la nécessité d'accorder dans la société, et aux dépens, de la société, des récompenses pécuniaires dedéux classes différentes : les unes, pour fournir aux besoins de la vie, tant que la vie se conservera; ce sont les pensions : les autres, pour fournir des dédommagements passagers, effets d'un besoin momentané ; ce sont les gratifications. Gardons-nous bien de confondre ou ces dédommagements, ou ces récompenses accordées au mérite et à un besoin plus ou moins pressant, avec les partages qui se font entre des vainqueurs après une conquête. Il existe alors une masse de biens à distribuer; et comme elle doit être partagée entière, chacun prend nod à raison seulement de ses besoins, mais bien plutôt à raison, soit de ses forces, soit du consentement que donnent lesëo-partageants à ce qUe celui-ci ou celui-là prennent telle ou telle part dans les biens vacants.
Il n'en est pas ainsi des grâces pécuniaires qui se distribuent dans une société formée et subsistante- Gomme elles se prennent sur les fonds ou sur les Caisses publiques; comme elles sont une délibération de ce qu'on a laissé en commun, ou de ce qu'on apporte journellement pour les charges publiques; comme elles opèrent un retranchement plus ou moins direct sur les jouissances propres et personnelles, la facilité de donner des récompensés pécuniaires à ceux qui ont bien mérité de l'État, est nécessairement restreinte par les prihcipés dé justice, qui ne permettent ni de dépouiller un citoyen pour en enrichir un autre, ni d'ôtêr la subsistance de l'un, pour donner l'aisance à l'autre, ni même de trop ôter de l'aisancë qu'un citoyen acquiert par sbn travail personnel, pour ajouter beaucoup aux commodités de la vie d'un autre citoyen.
Deux vues, l'une et l'autre également de justice, doivent donc être continuellement présentes à l'esprit de quiconque distribue des grâces pécuniaires sur les fonds de l'État. Il faut considérer le mérite et lë besoin de celui qu'on représente ; il faut respectër lë droit de propriété de celui sur les biens duquel on fait un retranchement.
La combinaison de ces idées produisit une sage économie chez les anciens peuples. On y fournissait, aux citoyens qui avaient oiëh mérité de leur patrie, le logement dans des édifices publics; oh leur donnait la nourriture aux dépens des fonds publics. La récompense était bornée à l'étroit nécessaire, mais elle était décernée par le vœu commun de la cité : les suffrages unanimes du peuple y ajoutaient beaucoup, et la mettaiènt au niveau des grands hommes qui là recevaient.
Disons plus de lâ modicité même de la récompense dont le citoyen qui avait bién mérité de sa patrie, savait se contenter, il sortait pohr lui uh nouveau stljet de gloire. Il prouvait qU'aU feu du génie qui inspiré jles grandes actions, il joignait la Sagesse du cœur, la modestie qui se contente dé peu, lâ force d'Un esprit sufciéhëiir à de pré-téhdus besoins auxquels le vulgaire sacrifie aVec tant de bassesse. Chez des peuples modernéé, dâns
les lieux où un grand luxe avait banni les vertuà Sévères, lé Choix et lë désir des récompenses fut égaré par des passions quë l'aisance et les commodités de la vie fomentàieht. On eUt intérêt dë croire que l'honneur résultant des récompenses pécuniaires, augmenterait dans la proportion de la somme qU'on recevrait ; ce qu'dn eut intérêt de croire, parut vrai, et cette idée une fois établie, l'ambitidn qui désire de grands honneurs, ia cupidité qui convoite de grandes sommes d'argent, S'accordèrent pour solliciter de fortes récompenses pécuniâires. Il était facile de prévoir, dès lors, que Ceux qui prétendraient aux récompenses pécuniaires oublieraient qu'on ne leur donnait de l'argent qu'en l'ôtant à leUrs concitoyens.
Mais ce premier mal n'était pas le seul à prévoir. Le double avantage arraché aux récompenses pécuniaires, commodité et honneur, devait engager â les arracher par d'importunes sollicitations, quand oh ne les méritait pas par de bëllés actions. Il est des personnes d'Un caractère digne de la grandeur de l'homme, auxquelles il coûte plus dë solliciter les distributions des gfàcés, qu'il ne léur coûte d'exposer leur fortune et leur vie. Ils savent mériter; ils nesâyent pas demander. Mais combien d'autres s'élahcent en rampant, et se courbent dans le faux espoir de s'élever ! Ceux-ci consument, dâUs des intrigues, la petite activité de leur esprit : ils assiègent les rois en les flattant : ils trompent les ministres, ou sont d'intelligence avec eux; ils épuisent la substance du pauvre, et la dissipent sans remords, parce qu'ils n'ont pas connu les fatigues ët les . peines qu'elle lui coûte. Heureux si lës succès trop brillants des hommes vils n'eussent pas quelquefois tenté ceux même qui avaient des titres légitimes à la reconnaissance,publique! Delà sont décoU-lés les abUs dont lë torrent a sans cesse grossi, malgré les obstacles trop faibles qu'on mettait à son cours.
§ m
Abus qui ont eu lieu à Végard des grâ'ôes pécuniaires sur les caisses publiques; efforts faits pour les réprimer ; état des grâces pécuniaires à différentes époques, progression successive des sommes auxquelles elles se sont portées.
Pour bien juger, des abus relatifs aux grâcès pécuniaires, il ne faut pas considérer ces grâceë seulement dans des temps où déjà grand nombre d'abus étaient introduits; on serait exposé à prendre des abus pour des usages uniformes, constants; et on les croirait légitimes, parce qu'on ne connaîtrait pas d'exemples contraires. Remontons à une époque à laquelle, à raison de quelques circonstances particulières, les vices ae la constitution de l'Etat aient été moins actifs. Que faisait-on alors ? En quoi, dès ce temps, était-on en Opposition avec les principes?
Le commencement du siècie dernier est l'époque à laquelle nous nous fixerons. Henri IV régnait; Sully était son ministre ; les grandes qualités du princë donnait de là valeur aux récompenses qu'il distribuait : la sage économie du ministre ne permettait pas c(ue les contributions fournies par ies peuples, poUr les besoins de 1 Etat, fussent dévorées pat les fantâisies dë3 courtisans.
Avant Sully, le Trésor public étant épuisé, et les solliciteurs des grâces ne poUvaht obtenir de 1 argent, parce qu'il n'y» êfl avait pas dâtis lé
Trésor, avait demandé, pour dons et pensions, des rentes qu'ils avaient fait créer à leur profit. Sully anéantit, en 1604, ces constitutions de rentes établies sans capital : il en fit prononcer l'extinction en 1609. (Recherches de Fortbonnais, tom.I, p. 63.) Lorsqu'il eut rétabli l'ordre dans les finances, les pensions se trouvèrent montpr, tant par rôle que par acquits-patents, à 2,506,486 livres; les dons par acquits-patents, à 1,684,522 livres; les bienfaits et aumônes, à 85,598 livres (extrait du compte de l'épargne, rapporté par Fortbonnais, tome I, p. 117 et suivantes). La somme totale de la recette du Trésor public était de 32,589,659 liv. : la somme totale de ce qui était donné était de 3,826,606 liv. Le roi donnait donc un peu plus du neuvième de ce que ses peuples versaient dans le Trésor public; et si l'on considère la proportion de la valeur du marc d'argent à cette époque, avec la valeur au tempsprésent, Henri IV donnait environ 10,000,000 liv. de notre monnaie actuelle. C'était sans doute donner beaucoup que de donner le neuvième des contributions publiques : mais il y a deux remarques à faire. Henri avait été obligé de soutenir de longues guerres ; il tenait la couronne de sa naissance ; il l'avait placée sur sa tète par sa bravoure; elle y avait été affermie par ies efforts continus d'une multitude de Français, qui, pour défendre leur roi, avaient perdu leurs revenus et leurs propriétés; les grâces pécuniaires étaient, à leur égard, de justes indemnités. D'ailleurs, à cette raêmeépoque, Sully trouvait, sur les contributions du peuple, de quoi former un fonds réservé aux accidents imprévus; et quels que soient les revenus dont on jouit, on est riche lorsque l'on peut thésauriser. C'était donc dans un état de richesse qu'Henri donnait 10,000,000 livres de nos valeurs actuelles, formant à peu près le neuvième des revenus publics.
Henri mourut. (Recherches de Fortbonnais, tom. I, p. 138.) Les Etats du royaume furent convoqués en 1614; et déjà le montant des pensions accordées depuis le nouveau règne, excitait les réclamations. La sommé des pensions était de 5 millions 650,000 livres:les dons aux princes avaient été augmentés de 50,000 livres, les gratifications, de 1,100,000 livres. On donnait 9,020,100 livres, au lieu de 3,826,606 liv., quoique les perceptions fussent demeurées à peu près les mêmes. Des Etats demandèrent que les pensions fussent réduites sur le pied de 2,000,0u0 livres. On n'en fit rien: mais l'excès des grâces empêcha bientôt qu'elle ne fussent payées, et Conc-ini profita de cette détresse même, pour faire du bien à de nouvelles créatures. (Ibid., p. 152.) En 1615, il fit créer trois charges de trésorier des pensions, qui lui valurent un million. La disette du Trésor public ouvrait une branche de commerce très riche aux trésoriers. D'accord avec leurs protecteurs, dit Fortbonnais, ils achetaient à bas prix les créances sur le Trésor,, et la dépense entière en était portée sur te registre, à leur profit.
D'un autre côté, lorsqu'on vit qu'il fallait abandonner une partie de ses pensions pour toucher le surplus, on les sollicita plus fortes. Le président Jeannin déclara aux notables, assemblés en 1617, qu'elles se portaient à six millions. (Ibid., p. 157.) Les Etats demandèrent la réduction à trois millions, et ils proposèrent des règlements : de ne point payer les pensions sur de simples brevets, à moins qu'elles ne se trouvassent sur l'état signé de la main du roi; de supprimer ies charges de trésoriers des pen-
sions, sources d'une infinité de malversations; de n'employer aucune espèce de dons dans les acquits de comptant qui se font pour la nécessité des affaires ; d'obliger tous ceux qui solliciteraient des dons et bienfaits du roi d'exprimer, dans leurs placets, les dons qu'ils avaient déjà reçus, à peine d'être privés de la dernière grâce.
Ces règles s'exécutèrent mal; les réductions ne furentqu'imnarfaites. (Recherches de Fortbonnais, tom. i, p. 207.) Les notables, assemblés en 1627, se trouvèrent forcés d'être sévères : ils demandèrent que l'état des pensions fût réduit à deux millions, si Sa Majesté ne jugeait pas nlus à propos de les supprimer en totalité. Les plaintes contre les acquits de comptant furent vives : on rappela les anciennes Ordonnances qui en défendaient l'usage, pour être par iceux, couverts et ensevelis les plus grands abus qui peuveut être commis en Vordre des finances.
L'article 274 de l'ordonnance de 1629, prononça que « les Etats, entretennement et pensions, « seraient réduits à une somme si modérée, que « les autres charges de l'Etat pussent être préala-« blement acquittées; qu'il serait fait un état par « chacune année, qui contiendrait le nom de ceux « qui en devaient jouir, et hors lequel personne « ne serait reçu à les prétendre, quelque brevet « ou ordonnance qu'il en pût obtenir, ni être « employé dans ledit état qu'en vertu de let-« très patentes enregistrées à la Chambre des « comptes. »
On estime qu'en 1642 (Fortbonnais, p. 241, d'après le testament du cardinal de Richelieu), le revenu de l'Etat montant à 70,000,000 de livres, les pensions étaient de 4 millions; les dons ordinaires du roi, de 5 0,000 liv., et les acquits-patents, de 400,000 liv. : les dons étaient à peu près le quatorzième des revenus nets.
11 est difficile, faute des éléments nécessaires, de suivre l'état des pensions pendant la minorité de Louis XIV ; mais, à une époque très brillante de son règne, après la paix d Aix-la-Chapelle, en 1670, on a un état des dépenses, qui porte le total des pensions, gages du Conseil, appointements d'officiers, appointements de maréchaux de France, acquits de comptant, à 3,432,000 livres : le tofal des revenus nets étant de 70,483,834 livres. On ne donnait pas le vingtième du revenu; l'argent était à 27 livres le marc : on ne donnait pas 7 millions de nos valeurs actuelles ; et cependant on sortait d'une guerre, dans le cours de laquelleun nombre considérable de belles actions avaient mérité et obtenu des récompenses. (His-toire universelle t. 31, p. 438.) On commençait à jouir d'une paix que Louis XIV employait à faire refleurir les sciences, les arts, les manufactures et le commerce.
En 1672, les grâces pécuniaires reçoivent quelque augmentation : 200,000 livres sont employées en gratifications pour l'armée. Louis XIV faisait avancer cent mille hommes vers le Rhin : la guerre se prolongea, et Louis XIV, devenant de jour en jour plus absolu, abrogea, en 1678, les règlements qui avaient précédemment eu lieu pour la concession des pensions. Il décida qu'elles ne dépendraient que de sa volonté, et il ne tarda pas à éprouver les surprises auxquelles est sujet un prince accessible à la flatterie, et disposé à tout sacrifier au fantômè de sa gloire.
La somme des pensions s'élevait avec rapidité, mais il devenait plus difficile d'en saisir la masse et l'ensemble, parce qu'on la dispersait à dessein, sous une multitude de dénominations différentes.
C'était, en 1684, des récompenses
(Fortbonnais, t. 2. p. 40)............160 490 1.
Offrandes et aumônes......................159,708
Gratifications aux troupes................1,439,935
Des pensions proprement dites... 1,452,839
Gages du conseil................................2,076,781
Des gratifications par comptant... 2,747,886
Des affaires secrètes...............4,681,064
Des acquits-patents..........................227,700
Des menus dons.....................627,519
Total........ 13,573,922 1.
Le total des revenus nets ne se montait cependant alors qu'à 106,250,432 livres (Fortbonnais, t. 2, p. 8) ; et au lieu de n'en donner que le vingtième, on en donnait plus du neuvième.
En 1690 (livre du roi) les pensions et gratifications ordinaires étaient
montées à............. 2,354,860 1. 6 s. 8 d.
Les gratifications aux
officiers............... 1,552,164 6 9
Les gratifications par comptant, et autres dépenses................ 2,201,241 4 1
Les acquits patents... 226,450
Les menus dons, etc. 265,437 6 4
En 1700 (Fortbonnais, t. 2, p. 171) ces dépenses se portaient à 21,886,661 livres comme il suit :
- Offrandes et aumônes................341,817
Récompenses...................333,383
Gratifications aux troupes.... 1,807,009
Pensions........................................3,122',890
Gages du Conseil..........................2,330.106
Affaires secrètes.....................1,113,710
Gratifications par comptant.... 11,616,296
Acquits-patents,..........................217,000
Menus dons....................................375,449
Dépenses du roi et de la reine
d'Angleterre......................................600,000
Les reveDusnets n'étaient que de 69,041,711 livres. Ce défaut de proportion entre les dons et les revenus est un des caractères du désordre qui s'introduisit alors dans les finances, et qui, bientôt, fut général. Le vide du Trésor royal ne permettant plus qu'il fournît aux récompenses méritées par les militaires, on fit de nouvelles retenues sur leur solde. Des'arrêts du Conseil du 17 février 1682 et du 12 mars 1700, avaient établi une retenue de trois deniers pour livre sur toutes les dépenses des troupes, pour la subsistance et entretien des soldats reçus à l'Hôtel des Invalides. Un édit du mois de novembre 1704 ordonna la retenue d'un quatrième denier, pour servir de fonds aux gratifications à accorder aux militaires, dont l'état serait dressé tous les ans. Le même édit porte création de trois trésoriers généraux, payeurs des pensions des officiers des troupes ; de trois principaux commis de ces trésoriers, et de trois contrôleurs. Les créations d'offices étaient, à cette époque, le palliatif de l'épuisement des revenus de l'Etat, comme les emprunts l'ont été à une autre époque.
La progression des dons et des pensions devenant plus minutieuse à suivre, à mesure qu'ils augmentent, il suffira d'observer qu'en 1715 il a^ruit été ajouté aux articles qui existaient en 1700, ceux que voici :
Pensions de M. le duc de Chartres... 150,000 1.
De Mme la duchesse douairière..............190,000
De M. le duc...........................110,000
De Mme la princesse de Conti................100,000
De Mme la princesse de Conti, seconde
douairière...............................60,000
De M. le prince de Conti........................70,000
Ds M. le duc du Maine........................100,000
De M. le comte de Toulouse..................90,000
Total................ 87Q.000 1.
Lorsqu'au commencement de la régence de Louis XV (Fortbonnais, t. 2, p. 453), la nécessité força de mettre de l'ordre dans les finances, on fut très embarrassé à former une masse de toutes les pensions dispersées dans une multitude de départements divers, et déguisées sous une infinité de noms. On prit d'abord le parti d'établir des règles pour l'avenir.
Le conseil de régence fit publier, sur ce sujet, une déclaration Je 30 janvier 1717 : dans le préambule on rappelle les anciens règlements destinés à empêcher la concession trop facile des pensions, notamment l'article 174 de l'ordonnance de'1629.
On rappelle aussi la déclaration du 30 décembre 1678, par laquelle Louis XIV avait abrogé les anciennes règles, tant, avait-il dit, qu'il prendrait le soin et l'administration de ses finances.
Le conseil de régence n'hésite pas à dire qu'aux termes de l'ordonnance de 1629, et en suivant l'esprit de la déclaration de 1678, les pensions accordées par le feu roi étaient éteintes de plein droit au jour de son décès ; que l'intention de Louis XIV n'avait poiut été d'engager les revenus de la couronne par des dons et libéralités, au delà du cours de son règne. La condition de ceux qui sont chargés du poids des impositions lui paraît exiger qu'ils soient soulagés; elle invite à ne pas les charger de nouveau d'une contribution dont la libération semble leur être acquise; mais une considération arrête le conseil : c'est celle des motifs qui ont fait accorder les pensions ; elle porte à les regarder, en quelque manière, comme dettes de l'Etat. Le conseil de régence se croit obligé, par ces motifs, à conserver une partie des pensions, et, au lieu de retrancher absolument une dépense si considérable, de se contenter de la diminuer d'après des principes que les articles qui vont être analysés feront suffisamment connaître.
L'article premier confirme les pensions existantes, sans obliger leurs possesseurs à obtenir j de nouveaux brevets, mais sous les conditions et réductions qui doivent suivre.
L'article 2 déclare qu'il ne sera plus accordé, à l'avenir, aucune ordonnance particulière pour les pensions personnelles, ni pour les gratifications ordinaires; toutes seront employées dans un état général, par chapitres distincts et séparés, suivant la différence des personnes qui en devront jouir et la qualité de leurs emplois.
Cet état général (art. 3) sera arrêté au mois de décembre de chaque année, et il en doit être expédié deux doubles, l'un pour le garde du Trésor royal, l'autre pour être enregistré à la chambre des comptes.
L'article4ordonneque toutes les pensionsetgra-tifications ordinaires* accordées à une même personne, seront réunies en un seul article : il réduit graduellement les pensions ; celles de 10,000 livres et au-dessus, aux trois cinquièmes; celles au dessus de 600 livres jusqu'à 1,000 livres,
aux cinq sixièmes ; les pensions intermédiaires proportionnellement. Celles de 600 livres et au-dessous ne sont assujetties à aucune réduction.
L'article 5 excepte de la réduction les pensions de l'ordre de Saint-Louis, celles qui sont attachées aux corps des troupes, celles dont jouissent les officiers des troupes de la maison du roi, qui sont attachées aux emplois et non aux personnes : il excepte aussi les pensions attachées aux charges des officiers des cours.
La forme particulière du payement de ces pensions exceptées est établie dans l'article 6. Les pensions de l'ordre de Saint-Louis seront employées dans l'état général, mais dans un chapitre particulier. A l'égard des officiers de la maison militaire du roi et des officiers des cours, ils doivent être payés parles trésoriers de la maison du roi et par ceux des cours.
Les articles 7 et 8 ne sont relatifs qu'au mode de payement des pensions pour l'année 1716,
L'article 9 porte que dans le cas où ceux qui seront employés aux états des pensions et gratifications obtiendraient du roi quelques emplois ou établissements, ils seront retranchés de l'état de l'année qui suivra leur nomination.
L'article 10 défend d'accorder aucune pension ou gratification ordinaire à qui que ce soit, jusqu'à ce que toutes celles qui subsistent soient réduites à 2,000,000 de livres, non compris, dans cette somme, les pensions exceptées par l'article. 5.
La réduction étant opérée, l'article 11 ordonne qu'il sera établi différentes classes de pensions. En attendant que la réduction ordonnée mette en état d'accorder de nouvelles pensions, il est réservé au roi la faculté d'accorder des gratifications extraordinaires à ceux qui pourront les mériter, jusqu'à concurrence de 500,000 livres par an.
Les réductions ordonnées par la déclaration du 30 janvier 1717 ne procurèrent pas à l'Etat un soulagement suffisant. Un édit du mois d'août ordonna la retenue d'un cinquième sur toutes les pensions, en les comptant sur le pied où elles se trouvaient réduites d'après la déclaration.
Bientôt on rendit inutiles toutes ces dispositions. Les apparences trompeuses d'une opulence qui n'existait pas en effet (1), portèrent le rpi à rétablir, par un arrêt du conseil du 23 février 1720, les pensions sur le même pied qu'elles étaient avant les réductions de 1717; mais il ne fut pas possible de maintenir longtemps cet état de fausse opulence. Le 20 novembre 1725, une nouvelle déclaration rétablit les dispositions de la déclaration de 1717, concernant la réduction des pensions ; elle ajouta même la réduction d'un cinquième sur la somme à laquelle les pensions se trouveraient fixées par la réduction, mais elle abrogea les autres dispositions relatives à la forme dans laquelle les pensions devaient être accordées, et aux états qui devaient en être dressés. On donna pour prétexte trop de difficulté à exécuter ces dispositions. Un arrêt du conseil du même jour, 20 novembre, établit un ordre pour le payement des arrérages des pensions alors échues. La disposition du seul article 2 mérite d'être remarquée : elle veut que « ce qui « est dû des années 1724 et 1725 soit payé en « viager, par forme d'augmentation de pension, « sUr le pied du denier 25 du montant de ce qui « est dû à chaque pensionnaire pour chacune « desdites années. »
La réduction des pensions à la somme de 2,000,000 de livres, ordonnée par l'article 10 de la déclaration de 1717, ne parait pas avoir jamais été effectuée. D'un autre côté, il ne paraît pas que, sous le ministère du cardinal de Fleury, ni même plusieurs années après, les pensions aient éprouvé de grandes variations. Il serait difficile de donner des notions exactes et précises des sommes auxquelles elles montaient, parce que, dans les comptes du Trésor royal, elles sont réparties sous plusieurs chàpifrés, et que, dans quelques-uns de ces chapitres, elles se trouvent mêlées avec d'autres dépenses : mais les totaux des chapitres qui comprennent, dans différentes années, des dépenses du même genre, éprouvant peu de variations, il est à croire que les pensions en éprouvaient également fort peu. Un état de finance dressé en 1758 (Collection de comptes rendus, p. 7) pendant l'administration de M. dè Boullongne, calcule « les pensions des princes « et princesses du sang en cette qualité et pour « récompenses de services; celles des ordres du « Saint-Esprit et de Saint-Louis ; celles particu-« liéres sur le Trésor royal ; celles assignées sur « les affaires et dépenses militaires, et autres « pensions, à9,800,000 livres.» Onpayaitd'ailleurç, au roi de Pologne, une pension de 1,500,000 livres. Le total des revenus ordinaires, à ce|te énoque, était de 236,000,000 livres. Il y avait 37,000,000 de livres derevenus limités à temps. La masse des pensions était au-dessous du vingt-quatrième de tous ces revenus. M. de Silhouette évaluait, en 1759, les revenus à la somme de 286,547,037 livres, et les pensions à 8,000,000 de livres seulement (Jb.id. p.. 46 et suivantes), c'est-à-dire au trente-cinquième et même au-dessous : mais, comme les revenus de l'État se trouvaient déjà affectés de très grandes créances, la proportion des pensions avec les revenus nets aurait été beaucoup plus forte*
Aussi, dans leg économies que M. de Silhouette proposa en 1759, il compta pour beaucoup les diminutions à faire sur les pensipps. Une déclaration du 17 avril 1759 répète dans son préambule ces principes déjà souvent rappelés et oubliés, mais toujours frappants par leur grande vérité : Que les dons, pensions et gratifications accordés à quelques Français, ne doivent point nuire à la justice que les autres ont droit d'attendre; que « les ordonnances rendues rela-« tivement aux pensions sont autant de monu-« ments qui constatent que les importunités ont « souvent préjudicié au vrai mérite de là cfistri-« bution des grâces, et interverti, au détriment du « service public, la juste proportion qui doit être « établie dans les récompenses. Tous les rois « nos prédécesseurs, dit Louis XV, ont fait exa-« miner, à diverses reprises, les dons obtenus « sans titres légitimes. Pour les annuler, ils ont « voulu qu'à l'avenir toute grâce fût nulle, à « moins que les placets présentés pour l'obtenir, et « le brevet qui l'accordait, ne continssent les dons « et grâces déjà reçus par ceux qui les spjlici-« taient : ils ont enfin ordonné} dans tous les « temps, que ces sortes de dons ne fussent payés « qu'à la fin de l'année, sur les fonds restants « après l'acquittement des charges de l'État. » Le roi indique les ordonnances de plusieurs de ses prédécesseurs ; et après avoir fait rnentipn des déclarations de 1717 et de 1725, il'avoué que s'il s'est laissé entraîner à se relâcher de cette règle, et à pondescendre aux priprps qui lu): Oflf éfé faites, saps en approfondir rigoureusement le titre, plutôt que de s exposer à laisser uff seul §ery|pg
sans récompense, il n'en est pas moins obligé à modérer son inclination bienfaisante, par les égards de justice qu'il doit au besoin de ses peuples et de ses affaires.
L'article premier de la déclaration de 1759 ordonne à tous ceux qui jouissent de dons, pensions, augmentations de pensions et gratifications annuelles, de se pourvoir par devers le secrétaire d'État de leur département,, et par devers le contrôleur général, relativement aux pensions accordées en finances, pour, sur l'examen qui sera fait, et le compte qui sera rendu au roi, obtenir la confirmation de leurs dons et pensions, s'il y a lieu.
L'article 2 exige de ceux qui demanderont la confirmation de leurs dons et pensions, une déclaration contenant un état exact des différentes grâces, honneurs et dignités qu'ils ont reçus du roi, et des revenus et émoluments qui y sont attachés, comme aussi l'exposition des motifs sur lesquels lesdits dons, etc. leur ont été accordés; faute de quoi, les dons, pensions, etc. seront rayés des états, sans qu'ils puissent y être rétablis.
Le payement des pensions est suspendu par y l'article 4, jusqu'à ce que, sur l'examen qui en aura été fait, elles aient été confirmées. Après l'examen, il doit être dressé deux doubles de l'état de celles qui seront confirmées, l'un, pour être remis au garde du Trésor royal, afin d'être par lui acquitté; l'autre pour être envoyé à la Chambre des comptes, avec des lettres patentes qui en ordonnent l'allocation.
L'article 5 fixe le fonds des pensions, pour l'avenir, à trois millions, et déclare qu'il n'en sera accordé aucune jusqu'à ce que leur masse soit réduite à cette somme.
L'article 3 excepte des dispositions relatives aux autres pensions, à peu près les mêmes qui avaient été exceptées dans la déclaration de 1717; savoir, celles qui sont accordées aux princes du sang, à Tordre de Saint-Louis, aux corps des troupes, aux officiers des troupes de la maison du roi, par formes d'appointements et de suppléments de solde, et qui sont attachées, non pas à leurs personnes, n^is à leurs emplois; celles qui font partie des attributions de charges de plusieurs officiers de cours supérieures; celles qui sont attachées aux académies, corps et facultés d'études établies dans la capitale; les pensions de 600 livres et au-dessous, accordées aux officiers des troupes de terre et de mer, de la maison du roi et à leurs veuves.
L'article 6 déclare que les personnes qui, étant employées dans les états des pensions, obtiendront du roi quelque autre emploi, établissement, grâces, charges ou dignités, seront diminuées en proportion, ou retranchées dans l'état qui sera arrêté pour l'année qui suivra immédiatement leur nomination, et qu'il ne sera accordé aucune pension nouvelle, ûons, etc. que ceux qui devront les obtenir n'aient remis une déclaration signée du roi, de tous les dons, pensions, grâces et emplois qu'ils auront ci-devant obtenus. S'ils y manquent, ou s'ils émettent dans leurs déclarations une partie des dons par eux ci-devant obtenus, ils seront non seulement déchus des nouvelles grâces qui leur seraieqj; appoFdéegi. mais encore de toutes celles qui leur auraient été accordées précédemment.
L'article7 établit, sur le fonds des pensions qui restera libre au moyen des réductions ordonnées, la réserve d'un fonds d'un million, pour être dis- i tribaé eu gratifications extraordinaires. Mais, I
dans la vue d'empêcher qu'on ne les convertisse en gratifications ordinaires et annuelles, i'article8 déclare que personne ne pourra être porté sur leur état deux années de suite, et ne pourra y être jamais porté plus de trois fois, même avee l'intervalle de deux années.
Les dispositions de la déclaration de 1759 ne furent apparemment pas exécutées plus longtemps que leur auteur ne demeura en place. Les pensions (Collection des comptes, p. 51 et suivantes), loin de baisser à la somme de trois millions, comme il avait été ordonné, s'élevèrent, en 1764, à dix millions; en 1768, à onze, et déjà le déficit des finances commençait à se faire remarquer d'une manière sensible. En 1766 on s'était trouvé dans l'impuissance d'acquitter les arrérages échus. Les arrérages arriérés au premier janvier 1766 furent convertis en intérêts viagers, à 6 0/0 (1). En 1767, on inséra, dans un arrêt du conseil du 30 octobre, qui prescrivait les règles et les formalités à observer tant par les parties prenantes que par les payeurs des états du roi, une disposition qui tendait à ramener l'ordre : c'était qu'à compter de 1767 aucune pension ne serait portée sur les états du roi, mais qu'elles seraient toutes acquittées au Trésor royal (art, 6).
Un arrêt du conseil, du 29 jaovier 1770, rendu sur le rapport de l'abbé Terrai, ordonna que les pensions et gratifications de 600 livres et au-dessous seraient sujettes à la retenue du dixième ; de 600 livres à 1,200 livres, à un dixième et demi ; de 1,200 livres à 1,800 livres, à deux dixièmes; de 1,800 livres à 2,400 livres, à deux dixièmes et demi; toutes les pensions supérieures, à trois dixièmes. Quant aux intérêts à 6 0/0, des anciens arrérages suspendus en 1766, ils furent déclarés sujets seulement au dixième ordinaire. L'arrêt porte un effet rétroactif : il ordonne que les retenues prescrites pour les pensions au-dessus de 600 livres auront lieu à compter de celles qui sont échues en 1768.
M. Terrai assure que l'exécution de cet arrêt procura un soulagement, pour la finance, de 1,800,000 livres. Ce ministre ne porte les pensions qu'à 6,5OO,0QQ livrés dans un état de dépenses pour l'année 1773 et pour l'année 1774, ce qui, en comprenant 1,800,000 livres de réductions, fait seulement un total de 8,300,000 livres, au lieu de 1,100,000 livres (Çollection des comptes, pag. 89 et 111).
Mais, à cette même époque, on découvre qu'il existait un abus : c'était celui d'obtenir des pensions par déduction sur les revenus de l'Etat avant qu'ils fussent parvenus au Trésor royal; de destiner même certaines parties de revenus unique-r ment à des pensions, et enfin de former, de certaines pensions, une classe particulière, qui ne passait pas en compte avec les autres .(Collection des comptes, p. 99). Ainsi, dans l'état des reye-nus de 1779, on porte en déduction, pour pensions et gratifications sur les deniers à fournir au Trésor royal par les Etats de Languedoc, 280,110 livres; par les Etats de Bretagne, 80,000 livres; par ceux dé Bourgogne, 9,000 livres ; par ceux de Provence, 14,500 livres; pour les pensions des princes, 64,900 livres. On vqitdeplus (Ibid., p. 106 et 107) que le prix d'une ferme de petits domaines, donnée à un nqiprpé Hacquin, et qui montait a 130,000 livres, est employé entièrement en pen-
sioos, et que sur la ferme du Port-Louis, 27,200 livres avaient la même destination. Ces sommes, réunies aux 6,500,000 livres de pensions de 1774, donnent un total de 7,689,810 livres. Nous aurons occasion de revenir sur ces fonds destinés à des pensions et gratitications.
M. Turgot (Mémoire sur la vie et les œuvres de M. Turgot, part, i, p. 140), appelé au ministère en 1774, avait calculé la ressource des économies sur les pensions. Dans une lettre, devenue célèbre, qu'il écrivit au roi le 24 août, il lui disait : « Votre Majesté sait qu'un des plus grands obsta-« cles à l'économie est la multitude des demandes « dont elle est continuellement assaillie, et que « la trop grande facilité de ses prédécesseurs à « les accueillir a malheureusement autorisées. Il « faut, Sire, vous armer, contre votre bonté, de « votre bonté même; considérer d'où vous vient « cet argent que vous pouvez distribuer à vos « courtisans, et comparer la misère de ceux aux-« quels on est quelquefois obligé de l'arracher « par les exécutions les plus rigoureuses, à la « situation des personnes qui ont le plus de titres « pour obtenir vos libéralités. » M. Turgot dénonçait en même temps un autre abus au roi : ce qu'on appelle croupes et intérêts dans les affaires. « Ces grâces, lui disait-il, sont de toutes les plus c dangereuses et les plus abusives. Tout profit « sur les impositions, qui n'est pas absolument « nécessaire pour leur perception, est une dette « consacrée au soulagement des contribuables ou « aux besoins de lEtat. Ces participations au « profit des traitants sont une source de corrup-« lion pour la noblesse et de vexation pour le « peuple, en donnant à tous les abus des protec-« teurs puissants et cachés. »
Il entra ensuite dans les plans de M. Turgot (.Mémoire sur la vie et les œuvres de M. Turgot, part, il, p. 247), de réduire les pensions à une somme fixe de dix millions. La réduction paraît modique,si l'on s'arrête à la somme de 10,670,450 livres, pour laquelle les pensions sont portées dans un état de l'année 1775 ; mais cet état n'est nullement exact. (Recueil des comptes, p. 141 et suivantes.) Les pensions montaient alors au moins à seize millions, en y comprenant celles qui étaient payées sur des parties non versées au Trésor royal, ou avant qu'elles y fussent versées. L'état de 1775, dont nous parlons ici, est imprimé dans la collection des Comptes rendus, pages 127 et 163; les pensions y sont énoncées, en plusieurs articles, à différentes pages. On observe, dans un avertissement placé en tête, que ce fut un premier travail, d'après lequel M. Turgot fit faire un second tableau, où les dépenses du Trésor royal furent fixées et arrêtées. En calculant les pensions portées dans ce second tableau, pages 165 et 167, on trouve qu'elles se montent à 14,411,580 livres. M. de Galonné a pareillement observé, dans la réponse à l'écrit de M. Necker, page 145, que les pensions portées dans les comptes de M. de Glugni, en 1776, à 9,746,533 livres, sont de 5 millions 533,467 iivres au-dessous de la réalité; il les évalue par conséquent, pour 1776, à 15 millions 280,000 livres, et il faut encore joindre, soit à la somme de 14 millions, soit à celle de 15 millions, environ 1,200,000 livres de pensions payées sur les parties non versées au Trésor royal, ou avant le versement de ces.parties. M. Necker était convenu, dans l'écrit publié contre M. de Galonné, page 52, que les pensions avaient été portées à une somme trop faible dans le compte de M. de Glugni. Il assigne, pour cause de cette
erreur, la division des pensions dans une multitude de caisses.
M. Taboureau, devenu contrôleur général à l'époque de 1776, sentit, comme ses prédécesseurs, la nécessité de rétablir un ordre dans la concession des grâces pécuniaires.
De là un règlement du 22 décembre 1776, dans lequel le roi annonce qu'il a vu avec peine que des libéralités successives avaient extrêmement chargé l'état de ses finances, et qu'il a senti la 'nécessité de prévenir cet inconvénient pour l'avenir. Le roi propose différents moyens, tirés la plupart des anciens règlements dont il a été rendu compte, pour s'assurer la possibilité de ne jamais refuser des faveurs justement méritées, et d'aller même au-devant des hommes modestes, qui ne demanderaient ni la récompense de leurs services, ni l'encouragement auquel des talents distingués peuvent prétendre. Enfin, le roi annonce qu'il proscrira absolument, pour l'avenir, les croupes ou intérêts dans les affaires de finance, parce qu'il veut dissiper l'obscurité à la faveur de laquelle on cache souvent l'étendue de ses demandes, et qu'il désire, au contraire, donner aux grâces cette publicité qui retient les sollicitations indiscrètes et procure aux bienfaits mérités un nouveau prix, l'approbation publique.
M. Necker, placé à la tête des finances à la fin de 1776, fut frappé de la confusion et de l'incertitude qui résultaient de l'établissement des pensions sur un grand nombre de parties. Il fit rendre les lettres-patentes du 8 novembre 1778, dont le principal objet est de faire cesser cette confusion. « Etant informé, dit le roi, que le « payement des pensions, des gratifications an-« nuelles et de toutes les grâces viagères, est « assigné sur une multitude de caisses diffé-« rentes, et qu'il résulte de cette subdivision une « obscurité contraire à l'ordre et à l'économie, « nous avons cru essentiel d'ordonner que, doré-« navant, toutes ces grâces, sans distinction, « seront payées par un des gardes du Trésor « royal. »
Le roi expose ses vues ultérieures : c'est de faire dresser un tableau des pensions, où toutes les parties qui appartiennent à* divers départements soient classées à part, de manière qu'il soit possible de tixer les remplacements qui auront lieu sur les extinctions.
Les articles du dispositif contiennent les moyens de parvenir au but que le roi se proposait. On y remarque la défense très expresse, à la Chambre des comptes, de passer en dépense, sous quelque prétexte que ce soit, dans les comptes de tout autre comptable que ceux du garde du Trésor royal, aucun payement de pensions ou autres grâces viagères (art. 3.)
L'article 4 ordonne aux divers départements, dépositaires des décisions en vertu desquelles les pensionnaires jouissent des grâces viagères, d'en faire passer l'ampliation au département des finances, pour y être enregistrée et former les états d'après lesquels les pensions seront payées. Au moyen de cette formalité, l'article 7 dispense les pensionnaires de la nécessité d'obtenir une ordonnance particulière chaque année. Les autres articles ont pour objet de faire dresser des tableaux des pensions, à l'effet de parvenir à des états de réduction.
Une déclaration du 7 janvier 1779 prononça l'exécution des différentes parties du plan qui avait été annoncé l'année précédente. L'article premier ordonne, de la manière la plus générale, que le sieur Savalette, garde du Trésor royal,
payera toutes les pensions, gratifications annuelles, retraites, appointements conservés et autres grâces annuelles possédées à titre purement gratuit, sous quelque dénomination et dans quelque département qu'elles aient été accordées.
Le règlement contient quatre articles : par le premier, toutes les demandes des grâces pécuniaires, sous quelque forme qu'elles soient présentées, ne pourront être mises sous les yeux du roi, que dans le mois de décembre de chaque année. Les pensions et grâces pécuniaires nouvelles ne seront accordées que sur le Trésor royal, se payeront au bout de l'année révolue, et ne seront sujettes à aucune réduction (art. 2).
Il sera fait, à compter de 1777, un fonds annuel de 500,000 livres pour liquider les arrérages de pensions arriérées (art. 3).
Le roi défend toute demande et attribution d'intérêts dans les fermes ou régies de ses revenus, ainsi que dans toutes espèces d'affaires de finances, à moins qu'on n'en soit administrateur (art. 4).
Les pensionnaires doivent remettre entre les mains des secrétaires d'Etat des départements respectifs les titres des grâces dont ils jouissent, et le détail des différentes grâces (art. 6). Sur le rapport qui lui en sera fait, le roi confirmera les grâces, et il en sera expédié de nouveaux brevets (art. 7) Toutes les grâces seront comprises dans un même brevet (art. 9). Les pensions et grâces viagères sont déclarées non saisissables, sans préjudice des ordres particuliers qui pourraient être donnés par les secrétaires d'Etat, pour les arrêter (art. 13).
L'article 10 porte qu'il sera dressé un rôle de toutes les pensions accordées antérieurement, et qu'à l'avenir il sera expédié, chaque année, un rôle des pensions accordées dans l'année, lequel sera adressé à la chambre des comptes et enregistré par elle.
Par rapport aux arrérages échus, il ne doit en être payé, sur l'arriéré de chaque pension, qu'une seule année, et il doit être fait un décompte du surplus; lequel décompte, est-il dit, sera payé des fonds qui y seront destinés extraordinaire-ment, aussitôt que les circonstances le permettront ; et, à défaut, au décès des pensionnaires (art. 2,3 et 4).
L'article 17 excepte de tous les articles précédents les soldes, demi-soldes et récompenses militaires accordées pour retraites aux soldats et bas-ofliciers invalides, les pensions attachées aux charges, plusieurs autres pensions militaires (1).
Il porte aussi que les pensions assignées sur le domaine de Versailles, et dont les fonds ont une destination particulière, continueront d'être payées sur ces fonds.
Aux termes de l'article 18, il ne doit plus être accordé à l'avenir, aux officiers des troupes, aucune retraite ni pension, sous la domination de traitements des officiers entretenus dans les places, ni à la suite des corps ; ordonne néanmoins que ceux qui ont obtenu, par le passé, des traitements à la suite des places, continueront à en jouir.
Le 8 août 1779, il fut donné une autre déclaration, pour régler les faits à établir de la part des pensionnaires, lorsqu'ils se présentent pour recevoir. On peut y remarquer l'article 3, (Recueil des comptes, p. 27.) qui autorise les pensionnaires à donner quittance sans aucune autorisation, même de 1a part des maris à leurs femmes.
M. Necker déclare, dans le compte qu'il a rendu en 1781, que l'expérience lui a fait connaître de plus en plus combien il était utile de fixer une seule époque pour la distribution des pensions. « Cette méthode, qui réunit sous les yeux du » monarque tous les objets en masse, doit néces-» sairement lui en rendre l'étendue plus sensible, » et le mettre à portée de comparer la somme » des demandes avec la mesure de ses moyens ; » d'ailleurs, il est une multitude de ces demandes » auxquelles le moment prête une grande » force, mais dont l'impression s'affaiblit lors-» qu'un peu de temps permet de juger plus froi-» dement de la justice des sollicitations. » Il ajoute que la réunion de toutes les grâces dans un même brevet, leur enregistrement à la chambre des comptes, préviendront une multitude d'abus. Ges formes avaient déjà servi à faire connaître l'étendue des grâces : « Votre Majesté « elle-même a été surprise d'apprendre que ces « différentes grâces formaient actuellement une « charge pour les finances, d'environ 28 millions. « Je doute si tous les souverains de l'Europe en-« semble payent, en pensions, plus de moitié « d'une pareille somme (1) : c'est même un genre
« de dépense presque inconnu dans plusieurs « Etats. »
M. Necker a reconnu, dans les éclaircissements qu'il a donnés, en 1788, sur son compte de 1781, que l'évaluation des pensions, faite à cette date à la somme de 28 millions, était trop forte de 3,200,000 liv.; qu'elles ne se portaient réellement qu'à 24.820.425 liv. 17 s. 9 deniers ; que même en 1781, les payements effectifs n'avaient été que de 23,814,988 1. 3 s. 5 d., y compris les anciens arrérages payés à la mort de chaque pensionnaire. En 1782, les paiements effectifs avaient été de 25,593,3031. 7 s. 11 d. (1).
Dans le compte de M. de Fleury, pour 1783, ( Collection des comptes, p. 188. ) les pensions sont énoncées pour 25 millions (2) ; mais, sans
fiar an [Ibid. p. 394) : il convient qu'il y aurait d'excel-entes raisons à alléguer pour réduire davantage ses nouveaux dons; mais il appréhende que si l'on voulait aller trop loin, l'exécution n'y répondît pas. Il craint que les limites qu'on aurait posées étant une fois franchies, on ne sache plus où s'arrêter. On représentera sans doute, (Ibid. p. 396), ajoute-il, que a 450,000 liv. « ne suffiront pas aux grâces absolument nécessaires », mais il répond : « Ce qui est plus indispensable encore, « c'est d'établir une juste proportion entre les revenus « et les dépenses, entre les récompenses et les divers a besoins de l'Etat, entre les libéralités et le sort du a peuple. C'est l'habitude qui, dans toutes ces disposi-« tions généreuses, forme les plus forts liens: mais de nou-« veaux usages feront bientôt oublier les précédents. Je « ferai même une observation qui s'applique, je crois, à « toutes les grâces : c'est que la facilité avec laquelle a. on en accorde, et le défaut de justesse dans leur dis-« tribu'tion, sont la cause môme des importunités dont « on se plaint; car c'est des comparaisons que naissent « les prétentions, et quand la faveur influe sur les ré-a compenses, les sollicitations n'ont pas de terme, « puisqu'on compte alors parmi les titres tous les droits « qui manquent aux autres. J^es distinctions qui rap-« pellent l'idée du mérite, excitent la plus salutaire « émulation ; mais lorsqu'on voit ces faveurs accordées « à de faibles services ou à de petits talents, on croit « au pouvoir du crédit et de l'intrigue,et, chacun s'exer-a çant alors dans cette voie, on donne à la poursuite « des grâces le temps qu'on devrait employer à les mé-« riter... La mesure dans les récompenses est comme a la proportion dans la beauté : tous les grands effets « en dépendent ; et peut-être qu'en considérant ces ré-« compenses sous un point de vue moral, les gouverne-« ments qui en répandent davantage, sont ceux qui en «c accordent le moins. »
(1) Voici les éléments de cette somme totale, d'après l'état dressé pour être joint au compte du Trésor royal de l'exercice de 1782.
Pensions payées en vertu de brevets.
1. s. d.
Première section. Arrérages de pensions obtenues avant 1782. ..... 22,692,640 3 Seconde section. Portion de pensions
accordées en 1782.......... 786,641 1 8
Troisième section. Décomptes payés
à des successions.......... 1,370,962 9 3
Quatrième section. Décomptes payés à des pensionnaires vivants ..... 35,709 6 4
Pensions payées sur ordonnances (celles des princes, etc.)
Première section.............687,499 6 6
Seconde section. Décomptes .... 17,853 3 11
Total...... 25,593,303 7 11
(2) M. de Calonne dit qu'elles étaient alors à 27 millions. (Réponse à l'écrit de M. Necker, page 196.) M. Necker lui reproche d'avoir avancé ce fait sans aucune preuve. (Eclaircissements sur le compte de 1785, p. 260.)
doute, d'après l'indication donnée par M. Necker, en 1781, on persistait à compter les pensions sur le pied de 28 millions. M. de Galonné évalue à cette somme dans un mémoire, sur lequel il prit les ordres du roi, le 25 juillet 1784, pour faire cesser un abus qui s'était introduit depuis la déclaration de 1779. On se rappelle qu'il avait été ordonné que Je décompte des anciens arrérages dus à cette époque, ne serait payé qu'à la mort de chaque pensionnaire. M. Necker observe que, pendant son ministère, il s'était refusé, d'une manière absolue, à toute demande sur les années arriérées, excepté à la mort des pensionnaires (écrit publié en avril 1787, page 43). Après lui on avait été plus facile : plusieurs personnes avaient demandé des exceptions et obtenu le payement de leur décompte. « Ces exemples « de faveur ( Livre des décisions, t. XI, fol. 157), « dit M. Je contrôleur général, ont tellement mul-« tiplié ies demandes du même genre, qu'il « pourrait en résulter un dérangement réel « dans l'ordre des finances, si le contrôleur géné-« ral ne les rejetait pas presque toutes : « mais il demande une règle de conduite. » Le roi répond qu'il ne faut plus accorder de ces grâces.
Au mois d'avril 1785, M. de Calonne présenta au roi un nouveau travail sur les pensions; il en évalue la masse à 26,000,000 de liv.: ilprésentela nécessité de réduire cette masse ; et il observe que plusieurs de ses prédécesseurs ont vainement tenté d'y parvenir. 11 rend compte des règlements de 1759, de 1776, de 1778 ; il propose de nouvelles vues qui sont adoptées par un arrêt du conseil, du 8 mai 1785. Cet arrêt contient cinq articles. Le premier porte que la somme des pensions et des grâces pécuniaires que le roi permettra qu'on lui propose chaque année, sera réglée et déterminée par lui dans un conseil tenu à cet effet au mois de mars. A cette époque (art. 2), le tableau réuni des pensions et des grâces subsistantes sera mis sous les yeux du roi, avec l'état des extinctions arrivées' dans l'année précédente. Les deux tiers seulement du total des extinctions pourront être proposés en remplacement, l'autre tiers étant supprimé jusqu'à ce que les pensions soient réduites à la somme que le roi voudra fixer. Le montant des deux tiers (art. 4) sera partagé et distribué par le roi entre Jes différents départements. Il ne sera fait fonds (art. 5) que des sommes ainsi arrêtées. Si les grâces accordées montaient au delà, celles qui formeraient l'excédent ne pourraient être regardées que comme des expectatives pour l'année suivante.
Des lettres patentes du 4 novembre 1785 établissent des règles sur la comptabilité des pensions ; et, sous ce point de vue, la plupart des articles qu'elles contiennent sont inutiles à rapporter ; mais il en est quelques-uns qui méritent attention. Les décomptes d'arrérages anciens, suspendus et portés dans les brevets, ne doivent être payés, en tout ou en partie, que sur des arrêts du conseil (art. 13). Les transports et délégations de pensions pour l'avenir ne doivent être valables qu'autant qu'ils seront revêtus de lettres patentes enregistrées à la chambre des comptes (art. 15). L'article 16 dérobe à l'article 10 de la déclaration du 7 janvip^ 1779, qui ordonnait que les étals des pensions seraient remis annuellement à la cùambre des comptes : il porte que le3 rôles et états au vrai, arrêtés au conseil, et qui seront joints à chaque compte du
garde du Trésor royal, tiendront lieu de ces états (i).
Lorsque les notables furent assemblés en 1787, on ne pouvait pas douter qu'ils s'occupassent de l'examen des pensions. M. de Calonne prévint leurs réflexions dans le discours qu'il fit à l'ouverture de l'Assemblée. (Page 14) « Qu'importe, « dit-il, l'apparence de la profusion, si la réalité » est incontestable ? Persuadera-t-on que les li-« béralités sont devenues excessives, lorsqu'il « est constaté, par le compte] effectif de l'année « dernière, que les pensions qui s'élevaient no-« toirement à 28 millions, ne montent plus qu'à « environ 26,et qu'elles continueront nécessaire-« ment de décroître, chaque année, par l'exécu-« tion du règlement du 8 mai 1785? »
Malgré cette annonce de 26 millions pour les pensions, elles sont réllement portées à 27 millions dans les états des dépenses de 1786, et de 1787, qui furent remis aux notables (2). (Observations des notables, p. 306 et 348.) Le3 différents bureaux présentèrent leurs vues sur la réduction. Dans le bureau de Monsieur, on demanda que le fonds des pensions fût.réduit à 18 millions, ce qui devint le voeu uniforme des bureaux; mais on y ajoutait, dans le bureau de Monsieur, la demande que le roi ne permît pas de lui proposer d'en accorder de supérieure à la somme de 6,000 liv. : on y évaluait, par aperçu, à 4,500,000 liv. les retranchements à faire sur les pensions existantes. La plupart des bureaux demandèrent qu'à l'avenir les états des grâces pécuniaires fussent rendus publics par la voie de l'impression. Le bureau de M. le comte d'Artois, insistant pour cette publicité, observa que l'avantage d'un ordre aussi salutaire disparaîtrait bientôt (Ibid., p. 474.), « si le roi ne prenait la « plus ferme et la plus inviolable résolution d'op-« poser toujours une volonté décidée, absolue et « insurmontable à toutes les demandes qui se-« raient faites d'employer des dons, des pen-« sions ou des dispositions quelconques de « bienfaisance, au nombre des dépenses secrètes « portées dans les acquits de comptant (états de « comptant). Un seul exemple de ce genre aurait « les conséquences les plus fâcheuses... ren-« drait un libre cours aux libéralités non méri-« tées et surprises. »
Lès notables demandèrent qu'il ne fût point accordé de survivance avec gages ou appointements ; ils s'élevèrent contre la concession des croupes, des intérêts dans les affaires ou sur les places de finance. L'abus des croupes ou intérêts dans les places était devenu d'autant plus intolérable qu'il avait été étendu jusque sur des Offices de judicature. Il existe encore aujourd'hui (état envoyé par M. de La Luzerne), pour 68,099 livres de pensions accordées, avant le mois de décembre 1787, sur les offices de judicature et autres, dans les colonies des Iles-du-Vent et sous le Vent, et dans celles des Iles de France et de Bourbon.
Une partie des observations des notables furent
(2} Cette masse» de pensions est détaillée (pag. 325) comme il suit :
Guerre................ 16,000,000 1.
Marine....................2,000,000
Affaires étrangères. . . . . . . . . . . 590,000
Maison du roi. . ..... ... . . . . . . 4,000,000
finance et magistrature . ... ... . . 5,410,000
adoptées par l'arrêt du conseil du 13 octobre 1787. Il établit, pour le moment actuel, des retenues ; pour l'avenir, des règles destinées à assurer l'économie.
L'article premier porte des ordres absolus pour parvenir enfin à composer un état général et exact de toutes les grâces pécuniaires prises sur le Trésor public : cet état devait être revêtu de lettres patentes qui seraient adressées à la chambre des comptes pour y être enregistrées.
Le mois de mars de chaque année était l'époque indiquée (art. 2) pour la concession des nouvelles grâces. Il devait être remis, par chaque ministre et par chaque ordonnateur, une feuille motivée des grâces dont la demande lui aurait été adressée pendant le cours de l'année : cette feuille devait être émargée des décisions du roi ; le relevé devait former un état qu'on enverrait a la chambre des comptes, et que l'on rendrait public par la voie de l'impression.
Par l'article 3, le roi se réservait la faculté de disposer, dans l'année et pour gratifications momentanées, du quart des extinctions survenues pendant l'année précédente. Ces gratifications ne pouvaient pas monter à plus de 1,000 livres pour une même personne, ni être accordées deux années successives au même individu.
On réservait aux ordonnateurs à rendre compte au roi, durant le cours de l'année, des grâces qui pourraient être méritées; mais l'approbation du roi ne devait être définitive qu'au moment du travail général, au mois de mars.
La même époque était fixée (art. 5) pour la décision des demandes en réversion ou assurance de grâces pécuniaires. La masse des pensions pour l'avenir était réglée à quinze millions; et jusqu'à ce que les réductions fussent arrivées à cette somme, il ne devait être accordé de nouvelles grâces;, chaque année, qu'à concurrence de la moitié des extinctions de l'année précédente, connues et constatées. L'article 6, qui prononçait ces lois, entrait dans tous les détails nécessaires à leur exécution.
L'article 7 déclare toute pension ou grâce pécuniaire éteinte, lorsqu'on obtiendra une place, charge ou emploi ; mais il laisse l'espérance de la conserver, si elle est confirmée par le roi.
L'article 9 renouvelle les dispositions des règlements dont nous avons déjà rendu compte, pour que toutes les grâces pécuniaires soient acquittées au Trésor royal. Aucune grâce postérieure à l'arrêt ne doit être acquittée au Trésor royal, si elle n'est comprise dans les états qui seront enregistrés à la chambre des comptes, imprimés et publiés.
L'article 11 détermine les retenues à faire sur toute grâce pécuniaire actuellement existante. Celles de 2,400 livres et au-dessous ne doivent éprouver que ies retenues ordonnées par l'arrêt du 29 janvier 1770; de 2,400 livres à 8,000 livres, elles sont assujetties à la retenue de trois dixièmes et demi; de 8,000 liv. à 20,000 liv.,à trois dixièmes et demi; au-dessus de20,000 liv., à quatre dixièmes. Ces retenues sont établies pour cinq ans.
Les retenues ne doivent avoir lieu ni sur les anciens arrérages de pensions converties en rentes viagères, ni sur les pensions accordées par le feu roi de Pologne, ni sur les pensions non excédant 3,000 livres, qui appartiendront à des personnes âgées de 75 ans révolus.
Une instruction publiée en 1788 donne des explications à quelques articles. On y lit que les pensions accordées depuis le. premier mai 1787 ne doivent être sujettes à aucune retenue ; cette
décision avait été prononcée par Je roi le 23 décembre 1787 (Reg. des Décis.; tom. XIII, fol. 211) ; que les octogénaires, à la date du premier janvier 1788, n'éprouveront aucune retenue; que l'exemption accordée à ceux qui ont 75 ans comprend tous ceux qui ont acquis cet âge avant le premier janvier 1788 ; que les pensionnaires qui acquerront, pendant les cinq années pour lesquelles les retenues sont établies, l'âge de 80 ans ou l'âge de 75 ans, jouiront des exemptions attribuées à cet âge. Par une dernière disposition de l'instruction, on annonce que les pensions ne seront payées aux personnes sujettes à la capitation, que sur la représentation d'un duplicata de leur quittance.
Mais le 12 juillet 1788, un nouvel arrêt du conseil renversa une grande partie des dispositions de l'arrêt de 1787. Il prononça l'exemption de toute retenue en faveur de plusieurs espèces de pensions ; d'autres, notamment les retraites des ministres, jusqu'à 20,000 livres seulement, furent déclarées sujettes à la seule retenue du dixième. Les appointements dè gouverneurs ou d'officiers militaires, rejetés sur le Trésor royal, sont assujettis à la retenue du dixième et des quatre deniers pour livres, affranchis des autres retenues. Les pensions pour indemnité et prix d'immeubles, ou pour tout autre motif onéreux, sont déchargées des retenues, après que leur origine aura été reconnue et jugée. (Lettre d'envoi d'une copie de l'arrêt du 11 mai 1790.) Ou a eu l'attention de ne pas faire imprimer cet arrêt.
Les dispositions de l'arrêt du conseil de 1787, relativement à l'époque et à la somme des grâces accordées, ont été exécutées dans le département des affaires étrangères par M. le comte de Mont-morin. Gela est justifié par une feuille de travail, du 4 mars 1789, que le comité a eue sous les yeux,, et qui en relate une autre du mois d'avril 1788. Dans le département de la guerre, il a été présenté un tableau de ce qui devait être accordé en pensions, à raison des extinctions. Il ne devait en être donné que pour 312,000 livres; mais dans le fait.il en a été accordé 1,823,174 livres au delà, pour cause de retraites et de réformes. Dans le département de la marine, M. de La Luzerne ayant observé que, d'après les dispositions de l'arrêt de 1787, les fonds actuellement destinés au département de la marine deviendraient insuffisants, s'ils n'étaient employés avec une sage économie, présenta au roi un règlement en 26 articles, quicontient des dispositions très sages sur la concession des pensions. Il existe aussi dans d'autres départements, au bureau de la guerre, à l'administration des postes, à celle des domaines, des règles d'après lesquelles les pensions accordées aux commis qui se retirent doivent être déterminées, soit pour la somme à laquelle elles peuvent monter, soit pour le temps de service qui peut les mériter : mais nous ne devons pas nous livrer au détail de ces règles particulières ; elles pourront être rappelées avec fruit quand il s'agira de proposer les règles sur les pensions à accorder dans les divers départements. Ici, il n'est question que de faire connaître les règlements généraux.
La disposition de l'arrêt de 1787, qui ordonnait l'envoi de l'état des pensions à la chambre des comptes, n'était pas exécuté au mois de janvier 1788. La chambre (observations sur la comptabilité, p. 50), en enregistrant, le» 17 de ce mois, un édit de novembre 1787, portant création d'emprunts successifs, arrête que le roi
sera supplié d'adresser incessamment l'état des pensions. (Lettre de M. le premier président de la chambre des comptés, du 21 mai 1790.) L'envoi ne paraît pas avoir été fait depuis cette époque.
Dans le compte présenté au roi par M. l'archevêque de Sens, au mois de mars 1788, les pensions sur le Trésor royal sont portées à 27 millions; mais, en parcourant ce Compte, on y aperçoit environ six millions d'autres sommes employées en dons et gratifications.
Le compte général des revenus et défenses fixes, distribué à l'Assemblée au mois de janvier dernier, page 132, porte toutes les pensions à 29,954,000 livres ; il énonce d'ailleurs pour environ quinze millions de dons, secours, aumônes et gratifications, ce qui donne un aperçu de 45 millions.
Tel est le résultat des lumières que le comité des pensions a recueillies sur l'état ancien des grâces pécuniaires ; sur leur augmentation progressive ; sur les lois par lesquelles on a réglé leur distribution et leur payement; enfin sur le montant de leur masse, tel qu'il a été présenté jusqu'ici. Exposons maintenant plus en détail quel est l'état actuel de la masse des grâces pécuniaires ; quelle est leur distribution ; quels sont les abus existants.
§ III.
État actuel des grâces pécuniaires ; leur montant ; leur distribution; leurs abus.
Nous entendons par grâce pécuniaire, en général, toute somme donnée pour un autre motif que pour le prix d'un service actuel et effectif; ainsi les aumônes, les secours, les encouragements, les récompenses données, soit pour la vie, soit momentanémenl, sont des grâces pécuniaires.
Sans doute, dans le nombre de ces grâces, il en est de très justes ; il en est dont l'acquit est de nécessité première; et l'on se méprendrait totalement sur les vues du comité, si l'on s'imaginait que, parce qu'il se plaint des abus de grâces, il attaque leur existence. L'État doit des secours à ceux qui sont tombés dans un besoin dont il leur est impossible de sortir ; l'État doit des récompenses ; l'utilité de l'État demande qull accorde des encouragements; la grandeur d'une nation la porte à être libérale. Tout cela est vrai, tout cela est reconnu par le comité : il pense seulement que sur tous ces objets, il faut d'abord une sage modération pour ne pas perdre au lieu de donner; et qu'ensuite il faut une. différence entre le temps où le Trésor public est opulent, et le temps où ce Trésor est obéré.
Voyons ce que la nation donne dans l'état actuel de ses finances ; satisfait-elle à ses obligations, ou les excède-t-elle ?
La masse des grâces pécuniaires se divise en plusieurs parties, soit à raison des causes pour lesquelles on les donne, soit à raison des titres sous, lesquels on les accorde. Il serait impossible de tracer, de l'ensemble de cette masse des pensions, un tableau plus vif que celui qui a été fait par M. Necker, dans son compte de 1781 ;
« Lés mélanges d'état par des alliances (pages « 28 et 29), l'accroissement du luxe, lé prix qu'il « oblige de. mettrè à la fortu'pë, enfin l'habitude, « ce grand maître en toutes .choses, avaient fait « des grâces qui peuvent émaner du trône, la « ressource générale ; acquisitions de charges,
« projet de mariage et d'éducation, pertes impré-« vues, espérances avortées, tous ces événements « étaient devenus une occasion de recourir à la « munificence du souverain ; on eût dit que le « Trésor royal devait tout concilier, tout aplanir, « tout réparer ; et comme la voie des pensions, « quoique poussée à l'extrême, ne pouvait ni « satisfaire les prétentions, ni servir assez bien « la cupidité honteuse, l'on avait imaginé d'au-« très tournures, et l'on en eût inventé chaque « jour. Les intérêts dans les fermes, dans les « régies, dans les étapes, dans beaucoup de places « de finances, dans les pourvoiries, dans les « marchés de toute espèce, et jusque dans les « fournitures d'hôpitaux, tout était bon, tout « était devenu digne de l'attention des ner-« sonnes souvent les plus éloignées, par leur « état, de semblables affaires. Indépendamment « de ces différents objets, on sollicitait encore « les engagements des domaines de Votre Majesté, « les échanges onéreux à ses intérêts, l'accen-« semment favorable de terres en non-valeur, ou « la concession des forêts qu'on prétendait aban-« données. Enfin, venaient aussi les payements « de faveur sur des pensions arréragées, l'acquit-« tement de vieilles créances quelquefois achetées « à vil prix, leur admission dans les emprunts, « et tant d'autres manières encore, toutes d'au-« tant plus dangereuses que pour de pareilles « grâces, le consentement même du monarque « n'était pas nécessaire, puisque, sous la couleur « de la justice, ou d'un arrangement d'adminis-« tration, le ministre seul pouvait déterminer ces « dispositions. Cependant, ces formes une fois « introduites, on sent aisément combien elles de-« vaient plaire. L'obscurité prévenait la réclama-« tion publique ; et l'apparence d'une convenance « réciproque délivrait encore du joug de la re-« connaissance. »
En considérant en détail les grâces pécuniaires, la première partie sera composée de suppléments de traitement, indemnités, pensions attachées aux places, récompenses et gratifications ordinaires. Ces sortes de grâces tiennent à la place plutôt qu'à la personne ; elles sont données à l'occasion d'un service qui se fait, mais elles ne sont pas le prix de ce service ; elles sont un excédent accordé à la faveur ou au désir de tenir les personnes qui occupent la place, dans une certaine dépendance. On peut évaluer cette partie à la somme de 6,654,260 livres (1).
Les traitements attachés à l'admission dans les différents ordres de chevalerie, soit sous le nom de commap.deries, soit sous toute autre dénomination, sont une seconde espèce de grâces pécuniaires d'autant plus recherchées, que se trouvant jointes à une décoration extérieure, elles flattent en même temps la vanité et la cupidité. Les revenus des ordres du Saint-Esprit, de Saint-Louis, du mérite militaire et de Saint-Lazare, montent à 1,810,478 livres: ceux de l'ordre de Malte ont été évalués, lors de la contribution patriotique de cet ordre, à 4,284,651 livres.
11 y a, en troisième lieu, des dons d'aumône accordés à une nécessité plus ou moins réelle, mais toujours dans l'intention de procurer à des malheureux la subsistance qu'ils n'ont pas. Ces aumônes, dons, secours accordés à des particuliers, à des communautés, quelquefois à des
étrangers, aux dépens du Trésor public, et annuellement, s'évaluent à 5,600,417 livres.
L'article des pensions personnelles, desquelles nous formons la quatrième partie des grâces pécuniaires, mérite une attention spéciale, à raison de la multitude des objets sur lesquels elles étaient accordées, et sur lesquels il en subsiste encore. Nous avons déjà remarqué qu'avant la déclaration de 1779, elles étaient éparses dans tous les départements. Leur réunion sur le Trésor royal n'est pas encore complète. Le directeur du Trésor royal convient que (lettre de M. Dufresne, du 16 mars 1790), quand il s'est agi de rédiger le compte des dépenses fixes qui a été distribué à l'Assemblée, il s'est aperçu qu'on payait encore des pensions dans différentes caisses; il les a détaillées dans le compte de dépenses fixes ; (pages 111-113), -pensions que l'adjudicataire des fermes paye aux officiers au conseil et autres; pensions, gratifications et traitements annuels que le même adjudicataire paye à diverses personnes; pensions de l'Opéra; pensions sur la caisse des Monnaies. Il en existait que le directeur du Trésor royal convient n'avoir pas connues alors, telles que" celles qui se payaient sur les fonds particuliers de la police de Paris. Il en existe d'autres encore ; on en paye jusque sur les fonds de la mendicité. Ce sont toutes ces pensions que le comité fait imprimer dans un volume particulier, sous le titre de Pensions sur d'autres caisses que le Trésor royal ; et le volume sera très considérable.
Mais ce n'est pas encore assez de savoir qu'il existait des pensions sur différents fonds ; il faut savoir comment on disposait une partie des fonds de quelque département que ce fût à se convertir en pensions.
Il n'y avait, pour ainsi dire, aucune partie de recette et de dépense qui ne fût réglée avec assez de latitude, pour qu'à la lin de l'année il restât une somme que l'on pût donner. Ainsi sur l'imposition de la capitation, sur le produit des vingtièmes des offices et droits de la ville de Paris, sur l'imposition des fourrages dans les provinces qui y étaient assujetties, il restait ce qu'on appelait ailleurs un bon de masse, ce que l'on appelle ici fonds libres ou hors fonds; et sur ces fonds on assignait des pensions. Les pensions sur les fourrages d'Alsace et de Franche-Comté seront imprimées. A l'égard des pensions sur les fonds libres de la capitation, il n'y a rien de si commun que cette assignation dans les décisions dont le comité a vu les originaux ; on avait même trouvé le moyen de la faire subsister depuis les lois qui avaient ordonné que toutes les pensions seraient payées sur le Trésor royal. On donnait la pension sur le Trésor royal, mais on faisait augmenter d'autant la somme de la capitation à verser au Trésor royal (1).
Il en était de même pour les dépenses. Nous parlerons, dans un moment, de l'usage qu'on faisait de leur excédent ; mais ces deux ressources ne suffisant pas encore, toute recette nouvelle, tout ce que l'on pouvait appeller revenant bon, et qui ne montait pas à une somme fort considérable, était employé en pensions. Nous avons déjà eu occasion de citer le produit des domaines affermés à Hacquin (1); un excédent de fonds sur le Port-Louis (2). Il faut y joindre un fonds affecté à la bienfaisance sur la loterie royale (3); des deniers recouvrés aux fermes pour des restitutions (4); une recette appellée recette d'escompte (5). Un excédent de recette sur la petite
« Signé : Foacier. »
poste, dans le temps que son administration était séparée de la grande poste, fournissait aussi à des pensions (1) ; on en accordait sur des sommes annuelles à la charge des journalistes (2), et sur plusieurs autres objets de ce genre, dont le détail serait minutieux ou impossible, parce que le comité ne les a pas tous connus.
Les pensions qui se payent par brevets sur le Trésor royal, et qui, dans l'état que le comité fait imprimer, sont partagées en sept classes, àraison de la différence de leurs sommes, s'élèvent au total à 29,252,874 liv. (3). Cette somme se partage entre 22,090 pensionnaires, parmi lesquels on compte 1,016 personnes âgées de quatre-vingts ans et au-dessus, qui jouissen t ensemble de 1,540,093 1. et 3,481 personnes âgées de soixante-dix à quatre-vingts ans, dont les pensions montent à4,938,0841. M. Necker dit, dans son Traité de l'administration des finances (tom. II, p. 93), qu'on peut évaluer, d'après l'expérience, l'extinction annuelle des pensions,à trois etun quart pour centenviron : ce qui donnerait, sur la somme totale qu'on vient d'indiquer, à peu près 950,000 livres par an, mais il faut observer qu'il existe des brevets d'assurance pour la somme de 1,572,814 liv., distribuées entre 1,004 personnes. Il y a lieu de croire qu'il ne passe guère plus du septième de ces pensions dans les provinces (4), et que ce septième est partagé entre 6 à 7,000 individus.
Les pensions qui se payent ailleurs qu'au Trésor royal peuvent être évaluées à 3,749,241 liv. (5).
On peut ajouter aux pensions, et cependant il
convient de faire une classe particulière (la cinquième), des gouvernements, des provinces, villes et châteaux, parce que ces places n'ont aucun service nécessaire, et qu'elles n'exigent pas résidence. Ceux qui en sont pourvus ne peuvent remplir les fonctions qui semblent naturellement attachées à leur titre, sans un ordre exprès du roi (1), et cet ordre est accompagné d'un traitement particulier, qui subsiste tant que les fonctions s'exercent. Le produit des gouvernements est difficile à évaluer d'une manière exacte, à cause de la division des parties sur lesquelles les honoraires et émoluments de ces places sont à prendre; les émoluments surtout sont difficiles à calculer, parce qu'ils se prennent sur les lieux, et quelquefois d'après des titres assez peu connus. Par exemple, M. le maréchal de Noailles est gouverneur de Sain t-Germain-en-Laye ; et, sous différents titres attachés à cette qualité, il est porté sur l'état des domaines et bois pour la généralité de Paris (2), pour la somme de 13,376 liv. 1 s. 4d.
Plus, il a, par une décision du conseil, dont l'existence est attestée par les bureaux du domaine, la jouissance de tout le domaine de Saint-Germain et des droits seigneuriaux ; ce qu'on évalue environ à. ....... . 25,000
Total . .... 38,376 liv. 1 s. 4 d.
Le produit connu des gouvernements monte à la somme de 2,562,393 liv. (1).
La sixième classe des grâces pécuniaires sera composée des encouragements donnés sous le nom déprimes, ou sous toute autre dénomination. On peut en évaluer le montant à la somme de 3,990,330 liv. (2). .
La septième classe sera formée des gratifications extraordinaires et momentanées, qui ne s'assignent que pour une fois, quoiqu'elles se réitèrent souvent en faveur de la même personne. Quelquefois elles se donnent en meubles ou autres objets ; le plus souvent en argent. En réunissant plusieurs années de ces gratifications pour en faire une année moyenne (états à la suite du rapport, n° IX), nous" pensons que cette année moyenne peut être évaluée à 932,082 liv.
Voilà déjà une masse totale de 58,836,721 liv. qui est donnée annuellement dans le royaume; mais il y a une grande addition à faire, pour des objets dont les uns peuvent être évalués d'une manière précise : les autres ne présentent pas une valeur connue quant à présent, et offrent néanmoins, soit seuls, soit par leur réunion avec d'autres parties, un aperçu considérable.
1° L'Assemblée nationale ayant décidé que les biens, dont les ecclésiastiques jouissaient précédemment, étaient des biens nationaux, ne doit-on pas regarder comme pris sur les fonds nationaux les revenus des abbayes et des prieurés en eom-mende, à la possession desquels il n'était attaché aucune résidence ni aucun service, et pareillement les pensions que le roi accordait sur les bénéfices ? Il faut laisser au comité ecclésiastique à donner l'évaluation du revenu des bénéfices possédés en çommende. Quant aux pensions sur les bénéfices, on peut, d'après les états qui ont été envoyés, en établir l'aperçu à 1,622,472 livres (3).
2° Il existe des juifs à Metz. On sait que ceux-là ne jouissent pas encore du droit de cité. Ils avaient besoin, dans certaines occasions, d'être défendus contre les suites funestes de préjugés aveugles et barbares, et cette protection qui leur était due, leur a éié vendue. Le malheur de leur état est devenu un fonds sur lequel on a assis un produit annuel en argent. Louis XV, ou plutôt le régent, par des lettres patentes du 31 décembre 1715, accorda à la comtesse de Fontaine et au
duc de firancas la cession de ce qui devait être payé au roi'par les juifs de Metz, pour droit d'habitation, protection et tolérance, par ehaque famille juive établie dans la ville de Metz. Ce droit a été abonné à 20,000 liv. par an. La première cession avait été faite pour trente aonées ; elle fut renouvelée pour trente autres années, par un brevet du 15 décembre 1732, en faveur du mariage que M. le duc de Lauragais était sur le point de contracter avec M1U de Mailti. Quoique le renouvellement ne dût expirer qu'au 31 décembre 1775, la maison de Brancas a pris la précaution d'obtenir, dès 1750, le lep mai, un nouveau brevet de prorogation jusqu'en 1805 (1).
3° Des charges a la bienséance de personnes favorisées (Voyez le Livre rouge, p. 19), étaient vacantes aux parties casuelles ; on les obtenait gratis ; et au moyen d'une ordonnance de comptant, on les levait avec une feuille de papier, au lieu de verser dans le Trésor public les sommes pour lesquelles l'office avait été créé.
4° C'est encore un don, que la remise des retenues qui devaient être faites sur les pensions aux termes des arrêts du conseil de 1770 et de 1787. Un grand nombre de pensionnaires ont abusé du erédit dont ils jouissaient, pour obtenir l'affranchissement de ces remises. Quelquefois il a été accordé sur le prétexte que la somme que l'on touchait était un traitement plutôt qu'une pension; mais dans d'autres circonstances ce son t de véritables pensions qu'on a exceptées des retenues. C'était bien sur une pension de 15,000 liv. (vu l'original), que M. Coster a été affranchi des retenues par une décision du 3 mai 1789. De pareilles grâces ne s'accordaient pas à des pensionnaires éloignés de la capitale ; on ne les accordait pas à des militaires, sur leurs modiques pensions.
Il y avait plusieurs manières d'obtenir l'affranchissement des retenues. Quelquefois une décision formelle prononce la franchise ; on vient de le voir par rapport à M. Coster : d'autres fois, on faisait expédier une ordonnance de comptant, pour couvrir du montant des retenues (p. 33 et 58) : on a des exemples pour Mme de Poiignac, dans les états de comptant de 1783. Un troisième moyen était de faire refaire, sous une date postérieure à 1787, les brevets d'une date antérieure; parce que, comme nous l'avons remarqué ci-deèsus, p. 3,8, les pensions accordées après le 1er mai 1787 n'étaient pas sujettes aux retenues. Il nous est tombé sous la main deux exemples de cette opération. M. de Fourcroi, directeur dés fortifications (vu l'original de la décision), a 13,000 liv.de pensions par un brevet du 26 novembre 1788 : ce brevet en remjplâce ùri qui était de 1785. Le 17 janvier 1789, M. Coindet, secrétaire de M. le premier ministre des finances, (idem) expose qu'il jouit, en vertu d'une décision du 4 juin 1781, d'une pension de 4,000 liv.; qu'il jouit, de plus, d'une gratificaiion de 2,Q00 liv. sur les fermes. Il observe que ces pensions étant sujettes aux retenues, sont hors de proportion avec les services qu'il a rendus (2), et surtout avec la manière honnête et désintéressée dont il les a rendus. Il demande à être exempt des retenues et il prie M. le premier ministre des finances d'approuver qu'un nouveau brevet lui soit expédié. Au pied
de ce mémoire est, de la main de M. de Necker, approuvé; et de la maiu du roi, bon. Le nouveau brevet a été expédié sous la date du 17 janvier 1789. Le traitement de M. Coindet, comme secrétaire de M. le premier ministre (vu le brevet), est de 12,000 liv.; il est porté d'ailleurs sur le registre des ordonnances de 1789, pour une gratihcation de 12,000 livres.
5° Nous devons compter parmi les dons, les abonnements de vingtièmes accordés aux princes. (Pag. 15). On a le relevé de ces abonnements : dans l'état des revenus fixes. Monsieur, M. le ; comte d'Artois, M. le duc d'Orléans, M. le prince de Condé, M. le prince de Conti et M. le duc de Penthièvre, payent pour les vingtièmes de leurs biens-fonds 18®,700 livres, ce qui ne les supposait propriétaires que de 5,887,000 liv. de revenus en fonds. Il n'est pas difficile de sentir quelle faveur c'est d'obtenir de pareils abonnements; mais pour mieux le concevoir encore, il faut y comparer ce que le Trésor public paye pour raison des mêmes abonnements. C'est une énigme à expliquer. Les abonnements accordés aux princes ne peuvent pas avoir leur effet dans les pays d'Etats dont les revenus sont, en quelque manière, séparés de ceux du Trésor public, où se versent les abonnements. Les fonds que les princes possèdent dans oes provinces, y sont imposés; mais on tient compte, par une remise, qù on ' fait aux trésoreries des pays. d'Etats, des sommes qu'ils devraient- toucher des princes, qu'ils ne touchent pas. Ainsi l'on remet au trésorier des Etats de B retagne 41,897 liv. (état des dépenses fixes, p. 163.) pour les vingtièmes qu'il devrait toucher, à cause des fonds possédés par M. de Penthièvre dans cette province; et l'abonnement de M. de Penthièvre étant de57,000liv., il s'ensuit que le prinee ne paye que 15,203 liv. de vingtièmes pour tous les biens qu'il possède en fonds hors de la Bretagne (le duché d'Am-boise, Vernon, Armainvilliers, Sceaux, l'hôtel de Toulouse, etc,).
6° Quand Fabortnement n'a pas paru assez favorable, on a pris l'impôt d'une main et on Fa rendu de l'autre, (i'est l'objet de deux articles (entre autres) qu'on trouve dans les états de comptant. A M. de Maupeou, chancelier de France, (états de 1783, p. 59) pour indemnité des dixièmeset capitation dont la retenue lui a été faite au Trésor royal sur son traitement, 15,525 livres; à M. Miro-mesnil, garde des sceaux, idem, 12,400 livres. Des impositions ainsi perçues sont loin d'être productives à l'État : non seulement il n'en reste rien dans le Trésor, maisencore il faut payer ceux qui comptent et de leur entrée et de leur sortie : on gagnerait plus à ne pas imposer, qu'à imposer pour rendre.
7°. Plusieurs titulaires de charges, dans la maison du roi et ailleurs,. Obtiennent des brevets de retenue sur leur charge. La décision du roi, par laquelle, en cas de mort ou de démission du titulaire; celui qui lé remplace, doit payer à ce titulaire ou â ses héritiers une somme portée dans le brevet, est un don. Le breVét dé rétenue n'est pas l'indemnité d'une, somme versée dans le Trésor publie; c'est une. pure, gratification en faveur de celui qui le premier obtient un brevet de retenue sur sa charge. Nous disons le premier, parce que, quand on crbtient un brevet de retenue sur une charge déjà grevée d'une pareille grâce, ce n'est alors qu'uue indemnité, une assurance du remboursement de ce que le titulaire a payé à son prédécesseur; mais il reste à faire remplacer le brevet subsistant par un nouveau
brevet de plus forte somme, et l'on n'a pas manqué de faire usage de cette ressource.
Passons à des intrigues un peu plus compliquées.
Les uns ont présenté les demandes qu'ils formaient, (Voyez à la suite du rapport les pièces cotées n° XI.) comme une juste indemnité à raison de pertes dans des entreprises faites pour l'Etat. Beaucoup de personnes réclament aujourd'hui, sur ce fondement, la conservation de leurs pensions. Tant que les sommes accordées pour de pareilles causes sont encore sur la liste des pensions, le comité a dû les comprendre dans le calcul général des pensions; mais quand elles auront été rayées de ces listes, comme n'étant pas de véritables pensions, ce sera au comité de liquidation à juger des motifs de les conserver, de les réduire ou de les supprimer.
D'autres personnes, au lieu de solliciter des pensions, ont demandé des concessions de domaines, des échanges ; elles ont proposé la vente d'objets dont elles étaient propriétaires ; et alors la faveur ou l'intrigue ont augmenté le prix; comme quand on a payé, en vertu de la décision du 24 juillet 1785, 16,000 liv., à M. de Beaumarchais, pour de vieux parchemins qu'il avait fait transporter à la bibliothèque du roi (1) (Voyez à la suite du rapport la pièce cotée n° IX.) On a demandé le remboursement soit de pensions, soit de rentes viagères ; d'autres ont demandé le prix de la rétrocession d'objets qui leur avaient été donnés (2). La plupart de ces opérations recèlent des libéralités, tantôt libres et volontaires de la part du roi, tantôt surprises par les concessionnaires. C'est au comité des domaines à rendre compte des déprédations qui ont lieu à cet égard .
On s'est fait donner des gratifications annuelles, pour être indemnisé du profit d'abus qui avaient été sagement supprimés. Nous avons vu l'enregistrement d'ordonnances déjà expédiées pour cette année même 1790, mais non encore payées, à trois des garçons de la chambre de la reine, de 15,600 liv., pour indemnité du retour des bougies supprimées, auxquelles ils avaient droit. Semblable ordonnance de 20,000 livres aux deux premières femmes de chambre de Madame Elisabeth, pour le même objet.
Les prêts- pour le Trésor royal sont une autre source de libéralités; car on conçoit bien que les prêts de ce genre ne sont pas toujours exacte-ment rendus. Le comité a demandé à connaître le montant de ce qui était dû à ce titre : jusqu'à présent il n'a pu en obtenir l'état (3). Sans doute,
en établissant la nouvelle comptabilité du Trésor royal, on prendra les précautions nécessaires pour la rentrée de ces sommes.
On a sollicité et obtenu une remise soit des droits seigneuriaux, soit des droits de marc d'or, et autres de ce gen re. Et qu'on ne s'imagine pas qu'il s'agisse que de sommes modiques : nous voyons, dans l'état de comptant des six derniers'mois 1775 (arrêté le 26 septembre 1787), une ordonnance de 158,121 liv. à M. de Lambesc, pour remise des droits féodaux pour l'acquisition de Limours ; et dans l'état de comptant des six premiers mois de la même année, une ordonnance de 169,603 livres, en faveur du comte de Luzace, pour les droits de partie du marquisat de Pons ; plus 15,000 liv. pour les droits dus au bureau des hypothèques, à raison de la même acquisition (l). Monsieur a obtenu le 29 avril 1787, une ordonnance de 136,660 liv., pour remise de droits, à cause de l'acquisition de la baronnie de Sainte-Assise. On se tromperait encore si l'on pensait que de pareilles libéralités ne causent d'autre dommage au Trésor public, que le défaut de rentrée de fonds ; elles causent une sortie effective de fonds, parce que plusieurs officiers des domaines ayant à prendre, dans les droits seigneuriaux, une part qui leur a été abandonnée, pour les exciter à veiller au recouvrement, on leur paye cette part sur les droits dont le roi fait grâce, comme elle leur serait payée sur une recette effective.
il est un genre de dons qui a laissé peu de vestiges : ce sont les sommes données dans les divers départements sur les fonds assignés pour les dépenses secrètes et imprévues. M. Necker nous a appris, dans son Traité de Vadministration des finances, à nous défier de l'emploi des sommes assignées aux dépenses imprévues. « Cette dé-« pense, dit-il (tom. II, p. 513), dépend et des cir-« constances et de la sagesse de l'administration; « car c'est dans un pareil article que peuvent se « ranger et l'acquit des dettes des princes et des « grands seigneurs, et les gratifications, et les fêtes, « et les bâtiments extraordinaires, et tous les sa-« crifices de libéralité, de profusion, de négligence « et de maladresse. » Ailleurs, il dit que l'article des dépenses imprévues est celui sur lequel chacun croit avoir des droits, et que, par cette raison, il ne faut jamais élargir. On donnait, sur ces dépenses imprévues, des gratifications; on faisait payer des pensions sur ces fonds ; nous en avons la preuve (2) ; mais il est impossible d'évaluer la somme de leur montant.
Souvent il a été donné des sommes considérables pour le payement de dettes de particuliers. (Registre des décisions, tom. XI, fol. 364.) Par exemple, on accorde, le 13 Mars 1785, 200,000 livres à M. de Sartines pour payer ses dettes. Il avait demandé 300,000 livres; le roi l'avait refusé. M. de Sartines expose sa situation plus en détail; il promet de payer à ses créanciers 100,000 livres en dix ans; il représente qu'alors il ne lui restera plus que 54,000 livres de revenu : il obtient 200,000 livres, payables en quatre ans, de semestre en semestre (1).
Le 13 janvier 1780 (vu la décision au bureau des affaires étrangères), le baron de Breteuil, ambassadeur à Vienne, expose que les secours passagers, obtenus à différents temps de Sa Majesté, n'ont pu le mettre en état de se libérer ; qu'il reste encore chargé d'une masse considérable de dettes dont le poids l'inquiète, particulièrement d'une somme de 160,000 livres que le sieur d'Har-velay, garde du Trésor royal, a bien voulu lui prêter, et dont il désire vivement être soulagé. Il supplie le roi de daigner recevoir à sa charge la dette de 160,000 livres; le roi y consent et paye la dette.
En 1785, M. O'Dunne, ambassadeur à Lisbonne (ibidem), obtient du roi 220,000 livres, tant pour son retour en France que pour servir à la libération de ses dettes.
Le comte d'Adhémar, ambassadeur du roi en Angleterre (ibidem), avait reçu 150,000 livres pour frais de voyage et premier établissement. Le 30 avril 1784, il présente un mémoire dans lequel il expose que son établissement lui a coûté plus de 400,000 livres. Le ministre déclare qu'il est obligé de désapprouver l'imprudence avec laquelle M. l'ambassadeur s'est laissé entraîner à des dépenses fort au-dessus de ses moyens; cependant, pour prévenir l'humiliation et le scandale des poursuites ou des réclamations, le ministre détermine le roi à accorder au comte d'Adhémar 100,000 livres par forme de supplément aux dépenses de son premier établissement.
On n'a pas oublié, sans doute, les dons faits et les engagements pris pour payer les dettes de M. le comte d'Artois, qui sont rapportés dans le livre rouge : on se rappelle que ces dettes montaient à 14,600,000 livres de sommes exigibles (livre rouge, pag. 13); 74,740 livres de rentes constituées; 908,700 livres de rentes viagères.
On a donné, et trop souvent, dss rentes constituées surl'Eiat à des personnes qui ne fournissaient aucun capital. Cette forme de donner est dangereuse, parce que, commeelle ne tire point du Trésor royal ce qui n'y serait pas, ou ce qui aurait une destination fixe, il est possible de consentir à de tels dons dans le temps de la plus grandepé-nurieduTrésor public. Elle est dangereuse, parce que rien n'annonce alors au public l'apparence d'un don : celui qui a obtenu le don se trouve transformé, par la nature même du don, en créancier de l'Etat; il estau niveau du citoyen honnête qui a prêté son argent au Trésor public à un in-
térêt légitime, quelquefois même à un intérêt inférieur au taux ordinaire; enfin, cette forme est dangereuse, en ceque les rentes ainsi données étant une fois entrées dans le commerce, et ayant passé de main en main, celui qui les perçoit n'offre plus aux yeux du public la personne d'an homme qui a pillé le Trésor public, mais la personne d'un acquéreur légitime auquel il serait injuste de faire supporter la peine d'une faute qui lui est étrangère.
Des dons de cette espèce ont eu lieu à l'occasion de plusieurs emprunts : ils ont été singulièrement multipliés à l'égard d'une constitution de rentes à 4 0/0 établie en 1770. Il aurait été excessivement long et extrêmement difficile de reconnaître tous les dons faits sur les diverses créations de rentes (1) : mais le comité a cru devoir faire quelques recherches particulières sur les rentes de la création de 1770, et devoir produire les exemples d'une fraude dont il avouera qu'il lui a été impossible de connaître toute 1 étendue.
Un édit du mois de février 1770, donné sous le ministère de M. l'abbé Terrav, annonce que le roi (Louis XV) voulant faire cèsserenlin les anticipations portées à un excès qui causait des pertes considérables à l'Etat, et rembourser des créances liquidées, a résolu dese procurer des fonds créant en 6,400,000 livres de rentes à 4 0/0, au capital de 160 millions, dont quatre-vingts seront fournis en capitaux de rentes provenant des effets convertis en contrat?, en vertu de l'édit de novembre 1767, et quatre-vingts en deniers comptants ou en rescriptions et assignations suspendues. Ces rentes devaient être payées à l'hôtel de ville. L'édit accorde aux nouvelles rentes toute la faveur et tous les privilèges qu'il est d'usage d'accorder aux personnes qui viennent au secours de l'Etat en lui dounant l'usage de leurs fonds. On peut remarquer la prévoyance que le parlement eut, dans son arrêt d'enregistrement, de supplier le roi « de vou-« loir bien tenir la main à ce que le produit de « cet emprunt fût employé, sans aucune distrac-« tion ni aucun divertissement, au rembourse-« ment des engagements que le roi s'était proposé « d'éteindre ».
Cette prévoyance était inutile ; les supplications étaient vaines : le fonds des rentes créées fut, entre les mains du ministre et de ses successeurs, un trésor qui servit à toutes les libéralités comme à tous les payements qu'ils voulurent faire; tellement qu'au lieu de ne payer, conformément à l'édit de création que 6,400,000 livres de rentes, l'Etat en a payé jusqu'à 8,400,000 livres. Le capital de cet emprunt est aujourd'hui de211,175,176livres 8 sois 9 deniers. Les objets au remboursement desquels l'emprunt était destiné n'ont pas été soldés (2) ; et le Trésor public est grevé de la
somme de 211,000,000 de livres, au lieu d'une dette de 160,000,000 de livres (1).
Mais ce n'est pas seulement dans l'extension de l'emprunt que l'abus consiste à l'égard des rentes de 1770; il a été bien plus considérable encore dans la disposition des capitaux qui devaient le former. On a donné de ces rentes pour éteindre des dettes de tout genre. Quelquefois on a obligé ceux à qui on les donnait de les prendre au pair sur le pied du capital; quelques-fois on les donnait sur le pied de la rente, en augmentant la somme du capital, pour qu'on ne perdît rien sur les arrérages de sa créance : on donnait, par exemple, 25,000 livres de capital à celui qui avait une créance produisant 1,000 livres d'intérêts. Lorsque le créancier était plus favorisé, on lui donnait des contrats de cet emprunt au taux de la place, et on ajoutait en deniers comptants ce qu'il perdait sur leur capital à la vente qu'il en faisait. Enfin, il en a été donné beaucoup en pur don; et ce qui est remarquable, c'est que ces payements ou ces dons, avec des capitaux de l'emprunt de 1770, ont été faits à des époques éloignées du temps où il avait été ouvert, à quinze ou seize ans de date de cette ouverture, comme s'il n'eût dû être fermé que quand les ministres ne voudraient plus donner.
M. Necker, en discutant contre M. de Galonné l'exactitude du compte présenté en 1781, et voulant calculer les augmentations de charges survenues depuis l'époque de 1781 (écrit publié en avril 1789, pag. 80), fait entrer, dans les causes de l'augmentation, une émission de contrats de l'emprunt de 1770. Voici ses propres termes : « Les « contrats à 4 0/0 sur l'hôtel de ville, donnés en « payement, en indemnité ou par d'autres motifs, » depuis 1781 probablement 60 millions, et en in-« térêts 24 millions. » Il ajoute : Je n'ai, sur cet article, que des notions très incertaines.
M. de Calonne porta, dans sa réponse, l'émission des contrats à 10 millions au delà de la somme estimée par M. Necker : (Réponse, page 171 ; tableau, n° 14; autre, n° 18) : il porta l'extension des emprunts de l'année 1770 à 70 millions, et le point auquel il s'attacha fut de soutenir que cette extension s'était faite avant 1783, avant son entrée dans le ministère.
M. Necker combat cette prétention dans les nouveaux éclaircissements publiés en 1788 sur le compte de 1781 : « On a peine, dit-il, à se figurer « une invention aussi complète... les contrats « de 1770 ont été destinés constamment à ac-« quitter quelques vieilles prétentions, ou à li-« quider, avec un peu d'argent, des créances « moins anciennes, mais susceptibles d'un pareil « arrangement. Enfin, de temps à autre, tels sol-« liciteurs qui auraient été refusés, s'ils avaient « demandé de l'argent, ont eu assez de crédit pour « obtenir un secours en contrats de 1770; mais « jamais, à ma connaissance, ces contrats n'ont « procuré aucune ressource effective ; il eût fallu « pour cela les faire vendre au rabais, sur la place, « puisqu'ils ne rapportaient qu'un intérêt de 4 0/0 « et n'étaient pas remboursables. Ces circons-« tances sont connues des différentes personnes « attachées à l'administration, et même de tous « les particuliers qui suivent habituellement les « affaires de finance. » Nous n'avons pas besoin d'examiner les preuves que donne M. Necker que l'émission de 70 millions de contrats à 4 0/0
n'a pas eu lieu en 1781, mais postérieurement : ce qui importe, c'est la déclaration de M. Necker, déclaration qu'il n'hésite pas à appuyer du témoignage de toutes les personnes instruites, que les contrats de 1770 n'ont procuré aucune ressource effective; et cependant l'Etat a été grevé, par cet emprunt, d'une dette très effective de 211,175,116 livres, produisant un intérêt de 8,400,000 livres. Quelques exemples particuliers démontreront la vérité de la déclaration de M. Necker.
La demoiselle de Roman, marquise de Cavanac (Registre des décisions, t. IX, fol. 157), jouissait de 32,200 livres de rentes viagères. Elle obtient, par ordonnance du 22 octobre 1775, que ces rentes seront transformées en rentes perpétuelles. Voici comment on opère. (Etat de comptant de 1775, chapitre des dépenses diverses.) On fixe le remboursement des rentes à 330,000 livres. On y ajoute, par une ordonnance du 3 décembre 1775, 475,000 livres, et on lui délivre pour 805,000 livres de capitaux de rentes à 4 0/0 de 1770, ce qui lui produit en perpétuel exactement la même somme qu'elle avait en viager (1).
On a vu, dans le livre rouge, page 28, que Madame Dubarri possédait pour 1,250,000 livres de ces contrats à 4 0/0, qu'elle se fit rembourser en 1782.
Le 1er août 1784 (Registre des décisions, t. XI, fol. 177) M. Thierry de Ville-d'Avray en obtint pour 50,000 livres, dont il avait annoncé la destination ainsi qu'il suit : 10,000 livres pour le payement de droit de marc d'or, et autres frais que lui coûtera l'érection de sa terre en baronnie; un secours à son beau-frère et à sa sœur; une constitution de 4 ou 500 livres de rente pour la fabrique de Ville-d'Avray.
En 1786 (livre rouge, pag. 29), on en donna pour 3,125,000 livres à l'école militaire, pour prix de la cession qu'elle avait faite au Trésor royal d'un remboursement de 2,500,000 livres qui lui avaient été payées par le clergé : la perte pour le Trésor public, dans cette opération, était de 625,000 livres.
En 1785, d'après une décision du 4 août, on remet au comte de Polignac et à Mme d'Aspect, leur fille, pour un objet dont nous aurons occasion de parler, 30,000 livresderente en contrats à 4 0/0. Le don de 30,000 livres de rente est constaté par la décision; la forme du payement l'est par une seconde décision du 18 mars 1787, qui leur accorde trente autres mille livres de rente (Registre des décisions, t. XII, fol. 66, v°), et pour lesquelles le contrôleur général avait proposé de leur accorder, comme il avait déjà été fait, des contrats à 4 0/0.
Un plus grand nombre d'exemples serait superflu pour établir la vérité de la déclaration de M. Necker sur l'usage des contrats de l'emprunt de 1770; et l'on ne risque rien, sans doute, de dire que, dans les 8,400,000 livres d'intérêts de cet emprunt, la moitié au moins a été consommée en pur don, 4,200,000 livres.
C'est une autre opération analogue à celles dont on vient de rendre compte, que la création de charges ou de commissions, pour avoir le moyen de voiler une pension sous le titre de gages et d'appointements. L'Assemblée aura à juger si la
place du contrôleur général des monnaies, mentionnée dans l'état des dépenses fixes, page 70, qui a été créée en 1786, et à laquelle il a été assigné 12,000 livres de traitement, ne serait pas un acte de ce genre (1).
Voilà donc, d'une part, une masse énorme de 58,836,726 livres qui se prend chaque année sur les fonds publics, pour être distribuée en largesses, d'une autre part, une foule d'articles dont le montant est incalculable, et qui serventégalement à alimenter, sous le titre de récompense et de gratification, le luxe et la cupidité. Dans quel royaume et à quelle époque, des libéralités aussi abondantes ont-elles lieu ? est-ce chez un peuple nouveau, où il n'ait pas encore été formé d'établissements publics ; où la misère ne trouve pas de secours; où la pauvreté n'ait pas d'asile; où les malades soient sans ressources, les orphelins sans assistance, les vieillards sans consolation ? Non: presque toutes les villes de France offrent au malheureux, des secours de différents genres. La capitale a des établissements magnifiques en ce genre ; les troupes, la marine ont leurs Invalides; les écoles militaires, la maison de Saint-Gyr sont ouvertes aux enfants des personnes qui ont bien servi l'Etat. Les revenus de l'Ecole militaire montent à 2,200,000 livres. A Saint-Cvr, on entretient 250 élèves; les revenus de l'hôtel des Invalides sont évalués à 1,661,000 livres; la caisse des invalides de la marine fournit à une dépense d'environ 1,772,500 livres; dans les collèges, une multitude de bourses ont été fondées; dans les séminaires, un grand nombre de places gratuites ont été créées par la suppression et l'union de riches bénéfices : et c'est au milieu de cette abondance de secours pour tous les âges, que l'on distribue annuellement une somme de 58,836,726 livres : réduisons-la, à cause des faux et doubles emplois qui peuvent s'être glissés dans nos calculs, à 55,000,000 livres.
Cette somme se distribue, et elle a augmenté sans cesse, au sern de la plus grande détresse du Trésor public. Il n'est plus question, en effet, aujourd'hui, de comparer ce que l'on donne avec les reveuus nets dont on peut disposer ; il ne s'agit plus de calculer s'ils font le trentième, le vingtième ou le dixième du produit net : il n'y a pas de produit net quand la dépense est plus forte que la recette; et c'est l'état de nos finances depuis trop d'années.
Cette même somme n'a pas cependant suffi aux demandes qui se repoduisaientjournellement; et c'est après vingt-huit années de paix sur le continent, que les pensions militaires sont évaluées à 18 millions, indépendamment des gouvernements: tandis que dans le siècle dernier, après des guerres longues et glorieuses, on donnait 2,000,000 livres; tandis qu'en 1759, encore, après plusieurs années de guerre, on croyait pouvoir réduire toutes les pensions militaires et autres à 3 millions.
Encore, si la répartition de sommes d'une telle importance n'était faite que d'une manière qui pût soutenir un examen sérieux, le peuple qui fournit à tant de dépenses, retrancherait avec plaisir sur ses besoins, pour récompenser dignement la vertu. Mais si la somme qui est donnée, chaque année, est effrayante, la manière dont
elle est distribuée ne peut qu'affliger ceux qui la connaissent ; et c'est-pourquoi on en couvrait, autant qu'il était possible, la distribution, du voile du mystère. Aujourd'hui que tous les voiles sont déchirés, il faut apprendre à la nation, qui est-ce qui donnait les grâces pécuniaires; à qui on les donnait ; pourquoi on les donnait, dans quelle proportion on les répartissait.
Qui est-ce qui donnait les grâces pécuniaires? cette question a de quoi surprendre, parce que l'on ne s'imagine pas que, dans l'état de la France, tel qu'il existait avant la Révolution, aucun autre que le roi pût ou dût donner de pareilles grâces. Le comité s'est assuré que les ministres, chacun dans leur département, distribuaient des grâces pécuniaires. Les grâces s'obtiennent sur des mémoires qui exposent l'objet et les motifs de la demande, elles s'accordent par un Bon, ou par le mot Approuvé, qui est écrit au bas de la décision ; et le comité a vu beaucoup de ces Bons, écrits de la seule main du ministre. Il y a, entre les grâces accordées par les ministres et les grâces accordées par le roi, ceci de commun, que sur toutes les décisions, on expédie des brevets qui portent, par forme de signature, le nom de Louis ; mais il y a cette différence, que dans les livres des décisions, ou mémoires du roi, on ne transcrit que les décisions où se trouve le Bon du roi, et non les autres : de manière qu'il est impossible de justifier que le roi ait jamais eu connaissance de telle ou telle grâce particulière, donnée sur une décision du ministre.
Le comité a été averti de cet usage, par la lecture même de l'état des dépenses fixes, où il a trouvé plusieurs articles accordés par décision du minisire (i). Il s'est informé d'abord de l'autorité que les ministres pouvaient avoir à cet égard, et il lui a été répondu, des bureaux du, contrôle général, le 16 mars 1790 : « Il n'y a point « d'autorité particulière en vertu de laquelle les « ministres des divers départements ont joui du « droit et de la faculté d'accorder des pensions : « l'usage seul a consacré cette faculté. »
Alors le comité a demandé, dans plusieurs départements, à voir les originaux des décisions : il a fait remonter ses recherches jusqu'en 1780. Le temps ne lui a pas permis de les porter encore dans le département dé la marine et de la maison du roi. Au département des affaires étrangères, le comité n'a vu aucune décision signée du ministre. Au département de la guerre, il a trouvé plusieurs décisions signées du ministre seul : mais on lui a fait remarquer que la plupart étaient relatives à des pensions dont la plus forte n'excédait pas 500 livres, et qui étaient accordées à des veuves d'employés.
A l'égard du département des finances, il faut distinguer les époques. Il a d'abord été envoyé au comité un état intitulé : Pensions accordées dans le département des finances, sous le ministère de M. de Colonne, avec les décisions originales comprises dans cét état. Le nombre des personnes à qui il a été accordé des pensions, est de cinq cent
cinquante-sept, la somme des pensions données s'élève à 1,279,359 livres. Dans le nombre des personnes, trois cent trente-neuf ont été gratifiées par le roi; deux cent dix-huit l'ont été par le ministre. Sur la somme totale, le roi a donné 904,841 livres; le ministre a donné 374,517 livres. Parmi les dons du ministre, il faut remarquer, à l'article de M. Hamelm, la prorogation d'une pension de 15,000 livres, que le roi n'avait accordée, en 1783, qu'à condition qu'elle cesserait quand il aurait une charge de receveur des finances. Le cas arrive; et le 9 janvier 1785, le ministre proroge la pension : ce qui n'a pas empêché que M. Hamelin, passant de la charge de receveur général des finances de Rourges à celle de receveur général de Tours, ait obtenu, par décision du 31 décembre 1786, 40,000 livres de remise, sur 60,000 livres de droit de marc d'or qu'il devait pour sa nouvelle charge. Le premier janvier 1785, le ministre avait ajouté 2,000 livres à pareille somme que M. Routin tenait déjà du roi. Ainsi le comité n'a rien avancé au delà de la vérité (Avertissement en tête du livre rouge) lorsqu'il a dit que les ministres donnaient des pensions sans la volonté, outre la volonté, contre la volonté du roi.
Depuis le mois de mars 1787,le comité a vu, dans lès dépôts du département de la finance, quelques décisions signées des ministres seuls. Celles qui portent le bon ou l'approbation de M. Necker, ont en même temps ie bon ou l'approbation du roi, mis après celui du ministre. Il y a la même observation à faire sur les décisions de 1780, et du commencement de 1781 : les bons de la main de M. Necker sont accompagnés du mot bon, ou approuvé, de la main du roi. Des ordonnateurs accordaient également des grâces dans leur département. Il a été remis au comité un état des gratifications accordées dans les haras de province, en 1788, sur les ordonnances du directeur des haras, qui monte à 32,370 livres.
Voilà ce qui regarde les distributeurs des pen sions et grâces pécuniaires. A qui donnait-on ces grâces pécuniaires ? Il y a d'abord une distinction à faire entre les fonds affectés à certains objets déterminés et les grâces qui se payent sur des fonds sans destination spéciale, tels que ceux du Trésor royal,
Les fonds de l'ordre de Saint-Louis sont du nombre de ceux qui ont une affectation spéciale: le Comité n'a pas aperçu qu'on en ait distrait des grâces pour d'autres que des militaires. Mais il n'en est pas de même de quelques autres fonds (Pensions hors le Trésor royal, page 23) ; par exemple, on pourrait demander pourquoi la comtesse Diane de Polignac a 6,000 liv. de pension sur les fonds politiques de la Suisse? Pourquoi l'abbé Macdermot a une pension de 1,600 liv. (états envoyés par le ministre dé la marine) sur les fonds de la marine, en attendant qu'il ait obtenu un bénéfice? Pourquoi la dame!de Joblot, chanoinesse de Sales, a une pension de 300 liv. sur ces mêmes fonds, en attendant qu'elle obtienne une prébende?
On est pareillement étonné de voir (états remis par les directeurs, chargésde la liquidation de l'ancienne compagnie des Indes) à la tête d'une liste de gratifications annuelles sur les fonds destinés à la liquidation de la compagnie des Indes, M. de Rroc, ci-devant premier commis au département de M. Roullongne,pour 6,000 liv. de traitement annuel, par ordre de M. Lambert, du 17 mars 1788; M. de Maux, ancien chef du bureau des saisies de la ferme générale, pour
2,000 liv. de gratification annuelle, par ordre de M. de Calonne. Les pensions accordées à la demande des actionnaires de l'ancienne compagnie des Indes, lors de la cession des biens de cette compagnie au roi, pour servir de récompense à d'anciens serviteurs de la compagnie, montent actuellement à 250,605 liv. (état envoyé par les directeurs, le 22 mai); mais dans celte somme, il 1 y a pour 31,750 liv. de pensions accordées sans aucune demande des directeurs de la compagnie des Indes.
Les grâces assignées sur des fonds qui n'avaient pas de destination particulière ont pu être données avec plus de liberté : cependant on estétonné, en parcourant l'état imprimé des pensions, de trouver fréquemment des pensions cumulées jusqu'au nombre de six, sept, huit, dix sur le même individu (1): et ce que l'on ne voit pas encore dans l'état des pensions, ce sont les traitements d'activité dont ces mêmes personnes jouissaient : les concessions de domaines et les grâces en argent que les pensionnaires avaient obtenues d'ailleurs. Les exemples pourraient être nombreux à cet égard. IIn'y a qu'à jeter les yeux sur l'article des commissaires de la maison du roi dans l'état de cette maison. On verra le premier commissaire (Mesnard de Chouzi) jouir de 84,845 livres tant en traitements que pensions; le second (de la Chapelle) de 54,000 livres ; le troisième (de la Ferté) de 68,000 livres, outre une place de fermier des postes ; le quatrième (Thierry de Ville-d'Avray) de 109,997 liv.; le cinquième (Mercier de ia Source) de 72,364 liv. Il est vrai que, dans ces sommes, il entre 25,000 livres d'intérêts du prix de la finance de leur charge : mais l'état de la maison du roi, envoyé au comité des finances, fournit des notes intéressantes sur la manière dont plusieurs d'entre eux ont acquitté cette finance.
C'est par le résultat de cette multitude de grâces sur une même tête (état de3 pensions sur autres caisses que celles du Trésor royal, p. 1680) qu'il arrive que les officiers généraux de l'armée partagent entre eux une somme de 10,696,490 livres prise sur le Trésor public; que les conseillers d'Etat et maîtres des requêtes, au nombre de 62, partageaient, entre eux (en 1788) 1,516,940 liv. de traitements et de pensions.
Et certes, comment serait-il possible de se flatter d'une réforme dans ia distribution des appointements et des grâces, lorsqu'on voit les chefs de la finance réunir, sur leur tête, des charges, des traitements d'activité, des pensions et des grâces ?
M. Dufresne est receveur général des finances de la généralité de Rouen : c'est à ceux qui possèdent des charges de la même nature à apprécier le produit de celle-ci. Il est directeur général du Trésor royal, et, en cette qualité, il a un traitement de 60,000 livres; (état des pensions, t.I, p. II;) dès 1778, il a eu une pension de 12,000 livres; en 1780, il lui a été accordé un acquit patent de 3,000 livres; en 1788, il lui a été donné uneautre pension de 10,000 livres: sa fortune est belle à l'âge de 53 ans.
Le comité ajoutera à ces exemples celui de la réunion d'une multitude de pensions dans la
même famille. En jetant les yeux sur la liste des pensions, on peut remarquer combien on y trouve de fois les noms de Choiseui (1), de Les-chevin (2) et autres. Les deux branches de la famille des Polignac ont tiré ouvertement du Trésor royal, en pensions et traitements, 437,900 livres; en deniers comptants, deux millions cinq cent mille livres; indépendamment de 1,230,000 livres de deniers extraordinaires pour les haras, et indépendamment encore des traitements attachés à la direction générale des postes (3).
Pourquoi accordait-on des pensions et des gratifications? C'est encore là une question à laquelle il ne devrait y avoir qu'une réponse unique et fort simple; savoir : qu'on accordait des pensions et des gratifications sur le Trésor public, pour des services signalés rendus au public. Mais il s'en faudrait beaucoup que cette réponse simple rendît Exactement ce qui se pratiquait.
On voit, dans l'état des pensions, de braves militaires, des administrateurs, des magistrats, des savants auxquels l'État devait beaucoup, et qu'il a justement récompensés. Nous avons trouvé, dans les mémoires sur lesquels des décisions ont été accordées par le roi, et dans ceux que les pensionnaires ont remis au comité, le récit d'actions héroïques, supérieures à tout ce qu'on peut donner en argent, pour exprimer la reconnaissance : mais il est et bien d'autres personnes, et bien d'autres actions qui ont été récompensées. Toutes les pensions et les gratifications n'ont pas été accordées à des services publics ; toutes n'ont pas été accordées à des ser-
vices personnels : et par rapport aux services qui ont été le motif des récompenses, il reste encore à examiner leur nature et leur durée.
M. le prince de Hesse-Rhinsfeld était au service de la France depuis 1768 (Vu la décision au bureau de la guerre); il avait 12,000 livres de traitement. Le 9 novembre 1785, il obtient une augmentation du double en pension, sans exposer d'autre motif que le désir d'avoir un traitement relatif à sa naissance. L'arrêt de 1787, qui ordonne les retenues sur les pensions, arrive ; et le 10 mars 1788, le prince obtient 4,000 livres en addition à sa pension de 12,000 livres (Ibidem) pour lui tenir lieu des trois dixièmes retranchés.
Un très grand nombre de gratifications de 1,500 et de 1,800 livres (Ibidem) accordées au bureau de la guerre, n'ont pas d'autre motif que les dépenses faites par les personnes qui les sollicitent, et le besoin qu'elles ont des grâces du roi. Il y en a beaucoup qui sont accordées au bureau des affaires étrangères (vu les décisions aux affaires étrangères) sur les mêmes motifs.
La comtesse de Lismore est portée dans la liste des pensions (état des pensions, 1.1, p. 289) pour 6,000 livres, dont 2,000 livres réversibles à sa belle fille. Le brevet n'indique point les causes ; mais dans le mémoire sur lequel est intervenue la décision du 14 novembre 1780 (vu la décision), on dit que c'est parce qu'elle a eu le bonheur de concourir avec le feu roi, à procurer à M. le cardinal de Luynes le chapeau que Mme la Dau-phine désirait pour lui.
M. Duval de Montmilan, conseiller au grand conseil, est nommé président de ce tribunal ; il est rejeté par son propre corps. Le 29 mars 1789 (vu les pièces originales), M. Barentin, garde aes sceaux, lui obtient du roi une pension de 4,000 livres ; et en envoyant l'ampliation du brevet au directeur général des finances, il lui marque: « Vous vous rappellerez que c'est le « magistrat qui avait été nommé puur présider « le grand conseil, les circonstances ayant exigé « que le roi fît un autre choix, il était indispen-t sable que M. de Montmilan reçût un témoignage « de la bonté du roi. » Le 7 juin, on revient à la charge pour M. de Montmilan, on expose qu'en sa qualité de conseiller au grand conseil, il avait une pension de 2,500 livres ; qu'elle s'éteint parce qu'il quitte le grand conseil ; on fait porter à 6,000 livres la pension de 4,000 livres qu'il avait obtenue le 29 mars.
Le 6 septembre 1789 (vu la décision), Perrin et sa femme, concierges du contrôle général, obtiennent 1,200 livres de pension, dont un des motifs est que M. le premier ministre ne permet pas qu'on se serve de son adresse pour faire entrer des objets défendus. Nous ne savons si c'est pour de semblables motifs que le même Perrin a touché, le 18 du mois de mai dernier (vu le mandat pour le toucher), une gratification de 1,200 livres au Trésor royal.
Les grâces accordées sans aucuns services personnels (état des pensions, tom. I, pag. 69) et pour ceux de parents et d'ancêtres sont très communes. M1,e de Jarente, veuve du marquis de la Croix, obtient en 1779, 9,000 livres de pension, en considération des services de l'évêque d Orléans, son oncle. M. Bérenger obtient en 1778 (Ibidem, p. 34) une pension de 8,000 livres, en partie pour le dédommager de la perte de la place d'administrateur des postes qu'avait M. de Villemorien, son beau-père. (Ibid. p. 103.) Mme de Vintimille a 3,000 livres de pension en survivance de sa tante. Mme Pétilliot, femme
Abraham, 600 livres (Ibidem, p. 167) eu égard aux services de feu son père, ordinaire de la musique du roi.
De là l'usage s'était introduit de disposer des pensions comme d'un bien patrimonial, en les transportant d'une tête sur l'autre, en les cédant, les divisant, les partageant. On obtenait même la faculté d'y rentrer, lorsque l'on survivait à la personne en faveur de laquelle la cession avait d'abord été consentie.
Le 28 mars 1784 (registre des décisions, tom. il, fol. 34), la marquise de Montconseil fait transporter 10,000 livres de ses pensions sur la tête de la princesse d'Henin, sa fille.
Le 31 juillet 1785 (vu la décision au bureau de la guerre), la demoiselle d'Aultan, alors âgée de quatre-vingt cinq ans, obtient que l'on transfère sur la tête du sieur de Capelles, son neveu, une pension de 2,000 livres dont elle jouissait.
Le vicomte de Boisgelin avait obtenu, le 13 septembre 1778 (vu la décision aux bureaux du contrôle général) que ses appointements de gentilhomme de la Manche des enfants de France, convertis en pension, fussent transportés sur la tête de son épouse. Elle meurt le 19 juillet 1787: le 23 décembre suivant, il est réintégré dans la jouissance de sa pension.
Mme Sabatier, femme de chambre de Mme Sophie (vu la décision originale) avait 3,000 livres de pension, trois enfants, et une demoiselle de Fu-gerays, à qui sans doute elle voulait du bien. Par une décision du 6 janvier 1782, la pension de 3,000 livres est partagée, savoir : 600 livres à chacun des trois enfants, et 1,200 livres à la demoiselle des Fugerays.
Le premier juin 1789, le sieur Rolland, ancien sous-chef du bureau des affaires du conseil à la guerre, obtient sur sa retraite (Ibidem), qui était de 5,800 livres, une distraction de 800 livres en faveur d'une demoiselle qu'il veut épouser, avec clause que la somme lui reviendra si sa femme meurt avant lui.
Mme de Gameron, née Hamilton, expose qu'elle avait une pension de 3,025 livres net ; que la réversibilité en avait été accordée à son mari, et que ledécès de celui-ci rend la grâce infructueuse; elle obtient, le 5 janvier 1786 (registre des décisions, tom. XII, fol. 220), que la réversibilité passe sur ia tête de sa fille.
De là encore, cette multitude de réversibilités dans tous les degrés et dans toutes les classes. M. de Gontault obtient en 1757, 10,000 livres de pension (état des pensions, tom. I, p. 62), en considération de ses services et de ceux de ses ancêtres, avec réversibilité en faveur de celui de ses enfants qu'il voudra désigner. Mlu de Mauldes, aujourd'hui Mme de Lur-Saluces, avait obtenu à l'âge de 14 ans, en 1,757,4,000 livres de pension (état des pensions, tom. I. p. 77) réversibles à ses enfants et à sa postérité. (ibid. p. 41 et 42.). M. de Cambis et M. de Cha-bannes,dans la même année 1757,chacun 6,000 livres, réversibles à leurs enfants et à leur postérité.
Brunot, balayeur au château de la Muette, âgé de 49 ans, obtient, en 1787, 547 livres de pension de retraite (vu le brevet), avec assurance de 273 livres à sa femme, si elle lui survit.
De là l'usage que les personnes intéressées osèrent bien appeler une règle, de donner des pensions aux filles des ministres et à celles des premiers commis aussi, lorsqu'elles se mariaient. Trois filles de M. Delà ver d y ont à, ce titre, chacune 6,000 livres de pension; (état des pensions, tom. I, pag. 265, 272, 361) et lorsqu'ils n'avaient
point de filles, ils l'obtenaient pour leurs petites-filles ; c'est le sujet d'une demande faite par M. le maréchal de Castries, le 14 mars
1784, et accordée. La demande expose l'usage d'accorder aux filles des ministres 10,000 livres de pension à l'occasion de leur mariage (registre des décisions, t. IX), pension qui, selon le mémoire, a été souvent représentée par une somme de 200,000 livres.
Mlle Genet, dame Pannelier, tille d'un premier commis des affaires étrangères, obtient en 1781 une pension de 600 livres (vu la décision au bureau des affaires étrangères). Il est dit que cette grâce est pour lui tenir lieu de 6,000 livres qu'il est d'usage d'accorder à toutes les filles des premiers commis, lorsqu'elles se marient. En effet, MUe du Theil obtient 6,000 livres (Ibid.) pour cette cause, la même année ; MUe Tercier, l'aînée, avait eu ses 6,000 livres en 1780 (Ibid.), Mlle Tercier, cadette, les obtient en 1784.
De là, des assignations journalières de pensions pour des douaires, tantôt en considération du mari, tantôt en considération de sa femme.
M. deMolacavait obtenu une pension de 4,000livres pour assurance de douaire à une demoiselle qu'il se proposait d'épouser (vu la décision au bureau delà guerre) ; le mariage ne se fait pas: cette même pension est établie, en 1786, en faveur de MUe de Cernay qu'il épouse.
M. de Charvailles, sur le point d'épouser mademoiselle Mesnard de Chouzy (vu la décision au bureau de la guerre), désire lui accorder pour douaire 2,000 livres sur le traitement de 3,750 livres dont il jouit. Mme de Chouzy sollicite cette grâce pour sa fille et l'obtient le 10 juillet
1785.
Les exemples de pensions accordées pour douaires sont très fréquents ; il suffit de parcourir l'état imprimé des pensions pour en trouver un grand nombre.
De là enfin, des pensions et gratifications accordées pour indemniser des pertes de tout genre. Le premier juillet 1785, la sœur de M. de Bussi, commandant dans J'Inde (vu la décision au bureau de la guerre), obtient 8,000 livres de pension, sur ce qu'elle expose qu'elle n'a rieu à espérer de la succession de son frère. Le 20 juillet 1788, pension de 1,500 livres à Mm0 de Mey-nières (vu la décision au bureau du contrôle général), veuve d'un président au parlement de Paris, parce que la mort de son mari, qui jouissait de 5,000 livrés de pension, la réduit à un très modique revenu.
M. de Marcheval, intendant de Dauphiné (Registre des décisions, t. XII, fol. 109, v°), expose, en 1785, qu'il a perdu beaucoup de biens de famille sur lesquels il avait droit de compter, et que son intendance lui a causé beaucoup de dépense; qu'il est surtout embarrassé pour une somme de 30,000 livres qu'il s'est fait avancer par le caissier des ponts et chaussées. On lui accorde la quittance ae cette somme.
Le 5 février 1786 (Ibid., fol. 220), à la suite de plusieurs indemnités accordées à M. de Beaumarchais, on lui accorde encore 800,000 livres en contrats à quatre pour cent (t).
Parlons de la durée des services qui déterminent les pensions.
M. d'Ormesson n'a pas été neuf mois contrôleur général, et le public a regretté qu'il eût été si
peu de temps en place. Mais M. Ferrand, son secrétaire, n'obtient pas moins, après des services de si courte durée, et à l'âge de 23 ans, 4,000 livres de pension (1). A la retraite de M. de Calonne, le sieur de la Garde, neveu d'un autre sieur de la Garde, (Registre des décisions, t. 13, p. 78) maître de musique de la réine, expose qu'il a été attaché à M. de Calonne pendant seize ans en qualité de secrétaire, et que pendant huit mois il a suppléé le sieur Le Rat, premier commis des finances; il obtient 4,000 livres de pension, le29 avril 1787. Le secrétaire de M. de Lamoignon, garde des sceaux, a également, après environ dix-huit mois de services, 8,000 livres de pension dont 3,000 livres réversibles à sa femme (2).
Lorsqu'on énonce de très longs services (état des pensions, tom I, p. 424) il est à propos de voir à quelle époque ils ont commencé. Le sieur Chavanes obtient en 1787, âgé de 56 ans, une pension de 2,000 livres pour quarante-deux années de services au bureau de la guerre : ses services avaient commencé à quatorze ans.
Le sieur Jujardi a eu une pension en 1776, aux mêmes bureaux, en considération de vingt-deux années de services. Il avait alors trente-quatre ans; ses services avaient donc commencé à douze ans. Apparemment ces commis avaient, dès leur enfance, appris à écrire dans les bureaux, et on compte le temps de leurs études pour celui de leur service.
Plus d'une fois les pensions ont été accordées, non pour récompenser les services, mais pour les faire cesser. Des employés étaient en état de servir, mais on voulait rendre une place vacante pour gratifier un protégé, ou bien on ne voulait pas élever à une place supérieure celui qui la méritait : et pour éviter le reproche d'un passe-droit, on offrait à celui qui avait mérité la place, sa retraite ; on le forçait à l'accepter.
Les exemples de pareilles opérations sont connus dans tous les bureaux; voici les détails d'un fait dont nous avons les preuves sous les yeux. M. Réal était ordonnateur au port et département de Rochefort. II avait reçu, pendant le cours de son administration, un grand nombre de lettres des ministres de la marine, qui lui témoignaient la satisfaction de ses services. Au mois de novembre 1781, il reçoit de M. de Castries l'ordre ou congé que voici: « De par le roi, il est per-« mis au sieur Réal (pièces envoyées par M. Réal, « le 26 février 1790) commissaire général (3) des
« ports et arsenaux de la marine, de se retirer « du service que ses affaires particulières ne lui « permettent pas de continuer; et Sa Majesté étant satisfaite de ses services, elle lui a ac-f cordé une pension de 3,000 livres dont il jouira, « sa vie durant, à commencer de ce jour. Fait à « Versailles, le 17 novembre 1781. •> M. Réal avait 56 ans : il n'avait point sollicité de retraite ; il ne savait ce que signifiait ce congé; la lettre de M. de Gastries qui l'accompagnait, le lui expliqua. « Je vous annonce, Monsieur, que le roi a nommé « M. Prevot de Langristin, commissaire des ports « et arsenaux à Toulon, à la place de commis-« saire général à Rochefort, vacante par la mort « de M. Casamajor. J'ai pensé que cette disposi-« tion de Sa Majesté vous porterait à demander « votre retraite; et, dans cette persuasion, j'ai « proposé moi-même à Sa Majesté de vous l'ac-« corder avec un traitement proportionné à l'an-« cienneté de vos services : elle a bien voulu y « consentir» (1).
La nature des différents services qui sont récompensés mérite beaucoup d'attention.
M. de Balainvilliers, intendant de Languedoc (registre des décisions), a une gratification annuelle de 6,000 livres. Le 17 septembre 1789, il en obtient une extraordinaire de 10,000 livres à cause des dépenses de la tenue des États : « Dé-« pense, dit-il, d'autant plus considérable, que « l'Assemblée, étant composée d'un grand nombre « d'évêques ét de barons, exige une dépense « proportionnée à son importance (2). »
On voit qu'au moins ce n'était pas les personnes de ce qu'on appelait alors le Tiers-État, qui nécessitaient l'augmentation de dépense. -
M. Amelot, intendant de Bourgogne, obtient (vu la décision aux bureaux de la direction des finances), le 23 décembre 1787, une gratification de 24,000 livres pour la tenue des États de la province ; il observe que la tenue a duré huit jours de plus que d'ordinaire, et que la fermentation quia régné pendant toute la tenue, l'a obligé de multiplier ies invitations pour ne mécontenter personne. Le 10 mai 1789 (Ibidem), le même M. Amelot a obtenu 10,000 livres pour ies dépenses extraordinaires que l'enregistrement des lois du 8 mai de l'année précédente lui avait causées.
Des pensions sont accordées à des services qui semblent bien légers (Etat des pensions, tom. II, p. 36.) Perrette Châtelain obtient 1,200 livres de pension, à titre de retraite en qualité de blanchisseuse de Madame Louise de France. La demoiselle le Grand, sa coiffeuse, (ibid. tom. I, p. 473.) 1,800 livres. M. de Boisgiroud a eu, en 1766, 1,455 livres pour lui tenir lieu de son traitement, chargé de l'entretien de la volière du château neuf de Saint-Germain; il y a joint en 1780, 3,000 livres, pour ses services et ceux de son frère. On peut, en parcourant les listes déjà imprimées des pensions (ibid. p. 36), et à la quatrième classe surtout, remarquer combien il s'y
trouve de personnes de la musique et des ballets du roi et de la reine.
Voici des services d'un genre différent. Que penser de la multitude de pensions et de gratifications données à des magistrats? On n'en a pas toujours écrit la cause ; mais il y a quelques circonstances où l'on a tout écrit. Le 27. février 1785, M. l'archevêque de Narbonne avait représenté que ses revenus ne suffisaient pas pour satisfaire aux frais multipliés de l'assemblée du clergé (registre des décisions, t. II, fol. 355) ; il avait demandé que le caissier du clergé fût autorisé à lui avancer 4,000 livres, par chacun des mois de février, mars et avril, et 600 livres par chacun des mois suivants : promettant de prendre ensuite des arrangements pour le remboursement de ces avances, sauf, en cas de mort, à les faire supporter par le roi ; le roi avait accordé cette demande. Le 6 novembre 1785, M. de Galonné demande au roi deux ordonnances qui puissent servir de décharge d'une somme de 84,000 livres (registre des décisions), due par M. l'archevêque de Narbonne, moitié au Trésor royal, moitié à la caisse du clergé; et M. de Galonné donne pour motif d'accorder cette grâce, la considération de Vinfluence de M. l'archevêque sur les résolutions de l'assemblée qu'il a présidée. Le roi s'est contenté d'accorder un délai, et de faire porter au Trésor royal les billets faits au caissier du clergé.
Le sieur Borie, sénéchal de Rennes, obtient le 1er mai 1785, une gratification de 30,000 livres (registre des décisions, t. II, fol. 422). M. de Galonné expose pour motif de cette grâce, que les présidents du Tiers aux Etats de Bretagne^ ont toujours obtenu des gratifications, réglées tant à raison de leur dépense, que de la bonne conduite qu'ils ont tenue aux Etats. Il.observe que la dépense du sieur Borie a été considérable, eu égard au rétablissement des tables; que d'ailleurs, il a tenu la meilleure conduite à la dernière assemblée; en conséquence, on lui donne 30,000 livres, au lieu de 20,000 livres données à son prédécesseur. Le même (ibidem, t. XIII), a obtenu pareille somme de 30,000 livres, le 20 mai 1787, pour s'être très bien comporté à la dernière assemblée; et autres 30,000 livres en 1789.
Enfin, dans quelle proportion les grâces pécuniaires étaient-elles réparties ? La seule inspection du total de chacune des sept classes, entre lesquelles les pensions ont été distribuées à raison de leur valeur, présente des contrastes frappants. La première classe, qui n'est composée que de 84 personnes (voyez la suite du rapport, l'état n° V), absorbe 2,821,551 livres; dans la cinquième classe, il n'y a que 2,852,551 livres à partager entre 1,986 personnes ; dans la quatrième 2,151,934 livres à partager entre 1,071 personnes. On trouve néanmoins beaucoup d'anciens militaires et d'officiers généraux dans ces deux classes, mais on n'y trouve pas autant d'anciens ministres que dans la première classe.
Ajoutons quelques exemples particuliers. Le sieur Aude (vu le brevet), ancien carabinier, actuellement cavalier de maréchaussée* a une pension dont le produit net est de 188 livres 3 sols ; c'est la récompensequi luiaété acccordéeen 1748 ; pour avoir fait le général Ligonnier prisonnier à la bataille de Laufeldl
Un autre brevet, en date du 1er octobre 1779, au département de laguerre demande à être transcrit en entier :
« Brevet d'une pension de 50 livres, réduite à « 44 livres 5 sous, pour la retenue d'un dixième « sur lesdiles 50 livres, et de 4 deniers pour
« livre sur le restant, en faveur du nommé Jean-« René Hamel, né le 4 janvier 1724, ancien « sergent au régiment de Flandre: laquelle pen-« sion lui a été accordée sur le fonds de l'extraor-« dinaire des guerres, le 25 décembre 1762, en « considération de ses services et blessures, et « pour avoir, par sa valeur, occasionné la prise « de la ville deDuderstall, pendant la campagne « de 1761, ayant eu l'intrépidité d'aller seul atta-« cher les écrous du pétard qui en fit sauter la « porte : ci net, 44 livres 5 sous. »
Telle est la pension dont jouit encore aujourd'hui l'intrépide Hamel,arrivé à l'âge de 66 ans! et c'est en France qu'il jouit d'une pension de 44 livres 5 sols (état des pensions, tom. I, p. 15) ; tandis que M. le Noir y jouit de 47,500 livres de pensions (ibidem, p. 19); la demoiselle Filleul, veuve du sieur Poisson, marquis de Marigny, de 20,000 livres (ibidem, p. 70) ; le maître de musique des enfants de France (la Garde), de 8,000 livres ; et un surintendant de la musique du roi (Dau-vergne) ; de 4,000 livres (ibidem, p. 185). Mais peut-être croira-t-on que l'état des finances en 1762, et les dépenses de la guerre forçaient à l'économie. N'oubliez pas la date de sa pension : elle lui a été accordée le 25 décembre 1762 (ibidem, p. 67). Or,on venait d'accorder en 1761, au sieur Jelliote, vétéran de la musique du roi, 6,000 livres de retraite ; en 1762 même (ibidem, p. 94), on accordait au marquis d'Etampes, 4,000 livres en considération de son mariage et pour services de ses ancêtres ; à Mme de Durfort, 8,000 livres pour ies services de son père, et pour lui tenir lieu de douaire. Le Trésor n'était pas encore épuisé, car, en 1763, on donna au sieur Hébert, trésorier des menus plaisirs, 4,000 livres en considération de ses services.
A l'époque de 1782 (vu le brevet), la somme de 400 livres s'est trouvée dans le taux commun de plusieurs pensions accordées pour des services d'un genre fort différent. La dame Aubert obtient 400 livres de retraite, en qualité de monteuse de bonnets de feue Madame Sophie; deux demoiselles Belletrux, âgées l'une de dix ans (1) (vu les brevets), l'autre de onze, obtiennent chacune 400 livres, en considération des services de leur mère, coiffeuse et femme de chambre de Madame Adélaïde. Une pareille pension de 400 livres est pour le sieur Boullaud (Idem.) capitaine commandant au régiment d'Armagnac, la récompense de ses services, de ses blessures et des preuves de sa valeur; (Idem.) pour le sieur Bressolles, lieutenant en premier au régiment de Bretagne, la récompense de sa conduite distinguée sur la batterie flottante au siège de Gibraltar. Le sieur Ghortat, qui n'était qu'un simple sergent au régiment d'Auxerrois, est moins heureux que la monteuse de bonnets et que les filles de la coiffeuse : c'est assez pour lui de 50 livres (Idem.) (toujours en 1782), pour reconnaître « la conduite « distinguée qu'il a tenu à bord du vaisseau le Glorieux, dans le combat que ce vaisseau a sou-« tenu contre deux vaisseaux anglais, à trois « ponts et pendant lequel il a donné des preuves « du plus rare courage et de la plus grande in-« trépidité ! »
Voilà une esquisse très légère des abus qui ont eu lieu dans la concession des grâces pécuniaires en France : quelques exemples pris au hasard
dans les différentes classes et à différentes époques, sous différents règnes et sous différents ministres. Le comité les a choisis de cette manière, afin que l'on sût que son intention n'était d'inculper aucune personne plus que toute autre. Il l'a dit plusieurs fois ; il poursuit les abus ; les personnes lui sont absolument indifférentes : il ne nomme tel ou tel, il n'écrit les dates qu'afin de mettre à portée de vérifier les faits qu'il rapporte.
Que pensera donc la nation, lorsqu'incessam-ment elle aura sous les yeux le détail entier de la distribution annuelle de la somme de 55 millions de livres et que, par les rapprochements qui suivront les différents états nominatifs, elle connaîtra combien chacun de ceux qui avaient accès auprès des administrateurs du Trésor public, y prenait pour sa part, ce que l'on avait en domaines, en meubles, en indemnités, en argent, en traitements, en attributions, en grâces. La masse énorme de registres qu'il a fallu compulser, le grand nombre des états qu'il est nécessaire de publier, la difficulté, d'une route dans laquelle le comité n'avait point de guide et où sa patience'seule a pu lui faire faire quelques pas utiles, ne permettent pas que tous les abus soient encore manifestés; mais ils sont connus et on peut juger, par les exemples qui ont été indiqués, quel monstre ils formeront lorsque leur ensemble sera réuni.
Ges abus de détail, dont nous venons de présenter l'aperçu, sont peu de chose auprès d'un autre abus beaucoup plus générai qui embrasse la presque totalité des grâces pécuniaires : il faut le dévoiler à la nation.
Dans'les temps que nous venons de parcourir, dans ces temps où les grâces pécuniaires étaient si abondantes, les Français étaient partagés en trois ordres. L'ordre du clergé pouvait être regardé comme divisé en deux parties : on appelait l'une le haut clergé, et l'on y faisait^entrer les enfants des grandes maisons, comme l'on disait alors ; l'autre partie était ce que l'on n'avait pas eu honte d'appeler le bas clergé : les nobles y laissaient assez volontiers les places et les emplois aux roturiers. La France entière pouvait donc être considérée comme partagée en nobles et roturiers; mais parmi les nobles on doit faire une distinction. Il y avait dans les provinces quelques restes de la chevalerie française : gentilshommes anciens, vivant sur leurs petits domaines : pauvres la plupart, trop fiers de leur nom pour se livrer à des emplois lucratifs, trop grands aussi pour aller dans les Cours se livrera des intrigues et à des sollicitations, souvent réduits au dessous du nécessaire, leur vertu les faisait respecter plus que leur nom. Ët nous avertissons ici de ne pas les confondre avec cette autre partie de la noblesse qui demandait et obtenait ies grâces de la Gour et qui, nous devons le dire, en accaparait la presque totalité, à l'exclusion des roturiers (1).
En effet, les premières grâces pécuniaires, dont nous avons parlé, sont : les suppléments de traitements aux grands offices de la maison du roi, les pensions attachées aux grandes places de rob.e. Ces grands offices, ces grandes places de robe n'étaient-elles pas affectées à la noblesse? S'a-visa-t-on jamais, depuis deux ou trois siècles, de penser qu'un roturier pût parvenir à un grand office de la maison du roi, ou seulement à la présidence d'un parlement? Là où étaient les places, là se trouvaient aussi les suppléments de traitements et les pensions annexées aux places.
Les dons et les aumônes elles-mêmes, n'étaient pas également répandus. Voyez les fonds réservés sur le Fort-Louis, sur la loterie royale, sur diverses parties des revenus de la Bretagne : ces fonds sont destinés à des actes de bienfaisance, mais pour la noblesse pauvre: des nobles y sont employés, et avec quelle hauteur ceux d entre eux qui sollicitaient de pareils secours, ne parlaient-ils pas de leur maison, de leurs ancêtres, du sang répandu par leurs auteurs pour le service du roi ? avec quel dédain n'écartaient-ils pas un concurrent qui ne se présentait qu'avec des besoins et des vertus personnelles ?
Que l'on parcoure l'état de pensions : à chaque page on verra le prince, le duc, le comte, le marquis, le chevalier, au moins; et lorsque, parmi toutes ces personnes titrées (nous sommes réduits, pour nous faire entendre, à la nécessité d'employer les expressions de l'ancien régime),on aperçoit un particulier, c'est une faveur rare, qu'il a obtenue par des circonstances extraordinaires ; à moins qu'il ne se fût abaissé à être le valet de quelque grand qui lui vendait bien chèrement ses faveurs.
Nous avons dit que la quatrième espèce des grâces pécuniaires consistait dans les gouvernements, autres places réservées à la noblesse. Ils ne pouvaient être donnés qu'à des militaires ; et l'on sait les précautions qui avaient été prises, ces dernières années, pour qu'il n'entrât que des nobles parmi lès officiers des troupes.
Dans l'Eglise, qui est-ce qui parvenait aux évé-chés et aux abbayes en commende, si ce n'était les enfants des nobles ? Quelques-uns des derniers ministres de la feuille n'avaient-ils pas annoncé assez publiquement à leur audience, que les grâces du roi n'étaient que pour la noblesse? Et il faut convenir en effet, que dans les emplois et les revenus ecclésiastiques, militaires, civils, on avait fait un partage très singulier,
mais très uniforme, du travail et de l'argent, de la fatigue et des décorations.
Il s'était établi une sorte d'analogie entre les emplois ecclésiastiques, militaires, civils : les évêques, les officiers généraux, les ministres, étaient en activité de service, avec la permission néanmoins, dont ils usaient, de se faire aider; ils avaient de grandes décorations, de grands revenus.
Les abbés commendataires, les gouverneurs de places, auxquels il est défendu d'aller y commander ; les ministres d'Etat, auxquels il n'est pas permis d'entrer dans le conseil, peuvent être mis sur une autre ligne, à peu près au même niveau. Ges titres donnaient, en général, de l'aisance sans gloire ; mais à cause ae l'aisance qui les suivait, ils étaient recherchés; et comme l'on voit beaucoup d'évêques, d'abbés commendataires, on voit aussi bftaucoup d'officiers généraux, commandants de places où ils ne commandent point. Or, ces places actives (avec la faculté de se faire bien seconder) et non actives, mais toutes accompagnées de décorations et d'argent, étaient également dans les trois états, ecclésiastique, militaire et civil, le partage de la noblesse de cour.
Si un roturier devenait évêque par son mérite, on disait tout bas (parce que l'expression était singulière en parlant d'un successeur des apôtres) qu'il était évêque. de fortune; comme on disait tout haut d'un soldat parvenu au grade d'officier général, qu'il était officier de fortune. Exemples rares, au reste, et qui semblaient n'être établis que dans la proportion étroitement nécessaire pour que toute la classe des roturiers ne fût pas rebutée par le travail, si on ne lui eût laissé entrevoir aucune espérance. de parvenir aux honneurs.
Mais nous n'avons pas achevé l'examen de la distribution des grâces entre la noblesse et la roture.
Nous en étions restés aux primes : et ces grâces, nous convenons qu'en général on les donnait à des roturiers, toutes les fois qu'elles' n'étaient, conformément à leur nature, que le prix du travail et de l'activité, et non celui de rintrigue.
Les gratifications extraordinaires et momentanées s'accordent particulièrement à ceux qui fréquentent la cour et les dispensateurs des grâces : c'est donc encore un objet sur lequel la noblesse de la cour avait un fort préciput.
Pour les pensions attachées au droit de protection, on sent bien qu'elles ne se donnaient pas à des roturiers : la noblesse seule pouvait protéger.
Le produit des fondations faites pour l'humanité pauvre et souffrante était de nature à être distribué plus également ; et cependant, jusque-là même, il s'était établi des distinctions. Un noble pouvait recevoir les mêmes secours qu'un roturier; nous ne voyons point qu'il y eût de bourses ou places d'éducation, à l'égard desquelles la noblesse fût un titre d'exclusion ; mais il y avait beaucoup de secours de ce genre destinés à la seule noblesse. Il fallait être noble pour entrer à l'Ecole militaire; être noble pour entrer à Saint-Cyr. Le roi vient de faire cesser cette distinction injuste et humiliante ; il a ouvert les portes de l'Ecole militaire et celles de Saint-Gyr à tous les enfants qui devront être élevés aux dépens de l'Etat (1). Ainsi, toutes les fois que le roi connaît les abus, il les réforme ; et c est ici le lieu de
rendre compte de l'impression que l'examen suivi des mémoires présentés au roi nous a laissée sur les motifs pour lesquels le roi accordait, refusait ou modifiait les grâces. Beaucoup de demandes étaient fondées sur un usage qui paraissait tellement constant, qu'il aurait semblé injuste de s'y refuser ; elles sont accordées. D'autres demandes sont appuyées sur le besoin le plus pressant ; l'humanité du roi cède à beaucoup de ces demandes : mais, quand on a abusé du prétexte du besoin, quand on veut couvrir de ce prétexte de folles dépenses, ie roi devient sévère, il refuse inexorablement. Il refuse, avec plus de sévérité encore, quand on a la hardiesse de lui présenter une démande injuste. Il était un moyen assuré d'obtenir ses bienfaits : c'était de lui présenter l'avantage de son royaume, le bien de ses peuples, l'extension du commerce. Rien n'était refusé à ces vues ; et c'est pourquoi des courtisans intéressés avaient sollicité la direction des haras, c'était pour demander des sommes considérables, en faisant espérer que notre argent ne sortirait plus du royaume pour la remonte de la cavalerie.
§ IV.
Réflexions sur les causes des abus qui viennent d'être dévoilés.
Gomment les abus qui viennent d'être dénoncés à la nation et à ses représentants ont-ils existé? comment se sont-ils multipliés? comment se sont-ils perpétués ? 11 en est plusieurs causes : les unes générales, les autres pariculières à quelques départements.
La première cause générale est un défaut commun à toutes les lois faites sur cette matière. Leur préambule annonce les meilleures intentions. Les lois contiennent de bonnes dispositions ; mais toutes renferment un germe destructeur du bien qu'elles doivent opérer, dans les exceptions qu'elles portent. En général, les exceptions aux lois sont dangereuses ; mais elles le deviennent infiniment davantage, lorsque la loi attaque des passions dont l'action est vive et constante telle qu'est, dans la plupart des hommes, la passion des richesses. Le désir en est vil ; ie besoin qui se fait sentir chaque jour soutient la vivacité ûu désir : et les tentatives qu'il inspire se renouvellent, sous mille formes variées, jusqu'à ce qu'elles soient couronnées par le succès.
Une seconde cause générale, qui dérive en partie de la première, est l'inexécution des lois laites sur les pensions : leur multitude suffit pour prouver qu'elles ne furent point exactement gardées. Elles autorisaient elles-mêmes quelques personnes à ne pas s'y conformer : c'était un motif pour qu'un grand nombre d'autres eussent le désir et trouvassent des prétextes de ne pas les exécuter. Peu d'années après la publication des lois relatives aux traitements et aux grâces pécuniaires, lorsqu'on ne les avait pas oubliées encore, on y dérogeait ouvertement. Dans un mémoire présenté au roi (vu l'original de la décision) le 29 mars 1789 ; on expose, qu'aux termes d'une décision générale, du 15 mars 1778, le traitement des Intendants ne peut pas être de plus de20,000 livres; cependant on demande et on obtient pour le nouvel intendant de Rouen 9,000 livres de gratification annuelle, outre ses 20,000 livres de traitement, sur le fondement de l'exemple de M. de Villedeuil, qui avait eu 12,000 livres et de M. de Crosne, qui en avait eu 16,000.
L'ordonnance militaire du 18 mars 1776 accorde aux gouverneurs de province, contre l'usage ancien, l'intérêt à 4 0i0 des sommes qu'ils payeront à leurs prédécesseurs ou aux héritiers de ceux-ci, pour des brevets de retenue. Bientôt celte grâce nouvelle ne paraît plus suffisante. Le maréchal de Gontades, nommé gouverneur de Lorraine, à la mort du duc de Fleury, obtient, le 25 mai 1788, 3,000 livres annuellement, pour former, avec 12,000 livres qui lui étaient payées, suivant l'ordonnance de 1776, la somme de 15,000 livres, montant de l'intérêt à 5 0|0 du brevet de cent mille écus qu'il avait été obligé de payer.
11 subsiste encore des croupes et des intérêts dans les places des finances, malgré la démonstration, tant de fois répétée, des abus dont elles sont susceptibles, malgré tant de lois qui les ont proscrites (1) .
La facilité laissée aux ministres et aux ordonnateurs d'accorder des pensions dans leur département, devait les multiplier considérablement. Il est des personnes vis-à-vis desquelles un ministre ne peut alléguer d'autres causes de refus que l'impossibilité absolue d'accéder aux demandes qu'on lui propose. Faire cesser cette impossibilité,c'est livrer le ministre à la discrétion de tous ceux auxquels ou la place, ou le crédit, ou la hardiesse donnent de l'empire sur lui.
Les réductions prononcées, à diverses reprises, sur les pensions; les conversions d'arrérages échus en rentes viagères; les suspensions de payement, ont été une troisième cause générale de l'augmentation des pensions. Celui qui sollicite une grâce est attentif à tout ce qui peut en diminuer l'effet ; il calculerait d'après ses craintes, d'après des vraisemblances : à plus forte raison calcule-t-il d'après des exemples : il suffit de craindre peu, pour se déterminer à demander beaucoup ; et comme le plus ordinaire est que celui qui obtient une pension soit actuellement en faveur, il abuse de cette faveur, pour apaiser ses craintes autant que pour satisfaire ses désirs.
Une quatrième cause générale d'abus a été la facilité de réunir et de confondre, pour obtenir des grâces, des motifs d'un genre totalement différent. Les grâces pécuniaires sont des récompenses données au besoin. Les services rendus, le besoin existant, voilà les deux seuls objets qu'on devrait présenter pour déterminer une pension : mais au lieu de se renfermer dans une marche aussi simple, qui aurait toujours laissé la vérité à découvert, on a allégué des motifs d'indemnité, des payements à faire, des répétitions à éteindre. Dans d'autres circonstances, les pensions ont été demandées comme la soulte d'un échange, comme le remplacement de dons déjà assez anciens pour que la nature de causes, auxquelles on avait cédé alors, fût oubliée. Les mémoires sur lesquels les grâces pécuniaires étaient sollicitées, sont devenus compliqués, et le prince a été plus libéral lorsqu'on a su intéresser sa justice rigoureuse en même temps que sa bienfaisance.
On n'a pas non plus mis assez d'attention à exiger de ceux qui obtenaient de nouvelles grâces, l'état exact de celles dont ils étaient en possession. Nous avons eu sous les yeux un mémoire présenté pour M. Déliré, commissaire des guerres, attaché au régiment des gardes fran-
çaises, et premier commis des finances, (va la décision aux bureaux des finances), le premier janvier 1789 : M. Déliré expose qu'il a un acquit patent de 2,100 livres ; il demande 2,900 livres pour compléter une retraite de 5,000 livres ; il l'obtient. Mais au pied du mémoire, on trouve une petite note indicative qu'il avait obtenu, le premier janvier 1788, 6,000 livres au département de la guerre. Cette note était indispensable pour l'expédition du brevet, qui ne pouvait se faire que dans le département où la pension la plus forte était accordée ; mais ce n'était ni dans un coin du mémoire, ni après la signature du roi (comme il est vraisemblable qu'on Va fait) que la note devait être écrite : c'était dans le corps même du mémoire qu'il fallait déclarer ouvertement que M. Déliré demandait 11,000 livres, et non pas 5,000 livrea de retraite.
Passons de ces causes générales aux causes particulières, qui ont influé sur l'augmentation des grâces pécuniaires dans quelques départements.
Au département de la guerre, les grâces pécuniaires se sont excessivement multipliées à cause des changements très fréquents qui ont eu lieu dans la constitution et l'organisation de l'armée. On se rappelle qu'après la paix de 1763, M. de Choiseui proposa et fit adopter le plan d'une nouvelle constitution militaire ; elle entraînait la réforme de beaucoup d'officiers et un grand nombre d'autres préférèrent leur retraite à la nécessité de recommencer l'étude d'un art qu'ils avaient longtemps pratiqué avec succès. Ces réformes et les retraites de 1762 et 1763 ont été l'époque de beaucoup de pensions.
Les opérations de M. de Monteynard, en 1771, ont fait renaître les mêmes causes et les mêmes effets. Beaucoup de mouvements dans les troupes ont donné lieu à beaucoup de réformes, de retraites et de pensions.
Même résultat des opérations de M. le maréchal du Mu y en 1774, et du dédoublement des régiments en 1775.
On estime que la constitution nouvelle, donnée à l'armée en 1776, par M. de Saint-Germain, a coûté plus de 3 millions pour les réformes ; que les ordonnances de M. de Brienne, en 1787, ont occasionné 1,700,000 livres de dépenses de même nature.
Ces nouvelles ordonnances militaires ont occasionné une autre espèce de dépenses : plusieurs officiers perdaient sur leurs anciens traitements, et l'on appréhendait leur retraite. On leur accordait des suppléments de traitement, qu'il est difficile de calculer d'une manière précise, lorsqu'on veut en réunir le total, parce qu'ils ne se payent pas sur des brevets, mais sur des états arrêtés par le ministre ; et qu'après quelque temps, ces états varient à raison des morts, ou de nouveaux emplois accordés à ceux qui en jouissaient. Le bureau de la guerre nous a fourni un état de suppléments d'appointements, arrêté par le roi, le 24 janvier 1789, pour les officiers de son armée qui avaient éprouvé quelque diminution d'appointements par la formation de 1788 ; il monte à 224,814 livres. Enfin, il a été fait, depuis 1779, quatre ou cinq promotions d'officiers généraux, et chaque promotion donne lieu à une dépense de 150,000 livres à 200,000 livres en pensions, parce que l'officier français qui avait des appointements, par exemple, comme colonel, n'en ayant pas en qualité de maréchal de camp, ne manque pas de demander une pension pour suppléer à ce défaut de traitement.
Dans la maison du roi, les causes particulières qui ont multiplié les abus des grâces pécuniaires, remontent à l'époque de la fin du règne de Louis XV. Lorsqu'on forma les maisons des princes, frères du roi, les personnes qui étaient alors en faveur, soit auprès du roi, soit auprès du ministre de sa maison, obtinrent, la plupart, des charges que l'on créa dans les deux nouvelles maisons. Il les obtinrent gratuitement, et quelques-uns en réunirent plusieurs. Ces dons étaient faciles à faire, parce qu'il ne paraissait pas qu'il y eût rien à débourser pour les accorder : on exerça les charges pendant assez de temps pour acquérir la faveur du prince ou de la princesse à qui l'on était attaché, puis on se retira en obtenant des pensions, et en vendant fort cher la charge qui n'avait rien coûté. On avait des charges dans les deux maisons; on obtint des retraites dans l'une, et l'on demeura titulaire dans l'autre. De là, ce que l'on remarque souvent, dans la comparaison de la liste des pensions avec l'état des maisons des princes, que le même individu réunit sur sa tête, pension, retraite et traitement d'activité.
Dans le département des finances, on peut compter deux grandes causes de la multiplicité des grâces pécuniaires. La première est la fréquence des changements de ministres. Un ministre se retire ; il faut le récompenser, lui d'abord. Il avait ses créatures qu'il avait mises en place; elles se retirent avec lui ; elles allèguent des services, et elles obtiennent des récompenses. Le nouveau ministre arrive : on lui paye son établissement. Le besoin de soutenir sa faveur naissante le rend facile à accorder les grâces ; il ne saurait être sur-le-champ au fait de tout ce qui avait été demandé sous le précédent ministère, et refusé pour de justes causes : on se hâte de lui présenter des suppliques et on le surprend. Bientôt il songe à ses intérêts ; l'exemple de ses prédécesseurs l'avertit qu'il n'y a pas de temps à perdre ; il s'assure d'une retraite pour le cas, qu'il prévoit déjà, où il pourra être remercié. Nous avons calculé la dépense que le changement des ministres, en 1787 et 1788, a occasionnée : elle a monté, en argent comptant, à la somme de 881,000 livres; en pensions de retraite ou augmentations de traitement, à la somme de 499,410 livres (1); et cependant on pourrait dire encore qu'à cette époque (Etat de comptant de 1775), on a été économe et réservé; car, en 1775, lorsqu'on rappela le comte de Saint-Germain au ministère, on lui donna, pour les seuls frais de son établissement, 344,000 livres.
La seconde cause de l'augmehtation excessive des grâces pécuniaires dans le département des finances, est la conversion en pensions, sur le Trésor royal, de cette multitude d'intérêts dans les affaires, de pensions accordées sur toutes les parties de revenus possibles, et sous tous les prétextes imaginables. Il ne paraît pas qu'il ait été fait alors d'examen des grâces que l'on convertissait en brevets sur le Trésor royal; les concessions que l'on transformait en brevets étaient infiniment nombreuses et souvent sans cause (2). Il paraît qu'en général, on n'a donné
en pension que le tiers ou la modicité du revenu annuel auquel on évaluait le produit des iDtéréts dans les affaires et des croupes ; mais c'était bien assez encore pour grever excessivement le Trésor public.
Une dernière cause des abus, celle qui les couvre, les entretient et les fomente tous, c'est le secret dans lequel on ensevelissait une foule de libéralités, tantôt énoncées d'une manière positive, tantôt déguisées dans les états de comptant. Que l'on excuse ces états; que dans le grand nombre des articles qu'ils contiennent, on en produise plusieurs qui énoncent des dépenses légitimes; qu'on veuille laisser croire que les dépenses dont on ne parle pas, ne sont pas moins justes que celles dont on parie : il n'en est pas moins vrai que quiconque y jettera les yeux sera frappé d'une multitude d'abus qu'on couvre par cette forme de compter.
Le comité terminera ce premier rapport, en présentant la notice des registres, états et décisions, d'après lesquels il a établi la masse actuelle des pensions, dons, gratifications et les abus existants. Il est très important qu'on sache d'après quoi il a opéré, parce qu'étant convaincu que son travail n'aura pas été exempt d'erreurs, de même qu'il n'aura pas été exempt d'omissions, pour n'avoir pas eu toutes les connaissances nécessaires, il faut que les membres de l'Assemblée, et chacun des citoyens, puissent relever ses erreurs et suppléer à son silence. L'objet unique de tous ses travaux, ayant été de trouver le vrai et de le faire connaître, on- entrera également dans ses vues, en lui apprenant qu'i] s'est trompé, comme en ajoutant de nouvelles découvertes à celles dont il vient de rendre compte.
§ V.
Notice des registres, états et décisions qui ont servi de base au travail et aux rapports du comité.des pensions.
Dans une administration parfaitement organisée, les dons devraient être exactement connus de même que les dettes : et il faudrait que l'on pût, à la seule inspection des registres, voir la totalité de ce qui est donné, les personnes auxquelles il est donné, et les causes pour lesquelles les grâces pécuniaires ont été accordées.
Les livres du Trésor public, ou, pour employer l'expression en usage jusqu'à ce jour, du Trésor royal, ne présentent point cette clarté et cette simplicité. Son administration et sa comptabilité sont extrêmement compliquées, et Je même embarras se trouve dans la manière dont beaucoup de parties prenantes sont payées. Les mêmes indiviaus reçoivent le payement du service attaché à une charge unique, en une multitude de parties différentes. Cet abus a lieu singulièrement dans la maison du roi, de la reine et des princes. Un seul individu qui n'a qu'un seul service à faire, reçoit son payement quelquefois en treize parties, et sous treize dénominations distinctes. Des usages antiques ont introduit, dit-on, cette manière d'opérer; le désir de conserver des formes respectables l'a perpétuée. Il y a bien plutôt lieu de croire que c'est
l'intérêt des particuliers qui l'a maintenue. Il est facile de recevoir plus qu'il n'appartient, et de donner après cela encore de l'apparence à de nouvelles demandes, lorsque l'ensemble des sommes qu'on reçoit est devenu un mystère, dont celui qui est intéressé à en conserver le secret, peut seul dévoiler les profondeurs. A l'égard de l'embarras de la comptabilité, il augmente sans doute le travail des comptables, mais il procure aussi bien des ressources pour altérer les recettes et voiler les dépenses.
On a plusieurs fois tenté de diminuer la double complication de la comptabilité. M. Necker, dans le cours de sa première administration, fit rendre en 1778, 1779 et 1780, plusieurs édits qui conduisaient à ce but par la suppression d'un grand nombre de trésoriers et de contrôleurs particuliers. Il simplifia et diminua considérablement la dépense de la maison du roi, par le règlement du 17 août 1780, pour l'administration intérieure de cette maison, et par l'édit du mois d'août 1780, qui supprima 406 charges de la bouche et du commun.
Les plaintes des notables forcèrent à accélérer l'ordre de la comptabilité et à l'éclairer : seul moyen efficace pour la rendre exacte; car, comme on l'a fort bien observé dans le compte présenté au roi, au mois de mars 1788, page 7 : « Il n'est point d'abus que l'ordre et la publicité « ne parviennent à détruire .» Un règlement fait par le roi, le 5 juin 1787, pour la formation d'un conseil royal de finance et de commerce, ordonne, article 8, que « tous les ans, la distri-« bution des fonds, entre les différents dépar- tements, sera faite au conseil des finances; « qu'à cet effet (art. 9), l'état des dépen-« ses que chaque ordonnateur jugera néces-« saires pour l'année qui devra suivre, sera « rapporté au conseil; qu'après leur examen, « le roi déterminera les fonds qui seront assi-« gnés à chaque département .» L'article 11 contenait les dispositions les plus importantes : savoir que « l'état des fonds de l'année sui-« vante serait toujours fait et arrêté au conseil a royal des finances et du commerce, dans le « mois de décembre, et rendu public par la « voie de l'impression; que la vérification des « dépenses serait faite au mois de janvier ou « de février de chaque année. »
Un édit du mois de mars 1788, suivi d'un règlement général, du 30 du même mois, et de plusieurs règlements particuliers, a établi l'ordre qui s'observe actuellement au Trésor royal. L'administration générale en est partagée entre cinq administrateurs, dont l'un a pour département la caisse générale : celui-ci doit présenter au conseil, au mois d'avril de chaque année, l'état au vrai de toutes les recettes et dépeuses de l'année précédente. Les livres de la caisse générale doivent être tenus en parties doubles, et au 31 décembre de chaque année, les comptes doivent être additionnés et arrêtés, pour procéder à la balance des livres qui doit être faite dans le terme de trois mois au plus tard.
La nouvelle forme d'administration, établie par l'édit et le règlement du mois de mars 1788, a commencé au premier juillet 1788; mais il ne paraît pas que ce qui avait été ordonné pour la célérité de la reddition des comptes ait été exécuté : autrement l'Assemblée aurait pu connaître, ce qu'elle ne connaît pas encore, le résultat du service du Trésor royal en 1788 et 1789.
Ce résultat ne peut se connaître que par des comptes. 11 en existe, dans l'ordre actuel, de deux
espèces, qui se gênent et se retardent réciproquement. Le Trésor royal compte au conseil du roi et à la chambre des comptes, dans deux formes absolument différentes, mais qui ont quelques principes communs.
Le Trésor royal compte par exercices. Chaque année donne le nom à l'exercice, exercice deA760, exercice de 1780 ; mais les recettes ou les dépenses de l'exercice ne se sont pas toutes dans les douze mois de l'année à laquelle l'exercice appartient, de manière que, comptant par exercice, il est moralement impossible d'établir la balance du compte au dernier jour de l'année.
Les recettes et les dépenses publiques se font sur des états ou sur des ordonnances. Les états sont dressés avant le temps où les recettes et les dépenses doivent s'effectuer, d'après ce qui, aux termes des édits, déclarations, etc., doit être perçu ou payé. Un grand nombre d'ordonnances anciennes prescrivent la composition des états; elles ont été confirmées en particulier par un règlement du 15 septembre lê61, qui s'observe encore aujourd'hui pour la plupart de ces dispositions. Les ordonnances sont expédiées aux époques où les dépenses particulières, qui ne sont pas portées dans les états, se trouvent nécessaires.
L'exercice d'une année étant achevé, on rassemble la totalité des dépenses, et on en fait deux classes ; l'une comprend ies dépenses que la chambre des comptes peut admettre, d'après les lois selon lesquelles elles se régit ; l'autre comprend les dépenses que la chambre n'admettait pas comme légitimes, ou comme justifiées aux termes des lois.
On fait un rôle de toutes les dépenses de la première classe. Quelquefois le même rôle comprend les douze mois de l'année; quelquefois on fait deux rôles : l'un pour les six premiers mois, l'autre pour les six derniers mois. Il y a en outre, ordinairement, un rôle qui comprend les restes de l'année. On y place les dépenses tardives qui appartiennent à l'année, mais qui ne sont pas faites sur des ordonnances datées de l'année.
Les dépenses dont on ne veut pas justifier à la chambre des comptes, sont comprises dans les états de comptant, dont nous avons expliqué la forme ailleùrs (1), et pour exemple desquels nous avons fait imprimer ceux de 1783. Ils sont divisés en deux parties, année et restes ; quelquefois en trois : six premiers mois, six derniers mois, restes.
Ces rôles et états contiennent toutes les dépenses en détail, avec le nom des parties prenantes, excepté lorsque la dépense est pour l'acquit d'une ordonnance au porteur. Ils sont présentés au roi dans son conseil des finances : là, ils sont vérifiés et arrêtés par le roi, ses ministres, et tous les membres du conseil. C'est sur les rôles qu'on dresse ce que l'on nomme états au vrai, c'est-à-dire états de la dépense telle qu'elle a été effectuée : à la différence des premiers états qui contenaient la dépense seulement probable, et, pour ainsi dire, par aperçu. L'état au vrai est la base du compte que le Trésor royal fournit à la chambre des comptes.
L'édit du mois d'août 1669, qui a ordonné de dresser des états au vrai, pour compter à la chambre, porte, article 15, que ces états ne pourront être dressés qu'après avoir été arrêtés au conseil. Une déclaration du premier mars 1781
a confirmé cette disposition : de là, il est résulté que la reddition des comptes à la chambre a été fort arriérée, les gardes du Trésor royal s'excusant sur ce que les rôles n'étaient pas arrêtés au conseil ; et ces rôles, eux-mêmes, n'ont été arrêtés que longtemps après les dépenses faites. Leur présentation a été reculée, soit par la nécessité d'y comprendre toutes les dépenses relatives au même exercice, quoiqu'elles ne fussent faites qu'assez longtemps après l'expiration de l'année ; soit par la négligence à laquelle on se laisse si facilement aller. Les rôles de 1775 n'ont été arrêtés qu'en 1787; ceux de 1779 l'ont été en 1788 ; ceux de 1783 et des années postérieures ne le sont pas encore.
G'est un très grand inconvénient, sans doute, de n'avoir de compte dressé, que longtemps après la date des dépenses. Du temps de Louis XIV et de Louis XV,on remédiait en partie à cet inconvénient par la tenue d'un registre dont nous avons vu plusieurs volumes aux bureaux de la finance, et qui y est connu sous le nom de Livre du roi. La recette et la dépense journalières sont rapportées à chaque exercice auquel elles appartiennent; on en compte, pendant f'année même de l'exercice, mois par mois ; et trimestre par trimestre pendant les années qui suivent celle de l'exercice. Ces registres étaient mis sous les yeux du roi, chaque mois et chaque trimestre. Nous avons vu ceux du temps de Louis XIV, apostillés et arrêtés de sa main; les comptes de 1690 sont clos et arrêtés définitivement, au 6 septembre 1692. Ceux du temps de Louis XV sont arrêtés quelquefois de la main du roi, quelquefois de celle d'un ministre, mais toujours signés du roi, A la mort de Louis XV, la clôture des registres était retardée de quatre ans. Nous avons vu de3 dépenses de 1770, qui n'ont été allouées que par Louis XVI. Peu à peu, on s'est relâché encore davantage; et enfin, on assure qu'on ne tient plus de ces registres; ils sont remplacés par différents registres, tenus dans les bureaux de la finance, particulièrement par un registre où l'on inscrit jour par jour les ordonnances qu'on délivre aux parties.
L'état actuel a cependant quelque chose de fort extraordinaire. Les dépenses ordonnées par le roi et les ministres ne repassent sous leurs yeux comme acquittées qu'après une révolution d'un assez grand nombre d'années, à une époque où souvent il ne reste pas un seul des ministres sous lesquels elles ont été faites. Gommênt compter sur l'exactitude d'une vérification qui ne se fait qu'après une révolution quelquefois de douze années ? Par rapport au compte qui se rend à la chambre des comptes, de quelle utilité peut-il être, depuis que l'on s'est permis de porter les états de comptant à telle somme que l'on jugeait à propos, et d'y comprendre des dépenses de toute nature?
Le défaut de temps ne nous a pas permis un examen suivi des livres de Louis XIV et de Louis XV; d'ailleurs, ils. ne nous auraient pas instruits des abus actuels qui sont à réformer. Cependant, il nous a semblé que, si nous en avions eu le loisir, nous aurions pu nous en servir pour multiplier et établir avec plus de précision quelques rapprochements et quelques comparaisons capables de fixer les idées sur la nécessité et la somme des libéralités publiques.
Nous avons examiné plusieurs rôles de diverses années, et plufc particulièrement ceux de 1775, 1779 et 1783. En connaissant, par cet examen, le détail des dépenses effectives de ces années, et la manière de les mettre sous le3 yeux du roi,
nous nous sommes convaincus de la facilité qu'il y avait à se procurer de l'argent aux dépens du résor public. Nous avons remarqué sous combien de prétextes on obtenait des grâces pécuniaires. Les mêmes noms répétés nous ont fait voir que c'était souvent les mêmes personnes qui, sous différentes qualités, mettaient la main dans le Trésor public; qu'après leur avoir donné des gages, on leur donnait des appointements, ensuite des indemnités, puis des récompenses, puis des gratifications, puis des pensions. Nous présenterons à la suite de ce rapport, sous le n° XVII, un tableau de récapitulation des dépenses portées aux états de 1775, 1779 et 1783, afin qu'on ait quelque idée des titres de chapitres de dépenses, et qu'on sache aussi combien l'Etat a effectivemen t dépensé dans chacune de ces trois années. Après les rôles et les états de comptant, nous avons parcouru le registre journalier des ordonnances pour 1788, 1789 et 1790; nous avons même demandé des copies des chapitres qui nous paraissaient avoir quelque rapport aux dons et aux gratifications. Le comité a remarqué, sur l'exercice 1788, des dons et remises pour 216,785 livres; plusieurs gratifications, confondues dans le chapitre des appointements et traitements, ainsi que dans le chapitre des dépenses extraordinaires et diverses; et un chapitre de dépenses secrètes de la finance, de 3,562,833 livres. Sur l'exercice de 1789, ify a pareillement des gratifications confondues sous de pareils titres ; celui qui a spécialement pour titre, dons et remises, monte à 188,562 livres; celui des dépenses secrètes monte, en quatre articles à 1,523,000 livres; un seul article est de 1,500,000 livres. Dans le registre des ordonnances et des dépenses de 1790, nous avons aperçu encore quelques gratifications, et à la suite de plusieurs payemeuts faits à M. le comte d'Artois pour son comptant, pour sa maison, pour celle de ses en-fants(l), nous avons remarqué, à la date du 19mai, une somme de 100,000 livres à compte pour les six derniers mois 1789 des rentes de ce prince, dont le roi s'est chargé.
Les registres dont nous venons de parler, constatent seulement le fait du payement des pensions et des dons : c'est ailleurs qu il faut chercher les titres qui les établissent, et les motifs pour lesquels ces grâces sont accordées.
En générai, toute gratification ou pension est accordée par une décision donnée sur un mémoire qui explique brièvement les motifs de la demande. Ce mémoire est répondu par le roi (voyez ci-dessus, et quelquefois, comme nous l'avons fait remarquer , il l'est seulement par le ministre. Une lettre du ministre est souvent le titre unique des gratifications qui se payent ailleurs qu'au Trésor royal. A l'égard des pensions qui se pavent au Trésor royal, on expédie, sur la décision du roi ou du ministre, un brevet, signé : Louis, et contresigné par le ministre, dans le département duquel le breveta été expédié; on en retient une ampliation, et les brevets sont immatriculés, sur la présentation que les parties en font, dans des registres que l'on tient au Trésor royal. Les brevets sont le titre de la pension ; mais la plupart n'en font connaître la cause qu'imparfaitement, à raison de la mention souvent trop vague de services dont la nature et la durée ne sont pas expliquées.
Il faut donc recourir aux décisions elles-mêmes.
On tient dans les bureaux du contrôle général, ordinairement au bureau des dépêches, un recueil qui est intitulé Décisions du roi, quelquefois Mémoires du roi, et dans lequel on transcrit les mémoires présentés au roi, avec la décision dont ils sont suivis. Ce recueil est très intéressant à connaître, parce qu'il ne contient pas seulement les mémoires présentés pour obtenir des grâces pécuniaires, proprement dites, mais en général, les mémoires relatifs à toutes les opérations qu'on présente au roi, acquisitions, échanges, créations de charges, nominations de places, etc.
Cependant ce recueil, quelque ample qu'il soit, ne suffit pas encore (voyez la lettre de M. Nec-ker, du 3 avril 1790; Correspondance, pag. 13): d'abord, parce qu'il y a certaines décisions, qu'on omet d'y transcrire, quelquefois par négligence, quelquefois au contraire, par une attention particulière (1); ensuite, parce que l'on ne trouve pas là les décisions purement ministérielles. Il faut donc recourir aux décisions originales, qui sont conservées dans chaque département, sur des feuilles volantes telles qu'on les a présentées.
Les ordonnances que l'on voulait tenir plus secrètes étaient inscrites dans le livre rouge, dont le comité a publié le dépouillement.
Tels sont les matériaux qui ont servi de base aux différents travaux du comité. C'est d'après ces mêmes registres, d'après les ampliations de brevets, et d'après les états envoyés des bureaux, qu'il publie les états nominatifs de pensions, tant sur le Trésor royal que sur les autres caisses. Les observations qui y seront jointes, seront le résultat des connaissances acquises par l'examen soit des décisions originales, soit du recueil qui en contient la copie. Ces états nominatifs, dont une paftie a déjà été imprimée et distribuée, et dont la suite le sera sans interruption, serviront de preuve et de complément à ce que nous avons dit dans' le présent rapport, sur la masse et les abus de la somme et de la distribution des grâces pécuniaires.
La conférence résultant des faits que nous venons d'annoncer, et d'établir seulement par quelques exemples, est la nécessité absolue de faire cesser par des lois justes, mais sévères, une dilapidation portée à un excès intolérable. L'insuffisance des lois qui ont précédé, doit convaincre l'Assemblée du devoir indispensable où elle est, de prendre des mesures plus efficaces que celles qui ont eu lieu jusqu'à présent, pour imposer enfin silence aux demandes et aux sollicitations des gens ambitieux et en crédit.
Le comité a rédigé le plan de ces règles : les rapports qui vont suivre, en contiendront la proposition, et l'Assemblée les jugera dans sa sagesse.
Fait au comité des pensions, le 17 juin 1790.
Signé : Camus, Goupil, Gaultier, Expilly, Fré-teaU, Treilhard, J. de Menou, Julien-François Palasne, ci-devant ChampeaUx, cottin, L.-M. de la réveillère.
pieces justificatives du rapport sur les pensions.
N° I.
Travail de M. de Galonné avec le roi, sur les pensions.
(Registre des décisions, tome XII.)
Les pensions montent, suivant les états des différents départements à 32,290,000 livres.
savoir :
La guerre........................................18,900,0001.
La marine.................... 2,200,000
Les affaires étrangères......... 590,000
La maison du roi.............. 4,600,000
La finance.................... 6,000,000
Total.......... 32,290,000
Mais, suivant les états de payements au Trésor royal, ces pensions ne vont qu'à 28 millions, et meme un peu au-dessous.
Les quatre millions d'erreur proviennent, d'un côté, de ce qu'on a porté dans les états de la guerre plusieurs grâces et récompenses militaires qui ne se payent pas au Trésor royal, et qui vont a 2,900,000 livres; d'un autre côté, de ce que, dans les états des différents départements, on a laissé subsister, par articles distincts, plusieurs pensions qui ont été réunies, dans un seul brevet, au département où se trouve la plus forte, ce qui fait double emploi. Pour rectifier cette erreur, on a divisé la masse des pensions ainsi qu'il suit :
SAVOiR :
La guerre........................................16,000,000 1.
La marine........................................2,000,000
Les affaires étrangères......... 590,000
La maison du roi............................4,000,000
La finance......................5,410,000
Total......... 28,000,000 1.
Les extinctions s'élèvent, année commune, à 900,000 livres au plus : ce qui fait, à peu près, le trente-unième delà masse totale de cette somme. Le prélèvement fait du tiers amorti laisse à distribuer, chaque année, 600,000 livres.
La répartition doit en être faite entre les différents départements, en proportion, soit de la part qu'ils ont dans la masse des pensions, soit de leurs extinctions annuelles, ce qui revient au même.
Les extinctions comptées comme elles arrivent chaque année pourraient présenter des inégalités plus ou moins fortes. Il paraît préférable, pour former une base fixe, de les évaluer au trente-unième, évaluation qui s'accorde assez avec les résultats des extinctions des deux dernières années.
En conséquence,
partage
en comptant
les extinctions
au 31e, ce qui donnerait 900,000 et 600,000 livres k
distribuer.
La guerre ayant 16 millions de pensions, ses extinctions, au trente-unième, seraient de 516,000 livres, dont les deux tiers
à distribuer font............ ...
La marine ayant 2 millions de pensions, ses extinctions, au trente - unième, seraient de 64,500 livres : les deux tiers font.
Les affaires étrangères ayant environ 590,000 livres de pensions, ses extinctions seraient de 19,000 livres : les deux tiers sont.
La maison du roi ayant 4 millions de pensions, ses extinctions, au trente-unième, seraient de 129,000 livres, dont les deux
tiers sont.......................
La finance, comptée sur le pied seulement, de 5,400,000 livres de pensions, aurait, en extinctions, au trente-unième, 175,000 livres, dont les deux tiers à distribuer ne seraient que.................
livres.
344,000 43,000 12,666
86,000 116,000
Total de rigueur.
601,666
augmentations
proposées, en comptant
les extinctions
au 28®, ce qui don
nerait 990,000 livres par an, et
660,000 livres à
distribuer.
livres.
360,000 50,000 18,000
92,000
140,000 En y compre nant la ma gistrature.
Total tel qu'il est proposé
660,000
Mais on observe qu'en réduisant ainsi à 5,400,000 livres la somme de ces pensions, portée à 6 millions dans son état, il ne resterait rien pjur la magistrature, qui cependant doit être comprise dans l'article de ce département, et exige même un supplément. Ainsi, lorsque, dans la colonne des augmentations, on porte cet article à 140,000 livres, on est plutôt au-dessous qu'au-dessus de la proportion de ce qui est accordé aux autres départements.
Ce partage étant ainsi réglé, la même distribution pourrait subsister tous les ans, jusqu'à ce que la masse des pensions eût éprouvé une diminution assez forte pour influer sensiblement sur les extinctions. Il en résulterait cet avantage, qu'au lieu d'avoir, chaque année, une quotité variable, et souvent très différente, à distribuer, chaque département connaîtrait la mesure sur laquelle il pourrait compter; et que, lorsque des circonstances extraordinaires auraient obligé de l'excéder, par anticipation sur l'année suivante, il pourait prévoir et calculer d'avance à quel point sa distribution se trouverait alors restreinte pour rentrer dans la proportion. J'ai communiqué ce détail aux quatre secrétaires d'Etat; tous reconnaissent que la réduction proposée est convenable à la distribution proportionnée aux extinctions de chaque département.
M. le maréchal de Ségur observe seulement que les retraites actuelles étant fixées par les ordonnances sur un pied plus fort que les an-
ciennes, il lui sera difficile de satisfaire à tout avec la somme de 360,000 livres, sur laquelle il faudra prélever 120,000 livres au moins pour les retraites des différents corps de la maison militaire de Votre Majesté. lien résultera vraisemblablement plus de sévérité dans l'examen des pensions de ce genre, qui semblent ne devoir être accordées qu'à ceux qui sont vraiment hors d'état de servir.
M. le maréchal de Gastries représente que; d'après la nouvelle ordonnance de la marine, il doit y avoir beaucoup de retraites, et qu'il! croit juste de laisser, dans ce moment-ci, à son département, des moyens extraordinaires, relativement aux circonstances particulières qu'oc-cassionnent les dispositions dernièrement arrêtées par Votre Majesté.
M. le comte de Vergennes marque que les pensions du département des affaires érrangères, et leurs extinctions, fournissent un si petit objet dans la masse totale, qu'il ne croit pas qu'elles doivent déranger le plan général.
M. le baron de Breteuil applaudit à l'arrangement de la distribution, et ne fait aucune observation particulière.
Quant à M. le garde des sceaux, il approuve que les pensions qu'il proposera pour la magistrature continuent d'être comprises dans la portion assignée au département des finances, de la même manière qu'elles l'ont été jusqu'à présent. Mais comme il espère que Votrè Majesté reconnaîtra la nécessité d'augmenter le traitement des chefs de compagnie et des principaux membres de la magistrature, qui sont encore sur l'ancien pied, Votre Majesté approuvera, sans doute, que cette augmentation, qui sera plutôt de justice que de grâce, soit prise en dehors de la somme destinée aux pensions de ce département, qui doit paraître bien modique dans la proportion générale, lorsque l'on coasidère que, réduite à 140,000 livres elle comprend les pensions et retraites des ministres et de tout le conseil ; celles de tous les intendants, premiers secrétaires et chefs des bureaux; celles 'de tous les employés principaux à la recette des revenus de Votre Majesté; celles enfin de tout le royaume, lorsque n'ayant pas un caractère particulier qui ies rapporte spécialement à Un des départements, elles n'ont d'autres motifs que le malheur, et d'autres titres que la bienfaisance de Votre Majesté.
Je supplie Votre Majesté de me faire connaître si elle approuve toutes les parties de cette distribution*.
D e la main du roi : APPROUVÉ.
N° II.
Observations sur l'état qui suit.
Il est extrêmement difficile d'évaluer, d'une manière exacte et précise, ce qui est pur don dans les suppléments de traitements, gratifications éxtrordinaires et autres articles compris dans l'état. Il y a, par rapport à la manière dont la dépense, relative à différentes charges, est ordonnée, particulièrement dans la maison du roi, trois faits qui paraissent également impossibles à contester.
Le premier, que les gages, fixés sur un pied fort ancien, sont évidemment trop faibles aujourd'hui.
Le second, que ce qu'on nomme supplément de
traitement, gratification ordinaire, etc., est, à l'égard de plusieurs charges, et pour partie, un véritable supplément de gages.
Le troisième : mais qu'à l'égard d'autres charges, et souvent pour une portion considérable, ces suppléments de traitements, etc., sont de pures libéralités.
Une première conséquence de ces faits est que la manière d'opérer qui existe est sujette à une multitude d'abus. Oh a dit avec raison, dans le compte présenté au roi, au mois de mars 1788 (page 96): « Quand les traitèments ordinaires « sont insuffisants, ils doivent être augmentés ; « et il n'est pas étonnant que ce qui était conve-« nable il y a cent ans, soit maintenant au-dessous « du nécessaire. Mais ce n'est ni par des supplé-« ments séparés, ni par des ordonnances particu-« lières.que ces augmentations doivent avoir lieu. « En donnant en différents articles ce qu'on donne * à la même charge ou à la même personne, on « n'a pas sous les yeux l'ensemble de ce qu'elle re-« çoit, et on ne peut établir de proportion avec ce « qu'elle doit avoir. D'ailleurs, des ordonnances « particulières, quoique pour des causes justes et « indispensables, semblent toujours tenir de la « faveur. »
Le comité a dû dénoncer l'abus de cette manière d'opérer.
La seconde conséquence des trois faits exposés, est que le comité, qui devait faire connaître à la nation ce qui est une libéralité dans les objets dont il s'agit,était en même temps très embarrassé à distinguer ce qui est don de ce qui est payement. Plusieurs officiers delà maison du roi reçoivent des gages, de leurs charges; des gages, appointements et pensions du conseil; particuliers et récompenses sur le Trésor royal. Le comité n'a fait le relevé que de la somme des traitements particuliers.
Plusieurs des dames de la réineonl des répartitions sur treize colonnes différentes; savoir : gages, appointements et salaires; pensions; nourriture, et droit de plat ; entretien et habillement; charrois et haquenée ; entretien de chevaux ; logements ; droits de manteaux ; bougie et cire jaune ; récompenses et gratifications ; menues fournitures et frais ; traitements particuliers. Nous n'avons fait le relevé que de trois colonnes : pensions ; récompenses et gratificatipps ; traitements particuliers, quoique nous soyons convaincus que, dans les autres colonnes, il y a aussi beaucoup dé dons.
Mais dans toutes les parties que nous avons examinées, nous nous sommes toujours étudiés à diminuer lé résultat de la masse des dons, plutôt qu'à l'étendre. Ainsi nous n'avons pas compté la dépense des ateliers de charité, portée pour 1,911,035 livres à la page 184 de l'état des dépenses fixes, quoique, sous plusieurs rapports, cette dépense soit une auméne. Par exemple encore, nous avons séparé, avec le plus de soin qu'il nous a été possible, ce qui est indemnité, de Ce qui don dans les états portés aux dépenses fixes, dépuis la page 173 jusqu'à la page 183 ; et c'est pourquoi nousne portons le total décès dix pages qu'à 4,206,664 livres au lieu que dans l'état des dépenses fixes, il monte à 5,726,602 livres.
C'est en procédant avec ces précautious et ces réserves, que nous avons trouvé, pour'le total desgrâcés pécuniaires annuelles,58,836,721 livres. Nous sommesintimement convaincus que les faux ou doubles emplois et les erreurs qui peuvent s'être glissés idans ce éalcul, sont couverts par des omissions que nous n'avons reconnues que
postérieurement (1) ; par des erreurs de calcul en moins (2) ; par des objets que nous ne connaissions pas au temps où nous avons fait nos calculs (3) ; surtout, enfin par des objets que nous ne connaissons pas encore. Néanmoins, pour éviter absolument tout reproche, nous avons rabattu de cette somme de 58,836,721 livres, environ 4 millions ; et nous avons pris pour hase une somme ronde de 55,000,000 livres, comme nous l'avons annoncé dans notre rapport. 11 nous paraît impossible de soutenir que les grâces pécunières annuelles aient été au-dessous de
55,000,000, livres et trfcs raiscnnable en m6me temps de ne pas douler qu'elles excedaient de beaucoup cette somme.
Les indications qui se trouvent a c6te de chacun des articles, annoncent les pieces qui ont servi de base i nos calculs. Los unes sont deja impri- mis ; les autres le serontdans letatdes pensions qui se payent ailleurs qu'auTresor royal; mais en attendant qu'elles soient publiques, on a in- dique le num6ro sous lequel elles sont rang6es au secretariat du comity des pensions, oil toute per- sonne peut les voir et les examiner.
Suppléments de traitements, gratifications ordinaires et pensions attachées aux places.
État de la maison du roi pour 1789. Traitements particuliers et récompenses sur le Trésor royal, aux officiers de la maison du roi...........................— 154,000
Ibid............. Attributions et indemnités au grand écuyer....................246,400
Ibid.............Idem, au premier écuyer..........................................................................34,200
Ibid.............Idem, au premier écuyer en survivance..............................................2,400
Ibid.............Indemnité personnelle au secrétaire générai de l'écurie..................3,000
Ibid.... ........Gratification au chef de bureau.......................................................3,000
Ibid.............Idem, aux palefreniers, aux gens de l'écurie.............."........24,620
Ibid.............Idem, aux malades, blessés, veuves, etc..............................................41,068
Ibid.............A divers, à titre d'indemnités de chevaux et valets, sur les états de l'écurie......................................................................89,100
Ibid.............Etrennes aux grands valets de pied......................................................3,630
Vénerie.......Suppléments d'appointements à M. le duc de Penthièvre, grand veneur...................................................................................................14,000
Indemnité au même..........................................12,000
Ibid... Toiles des chasses.......Supplément des gages au marquis d'Ecquevilly................................4,800
Ibid.............Gratification aux officiers de la maîtrise de Recy......................1,350
Ibid... Chenil.... Gratifications, ustensiles et autres frais de la Livrée, portés pour 36,000 livres, seront comptés ici pour..................................18,000
Ibid.............Voiture et cocher de M. de Vaudelot.................................1,180
Ibid.............Chevaux et cocher de la comtesse de Malet..........................1,850
Maisons royales.
Fontainebleau.. Gratifications à six concierges, six jardiniers et un fontainier... 3,300 Supplément de traitement à M. de Montmorin, gouverneur de
Fontainebleau.......................................................6,000
Ibid. Gompiègne. M. le vicomte de Laval, gouverneur : indemnité...........10,000
Ibid. St. Hubert. M. Je duc de Duras, gouverneur : supplément d'appointement... 3,000
Maisons royales
en général .... Diverses étrennes et bonnes fêtes................................1,073
Prévôté de l'hôtel. Indemnités pour suppressions de droits au Grand-Prévôt et autres. 25,100
Maison de la
Reine.........Traitement particulier à la surintendante, et à d'autres.........285,210
Récompenses et gratifications à divers.......................10,400
Garde-robe. i.... Récompenses.......... ..................................2,100
/Ordonnances particulières...................................2,747
Conseil.......... Récompenses..............................................100
Ordonnances particulières...................................8,050
Faculté..........Récompenses...............................................1,200
Ordonnances particulières..................................13,300
Table...........Récompenses..............................................400
Ordonnances particulières...................................11,750
Ecurie..........Récompenses...................................................1,640
Ordonnances particulières...................................94,800
M. le dauphin.... Récompenses et gratifications à plusieurs Officiw.............14,346
Enfants de France. Traitements par ordonnances particulières....................58,340
Récompenses à divers....................................6,000
M. le duc de Normandie .......Traitements par ordonnances particulières....................12,329
Récompenses à divers........................................2,400
Madame Royale.. Traitements par ordonnances particulières.....................15,729
MadameElisabeth. Traitements par ordonnances particulières....................144,413
Mesdames, tantes du roi........Traitements par ordonnances particulières, chez Madame Adélaïde ....................................................83,450
Idem, chez Madame Victoire................................63,450
Idem, communes entre elles deux............................92,787
Commissaires de la maison du roi. Gratification annuelle à M. Mesnard de Chonzv................10,000
Indemnité de bougies à M. Thierry..........................1,095
Garde-meuble—Gratifications, tant fixes que variables;
Savoir
En 1784..........................................................16,637 liv.
En 1785...............;.....................33,899
En 1786...........................................26,288
En 1787............................21,210
En 1788......................................18,254
En 1789..............................18,556
Total.........................- 134,844 liv.
dont le sixième, pour une année commune, est...................22,474
Garde-meuble... Indemnités et abonnements, pour fournitures de linges, voitures, etc.................................................26,220
Manufacture de
Sevres.........Gratifications a divers............................................................6,450
Etatsde la marine. Supplements d'appointements et traileraents conserves a M. le comte d'Hector, et a M. Delaunay...........................6,450
Autres appointements et traitements conserves, suivant l'etat du 1er fevrier 1790..........................................24.000
Ibid.............Pensions sur la caisse du commerce de Marseille..................................56,360
Ibid.............Pensions sur les vivres...................................... 28,206
aux Acadiens............................................. 64,950
Ibid............Pensions dans les colonies........................................81,001
Pontsetchaussees. Gratifications.............................................233,210
Get article n'est ports que pour 180,000 Jivres dans le compte des revenus et depenses fixes, pag. 34. Nous suivons ici un Stat envoy6, le 27 janvier 1790, par M. Fontenay, l'un des premiers commis du Tresor royal.
Etats des economats..........Gratifications k des eccl6siastiques.............................................108,300
Autres, pour etudes......................................... 17,000
Autres, pour les dessertes.........................................19,400
Etat du 12 avril 1790..........Supplements de trailements aux intendants de provinces....... 539,023
Etat des Postes... Inuemnites aux raaitres de postes............. ............... 30,000
Appointements conserves et gratifications annuelles aux anciens officiers et commis........................................5,420
Ibid.............Autres, idem, sujettes à retenues, dont le net est de........................12,180
Ibid.............Gratifications aux employés des provinces et de Paris......................27,361
Ibid.............Aux employés de provinces, retirés, et aux veuves....................88J73
Etat, n° 97......Gratifications annuelles sur l'administration des Domaines............64,700
Ibid. n° 117.....Idem, aux employés aux carrières........................................................6,900
Etat du 16 août 178 9..........Pensions, suppléments de traitements, et secours sur la Loterie royale...... ................................................1,540,609
Etat imprimé des traitements, etc. N° IV, pag. 18. Traitements particuliers à différents commis des affaires étrangères................................................... 10,600
Compte général des dépenses fixes, pag. 137. A divers magistrats................... .....................................286,158
Ibid... p. 138... A diverses cours et juridictions.................................149,053
Ibid.............Vingt-et-un acquits-patents, à 3,000 liv. chacun (1).................63,000
Compte général des dépenses fixes, p. 139 et suivantes.........A diverses personnes.......................................................350,682
Ibid... p. 170.... Contrôleur général des monnaies...................................12,000
Compte des revenus de Languedoc, p. 144. Jetons..........................................................................10,000
Ibid.. p. 146.....Gratifications aux syndics..................................................................16,000
Ibid.. p. 147.....Idem, aux secrétaires et greffiers..................................................6,600
Ibid.. p. 158.....Idem, au secrétaire du président........................................................800
Ibid.. p. 176.....Idem, aux syndics-députés à la Cour..................................................4,500
Ibid.. p. 178.....Idem, à la députation de la Cour..........................................................12,000
Ibid.. p. 204.....Idem, à un commis.............................................600
Etat manuscrit des dépenses de Bretagne ..........Pensions, gratifications, etc., pour une année..................................441,118
Etat envoyé par M. ûufresne.... Gratifications sur les fourrages d'Alsace..............................................179,285
Ibid.............Idem, sur ceux de Franche-Comté........................................................74,989
Etat du 25 janvier 1790...........Idem, sur les fonds des subsistances militaires................................25,723
Etat envoyé des bureaux de la guerre, en avril 179 0.......•... Autres gratifications....................... ................................12,460
Ibid..............Idem, sur ies fonds de la guerre, et le 4e denier..............................114,434
Ibid..............Suppléments d'appointements pour dédommager les officiers qui,
par la formation de 1788, ont éprouvé des diminutions dans leurs
appointements.................................................224,814
Total.................6,654,260livres
No 111. Ordres de chevaleries.
Etat du 27 janvier 1790...........Ordre du Saint-Esprit.....;..... ;..................................606,000 livres
Etat n° 53........Ordre de SainULouis..........................................1,006,016
Ibidem...........Ordre du Mérite militaire...................... ............ 52,144
Etat n° 89.........Ordre de Saint-Lazare.......................................................146,318
1,810,478
Développement de
la motion rela- ' tive à cet ordre. Ordre de Malte.................................. .......... 4,284,651
Total....... 6,095,129 livres
N° IV.
Dons, aumônes et secours.
Etat de la Maison du roi pour 1789. Offrandes et aumônes ..............................................237,000 livres
Etat du clergé,
page 9.....:... Secours à divers.......................... ................................8,900
Etat des économats,
n° 104......... Aumônes...........................................................14,000
Ibidem...........Autres aumônes........................................................................2,500
Ibidem...........Gratifications et secours en faveur d'établissements........................49,500
Etat d u 3 août 1789. Hollandais réfugiés........................ ..............................829,448
Compte général des dépenses fixes, pag. 174 et suivantes......Pour diverses communautés.......................................1,831,176
Ibid. p. 177 et 178. A des hôpitaux..........................................................................................1,299,232
Ibid. p. 179......A d'autres, idem.................................................417,686
Ibid. p. 181......A d'autres, idem........... ....................... ..........101,188
Ibid. p. 182......Secours particuliers à divers curés, à quelques villes, et aux veuves et enfants de plusieurs personnes qui ont servi l'administration............................................................ 218.440
Ibid. p. 183 ;.....Diverses dépenses............................................................................348,9.42
Compte des revenus de Langue- doc, p. 161.... Aumônes générales..................................... 5,145
Ibid...... .......Autres, »dm..........................................................................1,200
Ibid. p. 165......Aumônes secrètes.......................................................6,560
Etat n° 145.......Secours à la Maison de Carignan........................................................197,500
Compte général des dépenses fixes,
p. 27..........Orphelins militaires...............................................................32,000
Total........ 5,600,417 livres
N° V. Etats des pensions sur le Trésor royal.
Pensionnaires.
84 de la 1re classé, de 20,000 livres et
au-dessus................................2,821,471 livres
478 de la 2e — de «,000 livres à 20,000 livres
exclusivement.................5,430,431
2,115 de la 3e — de 2,400 livres à 8,000 livres
exclusivement......................8,710,084
1,071 de la 4e — de 1^800 livres à 2,400 livres
exclusivement......................2,151,934
1,986 de la 5e — de 1,200 livres à 1,800 livres
exclusivement....................2,852,551
4,611 de la 6e — de 600 livres à 1,200 livres
exclusivement......................3,666,590
11,745 de la 7e — de 100 livres à 600 livres
exclusivement......................3,619,813
22,090 pensionnaires partagent................................................ 29,252,874 livres
A la page 132. des dépenses fixes, ces pensions sont détaillées ainsi qu'il suit:
1° De 600 livres et au-dessous..................................4.426,233 liv.1
2° De i 601 livres à 1,000 livres...............................2,926,030
3° De 1,001 livres à 3,000 livres...............................6,727,831
4° De 3,001 livres à 6,000 livres......................................................4,889,884
5° De 6,001. livres à 10,000 livres......................................................3,218,798
6° De 10,001 livres à 20,000 livres....................................................3,136,416
7» De 20,001 livres à 80,000 livres......................................................1,089,884
8° De 30,001 livres et au-dessus.........................................1,621,444
28,036,520 livres
Partant, la différence est de........... 1,216,354 livres
Il faut ajouter au total de 29,252,874 livres le montant des brevets nouvellement expédiés, qui ont été envoyés du bureau de la guerre, le 7 juin: il se porte à 207,586livres. Le total des pensions sur le Trésor royal est donc définitivement de 29,460,460 livres.
No VI.
Pensions sur d'autres caisses que le Trésor royal, ou qui sont payées dans ce département, par ordonnances particulières et sans brevets.
État de la Maison du roi pour 1879.
Écurie............A Mme la comtesse de Brionue, comme ayant eu
l'administration de la
grande écurie................. ..............................42,600 liv.
Ibid. Vénerie.. .... A l'ancien trésorier, pour livrées conservées......................1,910
Maison de la reine. Pension à la surintendante................................ • 6,000
Ibid..............Idem, à la dame d'honneur... i.........................— 6,000
Ibid. ;............ Idem, au chancelier de la reine.................................6,000
Ibid,.............. Idem, au surintendant des finances....................................................6,000
Ibid.............. Idem, à l'intendant de la maison....................................................3,000
Ibid.............. Idem, ad premier maître d'hôtel........................................................3,000
Ibid......... .... Idem, au premier écuyer..............................................4,800
Marine, état n° 4.. Pensions établies sur des offices de judicature dans les colonies.......................................................................68,099
État des journaux. Pensions sur le Mercure de France....................................................30,400
Ibid.............. Idem, sur le Journal politique et la Gazette de France..........46,961
Ibid.............. Idem, sur le Journal de France..........................................................1,500
État du clergé,n° 52. Pensions de retraites...............................................................8,400
Ibid.............. Idem, d'auteurs................................................................16,900
Ibid.............. Idem, de bienfaisance..................................................900
Ibid.............. Idem, des nouvelles converties...........................................70,000
Etat des économats. Pensions à d'anciens employés (en 1789)., — ...........................17,530
Ibid.............. Idem, aux nouveaux convertis..................................................104,359
Ibid............./dem, sur les revenus des bénéfices des jésuites..............................10,900
Ibid.,.......... Idem, à des ecclésiastiques............................................329,600
Compte général des dépenses fixes, page 110... Pensions des princes du sang.............................................................734,000
Ibid. p. Mi et 112. Gratifications sur les fermes, aux officiers des cours..................108,930
Ibid. p. H3 et 114. Pensions, gratifications, etc., à diverses personnes........................209,690
Compte général des dépenses fixes, p. 115..... Autres pensions diverses......................................................................43,700
Ibid. page 116 et suivantes.... Pensions de l'Opéra. Auteurs et acteurs..........................................100,650
Ibid. p. 119.......Idem, sur les monnaies....................................................5,270
Ibid. page 125 et 126....... Idem, sur le produit des messageries.........v............................15,995
Ibid. p. 127 et suivantes.....Pensions et gratifications sur 1a caissedu commerce................89,475
Ibid, p. 149________ Pensions, soldé et demi-solde à divers.............................................94,546
Ibid. p. 189.......Pensions aux membres de l'Académie des sciences..................54,000
Ibid.............. Supplément de traitement..............................................11,700
Ibid.............. Pensions et diverses dépenses de l'Académie des inscriptions et
belles-lettres.......................................................................32,800
Ibid............... Gratification à un membre de ladite Académie..............................1,500
Ibid..............Jetons distribués aux membres dès trois Académies...........42,563
ûtat n° 77.. ......Pensions sur les voitures de la cour................................................6,650
Ibid. N° 112....... Idem, à d'anciens employés à Saint-Cyr............................................3,174
Ibid. n° 2........ Idem, sur le domaine de Versailles..................................................147,999
État des postes.... Idem, aux postillons........................................................13,468
État, n° 102....... Idem, sur le receveur du tabac, à Paris..........................................4,200
Ibid. n°97......... Idem, à d'anciens employés de l'administration des domaines,
et payées sur les retenues faites aux employés existants... 59,710
Ibid. n° 25.......... Pensions sur les fon(ls de ,a police de Paris.............. ,,t.. 53,370
Ibid....:...:..,.. Idem, pour retraités au Régiment de Paris..............................48,000
Plus........................................................: 3,900
État, n° 32........ Pensions sur les fonds de la maréchaussée de l'Ile de France... 23,938
Ibid. n° 117....... Idem, sur ceux des Carrières^........ —3,160
Ibid. n°$i6.....:.J Idem, sur le mont-de-piété....................... —...... 16,250'
Ibid. n° 58........ Idem, sur les fonds de la mendicité.............................2,850
État imprimé des traitements, n° 1er pages 7 et
suivantes..........Traitements conservés et pensions de retraite du service du berceau des
enfants de M. le comte d'Artois................................230,850
Ibid. n° 2, p. 10 et suivantes........Pensions et vétérances des gouverneurs et autres des Maisons royales.........................................................38,533
Ibid. n° 6, p. 24.... Pensions sur les fonds de la Suisse................................................131,124
Ibid. n° 7, p. 23 et suivantes........ Idem, sur l'École militaire................................................281,722
Ibid. n° 8, p. 38 et suivantes........Idem, sur les invalides......................................................................60,800
Compte des revenus de Languedoc, p. 213.......... Retraites à des officiers des Etats..................................................2,500
Ibid. p. 361........Idem, à des directeurs de travaux..................................................12,700
Etat envoyé des bureaux de la guerre. Idem, aux bureaux de la guerre......................................................121,590
Ibid.............. Idem, à des employés des vivres de la guerre..............................42,720
Ibid............... Idem, aux officiers de santé............................................................110,350
Total....................3,749,236 liv.
N°. VII.
GOUVERNEMENTS.
État imprimé des traitements, etc.
n°. 12, pag. 165............... Gouvernements généraux de la lre classe..........754,595 liv.
Ibid. pag. 167................... Idem, de la 2e classe............................653,880
Ibid. pag. 168................... Gouvernements particuliers de la lw classe— 365,740
Ibid. pag. 169................... Idem, de la 2e classe............................................268,106
Ibid. pag. 171................... Idem, de la 3e classe..............................................520,072
Total..............................2,562,393 liv.
N° VIII.
Primes et autres encouragements.
Résultat du détail porté àux dépenses fixes, pag. 186 et suivantes...................... 3,862,000 liV.
Compte des revenus de Languedoc, pag. 216...................... Encouragement des sciences, arts et Cdmmérce,
en Languedoc.................................. 128,330
Total............................... 3,990,330 liv.
N° IX.
(Nous avons indiqué les gratifications extraordinaires autant qu'il nous a été possible de les connaître ; mais il s'én faut de beaucoup que nous ayons pu les connaître toutes. Par exemple, on trouve dans l'état des dépensés du domaine de Versailles, pour les années 1786,1787 et 1788, un article de 70,560 livres 12 sols, (année 1788), destiné en partie à des gratifications aux domestiques dë Leurs Majestés, et aux gens attachés aux domaines, quand elles n'excèdent pas 300 livres. Il y a lieu dë croire qu'il existe de pareilles destinations sur beaucoup de départëments.)
Gratifications extraordinaires. Dons de meubles. (États du garde-meuble.) Savoir:
En 1784............................................35,700 liv. v
En 1785...........................................15,276
En 1786.......................................................50,620
En 1787..............................................................................19,900
Total..................... 121,496 liv.
Ce qui donne, pour année moyenne, la somme de .>..................... ........ 30,374 liv.
En 1788. Haras des provinces................................................... 32,370
Idem, de Paris et de GhamborJ...............................•.................. l,f>40
Gratifications sur l'administration des domaines, (Domaines. État, n° 93.) Savoir :
En 1787........................................ 7,400 liv.
Eu 1788................................................12,788 '
En 1789..............................................8,040
Total..................... 28,228 liv.
Ce qui donne, pour année moyenne, la somme de....................*.......... 9,409
Gratifications sur les affaires étrangères. (États envoyés du bureau des affaires étrangères). Savoir :
En 1780...................................... 299,800 liv.
Eu 1781..........................................................800,800
En 1782...........................................249,600
En 1783........................................492,555
En 1784..............................................................296,000
En 1785......................................4 407,600
En 1786...........................................103,900
En 1787..........................................' 158,800
En 1788....................................................217,000
En 1789...........................................95,440
Total..........................3,121,495 liv.
Ce qui donne, pour année moyenne la somme de................. ... -......... 312,149
Gratifications extraordinaires, comprises aux états de domptant. Savoir :
4775 ..... Six premiers mois................... 61,450 Rv. )
Ibid....... Six derniers mois.................. 352,200 > 457,677 liv.
Ibid....... Restes............................. 44,027 J
1779....... D'aprèi l'état à ia suite des observations de M. Necker. sur l'avant-propos du Livre rouqe, p. 26...............533,822'
1783.......... Année............................. 401,100
Restes............................ 150,645
1784...... Année............................ 170,852
Restes................................ 622,964
551,745 793,816
Total des quatre années................... 2,337,060 liv.
Ge qui donne, pour année moyenne, la somme de............................... 584,245
Total..........................;....... 970,187 liv.
N° X.
ÉTAT DES CROUPES
Accordées sur plusieurs membres de l'administration des domaines.(Envoyé par M. le contrôleur général.)
observations preliminaires.
Les croupes sont des portions d'intérêt accordées sur les places de finances ; les croupiers font les fonds de l'intérêt qui leur est accordé, et ils jouissent des émoluments attribués à ces places dans la proportion de la quotité de cet intérêt.
NOMS des
administrateurs
sur lesquels il a été accordé des croupes.
MM. Allaire.,
De Baulny.
Le Moine de Crecy.
D'Isangremel de Cle-rigny..........
De Cimery.......
France...........
Des Mollières.
Thierry.
Nardot
De Montjourdain...
QUOTITE
de l'intérêt
porté sous leur nom.
i s, 1 d. 1/2
1 s.
1 s.
1 s.
NOMS des
croupiers.
Terré de Pétival.
De Yarennes.
Basin.
De Rayneval. Gaucherel....
10 d.
Desentelles,
1 s.
1 s.
(Brouquens........
VFerrand...........
Anthoine, comme ces-i sionnaire de Mlle de
l Cernay............
fFerrand.............
^Duruey, comme ces-sionnaire de Mme la comtesse /Anthoine, comme ces-sionnaire de M. Mangeot.
11 d. 1/2
10 d.
9 d.
Rouillé de l'Étang.
QUOTITE
de l'intérêt
accordé en croupe sur celui des Administrateurs.
3 d.
3 d.
3 d.
d. d.
3 d. 1/3
OBSERVATIONS.
d. d.
1 d.
3 d.
Cet intérêt a été accordé par M. Necker à M. Terré de Pétival, dès la précédente administration.
Même observation que ci-dessus. 11 a été décidé que M. de Baulny, à la mort de M. de Varennes, réunirait (son intérêt.
Même observation que ci-dessus. M. de Crecy s'est obligé, par arrangement de famille, de payer une somme aux parents malaisés de la famille Thierry; elle monte annuellement à 11,000 livres.
Le roi, en nommant M. de Clerigny à la place d'administrateur, lui a imposé, par décision du 19 mars 1786, la charge de donner un tiers du produit de la place de M. de Rayneval; on sait qu'il en donne encore un autre tiers à M. Gaucherel.
Même observation que ci-dessus. Mais la décision du roi du 13 janvier 1788 porte que M. Desentelles jouira du tiers de cette place jusqu'à ce qu'il en vaque une pour lui.
Ces croupes ont été accordées sous le ministère de M. de Calonne, depuis l'administration actuelle seulement.
Même observation que celle qui est ci-dessus. M. Des Mollières a encore été grevé sur sa place, au profit de M. l'abbé de Pardiac, de 1,500 livres par an c. rachetées.
M. Thierry s'est obligé de payer, sur les produits de sa place, 5,000 livres aux personnes malaisées de sa famille.
M. Rouillé de l'Étang est beau-frère de M. Nardot; c'est un arrangement de famille relatif à des intérêts qu'ils se sont cédés mutuellement; cet arrangement à été approuvé par le ministre des finances.
Quoique M. de Montjourdain soit compris pour neuf deniers dans les intérêts de l'administration des domaines, il n'en jouit d'aucuns sur sa place, en voici les raisons :
En 1786, M. Poujaud de Nauclas, administrateur des domaines, et frère de M. Poujaud de Montjourdain, adjoint à M. Poujaud père, oncle de ces deux derniers, éprouvant des embarras dans ses affaires, offrit de donner sa démission en faveur de son frère, à la charge de payer ses dettes.
M. Poujaud père, proposa, par honneur pour sa famille, de contribuer au payement de ces dettes, en nommantM.de Montjourdain à la place de M. de Nauclas, et M. Poujaud fils, à l'adjonction qu'avait M. de Montjourdain. En conséquence, MM. Poujaud donnèrent leur soumission portant : 1° que M. Poujaud père ferait remise d'une somme de 146,000 livres qui lui était due par M. de Nauclas ;
2° Qu'il abandonnerait, pendant les neuf mois qui restaient à courir de la précédente administration, et pendant tout le cours de celle actuelle, un tiers du produit de sa place, pour être employé au payement des dettes de M. Nauclas;
3» Qu'il donnerait à de M. de Montjourdain, pour se soutenir dans sa place d'administrateur, deux cinquièmes de ses émoluments pendant les neuf mois restants de la précédente administration, et un tiers des émoluments de ladite place, pendant tout le cours de celle actuelle.
M. de Montjourdain, de son côté, renonça par cette soumission à rien recevoir des émoluments de la place de M. de Nauclas, pendant les neuf mois restants de la précédente administration, et pendant le cours de celle actuelle, pour que ces émoluments fussent employés au payement des dettes de M. de Nauclas. M. Poujaud fils s'obligea pareillement, dans le cas où il succéderait à son père dans sa place d'administrateur, d'exécuter tous les engagements par lui contractés.
Il a été rendu compte au roi de ces propositions; et Sa Majesté a approuvé ces arrangements, le 5 février 1786: en conséquence M. de Montjourdain a été nommé à la place de M. de Nauclas son frère, et M. Poujaud fils a obtenu l'adjonction et la survivance de son père, qu'avait M. de Montjourdain.
N" XI.
Demandes d'indemnités.
Le sieur de Boullongne, ancien trésorier général de l'extraordinaire des guerres.
Il sollicite, depuis quinze ans, le remplacement d'une somme de 218,000 livres qu'il a perdue sur une négociation de20 millions de rescriptions que le gouvernement l'a forcé de prendre, en 1769, pour son service.
Les sieurs de Sainte-James, de Vezelay, trésoriers généraux, l'un des colonies et l'autre de l'artillerie, qui s'étaient trouvés dans le même cas, mais pour des sommes bien plus considérables, ont été indemnisés, dans le temps, de leurs pertes, par les ministres de leurs départements respectifs.
La réclamation du sieur de Boullongne, bien examinée, ne paraît pas moins susceptible d'être accueillie que celle de ces trésoriers, et on pourrait lui rembourser en contrats à 4 0/0 , ies 218,000 livres qui en font l'objet ; mais comme il serait forcé de les fondre pour acquitter 140,000 livres de ses billets qui sont au Trésor royal, et qu'ils ne lui produiraient, au cours de la place, qu'à peu près cette somme :
Le contrôleur général des finances a l'honneur de proposer à Votre Majesté d'approuver que ses billets lui soient rendus en payement de l'objet total de sa réclamation.
De la main du roi : BON.
Votre Majesté a nommé, au mois de janvier 1784, une commission de négociants maritimes, pour examiner les réclamations du sieur Garon de Beaumarchais relativement aux pertes qu'il a éprouvées par le changement de destination d'une flotille de plusieurs navires chargés de marchandises destinées aux Etats-Unis de l'Amérique, et qu'il a employées, par ordre, à l'approvisionnement des îles françaises. Par le résultat ci-joint des jugements de ladite commission, il reste dû audit sieur de Beaumarchais, sauf la réserve des indemnités dont il pourra paraître susceptible, une somme de 678,666 livres 10 sous 9 deniers.
II doit,sur cette somme,un capital de 400,000 livres à M. d'Harvelay, qui lui en a fait l'avance, à l'invitation de M.le comte deMaurepas; ci. 400,000 liv.
Plus, les intérêts à 5 0/0 dudit capital, depuis le 28 septembre 1782. 52,400
Total .... 452,400 liv.
Sur les 226,266 livres restants, le sieur de Beaumarchais, qui se trouve pressé par des engagements près d'échoir, et par des créanciers que les circonstances rendent plus exigeants, supplie Sa Majesté d'avoir la bonté de lui accorder un payement de 150,000 livres, dont 50,000 livres comptant, et le surplus en assignations à différentes échéances, pour ne pas gêner le Trésor royal.
Si Votre Majesté l'approuve, il sera remis en même temps à M. d'Harvelay des valeurs à un an, pour lui rembourser les 452,400 livres qui lui sont dues par le sieur de Beaumarchais.
De la main du roi : BON.
Sire,
C'est uniquement pour satisfaire au devoir de la justice dont Votre Majesté fait sa première loi, que je n'ai pu refuser de mettre sous, ses yeux ce qu'il reste à décider de l'affaire du sieur Caron de Beaumarchais. Votre Majesté daignera se rappeler que cette affaire a été examinée par deux]commissions successives, composées, la première, de magistrats du conseil, et la seconde, de négociants maritimes.
Pour avoir une base fixe qui les mît à portée d'apprécier ses réclamations, ils ont supposé toute l'expédition de la flotille du sieur de Beaumarchais au compte de Votre Majesté, et, sous ce point de vue, ils ont reconnu qu'il lui était dû 2,523,442 livres.
Cette somme lui a été payée par ordre de Votre Majesté.
Mais les mêmes commissaires ont déclaré qu'il ont divisé l'affaire en deux parts, et qu'ils ont cru ne pouvoir prononcer définitivement que relativement à l'emploi de sa flotille dans les campagnes de la Grenade et de Savanah, comme étant le seul objet qui pût être soumis aux calculs rigoureux du commerce ; que, sur ces objets, ils n'avaient alloué au sieur de Beaumarchais que ce qui lui était constamment dû, suivant la plus stricte justice ; qu'ils reconnaissaient que ce n'était point assez, pour que les armateurs fussent, à beaucoup près, indemnisés; mais que pour toute la partie des pertes relatives à la destination de la flotte, en 1778, n'ayant pas de bases certaines pour les estimer, ils ne pouvaient, à cet égard, que s'en référer à l'équité de Votre Majesté. Or, l'état de ces pertes, d'après les pièces présentées par ie sieur de Beaumarchais, monte, savoir :
Pour le navire le Duc du Châtelet, sauté en l'air à Mainden, à ..... . 247,310 liv. Pour le navire la Victoire, pris
par les Anglais . ..... . . 101,523 Pour le navire le Sabran, naufragé à Charles-Town ....... 421,795
Total . . . 770,628liv.
Sur quoi payé acompte . . 75,000
Reste en arrière. . 695,628liv.
De plus, les mêmes commissaires ont estimé que le sieur de Beaumarchais pouvait espérer de la bonté de Votre Majesté les articles suivants:
1° L'affaire étant au compte de Votre Majesté, il est d'usage d'accorder, pour les peines et soins de celui qui la dirige, une commission qui, à raison de 5 0/0, ainsi qu'elle est accordée dans les affaires maritimes, monterait à environ 150,000 livres ;
2° Les fonds qu'il a empruntés lui ont coûté, pendant la guerre, 7. à 8 0/0, ce qui fait trois de différence, du 1er janvier 1779 au 1er janvier 1785, environ 350,000 livres.
L'ensemble de tous ces objets présente pour 1,195,628 livres de dédommagements à prétendre7 mais sur lesquels il n'y a que Votre Majesté qui puisse prononcer.
Le sieur de Beaumarchais expose qu'il est à la veille de manquer à ses engagements, s'il n'est promptement secouru. Les Américains, qui lui doivent des sommes considérables, ne lui ont fait, ce mois-ci, qu'une remise de 5,000 livres seulement, et il en attendait au moins un acompte de 4 à 500,000 livres. Il implore les bontés de
Votre Majesté, et la supplie de ne pas le laisser périr. Sa chute entraînerait celle de plusieurs maisons de commerce.
Si Sa Majesté daigne venir à son secours sur les objets ci-dessus détaillés, le contrôleur général proposerait à Votre Majesté d'accorder audit sieur de Beaumarchais, au lien de la somme montant à 1,200,000 livres qu'il réclame, celle de 800,000 livres seulement, pour toute solde de compte, laquelle même ne lui serait payée qu'en contrats à 4 1/2 0/0, et lui tiendrait lieu de toute indemnité, de manière qu'il n'aurait plus aucune réclamation à former relativement à cette affaire.
De la main du roi: APPROUVÉ.
N° XII.
Conversions de rentes viagères en rentes perpétuelles, et de -pensions en domaines.
Le sieur de Pange, propriétaire de deux parties' de rentes sur les revenus de Votre Majesté, l'une viagère de..................24,000 liv.
et l'autre perpétuelle, au capital de 185,000 livres provenant de la liquidation des offices de feu son père, trésorier général de l'extraordinaire des guerres, et de l'ordre de Saint-Louis, de............. 9,250
Total...... 33,250 liv.
A la veille de se marier avec une jeune demoiselle, il demande lat conversion de ces deux rentes en une rente perpétuelle dè 24,00Q livres, afin d'en laisser le capital à sa postérité:
Cette opération paraîtrait, au premier coup d'œil, onéreuse aux finances de Votre Majesté; mais en considération que le sieur de Pange n'est âgé que de vingt-deux ans, et que, dans l'ordre des probabilités, il peut jouir longtemps de sa rente viagère, et emporter, par son cumulement, le double de son capital,, on voit un avantage à faire l'arrangement qu'il propose : des considérations particulières paraissent, en outre, militer en faveur de la demande du sieur de Pange:
1° Son père avait placé le fonds de 120,000 liv. de rentes viagères en cinq parties égales de 24,000 livres, sur la tête de chacun des cinq enfants qu'il avait ;
2° Peu de temps après les constitutions de ces rentes, il s'en éteignit deux parties qui étaient, l'une sur la tête de la dame comtesse de Berchény, et l'autre sur celle de la dame marquise de Saint-Simon, mortes à peu de distance Pu ne de l'autre ; desquelles rentes, ensemble de 48,000 livres, Votre Majesté a hérité ;
3° Les services du feu sieur de Pange, en qualité de trésorier général de l'extraordinaire des guerres pendant vingt-deux ans, dans lesquels il a été, par son crédit, de fa plus grande utilité aux finances de Votre Majesté.
Je supplie Votre Majesté de donner ses ordres sur cet arrangement.
De la main du roi: BON.
Note remise par M. Parent, président du comité des domainesx, le
Mme la comtesse de Coaslin avait 22,000. livres de pension tant
sur la cassette que sur le Trésor royal.. Elle obtint, le &aoùt 1771, un bon du feu roi,
qui réunit toutes ces pensions, et les convertit dans la jouissance des domaines, et étangs
de Lindres, en Lorraine, pour lesquels elle fut assujettie à 25,000 livres de rente envers le
domaine ; et elle fut autorisée à compenser, jusqu'à due concurrence, ces 25,000» livres de
rente qui lui étaient imposées, avec les 22,000 livres de pension dont elle jouissait. En
conséquence, tous les ans, on lui expédie une ordonnance de comptant de 22,000 livres qu'elle
donne en payement au domaine, et à laquelle elle joint 3, OOu livres en deniers. Mais comme
le Bon du roi l'exemptait des impositions, et comme ses feriaiers étaient employés pour les
impositions sur le rôle, de la communauté de Lindres, elle a obtenu, au mois d'août 1787,
qu'on lui tiendrait compte des impositions sur les 3,000 livres qu'elle paye en deniers.
Aujourd'hui, ies domaines, et étangs de Lindres, malgré des baux apparents,, valent 35,000
livrés de rente ou environ. Ainsi cette pension est augmentée d'un tiers par la seule
progression graduelle des fermages, sans aucunes avances ni dépenses, et les pensions ont
subi dernièrement des réductions considérables: mais le déguisement de celle de Mmft la
comtesse de Coaslin, l'a mise à l'abri de> cette perte; elle ne paye pas même les vingtièmes.
On pourait citer plusieurs exemples, semblables qui dénaturent des, pensions.
XIII.
TRAITEMENTS ET PENSIONS DE LA FAMILLE DE P0L1GNAC.
La famille de Polignac est composée de deux branches ; l'une établie en Auvergne, l'autre en Saintonge.
INDICATIONS.
État des officiers de la maison de M. le comte d'Artois........................
Suivant le brevet du 25 juillet 1772, reporté sur un nouveau brevet, expédié le 1er août 1786............................
Registre des décisions, t. 11, fol. 47.
Ibid. fol. 191........................
Ibid. fol. 223........................
NOMS ET QUALITÉS.
François Camille, marquis de Polignac, premier écuyer
de M. le comte d'Artois; Pour gages en cette qualité.........................
Les attributions attachées à cette place portent son produit à la somme d'environ 20,000 livres.
Comme chevalier des ordres du roi.................
En 1772, pour se soutenir avec la décence convenable son rang Pension de..... ........................
Ibid. fol. 426 ..........................
Expédition de la décision envoyée par M. Dufresne.........................
Vu la décision et le brevet du premier
août 1786..............................
Registre des décisions, t. 12, fol. 436, v°..
Fonds extraordinaires pour les haras.
Augmentation de fonds des haras.
18 avril 1784. Une fois payé..............40,000 livres
28 août 1784, idem.................... 130,000
19 septembre 1784, pour quatres années, à compter du mois d'octobre suivant.. 600,000
8 mai 1785. Voyages pour les haras..........60,000
Comme directeur des haras de Chambord, pour quatre années, à commencer du
premier octobre 1788 ................................400,000
Total.......... 1,230,000 livres
Ibid. t. 13, fol. 841
Etat des pensions, t. 1". p. 19...........
Etat de comptant de 1783, p. 5.
Registre des décisions.........
Ibid. t. 12, fol. 202.............
Livre rouge, p. 17.......
Etat de la maison du roi.
Ibid. Ibid.
État des pensions, t. ler. p. 332. .........
Etat imprimé des pensions sur divers départements, p. 23......................
État des pensions, 3e classe, p. 332.....
(Voyez ci-dessous, un article de 5,250 livres de deniers comptants, omis ici). Etat de la maison du roi......................
Ibid. Ibid.
Retraite de la place de directeur général des haras du
royaume, en se réservant Paris et Chambord. Pension Jales-François, duc de Polignac, neveu du précédent créé duc héréditaire par brevet du 20 septembrs 1780, premier écuyer de la reine en survivance. Traitement.
Sur ce traitement, 72 000 livres sont affranchies des retenues.
28 Septembre 1783. Pension avec réversibilité à sa
femme............................................
Gratification annuelle...............................
4 avril 1784. Par décision du 28 septembre 1783......
8 janvier 1786. Remboursement du droit de Huitain, dû
au fief de Puipaulin...............................
Ordonnance au porteur, pour prix du domaine de Fenes-
trange...........................................
D"» de Polastron, duchesse de Polignac, gouvernante
des enfants de France. Gages......................
Ordonnances particulières............................
Dépenses ordinaires de la garde-robe et
chambre............................. 328,000 livres.
Pour ses services auprès de M. le dauphin et de Madame
Sophie. (Brevet du 1er mars 1789)...................
ouis-Héraclius-Metchior, vicomte de Polignac. Pension de
retraite de l'ambassade de Suisse.....................
4.000 livres sont réversibles à sa fille. Appointements conservés eomme gouverneur du Puy-en-Velav. (Brevet du 1er janvier 1781)...................
Diane-Augustine, comtesse de Polignac, fille du précédent, dame d'honneur de Madame Élisabéth. Gages en
cette qualité........................................
Ordonnances particulières..............................
Dépenses de la chambre............... 60,000 livres.
De cette part.
SOMMES
pâtées
comptant.
livres.
100,000 800,000 1,200,000
2,100,000
PENSIONS
livres.
2,400
6,000 12,000
12,000 80,000
80,000 30,000
7,200 14,400
7,200 20,000
3,000
7,200 4,500
285,900
INDICATIONS.
Etat des pensions sur divers départements,
, p. 23................................
Etat des pensions, 2» classe, p. 91.....
Ibid,....................................
Etat remis par les économats.
Etat des pensions, t. lor, p. 62.
Registre des décisions, t. 2, fol. 138, v0.. Ibid. t. 12, fol. 52........................
Etat des pensions, t. lor, p. 332..........
NOMS ET QUALITÉS.
Report.......
Pensions sur les fonds de la Suisse.................
Pension sur le Trésor royal. (Rrevet du 1er avril 1781). Idem..............................................
Auguste-Appolinaire-Armand, religieux de Çluny, fils du
vicomte de Polignac. Pension sur l'abbaye de Saint-Germain-des-Près, en
1777, payable sur les quittances de son père.........
Camille-Louis-Appolinaire de Polignac.
En 1779. Évêque de Meaux............ ..............
En 1782. Abbé de Saint-Epvre.......................
M'le de Polignac, femme du duc de Guiche, assurance de pension à titre de douaire....................
La branche
Polignac, établie en Sainlonge, est composée de :
Guillaume-Alexandre, comte de Polignac ; Madame d'Aspect, sa fille.
A eux, pour l'affaire de Boulonmoranges, le 27 juin 1784.
Rentes perpétuelles. Le 14 août 1785 ..................
Idem, le 18 mars 1787.................................
Charlotte-Elisabeth, tille de François-Alexandre. Kn 1785] et 1786, en considération des services de son père. (Brevet du 18 avril 1788)...........................
SOMMES
payées
comptant.
livres. 2,100,000
Total.
400,000
2.500,000
PENSIONS.
N° XIV.
Pension pour cessation de service.
M. le garde des sceaux désire que le sieur Dessain, directeur général des droits de traites, se démette de son emploi en faveur du sieur Brak, instituteur de son fils.
Gel emploi est un des plus importants de la ferme générale.
Le sieur Dessain demande, pour sa retraite, une pension de 10,000 livres, ou l'assurance d'une place de fermier général.
Il cite l'exemple de ses prédécesseurs, qui tous ont été fermiers généraux ; et ses anciens services le rendent très digne de la même faveur.
Je prendrai incessamment les ordres de Votre. Majesté sur les conditions du nouveau bail, et sur le nombre de ses cautions.
Mais si Votre Majesté ne croit pas devoir y comprendre le sieur Dessain, une pension de 10,000 livres qu'elle lui accorderait à titre de récompense et de dédommagement, n'excéderait pas les justes proportions.
Je supplie Votre Majesté de me faire connaître ses intentions.
De la main du ministre : Le roi approuve que la pension soit assurée dès à présent pour le moment où le sieur Dessain quittera la direction générale des traites, à moins qu'il ne soit alors nommé à une place de finance du premier ordre.
N° XV.
ÉTAT de la dépense occasionnée par les changements de ministres, en 1787 et 1788.
INDICATION
des registres od se trouvent
les différents articles détaillés au présent état.
Registre des décisions, tome 13, fol. 78............................
Ibid. fol. 84..........................
Ibid. fol. 265........................
Ibid. fol. 84.........................
Ibid. fol. 100........................
Ibid. fol. 101.......................
Registre des décisions, t. 13, fol...
417, v°...........................
Ibid. fol. 396........................
Etat des pensions, t. lor, p. 23 ; vu le brevet expédié le 4 septembre
, 1787 ..............................
État des pensions, t. 1er, p. 314; vu le brevet expédié le 1er octobre
178 7...............................
Registre des décisions, tome 13,
, fol. 216....................... ...
Etat des pensions, t. ler, p. 76; vu le brevet expédié le 26 novembre
1788 ...............................
Registre des décisions, t. 13, foli.. 431, v°............................
Etat des pensions, t. 1er, p. 14; vu le brevet expédié le 1er septembre
178 7...............................
Registre des décisions, tome 13, fol.
216, ..............................
État des Pensions, t. l*r, p. 16; vu le brevet expédié le 1er septembre
1788 ............................
Ibid...............................
Etat des pensions t. 1er, p. 217; vu le brevet expédié, le 3 août 1788.
Registre des décisions, t. 13, fol. 429, v»...........................
DATES des
décisions
ou brevets.
29 avril 1787.
Ibid.........
Ibid.........
9 mars 1788. 29 avril 1787.
20 mai 1787.
Ibid.........
14 sept. 1788 Ibid.........
21 déc. 1788. 26 oct. 1788.
4 sept. 1787..
1er oct. 1787.. 30 déc. 1787...
26 nov. 1788...
Ibid...........
8 février 1789.
l" sept. 1787. 30 déc. 1787..-.
NOMS ET QUALITES.
17 août 1788.
Ibid.
3 août 1788.
25 janv. 1789.
Gardes des sceaux.
M. de Miromesnil. Pension........«.....
6,000 livres sont réversibles à chacun
de ses enfants.........................
M. Etienne, secrétaire du sceau.........
Promesse d'un acquit-patent;...........
Obtient l'acquit-patent, ci..............
M. Gaillard, secrétaire de M. de Miromesnil. Pension.....................
M. de Lamoignon, augmentation de frais
de bureaux..........................
Augmentation de traitement.............
Ordonnance de comptant...............
Pension................................
M. Blondel, secrétaire du sceau... M. Barentin, frais d'établissement.
Ministres de la guerre. M. le maréchal de Ségur, Pension.
M. Motel, secrétaire de la guerre.
M. le comte de Brienne. Frais d'établissement ..............................
Pension.
Quittance de ce qu'il devait au départe-
ment ................................
M. le comte de Puiségur. Ordonnance de comptant........... ....
Ministres de la mariné.
M. le maréchal de Castries. Pension de
retraite..............................
M. le comte de la Luzerne. Frais d'établissement ...........................
Ministres de la maison du roi.
M. le baron de Breteuil. Pour lui tenir lieu des. gages dont il jouissait en qualité de ministre d'Etat, (pour en jouir
à compter du 25 juillet précédent.....
Supplément de traitement, conservé à titre de retraite, en qualité de ci-devant secrétaire d'Etat (pour en jouir à compter du même jour que celle ci-
dessus)...............................
M. Finot, secrétaire de M. le baron de
Breteuil. Pension de retraite.........
Il jouit en outre d'une pension de 2,000 livres qui lui a été accordée par brevet du 30 décembre 1785. M. le comte de Saint-Priest. Appointements de ministre, et supplément de traitement, (d'après une décision du 27 décembre 1788).....................
De cette part.
supplements
d'appointements, augmentation de
traitements, et
pensions.
livres.
60,000
8,000
3,000
1,200
9,000 100,000
40,000 8,000
30,000 4,800
10,000
20,000
20,000
28,675 3,000
24,476
gratifications, frais d'établissements, ou
autres dons, une fois payés.
370,151
INDICATION
des registres ou se trouvent
les différents articles détaillés au présent état.
DATES des
décisions
ou brevets.
Ibid. fol. 70, v° Ibid............
Registre des décisions, tome 13, fol.. 78, v°..............................
Ibid.........'
Ibid. fol. 120. Ibid. fol. 92..
Ibid. fol. 888........................
Les brevets d'assurance de ces pensions sont datés dudit jour, 24 août.
Registre des décisions, tome 13,
foi. 159...........:...............
Ibid. fol. 159 bis...................
Ibid. fol. 159, v° ....................
Ibid. fol. 92.........................
Ibid. fol. 210, .....................
Ibid. fol. 228........................
15 avril 1787. Ibid.........
NOMS ET QUALITES.
Report.
17 juin 1787 ..
8 juillet 1787. 20 mai 1787...
24 août 1788.
16 sept. 1787.
Ibid..........
Ibid..........
20 mai 1787... 23 déc. 1787.. 6 janv. 1788.
Finances.
M. de Calonne. Appointements du conseil, conservés en qualité de ministre d'Etat.
Pension à titre de retraite.............
Indépendamment des pensions ci-dessus, il a conservé 14,360 livres, dont il jouissait avant cette époque. M. de la Garde, secrétaire de M. de Calonne. Pension de retraite............
M. de Fourqueux. Frais d'établissement.
Appointements de ministre d'Etat.......
Plus, par supplément de traitement.....
M. de Brienne, chef du conseil des finances (alors archevêque de Toulouse)
pour frais d'établissement..........
Lors de sa retraite, il a obtenu une pension de 12,000 livres, et une de 6,000 livres : la première, pour madame de Loménie ; la seconde, pour madame de Canisy; lesquelles néanmoins, n'en jouiront qu'après sa mort : il ne demande rien pour lui, attendu qu'il est suffisamment pourvu.
M. Lambert. Augmentation de traitement.
Frais d'établissement...................
Assurance de retraite, convertie en pension.............................•..
M. de Villedeuil. Frais d'établissement.. Pour sa retraite de contrôleur général.. M. le duc de Nivernais, entré au conseil au mois de juin 1787, avec un traitement de ministre de.................
Totaux.
suppléments
d'appointements, augmentation de
traitements, et
pensions
370,151
18,000 10,493
4.000
20,000 11,816
29,950 "iè'ôôô*
20,000
499,410
gratifications,
frais d'établissements, ou
autres dons, une fois payés.
617,000
18,000
33,000
80,000 100,000
33,000
881,000
(Ce n'était pas aux seuls ministres qu'on accordait des sommes considérables pour leur établissement; on en accordait aux commandants de province. La décision qui suit montre une gratification de 100,000 livres accordée, en 1784, au commandant de Bretagne pour son établissement: bien entendu que cette gratification ne préjudi-ciait pas à celle de deux ou trois cent miile livres qui avait lieu pour la tenue des Etats. La décision du 23 janvier 1785, qui suivra également, en fournira la preuve.)
M. le comte de Montmorin supplie Votre Majesté cle le mettre en état de faire la dépense de son établissement en Bretagne.
Le roi accordait anciennement une gratification de 60,000 livres à son principal commissaire, pour l'indemniser de toutes dépenses lorsqu'il assistait à l'assemblée des Etats de Bretagne, et Sa Majesté accordait 40,000 livres lorsqu'il les tenait pour la première fois, ce qui faisait 100,000 livres.
Les denrées de toute espèce ayant augmenté, et les assemblées des Etats étant devenues beaucoup plus longues et plus difficiles, les gratifica-
tions ont été augmentées en proportion : on joint l'Etat de celles qui ont été accordées depuis 1752.
M. le duc de Fitz-James est le premier commissaire du roi à qui il a été donné une gratification séparée pour la dépense de son établissement. Cette gratification n'avait d'abord été fixée qu'à 80,000 livres, et il avait été convenu qu'il lui serait payé, en outre, 50,000 livres par mois pour ses autres frais; mais sur ces représentations, que ces dépenses de toute nature avaient excédé les sommes fixées de 99,560 livres, il lui fut accordé, par bon du roi, du 23 août 1875, un supplément de 100,000 livres.
En 1776, M. le maréchal d'Aubeterre a obtenu 100,000 livres pour la dépense de son établissement.
Votre Majesté trouvera, sans doute, juste d'accorder la même somme à M. le comte de Montmorin.
Le la main du roi : BON pour cent mille livres.
M. le comte de Montmorin supplie Votre Majesté de le mettre en état de s'acquitter des avances que le trésorier des Etats de Bretagne
lui a faites et continuera de lui faire pendant l'Assemblée,
Il est d'usage de rembourser au commandant en Bretagne les dépenses que chaque tenue lui occasionne.
M. le comte de Montmorin ne dit pas à quoi montent les avances que le trésorier lui a faites jusqu'à présent; mais il espère que ses dépenses, au moyen de l'économie qu'il y met, n'excéderont pas 300,000 livres. Il observe que celles de la dernière Assemblée ont monté à 185,000 livres, quoiqu'il n'y eût pas de tables.
Il est question de mettre le trésorier dans le cas de retenir les avances dont il s'agit, sur les fonds qu'il a à verser au Trésor royal au commencement de ce mois. Comme on ne pourra connaître qu'après l'Assemblée l'objet de ces avances, Votre Majesté pourrait se borner, dans ce moment, à ordonner un payement provisoire de 250,000 livres à valoir sur l'indemnité qui sera due à M. le comte de Montmorin pour ses dépenses pendant l'Assemblée.
De la main du roi : BON.
N° XVI.
Gratifications avant la naissance au roi.
Sire,
Né sans fortune, et plus encore dénué de titres personnels pour réclamer les bontés du roi, Croismare, cependant, ose supplier Votre Majesté de vouloir bien lui accorder une grâce qui fixera à l'avenir rétablissement de l'un de ses enfants.
L'ordre de Malte offrait un asile à son second fils, et il avait eu recours, pour en acquitter les
frais, à des emprunts déjà fort onéreux pour lui. Cette ressource, également utile au troisième enfant qui doit naître en juillet, deviendrait nulle pour lui, sa fortune ne lui permettant pas d'emprunter une nouvelle somme dont le remboursement lui deviendrait impossible. Croismare supplie le roi de daigner accorder à cet enfant (s'il est garçon) une somme de sept mille cinquante livres pour payer le droit de passage, fixé par l'ordre de Malte.
Assuré des bontés du roi, Croismare ferait inscrire cet enfant à Malte à sa naissance, et il lui apprendrait, dès son enfance, les bontés du roi et les obligations auxquelles elles l'engagent.
De la main du roi : BON.
(Mme de Croismare accoucha d'une fille, mais la grâce qui avait
été sollicitée ne fit que changer de forme : lisez ce qui suit. )
M. le vicomte de Croismare a présenté à Voire Majesté, dans le mois de juin dernier, un mémoire, par lequel il a exposé que la médiocrité de sa fortune l'avait forcé de recourir à des emprunts, afin d'acquitter, en faveur de son second fils, le droit de passage fixé par l'ordre de Malte.
Il touchait alors au moment d'être père d'un troisième enfant ; et comme il se proposait de le faire également inscrire à Malte (si c'était un garçon), Votre Majesté voulut bien lui accorder la somme de 7,050 livres pour le droit en question.
Mais Mme de Croismare vient de donner naissance à une fille.
Persuadé qu'en cette circonstance, l'intention de Votre Majesté n'est pas de détruire l'effet de ses bontés pour M. de Croismare, je prends la liberté de lui proposer de transporter cette grâce sur le second de ses fils.
De la main du roi : BON.
N° XVII.
Notice des rôles de 1775, 1779, 1783. Exercice de 1775.
Rôle des six premiers mois.
Comptables...........................109,398,667 1. » s . 5 d
Voyages et vacations.............241,034 19 8
Dons, aumônes et récompenses.........29,086 » »
Pensions, gages, états et appointements.............1,882,654 10 »
Deniers payé8 par ordonnances........3,363,374 12 8
Remboursements et intérêts............10,398,886 5 3
Ambassades...........................1,388,714 8 10
Comptant du roi.......................600,000 » »
Comptant de Mesdames................654,000 » »
Chambres et garde-robes de Mesdames...330,259 8 8
Total des six premiers mois....................128,286,6771. 5 s. 6 d .
Rôle des six derniers mois.
Comptables.............................................................48,434,741 1. 4 s. 9 d.
Voyages et vacations..............................................391,869 3 3
Dons, aumônes et récompenses. -..................................................................40,285 11 1
Pensions, gages, états et appointements.......................................................369,520 13 6
Deniers payés par ordonnances.....................................6,919,654 9 11
Remboursements et intérêts...................................... ..3,666,202 4
Ambassades...................................................1,410,146 13 4
Comptant du roi...........................................................600,000
Chambre et garde-robe du roi..........................................105,683 17
Chambres et garde-robes des princes et princesses......................................361,862 12 4
Total des six derniers mois........................ 62,800,026 1. 9 s. 3 d.
Rôle des restes.
Comptables.......................203,169,579 1. 11 s. 2 d.
Récompenses....................216,197 8 4
Pensions, gages et appointements. Deniers payés par ordonnances... 8,227,360 9 »
Remboursements et intérêts......5,481,965 12 11
Total des restes................................225,182,391 16 3
récapitulation de l'exercice 1775.
Rôle des six premiers mois 1775...............128,286,677 1 . 5s. 6 d.
Idem des six derniers mois....................62,800,026 9 2
Idem des restes...............225,182,391 16 3
Total général.................................... 416,269,0951. 10 s. 11 d.
exercice de 1779. Rôle des douze mois.
Comptables.......................................................................................................273,046,369 1. 12 s. »
Voyages et vacations..............................................................................300,070 10
Dons, aumônes et récompenses.................................................................184,456 » »
Pensions, gages et appointements........................................382,658 12 7
Deniers par ordonnances...............................................................................4,926,605 17 7
Remboursements et intérêts...................................................4,566,591 10 6
Ambassadeurs...........................................................2,070,295 » »
Comptant du roi.................................................................................1,209,000 » »
Comptant de Mme Elisabeth et de Mesdames..................................................684,000 » »
Chambres et garde-robes....................................................................................1,059,605 19 6
Total des douze mois....................................288,429,653 1. 2 s. 2 d.
Rôle des restes.
Comptables..........................................................395,166,662 1. 19 s. 5 d,
Récompenses.........................................................108,967 10 il
Pensions, gages, états et appointements.................................... 37,593,242 7 6
Deniers payés par ordonnances..........................................5,351,975 »
Remboursements et intérêts................... ....................................6,731,970 18 1
Total des restes..............444,952,818 1. 16 s. 10 d.
récapitulation.
Total du rôle des douze mois...................................... 288,429.653 1. 2 s. 2 d.
Total du rôle des restes.......................................... 444,952,818 16 10
Total général..................................... 733,382,471 J. 19 s. » d,
exercice de 1783. Rôle des douze mois.
Comptables.......................................................367,356,811 liv. 13 s. -
Voyages et vacation........................ ........................153,559 5 »
Dons, aumônes et récompenses.................................187,238 » »
Gages et appointements................................................................................325,987 10
Deniers payés par ordonnances....................................................................4,214,692 12 0
Remboursements et intérêts..........................................................................3,711,807 6 1
Ambassades......................................................2,254,058 6 8
Comptant du roi...................................................................1,641,000
Comptant de Mesdames......................................................................................684,000
Chambre et garde-robe du roi........................................12,281 17
Chambre et garde-robe de la reine.......................................................8,618 18 »
Chambres de M. le Dauphin et de Madame................................................230,167 7 »
Chambres de madame Elisabeth et de Mesdames......................................495,635 10 6
Total de douze mois............................ 381,275,858 liv. 5 s. 9 d,
Rôle des restes.
Comptables ......................................................................................................606,633,801 liv. 18 s. 7
Récompenses..................................................................................................81,404 6 1
Pensions, gages ei appointements.. i........... ..................................4,864,822 13 9
Deniers payés par ordonnances.............................................................22,589,776 11 10
Remboursements et intérêts........................................................................104,451,467 1 7
Total des restes............................... 738,620,872 liv. Il s. 10 d.
récapitulation.
Total du rôle des douze mois............................... 381,275,858 liv. 5 s. 9 d.
Total du rôle des restes.................................... 738,620,872 11 10
Total général.............................. 1,119,896,730 liv. 17 s. 7 d.
Nota. Il est à observer que l'on ne doit pas calculer, dans la dépense effective de l'année, le total des sommes portées au chapitre des comptables. Ge sont des sommes en masse, dont le comptable donne une quittance unique, mais qu'il emploie ensuite pour le dû de sa charge, et dont Je compte se trouve détaillé dans les comptes de l'année de son exercice; de manière qu'on ferait un double emploi, si l'on comptait la somme en masse, et les dépenses en particulier.
Par exemple, dans le chapitre des comptables, aux restes de 1789, il est porté un article en ces termes: t Au sieur Savalette de Langes, 213,479,799 liv. 18 s. pour employer aux dépenses de son exercice 1782. » Cela signifie que de l'exercice 1783, on a reversé cette somme sur 1782; mais il ne faut pas la compter comme consommée en 1783: elle l'a été en 1782.
Il est plus difficile de concevoir d'autres articles qui suivent immédiatement celui.qui vientd'être rapporté. «Au sieur Savalette de Langes, 260,481,891 liv. 12 s. 6 d., pour employer aux dépenses de son exercice 1784 ».... « A lui, 30,000 liv. pour employer aux dépenses de son exercice 1788. > Cela signifie que l'exercice 1783 ayant une surabondance de recette, à cause de quelque opération de finance, comme un emprunt, et le compte de 1783 n'étant pas clos, on reverse l'excédent de la recette sur toutes les années soit postérieures soit antérieures qui en ont besoin. Gela vient, dit-on, de ce que la chambre des comptes exige que le compte du Trésor royal soit toujours dressé de manière que la dépense absorbe la recette. C'est un système dont il est difficile d'apercevoir l'utilité : et il est manifeste, au contraire, qu'il y a de très grands inconvénients à faire chevaucher ainsi les comptes des années les unes sur les autres : c'est là ce qui en a fait une machine très compliquée, et ce qui empêche qu'on ne puisse connaître, au moment où on le veut, avec clarté, l'état de la dépense et ae la recette propres à chaque année.
Voici un exemple de ce que comprend le chapitre des deniers payés par l'ordonnance : il est de l'exercice 1779, et a paru assez curieux pour être rapporté.
Au vicomte de Polignac, pour gratification et pour son assistance aux Etats de Languedoc, en.
octobre 1778, dont le roi l'a dispense...........................................................................5,250 liv.
Au marquis de Castries, pour idem.............................................................................................5,000
A lui, pour idem................................................................2,250
A M. le duc d'Uzès, pour idem..........................................................................................................2,250
Au sieur comte du Roure, pour idem, en qualité de baron de Tour de Gévaudan, pour sa baronnie de Florac......................................................................2,250
A lui, pour idem, à cause de sa baronnie de Barjac................... .....................2,250
A M. le maréchal de Mouchy, pour idem..............................................2,250
A M. le comte de Roquelaure, pour idem...........................................2,250
Au sieur vicomte de Beaumont, pour idem, en novembre 1777........................2,250
Au sieur comte de la Tour-Mau bourg, pour idem, en octobre 1778 .......................» 2,250
Au sieur comte de Murviel, pour idem............................................................2.250
Au sieur comte de Rochechouard, pour idem.....................................................2,250
Au sieur vicomte de Bernis, pour idem................................................. 2,250
Total....................................................... 35,000 liv.
second rapport du comité des pensions.
Principes fondamentaux et règles générales.
Messieurs,
En vous instruisant de l'énormité des abus qui se sont glissés dans la distribution des grâces créées pour la récompense des services rendus à l'Etat, votre comité des pensions a rempli le premier de ses devoirs. Pour se conformer littéralement à votre décret du 4 janvier, il devrait maintenant vous présenter le plan d'après lequel les pensions, dons, traitements et gratifications existantes, seront supprimées, réduites ou augmentées. Mais avant tout, il a jugé nécessaire ae poser les bases et d'établir les principes qui doivent déterminer la concession des pensions futures. En effet, Messieurs, comment porter une décision, fondée en principe, sur les pensions actuelles ? Gomment parvenir à juger les motifs qui les ont fait accorder, si nous ne mettons pas d'abord sous vos yeux des règles générales, d'après lesquelles vous puissiez, en connaissance de cause, eu égard au temps et aux circonstances de leur concession, prononcer les suppressions, réductions et augmentations convenables ? Voici, Messieurs, quelles sont ces bases et ces principes.
L'Etat a deux manières de reconnaître les services rendus au corps social, les récompenses honorifiques et les grâces pécuniaires. Les premières conviennent mieux à la fierté d'une nation libre. Les secondes ne doivent être accordées que pour le soutien honorable du citoyen qui a bien
mérité de la patrie, ou pour lui tenir lieu de3 sacrifices faits à l'utilité publique.
Les récompenses pécuniaires sont de deux espèces : les traitements annuels et viagers, connus sous le nom de pensions, et les gratifications passagères et momentanées qui s'accordent en considération d'une perte, d'une blessure, d'un accident grave, ou comme récompense d'une action distinguée, d'un service éclatant. Pour mériter les unes ou les autres, il faut avoir, ainsi qu'on l'a déjà dit, rendu service au corps social.
On ne doit pas confondre ce service avec celui qu'un individu rend à un autre individu, et qui ne peut être considéré comme intéressant la société entière, qu'autant qu'il est accompagné de circonstances qui en font réfléchir l'effet sur toute la nation. Cette confusion a été la source de bien des abus, l'origine de beaucoup de pensions encore existantes. Pour qu'elle ne puisse pas, en se reproduisant, opérer le même effet, votre comité a déterminé, d'une manière précise, ce qu'on devait entendre parservices rendus au corps social ; il a désigné ceux qui peuvent prétendre aux bienfaits de la nation : il a rangé dans cette classe le guerrier, l'administrateur, le magistrat, le savant, l'artiste pil a enfin posé pour principe, que tout citoyen qui a servi, défendu, illustré ou éclairé sa patrie, ou qui a donné un grand exemple de dévouement à la chose publique, peut prétendre aux récompenses honorifiques ou pécuniaires.
Après ayoir ainsi distingué les différentes manières de récompenser un citoyen vertueux, les différentes espèces de services qui lui donneri
des droits à la reconnaissance de la patrie, nous avons proscrit avec sévérité tous les moyens odieux dont on s'est servi jusqu'à présent pour perpétuer les grâces dans les familles, enrichir les courtisans avides et faire passer la substance des peuples, par les canaux de la faveur et de l'intrigue, dans les mains impures des vils agents du despotisme ou de ses esclaves.
Nous vous proposerons, en conséquence, de décréter, comme principe constitutionnel, qu'à l'avenir aucunes pensions ou gratifications ne pourront être accordées à titre de réversibilité, d'indemnité, de dédommagement, de prix d'aliénation et autres causes semblables. Le fonds destiné aux pensions ne peut jamais servir au payement d'une dette contractée; et quand un citoyen se prétend porteur d'un titre sur le Trésor public, le fonds destiné au payement des dettes doit y satisfaire. Quant à la femme et aux entants de celui qui, dans le cours des services qu'il rend à sa patrie, est enlevé par une mort précipitée au milieu de sa carrière, si sa mort les laisse sans ressource, une pension alimentaire à la veuve, une éducation publique et gratuite accordée aux enfants, suppléeront au défaut de patrimoine.
La réunion de plusieurs pensions sur un même individu était encore un vice de l'administration ancienne. Nous avons également proscrit cet abus qui ne tendait qu'à se faire accorder partiellement ce qu'on aurait rougi de solliciter en masse, et à accumuler sur la tête d'un seul ce qui eût pu servir à récompenser dignement plusieurs citoyens vertueux.
Nous avons jugé qu'une pareille proscription devait être prononcée contre toutes les pensions que ia faveur accordait à ceux qui, employés au service de l'Etat, jouissent des traitements et appointements attachés à leurs places. Nous avons, en conséquence, établi pour principe, qu'on ne pourrait en même temps avoir traitement et pension, ni continuer à toucher ses appointements sous le titre de traitement conservé. Mais en posant cette règle, nous n'avons pu prétendre, Messieurs, imprimer à la nation une tache d'ingratitude envers ceux qu'elle emploie, et qui, par quelque action d'éclat, quelque service signalé, se rendraient dignes d'un bienfait particulier. Alors, si quelque circonstance impérieuse exige soit une récompense, soit des secours, la nation doit, suivant la nature des pertes ou des services, et la position de ceux qui les auront souffertes ou rendus, faire usage des récompenses honorifiques, des dons ou gratifications. Quelle que soit, dans ce cas, la grâce que l'Etat accorde, elle est toujours honorable pour celui qui la reçoit. La récompense honorifique est moins onéreuse à l'Etat ; elle rappelle d'ailleurs la loyauté de nos anciens et braves guerriers qui préféraient à tout le don d'une écharpe, d'une épée, d'une armure, d'un cheval de bataille. La nature du don, le montant de la gratification, dépendront du mérite de l'action, du genre de service, et delà situation de celui qui aura mérité la récompense ; et quand les circonstances*exigeront que cette gratification soit en argent, on en fixera la somme, de manière qu'elle soit toujours eu proportion de l'ac-tionr cki service eb du besoin.
Au moyen de ia somme accordée au roi pour la dépense èci sa maison, son service particulier n'est plus à la charge de l'Etat, et les personnes qui y ont été, ou. y sont employées, ne peuvent obtenir les récompenses destinées aux services rendus à la nation. Un article particulier, en consacrant ce principe, renvoie à la liste civile
toutes les pensions de la maison du roi, tant domestique que militaire : vous le trouverez, Messieurs, au nombre de ceux dont votre comité vous offre le projet.
Permettre à un pensionnaire de l'Etat, qui a reçu de la patrie une récompense proportionnée à la nature et à la durée de ses services, de ne recevoir une pension d'aucune autre personne, c'était ouvrir la porte à de nouveaux abus, et avilir en quelque sorte le bienfait de la nation, qui doit suffire à la subsistance de celui qui le reçoit. Nous avons cru, Messieurs, qu'un peuple libre ne devait pas souffrir qu'un autre que lui prît soin de pourvoir aux besoins de ceux qui ont bien mérité de l'Etat, et nous vous proposons de décréter ce principe.
Dans l'ancien état des choses, tout était arbitraire; il n'y avait aucune somme fixe pour les pensions, aucune quotité déterminée, soit pour le temps, la nature ou l'espèce de service, soit pour le grade ou la qualité de celui auquel elle était concédée. La somme des pensions n'était pas déterminée; la faveur présidait presque toujours à la concession des grâces : aussi vo-us avez vu, Messieurs, par le premier rapport qui vous a été fait, à combien d'injustices ce défaut de fixation a donné lieu, et de quelle masse de charges il a grevé le Trésor public. Pour remédier à ce double inconvénient, votre comité a cru devoir vous proposer : 1° d'ordonner qu'il sera fixé une somme pour les pensions et gratifications, au delàde laquelle aucunes pensions et gratifications ne pourront être accordées ; 2° de fixer pareillement un maximum, au delàduquel aucune pension ne pourra être portée. Après avoir comparé la somme des charges avec l'état des revenus, votre comité a pensé qu'une somme de 12,000,000 livres, savoir : 10,000,000 livres pour les pensions, et 2,000,000 livres pour les dons et gratifications, était suffisante pour acquitter la nation envers ceux qui ont bien mérité d'elle; et il a porté à 12,000 livres le maximum des pensions qui seront distribuées à l'avenir. Calculant ensuite le nombre des années qu'un citoyen doit consacrer au service de l'Etat, avant de pouvoir en demander la récompense, nous avons pensé que, pour avoir des droits aux grâces de la nation, il fallait l'avoir servie pendant trente ans; et qu'à moins de blessures ou infirmités provenant des fatigues, voyages ou séjour en des lieux malsains, aucune pension ne pouvait être accordée avant trente ans de services publics et cinquante ans d'âge. En reculant ainsi de quelques années le terme fixé pour les pensions, nous avons envisagé que, si on les accordait à des époques plus rapprochées, le public ne profiterait pas de l'expérience de ceux qui remplissent les différents emplois, outre l'augmentation de charges qui en résulterait pour le Trésor public. Cependant, Messieurs, vous savez combien l'expérience ajoute aux qualités naturelles et acquises ; et combien il importe de fixer dans les places, le plus longtemps qu'il est possible,, ceux qui joignent ce mérite aux talents dont ils peuvent être pourvus.
D'après ces mêmes principes, nous avons réglé au quart de ce qu'on avait pour appointements lorsqu'on était en activité, le montant de la pension qui sera accordée après trente années de services effectifs; et pour encourager, par l'espoir d'améliorer leur sort, ceux que le patriotisme déterminera à continuer leurs fonctions, nous avons établi une progression telle, qu'à cinquante ans de service on pourra obtenir la tota-
lité de ses appointements. A l'effet de quoi, au-dessus de trente ans, chaque année augmentera d'un vingtième des trois quarts des appointements restants (1).
La publicité des grâces réunissant le triple avantage d'instruire le peuple des noms de ceux qui ont bien mérité de la patrie, d'animer tous les citoyens par l'espérance de partager ses bien-laits, et d'écarter les sollicitations de ceux qui, dénués de titres pour obtenir des grâces, pourraient parvenir à les surprendre, votre comité a cru devoir vous proposer, Messieurs, de décréter : 1° que l'état des pensions, tel qu'il sera arrêté par l'Assemblée nationale, sera rendu public; 2° que tous les dix ans il sera imprimé en entier; et que, tous les ans, dans le mois de janvier, l'état des changements survenus dans le cours de l'année précédente, et celui des concessions de nouvelles pensions, seront livrés à l'impression. Par ce moyen, le public instruit de l'usage que l'on aura fait des sommes destinées à récompenser les services rendus à la nation, sera dans le cas de juger si ses représentants se sont écartés des principes qui doivent toujours déterminer ses bienfaits.
Quelque sage, quelque utile que soit une loi, une surveillance continuelle peut seule en assurer l'exécution. Sans cette surveillance, chaque jour la loi s'altère, et elle finit bientôt par tomber en désuétude. Nous en faisons depuis longtemps la malheureuse expérience; et combien de lois ne pourrait-on pas citer, que leur sagesse et leur utilité n'ont pu sauver de l'inexécution, et même de l'oubli ! Celle que nous vous présentons, Messieurs, devant se trouver souvent en contradiction directe avec les vues personnelles des ministres, éprouvera infailliblement des atteintes dan-geureuses : si l'œil attentif du pouvoir législatif n'est pas constamment ouvert sur son exécution, dans peu ses dispositions seront annulées, et les anciens abus renaîtront avec plus de vigueur que jamais. D'après ces réflexions, dont vous sentez, Messieurs, toute la justesse, votre comité a cherché les moyens de concilier les intérêts de la nation avec ce qu'elle doit à son auguste chef; et il a pensé qu'en conservant au roi la proposition de la liste des grâces, il devait poser des limites que les agents du pouvoir exécutif ne pussent franchir.
Cette liste, à laquelle sera jointe celle des pensionnaires décédés, et celle des pensionnaires existants, sera, par Sa Majesté, présentée à chaque législature. L'Assemblée examinera ces listes, et rendra un décret approbatif des pensious qu'elle croira devoir être tant accordées que conservées : le roi sanctionnera ce décret; et ies pensions accordées en cette forme, seront les seules exigibles.
Comme il pourrait se faire que la religion du monarque fût trompée, et que son erreur échappât à la vigilance et à la sévérité de l'examen de l'Assemblée législative, votre comité a cru devoir poser, comme loi première et essentielle, qu'aucun citoyen ne pourrait prétendre aux grâces et aux récompenses de l'Etat, qu'autant que ses services seraient recommandés et attestés par les
départements, les officiers généraux et autres agents des pouvoirs exécutif, administratif et judiciaire, qui peuvent en avoir une pleine connaissance. Le concours de ces moyens rendra les surprises plus rares, lés fraudes plus difficiles, et deviendra une barrière contre les entreprises du ministère.
Telles sont, Messieurs, les bases que nous vous présentons pour la distribution des pensions et des gratifications à venir.
projet de décret.
L'Assemblée nationale, considérant que chez un peuple libre, servir l'Etat est un devoir que tout citoyen est tenu de remplir, et qu'il ne peut prétendre de récompense, qu'autant que la durée, l'éminence et la nature de ses services lui donnent des droits à une reconnaissance particulière de la nation; que s'il est juste que, dans l'âge des infirmités, la patrie vienne au secours de celui qui lui a consacré ses talents et ses forces, lorsque sa fortune lui permet de se contenter des grâces honorifiques, elles doivent lui tenir lieu de toute autre récompense, décrété ce qui suit :
Art. 1er. L'Etat doit récompenser les services rendus au corps
social, quand leur importance et leur durée méritent ce témoignage de reconnaissance. La
nation doit aussi payer aux citoyens le prix des sacrifices qu'ils ont faits à l'utilité
publique.
Art. 2. Les services qu'il convient à l'État de récompenser sont ceux qui intéressent la société entière. Les services qu'un individu rend à un autre individu ne peuvent être rangés dans cette classe, qu'autant qu'ils sont accompagnés de circonstances qui en font réfléchir l'effet sur tout le corps social.
Art. 3. Les sacrifices dont la nation doit payer le prix sont ceux qui naissent des pertes qu'on éprouve en défendant la patrie, ou des dépenses qu'on a faites pour lui procurer un avantage réel et constaté.
Art. 4. Tout citoyen qui a servi, défendu, illustré, éclairé sa patrie, ou qui a donné un grand exemple de dévouement à la chose publique, a des droits à la reconnaissance de la nation, et peut, suivant sa position, la nature et la durée de ses services, prétendre aux récompenses honoriliques ou pécuniaires.
Art. 5. Une médaille ou tout autre symbole de la gratitude nationale, seront la récompense la plus flatteuse et la plus distinguée.
Art. 6. Il y aura deux espèces de récompenses pécuniaires : les pensions et les gratifications. Les premières seront destinées au soutien honorable du citoyen auquel ou les accorde; ies se-| condes, à payer des pertes souffertes, des sacri-! lices laits à l'utilité publique.
Art. 7. Aucune pension ne sera accordée à qui ! que ce soit, avec clause de réversibilité au profit l d'un autre; mais suivant les circonstances, et ! dans le cas de défaut absolu de patrimoine, la ! veuve d'un homme mort dans le cours de son ser-| vice public, pourra obtenir une pension aiimen-| taire, et ies enfants être élevés aux dépens de la I naiion, jusqu'à ce qu'elle les ait mis en état de pourvoir eux-même à leur subsistance.
Art. 8. 11 ne sera compris dans l'état des pensions que ce qui est accordé pour récompense de service. Tout ce qui sera prétendu à titre d'in-1 demnité, de dédommagement, comme prix d'à-
liénation ou autres causes semblables, sera placé dans la classe des dettes de l'Etat, et soumis aux règles qui seront décrétées pour la liquidation des créanciers de la nation.
Art. 9.,Dans l'administration du Trésor national il sera établi, pour le payement des pensions, dons et gratifications, une caisse distincte de toute autre. On ne pourra jamais être employé sur cette caisse qu'en un seul et même article. Ceux qui auraient usurpé, de quelque manière que ce soit, plusieurs pensions, seront rayés de la liste des pensionnaires et privés des grâces qui leur auraient été accordées.
Art. 10. Nul ne pourra recevoir en même temps une pension et un traitement. Aucune pension ne pourra être accordée sous le nom de traitement conservé et de retraite.
Art. 11 II ne pourra être concédé de pensions à ceux qui jouissent d'appointements, gages ou honoraires ; sauf à leur accorder des gratifications, s'il y a lieu.
Art. 12. Un pensionnaire de l'Etat ne pourra recevoir de pension d'aucune autre personne.
Art. 13. La liste civile étant destinée au payement des personnes attachées au service particulier du roi et à sa maison, tant domestique que militaire, ie Trésor public demeure déchargé de de toutes pensions et gratifications qui peuvent avoir été accordées, ou qui le seraient, par la suite, aux personnes qui auraient été, sont ou seront employés à l'un ou à l'autre de ces services.
Art. 14. Il sera versé dans la caisse des pensions une somme de douze millions de livres, à laquelle demeurent fixés les fonds destinés aux pensions, dons et gratifications; savoir : dix millions pour les pensions et deux millions pour les dons etgratihcations. Dans le cas où le remplacement des pensionnaires décédés ne laisserait pas une somme suffisante pour accorder des pensions à tous ceux qui pourraient y prétendre, les plus anciens d'âge et de service auront ia préférence; les autres l'expectative, avec assurance d'être les premiers employés successivement.
Art. 15, Au moyen de ce versement, il ne pourra être payé par aucune autre caisse, ni accordé par qui que ce soit, et sous quelque prétexte ou dénomination que ce puisse être, notamment sous celle de. prêt, avances., secours pour payement de dettes, ou autrement, aucunes pensions, dons et gratifications, à peine contre ceux qui les auraient accordées ou payées, d'en répondre en leur propre et privé nom.
Art. 16. Sont exceptées de la disposition de l'article précédent, les soldes et demi-soldes, tant de terre que de mer, et les pensions des curés et vicaires, qui continueront d'être payées sur les fonds qui y sont ou seront affectés.
Art. 17. Aucun citoyen, hors le cas de blessures reçues, ou d'infirmités contractées pendant son service public, et provenant de fatigues ou de travaux, de voyages ou séjour en des lieux malsains, ne pourra obtenir de pension qu'il n'ait trente ans de service effectif, et ne soit âgé de cinquante.
Art. 18. Il ne sera jamais accordé de pension au delà de ce dont on jouissait à litre de traitements ou appointements au moment où cette pension sera accordée; mais quel que fût ie montant de ces traitements et appointements, la pension, dans aucun cas, sous aucun prétexte,, et quels que puissent être le grade ou les fonctions du pensionné, ne pourra jamais excéder la somme de douze mille livres,
Art. 19. Tout citoyen après trente ans de service public et effectif, et s'il est âgé de cinquante, pourra obtenir une pension. Elle sera alors du quart du montant de ses appointements lorsqu'il était en activité.
Art. 20. Chaque année de service, ajoutée à ces trente ans, produira une augmentation progressive du vingtième des trois quarts restants de ses appointements et traitements; de manière qu'après cinquante ans de service, le montaat de la pension sera de la totalité des appointements et traitements, sans que néanmoins, comme on l'a dit ci-devant, cette pension puisse jamais excéder la somme de douze mille livres.
Art. 21. Le fonctionnaire public, ou tout autre citoyen au service de l'Etat, que ses blessures ou ses infirmités obligeront de quitter son service ou ses fonctions avant les trente années expliquées ci-dessus, recevra une pension déterminée par la nature et la durée de ses services, le genre de ses blessures et l'état de ses infirmités.
Art. 22. Les pensions ne seront accordées que sur la recommandation et l'attestation des directoires de département et le district, des officiers généraux et autres agents des pouvoirs exécutif, administratif et judiciaire.
Art, 23. A chaque législature, le roi formera la liste des pensions à accorder aux différentes personnes qui, d'après les règles ci-dessus, seront dans le cas d'y prétendre. A cette liste sera jointe celle des pensionnaires décédés, et des pensionnaires existants. Ces deux listes seront, par Sa Majesté, remises à la législature, qui rendra un décret approbatif des pensions qu'elle croira devoir être accordées et conservées. Le roi sanctionnera le décret, et les pensions accordées dans cette forme, seront les seules exigibles, et les seules payables{par le Trésor public.
Art. 24. Les gratifications seront accordées sur les mêmes recommandations et attestations : elles ne seront jamais annuelles, mais pour une fois seulement, et elles seront calculées sur la nature des services rendus, des pertes souffertes, et d'après les besoins de ceux auxquels elles seront concédées. A chaque législature, il sera présenté un état des gratifications à accorder, et des motifs qui doivent en déterminer la concession et le montant. L'état de celles qui seront jugées devoir être accordées sera pareillement décrété par l'Assemblée législative, et sanctionné par le roi; les gratifications accordées dans cette forme seront aussi les seules payables par le Trésor public.
Art. 25. Néanmoins, dans les cas urgents, le roi pourra accorder provisoirement des gratifications : elles seront comprises dans l'état qui sera présenté à la législature; si elle les juge accordées sans motif ou contre les principes décrétés, le ministre, qui aura contresigné les décisions, sera condamné à en verser le montant au trésor de l'Etat.
Art. 26. L'état des pensions, tel qu'il aura été arrêté par l'Assemblée nationale, sera rendu public. Il sera imprimé en entier tous les dix ans ; et tous les ans, dans le mois de janvier, l'état des changements survenus dans le cours des .années précédentes, ou des concessions de nouvelles pensions et gratifications, pareillement livré à l'impression.
Fait au comité des pensions le 17 juin 1790. Signé : camus, goupil, Gaultier, expilly, Fré-teau, Treilhard, J. de Menou? Julien-François Palasne, Cottin, L. M. de la Réveillère.
troisième rapport du comité des pensions.
Sur le parti à prendre par VAssemblée nationale au sujet des pensions existantes.
L'Assemblée nationale se propose d'établir des règles sur la concession et le payement des pensions pour l'avenir. Elle satisferait pleinement à son devoir par la promulgation de ces lois, si elle n'avait autre chose à faire que de mettre l'ordre dans une des parties les plus importantes de l'administration. Mais les représentants de la nation ont reçu une autre mission de leurs commettants, celle de réformer les rbus: c'est un second devoir à remplir. Beaucoup de pensions existantes sont abusives : le fait est évident, d'après les exemples réunis, quoiqu'en très petit nombre, dans le premier rapport présenté à l'Assemblée nationale. Gomment réformer ces abus ? L'état des finances de la nation exige, d'ailleurs, l'économie la plus sévère dans toutes les parties de la dépense. Comment ramener la dépense des pensions dans les limites étroites de cette sage économie ?
Voici les réponses qui doivent se présenter les premières à l'esprit des personnes attachées aux maximes d'une justice rigoureuse.
Les lois n'ont point d'effet rétroactif; par conséquent les décrets qui seront prononcés par l'Assemblée pour régler à l'avenir les pensions, ne doivent pas déterminer la conservation, la suppression ou l'état des pensions existantes : il faut les juger par les lois antérieures.
On sera autorisé alors à mettre la même raideur dans l'application des lois anciennes, que l'on apportera à défendre le principe quiôteaux lois nouvelles tout effet rétroactif; et quelle conséquence résulterait de cette manière de procéder? Il existait des règles: quel serait l'effet du décret qui proscrirait les libéralités contraires à leur disposition ?
D'abord, on verrait tomber les dons qui n'ont d'autre titre que la concession et le bon d'un ministre ou d'un ordonnateur : car à quelque point que fût porté le pouvoir ministériel, il n'avait encore été écrit dans aucun code que les ministres eussent le droit de faire les largesses du montant des contributions publiques.
Ensuite, il faudrait rayer toute pension assise sur d'autres caisses que sur celle du Trésor royal, d'après la disposition des lettres patentes de 1778, et on ne devrait pas regarder comme suffisant, pour remplir le vœu de cette îoi, qu'à une époque quelconque la pension eût été reportée sur le Trésor royal par l'expédition d'un brevet accordé sans examen. La pension établie depuis 1778, ailleurs que sur le Trésor royal, est nulle : il ne s'agit pas de la confirmer par un brevet ; il faut l'établir en connaissance de cause : si l'on n'a pas pris cette précaution, la pension n'existe pas.
La déclaration de 1779 a fixé plusieurs règles pour l'obtention légitime des pensions. Les solliciteurs ne doivent' présenter leurs demandes, et il n'estpermis de leur répondre qu'à une époque déterminée, à la fin de l'année : de manière qu'on sache, quand on les accorde, ce que l'état des finances de l'année peut permettre. Ils doivent faire un exposé fidèle des grâces dont ils jouissent déjà. Toutes les pensions doivent être portées sur un rôle enregistré à la chambre des comptes.
Il n'est peut-être pas une pension accordée depuis 1778 qui pût supporter l'épreuve de la comparaison avec les règles; et si l'on remontait au delà de cette époque, les pensions plus anciennes rencontreraient également des règles qui ne permettraient pas de les conserver.
Il faudrait anéantir toutes ces pensions qui ont été accordées pour des croupes et des intérêts dans les affaires, parce que les croupes ayant été déclarées illégitimes, le Trésor public n'a pas dû être chargé du dédommagement de leur'perte. Il faudrait renvoyer au nombre des créances sur l'Etat les pensions accordées pour prix d'aliénation, d'indemnité, de dédommagement, parce que ce n'est pas par des dons que lEtat doit acquitter ses dettes, mais par des payements qui suivent la juste mesure des créances. Il faudrait décharger le Trésor public des pensions accordées en récompense des services rendus personnellement au roi et à sa maison, puisqu'il lui a été assigné des fonds pour payer et récompenser les services qu'on lui rend.
Et après le retranchement total de la multitude des pensions contraires aux règles qui ont précédé les décrets de l'Assemblée, il y aurait encore à faire sur les pensions qui subsisteraient, ia réduction des retenues établies en 1770 et 1787. Alors disparaîtraient ces nombreux affranchissements des retenues dont il a été indiqué des exemples: de simples décisions, données dans le secret du cabinet, n'étant pas une dérogation suffisante à la loi publique ; et peut-être serait-on autorisé à ajouter aux premières réductions de nouvelles retenues nécessitées par l'état actuel des finances.
Quel serait donc le dernier terme de ces opérations longues et compliquées? Le comité ne parlera pas du travail immense qu'elles exigeraient : c'est sous un autre point de vue qu'il faut considérer le travail et son résultat; on doit en envisager les suites à l'égard des pensionnaires.
Veut-on considérer leur intérêt en masse? il est constant, d'après les abus qui ont été démontrés, que l'examen sévère qui serait fait des pensions, réduirait leur montant total au-dessous de la somme de 10 millions, qui est celle à laquelle le comité a proposé de les fixer. Les pensionnaires auraient à partager entre eux moins de 10 millions ; et comme ils auraient exigé qu'on ne les jugeât que d'après les anciennes lois, ils ne pourraient prétendre à des grâces qui ne leur sont pas accordées par ces lois anciennes.
Veut-on considérer l'intérêt individuel des pensionnaires ? Le grand Dombre d'entre eux serait victime de l'examen qu'on aurait entrepris. Ils pouvaient avoir des titres légitimes à une pension, quoique celle qu'ils ont obtenue ne dût pas subsister. Leur pension serait anéantie à raison de défaut de formes dont il serait dur de les rendre responsables, parce qu'elles ne leur étaient pas connues. Combien d'entre eux souffriraient de la longueur d'un travail qui ne se ferait que successivement et par une espèce d'inquisition individuelle !
A l'égard de la réduction sur les pensions qui seraient conservées, quelles seraient les bases pour l'établir ? Si on la fixait à la même cote pour toutes les pensions, on serait injuste envers le pensionnaire auquel onôterait 100 livres, par exemple, sur 1,000 livres, et trop facile envers le pensionnaire qui conserverait 9,000 livres après avoir payé le dixième de sa pension : si l'on
voulait graduer la réduction, on flotterait entre Une infinité de considérations incertaines ou contraires.
Le résultat trop peu favorable de ces premières vues nécessite de recourir à un autre parti qui est plus simple, qui n'est pas bors du pouvoir du législateur, et qui est plus avantageux pour les pensionnaires ; c'est de supprimer la totalité des pensions qui existent au moment actuel, ainsi que les autres dons, sous quelque dénomination que ce soit.
Mais qu'on ne s'effraye pas de cet anéantissement total des pensions : le même décret qui le prononcera, ordonnera la création de nouvelles pensions, jusqu'à concurrence de la somme de 10 millions, en faveur de ceux qui y ont droit, suivant les règles que l'Assemblée nationale aura décrétées.
Quiconque a des droits réels aux grâces pécuniaires sur leTrésor public, n'a rien à appréhender de cette opération. Elle ne lui sera pas funeste ; 11 a, dans ses services, des titres sacrés. Elle lui sera avantageuse, parce que sa pension ne se trouvant plus en concours avec cette foule de grâces non méritées qui épuisaient le Trésor public, il sera payé plus sûrement et plus exactement du prix de ses services.
A l'égard de ceux qui n'o n t poin t de droit aux pensions dont ils jouissent, mais qui les ont obtenues par suite de la commisération que leur position malheureuse a inspirée; à l'égard de ceux mêmes qui, dans le principe, n'ont eu aucun titre, de quelque genre qu'il fût, pour obtenir une pension, mais qui ont vieilli dans l'habitude de subsister des secours publics, le comité proposera à l'Assemblée de jeter sur tous un regard de compassion et d'écarter d'eux les horreurs du désespoir, en consacrant à leur soulagement un fonds distribué de manière à procurer des secours à un grand nombre. La liste des personnes auxquelles ce secourssera partagé n'étant susceptible d'aucun remplacement, la masse des fonds qui y sera destinée recevra chaque année une diminution graduelle ; et bientôt l'Etat, qui survit à tous les individus, aura acquis sa libération totale.
Il est une autre classe d'hommes respectables, qui doit fixer l'attention de l'Assemblée : ce sont ies vieillards. Toutes les nations libres ont été affectées d'un grand sentiment de respect pour la vieillesse ; et nous ne devons pas oublier que les glaces de l'âge n'ont pas rendu nos vieillards insensibles au bonheur de la Révolution. On les a vus, dans cette capitale, consacrer leurs derniers jours à montrer aux jeunes gens le chemin de la gloire : ils ont voulu que la mort qui s'approchait d'eux, les saisit revêtus d'un costume militaire; tant le sentiment de l'honneur est constant chez les Français! tant le patriotisme est profondément gravé dans leurs cœurs !
Ainsi, l'Assemblée conciliera ce que l'humanité demande avec ce que le devoir exige : tous ceux qui ont bien mérité de la patrie seront récompensés. Ceux qui n'avaient que des récompenses inférieures à leur mérite auront une augmentation. Le scandale résultant d'une multitude de dons obtenus par la faveur ou l'intrigue, disparaîtra; et cependant la nation, toujours indulgente pour les fautes passées, consolera encore, par quelques secours, ceux qu'une justice rigoureuse aurait punis par une perte totale de leurs pensions. Mais pour assurer le succès de ces vues combinées, il faut que les suppressions que l'Assemblée prononcera soient absolues et universelles. Nulle autre exception, nulle autre grâce
ue celles qui seront écrites dans le texte du écret de l'Assemblée ; toutes les pensions établies sur les caisses diverses doivent être supprimées ; tout ce qui est pension ou don, sous le voile d'une autre dénomination, doit être anéanti : autrement la réforme ne s'établirait pas dans le moment actuel ; et l'on ne doit pas se le dissimuler, les abus qui ne seront pas réformés par l'Assemblée nationale, ne le seront ni dans aucun temps ni par aucune puissance.
Il ne reste qu'une seule question sur laquelle les avis peuvent être partagés : à qui l'Assemblée renverra-t-elle le travail nécessaire pour dresser les nouveaux états des pensionnaires? Ce travail ne sera pas aussi considérable qu'il semblerait au premier coup d'oeil. On doit croire que parmi les personnes qui ont obtenu des pensions avec trop de facilité, il s'en trouvera qui, n'ayant pas perdu toute pudeur, rougiront ae se présenter pour conserver le fruit de leurs intrigues et de leurs bassesses. A l'égard de ceux qui mériteront des pensions, il ne s'agira, pour les cas ordinaires, que de vérifier trois faits : l'âge, la durée des services, le montant du traitement d'activité. Des opérations simples, à la portée de tout le monde, établiront à l'avenir la liste des pensionnaires. L'avis du comité est que ce travail soit renvoyé au pouvoir exécutif.
Voici le projet de décret résultant des principes qui viennent d'être développés.
L'Assemblée nationale décrète ce qui suit :
Art. 1er. Toute pension, don, traitement ou ap-pointement
conservés, récompense, gratification annuelle* engagement consenti pour payement de dettes,
assurance de dot ou de douaire, concessions gratuites de domaines, existant au premier
janvier 1790, ou accordés depuis cette époque, sous quelque dénomination que ce puisse être,
sur quelque caisse que ce soit, et étant directement ou indirectement à la charge du Trésor
public, sont et demeurent supprimés. Tout ordonnateur qui en autoriserait le payement, et
tout caissier qui l'effectuerait, en sera responsable en son propre nom.
Art. 2. Les gouvernements des provinces, villes, châteaux, qui n'exigent pas résidence, ainsi que les gages et émoluments qui y sont attachés, sont supprimés. Lesdits gages et émoluments échus au 31 décembre 1789, seront payés aux titulaires par les administrateurs des caisses qui en sont chargées ; mais il ne sera rien payé au delà, à peine, par ceux qui ordonneraient ou feraient le payement, d'en demeurer responsables comme dessus.
Art. 3. Les fonds des ordres de Saint-Louis, du Mérite militaire, de Saint-Lazare et du Mont-Car-mel, seront versés, à compter du jour de la sanction des présentes, dans la caisse des grâces pécuniaires nationales, à valoir sur les dix millions qui doivent y entrer.
Art. 4. Toute assurance, promesse, survivance, réversibilité de pension, don, gratification, sont révoqués à compter de ce jour, et anéantis.
Art. 5. Sont exceptés des dispositions des articles précédents, les objets qui suivent, savoir :
1° Les pensions dues aux personnes qui ont atteint leur quatre-vingtième année, lesquelles seront payées comme parle passé, sans que néanmoins la somme qui sera payée à chacune d'elles puisse excéder celle de 24,000 livres;
2° Les secours accordés aux Hollandais patriotes, réfugiés en France;
3° Les pensions stipulées lors des cessions faites au roi par l'ancienne Compagnie des Indes;
4° Les pensions accordées aux employés de diverses régies et compagnies de finance, dont le fonds était fait par des retenues sur les gages et appointements des employés ;
5° Les soldes et demi-soldes accordées aux troupes de terre, ainsi qu'aux troupes et aux gens de mer;
6° Les pensions des ci-devant jésuites, et celles qui ont été établies par les décrets de l'Assemblée concernant l'organisation du clergé;
7° Les pensions sur le Trésor royal, au-dessous de 600 livres seulement, quant au payement des six premiers mois de la présente année 1790.
L'Assemblée se réserve de prononcer sur ce qui regarde chacun de ces articles en particulier, d'après le compte qui' lui en sera rendu par son comité, lorsqu'elle aura statué sur les règles générales et communes à toutes les pensions.
Art. 6. Il sera créé jusqu'à la concurrence de la somme de 10 millions, franche et quitte de toutes charges, de nouvelles pensions dont les arrérages courront à partir du premier janvier dernier : lesquelles seront distribuées conformément aux règles générales décrétées par l'Assemblée, et réparties entre les officiers de terre et de mer, les personnes qui oqt rempli des emplois civils, les savants, les artistes, et autres personnes qui ont bien mérité de la patrie par des découvertes et des entreprises utiles, conformément à ce qui sera établi par l'Assemblée, relativement à chacune de ces classes de pensionnaires, sur le rapport de son comité.
Art. 7. Les mémoires déjà présentés au comité des pensions, et ceux de toutes personnes qui prétendraient à des pensions, seront remis au pouvoir exécutif, pour être fait par ses ordres un état des pensions à accorder, lequel sera adressé à l'Assemblée et décrété par elle.
Art. 8. Il sera pareillement fait, par les ordres du pouvoir exécutif, d'après les règles établies par l'Assemblée, un état des personnes qui ont droit de prétendre à des gratifications ; cet état sera présenté à l'Assembiée et décrété par elle.
Art. 9. Pour subvenir aux besoins pressants des personnes qui, se trouvant privées des pensions qu'elles avaient précédemment, n'auront pas de titres suffisants pour en obtenir de nouvelles, il sera fait un fonds annuel de quatre millions, réparti d'après les proportions et les règles suivantes :
Un million sera distribué en portions de mille livres ; un second million en portions de 500 livres, et les deux autres millions en portions de 200 livres, le tout formant huit mille parts.
Ces secours seront accordés aux personnes qui avaient des pensions sur les différentes caisses publiques, et particulièrement sur les fonds réservés pour les actes de bienfaisance, tels que ceux de la loterie royale.
Les personnes chargées de la distribution de ces secours s'assureront que ceux qui les demanderont, sont réellement dans le besoin. Les secours de 1,000 livres ne seront accordés qu'à des personnes mariées ou ayant des enfants ; les secours de 500 livres ne le seront qu'à des personnes ou mariées, ou ayant des enfants, ou sexagénaires. Plusieurs portions de secours ne pourront être réunies sur le même individu, ni même sur le mari et la femme.
Lorsque ceux qui jouiront des secours viendront à mourir, la portion dont ils jouissaient s'éteindra, et le fonds n'en sera plus versé dans la caisse des pensions, sans que, sous aucun
prétexte, on puisse la faire passer sur une autre tête.
Fait au comité des pensions, le premier juillet 1790. Signé : Camus, Goupil, Gaultier, Expïllt, Fréteau, Treilhard, J. de Menou, Julien-François Palasne ; L. M. de la Réveillère.
Séance du
La séance est ouverte à 9 heures du matin.
, secrétaire, doune lecture du procès-verbal de la séance du jeudi 1er juillet au soir.
, autre secrétaire, lit le procès-verbal de la séance d'hier vendredi 2 juillet.
Ces procès-verbaux sont adoptés.
, au nom du comité de Constitution. La ville de Gemenos a été autorisée à opter pour Aix ou pour Marseille. La municipalité avait décidé la réunion au district d'Aix, mais les citoyens actifs de Gemenos ont prétendu, avec raison, que l'Assemblée nationale, en accordant à la ville la faculté d'option, n'entendait pas parler de la municipalité et ils se sont, en conséquence, prononcés pour Marseille qui convient mieux à leurs intérêts. Nous vous proposons de sanctionner, par un décret, l'option faite par les citoyens actifs de Gemenos.
Je prie l'Assemblée de ne pas prononcer aujourd'hui sur cette affaire et de prescrire, avanttout, une nouvelle assemblée régulière des citoyens actifs ; car la délibération des citoyens est aussi vicieuse que celle de la municipalité; elle est le fruit de la violence. Il y avait parmi les votants beaucoup de gens qui n'étaient pas citoyens actifs. Au fond, cette nouvelle réunion porte la population du district de Marseille à plus de 190,000 âmes tandis que celui d'Aix n'en a que 32,000, un autre voisin 18,000. Où est la proportion ?
L'Assemblée nationale a laissé une faculté à la ville de Gemenos; elle use de son droit ; M. Bouche peut trouver l'option mauvaise, mais comme elle est conforme au décret sur la division du royaume, votrecomité de Constitution a pensé qu'elle devait être ratifiée.
Ces conclusions sont adoptées et le décret suivant est rendu :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu son comité de Constitution, a décrété et décrète que la ville de Gemenos est réunie, selon son vœu, au district de Marseille. »
Vous avez fixé provisoirement dans la ville de Mont-de-Marsan le chef-lieu du département
des Landes, en réservant aux électeurs la faculté de proposer l'alternat. La formation de ce
département éprouve des difficultés. Parmi les causes de cette lenteur, la principale
« L'Assemblée nationale a décrété et décrète que, conformément à son décret du 15 février dernier, les électeurs procéderont à Mont-de-Marsan à l'organisation du corps administratif du département, et qu'ils se retireront ensuite à Tar-tas pour délibérer sur l'alternat. »
, député de Mont-dé-Marsan. Je dois à mes concitoyens de repousser les inculpations qui leur sont faites. Ils n'ont cessé de donner des preuves de modération et de patriotisme; ils ne cessent, depuis la réunion du pays des Landes à la Ghalosse; d'eogager les nouveaux alliés aux sentiments de fraternité. Ils les ont invités à un pacte fédératif qui a eu lieu dans le mois de mai dernier. Les gardes nationales de plusieurs cantons de la Qhalosse s'y sont rendues, et elles ont été accueillies avec les transports de 1a joie la plus pure.
Tout s'est passé, dans cette fête civique, dans les épanchementsréciproques de l'amitié la mieux sentie. Les villes, de Saint-Sever et de Dax ont seules dédaigné l'invitation la plus honnête. J'ai de fortes raisons pour désirer que lâ conduite du commissaire dénonciateur soit manifestée; en conséquence, je conclus à ce gue la correspondance du commissaire et les pieGes qu'il a produites soient déposées aux comités des rapports et de Constitution, afin que sur le compte qui eu sera rendu à l'Assemblée nationale, elle prenne le parti le plus convenable.
, député de Mont-de-Marsan. La ville de Mont-de-Marsan a multiplié les preuves 4e son patriotisme et de sa soumission aux décrets de l'Assemblée nationale: les suppositions qu'on apporte contre elle sont donc une in jure, gratuite. J'affirme, au contraire, que ce sont les commissaires du roi qui se sont coalisés ayec les villes de Dax et de Saint-Sever; je suis en mesure de prouver ce que j'avance, aussi je demande que les pièces que j'ai en mains soient renvoyées au comité des rapports, afin que la ville dont je suis député soit disculpée hautement ou punie avec sévérité, si elle a pu se rendre coupable de.préméditer une insurrection crimi-miuelle.
consulte l'Assemblée, qui renvoie cette affaire aux comités réunis des rapports et de Constitution.
, au nom du comité de Cons-titution. Votre comité ne se refusant à rien de ce
qui peut être utile, a reçu des représentations de la part des commissaires de la ville de Paris qui se trouvent chargés des apprêts de la fédération.
Voix nombreuses : L'ordre du jour 1 l'ordre du jour 1 (Un grand tumulte se produit.)
Ceux qui s'occupeut de la fédération n'ont pas de mission. Je demande l'ajournement.
Nous n'avons plus que dix jours jusqu'à la fédération, et ii faut une autorité suffisante pour ordonner, sans aucun empêchement, tout ce qui sera nécessaire pour cette fête. Il faut que quelqu'un ait assez de pouvoir pour qu'on ne perde pas de vue les règles de i'êconomie.
Qui est-ce qui a chargé ceux qui font ces dépenses, de les faire? Qui est-ce qui a chargé le coiûité de s'en occuper ? cela ne nous regarde pas. L'ordre du jourl
Il faut que les commissaires de la ville de Paris calculent les dépenses que pourra occasionner cette fête, aûn d'en rendre compte au comité des finances.
La fédération générale n'a lieu à Paris que parce que l'Assemblée nationale y tient ses séances, que parce que le roi y réside. On veut la faire passer pour une fête nationale! Mais les fédérations de Metz, Strasbourg, Lille, Orléans, Tours, étaient aussi des fêtes nationales et ces villes s'en sont occupées seules. Si la ville de Paris fait trop de dépenses, tant pis pour elle , ce n'est pas à nous d'y entrer.
Je désavoue, au nom de mes concitoyens, cette prétendue pétition de Paris. Cette ville est trop heureuse que ses frères d'armes Veuillent bien se rendre dans son sein ; mais elle n'a jamais entendu leur faire payer la fête qu'elle leur donne. Si la proposition en avait été faite dans les sections, elle aurait été repoussée unanimement.
La commune de Paris n'est pas plhs haut placée dans la Constitution que celle de Vaugirard ; elle n'a pas le droit de vérifier les pouvoirs des députés qui vont arriver si vous ne l'y autorisez expressément. Voilà ce qu'elle demande. La commune de Paris n'est rien maintenant ; elle est partagée en quarante-huit sections qui n'ont nulle inspection les unes sur les autres. La marche constitutionnelle veut que les moindres dépenses d'une municipalité ne puissent, passer sans l'autorisation du département. Ici, point de département ; par conséquent, nulle surveillance sur les dépenses qui pourraient s'étendre trop loin. G'est donc à l'Assemblée à prendre sur elle cette inspection. Je vous prie de repousser toute prétention étrangère et, si vous ne voulez pas vous expliquer aujourd'hui, je demande l'ajournement pour que les députés de Paris puissent conférer ensemble.
La ville de Paris vou3 a invités à une fêle. Elle doit vous apprendre comment cette fête sera ordonnée. Qu'elle vous en présente donc ie plan et rien de plus.
consulte l'Assemblée sur l'ajournement qui a été proposé.
L'ajournement à demain est prononcé.
, membre du comité de la marine. Vous avez renvoyé, le 27 juin, aux deux comités militaire et de la marine réunis, l'article 14 de votre décret de la veille 6ur les principes constitutionnels de la marine. Vous vous y êtes déterminés sur l'observation qui vous fut faite qu'il pourrait être dangereux d'arrêter les opérations au pouvoir exécutif dans l'intervalle des sessions du Corps législatif. Nous nous sommes assemblés, et en nous conformant à un article de la Constitution accepté depuis longtemps, nous avons été d'avis d'ajouter à cet article 14 la disposition suivante :
« Sauf les proclamations nécessaires pour ordonner l'observation des lois et en rappeler les détails. »
Cette rédaction présente de l'équivoque et je vous en soumets une autre qui n'aura pas, je crois, le même défaut. (M. Lanjui-nais lit son amendement.)
Plusieurs membres réclament la priorité pour l'article proposé par M. Lanjuinais.
La priorité est accordée et l'article est décrété ainsi qu'il suit :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu son comité de la marine, a décrété et décrète qu'il n'y aura d'autres règlements et d'autres ordonnances sur le fait de la marine que les décrets du Corps législatif sanctionnés par le roi, sauf les proclamations que pourra faire le pouvoir exécutif pour rappeler ou ordonner l'observation des lois et en développer les détails. »
, rapporteur du comité des finances, présente un projet de décret concernant la ville de Cambrai qui est adopté, sans débat, ainsi qu'il suit :
« L'Assemblée nationale, sur le rapport qui lui a été fait par son comité des finances de la délibération des officiers municipaux de Cambrai sous la date du 22 mai, et pièces y jointes, tendant à faire autoriser ladite ville à un emprunt de 200,000 livres, tant pour le remboursement des anciens offices municipaux et achats de blés faits par la ville l'année dernière sous l'autorisation du gouvernement, que pour être employées à procurer des ateliers de cnarité ;
c Considérant que la remise ae l'aide extraordinaire a été accordée aux Etats de Cambrésis pour seize ans, à dater de 1783, pour la confection des canaux de navigation de la province et la jonction de l'Escaut à la Somme, dont la communication avec Paris est établie par le canal Crozat, qui joint la Somme à l'Oise, a décrété et décrète :
« 1° Que la demande en remboursement des anciens offices municipaux de la ville et commune de Cambrai demeure ajournée conformément au décret du 19 janvier dernier.
« 2° Que les Etats de Cambrésis sont autorisés à prêter aux officiers municipaux de Cambrai la somme de 64,558 liv. 18's., pour le sieur Vanler-bergh et compagnie, à prendre ladite somme sur l'excédant de celles qui avaient été accordées par le gouvernement, et qui restent en caisse a la disposition libre des Etats, sans qu'à raison de ce prêt, on puisse toucher en aucune manière aux sommes appartenant au Trésor public, et refuser d'acquitter les trois mois d'impositions de 1789, dont le payement avait été suspendu; sauf, lors du partage des sommes existant dans la caisse des Etats, à être fait raison du plus
ou du moins de ce qui peut en revenir à la ville de Cambrai.
« 3° Que le montant de l'aide extraordinaire pour l'année 1790, sera employé, jusqu'à concurrence de 68,962 livres 10 sols, à l'puverture du canal, le long de l'Escaut, entre Cambrai et Manières, conformément au devis qui sera dressé par le sieur Richard, directeur des travaux des Etats, sous l'inspection du district de Cambrai et du département du Nord.
« Les deniers en seront fournis au fur et à mesure des ouvrages, ou des termes qui seront pris par les adjudicataires, ensuite des enchères faites à la forme ordinaire. »
, député suppléant du bailliage de Dourdan, se présente pour remplacer M. de Gauville, député démissionnaire.
Sur ie rapport du comité de vérification des pouvoirs, portant que les pouvoirs ont été trouvés réguliers, l'Assemblée décrète « que M. l'abbé Bêchant est admis au nombre de ses membres au lieu et place de M. de Gauville ».
M. Bêchant prête le serment civique ordonné par le décret du 4 février dernier et prend place.
Je suis chargé par les comités de féodalité et des domaines de vous présenter un projet de décret additionnel à celui du 3 mai dernier, sanctionné par le roi le 9 du même mois, sur le rachat des droits féodaux.
Ce projet de décret est ainsi conçu :
« L'Assemblée nationale s'étant réservé, par les articles 9, 10 et il de son décret du 3 mai, de statuer ultérieurement sur plusieurs points relatifs au rachat des droits féodaux, dépendant des biens désignés dans lesdits articles, a décrète et décrété ce qui suit :
« Art 1er. Le prix qui proviendra du rachat des droits féodaux
qui auraient été liquidés par les officiers des municipalités, en exécution de l'article 9 du
décret du 3 mai, sera employé à l'acquit des dettes de l'Etat, et à cet effet versé dans la
caisse du district du ressort, et de cette caisse en celle de l'extraordinaire, sauf à être
pourvu, s'il y a lieu, par l'Assemblée nationale, ou par les législatures suivantes, en
faveur des établissements auxquels appartenaient les droits rachetés, à une indemnité
convenable, sur l'avis des assemblées administratives du ressort.
« Art. 2. Il en sera de même du prix qui proviendra du rachat des droits dépendant des biens énoncés en l'article 10 du décret du 3 mai, même quant à ceux desdits biens dont l'administration a été conservée provisoirement à certains établissements par les articles 8 et 9 des décrets des 14 et 20 avril dernier, sauf à être pourvu, s'il y a lieu, ainsi qu'il est dit en l'article précédent, à telle indemnité qu'il appartiendra: en conséquence, les assemblées administratives qui ont été autorisées à liquider les rachats des droits dépendant desdits biens, en feront verser le prix en la caisse de l'extraordinaire.
« Art 3. Sont exceptés de la disposition précédente les rachats des droits dépendant des biens appartenant aux commandeîies, dignités et grands prieurés de l'ordre de Malte, lesquels, jusqu'à ce qu'il en ait été autrement ordonné, pourront être liquidés par les titulaires actuels, a la charge par eux de se conformer aux taux et au mode prescrits par le décret du 3 mai. de faire approuver les liquidations par les assemblées administratives du ressort ou de leurs directoires,
lesquelles feront verser le prix qui en proviendra dans la caisse de l'extraordinaire.
« Art. 4. Quant aux rachats des droits appartenant aux biens ci-devant connus sous le titre de domaines de la couronne, et dont l'administration a été jusqu'ici confiée à la régie desdits biens, soit en totalité, soit pour la perception des droits casuels, la liquidation du rachat aes droits dépendant desdits biens sera faite par les administrateurs de ladite régie, ou par leurs préposés, et ce jusqu'à ce qu'il en aitété autrementordonné; à la cnarge : 1* de se conformer aux taux et au mode prescrits par le décret du 3 mai ; 2° que lesdites liquidations seront vérifiées et approuvées par les directoires des assemblées administratives, dans le ressort desquels seront situés lesdits biens ; 3° que lesdits administrateurs compteront du prix desdits rachats, et le feront verser au fur et à mesure en la caisse de l'extraordinaire.
« Art. 5. La disposition de l'article précédent aura lieu même pour les rachats des droits et redevances fixes et annuelles des biens actuellement possédés à titre d'éngageinent, ou concédés à vie ou à temps, et pour les rachats des droits tant fixes que casuels dépendant des domaines possédés à titre d'échange, mais dont les échanges ne sont pas encore consommés ; sauf à être pourvu, rtl y a lieu, aux indemnités qui pourraient être dues aux engagistes ou échangistes, le tout sans aucune approbation des échanges consommés, et sans préjudice des oppositions qui pourront être formées, au nom de la nation, aux rachats des droits dépendant des biens aliénés à ce titre, et dont le titre aurait été reconnu susceptible de revision, lesquelles oppositions ne pourront être formées que de la manière et en la forme prescrite par les articles 47, 48 et 49 du décret du 3 mai.
« Art. 6. Quant aux rachats des droits dépendant des biens possédés à titre d'apanage, ils pourront, jusqu'à ce qu'il en ait été autrement ordonné, être liquidés par les possesseurs actuels, à la charge que lesdites liquidations seront faites conformément aux taux et au mode prescrits par le décret du 3 mai, et qu'elles seront vérifiées et approuvées par les assemblées administratives dans le ressort desquelles seront situés les biens dont dépendront lesdits droits, et que le prix en sera versé dans la caisse du district, et de cette caisse dans celle de l'extraordinaire, sauf à être pourvu, s'il y a lieu, aux indemnités convenables au profil desdits apanagistes.
« Art. 7. A l'égard des rachats qui seront dus à la nation par les propriétaires des biens mouvants des biens nationaux, même par les apanagistes ou les échangistes dont les échanges ne sont point encore consommés, à raison des rachats par eux reçus pour les droits dépendant de leurs fiefs, la liquidation des sommes par eux dues sera faite provisoirement et jusqu'à ce qu'il en ait été autrement ordonné par les administrateurs de la régie des domaines, sous les conditions qui ont été prescrites auxdits administrateurs par les articles 4 et 5 ci-dessus.
« Art. 8. Les fonctions ci-dessus déléguées aux assemblées administratives seront exercées par la municipalité actuelle de Paris, ou par celle qui sera établie conformément au règlement décrété les 3, 6, 7, 10, 14,15, 19 et 21 mai dernier, jusqu'à ce que l'administration du département de Paris soit en activité. »
Plusieurs membres demandent la parole.
Je demande l'ajournement de l'article 3 concernant le rachat des droits féodaux possédés par l'ordre de Malte, jusqu'à ce que l'Assemblée ait prononcé sur l'existence de cet ordre que je regarde comme incompatible avec la Constitution nouvelle de la France.
On ne peut laisser faire les rachats dans les mains des titulaires ou des administrateurs chargés de les verser dans les caisses publiques.
J'observe qu'on ne peut se dispenser de faire ies rachats entre les mains des administrateurs de Malte ou titulaires de com-menderies, parce qu'ayant les titres féodaux dans les mains, il y aurait des difficultés à faire les rachats au district ; il est donc préférable que ces rachats se fassent dans la main des titulaires qui verseront le produit dans la caisse du district.
Lorsque l'Assemblée connaîtra à fond l'origine de l'ordre de Malte, elle verra qu'elle ne peut pas, sans injustice, le dépouiller de ses biens ; je pense, néanmoins, qu'en attendant la décision, les fonds du rachat peuvent être versés dans la caisse de3 districts et non dans celle des titulaires.
Un membre propose de verser les fonds dans les caisses des commenderies.
Je propose d'ajouter la disposition suivante à la fin de l'article 3 : « Que les « intérêts des sommes provenant des rachats « desdits droits, qui seront déposéesdans la caisse « de l'extraordinaire en vertu du présent décret, « tourneront au profit du titulaire ou adminis-a trateur, au taux ordinaire, à dater du jour du « dépôt. »
Plusieurs membres réclament la clôture de la discussion.
La clôture est prononcée.
Des amendements proposés sont rejetés.
La disposition additionnelle de M. de Folleville est ajournée.
Les articles du décret sont ensuite mis successivement aux voix et adoptés sans changement.
, secrétaire, fait lecture de la liste des décrets suivants, qui ont été sanctionnés par le roi.
Le roi a sanctionné :
« 1° Le décret de l'Assemblée nationale, du 21 juin, relatif aux emplois des bureaux de la ferme, de la régie et de l'administration des douanes ;
« 2° Le décret du même jour, portant que le premier ministre des finances remettra le 15 de ce mois, au plus tard, le compte détaillé des recettes et dépenses du Trésor public depuis le 1« mai 1789;
« 3° Le décret du 23, qui autorise les officiers municipaux de la ville de Cherbourg à lever, pendant une année, 3 deniers par pot de cidre, 6 deniers par pot de vin et 9 deniers par pot d'eau-de-vie qui entreront dans cette ville pour y être consommés ;
« 4° Le décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de Cy vring, district de Lille, département du Nord, à emprunter la somme de 5,000 florins en billets de change à douze usan-ces, à charge et condition expresse d'imposer
chaque année, pendant cinq ans, le cinquième du principal et de l'intérêt ;
« 5° Le décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux du bourg d'Arlay, département du Jura, à imposer la somme de 800 livres sur tous ceux qui payent 4 livres et au-dessus d'impositions principales;
« 6° Le décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de la commune de Fuveau à imposer la somme de 1,200 livres en trois ans sur tous les contribuables qui payent 4 livres et au-dessus de toutes espèces d'impositions ;
« 7° Le décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de Briare à imposer, en supplément de rôles, , la somme de 295 livres 5 sols, à raison d'un sol 6 deniers pour livre des impositions principales ;
« 8° Le décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux d'Angers à faire un emprunt de40,000 livres;
« 9° Le décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux des Sables-d'Olonne département de la Vendée, à imposer la somme de 10,000 livres en cinq ans sur tous ceux qui payent dans leurs rôles au-dessus de 6 livres de toutes impositions directes;
« 10° Le décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de Scey-sur-Saône, et Neuvelle-lès-Scey, à emprunter la somme de 3,000 livres;
« 11° Le décret, du même jour, qui autorise les officiers municipaux de la ville de Saint-Flour à faire un emprunt de 12;000 livres;
« 12° Le décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de la ville de Muret à imposer la somme de 2,000 livres en quatre ans, , à raison de 500 livres par chaque année sur tous . ceux qui payent 6 livres et au-dessus de'"'toutes tailles.
« 13° Le décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de la commune de Baron, département de Senlis, à se faire remettre la somme de 2,000 livres sur celle de 4,430 livres en dépôt dans la caisse des fonds de THôtel-Bieu ;
« 14° Le décret du 24, interprétatif des décrets des 26 février dernier et 6 juin, contenant augmentation de paye en faveur des soldats français;
« 15° Le décret du 25, concernant les officiers municipaux de la ville de Rions ;
« 16° Le décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de la ville de Lyon à faire un emprunt de 2 millions, soit en France, soit à l'étranger ;
« 17° Le décret du même jour, portant que l'élection des juges-consuls se fera provisoirement comme ci-devant ;
« 18° Le décret du 26, relatif aux rôles de supplément sur les ci-devant privilégiés, dans le département de l'Ain, et portant que les fonctions des commissaires départis cesseront au moment où les directoires de département ou de district seront en activité ;
« 19° Le décret du même jour, concernant les francs-marchés de Beauvais ;
« 20° Le décret du même jour, concernant M. de Lautrec;
« 21° Le décret du même jour, portant que la ville de Saint-Florentin demeurera définitivement chef-lieu de son district;
« 22° Le décret du même jour, qui déclare que, pour les élections de cette année seulement, la quittance de contribution patriotique doit tenir lieu d'imposition directe aux maîtres, professeurs et principaux des collèges de Paris ;
23° Le décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de la ville de Fécamp à répartir au marc la livre sur les contribuables qui payent au delà de 3 livres d'imposition, une somme de 3,000 livres sur le rôle de cette année.
« 24° Le décret du 27, concernant les foires franches;
« 25° Le décret du 28, contenant diverses dispositions concernant les membres déjà nommés ou à nommer pour composer les administrations de département et de district;
« 26° Le décret du 29, pour l'admission à la fédération générale d'une députation des officiers militaires et commissaires des classes;
« 27° Et enfin, Sa Majesté a donné des ordres pour l'exécution du décret du 30, pour la communication officielle à l'Assemblée des renseignements reçus de l'île de Tabago.'»
Signé : Champion de Cicé, Archevêque de Bordeaux.
J'ai reçu de M. le ministre de la marine une lettre dont un de MM. les secrétaires va donner lecture.
lit la lettre. La voici (1) : '
« Monsieur le Président,.
« Le roi m'a ordonné de faire connaître à l'Assemblée nationale des désordres nouveaux et d'un genre qui méritent toute son attention*
« Des Français et des étrangers ont exercé récemment sur les côtes de la Méditerranée, plusieurs actes de violence, dont les conséquences peuvent porter préjudice au royaume entier. Non seulement on a, par des voies défait, transgressé les lois maritimes de toutes les nations policées, mais ces transgressions sont de nature à altérer la bonne intelligence qui règne entre la France et d'autre3 puissances.
« Des pêcheurs napolitains s'étaient présentés pour entrer dans le port de Martigues. Tandis qu'ils demandaient admission au bureau de santé, plusieurs marins cie ce lieu qui exercent la même profession, se sont emparés, par force, d'une grande quantité de filets qui étaient à bord de ces bateaux étrangers.
« Les Napolitains spoliés, ont recouru à l'amirauté du lieu pour obtenir la restitution. L'exhortation n'a eu aucun effet sur les détenteurs et leurs menaces ont, à ce qu'il paraît, empêché le-tribunal de suivre l'information qu'il avait commencée.
« L'impunité a eu des suites fâcheuses. Elle a excité le capitaine d'un pingue napolitain qui sortait du même port à user de représailles,ayant trouvé en mer des filets qui appartenaient à un autre pêcheur français, qui n'avait pris aucune part à la faute commise. L'étranger, pour venger sa nation, a enlevé l'unique propriété d'une famille innocente, indigente, qui n'avait que ce moyen de subsister. Le roi vient d'ordonner à l'amirauté de Martigues, de continuer ses poursuites, et a chargé le ministre de la guerre, de lui faire prêter mainforte, si elle le requiert, par les troupes qui se trouvent le plus à portée.
« Les autres événements dont je vais vous faire part, intéressent beaucoup plus encore la
chose publique : ils présentent des violations formelles du traité que nous avons récemment
conclu avec
« Plusieurs corsaires de cette nation qui est en guerre avec la cour des Deux-Siciles et avec la République de Gênes, s'étaient emparés de bâtiments appartenant à ces deux puissances.
« Il paraît que quelques-unes des prises qu'avaient amarinées les Algériens, ont été, par des événements de mer, obligés de relâcher sur nos côtes et que deux y ont été enlevées à main armée aux nouveaux propriétaires, quoiqu'elles fussent mouillées à une distance de notre territoire beaucoup moindre que la portée du canon;
« L'un de ces bâtiments pris antérieurement sur les Génois a été attaqué et repris par un bâtiment de la même nation, près de la rade d'Hyères. Il a été réclamé à la Giotat par le corsaire algérien qui s'en était d'abord emparé. Sa Majesté a chargé son ministre auprès de la République de Gênes, de porter des plaintes de cette voie de fait et de demander la restitution du navire, parce que la régence d'Alger l'exigera de nous indubitablement.
« L'autre prise mouillait à l'entrée de la grande rade de Toulon. Plusieurs navires napolitains qui se trouvaient alors dans le port de cette ville, en ayant été instruits, ont armé 17 chaloupes. Ils ont enlevé à l'abordage la tartane et l'équipage algérien ; quoiqu'il ne paraisse pas que les Barbaresques aient fait une grande résistance, j'ai lieu de croire, par les détails qui m'ont été transmis, qu'un d'eux a été tué ; que deux ou trois autres ont été blessés, et que quelques Français se trouvaient mêlés aux Napolitains qui ont exécuté ce projet illicite.
« Avant de le tenter, ils avaient tâché de s'y faire autoriser par un officier municipal de Toulon, et lui avaient faussement exposé que la prise qu'ils voulaient ramener avait été abandonnée.
« Mais quand bien même cette allégation eût été vraie, les lois du royaume, celles de toutes les nations policées, lois dictées par l'humanité, qui préviennent beaucoup d'actions barbares et qui assurent les droits des vrais propriétaires, défendaient, sous des peines sévères, à qui que ce soit, d'en approcher sans avoir appelé l'amirauté et dans ce cas particulier les précautions ordonnées pour repousser de nous le fléau de la peste, exigeaient de plus l'intervention des intendants de la santé.
. « Le bâtiment repris a été conduit au lazaret de Toulon où il est en quarantaine. Bientôt après le corsaire algérien à qui il appartenait, ayant été informé de ce qui s'était passé, est accouru. Il, s'est élevé contre une violation aussi manifeste du territoire français et a demandé la restitution du navire. Comme on ne le lui a pas rendu sur-ler-champ, il a remisa la voile et est peut-être en ce moment à Alger. On doit craindre qu'il ne nous y accuse d'avoir souffert ou même autorisé une transgression évidente du dernier traité; qu'il n'y exagère peut-être les faits, et ne se plaigne au moins avec raison de ce qu'on n'a pas même poursuivi judiciairement les auteurs de cette violence.
« La régence d'Alger se pique de fidélité à ses promesses, mais elle est prête à prendre les armes dès qu'on manque aux engagements qui
ont été contractés avec elle, et il ne serait pas étonnant que, sans attendre d'autre explication, elle permît à ses corsaires de courir sur nos navires marchands. Les commerçants de Marseille ont senti combien les suites de l'événement que je viens d'exposer pouvaient être funestes pour eux. Ils m'ont aussitôt écrit, et ils demandent avec instance qu'il soit pris des mesures tendant à prévenir une rupture. Je n'ai pas perdu un moment pour le recommmander au consul de la nation française à Alger.
« Le roi, a de plus, ordonné la restitution de la tartane qui, quoique mouillée sur les.côtes de France, y a été enlevée aux Algériens. 11 a en-joiut à l'amirauté de Toulon de remplir ses devoirs et d'informer d'une agression si contraire aux lois du royaume, aux droits de toutes les nations et aux traités qui nous lient avec elles.
« Si, dans plusieurs lieux, on a cru pouvoir impunément violer les règlements les plus sages dont dépendent la prospérité et la sûreté publiques ; peut-être par cette raison même l'Assemblée nationale jugera-t-elle qu'il est utile qu'elle concourre à les faire respecter et qu'elle témoigne son improbation de ce qui vient de se passer. Il serait surtout important de faire sentir que, dans quelque cas que ce soit, les tribunaux doivent informer sans délai des contraventions aux lois maritimes ; lois dont l'inobservation compromet l'honneur de l'Etat et excite les justes réclamations des puissances étrangères.
« J'ai cru devoir soumettre ces considérations à la sagesse de l'Assemblée nationale et je lui transmettrai, si elle le désire, la copie des lettres qui m'ont été écrites sur ces faits.
« Je suis avec respect,
« Monsieur le Président,
« Votre très humble et très obéissant serviteur. »
La Luzerne.
« P-S. Ne voulant rient omettre, j'ajouterai, Monsieur, quelques mots sur une autre voie de fait qui n'a pas eu des suites aussi fâcheuses. Un bâtiment algérien mouillait à Aigues-Mortes, une partie du peuple a voulu l'attaquer et il eût été difficile de la contenir. Heureusement il n'avait point d'armes ; quelques pierres jetées dont un ou deux Barbaresques ont été atteints pendant que ce navire sortait du port, sont, a ce qu'on m'a assuré, le seul acte de violence qui ait été exercé en cette occasion. »
La Luzerne.
Je demande le renvoi au comité du commerce et de la marine.
le jeune. Cette affaire étant de la dernière importance, je demande que le comité qui en sera chargé, en fasse le rapport à la séance de ce soir, ou de demain naatin.
(L'Assemblée décide que cette affaire sera renvoyée au comité de commerce et de marine qui en fera le rapport à la séance de demain.)
M. de Batz a la parole pour faire un rapport sur la limite des fonctions et des attributions du comité de liquidation.
(ci-devant le baron). Messieurs, je viens, au nom du comité de liquidation, présenter à l'Assemblée un rapport sur la limite des fonctions et des attributions que vous avez données à votre comité de liquidation; mais, avant de le commencer, je dois faire entendre quelques
explications qui me sont particulières et qui ne peuvent concerner le comité. Hy a quelques jours qu'il fut dit que la dette publique s'élevait à 7 milliards et que j'avais avàncé cette opinion à quelqu'un de mes collègues.
«J'obserVe que le comité de liquidation est, par son institution, étranger aux calculs qui peuvent concerner la consistance de la dette publique.
« Il ne s'occupe que de la dette arriérée et non liquidée des départements. Il ne s'agit donc que de mon opinion personnelle et non de celle du comité. On prétend (1) que j'ai avancé que l'aperçu des affaires publiques portait la dette à 7 milliards.
« Je dis seulement qu'il est impossible que tous les engagements et toutes les charges fussent acquittées sans une somme de plusieurs milliards. Mais la nation a acquis des capitaux immenses et cette dette n'est pas effrayante. Avant la convocation des Etats généraux, l'opinion la plus générale était qu'elle s'élevait à environ cinq milliards ; les travaux déjà faits donnent un aperçu de quatre milliards quelques cents millions. Le capital représenté par les cent millions pour les frais du culte va à deux milliards ; ensuite viennent les indemnités pour les dîmes inféodées et autres charges ; mais ce qui est charge n'est pas dette. D'ailleurs, une grande partie de la dette sera éteinte, pour la nation, par la vente des biens nationaux. Au surplus, je n'en connais pas l'état bien exactement.
Quelques voix : C'est assez, faites votre rapport.
Mes explications personnelles sont terminées. Voici le rapport du comité de liquidation (2).
Messieurs, par le décret du 22 janvier dernier, sanctionné par le roi, vous avez voulu que toutes les créances arriérées des départements, fussent liquidées par un comité créé à cet effet. Voici, Messieurs, les expressions des articles 5 et 6 du décret que vous avez rendu.
Il sera sursis au payement des créances arriérées, jusqu'à ce qu'elles soient liquidées, et, pour procéder à cette liquidation, il sera nommé un comité.
Avant rétablissement de ce comité, les vérifications, appurements et liquidations des comptes se faisaient principalement au conseil, ou dans diverses commissions qui en dépendaient. Quel changement était apporté dans cette marche ordinaire du conseil? Ce fut la première incertitude du comité ; ce fut aussi celle des ministres du roi.
Sur ce premier point, l'Assemblée nationale jugea provisoirement, en quelque sorte, que le conseil devait continuer les vérifications et appurements, mais seulement des comptes dont il était saisi, sauf la révision que l'Assemblée nationale se réserva. Voici les termes de cette décision :
L'Assemblée nationale a jugé que, conformément à son décret du 20 octobre dernier, le
conseil du roi devait continuer les apurements des comptes dont il est saisi, et que, si,
après l'apurement d'un compte ou d'une indemnité, elle les revoyait elle-même, et y trouvait
quelques méprises, elle
Cette décision, Messieurs, n'est pas la sèule nécessaire au comité, pour qu'il puisse marcher sans embarras vers le but ae son institution; mais si la nature, les formes et les limites des fonctions du comité de liquidation ont donné lieu à quelques diversités d'opinion, sur l'interprétation du décret qu'on vient de citer, cette incertitude a dû naître du plus juste respect pour les volontés de l'Assemblée nationale; elles doivent être les seules lois de ses comités. Ainsi, Messieurs, c'est pour connaître distinctement ses devoirs, que le comité de liquidation vient vous soumettre ses observations sur la plus utile direction à donner à un comité, dont l'activité, devenue indispensable, pourra porter de grandes lumières sur l'administration et l'état des finances.
Le comité, Messieurs, croit d'autant plus inutile d'entrer dans tous les détails qu'il a discutés, que presque toutes les incertitudes ont cessé dès 1 instant où le comité a reconnu et saisi le principe nécessaire et constitutionnel sur le fait des liquidations. Or, ce principe se présente naturellement.
Qu'entend-on par liquidation des comptes?
C'est le jugement souverain par lequel la quotité et la légitimité d'une créance sont définitivement fixées et reconnues.
Sous le régime précédent, le roi, exerçant seul la représentation et la souveraineté de la nation, ordonnait dans son conseil toutes les dépenses publiques. Il y faisait vérifier ensuite et ces dépenses, et l'emploi des fonds qui y avaient élé appliqués. Toutesautres vérifications des comptes, faites hors du conseil n'étaient que préparatoires ou relatives à des formes : les liquidations et les indemnités n'étaient prononcées que par le roi, comme unique représentant de la nation.
Mais puisque la liquidation d'une portion quelconque de l'arriéré renferme l'engagement de la payer, et que cette liquidation crée une obligation publique, un mandat sur l'impôt et sur la nation, ses représentants ont seuls, sans contredit, le droit de prononcer et de consentir cette obligation, comme avant de la consentir, leur devoir est, d'en vérifier et d'en reconnaître la ligitimité. L'établissement d'un comité, pour préparer cette vérification nationale, était donc la première conséquence du principe constitutionnel. D'autres conséquences du même principe vont déterminer ses attributions.
La très grande partie de la dette publique est absolument étrangère au comité de liquidation, par exemple, les rentes, soit perpétuelles, soit viagères, sur l'Hôtel de Ville de Paris, tous les emprunts revêtus des formes authentiques, légales, telles que l'enregistrement des cours, même les emprunts faits par la médiation des ci-devant Etats des différentes provinces* et généralement tous les emprunts dont les formes solennelles ont enchaîné la foi publique.
Tous ces objets n'ont rien de commun avec le comité de liquidation ; ses fonctions ne s'étendent qu'à l'examen des parties arriérées de la dette, qui restent à acquiter, soit que le payement en ait été suspendu, soit que les titres n'en aient pas encore été vérifiés et jugés, soit enfin que les jugements qui les consacrent n'aient pas encore reçu leur exécution.
Ces bases posées, il ne reste qu'à déterminer la position respective du comité de liquidation et des tribunaux où se vérifient les comptes publics.
Lors de la décision du 15 février dernier, portant que le conseil du roi devait continuer la vérification et l'apurement des comptes dont il était saisi, l'Assemblée nationale avait sans doute pensé que les dépenses ordonnées en présence ae ce tribunal, devaient ensuite et nécessairement y être vérifiées et apurées ; mais, en décrétant aujourd'hui que cette vérification du conseil ne sera que préparatoire, et que nulle créance arriérée ne sera désormais admise sur le tableau de la dette publique, qu'après avoir subi l'examen du comité de liquidation, le jugement de l'Assemblée nationale, et reçu la sanction du roi, l'Assemblée va consacrer fa seule forme constitutionnelle d'un jugement souverain en matière de comptabilité.
Telle doit donc être aujourd'hui, Messieurs, la position respective du conseil el dH comité de liquidation ; que le conseil ne doit point interrompre sa marche ordinaire sur le fait de la vérification des comptes arriérés dans les départements, mais que leur liquidation ne pourra résulter que de l'examen du comité, du jugement de l'Assemblée nationale et de la sanction du roi.
Des conséquences de même nature conduisent à penser que les fonctions de la chambre des comptes doivent subsister jusqu'à ce que l'Assemblée nationale ait changé les formes actuelles de cette cour, ou les ait attribuées à un autre tribunal. Ainsi, sans rien préjuger sur l'existence future de la chambre des comptes, le comité de liquidation ne pourra présenter à l'Assemblée nationale, comme admissibles au rang des créances de l'Etat, aucuns titres dont la légitimité, ci-devant résultant des jugements de la chambre des comptes, n'aurait point subi cette forme, à moins cependant d'une dérogation particulière de la part de l'Assemblée nationale. En un mot, le comité pense que son établissement ne doit, quant à présent, introduire nul changement dans la marche d'aucun tribunal, ni d'aucun des commissaires chargés de la vérification des comptes publics ; mais l'Assemblée nationale qui veut et doit tout revoir, et tout vérifier, a conféré à son comité de liquidation l'examen de la seule portion de comptabilité qui forme l'arriéré actuel des départements, mais seulement après les apurements ordinaires, se réservant, sur les divers rapports de ce comité, de prononcer ainsi qu'elle le jugera convenable. Sans doute, il n'est pas nécessaire d'expliquer que le comité n'est point un tribunal, et qu'il ne peut juger aucune cause. Personne n'ignore que l'Assemblée nationale prononce seule ses jugements, et {que ses comités ne lui fournissent que des vérificateurs et des rapporteurs.
Enfin, Messieurs, après avoir recherché ses fonctions dans les conséquences de vos principes, le comité n'a pas cru ses devoirs remplis ; il a jugé nécessaire d'appeler vos regards sur les résultats de son activité.
Premièrement, l'Assemblée nationale a certainement le dessein de «connaître et de juger sans retour tout l'arriéré des départements. Ce fut la tâche que s'imposèrent Sully et Colbert, quand ils eurent à rétablir l'ordre dans les finances. Avec eux, l'Assemblée nationale voudra penser sans doute que rien d'obscur, rien de litigieux, rien d'indéterminé ne doit subsister dans la compta- I bilité. Les traces des faits et les moyens de vérification s'effacent et disparaissent si rapidement, que, sous cet aspect, l'arriéré négligé est le signe certain du désordre, et le plus fort indice d'une mauvaise administration.
A l'avantage de connaître en très peu de temps l'arriéré des départements va se joindre celui ae le juger enfin d'une manière régulière et irrévocable. Sous le régime précédent, il faut en convenir, les liquidations de toute espèce étaient purement arbitraires. Un léger aperçu sur cet objet justifiera suffisamment aux yeux de l'Assemblée nationale, la sagesse des mesures qu'elle a déjà prises, et dont l'exécution sera assurée par le décret que le comité m'a chargé de lui soumettre.
Voici d'abord, Messieurs, comment les fonds et les dépenses s'ordonnaient dans les départements.
Chaque administrateur, jusqu'à présent, faisait au conseil du roi le rapport d'un travail de ses bureaux, contenant une approximation des dépenses de sou département pour le cours de l'année. Sur ce projet, on arrêtait au conseil la distribution des fond3 applicables à ce premier aperçu des dépenses. C'est ce qu'on nomme l'ordinaire du département. Quant à l'extraordinaire ce sont des suppléments accidentels qui s'obtenaient sur la demande des divers ministres.
Voici maintenant comment se vérifient et se liquident ces dépenses.
La vérification et l'apurement des comptes se font d'abord devant de simples mandataires de l'administration et devant des commissions du conseil. Mais les dernières vérifications se font dans les seuls bureaux des ministres ainsi que les liquidations, car on sait qu'ordinairement le rapport de chaque ministre au conseil fait l'arrêt.
Qu'est-ce ensuite que la révision de la chambre des comptes? C'est une opération faite avec intégrité et sagacité sans doute, la seule même qui ait une forme légale, mais au fond elle est presque illusoire, puisque ce tribunal ne juge que des formes. La vérification des acquits de comptant en particulier, ainsi que de toute dépense déjà reconnue au conseil lui est expressément interdite. Cette première barrière est celle qui protégeait l'irresponsabilité du dernier régime, s'il est permis d'en exprimer ainsi l'étrange commodité ; et voici l'une de celles qui en protégeait l'arbitraire, contre toute réclamation des lois. Il est formellement défendu à la chambre des comptes d'écouter aucune réclamation ou de faire dans les comptes, même dans ceux qui lui sont adressés par arrêt du conseil, la vérification d'aucun article qui pût rendre le roi débiteur.
Voilà, Messieurs, comment les administrateurs de la fortune publique ont toujours été leurs propres vérificateurs, et comment, sous eux, des préposés subalternes et sans caractère public ont distribué les produits de l'impôt, réglé et liquidé à leur gré les dépenses de l'Etat. Quels que soient les principes que l'on puisse adopter, il est certain qu'il ne peut exister deux opinions sur les vices d'une administration sans autres règles que sa volonté, sans autres limites que l'impossible, et législatrice souveraine, sans reconnaître ni ses propres lois, ni presque aucune jurisprudence. Aussi, Messieurs, le cri de la France entière, s'est-il élevé contre ce désordre, dès l'instant de la convocation, c'est-à-dire du premier moment où les Français ont pu faire entendre des réclamations, publiques. Vues de plus près, les formes vicieuses, arbitraires et si réprouvées du régime actuel, n'ont pu que vous exciter davantage, Messieurs, à suspendre ce mauvais régime et à tout revoir par vous-mêmes, en attendant qu'uu plan général sur les finances restitue solennellement à la nation et aux Jois leurs droits sur la fortune de l'Etat.
Encore un mot, Messieurs, si c'est pour connaître de véritables abus et les proscrire ; si c'est pour connaître et fixer promptement les règles de la responsabilité et les bons principes de l'administration des finances ; si c'est enfin pour connaître positivement et juger constitu-tionnellement, cette portion de la dette générale, nommée dette arriérée des départements que vous avez institué votre comité de liquidation, c'est aussi pour préparer la réalisation d'aussi sages vues, que votre comité de liquidation, Messieurs, a médité le projet de décret que je vais avoir l'honneur de vous soumettre.
projet de décret.
L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de liquidation, sur la nécessité de fixer d'une manière précise les pouvoirs de ce comité, et de déterminer les fonctions qui lui sont attribuées, a décrété ce qui suit :
Art. 1er. L'Assemblée nationale décrète comme principe
constitutionnel, que nulle créance arriérée ne peut être admise parmi les dettes de l'Etat,
qu'en vertu d'un décret de l'Assemblée nationale, sanctionné par le roi.
Art. 2. En exécution du décret sanctionné, du 22 janvier, et de la décision du 15 février derniers, aucunes créances arriérées ne seront présentées à l'Assemblée nationale, pour être liquidées, qu'après avoir, été soumises à l'examen du comité de liquidation ; mais néanmoins les vérifications et apurements des comptes continue-ront à s'effectuer comme ci-devant, suivant les formes ordinaires, et devant les tribunaux à ce compétents; l'Assemblée nationale.n'entend, quant à présent, rien innover à ce sujet.
Art. 3. Le garde des sceaux sera tenu de donner au comité de liquidation connaissance et état exact de toutes les instances actuelles, concernant la vérification, apurement et liquidation des créances sur le Trésor public, à quelque titre que ce puisse être.
Art. 4. La chambre des comptes fera pareillement remettre audit comité un tableau de toutes les parties de comptabilité, dont la vérification et apurement sont actuellement à l'examen de ce tribunal.
Art. 5. Tous administrateurs, ordonnateurs, magistrats et autres personnes publiques seront tenus de fournir les documents et instructions qui leur seront demandés par le comité.
Art. 6. Tous les créanciers qui prétendent être employés dans l'état de la dette arriérée seront tenus de présenter leurs titres dans le délai de deux mois.
Tous ceux qui, dans ce délai, n'auraient pas justifié au comité de liquidation, soit de leurs titres dûment vérifiés, soit de l'action qu'ils auraient dirigée devant les tribunaux qui en doivent connaître, pour en obtenir la vérification, seront déchus de plein droit de leurs répétitions sur le Trésor public.
Art. 7. Relativement à la comptabilité ordinaire des dépenses de l'Etat, ainsi que pour les indemnités et autres réclamations, le comité n'admettra, comme titres justificatifs de créance sur le Trésor public, que ceux qui auront été vérifiés et jugés, soit par le conseil, soit par la chambre des comptes, soit par les tribunaux à ce compétents, suivant les lois, ordonnances et règlements rendus et observés en cette matière.
Art. 8. Le comité de liquidation présentera à
l'Assemblée nationale ses observations sur la nature de toutes les créances arriérées sur lesquelles l'Assemblée nationale aura à prononcer. 11 vérifiera particulièrement si les créances arriérées, comprises dans les états certifiés véritables qui doivent lui être remis, en exécution de l'article 7 du décret du 22 janvier dernier, ont été dûment vérifiées; ou jugées et apurées, dans les formes prescrites par les règlements et ordonnances.
Art. 9. Il sera tenu registre de toutes les décisions qui auront été portées sur l'admission, rejet ou réduction des diverses portions de la dette arriérée, afin que, dans aucun temps, et sous aucun prétexte, les porteurs de titres rejetés ou réduits ne puissent renouveler leurs prétentions.
Art. 10. Conformément k l'article 9 du décret du 9 janvier dernier, les délibérations du comité sur l'admission, rejet ou réduction des diverses parties de la dette arriérée, ne seront que provisoires; aucune portion de créance, présentée au comité de liquidation, ne pouvant être placée sur le tableau de la dette liquidée, qu'après avoir été soumise au jugement de l'Assemblée nationale et à la sanction du roi.
Plusieurs membres demandent que le rapport, à cause de son importance, soit imprimé et envoyé au domicile de tous les députés.
Cette motion est adoptée.
L'ordre du jour ramène la discussion sur les dépenses de toutes les parties de la dette publique et en particulier sur le régime de la loterie et les différents traitements à accorder à ses agents.
, rapporteur. La loterie royale a cinq administrateurs et un receveur général, qui ont fait 3 millions deux cent mille livres de fonds d'avances.
Des receveurs particuliers ont donné 7,400,000 livres de cautionnement ;{ces deux sommes portent intérêt à 5 pour cent.
Les cinq administrateurs ont 20,000 livres chacun, ci........ 100.000 liv.
Le receveur général........... 20.000
Il a été accordé des remises à raison du produit; on lésa divisées en quatorze parties ; chaque régisseur un quatorzième, le receveur général trois quatorzièmes; autrefois deux adjoints, deux quatorzièmes chacun ; M. Arlincourt, adjoint honoraire.
Chacun de ces quatorzièmes produit, année commune, 5,000 1.
Quatre quatorzièmes appartiennent au Trésor royal, par la suppression des adjoints : reste ci.... 50.000
Bureaux du receveur général.... 12.000
Remise d'un denier pour livre accordé à cinq directeurs généraux à Paris, et quatre en province, évaluée dans l'état imprimé à.............................24.000
Appointements des employés à Paris, Lyon, Bordeaux, Lille, Strasbourg........................ 366.602
Gratifications aux employés de Paris.......................... 48.000
Chambre apostolique d'Avignon pour permettre la circulation des
A reporter. .... 620.602
Report. . . . .620.602
billets de loterie................3.000
Commis de la poste...........1.500
Religieux de la Charité, Gazette
d'Avignon.....................132
Imprimerie, soit à Paris, soit
dans les provinces..............191.156
Les postes formant une dépense
de.............................750.000
Messageries..................20.000
Courriers extraordinaires......6.000
Papiers, registres, bois, lumières, frais de tirage, entretien de l'hôtel et bureaux, étrennes..150.000
Mille livres par tirage aux annexes, destinées autrefois pour marier des filles de province....24.000
Total......... 1766.390 liv.
L'article des postes a commencé par 20,000 liv., il était abonné à 50,000 livres. Eu 1787, l'abonnement fut cassé, et il en a résulté cette dépense énorme de 750,000 livres.
Les postes, mises en régie, permettront une amélioration dans cette partie sur laquelle le comité ne peut prendre ni proposer aucun parti, que l'Assemblée n'ait prononcé sur les postes.
Messageries, courriers extraordinaires....................... 26.000 liv.
Papiers, registres, etc. Cette fixation est un peu vague; la dépense n'est ordinairement que de 70.000
Bois, lumières................ 10.000
Frais de tirage, etc ........... 10.000
Entretien de l'hôtel et des bureaux....................,.... 8.000
Les 24,000 livres destinées aux mariages des filles de province ont été appliquées à la Société maternelle. La première destination serait peut-être rétablie d'une manière avantageuse, si on partageait cette somme entre les 83 départements, qui la distribueraient en dot aux filles les plus vertueuses. 24.000
Réduction en supposant les frais de poste à 750,000 livres......... 203.102
Avant que de prendre un parti sur la loterie royale, l'Assemblée portera ses regards sur le reste de l'Europe; il n'est plus guère possible à un peuple d'avoir sa morale à part, à moins qu'il ne s'isole par des barrières et des déserts. Les loteries étrangères ont leurs bureaux en France, et il y a une sorte de préférence pour elles. Sous le ministère de M. de Calonne, on crut qu'il fallait établir à la loterie royale une loterie clandestine, pour déjouér les doubleurs de chance français et les loteries étrangères. Au cinquième mois, les mises montaient à 500,000 livres et il y avait 300,000 livres placées sur des loteries étrangères;; ce bureau n'existe plus.
La morale de tous les temps a proscrit les loteries et votre comité n'entreprendra pas de les défendre.
Mais elles sont devenues la maladie générale de l'Europe.
Malgré nous,elles existeraient aujourd'hui parmi nous au profit de nos voisins ou de citoyens avides, si elles n'existaient pas au profit de la chose publique.
Dans des temps plus heureux, quand l'administration aura repris plus de force et d'énergie,
peut-être il sera possible de se défendre de l'invasion des loteries étrangères et d'imposer à la cupidité du citoyen: alors, si cette ressource n'est plus nécessaire à nos besoins, il sera permis de frapper sur la loterie royale.
Mais aujourd'hui votre comité ne doit voir que les économies dont son administration est susceptible.
Sa dépense actuelle s'élève à 1,766,390 livres. :Cinq régisseurs seraient trop dans d'autres temps.
Mais ces cinq régisseurs ont fourni chacun 500,000 livres de cautionnement.
Ils les ont fournies dans les circonstances les plus difficiles et quelques-uns, dans ces derniers moments, ont été réduits à payer un intérêt de huit à neuf pour cent, afin de conserver des fonds qu'il ne leur était pas possible de rendre.
Vous ne pouvez pas supprimer un régisseur sans le rembourser ou sans rompre ses engagements.
Vous ne pouvez pas rembourser.
Vous ne pouvez pas rompre ces engagements particuliers.
Vous ne pouvez pas faire que celui qui a prêté à un particulier ait prêté à l'Etat.
Votre comité du moins ne le pense pas. Dans cette circonstance, il ne peut ni ne doit vous proposer que des réductions légitimes. Il croit que le traitement des régisseurs doit être fixé à 12,000 livres au lieu de 20,000 livres, mais qu'on doit leur laisser des remises sur le produit.
Ces remises, dans l'état actuel, n'excéderont pas trois mille livres pour chacun d'eux.
L'adjoint honoraire est inutile. Le receveur général doit être supprimé aussi.
Le bureau du trésorier sera supprimé et le travail en sera réuni au bureau de comptabilité. Il serait imprudent d'ôter les remises aux directeurs des provinces, dont il est nécessaire d'exciter le zèle et l'activité. .
Les employés dans les bureaux de Paris et des provinces peuvent éprouver une réduction.
L'article suivant est mis à la discussion.
« Art. 1er. Le traitement des administrateurs delà loterie
royale sera réduit à 12.000 livres. Ils continueront à jouir des remisés qui leur étaient
accordées. »
Je demande à M. le rapporteur si c'est provisoirement qu'il nous propose ce traitement, ou bien si nous ne contracterions pas, par ce projet de décret, l'engagement de conserver les loteries ?
répond affirmativement.
Il y a uhe question préliminaire à examiner. Combien conserverez-vous d'administrateurs ? n'y en avait-il pas trop dans l'ancienne régie? Quant au traitement, il est nécessaire de le réduire. Si l'Assemblée se détermine, ce que je ne crois pas, à donner 12,000 livres, pourquoi y ajouter encore deà remises? Je demande, au moins, que cet excédant soit retranché.
J'ai donné le motif de la conservation actuelle de cinq administrateurs. J'observerai, au sujet de la réduction de traitement proposée, que les remises ne sont que d'un quatorzième pour cent.1
(L'Assemblée ajourne la réduction du nombre des administrateurs.)
Je demande que l'ar-
ticle 6 concernant les gratifications et appointements des employés soit ajourné et je propose un article dans ce but.
(de Nemours). La société de la charité maternelle, dont M. Lebrun vous a parlé dans son rapport, s'est formée pour donner des secours aux mères et les empêcher de mettre leurs enfants aux Enfants-Trouvés. Sur dix de ces enfants, il en mourait neuf dans cette maison : nourris par les mères, il n'en meurt que deux sur dix ; cette institution touchante aidait à remplir un des premiers devoirs de la nature ; elle ménageait à l'Etat un grand nombre de citoyens. Cette société est formée de dames et d'un petit nombre de souscripteurs: le gouvernement a protégé cet établissement et lui a donné annuellement une somme de 24,000 livres, sur les annexes de la loterie. Les compagnies de finance n'ont pu renouveler leurs soumissions ; la société de charité maternelle a perdu une partie de ses souscripteurs, et s'est trouvée forcée de diminuer de moitié le nombre des mères qu'elle secourait ; elle mérite ta plus grande considération et toute votre estime. (L'Assemblée, par des applaudissements, s'unit aux sentiments qu'exprime l'orateur.) Je propose ie projet de décret dont voici les termes:
« L'Assemblée nationale décrète qu'elle conserve provisoirement, et pour la présente année, à la société de la charité maternelle, ies secours que lui donne le gouvernement, et charge le comité de mendicité de rendre compte incessamment à l'Assemblée de ce qui concerne ces établissements. •
met successivement aux voix les propositions qui viennent d'être faites.
Tous les articles, purgés de leurs amendements par adoption ou par rejet, sont décrétés ainsi qu'il suit :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des finances sur la loterie royale, a décrété et décrète ce qui suit :
« Art, 1er. A compter du premier juillet présent mois, le
traitement des administrateurs de la loterie royale demeurera fixé à 9,000 livres.
« Ils continueront à jouir des remises qui leur étaient allouées sur le produit.
« Art. 2. Le régisseur honoraire sera supprimé.
« Art. 3. Le receveur général sera également supprimé ; il sera remplacé par un caissier aux appointements de 8,000 livres, qui fournira un cautionnement de 200,000 livres en immeubles.
« Art. 4. Le bureau du receveur général sera supprimé, et son travail réuni au bureau de comptabilité.
« Art. 5. Le ministre des finances prendra les mesures nécessaires pour assurer la surveillance de la caisse et l'exactitude des recouvrements.
« Art. 6. L'Assemblée ordonne que l'état des appointements et gratifications des divers employés, soit de Paris, soit des directoires secondaires, sera imprimé et distribué à chacun de ses membres, et renvoie à statuer sur les réductions dont lesdits appointements et gratifications sont susceptibles, jusqu'après l'impression et la distribution de l'état qui en sera dressé.
« Art. 7. L Assemblée conserve provisoirement, et pour la présente année, à la société de la charité maternelle, les 1,000 livres qui lui étaient données par chaque tirage, et charge son comité de mendicité de lui rendre compte de cet établissement.
L'Assemblée va se retirer dans ses bureaux pour procéder à la nomination de son président et de trois secrétaires. La séance est levée à deux heures et demie.
Séance du
, ex-président, ouvre la séance à six heures du soir, en l'absence de M. Le Pelletier, président.
, secrétaire, fait lecture de l'extrait des adresses dont la teneur suit :
Adresse de la commune de Rosny-sur-Seine ; indépendamment de sa contribution patriotique, montant à la somme de 2,586 liv. 10 s. elle fait don du produit des impositions sur les ci-devant privilégiés, se portant à 3,269 livres;
De la commune et de la garde nationale de la ville de Millau en Rouergue, de la nouvelle municipalité de la communauté de Granace en Corse;
Des maîtres cordonniers de la ville de Grenoble, qui expriment leur indignation contre la délibération des citoyens catholiques de Nîmes, qu'ils leur ont envoyée par la poste;
De la commune de Serre, département du Doubs, qui se soumet d'acquérir des biens nationaux pour la somme de 30,000 livres, de celle de Frasooy, même paroisse, qui fait une soumission de 18,000 livres.
De la municipalité de Lavaudieu, qui fait une soumission de 48,000 livres et de celle de la ville de Blesle, qui offre d'acquérir tous les biens nationaux situés dans son territoire, et sollicite l'établissement d'un marché de grains ;
De la ville d'Aix, qui annonce que sa contribution patriotique se porte à la somme de 702,000 livres ;
Des administrateurs du département de la Côte-d'Or, qui' félicitent particulièrement l'Assemblée sur le décret qui abolit la noblesse héréditaire;
De l'assemblée électorale du Calvados, qui annonce que le régiment du commissaire général cavalerie, en garnison à Falaise, a député vers elle pour lui exprimer son adhésion à tous les décrets de l'Assemblée nationale ;
Des curés et vicaires des cantons de Barbonne, de Bourg et du Baurget, de l'archiprêtré de la Porcherie du district de Boussac, des électeurs ecclésiastiques du district d'Issoudun, et des ci-devant chanoines réguliers trinitaires de la maison de Cerfroid, qui, tous, manifestent l'adhésion la plus entière aux décrets de l'Assemblée nationale et désapprouvent la déclaration d'une partie de l'Assemblée ;
Les ci-devant trinitaires de la maison de Cerfroid annoncent qu'à l'époque du 19 du mois dernier, ils ont fait disparaître de leur temple des marbres et armoiries qu'un despotisme aveugle et présomptueux y avait fait placer;
De la ville de Philippeville, département des
De l'assemblée générale des citoyens actifs de la ville d'Orange, qui expriment 1 indignation la plus vive contre la déclaration de la minorité de l'Assemblée;
Des citoyens-soldats, et des soldats-citoyens du département de la Loire-inférieure, qui,* réunis dans la ville de Nantes, ont proféré le serment solennel d'une union indissoluble, et de maintenir de tout leur pouvoir la Constitution. « Fidèles « à vos lois, disent-ils, nous les ferons respecter ; c et pleins d'amour pour le meilleur des rois, et de respect pour ses vertus, nous ne cesserons « de faire des vœux pour sa gloire. »
Procès-verbal de la prestation du serment civique de la garde nationale de Romans et des chasseurs royaux de Dauphiné, en garnison dans cette ville.
Adresse des assemblées primaires des cantons de Daumazan,département de l'Ariège, de la ville de Bourg et du Bourget, département de la Gironde ;
Des assemblées électorales du district de Vitré, du district de Fresnay, du district de la Ferté-Bernard, du district a'Issoudun, des administrateurs du district de Machecoul et des électeurs du département de l'Hérault ;
Toutes ces assemblées présentent à l'Assemblée nationale l'hommage d'une adhésion absolue à ses décrets, et d'un dévouement sans bornes pour en procurer ou maintenir l'exécution.
Les électeurs du district de la Ferté-Bernard demandent qu'il ne soit point nommé de trésorier dans son sein, et de verser directement ses fonds dans la caisse nationale.
Les électeurs du département de l'Hérault se réunissent aux assemblées primaires du canton et au conseil général de la commune de Montpellier, pour demander la démolition de la citadelle de cette ville.
Adresse des gardes nationales du département des Landes, confédérées à Mont-de-Marsan, dans laquelle elles expriment à l'Assemblée nationale leur profonde reconnaissance et leur inviolable respect pour la loi et le roi, leur adhésion à tous les décrets de l'Assemblée sanctionnés par le roi, et la ferme résolution de défendre, jusqu'au dernier soupir, la Constitution.
A la suite de cette adresse, elles manifestent le regret qu'éprouvent les soldats citoyens du district de Mont-de-Marsan, de Saint-Sever, Tartas et Dax, de n'avoir pu embrasser leurs frères d'armes des villes de Saint-Sever et de Dax, qui ont cru devoir résister aux pressantes invitations des citoyens de Mont-de-Marsan ; elles se jurent une amitié réciproque et inaltérable, et des secours mutuels dans tous les cas où la liberté commune serait menacée.
Adresse de la communauté de Garouge, qui fait un don patriotique de l'imposition des ci-devant privilégiés, qui se monte à deux mille quatre cents livres, non compris sa contribution patriotique, qui se monte à plus de 6,000 livres, jusqu'à ce moment, plusieurs particuliers qui ont fait leur soumission n'ayant pas encore désigné le montant de leur soumission pour laquelle ils demandènt un délai.
Procès-verbal de la municipalité de Haguenau, du 10 mai 1790, portant qu'il n'est pas possible que les imprimés qui lui ont été adressés, datés de Nîmes, viennent de cette ville ; qu'elle ne croit pas qu'il existe des Français capables de se laisser aller à cet excès de folie ; qu elle ne peut
l'attribuer qu'à ses anciens oppresseurs qui ne cessent de répandre des écrits et des imprimés tendant à soulever le peuple contre les décrets de l'Assemblée nationale ; qui ne négligent aucun moyen de séduction pour gagner les faibles, ni d'oppression et de persécution pour décourager les amis de la liberté.
Cette municipalité conjure les habitants de rejeter les pièges qui lui sont tendus ; de n'avoir devant les yeux que les décrets de l'Assemblée nationale, qui n'ont pour objet que leur bonheur, et de renouveler avec elle le serment d'être fidèles à la nation, à la loi et au roi, et de défendre, jusqu'à la dernière goutte de leur sang, la sainte Constitution qui assure notre bonheur.
Soumission de la municipalité de Haguenau, de livrer incessamment 32,737 liv. 18 s. à laquelle somme se montent les dons patriotiques de cette ville.
Adresse d'adhésion de la commune d'Yvren-cheux, contenant l'expression énergique du dévouement de ses citoyens à la Constitution, à la liberté et à la patrie, et l'offre de ce qui doit lui revenir du montant des rôles de supplément des ci-devant privilégiés pour les six derniers mois de 1789.
Adresse de la commune de la ville de Château-Gontier, département de la Mayenne, qui présente h l'auguste Assemblée nationale l'adhésion laplus respectueuse et la plus sincère à tous ses décrets, son zèle pour le maintien de la Constitution, et se plaint que ses décrets ne lui parviennent que deux et trois mois après leur sanction, et elle prie l'auguste Assemblée de lui permettre de déposer sur l'autel de la patrie le montant de la contribution des privilégies des six derniers mois de 1789.
Elle demande à faire sa soumission d'un million pour l'acquisition des biens nationaux situés dans son district, et annonce que sa contribution patriotique monte à près de 60,000 livres et que le serment civique a été prêté par les citoyens de tous les ordres.
Adresse d'adhésion, de dévouement à la Constitution et à ia liberté, présentée par le canton de Rignac.
Adresse de la garde nationale de Landerneau en Bretagne, qui dépose dans le sanctuaire de ia liberté le serment que leurs députés prêteront à la fédéràtion générale.
, secrétaire, donne lecture d'un mémoire du régiment de Guyenne infanterie qui rend compte de toute sa conduite à Nîmes depuis le 13 jusqu'au Al juin 1790 inclus, pendant les troubles de la ville.
M. le Président est chargé d'écrire à ce régiment pour lui témoigner la satisfaction de l'Assemblée.
L'impression du mémoire, qui est ainsi conçu, est ensuite ordonnée.
MÉMOIRE DU RÉGIMENT DE GUYENNE INFANTERIE.
Le régiment de Guyenne infanterie croit devoir faire connaître à ses frères d'armes et à la France entière, la conduite qu'il a tenue pendant les troubles qui ont affligé 1a ville de Nîmes durant quelques jours.
Plus les circonstances ont été difficiles et délicates, plus il lui semble important de prévenir les narrations fausses et calomnieuses que l'iguo-
rance ou la méchanceté pourraient vouloir répandre et accréditer.
Un exposé simple et fidèle des événements instruira les amis de la vérité et conservera dans tout son lustre, au régiment de Guyenne, l'honneur et la réputation, apanages précieux du militaire français.
« Dimanche 13 juin, à six heures et demie du soir, pendant le spectacle où se trouvaient, suivant l'usage, une partie des officiers, bas-officiers et soldats du régiment, l'on entendit tout à coup quan-titéde coups de fusils, mêlés de coups de pierres et décris d'effroi. Chacun courut au quartier pour se fixer sur l'événement et se trouver à son poste. La salle de comédie se trouvant très à portée des casernes, le régiment y fut bientôt en bataille dans la cour.
« Quelques soldats plus écartés rentrèrent sans accident. Les coups de fusils se faisaient entendre avec la même force.
« Le régiment était inquiet sur le sort d'une patrouille composée de quinze grenadiers et d'autant de chasseurs, commandés par un lieutenant. laquelle faisait la,ronde pour la sûreté de l'assemblee électorale. On distribua des cartouches à chaque sodat ; et l'on allait envoyer un détachement pour favoriser la rentrée de 1a patrouille, lorsqu'elle arriva en bon ordre et sans accident.
« À sept heures et demie, le commandant du corps reçut une réquisition de MM. les officiers municipaux de mettre le régiment en bataille sur la place en avant du quartier; ce qui fut exécuté sur-le-champ, en présence de M. Pontier, officier municipal. Le régiment resta dans cette position jusqu'à dix heures et demie du soir. Peu de't temps après, un caporal du régiment remit une lettre adressée à M. de Lespin, commandant accidentellement le militaire de la ville et le fort, à son défaut, au commandant du régiment, contenant une réquisition de MM. les officiers municipaux, afin que le régiment se transférât à l'hôtel de ville pour le soutien dé la proclamation de là loi martiale. Cette réquisition arriva trop tard, ainsi qu'il est prouvé par la lettre de M. Fevrand de Missol, officier municipal, porteur de ladite réquisition, qui avait été arrêté dans sa marche, de même que par le témoignage de M. Pontier, autre officier municipal qui, ayant signé la réquisition et se trouvant alors au quartier, jugea qu'il n'était plus temps de faire marcher le régiment à la maison de ville.
« Les différentes réquisitions de la municipalité furent adressées directement au commandant du régiment, d'après une lettre de M. de Lespin, qui, devant la brièveté dé l'exécution des ordres, et jugeant que l'éloignement du fort où il loge, pourrait y nuire, engagea MM. les officiers municipaux et le chef du corps à agir de concert.
« On ordonna des patrouilles alternatives de grenadiers et de chasseurs, qui parcoururent la ville et ses faubourgs pendant toutè la nuit.
A onze heures et demie, nouvelle réquisition de MM. de la municipalité de fournir sur le champ cent hommes pour la garde de là maison de ville; ce qui fut exécuté.
Lundi 14 juin, sur la réquisition de MM. les officiers municipaux, le régiment se mit en bataille devant le quartier, à cinq heures du i matin, pour y attendre de nouveaux ordres.
A six heures du matin, autre réquisition d'envoyer cent cinquante hommes au palais, pour la sûreté de l'assemblée électorale du département.
A onze heures, le régiment reçut ordre de
rentrer dans ses casernes, avec défense de s'en écarter.
A une heure et demie après midi, M. Atibry, capitaine d'artillerie, membre d'un comité militaire, dont les trois autres membres étaient électeurs, se présenta avec cinquante hommes de la garde nationale, muni des clefs de l'arsenal, situé dans une cour séparée, et nullement à la charge du régiment, ce soin étant confié à un autre officier d'artillerie, garde-magasin des arsenaux. M. Aubry demanda au commandant du corps où était la porte de l'arsenal, et s'il n'était pas possible de passer par la communication de la cour du quartier à celle dudit arsenal. Ce passage lui fut refusé et la porte extérieure de l'arsenal indiquée. A peine arrivés, cet officier et sa troupe essuyèrent une décharge qui tua un homme et en blessa deux. Ils rétrogradèrent et, toujours poursuivis par les coups de fusils, ne trouvant de passage que par la cour du quartier, ils y entrèrent avec une réquisition de la municipalité, et s'occupèrent de remplir l'objet de leur mission. Us vinrent, à différentes reprises, solliciter le commandant du corps de leur donner des poudres, et de faire mettre le régiment en bataille devant le quartier pour protéger, par sa présence, la sortie des canons.
Arrivèrent, pendant ce temps-là, cent cinquante hommes de la garde nationale, ayant avec eux M. du Roure, officier municipal, qui, s'étant fait connaître à la porte du quartier, demanda à parler au commandant du corps.
Le résultat de cette conférence fut une réquisition de sa part pour laisser entrer ce détachement qui fut rejoindre dans la cour de l'arsenal celui qui y était déjà établi. Dès lors, le commandant du corps fut forcé, par des instances réitérées et les circonstancesimpérieuses du moment, de livrer, pour le service des canons, des poudres destinées particulièrement à l'usage du régiment. L'officier municipal présent requit que le régiment sortît par la porte de son quartier, en même temps que les canons et les troupes nationales par celle extérieure de l'arsenal, pour se mettre en bataille devant les casernes, ce qui fut exécuté vers les six heures du, soir.
Après quelques coups de canon tirés sur les tours d'où partaient des coups de fusils intermittents, les pièces ayant été conduites parles gardes nationales sur la place de l'Esplanade, rendez-vous de toutes les légions, le régiment resta dans son ordre de bataiSe jusqu'à dix heures. La tranquillité paraissant rétablie, il rentra dans ses casernes.
Sur les onze heures, nouvelle réquisition de la municipalité, d'envoyer trente chasseurs et un lieutenant au couvent des capucins, pour conserveries blés destinés à l'approvisionnement de la ville. Le détachement, à son arrivée, trouva les greniers fermés et prit les précautions convenables pour leur sûreté.
Le mardi 15, le régiment ne donna plus de nouveaux secours. Les divers détachements extraordinaires continuèrent d'être relevés toutes les douze heures, et les patrouilles des compagnies de grenadiers et de chasseurs de marcher toutes les nuits. Enfin, dans la soirée, on vit renaître la confiance et la paix, qui fut encore mieux établie le lendemain mercredi 16, à dix heures du matin, par la proclamation d'une fédération solennelle entre toutes les troupes nationales, tant de la ville qu'étrangères, et le régiment de Guyenne. Le soir, entre quatre et cinq heures, il y eut une fausse alarme qui détermina
à faire battre la générale. Le régiment se mit en bataille devant le quartier où il resta jusqu'à ce que l'erreur fut reconnue.
Le jeudi 17, l'amnistie fut publiée, et le drapeau blanc arboré à la maison de ville. A deux heures de l'après-midi, l'on battit encorela générale, sur la nouvelle de l'arrivée de trois mille hommes de troupes nationales. A trois heures, le régiment fut requis par MM. de la municipalité pour marcher, avec quatre pièces de canon, sur la route de Remoulin, aiin de reconnaître ces troupes et l'objet de leur marche.
A peu de distance des faubourgs, il apprit par le retour d'un détachement de la garde nationale qu'un même intérêt avait fait précéder le régiment, que l'intention de ces troupes annoncées était de se réunir à ceux qui coopéraient au rétablissement du calme, et qu'averties de la proclamation de la paix, elles s'étaient déterminées à retourner sur leurs pas. De ce moment, le régiment rentra dans ses casernes.
Tels sontles faits qui doi ventmettre au plusgrand jour sa conduite pendant la durée des désordres de la ville de Nîmes. S'il a à gémir de n'avoir pu prévenir leurs funestes effets, au moins croit-il pouvoir se féliciter de les avoir modérés.
Au milieu des troubles déplorables, auxquels le régiment ne prenait aucune part, son influence a dû en être plus efficace. Les réquisitions de la municipalité ont précédé et guidé seules toutes ses démarches : il en fournit les preuves authentiques. Sa conduite est donc à la fois conforme aux lois de l'Etat et de l'honneur, et conséquem-ment exempte de reproches. Le corps instruit, par l'expérience commune à tous les hommes, que l'opinion publique est souvent égarée par l'imposture ou l'ignorance, et jaloux d'obtenir dans cette circonstance celle qu'il mérite, croit devoir aller au devant de ce qui pourrait y porter atteinte injustement. Exact observateur de la loi dans l'exécution de ses devoirs, il a cru qu'il ne devait point se charger de faire connaître au public tous les faits qui lui sont étrangers ; aujourd'hui le pouvoir militaire a des limites qu'on ne peut franchir sans s'exposer à de grands inconvénients; et c'est ce que le régiment se fera toujours scrupule d'éviter.
N. B. Les régiments de l'armée, les municipalités dû royaume, et toutes personnes particulières auxquelles parviendront des exemplaires du présent, sont priés de les communiquer au public.
Et ont signé MM. les officiers du régiment de Guyenne.
Montgaillard, colonel. Le chevalier de Bonne Lesdiguières. Thierriat de Miller elle, major. De La-motte. Dumesny. La Garlière. Canredon. Le chevalier de Virvent. Le chevalier de Lenferna. Dauzy. Dubreuil. De Larivoire. Mauny, Dumas. Savignac. Champeron. Chaucesse. De la Besneraye. De Costa. Le chevalier de Pouliac. Le chevalier de Lamil-lianchère. Salignac-Fénelon. Lesdiguières. Le Chevalier de Clervaux. Fontenay. Le chevalier de Fontenay. Janet. Deplas. De Virvent. Rouaix. De Brossard. De Perrault. Galembert. De Carvoisin. Fontbelle. Le chevalier Tassin. Giraud d'Agay. Pontanier. Lafargue. Virvent de Sauvegarde. Va-rennes. Chatelain. Jalabert. Lachaise. Le chevalier de Lesdiguières. Dupei'on. Gueroult. Belissen. Capponel. Farincour. Goyer de Villers.
En rendant hommage à la vérité, nous nous empressons de signer le présent mémoire.
lespin, major-commandant.
NOUS, commissaires de l'assemblée administrative du département du Gard, et chefs de la garde nationale de la ville de Nîmes, rendons hommage au patriotisme que le régiment de Guyenne a fait éclater pendant les malheureuses journées des 13,14, 15,16 et 17 de ce mois, à la généreuse impatience qu'il a témoignée de secourir les patriotes, et à son zèle qui a toujours été dirigé ou retenu par les réquisitions de la municipalité.
Donné à Nimes, le 21 juin 1790.
Vincens Devillas; Mazer; Chabaud de Latour ; Vigier-Sarrasin; Sauvaire; Lecointe, commissaires.
Le chevalier Aubry, commandant général des gardes nationales rassemblées à Nîmes. D'Azemar, major général de la cavalerie. Mirande, lieutenant-colonel. Saint-Pons, major.
Nous, officiers municipaux de la ville de Nîmes, instruits par nous-mêmes et par autrui, de la vérité des faits ci-dessus détaillés, nous nous empressons de les attester, d'y ajouter que Messieurs du régiment de Guyenne, dont les sentiments patriotiques sont évidemment connus, se sont conduits avec beaucoup de prudence sur nos réquisitions, et que Je régiment a fait le service avec grande exactitude. A Nîmes, ce 21 juin 1790. »
Ferrand de Missol; du Roure; Pontier, officier municipal.
, secrétaire, donne lecture d'une lettre du maire d'Uzès et d'une délibération de sa municipalité. Sur la nouvelle des malheurs arrivés à Nîmes, il s'est formé à Uzès, d'après la teneur de la lettre, une société aussi sainte que patriotique, un comité de paix qui est composé mi-partie de catholiques, mi-partie de protestants.
, évêque d'Uzès, demande que les personnes mandées à la barre par le décret du 17 juin soient dispensées de ce voyage.
, curé de Chavanne. M. l'évêque d'Uzès remplit les devoirs d'un bon pasteur en sollicitant une grâce. Je ne doute pas d'ailleurs, qu'il ne fasse un mandement pour repousser les doctrines qui prévalaient à Nîmes et à Uzès.
Plusieurs membres demandent l'ordre du jour et l'Assemblée décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer.
Une députation du bataillon des jeunes patriotes du Cul-de-Sac-Saint-Pierre est admise à la barre. M. Foin, l'aîné, son commandant, prononce le discours suivant dont l'impression est décrétée :
« Messieurs, grâce à la sagesse des lois constitutionnelles, chef-d'œuvre admirable de la prudence et des lumières des pères de la nouvelle régénération, il n'est pas de plaisirs plus doux, de délices plus ineffables, que de se consacrer et de se former, pour ainsi dire dès le berceau, au service et à la défense de la patrie. Grâces immortelles à la providence divine qui a permis la plus heureuse des révolutions qui change tout à coup et recrée d'une manière merveilleuse la face entière de l'Empire ; nous n'avons pour im-probateurs de nos jeunes évolutions patriotiques, que quelques êtres avilis et dégradés, ennemis de la Constitution, et qui, ne rendant pas même à Dieu l'honneur qui lui est dû, sont plus éloi-
gnès encore de se vouer au service de la patrie. Déjà je vois flotter dans toutes les provinces l'étendard sacré de la liberté ; il est arboré par tous les âges, par tous les états ; il ombrage nos berceaux. Toutes les villes sont en armes ; notre enfance, même au sein de la capitale, est forte des vertus belliqueuses de notre général magna-gnime etducourage invinciblede nos pères ; toute la nation entin est prête à consommer le grand pacte fédératif sur l'autel de la patrie ; ses nombreux habitants ne feront plus qu'une immense famille, dont nous aurons le bonheur d'être les enfants ; et la France désormais sera aussi heureuse par la prudence et l'équité de ses lois, qu'imposante par la majesté de sa puissance redoutable à toutes les nations. En vain dirait-on que nos tendres années sont encore bien précoces; tout est viril chez de jeunes patriotes brûlant d'ardeur pour le salut et la gloire de la patrie ; toujours forts et invincibles quand il s'agit de lui procurer la victoire et d'assurer son bonheur, même au prix de leur sang. Le patriotisme est le devoir de tous les âges, de tous les états ; il sera la vertu de tous les temps. L'enfant même, à peine conçu dans le sein maternel, y respire autant par la force des douces ardeurs patriotiques que par l'effet des liens sacrés qui serrent les nœuds conjugaux. Par vos soins, ô nos pères l ô pères de la patrie 1 nous serons libres entin, nous serons heureux; il ne noUs reste plus de désirs à' satisfaire; vous avez surabondamment pourvu à nos besoins. Nous n'avons plus qu'un vœu à former ; il est dicté par la reconnaissance : c'est de célébrer l'auguste pacte fédératif, et vous jurer, sur l'autel de la liberté, d'être jusqu'à la mort les plus zélés défenseurs de la Constitution. 0 France! ô ma,chère Patrie ! si tes ennemis étaient assez hardis pour oser attaquer encore ce grand édifice, ce rempart constitutionnel qui a coûté à nos pères tant de sueurs et de veilles, qu'ils tremblent, les scélérats I Le ciel dans sa justice armerait les enfants pour venger leurs pères : les sentiments, l'intrépidité, la valeur, chez les Français, ne sont t point enchaînés au cercle que parcourt le char despostique des années. »
M. de Mordant, membre du département de l'Eure, présente une adresse de rassemblée électorale de l'Eure. L'Assemblée en ordonne l'impression.
Elle est ainsi conçue :
Messieurs, l'assemblée électorale du département de l'Eure, après avoir rempli le vœu. de ses commettants pour le choix des membres de ce département, s'empresse de s'acquitter du plus important de ses devoirs, celui de vous exprimer la reconnaissance donttous les cœurs sont pénétrés par tant de bienfaits que vous versez si rapidement sur une nation que vous régénérez par la sagesse de vos lois. Chaque étincelle de votre génie fait disparaître en un instant des siècles de calamités et d'humiliations; à votre voix, la liberté, ce bien plus cher que la vie, a ranimé cette belle contrée si longtemps avilie, si longtemps gémissante sous les fers du despotisme ; chaque habitant de cet Empire a repris un nouvel être i chacun s'est élevé à la dignité d'homme; chacun a recouvré ses droits primitifs, éternels, imprescriptibles! ils étaient écrits au fond de vos cœurs.
Avec quels transports d'admiration, Messieurs, devons-nous contempler le superbe édifice de notre Constitution, que vous élevez avec tant de
courage I L'égalité naturelle, sans laquelle il n'est plus de citoyens, en fait la base inébranlable ; à ia place de ces distinctions imaginaires, qui ne donnaient que la barbare jouissance du spectacle de l'avilissement du plus grand nombre, on cherchera, à votre exemple, la véritable gloire, celle d'être honoré de l'estime de ses concitoyens; cette estime si précieuse, vous l'avez obtenue, Messieurs, par 1 exercice de toutes les vertus patriotiques, de ces vertus sublimes qui, dans les pays libres, ont produit dans tous les temps ces faits mémorables, dont le récit nous charme etnousenlève, et qui, s'il est possible, nous console de la lecture déchirante de l'histoire de ces immenses régions, foulées par le despotisme ; elle n'est que le déplorable registre des crimes des tyrans et des malheurs des peuples.
« Quelle plume, Messieurs, tracera l'époque célèbre dont vous honorez nos annales ! c'est à cette époque que commence l'âge d'or de la France ; vos travaux héroïques vous obtiendront de nos derniers neveux un hommage bien mérité.
« Mais nous, heureux témoins de la Révolution, nous, à qui vous avez fait franchir l'intervalle immense de l'esclavage à la liberté, nous manquons de termes pour vous peindre les sentiments dont vous avez pénétré nos âmes : consommez, Messieurs, votre glorieux ouvrage ; nous le maintiendrons, nous le défendrons de tout notre pouvoir; les premiers mots que nous apprendrons à nos enfants, seront des actions de grâce à nos courageux et immortels représentants. »
Signé : Hue,' président ; Duroi, secrétaire ; Nicolas-Lucien-Armand Cochart, électeur; François Luverlu, administrateur du district; G. Êoquin, administrateur du département de VEure; A. F. L. de Mordant, électeur ; députés par le département de l'Eure et district d'Evreux.
Trois officiers du régiment Royal-Gomtois, condamnés en 1773 par un conseil de guerre tenu à Lille, demandeque le comité militaire, déjà muni des pièces relatives à leur affaire, veuille bien s'en occuper.
Voici leur adresse (1) :
« Messieurs,
« Vous voyez devant vous les officiers du régiment Royal-Comtois, condamnés en 1773 par un conseil de guerre tenu à Lille. Déjà vous nous avez fait l'honneur de nous admettre à la barre de cette auguste Assemblée et de recevoir l'hommage de notre mémoire justificatif ; vous avez même daigné nous répondre que vous prendriez notre demande en considération. Depuis ce moment nous nous sommes reposés sur votre équité bienveillante ; mais, au son de la trompette nationale, nos vœux et nos regrets se sont réveillés.
« lis accourent de tous les côtés ces soldats citoyens, ces braves vétérans parmi lesquels, sans nos malheurs, plusieurs d'entre nous auraient l'avantage inappréciable de paraître. Ils vont jurer à l'autel de la patrie celte sainte fédération, ce pacte solennel qui doit unir tous les français et consolider pour toujours l'édifice admirable de notre Constitution : et nous, nous ne suivrions nos anciens camarades que de cœur et d'esprit l Ah ! s'il était possible du moins, Mes? sieurs, que nous ayons la consolation de voir à leurs yeux éclater notre innocence ; que les dé-
putés de cette armée qui, malgré le Jugement le plus imposant, n'a pu se persuader que nous fussions coupables, lui rapportent l'agréable conviction de n'avoir conservé son estime qu'à des hommes qui ne cessèrent jamais d'en être dignes; que la vérité brille dans tout son jour ! Nous ne redoutons que les ténèbres ; c'est à leur ombre que nos réclamations légitimes ont été jusqu'ici étouffées et nous nous félicitons aujourd'hui de leur peu de succès.
« Notre justification sous l'ancien régime, et d'après sa marche obscure, aurait pû être soupçonnée d'être le fruit de l'intrigue, de 1 impor-tunité et d'une complaisance miséricordieuse.
« Qu'il nous sera bien plus doux de ne la devoir qu'à là pureté de notre conscience et à la justice incorruptible des législateurs de la nation.
« Notre mémoire, Messieurs, a été remis à votre comité militaire; il n'attend que vos ordres pour prendre une connaissance parfaite de notre affaire et vous en faire le rapport. Est-il une circonstance plus favorable ? L'armée entière, assemblée dans ses représentants, connaîtra par un exemple aussi frappant quels sont les maux auxquels des militaires, quoique irréprochables, étaient exposés, sous le régime du despotisme que vous avez détruit: xjuels sont les biens dont ils sont assurés sous l'empire de la liberté que vous avez établie et pour laquelle ils réuniront désormais tous les efforts.
«Signé: Martimprey, Mengaud, Bousquet, pour nous et nos camarades absents. »
Je demande que cette affaire, déjà ancienne, soit examinée par le comité militaire réuni à celui des rapports et qu'il en soit rendu compte mardi prochain.
(Cette motion est adoptée.)
, député de Bordeaux, demande que le rapport sur l'envoi de la garde nationale de Bordeaux à Moissac,lors des troubles de Montauban, soit fait tout de suite.
Un membre observe que cette affaire n'oqcupe que le quatrième rang a l'ordre du jour.
observe que cette affaire peut venir en Ce moment, comme adressé , si l'Assemblée consent à entendre M. Nairac.
(L'Assemblée adopte cette proposition.)
commence la lecture de la relation du voyage du détachement de l'armée bordelaise envoyé à Moissac, adressée à l'Assemblée par ce détachement. « La municipalité de Montauban s'est rendue fameuse et peut-être immortelle par la conduite la plus coupable. Nous devons dévoiler cette conduite et prévenir la calomnie; car la municipalité de cette ville malheureuse ne peut se défendre qu'en calomniant les meilleurs citoyens, et peut-être nous-mêmes, nous que l'indignation avait armés, nous qui devions paraître des ennemis, parce que le patriotisme nous animait. Il se pourrait que ce patriotisme eût mêlé quelque exaltation au zèle le plus pur ; il se pourrait que nous eussions quelquefois passé les bornes de notre mission ; mais, citoyens, marchant au secours decitoyens, nous avons cru faire ce que tous les Français auraient voulu faire; nous nous sommes Crus envoyés par la France entière. Vous connaîtrez, vous jugerez. Nous vous tracerons le tableau pé-
nible de la barbarie de nos ennemis ; vous les verrez se jouant sâns cesse des souffrances de leurs prisonniers, prodiguer les serments et les parjures... Notre détachement se met en marche le 16 et le 17 mai... » (Une grande impatience se manifeste dans l'Assemblée.)
Un membre : Ce n'est pas un rapport, c'est un réquisitoire ou un pamphlet.
divers membres: Le renvoi au comité des rapports.
consulte l'Assemblée qui décide que la lecture ne sera pas continuée et que les pièces seront renvoyées au comité des rapports.
Je prie l'Assemblée d'ordonner l'impression et la distribution.
L'Assemblée ne peut décréter l'impression d'une pièce qu'elle ne connaît pas; elle ne peut donner dè la publicité à une adresse qui n'est autre chose qu'une dénonciation, sans savoir si les faits sont exacts.
(La demande d'impression est rejetée.)
Une députation de la société du serment du Jeu de Paume est admise y la barre et remet le procès-verbal qui constate qu'on a placé à Versailles, au Jeu de Paume, le monument relatif au serment du 20 juin 1789.
La députation dit :
Messieurs,
« Nous eûmes, le 10 juin dernier, l'inestimable honneur d'offrir à vos regards le premier monument qu'on ait encore élevé au souvenir de votre généreux dévouement. Ce don, que la simplicité et l'énergie du patriotisme pouvait rendre touchant, vous l'avez accueilli ; le lieu qu'il devait consacrer .et embellir, vous l'avez proclamé le point de ralliement des amis de la liberté.
« Fiers de vos suffrages, Messieurs, au nom de la patrie que vous avez sauvée, inspirés nous-mêmes par le génie de la reconnaissance, nous avons, le lendemaip 20 du même mois, exécuté le vœu que le civisme nous avait dicté. Notre monument au milieu de nous, nous avons traversé lentement et eii silence la ville dé Versailles. L'aspect religieux de.cette marche, ou plus encore sans doute, le souvenir du serment auguste qu'elle rappelait, a frappé tous les cœurs ; la municipalité, les corps militaires, des citoyens de tous états eit de tout âge ont voulu partager l'honneur d'accompagner, de porter, de consacrer le monumènt. Des gardes nationales ont juré sur leurs sabres de le garder au péril de leur vie. Tous paraissaient sentir qu'après celui de la Divinité, il n'est pas de culte plus doux ni plus saint que .celui de la patrie.
« Ainsi, Messieurs, un acte privé de piété civique est devenu tout à coup, pour une ville entière, une fête publique et nationale. Cette ville nous à offert de toutes parts les expressions les plus touchantes de l'union, de la fraternité, die l'affectiOn la plus tendre. Un seul sentiment, le souvenir c£e vos bienfaits, régnait dans toutes lés âmes, et confondait tous les mouvements.Tel est,Messieurs, tel sera toujours l'effet du véritâbié amour de la liberté : tel ne sera jamais l'effet de cette licence coupable qui, se parant audacieusement du nom de la liberté et n'aspirant au contraire qu'à opprimer la liberté commune et la religion même
dont elle ose se dire la protectrice, sème entre les citoyens la discorde et les haines, arme des frères contre des frères et réservait au dix-huitième siècle l'horrible et inattendu scandale de voir le sang des Français versé par des Français. Puissent les haines funestes s'éteindre, ou n'exister du moins qu'entre ceux qui les suscitent ! c'est à eux seuls qu'il appartient de se haïr et de se diviser. Puissent les nœuds sacrés d'une union fraternelle et inaltérable, rallier les efforts et les opinions des amis de la patrie I c'est à eux qu'il convient de s'aimer et de s'unir.
« Nous vous offrons, Messieurs, le procès-verbal de l'inauguration du monument élevé par nos mains. Nous croyons utile d'en consacrer le souvenir el de légaliser, autant qu'il est en nous, un acte dont les siècles futurs aimeront à retrouver les traces. C'est à ce titre, Messieurs, que nous vous supplions d'ordonner que ce procès-verbal soit déposé dans les archives de la nation. »
Signé : E. Mojan; F.Beaulieu; Hugounenc, député de la garde nationale de Montpellier ; Jou-ert; G. Romme; Pascal; Coqueau; Otcher; D. Bosc ; J. B. P. Riffaut ; Oilivier ; Brival ; Boussogn ; Mellet; Ladainte; l'abbé Anaclet; Pierre Viaud, ci-devant de Belair; l'abbé Leroy ; J.-F. Le Cocq, secrétaire-commis des archives de l'Assemblée nationale; Gilles; Gillet; l'abbé Joseph Ruhui; Jacob; Poullenot; Boy : Guérin; Chenaux; Briare; Naudet; Souberbielle; Lefebvre; Monet; Gailleux de Remcourt, capitaine lieutenant des gardes de la prévôté de l'Hôtel du roi ; J.-P. Giily, de ia garde nationale d'Angers ; H. Rousseau ; L. Coin-treau; J.-B. Tailhand; femme Gilles; Duplay.
répond : « L'Assemblée nationale applaudit avec la plus vive satisfaction au zèle des citoyens qui, comme vous, s'empressent de donner des marques sincères de leur attachement à la Constitution. Son unique vœu est de voir tous les Français ne faire plus qu'un el marcher d'un pas égal vers le bien public. L'Assemblée vous permet d'assister à sa séance. »
Plusieurs membres demandent que l'adresse de la Société du serment du Jeu de Paume soit insérée dans le procès-verbal. (Cette motion est adoptée.)
Messieurs, les citoyens de tous les âges, de tous les états, fixent leurs regards sur la fédération du 14 juillet, sur la fête de la patrie. Tous ceux qui se sont armés pour la défense delà Constitution, tous ceux que les besoins de l'ordre social avaient armés pour défendre l'Empire, unis par les mêmes sentiments, se rassembleront par leurs députés au sein de la capitale, au sein de cette ville, où l'amour de la liberté s'est fait sentir avec tant d'énergie, de cette ville qui, la première, s'est armée pour conquérir la liberté, et dont le courageux exemple a été imité par toutes les .villes de France associées à ses triomphes. Dès lors que tous les citoyens qui se sont consacrés à la défense de la patrie sont admis à cette fédération générale, ne eut-on réclamer les droits de notre escadre ? ette réclamation est l'objet de ma proposition. M. d'Albert de Rioms désirerait être admis à la fédération générale pour y prêter le serment civique en son nom et en celui de l'escadre dont le commandement lui est confié.
(Le côté droit et une grande partie du côté
gauche demandent à aller aux voix et applaudissent à cette motion,)
Je ne prends pas la parole pour m'opposer à la motion honorable.....(On demande à aller aux voix.) Je reconnais tout le mérite militaire de M. d'Albert.... Je ne crois pas que des honneurs, que des distinctions particulières doivent nous occuper dans cet instant..... Je ne crois pas que la fête de l'égalité..... Supposons que M. d'Albert soit revêtu de toutes les qualités que je ne veux pas lui contester; mais est-il le premier parmi les citoyens qui ont montré avec le plus d'éclat et d'utilité, pour la chose publique, leur dévouement à la Constitution, leur amour pour la liberté? Est-ce à ce titre qu'il a droit à une distinction particulière ?.... C'est d'une fête nationale, où tous les bons citoyens viennent répéter un serment qu'ils ont prononcé avec le même respect, qu'ils ont prononcé avec le même courage, qu'on doit exclure toutes les distinctions.,,. (Les murmures d'une grande partie du coté gauche et l'empressement d'aller aux voix qui, à chaque phrase, interrompaient l'orateur, se renouvellent avec plus de force.) Je prends la liberté de faire une question aux plus zélés partisans de M. d'Albert; je leur demande si M. d'Albert est, de tous les citoyens, celui qui ait le mieux servi la liberté publique.... (Les applaudissements d'une partie du côté gauche et des tribunes interrompent l'orateur.) Les principes que je viens de rappeler sont les vôtres; ils sont incontestables. On m'oppose que M. d'Albert a un titre particulier, comme chef de l'escadre... (Applaudissements et murmures.)
J'espère que M. d'Albert lui-même trouvera son mérite asssez récompensé par le commandement dont il est honoré. J'espère surtout que la nation n'aura pas en ce moment besoin de ses talents distingués, et qu'il ne les exercera pas en faveur de l'Espagne : j'espère que la paix ne sera point troublée. Je laisse à l'Assemblée à suppléer à toutes les raisons que je n'ai pas dites : mais si, malgré celles que j'ai présentées, malgré celles qui se présentent d'elles-mêmes à chacun de nous, la motion était accueillie, je demanderais que l'on recherchât avec soin, avec justice, tous les citoyens qui ont rendu des services à la patrie pour les faire participer à cet honneur; je demanderais qu'ils fussent placés dans un ordre déterminé par le degré d'utilité de ces services.... M. d'Albert serait-il à leur tête?.... (Les applaudissements d'une partie du côté gauche et les murmures du reste de l'Assemblée se mêlent à la demande réitérée d'aller aux voix.)
Je demande qu'on passe à l'ordre du jour. (Les membres qui environnent M. de Lameth se lèvent.pour appuyer cette proposition, que repousse le reste de l'Assemblée),
Après de longs débats, l'Assemblée consultée décide qu'on ne passera point à l'ordre du jour.
Il paraît que je n'ai pas été entendu : qu'on me permette de m'expliquer. Si c'était à titre de faveur que j'eusse demandé que M. d'Albert fût admis à la fédération, je retirerais ma motion-: il n'a point encore mérité de faveurs particulières de la nation régénérée. Mais je parle comme membre du comité de la marine chargé par vous de désignèr les représentants de notre escadre à cette fête, et c'est eu cette qualité que je propose M. d'Albert.
demande la parole ; au milieu des murmures dont l'Assemblée est agitée, il ne peut parvenir à se faire entendre, et la discussion est fermée.
demande la parole. Il ne peut l'obtenir.
annonce que M. Muguet a réclamé pour proposer qu'un officier de chaque grade, parmi les officiers de l'escadre, accompagne M. d'Albert.
Après des agitations très longues et très tumultueuses, la proposition de M. Nompère de Gham-pagny est mise aux voix et décrétée à une grande majorité.
Voici le résultat du scrutin qui a eu lieu aujourd'hui pouv Y élection du président et de trois secrétaires :
M. déBonnay................................306 voix.
M. deMenou............................188 »
M. de La Rochefoucauld......................187 »
M J de Gazalès.................... 62 »
Voix perdues.................... 17 »
Total....... 760 voix.
Personne n'ayant obtenu la majorité absolue, il y a lieu de procéder à un nouveau scrutin.
Pour les secrétaires, les voix se sont réparties de la manière suivante:
M. Dupont (de Nemours).......... 402 voix.
M. Garat, l'aîné.................. 252 »
M. Regnaud (de Saint-Jean-d'Angély) 2ô2 »
Je les proclame secrétaires à la place de MM. de Pàrdieu, Gourdan et Dumouchel, secrétaires sortants.
L'ordre du jour est le rapport de l'affaire de Haguenau.
, au nom du comité des rapports. La ville de Haguenau était autrefois gouvernée par des magistrats qui remplissaient tout à la fois les fonctions déjugés et d'administrateurs. Les officiers municipaux nommés en 1789 exigent les comptes de ces magistrats; l'exercice de ce devoir parut un crime; les officiers municipaux furent enlevés par la maréchaussée et menacés d'un jugement de mort. Ils ont été élargis, en vertu d'un décret de PAssem-blée nationale, sur leur simple caution juratoire. Lors de la formation de la municipalité, établie par la Constitution, les mêmes officiers municipaux ont été nommés. Ils se sont occupés de nouveau de la vérification des comptes. Ils ont reconnu que, depuis 1785, il n'en avait été rendu auCun; qu'il,y avait dans la caisse un déficit de 200,000 francs, et qu'on avait fait des emprunts pour 2,000,000. Les anciens administrateurs ont pris, en partie, la fuite, et le receveur a fait l'abandon de ses biens. Sur la réquisition du procureur de la commune, un décret permit la saisie sur ies anciens administrateurs, déclarés solidaires, qui interjetèrent appel au conseil souverain de Gol-mar. Ce tribunal donna mainlevée provisoire des saisies, et motiva son arrêt d'une manière extrêmement injurieuse aux officiers municipaux, et cet arrêt fut répandu avec profusion. Les anciens administrateurs sont revenus à Haguenau : dès ce moment, le désordre a commencé. Ils sont parvenus à faire nommer l'un d'eux administra-
teur du département. Tels sont les faits antérieurs à l'événement qui fait l'objet du rapport. La mauvaise conduite du régiment de Salm ayant obligé à le faire sortir de cette ville, le peuple, persuadé que le ministre n'enverrait plus de garnison à Haguenau, effrayé par la perte des avantages qu'il retirait de la consommation des troupes, et enivré par les malintentionnés, se porte en foule à la maison commune et demande à grands cris le rappel du régiment de Salm. Sur le refus de la municipalité, l'hôtel de ville est attaqué, le greffe enfoncé et pillé, et les officiers municipaux menacés. Le lendemain les séditieux ont formé une nouvelle garde nationale ; ils se sont emparés de tous les postes, et ils sont maîtres de la ville. — La municipalité fait plusieurs demandes qui sont prises en considération dans le décret dont le projet va être lu. Ce récit prouve assez la nécessité de les accueillir.
lit ce projet de décret, qui est adopté en ces termes :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu son comité des rapports, et avoir examiné les pièces qui constatent:
« 1° Les difficultés qui se sont élevées entre la nouvelle municipalité de Haguenau et les anciens magistrats de cette ville;
« 2° La nullité de l'élection du sieur Schwendt, administrateur comptable, à la place de membre du département du Bas-Rhin;
« 3° Les troubles qui ont eu lieu les 16 et 17 de ce mois dans la ville de Haguenau, et les violences qui ont été exercées contre les officiers municipaux de cette ville ;
« 4° L'illégalité de la formation de la nouvelle milice nationale de Haguenau;
« Considérant que Je maintien de l'ordre public est particulièrement intéressé au libre exercice des fonctions attribuées aux officiers municipaux, au respect porté à ceux qui les exercent, et à la plus parfaite soumission de tous les citoyens français, aux décrets émanés du Corps législatif acceptés et sanctionnés par le roi, a décrété et décrète :
Art. 1er. « Que son président se retirera par devers le roi, à
l'effet de supplier Sa Majesté de donner les ordres nécessaires pour qu'il soit informé,
sans aucun retard, des troubles qui ont été excités dans la ville de Haguenau, ces violences
qui ont été commises contre les officiers municipaux, ainsi que de l'enlèvement des papiers
lors du pillage du greffe, et pour que les auteurs, fauteurs et complices desdits excès
soient poursuivis, jugés et punis suivant la rigueur des lois.
Art. 2. « Qu'à l'effet de mettre les officiers municipaux à l'abri de toute violence ultérieure, et de leur assurer le libre et paisible exercice des fonctions qui leur sont confiées, 4e roi sera également supplié d'ordonner qu'il soit envoyé à Haguenau un régiment de cavalerie française.
Art. 3. « Que le directoire du département du Bas-Rhin, auquel l'audition des comptes des ci-devant administrateurs de la ville de Haguenau est déférée par ies décrets, et autorisé, pour assurer les intérêts de la commune, à permettre toutes saisies et arrêts provisoires qui pourront être requis.
« Déclare, en outre, l'Assemblée nationale:
« 1° Que l'élection du sieur Schwendt à la place de membre du département du Bas-Rhin est nulle, comme contraire à l'article 2 des décrets des 20, 23 mars et 19 avril derniers, et qu'en
conséquence, il doit être procédé, dans la forme ordinaire, à l'élection d'un nouveau membre de ce département;
« 2°. Que le corps de milice nationale qui s'est illégalement formé en dernier lieu dans la villede Baguenau, demeurera dissous à compter du jour delà publication du présent décret; sauf aux citoyens qui le composent, à remplir les formalités prescrites pour être admis dans le corps de milice nationale formé d'après les principes établis parla Constitution;
« 3°. Qu'elle approuve le refus que la municipalité de Haguenau a fait d'accepter la démission deè seize officiers de la milice nationale, légalement formée; lesquels officiers doivent continuer leurs fonctions. »
(ci-devant marquis). Je demande la parole pour un malheureux citoyen opprimé par les pouvoirs judiciaire et ministériel. M. Morizot, en faveur duquel je viens réclamer ici votre justice, a donné trois mémoires en plaintes, pour recevoir le payement de douze années consacrées au service de l'administration, sans avoir été payé, et pour se plaindre du ministre des finances, qui lui a enlevé son état sans motif. (On demande l'ordre du jour, et on observe que M. Digoine n'est rapporteur d'aucun comité.) votre comité des rapports a été saisi de l'affaire de M. Morizot; et comme il a pensé que cette affaire n'était point de son ressort, ce citoyen a été renvoyé et ballotté de comité en comité, il a fait plusieurs démarches auprès de M. Beaumetz, lors de sa présidence; enfin M. Ricard a été chargé de son affaire, mais il a jeté les pièces au feu ; et c'est encore contre cette prévarication que je viens réclamer.
Ayant entendu prononcer mon nom, je dois instruire l'Assemblèè des faits qui sont à ma connaissance. Parmi le grand nombre de personnes qui sont veuues chez moi, ; à l'époque de ma présidence, s'est trouvé M. Morizot, qui "prétend que l'administrateur de la loterie lui devait des sommes très considérables ; . il s'est plaint des abus des pouvoirs judiciaire et i ministériel. Cette affaire m'a paru de nature à être renvoyée au comité des rapports.- Vous I savez que ce comité se renouvelle presque tous ! les mois, et qu'une affaire qui,n'intéresse qu'un seul individu a pu, par conséquent, se trouver arriérée. Il est bon de vous observer que M. Morizot est un dès solliciteurs les moins agréables à recevoir chez soi : heureusement qu'on né se laisse pas intimider aisément. Quant à moi, j'ai fini par lui fermer ma porte. M. Ricard, rapporteur de l'affaire, en a fait l'extrait très circonstancié, et il a eu la loyauté de le communiquer à M. Morizot, qui ne l'a point trouvé de son goût, et qui lui en a envoyé un de sa façon, en disant que c'était ainsi qu'il fallait rapporter l'affaire. C'est ce rapport projeté que M. Morizot appelle une pièce. Ayant désiré que son mémoire lui fût rendu, je m'adressai à M. Ricard pour le ravoir, et je -lui dis : « Je vous le demande moi-même, parce que vous avez pris sur M. Morizot un tonsi supérieur que vous lui en avez imposé. » M. Ricard m'a répondu : « J'avais bien prévu que vous me le demanderiez, et que votre influence me déterminerait à manquer à la parole que j'avais donnée à M. Morizot, de ne pas le lui .rendre; en conséquence, je me suis mis dans l'impossibilité de le faire, et j'ai brûlé la pièce. » Cependant j'appuie la proposition de M. de Di-
goine. Il faut renvoyer cette affaire à un comité, et je demande que ce soit celui des recherches, car il est important qu'on fasse justice à M. Morizot, et que l'Assemblée nationale connaisse aussi ses mémoires, que je regarde comme d'infâmes libelles.
M. Morizot est un homme très violent, qui plusieurs fois a fait entendre les menaces de brûler la cervelle à M. Nècker et à M. Lambert, parce que, disait-il, étant parent de l'ancien contrôleur général, il n'était pas fait pour un emploi de 1,800 livres : on n'a pu garder un homme qui paraissait aussi dangereux ; son emploi lui a été ôté, en lui conservant toutefois une pension de 900 livres; il s'est rendu chez M. l'évêque de Châlons, président du comité; en casant que si on ne lui rendait pas justice, il se la rendrait lui-même : en conséquence, il lui a mis un pistolet sur la gorge. Pour rendre justice à M. Morizot, il est bon d'observer qo*il a présenté ce pistolet du côté de la crosse. La société ne doit point avoir dans son sein des hommes de ce genre.
Sans convenir des faits, j'appuie le renvoi au comité des recherches. Si M. Morizot est coupable, qu'il soit puni; s'il y en a d'autres, qu'ils le soient aussi.
(L'Assemblée ordonne le renvoi au comité des recherches.)
J'ai reçu de la municipalité du Havre un e lettre annonçant que la flotte Anglaise a pris la mer.
Voici la déclaration d'un capitaine hollandais qui est jointe à cette lettre :
Le ler juillet 1790, a comparu devant les maire et officiers
municipaux du Havre, au bureau de la municipalité, le capitaine Thomas Stugner, du sloop
YËlisabeth, parti de Soutam-pton le 28 juin dernier, dix heures du matin, et de la rade de
Portsmouth, où il a mouillé le même jour vers minuit.
« Lequel capitaine arrivé présentement en ce port, nous a déclaré, en l'énonçant par l'interprétation du sieur Vièr, son interprète, qu'il a eu connaissance, étant sur la rade de Portsmouth, qu'une partie de la flotte anglaise, composée de vingt-cinq vaisseaux de ligne, avait appareillé de Portsmouth et pris la mer ledit jour 28 juin et qu'il a appris que l'autre partie avait appareillé le lendemain.
« La partie qu'il a vu prendre la mer, était de douze vaisseaux et quatorze frégates; une autre, douze à treize vaisseaux, devait sortir le lendemain, déclarant qu'il a appris à Portsmouth que la flotte espagnole était en mer; et avec le sieur interprète, signé sa présente déclaration, une marque autour de laquelle est écrit Thomas Stugner. Signé: Vier, avec paraphe.
« Pour copie conforme à la déclaration étant au greffe de la munipalité.
« Signé : Pierre fiuval, maire. »
L'Assemblée charge son président de se retirer par devers le roi pour l'informer de la lettre et de la déclaration.
La séance est levée à dix heures du soir.
Séance du
La séance est ouverte à onze heures du matin.
, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance de la veille au matin.
Il ne s'élève pas de réclamation.
fait part à l'Assemblée d'une délibération des religieux Prémontrés de Belval, prise avant le décret qui met les biens ecclésiastiques aux mains de la nation, par taquelle ils ont arrêté un don patriotique de 50,890 livres.
L'Assemblée ordonne qu il sera fait dans son procès-verbal, mention honorable de ce don patriotique. .
Le comité de la marine est prêt à foire son rapport sur la lettre de M. La Luzerne, que vous lui avez envoyée hier, concernant les délits commis sur les côtes de Provence.
Vous avez renvoyé au comité de la marine la lettre qui vous a été adressée sur les délits commis sur les côtes de la Méditerranée. Cette lettre renferme trois objets : 1° les faits qui caractérisent le délit; 2° les ordres donnés par le roi, d'une part, pour faire prêter mainforte aux opprimés ; de l'autre, pour faire restituer la tartane qui a été prise; 3°la demande que les tribunaux soient autorisés à poursuivre les auteurs et fauteurs des délits commis. Le ministre appuie sur l'importance de l'exécution des précautions proposées. Le comité a cherché à réunir tous ces objets dans le projet de décret que je suis chargé de vous présenter.
PROJET DE DÉCRET.
« L'Assemblée nationale, instruite des délits commis, contre le droit des gens et la foi des traités, sur les côtés de la Méditerranée soumises à la domination française, et des mesures prises pour faire punir lès auteurs et les fauteurs de ces délits, et accélérer les réparations qui peuvent être dues aux puissances d'Alger et de Naples, a décrété:
« Que son président se retirera par devers le roi, pour lé remercier des mesures qu'il a prises ;
« Que les tribunaux auxquels ont pu ou dû être déférés ces délits, et en seraient déférés de semblables, en feront ou continueront l'instruction, et que les municipalités, corps administratifs et militaires aideront et protégeront de tous leurs moyens les tribunaux, et leur donneront mainforte à la première réquisition;
« Enfin, que les ordonnances relatives aux précautions de santé seront exactement observées. »
J'adopte le décret gui vous est présenté; mais j'observe qu'il s'agit des délits relatifs
à la violation du droit des gens; délits qui ont été commis à force armée, et qui ne peu-
Je dois prévenir l'Assemblée que cinq vaisseaux de la Religion (1) sont en mer pour défendre les vaisseaux français envers et contre tous.
C'est un principe constitutionnel que la force publique, soit en troupes réglées, soit en milices nationales, ne peut, en pleine paix, être mise en activité sans l'autorité de la municipalité dans le territoire de laquelle la présence de ces troupes sera nécessaire. Je propose donc l'alternative, ou d'admettre la question préalable sur l'amendement de M. Malouet, ou d'y ajouter que les troupes ne pourront être employées sans l'autorisation des municipalités.
On vous propose, d'un côté, des'dispositions étrangères à la lettre du ministre; de l'âutre, un objet général qui intéresse l'Assemblée nationale. Cette question, que renferme implicitement l'amendement de M. Malouet, sera sûrement discutée quand on s'occupera de l'organisation de l'ordre militaire : sans doute alors, on fixéralescas où 'les commandants pourront envoyer des troupes. Mais ce n'est point lorsque vous traitez des dispositions particulières, que l'on peut vous faire adopter un décret général. Je demande que l'article proposé soit adopté, et que l'on passe à l'ordre du jour.
Dans les faits dont on vous a rendu compte, vous avez vu que la force armée avait été employée pour reprendre, sur les vais-Seaux algériens", la prise qu'ils avaient faite... Il y a deux ans, un événement moins grand que celui-ci, occasionna une rupture entre la France et la régence d'Alger; et, malgré les bons traitements que l'on fit aux Algériens, on ne put éviter une guerre qui vient de vous coûter un million 400,000 livres, et que vous avez payé depuis peu. Je ne vous demande que ce qui est très constitutionnel. Vous avez décrété que la force armée était principalement destinée à maintenir les droits de ceux que l'on opprime, et si vous n'autorisez les commandants des ports à la faire mouvoir toutes les fois qu'il sera nécessaire, vous vous écartez de vos principes. Et parce que cette demande ne vous est point faite, ce n'est pas une raison pour que vous ne décidiez rien sur elle. Vous devez veiller à la sûreté du royaume et outre-passer les demandes que l'on vous" fait à cet égard, toutes les fois qu'il est nécessaire d'aller au delà.
(L'amendement de M. Malouet est renvoyé au comité de marine, et le décret proposé est adopté sans aucun changement.)
Le comité des finances demande la parole pour présenter plusieurs décrets urgents.
(de Nemours). Nous avons plusieurs traités avec l'Allemagne pour lui fournir du sel à un prix déterminé : quelques municipalités ont mis obstacle au passage de cette denrée ; cependant la circulation doit en être libre, et il s'en présente deux raisons bien importantes : la première, un débouché considérable que nous ne trouverions pas ailleurs ; la seconde, la conservation des traités que nous avons faits. Dans ces circonstances, le comité des finances vous propose le projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale a décrété et décrète que les fournitures de sel qui doivent être faites à l'étranger conformément aux traités subsistants, seront effectuées avec les sels qui appartiennent à la nation, et par. les préposés à qui elle a confié la vente de ces sels ; que tous ceux qui s'opposeraient au transport desdits sels doivent être réprimés, comme portant atteinte aux propriétés nationales;
« Et que son président se retirera par devers le roi, pour le supplier de donner tous les ordres nécessaires à l'exécution du présent décret. »
(Ce projet est adopté sans discussion.)
(de Nemours). Vous avez autorisé le pouvoir exécutif à faire un armement maritime; vousl'avez autorisé à prendre des mesures pour que cet armement fût pourvu de tous les objets qui lui sont nécessaires. La plupart des municipalités dans le territoire desquelles on a fait passer des poudres ou autres munitions de guerre, les ont arrêtées. Le ministre de la marine s'est adressé au comité pour obtenir la libre circulation des munitions qu'il est obligé de rassembler.
Voici le projet de décret que nous vous soumettons:
. « L'Assemblée nationale, instruite des difficultés qui se sont élevées dans plusieurs villes, relativement à la circulation des poudres et autres munitions destinées à l'approvisionnement des arsenaux de terre et de mer, au service des municipalités, au commerce extérieur et intérieur du royaume, et voulant assurer le transport de toute espèce de munitions nécessaires au service de l'Etat, a décrété et décrète ce qui suit :
« Art. 1er. Il ne sera apporté aucun retard ni empêchement
quelconque au transport des poudres et autres munitions qui seront tirées des arsenaux de la
nation ou des fabriques et magasins de la régie des poudres, pour les approvisionnements des
ports, des places et du commerce ; elles seront accompagnées de passe ports en bonne forme,
délivrés par les ministres de la guerre et de la marine, ou par les officiers et
gardes-magasins de l'artillerie de terre ou de l'artillerie de la marine, pour les poudres
qui sortiront des arsenaux ; et par les régisseurs des poudres, pour celles qui seront tirées
de leurs fabriques ; la destination desdites poudres sera, en outre, justifiée par lettres de
voiture régulières.
« Art. 2. Lesdits passe ports et lettres de voitures contiendront le lieu du départ, la quantité Chargée et la destination des poudres, et seront visées par la municipalité du lieu du chargement.
« Art. 3. Ces mêmes expéditions seront présentées aux officiers municipaux des villes de la route, pour être par eux visées : il est enjoint -expressément aux directoires de département et de district, et aux officiers municipaux, de laisser passer librement lesdits convois, de veiller à leur
sûreté, de les faire accompagner par les cavaliers de la maréchaussée, et même, si besoin est,- de fournir des escortes de gardes nationales, et de faire remettre aux régisseurs des poudres ou à leurs préposés, ou conduire à leur destination, dans les arsenaux, les poudres qui pourraient avoir été arrêtées dans leurs municipalités.
« Art. 4. Les règlements précédemment rendus relativement à la fabrication et à la vente des salpêtres et poudres du royaume, continueront provisoirement d'être exécutés selon leur forme et teneur, et les corps administratifs et municipalités veilleront à cette exécution. »
(Ce projet de décret est également adopté sans discussion.)
(de Nemours), en qualité de secrétaire, donne lecture d'une adresse des députés du commerce de France quidemandent que des forces suffisantes soient promptement mises à la mer pour la protection du commerce.
Extrait de cette adresse.—Nos places maritimes sonten alarme et notre commerce en danger. Plusieurs vaisseaux de ligne sortent des ports d'Angleterre, soixante sont en commission, ainsi que plusieurs autres; on met une activité persévérante dans les armements. Les Hollandais, de leur côté, préparent un armement redoutable. Les députés du commerce ne peuvent pas plus longtemps dissimuler leurs craintes. Notre pêche et notre cabotage occupent une grande partie de nos capitaux et l'élite de nos matelots. Il est important d'en protéger la rentrée. L'exemple de la guerre de 1756 est encore récent. On se rappelle les atteintes qu'elle a portées au commerce ; c'est au milieu des protestations d'amitié que cette guerre injuste a pris naissance et que la ruse a triomphé de la bonne foi; ce serait peut-être l'instant de jeter les regards sur nos colonies... Dans cet état d'anxiété, nous mettons en vous notre pleine confiance, et nous nous bornons à transmettre le vœu du commerce de France, pour vous engager à ordonner que toute l'étendue de nos forces soit déployée.
D'après cette adresse, le parti le plus convenable est de supplier le roi ae faire sortir un nombre suffisant de frégates pour protéger la rentrée de nos attérages, d'envoyer quelques bâtiments aux colonies, pour les avertir des intentions de nos voisins.
Non seulement il nous faut ajourner cette proposition, mais encore toutes celles relatives à cet objet. Il ne faut pas fixer notre attention sur une adresse faite par telle ou telle personne ; il faut saisir l'ensemble des grands événements; il faut calculer toutes les circonstances : on dit tantôt que l'escadre anglaise est sortie de ses ports ; tantôt qu'il faut autoriser vos commandants à déployer la force armée pour protéger vos prétendus alliés. Je ne vois en cela que des propositions isolées amenées avec plus ou moins d'adresse. (Il s élève des murmures.) Chacun a sa manière de voir. En examinant ia marche qu'on prise ceux qui prétendent' influer sur nos délibérations, je ne vois que des motifs de défiance. Ceux pour qui la guerre est le premier des besoins, parce qu'ils l'envisagent comme le plus sûr moyen de s'opposer à une révolution qui les désespère, ne voient peut-être pas du même œil que moi. On cherche de toutes parts les moyens de vous amener à un parti qui rendrait la guerre nécessaire; on vous a fait la
proposition de faire figurer à la fédération celui que le roi a nommé chef d'escadre : on a fait lecture d'une lettre qui annonce que l'escadre anglaise est sortie de Porstmouth ; aussitôt on a fait la motion de renvoyer celte lettre au pouvoir exécutif, comme si. ce n'était pas à vous qu'il appartient de délibérer sur les grandes destinées de l'Etat. On vous a fait décréter que vous secourrez ce qu'on appelle vos alliés. (Il s'élève de grands murmures dans fresque toutes les parties de lasalle.)ie n'entends parler que de guerre. Si vous adoptez le détail des mesures dont le ministère a bien calculé l'effet, on tâchera de persuader aux nations étrangères que l'Assemblée nationale est d'accord avec le ministère, et le ministère avec les cabinets étrangers. En conséquence, je fais la motion que toutes ces propositions soient ajournées, et que l'Assemblée fixe un jour où elle s'en occupera. C'est le moyen d'écarter les manœuvres de tous les ministres du monde.
Je suis surpris que dans une séance du matin et sans l'avoir annoncée, on traite une pareille question: après avoir écarté tous les obstacles au dedans, il faut en combattre de nouveaux au dehors ; il faut user de circonspection; c'est à vous à attendre le résultat des négociations commencées. N'ordonnez pas des préparatifs de guerre, au moment où l'on est occupé d'une négociation. Vous verrez ce qu'on veut tramercontre vous;maisuseztoujours déloyauté; c'est au ministre de vous prévenir de votre situation par rapport aux nations étrangères. Nous avons manifesté solennellement nos sentiments pacifiques ; cependant, si l'on nous force à faire la guerre, nous la ferons; et certes, j'ose le dire, nou s la ferons aveccourage Je demande qu'on passe à l'ordre du jour, et que lorsqu'on traitera cette question, elle soit auparavant annoncée sur le tableau.
L'Assemblée décide qu'elle passera à l'ordre du jour.
J'ai reçu de M. le premier ministre des finances un mémoire relatif aux besoins du Trésor public.
Un de MM. les secrétaires va donner lecture du mémoire. Il est ainsi conçu (1) :
« J'adresse exactement au comité des finances les bordereaux des recettes et des dépenses de chaque semaine.
« Je lui ai remis, de plus, le tableau général des recettes et des dépenses pour le mois de mai, et aujourd'hui ou demain il recevra celui du mois de juin qui vient de finir.
« Enfin, je lui ai envoyé l'aperçu des besoins et des ressources de ce mois, aperçu d'où il résulte qu'en faisant usage du fonds de caisse en entier, il faudrait pour ce mois un supplément de 35 millions. Il est donc nécessaire que l'Assemblée nationale autorise la délivrance de 45 à 50 millions, soit en billets de la caisse d'escompte portant promesse de fournir des assignats, soit en assignats mêmes à prendre sur les parties qui vont être successivement achevées, ainsi que les membres du comité des finances, nommés pour suivre cette fabrication, pourront vous en rendre compte.
« J'ai rappelé dans mon dernier mémoire à
« Anticipations à rembourser ;
« Payement d'un double semestre aux rentes;
Dépenses extraordinaires ;
« Dépérissement du produit des droits indirects.
« J'ai évalué ces quatre articles à 32 millions par mois; ils se monteront plus haut parce que les diminutions de produit sur les impôts indirects vont en croissant.
« J'ai fait observer, de plus, que les besoins des huit derniers mois de l'année n'étaient pas répartis également.
« Voici par quelles raisons ceux du mois de juillet sont plus considérables que les besoins des autres mois:
« 1° La dépense des anticipations à rembourser dans le mois de juillet sera de sept millions et demi plus forte que le terme moyen des huit derniers mois de l'année;
« 2° La supériorité des dépenses ordinaires sur les revenus ordinaires existe encore en grande partie ;
« 3° L'accroissement de solde accordé aux soldats n'est pas encore balancé par de3 diminutions sur les autres dépenses du département de la guerre;
« 4° Plusieurs dépenses qui se payent àu Trésor public et à la guerre, soit par semestre, soit par quartier, grossissent en tous temps les dépenses du mois de juillet.
« Les indices que je viens de donner suffisent pour expliquer d'une manière générale l'étendue des besoins du mois de juillet et l'examen circonstancié que le comité des finances pourra faire de tous les comptes remis entre ses mains, lui donnera le moyen de vous éclairer avec toute la précision que vous désirerez.
« Je dois faire observer encore que la contribution patriotique de province donne jusqu'à présent peu de secours, quoiqu'elle s'annonce convenablement, et ce qu'on a reçu de la contribution de Paris consiste essentiellement en co m pen sation d'arrérages.
« J'ai rappelé plusieurs fois à l'Assemblée nationale et je lui rappele encore qu'elle n'a point décrété la répartition entre les provinces du remplacement de la gabelle et du droit sur les cuirs, les fers, les amidons, les huiles, etc.; en sorte qu'on ne peut pas commencer à s'occuper du recouvrement.
« Je rappelle aussi que le Trésor public, loin d'avoir reçu le remplacement des quatre millions en vide au 1er mai sur les impositions directes par le retard de leur recouvrement, s'est trouvé depuis cette époque dans la nécessité de rembourser encore 2,450,000 livres de rescriptions sur ces mêmes impositions à défaut de moyens de la part des receveurs généraux.
« Enfin, je ne puis éviter de fixer l'attention de l'Assemblée sur la constante diminution du produit de la ferme du tabac et de la plus grande partie des impôts indirects. »
, au nom du comité des finances, propose le projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité des finances, décrète que la caisse d'escompte sera autorisée à verser au Trésor public la somme de 45 millions en ses billets portant promesse d'assignats, lesquels seront échangés
contre des assigDats-monnaie, lors de leur émission;
« Ordonne, en outre, que son comité des finances lui rendra incessamment un compte détaillé de l'aperçu spéculatif, fourni par le premier ministre des finances, des recettes et des dépenses des 8 derniers mois de la présente année, pour, sur son rapport, être pourvu définitivement à la remise du restant des 400 millions d'assignats, conformément à ses précédents décrets* »
(Ce décret est adopté sans discussion.)
Vous avez renvoyé à aujourd'hui le projet de décret sur les apprêts de la fédération générale. Je commence par vous prévenir qu'il n'est pas question d'en faire porter la dépense au Trésor public, mais seulement d'autoriser des commissaires à vérifier les pouvoirs des députés envoyés par les provinces. Je vais vous lire notre projet dè décret:
« L'Assemblée nationale, considérant qu'il est nécessaire d'établir une commission pour vérifier les titres des députés des gardes nationales et aiitres troupes qui doivent se rendre à Paris ;
« Considérant, de plus, que la municipalité de Paris n'est point organisée; que les circonstances actuelles ont même obligé d'en différer l'organisation; qu'enfin il n'existe aucune administration de département, qui puisse, aux termes des décrets constitutionnels, autoriser les délibérations qui ont été prises, tant par les cent vingt commissaires nommés par les sections, que par les sections elles-mêmes relativement à la fédération générale, indiquée au 14 de ce mois, a décrété ce qui suit :
« l°Le maire de Paris, les six commissaires nommés par le conseil de ville, et les six commissaires nommés par les cent vingt commissaires des sections, donneront les ordres de détail relatifs aux dépenses de la fédération (1).
« 2° Les cent quatorze commissaires restants vérifieront et enregistreront les procès-verbaux de nomination des députés qui se présenteront pour être admis au serment de la fédération. Ils se partageront d'ailleurs tous les autres objets de travail, auxquels la fédération pourra donner lieu.
« 3° Le maire et le commandant général de la garde nationale de Paris veilleront spécialement, en cette occasion, à la sûreté et à la tranquillité publique. »
(Ce décret est adopté sans opposition.)
présente ensuite un autre décret sur le serment à prêter à la fédération. Ce décret est adopté en ces termes :
« L'Assemblée nationale décrète que les* députés des gardes nationales et autres troupes qui viendront à Paris, pour la cérémonie de la fédération générale, indiquée au 14 de ce mois, y prêteront le serment qui suit :
« Nous jurons de rester à jamais fidèles à la nation, à la loi et au roi ;
De maintenir de tout notre pouvoir la Constitution décrétée par l'Assemblée nationale et acceptée parle roi;
De protéger, conformément aux lois, la sûreté des personnes et des propriétés, la libre
circulation desgrains et subsistances dans l'intérieur du royaume, et la perception des
contributions
« De demeurer unis à tous les Français par les liens indissolubles de la fraternité. »
Je demande la parole, pour ajouter au décret une disposition que je crois essentielle, afin de prévenir l'enthousiasme qui doit naître de la fédération générale. Je propose de décréter que l'Assemblée ne prendra aucune délibération hors du lieu de ses séances.
Cette proposition est adoptée, à l'unanimité, en ces termes :
« L'Assemblée nationale décrète que pendant la durée des cérémonies delà fédération indiquée au 14 de ce mois, elle ne recevra aucune adresse, pétition ou motion, et ne prendra aucune délibération hors du lieu ordinaire de ses séances. »
Vous n'avez pu vous occuper encore des décrets nécessaires pour fixer constitutionnellement le mode sous lequel vous correspondrez à l'avenir avec le chef suprême du pouvoir exécutif. Vous avez cru qu'il était également digne de votre zèle de ne point vous distraire des grands et importants objets soumis à vos délibérations, et d'attendre l'époque où les circonstances sembleraient exiger que vous déterminassiez les formes et l'appareil dont les représentants d'une grande nation doivent être environnés dans toutes les fêtes et cérémonies publiques. Au momentoùde toutes les parties de l'Empire les amis de la Constitution viennent jurer de la maintenir; lorsque le spectacle le plus saint, le plus imposant, le plus auguste, va consacrer vos immortelles institutions, il est de la dignité de l'Assemblée nationale et Constituante de France de ne plus dilférer de s'expliquer. Vous avez tous jugé que le premier trône du monde exigeait un grand éclat ; et vos sacrifices, pour conserver au roi des Français , toute l'étendue de magnificence qui distinguait si spécialement sa cour, ont égalé votre amour pour sa personne. Mais lorsque le chef suprême de la nation, dépositaire de toutes les forces actives de l'Empire, est assuré de toute la plénitude des hommageB et des respects, c'est à vous d'assurer aussi au Corps législatif des droits aux mêmes hommages et aux mêmes respects. Vous sentez déjà que rien ne s'opposerait davantage à cette haute considération que vous devez concilier à la nation en la personne de ses représentants, que dè continuer d'ordonner à votre président de se retirer par devers le roi, et à l'exposer, pendant cette espèce d'isolation, à être méconnu ou compromis. Vous pensez donc que l'Assemblée nationale doit être inséparable de son président ; et que deux de ses membres, députés à cet effet, seront dorénavant chargés de se retirer par devers le roi, toutes les fois que les circonstances l'exigeront. Vous êtes sans doute également persuadés qu'il est nécessaire d'achever de régler la formule des décrets, celle des acceptations et sanctions, de régler enfin le mode sous lequel seront données ces acceptations et sanctions, afin de concilier les égards dus au monarque avec la dignité du Corps législatif; et surtout, afin que vos décrets et les lettres de proclamation qui en sont la suite, ne présentent plus des expressions que la flatterie ou ia servitude pouvait avouer, mais qui ne doivent plus se retrouver dans les fastes d'une nation loyale et libre.
Je demande que ma motion soit renvoyée au
comité de Constitution auquel douze commissaires seraient adjoints pour cet effet,
Le trop grand nombre de membres, dans un comité, loin d'activer le travail n'est qu'une gêne. Quand les comités sont trop nombreux, les commissaires ont beaucoup de peine à être en nombre pour délibérer. — J'appuie donc le renvoi de la motion de M. de Delley au comité de Constitution, mais en en retranchant la partie relative aux commissaires adjoints.
(Cette proposition est adoptée.)
Le projet de décret sur lés Archives, qui se trouve le premier à l'ordrë du jour est ajourné à mardi soir.
L'Assemblée reprend la suite de la discussion des décrets proposés par le comité des finances sur toutes les parties des dépenses publiques.
, rapporteur. Avant de passer à l'administration du Trésor public, le comité croit devoir vous occuper des payeurs des rentes. Il y a 40 payeurs dés rentes. Leur finance est de 600,000 livres avec les retenues. Les frais de réception sont d'environ 20,000 livres.
Ils ont de taxation, 12,000 livres . . 480,000 1.
Pour frais de bureau, 3,000 livres . 120,000
Quarante contrôleurs ont de droit d'exercice, 3,000 livres...... 120,000
Epices et frais de comptes......572,000
Total............. 1,292,000 1.
Les payeurs des rentes ont un travail épineux et une responsabilité qui les expose à de grands risques. L'ordre le plus sévère est établi dans cette partie. Il n'y a d'économie à y chercher que celle qu'on atteindra, en les chargeant de tout ce qui peut être payé par eux ; mais on trouvera une grande réduction sur lés épices et frais de compte. Le comité ne peut fixer ce qu'il en coûtera pour la comptabilité dans le nouvel ordre de choses : et ce n'est que par aperçu qu'il indique ici une économie de 400,000 livres.
présente un projet de décret, dont le premier article a pour objet de fixer à Paris le lieu du paiement des rentes de toute espèce, soit sur le clergé, soit sur les pays d'Etats, etc.
Il est impossible que des gens placés dans les provinces viennent recevoir leur argent à Paris ; il est impossible que des officiers de magistrature viennent retirer à Paris le montant de la finance de leurs offices ; d'ailleurs ces paiements se faisaient sans frais dans les provinces, tandis qu'il faudrait envoyer des procurations, et outre cela perdre pendant longtemps l'intérêt du capital que l'on aurait perçu à la prémière réquisition. Je demande donc la question préalable sur ce premier article.
Les réflexions que fait M. d'André ne me laissent presque rien à dire; j'ajouterai cependant que plusieurs personnes, en prêtant aux provinces ou au clergé, ont mis, dans leur prêt, la clause expresse qu'elles seront payées dans leurs provinces. Les contrats doivent être exécutés. J'appuie la motion de M. d'André.
Je fais observer à l'Assemblée na-
tionale que le paiement des 'intérêts à Paris réclame des soins, des dépenses et des difficultés de correspondance pour les rentiers qui habitent les provinces.
J'ai entendu mes commettants se plaindre^ sou-ventde ces difficultés et de ces bordereaux qui diminuent toujours le montant des rentes ; voulez-vous détruire l'agiotage d'un seul coup ? Ordonnez que les intérêts et les rentes seront payés dans chaque district.
Ce n'est pas que je propose de payer subitement de cette manière. Il faut dans ce moment que le paiement se fasse aujourd'hui comme auparavant, mais provisoirement ; et je demande qu'on organise ce mode de paiement et qu'en attendant on ajourne le projet ae décret.
Il est un objet très instant à régler, c'est le payement des rentes des pays d'Etats, qui doit être fait sur les lieux pour assurer les caisses qui doivent payer. Je demande que le comité présente un projet de décret sur cette matière.
, député de Saint-Jean-d'Angély. Lorsqu'on vous présentera un travail sur les finances, vous réglerez sûrement les arrérages delà dette publique et des rentes. Il ne s'agit en ce moment que de fixer un traitement provisoire aux payeurs des rentes ; et je ne Vois pas pourquoi vous rendriez un décret définitif. Je vous propose de décréter le renvoi du projet qui vous est soumis, et d'ordonner qu'on vous remettra incessamment Celui d'un traitement ultérieurement déterminé.
Je suis d'avis què l'on ajourne le projet de décret, mais que l'on délibère sur le traitement des payeurs de rentes .En conséquence, je demande qu'il leur soit alloué 100 pistoles par mois.
L'ajournement proposé est décrété.
La motion de M. d André est décrétée en ces termes :
« La taxation de chaque payeur des rentes sera provisoirement fixée à 12,000 livres, et les frais de bureau seront de 3,000 livres. »
— Un de MM. les secrétaires fait lecture de detix lettres ; la première, adressée par le ministre de la guerre, a pour objet diverses dépenses particulières de l'arriéré de ce département; la seconde, de M. le contrôleur général, est relative à l'abonnement des droits de contrôle et droits y joints. En Artois, la ferme de ces droits est prête à expirer. Gommé le département du PasL ae-Galais n'est pas encore organisé, et que son organisation pourrait être reportée à une époque un peu éloignée, les députés d'Artois se sont adressés à ce ministre pour demander que les anciens administrateurs fussent autorisés à procéder provisoirement à une nouvelle adjudication de ces droits. M. Lambert appuie cette demande, en en donnant connaissance à l'Assemblée. €es deux lettres sont renvoyées au comité des finances.
La séance est levée à deux heures et demie.
A LA SÉANCE DE L'ASSEMBLÉE NATIONALB DU
CONFÉDÉRATION GÉNÉRALE (L).
Rapport des commissaires nommés par la municipalité de Paris.
L'Assemblée nationale, en décrétant le pacte fédératif, qu'elle a fixé au 14 juillet, a voulu qu'un serment auguste et public, réunissant, au même instant, tous les citoyens d'un même empire, les liât d'un nœud indissoluble et les associât a la conservation de l'ouvrage qu'elle va terminer et qui assure la liberté et le bonbeur de tous les Français.
Cette cérémonie imposante, qui appelle et rassemble dans la capitale les députés de tous les départements et de toutes les troupes du royaume ; ce spectacle superbe d'une nation tout entière qui vient librement renouveler ses engagements ae fraternité mutuelle, et de fidélité à la loi, devrait, s'il était possible, avoir pour témoins tous les habitants de l'univers.
Le premier devoir des commissaires nommés par la municipalité et par la commune de Paris, pour veiller aux préparatifs de cette fête, était onc de la fixer dans un lieu vaste, qui, réunissant l'espace à la proximité, présentât le plus de facilité et d'économie pour les dispositions et le plus d'étendue dans ses dimensions.
Quatre endroits différents ont été proposés :
La plaine de Saint-Denis ;
La plaine de Grenelle;
La plaine des Sablons ;
Le champ de Mars.
Les moissons abondantes dont les deux premières sont chargées n'ont pas permis de s'arrêter longtemps sur cette idée. L'avantage que ces plaines pouvaient promettre aurai t. été acheté par un sacrifice trop coûteux et trop pénible, puisqu'il fallait enlever au cultivateur le prix de son travail et l'espérance de sa récolte. En vain a-t-on osé dire que des indemnités pouvaient le consoler de ses perles; ce système oppresseur, pris dans l'ancien code des chasses ; ce système qui, pour le plaisir d'un moment, dévore le bien d'une année, et qui, dans ses calculs infidèles, ruine celui qui dédommage et ne remplace jamais, pour le propriétaire ni pour la société, les productions dont il les prive, ne pouvait être adopté pour une fête, où le premier serment des citoyens était de maintenir la liberté et de respecter les lois et surtout les propriétés.
Il ne restait donc à choisir qu'entre la plaine des Sablons et le champ de Mars.
La première, cultivée en partie, offrait les mêmes inconvénients; cependant le genre de productions dont elle est couverte, aurait, peut-être, permis un sacrifice, si l'on eût trouvé le dédommagement dans les dimensions qu'elle présentait ; mais, plus éloignée de Paris, irrégu-lière dans sa forme, beaucoup plus étroite dans un de ses côtés que dans l'autre, elle donne, d'après les mesures qu'on a prises, une superficie moindre que le champ de Mars.
Le champ de Mars, dont le nom appelle une fête militaire, orné de quatre rangées d'arbres intérieures et de quatre autres extérieures, terminé d'un côté par un bâtiment vaste, qui offre des ressources ; de l'autre, par un superbe amphithéâtre, qui semble placé exprès pour réunir sans fatigue et sans danger un nombre considérable de spectateurs, qui ne contient ni récolte ni production, qui est dans l'intérieur des murs de la ville, et ne porte pas à une trop grande distance, ni les citoyens que leur curiosité attire, ni les troupes qui veillent à leur sûreté et à.leur tranquillité, rassemble tous les avantages que la prudence pouvait désirer; et c'est le lieu, qu'après un long examen, les commissaires ont cru devoir choisir.
Pour l'arranger et le décorer d'une manière convenable, ils ont sollicité les secours de l'art et le génie des artistes. Tous ont été invités à faire hommage à la patrie de leurs idées, et c'est avec le plus grand plaisir qu'ils ont vu le zèle dont étaient pénétrés tous les artistes de la capitale et le noble enthousiasme dont ils étaient animés. Tout ce que l'architecture a de luxe et de beautés ; tout ce que l'imagination a de grandeurs, tout ce que les arts peuvent réunir a été déployé dans les plans qui leur ont été présentés, et c'est avec regret que leur économie et leur prudence leur a commandé le sacrifice de la plupart d'entre eux. Mais, dépositaires de la confiance de leurs concitoyens, obligés d'êtré sévères sur les dépenses, et devant laisser à cette fête ce ton de simplicité qui lui convient si bien, il a fallu que leur cho x sur les préparatifs fût dicté par ces principes ; il a fallu que, dans là fnUltitude des propositions qui ont été faites, ils préférassent celles qui joignaient la commodité à la sagesse et à la sûreté,. Aussi, corrigeant un plan par un autre, empruntant successivement tout ce qui pouvait seconder leurs vues et celles de la commune, le plan qu'ils ont arrêté n'est-il, pour ainsi dire, qu'un résultat, et est composé des idées qu'ils ont puisées dans tous les dessins qu'on a mis sous leurs yeux.
On n'a employé de charpente que celle qui était indispensablement nécessaire et dont on pouvait répondre. On a supprimé les échafauds pour le public, parce que, construits à la hâte et établis pour un temps fort court, la négligence qu'on y met, quand on les multiplie, entraîne presque toujours des accidents et mêle, à presque toutes les fêtes, des souvenirs funestes. Mais, pour conserver à l'enceinte qui réunira les spectateurs l'avantage que donnent les amphithéâtres et les mettre tous à portée de voir également, on a formé, autour du champ de Mars, un glacis en terre, qui, graduellement élevé, portera trente rangs de gradins dans tous les pourtours et fournira cent soixante mille places commodes, où seront assis tous les citoyens. Ce moyen, en conservant tout l'agrément des échafauds, prévient le danger de leur élévation, et s'oppose à l'indiscrétion de ceux qui, par désœuvrement ou par tout autre motif, se glissant sous les gradins, inquiètent souvent ceux qui sont assis, et les tourmentent d'un sentiment pénible. Le reste du glacis, pouvant contenir cent mille personnes et plus, debout, fera du champ de Mars une salle immense qui, indépendamment de l'Assemblée nationale, du roi, de toute la cour, des députés des différentes communes et de tous ceux qui seront nécessaires à la fête, rassemblera environ trois cent mille spectateurs.
Ces glacis sont exécutés par les ateliers publics, composés d'ouvriers pris dans toutes les sections
et journellement payés par le gouvernement. Ainsi, en diminuant la dépense déjà établie, ces préparatifs, devenus moins dispendieux, seront l'ouvrage des citoyens que la capitale renferme.
Un autel simple, posé sur un stylobate carré, élevé de vingt-cinq pieds, et posé sur de larges gradins, fera la noble et simple décoration de ce temple.
Un arc de triomphe le fermera et sa plus belle parure, son luxe le plus pompeux sera une foule immense d'hommes libres, qui, n'étant enfermés dans aucuns murs, et n'ayant rien qui les cacbe au ciel qui les écoute, seront témoins et acteurs de cette scène superbe et joindront au serment qu'on prononcera devant eux ies transports d'une véritable ivresse et les cris de la reconnaissance.
Quant à la sûreté intérieure et extérieure, ii n'est pas de soins que les commissaires n'aient cru devoir prendre. Il n'est aucun endroit qui n'ait été examiné, aucun souterrain qui n'ait été / visité ; et les différentes sections de Paris sont priées de vouloir bien nommer chacune un commissaire qui, deux jours avant la fête, vienne examiner le lieu et les préparatifs, réunir sa vigilance à celle des commissaires et ajouter les précautions qu'il croira nécessaires, s'il en est qui soient échappées à leur prévoyance.
Tels sont les motifs qui ont guidé les commissaires, les raisons qui ont déciaé leur choix et les précautions qu'ils ont cru devoir prendre pour la préparation du lieu où sera établie la fête. Pour l'ordre, la marche et les détails, on publiera incessamment le programme qui doit les contenir et qui n'est retardé que par l'immensité des soins, des préliminaires et des arrangements dont il faut s'occuper.
Par cet exposé simple et dont les circonstances ordonnent la brièveté, tous les citoyens jugeront quelle confiance on doit avoir aux calomnieuses imputations, aux dangereux rapports répandus avec une coupable profusion dans le public.' Les commissaires ne répondront pas à ces nombreux écrits dictés par des intérêts bien opposés à l'intérêt public. La vérité et la tranquillité de leur conscience seront leur seule réponse.
Signé : ChahON, president de Ic cmtmne pour fe pacle federatif; Xvrii, Pons de YEKDUN. J.-L. I)K(JUS>K, JALLIER, A.-C.-F. Cuampiun, Mmis, CEle- luua, lbMit, de Dourges, Desmccs- beaux, l.ti-isse, lout comniusart nomtnts pcur le pacle fedirctif.
Séance du
, président, ouvre la séance à neuf heures du matin.
lit le procès-verbal de la séance de samedi soir, 3 juillet.
Je réclame contre la
Aucun secrétaire ne se permet de rédiger Tes décrets; notre mission est de les transcrire dans les termes où ils sont adoptés; c'est ce que j'ai fait, pour mon compte, dans le procès-verbal incriminé.
L'observation de M. Delley-d'Agier est fort juste. Je demande que le procès-verbal soit adopté sans modification.
met le procès-verbal aux voix ; il est adopté.
, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier 4 juillet.
Je propose d'ajouter à la formule du serment qui sera prêté à la fédération civique, la disposition suivante : « Nous jurons de ne jamais prendre les armes pour une querelle de religion. » L'exemple récent d'un de nos départements me dispense de commentaires pour justifier ma motion.
l'aîné. Les guerres civiles occasionnées par les différences de religion ont toujours été les plus sanglantes et les plus implacables ; j'appuie donc l'amendement.
La rédaction présentée par M. de Tracy est beaucoup trop vague pour qu'elle puisse être adoptée; elle irait à l'en contre du but que veut atteindre son auteur; en effet, les soldats lu régiment de Guyenne qui ont résisté aux soi-disant catholiques de Nîmes pourraient être considérés comme ayant pris les armes pour uu trouble religieux. Ge serait l'anarchie dans le désordre.
Je demande le renvoi au comité de Constitution.
Le renvoi est prononcé.
Le procès-verbal est adopté.
J'ai reconnu l'exactitude du procès-verbal, et je n'ai pas cherché à m'élever contre s* rédaction ; C'est donc par une motion spéciale que je demande à l'Assemblée d'ordonner au comité des finances de nous présenter incessamment un état complet des employés dans les divers départements.
J'appuie la motion en la complétant, car je réclame un tableau comparatif des appointements en 1740, 1760 et 1790.
La motion étant appuyée, elle est mise aux voix et le décret suivant est rendu :
« L'Assemblée nationale décrète ce qui suit :
« Le comité des finances sera tenu de faire imprimer, avant de présenter ses rapports sur l'état des employés dans les divers départements, le détail de la composition des bureaux, telle qu'elle est actuellement, telle qu'elle était en 1788, et telle qu'elle fut trouvée à deux époques antérieures, distantes de dix années au moins l'une de l'autre. »
L'un de MM. les secrétaires lit une adresse dans laquelle les commissaires du roi pour le départe-
ment de la Charente-Inférieure dénoncent à l'Assemblée nationale des violences dont ils ont été menacés vers la fin de leur mission. Cette adresse est renvoyée au comité des rapports. En voici un extrait :
« Les commissaires du roi du département de la Charente-Inférieure n'avaient éprouvé aucune défaveur; ils croyaient avoir atteint la fin de leurs travaux, puisque l'Assemblée doit clore demain ses séances, lorsqu'un événement dont les suites pourraient devenir fâcheuses, a troublé leurs opérations. Les commissaires du roi s'étaient partagé leurs districts pour accélérer leur formation ;M. Co-qué, l'un d'eux, était chargé de celui de Saint-Jean-d'Angély ; il a cherché à se concerter avec les électeurs de ce district, pour fixer le jour auquel il conviendra de se réunir dans le chef-lieu. Un très grand nombre lui demandèrent le dimanche 4 juillet; il se prêta d'autant plus volontiers à cet arrangement, qu'il était convenu avec M. Valentin que le mardi 6, on procéderait à la nomination dés officiers municipaux, ainsi qu'il est ordonné par l'Assemblée nationale. Mais M. Valentin , à qui cette disposition sans doute ne convenait pas, et qui voulait faire organiser la municipalité avant le district, voulut ensuite, fiar de sollicitations, et bientôt par des menaces, e déterminer à changer le jour marqué. Comme M. Coqué fut inébranlable, une trentaine de volontaires de Saint-Jean-d'Angély, qui se trouvaient ici, imaginèrent sans doute qu'on lui en imposerait. Ils s'oublièrent jusqu'à lé menacer de le massacrer, lui et les électeurs, s'ils se présentaient au jour indiqué. Si les circonstances l'exigent, les commisssaires prendront les ordres de l'Assemblée nationale. »
, président, annonce que le résultat du second tour de scrutinélèveM. de Bonnay à la présidence : les voix se sont réparties de la manière suivante :
M. de Bonnay.................307
M. de Menou................................101
M. de La Rochefoucauld..........82
M. de Cazalès........................47
, avant de quitter le fauteuil, dit :
« Messieurs,
« Lorsque j'ai accepté le pénible honneur auquel m'ont appelé vos suffrages, pénétré de mon insuffisance, je n'ai pu que vous offrir l'hommage de mon zèle et de mon dévouement à vos ordres.
« Aujourd'hui, je dois vous exprimer un nouveau sentiment: vos bontés ont accueilli mes efforts; et ce qui me manquait, j'ose le dire, vous avez daigné, Messieurs, y suppléer par votre indulgence.
« Une époque à jamais célèbre dans les annales de la liberté appelle toute la France à la plus touchante cérémonie : en vain quelque nuages rassemblés et grossis par des souffles malfaisants obscurcissent au loin l'horizon de cette fête civique... Non, ils ne se formeront point en orage, et les premiers rayons de ce beau jour les disperseront aisément.
« Dans un moment où la nation et le roi resserreront encore le lien qui les unit, où les souvenirs les plus amers vont se perdre dans le bonheur d'une allégresse fraternelle ; dans un moment enfin, où il n'y aura plus qu'un parti, vous avez voulu, Messieurs, qu'on revît à votre tête un de
nos collègues qui toujours a su tempérer ce que chaque parti pouvait avoir d'extrême et d'exagéré : constamment distingué par un esprit de maturité, de sagesse et de conciliation, il vous a paru digne de cette place et de cette circonstance ; et, sous tous les rapports, il devait vous inspirer le désir de mettre à cette seconde épreuve des talents si avantageusement connus par un premier succès. »
prend place au fauteuil et s'exprime en ces termes : « Messieurs,
« La nouvelle marque de confiance dont vous m'honorez ne m'inspirera point une présomption déplacée; et l'éclat de la circonstance, en ajoutant à ma reconnaissance pour vos bontés, ne m'aveuglera point sur vos véritables motifs.
« J'ai peut-être eu le bonheur de vous donner quelques preuves de zèle ; et vous avez voulu les récompenser.
« Je vous ai montré une exactitude rigide à faire observer les lois de votre police intérieure ; et vous avez senti qu'au moment où vous alliez paraître, j'oserai dire aux yeux de la France entière, il était plus nécessaire que jamais de respecter avec scrupule des règlements que vous avez faits, et que vous ne pouvez enfreindre qu'au détriment de vos travaux et de votre gloire.
« Enfin, Messieurs, vous avez peut-être espéré que parmi ies fautes que vous aurez encore à me pardonner, je pourrais, à l'aide de mon premier essai, éviter au moins celles de l'inexpérience.
« Tels sont les titres sans dopte auxquels je dois vos suffrages ; mais si l'honneur que j'ai déjà eu de les obtenir, si l'indulgence que vous avez alors daigné m'accorder me donnent aujourd'hui le droit de vous parler avec quelque franchise, j'oserai vous dire, Messieurs, que jamais l'Assemblée nationale n'est si auguste, qu'elle n'obtient jamais mieux le respect et la confiance, que, lorsqu'attentive et recueillie, elle écoute froidement les discussions, permet les opinions les pl us opposées, et que du sein d'une délibération réfléchie, elle fait sortir ces décrets dont la sagesse persuade tous les esprits-
« Qu'il me soit permis, Messieurs, de vous inviter, au nom du bien public qui souffre de nos moindres fautes, de nos moindres pertes de temps, au nom de la nation qui attend dè vous son bonheur, au nom de la liberté que vous êtes venus établir, de vous inviter, dis-je, à l'ordre et à la paix.
« Les circonstances exigent impérieusement le sacrifice de toutes les rivalités, et la réunion de tous les bons esprits. Il est temps, il est nécessaire que tous les membres de l'Assemblée se rapprochent, qu'ils marchent tous au même but; et ce but doit être le bien général.
« J'y concourrai moi-même, Messieurs, en m'efforçant constamment de diriger vers lui la marche de vos délibérations. Je serai secondé par vous; et cette pensée peut seule me donner la confiance que j'ai besoin pour parcourir de nouveau une carrière difficile. Mais si, dans quelques moments orageux, le choc des passions se faisait encore entendre, s'il allait jusqu'à troubler l'ordre que vous désirez tous, et que vous m'ordonnez de maintenir, si des volontés du moment et passagères s'opposaient à l'exécution de vos Volontés réfléchies et constantes, alors. Messieurs, fort de vos propres lois, fort de ma conscience et des intentions que je vous connais, je saurais en appeler de l'Assemblée nationale à elle-même, et
je ne craindrais point d'encourir sa défaveur d'un moment pour mériter à jamais son estime. »
(Ces deux discours sont fort applaudis.)
L'Assemblée vote des remerciements unanimes à M. Le Pelletier pour sa présidence.
Le premier objet à l'ordre du jour est la discusssion. du nouveau projet du comité de Constitution sur l'ordre judiciaire (1).
, rapporteur. Messieurs, l'ordre judiciaire était si dénaturé en France que le comité a cru devoir faire précéder son travail d'un titre qui pût convenir à tous les tribunaux, à tous les juges. C'est ainsi que vous avez placé en tête de la Constitution la déclaration des droits de l'homme et du citoyen.
Je vais vous donner lecture de l'article 1er.
TITRE PREMIER.
Des juges en général.
Art. 1er. La justice sera rendue au nom du roi.
Il n'est pas dans les principes de dire que la justice est rendue au nom du roi ; c'est au nom de la société entière, et même sous l'ancien régime, le nom du roi n'intervenait que lorsqu'il s'agissait de rendre les jugements exécutoires.
Votre sagesse a prévenu les inconvénients de cette expression trop vague. D'après les décrets rendus, il ne reste aucun doute sur son véritable sens; vous avez statué que ni l'Assemblée nationale, ni le roi ne pourraient rendre aucun jugement. Il y a une seconde maxime ; c'est qu'il n'existera plus de juges seigneuriaux ; d'après cette explication, il ne reste plus de difficulté, et je demande qu'on aille aux voix.
Je demande au rapporteur : 1° si, en conséquence de cette disposition, les jugements seront intitulés, comme ci-devant, au nom du roi ; 2° si, à côté de chaque tribunal, il y aura comme ci-devant, une chancellerie, dont l'inutilité me paraît démontrée ; 3° si, en conservant le principe, on ne pourrait pas inscrire en tête des jugements les noms des juges qui les auraient rendus ?
Le comité s'est borné, à cet égard, à transcrire les dispositions déjà décrétées par l'Assemblée.
Je ne connais pas de monarchie dans laquelle la justice ne soit pas rendue au nom du roi.
(L'article 1er est adopté sans changement.)
, rapporteur. Vous avez déjà adopté les articles 2, 3 et 4. J'en donne lecture:
« Art. 2. La vénalité des offices de judicature est abolie; les juges rendront gratuitement la justice, et seront salariés par l'Etat.
« Art. 3. Les juges seront élus par les justiciables.
(Ces articles sont décrétés de nouveau sans discussion).
, rapporteur. L'article 5 contient une disposition nouvelle, mais qui est une conséquence des articles précédents. Le comité a pensé que, puisque le peuple nommait ses juges, il convenait qu'il ne fût pas sans cesse convoqué pour des élections nouvelles que la mort, la démission des juges nécessiteraient souvent: l'établissement des suppléants pare à cette difficulté : il n'a pas plus d'inconvénients dans l'ordre judiciaire que dans l'ordre représentatif. Le comité a pensé que le second avantage de ces suppléants serait de remplacer momentanément les juges qui seraient forcés de s'absenter. Voici l'article tel que nous vous le proposons :
Art. 5.11 sera nommé aussi des suppléants qui, selon l'ordre de leur nomination, remplaceront, jusqu'à la prochaine élection, les juges dont les places viendront à vaquer dans le cours des six années ; une partie sera prise dans la ville même du tribunal, pour servir d'assesseurs en cas d'empêchement momentané de quelques-uns des juges. »
L'ancien usage des tribunaux était de remplacer les juges forcés de s'absenter par des gradués; je ne vois aucune nécessité de déroger à cet usage.
Le comité a considéré qu'il était préférable que les suppléants fussent revêtus d'une mission du peuple.
Je demande qu'après le mot empêchement on ajoute celui de légitime, afin que les juges ne négligent pas leurs devoirs pour leurs plaisirs.
l'aîné. Je demande qu'en l'absence des suppléants, les gradués soient appelés comme dans l'usage établi jusqu'à présent.
Il faut dire dans l'article que tous les suppléants seront pris dans la ville.
Je considère tous ces amendements comme inutiles et je propose la question préalable. Les amendements sont rejetés. (L'article 5 est adopté sans changement.)
, rapporteur. L'article 6 est ainsi conçu :
« Les juges élus et les suppléants, lorsqu'ils devront entrer en activité, recevront du roi des lettres patentes, scellées du sceau de l'Etat, lesquelles ne pourront être refusées, et seront expédiées, sans retard et sans frais, sur la seule présentation du procès-verbal d'élection. »
Il faut distinguer deux sortes d'activité que peuvent avoir les suppléants, l'une permanente et l'autre momentanée. L'article du comité ne fait aucune distinction entre deux cas si différents.
Les parties out toujours intérêt à connaître le nom des juges, parce que la patente
d'un juge et de l'une des parties est un moyen de cassation. L'article ne s'explique pas à ce sujet.
Rien ne justifie l'observation du préopinant, puisque l'article ne porte pas que le procès-verbal de l'élection des suppléants doive être séparé.
Le mot suppléants est en trop dans l'article. J'en demande la suppression.
Je crois que nous lèverions toutes les difficultés en introduisant dans l'article le membre de phrase suivant : « Après la mort ou démission des juges. »
Cette modification est adoptée, et l'article 6 est décrété ainsi qu'il suit :
« Art. 6. Les juges élus et les suppléants, lorsqu'ils devront entrer en activité après la mort ou la démission des juges, recevront du roi des lettres patentes scellées du grand sceau, lesquelles ne pourront être refusées, et seront expédiées sans retard et sans frais, sur la seule présentation du procès-verbal d'élection ».
, rapporteur. Je donne lecture de l'article 7 qui porte :
Les lettres patentes seront conçues dans les termes suivants : Louis, etc.
Les électeurs du « district de.... (ou du ressort du tribunal d'ap« pei de....), Nous ayant fait présenter le procès- « verbal de l'élection qu'ils ont faite, confor-« mément aux décrets constitutionnels, de la « personne du sieur.... pour remplir, pendant « six années, un office de juge dans le district de.... (ou dans le tribunal d'appel de....), « Nous avons déclaré et déclarons que ledit « sieur.... est juge du district de.... (ou du tri-« bunal d'appel dé....)*, qu'honneur doit lui être « porté en cette qualité ; et que la force publique « sera employée, en cas de nécessité, pour l'exé-« cution des jugements auxquels il concourra, « après avoir prêté le serment requis et avoir « été dûment installé. »
L'article 7, par sa formule dénonciation, préjuge la question qui n'est pas résolue de savoir si, oui ou non, il y aura des tribunaux de district. Je demande la suppression de cette partie de l'article.
L'observation est fondée ; en conséquence, nous vous proposons d'adopter l'amendement et de rédiger l'article ainsi qu'il suit :
Art. 7. Les lettres patentes seront conçues dans les termes suivants :
« Louis, etc., les électeurs............. Nous ayant fait présenter le procès-veroal d'élection qu'ils ont faite, conformément aux décrets constitutionnels, de la personne du sieur........., pour remplir, pendant six années, un office de juge........... Nous avons déclaré et déclarons que ledit sieur........... est juge du. ........qu'honneur doit lui être porté en cette qualité, et que la force publique sera employée, en cas de nécessité, pour l'exécution des jugements auxquels il concourra, après avoir prêté le serment requis et avoir été dûment installé. »
, rapporteur. Voici l'article 8 :
« Les olficiers chargés des fonctionsduministère public, seront nommés par le roi et ne pourront
être dépossédés que pour forfaiture- dûment jugée par juge compétent.
J'observe qu'il faut énoncer dans l'article une autre disposition constitutionnelle, déjà décrétée, qui distingue entre les juges qui sont élus à temps et entre les officiers du ministère public qui doivent être à vie.
J'ai à présenter une autre observation sur ce même article 8, c'est que le mot dépossédés est impropre comme dérivant des funestes idées de propriété que la vénalité avait amenées dans les offices.
Ces deux amendements sont adoptés.
L'article est décrété en ces termes :
« Art. 8. Les officiers chargés du ministère public seront nommés « à vie » par le roi, et ne pourront être destitués que pour forfaiture dûment jugée par juge compétent.
, rapporteur. L'article 9 porte :
« Art. 9. Nul ne pourra être élu juge, ou suppléant, ou chargé des fonctions du ministère public, s'il n'est âgé de trente ans accomplis, et s'il n'a été pendant cinq ans juge ou homme de loi exerçant publiquement auprès d'un tribunal.»
On a oublié les procureurs, cette classe d'hommes qui ne sont pas indignes de l'éligibilité, puisque, par la jurisprudence de plusieurs cours, ils ont postulé un certain temps.
Je demande qu'on ait égard aux dispenses d'âge accordées à des personnes qui ont été juges et qui n'ont pas encore 30 ans.
Je réponds à M. Pellerin que le comité a employé le terme générique d'homme de loi et non d'avocat, parce que l'Assemblée n'a pas encore jugé si l'ordre des avocats serait conservé et que le comité présentera un article détaillé sur cet objet, avant les exceptions.
Quant aux juges actuels par dispense d'âge que le comité a cru ne pas devoir proposer à l'Assemblée, c'est parce que cela est contraire aux principes constitutionnels; quant au mot homme de loi, nous l'avons choisi afin de n'employer, dans les articles de la Constitution, que des éxpressions génériques.
Pour se conformer aux principes de la Constitution, il faut appeler tous les citoyens aux places de la magistrature et dire, en conséquence, hommes capables et instruits.
Je crois, comme le préopinant' qu'il est conforme aux priucipes de la Constitution* que tout citoyen soit appelé à être juge. Mais examinons s'il y a des objections propres à faire oublier le principe constitutionnel. Il y a beaucoup d'hommes qui ont exercé l'état d'homme de loi pendant cinq, dix, vingt ans, et qui n'entendent pas mieux les lois. Il y en a, au contraire, qui n'ont pas étudié les lois et qu'on choisit tous les jours pour arbitres et qui jugent fort bien. Vos juges de paix ne pourront pas être nommés dans la suite juges dans les tribunaux, si vous n'y appelez que les hommes de loi; aussi j'appuie l'amendement de M. de Folleville.
Ce qui est le plus conforme à la
Constitution est le plus raisonnable. Il est souverainement déraisonnable de confier les fonctions qui supposent des connaissances acquises à des hommes qui n'ont pu les acquérir. La Constitution appelle tous les citoyens, cela est vrai; mais elle ne dit pas que tous ont la même aptitude à être juges.
Tout citoyen peut aspirer à toutes les places ; mais il faut des dispositions pour les bien remplir. Vous ne voulez pas sans doute qu'un avocat soit homme de mer et qu'un artiste soit homme de loi.
On suppose la coalition dangereuse des hommes de loi ; mais ce sont eux qui se sont liés à la cause publique contre les cours quand il s'est agi de l'aristocratie, comme ils s'étaient réunis aux cours quand il s'agissait de soutenir la cause publique contre 1e despotisme.
Je n'ai pas entendu inculper les avocats.
Je sais bien qu'il y a beaucoup de gens dans le monde qui font très mal leur métier et parmi les magistrats et parmi les avocats ; mais cela ne prouve pas qu'il faille ouvrir les tribunaux à des hommes qui n'ont jamais étudié les lois,surtout dans un royaume où elles sont si obscures et si compliquées. J'adopte l'article en substituant aux mots homme de toi, un terme plus déterminé et moins générique.
Je regarde comme très dangereux de ne pas fixer l'éligibilité aux hommes de loi dans cette première électiôn ; mais je pense qu'il serait très impolitique de fairè un article constitutionnel d'une limitation quelconque. Je propose de ne pas adopter l'article quant à présent.
Les propositions de MM. de Folieville et d'André sont inacceptables ; elles ne tendent à rien moins qu'à vous faire décréterque pour être magistrat politique, religieux ou civil, il n'y aura plus d'examen ni d'études préalàbles. On vous propose de décréter qu'un homme de loi pourra exercer une place dans la marine. Il en sera de même pour les autres fonctions publiques: on vous propose encore de renverser ce que vous avez établi, car vous avez exigé que pour être propre à une place il fallait avoir fait des études et rempli des fonctions analogues. En discutant les règles des corps administratifs et municipaux, vous avez rejeté, une foule d'amendements de ce genre. Je conclus à la question préalable sur les diverses motions qui viennent d être faites et à l'adoption pure et simple de l'article du comité.
, député de Saint-Jean d'Angély. Je demande une exception pour l'amendement de M. Mougins ; vous avez eu à votre tête un président au parlement dont vous avez eu à vous louer, et peut-être il n'a pas trente ans.
On doit faire les lois pour les choses, et non pour les personnes. Dans tous les cas, j'observe que j'ai plus de trente ans.
La discussion est clpse.
Les amendements sont tous rejetés.
L'article 9 présenté par le comité est adopté sans changement.
, rapporteur. Voici la teneur de l'article 10 :
« Les juges ne pourront prendre directement ou indirectement aucune part à l'exercice du pouvoir législatif, ni empêcher ou suspendre l'exécution des décrets du Corps législatif sanctionnés par le roi, à peine de forfaiture. »
Dans la rédaction de cet article on a préjugé une grande question, car il en résulterait que les juges ne pourraient pas être députés à l'Assemblée nationale, ce que vous n'avez pas encore décidé. Je propose de dire : Les juges ne pourront, dans leurs fonctions, etc.
Il me semble que pour prévenir toute équivoque sur l'esprit de l'article, il suffirait de dire simplement : Les tribunaux, etc.
Cet amendement est adopté et l'article 10 décrété ainsi qu'il suit :
Art. 10. « Les tribunaux ne pourront prendre directement ou indirectement aucune part à l'exercice du pouvoir législatif, ni empêcher ou retarder l'exécution des décrets du Corps législatif sanctionnés par le roi, à peine de forfaiture.
L'article 11 est décrété, sans discussion, dans les termes du projet ainsi qu'il suit :
Art. 11. « Ils seront tenus de transcrire purement et simplement sur leurs registres, et de publier, dans la huitaine, les lois qui leur seront envoyées. »
, rapporteur, lit l'article 12 en ces termes :
« Ils ne pourront point faire de règlements ; mais ils adresseront leurs représentations au Corps législatif, toutes les fois qu'ils croiront nécessaire soit d'interpréter une loi, soit d'en faire une nouvelle. »
L'observation que j'ai à faire porte simplement sur la rédaction. Par la manière dont l'article est rédigé, il semble donner aux tribunaux le droit de représentation. Si par ce droit de représentation on entend celui de pétition, il était inutile d'en faire une application particulière aux juges, puisque c'est un droit qui appartient à tous les citoyens ; mais je ne crois pas que ce soit là le sens de l'article. Le comité a prévu le cas où les juges, trouvant la loi obscure, voudraient recourir au pouvoir législatif : ce ne peut être par des représentations que ces observations soient exprimées; il serait dangereux d'accorder à un tribunal un droit de représentation, qui serait un droit de résistance. Sans doute, les juges ne seraient pas dispensés de publier la loi ; mais, dans leur sens, ils se croiraient peut-être dispensés de s'expliquer sans délai. Je propose de rédiger ainsi cet article : « Ils ne pourront point faire de règlements, mais lorsque les lois leur paraîtront insuffisantes ou obscures, ils s'adresseront au Corps législatif pour obtenir, soit une interprétation, soit une loi nouvelle. »
J'appuie les sages réflexions du préopinant ; mais je crois qu'on peut en présenter d'autres qui importent également à la liberté pu-i blique. Ce n'est point assez d'empêcher les représentations, il faut encore prévenir les interprétations. Je pense donc qu'on pourrait ajouter à l'article ces mots : « ni interpréter une loi, ni , l'étendre d'un cas à un autre ; ni prononcer sur un cas qui ne serait pas prévu par la loi. » Pour appuyer mon observation, je vous prierai de ne pas perdre de vue ce principe: Le juge doit appliquer la loi au fait qui lui est dénoncé ; s'il n'y a
pas de loi sur ce fait, et qu'il prononce, son jugement est une loi.
J'adopte cet amendement. On ne saurait trop répéter aux juges qu'ils ne sont que les organes de la loi, et qu'ils doivent se taire quand elle n'a pas parlé. Quant à la demande de la suppression du mot représentation, les juges ne peuvent arrêter l'effet de la loi, leurs représentations n'auraient rien de dangereux ; bien loin de redouter l'exercice de cette faculté, on doit désirer que souvent ils en fassent usage. Les législateurs, qui n'ont d'autre but que de faire le bonheur du peuple par de bonnes lois, doivent, pour ainsi dire, aller au devant des observations, parce qu'ils peuvent tomber dans des erreurs préjudiciables aux droits de quelques citoyens ou à la félicité publique.
l'ainé. Les représentations accordées aux anciens tribunaux étaient dangereuses, parce qu'elles avaient l'effet de suspendre la loi. Les articles que vous venez de décréter défendent cette suspension. Où est l'inconvénient de ce mot représentation ? C'est un mot très modéré, très soumis. Quant à l'amendement de M. Prieur, il suppose une perfection complète dans notre législation; cette perfection4ui manque, et manquera sans doute aux lois que nous ferons; si vous voulez qu'on ne juge absolument que les cas prévus par la loi, vous paralyserez ia justice.
L'article du comité a été rédigé dans le sens exprimé par M. Barnave ; il n'y a de difficulté que sur la rédaction. Gomme le mot représentation a donné à beaucoup de bons esprits des craintes inspirées par le souvenir de l'ancien régime, il faut le supprimer. J'adopte la rédaction présentée par M. Barnave,à moins qu'on ne trouve plus convenable de dire simplement : « mais ils s'adresseront au Corps législatif, etc. »
Il y aura des inconvénients à défendre sans aucune restriction toute espèce d'interprétation aux juges. Une loi de François Ier, rendue en 1534, étend la peine de la roue aux voleurs, dans certains cas, et même aux femmes, en les condamnant ainsi à des douleurs au-dessus desforces de leur sexe: aucun édit, aucune ordonnance n'a modifié ou expliqué cette loi. Les juges, en l'interprétant,, ont dû s'en écarter, et l'on fait. Il y a un grand nombre de lois qui donnent lieu à de semblables interprétations. Si les tribunaux ne sont point autorisés à ne pas observer strictement ces lois, ils ne sauront commèrft statuer. Les accusés resteront longtemps dans les prisons, et il sera nécessaire de remanier les deux tiers de notre Gode criminel.
Cette observation, quelque fondée qu'elle soit, ne peut pas faire l'objet d'un article où il s'agit uniquement de la division des pouvoirs. L'intention du comité a été d'écarter tous les actes qui auraient intérieurement ou extérieurement la forme d'un acte du Corps législatif.
Plusieurs membres demandent la clôture de la discussion.
La clôture est prononcée.
L'article 12 amendé est adopté ainsi qu'il suit :
A,rt. 12. « Ils ne pourront faire de règlements; mais ils s'adresseront au Corps législatif toutes les fois qu'ils croiront nécessaire, Boit d'interpréter une loi, soit d'en faire une nouvelle. »
, rapporteur, lit l'article 13 qui est adopté sans discussion, dans les termes du projet ainsi qu'il suit :
Art. 13. « Les fonctions judiciaires, sont distinctes et demeureront toujours séparées des fonctions administratives; les juges ne pourront, à peine de forfaiture, troubler, de quelque manière que ce soit, les opérations des corps administratifs, ni citer devant eux les administrateurs pour raison de leurs fonctions ».
donne lecture de l'article 14 en ces termes :
Art. 14, « En toute matière civile ou criminelle, les plaidoyers, rapports et jugements seront publics ; et tout citoyen aura le droit de défendre lui-même sa cause soit verbalement, soit par écrit. »
l'aîné. Je voudrais que l'article renfermât encore la publicité des opinions. Voulez-vous des juges éclairés? voulez-vous que les places né soient pas sollicitées par des ignorants? ordonnez la publicité des opinions. Si tout ce qui se passe dans les délibérations clandestines était dévoilé, nous rougirions de honte. Ce secret est la cause principale des prévarications et des injustices dont nous avons souvent gémi. L'homme méchant, l'homme improbe, sent -ces vices dans le secret de son cœur ; il y renoncerait, si la publicité de ses actions ou de ses opinions était assurée. Voulez-vous que le peuple fasse de bons choix ? il faut qu'il connaisse ses juges, puisqu'il peut les conserver : établissez donc la publicité des opinions.
Cette publicité pourrait être dangereuse pour les juges, et, dès lors, la crainte pourrait les empêcher de dire leur sentiment avec franchise. Cet inconvénient est sans doute très grand, mais il ne peut balancer les raisons exposées par le préopinant, ûussé-je porter malheur à son amendement, je l'adopte. J'ajoute à ses raisons votre propre exemple. La publicité de vos séances a fait votre force et assuré la bonté de vos lois. Je demande donc la publicité des opinions et le jugement motivé.
Vous avez ordonné, en matière criminelle, que les opinions seraient prises dans la chambre du conseil. Vous ne pouvez décréter une disposition contraire. Je pense qu'il n'y a pas lieu à délibérer, ou qùe, du moins, il faut ajourner ce qui, dans l'article, concerne les affaires criminelles.
La publicité des opinions en gênerait la liberté..... En général, le choix du Peuple
sera assez éclairé pour porter sur d'honnêtes gens, les gens honnêtes n'auront pas toujours la facilité de s'exprimer.
Je ne vois pas de raison qui puisse faire balancer entre le secret des opinions et le danger d'en détruire la liberté. Les ignorants opineront par oui et Par pou. Le peuple, presque toujours mauvais juge, ne saura apprécier telle ou telle opinion, quoiqu'elle ait été hautement motivée,
Pour attaquer l'amendement de M. Garat, je me bornerai à rappeler ce qui s'est passé à Versailles, lorsque vous avez discuté une opinion semblable, au sujet de la réforme de
quelques parties de la jurisprudence criminelle. On a rappelé l'usage des tribunaux ; chacun opine à son tour ; on profite mutuellement des lumières les uns des autres ; les erreurs de fait ou de droit sont réciproquement relevées, et alors le jugement se forme. Si les opinions sont publiques, un juge n'osera pas revenir de celles qu'il aurait d'abord ambrassées. Le public assistant à l'audience prend un parti dans l'affaire.Pour se concilier son suffrage, ou ne pas s'exposer à son mécontentement, n'arriverait-il pas que tel ou tel juge se décidât en faveur de l'opinion des auditeurs ?
, député de Gannat. L'article porte que tout citoyen aura le droit de défendre lui-même sa cause. Je demande qu'on ajoute « pourvu qu'il soit domicilié dans le lieu de l'instruction ».
Cette question est très délicate ; elle présente des inconvénients des deux côtés. On peut soupçonner que le secret des opinions donnera lieu a de mauvais jugements ; mais il est certain que la publicité en fera rendre de mauvais. Le comité s'est conduit par ce principe : que quand il s'agit de choses et de lois générales la sûreté des opinions est dans leur publicité ; quand il s'agit des individus la sûreté des opinions est dans le secret.
(Les différents amendements sont écartés par la question préalable, et l'article 14 est adopté tel qu'il a été présenté.)
Voici la teneur de l'art. 15 :
« La procédure par jurés aura lieu en matière criminelle, et l'instruction sera faite publiquement. »
Vous ne pouvez prononcer en masse la publicité de l'instruction ; peut-être croirez-vous, en formant le règlement de la procédure par jurés, devoir décréter que quelque partie sera secrète. Dans l'état actuel, on ne peut se refuser au secret de instruction qui précède le décret.
Je demande l'ajournement de l'article.
Il suffît d'ajouter à l'article que la publicité aura lieu sur le modé déterminé par le règlement sur la procédure par jurés.
L'addition est suffisante et ne préjuge point les décisions que l'Assemblée pourra prendre dans la suite.
L'article modifié est mis aux voix et décrété en ces termes :
« Art. 15. La procédure par jurés aura lieu en matière criminelle; l'instruction sera faite publiquement et aura la publicité qui sera déterminée. »
L'article 16 du projet proposé par le comité est lu, mis aux voix et adopté, sans discussion, ainsi qu'il suit :
« Art. 16. Tout privilège en matière de juridiction est aboli ; tous les citoyens, sans distinction, plaideront en la même forme, et devant les mêmes juges, dans les mêmes cas. »
, rapporteur, lit l'article. 17.
L'ordre constitutionnel des juridictions ne r pourra être troublé, ni les justiciables distraits de leurs juges naturels par commissions, attributions ou évocations arbitraires. »
Je demande la suppression du mot arbitraires puisqu'il ne peut y avoir de commissions légales.
Je demande à M. le rapporteur si la soumission faite dans les contrats à certaines juridictions est emportée par l'article.
Le comité ne s'est pas occupé de cet objet de législation.
L'article amendé est mis aux voix et adopté en ces termes :
« Art. 17. L'ordre constitutionnel des juridictions ne pourra être troublé, ni les justiciables distraits de leurs juges naturels par aucunes commissions, ni par d'autres attributions ou évocations que celles déterminées par la loi.
L'article 18 est mis aux voix et décrété sans discussion, dans les termes du projet, ainsi qu'il suit :
« Art. 18. Tous les citoyens étant égaux devant la loi, et toute préférence pour le rang et le tour d'être jugé étant une injustice, toutes les affaires, une fois instruites, seront jugées dans l'ordre selon lequel le jugement en aura été requis ».
, rapporteur, donne lecture de l'article suivant:
« Art. 19. Les lois civiles seront revues et réformées par les législatures, et il sera fait un code général de lois simples, claires et appropriées à la Constitution. »
Dans la série de questions que vous aviez adoptées pour être mises à la discussion, celle-ci était comprise : « Sera-t-il nommé des commissaires pour travailler à la réforme des lois civiles, de la procédure civile et du code pénal ?» Je demande que ces commissaires soient nommés. Cet ouvrage ne sera pas fini dans cette session : mais il sera remis tel qu'il se trouvera à la législature qui vous succédera. L'Assemblée s'en occupera dans ses loisirs... (On demande à passer à Vordre du jour.)
Il est certain que l'Assemblée nationale ne peut pas réformer le code civil et le code criminel,; mais la réforme de certaines parties des lois est nécessaire pour l'exécution de vos décrets sur l'ordre judiciaire : il serait d'ailleurs utile que vous fixassiez les bases d'après lesquelles les législatures suivantes travailleront pour établir un système complet de législation.
Si l'on fait un travail partiel, il est possible que les différentes parties ne s'accordent pas entre elles; l'Assemblée nationale actuelle a assez d'objets majeurs pour employer tous ses moyens dans le cours de cette session. Il est infiniment important que les mèches hommes s'occupent de la réformatioû du code. Vous avez le droit exclusif de faire lâ législation. Pouvez-vous tracer aux législatures futures les bases de leur travail ? (Une grande partie de la salle applaudit.)
Je ne connais pas de constitution complète sans les lois sur l'état des personnes; il n'y a point de liberté, si la liberté domestique n'est assurée.
met aux voix l'article 19. Il est adopté sans changement.
L'article 20 du projet du comité est lu et adopté, sans discussion, ainsi qu'il suit :
« Art. 20. Le code de la procédure civile sera incessamment réformé, de manière qu'elle soit rendue plus simple, plus expéditive et moins coûteuse. »
donne lecture de l'article 21 du projet, en ces termes :
« Le code pénal sera incessamment réformé, de manière que les peines soient mieux proportionnées aux délits ; observant que les peines soient douces, et ne perdant pas de vue cette maxime, que toute peine qui n'est pas nécessaire est une violation des droits de l'homme, et un attentat du législateur contre la société. »
Cet article est terminé par une maxime qui paraît déplacée. Nous ne faisons pas un code de morale et il n'est pas de la dignité de l'Assemblée de prendre une maxime tirée de l'ouvrage d'un particulier.
On peut substituer à cette maxime un article de la déclaration des droits. Il est plus convenable, en faisant un article constitutionnel, de se référer à la déclaration des droits qu'à un principe de philosophie. 11 faut saisir cette occasion ae montrer la correspondance de nos décrets et de nos principes. — (M. Barnave lit l'article 8 de la déclaration des droits).
Le comité adopte le changement proposé.
L art. 21 amendé est mis aux voix et décrété ainsi qu'il suit :
«Art. 21. Le code pénal sera incessamment réformé, de manière que les peines soient proportionnées aux délits; observant qu'elles soient modérées, et ne perdant pas de vue cette maxime : Que la loi ne doit établir que des peines évidemment et strictement nécessaires. »
Un membre de l'Assemblée, contre lequel on a répandu des bruits calomnieux, demande à s'expliquer avant que la séance soit levée.
Je lui donne la parole, s'il n'y a pas d'opposition.
le jeune. Avant hier, j'étais à la campagne; en revenant hier, j'ai trouvé une sentinelle à ma porte, une autre dans mon escalier, et des officiers civils dans un appartement que j'ai sous-loué. J'ai demandé la raison dé cet appareil ; on m'a dit que, trois crocheteurs passant dans la cour du commerce, un papier était tombé; un particulier ayant cru y voir quelque chose contraire à ses idées, courut au corps de garde, et deux soldats suivirent jusque chez moi ces trois crocheteurs. Une personne qui m'accom-pagnait, demanda comment et par quel acte judiciaire on avait été autorisé à s'introduire dans la maison d'un particulier.
Les officiers civils répondirent qu'il n'y avait pas d'acte, mais que le succès justifiait les entreprises hardies. Je ne savais quel succès couronnait cette entreprise. Je demandai comment on était entré dans un appartement qui ne m'appartenait pas ; comment cès papiers s'y trouvaient. L'imprimeur, qui ne se cachait pas, nomma l'auteur, et dit qu'une personne, qii'il ne nomma point, lui avait ordonné d'envoyer ces papiers
chez moi. J'interrogeai mon secrétaire, qui me répondit que M. l'abbé Lubersac avait demandé un lieu pour mettre ses papiers. M. Lubersac est un Limousin ; mon secrétaire avait cru que je ne refuserais pas cette permission. Je dis que je n'étais pas instruit de cela; que je n'avais nul rapport littéraire avec M. l'abbé Lubersac. J'observai que, d'après les idées très prononcées du district des cordeliers et de M. Danton, alors présent, sur la liberté de la presse, je trouvais la démarche du district extraordinaire, et que je ne savais comment on avait cru pouvoir en agir ainsi avec un député. Je n'ai qu'à me louer de l'honnêteté des officiers du district des cordeliers qui se trouvaient là, je ne sais pas pourquoi; mais on m'a dit que ce district avait une suprématie sur tous les autres.
Mon district avait aussi chez moi des commissaires : je rendis honnêtetés pour honnêtetés; je fis plus, je déclarai à ces messieurs que je rendrais compte à l'Assemblée nationale de ce qui m'était arrivé; que je différerais cependant, pour leur donner le temps de rédiger et de faire con-r naître leur procès-verbal.
J'observai cependant que je me trouvais à la merci des mille et un colporteurs de la capitale, et des personnes au service desquelles ils sont. Ces personnes croient tenir le bon Dieu par ies pieds, quand ils tiennent le vicomte de Mirabeau dans leurs feuilles. On me dit d'être tranquille, que cela n'arriverait pas, qu'on en répondait; et ce matin trois libelles couraient : l'un est intitulé la nouvelle conspiration du vicomte de Mirabeau. J'ai déjà dénoncé quatre auteurs de cette espèce ; mes conclusions sont un peu fortes; je n'obtiendrai pas tout, mais j'obtiendrai quelque chose. Gomment dénoncer ceux-ci? Cela devient fati-. gant. Ces coquins-là ont beaucoup de confiance : il faut que l'Assemblée prenne dans sa sagesse des précautions, pour que ces gens-là ne soient pas l'écho de la calomnie. Je prie l'Assemblée de faire juger le plus promptement possible, non-seulement cette affaire, mais celle de l'insubordination des soldats du régiment de Touraine, pour laquelle je remets de nouvelles pièces. (Voy. ces pièces annexées à la séance de ce jour,)
(Cette affaire est renvoyée au comité des rapports.)
demande à rendre compte des travaux du comité de judicature.
Plusieurs membres proposent, à cause de l'heure, d'ordonner l'impression, la distribution et l'adjonction au procès-verbal de la séance. (Voy. plus loin le rapport Le M. Tellier).
Cette motion est adoptée.
La séance est levée à quatre heures du soir.
A LA SÉANCE DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE
DU
1erANNEXE.
Nouvelles pièces justificatives relatives à l'insurrection des soldats du régiment de Touraine, contre les ordres du roi et de leur chef (1).
J'ignore le moment où mon affaire sera rapportée: j'ai cru qu'un membre de l'Assemblée nationale n'avait pas besoin de solliciter auprès de ses comités upe affaire qui l'intéresse; je ne réclame que justice, et je ne doute nullement qu'elle me soit rendue. Je présente au public plusieurs pièces justificatives nouvelles, on verra que la lettre signée du lieuteuant-colonel, qu'on avait regardée comme une 'pièce infiniment contraire à mes intérêts, a été l'ouvrage de la contrainte; on verra aussi, avec peine, sans doute, quelles sont les victimes de l'insurrection du régiment de Touraine, leur innocence et leur courage se peint dans leurs lettres, auxquelles je n'ajouterai aucunes réflexions : je ne pourrais qu'en diminuer l'effet sur les âmes sensibles.
L'hommage des lieutenants et sous-lieutenants du corps, la démarche qu'a faite le plus ancien d'entre eux en venant, muni de leurs pouvoirs, combattre la calomnie, satisfait mon cœur,; le déchargé d'un poids énorme, et fait encore plus pour mon bonheur que pour ma justification.
Lettre écrite de Perpignan, par M. le chevalier d'Iversay, lieutenant- colonel du régiment de Touraine, à M. le vicomte de Mirabeau, colonel dudit régiment, en date du 1er juillet 4790.
Monsieur, j'ai l'honneur de vous envoyer l'état de situation de votre régiment et de vous rendre compte que depuis votre départ le 11,' M. dé la Porte a comparu à la municipalité devant Vernay, fourrier des grenadiers, son accusateur, qui lui imputait d'avoir dit que si les bas-offieiérs voulaient s'assembler, ils auraient bientôt raison de cette canaille, en parlant du régiment. Cet officier a été mis sous la sauvegarde dé la municipalité, et conduit au castillet ; j'ai été. l'en faire sortit, et l'ai conduit dans une chambre du quartier. 15, MM. Reinaud et la de Landelle ont été mis dans une chambre de la citadelle, le premier pour avoir dit qu'il avait passé la nuit avec M. le vicomte lors de son départ et qu'il lui avait parlé des drapeaux ; le second pour avoir mis l'épée à la main le jeudi 10, jour de l'insurrection, étant le matin chez M. le vicomte, lorsque les soldats vinrent lui demander de ne plus voir le sieur Maréchal, adjudant; le 16, MM. de la Porte ét de la Landelle sont sortis ainsi que M. le marquis d'Aguilar, maire de cette ville, qui était détenu à la citadelle et gardé à vue.
La garnison sous les armes, en grande tenue, avec là municipalité et la garde natl0nale, il a été conduit chez lui; MM.deslnnccenset d'Iversay lui donnant le bras au bruit de la mousqueterië et du cànon. Le 17, on nous a apporté nos dra-peâux cachetés, escortés par des détachements
de la garde nationale de Gasteinaudary, Garcas-sonne, Narbonne, Syean, Lezignan et un détachement de Touraine qui avait été jusqu'à Narbonne, ainsi que celui de la garde nationale de Perpignan. La division et la garde nationale sous les armes en grande tenue, la municipalité a été hors la ville recevoir les drapeaux ; ils ont été apportés chez M. le marquis d'Aguilar et remis à lui ; il a décacheté le paquet, les a lui-même attachés aux bâtons, et les a accompagnés avec la municipalité, au bruit des canons, chez M. d'Iversay. MM. les officiers ont reconduit M. le maire et la municipalité; le 18, M. Reynaud est sorti, et on a demandé aussi la sortie de M. Rossouche, détenu en prison, dont, Monsieur le vicomte, j'avais eu l'honneur de vous rendre compte.; on avait cassé, le jour d'avant, le sergent-major, un sergent et trois caporaux des grenadiers. Le même jour 18, les officiers du régiment de Touraine, ont donné un grand dîner aux officiers des détachements qui avaient accompagné les drapeaux, avec une partie des volontaires de cette ville et autres corps. Le soir, il y eut un grand souper donné à l'hôtel de ville par MM. les volontaires citoyens, où il y avait au moins deux cents personnes; le 19, les grenadiers de Touraine ont donné un dîner à l'intendance où étaient M. de Chollet, qui n'y a pas resté, toute la maison. d'Aguilar, Mme la comtesse, les chefs et officiers des grenadiers et toute cette compagnie de Vermandpis ; les officiers des détachements et partie des volontaires de la ville. Le régiment* c'est-à-dire le prétendu comité, a donné au commandant du détachement de Gasteinaudary, en reconnaissance d'avoir apporté nos drapeaux, un drapeau de. la couleur des nôtres, une épée, habit et équipement d'officier; ces détachements ont été accompagnés en grànde pompe hors de la ville; le matin,.à leur sollicitation, on a fait sortir tous les bas-officiers qui étaient, détenus pour avoir signé la lettre et des congés absolus, excepté Vernay, le fourrier ; les bas-officiers ont été réintégrés, parce que je n'avais pas voulu consentir qu'on les remplaçât, malgré les instances réitérées qu'ils m'ont faites pour cela en me désignant des sujets ; les places une fois prises, ils ne les auraient pas remises. Après dîner, on s'est promené dans les rues pour aller aux deux quartiers avec Mm? la comtesse d'Aguilar ; on a porté des santés ; ils ont même continué à se promener la nuit.
Sur l'ordre du ministre de se rendre à la fédération à Paris, MM. Garrot, Gondrah, Raye, Petit, Guiraud et Morand sont partis mardi 22; une autre députation demandée par les soldats, le 13, MM. ae Thorenc, Martin, Sauveton et Aboux dont on aurait bien pu se passer.
Il est arrivé des congés pour MM. de Marcy et d'Arberàtz ; le premier n'en a pas profité.
J'ai aussi l'honneur de vous rendre compte, Monsieur le vicomte, que MM. de Vidampierre, la Croix et Mathey demandént des congés pour rétablir leur santé. Il est parti un détachement de cent vingt hommes de votre régiment pour le Mont-Louis, commandé par MM. de Gampan, Gorsac et Pis.
Dans tout ce qui s'est passé, Monsieur le vicomte, quoique très désagréable, il n'y a aucune plainte, et le service s'est fait exactement ; les compagnies correspondantes de Vermandois ont régalé les nôtres, et pelles de Touraine le leur ont rendu; ce qui coûte des sommes considérables.
J'ai aussi l'honneur de vous assurer, Monsieur
le vicomte, que j'ai été très surpris, et ai marqué mon mécontentement aux bas-officiers de ce qu'ils ont fait imprimer un exposé saDs m'en parler ni à ces messieurs, et ma surprise fut extrême lorsqu'on me remit cet exposé, et surtout d'y voir que leur prétendu comité avait disposé de moi sans m'en parler, disant que la médaille qu'ils fout faire au sieur Gilis, devait être présentée incessamment par moi à la tête du régiment qui serait en grande tenue. Je leur ai signifié que je n'en ferais rien, et vous supplie instamment, Monsieur le vicomte, d'en assurer le ministre, ne pouvant faire prendre les armes à votre régiment sans un ordre de M. deGhollet que je De solliciterai sûrement pas pour cela, ne voulant pas manquer à la subordination, et que cela devrait leur servir d'exemple : ils ont paru très mécontents. Pour l'autre article, Monsieur le vicomte, voici aussi le fait : C'était au moment de l'effervescence, et pour éviter une nouvelle insurrection à l'arrivée de l'officier des volontaires de Gastelnaudary, qui apportaient nos drapeaux, qui ont causé tant de troubles, ce prétendu comité des bas-officiers et soldats, qui ont fait partir M. de Thorenc, me dirent qu'en reconnaissance ils lui donneraient un drapeau aux couleurs des nôtres, et l'équipement d'officier et une épée que je lui présenterais : mais ne pouvant ni ne devant reconnaître ce prétendu comité, et sur la résistance que je fis, ils dirent : « Tout le monde nous trahit. » Voyant que l'impatience augmentait, pour ramener le calme, forcé par la circonstance, je me décidai à leur promettre que je le lui remettrais à dîner, et l'uniforme a été renvoyé à cet officier après son départ. Je dois, Monsieur le vicomte, en parlant d'une affaire aussi malheureuse, rendre, aux officiers la justice qui est due à leur zèle : ils se sont bien conduits et ont fait tout ce qu'ils ont pu pour calmer les têtes des soldats, et pour arrêter le désordre qui aurait cependant continué, si je n'eusse parlé avec force. Ils voulaient recommencer leurs farandoles et leurs repas avec les compagnies correspondantes du régiment de Vermandois. Les officiers et bas-officiers ne pouvaient rien gagner sur eux; j'ai été aux compagnies, et ils se sont rendus à mes sollicitations. Tout est fini et rentré dans l'ordre. J'ai été à quatre heures du matin faire partir le détachement de Mont-Louis ; je l'ai trouvé fort en règle.
11 y a actuellement l'article de la dépense : celle de Vermandois passe 11,000 francs ; celle du vôtre, Monsieur le vicomte, ira au moins à cela : les dépenses qu'ils ont faites avec Vermandois sont énormes. J'en ai rendu compte à l'inspecteur, il ne m'a pas fait l'honneur de me répondre. Savoir quel moyen prendre, si l'on vient me demander le payement que je ne ferai pas sans ordre, et je ne peux savoir au juste à quoi cela se monte. Les soldats ni les aubergistes ne m'en ont pas encore parlé; il y a quelques capitaines qui ont signé des bons.
Ayant refusé de donner cette médaille au sieur Gilis, ce comité a eu le projet de demander à l'Assemblée nationale qu'il fût nommé porte-drapeau à la suite du régiment, comme étant le fourrier qui a fait arrêter les drapeaux : ils prétendent que c'est à lui qu'ils ont le plus d'obligation : je crois cependant que ce projet n'aura par lieu, et je sais quel parti ils prendront à ce sujet.
J'ai l'honneur de vous rendre compte que ce prétendu comité a chassé Bande de Prechateau, mauvais sujet, qui avait tenu des propos affreux >
contre ses bas-officiers; deux soldats sont rentrés par retour volontaire. Le conseil du régiment les a condamnés à un an de service.
M. Dubelloy est allé en Espagne, sur quelques menaces de sa compagnie. Des soldats ont été le chercher. MM. de la Lande, Vaubercey, la Croix, Vidampierre, de Bressolle, Mathey, le" Coq, la Bothelière, Saint-Martin, chevalier du Moulin et Mûries ne sont pas encore rentrés. MM. Patel et Carrot ont reçu leur croix de Saint-Louis.
Je suis désespéré de tout ce qui est arrivé à votre régiment, Monsieur le vicomte, et je vous supplie de me rendre la justice de croire que j'aurais voulu pouvoir remédier aux désagréments et chagrins que tout ceci vous a causés : j'en ai le cœur navré de douleur, et vous demande toujours la continuation de vos bontés et Vhonneur de votre protection. Je ferai tout ce qui dépendra de moi pour me conserver un bien si précieux et pour vous prouver le respectueux attachement avec lequel j'ai l'honneur d'être, Monsieur le vicomte,
Votre très humble et très obéissant serviteur.
Signé : le chevalier d'Iversay.
Lettre écrite de Toulouse, par M. d'Espenan, capitaine des grenadiers du régiment de
Touraine, à M. le vicomte de Mirabeau, colonel dudit régiment, en date du
Monsieur et cher colonel,
Je ne puis vous exprimer que bien faiblement la joie ijue m'a fait éprouver votre départ de Gastelnaudary : je fais des vœux bien ardents pour que votre retour à Paris soit heureux en n'éprouvant sur votre route aucuns désagréments pareils à ceux que vous avez essuyés et que vous méritez si peu ; vous devez être bien sûr de ma façon de penser à cet égard.
Si j'avai3 eu des moyens, je n'aurais pas hésité un moment à aller vous joindre; mais je suis dans la position la plus cruelle qu'il soit possible de se figurer. Sans argent, forcé de me cacher, innocent comme l'enfant qui vient de naître, et pas un de mes camarades ne daigne m'instruire de l'espèce de calomnie dont on m'accuse 1 je vous avoue, Monsieur et cher colonel, que cette conduite de leur part m'afflige au delà de toute expression. Il ne me reste donc que vous; et je suis trop heureuxoui, certainement, je suis trop heureux dès que vous voulez bien prendre ma défense et faire triompher mon innocence.
Veuillez, je vous prie, Monsieur et cher colonel, me continuer l'attachement dont vous m'avez toujours honoré ; vous savez mieux que personne l'amour que je porte à mon roi et à ma patrie: mon sang leur appartient, et ils sontbien maîtres d'en disposer. Cependant, d'après l'affreuse manière dont j'ai été forcé de quitter le régiment, je suis bien éloigné d'y rentrer jamais ; mais je suis sans fortune, et je n'avais que mes appointements pour vivre. Vous savez depuis douze ans la manière dont je faisais mon métier, et si on peut me faire quelques reproches de négligence sur cet objet et sur tous ceux dont on tâche de me noircir. Ainsi, Monsieur et cher colonel, j'implore votre justice pour me faire obtenir un emploi. Je ne demande point de grade, mais je demande à pouvoir vivre, et s'il vous était possible de me faire employer, soit aux îles ou dans l'Inde, je vous devrais certainement plus qu'à mon père. Plus je pourrai m'éloigner de ma patrie, plus il me semble que je pourrai oublier l'injustice af-
freuse dont on m'accable. Donnez-moi de vos nouvelles le plus tôt qu'il vous sera possible, ma vive reconnaissance égalera le respect, avec lequel, je suis, Monsieur et cher colonel, votre, etc.,
Signé : d'EsPENAN.
P.-S. Je vous serai obligé de m'écrire sous l'enveloppe de M. de... Je suis si étonné de ne recevoir aucune lettre que je crains qu'on ne les enlève.
Copie de la lettre de M. le chevalier de La Peyrouse, officier au régiment de Touraine,
écrite de Se-reau, près Lavaux en Languedoc, à M. le vicomte de Mirabeau, colonel dudit
régiment, en date du du
Monsieur le vicomte, j'apprends à l'instant la nouvelle de votre élargissement et votre départ pour Paris ; permettez-moi de vous en témoigner ma joie et de vous rappeler les faits qui nous ont empêchés de rentrer à Perpignan. A peine eûmes-nous reçu la lettre que vous nous fîtes l'honneur de ûous écrire, que notre empressement nous lit partir à pied malgré la pluie qui tombait par torrents. Notre exprès nous avait dit que nous aurions des chevaux à Villefranche. Notre surprise fut extrême de ne pas en trouver: en vain offrîmes-nous tout l'argent qu'on nous demanderait, il ne s'en trouvait pas. Doublement affligés de ce contre-temps qui nous empêchait de nous rendre le jour-même, ainsi que nous vous l'avions annoncé, nous nous mîmes en marche, résolus d'aller aussi loin que nos forces nous le permettraient. La chaleur était excessive, et nous ne pûmes faire que neuf lieues ce jour-là. Nous Partîmes le lendemain et trouvâmes à Gorbères . de la Porte qui nous attendait avec des chevaux de poste. Nous montâmes à cheval sur-le-champ et ne fîmes qu'une légère attention aux avis qu'on nous donnait eu route. On nous annonçait les plus grands dangers, on nous suppliait de rétrograder; mais nous marchions toujours. Arrivés au Solet, village où nous devions attendre vos ordres, nous nous arrêtâmes. Plusieurs personnes nous entourèrent et nous pénétrèrent d'horreur en nous disant que les soldats avaient poussé l'égarement jusqu'à tourner leurs armes contre leur colonel. Ils nous ajoutèrent que sans doute il était déjà massacré, que toute la ville était en combustion, et qu'un détachement de rebelles venait pour nous faire subir le même sort. Ils nous supplièrent de nous éloigner au plus vite. La nouvelle du meurtre qu'on nous annonçait nous paraissait si terrible et si affligeante que nous nous obstinions à ne pas la croire; mais les avis qui se succédaient sans cesse et qui s'accordaient tous, augmentèrent nos alarmes ; sur ces entrefaites arrivèrent deux soldats de la garde nationale courant à toute bride; ils étaient porteurs d'un billet sans signature qu'ils nous remirent. On nous écrivait de nous éloigner au plus vite et d'éviter les soldats qui venaient nous chercher. La multiplicité des avis nous lit prendre à regret le parti de rétrograder; il fallut s'y résoudre, et nous arrivâmes au Mont-Louis le lendemain. La fatigue d'un voyage aussi pénible (nous avions toujours été à pied excepté une lieue et demie que nous fîmes à cheval), l'épuisement de nos forces, la pluie qui nous avait mouillés jusqu'aux os et, plus que tout cela, l'imagination frappée de la perte irréparable que nous avions faite : tout contribua à faire en moi
une révolution des plus violentes. Je fus atteint, en arrivant, d'un choiera morbus, dont les effets se firent ressentir dix heures de suite ; jamais je n'ai vu la mort de si près.
L'habileté du médecin de l'hôpital et la bonté de mon tempérament me tirèrent d'affaire; il me restait encore une fièvre et une faiblesse extrême, lorsque nous reçûmes un nouvel exprès pour nous rendre à Perpignan.
Je n'ai de ma vie senti aussi vivement la privation de mes forces ; j'étais au lit et ne pouvais voler vers vous. Il fallut demeurer. Montalembert partit sur-le-champ; il resta un jour et demi au Solet à attendre. Impatient de ne recevoir aucun ordre, il envoya un homme à Perpignan qui lui dit, à son retour, que le colonel était parti en emportant les drapeaux, que M. d'Aguilar avait été mis en prison, etc. il attendit encore jusqu'au soir, et, ne recevant pas d'autres nouvelles, il revint au Mont-Louis. Je ne puis vous exprimer la joie dont je fus pénétré au récit de votre héroïque démarche; je jugeai de l'impression qu'elle devait faire sur tous les bons Français par celle qu'elle faisait sur moi. Le génie malfaisant qui gouverne aujourd'hui nos soldats prévalut. Je fus accablé à la nouvelle de votre détention et craignis que la rage d'un peuple qu'on égare tous les jours ne vous devînt funeste. Mes craintes cessèrent bientôt, et j'appris seulement qu'on vous gardait avec soin. Dès'lors, je jugeai qu'on vous rendrait bientôt votre liberté, et mes espérances se sont réalisées.
Nous restâmes encore quelques jours au Mont-Louis; ma santé était rétablie, mais les forces me manquaient. La fatalité de notre étoile nous poursuivait encore. Le régiment de Vermandois, qui s'était jusque-là bien conduit, fit une coalition avec nos factieux. Le détachement qui était au Mont-Louis commençait déjà à donner des signes de révolte. Il fallut partir ( nous avons appris, depuis, que le projet était de nous livrer); l'argent nous manquait. Ma maladie et les différentes courses que nous avions faites avaient épuisé nos moyens; en vain avions-nous demandé quelques secours au conseil d'administration, on nous les avait toujours refusés. Nous fûmes donc obligés de traverser les Pyrénées à pied, malgré la neige, et nous nous sommes rendus chacun chez nous. Dans ce pénible voyage, nous ne nous arrêtions que la nuit, de crainte qu'on ne nous demandât des passeports, que nous n'avions pas. Souvent nous rencontrions des voyageurs qui, n'ayant garde de nous reconnaître, nous racontaient avec emphase les hauts faits du régiment de Touraine. Jugez de notre situation : la prudence nous prescrivait de nous taire... et nous ne disions rien.
M. de Chollet nous avait écrit, peu dé jours avant notre départ, pour nous permettre d'aller où bon nous semblerait : nous en avons profité.
Montalembert est parti pour Saintes et moi pour Lavaur : il m'a chargé de vous présenter ses respects et de vous demander pour nous deux congés avec appointements jusqu'au mois d'octobre. J'ose attendre de vos bontés de m'honorer d'une réponse et de ne rien négliger auprès du ministre de la guerre.
J'ai l'honneur d'être, avec un profond respect, Monsieur Je vicomte, votre très humble, très obéissant et très dévoué serviteur.
Signé : le chevalier de La Peyrouse.
Lettre de MM. les lieutenants et sous-lieutenants du régiment de Touraine à M. de la Tour-du-Pin, ministre de la guerre, en date du 4 juillet.
Monsieur le comte, nous avons lu dans le courrier extraordinaire, ou le premier arrivé du 24 juin, une lettre de MM. les officiers du régiment de Touraine, qiii demandent à l'Assemblée nationale prompte justice du vicomte de Mirabeau ; quelques officiers du régiment ont signé ia lettre dont parle ce journal; ceux qui l'ont fait ne s'y sont déterminés qUe dans l'espoir de suspendre par là la fureur à laquelle s'étaient abandonnés les soldats de leurs corps, fureur qu'ils avaient déjà manifestée en emprisonnant le maire de la ville qu'ils menaçaient d'assassiner.
Si les officiers du régiment de Touraine, qui ont signé au milieu des baïonnettes, n'avàient eu à craindre que pour leurs jburs, jamais on n'aurait pu les contraindre à la demande de la punition d'un colonel dont les talents militaires lui ont acquis tant de droits à l'estime de l'armée française.
Comment les officiers de son corps, pénétrés des vrais principes de la discipline militaire et des devoirs qui les obligent envers leurs chefs, auraient-ils écrit contre M. le yicomte dé Mirabeau, si les jours de M. le marquis d'Aguilar n'eussent été dans le plus grand danger, et si les dispositions les plu3 hostiles n'eussent répandu parmi les bons citoyens une consternation qui a fait aux officiers une loi forcée d'une démarche qui répugnait si fort à leur façon de penser? Malgré ces excellentes raisons, qui ne peuvent échapper à la sagesse du ministre du roi, les officiers ssmestriers arrivés depuis ce fâcheux événement, ainsi que ceux qui n'ont signé cette lettre que par les raisons ci-dessus énoncées, s'empressent de vous adresser, Monsieur, l'expression de la douleur que leur occasionné la conduite insubordonnée de leurs soldats, qui ont exigé d'eux une demande de sévérité contre un chef qui a si bien mérité d'eux par ses vertus, ses talents et son amour connu et manifesté tant de fois pour sa patrie, son roi et son régiment.
Nous désavouons, en outre, comme illégale, la députation composée de MM. dé Thorenc, capitaine ; Martin, sous-lieuténant ; Sauveton, fourrier et Babou, fusilier; déclarant que ces messieurs sont seulement porteurs des volontés des bas-officiers, caporaux et soldats et non des nôtres.
Nous sommes avec respect, Monsieur le comte, vos très humbles et très obéissants serviteurs.
Pour les lieutenants et sous-lieutenants du régiment de Tourainè.
Le chevalier de la Porte, premier lieutenant, muni des pouvoirs.
Le comte de Chauclos, capitaine adhérant.
Exposé sommaire des travaux du comité de judi-cature, par M. Tellier> député de Melun, membre de ce comité (1).
L'invention purement fiscale de la vénalité des
offices avait érigé, pour ainsi dire, en patrimoine individuel la fonction redoutable de juger les hommes. L'Assemblée nationale n'a pas dû balancer un moment à détruire ce régime oppresseur, né de la détresse des finances de l'Etat. Sans être effrayée de la masse des remboursements que nécessite la suppression prononcée par les décrets des 4 et 11 août 1789, elle s'est élevée à des considérations fort au-dessus de celle d'un embarras dans le Trésor public, dont elle avait d'avance envisagé le remède. Elle a senti que le grand but de Ja Constitution était manqué, si l'organisation actuelle du pouvoir judiciaire échappait à la destruction des abus de l'autorité. Elle a regardé sa régénération comme une dés bases essentielles de la liberté publi-; que.
Avant de poser cette base, il fallait d'abord renverser tout ce qui pouvait nuire à la stabilité du nouvel édifice qu'elle allait élever. Il fallait ensuite, en recréant l'ordre judiciaire, l'attacher fortement à la Constitution, l'identifier tellement avec elle, qu'il n'existât plus désormais que pour la soutenir et la défendre. C'est ce que l'Assemblée nationale exécute aujourd'hui.
Quand il serait vrai que cette opération, aussi grande que hardie, dût coûter à l'Etat des sacrifices ; quand il serait vrai qu'elle dût imposer quelque charge extraordinaire et du moment sur les citoyens de l'Empire français, doit-on douter qu'ils ne la supportent avec joie, puisqu'à ce prix ils sont assurés de recouvrer l'avantage inestimable de choisir eux-mêmes les arbitres de leur fortune, de leur honneur et de leur vie ?
Le comité de judicature, pénétré des principes de l'Assemblée nationale, n'a rien négligé pour seconder ses vues ; il s'est livré avec zèle aux travaux qui lui ont été confiés. Chargé par le décret, duquel il tient son existence, « de s'occuper des règlements à faire sur la liquidation des offices de judicature, » il a tâché d'embrasser dans son examen toutes les questions auxquelles elle peut donner lieu. Sans perdre le temps à se faire un mérite d'avoir surmonté tous les dégoûts inséparables des détails longs et arides dans lesquels il a été obligé d'entrer, il se contentera d'exposer sommairement la marche qu'il a tenue dans ses travaux, pour se conformer à l'ordre que l'Assemblée en a donné à tous les comités.
D'abord, en arrêtant son attention sur les termes des décrets des 4 et 11 août, il a été quelque temps incertain sur la plus ou moins grande latitude que l'Assemblée nationale avait voulu leur donner.
Le premier porte : « Déclaration de l'établisse-« ment prochain d'une justice gratuite, et de la « suppression de la vénalité des offices. »
Le second est ainsi conçu : « La vénalité des « offices de judicature et de municipalité est « supprimée dès cet instant. La justice sera « rendue gratuitement, et néanmoins les officiers « pourvus de ces offices continueront d'exercer « leurs fonctions et d'en percevoir les émoluments «jusqu'à ce qu'il ait été pourvu par l'Assem-« blée aux moyens de leur procurer leur rem-« boursement. »
D'après le texte de ces deux décrets, les opérations relatives à la liquidation doivent-elles se borner aux offices de ceux qui remplissent les fonctions de juges dans les différentes espèces de tribunaux, ou doivent-elles s'étendre à tous les offices qui dépendent de l'ordre judiciaire ?
Le comité a cru devoir se renfermer dans la
première de ces interprétations. 11 a craint, en suivant la seconde, d'anticiper sur les décrets de l'Assemblée nationale, et de présupposer des suppressions entièrement subordonnées à la constitution du nouvel ordre judiciaire; il s'est gardé même de demander à ce sujet une solution à l'Assemblée, pensant bien qu'elle ne pourrait déterminer précisément l'étendue des réformes qu'elle entend faire, qu'après que la nouvelle organisation dont elle s'occupe lui en aurait démontré la nécessité. Le comité a, sur cette question, un rapport tout prêt qu'il fera imprimer et distribuer incessamment, et il attendra le moment où l'Assemblée en permettra la discussion.
Sans chercher donc à pénétrer, dès à présent, les vues ultérieures de l'Assemblée, et de peur aussi de répandre inutilement l'alarme parmi les titulaires d'office sur lesquels l'Assemblée ne s'est point encore expliquée, le comité s'est fixé au sens le plus limité des deux décrets, en observant toutefois de préparer les matériaux qui pourraient être nécessaires dans le cas d'une suppression plus générale.
Il n'a cependant pas cru devoir s'y renfermer avec une telle rigueur, qu'il ne dût pas comprendre, dans la suppression déjà prononcée, tout ce qui faisait partie des corps de judicature, ou y tenait presque essentiellement, comme les greffiers, receveurs des epices, huissiers-audien-ciers, les receveurs des consignations, et commissaires aux saisies-réelles. 11 a opéré même en présumant comme certaine la suppression des jurés-priseurs, contre lesquels l'universalité des cahiers s'est récriée si hautement, qu'il n'est pas permis de douter que l'Assemblée nationale ne consacre ce vœu du royaume entier.
Après avoir ainsi déterminé l'étendue de son travail, le comité a demandé à M. le garde des sceaux les différents états sur les offices de judicature et de municipalité dont il avait besoin d'être aidé.
On n'a rien pu lui fournir sur les finances originaires des offices. Tout lé monde sait qu'une partie de ces finances est inconnue aujourd'hui, et que celles sur lesquelles on pourrait acquérir quelques notions, ont tellement varié depuis tous les édits qui les ont successivement augmentées ou grevées de différents droits, qu'il serait impossible d'en donner un état qui ne fût pas tout à la fois incomplet et incertain. Au surplus, quand il eût été possible d'obtenir cét état avec quelque exactitude, il serait parfaitement inutile, comme ie comité se propose de le démontrer ; car les raisons de la plus grande force viennent en fôuie pour prouver que le remboursement sur le pied de la finance est, en général, tout à fait inadmissible.
L'évaluation faite en exécution de l'édit de 1771, offrait des résultats plus justes et plus sûrs; le comité a tout employé pour en acquérir la connaissance la plus complète. Il a trouvé les plus grands secours dans l'état que M. Necker en avait fait dresser en 1778; mais il n'a pas été longtemps sans apercevoir que ce travail, quelque lumineux qu'il fût, ne pouvait point encore lui suffire.
Depuis qu'il avait été terminé, il était survenu divers changements dans les offices ; plusieurs avaient été supprimés ou réunis, d'autres créés, d'autres avaient varié dans leur évaluation, d'autres enfin, et en très grand nombre, n'avaient pas été évalués.
Il fallait d'ailleurs connaître les dettes des compagnies, et cet état n'en fait aucune mention.
Il fallait s'assurer de la différence du prix de l'évaluation avec celui des contrats d'acquisition, qui n'est connu que des propriétaires.
Il fallait calculer, au moins par aperçu, les frais de provisions, droits de mutation, marc d'or, etc., tous objets sur lesquels le comité a cru devoir prendre des instructions, afin d'être prêt à mettre sous les yeux de l'Assemblée nationale tous les tableaux de comparaison et les éclaircissements qu'elle pourra exigerlorsqu'il s'agira de choisir entre les modes de remboursement.
La communication que le comité a prise des pièces déposées à la chancellerie ou aux parties casuelles, la nécessité d'en extraire de nouveaux états avec les divisions appropriées aux décrets rendus et à ceux qu'il était possible de prévoir; l'examen auquel il a été obligé de se livrer pour arriver à réconnaître ce qui lui manquait dans les matériaux qui lui étaient fournis ; tout cela, comme il est facile de le concevoir, a pris un temps considérable, pendant lequel le comité n'a pu que se tracer à lui-même la route qu'il avait à parcourir. Après toutes ses recherches, il s'est convaincu qu'il n'avait de secours à espérer que de la part des titulaires d'offices, sur tous les points qui restaient à constater. Il les a demandés par une première lettre circulaire envoyée à tous les tribunaux du royaume, dont la liste lui a été fournie,à la chancellerie.
Cette liste/prise sur l'état des évaluations, a idonné de grandes facilités au comité ; mais il a eu lieu d'observer que beaucoup de tribunaux supprimés y étaient compris, tandis que d'autres existants avaient été omis. Il lui a été impossible de suppléer tout à fait à cette imperfection.
A l'égard des municipalités en titre d'office, le comité a été encore moins heureux ; il n'a pu jusqu'ici s'en procurer une liste, qu'on s'occupe d'achever. Mais cet objet, moins important à vérifier, parce qu'il ne présente pas autant d'incertitudes et de variations que les offices de tribunaux, paraît d'ailleurs connu assez sûrement par l'état donné ensuite de celui des offices de judicature, qui le fait monter à environ 8,600,000 livres.
Le but principal des lettres envoyées par le comité, était d'acquérir des éclaircissements sur les dettes des compagnies, leurs causes_ et les autorisations en vertu desquelles elles avaient été contractées. Mais il s'en faut de beaucoup qu'on ait satisfait à sa première demande. Une partie de ces renseignements ne lui est point parvenue; une autre a laissé à désirer ; beaucoup de détails nécessaires auxquels on en avait substitué d'entièrement étrangers a la liquidation, et qui, se trouvant sans ordre et sans objet, rendaient les dépouillements interminables.
Le comité a pris de nouvelles mesures pour diriger vers son but les réponses qu'il attendait. En expédiant une seconde lettre circulaire, encore plus instante que la première, il y a joint une instruction facile à suivre, et un modèle de tableau •qu'il ne s'agissait que de remplir, afin d'éviter à chaque tribunal le moindre doute à élever, la moindre difficulté à résoudre.
Ge second envoi a eu plus de succès que le premier ; mais la dispersion de quelques compagnies, l'indifférence de quelques autres à satisfaire le comité, et quelques omissions involontaires de la part du comité lui-même, laisseront encore beaucoup d'inexactitudés dans les dépouillements qu'il se propose d'offrir à l'Assemblée.
Ces obstacles n'ont point arrêté le comité, persuadé, comme il l'est d'ailleurs, que ia précision
rigoureuse dans les résultats des remboursements à opérer ne sera possible et nécessaire qu'à mesure de la liquidation effective, et que l'Assemblée peut se contenter, quant à présent, des aperçus par approximation qui lui seront soumis.
A la suite de ce travail, le comité s'est occupé de dresser le projet des différents articles ae règlement pour parvenir à la liquidation des offices.
Les plus importants, sans doute, étaient ceux qui devaient déterminer les bases de remboursement, et l'acquittement, s'il doit avoir lieu, des dettes contractées par les corps supprimés.
Le comité est prêt à faire à l'Assemblée un premier rapport, dans lequel ii exposera les difficultés insurmontables, et plus encore les injustices qui naîtraient d'asseoir les remboursements à faire, sur le pied de la finanee des offices. Il ne restera donc plus au choix de l'Assemblée que deux modes possibles, celui de l'évaluation, ou celui des contrats d'acquisition ; le comité discutera ces deux moyens, et après avoir balancé les avantages et les inconvénients de chacun d'eux, il proposera celui qui lui a paru le plus facile et le plus généralement juste. Il exposera aussi ses doutes sur la question de savoir si les frais de provision, droits de mutation et marc d'or doivent être remboursés en tout ou partie aux titulaires, ou s'ils doivent être entièrement écartés. Il indiquera les mesures qu'il croit convenables de prendre pour les offices non évalués. En un mot, il entrera dans le détail desexceptions particulières que l'Assemblée doit prévoir, et sur lesquelles elle prononcera.
Dans un second rapport, le comité rendra pareillement compte à l'Assemblée de la nature des dettes contractées par les corps supprimés, du classement qu'il en fait, des décisions qu'il croit nécessaires, tant sur les dettes anciennes, et particulièrement sur celles qu'il n'est pas possible de vérifier, que sur les dettes plus récentes dont les causes sont mieux connues, et qui peuvent être plus sûrement allouées ou rejetées, et enfin sur les questions accessoires à ces questions principales. A la suite de chacun de ces deux rapports le comité joindra les projets de décrets réglementaires qu'il croitindispensables de rendre pour guider ceux qui seront chargés de liquider les offices supprimés.
Enfin, sur toutes les suppressions qui ne sont point encore prononcées, le comité combine ses autres travaux, de manière qu'ils puissent être utiles à l'Assemblée, dans les différentes hypothèses que la marche de ses décrets déjà portés peut lui rendre probables.
Séance du mardi
La séance est ouverte à neuf heures du matin.
présente une adresse du district de Saint-Claude, qui supplie l'Assemblée natio-
Un de MM. les secrétaires annonce une adresse des commissaires du roi pour la formation du département du Gard, par laquelle ils rendent compte des mesures qu'ils ont cru devoir prendre pour calmer les agitations de la ville de Nîmes. Ils demandent que, attendu l'évasion des officiers municipaux, l'Assemblée nationale leur donne des pouvoirs suffisants pour le maintien de l'ordre pendant les opérations relatives au département.
Cette adresse est renvoyée au comité des rapports.
Il est donné lecture des décrets présentés à la sanction du roi, hier 5 juillet :
Des 25, 26 et 29 juin.
Décret sur la ventes des domaines nationaux aux particuliers, auquel sont joints des articles du décret du 14 mai dernier, avec les changements d'expressions nécessaires pour adapter ces articles au présent.
Du 3 juillet.
Décrets sur les difficultés qui se sont élevées entre la nouvelle municipalité de Haguenau et les anciens magistrats de cette ville.
Dudit jour.
Décret qui prescrit au commandant de l'escadre actuellement en armement de se rendre à la fédération générale.
Dudit jour.
Décret qui autorise les É tats du Cambrésis à prêter aux officiers municipaux de Cambrai la somme de 64,558 livres 18 sols, pour le remboursement des blés vendus par le sieur Wanlerbergt.
Dudit jour.
Décret qui statue ultérieurement sur plusieurs points relatifs aux droits féodaux.
Dudit jour.
Décret qui prescrit la formule du serment à prêter par les députés des gardes nationales lors de la fédération du 14.
Dudit jour.
Décret portant que l'Assemblée ne recevra aucune adresse, et ne prendra aucune délibération hors du lieu ordinaire de ses séances.
Dudit jour.
Décret tendant à assurer le transport des poudres et autres munitions tirées des arsenaux de la nation.
Du 3 juillet.
Décret qui charge le président de se retirer par devers le roi, pour remercier Sa Majesté des mesures prises pour faire punir les auteurs des délits commis contre le droit des gens, sur les côtes de la Méditerranée.
Dudit jour.
Décret portant homologation des délibérations paises par la commune et les sections de la ville de Paris, et relatif à la vérification des députés confédérés.
Dudit jour.
Décret qui autorise la caisse d'escompte à verser en ses billets au Trésor public la somme de 45 millions.
annonce à l'Assemblée la demande faite par le sieur Plongenet, maître ès arts, et par quelques membres de l'Académie de peinture, d'être admis ce soir à la barre pour y présenter des pétitions.
L'Assemblée, sur le compte que M. le président lui rend de l'objet de ces pétitions, les renvoie au comité de Constitution.
annonce aussi une pétition des créanciers anglais des habitants de L'île de Tabago : elle est renvoyée aux comités réunis des colonies et du commerce.
Je demande que le comité de Constitution nous fasse jeudi son rapport sur l'ordre à observer dans les cérémonies où assistera l'Assemblée nationale. Les circonstances présentes nous font un devoir de régler les honneurs qui sont dus au président de l'Assemblée nationale et à tous ses membres.
Ceci me paraît absolument important; je crois même qu'il doit être ajouté une disposition particulière dans le décret que nous avons adopté dans l'une des dernières séances. Ce décret contient bien le serment des citoyens et des gardes nationales ; mais je n'ai pas vu quel sera le serment que prêtera le roi au pacte fédératif.
annonce que cette question sera mise jeudi matin à l'ordre du jour.
Quoique vous n'ayez point encore discuté le projet de décret relatif aux Archives, il est cependant instant d'autoriser votre archiviste à changer le local actuel qui devient insuffisant, et à s adjoindre un coadjuteur pour le service de l'intérieur.
Cette proposition est adoptée en ces termes :
L'Assemblée nationale a décrété, sur la demande de l'archiviste, qu'en remettant à un temps où les occupations de l'Assemblée seraient moins multipliées le décret à rendre sur les Archives, elle autorise provisoirement les arrangements qui seraient faits par lui et les commissaires déjà nommés pour le changement et la distribution du local et des dépendances des archives; et l'autorise pareillement à prendre un
commis de plus pour l'aider dans l'intérieur de son travail.
, rapporteur du comité des finances, présente un projet de décret sur un emprunt par la ville d'Arras. Ce projet de décret est adopté sans discussion ainsi qu'il suit:
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité des finances, autorise les officiers munir cipaux de la ville d'Arras, conformément à la de-libération prise en conseil général le 28 mai, à faire l'emprunt de la somme de 30,000 liv., sans intérêts, pour ladite somme être employée à des ateliers de charité, travaux publics, sous la condition, et non autrement, d'en faire le remboursement dans deux ans, sur le prix à provenir de la vente des arbres dépérissants des promenades, au cas qu'ils soient autorisés à cette ven te par le district et département ; et, à ce défaut, par la voie d'impositions dans trois ans, à raison de dix mille iivres chaque année; et, en outre, sous l'obligation de rendre compte, »
, rapporteur. La ville de Sedan a une dette de 695,000 livres contractée pour bâtir ses casernes et trois différents octrois pour y faire face. La cessation de l'un d'eux est expirée du mois de décembre dernier. Le renouvellement en est instant; car, dans cette somme, il y a 70,000 livres d'exigibles; dont 30,000 pour une année d'arrérages d'un emprunt fait à Gênes. Cette dernière ville menace d'arrêter les marchandises des commerçants de Sedan si celle-ci néglige de remplir ses engagements vis-à-vis d'elle. Le comité des finances vous propose un décret sur cette affaire.
Je demande que les 40,000 livres déposées aux mains de la municipalité de Sedan par les religieux prémontrés de Belval (1) soient employées a désintéresser la ville de Gênes.
Cette proposition est écartée par la question préalable.
Le projet de décret du comité des financés est ensuite adopté ainsi qu'il suit :
« L'Assemblée nationale, sur ie rapport qui lui a été fait par son comité des finances de
la délibération du 6 juin, prise en conseil général de la ville de Sedan, des mémoires et
pièces jointes, décrète que tous les octrpis établis, concédés ou prorogés au profit de
ladite ville par l«s arrêts des 20 octobre 1769, 4 octobre 1774, et 7 août 1781, et dont le
terme est expiré au 31 décembre 1789, notamment les droits sur les boissons de toutes
espèces, bois, charbons, métaux bruts ou façonnés, et généralement tous autres droits,
quoique non exprimés au présent décret, continueront d'être perçus provisoirement sur tous
les habitants sans distinction ni privilège ; déclarant, en tant que de besoin, valable la
perception faite depuis le 1er janvier dernier, de ceux desdits droits expirés au 31 décembre
1789 : ordonne que, d'après le payement auquel plusieurs citoyens se sont soumis, tous
redevables y seront contraints depuis le 1M janvier dernier ; a l'effet de quoi, le corps
municipal ou les receveurs sont autorisés à faire les recouvrements, d'après les registres
tenus et les déclarations précédemment fournies : sur tous lesquels droits seront perçus, au
profit du Trésor public, les sols pour livre comme ils l'étaient ci-devant ; le tout jusqu'à
ce qu'il ait été
« Et pour mettre les officiers municipaux dans le cas de satisfaire aux dettes les plus urgentes de la commune, notamment à celles des Génois, elle les autorise à faire un emprunt de 40,000 liv. à charge de rembourser le principal et intérêts sur le produit des octrois ; et, en cas d'insuffisance par la voie d'impositions, à la forme et dans les délais qui seront prescrits par les assemblées de district et de département. »
, rapporteur, présente un troisième décret concernant la commune de ûampierre, qui est adopté, sans discussion, dans les termes ci-après :
« Ouï le rapport du comité des finances, l'Assemblée nationale autorise les officiers municipaux de la commune de Dampierre, district de Versailles, département dé Seine-ét-Oise, à imposer la somme de 1,200 livres en quatre ans, sur tous les contribuables qui payent 4 livres et au-dessus de toutes impositions, pour ladite somme être employée à continuer leur atelier de charité: le' tout conformément aux délibérations prises en conseil général les 30 et 31 mai, et à charge d'en rendre compte.
, rapporteur, présente enfin un quatrième décret concernant la commune de Dourgne, qui ne rencontre aucune opposition et qui est également adopté en ces termes :
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité des finances, autorise les officiers municipaux de la commune de Dourgne, district de Castres, département du Tarn, à imposer par des rôles additionnels la somme de 10,000 livres en deux ans, sur tous ceux qui payent 5 livres et au-dessus d'impositions directes, laquelle somme sera employée aux remboursements des emprunts faits pour soutenir les ateliers de charité qui ont été occupés aux réparations et constructions des routes énoncées dans la délibération du 9 mai 1790. »
, membre du comité de la marine. Les officiers de la marine marchande ayant fait des réclamations sur Ja forme du service auquel ils sont tenus à bord des vaisseaux dé guerre, je vous propose, au nom du comité de la marine, le décret suivant :
L'Assemblée nationale, jugeant nécessaire de pourvoir provisoirement aux justes réclamations qui lui ont été adressées par les officiers de la marine marchande, sur la forme du service auquel ils sont tenus à bord des vaisseaux de guerre, a décrété ce qui suit :
« Art. 1er. Tous les jeunes gens qui auront été employés,
pendant une campagne de long Cours, comme officiers sur les navires marchands, ne pourront
être commandés pour servir sur les vaisseaux de guerre qu'en qualité de volontaires.
« Art. 2. Les navigateurs qui auraient été employés sur les navires marchands en qualité de seconds capitaines et de premiers lieutenants, ne pourront être employés sur les vaisseaux de guerre dans un grade inférieur à celui de pilotes, ou d'aides-pilotes.
« Art, 3. Les capitaines de navires qui auront commandé dans des voyages de long cours ou de grand cabotage, des bâtiments au-dessous de 150 tonneaux, et ceux qui ont déjà servi comme officiers auxiliaires,- ne pourront être employés
au service de la flotte qu'en qualité d'officiers.
« Art. 4. Tous les officiers des navires marchands qui ont été appelés au service, et qu'il ne sera pas nécessaire d'employer dans les grades énoncés ci-dessus, auront la liberté de se retirer chez eux.
« Art. 5. Le présent décret sera présenté sans délai à la sanction du roi, et exécuté provisoirement par l'armement de l'escadre. »
L'ordre du jour est un rapport du comité ecclésiastique et du comité de Constitution sur la division du royaume en arrondissements métropolitains et sur la fixation des sièges des évêchés dans chaque département.
Le rapporteur a la parole.
, rapporteur (1). Messieurs, vous avez décrété que chaque département formerait un seul diocèse et que chaque diocèse aurait la même étendue et les mêmes limites que le département.
Vous avez chargé votre comité ecclésiastique de vous indiquer les villes qui doivent être le siège des évêchés dans tous lés départements. Il a terminé ce travail, et il va vous en rendre compte.
Tous les départements peuvent être rangés en trois classes : la première comprend ceux où il n'y a qu'un seul évêché, qui sera nécessairement conservé.
Dans la seconde sont les départements où il existe deux ou plusieurs évêchés, parmi lesquels il faiit en choisir un qui subsistera seul dans le département.'
La troisièuie comprend les départements où il n'existe point d'évêchés, et où il est nécessaire d'en établir un.
Il y a quarante-deux départements dans la première classe. Nous ne vous proposerons pour eux aucun changement.
Trente-trois départements forment la seconde classe. Nous avons adopté, pour la conservation d'un évêché dans chacun d'eux, et pour là suppression des autres, des principes et des règles que nous allons vous soumettre.
Enfin, la troisième classe, où il n'y a point d'évêchés, comprend huit départements. Pour déterminer les villes qui doivent y être le siège des évêchés, nous avons suivi les mêmes principes qui nous avaient dirigés pour la conservation des sièges dans les départements de la seconde classe.
Nous avons pensé que le plus grand avantage des habitants de chaque département devait principalement déterminer vos résolutions, et que les convenances et les intérêts particuliers ne devaient être écoutés que lorsqu'ils n'étaient pas en opposition avec l'intérêt général.
Lorsque vous avez entrepris l'ouvrage difficile d'une nouvelle division des provinces,
ouvrage unique dans les fastes du monde, et qu'aucune nation n'avait osé tenter avant vous
dans ses domaines, Ja France était encore déchirée par des dissëntions intestines ; les
préjugés anciens étaient dans toute leur forCe; le royaume était plein de mécontents, de
factieux, d'ennemis de la Révolution ; vous aviez des difficultés innombrables à surmonter.
C'est donc avec raison que vous avez alors usé de ménagements, et que
Dans chacun des huit départements où il n'y a point d'évêchés et où il faut en établir, quatre ou cinq villes peut-être seront en concurrencé, et vous demanderont à être entendues: alors les difficultés se multiplieront, et les discussions seront interminables. Vous aurez autant de contestations et de procès à juger qu'il y aura d'évêchés à supprimer, à conserver ou à établir, il en résultera un accroissement de travail pour votre comité, déjà surchargé d'occupations, et une perte de temps considérable pour l'Assemblée, dont les moments sont si précieux.
Votre comité vous invite donc à prendre très incessamment une résolution définitive. Si vous hâtez votre décision sur le décret que nous sollicitons, vous épargnerez d'abord aux habitants des villes des déplacements et des frais de voyage très dispendieux, ensuite vous préviendrez la fermentation et la chaleur des esprits. Vous éviterez aux villes des sujets de querelles et de jalousies dont les effets ne se sont déjà que trop manifestés dans quelques-unes des assemblées électorales auxquelles vous aviez permis de vous proposer les chefs-lieux de districts et de départements qu'elles jugeraient les plus convenables. Lorsque après avoir examiné et discuté le projet de votre comité, vous aurez prononcé, toutes les villes intéressées, convaincues que l'unique but de vos travaux et de votre sollicitude est le bien général et l'avantage de tous, s'empresseront d'obéir à vos décrets.
Et comment aurions-nous hésité à vous proposer des vues uniquement fondées sur l'utilité générale, lorsque nous avons réfléchi que, par une fatalité singulière, les établissements ecclésiastiques ont souvent été nuisibles aux villes où ils étaient fixés, en y'éteignant ou affaiblissant toutes les idées d'industrie, d'activité et d'émulation ? Il est vrai que les causes de cet état d'engourdissement ne subsisteront probablement plus. Nous devons espérer que les réformes salu-
taires que vous avez faites, et surtout l'ancien usage des élections, que vous avez rétabli, en purifiant le choix des ministres de la religion, ramèneront parmi nous les temps heureux de la primitive Eglise, et que les ecclésiastiques seront, comme autrefois, les instituteurs, les modèles et les consolateurs des peuples. Mais aussi, leurs traitements étant portés à une mesure plus juste, les avantages pécuniaires que les villes en retireront seront peu considérables : le siège d'un évêché, en y comprenant le traitement des Vicaires et la dépense des séminaires, ne formera qu'un total de 60 à 72,000 livres.
Ainsi, les villes qui n'obtiendront point d'établissements écclésiastiques n'auront pas lieu de les regretter : privées de cette faible ressource, elles tourneront leurs vues vers des branches d'industrie qui leur seront bien autrement profitables; une seule manufacture établie dans une ville y procurera plus de ressources, y fixera plus de familles industrieuses, que ne léseraient plusieurs évêchés. L'état de langueur et d'inertie que les villes éprouvent en ce moment, et qui leur fait désirer des établissements publics, est l'effet inévitable d'une grande révolution qui a diminué ou suspendu toutes les consommations, même Celles de première nécessité; mais les villes ne tarderont pas à recueillir aussi les fruits de la Constitution, qui déjà fait le bonheur des campagnes. Si les terres soignées par des mains libres récompensent plus abondamment les travaux des cultivateurs; si les habitants des ; campagnes sont plus heureux et plus aisés, ils auront plus de besoins ; ce sera dans Ie3 villes qu'ils pourront les satisfaire, et se procurer des jouissances qui,,jusqu'à ce jour, leur étaient in-, connues. Toutes les consommations, et consé-quernment toutes les branches d'industrie dont le siège naturel est dans les villes, s'accroîtront dans une proportion incalculable; ou ne sera plus honoré quand on vivra, comme on le disait autrefois, noblement, c'est-à-dire dans une honteuse oisiveté.
Tous les arts, tous les genres d'industrie utiles à l'homme seront estimés: les villes, devenues manufacturières ou commerçantes, seront loin alors de désirer des établissements ecclésiastiques d'une aussi médiocre importance.
On nous a dit, et on vous répétera, Messieurs, que les établissements doivent être divisés entre les principales Villes d'un département; nous pensons aussi qu'ils doivent l'être, pourvu que cette division ne soit pas préjudiciable à la majeure partie des habitants. Sans cette condition, de quel droit deux ou trois villes, dans la vue de leur intérêt particulier, prétendraient-elles se partager tous les avantages ? Pourquoi lés bourgs, pourquoi les simples villages ne seraient-ils pas fondés à réclamer aussi des établissements publics? N'auraient-ils pas également leur intérêt particulier à faire valoir? et à quel terme faudra-t-il s'arrêter? Tous vos décrets ont consacré la maxime salutaire que l'intérêt particulier doit se perdre et se confondre dans l'intérêt général. C'est ce principe qui nous a servi de guide et c'est en le suivant que nous avons adopté, pour la fixation des métropoles et des évêchés, les bases suivantes :
1° La convenance de la majeure partie des habitants du département, convenance presque toujours déterminée par la position la plus centrale ;
2° La facilité des abords et des communications ;
3° La population plus considérable qui attire
et multiplie lesaffaires, et sans laquelle les vicaires de l'évêque ne pourraient être utilement employés;
4° Les établissements déjà formés pour le logement des évêques et pour l'emplacement des séminaires.
Ces conditions se trouvent réunies en faveur de la plupart des villes qui ont fixé le choix de votre comité. Il est un petit nombre de départements où plusieurs villes sont en concurrence et où chacune d'elles offre des avantages particuliers sans les réunir tous ; votre comité a cru devoir alors préférer celle qui, dans les circonstances actuelles, perd ses établissements.
Le comité n'ayant fait aucun changement dans quarante-deux départements où il n'existe qu'un seul évêché, il n'a dû appliquer ces principes qu'à quarante et un départements, dont huit n'avaient point d'évêché et trente-trois en avaient deux, ou plusieurs, parmi lesquels il a choisi ceux dont la position s'accordait le mieux avec les règles qu'il s'était imposées.
Le comité a arrêté particulièrement son attention sur le nombre des métropoles qui devaient être conservées. II y a dans ie royaume dix-huit archevêchés : il n'a pas cru qu'il fût possible de les conserver tous. La juridiction des métropoles sera probablement bornée à un très petit nombre d'affaires, et la Constitution semble se refuser à multiplier des dignités où il n'y aurait presque aucune fonction à remplir. Les archevêchés actuels sont très inégalement répartis entre les provinces du royaume. Il y en a un plus grand nombre dans les départements méridionaux, et ils y sont très rapprochés les uns des autres : si donc on en conservait dix-huit, il faudrait ou en transférer plusieurs, ou en établir de nouveaux. Le nombre des évêchés suffragants qui en dépendent n'est pas moins inégal : il a été fixé sans règles; il a été la suite de réunions ou d'érections accidentelles : vpus n'aurezsansdoute aucune considération pour une division aussi irrégulière.
Votre comité vous propose de partager la France entière en dix arrondissements métropolitains, qui comprendront chacun un certain nombre d'évêcbés. Il n'a pas été possible d'attacher à chaque arrondissement un nombre égal. de diocèses, parce qu'il a fallu avoir égard à la position des plus grandes villes du royaume qui, par Jeur population et leur importance, et par la facilité des communications, semblaient destinées à être le centre des arrondissements.
Nous vous proposons de fixer une métropole à Rennes, qui n'était ci-devant qu'un évêché : le département dont cette ville est le chef-lieu, et les départements voisins sont si éloignés de toutes les autres métropoles, que cet établissement nous a paru indispensable.
Vous avez ajourné et renvoyé à votre comité l'examen de la demande faite par l'un de Messieurs les députés de la Corse d'établir plusieurs évêchés dans cette île : nous avons cru devoir prendre auprès de MM. ses collègues des éclaircissements sur cette demande; nous les avons trouvés partagés d'opinion. Les uns proposent l'établissement d'une métropole et de deux évêchés en Corse. Ils fondent la nécessité de ces établissements sur l'éloignement des habitations et sur la difficulté des communications entre les différentes parties de l'île, qui est coupée en deux par une chaîne de montagnes. Ils croient le nombre de trois évêques nécessaire pour prévenir les inconvénients et les longueurs que la Corse
éprouverait en cas de vacance, et lors d'une nouvelle élection, s'il n'y avait qu'un seul siège, et si pour la consécration de l'élu il fallait faire venir des évêques en France. Au reste, ils protestent au nom de la Corse de sa parfaite soumission à ce qu'il vous plaira déterminer sur l'objet de leur demande.
Les autres pensent que la Corse, n'ayant qu'une seule assemblée de département, ne doit avoir non plus, suivant la Constitution, qu'un seul évêché. Ils: ont déclaré que tous les habitants de l'île ayant professé leur adhésion et leur soumission à la Constitution du royaume, étaient très éloignés de proposer qu'il fût fait en leur faveur une exception qui y serait contraire; ils ont seulement demandé que le siège de l'évêque de Marjana et Accia, qui depuis longtemps réside à lîaslia, où tous les établissements ecclésiastiques sont formés, y restât fixé; cette ville, la plus considérable ae l'île, ayant des relations fréquentes et des communications faciles soit par terre, soit par mer, avec toutes ses parties.
Ces sentiments honorables, que MM. les députés de Corse nous ont assuré être ceux de l'île entière, nous ont paru devoir être connus de l'Assemblée; mais nous avons cru que la dernière opinion, plus conforme à vos principes, devait fixer votre résolution et vous déterminer à la conservation d'un seul évêché en Corse, suivant la Constitution adoptée pour tout ie royaume.
Si, néanmoins, sur le vœu des électeurs de cette île, vous vous déterminiez à y établir deux départements, alors, conformément à la Constitution, il y aurait, dans chacun d'eux, un évêché.
Les évêchés existants seuls dans les quarante-deux départements de la première classe, et qui doivent être conservés, sont : Vannes, Nantes, Angers, le Mans, Luçon, Agen, Tulle, Limoges, Angoulême, Tarbes, "Perpignan, Mende, Lyon, Clermont, Saint-Flour, le Puy, Viviers, Befley, Besançon, Strasbourg, Saiut-Diez, Langres, Dijon, Saint-Claude, Verdun, Metz, Cambrai, Rouen, Séez, Evreux, Amiens, Paris, Chartres, Orléans, Troyes, Meaux, Bourges, Blois, Tours, Poitiers, Moulins et Nevers.
Les évêchés que votre comité vous propose de conserver dans (es départements où il en existe deux ou plusieurs, sont : Rennes, Saint-Brieuc, Quimper, Bordeaux, Saintes, Dax, Périgueux, Toulouse, Auch, Oléron, Pamiers, Carcassonne, Rodez, Cahors, Alby, Aix, Bastia, Fréj«us, Digne, Embrun, Valence, Nîmes, Montpellier, Grenoble, Autun, Reims, Nancy, Soissons, Lizieux, Coutan-ces, Beauvais, Saint-Omer et Sens.
Les villes que nous désignons comme devant être les sièges des évêchés dans les départements où il n'en existe point,/ sont : Laval, Saint-Maixent, Colmar, Vesoul, Sedan, Versailles, Châ-teauroux et Guéret.
Les villes que nous vous proposons pour être les chefs-lieux des arrondissements métropolitains sont : Rouen, Reims, Rennes, Besançon, Paris, Bourges, Bordeaux, Toulouse, Aix et Lyon.
Ces métropoles auront la dénomination suivante :
Celle de Rouen sera appelée métropole des côtes de la Manche.
Celle de Reims .,.,.» métropole du nord est.
Celle de Besançon. . . . . métropole de l'est.
Celje de Rennes. . . . . . métropole du nord ouest.
Celle de Paris. . . . ... métropole de Paris.
Celle de Bourges.....métropole centrale.
Celle de Bordeaux. .... métropole du sud-ouest.
Celle de Toulouse. . , . , métropole du sud.
Celle d'Aix.......métropole des côtes de la Méditerranée,
Celle de Lyon. . . ,...métropole du sud-est.
Les évêchés qui doivent êtje Compris dans chaque arrondissement métropolitain, sont dénommés au projet de décret que nous allons vous soumettre.
Nous ajouterons seulement que ce projet, en son éntier, a été concerté avec le comité de Constitution : c'est donc au nom des deux comités que nous vous proposons le décret suivant :
I
A compter du jour de la publication du présent décret, les sièges des évêchés des quatre-vingt-trois départements du royaume seront fixés, savoir :
Celui du :
Department de la Seine-Inferieuro. A Koicn.
Dvpurtimonc do Calvados.....a Lisiaux.
Depart* me at de la Manclw.....A CoiKanccs.
Dcpuru-iueiu do l'Oroe.......a Scmc.
Deparltmeit do l'Eure.......A Evtcux.
Dcpartemeat dc l'Uise.......a Beanvais.
D6jiart«maot do la Somme. ... A Amiens.
Department lu Pas-de-CalaU ... A Saial Ocoer.
Dcparl-jnioot do J*. Marnc.....ii Roiina.
Dcparumcut de Ii Mtuse.....A Veidun.
Department do la Meurthe .... a Nancy.
Department do h Moselle .... A Mel8.
Department des Ardennes.....a Secan.
Department do I'Aisno ...... .1 Soksans.
Department du Nord.......a Caubrai.
Dcpartemeat du Doub?......a Bcmnc«n.
Department du Haut-Rhin.....a Colnar.
Department (lU RlS-KMa.....a SlnsbOurg.
D^partemcnt des Vosjcs......a Saiat-Diez.
Department de la Hautc-Sadne. . . a Vesoul.
Di'-parNmo-it la Hanta-Marno . . a I.:ingri>K.
Department de la Cdtc-dOr .... A Dijin.
DipaiU incut du Jura.......a Saint-Qaude.
Departmeat de I'llle-ot-Villainc . . A Hemes.
Department des COtes-du-lSord . . a Sabt-Brletfc.
Department du Finisterc.....A Ouimpw.
Depart*merit du Morbihai.....A Vatnes.
Drtp.iricinoat de la Le^ro-Inforiouro . a Natios.
Department de Wain«-et-Loirc . . . A Anpers.
Departwcul do It Suilh«.....an Mens.
Department de la Miycrino . . . . A Laval.
Department dc Paris.......a l'aris.
Department do Seine-et-Oie. ... a Versailles.
Department d'Eure-et-Loir.....4 Chsrtrts.
Dcprt«mout ilu L>irot..... Orluina.
Department ds l'Yome......a Sens.
Department du l'Aubu......A Troycs.
Department de Siine-et-Mamc . . a Meaux.
De jam meat du Cher.......A Bourges.
Department du Liir-ot -Clu-r ... a Klois.
Department d'lndre-et-Leire ... A loirs.
Dci artcmoDt do la Yitnnv ..... A I'oitiore.
Department do l'lndie ...... A Chaxauroux.
Dcpartemeat c!« la Cause.....A Gufret.
Dcpartemeat do l'Allier......a Nloilins.
Dcpartemeat do la N"i6vr....A Nevcrs.
Deparmeat doIn Girondc .... A Rorroaut.
Departmeit dc la Vendee.....A Lucca.
Department co lo Charcute-Inf.. . a Saimcs.
Department des Landos......A Dax.
Depart meat dc Ltt-ei-Garonno . . a Agei.
Department do la Dordojno. ... A Perijuoux.
Department do la Ccrrcze .... A lulls.
Depart*meat H* la llnut«-Vionno. . A l.imogos.
Department dc la Cbarenta. ... A Ang»ul4ne,
Department des I>eux>S6\res ...» Saiui-Maixoiit.
Departmcat do la Hautc-GaxontK:. A TouIousj.
Department da Gars.......a Auck.
Department des Rnss»s-Pyroi»eii . A Olermi.
Deparlcmctt des Hautes-I'yrenees . A Tartss.
Departoment des Pyrenees-Orient.a Perpiguan.
Departement de l'Aude......a Carcassonne.
Department de l'Aveyron . . . .a Rodcz.
Departoment du Lot.......a Cahors.
Departement du Tarn......a Alby.
Departement des Bouches-du-Rhdne a Aix.
Departement do la Corse.....a Rastia.
Departement du Var.......a Frejus.
Departement des Basses-Alpes . .a Digne.
Departement des Hautes-Alpes. .a Embrun.
Departement de la Drume ....a Valence.
Departemeut dc la Lozore ....a Mende.
Departement du Gard......a Nirnes.
Departement do l'Herault.....a Montpellier.
Departement do Rhone......a Lyon.
Doparlement du Puy-de-Ddme . .a Clermont,
Ddpartement du Cantal......a Saint-Flour,
Departement de la Haute-Loire . .a u Puy.
Departement de l'Ardeche ....a Viviers.
Departement de l'lsere......a Grenoble,
Departement de l'Ain ......a Belley
Departement de Sadne-et-Loire. .a Autun.
Tous les autres évêchés existants dans les quatre-vingt-trois départements du royaume, et qui ne sont pas nommément compris au présent article, sont et demeurent supprimés.
II
Le royaume sera divisé en dix arrondissements métropolitains, dont les sièges seront : Rouen, Reims, Besançon, Rennes, Paris, Bourges, Bordeaux, Toulouse, Aix et Lyon. Ces métropoles auront la dénomination suivante :
Celle de Rouen sera appelée. métropole des côtes de la Manche.
Celle de Reims ....... métropole du nord-est.
Celle de Besançon...... métropole de l'est.
Celle de Rennes.......métropole du nord-ouest
Celle de Paris. .......métropole de Paris.
Cellle de Bourges......métropole centrale.
Celle de Bordeaux. ..... métropole du sud-ouest.
Celle de Toulouse...... métropole du sud.
Celle d'Aix.........métropole des côtes de la Méditerranée,
Celle de Lyon........métropole du sud-est.
III
L'arrondissement de la métropole des côtes de la Manche comprendra les évêchés des départements de la Seine-Inférieure, du Calvados, de la Manche, de l'Orne, de l'Eure, de l'Oise, de la Somme, du Pas-de-Calais.
L'arrondissement de la métropole de nord-est comprendra les évêchés des départements de la Marne, de la Meuse, de la Meurthe, de la Moselle, des Ardennes, de l'Aisne, du Nord.
L'arrondissement de la métropole de l'est comprendra les évêchés du département du Doubs, du Haut-Rhin, du Bas-Rhin, des Vosges, de la Haute-Saône, de la Haute-Marne, de la Côte-d'Or, du Jura.
L'arrondissement de la métropole du nord-ouest comprendra les évêchés des départements de l'Ille-et-Vilaine, des Côtes-du-Nord, du Finistère, du Morbihan, de la Loire-Inférieure, de Maine-et-Loire, de la Sarthe, de la Mayenne.
L'arrondissement de la métropole de Paris comprendra les évêchés de Paris, Seine-et-Oise, d'Eure-et-Loir, du Loiret, de l'Yonne, de l'Aube, de. Seine-et-Marne.
L'arrondissement de la métropole centrale.com-prendra les évêchés des départements du Cher, de Loir-et-Cher, de l'Indre-et-Loire, de la Vienne,
de l'Indre, de la Creuse, de l'Allier, de la Nièvre.
L'arrondissement .de .la métropole du sud-ouest comprendra les évêchés des départements de la pironde, de la Vendée,- de la Charente-Inférieure, des Landes, de Lot-et-Garonne, de la Dordogne, de la Corrèze, de la Haute-Vienne, de la Charente, des Deux-Sèvres.
L'arrondissement de la diétropole du sud comprendra les évêchés des départements de la Haute-Garonne, du Gers, des Basses-Pyrénées, des Hautes-Pyrénées, de l'Ariège, des Pyrénées-Orientales, de l'Aude, de l'Aveyron, du Lot, du Tarn.
L'arrondissement dé la métropole des côtes de la Méditerranée comprendra les évêchés des départements des £>oûcbes-du-Rhône, de la Corse, du Var, des Basses-Alpes, des Hautes-Alpes, de la Drôme, de la Lozère,, du Gard, de l'Hérault.
L'arrondissement delà métropole du Sud-est, comprendra les évêchés des départements du Rhône et Loire, du Puy-de-Dôme, du Gantai, de la Haute-Loire, de l'Ardèche, de l'Isère, de l'Ain, de SaÔne-et-Loire.
Plusieurs membres demandent la parole pour faire des réclamations particulières.
Il s'agit de savoir si l'on discutera le principe, c'est-à-dire si les évêchés existants seuls dans les quarante-deux départements indiqués par le comité doivent être conservés, ou bien si l'on entendra les réclamations particulières.
(L'Assemblée décrète qu'on se bornera à la discussion du principe.)
Je demande la parole pour observer que dans les départeûiénts' o'ù' il n'y a qu'une Ville épiscopale on ne jrêut admettre la translation'; ce serait se préparer des obstacles de tout genre. Le concours et les pétitions des villes rivales, la construction- des cathédrales, des maisons épiscopales et des séminaires,-ne retarderaient-ils pas la translation ?
(On demande à aller aUx'vbiX.)
Il n'existe, à la vérité, qu'un seul évêché dans le département du Nord ; mais dans l'ancienne division, chaque province avait son évêché ; au moyen de cette suppression, les quatre villes principales du département du Nord, se trouveront à trente lieues, de Cambrai. Je demande donc que l'Assemblée renvoie au département la fixation du siège de l'évèché.
Plusieurs membres demandent que le mot provisoirement soit ajouté à l'article.
L'Assemblée décide qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur ces amendements.
(Le projet de décret du comité est adopté.)
Vous avez à vous occuper maintenant des départements où il y a plusieurs évêchés et de ceux où il n'y en a point.
Le comité propose dé fixer à Lisieux le siège de l'évèché du département du Calvados.
et plusieurs de ses collègues réclament en laveur de Bayeux, à cause de sa position centrale. >
L'Assemblée décrète que la ville de Bayeux sera le siège de l'évèché du département de Calvados.
annonce que M'de La Touche
demande à être entendu à £'ordre de,deux heures au nom de M. le duc d? Orléans.
L'Assemblée décide que M. de La Touche aura la parole à deux heures.
La discussion est reprise sur la fixation des sièges des évêchés.
Le comité propose de fixer le siège de l'évèché du département de la Manche à Goutances.
Quelques membres réclament en faveur d'A-vranches.
L'avis du comité est adopté.
Les évêchés de Noyon, Senlis et Beauvais se trouvent dans un même département. Le comité s'est déterminé pour Beauvais.
, curé de Noyon, demande que l'évèché soit fixé à Senlis, et le collège à Noyon.
xlèfeunèt soutient l'avis du comité.
Cet avis est adopté..
Le département du Pas-de-Calais contient trois évêchés, Saint-Omer, Boulogne et Arras;ia viHe la plus centrale étant Saint-Omer, le comité l'a choisie pour Je siège de l'évèché,
Je demande qne l'Assemblée attende que les électeurs de ce département aient déterminé le chef-lieu, afin de partager les établissements, ou'qu'elle décide que celle des deux villes de BoWogn'e ou d'Arras, qui n'aura pas le chef-lieu, sera le siège de i'évêcné.
appuie l'avis du comité. —> Un membre réclame pour Boulogne.
L'avis du comité -est adopté.
Deux évêchés se trouvent dans le département de la Marne, Châlons et Reims. La première de ces villes est à 1a vérité plus centrale ; mais, l'autre est plus peuplée : c'est dans celle-ci que nos.rois sont sacrés; ces considérations ont engagé .le comité à fixer à Reims le siège de l'évèché du département de la Marne.
L'avis du comité est adopté.
Toûl'et Nancy se disputent le siégé dè l'évèché du département de la Meuse. Nancy a été préféré par le comité, à cause de sa population et de sa position centrale.
demande-la préférence pour Toul et s'élève avec force contre l'aristocratie des grandes villes.
M. Begnier appuie l'avis du comité.
Cet avis est adopté.
Plusieurs villes sont en concurrence, pour devenir le siège de l'évèché qu'on doit établir dans le. département des Ardennes: Gharleville, Mézières, Mouzon et Sedan. Le comité s'est décidé en faveur de Sedan.
rédame pour Mouzon.
Après les observations de quelques autres membres, l'avis du comité est adopté.
Dans le département de
l'Aisne, se trouvent Soissons et Laon. Le comité s'est décidé en faveur de Soissons.
Je réclame, pour la conservation de l'évéché de Laon, les principes mêmes du comité. Laon est au centre du département; il a eu, pour être le chef-lieu d'administration, le vœu des deux tiers des électeurs de ce département. Son diocèse se trouve en entier dans le département de l'Aisne, qui ne comprend au contraire qu'une partie de celui de Soissons ; on ne doit point sacrifier à de petites convenances particulières l'intérêt général des administrés, qui, pour la plupart, ont déjà leurs habitudes religieuses dirigées vers Laon. La position même de cette ville veut que l'évêché soit dans le même lieu que l'administration, pour que l'évêque et son conseil soient perpétuellement sous la surveillance des administrateurs.
(L'avis du comité est adopté.)
Il n'y a point d'évêchédans le département du Haut-Rhin. Le comité a choisi liolmar pour le siège de l'évéché.
se plaint de ce que cette ville a tous les avantages, et réclame en faveur de Quie-ville.
L'avis du comité est adopté.
Les villes de Vesoul, Gray et Luxeuil, dans le département de la Saône, sollir citent également le siège de l'évêché. Le comité s'est décidé en faveur de Vesoul.
réclame pour Gray.
Après avoir entendu quelques observations pour et contre, l'avis du comité est adopté.
Les trois évêchés de Dol, Saint-Maio et Rennes, se trouvent dans le même département. Le comité s'est déterminé en faveur de cette dernière ville.
(L'avis du comité est adopté.)
Le comité a été d'avis d'éla^ blir à Saint-Brieuc l'évêché du département des Côtes-du-Nord.
(Cet avis est adopté.)
Dans le département du Finistère se trouvent les villes de Saint-Pol-de-Léon et Quimper; ni l'une ni l'autre ne sont centrales; Saint-Pol cependant approche davantage du centre; mais le comité a cru devoir se décider en faveur de Quimper, à cause de sa population.
réclame pour Saint-Pol-de-Léon.
L'avis du comité est adopté.
Château-Gontier, Mayenne et Laval, dans le département de la Mayenne, sollicitent également le siège épiscopal. La ville de Laval, plus centrale et plus pçuplée, a été préférée par le comité.
réclame pour Mayenne.
pour Château-Gontier.
L'avis du comité est adopté.
Plusieurs villes prétendent au siège épiscopal du département de Seine-et-Oise;
la ville de Pontoise a envoyé une députation extraordinaire pour exposer ses motifs. Sa population est un de ses moyens principaux : mais elle ne peut être comparée à celle de la ville de Versailles, qui, malgré les émigrations, est portée à plus de 52,000 âmes; c'est pourquoi le comité a préféré cette ville.
, curé de Sergy, observe que, entre autres considérations, l'Assemblée nationale ne veut pas que les évêques soient courtisans, et que celui de Versailles le deviendrait infailliblement : il demande la préfence pour la ville de Pontoise.
L'avis du comité est adopté.
Il y a deux évêchés dans le département de I Yonne, l'un à Sens et l'autre à Auxerre. Auxerre est le chef-lieu de département: elle réclame, à ce titre, l'évêché. Sens représente que, quoique moins bien située, ses communications avec le reste du département sont faciles; elle s'autorise surtout d'une convention faite en présence du comité de Constitution, lors de la détermination des chefs-lieux de département ; par cette convention, un établissement particulier a été promis à la ville de Sens. Le comité propose de donner l'évéché à cette ville.
réclame en faveur d'Auxerre.
Auxerre est au centre du département. Sens est à l'extrémité. L'administration du département a manifesté son vœu en faveur d'Auxerre. Les dispositions de l'Assemblée ne me permettent pas de m'étendre; je m'en réfère donc à ces deux considérations. On ne peut y opposer qu'une prétendue promesse faite par le comité de Constitution de procurer à la ville de Sens une indemnité quelconque. Quoi qu'il en soit de cette promesse, on ne doit pas s'y arrêter, parce qu'un comité n'a pas lé droit d'engager l'Assemblée ; s'il en était autrement, il serait inutile de se réunir en assemblée, et les comités seraient les seuls législateurs.
présente des considérations en faveur de Sens.
L'Assemblée décrète l'avis du comité.
L'ordre du jour de deux heures étant arrivé, on demande que la discussion soit suspendue et renvoyée à une séance extraordinaire qui aurait lieu demain au soir.
Cette proposition est adoptée.
M. de La Touche monte à la tribune. (Un grand silence s'établit.)
Messieurs, je vais parler au nom de M. Louis-Joseph-Philippe de France, duC d'Orléans, et la lettre que je Vais lire sera déposée sur le bureau avec d'autres pièces (1).
« Londres, le
« Je vous prie, Monsieur, de mettre le plus tôt possible èt en mon nom, sous les yeux de l'Assemblée nationale, les faits dont l'exposé est ci-dessous.
« Le 25 du mois dernier j'ai eu l'honneur d'écrire au roi, pour prévenir Sa Majesté que je
me
« A l'époque de mon départ pour l'Angleterre, ce fut M. de Lafayette qui me fit le premier, au nom du roi, la proposition de me charger de la mission que Sa Majesté désirait me confier. Le récit de la conversation qu'il eut avec moi à ce sujet est consigné dans un exposé de ma conduite, que je me proposais de rendre publique, seulement après mon retour à Paris, mais que d'après ce nouvel incident je prends le parti de publier aussitôt, commè aussi d'en faire déposer l'original sur le bureau de l'Assemblée (Voy. ce document annexé à la séànce de ce jour).
« On y verra que parmi les motifs que M. de Lafayette me présenta pour accepter cette mission, un des principaux fut, dis-je, que mon départ ôtant tout prétexte aux malintentionnés de se servir de mon nom pour exciter des mouvements tumultueux dans Paris,lui, M. de Lafayette, en aurait plus de facilité pour maintenir la tranquillité de la capitale; et Cette considération fut une de celles qui me détermina. Cependant j'ai accepté cette mission et la capitale n'a pas été tranquille ; et si, en effet, les fauteurs de cés tumultes n'ont pas pu se servir de mon nom pour les exciter, ils n'ont pourtant pas craint d'en abuser dans vingt libelles, pour tâcher d'en fixer les soupçons sur moi.
« 11 est enfin temps de savoir quels sont les gens malintentionnés dont toujours on connaît les projets, sans cependant pouvoir jamais avoir aucun indice qui mette sur leurs traces, soit pour les punir et pour les réprimer; il est temps de savoir pourquoi mon nom servirait plutôt que tout autre de prétexte à des mouvements populaires ; il est temps enfin qu'on ne me présente plus ce fantôme sans me donner aucun indice de sa réalité.
. « En attendant, déclare que, depuis le 25 du mois dernier, mon opinion est que mon séjour en Angleterre n'est plus dans le cas d'être utile aux intérêts de 1a nation et au service du roi ; qu'en conséquence, je regarde comme un devoir d'aller reprendre mes fonctions de député à l'Assemblée nationale ; que mon vœu personnel m'y porte ; uue l'époque du 14 juillet, d'après les décrets de l'Assemblée, semble m'y rappeler plus impérieusement encore et qu'à moins que l'Assemblée ne
décide d'une façon contraire et ne me fasse connaître sa décision, je persisterai dans ma résolution première. J'ajoute que si, contre mon attente, l'Assemblée jugeait qu'il n'y a lieu à délibérer sur ma demande, je croirais en devoir conclure qu'elle Juge que tout ce qui m'a été dit par le sieur de Boinville, doit être considéré comme non avenu ; et que rien ne s'oppose à ce que j'aille rejoindre l'Assemblée dont j'ai l'honneur d'être membre. Je vous prie, Monsieur, après avoir fait connaître ces faits a l'Assemblée nationale, d'en déposer sur le bureau le présent détail, signé de moi, et de solliciter la délibération de l'Assemblée à ce sujet.
« J'envoie copie de la présente lettre à Sa Majesté par M. de Montmorin et à M. de Lafayette.
« Signé : L.-Ph. d'Orléans. »
M. de Lafayette a demandé la parole.
D'après ce qui s'est passé entre M. le duc d'Orléans et moi, au mois d'octobre, et que je ne me permettrais pas de rappeler s'il n'en entretenait lui-même l'Assemblée, j'ai cru devoir à M. le duc d'Orléans, de l'informer que les mêmes raisons qui l'avaient déterminé à accepter sa mission pouvaient encore subsister, et que peut-être on abuserait de son nom pour répandre sur la tranquillité publique quelques-unes de ces alarmes que je ne partage point, mais que tout bon citoyen souhaite écarter d'un jour destiné à la confiance et à la félicité commune.
Quant à M. de Boinville, il habitait l'Angleterre depuis six mois ; il était venu passer quelques jours ici, et à son retour à Londres il s'est chargé de dire à M. le duc d'Orléans ce que je viens de répéter à l'Assemblée.
Permettez-moi de saisir cette occasion, comme chargé par l'Assemblée de veiller, dans cette époque, à la tranquillité publique, de lui exprimer sur cet objet mon opinion personnelle. Plus je vois s'approcher la journée du 14 juillet, plu3 je me confirme dans 1 idée qu'elle doit inspirer autant de sécurité que de satisfaction. Ce sentiment est surtout fondé sur les dispositions patriotiques de tous les citoyens, sur le zèle de la garde nationale parisienne et de nos frères d'armes qui arrivent ae toutes les parties du royaume; et comme les amis de la Constitution et de l'ordre public n'ont jamais été réunis en si grand nombre, jamais nous ne serons plus forts.
Dans le temps d'un régime despotique et arbitraire, le soupçon seul pouvait perdre un bon citoyen, l'écarter de ses foyers, l'exiler de son pays : la liberté ne permet" pas ces excès. M. d'Orléans a fait beaucoup pour elle. Il est accusé depuis huit mois ; depuis huit mois, aucuns des gens qui l'accusent ne se sont fait connaître; aucun fait n'a justifié ces accusations. Je demande que M. d'Orléans vienne rendre compte de sa conduite, et prendre part à la fête nationale qui s'apprête.
Si tous ceux d'entre nous contre lesquels on a fait des libelles de toute espèce, ou permis des inculpations de tout genre, s'étaient absentés, l'Assemblée nationale serait dissoute depuis plusieurs mois. M. d'Orléans a quitté l'Assemblée, parce qu'if était chargé d'une mission du roi. Quand il vous a écrit qu'il acceptait cette mission, vous n'avez pas trouvé mauvais qu'il s'absentât.Lorsque,à 1 archevêché, M. de Menotz a demandé qu'il rat rappelé pour rendre
compte de sa conduite, vous avez décidé qu'il n'y avait pas lieu à délibérer. Vous avez jugé depuis longtemps ce que vous devez faire aujourd'hui. Chaque fois qu'il a été question d'un membre absent et des motifs de son absence, vous avez demandé qu'on passât à l'ordre du jour. Je demande donc qu'on passe à l'ordre du jour.
Vous avez entendu la lecture de la lettre de M. Louis-Joseph-Philippe de France ; vous avez vu qu'il déclarait que si l'Assemblée ne délibérait pas, il reviendrait; vous avey entendu M. de Lafayette, M. de Biron et la dernière motion qui a pour objet de passer à l'ordre du jour. Suivant l'ordre établi dans vos délibérations, cette motion doit être mise la première aux voix.
L'Assemblée décide qu'elle passe à l'ordre du jour.
La séance est levée à trois heures.
Séance du
La séance est ouverte à six heures du soir.
(de Saint-Jean-d! Angély), secretaire, lit les adresses ou les extraits qui suivent :
Adresse des membres de la juridiction consulaire de la ville d'Auxerre, contenant les témoignages d'une vive reconnaissance pour le décret qui consacre l'établissement des tribunaux de commerce, le serment d'être fidèle à la nation, à la loi et au roi, et de regarder comme ennemis de la patrie les auteurs de toutes protestations contraires aux décrets de l'Assemblée, et propres à en empêcher l'exécution.
Lettre de M. de Puymonbrun, commandant général de la garde nationale dè Montauban, qui demande justice de tous les troubles arrivés dans cette ville le 10 mai, et dont il a manqué être la victime. Il supplie l'Assemblée de lui rendre la justice qui est due à un bon citoyen qui n'a jamais été et ne sera jamais animé que de l'amour du bien public.
Adresses des officiers municipaux de la ville de Bourgoin, département de l'Isère, contenant adhésion à tous les décrets de l'Assemblée nationale, et notamment à celui du 13 avril dernier. Les ci-devant religieux Augustins réformés de cette ville, le prieur et un religieux des Dominicains de Paternos se réunissent à cette adhésion ;
Des manufacturiers, marchands et négociants de Moulins en Bourbonnais, qui demandent l'établissement d'une juridiction consulaire dans cette ville ;
De la commune de Lons-le-Sauuier, au département du Jura, qui adhère pleinement et avec transport au pacte fédératif qui doit avoir lieu à Paris le 14 du présent mois;
Des gardes nationales d'une .multitude de communautés voisines de la ville de Metz, fédérées à Longeau, le 13 mai dernier;
Des officiers municipaux de,la ville de Bordeaux
Adresse des élèves de M. Jouan, le jeune, instituteur français, à Tonneins, qui ont, avec enthousiasme, prêté le serment civique, et ont invité à un pacte fédératif tous les jeunes gens maintenant en cours d'éducation dans tous les collèges et pensionnats du département de Lot-et-Garonne ;
Des communautés de Preigney et de Saint-Ger-main-le-Grand, qui remercient avec transport l'Assemblée des grands bienfaits dont elle a comblé les pauvres habitants des campagnes ; la communauté de Saint-Germain-le-Grand demande la permission d'employer le produit de l'imposition des ci-devant privilégiés pour les six derniers mois de 1789 a acheter des armes pour le service de sa garde nationale ;
Des citoyens formant la garde nationale de la ville et paroisse d'Honscotte, qui saisissent avec empressement le premier moment de leur création pour présenter à l'Assemblée nationale le tribut de leur admiration et de leur dévouement ; ils se glorifient, à juste titre, d'avoir jusqu'à ce jour, sans garnison, maréchaussée, ni garde bourgeoise quelconque, su maintenir entre eux la plus grande union, et jouir d'une entière tranquillité.
Adresse des administrations du département de l'Aisne et du district deLaon, qui demandent la prompte organisation des milices nationales.
Déclaration du clergé de l'église naroissiale de la ville de Barjols, et d'une multitude de curés et vicaires de la ci-devant Provence, par laquelle ils s'élèvent hautement contre des délibérations de divers chapitres, rèfractaires aux sages et religieux décrets de l'Assemblée nationale ; déclarent, au contraire, qu'ils adhèrent à tous les décrets de ladite Assemblée intervenus ou à inter venir.
Délibération du chapitre de l'église collégiale de la ville de Pignan, département du Var, contenant la même déclaration patriotique. 11 supplie l'Assemblée d'agréer le don patriotique de cent quatre marcs d'argenterie, indépendamment de la contribution du quart des revenus.
Adresse de trente Bretons des villes de Port-Louis, Lorient et Hennebon, qui, pour manifester leur dévouement pour la chose publique, font le don patriotique de la somme de 1,200 livres ;
De l'assemblée primaire du canton d'Ogny, district de Metz ;
Des électeurs du district de Thiers, des admi-I nistrateurs des districts de Janville, de Château-Neuf en Thimerais, d'Argenton, de Châlons-sur-Marne et de Lure ;
Des assemblées électorales du département de Maine-et-Loire, du département de rlndrè, et des administrateurs du département des Ardennes.
Toutes ces assemblées consacrent les premiers moments de leur formation, pour présenter à l'Assemblée nationale l'hommage d'une adhésion absolue à ses décrets et d'un dévouement sans bornes, pour en procurer ou maintenir l'exécution.
Délibération du conseil général de la commune de Valence, par laquelle elle rend justice à l'observation de la discipline, de la subordination, à l'intégrité du service, aux actes répétés de patriotisme, d'attachement à la constitution du régiment de Grenoble, artillerie, en garnison dans cette ville, et rend compte des services soutenus que ce régiment lui a rendus pour le maintien du bon ordre et de la tranquillité publique, ainsi que de ses actes d'humanité et de chanté.
L'Assemblée a ordonné que son président écrirait à ce régiment, pour lui témoigner avec combien de satisfaction elle a vu le bon exemple qu'il a donné à tous les régiments de l'armée, par sa conduite patriotique et paisible.
Adresse des ecclésiastiques du district de Valence, qui improuvent les protestations faites par un nombre considérable d'ecclésiastiques aux décrets de l'Assemblée, auxquels ils adhèrent sans exception ni modification quelconque, déclarant qu'ils en feront la règle invariable de leur conduite et la base de leur doctrine civique.
Adresse du sieur Guyot, écolier de physique à Gray, qui dédie une thèse à l'Assemblée nationale.
Rétractation des prêtres du collège de Bourbon, qui ont signé la lettre du clergé séculier et régulier de la ville d'Aix à M. l'archevêque, en date du 21 avril.
Serment civique des curés et vicaires des paroisses de la ville d'Aix et de plusieurs autres prêtres qui se sont joints à eux.
Profession de foi des religieux de la ville d'Aix, qui adoptent tous les décrets de l'Assemblée.
Adresse dès citoyens de couleur, réunis à Paris sous le titre de colons américains, ainsi conçue :
Messieurs, tandis que la nation applaudit à vos décrets et qu'elle goûte les premiers fruits de l'heureuse Révolution qu'elle doit à vos travaux ; tandis que, des extrémités du royaume, on vient apporter à votre Assemblée l'expression de la joie et de la reconnaissance, seuls, de tous les Français, les citoyens de couleur ne s'y présentent que pour faire entendre leurs plaintes et réclamer votre justice contre un nouveau genre de vexations;
Ce n'est plus de leur sort, de l'état civil de leurs frères qu'il s'agit en ce moment ; un de vos plus sages décrets a su concilier les droits de l'homme, les égards et les ménagements qu'exigeaient les circonstances ; c'est une infraction à vos décrets qu'ils viennent vous dénoncer aujourd'hui; c'est votre ouvrage, c'est la cause de l'humanité outragée; dans la personne des citoyens de couleur, que vous avez à venger.
Vous l'avez solennellement reconnu, Messieurs, dans la déclaration des droits de l'homme : on y lit en caractères ineffaçables : « La liberté con- siste à faire tout ce qui ne nuit pas à autrui; « ainsi, l'exercice des droits naturels de chaque v homme n'a de bornes que celles qui assurent « aux autres hommes la jouissance de ces mêmes we droits: ces bornes ne peuvent être déterminées « que par la loi. La loi n'a le droit de défendre « que les actions nuisibles à la société: tout ce m qui n'est pas défendu par la loi ne peut être « empêché. »
Plus loin vous avez déclaré que nul homme « ne peut être accusé, arrêté, ni détenu, que « dans les cas déterminés parla loi, et selon les « formalités qu'elle a prescrites; que ceux qui « sollicitent, expédient, exécutent ou font exécu-« ter des ordres arbitraires, doivent être punis.»
Hé bien, Messieurs, ces maximes éternelles, gravées dans le cœur de l'homme longtemps avant de l'avoir été dans les fastes des empires, ces maximes ont été méconnues et violées par les colons blancs, au préjudice des citoyens de couleur.
A la loi, qui seule peut fixer les limites de la liberté de l'homme, ils ont substitué leurs caprices, leurs passions. Ils ont prétendu que là doivent se borner les droits des citoyens de couleur où leur amour-propre et leur intérêt personnel leur paraissaient compromis.
Vous n'avez pas perdu de vue la résistance, les difficultés que les citoyens de couleur ont dû combattre, lorsqu'il s'est agi de prononcer sur leur sort. Dans ces moments où leurs relations avec leurs frères, domiciliés dans les colonies, leur étaient devenues si indispensables, des menées gourdes et criminelles avaient intercepté toute communication avec leur patrie; trois mois s'étaient écoulés, sans qu'ils eussent reçu aucune lettre de Saint-Domingué.
Les citoyens de couleur n'ignoraient pas d'où partaient tous ces coups ; mais, dénués de preuves légales, ils étaient réduits au silence et forcés de suppléer, en redoublant de zèle et d'efforts aux moyens de défense qu'ils auraient trouvés auprès de leurs concitoyens.
Une circonstance particulière a mis leurs adversaires à découvert; elle a fait enfin pénétrer les moyens répréhensibles qu'ils emploient pour parvenir à leur but.
Au mois de décembre 1789, c'est-à-dire postérieurement^ la déclaration des droits, à l'acceptation solennelle de Sa Majesté; dans un moment où, comme hommes, comme Français, comme citoyens, et plus particulièrement comme députés, pour vous déférer les plaintes et les réclamations d'une classe trop longtemps opprimée, les citoyens de couleur étaient sous la protection, sous la sauvegarde de la loi, l'un d'entre eux, le nommé Soubise, que des affaires importantes appelaient dans la colonie, se rendit à Nantes, et demanda à s'embarquer sur un navire prêt à faire voile vers le Nouveau-Monde.
Le croiriez-vous, Messieurs ? Soubise était muni de tous les passeports, de toutes les attestations nécessaires. Néanmoins, il fut cruellement repoussé, on opposa à ses instances des prétendus ordres supérieurs qui défendaient de recevoir à bord les personnes de sa classe.
Le sieur Soubise revint à Paris. Il rendit compte à ses concitoyens des obstacles qu'il venait d'éprouver ; il les pria de se joindre à lui pour les faire cesser;
Ge n'était pas seulement à Nantes qu'il avait été donné des ordres pareils à ceux dont se plaignait le sieur Soubise ; plusieurs lettres écrites du Havre, de Bordeaux, etc., annoncèrent partout les mêmes ordres, les mêmes exactions.
Il était important de remonter à la source, et de faire réprimer des entreprises aussi contraires à l'esprit de la loi. Les citoyens de couleur s'adressèrent au ministre de la marine. Ils le supplièrent tle leur faire connaître les auteurs, ainsi que les motifs qui avaient pu déterminer les ordres qu'on opposait à leur passage dans les colonies
Le 29 décembre 1789, ils reçurent une réponse conçue en ces termes :
« Je suis fâché, Messieurs, de ne m'être pas « trouvé chez moi lorsque vous avez pris la peine « d'y passer.
« Je n'ai donné aucun ordre dans les ports de « refuser le passage aux noirs que l'on voudrait « renvoyer ou reconduire dans les colonies ; à plus « forte raison n'ai-je rien prescrit relativement « aux citoyens de couleur; mais j'ai appris que « les armateurs de différents ports s'y étaient refusés « de leur propre mouvement ou, au moins, d'après « le voeu des colons, et je n'ai pas cru que l'auto-« ritépût, ni dût les y contraindre » « J'ai l'honneur d'être, etc...
« Signé : La luzerne. »
Ce n'était pas assez pour les citoyens de couleur d'être convaincus qu'il n'existait pas d'ordres émanés du gouvernement et conséquemment de leur illégalité, s'il en existait ailleurs; les obstacles qu'ils éprouvaient n'étaient pas moins réels; il fallait, pour les lever, faire intervenir la force et l'autorité de la loi.
Ce fut l'objet d'une seconde lettre à M. de la Luzerne (1) à laquelle ce ministre fit la
réponse suivante :
Nous voyons, par votre lettre, en réponse à celle que nous avions eu l'honneur de vous adresser, que les droits de l'homme et du citoyen sont aussi peu respectés en France par les colons blancs, que dans les iles et colonies françaises. Ce nouveau genre de vexations de leur part ne nous étonne pas.
Mais nous ne pouvons vous dissimuler que nous avons vu, avec la plus grande peine, le parti que vous paraissez avoir pris. Vous êtes instruit que les « ar-« mateurs de différents ports se sont refusés, de leur « propre mouvement, ou au moins d'après le vœu des « colons blancs, au départ des citoyens de couleur ; et « cependant vous n'avez pas cru que l'autorité pût a ni dût les y contraindre. »
Nous croyons, au contraire, et nous avons le courage de vous le dire, que l'autorité pouvait, qu'elle devait même déployer toutes ses forces pour repousser les entreprises des colons blancs et assurer aux citoyens de couleur le libre exercice des droits que la nature leur a donnés, que l'Assemblée nationale a consacrés et que le roi des Français a solennellement reconnus. La neutralité à laquelle, dans cette circonstance, l'autorité parait se vouer est une véritable déclaration en faveur des colons contre les citoyens de couleur. Tolérer la résistance des armateurs ou celle des colons, c'est incontestablement les permettre ; c'est forcer les citoyens de couleur qui sont sans protection, sans appui, sans secours, à rester en France, lorsque leur santé ou leurs affaires les appellent dans les colonies.
Nous vous supplions, Monsieur le comte, de peser ces différentes considérations, et même, si vous le jugez convenable, de les mettre sous les yeux du roi : elles intéresseront sa bonté paternelle, elles détermineront sa justice, elles assureront, à l'instant même de sa proclamation, l'exécution de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen.
Nous aurions pu la réclamer auprès de l'Assemblée nationale, mais nous nous ferons toujours un devoir, même lorsque nous aurons à nous plaindre (et vous savez, M. le comte, que c'est notre état habituel), d'épuiser les démarches, les procédés, les égards et même les moyens de conciliation, avant de recourir à l'autorité du Corps législatif.
Signé : Les commissaires et députés des citoyens de couleur.
N. B. Les originaux de ces lettres sont entre les mains de M. de Joly, avocat aux Conseils,
« Lorsque plusieurs colons blancs ont cru, « Messieurs, qu'il était prudent de s'opposer au « retour dans les colonies des hommes de cou-« leur, esclaves ou libres, et qu'ils ont sollicité « le gouvernement d'interposer à cet effet son « autorité, il a refusé d'accueillir leur demande.
« Il paraît que les colons blancs se sont alors « concertés avec quelques armateurs des ports « du royaume, et que ceux-ci n'admettent plus « aucune personne de sang - mêlé dans leurs « navires.
« Le pouvoir exécutif, qui doit être impartial, « ne peut, sur la sollicitation des citoyens de « couleur, enjoindre aux armateurs de leur don-« ner passage, sans attenter aux droits et à la « propriété de ces derniers, qui sont absolument « maîtres de disposer à leur gré de leurs bâti-« ments, et d'y embarquer ou de n'y pas recevoir « qui bon leur semble.
« Le gouvernement aurait à craindre qu'on ne « le rendît responsable des suites réelles ou sup-« posées de l'ordre que vous lui demandez.
« Il convient donc, ou que vous engagiez de « gré à gré des armateurs à recevoir sur leurs « navires les citoyens de couleur, ou que vous « obteniez de l'Assemblée nationale un change-« ment dans les lois maritimes existantes.
« J'ai l'honneur d'être, etc.
« Signé : La LUZERNE. »
Que faire ? quel parti prendre dans cette posp-tion délicate ?
Sans doute, les citoyens de couleur auraient pu vous dénoncer tout à la fois, et les vexations qu'on se permettait contre eux, et le refus du gouvernement de venir à leur secours.
Mais, depuis longtemps accoutumés aux sacrifices, ils crurent devoir en faire un dernier et donner à ce prix de nouvelles preuves de leur dévouement et de leur soumission.
Ils comptaient, d'ailleurs, sur le moyen que leur indiquait la lettre du ministre, celui de traiter de gré à gré avec un armateur qui voulût les recevoir sur son bord.
Ces faits se passaient dans les premiers jours de janvier 1790.
Le 28 mars suivant, vous avez prononcé, Messieurs, sur les réclamations des citoyens de couleur. Vous avez irrévocablement fixé leur état civil.
Plusieurs d'entre eux que leurs affaires particulières appelaient depuis longtemps dans les colonies, mais qui avaient fait taire leurs intérêts particuliers, lorsqu'il s'était agi de défendre, de réclamer les droits de leurs frères, se sont alors disposés à revenir dans leur patrie : ils ont traité avec un armateur qui s'est engagé à les passer à Saint-Domingue.
Le traité est souscrit depuis près de deux mois ; le navire est prêt à mettre à la voile, et cependant, Messieurs, l'armateur et les voyageurs sont également arrêtés; deux lettres, écrites du Havre, qui seront jointes au mémoire, leur annoncent que M. Mistral, intendant de la marine, prétend avoir des ordres pour s'opposer à l'embarquement et au départ.
Les citoyens de couleur ont dénoncé ces nouveaux obstacles au gouvernement; ils ont sollicité sa justice, réclamé son autorité ; ils ont mis en opposition ce qui se passait, les refus du sieur Mistral, avec ce que M. de la Luzerne leur avait écrit le 1er janvier dernier; c'est-à-dire avec l'avis que le ministre leur avait donné, de traiter de gré à gré avec un armateur, Mais deux
lettres écrites à ce sujet, au ministre de la marine, sont restées sans réponse ; et leurs sollicitations réitérées auprès de lui n'ont produit aucun effet.
Ainsi, quand le cri de liberté se fait entendre dans tout le royaume ; quand les bras de tous les Français sont armés pour la défendre, seuls étrangers à vos bienfaits, seuls privés des avantages de la Révolution, les citoyens de couleur sont arrêtés dans l'exercice du premier, du plus sacré de leurs droits, d'un droit que tout homme reçoit avec la vie, celui d'errer à sa volonté sur la surface du globe 1
Ët le gouvernement, instruit, témoin de ces attentats, les voit d'un œil indifférent 1 II refuse de protéger, de forcer l'exécution de la loi ! Il reste neutre entre ie puissant qui opprime et l'infortuné qui réclame inutilement son secours et son autorité 1
Les citoyens de couleur ne chercheront pas à pénétrer les motifs de cette inaction ; ce n'est plus sans doute le prétexte allégué par le ministre de la marine dans sa lettre du 1er janvier 1790.
« Le pouvoir exécutif, disait-il alors, ne peut, « sur les sollicitations des citoyens de couleur, « enjoindre aux armateurs de leur donner pas-« sage, sans attenter aux droits et à la propriété « de ces derniers, qui sont absolument maîtres « de disposer à leur gré de leurs bâtiments et d'y « embarquer ou de n'y pas recevoir qui bon leur « semble. »
Cette objection, si elle en fût une, dans aucun temps, sous le règne de la liberté, disparaît entièrement aujourd'hui. Ce n'est plus de la part des armateurs que les citoyens de couleur éprouvent de la résistance. Celui avec lequel ils ont traité s'est engagé à les passer à Saint-Domingue. Il les presse même d'exécuter leurs conventions; il réclame, par leur bouche, contre les actes arbitraires et mystérieux qui le retiennent au port.
Ainsi, victimes d'un pouvoir qui craint évidemment de se montrer, repoussés par le gouvernement qui refuse d'écouter leurs plaintes, les citoyens de couleur ne peuvent que recourir à l'Assemblée législative; elle seule a le droit de juger tout à la fois, les infracteurs et les dépositaires de la loi.
Oui, Messieurs, c'est à vous à prononcer ; c'est à vous à déclarer si le pouvoir exécutif doit se taire et rester inactif, lorsque la loi est méconnue, lorsque ses agents se permettent de la violer ouvertement ; c'est à vous, c est à votre justice à décider si les colons blancs qui, dans un temps, ont mis en problème : si les citoyens de couleur doivent être comptés au rang des hommes, ont encore le droit de les vexer impunément, de leur interdire ce que lâ loi leur permet, d'attenter à leurs personnes, à leurs propriétés, de les retenir dans le royaume, de régler à leur gré les actes les plus indifférents de leur vie ; ou plutôt, Messieurs, c'est à vous à prononcer s'il existera toujours une distinction humiliante et barbare entre les blancs et les citoyens de couleur ?
Signé : Honoré, Aza Colomba, Colom, Baptiste Lanon, P. du Souchet, P. Poizat, Saint-Ajlbert, Fleury, Roland Audiq, F. do Souchet, P. Morcelli.
présente une adresse de la municipalité de Rennes, qui rappelle son attachement à la Constitution, son désir d'en assurer les effets, et que sa contribution patriotique B'élève à plus de 600,000 livres.
fille observe que, depuis longtemps, ou est con-
vaincu de la nécessité d'avoir un établissement d'artillerie à portée des côtes de l'Océan; que différents motifs ont éloigné l'exécution ae ce projet, et qu'aujourd'hui ces motifs n'existent plus.
Que la ville de Rennes, par sa situation, paraît réunir tout ce qui est à désirer pour former cet établissement dans son'sein; et elle espère que le grand avantage qui en résultera pour le service public, déterminera l'Assemblée à lui procurer cet établissement.
dit que cette affaire n'est pas du ressort de l'Assemblée, qui ne peut entrer dans tous ces détails, et que la réclamation de la ville de Rennes doit être renvoyée au pouvoir exécutif.
Ce renvoi est prononcé.
(de SaintrJean-d'Angély), secrétaire, lit une adresse des gardes nationaux de la ville d'Estoges, datée du 24 juin, l'an deuxième de la liberté; cette adresse témoigne ie désir qu'ils auraient de réunir dans leur ville tous les papiers incendiaires, opposés aux principes de la Constitution pour les réduire en cendres ;
Une autre adresse de la société des amis de la Constitution de Châlons-sur-Marne, qui applaudissent à leur administration actuelle, et à la vente des biens du clergé;
Une délibération d'un grand nombre de curés du diocèse de Lyon, archiprêtre de Courlieux, qui promettent d observer et faire observer les décrets de l'Assemblée nationale, et de les faire respecter par leur exemple et leurs instructions ;
Une soumission du district de Saint-Brieuc, d'acquérir pour deux millions de biens nationaux;
Une adresse de la société des amis de la Constitution de Gharolles, qui blâment,dans les termes les plus forts, les signataires et colporteurs de libelles, déclarations ou protestations contre les décrets de l'Assemblée nationale ;
Une adresse des ecclésiastiques du district de Valence, qui improuve toutes protestations contre les décrets de l'Assemblée nationale.
Une adresse des amis de la Constitu tion de Nancy, ainsi conçue:
« Messieurs,
« Un des fruits heureux de la grande Révolution, l'ouvrage de votre héroïsme, est la formation des sociétés patriotiques, singulièrement dévouées à l'étude et au maintien de vos décrets immortels.
« Dans le sein de ces sociétés nées de la liberté que votre sagesse a recréée, l'égalité que vous avez rendue aux hommes règne dans toute sa pureté. Le cœur s'embrase du feu céleste du patriotisme ; l'âme se livre tout entière à ces deux transports qu'inspirent à tout vrai citoyen les bienfaits inappréciables des législateurs ae l'Univers.
« Dans le sein des mêmes sociétés se nourrit l'amour des lois et la haine des abus, l'attachement inaltérable aux principes fondamentaux des sociétés et le mépris de tant de préjugés barbares qui désolèrent si longtemps l'espèce humaine.
« La société des amis de la Constitution établie à Nancy s'est efforcée, jusqu'à présent, de remplir le but d'une institution si salutaire ; elle s'est fortement attachée à ces lois sublimes, dont la nation opprimée avait besoin depuis si longtemps. Que ne doit-elle pas à vos travaux dont la continuité pénible, faite pour épuiser les forces des
hommes ordinaires, semble donner chaque jour aux vôtres une nouvelle énergie !
Dans les premiers instants de sa naissance, notre société vous offrit l'hommage de son respect, de sa soumission, de son adhésion absolue à tous les décrets de l'auguste Assemblée nationale.
Tout ce que la reconnaissance et l'admiration peuvent exciter d'émotions vives, nous les éprouvions, Messieurs, sans qu'il nous fût donné d'en exprimer toute l'étendue*
« Mais depuis celte époque, Messieurs ; depuis le commencement de cette année mémorable à jamais, que de nouveaux prodiges votre sagesse a opérés 1 Combien de préjugés, d'erreurs, d'abus immolés au salut de la patrie 1 Combien de triomphes ajoutés à de nouveaux triomphes, de bienfaits à de nouveaux bienfaits ! De combien d'hymnes, de remerciements et de concerts de louanges n'a pas retenti chaque jour la France entière.
« C'est parmi nous, surtout, législateurs augustes, c'est dans nos assemblées qu'a été vivement senti le prix de vos travaux.
« Nos cœurs ont été émus des mêmes impressions qui ont fait éclore tant d'adhésions missives, où l'éloquence déploie toutes ses richesses et le patriotisme toute sa chaleur.
« Daignez, Messieurs, agréer les nouveaux hommages d'une société qui ne subsiste que par vous et dont le bonheur est de seconder, autant qu'il est en elle, tout ce que vous exécutez pour le bien de l'Empire.
« Rien ne ralentira son zèle, ni les calomnies lâches, ni les menées sourdes pour décrier ses démarches, pour empoisonner ses actions les plus louables, ni tous les efforts des ennemis d une Révolution, le salut de la France, l'étonnement de l'Europe, le désespoir des tyrans.
« Daignez aussi, Messieurs, laisser tomber sur cette société un regard favorable et donner, par votre approbation de cet établissement et de ceux du même genre, des encouragements au patriotisme et un appui de plus à cette Constitution sainte, à ces lois salutaires que tout bon Français soutiendra toujours au péril de sa vie.
« Nous sommes avec respect, Messieurs, vos très dévoués compatriotes.
« La Société des amis de la Constitution à Nancy,
Signé: Biaise, président ; Mathieu et Zangia- ' comi, secrétaires. »
(L'Assemblée applaudit aux sentiments patriotiques exprimés aans toutes ces adresses et délibérations.)
, député d'Alsace, lit une adresse de l'Assemblée électorale du département du Haut-Rhin, qui témoigne sa reconnaissance et son adhésion aux décrets de l'Assemblée nationale dans les termes les plus forts et les plus énergiques.
L'Assemblée nationale, en applaudissant au patriotisme qui a dicté cette adresse, ordonne qu'il en sera fait mention honorable dans son procès-verbal.
lit une adresse de la commune de Bourgheile, district de Lille, département du Nord, qui adhère à tous les décrets de l'Assemblée, et jure de traiter comme ennemis du bien public tous ceux qui oseraient écrire ou parler contre eux.
On introduit une députation de la commune
de Ris, qui s'est empressée de venir rassurer l'Assemblée sur les suites des troubles élevés dans ce lieu, en lui apprenant leur cessation par les soins de la municipalité et des officiers de la garde nationale.
répond aux députés en ces termes :
« Les désirs et les travaux de l'Assemblée na -tionale n'ont d'autre but que de procurer la paix et l'union entre les Français ; faire tous ses efforts pour en assurer la durée dans l'Empire, c'est son unique soin. Elle voit avec satisfaction que vous vous êtes empressés de seconder ses vues, et que vos efforts ont été couronnés du succès : elle vous permet d'assister à sa séance. »
Les sous-officiers et soldats du régiment de Forez, en garnison à Saint-Servan, ont offert à la patrie le don d'une somme de 500 livres.
lit une lettre des officiers municipaux de la ville du Havre, qui apprend l'arrivée de cent trente-trois hommes du régiment de la Guadeloupe, venus de Tabago en France, à bord du vaisseau de Patty-Wand Worth, et annonce que le navire le Lion, attendu d'un jour à l'autre, amène 124 hommes du même régiment.
Ils ajoutent qu'ils se sont concertés avec ie commandant de la place et l'intendant de la marine, pour tenir les troupes â bord sous garde citoyenne et militaire, jusqu'à ce qu'il en ait été autrement ordonné.
L'Assemblée renvoie cette affaire au pouvoir exécutif, et décrète que son président écrira à la municipalité du Havre, pour lui témoigner sa satisfaction de la sagesse des mesures qu'elle a prises.
, membre nouvellement adjoint au comité pour l'envoi des décrets, demande à proposer plusieurs articles sur cet objet.
Messieurs, il est essentiel que les décrets ne soient pas présentés à la sanction sans avoir été collationnés. 11 est impossible de les emporter du bureau des procès-verbaux, attendu que dans le même moment où l'on en a besoin les commis les transcrivent, de manière qu'on les envoie aux archives sans avoir été comparés aux originaux ; pour accélérer la vérification et l'envoi, il est nécessaire de savoir quel jour on les porte à la sanction. Il importe également d'empêcher que les décrets restent à la sanction plus de temps qu'il n'est nécessaire au bien public. Quand vous relirez vos décrets vous serez surpris des changements considérables que vous y trouverez, je pourrais en citer plusieurs, et de même si vous vérifiiez les minutes de vos procès-verbaux, vous en trouveriez très peu qui fussent signés par les ex-secrétaires. Vous sentez les inconvénients qui résultent d'une pareille négligence. Je vais donner lecture d'un projet de décret.
Je suis membre du comité et je témoigne mon étonnèment de n'avoir eu aucune connaissance du projet de décret qu'on vous propose. Les autres membres du comité seraient-ils dans le même cas ? c'est uu fait à éclaircir. Je ne m'oppose pas à l'adoption du décret, mais je trouve que la forme en est mauvaise et surtout que les mots d'inspection de sanction sont inadmissibles. La sanction du roi doit être libre;
elle ne le serait pas s'il y avait des inspecteurs de sanction.
Je conviens que les mots inspection de sanction sont impropres et je propose d'y substituer ceux-ci : surveillance d'expédition de sanction.
Le préopiDant a dû savoir que le comité était convoqué pour entendre la lecture du projet de décret que je viens de proposer. Vendredi, à six heures du soir, deux membres et moi avons attendu jusqu'à huit heures et demie : lorsque nous désespérâmes de voir arriver personne, nous convînmes à peu prés des articles. Je les ai rédigés et ils ont passé sans contradiction, car j'étais tout seul.
De l'aveu du préopinant il résulte que le décret qui vous est proposé n'est point l œuvre du comité, et c'est là le fait que je voulais établir.
met aux voix le décret amendé. 11 est adopté ainsi qu'il suit :
« Art. 1er. L'Assemblée nationale charge les commissaires inspecteurs des travaux des bureaux, de faire porter tous les jours au comité chargé de collationner les décrets et d'en surveiller l'expédition et l'envoi après la sanction, une copie en forme des décrets rendus la veille. Cette copie sera signée par les secrétaires.
Art. 2. Les notes originales des décrets sanctionnés que le garde des sceaux adresse au président, seront aussi portées au même comité le même jour qu'elles seront reçues.
Art. 3. Successivement on portera au même comité un état signé par les secrétaires, de tous les décrets présentés à la sanction. Cet état contiendra le jour de 1a présentation.
Art. 4. Le comité chargé de collationner les décrets et d'en surveiller l'expédition et l'envoi après la sanction, veillera à ce que les trois articles ci-dessus soient ponctuellement exécutés.
Art. 5. Pour l'entière exécution du décret du 5 novembre 1789, le garde des sceaux et les autres ministres enverront de huit jours en huit jours à ce comité un état par département, et par ordre de date, des accusés, ou certificats de réception des décrets.
Art. 6. L'imprimeur de l'Assemblée nationale remettra, dans le jour, à ce comité, un exemplaire de tous les procès-verbaux depuis le 5 mai 1789, jusqu'à ce jour, et ainsi successivement jusqu'à la fin de la présente session. »
lit une lettre par laquelle la municipalité de Grenoble témoigne des inquiétudes sur un camp de quinze mille hommes qui se forme en Savoie, et sur l'ordre' donné par le ministre de la guerre, de faire partir les chasseurs de royal-corse en garnison à Grenoble. La municipalité demande le remplacement de ce bataillon, s'u n'est pas possible de le conserver.
confirme la nouvelle des alarmes de la ville de Grenoble. Il demande que des mesures soient prises pour les calmer. Il propose un projet de décret.
observe que le ministre a dû prévoir, d'après sa responsabilité, ce qu'il avait a faire, que cela concerne le pouvoir exécutif et que l'Assemblée ne peut s'occuper de cette réclamation.
ajoute que M. de Montmorin a lui-même envoyé des détails à cet égard au comité des recherches et qu'il n'y a aucun inconvénient à adopter le projet de décret qu'il propose.
La motion de M. Barnave est mise aux voix et adoptée ainsi qu'il suit :
« L'Assemblée nationale décrête que son président se retirera devers le roi, pour lui remettre la lettre de la municipalité de Grenoble, et le supplier d'avoir égard aux demandes portées par cette lettre. »
Je crois devoir rendre compte à l'Assemblée de l'altération éprouvée par deux de vos décrets dans les bureaux du garde des sceaux. Lorsque j'en ai témoigné ma surprise, on m'a répondu que le premier portait que le président écrirait, etc., et qu'on avait pensé que cette disposition n'étant pas une loi, n'était pas susceptible de sanction ; que le préambule du deuxième, relatif aux lettres de cachet, taxait l'ancien régime de gouvernement absolu et arbi~ traire, et que le roi avait désapprouvé ces expressions.
fait lecture d'un arrêté ou règlement du département de la Haute-Saône pour la police des campagnes et en demande la confirmation par l'autorité de l'Assemblée.
remarque que ce serait introduire une nouvelle forme des lois,qu'il ne doit y en avoir qu'une seule, et que si l'Assemblée adoptait ces dispositions, ce ne pourrait être que par approbation, mais en leur donnant la forme d'un décret.
rappelle les principes établis par l'Assemblée sur le droit de faire des règlements et même des représentations qu'elle a ôté à tous les tribunaux ; il demande le rejet de ce règlement, sauf au département de la Haute-Saône à l'adresser par voie de pétition.
reconnaît la force du principe et prie l'Assemblée d'accueillir comme pétition l'arrêté pris par le département de la Haute-Saône. Il demande, en outre, le renvoi de cette pétition aux comités des domaines, de commerce et d'agriculture qui présenteront, s'il y a lieu, un projet de décret dans les mêmes vues que le règlement.
Cette motion est adoptée.
annonce que l'ordre du jour est la suite de la discussion sur le commerce de Plnde et la liberté indéfinie des retours dans tous les ports de France.
Si, en ouvrant le commerce de l'Inde à tous les Français, vous avez prononcé que chaque négociant pourrait arriver librement dans le port de son domicile, vous ne décréterez point que ce négociant fera le retour et la vente de sa cargaison dans son port; ce serait une conséquence fausse, ce serait l'éciieil de la liberté indéfinie ; car si le Bordelais vendait à Bordeaux, le Marseillais à Marseille, le Ro-chellais à ia Rochelle, et de suite, chacun dans son port respectif, les armateurs seraient bientôt ruinés. Il faut indispensablement pour les retours et pour les ventes des marchandises de l'Inde un point de réunion, et ce n'est pas, comme on le
répand, un privilège à accorder à une ville. Si c'en était un, je m'y opposerais; mais la nécessité exige la fixation d'un point central, et cette nécessité va vous devenir sensible. Que des particuliers ou qu'une compagnie s'arment pour quelque partie de l'Inde que ce soit, leurs agents ne peuvent fournir que ce qu'ils ont traité, et que ce qui est successivement fabriqué; d'où il suit que la cargaison d'un vaisseau ne forme point un assortiment, mais que chaque vaisseau assortit un autre vaisseau, et que tous ensemble forment un assortiment complet de toutes les toiles et de toutes les productions de l'Inde. Les bulletins de ces cargaisons sont envoyés à tous les consommateurs du royaume qui arrivent à Lorient. (L'époque où la vente a été fixée.) Une balle de marchandises la plus commune, dès qu'elle est déposée dans les magasins, y est examinée par des experts, et chaque prix y est assorti avec la pièce qui lui est semblable, de manière que cette balle forme trois ou quatre qualités différentes, et s'il y a de l'avarie, elle y est graduellement appréciée à sa juste valeur; en sorte que ni le vendeur ni l'acheteur ne peuvent être aupes. La réunion des acheteurs naît de la réunion des armateurs, et ceux-ci ont le plus grand intérêt à rassembler dans un même lieu tous les consommateurs du royaume à cette espèce de foire, pour établir une concurrence générale ; car il est d'usage que la même espèce de marchandises se vende seule; par exemple, les guinées du second vaisseau passent en vente, et successivement le troisième et le quatrième, etc. Le premier vendeur fait donc le prix, et les autres vendeurs s'y conforment; de même les acheteurs ayant acheté les premières guinées à un prix, soutiennent ce prix, pour que les secondes ne soient pas vendues plus bas ; et de cette manière l'armateur de Bordeaux vend au même prix que celui de Marseille, et l'acheteur de Montpellier achète au même prix que celui de Rouen. Enfin, chaque espèce de marchandises ayant été successivement vendue, la vente se ferme jusqu'à l'année suivante; chacun retourne chez soi pour manufacturer ou vendre les marchandises qu'il a achetées, et il emporte avec lui la certitude précieuse qu'un autre n'a pas été mieux traité que lui, et qu'il a toute i'année pour écouler ses achats. Si, au contraire, écoutant le vœu d'une liberté mal calculée, vous permettiez que chaque armateur fît la vente de chaque cargaison dans son port, outre les secours qui lui manqueraient pour classer, assortir et tirer ses marchandises (objet infiniment important, outre encore que sa cargaison ne fournirait pas un assortiment complet), comment serait-il possible que six cents acheteurs principaux, qui se rendent tous les ans à Lorient, quittassent tous les points du royaume sur lesquels leur établissement est placé, parcourussent successivement tous les ports pour acheter là telle espèce de marchandises, là telle autre ? car chaque acheteur a besoin, pour son magasin et sa manufacture, d'un peu de toutes les espèces ; et comment couvrirait-il les frais et le désavantage des frais de voyage et d'un déplacement continuel ? Je suppose cependant que tous les vaisseaux de retour de l'Inde, épars dans les ports, un acheteur trouve à Bordeaux l'assortissement total qui lui convient, et je suppose l'impossible, il n'osera acheter; car il craindra qu'un négociant de sa ville ou de sa province ne soit parti pour Marseille, et qu'il n'y achète à beaucoup meilleur marché; il.craindra qu'il n'arrive dans les ports dont il est éloigné une telle quantité des mêmes
marchandises qu'il a achetées à Bordeaux, qu'elles pourraient subir une baisse sensible...
Je conclus de ces raisons que les acheteurs ont besoin d'un point de réunion. D'un autre côté, l'armateur isolé au milieu de marchandises qu'il ne connaît que de nom, car ces marchandises ne sont ni du sucre ni du café, mais des toileries de toutes les espèces, de toutes les qualités, subdivisées de manière qu'elles demandent l'œil le plus exercé dès la plus tendre jeunesse et le jugement le plus sain pour apprécier la différence extrême de leur valeur ; cet armateur, dis-je, dénué des combinaisons qu'il pourrait faire avec les autres armateurs, dénué de la concurrence de tous les acheteurs, ne saura à quel prix se fixer. Ainsi, les armateurs ont intérêt à se réunir en un seul point pour leurs ventes. Il est une espèce de négociants dont les capitaux sont unis sans cesse à leurs talents personnels, ou suppléés par l'adresse et l'intelligence subtiles de leurs agents. Us se garderont bien d'employer leurs fonds à des armements pour l'Inde. Ils préféreront placer leurs émissaires dans tous les ports, en embuscade, comme une araignée qui attend la mouche sur sa toile. Ces agents, bien instruits des besoins et des débouchés, pouvant payer comptant et donner de longs crédits, attendront patiemment l'embarras du vendeur, ou ils le désassortiront et rendront par là le reste de sa cargaison invendable, ou n'offrant partout que le même prix pour chaque espèce de marchandise, il sera impossible à quelque armateur que ce soit d'éviter le piège.
Jusqu'à ce moment, je vous ai entretenus de l'intérêt réciproque des vendeurs et des acheteurs ; mais j'entrevois des considérations importantes à vous présenter pour nos manufactures et pour les finances. Nôus tirons de toutes les parties de l'Inde et de la Chine des satinages, des étoffes de soie de toutes les espèces. Elles peuvent se donner à moitié du prix des mêmes étoffes de nos manufactures. Nous recevons une quantité immense de toiles teintes et d'étoffes mêlées qui sont à si bas prix, que nos manufactures ne peuvent, en général, en soutenir la concurrence ; c'est ce qu'on appelle le prohibé, parce qu'il est défendu de les introduire en France. Plus vous ouvrirez de ports aux retours de l'Inde, plus vous ouvrirez de canaux à la fraude, et, malgré toutes les précautions coûteuses que vous pourriez prendre, l'appât d'un grand bénéfice rompra toutes les digues que vous lui opposerez. Quant aux marchandises soumises aux droits, elles échapperont aux marques et bulletins ; elles en recevront de faux et tellement semblables aux vrais, que le Trésor public tarira dans cette partie de ses revenus. Mais si vous pouvez vous consoler de ce manque de perception, comment consolerez-vous les manufactures de soiries et d'une infinité d'étoffes, de leur ruine totale ? Ne regardez donc point la concentration des marchandises et des ventes de l'Inde comme un privilège ; c'est le bien général qui l'exige. Si vous voulez lire l'adresse des députés extraordinaires du commerce et des manufactures, vous verrez qu'en réclamant la liberté du commerce de l'Inde elle demande que le commérce soit fait ainsi et de la même manière qu'il se faisait avant le privilège accordé à la compagnie actuelle. Toutes les manufactures et tous les ports sont donc d'accord sur la nécessité de ne point se réunir; et s'il était nécessaire d'ajouter d'autres autorités, je vous apporte, à la suite de l'adresse que la ville de Lorient m'a chargé de présenter à l'Assemblée nationale, et dans laquelle elle vous demande, en écoutant
l'intérêt général, de la préserver d'une ruine totale ; je vous apporte, dis-je, l'adhésion des négociants-acheteurs des principales villes du royaume.
Il a été plus aisé à M. de Mirabeau d'enflammer une partie de l'Assemblée au mot de liberté, et de renouveler le mécontentement de l'autre au souvenir des privilèges, que de résoudre une question de commerce ; mais je soutiens, avec toute la force de la vérité et ae l'expérience, que si l'on n'adopte pas un point central pour les ventes, le commerce ae l'Inde est perdu : je puis donc, au nom de la députation de Bretagne, dont je me crois l'interprète en ce moment, vous dire que s'il est un port plus favorable au commerce de l'Inde, elle ne s'opposera pas à la ruine de ce port pour l'utilité générale. Mais je persévère, en homme d'honneur, dans ce principe, qu'il ne faut qu'un port pour les armements et les ventes.
s'attache principalement aux intérêts de la ville de Marseille et des autres ports de la Méditerranée ; il affirme qu'aucune de ces villes n'a pu demander ni consentir les retours exclusifs en faveur de Lorient.
Si, comme j'en suis convaincu* la liberté de recevoir les retours de l'Inde par tous nos ports ruinait presque toutes les manufactures de ce royaume, celles des draps, trouvant alors une quantité prodigieuse d'ouvriers à leur disposition, obtiendraient une main-d'œuvre à bien meilleur compte, et seraient au moins, sous ce point de vue, dans une heureuse position, puisqu'en diminuant leur prix les draps auraient la préférence dans les marchés étrangers. C'est donc parce que je ne puis être excité par aucun intérêt particulier, mais seulement par la vue du bien général du commerce, que je me crois obligé de donner très succinctement mon opinion. Plusieurs des préopinants ayantdéjà assez développé les raisons qui prouvent que la libre entrée des marchandises de l'Inde dans tous nos ports ruinerait presque toutes nos manufactures, c'est-à-dire presque tout le commerce, et même l'agriculture, je me bornerai à quelques observations. Comme vous l'a très bien dit M. Rœderer, ce n'est pas ici le procès des ports contre Lorient; c'est celui du négoce des ports contre les manufactures nationales. Cependant le commerce extérieur de Marseille, de Bordeaux et des autres ports, qui ne pouvaient recevoir les retours de l'Inde, ne sera pas moins florissant qu'il ne l'a été jusqu'à présent, lors même que le port de Lorient, non pas comme privilégié, mais comme plu3 convenable à tous les intérêts nationaux, continuera de les recevoir exclusivement. Réfléchissez aux précautions que les Anglais prennent pour balancer l'avantage que les marchandises des Indes ont sur celles de leurs manufactures. L'état florissant de Manchester en est une preuve convaincante ; vous ne savez que trop bien qu'ils ont toujours mieux vu que nous en commerce ; vous pouvez vous en rapporter à eux. Ils nous ont donné une bonne leçon par leur traité. Croyez que tous les préopinants qui vous oat parlé en faveur de tous les ports, même en ne croyant suivre que leurs vues pour la plus grande prospérité de tout le commerce, ont pu être entraînés, sans s'en apercevoir, par l'irrésistible plaisir de faire le bien de leurs villes ou de leurs départements. On est tellement trompé par cette douce affection qu'on croit, ou du moins qu'on se persuade, que le bien particulier concourt au bien général.
Il ne s'agit pas ici de privilège exclusif; il est question d'imposer et de percevoir exactement des droits qui puissent balancer l'avantage que, par des circonstances locales, les manufactures de l'Inde ont sur celles de la France. Celles de l'Inde fournissent presque toutes des objets de luxe; celles de la France, en s'éloignant peu de leur perfection, peuvent suffire à une nation que le patriotisme et le rapprochement pour les choses solides ramènent à ne consommer que des étoffes nationales. Je suppose pour un moment, ce qui est impossible, que les droits sur les retours de l'Inde soient aussi bien perçus dans tous les ports qu'ils le seraient dans un seul. Eh bien, le but sage de l'imposition de ces droits ne serait pas rempli, puisque, par cela même que tous les ports étant ouverts à ces retours, ies mêmes spéculations faites en même temps produiraient une abondance ruineuse. De là la crainte de ne pas vendre; de là la baisse du prix des marchandises de l'Inde au-dessous de celui de nos manufactures; enfin de là la ruine totale de notre commerce. Vous savez tous que nos vins de Bordeaux se sont souvent vendus dans nos îles au-dessous du prix qu'ils valaient en France. Si les retours de l'Inde, comme je l'espère, ne sont reçus que dans un port, les différents spéculateurs seront Informés de Ja Quantité de chaque espèce de marchandises et e denrées à vendre dans un temps donné; ils ordonneront d'emmagasiner ce qui excédera de beaucoup ies demandes, pour être mis en vente dans un moment plus favorable; si c'est un monopole, c'est le moins immoral de tous les monopoles, puisqu'il tiendra des étoffes de luxe à un prix plus elevé que les nôtres, et n'est-ce pas un moyen désirable que celui de faire rentrer l'argent du capitaliste, qui, en général, ne vit que pour ses jouissances, dan» la circulation du commerce le plus actif, le plus utile, c'est-à-dire celui des manufactures nationales? D'ailleurs rapportez-vous-en même aux calculs d'intérêts des vendeurs de toutes les parties du royaume. En général, les vendeurs préfèrent à des espérances des bénéfices assurés et répétés; presque tous ayant des engagements à remplir ont besoin de fonds; et il faut qu'il, y ait vraiment à perdre pour qu'ils s'accordent à faire remmagasiner, au lieu de vendre.
J'ai été d!avis de la suppression du privilège exclusif de la compagnie des Indes, parce que regardant son commerce comme désavantageux à une nation qui n'a plus dans l'Inde ni propriétés foncières, ni forces militaires, j'ai pensé que la liberté en accélérerait la ruine; mais si vous y ajoutez celle de recevoir les retours par tous les ports, sa ruine n'en sera que plus certaine; elle aura déjà commencé la destruction des manufactures nationales, puisque, dès ce moment, le bas prix des marchandises de l'Inde aura suspendu le débit des nôtres, et par conséquent porté une atteinte funeste à notre agriculture; car sans manufactures, point de population; sans population, point de consommation; et sans consommation, point de culture. Je suis donc de l'avis du comité, et dans le cas où, . contre mon attente, il n'obtiendrait pas la majorité de vos suffrages, je demande pour amen-. demeat que la libre entrée pour les retours de l'Inde soit restreinte aux ports de Lorient et du Havre, qui, en présentant deux marchés assez espacés pour approvisionner toutes les parties de la France, n'ont pas pour la fraude l'inconvé-.. nient des ports avancés dans les terres.
Je De viens point ici plaider lacause d'un port du royaume ;je viens examiner la question sous le point de vue le plus général, celui des principes. Peut-être dira-t-on qu'il y a de la témérité de ma part à monter à cette tribupp après les habiles négociants qui m'ont précédé ; mais comme la question peut se décider par les règles du bon sens, nous avons tous des droits égaux à la discuter. Les mêmes hommes qui réclament aujourd'hui un privilège pour le pôrt de Lorient ont voté pour la liberté du commerce de l'Inde, lors de la suppression de cette compagnie; et de là je conclus qu'on peut débarquer dans tous les ports, et que des raisons majeures peuvent seules nous déterminer à une exception. Examinons si effectivement il existe des raisons de cette nature. L'avantage des vendeurs, celui des acheteurs, l'intérêt du fisc et des manufactures, tels sont les motifs qu'on allègue pour le port de Lorient. Quant à l'avantage des vendeurs, j'en demeure d'accord ; car, tant que la même nature de marchandises se vendra dans le même lieu, les vendeurs seront toujours maîtres du prix et imposeront des lois aux acheteurs. Tout le monde convient que ce commerce est nuisible à nos manufactures; il ne faut donc point chercher l'intérêt des vendeurs, mais rendre au contraire leur condition pénible. Quant à l'intérêt des acheteurs, j'en conviens encore, mais je distingue les acheteurs en gros et les acheteurs en détail. Gomme tout le monde ne peut pas aller à Lorient pour acheter neuf à dix pièces de mousseline, ces premiers, c'est-à-dire les gros négociants, achètent et exercent le même monopole que les vendeurs à leur égard; ainsi, si c'est l'avantage de l'acheteur en gros, il est bien clair que c'est le désavantage de l'acheteur en détail.
Le troisième avantage, c'est l'intérêt du fisc; mais de celui-là je n'en conviens point. Il est impossible, dit-on, que l'on perçoive des droits sur une foule de marchandises de l'Inde, si les retours sont libres dans tous les ports ; — mais je réponds qu'on perçoit, dans tous les ports du royaume, un droit qu'on appelle Domaine d'occident, sur tous les vaisseaux qui viennentde l'Amérique, et cependant il n'y a point de fraude. On a voulu faire valoir les avantages locaux, pour les postes des employés des fermes; mais les ports de Bordeaux, de la Rochelle et tant d'autres, ont, comme le port de Lorient, des châteaux avancés dans la mer, où sont les postes des employés. La localité n'est donc point un avantage pour le port de Lorient.
Je passejjà l'intérêt des manufactures : il exige que le commerce de l'Inde ne se fasse pas du tout. Si ceux qui réclament un privilège pour le port de Lorient demandaient laprohibilion des marchandises de l'Inde, je serais de leur avis ; mais c'est tout le contraire. Veut-on savoir pourquoi, sous l'ancien régime, le commerce languissait; c'est que dès qu'un homme avait gagné cent mille écus à une manufacture, il achetait promptement une charge de secrétaire du roi, et laissait sa manufacture entre les mains de commis qui n'avaient pas assez de fonds pour la soutenir : aujourd'hui que son ambition ne sera plus tentée par une charge de secrétaire du roi, qu'il ne verra plus rien au-dessus de lui, sa manufacture deviendra de plus en plus florrissante : la concurrence des marchandises de l'Inde ne fera peut-être qu'exciter l'émulation et encourager les manufacturiers. Les toiles peintes furent longtemps défendues en France; en 1760 le gouvernement fut sollicité pour permettre l'entrée de ces marchandises : le
commerce jeta de grands cris; mais le gouvernement eut le bon sens de le laisser crier. Qu'ar-riva-t-il ?
Les anciennes manufactures sont-elles détruites? non ; nous avons plus de deux cents manufactures de ces toiles peintes. Il me semble qu'il résulte de tout cela que la liberté est l'âme du commerce ; qu'il faut séparer l'intérêt du vendeur et celui de racheteur ; enfin que ni l'intérêt du fisc ni l'intérêt des manufactures n'exigent un privilège pour le port de Lorient. Je finirai par une simple observation. On doit examiner notre commerce sous ses rapports extérieurs. Nous sommes les colporteurs des nations étrangères. Nous sommes situés de manière à pouvoir faire le commerce pour les Italiens, les Turcs, les Danois et même les Anglais. Si vous ne laissez qu'un seul port, vous perdez le bénéfice du chargement; au contraire, en permettant le retour de l'Inde dans tous les ports du royaume, il s'établira une commission que les étrangers payeront tous les ans. Si, au contraire, vous défendez les retours, vous établirez, comme auparavant, une grande compagnie, et les commerçants feront ia contrebande comme ils la faisaient du temps de la compagnie. Je conclus à ce que tous les ports soient ouverts pour les retours comme pour les départs de l'Inde. —(On demandeavec empressement que la discussion soit fermée.)
demande avec instance l'ajournement. L'Assemblée ajourne à la séance du jeudi soir.
La séance est levée à 10 heures.
DU
Exposé de la conduite de M. le duc d'Orléans, dans la Révolution de France (1).
(Rédigé par lui-même à Londres) (2).
J'ai toujours cru, et je crois encore, que ma conduite, dans la Révolution présente, a été aussi simple et naturelle que mes motifs étaient raisonnables et justes. Il me paraît cependant que tout le monde en a jugé autrement : je dis tout le monde, car j'ai été aussi souvent étonné de l'exagération des éloges que de celle des reproches. Chacun a voulu deviner mes sentiments et mes pensées ; et, comme il arrive d'ordinaire, au lieu de les chercher en moi, chacun m'a prêté les siens.
Les démocrates outrés ont pensé que je voulais faire faire de la France une République ; les courtisans ambitieux ont supposé que je voulais , par une excessive popularité, forcer la cour à m'ac-corder une grande influence dans l'administration; les méchants m'ont prêté les intentions les plus
criminelles et n'ont pas même été arrêtés par l'absurdité de leur système calomnieux ; les patriotes les plus zélés ont eu aussi leur erreur, et quoique infiniment honorable pour moi, je ne 1 adopterai pas davantage, car je ne cherche pas ici ce qui serait le mieux, mais ce qui est le vrai.
Les meilleurs patriotes ont donc eu aussi leur erreur. Ils m'ont vu, ils m'ont présenté comme m'immolant uniquement à la chose publique: ce que je cédais sans peine leur a paru d'immenses sacrifices ; ils ont tout calculé d'après le prince et rien d'après l'homme. En observant mieux, ils auraient bientôt reconnu que mon caractère, mes opinions, mes goûts, étaient tels que mon bonheur personnel et particulier se trouvait nécessairement lié au bonheur public, en ce qu'il ne pouvait venir que de la même source, je veux dire de la liberté. C'est ainsi que tous ont été chercher si loin des motifs que j'avais trouvés si près de moi.
Ces réflexions me déterminent à me remettre sous les yeux ce que j'ai fait, dit et pensé de relatif à la Révolution présente depuis son origine. Je rappellerai même tout ce qui, dans ma conduite précédente, peut avoir quelque rapport aux sentiments que j'ai développés depuis. Je veux enfin, pour ma propre satisfaction, tâcher de découvrir si j'ai donné lieu ou non à tant d'éton-nement, à tant de louanges, à tant de reproches. En me livrant à ce travail, j'ai la ferme intention de tout dire; et j'avoue que je n'en suis pas moins persuadé que, si j'avais, par la suite, le désir ou le besoin de montrer à d'autres ce qu'en ce moment je fais pour moi seul, je suis, dis-je, très persuadé que je ne trouverais rien du tout à y changer. Je suis curieux de savoir si je conserverai cette idée jusqu'à la fin.
J'ai lu quelque part, je ne me souviens plus où, que chaque homme voit avec un goût dominant qui, non seulement maîtrise tous les autres, mais qui ne cède ni aux événements, contre lesquels il ne cesse de lutter avec courage, ni même aux passions qu'il parvient toujours à modifier à son gré. Ce goût dominant a de tout temps été chez moi le goût de la liberté. Je conviens qu'il fût d'abord bien plus l'effet du sentiment que celui de la réflexion, et que je chérissais la liberté bien avant de la connaître. Je la cherchais en vain autour de moi ; je n'étais pas placé pour la rencontrer si facilement. Je crus en apercevoir l'image dans ces grands corps de magistrature qui, au moins, en avaient, en quelque sorte, conservé les formes et le langage. Au défaut de la réalité, j'embrassai le fantôme et lui consacrai mes premiers vœux. Trois fois j'en ai été la victime, et trois fois ces traverses passagères ont augmenté Je goût que, par elles, on cherchait à détruire.
Je dois pourtant faire quelques distinctions, entre ces trois époques. A la première, je suivais, sans trop en chercher les raisons, l'impulsion de mon penchant, celle de la voix publique et de l'exemple. Il est bien vrai qu'on me dirigeait d'une manière conforme à mon goût, mais, enfin, on me dirigeait, et je ne puis pas dire que la conduite que je tins alors, fût réellement ma conduite. Livré à moi seul, fût-elle meilleure ou pire? C'est ce qu'il ne me convient pas d'examiner.
A la seconde époque, je n'avais d'autre motif que de ne pas vouloir contredire , par une démarche publique, les sentiments que j'avais publiquement professés.
Mais à la troisième époque, ma conduite fut
entièrement le résultat de mes idées et l'effet de ma volonté.
Mon goût pour la liberté m'avait, depuis long' temps, engagé à me répandre à Paris dans les différentes classes de la société ; mes opinions avaient été renversées ou raffermies par le choc des opinions contraires. Le même motif m'avait porté à voyager chez les nations voisines, et, dans ces voyages, j'avais été déjà plusieurs fois en Angleterre, cette terre natale de la liberté. Je ne m'y étais pas beaucoup occupé de rechercher sur quels principes était fondée la Constitution qui fait des Anglais un peuple libre ; je ne prévoyais pas que ces connaissances dussent être jamais à mon usage ; mais je n'en avais pas moins observé les heureux effets de la liberté pour le bonheur de tous, et mon goût dominant s'était fortifié de tout ce que j'avais acquis d'expérience.
Le moment arriva où avaient été promis les Etats généraux, et les lettres de convocation parurent. Dès ce moment je me vis libre, car je ne doutai pas que la nation ne voulût le devenir.
J'ai eu lieu de remarquer depuis, que, dans tout ce gui concerne la liberté individuelle, j'avais deviné le vœu de la nation jusque dans les détails. En effet, les instructions que je crus devoir joindre aux nombreuses procurations que j'étais alors dans le cas de donner sont, sur ce point, d'une conformité frappante avec la généralité des cahiers des bailliages; et l'on peut se rappeler qu'elles étaient déjà publiques avant qu'aucun bailliage eût été assemblé. Ce n'est pas que je prétende avoir servi de modèle, cela prouve surtout que je n'en avais pas besoin : cela prouve surtout que mon goût dominant, le goût de la liberté avait, dès lors, lié mon intérêt personnel à l'intérêt public.
Si l'on en voulait une autre preuve, on pourrait voir encore que dans ces mêmes instructions, et toujours avant qu'aucun baillage ait pu se faire entendre, j'ai provoqué la suppression des droits qui pouvaient m'être les plus agréables, en déclarant que je me joindrais à la demande qu'en feraient les bailliages : on pense bien que je ne me fais pas un mérite d'un abandon si juste ; mais on peut au moins en conclure que, quelle que fût la vivacité de mes goûts, j'aimais encore mieux la liberté ; que je sentais déjà qu'elle ne pouvait pas prospérer au milieu des privilèges, et que rien ne me coûtait de tout ce qui pouvait me la faire acquérir.
En donnant ces instructions, que je faisais rédiger à mesure, par l'un de mes secrétaires des commandements; en y joignant un ouvrage du plus fort de nos publicistes, je n'avais eu que deux motifs : l'un d'avoir, dans les différents bailliages où j'étais représenté, un vœu uniforme et qui fût le mien; l'autre de donner à mes représentants un guide sûr qui pût les diriger dans les ! cas que je n'avais pas prévus. Cependant la pubii-j cité qu'acquirent ces instructions, en a fait une mémorable époque dans ma vie. C'est de ce mo-j ment que l'affection des uns et la haine des ! autres se sont manifestés, à mon égard, avec plus d'énergie : mais je puis bien affirmer avec vérité, que j'ai été très reconnaissant pour les uns et très peu affecté parles autres.
C'est peut-être ici le lieu de dire un mot sur une sorte de reproche que je n'ignore pas qu'on me fait depuis longtemps, de mon insouciance relativement à l'opinion publique. Il me semble qu'on n'a deviné, à ce sujet, que la moitié de ma pensée : la voici tout entière.
Dans toute démarche un peu importante, je ne me suis jamais décidé qu'après avoir été pleine-.
ment persuadé que j'avais droit et raison ; et 8i quelquefois j'ai été dans l'erreur, cette erreur, d'après ma persuasion, n'en était pas moins une vérité pour moi. Or, quand l'opinion du public s'est trouvée contraire à la mienne, j'ai pensé, avec quelque raison, qu'il s'était moins occupé que moi de la question et qu'il m'avait jugé sans, m'entendre; j'en ai donc été peu affecté : mais quand, au contraire, le public a approuvé ma conduite, plus affermi par là dans mon opinion, je n'en ai été que plus sensible à son suffrage. Je ne sais comment font ceux qui se conduisent autrement; mais je persiste à penser que, dans tout autre système, il faut se résoudre à faire dépendre sa raison et sa justice, de toutes les erreurs, de tous les préjugés, et aussi de tous les intrigants, qui savent si bien les faire naître et en diriger le cours.
C'est pour me rendre compte de tout que je suis entré dans ces détails. Je reprends l'historique de ma conduite.
A peine eus-je entrevu qu'enfin la France aurait des.citoyens, que je voulus me mettre à même d'en remplir les devoirs ; non seulement je désirai d'être député, mais quoique déjà nommé par deux bailliages, je ne m'en livrai pas avec moins de zèle et d'exactitude aux fonctions d'électeur que m'avait confiées l'une des sections de la ville de Paris. J'en obtins l'honorable récompense d'être nommé député par mes concitoyens ; et quoique je n'ai pas pu accepter cette place, j'ose croire cependant avoir justifié leur confiance, par la conformité de mes principes avec ceux de la grande pluralité des députés de la ville de Paris.
Pendant que tout ceci se passait, les États généraux étaient déjà ouverts; et chaque jour les débats entre les différents ordres qui existaient alors, acquéraient plus de chaleur et de vivacité.
La fameuse question de la vérification des pouvoirs en commun était élevée, et l'unanimité pour le refus était presque égale dans la chambre de la noblesse, à celle qui avait décidé la demande dans la salle du tiers état. La minorité de la Chambre, si forte en raison, mais si faible en nombre, était rarement écoutée et jamais entendue; tous ses efforts ne parvenaient pas à ébranler la moindre des prétentions; et l'on se rappelle encore combien on trouvait scandaleux que des gentilshommes français osassent penser qu'il était possible que le tiers état eût raison, contre les deux premiers ordres. J'étais un de ces gentilshommes et quelques personnes prétendaient que cela ajoutait beaucoup au scandale.
Je n'écris pas l'histoire de la Révolution, mais seulement celle de la conduite que j'y ai tenue; je passe donc au moment où quelques membres de la noblesse délibèrent s'il n'était pas de leur devoir d'abandonner la section des Etats généraux dont ils faisaient partie, pour se réunir à la pluralité effective des députés, que, dans la chambre de la noblesse, on appelait encore le tiers état, et quelques dissidents du clergé, mais qui s'était constituée et qui était devenue, réellement et de fait, l'Assemblée nationale.
Cette délibération importante était purement individuelle et paraissait alors dépendre principalement de la teneur des cahiers de chaque bailliage, puisque la question des mandats impératifs n'était pas encore résolue, n'avait pas même encore été discutée.
Quoique le cahier de mon bailliage ne contînt aucun article réellement impératif, l'opinion par
ordre y était suffisamment énoncée comme le vœu de la noblesse ; mais ce même cahier énonçait plus positivement encore le vœu de la régénération du royaume, et je voyais clairement que, sans réunion, il n'y aurait pas de régénération. Je jugeai qu'en toute affaire les moyens devaient être subordonnés à la fin, et je me déterminai à me joindre au petit nombre. des membres de la noblesse qui se réunissait à l'Assemblée nationale. J'en rendis compte aussitôt à mes commettants, et j'eus la satisfaction d'en recevoir l'approbation la plus entière. On ne manqua pas, à cette époque, de répandre dans le public que mon seul motif était l'ambition et mon seul désir celui d'être le chef de l'Assemblée nationale. En effet, très peu de temps après, l'Assemblée me fit l'honneur de me choisir pour son président, et je refusai la présidence, non pas, à la vérité, à raison des propos qu'on avait tenus, mais, tout simplement, parce que je croyais, alors, comme je le crois eucore aujourd'hui, que je ferais un très mauvais président de l'Assemblée nationale. (1)
Cette démarche de quelques députés de la noblesse rendait plus pressante pour les autres la nécessité de prendre un parti ; bientôt après ils se décidèrent à la réunion désirée, et l'Assemblée nationale fut complète : l'allégresse publique qui éclata à cette occasion, fit assez connaître que tel était le vœu de la nation.
Les principes de la grande pluralité de l'Assemblée furent bientôt connus, et la destruction totale et prochaine des abus de tous les genres, put être facilement aperçue par les moins clairvoyants. Aussi vit-on redoubler les efforts de tous ceux qui avaient quelque intérêt au maintien de ces abus. Les prétentions les plus opposées cédèrent même à ce danger commun : les rivalités de corps et de personnes parurent également oubliées; et si (a sagesse de l'intrigue en eût égalé l'activité, il est difficile de calculer quel degré de force elle eut pu acquérir.
Ce n'était pas que, dès lors, il ne me parut bien démontré qu'il était impossible d'empêcher la Révolution; car ce n'était pas l'ouvrage de quelques chefs qui aurait suffi de gagner ou de vaincre; ce n'était même pas celui de l'Assemblée nationale qui en a plutôt été l'organe que le moteur ; c'était l'effet de la volonté générale de la nation, ou au moins des dix-neuf vingtièmes de la nation: et que pouvait-on opposer à une telle puissance ? Mais tout le monde ne voyait pas ainsi, et de fausses combinaisons pouvaient être
Les fonctions de président du bureau, fonctions que i'avais eu l'occasion de connaître à ia première assemblée, consistaient principalement à recueillir les opinions et à certifier ensuite, par sa signature, qu'un tel avis était celui de la pluralité de son bureau. Mais1 les questions ne s'y posaient pas par oui ou par non, et les opinants n'étaient point tenus de se réduire à deux opinions. On regardait comme majorité l'opinion seulement la plus nombreuse. Je jugeai que, surtout dans des questions aussi importantes que celles qu'on avait à discuter dans cette assemblée, je ne pouvais ni ne devais me charger de certifier que tel ou tel avis était celui de la majorité, quand il était évidemment pour moi celui de la minorité. Je n'ai jamais pu ni renoncer à ce calcul ni le faire adopter, et je me suis abstenu de présider.
soutenues par des efforts vigoureux, et entraîner des maux incalculables.
J'ignore jusqu'où fut portée l'illusion à cet égard; mais différents corps de troupes furent rassemblés, ils entouraient l'Assemblée nationale et semblaient menacer Paris. La France entière était alarmée ; la capitale, dont le danger paraissait plus pressant, observait avec inquiétude la contenance des troupes dont elle était investie ; ou qu'elle renfermait dans son sein. Les gardes françaises furent les premiers qui rassurèrent leurs concitoyens ; ils furent les premiers qui professèrent hautement les sentiments qui, depuis, sont devenus la base du serment qu'on exige des troupes.
il était naturel que la conduite civique de ce régiment déplût à tous ceux dont elle contrariait les projets, et ils publièrent avec affectation qu'il avait été acheté.Plusieurs personnes crurent aussi, ou plutôt cherchèrent à faire croire, que j'avais fait, en grande partie, les frais de ce marché. Répondre à un tel reproche serait faire à ce corps une injure gratuite, car on ne peut acheter que ceux qui sont à vendre ; mais je dirai librement mon opinion. C'eût été, si les gardes françaises se fussent conduites autrement, que j'aurais été tenté de croire que, sans doute, on leur avait payé chèrement de semblables services. Ce n'est pas que je ne connaisse comme un autre la nécessité de l'obéissance militaire, mais il faut aussi distinguer la règle de l'abus : car les exemples ne manquent pas des ressources qu'a trouvées le despotisme ministériel, dans la fausse application des principes les plus vrais.
Plusieurs régiments ne tardèrent pas à manifester des sentiments conformes à ceux des gardes françaises ; mais on comptait davantage sur quelques autres, et rien ne fut changé dans les dispositions.
L'alarme qui, depuis quelque temps, augmentait tous les jours, fut au comble dans Paris, quand on y apprit le renvoi d'un ministre que ses amis et ses ennemis ont également concouru à identifier avec la Révolution. Le bruit se répandit aussitôt que l'Assemblée nationale allait être dissoute et que plusieurs de ses membres devaient être arrêtés : on les désignait, on en donnait des listes, et mon nom se trouvait sur toutes : j'ai toujours pensé que ce fut cette particularité qui fut cause qu'on joignit mon effigie à celle de M. Necker, dans l'espèce de triomphe que le peuple lui décerna.
On se rappelle assez la scène désastreuse qui se passa le même jour à la place de Louis XV: ce fut l'étincelle qui causa l'explosion.
Au milieu de ces événements, quelle fut ma conduite ? Je ne flattai point le peuple et ne craignis point ia cour. Je me dérobai à des empressements qui me paraissaient plus propres à augmenter le trouble qu'à remédier au mal; je me retirai, pour la soirée, à ma maison de Monceau, où je passai la nuit; et le lendemain, je me rendis, comme de coutume, à l'Assemblée nationale.
Je n'ai pas besoin de retracer ni la conduite si sage de l'Assemblée, ni la conduite si énergique des habitants de Paris; l'une et l'autre seront consacrées dans l'histoire et y feront l'admiration des races futures. Je passe au moment plus heureux, où le roi, mieux informé et rendu à sa propre volonté, vint se réunir à l'Assemblée nationale ; et j'observe que je demandai de ne pas être de la députation qui fut chargée d'aller annoncer à la capitale cette grande et mémo-
rable nouvelle, j'évitai pareillement de me montrer à Paris le jour où le roi y fut et encore quelques jours après. Je ne vois pas quelle conduite j'aurais pu tenir qui eût été plus sage et plus opposée aux vues ambitieuses que mes ennemis, ou plutôt les ennemis de la liberté ont, depuis, affecté de me supposer.
L'orage était passé, mais l'agitation des flots dure plus longtemps que la tempête, et quelques personnes furent encore les victimes d'une impulsion dont la cause n'existait plus. Cependant l'Assemblée nationale, de concert avec le roi, et secondée par la commune de Paris, parvint, bientôt après, à ramener le calme ; et on commença, dans la capitale, à respirer l'air de la liberté dégagé deg vapeurs de la licence.
Cet état de tranquillité dura jusque vers la fin de septembre.
A cette époque, les alarmes se renouvelèrent. On parut craindre une contre-révolution. On débitait qu'il s'était formé un parti puissant, dont le projet était d'emmener le roi de Versailles et de le conduire dans quelque grande place de guerre : il m'a paru qu'on s'accordait peu sur les circonstances qui devaient suivre cette démarche; mais l'effet n'en était pas moins le même, et l'inquiétude devint générale. Une fête dont on n'avait pas calculé l'effet excita de ia fermentation dans le peuple, que déjà l'excessive disette du pain mécontentait depuis longtemps ; des cocardes (blanches pour Versailles et noires pour Paris) distribuées avec profusion et substituées par un grand nombre de personnes à la cocarde nationale, donnèrent une consistance dangereuse aux bruits qui s'étaient répandus : telles furent à mon sens les causes réunies qui amenèrent les journées des 5 et 6 octobre.
Voici d'abord ce qui m'est personnel dans les événements de ces deux jours.
Il n'y avait pas d'assemblée le dimanche 4, et j'étais parti, suivant mon usage, le samedi, au soir, pour me rendre à Paris. J'étais dans l'intention de retourner le lundi matin à Versailles ; mais je fus retenu par le travail qu'avaient à faire avec moi quelques personnes de ma maison. J'appris successivement, pendant ce jour, l'effervescence qui régnait dans Paris, le départ pour Versailles d'une quantité de peuple assez considérable, ayant des armes et qiême du canon ; et enfin le départ d'une grande partie de la garde nationale parisienne. Je ne sus d'ailleurs rien de ce qui se passait à Versailles jusqu'au lendemain mardi matin, que M. le Brun, capitaine d'une compagnie de la garde nationale, bataillon de Saint-Roch, et inspecteur du Palais Royal, me fit éveiller, et vint me dire qu'un exprès de la garde nationale était venu donner, à son corps de garde, des nouvelles de Versailles; mais elles ne contenaient aucun détail, ni le récit d'aucun événement.
Le même jour, vers huit heures du matin, je me mis en route pour me rendre à l'Assemblée nationale. Tout me parut tranquille jusqu'à l'entrée du pont de Sèvres; mais là, je rencontrai les têtes des malheureuses victimes de la fureur du peuple. Je dois dire cependant, à la décharge de ce même peuple, que le cortège qui suivait ce spectacle sanglant était peu considérable.
Entre Sèvres et Versailles, je rencontrai quelques charrettes chargées de vivres et escortées par un détachement de la garde nationale. Quelques-uns des fusiliers de cette garde pensèrent que ma voiture ne devait pas passer ce convoi ; malheureusement mon postillon, à qui ils s'adres-
sèrent, était Anglais, et ne savait pas un mot de français; il écoutait sans comprendre, et continuait son chemin; un des fusiliers le mit en • joue, à bout portant, et tira son coup de fusil, qui, par bonheur, ne partit point. L'officier qui commandait le détachement s'aperçut de ce qui se passait, il accourut, réprimanda sévèrement le soldat, me dit que cet homme était ivre, ordonna très honnêtement qu'on me laissât passer, et me donna deux hommes à cheval pour escorte, afin que je n'essuyasse pas de nouvelles difficultés dans ma route. Ces deux cavaliers m'escortèrent, en effet, jusque chez moi, et refusèrent la légère récompense que je crus devoir leur offrir.
Je sortis sur-le-champ de chez moi pour me rendre à l'Assemblée nationale. Je trouvai une partie des députés dans l'avenue ; ils m'apprirent que le roi désirait que l'Assemblée se tînt dans le salon d'Hercule ; je montai au château et j'allai chez Sa Majesté : j'appris ensuite que l'Assemblée se tiendrait dans la salle accoutumée et j'y revins à temps pour participer au décret qui déclarait l'Assemblée nationale inséparable de la personne du roi.
Ici finit tout ce que je devrais avoir à dire sur ces deux journées; mais la suite des événements me forcera d'y revenir.
Peu de jours après l'arrivée du roi à Paris, M. de La Fayette m'écrivit pour me demander un rendez-vous. Je lui répondis qu'il n'avait qu'à me dire le lieu et l'heure, et il me les donna chez Mme de Goigny. Voici ce qui se passa de relatif à moi, dans cette entrevue. M. de La Fayette me dit que le roi désirait que je me chargeasse d'une mission à l'étranger; et il ajouta que mon absence, ôtant tout prétexte à se servir de mon nom, dont il croyait qu'on pouvait abuser, il pensait qu'alors il trouverait plus de facilité pour maintenir la tranquillité dans la capitale et empêcher des mouvements qu'en effet ses soins n'avaient pu ni prévenir, ni réprimer. Il me présenta aussi, comme un motif pour accepter, que cette marque de confiance de ia part de Sa Majesté détruirait entièrement tous les bruits que ia méchanceté commençait à répandre sur mon compte. Il finit par ajouter que son opinion personnelle était que je pouvais être en Angleterre, d'une grande utilité pour la nation.
Le désir du roi eut été, à lui seul, un objet important de considération : concourir au retour de la tranquillité publique me parut le plus grand bienfait dont je pusse payer l'affection si touchante que m avait témoigné le peuple ; il me parut encore que cette tranquillité était le besoin le plus pressant de la capitale, dans un moment où déjà elle possédait son roi, et où elle allait, sous peu de jours, posséder l'Assemblée nationale ; je voyais surtout la Révolution, plus affermie que jamais, n'avoir qu'à redouter que des troubles dont on pourrait tenter d'embarrasser sa marche ; enfin la mission qu'on me proposait pouvait être très importante pour la France. J'acceptai donc sous la seule condition que l'Assemblée nationale consentirait à ce que je m'absentasse ; elle consentit, et je partis aussitôt.
Je ne sais quelle intrigue jugea convenable à ses intérêts d'engager le peuple de Boulogne à s'opposer à mon départ ; mais ce que je n'ai pas pu ignorer, c'est que l'agent qui fut envoyé à cet effet n'osa employer d'autres moyens que ceux que lui fournissait l'amour que me portait le peuple. Retenu par une foule considérable, on eût dit que j'emportais avec moi le salut de toute
la France ; la résistance ne se manifestait qu'au milieu des louanges et des bénédictions ; il était difficile de ne pas être impatienté, mais il était impossible de ne pas être attendri.
Cet incident retarda de trois jours mon arrivée en Angleterre ; mais rien ne retarda l'activité de mes ennemis, et ce voyage, entrepris par de louables motifs, a été à la fois le signal et le prétexte des plus absurdes comme des plus atroces calomnies. Il ne me convenait assurément pas de m'abaisser jusqu'à répondre à de si méprisables libellistes, mais il entre dans le plan de l'examen que je fais en ce moment de chercher si les forfaits que la haine m'a imputés, je ne dirai pas sont vraisemblables, mais s'ils ne sont pas réellement impossibles.
On a répandu que j'avais été le fauteur du mouvement de Paris sur Versailles, du 5 octobre ; et on a supposé que mon motif était l'espoir que la terreur déciderait le roi à fuir de Versailles ; qu'il emmènerait avec lui M. le Dauphin: que Monsieur l'accompagnerait; et que je parviendrais à me faire nommer régent ou lieutenant général du royaume. Ces calomnies font frémir 1 eh bien les libelles où elles se trouvent sont encore les plus modérés. D'autres n'ont pas craint de prodiguer les assasssinats et de me supposer l'ambition du trône. Tâchons de surmonter l'indignation que causent ces horreurs ; un moment suffira pour en démontrer l'absurdité.
Examinons le premier de ces systèmes de calomnie.
Le roi s'enfuira : — pour établir un fait sur cette proposition, les libellistes ont été obligés de dissimuler une remarque que tout le monde a pu faire, et qui est généralement honorable pour le monarque et pour la nation. C'est qu'au milieu des événements les plus désastreux, jamais le roi n'a manqué de confiance dans le peuple, ni le peuple dans le roi. Certes, il eût été difficile de penser que celui qui, de son propre mouvement, avait été à Paris le 16 juillet, se serait enfui de Versailles le 5 octobre : — mais soit, supposons-lui cette volonté. Ne dirait-on pas que les barrières de Versailles sont les limites de la France? Les libellistes supposent donc, ou que le roi aurait pu se dérober à tous les yeux, dans toute la traversée du royaume, et cela dans quel temps ? ou que nulle part il n'eût trouvé les Français empressés à le rassurer, à le retenir, à le ramener? Ce n'est pas moi que cette calomnie outrage, c'est à ia fois le monarque et la nation. Je poursuis.
Monsieur s'enfuira comme le roi, et quelle raison aurait-il eue de fuir, lui qui ne s'était montré dans la Révolution que pour donner sa voix à la double représentation du tiers ? — Mais par attachement pour sa Majesté ; — c'eût été, il me semble, une étrange marque d'attachement que d'abandonner le soin du royaume, et peut-être l'intérêt et le salut du roi, aux premières mains qui eussent voulu s'en saisir l
Et pourtant si le roi ne fuit pas, si Monsieur ne le suit point, si tous deux ne parviennent pas à se rendre invisibles à toute la France, le crime qu'on me suppose est totalement sans objet ; ce serait le délire de l'atrocité.
Et dans l'impossible supposition de cet affreux succès, quel devait en être le prix ? Ou ia régence, ou ia lieuienance générale du royaume. Ce reproche qu'on m'a fait, m'a donné lieu de considérer quel serait donc l'avantage de ce poste qu'on suppose si désirable. J'ignore encore ce que décidera l'Assemblée nationale sur cet
objet ; mais voici les réflexions qu'il m'a inspirées. L'Assemblée a déclaré, avecautant desagesse que de raison, la personne du roi inviolable et non responsable : mais je crois connaître assez ses principes pour être sûr qu'elle sentira que s'il y avait dans le royaume deux personnes non responsables, dès ce moment il y aurait deux rois. Or, si un régent, si un lieutenant général du royaume est responsable, comme je n'hésite pas à dire que je pense que cela doit être, il me semble que cette place, toute éminente qu'elle serait, devra toujours moins exciter . l'ambition que la crainte.
On se forme par l'usage, et les iibellistes ont senti l'absurdité de ce premier système ; ils ont essayé, dans un autre, de le faire disparaître à force d'atrocités. Voyons s'ils ont mieux réussi.
ils se sont aperçus que l'impossibilité évidente du roi, de la reine, du Dauphin, Ae Monsieur, traversant le royaume sans être aperçus, ôtait toute base à la calomnie, alors ils ont accumulé les meurtres, et m'ont frayé la route du trône a travers une foule d'assassinats. Mais comme ils n'ont pas pu y comprendre M. le comte .d'Artois, ils n'ont pas hésité à supposer que la France le déclarerait, ainsi que ses enfants, inhabiles à succéder au trône. Ainsi calomniant une seconde fois la nation, ils ont pensé que les Français dépouilleraient de ses droits un prince devenu leur roi légitime, et pourquoi ? Parce que l'erreur^ dont quelques courtisans l'ont entouré a duré plus que celle du reste de la France, et ces calomniateurs ne s'aperçoivent pas qu'ils me donnent, nécessairement, l'Assemblée nationale pour complice : car assurément on ne niera pas qu'un seul décret émané d'elle n'eût suffi pour anéantir de si criminelles prétentions : l'adhésion de toutes les parties du royaume aux décrets de l'Assemblée était déjà suffisamment connue. Ët disons plus, cette adhésion méritée et obtenue par la raison et par la justice eût cessé dès le moment même où, par impossible, l'Assemblée eut porté cejugementinjuste. Les Français en changeant leur gouvernement, n'ont changé ni.de sentiments, ni de caractère, et j'aime à croire que le prince, dont il est ici question, en fera lui-même l'heureuse épreuve. J'aime à croire que se rapprochant d'un roi qu'il chérit et dont il est si tendrement aimé, se rapprochant d'un peuple à l'affection duquel tant de qualités aimables lui donnent de si justes droits, ce prince reviendra jouir de la partie la plus précieuse de son héritage: l'amour que la nation la plus sensible et la plus aimante a voué aux descendants de Henri IV.
Je n'avais pas besoin de ces réflexions pour ne laisser approcher de moi ni l'idée ni le soupçon de ces crimes odieux, mais je les ai employées pour confondre mes calomniateurs.
Tandis que, par ces basses manœuvres, on cherchait en France à profiter de mon absence pourme faire perdre l'affection des bons citoyens, je m'occupais à Londres des moyens de me rendre utile à mon pays,en préparant le succès de la négociation que le roi m'avait fait l'honneur de me confier. Différents événements, et particulièrement ceux qui ont, depuis quelque temps, entièrement changé la face des affàires publiques de l'Europe, ont opposé jusqu'ici des obstacles renouvelés aux efforts de mon zèle. Je saurai . bientôt, je l'espère, si ces obstacles sont en effet invincibles, et alors je m'empresserai de me réunir à l'auguste Assemblée, dont j'ai l'honneur d'être membre, et de concourir avec elle à l'achève-, meut d'une Constitution si désirable et si désirée.
Que si l'on demande encore quel est l'intérêt qui me guide ? je répondrai que ç'en est un le plus cher à mon cœur et dont je ne me départirai jamais : celui de vivre libre et heureux, au milieu de la France heureuse et libre ; enfin celui de voir la nation française jouir du degré de puissance, de gloire et de bonheur, que, depuis si longtemps, la nature lui destinait en vain.
P. S. — En consignant dans cet écrit mes actions, mes sentiments et mes pensées, je n'avais d'autre projet que de déposer dans mes archives, pour mes enfants et pour mes amis, un exposé de ma conduite qui n'eût été défiguré ni par l'éloge, ni par la satyre. En le relisant, j'ai jugé convenable de le rendre public, non pour répondre à de méprisables libelles, mais pour que les amis de la vérité et les bons citoyens n'aient pas à me reprocher d'avoir concouru, par mon silence, à l'erreur dans laquelle on a voulu, évidemment, les entraîner sur mon compte.
Séance du
La séance est ouverte à neuf heures du matin.
(de Saint-Jean-dAngèly), secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier au matin dans lequel il est fait mention de la lettre lue par M. de la Touche au nom de M. Louis-Philippe d'Orléans.
Plusieurs membres demandent que cette partie du procès-verbal soit supprimée.
Vautres membres en réclament le maintien.
Lorsque l'Assemblée a passé à l'ordre du jour, son usage constant a été ae ne pas faire mention des faits dans son procès-verbal. Je demande qu'il ne soit pas fait d'exception pour M. d'Orléans.
Il faut distinguer entre les affaires que l'Assemblée interrompt de prime-abord pour passer à l'ordre du jour et celles qu'elle a examinées et discutées avant d'y passer. Pour ces dernières, il doit en rester trace dans le procès-verbal.
J'appuie l'opinion de M. de Di-goine, parce que si l'Assemblée a entendu la lecture de la lettre de M. d'Orléans, elle n'en a pas délibéré et qu'elle s'est bornée à passer à l'ordre du jour.
, rédacteur du procès-verbal. Il s'agit d'une circonstance particulière, d'une circonstance importante dans l'opinion publique et qui peut même être un mouvement précieux à conserver pour l'histoire de notre Révolution. Il y a d'ailleurs un dépôt de pièces sur le bureau : il est impossible de le constater dans le procès-verbal.
Constater ce dépôt, ce serait consigner un faux dans ies archives ; insérer au procès-verbal la remise des pièces sur le bureau, ce serait en supposer l'acceptation par l'Assemblée. Un dépôt ne peut s'effectuer que par le concours de la volonté de celui qui dépose et de celui qui reçoit : l'Assemblée, en passant à l'ordre du jour, n'a pas manifesté la volonté de recevoir le dépôt. Je propose d'exprimer ainsi le fait qu'il s'agit de rappeler dans le procès-verbal : « Un membre ayant présenté une demande, au nom d'un député absent, et ayant offert de déposer des pièces sur le bureau, l'Assemblée a décidé de passer à l'ordre du jour. »
, (Cette rédaction est adoptée par l'Assemblée.)
, recteur de VUniversité de Paris. L'approche de la fête la plus mémorable qui ait jamais été célébrée, l'ardeur d'une jeunesse qui a déjà manifesté ses sentiments patriotiques, nous ont invités à accélérer la distribution solennelle des prix. Nous avons cru que le jour où la nation allait sceller le contrat immortel qui lui donne des droits à la reconnaissance de tous les peuples de l'univers; devait être noté dans le cœur de nos jeunes élèves par des circonstances particulières. — Ce serait un spectacle bien intéressant que celui où cette jeunesse pourrait recevoir sous vos yeux les récompenses qui lui sont distribuées à la fin de chaque année ! L'Université de Paris, par Ja nature de ses établissements, est l'école de la France entière : c'est à ce titre que nous vous supplions de venir couronner de vos mains des enfants de la patrie. Quel enthousiasme votre présence ne fera-t-elle pas naître dans ces jeunes cœurs, destinés à recueillir tous les fruits de vos travaux 1 J'ai l'honneur de vous supplier de nommer une députation pour assister à la distribution solennelle des prix qui se fera lundi prochain dans les écoles de la Sorbonne.
(L'Assemblée décide qu'une députation de vingt membres assistera à cette cérémonie.)
fait lecture d'une lettre par laquelle M. Rollin demande s'il peut continuer les poursuites, pour le payement d'une lettre de change, contre un membre de l'Assemblée nationale.
L'Assemblée ne peut pas soustraire à des poursuites légitimes un de ses membres qui a eu l'imprudence de s'y exposer; mais elle ne peut pas non plus permettre qu'il soit détenu en prison sans un jugement préalable. Ce principe tient à l'inviolabilité des membres de l'Assemblée nationale ; ce qui est moins leur privilège que celui delà nation. Je puis citer en exemple ce qui se passe au parlement d'Angleterre. Quelle est sur cela la rigidité de ses maximes ? 11 permet qu'un de ses membres accusé de félonie ou de haute trahison soit arrêté. Vous avez été plus favorable que lui, puisqu'un député de l'Assemblée nationale ne peut être constitué prisonnier sans un jugement préalable de l'Assemblée. Ne vous laissez pas entraîner par une indignation vertueuse, méfiez-vous de vos propres sentiments, et souvenez-vous que l'inviolabilité est ie privilège du peuple.
On n'a pas parlé de l'exception de la main-mise et du flagrant délit. Quant au civil, le particulier qui réclame a rempli les formes en consultant l'Assemblée nationale.
, Quoi qu'on puisse dire de l'invio-
labilité des membres de l'Assemblée nationale, je vois qu'elle doit être bornée aux opinions qu'ils profèrent dans cette Assemblée. Une fois sortis d'ici, nous rentrons dans la classe ordinaire des citoyens, et nous sommes comme eux soumis à toutes les lois.
Si nous prétendons donner aux députés une sauvegarde pour ne pas payer leurs dettes, il faut que 1 Assemblée les paie pour eux.
(On demande le renvoi au comité de Constitution.)
Nous n'avons pas besoin de l'avis du comité pour savoir si nous devons payer nos dettes.
La discussion est fermée, et l'Assemblée rend le décret suivant:
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu la lecture de la lettre que le sieur Rollin a adressée à son président, a décrété et décrète que son président est chargé de répondre au sieur Rollin, qu'elle trouve juste qu'il exerce contre son débiteur tous les droits et toutes les contraintes que lai assure la loi. »
— Les anciens officiers municipaux de la ville d'Alençon font un don patriotique de 40 mille livres, provenant du capital de leurs anciens offices, qu'ils remettent à l'Etat.
, curé de Fontaine-lès-Dijon. Vous connaissez la protestation d'une des parties de cette Assemblée ; je l'ai signée, et je viens déclarer que je renonce à cet acte de minorité. Si j'y ai accédé d'abord, j'assure avec loyauté que je n'y ai pas été poussé par l'intérêt personnel, je n'ai souffert en aucun cas des sacrifices qu'on a imposés au clergé ; je n'ai eu d'autre motif que de manifester mon vœu pour la religion de nos pères. J'ai cru joindre mon hommage à celui que l'Assemblée lui a rendu dans son décret. Mais puisqu'il existe des malveillants qui s'efforcent d'en tirer des inductions capables de fomenter des troubles désastreux, je dois leur enlever ce coupable prétexte. Je rétracte ma signature, et je supplie l'Assemblée nationale d'agréer celte retractation d'un député fidèle à sa patrie. Je vois avec allégresse s'approcher le jour où nous n'allons former tous qu'un peuple de frères, et réunir nos forces pour le maintien de la Constitution. Mettons de côté les haines et les intérêts particuliers, pour donner l'exemple d'une vertueuse liberté. Puisse le nom français deveniràjamais célèbre partout où il y aura des hommes l — Je demande que ma rétractation soit insérée dans le procès-verbal.
(L'Assemblée passe à l'ordre du jour.)
(de Saint-Jean-d'Angély)% secrétaire, do une lecture du procès-verbal delà séance d'hier, mardi au soir.
Ce procès-verbal est adopté.
(de Nemours)i autre secrétaire, lit une note des différentes lettres patentes et proclamations expédiées sur divers décrets de l'Assemblée nationale.
Expéditions en parchemin pour être déposées dans les archives de VAssemblée nationale.
« 1° D'une proclamation sur le décret de l'Assemblée nationale du 1er juin, portant que chaque
mois les reveveurs généraux des finances et ceux des impositions de Paris, fourniront un état de leur recette, tant sur l'arriéré des rôles de 1789 et années antérieures, que sur les recouvrements, à compter de ceux de 1790;
« 2° De lettres patentes sur le décret des 6 et 7 juin, portant que le caissier et administrateur général, et tous dépositaires du prix des domaines et bois, seront tenus de verser dans la caisse des receveurs des districts le montant des quarts de réserve des bois des communautés, tant ecclésiastiques que laïques ;
« 3° D'une proclamation sur le décret du 9, portant que toutes les anciennes ordonnances sur la nature et les formes du service militaire, notamment sur la police des spectacles, doivent être exécutées provisoirement;
« 4° D'une proclamation sur le décret du même jour, relatif aux citadelles, forts et châteaux qui existent actuellement dans le royaume, et notamment à la citadelle de Montpellier ;
« 5° De lettres patentes sur le décret du 11, concernant l'imposition de la somme de 4,000 liv. à lever en deux années par les officiers municipaux de Salins;
6° De lettres patentes sur le décret du même jour, qui autorise la municipalité d'Ëscutalens à emprunter une somme de 500 livres;
« 7° De lettres patentes sur le décret du même jour, concernant la conversion, pour une année seulement, des droits perçus à la boucherie, dans la ville de Montpellier, en une taxe personnelle ;
« 8° De lettres patentes sur le décret du même jour, qui autorise la municipalité de Valentine a imposer une somme de 500 livres, et à retirer de la caisse de la province plusieurs sommes qui y sont déposées;
« 9° De lettres patentes sur le décret du même jour, qui autorise la municipalité de Mirepoix à imposer une somme de 2,000 livres sur la ca-pitation ;
« 10° De lettres patentes sur le décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de Fontenay-sous-Mailly-le-Château, à faire un emprunt de 800 livres ;
11° De lettres patentes sur le décret du même jour, concernant l'imposition de la somme de 500 livres à lever par les officiers municipaux d'Estroux;
« 12° De lettres patentes sur le décret du même jour, concernant l'emprunt à faire par les officiers municipaux de Ghapet d'une somme de 300 livres ;
« 13° De lettres patentes sur le décret du même jour, Concernant l'emploi à faire par la ville de Vezelay en ateliers de charité, d'une somme de 2,000 livres;
« 14° De lettres patentes sur le décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de la commune de Chalvraine à faire un emprunt de 6,000 livres;
« 15° De lettres patentes sur le décret du même jour, concernant, l'imposition de la somme de 3,000 livres à lever dans la ville deMoissac ;
« 16° De lettres patentes sur le décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de la ville du Mur-de-Barrès à toucher entre les mains du correspondant de l'administration provinciale de Haute-Guyenne la somme de 2,000 livres ;
« 17° De lettres patentes sur le décret du même jour, concernant l'imposition de la somme de 4,000 livres à lever en 4 années par les officiers municipaux de Cbevreuse ;
« 18° D'une proclamation sur le décret du 12,
relatif à l'inscription des citoyens actifs sur les registres de service des gardes nationales;
« 19° D'une proclamation sur le décret du même jour, portant que le règlement provisoire proposé par le conseil général de la commune de Caen, et par l'état-major de la garde nationale de la même ville, sera provisoirement exécuté *
« 20°'De lettres patentes sur le décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de la commune de Valais, département de la Haute-Saône, à employer en achat de grains une somme de 2,000 livres;
« 21° De lettres patentes sur le décret du 13, portant abolition des retraits de bourgeoisie, d'habitations et autres ;
« 22° De lettres patentes sur le décret du même jour, portant que les deniers des dons patriotiques continueront à être versés aux payeurs des rentes de l'hôtel de ville de Paris, et détermine les payements auxquels ils pourront être employés ;
« 23° De lettres patentes sur le décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux du bourg de Mouton en Auvergne, à faire un emprunt de 6,000 livres ;
« 24° De lettres patentes sur le décret du 14, portant suspension des procédures relatives aux dédommagements dus a raison des dégâts sur les terrains et marais desséchés ;
t 25° De lettres patentes sur le décret du 15, concernant les droits connus sous la dénomination de criées de Mons ou domaine du Hainault, auxquels la ci-devant province du Hainault demeure assujettie;
« 26° D'une proclamation sur le décret du 16, qui fixe définitivement à Vervins le chef-lieu du district de Guise;
« 27' D'une proclamation sur le décret du 17, qui mande à la barre différents particuliers des villes de Nîmes et d'Uzès, qui ont signé des délibérations contenant des principes dangereux et propres à exciter des troubles et des dissentions dans le royaume, et ordonne qu'il sera informé des troubles arrivés dans la ville de Nîmes; U
« 28° De lettres patentes sur le décret du 18, concernant la dîme;
« 29° De lettres patentes sur ie décret du 20, qui autorise les villes, bourgs, villages et paroisses auxquels les ci-devant seigneurs ont donné leurs noms de famille, à reprendre leurs noms anciens ;
« 30* D'une proclamation sur le décret du même jour, portant que les quatre figures enchaînées au pied de la statue de Louis XIV, à la place des Victoires, seront enlevées;
« 31° De lettres patentes sur le décret du 21, portant établissement d'une cour supérieure provisoire à Dijon;
« 32° De lettres patentes sur le décret du même jour, concernant les biens et dîmes en France et dans l'étranger, possédés respectivement par des bénéficiers, corps, communautés et propriétaires laïques, français et étrangers ;
« 33° D'une proclamation sur le décret du 22, portant que la ville d'Angers demeurera définitivement le siège de l'administration, du département de Maine-et-Loire ;
« 34" D'une proclamation sur le décret du même jour, relatif à la municipalité de Montmartre;
« 35° D'une proclamation sur le décret du même jour, portant que la ville de Chaumont
demeurera définitivement le siège de l'administration du département de la Haute-Marne ;
« 36° D'une proclamation sur le décret du 24, portant que les commissaires du roi, pour l'établissement des corps administratifs du département et des districts de là! Charente-Inférieure, sont autorisés à ordonner lès convocations prescrites, relativement aux députés des gardes nationales qui doivent se rendre à la confédération générale qui aura lieu le 14 juillet;
« 37* D'Une proclamation sur le décret du 25, concernant la municipalité dè la Ville dé Riom ;
« 38° D'une proclamation sur le décret du 26, qui déclare que, pour les élections de cette année; seulement, la quittancé Jë là contribution patriotique doit tenir lieu d'imposition directe aux maîtres, professeurs et principaux des collèges de Paris ; "
« 39*; D!une proclamation sur le décret du même jour, partant qiie la ville de Saint-Floren-' tin demeurerà définitivement chef-lieu de son district;' 1 !
« 40° D'une proclamation sur le décret du même jour, con,bernant M. dë Lautrec; *
« 41° De lettres patentes sur le décret du, même joiir, concernant là' perception des droits' d'aides à Beauvais sûr lés bestiaux les jours de francs marchés;
« 42° D'une proclamation sur le décret du même jour, qui déclare que les commissaires nommés par le roi pour la fdrmàtioh des àsséinblêës administratives7 du, département du Nord, sont chargés :de tenir là main',' lârs des assemblées1 électorales, à l'exécution de's décrets qui les concernent ;
« 43° Et enfin d'une proclamation sur le décret du 20 avril dernier, concernant' le sieur de la Borde, iièutenânt-génml dë Crécy.
Paris, ce
Je viens appeler l'attention de l'Assemblée ' sur le siège archiépiscopal de Cambrai,et je demandé' s'il ne doit pàs être conservé comme métropolitain de§ êvêchés étrangers d'Yprçs et dé Naqaur.
Cette discussion n'est pas à sa place en ce moment et j'éh demandé le renvoi à l'ordre'du! soir. ! (Cette inotion est adoptée.)
Je viens prier l'Assemblée d'autoriser' lé commis du contre-seing à^séjourner ên-core dans" son àncien bureau, jusqu'à cé'que celui qu'on vi^pt de lui préparer5 soit devenu plus sâ-lubre par l'effet du temps qui en chassera l'humidité.
(L'Assemblée autorise son président, assisté des commissaires-inspecteurs, à prendre toutes lés mesurés qu'il croiran écessaires à cet effet.)'1
Une députation de l'ancienne garde dès poiits* dé 'Paris, actuellement incorporée \ dans la garde nationale,' demandé à être admise à ia barre pour présenter une pétition.
L'Assemblée renvoie cette pétition au comité des rapports.
(ci-devant comte)» député de la Basse-Marche, absent par congé/ expose par lettre, que le mauvais état de sa santé lui rend très difficile dë h-joincfre l'Assemblée, mais qu'il obéira néanmoins aux ordres qu'elle lui donnera à ce sujet.
L'Assemblée accorde à M. de Laipaud une prolongation de congé.
présente une adresse du sieur Naudier, màrchand d'estampes, qui prie l'Assemblée de lui permettre de faire hommage' d'un Canon de messe, consistant en trois cartons richement encadrés, et sur lesquels sont gravées les diverses parties de l'ordinaire de la mésse, pour être déposé sur l'autel delà patrie au champ de Mars, lors de la confédération. '
L'Assemblée agrée le tribut de zèle du sieur Naudier.
L'ordre du jour est la suite de la discussion du nouveau projet sur l'ordre ju-diciaire. :r
DanS sa séance du 5 juillet, l'Assemblée a adopté les 21 articles qui forment le titre 1®P.
M. le rapporteur va donner lecture des articles du titre II.
, rapporteur Messieurs, vous avez à vous occuper du titré et du projet concernant l'établissement des jugés de paix. Pour éclairer la disciiSsfdh et accélérer la délibération, je crois utile de vous ra ppeler les motifs qui ont déterminé le comité. i— Viustitution des juges de paix est connue chez'plusieurs nations. Elles ont varié sur le mode de rétablissement. Le désir Je plus généràl;poùr le fond'de la chose en elle-même, est de procurer aux habitants des campagnes une jtfsticé prompte,' facile,1 et, poiir ainsi'dire, dodiestiqiïe, qui n'exige' pas l'appareil d'une procédure ruineuse, et qui nedemande pas d'autres lois que les indications du bon sens : c'est sans doùfe un grand bienfait pour 'des citoyens longtemps dupes des praticiens. On ne verra plus les chemins qui conduisent des villages aux villes, 'couverts de plaideurs, allant consulter des juges faits plutôt pour embrouiller, que pour décider le3 différends. Pour être jhge dë 1 paix, il suffira d'avoir les lumières dë l'ex-périehce et d'un bon jugement, et l'habitude des contestations. Ces jugés seront semblables aux citoyens qui décident aujourd'hui en qualités d'aroitres. La justice sera dégagée des frais qui absorbent lés càpitâux qui Sont l'objet des contestations, dés formes qui obscurcissent-tellement les prodês, que le juge le plus expérimenté ne sait plus qui a tort ou a raison. Cet établissement déchargéra lès autres tribunaux'd'utiè multitude de càuàes qui 16s embarrassaient en ruinant les plaideurs. Pour bien juger de ces avantagés,'il ne suffira pas d'examiner les premières élections; il fàut sedier, il faut protéger la cruè dé la'jëdnè planté;'pour pouvoir ensuite en recueillir1 les fruits. Par les effets salutaires de notrë Constitution, l'agriculture sera plus honorée, ët le séjour des champs plus recherché. Lës Campagnes seront peuplées d'hoinmes de mérite dans tous les geûres. PoUrrà-t-ôn leur confier un posté plus honorable que celuVde juges de paix? Je lé demande à chacun de vbiis : aë retour dans votre département, ne crolriez-vous pas recevoir une grande favedr, si la confiance vous appelait à uhe pièce oh Thdnnête homme pourra fairë tant de bien? Rien n'est plus digne dè l'esprit de popularité de cette Assemblée que cettë institution; mais si les juges de paix n'étaient que' dés médiateurs, ils deviendraient bientôt inutiles : tous leurs efforts n'arrêteraient pas les plaideurs : votre comité vous proposera donc de réunir en eux le double caractère de médiateur
et de juges. Leur décision ne pourra être rejetée que dans les cas d'appel qui seront déterminés par l'Assemblée.
La justice de paix ne doit point être sujette aux rigueurs de la procédure; un règlement très simple en doit faire tout le code; il faut aussi en écarter les formes; parce qu'elle doit être bonne, prompte et exempte de frais : il faut que tout bomme de bien, pour peu qu'il ait d'expérience et d'usage, puisse être élu juge de paix ; il n'aura à prononcer que sur des décisions simples, qu'il pourra juger sans appel, jusqu'à la concurrence de 50 livres, dans les causes personnelles. Le co-r mité a fixé cette somme, parce que, même en supposant un mauvais jugement, les frais d'appel deviendraient plus considérables que le capital de la somme, et qu'il doit être défendu de mettre à une loterie où l'on ne gagne rien, si l'on ne perd pas. Le comité a pensé aussi que les juges de paix pourraient juger jusqu'à la concurrence de 100 livres à la charge de l'appel, parce que, dans le cas d'injustice, le jugement sera ré-formable, et se terminera sommairement au tribunal de district. Voici les articles que nous avons l'honneur de vous présenter :
TITRE II.
Des juges de paix.
« Art. 1er. Il y aura dans chaque canton uu juge de paix, et
des prudhommes assesseurs du juge de paix. »
Déjà le vœu général s'est manifesté pour l'institution des juges de paix ; plusieurs pèuples s'applaudissent de les voir établis ; aussi ne v.iens-je point pour combattre cet établissement, mais seulement les juges de paix avec les modifications que le comité présente. Ou je m'abuse, ou ils ne remplissent pas le but qu'il a eu lui-même en vue ; ils ne sont pas juges de paix, dans l'acception qu'on attache ordinairement à ce mot : dans aucun gouvernement ils ne sont établis tels qu'on nous les propose.
Je sens bien que ce ne serait pas un motif pour les rejeter, s'ils présentaient effectivement les avantages supposés par le comité. Fixons bien nos idées sur la nature de cet établissement. Je soutiens que les juges de paix qu'on vous offre sont des juges contentieux, tandis qu'ils ne devraient être que des juges arbitres et conciliateurs. Ce sont, dis-je, des juges contentieux, auxquels même en donne une grande étendue de pouvoirs, puisqu'ils jugeront toutes les causes personnelles, jusqu'à la valeur de 50 livres sans appel, et à charge d'appel, jusqu'à la valeur de 100 livres. Je dis que ce pouvoir est trop étendu et qu'il peut avoir des suites funestes. Loin de prévenir les procès, vous les multiplieriez. N'oubliez pas que vous avez dans le district une juridiction. L'habitant des campagnes ne s'en trouvera pas éloigné de plus de trois ou quatre lieues. Si vous ne mettez pas une différence entre les juges de district et les juges de paix, vous ne ferez qu'augmenter le nombre des juges, et rejeter peut-être les peuples dans le chaos de l'ancienne procédure. Vous allez créer des espèces de justices seigneuriales. On vous a représenté que le séjour des campagnes deviendrait plus précieux pour les bons citoyens. C'est une raison d'en écarter le trop grandnombre de juges. Ne serait-ce pas aussi une nouvelle surcharge de dépense pour
l'Etat? car tout fonctionnaire public doit être payé. (On s'écrie que non, dans plusieurs parties de la salle.) Si vous ne les payez pas, vous n'en trouverez pas. Qui voudrait aller habiter au milieu d'un canton pour être juge pendant deux ans? Remarquez que je raisonne toujours dans l'hypothèse que les tribunaux de district suffisent pour les affaires contentieuees. J'entends par juge de paix, un homme devant lequel les parties se rendent, et qui cherche à les concilier. Je demande donc que l'Assemblée s'explique, si elle veut avoir des juges contentieux dans les campagnes, ou bien si elle n'y veut que des juges pacificateurs. Cette dernière proposition est l'objet particulier de mes vœux.
Le nom seul de juge de paix a le droit d intéresser : ce mot fait bien au cœur; il fait adorer la justice, et si je voyais passer un de ces hommes destinés à faire le bonheur de ses concitoyens, je serais tenté de lui dire : Je vous salue, homme de paix. Mais cet hommage solennel me fait en ce moment réfléchir sur cet établissement, tel que nous le propose le comité. 11 me paraît qu'on peut attaquer le comité dans ce qu'il a dit et dans ce qu'il n'a pas dit. Il est évident que c'est un premier degré de juridiction qu'il nous propose. 11 y a des malheurs de circonstances; et peut-être serait-il difficile, dans certaines communautés, de trouver un homme capable d'accorder avec justice une permission de saisir ou d'assigner. Sous l'ancien régime, on se plaignait, avec raison, sans doute, des justices seigneuriales, et cependant c'était un gradué qui prononçait. Les juges qu'on nous propose d'établir manqueraient de connaissance, et ne seraient peut-être pas moins accessibles à la corruption. Ils auraient ordinairement, car je ne généralise rien, un avantage de moins et un désavantage de plus; ils seraient dénués d'éducation et plus près du besoin. D'ailleurs, en les établissant, ainsi qu'on vous le propose, vous tomberez dans l'arbitraire, et l'arbitraire même de la vertu est dangereux. On leur permet de juger en dernier ressort jusqu'à 50 livres. Cette somme paraît peut-être faible pour Paris ; mais dans nos provinces, c'est quelque chose, c'est beaucoup pour les villages où la journée de travail est à 10 sous. Je crois donc qu'on attribue une trop grande étendue d'affaires à ces juges, qui ne doivent dominer que sur un petit horizon.
Ne craint-on pas l'influence que les praticiens pourraient avoir dans les campagnes sur ces magistrats sans expérience, qui, le plus souvent, auraient besoin d'un faiseur? Croit-on que les praticiens ne prononceraient pas très souvent? Sur les plus grands théâtres, n'y a-t-il pas des souffleurs? Pourquoi n'y en aurait-il pas sur les petits? Les praticiens seront toujours derrière la toile, et le plaideur un peu avisé pourrait bien abuser de sa force contre ses adversaires. Ce nouveau juge ne serait pas au fait de toutes les chances; on lui ferait des questions embarrassantes qu'il ne pourrait résoudre qu'à l'aide de ceux dont j'ai parlé. On a opposé aux juges seigneuriaux qu'ils étaient privés de cette indépendance qui ne doit jamais reconnaître que la loi ; mais cet inconvénient ne s'augmente-t-il pas lorsqu'on examine les juges que nous propose le comité, puisque leur mission ne doit durer que deux ans? C'est bien pis que d'être soumis à une destitution dont on voyait peu d'exemples. (Ne vous laissez pas séduire par ces établissements qui ont le mérite de la nouveauté, la fraîcheur
de la jeunesse. Croit-on que le ressort de l'honneur conduira toujours ces juges?
Craigne* de multiplier trop ces présidiaux en miniature, dont le nombre est effrayant. En suivant le calcul de votre comité, il faudra 4,980 juges de paix pour les campagnes, et plus de 20,000 pour tout le royaume; si vous ne les payez pas, vous vous exposerez à l'inconvénient incalculable de la négligence. D'après cela, je me bornerai, pour cette session seulement, à établir des juges pacificateurs. Rendre la justice n'est que la seconde dette de la société. Empêcher les procès, c'est la première. Il faut que la société dise aux parties : Pour arriver au temple de la justice, passez par celui de la concorde. J'espère qu'en passant vous transigerez. Je voudrais que les juges de paix fussent autorisés à poser les scellés; cela éviterait le déplacement des juges des tribunaux de districts. Je les autoriserais à faire arrêter un homme trouvé en flagrant délit, à la charge de le renvoyer, dans les 24 heures, devant les juges de districts. On ne peut se familiariser avec l'idée d'un juge qui n'aurait pas le pouvoir de faire arrêter quelqu'un, lorsque le délit se serait, pour ainsi dire, passé sous ses yeux. Je désirerais aussi que les juges de paix exerçassent les fonctions tutélaires, et que les assemblées de familles se tinssent devant eux; je ne leur accorderais pas la moindre compétence en matière réelle, et cela pour abréger la marche de Ja procédure, parce que la partie qui aurait été condamnée, conservant toujours l'espoir d'un second jugement, ne manquerait pas de recourir aux tribunaux de districts.
Voici, en conséquence, le projet de décret que je vous propose. J'adopte les deux premiers articles du comité. .
« Art. 3. Les juges de paix seront autorisés à apposer les scellés en cas de décès et de faillite.
« Art. 4. Ils feront arrêter provisoirement lès malfaiteurs pris en flagrant délit, à la charge de les renvoyer, dans les 24 heures, devant les juges des districts.
« Art. 5. Ils exerceront les fonctions tutélaires, et feront tenir devant eux les assemblées de familles, toutes les fois qu'il s'agira de quelque délibération domestique. »
La qustion n'est pas de savoir si on instituera des juges de paix, mais seulement quelles fonctions on pourra leur attribuer. Un premier opinant a observé que s'ils passaient les termes de conciliation et de simple arbitrage, ils ne seraient plus juges de paix; c'est à cela que je m'arrête, et je crois que cette opinion doit être totalement renversée. A mon sens, si vous établissez des officiers chargés uniquement de conciliation et d'arbitrage, vous manquez absolument votre but. Toutes les fois que la médiation pourra être sans efficacité, toutes les fois que vos juges ne feront qu'inviter les parties à la paix, vous ne remplirez pas l'objet que vous voub proposez. Voulez-vous avoir de véritables juges de paix? donnez-leur une véritable compétence; c'est 'e seul moyen de prévenir les procès, et de retenir dans leurs campagnes ces utiles habitants, obligés d'abandonner leur charrue pour aller suivre des procès dispendieux. Au surplus, je voudrais que cette compétence fût très modique ; qu'ils ne fussent chargés que de prononcer sur des affaires personnelles qui n'excédassent pas 25 livres ; alors vous ferez valoir la médiation : mais, crainte d'erreur, vous abandonnerez le jugement aux tribunaux. En suivant
pas à pas le projet de votre comité, il me semble qu'il est quelquefois allé trop loin. En étendant ainsi la compétence, il est tombé dans les inconvénients qui dénaturent absolument cette institution. Je voudrais que les juges de paix se bornassent à juger des faits locaux sur lesquels les juges de district ne peuvent prononcer avec autant de connaissance de cause. Par exemple,un particulier a causé du dommage dans un champ; qui pourra mieux le constater que ie juge ae paix? Je demande seulement que les juges de paix soient arbitres et juges; qu'ils aient le contentieux sur les choses et non sur les personnes ; enfin qu'ils puissent anéantir tous les procès jusqu'à la concurrence de telle somme qu'il vous plaira fixer, pourvu qu'elle soit modique.
Je demande qu'on ne se borne pas à écouter des avocats ; il faut entendre aussi des laboureurs qui peut-être ont à se plaindre des anciens tribunaux.
Je demande la parole, pour soutenir l'avis du comité. Si, comme le prétendent quelques opininants, on établissait un bureau de concorde qui n'eût aucun droit de juger, ce serait un établissement nul ; les juges de paix doivent juger souverainement jusqu'à 25 livres et jusqu'à 50 livres, sauf l'appel. Quant à leur salaire, je crois qu'il faut leur en accorder un ; mais pour ne pas exciter la cupidité et charger les peuples, il doit être modique.
Si la discussion se continue de cette manière, elle durera jusqu'à demain, sans que nous puissions arriver à Un résultat certain. Quelques-uns prétendent que les juges de paix doivent définitivement jugerjusqu à la concurrence de 50 livres, d'autres jusqu'à 25 livres. Je crois qu'il est une question préliminaire: les juges de paix connaîtront-ils des matières con-tentieuses ?
Les fonctions d'arbitres sont absolument incompatibles avec celles de juges contentieux. Si vous confondez ces deux parties, vous établissez une tyrannie et l'arbitraire le plus terrible et lé plus dangereux : je demande qu'il y ait dans chaque canton un juge de paix et un juge contentieux.
J'appuie l'opinion qui tend à fixer l'état de la délibération. En faisant quelques réflexions préliminaires sur les articles, je n'ai pas prétendu qu'on dût les discuter tous ensemble, et dans le moment même; mais j'ai seulement voulu jeter quelque clarté sur l'ensemble du plan.
On demande la clôture qui est prononcée. L'article 1er proposé par le comité est ensuite mis aux voix et adopté sans changement.
, rapporteur, donne lecture de l'article 2 ainsi conçu :
« S'il y a une ou plusieurs villes dans le canton, ces villes auront un juge de paix et des prud'hommes particuliers; et dans les villes qui contiendront plus de 4,000 âmes, il y aura un juge de paix par deux sections ou divisions d'assemblées primaires. »
l'aîné. On ne peut entendre autre chose par ces mots : juges ae paix, que des juges conciliateurs ; je demande donc qu'il soit décidé
si on les investira d'une juridiction contentieuse, avant de statuer sur leur nombre dans chaque canton.
Vous venez de décréter qu'il y aurait des juges de paix; l'article qu'on vous propose est une suite nécessaire du premier ; mais je pense que le comité n'a point assez examiné les localités ; il y a des cantons dont le chef-lieu est une ville plus petite que certains villages ; il y a beaucoup de villes murées où il n'y a pas plus de 300 habitants, et je crois qu'il serait inutile de mettre dans ces villes un juge de paix particulier. Si l'on établissait ud juge pour la ville et un pour les cantons, il en résulterait que l'habitant de la campagne serait souvent obligé de traverser la viile où il y aurait un juge de paix, pour aller trouver son juge, qui serait à 1 autre extrémité du canton ; je voudrais que dans les villes où il y aura 4,000 âmes, i) fût établi un juge de, paix, et dans celles où il y en aurait 6,000, un par paroisse, de manière cependant que chaque paroisse contienne 3,000 habitants.
Vatné. Je sens bien qu'il y aurait de véritables inconvéhients à obliger l'habitant des campagnes à quitter ses foyers pour aller chercher son juge dans les districts ; mais, sans avoir recours à de nouveaux fonctionnaires publics, nepouvez-vous pas procurer aux habitants des campagnes des juges à leur portée ? Pourquoi né leur donneriez-vous pas pbur juges leurs officiers municipaux ? En vain opposerait-on leur défaut de lumières ou de connaissance des lois ; ils seront nécessairement aussi instruits que ceux qu'on pourrait élire. D'ailleurs, lorsque l'objet n'excède pas 50 livres, il est bien rare que la Maison naturelle ne suffise pas pour juger.
Je demande que l'Assemblée décrète que les juges de paix auront une juridiction contentieuse.
(Cette proposition est adoptée,)
, présente une nouvelle rédaction de l'article 2. Elle est décrétée ainsi qu'il suit :
« Art* 2. S'il y a dans un canton un ou plusieurs bourgs ou villes dont la population excède deux mille habitants, ces villes ou bourgs auront un juge de paix et des prud'hommes particuliers.
« Les vifUes et bourgs qui contiendront plus de huit mille âmes auront le nombre de juges de paix qui sera déterminé par le Corps législatif, d'aprè6 les renseignements qui seront donnés par les assemblées administratives de département. »
(La séance est levée à trois heures.)
Séance du
La séance est ouverte à six heures du soir.
, ex-président, occupe le fauteuil en l'absence de M. de Bonnay, empêché.
(de Nemours), secrétaire, donne lecture du procès-verbal4de la séance du matin.
Plusieurs membres demandent la parole sur ce procès-verbal.
observe qu'à la séance, de ce matin, M. Merceret, curé de Fontaines-lez-Dijon et député du bailliage de Dijon, a donné sa rétractation de la signature qu'il avait apposée à un écrit intitulé : Déclaration, que plusieurs membres de cette Assemblée, mais en très petite minorité, s'étaient permis de signer au sujet du décret rendu le 13 avril dernier, concernant la religion. Il dit que cette rétractation fait l'éloge des sentiments de celui qui l'a donnée et honore, en quelque façon, l'erreur dans laquelle il était tombé. Il demande que, pour rendre la rétractation aussi authentique que la signature a été publique, le nom propre de M. Merceret soit inséré dans la partie du procès-verbal de ce matin, qui renferme sa rétractation.
fait la même observation et la même pétition en faveur de M. de Coul-miers, abbé d'Abbecourt, députêde la vicomtéde Paris, qui donna, à la séance de jeudi soir, 1er juillet, présent mois, sa rétractation de 1a signature qu'il avait pareillement apposée au même écrit.
Ces deux motions mises aux voix, l'Assemblée ordonne que le nom propre de M. de Coulmiers, abbé d'Abbecourt, sera inséré dans le procès-verbal de la séance de jeudi 1er du présent mois, et en tête de sa rétractation; et que celui de M. Merceret le sera pareillement dans le procès-verbal de ce matin.
Le procès-verbal est adopté.
Il est ensuite fait lecture d'une délibération en date du 27 juin 1790, prise par le conseil général de la commune de Marseille, par laquelle cette commune donne sa soumission d'acheter, jusqu'à, concurrence de 16 millions, les biens nationaux situés dans sa ville et sur son territoire.
L'Assemblée ordonne que cette délibération sera remise à son comité d'aliénation des biens nationaux et domaniaux.
L'ordre du jour estîla suite de la discussion du projet de décret sur la fixation des sièges des évêchés et des métropoles.
, rapporteur. Le comité ecclésiastique propose de fixer à Cbâteauroux le siège de l'évèché du département de l'Indre.
Châteauroux a déjà le département; je réclame, pour les autres villes, une part équitable dans les établissements de la Constitution, et je demande que l'évèché soit établi à Issoudun; cette ville possède des églises et des bâtiments qui seront facilement appropriés pour un évêché.
Châteauroux est aussi bien doté qu'Issoudun au point de vue des bâtiments publics ; il est au centre du département, tandis qu'Issouduu est à l'extrémité et fort rapproché de Bourges. (L'avis du comité est mis aux voix et adopté.)
, rapporteur. Le comité propose de fixer le siège de l'évèché du département de la Creuse à Guéret ;
Celui ilu département de la Gironde à Bordeaux ;
Celui du département de la Charente-Inférieure à Saintes;
Celui du département des Landes à Dax.
Ces propositions sont mises aux voix et décrétées.
Le comité Propose la ville de Périgueux comme siège de l'évêché du département de ia Dordogne.
Je viens combattre l'avis de votre comité ecclésiastique et plaider devant votre justice la cause de la ville de iSarlat. Périgueux est important par son Commerce; vous ne pouvez tout lui donner, et je demande que, comme compensation, Sarlat obtienne l'évéché.
demande la parole.
On crie : Aux voix ! aux voix !
(La proposition du comité est adoptée»)
fait décréter ensuite :
« Que le siège de l'évêché du département dès Deux-Sèvres sera fixé à Saint-Maixent ;« Celui de la Haute-Garonne, à Toulouse; « Celui du Gers, àAuch ; « Celui des Basses-Pyrénées, à Oléron; « Celui de l'Ariège, à Pamiers.
Le comité ecclésiastique propose de fixer à Carcassonhe le siège épiscopal du département de l'Aude.
(M. Morin demande, lai parole.)
Plusieurs membres : Aux voix ! aux-voix ! L'avis du comité!
, député de la sénéchaussée de Car-cassonne. J'entends Crier de toutes parts, aux voix! aux voix! Vdvis 'du comité! Vous avez donc résolu de détruire èn une minute des monuments qui existent depuis dix siècles ? Dans l'incertitude où vous êtes, si vous n'allez pas commettre une injustice, vous voulez, en me privant de la parole, empêcher que je vous en fasse connaître toute l'étendue. Je parlerai; vous serez instruits, et vous ne refuserez pas justice à un de vos frères. Je suis seul député de Narbonne et de son vaste diocèse; je suis le seul, de tous les députés de l'Empire réunis dans cette salle, qui connaisse les droits et les besoins de cette 'cité et de ses campagnes : ce titre m'impose le devoir d'être auprè3 de Vous l'organe de leur jùste réclamation. Je demande que le siège épiscopal du département de l'AUde soit fixé à Nar-bonne, et non à Garcassonne, ainsi que le propose votre comité ecclésiastique. Mes moyens sont coUrtset victorieux. La nouvelle organisation du clergé offrira sans doute une des principales sources de la prospérité générale; mais en même temps elle détruit les seuls établissements publies et l'unique moyen de vivification qui reste à Narbonne. tïn clergé riche et nom-"breux versait toutes les années dans cette viHe 7 à 800,000 livres qui, réunies aux productions du sol, suffisaient pour notirtir une population de douze mille âmes. Ces généreux habitants, sacrifiant leurs intérêts au succès de la Constitution, se sont armés les premiers pour la défendre dans une province et dans tfn moment où il fallait de la vertu et du courage pour se, montrer partisans de la liberté que vous établissiez.ilSi Narbonne a déployé tous ses efforts pour le
maintien de votre ouvrage, vous devez ia préserver de l'Injustice où l'expose l'erreur de votre comité. Je ne fixerai pas votre attention sur l'ancienne splendeur de Narbonne : cé qu'on a été n'est plus un titre pour obtenir ce qu'on voudrait être. Vous êtes appelés, non pour conserver, mais pour régénérer.
Pour prouver que Narbonne" doit être le siège dè l'évêché, je ne m'arrêterai qu'aux quatre bases que votre comité a déterminées pour leur établissement : la position centrale, la facilité des communications, la population et les relations commerciales, les établissements formés. Si, comme on va le voir, Narbonne remplit les prin cipales de ces conditions et dans un degré plus éminent que Garcassonne, elle doit rester siège de l'évêché du département. Narbonne a une population de 12,000 âmes, dans une enceinte fortifiée qui en contiendrait 24,000 ; elle jouit d'un canal de navigation et de quatre grandes routes qui ouvrent et facilitent les communications en tous sens ; son commerce de blé, de vin, de miel et autres denrées, attirent dans son sein leshabitants du département qui s'y.Tendent] journellement pour faire leurs ventes et leurs achats : si sa position n'est pas géographiquement centrale, elle n'en est pas moins le centre de toutes les relations commerciales qu'ont entre eux les habitants et surtout les cultivateurs du département : si on jette les yeux sur ses; établissements, on trouve que nulle autre ville n'en a proportionnellement d'aussi beaux et d'aussi durables : ils font l'admiration des étrangers et la gloire de cette antique cité, ma patrie. Ce sont ces monuments précieux que vous allez détruire, en fixant à Carcassonne le siège de l'évêché.
Garcassonne a pour elle un peu plus de population et de centralité ; mais elle n'a pas autant de relations avec lés nombreux habitants du département; elle possède une maison épiscopale qui, à cause de sa forme et de son emplacement, pourrait être vendue avec avantage, tandis que jes établissements qui se trouvent à Narbonne resteraient inutiles ou invendus. Garcassonne n'a pas besoin d'un nouveau secours ; ses manufactures de draps, la richesse de son? sol, sa qualité de chef-lieu du département, lui suffisent sans doute ; je demande donc, autant pour l'avantage du département que pour celui de Narbonne, qu'on utilise les établissements qui se trouvent dans cette dernière ville, en y fixant le siège épiscopal ; par là,on épargnerait descontributions coûteuses et les inconvénients qui résulteraient de cette fixation à Garcassonne. Si l'Assemblée ne donnait pas assez de confiance aux faits que je viens de lui exposer, et hésitait à donner à Narbonne le siège épiscopal, comme je le demande, -je me réduirais à la supplier d'autoriser les électeurs du département de l'Aude à onter entrée Narbonne et Garcassonne, pour la fixation du siège, afin que ce choix soit fait en connaissance de cause, et pour le plus grand avantage du département. Mais je m'aperçois que vous ne voudriez pas renvoyer'à d'autres une justice que voue i pouvez me rendre vous-mêmes. La conduiteque j'ai tenue au milieu de vous, m'a mérité et obtenu votre confiance ; vous n'hésiterez pas sur la vérité des faits et la justice des motifs que je vous ai exposés. Si le comité ou d'autres membres prennent la parole pour me combattre, je la demande pour leur répondre.
(L'avis du comité est rejeté, et le siège de l'évêché du département de l'Aude fixé «rNarbonne.)
, rapporteur, propose de fixer le siège de l'évêché du département de l'Aveyron, à Rodez ;
Celui du Lot, àCahors.
Ces propositions sont adoptées.
Plusieurs villes étaient en concurrence dans le département du Tarn ; après un mûr examen, le comité ecclésiastique vous propose de donner la préférence à Alby.
réclame vivement en faveur de Castres.
met aux voix l'alternative et l'Assemblée décide que le siège du département du Tarn sera fixé à Alby.
Dans le département des Bou-ches-du-Rhône, les villes d'Aix, Arles et Marseille prétendent également à obtenir l'évêché. Le comité vous propose de donner la préférence à la première de ces villes.
demande la parole et parle en faveur de la ville d'Arles qui est le siège d'un archevêché.
fait valoir l'importance de Marseille et les relations suivies qu'elle entretient dans tout le département.
appuie l'avis du comité.
L'Assemblée, consultée, décide que le siège de l'évêché du département des Bouches-du-Rhône est conservé à la ville d'Aix.
Le comité propose de réduire les trois évêchés du département de la Corse à un seul, dont le siège serait à Bastia.
J'observe qu'un seul évêque serait insuffisant pour l'administration spirituelle de l'île qui est séparée du surplus du royaume par un bras de mer qui l'en éloigne de plus de cinquante lieues; elle est d'ailleurs coupée dans toute sa longueur en deux parties égales par une chaîne de montagnes, ce qui rend les communications très difficiles. Je réclame pour l'île l'établissement de trois sièges épiscopaux, dont une métropole placée à Aléria, et il est encore nécessaire que le premier vicaire d'Alêria soit évêque inpartibus, afin qu'en cas de mort ou de démission il y ait un nombre suffisant de prélats pour consacrer le nouvel élu.
Nous n'avons demandé pour nous ni distinction, ni exception ; nous avons conquis la liberté au prix de notre sang ; nous saurons la conserver sous la protection des lois et sous l'influence salutaire de la plus belle Constitution de l'univers. Nous ne vouions pas d'autres lois que les vôtres. Si vous accordiez une exception pour les établissements ecclésiastiques, bientôt on en solliciterait pour l'organisation militaire, pour l'ordre judiciaire, pour la manutention des finances. Nous ne pouvons obtenir aucune exception qui ne soit préjudiciable à notre liberté. Nous n'avons pas la mission de vous demander quatre évêques : si la Corse obtient, comme elle le désire, d'être divisée en deux départements, elle aura deux évêchés. En attendant, je conclus pour l'avis du comité.
pose deux questions :
Première question. Ne sera-t-il accordé qu'un seul évêque au département de la Corse ?
Seconde question. Dans le cas d'un seul évêque accordé au département de la Corse, le siège de l'évêché sera-t-il fixé à Bastia?
Les deux questions mises successivement aux voix, l'Assemblée décrète : « 1° Qu'il n'y aurait « qu'un seul siège épiscopal pour le département « de la Corse ; 2° que ce siège sera fixé à Bastia ».
Le comité ecclésiastique propose de placer à Fréjus le siège épiscopal du Yar.
dit que Grasse ayant une population de 13,000 âmes doit être préférée à Fréjus qui n'est qu'une bourgade et dont la salubrité est fort contestable.
met aux voix la proposition du comité. Elle est adoptée.
Le comité a choisi la ville de Digne pour siège épiscopal du département des Basses-Alpes.
réclame en faveur de Sisteron.
fait valoir les prétentions de Riez.
L'Assemblée adopte Digne, conformément à la proposition de son comité.
Le siège épiscopal du département des Hautes-Alpes nous a paru devoir être établi à Embrun, et nous vous proposons de vous prononcer pour cette ville.
Messieurs, la ville de Gap vient de vous envoyer M. Le Moynier du Bourg, son député extraordinaire, porteur d'un mémoire de la municipalité pour la défense de ses intérêts. Ce mémoire est très court, et je vous demande la permission de vous en donner lecture. Il est ainsi conçu :
« La ville de Gap est en concurrence avec celle d'Embrun pour l'établissement du siège épiscopal dans le département des Hautes-Alpes. Des motifs d'intérêt particulier, relatifs à ces deux villes, ne détermineront pas le choix de l'Assemblée nationale ; c'est l'avantage de tout le département qui sera consulté.
« L'Assemblée nationale a manifesté son intention de placer les établissements publics à la proximité de la majeure partie des peuples. Il est facile de prouver que Gap est absolument le point central pour la réunion des fidèles auprès de leur pasteur commun et la seule ville où l'on puisse établir le siège principal de la religion.
« Le département est divisé en quatre districts, qui, depuis la sommité des Alpes et la frontière du Piémont, s'étendent d'Orient en Occident de la manière et dans l'ordre qui suit : Briançon, Embrun, Gap et Serres.
«Le district de Briançon est composé de vingt-cinq communautés, celui d'Embrun de quarante. Leur réunion présente soixante-cinq communautés.
« Le district de Gap comprend soixante-six communautés, celui de Serres soixante; ces deux districts, dont l'intérêt est ici le même, renferment cent vingt-six communautés. La supériorité de ce nombre est déjà une preuve suffisante de la centralité de Gap. Les observations suivantes la confirment et la démontrent d'une manière plus évidente.
« Le relevé des distances de toutes les communautés, pris collectivement, prouve que la totalité est éloignée d'Embrun de dix-huit cents lieues, tandis que son éloignement de Gap n'est que de douze cent cinquante.
« Sur cent quatre-vingt-douze communautés qui composent le département, cent-trente-huit sont plus près de Gap que d'Embrun, deux à unedis-tance égale, et cinquante et une seulement plus éloignées de la première de ces deux villes.
« Ajoutez à cette différence la facilité des communications, qui doit être une des plus puissances considérations en faveur d'un établissement aussi utile au département que le siège épiscopal.
« On ne peut disconvenir que les routes ouvertes sur Gap dans tous les sens ne soient praticables en tout temps et dans toutes les saisons, tandis que les routes qui conduisent à Embrun sont plus difficiles, principalement en hiver, où la neige apporte des obstacles quelquefois insurmontables. La communication des trois quarts du département avec cette ville est même souvent interrompue par la crue des eaux de la Du-rance et par divers torrents qui s'y jettent.
« La ville de Gap est située dans une plaine agréable et jouit d'un climat très tempéré; celle d'Embrun, située sur un rocher, sous un climat plus rigoureux, est confinée presque au fond des Alpes et rapprochée des frontières du Piémont.
« Non seulement aucun motif de bien public ne milite en faveur de cette dernière ville, mais elle n'a pas les caractères particuliers qu'exige un établissement épiscopal. Trois mille âmes forment toute sa population et il est difficile de concevoir quelle serait l'occupation de douze vicaires exerçant, sous leur évêque, les fonctions curiales dans une paroisse aussi bornée.
« La population de Gap est de huit mille âmes. Cinq à six mille sont dans la ville; le reste est dispersé dans son territoire qui est très étendu et ne forme avec la ville qu'une seule et même paroisse.
«En vain, la ville d'Embrun cherche à faire valoir, dans un mémoire remis au comité ecclésiastique, l'utilité de ses établissements. Il est vrai qu'elle possède un collège, qui jouissait de quelque réputation sous les jésuites ; mais depuis la suppression de cette société, cet établissement a déchu d'une manière bien frappante. La ville de Gap a aussi un collège bâti dans le couvent des Jacobins, en bon état, et régulièrement distribué ; des raisons particulières ont fait transférer les études dans une maison plus commode. Il faut espérer qu'une nouvelle et plus sage administration réformera les erreurs de l'ancienne. Quoi qu'il en soit, on n'a aucune prétention sur le collège d'Embrun.
« Le séminaire de Gap est tel qu'on peut le désirer. Les bâtiments, augmentés depuis peu de temps, sont commodes et spacieux. Il est placé dans le voisinage du palais épiscopal et de l'église cathédrale, dont l'étendue est relative à la population de la ville.
« On allègue l'importance et la valeurdes biens-fonds du chapitre d'Embrun ; mais ces biens-fonds sont rentrés dans les mains de la nation et vont passer dans celles des citoyens qui voudront les acquérir.
«Les égards que demande la ville d'Embrun pour elle, Briançon et Mont-Dauphin, sous le rapport des villes frontières, mériteraient certainement une sérieuse attention, s'il s'agissait de quelque établissement militaire. Ces villes ont toujours
une garnison dont la solde, consommée dans leur enceinte, supplée aux ressources locales qui peuvent leur manquer.
« Toutes les communautés du Haut-Dauphiné, accoutumées à communiquer avec la ville de Gap pour le tribunal de l'élection, continueront facilement cette communication pour les besoins du culte; ce qui, sans doute, a moins d'inconvénient que de forcer le district de Serres, dont une grande partie est située dans un climat chaud, à faire quatorze, seize, dix-huit lieues pour se rendre à Embrun et dans un climat très froid, ouand il faudra recourir au siège épiscopal. Le décret de l'Assemblée nationale qui le fixerait dans cette ville, serait regardé, par les deux tiers du département, comme un arrêt de condamnation qui les priverait de toute relation avec le chef de l'Église. Une disposition si contraire au bien général ne pourrait avoir lieu sans porter le préjudice le plus notable à la religion dont il est si important de conserver les précieux restes dans l'esprit des peuples.
« Ou doit considérer enfin que le département des Hautes-Alpes étant un des plus faibles et des nlus pauvres du royaume, il est à désirer qu'on lui conserve le siège épiscopal qui entraînera le moins de dépenses et qui, par ses rapports et sa situation, exigera d'un peuple agricole moins de sacrifices en déplacements, en frais et en perte de temps.
« D'après cet exposé le district de Gap espère que l'Assemblée nationale, prenant en considération les puissants motifs qui anpuient sa demande, conservera dans la ville de Gap le siège épiscopal que le bien de la religion et l'intérêt public réclament également. »
Plusieurs membres réclament la parole. (On crie : aux voix I aux voix !)
consulte l'Assemblée, qui décrète qu'Embrun sera ie siège de l'évêché du département des Hautes-Alpes.
(La suite de la délibération est ajournée à la séance de demain au matin.)
proclame la liste des membres qui composeront la députation qui doit assister, au nom de l'Assemblée, à la distribution des prix de l'Université, savoir :
MM. Le Pelletier.
Christih.
Bourdon, curé.
D'Estourmel.
Regnard.
Mathieu de Montmorency.
Alexandre de Beauharnais.
De Coulmiers, abbé d'Abbecourt.
Gouttes, curé.
Papin.
Sentelz.
Landreau, curé.
De la Rochefoucauld, card.
Moutier.
Merceret, curé.
La séance est levée à 10 heures du soir.
Séance du
La séance est ouverte à neuf heures du matin.
dit qu'il a porté la veille à la sanction l'état suivant des décrets :
Du
Décret qui enjoint au président de se, retirer par devers le roi, pour lui remettre une lettre de la municipalité de Grenoble.
budit jour.
Décret qui autoriseriez officiers municipaux de la commune de Dampierre à imposer la somme de 1,200 livres.
'Dudit jour
Décret qui. autorise les .officiers municipaux d'Arras à emprunter la somme de 30,000 livres.
Dudit jour.
Décret qui autorise les «officiers municipaux de la ville de Dourgne, à imposer la somme de 10,000 livres.
Dudit jour.
Décret portant que tpus lés octrois établis au profit de la ville de Sedan continueront d'être perçus sur tous les habitants, sans distinction pi privilège, et autorise cétte ville à Un emprunt de 40,000 livres.
Dudit jour.
Décret qui pourvoit provisoirement aux réclamations adressées par les officiers, "de iâtna-rine marchande, sur la forme des services auxquels ils sont tenus à bord dés Vaisseaux de guerre.
(de Sain t- ïean-tfÂUgely), secrétaire, lit T'extrait dès adresses suivantes :
Adresses de ïélicitatîbn, adhésion et dévouement des communautés de Gititrey, Molay et la Rochelle.
Adresse du conseil général de la commune de Toulon, qui exprime la plus vive indignation ;
contre la déclaration et pétition, des catholiques de Nîmes. Il voue à l'exécration publique
les auteurs de cette infâme production; enjoint à tous; ceux quj pourraient avoir-des
exemplaires de lfim-j primé, de les apporter à la niunicipalité pbur y ; être
ignominieusement foulés aux pieds, et les! lambeaux épars jetés au feu, et charge son comité]
des recherches de faire à cet égard les perquisi-j
Adresse de la commune d^ Saint-Quentin, du département delà Charente, qui suppjie l'Assemblée! de ne pas se séparer avant d'avoir achevé la Constitution. Elle se soumet d'acquérir tous les biens nationaux situés dans son territoire.
Adresse de la société des amis de la Constitution établie au Mans et affiliée à celle de Paris. ? Adresse des citoyens de la ville de Châtilloo-sur-Loire, qui, par l'organe de leurs députés à la confédération du 14 juillet,présentent à l'Assemblée le tribut de leur admiration et de leur dévouement, et déposent sur l'autel de la patrie les faibles efforts de leurs fortunes languissantes.
Adresse des officiers, municipaux et.de la gardé [nationale de là ville d'Huningue, département du "Haut-Rhin; ils supplient l'Assemblée d'interposer son autorité pour, leur procurer deux cents fUsils avec leurs baïonnettes.
Adresse de la corporation des maîtres cordonniers de la ville d'Orléans, qui supplient 1'As-sembJée d'agréer la réfutation qu'ils , ont faite, en réponse à la déclaralion et pétition des catholiques. de Nîmes, comme une preuve authentique de leur patriotisme éclairé-, Adresse de la. Société royale des sciences de Montpellier, qui 'Compresse de joindre son hommage 'à celui que l'Académie des sciences de Paris ^vec . laquelle elle ne fait qu'un seul ét même Corps, vient de présenter à l'Assemblée.
Adresse des, curés d'Ûrsemont, Crèches ét Orfin, qui déclarent de la manière la plus formelle qu'ils placehtlès.décrets,relatifs à 1;organisation du clergé, à la répartition ét disposition des biens qu'il possédait, au rang des plus sages r^ui ont été rendus par l'Assemblée., qu'ils s'y soumettent de cœur et., d'esprit .ét^ s'engagent' d'insinuér à leurs, paroissiens les mêmes sentiments.
Ajdresèe des électeurs du distric^ d'Alais qui, frappés des troubles qui Ont .régné 'dans la ville de Nîmes et qui, quoique assoupis, péuvént se renouveler, supplient rAssemblée de vbuloir bien prendre les mesurés nécessaires pour transférer ailleurs qu'à Nîmes le corps administratif du département au Gard, ï Adresses,.,des admin^strateiirs dés' districts de Mé.ude, d'îssoudun , de Quimper et ,ab Màr-vejojs. ... . ; , . ,,
Adresse de l'assemblée électorale du département dès Bouchés-dU-Rhône.
Toutes ces assemblées consacrent les premiers moments de léur formation à,;exprimer avec énergie ies sentiments d'admiration, de reconnaissance et de dévouemeritvdori t èllés sont pénétrées pour l'assemblée nationale. Lès administrateurs du district de Quimpér et les électeurs du département dçs Bpucheç-du-Rhône manifestent surtout leur improbatiqi}. de la déclaration d^une partie de. l'Assénibiée, ainsi que de. tous âutè'es écrits, qui tendent à affaiblir le respect et la confiance dus à ses décrets. ...... ,
Adresse de la ville de Manosquei département des Basses-Alpes, qui se soumet d'acquérir tous les biens nationaux situés dans son territoire.
Extrait du procès-verbal de la prestation du serment civique du cantonnement de Connicy, département de la Marne, district de Reims, et du
discours du curé d'ïïermonville, qui exprime les sentiments lés plus estimables, son adhésion aux décrets de l'Assemblée hàtionale, lés plus touchantes exhortations à la soumission, à la confiance et à la paix. L'Assemblée nationale, en applaudissant au patriotisme de ce ministre des "autels, a ordonné qu'il en serait fait une mention honorable dans soh procès-verbal.
Adhésion à tous les décrets de l'Assemblée nationale, de la part de la municipalité de Cisoing, département du Nord, district de Lille. Elle demande de faire l'achat de tous les biens appartenant à l'abbaye de Cisoing, qui sont situés sur l'éntendue de ladite municipalité.
, membre du comité des finances, après avoir exposé les besoins urgents de la ville de Louviers et de là commune de Saint-Porquier, propose deux projets de décrets portant autorisation d'un emprunt pour Louviers, avec une imposition pour la rembourser, et la même mesure pour Saint-Porquier.
L'Assemblée nationale adopte les deux décrets en ces termes :
« L'Assemblée nationale, Sur le rapport de son comité des finances, autorise les officiers municipaux de la ville de Louviers à imposer la somme de 20;D00 livres, en quatre ans, sur tous ceux qui payent au-dessus de 8 livres de toutes impositions directes et indirectes, laquelle somme sera eniployée'à rembourser celle de 3,000 livres, due à ceux qui ont fait des avances pour l'atelier de charité, et le surplus à des travaux publics, notamment à l'embranchement qui, depuis Louviers, communique à la route de Paris, sur la distance d'une lieue ; et jusqu'au recouvrement de ladite somme, autorise lesdits officiers municipaux à faire l'emprunt du tout ou d'une par-tie ; le tout conformément à la délibération des officiers municipaux et notables du 25 juin 1790, au surplus, à charge de rendre compte.
« Ouï le rapport du comité des finances, l'Assemblée nationale autorise les officiërs municipaux de la commune de Saint-Porquier, département de..., à imposer en addition de, rôles, la somme de 800 livres, dont 575 seront em-ployéés au remboursement des emprunts faits pour la subsistance de leurs pauvres, le surplus à continuer leur atelier de charité, le tout conformément à la délibération du 8 juin, confir-mative de celle du 7 avril, et à charge de rendre compte.
rend compte à l'Assemblée des différentes demandes qui lui ont été présentées'pour admettre à la séance du soir, des députations à la barre ; elle approuve ïés mesures prises à cet égard.
ajoute qùe parmi les'députés à la fédération, plusieurs ont atiSsi demandé à être admis à la barre.
Plusieurs membres observent que cette admission occuperait plusieurs séànces destinées à des travaux pressants ; et pour concilier leur accélération^ avéclé désir qu'a l'Assemblée d'accueillir les citoyens qui arrivent auprès d'elle de toutes les parties de l'Empire, elle rend le décret suivant :
L'Assemblée nationale, regrettànt de ne pou-voir, d'après la multiplicité de ses travaux, admettre chaque députation particulière des différents corps qui envoient des députés à la fédération du 14 juillet, déclaré qu'elle ae recevra :
Qu'une seule députation au nom de toutes les gardés nationales ae France ;
Une au nom de toutes les troupes de ligne à pied ;
Une au nom de toutes les troupes à cheval ;
Et une, au nom des différents corps réunis "de la marine royale ét marchande.
Elle ordonne que le décret sera impririié, affiché et envoyé au bureau de la. vérification des pouvoirs des députés à la fédération.
L'ordre du jour est la suite de la discussion du décret sur la fixation des sièges des évêàhès et des métropoles.
, rapporteur. Le comité ecclésiastique propose de fixér à ValenCe le chéf-jieu du département de la Drôme.
'(Cette proposition est adoptée.)
Le comité propose de décréter que le .siège lépiscopal du département du Gard sera fixé à Nîmes.
demande la pàrole et fait valoir les avantages qu'il y aurait à donner la préférence à la ville d'Alais.
soutient au contraire que l'évêché doit être donservé à là ville'd'Ûzès.
On va aux voix et l'Assemblée décide que le siège de l'évêché du dépàrtement du Gard séra à Nîmes.
Dans le département de l'Hérault, il y a ciiitr évêchés : Lodève, Saint-Pons, Agde, Béziers et Montpellièr. Les prétentions des trois premières villes ne supportent pas un long examen; les déux dernières restent donc en concurrence et bous5vous proposons de donner l'avantage à Montpellier.
et autres députés de la sénéchaussée de Béziers réclament en faveur de cette ville'et allèguent queles mêmes ràîéons quront détérimrié l'Âss'etnbiée à dônnér la pré-fërénce'à la'ville de Bàyeux' sur celle de Lisieux, militent en faveur de Béziers.
Après avoir èhtëndu lés députés dés deux villes, l'Assemblée d,éci;de que le siège' épiscopai du dé-' pàrtement de l'Héràult sera fixé à 'Béziers.
Les viîlès de Vienne ét (le Grenoble Ont des prétentions à posséder le siège de l'évêché du département de l'Isère. Le comité s'est déterminé en faveur de Grenoble.
réplame en faveur de Vienne, le plus ancien siège'dës Gaules.
L'avis du comité est adopté.
Plusieurs villes, et notamment celles de Ghâlôn, Autuh et'Mâcon, Se disputent dans le département de Saône-et-Loire, le siège épiscopal. Le Comité s'est déterminé'en faveur de la ville d'Autun.
présente des réclamations pour Ghâlon.
les combàt.
, député de Mcon, sbutfëàt l'avis du comité et réclame pour Mâcon, en cas que cet avis ne soit point aaôpté.
On va aux voix sur l'avis du comité. La pre- Imière épreuve parait douteuse. On passe à une ! seconde épreuve contre laquelle ce doute est ; encore présenté.
prononce que la ville d'Autun est le siège épiscopal du département de Saône-et-Loire.
Le comité m'a chargé de vous proposer d'adopter l'article suivant :
L'Assemblée nationale décrète que tous les autres évêchés existants dans les 83 départements du royaume et qui ne sont pas nommément compris dans les articles précédents, demeurent supprimés. »
Cet article est mis aux voix et décrété.
On demande le renvoi à une autre séance de la partie du décret concernant les métropoles.
Le renvoi est prononcé.
M. de Menou demande la parole pour une motion relative à la fédération, mais comme elle n'a pas été mise à l'ordre du jour, je n'ai pas voulu l'autoriser à monter à la tribune sans l'aveu de l'Assemblée.
(L'Assemblée décide que M. de Menou sera entendu.)
Danstoutes les parties duroyaume où ont eu lieu des fédérations particulières, on a senti la nécessité d'établir l'ordre parmi les confédérés, et de nommer un chef pour les commander. Le rassemblement de toutes les gardes nationales du royaume, qui aura lieu le 14 juillet, et qui va lier, d'une manière indissoluble, les différentes sections de la force publique, exige le même ordre et les mêmes précautions. D'après l'empressement qui anime tous les bons citoyens, il paraît que le nombre des députés à cette auguste cérémonie, sera au moins de trente-cinq mille. Il est nécessaire d'éviter les inconvénients pour qu'on puisse se livrer sans danger à tout l'enthousiasme de la liberté. Déjà vous avez pénétré mes idées, déjà vous avez désigné le chef de cette fête civique ; peut-il en exister un autre que celui qui s'est mis à la tête de la Révolution, et que nous avons proclamé le restaurateur de la liberté française ? Si les citoyens ont joui du droit de nommer les chefs de toutes les fédérations qui ont eu lieu, les représentants de la nation réclament aujourd'hui cette prérogative, et je vous propose de décréter que le roi est le chef ae la fédération qui doit avoir lieu entre les gardes nationales et les troupes réglées, et qu'il désignera les officiers qui seront chargés de les conduire sous ses ordres.
demande la question préalable.
Cet objet a fait la matière d'une discussion fort longue entre le comité de Constitution et les députés de la commune de Paris. En conséquence, je demande qu'il ne soit rien statué jusqu'à ce que le comité ait fait son rapport.
(L'Assemblée décide qu'elle passera à son ordre du jour.)
L'ordre du jour est la suite de la discussion du nouveau projet sur Vordre judiciaire. Titre II. Des juges de paix.
Le temps qui vient d'être em-
ployé à des objets particuliers nous fait un devoir d'accélérer l'importante délibération qui vous est soumise ; en conséquence, je vais vous faire lecture de l'article 3 :
« Le juge de paix ne pourra être choisi que parmi les citoyens éligibles aux administrations de département et de district, âgés de 30 ans accomplis, sans autre condition d'éligibilité. »
Je pense qu'il serait convenable de fixer l'âge de 40 ans, au lieu de celui de 30. S'il n'y avait que des causes légères qui dussent être soumises au juge de paix, je ne ferais pas de réclamation; mais il y a des causes de la dernière importance, et qui demandent la plus grande prudence dans les décisions. Ne méconnaissez pas cette sage législation, qui accorde aux anciens le droit de juger. Comment ceux qui n'auraient jamais participé aux affaires pourraient-ils, sur une instruction rapide, rendre des décisions qui portassent la paix dans les familles, et assurassent la propriété des citoyens ? ( On applaudit dans une grande partie de la salle.)
ll y a, sans doute, de la témérité à combattre une opinion qui vient d'avoir tant de succès. Je suis bien convaincu qu'il ne faut admettre aux places que des hommes capables de les remplir ; mais ces conditions ne peuvent-elles se rencontrer que dans les personnes qui sont âgées de 40 ans ? c'est là ce qui est en question. En prenant des exemples dans le sein de cette Assemblée, ne trouvons-nous pas plusieurs de nos collègues qui n'ont pas cet âge, et qui cependant nous ont étonnés, non seulement par leur éloquence, mais encore par leur prudence et leur sagesse? Ceux qui sont destinés à servir leur patrie par leurs connaissances et leurs lumières, les ont presque toujours acquises à 30 ans ; au reste, je m'en rapporte à la sagesse de l'Assemblée.
On veut faire entendre que l'homme qui aura passé 30 ans à cultiver ses terres, ne sera pas un bon juge de paix ; mais celui qui pendant 40 ans aura été occupé à la suite de ses affaires, sera-t-il beaucoup plus capable de remplir ces fonctions ? Il est question d'une institution nouvelle : aucun citoyen, si vous en exceptez les légistes, n'est préparé, et je crois qu'il sera plus facile encore de se ployer au régime de cette institution à 30 ans qu'à 40. Il a été reconnu chez tous les peuples que la force de la raison arrive à l'âge de 25 ans.
Chez les anciens, on choisissait les vieillards pour juger les différends ; une magistrature pareille a celles des juges de paix exige une longue expérience. Cette raison me ferait adopter l'amendement proposé par M. Fréteau.
On a tort de craindre l'inexpérience d'un homme de 30 ans. Le choix des peuples tombera sur des hqmmes capables, sur des hommes qui, appliqués dès leur tendre jeunesse à l'étude des sciences, vont refluer dans les campagnes; voilà ceux qu'on choisira et qu'on propose cependant d'exclure.
La faveur assez générale que vient d'éprouver l'opinion de M. Fréteau, m'engage à ne pas m'y opposer. Cependant, mon avis particulier ne changera point. Prétendre que les choix seront meilleurs, si on n'admet que des
gens de 40 ans, ce n'est là qu'une probabilité; mais en décrétant ce principe, il est bien certain que vous vous privez de tous les hommes instruits depuis 30 ans jusqu'à 40. Je vous laisse à juger de quel côté est l'avantage.
(L'amendement de M. Fréteau est rejeté et l'article est adopté comme ci-dessus.)
Les amendements qui ont été faits, dans la séance d'hier, à l'article 2, nous ont forcés de changer la rédaction de l'article 4, dont je vais vous donner lecture :
c Art. 4. Le juge de paix sera élu au scrutin individuel et à la pluralité absolue des suffrages, par les citoyens actifs réunis en assemblées primaires: s'il y a plusieurs assemblées primaires dans le canton, le recensement de leurs scrutins particuliers sera fait en commun par des commissaires de chaque assemblée. Il en sera de même dans les villes au-dessus de 8,000 âmes à l'égard des sections qui concourront à la nomination des juges de paix. »
L'article 4 est adopté sans discussion, ainsi que l'article 5 qui est ainsi conçu :
« Art. 5. Une expédition de l'acte de nomination du juge de paix sera envoyée et déposée au greffe du tribunal du district. L'acte de nomination et celui du dépôt au greffe tiendront lieu de lettres patentes au juge de paix. »
, rapporteur, donne lecture de l'article 6, qui est ainsi conçu :
• Chaque municipalité du canton nommera, au scrutin de liste et à la pluralité relative, quatre notables destinés à faire les fonctions d'assesseurs du juge de paix. Le juge appellera ceux qui se trouveront les plus voisins du lieu où il aura besoin de leur assistance.
J'ai à faire deux observations importantes. D'abord, je ne crois pas que le choix des notables doive être fait par les municipalités de chaque canton ; au moins devriez-vous faire nommer ces officiers par le conseil général. Les élections doivent se faire indistinctement dans toutes les municipalités, quelle que soit leur étendue. Il me semble qu'il aurait bien mieux valu prendre pour base la population.
Je demande que les notables soient choisis par les mêmes électeurs qui nommeront les juges de paix.
Il y a une foule de paroisses où l'on a choisi tous les individus capables. Y aurait-il de l'inconvénient à décréter que ceux déjà choisis serviront d'assesseurs aux juges de paix?
présente une nouvelle rédaction, ainsi concue :
« Art. 6. Les mêmes électeurs nommeront parmi les citoyens actifs de chaque municipalité, au scrutin de liste et à la pluralité relative, quatre notables destinés à faire les fonctions d'assesseurs du juge de paix ; ce juge appellera ceux qui seront nommés dans la municipalité du lieu où on aura besoin de son assistance).
Cette rédaction est adoptée.
L'article 7 est lu, mis aux voix et adopté sans discussion en ces termes :
« Art. 7. Dans les villes et bourgs dont la population excédera 8,000 âmes, les prud'hommes assesseurs seront nommés en commun par les
sections qui concourront à l'élection d'un juge de paix ; elles recenseront à cet effet leurs scrutins particuliers, comme il est dit en l'article 4 ci-dessus.
Je donne lecture de l'article 8 :
« Art. 8. Les juges de paix et les prud'hommes seront élus pour deux ans et pourront être continués par réélection. »
Je demande qu'il soit pourvu, par un article, au cas d'absence, de maladie ou de suspicion d'un juge de paix.
Il avait paru d'abord au comité que les assesseurs pourraient le remplacer ; mais si l'Assemblée le juge à propos, on fera un article à part.
Sans entrer dans les motifs qui ont pu réduire à deux années le temps pour lequel les juges de paix seront élus, et sans prendre eu considération les motifs qui pourraient engager à proroger ce temps, je crois que c'est de la nature de leurs fonctions que doit dépendre leur durée. La trop grande influence qui résulterait de ces fonctions, déterminera sans doute à en restreindre la durée; mais leur importance et leur utilité doivent engager à donner aux juges une force suffisante pour remplir, suivant 1e vœu de la société, les devoirs qui leur seront imposés. Je demande donc que cet article soit renvoyé au comité, pour nous être présenté lorsque les fonctions des juges auront été déterminées.
Il faut rendre facile le choix des juges. C'est le premier objet des vues du comité. Tel accepte pour deux ans les fonctions de juge de paix, qui les refuserait pour six. En examinant 1e genre de leurs fonctions, le comité n'a pas cru avoir besoin de motifs particuliers pour augmenter leur énergie.
(L'article 8 est adopté.)
L'article 9 est lu en ces termes :
« Le juge de paix, assisté de deux assesseurs, connaîtra avec eux de toutes les causes purement personnelles sans appel, jusqu'à la valeur de 50 livres, et à charge d'appel jusqu'à la valeur de 100 livres; en ce dernier cas, ses jugements seront exécutoires par provision, nonobstant l'appel. Les législatures pourront élever le taux de cette compétence. »
Ici commence une matière digne de votre attention. En attribuant aux juges de paix une juridiction contentieuse, vous avez porté un décret qui doit devenir avantageux aux habitants des campagnes. Si vous considériez l'amour-propre des tribunaux, il faudrait accueillir favorablement les plus légers prétextes de restriction et rétracter, pour ainsi dire, le décret que vous avez rendu, en réduisant jusqu'à la nullité l'exercice de la juridiction que vous avez attribuée aux juges de paix. Il faut régler leur compétence de manière qu'ils jugent toutes les causes qu'ils seront plus en état de décider que les hommes de loi, et celles dont on ne pourrait appeler sans perdre en frais une somme plus considérable que celle qu'on réclamerait. N'examinons pas ce qui restera à faire aux tribunaux de district : ils n'auront toujours que trop d'exercice. Comme l'appel n'est point dû par la Constitution, ne réservons la liberté d'en user qu'à ceux qui auront le moyen d'en courir les chances. On a attaqué
hier la partie du décret qui autdrise les juges de paix à connaître des Causes purement personnelles sans appel, jusqu'à la valeur de 50 livres, et à la charge d'appel, jusqu'à la valeur de 100 livres. On a cherché à réduire leur compétence à 25 livres sans àppel, et à retrancher tout ce qui est à charge d'appel. Un des principaux motifs qu'on a allégués, est que la somme de 50 livres, qui n'est rien pour la capitale, est beaucoup pour les campagnes. C'est précisément à cause de l'insuffisance deis moyens de l'homme qui 'n'est pas riche, que nous avons voulu écarter de lui l'incertitude de l'appel. Je vais rendre ce raisonnement sensible par une hypothèse. Un homme a 100 livres, on lui en demande 50, et il est condamné à lés payer. S'il acquiesce, il lui en reste encore 50. On veut qu'il appelle.'S'il est encore condamné, il a perdu ce qui lui restait, et s'il a gagné, qu'il calcule les frais d'appel, et il trouvera qu il lui manque encore 50 livrés. Il est indubitable que la faculté d'appel est plus funeste qUe favorable. Les législateurs doivent veiller sur les faiblesses et les passions des hommes, ët ne pas laisser entre leurs mains un instrument dangereux dont ils pourraient ne pas faire un bon usage. ToUt le monde désire simplifier la procédure, et cependant on hésite èncdre à adopter le mode que propose le comité. On hésite à retrancher ce second degré de juridiction. Il ne doit êtrè permis de courir cette seconde chance, qu'à ceux dont l'enjeu peUt én supporter la perte.
Il me paraît important de suspendre la décision de cet article, jusqu'à de qu'on ait décrété les premiers articles du titre IV, concérnant les juges d'appel.
l'aîné. II est impossible de rien ajouter à Ce qu'a dit M. le rapporteur, pour prou-Ver que les juges de paix doivent connaître sans appel jusqu'à la valeur de 50 livres; mais, quant à leur compétence à charge d'àppel, il me Semble que, dans le grand intérêt de la tranquillité publique, les plaideurs ne doivent avoir qu'un deferé de juridiction. Je suppose que la valeur de l'onjet pour lequel on plaide, soit de 60 livres ; voulez-vous que, pour un si mince objet, il faille ' subir deux degrés de juridiction'? Selon moi, cette seconde partie du déeret doit être retranchée. Tout ce qu'a dit M. le rapporteur, pour la nécessité d'un tribunal sans appel, se réunit en ma faveur. On a prétendu qu'un premier jugement motivé serait une leçon pour le plaideur, je ne Sais si je me trompe, mais je crois qu'Un premier échec ne le rend pas plus sage. L'amoùr-propre se trouve blessé, et on n'en est que plus acharné à poursuivre sa cause, même avec le plus faible espoir de la gagner. Le juge de district n'étant pas éloigné, on n'aura pas de longs voyages à faire'pour aller chercher la justice. Je demande donc que la compétence des juges de paix, à la charge d'appel, soit retranchée de l'article.
Je demande qu'onconsulte l'Assemblée pour savoir si les juges de paix auront, ou non, une portion de juridiction sujette à l'appel.
Les réflexions que j'ai à proposer rentrent dans celles de M. Pison. Je suis d'avis que les juges de paix n'aient point de juridiction à charge d'appel. Ayant une juridiction contentieuse, il est impossible que les habitants des campagnes soient assez instruits pour pouvoir
faire valoir eux-mêmes leurs raisons. Tout le cortège du palais viendra bientôt s'en mêler. On s'est beaucoup élevé contre un second degré de juridiction; je Sais quels étaient, sous l'ancien régime, les inconvénients : mais aujourd'hui les frais d'appel seront moins considérables, et la justice plus assurée. Quant à l'attribution des causes personnelles sans appel jusqu'à la concurrence de 50 livres, je crois qu'dn est allé trop loin. Cette somme ne laisse pas que d'être considérable pour les habitants de nos provinces pauvres, et particulièrement de la mienne. Je désirerais donc qu'elle fût restreinte à 25 livres seulement, en réservant aux législatures le droit d'élever ce taux. Nous ne connaissons pas l'effet de nos nouvelles institutions. Nous ne pouvons pas nous dissimuler que l'expérience fait beaucoup ; il faut donc 'd'abord aller avec mesure.
Afin de fixer l'état de la délibération et d'avancer dans la discussion, je démande qu'on pose ainsi les questions : Les juges de paix aUroht-ils Une juridiction "sans àppél ? — Dans le cas de l'affirmative, jusqu'à quelle somme pôurrorit-ils prononcer sans appel? —LeUr don-nera-t-on une compétence extràjudiciaire?
Tout le monde est d'accord qu'il faut donner aux juges de paix une compétence sans appel. Je demande donc qu'on.passe à la seconde proposition de M. Chabroud.
Je ne suis point du tout de l'avis que suppose le préopinant. Adopter cette proposition, ce serait prononcer l'abolition du bonheur fet de la liberté dés campagnes. Il n'y a'point de raison de donnër aux juges de paix une attribution souveraine pour aucune somme; c'est beaucoup que 50 livres pour l'indigent qui habite surtout les campagnes. Le raisonnement par lequel on a voulu établir qu'il valait mieux perdre son procès que d'en appeler, est, suivant moi, détestable ; il ne s'agit pas seulement d'un intérêt d'argent, il s'agit de se défendre de l'oppression, et vous ne voulez pas établir l'impossibilité de l'arirêter 1 Si vous réfléchissez à la nature de ces établissements, il sont d'autant plus à craindre, qu'il sont moinsi entourés de l'opinion publique ; au lieu que les tribunaux de district sont en vironnés d'hommes de loi en'état de'Censurer leur conduite. Je ne puis me défendre d'être sensiblement affecté de l'établissement qUi 'doit nous livrer à l'arbitraire, parce que^comme on l'a très bien dit, on'dôit redouter l'arbitraire, même de la vertu.: Il est impossible que des assesseurs au Choix des jugés puissent attirer la confiance : je dis au choix des juges, car l'élection ne sera qu'une forme ; et par l'ascendant que prendront ces hommes, vous verrez bientôt que la réélection même ne sera plus libre. Je conclus à ce que les juges de paix ne puissent connaître d'aucune cause sans appel.
(La première proposition de M. Chabroud est mise aux voix, et l'Assemblée décrète'« que les juges de paix aurontjune compétence sans appel».)
On lit la seconde question :
« Jusqu'à quelle Somme les juges de paix pourront-ils juger sans appel? »
Il me semble que le comité a trop restreint la compétence îles juges de paix, et qu'elle doit être portée jusqu'à 150 livres.
Lorsqu'on vous propose de déter-
miner la compétence à une somme fixe, c'est comme si l'on vous proposaitde renouveler l'ancien système, de vous résigner de nouveau aux abus que vous avez proscrits. Vous exposez le peuple a l'ignorance des juges inférieurs et aux inconvénients d'une mauvaise défense. Cinquante livres sont la valeur de la chaumière du pauvre, le prix de plusieurs années de travaux et de sueurs ; tandis que cette somme est à peine la centième partie du superflu du riche. Le riche et le pauvre, pour cette somme de 50 livres, seraient doncjugéssansappel : il serait peut-être plus juste, si Je pauvre succombait, de lui laisser la faculté d'appeler, et dans le même cas de refuser cette même faculté au riche... La proportion de la valeur relative de telle ou telle somme, pour le riche et pour le pauvre, est très difficile à, saisir... J'ai été membre d'un tribunal : pour une contestation de 6 livres, je le dis avec pudeur, il fallait avancer 100 livres, et dans cette somme tout était pour les huissiers, les procureurs, les avocats, et rien pour les juges. Si l 'on conservait les salaires, il vaudrait mieux, pour le pauvre, abandonner une propriété que de la défendre... L'inégalité des fortunes n'est pas le seul désavantage des pauvres...
(L'Assemblée avait plusieurs fois interrompu l'opinant, en demandant que la discussion lût fermée. Cette demande se renouvelle avec plus d'empressement. — La discussion est fermée.)
Je demande, en amendement, que l'article soit provisoire jusqu'à ce que les départements aient donné leur avis.
L'Assemblée décrété que « les juges de paix jugeront sans appel les causes purement personnelles, jusqu'à 40 livres ».
La discussion s'ouvre sur la question qui suit :
« Les juges de paix auront-ils une compétence à la charge de l'appel? »
Je soutiens la négative. Les juges de paix sont essentiellement conciliateurs. Je maintiens qu'ils ne peuvent avoir aucune juridiction au delà de l'attribution que vous leur avez donnée par une exception de faveur. Le comité est d'avis de les faire juger, sauf l'appel, jusqu'à 100 livres. Mais à quoi bon cet intermédiaire ? Pourquoi ces sortes de causes ne seraient-elles eas portées directement au tribunal de district ? e comité accorde à ces jugements l'exécution provisoire: ce provisoire entraîne la nécessité d'une caution, et les cautions donneront lieu à des querelles fréquentes et à des frais considérables. Je pense donc qu'il ne faut donner aux juges de paix aucune espèce de juridiction avec appel.
En prononçant sur la question générale, telle qu'elle a été posée, il serait possible que beaucoup de membres se décidassent pour la négative ; cependant ils croiront peut-être convenable d'accorder aux juges de paix une compétence à charge d'appel pour certaines matières. Le comité a proposé deux cas. L'article 9 indique les matières mobilières personnelles au-dessus de 50 livres. L'article 10 contient d'autres dispositions, qu'il ne faut pas confondre avec celles de l'article 9, parce que ce dernier article n'a pour objet que des matières dont la valeur est indéterminée. Si vous refusez la compétence à charge d'appel, vous annulez l'attribution donnée aux juges de paix» Ainsi donc, U est important de se renfermer absolument dans l'arti-
de 10. Quel inconvénient y a-t-il à faire prononcer ces juges, à charge d'appel, jusqu'à 100 livres dans les matières mobilières personnelles ? Il n'y en a aucun : on trouve, au contraire, un avantage très réel. Les frais de l'instruction ne seront pas doublés; cette instruction se fera devant le juge de paix avec plus de sûreté et d'exactitude : quel est donc le résultat que se propose le comité? Faire faire, devant le juge de paix, d'une manière exacte et sans frais, l'instruction qui se ferait devant un autre juge avec moins d'exactitude et avec des frais.
Plusieurs personnes demandent la parole.
La discussion est fermée.
L'Assemblée décide que « le juge de paix connaîtra des causes purement personnelles, à charge d'appel, jusqu'à la valeur de 100 livres ».
L'exécution provisoire a paru nécessaire au comité, parce qu'il a pensé qu'elle suffira pour arrêter des appels, qui trop souvent n'ont d autre but que de se soustraire à l'exécution du jugement.
L'Assemblée décrète que « les jugements rendus à charge d'appel, par le juge de paix, seront exécutoires par provision ».
Par la réunion des diverses dispositions qui viennent d'être décrétées, l'article 9 se trouve ainsi rédigé :
« Art. 9. Le juge de paix, assisté de deux assesseurs,connaîtra àvec eux de toutes les causes purement personnelles, sans appel jusqu'à la valeur de 50 livres et à charge d'appel jusqu'à la valeur de 100 livres ; en ce dernier cas, ses jugements seront exécutoires par provision, nonobstant l'appel en donnant caution. »
(L'article 9, ainsi rédigé, est adopté.)'
annonce l'ordre du jour pour la séance de ce soir et celle de demain .
Un de MM. les secrétaires donne lecture, de l'état suivant des décrets acceptés ou sanctionnés par le roi.
Le roi a sanctionné ou accepté :
« 1° Le décret de l'Assemblée nationale du 26 juin, concernant une délibération prise par le conseil d'administration du département de la Haute-Saône, relativement à la disette des grains;
2° Le décret du même jour, concernant l'armée navale ;
« 3° Le décret du 28, pour le payement des impositions de 1789 et 1790;
« 4° Le décret du même jour, relatif aux réclamations de la municipalité et de la garde nationale de Marchiennes, concernant des abatis et ventes de bois ;
« 5° Le décret des 25, 28 et29, sur la vente des domaines nationaux aux particuliers ;
« 6° Le décret du 29, relatif aux oppositions qui auront été faites ès mains du trésorier de l'extraordinaire, ou en celles de tout autre, à l'échange contre des assignats, des billets de la caisse d'escompte, transmip dans les provinces ;
« 7° Le décret du même jour, pour l'entretien de la libre circulation ducaoal de Picardie,, ou de Crozat ;
« 8° Le décret du 30, portant qu'il sera sursis à toute nomination de commandant en chef dans la ville de Versailles;
« 9" Le décret du premier juillet, qui fixe dans
la ville de Châlons-sur-Marne l'assemblée du dé-partememeot de la Marne.
« 10° Le décret du même jour, qui, déclarant que le décret du 30 mars sera exécuté, invite les officiers municipaux de la ville de Montbrison à continuer leurs fonctions:
« 11° Le décret du même jour, qui déclare comme non avenue la procédure commencée à l'occasion de l'incendie des barrières, au mois de juillet 1789;
« 12* Le décret du 2 juillet, portant que les 400 livres payées par la ville de Toul au sieur de l'Epineau, commissaire des guerres, pour son logement, seront encore acquittées pour les arriérés de 1188 et 1789 ;
« 13* Le décret du 3 juillet, sur les difficultés qui se sont élevées entre la nouvelle municipalité de Haguenau et les anciens magistrats de cette ville ;
« 14° Le décret du même jour, qui autorise les Etats du Gambrésis à prêter aux officiers municipaux de la ville et commune de Gambrai, la somme de 64,558 livres 18 sous, pour le remboursement des blés vendus par le sieur Vanlerbergh et Compagnie;
« 15° Le décret du même jour, qui statue ultérieurement sur plusieurs points relatifs au rachat des droits féodaux ;
16e Le décret du 4, qui prescrit la forme du serment à prêter paries députés des gardes nationales, lors de ia fédération du 14 de ce mois;
« 17° Le décret du même jour, pour assurer le transport des poudres et autres munitions tirées des arsenaux ou des fabriques et magasins de la régie des poudre» ;
« 18° Le décret du même jour, concernant les fournitures de sel qui doivent être faites à l'étranger ;
« 19° Le décret du même jour, concernant les délits commis sur les côtes de la Méditerranée, soumise à la domination française ;
« 20° Le décret du même jour, relatif aux dépenses de la fédération, à la vérification des procès-verbaux de nomination des députés, et au soin de veiller, lors de la fédération, à la sûreté et à la tranquillité publiques ;
« 21° Le décret au même jour, qui autorise la caisse d'escompte à verser au Trésor public la somme de 40 millions en ses billets portant promesse d'assignats.
Sa Majesté a en même temps donné des ordres pour l'exécution :
« 1° Du décret du 28 juin, concernant une lettre par laquelle M. Vigier-Sarrasin, président de l'assemblée électorale du département du Gard, exprime le vœu de cette assemblée en faveur de M. Gbabaud, lieutenant-colonel au corps royal du génie, de M. Aubry, capitaine au corps-royal d'artillerie, et de M. de Jonquières, capitaine au régiment de Champagne ;
« 2° Du décret du même jour, qui ordonne que la somme de 6,000 livres, qui reste due à l'entrepreneur de la fabrique des cuirs anglais de Pont-Audemer, sur celle de 150,000 livres, sera incessamment acquittée ;
f 3° Du décret du premier de ce mois, pour faire passer à Tabago des moyens de subsistance et de défense;
« 4° Du décret du même jour, pour remettre au vingt-cinq du présent mois, à commencer les opérations prescrites par les décrets de la division de Paris du 22 juin ;
« 5° Et enfin, du décret du 3, portant que le commandant de l'escadre actuellement en arme-
ment, sera tenu de se rendre à la fédération générale du 14, pour y prêter le serment civique. »
Signé, Champion de CicÉ,
Archevêque de Bordeaux.
Paris, le! juillet 1790.
La séance est levée à 3 heures.
Séance du
La séance est ouverte à six heures du soir.
, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier au soir.
La rédaction n'éprouve aucune réclamation.
Les citoyens de la ville de Tonnerre offrent, en supplément de l'offrande qu'ils ont déjà faite, le don de plusieurs effets d'or et d'argent, renfermés dans deux boîtes qui sont remises au trésorier des dons patriotiques.
, secrétaire, lit l'extrait de différentes adresses présentées à l'Assemblée nationale, ainsi qu'il suit :
Adresse de félicitation, adhésion et dévouement de la municipalité du bourg de Moutier-Saint-Jean.
Adresse du conseil général de la commune de Valence, département de la Drôme, qui improuve les principes inconstitutionnels développés par les prétendus catholiques de Nîmes, dans une déclaration et une pétition par eux adressées aux corporations des arts et métiers de Valence, comme une suite des complots odieux des ennemis de la nation, propres à fomenter la division et la guerre civile dans le royaume ; déclare indignes du nom de Français tous ceux qui, par leurs assemblées, leurs actions, leurs écrits et leurs protestations, chercheraient à affaiblir la confiance et le respect dus aux représentants de la nation; dénonce, en conséquence, à l'Assemblée, les nouvelles déclaration et pétition des prétendus catholiques de Nimes, pour qu'elle en fasse punir les auteurs.
Adresse des commissaires du roi pour la formation du département de l'Eure, qui annoncent qu'ils ont heureusement terminé leurs fonctions, et félicitent l'Assemblée sur le succès de ses travaux.
Adresse des officiers municipaux de la ville de Meulan, qui envoient une délibération de la commune, portant que le 14 du présent mois sera fêté dans cette ville comme à Paris, et que les curés seront invités à célébrer un service solennel d'actions de grâces, en reconnaissance de notre heureuse Révolution, lors duquel il sera chanté et répété par tous les citoyens Domine salvum fac Regem. Ils demandent l'approbation de l'Assemblée.
Adresse de la société des amis de la Constitution de la ville de Saint-Omer, qui s'élève
avec force contre les protestations aux décrets du 13 avril dernier.
Adresse de la garde nationale de la ville de Mortain, qui supplie l'Assemblée d'organiser, le plus tôt possible, les gardes nationales.
Adresse de la commune de Saint-Pons, qui im prouve et désavoue une adresse et délibération de quelques citoyens actifs de cette communauté, du 2 mai dernier, en tout ce qui pourrait être contraire aux décrets de l'Assemblée nationale sanctionnés par le roi.
Adresse de la communauté des tanneurs de la ville de Pont-Audemer, contenant les expressions de la plus vive reconnaissance pour 1 abolition des ; droits qui mettent des entraves au commerce et à l'industrie : elle fait le don patriotique d'une somme de 3,744 livres.
Adresse de M. Marduel, curé et maire d'Ayraines, qui a prononcé au prône de la messe paroissiale un discours aussi noble que touchant, pour engager tous les citoyens à faire un don patriotique. Il a pris l'engagement solennel de verser dans la caisse patriotique une somme de 900 livres.
Adresse de l'assemblée administrative du district de Dijon, qui félicite l'Assemblée nationale sur le désaveu fait par M. Merceret, curé des Fontaines-lez-Dijon, relativement à la déclaration de la minorité de l'Assemblée, et sur le retour de cet honorable membre aux principes régénérateurs qui dirigent le corps constitutif dans ses travaux.
Adresses des assemblées primaires de la ville de Pau en fiéarn, de la ville de Grasse, et de celle de Sisteron en Provence, qui adhérent avec une respectueuse reconnaissance aux décrets de l'Assemblée nationale, et expriment, de la manière la plus forte, leur indignation contre tous ceux qui, par des protestations et des manœuvres, ne cherchent qu'à allumer le feu de la discorde, à armer les citoyens contre les citoyens et à déchirer le cœur paternel de Louis XVI. Elles conjurent les représentants de la nation de ne point se séparer sans avoir fini et perfectionné le grand ouvrage de la Constitution.
Adresses des assemblées électorales du district de Neufcbâteau, de celui de Loudéac, et des administrateurs du district d'Is-sur-Til et de celui de Saint-Florent, qui s'empressent, dès l'instant de leur formation, de présenter à l'Assemblée nationale le tribut de leur admiration et de leur dévouement.
Les électeurs du district de Loudéac supplient l'Assemblée de prendre en considération l'article de la suppression de tous les domaines congéables, qui intéresse essentiellement les habitants des campagnes.
Adresse des volontaires de la première compagnie de Poitiers; il envient le sort de de ceux qui doivent assister à la fédération du 14 juillet.
Adresse de la municipalité de Saint-Brieuc ; elle se soumet d'acquérir des biens nationaux pour la somme de deux millions.
Soumission des officiers municipaux d'Auchi-le-Moine d'acquérir tous les biens nationaux situés dans leur territoire.
Soumission des officiers municipaux et notables de Bonneval d'acquérir tous les biens nationaux situés dans leur territoire, et dépendants de la ci-devant abbaye de Bonneval.
, secrétaire. J'ai trouvé parmi les adresses une lettre dont je vous demande la permission de vous lire un extrait :
« Messieurs,
« J'ai lu dans les feuilles publiques du 19 du mois dernier que M. l'abbé Maury avait fait une sortie contre le ministre des finances et qu'il avait annoncé une réticence de 600 millions dans ses comptes. Dans le cas où il ne pourrait pas fournir la preuve de ce qu'il a avancé, je l'offre et j'ajoute que je pourrai en donner de plus positives que lui. Si ces preuves restaient sans effet, je demanderais que vous voulussiez nommer des commissaires fermes et inaltérables, associer à leurs travaux des citoyens en état de prouver les faits importants ; et alors l'Assemblée nationale ne jugerait que sur des pièces probantes.
« Signé : Colmar, avocat, auteur de différents ouvrages sur l'économie politique. »
Vous connaissez tout le zèle, l'activité et les intentions de votre comité des pensions. Je demande que cette affaire lui soit renvoyée.
(de Saint-Jean-d Angely). Toutes les fois qu'on foit à l'Assemblée nationale un appel de-cette nature, elle ne peut garder le silence. Il faut qu'elle cherche des preuves d'une pareille dénonciation ou qu'elle établisse qu'elle est mal fondée, autrement la nation pourrait la taxer de négligence et le ministre dénoncé d'injustice. Je propose le renvoi au comité des finances comme le seul dépositaire des pièces qui puissent servir à constater les faits. Au reste, 1 exactitude et la sévérité connue du comité des pensions peuvent être utiles en cette affaire et l'on pourrait prendre quatre commissaires dans chacun d'eux.
(de Nemours). Cette affaire ne concerne que les finances et le comité des pensions n'a rien à y voir.
Il me semble que l'Assemblée s'émeut pour bien peu de chose et il suffirait du premier étranger venu pour suspendre vos délibérations. M. Colmar dénonce, mais ne prouve pas ; je demande que son dire soit accompagné des preuves ou qu'il n'en soit pas tenu compte.
Ni le comité des finances, ni celui des pensions ne doivent être chargés de cette affaire parce que cela les détournerait de leurs occupations. Si vous voulez prendre la dénonciation au sérieux, nommez des commissaires spéciaux.
consulte l'Assemblée qui renvoie la dénonciation au comité des finances en le chargeant d'en donner avis au premier ministre des finances. (Voy. séance du 21 juillet, la dénonciation de M. Colmar).
, député du département des Ar-dennes, rend compte d'une adresse de l'assemblée du département des Ardennes, et demande que l'Assemblée nationale approuve deux déli-
bérations de l'assemblée de ce département, dont l'une autorise les habitants du ci-devant duché de Bouillon à se pourvoir des blés nécessaires à sa subsistance sur le marché de la ville de Sedan ; l'autre autorise les habitants des villages de Rohan, Membre, Burimont et Pussumurgi, pays de Luxembourg, à se pourvoir sur le marché de Charleville.
(L'Assemblée renvoie cette motion au comité des ^apports, pour lui en rendre compte à la séance du soir, samedi prochain.)
M. Lavigne est admis à la barre, à la tête d'une députation des anciens électeurs de la ville de Paris etdit :
« La première députation qu'ait reçue l'Assemblée nationale est celle des électeurs de Paris. Vous venez d'apprendre à la France cè qu'elle devait attendre de. la conduite de ses représentants. Les électeurs furent les premiers qui jurèrent de soutenir les principes de la nouvelle Constitution dans tous les tenips et dans toutes les circonstances. La première assemblée de citoyens, au milieu de laquelle le roi annonça qu'il, était pour la Révolution est celle des électeurs, de Paris,*et les électeurs de Paris ont été assez heureux pour en assurer le triomphe.
« Nous venons prier l'Assemblée nationale de nommer des députés pour assister aux solennelles actions de grâces que nous nous préposons de rendre à l'Être suprême dans l'église bàthé-drale de Paris, le.^3 de ce mois, pour célébrer cet heureux événement. »
leur répond :
« Messieurs,.
« L'Assemblée nationale n'a point publié votre zèle ni votre patriotisme; le sû'cdès de vçs travaux vivra dans l'histoire; et l'acte religieux que vous destinez à consacrer annuellement le retour des Français à la liberté, servira également de témoignage aux cœurs généreux qui veillaient alors sur la destinée de la capitale.
« Une députaiipn de'l'Assemblée nationale se joindra aux électeurs de Paris pour assister au Te Deum que vous avez fixé au 13 de cémofs. La députation des électeurs de Paris peut assister à laséapcede. 1 ÂjsséjGQÈ][èe najtionale. »
Les douze membres dont Wnoms suivent sont nommés pour assister à cétte cérémonie.
MM. Le Chapelier.
Jallet, curé.
Mollet.
Le Goazre de Kervelegan.
Muguet.
De La Rochefoucauld, ci-devant duc.
L'abbé Sieyès.
Liancourt, ci-devant duc.
Dupré.
Périsse.
Briois de Beaumetz.
De Lubersac,' évêque de Chartres.
Les administrateurs du département du Loiret présentent à l'Assemblée rçxpjççssjLon énergique de leur patriotisme et de. leur dévouement à la liberté et à la patrie.
leur répond :
« Messieurs,
«Eu nous honorant de sa confiance, la nation nous, avait imposé de grands devoirs. Elle nous avait demandé sa liberté et son bonheur : npus croyons être parvenus à assurer l'une, et nous
osons dire que tout bon Français aperçoit l'autre dans un avenir prochain.
« L'Assemblée nationale en jouit déjà, quand les représentants partiels des provinces viennent lui apporter les témoignages ae leur adhésion et de leur satisfaction ; elle reçoit avec sensibilité ceux que vous lui adressez, et elle vous permet d'assister à sa séance. »
Les commissaires de la fédération des gardes nationales de la Nièvre manifestent à l'Assemblée des sentiments dignes de la liberté recouvrée par la nation, et de la fête prochaine qui doit cimenter l'égalité et la fraternité qui vont unir tous 1er Français.
leur répond :
« Messieurs,
« L'Assemblée nationale, chargée de donner des lois à la France, a constamment tâché qu'elles n'exprimassent jamais que la volonté générale. Elle s'applaudit quand elle a deviné la pensée des peuples, ou quand la sienne a été prévenue. C'est ainsi que les gardes nationales du département de la Nièvre se sont fédérées : c'est ainsi qu'elles se sont prêté serment, sur les mêmes principes, et presque dans les mêmes expreèsions que l'acte solennel du 14 juillet va consacrer à jamais. L'Assemblée nationale voit avec satisfaction ce concert heureux de sentiments et de patriotisme. Elle vous permet d/assister à sa séance. »
, membre du comité des rapports, rend compte des plaintes formées par les commissaires du départepaent de la Gnarente-lnfé-rieure, çoptre les ci-devant maire et volontaires de Saint-Jean-d'Angely, et propose un projet de décret qui est adopté ainsi qu'il suit :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu son comité des rapports relativement aux faits énoncés dans ia lettre des commissaires du roi au département de la Charente-Inférieure, en date.du 28 juin 1790 ;
« Considérant qu'il importe au maintien de l'ordre public que l'autorité des commissaires du roi soit partout respectée, et qu'il ne soit portée aucun obstacle à l'exécution des opérations importantes dont ils sont chargés, a décrété et décrète :
« Art. 1er. Que le, sieur Goguet, commissaire du roi au
département de la Charente-Inférieure, est autorisé à ne faire procéder à l'élection des
officiers municipaux de Saint-Jean-d'Angely, qu'au moment où l'organisation du district de la
même ville aura été terminée.
« Art. 2. Que ni le sieur Valentin, ni aucunes autres personnes, ne peuvent, sans se rendre coupables, apporter d'obstacles à l'exécution des dispositions arrêtées par ie sieur Goguet ; et que, dans le cas où ce commissaire du roi éprouverait des oppositions ou des violences, il est autorisé à requérir ia force publique, et à faire informer par les voies légales contre les auteurs et fauteurs des troubles*
« Art. 3. Déclare, en outre, l'Assemblée nationale, qu'elle improuve la conduite des volontaires ou canonniers de Saint-Jean-d'Angely envers les commissaires du roi, et qu'elle les rappelle aux obligations que leur imposent la qualité de citoyens, les décrets de l'Assemblée nationale, et le serment qu'ils ont prêté. »
L'ordre du jour est la suite de la discussion du décret sur la fixation des sièges des évêchés et dès métropoles.
, rapporteur, donne lecture des articles 3 et 4 du décret, qui concernent les métropoles.
, réclame une onzième métropole pour la ville de ToUrs qui y a droit par sa position et par son importance.
demande que le titre de métropole soit conservé à Gambray qui y a droit en vertu de ses anciens privilèges, de ses capitulations avec Louis XIV et comme ayant des évêchés suffragants à l'étranger.
Ces amendements sont écartés par la question préalable.
Les articles 3 et 4 présentés par le comité ecclésiastique sont ensuite décrétés en ces termes :
« Art. 3. Le royaume sera divisé en dix arrondissements métropolitains, dont les sièges seront Rouen, Reims, Besançon, Rennes, Paris, Bourges, Bordeaux, Toulouse, Aix et Lyon. Ces métropoles auront la dénomination suivante :
Celle de Rouen sera appelée métropole des Côtes de
la Manche.
Celle de Reims....... métropole du nord-est.
Celle de Besançon......métropole de l'est.
Celle de Rennes.......métropole du nord-ouest
Celle de Paris. . ......métropole de Paris.
Celle de Bourges...... métropole du centre.
Celle de Bordeaux......métropole du sud-ouest
Celle de Toulouse......métropole du sud.
Celle d'Aix......... métropole des Côtes de
Méditerranée.
Celle de Lyon........métropole du sud-est.
« Art. 4. L'arrondissement de la métropole des Côtes de la Manche, comprendra les évêchés des départements de la Seine-Inférieure, du Calvados, de la Manche, de l'Orne, de l'Eure, de l'Oise, de la Somme, du Pas-de-Calais.
« L'arrondissement de la métropole du Nord-Est comprendra les évêchés des départements de la Marne, de la Meuse, de la Meurthe, de la Moselle, des Ardennes, de l'Aisne, du Nord.
« L'arrondissement de la métropole de l'Est comprendra les évêchés des départements du Doubs, du Haut-Rhin, du Bas-Rhin, des Vosges, de la Haute-Saône, de la Haute-Marne, de la Côte-d'Or, du Jura.
« L'arrondissement de la métropole du Nord-Ouest comprendra les évêchés des départements d'Ille-et-Vilaine, des Côtes-du-Nord, du Finistère, du Morbihan, de la Loire-Inférieure, de Maiue-et-Loire, delà Sarthe, de la Mayenne.
« L'arrondissement de la métropole de Paris comprendra les évêchés de Paris, de Seine-et-Oise, d'Eure-et-Loir, du Loiret, de l'Yonne, de l'Aube, de la Seine-et-Marne.
« L'arrondissement de la métropole du Centre comprendra les évêchés des départements du Cher, de Loir-et-Cher, de l'Indre-et-Loire, de la Vienne, de l'Indre, de la Creuse, de l'Allier, de la Nièvre.
« L'arrondissement de la métropole du Sud-Ouest comprendra les évêchés des départements de la Gironde, de la Vendée, de la Cnarente-In-férieure, des Landes, de Lot-et-Garonne, de la Dordogne, de la Corrèze, de la Haute-Vienne, de la Charente et des Deux-Sèvres.
« L'arrondissement de la métropole du Sud comprendra les évêchés des départements de la Haute-Garonne, du Gers, des Basses-Pyrénées, des Hautes-Pyrénées, de l'Ariége, des Pyrénées-
Orientales, de l'Aude, de l'Aveyron, du Lot et du Tarn.
« L'arrondissement de la métropole des côtes de la Méditerranée comprendra les évêchés des départements des Bouches-du-Rhône, de la Corse, du Var, des Basses-Alpes, des Hautes-Alpes, de la Drôme, de la Lozère, du Gard et de l'Hérault.
« L'arrondissement de la métropole du Sud-Est comprendra les évêchés des départements du Rhône-et-Loire, du Puy-de-Dôme, du Cantal, de la Haute-Loire, de i'Ardèche, de l'Isère, de l'Ain et de Saône-et-Loire. »
La tranquillité publique est depuis fort longtemps menacée dans la ville de Soissons. Votre comité des recherches a déjà été saisi de cette affaire ; je demande qu'il examine de nouveau ces diverses pièces qui lui ont été remises, et qu'il vous propose les mesurés qu'il croira nécessaires pour mettre un terme à l'ani-mosité des partis. (Voyez, aux Annexes de la séance, les pièces concernant cette affaire.)
L'Assemblée décide que le comité des recherches rendra compte de l'affaire de Soissons.
L'ordre du jour est la suite de la discussion sur la liberté du commei'ce de llnde.
La question importante, soumise dans ce moment à votre délibération, me paraît pouvoir se réduire à deux termes bien simples :
1° Les retours du commerce de l'Inde auront-ils lieu dans tous les ports du royaume sans restriction, ou bien ne pourront-ils s'effectuer provisoirement que dans un seul port ? 2° ce port unique doit-il être celui de Lorient de préférence à tout autre ? Je vais tâcher d'examiner brièvement ces deux propositions sous les différents points de vue des avantages ou des inconvénients qu'elles peuvent entraîner; et, si je ne me trompe, il me semble que de la discussion dans laquelle je vais entrer découlent tout naturellement les réponses qu'on peut faire au système de ceux qui ont combattu ou qui voudraient combattre le projet de décret qui vous est pré senté parle comité d'agriculture et de commerce, dont j'ai l'honneur d'être membre, auquel j'ai fait part des observations que je viens vous soumettre, et qui m'a autorisé à vous les présenter en son nom ; elles ont aussi obtenu les suffrages de MM. les députés extraordinaires des manufactures et du commerce de France, qui assistaient à la séance du comité. Ce ne sont pas les calculs de l'intérêt ou de l'amour-propre, toujours dangereux, toujours du moins justement suspects, que je viens vous présenter; mais je viens offrir les résultats auxquels m'a fixé la conviction du plus grand avantage ou, pour mieux dire, du moindre détriment national, malgré les efforts de ceux qui cherchent sans cesse à vous persuader des immenses avantages du commerce de l'Inde; qui, pour augmenter l'illusion qu'ils veulent vous faire, vous remettent perpétuellement sous les yeux le tableau d'un commerce qu'ils élèvent subitement à 60 millions par année.
11 ne faut pas se le dissimuler, tant que notre position, dans ces contrées, n'aura pas changé, et peut-être ne devons-nous pas le souhaiter, du moins pour le moment, le commerce de l'Inde ! n'est et ne sera pour la France qu'un commerce 1 désavantageux. C'est ce que n'ont pas craint d'à-
vouer, dans le temps, ceux même qui, avec des connaissances approfondies sur le commerce en général, ont soutenu le plus fortement, dans cette Assemblée, le système de liberté que vous ayez consacré, à l'époque du 3 avril, pour ie commerce de l'Inde. Mais, en rendant ce décret, avez-vous, comme, par un étrange abus des principes, on l'a soutenu devant cette tribune, avez-vous, dis-je, entendu prononcer une liberté indéfinie, soit pour les chargements, soit pour les retours; ou plutôt ne vous êtes-vous pas réservé de statuer sur les modifications qu il vous paraissait juste et nécessaire, pour l'avantage général, d'adopter d'après ce principe de liberté? et n'avez-vous pas vous-mêmes préjugé leur nécessité, en ordonnant que votre comité d'agriculture et de commerce vous présenterait incessamment le projet des dispositions qu'il croirait utile de suivre dans l'article que vous venez de décréter? Que devient, à présent, ce système soutenu, il y a deux jours, devant cette tribune, avec une éloquence encore plus insidieuse que persuasive, que la question était jugée par votre décret du 3 avril ; qu'il n'y avait pas lieu à délibérer sur les propositions de votre comité ; qu'en fait de commerce, le seul bon principe était : laissez tout faire, laissez tout passer ? Adoptez sans modification, sans réserve, de pareils systèmes, et bientôt vous verrez l'avidité mercantile servant l'inconstance et la frivolité nationales, dont la Révolution n'a pas pu nous guérir encore ; vous la verrez, dis-je, inonder vos entrepôts de productions étrangères; vous verrez la légèreté, le goût des choses rares et nouvelles, préférer ces marchandises à celles de nos manufactures nationales, et celles-ci tomber tout à coup dans le discrédit, dans une léthargie qui amènerait, sons peu d'années, leur anéantissement total. Vous n'avez cherché qu'à favoriser nos manufactures, en multipliant les moyens d'échanges, des débouchés de leurs denrées, et leurs relations commerciales dans l'Inde, jusqu'alors exclusivement concentrées dans les mains d'une seule Compagnie.
Et cependant, on vous aurait, par des syllogismes, par de fausses conséquences tirées d'uD principe en lui-même incontestable, amenés au point d'accorder par le fait le même privilège exclusif sur nos arts, notre industrie et nos manufactures nationales, à toute l'Inde, à l'Angleterre votre rivale, propriétaire et dominatrice des 55 centièmes du territoire de l'Inde; àl'Angleterre qui servirait, sans pudeur, sans aucune opposition possible, la contrebande et l'avarice de quelques spéculateurs, indignes du nom français dont ils se parent et d'une liberté qu'ils réclament particulièrement, mais qu'ils n'obtiendront pas sûrement de vous dans cette circonstance, puisqu'ils ne veulent qu'une chose au détriment de tous. J'ai dit sans opposition possible, et je n'ai rien avancé de trop, car ie seul obstacle qu'on puisse opppser à la contrebande, c'est la surveillance , et cette surveillance est impraticable. Or, elle sera ruineuse si, cédant à l'intérêt particulier, qui seul s'est fait entendre devant cette tribune, en opposition avec l'àvis de votre comité, vous déclarez, en vertu du principe de liberté consacré par votre décret du i avril, que les retours pourraient avoir lieu dans tous les ports du royaume ; car il n'y a pas, il ne peut y avoir de terme moyen à prendre dans la question qui s'agite. La liberté que vous avez décrétée est indéfinie ou ne l'est pas ; si elle est indéfinie, il faut que les retours puissent se faire dans tous les ports sans exception ; si, comme l'a pensé presque
unanimement votre comité, il est indispensable d'y apporter des modifications, les premières de toutes sont incontestablement d'assujettir les retours dans un seul port; et ce dernier parti est le seul qui puisse concilier l'avantage général de votre commerce, de vos manufactures, de vos consommations avec l'intérêt particulier des armateurs pour l'Inde; le seul qui puisse compenser ou, pour mieux dire, amoindrir les funestes effets d'un commerce désavantageux, que| votre sagesse vous a déterminés à tolérer comme un mal indispensable. J'ai dit que l'intérêt de votre commerce, de vos manufactures, de vos consommations, exigeait que les retours se fissent dans un seul port, et, pour vous en convaincre, il suffira de vous rappeler en peu de mots comment se font les spéculations pour le commerce de l'Inde. Chaque armateur fait ses expéditions, commande ses retours, suivant qu'il croit que les uns ou les autres pourront lui être le plus avantageux. Il se fixe à une tout au plus ou à quelques-unes des espèces de marchandises qu'on peut rapporter de l'Inde; mais aucun d'eux n'a jamais pensé à former des magasins assortis.
Les acquéreurs de première main n'ont pas, pour satisfaire aux différents goûts et demandes, besoin seulement d'une seule espèce de ces marchandises; il leur en faut plusieurs, quelquefois même de toutes. Supposons un moment l'adoption du système de ceux qui veulent une liberté indéfinie : il résultera sans doute quelquefois dé cette disposition, qu'à Lorient, par exemple, on ne trouvera que des épiceries, à Marseille que desguinées blanches/à Bordeaux que des toiles propres à l'impresssion, au Havre, que des porcelaines, etc. Supposons, au contraire, que chaque armateur d'un port ait isolément combiné ses demandes, de manière que par un effet du hasard, ce port se trouve à peu près assorti de toutes les marchandises de PInde ; alors il n'y en aura là ni trop, ni trop peu... Dans cette supposition, si l'armateur a bien vendu, voilà l'acquéreur de première main ou le consommateur lésé nécessairement; mais si l'armateur n'a pas vendu, parce qu'il a voulu tenir à un prix qu'aucune concurrence à lui connue n'a dû raisonnablement le déterminer à baisser, le voilà victime d'une spéculation que sa position paraissait justifier ; et ce que je suppose pour un seul port, pour un seul armateur, pour un seul acquéreur, peut également s'étendre, par une supposition qui n'est point du tout hors de probabilité, à plusieurs ports, à plusieurs armateurs, à plusieurs acquéreurs, et je trouve dans chacune de ces dispositions des pertes fâcheuses, mais indispensables, que la chance des biens particuliers ne peut balancer dans mon esprit. Si vous admettez, au contraire, le plan de votre comité, je vois tous les inconvénients disparaître, excepté ceux même auxquels ne pare pas l'autre système; en effet, quelles qu'aient été les différentes spéculations de tous les armateurs de l'Inde, elles se trouvent toutes, à certaines époques, réunies au lieu commun de la vente. Là, il sera, comme d'usage et de nécessité pour cette espèce de commerce, procédé à un lotissage, à un assortiment des différentes denrées que chacun des armateurs aura isolément rapportées. Or, connaître au juste la quantité de chacune d'elles, et le besoin de s'en défaire, l'armateur, d'un côté, et l'acheteur d'un autre, ne pourront y mettre d'autre prix que celui de leur abondance ou de leur rareté réeUe ; l'évaluation en sera faite par des gens connaisseurs, et les acquéreurs pourront
traiter en toute sûreté..........................
Pouvez-vous offrir au commerce les mêmes avantages et les mêmes sûretés dans tous les ports du royaume?... Les mêmes difficultés, les mêmes dépenses se présentent, quand il s'agit de jeter les yeux sur la surveillance qu'il faut opposer au versement de contrebande, à l'infidélité des déclarations, à l'inexactitude des évaluations.....Quand je m'arrête aux considérations fiscales, je suis bien éloigné de chercher à les faire valoir par l'importance du produit de l'exacte perception des droits et par la nécessité où l'état de vos finances vous a réduits de faire usage de toutes vos ressources; mais ces entraves mêmes sont destinées à tourner à l'avantage de votre commerce, à en augmenter l'état et l'étendue, et à encourager l'industrie nationale aux dépens du besoin, du luxe et de la frivolité... Il me reste à vous exposer les motifs qui doivent vous déterminer à donner au port de Lorient la préférence sur tout autre pour les retours de l'Inde, et jë ne puis vous en présenter de plus décisifs que ceux qui vous ont été soumis par votre comité. Le port de Lorient, vous a-t-on dit, a des avantages qui lui sont propres : les vaisseaux qui se présentent pour y entrer sont aperçus de plusieurs lieues ; ils doivent passer sous l'île de Groays, résidence d'un poste d'employés, chargé de les signaler et de se rendre immédiatement à bord pour empêcher le versement. La surveillance des employés n'est point partagée dans ce port, et les versements dans les magasins y sont faciles. On peut, quand on le voudra, éviter qu'il ne soit soustrait aucunes marchandises, et y assurer, plus qu'ailleurs, l'embarquement de celles qui sont destinées à être respectées; enfin cette ville offre un mouillage sûr, des magasins vastes, à l'abri des incendies, etc. A ces raisons, nous joindrons l'opinion des députés extraordinaires du commerce et des manufactures qui ont été consultés, et qui, s'ils n'avaient pas pensé que cette disposition fût utile, ne l'auraient pas adoptée. Je demande que la discussion soit-fermée, et je conclus à ce qu'on décrète les articles tels qu'ils sont proposés, par votre comité.
Lorsque vous avez aboli le privilège exclusif de la compagnie des Indes, vous avez fait ce que la raison et vos principes exigeaient de vous, et vous avez voulu rendre au commerce cette liberté précieuse, sans laquelle le commerce n'existe pas. Votre comité paraît avoir méconnu ces principes, et ce n'est pas sans étonnement que je vois proposer, dans le projet de décret, de concentrer exclusivement dans le port de Lorient les retours et les désarmements ae l'Inde, c'est-à-dire de créer un privilège, après avoir détruit les privilèges. Je vais examiner les motifs sur lesquels sont fondées ces étranges propositions : la nécessité de réunir les marchandises venant de l'Inde au port de Lorient, pour la commodité des acheteurs; la possibilité de la fraude, si les déchargements avaient lieu dans les autres ports du royaume. La première considération ne porte absolument que sur l'intérêt particulier et non sur l'intérêt du commerce. Ge n'est point à l'Assemblée nationale de prescrire aux négociants la route que peut commander leur intérêt particulier : cet intérêt suffit pour les conduire ; et il n'est besoin, à cet égard, ni de lois, ni de contrainte. L'intérêt général du commerce, c'est que tous les échanges nécessaires et permis puissent se faire sans limitation, comme sans gêne : voilà le seul principe qui puisse vérita-
blement intéresser la dignité de l'Assemblée nationale et déterminer son autorité ; mais les moyens de mettre ce principe en action, sont du ressort des agents du commerce; elles meilleurs, comme les plus sûrs, ne pourront naître que de la plus parfaite liberté. Ou le privilège des retours de l'Inde, en faveur du port de Lorient, est avantageux, ou indifférent pour le commerce. S'il est indifférent, il est inutile de le décréter : s'il est avantageux, doutez-vous que les armateurs ne s'empressent de prendre d'eux-mêmes cette détermination, et d'effectuer leurs retours dans un entrepôt? et vos décrets pourraient-ils leur rien apprendre à cet égard, que leur intérêt particulier ne leur apprenne bien mieux encore? — Si le projet de votre comité était adopté, que deviendrait la liberté que vous avez rendue au commerce ? La liberté ne consiste-t-elle donc, pour le commerçant, qu'à faire armer son navire dans le port qu'il habite; et voudriez-vous lui enlever l'avantage inappréciable d'en faire opérer le retour sous ses yeux, d'en surveiller le désarmement et de mettre dans cette importante opération les soins et l'économie qui doivent à la fois assurer et accroître les bénéfices de l'entreprise? Vous le forceriez à faire dévirer son bâtiment, soit pour gagner le port privilégié, soit pour regagner le port de désarmement, et à payer des frais énormes de magasinage^ Vous l'obligeriez ou à un déplacement onéreux, ou à payer des droits exorbitants de commission aux négociants de Lorient, pour une opération qu'il aurait pu faire chez lui, et à bien moins de frais ; vous prolongeriez les dépenses de l'armement, et souvent enfin le navire pouvant être retenu par les vents contraires, vous feriez manquer une seconde expédition, dont les matériaux étaient préparés d'avance.
Enfin le privilège d'un port quelconque, le centre du retour d'une branche de commerce, ne serait véritablement qu'un impôt levé sur les agents et sur les consommations du commerce, au profit du port privilégié. Ge régime, aussi vicieux qu'im-politique, a pu exister dans l'ancien ordre de choses ; Û avait été envahi par des compagnies monopoleuses, qui, certaines d'appeler des acheteurs partout où elles jugeaient à propos de se placer, mettaient fort peu de soin à adoucir l'exercice de leurs droits et ne cherchaient, au contraire, qu'à l'aggraver pour décourager les armateurs et pour s'approprier exclusivement les profits de l'industrie et du commerce de l'Inde. Il semble, en examinant ce qui a été dit pour prouver la possibilité de la fraude, que les marchandises de l'Inde soient tes seules qui puissent être l'objet d'une importation prohibée. Mais il en existe une infinité d'autres qui sont aussi frappées de prohibition, qui ne peuvent franchir nos barrières, et qu'une surveillance exacte et sévère écarte de nos côtes et de nos ports. Mettez donc au rang des exagérations, tout ce qu'on vous dit sur la difficulté de percevoir les droits et d'empêcher la fraude. On ne peut abuser, à cet égard, que ceux qui, habitant l'intérieur du royaume, ne connaissent pas les moyens employés sur les côtes, pour surveiller l'importation des objets prohibés. 11 n'y a rien à innover à cet égard : les établissements sont faits, et il ne sera pas plus difficile d'empêcher l'introduction des objets venant de l'Inde, que celle des autres marchandises prohibées. D'ailleurs, j'avoue que dans ce détail fastidieux des précautions à prendre pour assurer la perception des droits, j'ai moins retrouvé les pensées d'un législateur, que les
idées rétrécies d'un agent du fisc; et le rapporteur aurait dû penser qu'il est des moyens plus sûrs, et en même temps plus conformes au régime de la liberté, pour garantir la portion de revenus que doit rendre au Trésor public cette branche importante du commerce français. Je ne me permettrai plus qu'une seule réflexion sur le projet du comité. On vous propose de décréter que les retours se feront provisoirement à Lorient. Mais il me semble qu'en vous proposant un essai en matière de législation, une loi provisoire sur le commerce, le provisoire devrait être en faveur de la liberté, et qu'à cet égard la liberté devrait, dans une assemblée telle que celle-ci, obtenir au moins l'avantage et l'honneur de la priorité. Tout ce qu'on vous a dit sur les inconvénients de la liberté illimitée des retours, n'est au fond qu'un calcul de probabilités, et je n'imagine pas que l'Assemblée nationale se décide, d'après des vraisemblances, à rendre un décret qui aurait certainement l'influence la plus funeste sur une grande Sartie des ports du royaume. En bonne logique, essieurs, ce n'est qu après l'abus que la restriction doit venir, et il est étonnant que votre comité vous ait proposé une loi prohibitive, sans autre base que des alarmes exagérées, et avant d'être averti de sa nécessité par "expérience. Ce sera, si le commerce abuse de la liberté des retours, si la perception des droits est annulée ou affaiblie parla fraude, si vos manufactures souffrent d'un commerce trop vaste et d'une importation trop abondante, qu'on pourra, qu'on devra mettre des entraves au commerce de l'Inde, et en concentrer les retours dans un seul entrepôt, pour surveiller une perception qui se serait évanouie en se divisant sur un trop grand nombre de ports ; mais ne débutez pas par des restrictions odieuses autant qu'impoiitiques : que vos lois prohibitives soient toujours le remède à un mal public,mais ne commencez pas par asservir; c'est la marche du despotisme ; et sous prétexte de parer à des abus qu'il est si facile de prévenir, n'anéantissez pas le commerce que vous devez encourager. Je demande que les retours et les désarmements de l'Inde puissent s'effectuer dans tous les ports du royaume indistinctement.
(1). Messieurs, quand vou3 avez décrété que le commerce au delà du cap de Bonne-Espérance était libre à tous les Français, vous avez tellement entendu vous réserver le droit de régler le régime de ce commerce, que vous avez, dans le moment même, chargé votre comité d'agriculture et de commerce, auquel vous avez adjoint pour cet objet celui des impositions, d'examiner et de vous proposer les formes applicables à ce régime.
C'est ce qu'ont fait, Messieurs, vos deux comités; et ils vous soumettent un projet de
décret renfermant toutes les dispositions qui leur paraissent propres à concilier, autant
qu'il est possible, les intérêts de tous ; à faire fleurir le commerce de l'Inde, sans nuire
essentiellement aux manufactures nationales. Ce n'est pas, je vous l'avoue, sans beaucoup
d'étonnement, que j'ai entendu dire à cette tribune qu'il n'y a pas même à délibérer sur une
des dispositions les plus essentielles de ce projet de décret ; celle du retour des navires
de l'Inde provisoirement forcé à Lorient, parce que, vous a-t-on dit, cette disposition
contrarierait
Pour étayer un tel système, on vous a débité ce fameux principe des économistes, relativement au commerce : laissez faire et laissez passer. Voilà en deux mots, vous a-t-on dit, tout le code du commerce.
Gertes, les administrateurs des nations doivent un tribut éternel de reconnaissance à messieurs les économistes qui ont réduit à des termes aussi simples une science aussi étendue, aussi compliquée que celle du commerce.
Mais ce système, aussi dangereux que séduisant, n'est pas encore adopté par l'Assemblée nationale : il ne l'est pas par la nation qui n'a que trop appris à ses dépens, par l'expérience du traité de commerce avec l'Angleterre, quelle est Ja supériorité d'industrie de cette nation sur la nôtre et combien il est douloureux que les ministres, auteurs de ce traité, n'aient pas mieux connu l'état des manufactures dans les deux pays et n'aient pas été pénétrés, comme ils auraient dû l'être, de la nécessité de connaître et de défendre notre industrie contre une industrie très supérieure. — Car, Messieurs, ce grand axiôme de liberté générale de commerce entre toutes les nations, quia malheureusement séduit tantdephi losophes,tant d'excellents esprits, tant d'hommes vertueux et vrais amis de l'humanité, ne doit pas être considéré d'une manière abstraite ou positive; il n'est vrai ou faux que relativement: il pourrait convenir à telle nation et nullement à telle autre. Le peuple, qui aurait porté son industrie au plus haut degré de perfection en Europe, qui serait en état ne braver la concurrence des artistes et des ouvriers de tous les autres peuples; ce peuple-là, dis-je, et ce peuple-là seul, devrait admettre ce principe général et s'efforcer de le
propager dans tout le reste de l'Europe : l'anéantissement de toutes les barrières serait son triomphe. Ce peuple est peut-être l'Anglais; — à coup sûr ce n'est encore point leFrançais. Car il n'est presque aucune branche de notre industrie qui ne soit rivalisée ou surpassée par quelqu'autre nation ; et l'Angleterre même, qui, certes, en fait de commerce nous offre un grand modèle et des leçons consacrées au moins par de longs et brillants succès, l'Angleterre, dis-je, quoiqu'elle nous soit si supérieure en industrie, nous donne encore l'exemple des mesures les plus sévères pour défendre sa main-d'œuvre et son travail contre toute concurrence étrangère.
On vous a dit qu'il ne fallait pas gêner, entraver vos négociants, qu'ils doivent jouir de toute liberté dans leurs opérations, qu'elles n'en seront que plus fructueuses pour l'Etat, qu'ils sont toujours les meilleurs juges de ce qui leur convient.
Personne, Messieurs, n'est plus disposé que moi à rendre hommage à ces principes, quand ils sont renfermés dans leurs justes limites, mais il serait très dangereux de les en tirer et de les porter au delà. Ce serait en abuser au grand détriment de la chose publique. Ainsi, je disque le gouvernement doit proscrire ou limiter ou modifier tout trafic, toute branche de commerce qui pourrait être nuisible à l'intérêt général ; il est donc de son devoir d'imposer aux négociants des règles et des lois pour l'avantage de la nation. — Mais quand il a posé ces règles et ces lois générales conservatrices de l'intérêt social, il doit laisser à ses négociants, tant qu'ils ne les transgressent pas, toute facilité, toute liberté dans leurs opérations. Car toute gêne, toute entrave qui n'est pas commandée par l'utilité, par l'intérêt général, est non seulement injuste, mais encore dommageable pour la chose pu blique, puisque tout ce qu'elle coûte au commerçant soit en frais soit en perte réelle, soit en diminution de bénéfice, retombe en eutier sur la nation même. M. de Mirabeau, j'en conviens, a reconnu ce principe, car en réclamant la liberté du retour des marchandises de l'Inde dans tous les ports, il a dit que la liberté en général consistait à pouvoir faire ce qui ne nuit point aux autres. Il a ajouté que cette liberté ne peut être restreinte que par 1 intérêt social. Ainsi, j'aurai répondu à M. de Mirabeau, si je prouve qu'un grand intérêt social, celui de nos manufactures, s'oppose à cette liberté. — Ce n'est point certainement par prédilection pour le port de Lorient, qui m'est étranger, que j'emhrasse l'opinion du retour provisoire dans ce port qui vous est proposé par votre comité. — Ce n'est point un privilège en faveur de Lorient, dont il est ici question ; il ne s'agit d'autre chose que du moyen de rendre le commerce de l'Inde, dont nous ne pouvons nous passer, le moins dommageable à la nation qu'il est possible.
C'est pour cela que votre comité vous propose un tarif d'impositions qui me parait, en général, propre à remplir ces vues, en s'écartant également de tout excès qui, d'une part, pourrait exciter la cupidité des fraudeurs, ou, de l'autre, mettre les marchandises de l'Inde trop à portée des consommateurs nationaux, trop en rivalité avec nos propres manufactures.
C'est pour cela qu'il vous propose quelques prohibitions qui lui ont paru nécessaires, telles entre autres que celles des étoffes de soie et toiles peintes, prohibitions dont la convenance ne peut être révoquée en doute par ceux qui savent que nos fabriques ne peuvent, pour ces objets de luxe,
souffrir aucune concurrence avec celles de l'Inde.
Enfin c'est pour cela qu'il vous propose de décréter que les retours et désarmements ne pourront avoir lieu provisoirement que dans le seul port de Lorient.—C'est l'article 4 du projet; c'est cette disposition qui, jusqu'à présent, a éprouvé la plus forte contradiction ; c'est, par cette raison, celle que je m'attacherai le plus à soutenir, parce que je la crois convenable dans les circonstances, et la mieux adoptée à l'état actuel de notre navigation et commerce dans l'Inde, et de nos manufactures nationales.
Quand vous avez décrété, Messieurs, la liberté du commerce de l'Inde, vous l'avez fait avec la ferme résolution de défendre, autant qu'il serait en vous, la main-d'œuvre nationale, de la protéger contre tous les dangers/tous les abus qu'on pourrait faire du commerce de l'Inde. — Votre comité, pénétré des mêmes vues patriotiques, a rédigé un tarif qui me paraît très bien calculé pour cet effet ; mais il est évident qu'il ne le remplirait pas, si ces dispositions pouvaient être aisément éludées par la fraude, et la fraude en ce genre me paraît impossible à prévenir, si les retours de l'Inde s'effectuent dans des ports où on ne puisse espérer de lui opposer avec succès des précautions suffisantes.
Je crois qu'à cet égard aucun port ne présente autant de facilités que Lorient pour faire ce commerce et pour y surveiller la fraude.
Je m'abstiendrai, Messieurs, de vous décrire tous les avantages de situation de Lorient, parce que cette tâche a été très bien remplie par plusieurs des préopinants.
Opposez, jevous prie, à cette situation celle des ports de rivières, tels que Nantes, Bordeaux et autres, et vous sentirez les immenses facilités qu'ils présentent aux versements frauduleux sur les deux rives avant de parvenir au port. — Les ports francs présentent des dangers bien plus grands encore, et comme Marseille, entre tous les ports francs, est sans contredit le plus important, et que c'est en même temps celui qui ambitionne le plus la faculté générale du retour des bâtiments, je dois vous exposer une partie des inconvénients que j'y aperçois.
Toute marchandise étrangère dont la consommation dans le royaume n'est pas prohibée, est, à peu d'exceptions près (1), importée en franchise à Marseille ; ainsi les matières premières, les drogueries et épiceries et les ouvrages vernis de même nature que ceux de l'Inde ne doivent aucun droit en venant de l'étranger à Marseille, mais aussi, par une conséquence bien juste, les mêmes objets passant de Marseille dans le royaume sont traités comme étrangers.
Remarquez cependant,Messieurs^ que lesbours et les toiles peintes du Levant, quoique
prohibées à l'entrée du royaume, sont admises à Marseille pour sa consommation et celle de
son territoire, et que, nonobstant la prohibition des toiles de coton étrangères, celles du
Levant peuvent non seulement entrer à Marseille en franchise, mais encore passer dans le
royaume en acquittant au bureau de Septèmes, 37 livres 10 sols par quintal, au lieu de 50
livres que votre comité vous propose de faire payer aux toiles de coton de l'Inde, vendues
par le commerce français.
En effet, si lors de l'arrivée dans ce port d'un navire de l'Inde ou dé Chine, il s'y trouvait un autre bâtiment chargé de productions étrangères de même espèce, comme canelle, girofle, muscade, thé, poivre, rhubarbe, ouvrages vernis, il suffirait de verser ces marchandises du bâtiment étranger dans le bâtiment indien, pour franchir (lors de l'expédition pour l'intérieur du royaume) la différence toujours considérable qui existera entre la production importée par l'étranger et celle apportée par le commerce français, au delà du Cap de Bonne-Espérance ; différence qui, suivant le tarif général qui vous sera proposé par votre comité, devra être de 80 livres sur les poivres, de 5 livres 0/0 de la valeur sur les vernis, de 60 livres par quintal sur le thé, etc., etc.
Un moyen encore plus facile et plus habituel d'obtenir le même résultat, consisterait à faire porter de Marseille même dans le bâtiment indien national les articles étrangers auxquels on voudrait procurer au passage de Marseille dans le reste du royaume, la modération des droits dont jouissent ceux de l'Inde, venus par navires français.
J'ajoute que les substitutions lors du transport dans les magasins seraient également faciles ; car la seule précaution praticable pour assurer la représentation dans les magasins d'entrepôt des marchandises déchargées, ne peut consister que dans un bulletin donné au porteur, ou au conducteur, pour l'obliger à représenter au garde-magasin un certain nombre déterminé de balles, ballots, sacs ou caisses. Or, qui empêchera, que dans la vue de frauder une partie des droits, on ne substitue, dans le trajet du bâtiment au magasin, d'autres balles, ballots, sacs ou caisses de marchandises étrangères de même nature que celles de l'Inde, mais d'un poids beaucoup plus considérable.
D'ailleurs, quelles précautions la franchise de Marseille n'obligerait-elle point à prendre lors des expéditions pour l'intérieur du royaume? Dans le port de Lorient, comme dans tout autre non franc, il suffirait de peser les marchandises qui acquittent au poids, de prévoir sur celles qui* payent à la valeur les droits dus à raison du prix de la vente. A Marseille,il faudrait encore, même pour les expéditions par terre, plomber les marchandises, afin d'empêcher que l'on n'y substituât ou qu'on n'y ajoutât d'autres marchandises étrangères de même espèce, prises à Marseille où, par l'effet de la franchise du port, elles sont reçues sans droits, et qui en doivent supporter de considérables à leur entrée dans le royaume.
Et toutes ces précautions, quelque multipliées, quelque coûteuses et quelque pénibles qu'elles puissent être, échoueraient journellement contre les ruses et l'adresse des fraudeurs. On a voulu vous persuader le contraire, Messieurs, en vous disant que dans ce même port de Marseille, et dans tous nos ports de rivière, on faisait le commerce des colonies ; que les dènrées en provenant étaient assujetties à des droits ; qWon savait bien les y percevoir et trouver le moyen d'empêcher qu'ils ne fussent fraudés.
A cette objection je réponds :
1° Que les denrées de nos colonies presque
toutes en grosses futailles, barriques de sucres bou-cauds, banques de cafés, balles de coton, sont et par leur volume et par leur valeur relative au poids et encombrance, sans nulle comparaison, moins aisés à frauder que des balles de toiles de coton et de mousseline d'une bien plus grande valeur sous un moindre volume;
2° La fraude qui se fait sur ces denrées n'a qu'un inconvénient, celui de porter atteinte aux produits du- fisc, tandis que la fraude qui aurait lieu sur les marchandises manufacturées de l'Inde,joindront à cet inconvénient un autre infiniment plus grave, celui de ruiner nos manufactures nationales.
On vous a dit, Messieurs, que le retour forcé à Lorient donnerait à ce port, en quelque sorte, un privilège exclusif pour les armements pour l'Inde. Mais ce qui s'est passé depuis 1769 jusqu'en 1785, pendant tout le temps du commerce libre, dément cette assertion. Pendant cet espace de temps, presque tous les ports ont armé, et Marseille plus qu'aucun autre ; et ses armements ont prospéré, ainsi qu'il a été attesté par les armateurs de Marseille eux-mêmes lors de la discussion sur le privilège de la compagnie.
Mais, dit-on, le retour forcé a Lorient est une aggravation de charges, notamment pour les ports de la Méditerranée. Pour éviter le retour à Lorient, la décharge dans un port éloigné, l'obligation coûteuse d'en relever, après y avoir déchargé, et de revenir dans leur port d armement, les capitaines n'auront d'autre parti à prendre que de revenir directement de l'Inde dans les ports étrangers, et ils frustreront ainsi la France de tous les avantages du retour dans ses ports.
Tandis qu'au contraire la faculté du retour dans les ports français de la Méditerranée mettait ces ports en état d'approvisionner l'Italie et tous les peuples voisins, des marchandises de l'Inde.
Marseille aurait, ajoute-t-on, un débouché considérable, pour la Turquie, de toutes les marchandises de l'Inde, et particulièrement des mousselines dont les Turcs font une grande consommation.
A ces objections plus spécieuses que solides j'opposerai des faits, je demanderai pourquoi de 1769 à 1778 que le commerce de l'Inde a été libre à tous les Français; Marseille n'a fourni ni l'Italie, ni la Turquie, des marchandises provenant de ce commerce, ni détruit celui qui se fait par la Caravane?
Je demanderai pourquoi depuis 1785 jusqu'à ce jour, les vaisseaux VHedwing-Sophie, la Ma-dona de Monteneiro, le Grand Duc de Toscane, Je Roy ai-Archiduc, le Comte du Perron, le Saint-Charles, le Prince de Piémont, et le Duc de Chablais, que des armateurs de Marseille ont expédiés pour Tlnde sous pavillon sarde ou toscan, n'ont pas fait leurs retours dans les ports d'Italie qui leur étaient ouverts, plutôt que de passer devant celui de Lorient, traverser la Manche en courant des dangers considérables, pour se rendre à Ostende, où ils ont vendu leurs marchandises? du moins, à l'exception de deux ou trois chargements qui sont venus directement de l'Inde a Livourne où ils ont resté longtemps sans pouvoir être vendus, et qu'enfin, après leur vente, les marchandises ont été chargées pour nos ports francs : ie laisse à deviner quelle retour elles ont dû prendre ensuite.
Pourquoi n'ont-ils pas vendu tous ces chargements à l'Italie, puisqu'ils avaient la liberté
de les y faire venir directement de l'Inde? et pourquoi n'ont-ils pas profité de leur voisinage pour fournir aux besoins de la Turquie. —Pourquoi? Messieurs, c'est que les grands besoins de la Turquie en marchandises de l'Inde consistent en mousselines communes, que ces mousselines se tirent du Bengale où les Anglais dominent, où ils les ont à bien meilleur marché que toutes les autres nations. Ce qui les met en état de les fournir au Levant à bien plus bas prix que nous et conséquemment à notre |exclusion. Ainsi, l'approvisionnement de iaTurquie^de l'Italie, l'anéantissement du commerce des caravanes, tout cela n'est que chimère. En voulez-vous encore, Messieurs, savoir une autre raison ? c'est que la consommation de la France pour tous ces objets vaut infiniment mieux aux spéculateurs, que tous ces prétendus débouchés; et comment en serait-il autrement, puisque chacun sait que jamais notre commerce n'a suffi à beaucoup près aux besoins du royaume, et que nous sommes tributaires de l'étranger pour des versements annuels très considérables?
On a été jusqu'à prétendre que, s'il était expédient de restreindre le retour des vaisseaux de l'Inde dans un ou plusieurs ports, bien loin d'exclure les ports francs, c'étaient eux qu'il fallait préférer, parce que les ports francs sont les plus convenables pour l'exportation à l'étranger; et que, dans cette branche de commerce, c'est à l'exportation qu'il faut tendre le plus qu'il est possible.
Je réponds: 1° que les ports francs ne sont pas plus convenables que d'autres pour l'exportation à l'étranger; que, pour quiconque a les éléments du commerce, des entrepôts remplissent parfaitement et complètement cet objet ; 2° qu'il est bien plus vrai de dire que les ports francs étant des magasins de marchandises étrangères rapprochés du royaume, ils sont très propres à l'introduction furtive de ces marchandises dans le royaume, et qu'ils remplissent parfaitement cette dangereuse fonction ; 3° que s'il était vrai que les ports francs soient les plus convenables pour l'exportation à l'étranger, leur utilité ne pourrait point s'appliquer à ce cas-ci, à celui de l'exportation des marchandises venues de l'Inde par nos navires, attendu que nous sommes encore loin de pouvoir exporter à l'étranger, puisque nous sommes loin de suffire à la consommation du royaume ; d'où je conclus que le retour provisoire à Lorient est très bien adapté à l'état actuel de notre commerce dans l'Inde, dont les retours sont consommés dans le royaume et non exportés à l'étranger. Enfin, Messieurs, j'admets que le retour forcé à Lorient est un inconvénient pour tous les autres ports: je conviens qu'il leur impose quelque augmentation de frais, de peines, d'embarras; je conviens qu'il exige d'eux un sacrifice; mais je pense qu'ils en trouveront quelque dédommagement dans l'avantage de la réunion des retours dans un seul lieu, et je soutiens que quand même cela ne serait point, vous ne devez point encore être arrêtés par cette considération, parce que vous devez la faire céder, sans hésiter, à l'intérêt de vos manufactures qui est pour vous un intérêt de première ligne, et devant lequel des gênes, quelques entraves imposées au commerce de l'Inde, à un commerce défavorable en lui-même, ne font rien à mes yeux.
Je dis, Messieurs, que si vous n'adoptiez pas un point central commun pour le retour des navires de l'Iude, vous ne pourriez plus exiger des
ventes publiques pour les marchandises blanches, les toiles rayées et à carreaux, les guinées bleues et autres marchandises assujetties à un droit sur la valeur, et ce serait un inconvénient des plus graves: il ne tendrait à rien moins qu'à rendre absolument illusoires toutes les dispositions de votre tarif. — La manière dont se font les déclarations en exécution du traité de commerce avec l'Angleterre en est la preuve. — Elle réduit les droits de plus de moitié, sans qu'il soit possible de remédier à cet abus : il en serait de même pour les marchandises de l'Inde.
Un de Messieurs les préopinants vous a proposé, il est vrai, d'en agir à cet égard pour les retours de l'Inde, comme pour ceux de nos colonies, c'est-à-dire d'ën faire une estimation générale tous les six mois, et d'acquitter les droits sur cette estimation. — Mais, suivant moi, ce mode d'imposition est inappliquable aux retours de l'Inde : les denrées de nos colonies sont en petit nombre, aisées à classer et à évaluer: — les marchandises de l'Inde sont, au contraire, très diversifiées en nombre, espèces et qualités. 11 me paraît impossible, d'appliquer une estimation générale à des toiles de coton, à des mouchoirs, à des mousselines, dont les qualités et les prix, vous le savez, diffèrent si considérablement ies uns des autres.
Réfléchissez encore, Messieurs, que la réunion des retours dans le port de Lorient a de grands avantages pour les vendeurs comme pour les acheteurs; que pour ceux-ci, réunissant en un seul point tous les objets d'assortiment dont ils peuvent avoir besoin, elle mérite que les acheteurs s'y transportent en personne ; que pour les vendeurs, elle doit naturellement leur procurer des prix pius avantageux, par la concurrence personnelle de tous les acheteurs qui, dans les ventes publiques, s'animent réciproquement, et haussent les enchères à l'envi les uns des autres.
Je prévois la réponse, et je vais au devant. Si c'est, me dira-t-on, l'avantage de tout le monde, pourquoi le prescrire ? Laissez la liberté, et tous les armateurs reviendront librement à Lorient, si telle est véritablement leur convenance générale.
Je réplique, Messieurs, que cet intérêt général des armateurs et des acheteurs de bonne foi contrarie souvent les vues des fraudeurs qui ont un tout autre intérêt, celui d'éviter une surveillance trop active et trop efficace à leur gré.
Je pourrais mettre en ligne décompté un autre avantage du port de Lorient pour ce commerce; c'est l'existence des plus beaux et des plus vastes magasins, qui ont été construits exprès pour être le dépôt des marchandises des Indes ; magasins immenses, qui ont le double avantage de faciliter tout à la fois le bénéficiement nécessaire des marchandises des Indes et la surveillance de leur destination, de manière qu'elles acquittent exactement les droits et n'entrent dans la consommation qu'avec les charges que vous aurez jugées à propos de leur imposer, comme contre-poids en faveur de nos manufactures.
Enfin, Messieurs, je dois vous dire nettement quel est le nœud de la question qui vous est soumise et que vous allez décider; le voici en deux mots : si vous enfermez le commerce de l'Inde dans le seul port de Lorient, vous aurez prononcé en faveur de vos manufacturiers, de vos ouvriers, contre tous les armateurs, spéculateurs et négociants des marchandises de l'Inde; si, au contraire, vous ouvrez dans ce moment tous les ports de France aux retours de l'Inde, vons sacri-
fierez, oui, Messieurs, vous sacrifierez l'intérêt de vos manufactures à celui des armateurs, négociants et spéculateurs. Choisissez, Messieurs, et prononcez.
Mon avis n'est pas suspect, j'ose vous l'observer ; car le Havre, dont je suis député, est un des ports de France les mieux placés pour la vente des marchandises des Indes, si le retour devenait libre pour tous les ports : c'est ce qu'on ne peut, je crois, me contester.
M. d'André vous a dit, Messieurs, que Marseille ayant besoin des mousselines de l'Inde pour son commerce du Levant, et étant gênée dans ses retours, était obligée de faire ses retours à Nice, d'où les mousselines loi parvenaient avec la plus grande facilité par le Var.
Je conviens sans peine avec M. d'André qu'à Marseille, comme ailleurs, il existe des personnes qui se livrent à la contrebande, et qui s'y livreront d'autant plus qu'on la leur facilitera davantage. Jusque-là, je suis d'accord avec M. d'André : mais je dis que ces mousselines ne sont point destinées pour le Levant, et j'en ai pour garants les états d'exportation de cette ville au Levant, qui justifient qu'il n'y en passe pas une seule aune.
M. d'André vous a dit aussi que l'introduction plus libre des mousselines et des toiles de coton exciterait l'émulation des fabricants ; qu'on en a pour exemple la permission accordée de faire entrer dans le royaume des toiles peintes étrangères, époque depuis laquelle nos fabriques en ce genre ont considérablement augmenté.
Je réponds que cet exemple est bien mal choisi, parce que le règlement de' 1759 qui a permis l'entrée des toiles peintes étrangères, est le même qui a levé la prohibition d'imprimer des toiles en France. S'il n'existait et ne pouvait alors exister de fabrique de toiles peintes dans le royaume, ce genre de fabrication n'a pu augmenter à cette époque.
11 est encore mal choisi, parce que l'entrée des toiles peintes étrangères n'a été permise qu'à la charge d'un droit de vingt-cinq pour cent, et quatre sols pour livre, c'est-à-dire de trente pour cent de la valeur, ce qui est un droit prohibitif, et précisément établi pour encourager en France cette manufacture.
Je ne voudrais pas conseiller à l'Assemblée nationale de faire l'essai du moyen tout nouveau que semble proposer l'honorable membre, je veux dire celui de permettre l'entrée de toutes les toiles étrangères, afin d'exciter l'émulation de nos ouvriers. Je craindrais fort qu'elle n'excitât, par là, non leur émulation, mais leur émigration.
Si, malgré toutes les raisons dont j'appuie l'opinion du comité pour le retour provisoire des navires de l'Inde à Lorient seulement, si, malgré l'intérêt des manufactures nationales qui parle si hautement dans cette cause, l'Assemblée nationale voulait (ce que je ne puis croire) un second port de retour, et le fixer dans la Méditerranée, je demanderais, dans ce cas, que ce ne fût pas Marseille, à cause de la franchise de son port.
J'observerai à ceux de messieurs les députés de Provence, qui insisteraient pour le retour à Marseille, qu'ils compromettent la franchise de ce port s'ils obtiennent cette faculté ; car ils se flatteraient en vain d'étouffer la voix de toutes les places de commerce, qui s'élèveraient, avec la plus grande force, contre l'existence d'une franchise qui donnerait lieu à des abus si multipliés.
Ainsi, Messieurs, si, contre toute apparence, contre l'intérêt de vos manufactures, vous rejetiez l'article 4 du projet de décret de votre comité, dans ce cas, je me réserverais formellement le droit de proposer, par amendement à la faculté générale du retour, que tous les ports qui conserveront une franchise quelconque, en soient formellement exceptés.
Permettez-moi, Messieurs, de terminer par quelques observations générales, qui ne sont pas étrangères au sujet que je traite.
Le commerce est, dans les mains d'une administration sage, éclairée et prévoyante, le moyen le plus efficace d'assurer le bonheur et l'aisance des peuples.
La moitié de la population de la France n'a point de propriétés et vit de son travail. Cette nombreuse population est donc salariée par les propriétaires, par les négociants et les entrepreneurs de manufactures, et rien ne lui manque pour vivre et pour être heureuse, quand le travail ne lui manque pas.
Si les riches et le3 propriétaires sont gênés dans la consommation des ouvrages de fabrique étrangère^ s'ils sont obligés, ou du moins fortement excités à consommer de préférence les produits du sol et des manufactures nationales, les ouvriers auront l'assurance d'une plus grande masse de travail, et, conséquemment, ils obtiendront dés salaires plus analogues à leurs besoins, ou, au moins, des salaires plus assurés et moins précaires. Ils auront alors plus de moyens d'élever leurs enfants, ils en auront davantage, ils les soigneront et les élèveront mieux. La population en sera augmentée, et cet accroissement de population augmentera à son tour la consommation des produits du sol, à l'avantage de l'agriculture et des propriétaires. C'est véritablement dans cet ordre de choses que se trouve réuni le plus grand avantage de tous, et le bonheur commun des citoyens de tous les états.
Si, au contraire, on admet sans restriction ou trop facilement dans le royaume les ouvrages étrangers; si leur consommation n'y est pas restreinte et découragée, alors l'ouvrier étranger est salarié par le consommateur français. Si cent mille ouvriers étrangers ont réussi à débiter ea France leurs ouvrages d'une année, cent mille ouvriers français auront manqué de travail pendant cette année entière.
Obliger les propriétaires et les riches à consommer les ouvrages des travailleurs nationaux par préférence à ceux de l'étranger, ce n'est point un acte attentatoire à la liberté ni à la propriété. Si c'est un sacrifice de la part des riches et des aisés, il est ordonné par l'intérêt général en faveur des pauvres, qui sont les travailleurs.
Je n'ai plus qu'un mot à dire, Messieurs, et c'est pour reporter un moment vos regards sur les manufactures de toiles de coton. — Voyez quels succès ellesontobtenu depuis vingt ansenAngle-terre. Elles y emploient maintenant 159,000 hommes, 93,000 femmes et 101,000 enfants. La même espèce de manufactures n'en emploie pas la dixième partie en France, et tel était aussi l'Etat d'Angleterre il y a 20 ans. Je ne doute pas, Messieurs, que votre patriotisme ne s'anime à l'aspect d'une si grande prospérité, qu'il vous est d'autant plus facile d'imiter, ae rivaliser et même de surpasser, que vous avez chez vous les matériaux de cette immense fabrique, et que vous les fournissez en grande partie aux Anglais, qui vous les renvoient manufacturés. Si cette comparaison vous humilie et vous afflige, ce ne sera pas en
vain. Vous vous hâterez, Messieurs, de décréter tous les encouragements et de prendre, dès ce moment, toutes les mesures qui doivent un jour vous assurer les mêmes avantages; le rapport et le projet de décret de votre comité vous en préparent les voies. Ces avantages sont précieux, une foule de bras oisifs vous demandent de l'emploi.
Considérez surtout le monde immense de femmes et d'enfants que ces manufactures emploieraient et que, sous le rapport de la morale, non moins que sous celui de l'humanité et de la politique, il est si important de soustraire à l'oisiveté, cette éternelle corruptrice des mœurs.
Par tous ces motifs j'appuie (sauf de légères modifications sur quelques articles} le projet de décret qui vous est proposé par votre comité, et spécialement la disposition de l'article 4 pour le retour provisoire.
J'adopte, toutefois, l'article 21 du projet de décret de M. Nairac (1) parce que je pense, comme lui, que les encouragements effectifs sont nécessaires à la prospérité de nos manufactures de toiles de coton, et qu'il ne suffit pas, pour atteindre à ce but, d'imposer les toiles de l'Inde et les toiles étrangères.
Plusieurs membres demandent l'impression du discours de M. Bégouen.
L'impression est ordonnée.
On demande la clôture de la discussion.
Les raisons pour et contre n'ont pas toutes été produites. Je demande le renvoi à une autre séance.
Ce renvoi est prononcé.
La séance est levée à dix heures du soir.
DU
AFFAIRE DES TROUBLES DE SOISSONS.
Lettre de cent-vingt citoyens de Soissons à l Assemblée nationale.
Du
Nosseigneurs,
Les citoyens de Soissons, après de longs débats, et par la médiation de M. l'abbé Expilly, venaient enfin d'établir une municipalité constitutionnelle. Elle offrait dans son organisation tout ce qui
pouvait contrarier l'amour-propre des partisans de l'ancien régime; de simples bourgeois, marchands, ouvriers, artisans, se trouvaient élevés aux places de municipaux et de notables.
Leurs adversaires multipliés et puissants imaginèrent, pour les traverser, de former une société qui, sous le nom de club potriotique, réunissait à peu près tous les ex-privilégiés, dont le nombre est considérable à Soissons.
De leur côté, les partisans de la Révolution, pour soutenir la municipalité, qui leur paraissait trop faible contre une pareille coalition, se réunirent en une société qui, peu après, obtint le précieux avantage d'être affiliée à la société des amis de la Constitution de Paris. De cette société étaient membres le maire, les officiers municipaux et plus des trois quarts des notables. Le maire la présida le premier mois, et le procureur de la commune le mois suivant.
Alors (s'il est permis de s'exprimer ainsi), les deux partis se trouvèrent fort à fort, et la municipalité soutint avec égalité la lutte contre les ex-privilégiés : mais cet état ne convenait point à ceux qui avaient projeté de s'élever sur les ruines de la municipalité.
La fixation du chef-lieu du département de l'Aisne dans une ville rivale, fut l'occasion dont on se saisit pour jeter de la défaveur sur les opérations de la municipalité, jusque dans la société des amis de la Constitution. De nouvelles inquiétudes étant survenues pour la, fixation du siège épiscopal, les choses en vinrent au point, par les insinuations du parti opposé, que la plupart des officiers municipaux n'osaient déjà plus se rendre dans leur propre club, où on les accusait d'être la cause des pertes que la ville essuyait journellement.
Les choses étant en cet état, les anti-muni-cipaux négocièrent une réunion entre les deux sociétés, qui eut effectivement lieu les 12 et 13 juin, et qui eût pu avoir les plus heureux effets, si la municipalité eût été comprise dans la capitulation, et si l'on n'eût point saisi, pour la signer, l'instant de son éloignement.
Il résulta de cette réunion que le peuple reprit, sous une forme nouvelle, le joug des ex-privilégiés ; aussi les vrais amis de la Constitution désertèrent-ils incessamment ce club, pour l'abandonner à leurs rivaux.
En cet état de choses, le club forma une pétition de cent cinquante citoyens actifs,pour obtenir une assemblée générale de la commune. Elle fut fixée, pour ménager la perte du temps aux ouvriers, au dimanche 13 juin.
Nous ne nous étendrons pas sur les scènes mortifiantes de cette assemblée,parce que M. Je maire est porteur de son procès-verbal ; il suffira de dire que les ex-privilégiés y dominèrent, que les officiers municipaux qui y présidèrent y furent honnis, bafoués, vilipendés ; que ce ne fut qu'après la séance fermée, et rouverte par la complaisance de M. le maire, qu'un petit nombre (1)
de membres de ia cemmuné choisirent quatre députés pour Paris parmi les membres de l'ancienne société patriotique, qui remportèrent encore cet avantage sur les vrais amis de la Constitution.
Alors leurs prétentions ne connurent plus de bornes : ce que l'on aurait peine à se persuader, le lendemain même de l'assemblée générale, ils avaient déjà fait signer et présenter une pétition de cent cinquante citoyens actifs, pour en demander une autre pour le jour suivant, abusant sans pudeur d'un décret qui fait le plus sûr rempart de la liberté publique contre le despotisme qui pourrait s'introduire dans les municipalités ; despotisme qui ne pourra jamais affecter 1a municipalité de Soissons : 1° à cause de son attachement à la Constitution (1) ; 2° à raison de sa faiblesse relative contre le parti qui lui est opposé.
La municipalité prévoyant les suites d'une pétition aussi déplacée, remit à y faire droit après que son maire, qu'elle députa incontinent à Paris, aurait pris les ordres de l'Assemblée nationale sur une demande afassi extraordinaire.
Ge refus devint bientôt le prétexte de nouvelles calomnies, et M. le maire, le jour de son départ pour Paris (le 15 juin),se trouva tellement menacé, qu'il crut devoir requérir que, pour la sûreté et la tranquillité publiques, une brigade de maréchaussée se transportât (secrètement cependant, our éviter l'alarme) à l'hôtel de son comman-dant.
Nouveau sujet à la calomnie. On inculpe le maire d'avoir demandé la maréchaussée au mépris de la garde nationale, quoique la garde nationale fût l'ouvrage de ce même maire, qui, seul avec la municipalité, l'avait créée, composée, mise en activité, malgré tous les efforts du parti opposé : c'est une de ces vérités dont on peut dire qu'à Soissons les murs mêmes sont témoins; ce qui prouve invinciblement qu'il n'a jamais pu la mépriser.
La société patriotique toujours dominante, l'ex-club des amis de la Constitution imagine une adresse aux représentants de la nation, avec quatre chefs de demande, dont les trois premiers portent évidemment sur des objets d'utilité publique ; le quatrième même, ne paraissant avoir pour objet que de disculper la ville de Soissons auprès des représentants de la nation, ne présente qu'un objet louable : aussi n'est-ce que dans le second membre de la période que le venin est caché. Là, le chef du corps municipal est formellement accusé d'avoir donné des ordres pour la sûreté de la municipalité, qui n'était pas menacée, et pour la tranquillité publique, qui n'était pas troublée : c'est-à-dire que les pétitionnaires, sans s'en douter, au moins pour la plupart, accusaient M. le maire de mensonge et de calomnie. Les citoyens simples et sans défiance furent pris au piège et, sans entrer en discussion sur le second membre du quatrième chef, signèrent aveuglément la pétition (2). On peut prouver que sur cinq cents signatures, il n'y a guère que trois cents citoyens actifs, dont les deux tiers au moins sont de l'ancien régime, pour ne rien dire de plus ; le surplus est de citoyens inactifs, de jeunes gens, de signatures répétées et même d'étrangers, qui ont signé par bienveillance sur
les trois premiers chefs de pétition. Les vrais amis de la Constitution indignés de l'artifice, et spécialement du propos que l'on ferait sauter, c'est-à-dire changer la municipalité, s'élancent au milieu du club, tout à coup, sur la boîte de laquelle, comme de celle de Pandore, sortent tous les maux qui affligeaient la ville, sans même que l'espérance de les voir finir restât au fond, s'en emparent, heureusement sans accident, par la retraite prudente des membres de l'ancienne société patriotique, et arrivent, suivis d'un peuple nombreux, à l'hôtel commun, où ils requièrent que le scellé soit apposé sur la boîte fatale.
Mais, dans l'intervalle, l'inquiétude et la terreur se répandent. L'officier (1) de la garde vient annoncer à l'hôtel de ville que les deux partis sont aux mains. On lui ordonne de voler à leur secours avec les forces de son poste. Plusieurs officiers et notables le suivent. Le conseil général, peu nombreux, et qui venait de clore la séance, agite déjà s'il fera déployer le drapeau rouge. Le calme succède à 1a plus vive agitation, lorsqu'une multitude de citoyens,qui escortent la boîte,annoncent que personne n'a été blessé, mais que tous les aristocrates (ce sont les termes) sont en fuite.
Cependant l'officier municipal, faisant les fonctions de procureur de la commune, avait requis cent hommes de gardé nationale extraordinaire. Les patrouilles sont en activité, les postes essentiels doublés. A ce moment, la multitude de citoyens qui remplit le salon et les pièces attenantes à l'hôtel de ville demande à cris redoublés l'interdiction des çlubst comme causant depuis trois mois le malheur des citoyens les plus respectables, et des pères de famille les plus intéressants, principalement à cause d'une menace faite à plusieurs ouvriers de les quitter, dans un temps surtout où l'ouvrage est rare et précieux ; comme ayant exposé, au moment même, des citoyens (qui avant l'érection des clubs, vivaient en frères) aux suites toujours redoutables d'une insurrection ; en un mot, comme étant un germe perpétuel de dissention dans une ville trop peu peuplée pour avoir deux de ces établissements, c'est-à-dire deux partis toujours subsistant?.
Sur cette réquisition, deux officiers municipaux en écharpe, et deux notables, assistés d'un secrétaire-greffier, se rendent aux deux clubs, tant à celui où s'était opérée la réunion, qu'à celui qui, quoique réuni, avait encore conservé son premier local, où on préparait les matières à discuter dans les assemblées. Le scellé est apposé et les deux clubs provisoirement interdits. Les officiers reviennent aux acclamations d'un peuple nombreux. Enfin, le zèle et la sagesse de M. le major, des officiers, soUs-officiers et Soldats de là garde nationale, assuraht le conseil général de la tranquillité de cette nuit qui s'était ouverte par unè scène aussi alarmante, le conseil, qui qui s'était réuni une seconde fois sur la clameur publique, se sépare à minuit ; et l'officier faisant ies fonctions de procureur de la commune, assuré que tout est rentré dans l'ordre, se retire, après avoir conféré une dernière fois avec M. le major c(ui lui atteste ultérieurement le rétablissement de la tranquillité-
Telle est, Nosseigneurs, dans l'exacte vérité, la série des événements qui ont failli se terminer,
le vendredi 18 juin au soir, par une insurrection dangereuse, dont la vigilance du conseil général, le zèle de la garde nationale et le caractère de douceur et de générosité de nos concitoyens ont heureusement empêché les suites.
Sur quoi les citoyens soussignés vous supplient de décréter que provisoirement, et jusqu'à ce que la fermentation qui règne dans les esprits soit calmée, les choses restent en cet état ; et déjà redevables à vos soins paternels du premier des biens, de la liberté, ils vous devront encore leur tranquillité et leur sûreté.
Signé: Drigni, «aporal ; Gérard, marchand tapissier ; Duhamel, soldat national ; Gérard, chapelier, soldat de la garde nationale ; Mulot, soldat national ; Vàlot, lieutenant de la garde nationale; Pillont-Deviile; Soumacher; Corneli ; Chevalier, traiteur; Pivot; de la Croix; Rivierre; Charles Leclerc ; Tingri ; Osselin-Couslaut, lieutenant de la garde nationale; Flament; Michel deMontval; Revercaux ; d'Auvergne ; Levasseur; Quinquet, Capitaine de la garde nationale ; Jur-geans, soldat de la garde nationale; Vauvillé ; Roussel ; de Corse ; Fabus, cordonnier ; Thérotte l'aîné; Bourdon; Carlier;François Maréchal; Vil-loque fils: Guion fils; André Yve, Turaux fils; Flamant-Vaudendriez; Leroux; Pierre Bourgier; Letellier ; Agouin ; Morlet ; Prévost fils ; Nicolas Flamant ; Dru fils, marchand drapier ; Dru père; d'Auvergne, notaire; Binard, soldat de la garde nationale; Richeron ; Mignot; Hédouin; Jupin, marchand fripier ;. Moury ; Lebrun ; Picard ; Naudet, Rousm ; Jupin raîné ; Istre Roger ; Os-seim, notaire ; Bertrand ; Durand ; Buguicourt ; Ohtte Campamgne ; Pezontos-Uvalle ; Levasseur, sous-lieutenant de la garde nationale; Tingri, sergent, Nicolas Solalle;Thévoitte le jeune, garde national ; Nirigaux, meunier; Delahaye; François Tingri ; Vanisier ; Vauvillé, maître tonnelier ; Fouget; le Paon; Dubois, potier; Barbier; La-dague; Moiselot l'aîné; Malo, coutelier; Henri Guenne ; Maséré ; Humel ; Henique ; Humel ; Dudon ; Bézu ; Pourvilit; Humel; ïoseph Monté-nécourt ; Jupin ; Monténécourt ; Mahy ; Dudrumet; Faquy-Veaumarne; Nicolas Cbariier;Charlier ; Charpentier ; Mëlay ; Pillet, maître d'école ; Lefebvre, maître charron; Ducoffre; Pado, serrurier; Sénéchal ; Bendaut ; Roland, caporal dè la garde nationale ; Levasseur ; Fiet ; Morlon ; Pierre Dubois ; Le Grand-Gosse ; Evrard ; Paulhet ; d'Au-teuil;Bressaud, marchand; Guillaume, marchand; Morel, marchand ; Dumont; Pain blanc, chanoine; Houdry; Paris, serrurier; Caplet.
L'original ès mains de M. le rapporteur du comité de rapport.
Le 3 juillet, proclamation du çbnseil général de la commune de Soissons, d'après une lettre du comité des recherches de l'Assemblée nationale du 30 juin, par laquelle proclamation, pour la grande considération de la sûreté publique menacée, si le chef rouvrait : il est fait défense à toute personne de tenir des assemblées particulières, ou d'y concourir, sans avoir préalablement averti la municipalité de l'heure et du lieu de ces assemblées, conformément au titre 62 du décret constitutif des municipalités.
Toutes les lettres venant de Soissons, soit du conseil général, soit de la municipalité, soit de particuliers, tous les rapports de ceux qui arrivent de cette ville à Paris, annoncent que le calme règne à Soissons, depuis que le club a cessé, mais que l'agitation renaîtrait, s'il rouvrait : en sorte que le conseil général supplie l'Assemblée nationale de laisser subsister la proclamation,
pour que là municipalité se livre avec sécurité à ses fonctions.
Quant à la boîte dont il est question en la lettre ci-dessus, la municipalité, qui l'a reçue pour éviter une insurrection, n'entend point et n'a jamais entendu la retenir. Le conseil général est prêt à la remettre, dès qu'il le pourra, sans qu'il en résulte de la fermentation ; mais tant qu'elle est à craindre, son devoir est d'en éloigner toutes les causes.
Il est très important d'observer que les citoyens qui ont enlevé cette boîte du club en sont membres avant sa réunion au second; qu'ils étaient à la séance où cet enlevèrent a eu lieu, et qu'ils se sont crus autorisés à s'emparer de cette boîte sur le refus qui leur a été fait de leur communiquer plusieurs pièces ; que lorsqu'ils sortirent de la salle du club avec cette boîte, dont ils se regardaient comme propriétaires, ils furent suivis jusqu'à l'hôtel de ville de plus de deux cents personnes.
Quant au scellé apposé par la municipalité sur les clubs, la lettre ci-dessus et le rapport de l'officier degarde prouvent encore que la municipalité devait aussi cette apposition à la tranquillité publique.
Dans untemp8 plus calme, quand la division cessera entre les citoyens de Soissons, le conseil général s'empressera de rendre hommage à la liberté, en rouvrant les clubs, aussi utiles, quand la paix et un même esprit y rassemblent les citoyens, que dangereux, qu'alarmants, lorsque deux partis partagent toute une ville, soit qu'il n'y existe qu'un elub, soit qu'il y en ait deux.
Rapport fait à la municipalité de Soissons, par l'officier de garde, de ce qui s'est passé dans la soirée du vendredi 48 juin 1790, au club des cor-deliers.
Je, soussigné, Remi-Antoine Furcv-Lampon, sous-aide major de la première division de la garde nationale soissonnaise, atteste ce qui suit : Que me rendant aux Cordeliers, pour y assembler la garde, ainsi qu'il était d'usage, j entendis beaucoup de bruit dans une salle proche du cloître de ce couvent où se tenait le club dit des « Amis de la Constitution;» alors, craignant que ce bruit ne devînt dangereux, je priai les fusiliers de la garde de laisser leurs fusils dans le cloître, afin que personne n'entrât dans la salle du club. Mais, voyant enfin que ce tapage augmentait, je crus qu'il était de la prudence d'en prévenir la municipalité ; c'est ce que me vinrent conseiller plusieurs personnes qui avaient pu s'échapper de ce club. Arrivé à la municipalité, je rendis compte de ce qui se passait ; l'on me remit un ordre signé Dieu, procureur de la commune, pour que la garde se transportât au club des Cordeliers, à l'effet de ne laisser entrer personne. Retournant à la garde qui allait se former pour remplacer l'ancienne, je la vis toute dispersée ; je m'adressai à quelques membres qui restaient, à l'effet de leur faire part de l'ordre dont j'étais porteur ; ils me répondirent que la garde n'étant point encore formée, c'était à l'ancienne garde à marcher. Voulant suivre cet avis, d'autant plus fondé, que l'ordre ne portait pas si ce serait l'ancienne garde, qui était alors incomplète, qui marcherait, ou la nouvelle, je voulus retourner au corps de garde de la place, pour faire mettre le plus promp-tement possible cet ordre à exécution, attendu que te bruit et les clameurs qui se faisaient en-
tendre donnaient lieu de croire que l'on en était aux mains. Aussitôt, j'aperçus plusieurs personnes qui sortirent avec une botte, et se rendirent à la municipalité. Les disputes s'étant alors apaisées, je revins, à la sollicitation des fusiliers qui me dirent de faire défiler la garde. M'étant rendu sur la place à cet effet, M. Roussel, sous-aide major, me fit part d'un nouvel ordre de la municipalité, adressé à M. Glacy, capitaine, à cause de l'absence de M. le major, par lequel messieurs de la municipalité requéraient cent hommes de garde, pour maintenir le bon ordre qui paraissait alors troublé. J'annonçai donc aux sergents et caporaux d'ordre cette réquisition, qui fut exécutée peu de temps après. Ma garde défilée, el ce service fini, je remontai à l'hôtel de ville, où l'on me chargea de deux ordres pour M. Vallot, alors officier de garde, à l'effet, l'un de faire des patrouilles sur-le-champ, l'autre ensuite, portant que les patrouilles dissiperont, le plus doucement possiole, les attroupements qu'elles rencontreront. MM. les officiers municipaux ayant manifesté qu'ils craignaient encore de nouvelles insurrections, et les voulant éviter, me donnèrent ordre verbal de les suivre avec un piquet de trente hommes, pour aller fermer la salle du club des Cordeliers : nous étant transportés à la porte de ce couvent avec MM. Le Lièvre et Floquet, officiers municipaux, la première porte d'entrée se trouva fermée. L'on fit sonner à plusieurs reprises ; personne ne vint, et l'on se retira. Seconde réquisition semblable nous fut faite, en présence de M. Garnier, major, pour nous rendre dans un lieu destiné à la société dite Patriotique, où étant, nous fûmes introduits par la fille de M. Daras dans deux appartements, le premier au rez-de-chaussée, qui paraisail destiné à la lecture des nouvelles. Etant ensuite montés au premier étage, nous avons trouvé une chambre garnie de tapisseries, chaises rangées, bureau, fauteuils et tribune: alors M. Devillers, faisant les fonctions de greffier, dressa procès-verbal et ensuite apposa le scellé sur les portes de ces deux appartements. Après quoi l'on descendit dans la salle à manger de M. Daras, où l'on fit signer le procès-verbal par la domestique qui était présente à la visite ; nous avons tous signé et quatre fusiliers seulement, et nous nous sommes rendus à l'hôtel de ville dans le même ordre ; le piquet ayant repris son poste, nous nous retirâmes.
Lesquels faits je certifie conformes à la vérité.
A Soissons, ce
Signé : Lampon fils, sous-aide major.
Proclamation du conseil général de la commune de Soissons, du
Le comité des recherches vient de consacrer, par une approbation authentique, les principes qui ont dirigé le conseil général dans la suspension provisoire de l'assemblée qui tenait ses séances aux Cordeliers. Ces principes reposent sur l'obligation étroite imposée par la loi à toute administration municipale, de veiller au maintien de la sûreté et de la tranquillité publiques, et de prendre, par conséquent, toutes les mesures nécessaires pour prévenir ce qui pourrait les compromettre ou les altérer.
Cependant, s'il pouvait exister quelques doutes sur la légalité des démarches du conseil général, la décision du comité des recherches suffira pour prouver à tout citoyen véritablement ami de la Constitution que le conseil général n'a point
excédé les bornes d'une sage surveillance, en interdisant provisoirement une assemblée devenue la cause d'une effervescence dangereuse, et en se précautionnant contre celles que l'on n'aurait pu tenir ailleurs sans s'exposer au même inconvénient.
Lettre du comité des recherches de VAssemblée nationale, à MM. les maire et officiers municipaux de la ville de Soissons.
« Paris, le
« Le comité des recherches a examiné votre « adresse et les pièces y jointes. 11 pense, Mes-« sieurs, que la loi ayant prononcé que les « citoyens ont droit de s'assembler paisiblement « et sans armes, après en avoir prévenu les offi-« ciers municipaux, a exigé incontestablement « que la condition de paix et de tranquillité fût « remplie. C'est dône aux municipalités, aux-« quelles la police est confiée, de veiller au main-« tién de l'ordre et de la tranquillité publics, « et lorsqu'il est manifestement prouvé qu'une « assemblée mésuse de la liberté pour détruire « la liberté même et troubler le repos public, les « administrateurs sont fondés à suspendre cette « assemblée ; ainsi, la municipalité de la ville de « Toulouse a donné une preuve de sa prudence « et de sa sagessé ensuspendant, par une procla-« mation motivée, des assemblées qu'elle avait « approuvées ; ainsi, la municipalité de la ville « de Paris a suspendu une assemblée qui, malgré « une protection continuelle de la police, produi-« sait un mouvement tumultueux dans le peuple « et faisait craindre des événements fâcheux. Le « comité croit donc devoir approuver les mesures « sages que vous avez prises pour suspendre une « assemblée qui occasionnait des agitations nui-« sibles au repos public.
« J'ai l'honneur d'être, Messieurs, votre très « humble et très obéissant serviteur.
Signé : Charles Voidel, vice-président ; et « Charles Cochois, secrétaire. »
Le corps municipal, vu la lettre ci-dessus, ouï les conclusions de l'officier municipal faisant les fonctions de procureur de la commune, et après avoir pris l'avis de messieurs les notables, fait défense à toute personne de tenir des assemblées particulières, ou d'y concourir, sans avoir préalablement averti la municipalité de l'heure et lieu desdite assemblées, conformément au titre 62 du décret constitutif des municipalités, sous peine de désobéissance; ordonne, en outre, que le présent arrêté sera lu, publié et affiché dans tous les lieux bublics et carefours de cette ville et faubourg à ce que personne n'en ignore.
Fait en l'hôtel de ville lesdits iour et an.
Signé : Pourcelle aîné, président; Le Lièvre, Oantan, Carpette, Floquet, officiers municipaux ; Dieu, officier municipal, faisant les fonctions de procureur de la commune ; Arouy, Huet, Macadré, Millet,, Dehureau, Rression, Latson, Ringard, Tingry, marchand, le Grand, Devillers, Delobelet D'Auvergne, secrétaire-greffier.
Précis présenté à VAssemblée nationale pour le conseil général de la commune de Soissons,
le
L'Assemblée nationale va prononcer entre deux partis qui divisent la ville de Soissons; les exprivilégiés, tous ceux qui tiennent à l'ancien ré-
gime, et la nouvelle municipalité, avec elle les notables et toute la partie des habitants de Sois-sons qui sont attachés à la Constitution.
Les ex-privilégiés, les anciens dominateurs de cette ville, voient avec indignation que toutes les places de la municipalité leur ont échappé. Ils ont formé le plan de renverser cette municipalité constitutionnelle et de se ressaisir de l'autorité. Pour y parvenir, ils se sont transportés du club qu'ils occupaient dans un autre, formé par la municipalité et né avec elle. C'est là qu'ils égaraient le peuple par des motions continuelles contre les officiers municipaux; c'est là qu'ils leur étaient la confiance de leurs concitoyens. Ce club, en peu de jours, était devenu une commune permanente, rivale de la municipalité et du conseil général. La tranquillité publique était troublée. Les haines,, les animosités renfermées dans un espace étroit, éclataient au dehors et faisaient craindre les derniers excès. Les choses en étaient venues à ce point lorsque, le 18 juin, ce club a été dissipé par une trentaine de ses anciens membres, et dans une séance où ils étaient. Ils en ont été, sans commettre aucune violence, une boîte qui renfermait quelques papiers.
Ils l'ont portée comme en triomphe et accompagnée de plus de deux cents personnes à l'hôtel de ville. Ils y ont demandé que les scellés y fussent apposés, et que ce club et celui que l'aristocratie n'avait quitté qu'en apparence fussent provisoirement interdits; c'est ce qu'a fait la municipalité en apposant les scellés sur la porte de ce dernier club.
Depuis, une décision du comité des recherches a approuvé la conduite de la municipalité de Soissons. Le calme y règne par l'interruption de ce club, dont tous les citoyens paisibles des deux partis désirent la suspension ordonnée par une proclamation du conseil général de cette ville, proclamation jointe à cette décision du comité des recherches.
Telle est l'affaire qui doit être incessamment rapportée à l'Assemblée nationale.
La municipalité ne prétend point retenir la boîte du club. Elle n'en est que dépositaire. Elle ne pouvait refuser ce dépôt ni l'apposition des scellés sur un des clubs sans occasionner une insurrection. Elle est prête à renvoyer cette boîte dès que les mouvements dans le peuple, pour cette remise même, ne seront plus à craindre.
Cette municipalité est loin de vouloir proscrire irrévocablement les clubs. Elle est trop pénétrée des principes de la Révolution pour former même un désir opposé à la liberté. Mais elle demande que le club qui agitait tout Soissons, qui alarmait ses habitants, ne reprenne point ses séances jusqu'à ce que la fermentation qui règne dans cette ville soit apaisée. Par là, elle remplit son plus saint devoir, de veiller à la sûreté publique.
Cependant il n'est rien que ses ennemis ne tentent contre cette municipalité.
Us osent lui imputer d'avoir coopéré à l'enlèvement de la boîte du club. Elle défie ses adversaires d'administrer la moindre preuve de cette imposture. Si elle a pu s'accréditer par la hardiesse à la soutenir, la municipalité demande qu'une information constate sa conduite à cet égard.
Elle a regu la boîte, elle le devait.
On lui fait un reproche de l'apposition des scellés sur un club. La lettre des citoyens de Soissons à l'Assemblée nationale, le rapport de l'officier de garde, imprimé avec cette lettre, prouvent que cette apposition de scellés a été, de la part de la municipalité, un acte de sagesse et
nécessaire pour prévenir les suites d'une agitation qui ne faisait que croître, et même pour garantir la maison où était ce club. S'il existe des doutes sur cet objet, la municipalité demande encore qu'il en soit informé. Contre son assertion, contre les pièces qu'elle produit, des actes fournis par ses ennemis, composés et rédigés par eux, des signatures mendiées ne peuvent rien faire préjuger. Pour improuver un corps administratif, il faut à l'Assemblée nationale des preuves constantes. Jusque-là, cette auguste assemblée est l'égide des municipalités, qui ne peuvent se soutenir que par une considération qu'il importe au progrès de la Révolution de leur conserver.
Enfin, les ex-privilégiés nient qu'il y ait deux partis à Soissons et que le club dans lequel ils ont eu l'adresse de s'incorporer (ce qu'ils méditaient depuis longtemps) ait causé la moindre agitation.
A les entendre, « ils dressent des autels à la « Constitution, ils sont les défenseurs de la muni-« cipalité; la paix, la douce paix a réuni leur « club à celui des amis de la Constitution ; ils m sont venus trouver leurs frères pour s'entretenir « avec eux des avantages de la Révolution. Ils ne a sont occupés dans le club qu'à des matières « publiques, que d'objets généraux, jamais de la « municipalité, moins encore de la combattre, « de lui susciter des ennemis, de lui prêter des « torts et de méditer contre elle de continuelles « pétitions. Ils sont enfin les vrais, les bons amis « de la Constitution. Plusieurs d'entre eux portent « l'habit de garde nationale. Ils sont des persé-« cutés par la municipalité, s'ombrageant (1) de toute assemblée, sans doute pour administrer « despotiquement et sans contradicteurs. »
Il faut enfin leur répondre, puisque leurs chefs, leurs organes, ont nécessité cet éclat; le moment est venu de publier des vérités que la modération a. tenu cachés jusqu'ici.
S'il n'y a point deux partis à Soissons, pourquoi, au moisldejfévrier dernier, la députation des ex-privilégies et celle du peuple à l'Assemblée nationale, à l'occasion de troubles dont M. l'abbé Expilly a été le ^pacificateur ?
Pourquoi le 21 de ce même mois, une des trois assemblées primaires formées pour l'élection de la nouvelle municipalité, a-t-elle été, sur la réquisition de l'ancienne municipalité, dissipée, et M. l'Herbon, son président (aujourd'hui officier municipal), misen fuite, quinze jours après le commencement de ses séances, par un détachement d'un régiment appelé, conservé depuis près d'un an à Soissons ?
Pourquoi, à cette époque, des citoyens ont-ils été arrêtés par ordre de celte ancienne municipalité ?
Pourquoi la garde nationale a-t-elle trouvé tant d'obstacles à se former; que ce n'est que depuis le mois de mai dernier et par les soins, la sollicitude et le zèle de la nouvelle municipalité qu'elle existe ?
Pourquoi, pendant plusieurs mois après la Révolution, dont l'anniversaire va se célébrer avec tant d'éclat, était-ce à Soissons, non seulement Un ridicule, mais presque un crime de porter la cocarde nationale ?
Pourquoi le bailliage de Soissons vient-il de prononcer une condamnation provisoire et en
dernier ressort contre la municipalité, pour raison d'une modération qu'elle a accordée sur la taxe du pain, proportionnellement à la diminution du blé?
Pourquoi...........mais il faut penser à la brièveté que doit avoir cet écrit et sacrifier à sa précision une foule d'autres traits semblables à ceux (1) qu'on vient de rapporter.
Il y a donc deux partis a Soissons.
Croira-t-on que celui des ex-privilégiés n'ait offert, depuis l'élévation de la nouvelle municipalité que le spectacle touchant qu'il étale par ses représentants à Paris ?
Qu'on lise la lettre ( qu'on a déjà citée) des citoyens de Soissons à l'Assemblée nationale; qu'on consulte l'enquête faite à la municipalité et les déclarations du nombre de citoyens sur ce qui s'est passé au club et sur les suites de ses séances depuis que les ex-privilégiés en sont les maîtres ; qu'on parcoure le procès-verbal (2)
dressé par le conseil général de la commune, de ce qui s'est passé à la séance de l'assemblée générale de la commune du 13 juin, et on verra si les ex-privilégiés se sont conduits dans ce club comme ils l'assurent ici ; et on se convaincra du trouble qui menaçait Soissons si ce club eût subsisté.
Au reste, — et c'est où réside tout l'intérêt de cette affaire, — si le club a alarmé la tranquillité publique, on ne croit pas qu'on trouve de contradiction en soutenant qu'il doive être suspendu.
Si les preuves apportées par le conseil général ne paraissent pas suffisantes, encore, à cet égard, la municipalité demande des commissaires chargés de vérifier les faits, tout demeurant en état.
Si le recours du conseil général de la commune de Soissons et les pièces qu'il produit, et le jugement qu'en a porté le comité des recherches, paraissent devoir convaincre l'Assemblée nationale du danger qu'il y aurait à Soissons de rouvrir un club dans ce moment ; la municipalité, les notables, supplient l'Assemblée natiouale de décréter conformément à l'avis du comité des recherches.
bailliage de Meaux. Donne sa démission (t. XVI» p. 132).
p. 136). — Parle sur un projet de décret du comité de la marine sur la fédération (p. 151), — sur un mandement de l'évêque d'Angers (p.228),—sur la constitution du clergé (p. 235), — sur la liberté du commerce des Indes (p. 755 et suiv.).
tionales (4 juin, p. 95 et suiv.), réponse du président, Briois de Beaumetz (ibid. p. 96) ; — débat sur des motions diverses : baron de Menou, comte de Custine, baron de Menou, Bureaux de Pusy, Fréteau, marquis de Beauharnais, Malouet, do Noailles, Charles de La-meth, Arthur Dillon, d'Estourmel, de Rostaing, do Broglie, de Noailles, Malouet, Achard de Bonvouloir (ibid. et p. suiv.) ; — renvoi au comité militaire (ibid.) p. 97); — adoption d'un décret présenté par Rostaing sur les 32 deniers accordés à l'armée (6 juin, p. 121). Lettre de La Tour-du-Pin, ministre de la guerre, relative à un marché fait pour l'entretien de 300 chevaux des trains d'artillerie (7 juin, p. 136) ; — renvoi au comité militaire (ibid.). — Projet de décret présenté par le marquis de Crillon, au nom du comité, sur des actes d'insubordination de quelques corps de l'armée (10 juin, p. 162) ; — Aubergeon de Murinais demande qu'on entende Puységur, colonel du régiment d'artillerie en garnison à Strasbourg, apportant en don patriotique l'argent donné à des soldats pour les séduire (ibid.) ; — discours de Puységur (ibid.)', — réponse du président, marquis deBonnay (ibid. p. 163); — Aubergeon de Murinais demande que le caporal Maugin, qui s'est signalé par son incorruptibilité, soit mis hors de rang pour être envoyé à la fête de la fédération (ibid)', — Bobespierre réclame l'ordre du jour (ibid.)',— Charles de Lameth demande l'impression du discours de Puységur (ibid.); — elle est votée (ibid.);— débat sur la question de savoir s'il est opportun de voter le projet de décret présenté par le comité militaire : marquis de Crillon, Charles de Lameth (ibid.); — renvoi au comité militaire (ibid.).— Bapport par Emmery sur l'augmentation de solde décrétée les 28 février et 6 juin (24 juin, p. 449 et suiv.);— discussion : de Foucault, d'Aubergeon de Murinais, Emmery (ibid. p. 450);—décret (ibid. et p. suiv.) ; — De Noailles (ci-devant vicomte) demande l'impression des considérations sur l'armée présentées par Emmery au comité militaire (26 juin, p. 470); — texte de ce travail (p. 493 et suiv.). — Le même député propose un décret qui rappelle à la subordination le régiment de Lorraine (27 juin, p. 507); — adoption (ibid.) — Les officiers du régiment Royal-Comtois, condamnés en 1773 par un conseil de guerre tenu à Lille, présentent un mémoire justificatif (3 juillet, p. 6>«8 et suiv.) ; — renvoi, sur la demande de Re-gnault, aux comités militaire et des rapports réunis (ibid. p. 689).
d'une députation de cette basocbe introduite à la barre (26 (juin 1790, t. XVI p. 478) ; — réponse du président (Le Pelletier) (ibid.).
de Lancosne, abbé Maury, Lucas (de Moulins), Le Deist de Botidoux, abbé Gouttes, abbé Maury, Dupont (de Bigorre), abbé Maury, Victor de Broglie, abbé Maury, Victor de Broglie, abbé Gouttes, Anson, de La Rochefoucauld, abbé Maury, de La Rochefoucauld, Le Chapelier, de Folleville, de La Rochefoucauld, Malouet, Martineau (ibid. et p. suiv). ; — adoption de l'art. 1er amendé (ibid. p. 458); — art. 2 : Prieur, Delley d'Agier, Legrand (26 juin, p. 471); — adoption (ibid.); — adoption des art. 3 à 11 (ibid.) ; — ajournement de l'art. 14 qui était devenu l'art. 13 (ibid.) ; — art. 15 et 16 devenus 13 et 14; —adoption (ibid. et p. suiv.); — changements dans la rédaction des art. décrétés (ibid., p. 472) ; — addition, sur la proposition de Merlin, de 8 nouveaux art., devenant les art. 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21 et 22 (29 juin, p. 564 et suiv.) ; — modèle de soumission pour les acquisitions (ibid. p. 565) ; — adoption de la proposition de Le Chapelier tendant à la revision de tous les art. par le comité, à leur impression à nouveau, en les faisant précéder du rapport de La Rochefoucauld, et à la jonction du tout au procès-verbal du jour (ibid.) ; — texte définitif (p. 569 et suiv.).—Mémoire et adresse de la ville de Paris sur l'aliénation et la vente des biens nationaux (17 juin 1790, t. XVI, p. 250).
— Demande que les villes, bourgs et paroisses, portant des noms de famille imposés par des seigneurs, soient autorisés à reprendre leurs noms anciens (p. 389); — que ceux qui portent un nom en vertu
d'un acte ou d'un don soient obligés de reprendre leur nom primitif (p. 393). — Parle sur la constitution du clergé (p. 400), (p. 404); — sur le Comtat Venaissin (p. 407). — Fait une motion sur l'affichage de l'ordre du jour (p. 418). — Parle sur la question de savoir si les absents pour cause de maladie doivent subir une diminution de leur indemnité proportionnée à la durée de leur absence (ibid. p. 437); — sur le traitement du clergé (p. 449), (p. 453) ; — sur le genre d'admission d'une députation de la ville d'Avignon (p. 476) ; — sur le traitement du clergé (p. 534), — sur une adresse des artistes concernant la statue de Louis XIV (p. 541), — sur le traitement du clergé (p. 565), (p. 579), — sur une demande de congé (p. 616), sur la division du royaume (p. 674), — sur les apprêts de la fédération (p. 675), — sur le procès-verbal (p. 699), — sur le pouvoir judiciaire (p. 705), (p. 706), — sur l'ordre de préséance (p. 713). — Fait une motion sur la sanction (p. 725);— la défend (p. 726). — Demande l'inscription au procès-verbal du nom de l'abbé Merceret qui a rétracté son adhésion à la déclaration contre le décret du 13 avril 1790 (p. 740).— Parle sur les diocè'ses (p. 742).
larde, de Rewbell, de Folleville, marquis de Mon-tesquiou, de Richier, de Montlosier (ibid. p. 97 et suiv.) ; — adoption (ibid. p. 98). — Rapport du premier ministre des finances (Necker) précédé d'une lettre d'envoi, sur un versement par la caisse d'escompte de 30 millions de billets au Trésor royal (18 juin, p. 274 et suiv.); — observation de de Folle-ville (ibid. p. 276) ; — projet de décret présenté par Naurissart, au nom du comité des finances (ibid.) ; — motion de l'abbé Maury (ibid.) ; — discussion : Naurissart, Camus, Le Couteulx de Canteleu, abbé Maury, Vernier, Anson, Camus (19 juin, p. 365 et suiv.); — renvoi au comité des finances d'une motion de Camus obligeant le ministre à présenter l'état des dépenses de 1789, l'état de l'acquit et des dépenses des 30 millions, etc. (ibid. p. 367) ; — décret autorisant la remise au ministre de la somme de 30 millions (ibid.). — Compte rendu par Le Couteulx de Canteleu des réclamations adressées au comité des finances sur la circulation actuelle des billets de caisse qui représentent les assignats (29 juin, p. 563) ; — projet de décret (ibid. et p. suiv.) ; — adoption (ibid. p. 564). — Projet de décret autorisant le versement de la somme de 45 millions en billets portant promesse d'assignats (4 juillet, p. 695 et suiv.) ; — adoption (ibid. p. 696).
suiv.) ; — sur les troubles de Perpignan (p. 257), (p. 273). — Proteste contre la lecture d'une lettre relative à la révolution d'Avignon (p. 369). — Parle sur la constitution du clergé (p. 401), — sur le traitement du clergé (p. 444), — sur la question de savoir si Mirabeau jeune doit paraître à la barre ou à la tribune (p. 509), — sur un incident relatif à une demande de congé (p. 617).
Nicolas du Chardonnet et membre de l'Assemblée nationale, de sa signature au bas d'une protestation contre le décret du 13 avril, présentée par une députation du district de Saint-Nicolas du Chardonnet (l*r juin 1790, t. XVI, p. 37et suiv.).—Dénonciation par Fricaud de l'usurpation d'un curé d'Issy-l'Evèque (l'abbé Carion) s'arrogeant le droit d'administrer cette ville selon son bon plaisir, le casque en tète et l'épée au côté (5 juin, t. XVI, p. 120);—renvoi au comité des rapports (ibid.). — Mandement de l'évêque d'Angers (Couet du Viviers de Lorry) signalé par la Réveillère de Lépeaux comme l'œuvre d'un a citoyen patriote» (15 juin, p. 227);—texte de ce mandement (ibid. et p. suiv.);—motion de l'abbé Colaud de laSalcette tendant à l'impression et à l'envoi à tous les départements et à tous les évêques (ibid. page 228);—débat: Alquier, Cortois de Balore, évêque de Nîmes (ibid.);—adoption (ibid.);—rétractation de l'abbé Lapierre de la délibération prise le 20 avril 1790, dans l'eglise des pénitents, par les citoyens catholiques de Nîmes qu'il a eu le malheur de présider (1er juillet, p. 598);—rétractation de l'abbé de Coulmiers de la part prise par lui à la déclaration faite par la minorité contre la constitution du clergé (ibid. p. 604 et suiv.);—incident : de Foucault, abbé de Coulmiers, de Foucault (ibid. p. 605); —rétractation de l'abbé Merceret (7 juillet, p. 735).
mus, Martineau (ibid.) ; — suppression (ibid.) ; — art. 16 et 17 : adoption sans discussion (ibid.) ; — art. 18 : adoption sans discussion (ibid. p. 144) ; — art. 24, 25, 26, 27, 28, 29 et 30 anciens : suppression des art. 24 à 27, et ajournement des articles 28, 29 et 30 (ibid.) ; — art. 19 (ancien 31) : Barrère de Vieuzac, Duquesnoy, Camus, Prugnon, Goupil de Préfeln, Duquesnoy, Duval d'Eprémesnil, Duquesnoy, abbé Grégoire, Duval d'Eprémesnil (ibid. et p. suiv.) ; — adoption (ibid. p. 145) ; — art. 20 : Martineau, Charles de Lameth (ibid.) ; — adoption (ibid.). — Proposition de Martineau concernant une nouvelle rédaction des trois articles relatifs aux vicaires (9 juin, p. 153) ; — renvoi au comité (ibid.) — Titre II : adoption sans discussion de l'art. 1er (ibid ) ; — art. 2 : Grégoire, divers membres (ibid.) ; — adoption (ibid.) : — art. 3 : Martineau, de Bonnal, abbé Jacquemart, Martineau, de Robespierre, Goupil de Préfeln, Le Chapelier, Garat atné, Gaultier de Biauzat, Camus, Barnave, Rew-bell, abbé Grégoire, Duquesnoy, Féraud, Thévenot de Maroise, de Toulongeon (ibid. et p. suiv.); — adoption des art. 3 et 6 (ibid. p. 158); — art. 4 r.abbé Le Borlhe de Grandpré (10 juin, p. 163) ; — adoption (ibid. et p. suiv.) ; — art. 5 : abbé Mougins de Roquefort (ibid, p. 164) ; — adoption (ibid.) ; — art. 7 : abbé Gouttes, Briois de Beaumetz, Camus, abbé Ou-dot (ibid.) ; — adoption (ibid.) ; — débat sur le pro-cès-verbal au sujet de l'art. 9 : abbé Mougins de Roquefort, Martineau, abbé Mougins de Roquefort (11 juin, p. 164) ; — adoption de l'amendement proposé par ce dernier (ibid.) ; — observation de Martineau (ibid.) ; — motion de Camus (ibid.) ; — adoption (ibid.) ; — proposition du comité ecclésiastique tendant à modifier 1 art. 7 du titre II (12 juin, p. 180) ;— discussion : Goupil de Préfeln, Martineau, abbé Gouttes, abbé Oudot, Martineau (ibid. p. 181); — adoption avec amendements (ibid.) ; — art. 8 : Fréteau, de Sérant, abbé Mougins de Roquefort, Moreau, de Sillery, Dumouchel, Prieur, abbé Grégoire, Martineau, abbé Gouttes, Bouche, abbé de Saint-Esteven,de Sillery (14 juin, p. 215 et suiv.) ; — adoption avec amendements (ibid. p. 216) ; — adoption sans discussion des art. 9, 16 (ibid. et p. suiv.) ; — art. 17 (ancien art. 16) : Duquesnoy, abbé Gouttes, abbé Bour don, Lanjuinais, abbé Dillon, Laborde de Méréville, Martineau, de Sillery, Lanjuinais, Treilhard, Goupil do Préfeln, abbé Bourdon, Prieur, Camus, de Foucault (ibid. p. 217 et suiv.) ; — adoption avec amendement (ibid. p. 218) ; — adoption de l'art. 18 sans discussion (ibid.) ; art. 19 r abbé Goulard, abbé Gouttes (ibid.) ; adoption (ibid) ; — adoption des art. 20 et 21 sans discussion (ibid.) ; — art. 22 : Camus, Pi-son du Galand, Thibault, abbé Gibert (ibid. p. 219) ;— adoption (ibid.) ; — art. additionnel destiné à devenir l'art. 23 : Pison du Galand, abbé Gouttes, abbé Gibert (ibid.) ; — adoption (ibid.) ; — art. 24 : abbé Mougins do Roquefort, Martineau, Moreau, Martineau (15 juin, p. 221) ; — adoption d'une addition à l'art. 22 (ibid.) ; — adoption de l'art. 24 (ibid.) ; — art. 25: Pétion de Villeneuve, abbé Grandin, abbé Jacquemard, abbé Guégan, Boutteville, Dumetz, Gérard, Loys, Defermon, Martineau, Pétion de Villeneuve (ibid. p. 221 et suiv.) ; — adoption (ibid. p. 223) ; — art. 26 : abbé Grégoire, chevalier de Murinais, Féraud (ibid.) — adoption (ibid.) ; — adoption sans discussion des art. 27 et 28 (ibid.) ; — art. additionnel proposé par l'abbé Goulard, et devenant l'art. 29 (ibid.); —adoption (ibid.) ; — art. 30 : Moreau, Martineau (ibid!) ;— adoption (ibid. p. 224) ; — adoption sans discussion des art. 31, 33 (ibid.) ; — art. 34 : de Murinais, Garat aîné, Gassendi, Goupil de Préfeln (ibid.) ; — adoption (ibid.) ; — adoption sans discussion des art. 35, 42 (ibid.) ; — art. 43 et 44 : Camus, de Murinais, Camus, abbé Golson , abbé Grégoire, abbé Dillon, abbé Mougins de Roquefort (ibid. et p. suiv.) ; — adoption (ibid. p. 225) ; — titre III, art. 1er : de Robespierre, Alquier, d'André, Fréteau (16 juin, p. 235) ; — adoption de l'art. 1er (ibid.) ; — art. 2 : Ramel, Nogaret, Lanjuinais, Garat aîné, Durand doMaillane, abbé Thibault, abbé Gouttes, Devillas, Garat aîné, Le Chapelier, abbé Grégoire, Bourdon, Regnaud (de Saint-Jean-d Angely) (ibid. et p. suiv.) ; — adoption de l'art, amendé (ibid. p. 236) ; — art. 3 : de Cazalès, de Robespierre, abbé Gouttes, Le Chapelier, marquis de Foucault, Durand
de Maillane (ibid. et p. suiv.) ; — adoption (ibid. p. 238) ; — art. 4 : Camus, Le Chapelier, Charles de La-meth, Garat aîné (ibid.) ; — adoption de l'art, modifié (ibid.) ; — art. 5 : abbé de Marolles, abbé Jacquemart, abbé Gouttes, abbé Jacquemart, abbé Grégoire, abbé Aubert, abbé Jacquemart, abbé Dillon, abbé Jacquemart, abbé Gouttes, abbé Grégoire, Goupil de Préfeln, Gérard, Le Chapelier, de Lachèze, Treilhard, Garat aîné, de Folleville, abbé Gouttes, Prieur, Lavie (11 juin, p. 239 et suiv.); — adoption (ibid. p. 241) ;— article additionnel (ibid. p. 244) ; — rejet (ibid.) ; art. 6 : abbé Grégoire, Martineau, Loys, abbé Gibert (ibid et p. suiv.); — adoption (ibid. p. 245); — art. 7 : Garat aîné, Camus (ibid. p. 246) ; — ajournement (ibid.) ; — art. 8 : de Beauharnais (ibid.) ; — rejet (ibid.) ; — art. 9 et 10 : abbé Simon, abbé Gouttes, d'André, Treilhard, de Liancourt (ibid. et p. suiv.) ; — art. unique proposé par Martineau pour remplacer les art. 9 et 10 (18 juin, p. 273) ; — discussion : d'André, abbé Gouttes, baron d'Allarde (ibid:) ; — l'Assemblée décide qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur les art. 9 et 10, et sur l'art, unique (ibid.) ;—adoption sans discussion des art. 11 et 12(21 juin, p. 398); — art. 13 et 14 : abbé Pons (ibid.)', adoption (ibid. p. 399 et p. suiv.) ; — rejet d'un article additionnel proposé par l'abbé Grégoire, combattu par Martineau, et appuyé par Beauharnais (ibid. p. 400) ; — observations de Bouche et Martineau (ibid) ;— addition proposée par l'abbé Mougins à l'art. 14 (ibid.); — adoption (ibid.)', — adoption de l'art. 15 sans discussion (ibid.); — art. 16: Martineau, abbé Gouttes, Thibault, Lanjuinais (ibid.) : adoption (ibid);— l'assemblée décide une modification dans le numérotage des articles du titre III, nécessitée par le rejet de plusieurs (ibid.) ; — titre IV (de la loi de résidence) : adoption de l'art. 1er sans discussion (ibid.) ;— art. 2, 3 et 4 : abbé Papin, abbé Bourdon, abbé Gouttes (ibid, p. 401); —• art. 5: Lanjuinais, Populus, abbé de la Salcette, Cazalès, de Montlosier, Fréteau, Charles de Lameth, Barnave, Martineau (ibid.) — adoption sauf rédaction (ibid.) ; — art. 6 et dernier: retrait par la commission (ibid.); — reprise par Go-bel (ibid. et p. suiv.) ; — question préalable demandée par Treilhard et combattue par de Virieu (ibid. p. 402) ; — l'Assemblée décide qu'il n'y a pas lieu à délibérer (ibid.) ; — Bouche demande le renvoi au comité de l'art. 14 du titre III pour cause de rédaction ambiguë (22 Juin, p. 404); — Fréteau l'appuie (ibid);— Martineau le combat (ibid.) ; — ordre du jour (ibid.) ; — modification de l'art. 5 du titre IV, divisé en trois articles (ibid.) ; — résumé du rapport par Expilly sur le traitement du clergé actuel (22 juin 1790, t.XVI, p. 407 et suiv.); — discussion: art. 1er: Castellane, Rœderer, Robespierre, de Boij/flers, Treilhard, Dupont (de Nemours), Briois de Beaumetz, Thouret (ibid. p. 408 et suiv.); — Expilly, Delley d'Agier, Stanislas de Clermont-Tonnerre , Ricard (de Castres), Potion, de Cazalès, Chasset (23 juin, p. 439 et suiv.);—Le Chapelier, Lucas, abbé Grégoire, Per-rotin (ci-devant abbé de Barmond), Delley d'Agier, Chasset, Rœderer, de Lafayette, Rœderer, Robespierre, Charles de Lameth, Loys, Lucas, Martineau, Sallé de Choux, de Bousmard (ibid. p. 445 et suiv.) ;—adoption de l'art. 1er du comité amendé par Martineau (ibid. p. 446); -— substitution, à la demande de Martineau, du mot métropolitain à celui d'archevêque dans l'art. 1er 24 juin, p. 448); — suite de la discussion; art. 2: Delley d'Agier, Ricard de Séalt, Bouche, Loys, de Crilion (de Beauvais), Le Chapelier, d'Ailly, Martineau, Camus (ibid. p. 449) ; — adoption (ibid.) ; art. additionnel relatif aux évêques in parlibus : Camus, abbé Perrotin, Coche-let, Camus (24 juin, p. 451 et suiv.) ; — question préalable (ibid. p. 452) ; — art. 33 : abbé Jallet (ibid.) ;— adoption d'un amendement proposé par ce dernier (ibid.) ; — amendement proposé par Camus: Martineau, Camus (ibid.) ; — renvoi au comité (ibid.) ; — renvoi, comme conséquence, des art. 4, 5 et 6 sur la demande de Chasset (ibid.) ; — adoption de l'art. 3 amendé (ibid.); — art. 7: Delley d'Agier, de Sérent, Pison du Galand, de Brémond d'Ars, abbé Mathias, abbé d'Eymard, de Grillon (de Beauvais), de Foucault, Ricard de Séalt (ibid. et p. suiv.) ; — adoption (ibid. p. 453) ; — amendement à l'art. 7, par Prugnon (25 juin, p. 453) ; — renvoi au comité (ibid.) ;
— autre amendement par Bouche (ibid.) ; — renvoi au comité (ibid.) ; — adoption des art. 4 à 8 (26 juin, p. 472) ; — renvoi d'un article additionnel au comité (ibid.) ; — art. 9 : Barnave, Martineau, Duport, Martineau, Chasset, Delley d'Agier, Camus, de Bonnal, Camus (ibid. et p. suiv.) ; — adoption de l'art, amendé (ibid. p. 473) ; — Chasset, sur le procès-verbal, attaque une disposition de cet article, que défend Camus (27 juin, p. 506) ; — question préalable (ibid.) ; — articles additionnels : premier de ces articles destiné à devenir l'art. 11 (28 juin, p. 532 et suiv.) ; — adoption (ibid. p. 533); — deux autres articles additionnels : Camus, Chasset, Lanjuinais, Camus, Martineau (ibid.) ; — ajournement à huitaine (ibid) ; — art. 8 (devenant l'art. 12) (ibid.) ; amendement de l'abbé Bourdon (ibid.) ; — renvoi au comité ecclésiastique (ibid ) ; — amendement de Dupont (de Nemours) (ibid.) ; — rejet (ibid.) ; — amendement de Dumouchel (ibid.) ; — renvoi au comité ecclésiastique (ibid.) ; — adoption de l'art. 12 (ibid. et p. suiv.) ;— art. 9 : Bouche, abbé Gouttes, abbé Bourdon, Chasset (ibid. p. 533) ; —question préalable (ibid. p. 534) ; — art. 10 : Martineau, Bouche, Duquesnoy, abbé Gouttes (ibid.) ; — Camus propose un article qui deviendrait l'art. 13. (ibid.) ; — adoption (ibid.) ;— nouvelle rédaction de l'art. 10, devenant l'art. 14 (ibid.);— adoption (ibid.) ; — art. 11 : Fricaud, Martineau, Démeunier, de Toulongeon, Lucas (ibid. et p. suiv.) ; — motion de Bobespierre (ibid. p. 535) ;— question préalable (ihid.) ; — rejet de l'art. 11, à la demande ne Lucas (ibid.) ; — adoption de l'art. 15 (29 juin, p. 565) ; — art. 12 devenant l'art. 16 : Bouche, Delley d'Agier, Chasset (ibid.) ; — adoption (ibid.) ; — art. 13, destiné à devenir l'art. 17 : Mé-volhon, Martineau, Chasset (ibid. p. 566) ; — ajournement (ibid. p. 567); — art. 14 devenant l'art. 17 : Chasset, abbé Gouttes, Lavie, Martineau, abbé Gibert Treilhard, abbé Gibert (ibid.) ; — adoption (ibid.) ;— art. 15 devenant l'art. 18 (ibid.) ; — adoption (ibid.);— art. 16 devenant l'art. 19 : de Jessé, Delley d'Agier, Crilion jeune, Treilhard, abbé Thibault, Martineau, abbé Grandin, Chasset, Camus (ibid. et p. suiv.);— adoption (ibid. p. 568) ; — demande de l'abbé Gouttes relative au sort de l'évêque de Babylone (30 juin, p. 576) ; — renvoi au comité des pensions (ibid.) ; — art. 17 devenant l'art. 20 : Camus, Chasset (ibid. p. 577) ; — adoption (ibid.) ; — art. 18 et 19 devenant les art. 21 et 22 : Gourdan, Treilhard, d'Estourmel, Duquesnoy, Camus, Cochard, abbé Lompré, Populus, Chasset, Tronohet (ibid. et p. suiv.); ajournement et renvoi au comité (ibid. p. 578) ; — adoption de l'art. 20 devenant à son tour l'art. 21 (ibid.) ; — art. 21 devenant l'art. 22: de La Chaise, abbé Julien, Tronchet (ibid.) ; — adoption (ibid.) ; — art. 23 : Chasset, Begnaud (de Saint-Jean-d'Angely), Lucas, abbé Mougins, abbé Mayet (ibid. et p. suiv.);— adoption (ibid. p. 579); art. 24 : Martineau, abbé Bourdon, Bouche, Chasset, abbé Gibert, Martineau (ibid.) ; — adoption (ibid.) ; — adoption des articles 25 et 26 (ibid.) ; — suite du rapport de Durand de Maillane sur le projet de décret relatif aux fondations et patronages laïques (Ier juillet, p. 588 et suiv.) ; — débat préliminaire : Loys, Mougins de Bo-quefort (ibid. p. 594) ; — discussion : Andrieu, Treilhard, Delandine, Barrère, Camus, abbé Charrier, Regnaud (de Saint-Jean-d Angely), Legrand, Martineau, Durand de Maillane (ibid. et p. suiv.) ; Treilhard, de Sérent, do Croix (ibid. p. 600 et. suiv.) ;— présentation, par Durand de Maillane, d'une nouvelle rédaction des articles (2 juillet, p. 615) ; discussion sur l'article l«r : abbé Mougins de Roquefort, abbé Bourdon (ibid.); — adoption (ibid.); — art. 2: abbé Boudard, de Lachèze, de Fumel, Durand de Maillane (ibid. p. 616) ; — adoption (ibid.) ; — adoption des articles 3 et 4, avec un amendement de Bouchotte (ibid.); — art. 5 : abbé Papin, Durand de Maillane Delandine, Barrère, Martineau, Camus (ibid.) ; — adoption (ibid) ;—présentation, par un membre, d'un article additionnel: Delandine, abbé Papin (ibid.) ;— renvoi au comité ecclésiastique (ibid.)
— sur la perception des dîmes et champarts (p. 244), sur le traitement du clergé (p. 449), (p. 453), — sur les vainqueurs de la Bastille (p. 465), — sur le traitement du clergé (p. 568), — sur les troubles de Tabago (p. 599), — sur des désordres commis en mer (p. 679),— sur les diocèses (p. 718).
suiv.) ; — discussion : Camus, Fréteau, Dupont (de Nemours) (ibid. p. 179 et suiv.) ; — décret (ibid. p. 180). — Rapport par Lebrun sur la régie générale (droits sur les boissons, sur les cuirs, etc.) (12 juin, p. 192) ; — projet de décret (ibid.)\ — discussion : Fréteau, Lebrun (ibid. p. 193);—adoption (ibid.) ; —rapport par Lebrun sur la dépense de la régie générale des do-- maines (ibid. et p. suiv.) — Projet de décret (ibid. p. 195) ; — discussion : Fréteau, de Richier, Lebrun, Camus, Fréteau, Lebrun, Camus, baron d'Elbeck, Camus (ibid. et p. suiv.); — adoption d'un projet de décret rédigé par Camus et formant l'art. 1er (ibid. p. 196); — adoption sans discussion des art. 2, 3 et 4 (19 juin, p. 368); — art. 5: Le Couteulx. de Canteleu, Hernoux, Regnaud (de Saint-Jean d'Angély), de La-chèze, Martineau (ibid.) ; — ajournement (ibid.) ; — Lebrun, au nom du comité des finances, demande le rétablissement d'un article concernant le traitement des régisseurs généraux et supprimé à la demande de Camus (ibid.) ; — discussion : Fréteau, Charles de La-meth, Fréteau (ibid. et p. suiv.) ; — adoption avec amendement (ibid. p. 309) ; — administration des postes ; —adoption sans discussion des quatre articles y relatifs (ibid.)', —addition à ces quatre articles (21 juin, p. 395); — nouvelle rédaction de l'art. 5 du décret concernant la régie générale des domaines (21 juin, p. 397); — rapport par Lebrun et projet de décret sur le régime de la loterie (3 juillet, p. 682 et suiv.); — discussion : Fréteau, Lebrun, Pison du Galand, Dupont (de Nemours) (ibid. p. 683 et suiv.) ; — adoption au projet amendé (ibid. p. 684) ; projet de décret concernant les payeurs des rentes (4 juillet, p. 697) ; — discussion: d'André, Mouginsde Roquefort, deVirieu, Regnaud (de Saint-Jean d'Angély), d'André (ibid.);— ajournement (ibid.)', — adoption d'une motion de d'André sur la fixation du traitement des payeurs de rentes (ibid.).
Nauthou, Boislandry, Prudhomme, Boislandry, Mau-petit, Allard, Boislandry, Massieu, Boislandry, Bou-chotte, Marie de Laforge, Jaillant (ibid. et p. suiv.) ;— Boislandry, Baucheton, Legrand, Boislandry, Loys, Boislandry, Morin, Boislandry, Cavailhez, Boislandry, Durand de Maillane, de Sinéty, Bouche, Boislandry, abbé Peretti, Salicetti, Boislandry, Mougins de Roquefort, Mévolhon, Solliers, Boislandry, abbé Rolland (7 juillet, p. 740 et suiv.) ; — Boislandry, Soustelle, Chambon de Latour, Boislandry, Rocque, de Jessé, Boislandry, Chabroud, Boislandry, Sancy, Repoux, Merle, Boislandry (8 juillet, p. 745 et suiv.) ; — l'Assemblée décrète que tous les autres évêchés existant dans les 83 départements du royaume et qui ne sont pas nommément compris dans ies articles précédents, demeurent supprimés (ibid. p. 746) ; — articles relatifs aux métropoles : Moreau, d'Estourmel (tdtd. p. 753); — adoption (ibid.).
— renvoi aux comités des domaines, finances et impositions (ibid.).
f>. 43), (p. 144);— son opinion, non prononcée, sur a suppression des chapitres de femmes (p. 149 et suiv.); — parle sur le constitution du clergé (p. 158), • (p. 217), — sur la perception des dîmes et champarts
(p. 244), — sur le tratement du clergé (p. 534), (p. 577), — sur le duc d'Orléans (p. 720).
troupes (t. XYI, p. 449 et suiv.); — le défend (p. 450).
Vezelay et Valay, adoption de projets de décrets (12 juin, p. 185).
Monton. Adoption d'un projet de décret (13 juin p. 204). '
Lysving, Saint-Flour et Baron : adoption de trois projets de décrets (23 juin, p. 438).
Lyon. Adoption d'un projet de décret (25 juin, p. 454).
Montbrison. Confirmation du décret rendu le 30 juin et contesté par 150 habitants de cette ville (lor juillet, p. 587).
Cambray. Adoption d'un projet de décret (3 juillet, p. 676).
Arras. Adoption d'un projet du décret (6 juillet, p. 713).
Louviers et Saint-P or quier. Adoption de deux projets de décrets (8 juillet, p. 745).
nobleise (p. 374 et suir.), (p. 376),—sur la police de l'Assemblee (p. 392), — sur les congés (p. 617).
(ibid. p. 690) ; — discussion : Robespierre, Charles de Lameth, Nompère de Champagny, Charles de Lameth, Muguet de Nanthou (ibid. et p. suiv.) ; — adoption de la proposition (ibid. p. 691). — Projet de décret présenté sur les apprêts de la fédération (4 juillet, p. 696) ; — adopiion (ibid.). — Projet de décret sur le serment à prêter par les fédérés (ibid.);— adoption de ce projet et d'un amendement de Barrère portant que l'Assemblée ne prendra aucune délibération hors du lieu de ses séances (ibid.). — Rapport des commissaires de la municipalité de Paris sur les préparatifs et l'emplacement de la fête (ibid. p. .698 et suiv.). — Addition à la formule du serment proposée par de Tracy (5 juillet, p. 699) ; — discussion : Garat aîné, Goupilleau, Mathieu de Montmorency (ibid.) ; — renvoi au comité de constitution (ibid.). — Décret réglant l'admission à la barre des députés à la fédération (8 juillet, p. 745). —De Menou propose de décréter que le roi est le chef de la fédération et qu'il désignera les officiers chargés de conduire sous ses ordres les gardes nationales et les troupes réglées (ibid. p. 476); — débat : Dupont, Martineau (ibid.) ; — ordre du jour (ibid.). — Noms des 12 membres de l'Assemblée nationale devant assister au Te Deum du 13 juillet (ibid. p. 752).
Rouen. Fait un rapport sur le commerce de l'Inde (t. XVI, p. 543 et suiv.).
— sur les troubles de Ntmes (p. 255), — sur l'arrestation de Toulouse - Lautrec (p. 462). — Secrétaire (p. 691). — Parle sur le serment de la fédération (p. 699), — sur l'organisation judiciaire (p. 101), (p. 704), (p. 739 et suiv.), (p. 740), (p. 748).
rétractation de la signature apposée par lui au bas de la Déclaration contre le décret du 13 avril 1790 (p. 740).
er juillet 1790, t. XVI, p.
587 et suiv.).
(p. 376), — »ur le traitement du clergé (p. 446), — -— sur le duc d'Orléans (p. 720).
son des princes, frères du roi (p. 111), — sur la dépense des affaires étrangères (ibid.), — sur la dépense des ponts et chaussées (ibid. et p. suiv.), — sur les traitements des ministres et conseil du roi (ibid. p. 112 et suiv.); — défend ce dernier rapport (p. 113), (p. 114). — Fait des rapports sur les cours supérieures et juridictions diverses (p. 123), — sur les acquits-patents (p. 123 et suiv.), — sur les dépenses portées sous le nom de gages et de traitements (p. 124), — sur les dépenses de la police de Paris (p. 125), — sur les pensions des officiers et soldats de la garde de Paris (ibid.), — sur la maréchaussée de l'Ile-de-France (ibid. et p. suiv.), — sur la dette publique (p. 172), (p. 174 et suiv.), (p. 192 et suiv.). (p. 368), — sur les loteries (p. 682 et suiv.), (p. 683),— sur les payeurs des rentes (p. 697).
p. 26) — Parle sur les ponls et chaussées (p. 112),— sur la mort de Franklin. (p. 170), — sur la perception des dîmes et champarts (p. 244), — sur les biens nationaux (p. 471),— sur les fondations, et patronages laïques (p. 598); — sur les diocèses (p, 740).
(p. 603 et suiy.). — Parle sur des délits commis en mer (p. 693), — sur une motion relative à la sanction (p. 726), — sur l'altération des décrets (ibid.).
les étrangers de la prohibition des livrées et des armoiries (p. 393). —Parle sur le parlement de Dijon (p. 396), — sur la constitution au clergé (p. 400), (p. 401), (p. 404), — sur le traitement du clergé (p. 446), (p. 449), (p. 452),— sur les biens nationaux (p. 455), (p. 456), (p. 458), — sur la suppression des ordres (p. 464), — sur le traitement du clergé p. 473), (p. 533), (p. 534), (p. 567), (p. 568), - sur a mise en activité des nouveaux corps administratifs (p. 576), — sur le traitement du clergé (p. 579),— sur les fondations et patronages laïques (p. 598), —sur les élections municipales (p. 604), — sur les droits féodaux (p. 677), — sur une motion relative à la fédération (p. 746).
au sujet de la police des spectacles (p. 153), — sur la liste civile (p. 159), — sur les troubles de Nîmes (p. 231). —Répond, comme président, à des députations (p. 373), (p. 378). — Demande que les auteurs de la protestation contre la constitution du clergé la rétractent (p. 403). — Parle sur les vain- 3ueurs de la Bastille (p. 464). — Demande la création 'un ordre national (ibid.), — la nomination, par le roi, des officiers chargés de commander les gardes nationales et les troupes réglées fédérées (p. 746).
Perpignan (p. 272), — sur la police de l'Assemblée (p, 392).—Fait un rapport sur l'affaire des procé-ures suivies par la cour des aides au sujet des barrières brûlées (p. 605 et suiv.).— Parle sur les diocèses (p. 719).
les villes, bourgs et paroisses, portant des noms de famille imposés par des seigneurs, à reprendre leurs noms anciens (20 juin 1790, t. XVI, p. 389) ; — adoption (ibid.).
paux de Sauveterre (l,r juin 1790, t. XVI, p. 27) ; — discussion : Mourot, Darnaudat (ibid. et p. suiv.); adoption (ibid. p. 28). — Annulation des arrêts rendus par le parlement de Toulouse les 11 décembre 1789, 12 janvier et 30 mars 1790, à l'occasion du renouvellement des consuls de la ville de Mirepoix (1" juin 1790, t. XVI, p. 38). — Rapport par Vieil-lart sur un jugement rendu par le parlement de Navarre contre le sieur Laugar (12 juin, p. 202 et suiv.); — projet de décret (ibid. p. 203) ; — discussion : Bouche, Dufraisse-Duchey, Barnave (ibid.) ; — adoption du projet de décret amendé (ibid.) — Motion d'Arnoult tendant à une réorganisation du parlement de Dijon (21 juin, p. 395); — discussion : Brillat-Savarin, d'André, Mougins de Roquefort, Arnoult, Defermon, Populus, Martineau (ibid. et p. suiv.) ; — décret (ibid. p. 396).
Regnaud (de Saint~Jean~d'Angély), Le Pelletier (ibid. et p. suiv.) ; — adoption (ibid. p. 703) ; — art. 10 : Goupil de Préfeln, Gourdan (ibid.) ; — adoption avec amendement (ibid.) ; adoption de l'article 11 sans discussion (ibid.); — art. 12 : Barnave, Prieur, Bouchotte, Garat aîné, Thouret, Fréteau, Thouret (ibid. p. 704) ; — adoption avec amendement (ibid.) ; — adoption de l'article 13 sans discussion (ibid.) ;— article 14 : Garat aîné, d'André, Drévon, Loys, Pison, Prieur, Lucas, Thouret (ibid. et p. suiv.); — adoption (ibid. p. 705) ; — art. 15 : Pison, Fréteau, Thouret, Tronchet (ibid.) ; — adoption avec amendement (ibid,); adoption de l'article 16 sans discussion (ibid.);— art. 17: Pison, Pellerin de la Buxière (ibid.);— adoption avec amendement (ibid.) ; — adoption de l'article 18 sans amendement (ibid.); — art. 19 : Chabroud, de La Rochefoucauld, Régnier, Bouche (ibid.); — adoption (ibid.); — adoption de l'article 20 sans discussion (ibid. p. 706) ; — art. 21 : Bouche, Barnave (ibid.) ; — adoption avec amendement (ibid.); — titre II : Thouret (7 juillet, p. 737 et suiv.); — art. 1er : Pétion, Prugnon, Chabroud, Dubois de Crancé, Dufraisse-Duchey, d'André, de Montlosier, Thouret (ibid. p. 738 et suiv.); — adoption (ibid. p. 739) ; — art. 2 : Garat aîné, d'André, Garat aîné, :. Démeunier, Barnave (ibid. et p. suiv.) ; — adoption avec amendement (ibid. p. 740); — art. 3 : Fréteau, Boutteville-Dumetz , Chabroud, Mougins, Lanjuinais,Thouret(8 juillet, p. 746 et suiv.);—adoption (ibid. p. 747); — adoption sans discussion des articles 4 et 5 (ibid.); — art. 6 : Rewbell, Chabroud, abbé Bourdon (ibid.); adoption avec amendement (ibid.); — adoption de l'article 7 sans discussion (ibid.) ; — art. 8 : Pérez de Lagesse, Thouret, Barnave, Thouret (ibid.); adoption (ibid.); — art. 9 : Thouret, obbé de Chabanettes, Gjtrataîné, Pison, Loys, Chabroud, Démeunier, de Montlosier, Lucas, Sentetz, de Montlosier, Pison, Thouret (ibid. p. 747 et suiv.) ; — adoption (ibid. p. 749).
30 juin, lu par Robespierre pour être revisé dans sa rédaction (ler juillet 1790, t. XVI, p. 587 et suiv.); — adoption (2 juillet, p. 607). —
Réclamation de Charles de Lametn contre le procès-verbal du 3 juillet (5 juillet, p. 699) ; —
débat : Delley d'Agier, Bouche (ibid.);— adoption du procès-verbal (ibid.). — Bouche et l'abbé
Grégoire demandent l'inscription des noms de l'abbé Merceret et de l'abbé Coulmiers, qui ont
rétracté leur adhésion à la Déclaration contre le décret du 13 avril dernier (7 juillet, p.
740); — adoption (ibid.).
des troubles dans les départements du Cher, de la Nièvre et de la Corrèze (t. XVI, p. 41).
de Langres. Parle sur la constitution du clergé (t. XYI, p. 143), (p. 158).
tant pour la Corrèze que pour les autres départements, ne concerne point les troubles antérieurs au 1er mai (ibid.). — Mémoire des députés de la ville de Tulle relatif aux troubles du Bas-Limousin (ibid. p. 51 et suiv.). — Adoption d'un projet de décret présenté par Fricaud au sujet des troubles dans les bailliages de Bourbon-Lancy et de Charolles (5 juin, p. 110). — Affaire concernant la municipalité de Saint-Jean-de-Luz (ibid. p. 120) ; — ajournement (ibid.). — Nouvelles données par Castellanet de l'exécution du décret relatif à la suspension de la démolition de la citadelle de Saint-Nicolas à Marseille (6 juin, p. 123) ; — renvoi au comité des rapports libid.). — Résumé par Boullé de l'affaire de Saint-Jean-de-Luz (8 juin, p. 147);— projet de décret présenté au nom du comité des rapports, combattu par de Macaye (ibid.)', — adoption d'un autre projet de décret présenté par ce dernier (ibid.). — Rapport par Henry de Longuève sur une affaire relative à la municipalité de Schelestadt (ibid. p. 148) ; — discussion : Voidel, Barnave (ibid.);— décret (ibid. et p. suiv.). — Rapport par le baron de Menou sur les troubles de Montpellier (ibid. p. 152);>— projet de décret (ibid.) ; — discussion : Loys, d'Au-bergeon de Murinais (ibid.) ; — adoption (ibid. p. 153).— Rapport par le baron de Menou sur des contestations survenues entre les canonniers-matelots du corps de la marine, les grenadiers et les fusiliers des régiments de Beauce et de Normandie, en garnison à Brest, à l'occasion de la police des spectacles (ibid.) ;— décret (ibid.). — Des habitants de Tabago, résidant en France, demandent le renvoi au comité colonial des pièces relatives aux troubles existant dans cette colonie (12juin, p. 202) ; — renvoi (ibid.). — Rapport par de Macaye sur les troubles de Nîmes (15 juin; p. 229); — interruptions : de Lachèze, abbé Maury, de Macaye, comte de Faucigny-Lucinge, Le Chapelier, de Macaye, comte de Faucigny-Lucinge, de Macaye, baron de Marguerittes, comte de Faucigny-Lucinge, comte de Mirabeau, Duval d'Éprémesnil, comte de Mirabeau, Duval d'Éprémesnil, ftewbell, Duval d'Éprémesnil,comte de Faucigny-Lucinge, comte de Mirabeau, de Menou, de Lachèze, Voidel, de Macaye (ibid. p. 230 et suiv.) ; — projet de décret de comparution et d'information (ibid. p. 232); — discussion : Alexandre de Lameth, Malouet, comte de Mirabeau, Malouet, Cor-tois de Balore, Garat aîné, baron de Marguerittes, Barnave (17 juin, p. 250 et suiv.) ; — adoption (ibid. p. 256). — Lettre des conseillers municipaux d'Avignon demandant la réunion de cette ville à la France (ibid.) ; — l'Assemblée, sur la proposition d'Alexandre de Lameth, décide que cette lettre sera communiquée au roi (ibid.). —Lettre des officiers municipaux de Perpignan sur les troubles de cette ville (ibid. et p. suiv.) ", — discussion : Terrats, de Cazalès, de Foucault, Rœderer (ibid. p. 257) ; — décret de mise en liberté du maire de Perpignan (ibid.) ; — compte rendu de sa propre arrestation, par le vicomte de Mirabeau (18 juin, p. 265 et suiv.) ; — pièces à l'appui (ibid. p. 270 et suiv.) ; — discussion : de Folleville, abbé Maury, d'André, Muguet de Nanthou, Goupil de Préfeln, Malouet, de Cazalès, Devillas, de Folleville, Prieur (ibid. p. 272 et suiv.) ; — décret renvoyant les pièces aux comités des rapports et militaire, et demandant les ordres nécessaires pour la sécurité du vicomte Mirabeau (ibid. p. 273) ; — modification de ce décret, à la demande du comte de Mirabeau,appuyée par Prieur (19 juin, p. 363 et suiv.) ; —lettre des officiers municipaux de Perpignan, annonçant la mise en liberté du maire de cette ville (ibid. p. 364). — Relation des troubles de Nîmes présentée par Voulland (21 juin, p. 402) ; — motion tendant à continuer leurs pouvoirs jusqu'au rétablissement du calme aux commissaires pour la formation du département (ibid.) ; — discussion : de Marguerittes, Voulland (ibid.) ; — motion de Barnave tendant à mettre aux mains de ces commissaires la disposition des forces militaires ( ibid. ) ; — discussion : de Virieu, Cortois de Balore, de Montlosier, Fréteau, de La Rochefoucauld, Corlois de Balore, de Marguerittes, Youlland, de Rochebrune, Rewbell (ibid. et p. suiv.); — amendement de de Menou tendant àamener les auteurs de la protestation contre la constitution du clergé à la rétracter (ibid. p. 403); — discussion : de Montlosier, de Menou, de Montlosier (ibid.) ; — adop-
tion du projet de décret de Barnave (ibid. et p. suiv.).— Lettre des officiers du régiment de Touraine inculpant le vicomte de Mirabeau pour mutilation de drapeaux (23 juin, p. 444 et suiv.) ; — renvoi aux comités des rapports et militaire (ibid. p. 445). — Annonce par Viguier de l'arrestation à Toulouse de Toulouse-Lautrec (24 juin, p. 451); — renvoi au comité des recherches (ibid.); — rapport par Voidel (25 juin, p. 458 et suiv.) ; — projet de décret (ibid. p. 461); — discussion : d'Ambly, de La Rochefoucauld, Garat aîné, Robespierre, Fréteau, Robespierre, Pétion, Viguier (ibid. et p. suiv.) ; — renvoi aux comités de constitution et des recherches pour la présentation d'un projet de décret sur l'inviolabilité des députés et l'affaire pendante (ibid. p. 464); — rapport par Démeunier (26 juin, p. 466);— projet de décret (ibid.); —discussion : d'André, Fréteau, Briois de Beaumetz, Démeunier, Gourdan, Loys (ibid. et p. suiv.) ; — adoption du projet amendé (ibid. p. 467). — Dépôt sur le bureau de pièces relatives aux troubles de Nîmes Iibid. p. 470). —Lettre de Mirabeau le jeune se déclarant prêt à venir se défendre (ibid. p. 476);— ajournement au lendemain (ibid.); — introduction de trois députations : du régiment de Touraine infanterie, en garnison dans la ville de Perpignan ; de la municipalité de Perpignan et des gardes nationales de la même ville (ibid. p. 478); — exposé justificatif de la conduite du régiment depuis le 19 mai jusqu'au 11 juin 1790, par Aboul, député du régiment de Touraine (ibid. et p. suiv.); — discours de Vergés, député de la commune de Perpignan (ibid. p. 480 et suiv.);— discours de Siau, député de la garde nationale de Perpignan (ibid. p. 481); — réponse du président (Le Pelletier) (ibid.); — renvoi des pièces déposées sur le bureau aux comités militaire et des rapports (ibid.).— Récit des événements arrivés à Nîmes les 13, 14, 15, 16 et 17 juin 1790, envoyé par l'administration du département du Gard (ibid. p. 482 et suiv.); — renvoi de cette pièce, sur la démande de Cortois de Balore, aux comités des recherches et des rapports (ibid. p. 483). — Réplique de Mirabeau le jeune à la réponse qui lui a été faite au nom du régiment de Touraine (26 juin, p. 504 et suiv.). — Lettre des officiers municipaux de Nîmes, signataires du compte rendu des derniers événements, annonçant leur intention de donner leur démission (27 juin, p. 509); — Cortois de Balore demande des secours pour les ouvriers de cette ville sans ouvrage (ibid.); — débat : abbé Gouttes, Le Deist de Botidoux (ibid.) : — ordre du jour (ibid.) ; —Mirabeau le jeune fait demander s'il doit paraître à la barre ou à la tribune (ibid.);—débat : Cazalès, Mirabeau ainé [ibid.); —Mirabeau le jeune, à la tribune (ibid. et p. suiv.); — renvoi de sa justification aux comités des rapports et militaire réunis (ibid. p. 512) ; — annexes à la décharge et à la charge de Mirabeau le jeune (ibid. et p. suiv.).— Nouveaux détails donnés par Voulland sur les troubles de Nîmes (28 juin, p. 539) ; — lettre de Vigier-Sarrazin,président de l'assemblée électorale (ibid. elp. suiv.);—proclamation des officiers municipaux de la ville de Pont-Saint-Esprit (30 juin, p. 576). — Troubles à l'occasion de l'affiliation des gardes nationales de Ris et de deux autres communes avec celle de Corbeil (l*r juillet, p. 587); — renvoi au comité chargé d'une affaire relative à l'organisation de la municipalité de Ris (ibid.). — Mémoire du régiment de Guyenne infanterie rendant compte de sa conduite à Nîmes, pendant les troubles, du 13 au 17 juin 1790 (3 juillet, p. 685 et suiv.; ; — attestations des commissaires de l'assemblée administrative du département du Gard et des officiers municipaux de la ville de Nîmes (ibid. p. 687) ; — Béthizy de Mézières, évêque de Nimes, demande que les personnes mandées à la barre par le décret du 17 juin, soient dispensées de cette comparution (ibid.); — l'anbé Royer démande que l'évêque désapprouve par un mandement les doctrines qui prévalaient à Nîmes et à Uzès (ibid.);—ordre du jour (ibid.); — Paul Nairac demande la lecture du rapport sur l'envoi de la garde nationale de Bordeaux à Moissac lors des troubles de Montauban (8 juillet, p. 689); — renvoi au comité des rapports (ibid.). — Rapport de l'affaire de Haguenau par Victor de Broglie (ibid. p. 691); — décret (ibid. et p. suiv.).— Dépôt par Mirabeau le jeune de nouvelles pièces
relatives à l'insurrection do régiment de Touraine (ibid. p. 706); — texte de ces pièces (ibid. p. 707 et suiv.).—Cessation des troubles de Ris (6 juillet, p. 725). — Alarmes de la ville de Grenoble au sujet d'un camp en formation en Savoie (6 juillet, p. 726) ; — débat : Barnave, de Foucault, Barnave (ibid.) ;— décret (ibid.). — Troubles dans la ville de Soissons (8 juillet, p. 753); — le comité des recherches est chargé d'en rendre compte (ibid.).
fis de la table alphabétique et analytique du tome xv i.
Paris. —Imprimerie PAUL DUPONT, 41, rue Jean-Jacques-Rousseau. (15.8.83).