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ARCHIVES PARLEMENTAIRES
IMP. PAUL DUPONT, 4, rue du Bouloi. — Paris, 1er Arrt. — 166.6.1902 (Cl.)
ARCHIVES PARLEMENTAIRES DE 1787 A 1860
RECUEIL COMPLET DES DÉBATS LÉGISLATIFS ET POLITIQUES DES CHAMBRES FRANÇAISES IMPRIMÉ PAR ORDRE DU SÉNAT ET DE LA CHAMBRE DES DÉPUTÉS fondé par MM. MAVIDAL et E. LAURENT CONTINUÉ PAR
M. L. LATASTE chef-Adjoint du Bureau des procès-verbaux et de l'expédition des lois de la Chambre des Députés M. LOUIS CLAVEAU secrétaire-rédacteur de la Chambre des Députés
M. CONSTANT PIONNIER Sous-Bibliothécaire de la Chambre des Députés M. ANDRÉ DUCOM Archiviste paléographe, Commis principal du Bureau des archives de la Chambre des Députés
PREMIÈRE SÉRIE (1787 à 1799)
TOME LXI Du
PARIS IMPRIMERIE ET LIBRAIRIE ADMINISTRATIVES ET DES CHEMINS DE FER PAUL DUPONT, Éditeur 4, RUE DU BOULOI,4
1902
NOTE
Nous rappelons au lecteur, ainsi que nous l'avons dit au début de la publication des séances de la Convention (Tome LU), qu'en vue de donner un compte rendu de chaque séance aussi complet que possible, nous nous servons du Procès-verbali qufest notre premier guide, comme le seul compte rendu officiel, authentique, des débats de l'Assemblée. Ce procès-verbal est celui qui, à partir du 17 juin 1789, fut imprimé sur l'ordre de l'Assemblée constituante. Il porte la signature du président et des secrétaires. Nous en avons collationné les épreuves avec la minute originale qui se trouve déposée aux Archives de la Chambre des députés.
Nous y ajoutons les développements donnés par les Annales patriotiques, l'Auditeur national, VAssemblée nationale (Perlet), le Bulletin de la Convention, le Défenseur de la Constitution, le Journal des Débats et des décrets, le Logotachigraphe, le Mercure universel, le Moniteur universel et le Point du Jour ou premier journal de la Convention nationale.
Nous nous sommes servis, pour contrôler le texte des lois qui figurent dans notre Recueil, de la réimpression qu'en a faite Duvergier, après nous être assurés, par une comparaison sévère avec le texte dè la collection Baudouin, que cette réimpression était fidèle.
Nous continuons à indiquer, par des notes au bas des pages, les sources où nous puisons tous les documents, discours, rapports in extenso que nous retrouvons, pour la plus grande partie, soit aux Archives nationales, soit à la Bibliothèque nationale, soit dans la collection des textes imprimés par ordre de l'Assemblée, réunis par le conventionnel Portiez (de l'Oise), et qui se trouvent à la Bibliothèque de la Chambre des députés.
Pour les développements empruntés aux différents journaux, nous continuons également à distinguer les additions qui y sont faites, par une note indiquant, au début de chaque paragraphe intercalé, le nom du journal auquel le texte est emprunté. Lorsque nous n'avons pas le texte exact d'un discours dont l'auteur a joué un rôle important sous la Révolution, nous etablissons.ee texte en coordonnant les journaux de l'époque, et pour permettre au lecteur de comparer les différences qui existent entre chacun d'eux, nous donnons en Annexe la version de ces divers journaux.
Séance du dimanche,
présidence de jean debet, président.
La séance est ouverte à dix heures 35 minutes du matin.
, secrétaire, donne lecture des lettres, adresses et pétitions suivantes :
1° Lettre des maire, officiers municipaux et membres du conseil général de la commune de Paimpol (1) par laquelle ils adhèrent aux décrets de la Convention nationale. Ils adressent en outre, au ministre de la guerre, 65 paires de bas,, 3 chemises et 3 capotes pour les postes des côtes. ( Faites respecter, disent-ils, en vous la majesté du peuple, et si on l'outrage, un mot peut suffire pour faire voler près de vous un million d'hommes. »
(La Convention décrète la mention honorable et ordonne l'insertion de la lettre au Bulletin.)
2° Adresse des membres du tribunal de district de Pont-Sai&t-Esprit pour exprimer leurs regrets sur la mort de Michel Lepeletier. Cette adresse est ainsi conçue (2) :
Pont-Saint-Esprit, le 25 mars 1*793, l'an II de la République.
« Citoyens Législateurs,
« Louis Capet et son satelliter Pâris ne sont plus; l'un fut un roi
parjure : vous en fîtes bonne justice; grâces vous soient rendues!
L'autre fut un vil assassin qui se la fit lui-même; mais en différant de
supplice, ils nous ont inspiré la même horreur.
ve série. t. lxi.
Ils ne nous laissent d;autres regrets que la perte de Michel Lepeletier. Ces regrets seront éternels. Et puisque la malheureuse vérité fut de tous les temps, l'épitaphe réservée pour le tombeau des morts, que la République l'écrive en pleurant, sur celui de Lepeletier : qu'il scella de son sang et la chute des rois et le bonheur des Français.
« Les membres du tribunal du district de Pont Saint-Esprit.
« Signé : Chamet, président; Cambon, juge; Flandin, greffier.
A cette adresse, se trouve jointe celle des administrateurs du district de Pont-Saint-Esprit; elle est ainsi conçue (1) :
« Pont-Saint-Esprit, le
« Citoyens représentants,
« Constamment soumis à vos décrets, nous vous renouvelons notre adhésion à tout ce .qui émane de votre part; continues avec fermeté vos travaux; hâtez-vous à nous donner une Constitution digne d'une nation libre, et la République sera sauvée. Michel Lepeletier est mort martyr de la liberté et de l'égalité, et aussi nous, représentants, nous saurons mépriser les jactances et les poignards des ennemis du bien public et sacrifier notre vie pour l'exécution des lois.
« Les administrateurs du directoire du district de Pont-Saint-Esprit.
« Signé : Pellissier, Tortilia, Datjte-ville, Rivoire, Soubeyran. ».
(La Convention décrète la mention honorable de ces doux pièces et ordonne
leur insertion au Bulletin.)
« Saint-Brieuc, le
Citoyen Président,
« Nous faisons au ministre de la guerre un troisième envoi d'effets destinés aux volontaires qui combattent pour la liberté de nos frontières. Ils proviennent des districts de Ean-nion et de Pontrieux. Cet envoi consiste en deux caisses et quatre ballots dont nous vous remettons l'état : nous avons fait précédemment passer celui des deux premiers envois dea 12 février et 7 de ce mois.
« C'est un nouvwuu gage de dévouement de nos concitoyens aux intérêts de la République. ' ( Les administrateurs du directoire des Gôtes-du-Nord.
« Signé : Hellos; Lenée; Gonesse.
A cette adresse se trouve joint l'état suivant (2) :
ETAT du 3e envoi cTeffets d'habillement et d'équipement envoyés au citoyen Béurnônvillé, ministre de la guerre, pour faire passer aux i" et
2e bataillons des Côtes-du-Nord, le 28 mars 1793.
16 chemises. 32 paires de bas. 1 paire de guêtres. 424 paires de souliers.
1 habit.
3 aunes drap bleu.
2 aunes de toile. 24 paires de souliers. 20 paires de gants. 49 chemises. 28 paires de bas.
110 paires de souliers;
4 capotes. 2 bonnets de toile. 1 aune de toile.
« Le procureur général syndic du département des Gôtes-du-Nord.
« Signé : Lesaulnier. »
(La Convention décrète la mention honorable et ordonne 1 insertion de ces deux pièces au Bulletin.)
4° Lettre des membres de la société des Amis de la liberté et de l'égalité de Gray, par laquelle ils annoncent qu'ils expédieront au plus tôt 54 paires de souliers à l'armée du Rhin. Cette lettre est ainsi conçue (3) :
« Gray, le 22 mars 1793, l'an II de la République française.
« Citoyens représentants,
« La société des Amis de la liberté et de l'égalité de oette ville a
l'honneur de vous faire part
' « Elle considère ciu'il ne peut exister de différence entre les défenseurs de la patrie et que tous ont les'mêmes droits à sa reconnaissance.
« Elle vous observe, citoyens représentants, que les levées d'hommes pour les bataillons des volontaires du département se sont faites avec un zèle et une célérité presque incroyables et que sur une population de 4,200 âmes, la totalité des volontaires se porte déjà, pour la seule ville de Gray, à 260 combattants, non compris les soldats de ligne, aussi en très grand nombre;
« Que ces braves gens n'ont point mis de prix à leurs services; mais que, vu celui des objets de première nécessité et le manquement de ressources dans la plupart, ladite société a cru devoir leur procurer les moyens de s'équiper et de laisser quelques secours à leurs familles, en partant pour nos armées, tellement que cinq souscriptions ont produit une somme grosse de 20,031 livres dont 12,331 livres ont été distribuées aux volontaires des précédentes levées qui y ont participé, ainsi qu'aux fédérés, partis en août, pour le camp de Soissons; 3,200 livres employées en Janvier dernier, à leur envoyer 160 paires de souliers, 160 chemises et 160 paires de bas et 3,000 livres, à quinze hommes de la levée actuelle, pour le recrutement de l'armée, conformément au décret du 24 février dernier;
« Qu'en outre de ce dernier contingent pour la ville de Gray, la société vient de fournir un secours de 600 livres et équiper trois hommes qu'elle a engagés eu qu'elle envoie, comme surnuméraires, à l'armée de Custme;
« Et enfin, qu'après toutes les contributions ci-dessus, il lui reste encore une certaine somme, qu'elle destine à procurer du pain, dans l'intervalle de la moisson, aux familles qui subsistaient des secours de partie desdits volontaires;
« Qu'elle a pareillement en réserve, une somtoe de 1,415 livres pour monter incessamment deux petites pièces de canon, que le commandement de Besançon lui a confiées.
« La même société n'a fax*, dans tous ces procédés, qu'imiter les communes qui, les premières, ont donné cet exemple de leur dévouement à la cause de la patrie; mais, jalouse de voir propager les mêmes sentiments et les mêmes effets dans toute l'étendue de la République, elle vous prie, citoyens représentants, moins par rapport à la chose que pour attester .de son patriotisme, de donner à sa conduite la manifestation dont Vous la jugerez digne; et encore d'y ajouter qu'elle a fait éclater, à la mort du dernier despote français et à celle du patriote Lepeletier, son aversion pour la tyrannie et son amour pour les régénérateurs et les défenseurs des droits die l'homme. Nous sommes fraternellement,
, « Les membres de la société des Amis de la liberté et de l'égalité établie à Gray.
« Signé : Lagnier, cadet, président; Bois-seroT, secrétaire ; Mottchet, secrétaire-adjoint. »
Lâ Société populaire de Lannion
La municipalité de Chatelaudrén
Les communes du district de Pontrieux........«.........
(La Convention décrète la mention, honorable de cette lettre et son insertion -au Bulletin.)
(1) ; Je propose de décréter que la ville de Gray a bien mérité de la patrie.
(La Convention décrète la proposition de Balivet.)
5® Lettre des officiers municipaux de Gha-teau-Thierry, par laquelle ils annoncent que cette ville a adressé au ministre de la guerre, pour lès volontaires du bataillon dé l'Aisne, 130 paires de souliers et 120 chemises, fruit de souscriptions patriotiques; cette lettre est ainsi conçue (8) ;
« ChâteaU-Thierry,
« Citoyen Président,
« Nous vous prions de faire part à la Convention nationale que la commune de cette ville vient d'adresser au ministre de la guerre pour ses frères les volontaires des bataillons de l'Aisne cent trente paires de souliers et cent vingt-six chemises, fruits des souscriptions patriotiques des citoyens de cette commune.
« Les officiers municipaux de Château-Thierry.
« Signé : Sauvroque, file; Dulàbbe; Quequet. »
, (La Convention décrète la mention honorable de oette lettre et son insertion au Bulletin.)
8° Lettre du maire et des officiers municipaux de Douai, qui envoient un registre ouvert pour l'inscription des offrandes patriotiques, faites tant par la société des amis de la République que par un grand nombre dè citoyens de cette ville, et dont le produit consiste dans les articles suivants ; 1° Une somme de 8,954 1. 15 s. en assignats; 2® 379 1. 12 s. 6 d. en numéraire; 3° Une décoration militaire; 4® 9 jetons d'argent; 5® 263 paires de bas; 6® 373 paires de souliers; 7° 109 chemises; 8° 23 habits; 9® 12 vestes; 10® 9 culottes; 11® 4 -capôteS; 12® 31 paires de guêtres; 13° 4 pantalons:
14° 7 bonnets, dont 2 de police et 5 de coton;
15° 3 sabres;
16® 245 sâcs à peau;
17° 2 paires de bottes;
18° Un fusil et une giberne;
19® 5 baudriers;
20® 2 ceintures;
21° Un chapeau, un C0l, Un mouchoir et un panache;
22e 4 auneâ et dëffiie de tricot; 23° Une cession d'action pour
l'indemnité due à cause de la suppression d'un droit de terrage, évalué
à 3,000 livres environ.
(La Convention décrète la mention honorable" de cette lettre et son insertion au Bulletin) (1).
7° Adresse des membres-du conseil général de la Commune d'Epinal, par laquelle ils annoncent que le produit d'une souscription patriotique a étç de 161 chemises, 27 paires de souliers, 9 habits, 3 vestes, 3 paires dé culottes, 27 paires de bas et 6 paires de guêtres et demandent de les faire passer à l'armée.
(La Convention décrète la mention honorable dè cette adresse et son insertion au Bulletin) (2).
8® Lettre des administrateurs du directoire et procureur syndic du district de Toul à la Convention nationale, par laquelle ils applaudissent au décret qui a fait tomber la tête du tyran et qui envoient l'état des offrandes patriotiques de ce district; cette lettre est ainsi conçue (3) -:
« Citoyens représentants,
« Une adhésion parfaite à tous vos décrets; les vues du maintien du bon ordre et de la tranquillité publique, l'amour de la patrie, de l'égalité et de la liberté : tels sont les sentiments qui animent les membres du directoire du district de Toul; telle est la passion la plus ardente de leurs âmes républicaines, voub vous êtes acquitté du plus sacré de vos devoirs en faisant tomber la tête du tyran, puisque la nature, l'humanité et la justice demandaient vengeance des outrages qu'il avait exercés avec tant de perfidie contre la souveraineté du peuple.
« Nous prions la Convention nationale d'agréer pour nos frères d'armes le fruit des offrandes civiques que nous avons recueillies de la majeure partie des communes de la campagne de ce district, ainsi que celle des administrateurs, procureur-synaic et secrétaire-greffier; elles consistent en 231 chemises, 306 paires de souliers, une paire de brodequins, 8 paires de guêtres, 4 paires de bas, 3 pantalons, 3 cols blancs, 4 bonnets de coton, 2 habits uniformes, une capote, 3 paires de culottes èt 3 vestes blanches, pour leB communes et en 2 chemises pour les administrateurs, procureur syndic et secrétaire-greffier.
« Nous prévenons l'Assemblée que, dans ce moment, nous adressons tous, ces objets au département de la Meurthe qui s'est chargé de les transmettre aux armées.
« Nous vous adressons une décoration militaire trouvée chez le nommé Bailliry, émigré.
« La commune de Toul, ainsi que la société des Amis de la liberté et de l'égalité séant en cette ville, ont également ouvert des souscriptions pour la fourniture d'habillements, r-hemises et souliers pour les défenseurs de la patrie, dont le résultat a donné un produit assez considérable.
« Le district de Toul, qui a grandement contribué à la formation des dix
bataillons des volontaires de la Meurthe, se distingue encore
en ce moment par ces vertus républicaines si propres aux Français; nous avons cru que les représentants du peuple, que la nation entière verrait avec sensibilité cette énergie franche et martiale qui arfme nos concitoyens, qui ne désirent rien plus que de combattre glorieusement nos ennemis, lorsque les agents militaires seront parvenus et qu'ils leur auront assigné à leur poste.
« La commune de Chaudeney a été la pre-mi ère dont tous les garçons en état de porter les armes se soient dévoués sans réserve au service de la République, comme la Convention nationale en sera persuadée par l'arrêté du directoire du 19 de ce mois dont six exemplaires lui sont adressés. Plusieurs communes ayant imité cet exemple d'héroïsme, le recrutement formé de l'élite des hommes se trouvera dans ce district excéder de beaucoup le contingent demandé: d'autres communes offrent de fournir à leurs frais l'habillement, l'équipement et l'armement des citoyens choisis dans leur sein pour marcher aux frontières. Qu'il en soit de même danB toute l'étendue de la République : que tous les Français redoublent d'ardeur et de courage et alors les armées de cette République naissanté, devenues invincibles et nombreuses, lui assureront la victoire des combats, et elle proclamera bientôt la chute des tyrans couronnés et le triomphe de tous les peuples.
« Fait et arrêté en séance publique, le 21 mars 1793, l'an II de la République française,
« Signé : Poincloux, vice-président; Lié-nard, Chauvenel, Roussel, Prugneaux, procureur syndic; Ballaud, secrétaire greffier. »
A cette pièce se trouve joint l'extrait du registre des délibérations du district de Toul; il est ainsi conçu (1) :
district de toul
Département de la Meurthe.
Extrait des registres des délibérations du directoire du district de Toul.
Séance publique
Du
Le procureur syndic a déposé sur le bureau une délibération de la municipalité de Chaudeney, en date du 18 mars, relative au recrutement décrété par la Convention nationale, le 24 février dernier, dont la teneur suit et dont il a été donné lecture,
« Cejourd'hui, 18 mars, l'an second de la République, la municipalité de
Chaudeney, Cu exécution du décret du 24 février dernier, w'est
assemblée.au domicile du maire, après avoir convoqué tous les garçons
ayant l'âge et les qualités voulues. La séance^ a commencé par la
lecture du décret.. Le maire a dit ensuite aux garçons : Est-ce par la
voie du sort ou celle du scrutin que nous déterminerons parmi vous les
hommes qu'on nous demande ?
« C'est de quoi nous avons dressé procès-verbal et avons inscrit les noms des garçons prêts à marcher, comme il suit :
« Alexis Martin; Nicolas Martin; Gabriel Lecos; François Rosman; Mansui Lemaire; Nicolas Henriet; Nicolas Potier; Barthélémy Faisant; Gabriel Didelot; Sébastien Simonin; Nicolas Segault; Biaise Yogenot; Joseph Le-lièvre ; Louis Joachim ; Nicolas Joachim ; François Simonin; Nicolas Mathelin; Barthélémy Liébaut, marié, avec enfants, commandant de la garde nationale de- Chaudeney.
« Tous ont signé à la minute.
« Et nous avons arrêté la liste ci-dessus, et signé le présent procès-verbal, à Chaudeney les jour et an que dessus.
« Signé : J.-F. Thouvenin, maire; Jean Martin et Louis Heuriet, officiers . rn/unici-paux; Nicolas Segaut, procureur de la commune; Etienne M.édard, secrétaire greffier.
. « Je soussigné, secrétaire greffier de la municipalité de Chaudeney, certifie la présente copie conforme à Voriginal.
« Signé : Etienne Médard, greffier. »
« Le directoire du district de Toul, considérant que le généreux dévouement de la commune de Chaudeney donne l'exemple des vertus républicaines et de cet amour pur de la patrie et de la liberté;
« Qu'il importe de propager ces principes précieux dans l'origine d'un gouvernement républicain et de donner à la commune de Chaudeney des témoignages de la reconnaissance publique et Un modèle à l'ardente jeunesse aes*autres communes de ce ressort; après avoir ouï le procureur-syndic, a délibéré a l'unanimité, qu'il serait voté des remerciements à la commune de Chaudeney; que la délibération prise par ladite municipalité, le 18 mars courant, et le présent arrêté seraient imprimés, au nombre de 350 exemplaires, tant en cahiers qu'en placards adressés à la Convention nationale, au directoire du département de la Meurthe et à toutes les municipalités du ressort, pour être lus, et affichés dans les lieux ordinaires et accoutumés à la diligence des procureurs des communes qui seront chargés d'y tenir la main.
« Fait à Toul, en séance publique, le 29 mars 1793, l'an II de la République, par les administrateurs composant le directoire du district de ladite ville.
« Signé : Poincloux, vice-président ; Lié-nard; Chauvenel; Roussel; Prugneaux, procureur syndic; Ballano, secrétaire greffier.
(La Convention décrète la mention honorable de ces deux pièces et leur insertion au Bulletin.)
9° Lettre du procureur syndic du district ue
Château-Chinon, par laquelle il transmet plu-
sieurs pièces relatives à différents dons patrio-
tiques faite par le citoyen Jacques-Louis La-ferté-Meun. Cette lettre est ainsi conçue (1) :
Château-Chinon,
« Représentants,
« Je vous adresse : 1° la lettre du citoyen Jacques-Louis Laferté-Meun, contenant don à la nation de deux juments; 2° Un extrait du pro-cès-verbal de ce district de ce jour qui en fait mention honorable; 3° un autre extrait du procès-verbal de ce même district du 6 août dernier, pris relativement à un don de 500 livres fait par le même citoyen pour les frais de la guerre.
« Ce citoyen, quoique de la ci-devanifc caste privilégiée a, depuis la Révolution, manifesté les sentiments du plus pur patriotisme et s'est toujours comporté comme un vrai républicain. Non content de faire dans la même année des dons à la nation de plus de 2,000 livres, il a encore payé 2,000 livres d'acompte de ses contributions de 1793 et fourni et habillé à ses frais un volontaire pour la défense de la patrie.
« Un dévouement si généreux doit être connu" dans toutes les parties de la République.
« Le procureur-syndic du district de Château-Chinon.
t Signé : J.-M. Duveenoy. » Suivent les pièces ci-dessous :
I.
Copie de la lettre écrite aux administrateurs du directoire du district de Château-Chinon, par le citoyen J.-L. Laferté-Meun (2).
Saulière,
« Citoyens administrateurs,
« Il s'était élevé entre la commune de Sainte-Péreuse et moi des difficultés sur l'évaluation de mes propriétés; mes nombreuses réclamations vous l'ont fait connaître; mais dans le danger de la patrie, il faut oublier ces petites inégalités pour ne songer que de son salut. Le rôle n'étant pas en recouvrement, je vous prie d'autoriser la citoyenne mon épouse, à payer entre les mains du receveur du district et acompte sur mes impositions la somme de 2,000 livres.
« Celui qui ne fait que son devoir dans ces temps désastreux n'a pas le droit de prétendre au titre de bon citoyen. J'offre à la patrie deux juments, de quatre ans et demi chacune. Je pense que cette offrande sera plus utile que leur valeur en assignats. Veuillez, en son nom, agréer cette offrande Croyez que, dans tous les temps, je concourrai de tout mon pouvoir à conserver à moi et à mes frères le titre sacré d'homme libre.
« Signé : J.-L. Laferté-Meun.
Extrait du procès-verbal de la séance du directoire du district de Château-Chinon, 22 mars 1798, Van II de la République (1).
« Le procureurrsyndic fait lecture d'une lettre adressée cejourd'hui à l'administration par le citoyen Jacques-Louis Laferté-Meun, de la municipalité de Sainte-Péreuse et par laquelle il marque que les rôles des contributions n'étant point en recouvrement dans sa commune, son épouse va remettre au receveur du district la somme de deux mille livres acompte de ses contributions, il prie, en outre, l'administration de vouloir bien accepter, au nom de la patrie, deux juments de quatre ans et demi chacune.
u Les administrateurs composant le directoire du district de Château-Chinon, « Ouï de nouveau le procureur-syndic, « Applaudissent aux sentiments généreux du citoyen Laferté-Meun et acceptent avec re connaissance, au nom de la patrie, le don pai lui fait de deux juments;
« Arrêtent l'insertion au présent procès-verbal de la lettre du citoyen Laferté-Meun; '
« Chargent le procureur-syndic de transmettre expédition tant de ladite lettre que du présent à la Convention nationale, au ministre de la guerre, au département et audit citoyen Laferté-Meun.
« Fait en séance publique à Château-Chinon, le 22 mars 1793, l'an II de la République. « Signé : Colon, vice:président ; Louis Gal-lopin, CoQTTARD, 1ÈE.-J. dljvernoy, procu-reur-syndic et Roohambeau, secrétaire.
« Certifié conforme.
( Signé : Rochambeau,n secrétaire. »
III.
"Extrait du registre des procès-verbaux du con* seil du district de Château-Chinon. Séance publique du 6 août 1792, Van IV de la liberté, à laquelle ont assisté MM. Duvernoy, président par intérim, Rollot, Colon, Ravault, Coquard et Mellin, procureur syndic (2).
« Un membre a fait lecture d'une lettre adressée cejourd'hui à l'administration de cfe district par M. Jacques-Louis Laferté-Meun et par laquelle il marque que n'allant point en personne se joindre aux braves citoyens qui vont nous protéger et nous défendre, il prie l'administration de vouloir bien accepter, au nom de la patrie, la somme de 500 livres, sans préjudice du service personnel qu'il sera toujours prêt à faire pour le maintien de la tranquillité intérieure toutes les fois qu'il sera requis légalement.
« Le conseil, après avoir ouï le procureur syndic, applaudissant aux
sentiments géné reux de M. Laferté-Meun, accepte avec reconnaissance, au
nom de la patrie, le don par lui fait de la somme de 500 livres; «
Arrête qu'extrait du présent procès-verbal
« Arrête enfin que l'assignat de 500 livres, envoyé par ledit sieur Laferté-Meun sera sur-le-champ remis au receveur du district pour qu'il l'inscrive sur le registre à ce destiné, le faire passer ensuite à la trésorerie nationale.
« Signé : Dtjvebnoy, président par intérim; Rollot; Colon; Ravault; Oo-quard, Mellin, procureur syndic.
«t Pour copie conforme :
« Signé : Rochàmbeau, secrétaire. »
(La Convention décrète la mention honorable de ces différentes pièces et leur insertion au Bulletin.)
10° Lettre de Monge, minispre de la marine, par laquelle il fait part à la Convention nationale de la conduite énergique de la municipalité de Saint-Arnoult (Seine-et-Oise), relativement à l'achat des grains. Cette lettre est ainsi conçue (1) :
« Paris, le
( Citoyens législateurs,
« Les officiers municipaux de Saint-Arnoult, district de I)ourdan, département de Seine-et-Oise, viennent de déployer avec butant de fermeté Que de sagesse cette énergie qui caractérise les vrais magistrats d'Un peuple libre, en protégeant le agents porteurs de mes ordres pour l'achat des grains nécessaires au servicë dé la marine.
« Lorsque par des intrigues perfides, on oppose si souvent une résistance coupable et impolitique à la libre circulation des subsistances, cette municipalité,■ fidèle aux bons principes, a senti combien il était nécessaire de la protéger pour satisfaire aux besoins des Administrations publiques dont les opérations ne peuvent être arrêtées sans danger pour la patrie.
« Le département de la marine a des besoins considérables de comestibles que l'on ne peut révoquer en douté; le service des marins, de ces hommes dont le courage éprouvé, lutte également contré les éléments et nos ennemis, offre le spectacle du plus grand dévouement à là patrie par les dangers qui y sont attaohés.
« Leur assurer des subsistances dé la meilleure espèce et en qualité suffisante pour ne pas trop multiplier leurs privations, c'est acquitter une dette sacrée, une dette qui devient une obligation nationale, cette vérité a été sentie et appréciée par la municipalité de Saint-Arnoult ; elle s'en est pénétrée et sa conduite doit être citée comme un exemple d'équité, de eagesse et de Justice.
« J'ai pensé qu'il était de mon devoir, citoyens législateurs, de vous faire connaître l'esprit et le zèle vraiment patriotique de la municipalité de Saint-Arnoult. On ne peut trop lui donner de publicité et, si elle obtient votre approbation d'une manière éclatante, il en résultera les meilleurs effets et pour la tranquillité publique et pour l'administration que vous m'avez Confiée.
« Le ministre delà marine, « Signé ; Monge. »
(La Convention décrète la mention honorable de la conduite de la municipalité dé Saint-Arnoult et ordonne l'insertion dé la lettre du ministre au Bulletin.')
11° Lettre du citoyen Emezia, aumônier de l'hôpital militaire à Golmar, qui avait fait don à la patrie de son traitement pendant six mois et qui ajoute encore celui des six autres mois; sa lettre est ainsi conçue (I) :
« Colmar, 18 mars 1793, l'an II de la République.
« Citoyen président,
« Lorsque les dangers de la patrie s'accroissent, la seule pensée Ou l'espoir d'en retirer au delà de ce qu'il faut pour pouvoir la défendre serait sans doute criminel. Je déclare donc en faveur de la patrie qu'au sacrifice de six mois de traitement d'aumônier, fait en février, je joins volontiers celui des autres six moi quï me restaient dus sur l'année datant de juin 1791 jusqu'à juin 1792.
« Signé .- Emezia, aumônier de l'hôpital militaire. »
(La Convention décrète la mention honorable de oette offrande qu'elle accepte et ordonne l'insertion au Bulletin. )
12° Lettre du procureur syndic du district de Valenciennes et du citoyen Flimiaux, administrateur du département du Nord, en commission dans cette ville, par laquelle ils informent la Convention qu'ils sont à la recherche de tous les agents de la trame odieuse qui avait pour but d'empêcher le recrutement dans l'étendue de ce district. Ils annoncent que depuis l'arrestation du capitaine Fontenay, commandant à Yalenciennes, ils ont désabusé les citoyens qu'il avait égarés, et que la levée ordonnée par la loi du 24 février est prête à être terminée, ainsi que les rassemblements requis par les commissaires de la Convention dans la Belgique.
(La Convention décrète la mention honorable de cette lettre, son insertion au Bulletin et le renvoi à la commission des Six.)
413° Adresse de la municipalité de Romoran-tin, pour adhérer à tous les décrets de la Convention nationale^ notamment à celui qui a prononcé la mort du tyran; elle est ainsi conçue (2) ;
« 28 février 1793, l'an II de la République.
« Citoyens Législateurs,
« L'aurore de la félicité des peuples a brillé dès le jour où vous fûtes
appelés à lui donner des lois. Celui où vous avez prononcé l'abolition
du trône et le jugement du dernier roi des Français, fut le triomphe de
l'humanité. En nous faisant républicains, vous avez élec-trisé nos âmes
et avez effacé de nos cœurs toutes les expressions d'adulation, que le
législateur d'un peuple libre dédaigne et méprise. C'est par notre amour
à la sainte liberté, notre
« Les citoyens composant la municipalité de Komùrcwtin.
« Signé : Rangeard-Villiers, jiU Bodin, Leraut; Pommeret; Deïtot; Anselin; Vanoir; De veaux, procureur de ta commune. »
(La Convention décrète la mention honorable de cette lettre et son insertion au Bulletin.)
14° Lettre de Monge, ministre de la marine, par laquelle il transmet à la Convention : 1° copie d'une lettre du district de Pqimbopuf, qui annonce que cette ville doit son salut aux capitaines de la frégate La Capricieuse et de l'aviso l'Impatient; 2° copie d'une lettre du citoyen Favereau, directèur de la fondtrit d'Indret, poBte qui a été de la plus grande utilité à la ville de Nantes; suit l'extrait de ces pièces (1) ;
Extrait de la lettre des administrateurs du district de Paiiribœuf.
« Notre garde nationale s'est montrée digne de porter l'uniforme national et elle nous a
Srouvé que rien ne résiste aux hommes libres.
ous devons aussi des éloges au citoyen SSavary, commandant la frégate La Capricieuse, en station à Mindin, aux citoyens Fuel, Pommier, Godabert, Paiferrat et Boumeur, commandant et officiers de la corvette l'Impatiente; aux citoyens Perrin et Daumière, volontaires sur ce dernier bâtiment. Ils nous ont fourni tous les secours qui étaient eh leuf pouvoir, eh hommes, en armes et canons ; aU corps de la gendarmerie commandé par le citoyen Murin; au corps de canonniers mafins de Paimboeuf. Les officiers de tous les corps ont souvent oublié leur grade pour se mêler dans les rangs de nos soldats, et nous ont donné le spectacle flatteur d'une confiance qui était inconnue sous l'ancien régime. Enfin tous ont donné des preuves non équivoques d'un civisme épuré et d'une bravoure avec laquelle ils se distingueront partout. »
Entrait de la. lettre du citoyen Favereau, directeur dé la fonderie d'Indret.
« Aussitôt que l'insurrection s'est maUffestée sur quatre villages qui avoisihent Indret, à une portée dé fusil, dans l'un desquels était un rassemblement considérable, j'ai fait les dispositions convenables pour ne pas être attaqué dans cet établissement où, me dit-on, ils voulaient se porter pour avoir de la poudre, boulets et canons. J ai formé, une compagnie des ouvriers de cette fonderie, composée de 80 à 85 hommes, mais dont plusieurs ont servi. Je leur ai désigné les postes qu'ils devaient occuper, et j'ai fait placer à l'entour de l'île 6 caronades, 4 pièces de 8 long et 4 de 4. Depuis le moment de l'insurrection, la surveillance la plus exacte a été exécutée; jour et nuit nous avons été debout,
« Je dois vous faire l'éloge de tous les ouvriers de la fonderie; chacun
d'eux s'est porté .de la meilleure volonté à tout ce que j'ai exigé
« Ce matin (17 mars) j'ai été informé d'un rassemblement de brigands à une deiçi-lieue d'ici, Ils étaient environ 60 à 80 qui voulaient, après avoir bien bu et bien mangé chez un fermier, lui etilever sou blé, son vin et ses beeufB. Sur-le-champ, je marchai à la tête de 80 hommes, tant ouvrier de cette fonderie que gardes nationales. Je ne pus les surprendre, mais je les mis en fuite et j'en pris trois que j'envoyai à Nantes. Le fermier a mis toutes ses provisions en sûreté à la Basse-Indre, village vis-à-vis Indret, qui a fait résistance aux brigands avec quelques anciens pierriers et une pièce du calibre de deux. »
(La Convention décrète la mention honorable de ces différentes pièces, leur insertion au Bulletin et leur renvoi au comité de défense générale.)
15° Lettre de Lebrun, ministre des affaires étrangères j président du conseil exécutif provisoire, par laquelle il annonce que les révoltés occupent encore un des côtés de la Loire eb qu'il arrive à Nantes un grand nombre de troupes pour les combattre: elle est ainsi conçue (1) ;
« Suivant une lettre de Nantes du 25, adressée au ministre de la marine, les brigands occupent encore un des côtés de la Loire, ce qui les rend maîtres d'une partie du cours de cette rivière. Il n'y a encore aue la route de Paris qui soit libre; mais cette lettre annonce en même temps qu'il arrive un grand1 nombre de troupes.
« O'ést ce qui est confirmé par d'autres lettre®, ainsi que les dispositions faites par les généraux, pour faire agir ces troupes de la manière la plus efficace.
« Signé : Lebrun.
(La Convention renvoie la lettre au comité de défense générale.)
16° Lettre de Beurnonville, ministre de la guerre (2), qui envoie un état de plusieurs veuves dont les maris sont morts en activité de service et qui ont droit à des pensions.
(La Convention renvoie la lettre au comité des pensions.)
1 ^Lettre de Beurnonville, minisire de la guerre (3), par laquelle il demande de nouveau que la Convention statue sur les moyens de satisfaire aux demandes d'indemnités relatives aux pertes essuyées par les corps ou les individus dans nos armées.
(La Convention nationale renvoie cette demande au comité de la guerre, et le charge d'en faire un prompt rapport.)
18° Lettre du lûinistre de Vintérieur, par laquelle il transmet la
demande faite par la municipalité de .Toulon, consistant en ce que le
droit de prêt dè 7 liv. 10 s. par tonneau de mer, impose sur les navires
génois, toscans,
« Paris,
« Citoyen Président,
. « La municipalité de Toulon m'annonce que les grains étrangers qu'elle a reçus pour l'approvisionnement des départements méridionaux sont insuffisants à leurs besoins et elle demande, pour encourager l'importation de cette denrée dans nos ports, que le droit de frêt de 7 1. 10 s. par tonneau de mer, imposé sur les navires génois, toscans, romains, vénitiens et ragusois employés aux transports des grains en France, soit suspendu penaant tout le temps que durera la guerre. L appât que ce moyen présente aux négociants me paraît, en effet, très propre à favoriser l'importation des ressources que l'Italie nous offre encore, et je pense que les sacrifices qu'il occasionnera seront beaucoup moins grands que ceux que la nation fait pour acquitter les blés que no»s tirons actuellement de ce pays. Je vous prie, en conséquence, citoyen Président, de soumettre la demande des officiers municipaux de Toulon à la décision de la Convention nationale et de l'inviter à en faire promptement connaître ses intentions à cet égard.
« Le ministre de l'Intérieur, « Signé : Garat. »
Un membre convertit en motion la demande du ministre.
(La Convention décrète que le droit de fret de 7 1. 10 s. par tonneau de mer, imposé sur les navires génois, toscans, romains, vénitiens et ragusois, employés au transport des grains en France, soit suspendu pendant tout le temps que durera la guerre.)
19° Lettre des citoyens Gleizal et Servière, commissaires envoyés dans le département de l'Ardèche et de la Lozère (2), qui demandent un règlement relatif aux postes, dont le service est très mal fait.
(La Convention nationale renvoie cette lettre au comité des décrets, pour lui rendre compte le lendemain de l'envoi du décret relatif aux postes.)
20°Lettre de Beurnonville, ministre de la guerre, qui dénonce un abus relatif au mode d'élection des officiers dans les bataillons de volontaires nationaux.
(La Convention renvoie la lettre au comité de la guerre, pour en faire un prompt rapport.)
21° Lettre des commissaires envoyés dans les départements de l'Eure et du
Calvados, qui annoncent que le recrutement est entièrement terminé dans
le district de Lisieux, et adressent un arrêté par lequel ils ont
suspendu provisoirement de ses fonctions le citoyen Duval,
administrateur du département.
i 22"Lettre de Beurnonville, ministre de la | guerre, qui transmet la demande que fait le j corps de gendarmerie, pour réclamer d'être traité sur le pied de guerre.
(La Convention renvoie la lettre aux comités de la guerre et des finances, pour en faire un rapport le lendemain.)
23"Lettre de Glavière, ministre des contri-I butions publiques, qui fait part d'une demande d'un directeur des postes à Bordeaux, relative à l'emplacement de son bureau.
(La Convention renvoie la lettre au comité des finances.)
24"Lettre de Beurnonville, ministre de la i guerre, qui dénonce des accaparements de fourrages dans les départements de la Côte-d'Or et de la haute-Saône.
(La Convention renvoie la lettre au comité de défense générale.)
25° Lettre de Beurnonville, ministre de la guerre, qui envoie des observations sur le recrutement des légions et corps francs.
(La Convention renvoie ces observations au comité de la guerre.)
26° Lettre de Garat, ministre de l'Intérieur, qui rend compte des mesures qu'il a prises pour faire passer des fonds au département ae Mayenne-et-Loire.
(La Convention renvoie la lettre au comité de défense générale.)
27"Lettre de Beurnonville, ministre de la guerre, qui transmet à la Convention nationale un cartel d'échange de prisonniers, convenu entre le général Dumouriez et le roi de Prusse.
(La Convention renvoie la lettre au comité de la guerre.)
28"Lettre de l'administrateur des domaines nationaux, à Paris, qui adresse à la Convention nationale un mémoire qui a pour objet de lui soumettre deux questions relatives à l'admission des reconnaissances de dîmes inféodées, en paiement de domaines nationaux.
(La Convention renvoie la lettre aux comités des finances et de législation réunis.)
29° Lettre de Garat, ministre de l'intérieur, qui transmet une demande de plusieurs officiers de santé, relative au recrutement.
(La Convention renvoie la lettre au comité de la guerre.)
30° Lettre de. Monge, ministre de la marine, qui envoie copie d'une lettre qui lui est parvenue de Cayenne.
(La Convention renvoie la lettre au comité colonial.)
31 "Lettre de Beurnonville, ministre de la guerre, qui fait part d'une demande des gardes magasins généraux^ commis principaux et ! inspecteurs généraux des effets militaires.
j (La Convention renvoie la lettre au comité de la guerre.)
32° Lettre de Garat, ministre de l'intérieur, : par laquelle il transmet une délibération du ! directoire du département de l'Indre, relative i au payeur général et à l'ingénieur ordinaire
du département, demandant que tous deux soient dispensés de se rendre à l'armée, quoique le sort soit tombé sur eux. Cette lettre est ainsi conçue (1) :
Paris, 30 mars, l'an II de la République française.
« Citoyen Président,
« A Chateauroux, les citoyens ont adopté la voie du tirage pour l'enrôlement du nombre d'hommes que cette ville doit envoyer à la défense de la patrie. Le sort est tombé sur le payeur général et sur l'ingénieur ordinaire du département. La loi du 24 février ne dispense point ces sortes de fonctionnaires de concourir à l'enrôlement. Cependant le département de l'Indre représente que le payeur-général ne peut quitter son poste sans nuire infiniment à la chose publique, en ce qu'il ne pourrait pas être remplacé sur-le-champ, en ce qu'étant chargé d'une responsabilité immense et d'acquitter les dépenses relatives à la guerre, le service se trouverait alors entravé; ce corps administratif a pris, en conséquence, une délibération que j'envoie à la Convention nationale et dont l'objet est d'obtenir que ce payeur soit dispensé de se rendre à l'arméa Il demande aussi la même exception pour son ingénieur ordinaire dont il assure que la présence est d'autant plus nécessaire mns le département de l'Indre qu'il est seul pour surveiller et conduire les travaux publics.
« L'Assemblée jugera quel égard méritent ces représentations.
( Le ministre de l'Intérieur,
Signé : Garat ».
A cette lettre sont joints les deux documents suivants :
I
Lettre des administrateurs du directoire du département de l'Indre au citoyen ministre de l'Intérieur (S).
« Citoyen ministre,
« L'assemblée des citoyens de cette ville appelés en vertu de la loi du
24 février dernier pour la formation du contingent dans le recrutement,
ayant adopté le mode du tirage pour désigner ceux qui doivent partager
l'honneur de sauver la chose publique, il en est résulté que le payeur
général du département et l'ingénieur ordinaire sont tombés au sort.
L'un et l'autre, citoyen, en nous en faisant part, ont bien manifesté le
désir de voler au secours de la patrie; mais nous pensons qu'il pourrait
résulter les plus grands inconvénients, si nous perdions dans ce moment
ces deux citoyens. Le payeur général, chargé d'une caisse immense, ne
peut en laisser les fonds en d'autres mains, sans courir les plus grands
dangers, et sans nuire à la chose publique, en ce que dans cette ville,
traversée par la grande route de Paris à Toulouse, il passe
considérablement de volontaires à qui il est obligé d'acquitter la
solde. Au surplus, les fonctions de cet agent
« A l'égard du citoyen Normand, ingénieur ordinaire, sa présence nous paraît d'autant plus nécessaire à son poste qu'il est seul depuis près de six mois, par rapport à la maladie de son confrère; qu'il a, en conséquence, à parcourir toute la surface de notre territoire; à veiller, en outre, à l'entretien des routes de Paris à Toulouse et de Tours à Cler-mont, et à la construction de plusieurs ponts qui sont sur le point de s'exécuter : enfin nous pensons, citoyen ministre,, que notre département ne peut se passer d'ingénieur.
« Quoique la loi n'ait point excepté ces agents de concourir au mode du recrutement, nous ne pouvons nous persuader que la Convention n'y mette, par des articles additionnels, quelques modifications. Nous vous prions, en conséquence, de vouloir bien les solliciter et nous faire part, en attendant que vous les ayez obtenus, de la conduite que nous aurons à tenir vis-à-vis le citoyen Normand, ingénieur.
« Les administrateurs du directoire du département de l'Indre,
« Signé : Louis Flettry; Gaultier, procureur syndic; Gtjérinet, secrétaire général.
II
Extrait des délibérations du directoire du département de l'Indre (1).
Séance publique
Du
« Le citoyen Robin, payeur général de oe département, étant entré, a représenté que d'après le mode adopté par les citoyens assemblés en exécution de la loi du 24 février dernier, pour le complément du contingent de la ville de Châteauroux, il était tombé hier au sort, comme volontaire et a demandé à l'administration quel était le parti qu'il avait à prendre dans ce moment, en ce qu'il avait beaucoup de fonds à la disposition de la trésorerie nationale et que s'il était obligé de partir, il ignorait à qui il rendrait ses comptes et1 qui remplirait ses fonctions qui sont on ne peut plus importantes.
« Le directoire, considérant que les fonctions du citoyen payeur général
ne peuvent être remplies indistinctement, puisque l'administration n'a
aucun droit de recevoir ses comptes; considérant qu'un payeur général ne
peut être sur-le-champ remplacé, attendu l'immensité des fonds qu'il
peut avoir, appartenant à la République ; considérant que le payeur
général est chargé de l'acquittement de toutes les dépenses de la guerre
et qu'un prompt rappel pourrait compromettre la sûreté publique, surtout
dans les moments où les
Arrête, sur ce, ouï le procureur général syndic, qu'il sera écrit par le premier courrier au ministre de la guerre pour lui annoncer l'impossibilité où se trouve le citoyen payeur général de voler aux frontières avant d'avoir son assentiment et que, jusque-là, il sera tenu de continuer ses fonctions; qu'en conséquence, expédition de la présente sera adressée tant à la municipalité qu'audit citoyen Robin, à l'effet, par la première, de ne point le requérir et, par ledit payeur, à ne point quitter ses fonctions jusqu'à ce qu'il en soit autrement ordonné.
« Les administrateurs composant le directoire
du département de VIndre, « Signé : Louis Fleurv, Huart, Simon, La-brosse, Couturier, Robert, Gaultier, procureur général syndic, Guerinet, secrétaire général.
« Pour expédition conforme :
« A Châteauroux, ce
« Signé : Guerinet, secrétaire général.
Un membre : Je propose l'ordre du jour motivé sur ce fait qu'une loi existe sur cet objet, et je demande que le payeur général et l'ingénieur ordinaire du département de l'Indre se conforment à la loi,
(La Convention passe à l'ordre du jour ainsi motivé. )
33° Lettre de Vadministrateur de la caisse de Vextraordinaire (1), qui transmet à la Convention nationale une question qui lui a été proposée par le directoire du département de l'Hérault, au sujet de quelques domaines na-tonaux.
(La Convention renvoie la lettre au comité d'aliénation.)
34° Lettre de Beurnonville, ministre de la guerre, qui rend compte de ce qu'il a fait pour l'habillement du trente-deuxième régiment, ci-devant Angoulême, et l'approvisionnement de Saint-Servan.
(La Convention renvoie la lettre au comité de défense générale. )
35° Lettre de Garat, ministre de l'intérieur, qui envoie copie de deux lettres relatives, l'une à la rareté des denrées, et l'autre aux productions provenant de la pêche des puissances ennemies.
(La Convention renvoie la lettre aux comités de commerce et des finances
réunis.)
(La Convention renvoie la lettre au comité de la guerre, pour en faire un prompt rapport.)
37° Lettre de Beurnonville, ministre de la guerre, qui demande si le décret du 7 septembre dernier, sur les pensions et destitutions, est applicable à la gendarmerie de l'intérieur.
(La Convention renvoie la lettre au comité de la guerre.)
38° Lettre de Beurnonville, ministre de la guerre, qui annonce que le conseil exécutif a ratifié deux arrêtés du département des Bou-ches-du-Rhône, par lesquels les citoyens Du-veyrier, lieutenant-colonel et Bouchard lieutenant de gendarmerie dans ce département, ont été suspendus de leurs fonctions.
(La Convention renvoie la lettre au comité de la guerre, pour en faire un prompt rap^ port.)
39° Lettre de Beurnonville, ministre de la guerre, qui envoie l'état nominatif de quatre soldats à qui il a délivré des brevets de pension, et l'énonciation des pièces justificatives qu'ils ont produites à l'appui de leur demande.
(La Convention renvoie la lettre au comité des pensions.)
40° Lettre de Garat, ministre de l'intérieur, qui envoie l'état de l'emploi des sommes mises à la disposition du département de Paris, pour le remboursement des billets de parchemin et de la maison de secours.
(La Convention renvoie la lettre au comité des finances.)
41° Lettre de Garat, ministre de l'intérieur, qui fait part à la Convention nationale des mesures qui ont été prises par les corps admi-nitratifs du département du Tarn, au sujet de quelques troubles qui s'étaient manifestés à Castres, à l'occasion du recrutement.
(La Convention renvoie la lettre au comité de sûreté générale.)
42° Lettre de Garat, ministre de l'intérieur, qui envoie copie d'une lettre des officiers municipaux de Versailles, qui demandent qu'on les mette à portée d'indemniser les boulangers, pour qu'ils ne soient pas obligés d'augmenter le prix du pain.
(La Convention renvoie la lettre aux comités d'agriculture et des finances réunis.)
43° Lettre du citoyen Blaux, commissaire de la Convention dans le pays
des Deux-Ponts (1), datée du 23 mars 1798, par laquelle il annonce que
les municipalités s'organisent dans la plupart des communes de ce pays
et que le citoyen Guadet y a contribué. Il se plaint de l'administrateur
Bontay qui fait vider les meubles du ci-devant duc sans les formalités
nécessaires pour en constater les états. Il observe en outre que neuf
bataillons de volontaires nationaux qui sont partis de Deux-Ponts pour
aller vers Kaiserslautern, Saint-Wendel, etc..., sont incomplets et mal
habillés. Les gilets
(La Convention renvoie la lettre aux comités de défense et de sûreté générales. )
44° Lettre de Monge, ministre de la marine (1), qui communique à la Convention nationale un mémoire du citoyen Corberon, qui demande une pension ou une indemnité pour ses services; il transmet aussi les pièces que ce vieillard a produites à l'appui de sa demande.
(La Convention renvoie la lettre au comité des pensions.)
(2). Je propose de décréter qu'à l'avenir les secrétaires ne liront en entier que les lettres des ministres et, qu'à l'aide des commis qu'ils jugeront à propos d'employer, ils présenteront l'analyse des lettres des commissaires et autres.
(La Convention adopte cette proposition.)
(3)J'avertis la Convention que demain, à raison de l'ordre du jour qui est énormément chargé, j'ouvrirai la séance à neuf heures précises. J'invite les membres à s'y trouver.
(4). J'annonce à la Convention que depuis Ingrande jusqu'à Nantes, la rive gauche de la Loire est couverte de révoltés qui y ont établi des batteries de canon. Ils étaient retranchés au nombre de 3,000, à Pornic, où ils avaient des pièces de canon de 36; ils ont été attaqués avec une vigueur qui aurait dû leur en imposer. Quatre-vingt-cinq patriotes leur ont livré bataille, en ont tué 200 et fait 300 prisonniers, que dans leur fureur ils ont aussi mis à mort. Malgré un aussi terrible exemple, ils sont revenus à la charge avec une telle force que les 85 patriotes sont actuellement leurs prisonniers. Il importe de leur porter les plus prompts seoours; car ce pays court les plus grands dangers, et il est à craindre que les Anglais ne profitent de cet avantage des révoltés, pour faire une descente. Cette crainte est d'autant mieux fondée, que le cri de ralliement des rebelles est actuellement: Vivent les Anglais. Ils sont commandés par des chefs très expérimentés qui ont enforé des canons qui avaient été encloués. Je demande que le ministre de la marine mette en croisière sur les côtes toutes les forces maritimes dont il pourra disposer.
Je vais faire donner lecture à la Convention de deux lettres qui confirment malheureusement les nouvelles que Mellinet vient de donner à l'Assemblée; l'une venant de notre collègue Fouché, l'autre est des administrateurs eux-mêmes du département de la Loire-Inférieure.
, secrétaire, donne lecture de ces deux lettres :
1° Lettre du citoyen Fouché, commissaire de la Convention dans les
dénartements de la Loire Inférieure et de la Mayenne par laquelle il
rend compte de la situation malheureuse dans laquelle se trouve le
département
Nantes, le
« Citoyens mes chers collègues,
« Le département de la Loire-Inférieure est toujours dans une situation effrayante. Les émigrés, les prêtres déportés sont descendus sur nos côtes et ont infesté nos campagnes ; ils ont armé les brigands, et assassinent les plus fermes, les plus courageux défenseurs de la Liberté, Il est instant qUe vous noUs envoyiez des forces ; nous les attendons avec impatience ; vous pouvez compter sur l'énergie des gardes nationales de Nantes, elles sont pleines de valeur ; mais elles auraient besoin de chefs expérimentés dans l'art de la guerre : jusqu'ici elles n'ont fait que des sorties autour de la ville. Pour la première fois, ce matin nous avons composé un corps d'armée de mille hommes, qui marche au secours de Paimbœuf, sous la conduite de l'adjudant général de l'armée des côtes. Nous espérons que cette expédition sera heureuse. Demain il partira un bataillon de 800 hommes pour assurer la sûreté de la route de communication de Nantes à Paris. Il nous est impossible d'ordonner d'autres expéditions. Les gardes nationales qui restent à Nantes1, y sont nécessaires pour la garde de la ville, qui est attaquée de toutes parts, et quoi qu'on vous en ait dit, si nous ne recevons des secours prompts et efficaces, nous courrons les plus grands dangers.
Pour accélérer vos opérations, nous prenons le parti de vous envoyer un de nos concitoyens, qui vous donnera tous les éclaircissements nécessaires sur l'état réel où nous nous trouvons.
« Je vous envoie copie de la proclamation que j'ai fait publier, et de l'arrêté qui y est joint.
« Signé : Fouché, député commissaire.
« P. S. Nos côtes se trouvent menaoées de toutes parts. J'ai requis tous les commandants de frégate, d'aviso, de corvette qui sont en station à Mindin, de rester dans cette station jusqu'à ce que nos côtes soient délivrées dès brigands qui les ravagent.
« Signé : Fouché, député commissaire. »
2° Lettre des administrateurs du départe* ment de la Loire-Inférieure par laquelle ils rendent compte des dangers qui menacent la ville de Nantes ; en voici l'extrait (2) :
« Nantes, 28 mars 1873, an II de la République.
« Yous pouvez augurer t>ar la lettre du oommandant de notre garde nationale, qui vous a été lue, que nos périls sont passés. Plût à Dieu que nous pussions voir et sentir les choses ainsi ! Mais il n'en est rien ; notre position est plus critique que jamais.
« Notre ville ne cesse pas d'être assiégée par les rebelles, chaque jour
les enhardit, et
« Pornic, pris par les brigands, repris sur eux par le courage de ses habitants et d'environ 80 hommes, vient d'être enfin réduit et incendié et ces brigands y ont commis toutes les horreurs dont est capable une horde fanatisée et agitée de toutes les fureurs. Reste, dans cette partie, la ville de Paimbœuf, l'unique ville qui ait encore résisté aux at-taciues multiples qu'elle a reçues. Cette ville prise, les rebelles seront maîtres de toutes nos contrées et de notre navigation.
« Cependant nous ne pouvons, avec nos propres forces, presque entièrement nécessaires à la défense de notre ville, fournir les secours que Paimbœuf ne cesse de réclamer pour la sienne. Nous ne vous répétons pas que les in-surgents sont toujours maîtres des principales places et villes ; qu'ils tiennent six districts dans leur possesion ; qu'ils s'établissent et se fortifient dans tous les lieux où ils prennent pied,., indépendamment des cantonnements qu'ils font aux entrées de notre ville. On en compte quatre à moins d'une lieue de distance, et qu'on nous dit renfermer chacun plus de 3 à 4,000 hommes.
« Les secours demandés au département de Maine-et-Loire, toujours promis et toujours attendus, n'arrivent point. Nous avons dépêché des commissaires pour hâter l'arrivée des forces.
« Nous devons ajouter que la frégate La Capricieuse, stationnée à Mindin, où nous l'avons retenue, est menacée et canonnée par les batteries voisines, dont les rebelles se sont rendus maîtres. Elle court le plus grand risque et il est indispensable de lui envoyer des secours.
« Si une descente combinée..... : nous n'osons
prévoir ni calculer tous nos maux.....; mais
tout est possible, tout est probable.
« Le général Labourdonnaye est à Rennes, mais il y est sans forces, et nous en a demandé pour aller au secours de Redon assiégé, bloqué et peut-être pris aujourd'hui. Nous avons refusé avec douleur ; mais nous avons été forcés de refuser à sa réquisition, n'ayant pas assez de nos propres forces. »
(1). Citoyens, je suis saisi à mon tour d'une lettre des administrateurs du district d'Ancenis, qui relatent pour cette ville les mêmes nouvelles que vous venez d'entendre pour le département tout entier et sollicitent de prompts secours de la Convention nationale. Ils annoncent que c'est la loi du recrutement qui a provoque la révolte, ou plutôt ils assurent que c'est là le prétexte dont tous les contre-révolutionnaires de la région se servent pour égarer les esprits.
Yoici d'ailleurs leur lettre qu'ils m'ont chargé de remettre au Président de la Conven-
tion nationale pour en faire donner lecture à l'Assemblée (1) :
« Ancenis, le
« Citoyen Président,
« La loi du recrutement de trois cent mille hommes a révolté toutes les campagnes du district d'Ancenis et les circonvoisines sur le bord de la Loire, ou plutôt c'est le prétexte dont les ci-devant nobles, les prêtres réfractaires, les royalistes et leurs nombreux partisans se servent pour égarer les esprits.
« Nous sommes, depuis le 10 de ce mois, assaillis de brigands; ils forment des attroupement innombrables, infestent le pays, entraînent de force les patriotes, pillent et dévastent de toutes parts, ne vivent que de rapines, s'emparent des subsistances et ne respectent que les personnes et les propriétés des mauvais citoyens. Ils ont intercepté les passages, formé des retranchements et fait des tranchées sur la grande route d'Ingrandes à Nantes. Par là, les communications sont interceptées, au point qu'il ne parvient ici aucun décret, et les affaires, en tous genres, restent suspendues.
« Le recrutement ne peut s'effectuer; les contributions sont plus que jamais arriérées et les travaux de la campagne ne se font point.
« Le mercredi 13 de ce mois, une troupe de plus de trois mille hommes brigands, attaqua la ville d'Ancenis par son entrée au nord; elle fut repoussée et dispersée par nos braves habitants.
« Une autre cohorte aussi considérable livra une pareille attaque samedi dernier. Elle fut également battue, mais on aurait peut-être succombé, si les frères d'armes de Nantes et de Candé n'étaient pas venus hier ici donner des secours.
« Il serait trop long, citoyen Président, de vous faire le récit circonstancié des malheurs qui affligent le district d'Ancenis et de ses alentours. Nous le ferons parvenir à la Convention quand de si grandes calamités venant à cesser, nous pourrons la mieux instruire. Priez-la de trouver un prompt et efficace remède à un aussi terrible fléau et assurez-la que, quels que soient les événements, nous voulons maintenir la liberté et l'égalité ou mourir en les défendant.
« Les administrateurs du district et les membres du conseil général de la commune d'Ancenis, réunis en permanence.
« Signé : Bourget, président; Gautrais, commissaire du département de la Loire-Inférieure ; Du Cellier, maire; Cathelineau, officier municipal; Guilbau, officier municipal;Gui-chard, notable; Michon, notable; Dénécheau, notable; Pillon, no table; Gicqueau, administrateur ; Barbarin, officier municipal ; Richard, procureur de la commune; Jousselin, procureur-syndic ; Saint-Aubin, secrétaire-greffier.
- P. S. — Nos frères d'armes de Nantes seront forcés de nous quitter d'un
moment à l'autre pour aller à la défense de leurs propres
« Le porteur de la présente se charge d'ajouter à cet exposé fait à la hâte.
« Signé : Bourget, Saint-Aubin. »
Je me joins à Mellinet pour demander que le ministre de la marine soit chargé de prendre les mesures nécessaires pour empêcher l'invasion des côtes de Bretagne et du Poitou. Je propose, en outre, qu'il soit tenu de rendre compte dans les vingt-quatre heures, par écrit, de ses dispositions à cet égard.
(La Convention décrète que le ministre de la marine est chargé de prendre les mesures nécessaires pour préserver des invasions de l'ennemi les côtes de Bretagne et du Poitou, qui paraissent menacées; il rendra compte dans vingt-quatre heures, par écrit, de ses dispositions à cet égard.)
(1). Comme on ne saurait s'entourer de trop de lumières en ces cas urgents, et qu'il est nécessaire de faire appel à tous les concours, je propose le renvoi de ces différentes lettres au comité de défense générale, qui joindra ses efforts à ceux du ministre pour conjurer le péril.
(La Convention décrète le renvoi demandé par Mellinet.
Un membre (2) : Je propose à l'Assemblée de décréter qu'elle entendra demain le rapport sur l'affaire du général Miranda et la série des questions auxquelles il sera tenu de répondre.
(La Convention décrète cette proposition.)
donne l'ordre d'ouvrir la barre aux pétitionnaires.
Les citoyens Soubisan et Deffès, officiers du 40° régiment d'infanterie, sont admis à la barre (3) :
Le citoyen Soubisan s'exprime ainsi :
Citoyens législateurs, nos chefs sont inciviques, un dé nos officiers est un émigré de Co-blentz; il refusa de porter secours à un poste de huit hommes, qui avait plus de cinquante ennemis contre lui. Un conseil militaire les avait destitués, vos commissaires avaient appuyé cette mesure. Par un effet de cette intrigue, qui tient à un grand plan de trahison, le lendemain, l'arrêté de leur destitution a été cassé, de l'aveu de vos commissaires. Ces officiers contre-révolutionnaires sont encore à notre tête. Fidèles a la discipline, nous attendons votre décision, d'où doit dépendre le salut de la République
Le citoyen Deffès s'exprime, à son tour, ainsi :
Représentants, j'appuie dans tout son entier le discours prononcé par mon
collègue. J'estime que la mesure, prise par vos commissaires, de
maintenir dans leur grade des officiers qu'ils avaient auparavant
destitués, est infiniment dangereuse, parce que le régiment étant au
fort Louis, c'est-à-dire sur la frontière, les traîtres peuvent
facilement correspondre avec les ennemis du dehors. Nous vous
répond aux pétitionnaires et leur accorde les honneurs de la séance.
Je demande que le jugement prononcé par le conseil de discipliné au 40e régiment d'infanterie, soit maintenu tant envers le colonel, qu'envers les officiers et sous-officiers, dont la destitution a été jugée nécessaire.
Il est constant que le colonel du 40e régiment d'infanterie était émigré lors de sa nomination à cette place. Il a toujours persécuté les soldats et j'ai été porté à vérifier les faits pendant que le 40e régiment était à Grenoble. J'ajoute que les officiers et sous-offi- . ciers qu'on vous dénonce sont convaincus d'avoir déchiré des affiches patriotiques ét se sont hautement récriés contre le décret qui fit tomber là tête du tyran.
J'appuie donc la proposition de Montaut, et je demande que la Convention approuve la destitution des officiers et sous-officiers du 40e régiment.
(La Convention adopte la proposition de Maribon-Montaut.)
Suit le texte définitif du décret rendu (1) :
« Sur une pétition du 40® régiment d'infanterie, actuellement en garnison au Fort-Louis du Rhin, présentée à la barre de l'assemblée par une dféputation de ce régiment, la Convention décrète qu'elle casse et annule comme illégaux les jugements rendus par les conseils de discipline tenus au Fort-Louis du Rhin, les 8, 9, 10 et 11 mars dernier, en vertu des réquisitions des commissaires de la Convention envoyés dans le Bas-Rhin; et néanmoins la Convention nationale décrète qu'elle casse et destitue de leurs fonctions les nommés Bro-becq, colonel ; Ladevèze, lieutenant-colonel ; Naugent, capitaine; Caldayroux, capitaine; Carâquel, capitaine: Dartus, capitaine; Geoffroy, lieutenant ; Borrelly, sous-lieutenant ; Hugues, sergent; Liard, sergent; et Malle-ville, aussi sergent; tous officiers et sous-officiers dans le 40e régiment, én cantonnement au Fort-Louis du Rhin.
« Le présent décret sera envoyé dans le jour au conseil exécutif provisoire, pour le .mettre en exécution sur-le-champ ».
(2). Je suis chargé par le citoyen Maurice, domicilié rue Française, au Havre, de déposer sur le bureau de la Convention une somme de 1200 livres. Ce courageux patriote et fervent ami de la liberté destine cette somme aux veuves et orphelins de ceux qui sont tombés dans la journée du 10 août.
Je propose à la Convention de décréter la mention honorable et de décider que cette offrande sera insérée au Bulletin.
(La Convention adopte les propositions de Richou.)
Elle se plaint à la Convention des usurpations de son frère et demande à entrer en partage avec ce dernier dans la succession de son père. Elle invoque les nouveaux textes du Code civil qui a supprimé le droit d'aînesse et établi l'égalité de tous l«s enfants au partage des biens familiaux.
répond à la pétitionnaire et lui accorde les honneurs de la séance.
(La Convention renvoie la demande au comité de législation.)
Un citoyen, chef . du bureau des contributions du bourg de l'Egalité> se présente à la barre (2).
Il fait hommage à la Convention d'un ouvrage intitulé : Le Guide des contribuables.
répond au pétitionnaire et lui accorde les honneurs de la séance.
(La Convention décrète la mention honorable de cetté" offrande qu'elle accepte et en ordonne l'insertion au Bulletin.)
Lé citoyen Serieys, secrétaire coin/mis aux bibliothèques nationales, se présente à la barre (3).
Au nom de la section du Panthéon français, il fait hommage à la Convention nationale d'un ouvrage en l'honneur de Michel Lepeletier. Î1 a pour titre : Epode à réciter près du tombeau (4),
remercie le pétitionnaire et lui accorde les honneurs de la séance.
(La Convention décrète la mention honorable et l'insertion au Bulletin.)
Le citoyen Faveaux, capitaine d'une compagnie de chasseurs nationaux, est admis à la barre (5).
Il demande que cette compagnie soit conservée.
répond au pétitionnaire et lui accorde les honneurs de la séance.
(La Convention renvoie cette demande au comité de la guerre.)
Une députation des épiciers de la ville, de Paris se présente à la barre (6).
L'orateur de la députation s'exprime ainsi :
« Citoyens représentants, nous ne Venons point affliger votre sensibilité
par le récit nouveau de ce que nous avons souffert dans les malheureuses
journées de® 25 et 26 février dernier.
« Vous seriez affligés de savoir que cette ville, dont aujourd'hui la principale ressource est le commerce, et dont le premier intérêt est de faire respecter les lois et les propriétés, ait souffert des mesures qui ont compromis la fortune de douze cents négociants, de douze cents citoyens domiciliés, presque tous pères de famille.
(( Loin de nous, d'ailleurs, tout esprit de vengeance.
( Nous savons que le peuple est toujours bon, et que toujours aussi il finit par être juste; nous savons qu'il est le premier à se repentir des excès qu'on lui fait commettre, et qu'il sent le besoin de substituer à l'anarchie qui le désole, le règne absolu de la loi, sans lequel il n'est ni liberté ni gouvernement.
(( Nous voudrions, citoyens représentants, pouvoir ajouter au sacrifice de notre douleur, celui des indemnités qui nous sont dues ; mais la plupart d'entre nous ont tout perdu dans ces malheureuses journées ; il en est même, et il en est beaucoup, qui seraient réduits à l'affreuse nécessité de manquer à leurs engagements, s'ils ne recevaient le remplacement des pertes qu'ils ont faites : leur existence civile et leur honneur leur font une devoir d'invoquer votre justice, pour obtenir un dédommagement légitime et nécessaire : car, sans cela, leur existence civile et leur honneur seraient perdus pour eux. >
« Nos pertes sont justifiées par un état que nous remettrons à celui de vos comités que vous nous indiquerez ; nous en garantissons l'exactitude ; et si cette garantie ne vous paraissait pas suffisante, nous nous soumettons avec empressement à vous prouver par nos livres, par des factures, et par notre correspondance, que nous avons apporté à cet état l'exactitude la plus sévère et la plus impartiale. »
L'orateur soumet ensuite à la Convention l'état du prix des denrées dans les fabriques, et prouve que la surhausse de ce prix est l'unique cause de leur renchérissement dans Paris.
répond aux pétitionnaires et leur accorde les honneurs de la séance.
(Les pétitionnaires entrent dans la salle et vont s'asseoir sur les bancs de la droite).
J'observe à la Convention que j'ai un rapport tout prêt sur cet objet.
Ce rapport est inutile ; je demande que les épiciers avant d'obtenir une indemnité, soient contraints de rendre compte de ce qu'ils ont gagné depuis le commencement de la dévolution (Murmures). Je propose, en outre, que les municipalités fassent aificher, tous les quinze jours, le prix des savons à Marseille, et des suifs dans leB ports de mer.
Le préopinant a raison ; puisque les épiciers demandent que la municipalité les indemnisent de leurs pertes, je demande, moi, qu'ils restituent eux-mêmes ce qu'ils ont gagné en vendant trop cher (Nouveaux murmures sur les mêmes bancs et vifs applaudissements des tribunes).
(1) Je déclare, au nom de la Convention, bous ma responsabilité, que je ferai punir tous ceux, soit des membres de la Convention, soit des citoyens des tribunes, qui se permettraient de violer le règlement.
Président, vous n'avez pas le droit de punir un membre de la Convention.
Je répondB au membre qui m'apostrophe que je regarde toujours comme line véritable punition, pour un membre de la Convention, d'être rappelé à l'ordre ou d'être censuré au procès-verbal.
La loi a, tracé la marche que les épiciers de Paris doivent tenir pour obtenir l'indemnité qu'ils réclament avec justice ; ce sont; les tribunaux qui doivent en connaître et la fixer.
Le tableau qu'ils ont fait des causes qui ont amené progressivement les hauts prix des denrées qu'ils réclament est vrai ; il est nécessaire qu'il soit Connu, que les pétitionnaires le rendent public par l'affiche : en même temps qu'il fera ce®Ber les soupçons, il leur servira d'apologie.
Je suis épicier aussi, moi, et je dirai la vérité J elle n'est pas pour le détailleur, qui n'est qu'un simple revendeur ; c'est au riche épicier capitaliste que je l'adresse : je lui demande quel nom il donnera à cette espèce de commerce, l'effet de son insatiable cupidité ; à cette opération désastreuse qui a eu lieu, lorsque après avoir, par ses agents, arraché au moindre détailleur de l'intérieur, Bon dernier pain de sucre, son dernier pain de savon, son dernier grain de café, il les a fait remonter vers leur source, les a fait passer en Hollande ou dans les villes hanséatiqUes oii ces mêmes denrées sont à meilleur marché qu'ici, n'est-ce pas un véritable accaparement et une des premières causes de l'excessive cherté dont se plaignent les Consommateurs?
Je n'examine point si parmi les épiciers de Paris, il en est qui aient eu des torts ; mais je île Vais point non plus approuver les brigands qui vont piller leurs magasins. Je demande le renvoi de leur pétition au comité des finances. Quant aux observations dé Maure, je conviens qu'il est des Circonstances où l'on doit, sans doUte, prendre de® précautions pour ne pas produire le renchérissement de nos denrées ; mais il faut aussi réfléchir que l'utilité principale des colonies est de nous fournir des moyens d'échange avec les puissances du nord avec qui nous allons acheter du bois, du blé et du goudron, que nous serions obligés de payer éh humérairè.
(2). Ce que je viens d'entendre m'oblige à prendre la parole. Un membre de la Convention semble attaquer les propriétés par dés observations inconsidérées à; insulter en quelque sorte aU malheUr. (Interruptions et murmura sur là Montagne et dans tes tribunes).
Plusieurs membres du centre se lèvent et s'écrient : A l'ordre ! à l'ordre ! Qui de noue ou des tribunes pourront parler ici ? On insulté des à
la représentation nationale! La liberté opinions est violée 1
rappelle les tribunes l'ordre.
Est-ce donc ainsi qu'Un représentant du peuple doit être interrompu ? M'accusera-t» on de violer les décrets en voulant émettre mon opinion?
Fermez la discussion.
Mais quelle est donc cette tactique de l'Assemblée, de vouloir, aussitôt qu un membre de tel ou tel Côté veut parler, fermer la discussion; je demande que la discussion ne soit pas fermée.
Je ne serai pas long. Je tiens à dire deux. mots seulement contre Ce que vient de dire Bentabole, interprétant en cela fort mal la première motion que Faure ^vait présentée. J'estime que cela est plus important que vous ne pensez.
On vous a proposé d'insulter, pour; ainsi dire, à la misère de ceux qui ont été pillés le 26 février, par des propositions détournées, et de légitimer le pillage fait par le peuple égaré sans doute. (Nouvelles interruptions sur ta Montagne.)
Plusieurs membres : L'ordre du jour sur la discussion.
Souvenez-vous, citoyens, que c'est ainsi que l'on corrompt la moralité du peupie, et qu'on empoisonne tous lis jours la source la plus pure de la prospérité des empires.....
(interruptions violentes sur la Montagne.)
Les mêmes membres : Aux voix, aux voix; l'ordre du jour 1
Puisqu'on y met tant d'insistance, je demande moi-même l'ordre du jour et qu'on pille si l'on veut. (Nouvelles interruptions.)
met aux voix l'ordre du jour.
(Deux épreuves paraissent douteuses.)
Mettez aux voix, Président, le renvoi de la pétition au comité des finances et voUs statuerez ensuite sur les autres propositions.
jétitiôn des épi-inances.)
consulté une troisième foiB l'Assemblée sur l'ordre du jour..
(La Convention rejette l'ordre du jour et dé-crète-que Buzot sera entendu pour répondre à Bentabole.)
et plusieurs autres membres (1). Il est inutile de faire perdre le temps de l'Assemblée ; tout le monde désapprouve Bentabole. Aux voix l'improbation, ét passons à l'ordre du jour.
(La Convention improuve la motion de Beti-tabole.)
Une députaUon du conseil général de la commune de Paris est admise à la barre (2).
Le vice-président du conseil général^ orateur de la députation, s'exprime ainsi ;
« Représentants du peuple, les dernières nouvelles arrivées de la Belgique ont fait dans
(La Convention renvoie la ciers dé Paris au comité des
Anaxagoras Chaumette,procureur syndic de la Commune, donne alors lecture de la pétition suivante (1) :
( Représentants de la nation,
« Le conseil général de la Commune a appris les nouveaux dangers qui menacent la République, et ces revers auxquels on devait s'attendre de»la part de ceux qui en sont les auteurs. Loin d abattre le courage aes amis de la patrie, il ne fait que l'augmenter : à la vérité, un sentiment profond d'indignité a été la première sensation qu'aient éprouvée nos âmes. Il a dû éclater d'une manière violente si l'on en juge par le long temps qu'il est resté concentré en nous. Avant que vous eussiez Cité devant le tribunal un général imprudent et perfide, l'opinion des amis de la liberté était prononcée sur son compte, mais par respect pour l'opinion de la Convention nationale, ils s'étaient condamnés à un pénible silence. Aujourd'hui que des faits parlent ; aujourd'hui que la conduite de cet homme n'est plus un problème ; aujourd'hui que les nouveaux Français de la Belgique ont été sacrifiés à l'intrigue et que ce nouveau Brennus n'a pas rougi de peser la destinée des peuples amis dans la balance de l'ambition ; aujourd'hui enfin que, de toutes parts, les cris d'indignation de nos concitoyens retentissent autour de nous, nous leur devons, nous nous devons à nous-mêmes de vous demander une justice prompte de cet audacieux et de tous ceux qui, comme lui, voudraient rabaisser l'autorité de la représentation nationale.
En vain chercherait-on à nous en imposer sur le compte de l'armée dont, par malheur, il était chef. Cette armée est composée de Français, de républicains ; c'est sur les monceaux de cadavres de nos frères qu'elle a déjà jugé Dumouriez. Non, non, l'opinion de Du-mouriez n'est pas celle de son armée. Il peut vouloir un roi ; mais son armée a juré de vivre libre ou de mourir. Que d'autres la calomnient, l'injurient. C'est à nous, républicains, de la disculper, de la venger. L'armée qui a vaincu à Jemmapes saura récupérer ses pertes et prouver à l'Europe entière qu'elle n'a pas été vaincue, mais trahie. Donnez à cette armée un chef digne d'elle, un chef plébéien enfinj et vous la verrez bientôt se ressusciter elle-même et voler de victoire en victoire. Des chefs républicains, législateurs, des chefs républicains qui n'aient jamais respiré l'air pestiféré des cours, voilà le moyen très sûr de ramener l'ordre dans nos armées, de les préserver de la | contagion.
Législateurs, si dans ce moment toutes les administrations populaires,
toutes les autorités constituées de la République étaient à Paris, voua
les verriez toutes se rallier autour
Citoyens, les mesures nouvelles qui ont été prises à l'unanimité par la Convention nationale, pour remédier aux maux qui menacent la République, doivent rassurer tous les Français. Il ne sera pas dit que nous n'avons fait que montrer la liberté au monde. Autant la Convention nationale mettra d'énergie pour faire exécuter les lois, autant elle mettra de sévérité à punir les traîtres. Elle montrera que sous le régime de l'égalité, il n'est point de têtes pour lesquelles il existe des privilèges.
Sensible à vos offres, la Convention nationale reçoit, vous le voyez, votre hommage avec enthousiasme.
Citoyens, qu'un même esprit nous garde, que la tranquillité publique ne soit pas altérée, et nous triompherons de tous nos ennemis.
La Convention nationale vous invite à sa séance. (Vifs applaudissements.)
Un grand nombre de membres : Nous demandons l'impression du discours de Chau-mette et de la réponse qu'y a faite le Président; nous demandons également que le tout soit envoyé aux départements et aux armées.
J'appuie, certes, la proposition ; je demande néanmoins que l'envoi aux départements soit différé jusqu'à ce que le général inculpé ait été entendu.
(La Convention décrète que le discours de Chaumette et la réponse du Président seront imprimés^ et que l'envoi aux départements en sera différé jusqu'à ce que le général inculpé ait été entendu.)
Les membres du directoire du département de Paris se présentent à la barre (1).
Ils demandent le remboursement des billets de confiance, déposés en exécution du décret du 9 janvier 1793.
répond aux pétitionnaires et leur accorde les honneurs de la séance.
(La Convention renvoie la pétition au comité de3 finances.)
Le citoyen Basty, à la tête d'une compagnie de la section du Contrat social, est admis à la barre (1).
Il s'exprime ainsi (2) :
« Citoyens législateurs,
« Organes de la section du Contrat social, nous venons offrir à la patrie le tribut sacré de notre amour pour elle.
« La compagnie des canonniers de notre section, composée de frères, parents et amis, une et indivisible comme la République, brûlant du désir de réparer nos défaites, se présente dans votre sein.
« Les succès passagers de nos ennemis, bien loin de l'intimider, ne servent qu'à accroître son courage. L'esclave se laisse abattre au premier revers ; le républicain, au contraire, en acquiert de nouvelles forces. Les despotes ne jouiront pas de leur triomphe : la trahison n'a qu'un temps et les traîtres périssent. (Applaudissements.)
« Recevez donc,, législateurs, le serment de la compagnie des canonniers d'être soumise aux lois, fidèle à la République une et indivisible, de combattre tous ses ennemis, de vaincre ou de périr au poste d'honneur. qui lui est assigné. »
Citoyens, l'émulation produite par votre généreux exemple, soutiendra le courage des défenseurs de la liberté. Nous sommes tous attachés à son sort, et nous ne pouvons pas douter qu'elle ne triomphe de nos ennemis. Allez donc, braves défenseurs de la République. Le tombeau du despotisme sera creusé par vos mains.
(Les volontaires prêtent le serment ; ils défilent ensuite dans la salle, au milieu des plus vifs applaudissements.)
Les officiers, sous-officiers et soldats du 2e bataillon du 38® régiment d'infanterie, en garnison à Givet, adressent 600 livres en écus, et 520 livres en assignats, et demandent à être les premiers à combattre les phalanges ennemies.
En l'absence de Carra* ie dépose cette offrande sur le bureau de l'Assemblée ; j'en demande la mention honorable et l'insertion au Bulletin.
(La Convention décrète la proposition de Bréard.) -
(3). J'annonce à la Convention que les citoyens patriotes de la paroisse
de St-vignac, district de Broons, département des Côtes-au-Nordy ont
donné une somme de 150 livres pour .leurs frères d'armes qui vont
combattre les satellites du despotisme, et que l'administration de leurs
districts les ayant requis le 21 mars, à midi, pour coopérer à repousser
les brigands qui menaçaient le district, ils abandonnèrent aussitôt leur
travail
(La Convention décrète la mention honorable de la conduite des citoyens de la paroisse de Sérignac ; elle ordonne l'insertion au Bulletin de leur offrande qu'elle accepte avec les plus vifs applaudissements.)
J'ai, à mon tour, à donner connaissance à la Convention d'une lettre du directoire du district de Neuville (Loiret), qui annonce que le tribunal de cette ville, voulant joindre son offrande à celle de la municipalité^ la société populaire et les citoyens lui ont envoyé différents objets d'habillement pour lea volontaires de ce département qui combattent aux frontières. Toici cette lettre (1) :
Neuville, département du Loiret, le
« Citoyens représentants de la patrie,
« Le directoire du district, les citoyens, la municipalité, le tribunal et la société des amis de la République de Neuville, départe^ ment du Loiret; convaincus de l'obligation où sont tous les citoyens de contribuer, suivant leurs facultés, à la défense de la patrie et qu'ils ne sauraient le faire plus utilement qu'en subvenant aux besoins de nos braves frères qui prodiguent leur vie pour la cause de la liberté et de l'égalité, en leur offrant, de préférence, des dons en nature, d'objets fa. briquée et fournis sous leurs yeux par do bons patriotes, font passer au département du Loiret, savoir :
« Le tribunal, 12 paires de souliers et 14" paires de bas.
« Et les autres citoyens ci-dessus dénommés, 3 chapeaux et une chemise.
« Ce n'est point ici, législateurs, le premier don des citoyens et fonctionnaires publics du district de Neuville ; ils n'ont perdu jusqu'à présent aucune occasion d'offrir à la patrie des gages de leur amour et de leur dévouement, mais c'est le denier de la veuve, de l'orphelin, même de la tendre enfance : c'est l'offrande de vrais républicains.
« Représentants, la commune de Neuville vient de fournir son contingent ; il vole aux frontières; ses dons patriotiques se sont élevés, en cette occasion, à quatre mille cent livres.
« Le tableau des dons est le suivant :
- P. de bas Souliers Chemises Chapeaux
Le direc'oire du.district............. » 6 » »
Le tribunal ........ 14 12 » •
La municipalité, les citoyens et amis de
la République .... 9 10 • 1 3
Total.... "23 28 T ~3
(La Convention décrète la mention honorable de ces différentes offrandes qu'elle accepte et ordonne F insertion de la lettre, lue par Gentil, au Bulletin.)
Le citoyen Vassant, procureur de la commune de Sedan, est admis à la barre.
Il donne lecture de la pétition suivante (1) :
Représentants,
« Si vous ne vouliez pas sauver sincèrement la patrie, je ne viendrais pas ici vous interrompre une seconde fois, et je m'en irais gémir avec mes concitoyens, sur l'insouciance et le despotisme de vos comités, en attendant le funeste accomplissement des prédictions que je vous ai faites, sur les malheurs qui suivront nécessairement la disette où nous sommes.
« Il y a trois semaines que je vous ai présenté, au nom du conseil général de la commune de Sedan, une pétition pour vous exposer le délabrement affreux de ses finances, pour vous dire que les subsistances allaient manquer dans cette ville, enfin pour vous demander un secours de 100,000 écus. L'honneur d'être renvoyé au comité des secours n'est pas très difficile à obtenir; aussi l'ai-je obtenu. Le comité des secours, après être convenu de la grandeur des besoins de la ville de Sedan, de l'extrême faiblesse de ses ressources actuelles, en un mot de la justice de ma demande, m'a procuré un autre honneur; c'est celui d'être renvoyé au comité des finances et tout cela pour se débarrasser de moi. Le comité des finances auprès duquel, en vertu de mes pouvoirs, j'ai converti ma demande d'un secours pur et simple en celle d'une avance remboursable, au terme et de la manière qu'il jugerait à propos, m'a également donné de l'eau bénite de cour et a mis néant au bas de ma requête. Je crois qu'il se dispose, pour se débarrasser de moi, ainsi que l'a fait son digne confrère, le comité des secours, à me renvoyer au ministre de l'intérieur; et le ministre de l'intérieur me renverra aux calendes grecques où l'on croit peut-être que je m'arrêterai de fatigue et d'ennui.
« Yous voyez, citoyens représentants, et toute la France le verra avec vous, que c'est se jouer d'une manière atroce du droit sacré de pétition que de promener ainsi les gens pour ne leur rien accorder. C'est une chose indigne des délégués d'une nation libre et généreuse; c'est le comble de l'immoralité politique. Certes, si tous les pétitionnaires qui font des demandes aussi justes et aussi importantes que la mienne sont traités de même, je vous assure qu'il ne faudra pas plus de trois mois pour mettre la République entre les mains de Monsieur Pitt, de Monsieur Frédéric-Guillaume et compagnie.
« Cependant, citoyens représentants, dépuis les commencements de la
guerre, la ville de
« Le cofEre-fort de la municipalité est à sec; le trésorier est en avance de plus de 10,000 fr. ; moi-même, comme procureur de la commune, j'ai été assigné à payer des sommes considérables que je ne sais où prendre : voilà encore des faits.
Le pain vaut 6 sols la livre dans tout le département des Ardennes; toutes les autres denrées y sont plus chères qu'à Paris, et Sedan n'étant peuplé en partie que de citoyens pauvres, la respectable sans-culotterie y meurt de faim : voilà encore des faits.
« Les pauvres ouvriers attachés aux manufactures ne sont pas plus payés aujourd'hui qu'ils ne l'étaient dans l'ancien régime, et les riches, en les exténuant par un travail ingrat et malsain, continuent de bâtir de superbes maisons aux dépens de ces pauvres qu'ils volent avec impudence. Ces mêmes riches mettent la misère dans Sedan par leur avarice et paralysent le patriotisme par leur aristocratie : voilà encore des faits certains.
« Les habitants du duché de Bouillon, qui dédaignent l'honneur d'être français et qui cependant aiment bien à jouir de tous les avantages que leur procure la République française, sans supporter aucune des charges auxquelles sont assujettis les citoyens français; les Bouillonnais, dis-je, que l'on doit regarder comme de véritables cancers sur le corps politique, accaparent tout notre argent monnayé et ne prennent nos assignats que pour la moitié de leur valeur. Ainsi, avec une certaine quantité d'assignats qui ne leur coûte que 25 livres, ils achètent sur nos marchés une portion de blé que nos concitoyens malheureux sont obligés de payer 50 francs; par ce moyen, ils épuisent nos provisions; l'abondance est chez eux, la misère est chez nous. Yoilà encore des faits certains. Si, par un décret, vous leur coupiez seulement les vivres pour quinze jours, ils seraient bientôt français et, en partageant nos faibles avantages, ils contribueraient comme les autres à sauver la République.
« Le département des Ardennes, en partie stérile, surtout du côté de Rocroi, ne peut nourrir ses nombreux habitants avec son propre fonds; c'est un fait certain.
(( Pour surcroît de misère, la partie fertile de ce département a été, aux mois de septembre et d'octobre derniers, ravagée par les émigrés : c'est encore un fait certain.
« Le fertile département de la Meuse, d'où nous tirons annuellement nos subsistances, a été également ravagé par les émigrés, les Prussiens et les Autrichiens; quantité de terres sont restées incultes cette année : voilà encore de& faits certains.
« Le département de l'Aisne, d'où nous tirons aussi annuellement nos subsistance"!, est épuisé par le gouvernement qui, nécessairement, accapare pour l'entretien de nos armées : voilà encore des faits certains.
« Les habitants de la campagne, qui ont coutume de fournir nos marchés, ne viennent plus en aussi grand nombre qu'autrefois nous amener des grains : voilà encore un fait incontestable.
« La municipalité de Sedan, pour maintenir le pain au prix où il est et pour l'empêcher de se monter à 12 et 15 sols la livre, a nécessai-
rement besoin d'avoir dans ses magasins du "blé pour le donner au prix courant. C'est une mesure extraordinaire et indispensable quelle ne peut cependant prendre, si elle n'a point d'argent : voilà encore des faits très certains.
« La ville de Sedan a besoin de blé, non seulement pour pouvoir alimenter ses marchés, mais encore pour pouvoir nourrir le citoyen en cas de siège : voilà encore des faits certains.
« Réveillez-vous donc, législateurs, il s'agit ici de mettre toutes nos frontières hors d'état d'être franchies par les valets enrégimentés des brigands couronnés. Voulez-vous sauver la ville de Sedan ou ne le, voulez-vous pas ? Voulez-vous y voir bientôt la famine; après la famine, les séditions et les révoltes; après les révoltes, le triomphe de contre-révolutionnaires, ou voulez-vous sincèrement détourner ces fléaux de dessus nos têtes 1 Voulez-vous que le général Beaulieu, qui doublera ses efforts 'en raison de la détresse où il saura que nous sommes, envahisse le territoire de la République, ou ne le voulez-vous pas? Voulez-vous que le sans-culottisme soit toujours victorieux à Sedan, ou ne le voulez-vous pas ? Car je vous le déclare, citoyens représentants, si vous ne nous soulagez à l'instant par un décret, les sans-culottes qui composent le conseil général de la commune de Sedan n'y pourront pas tenir, parce que la responsabilité sera au-dessus de leurs forces; ils seront forcés, malgré leur bouillant patriotisme, d'abandonner les rênes de l'administration municipale, de quitter l'écharpe tricolore, pour reprendre le fusil et endosser encore une fois la giberne, et la ville retombera entre les mains des riches qui'se remettront à conduire les affaires, comme ils les ont déjà conduites avec l'infâme LaFayette.
« Voilà, citoyens représentants, ce que j'ai dit dans les comités où je me suis vu ballotté depuis trois semaines; on est convenu que tout ce que je disais était vrai, que ce que je demandais était juste, mais on ne m'a répondu que par des sophismes et des calembredaines qui m'ont laissé entrevoir la détermination prise de ne me rien accorder du tout. Cependant Sedan est dans un cas pressant; Sedan est dans un cas extraordinaire; notre position ne ressemble à rien de ce qui existe dans la République. Citoyens représentants, je me décharge entre vos mains de ma commission; je remets sur vous toute responsabilité morale; je vous déclare que nous ne pouvons plus y tenir : nos maux sont à leur comble.
« Législateurs, je me résume en vous demandant ou que vous nous accordiez sur-le-champ une avance que nous vous remettrons quand vous le jugerez à propos, ou que vous donniez aussi sur-le-champ des ordres au ministre de l'intérieur afin qu'il nous envoie des grains pour alimenter nos marchés et pour nous mettre en état de tenir contre l'ennemi. Encore un coup, législateurs, sauvez-nous. Du pain, -du pain, du pain ! Il faut avoir de quoi manger pour pouvoir se battre ! Nous avons beau avoir des munitions de guerre en attendant l'ennemi, la -poudre n'est pas de la far rine ; des assiégés ne font pas la soupe avec des tranches de canons ; les boulets et les bombes ne sont pas des pains de munition.
« Législateurs, si vous voulez que les Seda-nais se battent jusqu'à la mort d'une manière qui soit profitable à la République, rendez-leur à l'instant le service important que je rr>\-
'! licite et renvoyez-moi à mon poste, car j'y ai ; besoin. »
répond au procureur de la i commune de Sedan, et lui accorde les hon-! neurs de la séance.
(1). Depuis que vous avez décrété une demande semblable à celle qui vient de vous être faite, pour les villes de Nantes et de Bordeaux, vous ne pouvez plus vous empêcher j d'accueillir celle-ci de la même manière, parce | que vous ne pouvez avoir deux poids et deux mesures ; mais je dois observer à la Convention que la pétition de la ville de Sedan ne portait d'abord que 100,000 livres et que le procureur syndic de cette commune y a ajouté 200,000 livres de plus. Je demande qu'il soit accordé à la ville de Sedan, la somme de 100,000 livres seulement.
(2). La ville de Sedan est menacée d'être assiégée par le général Beaulieu, et ! comme on ne peut pas ajourner les attaques de nos ennemis, je demande qu'il soit accordé la somme de 300,000 livres, afin qu'elle soit suffisamment approvisionnée en cas de siège.
(3). J'appuie la proposition de Mallarmé, mais je demande que, comme on l'a fait pour Nantes et pour Bordeaux, cette somme de 100,000 livres soit prise sur les contributions de la ville, qui ont dû être recouvrées en l'année 1792. Cette somme devra être remboursée au Trésor public en 1793, au moyen de la revente des grains; et, en cas de déficit, il sera imposé par addition, suivant le mode j progressif.
(La Convention adopte la proposition de Mallarmé avec les modifications apportées par Cambon).
Suit le texte définitif du décret rendu (4) :
« La Convention nationale, après s'être fait rendre compte de la pétition du Conseil général de la commune de la ville de Sedan, par le comité des finances, décrète ce qui suit :
Art. 1er.
( Il sera prêté à la commune de Sedan la somme de 100,000 livres, pour servir à s'approvisionner de subsistances, à charge d'en rendre compte.
Art. 2.
Cette somme sera prise sur les contributions de la ville de Sedan, qui ont dû être recouvrées en l'année 1792.
Art. 3.
« Cette somme de 100,000 livres sera remboursée au Trésor public en 1793, au moyen de la revente des grains; et, en cas de déficit, il sera imposé par addition, suivant le mode progressif ».
(5) demande que le Comité des
(l) fait une pareille demande en ce qui concerne la ville de Besançon.
(La Convention décrète qu'il sera fait un rapport sur les pétitions des villes de Strasbourg et de Besançon).
Un membre propose et l'Assemblée décrète ce qui suit(2) :
« La Convention nationale, interprétant son décret du 16 de ce mois (3), décrète que sur les sommes tant en numéraire qu'en assignats et autres valeurs, trouvées dans les caisses du citoyen Forestier, quartier-maître trésorier du ci-devant régiment de gardes-suisses, et déposées dans une des caisses de la Trésorerie nationale, les commissaires de la Trésorerie sont autorisés à retenir la somme de 208,363 liv. 9 s. 1 d., montant du débet du citoyen Forestier, réglé et arrêté par lè ministre de la guerre et les commissaires par lui nommés pour l'examen de ses comptes; le surplus des sommes et valeurs déposées sera remis au citoyen Forestier, y compris une somme de 7,040 livres en numéraire, qui est reconnue appartenir à la caisse particulière.
« Le présent décret sera exécuté dans les vingt-quatre heures. »
, secrétaire, reprend la lecture des lettres, adresses et pétitions envoyées à l'Assemblée :
45° Lettre des membres composant le conseil général de la commune, de Langres (4) par laquelle ils annoncent que l'inscription volontaire a produit au delà du contingent qui leur était assigné dans le recrutement ; et qu'en outre quinze enfants âgés de douze à seize ans, avec l'agrément de leurs parents, se sont inscrits pour servir sur les vaisseaux de la République ; ils demandent que la Convention désigne le port auquel ils doivent se rendre.
(La Convention décrète la mention honorable du patriotisme des citoyens de Langres et renvoie la demande au ministre de la marine.
46° Adresse des républicains composant la société des Amis de la liberté
et de l'égalité de la ville de Langres (5) par laquelle ils instruisent
la Convention au succès de la souscription qu'ils ont ouverte pour
subvenir aux besoins des volontaires qui sont aux frontières. C'est le 6
janvier qu'elle a commencé, et dès le 24 du même mois, ils ont envoyé
aux bataillons de la Haute-Marne 109 chemises, 78 paires de bas, 234
paires de souliers, 68 culottes, 134 paires de guêtres, 2 habits à
uniforme, 8 vestes et gilets, 2 pantalons et 6 douzaines de paires de
mitons.
(La Convention décrète la mention honorable et l'insertion au Bulletin.)
470 Lettre du président de la section de la Maison commune, qui annonce qu'elle a fourni 143 volontaires au lieu de 128 demandés pour son contingent ; cette lettre est ainsi conçue (1) :
comité de police.
Section de la Maison commune.
Paris, le
« Citoyen Président,
« La section de la Maison commune a enrôlé et fait partir pour les frontières, le 22 du présent mois, ses frères d'armes au nombre de 143, au lieu de 128 qui lui étaient demandés pour son contingent.
« Ces généreux défenseurs ont craint jusqu'à l'ombre du soupçon d'un vil intérêt. Contents, des efforts de leurs concitoyens dont la plus grande partie n'est pas dans l'aisance, tel n'a rien reçu du tout, tels ne voulaient rien recevoir, et tous se sont contentés d'une légère offrande. Ils ont consenti à n'être pas présentés à la Convention nationale, pour ne pas lui dérober des moments qu'elle emploie aussi utilement au salut de la patrie et pour voler plus promptement à sa défense.
« La section de la Maison commune continue ses enrôlements et ne sera pas la dernière à se sacrifier pour le maintien de la République une et indivisible.
« Le président de la section de la Maison commune.
« Signé : Ditmont. »
(La Convention décrète la mention honorable de cette lettre au Bulletin.)
48° Lettre du citoyen Aubourg, qui offre à la patrie un habit, un équipement complet et 100 livres pour les frais ae la guerre ; sa lettre est ainsi conçue (2) :
« Citoyen Président,
. « Nicolas Aubourg, dévoué jusqu'à la mort à la défense de la République, offre à la patrie un habit, un équipement complet et cent livres pour les frais d'une guerre qui renversera tous les tyrans. #
« Aubourg est père de deux enfants, jeunes encore, qu'il vOue, dès à
présent, au service de la République; à l'exemple d'Annibal, il
« Epoux et père, âgé de 56 ans, l'amour conjugal n'a pas éteint son ardeur ; rien que la mort ou la chute des tyrans ne pourra lui faire abandonner son poste.
« Signé : àubourg. »
(La Convention décrète la mention honorable de cette offrande, l'insertion au Bulletin et l'envoi de l'extrait du procès-verbal au citoyen Aubourg.)
(1). Citoyens, la peste ravage dans ce moment les côtes de Barbarie y il importe que la surveillance la plus active soit exercée dans tous les ports de la Méditerranée. Cependant, le département des Bouches-du-Rhône veut, contre l'avis de la municipalité de Marseille, désorganiser le bureau de santé et le bureau provisoire de commercé. Je vous propose de décréter que ces deux établissements seront conservés jusqu'au rapport qu'on doit vous faire sur une adresse de la municipalité de Marseille, relative à cet objet.
(La Convention nationale décrète que le bureau de santé et le bureau de commerce de Marseille existeront provsoirement dans cette ville jusqu'à ce que la Convention nationale ait prononcé sur la pétition de cette commune, renvoyée aux comités de commerce et de marine, réunis) (2).
Le citoyen Vassant, procureur de la commune de Sedan, se présente de nouveau à la barre (3).
Il réclame une augmentation de secours.
(4). Puisque la Convention, par l'adoption de la proposition de Mallarmé, a repoussé la demande d'une subvention de 300,000 livres que j'avais sollicitée pour la commune de Sedan, je propose de décréter que le citoyen Vassant s'adressera au comité aes finances pour en faire rapport s'il y a lieu.
(La Convention décrète la proposition de Marat. )
, au nom du comité de législation, fait un rapport et présente un projet de décret interprétatif de Varticle 2 de la loi du 11 septembre 1792, relative aux acquéreurs de biens nationaux (5); il exprime ainsi :
Législateurs, le citoyen Pondeux était propriétaire de dîmes inféodées,
et en sollicitait la liquidation, lorsqu'il fit l'acquisition des biens
nationaux; il prétend qu'il espérait en payer le prix par une
reconnaissance de liquidation ; mais l'Assemblée nationale législative
ayant supprimé l'indemnité, permit à ces acquéreurs de biens nationaux
ci-devant propriétaires de dîmes inféodées, de renoncer
« La Convention passe à l'ordre du jour, motivé sur le texte de la loi du 11 septembre, qui a ordonné que le délai de deux mois courrait dès le jour même de la loi et non de la promulgation. »
(La Convention adopte ce projet de décret.)
(1). Le citoyen Gautier a découvert, vers le milieu de décembre dernier, que les sieurs Bonvalet, Desbrossês, Rolly, Bleau, et le ci-devant comte de Massac, se disant aujourd'hui chevalier de Beauvais, étaient chargés de la part des ci-devant princes, Monsieur et comte d'Artois, d'établir à Paris une fabrication d'assignats, à leur effigie et à leur privé nom, avec ordre d'en mettre en émission une quantité satisfaisante pour remplacer les assignats nationaux, au moment de leur rentrée à Paris. Cette rentrée est annoncée pour la fin d'avril prochain. Il existe une piece convaincante qui a été saisie par le citoyen Gautier dans le courant de janvier dernier. Cette pièce est signée des ci-devant Monsieur et comte d'Artois.
Les informations données de cette affaire par le citoyen Gautier, sont déposées à votre comité de sûreté générale depuis le milieu de janvier, et les agents criminels des Capet fugitifs sont détenus à l'Abbaye depuis cette epoque ; ils n'ont pas encore été entendus, et l'on ne semble les avoir oubliés que pour les soustraire au supplice. Le rapport qui aurait dû vous être fait de cette affaire depuis trois mois, vous prouvera que tous les événements désastreux qui dès lors ont désolé la patrie, y sont annoncés. Vous y verrez que les ci-devant princes se promettent de rentrer en France, au moyen des légions innombrables de suppôts qu'ils ont dans le ministère, dans les départements et à la tête de nos armées. Vous y verrez les traces des trahisons de nos généraux qui mettent aujourd'hui la liberté en péril.
Je demande que mardi prochain votre comité de sûreté générale soit tenu de vous faire le rapport de cette affaire, et que la date de la dénonciation du citoyen "Gautier sera constatée.
(2). J'observe que le
(1). Je réponds à Puyraveau que là n'est pas la vraie raison. Si on n'a pas poursuivi les coupables, c'est que lorsque les dénonciations en furent faites au comité de sûreté générale, ce dernier n'était composé que de membres du côté droit. ( Vifs applaudissements des tribunes.)
Plusieurs membres (de droite) opposent un défi formel à Marat de prouver son assertion. Ils insistent pour que la date de la dénonciar-tion soit insérée au rapport qui sera fait mardi.
(La Convention nationale décrète que le comité de- sûreté générale fera irrévocablement mardi prochain son rapport sur l'affaire des sieurs Rolly, Bleau, Bonvalet, Desbrosses, et le ci-devant comte de Massac, se disant chevalier de Beauvais, détenus à l'Abbaye, comme agents des ci-devant monsieur et comte d'Artois, et spécialement chargés de la fabrication de faux assignats, à l'effigie et au nom des ci-devant princes.. Décrète, en outre, que la date à laquelle les pièces ont été remises au comité sera constatée) (2).
Tue citoyen Rossignol se présente à la barre(3).
Il réclame les avantages que la loi attribue aux artistes qui _ font des découvertes; la sienne est un vernis pour préserver les armes de la rouille.
répond au pétitionnaire et lui accorde les honneurs de la séance.
La Convention renvoie la demande au comité de la guerre.)
La veuve Barbier se présente à la barre (4),
Elle expose que son mari a été employé, pour le canal de Calmar et autres travaux, à diverses opérations utiles, sous les ministères de Calonne et de Necker. Elle réclame pour ces faits une pension de 1,200 livres.
répond à la p étitionnaire et lui accorde les honneurs de la séance.
(La Convention renvoie la demande aux comités de commerce et de secours, réunis.)
Le citoyen Paschal, concierge au château de Compiègne, est admis à la barre (5).
Il demande un traitement qui le mette en état de soutenir sa famille. Il expose que c'est à son patriotisme seul qu'il doit d'avoir perdu la pension que lui faisait le ci-devant roi. On l'a chassé de sa place, et on a retenu le peu de meubles qu'il possédait.
répond au pétitionnaire et lui accorde les honneurs de la séance.
(La Convention adopte ces propositions.)
U ne députation des citoyens de la section de VOratoire se présente à la barre (1).
L'orateur de la députation s'exprime ainsi :
Citoyens, des hommes qui doivent disposer de la vie et de la liberté des citoyens, ne peuvent se passer de l'estime publique. Or, ceux que le corps électoral de Paris vient de nommer pour juges n'ont point notre confiance. (.Murmures sur. la Montagne.)
Nous demandons que la nomination des membres du tribunal révolutionnaire soit soumise à la ratification des assemblées primaires et qu'il soit sursis à leur installation jusqu'après cette ratification.
répond à l'orateur et accorde à la députation les honneurs de la séance.
Je fais mienne la demande des pétitionnaires et je demandé que la Convention prononce à l'instant sur cet objet.
Je m'oppose à cette mesure, car l'appliquer au tribunal révolutionnaire serait en voter le principe et l'application plus ou moins tardive à tous les tribunaux. Ce serait la désorganisation de tout pouvoir judiciaire dans la République.
Je ne comprends rien à l'opposition de Valazé. Tout le monde sait que c'est de l'ignorance profonde et de la stupidité inexplicable de la plupart des fonctionnaires que viennent tous les maux; les mettre sous le contrôle des assemblées serait parer dans la mesure du possible à cet inconvénient. Je demande du moins le renvoi de ma proposition au comité.
(La Convention renvoie la pétition des membres delà section de.l'Oratoire au comité de législation.)
, au nom du comité de sû~ reté générale, donne lecture d'une lettre des citoyens Thibault et Bezard, commissaires de la Convention nationale à Chantilly et présente un projet de décret à l'effet de fixer la destination des objets, matières d'or et d'argent, armes et médailles, qui y ont été trouvés; il s'exprime ainsi :
Citoyens, j'ai reçu la mission de votre comité de sûreté générale de vous donner lecture d'une lettre et de plusieurs pièces, qui nous ont été transmise par nos collègues Thibault et Bé-zard, commissaires de la Convention nationale à Chantilly. Yoici d'abord leur lettre (2) :
« Chantilly, le
( Citoyens nos collègues,
« Nous vous faisons passer l'arrêté que nous venons de prendre pour faire
transporter, à Paris, les matières d'or, argent, galons, ainsi
« Les commissaires de la Convention nationale à Chantilly, « Signé : Thibault, Bézard.
a P.-S. —- Les commissaires envoyés par le comité de sûreté générale mettent le plus grand zèle dans leurs recherches.
Suivent les pièces annoncées ci-dessus; elles sont ainsi conçues :
I
Arrêté des commissaires de la Convention nationale.
« Chantilly, en date du
« Nous, commissaires de la Convention nationale à Chantilly, considérant que les effets précieux trouvés dans les fouilles faites dans le château du ci-devant prince de Condé exigent une surveillance et une sûreté qui entraînent beaucoup de dépenses, qu'il est important de ne pas laisser dans une maison qui pourrait devenir redoutable par sa position, des armes évidemment préparées contre la liberté et la sûreté générale, avons arrêté que les matières en or et en argent, et les armes de toute nature déjà trouvées dans les fouilles seraient transportées à Paris et déposées au lieu qui sera indiqué par la Convention, et que ce convoi sera escorté par une garde suffisante.
« Délibéré au château de Chantilly, le 25 mars 1793, l'an II de la République française.
« Pour copie conforme :
( Signé : Thibault; Bézard. »
II
Entrait duprocès-verbal commencé par Thibault et Bézard, députés, commissaires de la Convention nationale au château de Chanlilly, le 26 mars 1793, Van II de la République française. (2).
Nombre
de pièces Marcs Onces Gros» Gsains
Pièces d'or...... 19 » 6 1/2 12
Or :
Une garde d'épée composée de.. Ornements de cannes...........
Un collier de l'ordre du Saint-Espritpeséavec l'émail.......
Total de l'or.
de pièces Marcs Onces Gros Grains
Argent doré :
Onze bouchons de
flacons.....
Une petite cafetière .........
Une cuillère .... Une petite soucoupe à 2 anses.
Pièces d'argent, : Monnaies étrangères et jetons............... 432 14 »
Argent :
Une jatte..............
Une paire de boucles... Une petite cafetière.... Un manche de crachoir. Trois embouchures de
cor.................
Un collier de chien..... Quatre girandoles à trois
branches.............
Dix chandeliers........
Un réchaud à l'esprit de vin en 3 pièces .......
Un marahout..........
Trois cafetières avec couvercles .............
Une boite à éponge....
Une autre cafetière saiis couvercle .....
Cinq sabliers........
Six encriers...........
Un réchaud...........
Un bougeoir,....... ..
Une soucoupe octogone. Deux, couvercles de sucrier ...............
Une cuvette...........
Quatre cuillers à café..
Un petit bouloir......
Une jatte d'écritoire...
Un cercle............
Un robinet............
Trois parties d'un collier de chien........
Un entonnoir .........
Un bouchon de flacon.. Trois viroles..........
Total de l'argent. 511 106 5 1/2
Récapitulation.
Nombre de pièces Marcs Onces. Gros Grains
Or......... 32
Argent..... 511
Total général 543
Etat des galons.
Marcs Onces
1013 marcs de galon or et argent provenant des tapis de pied et
tapisseries.............-.....-...... 1013 »
51 marcs 3 onces galon système
franges et tresses en or, ci........,.. 54 3
65 marcs 4 onces galops or et argent, ci. 65 4 21 marcs onces or et argent eu paillettes, ci.......................... 21 5
Franges or, argent et soie, ci......... 77 »
1 marc, 2 onces boutons d'argent en feuilles..............................I 2
1232 6
21/2 1
1
32
12
11 J
1 > i 1 31/2 » 1 (
1 j
Nombre
de pièces Marcs Onces Gros
5 » » » 106 4 81/2 12
111 5 1/2 12
État des armes.
Canons de fusil
12 affûts portant 5 canons do fusil
chacun, ci................................60
12 aifûts à 3 canons chacun, ci.... 36
40 affûts à 2 canons chacun, ci..........80
17 affûts à 1 canon, ci ........................17
Total des canons de fusil : 193
28 couleuvrines fauconnières ou fusils
de rempart, ci...................28
4 petits canons, ci..................................4
Total des canons de fusil. 193
Total général des bouches à feu : 225
13 piques ou lames.
2 damas.
1 hache d'armes.
25 aiguilles à lumière.
14 baguettes à mèches.
3 affûts de petits canons.
13 essieux de canons.
1 paire de roues.
2 affûts à deux visières.
16 sacs de balles.
59 lingots en plomb de tous calibres.
1 petite lame en fer.
« Certifié véritable par nous, commissaires de la Convention nationale.
« Chantilly, le 30 mars 1793, l'an II de la République française.
« Signé : Thibault; Bézard. »
poursuit (1) : Je me permettrai quelques observations sur ce dernier état. Nous avons remarqué que quelques-uns des canons, dont il est question, avaient leurs affûts remis à neuf. J'en dirai autant de leur culasse et de leur gueule. Apparemment qu'on s'attendait ces temps derniers à commencer la contre-révolution, car ces réparations ont à peine, au dire des experts, quinze jours de date. Vous pouvez vous en rendre compte d'ailleurs, car ces objets ont été transportés à Paris; il vous sera facile, rien qu'en venant au comité de sûreté générale, où elles ont été déposées, de voir un certain nombre de piques remontées à neuf, depuis une quinzaine à peine, bien que le château de Chantilly soit depuis longtemps déjà entre les mains de la nation.
Votre Comité a délibéré pour fixer les endroits ou ces différents objets pouvaient être déposés ; il vous propose le projet de décret suivant : (2).
« La Convention nationale décrète :
Art. 1er.
« Les armes découvertes dans les fouilles à Chantilly, seront déposées à l'Arsenal, pour y être examinées et employées par le ministre de la guerre de la façon la plus utile pour la défense de la République.
Art. 2.
«Les matières d'or, argent et galons seront envoyées à la Monnaie pour y
être déposées sous le scellé des commissaires, du directeur de la
Monnaie et de celui de la Sûreté générale de la Convention nationale,
jusqu'à ce que
Art. 3.
« Les médailles contenues dans le cabinet d'histoire naturelle. de Chantilly seront déposées à la Bibliothèque nationale pour y être examinées par les commissaires des monuments et le comité d'instruction publique, iaprès l'entier envoi de tout ce qui reste à découvrir à Chantilly ».
(La Convention adopte ce projet de décret.)
(1). Je demande que le ministre de la guerre soit tenu d'envoyer les fusils de rempart et autres pièces de calibre, trouvées à Chantilly, qui sont propres à la défense des montagnes, aux districts de la N'este et d'Ar-gelès, qui en sont totalement dépourvus.
(La Convention nationale décrète que le conseil exécutif est spécialement chargé de pourvoir dans délai à l'armement de l'armée des Pyrénées, et de rendre compte dans 24 heures à la Convention des canons,fusils et autres armes qu'il a fait passer à cette armée.)
Un membre : Je propose de décréter également que le ministre de la guerre sera tenu de rendre compte, sous huit jours, des armes qu'il a fait passer pour la défense des côtes de la Manche dans les départements frontières.
(La Convention décrète cette proposition.) (2).
Les citoyens Valentin et Barrois sont admis à la barre (3).
Ils demandent à jouir de la suspension de la prescription de trente ans en faveur des militaires.
répond aux pétitionnaires et leur accorde les honneurs de la séance.
(La Convention renvoie la demande au comité de législation.
Une députaiion des suisses des ci-devant compagnies de la garde du corps et d'Artois ;est admise à la barre (4).
L'orateur de la députation réclame pour ses camarades, devenus à cette heure gendarmes de la République, le remboursement de 1,000 livres qu'ils ont données, lorsqu'ils ont été admis dans ces compagnies.
répond à l'orateur et accorde à la députation les honneurs de la séance.
(La Convention renvoie la idefmande au comité de liquidation.)
Une députation du bataillon des vétérans-de Paris est admise à la barre.
Le citoyen Goulin, secrétaire du bataillonr portant la parole au nom du corps, s'exprime, ainsi : (5).
« Législateurs,
« Le bataillon des vétérans de Paris ne vient point étaler le don de
l'opulence; elle n'existe
« Dans cette enceinte auguste, les vétérans ont plusieurs fois prêté le serment d'être fidèles aux lois. Ils veulent, avec tous les bons citoyens, la République une et indivisible.
« La Convention a déclaré qu'elle sauvera la patrie; de puissants moyens sont dans ses mains. Le succès est certain, si elle est une et indivisible, comme la République qu'il faut affermir.
'Dévoués depuis quatre ans à la garde des représentants au peuple souverain, lés vétérans jurent qu'ils les défendront jusqu'à l'effusion de tout leur sang. « Nous vous envoyons : « 6 habits complets, c'est-à-dire habits, vestes ou culottes, " « 6 chapeaux, « 12 chemises, " « 6 paires de bas, « 6 paires de guêtres noires, « 6 paires de guêtres de toile blanche, « 6 paires de souliers,
« 6 fusils avec leurs baïonnettes et bande-rolles,
« 6 gibernes avec leurs baudriers ou bande-rolles.
« 6 sabres avec " leurs baudriers, « 6 havresaos de cuir garnis de leurs poils. »
répond à l'orateur et accorde à la députation les honneurs de la séance.
Avant de se retirer, le citoyen Ccuillers, qui fait partie de la députation, s'exprime en ces termes :
Législateurs, je suis l'instituteur du. corps des vétérans; je serai toujours jeune pour la liberté et l'âge ne glacera jamais mon sang, qui bouillera jusqu'à ma mort au souffle de 1 égalité. La République peut compter sur moi. Les vétérans-de Paris ont versé leur sang pour la patrie, j'élèverai leurs enfants dans l'idée de tout sacrifier pour la défense de la République et dans la haine des tyrans. (Vifs applaudissements.)
(La Convention décrète la mention honorable et l'insertion de l'offrande au Bulletin.)
Le citoyen Jean Bourgeois, ancien militaire du 14e bataillon des fédérés, est admis à la barre (1).
Il rappelle les blessures qu'il a contractées au service de la patrie et sollicite d'être admis à l'Hôtel des Invalides.
répond au pétitionnaire et lui accorde les honneurs de la séance.
Votre comité de la guerre a déjà examine cette pétition, il vous propose de la renvoyer au ministère de la guerre en le chargeant de faire droit à la demande du citoyen Bourgeois.
(La Convention nationale, après avoir entendu son comité de la guerre,
décrète qu'elle renvoie au ministre de la guerre la demande du citoyen
Jean Bourgeois, volontaire du quatorzième bataillon des fédérés, qui, en
raison
l'aîné (1). Je dénonce à la Conven-^ tion que le ministre de l'intérieur n'a pas en-| core fait mettre à exécution là loi du 16 mai j relative aux Invalides; en d'autres termes, le j décret que vous avez rendu sur cet objet n'a pas | été envoyé aux départements. Jedemande à la j Convention d'interroger le ministre sur ce ! point.
(La Convention nationale décrète que le ministre de l'intérieur rendra compte, sous trois jours des raisons qui l'ont empeche de mettre ladite lôi à exécution.)
La sœur et le beau-frère de Paul Jones se présentent à la barre (2),
Ils déclarent qu'ils sont venus du fond de l'Ecosse pour réclamer le remboursement des avances qu'a fait Paul Jones, comme chef d'escadre. Ils demandent à n'être pas compris dans, le décret, qui défend la liquidation de toute dette au-dessus de 1,000 écus.
répond aux pétitionnaires et leur accorde les honneurs de la séance.
(La Convention renvoie la demande au comité de liquidation pour en faire rapport le lendemain.)
Un pétitionnaire présente à la barre la citoyenne Gorbin, marchande joaillière (3).
Il expose les services que la citoyenne Cor-bin a rendus à la République.
« C'est elle, dit-il, qui découvrit quatre voleurs du garde-meuble et les fit arrêter. Soupçonnée pour ce vol, elle fut incarcérée à la Con--ciergerie du 8 au 21 novembre et ses débiteurs ; lui firent banqueroute. Ses meubles furent vendus. Elle n'a de ressources pour vivre que la charité de ses amis. Cette citoyenne représente toutes les pièces justificatives, qui prouvait qu'elle a sauvé pour 30 millions de diamants. Elle demande que la Convention lui accorde les récompenses décrétées pour ceux qui découvrirent les voleurs du garde^meuble. »
répond à la pétitionnaire et lui accorde les honneurs de la séance.
(La Convention renvoie la demande au comité des finances.)
Une députation des citoyens de la section des Quinze-Vingts est admise à la barre (4).
L'orateur de la députation s'exprime ainsi :
Citoyens, 4a section des Quinze-Vingts avait -arrêté de venir vous demander le mandat à la barre, du général Dumouriez; vous avez pris cette grande mesure; il ne lui reste qu'à vous remercier. Mais, citoyens, ce générai n'a pu seul trahir la patrie; il a des complices qu'il faut connaître. La section des Quinze-Vingts vous propose d'entendre demain, à votre barre, le citoyen Gonchon, commissaire du pouvoir exécutif dans la Belgique, qui vous donnera tous les renseignements que vous pouvez désirer sur les crimes dont s'est rendu coupable Dumouriez.
répond à la députation et lui accorde les honneurs de la séance.
(La Convention renvoie la pétition au comité de sûreté générale.)
Jacques-François Armand-, citoyen suisse et aumônier de Vambassadeur de- Hollande, est admis à la barre (1).
Il se plaint de la violation du droit des gens en sa personne, par la suspension mise, par le département de Paris, à la délivrance du passeport qui lui a été donné par la municipalité de Paris, sur le certificat de sa section, pour retourner dans sa patrie.
répond au pétitionnaire et lui accorde les honneurs de la séance.
Je propose de décréter que la loi portant suspension de passeport ne s'étend pas aux agents ni membres d'ambassade des puissances étrangères, reconnus par le pouvoir exécutif.
(La Convention décrète la proposition de Féraud.)
Un soldat du 4e bataillon de la Dordogne, en garnison au Havre, se présente à la barre (2).
Il demande que tous les soldats soient payés sur le pied de guerre. Il expose que le militaire ne reçoit que 15 sous par jour en assignats, sur lesquels on lui retranche 5 sous pour l'habillement et 2 sous pour les subsistances.
11 ne lui reste que 8 sous; or, la viande coûte
12 sous la livre, le pain 5 sous 6 deniers, le blanchissage d'une chemise, 5 sous.
Il présente ensuite de mauvais souliers, incapables d'une durée de trois jours, bien qu'ils Soient marqués de l'estampille « bons ».
répond au pétitionnaire et lui accorde les honneurs de la séance.
(La Convention renvoie ces différentes réclamations au comité de la guerre. )
Des députés de la commune de Bapaume sont admis à la barre (3).
Ils demandent la, liquidation des dettes de cette commune, et font part d'un arrêté du conseil général qui fait don à la nation du tiers du produit de l'excédent du seizième qui lui revient dans l'aliénation des domaines nationaux.
répond aux pétitionnaires et leur accorde les honneurs de la séance.
(La Convention nationale décrète la mention honorable et l'insertion du don au Bulletin, et renvoie la pétition aux comités de liquidation et. des finances, pour en faire rapport dans trois jours.)
(4). Je demande la parole pour un objet qui intéresse la tranquillité publique.
Dernièrement je me trouvai au théâtre de la Montansier : on y jouait
Mérope, tragédie très connue, de Voltaire. Tous les patriotes qui s'y
trouvèrent furent indignés de voir que dans les circonstances où nous
nous trouvons,
Je demande l'ordre du jour motivé sur ce que c'est à la municipalité, et non à la Convention, à faire la police des théâtres.
Je ne suis pas de l'avis de Ferrand, et je propose que, pour remédier à l'abus dénoncé par Génissieu, la Convention charge son comité d'instruction publique de lui faire incessamment un rapport sur la police des spectacles.
Voici, d'ailleurs, la rédaction que je présente :
« La Convention nationale décrète qu'elle charge son comité d'instruction publique de lui faire incessamment un rapport sur la surveillance à exercer sur les théâtres, et autres spectacles publics, et sur le fait particulier dénoncé par un membre que la tragédie de Mérope est affichée pour être jouée ce soir sur un des théâtres de Paris; elle charge la municipalité de donner les ordres nécessaires pour empêcher la représentation de cette pièce. »
(La Convention adopte la rédaction de Boissy-d'Anglas.) (l).
(2). Je dois annoncer à l'Assemblée une nouvelle qui ne peut que lui être agréable.
Notre collègue, Léonard Bourdon, guéri de ses blessures, est actuellement au poste que vous lui avez assigné.
La députation de la Côte d'Or vient de recevoir de lui une lettre datée de Dijon, où il est aujourd'hui et où un accueil vraiment patriotique l'a justement dédommagé des mauvais traitements que les aristocrates d'Orléans lui avaient fait essuyer. (Tifs applaudissements. )
La, séance est levée à cinq heures du soir.
A LA SÉANCE DE LA CONVENTION NATIONALE
DU
Les Républicains du Panthéon français aux mânes de MiGhel Lepeletier.
ÉPODE A RÉCITER PRÈS DU TOMBEAU DE CE GRAND HOMME, AU PANTHÉON (2).
P urpureos spargam flore», animamque parentis Histaltem accumuletn do-nis, et fungar amico. Mu-nere.
a Queje couvje sîu tom-t bc âe fleurs, que j'offre « au moins ce tribut à l'a « mémoire d'un père, et « que je m'acquitte d'un « devoir bien cher à mon «. cœar. »
Illustre fléau des, tyrans, Des tyrans illustre victime, 0 toi, dont le cœur magnanime Sut s'affranchir, avant le temps, De ces préjugés, trop puissants Qu'au Panthéon du fanatisme Perpétuait le despotisme, Dans ce temple éleve sur ces trônes croulants, Où la raison te déifie, Lepeletier, martyr de la Patrie,. Reçois nos vœux et nos serments!
Sur ton cerceuil inondé de nos larmes, Nous jurâmes la mort de ton lâche assassin; Il n'est plus ! nous jurons, et ce n'est point en vain,
Nous jurons de plonger nos armes Dans le sein des bourreaux qui conduisaient sa main.
Mais que t'a fait sa barbarie? Tu meurs pour ton pays et pour la liberté, Tu meurs content, le terme de la vie Est pour toi le signal de l'immortalité.
Quel supplice, à la fois, quel triomphe s'apprêtè ! De Louis, ce grand criminel, Quand la loi fait tomber la tête, La loi te consacre un autel. Eh ! si ta perte irréparable Ne causait d'éternels regrets, Si l'on ne comptait les bienfaits, Dont nous ravit l'espoir cette fin déplorable, Quel Français, après tout, n'est jaloux de ton sort? La plus belle existence est le prix de ta mort. De l'avare Alecto quel que soit la furie, Ç& n'est point cesser d'exister Que de mourir pour la Patrie.
De ta présence, oserait-on douter ? Dans tes écrits vit ta sagesse, L'Ecole y découvre Un trésor, La jeunesse y voit un Mentor, Et les dignes rivaux des Solons de la Grèce De nos Solons-Brutus y trouvent le Nestor.
Non, la mort n'a pu te détruire, Dans l'ombre vainement elle a porté ses coups, Ta grande âme, ta voix, tout Peletier respire, Il respire encor parmi nous.
Que nos David, nos Praxitèle Sur l'airain, sur la toile éternisent tes traits, C'est dans nos cœurs qu'ils, prendrons leur modèle ; Cest là qu'est tout entier ce Décius français.
Illusion ! trop ingrate chimère !_ Ah ! tu ne te trompes qu'à demi, Sur un beau songe en vain ton trône est affermi, Quand nous perdrons un défenseur, un père ! Quand le peuple perd son ami.
Cependant, au milieu de ce terrible orage Qui de la République^ agite le vaisseau, Sur cette mer, hélas ! si fertile en naufrage, Il peut encor du moins nous servir de flambeau,
Et nous guider vers cet heureux rivage Où de tous les tyrans se creuse le tombeau,
Père d'un peuplelibre et d'un monde nouveau, Lepeletier, veille sur ton ouvrage! A longs flots, les rois conjurés Sur no« bords vomissent leur rage, Glace les bras désespérés De cette horde anthropophage ! Aux horreurs de la faim que ces monstres livrés Dans la fange et le sang, dans l'opprobre expirés, Couvrent do leur cadavre une plaine stérile Et que leur phalange servile De satellites égarés Ne retrouvent partout que Jemmapes, que Lille ! Que dis-je ? de leur chef,, ce dernier de nos rois, Législateur, tu votas le supplice, Dieu, frappe ! sous le fer des lois, De tous ses pareils à la fois, Que la race infâme périsse !
Trop de mortels sont encore enchaînés-;. De tous les brigands couronnés Il est temps de purger la terre; A l'échafaud qu'ils soient traînés, Et que leurs corps empoisonnés Dans un cercueil de feu soient réduits en poussièie!
Est-il vrai, le sang des Français Du Vatican inonde le portique ! Il ruisselle dans Rome, au nom d'un Dieu de paix Sous le couteau d'un prêtre fanatique!
De quel front les Brutus, les Coclès, les Catons Ont-ils vu de leurs fils cette horde stupide, Misérable instrument des crimes d'un druide, De Brennus égorger les dignes rejetons! Ils seront punis, nous partons. Un cruel combat se prépare,.N Avec nous, Peletier, accours, venge nos droits ! Basseville expirant te parle par ma voix, Victime, comme toi, d'un assassin barbare, Comme toi, de sang il a scellé nos lois. Va! que pour la dernière fois, Ce peuple esclave, qu'on égare. Soit reconquis par le Gaulois Que, pour tout fruit de nos exploits, Le civique bonnet remplace la thiare !
N'imite point des dieux l'ingrate oisiveté ; Aux nouveaux Busiris montre un nouvel Alcide, Montre un Dieu citoyen, un Dieu tyrannicide ! Laisse du moine obscur, par des moines fêté, Dormir sur un autel la sainte nullité !
Vole aux combats ! sois notre égide ! Conserve parmi nous paix et fraternité ;
Qu'au Sénat ton ombre préside, Propage de nos lois le code respecté, Et qu'à ta voix le monde enfin ressuscite Vienne y puiser l'horreur d'un despote homicide Et l'amour de l'égalité !
Serait-ce une vaine espérance Que cette résurrection ? Des fils d'Albion L'étendard s'avance, La foudre s'élance, Leur ambition, Sur les mers, errante, Sème l'épouvante, La mort, les débris, Ranime et fomente
La ligue expirante Des soudans proscrits. Pour qui ces flots de sang, ces combats, ce ravage,
Ces fratricides, ce carnage ? De leurs fers, se peut-il ! d'aveugles défenseurs S'armer pour un tyran contre leurs rédempteurs, Que dis-je ? nous donner un maître ! Quoi ! d'un nouveau tyran peut-être Le Temple serait le berceau ! Le Temple serait son tombeau.
Reconnais ta folie extrême, Peuple seul souverain ! ce roi, Ce monstre enorgueilli de ton pouvoir suprême,
Ce tigre qui te fait la loi, Insensé ! n'est-ce point ton ouvrage, toi-même ? C'est par toi qu'il naquit, par toi qu'il vit encor, Par toi qu'il boit ton sang, qu'il dévore ton or; Du fruit de tes sueurs il nourrit sa mollesse ; Tes erreurs font ses droits ; tes lauriers, sa noblesse; Tes filles, son sérail; tes dépouilles, son bien; Sans lui, le peuple est tout; sans le peuple, il n'est rien.
Où suis-je ? quelle voix vient de se faire entendre ! Voyez-vous tressaillir ces divins ossements ? Est-ce toi, Peletier!... Ecoutons ces accents! C'est un oracle qu'il va rendre.
« Rassure-toi, Français ! digne républicain, « Ton sort, du monde entier le sort est dans ta main ; « Contre toi, vainement, tous les tyrans s'unissent, « Les bras, qu'ils ont armés, sur eux s'appesantissent; « Leur chute est le signal d'une éternelle paix ; « La terre et l'Océan, remplis de tes succès, « Vont demander tes lois; sous les deux émisphères, « La liberté conçoit un seul peuple de frères. »
Tuteur des nations, dont tu scellas les droits D'un sang qui crie encor « vengeance, mort des rois ! » Dans nos cœurs, ce présage était gravé d'avance ; Mais cet oracle, enfin, notre unique espérance, Le seul prix des lauriers, que nos mains vont cueillir, C'est à toi de hâter l'instant de l'accomplir.
O toi, nouveau Caton, généreux Beaurepaire, Dont la cendre, à l'aspect du sanglant Peletier, Sembla se ranimer, pour se glorifier De ton exemple salutaire, Seconde son bras tétulaire ; Secondez nos efforts, grands dieux ! au même instant, Tous les tyrans détruits, rentrent dans le néant.
A la citoyenne Suzanne Lepeletier.
Rejeton généreux d'un si vertueux père, Cessez enfin, cessez vos pleurs ; Cet immortel objet de vos chères douleurs, Vous le retrouvez dans un frère Nous le retrouvons dans vos cœurs.
En vous revit sa bienfaisance, Son amour pour l'humanité. En vous l'indigent adopté Croit reconnaître sa présence.
D'une double reconnaissance Comment le saint tribut sera-t-il acquitté? Le vœu du pauvre, un cœur, seul s biens en sa puissance. Voilà son Panthéon ! vous y régnez d'avance, Digne fille d'un père à jamais regretté ; Qu'un siècle de beaux jours soit votre récompense, Vivez pour la félicité Et pour l'exemple de la France!
Sérieys.
Séance du lundi
présidence de jean debry, président.
La séance est ouverte à neuf heures et demie du matin.
secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance du dimanche, SI mars 1793 (1).
(La Convention en adopte la rédaction).
, secrétaire, donne lecture des lettres, adresses et pétitions suivantes :
1° Lettre des citoyens Servière et Gleizalt commissaires de la Convention dans les départements de VArdèche et de la Lozère, datée de Privas, 21 mars (2), par laquelle ils annoncent que le recrutement se fait ainsi que l'habillement avec la plus grande activité et que le contingent qui a été demandé sera prêt pour la fin de mars. Ils ajoutent que ce département jouit d'une tranquillité parfaite et qu'ils vont partir pour Tournon, afin d'y presser le départ des troupes dont le commissaire a ordonné le rassemblement.
(La Convention renvoie cette lettre au comité de défense générale.)
2° Lettre des citoyens Siblot et Michaud, commissaires de la Convention dans les départements du Doubs et de la Haute-Saône, par laquelle ils annoncent que l'agent du ministre de la guerre pour le recrutement n'étant point encore arrivé, ils ont nommé pour le suppléer le citoyen Joly; elle est ainsi conçue (3) :
Lure, un des chefs-lieux de district du département de la Haute-Saône, 23 mars 1793, an II de la République.
« Citoyens nos collègues,
« Après vous avoir annoncé, par notre lettre du 20 de ce mois, qu'à notre
arrivée à Vesoul nous y avions appris que le commissaire du ministre de
la guerre, chargé d'y faire exécuter votre décret sur le recrutement des
armées de la République, n'y avait point encore paru, ni personne de sa
part, et qu'il n'avait pas même prévenu le département du jour qu'il y
arriverait, et que nous avions nommé le citoyen Joly, membre du
directoire de ce département, pour le suppléer dans ses fonctions, et
que nous l'avions autorisé en même temps à se choisir, dans chaque
district, des agents en sous-ordre, nous venons vous faire part d'un
nouvel arrêté que nous avons cru devoir prendre pour accélerer de plus
en plus le départ des citoyens recrutés dans les différentes
municipalités du ressort, et qui attribue au citoyen Joly un nouveau
pouvoir relatif à sa commission provisoire. L'instruction envoyée par le
ministre de la guerre à ses commissaires n'indiquant pas les routes
qu'ils doivent faire suivre aux hommes recrutés
« Tandis que les papiers publics nous apprennent dans les différents endroits que nous parcourons, que le fanatisme entrave dans quelques départements les opérations des commissaires que vous y avez envoyés, nous avons la satisfaction de voir que, dans celui-ci, nous sommes secondés avec le zèle le plus actif et le plus efficace, non seulement par les corps administratifs et les sociétés populaires, mais encore par la généralité des citoyens qui ont la plus grande confiance à vos lumieres, à votre fermeté et à l'ardent amour que vous avez montré jusqu'ici pour la liberté et l'égalité, et que les infâmes trahisons qui ont fait éprouver à la République quelques revers dans la Belgique, loin d'avoir refroidi leur courage, n'ont fait que l'enflammer de plus en plus. Comptez, citoyens collègues, sur l'exactitude de cet aperçu, et que le département de la Haute-Saône abhorre toute espèce de tyrannie et ne veut d'autre forme de gouvernement que celle que vous avez décrétée. Nous recevons, de temps en temps, des nouvelles de celui du Doubs, qui nous font espérer que nous le trouverons animé du même esprit et que nous remplirons avec la même facilité que dans celui-ci la tâche que vous nous avez imposée. D'abord que nous serons arrivés à Besançon, nous prendrons des renseignements plus positifs sur l'état politique de cette ville et des environs, et nous aurons l'honneur de vous les transmettre..
« Agréez, citoyens collègues, l'assurance de nos sentiments fraternels.
« Les membres comnussaires de la Convention nationale près les départements du Dovhs et de la Haute-Saône.
« Signés : Siblot, Michaud. »
(La Convention renvoie cette lettre au comité de défense générale).
3° Lettre des citoyens Isoré et Mauduyt, commissaires en mission dans les départe-de l'Oise et de Seine-et-Marne; ils adressent à la Convention nationale des pièces relatives à une plainte formée contre le curé de Bresles, district de Beauvais.
(La Convention renvoie la lettre à la Commission des six (1).
4° Lettre des citoyens Gleizal et Servière, commissaires pour les départements de l'Ar-dèche et de la Lozère ; ils invitent la Convention nationale à s'occuper du partage des communaux.
(La Convention renvoie la lettre au comité d'agriculture. )
5° Autre lettre des mêmes commissaires; ils se plaignent de ce que la loi sur les passeports ne s'execute pas.
La Convention renvoie la lettre au ministre de l'intérieur.)
l'analyse du P. Y., tome 9, page 2.
6° Lettre des citoyens Isoré et Mauduyt, commissaires pour les départements de l'Oise et de Seine-et-Marne, relative aux délits qui se commettent journellement dans les bois nationaux.
(La Convention renvoie la lettre au comité des domaines, pour qu'il présente incessamment à la Convention un travail sur cet objet).
7° Lettre du citoyen Godard, prêtre, desservant l'hôpital de Namur, placé par l'événement du scrutin au nombre de ceux qui doivent marcher à l'ennemi ; il demande à profiter de l'exception prononcée en faveur des évêques, des curés et des vicaires.
(La Convention renvoie la lettre au comité de législation.)
8° Lettre de Monge, ministre de la marine, dans laquelle il rend compte des mesures qu'il a prises pour la défense des côtes; cette lettre est ainsi conçue (1) :
Paris, 31 mars 1793, l'an II de la République française.
« Citoyen Président,
« Je préviens la Convention nationale que, du 24 au 28 mars, j'ai donné des ordres à Brest et à Rochefort de faire sortir sept frégates de 36 à 50 canons, et quatre avisos. On m'écrit de Brest, en date du 25 mars, que deux frégates et un aviso devaient partir le même jour; toutes les forces ont ordre d'établir une croisière correspondante, tant sur la côte de la Vendée, que sur celle du Mohiban.
« Une corvette était déjà partie à Brest ; une frégate et un aviso étaient aussi au bas de la rivière de Nantes ; ainsi la Convention nationale verra que nous devons avoir en ce moment sur les côtes de ces deux départements, 8 frégates, une corvette et cinq avisos.
« D'après le décret rendu ce matin, je préviens la Convention que je m'occupe de l'expédition extraordinaire qui portera à Brest et à Lorient des ordres pour faire sortir de ces deux ports des forces imposantes.
« La Convention verra que je ne néglige aucun des moyens qui sont entre mes mains, pour exterminer les rebelles, et combattre avec avantage les ennemis extérieurs de la République.
« Signé : Monge ».
(La Convention renvoie la lettre au comité de défense générale. )
9° Lettre du président du pouvoir exécutif provisoire, relative aux mouvements des rebelles de l'intérieur et aux dispositions que l'on fait contre eux, principalement à la Rochelle; cette lettre est ainsi conçue (2) :
Paris, le 1er avril 1793, l'an II de la République française.
« Monsieur le Président,
« Suivant des lettres datées de la Rochelle, du 26 mars, les dispositions
pour réduire les
« D'autres lettres du département de Morbihan mandent que, le 26, un corps de troupes, au nombre de 2,400 hommes dont 2,000 de troupes de ligne, ont commencé le siège du château de Rochefort, où se sont retirés les chefs des contre-révolutionnaires.
« Les détails des cruautés exercées par ces furieux, sont vraiment horribles ; il paraît qu'ils se sont particulièrement acharnés sur les agents de la régie nationale, pour venger les émigrés dont ces agents administrent les biens.
( Signé : Lebrun »
(( P. S. Le conseil n'a pas reçu de lettre de la Loire-Inférieure, où il paraît que les contrei-révolutionnaires réunissent leurs plus grands efforts. »
(La Convention renvoie cette lettre au comité de défense générale.)
10° Lettre des citoyens Fauvre-Labrunerie et Forestier, commissaires dans les départements du Cher et de VAllier (1), qui rendent compte de la conduite qu'ils ont tenue et de l'esprit qui anime ces départements. Ils font passer à la Convention une dénonciation des administrateurs du district de Moulins contre Gorsas, auteur du Courrier des 83 départements et le rédacteur du Patriote Français, qu'ils accusent d'avoir environné de soupçons les commissaires envoyés dans les départements.
(La Convention renvoie cette lettre au comité de sûreté générale.)
11° Lettre du citoyen Mazade, commissaire de la C onvention pour l'inspection des Côtes de l'Ouest, par laquelle il rend compte des mesures qu'il a prises pour faire passer des forces dans les départements menacés par les rebelles, et annonce qu'il a fait partir 3,000 hommes de Bordeaux; elle est ainsi conçue (2) :
« Bordeaux,
« Citoyens nos collègues,
« Lorsque j'avais l'honneur de vous entretenir hier des suceès de nos
armes contre les brigands de. la Vendée et des Deux-Sèvres, je
« Je pourrais faire encore marcher beaucoup d'autres hommes très zélés et très patriotes, mais la plupart manquent d'armes, et non seulement elles sont ici d'une excessive cherté, mais encore elles sont épuisées. Il y a ici deux commissaires du département de la Charente qui venaient acheter 60,000 fusils pour leur département. Ils seront forcés de s'en retourner comme ils sont venus. L'armement de l'expédition que j'ai ordonnée contre les rebelles les a rendus plus rares encore et, si j'ai autorisé cette dépense, c'est qu'elle était absolument indispensable.
« J'écris aux départements méridionaux, que je vais parcourir dans tous les points où se trouvent des établissements des classes. J'engage les départements à prendre les mesures les plus rigoureuses de sûreté générale, à tenir dans une inaction complète et dans une nullité absolue tous les gens reconnus pour suspects et soupçonnés d'être ennemis de la République. Le temps des ménagements est passé, leur dis-je, celui de la vigueur et de la fermeté doit lui succéder.
« Je vais partir dans trois ou quatre jours pour me rendre à Bayonne} en traversant quelques départements intermédiaires. Vous pouvez être certains, citoyens mes collègues, que partout où je ne trouverai pas vos commissaires rendus, rien n'échappera à mes regards, et qu'en même temps que je vous rendrai de la position des choses un compte fidèle, je ne manquerai pas de vous indiquer toutes les mesures de défense et de sûreté que les conjectures et le zèle des patriotes m'indiqueront.
« Salut et fraternité.
« Signé : J. B. Mazade. »
(La Convention renvoie la lettre au comité de défense générale.)
12° Lettre des citoyens Delacroix, Gossuiny Merlin (de Douai), Treilhard, Robert, Carnot et Lesage-Sénault, commissaires de la Convention près l'armée de la Belgique et dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais,
par laquelle ils transmettent l'arrêté qu'ils ont pris pour obliger les volontaires qui se sont retirés dans la ville de Lille à rejoindre leurs drapeaux; l'arrêté est ainsi conçu (1 ):
« Les commissaires de la Convention nationale près l'armée de -la Belgique et dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais, réunis, informés qu'il arrive journellement à Lille un grand nombre" de volontaires nationaux et soldats qui ignorent où se trouvent en ce moment leurs bataillons et régiments respectifs ; considérant que plusieurs corps, de troupes destinés à renforcer l'armée de la Belgique, sont incessamment attendus dans cette ville, et que, pour éviter l'engorgement et accélérer le complètement des armées, il est essentiel de procurer aux soldats qui se trouvent absents de leurs corps, le moyen de les rejoindre sans aucun retard;
« Arrêtent ce qui suit :
« Art. 1er. Tous les militaires qui se
trouvent maintenant dans la ville de Lille, dont les bataillons et les
régiments sont à l'armée, seront tenus d'en partir dans vingt-quatre
heures, pour rejoindre leurs drapeaux.
« Art. 2. Le commissaire-ordonnateur de l'armée prendra les mesures nécessaires, pour faire constater le nombre de ces militaires ; il fera réunir par détachement ceux du même bataillon et régiment ; il leur indiquera leur destination, et leur fera délivrer la route pour se rendre à leur corps. Il fera dresser un état de ces détachements^ de leur armement et équipement.
( Art. 3. Les militaires qui ne se seront pas trouvés au lieu de réunion indiqué par le commissaire-ordonnateur, pour se former en détachement^ et ceux qui, après avoir été compris dans les détachements, resteraient dans la ville de Lille, cesseront de recevoir la solde et le logement ; ils seront considérés comme déserteurs, arrêtés et conduits à leur corps, de brigade en brigade.
« Art. 4. Les citoyens qui logeraient chez eux des militaires qui auraient refusé de partir pour rejoindre leur corps, seront tenus d'en faire leur déclaration à la municipalité, sous' les peines de droit.
« Art. 5. Le général de brigade commandant à Lille, tiendra la main à l'exécution du présent arrêté.
« Fait à Lille, le 27 mars 1793, l'an II de-la République. « Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard, Robert, Carnot et LeSAGE-SeNATILT. »
(La Convention approuve les décisions prises par ses commissaires à l'armée de Belgique.)
13° Lettre de Garat, ministre de Vintérieur, par laquelle il appuie une réclamation des citoyens Daubas et Gautier, adjudicataires du pont de Montastruc.
(La Convention renvoie cette lettre aux comi-
14° Lettre de Clavière, ministre des contributions publiques, contenant quelques mesures très instantes pour l'amélioration des papeteries.
(La Convention renvoie la lettre au comité de commerce!)
15° Lettre de Garat, ministre de la justice, dans laquelle il expose les difficultés qui embarrassent l'exécution des lois relatives aux certificats de civisme.
(La Convention renvoie cette lettre au comité de législation.)
16° Lettre du citoyen Brunet, commissaire des guerres, suspendu de ses fonctions par les commissaires Couturier et Dentizel.
(La Convention renvoie cette lettre au comité de la guerre.)
17° Réclamation du citoyen Sautarré:, commandant général et général de brigade de la dix-septième division.
(La Convention renvoie cette lettre aux comités de la guerre et des finances, pour en faire incessamment le rapport.)
18° Léttre des membres composant le conseil général de la commune de Béziers, annonçant à la Convention un don patriotique; cette lettre est ainsi conçue (2) :
Béziers, le
« Législateurs,
« Le conseil général de la commune de Béziers vous fait hommage aujourd'hui de quelques dons volontaires faits par des Bitterois aux citoyens soldats qui se consacrent à la défense de la République et de la liberté.
« Il adhère d'une voix unanime à tous vos sages décrets, unique et fidèle expression de la volonté générale.
(( Organes du souverain, continuez à nous ordonner le mieux possible, par rapport au plus grand bien de tous. Commandez pour la sûreté intérieure et extérieure tout ce qui vous paraîtra nécessaire et gardez-vous de douter que pour constituer la République ainsi qu'elle doit l'être, pour la venger des ennemis du dehors, ou la purger des ennemis du dedans, il soit rien qui puisse paraître ou pénible, ou difficile à la commune de Béziers ou à tout autre commune française.
« Les membres composant le conseil général de la commune de Béziers.
( Signé : Sauret, maire; Agais, officier municipal ; Cairol, officier
municipal Carrière, officier municipal ; Bret, officier municipal ;
Moureau, officier municipal ; David, officier municipal ; Barré,
officier municipal; Malafosse, Salvaniac, Thomet, Gotti, Costel, fils
l'aîné; La-bor, Potjbe.
Thourel, procureur delà commune..........
Maffre, notable.......
Guibal, notable......
Bourguet, officier municipal.
Passebosc, notable Gottis, notable. . Coste ......
Suit la pièce ci-jointe (1) :
Extrait du registre des dons volontaires faits par des citoyens d'après l'invitation de l'arrêté du directoire du département de l'Hérault, en date du 19 février dernier et d'après celle du conseil général de la commune de Béziers.
1 habit uniforme, 1 épaulette d'or. 1 corftre-épaulette d'or. 1 épéc avec son baudrier.
1 paire de guêtres.
2 paires de souliers. 6 paires de soulier.*, 2 paires de guêtres. 10 paires de souliers. 2 paires de souliers. 50 liv. en assignats. 4 paires de souliers. 2 paires de guêtres. 6 paires de souliers. 6 paires de souliers. 1 contre-épaulette. 6 paires de souliers. 1 épaulette.
1 dragonne.
2 paires de guêtres. 6 paires de souliers. 1 paire de guêtres. 6 paires de souliers. 6 paires de souliers. 1 paire de guêtres. 4 paires de souliers. 1 épaulette. 1 épée. 1 habit.
1 paire de guêtres. 1 paire de guêtres. 1 habit. 1 épaulette. 1 épée. 1 dragonne.
Glouteau, notable
Roubes, cadet.......
Bessières........,
Moureau, substitut du procureur...........
David, officier municipal
Moureau, officier municipal.
Barré, officier municipal
La citoyenne Barré. . . . Mouertié, officier municipal
Harisson, notable ....
Carrière.
Bret. . . Dorsenne.
Guibal, aîné, notable. . .
Pastre, aîné, notable. .
Donadîeu, secrétaire adjoint
Cellier. ........
Un anonyme a fait présenter Bernard, père, apothicaire Requiraud, secrétaire-greffier
Roubès, ainé......
Azais, ainé, officier municipa Fraisse, officier municipal
Souris, notable......
Rougère, notable.'. . . . Malafosee, notable ... Barthélémy, notable . . . Bernard, trésorier de la com
mune .........
Coste aîné, notable . . . .
Azais, cadet.......
Fabre, officier municipal .
Gollis, père.......
Labor, notable.....
Sarret, neveu et son oncl prêtre.........
20 liv. en assignats. 2 paires de souliers. 15 liv. en assignats. ( 6 paires de souliers, ç 1 paire de guêtres, i 15 liv en assignats. ( 1 paire de guêtres.
20 liv. eu assignats. 10 paires de souliers. ( 6 paires de souliers. ( 1 giberne.
2 paires de souliers. ( 1 paire de souliers. ( 1 paire de guêtres.
1 paire de souliers. 10 liv. en assignats. 6 paires de souliers.
2 paires de souliers. 6 paires de souliers. 30 liv. en assignats. 30 liv. en assignats. 50 liv. en assignats. 15 liv. en assignats. 10 liv. en assignats. 10 liv. en assignats.
30 liv. en assignats. 6 paires de souliers.
4 paires da souliers. G paires de souliers.
3 paires de souliers. 10 livres en assignats.
4 paires de souliers.
Sabuc, citoyen......
Bonnet, aîné, notable . , . Cartau, homme de loi . . . Alicot, notable agriculteur . Tinrlel, notable ......
Auduze ..........
Un anonyme a fait remettre
Audous, cadet.......
Bonnet .... . . .... 6 paires de souliers Fabregat......... 6 paires de souliers.
6 paires de souliers. 6 paires de souliers. 10 livres en assignats. 5 livres id.
35 livres id.
10 livres id.
25 livres id.
20 livres id.
Olier, limonadier
Coste, greffier du tribunal de commerce . .......
Bourilhon, banquier .... Soulié, fils, tailleur, a offert de faire gratis.
30 livres en assignats. 2 paires de souliers. 1 sabre. 1 giberne.
50 livres en assignats. 6 paires de guêtres.
Laplace, père....... 50 livres en assignats.
Labeille, ex-capucin .... 25 livres en assignats.
1 habit )
1 veste > d'uniforme. 1 culotte ) 1 paire de bas. r ... 1 1 paire de souliers.
1,aiinac...........^ 1 chapeau.
1 paire de guêtres. 1 épée.
1 dragonne en or. 1 baudrier.
Donadieu . ........j \ ^bit.
x 1 baudrier.
Donadieu, père .... Julien, receveur du district
Martin....... .
Pastre, avoué ..... Hérail, notaire .... Nourry, homme de loi . , Lancarre, père, homme de loi
Crossous ........
Gasc..........
Guibert.........
Gassagnes, père ..... Caylor, vicaire épiscopal . Louis Nicolas Estagnol . .
6 paires de souliers.
12 paires de souliers. 26 livres en assignats.
2 paires de souliers. 6 paires de souliers. 25 livres en assignats. 5 livres en assignats'. 4 paires de souliers.
3 paires de souliers. 10 livres en assignats. 30 livres en assignats.
13 livres en assignats. 60 livres en assignats. 1 habit.
Joseph Salvan...... 1 paire de guêtres.
( 25 livres en assignats.
Marie Lambert Bru net
1 habit uniforme.
2 épaulettes en or. 1 épée.
1 dragonne en or. 5 gibernes.
2 sabres.
2 baudriers-
Brunei, député à la Convention nationale............1 habit complet d'unifor.
Gailhac aîné...........25 livres en assignats.
Jean Cus'e................15 livres en assignats.
Un anonyme a fait remettre 5 livres en assignats.
Pradines, citoyen..........1 paire de guêtres.
Pierre André Ribes .... 1 paire de souliers.
(La Convention décrète la mention honorable de oes différentes offrandes qu'elle accepte, et ordonne l'insertion de la lettre au Bulletin. )
19° Lettre des administrateurs du directoire du district de Strasbourg annonçant un don patriotique de 5,834 livres ; elle est ainsi conçue (1) :
Strasbourg, le 27 mars 1793, l'ai de la République française.
« Citoyen Président,
l'an II
« Le citoyen Gimpel, chef de la légion de la garde nationale de
Strasbourg, a remis au
« Par les administrateurs du district de Strasbourg.
« Signé : Zimmer, Dessolliers, Wissmann.
(La Convention décrète la mention honorable de l'offrande et ordonne l'insertion de la lettre au Bulletin.)
20° Lettre du général Gustine par laquelle il instruit la Convention de la peine qu'il a infligée à un officier de son armée qui donnait à jouer; elle est ainsi conçue (1) :
« Quartier général de Bretzenhem, le
« Citoyen Président,
(c Je vous préviens que je viens d'user de mon autorité d'une manière qui donnera peut-être à mon ordre le caractère du despotisme, mais qui ne laissera jamais sur ma conscience aucun nuage, puisque j'ai la conviction d'avoir fait un exemple utile pour réprimer un abus condamnable et dangereux. C'est pour prévenir tout regret, que je vous en instruit avec confiance, attendant avec calme l'opinion de la Convention nationale.
« Un officier nommé Roch, adjudant-major au troisième bataillon de grenadiers, donnait à jouer chez lui à des officiers de la garnison de Mayence ; le commandant de la place instruit du lieu et de l'heure du rendez-vous illicite, a surpris les joueurs, et leur a infligé une peine de discipline. L'officier qui tenait le tripot a été traduit à une cour martiale; mais par la nature des circonstances l'intention de la loi a été paralysée, puisque les seuls témoins qu'aient pu entendre les jurés dans cette cause, étaient et ne pouvaient être que les complices de l'accusé ; il a donc été acquitté. Instruit de ces circonstances, et considérant que la publicité ne pourrait qu'encourager le désordre, les inconvénients qui en émanaient, j'ai cru que l'autorité qui m'est confiée devait suppléer à l'effet dangereux qui serait résulté pour l'armée de l'impunité du coupable; en conséquence, je l'ai, pour ce fait, suspendu de ses fonctions, et envoyé pour trois mois en prison dans le château de Litchtemberg. Tel est, citoyen Président, l'acte que je vous dénonce moi-même, pour prévenir les spéculations de la calomnie, et qui, quoique ayant le caractère de l'arbitraire, n'a eu d'autre but que l'amour de l'ordre.
« Le général en chef de l'armée du Rhin. » « Signé : Custine. »
(La Convention approuve la conduite du général Custine.)
21°Lettre des citoyens Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai), treilhard,
Lesage-Senault, Robert et Carnot (2), commissaires de la Convention près
l'armée de Belgique et dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais
Arrêté des commissaires de la Convention nationale.
« Du mercredi
« Au nom de la République française,
« Nous, membres de la Convention, ses commissaires tirés l'armée et dans les départe-du Nord et du Pas-de-Calais; , « Vu la réquisition des citoyens commissaires de l'administration provisoire du Franc de Bruges, à l'effet de faire arrêter tous les magasins appartenant à la République dans la ville de Bruges, ladite réquisition signée Jacob fils, président, et signifiée par Lecler, juré, signée Charles Coopmans, au citoyen Boni-face, maître-magasinier;
« Sur l'assurance qui nous en a été donnée par le citoyen Petitjean que les magasins ont en effet été retenus par les ordres de l'administration provisoire du Franc de Bruges, que les commissaires des guerres et garde-magasin de la République ne se sont sauvés qu'avec beaucoup de peine de oette ville, qui a manifesté sa haine pour la liberté en se hâtant d'en détruire les signes;
« Considérant que la conduite de la ville de Bruges décèle la trahison la plus noire et la déloyauté la plus complète ;
« Autorisons le général en chef de l'armée de la Belgique à faire porter sur la ville de Bruges une force suffisante, pour faire enlever tous les magasins de la République, lever une contribution de deux millions de florins sur ladite ville, et à prendre pour otages tous les membres de l'administration provisoire et tel nombre d'autres citoyens qu'il jugera convenable.
« Fait à Lille, les jour, mois et an que dessus.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de (Douai); Treilhard, Robert, Carnot, Le-sage-Senault. »
(La Convention approuve, les réquisitions faites par ses commissaires.)
22° Lettre de Beurnonville, ministre de la guerre, par laquelle il sollicite l'exception du recrutement pour les employés des subsistances militaires, des vivres, de la viande et des étapes. Cette lettre est ainsi conçue (1) :
« Paris, le
« Citoyen Président,
« Les administrateurs des subsistances militaires, ceux des vivres, de la
viande et des
« Je joins ici, citoyen Président, plusieurs lettres de ces administrateurs qui prouvent la nécessité d'une exemption en faveur de leurs agents dont la plupart sont comptables et je laisse à la Convention nationale, lorsqu'elle aura pris lecture de ces lettres, à prononcer sur l'exemption demandée par ces administrateurs.
« Le ministre de la guerre,
« Signé : Beurnonville. »
, secrétaire, donne lecture de ces lettres, qui sont ainsi conçues :
I
Lettre des administrateurs généraux des subsistances militaires au citoyen ministre de la guerre (1).
« Paris, le
« Citoyen ministre,
( L'Assemblée nationale a rendu, le 2 septembre 1792, un décret qui ordonne que les secrétaires, commis des bureaux de l'Assemblée nationale, ceux des ministres et autres administrations publiques, seront tenus dans les dangers de la patrie et aux signaux d'alarme, de se rendre sur-le-champ dans leurs bureaux qui deviennent pour eux le poste du citoyen.
« Il est d'une grande importance pour l'avantage de notre service, citoyen ministre, que l'exécution de ce décret soit maintenue, quoiqu'elle puisse contrarier le zèle de ceux des employés dans l'administration confiée- à nos soins, qui sont classés, à raison de leur âge, parmi les citoyens qu'un décret de la Convention nationale a mis à la disposition du ministre de la guerre.
« Nous avons reçu, le 7 du courant, une lettre des administrateurs composant le directoire du département de Paris, par laquelle ils nous observent qu'ayant remarqué plusieurs jeunes gens, parmi ceux qui ont pris les certificats de civisme, sans lesquels nous avons grand soin de ne laisser partir aucun des employés dans les subsistances militaires, ils craignent que si de pareils faits se multipliaient, ce ne fût au détriment du service militaire qui réclame avant tout leurs bras.
« Nous avons répondu au directoire une lettre détaillée dont nous
joignons ici la copie, dans laquelle nous expliquons la nature de notre
service et la manière dont il est composé,
« Nous avons, en outre, des employés sédentaires dans le chef-lieu de notre administration à Paris, et dans les directions des provinces. Nous recevons de toutes parts des lettres et des réclamations, soit pour nous consulter sur ce que les employés doivent faire, soit pour nous avertir de fournir de nouveaux sujets qui puissent remplacer ceux que la guerre nous enlève.
« Rien ne peut nous mettre dans un plus grand embarras, et nous nous empressons de vous communiquer nos craintes, pour vous prier de vouloir bien donner les ordres les plus précis à l'effet de retenir dans leurs postes ceux qui, aux termes du décret du 2 septembre 1792, y sont placés d'une manière aussi utile pour la patrie et qui ne pourraient pas les quitter sans exposer le bien de la chose publique.
« Tous les citoyens en état de porter les armes ont été mis à votre disposition par le décret du 6 du courant. Le décret du 2 septembre 1792 explique formellement ce qui doit être pratiqué à l'égard de ceux qui sont employés dans une administration publique, et il en est peu de plus importante que la nôtre en ce moment.
« Nous ne pouvons vous empêcher de vous rappeler que déjà ces employés ont manifesté leur zèle d'une manière toute particulière par l'engagement qu'ils ont contracté, le 3 septembre 1792, d'entretenir dix volontaires armés pendant tout le cours de la guerre actuelle, et en s'obligeant d'en faire les fonds d'avance tous les quatre mois. Nous joignons ici l'extrait qui leur a été délivré du procès-verbal de l'Assemblée nationale.
« Quant au nombre de ces employés, il est limité par les états qui ont été mis sous vos yeux, et arrêtés par vous; non seulement nous ne l'avons pas excédé, mais nous ne l'avons pas même encore rempli, à raison du soin que nous mettons à ne faire que de bons choix.
« D'après toutes ces considérations, citoyen ministre, et particulièremnt d'après les craintes que nous aurions de voir manquer le service des armées au moment le plus important, le plus critique peut-être, nous vous prions de donner les ordres les plus prompts, à l'effet de retenir dans leurs emplois respectifs, dans l'administration des subsistances militaires, ceux des citoyens en état de porter les armes qui ont été mis à notre disposition par votre décret du 6 du courant, comme étant au poste le plus utile qu'ils puissent occuper pour le bien du service public.
« Les administrateurs généraux des subsistances militaires, « Signé : Battetinville, Tillemont, Bier-LET, BoYER, PoNCET, deladaCOURT, De-LARUE, FRIZON, DESCHAPELLES, GALLAM-BIER, LAMOTTE.
II
Copie d'une lettre des administrateurs généraux des subsistances militaires au commis-. saire-ordonnateur Dorly, adjoint au ministre de la guerre (1).
« Le
« Citoyen,
« Nous vous mettrons successivement sous les yeux les lettres que nous recevrons de nos différents préposés qui seront contraints d'abandonner leur service pour se rendre dans les différents bataillons des volontaires; vous en trouverez ci-joint deux, l'une au citoyen Bergerat, aide garde-magasin à Com-mercy, l'autre du citoyen Limbourg, inspecteur des vivres de la viande. Le premier nous mande qu'il a été compris dans le contingent que doit fournir son district, et le second, qu'il craint avec d'autant plus de raison que le service de la viande ne soit bientôt privé de tous ses agents; que l'on publie ouvertement qu'on trouvera les moyens ae faire partir les anciens employés pour laisser des places à d'autres. Nous n'élevons aucun doute sur 1 impartialité que les corps administratifs mettront au tirage, mais nous vous déclarons en nous référant à notre lettre d'hier et nous vous prions de déclarer au ministre que nous ne pouvons répondre de notre service, si nos agents sont exposés à se voir enlevés à leurs fonctions, que des mains neuves ne pourront remplir leurs places.
« Nous avions, au surplus, prévu ces difficultés par un mémoire adressé au ministre, le 15 février. Il est demeuré sans réponse. Yous jugerez sûrement, citoyen, combien il est urgent de prendre une détermination à cet égard, et nous pensons qu'il n'y a pas un moment à perdre pour solliciter une loi qui exempte tous les agents de notre administration qui, par la nature de leurs fonctions mêmes, font déjà un service militaire.
« Les administrateurs généraux des subsistances militaires.
« Signé : Battetinville, Tillemont, Boyer, Poncet, Bierlet, Delarue, Gallambier, Lamotte, Frizon, Deladacourt, Deschapelles.
III
Copie de la lettre écrite par le citoyen L/im-bourg, inspecteur des vivres de la viande, le 8 mars 1793, aux administrateurs généraux des subsistances militaires (2).
Le
« Citoyen,
« Je ne puis me dispenser de vous mander, et ce sera peut-être un peu
tard, que vous êtes
« Yos chefs de bureaux, ceux qui sont chargés de la comptabilité sont dans le même cas ; les commissaires ont prononcé et peut-être, dans quatre jours, serez-vous sans employés et le service sans serviteurs.
(c Voilà, citoyens, l'état des choses ; je m'empresse à vous en donner avis, afin que vous preniez des mesures promptes pour faire rester ceux que vous jugerez convenable de garder ou que vous teniez prête ceux que vous destinerez à les remplacer. J'imaginais d'abord qu'un employé qui avait déjà fait campagne devait être regardé comme un serviteur et que, désirant continuer ce service, il ne devait pas et ne pouvait pas en prendre un autre, lorsque surtout ils sont dans une partie aussi essentielle et-qu'il s'est montré jaloux de remplir son devoir avec cet empressement et cette exactitude qui caractérisent le bon Français, le véritable patriote.
( Vous ne devez pas douter de la perte de presque tous vos employés par le motif que voici ; le choix se fera au scrutin, cela est décidé, et la cabale, soyez-en convaincu, déplacera infailliblement ceux qui occupent les emplois pour y placer des créatures qui sont jalouses de voir qu'on leur préfère ceux qui ont servi dans la campagne dernière ; le motif n'en est pas très patriote, mais on le publie déjà.
« Signé : Limbourg. » IV
Copie de la lettre écrite par le citoyen Ber-
gerat, préposé des subsistances militaires à
Commercy, du 8 mars 1793, aux admims-
trateurs généraux des subsistances militaires (1).
Le
« Citoyens,
« La municipalité de cette ville vient de me comprendre, pour son contingent, dans le dénombrement des hommes qu'elle doit fournir en qualité de volontaires nationaux pour le -complément de l'armée. Je lui ai observé qu'étant attaché à la partie des fourrages, je ne pouvais être distrait de ce service, pour en remplir un autre ; elle ne paraît pas avoir égard à mes représentations.
« Je vous serais obligé de vouloir bien prendre envers moi, le plus promptement possible, des mesures pour assurer ma tranquillité.
« Signé : Bergerat. » Y
Copie de la lettre écrite par les administrateurs des subsistances militaires aux administrateurs composant le directoire du département de Paris (2).
Le
« Citoyens administrateurs,
« Nous répondons à la lettre du 7 de ce mois, que vous nous avez écrite pour nous prémunir contre la facilité que nous pourrions avoir de choisir pour nos préposés un trop grand nombre de jeunes gens, ce qui pourrait contrarier les besoins que Pon pourrait avoir de cette classe de citoyens pour le service militaire et ce qui enlèverait à la patrie une partie de ses défenseurs.
« Le service dont nous sommes chargés, citoyens administrateurs, exige des préposés de tous ordres et d'âge plus ou moins avancé. Nous avons, des emplois qu'on ne parvient à bien remplir qu'après les avoir pratiqués longtemps et dans sa plus tendre jeunesse. Nous devons porter notre prévoyance sur l'avenir. Un des mérites actuels de notre administration, c'est qu'elle est presque toute composée de sujets qui ont vu et fait le service des armées dans leur jeunesse. Nous sommes donc forcés, par nos principes, de donner une partie de nos commissaires qui doivent servir d'apprentissage à des jeunes gens sur lesquels nous fondons quelques espérances, soit à raison de leur éducation, de leur intelligence, de leur honnêteté et de leur civisme reconnus. Mais ce nombre d'agents choisis est très peu nombreux et nous sommes étonnés qu'il ait pu faire l'objet d'une observation ; il ne peut pas marquer dans une population telle que Paris la comporte.
« Nous vous prions, citoyens administrateurs, d'observer que nos employés
doivent être considérés sous le double point de vue du civil et du
militaire, qu'il n'y a point de cam-
« Nous aurons cependant le plus grand soin, citoyens administrateurs, de ne faire tomber notre choix pour nos emplois que sur le moindre nombre possible cfe jeunes gens et, nous vous le répétons, nous n'avons jusqu'à ce jour donné qu'un très petit nombre de commissions à de nouveaux préposés, et nous réduirons toujours ces commissaires à celui qui sera indispensable.
« Il serait peut-être d'une sage prévoyance de faire représenter nos nominations ou commissions aux personnes qui se diront nos préposés, afin d'éviter les surprises qui pourraient être faites, et nous mettre à couvert des inculpations qu'elles feraient naître contre nous.
Les administrateurs généraux des subsistances, militaires,
« Signé : Gallambier, Lamotte, Boyer, Pon-cet, Battetinville, Tillemont, Bierlet, Frizon, Deschapelles, Delarue, Dela-
dacourt.
VI
Copie de la lettre écrite par les administrateurs généraux des subsistances militaires au citoyen Beurnonville, ministre de la guerre (1).
Le
« Citoyen ministre,
« Nous vous avons déjà exposé, dans plusieurs lettres, les inquiétudes que nous avions conçues que le recrutement ne désorganisât notre service. Nous recevons de plusieurs endroits des avis que l'on a fait tirer au sort, non seulement nos employés présents, mais même ceux absents.
« La commune de Dourdan a fait tirer pour le citoyen Roger que nous avons nommé à un de nos emplois, pour l'organisation de l'armée des côtes et qui est rendu à son poste depuis le mois dernier ; cet employé est tombé au sort : ce n'est pas lui qui a tiré ; on a fait tirer pour lui ; nous vous adressons le procès-verbal du tirage.
« Le citoyen Delaunay, notre garde-magasin à Nogent-sur-Seine, comptable envers nous de plus d'un million de valeurs, a été forcé de tirer et est tombé au sort.
(« Nous réclamons, citoyen ministre, ces deux agents et nous vous prions
de faire régler que les employés des subsistances seront com-
« Les administrateurs généraux des subsistances militaires, « Signé : Delarue, Deladacourt, Gallam-bier, Lamotte, Poncet, Boyer, Tille-mont, Frizon, Bierlet, Battetinville, Deschapelles. »
(La Convention renvoie ces différentes pièces au comité de la guerre.
23° Lettre du citoyen Boyer, administrateur du directoire de la Haute-Saône, annonçant un don patriotique de la commune de Saint-Loup. Cette lettre est ainsi conçue (1) :
Yesoul,
« Citoyen,
« La commune de Saint-Loup, mon lieu natal, sise dans le département de la Haute-Saône, et le district de Luxeuil, dont Saint-Loup fait partie, confirment qu'elle a offert et déposé, en don patriotique, pour le soulagement des défenseurs de la patrie, 36 paires de souliers neufs, 38 chemises, 8 paires de bas, 28 paires de guêtres, 2 habits uniformes, et 1 anglaise de drap bleu et, en outre, qu'elle équipe volontairement de pied en cap un volontaire. C'est beaucoup pour une pauvre commune, mais quand il s'agit de soulager des frères d'armes, il n'est point de sacrifices pour le cœur des vrais Français; je désire avec les bons citoyens que, pour la récompenser de cette action généreuse, il en soit fait mention au Bulletin. J'ai pensé que par l'intérêt que vous prenez à tous ce qui regarde vos compatriotes, vous vous voudriez bien vous charger de faire faire cette insertion.
« En mon nom particulier, j© vous en serais reconnaissant. Ce sont les sentiments de votre concitoyen.
Signé : Boyer, administrateur au directoire du département de la Haute-Saône.
(La Convention décrète la mention honorable de ces offrandes qu'elle aceepte et ordonne l'insertion au Bulletin de la lettre du citoyen Boyer.)
25° Lettre du citoyen Marolle, évêque du département de VAisne, qui annonce que, dans la ville de Soissons, le recrutement s'est fait avec le plus grand succès et le plus grand ordre. Cette lettre est ainsi conçue (2) :
Soissons,
« Citoyen Président,
« L'assemblée des jeunes gens de la ville de Soissons que j'ai eu
l'honneur de présider, me
« Je suis avec respect, citoyen Président, votre compatriote.
« Signé : Marolle, évêque du département de VAisne.
(La Convention décrète la mention honorable du patriotisme des habitants de Soissons.)
25° Lettre des commissaires de la Gonvention nationale dans les départements de VAin et de l'Isère (1), pour annoncer que ce dernier département a recruté, indépendamment de son contingent,un troisième bataillon qui demande à être employé. Ils assurent que la tranquillité règne, que la Convention et les lois sont respectées, mais Grenoble manque de fusils.
(La Convention renvoie cette lettre au comité de la guerre.)
26° Lettre des membres du conseil général de la commune de Muret, département de la Haute-Garonne, faisant connaître qu'ils ont réuni un don de cinquante paires de souliers pour le ministre de la guerre. Cette lettre est ainsi conçue (2) :
Muret, le 25 mars.
« Citoyen président,
« En entendant parler des besoins qu'éprouvaient les braves défenseurs de la République, les citoyens de cette commune ont gémi de n'avoir pu les prévenir, pour empêcher que désormais nos frères d'armes n'éprouvent de pareils besoins. Les citoyens de la commune de Muret viennent de remettre à l'administration du district, pour être à la disposition du ministre de la guerre, cinquante paires de souliers.
( Les membres du conseil général de la commune de Muret.
« Signé : Joseph Niel, maire; SouÉ, officier municipal; Fauquet, officier municipal. »
(La Convention décrète la mention honorable de cette offrande qu'elle accepte, et ordonne l'insertion de la lettre au Bulletin.)
27° Lettre des administrateurs du district de Bar-sur-Seine, département
de l'Aube, annonçant que le recrutement est terminé dans leur territoire
et qu'ils ont déjà reçu différents
( Citoyen Président,
« Les administrateurs du directoire du district de Bar-sur-Seine, département de l'Aube, annoncent à la Convention, par l'organe d'un de leurs membres, qu'ils ont ouVert un registre pour inscrire les dons qu'on leur envoie pour l'armée, que ceux qu'ils ont reçus jusques à présent consistent en cinq capotes, douze chemises, vingt-une paires de guêtres et deux cent vingt-deux paires de souliers.
« Ils annoncent, de plus, que le recrutement a beaucoup occupé les ouvriers et que c'est ce qui a empêché plusieurs communes de leur faire passer les autres dons qu'elles leur ont fait espérer et qui en augmenteront le tableau.
« Ils annoncent enfin que. le recrutement est fini dans ce district; que la première division de leurs volontaires est partie pour Metz (lieu de leur destination), le 26 du mois dernier; qu'une autre division est partie le lendemain 27 et qu'ils en feront partir tous les jours jusqu'à la fin.
( Pour les administrateurs du district de Bar-sur-Seine.
« Signé : Duval ».
(La Convention décrète la mention honorable de cette offrande et ordonne l'insertion de la lettre au Bulletin.)
28° Adresse des chasseurs, bons tireurs, en garnison de Bitche (2), qui adressent à la Convention un don patriotique de 450 livres en assignats pour les frais de la guerre.
(La Convention décrète la mention honorable de cette offrande qu'elle accepte et ordonne l'insertion de cette adresse au Bulletin.)
29° Lettre de Garat, ministre de l'intérieur, par laquelle il demande à la Convention d'autoriser la levée des droits détaillés dans l'arrêté du directoire du district du Blanc, pour subvenir, tant à la dépense de l'acquisition de deux bacs, qu'à celle de leurs réparations et entretiens. Cette lettre est ainsi conçue (3) :
Paris, le 30 mars 1793, l'an II de la République.
« Citoyen Président,
«c Le département de l'Indre m'a adressé le 20_septembre 1792, l'arrêté qu'il avait pris relativement à la nécessité de conserver un bac sur la rivière d'Anglin, dans la paroisse d'Ingrandes, dont le service se trouve interrompu par la suppression du droit que la citoyenne Dupin y percevait à son profit, d'après la loi du 25 août 1792.
« Le passage de la route de Troyes à la Rochelle courant le risque d'être
intercepté par le défaut de bac, j'invitai ce département à prendre un
arrêté pour en demander l'établissement et d'y joindre un tarif des
droits à percevoir.
« Il vient, en conséquence, de m'envoyer son arrêté qui porte en substance que le directoire du district du Blanc est autorisé à procéder, dans le plus bref délai, à l'adjudication des réparations à faire au bac, et à faire payer les mêmes droits de passage perçus jusqu'à présent, jusqu'à ce qu'il en ait été autrement statué. Cet arrêté porte aussi que l'extrait de la délibératon prise par le district du Blanc, contenant le projet de tarif pour faire les premières dépenses et pour l'entretien du passage me sera envoyé.
« Je vous prie, en conséquence, de vouloir bien inviter la Convention nationale à rendre une loi qui autorise la levée des droits détaillés dans l'arrêté du directoire du district du Blanc que je joins ici pour subvenir tant à la dépense de l'acquisition des bacs, l'un pour les voitures et l'autre pour les gens de pied, qu'à celle de leurs réparations et entretiens.
« Je vois d'autant moins d'inconvénients à rendre cette loi, que ce tarif, que j'ai fait examiner, a été trouvé modéré et que ces droits à établir ne doivent pas être considérés comme un péage proprement dit; ils seront le salaire des citoyens occupés à manoeuvrer les bacs, et ils serviront aux premières dépenses ainsi que pour les entretiens.
« Il conviendrait que le produit de ce droit de passage fût versé dans la caisse du receveur du district.
« J'attends de votre sollicitude que vous voudrez bien inviter la Convention nationale à prendre une'prompte détermination au sujet de ce bac qui devient d'une nécessité indispensable pour les transports des convois militaires et de la marine qui parcourent la route de Troyes à la Rochelle.
« Le ministre de l'intérieur, « Signé : Garat. »
(La Convention décrète, sauf rédaction, cette demande, qui est convertie en motion par un membre.)
Je demande la parole pour une motion d'ordre (1). Citoyens, je vous demande du calme et la plus grande attention. Votre comité de défense générale, où se trouvent et que paraît influencer la faction Brissot, Guar det, Gensonné, Vergniaud... (Murmures.)
Plusieurs membres : Ils n'en sont pas.
Vote comité de défense générale que paraissent influencer ces hommes à qui nous devons la guerre actuelle; qui sont la cause que nos places fortes sont sans défense. (Nouveaux murmures.)
un grand nombre de membres demandent que Marat soit rappelé à l'ordre.
Votre comité, dis-je, vient de faire arrêter trois commissaires du
conseil exécutif,
Je demande qu'afin que tous les fa,its soient mis en évidence, que ces trois commissaires soient traduite à la barre, et qu'ils révèlent tout ce qui est en leur connaissance. (Applaudissements des tribunes.)
Je n'anticiperai pas sur le rapport qui doit être fait au nom du comité de défense générale, et qui contient des faits de la plus haute importance ; mais je ne dois pas laisser subsister l'impression qu'a faite le discours de celui qui m'a précédé à la tribune. Il est vrai que trois commissaires du conseil exécutif ont été arrêtés ; mais voici pourquoi : ils ont déposé au comité de défense générale un procès-verbal signé d'eux, et qui contient des faits de la plus haute importance ; et pour leur sûreté et pour l'intérêt de la République, ils ont été mis en état d'arrestation. C'est Fabre-d'Eglantine qui a fait sentir combien il était essentiel de s'assurer des signataires d'un procès-verbal qui intéresse si éminemment le salut de la République ; et remarquez que ce n'est pas en vertu d'un mandat d'arrêt du comité de défense générale, mais bien de sûreté générale, qui, instruit des mêmes faits, s'est réuni à nous.
Ce n'était pasl'arres-tation qu'il fallait prononcer contre des citoyens qui ont des preuves en mains et des moyens de sauver la patrie ; il suffisait de les mettre en sûreté (2).
Ces citoyens ont demandé eux-mêmes d'être mis en sûreté, et le comité n'a fait que leur accorder ce qu'ils demandaient.
Marat n'a voulu prononcer qu'un arrêt de proscription.
Je demande à répondre.
Vous n'avez pas la parole, elle est à Boyer-Fonfrède ; si vous insistez, je vous rappelle à l'ordre.
insiste.
Si j'étais un conspirateur, si j'avais un intérêt direct à ce que les
traces de plus d'une conspiration peut-être disparussent; si je voulais
appeler le poignard sur le sein de quelques membres de cette, assemblée
; si je redoutais un comité dans lequel tous les partis se réunissent
pour sauver la patrie en danger; si j'avais appris qu'à la suite d'une
nuit terrible, des arrestations nécessaires ont été ordonnées à
l'unanimité par 150 membres de la Convention, dans Paris et dans les
armées; si je voulais prévenir et effacer peut-être l'impression que va
faire un rapport important, alors je viendrais dénoncer ces
arrestations, alors je les rendrais odieuses et en rejetterais le blâme
sur des membres que je proscrirais, et qui n'étaient pas même à ce
comité, alors j'accuserais le comité entier de trahison ; je serais bien
sûr même que l'opinion publique égarée désespérerait de la Répu-
On sait que, pour le malheur de la France, le comité de défense générale est presque tout composé d'hommes de la faction des hommes d'Etat...
Toute la Montagne y était (Murmures) (1).
On sait que les patriotes y sont en mi norité. (Vifs murmures à droite et au centre.)
Un grand nombre de membres s'élèvent contre cette assertion de Marat, et le menaçant du geste s'écrient.: A l'Abbaye, Marat, à l'Abbaye!
(2) La vérité vous épouvante, les personnalités sont des faits, quand il s'agit de conspiration. On sait encore que ce sont des hommes d'Etat qui y font les décrets que vous adoptez sans discussion. Je viens au fait...
Si Marat entend par hommes d'Etat, ceux qui n'ont pas voté la mort du tyran, il est faux que la majorité des membres de ce comité soient des hommes d'Etat, puisque dix-sept de ceux qui le composent, ont condamné le tyran à la mort.
Vaîné et plusieurs autres membres réclament l'ordre du jour (3).
(La Convention passe à l'ordre du jour sur la dénonciation de Marat.
, cm nom des comités de défense et de sûreté générales réunis, fait un rapport (4) sur trois pièces qui inculpent gravement le général Dumouriez; il s'exprime ainsi :
Citoyens, le salut de la République a dicté à votre comité de défense générale les dispositions qui vous ont été proposées en dernier lieu par Camus, et que vous avez cru devoir consacrer par votre décret du 30 mars.
Aujourd'hui le même intérêt détermine vos comités de défense et de sûreté générales réunis à remettre sous vos yeux des pièces qu'il est temps de vous faire connaître, et qui doivent vous éclairer sur les complots formés contre la patrie et la liberté.
Ces pièces sont au nombre de trois.
La première est une lettre écrite le 12 mars par le général Dumouriez au
président de la Convention nationale ; elle a été insérée dans plusieurs
papiers publics : la seconde est une lettre du même général au ministre
de la guerre, sous la date du 28 mars. Des considérations de prudence
n'avaient pas permis jusqu'à ce moment de vous présenter ces deux
lettres ; la troisième est un procès-verbal des trois conférences que
les citoyens Proly, Pé-reyra et Dubuisson ont eues à Tournay avec le
général Dumouriez, mardi, mercredi et la nuit du jeudi au vendredi de la
semaine dernière; ce procès-verbal fut remis hier au soir par le
ministre des affaires étrangères aux comités de défense et de sûreté
générales réunis, et en présence de plusieurs membres de la Convention
qui se trouvaient à leur séance.
Le général Dumouriez à la Convention nationdle.
Louvain, le
« Citoyen Président,
( Le salut du peuple est la loi suprême ; je viens de lui sacrifier une conquête presque assurée, en quittant la portion victorieuse de l'armée prête à entrer dans le cœur de la Hollande, pour venir au secoure de celle qui vient d'essuyer un revers qu'elle doit à des causes physiques et morales que je vais vous développer avec cette franchise qui est plus nécessaire que jamais, et qui eût toujours opéré le salut de la République, si tous les agents qui la servent l'eussent employée dans tous les comptes qu'ils rendaient, et si elle eût toujours été écoutée avec plus de complaisance que la flatterie mensongère.
« Vous savez, citoyens représentants, dans quel état de désorganisation et de souffrance les armées de la Belgique ont été mises par un ministre et par des bureaux qui ont conduit la France sur le penchant de sa ruine. Ce ministre et ces bureaux ont été changés ; mais bien loin de les punir, Pache et Haassinfraatz sont passés à la place importante de la mairie de Paris, et dès lors la capitale a vu se renouveler, dans la rue des Lombards, des scènes de sang et de carnage.
« Je vous ai présenté au mois de décembre, dans quatre mémoires, les griefs qu'il fallait redresser ; je vous ai indiqué les seuls moyens qui pouvaient faire cesser le mal et rendre à vos armées toute leur force, ainsi qu'à la cause de la nation, toute la. justice qui doit être son caractère. Ces mémoires ont été écartés. Vous ne les connaissez pas. Faites-vous les représenter, vous y trouverez la prédiction de tout ce qui arrive ; vous y trouverez aussi le remède aux autres dangers qui nous environnent et qui menacent notre république naissante. Les armées de la Belgique, réunies dans le pays d'Aix-la-Chapelle et de Liège, y ont souffert tous les genres de besoins sans murmurer, mais en perdant continuellement par les maladies, par les escarmouches contre l'ennemi, par l'abandon de quantité d'officiers et de soldats, plus de la moitié de leurs forces. Ce n'est que depuis l'entrée du général Beurnonville dans le ministère, qu'on commence à s'occuper de son recrutement et de ses besoins ; mais il y a si peu de temps, que nous éprouvons encore tout le fléau de l'esprit désorganisateur dont nous avons été les victimes. Telle était notre situation, lorsque le premier février, vous avez cru devoir à l'honneur de la nation, la déclaration de guerre contre l'Angleterre et la Hollande. Dès lors j'ai sacrifié tous mes chagrins : je n'ai plus pensé à ma démission que vous trouverez consignée dans mes quatre mémoires; je ne me suis occupé que des énormes dangers et du salut de ma patrie. J'ai cherché à prévenir les ennemis, et cette armée souffrante a oublié tous ses maux pour attaquer la Hollande.
« Pendant qu'avec de nouvelles troupes arrivées de France, je prenais Bréda, Klundert et Gertruydenberg, me préparant à pousser plus loin ces conquêtes, l'armée de la Belgique, conduite par des généraux remplis de courage et de civisme, entreprenait le bombardement de Maastricht. Tout manquait pour cette expédition. Le nouveau régime d'administration n'était pas encore établi ; l'ancien était vicieux et criminel ; on regorgeait de numéraire, mais les formes nouvelles qu'on avait mises à la trésorerie nationale empêchaient qu'aucune partie du service ne reçût d'argent. Je ne peux pas encore détailler les causes de l'échec qu'ont reçu nos armées, puisque je ne fais que d'arriver. Non seulement elles ont abandonné l'espoir de prendre Maastricht, mais elles ont reculé d'abord avec confusion et avec perte. Les magasins de toute espèce qu'on commençait à ramasser à Liège sont devenus la proie de l'ennemi, ainsi qu'une partie de l'artillerie de campagne et des bataillons pris à Aix-la-Chapelle. Cette retraite nous a attiré de nouveaux ennemis, et c'est ici que je vais développer les causes morales de nos maux.
« Il a existé de tout temps, dans les événements humains, une récompense des vertus et une punition des crimes. Les particuliers peuvent échapper à cette providence qu'on appellera comme on voudra, parce que ce sont des points imperceptibles ; mais parcourez l'histoire,, vous verrez que les peuples n'y échappent jamais. Tant que notre cause a été juste, nous avons vaincu nos ennemis ; dès que l'avarice et l'injustice ont guidé nos pas, nous nous sommes détruits nous-mêmes, et nos ennemis en profitent.
« On vous flatte, on vous trompe; je vais achever de déchirer le bandeau. On a fait éprouver aux Belges tous les genres de vexations ; on a violé à leur égard les droits sacrés de la liberté ; on a insulté avec impudence à leurs opinions religieuses ; on a profané, par un brigandage très peu lucratif, les instruments de leur culte ; on vous a menti sur leur caractère et sur leurs intentions ; on a opéré la réunion du Hainault à coups de sabres et à coups de fusils ; celle de Bruxelles a été faite par une vingtaine d'hommes, qui ne pouvaient trouver d'existence que dans le trouble, et par quelques hommes de sang qu'on a rassemblés pour intimider les citoyens. Parcourez l'histoire des Pays-Bas, vous trouverez que le peuple de la Belgique est bon, franc, brave et impatient du joug. Le duc d'Albe, le plus cruel des satellites de Philippe II, en a fait périr 18,000 par la main des bourreaux. Les Belges se sont vengés par 30 ans de guerres civiles, et leur attachement à la religion de leurs pères a pu seul les faire rentrer sous le joug espagnol.
« Yos finances étaient épuisées lorsque nous sommes entrés dans la Belgique ; notre numéraire avait disparu ou s'achetait au poids de l'or. Cambon, qui peut être un honnête citoyen, mais qui certainement est au-dessous de la confiance que vous lui avez donnée pour la partie financière, n'a plus vu de remède que dans la possession des richesses de cette fertile contrée. Il vous a proposé le fatal décret du 15 décembre ; vous l'avez accepté unanimement, et cependant chacun de ceux d'entre vous, avec qui j'en ai parlé, m'a dit qu'il le désapprouvait, et que le décret était
injuste. Un de mes quatre mémoires était dirigé contre ce décret ; on ne l'a pas lu à l'As-1 semblée; le même Cambon a cherché à rendre mes remontrances odieuses et criminelles, en disant à la tribune que j'opposais le veto sur les décrets de l'Assemblée : vous avez confirmé ce décret par celui du 31 décembre; vous avez chargé vos six commissaires de tenir la main à son exécution. D'après vos ordres, le pouvoir exécutif a envoyé au moins trente commissaires; le choix en est très mauvais, et à l'exception de quelques gens honnêtes, qui sont, peut-être regardés comme des citoyens douteux, parce qu'ils cherchent à mitiger l'odieux de leurs fonctions, la plupart sont des insensés ou des tyrans, ou des hommes sans réflexion ; qu'un zèle brutal et insolent a conduits toujours au delà de leurs fonctions.
« Ces agents de la tyrannie fiscale ont été ré-
Î) and us sur la surface entière de la Belgique : es commandants militaires, en obéissant au décret, ont été obligés d'employer, sur leurs réquisitions, les forces qui leur étaient confiées; ces exacteurs ont achevé d'exaspérer l'âme des Belges. Dès lors la terreur et peut-être la haine ont remplacé cette douce fraternité qui a accompagné nos premiers pas dans la Belgique; c'est au moment de nos revers que ces agents ont déployé le plus d'injustices et de violence.
« "Vous avez été trompés sur la réunion à la France de plusieurs parties de la Belgique. Vous l'avez crue volontaire, parce qu'on vous a menti. Dès lors vous avez cru pouvoir enlever le superflu de l'argenterie des églises, pour subvenir, sans doute, aux frais de la guerre. Vous regardiez, dès lors, les Belges comme Français ; mais, quand même ils l'eussent été, il eût encore fallu attendre que l'abandon de l'argenterie de leurs églises eût été un sacrifice volontaire, sans quoi l'enlever par force de cette argenterie devenait à leurs yeux un sacrilège. C'est ce qui vient d'arriver. Les prêtres et les moines ont profité de cet acte imprudent, et ils nous ont regardés comme des brigands qui fuient, et partout les communautés des villages s'arment contre nous et le tocsin sonne de toutes parts.
« Ce n'est point ici une guerre d'aristocratie; car notre révolution favorise les habitants des campagnes, et cependant ce sont les habitants des campagnes qui s'arment contre nous. C'est pour eux une guerre sacrée ; c'est pour nous une guerre criminelle. Nous sommes en ce moment environnés d'ennemis ; vous le verrez par les rapports que j'envoie au ministre de la guerre : vous verrez en même temps les premières mesures que la nécessité m'a forcé de prendre pour sauver l'aimée française, l'honneur de la nation, et la République elle-même.
« Représentants de lanation, j'invoque votre probité et vos devoirs ; j'invoque les principes sacrés expliqués dans la Déclaration des droits de l'homme, et j'attends avec impatience votre décision. Dans ce moment-ci, vous tenez en main le sort de l'Empire, et je suis persuadé que la probité et la vertu conduiront vos délibérations, et que vous ne souffrirez pas que vos armées soient souillées par le crime, et en deviennent la victime.
« Le général en chef, « Signé : Dumotjriez. »
Copie de la lettre écrite par le général Du-mouriez au général Beurnonville, ministre de la guerre, datée de Tournay, le 28 mars 1793, l'an II de la République.
Le citoyen Dubuisson, mon cher Beurnonville!, qui m'a été envoyé par Lebrun, avec deux autres personnes, vous fera un tableau exact de ce qu'il a vu et de ce que je lui ai dit. Ce tableau funeste ne peint pas encore la moitié de nos désastres, du brigandage et du désordre désespérant où nous sommes plongés.
Depuis le départ du citoyen Dubuisson, j'apprends :
1° Qu'à ma droite, les généraux Ferrand et Neuilly ont été forcés, par la honteuse désertion des troupes, d'abandonner nuitamment Mons, et qu'à peine ont-ils de quoi jeter dans les places du Quesnoy, Condé et Yalenciennes, non pas de garnisons suffisantes, mais de quoi rassurer les administrateurs et les habitants sur la première terreur, de quoi désencombrer ces places der soldats de toutes armes, et surtout des volontaires qui s'y sont réfugiés, qui pillent les magasins et commettent tous les crimes ;
2° Je viens d'apprendre qu'à ma gauche, le lientenant général Marassé, vient d'être trop heureux de pouvoir sauver, par capitulation et par l'évacuation d'Anvers et de sa citadelle, un corps de 10,000 hommes qu'il va ramener dans la Flandre maritime, et qui est tout mon espoir pour jeter dans les places d'Aire, Saint-Omer, Dunkerque, etc. Le général Marassé a d'autant mieux fait, et est d'autant plus heureux d'avoir fait cette capitulation, qu'aussitôt après l'évacuation de Malines, les Autrichiens se sont avancés par Allost sur Termonde, qu'actuellement ils attaquent Gand, qu'ainsi la retraite du général Marassé eût été entièrement interceptée, si elle n'eût pas été assurée par une capitulation.
J'apprends aussi que le colonel Thouvenot est dans Gand avec 3,500 hommes, qu'il a à Deyns, 1,400 hommes, à Oudenarae 1,900, et qu'il est attaqué, quoique faiblement, dans le moment où il m'écrit. Il me mande aussi que le colonel Léclaire est, avec un corps d'environ 3,000 hommes, à Bevezen, sur la route d'Anvers à Gand, et que notre convoi de Malines est arrêté à Bruges par les administrateurs avec le commodore Moultson.
En conséquence, je viens d'envoyer ordre au colonel Leclaire de se porter à Bruges pour délivrer le convoi, et l'escorter jusqu'à Dunkerque, et au colonel Thouvenot de se rendre avec les 6,000 et quelques cents hommes d'Ou-denarde, de Deyns et Gand à Cassel, où le lieutenant général Omoran tâchera de faire un rassemblement.
Je donne ordre, en même temps, au général Marassé de faire sa retraite par Bruges, et dès qu'il sera aux frontières de France, de se jeter dans Saint-Omer, avec 6 bataillons et la moitié de sa cavalerie ; de jeter le général Ruault dans Aire, avec 6 bataillons et le reste de sa cavalerie, et d'envoyer le surplus de ses forces à Cassel, pour renforcer les corps que va rassembler le général Omoran, que je destine au commandement du camp retranché de Dunkerque, étant moins âgé et un peu plus allant que Marassé, qui sera excellent dans une place.
J'envoie sur-le-champ le lieutenant général Duval prendre le commandement de Lille, où
règne un désordre effrayant, et qui renferme plus de 10,000 fuyards qui se livrent à tous les. excès.
Vous jugez que, n'ayant plus la possibilité du camp d'Arlebeck pour appuyer ma gauche, le oamp de Mons n'existant plus pour appuyer ma droite, je ne peux plus garder longtemps la position de Tournay; j'ai déjà envoyé au camp de Maulde tout ce que j'ai pu rassembler ici de l'armée des Ardennes, pour la séparer et la refaire. Je me suis replié sur les hauteurs de Cherq, derrière la citadelle, l'Escaut devant moi. J'ai jeté la moitié de mon avant-garde dans la partie de la ville qui est sur la rive droite de l'Escaut. Je veux tenir ferme dans cette position, le plus longtemps que je pourrai, pour savoir où sc/nt posées mes autres troupes, et me retirer ensuite lentement et militairement dans la trouée du bois de Clermey que vous connaissez bien, d'où je couvrirai la plaine d'Orchies et toutes mes places. J'ignore encore si je réussirai à faire cette retraite d'une manière imposante, comme j'y suis parvenu jusqu'à présent dans la portion d'armée que je commande moi-même. Je n'ai aucune nouvelles du général Darville ; mais j'espère qu'il aura pu effectuer sa retraite sur Maubeuge et Givet.
Je vois avec la plus grande affliction que de jour en jour nos maux et nos périls s'aggravent. Vous verrez par le procès-verbal du commissaire-ordonnateur, Petitjean, que nous n'avons pas, sur toute cette frontière, pour dix jours de vivres. Le prétendu secours d'hommes qu'on nous a envoyé des départements du Nord et du Pas-de-Calais, est un ramassis de vieillards, d'enfants et de vagabonds, sans armes, qui n'ont fait qu'augmenter l'effroi et le désordre à Bruxelles, à Gand, décourager le reste de nos troupes et les entraîner dans leur fuite. Ces hommes n'ont fait que nous affamer ; et tels sont les secours qu'on envoie à grands frais, et sur lesquels on fonde l'espoir de soutenir notre liberté. Je vous déclare bien positivement que si on ne recrute pas avec promptitude les bataillons de ligne aux dépens des volontaires ; que si cinquante autorités plus absurdes les unes que les autres contrarient et traversent l'autorité militaire et les opérations, je saurai, avec quelques braves gens, m'ensevelir sous les ruines de ma patrie. Mais qu'il m'est impossible d'empêcher l'ennemi de pénétrer dans telle partie de notre frontière qu'il voudra, de prendre sans résistance telle place qu'il jugera à propos, et d'arriver à Paris. (Murmures.)
Pensez bien que, même sans s'arrêter à prendre nos places, il a 20,000 hommes de ca^ valerie, avec lesquels il peut mettre à feu et à sang toute la partie du royaume qui avoisine Paris ; que je n'ai pas la même ressource que j'avais en Champagne pour l'arrêter; qu'alors l'énergie du républicanisme était dans toute sa force ; qu'alors la Convention nationale avait de l'ensemble et de l'autorité ; qu'alors le royaume n'était pas déchiré par la guerre civile; qu'alors enfin il y avait des ressources pécuniaires qui n'existent plus.
Pesez bien ces tristes vérités, et voyez quel parti on croira devoir prendre ; jamais crise • n'a été plus dangereuse pour un peuple, et
jamais il n'a été plus frappé de l'esprit de vertige : l'ennemi est à nos portes, et je ne peux lui opposer que des fuyards sans armes,
sans habits, sans vivres et sans munitions. Ces mêmes ennemis paraissent employer vis-à-vis de nous des ménagements dont il est possible de profiter. Ils ont éloignésurdes derrièrestous les émigrés, et n'en souffrent aucun dans leur armée ; ils traitent avec douceur nos prisonniers et nos blessés, quoiqu'ils n'ignorent pas que beaucoup de lâches d'entre nous aient massacré les leurs. (Mouvement d'indignation.) La capitulation qu'ils viennent d'accorder au général Marassé est encore un exemple rare de modération.
Réfléchissez sur cette conduite à laquelle je ne me suis pas attendu, d'après nos excès; prenez un parti avec le conseil et les comités, et instruisez-moi sur-le-champ de ce que je dois faire. Je ne dirai ni mes opinions ni mes conjectures, car malheureusement on a craint jusqu'à présent de suivre mes avis, et ces avis sont devenus autant de prophéties funestes. Si l'imprudence et l'exagération dirigent encore les personnes qui gouvernent, la France entière sera perdue. J'ai toujours dit, et je le répète, qu'on ne fonde les républiques que sur la vertu, et qu'on ne les soutient qu'avec du courage, de l'ordre et de la sagesse.
« Le général en chef, « Signé : Dumouriez.
« Four copie conforme :
« Le général, ministre de la guerre.
« Signé : Beurnonville. » (L'Assemblée écoute dans un morne silence. )
Procès-verbal des trois conférences que les citoyens Proly, Pereyra et Dubuisson ont eues avec le général Dumouriez, mardi, mercredi, et la nuit de jeudi à vendredi dernier, à Tournay.
Chargés par le ministre des affaires étrangères d'une mission particulière et très importante, et de se rendre, chemin faisant, auprès du général Dumouriez, pour se concerter avec lui sur les moyens de maintenir la réunion de la Belgique, et d'obtenir quelques explications sur les proclamations qu'il y avait faites, les citoyens Proly, Pereyra et Dubuisson étaient en route pour se rendre à leur double destination, lorsqu'ils apprirent le malheureux succès des affaires de Nerwinde, et des jours suivants.
Ils se déterminèrent néanmoins à continuer leur voyage, et à joindre le général dans sa retraite.
Déjà ils approchaient de Bruxelles, lorsqu'ils apprirent qu'on en commençait l'évacuation.
Témoins douloureux du désordre qui régnait parmi les troupes, et qui couvrait les routes d'une multitude de fuyards, ils s'arrêtèrent à Valenciennes, où ils acquirent des connaissances exactes sur tous les événements de la semaine.
Informés de la direction des mouvements rétrogrades, ils parvinrent à joindre le général à Tournay, le mardi au soir 26, au même instant qu'il y entrait avec son avant-garde.
En apprenant qu'il n'avait que peu d'heures à y passer, et qu'il se disposait à repartir dans la nuit pour Ath, où était le corps de bataille, le citoyen Proly, déjà connu assez particulièrement du général, se rendit d'abord seul au-
près de lui pour annoncer ses collègues et faire part de leur mission commune.
Il le trouva dans une maison occupée par Mme de Sillery, MIles Egalité et Pamela, le général était accompagné des généraux Valence, Egalité, et d'une partie de son état-major. Il était de plus entouré de beaucoup de monde, et notamment d'une députation des districts de Valenciennes et Cambrai.
L'entrevue commença par une réception peu amicale de la part du général, et par de3 reproches très amers, auxquels ne s'attendait nullement le citoyen Proly, puisqu'il n'y avait donné aucun sujet. Le général avait été induit en erreur par de mauvais journaux, et par une relation fausse d'une séance des Jacobins, insérée d'une manière inexacte dans le Journal des Débats de la Société.
La conversation fut très aigre; et Proly, îort de son innocence, en parla le langage avec quelque dignité
Le général passa ensuite à une multitude de reproches contre la Convention et les Jacobins. Entre autres propos extrêmement inconsidérés, qu'il tenait devant tout le monde, il dit positivement que la Convention et les Jacobins étaient la cause de tout le mal de la France; mais que lui, général, était assez fort pour se battre par devant et par derrière, et que, dût-on l'appeler César, Cromwell ou Monch', il sauverait la France, seul, et malgré la Convention.
Proly trouva convenable de se retirer à l'instant, se souciant peu de servir d'occasion au général pour dirè tant de folies devant tant de monde.
Au retour de leur collègue, les citoyens Pé-reyra et Duftuisson, informés de tous ces détails, et sentant combien il importait à la chose publique de ne pas laisser le général en proie à des sentiments si extraordinaires, furent décidés par Proly à aller le trouver seuls, sur-le-champ, pour tâcher de ramener son esprit à des sentiments plus équitables.
Ils présentèrent leurs lettres de créance du ministre Lebrun, et demandèrent un entretien particulier, afin que ie général ne fût pas entraîné publiquement, comme avec Proly, aux expansives expressions de son humeur, qu'ils n'attribuaient alors qu'au chagrin des échecs multipliés que nos armes venaient de souffrir.
Le général les fit passer dans un appartement voisin, où ils s'occupèrent d'abord à calmer, s'il était possible, cette humeur violente dont il paraissait maîtrisé.
Leurs efforts furent presque heureux; et après ces diatribes répétées contre la Convention entière, le conseil exécutif et les Jacobins, ils parvinrent à lui inspirer plus de confiance, et se trouvèrent à peu près certains de savoir, dans une troisième conversation, ce que pensait véritablement un homme qui paraissait livré à mille idées contradictoires, et n'avait pas cependant énoncé assez clairement son plan de contre-révolution pour en tirer un résultat utile à la chose publique.
Il était huit heures du soir, le général allait partir pour Ath; ils sollicitèrent donc une troisième entrevue commune à eux trois, pour le lendemain l'après-midi, aussitôt son retour.
Elle leur fut promise positivement; et le général devenu très raisonnable, se porta vers eux avec un mouvement amical, et sans doute pour leur faire oublier les duretés personnelles
qu'il leur avait prodiguées d'abord comme Jacobins; ils les embrassa en les quittant, et monta de suite en voiture pour se rendre à Ath.
Les trois collègues réunis se communiquèrent tout ce qui leur avait été dit par le général, virent clairement que le salut de la République dépendait de ce moment, c'est-à-dire de savoir au juste le secret de Dumouriez, et s'il y avait véritablement quelque consistance dans ses projets.
Ils écrivirent la nuit même au ministre Le-bu un, et lui annoncèrent qu'ils prévoyaient qu'un d'entre eux se rendrait incessamment auprès de lui pour lui rendre compte de certains objets essentiels, que des lettres expliqueraient mal.
Ils se concertèrent le lendemain sur les moyens de prudence à employer pour connaître Dumouriez tout entier dans la troisième entrevue.
Il revint à'Ath sur les cinq heures du soir avec son corps de bataille qu'il plaça aux environs et sous les murs de Tournay.
Le citoyen Proly et ses deux collègues se trouvèrent sur son passage à son entrée à l'abbaye Saint-Martin où était son logement, et le quartier général.
Ils remarquèrent que Dumouriez avait l'air plus de mauvaise humeur que jamais : ils sentirent que ce n'était pas là le moment convenable pour se présenter à lui, et apprirent de son aide de camp Devaux, qu'il soupait chez le général Egalité, c'est-à-dire chez Mme Sillery, lieu de leurs premières entrevues.
Ils se décidèrent à l'y voir encore; et après deux heures d'attente, ils se rendirent chez cette dame au moment où Dumouriez y arrivait. En les apercevant il leur dit d'un ton d'humeur très renforce : Je ne suis pas ici chez moi, je suis chez Egalité; si vous voulez me parler,.vous me trouverez après souper à l'abbaye Saint-Martin.
Ils se retirèrent sans répliquer un seul mot, bien résolus à essuyer tousles désagréments possibles, pour rendre définitive cette dernière entrevue nocturne. A neuf heures et demie ils étaient dans son appartement, à l'attendre et à recorder leurs idées.
Ils y passèrent une heure et demie, pendant laquelle des adjudants et autres officiers les entretinrent de propos très inconsidérés, très antipatriotiques, et de la même teinte que ceux de leur général.
Celui-ci parut enfin, et malgré les traces de son humeur violente, fortement imprimées sur sa physionomie, il semblait désirer lui-même la conversation qui se préparait. Cette nuance n'échappa point aux trois collègues. Il les fit asseoir, renvoya tout le monde, et quand ils furent parfaitement seuls avec lui, il recommença les mêmes sorties véhémentes contre la Convention et les sociétés populaires.
Après une multitude d'idées que les citoyens Proly, Péreyra et Dubuisson lui présentaient successivement avec rapidité, pour parvenir à détruire cette méfiance qu'il semblait avoir reprise contre eux, ils lui firent reprendre lui-même cette première idée de la veille, qu'il sauverait la patrie seul, sans la Convention et malgré la Convention.
Il répéta qu'elle était composée de 745 tyrans
tous régicides, qu'il ne faisait aucune diffé-
rence des appelants ou non appelants.
Qu'il les avait tous en horreur; qu'il se moquait de leurs décrets; qu'il avait déjà dit à Danton, que bientôt ils n'auraient de validité que dans la banlieue de Paris.
De là il passa à une sortie virulente sur l'armée, sur les volontaires, qui étaient des poltrons; et dit qu'il ne veut que des troupes de ligne.
Il s'enflamme et se transporte de fureur en parlant du nouveau tribunal révolutionnaire, jure qu'il ne souffrira pas son existence qui est horrible; vainement on veut lui en démontrer la nécessité par la gravité des circonstances et par les mouvements de cette guerre civile dont il avait parlé avec une sorte de compassion.
Il s'emporte de plus en plus, et dit trois ou quatre fois que tant qu'il aura quatre pouces de lame à son côté, il saura bien empêcher cette horreur. Que si on renouvelle à Paris des scènes sanglantes, il marche à l'instant sur Paris. Qu'au reste la Convention n'a pas pour trois semaines d'existence. (Mumures.)
Cette dernière phrase, répétée dès la veille, engage à hasarder enfin de lui demander ce qu'il compte mettre à la place de cette Convention annihilée, et à laquelle il annonçait ne pas vouloir de successeurs.
Pressé vivement dès la veille par le citoyen Dubuisson, il hésite encore à s'expliquer; enfin serré vivement par des arguments sans réplique, il se décide à parler catégoriquement, et à développer ses idées.
Ici les mots sont devenus si précieux que, pour en conserver la plupart dans leur intégrité textuelle, il faudra quelquefois tracer littéralement le dialogue.
— Yous ne voulez donc pas de Constitution, lui disent les trois collègues?
— Non, la nouvelle est trop bête; et pour un homme d'esprit, en vérité Condorcet n'y a rien entendu.
— Mais, que mettrez-vous donc à la place?
— L'ancienne, toute médiocre et vicieuse qu'elle soit.
— A la bonne heure; mais sans royauté,, sans doute ?
— Avec un roi, car il en faut un, et absolument.
Ici deux d'entre nous concentrent leur indignation, le troisième ne peut la contenir, et dit vivement que pas un - Français n'y souscrira; qu'ils ont tous juré le contraire; qu'ils aimeraient mieux mourir jusqu'au dernier, et que pour lui le nom de Louis...
Dumouriez interrompt et réplique que peu importe qu'il s'appelle Louis ou Jacobus...
Ou Philippus, dit Proly. A ce mot, Dumouriez se livre à uni mouvement violent; dit que c'est une atrocité des jacobins qui depuis longtemps lui reprochent d'être du parti d'Orléans, parce que, après l'affaire de Jem-mappes, il a rendu à la Convention un compte avantageux de la conduite courageuse du jeune homme qu'il forme au métier.
On n'insiste pas sur cet incident, et on le ramène doucement à sa première idée de faire adopter l'ancienne Constitution, même avec un roi, puisqu'il le voulait.
Mais comment, lui dit-on, et par qui ferez-vous accepter cette Constitution, puisque vous insistez sur la destruction préalable de la Convention actuelle, et qué vous entendez qu'au-
cun corps représentatif ne la remplace en ce! moment ?
Dumouriez répond, sans hésiter, qu'il fera remplacer cette Convention par un moyen, tout simple : J'ai, dit-il, mes gens tous trouvés, sans les assemblées primaires qui prendraient trop de temps à se convoquer. Enfin,, j'ai les présidents des districts.
Ici la conversation fut interrompue par l'entrée subite du général Valence et de l'aide de camp Montjoie, qui annonçaient l'évacuation de Mons.
Les citoyens Proly et ses collègues eurent l'air de vouloir se retirer, Dumouriez leur dit. d'attendre un instant.
Après quelques minutes, il forme une espèce d'à parts avec le citoyen Proly, pendant lequel il parle d'une négociation qu'il avait entamée avec le général Gobourg, pour quelques arrangements relatifs aux malades laissés dans les hôpitaux de Bruxelles; négociation dont il comptait, disait-il, profiter adroitement pour retirer dix-huit bataillons qui sont dans les garnisons de Breda, Gertrui-demberg, etc.
Il lui était observé par Proly, que ce commencement de négociation pouvait conduire à la paix : Dumouriez répond que c'était bien là aussi son objet, mais qu'il la ferait seul, parce qu'aucune des puissances belligérantes ne voudrait jamais traiter avec la Convention, ni avec le conseil exécutif, qui était subordonné à 745 tyrans.
Pendant ce petit moment de conversation particulière, les deux autres collègues s'entretenaient avec le général Valence, et l'aide de camp Montjoie.
Ils entendaient aussi de leur part de vives plaintes contre le tribunal nouveau. Montjoie généralisait son mépris pour tous les décrets de la Convention,, et disait tout naïvement qu'elle n'avait pas le droit d'exiger son obéissance, parce qu'il n'y avait pas donné son consentement. Ce singulier principe de droit public donna la juste mesure de la judiciaire et du civisme de l'aide de camp.
Après quelques minutes, Dumouriez rentra dans le cercle, et en tira Dubuisson qu'il conduisit dans un coin de l'appartement, éloigné du reste de la compagnie.
Aussitôt celui-ci lui fit reprendre la conversation où elle était restée, c'est-à-dire à l'emploi que, dans son plan contre-révolutionnaire, il comptait faire incessamment des présidents de districts.
Dumouriez se livre alors verbeusement à tous ses développements.
Mais, dit Dubuissson. je vois bien environ 500 présidents de district, énonçant ce qu'ils appelleront le vœu du peuple, et sans doute qu'ils se rassembleront à cet effet.
Dumouriez répond : Non : ce serait trop long, et dans trois semaines, les Autrichiens seront à Paris, si je ne fais la paix.
Il ne s'agit plus de Répuplique, ni de liberté; j'y ai cru trois jours : c'est une folie, une absurdité; et depuis la bataille de Jem-mapes j'ai pleuré toutes les fois que j'ai eu des succès pour une aussi mauvaise cause. (Mouvements d'indignation.) Mais il faut sauver la patrie, en reprenant bien vite un roi, et faisant la paix, car ce serait bien pis, si le territoire était envahi, et il le sera, si je le veux, dans moins de trois semaines. (Exclamations.)
Cela se peut, reprend Dubuisson,. mais rendez-moi donc plus clairs vote moyens pratiques de sauver la patrie. Vous ne voulez pas de rassemblement de présidents de district : qui donc aura l'initiative pour émettre le vœu de rétablir un roi, et de reprendre la première Constitution 1
Dùmouriez dit : Mon armée. Silence de la part de Dubuisson, .pendant lequel Dumouriez répète : Mon armée, oui, l'armée des Mameluks. Elle le sera, l'armée des Mameluks pas pour longtemps, mais enfin elle le sera; et de mon camp, ou au sein d'une place forte, «lie dira qu'elle veut un roi. Les présidents des districts seront chargés de le faire accepter chacun dans leur arrondissement; la moitié et plus de la France le désire, et alors moi je ferai la paix dans peu de temps et facilement.
Dubuisson lui fait à l'instant beaucoup d'objections sur les moyens d'exécution, et lui représente le danger personnel que lui Dumouriez courrait s'il était soupçonné ou traversé dans la réussite.
Il répond que si ses projets échouent et qu'iï soit décrété d'accusation, comme il nous avait déjà dit plusieurs fois qu'il s'en moquait, et de ce décret, et de tous les autres; qu'il défiait la Convention de le faire mettre à exécution au milieu de son armée, et qu'au reste, il avait toujours pour dernière ressource un temps de galop vers les Autrichiens. (Etres.)
Dubuisson lui représente que le sort de La Fayette n'était pas tentant pour les imitateurs.
Il réplique : La Fayette avait inspiré le mépris pour ses talents et la haine pour la journée du 6 octobre à Versailles à toutes les puissances du Nord, mais moi je suis aimé et estimé d'elles toutes : d'ailleurs je Fuserai chez elles de manière à m'eni bien faire recevoir.
Enfin Dubuisson cherchant tous les moyens de l'engager à renoncer à ses idées,, imagine de lui proposer un autre plan de contre-révolution, qui aurait un même but, mais qui serait plus adroit et moins risquable.
Dumouriez l'écoute avec complaisance, et lui dit que quoique meilleur que le sien, il ne peut l'adopter parce que le temps manquerait. Qu'enfin le sien est plus propre aux circonstances, et qu'il aurait déjà commencé ostensiblement à l'exécuter,,, s'il n'avait craint pour les jours de cette infortunée qui est au Temple, et pour ceux de sa précieuse famille.
Dubuisson saisit cette idée dilatoire, la lui présente plusieurs fois sous diverses expressions, pour l'engager à renoncer à un plan qui compromettrait de fait l'existence royale à laquelle il prenait tant d'intérêt.
Il répond que le dernier des Bourbons serait tué,, même ceux de Ooblentz, que la France n'en aurait pas moins un roi; mais que si Paris ajoutait les meurtres du Temple à tous les autres, il marchait dans l'instant sur cette ville; mais qu'il n'en ferait pas le siège à la manière de Broglio, qui était un imbécile qui n'avait pas connu sa besogne; mais que lui, Dumouriez, se faisait fort de réduire Paris dans huit jours avec douze mille hommes, dont un corps à Pont-Saint-Maxence, un autre à Nogent etc., et autres postes sur les rivières ; qu'ainsi il l'aurait bientôt réduit par famine : qu'au reste la déclarations de guerre avec l'Angleterre, ouvrage
ridicule et perfide de Brissot, mènerait à faire capituler la France entière par disette de grains, attendu qu'elle n'en recueillait pas assez pour se nourrir, et que les corsaires anglais ne laisseraient pas entrer dans nos ports un seul navire chargé de grains.
Dubuisson lui répliqua que cette dernière donnée était inexacte; mais que sans s'arrêter à le lui démontrer, il voulait encore l'arrêter par ce même intérêt pour les jours de la famille royale, qui seraient certainement dans le plus grand danger au premier acte qui signalerait son plan.
Alors Dumouriez se tait un instant, et ensuite s'écrie comme inspiré par la force de la situation : Eh bien, vos jacobins à qui vous tenez tant} ont ici un moyen de s'illustrer à jamais, et de faire oublier tous leur3 crimes : qu'ils couvrent de leurs corps ceux de la famille royale; qu'ils fassent faire une troisième insurrection qui rachète le crime de celles de 1789 et de 1792, et que le fruit de cette dernière insurrection soit la dispersion des 745 tyrans, à quelque prix que ce soit; pendant ce temps je marche avec mon arme'e, et je proclame le roi. (Murmures prolongés.)
Dubuisson, effrayé de cette scélératesse, pressent dès lors que l'auteur de semblables confidences, au milieu d'une armée et d'une ville étrangère, pourrait fort bien, après une heure de réflexion, punir sa propre imprudence qui l'entraînait si légèrement à tant d'atroces confidences.
Alors il gagne a^sez sur lui-même pour chercher à assurer sa retraite et celle de ses collègues. Il se décide rapidement à faire accroire à Dumouriez qu'il trouve son idée belle et possible dans l'exécution; qu'il va partir pour Paris, et qu'il espère sonder adroitement les Jacobins sur cet objet; qu'il ne doute même pas du succès.
Ici les confidences se multiplient de la part de Dumouriez : il avoue qu'il a pensé à enlever à la maison d'Autriche la Belgique, pour se faire reconnaître le chef de la nouvelle République Belgique, amie, alliée de la France. Il déclare nettement que c'est la seule haine que les ingrats de la France lui ont portée, qui l'ont barré dans ce projet. Mais il fait entendre qu'il peut encore se réaliser pour la Belgique et pour lui, sous la protection de la maison d'Autriche.
Enfin Dubuisson, fatigué d'être dépositaire malgré lui, de tant de projets liberticides, demande, à trois heures du matin, la permission de se retirer.
Dumouriez lui dit de partir pour Paris avec ses collègues, mais de revenir seul dans cinq ou six jours,, après avoir jeté les racines de l'insurrection des jacobins, pour opérer la dispersion, et même plus, des membres de la Convention, et la protection tutélaire qu'ils donneraient à la famille royale jusqu'à son arrivée.
Dubuisson se retire avec Proly, qui était resté seul, et lui dit, dès qu'il se voit libre : Partons pour Paris, nous n'avons plus rien à faire; les horreurs que je viens d'entendre sont plus fortes encore que celles qu'il nous a dites en commun.
Les chevaux de poste sont demandés, et les trois collègues indignés, quittent sur-le-champ Tournay.
Dumouriez ne s'était pas couché tout de suite; il fait une lettre au ministre Beurnon-ville, et annonce le citoyen Dubuisson; la lettre est arrivée par un courrier de dépêches.
Proly et ses collègues rencontrèrent à Lille les députés, Delacroix, Robert et Gossuin.
Sans leur développer toutes les pensées cruelles qui les agitaient, ils leur firent entendre que le salut public demandait que la ville de Lille fût à l'instant déclarée en état de siège, et qu'ils la surveillassent exactement. Qu'il était d'une importance majeure d'en faire autant- pour toutes les places frontières que défendrait mal l'armée en partie dissipée, ou à la disposition d'un homme qui, d'après trois jours de conversation, leur paraissait devenu très dangereux au salut de la République.
Les députés parurent le considérer dans ce sens, et même énoncèrent le désir qu'ils avaient déjà eu, de lui envoyer l'ordre d'aller se reposer à Paris.
Les citoyens Proly, Pereyra et Dubuisson, un peu plus tranquilles sur le sort de Lille, par la présence des commissaires, se rendirent de suite à Paris, où ils ne purent arriver que hier samedi, à huit heures du matin, malgré le désir qu'ils avaient de déposer de si grands intérêts entre les mains de la puissance protectrice de la République, et du ministre qui avait eu quelque confiance dans leur véracité et leur zèle patriotique.
Paris, ce 31 mars 1793, l'an deux de la République et avons signé tous trois, collectivement, pour ce qui a été dit aux trois en commun; et chacun séparément, pour ce qui regarde les conversations particulières.
Signé : Proly, Pereyra, Dubuisson.
Paraphé à la séance du comité de défense générale, du 31 mars 1793, l'an second de la République, en exécution de sa délibération de ce jour.
Signé : L. B. Guyton, Président.
Citoyens, si vos comités n'avaient eu à fixer leur opinion que sur les lettres des 12 et 28 mars, peut-être auraient-ils hésité à se livrer au sentiment d'indignation dont ils ont été pénétrés; mais en rapprochant ces lettres du procès-verbal tenu par les citoyens Proly, Pereyra et Dubuisson; en conférant les expressions outrageantes et enveloppées des lettres avec les menaces et les développements qui se trouvent dans ïe procès-verbal, il demeure établi que la République naissante et la liberté sont menacées, que Dumouriez est un des principaux auteurs de ces trames odieuses, et tendent à vous donner un roi.
Que devaient faire vos comités 1 Le salut delà France, le cri de leur conscience, le désir de répondre à la confiance dont vous les aviez investis, toutes les considérations de politique et de devoir se réunissaient pour leur commander des mesures promptes, étendues, qui pussent embrasser toutes les ramifications du complot, atteindre ceux qui peuvent y avoir pris part, et même ceux sur lesquels il s'élève des soupçons.
Telles ont été, citoyens, les résolutions de vos comités. Quelques-unes des mesures qu'ils ont cru devoir prendre n'ont point encore reçu leur exécution; ce motif les engage à vous les taire pour quelques instants, à moins que vous n'en ordonniez autrement.
Mais je suis chargé de vous dire : 1° qu'on a provisoirement mis en état d'arrestation, chez eux, les trois citoyens qui ont signé le procès-verbal dont je vous ai parlé, non qu'on suspecte leur véracité, mais cette mesure a été commandée pour leur sûreté personnelle, et pour la conservation de témoins aussi précieux.
En second lieu, on a cru devoir s'assurer de tous ceux qui, à raison de leur naissance, de leur intérêt, de leurs habitudes, de leurs rapports et de leur situation, peuvent être soupçonnés de désirer le rétablissement de la royauté. Ce parti, sans doute, paraîtra effrayant aux Français qui n'ont point l'âme républicaine, mais eeux qui ne veulent point survivre à la liberté de leur pays approuveront des dispositions dont la durée doit être très courte, et qui, peut-être, deviendront inutiles, au moyen des éclaircissements que nous recevrons de ceux qu'elles doivent frapper.
En nous livrant à cès douces espérances,, notre zèle ne s'est point ralenti, et les motifs que nous venons d'indiquer nous auraient portés à comprendre dans les mesùres arrêtées les citoyens Philippe Egalité et Sillery, si notre respect pour la représentation nationale n'eût enchaîné notre activité : ce n'est pas que ces deux collègues soient nommés ni même désignés dans les preuves; mais les représentants d'une République ne doivent être arrêtés par aucune considération, lorsqu'il s'agit de connaître des faits dont dépend le salut public. Nous les avons appelés l'un et l'autre dans notre sein; le citoyen Egalité a répondu qu'il voyait avec plaisir toutes les mesures qui ont été prises; qu'il demande lui-même que l'on adopte, à son égard, toutes celles que le comité aurait crues convenables, parce qu'il désire que sa conduite paraisse au plus grand jour, et que la vérité, bien connue, fasse taire enfin tous ses calomniateurs.
Le citoyen Sillery s'est référé à la réponse du citoyen Egalité.
Citoyens, j'ai rempli les obligations qui m'avaient été imposées par mes collègues, je vous^ai lu lés pièces jqui ont basé nos opérations," et je vous ai rendu compte de l'effet qu'elles ont produit en nous.
On m'a chargé de vous faire un simple récit, et non pas de vous présenter un projet de décret.
Dans la conjoncture présente, les comités* ont cru qu'il était de leur devoir de préparer vos décisions, et non de les prévenir; d'ailleurs, vous avez mandé Dumouriez à votre barre : le respect des formes empêche d'aller plus loin, jusqu'à ce qu'il ait été entendu; et il a été pris des mesures pour s'assurer de sa personne.
Je termine par ces deux réflexions : Les victoires des Français avaient été le fruit de leur courage, leurs revers ont été l'ouvrage de la trahison; les traîtres seront livrés à la sévérité des lois : la France demeurera libre.
Et vous, citoyens, plus les circonstances sont critiques, plus vous les maîtriserez par votre fermeté. Rallions-nous tous autour de l'arbre de la liberté; expirons, s'il le faut, sous son salutaire ombrage; mais que la délibération que nous allons prendre soit le fruit de la réflexion, et qu'elle mérite d'être comptée parmi les oracles de la sagesse des nations.
(1). Citoyens, je me suis rendu ce matin au comité de défense générale, d'après l'invitation qui m'en a été faite. Etant moi-même suppléant de ce comité, j'ignorais entièrement l'objet du mandat qui m'y faisait venir. Je m'y suis donc rendu et le Président m'a fait part à peu près de tous les détails dont on vient de rendre compte.
Je vous avoue qu'enflammé de Colère contre la scélératesse du général Dumouriez, j'ai été confondu d'imaginer que je pouvais être compromis dans une pareille affaire. J'ai rédigé à mesure presque toutes les réponses que j'ai faites ce matin au comité; je vous demande la permission de vous les lire parce que cela est extrêmement essentiel, et parce que, quelque chose qui puisse arriver à Dumouriez, il y va de ma tranquillité particulière et de mon honneur, que vous sachiez ce que j'ai dit.
Je vous demande quatre minutes d'attention.
Citoyens, il paraît par les détails qui viennent de vous être donnés par le comité de dé-, fense générale, qu'une grande conjuration était à l'instant d'éclater. Si les faits.qui vous sont rapportés sont véritables (ce dont je doute un peu) (2), Dumouriez est un grand coupable, et tous ceux qui ont trempé dans sa conjuration, doivent être punis. Depuis l'époque de la Révolution, j'ai toujours entendu parler d'une faction appelée d'Orléans, et rassuré par mes anciennes et intimes liaisons avec cette famille, j'ai toujours combattu son existence; et dans ce mOment même, si elle existe, je serai celui de vous qui en sera le plus étonné.
Certes, citoyens, vous devez dans cette circonstance examiner scrupuleusement toutes les ramifications que ce grand complot peut avoir; et je désire que ma conduite, mes opinions, soient scrupuleusement examinées. Il est essentiel pour moi, citoyens, de vous donner le détail très abrégé des seules et uniques relations que j'ai eues avec Dumouriez. Je n'ai jamais eu aucune liaison avec lui, et je le connaissais fort peu avant son entrée au ministère. Ses opinions politiques m'étaient peu connues. Il sollicita d'être employé à Lyon, à l'époque de l'Assemblée constituante, et le comité des recherches, dont j'étais membre, s'opposa à sa nomination.
Lorsqu'il parvint au ministère, je l'ai vu une seule fois chez lui, et je lui parlai du désir que l'on m'avait témoigné de me charger d'une expédition (3); j'ai su que Dumouriez s'était opposé à ma nomination, parce qu'il protégeait un autre concurrent.
A l'époque où le dernier de nos rois renvoya le ministère patriote qu'il
avait choisi, Dumouriez, seul conservé, me parut suspect, et je ne
balançai pas à le dénoncer vivement. Le discours que je prononçai aux
Jacobins, à cette
Dumouriez quitta le ministère; il fut à l'armée, il tint le camp de Maulde malgré La Fayette, et les amis de la liberté eurent en ce moment de lui une opinion favorable. Dumouriez, après la défection de La Fayette, prit le commandement de son armée, et sa conduite dans l'Argonne me parut si franche, que je crus m'etre trompé sur son compte. Je lui écrivis une lettre dont, en peu de mots, voici la substance. J'ai mis si peu d'intérêt à mes relations avec lui, que je n'ai gardé aucune minute de ces lettres. Je lui disais, que lorsque je l'avais cru coupable, j'avais été le premier à l'attaquer; mais que j'étais charmé de m'être trompé, et que « puisqu'il protégeait si bien mes vignes, il était juste de lui envoyer de mon vin, et que je me mettais à L'amende de 100 bouteilles de vin dé Champagne. »
Quelques semaines après cette lettre, je fus nommé de la commission que vous avez envoyée à son armée, Carra, Prieur et moi, nous n'avons été que peu ae jours avec lui, parce que l'armée du duc de Brunswick fit sa retraite le lendemain de notre arrivée. Dumouriez partit peu de jours après pour aller en Flandres, et vos commissaires restèrent avec Kellermann, qui était chargé de reprendre Verdun et Longwy. A mon arrivée, je vous fis mon rapport, et je donnai à Dumouriez les éloges que méritaient alors les talents militaires qu'il avait développés.
Dumouriez a fait la conquête de la Belgique, et je ne lui ai pas écrit une seule fois pendant cette campagne, si ce n'est, à ce que je crois, pour le prier dé faire accorder les invalides à un jeune volontaire (1).
Dumouriez est venu à Paris, où il a passé environ quinze jours ou trois semaines; je ne l'ai pas vu une seule fois, ni chez lui, ni chez moi, ni dans aucune maison tierce. Je l'ai rencontré au comité de défense générale deux fois.
A l'époque où Dubois-Crancé proposa l'organisation nouvelle de l'armée, je fis l'amendement de donner six aides de camp aux généraux d'armée. L'Assemblée adopta cette mesure ; le soir j'écrivis à Dumouriez une lettre dans laquelle je lui mandais cette disposition, et je le priais, s'il n'avait pas de sujet en vue, de prendre avec lui un jeune enfant que la loi ne me permet pas d'avouer, mais qui m'intéresse particulièrement. Il ne m'a fait aucune réponse à ma lettre, et il n'a point pris avec lui ce jeune enfant que je lui recommandais.
Lorsque nos troupes ont commencé à éprouver quelques échecs dans la
Belgique, alarmé pour ma femmeA qui était à Tournay avec ma nièce ;
certain que si les émigrés la prenaient, ils la feraient périr, j'ai
écrit à Dumouriez le soir même que la section Poissonnière vint à la
barre le dénoncer ; dénonciation qui fut reçue avec indignation de la
Convention nationale. Ma lettre est un simple billet ; je lui parle de
mes alarmes, et lui recommande ma famille : je terminai ma lettre par
cette phrase : « Pour-
Si Dumouriez est coupable du crime qu'on lui impute, vous devez faire un grand exemple, et tirer la vérité du chaos où il paraît qu'on a voulu l'engloutir (2).
Je remercie mes collègues de m'avoir appelé au comité de défense générale ; je supplie dans ce moment la Convention de vouloir bien me donner trois commissaires de la Convention nationale, qui se transporteront chez moi pour mettre sous les scellés tous mes papiers ; ils en trouveront une immense quantité que je n'ai pas lu pour la plupart, ils y verront beaucoup de manuscrits de mes opinions politiques, et toutes écrites de ma main ; ils n'en trouveront pas une seule qui ne respire le plus pur patriotisme.
J'avoue que mes ppinions ne sont pas aussi exagérées que celles de plusieurs personnes ; mais quant aux bases décrétées par la Convention nationale pour la Constitution qu'elle se propose de donner à la France, l'on ne me verra jamais varier ; maître de ma pensée, je manifesterai sans crainte l'amour que j'ai pour mon pays, l'abolition éternelle de la royauté, et l'invincible opposition que je mettrai toujours à toute autorité qui voudrait attenter à la souveraineté du peuple : je désire le règne de la loi (3). Les membres du comité de défense générale ont bien fait de s'assurer des personnes qui peuvent leur donner des éclaircissements sur le projet insensé qu'il est à l'instant de découvrir. Quanti à moi, citoyens, je vous déclare que je n'ai aucune connaissance directe ni indirecte de cette trame coupable, et que j'aurais été le premier à vous la dénoncer si je l'avais pu soupçonner.
La lecture des lettres de Dumouriez m'a étonné, et cependant je n'étais pas sans inquiétude sur le parti que le comité avait adopté, je n'en ai pas parlé au comité, mais j'ai témoigné mes alarmes à quelques membres. Maintenant que les preuves paraissent authentiques, je me réfère à l'avis de toute la Convention, et je crois que la conduite de ce géné^ ral doit être sévèrement examinée et punie si elle est trouvée coupable ; ma famille ne craint point l'examen qui sera fait de sa conduite.
Notre attachement à la famille d'Egalité ne s'est jamais démenti ;
cependant, je crois, qu'il n'y a pas un seul de mes amis, avec lequel je
me sois moins occupé d'affaires politiques qu'avec lui ; Egalité et son
fils m'ont toujours paru de fidèles patriotes, et jamais je n'ai entendu
d'eux aucun propos qui fût dangereux pour la liberté de mon pays.
Plusieurs membres demandent que la discussion soit fermée, et que le rapporteur du comité de sûreté générale soit entendu.
(2). Je demande la parole pour une motion d'ordre.
Je demande que le rapporteur du comité de sûreté générale soit entendu. Jusqu'à présent deux seuls membres de cette Assemblée, Sillery et Egalité, ont été inculpés. Sillery a été entendu. Si Egalité veut parler, la parole lui appartient de droit ; mais comme il est prouvé qu'une discussion utile pour la chose publique ne peut pas être établie dans ce moment, je crois qu'elle doit être renvoyée, après que Dumouriez aura été entendu. (Murmures) Je demande l'ordre du jour.
(3). Vous avez entendu un rapport qui prouve que la République est exposée à de grands dangers. L'ordre du jour est donc de prendre les mesures nécessaires pour la sauver.
L'audace de Dumouriez attestée par tous ses actes, attestée par ses lettres insolentes, prouve qu'il croit être sûr que le moment de mettre à exécution son infâme complot est arrivé. Il n'y a pas un moment à perdre pour mettre la République en défense. Dumouriez ne vous a pas dissimulé que son intention était de livrer la République à vos ennemis ; et vous savez, citoyens, que vos places fortes sont sans défense. Comment donc hésitiez-vous à prendre des mesures pour les mettre en état de résister aux efforts de l'ennemi ? Je demande donc que la discussion s'ouvre à l'instant sur les mesures à prendre pour mettre nos frontières en état de défense.
Un grand nombre de membres : Appuyé, appuyé !
(4). Quelques jours avant l'arrivée de Danton et de Delacroix, commissaires à l'armée de Belgique, on reçut la première lettre que Dumouriez écrivit à la Convention. La lettre fut remise sur le bureau du Président, qui était alors le citoyen Bréard. L'Assemblée était occupée en ce moment à des affaires très urgentes, la lettre fut renvoyée au comité de défense générale sans avoir été lue.
Plusieurs membres : Ce n'est pas vrai.
La lettre fut apportée au comité de défense générale, où Danton fut
appelé pour en entendre la lecture. Bréard qui était alors Président,
dit qu'il était de son devoir d'en
J'ai hâte d'ajouter que Danton confirma ces paroles et nous dit que Dumouriez s'était trompé, que c'était une mazette en politique, mais un Dieu pour les armées. Il poursuivit : « Cette lettre ne peut être lue parce qu'elle pourrait causer les plus grands désordres ; mais je m'engage à revenir sur-le-champ en Belgique, et je promets de faire écrire à Dumouriez une seconde lettre, pour se rétracter de tout ce qu'il a dit. » Il ait encore : « Si je n'obtiens pas de Dumouriez cette réponse, alors moi-même je reviens devant, la Convention nationale et je demande le décret d'ac-sation contre lui. »
Il a été fait ce que demandaient vos commissaires. Le lendemain, plusieurs membres du comité demandèrent que la lettre de Dumouriez ne fût pas rendue publique, et la Convention se rendit à ces raisons.
Qu'est-il survenu ? Danton est arrivé de la Belgique à Paris ; il ne s'est pas présenté le jour de son arrivée à la Convention nationale, ni au comité de défense générale. Je demande pourquoi, n'ayant pu obtenir la rétractation de la lettre que Dumouriez avait écrite le 12 mars dernier à la Convention nationale, il ne l'a pas dénoncé? Pourquoi ne l'a-t-il pas fait décréter d'accusation ? Pourquoi lui et Delacroix, qui avaient eu des conversations avec ce général et avaient dit qu'ils le connaissaient dans tous les sens, et même dans les choses qu'on ne pouvait pas dire à la tribune, pourquoi, dis-je, n'en ont-ils pas plus tard rendu compte au comité de défense générale ? Je demande que Danton s'explique sûrement sur ce fait.
(1) Si l'on n'eût parlé que de moi, je ne paraîtrais pas à cette tribune, mais je dois répondre au fait sur lequel je suis interpellé.
Or, ce fait n'a pas été, à mon sens, exactement rapporté par Pénières.
Sur la fin d'une séance, je ne me souviens pas du jour, mais peu importe, on me remit un paquet de dépêches. J'ouvris ce paquet, je vis que c'était des lettres de la Belgique. La séance fut levée dans ce moment sans que je l'eusse annoncé, car il y avait fort peu de membres dans la salle. Je me bornai à dire que j'en ferais donner lecture le lendemain.
Pourtant, je ne crus pas devoir attendre jusqu'à cette date pour en donner connaissance à ceux qui ont la confiance de l'Assemblée : je communiquai ces dépêches au comité de défense générale. Alors ce comité crut devoir me prescrire une autre conduite. On me dit qu'il ne fallait point lire ces dépêches : je représentai au comité que je me compromettais en ne les lisant point et que je m'exposais à des reproches. Danton et Delacroix me rassurèrent là-dessus. Je suivis l'impulsion que m'avait donné le comité, en disant le lendemain à la Convention, que ces dépêches pouvaient devenir funestes, si on les lisait à présent, et
Logotachigraphe, n° 92, page 249, 28 colonne.
qu'il était prudent de prendre des mesures avant de les faire connaître. Elles furent renvoyées au Comité.
Quant à ce que dit Pénières, relativement à Danton, à Delacroix et à d'autres, je ne m'en rappelle pas du tout, - et d'ailleurs, cela ne me regarde pas. Danton est ici, il va répondre.
Je demande la parole.
La parole est à Danton.
(1) : Je commence par bien préciser l'interpellation qui m'est faite ; elle se réduit à ceci : Vous avez dit, Danton, que si vous ne parveniez pas à faire écrire à Dumouriez une lettre qui détrusît l'effet de la première, vous demanderiez contre lui le décret d'accusation. Cette lettre n'ayant point eu lieu, pourquoi n'avez-vous pas tenu votre promesse ?
Voilà bien, je crois, la manière dont je suis interpellé. Eh bien, je va,is donner les éclaircissements qui me sont demandés ; je répondrai par des faits positifs. ^
D'abord, j'ai fait ce que pavais annoncé ; la Convention a reçu une lettre par laquelle Dumouriez demandait qu'il ne fût fait de rapport sur la première qu'après que la Convention aurait entendu les renseignmnts que devaient lui donner ses commissaires. J'en appelle sur ce point à la mémoire de l'Assemblée.
Il y a plus. Cette lettre ne nous avait point satisfait, nous, commissaires ; et après avoir conféré avec lui, après l'avoir trouvé à la tête de l'armée, après être allés avec lui au feu de Nerwinden et être revenus nous entretenir de lui à Louvain, nous acquîmes la conviction qu'il n'y avait plus rien à attendre de Dumouriez pour la République.
Voici oe que je fis en arrivant. Il est très vrai que je ne suis pas allé à la Convention le jour même.
Arrivé à Paris à neuf heures du soir, je ne vins pas au comité ; mais le
lendemain j'ai dit que Dumouriez était devenu tellement atroce, qu'il
avait dit que la Convention était composée de 400 imbéciles qui se.
laissaient conduire par 300 brigands (2). J'ai demandé au comité que
tout fût dévoilé. Ainsi tous ceux q^i s'y sont trouvés ont dû voir que
mon avis était qu'il fallait arracher Dumouriez à son armée, le faire
juger et frapper si on acquérait la conviction de tous ses crimes. Je me
rappelle même qu'alors je fus présenté comme un homme qui tombait d'un
excès dans un
Mais ce fait ne suffit pas; il importe que la Convention et la nation entière sachent la conduite qu'ont tenue vos commissaires à l'égard de Dumouriez,-il est étrange que ceux qui constamment ont été en opposition de principes avec lui, soient aujourd'hui accusés comme ses complices.
Qu'a voulu Dumouriez ? Etablir un système financier dans la Belgique, y faire des emprunts, disposer des esprits, s'accorder avec l'aristocratie de ce pays et traiter avec elle. Qu'a voulu Dumouriez ? Point de réunion. Quels sont ceux qui ont fait les réunions ? Yos commissaires. La réunion du Hainaut, dit Dumouriez, s'est faite à coups de sabres. Ce sont encore vos commissaires, et moi, qui l'ont faite. C'est nous que Dumouriez accuse des malheurs de la Belgique ; c'est nous que Dumouriez accuse d'avoir méconnu l'esprit du peuple ; c'est nous qu'il accuse d'avoir fait couler le sang dans le Hainaut ; et par une fatalité inconcevable, c'est nous qu'on accuse de protéger Dumouriez.
Remarquez bien notre position.
Dumouriez était un de ceux qui avaient le plus de confiance de l'armée. J'ai dit que Dumouriez avait conçu un très beau plan d'invasion de la Hollande et j'ai dit la vérité. Si ce plan eût été exécuté, la vanité de Dumouriez, satisfaite à cet égard, eût pu lui épargner peut-être son crime. Peut-être cependant eût-il fait tourner ses victoires à son profit, mais toujours la République eût eu cet avantage que la Hollande aurait été conquise, que le crédit de l'Angleterre eût été ébranlé, que la ligue des rois eût été déjouée et que bientôt celui qui aurait voulu s'élever au dessus d'elle, après avoir vaincu la République française, aurait été obligé de se soumettre à ses lois ou de périr.
Remarquez bien quel est l'ensemble du système de Dumouriez. Il se plaint des massacres qui ont eu lieu à Paris, il se plaint des sociétés populaires, il se plaint du tribunal révolutionnaire que vous avez établi ; eh bien, qui sont ceux qui ont sollicité les mesures extraordinaires que vous avez prises ? Dumouriez fait plus : d'après le mémoire qui vous a été lu, Dumouriez dit que bientôt vos décrets n'auront plus de crédit que dans la banlieue de Paris (1).
Je passe à un fait plus important ; c'est que Dumouriez a dit à l'armée,
que si Danton et Delacroix y reparaissaient, ils les feraient arrêter.
Citoyens, les faits parlent d'eux-mêmes; on voit facilement que la
commission a fait son devoir. Quel est le citoyen de bonne foi, qui en
douterait, et par quelle singularité, dès lors, me rend-on responsable
des erreurs que les commissaires auraient pu commettre 1 Qui n'a pas
commis d'erreurs ? Dumouriez s'est rendu
J'ai déjà annoncé que Dumouriez a été égaré par les impulsions qu'il a reçues de Paris, et qu'il était aigri par les écrits qui présentaient les citoyèns les plus énergiques comme des scélérats. La plupart de ces écrits sont sortis de cette enceinte : je demande que la Convention vote une commission pour débrouiller ce chaos et pour connaître les auteurs de ce complot, car le mal remonte de plus loin. Quand on verra comment nous avons combattu les projets de Dumouriez, opéré la réunion, empêché qu'il s'emparât des deniers de la Belgique ; quand on verra que nous sommes tous solidaires par l'identité de notre conduite ; quand on verra que vous avez ratifié toutes nos opérations, car tous les arrêtés que nous avons pris ont été successivement soumis à vos lumières, il ne restera plus, je l'espère, aucun soupçon sur notre conduite.
Mais, citoyens, sans vouloir détourner votre attention ni de ce qui concerne la commission, ni de ce qui me concerne individuellement, je dois terminer cette explication purement préliminaire, en vous ramenant à l'intérêt public. Ce n'est point assez de découvrir d'où viennent nos maux, il faut leur appliquer un remède immédiat; vous avez, il est vrai^ ordonné un recrutement, mais cette mesure est trop lente; je crois que l'Assemblée doit nommer un comité de guerre, chargé de s'occuper sans délai d'une armée désorganisée, et de la prompte création d'une nouvelle armée. Tous les efforts des ennemis veulent se porter sur Paris. Le ci-devant général, indigne de porter le nom français, qui, après avoir servi la République, veut l'asservir, vous démasque les plans qu'il a tracés avec nos ennemis; c'est au cœur qu'on voudrait attaquer la liberté en attaquant Paris. Eh bien, je demande qu'il soit pris des mesures pour établir un camp à vingt lieues de Paris, composé au moins de quarante à cinquante mille hommes, qui pourra ôter à nos ennemis l'espoir d'arriver dans la capitale, ou qui pourra fournir des renforts à nos armées et mettre nos places fortes à l'abri d'un coup de main.
Je demande aussi que mes collègues de la Belgique soient rappelés sur-le-champ.
Plusieurs membres : Cela est fait.
Je demande enfin que le conseil exécutif rende un compte exact de nos opérations dans la Belgique : l'Assemblée acquerra ainsi les lumières qui lui sont nécessaires pour étudier cette affaire, et elle verra que nous avons toujours été en opposition avec ce qu'a pu faire Dumouriez. Quand on saura pour quelle raison nous lui avons rendu une sorte de justice sur les projets de la Hollande, on se rendra compte qu'il était de notre devoir de combiner la prudence avec la fermeté républicaine. En effet, si vos commissaires avaient fait enlever Dumouriez au moment où il était à la tête de son armée, on aurait rejeté sur eux la désorganisation de cette armée.
Remarquez également qu'il y avait, indé-jpendamment du danger de l'armée, une impossibilité physique de le faire arrêter. Yos commissaires, quoique investis d'un grand pouvoir, n'ont rien pour assurer le succès de leurs
opérations ; les soldats ne nous prennent, en arrivant aux armées, que pour de simples secrétaires de commission; il aurait fallu que la Convention donnât à ceux qu'elle charge de promulguer les lois à la tête des armées, soit une sorte de déclaration moitié civile et moitié militaire, soit une attestation, - soit— (Interruptions sur plusieurs bancs.)
J'observe qu'indépendamment des motifs que nous avions de ne pas engager une sorte de combat en présence de l'ennemi, j'observe, dis-je, que nous eussions très probablement échoué.
Que pouvaient faire, d'ailleurs, de plus vos commissaires? Dire : il y a urgence, il faut arracher Dumouriez à l'armée. Cela, nous [l'avons dit, j'en atteste tous les membres du comité de défense générale. Si nous avions voulu employer la force, elle nous eût manqué; car, quel général, au moment où Dumouriez exécutait sa retraite, et lorsqu'il était entouré d'une armée qui lui était dévouée, eût voulu exécuter nos ordres ?
Ici, il est bon que vous sachiez que ce même homme en manifestant son opinion contre la Convention et contre le peuple français, ce même homme, dis-je, par une singularité étrange, par un reste de vanité militaire, était constamment, jour et nuit, à cheval, et que jamais, tant que nous avons été dans la. Belgique, il n'y a eu deux lieues de retraite qu'il n'y ait eu un combat. Ce n'était donc pas au milieu des combats qui se livraient continuellement, que nous pouvions faire arrêter Dumouriez ; nous ne l'avons pas fait par impossibilité.
Nous avons provoqué le comité à prendre des mesures de rigueur contre Dumouriez. Nous avons satisfait à ce que notre devoir exigeait. Au surplus, j'appelle de nouveau, soit pour mes collègues, soit pour moi la plus sévère responsabilité et toute espèce de dénonciation, sûr que ma tête, loin de tomber, sera la tête de Méduse, qui fera trembler tous les aristocrates contre-révolutionnaires (1).
(Vifs applaudissements des tribunes,.)
(1). Ce n'est point une accusation formelle que je vais porter contre Danton, Delacroix et autres ; mais ce sont des conjectures que je vais soumettre à l'Assemblée. Je ne sais point déguiser ce que je pense, ainsi je vais dire franchement l'idée que la conduite de Delacroix et de Danton a fait naître dans mon esprit.
Dumouriez a ourdi un plan de contre-révo-lution ; l'a-t-il ourdi seul, oui ou noni
Danton a dit, pour répondre aux interpellations qui lui avaient été
faites par Pénières, qu'il n'avait pu, qu'il n'avait osé sévir contre
Il vous a dit encore qu'il avait fait connaître Dumouriez, et qu'il avait déclaré qu'il n'y avait rien de bon à espérer de lui.
Je réponds à Danton, d'abord qu'il est bien étonnant qu'il n'ait osé prendre aucune mesure contre Dumouriez, tandis qu'il nous a dit que l'armée était tellement républicaine, que, malgré la confiance qu'elle avait dans son général, si elle lisait dans un journal que Dumouriez a été décrété d'accusation, elle l'amènerait elle-même à la barre de l'Assemblée. D'où vient donc cette terreur que Danton et Delacroix ont eue, tandis qu'ils nous avaient assurés, au comité de défense générale, que si dans huit jours Dumouriez ne cédait pas, ils le feraient traduire à la barre. Pourquoi ne l'ont-ils pas fait?
Danton vient de dire qu'il avait assuré le comité que la République n'avait plus rien à espérer de Dumouriez. J'observe à l'Assemblée que Danton a dit au comité que Dumouriez avait perdu la tête en politique ; mais qu'il conservait tous ses talents militaires, et qu'il fallait bien, se garder de prendre aucun parti contre lui avant qu'il eût opté sa retraite. Robespierre était du même avis (1), mais il voulait qu'on examinât attentivement la conduite de Dumouriez. Je vous avouerai franchement que, devant ce fait de Danton nous faisant envisager qu'il serait dangereux de le remplacer, le comité de défense générale n'osa point vous proposer des mesures et s'en rapporta entièrement à ses commissaires.
Voilà les faits, et voici les conséquences que j'en tire.
(3). Il faut tout dire ; on a proposé d'envoyé Gensonné qui avait tout pouvoir sur Dumouriez, afin de traiter avec lui du salut de la République.
Plusieurs membres : C'est vrai !
Voici donc comment je raisonne. Je me dis que s'il y avait un plan de formé pour rétablir la royauté et que Dumouriez fût à la tête de ce plan, que fallait-il faire pour le faire réussir ?
Il fallait maintenir Dumouriez, cair Dumouriez était nécessaire.
Eh bien, j'examine ce) qu'ont fait vos commissaires.
Danton arrive, et vous vous rappelez tous que, loin de parler contre ce
général, il en a fait le plus grand éloge. C'était donc le moyen
D'autre part qu'a fait Delacroix ?
Delacroix, en arrivant de la Belgique, a affecté un patriotisme exagéré, dont jusqu'à ce moment il n'avait donné aucun exemple. (Murmures sur plusieurs bancs.) Et pour mieux dire, Delacroix se déclare montagnard. L'avait-il fait jusqu'alors ? Non. Il tonna contre les citoyens qui ont voté l'appel au peuple, et contre ceux qu'on désigne sous le nom d'hommes d'Etat. L'avait-il fait jusqu'alors? Non.
C'est qu'il fallait avant tout populariser le plan; c'est que ce qui importait le plus dans ce moment, c'était de capter la confiance populaire.
Yoici un second moyen pour faire réussir la conspiration.
Pour faire réussir la conspiration tramée par Dumouriez, il fallait tenir les deux extrémités du fil.
Eh bien, Delacroix reste dans la Belgique ; Danton vient ici ; il y vient pour prendre des mesures de sûreté générale, il assiste au comité, et il se tait...
Cela est faux !
Plusieurs membres : C'est faux !
Ensuite Danton, interpellé de rendre compte des motifs qui lui ont fait abandonner la Belgique, parle d'une manière insignifiante. Comment se fait-il qu'après avoir rendu son compte, Danton reste à Paris ? Avait-il donné sa démission? Non. Si son intention était de ne pas retourner dans la Belgique, il fallait qu'il le dît, afin que l'Assemblée le remplaçât; et, dans le cas contraire, il devait y retourner.
J'avoue que j'étais inquiet de savoir pourquoi Danton était ici, où sa présence ne paraissait pas nécessaire.
Pour faire réussir la conspiration de Dumouriez, que fallait-il faire? Il fallait faire perdre à la Convention la confiance publique. Que fait Danton ? Danton paraît deux fois à la tribune, et là il reproche à l'Assemblée d'être au-dessous de ses devoirs; il annonce une nouvelle insurrection; il dit que le peuple est prêt à se lever (ce sont les expressions de Danton), et cependant le peuple était tranquille. Il n'y avait pas de marche plus sûre pour amener Dumouriez à ses fins que de ravaler de la Convention, et de faire valoir Dumouriez; c'est ce qu'à fait Danton (1).
Pour faire réussir la conjuration, il fallait exciter des craintes, il fallait parler de revers, il fallait présenter les faits sous des vues presque desespérées. Eh bien, c?est ce qu'on fait Delacroix et Danton. Ils savaient qu'en
Î>arlant ainsi, il en résulterait deux choses : a première,; c'est que
les âme® timides trembleraient et se cacheraient; la seconde, c'est que
le peuple? furieux d'être toujours au milieu des trahisons, furieux de
se voir jouer, furieux d'être la victime de tous les complots, qui
n'avaient pour but que de le remettre sous les fers qu'il avait brisés
et de l'égorger, se porterait, dans son désespoir, à des mouvements
qu'il serait impossible de retenir. Ils
Citoyens, voilà les images que j'ai vues dans la conduite de vos commissaires. Je désire me tromper, mais, comme il y va de l'intérêt supérieur de la République, je dirai même de leur honneur, je demande, avec Danton, que vous nommiez une commission ad hoc pour examiner leur conduite, la comparer avec celle de Dumouriez et vous faire voir s'ils ont trempé ou non dans la oonjuration. J'aime à croire qu'ils se justifieront, sinon je dis qu'ils sont coupables.
Cela fait, citoyens, je vous propose une mesure de salut public, car jamais on n'en eut plus besoin qu'à présent.
Il faut que la nation soit instruite de la conduite de Dumouriez, il faut que l'armée le sache aussi, car Dumouriez se trouve aujourd'hui l'idole de la nation, comme Lafayette le fut jadis... (Interruptions). Pour prévenir l'inquiétude et le découragement, il faut que le peuple sache que si l'armée a été battue, quand elle allait au combat, c'est parce qu'elle a été trahie. Depuis que Dumouriez a remporté la victoire de Jemmapes, il a dit que ce n'était qu'un rêve et qu'il avait gémi quand il avait eu du succès (1)).
Je termine par une observation : vous voyez maintenant à découvert le projet de ceux qui parlaient au peuple de couper des têtes, vous voyez s'ils ne voulaient pas la royauté. Je sais bien que le peuple ne la voulait pas, mais il était trompe. On lui parle sans cesse de se lever. Eh bien ! peuple français, lève-toi, suis le oonseil de tes plus perfides ennemis, forge-toi des chaînes, car c'est la liberté qu'on veut perdre, et non pas quelques membres de la Convention.
Et vous, mes collègues, souvenez-vous que le
Point de fausse indulgence, le tribunal que vous avez créé ne marche pas encore.
Il ne peut être en activité; vous n'avez rendu aucun décret d'accusation contre les infâmes coquins... (Murmures).
Je demande :
1° Qu'il rende compte tous les trois jours des procès qu'il a jugés et de ceux qu'il instruit; de cette manière on saura s'il a fait justice.
2° Je demande que les citoyens Egalité et Sillery, qui sont inculpés, mais que je suis loin de croire coupables (car ce n'est pas pour Egalité qu'on travaille), soient mis en état d'arrestation chez eux.
3° Je demande que la commission proposée par Danton soit à l'instant organisée.
4° Que les deux lettres dé Dumouriez et le procès-verbal des citoyens Proly, Pereyra et Dubuisson, qui vous a été lu, soit imprimé, envoyé aux départements et aux armées.
5° Qu'une adresse soit joint© à ce procès-verbal; ce moyen est puissant; car, lorsque le peuple voit une adresse de l'Assemblée nationale, il croit voir un oracle.
Je demande qu'on envoie Lasource arrêter Dumourietz.
Je demande enfin, pour prouver à la nation que nous ne capitulerons jamais avec un tyran, que chacun d'entre nous prenne l'engagement ae donner la mort à celui qui tenterait de se faire roi ou dictateur.
(TJ ne acclamation unanime se fait entendre. Les applaudissements et les cris : Oui, oui! se répètent à plusieurs reprises. L'Assemblée entière est levée; tous les membres, dans l'attitude du serment, répètent celui de Lasource. Les tribunes applaudissent. )
(2). Je demande la parole pour un fait intéressant.
Plusieurs membres : Cela n'est pas vrai !
C'est une scélératesse : vous avez pris la défense du roi, et vous voulez rejeter vos crimes sur nous.
Je vais rendre les propres paroles de Fabre avec la réponse qu'on lui fit. Il dit... (Nouveaux murmures.)
Je demande la parole au nom du salut public.
Citoyens, je me suis recueilli; j'ai écouté tout ce qui a été dit à cette tribune. Mon opinion est que l'explication qu'on provoque dans ce moment, doit perdre la République.
Citoyens, de grands dangers menacent la patrie, mais sans nous en apercevoir et entraînés par des passions peut-être, nous allons les aggraver par des discussions qui, dans ce moment, ne peuvent qu'être funestes. J'ai aussi, moi, des rapprochements à présenter et des observations graves à soumettre; mais le temps n'est pas venu encore. Ne nous pressons pas de porter une imprudente lumière sur la conspiration qui a été tramée. Peut-être donnerions-nous à ses auteurs le moyen de. nous échapper; attendons que Dumouriez, que votre commission de la Belgique, que votre comité de salut public aient été entendus; alors nous nous expliquerons et les faits se saisiront avec plus d'ensemble et de facilité. J'appuie la proposition de former une commission particulière et je demande l'ordre du jour.
(La Convention décrète, à l'unanimité, l'établissement d'une commission extraordinaire chargée d'examiner la conduite des commissaires dans la Belgique, de chercher et découvrir toutes les trames de la conspiration. Elle ordonne ensuite que le rapport de son comité de défense générale, le procès-verbal des commissaires du pouvoir exécutif, et les lettres de Dumouriez seront imprimées et envoyées aux armées et aux départements (1)).
Je somme Cambon, sans personnalités, sans s'écarter de la proposition
qui vient d'être décrétée, de s'expliquer sur un fait d'argent, sur
100,000 écus qu'on annoncé avoir été remis à Danton et à Delacroix, et
de dire la
Plusieurs membres : Le renvoi à la commission.
(La Convention décrète cette proposition.)
, retournant à sa place. Tous voulez faire assassiner les patriotes; mais le peuple ne s'y trompera pas; la Montagne vous écrasera.
(A ce moment la Montagne se lève et, pendant que les tribunes applaudissent longuement, engage Danton à se défendre. Danton court vers Lasource et de là vole à la tribune. Les tribunes et la Montagne tout entière continuent à applaudir. )
Je veux avoir la parole.
Plusieurs membres : Non, non ! Président, maintenez votre fermeté, qu'on n'accorde la parole que par un décret.
TJn membre (du centre). Je propose de proclamer la dictature de Danton.
(Le tumulte recommence sur ces paroles; le Président se couvre pour rétablir Vordre et le silence, et ce n'est qu'après un certain temps que le calme renaît.)
Citoyens, je demande la parole, et je vous prie de m'écouter en silence.
Différentes propositions ont été faites : on avait provoqué une explication sur des faits' qui inculpaient des membres de la Convention. Delmas a demandé la nomination d'une commission chargée d'examiner les faits et d'en rendre compte à l'Assemblée. Cette proposition a été adoptée à l'unanimité. Danton s'y était rendu; maintenant il demande la parole pour des explications. Je consulte l'Assemblée.
Un grand nombre de membres (sur la Montagne). Non, non, il a la parole de droit !
D'autres membres (à droite et au centre) : Pas du tout, il existe un décret contraire !
Je soutiens qu'étant accusé, on doit m'entendre.
Je demande que Danton soit entendu, et je déclare qu'il n'est entré dans mon procédé aucune passion.
Citoyens, dans cette crise affligeante le vœu de l'Assemblée ne sera pas équivoque. Je vais le prendre. J e désire plus qu'un autre que les commissaires se justifient.
(La Convention, consultée, accorde la parole à Danton, à une très grande majorité.)
La parole est à Danton.
(1). Je dois commencer par vous rendre hommage comme vraiment amis du
salut du peuple, citoyens, qui êtes placés à cette Montagne (se tournant
vers l'extrémité gauche), vous avez mieux jugé que moi. J'ai cru
longtemps que quelle que fût l'impétuosité de mon caractère, je devais
tempérer les moyens que la nature m'a départis; je devais employer dans
les circonstances difficiles où
Je demande à faire une interpellation à Danton...
Un grand nombre de membres : Yous n'avez pas la parole... A l'Abbaye !
Et d'abord, avant que d'entrer aussi à mon tour dans des rapprochements, je vais répondre. Que vous a dit Lasource ? Quelle que soit l'origine de son roman, qu'il soit le fruit de son imagination ou la suggestion d'hommes adroits... (Nouveaux murmures à droite et au centre.)
l'aîné. Nous avons tranquillement écouté Lasource, soyez tranquilles à votre tour.
Soit que cet homme dont on s'est emparé plusieurs fois dans l'Assemblée législative, ait voulu préparer, ce que j'aime à ne pas croire, le poison de la calomnie contre moi, pour le faire circuler pendant l'intervalle qui s'écoulera entre sa dénonciation et le rapport général qui doit vous être fait sur cette affaire, je n'examine pas maintenant ses intentions; mais que vous a-t-il dit 1 Qu'à mon retour de la Belgique, je ne me suis pas présenté au comité de défense générale; il en a menti : plusieurs de mes collègues m'ont cru arrivé vingt-quatre heures avant mon retour effectif, pendant que j'étais parti le jour même de l'arrêté de la commission; je ne suis arrivé que le vendredi 29, à huit heures du soir. Fatigué de ma course et du séjour que j'ai fait à l'armée, on ne pouvait exiger que je me transportasse immédiatement au comité, je sais que les soupçons de l'inculpation m'ont précédé. On a représenté vos commissaires comme les causes de la désorganisation de l'armée. Nous, désorganisateurs ! nous, qui avons rallié les soldats français, nous qui avons fait déloger l'ennemi de plusieurs postes importants ! Ah ! sans doute, tel a dit que nous étions venus pour donner l'alarme, qui, s'il eût été témoin de notre conduite, vous aurait dit que nous étions faits pour braver le canon autrichien, comme nous braverons les complots et les calomnies des ennemis de la liberté.
J'en viens à la première inculpation de Lasource. En arrivant, je n'étais pas même instruit qu'il dût y avoir comité ce jour là. Me fera-t-on un crime d'avoir été retenu quelques heures chez moi pour réparer mes forces affaiblies par le voyage et par la nécessité de manger? Dès le lendemain, je suis allé au comité; et quand on vous a dit que je n'y ai
donné que de faibles détails, on a encore menti. J'adjure tous mes collègues qui étaient présents à cette séance : j'ai dit « que Dumouriez regardait la Convention comme un composé de 400 hommes stupides et de 300 scélérats. Que peut faire pour la République, ai-je ajouté, un homme dont l'imagination est frappée de pareilles idées? Arracnons-le à son armée. »
L'orateur se tournant vers Vextrême gauche : N'est-ce pas cela que j'ai dit?
Plusieurs membres (sur la Montagne) : Oui, oui! (1).
Il y a plus, Camus, qu'on ne soupçonnera pas d'être mon partisan individuel, a fait un récit qui a coupé le mien; et ici j'adjure encore mes collègues. Il a fait un rapport dont les détails se sont trouvés presque identiques avec le mien.
Les mêmes membres : Cela est vrai !
Ainsi, il est résulté de ce que nous avons dit en commun, un rapport effectif au comité.
Lasource trouve étrange que je sois resté à Paris, tandis que ma mission me rappelait dans la Belgique; il cherche à faire croire à des intelligences, entre Delacroix et moi, dont l'un serait resté à l'armée et l'autre à Paris, pour diriger à la fois les deux fils de la conspiration.
Lasource n'est pas de bonne foi. Lasource sait bien que je ne devais partir qu'autant que j'aurais des mesures à porter avec moi; que j'avais demandé et déclaré que je voulais rendre compte à la Convention de ce que je savais. Il n'y a donc dans ma présence ici aucun rapport avec les événements de la Belgique, aucun délit, rien qui puisse faire soupçonner une connivence.
Lasource vous a dit : « Danton et Delacroix ont proclamé que si un décret d'accusation était porté contre Dumouriez, il s'exécuterait, et qu'il suffirait que le décret fût connu par les papiers publics, pour que l'armée l'exécutât elle-même. Comment donc ces mêmes commissaires n'ont-il^ pas fait arrêter Dumouriez?.-.. Je ne nie pas le propos cité par Lasource-; mais avions-nous ce décret d'accusation dont j'ai parlé? Pouvions-nous prendre la résolution d'enlever Dumouriez,, lorsque nous n'étions à l'armée que Delacroix et moi; lorsque la commission n'était pas rassemblée? Nous nous somme rendus vers la Commission, et c'est elle qui a exigé que Delacroix retournât vers l'état-major, et qui a jugé qu'il y aurait du danger pour la retraite même de l'armée, à enlever Dumouriez. Comment se fait-il donc qu'on me reproche, à moi individu, ce qui est du fait de la commission ? La correspondance des commissaires prouve qu'ils n'ont pu se saisir de l'individu Dumouriez. Qu'auraient-ils donc fait en notre place, ceux qui nous accusent? eux qui ont signé des taxes, quoiqu'il y eût un décret contraire! (Rires ironiques et applaudissements sur la Montagne.)
Je dois dire un fait qui s'est, passé dans le comité même de défense
générale. C'est que
Quels sont ceux qui ont pris constamment des ménagements? Qu'on consulte les canaux de l'opinion, qu'on, examine ce qu'on disait partout, par exemple dans le journal qui s'intitule Patriote Français. On y disait que Dumouriez était loin d'associer ses lauriers aux cyprès du 2 septembre. C'est contre moi qu'on excitait Dumouriez. Jamais on n'a eu la pensée de nous associer dans les mêmes complots; nous ne voulions pas prendre sur nous la responsabilité de l'enlèvement de Dumouriez ; constamment, la politique de ce général, ses projets de finances, les projets d'ambition qu'il pouvait avoir sur la Belgique ; je les ai constamment mis à jour. Je 4e demande à Cambon, il dira par exemple la conduite que j'ai tenue relativement aux 300,000 livres de dépenses qui ont été secrètement faites dans la Belgique.
Et aujourd'hui, parce que j'ai été trop sage et trop circonspect, parce qu'on a eu l'art de répandre que j'avais un parti, que je voulais être dictateur, parce que je n'ai pas voulu, en répondant à mes adversaires, produire de trop rudes combats, occasionner des déchirements dans cette Assemblée, on m'acCuse de mépriser et d'avilir la Convention.
Avilir la Convention ! et qui plus que moi a constamment cherché à relever sa dignité; à fortifier son autorité? N'ai-je pas parlé de mes ennemis mêmes avec une force de respect 1 (Se tournant vers la droite.) Je vous interpelle, vous qui m'accusez sans cesse...
Plusieurs membres à droite : Tout à l'heurè vous venez de prouver votre respect.
Tout à l'heure cela est vrai; ce que vous me reprochez est.exact; mais pourquoi ai-je abandonné le système du silence et de la modération ? Parce qu'il est un terme à la prudence, parce que quand on se sent attaqué par ceux-là mêmes qui devraient s'applaudir de ma circonspection, il est permis d'attaquer à son tour et de sortir des limites de la patience. (Vifs applaudissements sur un grand nombre de bancs)
Mais comment se fait-il que l'on m'impute à crime la conduite d'un de mes collègues. Delacroix, dit-on, ne s'était jamais montré si fervent patriote, jamais il n'avait, siégé sur la Montagne, avant son retour de l'armée. Quoi ! parce qu'il a eu le bon esprit de ne pas partager (je le dis franchement, car je le tiens de lui) les vues et les projets de ceux qui ont cherché à sauver le tyran... (Violents mur-
mures et vifs applaudissements sur la Mon-tagne.) Quoi ! parce qu'il n'a pas voté comme eux dans cette grande question qui fait le schisme de cette Assemblée... (Nouveaux murmures sur les mêmes bancs.)
Plusieurs membres demandent que Danton soit rappelé à l'ordre.
Oui, c'est vrai, on a conspiré chez Roland, et je Connais le nom des conspirateurs.
C'est Barbaroux, c'est Brissot, c'est Guadet.
Parce que Delacroix s'est écarté du fédéralisme et du système perfide de l'appel au peuple; parce qu'après l'époque de la mort de Lepeletier on lui demanda s'il voulait que la Convention quittât Paris, il fit la profession de foi en répondant : « J'ai vu qu'on a armé de préventions tous les départements contre Paris; je ne suis pas des vôtres. (1) » On a inculpé Delacroix, parce que, patriote courageux, sa manière de voter dans l'Assemblée a toujours été conséquente à la conduite qu'il a tenue dans la grande affaire du tyran. Il semble aujourd'hui que moi, j'en ai fait mon second en conjuration. Ne sont-ce pas là les conséquences, les aperçus jetés en avant par Lasource?
Plusieurs membres (sur la montagne) : Oui, oui !
Un autre membre (à droite) : Ne parlez pas tant, mais répondez.
Eh ! que voulez-vous que je répondre? J'ai d'abord réfuté pleinement les détails de Lasource : j'ai démontré que j'avais rendu au comité de défense générale le compte que je lui devais; qu'il y avait identité entre mon rapport et celui de Camus, qui n'a été qu'un prolongement du mien; que si Dumouriez n'a pas été déjà amené pieds et poings liés à la Convention, ce ménagement n'est pas de mon fait. J'ai répondu enfin assez pour satisfaire tout homme de bonne foi...
Plusieurs membres (à Vextrême gauche) : Oui, oui !
et certes, bientôt je tirerai la lumière de ce chaos. Les vérités s'amoncè-leront et se dérouleront devant vous. Je ne suis pas en peine de ma justification.
Mais tout en applaudissant à cette commission que vous venez d'instituer, je dirai qu'il est assez étrange que ceux qui ont fait la réunion, contre Dumouriez ; qui, tout en rendant hommage à ses talents militaires, ont combattu ses opinions politiques, se trouvent être ceux contre lesquels cette commission paraît être principalement dirigée.
Nous, vouloir un roi ! Encore une fois les plus grandes vérités, les plus
grandes probabilités morales restent seules pour les nations.
(Un grand nombre de membres se levant, et indiquant du geste la droite : Oui, oui, ils l'ont voulu !)
Et leurs petits soupers.
Il n'y a que ceux qui ont fait des soupers clandestins avec Dumouriez quand il était à Paris. (Vifs applaudissements sur un grand nombre de bancs.)
Lasource !... Lasource en était... Oh î je dénoncerai tous les traîtres.
Oui, eux seuls sont les complices de la conjuration. (Nombreux applaudissements à l'extrême gauche et dans les tribunes.) Et c'est moi qu'on accuse!... moi!... Je ne crains rien de Dumouriez, ni de tous ceux avec qui j'ai été en relation. Que Dumouriez produise une seule ligne de moi qui puisse donner lieu à l'ombre d'une inculpation, et je livre ma tête.
Il a les lettres de Gensonné..... C'est
qui était en relation intime avec Dumouriez.
Danton, j'interpelle votre bonne foi. Tous avez dit avoir vu la minute de mes lettres, dites ce qu'elles contenaient.
Je ne parle pas textuellement de vos lettres, je n'ai point parlé de vous ; je reviens à ce qui me concerne.
J'ai, moi, quelques lettres de Dumouriez : elles prouveront qu'il a été obligé de me rendre justice ; elles prouveront qu'il n'y avait nulle identité entre son système politique et le mien : c'est à ceux qui ont voulu le fédéralisme.....
Plusieurs membres : Nommez-les !
Je vous somme de les nommer î
, se tournant vers la droite : Vous tous, mais vous avez beau faire, vous ne parviendrez pas à égorger la patrie.
Youlez-vous que je dise quels sont ceux que je désigne ?
Un grand nombre de membres : Oui, oui !
Ecoutez!
, s'adressant de nouveau à la droite : Ecoutez !
Youlez-vous entendre un mot qui paie pour tous ?
Les mêmes membres : Oui, oui !
Eh bien ! je crois qu'il n'est plus de trêve entre la Montagne, entre les patriotes qui ont voulu la mort du tyran et les lâches qui, en voulant le sauver, nous ont calomniés dans la France. (Un grand nombre de membres de l'extrême gauche se lèvent simultané-
ment et applaudissent. — Plusieurs voix se font entendre : Nous sauverons la patrie!)
Eh ! qui pourrait se dispenser de proférer ces vérités, quand, malgré la conduite immobile que j'ai tenue dans cette Assemblée, quand vous représentez ceux qui ont le plus de sang-froid et de courage, comme des ambitieux ; quand tout en semblant me caresser, vous me couvrez de calomnies, quand beaucoup d'hommes qui me rendent justice individuellement, me présentent à la France entière, dans leur correspondance, comme voulant ruiner la liberté de mon pays ! Cent projets absurdes de cette nature ne m'ont-ils pas été successivement prêtés ; mais jamais la calomnie n'a été conséquente dans les systèmes, elle s'est repliée de cent façons sur mon compte, cent fois elle s'est contredite dès le commencement de la Révolution. J'avais fait mon devoir, et vous vous rappelez que je fus alors calomnié ; j'ai été de quelque utilité à mon pays, lorsqu'à la Révolution du 10 août, Dumouriez, lui-même, reconnaissait que j'avais apporté du courage dans le conseil, et que j'avais contribué, par la mesure salutaire de l'envoi defe commissaires dans, toute la République, à sauver la patrie.
Un grand nombre de membres : Oui, oui !
Aujourd'hui les homélies misérables d'un vieillard cauteleux, reconnu tel, ont été le texte de nouvelles inculpations, et puisqu'on veuf des faits, je vais vous en dire sur Roland. Tel est l'excès de son délire, et Garat, lui-même, m'a dit que ce vieillard avait tellement perdu la tête, qu'il ne voyait que la mort ; qu'il croyait tous les citoyens prêts à le frapper ; qu'il dit un jour en parlant de son ancien ami, qu'il avait lui-même porté au ministère : Je ne mourrai que de la main de Pache, depuis qu'il se met à la tête des factieux de Paris (1)... Eh bien! quand Paris périra, il n'y aura plus de République. Paris est le centre constitué et naturel de la France libre. C'est le centre de lumières.
On nous accuse d'être les factieux de Paris ; eh bien, nous avons déroulé notre vie devant la nation, elle a été celle d'hommes qui ont marché d'un pas ferme vers la Révolution. Les projets criminels qu'on m'impute, les épithètes de scélérat, tout a. été prodigué contre nous, et l'on espère maintenant nous effrayer ! Oh non ! (Vifs applaudissements sur la Montagne et dans les tribunes.)
Plusieurs membres demandent que les tribunes soient rappelées au respect qu'elles doivent à l'Assemblée.
On nous accuse d'être du parti des vils scélérats, qui ont précédé ceux
qui les
Plusieurs membres : Les tribunes !
Eh bien oui, les tribunes ; mais les tribunes de Marseille ont aussi applaudi à la Montagne... J'ai vu depuis la Révolution, depuis que le peuple français a des représentants, j'ai vu se répéter les misérables absurdités que je viens d'entendre débiter ici. Je sais que le peuple n'est pas dans les tribunes, qu'il ne s'y en trouve qu'une petite portion, que les Maury, les Cazalès et tous les partisans du despotisme calomniaient aussi les citoyens des tribunes. (Vifs applaudissements.)
Citoyens, il fut un temps où vous vouliez une garde départementaire... (Murmures).
Plusieurs membres : Oui, oui !
On voulait l'opposer aux citoyens égarés par la faction de Paris; eh bien, vous avez reconnu que ces mêmes citoyens des départements, que vous appeliez ici, lorsqu'ils ont été à leur tour placés dans les tribunes, n'ont pas manifesté d'autres sentiments que le peuple de* Paris, peuple instruit, peuple qui juge bien ceux qui le servent (Vifs applaudissements sur un grand nombre de bancs et dans les tribunes); peuple qui se compose de citoyens pris dans tous les départements, peuple exercé aussi à discerner quels sont ceux qui prostituent leurs talents, peuple qui voit bien que qui combat avec la Montagne, ne peut pas servir les projets d'Orléans. (Mêmes applaudissements.) Le projet lâche et stupide qu'on avait conçu d'armer la fureur populaire contre les Jacobins, contre vos commissaires, contre moi, parce que j'avais annoncé que Dumouriez avait des talents militaires, et qu'il avait fait un coup de génie en accélérant l'entreprise de la Hollande : ce projet vient sans doute de ceux qui ont voulu faire massacrer les patriotes; car il n'y a que les patriotes qu'on égorge.
Un grand nombre de membres : Oui, oui !
Lepeletier et Léonard Bourdon.
Eh bien, leurs projets seront toujours déçus, le peuple ne s'y méprendra pas. J'attends tranquillement et impassiblement le résultat de cette commission. Je me suis justifié de l'inculpation de n'avoir pas parlé de Dumouriez. J'ai prouvé que j'avais le projet d'envoyer dans la Belgique une commission composée de tous les partis pour se saisir, soit de l'esprit, soit de la personne de Dumouriez.
Oui, c'était bon, envoyez-y Lasource.
J'ai prouvé, puisqu'on me demande des preuves pour répondre à de simples aperçus de Lasource, que si je suis resté à Paris, ce n'a été en contravention à aucun de vos décrets. J'ai prouvé qu'il est absurde de dire que le séjour prolongé de Delacroix dans la Belgique, était concerté avec ma présence ici, puisque l'un et l'autre nous avons suivi les ordres de la totalité de la commission; que si la commission est coupable, il faut s'adresser à elle et la juger sur des pièces après l'avoir
entendue; mais qu'il n'y a aucune inculpation individuelle à faire contre moi. J'ai prouvé qu'il était lâche et absurde de dire que moi, Danton, j'ai reçu i00,000 écus pour travailler la Belgique. N'est-ce pas Dumouriez qui comme Lasource nraccuse d'avoir opéré à coups de sabre la réunion ? Ce n'est pas moi qui ai dirigé les dépenses qu'a entraînées l'exécution du décret du 15 décembre. Ces dépenses ont été nécessitées pour déjouer les prêtres fanatiques qui salariaient le peuple malheureux; ce n'est pas à moi qu'il faut en demander compte, c'est à Lebrun.
Ces 100,000 écus sont tout simplement les dépenses indispensablernent nécessaires pour l'exécution du décret du 15 décembre.
Je prouverai subséquemment que je suis un révolutionnaire immuable, que je résisterai à toutes les atteintes, et je vous prie, citoyens (se tournant vers les membres de l'extrême gauche), d'en accepter l'augure. J'aurai la satisfaction de voir la nation entière se lever en masse pour combattre les ennemis extérieurs ,et en même temps pour adhérer aux .mesures que vous avez décrétées sur mes propositions.
A-t-on pu croire un instant; a-t-on eu la stupidité de croire que moi je me sois coalisé avec Dumouriez ? Contre qui Dumouriez s'élève-t-il ? Contre le tribunal révolutionnaire; c'est moi qui ai provoqué rétablissement de ce tribunal. Dumouriez veut dissoudre la Convention; quand on a proposé dans le même objet la convocation des assemblées primaires, ne m'y suis-je pas oposé? Si j'avais été d'accord avec Dumouriez, aurais-je combattu ses projets de finances sur la Belgique? Aurais-je déjoué son projet de rétablissement des trois Etats? (1) Toute la Belgique, les expatriés, ceux qui ont suivi l'étendard de la liberté, les citoyens de Mons, de Liège, de Bruxelles, diront si je n'ai pas été redoutable aux aristocrates, autant exécré par eux qu'ils méritent dé l'être; ils vous diront qui servait les projets de Dumouriez, de moi ou de ceux qui le vantaient daris les papiers publics, ou ceux qui exagéraient les troubles de Paris, et publiaient que des massacres avaient eu lieu dans la rue des Lombards.
Tous les ciîoyéns vous diront : quel fut son crime ? C'est d'avoir
défendu Paris.
Qu'on cesse donc de reproduire des fantômes et des chimères, qui ne résisteront pas à la lumière et aux explications.
Je demande que la commission se mette sur-le-champ en activité, qu'elle examine la conduite de chaque députe depuis l'ouverture de la Convention. Je demande qu'elle ait caractère surtout pour examiner la conduite de ceux qui, postérieurement au décret pour l'indivisibilité de la République, ont manœuvré pour la détruire. De ceux qui, après la réjee-tion de leur système pour l'appel au peuple, nous ont calomniés; et si, ce que je crois, il y a ici une majorité vraiment républicaine, elle en fera justice. J e demande qu'elle examine la conduite de ceux qui ont empoisonné l'opinion publique dans tous les départements, on verra, ce qu'on doit penser de ces hommes qui ont été assez audacieux pour notifier, à unë administration qu'elle devait arrêter des commissaires de la Convention, de ces hommes qui ont voulu constituer des citoyens, des administrateurs, juges des députés que vous avez envoyés dans-les départements pour y réchauffer l'esprit public et y accélérer le recrutement. On verra quels sont ceux qui, après avoir été assez audacieux pour transiger avec la royauté, après avoir désespéré, comme ils en sont convenus, de l'énergie populaire, ont voulu sauyer les débris de la royauté; car, on ne peut trop le répéter, ceux qui ont voulu sauver l'individu, ont par là même eu intention de donner de grandes espérances au royalisme. (Applaudissements sur un grand nombre de bancs.)
Tout s'éclaircira; alors on ne sera plus dupe de ce raisonnement, par lequel on a cherché à insinuer qu'on n'a voulu détruire un trône que pour en rétablir un autre. Quiconque auprès des rois est convaincu d'avoir voulu frapper un d'eux, est pour tous un ennemi mortel.
Un membre : Vous ressemblez à Cromwell. (Murmures sur la Montagne.)
, se tournant vers l'interlocuteur. Yous êtes bien scélérat de me dire que je ressemble à Cromwell. Je vous cite devant la nation.
Un grand nombre de membres se lèvent simultanément pour demander que l'interrupteur soit censuré.
Plusieurs membres demandent même qu'il soit envoyé à l'Abbaye.
Oui, je demande que le vil scélérat qui a eu l'impudeur de dire que je suis Un Cromwell soit puni, qu'il soit traduit à l'Ab-baye. {On applaudit.) Et si en dédaignant d'insister sur la justice que j'ai le droit de réclamer, si je poursuis mon raisonnement, je dis que quand j'ai posé en principe que quiconque a frappé un roi à la tête, devient l'objet de l'exécration de tous les rois : j'ai établi une vérité qui ne pourrait être contestée.
Plusieurs membres : C'est vrai.
Eh bien ! croyez-vous que ce Cromwell dont vous me parlez ait été l'ami des rois 1
Un membre : Il a été roi lui-même.
Il a été craint, parce qu'il a été le plus fort. Ici ceux qui ont frappé le tyran de la France seront craints aussi. Ils seront d'autant plus craints que la liberté s'est engraissée du sang du tyran. Ils seront craints, parce que la nation est avec eux. Cromwell n'a été souffert par les rois, que parce qu'il a travaillé avee eux. Eh bien, je vous interpelle tous (se tournant ver s les membres de l'extrême gauche), est-ce la terreur, est-ce l'envie d'avoir un roi qui vous a fait proscrire le tyran 1 (L'Assemblée presque unanime : Non, non!) Si donc ce n'est que le sentiment profond de vos devoirs qui a dicté son arrêt de mort, si vous avez cru sauver le peuple et faire en cela ce que la nation avait droit d'attendre de ses mandataires, ralliez-vous (s'adressant de nouveau à la Montagne ), vous qui avez prononcé l'arrêt du tyran, contre les lâches (indiquant du geste les membres de la droite), qui-ont voulu l'épargner (applaudissements); serrez-vous; appelez le peuple à se réunir en armes contre l'ennemi du dehors, et écraser celui du dedans, et confondez par la vigueur et l'immobilité de votre caractère tous les scélérats, tous les aristocrates, tous les modérés, (l'orateur s'adressant toujours à l'extrême gauche, et indiquant quelquefois du geste les membres du côté droit) tous ceux qui vous ont calomniés dans les départements. Plus de composition avec eux. ( Vifs applaudissements d'une grande partie de l'Assemblée et des tribunes.) Reconnaissez-le tous, vous qui n'avez jamais su tirer de votre situation politique dans la nation, le parti que vous auriez pu en tirer; qu'enfin justice vous soit rendue. Yous voyez, par la situation où je me trouve en ce moment, la nécessité où vous êtes d'être fermes, et de déclarer la guerre à tous vos ennemis quels qu'ils soient. (Mêmes applaudissements.) Il faut former une phalange indomptable. Ce n'est pas vous, puisque vous aimez les sociétés populaires et le peuple; ce n'est pas vous qui voudrez un roi. (Les ap-plaudisements recommencent. — Non, non! s'écrie-t-on avec force dans la grande majorité de l'Assemblée.) C'est à vous à en ôter l'idée à ceux qui ont machiné pour conserver l'ancien tyran. Je marche à la République; marchons-y de concert, nous verrons qui, dè nous ou de nos détracteurs, atteindra le but. (Nouveaux applaudissements. )
Après avoir démontré que loin d'avoir été jamais d'accord avee Dumouriez, il nous ac-
cuse textuellement d'avoir fait la réunion à coups de sabre, qu'il a dit publiquement qu'il nous ferait arrêter; qu'il nous était impossible à Delacroix et à moi, qui ne sommes pas la commission de l'arracher à son armée; après avoir répondu à tout; après avoir rempli cette tâche de manière à satisfaire tout homme sensé et de bonne foi, je demande que la commission des six que vous venez d'instituer, examine non seulement la conduite de ceux qui vous ont calomniés, qui ont machiné contre l'indivisibilité de la République; mais de ceux encore qui ont cherché à sauver le tyran (Nouveaux applaudissements de l'extrême gauche et des tribunes); enfin, de tous les coupables qui ont voulu ruiner la liberté, et l'on verra si je redoute les accusateurs.
Je me suis retranché dans la citadelle de la raison; j'en sortirai avec le canon de la vérité, et je pulvériserai les scélérats qui ont voulu m'accuser (1).
(Danton descend de la tribune au miheu des plus vifs applaudissements d'une très grande partie de l'Assemblée et des citoyens. — Plusieurs membres de Vextrémité gauche sè précipitent vers lui pour Vembrasser. — Les applaudissements se prolongent.)
(1). Je demande la parole pour un fait personnel. Birotteau m'a accusé d'avoir, en plein comité de défense générale, demandé un roi, de manière que c'est Birotteau qui est le républicain et moi le royaliste. Yoici le fait : J'étais au comité de défense nationale ; douloureusement affecté de voir qu'on y proposait sans cesse des mesures partielles, que des incidents écartaient sans cesse, je déclarai franchement que si notre gouvernement n'allait pas, c'est qu'il n'avait ni force, ni sûreté, ni ensemble et que si on ne lui donnait pas plus de cohérence, le premier bedeau qui s'entendrait avec lui, gouvernerait mieux que nous. Yoilà ce que j'ai dit.
Plusieurs membres : L'ordre du jour !
(La Convention passe à l'ordre du jour.)
, au nom du comité de sûreté générale, fait un rapport (2) et présente un projet de décret relatif à la surveillance à exercer par la municipalité de Paris sur les officiers et soldats qui se trouvent dans la capitale sans motifs valables; il s'exprime ainsi :
Citoyens, votre comité de sûreté générale toujours appliqué à maintenir la tranquillité publique, m'a chargé de vous prévenir que depuis quarante-huit heures, il reçoit de beaucoup ae municipalités et particulièrement de celles de Lille la nouvelle que le crime de désertion se multiplie et que les déserteurs affluent sur Paris.
Voici les dépositions qui ont été faites ce' matin :
Le citoyen Boujon, commandant de la cavalerie légère du Calvados, se rendait à l'armée de Dumouriez et passait par Tournay. Il entendit dire à un aide de camp que la Convention nationale était composée d'hommes du 2 septembre; que ces scélérats avaient fait périr le roi; que le pillage de la Belgique s'était fait en leur nom et qu'il nous fallait un roi. Boujon, indigné, mit la main sur son sabre, et demanda raison de ses propos insolents. L'aide de camp, déclarant alors qu'il se nommait Baptiste, répondit qu'il ne craignait pas de se battre; mais on sépara Baptiste et Baujon.
Yoici un autre fait :
Une fille d'auberge, à Orchies, instruisit Boujon qu'elle avait reconnu quatre officiers de houlands déguisés en gardes nationales et qui allaient à Lille.
On fait craindre qu'il ne s'introduise ainsi beaucoup d'ennemis dans nos places fortes au moment où elles sont menacées, et la municipalité de Paris a envoyé une délégation à votre comité pour lui' demander de continuer la surveillance des barrières.
Votre comité s'est déclaré du même avis : il a décidé qu'une force suffisante serait placée aux barrières et qu'on y arrêterait tous les citoyens, quels qu'ils soient, qui s'y présenteraient, les bons pour donner des éclaircissements, les scélérats et les lâches pour les punir.
Voici, du reste, le projet de décret :
( La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité
de sûreté générale, décrète ce qui suit : er.
« La municipalité de Paris est autorisée à continuer, jusqu'à nouvel ordre, la surveillance qu'elle exerce en ce moment aux barrières de la ville de Paris, et à y placer force suffisante pour viser les passeports, et arrêter les déserteurs et autres gens suspects.
Art. 2.
« Tout officier ou soldat sans cartouche ou sans congé valable, tout citoyen qui ne serait pas muni de sa carte civique, sera conduit à la section dont il se réclamera; et, dans le cas où il n'en désignerait pas, à une des sections les plus voisines.
Art. 3.
« Les comités de surveillance des sections examineront les certificats, billets d'hôpitaux, passeports, cartouches, congés ou autres pièces qui seront représentés; dans le cas où lesdites pièces paraîtraient suspectes et non valables, le prévenu sera retenu en état d'arrestation, jusqu'à ce que, sur le compte qui sera rendu par le comité des sections à la municipalité, il ait été statué par le corps municipal sur la validité des pièces représentées, et sur la légitimité des motifs pour lesquels le prévenu aurait quitté l'armée.
Art. 4.
« Le corps municipal appellera, si besoin est, un ou plusieurs commissaires des guerres, pour être entendus avant de donner sa décision sur les prévenus.
Art. 5.
( Le corps municipal est autorisé à faire conduire dans les casernes qui seront à cet effet destinées par le ministre de la guerre, ceux qui ne justifieront pas avoir des causes légitimes pour avoir quitté l'armée, ou qui ne représenteront pas des certficats, congés, passeports, tous valables.
Art. 6.
« L'état nominatif des prévenus de désertion qui ont été déjà arrêtés ou conduits dans des maisons d'arrêt^,, sera remis à la municipalité qui statuera à leur égard.
Art. 7.
« La municipalité informera le ministre de la guerre du' résultat de ses opérations, et lui fera remettre les états nominatifs des soldats et officiers qui n'auront pas justifié de cause légitime de leur absence de l'armée, et de ceux dont le renvoi à l'armée est nécessaire.
Art. 8.
« La Convention charge son comité de la guerre de lui présenter, sans délai, un projet de décret qui déterminera le mode d'application aux prévenus de désertion, de la loi rendue contre les soldats des ci-aevant troupes de ligne qui ont abandonné leurs drapeaux ».
(La Convention adopte ce projet de décret (1)).
(2). Je demande que Baptiste, à qui vous avez donné de si grandes preuves de reconnaissance et qui a manifesté des sentiments si .contre-révolutionnaires, soit mis en état d'arrestation et traduit à la barre.
(La Convention nationale décrète que le citoyen Baptiste aide de camp de Dumouriez, sera mis en état d'arrestation, et traduit à la barre). (3).
(4) J'observe à la Convention qu'il y I a à Paris 19 hussards de la République, dont Dumouriez a cassé le régiment; 17 de ces patriotes sont à l'Abbaye, 2 sont à la porte de la barre qui demandent d'être admis. Ce sont les citoyens Delamardelle et Ginestet; je demande qu'ils soient entendus.
(La Convention décrète leur admission immédiate).
Ils sont aussitôt introduits et le citoyen Delamardelle donne lecture de la pétition suivante (5) :
« Le
« Citoyens législateurs,
« Nous sommes hussards de la République, et nous venons vous demander justice de l'acte le plus despotique et le plus criminel qu'on puisse commettre dans un gouvernement libre.
« La loi de notre création nous accorde le droit de nommer nos chefs et
vos dernières lois sur l'organisation de l'armée confirment cette
première loi qui nous a servi de base. Nous avons exercé le droit que
vous nous avez accordé et c'est pour avoir obéi à la loi que. le général
Dumouriez nous a cassés. Il a voulu nous donner pour colonel le citoyen
Morgan, son aide de camp. Pour valider son choix, il nous a fait venir à
la citadelle d'Anvers et devant des pièces de canon, la mèche allumée,
il a voulu nous forcer à contracter des engagements à prix d'argent. Le
colonel Morgan autorisé, sans doute, par Dumouriez, a fait mettre trois
de nos officiers dans les cachots de la citadelle et parmi ces officiers
se trouve notre lieutenant-colonel,commandant que nous avons nommé. Deux
jours après, nous avons été cassés, et le général Marassé, exécuteur des
ordres de Dumouriez, nous a renvoyés sans nous accorder de frais de
route et sans faire dresser procès-verbal des effets du régiment que
nous avons remis. Etait-ce afin de pouvoir ensuite nous calomnier ? Nous
venons ici vous demander de nous conserver l'honneur qu'on a voulu nous
enlever, d'ordonner provisoirement l'élargissement de 19 de nos
camarades qui ont été conduits à l'Abbaye aussitôt leur entrée dans la
capitale, et
Signé : « Delamardelle ; Ginestet. »
répond aux pétitionnaires et leur accorde les honneurs de la séance.
Un membre (1) propose l'élargissement des 19 hussards détenus à l'Abbaye, de charger le ministre de la guerre de leur faire fournir leur paie provisoire, enfin de renvoyer leur pétition au comité de la guerre pour en faire un prompt rapport.
(La Convention adopte ces différentes propositions.)
Suit le texte définitif du décret rendu (2) : « La Convention nationale, après avoir entendu la pétition des deux citoyens faisant partie du régiment des hussards dits de la Liberté, et sur la motion d'un de ses membres, décrète le renvoi de leur pétition au comité de la guerre, pour en faire un prompt rapport; ordonne l'élargissement et sortie de la prison de l'Abbaye de dix-sept de leurs camarades qui sont détenus, et charge le ministre de la guerre de leur faire fournir leur paie provisoire ».
(3). Je demande que les officiers nommés par Dumouriez depuis la campagne de l'Argonne soient cassés et désarmés.
(La Convention renvoie cette proposition au comité de la guerre.)
au nom des comités d'instruction publique et de la guerre réunis, fait un rapport (4) et présente un projet de décret sur le procédé présenté par le citoyen Ghappe pour correspondre rapidement à de grandes distances; il s'exprime ainsi :
Citoyens, dans tous les temps on a senti la nécessité d'un moyen rapide
et sûr de correspondre à de grandes distances. C'est surtout dans les
guerres de terre et de mer qu'il importe de faire connaître rapidement
les événements nombreux qui se succèdent, de transmettre des ordres,
d'annoncer des secours à une ville, à un corps de troupes qui serait
investi, etc. L'histoire renferme le souvenir de plusieurs procédés
conçus dans ces vues, mais
Deux procès-verbaux de deux municipalités de la Sarthe attestent le succès de ce procédé dans un essai que l'auteur en a fait, et permettent à l'auteur d'avancer avec quelque assurance, qu'avec son procédé, la dépêche qui apporta la nouvelle de la prise de Bruxelles aurait pu être transmise a la Convention et traduite dans 25 minutes. Vos comités pensent cependant qu'avant de l'adopter définitivement, il convient d'en faire un essai plus aur thentique sous les yeux de ceux qui, par la nature de leurs fonctions, seraient le plus dans le cas d'en faire usage, et sur une ligne assez étendue pour prendre quelque confiance dans les résultats.
Voici le projet de décret que je suis chargé de vous présenter :
« La Convention nationale, après avoir en- ' tendu les comités réunis d'instruction publique et de la guerre, sur un procédé présenté par le citoyen Chappe, pour correspondre rapidement à de grandes distances, décrète que le conseil exécutif provisoire est autorisé à faire un essai de ce procédé, en prenant une ligne de correspondance assez longue pour obtenir des résultats concluants. Le comité d'instruction publique nommera deux de ses membres pour en suivre les opérations. Pour les frais de cet essai, il sera pris une somme de 6-,000 livres sur les fonds libre de la guerre. » (La Convention adopte ce projet de décret (1)).
Une députation des douze sections de la commune de Strasbourg est admise à la barre.
L'orateur de la dêputation donne lecture de l'adresse suivante (1) :
« Citoyens législateurs,
« Nous somme© chargés, comme députés de la commune dô Strasbourg, de vous
apporter
« La consternation et la terreur régnaient au milieu de nous, frappés successivement par les actes arbitraires de vos commissaires Couturier et Dentzel, dépouillés des droits que la souveraineté du peuple nous assure, nous avons la douleur de voir nos meilleurs citoyens, des hommes qui ont servi utilement la chose publique, chassés de leurs foyers ; nous n'osions plus nous croire ni citoyens, ni libres; mais votre décret du 17 mars, en déclarant la déportation de nos concitoyens nulle, nous a rendu l'espoir et le courage.
« Législateurs, il faut dévoiler la source de nos malheurs; ce sont des étrangers, venus au milieu de nous depuis dix-huit mois seulement, qui y ont introduit la discorde. Un journaliste insolent, connu par la témérité de ses calomnies, ci-devant stipendié des princes de l'Allemagne, est un des principaux auteurs de nos maux; un prêtre venu de l'électorat de Cologne, à peu près à la même époque, est son digne associé ; tels sont les hommes, qui, avec une poignée d'esprits turbulents et jaloux, jusqu'à présent inconnus à la Révolution, ont usurpé l'honorable titre de patriotes; ce sont ces mêmes hommes qui ont voulu ravir à Custine la confiance dont il est environné, et qui ont proposé des adresses pour faire replier son armée.
(c Nous avons vu avec une profonde douleur vos commissaires Couturier et Dentzel, s'environner de ce ramas d'agitateurs et écarter d'eux, tous ceux qui avaient des droits à • la reconnaissance publique ; que de maux ne nous ont-ils pas causés! Législateurs, la République est environnée d'ennemis ; il faut les combattre, vaincre ou mourir ; mais pour vaincre en hommes libres, il faut l'être, et nous osons dire, que nous ne le sommes pas, puisque nous sommes privés de tous droits.
« On a suspendu plusieurs membres de notre municipalité, on les a même déclarés inéligibles; nous ignorons quels sont leurs délits : depuis longtemps, avec nous tous, ils ont adhéré à tous vos décrets, à tous ceux de l'Assemblée législative, mais par une perfidie qui (peint noa misérables agitateurs, l'un d'eux s'est fait remettre trois cents livres pour apporter une adresse d'adhésion à la suspension du ci-devant roi, et cette adresse a été supprimée. Cependant ce prétexte a servi à leur suspension, et ils ont été remplacés, par qui 1 Le maire, par un jeune homme de 24 ans; les municipaux, contrairement au vœu de la loi, par des "citoyens pris hors du conseil de la commune. La municipalité de Strasbourg, l'accusateur public, la majorité des membres du département, ne sont que du choix de vos commissaires Couturier et Denizel; et de toutes parts, vous le savez, législateurs, des réclamations s'élèvent contre ces députés. Les hommes intrus qu'ils ont placés dans les corps administratifs, insultant à une commune de cinquante mille âmes, osent lâcher des adresses au nom du département, pour faire rapporter votre décret du 17 mars.
« Un administrateur du département ose même quiter son poste et se rendre ici l'organe des détracteurs de nos compatriotes déportés; nous ne doutons pas, législateurs, que vous ne rappeliez cet administrateur à ses devoirs.
« Nous espérons en même temps, que pour rétablir le calme dans une commune, dont tous les habitants se sacrifieraient pour l'exécution de vos décrets, vous lui rendrez tous ses droits, et en annulant toutes les suspensions prononcées par les commissaires Couturier etDent-zel, le département du Bas-Rhin, et la commune de Strasbourg, recouvreront la paix intérieure et l'énergie nécessaire à des hommes libres pour combattre. Il n'est pas un Stras-bourgeois qui ne soit prêt à faire un rempart _ de son corps, plutôt que de céder un pied du territoire de la République à nos ennemis, Germains, émigrés, rebelles; nous jurons de les exterminer tous et de maintenir vos décrets au péril de nos vies et de nos fortunes; tels sont les sentiments gravés dans les cœurs de Français de Strasbourg, que nous avons été chargés de vous exprimer en leur nom.
« Législateurs ! l'intérêt de la République appelle votre attention sur ce ramas d'étrangers et de patriotes nouveaux qui veulent expulser de leurs foyers les meilleurs citoyens; nous croyons que c'est là un des plus imminents dangers qui menacent le vaisseau de l'Etat, car sans la fidélité du peuple de Strasbourg, les excès de ces hommes nouveaux auraient déjà causé une explosion funeste à la chose publique, dont votre sagesse et votre fermeté sauront nous préserver.
« Nous déposons sur l'autel de la patrie la contribution patriotique de la garde nationale de Strasbourg, pour la guerre maritime.
« Les députés des sections de Strasbourg. Sirjné : Philippe Liebich, Pelletier, Jean Marchal, Cordonnier, Jean-Jacques Latjth, homme de loi. »
répond aux pétitionnaires et leur accorde les honneurs de la séance.
(1) Couturier, l'un des commissaires envoyés à Strasbourg, a donné à son fils la place d'un commissaire des guerres qu'il avait destitué. Je demande que cette nomination soit annulée, ainsi que celle du citoyen Bourgas, et que les citoyens suspendus par les commissaires Couturier et Dentzel, reprennent à l'instant leurs fonctions, sauf à faire droit sur les dénonciations faites contre eux.
(La Convention décrète cette proposition.)
(2). Et moi je propose que les commissaires envoyés par la Convention dans les départements, qui croiront nécessaire de destituer ou suspendre les administrateurs quelconques qui leur seront dénoncés, ne puissent les remplacer provisoirement que par des citoyens munis d'un certificat donné par le conseil général de la commune du lieu de son domicile et visé par le directoire du district et celui du département, qui atteste que, depuis 1789, ce citoyen n'a cessé de donner les preuves d'un civisme pur et soutenu.
(La Convention adopte cette nouvelle proposition.)
Suit le texte définitif du décret rendu (2) :
« Sur la motion d'un de ses membres, la Convention décrète que les
commissaires en-
(1). L'ordre du jour appelle la nomination des six commissaires chargés cVanalyser les projets de Constitution envoyés par les départements.
Il y a beaucoup de membres de la Convention qui sont absents parce qu'ils ont passé la nuit dans les comités. Je demande que la nomination des commissaires pour faire l'analyse des plans de Constitution envoyés par les départements, soit remise à demain.
(Morbihan) s'y oppose.
Lorsque le feu de la sédition est allumé dans plusieurs parties de la République ; lorsque les ennemis extérieurs vous pressent, lorsqu'ils s'agjt d'étouffer la guerre civile et d'arrêter l'ennemi, nous n'avons besoin que de lois révolutionnaires. Je m'oppose à toute discussion sur la Constitution.
Plusieurs membres : Il ne s'agit pas de discuter la Constitution, mais de charger six membres d'en analyser les différents projets.
Eh bien, attendons le retour des commissaires patriotes. Au reste, nous devons avant tout déchirer le voile qui couvre encore les trahisons de Dumouriez. Examinons la conduite des membres de la Convention, des généraux, des ministres, qui nous sont dénoncés de toutes parts. Frappons les traîtres quelque part qu'il se trouvent.
J'appuie la proposition faite par le citoyen Marat Dans un moment où la liberté est menacée de tout côté, toute espèce d'inviolabilité cesse ; le peuple ne doit pas laisser sa confiance à un député contre lequel sont portées de nombreuses accusations. Je demande que la Convention porte le décret d'accusation contre celui de ses membres sur la tête duquel flotteront de violents soupçons.
(La Convention adopte la proposition de Birotteau.)
Suit le texte définitif du décret rendu (3) :
, secrétaire, donne lecture d'une lettre (1) du citoyen François-Alexandre Lelièvre, commandant de la gendarmerie des approvisionnements des corps et armées de la République et de la ville de Paris, qui demande que les brevets qui sont dus aux officiers de son corps, soient délivrés sur-le-champ par le ministre de la guerre.
(La Convention renvoie la lettre au conseil exécutif pour la délivrance des brevets.)
(Marne), au nom du comité d'aliénation, fait un rapport et présente un projet de décret sur la vente en détail des châteaux, parcs, enclos, palais épiscopaux et autres grandes propriétés nationales, situées dans les campagnes et dans les villes (2) ; li s'exprime ainsi :
Trois années d'expérience ont prouvé l'avantage immense qu'aurait pu procurer aux finances, la vente en détail de certaines propriétés nationales, trop au-dessus par leur valeur réelle de la fortune et des moyens du grand nombre des citoyens ; telles étaient et sont encore les grandes abbayes, les châteaux ci-devant royaux, les palais épiscopaux, etc : beaucoup de ces vastes édifices sont restés invendus ; d'autres l'ont été au-dessous de leur juste prix ; quelques-uns, portés à un taux avantageux, mais supérieur aux ressources des acquéreurs, rentrent dans la masse des biens nationaux, pour être revendus à la folle enchère, d'où résulte, ou la ruine de l'acquéreur, ou une perte pour le Trésor public. La nation eût évité ces pertes ; elle eût même profité des bénéfices considérables que se sont procurés quelques acquéreurs plus industrieux ou plus favorisés par les circonstances, si l'on s'était déterminé à faire quelques modique® dépenses préliminaires, et à s'écarter en quelques points des règles d'administration simples, mais souvent trop sévères, que la crainte des abus a fait adopter.
Quelque solides que soient les motifs qui ont déterminé sur ce point les
Assemblées constituante et législative, ils doivent céder à la
nécessité, et s'il est vrai, comme personne n'en peut douter, qu'en
restant strictement attaché aux lois précédemment rendues, beaucoup de
grandes propriétés ne seraient point vendues, ou le seraient à vil prix,
il faut nécessairement les modifier et se rapprocher de l'administration
économique du père de famille, qui ne craint pas de hasarder quelques
avances, de
La loi du 17 mai 1790 (1) autorise les districts à ouvrir les enchères sur l'ensemble et sur les parties d'un même bien ; celle du 25 juillet (2) leur recommande de diviser les objets autant que leur nature le permettra, afin de faciliter les petites soumissions et l'accroissement du nombre des acquéreurs. L'instruction de l'Assemblée nationale du 3 juillet 1791, indique aux administrations, comme base principale des procédés qu'elles ont à suivre, le plus grand intérêt de la nation. Ces dispositions ont suffi pour déterminer quelques administrations animées d'un zèle, plus actif à opérer les divisions qu'elles indiquaient : mais comme elles contenaient moins un devoir a remplir, qu'une simple invitation, le plus grand nombre des administrateurs l'a négligée; elles devaient même regarder, comme entièrement impossible, de s'y conformer dans une multitude de circonstances. En effet, les divisions raisonnées qu'il eût été utile d'admettre pour l'espèce de propriétés dont il s'agit, exigeaient des mesurages, des plans qui ne pouvaient être faits que par des gens de l'art, qui, par conséquent, entraînaient des dépenses. Elles nécessitaient le sacrifice de quelques portions du terrain pour ouvrir des chemins, des rues nouvelles, souvent même l'acquisition de quelques propriétés particulières qui, environnant les propriétés nationales, masquant les grands édifices ou enclos situés dans la ville, ne permettaient pas de les diviser, de manière à en porter la vente au taux le plus avantageux. La loi se tait sur ces différents points, et l'administration livrée à l'incertitude d'une invitation vague, reste dans l'inaction ; ou si elle vend en masse les grandes propriétés, elle les livre à l'avidité de l'homme riche, presque toujours assuré d'écarter la concurrence, et *>ar conséquent d'obtenir à un prix inférieur, l'objet qu'il se propose d'acquérir.
Puisque l'intérêt pécuniaire de la République, puisque son intérêt
politique et moral s'accordent pour solliciter la division des grands
édifices nationaux qui sont à vendre, il est indispensable d'adopter de
nouvelles règles qui, en prévenant tous les abus, puissent porter le
prix de ces immeubles au taux le plus avantageux. Pour y parvenir, votre
comité a pensé qu'il était convenable : 1° d'ouvrir les enchères sur ces
immeubles en masse, sans assujettir l'acquéreur à aucun plan de
division, en se bornant à désigner les changements ou réserves que
l'intérêt public pourrait exiger ; le motif de cette disposition est
qu'il peut arriver que des manufacturiers, des commerçants auraient
intérêt de conserver ces édifices, ces enclos, sans les diviser, et que
leurs spéculations rendraient ces ventes plus profitables aux finances
de la République; 2° d'ouvrir dans la même séance les enchères sur
l'ensemble du domaine, à la charge, par l'adjudicataire d'exécuter le
plan de division arrêté, et de faire à ses frais tous les travaux qu'il
exige; 3° de les ouvrir ensuite sur chacun des lots désignés dans le
plan de division, en ne mettant à la charge de l'adjudicataire que les
travaux qu'il peut aisément exécuter sur son
Le principal obstacle qui s'est opposé jusqu'à présent à ce mode de vente des grands édifices, parcs et enclos appartenant à la nation, se trouve dans les acquisitions de terrains et dans les dépenses préliminaires qu'il exige. En effet l'expérience n'a que trop prouvé que les travaux exécutés aux frais de l'Etat sont toujours plus chers et plus imparfaits. On a même pu craindre l'effet de la corruption, de la faveur, de l'intérêt personnel, de cet attachement de préférence, si naturel sous l'ancien régime, et dont les républicains même auront toujours quelque peine à se défendre, pour la commune, le district, le département que l'on habite ; mais l'intervention du corps législatif, exia-ée par le projet de décret, fait disparaître cette crainte :^elle doit surtout céder a la loi impérieuse de la nécessité, puisqu'il est vrai de dire que la majeure partie des grandes propriétés nationales dont nous nous occuoons aujourd'hui, resteraient invendues ou le seraient à vil prix (1), si l'on persistait à vouloir les vendre en masse, et sans faire les dépenses préliminaires que peut exiger leur vente par portions.
Il serait superflu d'entrer dans de nouvelles explications sur les
différentes dispositions du
PROJET DE DÉCRET (1).
Art. 1er. Les châteaux ci-devant royaux, qui
ne seront pas réservés pour cause d'utilité publique, les palais
épiscopaux, les bâtiments, cours et jardins des abbayes, monastères ou
congrégations supprimées, les grands empla' cements nationaux situés
dans les villes, et
Art. 2. Les directoires de districts, et à Paris le directoire du- département, feront lever par des experts, dans le délai de deux mois, à compter du jour de la publication du présent décret, les plans visuels de tous ceux des susdits biens cpi sont situés dans leurs arrondissements respectifs ; et après avoir ouï là municipalité du lieu dont les dires et réquisitions seront joints aux pièces, ils feront tracer les divisions dont ils seront jugés susceptibles relativement à leur nature, aux localités, à l'utilité publique, et surtout au plus grand avantage de la vente ; ils feront en même temps dresser par les experts des procès-verbaux d'estimation, tant desdits biens en masse, que de chacun des lots résultant de la division.
Art. 3. Pour faciliter l'exécution de l'article précédent, lesdits directoires sont autorisés à retirer, sous récépissé, des bureaux du contrôle des bâtiments du ci-devant roi, du garde-meuble et de tous autres dépôts, les plans des châteaux, parcs, jardins, conduite des eaux, ainsi que les plans détaillés qui ont pu être levés de la ville de Paris. Tous dépositaires desdits plans seront tenus de les livrer, et invités à donner les renseignements qui sont à leur connaissance (1).
Art. 4. Si l'exécution du projet de division doit donner lieu à des démolitions, déblais et autres changements quelconques, les experts auront soin d'en donner les détails et l'évaluation dans leurs procès-verbaux.
Art. 5. Les directoires de districts fourniront leurs observations sur ces plans et procès-verbaux, ' et les adresseront aux départements, qui les examineront, proposeront les changements qu'ils jugeront convenables, et enverront le tout à l'administrateur des biens nationaux, qui demeure chargé d'arrêter définitivement les projets de division, hors les cas prévus ci-après dans les articles 6, 12, et 17, et d'en suivre l'exécution.
Art. 6. Dans le cas où ledit administrateur jugerait les plans et projets de division susceptibles de changements considérables pour l'amélioration du produit des biens divisés, il les indiquera aux départements, ceux-ci aux districts ; et après avoir recueilli les nouvelles observations des corps administratifs, il fera passer, toutes les pièces à la Convention nationale, qui statuera sur l'adoption de l'un ou de l'autre projet de division.
ouvrir les enchères sur le corps entier du fonds à ven" dre; et comme ce
changement entraînait différentes modifications dans les articles du
projet de décret, il a cru devoir le faire réimprimer avec ces
changements, persuadé que cette mesure ne pouvait qu'abréger la
discussion et économiser les moments de la Convention nationale. (Note
du rapporteur.)
Art. 10. Les travaux qui, par l'effet de la vente du bien par lots séparés, devront être exécutés aux frais de la nation, seront adjugés au rabais par le directoire, dans le plus court délai possible, après avoir rempli néanmoins toutes les formalités ordinaires en pareil cas.
Art. 11. Les frais auxquels donneront lieu, tant les plans et procès-verbaux de division et estimation, que les travaux qui ne pourront être exécutés par l'adjudicataire de chaque lot, séparé, seront au compte de la nation, payés par la trésorerie nationale, après que les formalif-és prescrites par la seconde section du titre S de la loi du 16 octobre 1791, auront été remplies.
Art. 12. Dans le cas où, pour faciliter la division d'un bien national, et pour donner une valeur beaucoup plus considérable à ses parties, il serait jugé nécessaire de faire, au nom de la nation, l'acquisition de maisons, jardins, ou autres terrains appartenant à des particuliers, cette acquisition ne pourra avoir lieu qu'en vertu d'un décret de la Convention nationale ; et à cet effet* l'administrateur des biens nationaux lui enverra toutes les pièces propres à constater les avantages du projet de division, dont l'exécution devra donner lieu à l'acquisition proposée.
Art. 13. Lorsque la Convention aura décrété l'acquisition, au nom de la nation, desdites maisons, jardins ou autres terrains, l'évalua-
Art. 8. Lorsque l'Administration des biens nationaux aura autorisé, ou la Convention nationale décrété l'exécution du projet de division d'un bien national, comme il est dit dans les articles 3, 5 et 6, le directoire annoncera, par trois affiches apposées de quinzaine en quinzaine, les premières et secondes séances d'enchères pour la vente de ce bien, et une dernière séance pour l'adjudication définitive. Le même directoire aura soin de désigner dans ces affiches chacun des lots, avec des détails suffisants pour qu'ils soient facilement reconnus, et d'y ajouter le prix de l'estimation de chacun d'eux, ainsi que les travaux dont l'adjudicataire de chaque lot sera chargé. Les plans visuels, projets de division, procès-verbaux d'estimation, devis estimatifs, et autres pièces relatives à la vente du même bien, seront déposés au secrétariat du district, et les citoyens invités par les affiches à en prendre communication.
tion en sera faite par deux experts nommés, l'un par le propriétaire et l'autre par le directoire du district, en prenant pour base le capital à cinq pour cent des loyers ou fermages connus ou présumés, et il sera ajouté au prix ainsi réglé un quart en sus par forme d'indemnité accordée aux propriétaires. Le prix desdites acquisitions sera payé par la trésorerie nationale.
Art. 14. Les adjudicataires des différents lots ne seront pas solidaires les uns pour les autres. Chaque lot sera adjugé par adjudication séparée sur la troisième publication, en observant au surplus les formalités prescrites pour les ventes des biens nationaux.
Art. 15. Il sera sursis à la location par baux des bâtiments, jardins ou autres terrains dépendant des biens nationaux désignés dans le premier article, qui seront reconnus susceptibles d'être vendus divisément. Les préposés de la régie pourront seulement les louer en tout ou en partie, avec la condition expresse que les locataires seront tenus d'en sortir et de les mettre au même état deux mois après leur vente, à la réquisition qui leur en sera faite par le district.
Art. 16. Ceux des mêmes biens nationaux qui auront été vendus en masse antérieurement au présent décret, et qui, par défaut de paiement de la part des acquéreurs, seront dans le cas de subir la folle enchère, seront revendus de la même manière que ceux du même genre non encore vendus, et les dispositions du présent décret leur seront applicables.
Art. 17. Les demandes qui ont été ou seront formées par les municipalités pour l'abandon des bâtiments ou terrains nationaux, sur le fondement qu'ils sont nécessaires à l'élargissement des rues, à l'agrandissement des places ou l'embellissement des villes, seront adressées au ministre de l'intérieur, qui, après avoir fait constater leur légitimité par les corps administratifs, et les avoir communiquées à l'administrateur des biens nationaux, les remettra à la Convention nationale, avec toutes les pièces justificatives. Il ne pourra être fait aucun abandon de ce genre qu'en vertu de décrets particuliers.
Art. 18. Toutes les fois que les demandes dont il s'agit n'auront pour objet qu'un simple alignement, dont l'exécution intéressera essentiellement la sûreté publique, l'abandon qui pourra en résulter de quélques portions de terrains appartenant à la République, ne sera pas mis à la charge des villes.
Art. 19. Si, au contraire, l'objet de l'abandon réclamé est l'élargissement des rues ou des places, la commodité des citoyens, ou l'embellissement de quelques quartiers des villes, sans qu'il soit prouvé que l'état actuel des choses , ..j esc-?niui^ljOmf'Mt"à la tranquillité et à la sûreté publiques, les terrains laissés à la disposition des communes seront payés par elles; et, à cet effet, l'estimation en sera faite, par deux experts nommés, l'un par la municipalité et^ l'autre par le district, et à Paris par le département. Le prix fixé par lesdits experts sera soumis par le district à l'approbation du département, et par le département à celle de l'administration des biens natio-
naux, pour être ensuite définitivement arrêté par le décret qui autorisera la concession des terrains réclamés.
(La Convention adopte ce projet de décret, moins les articles 12 et 13 qui sont réservés sur la demande de plusieurs membres) (1).
Suit le texte définitif du décret rendu (2).
( La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité d'aliénation, décrète :
Art. 1er.
« Les châteaux ci-devant royaux, qui ne seront pas réservés pour cause d'utilité publique, les palais épiscopaux, les bâtiments, cours et j arums des abbayes, monastères ou congrégations supprimées, les grands emplacements nationaux situés dans les villes, et tous autres biens nationaux d'une grande étendue, dont la vente en masse serait reconnue moins avantageuse, seront divisés et vendus par lots séparés.
Art. 2.
« Les directoires de districts, et à Paris le directoire- du département, feront , lever par des experts, dans le délai de deux mois, à compter du jour de la publication dit présent décret, les plans visuels de tous ceux des susdits biens qui sont situés dans leurs arrondissements respectifs ; et après avoir ouï la municipalité du lieu, dont les dires et réquisitions seront jointes aux pièces, ils feront tracer les divisions dont ils seront jugés susceptibles,relativement à leur nature, aux localités, à l'utilité publique, et surtout au plus grand avantage de la ventes ils feront en même temps dresser par les experts des procès-verbaux d'estimation, tant desdits biens 6n niciss e, que de chacun des lo'ts résultant dé la division.
Art. 3.
« Pour faciliter l'exécution de l'article précédent, lesdits directoires sont autorisés à retirer sous récépissé, des bureaux du contrôle des bâtiments du ci-devant roi, du garde-meuble et de tous autres dépôts, les plans des châteaux, parcs, jardins, conduits des eaux, ainsi que les plans détaillés qui ont pu être levés de la ville de Paris. Tous dépositaires desdits plans seront tenus de lès livrer, et invités à donner les renseignements qui sont à leur connaissance.
Art. 4.
Si l'exécution du projet de division doit donner lieu à des démolitions, déblais et autres changements quelconques, les experts auront soin d'en donner les détails et l'évaluation dans leurs procès-verbaux.
Art. 5.
« Les directoires de districts fourniront leurs observations sur ces
plans et procès-verbaux, et les adresseront aux départements qui les
examineront, proposeront les changements
Art. 6.
« Dans le cas où ledit administrateur jugerait les plans et projets de division susceptibles de changements considérables pour l'amélioration du produit des biens divisés, il les indiquera aux départements, ceux-ci aux districts; et, après avoir recueilli les nouvelles observations des corps administratifs, il fera passer toutes les pièces à la Convention nationale, qui statuera sur l'adoption de l'un ou de l'autre projet de division.
Art. 7.
« Les ventes des biens nationaux, susceptibles de division, seront faites par lot. Les enchères seront ouvertes sur chacun desdits lots, d'après l'estimation qui en aura été faite, eu exécution de l'article 2 ci-dessus. Il ne pourra être passé outre à l'adjudication définitive, qu'autant que la dernière enchère couvrira ladite estimation, augmentée de la portion contributoire de chaque lot dans les travaux et acquisitions qu'aura nécessités la division, et qui auront été ou devront être faits aux frais de la République.
Art, 8.
« Lorsque l'administration des biens nationaux aura autorisé, ou la Convention nationale décrété l'exécution du projet de division d'un bien national, comme il est dit dans les articles 3, 5 et 6, le directoire annoncera, par deux affiches apposées de quinzaine en quinzaine, la première séance d'enchères pour la vente de ce bien, et une seconde séance pour l'adjudication définitive. Le même directoire aura soin de désigner dans ces affiches chacun des lots, avec des détails suffisants pour qu'ils soient facilement reconnus, et d'y ajouter le prix de l'estimation de chacun d'eux, ainsi que les travaux dont l'adjudicataire de chaque lot sera chargé. Les plans visuels, projets de division, procès-verbaux d'estimation, devis estimatifs et autres pièces relatives à la vente du même bien, seront déposées au secrétariat du district, et les citoyens invités par les affiches à en prendre communication.
Art. 9.
« Les travaux à faire par les acquéreurs seront mis au nombre des clauses de l'adjudication, et le délai pour leur exécution sera fixé, à peine, en cas d'inexécution, d'y être procédé par folle enchère.
Art. 10.
« Les travaux qui, par l'effet de la vente du bien par lots séparés, devront être exécutés aux frais de la nation, seront adjugés au rabais par le directoire, dans le plus court délai possible, après avoir rempli néanmoins toutes les formalités ordinaires en pareil cas.
Art. 11.
(( Les frais auxquels donneront lieu, tant les plans et procès-verbaux de division et estimation que les travaux qui ne pourront être exécutés par l'adjudicataire de chaque lot séparé, seront au compte de la nation, payés par la Trésorerie nationale, après que les formalités, prescrites par la seconde section du titre II de la loi du 16 octobre 1791, auront été remplies.
Art. 12.
« Les adjudicataires des différents lots ne seront pas solidaires les uns pour les autres. Chaque lot sera adjugé par adjudication séparée sur la troisième publication, en observant au surplus les formalités prescrites pour le ventes des biens nationaux.
Art. 13.
« Il sera sursis à la location par baux des bâtiments, jardins ou autres terrains dépendant des biens nationaux désignés dans le premier article, qui seront reconnus susceptibles d'être vendus divisément. Les préposés de la régie pourront seulement les louer en tout ou en partie, avec la condition expresse que les locataires seront tenus d'en sortir et de les remettre au même état deux mois après leur vente, à la réquisition qui leur en sera faite par le district.
Art. 14.
« Ceux des mêmes biens nationaux qui auront été vendus en masse antérieurement au présent décret, et qui,, par défaut de paiement de la part des acquéreurs, seront dans le cas de subir la folle enchère, seront revendus de la même manière que ceux du même genre non encore vendus, et les dispositions du présent décret leur seront applicables.
Art. 15.
« Les demandes qui ont été ou qui seront formées par les municipalités pour l'abandon des bâtiments ou terrains nationaux, sur le fondement qu'ils sont nécessaires à l'élargissement des rues, à l'agrandissement des places ou à l'embellissement des villes;,, seront adressées au ministre de l'intérieur, qui, après avoir fait constater leur légitimité par les corps administratifs^ et les avoir communiquées à l'administrateur des biens nationaux, les remettra à la Convention nationale, avec toutes les pièces justificatives. Il ne pourra être fait aucun abandon de ce genre qu'en vertu de décrets particuliers.
Art. 16.
« Toutes les fois que les demandes dont il s'agit n'auront pour objet qu'un simple alignement, dont l'exécution! intéressera essentiellement la sûreté publique, l'abandon qui pourra en résulter de quelques portions de terrains appartenant à la République, ne sera pas mis à la charge des villes.
Art. 17.
« Si, au contraire, l'objet de l'abandon réclamé est l'élargissement des rues ou desplaces,. la commodité des citoyens ou l'embellissement de quelques quatiers des villes, sans qu'il soit prouvé que l'état actuel des choses, puisse nuire essentiellement à la tranquillité et à la sûreté publiques, les terrains laissés à la disposition des communes seront payés par elles : et, à cet effet, l'estimation en sera faite par deux experts nommés, l'un par la municipalité, et l'autre par le district, et à Paris par le département. Le prix fixé par lesdits experts sera soumis, par le district, à l'approbation du département, et par le département à celle de l'administrateur des biens nationaux, pour être ensuite définitivement arrêté par le décret qui autorisera la concession des terrains réclamés ».
(La séance est levée à cinq heures et demie du soir.)
a la séance de la convention nationale
du er avril
1793
premier projet de décret (2) sur la vente en détail des châteaux, parcs, enclos, palais épiscopaux et autres grandes propriétés nationales, situées dans les campagnes et dans les villes, présenté au nom du comité d'aliénation par Charles Delacroix.
Art. 1er. Les châteaux ci-devant royaux qui
ne seront pas réservés pour cause d'utilité publique, les palais
épiscopaux, les bâtiments, cours et jardins des abbayes, monastères ou
congrégations supprimées, les grands emplacements nationaux situés dans
les villes, et tous autres biens nationaux d'une grande étendue, dont la
vente en masse serait reconnue moins avantageuse, pourront être divisés
et vendus par lots séparés.
Art. 2. Les directoires- de districts, et à Paris le directoire du département, feront lever, par des experts,-dans le délai de deux mois, a compter du jour de la publication du présent décret, les plans visuels de tous ceux des susdits biens qui seront situés dans leurs arrondissements respectifs; et ils y feront tracer les divisions dont ils seront jugés susceptibles relativement à leur nature, aux localités, à l'utilité publique, et surtout au plus grand avantage de la vente. Elles feront en même temps dresser, par les experts, des procès-verbaux d'estimation, tant desdits biens en masse, que de chacun des lots résultant de la division.
Art. 3. Si l'exécution du projet de division doit donner lieu à des démolitions, déblais ou autres changements quelconques, les experts auront soin d'en donner les détails et l'évaluation dans leurs procès-verbaux.
Art. 4. Les directoires de districts fourniront leurs observations sur ces plans et procès-verbaux, et les adresseront aux départements, qui les examineront, proposeront lés
changements qu'ils jugeront convenables, et enverront le tout à l'administrateur des biens nationaux, qui demeure chargé d'arrêter définitivement les projets de division, hors les cas prévus ci-apres dans les articles 5 et 12, et d'en suivre l'exécution.
- Art. 5. Dans le cas ou ledit administrateur jugerait les plans et projets de division sus-ceptiblesi de, changements considérables pour l'amélioration du produit des biens divisés, il les indiquera aux département^ ceux-ci aux districts ; et après avoir recueilli les nouvelles observations dès corps administratifs, il fera passer toutes les pièces à la Convention nationale, qui statuera sur l'adoption de l'un ou de l'autre projet de division.
Art. 6. Toutes les ventes des biens nationaux susceptibles de division, seront faites d'après les trois modes suivants : les enchères seront ouvertes dans la même séance et successivement : 1° sur l'ensemble du bien dans l'état où il se trouve sans assujettir l'adjudicataire à aucun plan de division, et en désignant seulement les changements ou réserves que l'intérêt public pourrait exiger; 2° sur l'ensemble du bien, mais à la charge par l'adjudicataire d'exécuter le plan de division qui aurait été arrêté, et de faire en conséquence à ses frais, les démolitions,, déblais, constructions et autres travaux ae tous genres qui devraient en résulter; 3° sur chacun des lots désignés par le même plan de division, en ne mettant à la charge des adjudicataires nartiaires, que la partie des travaux que chacun pourrait facilement exécuter sur son terrain, en en laissant àu compte de la nation le surplus desdits travaux, ainsi que le tout sera exactement désigné par les clauses de l'adjudication.
Art. 7. Celui de ces trois modes d'adjudication qui aura produit le prix le plus avantageux, sera adapté définitivement, et le bien adjugé en conséquence ; mais dans la comparaison du résultat des enchères sur la massé avec celles sur les parties, on déduira du montant de ces dernières, le prix des travaux qui devront être exécutés aux frais de la nation, ainsi qu'il aura été fixé, soit par les devis estimatifs des experts, soit par les soumissions d'entrepreneurs qui auront été reçues à l'avance.
Art. 8. Dans le cas où immédiatement après que les enchères auront été reçues successivement, d'après les trois modes ci-dessus, des particuliers se présenteraient pour enchérir de nouveau sur le prix reconnu le plus avantageux, il y seront admis? et toutes nouvelles enchères seront reçues, soit sur la masse, soit sur les parties, et les dernières offres détermineront toujours le mode d'après lequel l'adjudication sera définitivement arrêtée.
Art. 9. Dans le cas où, lors de la réception des enchères sur les parties, il ne se présenterait pas d'enchérisseurs sur un ou plusieurs lots, on ajoutera le montant de l'estimation de ces lots non enchéris au prix offert pour les autres lots, et la somme qui en résultera sera considérée comme le montant de la vente partielle qui devra entrer dans la comparaison du produit de chacun des trois modes d'adjudication prescrits par l'article 7.
' Art. 10. Lorsque le mode de vente par par-
ties aura obtenu la préférence, chaque lot sera
censé aliéné par adjudication particulière, et les adjudicataires parti aires ne seront point solidaires pour le paiement de la totalité ou de partie des lots, dérogeant, en ce cas, aux dispositions contenues dans le § 2 de l'instruction du 3 juillet 1791.
Art. 11. Lorsque l'administrateur de biens nationaux aura autorisé, ou la Convention nationale décrété l'exécution du projet de division d'un bien national, comme il est dit dans les articles 4 et 5, le directoire annoncera par trois affiches apposées de quinzaine en quinzaine, les premières et secondes séances d'enchères pour la vente de ce bien, lesquelles auront lieu respectivement, suivant les trois modes déterminés par l'article 6 du présent décret,, et une dernière séance pour l'adjudication définitive d'après les mêmes modes. Le même directoire aura soin de désigner, dans ces affiches, chacun des lots, avec des détails suffisants, pour qu'ils soient facilement reconnus, et d'y ajouter le prix de l'estimation de chacun d'eux. Les plans visuels, projets de division, procès-verbaux d'estimation, devis estimatifs et autres pièces relatives à la vente du même bien, seront déposés au secrétariat du district, et les citoyens invités par les affiches à en prendre communication.
Art. 12. Les travaux de tous genres à faire par les acquéreurs seront mis au nombre des clauses de l'adjudication, et le délai, pour leur exécution, sera fixé, à peine, en cas d'inexécution, d'y être procédé par folles enchères.
Art. 13.- Les travaux qui, par l'effet de la vente du bien par lots séparés, devront être exécutés aux frais de la nation, seront sur-le-champ adjugés au rabais par le directoire, après avoir rempli néanmoins toutes les formalités ordinaires en pareil cas.
Art. 14. Les frais auxquels donneront lieu, tant les plans et procès-verbaux de division et estimation, que les travaux exécutés sur les biens nationaux, seront au compte de la nation, payés par la trésorerie nationale, après que les formalités prescrites par la seconde section du titre 2 de la loi du 16 octobre 1791, auront été remplies.
Art. 15. Dans le cas- où, pour faciliter la division d'un bien national, et pour donner une valeur beaucoup plus considérable à ses parties, il serait jugé nécessaire de faire, au nom de la nation, l'acquisition de maisons, jardins ou autres terrains appartenant à des particuliers, cette acquisition ne pourra avoir lieu qu'en vertu d'un décret de la Convention nationale, et, à cet effet, l'administration des biens nationaux lui enverra toutes les pièces propres à constater les avantages du projet de division^ dont l'exécution devra donner lieu à l'acquisition proposée.
Art. 16. Lorsque la Convention aura décrété l'acquisition, au nom de la nation, desdites maisons, jardins ou autres terrains, l'évaluar tion en sera faite par deux experts nommés, l'un par le propriétaire et l'autre par le directoire du district, en prenant pour base le capital à 5 0/0 des loyers ou fermages connus ou présumés, et il sera ajouté au prix ainsi réglé un quart en sus par forme d'indemnité accordée aux propriétaires.
Art. 17. Le paiement des sommes fixées pour lesdites adjudications et approuvées par la Convention nationale, sera mis au nombre des clauses de l'adjudcation qui pourra avoir lieu par le résultat des enchères, d'après le ! second mode établi par l'article 6 ; et l'adju-I dicataire sera tenu de l'effectuer, avant de j pouvoir disposer desdits bâtiments et ter-j rains : si l'adjudication a lieu d'après le troisième mode établi au dit article 6, le prix des j dites acquisitions sera payé par la trésorerie ! nationale.
Art. 18. Il sera sursis à la location par baux | des bâtiments, jardins ou autres terrains dé-I pendant des biens nationaux désignés dans j le premier article qui seront reconnus suscep-j tibles d'être vendus divisément. Les préposés | de la régie pourront seulement les louer en | tout ou en partie, avec la condition expresse que les locataires seront tenus d'en sortir et I de les remettre au même état deux mois après ! leur vente, à la réquisition qui leur en sera faite par le district.
Art. 19. Ceux des mêmes biens nationaux qui auront été vendus en masse antérieurement au présent décret, et qui, par défaut de j paiement de la part de.s acquéreurs, seront ! "dans le cas de subir la folle enchère, seront j revendus de la même manière que ceux du même genre non encore vendus,, et les disposi-I tions du présent décret leur seront applicables.
Les demandes qui ont été ou seront formées par les municipalités, pour l'abandon ! des bâtiments ou terrains nationaux, sur le fondement qu'ils sont nécessaires à l'élargissement des rues, à l'agrandissement des places, ou à l'embellissement des villes, seront adressées au ministre de l'intérieur, qui, après avoir fait constater leur légitimité par les corps administratifs, et les avoir communiquées à l'administrateur des biens nationaux, les remettra à la Convention nationale, avec toutes les pièces justificatives. Il ne pourra être fait aucun abandon de ce genre qu'en vertu de décrets particuliers.
Art. 20. Toutes les fois que les demandes dont il s'agit n'auront pour objet qu'un simple alignement dont l'exécution intéressera essentiellement la sûreté publique, l'abandon qui pourra en résulter de quelques portions de terrains appartenant à la République, ne sera pas mis à la charge des villes.
Art. 21. Si, au contraire, l'objet de l'abandon réclamé est l'élargissement des rues ou des places, la commodité des citoyens ou l'embellissement de quelques quartiers des villes, sans qu'il soit prouvé que l'état actuel des choses puisse nuire essentiellement à la tranquillité et à la sûreté publiques, les terrains laissés à la disposition des communes seront payés par elles,,, et à cet effet l'estimation en sera faite par deux experts nommés l'un par la municipalité et l'autre par le district, et à Paris par le département. Le prix fixé par lesdits experts sera soumis, par le district, à l'approbation du département, et par le département à celle de l'administrateur des biens nationaux, pour être ensuite définitivement arrêté par le décret qui autorisera la concession des terrains réclamés.
Séance du mardi
La séance est ouverte à 9 h. 50 du matin.
, secrétaire, donne
lecture des lettres, adi^esses et pétitions suivantes :
1° Lettre de Garat, ministre de l'intérieur, qui fait passer à la Convention l'état des décrets envoyés dans les départements jusqu'au premier de ce mois ; cet état est ainsi conçu :
ÉTAT des décrets de la Convention nationale, envoyés aux départements, par le ministre de l'intérieur
le Ier avril 1793, Van II de la République (4),
dates DÉPARTEMENTS
des TITRE DES DÉCRETS. AUXQUELS L'ENVOI OBSERVATIONS.
DÉCRETS. a été fait.
14 mars n° 594 Décret relatif à l'étoffe des culottes fournies aux volontaires. à tous les départemts A . .
16 mars n® 590 Décret qui supprime la maison de Saint-Louis à Saint-Cyr-lès-Versailles. —
16 mars n° 592 Décret en faveur des sous-officiers et soldats suisses licenciés.- ■ — -
17 mars n® 626 Décret portant que les prévenus d'avoir empêcher le recrutement seront jugés par le tribunal extraordinaire. —
18 et 21 mars n° 602 Decrets relatifs aux contributions directes et indirectes.
19 mars n° 606 Décret qui change le nom de l'ile Bourbon en celui d'île de la Réunion. —
19 mars n° 607 Décret qui ordonne de dénoncer et de livrer aux tribunaux tout citoyen qui se permettra des indécences dans les lieux consacrés à la religion. _
19 mars n° 610 Décret concernant la nouvelle organisation des secours publics. - —
20 mars Décret portant que François Lavigne recevra de la Convention une couronne civique. —
20 et 23 mars n° 621 Décret qui excepte de la loi sur le recrutement : 1° les professeurs et élèves entretenus dans les Ecoles vétérinaires; 2° les évêques, curés .et vicaires; 3° les officiers de santé attachés au service des armées.
21 mars-n° 609 Décret qui improuve une adresse de la société de la ville de Marseille et les adhésions des sections et casse les arrêtés des corps administratifs. __
25 mars n° 653 Décret relatif aux matières d'or et d'argent versées à la monnaie do Paris. de Paris manuscrit
26 mars n® 657 Décret qui exempte de l'enrôlement les agents des administrations des subsistances militaires. \ — —
26 mars n° 616 Décret qui suspend, dans le département de Paris, la vente du mobilier des émigrés. imprimé
27 mars n° 655 Décret qui annule tous les sursis à la vente des biens des émigrés accordés par le ministre de l'intérieur. | J§| manuscrit
27 mars n° 701 Décret pour faire évacuer le château des Tuileries. —. —
28 mars n° 633 Décret relatif aux mesures à prendre par la municipalité de Paris pour l'exécution du décret qui ordonne le désarmement des personnes suspectes. à tous les départem18
29 mars n° 656 Décret qui oblige tous les propriétaires, principaux locataires de faire afficher à l'extérieur de leurs maisons les noms, âges et qualités des personnes qui y résident. de Paris —
Le Ministre de l'intérieur, Signé : GARAT.
« Le
( Représentants du peuple,
« Les citoyens de ce département, à peine instruits des besoins de leurs
frères, les volontaires du premier et du deuxième bataillon de
Maine-et-Loire qui se sont si généreusement dévoués à la défense de la
patrie, s'étaient empressés d'y pourvoir de tous leurs moyens. Déjà des
dons de toute espèce avaient été déposés sur l'autel de la patrie ; ils
se multipliaient à l'envi chaque jour. Bientôt ils eussent formé une
masse qui aurait fait disparaître les besoins de nos frères ; et,
certes, c'était le plus beau jour de leur vie, en songeant qu'ils se
dépouillaient pour vêtir les défenseurs de la République. Mais,
représentants, les malheureux événements qui désolent notre département
et les circonvoisins ont
« 1° 309 paires de souliers ;
« 2° 48 paires de bas ;
« 3° 42 chemises ;
« 4° 36 mouchoirs ;
« 5° 3 culottes ;
« 6° 3 paires de guêtres ;
« 7° 1 pantalon.
« Les administrateurs du département de Maine-et-Loire.
« Signé : B. L. Dieusic, président ; Mamert-Coullion, L. J. Basdré, Brutet, Coulon-nier, Double, procureur-général-syndic. »
A cette lettre se trouve jointe la pièce suivante :
Tableau.
ÉTAT des dons faits aux volontaires des 1er et 2e bataillons de Maine-et Loire, par les citoyens du département de Maine-et-Loire (1).
M O . PS a S zs g; DONATEURS ai A a £3 O (O PANTALON oo -eo CHEMISES - a> a: o s s o c« fcd H O 1-9 s o GUÊTRES » CZ Cfl an A3 œ o -a S « en s
25
Paires Paires Paires
1 L'administration du département........................ 55 » ' » » » »
2 La Société des amis de la liberté et de l'égalité d'Angers 109 » 15 19 » 3 »
3 La municipalité de Mazé................................ 66 » 28 23 36 c » » 26 11
4 Le citoyen Mordrct, d'Angers........................... 1 3) T> » » » »
5 La citoyenne Guinebert, d'Angers.»..................... Y » » » » » » »
6 La citoyen Hartelon, d'Angers.......................... » yj » » » » » 30 »
1 Le citoyen Rafray, d'Angers............................ » » » » » ' )> . » 10* »
8 Le citoyen Hamon, d'Angers............................ a » » - » - » »
9 La citoyenne Hazard................................... » n 1 » » » » »
10 La citoyenne Savary................................... » 1 1 » » » »
11 Le citoyen Marchand, capitaine de gendarmerie......... » » » ' » » » » 10 »
12 Le citoyen Cordier, d'Angers............................ 0 v » » » » » »
13 Le citoyen Legendre, juge de paix d'Angers............ » n . » » » » 10 »
14 Le citoyen Thouin Gaudière, de Saint-Clément......... » » » » » » » 15 »
15 » 2 » » » » »
16 Le citoyen Joubert, marchand.......................... » » » » ' » » »
17 Le citoyen Cesbron, de Chemillé....................... 12 » » » » - » » »
18 La municipalité de Vauchrétien......................... » » » » » » 68 8
19 Le citoyen Mirault, chirurgien à Angers................ » X) » )> » »
20 Le citoyen Cesbron, fils, de Chemillé................... » s » » )) » »
21 La citoyenne Drouin................................... » » 1 » » » » »
22 Le citoyon Courandin, fils, d'Angers.................... 4 » » » » ' » » »
23 Le citoyen Blondeau, d'Angers.......................... 1 y> » y> » )> » »
24 Les instituteurs de la maison nationale de la Rossignol-lerie, d'Angers........................................ 20 » » » » » » »
N oxa. — Les dons faits en numéraire et assignats ont procuré 28 paires de souliers.
Total des dons :
Souliers.........................310 paires.
Bas.....................................48 -
Chemises........................42
Mouchoirs..............................36
Culottes........................ 3 paires.
Guêtres....................... . 3
Pantalon........................ 1
Collationné et certifié conforme à Vétat déposé au département de Maine-et-Loire.
« A Angers, le 29 mars 1793, l'an II de la République française.
« Signé : Bakbot, secrétaire général. »
(La Convention décrète la mention honorable de cette lettre et en ordonne l'insertion au Bulletin.)
3° Lettre de la société populaire de Saint-Jean-d'Angély, par laquelle elle transmet l'exemplaire d'une adresse qu'elle a fait circuler dans le département pour hâter le recrutement ainsi que la soumission faite par les citoyens Lambert et Morange, de fournir et
entretenir deux hommes pendant la guerre. Cette adresse est ainsi conçue (2) :
c Saint-Jean-d'Angély, le 17 mars 1793, l'an II de la République française.
« Citoyens représentants du peuple,
« Les amis de la liberté et de l'égalité, réunis e.i société à Saint-Jean-d'Angély, ont cru devoir vous mettre sous les yeux une adresse qu'ils ont faite à leurs frères et concitoyens des communes circonvoisines pour opérer et accélérer le recrutement des armées de la République. Ils en joignent ici quelques exemplaires. Le recrutement s'est opéré dans tout le district avec une rapidité et un enthousiasme que l'amour seul de la patrie pouvait produire.
« Ils vous transmettent aussi la soumission faite au sein de leur société
par les citoyens
« Citoyens, notre récompense en faisant le bien, se trouve dans la seule satisfaction de 1 l'avoir opéré.
« Les amis de la liberté et de Végalité réunis en société à Saint-Jean-d'Angély. a Signé : Duret, président ; Bartaré, Lair aîné, secrétaires,
Suivent les deux pièces annoncées ci-dessus; elles sont ainsi conçues :
I
Adresse des citoyens composant la société des
Amis de la liberté et de l'égalité de la ville de
Saint-Jean-d'Angély à leurs frères et amis
des communes circonvoisines (1).
Saint-Jean-d'Angély, le
Citoyens, frères et amis,
« Les tyrans sont coalisés contre votre liberté, souffrirez-vous qu'elle succombe sous les efforts des vils esclaves du despotisme? Non.
« La patrie attend de ses enfants un secours de 300,0000 hommes. Il aura suffi, sans doute, aux représentants de la République de faire connaître ce besoin pour le voir presque aussitôt rempli.
« Frères et amis, volons aux combats; quelle cause plus belle pourrait jamais exciter notre enthousiasme ? C'est pour le maintien de la liberté, de l'égalité; c est pour la conservation de nos propriétés que nous allons nous armer; quel Français, en ce cas, pourrait n'être pas soldat?
« Citoyens, la patrie attend tout de la bonne volonté; et vous avez déjà prouvé que la bonne volonté pouvait, faisait fout dans le3 moments de danger.
« Vous allez recevoir la loi qui fixe le mode du recrutement, et qui détermine le nombre que chaque commune devra fournir; vous prouverez, nous en sommes assurés, qu'une loi n'était pas nécessaire pour armer des hommes libres, contre ceux qui veulent devenir leurs oppresseurs; et elle n'aura d'autre effet que dç réduire le nombre que votre dévouement, votre courage eût sûrement voulu trop multiplier.
Frères et amis, cette loi indique le tirage au sort, ou toute autre voie coercitive, dans le cas où le nombre exigé ne se compléterait pas de bonne volonté. Ah ! loin de nous l'idée qu'il faille, nulle part, recourir à cet expédient dont l'exemple nous a été transmis par les despotes ! Dés soldats que la contrainte ou le hasard auraient indiqués, serviraient mal la patrie; ils n'auraient pas dans l'âme cette haine des tyrans, cet amour ardent de la liberté, qui seuls rendent invincible. Braves Français, que cette honte ne vienne pas s'imprimer sur nos fronts, et rehausser le courage de nos lâches ennemis !
« Plusieurs communes ont déjà fourni de nombreux défenseurs à la République; la patrie ne peut, ni ne veut exiger que leur contin-
gent soit encore égal à celui des autres, dans le recrutement qui va avoir lieu; mais ce qu'elles auront fait, ce qu'elles feront encore sera du moins un modèle, un exemple que chacune s'empressera, sans doute, de suivre. Et quelle commune voudrait donc qu'on pût dire qu'une autre a fait plus qu'elle pour la patrie?
« Mais, frères et amis, la patrie a non seulement besoin de bras, elle a besoin encore que ces bras soient armés; elle a besoin que chaque défenseur à qui elle confiera ces armes soit convenablement vêtu. Que chacun de nous, citoyens, s'empresse à offrir à la patrie, et l'habit tricolore, et l'arme dont il ne pourra pas faire usage contre l'ennemi. La patrie attend ce dévouement/ elle l'exige même ; mais avait-elle besoin de l'exiger d'hommes qui ont conquis leur liberté et qui veulent la conserver au prix de leur fortune et de leur sang ?
« Citoyens, la patrie a rompu pour vous tous les chaînons de l'esclavage; elle a brisé le joug qui courbait vos têtes, et fait disparaître jusqu'aux décombres de servitude qui dévoraient la substance de vos propriétés; vous voulez, sans doute, conserver cet inappréciable bienfait; vous avez justement en horreur, et les tributs féodaux, et l'orgueil accablant de vos ci-devant seigneurs, et la morgue insolente d'un clergé qui envahissait toutes les richesses, en parlant sans cesse de pauvreté et d'humilité; vous ne voulez plus ni nobles, ni dîmes, ni fief3, ni redevances féodales. Eh bien, armez-vous donc pour combattre, pour anéantir les despotes qui veulent tout rétablir, tout recréer. Aux armes, citoyens ! aux armes !
(( Signé : Duret, président; Bartaré, Lair aîné, secrétaire. »
II
Extrait du registre de la société des Amis de la liberté et de l'égalité de Saint-Jean d'Angély.
Aujourd'hui, cinq mars mil sept cent quatre-vingt-treize, l'an second de la République, la société des Amis de la liberté et de l'égalité de Saint-Jean-d'Angély, réunie au lieu ordinaire de ses séances, le président ayant annoncé que la séance était ouverte, l'un des secrétaires, monté à la tribune, a dit, etc...
Ensuite le citoyen Lambert ayant demandé et obtenu la parole, a dit :
« Citoyens,
« Des malheurs qu'il serait inutile de retracer ont empêché la société
Lambert, Morange et Cie de donner des preuves de leur civisme. Ils m'ont
prié personnellement de me présenter pour être admis dans l'une des
compagnies de la garde nationale; mais devenu libre, instruit des
besoins de la patrie, instruit qu'il est urgent de voler au-devant de
l'ennemi, je me présente ce soir avec tous les citoyens de chez moi au
sein de la société républicaine pour lui dire et jurer que nous
verserons jusqu'à la dernière goutte de notre sang pour le maintien de
la liberté et de l'égalité et, pour première preuve, nous offrons deux
hommes à la patrie
Le président a témoigné à ce citoyen la satisfaction de la société sur l'acte de patriotisme dont il venait de donner des preuves, et l'a invité à faire connaître directement son vœu à la Convention nationale, ou à le remettre par écrit sur le bureau de la société qui le transmettrait ensuite à la Convention, et à l'instant le citoyen Lambert a remis sur le bureau des secrétaires l'écrit ci-dessus.
« Pour copie conforme à V original, « Signé : Bartaré, secrétaire. »
(La Convention décrète la mention honorable et ordonne l'insertion de ces différentes pièces au Bulletin.)
4° Adresse des administrateurs du district de Compiègne, par laquelle ils font part à la Convention du succès du recrutement et de l'armement des volontaires, ainsi que du zèle des citoyens; cette adresse est ainsi conçue (1) :
« Le
c Citoyen Président,
« Nous vous prions de faire part à la Convention nationale qu'en huit jours à compter de l'envoi de la loi aux municipalités, le recrutement. a été totalement effectué dans le district de Compiègne, l'habillement, l'équipement et les armes préparées; partout nous avons eu la douce satisfaction de voir le même zèle, le même patriotisme se développer. Les offrandes civiques se sont multipliées aussi : la société populaire de la ville de Compiègne est venue au secours de la République par une somme de 3,000 livres et quantité d'effets d'équipement.
« Déjà deux détachements de nos volontaires sont en route, les autres vont suivre sans délai.
« Nous n'avons pas vu d'agents militaires; mais la loi, en déléguant les pouvoirs au procureur syndic, et le ministre de la guerre ayant eu la précaution de nous "envoyer de bonne heure toutes les feuilles nécessaires, nos opérations n'ont éprouvé aucun retard.
« Nous devons, à la vérité, de vous dire que la commune de Compiègne a fourni 130 hommes, plus que son contingent; que celles d'Estrées, Saint-Denis et Gournay ont donné aussi plus que le leur.
« La Convention nationale n'apprendra peut-être pas sans intérêt que
cette même commune de Gournay-sur-Aronde est un lieu de passage; que
depuis juillet 1792, ses citoyens n'ont cessé de loger les troupes de la
République et qu'ordinairement on met dans chaque commune 20 à 30
soldats. Eh ! bien, cette corn-
(( Nous avons du plaisir, citoyen président, à assurer la Convention nationale que le meilleur esprit anime les citoyens de notre ressort. S'il se trouve parmi eux quelques imbéciles aristocrates, quelques sots modérés ou quelques fripons feuillants, la masse les écrase et ils n'osent lever le nez.
« Pour nous, citoyen Président, quels que soient les événements, nous demeurerons toujours fermes à notre poste ; nous avons consacré à la République notre sang, notre vie et nous ne trahirons pas nos serments :
« La République ou la mort !
« Recevez, citoyen Président, notre salut respectueux et fraternel.
« Les administrateurs du Directoire du district de G ompiègne,
«Signé : J. B. Birè, Lorines, Darras, Car-
lier.
(La Convention décrète la mention honorable et ordonne l'insertion de cette adresse au Bulletin.)
5° Lettre du citoyen Laurent, commissaire de la Convention dans le Porrentruy, par laquelle il rend compte des efforts généreux des habitants pour le soutien de la cause de la liberté ; sa lettre est ainsi conçue (1) :
Le
« Citoyen Président,
( A mon retour de Besançon pour le procès de Fréderich Dietrich, j'ai cru devoir faire part à la Convention des offrandes patriotiques qui se font dans cette ville et de la manière dont elles s'acquittent.
« Il s'y est établi depuis six mois une société de femmes républicaines qui, du moment de son installation, s'est occupée de l'habillement des défenseurs de la patrie ; elles ont déjà fait passer à différents bataillons 434 chemises, 336 paires de souliers, 30 habits et beaucoup plus de vestes et de culottes, 239 paires de guêtres, 137 paires de bas, nombre de mouchoirs, cols, bonnets, sacs à peau, gants, quelques fusils et, en outre, l'équipement complet d'un grenadier, fourni par un seul citoyen.
« La citoyenne Maugras, alors présidente de la société, avait encore chez elle, à mon départ, quelques habits, 240 paires de souliers et 200 aunes de toile qu'elle allait faire mettre en chemises ; et ces dons se répétaient journellement dans le district de Besançon, d'après les lettres d'invitation envoyées dans les campagnes.
« Une nouvelle source de dons que je ne dois pas laisser ignorer est le
spectacle : Tous les dimanches, des citoyens et citoyennes jouent la
comédie à la salle publique, au pro-
« Yous me blâmeriez, citoyen Président, si des plaisirs aussi républicains et des sociétés de femmes aussi bienfaisantes ne vous étaient pas connus, pour en faire mention honorable dans le procès-verbal et le bulletin de la Convention.
« Signé : Laurent, député à la Convention nationale, et son commissaire dans le pays de Porrenttuy. »
« P.-S. — Il vient de se former ici, à la société des Amis de la liberté et de l'égalité, tin bureau ouvert, pour recevoir lés dons patriotiques dont J'espère donner sous peu des détails satisfaisants à la Convention.
( Signé : Laurent. »
(La Convention décrète la mention honorable et ordonne l'insertion de cette" lettre au Bulletin.)
6° Lettre dès citoyens Laurent, Monnot et Eitter, commissaires de la Convention à Por-rentruy (1), concernant l'arrestation d'un exchanoine de Strasbourg, émigré et l'annonco d'un don patriotique.
(La Convention décrète la mention honorable du don et renvoie la lettre au comité de défense générale.)
7° Lettre des citoyens Paganel et Garrau, commissaires de la Convention dans la Gironde et le Lot-et-Garonne, par laquelle ils expriment leur douleur sur l'attentat commis contre Léonard Bourdon et annoncent qu'ils s'appliquent à ranimer l'esprit publie ; elle est ainsi conçue (2) :
« Bordeaux,
« Citoyens nos collègues,
« Nous nous hâtons de vous exprimer la douleur profonde que nous avons ressentie à la nouvelle de l'attentat commis sur la personne de Léonard Bourdon. Ainsi l'aristocratie, n'ayant pu envelopper dans le plus horrible des complots, la Convention tout entière, tente d'immoler successivement à sa rage les représentants du peuple. Ses fidèles amis n'ont pas été découragés par le sort de Lepeletier. Le sang de Bourdon cimentera de nouveau leur union ; et ils rendront utiles à la liberté les crimes mêmes des traîtres et des conspirateurs.
« Qu'ils sont coupables, ces hommes qui égarent, par une correspondance
perfide, l'opinion des départements, qui représentent comme
tout-puissants des personnages qui ne sont que ridicules, qui
épouvantent les ima-
_« Nous combattons cette erreur funeste. Que l'indignation unanime de la Convention la frappe, et tous les esprits seront guéris des sombres terreurs qui les agitent. La confiance et le patriotisme réuniront tous les citoyens contre nos ennemis communs.
« Signé : Paganel, Garrau. »
(La Convention décrète l'insertion - par extrait de cette lettre nu. Bulletin.)
8° Lettre des administrateurs du département de Maine-et-Loire (1), par laquelle ils transmettent à la Convention la lettre du président du comité militaire du département! dans laquelle se trouve l'interrogatoire fait, par les membres de ce comité, à un nommé Joseph Cathelineau, pris et arrêté comme étant du nombre des révoltés qui ont désolé ce pays.
« On lui a demandé à quels signes ils se reconnaissaient ?
« Répondu : Par la cocarde blanche qu'ils avaient tous adoptée.
« On lui a demandé quel était leur cri de ralliement 1
« Répondu : Par les cris de vive le roi, vivent les aristocrates, vive la reine, vive la religion. »
(La Convention renvoie ces pièces au comité de défense générale.)
9° Lettre des membres du directoire du département de l'Aude, par laquelle ils envoient à la Convention une adresse où ils s'élèvent contre la faction qui voudrait désorganiser la République; elle est ainsi conçue (2) :
« Carcassonne, ce
( Citoyen Président,
« L'administration du département de l'Aude vous envoie une adresse qu'elle vous prie de faire connaître à la Convention. Puisse-t-elle y reconnaître ses principes, le langage d'un républicain, l'attachement à ses devoirs et l'amour de la liberté.
« Les membres du directoire du département de VAude, « Signé : Bénazet,
Courtier, Aget. » Suivent les deux pièces ci-dessous :
Extrait du registre des délibérations du directoire du, département de VAude, séant à Gar-cassonne (1).
Séance publique du
« Un membre vivement ému et profondément touché des dissensions qui, depuis trop longtemps, paraissent agiter la Convention nationale, par la faible condescendance qu'elle a de souffrir dans son sein des chefs soldés d'une faction désorganisatrioe, a mis sur le bureau un projet d'adresse sur cet objet, priant l'Assemblée de l'examiner et de l'adopter ou de la modifier.
« La matière mise en délibération par le citoyen président et lecture faite du projet d'adresse dont il s'agit, il a été adopté à l'unanimité; après avoir entendu le procureur général syndic, il a été arrêté que oette adresse sera transmise à la suite du présent, imprimé et envoyé à la Convention nationale, aux quatre-vingt-cinq départements et dans toutes les municipalités de celui-ci. »
II
Adresse des membres composant le directoire, du département de l'Aude, à la Convention nationale (2).
« Législateurs,
« Les ennemis extérieurs de la République ne sont pas ceux qu'elle a le plus à rédouter; que peuvent les esclaves des tyrans contre les généreux défenseurs de la liberté ?
« Mais tandis que parmi les bons citoyens, les uns font le sacrifice de leur fortunée et que les autres exposent leur vie pour le soutien d'une révolution qui doit à jamais assurer le bonheur du peuple français, d'autres se prétendant les amis exclusifs de ce peuple dont ils ne sont que les tyrans, jettent partout des semences de discorde et d'anarchie, prêchant le. pillage et l'assassinat et bientôt leurs atroces leçons seront mises en pratique. -
« Ce sont ces mêmes hommes qui provoquent le mépris des lois, des; autorités constituées et de la Convention elle-même ; ce sont eux, législateurs, qui osent vous insulter en face, et vous les souffrez parmi vous ? et un décret d'accusation n'a pas encore frappé le chef de cette horde criminelle ?
Attendez-vous que le système de désorganisation, de meurtre et de rapine, enfanté dans la ville où vous siégez, se soit propagé d'une manière plus alarmante ?
« Législateurs, il est pressant d'étouffer dans leur source ces germes contagieux qui menacent la société d'une destruction prochaine.
« Il est temps d'assurer à chacun son existence et sa propriété, non par
de vaines déclarations, mais par la punition exemplaire des corrupteurs
du peuple et de leurs principaux agents.
« Montrez, législateurs, un front sévère aux brigands qui vous entourent; que les poignards dont ils osent vous, menacer n'arrêtent pas votre justice vengeresse; que la tête des coupables tombe sous le glaive de la loi.
« Ne craignez pas les derniers efforts d'une horde factieuse; que peut sa criminelle audace contre la volonté imposante des peuples, des départements? î
« Les peuples sont amis de la liberté et il n'est point de sacrifices qu'ils ne soient disposés à faire pour la maintenir.
« Si les lois sont impuissantes, ils combattront les désorganisateurs et leurs suppôts, avec la même ardeur qui les a fait voler aux frontières, et repousser loin du territoire les ennemis du dehors.
« Tels sont, législateurs, les vœux des administrés du département de l'Aude et de ceux qu'ils ont honorés de leur confiance.
« Collationné, .
« Signé : Maraval, secrétaire général. ».
(La Convention décrète la mention honorable de ces différentes pièces et ordonne l'insertion de l'adresse au Bulletin.)
10° Lettre des citoyens Collet d'Herbois et Goyre-Laplanche, commissaires de la Convention dans les départements de la Nièvre et du Loiret, datée d'Orléans, 28 mars (1), par laquelle ils annoncent que toutes les forces que devait faire passer à Orléans le ministre de la guerre se réduisent à 150 dragons du 6e régiment. Ils en ont envoyé 100 à Nantes. Les citoyens manquent de piques, ils en réclament. Il n'y a pas assez de fusils pour armer les patriotes surs. Le commandant Dulac, justement honoré, parait plus effrayé des persécutions des aristocrates que de leurs armes. La contre-révolution a, dans la ville d'Orléans, de nom-reux partisans, parmi lesquels plusieurs prêtres figurent ouvertement .Malgré leurs trames, le recrutement est terminé.
Un volontaire, nommé Robicho'n, a fait preuve d'une générosité rare. Voyant à côté de lui un citoyen marié qui brûlait de partir et n'était retenu que parce qu'il n'avait les moyens de reconduire chez lui son épouse : « Si nous faisons route ensemble, dit Robichon, voilà ma bourse, nous allons partager. » L'effet suivit les paroles.
Voici un autre fait. Un jeune homme tambour, plein de bravoure et de sensibilité, nommé Billard, a tiré trois fois au sort dans sa section, et toujours gratuitement. Il a refusé 500 livres pour aller en remplacement. « Je paierais pour partir, disait-il, plutôt que d'être payé; mais cé que je demande en grâce, c'est un sabre; je vous en prie, et que la municipalité me laisse ma caisse pour battre la charge au milieu de nos frères. » Sa demande, couverte d'applaudissements, lui a été accordée.
(La Convention renvoie cette lettre au comité de défense générale; elle ordonne ensuite la mention honorable des deux traits de générosité qui y sont relatés et leur insertion au Bulletin.)
11° Lettre des citoyens Collot d'Herbois el Goyre-Laplanche, commissaire
de la Convention dans la Nièvre et le Loiret, par laquelle ils rendent
compte de différentes mesures de
« Orléans, er avril
1793
« Citoyens nos collègues,
« Au moment où nos collègues Bourbotte, Prieur et Julien vont nous remplacer, nous vous retraçons ce que nous avons fait depuis nos dernières dépêches pour assurer l'exécution de vos décrets.
« Nous avons mis en permanence les conseils généraux d'administration et les sections; chacune formera au plus tôt son comité des douze qui devra correspondre avec un comité de surveillance établi à la municipalité, lequel sera chargé d'exécuter les mesures ordonnées par vos commissaires, sur la réquisition faite aux administrations. Nous avons complété la municipalité provisoire que nous n'avions pu installer qu'incomplète à notre arrivée, n'ayant pas eu le temps de choisir avec prudence les citoyens vraiment dignes de notre confiance. Nous avons destitué plusieurs fonctionnaires qu'un grand nombre de renseignements nous ont fait connaître pour des citoyens suspects et fortement imprégnés d'aristocratie : tels sont le substitut au procureur de la commune, le secrétaire greffier, la directrice des postes et le contrôleur de ses bureaux; nous avons pourvu à leur remplacement.
« Nous avons destitué aussi un vicaire épis-copal nommé Kegnault, notoirement aristocrate et propagateur des plus mauvais principes. Il aurait été mis en réclusion, mais il s'est enfui. Nous avons défendu au trésorier des deniers publics de rien payer à ces indignes ministres du culte qui méritent destitution, et qui, traités généreusement par la nation, ne se servent de ses dons que pour la trahir.
« Il y a dans les seize vicaires épiscopaux encore quatre douteux, à peu près aussi suspects que Regnault; il y a plusieurs curés et vicaires bien désignés comme tels, sur lesquels nous prononcerons de concert avec nos collègues, après une délibération mûre. Leur destitution nous paraît nécessaire; nous pourvoirons après les fêtés à leur remplacement, de manière qu'il n'y ait pas d'absence à cet égard. Le curé d'Olivet avait été dénoncé chaque jour depuis notre arrivée par la voix publique et par les meilleurs citoyens comme un homme dangereux : sa commune ayant appuyé aujourd'hui ces dénonciations, nous n'avons pas balancé. Sa destitution vient d'être prononcée à l'unanimité ; nous avons en outre jtvis, à l'instant, qu'il s'est opposé au recrutement, et nous allons le faire poursuivre vigoureusement.
« Nous avons fait mettre en arrestation plusieurs de ceux que nous avons
reconnus, sur des indications données par un grand nombre d 3 citoyens
et par les instructions communiquées par les commissaires du pouvoir
exécutif, pour avoir été les chefs de tous les rassemblements et
conciliabules anticiviques ; mais, citoyens collègues, les moyens
d'exécution ont souvent trahi nos intentions, malgré le zèle de ceux qui
ont été chargés de nos ordres, parce
« Cette considération nous a détsrminés à retenir ici à leur passage 400 hommes des 600 qui, venant de Pa,ris,: vont conduire à Tours un train d'artillerie; 200 continuent d'escorter le convoi. De profondes réflexions et le sentiment d'une absolue nécessité ont forcé vos 5 commissaires réunis de prendre cette délibération à l'unanimité. Il suffira de vous dire, citoyens collègues, que tous ceux qui éont compromis dans les procédures se sont retirés dans les campagnes; il suffira de vous faire observer que dans ces campagnes sont retirés et les chevaux et les armes qu'on a voulu dérober à la loi, pour vous faire sentir que cette mesure était indispensable pour que les collègues qui nous remplacent puissent suivre le fil de nos opérations et assurer l'exécution des décrets de la Convention nationale.
« Nous observons, avec un sentiment bien différent, que nos instances pour approvisionner autant qu'il est possible, par tout ce qui nous entoure, la nouvelle armée des bords de la Loire, n'ont pas été vaines. Le zèle des administrateurs d'Orléans a bien secondé nos pressantes réquisitions. Beaugency vient encore de se signaler par un second envoi de farine. Cette ville est une digne pourvoyeuse des soldats de la liberté. Le district de Neuville a fait aussi conduire ici un envoi de grains assez considérable : c'était le tribut volontaire et civique de tous les laboureurs des environs; chacun avait apporté un ou plusieurs sacs. Nous les avons fait embarquer et conduire de district en district par un des administrateurs.
« Vos derniers décrets ont relevé le patriotisme abattu. La majeure partie des aristocrates, le3 incurables égoïstes sentiront bientôt qu'il faut faire des sacrifices à la patrie pour effacer le souvenir dès actions atroces dorit ils ont été tous de cœur et d'action plus ou moins complices : ils sentiront qu'il faut soutenir les lois républicaines et s7y soumettre avant tout lorsqu'on veut en être protégé.
« Quelques prêtres et valets d'émigrés ont excité, ces jours derniers, des mouvements à Montargis. Ne pouvant quitter d'ici où nous étions seuls, nous avons adressé une proclamation aux corps administratifs. Il paraît qu'ils ont pris d'assez bonnes mesures pour étouffer les complots et s~assurer de ceux qui voulaient exciter les volontaires prêts à partir à la désobéissance; nous avons avis qu ils ont commencé leur route. Cependant nous passerons à Montargis en allant à Nevers, si de nouveaux avis nous font connaître que notre présence peut y être nécessaire.
« Les administrateurs du département de la Nièvre Ont bien suppléé à notre absence; ils font partir 50& hommes dirigés au secours de la Vendée et à peu de chose près le recrutement y est complet. Mais l'intérieur y paraît inquiétant, et ils nous font sentir que notre retour est bien à désirer ; nous partons.
( Les commissaires de la Convention nationale dans les départements de la Nièvre et du "Loiret.
« Signé : Collot d'Herbois, Laplanche. »
(La Convention renvoie la lettre au comité de sûreté générale et ordonne la mention hono-
rable du zèle des administrateurs et de plusieurs citoyens des départements,)
12° Lettre des citoyens Delacroix, Gossuin, Robert et Merlin (de Douai), commissaires de la Convention près Varmée de la Belgique, par laquelle ils font passer copie de deux arrêtés; l'un en date du 28 mars dernier contenant des mesures de sûreté, l'autre en date du 30 du même mois concernant les frais de transport du trésor de Liège (1); ces pièces sont ainsi conçues (2) :
« Lille le
Les commissaires de la Convention nationale près Varmée de Belgique.
«( Citoyens nos collègues,
« Nous vous envoyons un exemplaire du règlement de police que la municipalité de cette ville nous a présenté. Ce règlement renferme des mesures de sûreté générale que la municipalité n'osait mettre à exécution sans y être autorisée par nous ; et, vu la 'difficulté des circonstances, nous n'avons pas cru devoir balancer un instant à le revêtir de notre approbation; nous avons même applaudi au zele et à la surveillance des officiers municipaux.
« Nous vous envoyons également copie d'un arrêté que nous avons pris relativement aux frais de transport du trésor de Liège dans la ville de Lille. iNous prions la Convention d'arrêter définitivement l'emploi qui sera fait de ce trésor et de ses argenteries.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Robert, Merlin (de Douai).
Arrêté du conseil g"enérdl de la commune de Lille, concernant la police.
.« Du
« L'affluence des étrangers, taut militaires qu'autres, exige que ceux qui sont chargés de maintenir l'ordre et la tranquillité puissent employer, à cet effet, des moyens efficaces et prompts.
« Il faut que non seulement tous les étrangers soient assujettis à une surveillance sage et active, mais que tous les citoyens même se conforment exactement aux règles prescrites; il faut que tous les étrangers soient connus, afin qu'aucun ne soit suspect.
(( Les agents aela police ne doivent pas pouvoir seulement s'introduire dans les lieux publics, mais ils doivent pouvoir pénétrer aussi dans l'asile de tous les citoyens, lorsque la sûreté générale exige cette mesure extraordinaire.
( Ce n'est pas assez que le conseil général de la commune soit permanent,
et se divise en différents comités, tous chargés d'objets relatifs à la
police et aux subsistances; ce n'est pas assez que les chefs militaires
emploient, comme ils en ont été requis, tous les moyens qui sont en leur
pouvoir, pour empêcher de séjourner dans la ville tous les militaires
qui y arrivent
« En conséquence, ouï le procureur de la commune, nous maire, officiers municipaux et notables, avons résolu et arrêté les points et articles suivants, sous l'autorisation des membres de la Convention nationale, qui se trouvent actuellement en cette ville.
« Art. ler. Les citoyens commissaires des six
sections tiendront des séances permanentes, aussi longtemps que les
fonctions qui leur sont déléguées l'exigeront ; ils se concerteront avec
la municipalité sur l'organisation intérieure de leurs bureaux : les
frais en seront avancés par la commune.
« Art. 2. Il sera nommé par le conseil général douze commissaires provisoires de police; l'exercice des fonctions qui leur seront attribuées ne durera qu'autant que le conseil général le jugera nécessaire : ils porteront pour marque distinctive un ruban tricolore en sautoir ; leur traitement sera fixé par le conseil général.
« Art. 3. Il sera adjoint aux consignes des portes de la ville, des surveillants en nombre suffisant pour qu'ils puissent se relever, afin que la loi concernant l'exhibition des passeports, soit rigoureusement exécutée.
Art. 4. Toute personne non actuellement domiciliée en ville, de quelque sexe, état ou profession qu'elle soit, ne pourra passer la nuit en ville, sans s'être présentée, accompagnée de deux citoyens connus qui en répondront, au bureau de la section dans l'étendue de laquelle elle se propose de loger.
« Art. 5. Les commissaires de sections tiendront note sur leurs registres, des noms, surnom, âge, profession et demeure de l'étranger qui leur sera présenté, ainsi que du lieu de sa naissance, du temps qu'il déclarera vouloir séjourner, et de l'objet de son séjour. -
« Art. 6. Lesdits commissaires donneront aux étrangers qui leur auront été présentés, et sur le compte desquels ils n'auront aucun motif de suspicion, une carte portant le cachet de la section et la signature d'un commissaire avec le nom de l'étranger, le numéro et la date de l'enregistrement, et le temps du | séjour.
« Art. 7. Les personnes que les commissaires de sections regarderont comme suspectes, seront conduites à la municipalité, où elles seront interrogées devant l'un des coimtés, qui tiendra procès-verbal d'audition, s il y échet, statuera ce que de droit, suivant l'exigence des cas, et pourra même constituer la personne suspecte en état d'arrestation.
« Pour faire conduire à la municipalité les
personnes qu'ils regarderont comme suspectes, les commissaires de sections pourront requérir la force armée.
« Art. 8. Aucun habitant, aubergiste ou autre, ne pourra donner le logement à un étranger, sans qu'il ait exhibé la carte de la section, ou un billet signé par un officier municipal, lequel ne sera donné qu'aux personnes qui auront été renvoyées à la munici' palité par les commissaires de sections.
« Art. 9. Tous les habitants autres que ceux qui sont chargés de fonctions publiques et élus par le peuple, devront aussi se munir d'une carte de leurs sections respectives. Il en sera de même de tous les étrangers qui sont actuellement en ville.
( Art. 10. Tout habitant ou étranger devra exhiber sa carte de section, lorsqu'il en sera requis de la part des officiers' municipaux, des commandants militaires, et des officiers de police et de sûreté, légalement constitués ou autorisés à cet effet.
« Art. 11. Toute personne qui n'aura pas fait sa déclaration à la section, ou qui en aurait fait une fausse, ou enfin qui n'exhiberait pas sa carte, sera conduite à la section, et de là à la municipalité, s'il y échet, pour y être ordonné et statué ce que de droit, suivant l'exigence des cas.
« Art. 12. Tout habitant ou étranger, qui, changeant de domicile ou de logement, passerait d'une section à une autre, devra se présenter au bureau de la section dans l'étendue de laquelle il entend se loger, pour y obtenir une carte civique.
( Art. 13. Sont exceptés des dispositions relatives aux cartes de sections, les militaires ou autres personnes attachées à l'armée, à qui il aura été donné des billets de logements pour trois nuits ; mais, si leur séjour devait durer davantage, les militaires ou autres devraient se munir d'une carte civique.
« Art. 14. Les billets de logement donnés jusqu'à ce jour sont révoqués; les militaires qui voudront continuer à être logés chez les habitants, devront se présenter de nouveau à la municipalité, et il est expressément défendu à tout citoyen d'admettre chez lui un militaire qui n'aura pas fait renouveler son billet de logement.
« Art. 15. Les anciens règlements concernant la police des cabarets et autres lieux publics, et la déclaration des étrangers, sont maintenus : leur exécution sera spécialement attribuée aux commissaires provisoires de police, qui, à cet effet, devront visiter souvent les auberges, cabarets, cafés, maisons de jeux et autres lieux publics, en prenant préalablement les renseignements qu'ils trouveront convenir dans les registres des commissaires de sections.
« Art. 16. Dans les cas de contraventions aux anciens règlements ci-dessus cités, les commissaires provisoires de police pourront requérir la force armée, et même constituer en état d'arrestation, ainsi que dans tous les cas où la prudence et l'exercice de leurs fonctions l'exigeront, à charge d'en faire, dans le jour, leur rapport à la municipalité.
« Art. 17. Les contraventions aux règlements concernant la police des cabarets et la déclaration des étrangers seront punies d'une amende de trente livres tournois au moins, laquelle pourra être augmentée par le tribunal de police municipale, selon la gravité des cas, sans préjudice aux peines de police correctionnelle, s'il y échet ; le jugement ne sera pas sujet à l'appel. les amendes se paieront de suite entre les mains du sergent de police, à péril d'emprisonnement, et la moitié de l'amende sera au profit du dénonciateur ; non seulement les cabaretiers, mais aussi les personnes qui seront trouvées dans les cabarets après les heures prescrites, seront sujettes à la condamnation de l'amende.
« Art. 18. Les visites domiciliaires pourront avoir lieu, soit de jour, soit de nuit, chez tous les citoyens indistinctement ; elles seront faites sur la réquisition du procureur de la commune, par un officier municipal, ou par un commissaire provisoire de police, qui pourront se faire accompagner d'un ou plusieurs commissaii^s de sections.
« Art. 19. Pour que le service public ne puisse rencontrer aucune entrave, toute personne, de quelque profession qu'elle soit, qui sera requise par un officier municipal ou un commissaire de police, pour fournir ou faire ce qui est relatif à son art, métier ou profession, sera tenue d'obtempérer sur-le-champ, à péril d'emprisonnement.
« Art. 20. Pour ne donner lieu à aucune inquiétude sur les subsistances, et éviter que les suggestions des malveillants ne fassent craindre une disette apparente au milieu d'une abondance réelle, les boulangers et les bouchers seront ténus de s'approvisionner comme de coutume; ceux dont les boutiques seront trouvées dépourvues, seront condamnés, sans appel, à une amende de 150 livres tournois, pour chaque jour de contravention, sans préjudice à plus forte peine, le cas échéant : la moitié de l'amende sera au profit du dénonciateur.
( Pour que personne n'en ignore, le présent arrêté sera lu, publié et affiché en la manière accoutumée.
« Fait en l'assemblée du conseil général le 28 mars 1793, l'an II de la République française.
( Signé : Rohart, secrétaire-greffier.
« Approuvé comme mesure de sûreté générale, pour être provisoirement exécuté.
Lille, le 29 mars, l'an II de la République française.
Les commissaires de la Convention nationale
u Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard, Robert, L. Carnot, Lesage-Senault.
13° Lettre de Garat, ministre de l'intérieur, du 31 mars 1793, par
laquelle il fait passer un mémoire qui lui a été transmis par le
directoire du département de Paris et qui concerne les sourds et muets
et les aveugles-nés. Le mémoire est ainsi conçu (1) :
« Au citoyen Dubois, administrateur du directoire du département de Paris.
« Toute l'institution des sourds-muets, instituteurs, adjoints, répétiteurs, maîtresses et économe, et même les élèves, viennent solliciter de votre surveillance paternelle de vouloir bien obtenir du directoire du département la séparation d'intérêts d'avec l'institution des aveugles-nés. Plus d'une année d'expérience dans la communauté de ces mêm«s intérêts ne prouve que trop combien cette séparation est urgente. Les motifs sont sans nombre ; nous nous contenterons d'en exposer quelques-uns : 1° le défaut d'émulation qui résulte de la réunion d'élèves qui'travaillent et d'élèves qui ne travaillent pas; 2° l'administration économique des uns, les dépenses extraordinaires des autres; 3° l'impossibilité de maintenir l'ordre, la règle et la garde des bonnes mœurs dans l'institution des sourds-muets tant qu'elle ne sera pas circonscrite dans une partie du local entièrement distincte et renfermée sous la surveillance d'un seul portier; 4° les différentes heures des travaux et des repos des deux institutions; 5° l'obsession perpétuelle des créanciers de l'une, qui tourmentent les administrateurs de l'autre; les avantages qui résulteront pour l'une et pour l'autre institution d'une séparation qui rendra plus facile dans les deux la partie économique de la dépense de bouche. Au reste, l'institution des sourds-muets offre à celle des aveugles de partager par égales portions les revenus du local, et le petit mobilier déjà acquis. Cette séparation est d'autant plus urgente que les travaux de l'institution des sourds-muets n'ayant pour clief de tous ses ateliers que son économe, celle des aveugles ayant au contraire deux chefs d'ateliers salariés, l'économe ne peut plus tenir autant en mains, et il faudra nécessairement créer au moins deux places de chefs d'atelier dans l'institution des sourds-muets si la séparation n'avait pas lieu, tandis qu'on trouverait facilement à remplacer l'économe dans l'institution des aveugles, en chargeant de cette partie d'administration ou le premier ou le second instituteur ou l'adjoint, ou enfin un des deux chefs d'atelier, tous très peu occupés, tous très propres à remplir les fonctions de l'économe.
Si le directoire craignait de trop accorder en accordant la séparation absolue, s'il pouvait appréhender qu'il ne résultât quelques inconvénients de cet acte de justice demandé au nom des intérêts des uns et des autres, l'institution espère que cette séparation sera du moins accordée provisoirement et sans tirer à conséquence, attendu les inconvénients sans nombre qui résultent, pour le moment, de cette réunion, et les avantages multipliés que pro curera aux deux institutions la séparation désirée.
« Signé : Sicard, premier instituteur ; Sal-van, deuxième instituteur ; Duhamel, instituteur-adjoint ; Polet, père ; Polet, fils ; Masset, économe ; de Tremolet, maîtresse de sourdes-muettes; Jobin, maîtresse de sourdes-muettes.
lre série. t. i xi.
A cette pétition est jointe : une lettre du directoire du département de Paris au ministre de l'intérieur, du 16 mars 1793, lui transmettant la pétition afin qu'elle fût mise sous les yeux de la Convention ; en effet, pour que la séparation demandée pût être effectuée, le rapport de l'article 6 du décret du 28 septembre 1791 était nécessaire. « Par la disposition du local, dit le directoire, la séparation peut s'effectuer sans aucunes dépenses. » La lettre est signée : Dubois, E.-J.-B. Maillard, Momoro, Leblanc, Houzeau.
(La Convention renvoie ces différentes pièces au comité d'instruction publique.)
14° Lettre de Glavière, ministre des contributions publiques (1), concernant les dépenses relatives à la fabrication des assignats.
(La Convention renvoie la lettre au comité des finances.)
15° Lettre de Garat, ministre de l'intérieur, pour rendre compte à la Convention d'une circulaire qu'il envoie aux citoyens Doerner et compagnie, relative à l'interruption de toute communication entre la France et l'Angleterre.
(La Convention renvoie la lettre au comité de défense générale.)
16° Lettre de Garat, ministre de l'intérieur, relative aux dépenses présumables du département de l'intérieur pour 1793.
(La Convention renvoie la lettre au comité des finances.)
17° Lettre de Garat, ministre de l'intérieur, relative à la caisse de la bibliothèque nationale.
(La Convention renvoie la lettre au comité des finances.)
18° Lettre de Garat, ministre de l'intérieur, relative à la loi du 26 août, concernant la déportation des prêtres.
(La Convention renvoie la lettre au comité des finances.)
19° Lettre du citoyen Dubois, premier suppléant du tribunal d'Ervy, par laquelle il demande que l'exception portée en faveur des juges à l'égard du recrutement, s'étende aux suppléants; cette lettre est ainsi conçue (2) :
« Le
« Citoyen Président,
« Par la loi relative au recrutement des 300,000 hommes, la Convention a
décrété que tous les membres des tribunaux civils seraient exempts de
concourir à ce recrutement; il n'y a pas de doute d'après une loi aussi
précise qu'un premier suppléant en état de réquisition permanente et
obligé de monter sur le siège pour remplacer un juge nui se trouve au
tribunal criminel et qui, outre ce président du
« Aujourd'hui, cependant, cette exemption prononcée par la loi même, paraît éprouver quelques difficultés; la question proposée aux commissaires envoyés pour présider au recrutement l'ont décidé en faveur des suppléants d'après l'avis du comité central ; elle l'a été de même par le citoyen Garnier, commissaire de la Convention ; le seul citoyen Thurot, collègue du citoyen Garnier, paraît être d'un avis contraire. Si on peut forcer les suppléants des tribunaux et les membres des bureaux de conciliation à concourir au recrutement, il n'en peut résulter qu'un très grand mal pour la République, parce que c'est désorganiser les tribunaux et mettre des entraves dans la justice qui ne peut être trop prompte à être rendue ; et le mal serait encore plus grand dans notre pays où l'on aurait une difficulté étonnante à remplacer les suppléants.
« Partisan de la République et ayant toujours eu à cœur de faire le bien de ma patrie et d'exécuter les lois en tout leur contenu, je me trouve forcé de vous distraire de vos travaux pénibles pour vous supplier de décider et faire décider par la Convention, et par le décret sur le recrutement qu'en exemptant les membres des tribunaux civils on a entendu y comprendre les suppléants qui, sans contredit, font partie des membres desdits tribunaux. Une prompte décision sur cette question, évitera dans notre pays quelques difficultés et empêchera la loi relative au recrutement d'éprouver aucun retard.
« J'ai l'honneur d'être, avec respect, votre très humble et obéissant serviteur.
« Signé : Dubois, citoyen d'Ervy. »
(La Convention passe à l'ordre du jour.)
20° Lettres des citoyens Focledey, député du département du Nord, et du citoyen Balla, député du Gard (1) ; ils annoncent, l'un et l'autre, que de graves infirmités les obligent à donner leur démission de représentants à la Convention nationale.
(La Convention renvoie ces deux lettres au comité des décrets.)
21° Lettre des corps administratifs de la ville de Nancy, qui écrivent à la Convention qu'ils ont pris toutes les mesures nécessaires pour maintenir la tranquillité dont jouit cette Ville et que plusieurs malveillants avaient tenté inutilement de troubler. Ils envoient l'extrait des délibérations du conseil général dè la commune, contenant différentes mesures de sûreté générale, en date du 23 mars dernier.
(La Convention renvoie la lettre au comité de sûreté générale.)
22° Lettre de Monge, ministre de la marine, par laquelle il donne
connaissance à la Convention de la conduite généreuse de Pierre-
« Je m'empresse de vous communiquer un trait d'humanité, de bienfaisance et de désintéressement.
« Les citoyens Pierre-Grégoire Noël et Dammam, tous deux maîtres pêcheurs du port de Dunkerque, viennent de donner une nouvelle preuve au caractère français à • la vue d'un bâtiment anglais prêt à être englouti dans les flots ; ces braves marins, incapables de conserver aucun sentiment de haine contre des ennemis, lorsqu'ils sont dans le malheur ou dans le danger, oublient leurs propres intérêts, ne comptent pour rien les périls auxquels ils s'exposent, et parviennent à sauver ces malheureux naufrages d'une mort presque inévitable, le bâtiment ayant coulé bas à leurs yeux, quelques instants après. Ces généreux marins ne se contentent point d'avoir sauvé la vie à ces étrangers; ils me demandent d'être autorisés à les reconduire eux-mêmes dans leur patrie ; mais je n'ai pas jugé convenable, dans les circonstances actuelles, d'accéder à leur vœu, et en même temps je n'ai pas cru pouvoir faire un meilleur emploi des fonds que la Convention nationale a mis à ma disposition, qu'en y faisant participer les deux citoyens dont le nom est bien digne d'être consacré dans les fastes de la reconnaissance publique.
« Il m'est bien doux, citoyen président, d'avoir à transmettre de pareilles actions à la Convention nationale ; quels exemples pour l'Angleterre, et quelle réponse aux lâches calomniateurs de la nation française !
u Signé : Monge. »
(La Convention approuve la conduite du ministre et ordonne la mention honorable de l'action des citoyens pêcheurs.)
23° Lettre des administrateurs des districts de Ghallans et des Sables, département de la Vendée} en dale du 25 mars 179S, qui font part de la situation fâcheuse de ce pays, par rapport aux rebelles qui le désolent; ils font passer une lettre signée Joly. se disant commandant général de cette armee.
Suit la teneur de ces deux pièces (2) :
I
Lettre des administrateurs des districts de
Ghallans et des Sables, département de la
Vendée à la Convention nationale.
« L'audace des insurgés est à son comble; ils ont tenté plus d'une fois
de s'emparer de la ville, qui leur offrirait l'invasion des côtes
maritimes; mais une vigoureuse résistance a paralysé leurs efforts
criminels. Ils se promettent de revenir à la charge et nous vous
prévenons avec douleur que nous ne pourrons tenir longtemps contre cette
horde de brigands qui s'ao-
« Vous jugerez de leur audace par une sommation que nous a adressée le sieur Joly, se disant commandant de l'armée chrétienne. Cette sommation porte que si la ville n'est pas livrée sous trois heures, tout sera dévasté, incendié et les habitants passés au fil de l'épée.
« Nous mourrons à notre poste, mais si vous voulez sauver la patrie, législateurs, envoyez-nous des secours qui puissent en imposer aux rebelles. Nous n'avons à cette heure que deux bataillons; ce sont ceux que nous ont envoyés nos frères de l'île de Ré.
II
Lettre du chef des insurgés aux administrateurs des districts de Challans et des Sables,
département de la Vendée.
« Messieurs, nous nous sommes soulevés pour combattre les principes désastreux avec lesquels vous avez renversé le trône et l'autel.
« Une des lois les plus respectées parmi vous est celle qui déclare que la souveraineté réside essentiellement dans le peuple. Eh bien ! nous sommes une partie du peuple; nous voulons des lois qui ne soient pas sans force et une religion qui soit respectée. Nous nous armons contre la tyrannie; nous serons secondés par d'autres départements.
« Ne nous forcez pas à répandre le sang de nos frères; pardonnez-nous, au contraire, les excès que quelques-uns de nous ont commis dans les premiers mouvements de leur vengeance.
« Ouvrez les yeux et considérez que la France, autrefois si florissante, n'est plus qu'un chaos. Toutes les vertus restent confondues avec les crimes les plus affreux; évitez les malheurs qui vous attendent et devenez nos amis. Si vous ne répondez pas dans trois heures et si vous ne traitez pas notre parlementaire avec tous les égards qu'il mérite, nous saurons tirer vengeance de cette violation du droit des gens; tout sera dévasté, incendié et les habitants passés au fil de l'épée.
« N'oubliez pas que nous ne sommes pas des brigands. Nous venons assurer au peuple sa véritable liberté qui consiste dans l'exercice de la religion et le maintien des propriétés dont les citoyens ne jouissent plus. Yous serez responsables du sang qui va couler. Nous sommes résolus de ne poser les armes qu'après la victoire, ou de mourir en combattant pour une si belle cause la religion et le roi. »
( Signé : Joly. »
(1). On croirait, à entendre tous ces renseignements, que le ministre de la marine est de connivence avec nos ennemis; je demande que le ministre de la marine rende compte de l'emploi qu'il a dû faire, contre ces brigands, de nos forces maritimes.
La Convention a déjà rendu plusieurs décrets qui sont demeurés illusoires, parce que les ministres ne les exécutent pas. Depuis trois mois, le conseil exécutif sait que nos côtes sont menacées. Il y a plus de sept semaines que le procureur syndic du Calvados est venu à la barre vou3 donner des renseignements sur les rassemblements d'émigrés à Jersey. Je demande que la Convention prenne les moyens de faire déclarer au conseil exécutif s'il a ignoré ces faits, et que le comité de défense générale vous présente les mesures propres à sauver nos côtes.
J'annonce avec satisfaction à l'Assemblée que 10 frégates et 6 vaisseaux de ligne croisent dans la Manche, et ont pour objet de protéger ces départements menacés. Ce fait vient de m'être affirmé par deux de mes collègues qui sortent des bureaux de la marine.
Cela dit, j'estime que nous devons examiner la question dans son ensemble; les nouvelles partielles que nous recevons des administrations, nous conduisent à des mesures partielles. Je demande* que le général Labourdonnaye rende compte, toutes les vingt-quatre heures, de la situation de son armée.
Nous abandonnerons-nous plus longtemps à un conseil exécutif dont l'inertie compromet sans cesse la sûreté de la République 1 Je demande : 1° que le conseil exécutif soit tenu, séance tenante, d'obéir au décret qui lui ordonne de rendre compte de la conspiration de Bretagne; 2° que le conseil exécutif soit obligé collectivement de vous instruire, dans vingt-quatre heures, de la situation de la République, chaque ministre dans son département. {Applaudissements des tribunes.)
Je propose d'examiner si dans les circonstances extraordinaires où l'on se trouve, il ne convient pas de donner à la Convention nationale plus de part dans l'exécution des mesures de salut public. Je demande que le comité de législation fasse sur cette question un prompt rapport. J'estime, en ce qui me concerne, que la surveillance de l'exécution des lois doit être momentanément confiée à un certain nombre de membres pris dans son sein.
Un membre cite deux faits qui, selon lui, prouvent que* le conseil exécutif est indifférent sur le salut de la patrie. U a confié, dit-il, le commandement de la citadelle de Yerdun à un citoyen très bon patriote, mais qui n'a aucune connaissance militaire; et il vient de donner le grade de capitaine dans l'armée du midi à un mauvais citoyen chassé des bureaux du dépar-, tement de la Nièvre.
(Seine-Inférieure) observe que les prêtres passés en Angleterre ont été rejetés sur la côte de Normandie, pour exciter la révolte dans cette partie de la République. Il observe aussi qu'il est impossible de faire tenir des frégates entre les îles de Jersey et de Guerj nesey, où sont la plupart de nos ennemis, et qu'on ne peut défendre ces côtes qu'avec des chaloupes canonnières et des armées de terre. Il demande que le pouvoir exécutif rende compte des forces qu'il y a envoyées.
l'aîné appuie la proposition de Ben-tabolle et de Pontécoulant. Il propose de décréter que, dans vingt-quatre heures, le pouvoir exécutif rendra compte en personne eb dans le
sein de la Convention de la situation de toutes les parties de la République. Il demande, en outre, que, dans ces mêmes vingt-quatre heures, le conseil exécutif rende compte à la Convention de l'exécution des différents décrets qui lui ordonnent de remettre à l'Assemblée les états et tableaux de tous les généraux de tous grades, tant civils que militaires, des armées de terre et de mer, avec la date de leurs différentes promotions, et de soumettre dans le même délai lesdits états, ainsi qu'ils ont été exigés.
(La Convention adopte ces deux propositions (1).
renouvelle sa demande et propose de l'étendre à tous les commandants en chef.
(La Convention décrète que les commandants en chef des armées de la République seront tenus d'adresser, toutes les vingt-quatre heures, à la Convention nationale et au conseil exécutif l'état de situation des armées^qui sont sous leurs ordres) (2).
rappelle sa proposition et demande un vote semblable à celui que l'Assemblée vient de prendre pour la motion de Va-lazé.
Plusieurs membres : Non, non, l'ordre du jour.
(La Convention passe à l'ordre du jour) (3).
annonce que Monge, ministre de la marine, a avoué hautement le vendredi précédent au comité de défense générale qu'il était au-dessous de ses fonctions. Il s'étonne que le comité n'en ait pas rendu compte.
Un membre : Il n'a pas dit cela.
(Gironde). S'il nel'a pas dit, il a eu tort, car cela est.
(La Convention passe à l'ordre du jour) (4).
Si vôus voulez avoir des armées bien disciplinées, bien approvisionnées, il faut nommer un ministre de la guerre qui ait votre confiance : car Beurnonville ne l'a pas (Applaudissements des tribunes), et voici pourquoi : 1° c'est que Dumouriez et Beurnonville ont laissé échapper les ennemis au mois d'octobre, lorsque 80,000 hommes attestent qu'ils pouvaient les anéantir; 2° Beurnonville n'a pas voulu seconder la marche victorieuse de Cus-tine. Il eut l'impudeur de dire qu'il n'avait que 10,000 hommes, pendant que nous l'avons trouvé au milieu d'une armée de 35,000. Sans lui, on aurait pris Coblentz.
Beurnonville est un orgueilleux qui a manifesté au milieu de vous autant
de fatuité que d'ambition, qui nous a raconté qu'il avait remporté 172
victoires, qui n'a jamais parlé que de lui. Je demande qu'on ne laisse
pas plus longtemps la direction de nos braves armées entre les mains de
ce vil intrigant, et qu'on procède à la nomination d'un nouveau ministre
de la guerre. (Nouveaux applaudissements des tribunes.)
Je ne dénonce pas Beurnonville, mais je dénonce un de ses agents; c'est Blanchard : c'était l'aristocrate le plus décidé de l'Assemblée législative. Nous sommes prêts à tomber dans l'abîme par la faute du conseil exécutif; il veut, dit-on, donner sa démission; mais moi je ne le veux pas. Je demande qu'une commission de six membres soit chargée de surveiller le conseil exécutif, et pour cela il ne faut pas de demi-mesure. Qu'on ne choisisse pas indistinctement dans les deux côtés, qu'on la prenne à gauche ou à droite, si on préfère, mais qu'on sauve la patrie.
(La Convention décrète qu'il n'y a pas lieu â délibérer sur ces propositions) (l).
(Calvados) (2). Citoyens, on a dit avec raison que nos côtes n'étaient pas armées, mais dans l'impossibilité où se trouve momentanément le conseil exécutif de pourvoir à tous les besoins, j'estime qu'il est une mesure qui pourrait, en partie du moins, parer aux premiers embarras ; ce serait de laisser quelque initiative aux pouvoirs locaux et de les autoriser à faire tout leur possible pour la défense du territoire. C'est ainsi que, pour les côtes du Calvados, on pourrait utiliser 12 vieux canons, qui sont à cette heure dans l'impossibilité de servir, mais qu'il serait facile de réparer et de mettre en état.
Je propose à la Convention de décréter que les directoires des départements maritimes feront mettre incessamment en réparation les redoutes, corps de gardes, pièces de canons et autres armes qui se trouvent le long de leurs côtes, et que les fonds nécessaires à ces dépenses seront pris provisoirement dans les caisses des districts aux charges par le directoires des départements d'en rendre compte au conseil exécutif.
Un grand nombre de membres : Appuyé, appuyé!
(La Convention décrète la proposition de Dumont) (3).
, secrétaire, reprend la lecture des lettres, adresses et pétitions envoyées à l'Assemblée :
24°Lettre des citoyens Bernard (de Saintes) et Guimberteau, commissaires
de la Convention dans les deux Charentes (4), qui écrivent de la
Rochelle, le 28 mars 1793, pour faire passer à l'Assemblée deux arrêtés
qu'ils ont pris, l'un pour la fabrication des piques, l'autre pour les
subsistances de la Rochelle. Ils invitent le ministre de l'intérieur à
faire conduire dans cette ville des grains; ils annoncent, en attendant
cette arrivée, un emprunt t de 200,000 livres pour parer aux premiers
besoins.
(La Convention approuve les arrêtés pris par ses commissaires et renvoie leur lettre au comité de défense générale.)
25° Lettre du citoyen, Blaux, commissaire de la Convention nationale (1), qui fait passer copie de celle qu'il a écrite au citoyen Ligne-ville, commandant en chef l'armée de la Moselle, en date du 28 mars, l'an II de la République.
(La Convention renvoie la lettre aux comités de la guerre et des marchés.)
26° Lettre du citoyen Couturier, commissaire de la Convention dans le Bas-Rhin, la Meurthe et la Moselle, par laquelle il annonce qu'un attroupement, qui s'était formé dans la commune de Molsheim, a été dissipé par la troupe; elle est ainsi conçue (2):
« Strasbourg,
Citoyens collègues,
« Je vous ai instruit, depuis quelques jours de différentes petites
tentatives et fermentations, entre autres de l'affaire du marchand de
bagues à devises ; je dois maintenant vous instruire que, de deux points
du départer ment, je fus hier sur les trois heures de relevée prévenu
qu'un rassemblement d'hommes armés passaient de village en village et
partout grossissaient ce rassemblement au point qu'au moment où des
maires patriotes vinrent avertir, ils assurèrent que ce rassemblement
était déjà de 400 à 500 hommes oui se portaient sur Molsheim où ils
paraissent être attendus. Je me réunis aussitôt aux collègues Louis et
Pflieger, qui viennent d'arriver pour le recrutement. Nous nous rendîmes
aussitôt au département, où nous reçûmes par écrit les déclarations
desdits maires qui nous dirent au surplus que les citoyens ainsi
coalisés criaient : Vive le roi, les princes, etc., et qu'ils voulaient
combattre, rétablir la religion, et rentrer dans lès anciens droits de
l'Alsace. Nous prîmes aussitôt un arrêté, de concert avec le
département, portant réquisition au général de faire marcher 500 hommes
avec deux pièces de canon vers Molsheim. Cette troupe est partie vers
les cinq heures et demie ou six heures du soir, et nous attendons
impatiemment des nouvelles pour vous les transmettre. Ceci est fait pour
faire des réflexions, surtout quand je me rappelle les différents coups
fourrés qui ont été tentés depuis une huitaine de jours, et que les
Autrichiens se sont nichés dan une île du Rhin entre Brisach et
Strasbourg, dont il s'agit de les faire déguerpir. Je présume que tous
ces stratagèmes sont inventés pour nous occuper de ce côté-ci pendant
que les forces ennemies se portent peut-être ailleurs. En tout cas,
collègues, il n'est pas un patriote qui ne croie à une conspiration
secrètement fomentée et qui n'a osé éclater que depuis que les gazettes
et les missives des pétitionnaires déportés annon-
« Yotre collègue,
« Signé : Couturier.
« P.-S. — J'ajoute que Clavière est le protecteur des députés, que Thomassin surtout, le plus artificieux, est son bras droit. S'ils avaient su que, quoique bon comme je le suis, je sais approfondir les trames je pense qu'ils auraient pris le parti de rester à Strasbourg.
« Au moment arrive le collègue Dentzel à l'effet de me prendre pour aller incontinent organiser les trente-deux communes près Landau. Me voilà entre l'enclume et-le marteau. Adieu. »
27° Lettre du citoyen Couturier, commissaire de la Convention dans le Bas-Rhin la Meurthe et la Moselle, par laquelle il annonce que l'attroupement de Molsheim a été dissipé, surtout par les volontaires malades ; elle est ainsi conçue (2) :
« Strasbourg,
« Citoyens collègues,
« Les commissaires des corps administratifs qui ont conduit la troupe envoyée pour défaire les rebelles qui avaient commencé un rassemblement, dont la suite aurait été extrêmement funeste s'ils avaient encore eu une douzaine d'heures de tèmps pour le renforcer, sont venus hier. Ils s'occupent aujourd'hui à dresser leur rapport ; et, attendu que l'un d'eux est à l'instant' venu me faire le narré verbal de ce qui s'est passé, j'ai pensé que, pour dissiper les inquiétudes de la Convention nationale, je devais lui faire part de ce que j'en ai retenu.
( Ce rassemblement a été concerté depuis que les ennemis de la chose
publique ont appris *e succès de leurs menées à Paris et qu'ils avaient
vu dans les bulletins que plusieurs autres départements étaient en
insurrection. J e vous ai mandé que le dimanche antéprécédent, dans la
ville de Strasbourg même un pareil complot avait voulu se manifester,
mais qu'il a étf étouffé dans le moment. Celui qui vient d'avoir lieu à
Molsheim a commencé par quelques malveillants salariés par nos ennemis
qui d'abord, par leurs conseils, ont engagé les jeunes gens à se
révolter contre le tirage de la milice. Ceux-ci, d'abord peu nombreux,
pas-
( On interroge maintenant les détenus pour découvrir les conseilleurs, et on agite au club la«question dë savoir si l'on peut mettre à exécution votre décret du 19 du courant, concernant les punitions à infliger aux prévenus d'avoir pris part à des révoltes qui auraient lieu à l'époque du recrutement. Les détenus sont positivement dans les termes de la loi, qui est bien arrivée ici, mais qui n'a pas encore été publiée dans les communes.
« Les ennemis de la Révolution marchent maintenant les oreilles basses ; on voit courir le parents et amis des prisonniers, dont les liens sont extrêmement étendus, et finalement je crois pouvoir dire que, si les déportés ne peuvent, dans ces moments critiques, venir influencer par leur seule présence, le département du Bas-Rhin est sauvé.
« Votre collègue,
« Signé : Couturier. »
(La Convention décrète la mention honorable de la conduite des volontaires et renvoie ces deux lettres au comité de sûreté générale.)
28° Lettre des commissaires Léonard Bour-
don et Prost (1), ils font part des mesures - efficaces qu'ils ont prises pour dissiper les obs tacles qu on voulait opposer au recrutement dans le département de la Côte-d'Or; ils se plaignent du renchérissement des grains dans ce pays.
(La Convention renvoie la lettre aux comités de la guerre et d'agriculture réunis.)
29° Lettre des citoyens Roux et Perrin, commissaires de la Convention dans la Haute-Marne et les Vosges, par laquelle ils annoncent que le recrutement est effectué et font part de la destitution prononcée par eux de deux officiers de la ci-devant maîtrise des eaux et forêts de Bourmont; elle est ainsi conçue (2) :
« Epinal,
« Citoyen Président,
« C'est toujours avec la plus vive satisfaction que nous annonçons à la Convention nationale que le recrutement est absolument terminé dans le département dés Vosges. L'habillement et l'équipement vont aussi leur train, et nous pouvons assurer que pour le 15 du mois prochain tous les volontaires seront en route .pour Metz, lieu de leur destination.
« Nous joignons à notre lettre une copie du procès-verbal de la suspension que nous avons prononcée contre le ci-devant maître particulier des eaux et forêts de Bourmont et le procureur du ci-devant roi en la même maîtrise. Nous avons été nécessités à user de cette mesure toujours pénible pour des hommes sensibles et qui n'aimeraient à rencontrer que de zélés patriotes ; la dénonciation par écrit du directoire du district de Lamarche nous en a fait un devoir.
(( Salut et fraternité.
« Les Commissaires de la Convention dans les départements de la Haute-Marne et des Vosges.
« Signés : Roux, Perrin. »
Suit l'extrait de l'arrêté des commissaires de la Convention nationale déposé au secrétariat du district de Lamarche (3).
Au nom de la nation française,
« Nous, commissaires de la Convention nationale, envoyés dans le département des Vosges par décret du 9 présent mois et d'après l'article 8 du même décret, sur la dénonciation à nous faite par le directoire du district de Lamarche, non seulement de la négligence des citoyens Alexandre, maître particulier de la maîtrise de Bourmont et Henry, procureur du ci-devant roi, dans la même maîtrise; mais encore de l'incivisme connu et en quelque façon démontré par l'émigration des quatre fils du premier et du fils unique de Henry;
« Considérant que des fonctionnaires aussi négligents et aussi suspects,
au lieu de servir la chose publique, cherchent à l'entraver par toutes
sortes de moyens;
« Arrêté à Lamarche, le
Signés : Perrin, Roux. »
(La Convention décrète la mention honorable du zèle des citoyens et renvoie ces deux pièces au comité de sûreté générale.)
30"Lettres et pièces relatives à la destitution faite par les citoyens Borie et Bordas, commissaires de la Convention nationale dans les départements de la. Haute-Vienne et la Cor-rèze (1), de Combret, capitaine et Tourme-nière, maréchal des logis de la gendarmerie nationale dans ce département.
(La Convention renvoie ces pièces aux comités de sûreté générale et de la guerre).
31° Pétition de la section de la fontaine de Grenelle, qui fait l'éloge du dévouement civique d'un grand nombre de domestiques désarmés par la loi, et demande qu'il lui soit permis de redonner des armes à ceux de ces citoyens qui méritent la confiance publique.
(La Convention renvoie la pétition au comité de la guerre.)
32° Lettre de Garat, ministre de Vintérieur, relative à des propos séditieux tendant à arrêter le recrutement "dans les districts d'Agen, Marmande, etc. Il annonce deux procès-verbaux d'interrogatoire qui ne sont pas renais à la lettre.
(La Convention renvoie la lettre au comité de sûreté générale.)
33° Lettre des citoyens Varlet, Lequinio, Dubois-de-Bellegarde, commissaires de la Convention nationale aux frontières du Nord qui rendent compte de l'état affreux des routes.
(La Convention renvoie la lettre au con-ité des ponts et chaussées pour en faire rapport très incessamment.)
34° Lettre de Clavière, ministre des contributions publiques, qui observe, qu'une coupe extraordinaire de bois est nécessaire pour les besoins de la marine.
(La Convention renvoie la lettre au comité des douanes pour en rendre compte séance tenante.)
Une députation de la Section de la Paix, dite des Fédérés, est admise à
la barre (2).
répond à l'orateur et accorde à la députation les honneurs de la séance.
(La Convention renvoie la pétition à la commission des marchés pour en faire un rapport le lendemain.)
Deux députés, dont le maire de la commune de Saint-Arnoult, département de l'Oise, sont admis à la barre (1).
Ils se plaignent de la rareté des subsistances dans leur commune et de leur excessive cherté. Ils demandent à la Convention d'ordonner qu'il sera fait, dans la commune de Saint-Arnoult, un recensement de tous les grains qui s'y trouvent, afin de constater s'ils peuvent suffire jusqu'à la récolte.
répond aux pétitionnaires et leur accorde les honneurs de la séance.
(La Convention renvoie la pétition au comité d'agriculture, auquel elle adjoint trois commissaires du comité de la guerre.)
Une citoyenne de Tonnerre se présente à la barre (2).
Elle y donne lecture de la pétition suivante (3) :
Tonnerre, ce
« Citoyens législateurs,
« L'esprit public languissait dans nos climats ; on n'était plus à la hauteur de la Révolution. L'aristocratie avait fait des progrès et prenait insensiblement la place du civisme; nous avons vu le désordre. Nous avons réuni et nous réunissons encore tous les jours les bons citoyens qui s'empressent de venir dans notre société jurer d'adhérer à tous vos décrets et reconnaître l'unité et l'indivisibilité de la République : c'est là que nous nous instruisons réciproquement, et nous tâchons de communiquer aux citoyens qui se rendent à nos séances tout le feu de notre patriotisme et de notre attachement à la loi. Non seulement nous avons fait des prosélytes dans notre ville, mais encore dans les campagnes circonvoi-sines ; déjà un grand nombre d'habitants de leurs communes sont venus se joindre à nous avec leurs officiers municipaux.
« Enfin nous espérons que les progrès augmenteront de plus en plus et que
les citoyens trompés par les mensonges et les calomnies des prêtres
fanatiques, par les séductions, les promesses et les faux bruits dont
les repaît la cabale aristocratique,, reconnaîtront leurs erreurs, se
rangeront avec nous autour de notre mère commune, la patrie, pour lui
faire un rempart inexpugnable; c'est le but que nous nous proposons.
« Nous avons ouvert une souscription et nous avons invité tous ceux qui aiment véritablement la République de faire, selon leurs moyens, le sacrifice de dons patriotiques pour nos frères d'armes qui prodiguent gér-néreusement leur sang pour nous ; c'est un tribut que nous leur devons.
« La société, les citoyens de cette ville, les communes de Gigny, de Rossey, Tronchoy, Cheney et Dannemoine se sont empressés de satisfaire aux besoins de nos défenseurs. Le fruit de notre collecte monte à soixante-huit chemises, vingt paires de souliers, seize paires de bas, huit paires de guêtres et deux mouchoirs; nous prévenons que si l'envoi n'est pas complet, tel que nous l'avons annoncé, c'est que le surplus n'est pas fait.
« Nous vous prions, citoyens législateurs, d'agréer ces offrandes comme un faible gage de notre reconnaissance pour nos braves volontaires ; ils sont tous indistinctement les enfants de la patrie. Si cependant ceux des premiers bataillons de l'Yonne, qui sont les nôtres d'une manière plus particulière, étaient dans le besoin, nous désirerions que ces objets leur fussent appliqués ;
« La souscription reste ouverte et nous espérons bientôt faire un second envoi.
Signé : Delagrange, président ; Cherest, fils, secrétaire. »
répond à la pétitionnaire et lui accorde ,les honneurs de la séance.
(La Convention décrète la mention honorable et ordonne l'insertion de cette pétition au Bulletin.)
Le citoyen Gamier, grenadier volontaire du deuxième bataillon de la Côte-d'Or, est admis à la barre. Il s'exprime ajnsi (1) :
Citoyens représentants,
Engagé dès le mois de septembre 1791, comme grenadier dans le second bataillon de la Côte d'Or, après plusieurs combats contre les Autrichiens, je restai sur le champ de bataille à la journée de Grisevelle, atteint de trois coups de feu au moment où je volais au secours du brave Cazotte, mon lieutenant-colonel, impitoyablement massacré sous mes yeux.
Neuf mois de traitement suivi n'ont point encore entièrement cicatrisé mes blessures, mais le cri de la patrie en danger a retenti à mes oreilles. Je ne puis résister au désir ardent de lui donner de nouvelles preuves de mon dévouement.
Contraint par mon état à renoncer au service de pied, je me sens encore la force de combattre à cheval.
Représentants, ce ne sont point des honneurs, des places, des
récompenses, que je viens solliciter. Le vrai patriote se trouve assez
payé par l'estime de ses concitoyens. Ma seule ambition se borne à
pouvoir me mesurer encore
répond au pétitionnaire et lui accorde les honneurs de la séance.
(1). Ce brave citoyen a été inscrit dans la gendarmerie nationale de la Côte-d'Or. Mais s'il a du courage, il n'a point de fortune, et ne peut se donner un cheval. Le citoyen Marey, notre collègue, a fait offrande d'un cheval ; il est à la disposition du ministre de la guerre. Je demande que ce cheval soit donné à ce citoyen, avec un secours provisoire de 300 livres.
(La Convention nationale décrète que le ministre de la guerre est autorisé : 1° à faire remettre au citoyen Garnier, pour son service dans la gendarmerie et à titre de récompense, le cheval d'escadron offert à la patrie par le citoyen Marey, député de la Côte-d'Or et qui est encore au pouvoir de ce dernier ; 2° à lui faire délivrer, à titre de secours provisoire, une somme de 300 livres) (2).
(3). Je demande à présenter à l'Assemblée quelques observations. L'avant dernière nuit, vos comités réunis de défense et de sûreté générale, ont fait arrêter plusieurs personnes compromises dans la conspiration de- Dumouriez. A cette heure ils estiment que la nécessité s'impose de les interroger promptement et de lever les scellés qui ont été apposés sur leurs papiers. Je vous propose, en leur nom, de procéder de suite à leur interrogatoire et d'ordonner l'inventaire des pièces recueillies à leur domicile.
(La Convention nationale décrète qu'elle autorise son comité de surveillance et de sûreté générale à faire procéder à la levée des scellés et à l'interrogatoire des personnes arrêtées le premier de ce mois, en vertu de l'arrêté pris par les comités de défense générale et de sûreté générale réunis) (4).
Je demande la parole pour une motion, dont je désire entretenir la Convention, cercernant la situation de la Corse (5).
Citoyens, de toutes parts les trahisons nous environnent ; dans le Nord elles sont à découvert ; dans le Midi elles n'attendent pour éclater que le moment favorable.
Depuis longtemps les départements qui avoi-sinent l'île de Corse se sont
soulevés contre le despotisme qu'y exerce le général Paoli. C'est là que
la liberté publique est enchaînée; que les droits de l'homme sont
méconnus, et les brigandages de toute espèce commis ou encou-
La société républicaine de Toulon, témoin, des malheurs qui désolent cette île, vous les dénonce de nouveau. Elle m'a chargé d'être son organe, et je ne puis mieux remplir les devoirs qu'elle m'a imposés, qu'en vous donnant lecture de cette dénonciation, à laquelle j'ajouterai d'autres faits et quelques réflexions.
Extrait de l'adresse de la société républicaine de Toulon, séante à Saint-Jean, à la Convention nationale.
« Citoyens législateurs, le département de Corse gémit sous l'oppression la plus affligeante; des actes arbitraires y sont encore exercés avec autant et plus de barbarie que sous l'ancien régime ; la loi salutaire de la procédure par jurés y est méconnue; des citoyens y sont sacrifiés à l'aristocratie la plus violente; ils sont jetés dans des cachots, au mépris des drois sacrés de l'homme et du citoyen.
« Une bastille y existe encore, et les malheureux que les ennemis de la liberté parviennent facilement à y engloutir, y sont traités avec toute la barbarie des premiers siècles.
(( Le lieutenant général Paoli, à qui la nation française a accordé sa confiance, protège, dirige ces attentats, ayant à sa dévotion un régiment suisse, qui est encore en garnison à la solde de France, tandis que depuis longtemps, il ne doit plus en exister au service de la République ; il est dans cette ville non le défenseur du peuple, mais son tyran.
« L'administration du département, qui devrait s'y opposer, ferme les yeux. Les sociétés populaires sont outragées; les conseils généraux des ditricts, qui sont dans les bons principes, ne sont pas consultés. Les commissaires de ce département répandent, avec la force armée, la terreur et la crainte partout; ils accueillent et protègent les prêtres réfrac-taires et leur font payer forcément ce que la loi leur a solennellement refusé.
« Bien loin d'exécuter la sage mesure de déportation, ils réduisent à l'exil ceux qui veulent combattre l'hydre du fanatisme. Le secret des postes y est violé, les lettres sont décachetées et retenues. Le citoyen Sémonville doit à cette infraction atroce le défaut de succès dans la mission qui lui était confiée pour Constantinople, qui était intéressante pour la République, et dont on est parvenu par là à l'éloigner.
« Tout anonce et présage malheureusement avec certitude une désorganisation sociale dans cette île. Hâtez-vous, citoyens législateurs, de remédier à tant d'atrocités. Paoli est coupable; il veut être souverain dans ce département; il en exerce tout le despotisme : sa place de lieutenant général lui en facilite les moyens; vous devez les lui enlever. Prononcez sans délai sa destitution; livrez sa tête au glaive de la loi; ordonnez l'expulsion du régiment suisse, qui n'est dans cette île que par une violation formelle des décrets; délivrez les malheureux habitants de toutes ces vexations, qui souillent encore la liberté; hâtez-vous de prendre des mesures rigoureuses. »
Citoyens, ce tableau effrayant des crimes du général Paoli, et de l'administration du département de Corse, ne vous offre qu'en masse les terribles vérités qui doivent attirer sur les
têtes coupables toute la sévérité nationale. Paoli, arrivé en Corse, loin d'y faire respecter la liberté qui le rendait à sa patrie, ne songea au contraire qu'à s'y former un parti. Le souvenir de ses anciennes persécutions, et les pouvoirs immenses qui l'y accompagnèrent, servirent efficacement à la réussite de ses projets. Revêtu de l'autorité militaire., comme général de division; de l'autorité civile, comme président de l'administration de département, il se servit alternativement du crédit immense que lui donna cette réunion de pouvoirs pour accabler ceux qui osèrent lui résister. Les places publiques ont été constamment à sa disposition; il a su maîtriser par la terreur jusqu'à l'opinion de ses concitoyens. L'administration du département, qu'il a formée à son gré, est entièrement dévouée à ses volontés; les membres qui la composent sont tous intéressés à flatter la tyrannie.
Le malheureux succès de l'expédition de la Sardaigne doit lui être principalement attribué. Le conseil exécutif avait donné des ordres pour qu'elle fût attaquée au mois de novembre dernier : Paoli, requis par le général qui commandait l'armée d'Italie, refusa de fournir les gardes nationales qui lui étaient demandées pour cette expédition, et prétendit n'avoir d'ordre à recevoir que du conseil exécutif. Lorsqu'enfin l'escadre de l'amiral Truguet eut abordé en Corse, et que l'embarquement des gardes nationales était sur le point d'être effectué, on sut, par des combinaisons affreuses, déjouer encore le succès de cette entreprise, en semant la division entre les Corses et les troupes françaises, au point que les premiers refusèrent d'agir de concert, et se réservèrent de faire une attaque particulière dans la partie du Nord, tandis que les autres se portèrent avec l'escadre sur Cagliari. C'est à cette funeste division que nous devons le défaut de nos succès et la honte de notre retraite. Paoli est coupable de cette division et des malheurs qui l'ont amenée; j'en appelle au témoignage de quelques députés corses, à qui on la fit pressentir, et qui l'annoncèrent avant même que les troupes françaises eussent débarqué dans leur île.
Les habitants des Bouches-du-Rhône et du Yar, qui ont su apprécier la conduite de Paoli et de ses agents, l'ont déjà dénoncé à plusieurs reprises. C'en a été assez pour qu'on les ait également proscrits du territoire de Corse... Le conseil exécutif vient d'ordonner dans cette île quelques dispositions qui ont paru annoncer de nouvelles forces..... Eh bien ! Paoli et
l'administration du département ont demandé avec instance au ministre de l'intérieur une exclusion formelle des gardes nationales du Yar et des Bouches-du-Rhône. Ils sont cependant attachés à la conservation d'un bataillon Suisse; et si la République avait encore des troupes étrangères à son service, ils vous en eussent demandé, parce que les tyrans ne veulent avoir à leurs ordres que des hommès aveuglément soumis à leur volonté.
La caisse nationale était fixée à Bastia : Paoli en a ordonné le transport à Corte, où il peut se retrancher dans sa citadelle. Le conseil exécutif a improuvé et cassé ces dispositions, a ordonné le retour de la caisse à Bastia; loin d'obéir, Paoli persévère dans ses volontés, et, dans ce moment même, exige que les nouvelles sommes que le gouvernement a
fait déposer à Bastia soient transférées à Corte.
Citoyens, Paoli commanda autrefois en souverain dans l'île de Corse; Paoli reçut l'hospitalité en Angleterre : par un séjour long et habituel, il en a contracté les habitudes, et la reconnaissance a dû y fixer ses inclinations. Croyez-vous qu'il puisse avoir assez de grandeur d'âme pour faciliter son ancienne tyrannie à la liberté de ses compatriotes T Croyez-vous qu'il puisse dédaigner les intrigues d'une cour acharnée à jeter la discorde au milieu de nous, et qui', peut-être, a déjà flatté des projets ambitieux pour faire une nouvelle diversion à nos forces ?
L'état actuel de la Corse me paraît exiger de la Convention nationale des mesures promptes et capables de déjouer les projets de nos ennemis sur cette partie essentielle de la France, qui, par sa position, influence la liberté de notre commerce et la sûreté de nos côtes dans la Méditerranée.
Je demande, en conséquence, que vous décrétiez, comme mesure provisoire, que le général Paoli soit suspendu de ses fonctions militaires dans le département de Corse, et qu'il soit mandé à la barre, ainsi que le procureur général syndic, pour rendre compte de leur conduite resepective.
Lorsque vous les aurez entendus, il vous restera à décider si le tribunal révolutionnaire n'aura pas à faire justice de leurs crimes et de leurs perfidies.
_ J'appuie les propositions d'Escudier, et j'ajoute un fait, c'est que Paoli a fait élever un trône en Corse, et montait quelquefois dessus pour voir, disait-il, s'il lui allait bien.
Qui ne connaît point Paoli, cè lâche intrigant qui prit les armes pour asservir son île, et faisait l'illuminé pour tromper le peuple? Craignez qu'aujourd'hui il ne livre l'île de Corse aux Anglais qui lui ont donné des secours. Je demande le décret d'accusation contre lui et la dissolution du régiment suisse.
Un membre (1) : Je prie la Convention de réfléchir avant d'adopter les propositions qui lui sont faites. Parmi les dernières lettres que nous avons reçues de notre département, il y en a une qui annonce que les soupçons contre Paoli sont semés par un de ses ennemis. C'est à Paoli qu© la Corse doit son attachement à la République. (Murmures.) J'estime que si vous consacrez les propositions d'Escudier vous rendrez une loi qui sera dangereuse et néfaste pour cette île. (Murmures prolongés.)
Et moi, je suis d'un avis contraire, c'est pourquoi je viens appuyer la
motion d'Escudier. Il a eu raison notamment de faire observer à
l'Assemblée que depuis longtemps Paoli détient entre ses mains les
finances de l'île, car il a eu grand soin de n'admettre dans les
administrations que des créatures qui lui étaient dévouées et qui lui
per-
(La Convention adopte les proposions de Cambon.)
Suit le texte définitif du décret rendu (1) :
« La Convention nationale décrète :
Art. 1er.
« Les commissaires de la Convention envoyés dans l'île de Corse, feront arrêter et conduire à la barre de l'Assemblée le général Paoli et le procureur général syndic du département de Corse.
Art. 2.
( Le présent décret sera envoyé par un oourrier extraordinaire à l'administration du département du Yar, qui fera partir de suite un aviso pour le porter aux commissaires de la Convention, en prenant les mesures, afin qu'aucun avis ne parvienne aux personnes qui doivent être arrêtées ».
(2). Je demande la parole en raison du décret qui vient d'être rendu.
Depuis longtemps nous ne voyons nos maux qu'en détail, et nous n'y appliquons comme les empyriques que des palliatifs. Yous n'ignorez pas qu'il y a dans J'île de Corse, comme en France, plusieurs partis ; vous n'ignorez pas que Paoli défendit la Corse contre les armes de la France. Il se sauva en Angleterre où il reçut des secours, et où Pitt rendit son cœur anglais. Revenu ensuite en France, par une suite de cet enthousiasme qui entraîne quelquefois trop loin, il a été replacé en Corse plutôt comme un despote que comme un citoyen. Pitt, qui est le mobile et le centre de la guerre que vous font les tyrans, Pitt cherchera tous les moyens de s'emparer de l'île de Corse. (Murmures.)
Yous avez pris des mesures contre un citoyen, je demande que vous en
preniez sur l'état de la marine. Il est une responsabilité qu'on ne
cesse de rejeter sans cesse sur le comité de défense générale; eh bien,
moi, qui suis de ce comité et qui ne crains aucune responsabilité, je
dis qu'il y a trois jours un citoyen, mon collègue Laignelot, a fait
dans le comité de défense générale, une interpellation vraiment
républicaine au ministre de la marine. « Peux-tu, lui a-t-il dit, avec
tes adjoints, sauver la Répuplique dans ton département? » Le ministre
homme de bien (car
Yos côtes sont indéfendues, vos corsaires sont pria, vos armateurs sont découragés. Les îles de Jersey, de Guernesey, vomissent sur notre territoire cette peste publique, les émigrés. Ostende est pris avec vos vaisseaux et vos subsistances. Les Anglais envient depuis longtemps l'île de Corse. L'Angleterre veut tyranniser la Méditerranée, comme elle tyrannise l'Océan. Il faut nommer un ministre de la marine capable, ou en le conservant, donnons-lui des moyens tels qu'il puisse agir d'une manière_ utile et salutaire.
Voilà, citoyens, ce que j'ai cru devoir, faire et comme collègue et comme membre du comité.
Je conclus à ce que le ministre, dont vous connaissez la probité, et qui, d'une part, est plus à la portée de connaître le fardeau, de l'autre, de connaître les moyens.de le faire porter, soit appelé et fasse une déclaration franche, pour que l'Assemblée prenne une détermination, telle que sa sagesse lui suggérera.
(La Convention nationale décrète que le ministre de la marine est invité à se rendre dans son sein, pour lui déclarer s'il peut, dans les circonstances actuelles, sauver la patrie dans ce qui concerne son ministère, et lui indiquer les moyens supplétifs.) (1).
(2) Nous dormons, et jamais la patrie ne courut de plus grands dangers. Les ennemis sont sur nos frontières et les menacent. Nos armées sont désorganisées et la plus grande faute de leur faiblesse est qu'elles n'ont aucune confiance dans nos généraux. Pour les investir de cette confiance, sans laquelle nous ne pouvons nous promettre aucun succès, je commence par demander que la Convention, dérogeant aux décrets précédents, nomme immédiatement les généraux. C'est le moyen de remettre sous les lois les soldats qu'on accuse d'indiscipline. Ce fut un acte de délire de ceux qui conduisaient le peuple français au commencement de la Révolution, de n'avoir pas écrasé sous le glaive national tous les ennemis de la liberté. Je demande aujourd'hui que vous le détruisiez ; je demande qu'il soit défendu à tout ex-noble de commander nos armées, à moins qu'on n'ait des preuves irrésistibles de leur civisme, depuis le commencement de la Révolution ; car n'en doutez pas, ils sont encore aujourd'hui à la tête de nos armées, et ce qu'il y a de plus désolant, c'est qu'on ne voit que ceux-là même prendre possession de toutes nos places fortes qui, jusqu'ici, sont sans défense, pour les livrer à l'ennemi lorsqu'il se présentera.
On m'a dénoncé Moreton-Chabrillant ; je demande contre lui un décret d'accusation... (Murmures.)
Citoyens, Chabrillant est un contre-révolu-
J'ajoute un mot. Citoyens, la misère est grande, et la misère est une des principales causes qui peuvent forcer le peuple à demander la servitude... (Murmures.)
Plusieurs membres : Vous calomniez le peuple.
Non, je ne le calomnie point; j'ajoute même que personne ne connaît mieux le peuple que moi et n'apprécie mieux ses vertus, mais il faut du pain avant toutt (Applaudissements.)
Je fais la proposition de pourvoir aux indemnités et secours dus aux départements qui ont souffert par l'invasion de l'ennemi, en accordant aux redevables, qui sont dans un état de misère, la remise de leurs impositions arriérées.
TJn grand nombre de membres : Il n'y a que les riches qui en profiteraient ; d'ailleurs on leur a accordé des secours.
Je fais remarquer que je n'insiste que pour les pauvres misérables. (Murmures.)
Président, je dois vous dire que c'est d'après les observations que m'ont faites vos commissaires dans vos départements que je fais cette demande à la Convention. Saint-Just s'est présenté trois fois à la tribune sans pouvoir obtenir la parole; c'est lui qui, obligé de s'absenter quelques instants, m'a chargé de prendre la parole en son nom. Il m'a dit qu'à mesure qu'on distribuait des secours aux pauvres malheureux, les receveurs des districts les retiraient d'une autre main, si bien qu'ils étaient toujours réduits à la misère.
Je propose que la Convention renvoie au moins ma demande au comité des secours pour qu'il examine si elle est fondée et qu'il nous en fasse un rapport demain.
(La Convention, décrète le renvoi demandé par Marat.)
(1). Je demande à dire deux mots sur la première motion qui a été faite par Marat. Il est certain que pour avoir actuellement de la confiance dans la noblesse, il faut être aveugle. Je ne veux pas dire que dans la noblesse, il ne se trouve pas quelques vrais patriotes et quelques bons républicains, je conviens qu'il y en a; mais, leur nombre est très petit. C'est pourquoi je partage l'avis de Marat.
Mais, comme il faut être juste avant tout, quand on prend des mesures pour sauver la-patrie, je demande qu'auparavant de procéder à ce scrutin préparatoire dont il a été parlé, on décrète que tous les régiments voteront pour dire si tous les officiers nobles, qui sont à leur tête, ont leur confiance.
(2). La Convention nationale a rendu, ce matin même (3), un décret aux
termes duquel le conseil exécutif est tenu
Un grand nombre de membres : Oui, oui, l'ordre du jour.
prononce que la Convention passe à l'ordre du jour.
Je demande la parole.
Si c'est pour la motion que vous avez formulée tout à l'heure, sachez que la Convention a décidé de passer à l'ordre du jour.
Pas du tout, la Convention n'a pas été consultée. Président, mes propositions sont appuyées; je vous somme de les mettre aux voix.
(La Convention, consultée, décide de passer à l'ordre du jour.)
Je prends acte de l'explosion de mon zèle, et je viendrai bientôt faire tomber sur vos têtes le poids de l'indignation publique.
, secrétaire, donne lecture d'une adresse des membres composant le directoire, du département de la Haute-Marne (1), par laquelle ils demandent des armes pour un bataillon de grenadiers et chasseurs formé dans leur circonscription.
(La Convention renvoie la lettre au ministre de la guerre pour donner des armes à ce bataillon et en rendre compte dès le lendemain.)
(2). Je demande qu'on accorde la parole au comité de défense générale pour qu'il nous donne connaissance de la lettre de Dumouriez qu'il a reçue hier au soir; mais auparavant je demande à la Convention que les trois commissaires envoyés près de Dumouriez par le ministre Lebrun et qui sont gardés à vue par l'ordre de ce comité, doivent être libres d'aller où bon leur semble. Cependant Dubuisson, l'un de ces commissaires, ne peut pas sortir de chez lui. Je propose que la liberté leur soit rendue.
Quand le comité de défense générale a prononcé l'arrestation de ces
trois commissaires, ce n'est pas qu'il y eût contre eux l'ombre du
soupçon, mais c'est au contraire, pour les protéger contre les poignards
des assassins. Vous auriez blâmé votre comité, s'il n'eût pas pris cette
mesure. Hier il est venu au comité une députation de la société des
Jacobins, pour faire la même demande que vient de faire Bentabole; je
lui ai expliqué l'intention. du comité; que ces commissaires n'étaient
pas consignés chez eux ; qu'ils pouvaient aller où ils voulaient,
accompagnés d'un ou plusieurs gendarmes. Je ne sais pas
(Gironde). Une preuve que ces commissaires peuvent sortir, c'est que j'en ai rencontré un hier, avec qui j'ai causé.
Je demande que la Convention décrète que les trois commissaires iront où ils voudront avec un garde.
(La Convention nationale décrète que les trois commissaires envoyés près de Dumouriez par le ministre Lebrun, seront libres d'aller où il leur plaira, accompagnés, pour leur sûreté personnelle, d'un gendarme que leur fournira le pouvoir exécutif) (1).
, au nom du comité de la guerre, fait un rapport et présente un projet de décret (2) pour réunir au 12e régiment de chasseurs à cheval l'escadron formé à Arras l'année dernière; le projet de décret est ainsi conçu :
« La Convention nationale, après avoir entendu son comité de la guerre, décrète ce qui suit :
« Le ministre de la guerre réunira définitivement comme 5e escadron au 12e régiment des chasseurs à cheval, l'escadron formé à Arras l'année dernière, et provisoirement attaché à ce même régiment. »
(La Convention adopte ce projet de décret.)
Un membre propose de décréter que le général Miranda sera admis demain à la barre, et que les comités chargés de présenter la série des questions à lui faire, seront tenus de les préparer pour demain.
Un autre membre demande que le rapport de l'interrogatoire que les généraux Lanoue et Steingel ont dû subir aux comités soit également fait demain.
'(La Convention décrète ces deux propositions) (3).
U ne députation de la section du Mail est admise à la barre.
Le citoyen Tranchelahausse, orateur de la députation, s'exprime ainsi :
Législateurs, les citoyens de la section du Mail nous ont chargé de vous faire lecture de l'arrêté suivant :
Extrait du procès-verbal de l'Assemblée permanente de la section du Mail.
« Le er avril
1793
« L'Assemblée générale de la section du Mailv après avoir entendu le rapport de ses commissaires nommés sur l'invitation faite par la section des Droits de l'homme, pour se rendre à l'évêché, à l'effet d'aviser aux moyens de sauver la-patrie;
« Lecture faite" de l'arrêté pris cejourd'hui en l'Assemblée desdits
commissaires de sections, portant qu'ils se constituaient en assemblée
centrale de salut public, correspondante avec les départements sous la
sauvegarde du peuple;
« Considérant, en outre, que cet arrêté serait une lutte contre les autorités constituées;
« Déclare qu'en approuvant la conduite de ses commissaires, en ce qu'ils se sont restreints dans les bornes de leurs pouvoirs, elle improuve très expressément l'arrêté pris cejour-d'hui par les comissaires de sections réunis à l'évêché, et qu'elle se soumettra toujours aux seules autorités constituées, et aux lois émanées de la Convention nationale.
« Arrête, en outre, que le présent arrêté sera porté à la Convention, aux sociétés populaires, et communiqué à la commune, au corps électoral, aux 47 autres sections, et nomme à cet effet les citoyens ïïarant, Chemelard, Schef-fard, Yalentin, Yillebourg et Desforges, pour ses commissaires ad hoc.
« Fait en l'Assemblée générale, lesûits jour et an.
« Signé : Tranchelahatjsse, président;
Harant, Letellier, secrétaires ».
( Vifs aplaudissements.)
(1). Trois fois la section du Mail a envoyé des défenseurs au sein de l'Assemblée, qui a déclaré que vous aviez bien mérité de la patrie. Yous n'avez pas voulu que ce décret fut vain, la Convention vous remercie et vous invite à sa séance. (JV ouveaux applaudissements.)
(La Convention nationale décrète la mention honorable de cet arrêté et son insertion au Bulletin. )
U ne députation des citoyens juges et jurés du tribunal révolutionnaire est admise à la barre.
L'orateur de la députation s'exprime ainsi (2) :
« Citoyens représentants, les juges et jurés composant le tribunal révolutionnaire se présentent devant vous, non pas pour témoigner de la reconnaissance à la Convention nationale, de la confiance qu'elle a placée en eux, mais pour lui annoncer qu'ils sont à leur poste.
« Déjà les ennemis de la patrie nous calomnient de toutes parts. Les uns désignent le tribunal comme un tribunal inquisitorial et un tribunal de sang, les autres profitant de l'inaction forcée dans laquelle on nous laisse depuis le jour de notre installation, excitent encore l'impatience qu'a le peuple de voir enfin les conspirateurs punis. Pour nous, au-dessus de la calomnie, impassibles comme la loi, mais inébranlables dans les fonctions augustes qui nous ont été déléguées, nous attendons le moment de déployer toute la sévérité des lois contre les ennemis de la chose publique.
( Représentants, le peuple s'indigne contre les traitements qui trament
sans cesse de nouveaux complots; leur audace le fatigue : nous vous le
disons avec courage; la patrie sera en
« Les ennemis de l'intérieur, d'accord avec ceux de l'extérieur, menacent la patrie d'une subversion totale; des généraux perfides et insolents osent dans leur fureur sacrilège nuus proposer des rois. Périsse avec nous notre propriété, périsse notre mémoire, plutôt que de connaître de nouveaux tyrans !
« Représentants, il n'y a pas un instant à perdre. Ordonnez à votre commission des six de faire cesser enfin l'inactivité dans laquelle se trouve le tribunal révolutionnaire depuis son installation; le peuple qui connaît les conspirateurs, veut leur punition ; apprenez au peuple que la Convention nationale" veut se réunir à lui pour sauver la République.
« Pour nous, représentants, nous vous le répétons, nous sommes au poste où vous nous avez placés, et nous jurons d'y mourir pour le salut de la patrie. (Applaudissements.) •
La Convention nationale vous a revêtus d'immenses fonctions, vous en sentez toute l'importance : la France entière attend de vous du zèle, de l'activité, de la justice, de la rigueur s'il est nécessaire. Nous sommes assurés que cette attente ne sera pas trompée et que vous remplirez dignement les fonctions qui vous sont déférées. La Convention nationale compte sur votre zèle et vous invite à la séance.
Un des membres des jurés demande que la Convention leur adjoigne de nouveaux membres pour les aider dans leurs fonctions, auxquelles ils ne pourraient seuls suffire.
(1). Si la commission des Six n'a pas encore proposé de rendre de décret d'accusation, c'est qu elle n'a pas reçu les pièces nécessaires pour servir de bases à un acte d'accusation.
l'aîné. S'il s'agissait de juger des faux-monnayeurs, je consentirais à ce que l'on suivît toutes ces formes; mais qUand il s'agit de juger des conspirateurs, il n'y a plus de formes à suivre. J e demande donc la suppression de la commission des six, et que toutes ces poursuites se fassent à la requête de l'accusateur public.
Très bien, très bien; j'appuie la suppression.
, l'un des membres de la commission des Six : Je suis bien loin de
m'opposer à la suppression de la commission des Six, mais j'ai des
éclaircissements à ajouter à ceux qui vous ont été donnés par
Garran-Coulon. Votre commission des Six a eu d'abord à se procurer un
local, dont elle avait absolument besoin pour le dépôt des pièces ;
plusieurs jours ont été ainsi perdus.
Mais l'accusateur public lui a fait des observations, desquelles il résultait qu'il pourrait y avoir des.chefs d'accusation à ajouter à ceux déjà présentés au tribunal criminel de Paris, où l'affaire avait déjà été instruite; il a donc été nécessaire de recueillir ces notions nouvelles, et de nommer un rapporteur qui avait besoin de revoir toute l'affaire, laquelle est extrêmement chargée; il était cependant convenu qu'elle pourrait être portée vendredi prochain au tribunal par l'accusateur public. Telles ont été les causes qui on't arrêté la marche de votre commission des Six. Cependant, je vous répète que je ne m'oppose point à ce que cette commission nommée par vous, soit aussi supprimée par vous, d'autant que cette suppression avait été annoncée dès sa création, ni que vous n'ayez pas deux commissions du même genre en activité. J'ai voulu seulement répondre aux tournures présentées par le tribunal, auquel la commission n'avait rien laissé ignorer dans ses communications avec lui. Voici le tableau des affaires remises à la commission :
Tableau des affaires qu'a la commission des six, avec la date de la réception des premières pièces.
Du 23 mars.
Barrault, de Seine-et-Oise. _
La commission a arrêté de proposer le décret d'accu satiop. Le rapport est prêt depuis bien des jours, quoique Prieur, qui s'en était d'abord chargé, ait donné sa démission. L'affaire est, au surplus, de peu d'importance.
Du 24 mars.
Les prévenus d'émeute au sujet du recrutement dans la ville de Gaen.
Un décret l'a renvoyée à Caen; mais il est arrivé depuis de nouvelles pièces, aujourd'hui même, qui peuvent changer la nature de l'affaire.
Du 26 mars.
Beaumarchais.
La Convention nationale lui a permis de venir à la barre présenter sa justification. L'acte d'accusation est prêt.
Du 26 mars.
Affaire de Sainte-Glare, de Charleval, de l'Eure.
Cette affaire ne peut être encore envoyée au tribunal :
1° Parce qu'on n'a pas toutes les pièces (et on les a demandées);
2° Parce que cette affaire avait été jugée par le tribunal, en même temps que le décret d'accusation a été rendu, il faut auparavant faire décider par la Convention si elle doit être jugée de nouveau.
Du 26 mars.
Amy, ex-législateur, et Marivaux, prévenus l'un de s'être laissé corrompre, et l'autre, d'avoir corrompu.
Cette affaire ne peut être présentée à la Convention, parce que les pièces n'ont point été envoyées à la commission, quoiqu'elle ait écrit le 28 au ministre de la justice, et au comité des Douze, le 28 et 31 du courant, pour les leur demander, et elle n'a pas encore reçu de réponse.
Du 29 mars.
Philippe et Le Poux, de l'Eure, prévenus de projets tendant à altérer la confiance dans nos armées.
Le rapport est prêt pour être présenté à la commission; des objets plus importants ont empêché de le faire jusqu'à présent.
Du 29 mars.
M. Groult-Beaufort, soi-disant officier, inconnu et suspect.
Le rapport est prêt. Cette affaire paraît devoir être renvoyée au département, pour vé-
rifier si ce n'est point un émigré. Il n'y a point dans les pièces d'indication de projet de contre-révolution.
Du 30 mars.
Hecquet et consorts prévenus d'opposition au recrutement.
Les pièces n'ont été remises que d'hier.
Du 31 mars.
Le général Lanoue et le général Steingel, mandés à la barre, pour rendre compte de leur conduite.
Les pièces qu'a la commission des Six ne viennent que d'être remises, et au surplus l'affaire est encore entre les mains des comités de la guerre et de sûreté générale.
Du 31 mars.
Talleyrand-Périgord, prévenu d'avoir servi les projets contre-révolutionnaires du ci-devant roi.
(Les pièces n'ont été remises qu'hier dans cette affaire. )
Du 31 mars. Talon ; même accusation. (Même observation.)
Du 31 mars.
Dufour, Joubert, Debourges, prévenus d'avoir persécuté les patriotes d'Arles.
La commission a écrit pour demander les pièces; elle n'en a aucune.
Du 31 mars.
Narbonne, accusé de malversations dans l'emploi des fonds de la guerre.
(Les pièces n'ont été remises qu'hier.)
Du 31 mars.
J. Ch. Paullin, accusé de s'être vanté d'être contre-révolutionnaire. ;
C'est une dénonciation adressée au tribunal révolutionnaire, par une lettre non signée. On a écrit au département pour avoir des renseignements.
Du 1er avril.
Aujourd'hui seulement, les pièces de l'affaire de Blanchelande qui remplissent un carton, ont été renvoyées par le ministre de la justice, avec quelques autres qui ont été distribuées aux membres du comité pour en faire l'examen.
Ce premier avril 1793, l'an II de la République.
Toutes les fois, citoyens, qu'un tribunal aura derrière lui un autre tribunal, ce dernier verra toujours sa marche paralysée et ne pourra produire aucune besogne utile. C'est par expérience que je vous en parle ; je
pense que nous n'avons pas besoin de cette commission.
Vous ne pouvez pas déléguer à l'accusateur public, à un seul homme dont vous feriez un dictateur, des fonctions aussi importantes, sans votre participation et votre surveillance. Je regarde la proposition de déléguer cette commission au seul accusateur public, comme une proposition trop vague, et je demande que le décret soit toujours porté à la Convention nationale elle-même.
On répand dans le public que la commission n'a été instituée que pour paralyser le tribunal révolutionnaire, et pour assurer l'impunité à quelques membres de la Convention, qui pourraient être impliqués.
Un membre : Marat," par exemple.
Je demande, pour faire cesser ces bruits infâmes, que la commission soit supprimée.
Vaîné. Je renouvelle ma proposition, que j'appuie d'après les motifs d'intérêt public et non sur de vains bruits.
(La Convention décrète que la commission des Six est supprimée.)
Je demande que l'accusateur public, établi près ce tribunal, soit chargé de poursuivre les prévenus sur les décrets portés ou à porter par la Convention.
(La Convention adopte la proposition de Carrier.)
Suit le texte définitif du décret rendu (1) :
« La Convention nationale supprime la commission des Six qui avait été formée pour surveiller le tribunal extraordinaire créé par une loi précédente; autorise l'accusateur public de ce tribunal à poursuivre les délits de sa compétence sur les décrets d'accusation rendus et à rendre par la Convention nationale. »
demande que l'on fixe les honoraires aux jurés de ce tribunal.
(La Convention renvoie cette proposition aux comités des finances et de législation réunis pour en rendre compte le lendemain) (2).
Un autre membre demande l'impression du discours prononcé par l'orateur de la députation, ainsi que l'exposé par Rabaut-Saint-Etienne de la oonduite du comité.
(La Convention adopte cette proposition) (3).
Une députation des citoyens de la section du Temple est admise à la barre.
L'orateur de la députation s'exprime ainsi (4) :
Législateurs, divisés entre nous, nous ne pouvons qu'être impuissants;
mais réunis, nous saurons tous vaincre. La section du Temple vient vous
demander une loi répressive contre ceux qui refusent de faire leur
service per-
répond à l'orateur et accorde à la députation les honneurs de la séance.
Si cette pétition est convertie en motion, je demande que les ex-nobles et tous les individus suspects ne puissent pas monter leur garde, mais qu'on les fasse payer.
(La Convention nationale, après avoir entendu la pétition qui lui a été présentée dans la présente séance par la section du Temple, la renvoie aux comités de la guerre et de défense générale, réunis, pour en faire le rapport demain) (1).
Je demande la parole sur la pétition de la section du Mail (2).
La parole est à Barère.
Citoyens, puisqu'il a manqué à la République une main courageuse qui déchirât le voile qui couvrait le précipice où la République était près d'être engloutie, je rends grâce aux citoyens de la section du Mail de l'occasion qu'ils m'offrent de découvrir à la nation l'abîme où l'on voulait la plonger.
Les plus grands ennemis de la République sont à Paris et aux frontières du Nord, ils se correspondent à côté du système d'avilissement de la Convention nationale. Il en existe deux autres que l'on met en avant à tour de rôle et suivant les besoins; un système de terreur, c'est celui de Brunswick; un système de calomnies, c'est celui de Marat.
C'est celui de Brissot.
Je dirai la vérité. J'ai toujours désiré que les traîtres fussent punis, les intrigants reconnus; mais je veux aussi que les honnêtes gens ne soient pas inculpés sans cesse.
Je m'attache d'abord à la pétition des sections de Paris.
Une nouvelle tyrannie veut s'élever; c'est celle du comité central appelé
comité de salut public, qui vient de vous être dénoncée. En effet, que
veut dire un comité placé à côté de la Convention, et qui correspondra
arec tous les départements? Certes, je ne blâmerai jamais l'inquiétude
des bons citoyens dans des moments où la patrie est en danger : mais je
blâmerai toujours ceux qui profitent de ce danger pour usurper la
souveraineté nationale. Je me suis demandé d'abord, en entendant cet
arrêté des sections, si l'on voulait
Je me plais à rendre ici justice à la société des Jacobins, à qui l'on a pu d'ailleurs reprocher quelques excès. Un homme arrive dans cette société, c'était l'un des commissaires composant ce comité central; il venait faire part à la société de cette institution. A l'instant tous les membres se sont levés pour improuver un pareil établissement, et Marat lui-même a demandé que ce commissaire fût mis en état d'arrestation. Je vous demanderai la juste récompense de la conduite civique de ces citoyens, mais si je rends justice, je la demande aussi pour moi.
J'ai dans les mains un écrit intitulé : Le Publiciste par Marat, député à la Convention. Je n'examinerai pas si un représentant du peuple peut ainsi montrer l'exemple de la désobéissance aux lois, en violant lui-même un de vos décrets, et si j'eusse été ici lorsque la loi qui défend aux représentants du peuple de faire un journal, a été rendue, je m'y serais fortement opposé. Mais je cite cet écrit pour repousser une calomnie. Jusqu'à présent la plume de Marat m'avait épargné, m'avait excepté du nombre de ceux qu'elle s'attache à calomnier; aujourd'hui je trouve mon nom inséré sur la liste de Marat. Je suis cité plusieurs fois dans sa feuille : à la suite d'une lettre de Lille, où on lui parle d'une grande faction, il ajoute : tous les faits démontrent jusqu'à l'évidence, que Dumouriez suit un plan de contre-révolution, concerté depuis longtemps entre les ministres et les meneurs de faction Guadet, Brissot, Vergniaud, Lasource, Gensonné, Barère »; et plus loin on y lit :
« Ce système horrible de vouloir dissoudre la Convention et d'en appeler aux Assemblées primaires au milieu des feux de la guerre civile, projet proposé par les Guadet, les Gensonné, les Vergniaud, les Barère, toute la faction des hommes d'État ».
Citoyens, ma conduite répond à tout. J'ai
voté la» mort du tyran avec assez d'énergie pour faire croire que je m'aime pas la tyrannie; je me suis opposé à la proposition faite par Pétion, de convoquer lés assemblées primaires ; j'ai combattu Buzot quand il a parlé en faveur de cette proposition. Quant à Dumouriez, je le connais pour l'avoir vu une fois chez le citoyen Laplace, doyen des hommes de lettres. Je lui ai écrit depuis en faveur d'un capitaine de la compagnie des Arts.
Quand on a lu au comité la lettre de Dumouriez, datée du 12 mars, je proposai contre lui le décret id'accusation. Danton seul s'y est opposé, et a empêché qu'il ne fût proposé à la Convention. Il nous dit qu'il croyait Dumouriez nécessaire à l'armée.
Cela, posé, qu'il ne soit plus question de moi, mais de la chose publique. Je demande que la Convention déclare que la section du Mail a bien mérité de la patrie, en vous dénonçant l'arrêté des commissaires ; que le maire de Paris rende compte de ce rassemblement de commissaires à l'évêché ; que ces commissaires soient traduits à la barre, pour expliquer leurs motifs.
Si le zèle de Barère, pour le bien public, était égal à mon amour pour la justice et la vérité, il m'aurait simplement adressé sa réclamation ; il sait que jamais je n'ai refusé de rendre à chacun la justice qui lui appartient.
Plusieurs membres : L'ordre du jour!
Je ne dois pas rester sous l'inculpation d'avoir violé les décrets de la. Convention, je ne donnerai jamais ce mauvais exemple ; mais j'observe qu'il n'a jamais pu être rendu un décret qui défendît à l'écrivain patriote de publier ses idées. On n'a jamais pu me faire un crime d'y avoir mis mon nom ; c'est le cachet de l'homme de bien qui veut répondre de ses écrits.
Au reste, pour vous donner les moyens d'employer mieux votre temps, je demande que vous vous occupiez de la défense de Valen-ciennes, Lille et Sedani.
Je demande que vous n'ôtiez pas la plume à Condorcet, quand vous laissez celle de Marat. Je propose le rapport du décret.
(La Convention nationale, considérant combien doit être grand le respect dû à la liberté de la pensée, rapporte le décret qui enjoint à ses membres d'opter entre la qualité de membre de la Convention et celle de Feuil-liste) (1).
Voici le texte du projet de décret que je propose :
« La Convention nationale décrète :
Art. 1er.
« La section du Mail a bien mérité de la patrie.
Art. 2.
« Le maire de Paris viendra à 4a barre pour rendre compte de la
connaissance qu'il a du rassemblement des commissaires de sections à
l'évêché, le 31 mars dernier.
« Les commissaires des sections qui ont pris l'arrêté du 31 mars sont mandés à la barre, pour rendre compte des motifs de cet arrêté et l'apport de leur registre.
Art. 4.
« La Convention nationale déclare à tous les citoyens de la République, que la même fermeté qu'elle a employée dans le jugement du tyran, va diriger ses délibérations dans des mesures qu'elle prendra pour abattre la nouvelle tyrannie qui s'élève et qui menace d'usurper ou d'anéantir la représentation nationale ».
(La Convention adopte le projet de décret présenté'par Barère) (1).
Président, je demande la parole (2)..
Vous avez la parole.
, au nom du comité de défense générale. Citoyens, lorsque vous demandiez la lecture des lettres de Dumouriez et que vous décrétiez qu'elle vous serait donnée, le comité de défense générale les mettait en ordre, et nommait un rapporteur pour vous les présenter..
Les voici :
Lettre du général Dumouriez au général Beurnonville, ministre de la guerre (3).
u Tonnerre,
« Je vous envoie, mon cher général, un mot. de mémoire, un projet de décret concernant la désertion. Tachez, je vous prie, d'y faire adopter les mesures que vous y trouverez, et qui sont indispensables et pressantes, si on ne -veut pas livrer la République aux plus grands malheurs, par la perte de son armée. Quelques-unes de ces mesures avaient déjà été prises. Lorsque mon paquet vous parviendra, ne les négligez pas, car je les regarde toutes comme extrêmement nécessaires. Si vous en avez d'autres qui marchent au même but, ne les négligez pas davantage ; nous ne pouvons nous" ménager trop de moyens. Je n'ai pas besoin d'appeler votre zèle sur cet objet intéressant; votre sincère amour pour le bien public nous est trop connu pour que je doute des soins que vous apporterez à examiner ce mémoire. (Suit le mémoire.)
« Signé : Dumouriez, général en chef.
Réquisition faite au général Dumouriez par
les commissaires de la Convention nationale
à l'armée du Nord (4).
Lille, le
« Les commissaires de la Convention requièrent le général Dumouriez de se
rendre aujourd'hui 29 mars, à Lille, maison du ci-
Signé : Gossuin, Delacroix, Carnot, Merlin (de Douai); Robert, Lesage-Sénault.
« Pour copie conforme, « Signé : Dumouriez, général en chef . »
Réponse du général Dumouriez aux commissaires de la Convention nationale (I).
Tournay, le 29 mars, l'an II de la République française.
« Il m'est impossible, citoyens commissaires, de laisser un instant l'année dans le moment où ma présence seule la retient, au moment où la défection de la gauche et de la droite me mettent, pour ainsi dire, en l'air. Le général Cobourg qui est aujourd'hui à Ath, l'archiduc Charles qui marche sur Mons, et le général Millin sur Courtray, m'ont presque cerné et me forcent à un mouvement rétrograde que je suis forcé de diriger moi-même. Si j'étais à Lille, Farinée aurait des craintes et je n'èn-trerais dans cette ville qu'avec des troupes pour punir les lâcheB qui y sont entrés après m'avoir abandonné, et qui me calomnient.
« Envoyez-moi deux ou quatre d'entre vous pour m'interroger, je répondrai à toute espèce d'inculpation avec ma véracité connue, mais je ne^ puis plaider et combattre. Ma tête né suffirait pas à ces deux genres de guerre.
« Signé : Dumouriez, général en chef. »
Deuxième lettre de Dumouriez au ministre de la guerre.
Quartier général de Tournay, le
la République (2).
« Le lieutenant colonel Morgan, mon cher Beurnonville, vous porte la capitulation du général Marassé pour évacuation d'Anvers. Ce général mérite des éloges en nous sauvant 10,000 hommes qui, n'ayant rien à craindre, feront une retraite plus honorable que celle de l'armée, ne seront point entamés ni fatigués de leur propre brigandage, et me fourniront des garnisons fraîches et en état pour défendre la Flandre maritime et l'Artois. En lisant cette capitulation, vous applaudirez à la prudence du général Marassé qui a pris séparément par écrit- l'opinion de tous les chefs de l'armée avant de se décider.
« Je compte voir demain, à mon quartier général, le chef de l'état-major
du prince de Cobourg, avec lequel je compte arranger une capitulation de
la même espèce pour nos garnisons de Breda et Gertruydemberg. Ce sont 7
à 8,000 hommes sacrifiés que je sauverai à la patrie, pour en faire, un
meilleur usage.
Ïiart, l'envahissement des étrangers; et de
'autre, pour rendre à la partie saine et op-
Srimée de l'Assemblée la force et l'autorité
ont la privation les jette dans l'avilissement^ même aux yeux des départements. Les commissaires de la. Convention viennent de me sommer d'aller à Lille, pour répondre à des imputations graves lancées centre moi. Je vous envoie, copie de leur* lettre et de ma réponse. Il est éxactement vrai que je ne peux pas quitter cette armée-ci une minute, sans l'exposer à être détruite. Je vous déclare d'ailleurs, mon cher Beurnonville, que je regarde ma tete comme trop- précieuse, pour la livrer à un tribunal arbitraire. Je ne peux être jugé de mon vivant que par la nation entière, comme je le serai. après ma mort par l'histoire.
Deux jours ayant la lettre des commissaires; il m'est venu des députés de la part du club des Jacobins; ceux-ci m'ont proposé les plus belles choses du monde, à condition que je les aidasse à culbuter la Convention. Ce qui m'a fort étonné, c'est qu'ils fussent porteurs d'une lettre de recommandation du ministre Lebrun. Il faut en finir, et je vous prie surtout de communiquer mes lettres, sans quoi vous savez, qu'elles seront un jour publiques.
Lorsqu'il s'agit de sauver l'Etat, lorsque la France est au moment der sa perte entière, je ne vois que factions, que projeta sinistres, que dénonciations, que crimes} je ne vois ni l'amour de la liberté, ni la liberté elle-même; je vois tous les individus prêta à se poignarder, et se couvrant mutuellement de boue; je vois partout la honte d'une grande nation, et pour toute ressource l'ingratitude envers vos malheureux généraux qui, depuis un an, sacrifient tout, et le désir de les accabler, certainement sans savoir qui on mettra à leur place. J'ai déjà, mon cher Beurnonville, joue plus d'une fois le rôle de Décius, en me jetant aans les bataillons ennemis; mais je ne jouerai pas celui de Curtius, en me jetant dans un gouffre.
Les nouveaux décrets de l'Assemblée me frappent d'étonnement; je voua manderai, sous deux jours, les réflexions profondes qu'ils m'occasionnent. Reprenons le bon sens, sans lequel on ne fait rien de bien; ne voulons point de montagnes, car nous sommes des pygmées qu'elles écraseront. Le vrai courage n emploie point de métaphores; il mesure le danger; il cherche dans la prudence les moyens de le diminuer; et après avoir tout calculé, il supporte l'événement avec confiance. Dites tout cela au comité : ce comité* à une demi-douzaine d'individus près, m'a paru bien compose; il me comprendra, et il arrêtera les criminelles exagérations de ceux: qui tyrannisent l'Assemblée par les tribunes. On a bientôt dit que la nation se lève! ce n'est pas tout d'être debout, il faut agir; ce n'est ni avec des
clameurs, ni avec des poignards, ni même avee des piques* ce n'est qu'avec de bonnes armes, de la sagesse et de la discipline que nous sauverons la France; c'est surtout avec un plan sage, et ce plan nous indique de chercher à faire la paix. Pensez donc bien à négocier, puisque vous n'avez pas la faculté de vous battre, et croyez que les hommes qui, comme vous et moi, ont soutenu le poids de la guerre, ne se laisseront pas écraser par de vils assassins.
« J'ai un autre objet effrayant à vous présenter, c'est le procès-verbal de nos besoins en subsistances et de nos ressources. Vous savez combien cette armée est désorganisée : je ne vous réponds de rien, si elle manque. On n'a pas voulu punir; on soutient encore les scélérats qui nous ont réduits à cette extrémité. L'armée en demandera justice, et je serais désolé, pour l'honneur des législateurs, qu'on la réduisît à cette extrémité.
« Vous devez juger par ma dernière lettre, qu'étant débordé par ma droite et par ma gauche , je ne peux pas tenir la ville de Tour-nay, pas même la citadelle, qui est hors d'état de défense. On a travaillé trop légèrement et trop tard à fortifier Mons et Tournay.
( Le ministre Pache avait eu même la criminelle absurdité d'ordonner qu'on détruisît les fortifications. Vous êtes arrivé trop tard au ministère pour réparer efficacement cette faute. Je suis donc obligé de ne pas y sacrifier une garnison qui serait absolument perdue, et de prendre, comme vous me l'indiquez dans votre lettre du 27, n° 101, la position de Bruille et de Maulde, avec garnison devant Orchies, et des postes à Rougies et les bois de Clermey. Je serai après-delmain dans cette position, qui peut se soutenir avec de l'infanterie, sans presque de cavalerie, et je placerai une partie de ma cavalerie derrière le canal de Marehiennes, pour pouvoir la rétablir pendant une quinzaine.
( Quand vous me reprochez, mon cher ami, de n'avoir pas exécuté le décret pour le recrutement de l'artillerie, et de la cavalerie, vous oubliez que depuis le 2 février que je suis arrivé à Anvers, j'ai été toujours en action, sans pouvoir m'occuper de la restauration de cette malheureuse armée, c'est que ce n'est pas des bords de Mordechk et des bords de la Meuse, toujours en présence de l'ennemi, qu'on pouvait s'occuper froidement du recrutement. J'espère que nous aurons plus de temps à l'avenir, si la sagesse peut enfin décider nos destinées. J'y ferai ce que je pourrai; mais je finis par vous déclarer que je ne serai pas, comme un agneau, victime des malveillants; et qu'en défendant mon existence et celle de mes compagnons d'armes; je croirai conserver à ma patrie des défenseurs. »
« Signé- : Dumouriez, général en chef. »
Troisième lettre de Dumouriez au général
Beurnonville, ministre de la guerre.
« Tournay, le 30 mars l'an II de la République (1).
« J'ai répondu d'avance, mon cher Beurnonville, à votre lettre du 29; il
m'était impossible, étant découvert par Mons et Courtray, de
« Le corps d'armée ennemi qui est devant moi, a fait aujourd'hui quelques petites attaques contre le général Neuilly, sur Que-vrin,rHermitage et Persruels;il a été repoussé. Je juge, d'après cela, que son intention était de me prendre en flanc par Burry. Demain ma marche sur Bruille me mettra dans une position respectable.
« Le colonel Thouvenot, chef de l'état-major de l'armée de la Hollande, est venu me re-joindre; iL a sauvé une partie de cette armée, qui se trouvait entre la Lys et l'Escaut : mais il m'a fait un tableau frappant du désordre, du brigandage des troupes, et de leur extrême désir d'arriver en France pour s'en aller chacun chez soi. Vous verrez, par les deux lettres ci-jointea de Richardot et de Leclaire, à quel point nos armées sont dénaturées. Les troupes "de ligne suivent l'exemple des "volontaires; il y aurait cependant un peu plus de ressource avec elles, elles font au moins face à l'ennemi. Cette différence établit une grande discorde entre elles et les volontaires; les régiments sont surtout très affectés de voir arriver des volontaires à:leur tête, et de perdre ainsi tout l'espoir de leur avancement; quantité d'officiers et de sous-officiers sont si dégoûtés qu'ils veulent quitter le service, et cependant nous ne pouvons compter que sur la troupe de ligne pour nous tirer d'affaire et résister à l'ennemi.
« Vous me mandez, mon ami, de ne pas perdre courage, je vous assure que- cela ne m'arrivera jamais; mais je crains bien plus d'être poussé à bout par les atrocités que se permettent contre moi les Jacobins, et par les interprétations absurdes qu'on donne à tout ce que je fais ou à tout ce que j'écris.
« La séance du 27 de la Convention, me montre ce que je dois attendre des suivantes : je mettrai toute la prudence possible dans ma conduite; mais j'annonce que je ne me laisserai pas accabler. J'aurai pour juge la nation entière: je soutiendrai tous les articles de ma lettre cm 12; je prouverai dans quel esprit elle a été écrite, et par là je prouverai dans quel esprit elle a été lue. Sa publicité sera ma justification : il ne sera pas dit qu'un Cambon, un Robespierre, puissent perdre, par des sophismes orgueilleux, un homme qui a déjà eu le bonheur de sauver plusieurs fois sa patrie.
Il a sauvé le roi de Prusse.
, continuant..... et qui la sauvera
encore malgré tous les malveillants, à moins qu'on ne pousse l'aveuglement jusqu'à vouloir lui arracher la vie pour le récompenser de ses services. Je suis bien loin d'accuser la Con-
vention nationale des excès de quelques-uns de ses membres. Livrée à la tyrannie des tribunes, elle lutte et succombe sous une minorité, qui réduit la majorité au silence : cela ne peut pas durer; les hommes de bien, qui, comme moi, veulent le salut de leur patrie, l'environneront de leurs forces, et lui rendront tout son éclat et toute sa considération. Il ne faut plus qu'il soit question de conciliation avec les scélérats; ils en ont trop abusé. La Convention nationale pourra tout, lorsqu'elle voudra se prononcer contre le système de sang et de crimes, qui, depuis quelque temps, fait le désespoir des vrais citoyens. Les départements gémissent, l'armée attend avec inquiétude, les ennemis qui nous environnent se réjouissent, et nos généraux sont victimes d'june désorganisation préparée; nous sommes calomniés, menacés de mort, lors-qu'avec toute l'énergie d'hommes libres, nous disons des vérités importantes et nécessaires.
« La portion d'armée qui est restée fidèle à ses drapeaux et à l'honneur français, est prête à combattre également les ennemis intérieurs et extènèurs de la patrie. Quant à moi, qui me suis entièrement dévoué à cette cause, je dirai toujours la vérité, et je croirais manquer de respect aux représentants de la nation, si je les trompais ou si je les flattais.
« Je vous répète ce que je vous ai déjà mandé, et ce qu'il ne faut pas cacher. Par le procès-verbal que je vous ai envoyé, il est prouvé que nous n'avons pas de quoi vivre dix jours, et que nos places sont dépourvues de tout. L'ennemi s'est avancé sur nous lentement, parce qu'ayant à traverser ùn pays mangé, il lui a fallu le temps de préparer ses magasins; mais le voilà sur notre frontière, qu'avons-nous à lui opposer ? Une armée manquant de tout, et que bientôt je ne pourrai pas tenir ensemble, et qu'il faudra éparpiller dans les places, faute de magasins, très peu de munitions et la guerre intestine.
« Cette dernière guerre est encore faible, parce que les Anglais n'ont pas voulu s'exposer aux vents de l'équinoxe ; mais bientôt ils désoleront vos côtes, et renforceront les rebelles ; alors que cette guerre deviendra terrible, et c'est le moment qu'attendent les armées ennemies pour presser vos frontières. La consternation et les malheurs de la capitale, les lois de sang, les exagérations d'une licence barbare, achèveront de détruire tout lien social et nous périrons, comme les juifs de Jérusalem, en nous égorgeant les uns les autres ; voilà les mots affreux auxquels il faut remédier très promptement. Une fermeté sage peut nous tirer encore de danger ; mais pour cela au lieu d'une frénésie aveugle, qui brave tout sans rien calculer, il faut une prudence froide, qui rapproche les esprits.
« Notre sort est encore dans les mains de ceux qui gouvernent. Les puissances qui nous font la guerre ont intérêt à la finir, et même à nous ménager; mais bientôt il ne sera plus temps. Si c'est un crime d'avoir cette opinion, je suis très criminel ; car vraisemblablement, je ne vous écrirai pas une dépêche sans la retracer sous toutes les formes, tant que je croirai qu'il y a encore du remède.
« Signé : Dumouriez, général en chef. »
Lettre du citoyen Kichardot, datée de Harbeleck, le 29 mars 1793 (1).
(( Vous m'avez chargé, citoyen colonel, de la commission la plus désagréable, faire l'ar-rière-garde de vo3 colonnes; j'aimerais mieux avoir mille Autrichiens ou Prussiens à combattre, que de faire marcher les fainéants de l'armée : la quantité des ivrognes est innombrable : celle des voleurs est considérable; ils se sont permis des horreurs qui déshonorent notre nom et qui font frémir; il faut, comme moi, marcher un des derniers pour en bien juger... D'après ce que vous avez dit hier, voici le parti que j'ai pris.
« Les ivrognes, je les fais lever avec douceur ; s'ils refusent, i'insiste. S'ils sont hors d'état de marcher, je fais prendre leurs armes, et les laisse dans les fossés ; s'ils font les impertinents, je les fais bourrer et même sabrer, et enfin joindre la colonne. Quant aux voleurs, je fais faire des patrouilles à pied et à cheval sur les deux flancs de la route, lorsque nous approchons d'un village ou des maisons éparses... Tout soldat qui est arrêté, le sac, les poches garnis de vols,, je les fais mener sur la place du village le plus près du délit. J'appelle le bourgmestre, je fais déposer entre ses mains les effets volés, et puis je fais couper les cheveux au soldat que je remets à la justice du pays ; pour son habit et ses armes, je les lui fais ôter, et les fais rendre à son corps.
« Aujourd'hui j'aurais pu en punir cent, je n'en ai puni que six; savoir trois Bataves que j'ai chassés a l'ennemi, ainsi qu'un volontaire et un grenadier de volontaires ; un autre grenadier de volontaires, voleur, mais moins coupable que le premier : à ma sollicitation les grenadiers, après lui avoir arraché les épaulettes et les grenades, l'ont renvoyé à son bataillon. Quant à celui que je vous ai envoyé, sans moi les grenadiers l'eussent tué ; il a volé plus de 50 louis et a tiré plusieurs coups de fusil sur nos patrouilles ; il mérite bien la mort...
« J'avais arrêté un officier qui faisait comme les soldats : il s'est échappé de la garde, et j'en suis bien, fâché ; mais garei demain le premier que j'arrêterai.
« U faut absolument dans vos colonnes commander à chaque brigade un piquet pour faire marcher les traîneurs, arrêter et chasser les voleurs, sans quoi le crime ira à son comble. Ce qui échappera à l'activité, à la surveillance des piquets ne m'empêchera pas. Par ce moyen, nous rétablirons peut-être l'ordre, la discipline, et réparerons la mauvaise réputation que nous font tous ces infâmes coquins.
« Mais, colonel, il faut de la sévérité, il faut fusiller ceux qui font de trop grandes horreurs ; je vous en demande l'ordre, car sans exemple, nous n'en finirons jamais.
« J'ai fait la réquisition, à l'égard des bà-teaux, à la municipalité ; elle m'a promis d'obéir et m'en a fait le reçu. J'ai vu sur la rivière plusieurs bateaux auxquels on avait mis le feu, sans doute par votre ordre. Demain je serai à Courtray à neuf heures du matin ; je prendrai deux voitures vides pour y mettre les armes, les habits, les sacs des ivrognes et des voleurs.
Signé : Richardot. »
Plusieurs membres demandent l'impression de ces lettres.
(La Convention décrète que toutes les lettres de Dumouriez seront imprimées (2).
(3). On vient d'arrêter aux barrières un courrier, qui a été conduit à la section de Bondy. Ce courrier a déclaré qu'il a été expédié dimanche 31 mars de Saint-Amand, par le général Valence, l'un de ceux contre lesquels se trouvent dirigées les mesures de sûreté que le comité a cru devoir prendre. On a ouvert la boîte dont il était porteur, et l'on y a trouvé des lettres aux adresses suivantes : Au général Beurnonville, à Mme de Montesson, à Mme Egalité, et une à Philippe Egalité.
Le comité de défense n'a pas pu prendre sur lui d'ouvrir ces lettres; d'une part, vous connaissez le respect qui est dû au secret des lettres; de l'autre, vous savez les précautions que commandent les circonstances critiques dans lesquelles nous sommes; mais le comité de défense générale a jugé à propos de vous rendre compte du tout et d'attendre vos ordres. 11 vous demande, en conséquence, si vous voulez l'autoriser à procéder à l'ouverture des lettres.
Un grand nombre de membres : Oui, oui !
(La Convention décrète que ces lettres seront ouvertes en présence des commissaires et des personnes auxquelles elles sont adressées.) (4).
, ministre de l'intérieur, entre dans la salle et demande la parole (5).
La parole est au ministre de l'intérieur.
, ministre de l'intérieur. Citoyens, la Convention nationale a, par son décret du 30 mars dernier,,, ordonné que le ministre de l'intérieur lui ferait connaître, sous trois jours :
1° L'emploi qu'il a fait des vingt-cinq millions qui ont été mis à sa disposition pour achats de subsistances ;
2° Les secours qu'il a fournis aux départements de la République ;
3° Les diverses demandes qui lui ont été faites à cet égard.
Et enfin la quantité de grains à distribuer, qui reste actuellement dans les différents ports de France.
Je vais conformément à ce décret, présenter à la Convention le compte qu'elle m'a ordonné de lui rendre.
Aussitôt que le décret du 1er février dernier, qui a mis vingt-cinq
millions à ma disposi-
Le succès de ces achats exigeait, d'ailleurs, les plus grandes précautions et des combinaisons telles que, d'un côté, il fallait éviter que les intérêts de la République ne fussent pas compromis et, de l'autre, que les denrées achetées parvinssent dans nos ports aussi sûrement qu'il serait possible.
Je me suis déterminé, en conséquence, à envoyer sur les lieux une personne qui avait entretenu pendant longtemps, pour le compte du gouvernement, des relations de commerce dans la Baltique et dont le civisme, la probité et l'intelligence m'étaient parfaitement connus. Je l'ai chargée d'acheter les grains provisoirement jusqu'à la concurrence de la somme de dix millions, pour laquelle je lui ai fait ouvrir un crédit sur Londres, Hambourg et Amsterdam.
Cette personne est partie, avec deux autres agents que j'ai également chargés de surveiller les achats et les autres opérations qui y sont relatives. J'ai déjà l'assurance que cette mission sera remplie avec succès, et ne tarderai probablement pas à recevoir des nouvelles des premières expéditions qui auront été faites pour nos ports.
Les besoins pressants de subsistances qu'éprouvent les départements méridionaux m'ont déterminé à faire faire aussi des achats de grains dans toutes les parties de l'Italie, où il sera possible de s'en procurer. J'en ai commis-sionné provisoirement pour six millions et il y en a déjà d'achetées environ soixante-douze mille quintaux, dont quelques cargaisons viennent d'arriver dans le port de Toulon. J'ai également commissionné cinquante mille quintaux de riz.
Je compte tirer, en outre, quelques cargaisons de l'Archipel et j'ai lieu de croire, d'après ce que l'on m'a assuré, que cette contrée pourra nous fournir des ressources.
Je prie, au surplus, la Convention de croire que je mets dans cette opération difficile et délicate toute l'activité et la prudence que commandent les circonstances.
J'observe à l'Assemblée que, sur les fonds qui ont été mis à la disposition du ministre de l'intérieur, par les décrets des 4 septembre et 3 novembre derniers, il a été distribué, à ceux des départements qui m'ont manifesté des besoins les plus urgents, savoir :
En avances pécuniaires 4,204,000 livres
Et en blé..................... 324,465 quintaux
Les demandes qui m'ont été adressés, depuis cette époque jusqu'à présent, s'élèvent à environ quatre millions trois cent mille quintaux de blé et à peu près dix millions d'avances pécuniaires ; mais je prie la Convention de remarquer que ces demandes sont tellement exagérées que tel département qui sollicitait six cent mille quintaux de grains et un secours de quatre cent mille livres en argent, s'est con-
tenté de cent mille francs et de quatre mille quintaux de blé.
Cette réflexion me porte à croire que si les grains étrangers que je fais acheter peuvent parvenir dans nos ports, sans de grands obstacles, il y aura des moyens suffisants pour satisfaire aux besoins réels qu'éprouvent les départements, d'ici à la récolte prochaine.
Au surplus, il y a encore dans les ports de Calais, de Saint-Valéry, du Havre, de Nantes, de Saint-Malo et de Bordeaux, tant en blé qu'en farine, l'équivalent de quatre-vingt-quatre mille six cent cinquante-huit quintaux de grains à distribuer, indépendamment de cent cinquante-six mille neuf cent quatre-vingt-treize quintaux qui sont en mer depuis longtemps^ Il est probable qu'une partie de cette dernière quantité est déjà arrivée dans nos ports, mais je n'en ai pas encore reçu la nouvelle certaine. Ces grains vont être successivement employés à procurer des secours indispensables.
Cela dit, je propose à la Convention de remettre sur le bureau le mémoire des achats et des envois qui ont été faits. Elle le fera, déposer dans le lieu qu'elle jugera convenable. Lorsque le temps sera venu d'exercer sa responsabilité on ouvrira le paquet ; il sera ma justification contre les soupçons.
(1). Je m'oppose à ce dépôt, nous avons tous confiance dans ce ministre.
(2). Et moi je le demande. La calomnie s'attache avec tant de force à tous les gens en place, que je veux sauver celui-ci, que je crois digne de la confiance nationale, des atteintes de ces traits.
(La Convention nationale décrète que cet état cacheté et contresigné par le Président, sera déposé aux Archives) (3).
propose d'autoriser les armateurs en course à saisir les marchandises appartenant aux négociants des nations avec lesquelles la France est en guerre, quoique chargées sur des vaisseaux neutres, en rendant toutefois le vaisseau, et les indemnités dues, tant à l'armateur, qu'au capitaine.
(La Convention renvoie la proposition aux comités de marine et de commerce réunis) (4).
, ministre de la marine, demande la parole (5). .
Vous avez la parole.
,ministre de la marine'. Je viens pour répondre au décret de la Convention qui m'enjoint de lui faire part des dispositions que j'ai prises pour la défense des côtes où la rebellion a éclaté.
La marine de la République a de bien grands moyens à opposer à ses
ennemis. J'ai donné les ordres les plus pressants pour que sur-le-champ
de grandes forces fussent déployées à l'effet de protéger les côtes
contre les malveillants. La plus grande partie des vaisseaux est prête à
mettre à la voile, je n'ai pas lieu de douter que le reste ne soit prêt
aussi sous peu de temps,
J'ai aussi appelé auprès de moi des officiers de marine et des généraux très expérimentés; ils doivent arriver incessamment. J'ai l'espoir qu'avec l'aide des forces nationales et les conseils de ces dévoués citoyens tout réussira.
Votre comité de défense générale vient d'être prévénu qu'une nouvelle lettre de Dumouriez, en date au 31 mars dernier, est parvenue au ministre des affaires étrangères et que la connaissance en est importante. Il vous demande d'en ordonner la lecture, et de décréter que le citoyen Lebrun sera tenu d'en adresser à l'Assemblée une copie sur-le-champ.
La Convention rend le décret suivant (1) :
« La Convention nationale décrété que le ministre/des affaires étrangères lui fera parvenir sur-le-champ la lettre adressée au ministre de la guerre par le général Dumouriez, en date du 31 mars. »
, secrétaire, donne, en attendant, lecture des lettres suivantes :
1° Lettre de Lebrun, président du conseil exécutif provisoire, qui annonce les dispositions prises dans les départements de la Loire-Inférieure, de Maine-et-Loire et de laCharente-Inférieure pour chasser les rebelles.
Suit la teneur de ces deux lettres (2) : I
Paris, le er avril
1793
« Citoyen Président,
« Le conseil exécutif provisoire fait passer à la Convention nationale le précis des nouvelles qu'il a reçues des départements.
« Le général Berruyer, arrivé le 29 mars au soir à Angers, va prendre le commandement de toutes les troupes.
Le général Ligonnier, à qui les commissaires de la Convention nationale avaient déféré provisoirement le commandement, a visité et organisé les différentes divisions : on a lieu de croire qu'il prépare une attaque.
( Le corps d'armée qui couvre la rive droite de la Loire, va se porter en partie sur Nantes, et il opérera sans doute dans toute l'étendue de ce département, dont quatre districts sont au pouvoir de l'ennemi.
« Tout est dans une activité continuelle pour la défense "commune. Le
département de Maine-et-Loire, dans lequel sont réunis en foule les
secours envoyés par les départements voisins, se dispose à diriger de
grandes forces vers ceux de la ci-devant Bretagne.
« Les administrateurs du département des Côtes-du-Nord annoncent qu'ils espèrent préserver entièrement cette contrée des horreurs du brigandage et de l'anarchie.
ù Signé : Lebrun. »
II
Paris, le er avril
1793
« Citoyen Président,
- « Le conseil exécutif provisoire transmet à la Convention nationale 1-e résultat de quelques,nouvelles qu'il a reçues des départements.
« Le 26 mars au matin, le château et la ville de Rochefort ont été repris ; 150 des rebelles sont restés sur la place. Parmi les morts se trouvent quelques hommes qu'une partie de leur costume annonce n'être point des paysans : cependant les chefs ont échappé. La nuit précédente ils avaient furtivement et lâchement abandonné leurs troupes, sous prétexte qu'ils allaient faire des patrouilles. Auoun patriote n'a perdu la vie dans cette expédition.
« .Le conseil a appris avec douleur qu'en entrant à Rochefort, les troupes :se sont portées à des actes de pillage, indignes de la cause pour laquelle ils sont armés.
« .Le conseil pense qu'il serait utile que la Convention .nationale portât une loi contre les excès et ceux qui pourraient les renouveler.
«-Une lettre de Paimbeuf annonce que Por-nic, qui était tombé au pouvoir des révoltés, et dont la position maritime est importante, ■a été reconquis par la valeur de 200 patriotes, qui en ont chassé 12 à 1,500 hommes.
« Suivant le compte, en date du 30 mars que rend le général Berruyer des dispositions qu'il a faites, 20,000 hommes, distribués en dif-iérents corps d'armées, vont commencer leur marche concertée pour délivrer entièrement ce malheureux pays des brigands qui le désolent. »
u.,Signé : Lebrun. »
(La Convention renvoie ces deux lettres au comité de défense générale.)
Je demande à donner connaissance à-man tour à la Convention -d'une lettre des administrateurs du district de Rennes, par laquelle ils annoncent que diverses communes d'Ille-et-Vilaine se sont distinguées par leur zèle et leurs succès contre les contre-révolutionnaires de ce district. .Cette lettre est ainsi conçue (1) y
Le
Représentants du peuple,
te Des hordes de contre-révolutionnaires S9 sont levées dans plusieurs
communes de notre district : déjà elles ravageaient les-propriétés des
patriotes; elles se baignaient dans leur
« Les administrateurs du district et le procureur syndic du district de Rennes.
.« Signé : Jourdain, Senard, Juston, Jacques Jan, procureur syndic.
(1). Je demande à dire deux .mots;, c'est qu'il convient. d'ajouter aux communes dont Lanjuinaisvous a signalé le patriotisme la commune de Saint-Aubin-du-Cor-mier, dont tous les citoyens ont rivalisé de zèle pour le recrutement et dont le fort contingent n'a pas peu contribué aux succès remportés sur les révoltés.
(La Convention nationale décrète que les communes de Rennes, Vem, Châteaugiron, Mélesse, Saint-Aubin-d'Aubigné, Andouillé, Ercée, Nauvoiton, Chevaigné, Acigné, Brecé, •Servon, Noyal-sur-Vilaine et Saint Aubin-du-Cormier ont bien mériter de la patrie, et ordonne que le présent décret sera inséré- -au Bulletin) (2).
(3-). Voici la lettre dont il a été question tout-à l'heure et que le ministre Lebrun vient de faire parvenir à l'Assemblée. Il y est joint une réquisition) de nos commissaires ordonnant un envoi des troupes à Lille pour couvrir cette ville, et la réponse qu'y fit Dumouriez déclinant cet envoi. Ces pièces sont ainsi conçues :
Copie de la lettre du général .Dumouriez au ministre de la guerre.
Saint-Amand, le
« J'ai fait ce matin, citoyen ministre, sans beaucoup d'inquiétude de la
part de l'ennemi
« J'ai reçu, hier au soir, à Tournay, le colonel Mack, chef de l'état-major du prince de Cobourg, avec qui je suis convenu de la reddition des villes de Breda et Gertruydenberg sous une capitulation honorable, et j'en ai envoyé l'ordre par les Autrichiens eux-mêmes au général Deflers et au colonel Tilly : par ce moyen, je sauve, pour le service de la patrie,
10 à 12 bataillons,, dei 1a> cavalerie et de l'artillerie qui étaient perdus, si je n'eusse pas fait consentir le prince de Cobourg à cette capitulation.
« Je m'attends encore à être blâmé de cette mesure de prudence. Comme c'est pour le salut de la patrie que je travaille, je résisterai à toutes les calomnies et à toutes les injustices. Je ferai mon devoir et rien ne rebutera mon .caractère.
« Les commissaires de la Convention nationale viennent de faire arrêter le général d'ïïarville, dans le moment où ses services -étaient le plus nécessaires : voilà déjà quatre généraux arrêtés depuis un mois. Que prétend-on faire ? où veut-on en venir 1 C'est- donc pour achever de compléter la désorganisation;
11 semble que l'aveuglement augmente avec le Ranger ; il semble qu'on veuille jouer de son reste sur le bord du précipice.
« J'ai appris de l'officier général autrichien que plusieurs de nos hussards sont désertés, ainsi que de la troupe de ligne et même des volontaires ; qu'ils disent tous qu'ils sont las de la guerre ; que les prisonniers disent la même chose : vous jugez les conséquences que doit en tirer l'armée autrichienne. Ce rapport de nos déserteurs et de nos prisonniers .n'est que trop vrai : cent mille hommes de troupes allemandes, anglaises, hollandaises, prussiennes et hanovriennes menacent cette frontière rapprochée de Paris. La plupart de nos vieux soldats sont morts, blessés ou désertés : on prétend les remplacer par des recrues sans armes et sans volonté.
« Nous n'avons point de subsistances. Les départements sont dans la consternation ; plusieurs même diffèrent d'opinion et sont sans confiance ; tous se plaignent des commissaires de la Convention. Ces commissaires tracent des plans de campagne, accusent, mettent en arrestation, et personne ne conçoit plus rien à cette activité révolutionnaire, qui de législateurs les transforme en pouvoir exécutif : tous les principes sont renversés, tous les genres de désordres sont à leur comble, et c'est avec une pareille conduite que nous prétejtt-dons soutenir la guerre contre toutes les nations de l'Europe! Je vous le répète, citoyen ministre, si nous ne travaillons pas bien vite à la paix, nous sommes perdus sans ressource; je vous envoie copie d'une lettre des commissaires de la Convention près de l'armée, dont ils n'approchent pas, et de ma réponse.
« Signé : Dumouriez, général en chef. »
i Lettre des commissaires de la Convention nationale près Varmée, au général Dumouriez, commandant en chef les armées de la République.
« Lille, le
« La rentrée des troupes sur nos frontières, citoyen général, et la juste inquiétude des habitants de ce pays, nous ont déterminés à réunir hier, auprès de nous, les différents agents, civils et militaires, employés à Lille. Nous avons eu une conférence sur les différents moyens à prendre pour approvisionner convenablement cette place, et la mettre en état de défense.
Le général Duval vous fera part du résultat de nos opérations. Quant à présent, nous nous bornerons à vous observer que les dispositions que vous paraissez adopter, si nous en jugeons par les dernières lettres que vous nous avez écrites, laisseront, dans cette partie très importante de la frontière, un vide qui faciliterait à l'ennemi une marche assurée jusqu'aux portes de Lille; tandis que, pour couvrir cette place et ses communications, il est nécessaire d'établir en avant un camp composé au moins de 14,000 hommes effectifs, et de 1,200 chevaux : c'est l'avis unanime des militaires que nous avons entendus.
« Yous n'avez pas un instant à perdre pour l'exécution de cette mesure qui est d'une nécessité indispensable dans la circonstance. Yous avez, comme nous, connaissance que l'ennemi fait une marche très rapide; on assure même qu'il est suivi de son artillerie de siège. L'invasion qu'il ferait infailliblement sur le territoire de la République, si on n'y met bien vite obstacle, serait très alarmante. Il est donc de notre devoir à tous de nous occuper sans relâche de cette mesure de sûreté générale. Il n'est pas inutile de vous observer aussi que toute la garnison de Lille est composée, dans ce moment, de 225 volontaires.
« P. S. La Deule et l'Escaut ne sont point gardées, et il n'y a pas de troupes ici pour les garder. Il faut que vous preniez des mesures pour assurer la conservation des postes importants qui sont sur ces deux rivières, qui, s'ils étaient en puissance de l'ennemi, nous ôte-raient la possibilité des approvisionnements de la place.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai), . Treilhard, Robert, Carnot, Lesage-Senault. »
Réponse de Dumouriez aux commissaires de la Convention nationale (2).
Bruille Saint-Amand,
« Dans le moment où j'ai reçu votre lettre, citoyens commissaires, je
donnais les ordres pour prendre deux brigades ou six bataillons
d'infanterie, un régiment de cavalerie pour former la garnison de Lille;
il est impossible, et il serait très peu militaire, de tirer d'une armée
désorganisée, dont tous les corps sont
« Je ne peux, en ce moment, mettre que des garnisons dans les places, et il est impossible de nous diviser en petits paquets; il s'agit de séparer les deux armées au Nord et des Ardennes, de Jeur rendre à chacune les corps qui leur appartiennent, pour les réorganiser, afin qu'elles puissent, ou s'éloigner l'une de l'autre, ou agir à portée l'une de l'autre, selon les circonstances; c'est pour cet effet que nous les avons fait camper séparément, l'armée des Ardennes à Maulde, l'armée du Nord à Bruille, afin qu'elles soient à portée d'échanger, sous deux jours, les oataillons qui leur appartiennent respectivement, afin aussi qu'on sépare l'artillerie, les tentes et effets de campement.
« Quant à la disposition générale que j'ai faite pour le placement des troupes sur la frontière, j'ai cru devoir destiner l'armée de l'expédition de la Hollande, pour la défense de la Flandre maritime, et de l'Artois, qu'elle doit couvrir par un camp sous Cassel; les deux armées des Ardennes et du Nord, sur le flanc de Yalenciennes et Lille, pour pouvoir se porter au secours de celle de ces deux places qui serait menacée; et cependant pour être quelques jours dans un camp tranquille, pour se réorganiser et se rétablir. La division du général Neuilly, qui était de 6,000 hommes, se trouvant réduite par la désertion à 2 ou 3, a été placée, par mes ordres, dans Condé et Valenciennes; les flanqueurs de gauche, du général Miaczinski occupent Orchies et les environs; les flanqueurs de droite, aux ordres du général Dampierre, occupent Bavai, pour lier la communication avec Maubeuge, et couvrir la trouée de Landrecies : le général d'Harville a ramené son. corps d'armée à Maubeuge et à Givet; mais il vient d'être mis en état d'arrestation par les commissaires de la Convention nationale, et dès ce moment, je ne réponds plus du sort de cette partie de la défensive.
« J'ai à vous observer que les généraux qui commandent les armées de la République et les troupes seront consternées de tant d'actes arbitraires, et que bien loin de donner de la force à l'armée, on l'affaiblit en la privant des chefs sous lesquels elle a combattu avec confiance.
« Signé : Dumouriez, général en chef. »
( P. S. J'ai appris, comme vous, que l'armée autrichienne marche assez vivement sur nous; cependant, comme il lui faut des vivres, et surtout des fourrages pour pouvoir pénétrer en France, j'espère qu'elle nous donnera au moins huit ou dix jours avant de se présenter en force, pour pénétrer sur un point quelconque de notre territoire. Ce n'est que lorsque je serai bien sûr de son mouvement, que je pourrai savoir où porter mes principales forces pour m'opposer à ces progrès. Vous verrez, par la copie de la lettre du général Ferrand, que l'archiduc menace aussi par le
côté de Mons. Travaillez à nous procurer des approvisionnements sur Douai, Valenciennes et Bouchain, pour que nous puissions nous porter en avant; car, avant de penser à former des camps, il faut savoir comment on les nourrira; il faut penser aussi à un approvisionnement pour le camp de Cassel, qui sera au moins de 12 à 15,000 hommes.
« Signé : Dumouriez, général en chef.»
(1). Je demande que Dumouriez soit déclaré infâme et traître à la patrie.
Plusieurs membres : Oui, oui, et qu'on propose aussitôt le décret d'accusation.
Je demande la parole.
Vous avez la parole.
(2). Citoyens, dans l'état où se trouve la République, je ne chercherai point à servir les projets d'un ambitieux en semant la discorde dans cette Assemblée. Ses projets sont assez connus et son but ressort suffisamment de ses discours, tantôt éclatant contre une partie de la Convention, connue sous le nom de Montagne, et ensuite se repliant sur ce que l'on appelle les appelants au peuple. Il me serait facile de vous le montrer, tantôt dans un entretien particulier, avec trois jacobins, les intéresser à son sort, pour rétablir la royauté; tantôt dans des lettres ostensibles, flatter ceux que l'on désigne sous le nom d'appelants au peuple, en les qualifiant de la partie saine de la Convention nationale. Ainsi il cherche à fomenter le désordre parmi nous ; , ainsi il veut nous diviser, et c'est par ces moyens qu'il croit monter sur le trône, ou y faire monter ses partisans.
J'ai gémi hier, avec tous les bons" patriotes, de voir que lorsque nous voyions clairement que le coupable est aux frontières, nous voulions absolument trouver des coupables, ou dans une partie de la salle, ou dans l'autre. Si successivement vous perdez des séances entières à entendre des dénonciations et des inculpations contre les membres de cette Assemblée, comment voulez-vous sauver la République 1
A cette heure il faut déchirer le voile; il est temps que la France
commence à croire que Dumouriez peut avoir eu des vues ambitieuses; il
est important d'examiner sa conduite depuis qu'il sert la République.
C'est alors que je prouverai que ce n'est pas d'aujourd'hui qu'il est un
traître. Ses projets d'ambition vous sont connus depuis longtemps, et ce
ne sont que ses succès qui nous ont aveuglés sur sa conduite. Je n'ai
cessé de réclamer la publicité de ses opérations; et lorsque je suis
monté à cette tribune, loin d'entrer en lice avec lui, je me suis
toujours borné à_ demander la lecture de toutes les pièces qu'il vous
adressait, afin que la nation pût connaître quels étaient ses desseins
et ses vues. Je sais qu'on craint la désorganisation de nos armées, en
leur donnant des méfiances contre ce général; eh bien ! il se plaint
aujourd'hui de ce que vous n'avez pas rendu publics et ses mémoires et
ses lettres, et tous les actes d'autorité qu'il a faits.
Je vais actuellement, devant toute l'Europe, vous démontrer la conduite qu'à tenue ce général ambitieux, et peut être vous aurez des soupçons contre plusieurs personnes qui l'environnent, car, ne croyez pas qu'il soit seul dans ses projets, et ne pensez pas que ce n'est que d'aujourd'hui qu'il a envie de vous -asservir. Vous savez qu'en entrant dans la Belgique le général Dumouriez eut soin de surprendre un décret à l'Assemblée. Comment s'y prit-il 1 Il avait la confiance du pouvoir exécutif qui correspondait avec lui; on lui avait donné des commissaires pour l'accompagner; vous aviez des commissaires de la Convention qui étaient à l'armée du Nord. Son premier acte d'autorité fut d'écrire au ministre des affaires étrangères, pour écarter des surveillants qui auraient pu l'arrêter dans ces projets ambitieux.
Vous avez rendu ce décret sans aucune discussion; dès lors, il s'est cru maître de gouverner l'Etat.
Quand je vis que son idée bien arrêtée était d'écarter tout ce qui pouvait le gêner et qu'il voulait s'emparer de tous les marchés et de tous les trésors de la République, je crus qu'il était de mon devoir d'annoncer à l'Assemblée que, quelle que fût la confiance qu'on avait dans ce général,il fallait toujours surveiller les finances; et voilà le premier crime que j'ai' commis à ses yeux.
La général Dumouriez était environné de ses satellites; il se plaint que vous lui ayez enleyé son payeur général et il cherche, par d'autres moyens, à se procurer de l'argent pour vous faire la guerre. Il tire des lettres de change sur les domaines nationaux et croit se faire un fonds de 48 à 50 millions aux dépens de ce gage qui devait indemniser la République des frais de la guerre. Mais, par malheur pour lui, un décret proposé par moi à l'Assemblée, au nom des trois comités réunis, et qui fut unanimement adopté, empêcha que ces lettres de change, qu'il avait tirées sur les biens nationaux, fussent acquittées. Dès lors les 48 à 50 millions, qu'il croyait avoir en réserve lui échappent, et il est forcé de venir vous rendre compte des lettres de change qu'il avait tirées.
Voilà d'où me vient cette haine implacable; il a cru qu'en me créant chef de parti, et en attaquant le rapporteur au lieu d'attaquer les décrets, il a cru, dis-je, détruire la Convention. C'est alors qu'il vous a envoyé ces mémoires, dont je ne cesserai jamais de demander la publicité, parce qu'ils éclairent beaucoup cette Assemblée sur les projets du général.
N'ayant plus la ressource de tirer des lettres de change sur les domaines nationaux, vous le verrez désorganiser la trésorerie nationale : pourquoi ? Parce que la trésorerie nationale, est le seul surveillant que nous ayons dans la partie des finances. C'est là où il faut un œil sévère pour que le trésor national ne soit pas épuisé. Lorsqu'il a vu que vous persistiez dans la conservation de cet établissement, qu'a-t-il fait 11l a emprisonné tous les contrôleurs, s'est emparé des caisses, a tiré des lettres de change, a fait des ordonnances, et toujours exerçant le
PARLEMENTAIRES. [l8r avril 1T93.]
pouvoir militaire, il n'av rien négligé pour se procurer les fonds qu'il voulait mettre à sa disposition.
Le premier acte arbitraire de Dumouriez, en entrant dans la Belgique, a été de désorganiser les sociétés populaires : le second acte a été de faire venir tous les trésors nationaux qu'on avait mis à Lille pour plus de sûreté.
Lorsque l'avantrgarde fut forcé, le caissier voyant qu'il avait alors quinze millions en caisse crut qu'il n'était pas prudent de laisser à Lille ces quinze millions; il les apporta alors au comité. Le général, quoique les commissaires eussent autorisé cette mesure de précaution, envoie chercher le caissier par des cavaliers de maréchaussée, et le met en prison, pour s'emparer des fonds de la République.
On vous a caché cet acte arbitraire, je demande qu'il soit connu; car enfin, si l'on prend i votre trésor, au moins faut-il que vous le sachiez.
J'ai demandé, le 27 de mars, ici à cette' tribune, que toutes les pièces qu'il a envoyées au | ministre de la guerre fussent connues : mais puisque aujourd'hui Dumouriez cherche à me ! créer honorablement chef de parti (et j'avoue que je suis un étrange chef de parti) je demande que le comité de défense nationale soit tenu de faire imprimer les lettres de Dumouriez; je demande, en outre, que le comité de défense générale soit tenu de nous faire connaître la conduite de ce général, lorsqu'il était ministre des affaires étrangères et de la guerre (car c'est là qu'il méditait son plan), et qu'il publie en même temps toutes les pièces et mémoires qui ont trait à la déclaration de guerre, qu'il nous a fait faire à l'Autriche.
Il est important que la France connaisse ce qui s'est passé; et ce n'est que par la publication de toutes ces pièces qu'elle pourra juger entre nous et ce général félon.
J'insiste pour que ma proposition soit mise aux voix.
Un grand nombre de membres : Appuyé, appuyé !
(La Convention adopte les propositions de Cambon. )
Suit le texte définitif du décret rendu (1) :
« La Convention nationale décrète :
Art. 1er.
« Toutes les lettres et mémoires du général Dumouriez à la Convention ou aux comités, ainsi que les lettres et mémoires du même général au ministre de la guerre, qui ont été communiquées ou remises à la Convention ou aux comités, seront imprimées.
Art. 2.
« Le comité de défense générale se fera remettre par le conseil exécutif toutes les pièces et mémoires du général Dumouriez pendant qu'il était ministre des affaires étrangères et de la guerre, pour en faire incessamment un rapport ».
Je demande la parole (2).
Vous avez la parole.
Citoyens, on pourrait croire, après la lecture des lettres de Dumouriez, que la patrie est tellement en danger, qu'il n'est plus même d'espoir pour les vrais patriotes. Cependant j'annonce à la Convention que déjà son comité de défense générale s'est occupé des mesures de sûreté commandées par les circonstances; demain elles lui seront présentées.
J'ai demandé la parole pour un fait. Il importe au salut de la République de ne pas laisser planer ce soupçon sur la tête des représentants du peuple.
En vous donnant lecture de la réquisition de vos commissaires dans la Belgique, qui sommait Dumouriez de se rendre à Lille pour y prendre communication de la dénonciation faite contre lui, on a omis un fait important : c'est que, d'après son refus, les commissaires prirent un arrêté pour se rendre eux-mêmes à Tournay, quartier général du général Dumouriez. Au moment où ils allaient entrer dans cette ville, Dumouriezx convaincu que le moment n'était pas encore arrivé de mettre ses desseins à exécution, et qui d'ailleurs sentit que, s'il faisait arrêter les commissaires, son a,rmée elle-même éclairée sur sa perfidie, le conduirait à la barre de la Convention, Dumouriez expédia une ordonnance aux commissaires par laquelle il leur faisait dire qu'il était impossible de les recevoir en ce moment, attendu que son avant-garde avait été attaquée par Clairfait. Ce trait de courage de la part de vos commissaires les honore, et je suis étonné que votre comité de défense générale n'en ait fait aucune mention dans son rapport.
.Je n'inculpe personne, car ce n'est pas mon genre d'esprit; mais enfin le fait existe, puisque Treilhard l'a mentionné devant moi hier au soir, en plein comité, avec pièces à l'appui (Mururmires); il était bon qu'il fût raconté.
Je passe à un autre fait : la Convention nationale, le 30 septembre dernier, me nomma commissaire dans le département du Nord, avec Duhem, Bellegarde, Duquesnoy et Doul-cét; nous y arrivâmes après le bombardement; c'est à cette époque que nous sommes tombés sur les traces des grandes trahisons de Dumouriez : j'en fis part à mes collègues, mais nous n'avions aucune preuve certaine. Il fallait nous taire sur les torts présumés de Dumouriez couvert de gloire, et nous borner au rôle d'observateurs.
Trois de i nous se rendirent à Hulingue, et eurent une conférence avec Dumouriez, dans laquelle il fut question du comité révolutionnaire des Belges, et des divisions qui agitaient ce pays; nous crûmes apercevoir à la manière dont Dumouriez parlait de les faire cesser, et la complaisance avec laquelle il s'arrêtait sur les moyens qu'il voulait employer, que son ambition le portait à ménager les esprits, sans doute pour se faire déclarer duc de Brabant; et dès lors, il nous fut démontré que Dumouriez perdait la République. Il existait alors des divisions entre lui et Labourdonnaye; nous lui observâmes que, dans trois jours, il pouvait être attaqué, et qu'il était de l'intérêt général de sacrifier ces haines : nous l'engageâmes à venir avec nous à Lille, pour avoir une explication avec Labourdonnaye. Cette explication eut lieu, et son résultat fut la bataille de Jem-mappes.
L'Assemblée doit se rappeler une lettre que nous lui écrivîmes, et dans laquelle nous lui demandions la permission de suivre Dumouriez dans son expédition de la Belgique. Notre intention était de le suivre dans ses projets ambitieux, et de le démasquer à la première occasion favorable; "mais Dumouriez demanda notre rappel, et Barère, qui ne connaissait pas ses vues criminelles, proposa le décret qui fut adopté à la presque unanimité. Il importe de connaître ces faits, parce que Dumouriez n'est pas seul coupable. Le moment viendra où ses complices seront connus, et où je pourrai découvrir toute cette trame; mais ce moment n'est pas encore arrivé.
, au nom du comité de la guerre, fait un rapport et présente un projet de décret (1) pour donner plus d'activité aux manufactures d'armes et réglementer la fabrication et la vente des fusils de guerre; ce projet est ainsi conçu :
« La Convention nationale, après avoir entendu son comité de la guerre, décrète ce qui suit :
Art. 1er.
« Tous les ouvriers attachés à la fabrication des armes, aux fonderies de canons, tant de terre que de mer, aux grandes forges et aux mines de fer, sont exceptés du recrutement, et si quelqus-uns sont enrôlés, ils seront rappelés dans-leurs ateliers. Les dispositions restrictives de la loi du mois de mars dernier seront applicables au présent article.
Art. 2.
« Le ministre de l'intérieur se fera rendre compte de l'état actuel des mines de fer, de cuivre, de plomb et de charbon de terre de la République, ainsi que des améliorations dont leur exploitation est susceptible. Sur son rapport, les comités d'agriculture et d'instruction publique présenteront à la Convention les mesures convenables pour donner de l'activité à cette branche importante des richesses nationales.
Art. 3.
« Pour mettre les entrepreneurs et les fabricants d'armes en état de se procurer le nombre d'ouvriers qui leur sera nécessaire, les municipalités recevront l'inscription des ouvriers pour en faire un tableau portant l'indication de la partie à laquelle chacun peut être employé; ces tableaux seront envoyés au .ministre de la guerre, qui en fera faire un tableau général ,et l'enverra à tous les conseils d'administration.
Art. 4.
« Les fusils fabriqués, à compter de la publication du présent décret, seront en tout conformes au modèle n° 1, présenté par les fabricants de Saint-Etienne, et déposé chez le ministre de la guerre.
Art. 5.
« On ne s'occupera du modèle 1777 que sur une demande déterminée du
conseil exécutif;
Art. 6.
« Ceux qui auront dans leurs ateliers ou magasins des armes de guerre qui ne seraient ni du modèle n0- 1 ni de celui de 1777, seront tenus de les déclarer, dans la quinzaine qui suivra la publication du présent décret, au conseil d'administration; passé ce terme, aucun de ces fusils ne sera admis dans le arsenaux de la nation.
Art.- 7.
« Le prix des fusils, modèle n° 1, demeure fixé à 40 livres; le prix de ceux du modèle de 1777, à 48 livres. Cette fixation n'aura lieu que jusqu'au 1er juillet prochain.
« Jusqu'à cette époque, le conseil d'administration de chaque ville où il se fabrique des armes, réuni au conseil général de la commune, et à douze chefs d'ateliers, examineront s'il y a lieu à changer les prix, et présenteront au ministre de la guerre un rapport à ce sujet : le prix des fusils qui ne seront point fabriqués sur ces deux modèles, sera fixé par le conseil d'administration, à raison de leur perfection, sans jamais passer le prix du modèle dont ils approcheront le plus.
Art. 8.
« Le conseil d'administration, d'après les modèles qui lui seront envoyés par le ministre de la guerre, donnera communication des calibres, formes et mesures propres au modèle, n° 1, à tous ceux qui se présenteront pour les connaître.
Art. 9.
« Il n'y aura qu'un seul lieu d'épreuve et de contrôle dans les endroits où il y aura un conseil d'administration; on y admettra tous les fusils du modèle demandé en quelque nombre qu'ils soient, qu'ils viennent d'un individu ou d'une compagnie.
Art. 10.
« On ne recevra point de fusils sans baïonnette, ni baguette d acier, toutes les parties de l'arme seront essayées conformément à la loi du 8 juillet; la baguette sera éprouvée dans tous les sens à la planche; la tête sera essayée séparément au tar.
Art. 11.
« On ne rebutera pas les bois pour quelques parties blanches, mais seulement pour cause de vermoulure, gelivure, échaudure, fente, éclat, défaut de sécheresse ou de proportion.
Art. 12.
« Il y aura auprès de chaque conseil d'administration un cabinet de modèles d'armes, d'outils et de machines, qui sera mis sous la direction d'un armurier-mécanicien, qui fera partie du conseil d'administration, et sera nommé par le conseil général de la commune.
Art. 13.
« Les fabricants et entrepreneurs ne pourront employer pour monter leurs armes que des bois préalablement examinés par le conseil d'administration, qui les marquera d'un poinçon d'acceptation. Ces bois ne pourront être mis en oeuvre que dans la troisième année de l'emmagasinement.
Art. 14.
te Tous les paiements seront faits en assignats, tant aux ouvriers qu'aux fabricants.
Art. 15.
« Les ouvriers et fabricants mettront leur marque sur leur ouvrage, afin que le zèle et le talent soient connus et honorés.
Art. 16.
( Tout citoyen, fabricant ou non, pourra faire passer au ministre de la guerre sa soumission, pour fournir des fusils du modèle demandé.
Art. 17.
« Toute invention, tout procédé tendant à simplifier, accélérer ou perfectionner l'arme à feu, seront examinés; et s'ils sont jugés bons, le ministre est autorisé à en faire l'acquisition pour les répandre dans la République.
Art. 18
( Le ministre est également autorisé à traiter avec le citoyen Javelle, attaché à la fabrique du citoyen Jovin, établie à Saint-Etienne, pour l'acquisition des machines de son invention, sur le jugement du bureau de consultation; il sera statué par un décret particulier sur l'emploi de ces machines, lorsqu'elles appartiendront à la République.
Art. 19.
« Le ministre de la guerre se fera rendre compte des procédés propres à chaque manufacture d'armes; il les fera examiner comparativement par des gens de l'art, pour répandre efc faire adopter partout ceux qui seront jugés les plus économiques et les plus utiles.
Art. 20.
( Tous les traités des manufactures d'armes, ci-devant royales, faits avec le gouvernement, sont résiliés; le directoire du département où elles sont établies enverra des commissaires pris dehors et dans son sein, pour prendre connaissance, de concert ave le conseil d'administration, de l'état de situation desdites manufactures vis-à-vis le gouvernement. Si les entrepreneurs se trouvent reliquataires, il leur sera accordé cinq années pour remboursement, en payant par eux un intérêt annuel de cinq pour cent.
Art. 21.
« Le prix de l'arme sera le même pour les manufactures que pour les fabricants particuliers. Il sera présenté, par le ministre de la guerre, à la Convention nationale un règlement général, qui dirigera la conduite du conseil d'administration conforme à ce nouvel état de choses.
Art. 22.
« Le conseil exécutif enverra à Saint-Etienne un commissaire-ingénieur pour visiter les lieux, à l'effet de voir ce qu'il serait possible de faire pour augmenter les eaux du Furens, dans les temps de sécheresse. Sur le compte qui en sera rendu à la Convention, il sera pris par elle une détermination définitive.
Art. 23.
( La loi du 19 août 1792 sera exécutée en tout ce qui n'est point contraire au présent décret. »
(La Convention adopte ce projet de décret.)
(l).En exécution du décret de l'Assemblée, le comité de défense générale à ouvert le paquet qui a été saisi sur le courrier expédié par le général Valence, les lettres qu'il renfermait n'indiquent aucune ligne de conspiration. Ce sont des lettres de famille et rien ne regarde la contre-révolution dont votre comité cherche le fonds avec précision et attention. En conséquence, votre comité vous propose de les renvoyer à leur adresse.
(2). Je demande le renvoi de ces lettres au comité de sûreté générale, parce qu'on sait que des lettres qui, quoique ne paraissant renfermer que des. objets très peu intéressants, lues d'une certaine manière, contenaient le plan d'un grand complot. Le comité les examinera.
Un autre membre (3). J'approuve la motion d'Osselin, et pour motiver cette approbation, je vous demande la permission de rappeler un fait. Un citoyen écrivait à un autre citoyen, la lettre fut arrêtée, on la porta au comité de sûreté générale. Tout d'abord, dans les sept à huit premières lignes on ne vit qu'une phrase d'un sens très patriote, mais sur un soupçon, on présenta la lettre au feu, et on découvrit deux pages qui ne renfermaient que des projets de contre-révolution. Je demande que ces lettres soient soumises à la même épreuve.
(La Convention renvoie ces lettres au comité de défense générale pour faire à leur égard l'usage des différents procédés connus pour découvrir si elles ne renferment pas quelque secret) (4).
(La séance est levée à six heures 20 du soir.)
a la séance de la convention nationale du
rapport fait au nom du comité des pétitions et de correspondance le
Citoyens législateurs,
Quand l'orage se forme de toutes parts, que les dangers de la patrie sont plus imminents que jamais, que chaque jour, a chaque heure, il se trame des complots, que les trahisons se succèdent inopinément, que nos frontières sont menacées par tous les despotes de l'Europe, que nos armes naguères victorieuses ont cessé de l'être par les indignes manœuvres de l'infâme Dumouriez, que plusieurs de nos départements sont en proie à la guerre civile; il fayt que vos âmes prennent un nouveau degré d'énergie; il faut que, déposant toute haine, tout ressentiment, vous éteigniez, parmi vous, le flambeau de la discorde; il faut qu'en envisageant le péril avec intrépidité, qu'en sondant toute la profondeur de nos maux vous arrêtiez la France sur le penchant de sa ruine, par des mesures inspirées par la sagesse et le courage; il faut qu'à votre voix, l'égoïsme se taise, l'orgueil se cache, l'ambition lâche sa proie, le fanatisme soit désarmé, l'hideux agiotage anéanti, et que le règne des lois fasse disparaître l'anarchie qui nous dévore.
Telle est votre tâche. Déjà vous vous êtes glorieusement avancés dans la pénible carrière qui vous est tracée; mais hâtez-vous d'en atteindre le but; c'est le vœu le plus exprès de vos commettants qui, en adhérant à tous les décrets que vous avez rendus jusqu'à ce jour, se réservent à vous décerner la couronne civique au moment où vous aurez sauvé la République, et affermi, sur des bases inébranlables, la sainte liberté, la consolante égalité, en leur donnant une constitution émanée des droits imprescriptibles de l'homme.
Citoyens législateurs, les Français que vous représentez dans cette auguste enceinte, vous conjurent donc, au nom de tout ce qu'il y a de plus sacré, d'opérer sans relâche le grand œuvre de leur bonheur : mais ils jurent en même temps de toujours vous seconder de leurs lumières, de leur fortune et de leurs bras. Par l'analyse de leurs adresses, vous verrez qu'ils tiennent parole, vous verrez que le plus ardent patriotisme embrase tous les cœurs, vous verrez qu'aucun sacrifice ne leur coûte, vous verrez enfin, que le recrutement que vous avez décrété, s'effectue avec enthousiasme, et que tout à l'heure même la France n'offre plus qu'un camp qui sera, si vous y prenez garde, inaccessible à la rage des tyrans. Les administrateurs des départements des
ArdenneSi du Lot, de la Haute-Marne, de Seine-etrMarne, des Vosges, de la Corrèze et de la Manche, ceux du district de Bayeux, les communes de Coutances, de Bomy, ae Lille, de Parthenay, de- Clichy-la-Garenne, de Champfleur, annoncent à la Convention que dans leurs arrondissements respectifs, .le recrutement s'opère sans trouble et avec la dernière activité.
Les officiers, municipaux de Saint-Savin réunis avec leurs concitoyens, vous font savoir qu'au lieu de quinze défenseurs qu'ils étaient tenus de fournir à la patrie, au cri de cette tendre mère, ils envoient, pour exterminer ceux qui osent l'attaquer, soixante jeunes gens qui sont, ajoutentrils, toute la génération militaire de leur commune.
Celle de Gales sie, sur quarante-cinq gardes nationaux qu'elle possède- dans son sein, vingt-trois passent sous les drapeaux de Mars. Le département du Lot, instruit de cet acte de Civisme, arrête qu'il sera, fait présent à cette municipalité d'une pique surmontée du bonnet de la liberté.
Le citoyen Champagneux, premier commis du ministre de l'intérieur, vous écrit : « J'ai un fils et un neveu employés dans les bureaux du ministère de l'intérieur. A la nouvelle de la dernière insulte de nos ennemis* je les via émus jusqu'aux larmes : ils regardèrent l'uniforme national, et fixèrent ensuite leurs yeux sur les miens. Je compris ce langage, je les ai vêtus de cette Honorable livrée et ils partent demain pour les frontières. » Le brave Chail-let. natii de Saint-Florentin, dont le nom est déjà inscrit sur la liste des héros, persuadé que la nation prendra soin de ses père et mère, dont il était depuis quelque temps l'unique ressource^ rejoint son bataillon pour moissonner de nouveaux lauriers.
Le dévouement, et non le sort, dans- presque toutes les municipalités que je viens de citer, conduit la jeunesse aux combats, et partout iis s'est fait en sa faveur des souscriptions patriotiques qui ont produit des sommes considéra*-bles, et une immense quantité d'effets1 d'habile lements et d'équipements. Le citoyen Bouquet de Rion, tailleur d'habits, et qui n'a d'autre fortune que le produit d'un travail journalier, a offert à la patrie un homme habillé et équipé à ses frais.
J e termine cet article par une courte réflexion, c'est que par'votre décret qui autorise vos commissaires à surveiller l'organisation, Farmement et le départ de vos nouvaux volontaires, vous arrêtez beaucoup de réclamations.
Que ne puis-je vous énumérer tous les traits d'héroïsme qui ont eu lieu lors de l'exécution de votre loi du recrutement dans les départements- dont je viens de parler: mais la matière est trop étendue, et je dois épargner1 vos moments.
J'ajouterai cependant que de tels efforts n'ont pas empêché les départements dé la Vendée; des deux-Sèvres et de la Loire-Inférieure, de recevoir de puissants secours en hommes de_ ceux du Lot, de la Sarthe et de Loir-et-Cher.' Sai.nt-Aigna.n, très petite ville de ce dernier département, a fourni pour les frontières-vingt-huit volontaires, et cent hommes pour les pays insurgés. L'aristocratie lève sa tête hideuse sur ces rives favorisées de la nature, mais le sans-culotisme y est dans la plus grande vigueur. La société populaire de
Blois qui professe énergiquement les meilleurs principes, propage avec succès le patriotisme dans tous Ie3 points de son affiliation. Celle d'Arles* qui a tant de fois donné des preuves de ses sentiment»' civiques &'exprime ainsi : « Nous: voilà debout et p rêts-à^ partir... parlez, .. nous volons à la défense de la patrie. Les revers ne nous effrayent point; préservez-nous des traîtres, et nous saurons vaincre les phalanges des despotes; ».
Joseph Serre, officier municipal de Tullins, vous fait hommage d'un discours qu'il a prononcé le 10 février dernier, pour engager les gardes nationales de. son canton à se porter à Paris, afin de défendre, dit-il, la Convention, l'objet de sa sollicitude. Ce bon citoyen ignore que les représentants du peuple n'ont jamais rien eu à craindre de la part des> Parisiens.
Ferdinand-Dubois d'Arras a entrepris de répondre, au nom du; peuple français, à l'adresse de la Convention dernièrement promulgué^., Ce républicain a énergiquement exprimé les sentiments de notre généreuse nation; et'il-vous fait hommage d'un exemplaire de cette, réponse.
La société populaire des environs de Toulouse,^ sous la dénomination de cultivateurs républicains, craint que les enrôlements ne nuisent à l'agriculture; et demande que personne ne pousse être arrêté pour dette. Ces bons Français savent maintenant que la Convention a paré à ces deux inconvénients.
Les citoyens d'Abrai, ^'uge du tribunal civil de Niee, Ànthenis et Serieys vous font hommage de trois adresses imprimées, qui, ayant-été répandues dans le public, ont du servir à-éclairer leurs concitoyens sur leurs droits et leurB devoirsy et à alimenter le patriotisme le plus pur.
La municipalité de Liergues dénonce l'aristocratie des administrateurs du district de Villefranche. Celle de Roye vous fait passer un procès-verbal qui constate que le 13 mars dernier, au milieu des fanfares et de la garde nationale sous les armes-, faisant cortège, le bonnet de lai liberté avaitr été'porté en triomphe dans leur ville, pour venger une insulte faite à ce respectable attribut.
Le comité permanent de Besançon dit que leur ville a éprouvé un. peu d'agitation,, lors du recrutement, mais que la fermeté des administrateurs de cette cité en a imposé sur-ler-champ aux.agitateursv
Les administrateurs des départements de l'Isère, du Mont-Blanc, ceux des districts de Nancy et de Tarascon. la commune de Véze-lise, les sociétés populaires de Saint-Pierre, île d'Oléron, de Cette et de Blois, en déplorant les malheurs qu'enfantent vos discordes, vous; demandent, vous somment de rappeler parmi vous l'esprit de paix et d'union, sans lequel, aioutent-ils, il est impossible que vous sauviez 1 Etat. Ils ne désirent pas avec moins d'ardeur que vous fassiez punir les traîtres, les agitateurs, les anarchistes de toutes les formes et de toutes les classes; ils vont même jusqu'à prouver que la représentation nationale ne doit couvrir aucun mandataire infidèle du manteau de l'inviolabilité, et que vous devez, sans tarder, envoyer à l'éenafaud celui d'entre vous qui serait reconnu pour conspirateur. Vos derniers décrets relatifs à la sûreté publique et aux fonctions du tribunal extraordinaire n'étaient pas encore connus de
ces républicains; mais néanmoins écoutons, à ce sujet, les Blésois réunis en société :
« Représentants, nous voyons moins la cause de nos maux actuels dans l'or étranger que dans nos intrigues domestiques... Que le glaive révolutionnaire se promène enfin sur toutes les têtes qui machinent des conspirations au nom d'un roi, ou de leurs ambitions privées... Plus de ménagements, plus de délai; frappez sur tous les grands coupables, quels qu'ils soient : leur vie est un crime pour ceux que la nation a ehargé de les punir... »_
Yoici quelques expressions des citoyens de Saint-Pierre, île d'Oléron
« Ne donnez rien aux passions, mais tout à la vertu : c'est elle qui doit vous diriger... Il est temps que les peuples ne soient gouvernés que par de sages lois; si les vôtres ont ce caractère, vous irez à l'immortalité; >r
Leur adresse que je voudrais pouvoir transcrire iei tout entière, ne respire que l'amour du bien public; ils la-terminent par couvrir de fleurs la tombe du célèbre Lepeletier.
Lès membres du district ae Tarascon vous tiennent ce langage :
« Mettez fin à ces déclamations indécentes, à ces inculpations odieuses qui prêtent des armes à vos ennemis, et ternissent votre gloire. » ...
La commune de Vézelise exprime ainsi son vœu : « Que la hâche du peuple fassent tomber ces têtes impies qui osent conspirer contre la souveraineté nationale, désigner des victimes parmi vous, parmi les plus zélés défenseurs de la liberté et de l'égalité. »
Les citoyens-soldats composant le bataillon de Brutus, à Lyon, annonçait leur départ pour les frontières, et prient la Convention de frapper les ennemis de l'intérieur, et de proscrire la famille des Bourbons. Au vœu de ces braves militaires, se joint celui des administrateurs de Gannat, qui veulent que le glaive de la loi abatte toutes les têtes coupables.
Les- membres du district de Sai nt-Rambert, de Nogaro, de Bayeux, du Pont-Saint-Esprit, de la Neste, de Grenade, de Crest, les communes de Louhans, de Vailly, de Bajet, du Bourg-de-Villiers, les sociétés populaires de Falaise, deEoix, de Castelr du Quesnoy, du bourg de Fontenay, de Saint-Quentin, de Morcaix, de Dieust. de Brignolle, de Doaziz, dë Yillefranche, d'Excideuil, de Ceizériafc, de Sarrebourg, le sixième bataillon du Doubs qui jure d'exterminer le tyran d'Espagne, et plusieurs citoyens de Cbâteaudun adhèrent à tous vos .décrets, notamment à celui qui lés a délivrés au monstre qu'on appelait Louis XVI; et témoignent la douleur qu'ils ont ressentie lorsqu'ils ont appris l'attentat Commis sur la personne de Lepeletier.
Parmi cette foule d'adresses qui vous sont parvenues de toutes les contrées que je viens de désigner, il en est peu dans lesquelles on ne vous conjure aussi ae donner le plus tôt possible à vos commettants la Constitution qui doit garantir leurs droits; d'organiser sans délai l'instruction publique qui. régénérera les mœurs, et qui fera de leurs enfante des hommes; et enfin d'extirper la mendicité que réprouve l'humanité et qu'accueille la fainéantise.
Citoyens-législateurs, quand vous aurez rempli ces hautes, destinées, retournez dans vos foyers; car alors seulement vousaurez bien mérité de la patrie, et « les noms de pèret du
peuple (disent les administrateurs du département de la Haute-Vienne) ne périront jamais : ils seront gravés dans le cœur de vos enfants et dans celui de leurs descendante. Sur tous les points de la République, des pierres, des plaques d'airain porteront une inscription simple, propre à rappeler votre mémoire.......
—La Convention nationale donna aux Français les lois gui rendent la République florissante et affermissent leur liberté. »
Suivent les dons patriotiques.
Dons patriotiques faits à la Convention depuis le 25 mars, jusqu'au 81 inclusivement.
Pour secourir les victimes de la journée du 10 août 1792.
Le citoyen Maurice, du Havre, en assignats ..................................... 1,200liv* »s.
-Pour les frais de la guerre.
Les citoyens ouvriers charpentiers de Paris........................... ' 143 E.» s.
Le citoyen Gaspard Thierry... 5 » Le citoyen Bailly, de l'Aigle. 10 » La citoyenne Trouard, de
Pont-àrMousson, en or.........................24 »
Les officiers et sous-officiers du 3® régiment d'infanterie, à Spire, , ont envoyé 3,06a 1. 18 sv, dont 84 1. 18 s; en.numéraire.... .3,089 18
Le citoyen'Marin-Néron......... 190 »
Les administrateurs du district
d'Avallon............................................1,466 15
Les amis de la liberté et de
l'égalité de Fréjus..................... 200 »
Les volontaires du 6e bataillon
de la Gironde............................ 272 10
Le citoyen Vannerel, pour les mois de novembre, décembre, janvier, février et mars........................25 >
Le citoyen Gensonné, pour un
inconnu...................................; . 25 »
Le citoyen Pierre Guichard,
d'Aumale.................................. 300 ».
Les officiers, sous-officiers et soldats du 2e bataillon du 38® régiment d'infanterie..................... 1,125" >»
Le citoyen Nicolas Aushourg... 100 »
Total......... 6,8641. 3 s.
Le citoyen Gilet a envoyé une bague en\ or, en forme de collier de chien.
Le citoyen Prieur, maître boucher à Beau-vais, a donné le récépissé de sa lettre de maîtrise dont la liquidation monte à 150 livres.
Les citoyens Gosselin, Dauvais, Culoteau et Homecourt, ont donné chacun une décoration militaire.
Le citoyen Albert, curé de Cousme, a envoyé une bague montée en or, deux boutons et une boucle de col en argent.
récapitulation.
Pour les victimes du 10 août 1792. 1,2001. » s.
Pour la- guerre..—„.'—...................6,864 3
Abandon........................ .150. » .
Quatre décorations, à 32 livres. 128 »
total......... 8,342 L 3 s.
Certifié conforme aux bordereaux visés et signés par les citoyens députés, secrétaires de la Convention.
Paris, le 2 avril 1793, l'an II de la République française.
Signé : Dttcroisi, receveur des dons patriotiques.
Séance du
présidence de bréard, ancien président.
La séance est ouverte à neuf heures du matin.
, secrétaire, donne lecture des procès-verbaux des séances du samedi 30 et dimanche 31 avril 1793.
(La Convention approuve cette rédaction) (1).
, secrétaire, donne lecture des lettres, adresses et pétitions suivantes :
1° Lettre du citoyen Jacques Queinnec, député du département du Finistère, (2), qui écrit à la Convention pour obtenir un congé d'un mois, fondé sur le besoin absolu qu'il a de se rendre dans sa famille où il à laissé son commerce, et six enfants en bas-âge,sans autre soutien que sa femme près d'accoucher et fort indisposée.
(La Convention accorde à Queinnec le congé qu'il sollicite.)
2° Lettre du citoyen Froger-Plisson, député au département de la Sarthe ( 1), qui écrit aussi à la Convention pour solliciter un congé de huit jours; cette lettre est ainsi conçue :
Paris,
« Citoyen Président,
« J'apprends que mon épouse est dangereusement malade, qu'elle demande à me voir. Je désire me rendre auprès d'elle. Je vous prie de vouloir bien demander et obtenir de la Convention un congé qui me permette de m'ab-senter. Je serai de retour sous huit jours.
« Je suis fraternellement votre collègue.
« Signé : L. Froger. »
(La Convention accorde le congé demandé par Froger-Plisson.)
3° Lettre du citoyen Teste (2), qui adresse à la Convention nationale une boîte concernant divers coupons d'une étoffe en soie chinée, représentant quatre différents modèles d'assignats, dont il croit l'adoption utile pour le perfectionnement de leur fabrication.
(La Convention renvoie la lettre au comité des assignats.)
4° Lettre de Garat, ministre de Vintérieur, par laquelle il transmet à la Convention nationale l'état des décrets qu'il a envoyés la veille aux départements; cet état est ainsi conçu (3) :
ETAT des décrets de la Convention nationale, envoyés aux départements par le ministre de l'intérieur,
le 2 avril 1793, l'an II de la République :
DATES
des DÉCRETS.
25 mars. N° 660
27 mars. N° 506
27 mars. N" 705
27 mars. N» 662
TITRES DES DÉCRETS.
Décret qui approuve l'arrêté fies administrateurs du district de Grandpré qui ordonne la vente des orges et avoines trouvés chez les émigrés.....................................
Décret relatif à huit séditieux arrêtés dans le district de Thiers.....................................................
Décret qui improuve une adresse de la société populaire d'Amiens..................................................
Décret qui confirme l'arrêté du département du Tarn qui ordonne d'élever autour de l'arbre la liberté un autel à la patrie aux frais de ceux qui avaient renversé le dit arbre
DÉPARTEMENTS
auxquels l'envoi a été fait.
De l'Aisne.
Du Puy-de-Dôme.
De la Somme.
Du Tarn.
OBSERVATIONS.
Manuscrit.
Le ministre de l'intérieur, Signé : Garat.
Perpignan, le
« Citoyen Président,
« La commune de Montlouis, extrême frontière, a demandé à ce département que son nom fût changé en Celui de Mont-libre; elle rougit de porter le nom d'un ancien despote; elle demande d'en porter un plus conforme à l'esprit d'égalité qui anime tous ses habitants. Vous faire connaître son vœu c'est être convaincu d'avance, que vous l'accueillerez;-prononcez et les républicains de Mont-Libre feront bientôt sentir au perfide espagnol qu'ils sont dignes de la faveur qu'ils sollicitent.
« Le procureur général syndic, « Signé : Lucia. »
U n membre convertit en motion la demande du procureur syndic du département des Pyrénées-Orientales.
(La Convention décrète qu'à l'avenir la commune de Montlouis portera le nom de Mont-Libre. )
6° Pétition de la municipalité de la Chapelle Saint-Denis (2), relative aux subsistances.
(La Convention renvoie la demande aux comités réunis d'agriculture et des finances pour en faire un prompt rapport.)
7° Lettre du citoyen Reynaud (3) par laquelle il adresse à la Convention un mémoire qui a pour objet de faire rendre les comptes et payer leur reliquat au receveur des amendes et autres comptables des eaux et forêts.
(La Convention renvoie, le mémoire aux comités réunis de liquidation et des domaines pour en faire rapport dans trois jours.)
7° Lettre du citoyen Leveneur, chef de division commandant l'armée des Ardennes, en l'absence du général Valence, par laquelle il instruit la Convention nationale d'un nouvel acte de patriotisme de ses soldats ; elle est ainsi conçue (1) :
« Quartier général de Maulde, le
: « J'ai à vous rendre compte d'un nouveau trait de générosité des braves frères d'armes que je commande.
« A l'affaire de Ulanden, devant Louvain, le 22 de ce mois, le village
qui couvrait la gauche du corps que je commandais1 avait été pris par
les ennemis, qui avaient déjà établi deux pièces de canon dont ils nous
foudroyaient ; il était essentiel de le reprèndre : ce poste important
était occupé par les grenadiers hongrois.
« J'ordonnai à la demi-brigade, composée du 17e régiment du 2e bataillon de Saône-et-Loire, et le 1er de la Mayenne, d'entrer dans le villaye, d'en chasser l'ennemi à la baïonnette, et de prendre les deux pièces de canon. J'ajoutai qu'il y aurait six louis de récompense pour chaque pièce qui serait prise,
« A l'instant la brigade commandée par le colonel Dumas, se porta avec la plus grande vigueur dans lè village farci de troupes ennemies, les chargea, les culbuta, hacha en pièces le corps de grenadiers qui le défendait, fit beaucoup de prisonniers, dont un capitaine, et enleva les deux pièces de canon avec les chevaux qui les conduisaient.
« Après l'action, je fis distribuer aux trois bataillons les douze louis qui leur appartenaient pour la prise de ces deux pièces. s
Ils les ont reçus, et ensuite ils me les ont fait remettre avec la lettre ci-jointe, désirant que cette somme de 288 livres fût offerte en don patriotique, et que je fusse auprès de la Convention l'interprète de leurs sentiments.
« Je joins ici la lettre que les trois bataillons m'ont adressée en commun à cet égard, et celle que le bataillon de la Mayenne en particulier m'a adressée.
« Signé : Leveneur, « chef de division, commandant l'armée des Ardennes. »
(La Convention nationale décrète la mention honorable de ce double trait de civisme et ordonne l'insertion de la lettre au Bulletin.)
8° Lettre de Clavièré, ministre des contrit butions publiques, qui prie la Convention nationale d'autoriser la coupe des balivaux de trois ceints arpents de taillis de la forêt de Braconne pour les forges de Ruelle, destinées au service de la marine; cette lettre est ainsi conçue (1) :
Paris,
« Citoyen Président,
« Les forges de Ruelle destinées au service de la marine étant à la veille de rester dans l'inaction faute de bois, il a paru au comité exécutif provisoire aussi urgent qu'indispensable de permettre à l'entrepreneur chargé de son exploitation de couper les balivaux qui se trouvent sur 300 arpents de taillis de la forêt de Braconne qui lui ont été délivrés l'année dernière. Comme cette coupe est extraordinaire, je vous prie d'engager la Convention nationale à confirmer par un décret la proclamation qui a été rendue à ce sujet. « Le ministre des contributions publiques, « Signé : ClavièRe. »
A cette lettre, se trouve jointe la pièce suivante :
Copie de la proclamation du conseil exécutif provisoire concernant la
délivrance d'après estimation à l'entrepreneur de la fonderie de Ruelle,
des balivaux de mauvaise qun-
« Sur ce qui a été représenté au conseil exécutif provisoire que les 300 arpents de bois de la forêt de Braconne dont il a été fait délivrance à l'entrepreneur de la fonderie de Ruelle vers la fin de l'année dernière pour son affouage de cette année, sont insuffisants, que cette fonderie serait forcée de ralentir ses travaux, peut-être même de les suspendre, s'il ne lui était fait une nouvelle délivrance, que dans le moment actuel, il est de l'intérêt de la République que la forge en question ne reste pas dans l'inaction faute de bois; qu'il existe, sur les 300 arpents de taillis de la dernière délivrance, des balivaux qui ont été reconnus d'une mauvaise qualité, qu'ils peuvent suffire à compléter les appi-ovisionne-ments dont cette forge a besoin, et qu'il est infiniment instant de mettre l'entrepreneur à portée d'en faire l'exploitation, vu la lettre de l'adjoint de la lre division du ministre de la marine du 16 de ce mois.
« Au nom de la République, le conseil exécutif provisoire, attendu l'urgence, a ordonné et ordonne que par les officiers de la ci-devant maîtrise d'Angoulême il sera procédé sans délai à l'estimation et à la délivrance à l'entrepreneur de ladite fonderie de Ruelle des balivaux de mauvaise qualité qui se trouvent sur les 300 arpents de la forêt de Braconne qui ont formé la dernière délivrance faite audit entrepreneur et ce pour servir à alimenter ladite forge et la maintenir en activité, à la charge par ledit entrepreneur de se conformer pour l'exploitation desdits arbres aux ordonnances et règlements, ôt de payer le montant de ladite estimation tant en principal que décimes entre les mains du préposé de la régie du droit d'enregistrement qui sera tenu d'en compter ainsi et de la même manière que des autres deniers de sa recette. Desquelles estimation et délivrance, il sera dressé procès-verbal qui sera déposé tant au greffe de ladite maîtrise qu'au secrétariat du district des lieux pour y avoir recours si besoin est^ « Mande et ordonne, etc... « Fait au conseil exécutif provisoire, tenu à Paris le 22 mars 1793, l'an II de la République française.
« Signé : Clavière. »
(La Convention décrète la proposition du ministre, convertie en motion par un de ses membres.)
9° Lettre de Clavière, ministre des contributions publiques (3), par laquelle il envoie un arrêté du directoire du département de la Meurthe du 9 mars, qui, pour prévenir les délits forestiers, augmente le salaire des gardes. Le ministre prie la Convention de décréter enfin le régime des forêts nationales au lieu d'adopter des mesures partielles.
(La Convention renvoie la lettre au comité des domaines pour faire son
rapport sous trois jours.)
Ils ont porté au-delà du complet leur contingent de 2,966 hommes. Ils vont en outre envoyer, à la réquisition des commissaires, le quart de tous ceux restant, depuis l'âge de 18 ans jusqu'à 40, y compris les veufs sans enfants et non compris les hommes mariés, qui voudront se porter volontairement à la défense de la patrie. Tous vont marcher à Mons.
Ils demandent des fonds et d'autres secours pour le rétablissement des routes.
(La Convention nationale décrète que ce département a bien mérité de la patrie, et renvoie la demande aux comités des ponts et chaussées, de la guerre, des finances et d'agriculture réunis.)
11° Lettre de Lebrun, ministre des affaires étrangères (2), par laquelle il envoie à la Convention nationale les éclaircissements qui lui avaient été demandés relativement à la destitution du citoyen Sémonville, qui avait été nommé ambassadeur de la République à Constantinople.
Lebrun écrit qu'il se félicite d'une dénonciation qui le met à la portée de justifier, 'd'une manière éclatante, la mesure qu'il a préposée au conseil contre un homme dont, à son avis, les talents et l'activité pouvaient être d'autant plus funestes à la République dans sa mission auprès du Grand Seigneur, qu'il eût été plus difficile de détromper l'opinion publique qu'il a subjuguée en sa faveur par un séduisant extérieur de civisme.
A l'appui de cette assertion, le ministre des affaires étrangères envoie une lettre de Talon à Louis Capet, trouvée parmi les papiers des Tuileries, et dans laquelle cet agent secret d'un roi parjure, désigne Sémonville comme d'autant plus propre à remplacer Dumouriez dans le ministère des affaires étrangères, qu'avec toutes les formes jacobines, son âme est toute dévouée au service de Sa Majesté. Le ministre ajoute que les renseignements qu'il a recueillis sur la vie privée de l'ambassadeur destitué justifient et aggravent même l'opinion que Talon s'était formée de son caractère et des avantages que la cour pouvait en tirer pour ses projets.
(La Convention renvoie cette lettre au comité diplomatique avec les pièces qui l'accompagnent.)
Un député de la commune de Yernon, accompagné du citoyen Levasseur, volontaire du département de l'Eure, se présente à la barre (3).
Il réclame, au nom des administrateurs de cette commune, "des secours
extrêmement
répond aux pétitionnaires et leur accorde les honneurs de la séance.
(La Convention nationale décrète que le ministre de la guerre, sera tenu d'exécuter sans délai, à l'égard du citoyen Levasseur, estropié au siège de Lille, la loi relative aux militaires blessés en défendant la patrie (1).
(2V. J'ai reçu une lettre de Cham-béry qui m'annonce que les citoyens de cette ville, vivement affectés des dangers qui menacent la patrie, se sont empressés de former un bataillon de volontaires nationaux, équipés ta plupart à leurs frais. On a uvert une souscription pour ceux qui ne pouvaient s'équiper : cette souscription a produit 16,000 livres en argent et 600 paires de souliers.
La même ville vient d'enrôler environ 200 jeunes gens pour servir dans la marine en qualité de mousses. La municipalité pourvoit à leur habillement. Tous les gardes nationaux demandent à voler au secours de la patrie, et ont souscrit pour l'achat de 8,000 fusils.
(La Convention nationale décrète la mention honorable et l'insertion au Bulletin.)
(3). Citoyens, je vous demande maintenant l'autorisation de vous lire un mémoire sur l'esprit public de ce département.
Lorsque le patriotisme des Français et la sagesse de vos décrets viennent d'apaiser la guerre civile qui se manifestait dans quelques parties de la République; lorsqu'on nous a fait pressentir que ce fléau se propageait dans quelques autres départements; la calomnie n'a pas épargné celui du Mont-Blanc. On a taxé ses habitants d'incivisme et d'éloignement pour la Révolution. Il est de mon devoir de présenter à la Convention nationale, et à la France entière, le caractère et l'esprit public d'une nation ignorée jusqu'à présent, qui mérite d'être connue, et dont le civisme sera toujours le plus ferme appui de la liberté et de l'égalité; je me contenterai de tracer quelques faits généraux, connus de î-out le département.
Dès le jour même où les soldats de la République mirent le pied sur notre
territoire, le cri de la liberté se fit entendre de toutes parts. Des
sociétés populaires s'établirent dans les principaux endroits du
département, (quoique l'on en puisse dire, ces sociétés seront toujours
le soutien de la liberté.) On a reproché aux troupes de la République de
s'être abandonnées au pillage, lorsqu'elles sont entréès sur les terres
étrangères; c'est qu'elles n'étaient pas habitées par des Savoisiens :
ce n'est pas Montesquiou qui, chez nous, eût empêché le pillage; mais le
Savoisien, qui connaissait tout le prix du bienfait qu'il recevait,
était reconnaissant, chaque soldat était reçu comme le fils de la maison
où il allait loger, et quand on accueille le Français comme il le
mérite, sa loyauté et sa générosité ne se démentent jamais.
L'on a osé supposer que ce vœu n'avait pas été libre et unanime. Il faut bien peu connaître les hommes, et surtout l'habitant de nos montagnes, pour croire qu'un seul savoisien puisse regretter un instant d'être français.
C'est en vain que le despotisme s'efforça, pendant dix siècles, de nous séparer de la France, pour nous réunir à la nation piémon-taise, malgré les barrières que la nature avait placées entre nous; la haine et l'antipathie ont toujours contrarié ces liens factices. Nous avons retenu constamment le langage, les mœurs, et les habitudes des Français, et lorsque le drapeau tricolore a flotté sur nos montagnes, ce n'est point une nation étrangère que la République a conquise, ce sont des anciens français dont vous avez brisé les fers pour les réunir à leur famille-primitive.
Connaissez, citoyens, l'habitant du Mont-Blanc, lorsque la liberté vint embellir ma patrie; plusieurs de mes compatriotes avaient été par force arrachés à l'agriculture pour servir un tyran, et traînés en Piémont; malgré cela, les bataillons des départements de la Gironde et du Yar, qui formaient l'armée, et n'étaient pas complets, l'ont été dans peu de jours par les patriotes savoisiens; ils ont complété ceux des troupes de ligne; ils auraient, dès longtemps, offert des bataillons de volontaires, s'ils avaient eu les moyens d'organisation; et maintenant qu'ils les ont, la ville de Chambéry vient de former, dans la seule enceinte de ses murs, un bataillon de volontaires nationaux équipés, la plupart, à leurs frais, et pour ceux qui n'ont pu y fournir, une souscription patriotique, leur a donné 16,000 livres-en argent, et 600 paires de souliers. 200 jeunes gens pour mousses, et toute la garde nationale volera au-devant dé l'ennemi.
Malgré les secousses d'une révolution subite, les efforts du fanatisme et de l'aristocratie, ce pays a été, et sera toujours tranquille; il jouit des bienfaits de la Révolution, parce que les autorités constituées, et les sociétés populaires, marchent d'un commun accord; que les noms de liberté et d'égalité sont les points de ralliement qui entraînent tous les individus au même but, qui est l'unité et la prospérité de la République.
Ne croyez pas que cette coalition des tyrans de l'Europe, puisse jamais affaiblir le patriotisme des habitants du Mont-Blanc; ils ne les regardent que comme une association de brigands, et bientôt l'univers entier ne verra en eux qu'une société de banqueroutiers. Quand ils parviendraient à faire de tout le département, un monceau de cendres, s'il y
reste un seul habitant, cet homme sera républicain. Voilà le vœu, voilà le caractère du Savoisien; si son âme participe de l'âpreté du climat, il a toute la franchise, la pureté des mœurs, de la nature, et le sang-froid de l'intrépidité. Cependant, on a osé vous dire que les armées françaises ne seraient pas en sûreté dans le département du Mont-Blanc, que ses habitants avaient, à l'égard des Français, des intentions perfides, et que le poignard de Francfort armerait leurs mains fratricides. Je n'emploierai pas, pour repousser cette calomnie, le langage des vertus et des sentiments honnêtes; ceux qui ont des vertus ne peuvent le soupçonner, et ceux qui n'en ont pas, ne pourront me comprendre. Je ferai parler la voix de l'intérêt, et je leur demanderai quel intérêt pourrait avoir le Savoï-sien à trahir son bienfaiteur. Voudrait-il former une république isolée et indépendante? Cette idée ne peut se soutenir un instant, l'exécution en est impossible. Voudrait-il rentrer sous la domination de ses anciens tyrans? Qu'y gagnerait-il? Des dîmes, des "fiefs, des nobles, de mauvais pYêtres, un militaire insolent, des impôts dont il ne profiterait pas, une justice arbitraire, des magistrats vendus au despotisme, des coups de bâton, et •dans -les circonstances présentes, tout le poids ■des vengeances d'un despote et de ses satellites irrités. Tant de considérations doivent faire taire la calomnie, rassurer la Convention nationale et la République entière sur un département qui, fidèle à ses serments, ne connaîtra jamais de souveraineté que celle du peuple français, dont il fait partie. Si quelque motif pouvait retarder, dans ce département, la marche de la Révolution, ce ne serait que le renversement subit des préjugés religieux chez un peuple, qui, sans instruction, est nécessairement imbu des idées superstitieuses dans lesquelles dix siècles d'ignorance et d'oppression l'ont entraîné. Ayez égard à cette position; éclairez l'opinion; et la loi sera exécutée..
Un grand nombre de membres : L'impres-vsion, l'impression!
(La Convention décrète l'impression de ce mémoire.)
Une dèputation de la municipalité de Paris -est admise à la barre.
Anaxagoras Chaumette, procureur de la >-commune, s'exprime ainsi (1) :
Citoyens représentants, on avait fait une nouvelle entreprise contre l'autorité souveraine; ce complot a été déjoué. On avait voulu "lui donner une tournure légale en faisant envoyer des commissaires par toutes les sections; presque toutes envoyèrent les commissaires qui leur étaient demandés. La municipalité, en leur accordant un local avait obéi à la loi; mais aussitôt qu'elle fut instruite que les commissaires des sections avaient pris des délibérations illégales, elle improuva et annula ces délibérations et renvoya aux 48 sections la rétractation des pouvoirs de la plupart d'entre elles.
fait part à la municipalité du décret relatif à la tranquillité de Paris.
Anaxagoras Chaumette, procureur de la Commune (1) : Un nouveau tyran menace la patrie, la Convention nationale qu'il outrage et Paris qu'il redoute.
Nous venons vous demander les moyens de prévenir ses attaques, le courage de nos républicains fera le reste.
Le conseil général de la commune a arrêté, dans sa séance d'hier soir, qu'il serait demandé à la Convention nationale la formation d'un camp entre Paris et les frontières. Voici l'autre moyen de défense que nous vous demandons.
Législateurs, la portion de l'armée, que Dumouriez a licenciée, se rend ici par pelotons détachés. Nous avons vu ces militaires, dignes d'un autre sort; ils brûlent du désir de servir la patrie. Nous n'avons vu en eux que de braves soldats harcelés, dégoûtés, gratuitement déshonorés, si toutefois la trame du traître peut flétrir. Nous vous demandons la réorganisation de cette armée.
Nous vous demandons, en outre, que les fabriques d'armes soient arrachées de la frontière, et mises en activité extraordinaire dans l'intérieur de la République.
Comme c'est principalement Paris que menacent les bandes de Brunswick et de Dumouriez, nous ne balancerons pas, si les circonstances l'exigent, à en donner avis à nos frères des départements. La prévention qu'on leur avait inspirée contre Paris n'existe plus chez eux; les événements leur ont appris à distinguer le langage des partis et celui de la mâle et véridique liberté.
Magistrats du peuple, ce n'est pas la première fois que vous l'avez servi, vous avez donné de fréquentes preuves que vous étiez disposés à remplir vos devoirs dans le poste honorable où il vous a placés. La Convention se repose encore sur votre zèle, et vous accorde les honneurs de la séance.
Plusieurs membres demandent l'impression et l'insertion au Bulletin de la pétition de la municipalité de Paris.
Je m'oppose à ce que cette pétition soit imprimée, je ne veux point inculper personne; mais il est certain que ce comité a été autorisé à s'établir à l'évêché, par un réquisitoire du procureur de la Commune, et que les frais du bureau devaient être payés par la municipalité : un autre fait encore, c'est que toutes les sections n'avaient pas envoyé les commissaires à l'évêché, je demande que le procureur de la Commune s'explique sur les faits que je dénonce.
(Chaumette entre dans la barre.)
Anaxagoras Chaumette. Les députés des sections vinrent nous demander un
local pour une assemblée de commissaires; après que je me fus assuré que
cette demande était faite par la majorité des sections, le local fut
accordé, ainsi que les frais du bureau de cette assemblée, conformément
à la loi. J'interrogeai les commissaires sur les motifs de leur
rassemblement; ils me répondirent qu'il se proposaient de présenter une
adresse à la Convention; mais dans la première séance, les meneurs de
cette assemblée se découvrirent, et aussitôt que la municipalité eut
(La Convention nationale passe à l'ordre du jour et renvoie la seconde partie de l'adresse présentée par Chaumette au comité de la guerre pour en faire son rapport.)
monte à la tribune, accompagné de Gossuin, de Treilhard et de Merlin (de Douai), et donne d'abord lecture d'une lettre des citoyens Bancal, Lamarque, Camus et Quinette, commissaires de la Convention à Varmée de Dumouriez : cette lettre est ainsi conçue (1) :
Lille, le er avril
1793
Les commissaires de la Convention nationale, etc, à leurs collègues composant le comité de défense générale.
Citoyens nos collègues,
« Nous venons d'arriver à Lille', où nos collègues Gossuin, Delacroix, Merlin et Robert s'étaient réunis. Nous avons conféré avec eux sur les mesures qu'ils avaient prises relativement à l'armée et au général Dumouriez. Nous les avons trouvés occupés, par rapport au général, des mêmes mesures que la Convention a décrétées; et ayant pris par rapport à l'armée, les moyens d'assurer sa subsistance, ils vous rendront compte de leurs opérations; nous, nous allons nous rendre au camp de Maulde, où est le général Dumouriez, et nous y exécuterons le décret du 29 dans toutes ses-parties.
« Le ministre a pris, de concert avec nous, sur toute la route, des mesures pour rallier les soldats qui.avaient quitté l'armée.
« Signé : Henri Bancal, Lamarque, Camus, Quinette. »
continuant (2). Nos collègues, Camus, Bancal, Quinette et Lamarque, que vous avez nommés pour nous remplacer, nous ont remis une expédition du décret par lequel vous nous rappelez dans votre sein pour vous rendre compte de l'état et de la situation de l'armée. Nous sommes partis aussitôt; nous ignorions encore dans ce moment que nous avions été calomniés. Nous avons regretté que notre mission n'eût pas duré vingt-quatre heures de plus, car, aujourd'hui, nous aurions amené Dumouriez, mort ou vif à votre barre, et, au contraire, vous avez des malheurs à entendre.. (Mouvement.)
Les calomnies c 'on a débitées ici contré moi ne me touc1 guère,
cependant elles m'obligent à par " oi. J'aurais dû laisser cette tâche à
m' jgues; je dirai donc
Lorsque nous sommes partis du comité de sûreté générale, avec Robert et Danton, nous nous étions promis d'étudier Dumouriez, de l'éclairer, de lui prouver qu'il avait été trompé par des gens intéressés à l'attacher à leur parti, de lui faire rétracter ce qu'il avait écrit à la Convention nationale, ou de le faire traduire à la barre.
Après avoir délibéré avec nos quatre collègues, nous nous sommes transportés le lendemain à Louvain, et de là à l'armée. Nous, assistons à l'affaire; nous rallions des bataillons entiers que des colonels inciviques faisaient marcher la nuit pour ne pas rencontrer l'ennemi et qui étaient suivis par six bataillons de volontaires nationaux -qu'on laissait à la débandade. Dumouriez était absent; il était à la tête de ce qu'il appelle son armée. Danton et moi, montés sur des chevaux de cavalerie, le rejoignons. Il était au feu; nous y restons avec lui, et nous le confessons, si je puis m'exprimer ainsi, depuis dix heures du : soir jusqu'à quatre heures du matin; ensuite' nous sommes venus à Bruxelles rendre compte.' de notre mission à Treilhard, Merlin et Gossuin. Je crois que Camus était ici.
Là nous aprîmes l'évacuation combinée de toute la Hollande et de la Belgique; nous eûmes également connaissance d'un rapport, dont j'ai donné communication au comité de sûreté générale, et dans lequel il était question d'un projet de contre-révolution pour livrer la place de Lille qui ne contenait alors que 245 volontaires nationaux sans munitions, la plupart non armés, et sans aucun secours, alors qu'il faut au moins quatorze ou quinze mille hommes pour la défendre.
Nos collègues se divisèrent : Merlin et Gossuin se rendirent à Gand, Treilhard et Robert Tournai; leur présence était nécessaire dans chacune de ces villes. Réunis à Lille, nous fûmes bientôt convaincus du projet de livrer la place. On voulait profiter du trouble qui devait nécessairement résulter de la fuite et de la débandade de douze à quinze mille volontaires qui s'étaient réfugiés dans cette ville après leur déroute. Nous prenons les mesures de sûreté générale dont nous avons déjà rendu compte.
Nous nous occupons en même temps à étudier le caractère, à suivre les traces de la-légèreté et des délits de Dumouriez. Je l'ai défendu parce qu'alors je le croyais républicain, et je suis bien surpris qu'on m'en fasse un reproche, car j'ai entendu défendre ici et. le roi et Lafayette. D'ailleurs, lorsque j'ai: défendu Dumouriez, je partageais l'erreur de nos collègues et le décret que je proposais alors passa à l'unanimité. Mais, à mon arrivée à Lille j'ai tout observé et l'on cherche à mettre en lumière les crimes de Dumouriez.. Mes collègues me rendront la justice de dire que c'est moi qui, le premier, leur ai donné des preuves, sinon de conviction, ou moins de présomption, contre ce général. Alors je me suis hâté de réparer l'erreur que j'avais commise en le défendant. J'ai proposé à mes collègues de le suspendre, de le mettre en état d'arrestation et de le faire traduire à la barre dé la Convention.
Mais il opérait alors sa retraite, et mes
collègues crurent que la mesure que je proposais méritait réflexion avant de la mettre à exécution. Je fus obligé de céder à la majorité. Nous appelâmes Carnot et Lesage-Senault qui avaient été envoyés dans le département du Nord pour hâter le recrutement. Ils vinrent conférer avec nous. J'insistai pour ma mesure de suspension, d'arrestation et de comparution à la barre; elle fut encore rejetée. Il fallait bien cependant prendre une détermination. Mes collègues crurent # qu'il était plus prudent d'écrire à Dumouriez de venir à Lille que d'aller tous les sept le faire arrêter à Tournay, ville dont nous n'étions pas sûrs et dont lui seul disposait.
Yoici notre arrêté (1) :
« Les commissaires de la Convention nationale près les armées de la Belgique, et dans les départements du Nord et du Pas-de Calais réunis, requièrent le général Dumouriez de se rendre aujourd'hui, 29 mars, dans l'après-midi, à Lille, maison du citoyen Mousquet, place du Lion d'or, pour s'expliquer avec eux sur des inculpations graves qui le concernent et dont il lui sera donné communication.
« Le général Dumouriez confiera le commandement de son armée, pendant son absence, à l'officier général à ses ordres qu'il jugera le plus propre à le remplacer.
« Fait à Lille, le 29 mars 1793, l'an II de la République.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard, Robert, Carnot, Lesage-Senault. »
Tel est l'arrêté qui fut pris à la majorité et contre la proposition que j'avais faite. Nous étions alors convaincu que Dumouriez se rendrait à Lille et nous avions rédigé une série de questions à lui faire qui étaient calquées sur les pièces que 'j'avais entre les mains.
Série des questions à faire au général Dumouriez (2).
Art. 1er. A-t-il dit qu'il s'était rapproché
des frontières à cause des insurrections du dedans ?
Art. 2. Que le peuple français est composé de fous, d'enragés, conduits par des brigands, auxquels les assassinats ne coûtent rien; que la Convention était composée de 300 brigands, qui dirigeaient 400 imbéciles?
Art. 3. Que la Convention nationale perdrait tout, si les honnêtes gens ne se rallient pour la faire finir ? Qu'il fallait que les assemblées primaires s'effectuassent, et que l'on renvoyât tous les conventionnels chez eux ?
Art. 4. Qu'il fallait qu'avant trois semaines la Convention fût renvoyée et remplacée par une autre, composée de tous les présidents de district ?
Art. 5. Qu'il fallait une révolution dans la Révolution, pour sauver la
France; qu'il se chargerait de la sauver, qu'il y perdrait la tête s'il
le fallait; que son parti était pris?
Art. 7. Que s'il était décrété d'accusation, il ne quitterait pas Bruxelles ?
Art. 8. Après avoir parlé de la nécessité d'une révolution dans la Révolution, a-t-il dit qu'il faudrait peut-être reprendre la Constitution de 1790?
Art. 9. Que si la France devait rester avec une Constitution telle qu'elle est, il quitterait le service?
Art. 10. Est-il vrai qu'il a parlé de propositions de paix avec les puissances coalisées contre la République; qu'il a entamé une négociation avec l'Autriche et la Prusse, ou avec leurs généraux?
Art. 11. A-t-il été question de reconnaître l'indépendance de la France, à condition qu'elle renoncerait à ses conquêtes, et que la ci-devant reine et son fils seraient envoyés en Autriche ?
Art. 12. Que lorsqu'il a voulu traiter avec l'Angleterre et la Prusse, il lui a été répondu qu'on traiterait volontiers avec la nation et avec lui; mais qu'on ne traiterait ni avec la Convention ni avec le conseil exécutif, en qui l'on n'avait aucune confiance?
Art. 13. Par qui avait-il été chargé de traiter avec l'Angleterre et la Prusse, et quelles propositions était-il autorisé à leur faire?
Art. 14. A-t-il dit qu'il y avait une guerre à mort entre lui et les Jacobins; qu'il fallait qu'il pérît ou qu'on rasât les Jacobins, et qu'on semât clu sel sur leur emplacement 1
Yoilà la série des questions qui avaient été arrêtées entre vos cinq commissaires et Carnot et Lesage-Senault qui avaient bien voulu se joindre à nous. Nous reçûmes aloi's la réponse de Dumouriez; elle est ainsi conçue :
Le général Dmnouriez aux citoyens commissaires de la Convention nationale (3).
Tournay, le 29 mars, l'an II de là République française.
« Il m'est impossible, citoyens commissaires, de laisser un seul instant l'armée, dans le moment où ma présence seule la retient, où par la défection de la droite et de la gauche j je suis en l'air par l'approche de Clairfait, qui est aujourd'hui à Ath, de l'archiduc Charles, qui est arrivé cette nuit à Mons, et du général Mylins, qui s'avance sur Courtray. Me voilà presque cerné et forcé à un mouve-ment rétrograde, que je suis forcé de diriger moi-même. Si j'allais à Lille, l'armée aurait des craintes, et certainement je n'entrerais dans cette ville qu'avec'des troupes, pour la purger de tous les lâches qui ont fui et qui me calomnient. Envoyez-moi deux ou quatre d'entre vous pour m'interroger sur les imputations graves que l'on met en avant; je répondrai sur tout avec ma véracité connue : mais je vous déclare que je ne peux pas en même temps plaider et eommander; ma tête ne suffirait pas à ces deux genres de guerre.
« Signé : Le général en chef, Dumouriez.
« Yu la réponse du général Dumouriez, en date de ce jour, à la lettre par laquelle lui était notifié notre arrêté de ce même jour, qui le mande par-devant nous;
« Nous, membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée de la Belgique et dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais, arrêtons que nous nous transporterons sur-le-champ à Tournay, pour entendre le général Dumouriez.
« Fait à Lille le
Nous nous disposions à partir pour exécuter cet arrêté, lorsque nous reçûmes de Dumouriez une autre lettre que voici (2) :
« Du quartier général de Tournay, le 29 mars 1793, l'an II de la République.
« Je vous envoie, citoyens commissaires, un procès-verbal qui vous prouvera notre détresse. Il faut absolument que vous nous aidiez de toute votre autorité, pour pourvoir à la subsistance de l'armée. "La partie qui s'est débandée jusqu'à présent, ne l'a fait que par lâcheté; mais si les braves gens qui sont restés avejc moi, malgré le mauvais) exemple, se débandent une fois, faute de subsistances, je ne réponds pas des suites; je prévois qu'elles seront terribles. Je compte réster encore ici demain, quoique déjà totalement environné, parce que j'ai ma retraite encore assurée sur Bruille, Maulde, et Saint-Amand, où le conseil exécutif me prescrit d'aller camper. J'y serai après demain; et à moins que le salut de la République ne dépende des explications que vous avez à me demander, je crois que vous ferez bien d'attendre cette époque pour venir me demander toutes les explications que je suis toujours prêt à vous donner.
« Signé : Le général en chef, Dumouriez. .»
Dans la crainte d'entraver les opérations, nous arrêtâmes qu'il serait sursis à la conférence, jusqu'à ce que la retraite fût effectuée. Yoici la délibération qui fut prise en présence de Carnot et de Lesage-Senault (3) :
« Nous, membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée de la Belgique et dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais; vu la lettre du général en chef Dumouriez, datée d'hier., et à nous parvenue ce matin, par laquelle il nous mande qu'il compte rester encore à Tournay aujourd'hui, quoique déjà totalement environné, parce qu'il a sa retraite encore assurée sur Bruille, Maulde et Saint-Amand, où le conseil exécutif lui prescrit d'aller camper, et où il sera demain.
« Considérant que l'exécution de notre
( Arrêtons qu'il sera sursis à entendre le général Dumouriez sur les inculpations à lui imputées, jusqu'à ce que la retraite dont il s'agit soit effectuée.
~ « Fait à Lille, le 30 mars 1793, l'an II de la République, à 4 heures du matin.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard, Robert, L. Carnot, Lesage-Senault. »
Permettez-moi de vous dire, en passant, que je n'ai pas signé cet arrêté parce que j'étais d'avis de nous rendre sur-le-champ près du général.
Pendant le temps de notre séjour à Lille, nous nous sommes convaincus que cette ville était dans une grande détresse et nous avons envoyé à votre comité de salut public un mémoire de tout ce qui manquait à sa défense. Nous avons réuni les officiers d'artillerie et du génie, les officiers généraux, les administrateurs et nous nous sommes mis d'accord sur les mesures à prendre. Il n'y avait dans cette place, qui exige pour sa garde quatorze ou quinze mille hommes, que 245 hommes de gardes nationales, dont la plupart n'étaient pas bien armés. Nous fîmes alors une réquisition au général Dumouriez, que nous savions bien n'être pas dans l'intention de défendre la place, de nous envoyer de quoi former un camp de quatorze à quinze mille hommes et nous lui annonçâmes en même temps le résultat de cette espèce de conseil que nous avions tenu. Mais comme nous doutions que Dumouriez obéit à cette réquisition, nous en fîmes une au général Duval de s'emparer sur-le-champ du poste du Pont-Rouge, passage important sans lequel la ville ne pouvait recevoir des vivres et par lequel les ennemis pouvaient entrer le soir même dans la place.
Pour occuper ce poste, il fallait un corps de 3,000 hommes que le général Duval n'avait pas puisque, comme on vous l'a dit, la garnison de Lille ne comprenait que 245 gardes nationales; mais il y avait au camp de Cassel un corps de troupes assez considérable. Duval, à la vérité, n'y commandait pas. Nous l'avons requis de donner ordre au commandant de ce camp de porter des forces au Pont-Rouge, ce qui fut exécuté le soir-même.
Assurés ensuite que Dumouriez était à Saint-Amand, nous fîmes arrêter quelques particuliers qui paraissaient compromis dans la conspiration dont nous vous avons rendu compte et nous prîmes, le 31 mars, la délibération que voici (1) :
« Du
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée,
considérant qu'après avoir pris les mesures nécessaires pour assurer la
place de Lille contre les entre- . prises des ennemis extérieurs et
contre les
Arrêtent ce qui suit :
Art 1er. Les commissaires de la Convention
nationale se rendront, demain lundi 1er avril, à Saint-Amand pour
interroger le général Dumouriez sur les inculpations dont il est
l'objet.
Art. 2. Les questions dont la série a été arrêtée le 29 mars, seront proposées au général Dumouriez par Delacroix; et il sera tenu note de ses réponses.
Art. 3. Si, d'après les réponses du général à toutes lesdites questions, il y a lieu de lui en faire d'ultérieures, chacun des membres de la commission pourra les lui proposer;
Art. 4. La proposition de destituer et faire arrêter le général Dumouriez, est ajournée jusqu'àprès ses réponses.
Art. 5. Après les réponses du général, les commissaires de la Convention se retireront dans une chambre particulière, pour délibérer sans désemparer; et pendant leur délibération, le général sera gardé à vue.
Art. 6. S'il y a lieu de faire arrêter le général, les commissaires manderont le plus ancien lieutenant général de l'armée, et le requerront, au nom de la République, de donner à l'instant les ordres nécessaires pour effectuer Bon arrestation. Ils pourvoiront ensuite à son remplacement provisoire, et ils feront connaître à l'armée, par une proclamation, les mesures qu'ils auront prises, ainsi que les motifs sur lesquels elles seront fondées.
Fait à Lille, les jour, mois et an susdits.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai), Robert. »
Je dois dire à la Convention que cette mesure avait été prise la nuit, que nous ne nous dissimulions pas le danger que nous courrions en nous rendant auprès de Dumouriez; mais nous comptions sur la confiance que nous avions su inspirer à l'armée. Nous l'avions visitée pour ainsi dire tous les jours. On avait, depuis longtemps, parmi les troupes, répandu le bruit que l'évacuation de la Hollande et de la Belgique s'était effectuée avec le consentement de la Convention nationale, que nous allions avoir un roij la paix, et que chacun s'en retournerait chez soi.
Je dis à mes collègues : Puisque nous nous rendons au camp, il faut que Dumouriez reconnaisse l'autorité déléguée aux commissaires de la Convention; il faut qu'il obéisse si son arrestation est ordonnée. S'il n'obéit pas ou s'il fait un mouvement, je vous demande l'autorisation de lui brûler la cervelle (Applaudissements ). Voilà la proposition que faisait votre collègue qu'on a dit être le complice de Dumouriez. Mes collègues ne me démentiront pas; il étaient décidés au même sacrifice; nous avions juré de mourir à notre poste ; moi, j'avais brigué l'honneur de tuer le scélérat. (Nouveaux applaudissements.)
C'est à l'instant que nous prenions cette mesure vigoureuse, qui seule pouvait sauver la patrie, qui seule pouvait épargner les malheurs qui sont prêts à fondre sur nous, qu'on nous calomniait ici, et que j'étais accusé d'être de connivence avec Dumouriez, par un homme (1) qui, alléguant qu'on devait, être étonné de me voir siéger à la Montagne, y a siégé lui-même, puis a passé à l'extrémité droite et a enfin pris place parmi ceux qu'on nomme modérés. Je ne veux pas examiner sa conduite.
Nos chevaux étaient prêts; nous allions partir pour exécuter notre arrêté lorsque nos collègues arrivèrent apportant votre décret qui semblait laisser planer sur notre compte une sorte de défaveur. C'est qu'en effet, vous ne connaissiez pas notre conduite et qu'on avait tout fait pour la dénigrer.
Nous résolûmes à l'instant de nous rendre à la Convention. Nous embrassâmes nos collègues à qui nous laissâmes la série des questions. Un de nous les avertit des dangers qu'ils courraient; un autre leur demanda de nous permettre de les accompagner; mais cela parut leur déplaire et ils ne voulurent pas y consentir. Ce refus est peut-être la cause du grand malheur que j'ai à vous apprendre.
Citoyens, la mesure que nous avions résolue d'employer envers Dumouriez était plus énergique que la vôtre qui était trop douce pour un général contumace : car, en apprenant le décret qui le mandait.à la barre, il pouvait passer à l'ennemi et nous être encore funeste. Nous, nous voulions, coûte que coûte, en dé: barrasser l'armée.
Nous partons; nous manquons de chevaux à Douai et nous sommes obligés d'attendre. Nous allons trouver les administrateurs de cette ville, et, après avoir fait arrêter deux complices de Dumouriez, nous reprenons notre chemin. Sur la route, entre Péronne et la poste suivante, — nous vous prions de recevoir cette nouvelle avec une fermeté républicaine! — nous sommes rejoints par un courrier extraordinaire des administrateurs du département du Nord. Ils nous envoyaient la copie d'une lettre qui leur avait été adressée par Dumouriez et dans laquelle ce traître leur annonçait qu'il avait fait arrêter le ministre Beurnonville et les commissaires, qu'il les retenait pour otages et qu'il allait marcher sur Paris. (Mouvement d'indignation et de surprise.)
Nous avons promis la vérité toute nue, nous ne vous dissimulerons rien. Voilà la lettre des administrateurs du département du Nord (2).
« Douai, le
( Législateurs,
« Nous avons juré de vivre libres ou de mourir, nous tiendrons nos serments.
« Nous vous envoyons la copie d'une lettre que nous adresse le général Dumouriez ; guidez notre conduite.
« Les administrateurs composant le directoire du département âu Nord. «
Signé : Girard, vice-président; Botjly. Le- bon, Desmoutiers, et
Lagarde, secrétaire général.
Le général Dumouriez aux administrateurs du département du Nord.
Citoyens administrateurs,
« La tyrannie, les assassinats et les crimes sont à leur comble à Paris.
« L'anarchie nous dévore; et, sous le nom sacré de la liberté* nous sommes tombés dans le plus vil esclavage. Plus les dangers sont grands, plus la Convention nationale met de cruauté, de tyrannie et d'aveuglement. Les vérités que je lui ai dites dans ma lettre du 12 mars, ont poussé les Marat et les Robespierre à dévouer ma tête à leur vengeance; elle a envoyé pour m'arrêter, ou plutôt pour se défaire de moi, quatre commissaires : et le ministre de la guerre, Beurnonville, dont j'avais fait la fortune ' militaire* les a accompagnés. Depuis plusieurs jours, l'armée frémissait de tout ce qui se tramait contre son général; et si je n'avais pas retenu son indignation, ils auraient été victimes de l'injustice de leurs commettants. Je les ai fait arrêter, et je le ai envoyés en lieu sûr, pour me servir d'otages, en cas qu'on prétende commettre de nouveaux crimes. Je ne tarderai pas à marcher sur Paris pour faire cesser la sanglante anarchie qui y règne. J'ai trop bien défendu la liberté jusqu'à présent pour qu'on puisse imaginer que je change d'opinion. Nous avons juré en 1789, 90 et 91, une Constitution qui nous assujettissait à des lois, et nous donnait un gouvernement stable. Ce n'est que depuis que nous l'avons rejetée, que nos crimes et nos malheurs ont commencé; en la reprenant! je suis sûr de faire cesser la guerre civile et la guerre étrangère, et de rendre à la France le repos, la paix et le bonheur qu'elle a perdus en prenant la licence et l'infraction de toutes les lois pour la liberté.
« Je connais la sagesse du département où je suis né; j'ai déjà été une fois son libérateur, j'espère être bientôt celui de la France entière et je vous jure sur tout ce qu'il y à de plus sa--cré, comme un homme vertueux qui aime sa gloire, que bien loin d'aspirer à la dictature, je m'engage à quitter toutes fonctions publiques, aussitôt après que j'aurai sauvé ma patrie.
« Signé : Dumouriez, général en chef de l'armée du Nord. »
Pour copie conforme. (« Signé : Girard, vice-président; Lagarde, secrétaire général.
La lettre des administrateurs du département du Nord se termine ainsi :
« Dans la nuit qui a précédé le jour de l'arrestation de vos collègues et
votre départ, nous avons été assurés par un bon citoyen qui en a donné
sa déclaration par écrit, que la veille de l'évacuation de Tournay, le
général autrichien Clairfayt était venu dîner -avec Dumouriez. Nous
avons encore acquis, depuis, la certitude que pendant l'événement de
Bruxelles, Dumouriez avait passé la nuit avec les prétendus
représentants de cette ville.
Cette lettre nous a donné l'explication de la disette et du dénuement absolus de toutes nos places frontières. Lille, Valenciennes et autres. L'intention de Dumouriez était de s'emparer de ces places ou de les ouvrir à l'ennemi, et nous devons en avoir la certitude, étant donnée sa négligence à s'emparer des postes les plus importants lorsque l'ennemi n'était plus qu'à quatre lieues de la ville. Je crois qu'il n'y a pas un seul moment à perdre. C'est à vous, citoyens, à vous occuper sans relâche des moyens que vous croirez convenables pour sauver la patrie. Je demande que votre comité de salut public s'assemble sur-le-champ. Nous lui communiquerons les idées que nous croyons salutaires, et il en fera un rapport séance tenante.
Nous avons été d'autant plus affligés du malheur arrivé à nos collègues et au ministre de la guerre que nous sommes presque sûrs que Dumouriez les a fait conduire, soit à Tournay, soit à Bruxelles, ou toute autre ville de Belgique. En effet, dans sa lettre aux administrateurs du département du Nord, il annonce qu'il les a fait mettre en lieu de sûreté pour lui servir d'otages. Nous avons la certitude que dans les départements que nous avons parcourus aucune municipalité n'aurait souffert qu'on mît en prison ou qu'on enfermât dans une citadelle quatre membres de la Convention. D'ailleurs, on nous avait assurés que nous ne pourrions jamais forcer Dumouriez à courber sa tête altière sous le joug de la loi et qu'il avait menacé de nous faire arrêter, particulièrement Danton et moi que vous regardez comme ses complices, afin de nous échanger contre la ci-devant reine et son fils.
(de Douai). Citoyens, je n'ai rien à ajouter aux détails qui vous ont été donnés par Delacroix. Les premiers arrêtés, dont il vous a fait lecture, sont déjà connus du comité de Salut public auquel Treilhard les a fait remettre. Il en est deux autres, dont il est de notre devoir de vous rendre compte, conformément à votre décret, que nous avons pris en passant à Douai contre deux individus qui ont été très intimement liés avec Dumouriez et qui sont connus pour très intrigants.
Voici l'un de ces arrêtés (2).
« Au nom de la République,
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée,
informés par
Requièrent le directoire du département du Nord de prendre les mesures nécessaires, pour que, dans le jour, le citoyen Cornet-des-Grès soit mis en état d'arrestation, et que les scellés soient apposées sur ses papiers; et arrêtent qu'il sera interrogé par qui il appartiendra, d'après les instructions qui seront données à cet effet par nos collègues Camus, Quinette, Lamarque et Bancal.
Fait à Lille, le 1er avril 1793, l'an II de la République.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin S de Douai), Robert. »
Nous sommes arrivés à Douai, avant hier, à neuf heures du soir. Nous avons sur-le-champ appelé auprès de nous le procureur général syndic et nous lui avons remis cet arêté qui a reçu son exécution avant minuit.
L'autre arrêté est relatif à un nommé Lasonde, plus connu sous le nom de Tort, ancien secrétaire d'ambassade, l'ami et le confident le plus intime de Dumouriez, qui logeait chez lui à Bruxelles. U était à l'abbaye de Saint-Martin, dont on assure que Dumouriez a fait l'acquisition sous le nom de Sainte-Foix. L'arrêté est conçu à peu près dans les mêmes termes que le précédent (1). Nous l'avons remis également ati procureur syndic qui, après avoir fait apposer les scellés sur les papiers de Cornet-des-Grès, est parti à l'instant pour Cambrai afin de mettre les scellés sur les papiers de Lasonde et exécuter l'arrêté.
Le département du Nord s'est longtemps honoré d'avoir donné naissance à Dumouriez; mais à présent je puis vous assurer qu'il n'est aucune municipalité, aucun citoyen de ce département qui ne le voue à l'exécration.
Une chose affligeante, et qui mérite toute votre attention, c'est qu'il
semble bien que toutes les communications entre vous et les commissaires
et peut-être l'armée sont interceptées. Depuis hier, en effet, nous
n'avons vu passer aucun courrier, ni à cheval ni en voiture, allant de
Douai à Paris. U est pro-
Je suis demeuré par votre ordre quatre mois dans la Belgique, et je me suis occupé avec mes collègues de toutes les opérations civiles et militaires. Delacroix vient de vous exposer notre conduite. Nous croyons avoir fait notre devoir et nous espérons que la Convention nous rendra justice à cet égard.
Quant à nos opérations politiques, ce n'est pas ici le moment de vous en entretenir.^ Je demande que la commission soit autorisée à faire imprimer le journal de ses travaux depuis quatre mois.
(La Convention autorise ses commissaires près l'armée de la Belgique à faire imprimer le compte rendu de leurs travaux (1).
J'atteste personnellement la vérité de tous les faits qui vous ont été détaillés par Delacroix, et je puis vous assurer, quoiqu'on ait pu dire, que tous les membres de la commission ont été constamment dirigés par le même esprit et ont presque toujours pris leurs délibérations à l'unanimité.
L'Assemblée ne connaît pas tous les dangers de la patrie. Je reçois à l'instant une lettre du général Custine; je vais vous en faire donner lecture par un secrétaire.
, secrétaire, donne lecture de cette lettre (2) :
Le général Custine au président de la Convention nationale.
Du quartier général, le 30 marSj l'an II de la République.
« Un peu reposé des fatigues que j'ai éprouvées par les travaux et
actions que j'ai essuyés depuis plusieurs jours, je vais vous faire le
récit des événements qui sont arrivés à l'armée que je commande. Vous
connaissez, citoyen Président, quelle était ma position sur la Lahn; j'y
avais réuni ce que j'avais de troupes sur deux points, l'un à Bingen,
l'autre sur le'..... et dans les défilés qui permettaient de déboucher
dans la plaine. J'ai rendu compte au ministre de la guerre de l'affaire
qui avait eu lieu entre les avant-postes de l'armée de la République et
ceux de l'armée prussienne, le mardi après-midi; le lendemain ils
revinrent en force» à l'attaque. Dès qu'on vint m'en avertir, j'ordonnai
sur-le-champ à «ne brigade du 12e régiment d'infanterie, de se porter
sur les hauteurs de Bingen, seules positions que l'ennemi pouvait oc-
« Le général Newinger m'assura qu'il avait déjà repoussé l'ennemi dans une pareille entreprise, et qu'il leur avait coupé le chemin; en effet, dès les dix heures du matin, l'ennemi avait déjà tenté de s'emparer de cette hauteur, occupée par cinq compagnies du département de la Cforrèze; mais Delmas, son brave commandant, avait donné le temps à Newinger d'envoyer quatre. compagnies de grenadiers qui, à leur apparition, déterminèrent l'ennemi à la retraite. Deux heures s'étaient écoulées, je prévins Newinger de changer de poste. Il me dit que son honneur était intéressé, et que je chérissais trop cet honneur là pour le forcer à y manquer. Apprenant qu'il paraissait dés troupes vis-à-vis la gauche, je m'y transportai pour les reconnaître. On avait tiré depuis quelque temps le canon sur les troupes ennemies; une demi-heure ne s'écoula pas qu'une canonnade se fit entendre sur Bingen, et bientôt on entendit une fusillade très vive, qui dura une heure. Je rassurai les troupes de la gauche, qui paraissaient ébranlées. Mais quel. fut mon étonnement quand on vint me dire, par une ordonnance, que la hauteur était emportée, que vainement les cinq compagnies de la Cor-rèze s'étaient battues jusqu'à l'extrémité; que son artillerie avait aussi fait vainement un effet terrible sur la colonne prussienne; que, n'ayant point été secondé par les compagnies de grenadiers, qui avaient abandonné leurs canons pour se retirer avec une précipitation inouïe, on avait livré à l'ennemi la hauteur; que l'artillerie ennemie ayant tiré sur notre cavalerie, elle avait été obligée de se retirer; que celle de l'ennemi ayant profité de ce mouvement rétrograde et traversé un marais, avait chargé nos cavaliers, qui d'abord l'avaient repoussée; mais les ennemis s'étant ralliés et revenant à la charge, nos troupes s'en laissant imposer par le nombre, se retirèrent sans entendre la voix du commandant, qui leur disait de charger. J'appris aussi que le général Newinger avait été pris dans cette affaire. La ville de Bingen n'était pas encore prise ; mais, d'une part, je ne comptais pas assez sur les troupes, et, de l'autre, les hauteurs étaient emportées.
« Ma première idée, comme mon premier sentiment, fut de les reprendre. .Je ne connaissais pas la fuite des cinq bataillons de grenadiers; mais en l'apprenant je quittai ce projet : je fus arrêté par la réflexion que ma témérité compromettrait le salut de l'armée qui m'était confiée par la République; j'ai donc abandonné cette résolution. Ma position est indépendante de celle dans laquelle j'ai été forcé, et où je ne l'eusse point été, si
j'avais eu de la cavalerie. Les ennemis ne nous ont pas montré moins de huit à neuf mille chevaux : ij fallait donc penser à la retraite; il eût été imprudent de la différer; autant elle était aisée dans ma position, autant il eût été difficile de résister, quand neuf mille hommes de cavalerie coupaient les chemins. Je suis venu camper hier auprès de Worms. Je vais me retirer successivement vers Landau le plus lentement possible; je serai peut-être obligé de faire détruire les magasins de fourrages qui se trouvent à Worms, par la trahison évidente des administrateurs du directoire des achats. Ma position est d'autant plus pénible, que je sais, par des nouvelles positives, que le revers des Yôsges a été abandonné par l'armée de la Moselle. Il ne faut cependant pas désespérer du salut de Mayence ni de _celui des départements du Rhin; j'ai mis dans Mayence le général Varé, dont le talent est connu; je laisse à Cassel le général de brigade Meunier, dont les talents et le civisme sont recomman-dables. Je vais couvrir les départements du Rhin; et j'espère me saisir bientôt d'une position qui les mettra à l'abri. J'ai envoyé aux commissaires de la Convention à Mayence, la prière la plus positive de sévir avec rigueur contre les lâches bataillons qui, ayant abandonné leur poste, sont cause du malheur que nous avons essuyé. Les infâmes ont fui jusqu'à Mayence sans s'arrêter.
« Signé : le général Custine. »
(1). Il ne s'agit pas en ce moment de discuter les faits, il faut prendre de grandes mesures de sûreté générale, et les décréter séance tenante. Je demande que le comité de Salut public soit à l'instant convoqué pour en aller méditer, et venir vous en présenter les bases.
Un grand nombre de membres : Oui, oui !
(La Convention décrète cette proposition.)
(2). Il y a huit jours que j'ai proposé une mesure; si on l'eût suivie, aucun des malheurs qui sont arrivés n'eût eut lieu. Il y a quelques jours, lorsque nous reçûmes cette lettre infâme de Dumouriez, cette lettre dans laquelle il disait : tous les soldats sont des lâches, des scélérats, des voleurs, des poltrons, des assassins », je vous dis : « Vous voilà bien embarrassés de ce que vous avez à faire relativement à ce que dit Dumouriez : eh bien, puisque vos commissaires vont partir, Baudouin va vous sauver. Que Baudouin imprime 100,000 exemplaires de la lettre de Dumouriez et que ces commis; saires disséminent ces feuilles dans toute l'armée. » Vous avez eu grand tort de ne pas adopter cette mesure.
(3). La proposition de Delacroix étant décrétée, je me renfermerai dans
une mesure particulière relative à Paris. Je vais dire à la Convention
des vérités qu'il est important qu'elle connaisse. Nous avons cru
Plusieurs membres : Il fallait dire cela plus tôt !
On m'observe que ce n'est pas le moment où il faut dire cela, qu'il fallait le dire plus tôt; mais j'observe que je ne le savais pas; ce n'est que parce que j'ai été instruit de ces grandes vérités, que j'ai pris la poste pour me rendre-ici, et j'espère que tous mes collègues qui sont dans les départements, ne balanceront pas de venir à leur poste, rendre le même compte et proclamer les mêmes vérités que je proclame aujourd'hui. Mais ce n'est pas pour présenter des moyens, je vous le répète, que je suis monté à la tribune, puisque vous avez chargé votre comité de s'en occuper, et de venir vous les développer à l'instant. Il est d'autres vérités qu'il faut vous dire.
Nous ne devons pas vous dissimuler que si nous ne prenons pas relativement à Paris des précautions, nous servirons complètement la cause de Dumouriez. Ce général veut avoir un prétexte, qui colore son projet pour marcher en droiture sur la capitale. Dans ces moments où nous arrivons à la découverte de toutes les trahisons, il faut que nous instruisions les citoyens de cette vaste cité, car nous ne devons pas nous dissimuler qu'il est encore dans les murs de cette ville des hommes qui seront assez lâches pour le servir.
Plusieurs membres (du centre) : Si vous les connaissez, nommez-les! (Murmures-)
Je prie les interrupteurs de laisser poursuivre l'orateur; ils auront toute facilité d'apporter ici leur motion et de travailler d'un commun accord avec nous tous à sauver la chose publique.
Dumouriez a calculé les moyens d'enlever les subsistances et les armes dans une infinité de villes frontières; c'était encore là les motifs qui nous ont déterminés d'arriver, car nous avions eu des éclaircissements par un aide de camp du général Chaisot. Nous avions été obligés de requérir 1,200 voi-turiers, pour porter à l'instant des subsistances du côté où il en manquait absolument. C'est Dumouriez qui avait tout fait enlever; de manière qu'en servant l'ennemi, il n'a cessé de priver notre armée de ce dont elle avait besoin.
Yoilà jusqu'où s'étend la scélératesse de cet homme. Il n'a été nommé ministre que par des intrigants, que par des gens qui n'ont cessé de trahir la chose publique.
Je demande la
parole après Thuriot, pour seconder ses bonnes vues et ses bonnes intentions.
Il faut que tous les citoyens sachent que si l'on faisait quelques actes de violence, la chose publique serait dans de plus grands dangers encore. Il faut qu'ils soient instruits que c'est par la bonne harmonie, que c'est par l'union, que c'est en se serrant, que la patrie pourra être sauvée. Il faut que les autorités constituées soient à l'instant instruites; il faut qu'elles soient appelées ici à votre barre; il faut qu'il leur soit démontré que s'il arrivait quelque mouvement dans une des sections de Paris, ce mouvement favoriserait les projets des contre-révolutionnaires, et deviendrait le point de ralliement; qu'alors nous serions en guerre entre nous, lorsqu'il faut que la paix et l'union y régnent. ( Appaudissements. )
Citoyens, dans des moments de crise où Paris s'est trouvé, il a suffi de parler pour être écouté; il a suffi d'exposer les bons principes, de faire saisir l'intérêt national. Ce qui a été fait, nous avons le droit de le faire, nous le devons.
Nous avons besoin du patriotisme le plus ardent et le plus pur. Il faut que l'on soit bien convaincu que s'il y avait ici un mouvement au lieu de porter nos forces aux frontière^, il en résulterait que les départements se porteraient aussi sur Paris, que les subsistances n'y arriveraient plus, que les armes ne parviendraient plus à leur destination.
Il faut, citoyens, que nous fassions bien entendre à toutes les sections de Paris, qu'il importe qu'elles s'occupent à l'instant des mesures de sûreté, de toutes les mesures nécessaires pour marcher, s'il le faut : car ne nous y trompons pas, nous avons ici une force telle qu il n'est pas possible de résister. Nous pouvons mettre 200,000 hommes sur pied; et avec une telle armée, nous dissoudrons à l'instant les forces du scélérat Dumouriez. (Nouveaux applaudissements.)
Citoyens, il faut surtout que le peuple soit bien convaincu, que dans ce moment et dans tous les temps, la Convention est l'âme de la République française; que sans cette âme, il n'y a plus rien qui puisse s'organiser, rien qui puisse séduire, rien qui puisse choquer; car il ne faut pas nous y tromper, des hommes qui, souvent inspirent de la confiance, sont souvent l'instrument de nos ennemis, et peuvent, sans le vouloir peut-être, peut-être en le voulant, porter le peuple à des mesures que l'humanité et l'intérêt national réprouvent également.
Il faut donc que toutes les autorités constituées impriment cette grande vérité, que sans l'existence de la Convention nationale, sans respect pour elle, il n'y a point de liberté, ni de salut pour la chose publique. (Applaudissements ).
Je dois le dire ici : dans toutes les parties de la République que nous avons parcourues, le feu sacré du patriotisme y brûle dans son plus haut degré; mais partout on demande que la vertu soit couronnée; partout on demande que les lois soient respectées. On a juré une haine implacable aux traîtres. A l'instant que nous partions de Châlons, déjà l'indignation était portée à son comble contre Dumouriez. Ne croyez pas que l'existence de cet homme, qui n'est qu'un tissu de crimes, que cet homme
qui ne s'était attaché aux tyrans que pour trahir les intérêts de la nation française, que cet homme qui n'a eu des correspondances à Paris, que pour perdre la liberté, puisse en imposer aux hommes de bien, aux hommes qui périraient, s'il le faut, au champ d'honneur ! Nous avons vu, citoyens, les pères de famille imprimer à leurs enfants les sentiments que nous honorons dans nos collègues.
Nous avons vu des femmes vertueuses encourager elles-mêmes leurs maris à prendre les armes, pour aller terrasser les cohortes étrangères. Etablissez le règne des mœurs, inspirez l'amour du bien et l'énergie républicaine, et soyez sûrs que vous verrez partout le feu sacré de la liberté électriser le peuple et le faire marcher tout entier pour aller'-combattre les ennemis.
Je me résume et je demande qu'on mandé à l'instant la municipalité et le conseil général de la garde nationale, et que le président de la Convention leur fasse sentir combien il est essentiel que l'harmonie la plus parfaite règne dans cette cité. Il faut, dans ces circonstances périlleuses! ne pas hésiter à consacrer les jours et les nuits au salut du peuple, il faut une permanence qui ne peut être de longue durée, car. l'âme s'épuise et devient nulle à force de travaux, mais dans ce moment-ci, il faut redoubler d'efforts pour être en mesure contre le scélérat de Dumouriez et contre ceux qui pourraient être disposés à le seconder ici !
Il n'y en a point dans la Convention.
Plusieurs membres (sur la Montagne) : Si, si! (Murmures sur certains bancs.)
Mon idée n'a pas été saisie par eelui qui a élevé la voix. S'il eût la bonté de me suivre plus attentivement; il aurait vu que mes idées ne s'appliquaient qu'à Paris en général, et non à l'enceinte de la Convention nationale. Et pourquoi ne voudrait-on pas que je soupçonnasse qu'il existe dans Paris, des hommes disposés à favoriser Dumouriez, lorsque tout a été calculé pour exciter une insurrection, lorsque, par mesure de sagesse vous avez vous-mêmes fait mettre en état d'ar-restation1 lorsqu'il est clair comme le jour, que cela a dû être le premier calcul de celui qui a juré la perte de la nation française! Je demande donc en même temps que l'Assemblée décrète qu'elle sera en permanence, jour et nuit, jusqu'à ce qu'il en était autrement ordonné !
(La Convention adopte les propositions de Thuriot.)
Suit le texte définitif du décret rendu (1) :
La Convention nationale décide que le conseil exécutif provisoire, le conseil général et le commandant de la garde nationale de Paris, seront appelés sur-le-champ à la barre; que le président leur rendra compte des circonstances où se trouve la République, et leur fera sentir la nécessité de doubler de surveillance, pour que l'ordre le plus parfait règne dans les murs de Paris.
La Convention nationale décrète en outre qu'elle sera en permanence et en
activité jour
Voici une lettre qui m'a été adressée par les citoyens composant le conseil général de la commune de Saint-Martin Ile de Ré; elle porte la date du 30 mars 1793 et est ainsi conçue (1) :
« Cher concitoyen,
« Nous recevons à l'instant une dépêche du général Foucault, datée des Sables, du 29 du courant, qui nous comble de la joie la plus pure, en nous apprenant la victoire complète que viennent de remporter nos frères d'armes sur les brigands qui menaçaient la ville des Sables, et qui l'auraient sans doute incendiée et détruite sans l'empressement et l'ardeur que nos concitoyens ont mis à voler à son secours : il y avait déjà plusieurs jours que les scélérats, forts seulement de leur nombre, essayaient de cerner les Sables. Le 24, ils s'étaient portés avec une grande fureur sur la ville; et le général, avec 300 hommes, avait eu l'avantage de les contenir dans une première sortie, et même de les repousser en leur tuant environ 200 hommes. Nos frères des Sables nous apprirent cette bonne nouvelle; mais ils nous firent entendre que la disproportion du nombre et le dénûment où ils étaient de tout autre secours que du nôtre, ne leur permettaient pas de se flatter d'aucun succès ultérieur, si nous ne faisions un nouvel effort en faveur de leur situation cruelle. Ils n'ignoraient pas que nous nous étions déjà saignés pour eux; mais ils savaient aussi que tous ceux qui nous restaient, étaient au service de la chose publique. 150 hommes qui nous restaient sont partis à l'instant, et nous nous applaudissons maintenant de n'avoir pas balancé à les envoyer; car à peine ont-ils eu mis pied à terre, que le 28 au soir, les ennemis se sont présentés au nombre de 6,000 devant les Sables : le commandant a fait battre la générale. Il ne s'est rien passé pendant la nuit, mais les brigands en ont profité pour se retrancher et pour lever les batteries. Le 29, à la pointe du jour, la canonnade a commencé avec beaucoup de vigueur de part et d'autre, et a duré 5 heures. Pendant cet intervalle le général a tout disposé pour un sortie : sur les 9 heures le feu ayant pris dans l'un des retranchements ennemis, la sortie a été exécutée; elle s'est faite sur deux points, et a été couronnée du succès le plus complet; l'ennemi a été mis en déroute, et le général s'est emparé de toute son artillerie composée de deux pièces de 18, et de quatre de 4 livres de balles, de plusieurs pierriers, quantité de fusils et instruments offensifs. Les brigands ont été pourstiivis pendant l'espace de deux lieues; et la fatigue seule des troupes arrivées la veille à 4 heures du soir, ainsi que la crainte de manquer de munitions, ont pu l'interrompre, et décider le général à rentrer en ville. La perte de l'ennemi est évaluée à 300 hommes environ, et de notre côté il n'y a eu qu'un seul homme tué et un blessé.
« Voilà, cher concitoyen, mot pour mot, le récit de l'avantage remporté
par les armes de nos frères dans la journée d'hier. Vous voyez qu'il
n'est mêlé d'aucune amertume et nous savourons le plaisir d'avoir sauvé
les Sables,
II est bien doux de pouvoir offrir à la patrie autre chose que des désirs de bien faire, et de pouvoir réaliser aussi heureusement que nous venons de le faire, les sentiments de dévouement dont nous sommes pénétrés pour la chose publique. »
«(.Nous sommes vos frères et amis.
t( Les membres du conseil général de la commune de Saint-Martin, Ile de Ré.. « Signé : Foucault, maire; Rivaille, fils aîné; Krafft, Boutet, Fraigneau, La-viallé, Vincent Rivaille, Valleau, Ma-hir, officier municipal.
« Nous vous prions de soumettre ces bonnes nouvelles à la Convention nationale.
« Signé : Foucault, Rivaille, fils aîné;
(La Convention décrète la mention honorable de cette lettre et en ordonne l'insertion au Bulletin.)
, au nom des comités de législation et des finances réunis, fait un rapport et présente un projet de décret sur le mode de paiement des jurés du tribunal révolutionnaire; le projet de décret est ainsi conçu (1) :
« La Convention nationale, sur le rapport des comités de législation et des finances, décrète que les jurés près du tribunal criminel extraordinaire seront payés par la trésorerie nationale sur le même pied que les juges de se tribunal. »
(La Convention adopte ce projet de décret.)
, secrétaire, donne lecture d'une lettre du citoyen Devitte, commissaire de la Convention nationale dans les départements des Ardennes et de l'Aisne, par laquelle il fait part des difficultés que causent l'af-fluence des recrues et le défaut de commissaires du pouvoir exécutif pour les placer dans les cadres; cette lecture est ainsi conçue (2) :
Sedan, le
« Citoyens nos collègues,
« Les recrues des départements de la Meuse, de la Marne et des Ardennes
sont levées; le ministre de la guerre dans son instruction, leur a
assigné pour lieu de rassemblement la ville de Sedan; ils commencent à y
affluer. Mais aux termes de la loi du 24 février, le ministre devait
envoyer dans les départements un commissaire pour recevoir ces recrues;
il devait encore désigner les cadres qui seraient conservés et ceux qui
seraient supprimés. Comment se fait-il que le ministre ne donne aucun
signe d'existence dans ces contrées ? Dans quels cadres faut-il
incorporer ces recrues? Leur abondance m'a fôrcé, en l'absence de mon
collègue, à autoriser le général Chazot à encadrer ceux arrivés dans les
corps exis:
« Le commissaire de ta Convention nationale dans le département des Ardennes, « Signé : Deville. »
U n membre regarde cette négligence comme une machination du conseil exécutif.
(1). Je ne partage pas l'avis du préopinant. J'arrive du département de la Marne et j'affirme que quoique le ministre n'ait nommé qu'un petit nombre d'agents supérieurs pour diriger la marche des volontaires, néanmoins la répartition s'en fait très facilement. Je vous ai déjà dit combien l'esprit public est à la hauteur des circonstances et combien dans toutes les communes qui environnent Châlons, le nom de roi et tout ce qui touche à Louis Capet était en horreur. J'ajoute qu'en ce qui concerne, les subsistances, le zèle déployé pour le pouvoir exécutif est des plus louables.
Néanmoins si vous ne partagez pas mon optimisme et si vous tenez à être éclairé davantage sur les dangers menaçants que prévoient vos commissaires, il est un moyen de donner satisfaction à tous : c'est de décréter que le ministre de la guerre par intérim et ses adjoints rendront compte des cadres que les recrues doivent remplir et des instructions que les commissaires militaires ont reçues sur ce point
(La Convention adopte les propositions de Thuriot.)
Suit le texte définitif du décret rendu (2) :
« La Convention nationale décrète que le ministre de la guerre par intérim rendra compte dans le jour de demain des mesures qui doivent avoir été prises pour qu'il y ait dans tous les départements des commissaires militaires pour inspecter les volontaires nationaux de nouvelles levées, et des instructions que ces commissaires ont reçues pour la conservation des cadres, et la distribution des recrues dans chacun de ces cadres. »
U n membre (3) demande que la Convention nationale charge son comité des décrets de surveiller l'envoi des lois, ordonne que le ministre de l'intérieur enverra tous les jours à ce comité, qui en donnera récépissé, la notice des décrets envoyés dans les départements, et que tous les jours cette notice soit imprimée à la suite du feuilleton et du bulletin de la Convention.
(La Convention adopte ces propositions.)
Une députation du département de Paris est admise à la barre.
Le peuple français est en danger; le modé-rantisme, la faiblesse ou la mauvaise foi des ministres, les trahisons des généraux, vos divisions, telles sont les causes de nos malheurs.
Nos armées du Nord sont commandées par un esclave qui demande un roi; presque aucun de nos généraux n'est investi^ de la confiance du peuple; nos places sont dégarnies de troupes et manquent de vivres; nos vaisseaux manquent d'hommes; les- nobles, les prêtres, les mécontents de tout genre, conspirent hautement, et osent parler d'un roi; pendant ae temps, les tyrans réunis font avancer leurs nombreux bataillons.
La position de la France est telle en ce moment, que si la Convention n'adopte au plus tôt unè mesure grande, une mesure peut-être gigantesque, nous sommes perdus.. Qu'à notre voix, qu'à la nouvelle de nos dangers tous les Français se lèvent et marchent à la fois : imitons les Romains, que chaque soldat porte avec lui des vivres pour trois jours, et ne s'en serve que quand il n'en trouvera plus; que cette guerre ne ressemble point à celles que nous avons vues; la guerre de la liberté ne doit pas être la même que celle de l'esclavage. Le courage seul doit être notre guide, il déjouera la tactique des despotes; nous fondrons tous ensemble sur nos ennemis, et ce genre de combat, le. seul que puisesnt livrer des hommes peu exercés au maniement des armes, est aussi le seul qui puisse nous sauver.
Nos nombreuses phalanges ne seront pas celle de Xerxès, et nous n'avons pas de Grecs à combattre; elles seront formées d'hommes armés pour la défense de leur liberté, de leur vie et de celle de leurs femmes et de leurs enfants; on est déjà victorieux quand on combat pour une telle cause. Hâtez-vous d'adopter ces mesures avant que le mal soit à son comble; bientôt, peut-être, il ne serait plus temps : prévenez de grands malheurs, plutôt que de chercher à y remédier. Citoyens, décrétez que tout Français, depuis l'âge de 18 ans jusqu'à 50 ans, prenne à l'instant les armes, et coure à l'ennemi; qu'il n'y ait point d'exception; que les corps administratifs, et qu'une partie de la Convention elle-même, ceux de ses membrès qui seront dans lè cas de la loi, se mettent à la tête de nos armées (Applaudissements); ne laissons dans nos foyers que les femmes, les enfants, et les citoyens âgés de plus de 50 années. Indiquez à chaque département où il doit porter ses coups; que la nation armée tout entière inonde les pays ennemis, dissipe leurs armées, immole leurs tyrans, et sous peu de mois cette grande lutte sera terminée, et la liberté et la paix de l'Europe seront le fruit de nos efforts. (Applaudissements.)
(2). Citoyens, dans le moment où vous paraissiez à la barre, la
Convention venait de décréter que vous seriez invités à vous rendre,
pour prendre ses ordres à l'effet
(1). Yoici une lettre d'un excellent patriote de Lille, qui me marque que la Convention doit bien peser la motion de faire marcher tous les hommes et de mettre à leur tête la moitié de la Convention, parce que ce sont les aristocrates qui, dans les villes frontières, proposent aussi cette mesure, afin de dissoudre la Convention.
Je ne doute pas que la proposition du département de Paris ne vous soit faite dans les plus pures intentions, mais cette lettre vous montre que ce n'est pas sans y avoir mûrement réfléchi que vous devez adopter la motion qui vous est présentée. Je demande qu'il ne soit pas délibéré pour l'instant sur cette proposition.
(La Convention passe à l'ordre du jour et la députation du département de Paris se retire.)
Je demande la parole (2).
Je demande l'ordre du jour, et le rapport sur le partage des biens communaux.
(La Convention passe à l'ordre du jour.)
Je prends acte aujourd'hui contre la Convention des efforts qu'on a faits pour étouffer ma voix.
S'il arrivait un malheur, Marat dirait que c'est parce qu'on n'a pas voulu l'entendre. Je demande qu'on lui accorde la parole. 1
Plusieurs membres : Eh bien, entendons-le !
(La Convention décide que Marat sera entendu.)
Il n'y a que des traîtres qui puissent étouffer ma voix; je vous rappelle au silence et à vos devoirs. S'il est un homme qui ait des droits pour être entendu, c'est moi, qui depuis huit mois vous ai prédit tout ce qui arrive. Quel que soit le sort qui me menace, je vous déclare que la conduite que vous avez tenue depuis la Révolution, est celle d'échap- j pés des Petites-Maisons. (Murmures).
Plusieurs membres : A l'ordre ! à l'ordre ! [
Ne vous offensez pas de mes expressions, car je ne veux pas vous offenser. Je n'ai que l'amour du salut public, il triomphera de tout.
La première mesuré dans ces circonstances, est de nommer sur-le-champ un comité de sûreté générale et un comité de défense générale, composés chacun de 12 membres, pris parmi les citoyens qui ont déjà fait leurs preuves en patriotisme et qui ont votre confiance. Je demande que les comités soient autorisés à délibérer à huis clos, jusqu'à l'arrestation des traîtres qui sont à l'intérieur, des agents des puissances ennemies et de tous les gens suspects.
Ma seconde proposition est de leur donner des pouvoirs les plus étendus, les plus formidables pour faire le bien, dussiez-vous leur donner des gardes et leur mettre aux pieds un j boulet.
J'estime que ces mesures de circonspection sont nécessaires; en tous cas, j'ai acquitté ma conscience en vous le proposant.
Plusieurs membres : Appuyé, appuyé!
Je demande à ne pas faire partie de ce comité,
(1). J'aVais une proposition fort simple à faire; mais dès que celle de Marat est appuyée, j'en ferai sentir le danger en peu de mots. Je me plaindrai d'abord du peu de clarté avec laquelle il l'a annoncée; que veut-il dire par la réunion des pouvoirs les plus formidables entre les mains de membres qui seront gardés à vue? Je ne veux pas de dictature, moi, fût-elle exercée du fond d'une prison; si la Convention veut former, renouveler des comités, changer les formes du conseil exécutif, je ne m'y oppose pas; cette mesure ne compromet pas la liberté de ma patrie; mais je ne veux pas qu'en portant une chaîne ou un boulet au pied, quelques hommes puissent en donner de plus lourds à mon pays. D'un çôté, il importe que toutes les mesures que vous allez prendre, le soient à l'unanimité; or, le seraient-elles si votre comité délibérait en secret? Je suis soupçonneux, et vous devriez l'être tous alors; cependant vous avez besoin de vous appuyer les uns sur les autres, et doubler votre force par votre union; si les mesures qui doivent vous être présentées sont concertées dans un comité secret, vous n'aurez ni confiance, ni union, et vous êtes perdus sans elles : je passe à ma proposition; nos ennemis ont des intelligences sûres, promptes et secrètes; ils seront instruits plus tôt que le3 bons citoyens de l'indigne trahison de Dumouriez; ils augmenteront les alarmes; ils décourageront les faibles; ils ne diront pas avec quel calme, avec quelle fierté républicaine vous avez entendu l'affligeant rapport de Delacroix. Oui, citoyens, vous avez tous cette fermeté d'âme qui est la première vertu des républicains; vous êtes tous inacessibles à cette sorte de timidité qui calcule davantage ses dangers que les moyens de sauver la patrie; vous la sauverez, ou vousi périrez; voilà votre sort; il est glorieux. Dites aux départements que vous êtes prêts à le remplir, vous allez redoubler leur énergie; telle ville qui vous a donné 3,000 hommes, va vous en donner 10,000; la France entière va marcher, et malheur a.ux traîtres! Je demande la question préalable sur la proposition de Marat, la prompte impression du rapport de Delacroix, et son envoi dans les départements par des courriers extraordinaires. J'estime, à mon tour, que si Marat a acquitté sa conscience en proposant cette mesure, j'ai acquitté la mienne en la combattant.
(La Convention décrète la question préalable sur la proposition de Marat, la prompte impression du rapport de Delacroix et son envoi dans les départements par des courriers extraordinaires) (2).
Lé commandant général Santerre est introduit à la barre (3).
Il s'exprime ainsi :
Citoyens, je n'ai point douté de l'alarme que
Avec les moyens physiques que nous avons, nous battrions quatre armées comme celle qui nous menace. Si vous me permettez de me concerter avec le comité de défense générale, dans les 24 heures nous aurons les moyens de partir avec une force suffisante pour sauver la patrie. Nous avons à Paris 96,000 hommes en état de porter les armes; 40,000 sont dans le cas de partir sans inconvénient. On peut indemniser ceux qui font vivre leur famille. Telle est l'ardeur qui vous anime, que si Paris reçoit vos ordres il partira tout entier. Or, Paris peut répondre de la Convention et de Paris seul peut sortir le salut public. (Aouveaux applaudissements.)
(1). La Convention vous remercie des nobles paroles que vous avez prononcées. Dans ces moments d'alarme, il convient que toutes les autorités civiles et militaire^ agissent de concert, pour empêcher le peuple de se porter à des scènes fâcheuses, dont les aristocrates profiteraient pour aliéner l'esprit des départements et qui surtout donneraient un prétexte au traître Dumouriez de marcher, comme il l'a dit, sur Paris. Nous allons tous prendre les mesures nécessaires pour maintenir le calme; vous avez bien servi la liberté, vous pouvez bien la servir encore.
Santerre : Jusqu'à la mort.
(La Convention autorise Santerre à se concerter avec les comités afin d'aviser aux mesures à prendre pour le salut de la République.)
(Santerre se retire, mais il reparaît presque aussitôt à la barre.)
Santerre (2). Les citoyens alarmés m'ont suivi au comité et m'ont ramené ici. Voici la députation ; ils vous offrent leurs bras et demandent les armes; (se tournant vers les pétitionnaires) n'est-ce pas, mes amis, c'est cela que vous venez demander?
Tous : Oui, oui ! (Vifs applaudissements.)
accorde à ces citoyens les honneurs de .la séance.
. (de Saintes) (3). Vous avez entendu trop souvent une vérité dont vous
n'avez jamain été assez pénétrés : c'est que les demi-mesures sont
autant de coups de poignards pour la liberté. Quand la liberté s'asseoit
avec effort dans un pays, ce n'est pas le nombre des délibérants qui
sauve la patrie, c'est l'énergie de leurs mesures et de leurs
dispositions. Il faut que nous sachions que nous sommes la
Un grand nombre de membres : Le renvoi au comité de défense générale.
(1). Je pense que le comble de la folie serait de désorganiser les pouvoirs publics dans ce moment-ci; mais je pense*aussi, puisque la Convention paraît décidée à renvoyer la proposition de Garnier au comité, qu'il y aurait injustice et faute de ne pas y renvoyer également celle que j'ai formulée. Je rappelle la motion que j'ai faite de nommer deux comités de douze membres parmi les patriotes connus comme les plus purs et qui jouissent de la confiance publique. Les membres dé* cee comités seront responsables sur Jeurs têtes des mesures qu'ils prendront pour le salut public, et ils se soumettront eux-mêmes à être gardés à vue.
Si vous ne prenez ces mesures je donne ma démission.
Plusieurs membres : Donnez-la ! donnez-la !
Je demande l'ajournement de toutes les propositions jusqu'au rapport du comité de défense générale.
(La Convention décrète l'ajournement demandé par Bentabole.)
reste à la tribune.
Marat, vous venez d'entendre la décision de l'Assemblée; retirez-vous, et allez au comité présenter vos vues.
Je n'irai pas; ce n'est pas au milieu de ses ennemis qu'un général peut délibérer.
Je vous rappelle, Marat, que vous n'êtes pas un général.
Je demande le renouvellement du comité.
(La Convention passe à l'ordre du jour.)
, secrétaire, donne lecture d'une lettre des chasseurs volontaires de la Charente; ils demandent à voler au secours de la patrie, ou qu'on décrète qu'ils doivent rester dans leur département ; oétté lettre est aiûsi conçue (i)^
a Citoyen Président,
« Ét vOUs pères de là République française.
« Lès chasseurs volontaires de la Charente ont pries les armés dès que le danger de la patrie a été proclamé; cependant l'aristocratie levait encore un front audacieux dans notre département et nos Compagnons d'armes, plus héufeuX que nous, en volant au poste de la gloire, nous avaient lâi$sé le Soin de la contenir; mais l'Assetttblée législative, en frappant son chef, Uoùs a évité la peine de la combattre.
« Des hordes d'étrangers, auxquels des traîtres avaient oUvêft les portes de la France, menaçaient nos frères de Paris; nous accourons : déjà Jes bàrbares sont vaincus. Législateurs, nos bras seront-ils donc tdtljours enchaînés ? Ne restè-t-il pas des ennemis à combattre 1 Ne reste-t-il pas des peuples à conquérir à lâ liberté i Tous les jours nous entendons vanter les exploits de nos ffèfes d'armes, et nous... serions-nous donc les seuls dont les noms ne seraient pas honorablement inscrits par ceux des braves défenseurs de la République? Législateurs, on formait un camp sous les murs de Paris lorsque nous sommes arrivés; vous l'avez jugé inutile et, depuis ce temps, la calomnie cherche à persuader que ce n'est pas pour défendre nos frères de Paris que nous avons quitté nos départements. Nous ne nous amuserons pas à réfuter ces diatribes mensongères; nous ne croyons ni à l'intrigue ni aux partis.et, prêts à terrasser nos ennemis quand ils se montrent, nous mépriserons toujours ceux qui nous attaqueront dans l'ombre.. Les malveillants seuls peuvent concevoir quelque ombrâge de notre séjour à Paris; mais les hommes du 14 Juillet ! mais ceux du 10 Août 1 voilà le peuple, et il nous aime; il sait que ce n'est pas contre lui que nous voudrions tourner nos armes : que pourriez-vous craindre àù milieu de ces fiers enfants de la liberté : ils feraient rentrer dans la poussière les êtres turbulents qui prétendraient troubler vos délibérations; lgurs vertus, les sages lois que vous allez nous donnèr, voilà votre garde la plus sûre
« Ne nous laissez donc pas plus longtemps dans l'inaction; en quittant
nos foyers, nous avons promis à nos pères, à nos amiB, à nos compagnes,
à celles qu'uM gentiment réciproque destine à lé devenir, de É f point
feutrer sans nous être mesures contre les satellites des despotes, et ce
n'est (ju'à ce prix que nous pouvons obtenir leur main ; nous faudra-il
renoncer à ce qu'il y a de plus précieux pour des guerriers après la
gloire de leur patrie ? Législateurs, nôus vous en conjurons,
laissez-nous accomplir nos promeôs'îs et levez tous les obstacles qui
s'opposent à notre départ ou bien décrétez que nous devons rester Ici;
« Pour les chasseurs volontaires de la Charente.
« Signé : Chatéauôàîllâïï. »
(La Convention nationale décrète la mention honorable.)
Le même secrétaire donne lèctuïé d'une lettre des administrateurs composant lé Conseil exécutif et militaire du département de M ayenne-et-Loire, datée d'Angers le 1er avril, par laquelle ils donnent de nouveaux détails sur l'état actuel des forces dans cé département, sur leur position, sur celles des contre-révolutionnaires et sur de nouveaux succès des armées de la République; èîle est ainsi conçue (1) :
« Notre lettre du 29 mars vous présentait le tableau de notre situation; aujourd'hui nous allons vous offrir quelquep détails sur l'état actuel de nos forces, sur leur position et sui- celle des contre-révolutionnaires.
« La rivé droite de la Loite eât occupée par un corps de 2^400 hommes, composé en grande partie dè la garde nationale d'Angers. Ce cdrps; qui occupe les postes d'Ingrandes, Yaradés et Ancénis, a pour objet de tenir libre notre communication avec Nantes, et d'empêcher les rebelles, dont une partie occupe Saint-FlOrent-le-Vieux, sur la rive gauche, de passer la Loire pour se réunir aux autres hordes qui inquiètent lâ vijle de» Nantes.
« Un corps de 3,600. hommes a été porté au midi du Layon, où il occupe Saint-Lambert ét d'autres postes sur la même rîvè. Ce corps a en tête une troupe de révoltés, cantonnée à Chemillé. Le Sb du mois dernier, ils sont venus attaquer le poste de Saint-Lambert, èt Ont été vigoureusement répousëés, après un combat qui a dUré jusqu'à 7 hfeûreS du Soir. L'ennemi a profité de la nUit pour se retirer sur Chemillé, laissant une trentaine de morts sur le champ dé bataille. On a lieu de croire qu'ils en ont emporté un plus grand nombre, avec beaucoup de blessés. Leur artillerie ne nous a fait aucun mal; deux patriotes tués, et 15 ont reçu des blessures, dont heureusement aucune n'est dangereuse.
m Le corp3 rassemblé à Doué, est maintenant composé d'environ 10,000 hominés : il s'èêt ! porté à Yihiers. Des détachements de cette armée occupent des postes qui établissent sa communication avec celui de Saint-Lambert.
« L'atmée dont il s'agit, commandée par le générâl DuhouX, marche Sur Coron et VezinS, où les contre-révolutionnaires ont quelques forces; ils occupent aUSsi Cholet, Beaupréaux et Saint-Florent, où sont leurs principales forces. La marche , combinée de nos armées a pour objet de les débusquer successivement de tous ces postes.
« Quant à la force des révolutionnaires, il
(La Convention renvoie la lettre au comité de défense générale.)
Uttë députation dés citoyens de la, section de la BUttê des Moulins est admise à la barfe.
Le .citoyen Grandperrin, prateur de l'a 'déL pîttàiiôH, donné lécturë de la lettre suivante (1) :
Paris
; « Citoyen Président,
« Là section de la BUttë dëâ Moulin^ toujours ferme dans ses principëëj vous prie de voulbitf bien faiïé part à la Convention nà-tiônalé de l'âtrêté ci-jôiiit qu'elle à pris, et l'assurer du dévouement qu'elle lui a toujours voué et de son'rekpëcfc' à là loi et pour ses lé-gislatèurs.
« Lès président et secrétàire de la sëàtîôft dk la Bulle dès Môtilms.
« SigWé : GtRMdpèëRin, prêsidèht; Cotinet, secrétaire. M
Suit le texte de cet arfêté, qtii ë§t aiiisi cbhçu i
Extrait du pfocès-vérbal de l'assemblée générale et permanente de la section de la Butte des Moulins (2).
du er avril
1793
de là Rëptiblitjuè frànÇàisé. .
« il a été fait iecture d'une adresse de la section des Droits de, l'homme qui invite la section de la Butté des Moulins à nommer qiiàtré CQipmissairès pcfUr sè rendre à l'Evêché lé plus tôt possible, a l'effet qê former Uii Comité central rèvblUtiônnâiré, Correèp Ofadant avec les dép artements de la Rép ubiitJUè.
« tTn ifiëinbré déndnëé Ce cbmité qu'il Regarde coininë nuisible à la chose publiqUé.
« Un àUtre thembre appuiè cette dénoncia^ -tion et pi-ésëttte des idéës lumineuses sUr lëë fônctidiis dès ëoriiihissaii'fes qui doivént coiû-poser lé comité et lës rëgàrdë ëotnme prévMUs d'iht§sntions cohtte-réyolutiohriàirëé.
u L'assëMbléë éonvâincUë dë cëè principes, ârrêtë qu'élue dëmàndëfà à là Cdhvéntipii iià-tiôtiale la dissolution dë cë dômité central et qUé lë présétit àrfêté àerà cbiiïmutiiqUé àu cotpS électoral, à la mUniëipaiité ët aux qua-ràtitefièpl àutrés sëctiofis pouf ëii àëèélérët' la dissblutidfa.
« Pour extrait conforme.
« Signé : Grandperrln, président; cbtinêt, Sécïêtairè.
félicite les pétitionnaires de leur zèle ét leur accorde les honneurs de
la séance.
, députation des citoyens de la iecîion de Reaurépaire est admise à la barré.
L'orateur de la députation donne lecture dë l'arrêté suivant (ï) ;
SECTION DE BEAUREPAIRE
séante aux mathurins
Extrait dès délibérations.
«. L'assemblée généràle ayant pris coîinàisr sahëé d'un àrrêtë dë là sectioii de l'Arsëiiai en dàtë de cë joUt, qui défend à ses commissaires de tié plus. se trôUVer én assemblée dé commissaires des sectïohS, réunies à l'Evêché, les trois jours précédents et qui témérairement s'étaient constitués, parleur .procès^verbai, du jour d'hier, assemblée générale du saîztf jpublic et de correspondance avee tous les départements, soUs là sdïlvegardé du peïtplfë, deôlâre qU'ëllë adhère à l'arrêté dë ià SèctibU dë l'Amenai; déclàre, en bufàe, qu'ëllë avàit lté dé|à avertie de la pïevàrifeatioiir dé cette assemblée de l'Evêché par ses commissaires dont elle aprouve la conduite ; elle nommé les citoyens Lemasson et Godefroy pour porter son arrêté a la mUnicipaïitéj àu département et au président de îa Convention nationale.
« Signé LANëÈOis- président. » « Pour extrait coiifofme :
« Signé : MAéTiit, Ékt^'éiài^è. »
répond à l'orateur ët accorde à la députation les honneurs de ia séance.
(La Convention décrète la mention honorable du patriotisme des citoyens de la sec-tioù de Beaurepaire).
TJnk dèputahon dés citoyens dé la section des Drpzts de l'homme ëst admise à la barre (2).
L'orateur de la députation donne lecture d'un arrêté de cette sectioii qui demande également la dissolution dé ce comité cèntral.
répond à l'orateur 'ët àccdtdë à là detJUiatiori lës honneurs de là séàîiôè.
(La Convention décrète la mention honorable du patriotisme des citoyens de la section dés Droits de l'nomme).
(3). Je demandé l'éiéëti-tiOn du décret rendu hiër cohtre les commissaires prévaricateurs qui ont cherché^ àu clUb CëUtràl, à égàrër l'opiriioU publique; en d'autreS termes, jë réclame là comparution à la barre des présidents de ce comité.
Jë suis précisément saisi Ë'utië lettre dé deux de ces citoyens qUi se déclarent prêts à comparaître poyr fournir à la Convention tous éclaircissements.
(1). Je demande qu'on s'occupe d'objets généraux, avant de passer à des objets particuliers : chaque minute qu'on perd, est une victoire pour nos ennemis. Dumouriez a été nommé par le conseil exécutif général en chef; il a une grande étendue de pouvoirs; il fait mouvoir tous les commandants des places; il peut faire enlever toutes les armées. Il faut proclamer à la République entière que Dumouriez n'est plus un général, que c'est un traître. Il faut que sa tête soit mise à prix; il faut prendre toutes les mesures de sûreté, e*> deux heures de retard peuvent tout perdre. Il faut que tous les courriers soient sur les routes; il faut défendre à tous les commandants de place de le reconnaître pour chef, à moins d'être punis comme traîtres à la patrie. Il faut déclarer que Dumouriez est hors de la loi, et que quiconque le tuera, aura une récompense de 300,000 livres. Je demande, en outre, que le conseil exécutif soit en permanence ainsi que la Convention.
Adopter ces propositions, c'est mettre vos commissaires sous le couteau.
Je sais bien que nos commissaires sont au pouvoir des traîtres, mais nous ne pouvons pas mettre dans la balance quatre citoyens et le salut de la patrie.
(La Convention adopte les propositions de Thuriot.)
(2). Je demande que l'on donne une couronne civique à celui qui livrera Dumouriez, et que la somme de 300,000 livres dont a parlé Thuriot, soit pour ses enfants.
observe que lorsqu'il y a un intérêt, ce n'est pas le cas de donner la couronne civique.
Marat insiste.
(La Convention adopte la proposition de Marat.)
Suit le texte définitif du décret rendu (3) :
« La Convention nationale ordonne que le «onseil exécutif provisoire nommera sur-le-champ un général pour remplacer Dumouriez.
( Déclare à la nation française que Dumouriez est traître à la patrie, qu'il a juré la perte de la liberté et le rétablissement du despotisme.
« Fait défense à tout général, à tout commandant de place, à tout soldat de la République, à toutes les autorités constituées en France, de reconnaître Dumouriez pour général, d'obéir à aucun ordre- de lui et à aucune réquisition.
« Décrète que tout Français qui reconnaîtra Dumouriez pour général sera regardé comme traître à la patrie et puni de mort, et que ses biens seront confisqués au profit de la République.
« Décrète que Dumouriez est mis hors de la loi; autorise tout citoyen à
courir sus, et
« La Convention nationale met sous la sauvegarde de l'honneur et de la loyauté des soldats français qui sont dans l'armée qui était commandée par Dumouriez, les cinq commissaires par elle envoyés, et que Dumouriez tient en arrestation, et le ministre) de la guerre.
« Ordonne que le présent décret sera envoyé par des courriers extraordinaires dans tous les départements, aux corps administratifs, aux généraux et aux commandants de places, et qu'il sera de suite proclamé dans les villes et à la tête des corps armés. »
(1). Je demande qu'on invite, au nom de la patrie, tous les parents et amis de nos frères d'armes, qui sont devant l'ennemi, de leur écrire que Dumouriez est un traître. Je demande, en outre, que le service des postes, d'ici à l'armée, soit gratuit pendant quinze jours, afin de pouvoir entretenir plus facilement avec les citoyens, qui sont aux frontières, ces communications fraternelles qui déjouent tous les complots.
(La Convention décrète ces nouvelles propositions.)
(2). En présence des circonstances périlleuses où se trouve la patrie, je déclare que je renonce à faire usage du congé que, sur ma demande, la Convention avait bien voulu m'accorder. (Applaudissements.)
Les ministres composant le conseil exécutif entrent dans la salle.
Garat, ministre de l'intérieur, s'exprime ainsi (3) :
Citoyens, la Convention a décrété que le conseil exécutif, le département et la municipalité de Paris se rendraient à sa barre pour y recevoir ses ordres. Nous nous présentons en exécution de ce décret.
Ce matin, de meilleure heure qu'à l'ordinaire, nous nous sommes rendus à
peu près tous dans la salle du conseil pour nous concerter sur le compte
général que vous nous avez demandé de l'état de la République. C'est à
ce moment que nous sont parvenues les nouvelles de vos commissaires de
la Belgique. Nous sommes accourus aussitôt au comité de défense
générale. Là, nous avons entendu le commandant général de la garde
nationale demander l'autorisation de choisir parmi les militaires qui
lui étaient connus, et dans lesquels il avait la plus grande confiance,
pour composer son état-major. Il est
Citoyen Président, c'est le moment pour les ministres de la République, car ils sont tous républicains, de faire ici leur profession de foi. Je puis assurer à l'Assemblée qu'il n'est aucun d'entre nous qui, dans l'occasion, ne soit prêt à jouer non seulement le rôle de ministre, mais encore, s'il le faut, celui de soldat. (Applaudissements.)
J'ignore, citoyen Président, quelle est l'opinion de mes collègues, mais, dans ce moment, où des nominations importantes vont avoir lieu, où plusieurs généraux ont besoin d'être renouvelés, dans ce moment où le conseil exécutif va être chargé d'opérations auxquelles le sort de la République est attaché, mon opinion serait que toutes les nominations fussent faites par la Convention nationale elle-même.
Je rappellerai que l'époque la plus périlleuse et la plus glorieuse de l'Assemblée constituante fut celle de la fuite du roi à "Varennes. A ce moment, cette Assemblée saisit d'une main ferme les rênes du gouvernement. Elle fit venir dans son sein les hommes auxquels elle voulait confier l'exécution de ses ordres. Les ministres, les généraux, après lui avoir prêté le serment de fidélité, sortaient de la barre investis. de la confiance publique. Jamais la France ne fut plus calme et le peuple plus majestueux. Dès ce moment, il fut décidé que la France serait une République.
Eh bien, citoyens, en vous rappelant cette époque glorieuse, faites que celle-ci lui ressemble. Si les mêmes mesures étaient prises, "si la Convention nationale, qui s'est déclarée permanente faisait elle-même les nominations si les délibérations les plus importantes du conseil exécutif étaient prises dans son sein, si les ministres n'étaient que les exécuteurs de ses décrets, j'ose croire que le salut de la République serait plus assuré.
Peut-être conviendrait-il de donner aux membres du conseil exécutif un autre nom que celui de ministre qui rappelle toujours au peuple tant de trahisons et de crimes.
Je demande pardon à la Convention si je m'exprime avec une chaleur qui n'est peut-être permise qu'à ses membres. Soyez assurés que c'est le zèle, le sentiment profond de mes devoirs qui m'inspirent et me font un besoin de vous communiquer ces mesures. Depuis longtemps, je suis persuadé qu'il n'y en a pas de meilleures pour le salut de la République. Je les soumets à vôtre sagesse. (Applaudissements.)
(IV J'applaudis au zèle qui anime le conseil exécutif, mais je n'adopte pas les. mesures qu'il propose, parce qu'il faut que le peuple ait des agents responsables.
Il y a une mesure qui peut se rapprocher des propositions du ministre :
le conseil a des connaissances sur les officiers patriotes; c'est lui
qui doit les désigner, parce qu'il est res-
Je demande que l'Assemblée décrète que le conseil exécutif continuera de nommer les généraux, mais que leurs choix seront soumis à la ratification de la Convention.
Je demande l'ajournement de cette proposition jusqu'après le rapport du comité de défense générale.
(La Convention décrète cette proposition) (1).
au conseil exécutif (2). La Convention a décrété qu'elle serait permanente; c'est assez vous dire que vous devez l'être aussi, afin de prendre de concert avec elle les mesures nécessaires pour assurer la tranquillité publique.
(3). Je demande, afin d'investir la Convention de la confiance publique, que tous ses membres restent à leur poste, et que ceux qui passeraient les barrières, soient déclarés infâmes et traîtres à la patrie, et qu'il soit permis de tirer sus. (On rit.)
Plusieurs membres : De même ceux qui se cacheraient dans des caves.
Je demande qu'il en soit de même des ministres et de leurs agents.
Aucun -de nous n'est assez lâche pour abandonner son poste, lorsque la patrie est en danger. Je demande, au nom de la morale publique, que l'Assemblée, improuve la proposition de Marat.
(La Convention passe à l'ordre du jour).
La municipalité de Paris est admise à la barre (4).
Le maire. Aussitôt que nous avons eu connaissance du décret de l'Assemblée, nous nous sommes empressés de nous y rendre, afin de recevoir ses ordres.
La Convention nat'onalé a décrété que les autorités constituées de la
ville de Paris se rendraient à sa barre, pour leur faire part des
nouvelles qu'elle a reçues. L'intention de l'Assemblée, en vous appelant
à la barre, a été de vous engager à prendre des mesures, de concert avec
les autres autorités, pour réprimer les malveillants. L'Assemblée est
pleine de confiance dans le peuple de Par-ris; mais il se glisse dans
son sein des agitateurs qu'il faut; surveiller. L'Assemblée est en
permanence; elle désire que vous le soyez
(La municipalité de Paris se retire.)
Un membre (1) : Je demande la parole pour rendre compte à l'Assemblée des dépêches que j'ai reçues de Valenciennes. Dumouriez a cherché à pervertir l'esprit public dans les municipalités du Nord, et principalement à Valenciennes; mais ses écrits n'ont produit aucun effet.
Voici une lettre qu'écrivait à Valenciennes l'armée sur laquelle compte le plus Dumouriez.
Du lugubre quartier général de Tournay.
« Nous ne resterons avec Dumouriez, qu'à condition qu'il repoussera les ennemis extérieurs, et qu'à condition qu'il ne les laissera pas approcher des frontières. »
On me mande à Lille : Nous laisserons plutôt incendier notre ville que de là rendre.
Proclamation du général Dumouriez aux
départements du Pas-de-Calais et du
Nord (8).
« Citoyens,
« Je né vous dissimulerai ,pa$ la grandeur des dangers qui nous menacent; ils existent moins dans le nombre et le courage de nos ennemis, que dans l'abandon coupable des soldats de République, et daïlS lpuT indifférence pour la cause que nous avoirs jure de défendre. Ceux qui restent avec nftoi et avec les autres généraux, sont de braves soldats, de bons citoyens. Nous ne fuyons pas, nous reculons comme de vrais guerriers; et chaque fois que l'ennemi tente de nous entamer, nous nous défendons comme des hommes libres. Nous couvrons en ce moment notre frontière. J'ai pourvu, par des garnisons, à la sûreté de vos principales places fortes : nous les défendrons si on les attaque, et vous nous seconderez.
« Mais pensez, chers concitoyens, que nous avons à combattre un monstre bien plus dangereux que les ennemis extérieurs : c'est l'anarchie. Ce montre nous désorganise depuis longtemps; il prend les formes et le langage d'un patriotisme exagéré, et il nous conduit à la lipence et au crime. Les lâches qui cçupent les têtes ou qui conseillent les moyens violents, sont ceux qui donnent l'exemple de la fuite, et qui n'osent soutenir le regard de l'ennemi. L'jiomme vraiment courageux est vertueux et humain. Bientôt, lorsque mes braves camarades et moi, réduits à iin petit nombre par la désertion, rentrerons dans l'intérieur de nos frontières, nous serons assaillis d'une foule de dénonciations et de calomnies : aucun de vos généraux n'a pu encore y éohapper,
« J'ai été souvent menacé de mort; ne craignez rien : citoyens, nous
défendrons nos têtes, parce qu'elles sont nécessaires à la République.
lies braves se rassembleront autour de nous; les hommes égarés
reviendront de
( A Tournay, le 28 mars 1793, l'an II de la Republique française.
« Signé : Dumouriez, général en chef.
J'observe à l'Assemblée que cette proclamation n'a fait aucun effet sur les esprits des citoyens, et qu'on est convaincu de la complicité de Dumouriez avec Clairfait.
(La Convention renvoie ces pièces au comité de défense générale, avec invitation aux députés qui ont des instructions à donner ou de nouvelles mesures à proposer sur cet objet, de Jes communiquer à ce comité (1).
Une nouvelle députation des citoyens de la ville de Strasbourg est admise à la barre (2).
L'orateur de la députation demande la révocation du décret rendu le 1er avril (3), qui autorise les citoyens du département du Bas-Rhin, suspendus par les commissaires Couturier et Dentzel à reprendre leurs fonctions.
Il expose le danger qu'il y a pour la ville de Strasbourg à maintenir en place les administrateurs inciviques qui molestent tous les bons citoyens, insultent et outragent la société populaire.
« Vos commissaires, ajoute-t-il, se sont très bien conduits, et pour avoir fait les choses qu'ils ont faites sans être assassinés, c'est un miracle. Etablissez les patriotes seuls maîtres dé tout; ils veulent le bien. » .
répond à l'orateur et accorde à la députation les honneurs de la séance.
J'appuie la pétition des députés de Strasbourg. Je propose à la Convention de rapporter la partie du décret qui ordonnait la réinstallation des administrateurs et autres fonctionnaires publics de ce département, suspendus par les citoyens Couturier et Dentzel, et décrète que ses commissaires, tant dans les départements que dans les armées, seront autorisés à faire arrêter, même déporter d'un département à l'autre les personnes suspectes, à la charge par eux d'en rendre compte à l'Assemblée dans les 24 heures.
J'appuie ces propositions, mais je demande, en outre, que lés courriers extraordinaires qui doivent porter dans les départements du Haut et du Bas-Rhin les décrets rendus dans la séance de ce jour, soient aussi porteurs du présent déeret, et, en cas de départ, qu'il soit envoyé par un courrier extraordinaire.
(La Convention, après une courte discussion, adopte, sauf rédaction, les propositions de Bentabole et de Charlier) (4)." .
, secrétaire (5), se plaint au nom des secrétaires du bureau de l'Às-
(La Convention décrète œtte proposition).
(Charente-Inférieure), au nom du comité de commerce, fait un rapport et présente un projet de décret (1) tendant à interdire la sortie des drilles ou chiffes hors de la République; le projet de décret est ainsi conçu :
« La Convention nationale, après avoir entendu son comité de commerce, décrète :
Art. 1er. La sortie des drilles ou chiffes,
hors de la République, demeure interdite.
Art. 2, Nul entrepôt ni circulation desdites matières n© pourra se faire dans l'étendue de trois lieues des frontières, soit de terre, soit de mer, à moins qu'il ne soit justifié par un acquit-à-caution de leur destination pour l'intérieur de la République.
Art. 3. Toutes drilles ou chiffes, prises dans l'étendue de trois lieues des frontières, soit de terre, soit de mer, qui circuleraient sans ces formalités, seront saisies et confisquées.
Art- 4- Les préposés aux douanes sont chargés, sous la surveillance des corps administratif} de l'exécution du présent décret. »
(La Convention adopte ce projet de décret.)
(2). Citoyens, votre comité de défense générale, dans les dangers qui menacent la patrie, est convaincu que, saas rapport préliminaire, la Convention peut sauver la liberté. Cependant il me charge de vous observer qu'en décrétant des mesures partielles, le salut public peut être compromis. On rédige dans ce moment un tableau général dans lequel toutes les mesures capables de sauver la République sq$t comprises. Dans une heure on vous présentera un décret qui déjouera les perfides projets de Dumouriez et de tous ceux qui tenteraient de lui ressembler. Votre comité demande que tous les décrets rendus dans cette séance lui soient communiqués, afin de les faire concorder avec son travail.
(La Convention adopte la proposition de Delmas).
(La séance e§t susp exclue à six heures pour être reprise à huit heures du soir.)
a la séance de la convention nationale du
Compte rendu par Delacroix, au nom des commissaires près Varmée de Belgique.
Texte du Moniteur (2).
Nos collègues, Camus, Bancal, Quinette et Lamarque, nous ont remis une expédition du décret par lequel vous nous rappelez dans votre sein. Nous partîmes aussitôt, en regrettant que notre mission n'ait pas duré vingt-quatre heures de plus; car vous auriez eu aujourd'hui à votre barre Dumouriez mort ou vif, au contraire vous allez apprendre dea malheurs
Réunis à Lille, nous fûmes convaincus de l'existence du complot de livrer cette place, par la négligence de l'apprivisionnër et d'y mettre une garnison suffisante;, elle ne contenait alors que 245 volontaires dont la moitié n'était pas armée, tandis qu'il faut au moins quatorze ou quinze mille hommes pour la défendre. On devait profiter de la confusion qu'exciterait dans cette ville la fuite de 15,000 hommes qui avaient abandonné l'armée. Nous prîmes des mesures pour la mettre en sûreté.
Nous nous occupâmes ensuite d'étudier le caractère de Dumouriez. Je l'ai défendu ici, parce qu'alors je le croyais un homme de bien; et je suis étonné qu'on m'en ait fait un crime, car j'ai vu aussi défendre ici le roi et La-fayette. Mais en arrivant à Lille j'ai tout observé, et mes collègues me rendront la justice de dire que c'est moi qui, le premier, leur ai donné des preuves, non de conviction, mais de présomption contre Dumouriez; alors je leur proposai de le suspendre, de le faire arrêter et traduire à la barre de la Convention : mais il opérait sa retraite alors, et l'on crut que ce n'était pas le moment d'exécuter ces mesures. Nous appelâmes nos collègues Carnot et Lesage-Senault : je renouvelai ma proposition devant eux; mais je fus obligé de céder à la majorité. On crut plus prudent de la faire venir à Lille, que d'aller le faire arrêter dans Tournay, ville dont nous n'étions pas sûrs. Nous avons arrêté une série de questions à lui faire, calquées sur les délits dont il était prévenu.
Il nous répondit qu'il ne pouvait pas quitter un seul instant l'armée; nous délibérâmes de nous transporter à Tournay, et nous allions partir, lorsque Dumouriez nous envoya un procès-verbal qui constatait que son armée était dans la plus grande détresse, et noua annonça qu'il comptait rester à Tournay le lendemain, quoiqu'il fût déjà entouré, parce qu'il avait sa retraite assurée sur Saint* Amand, Bruille et Maulde. Il annonça qu'il
devait être le surlendemain dans cette position, et, qu'à moins que le salut de la République ne dépendît de ce que nous avions à lui demander, il nous conseillait d'attendre, pour venir l'interroger, qu'il fût à Saint-Amand.
Dans la crainte d'entraver la retraite, nous préférâmes ce dernier parti. Yoici notre réquisition et sa réponse.
Lettre des commissaires de la Convention nationale au général Dumouriez, datée de Lille le 29 meurs 1793.
Les commissaires de la Convention nationale près les armées de la Belgique, et dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais réunis, requièrent le général Dumouriez de se rendre aujourd'hui 29 mars, dans l'après-midi, maison du citoyen Mouttier, place du Lion d'or, pour s'expliquer avec eux sur des inculpations graves qui le concernent, et dont il lui sera donné communication.
Le général Dumouriez confiera le commandement de son armée pendant son absence, à l'officier général à ses ordres, qu'il jugera le plus propre à le remplacer.
Lille, le 29 mars 1793, l'an II de la République.
Signé : Gossuin, Delacroix, L. Carnot, Merlin (de Douai), Robert, Treilhard, Lesage-Senault.
Lettre du général Dumouriez, aux citoyens commissaires de la Convention nationale, du 29 mars.
Il m'est impossible, citoyens commissaires, de laisser un seul instant l'armée dans le moment ou ma présence seule la retient, où, par H défection de la droite et de la gauche, je suis en l'air par l'approche de Clairfait, qui est aujourd'hui à Ath; de l'archiduc Charles, qui est arrivé cette nuit à Mons, et du général Millins, qui s'avance sur Courtray; me voilà presque cerné et forcé à un mouvement rétrograde, que je suis forcé de diriger moi-même.
Si j'allais à Lille, l'armée aurait des craintes, et certainement je n'entrerais dans cette ville qu'avec 'des troupes pour la purger de tous les lâches qui ont fui et qui me calomnient : envoyez-moi deux ou quatre d'entre vous pour m'interroger sur les imputations graves que l'on met en avant, je répondrai surtout avec ma véracité connue; mais je vous déclare que je ne peux pas en même temps plaider et Commander; ma tête ne suffirait pas à ces deux genres de guerre.
« Signé : Dumouriez. »
Nous nous occupâmes alors des dangers de Lille, et nous requîmes le général Dumouriez d'envoyer quatorze ou quinze mille hommes pour former un camp qui pût couvrir cette ville. Mais comme nous étions bien sûrs qu'il nous refuserait, nous requîmes le général Duval de s'emparer du Pont-Rouge, et d'autrès postes de la plus grande importance pour assurer les subsistances de la ville. Il fallait pour occuper ces postes 3,000 hommes que le général Duval n'avait pas; nous lui ordonnâmes de requérir le commandant du
camp de Cassel, de les lui envoyer. Cela fut exécuté.
Assurés ensuite que Dumouriez était à Saint-Amand, nous délibérâmes, le 31 mars, après avoir fait arrêter quelques-uns de ses complices, que nous nous rendrions le lendemain à Saint-Amand, pour lui faire les questions que nous avions arrêtées : qu'après l'avoir entendu, nous nous retirerions data une chambre particulière pour délibérer, et qu'en attendant, il serait gardé à vue, et que s'il y avait lieu à l'arrêter, cette décision serait exécutée par le plus ancien lieutenant général de l'armée, que nous nous occuperions de le remplacer, et que nous ferions connaître le tout à l'armée, par une proclamation.
Nous ne nous dissimulâmes point le danger de cette entreprise; mais nous comptions sur la confiance que nous avions inspirée à l'armée, et je dis à mes collègues : puisque nous nous rendons au camp, il faut que Dumouriez obéisse et reconnaisse l'autorité de la Convention; ou, s'il fait un mouvement, je vous demande l'autorisation de lui brûler la cervelle. Tous mes collègues étaient décidés au sacrifice de leur vie; tous étaient armés; mais je briguai l'honneur de punir le scélérat.
Nous allions partir pour exécuter notre arrêté, lorsque nos collègues arrivèrent, apportant votre décret qui nous semblait laisser de la défaveur sur notre compte. Nous les instruisîmes de ce que nous avions fait, et l'un de nous leur proposa de les accompagner. Cela ne parut pas leur convenir, et nous n'insistâmes point.
Nous revînmes. Sur la route, entre Péronne et la poste suivante nous reçûmes un courrier extraordinaire des administrateurs du département du Nord, qui nous envoyaient la copie d'une lettre qui leur avait été adressée par Dumouriez, dans laquelle il leur annonçait qu'il avait fait arrêter le ministre et les commissaires; qu'il les gardait pour otages, et qu'il fallait marcher sur Paris. Voici cette lettre :
Le général Dumouriez aux citoyens administrateurs du département du Nord.
Citoyens administrateurs, la tyrannie, les assassinats et les crimes sont à leur comble à Paris. L'anarchie nous dévore, et sous le nom sacré de la liberté, nous sommes tombés dans un insupportable esclavage. Plus les dangers sont grands, plus la Convention semble mettre d'aveuglement dans sa conduite. Je lui ai dit des vérités dans ma lettre du 12 mars, et elle a envoyé, pour m'arrêter ou pour se défaire de moi, quatre commissaires et le ministre de la guerre, Beurnon-ville, dont j'ai fait la fortune militaire, les accompagne. x
Depuis plusieurs jours l'armée est révoltée des calomnies et des attentats dirigés contre son général; et ils auraient été victimes de l'imprudence de ceux qui les avaient envoyés, si je n'avais retenu son indignation.
Je les ai fait arrêter, et je les ai envoyés dans un lieu sûr pour servir d'otages, en cas qu'on se prépare à commettre de nouveaux meurtres et de nouveaux crimes.
Je ne tarderai plus à marcher sur Paris, pour faire cesser la sanglante anarchie qui y règne; j'ai trop bien défendu la liberté jusqu'à
présent, pour m'arrêter au moment où elle est le plus en danger.
Nous avions juré en 1789, 1790 et 1791, une Constitution qui, en nous soumettant à des lois, nous donnait un gouvernement stable; ce n'est que depuis que nous l'avons renversée, que nos malheurs ont commencé. En la le-prenant, je suis sûr de faire cesser sur-le-champ la guerre civile et la guerre étrangère, la licence, le brigandage, et de rendre à la France la paix et le bonheur qu'elle a perdus.
Je connais la sagesse du département où je suis né et dont j'ai déjà été le libérateur; puissé-je l'être bientôt de la France entière !
Je vous jure que je suis loin d'aspirer à la dictature, et je m'engage à quitter toute fonction publique lorsque j'aurai sauvé ma patrie.
« Signé : Dumouriez. »
Dans la nuit qui a précédé notre départ, nous avons été instruits par un bon citoyen qui a fait sa déclaration par écrit, que la veille de l'évacuation de Tournay, Clairfait était venu dîner avec Dumouriez.
Nous avons appris aussi que pendant l'évacuation de Bruxelles, Dumouriez avait passé la nuit, dans une séance secrète, avec de soi-disant représentants provisoires du peuple de Bruxelles.
Nous avons été d'autant plus affligés du malheur arrivé à nos collègues,j que nous avons pu conjecturer de la lettre de Dumouriez qu'il les avait fait conduire à Bruxelles ou à Tournay ; car dans le département du Nord, aucune municipalité n'aurait souffert qu'on emprisonnât quatre membres de la Convention : on nous avait assuré d'ailleurs qu'auparavant il avait pensé à nous faire arrêter Danton et moi, pour nous échanger contre la ci-devant reine et son fils.
Yoici la lettre des administrateurs :
Douai, le 2 avril.
« Citoyens législateurs, nous avons juré de vivre libres ou de mourir; nous tiendrons notre serment. Nous vous adressons copie d'une lettre que Dumouriez vient de nous écrire.
« Dans la nuit qui a précédé le jour de l'arrestation de vos collègues et votre départ, nous avons été assurés par un bon citoyen, qui en a donné sa déclaration par écrit, que la veille de l'évacuation de Tournay, le général autrichien Clairfait était venu dîner* avec Dumouriez. Nous avons encore acquis depuis la certitude que pendant l'événement de Bruxelles, Dumouriez avait passé la nuit avec les prétendus représentants de cette ville. C'est à vous, représentants, à prendre toutes les mesures qui pourront sauver la patrie. »
Texte du « Journal des Débats » (1).
« Les collègues que vous avez nommés pour nous remplacer, nous ont remis les expéditions du décret par lequel vous nous avez appelés pour rendre compte de l'état et de la situation de l'armée; nous somme partis aussitôt; nous ignorions encore dans ce moment que nous avions été calomniés; nous
avons regretté que notre mission n'eût pas duré vingt-quatre heures de plus; car, aujourd'hui, nous aurions appelé Dumouriez mort ou vif à votre barre, et au contraire vous avez des malheurs à entendre. Lorsque je suis parti du comité de sûreté générale avec Robert et Danton, nous nous étions promis d'étudier Dumouriez, de l'éclairer, de lui prouver qu'il avait été trompé par des gens intéressés à l'attacher à leur parti, de le faire rétracter de ce qu'il a écrit, ou de le faire traduire à la barre; nous nous rendons à Louvain, de là à l'armée; nous assistons à l'affaire, nous rallions des divisions entières, que des colonels inciviques faisaient marcher la nuit pour ne pas rencontrer l'ennemi. — Dumouriez était absent, il était à ce qu'il appelle son armée. Danton et moi, montés sur des chevaux de cavalerie, rejoignons Dumouriez; il était au feu, nous y restons avec lui, et nous le confessons, si je puis m'exprimer ainsi, depuis dix heures du soir jusqu'à quatre heures du matin; nous sommes venus rendre compte à Bruxelles de notre mission à Treilhard, Merlin et Gossuin. La retraite de la Hollande et l'évacuation de la Belgique, combinées ensemble, l'étaient tellement avec le projet de contre-révolution, qu'à Lille il n'y avait que 245 hommes de garnison. Nos collègues se divisèrent; Merlin et Gossuin se rendirent à Gand. Treilhard et Robert à Tournay. Réunis à Lille, nous fûmes bientôt convaincus du projet de livrer la place.
On voulait profiter des troubles qui devaient éclater dans la place, par l'influence de douze à quinze mille volontaires qui s'y étaient réfugies après leur déroute. Nous nous occupions en même temps à étudier le caractère, à suivre les traces de la légèreté et des délits de Dumouriez. Je l'ai défendu, parce que j'ai cru qu'il était républicain. J'ai été étonné que ce reproche ait pu m'être fait, car j'ai aussi entendu défendre et le roi et Lafayette ; d'ailleurs, lorsque j'ai défendu Dumouriez, je partageais l'erreur de nos collègues, et le décret que je proposai alors passa à l'unanimité : mais à mon arrivée à Lille, j'ai cherché à trouver les convictions des crimes de Dumouriez. Mes collègues me rendront la justice de dire que je proposai, dès ce moment, de suspendre Dumouriez, de le mettre en état d'arrestation, et de le faire traduire à la barre. La retraite s'opérait alors; mes collègues crurent que la mesure que je proposais méritait réflexion avant de la mettre à exécution; je fus obligé de céder à la majorités Nous appelâmes Carnot et Lesage-Senault ; j'insistai encore sur l'arrestation. La mesure fut encore rejetée; il fallait bien cependant en prendre une; elle fut adoptée. Nous crûmes plus prudent de faire venir le général à Lille, que d'aller à Tournay, où nous fîmes la réquisition dont il vous a été fait lecture. Convaincu que Dumouriez se rendrait à Lille, nous préparâmes une série de questions ainsi conçue :
1° Le général Dumouriez a-t-il dit qu'il s'était rapproché des frontières, à cause des insurrections intérieures; que le peuple français est composé de fous et d'enragés, conduit par des brigands auxquels l'assassinat ne coûte rien?
2° A-t-il dit que la Convention nationale est composée de 300 brigands et de 400 imbéciles;
qu'elle perdrait tout si les honnêtes gens ne se réunissaient pas, que les assemblées primaires devaient être convoquées, la Convention renvoyée avant trois jours, et remplacée par une autre, composée des présidents de districts?
3° A-t-il dit qu'il fallait une Révolution nouvelle, dans la Révolution, pour sauver la France; qu'il se chargeait de la sauver; qu'il y perdrait la tête, s'il le fallait, mais qu'il l'opérerait; qu'il bravait les décrets d'accusation pour sauver son pays?
4° A-t-il dit qu'il faut reprendre la Constitution de 179Q ? Est-il vrai qu'il a porté des propositions de paix aux puissances coalisées ?
5° A-t-il entamé des négociations avec l'Autriche? Â-t-il proposé aux ennemis de reconnaître l'indépendance de la République à condition qu'elle abandonnera ses conquêtes, et que les prisonniers du Temple recouvre» ront leur liberté?
6° A-t-il dit que, lorsqu'il a voulu traiter avec la Prusse et l'Autriche, on a répondu qu'on traiterait volontiers avec la nation et lui, mais non avec la Convention ou le pouvoir exécutif dans lequel on n'a point confiance ?
7° Par qui a-t-il été chargé de traiter avec l'Angleterre et la' Prusse? A-t-il dit qu'il vouait une guerre à mort aux jacobins, et qu'il n'aurait de paix que lorsqu'il aurait fait raser le lieu 4e leurs séances et qu'il y aurait fait semer du sel?
Telle est la série des questions que nous nous proposipns de lui faire. Voici la réponse du général, elle vous a été lus hier.
Nous prîmes sur-le-champ la délibération de nous transporter à Tournay pour interroger Dumouriez, nous nous disposions à exécuter cet arrêté, lorsque nous reçûmes de ce général, une lettre dont voici l'entrait :
« Citoyens commissaires, il est instant de pourvoir sur-le-champ à la subsistance de l'armée; la partie qui s'est débandée ne Fa fait que par lâcheté, mais les braves gens qui restent autour de moi, se débanderaient forcément faute de vivres; je ne répondrais pas des suites qu'il serait impossible de prévoir. Je compte rester ici demain quoique je sois presque totalement cerné, parce que j'ai ma retraite assurée sur Breuil, Bruges, Maulde et Saint-Amand, où le conseil exécutif me prescrit d'aller camper, et où je serai demain, à moins que le salut de la République ne dépende des explications que vous attendez de moi, mais je crois que vous ferez bien d'attendre pour venir demander ces explications, que je suis prêt à vous donner. »
Nous arrêtâmes qu'il serait sursis à la conférence jusqu'au moment où la retraite serait effectuée.
Permettez-moi de vous dire en passant que je n'ai point signé cet arrêté, parce que j'étais d'avis de nous rendre sur-le-champ près le général. Pendant le temps de notre séjour à Lille, nous nous sommes assurés de l'état de détresse de cette place; nous avons réuni tous les officiers généraux civils et militaires; nous avons fait une réquisition au général Dumouriez, que nous savions bien n'être pas dans l'intention de défendre la place; de nous envoyer de quoi former un
camp de quatorze à. quinze mille hommes; mais comme nous nous doutions que le général Dumouriez obéit à cette réquisition, nous en fîmes une au général Duval de s'emparer, sans délai, des postes du Pont-Rouge; seul passage par lequel on pouvait recevoir des vivres; nous fîmes fermer les portes, parce que l'ennemi pouvait y entrer le soir même.
Le 31 nous arrêtâmes : 1° que l'arrêté du 30 serait exécuté; que nous nous rendrions près du général Dumouriez à Saint-Amand, pour l'interroger : que Delacroix serait chargé de lui faire la série des questions, et de tenir note de ses réponses; que la proposition d'arrêter ou de destituer le général Dumouriez serait ajournée jusqu'après sa réponse; et qu'aussitôt cette réponse, nous nous retirerions dans une chambre particulière pour y délibérer sans désemparer; que pendant cette délibération, le général serait gardé à vue; que s'il y avait alors lieu à faire arrêter le général, le plus ancien lieutenant général en recevrait l'ordre, et qu'à l'instant une proclamation ferait connaître à l'armée les motifs de cette mesure. Je dois dire à la Convention nationale que nous ne nous dissimulions pas le danger; mais aussitôt nous comptions Bur la confiance que nous avions su inspirer à l'armée, dans laquelle on avait répondu que l'évacuation de la Belgique et de la Hollande était faite d'accord avec la Convention nationale, que nous avions un roi, la paix et que chacun s'en retournerait chez soi.
Je dis à mes collègues : « Nous nous rendrons an camp, il faut que Dumouriez reconnaisse l'autorité nationale, et s'il n'obéit pas, s'il fait \in mouvement, je vous demande la permission de lui brûler la cervelle en votre présence. » Voilà la proposition faite par un de vos Collègue^, qu'on a dit être le complice de Dumouriez. Mes collègues ne me démentiront pas, ils étaient décidés au même sacrifice; nous avions juré de mourir à notre poste, mais j'avais brigué l'honneur de tuer le scélérat. (On applaudit.) C'est à l'instant que nous prenions cette mesure vigoureuse, qui seule pouvait nous sauver, qu'on nous calomniait ici, et que j'étais accusé d'être de connivence avec Dumouriez par un homme qui, alléguant qu'on devait être étonné de me voir siéger à la Montagne, lui-même y a siégé, puis a passé à l'extrémité droite, et est enfin revenu à la placé connue sous le nom de celle des indépendants. C'est à ce moment que nous vîmes nos nouveaux collègues; nous résolûmes à l'instant de nous rendre à la Convention; nous embrassâmes nos collègues auxquels nous laissâmes la série des questions; un de nous ne leur laissa pas ignorer leurs dangers; un de nous voulait les accompagner, mais ils ne parurent pas y consentir. Ce refus peut être la cause du malheur que j'ai à vous apprendre. Nous partons. A Douai, nous manquons de chevaux; nous y faisons, de concert avec les administrateurs, arrêter un complice de Dumouriez; nous suivons notre route; et après Péronne, nous sommes arrêtés par un courrier extraordinaire, porteur d'une dépêche des administrateurs de Douai; ils nous envoyaient une lettre à eux adressée par Dumouriez. Ce traître a fait arrêter vos commissaires et le ministre ; il les retient en otages, et va marcher sur Paris. Voici la lettre de Dumouriez :
Copie de la lettre écrite par le général
Dumouriez aux administrateurs du département du Nord.
Le général Dumouriez aux administrateurs du département du Nord.
« Citoyens administrateurs,
« La tyrannie, les assassinats, les crimes sont à leur comble dans Paris, l'anarchie nous dévore, et sous ïe nom sacré de liberté, nous avons le plus vil esclavage. Plus les dangers sont grands, plus la Convention nationale met do cruauté, de tyraniîie et d'aveuglement. Les vérités que je leur avais dites dans une lettre du 12 mars, ont poussé les Marat, les Robespierre à dévouer ma tête. Ils ont envoyé, pour m'arrêter ou plutôt pour se défaire de moi, quatre commissaires; et le ministre de la guerre Beurnonville, dont j'ai fait la fortune militaire, les a accompagnés. Depuis plusieurs jours, l'armée frémissait des vexations exercées contre ses chefs; et si je n'eusse retenu son indignation, ils en eussent été les victimes. Je les ai fait arrêter, et je les ai envoyés en lieu sûr, pour me servir d'otages, en cas qu'on veuille commettre de nouveaux Crimes, je ne tarderai pas à marcher sur Paris, pour faire cesser la sanglante anarchie qui y règne; j'ai trop bien défendu la liberté jusqu'à présent, pour abandonner cette cause.
« Nous ayions pn 1789, 1790 et 1791, accepté uns Constitution qui nous assujettissait à des lois, à un gouvernement stable. Depuis que nous l'avons rejetée, les crimes, les malheurs ont commencé en prenant la licence et l'infraction à toutes le» lois, pour la liberté. En reprenant cette Constitution, jè suis sûr de faire cesser la guerre civile et la guerre étrangère, et de rendre à la France le repos, la tranquillité et le bonheur. Je connais la sagesse du département où je suis né; j'ai déjà été son libérateur, je le serai bientôt de la France entière. Je vous jure, sur ce qu'il y a de plus sacré, que bien loin d'aspirer à la dictature, je m'engage à quitter tqute§ fonctions publiques aussitôt que j'aurai sauvé ma patrie.
« Signé : Dumouriez, général en chef.
Tour copie conforme • « Lçs administrateurs du département du Nord.'
Dans la nuit qui a précédé le jour de l'arrivée de nos collègues, et celui de notre départ, nous avons été assurés par un bon citoyen, qui .en a passé sa déclaration par écrit, que là veille de l'évacuation de Tournay, un général autrichien, Clairfait, était - venu dîner avec Dumouriez, et nous avons acquis, depuis, la certitude que, pendant l'évacuation de Bruxelles, Dumouriez avait tenu une séance de nuit avec les séditieux administrateurs provisoires de Bruxelles. Cette lettre nous a donné l'explication de la disette et du dénuement absolu dans lesquels se trouvaient nos places frontières. L'intention de Dumouriez était de s'emparer de ces places, ou de les ouvrir à l'ennemi. C'est à vous, citoyens, à prendre tqutes les mesures qui peuvent sauver la patrie. Je demande que votre comité de salut public s'assemhie sur-le-champ; nous lui communiquerons les idées que nous croyons salu-
taires, et il vous en fera un rappv jance tenante.
« Nous ayons été fort affligés du malheur de nos collègues et du ministre, lorsque nous ayons presque été sûrs qu'ils ne pouvaient être qu'à Tournay ou à Bruxelles, que c'était là que Dumouriez les avait fait conduire comme otages; car nous avions la certitude qu'aucune municipalité 4'6S départements que nous avops vus, ne souffrirait qu'ils y fussent mis en prison ou dans une citadelle. Nous savions d'ailleurs qu'il nous avait menacés de nous arrêter et de nous échanger avec la ci-devant reine et le ci-devant dauphin.
Texte du Logotachigraphe (1).
Delacroix. Citoyens, les collègues que vous avez nommés pour nous remplacer, nous ont donné connaissance du décret par lequel vous nous appelez dans votre sein, pour vous rendre compte. Nous avons parti aussitôt; et eu partant, nous avons regretté que notre mission n'ait pas duré 24 heures de plus, car vous auriez aujourd'hui Dumouriez à votre barre, mort ou vif! Yous allez savoir le malheur qui s'en est suivi. Les calomnies qu'on a débitées ici contre moi, ne me touchent guère, cependant elles m'obligent de parler de moi : j'aurais dû laisser cette tâclie à mes collègues, mais je ne dirai que ce que je ne puis me dispenser de dire, pour ne pas être regardé comme conspirateur, du comité de sûreté générale, avec Robert et Danton. Nous nous étions promis d'entretenir Dumouriez, de l'étudier, de le faire convenir qu'il avait été trompé par des personnes intéressées, de le faire rétracter de ce qu'il avait, écrit à la Convention nationale, ou de le faire traduire à la barre. Après en avoir délibéré avec nos quatre collègues, nous nous sommes transportés le lendemain à Lquvain, et de là à l'armée. Nous avons assisté à une partie de l'entretien qui a eu lieu pour réunir des bataillons entiers? conduits par des colonels inciviques, qui faisaient marcher leurs soldats la nuit, pour eviter d'aller au combat, et qui s'étaient fait suivre par six bataillons de volontaires nationaux, qu'on laissa à la débandade. Dumouriez était absent, il était à la tête de ce qu'il appelle son armée. Danton et moi montâmes chacun sur un cheval de cavalier : nous apprîmes qu'il était au feu; nous nous en approchâmes; nous lui exposâmes l'objet de notre mission- Nous avons été à le confesser depuis 10 heures du soir jusqu'à 4 heures du matin. Nous sommes venus rendre compte de notre mission à Bruxelles, où étaient Treilhard, Gos-suin et Merlin ; je crois que Camus était arrivé ici. On nous y fit part de l'évacuation combinée de toute la Hollande, et de la Belgique, ainsi que d'un rapport dont j'ai donné communication au comité de sûreté générale, rapport dont nous avons justifié les trames, rapport dans lequel il était question d'un projet contre-révolutionnaire à Lille, pour livrer la place où le général Dumouriez avait laissé 250 volontaires nationaux sans munitions, la plupart non armés et sans aucun secours. # Nos collègues avaient pris chacun une destination; Gossuin et Merlin étaient à Louvain, Treilhard et Merlin (de Douai) étaient à
Douai; leur présence était nécessaire dans chacune de ces villes. Nous nous réunissons à Lille, et là nous sommes convaincus du complot de conspiration et du projet de livrer la place. On devait profiter du trouble qui devait nécessairement résulter dans ces circonstances, de la fuite et de débandade de 12 ou 15,000 soldats. Nous prenons les mesures de sûreté générale dont nous avons déjà rendu compte, ensuite nous continuons d'étudier le caractère de Dumouriez; partout nous suivons les traces qui nous sont indiquées! et les délits qu'il se proposait de commettre.
J'ai défendu ici Dumouriez, car alors je le croyais républicain, et je suis bien surpris qu'on m'en fasse un reproche; j'ai vu défendre le roi et Lafayette. Lorsque j'ai défendu Dumouriez, j'ai pensé comme mes collègues; mais en arrivant à Lille, j'ai cherché, j'ai scruté toutes les consciences, et j'ai trouvé des délits contre Dumouriez; mes collègues me rendront justice, que c'est moi qui leur ai donné des preuves, sinon de conviction, au moins de présomption sur ce général. Alors je me suis hâté de réparer l'erreur que j'avais commise en le défendant. J'ai proposé à mes collègues de le mettre en état d'arrestation, de le suspendre et de le traduire à la barre.
Alors la retraite s'opérait, mes collègues crurent que ce n'était pas là le moment de la mettre à exécution. Je résistais longtemps, mais je fus obligé de céder à la majorité. Nous appelâmes Carnot et Lesage, qui avaient été envoyés dans ce département, pour hâter le recrutement, ils vinrent conférer avec nous. J'insistai pour ma mesure de suspension, d'arrestation^ de traduction à la barre, mes collègues crurent qu'il était plus prudent d'écrire à Dumouriez de venir à Lille, que d'aller tous les sept pour le faire arrêter dans une ville sur laquelle nous ne pouvions pas compter, et dont lui seul disposait.
Yoici notre arrêté :
« Les commissaires de la Convention nationale, près des armées de la Belgique et dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais réunis, requièrent le général Dumouriez de se rendre aujourd'hui 29 mars, deux heures après midi, à Lille, maison de M. Mouttier, pour s'expliquer avec eux sur les inculpations gravçs qui le concernent, et dont il lui sera donné communication. Le général Dumouriez, pendant son absence, confiera lè commandement de son armée à celui de ses officiers généraux qui aura le plus sa confiance. »
Voilà l'arrêté qui fut pris à la majorité et contre la proposition que j'avais faite. Nous étions alors convaincus que Dumouriez se rendrait à Lille, et nous avions rédigé une série de questions à lui faire, qui avaient été calquées sur les pièces que j'avais dans la main.
« Première question : A-t-il dit qu'il s'était rapproché des frontières à cause des insurrections du dedans? 2° que le peuple français est composé de fous, de brigands auxquels les assassinats ne coûtent rien ? 3° que la Convention est composée de 400 brigands qui dirigeaient 300 imbéciles? 4° Est-il vrai qu'il ait dit que laConventionnationale perdrait tout, si les honnêtes gens ne se réunissaient pour sauver la chose publique? qu'il fallait que les assemblées primaires eussent lieu pour ren-
voyer les conventionnels chez eux ? qu'il fallait qu'avant trois semaines la Convention fût renvoyée eÇ remplacée par une autre composée de tous les présidents de districts? 5° qu'il fallait une Révolution dans la Révolution pour sauver la patrie; qu'il la sauverait, qu'il y perdrait la tête s'il le fallait, mais que son parti était pris ? 6° qu'il braverait dix décrets d'accusation, s'il le fallait; qu'il voulait sauver son pays qui était à deux doigts de sa perte? 7° que s'il était décrété d'accusation, il ne quitterait pas son poste? 8° Après avoir parlé d'une révolution dans les circonstances, qu'il faudrait peut-être reprendre la Constitution de 1790 ? 9° que si la France devait rester telle qu'elle esk il quitterait le service? 10° A-t-il dit qui! négocierait la paix avec les puissances coalisées contre la République, qu'il a entamé une négociation avec l'Autriche et la Prusse et avec leurs généraux? 11° A-t-il été question, dans ces négociations, de reconnaître l'indépendance de la France, à condition qu'elle renoncerait à ses conquêtes, que la reine et son fils seraient renvoyés en Autriche ? 12° Lorsqu'il a voulu traiter avec l'Angleterre et la Prusse, lui a-t-il été répondu qu'on traiterait volontiers avec la nation et avec lui, mais qu'on ne traiterait ni avec la Convention, ni avec le conseil exécutif, en qui on n'avait aucune confiance? 13° Par qui avait-il été chargé de traiter avec le roi de Prusse et l'Autriche? 14° A-t-il dit qu'il y avait une guerre à mort entre lui et les jacobins ? qu'il fallait qu'il pérît ou qu'on rasât les jacobins, et qu'on semât du sel sur la place ? »
Voilà la série des questions qui avaient été arrêtées entre vos cinq commissaires, Carnot et Lesage qui avait bien voulu s'adjoindre à nous. Nous reçûmes alors la réponse de Dumouriez. La voici :
Le général en chef Dumouriez aux citoyens commissaires de la Convention.
« Il m'est impossible, citoyens commissaires, de laisser l'armée dans ce moment où, par la défection de la droite ou de la gauche, je suis exposé à être attaqué par Clairfait qui est aujourd'hui à Ath, et Charles qui est arrivé cette nuit à Mons, et le général Millins qui s'avance sur Courtrai. Me voilà presque cerné et forcé à un mouvement rétrograde que je suis forcé de diriger moi-même. Si j'allais a Lille, mon armée aurait des craintes, et certainement je ne rentrerais dans cette ville que pour la purger des brigands et de tous les lâches qui me calomnient. On veut que je vienne à Lille pour m'intèrroger sur les faits graves dont l'on m'inculpe. Toujours je répondrai avec ma véracité connue, mais je déclare que je ne puis plaider et commander; ma tête ne suffirait pas à ces deux genres de guerre. »
L'orateur continue : Nous reçûmes cette lettre par le courrier qui avait porté la nôtre, et voici la délibération qui fut prise ensuite par les sept mêmes commissaires, sur la réponse du général Dumouriez, en date de ce jour. Nous arrêtons que nous nous transporterons à Tournay pour conférer avec Dumouriez. Nous nous disposions à partir, lorsque nous reçûmes une autre lettre de Dumouriez que voici :
A 4 heures du matin. — Je vous envoie, citoyens commissaires, un procès-verbal qui vous prouvera notre détresse. Il faut absolument que vous nous aidiez de toute votre autorité, pour pourvoir à la subsistance de l'armée qui s'est débandée. Jusqu'à présent, elle ne l'a fait que par lâcheté; mais si les braves gens qui sont restés avec moi, malgré le mauvais exemple, viennent à manquer de vivres, je ne réponds pas des suites. Je crois cependant me retirer encore, quoique je sois déjà totalement environné; mais j ai ma retraite encore assurée sur Bruges, Maulde et Saint-Amand où le conseil exécutif me presse d'aller camper; j'y serai après-demain, et à moins que le salut de la République ne dépende des explications que vous avez à me demander, je crois que vous ferez bien d'attendre cette époque.
« Signé : Dumourie?, général en chef. »
Yoici la délibération qui fut prise en présence de Carnot, Lesage, etc :
« Nous commissaires de la Convention nationale, dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais, vu la lettre du général Dumouriez, datée d'hier, et à nous rémise ce matin, par laquelle il nous mande qu'il faut rester encore aujourd'hui à Tournay, quoique totalement environné, parce qu'il Sh s£t retraite assurée sur Maulde et Saint-Amand, où le conseil exécutif lui prescrit d'aller camper et où il sera demain.
« Considérant que pour l'exécution de notre arrêté pris hier, d'après lequel nous devions nous rendre à Tournay, pour exécuter l'arrêté pris par le conseil exécutif provisoire, qui enjoint de se retirer sur Maulde et Saint-Amand : arrêtons qu'il sera sursis à entendre le général Dumouriez sur les inculpations à lui imputées, jusqu'à ce qu'il puisse y répondre en un temps plus proprie. »
Il faut que je dise à la Convention, que je n'ai pas signé cet arrêté : en voici un autre. Pendant le temps que nous avons resté à Lille, nous nous sommes convaincus que cette ville était dans une grande détresse; nous avons envoyé à votre comité de salut public, tout ce qui manque pour sa défense. Nous avons réuni tous les officiers d'artillerie, tous les officiers du génie; tous sont convenus des mesures que nous avons prises. Il n'y avait dans cette grande place qui exige pour sa garde 14 ou 15,000 hommes, que 225 hommes de gardes nationaux, dont la plupart n'était pas bien armés; alors nous fîmes une réquisition au général Dumouriez qui, suivant nous, n'était pas dans l'intention de défendre cette place, mais de l'abandonner. Nous fîmes une réquisition de nous envoyer un détachement et de quoi composer un camp de 14 à 15,000 hommes devant Lille; et nous lui annoncions le résultat de cette espèce de conseil que nous avions tenu; mais comme nous comptions bien que le général Dumouriez ne nous enverrait pas ce que nous demanderions, nous fîmes à Duval la réquisition de s'emparer sur-le-champ du poste du Pont-Rouge, poste important sans lequel la ville ne pouvait recevoir aucune subsistance et par lequel les ennemis pouvaient entrer le soir dans la ville. Pour occuper ce poste, il fallait un corps de 3,000 hommes. Le général Duval n'avait pas ces hommes à sa disposition, puisque, comme on vous l'a
dii^ sa garnison n'était composée que de 230 hommes; mais il se trouvait au camp de Casse! un corps de troupes assez considérable. Duval, à la vérité, n'y commandait pas : nous avons requis Duval de donner ordre au commandant de ce camp de porter des forces sur le Pont-Rouge; ce qui a été exécuté le soir même. Nous avons acquis toute la certitude que Dumouriez s'était rendu à Saint-Amand; eb alors, après avoir fait arrêter les particuliers qui paraissaient impliqués dans la conspiration dont nous vous avons rendu compte, nous avons pris, le 31 mars, la délibération que voici :
« Les membres de la Convention nationale et ses commissaires près l'armée, etc., délibérant, après avoir pris les mesures nécessaires pour assurer la place de Lille contre les tentatives des ennemis extérieurs et contre les manoeuvres de ceux de l'intérieur, dans la circonstance où ils savent" que Dumouriez a évacué Tournay; qu'il importe à la République qu'il satisfasse à l'arrêté du 30 mars, qui concerne le général Dumouriez, et qu'il détermine la marche qu'ils auront à tenir, arrêtent ce qui suit :
« Art. 1er. Les commissaires de la Convention
se rendront demain à Saint-Amand, pour interroger le général Dumouriez
sur les inculpations dirigées contre lui. Les questions, dont la série a
été arrêtée par les commissaires, seront proposées au général Dumouriez
par Delacroix. Il sera tenu note de toutes les réponses.
« Art. 2. Si d'après les questions faites au général Dumouriez, s'il y a lieu de lui en faire d'ultérieures, chaque membre de la commission aura le droit de lui en faire.
« Art. 3. La proposition de destituer, d'arrêter le général Dumouriez, est ajournée jusqu'après ses réponses.
Art. 4. Après les réponses du général, les commissaires se retireront dans une chambre particulière, pour délibérer sans désemparer, et pendant leur délibération le général sera gardé à vue.
« Art. 5. S'il y a lieu de faire arrêter le général, ils avertiront le plus ancien lieutenant général, et le requerront au nom de la République pour faire exécuter l'arrêté pris, pour effectuer l'arrestation du général Dumouriez : ils procéderont ensuite à son remplacement, et ils feront connaître à l'armée, par une proclamation, les mesures qui auront été prises, ainsi que les motifs sur lesquels ils se seront fondés. »
Citoyens, je dois dire à la Convention que cette mesure avait été prise la nuit; que nous ne nous dissimulions pas le danger que nous courions en nous rendant à l'armée, commandée par le général Dumouriez : mais aussi nous comptions que la confiance de l'armée nous était acquise; nous l'avions visitée pour ainsi dire tous les jours. On avait répandu depuis longtemps, dans l'armée, que l'évacuation de la Belgique s'était effectuée par le consentement de la Convention nationale; que nous allions avoir un roi et que chacun se rendrait en paix chez soi. Je dis à mes collègues, dès lors que nous nous rendrons au camp, il faut que Dumouriez, puisque nous le connaissons pour un traître,
reconnaisse l'autorité déléguée aux commis- j saires de ia Convention nationale; il faut qu'il obéisse à son .arrestation, quand elle sera prononcée; et s'il n'y obéit pas, et s'il fait quelque mouvement, je vous demande l'autorisation de lui brûler la cervelle. (Applaudissements). Voilà la proposition que faisait votre collègue qu'on a calomnié. (Applaudissements).Tous mes collègues étaient décidés au même sacrifice, je briguai l'honiteur de tuer le scélérat.
C'est à l'instant que nous prenions les mesures les plus vigoureuses, qui seules pouvaient sauver la patrie, qui seules pouvaient épargner les malheurs qui soht prêts à fondre sur nous, c'ést dans ce moment qu'on hoUs calomniait ici, qu'on nous accusait d'être les complices du conspirateur Dumouriez. On disait qu'au retour de lâ Belgiqùë, j'avais siégé dans la Montagne, et l'homme qui me faisait ce reproche y avait siégé, mais il revint ensuite se confondre parmi ceux qu'on nomme modérés, je né veux pas examiner sa conduite.
Nos chevaux étaient prêts, nous partions; nos collègues arrivent, nous aperçûmes que le décret qûi nous rappelait, laissait sur notre conduite une espèce de défaveur, et non une approbation de conduite, car vous np la connaissiez pas et on avait tout fait pour la dénigrer. Nous partons le même jour en embrassant nos collègues, auxquels nous faisons part de toutes les délibérations que nous avions prises, un de nous les pria de vouloir bien souffrir que nous les accompagnions à l'armée de Dumouriez; mais npus vîmes que cela ne leur plaisait pas; cependant ils auraient évité un grand malheur, dont je vais vous donner connaissance.
Citoyens, la mesUre que noiis avions résolu d'employer envers Dumouriez, était plus grande que la vôtre, qui était trop faible pour un général contumacé : car en apprenant le décret qui le mandait à la barre, il pouvait passer de l'autre côté et nous être encore funeste. Nous, nous voulions en défaire l'armée. Nous partons, nous manquons de chevaux à Douai, et nous sommes obligés d*attendre; nous allâmes trouver les administrateurs de Douai, et après avoir fait arrêter deux complices de Dumouriez, nous reprîmes notre chemin. Lorsque nous étions entre Péronne et la première poste (nous vous prions de recevoir cette nouvelle avec •la fermeté républicaine), nous recevons un çoUrrièr extraordinaire qui nous annoncé que les administrateurs du département ont reçu une lettre de Dumouriez, qui leur apprend qti'il a fait arrêter le ministre Besutnonville et vos Commissaires; qu'il les retient pour otages, et qu'il va marcher Sur Paris. (Mouvement d'indignation et de surprise). Nous voUs avons promis la vérité toute nue, jUsqU'à présent iioUs vous l'avons dite, et nous ne Vous dissimulerons rien. Voici la lettre des administrateurs du département du Nord :
De DdUai, le er
avril 1793
« Législateurs,nous ayons juré de vivre iibres où dé mourir; nous tiendrons nos serments; nous vôUs envoyons copie d'une lettre qui nous à été adressée par Dumouriez; nous vous
prions de nous tracer la cônduitè que nous devons tenir.
(« Signé : Les Administrateurs du département du Nord.
« Voici là COj)ié de cette lettré ; elle n'est point datéë, mais elle a été envoyée par un courrier extraordinaire :
« Lé général Dumouriez aux Adminiètfaiêurs du département.
« Citoyens administrateurs, le méUttre, l'assassinat et les crimes sont à leur comble à Paris; l'ânarchie nous dévore, nous sommés tombés dans lé plus Vil esclavage : plus les dangers sont grands, plus la Convention nationale met de tyrannie et d'aveuglement dans sa conduite. Les vertus que je lui ai dictées le 12 mars Ont poussé lés Marat, les Robespierre à me déchirer par la calomnie, elle à envoyé pour m'arrêter ou plutôt pour se défaire de moi, quatrë commissaires, êt lé ministre de la guerre Beurnonvillej dont j'avais fait la fortune militaire* les a accompagnés. Depuis plusieurs jours l'armée frémissait d'indignation de tous les outragés qu'on fait à son général, et si je n'avais pas retënu son indignation, ils auraient été victimes de l'injustice de leurs commettants. Je lés ai fait arrêter et conduite en lieU sûr, pour me servir d'otages en attendant qu'on mé pousse à bout. Je ne tarderai plus à marcher SUr Paris pour y faire cesser la grande anarchie qui y règne. J'ai trop bien défendu la patrie, jusqu'à présent* pour qu'on puisse imaginer qUe je change d'opinions. Nous avons juré en 89, 90, 91, une Constitution qui noUâ assujettissait à des lois, et nous donnait un gouvernement stable. Ce n'est que depuis que iioUs l'aVOnS rejetée que nos crimes et nos malheurs dnt recommencé; ce n'est qu'en la reprenant que je suis sûr de les faire cesser et de rétablir l'ordre et la paix. On a tout renversé en prenant la licence et l'infraction de toUtès les lois poUr la liberté. Je reconnais la sagesse du département où je suis né : j'ai déjà été Une fois son libérateur et j'espère bientôt être celui de la France entière, et je vous jure, sur tout ce qu'il y a de plus sacré, que je suis bien loin d'aspirer à la dictature. Je m'engage à quitter toute fonction publique, aussitôt qUé j'aurai sauvé ma patrie.
( Signé : le général DuMotrËiÉi. >s
continue.: Dans la nuit du qui a précédé celle de notre départ* hOus avons été assurés, par un bon citoyéil, qui en a donné sa déposition par écrit, que, la veille de i'ëvaçuation dé Tournay, un général autrichien, Clairfaiti était Venu dîner avec Dumouriez. Nous avons acquis de plus la certitude que, pendant 1 évacuation de Bruxelles, Dumouriez avait passé toute la nuit dans une séance secrète, et soi-disant représentante du peuple belge.
Voici la lettre qui nous a donné le dénouement de la disette absolue où se trouvent toutes nos places-frontières, Lille, Valeiiciennes et autres. C'est à vous, citoyens, à vous occuper, sans relâche, des moyens que vous croirez convenables pour sauver la patrie. L'intention de Dumouriez était de s'einpareç. de ces plaéèi fortes ou de les livrer; et nous devons en avoir la certitude d'après sa négligence à s'emparer
des postes les plus importants lorsque l'ennemi n'était qu'à quatre lieues de la tille, et que nous avons été obligés d'y suppléer. Je crois qu'il n'y a pas Un seul moment à perdre.
Citoyens, nous avons été fort affectés des malheuys arrivés à nos Collègues et au tni-nistre de la guerre, mais nous avons encore été plusi affligés de voir, dans la lettre de Dumouriez, qu'il paraissait qu'il les avait fait conduire, soit à Tournay, soit à Bruxelles, soit ailleurs, car il dit aux administrateurs du département du Nord, qu'il les a fait mettre en lieu de sûreté jaour lui servir d'otages. Nous avons la certitude que, dans le département du Nord, aucune municipalité n'aurait souffert qu'on eût renfermé, dans une prison, quatre membres de la Convention nationale; et c'est d'après ces assurances que nous sommes très inquiets. D'ailleurs, on nous avait assuré que noùs .ne po'Urrions jamais forcer Dumouriez à plier sa, tête altière sous le joug de la loi. On nous avait assuré qu'il nous âvait menacé de nous faire arrêter, et particulièrement Danton et moi; ue vous regardez comme ses complices, afin e nous échanger cohtre la ci-devant reihe et son fils.
a la séance de la convention nationale dtj mercredi
Second rapport des citoyens Delacroix, Gossuin, DanTon, Merlin (de Douai), Treilhard, Robert, rtiembres de la Convention nationale, et nommés par elle commissaires prés l'armée et dans les pays dé la Belgiquej de Liège, etc... (2)
discours préliminaire.
Citoyens, les commissaires que vous avez envoyés près l'armée de la Belgique et chez le peuplo dont elle occupait le territoire, viennent d'achever le rapport qu'ils ont à vous faire de leurs opérations; il vous paraîtra peut-être trop volumineux/ ce que nous aurions pu sans doute éviter en ne vous présentant que des aperçus rapides; mais ce n'était point là ce que vous attendiez de nous, puisque, par votre décret du 3 avril; vous nous avez autorisés à faire imprimer, non un simple exposé, mais le journal de nos opérations. D'ailleurs, ces opérations ne peuvent vous être bien connus que par leurs détails. Il nous serait aisé de dire : Nous avons fait telles recherches; nous avons pourvu à tels besoins; nous avons remédié à tels abus; nous avons pris telles mesures de sûreté, ou de défense générale; mais quelle foi ajouteraient à de pareilles allégations ceux qui, armés de défiance, n'en auraient pas les preuves sous les yeux? Une mission aussi vaste que l'a été la nôi re, ouvre une large Carrière à toutes les
inculpations vagues qu'enfantent et que multiplient toujours les passions des individus dont On a blessé l'amour-propre ou contrarié les intérêts. Ce n'est qu'en mettant notre conduite au grand jour; ce n'est qu'en lui donnant tous les développements dont elle est susceptible, que nous pouvons vous mettre à portée d'en faire une juste appréciation. Honorés par vous d'une grande confiance, nous n'en avons pas moins droit à un examen sévère; nous l'avons demandé en rentrant au sein de la Convention; nous le demandons encore, et nous vous apportons tous les objets sur lesquels il doit se fixer.
Par la multitude de ces objets, voub jugerez de l'immensité des travaux que nous avions embrassés. Vous aviez confié à notre surveillance, l'armée, l'exécution du décret du 15 décembre, la conservation des propriétés de la République, la police et la sûreté générale : c'est our ce que nous avons fait relativement à chacune de ces parties, dans un pays ou le diamètre s'étend a plus de soixante lieues, que doit porter et que porte en effet le compte que nous avons à vous rendre.
Yous y verrez que nous h'âvonfe laissé échapper aucune occasion d'inspecter, de haranguer, d'éclairer, d'encourager les troupes; que nous avons constamment eu l'œil sur leurs subsistances, que nous avons pris, pour assurer leur solde et leur habillement, toutes les précautions que les circonstance^ ont reh-çtue& nécessaires, et que la loi nous rehdait possibles; que nous avons même trouvé le moyen de leur faire fournir des chevaux, des effets dé campement, des matelas, des étoffes qui n*Ont rien coûté à la République; que nous avons également priâ des mesures pour fâira garnir sans frais nos arsenaux de bois de charronnage, que les hôpitaux militaires ont particulièrement intéressé notre sollicitude; que la police et l'instruction des corps nous ont occupés d'une manière spéciale; que nous avons employé contre l'ihertie des tribunaux militaires tous les moyens qui ont été en notre pouvoir; que la loi, par notre organe, a sévi sans ménagement contre tous les officiers généraux et subordonnés, qui, dans l'exercice de leurs fonctions, ont trahi ou négligé les devoirs que la patrié leur avait imposés; que nous n'avons rien omis pour arrêter les désertions qui ont si considérablement affaibli l'armée; que le service des commissaires des guerres a excité notre censure; que les abus de l'Administration dès charrois militaires ont été l'objet de notre attention; que l'état des troupes belges et liégeoises a nécessité de notre part différentes mesures, et nous a forcés de vous engager à les dissoudre; qu'avant la défaite de notre avant-garde à Aix-la- " Chapelle, nous avions donné les renseignements pour la prévenir; que, depuis, il n'est pas de moyens qUe nous n'ayons employés pour en découvrir les causes et pour en réparer les effets; qu'à notre voix, des milliers de citoyens sont accourus des départements du Nord, du Pas-de-Calais et la Somme, afin de remplacer dans les garnisons de la Belgique les bataillons qui, par là, se sont trouvés à la disposition des généraux pour renforcer l'armée; que nous avons en même temps assuré les communications entre lés différents corps de troupes qui étaient aux prisés avec l'ennemi; que toutes lés mésures qu'il à été pos-
sible de prendre pout yaettre en sûreté et faire rétrograder en France les approvisionnements d'armes, de munitions et de vivres, nous les avons prisés; que nos soins et nos veilles pour la défense des frontières du Nord, et particulièrement de la place de Lille, ont été proportionnés à l'urgence des besoins et à l'importance de leur objet.
Vous y verrez que, dans nos premières relations avec Dumouriez, nous n'avons pu voir en lui que ce que toute la République y voyait; un homme qu'une vanité excessive rendait quelquefois inconséquent, mais qui paraissait voué franchement à la défense de la liberté et au salut de la République; que, lorsqu'à son retour de la Hollande, il eut donné dans quelques travers, et publié des proclamations qu'on ne croyait alors qu'irréfléchies, nous avons cru devoir nous borner à empêcher l'exécution de ses ordres arbitraires, et à les dénoncer à la Convention nationale; que cette réserve vous a été commandée par deux considérations puissantes : l'une, que la Convention nationale aurait dû naturellement trouver mauvais que nous nous fussions montrés plus sévères contre Dumouriez qu'elle ne l'avait été elle-même, lors des lettres insolentes qu'il lui avait adressées en novembre et janvier; l'autre, que destituer ou traduire à la barre, dans la position critique où se trouvait l'armée à cette époque, le chef qui avait seul sa confiance, et qu'elle ne pouvait pas en croire indigne, le voyant revenir de la Hollande couvert de nouveaux lauriers, c'eût été livrer cette armée à tous les maux que pouvaient lui faire, et l'ennemi qui la pressait de toutes parts, et le peuple Belge dont la très grande majorité portait une haine profonde aux Français, et la perfidie des généraux qui, dès lors, montraient pour Dumouriez un dévouement sans bornes, et ont depuis partagé hautement ses crimes; qu'ainsi, ne pas temporiser à son égard dans de pareilles circonstances, c'eût été véritablement trahir la patrie? mais que, du moment où ses projets liberticides ont commencé à se dévoiler, nous avons pris, pour les arrêter, des mesures dignes de notre caractère, et que si, plutôt connues de la Convention nationale, elles eussent pu être exécutées telles que nous les avions conçues, elles auraient coupé dans un instant la trame de ses perfides complots, et prévenu la crise violente à laquelle sa scélératesse a exposé la République.
Vous y verrez que nous ayons tout employé pour faire exécuter, et qu'en effet nous sommes parvenus à mettre à exécution votre décret du 15 décembre, ce décret si amèrement censuré par la nombreuse aristocratie belge; si astucieusement combattu par Dumouriez et ses partisans, si indiscrètement compromis (il faut le dire) dans le sein même de la Convention, par la facilité avec laquelle vous avez, pendant plus d'un mois, admis et ren- • voyé à vos comités les réclamations que l'intrigue vous présentait contre ses dispositions.
Vous y verrez avec quelle vigueur nous avons sévi contre les administrations provisoires qui s'étaient permis de protester ou d'agir contre ce décret, avec quelle rigidité nous avons empêché la perception des droits et des impôts qu'il avait établis; avec quel soin nous avons, non seulement fait séquestrer,
mais utiliser pour la République les biens meubles et immeubles que vous aviez, par l'article 4 de cette loi, ordonné simplement de mettre sous la sauvegarde de la nation française.
Vous y verrez les commissaires nationaux du conseil exécutif. constamment sous notre surveillance, toujours dirigés dans leurs opérations par nos arrêtés ou nos lettres, et recevant de nous, ou les témoignages de confiance, ou .les reproches qu'ils méritaient.
Vous y verrez le détail de tous les travaux de toutes les dispositions, de toutes les mesures qu'ont exigé de nous la convocation, la tenue et le résultat des assemblées primaires; les effets et les suites des vœux émis dans ces assemblées.
Vous y verrez que, sans en être chargés spécialement par aucune loi, mais guidés uniquement par notre zèle, et fondés sur des pouvoirs illimités donnés à tous vos commissaires par votre décret du 26 janvier, nous avons pris un soin particulier des biens appartenant à la République française dans la Belgique et dans le pays de Liège; que nous avons ordonné la recherche de tous ces biens, la vente des meubles; le recouvrement des fermages des immeubles, l'adjudication des coupes ordinaires des bois, le versement des fonds provenant de ces divers objets dans le trésor de l'armée; et qu'en cette partie comme en tout autre, nous avons pris toutes les mesures d'exécution qui ont été en notre pouvoir.
Vous y verrez que la police et la sûreté générale tiennent une grande place dans nos travaux et que vous n'en serez pas étonnés, lorsque vous rappelant que, par l'article 1er du décret du 15 décembre, la Convention nationale avait aboli toutes les autorités de la Belgique et du pays de Liège, vous en aurez conclu que c'était sur nous que devait peser éminemment le fardeau du gouvernement de ce pays. Aussi vous passera-t-il sous les yeux une foule de réquisitions et d'arrêtés tendant à réprimer des séditions, à faire arrêter des personnes suspectes, à faire informer sur des délits qui attaquaient la sûreté générale, ou violaient les propriétés publiques, à forcer les émigrés et prêtres déportés de France de sortir de tous les pays occupés par les armées françaises, à découvrir et poursuivre les distributeurs de faux assignats, etc.
Enfin nous appelons votre attention sur les choses graves et majeures qui, en évacuant la Belgique, nous ont déterminés à attendre vos ordres dans la ville de Lille, de préférence à tout autre lieu, sur les machinations qui se préparaient, lors de notre arrivée, pour faire de cette place importante la première proie des ennemis de la liberté; sur les mesures sévères à l'aide desquelles nous sommes parvenus à déjouer cet exécrable» complot et sur les précautions que nous avons prises pour empêcher qu'il ne s'en formât de nouveaux.
Voilà, citoyens, le sommaire du rapport de vos commissaires. Les détails en seront fort étendus; cependant ils ne le seront pas encore autant qu'ils pourraient et devraient l'être; car, d'un côté, il nous est arrivé très fréquemment, dans le cours de nos tournées, de rappeler a leur devoir des fonctionnaires qui s'en écartaient, de-pourvoir à des abus locaux, de faire droit à des plaintes verbales,
sans en tenir, sans même pouvoir en tenir ni registre ni note; et il est évident que ce genre de travail, quoique très considérable, ne peut entrer pour rien dans ce rapport; d'un autre côté, dans les déplacements continuels de nos papiers, surtout pendant le mois de mars, il s'est égaré plusieurs pièces dont il nous sera, par là-même, impossible de vous rendre compte.
Mais notre rapport, tel qu'il est, et celui qui vous a été adressé de Liège le 11 janvier, vous prouveront toujours que nos efforts ont .répondu à votre confiance, et que si la plus noire des trahisons n'avait pas fait tourner le sort des armes au désavantage des soldats de la liberté les résultats de notre mission auraient été aussi utiles à la République que nous avions droit de l'attendre de la pureté et de l'ardeur du zèle qui nous a constamment animés.
RAPPORT
Des citoyens Delacroix, Gossuin, Danton, Merlin (de Douai), Treilhard et Robert, membres de la Convention nationale, et nommés par elle commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc.
Par un décret du 30 novembre 1792, la Convention nationale a chargé quatre de ses membres, Camus, Delacroix, Gossuin et Danton de se rendre à l'armée de la Belgique, pour en vérifier l'état et constater les faits sur lesquels le ministre de la guerre, Pache, et Dumouriez étaient en opposition.
Ces quatre commissaires se sont acquittés de leur mission. Ils en ont rendu compte à la Convention nationale par le rapport très détaillé qu'ils lui ont adressé le 11 janvier dernier, et qui a été imprimé par son ordre.
Le 23 du même mois, sont arrivés à Bruxelles Merlin (de Douai) et Treilhard, qui leur avaient été adjoints par décret du 13 et dul6, tant pour continuer avec eux leur première mission, que pour les aider dans l'exécution du décret du 15 décembre 1792.
Ce n'est proprement qu'à cette époque que peut commencer le nouveau compte de la commission, car l'une des victimes de la scélératesse de Dumouriez, Camus, a en sa possession la presque totalité des pièces relatives à ce qui s'est fait dans l'intervalle du 11 au 23 janvier. Ce qui en est resté à la commission porte uniquement sur le décret du 15 décembre.
Il est d'ailleurs à remarquer qu'à l'arrivée de Merlin, Treilhard, Delacroix et Danton se trouvaient à Paris, où les avait appelés un décret de la Convention, et que Camus venait de partir pour s'y rendre également; en sorte qu'à cette époque, Gossuin restait seul dans la Belgique.
La commission remise en activité par l'arrivée de ses deux nouveaux membres, complétée bientôt par le retour des autres, et augmentée ensuite par la nomination de Robert, député du département de Paris (1), s'est livrée aux divers genres de travaux dont elle était chargée. Après avoir d'abord opéré en commun, elle
s'est répartie en trois divisions, et voici ce. qu'elle en a écrit à la Convention nationale, la 15 février :
( Citoyens nos collègues.
« Pour exécuter leur mission avec toute lar célérité qu'exige l'intérêt de la République, vos commissaires, en usant de la faculté que vous leur avez donnée par votre décret du. 31 janvier3 viennent de diviser en trois grands arrondissements le territoire dans lequel vous* les avez envoyés. Delacroix et Danton iront à Lièget Namur, Aix-la-Chapelle, et dans leurfc dépendances. La division de Camus et Treilhard comprend le Hainault et la Flandre^.. Le Brabant forme celle de Gossuin et Merlin^. (de Douai).
« Il est convenu, entre nous, que cette répartition sera changée, et quant aux personnes, et: quant au territoire, toutes les fois que les circonstances l'exigeront.
« Les six commissaires se réuniront d'ail--leurs à Bruxelles tous le3 quinze jours, et plus souvent s'il est nécessaire, pour concerter en commun les mesures générales qu'il y aurai, lieu de prendre.
« Si un zèle infatigable, pour répondre à- : vos vues, peut garantir le succès de nos opérations, ce succès n'est pas douteux.
« La manière la plus simple et la plus efficace de mettre la Convention nationale à portée de juger ces opérations, est de lui en présenter les résultats tels qu'ils sont. Ces résultats consistent en arrêtés, lettres et autres pièces. On les classera pour plus grande clarté,, en autant de parties qu'ils embrassent d'ob- •jets.
( La première partie comprendra tout ce/ qui est relatif à l'armée.
« La seconde, tout ce qui a été fait en exécution du décret du 15 décembre 1792.
« La troisième, l'exécution des lois relatives^ aux biens et effets dans la Belgique et le paya de Liège, appartenant à la République française.
( La quatrième partie, les diverses mesures de police et de sûreté que les circonstances; , ont forcé de prendre. »
première partie.
De l'armée.
Chargés d'opérations politiques qui les obligeaient à des déplacements continuels, forcés très fréquemment de se porter à vingt, trente et même quarante lieues des camps et des cantonnements , harcelés chaque jour par cent pétitionnaires qu'il leur était impossible de ne pas entendre, le3 commissaires de la Convention auraient pu, s'ils n'avaient calculé que leurs forces, ne pas inspecter, haranguer,. éclairer? encourager les troupes; mais ils n'ont , écouté que leur zèle, et cette partie importante de leur mission a été remplie aussi sou- ~ vent que les circonstances ont pu le permettre. .
Ils ont d'ailleurs fait sur l'armée des tra-"-vaux et des observations qui embrassent uni : grand nombre d'objets; voici les principaux rr
Subsistances.
Solde et habillement et troupes.
Hôpitaux.
Police et instruction.
Tribunaux militaires.
Mesures contre les officiers prévenus de délits ou de fautes.
Mesurés contre les soldats qui ont abandonné leurs drapeaux.
Service des commissaires des guerres.
Charrois de l'armée.
Troupes belges et liégeoises.
Défaite de l'avant-garde cantonnée sur la Roër. — Levée du siège de Maastricht. — Evacuation de Liège. — Suite de ces événements.
Réquisition des gardes nationales des départements du Nord, du Pas-de-Calais, de la Somme, de l'Aisne et des Ardennes.
Mesures pour assurer les communications entre les différentes parties de l'armée de la Belgique.
"Mesures pour procurer à la République des étoffes, des effets de campement, des chevaux, des bois de charronnage et de marine.
Mesures pour la conservation des armes, munitions et approvisionnements de l'armée, lors de l'évacuation de la Belgique.
Mesures pour la défense des côtes de la Flandre et des frontières du Nord.
Vues proposées au comité de la guerre.
Conduite de Dumouriez.
Art. 1er.
Subsistances.
D'après les mesures qui avaient été prises en décembre et janvier, pour pourvoir aux subsistances de l'armée, et dont le premier rapport de la commission renferme tous les développements, il ne restait plus qu'à continuer la visite des magasins, s'en faire délivrer les états, les vérifier autant que possible, et surveiller les agents des vivres ; c'est aussi • ce qu'ont fait constamment les commissaires de la Convention dans toutes les villes de la Belgique qu'ils ont parcourues.
Mais pour se mettre à portée de voir plus en grand tout ce qui avait rapport aux subsistances de l'armée, ils ont demandé au ministre de la guerre, par une lettre du 27 février, l'état général de la situation et de la composition des administrations des vivres. Rien ne paraissait plus simple ni plus facile à expédier : cependant il leur a été répondu, le 12 mars, qu'on ne pouvait pas leur fournir ■ cet état, et qu'il leur serait remis dans la Belgique par les administrateurs Lepayen et Boyer; ce qu'ils n'ont pas fait.
Du reste, indépendamment des dispositions faites pour sauver les magasins de l'armée, lors de l'évacuation de la Belgique, dispositions qui feront la matière de l'article 15 Gi-après, les commissaires de la Convention n'ont pris, relativement aux subsistances, que deux arrêtés.
Le premier est ainsi conçu :
Vu les réquisitions faites par le commissaire-ordonnateur Petit-Jean, au lieutenant général de division Duval, commandant en Brabant et Hainault, et par ledit lieutenant général Duval, aux termes du décret du 13 décembre dernier, portant qu'il est urgent de mettre à la disposition du commissaire-ordon-
nateur une somme de 3 millions pour les besoins indispensables de l'armée :
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans le pays de la Belgique, de Liège, etc., requièrent le payeur de la guerre de prendre tous les moyens que la loi autorf&e pour satisfaire aux réquisitions du commissaire-ordonnateur et du lieutenant général Duval, sous la condition néanmoins qu'il ne sera rien payé aux Belges, qu'en satisfaisant par eux aux dispositions du décret du 26 janvier dernier, et que les précautions nécessaires seront prises pour que les autres services de l'armée n'éprouvent point de retard.
« Fait à Bruxelles, le 15 mars, l'an II de la République française.
( Signé : Camus, Gossuin, Merlin {dt Douai), Treilhard. »
Il doit paraître étonnant, au premier coup d'œil, que les commissaires de la Convention aient interposé leur autorité pour faire exécuter une réquisition du commissaire-ordonnateur, fondée sur un procès-verbal d'urgence; car le décret du 13 décembre 1792 n'exige nullement, dans ces sortes de cas, l'intervention des représentants du peuple qui peuvent se trouver près les armées. Mais une circonstance particulière a déterminé l'arrêté qu'on vient de lire; c'est que le procès-verbal d'urgence n'était signé que d'un général de division. Tandis qu'aux termes du décret, il aurait du l'être du général en chef. C'était un défaut qu'il était aussi essentiel que pressant de couvrir, et les commissaires de la Convention en avaient seuls le pouvoir.
Aussi, dans une autre circonstance beaucoup plus critique (1),. mais où les formes prescrites par le décret étaient remplies exactement, se sont-ils bien gardés d'autoriser une réquisition semblable à la précédente. Cependant le payeur de l'armée ayant refusé d'y satisfaire, sous prétexte que la trésorerie nationale lui avait défendu d'acquitter aucun mandat d'urgence, qu'il ne fût visé des commissaires de la Convention, ils ont pris et fait notifier au payeur l'arrêté suivant :
( Nous membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée;
« Vu le procès-verbal d'urgence du 26 mars présent mois, signé Dumouriez et l'ordonnance du commissaire ordonnateur en chef Petit-Jean, portant que le payeur général de l'armée du Nord paiera au citoyen Le Payen, administrateur des subsistances militaires, la somme de 500,000 livres, en numéraire et 1,500,000 livres en assignats, pour être par lui employée,, sans aucun retard, aux achats urgents des approvisionnements des places frontières, et à la subsistance des armées du Nord et des Ardennes;
« Vu pareillement l'avertissement donné au commissaire-ordonnateur en chef Petit-Jean, par le contrôleur général des subsistances militaires, que le payeur général des dépenses de l'armée ne veut acquitter ladite ordonnance de deux millions, qu'après y avoir été autorisé par nous; « Considérant que notre autorisation pour
l'acquittement de pareilles ordonnances, n'est requise par aucune loi; qu'en l'exigeant comme une condition préalable et nécessaire, le payeur général de l'armée ajoute à la loi du 13 décembre dernier et conséquemment exerce un acte arbitraire et commet un véritable délit; que d'ailleurs notre mission pouvant nous appeler, d'un moment à l'autre, loin du lieu de sa résidence actuelle, un refus semblable à celui qu'il vient de faire, sous le prétexte de non-autorisation de notre part, pourrait réduire l'armée à une inanition abo-lue; que c'est pour prévenir de tels malheurs dans les cas d'urgence, qu'a été portée la loi du 13 décembre; et que le salut de la République peut dépendre de l'exécution de cette loi, dans les circonstances actuelles;
« Enjoignons au payeur général de l'armée d'acquitter, sans aucun délai, ladite ordonnance du commissaire-ordonnateur en chef Petit-Jean, et lui faisons défenses, sous peine de destitution et autres peines plus graves qu'il appartiendra, de se refuser à l'avenir au paiement des ordonnances conformes à la loi du 13 décembre dernier, sous le prétexte qu'il n'y serait pas autorisé par les commissaires de la Convention nationale.
« Fait à Lille, le 31 mars 1793, l'an II de la République.
( Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (dé Douai) et Robert. »
Art. 2.
Solde et habillement des troupes.
« Les commissaires de la Convention n'ont eu à prendre sur la solde des troupes françaises (1) que deux arrêtés, l'un du 12 février, l'autre du 21 mars.
On trouvera le second ciraprès, article 13, pièce quinzième. Yoici le premier :
« Du
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans le pays de la Belgique, de Liège, etc., délibérant sur les demandes réitérées qu'il leur sont présentées par les volontaires nationaux, à l'effet d'être payés de leurs décomptes en numéraire, ^t considérant que le décret du 18 et 20 avril •dernier porte expressément, article 4 que les volontaires nationaux ne seront payés qu'en assignats, des retenues ordonnées pour leur habillement, linge et chaussure; que cependant il peut être arrivé, dans le dénuement où l'armée s'est trouvée de la plus grande partie des objets qui appartiennent à la masse de linge et Chaussure, que plusieurs bataillons et les volontaires qui les composent aient été .obligés d'acheter en numéraire ce qu'on ne leur fournissait pas; et qu'alors il serait contre la justice de leur rembourser seulement en assignats ce qu'ils auraient déboursé en numéraire;
(c Considérant aussi les plaintes que les
Ïjayeurs de la guerre n'ont cessé de former sur e peu d'ordre qui avait régné dans le paie-
ment de la solde des bataillons, par le défaut d'état de leur effectif, d'où il résultait qu'il leur avait été fait de grandes avances, dont ils devaient compte;
« Arrête ce qui suit :
« Art. 1er. Les conseils d'administration
feront faire sans délai, aux termes du règlement du 1er. janvier 1792,
le compte des deniers qui leur ont été fournis, et prendront les moyens
convenables pour remplacer à la caisse de l'armée les fonds qui auront
été remis au quartier-maître, au delà de ce qui était dû au
bataillon.
« Art. 2. Les conseils d'administration constateront les achats faits à la masse de linge et chaussure, qui auraient été faits, soit par les bataillons, soit par les volontaires, à défaut de provisions existantes ou de fournitures de qualité suffisante dans les magasins de l'armée.
« Art. 3. Il sera sollicité de la Convention nationale un décret qui, en dérogeant à celui du 18 et 20 avril 1792, ordonne que, dans les bataillons ou il aura été constaté des achats d'objets appartenant à la masse de linge et chaussure, le décompte des volontaires desdits bataillons leur sera payé en numéraire.
« Art. 4. Le présent arrêté sera imprimé et envoyé aux généraux pour qu'ils le fassent connaître aux bataillons de volontaires, en le mettant à l'ordre de l'armée; il en sera envoyé une expédition à la Convention nationale, en lui proposant de rendre le décret mentionné en Tarticle précédent.
« Ainsi fait et arrêté à Bruxelles, mois et an que dessus.
-« Signé : Camus, Gossuin, Merlin, (de Douai), Treilhard. »
Indépendamment de ces arrêtés, il a été .écrit plusieurs lettres pour assurer le paiement de la solde des divers corps de troupes. En voici une qui montre à quel point était quelquefois portée, -sur cet effet, l'insouciance des agents du conseil exécutif.
« Qstende, le
Les commissaires de la Convention, etc., au
citoyen Lemonnier, contrôleur général des
dépenses de l'armée, à Bruxelles.
« Nous avons appris en passant à Bruges qu'il se trouvait dans l'arrondissement de Bruges, Ostende, Nieuport et Furnes, des volontaires que le général Dumouriez nous a dit être au nombre d'environ dix mille (1). Il n'existe pour eux ni commissaire des guerres, ni payeur, et nous avons vu avec peine que le prêt manquait absolument pour ces troupes.
« Nous avons cru, avant tout, qu'il convenait de pourvoir à ce dernier objet, le plue pressant de tous, par un emprunt sur les caisses impériales; mais on ne peut y pourvoir que pour 4 à 5 jours, vu le défaut de fonds,
dans toutes ces caisses. Il est donc absolument indispensable que vous fassiez passer des fonds sans retard, et que vous établissiez à cet effet un payeur dans l'arrondissement des quatre villes dont nous venons de vous parler. Yous voudrez bien nous assurer, d'ici à quatre jours, que vous avez pris les mesures que les circonstances rendent absolument nécessaires, ît que nous venons de vous indiquer.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard.»
Quant à l'habillement des troupes, les commissaires de la Convention ont transmis au ministre de la guerre presque toutes les plaintes qui leur ont été portées. Les mesures qu'ils ont prises par eux-mêmes à cet égard sont retracées dans les réquisitions suivantes : ( Les commissaires de la Convention nationale dans la Belgique, le Hainaut et le pays de Liège requièrent le commissaire des guerres Châlon de faire passer à Malines la quantité de 500 capotes, pour être distribuées aux vblontaires du 3e bataillon du Calvados et du 1er bataillon de Paris, actuellement en garnison en ladite ville.
« Fait à Anvers, le 19 janvier, l'an II de la République française.
« Signé : Camus, Gossuin. »
« Bruxelles le
Les commissaires de la Conventionu nationale, etc., au citoyen Lambert, commissaire ordonnateur à Liege.
« Les commissaires nationaux du conseil Sécutif pour l'arrondissement de Rure-monde, se plaignent, ainsi que le général La-marlière, commandant l'avant-garde, que les soldats qui la composent manquent de vêtements et de souliers. Nous vous recommandons, citoyen, de vous concerter, sur-le-champ, avec les commissaires de guerres employés dans cette partie, et de prendre tous les moyens convenables pour pourvoir à cet état de dénuement si contraire aux intentions de la Convention nationale de la République entière. Yous voudrez bien, en nous accusant réception de cette dépêche, nous rendre compte de vos opérations sur cet objet.
« Signé : Camus, Delacroix, Gossuin Danton, Merlin (de Douai), Treilhard. »
Art. 3. Hôpitaux.
On a vu dans le rapport de la commission du 11 janvier, les mesures qui avaient été prises jusqu'alors pour l'établissement et le service des hôpitaux de l'armée.
Depuis, de nouveaux établissements ont été formés à la réquisition des commissaires. Voici les pièces qui y sont relatives :
N° 1.
Liège, le
« Le général Miranda, commandant en chef l'armée de la Belgique, ayant convoqué
les généraux commandant en chef, les chefs de l'état-major, les commissaires-ordonnateurs, les officiers de santé de tous les corps d'armées pour aviser et décider sur les moyens sûrs et prompts à prendre pour l'établissement d'un hôpital auxiliaire, indépendamment de l'hôpital sédentaire de l'armée des Ardennes qui y est établi, qui servira à l'évacuation des malades des hôpitaux de Liège ;
« Il a été décidé et arrêté entre eux : « Que l'hôpital de Saint-Tron sera employé en totalité à un hôpital pour les malades des armées;
( Que ce local sera garni de toutes les fournitures nécessaires pour pouvoir y faire des évacuations;
« Que les malades venant de l'armée belge ne pourront être placés dans les lits disposés pour ceux de l'armée des Ardennes, mais seulement dans les lits que le régisseur va faire placer sans retard dans ledit local, de manière que les malades de l'une et de l'autre armée n'aient aucun rapport ensemble. Néanmoins, si dans le nombre des malades il s'en trouvait qui, d'après le jugement des officiers de santé, ne seraient pas dans le cas d'être évacués dans d'autres hôpitaux, ils seront reçus dans l'hôpital sédentaire même.
« Convenu que le service des deux armées se fera par les officiers de santé de l'armée des Ardennes, et par ceux de la Belgique, s'il y avait lieu à y en avoir, de manière qu'il n'y ait aucune différence dans le service, et que les ordres seront donnés sans retard à ce sujet aux officiers de santé.
« Les médecins et chirurgiens de l'armée nous assurent, qu'au moyen de l'évacuation déterminée, et des autres mesures qu'ils ont prises, nous devons être tranquilles sur la maladie épidémique qui a lieu dans l'hôpital Saint-Laurent.
« D'après ce que le général en chef peut présumer des opérations militaires de la campagne prochaine, il estime que les points centraux des principaux établissements d'hôpitaux doivent être fixés à Louvain, Bruxelles Malines, et Gand, villes qui présentent de grandes ressources. Il invite les officiers de santé et commissaires- des guerres de l'armée à lui faire connaître leur opinion sur sa proposition.
« Les commissaires et officiers de santé pensent que les villes proposées par le général en chef, sont celles qui sont le plus propres à l'établissement proposé.
« Signé : Lanoue, lieutenant général ; Leve-neur, lieutenant général, commandant l'armée des Ardennes en l'absence du général Yalence ; Thowenot, maréchal de camp, chef de Vétat major de ïarmée de la Belgique ; Soliva , commissaire-ordonnateur en chef de Varmée des Ardennes; Petit-Jean, commissaire ordonnateur en chef des armées de la Belgique, Lambert, commissaire-ordonnateur', Menuret, premier médecin de Varmée de Belgique', Lagrésile; chirurgien consultant de Varmée de la Belgique; Miranda, commandant en chef les armées de la Belgique ; »
N° 2.
« Ostende, le
« Les commissaires de la Convention nationale, etc, aux citoyens Menuret, médecin en chef, et Lagrésili, chirurgien major consultant de Varmée de la Belgique, au quartier général à Liège.
« Nous voyons avec beaucoup de peine, citoyens, qu'il manque d'établissements d'hôpitaux militaires ambulants dans les villes de Bruges, Ostende, Nieuport et Furnes, malgré que ces places soient occupées dans ce moment par 10,000 volontaires; nous vous invitons à donner tous vos soins pour y pourvoir sans le moindre délai. Comme nous ignorons l'endroit où sont les inspecteurs chargés de cette partie du service, ne différez pas à vous en informer, et concertez avec eux, s'il est possible, tous les moyens d'établir promptement et en suffisance, les hôpitaux, dans cette partie intéressante de la Flandre.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
Réponse du citoyen Menuret, datée de le 19 février.
« Citoyens commissaires de la Convention,
« Aussitôt après la réception des mémoires que vous m'avez renvoyés, j'ai conféré avec le cnirurgien consultant de l'armée pour en remplir l'objet.
« J'avais compté, d'après votre lettre du 2 du présent mois, relative à l'état de dénuement des hôpitaux de Bruges, Ostende, etc., et les renseignements que j'avais reçus d'ailleurs , faire une tournée dans ces cantons pour y pourvoir à tous les besoins; j'en ai été jusqu'à présent empêché par la multitude des malades qui sont dans les hôpitaux de cette ville, et la pénurie de médecins; je suis, depuis plus de 15 jours, obligé de joindre à mes fonctions en chef le service journalier de médecin ordinaire, ayant sept de nos confrères malades, dont trois étaient employés ici. J'ai trouvé quelques coopérateurs à portée que j'ai occupés; j'ai demandé du renfort au ministre, qui sera lent à arriver, en attendant, je suis enchaîné parles besoins de nos frères d'armes : d'un autre côté, les généraux, qui ont déjà mis les troupes en mouvement vers Bréda et vers Maëstricht, désirent que nous ne nous éloignions pas, et que nous soyons prêts à marcher pour former des établissements que la marche des armées et les hasards de la guerre peuvent rendre très prochainement nécessaires.
« J'avais depuis longtemps prié le citoyen Thibault, médecin de l'hôpital militaire de Dunkerque, de donner quelques coups d'œil aux hôpitaux qui seraient établis à Ostende, à Furnes et au voisinage, et d'aider de ses conseils les officiers de santé qui y seraient employés, Nous avons, Lagrésile et moi, pris de nouvelles dispositions pour y faire arriver quelques secours dans tous les genres, juqu'à ce que les circonstances nous permettent de nous en occuper d'une manière plus active et plus immédiate.
« Recevez l'assurance d'un zèle constant et inépuisable pour le service de la patrie, dans les fonctions importantes qui me sont confiées, et de mes sentiments personnels.
( Signé : Le premier médecin de l'armée de la Belgique, Menuret. »
Indépendamment de ces dispositions, les commissaires de la Convention nationale ont eu soin, dans toutes les villes où ils ont séjourné ou passé, de visiter les malades, de faire droit à leurs plaintes, quand ils leur en portaient, ce qui était assez rare? d'inspecter les employés, de vérifier la qualité du pain, de la viande, du riz, des boissons, etc.
Art. 4. Police et instruction.
Parmi les mesures prises par les commissaires de la Convention pour arrêter les désordres, maintenir la police, et établir l'instruction dans l'armée, il en est un grand nombre qui ont été concertées de vive voix avec les chefs, et dont, par cette raison, il n'est pas possible de rendre compte. Les pièces suivantes indiqueront une partie des autres.
N° 1.
Bruxelles, le
« Les commissaires de la Convention nationale dans la Belgique au général Moreton, commandant en chef dans le Bràbant\ et le Hainaut.
« Le colonel commandant la légion du Nord nous a fait passer copie d'un article du Moniteur du 18 janvier, par lequel des chasseurs de cette légion se trouvent gravement inculpés; comme il importe également de les laver de tout soupçon, s'ils ne sont pas coupables ou de les faire punir dans le cas contraire, nous vous invitons à nous faire passer les connaissances que vous avez acquises ou que vous pourrez acquérir sur le fait qui est imputé à ces chasseurs; nous vous envoyons en conséquence la copie de l'article du Moniteur.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard.
Bruxelles, le
« Les commissaires de la Convention nationale au colonel commandant la légion du Nord.
« Nous avons pris, citoyen, en conséquence de votre lettre du 24 janvier, tous les renseignements possibles sur les inculpations que contient, à la charge de la légion du Nord, le ;n° 18 du Moniteur universel; et c'est avec une véritable satisfaction que nous en avons constaté l'insigne fausseté.
« Des deux faits imputés à des soldats de votre légion, le premier est absolument con-trouvé, le second est vrai, mais le coupable n'était point de votre corps; c'était un Belge dont le supplice a suivi de près le crime.
« Le général Moreton, qui nous a fourni ces renseignements, nous assure d'ailleurs que la discipline s'établit chaque jour de mieux en mieux dans la légion du Nord. Nous vous exhortons à la maintenir, et nous comptons à cet égard sur toute votre sollicitude. Tous pouvez rendre notre lettre publique.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard.
N° 2.
« Ypres, le
« Les commissaires de la Gonvention nationale au général Dumouriez, commandant en chef l'armée de l'expédition Belgique.
« Nous avons trouvé en passant à Nieuport, un détachement de 50 hommes du 14e bataillon de volontaires nationaux, en garnison à D unkerque. C'est vraisemblablement par oubli qu'on laisse ainsi ce détachement éloigné de son corps : ce qu'il y a de certain, c'est que la discipline et l'instruction ne peuvent qu'en souffrir beaucoup. Nous laissons à votre prudence les mesures à prendre, d'après notre observation.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard ,
N° 3.
( Anvers, le
« Les commissaires de la Convention nationale au ministre de la guerre.
« Depuis notre séjour dans la Belgique', citoyen ministre, les troupes de la République nous ont constamment porté des plaintes sur la coupable insouciance que l'on montre à leur faire l'envoi et à leur donner connaissance des lois. Les commissaires des guerres eux-mêmes,, auxquels nous en avions fait des reproches, nous assurent que la plus grande
Sartie de ces lois ne leur parvient pas. ous en avons écrit à Pache votre prédécesseur, qui a gardé le silence : il faut enfin espérer qu'un pareil abus n'existera plus, et c'est pour y faire remédier le plus promptement possible que nous vous écrivons : Veuillez donner vos soins à cet objet particulièrement confié à votre administration. Il convient d'envoyer à chaque commissaire des guerres-, à chaque bataillon et régiment, un exemplaire du recueil complet des lois relatives à l'armée; il est juste que le soldat français ait une parfaite connaissance du louable motif pour lequel il porte les armes, et nous ne voyons pas sans peine que les travaux de la Convention nationale lui sont presque inconnus, à défaut d'envoi ou de distribution à chaque bataillon, des lois, des Bulletins et des adresses dont l'impression, aux frais de la République, est décrétée. Nous vous prions de nous accuser réception de cette lettre.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard.
Paris, le
« Le ministre de la guerre aux citoyens commissaires de la Convention nationale, députés dans la Belgique.
« L'envoi des lois se fait aux armées avec la plus grande exactitude, à fur et à mesure qu'elle sont rendues, il en est ainsi du Bulletin de la Convention qui est adressé chaque jour, au nombre de 6,000 exemplaires, aux différentes armées. Je ne sais à quoi attribuer l'abus dont vous vous plaignez, par votre lettre du 9 de ce mois, puisque les reçus que me fournit l'administration des postes* pour chaque paquet de lois qui lui est confié, me sont des preuves certaines qu'il n'y a aucune négligence dans ces envois de la part de mes bureaux.
« J'ai donné les ordres pour que les collections de lois que vous demandez, se fassent avec la plus grande célérité; je vous observerai qu'il est nécessaire de réimprimer la plus grande partie des lois militaires dont les exemplaires sont épuisés, ce qui nécessitera un retard de quelques semaines dans l'envoi (1).
« Signé : Beurnonville. » N° 4,
Bruxelles, le 13 février 1793, l'an II de la République.
« Lettre circulaire des commissaires de la Convention nationale, aux généraux d'armée et commandants de place dans la Belgique.
« Un cri universel, citoyen commandant, s'élève contre la négligence des volontaires nationaux à entretenir leurs armes; et nous n'avons que( trop acquis, par nos propres yeux, la certitude que cette plainte est très fondée. Cependant l'ouverture de la campagne approche, le salut de la patrie exige de nos braves frères d'armes de nouveaux actes de valeur, et nous sommes persuadés qu'ils brûlent tous du désir de chasser au delà du Rhin les vils esclaves qui voudraient nous faire partager leurs fers. Mais, pour remplir ce grand obj et, pour attendre ce glorieux but, il ne faut pas seulement du courage, il faut aussi des, armes-et des armes bien entretenues ;. car une arme rouillée et malpropre n'est pas seulement inutile à la défense de la patrie, elle est encore dangereuse pour celui qui la porte. Il est donc de la plus haute importance, citoyen commandant, que vous rappeliez à leur devoir sur ce point capital, tous les volontaires nationaux qui sont sous vos ordres. Nous exigeons de vous, au nom de la
Convention nationale, et sous votre responsabilité personnelle, que vous fassiez punir ceux qui, à l'avenir, ne seraient pas À cet égard de la plus grande exactitude ainsi que les officiers qui n'y tiendraient pas la main avec la fermeté que la loi exige d'eux.
« Vous voudrez bien faire mettre cette lettre à l'ordre, et la faire lire à toutes les compagnies
« Signé : Camus, Delacroix, Gossuin, Danton, Merlin ( de Douai), Treilhard. »
N° 5.
Bruxelles, le 24 février 1793, l'an II de la République.
« Les commissaires de la Convention nationale, au général Moreton, commandant dans le Brabant et le Hainaut.
« Il paraît, citoyen général, par la. note ci-jointe qui nous été remise par les représentants provisoires de Bruxelles, qu'il se commet de grands désordres dans les casernes de cette ville. Nous vous requérons d'y pourvoir de suite, par les moyens que la loi a mis à votre disposition.
Nd 6.
Bruxelles, le 28 février, l'an II de la République.
« Les commissaires de la Convention, au général Valence, commandant l'armée des Ardennes à Liège.
« Nous vous renvoyons, citoyen général, les pièces que nous a transmis en votre absence le citoyen général Laveneur, au sujet d'une dénonciation qui nous avait été adressée contre ,ie lieutenant-colonel Dargoubet. Comme il est important d'arrêter les dénonciations indiscrètes par des. peines légales, vous voudrez bien déférer cette affaire au conseil de discipline du 58e régiment, afin que si le citoyen Morel est trouvé coupable de calomnie, il subisse au moins la peine de discipline infligée aux mauvais propos par l'article 5 de la loi du 29 octobre 1790.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai), N° 1.
Le 22 mars, l'an II de la République.
« Les commissaires de la Convention nationale, au général de brigade Canolle, commandant à Tournay, Y près, etc.
« Nous vous adressons, citoyen général, copie d'un rapport qui vient de nous être fait pa,r un commissaire du conseil exécutif provisoire. Vous .voudrez bien nous rendre le compte le plus prompt à' Tournay (ou deux de nous se rendront au premier jour) des mesures que vous aurez prises pour faire exécuter la loi contre les officiers prévenus des délits mentionnés dans ce rapport.
N° 8.
Lille le 26 mars 1793, l'an H de la République.
« Les commissaires de la Convention nationale au citoyen Bécourt, général de bri gade, commandant à Lille.
« Nous sommes informés, général, que le citoyen Robert, lieutenant-colonel en second du 3e bataillon du district de Cambrai, et le citoyen Deguillot, lieutenant au même bataillon, ont reçu du général Omoran l'ordre de se rendre en prison à Lille. Nous savons aussi qu'ils étaient ce matin en cette ville.
( Vous voudrez bien vous informer sur-le-champ s'ils sont actuellement en prison, et en cas que non, prendre à l'instant les mesures nécessaires pour les faire arrêter et constituer prisonniers. »
Art. 5.
Tribunaux militaires.
Le but de l'établissement des cours martiales à la suite des armées, est d'accélérer la punition des délits que peuvent commettre les militaires de tout grade. La nécessité impérieuse du maintien de la discipline exige cette célérité, et l'humanité la commande pour les innocents qui ont le malheur d'être accusés.
Mais ce but est manqué, si les cours mar=-tiales ne jugent pas^ ou ne jugent que très lentement les prévenus de crimes qui leur sont déférés, et c'est ce dont les commissaires de la Convention n'ont cessé de se plaindre dans la Belgique. Partout ils ont vu les prisons militaires regorger de prévenus, et nulle part, ou presque nulle part, ils n'ont vu les cours martiales en activité.
Dès le 28 janvier ils ont. par une lettre circulaire, requis tous les généraux, de tirer la justice militaire de cette funeste léthargie, et de donner les ordres les plus prompts et les.plus positifs.
Les réponses et les observations qui leur ont été adressées en conséquence, les ont convaincus queA si les vices de l'organisation de la justice militaire contribuaient pour beaucoup à la malheureuse lenteur dont ils se plaignaientr elle avait aussi pour causes, et la négligence du pouvoir exécutif, et l'impéritie ou l'insouciance de plusieurs de ses agents. On en jugera par les pièces suivantes :
N° 1.
Au Quartier général de Liège le 5 février 1792, l'an II de la République française.
« Le lieutenant général commandant l'armée des Ardennes en F absence du général Valence, aux commissaires de la Convention-nationale, députés dans la Belgique. »
u Votre lettre au général Valence, en date du 28 janvier dernier, par laquelle vous vous plaignez, citoyens commissaires, de ce que la cour martiale de l'armée (apparemment des Ardennes) n'est point en activité, m'a été re—
nise par 1© général Miranda; surpris de voir que vous eussiez cette opinion, je me suis empressé d'écrire au commissaire Emery, qui, «comme le plus ancien des commissaires, tient à Saint-Tron, la cour martiale de l'armée des -Ardonnes, aux termes de la loi^ pour lui demander ce qui pouvait manquer à l'activité de cette cour, que je croyais parfaitement organisée, puisque je n'avais reçu ni plaintes ni ^demandes à cet égard. Ce commissaire m'a répondu, et je vous fais passer copie de ses réponses. Vous verrez ce qui manque à l'organisation de la cour martiale, et ce qu'il est hors de mon pouvoir de lui procurer.
te Son exposé me semble très vrai; il n'y a réellement que trois commissaires ordinaires k l'armée des Ardennes; le ministre m'en avait annoncé un quatrième, mais il n'arrive point; .mais quand bien même il y serait, la distance -extrême où sont les différentes divisions de l'armée des Ardennes les unes des autres, rendrait toujours ce service presque impossible, >u au moins Très difficile.
( Il me paraît également Juste! comme l'observe le citoyen Emery, que celui qui fait les Jonctions d'auditeur ne soit chargé d'aucune autre fonction ; et si cela est, le nombre des -commissaires des armées des Ardennes se trouvera encore plus insuffisant, puisque dans le fait il n'y en aura que deux qui puissent s'occuper du bétail des troupes, ce qui est, je crois, ^absolument impossible.
« J'ai donné au citoyen Dagnier, sur la réquisition du commissaire Emery, une commission pour exercer les fonctions de greffier près la cour martiale de l'armée des Ardennes, jusqu'à ce qu'il y ait été pourvu par le pouvoir exécutif. Je pense que c'est à vous, citoyen, à le stimuler à cet égard, ainsi que sur Tenvoi du nombre des commissaires suffisants. »
« Le lieutenant général, Leveneur. »
-su "Extrait de là lettre du commissaire Emery,
au lieutenant général Leveneur, en date du
« Je voùs observerai, mon général, qu'étant Chargé des fonctions de commissaire-auditeur, •qui me donnent jet me donneront malheureusement trop d'occupations encore, je dois être -affranchi de tous les détails d'administration -que le commissaire-ordonnateur semble vouloir toujours cumuler ; s'il en était autrement, il faudrait que tous les commissaires des guerres remplissent alternativement les fonctions de commissaire-auditeur, parce qu'il ne serait pas juste, et ce ne serait pas l'esprit de la loi, que son ancienneté fût un titre contre moi pour me surcharger exclusivement d'un travail qui est plus que suffisant pour être la seule tâche d'un commissaire. Je vous prie, mon général, de prendre en considération ces observations, et de les présenter aux députés '•de la Convention.
« Une1 autre observation, c'est que, pour mettre en activité la cour martiale, il faudrait pouvoir réunir trois commissaires des guerres pour tenir cette même cour martiale^ et faire l'application de la loi, d'après le jugement ■du juré,. et cela n'est pas possible dans cette division, ou le nombre des commissaires ne m'offre pas celui déterminé par la loi pour la tenue do la cour martiale.
« L'armée des Ardennes n'a que quatre commissaires des guerres y compris celui qui y remplit les fonctions de commissaire-ordonnateur. Celui-là ne peut s'arracher un instant à ses grandes occupations; le commissaire employé à l'avant-garde est toujours trop éloigné du corps d'armée, pour pouvoir assister à la tenue de la cour martiale. Il n'en reste donc plus que deux, qui est un nombre insuffisant. D'un autre côté, le petit nombre des commissaires est tellement surchargé, qu'il n'est pas possible de les appeler à là cour martiale, sans que le service en souffre.
( Je n'ai point eu de greffier en titre, dans les commencements où j'ai été chargé par le général Valence de la police correctionnelle de l'armée. Je me suis servi d'un jeune homme qui travaille à l'état-majort ©t qui se nomme Dagnier.
« Je tiens ici en prison plusieurs soldats dont les délits graves pourront' bien provoquer la peine de mort. Je ne puis les juger. L'ordonnance veut que le jugement portant peine de mort soit mis à exécution dans les 24 heures; et nous n'avons ici, ni guillotine ni guilloti-neur. Que faire ? Je vous prie de solliciter une décision sur cet objet.
2.
Anvers, le
« Les commissaires de la Convention, au général H ar ville, commandant à JSamur.
« Vous retrouverez, ci-jointe, citoyen général la lettre du commissaire des guerres, Bar-neville, que vous nous avez adressée avec votre réponse à notre dépêche du 28 janvier; nous vous invitons à communiquer au général en chef de l'armée dont votre division fait partie, les vues que renferme cette lettre, sur la poursuite des délits militaires.
( Vous pouvez, au surplus, assurer le commissaire des guerres, Barneville, que d'après la disposition expresse de la loi du 13 décembre 1792, c'est au plus ancien commissaire des guerres de chaque division que sont dévolues les fonctions de commissaire-auditeur; qu'ainsi rien ne peut le dispenser d'aller en avant pour la tenue dés jurés d'accusation (1).
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
N° 3.
« Bruxelles, le
( Les commissaires de la Convention nationale, au lieutenant-général Miranda, commandant en chef par intérim l'armée de la Belgique. »
« Citoyen général, nous avons reçu les tableaux de l'état-major de l'armée de la Belgique que vous nous avez envoyés et de celui
des Ardennes que vous nous annonciez et que le général Ruault nous a adressé.
« Relativement à l'activité de la cour martiale de votre armée, nous voyons avec peine qu'elle est encore suspenduç par le défaut de greffier. Nous vous invitons à ne pas perdre cet objet de vue, et à prendre tous les moyens qui sont en votre pouvoir, pour qu'un greffier soit établi sans délai, ou provisoirement ou définitivement, et que la cour martiale puisse enfin reprendre ses opérations. »
« Signé : Camus, Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
N° 4.
( Bruxelles, le
Les commissaires de la Convention au lieutenant général Lanoue, à Liège.
« Nous avons reçu vos explications sur rétablissement des cours martiales; nous apprenons avec plaisir les tenues successives du juré d'accusation pendant le mois de janvier, et la nouvelle que les séances de la cour martiale ont dû s'ouvrir au commencement de ce mois; mais nous voyons avec peine que vous manquez encore des machines nécessaires pour 1 exécution des jugements à mort : c'est au commissaire des guerres à pourvoir à cet objet, et vous devez lui enjoindre de ne rien négliger de tout ce qui peut contribuer à mettre la cour martiale dans la plus grande activité.
« Nous vous invitons à nous instruire promp-tement de ce qui aura été fait à cet égard, et surtout à nous marquer s'il a été statué sur le sort dies émigrés détenus dans 'les prisons; vous n'ignorez certainement pas les dispositions de la loi, qui exige dans ce cas un jugement très prompt.
« Signé : Camus, Delacroix, Gossuin, Danton, Merlin (de Douai), Treilhard. »
N° 5.
Bruxelles, le
« Les commissaires de la Convention nationale, au général - Moreton, commandant dans le Brabant et le Hainaut.
« Nous venons d'apprendre, citoyen général, que le citoyen Pierre Garau, lieutenant de grenadier de la réserve de Dumouriez, est en prison à Bruxelles depuis près de trois mois : une aussi longue détention sans jugement d'une cour martiale, nous paraît tenir beaucoup de l'arbitraire. Vous voudrez donc bien vous procurer des renseignements positifs sur les causes et la longue durée de l'emprisonnement de ce citoyen, et nous en rendre compte dans le jour.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
N° 6.
« Bruxelles,
« Les commissaires de la Convention nationale, au citoyen Lambert, commissaire ordonnateur des guerres, à Liège. .
(« Nous avons reçu votre dépêche du 10 de ce mois, contenant une dénonciation grave contre Sevestre, lieutenant au bataillon de Mayenne-et-Loire. Il ne suffit pas que vous en ayez instruit le ministre de la guerre; il entre dans vos fonctions de poursuivre sans délai, auprès de la cour martiale ou du tribunal de police correctionnelle, les militaires prévaricateurs ; nous vous recommandons de ne pas perdre un instant pour vous mettre en règle à cet égard.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai). » N° 7.
Bruxelles, le
« Les commissaires de la Convention nationale, au ministre de la guerre.
« Depuis notre séjour dans la Belgique, citoyen ministre, nous avons cherché à connaître les motifs pour lesquels des militaires prévenus de crimes et de délits, demeurent dans les prisons sans qu'on s'occupe d'eux: nous y avons remarqué aussi que l'impunité règne, et que la détention de ces militaires, trop longtemps prolongée, devient pour eux une punition terrible que la loi n'a pas prononcée. Nous avons entendu à cet égard les généraux et les commissaires ordonnateurs des guerres; nous leur avons demandé pourquoi les cours martiales n'étaient pas en activité; tous se sont accordés à dire qu'ils manquaient de moyens pour les établir, et qu'ils en attribuaient principalement la cause à l'insuffisance des commissaires, au défaut d'argent pour les frais de bureau et paiement des greffiers, à ce qu'il n'existe pas à la suite de l'armée un exécuteur des jugements criminel, enfin, à ce que. quoique les jugements à mort doivent être exécutés dans les 24 heures, on manque des instruments nécessaires à cet effet.
« Lorsqu'il n'y avait pas de commissaires auditeurs auprès des armées, l'inexécution de la loi trouvait un prétexte; à présent qu'il y a été pourvu, et que le plus ancien commissaire des guerres en fait les fonctions, les choses ne vont pas mieux. Il est temps, citoyen ministre," que vous fixiez vos regards sur cette partie importante de l'administration dont la surveillance vous est particulièrement confiée; une bonne discipline assurera le salut de la République. L'armée ne verrait pas sans peine qu'on laissât dans son sein des prévaricateurs dangereux, dont l'unique occupation est de chercher à entraîner le soldat à des désordres les plus répréhensibles, et à ternir par ce moyen les armes françaises. Nous aurions à vous citer, s'il était nécessaire, plusieurs exemples qui ont excité l'indignation de nos braves défenseurs de la patrie. Nous vous demandons donc, citoyen ministre, de pourvoir par tous les moyens possibles, et
sans différer, à ce que. les cours martiales soient pleinement établies au désir de la loi, et de nous accuser réception de cette dépêche.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai). » N° 8.
Bruxelles, le
« Les commissaires de la Convention, au commissaire-ordonnateur des guerres, Lambert.
« Nous venons, citoyen, d'envoyer au ministre de la guerre la dépêche que vous nous avez fait parvenir le 13 de ce mois, par laquelle vous nous expliquez la nécessité d'atta-cner particulièrement un commissaire des guerres aux fonctions de grand juge militaire près l'armée de la Belgique. Nous lui avions écrit précédemment, pour l'engager à s'occuper, sans aucun délai, de l'entière organisation des cours martiales; nous espérons qu'il ne différera pas à prendre cette utile et importante mesure.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai). »
N° 9*
Paris, le
« Le ministre de la guerre, aux commissaires de l'a Convention nationale de Varmée delà Belgique.
« J'ai reçu, citoyens, la lettre que vous m'avez écrite au sujet de l'inactivité des cours martiales dans l'armée de la Belgique. Je me suis empressé de faire part des plaintes qu'elle renferme au général Dumouriez et au commissaire-ordonnateur employé auprès de lui. Ee nombre des commissaires des guerres qu'il a- sous ses ordres est de 29 : il est par conséquent assez considérable pour suffire à tous les objets du service. Mais il est possible qu'il s'en trouve qui n'aient pas toutes les connaissances nécessaires pour remplir avec célérité les fonctions qui leur sont confiées. Jaloux de rétablir la discipline dans les corps militaires, je vais me faire rendre compte de tout ce qui a rapport à ces agents de l'administration de la guerre. J'espère que, lorsque j'aurai fait passer dans les armées des commissaires de mon choix, le service n'éprouvera plus d'entraves.
« Signé : Beurnonville. »
« On va nous demander sans doute quel a été l'effet des promesses du ministre? Nous répondrons que les choses ont continué sur le même pied, jusqu'à l'évacuation de la Belgique; nous nous en sommes convaincus par les conférences que nous avons eues à ce sujet avec les commissaires-auditeurs, qui manquant toujours, tantôt d'une chose, tantôt d'une autre, ne pouvaient jamais aller en avant. — Il est temps, plus que temps que la Convention nationale s'occupe de ces abus désorganisateurs, et que par une judicieuse réforme, elle imprime aux tribunaux militaires le mouvement qui leur est si essentiel pour le salut de la République.
Art. 6.
( Mesures contre les officiers prévenus de délits ou de fautes.
(( Les commissaires de la Convention se sont particulièrement attachés à connaître les prévarications, les négligenoes, les fautes qui pouvaient se commettre dans l'armée de la Belgique, par les officiers. S'ils n'ont pas pu les découvrir toutes du moins ils ont sévi contre toutes celles qui sont venues à leur connaissance. On s'en convaincra par les pièces suivantes f
N° 1.
Au nom de la République française.
« Vu par nous, membres de la Convention nationale de France, commissaires députés par elle dans la Belgique, le pays de Liège, etc., le procès-verbal dressé le 21 de ce mois par le commissaire des guerres Doizon, duquel il résulte que le citoyen Portrait, adjoint à l'état-major de l'armée de la Belgique, a tenu, dans le bureau du commissaire-ordonnateur, des propos très inciviques sur le jugement de Louis Capet.
« Nous commissaires susdit de la Convention nationale de France, en vertu des pouvoirs à nous attribués par le décret du 29 décembre 1792, déclarons, après en avoir délibéré en commun, que le citoyen Portrait, adjoint à l'état-major de l'armée de la Belgique, est et demeurera^ jusqu'à ce qu'il en ait été autrement ordonné par la Convention nationale, suspendu de ses fonctions, sans préjudice aux poursuites dirigées contre lui par le commissaire-auditeur.
« Et sera le présent arrêté notifié audit Portrait, à la diligence du commissaire-ordonnateur Rousin, qui tiendra la main à sa pleine et entière exécution.
(( Ainsi fait et arrêté à Bruxelles, le 26 janvier 1793, l'an II de la République.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
N° 2.
Bruxelles, le
« Les commissaires de la Convention nationale, au citoyen Towenot, maréchal des camps, chef de l'état-major de l'armée de la Belgique.
« Nous venons de prendre un arrêté qui suspend de ses fonctions le citoyen Portrait, adjoint à l'état-major dont vous êtes chef. Le commissaire-ordonnateur Ronsin est chargé de le lui notifier. Nous vous en informons directement, parce que nous croyons nécessaire de vous rappeler qu'il importe au salut de la République, ainsi qu'à la gloire qui est promise à vos talents militaires, de vous tenir plus que jamais en garde contre l'incivisme de plusieurs fonctionnaires qui nous entourent et partagent vos travaux.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
N° 3.
Bruxelles, le
« Lettre-circulaire des commissaires de la Convention nationale, aux généraux Dumouriez, Miranda, Valence et HarviUe.
« Nous vous prions, citoyen général, de nous faire parvenir à Bruxelles, le plus tôt possible, un état exact de tous les officiers adjoints qui composent l'état-major de l'armée, dont le commandement vous est confié, et de désigner les grades de chacun d'eux; nous nous assurons que vous satisferez à notre demande avec tout le zèle et la célérité convenables.
( Signé : Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
N° 4.
Bruxelles, le
Les commissaires de la Convention nationale dans la Belgique, au général Miranda, commandant en chef à Liège.
« Les volontaires du 1er bataillon du département de la Moselle, auxiliaires à l'artillerie, nous ont adressé un mémoire, par lequel ils dénonçaient le citoyen Gauclos, leur capitaine, comme ayant abandonné son poste; le conseil d'administration, à qui le mémoire a été renvoyé, certifie qu'en enet, ce capitaine est parti de Tirlemont le 30 décembre, sans permission; et le citoyen Mangai, commandant du bataillon, nous prévient qu'il a écrit, par vos ordres, au capitaine Gauglos de rejoindre sur-le-champ, s'il ne voulait être remplacé. Nous vous requérons de le faire remplacer sans délai, s'il n'est pas revenu à son poste, lorsque vous recevrez notre lettre.
« Signé :. Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
N° 5.
Au nom de la République française.
« Sur le compte qui nous a été rendu des propos inciviques que le citoyen Sâint-Désiré, capitaine des hussards de la République, en garnison à Gand, mis hier en état d'arrestation par ordre du ministre de la guerre, s'est permis le 16 de ce mois, en présence de plusieurs personnes, tant au sujet du jugement de Louis Capet que sur l'état politique de la France et sur le décret du 15 décembre 1793, concernant la Belgique;
« Nous commissaires de la Convention nationale, députés par elle dans la Belgique et le pays de Liège, etc., usant des pouvoirs à nous attribués par le décret du 29 décembre 1792, déclarons, après avoir vérifié les faits, et en avoir délibéré en commun, que le citoyen Saint-Désiré est et restera suspendu, jusqu'à ce-qu'il en ait été ordonné autrement par la Convention nationale, des fonctions de capitaine des hussards de la République; et que, lorsqu'il aura été mis en liberté, s'il y a lieu, il sera tenu de se retirer dans l'intérieur de
la République française, à vingt lieues des frontières, conformément à la loi.
« Fait à Gand, le
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
« Au nom de la République française.
« Vu le mémoire justificatif présenté par le citoyen Saint-Désiré, par lequel il cherche à se justifier des imputations qui ont motivé l'arrêté pris contre lui le 31 janvier dernier, portant suspension de ses fonctions de capitaine des hussards de la République, avec injonction audit Saint-Désiré, dans le cas où il serait mis en liberté, s'il n'est pas détenu pour d'autres causes, et à la charge par lui de se retirer dans l'intérieur de la République française, à 20 lieues des frontières.
« Nous, commissaires de la Convention nationale dans la Belgique, pays de Liège, etc., en persistant dans notre précédent arrêté, arrêtons que ledit Saint-Désiré, qui n'avait pas été mis en état d'arrestation par ledit arrêté, sera mis en liberté, s'il n'est pas détenu pour d'autres causes, et à la charge par lui de se retirer dans l'intérieur de la République française, à 20 lieues des frontières.
« Fait à Bruxelles, ce
« Signé : Camus, Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
N° 6.
Bruxelles, le
« Les commissaires de la Convention nationale, au général Omoran, commandant à Tournay.
« Nous avons sous les yeux, citoyen général, la copie d'une lettre qui vous a été écrite le 1er de ce mois, par le citoyen Blanot, lieutenant de grenadiers au 4e bataillon du Nord, en garnison à Ypres, et dans laquelle cet officier accuse le commandant de son corps : 1° d'avoir engagé deux déserteurs d'Auxerrois et de Penthièvre ; 2° d'avoir donné des congés de grâce; 3° de n'avoir pas assemblé le conseil d'administration depuis le 24 octobre 1792 jusqu'au 20 avril dernier.
Nous sommes persuadés, citoyen général, que vous n'avez pas négligé des chefs d'accusation aussi graves. Vous voudrez bien nous informer des mesures que vous avez prises, et de ce qui a été fait en conséquence.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
N° 7.
Bruxelles, le
« Les commissaires de la Convention nationaleau citoyen Ferrand, lieutenant colonel des volontaires nationaux du département de la Somme, commandant à Gand.
« Des plaintes nous ont été portées contre vous, et il est de notre devoir de vous les transmettre.
1° Vous avez accordé des sauf-conduite à des individus reconnus pour agents de la tyrannie autrichienne; tels que le président du conseil de Gand, le procureur général du même tribunal, le fiscal, etc.
« 2° Vous êtes lié„avec plusieurs royalistes de Gand, notamment avec l'avocat Halle-broeck.
« 3° Vous ayez souffert que des hussards de la République troublassent, à différentes reprises, la tranquillité publique* et vous n'avez fait faire contre eux aucune poursuite.
« Voilà, citoyen commandant, les griefs qu'on vous impute. Nous attendons vos réponses pour les apprécier (1).
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
N° 8.
Bruxelles, le
« Les commissaires de là Convention nationale, ay, lieutenant général Lanoue, commandant à Liège.
« Vous trouverez ci-jointes, citoyen général, des pièces qui présentent une inculpation grave contre le, commissaire des guerres Lan-geron et un autre officier. Vous voudrez bien vérifier les faits, et, s'il y a lieu, infliger la peine des arrêts à celui ou ceux qui se trouveront répréhensibles.
« Signé : Camus, Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
« P. S. Nous recevons à l'instant une lettre du commissaire Langeron lui-même, que nous vous envoyons également.
N° 9.
Du
' « Les membres de la Convention nationale, ses commissaires, etc., après avoir entendu les plaintes du commandant du 21° bataillon des fédérés volontaires, en garnison à Bruxelles, sur le refus que fait le colonel Westermann, commandant la légion du Nord, de lui remettre, en exécution du décret de la Convention nationale du 29 décembre dernier, et des ordres du ministre de la guerre, les fédérés de son bataillon qui se sont enrôlés dans la légion du Nord, à moins que le bataillon ne restitue préalablement les sommes payées àux-dits volontaires, pour leur engagement :
« Vu le décret du 29 décembre, la lettre du ministre de la guerre au commandant du 21e bataillon des fédérés, en date du 30 jan-^jer dernier, la lettre adressée sans date, au même commandant, par le colonel Wester-mann;
« Considérant qu'un bataillon ne peut pas être responsable en corps des sommes payées à l'occasion d'actes contraires à la loi, aux particuliers qui le composent ^
( Requièrent le général Moreton, commandant en chef dans le Brabant et le Hainaut, d'employer tous les moyens que la loi met en son pouvoir, pour contraindre le colonel Westermann à effectuer sans retard la restitution des volontaires du 21e bataillon des fédérés qu'il a indûment enrôlés dans sa troupe, sauf à lui à prendre ensuite les moyens de droit contre lesdits volontaires, pour parvenir au recouvrement des sommes qu'il justifiera leur avoir payées. Requièrent en outre le général Moreton de leur rendre compte .dans le jour des mesures qu'il aura prises pour l'exécution de la présente réquisition.
« Signé : Camus, Delacroix, Gossuin, Danton, Merlin (de Douai), Treilhard. »
Du
« Les membres de la Convention nationale de France, ses commissaires, etc. Vu leur arrêté du jour d'hier, qui ordonne au colonel Westermann, de restituer sans délai au commandant du 21e bataillon des fédérés, les hommes de ce bataillon indûment enrôlés dans sa légion ; requièrent, en outre, le géné-écrite d'après la notification de cet arrêté, par le colonel Westermann au lieutenant général Moreton; ladite lettre remise par ledit général;
(t Requièrent le lieutenant Moreton, commandant dans le Brabant et le Hainaut, de faire sur l'heure de nouvelles injonctions au colonel Westermann d'obéir à la loi; ainsi qu'à l'arrêté du jour d'hier, et de remettre, à l'instant de l'injonction qui lui sera faite, les hommes du 21e bataillon des "fédérés enrôlés dans sa légion; requièrent en outre le général Moreton de leur donner de suite connaissance de l'exécution que le présent arrêté aura reçu.
« Fait à Bruxelles, les jour et an que dessus.
« Signé : Camus, Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
« Au nom de la République française.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires, etc. - Vu leur arrêté des 13 et 14 de ce mois, qui ordonnent au colonel Westermann, de restituer sans délai au 21e bataillon des fédérés, les hommes de ce bataillon indûment enrôlés dans la légion du Nord;
« Considérant que le colonel Westermann, en donnant des ordres conformes aux arrêtés ci-dessus, n'a pris aucune mesure efficace pour en assurer l'exécution, et que dans le fait ils ne sont pas exécutés (1).
« Requièrent le général Dumouriez. de réitérer au colonel Westermann, l'injonction portée par les arrêtés ci-dessus, et déclarent que si la remise des hommes dont il s'agit n'est pas effectuée dans trois semaines, le colonel Westermann, demeurera, par le seul fait suspendu de ses fonctions; font défense, ce cas arrivant, à tous payeurs des armées fran-
çaises de lui payer aucuns appointements, et pour qu'il n'en soit pas prétendu cause d'ignorance, ordonnent que copie du présent arrêté sera adressé au contrôleur général des dépenses de l'armée de la Belgique.
( Fait à Bruxelles, le 20 février 1793, l'an II de la République.
( Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
Zevenbergen, le
« Le général Dumouriez, aux citoyens commissaires de la Convention nationale à Bruxelles.
« Bréda est rendu d'hier au soir, etc. (1). « Ce n'est pas le moment d'exécuter votre ordre pour la légion du Nord. Elle serait entièrement désorganisée et d'ailleurs rien ne pourrait déterminer les volontaires à quitter l'avant-garde, pour aller joindre leurs bataillons respectifs : ainsi ces hommes seraient toujours perdus pour le service de la République.
« Je vous prie de prendre en conséquence ces observations, que je vous fais uniquement par zèle, et de suspendre les ordres sévères que vous avez donnés à cet égard, tant au colonel Westermann, qu'au contrôleur général des dépenses de l'armée. Je vous représente qu'il ne pourrait en résulter qu'un très grand mal. Pensez, d'ailleurs, que la légion du Nord est déjà aux avant-postes de mon armée, bien avant dans la Hollande, et qu'elle sera peut être enfoncée de 11 lieues dans le pays, lorsque votre réponse pourra m'arriver ; pensez aussi que je ne suis à la tête que d'une poignée de monde, et que ce n'est pas le cas d'une rigueur extrême.
« Signé : Dumouriez, général en chef des armées de la Belgique.
Bruxelles, le
« Les commissaires de la Convention nationale, au général Dumouriez.
« Nous avons la certitude, général, etc. « A l'égard de ce que vous nous marquez au sujet de notre arrêté relatif à la légion de Westermann, arrêté qu'il aurait dû exécuter avant son départ, vous devez sentir comme nous, citoyen général, de quelle conséquence il serait pour la République, que les décrets et arrêtés qui en ordonnent l'exécution, fussent éludés par les citoyens armés et demeurassent sans exécution. Nous persistons dans notre arrêté, nous demandons qu'il soit exécutés ; mais nous nous en rapportons à votre prudence et à votre amour de la loi, pour le moment où il le sera (2).
« Signé : Camus, Delacroix, Gossuin, Merlin ( de Douai).
N° 10.
Louvain, le
« Les capitaines Galaup et Gaillot ont suivi de DunkerqUe à Lille, le second bataillon du 12e régiment d'infanterie, qui était en marche pour se rendre à l'armée du Nord dans le mois de février.
« Ces deux capitaines, au lieu dé se rendre avec leur bataillon où leur devoir et le bien de la patrie les appelaient, sous prétexte de maladie, ont quitté illégalement leur poste, et se sont retirés chez eux; en conséquence, les officiers du 12e régiment représentent aux citoyens commissaires de la Convention nationale et au général Lamarlière, qu'ils veuillent bien faire nommer à leur emploi. La justice et le bien du service, dans les circonstances actuelles, l'exigent impérieusement; car il importe que les compagnies soient complètes en officiers, et cependant il s'en trouve plusieurs qui n'en ont pas un.
« Signé : Rouyer, Coignet, Michaud, Le-~ suisse, Decours, Giraud, Cerrisat, Jaus-sand, capitaines ; Lacour, Duhail, Belin, Eirisch, Chossat, Janin, Lesuisse, Du-carla, Bernier , Lequay, lieutenants; Berthaud, Beaulieu, Guilleminot, Robert, Morand, Chateauneuf, Tachot, sous-lieutenants. »
« Yu et approuvé la pétition des citoyens officiers du régiment que j'ai l'honneur de commander.
« Signé : Desperrières, colonel. »
« D'après les représentations contenues dans ce mémoire, je me suis procuré des renseignements sur la conduite et les opinions des capitaines Galaup et Gaillot; il en résulte que je crois du bien du service de la République, qu'il soit pourvu sur-le-champ à leur remplacement, et qu'il leur soit fait part qu'ils ne font plus nombre dans l'état des officiers du 12e régiment d'infanterie.
« Signé : Le général commandant l'avant-garde de l'armée du Nord, Lamarlière. »
« Vu le mémoire ci-contre et les attestations dont il est appuyé, les commissaires de la Convention nationale destituent provisoirement les capitaines Galaup et Gaillot, et ordonnent qu'ils seront remplacés, en conformité des décrets de la Convention nationale.
« Le présent arrêté sera adressé à la Convention.
« Fait à Bruxelles, le 10 mars, l'an II de la République française.
« Signé : Camus, Treilhard. » N° 11.
« Au nom de la République française.
« Nous membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans le pays de la Belgique, de Liège, etc., après avoir entendu le rapport de nos collègues Danton et Delacroix, duquel il résulte que cejour-
d'hui quatre heures du matin, revenant de l'armée campée au-dessus de Louvain où nous les avons invités à se rendre, ils ont rencontré sur la route de Louvain à Bruxelles le colonel du 73e régiment d'infanterie, à la tête de ce régiment, suivi de plusieurs bataillons de volontaires nationaux avec lequel ils formaient une division, et qui leur ont déclaré l'avoir suivi parce qu'ils croyaient qu'il avait ordre de les conduire vers Bruxelles; qu'ils ont demandé au colonel du 73e régiment, en vertu de quel ordre il s'éloignait de l'armée; qu'il leur a déclaré n'en avoir reçu aucun; que plusieurs soldats de ce régiment leur ont exposé que, depuis plusieurs jours, leur colonel les faisait aller et revenir sur leurs pas, sans aucun but fixe; qu'il avait l'air d'éviter l'ennemi, tandis qu'ils le cherchaient constamment; qu'en applaudissant au zèle de ces braves soldats, nos collègues Danton et Delacroix ont requis leur colonel de les faire rétrograder sur Louvain, où il prendrait l'ordre du général Dumouriez; et qu'ils lui ont enjoint de se rendre, dans la matinée de ce jour, près de la commission réunie à Bruxelles, pour y rendre compte de sa conduite : ce qu'il n'a pas fait;
( Arrêtons que le colonel du 73e régiment d'infanterie est provisoirement suspendu de ses fonctions; qu'il se rendra sans délai à Paris, auprès du comité de la guerre de la Convention nationale et du' conseil exécutif provisoire, pour rendre' compte de sa conduite et que jusqu'à ce qu'il en ait été autrement ordonné, ses fonctions seront remplies par le premier lieutenant-colonel du 73e régiment.
( Fait à Bruxelles, le 21 mars 1793, l'an II de la République.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Danton, Merlin (de Douai), Treilhàrd, Robert. »
12.
« Au nom de la -République française'.
« Nous membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et jdans le pays de la Belgique, de Liège, etc., délibérant] sur les plaintes qui nous ont été portées contre le général Miranda, au sujet de sa conduite tant au siège de Maëstricht, qu'à la journée du 19 de ce mois, et considérant, d'une part, que les faits imputés à ce général ne paraissent-pas moins graves que ceux qui ont motivé le décret par lequel la Convention nationale a fait traduire à sa barre les (généraux Lanouë et Steingel; de l'autre qu'il serait dangereux pour le succès des armes de la République, qu'un général inculpé conservât le commandement des troupes, tant qu'il ne s'est pas justifié;
« Arrêtons, vu l'urgence, que le général Miranda se rendra, sans aucun délai, à la barre de la Convention nationale, pour y rendre compte de sa conduite; et chargeons le général en chef Dumouriez de pourvoir provisoirement à son remplacement.
« Fait à Bruxelles, le 21 mars 1793, l'an II cle la République.
« 'Signé.: Delacroix, Gossuin, Danton, Merlin (de Douai), Treilhard. »
Ce dernier arrêté n'a pas paru assez sévère à.la Convention nationale, qui, tout en l'approuvant, l'a converti, le 24 mars, en décret d'arrestation. — La Convention nationale a fait plus; elle a, par un décret du 12 avril, renvoyé le général Miranda par devant le tri* bunal criminel extraordinaire.
Les commissaires de la Convention font des vœux bien sincères pour que cet officier parvienne à dissiper les soupçons qui s'élèvent contre lui. Il leur en a coûté de l'envoyer à la,barre, après tous les témoignages d'estime qu'ils lui avaient précédemment donnés (1); mais les faits dont ils avaient connaissance, leur en imposaient la loi.
1° Le siège de Maëstricht avait été commencé presque sans poudre, et avec des bombes qui, pour la plus grande partie, n'étaient point de calibre. De là était résulté dans les premières, et peut-être dans les plus importantes opérations de ce siège,une stagnation qui avait indigné toute l'armée, et qu'on n'était parvenu, à faire cesser qu'en envoyant en poste, de Bruxelles, les bombes et la poudre qui manquaient.
3° La nuit du 3 au 4 mars, le [général Miranda jurait, sur sa tête, aux commissaires Delacroix, Gossuin et Merlin (de Douai), en présence des généraux Valence et Thowenot, que la position qu'il avait prise à Tougres était inexpugnable; et le 4 Tougres était au pouvoir de l'ennemi.
3° Tandis que, pénétrés de l'indispensable, nécessité de replacer à la tête des troupes découragées par la déroute d'Aix-la-Chapelle, et la levée du siège de Maëstricht, le général qui avait leur confiance et qui alors ne paraissait pas capable d'en abuser, les commissaires de la Convention nationale pressaient Dumouriez d^accourir à Liège, le général Miranda lui faisait entendre qu'il n'y avait point de danger ni de désastre qui dussent occasionner
le renversement du plan de campagne de la Hollande (1).
4° Les portions de l'armée, que Delacroix et Danton avaient vues le 20 mars près de Louvain, accusaient hautement le général Miranda de la défaite de la veille, et promettaient de ne plus se battre sous ses ordres.
Il faut, au surplus, que Dumouriez ait sollicité l'arrêté dont il s'agit. Dumouriez n'a parlé de Miranda aux commissaires de la Convention, que le 1er février, à Bruges; et là, bien loin de l'inculper, il leur a dit formellement que Miranda était l'homme le plus en état de le remplacer dans le commandement en chef.
Art. 7.
Mesures contre les soldats qui ont abandonné Leurs drapeaux.
Il y avait déjà plusieurs mois que les désertions affaiblissaient de plus en plus les bataillons de volontaires, lorsque est arrivé à l'avant-garde cantonnée sur la Roër, cet échec qui, par ses suites, a été si fatal à la République. Dès ce moment, les désertions se sont multipliées de la manière la plus affligeante. Partout où les commissaires de (la Convention pouvaient se porter, ils voyaient les routes couvertes de soldats et de volontaires qui rétrogradaient vers leurs foyers, et même emportaient leurs armes. On était loin de soupçonner alors que la perfidie la plus noire eût ourdi dans le quartier général les moyens désorganisateurs qui étaient employés sourdement pour éloigner de l'armée ces braves républicains; mais voici,les mesures qui ont été prises pour les ramener sous leurs drapeaux.
N° 1
Bruxelles, le
« Lettre circulaire des commissaires de la Convention nationale, aux citoyens commandant des places de Tournay, Valen-ciennes, Mons, Douai, Cambrai, Ypres et Bergues.
« Nous sommes informés, citoyens, que plusieurs soldats et volontaires nationaux de la République ont abandonné lâchement leurs drapeaux, et retournent dans leurs foyers, quelques-uns par les grandes routes, et la plupart par les chemins de traverse. Yous voudrez bien prendre les mesures les plus promptes et les plus rigoureuses, pour que ces fuyards soient arrêtés et renvoyés à leurs bataillons. Il sera essentiel pour cet effet, que vous fassiez placer des postes dans les campagnes de votre voisinage, aux endroits par où vous présumez qu'ils pourront passer.
« Signé : Camus, Gossuin, Merlin (de Douai), Treilharb. »
Du
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans le pays de la Belgique, de Liège, etc.
« Instruits par eux-mêmes et par les rapports qui leur sont adressés journellement, qu'un grand nombre de volontaires, après avoir quitté l'armée, se retirent dans l'intérieur de la République;
« Considérant que dans le moment où tous les Français sont réunis sous l'étendard de la liberté pour anéantir les satellites des despotes; on ne saurait regarder les fuyards qui abandonnent lâchement leurs drapeaux, comme de vrais républicains; mais qu'ils sont plutôt les agents dirigés par les auteurs des complots formés pour disperser l'armée française, et pour faire disparaître de dessus la terre les défenseurs de la liberté et de l'égalité;
« Considérant que celui-là trahit le peuple et se rend coupable du crime de lèse-nation, qui, tandis que la patrie se repose sur les serments qu'il a faits de la défendre, abandonne les camps, sans s'être fait remplacer, et enlève des armes qu'il doit remettre entre les mains d'un autre citoyen, lorsque lui-même ne veut ou ne peut s'en servir ;
« Arrête ce qui suit
« 1° Les corps administratifs, municipalités, officiers militaires, généraux, commandants de place et de gendarmerie, emploieront la force que la loi a mise entre leurs mains pour arrêter et faire retourner à l'armée tout militaire qui rentrerait dans l'intérieur de la République. Les membres des corps administratifs et autres personnes dénommées au présent article, seront, en cas de négligence, poursuivis comme fauteurs du crime des traîtres qui abandonnent, en ce moment, la défense de leur patrie ;
« 2° Seront exceptés des dispositions du précédent article les militaires qui se rendraient dans l'intérieur de la République, pour remplir, de la part de leurs chefs, une mission dont ils justifieraient par écrit, et ceux qui, porteurs d'un billet d'hôpital, seraient en outre porteurs d'un congé de leur corps ou d'un certificat de route visé par les commissaires de guerres : mais lesdits militaires, porteurs d'un billet d'hôpital, seront tenus de déposer, dans la première ville où ils entreront, entre les mains du commandant de la place, leurs fusils, ■ sabres et gibernes. Ces armes leur seront rendues, lorsqu'ils retourneront à l'armée, si, avant ce temps, elles n'ont pas été distribuées à des citoyens qui les aient remplacés ;
« 3° La Convention nationale ayant déjà effacé par ses décrets la différence qui existait sur plusieurs points importants entre les troupes de ligne et les volontaires* elle est invitée à imposer aux officiers et soldats volontaires qui qifittent leurs drapeaux, les mêmes peines qui ont été prononcées, en ce cas, contre les officiers et soldats des troupes de ligne. La Convention est pareillement invitée à décréter que les municipalités qui | recevront dans leur sein des fuyards, et qui ne les forceront pas à retourner à l'armée, seront tenues d'équiper et entretenir à leur frais, autant de volontaires qu'elles souffriront de fuyards habiter dans leur territoire.
« Fait à Bruxelles, les jour, mois et an que dessus.
« Signé : Camus, Delacroix, Gossuin, Danton, Merlin (de Douai), Treilhard, Robert. »
N° 3.
Bruxelles, le 21 mars, l'an. II de la République.
« Circulaire des commissaires de la Convention nationale, au général Duval, commandant à Bruxelles;
« Au général Ferrand, commandant à Mons; « Au général Canole, commandant à Tournay ;
« Au général Tricotel, commandant à Arras; « Aux commandants de Valenciennes, Condé, Douai, Maubeuge, Avesnes,, Givet,• Fhilippeville, Laite, Cambrai, Sedan, Mé-zièrés.
« Nous vous adressonsj citoyen, un arrêté sur les lâches soldats qui abandonnent leurs drapeaux. Nous vous requérons de le faire publier de suite, de le notifier à la gendarmerie qui est idans votre arrondissement, et de tenir la main à son exécution.
« Signé : Delacroix, Danton, .Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
N° 4.
Bruxelles, le
« Lettre circulaire des commissaires de la Convention nationale,' aux administrateurs des départements du Nord, du tas-de-Calais, de l'Aisne, de la Somme et des Ardennes.
« Ne différez pas d'un instant,citoyens administrateurs, à donner la plus grande publicité à la proclamation ci-jointe." Il est nécessaire que vous l'adressiez, par des courriers extraordinaires, à chacun des districts de votre arrondissement, et que vous donniez les plus grande soins à son exécution. Le nombre des fuyards de l'armée française, actuellement en présence de l'ennemi, est effrayant. Cette lâcheté a beaucoup nui au succès de nos armes. Nous en appelons à tout ce que vous dicteront votre activité et votre civisme, pour faire remédier à un abus extrêmement préjudiciable au salut et à la santé de la Republique. Nous vous prions de nous accuser réception de notre dépêche.
: '-« Signé : Delacroix, Gossuin, Danton, Merlin (de Douai), Treilhard, Robert. »
N° 5.
« Les commissaires de la Convention nationale près l'armée de la Belgique et dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais, réunis, informés qu'il arrive journellement à Lille un grand nombre de volontaires nationaux qui ignorent où se trouvent en ce moment leurs bataillons et régiments respectifs; considérant que plusieurs corps de troupes destinés à renforcer l'armée de la Belgique, sont incessamment attendus dans cette ville), et que, pour éviter l'engorgement et accélérer le complètement des armées, il est essentiel de procurer aux soldats qui se trouvent absents de leurs corps, le moyen de les rejoindre sans aucun retard ;
« Arrêtent ce qui suit :
( Art. 1er. Tous les militaires qui se
trouvent maintenant dans la ville de Lille, dont les bataillons et les
régiments sont à l'armée, seront tenus d'en partir dans 24 heures, pour
rejoindre leurs drapeaux.
«Art. 2. Le commissaire-ordonnateur de l'armée prendra les mesures nécessaires, pour faire constater le nombre de ces militaires: il fera réunir par détachement ceux du même bataillon et régiment; il leur indiquera leur destination, et leur fera délivrer la route pour se rendre à leur corps. Il fera dresser un état de ces détachements, de leur armements et équipement.
« Art. 3. Les militaires qui ne seront pas trouvés au lieu de réunion indiqué par le commissaire-ordonnateur, pour se former en détachement, et ceux qui, après avoir été compris dans les détachements, resteraient dans la ville de Lille, cesseront de recevoir la solde et le logement; ils seront considérés comme déserteurs, arrêtés et conduits à leur corps, de brigade en brigade.
" « Art. 5. Les citoyens qui logeraient chez eux des militaires qui auraient refusé de partir pour rejoindre leur corps, seront tenus d'en faire leur déclaration à la municipalité, sous les peines de droit.
« Art. 5. Le général de brigade commandant à Lille, tiendra la main à l'exécution du présent arrêté.
« Fait à Lille, le 27 mars 1793, l'an II de la République.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard, Carnot, Lesage-Senault. » •
N° 6.
Lille, le
( Les commissaires de la ,Convention nationale, à la municipalité de Lille.
« Nous sommes informés, citoyens, qu'un très grand nombre de militaires français ou belges arrivent dans la ville sans permission et qû'ils forcent les habitants à leur procurer des logements : vous ne devez pas différer à prendre, à cet égard, tous les renseignements nécessaires. Nous avons pris hier un arrêté pour forcer /ces militaires à rejoindre dans les 24 heures leurs corps respectifs; de votre côté, il serait essentiel que vous rendissiez à l'instant une ordonnance de police, qui enjoignît, aux: citoyens de Lille, de venir déclarer à la municipalité, le nombre des militaires qui se trouvent actuellement logés chez eux, et leur fît défense expresse d'en recevoir à l'avenir, sans un billet signé de vous.
« Cette disposition ne doit pas seulement s'étendre aux militaires; les circonstances exigent que vous vous occupiez aussi des étrangers indistinctement qui arrivent ici; il serait bon qu'ils ne fussent admis à séjour-née dans Lille, qu'en vertu d'un billet de votre part.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard, Robert. »
N° 7.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée;
« Après avoir entendu les observations des corps administratifs de la ville de Péronne et des préposés provisoires à l'établissement de l'hôpital militaire;
« Déclarent-: 1° Que la réquisition donnée par le ministre de la guerre, le 31 mars dernier, d'arrêter tout militaire de quelque grade qu'il soit, passant par Péronne, et de le faire refluer sur l'armée, ne s'applique qu'aux militaires en activité de service', et qu'il faut laisser passer ceux qui sont licenciés, chassés, cassés, ou bien qui ont des congés absolus, antérieurs à l'époque du 8 mars dernier;
« 2° Que parmi les malades qui se présentent pour entrer à l'hôpital, il faut renvoyer à leur bataillon les militaires qui n'ont d'autres maladie que la gale, parce qu'on traite actuellement cette maladie à l'armée et dans les garnisons;
« 3° Qu'il faut'évacuer sur les hôpitaux de l'intérieur, les malades attaqués de maladie vénérienne, qui peuvent voyager à pied ou souffrir le transport en voiture;
« 4° Qu'on ne doit garder à l'hôpital militaire, que ceux qui sont attaqués de maladie grave, ou qui sont blessés grièvement;
« 5° Que l'hôpital militaire établi à Péronne depuis deux jours, manquant de fournitures, on doit y employer les matelas, couvertures, linges et ustensiles réservés aux termes des décrets, lors de la vente du mobilier des émigrés.
« Fait à Péronne, le 2 avril 1793, l'an II de la République
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai), Robert. »
Art. 8.
Service des commissaires des guerres.
Nous avons peu de choses à ajouter aux détails que présente, sur cette matière, le premier rapport des commissaires de la Convention.
Le nombre des commisaires des guerres dans la Belgique, qui n'était, à la date de ce rapport, que de 30 ou environ, s'est depuis monté successivement à 36, y compris un aide commissaire établi à Tirlemont, le commissaire-ordonnateur en chef Petit-Jean et le commissaire-ordonnateur Lambert; et il s'en fallait encore de beaucoup que ce nombre excédât les besoins du service.
D'après ce que nous avons déjà dit de ces officiers à l'article des tribunaux militaires, et ce que nous en dirons encore dans les deuxième et troisième parties, il ne nous reste ici qu'à faire connaître deux pièces relatives à leurs fonctions.
N° 1.
« Ait nom de la République française,
« Nous commissaires de la Convention nationale, députés dans la Belgique, le pays dé
lre série, t. lxi.
Liège etc., considérant qu'il est d'une extrême urgence d'établir un commissaire des guerres près le général Deflers, commandant à Bruges. Ostende, Nieuport, Furnes etc., et que cet établissement ne peut être différé davantage sans compromettre la chose publique; vu le certificat de civisme délivré au citoyen Pierre-Louis-Paul-Achille Hébert, par le conseil général de la commune de Bergues le 18 janvier dernier, lequel demeurera annexé à l'expédition du présent arrêté, et usant du pouvoir à nous attribué pour les mesures provisoires qui intéressent le bien de la République, déclarons commettre le susdit citoyen Hébert pour remplir provisoirement les fonctions de commissaire des guerres dans l'étendue du commandement du général Deflers.
« Ainsi fait à Ypres, le 4 février 1793, l'an II de la République
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai) Treilhard. »
« Réponse du citoyen Hébert à la lettre par laquelle cet arrêté lui était adressé.
« L'un des plus anciens et des meilleurs amis de l'immortel Lepeletier, fera tous ses efforts pour vou3 prouver qu'il était digne de la bienveillance du plus illustre martyr de la liberté, c'est le seul tribut d© reconnaissance qu'il nous offre; c'est le seul digne de vous et de lui. »
N° 2.
Lille, le 31 mars 1793, l'an II de la Républque.
« Les commissaires de la Convention nationale au citoyen Malus, commissaire-ordonnateur en chef de Varmée du Nord.
Nous sommes informés, citoyen, que plusieurs- commissaires des guerres reçoivent avec hauteur et traitent avec dureté les soldats et volontaires nationaux qui s'adressent à eux. Nous avons eu mijme la douleur de nous assurer plusieurs fois par nous-mêmes de la véracité de ces plaintes. Il est temps et plus que temps d'arrêter un désordre aussi désorgani-sateur; et nous vous requérons formellement de prendre toutes les mesures néceessaires pour qu'il cesse absolument. Apprenez aux commissaires des guerres qui sont sous vos ordres, que lorqu'ils parlent aux défenseurs de la liberté, ils doivent le faire avec toute l'honnêteté qu'exige la fraternité républicaine. La nation veut impérieusemnt qu'ils mettent dans leur langage et dans leurs procédés, les égards et en même temps la fermeté qu'exige le service de la patrie. Nous vous rendons responsables des fautes que vos subordonnés pourraient encore commettre, tant en ce genre que sur les autres parties du service, sur lesquelles ils ne sont en général rien moins qu'exacts; et nous vous déclarons que, sur la première plainte fondée, ceux qui en seront l'objet seront traduits au tribunal révolutionnaire à Paris.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai), Robert. j.
Art. 9.
Charrois de l'armée.
Il règne dans cette partie importante de ^administration militaire de grands abus que les commissaires de la Convention ont dénon cés au'ministre de la guerre^' et qui se sont particulièrement manifestés lors de l'évacuation de la Belgique. Les commissaires de la Convention ont fait tout ce qui était en leùr pouvoir pour en arrêter le cours; et ils ont eu à ce sujet des conférences tant avec le chef de la régie du charroi qu'avec le commissaire ordonnateur Petit-Jean. Celui-ci leur a proposé, pour y remédier efficacement, des me sures qu'ils ont trouvées très sages, mais pour l'exécution desquelles ils ont cru devoir recourir à l'autorité de la Convention nationale. Ils en ont adressé le plan au comité de défense générale, le 27 mars; et il est bien instant que la Convention nationale s'en fasse rendre compte.
Voici, au surplus, deux arrêtés qui ont été pris, l'un pour suppléer au défaut de fonds nécessaires au paiement des voituriers qui conduisaient à Maëstricht les effets de siège; l'autre, pour punir un officier de charrois.
N° 1.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique de Liège, etc., vu la lettre du citoyen d'Héli, directeur du parc d'artillerie à Louvain, les ordres du général Moreton au pied de ladite lettre, la lettre du général More-ton à eux adressée, le tout en date de ce jour, et attendu l'urgence des circonstances prouvées par les lettres susdites qui demeureront annexées à la minute de la présente réquisition;
( Requièrent le contrôleur général des dépenses de la guerre d'avancer à l'instant jusqu'à concurrence de la somme de six mille livres, si tant est nécessaire, pour assurer le départ du convoi de munitions d'artillerie actuellement en charge à Louvain, et deman-lé par les généraux pour le service de l'armée.
« Fait à Bruxelles, le 27 février, l'an II de la République française, trois heures et demie après midi.
t( Signé : Camus, Delacroix, Gossuin,
Merlin (de Douai). »
N° 2.
« Au nom de la République française,
« Nous, membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée, informés que le citoyen Herbault, capitaine en second des charrois de l'armée, s'est permis hier d'arrêter, sans ordre, le départ d'un convoi qu'il lui était enjoint de conduire de Lille à Tournay; vu l'acte qualifié délibération, par lequel ledit Herbault a suspendu ce convoi, en prenant pour témoin le citoyen Burette, officier municipal, et le citoyen de Herle, commandant du poste de la porte de Fives; après avoir entendu lesdits citoyens Burette et Herbault, et le commissaire-ordonnateur en chef Petit-Jean;
« Arrêtons que le citoyen Herbault demeurera suspendu de ses fonctions pendant 15 jours, et que le commissaire-ordonnateur en chef Petit-Jean prendra les mesures nécessaires pour lui faire subir, pendant ce temps, telle peine de discipline qu'il appartiendra.
( Fait à Lille, le 30 mars 1793, l'an II de la République.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai), Robert. »
Art. 10.
Des troupes belges et liégeoises.
Les corps de troupes belges qui se sont formés à Lille en 1792, ont montré dans la dernière campagne une grande bravoure; et il serait heureux pour la République qu'ils n'eussent éprouvé dans leur composition aucun changement. Mais par les nouvelles levées qu'ils ont faites dans leur pays, et surtout par le mauvais esprit d'un grand nombre des nouveaux officiers que le soi-disant comité militaire de la Belgique s'est permis de leur donner, ils ont presque fini par devenir dangereux. Nous nous occupions, lorsque sont arrivés les revers qui ont nécessité l'évacuation de la Belgique, à rechercher tous les renseignements nécessaires pour éclairer sur ce point important la Convention nationale. Ces ren-gnements ne nous sont pas parvenus officiellement, mais nous en avons appris assez pour pouvoir assurer, entre autres choses, que parmi les corps dont il s'agit, il en est qui ont beaucoup plus d'officiers que de soldats; qu'ils sont en général très indisciplinés; que l'une des causes de la trouée d'Althenoven et d'Aix-la-Chapelle est la lâcheté d'un corps liégois qui, bien retranché, bien armé, et défendu par d'excellents canons, s'est laissé prendre par un détachement de cavalerie autrichienne, sans faire la moindre résistance; que la nuit qui a suivi cet échec, plus de deux cents soldats d'un corps formé à Mons, ont déserté de Liège où ils étaient en garnison etc.
« Il faut le dire : 1a- Convention nationale a commis Une grande erreur, lorsqu'elle a adopté, par son décret du 26 janvier, les troupes belges et liégeoises; sans doute il était sage, il était utile de conserver les soldats belges et liégeois qui s'étaient rangés sous les drapeaux de la liberté. Mais il était impolitique de les laisser exister en corps distincts; il fallait les disséminer dans nos régiments de ligne ou dans nos bataillons de volontaires; c'était le seul moyen de les soustraire à l'intrigue qui les travaille sans cesse, de les rendre véritablement Français et d'en faire de bons défenseurs de la République. Ce moyen nous l'avons employé, comme on verra dans l'instant, pour les troupes levées dans le Hainaut postérieurement au décret du 26 janvier; et il est instant, nous osons le dire, que la Convention nationale prenne la même mesure pour tous les individus qui restent actuellement dans les corps belges et liégeois, soldés par la République.
« Voici, au surplus, les dispositions que les circonstances ont nécessitées de notre part, relativement à ces corps.
N° 1.
Bruxelles, le
« Les commissaires de la Convention nationale au général Dumouriez, commandant en chef l'armée de la Belgique.
« Nous sommes informés, citoyen général, par une note officielle d'un commissaire du pouvoir exécutif, que la légion belge, en garnison à Louvain, est dans un dénuement affreux et dans une effrayante indiscipline. Ce commissaire pense qu'il serait avantageux et prudent de l'envoyer s'organiser dans une citadelle de France. Vous apprécierez, citoyen général, cette observation : nous la soumettons à votre sagesse.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
N° 2.
« Au nom de la République française,
« Yu par nous, commissaires de la Convention nationale de France, députjes dans la Belgique et dans le pays de Liège, etc., le mémoire à nous adressé le 7 de ce mois par1 le général Rozière, contenant l'exposé du dénuement dans lequel se trouve le corps des belges cantonné à Louvain, et l'état de situation de ce corps en date du même jour, dressé d'après les revues des 23 et 24 janvier dernier ;
Considérant- que, d'après le décret de la Convention nationale du 26 du même mois, les légions belges doivent, à compter de la revue qu'il ordonne, faire partie de l'armée française, et être soldées par la République;
« Considérant qu'en attendant cette revue, il est indispensable de faire subsister les Belges qui composent ces légions ;
(( Nous, commissaires susdits, requérons le commissaire-ordonnateur Petit-Jean de pourvoir provisoirement aux besoins ;
« Ainsi fait et arrêté à Bruxelles, ce 8 février 1793, l'an II de la République française.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai; Treilhard. »
N° 3.
« Bruxelles, le
« Les commissaires de la Convention nationale au citoyen Petit-Jean, commissaire-ordon-nateur en chef de l'armée de la Belgique.
« Par notre réquisition du 8 de ce mois, nous vous avons autorisé à pourvoir provisoirement aux besoins indispensables de la légion belge qui n'avait pas reçu de prêt depuis quelque temps; nous croyons devoir vous observer que ces besoins indispensables seront remplis, lorsque la solde aura été payée sur le pied des troupes françaises, conformément au décret qui met cette légion à la solde de la République. Vous n'ignorez pas, d'ailleurs, que les dispositions de ce décret n'auraient dû être
exécutées qu'à compter de la revue et des réformes qu'il ordonne; il ne faut pas que des paiements anticipés et provisoires soient un prétexte pour éluder ou pour retarder cette revue et les réformes qu'elle pourra entraîner; ainsi notre réquisition ne doit avoir d'effet que pour ce mois de février; il reste encore beaucoup plus de temps qu'il n'en faut pour l'exécution du décret; nous prévenons le général Rozière de l'avis que nous vous donnons, afin qu'il ne néglige aucun moyen de hâter la revue prescrite par la loi qui met la légion belge sur le pied des troupes françaises.
« \ Signé : Camus, Delacroix, Gossuin, Danton, merlin^ezwaij; Treilhard. »
N° 4.
Bruxelles, le
« Les commissaires de la Convention nationale, au général Rozière.
« En vous instruisant de la réquisition que nous avons faite au commissaire-ordonnateur Petit-Jean de pourvoir provisoirement aux besoins indispensables de la légion belge, nous vous avons exposé la nécessité pressante de faire passer la revue, et de faire subir les réformes ordonnées par le décret qui met la légion à la solde de la République. Nous écrivons encore aujourd'hui pour cet objet au commissaire-ordonnateur, et nous vous envoyons copie de notre lettre, afin que vous sentiez encore plus combien il est indispensable, pour la légion, de hâter l'exécution de cette partie du décret.
(( Signé : Camus, Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai); Treilhard. »
N° 5.
« Du
Les commissaires de la Convention nationale près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc.,
Yu le mémoire présenté par le citoyen François-Jean Rens, négociant de la ville de Gand, par lequel il expose avoir fait plusieurs fournitures de draps et autres objets d'habillement pour les troupes belges, et demandé à en être payé par la République française, les états desdites fournitures faites sur la réquisition du comité militaire et des chefs des corps belges; le décret de la Convention nationale, du 26 anvier dernier, portant entre autres dispositions : « Qu'avant de statuer sur toutes demandes des légions belges, autres que celles qui sont relatives au paiement de la solde^ lesdites légions seront tenues de rendre compte aux officiers chargés de passer leurs revues, des rations de fourrage, numéraire et autres effets qu'elles ont reçus » y « Arrêtent que le citoyen Rens présentera son mémoire et les pièces à l'appui au commissaire-ordonnateur des guerres Petit-Jean,, pour être le tout par lui examiné, ordonnancé, et payé, s'il y a lieux sur les fonds de la Répu-
blique, après que les dispositions du décret du 26 janvier dernier auront été mises à exécution.
« Fait à Bruxelles, les jour, mois et an que dessus.
« Signé : Camus, Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
N° 6.
« Au nom de la République française,
« Les membres de la Convention nationale, •ses commissaires près l'armée, et dans les pays •de la Belgique, de Liège, etc., informés par une lettre du commissaire des guerres Piet-Cham-Sbelle, en date de ce jour, de l'état de détresse «dans lequel se trouve, par faute de prêt, le •corps de Belges en garnison à Louvain, et de la nécessité de faire délivrer à ce corps une somme de 5,000 livres pour subvenir à ses besoins urgents; et considérant qu'en attendant la parfaite exécution du décret de la Convention nationale, du 26 janvier dernier, il serait du plus grand danger de laisser sans prêt une troupe que la République française a reçue à son service;
« Arrêtent que le payeur général des troupes françaises à Bruxelles, est autorisé à compter aiPquartier-maître du corps des Belges, dont il s'agit, ladite somme de 5,000 livres, de laquelle il sera rendit compte lors du complément de l'exécution dudit décret du 26 janvier dernier.
( Fait à Bruxelles, le 26 février 1*793, l'an II de la République française.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
7
Au nom de la République française,
-(( Les membres de la Convention notionale, ses commissaires près l'armée et dans le pays do la Belgique, de Liège, etc., sur la représentation à eux faite par les officiers du corps des Belges en garnison à Bruxelles, que depuis 3 mois ils n'ont point reçu d'appointe-ment, ce qui les a obligés à contracter des dettes, et les met dans le besoin; considérant qu'en attendant la plus parfaite exécution du décret de la Convention nationale du 26 janvier dernier, il serait du plus grand danger de ^ différer à solder des militaires que la République a reçus à son service;
« Yu l'état de revue de ce jour-ci, certifié par le commissaire des guerres Malus, fils, qui constate que 22 officiers sont présents au corps ;
(( Arrêtent que le contrôleur des dépenses de l'armée de la Belgique à Bruxelles, est autorisé à compter au quartier-maître des Belges, une somme de 6,000 livres de laquelle r- somme il sera rendu compte lors du complément de l'exécution dudit décret du 26 janvier dernier.
« Fait à Bruxelles, le 28 février 1793, l'an II *de la République.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
N° 8.
« Au nom de la République française.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc.; vu le mémoire à eux présenté aujourd'hui par le jconseil d'administration du corps de Belges en garnison à Louvain; ensemble les états énoncia-tifs des revues du même corps, en date du 23 février dernier, visés par le commissaire des guerres Ris, et considérant qu'il est indispensable de subvenir aux besoins dudit corps, en attendant que le commissaire-ordonnateur en chef de l'armée de la Belgique ait donné les ordres nécessaires pour le paiement du prêt auquel il a droit, d'après le décret du 26 janvier dernier;
« Arrêtent que le payeur général de l'armée de. la Belgique est autorisé à délivrer au quartier-maître dudit corps, la somm'e de 12,000 livres, pour être employée au paiement du prêt dû aux soldats et aux appointements dûs aux officiers du même corps, suivant les proportions usitées pour les troupes de lignes de la République, le tout à la charge d'en compter à qui et quand il appartiendra.
« Fait à Louvain, le 1er mars 1793, l'an II de la République.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
9.
« Aux citoyens commissaires de la Convention.
« Citoyens,
« Je vous présente le tableau de la formation d'une compagnie d'ouvriers que je suis chargé de recruter; comme il est important que cette compagnie soit d'abord formée pour commencer les travaux qui sont en grand nombre à l'arsenal de Malines, je vous prie de m'autoriser à recevoir une somme "de 6,000 livres, qui, je crois, pourra suffire à remplir cet objet.
« Je suis avec fraternité,
« Signé : G. Lahure, premier lieutenant v d7artillerie. »
« Le payeur général des dépenses de l'armée est autorisé, vu l'urgence des circonstances, à payer au commandant de la compagnie de l'artillerie belge une somme de 6,000 livres pour l'usage projeté, sauf la retenue lors du paiement qui devra être fait à cette compagnie, de sa solde, en exécution du décret du 26 janvier dernier; auquel effet copie des présentes sera remise au commissaire-ordonnateur de l'armée de la Belgique.
« Fait à Bruxelles, le 5 mars 1793, l'an II de la République.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai).
N° 10.
« Au nom de la République française.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays dç la Belgique, de Liège, etc. ; considérant que
la presque totalité des communes du Hainaut a émis son vœu pour la réunion de ce pays à la République française; qu'ainsi les habitants de ces communes doivent se considérer comme Français, et qu'il leur importe autant qu'aux Français eux-mêmes de concourir à la défense de la liberté et à l'anéantissement de la tyrannie; arrêtent ce qui suit :
« Art. 1er. L'Administration provisoire de
Mons est requise d'organiser sans délai les citoyens de toutes les
communes du Hainaut en gardes nationales, à l'instar de celles qui ont
été formées en France.
« Art. 2. Les citoyens Clesse, Lilierre et Huper sont nommés commissaires à l'effet de presser cette organisation; et l'administration provisoire de Mons est requise de leur adjoindre tel autre nombre de citoyens qu'elle jugera nécessaire à cet effet.
« Art. 3. Les gardes nationales, aussitôt après leur formation, seront en état de réquisition permanente, et se tiendront prêtes à marcher.
« Art. 4. Les commissaires-ordonnateurs des armées françaises tiendront prêt le nombre d'armes nécessaires pour armer lesdites gardes nationales; et l'administration provisoire de Mons est requise de faire incessamment fabriquer deux mille piques pour servir d'armes supplémentaires aux citoyens qui resteront dans les garnisons.
« Art. 5. Le présent arrêté sera imprimé, publié et affiché partout où il appartiendra, à la diligence de l'administration provisoire de Mons.
« Fait à Bruxelles, le 5 mars 1793, l'an II de la République.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Danton, Merlin (de Douai). »
11.
Du
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans las pays de la Belgique, de Liège, etc.
« Arrêtent que les administrateurs provisoires de Mons et autres communss de la ci-devant province du Hainaut-Belgique, donneront dans les 24 heures, au général Ferrand, un état de tous les citoyens qui se sont enrôlés ou inscrits pour servir dans les troupes de la République française; que tous lesdits citoyens seront dès à présent à la disposition de la République pour être employés selon l'arme pour laquelle il se sont enrôlés ou inscrits, dans les lieux et dans les corps qui leur seront indiqués par le conseil exécutif provisoire et par les généraux; qu'à cet effet le général Ferrand enverra au ministre de la guerre et au général Dumouriez un double de l'état desdits citoyens enrôlés ou inscrits.
« Les incorporations qui pourront avoir lieu aux termes du présent arrêté, se feront sans préjudicier au décret qui assure aux officiers belges le grade dont ils étaient en possession à l'époque dudit décret. A l'égard des nominations qui auraient été ou seraient
postérieures audit décret, elles sont nulles et n'auront aucun effet.
« Fait à Mons, les jour, mois et an que-dessus.
« Signé : Camus, Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
Art. 12.
Défaite de Vavant-garde cantonnée sur les bords de la Roër. — Levée du siège de Maastricht. — Evacuation de Liège. — Suites de cet événement.
« La Convention nationale nous a chargé» spécialement par un décret du 10 mars,^ de-prendre des renseignements sur ces événements dés'astreux; nous l'avons fait (1); et d'après son décret du 12 avril nous avons remis à l'accusateur public du tribunal criminel extraordinaire, les pièces que nous, avions recueillies à ce sujet (2).
Outre ces pièces, il est des dispositions que nous avons faites, et dont nous devons rendre compte.
N° 1.
Bruxelles, le
v m Les commissaires de la Convention nationale au général Valence, à Liège.
« Nous vous envoyons, citoyen général, une lettre qui contient des faits importants; vous . en ferez l'usage que votre civisme et votre prudence sous suggéreront.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai).
r Copie d'une lettre écrite aux commissaires
de la Convention nationale dans la Belgique. -
« Citoyens commissaires,
( Je manquerais à mon devoir et à la patrie, : si je ne venais vous dénoncer les faits de nature à compromettre le salut de la iiépu-blique.
« Né dans le Limbourg, mais depuis six ans
citoyen de...... je me suis appliqué à découvrir
les manœuvres criminelles de plusieurs individus aristocrates du pays de Limbourg et
- d'Aix-la-Chapelle.
« Des charretiers et autres m'avaient ins-? truits vaguement de ce qui s'y passait; mais jusqu'ici je n'avais encore acquis aucune notion positive pour déterminer ma dénonciation; mais hier ayant trouvé un charretier de Limbourg, je lui ai demandé des nouvelles du pays; et voyant qu'il ne répondait pas entièrement à ce que je désirais savoir, je suis entré dans ses sentiments aristocratiques; j'ai vanté la bravoure des troupes autrichiennes, et ce langage m'a valu sa confiance. Oui, me dit-il pour lors, puisque vous pensez si bien, ces braves troupes seront bientôt dans le Limbourg; nous en recevons souvent des avis à' n'en plus douter; nous avons une correspondance secrète; et des personnes d'Aix-la-Chapelle, qui pensent comme nous, se rendent même souvent chez le général autrichien à Berghem, pour lui rendre compte de ce qui se passe dans le pays, et ce général
- compte beaucoup sur les officiers français de la troupe de ligne.
( Cet homme m'a aussi parlé de Maëstricht; il m'a dit que 700 Prussiens étaient entrés dans ladite ville, et que les Autrichiens qui sont dans le pays de Juliers comptaient de rentrer dans le Limbourg, pendant que les troupes françaises s'amuseraient à faire le siège de Maëstricht.
« Je soumets ces faits à vos lumières, citoyens commissaires, pour qu'elles puissent arrêter tout ce qui tendrait au détriment de la liberté et de l'égalité, et faire saisir les espions et autres personnes qui pourraient nuire au succès des armes victorieuses! de la République française.
« Si ma fortune égalait mon zèle et le civisme dont j'ai donné les preuves, je serais déjà parti pour Aix-la-Chapelle, pour découvrir ces traîtres; la connaissance que j'ai de la langue de ce pays, secondée du désir que j'ai de servir ma patrie, m'en fournirait aisément Je moyen.
« J'ignore, citoyens commissaires, si dans le Limbourg et à Aix-la-Chapelle il existe des comités de surveillance; mais, dans la supposition de cette existence, ils sont, j'ose le dire, composés de personnes ou suspectes, ou qui ne prennent pas assez de précautions, et qui ne surveillent pas d'assez près les messagers qui dans le pays portent les paquets ou les lettres d'une ville ou d'un village à l'autre.
« Si mes faibles talents peuvent servir la patrie, j'offre, citoyens commissaires, de les employer de tout mon pouvoir, et de verser tout mon sang, s'il le faut, pour défendre la liberté et l'égalité (1).
N° 2.
(( Les commissaires de la Convention nationale près l'armée et dans le pays de la Belgique de Liège, etc., au général Dumouriez, commandant en chef l'armée de la Belgique.
« Nous arrivons, citoyen général, dans cette ville au moment où y parvient la fâcheuse nouvelle de l'évacuation d'Aix-la-Chapelle, nécessitée par un échec qui jette l'épouvante et l'alarme dans tout le pays.
(( Nous venons d'avoir sur tout cela une conférence avec les généraux Yalence et Thowe-not; il paraît, suivant eux, que votre présence est indispensable ici, parce qu'il y a de nouvelles mesures à concerter : Yenez donc et promptement, s'il est possible; au surplus, c'est à vos lumières que nous en appelons.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
Au Moërdick, le
« Le général Dumouriez aux .citoyens commissaires de la Convention nationale.
« Citoyens commissaires,
« Je suis très sensible à l'échec qui nous a fait abandonner Aix-la-Chapellej et qui nécessite la levée du siège de Maëstricht. Il réduit notre grande armée à une défensive régulière, dont les généraux "Valence et Miranda connaissent parfaitement tous les détails. Ils seront très bien secondés par les avis du général Thowenot; et à moins qu'on ne perde absolument la tête, ce qui ne peut pas être, je ne vois pas comment 25 à 30,000 hommes pourraient se hasarder à passer la Meuse devant plus de 50,000 hommes réunis, qui n'ont, pendant quelques jours, d'autre objet que de défendre ce passage. Il n'y a donc rien à craindre; et si l'ennemi, enhardi par le succès, faisait cette tentative, il serait aisé de l'accabler. Je suis ici occupé à deux sièges; je rassemble un second corps d'armée près d'Anvers, sous le maréchal de camp Deflers; si Williemstat et Gertruydenberg sont rendus demain ou après-demain, comme je l'espère, -ce succès dédommagera suffisamment de l'échec de notre avant-garde. Si ces deux sièges se prolongent, je ne m'y obstinerai pas : je viendrai moi-même à l'armée, et je lui amènerai un renfort de plus de 20,000 hommes, me contentant de garder Breda et Klundert. J'espère qu i les ordres donnés pour fortifier Malines s'exécutent. Pressez les généraux pour qu'ils fassent achever ce qui est nécessaire pour mettre cette ville à l'abri d'un coup de main.. J'espère que l'armée se souviendra toujours de sep victoires de Jemmapes, de Bruxelles, de Tirlemont et de Liège, et qu'elle ne fera rien d'indigne de sa gloire et de la noble cause qu'elle défend. Pressez la réunion de tous les corps qui peuvent arriver de France, pour compléter et augmenter cette hrave armée, dont le fond actuel, si tous les corps étaient complets est de plus de 130,000 hommes. Il n'y a donc pas de quoi se décourager, pas même de quoi s'inquiéter, en se bornant, pendant un quinzaine de jours, à une défensive régulière, que nous changerons bientôt en une offensive terrible.
« Signé : Dumouriez, général en chef. » N° 3.
Liège, le 3 mars 1793, l'an II de la République.
( Les commissaires de la Convention nationale au général Dumouriez.
« Yous avez dû recevoir, citoyen général, plusieurs dépêches du général Yalence qui vous attend ici avec la plus grande impatience. Nous vous avons écrit, et nous avons joint nos instances aux siennes. Les circonstances sont bien pénibles, pour ne rien dire de plus. La situation de l'armée est désolante : elle vous cherche, elle vous demande; rendez-vous, venez la rassurer et la conduire encore une fois dans, le chemin de la victoire. Nous
rendons compte à la Convention nationale de notre démarche pour vous appeler ici, et nous ajoutons que nous espérons que vous y serez demain (1).
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
A Moërdick, le
Le général Dumouriez aux commissaires de la Convention nationale.
Citoyens commissaires,
« Yous n'aviez point encore reçu ma réponse à votre première lettre, lorsque vous m'avez dépêché hier le courrier auquel je réponds sur-le-champ. Je vois par les rapports du général Lanoue, du général Thowenot et du général Miranda, qu'excepté l'évacuation d'Aix et la levée du cantonnement de la Roër, qui a occasionné la levée du siège de Maastricht, il n'y a point de danger ni de désastre qui doive occasionner le renversement d'un plan de campagne dont peu de jours suffisent pour recueillir les plus grands fruits. Je vous déclare : que j'ai mandé à la Convention nationale ce que j'ai dit et écrit au pouvoir exécutif; c'est que nous ne pouvons sauver les Pays-Bas que par la prise de la Hollande; par conséquent je regarde cette campagne-ci, non seulement comme perdue, mais encore comme pouvant nous attirer tous les maux dans la République, si le plan en est dérangé. Je me décharge entre vos mains de toute responsabilité personnelle. Après cette déclaration positive que je dois à ma patrie, je vous prie d'assembler un conseil de guerre, d'y faire représenter les deux lettres que j'ai écrites au général Miranda, trois que j'ai écrites au général Valence, une au général Lanoue, et les deux que l'adjudant général Thowenot a écrites par mon ordre au général Thowenot son frère. Pesez bien mûrement ce qui est contenu dans ces lettres; décidez ensuite, et alors j'obéirai quoi qu'il doive en arriver.
« Comment est-il possible qu'une armée double de celle devant laquelle elle a reculé, puisse craindre des ennemis qu'elle a toujours vaincus ? Je connais votre énergie, citoyen commissaires; inspirez-la à cette armée. S'il ne s'agissait ici que de ma gloire particulière, je partirais sur-le-champ, mais il s'agit du salut de l'Etat; et c'est le seul motif qui m'engage à attendre votre dernière résolution. Je vous prie de me répondre sur-le-champ (2).
« Signé : Dumouriez général en chef. »
N"0 4.
Les commissaires de la Convention nationale près de l'armée de la Belgique, aux bataillons de l'avant-garde.
« Braves guerriers, demeurez fermes à vos postes; la patrie, votre propre gloire et vos droits à l'égalité vous en font un devoir. Quoi ! regarderiez-vous comme un revers d'avoir été surpris dans quelques-uns de vos cantonnements par une force ennemie? C'est un avertissement pour vous de redoubler de surveillance. Vous combattez pour la liberté : continuez de vaincre; assurez-vous que cette campagne sera pour la France aussi brillante que la dernière; votre courage nous en répond. Soldats de la République, vos frères des départements sont tous sous les armes; ils voleront au besoin à votre secours. Obéissance aux généraux, confiance dans leurs opérations et activité pour l'exécution, voilà comment s'est toujours montrée l'armée française. Il sera fait justice des lâches qui s'avisent de répandre l'alarme, tandis que vos frères d'armes sont vainqueurs et bien accueillis dans la Hollande, et que vos forces sont suffisantes pour repousser au delà du Rhin les aveugles satellites des despotes qui nous font la guerre la plus injuste et la plus outrageante.
« La Convention nationale se repose entièrement sur votre bravoure.
( Fait à Liège, le 2 mars 1793, l'an II de la République.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
5.
Les commissaires de la Convention nationale de France, au peuple libre de la ville et du pays de Liège.
« Braves Liégeois, vos ennemis, qui sont aussi les nôtres, cherchent à vous tromper; ils vous peignent comme une déroute complète le léger échec d'avant-poste qu'a essuyé hier dans les cantonnements voisins d'Aix-la-Chapellei, une faible portion des armées françaises, attaquée par des forces très supérieures; mais que leurs manœuvres ne vous en imposent pas. Les soldats français ont fait une retraite digne de la République qu'ils défendent; ils occupent maintenant un poste avantageux d'où ils attendent fièrement les satellites de vos anciens tyrans; et les deux armées que commandent Miranda et Yalence sont là pour les soutenir au' besoin.
« Pour vous, braves Liégèois, soyez fermes, tenez-vous prêts à marcher au premier signal, et si les Français ont besoin de secours, allez vous confondre dans leurs rangs et partager avec eux la gloire d'anéantir vos despotes.
Fait à Liège, le 2 mars 1793, l'an II de la République.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
6.
( Au nom de la République française,
Les membres de la Convention nationale, etc., vu le mémoire ci-dessus (1) requièrent le commissaire-ordonnateur en chef Petit-Jean, de mettre sur-le-champ à la disposition du comité militaire de l'administration provisoire de la ville et du pays de Liège, deux mille fusils qu'il se procurera, soit chez les fournisseurs liégeois, soit dans les dépôts de la République existant à Liège, sauf à en compter ci-après par qui il appartiendra.
« Fait à Liège, le 3 mars 1793, l'an II de la République.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai). »
N° 7.
« Au nom de la République française,
« Les membres de la Convention nationale, etc.,
« Considérant que dans la pénurie de généraux où se trouve actuellement la partie de l'armée retirée à Liège et aux environs, il importe qu'il existe un point central d'autorité militaire , auquel on puisse s'adresser à chaque instant;
( Requièrent le général Thowenot, chef de l'état-major de l'armée, d'établir au quartier général un comité composé de militaires, pour pourvoir sur-le-champ aux demandes et aux besoins des troupes.
« Fait à Liège, le 3 mars 1793, de la République.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai); »
N"0 8.
« Au nom de la République française,
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée, etc.,
« D'après la réquisition du général Thowe-
not, chef de l'état-major de l'armée de la Belgique, contenue dans sa réponse à leur arrêté relatif à l'établissement d'un comité militaire au quartier général, pour pourvoir aux demandes et aux besoins des troupes, dans les circonstances critiques où elles se trouvent en ce moment;
« Arrêtent que le commissaire-ordonnateur en chef, Petit-Jean, est autorisé à ordonnancer les dépenses "urgentes que le comité dont il s'agit sera obligé de faire, et ce, jusqu'à ce qu'il en ait été autrement ordonné.
« Fait à Liège, le 3 mars 1793, de la République.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai). » 9.
( Au nom de la République française,
( Les membres de la Convention nationale, ses commissaires, etc.,
« Autorisent et chargent l'un des commissaires nationaux du pouvoir exécutif, actuellement à Liège, de quelque arrondissement qu'il soit, de procéder, conjointement avec l'administration provisoire de la ville et pays de Liège, à la levée des scellés apposés en exécution du décret du 15 décembre 1792 sur tous effets, papiers et argents, et de prendre de concert avec ladite administration, toutes les mesures nécessaires pour mettre lesdits effets, papiers et argent, en lieu de sûreté (1).
« Fait à Liège, le 3 mars 1793, l'an II de la République.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai). »
En même temps que les commissaires de la Convention prenaient les mesures indiquées par les pièces ci-dessus, ils ne négligeaient rien pour rallier les troupes, et les déterminer à faire face à l'ennemi. Tout paraissait d'abord seconder leurs vœux, et les courses qu'ils avaient faites dans la journée du 3 mars, leur laissaient de grandes espérances. La conférence qu'ils, eurent le soir de ce même jour avec les généraux Valence, Miranda et Thowenot, les rassura encore davantage, par les mesures qui y furent arrêtées pour la défense de Liège. Mais ces mesures furent aussitôt rompues par la prise de Tongres que le général Miranda assurait être impossible.
Il est à remarquer qu'à cet époque et dans la conférence dont on. vient de parler, les généraux ne connaissaient ni le nombre, ni la position de l'ennemi.
De là, la précipitation et le désordre avec lesquels s'est fait l'évacuation de Liège, malgré les mesures que nous avions concertées à ce sujet avec le commissaire-ordonnateur Petit-Jean, mais que la légèreté ou la malveillance des généraux ont rendues inutiles.
Celui-ci nous a assuré, peu de temps après, que la République y. avait perdu une grande quantité de vivres, de fromages, et d'habille-
ment. Qu'il y était resté environ 100,000 fusils appartenant en partie à la nation, pour le eompte de laquelle ils avaient été achetés en cette ville, et en partie à des marchands liégeois, qui ne demandaient qu'à les lui vendre.
Quant aux suites de l'évacuation de Liège, par rapport aux commissaires de la Convention, voici ce .qui s'est passé :
D'après un arrêté pris le 5 mars, et qu'on trouvera ci-après, art. 13, Delacroix et Danton se sont rendus à Paris; Gossuin et Merlin se sont portés dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais, pour une grande opération, dont le même article présentera tous les détails.
A l'égard de Camus et Treilhard, les trois lettres suivantes rappelleront ce qu'ils ont fait.
N° 10.
« Tirlemont, le
« Les commissaires de la Convention nationale près l'armée et dans le pays de la Belgique, etc., à leurs collègues composant la Convention nationale.
« Citoyens nos collègues, lè désir de vous donner promptement des nouvelles positives de l'armée et l'invitation des généraux, nous ont déterminés à nous rendre dès aujourd'hui au quartier général que nous avons trouvé établi à Tirlemont. Une partie des troupes est encore au delà de Tirlemont du côté de Liège, à Saint-Tron; une partie est aussi en dejça de Tirlemont, du côté de Bruxelles, à Louvain. Nous avons vu au quartier, le général Valence qui commande l'armée en chef; les généraux Miranda, Ruault, Lanoue, Egalité, Thowen not, etc. Leur plan arrêté en commun est de camper derrière Louvain en portant les avant-postes vers Tirlemont, d'y réunir toutes les parties de l'armée; et les y tenir quelque temps pour qu'elles puissent s'y refaire.
Le camp sera formé, et après-demain 10, toute l'artillerie de campagne y sera réunie; on commence déjà à la faire filer de Bruxelles où elle avait été ramenée, sur Louyain.
« Ces opérations sont concertées avec Dumouriez; elles sont bien d'accord entre tous les généraux. Ils nous ont communiqué quelques détails dont nous rendons compte par une lettre particulière au comité de défense générale.
« Les troupes de ligne et les bataillons de volontaires qui ont été forcés de se retirer en deçà de la Meuse, se sont trouvés composés de deux espèces d'hommes, Le plus grand nombre étaient de braves soldats qui ont fait la retraite dans le meilleur ordre, et qui ont souffert les fatigues avec un courage admirable -et des sentiments qu'or ne peut trop respecter. Leur regret était d'abandonner les Liégeois qu'ils appellent leurs frères, et leur plus grande peine était de voir qu'ils étaient nécessités de faire des marches rétrogrades : on les a consolés en les assurant que la marche de demain serait la dernière de ce genre, et en leur expliquant les raisons qui déterminent à réunir toute l'armée derrière Louvain. Pour
ces braves républicains, le revers qu'ils ont éprouvé ne fait qu'enflammer leur courage, et leur faire sentir la nécessité de la discipline et de la vigilance : ils retourneront plus terribles au combat.
(( Mais il était dans l'armée d'autres hommes qu'il est essentiel de vous faire connaître, et contre les discours dangereux desquels les bons citoyens doivent être prémunis. Ce sont des lâches, indignes du nom de Français, qui ne cherchent au moment du combat que le prétexte d'abandonner le champ de Bataille, et qui pour colorer leur fuite, crient à la trahison, et accusent indistinctement tous les généraux qui les conduisent à la bataille. Une grande partie de ces soldats se rendaient à Bruxelles où ils venaient semer le trouble et la confusion; nous en avons rencontré plusieurs, qui aujourd'hui encore et lorsqu'ils ne peuvent plus s'excuser sur un premier mouvement de terreur, fuyaient leurs drapeaux. Le général Duval, qui commande dans le Brabant, a donné d'après notre réquisition, des ordres pour que les portes de Bruxelles leur fussent fermées et qu'ils fussent contraints de retourner au camp.
« Il s'annonce cependant d?ailleurs, et nous devons vous en prévenir, des plaintes au moins de défaut de vigilance contre quelques officiers qui commandaient à l'avant-garde, mais elles n'ont pas encore assez de consistance et de précision pour les mettre sous vos yeux : nous en approfondirons les motifs et nous vous les ferons connaître. Nous retournerons au camp lorsqu'il sera formé; quant à présent (dix heures du soir) nous retournerons à Bruxelles, où la tranquillité se conserve, mais seulement au moyen d'une surveillance immédiate et très active.
« Signé : Camtjs, Treilhard. » N° 11.
Bruxelles, le
« Camus et Treilhard, commissaires de la Convention à leurs collègues composant le comité de défense générale.
« Citoyens nos collègues, de retour ici d'une course que nous venons de faire à Louvain à Tirlemont où nous avons conféré avec les généraux, nous vous écrivons pour vous donner quelques détails particuliers que nous annonçons dans une lettre à la Convention, mais qui ne doivent pas être connus du public.
« Nous avons trouvé réunis les généraux, à l'exception de Steingel qu'on nous a dit être à Namur, et de Dampierre et La Marche qui étaient à Saint-Tron. Lamarlière était à Louvain. Les généraux nous ont paru parfaitement d'accord sur le parti qu'ils allaient prendre de camper à Louvain; cependant il paraît que Miranda se séparera de Valence qui a maintenant le commandement en chef et qu'il ira se réunir avec Dumouriez. Les généraux sont en correspondance suivie avec Dumouriez; leur plans sont concertés avec lui.
« Ce qui les a déterminés à prendre une
position derrière Louvain et non plus avant vers Liège, est pour avoir un camp bien assuré, où le soldat puisse être à l'abri de toute inquiétude pendant qu'on va recomposer l'armée, et où il puisse se reposer de dix jours de bivouac.
« Cette position a l'avantage de couvrir lès magasiné qui sont à Louvain, et la place de Malines qui devient importante à cause du passage que les ennemis pourraient y chercher, pour couper Dumouriez par derrière. Elle a l'avantage encore de conserver des communications avec Anvers et Mons, de défendre Bruxelles et la Belgique, de faciliter l'envoi de secours à Dumouriez.
« Il aurait été impossible, au surplus, de prendre une position entre Louvain et la Meuse; il ne s'y trouve aucune place qui puisse fournir les ressources de Louvain; et dès que Maëstricht n'est plus neutre, les généraux jugent qu'on ne saurait se rétablir dans Liège avec quelque espérance de s'y conserver.
h Le général Duval qui commande en Bra-bant a eu soin de faire évacuer tout ce qui se trouvait dans l'arsenal de Malines; il l'avait fait porter d'abord sur Gand; nous l'avons engagé à faire tout transporter à Douai.
« Les généraux paraissent au total fort tranquilles; ils assurent que les soldats qui sont restés au drapeau ne sont nullement décoùragés, et ont pleine confiance en eux. Ils ne craignent maintenant qùe pour l'espace situé entre Givet et Longwy; ils observent que cette dernière place n'est pas en état de défense; ils demandent qu'on y envoie un officier général actif avec une armée suffisante. Ils estiment qu'il peut y avoir 25,000 hommes dans le Luxembourg.
« Au nombre des causes qui ont pu occasionner les revers de l'avant-garde, les généraux mettent la négligence des chefs de corps à se trouver à leurs postes. Ils se plaignent aussi de la gendarmerie; Miranda s'en plaint plus particulièrement; il" paraît que ce corps désorganise entièrement l'armée, sans lui rendre de grands services par la manière dont il sert.
« Dans plusieurs campagnes il s'est formé des insurrections assez fortes; on les a apaisées en y envoyant autant qu'il a été possible de la force armée. Ces insurrections ont eu lieu même dans les lieux où la réunion a été votée.
« Il est indispensable d'assurer la discipline de l'armée, en prenant des moyans pour que les officiers soient présents à leurs corps et les surveillent, partout nous avons reçu des plaintes d'excès qui ne viennent pas du gros de la troupe, mais de quelques mauvais sujets que l'on ne peut contenir lorsque les chefs sont absents. Ces brigandages nous font des ennemis parmi le peuple; on assure qu'à Aix-la-Chapelle quelques bourgeois ont tiré sur nos troupes; ce qui est certain, c'est qu'elles ont été insultées.
« Nous n'avons pas pu encore savoir des nouvelles de ce qui s'est passé à Liège après la sortie des troupes de la République; nous savons seulement que lés administrateurs provisoires de la ville se sont échappés, et sont en sûreté. »
N° 12.
Bruxelles, le 11 mars 1793, l'an II dé la République française.
( Camus et Treilhard, commissaires de la Convention, à leurs collègues composant le comité de défense générale (1).
« Les généraux ont exécuté le plan que nous avons dit qu'ils avaient formé de se retirer entièrement sur Louvain, en laissant seulement l'avant-garde vers Tirlemont. Ils ont fait camper un tiers de la troupe et cantonner dans les environs les deux tiers. Ils ont envoyé Larmarlière et Champmorin verscDiest et Malines; Harville et Neuilli sont à Namur; ils estiment toutes ces parties d'armées réunies à près de 40,000 hommes; ils estiment à 30,000 hommes les forces des ennemis, dont les postes avancés sont à Saint-Tron. Plusieurs rapports leur annoncent que Clairfait est lui-même dans cette ville de Saint-Tron, que nous avons ainsi entièrement évacuée, nous avons pareillement évacué le 9 de la ville de Hu.
« Hier, à 4 heures après midi, à Tirlemont, un magasin où il y avait- des cartouches a sauté; quelques hommes ont péri.
« Les généraux se croient, dans l'état où ils sont, à l'abri de toutes surprises; ils n'ont voulu prendre entre eux aucun plan ultérieur, s'en rapportant entièrement à Dumouriez qu'ils ont sollicité de venir. Dumouriez, arrivé ce soir, a approuvé la position actuelle à Louvain; à l'égard des plans ultérieurs, il était.trop tard lorsqu'il est arrivé pour s'en occuper et les arrêter; nous n'avons pas pensé qu'il fût possible que nous demeurassions plus longtemps absents de Bruxelles, ainsi nous ne saurions nous instruire aujourd'hui de ces plans.
« Yous voyez dans la détermination que les généraux ont prise de tout suspendre jusqu'à ce que Dumouriez eût prononcé, un effet de la composition extraordinaire du corps des troupes qui est rassemblé sur Louvain; il est formé de trois armées, des Ardennes, du Nord, de la Belgique, ayant chacune leurs généraux, savoir : Yalence, Miranda, Lanoue, et chacune leur état-major. Les trois généraux, foncièrement égaux en pouvoirs, ne sont pas d'un caractère qui s'allie facilement l'un avec l'autre; les délibérations sont longues et difficiles à consommer; l'exécution éprouve les mêmes entraves de la part des trois états-majors, qui doivent y concourir également, mais qui sont indépendants l'un de l'autre. Le défaut d'harmonie entre les" généraux serait d'une conséquence funeste, s'il subsistait. La présence de Dumouriez va le faire cesser; il donnera son plan, que tous sont également disposés à suivre, et vraisemblablement il confiera à chaque général des opérations séparées.
« Une partie de l'armée est encore frappée de la terreur des échecs des premiers jours de ce mois; il y a encore des fuyards qu'on a de la peine à ramener, d'autres sont fatigués du service,_ et le refusent ou le font avec peu d'exactitude; quelques jours de campement
auprès de Louvain calmeront les esprits, et si l'on peut obtenir ensuite un succès quelconque, on les ranimera entièrement.
« Mais il est un autre mal très grand, que l'on aura beaucoup plus de peine à détruire, c'est le pillage et les excès auxquels les troupes se livrent. La discipline s'anéantit dans l'armée, et les peuples s'indisposent contre les Français; cette mauvaise disposition à notre égard peut venir en partie des causes que nous vous exposerons en parlant de l'état intérieur de la Belgique, mais elle est au moins fortement augmentée" par la conduite des troupes que se font haïr, et sur les détachements desquelles on a tiré dans plusieurs villages. Quelques prisonniers autrichiens ont été massacrés; il paraît indispensable de mettre dans les mains des généraux toute l'autorité nécessaire pour arrêter ces désordres.
« La plupart des préposés aux différentes parties de l'armée ont montré ou beaucoup d'insouciance, ou beaucoup de lâcheté, lors des retraites du 1er de ce mois et des jours suivants; aucun officier de santé n'est demeuré à Liège pour continuer le soin des malades; on y en envoie deux aujourd'hui; les préposés inférieurs des vivres avaient laissé leurs magasins dans un abandon inconcevable; on a perdu à Liège une quantité immense d'habillements.
« Il est juste, au surplus, d'observer que les malveillants cherchent à augmenter les suites de la déroute ou à les excuser, en publiant que la Convention nationale a décrété que toutes les troupes rentreraient dans l'intérieur de la République. Le général Neuilii a fait arrêter, près de Nàïnur, un homme qui semait ces bruits.
« Un des objets principaux sur lesquels nous désirons avoir des renseignements, était les causes de la . défaite de l'avant-garde le 1er mars; beaucoup de questions à cet égard ne nous ont pas procuré dès résultats suffisants. Nous voyons qu'il y a eu des fautes, mais on ne peut pas faire connaître les coupables; nous ne pouvons pas vous dissimuler, à cette occasion, que nous ne saurions être pleinement satisfaits de la manière dont les généraux s'expliquent avec nous; il n'y a ni cette ouverture ni cet abandon franc et loyal que nous aimerions à voir; on n'a d'explications que celles que l'on force par des questions précises. Relativement à l'affaire de l'avant-garde, le général Lanoue envoie au ministre de la guerre une relation, dans laquelle vous verrez que deux corps sont fortement inculpés; nous joignons ici un mémoire relatif au général Lamarlière, "qui nous a été remis par les commissaires du pouvoir exécutif; enfin, on se réunit à se plaindre que les chefs de corps n'étaient point à la tête de leurs troupes, mais on ne dit pas quels sont ces chefs qui manquaient.
« Nous pensons, citoyens, qu'il serait à propos que la Convention ou le pouvoir exécutif, par ses ordres, envoyassent au camp de Louvain des personnes au fait des règles et des expéditions militaires, pour obtenir des connaissances que nous . croyons nécessaires à prendre, afin de punir les négligences et les coupables; nous sommes persuadés qu'il en existe, les généraux provoquent eux-mêmes ces instructions.
( Signé : Camus, Treilhard. »
On doit encore mettre au nombre des suites, tant de l'échec d'Aix-la-Chapelle, que de l'évacuation de Liège, les secours qui ont été accordés aux patriotes liégeois, réfugiés dans la Belgique auprès des Français. Yoici ce qui a été écrit sur cet objet à la Convention nationale, par Camus et Treilhard.
N° 13.
Bruxelles, le 9 mars l'an II de la République.
( Camus et Treilhard, commissaires de la Convention nationale près l'armée et dans le pays de la Belgique etc., à leurs collègues composant la Convention nationale.
« Citoyens nos collègues,
« Plusieurs membres de l'administration provisoire de la ville de Liège sont venus ce matin nous rendre compte de leur position et de la détresse de plusieurs de leurs concitoyens. L'entrée des Autrichiens dans la ville les a forcés à en sortir précipitamment, en y laissant familles, papiers, argents et tout ce qu'ils avaient de précieux. Ils se sont réfugiés à Bruxelles et aux environs, où ils se trouvent au nombre de plus de 200, sans logement et sans fonds. Nous avons sur-le-champ requis les représentants provisoires de la ville de Bruxelles, de .disposer une ou plusieurs maisons où les réfugiés de Liège pussent se retirer. Nous pensons qu'à ce premier secours, il serait à propos d'en joindre un second, ce serait celui de quelques fonds, qu'il faudrait distribuer par forme de prêt, aux Liégeois forcés, par leur attachement à la France, de quitter leur patrie. Nous attendons vos ordres à cet égard.
« Signé : Camus, Treilhard. »
Sur cette lettre la Convention a rendu, le 13 mars, un décret, d'après lequel nous avons pris le 19, l'arrêt suivant :
N° 14.
Du 19 mars, l'an II de la République.
« Yu le décret de la Convention nationale, du 14 mars présent mois, rendu sur la proposition de ses commissaires, portant que la trésorerie nationale tiendra à la disposition du ministre de l'intérieur, et pour subvenir aux besoins des Liégeois forcés de quitter leur patrie, une somme de 50,000 livres, laquelle leur sera distribuée, à titre d'avance, sur les arrêtés qui seront pris par les commissaires de la Convention à l'armée de la Belgique.
« Yu aussi la délibération prise le jour d'hier par les administrateurs provisoires du pays de Liège, et par les officiers municipaux de la ville de Liège assemblés à Bruxelles;
« Considérant que lesdits administrateurs et officiers municipaux méritent à juste titre la confiance de la nation française, et que personne ne peut mieux connaître les patriotes liégeois qui doivent participer aux bienfaits de la République.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays
de la Belgique, de Liège etc., arrêtent que la \ somme de 50,000 livres accordée par le décret du 13 mars présent mois, sera distribuée, con- j formément au vœu des administrateurs provisoires et officiers municipaux de la ville de Liège etc., par un bureau qu'ils établiront conformément à leur délibération du"18, lequel distribuera aux Liégeois qui sont dans le cas de participer aux bienfaits de la République, savoir : à chacun de ceux qui ne sont pas enrégimentés, 24 livres, et à chacun de ceux qui sont enrégimentés 6 livres; à la charge par les administrateurs dudit bureau, de remettre chaque semaine à la commission de la Convention nationale l'état nominatif des distributions qu'ils auront faites dans la semaine.
« Fait à Bruxelles, les jour, mois et an que dessus.
( Signé : Camus, Delacroix, Gossuin, Danton, Merlin (de Douai), Treilhard, Robert. »
« Au nom de la République,
« Il est ordonné au payeur de l'armée de la République, à Bruxelles, de délivrer aux ad- j ministrateurs provisoires du pays et officiers l municipaux de la ville de Liège, actuellement j en cette ville, la somme de 50,000 livres, énoncée j au décret du 18 de ce mois, pour en être par i eux usé, conformément à notre arrêté du jour j d'hier, dont copie est ci-dessus.
« Fait à Bruxelles le 20 mars 1793, l'an II de la République.
(( Les commissaires de la Gonvention nationale près l'armée et dans les pays de la Belgique et de Liège, etc.
« Signé : Camus,, Delacroix^ Gossuin, Danton, Merlin (de Douai), Treilhard, Robert. »
Art. 12.
« Réquisition des gardes nationales des départements du Nord, du Pas-de-Calais, de la Somme, de l'Aisne et des Ardennes.
Les gardes nationales des départements les plus voisins de la Belgique offraient un moyen prompt et facile de réparer l'échec d'Aix-la- j Chapelle et d'en faire oublier les funestes suites. Déjà elles avaient été mises en état de réquisition permanente pour le service de la Belgique même, par notre arrêté du 17 février, que la Convention nationale avait approuvé le 19 du même mois. Nous avons pensé, en évacuant Liège, que le moment était venu d'en tirer parti; et voici ce que nous avons fait en conséquence :
N° 1.
« Au nom de la République française,
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège etc, considérant qu'au milieu des élans multipliés de patriotisme, qui chaque fois manifestent de plus en plus 1 amour des peuples belges pour la liberté et j l'égalité, la tyrannie autrichienne et l'aristo- j cratie sacerdotale, sa complice naturelle osent \ encore montrer de coupables espérances; « Considérant que de bas et vils émissaires :
de l'une et de l'autre, intriguent sans cesse pour égarer les citoyens, les diviser et les- reconduire, par la guerre civile, sous l'infâme joug du despote de Yienne;
« Considérant que déjà ces hommes pervers ont osé, dans quelques villes dé_ la Belgique, exciter des désordres qui, s'ils n'avaient pas été promptement arrêtés par les bons citoyens, auraient bientôt dégénéré en mouvements contre-révolutionnaires;
« Considérant que leur audace pourrait prendre un nouvel essor, par l'affaiblissement qui opère dans les garnisons des places, l'ordre donné à plusieurs corps de troupes et sollicité par tous de marcher en avant pour chasser au loin l'ennemi commun de la France et de la Belgique; et qu'ainsi les progrès mêmes des armées de la liberté, pourraient devenir funestes à ses amis belges, s'il n'était pris des mesures pour mettre ceux-ci à l'abri de toute insulte;
« Considérant que de tous les citoyens français, ceux qui habitent les départements les plus voisins de la Belgique, sont par là même plus à portée que tons les autres de contribuer à son entier affranchissement; qu'ils n'ont pas oublié leur antique fraternité avec les Belges; qu'après avoir partagé avec eux, sous leur antique nom d'habitants de la Gaule Belgique, la gloire de vaincre, les premiers, les Césars de " l'ancienne Rome, ils ambitionnent actuellement celle d'anéantir les Césars de la Germanie, et qu'à cet égard leur intérêt particulier se joint à leurs sentiments fraternels, puisque l'anéantissement de la maison d'Autriche les garantira à jamais de ces invasions de territoire, qui, l'année dernière, ont répandu au milieu d'eux toutes les horreurs qu'entraînent avec soi le brigandage le plus féroce et la barbarie la plus monstrueuse;
« Yu le décret d© la Convention nationale du 26 janvier dernier, arrêtent ce qui suit :
1° « Les gardes nationales des départements du Nord, du Pas-de-Calais, de la Somme de l'Aisne, des Ardennes sont en état de réquisition permanente.
2° « En conséquense, à compter du jour de la publication du présent arrêté, elles se tiendront, sans aucune interruption, prêts à marcher avec armes et bagages, pour se rendre, au premier signal, dans les parties de la Belgique qui leur seront désignées, à l'effet d'y maintenir le bon ordre, et d'y faire respecter les personnes et les propriétés.
3° « Le présent arrêté sera publié dans toutes les communes de la Belgique, à la diligence des officiers généraux de la République française; et dans toutes celles des départements ci-dessus nommés à la diligence de leurs administrations respectives.
Bruxelles, le 18 février 1793, l'an II de la République.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
N° 2.
Bruxelles, le
( Circulaire des commissaires de la Convention nationale, aux citoyens administrateurs, composant les directoires des départements
du Nord, du Pas-de-Calais, de la Somme, de l'Aisne, des Ardennes.
( Les circonstances impérieuses qui nous, environnent, citoyens administrateurs, nous forcent de déployer avec énergie l'autorité que la Convention nationale nous a déléguée par son décret du 26 janvier dernier. Nous prenons, par l'arrêté ci-joint, une mesure grande, salutaire ,et seule capable d'en imposer aux malveillants que l'Autriche et l'Angleterre soudoient dans la Belgique. "Vous voudrez bien donner des ordres pour la très prompte réimpression de cet arrêté, le faire publier sans aucun délai dans toutes les communes dépendant de votre administration, et nous en informer. Nous comptons sur tout votre zèle; l'influence que votre patriotisme vous a méritée sur tous les bons citoyens, ne peut manquer d'assurer à nos dispositions une exécution aussi heureuse que rapide.
« Signe ; Gossuin, Merlin (de Douai). »
N° 3.
« Au nom de la République française,
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc., considérant que l'échec récemment arrivé, par l'effet d'une surprise, aux troupes françaises, cantonnées à Aix-la-Chapelle et dans les environs, démontre plus que jamais la nécessité de réunir une grande masse de forces pour anéantir ou chasser au delà du Rhin les soldats des despotes coalisés pour la destruction de la liberté et de l'égalité, qu'ainsi il importe infiniment au salut de la patrie, de faire marcher vers l'ennemi des troupes qui forment actuellement les garnisons de la Belgique, et de les remplacer par les gardes nationales des départements du Nord, du Pas-de-Calais, de la Somme, de l'Aisne et des Ardennes, mises à cet effet en état de réquisition permanente par l'arrêté des commissaires de la Convention nationale, du 17 février dernier, que la Convention nationale elle-même a approuvé par décret du 19 du même mois;
« Considérant que cette mesure devient d'autant plus indispensable et d'autant plus ur-sente, que la grande majorité des communes de la Belgique a déjà émis le vœu de la réunion à la République française; que déjà même ce vœu a été adopté par la Convention nationale relativement au Hainaut, à la ville de Bruxelles, à celle de Gand, à celle de Bruges, etc., que par conséquent, c'est pour tous les citoyens français un devoir sacré de venir protéger leurs nouveaux frères contre les entreprises des conspirateurs, qui, aujourd'hui cachés, se montreraient bientôt à découvert, si la force publique cessait de les contenir; et que ce devoir sera pour les citoyens des départements ci-dessus désignés, d'autant plus facile à remplir, que leur présence et leurs services ne seront nécessaires dans la Belgique, que jusqu'au moment où sera effectuée la nouvelle levée de 300,000 hommes, que la Convention nationale vient de décréter.
« Arrêtent ce qui suit :
Art. 1er. ( En exécution de l'arrêté des
commissaires de la Convention nationale, du 17 février dernier, et du
décret du 19 du même
mois, qui l'a approuvé, Gossuin et Merlin (de Douai) se rendront sur-le-champ, dans les départements du Nord, du Pas-de-Calais, de la Somme, de l'Aisne et des Ardennes, pour y prendre, sur l'avis des corps -administratifs, toutes les mesures que les localités leur feront juger les plus propres à faire arriver aux lieux et aux époques qui vont être déterminées, le plus grand nombre qu'il sera possible de citoyens armés :
( Savoir : .
« Ceux du département du Nord, à Bruxelles, le 18 mars présent mois;
« Ceux du département du Pas-de-Calais, à Anvers, le 24;
« Ceux du département de la Somme à Gand, le 26;
« Ceux du département de l'Aisne, à Tour-nay, le 28;
« Ceux du département des Ardennes, à Mons, le 30 du même mois.
Art. 2. «A compter du jour où chaque citoyen arrivera à sa destination, telle qu'elle est prescrite par l'article précédent, il recevra la même solde et le même traitement, en tous points, que les volontaires nationaux servant dans les armées.
Art. 3 « Chaque citoyen voyagera par étape et sera logé comme les soldats de la République. Les commissaires ordonnateurs des armées de la Belgique, du Nord et de Ardennes, donneront tous les. ordres et feront toutes les réquisitions nécessaires à cet effet.
Art. 4. « Le payeur général de l'armée tiendra prêts les fonds nécessaires pour assurer la subsistance desdits citoyens armés dans la Belgique.
Art. 5. « Delacroix et Danton se rendront sans délai à Liège, pour y presser la formation et l'armement des gardes nationales du pays (1).
« Camus et Treilhard resteront à Bruxelles pour suivre les affaires courantes, jusqu'au retour des autres commissaires.
Fait à Bruxelles, le 5 mars 1793, l'an II de la République.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Danton, Merlin (de Douai). »
N° 4.
( Au nom de là République française.
« Nous, membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans
les pays de la Belgique, de Liège, etc., réunis à nos collègues Bellegarde, Cochon et Lequi-nio, commissaires délégués pour la visite des places frontières de la République;
« Considérant que le département du Nord offre dans le grand nombre de citoyens qu'il renferme de puissants moyens pour remplir promptement l'objet de nos arrêtés des 17 février dernier et 5 mars présent mois, et qu'il peut, sous peu de jours, envoyer dans la Belgique un renfort imposant -de braves républicains, pour faire le service des places, contenir les aristocrates et protéger les patriotes;
« Voulant seconder des dispositions aussi dignes du nom français, diriger les mesures à prendre pour en tirer tout le fruit que la République a droit d'en attendre, et donner sans délai à nos frères de la Belgique une preuve non équivoque de la résolution inaltérable qu'a prise la France, en les adoptant, de les défendre contre leur ancien despote;
« Requérons le directoire du département du Nord;
« 1° de faire partir après-demain pour Bruxelles la moitié des compagnies des gardes nationales soldées, qui se trouvent dans quelques villes du département, en réservant l'autre moitié pour la garde des arsenaux et magasins, ainsi que pour le service des places, qu'elles feront exactement sur le même pied que les troupes à la solde de la République;
« 2° D'envoyer dans chaque chef-lieu de district un commissaire! pris dans leur sein, lequel tiendra la main à ce que chaque conseil général de district nomme à l'instant des commissaires qui se répandront partout où il sera nécessaire pour faire marcher sans délai vers Bruxelles le nombre qui sera ci-après déterminé, des citoyens de chaque communes tenus au service de la garde nationale;
« 3° De déclarer néanmoins que l'on ne comprendra pas dans le nombre des citoyens qui devront marcher, ceux que des défauts de conformations mettent hors d'état de porter les armes, les administrateurs composant les directoires du département et de districts, les procureur général syndic et procureurs syndics, le secrétaire général du département et ceux des districts; les maires, officiers municipaux et procureurs de communes; les membres du tribunal criminel,ceux des tribunaux civils, leurs commissaires nationaux et greffiers, les juges de paix, les receveurs de districts, les receveurs et directeurs des droits nationaux; enfin, les ouvriers employés à la fabrication des armes et des poudres;
« 4° De fixer au quart des citoyens tenus au service de la garde nationale, le nombre de ceux qui devront marcher en exécution de l'article 2 ci-dessus, et de laisser aux commissaires mentionnés dans le troisième article la faculté de déterminer, de concert avec les municipalités, le mode d'exécution le mieux approprié aux localités et aux circonstances;
« 5° D'ordonner qu'aussitôt qu'un commissaire de district aura levé 100 hommes, il les assemblera pour leur faire nommer un chef qui, sous le nom de centenier, sera uniquement chargé de les conduire à Bruxelles; afin d'éviter toute méprise pour les étapes et logements, il leur tracera leur route ainsi qu'il suit :
( Aux citoyens du district de Cambrai, par Bouchain, Valenciennes, Mons, Braine-le Comte et Bruxelles;
« A ceux des districts de Lille et de Douai, par Tournay, Ath et Bruxelles;
« A ceux du district d'Avesnes, par Mau-beuge, Mons, Braine-le-Comte et Bruxelles;
( A ceux du district de Quesnoy, par Valenciennes, Mons, Braine-le-Comte et Bruxelles;
« A ce,ux du district de Bergues et d'Hazebrouck, par Ypres, Courtrai, Aude-narde et Bruxelles;
« De faire donner à chaque? citoyen un bonnet rouge orné de la cocarde nationale, et de prendre les mesures nécessaires pour qu'ils soient tous armés;
« De faire fournir à chaque centurie de citoyens un tambour et une flamme tricolore, qui sera placée sur l'arme du porteur, de manière à ne pas en empêcher l'usage;
« De charger les commissares de districts de se concerter avec les municipalités, pour faire fournir en nature, et sur-le-champ, par les citoyens qui ne marcheront pas, les bas, souliers et chemises dont pourraient manquer ceux qui marcheront.
« Fait à Douai, le 7 mars 1793, l'an II de la République (1).
« Signé : Bellegarde, Lequinio, Charles Cochon, Gossuin, Merlin (de Douai). »
N° 5.
Douai, le
« Circulaire des commissaires de la Convention nationale près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc., aux commissaires-ordonnateurs des guerres Petit-Jean, Lambert et Olivier.
( Nous vous adressons, citoyens, deux exemplaires des deux arrêtés que nous avons pris pour faire arriver promptement dans les villes de la Belgique une force armée imposante. Vous voudrez bien prendre toutes les dispositions et donner tous les ordres nécessaires pour faire assurer l'étape et le logement dans tous les lieux du passage des patriotes volontaires de nos départements frontières, qui se rendront successivement aux villes qui leur sont désignées par nos arrêtés. Nous en avons informé les généraux; et, pour mieux assurer le service, nous leur avons recommandé d'avertir aussi les commissaires ordinaires des guerres, de nos opérations.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai). »
N° 6.
Douai, le
« Circulaire des commissaires de la Convention nationale près l'armée, et dans le pays de la Belgique, de Liège, etc., aux citoyens
commandants des places de Tournay, Vàlen-ciennes, Cambrai, Mons, 7 près, Aude-narde et Courtrai.
« Nous vous prévenons qu'en exécution de notre arrêté du 7 mars, dont nous joignons ici un exemplaire, il doit passer successivement des volontaires dans les lieux où vous commandez. Nous espérons que vous prendrez toutes les mesures nécessaires pour que ces braves défenseurs de la République ne manquent de rien à leur arrivée, et vous voudrez bien, à cet effet, donner tous les ordres nécessaires pour leur assurer l'étape et le logement.
« Nous vous recommandons, en outre, de remettre à chacun des commissaires des guerres qui sont sous vos ordres, un exemplaire de chacun des arrêtés ci-joints.
« Signé: Gossuin, Merlin (de Douai). »
N° 7.
« Au nom de la République française.
« Nous, membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans le pays de la Belgique, de Liège, etc., réunis à nos collègues Bellegarde, Cochon et Lequinio, commissaires députés pour la visite des places frontières, considérant qu'il importe de mettre la ville de Tournay en état de défense, et de seconder les réquisitions à nous adressées à cet effet par le général Omoran;
( Requérons le citoyen Polh, commandant de la place à Dokai, de donner à l'instant les ordres nécessaires pour qu'une des deux compagnies de canonniers volontaires soldés, formées à Douai, se rendent demain à Tournay.
« Fait à Douai, le 8 mars 1793, l'an II de la République .
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai), Bellegarde, Lequinio, Charles Cochon. »
N° 8.
« Au nom de la République française.
« Nous, membres de la Convention nationale, ses commissaires, etc., réunis à nos collègues Bellegarde, Cochon et Lequinio, commissaires députés pour la visite des places frontières, considérant qu'il importe de hâter l'exécution de l'arrêté pris hier, d'après notre réquisition, par le conseil général du département du Nord;
« Requérons le citoyen Polh, commandant de la place à Douai, de donner les ordres nécessaires pour que deux des quatre compagnies de grenadiers volontaires soldés, formées en cette ville, partent demain pour Bruxelles, en dirigeant leur route par Tournay et Ath.
« Fait à Douai, le 8 mars 1793, l'an II de la République.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai), Bellegarde, Cochon, Lequinio. »
N° 9.
« Au nom de la République française.
« Nous, membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans
le pays de la Belgique, et pour la visite des places frontières, sur les observations à nous faites par les compagnies de grenadiers soldés de Douai, relativement à l'exécution de l'arrêté pris par le directoire du département du Nord, le 7 de ce mois, en exécution de notre réquisition du même jour;
« Arrêtons que la première et la seconde desdites compagnies partiront après demain pour Bruxelles, et qu'elles y seront relevées par les deux autres compagnies le 1er mai prochain.
« Fait à Douai, le 10 mars, l'an II de la République.
( Signé : Gossuin, Merlin (de Douai), Bellegarde, Cochon, Lequinio. »
N° 10.
« Au nom de la République française.
« Nous, membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc.
( Considérant qu'il importe au salut de la République et à l'honneur du nom français^ de hâter l'exécution des mesures prises par nos arrêtés des 17 février et 5 mars présent mois, pour protéger les patriotes belges contre les entreprises des conspirateurs;
(( Considérant que le département du Pas-de-Calais est, par sa grande population, par le patriotisme qui distingue ses habitants, et par sa proximité des p.laces. de la Belgique, en état de fournir promptement à ces places un nombre considérable de citoyéns armés, qui, en y faisant le service et la garde ordinaires donneront aux généraux les moyens de faire de suite marcher à l'ennemi les troupes qui s'y trouvent actuellement;
« Considérant qu'il est d'autant plus facile de tirer, à cet égard, un parti avantageux des dispositions patriotiques des citoyens du département du Pas-de-Calais, qu'il nest question que de procurer aux villes de la Belgique des garnisons supplémentaires, en attendant que les troupes de la nouvelle levée décrétée par la Convention nationale, soit en activité;
« Requérons le conseil général du département du Pas-de-Calais :
« 1° De donner aux commissaires par lui envoyés dans les huit districts de son arrondissement, les pouvoirs nécessaires pour faire nommer, sans délai, par chaque directoire de district, des commissaires chargés de parcou-| rir toutes les communes, à l'effet de faire marcher promptement vers la ville d'Anvers;
« 1°) Les divers contingents des communes qui n'ont pas fourni ou qui n'ont fourni qu'incomplètement à la réquisition du général Marassé, du mois de septembre 1792;
« 3°) Le dixième restant des citoyens, qui, dans ces communes et dans toutes les autres, sont tenus au service de la garde nationale, en laissant au zèle et au patriotisme de chaque commune, le mode d'exécution qui lui conviendra le mieux, mais en tenant la main à ce que ce choix se fasse s'en désemparer;
« 2° De déclarer néanmoins que le choix ne pourra pas tomber sur ceux que des défauts de conformation mettent hors d'état de por-
ter les armes; sur les membres des directoires du département et des districts; sur le procureur général syndic et les procureurs syndics; sur le secrétaire général du département et ceux de districts; sur les maires, officiers municipaux et procureurs de communes; sur les membres du tribunal criminel, ceux des tribunaux civils, leurs commissaires nationaux et greffiers; sur les juges de paix; sur les receveurs de districts de droits nationaux; sur les ouvriers employés à la fabrication des armes et des poudres;
« 3° D'ordonner qu'aussitôt qu'un commissaire aura levé 100 hommes, il les assemblera pour leur faire nommer deux chefs provisoires, qui seront uniquement chargés de les conduire à Anvers; et qu'afin d'éviter toutes méprises pour les étapes et logements, il leur tracera leur route ainsi qu'il suit :
( Savoir :
(( Aux citoyens du district d'Arras; par Lens, Lille, Courtrai, Gand, Saint-Nicolas, Anvers;
« A ceux du district de Bapaume; par Arras, Lens, Lille, Courtrai, Gand, Saint-Nicolas, et Anvers;
( A ceux du district de Béthune; par Lille, Courtrai, Gand, Saint-Nicolas et Anvers;
« A ceux du district de Boulogne; par Calais, Ardres, Saint- Omer, Cassel, Armen-tières, Lille, Courtrai, Gand, Saint-Nicolas et Anvers;
' « A ceux du district de Calais; par Ardres, Saint-Omer, Cassel, Armentières, Lille, Courtrai, Gand, Saint-Nicolas et Anvers;
« A ceux du district de Montreuil; par Hes-din, Saint-fol, Béthune, Lille, Courtrai, Gand, Saint-Nicolas et Anvers;
« A ceux du district de Saint-Omer; par Sas-sel, Armentières, Lille, Courtrai, Gand, Saint-Nicolas et Anvers;
« A ceux du district de Saint-Pol; par Béthune,. Lille, Courtrai, Gand, Saint-Nicolas et Anvers;
« 4° De faire fournir à chaque centaine de citoyens un tambour et une flamme tricolore, qui sera placée sur l'arme du porteur, de manière à ne pas en empêcher l'usage;
5° De faire donner à chaque citoyen un bonnet rouge, orné de la cocarde tricolore, et de prendre les mesures nécessaires pour qu'ils soient tous armés;
« 6° De charger les commissaires de district de se concerter avec les conseils généraux des communes, pour faire fournir en nature et sur-le-champ, par les citoyens qui ne marcheront pas, les bas, souliers et chemises dont pourraient avoir besoin ceux qui marcheront.
« Fait à Arras, le 8 mars 1793, l'an II de la République.
« Signé : Merlin (de Douai), Gossuin. »
« Extrait des registres aux arrêtés du conseil du département du Pas-de-Calais, séance publique du 8 mars 1793, l'an II de la République française.
« Le conseil du département du Pas-de-Ca-lais, en exécution de la réquisition des com-
lre série, t. lxi.
missaires députés par la Convention nationale dans la Belgique et le pays de Liège;
( Considérant que le premier devoir des gardes nationales est d'être toujours prêts à voler au secours de la patrie, lorsque ce secours lui est nécessaire;
« Considérant que la Belgique, unie maintenant presque entièrement à la République française, et devenue partie intégrante de cette république, a droit à notre assistance;
« Considérant que, quand cette réunion n'aurait pas eu lieu, le devoir le plus sacré des amis de la liberté serait de défendre ceux qui ont secoué les chaînes de l'esclavage ;
« Considérant que cette Belgique, le théâtre de nos triomphes, est encore souillée par la présence des aristocrates et des fanatiques ;
« Considérant que, pour déjouer leurs perfides complots, il n'est point d'efforts que ne doivent tenter ceux qui ont juré de ne souffrir d'autre despotisme que celui de la loi;
« Considérant néanmoins que ces hommes vils sont aussi lâches qu'ils sont traîtres, et qu'il serait superflu de déployer contre eux toute la force dont la France peut disposer ; mais que s'ils avaient l'audace d'élever encore leurs têtes coupables, malgré le poids qui va les écraser, le département du Pas-de-Calais devrait alors se lever tout entier, se porter au milieu de cette terre qu'ils déshonorent, et qu'ils voudraient asservir de nouveau, et leur faire éprouver l'effet terrible que produisent des bras armés par la justice et la vengeance;
« Oui le procureur général syndic;
« Arrête que se renfermant dans les termes de la réquisition qui leur est faite par les commissaires de la Convention nationale, et mettant des bornes au zèle que pourraient montrer les gardes nationales du département, les communes fourniront seulement la quantité des gardes nationales de leur arrondissement, déterminée par la réquisition des commissaires de la Convention nationale ci-dessus mentionnée;
Que les commissaires précédemment envoyés par le département, dans chaque district, pour, en exécution de la loi du 24 février dernier, suivre et surveiller les opérations relatives au recrutement de l'armée, seront également chargés d'assurer l'effet de la réquisition des commissaires de la Convention nationale; en conséquence, que le présent arrêté et celui desdits commissaires, leur seront envoyés par de3 courriers extraordinaires, pour qu'eux-mêmes les fassent tenir sur-le-champ, par la voie la plus courte, aux directions des districts et aux municipalités; arrête, au surplus, que le pouvoir desdits commissaires du département, sera étendu à tous les effets résultant de ladite réquisition, de laquelle, tant les directoires des districts que les municipalités, exécuteront strictement et sur leur responsabilité, toutes les dispositions qui les concernent et en rendont compte, savoir : les municipalités aux districts, et les districts au département avec la plus scrupuleuse exactitude.
« Fait en conseil général, séance publique, le 8 mars 1793, l'an II de la République française.
« Signé: Dubois, président; Galand, secrétaire 1général. »
N° 11.
Arras, le
« Circulaire des commissaires de la Convention nationale près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc., aux citoyens administrateurs des départements de l'Aisne, de la Somme et des Ardennes.
« Nous nous étions proposé, citoyens, d'après un arrêté du 5 mars, que vous trouverez ci-joint, de nous rendre près dé vous pour discuter et préparer ensemble les moyens locaux les plus propres à faire arriver dans la Belgique les hommes qui y sont nécessaires pour remplacer les troupes dans les garnisons. Mais la crainte de nous éloigner trop de notre poste qui est à Bruxelles, et l'urgence des motifs qui nous y rappellent sans délai, nous ont déterminés à prier là Convention nationale d'envoyer dans votre département des commi— saires particuliers pour cet objet. En attendant leur arrivée, et même en supposant qu'ils n'arrivent pas, il est essentiel que vous preniez des mesures pour que notre grand but soit promptement rempli. Ce but, vous le savez, est d'en imposer à l'aristocratie belge par des renforts. Ce ne sont pas précisément de nouveaux soldats que nous vous demandons, mais des patriotes bien déterminés à protéger efficacement les patriotes belges, et à seconder vigoureusementnos opérations politiques. C'est assez vous dire que nos arrêtés des 17 février et 5 mars n'ont rien de commun avec la nouvelle levée que la Convention nationale a décrétée, et que l'une ne doit pas préjudicier à l'autre. Seulement nous vous observons que la manière la plus simple et la plus efficace de fournir votre contingent dans la nouvelle levée, serait d'envoyer dans la Belgique un grand nombre d'hommes qui ne marcheraient qu'en vertu de nos arrêtés, èt conséquemment ne se considéreraient pas comme enrôlés; car on ne peut pas douter qu'une fois habitués au service de place pendant cinq ou six semaines, il ne s'en trouve beaucoup parmi eux qui prendront le service des armes, et s'enrôleront volontairement.. Tous feriez même bien d'envoyer auprès d'eux, dans la Belgique, des commissaires chargés de cette mission.
« Nous vous adressons les réquisitions que nous avons faites aux départements du Nord et du Pas-de-Calais, et les arrêtés qu'ils ont pris en conséquence. Nous ne connaissons pas assez les localités pour juger si les mêmes mesures peuvent produire d'aussi bons effets dans votre arrondissement; c'est pourquoi nous ne vous adressons pas de réquisitions détaillées. Cette lettre vous tiendra lieu de réquisition générale et nous comptons sur votre civisme et vos lumières pour le mode d'exécution qui peut tout à la fois convenir le mieux à vos administrés et servir le mieux la chose publique.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai). »
N° 12.
Bruxelles, le 12 mars 1793, l'an II de la République française.
« Les commissaires de la Convention nationale aux citoyens Petit-Jean et Lambert, commissaires-ordonnateurs de Bruxelles.
Au citoyen Olivier, commissaire-ordonnateur à Lille.
« Nous vous adressons, citoyens, des exemplaires d'un arrêté pris par le département du Pas-de-Calais, sur notre réquisition. Vous voudrez bien donner les ordres nécessaires pour que les volontaires qui se rendront successivement à Anvers, par les routes qui y sont indiquées, trouvent sur leur passage l'étape et le logement.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai). » N° 13.
« Au nom de la République française.
« Nous, membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans le pays de la Belgique, de Liège etc.^considérant qu'il est urgent d'organiser les citoyens armés du département du Nord, qui se sont rendus à Bruxelles d'âprès l'arrêté pris par le conseil général dudit département, le 8 mars présent mois, en conséquence de notre réquisition du même jour :
« Requérons le général Duval, commandant dans le Brabant et le Hainaut, de procéder sans délai à l'organisation desdits citoyens, suivant le mode que sa prudence lui fera juger le plus analogue aux circonstances actuelles, et le plus utile à la République.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai). » N° 14.
« Les commissaires de la C onvention nationale près l'armée et dans le pays de la Belgique de Liège, etc., au citoyen Petit-Jean, commissaire-ordonnateur en chef des guerres.
« Nous vous avons informé dans le temps, citoyen, qu'en conséquence de nos arrêtés, dont vous avez aussi eu connaissance, il arriverait le 18 de ce mois à Bruxelles, des citoyens patriotes du département du Nord, pour faire le service de la place, en remplacement de la troupe qui y tient garnison, et qui doit en partie servir de renfort à l'armée. Il nous est revenu plusieurs plaintes sur l'indifférence très coupable que l'on a montré jusqu'à ce jour pour pourvoir aux besoins de ces nouveaux défenseurs de la patrie. Nous vous requérons, au nom de la loi, de vous occuper sur-le-champ de cette branche importante d'administration confiée à vos soins, et vous voudrez bien nous rendre compte, dans ce jour, de toutes les mesures que votre activité et votre patriotisme vous dicteront pour remédier à un abus aussi préjudiciable aux intérêts et à la sûreté de la République.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai). »
N° 15.
« Vu le mémoire des officiers, sous-officiers et grenadiers des deux premières compagnies de la garde nationale sédentaire de Douai, en garnison à Bruxelles, tendant à ce que la retenue à faire sur leur solde, pour leur subsistance, soit faite sur la partie payable en assignats! et considérant que le décret du 21 décembre dernier a déterminé d'une manière absolue le traitement des volontaires nationaux; que la Convention nationale, après avoir rendu ce décret, n'a pas donné à ses commissaires le pouvoir d'y déroger, et que d'ailleurs il serait souverainement injuste de traiter mieux les volontaires uniquement attachés au service des places, que ceux qui sont journellement aux prises avec l'ennemi ;
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans le pays de la Belgique déclarent qu'il n'y a pas lieu à délibérer Sur ledit mémoire, et que le payeur ne doit payer la solde des exposants que sur le pied réglé par le décret du 21 décembre dernier;
_ ci Fait à Bruxelles le 21 mars 1793, l'an II de la République française. « Signé : Camus, Delacroix, Danton, Gossuin, Merlin (de Douai); Treilhard et Robert.
N° 16.
« Lille, le
« Circulaire des commissaires de la Convention nationale près l'armée de la Belgique, et pour le recrutement dans les départements du Word et du Pas-de-Calais, aux administrateurs des départements du Nord, et du Pas-de-Calais, de la Somme, de l'Aisne et des Ardennes, et des districts compris dans les arrondissements respectifs de chacun de dès départements.
« Notre arrêté, citoyens administrateurs, pour la levée d'une partie des gardes nationales des départements frontières, qui devait tenir garnison dans les villes de la Belgique^ devient actuellement sans effet par la circonstance. Il est urgent de s'occuper uniquement du recrutement ordonné par la loi; la patrie a besoin de ses enfants;, le zèle et le civisme bien oonnus des citoyens de ce département, nous promettent qu'ils fourniront, sans le moindre retard, leur contingent.
« Bon à exécuter dans les districts, avant que l'ordre soit transmis par les administrateurs de département. t Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai); Treilhard, Robert, Carnot, Lesage-Senault.
Art. 13.
Mesures pour assurer les communications enttreîes différentes parties de la Belgique.
Plus l'ennemi s'avançait dans la Belgique, plus il importait de connaître ses différentes marches. Il était donc bien essentiel d'établir
des moyens prompts et sûrs de correspondance entre les différents corps de l'armée française; et c'est à quoi ont pourvu les arrêtés suivants.
N* 1.
Du
(c Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dams les pays de Liège;
« Considérant combien il est essentiel qu'il y ait des communications rapides et sûres établies entre les différentes parties des armées de la République qui occupent la Belgique, notamment dans les points de Namur, Jodoigne, Tirlemont, Louvain, Diest et Malines ;
« Requièrent le maréchal de camp Ferrand, commandant dans le département de Jean-mapes, d'établir sans délai, de Mons aux différents points ci-dessus désignés, et sur chacun par une route double, des communications qui lui procurent des rapports particuliers de l'état des différentes parties de l'armée; s'en réfèrent ensuite à-sa prudence, à son patriotisme et à son activité, de donner avec la plus grande célérité toutes les communications nécessaires des avis qu'il recevra.
« Requièrent le payeur de la guerre de prendre tous les moyens que les lois autorisent, pour mettre à la disposition du général Ferrand les fonds qui seront nécessaires pour suivre sans interruption la correspondance.
« Requièrent pareillement tous les commandants civils et militaires, municipalités et autres autorités constituées, de faciliter par tous les moyens qui sont en leurs pouvoirs, la célérité et la sûreté de la correspondance.
« Fait à Mons, les jour, mois et an que dès-sus*
m Signé : Camus,, Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. >>
N° 2.
« Du
« Des membres de laConvention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Begique de Liège, .etc.
- « Considérant combien il est essentiel qu'il y ait des communications rapides et sûres établies entre les différentes parties des armées de la République qui occupent la .Belgique, notamment dans les points de Namur, Jodoigne, Tirlemont, Louvain, Diest, Malines et autres où lesdites armées pourront se porter;
«Requièrent le général de division Duval, commandant dans le Brabant et le Hainaut, d'établir sans délai, de Bruxelles aux différents points ci-dessus désignés, et sur chacun par une route double, s'il en est besoin, des communications qui lui procurent des rapports journaliers de l'état des différentes parties de l'armée, s'en référant ensuite à sa prudence, à son patriotisme et à son activité, de donner avec la plus grande célérité toutes les communications nécessaires des avis qu'il recevra;
« Requièrent le payeur de la guerre de prendre tous les moyens que les lois autorisent,
pour mettre à la disposition du général Duval, les fonds qui seront nécessaires pour suivre, sans interruption, ladite correspondance.
« Requièrent pareillement tous les commandants civils et militaires, municipalités et autres autorités constituées, de faciliter par tous les moyens qui sont en leur pouvoir, la célérité et la sûreté de la correspondance.
« Fait à Bruxelles, les jour, mois et an que dessus.
« Signé : Camus, Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
N° 3.
« Au nom de la République française,
« Nous, membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans le pays de la Belgique de Liège etc.j après avoir entendu le rapport que Delacroix et Danton nous ont fait de l'état de l'armée campée au-dessus de Louvain, où nous les avions invités à se rendre hier, duquel il résulte qu'elle est dans une désorganisation affligeante, et qui provient du défaut de lois répressives et pénales contre l'insubordination, la désertion et le pillage; que la nécessité de ces lois est reconnue par l'armée elle-même, dont plusieurs bataillons se sont adressés à nous pour inviter la Convention nationale à les décréter;
« Considérant que les désordres et excès dont il s'agit, nous avaient déjà été dénoncés et certifiés par un grand nombre de citoyens;
« Considérant que pour remplir intégralement la mission dont nous a chargés la Convention nationale, il est indispensable de nous répartir sur plusieurs points;
Arrêtons ce qui suit :
1° « Danton se rendra incessamment à Paris pour exposer au comité de défense générale la position de l'armée, et, de concert avec ce comité, solliciter de la Convention nationale les mesures et les lois nécessaires au salut de la République;
« 2° Delacroix se tiendra au quartier général et près des différents états-majors de l'armée, d'où il correspondra avec tous les autres membres de la commission ;
« 3° Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard et Robert se tiendront, les deux premiers à Gand, Bruxelles, Bruges etc.; Ie3 deux autres à Tournai, Mons, Namur, etc., pour y remplir les divers objets de notre mission commune, et entretenir toutes les correspondances qui pourraient y avoir rapport.
« Fait à Bruxelles, le 21 mars 1793, l'an II de la République.
u Signé : Gossuin, Delacroix, Danton, Merlin (de Douai); Treilhard, Robert. »
Art. 14.
Mesures pour procurer à la République, des
étoffes, des effets de campements, des chevaux, des bois de charronage et de marine.
N° 1.
« Au nom de In République française,
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée etc., informés
que, dans le mobilier à vendre dans la Belgique, le pays de Liège, etc., en exécution des décrets de la Convention nationale, sur les Français émigrés, sur le fisc Autrichien, aur les fauteurs et satellites volontaires de l'ancien gouvernement se trouvent compris des chevaux, qui, par des circonstances locales, pourraient n'être pas vendus leur juste valeur, et qui seraient très utilement employés au service des armées de la République;
Arrêtent ce qui suit :
« Art. 1er. Tous les chevaux existant dans la Belgique, le pays de Liège, etc., et faisant partie, soit des biens des émigrés, soit des effets mobiliers dont la vente a été ordonnée par notre arrêté du 13 de ce mois (1) sont remis à la disposition du commissaire-ordonnateur en chef de l'armée de la Belgique.
c Art. 2. En conséquence, chaque commissaire des guerres, ou autre préposé à la vente des meubles des émigrés, du fisc, des fauteurs et satellites volontaires de la domination autrichienne, sera tenu, au lieu de faire vendre lesdits chevaux, de les faire estimer, et d'en adresser l'état au commissaire-ordonnateur en chef, qui en disposera pour le service de l'armée.
« Art. 3. L'estimation ordonnée par l'article précédent sera faite par deux experts, dont un Français, l'autre Belge.
« Art. 4. Ces experts seront nommés par le commissaire des guerres de l'arrondissement, autre que celui chargé de la vente.
( Art. 5. Le procès-verbal de chaque estimation sera remis au contrôleur général de l'armée, qui le prendra pour comptant, et en comptera sur ce pied à qui il appartiendra;
«"Art. 6. Les commissaires nationaux du pouvoir exécutif tiendront la main à l'exécution du présent arrêté.
« Fait à Bruxelles, le 20 février 1793, l'an II de la République.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai). » N° 2.
( Au nom de la République française,
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires, etc.,, informés que, dans les ventes publiques qui se font journellement des effets provenant des Français émigrés, des fiscs, des princes et de leurs fauteurs, adhérents et satellites volontaires, il se trouve fréquemment des étoffes de drap, des matelas, des marmites et autres effets propres au service de l'armée de la Belgique; considérant qu'il importe de hâter, par tous les moyens possibles, le complément des fournitures nécessaires aux défenseurs de la patrie;
« Arrêtent ce qui suit :
« 1° A compter du jour de la notification qui leur sera faite du présent arrêté par les commissaires nationaux du pouvoir exécutif, les préposés aux ventes ci-dessus énoncées, ne mettront plus en vente, les étoffes de drap, matelas, marmites et autres effets de campe-
ment qui pourraient se trouver compris dans les meubles qu'ils sont chargés de vendre, mais " les tiendront à la disposition du commissaire-ordonnateur en chef de l'armée de la Belgique, desquels effets ils seront tenus dç lui adresser un inventaire particulier, dont ils remettront uii double aux commissaires nationaux du pouvoir exécutif, qui en feront passer le relevé aux commissaires de la Convention nationale.
« 2° Il ne pourra être délivré aucun des effets ci-dessus pour le service des armées, que sur une ordonnance signée dudit commissaire-ordonnateur en chef; et cette délivrance ne sera effectuée qu'après une estimation qui sera faite par deux experts que nommera le commissaire des guerres de l'arrondissement, et dont l'un sera Français et l'autre Belge.
« 3° Le procès-verbal de chaque estimation sera remis au contrôleur général des dépenses de l'armée, qui le prendra pour comptant, et en comptera sur ce pied à qui il appartiendra.
4° Les commissaires nationaux du pouvoir exécutif tiendront la main à l'exécution du présent arrêté. '
« Fait à Bruxelles, le 24 février 1793, l'an II de la République.
«Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
« Bruxelles, le 16 février, l'an II de la République.'
( Les commissaires de la Convention nationale, au ministre de la guerre.
« Nous croyons devoir, citoyen ministre, vous donner connaissance d'un arrêté que nous avons pris le 24 de ce mois pour mettre à la disposition de votre département, divers effets qui se trouvent compris dans les meubles à vendre dans la Belgique et le pays de Liège, pour le compte ou au nom de la République;
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
N° 3.
« Au nom de la République française,
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée, etc., instruits de la nécessité d'approvisionner les arsenaux de la République en bois de charronage, et considérant, d'une part, que la forêt de Soigne, près de Louvain, ci-devant dépendant du fisc autrichien, offre de grandes ressources pour ces sortes de bois; de l'autre, qu'il est de l'intérêt commun de la République française et du peuple belge, de ne négliger aucun des moyens propres à repousser la coalition des tyrans du Nord; vu la lettre du ministre de la guerre, au général d'Hangest, du 21 décembre 1792, la réponse du général d'Hangest, du 31 du même mois, les lettres du colonel Duturby, directeur de l'arsenal de Douai, du 27 janvier dernier, du général d'Hangest du 13 février présent mois, aux commissaires de la Convention nationale et l'avis des commissaires nationaux du pouvoir exécutif de l'arrondissement de Bruxelles, en date du 31 de ce même mois;
(( Requièrent le général Guiscard, commandant à Louvain, de prendre, sans aucun délai, les mesures nécessaires pour faire abattre, et conduire incessamment à l'arsenal de Douai, telle quantité de bois de la forêt de Soigne, qu'il jugera convenir pour le service de l'artillerie de la République;
« Et arrêtent :
« 1° Que lesdits bois, avant d'être abattus, seront marqués et estimés par deux experts nommés par les commissaires nationaux du pouvoir exécutif, et dont l'un sera Belge, l'autre Français;
« 2° Que l'un desdits commissaires nationaux sera présent à la marque et à l'estimation, et qu'il sera du tout dressé procès-verbal à son intervention;
(( 3° Que les indemnités dues auxdits experts et agents qui seront nommés pour cette opération par le colonel Duturby, seront taxées par lesdits commissaires nationaux et payées d'après le visa des commissaires de la Convention nationale sur le produit de la vente à faire sur les lieux, des branches, souches et racines des arbres abattus;
( 4° Qu'il sera compté, s'il y a lieu, de l'excédent de ce produit, et qu'il sera versé dans la même caisse où doivent être déposés les deniers provenant des coupes ordinaires des bois ci-devant dépendant du fisc autrichien;
« 5° Qu'il sera adressé copie du présent arrêté, tant à la Convention nationale qu'au ministre de la guerre, au général d'Hangest et au général Guiscard.
« Les commissaires nationaux du pouvoir exécutif tiendront la main à l'exécution du présent arrêté. v
cc Fait à Bruxelles, le 24 février 1793, l'an II de la République.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
N° 4.
Du 26 février l'an II de la République.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans le pays de la Belgique, de Liège, etc.
« Vu le mémoire des commissaires nationaux du conseil exécutif sur la possibilité de tirer des bois de construction pour la marine, dont on a le plus grand besoin à Dunkerque, de la forêt de Saint-Six, près Ypres, et autres forêts adjacentes, qui faisaient ci-devant partie des biens dénommés domaine de l'empereur;
( Considérant, d'une part, la nécessité de pourvoir promptement le port de Dunkerque de bois de construction indispensables pour mettre la marine de la République dans un état respectable de défense, et faciliter les armements que les citoyens ont été invités à mettre en mer; d'autre part, l'urgence de la saison, qui ne permet pas de différer plus longtemps la coupe des bois qui seront jugés propres auxdites constructions;
« Arrêtent :
« 1° Que le commissaire-ordonnateur de la
marine étant à Dunkerque, se transportera au reçu du présent arrêté, ou enverra en son nom une personne ayant les connaissances suffisantes, dans la forêt de Saint-Six, et autres adjacentes, pour y marquer les bois qui seront propres à la construction des vaisseaux français;
- « 2° Les commissaires ' nationaux envoyés par le conseil exécutif dans le Courtraisis, nommeront deux commissaires, l'un français, l'autre belge, pour se transporter dans la forêt de Saint-Six et autres forêts adjacentes, en même temps que le commissaire-ordonnateur de Dunkerque ou son préposé, et y feront l'estimation des arbres qui auront été jugés propres à la construction des vaisseaux; il sera dressé procès-verbal de l'estimation;
« 3° Aussitôt après Je procès-verbal de l'estimation, la coupe desdits bois et le transport des corps d'arbres à Dunkerque seront adjugés au rabais; la vente des souches, racines et branches sera faite par semblable adjudication, au plus offrant et dernier enchérisseur;
« 4° Les frais de transport et d'estimation, d'adjudication et de vente, de coupe et charroi seront payés sur le prix de la vente des souches, racines et branches; en cas d'insuffisance, ils seront payés sur les fonds de la République française; et dans le cas contraire où les prix de la vente des souches, racines et branches fournirait un excédent, ledit excédent sera versé dans les caisses où se portait le produit des forêts du domaine de l'empereur, pour y demeurer sous la sauvegarde de la nation française, aux termes de l'article 4 du décret du 15 décembre dernier;
« 5° Expéditions du présent arrêté seront envoyées au commissaire-ordonnateur à Dunkerque, aux commissaires du conseil exécutif dans le Courtraisis, aux membres du conseil exécutif à Paris et à la Convention nationale.
« Signé : Camus, Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
Nota. — Pour l'exécution de cet arrêté, il en a été pris un autre à Lille, le 30 mars, dont la minute est égarée, mais dont il est fait mention dans la lettre suivante.
Dunkerque, le 31 mars 1793, l'an II de la République française, 9 heures du matin.
« Citoyens représentants du peuple français.
(c Aussitôt la réception de votre arrêté du 30 de ce mois, j'ai requis le général Pascal de procurer des forces nécessaires pour assurer les opérations des commissaires chargés de faire transporter sur le territoire français les arbres qui ont été abattus dans les bois de Furnes et cantons voisins, et je mets à la disposition du citoyen Cosmar, sous-chef d'administration et agent de la République dans cette partie, tous les fonds dont il aura besoin pour la suite de ces opérations, dans laquelle je lui recommande la plus prompte activité.
Signé : Tostain, ordonnateur civil de la marine, par intérim.
N9 5.
Du 27 février, l'an II dé la République française.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc.
Sur l'avis qui leur a été donné par le conseil directeur de l'arsenal de Douai, qu'il existe à Mons un dépôt de bois de construction, qui avaient été originairement coupés en France par les agents de l'empereur, et qui sont en état de servir aux constructions à faire dans les ateliers de Douai, pour l'artillerie destinée à suivre les armées de la République, qui assurent la liberté des peuples réunis contre le despotisme :
« Arrêtent que les bois propres à la construction des équipages d'artillerie, qui peuvent se trouver à Mons, seront transportés à Douai après que l'état desdits bois aura été dressé par deux commissaires, l'un Français, l'autre habitant de la ville de Mons, que le maréchal de camp Ferrand, commandant de Mons, nommera à cet effet.
« Expéditions du présent arrêté seront envoyés au ministre de la guerre, au maréchal de camp Ferrand, au colonel Durtubie, directeur de l'artillerie et de l'arsenal de Douai, et à la Convention nationale.
( Fait à Bruxelles, les jours et an que dessus.'
« Signé : Camus, Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
Art. 15.
« Mesures pour la conservation des armes, munitions et approvisionnements de l'armée, lors de l'évacuation de la Belgique.
« Les commissaires de la Convention natio- • nale ont pris sur cet objet deux sortes de mesures, l'une générale, les autres particulières.
« La première a été de faire employer les gardes nationales qu'ils avaient appelés des départements frontières, par leurs arrêtés du 5 mars, à accompagner et protéger les convois dans leur retraite. La réquisition a été faite expressément au général Duval, le 21, à Bruxelles, et il nous a été assuré depuis qu'elle avait été exécutée. Aussi n'a-t-on plus vu les habitants du pays piller nos convois comme ils avaient osé le, faire le 6 mars à Alost; et si la Républiquë a perdu dans cette malheureuse circonstance une partie de ses magasins, c'est uniquement parce que le perfide Dumouriez n'ayant donné qu'à la dernière minute l'ordre d'évacuer Bruxelles, on n'avait eu ni le temps ni le nombre'de chariots nécessaires pour tout emporter.
« Les autres mesures qu'on a annoncées, sont particulières aux magasins qui étaient placés à Malines et à Bruges.
« On a vu plus haut article 12, n° 11, que Dumouriez, par une lettre du 3 mars, datée de Moërdick nous recommandait de presser l'exécution des ordres qu'il avait donnés pour fortifier Malines. Persuadés, comme nous l'étions, de l'impossibilité de mettre en aussi peu de temps cette ville en état de soutenir
un siège, et de l'avantage qu'il y avait pour la République, d'exécuter sans délai le projet que nous avions formés depuis deux mois, mais qu'il avait toujours combattu, de faire transférer à Douai les immenses magasins d'artillerie, d'armes et de munitions de toute espèce qu'on y avait pris sur les Autrichiens, non seulement nous n'avons eu aucun égard à la recommandation de Dumouriez, mais dès le 5 mars nous avons pressé le général de division Duval, d'ordonner la très prompte évacuation de Malines; il l'a fait, et voici quel en a été le résultat.
« Inventaire des effets militaires, attirails et munitions de guerre, provenant des magasins de Malines, évacués sur les places de Lille et de Douai.
(t Place de Douai, « 95 pièces de canons et mortiers autrichiens, tant de siège que de campagne, non compris un mortier de 11 pouces, crevé au siège de Lille, et conduit dans ladite place, 134,536. (Dans ces 95 pièces il s'en trouve 32 de quatre, du calibre français, fondues à Malines par le capitaine de la 10e compagnie d'ouvriers); 2,340 fusils du calibre autrichien, neufs; 4,000 à réparer de calibré français et autrichien, neufs; 285 de rempart autrichien; 2,460 canons de fusils autrichiens; 1,710 pelles carrées, 910 pioches, 100 roues neuves ferrées de derrière, le tout pour affûts autrichiens; un moule à balle autrichien, une forme en cuivre, un étau, une enclume,
10 poulies de cuivre pour des roues d'affûts de quatre; quatre sacs de cuirs à munitions, 18 à bricoles, 3 à lances à feu, une à étou-pilles; 266,040 cartouches à fusils de différents calibres; 312,600 pierres à fusil; 6 caissons autrichiens.
( Place de Lille,
« 1,379,000 cartouches à balles d'infanterie; 2,087 fusils à réparer; 313' bons; 2,600 pelles carrées bonnes; 400 à réparer; 400 pelles rondes bonnes; 200 à réparer; 2,000 pioches bonnes, 150 à réparer; 150 piques, une pompe à incendie, sans tuyau ni boyau; 1,476 cartouches à boulet de 32, à neuf charges l'une; 2,015 de huit, à treize l'une^ 4,100 de 4, à 55 charges l'une; en tout, 7,591 sabotées en différentes caisses, environ 625,000 pierres à fusils; environ 5,500 sacs à terre.
c Tous les effets de l'artillerie française, existant à Malines, ont été ramenés, tant à Lille qu'à Douai, avec ceux pris des Autrichiens.
« Il est à observer que deux des bateaux chargés de fers, bois, étaux, enclumes, une partie de cuivre de rosette ont été pris par l'ennemi entre Gand et Courtrai; cependant
11 m'a été rendu compte par un officier d'artillerie belge qui en était le conducteur, qu'il avait fait jeter à l'eau les effets dont ils étaient chargés, de crainte que l'ennemi en profitât.
« Certifié véritable par m.oi, capitaine de la 10e compagnie d'ouvriers chargé de l'évacuation et de l'inventaire des munitions provenant de Malines. ' « A Douai, le 18 avril 1793, l'an II de la République française.
« Signé : Bouquerot. »
« Quant à Bruges, informés que le peuple de cette ville, à la nouvelle de la retraite de l'ârmée française, avait levé le masque de patriotisme dont il s'était en partie couvert jusqu'alors; qu'il avait manifesté la haine la plus forte contre les Français; qu'il avait poursuivi avec acharnement les agents de la République, notamment l'homme connu particulièrement par ses anciennes et intimes liaisons avec Michel Lepeletier, le commissaire des guerres, Hébert (1); qu'il avait abattu et brûlé l'arbre de la liberté; que les magistrats avaient fait saisir nos magasins... Les commissaires de la Convention nationale ont pris et envoyés sur-le-champ à Dumouriez l'arrêté suivant :
Du mercredi
« Au nom de la République française,
« Nous, membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais :
« Yu la réquisition des citoyens commis— saires de l'administration provisoire du Franc de Bruges, à l'effet de faire arrêter tous les magasins appartenant à la République dans la ville de Bruges, ladite réquisition signée Jacob fils, président, et signifiée par Leclerc, juré, signée Charles Coopmans, au citoyen Boniface, maître magasinier;
« Sur l'assurance qui nous a été donnée par le citoyen Petit-Jean que les magasins ont en effet été retenus par les ordres de l'administration provisoire du Franc de Bruges, que les commissaires des guerres" et garde-magasins de la République, ne se sont sauvés qu'avec beaucoup de peines de cette ville, qui a manifesté sa haine pour la liberté en se hâtant d'en détruire les signes; - « Considérant que la conduite de la ville de Bruges décèle la trahison la plus noire et la déloyauté la plus coupable :
« Autorisons le général en chef de l'armée de la Belgique à faire porter sur la ville de Bruges une force suffisante, pour faire enlever tous les magasins de la République, lever une contribution de deux millions de florins sur. ladite ville, et à prendre pour otages tous les membres de l'administration provisoire et tel nombre d'autres citoyens qu'il jugera convenable.
« Fait à Lille, les jour, mois et an que dessus.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard, Robert, Carnot, Lesage-Senault.
Le lendemain 28 mars, le conseil général du district de Bergues envoya aux commissaires de la Convention de nouveaux détails sur cet objet; et à l'instant les commissaires de la Convention nationale les transmirent à Dumouriez. Yoici leur lettre :
Lille, le
« Les commissaires de la Convention nationale, etc., au général Dumouriez.
« Les pièces ci-jointes, général, que le district de Bergues vient de nous faire parvenir
par un courrier extraordinaire, vous convaincront de la nécessité de mettre promptement à exécution notre arrêté d'hier. Le commissaire ordonnateur Petit-Jean s'est chargé de vous le remettre. Les entreprises coupables des malveillants de Bruges exigent une mesure répressive. Votre activité et votre zèle nous assurent que vous vous empresserez à venger la nation Française et l'insulte qui lui est faite par cette ville.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard, Robert, Carnot, Lesage-Senault.
Tournay, le
« Le général Dumouriez, aux commissaires de la Convention nationale.
« Dès que j'ai reçu votre lettre de ce matin, citoyens commissaires, j'ai expédié sur-le-champ copie de votre arrêté et un ordre au colonel Leclaire qui commande un corps d'à peu près 3,000 hommes, d'aller faire relâcher nos bateaux, et de faire procurer, par les administrateurs mêmes de Bruges, les moyens de les faire arriver en sûreté par Ostende, ou par les canaux de Dunkerque. Le colonel Leclaire sera suivi de près par le général Marassé, qui a été obligé de faire une capitulation pour évacuer Anvers, et se retirer avec les honneurs de la guerre.
« Nous avons dû compter, d'après cette lettre, que notre arrêté du 27 serait exécuté. L;à-t-il été effectivement, et l'a-t-il été en tous points ? C'est ce que nous ignorions encore le 1er avril, jour de notre départ de Lille pour revenir à Paris, et depuis, nous n'avons eu aucun moyen de nous en instruire officiellement.
Art. 16.
Mesures pour la déf ense des côtes de la Flandre
et des frontières du Nord ; notamment de la
place de Lille.
Le dénuement dans lequel se trouvait Ostende et ses environs lors de la première tournée des commissaires de la Convention dans la Flandre maritime, a déterminé l'arrêté et les trois lettres qu'on va lire.
N° 1.
« Au nom de la République française,
« Nous commissaires de la Convention nationale, députés dans la Belgique et le pays de Liège, ayant vérifié que la ville d'Ostende et son port ne sont défendus par aucune pièce d'artillerie, et considérant qu'il serait très instant d'en faire passer quelques-unes dans cette ville, ne fût-ce que pour assurer l'exécution des ordres donnés pour l'embargo sur les vaisseaux anglais, hollandais et autres, après nous être assurés dans une conférence tenue à ce sujet avec le maréchal de camp Pascal, coxnmandant à Dunkerque, qu'il pouvait sur-le-champ faire transporter à Ostende quatre pièces de canon, munies de tout leur attirail, sans dégarnir en | aucune manière le ville de Dunkerque de tout i ce qui peut lui être nécessaire.
Nous commissaires susdits requérons le citoyen Pascal, commandant à Dunkerque, de faire transporter le plus tôt possible, et par mer s'il le faut, quatre pièces de canon avec leur attirail, dans la ville d'Ostende.
« Fait à Dunkerque, ce
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
N° 2.
Bruxelles, le 13 février, l'an II de la République française.
( Les commissaires de la Convention nationale, au ministre de la guerre.
« Le dénuement dans lequel se trouve la place d'Ostende, citoyen ministre, nous a frappés pendant notre séjour en cette ville au commencement de ce mois. Sur l'observation que nous en avons faites au maréchal de camp de Fiers, commandant à Bruges ; il nous a répondu le 30 que presque tous les bataillons de son commandement manquaient de canons, de cartouches, de bas, de souliers, de culottes et d'instructions.
( Nous vous invitons, citoyen ministre, après cette réponse affligeante, à remédier promptement aux maux qu'elle annonce.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai)f -Treilhard. »
N° 3.
Bruxelles, le 8 février l'an II de la République.
Les commissaires de la Gonvention nationaler
au citoyen Dumouriez, -général en chef.
« Nous vous avons parlé à Anvers d'une lettre que nous avait envoyée le général Deflers, par laquelle il nous exposait le dénuement absolu où il se trouvait, et de canons et de cartouches, et la nécessité de lui donner de la cavalerie ; il nous annonçait dans la même lettre qu'une sentinelle venait d'être tuée-d'un coup de fusil, et qu'on avait aussi tiré sur une patrouille. Vous nous avez dit que vous enverriez des cartouches à ce général, mais comme nous ne vous avons pas laissé sa lettre, et que dans l'immensité de vos occupations, un objet dont on a seulement parlé, peut être facilement oublié, nous prenons le parti de vous écrire.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai)r Treilhard. »
Le dénuement de la place d'Ostende n'était pas le seul sujet de l'inquiétude que cette ville inspirait aux commissaires de la Convention, l'arrêté suivant en indiquera un autre et prouvera, en même temps, qu'ils y ont pourvu.
N° 4.
Du mercredi 20 février, l'an II de la République.
« Les membres de la Convention nationale," ses commissaires près l'armée et dans le pays de la Belgique, de Liège, etc.
"« Sur le compte qui leur a été rendu que plusieurs emplois importants pour la garde du port et des écluses, ainsi que pour la sûreté de la ville d'Ostende, étaient entre les mains d'étrangers, 'qui jusqu'à présent n'ont donné aucun signe authentique de leur attachement à la République française, requièrent le commandant temporaire de la ville et le consul de la République dans la même ville, de nommer sans délai des commissaires français, qui seront adjoints aux préposés à la garde du port et des écluses de la ville, pour exercer leurs fonctions conjointement avec eux,* même les remplacer en cas d'absence ou négligence.
« Fait à Ostende, les jour, mois et an que dessus.
« Signé : Camus, Treilhard. »
On verra, dans la quatrième partie, qu'elles sont les causes qui nous ont appelés à Lille, en sortant de la Belgique.
Arrivés en cette ville, nous avons dépêché des courriers à nos collègues Carnot et Lesage-Senault d'une part, à Bellegarde, à Cochon et Lequinio de l'autre, aux administrateurs du département du Nord, et à ceux du département du Pas-de-Calais, pour les avertir de ce qui se passait, et les engager à prendre pour le salut de la République toutes les mesures que commandaient les circonstances.
Nous en avons également dépêché un à Dumouriez, pour savoir de lui quel était l'état des diverses portions de l'armée : « Nous vous prions, lui disions-nous (1), de nous les faire connaître de suite, et jour par jour. Veuillez bien aussi nous communiquer vos vues sur ce qu'il y avait de plus important à faire. Nous comptons sur tout votre zèle et sur toute votre activité pour le salut de la République. »
Cette lettre n'est parvenue à Dumouriez qu'après un long circuit, parce que le courrier qui en était porteur avait dirigé sa route sur Gând, tandis que Dumouriez faisait sa retraite par Hal et Enghien. On verra, par la suite, ce qui nous a été écrit en conséquence.
Quant à nos collègues Carnot et Lesage-Se-nault à l'instant où notre dépêche leur a été remise, ils sont venus nous rejoindre, et nous n'avons eu qu'à nous féliciter des effets qu'à produit cette réunion pour la chose publique.
Les administrateurs du département du Nord, de leur côté, nous ont fait une réponse qui mérite d'être connue. La voici :
Douai, le
« Citoyens législateurs,
« Nous venons de recevoir votre lettre d'hier, qui nous est parvenue à une heure du matin. Nous avons fait expédier de suite vos paquets pour leur destination, après en avoir pris lecture.
« Nous avions déjà pris ici toutes les mesures nécessaires pour faire mettre en état de défense les places de la frontière, en requérant à cet effet le général Moreton.
« Nous prenons à l'instant un arrêté pour obliger tous les cultivateurs à transporter leurs grains, pailles, foins, avoines, et des bestiaux
même, dans les villes de guerre les plus voisines.
Enfin, citoyens législateurs, comptez sur le zèle des administrateurs républicains du département du Nord ; ils feront tous leurs efforts pour sauver la "République et la liberté, où ils mourront pour elles.
Les administrateurs composant le directoire du département du Nord.
« Signé : Girard, Lebon, Païen, C. Bouly, vice-président, J. C. Sluys. »
Après ces premières dispositions, nous avons pris connaissanoe de l'état de la place de Lille et des environs. Les pièces suivantes indiqueront ce que nous avons fait ou proposé pour en assurer la défense.
Lille, le
« Les commissaires de la Convention nationale,
à leurs collègues composant le comité de défense générale.
« Nous nous hâtons, citoyens nos collègues, de vous mettre sous les yeux la déplorable et alarmante situation de la ville de Lille. Cette place, l'une des plus fortes et des plus importantes de la République, est encore menacée par nos ennemis. Nous sommes convaincus que les habitants montreront le même courage, la même énergie, que l'an passé, mais pressez-vous de leur procurer les moyens de défense dont ils manquent. Cette place est dans un dénuement presque absolu en munitions et en troupes. Hier nous avons réuni les généraux, les officiers de l'artillerie, du génie, les membres du district et de la commune ; et après une longue conférence, nous avons acquis la triste certitude qu'il y a un déficit énorme dans les objets de première nécessité pour la défense de la ville. Nous ne vous parlons point ici des subsistances, nos magasins sont vides, ou à peu près ; mais vous verrez les mesures que nous avons prises avec le général et les commissaires ordonnateurs, pour les faire remplir. Nous avons cherché la cause de ce dénuement de provisions de toute espèce, et nous avons appris qu'elle procédait de Pache, qui avait pris dans nos places frontières les munitions et les vivres dont elles étaient approvisionnées pour les faire passer à l'armée de la Belgique qui en manquait. Il aurait dû les remplacer aussitôt, et c'est ce qu'il n'a point fait. C'est à vous, citoyens nos collègues, à faire réparer cette faute. Vous n'avez pas un instant à perdre. Faites venir le ministre de la guerre, demandez-lui les moyens qu'il a pour procurer à Lille ce qui lui manque, et exigez que cet approvisionnement se fasse dans le plus bref délai. Nous avons tout lieu de craindre que nos autres places ne soient dans la même détresse. Ne vous laissez pas endormir plus longtemps.
« Nous n'avons pas cru prudent de rendre publics ces détails que nous vous donnons. Nous vous les adressons directement ; notre responsabilité finit, la vôtre commence.
( Dans le nombre des officiers qui ont assisté hier à notre séance, il en est plusieurs qui ont les plus grands talents, et qui jouissent de toute la confiance de Lille, qu'ils ont défendue.
Tous les corps civils et militaires nous ont priés de les requérir d'y rester, car ils ont reçu l'ordre d'aller ailleurs. Nous n'avons pu nous refuser à leurs instances, et nous vous prions d'en prévenir le ministre, afin qu'il donne des ordre en conséquence.
« Yous trouverez ci-joint l'état de ce qu'il faut pour la défense de la place, ce qu'il y a en effectif, ce qui manque.
« Nous vous invitons à vous réunir au comité de salut public, à y appeler le ministre, et à nous faire part des mesures qui auront été prises dans votre séance^
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai), Robert.
« P. S. Les officiers du génie sont Marescot, Schermont et Flayelle (1). »
Lille, le
« Les commissaires de la Gonvention nationale au général Dumouriez.
« La rentrée des troupes sur nos frontières, citoyen général, et la juste inquiétude des habitants de ce pays, nous ont déterminés à réunir hier auprès de nous les différents agents civils et militaires employés à Lille. Nous avons eu une conférence sur les différents moyens à prendre pour approvisionner convenablement cette place, et la mettre en état de défense : le général Duval vous fera part du résultat de nos opérations. Quant à présent, nous nous bornerons a vous observer que les dispositions que vous paraissez adopter, si nous en jugeons, par les dernières lettres que vous nous avez écrites, laisseront dans cette partie très importante de la frontière un vide qui faciliterait à l'ennemi une marche assurée jusqu'aux portes de Lille; tandis que, pour couvrir cette place et ses communications, il est nécessaire d'établir en avant un camp composé au moins de 14,000 hommes effectifs et de 1,200 chevaux : c'est l'avis unanime des militaires que nous avons entendus, vous n'avez pas un instant à perdre pour l'exécution de cette mesure qui est d'une nécessité indispensable dans la circonstance. Yous avez, comme nous, connaissance que l'ennemi fait une marche très rapide : on assure même qu'il est suivi de son artillerie de siège; l'invasion qu'il ferait infailliblement sur le territoire de la République, si on n'y met bien vite obstacle, serait très alarmante. Il est donc de notre devoir à tous de nous occuper sans relâche de cette mesure de sûreté générale- Il n'est pas inutile de vous observer aussi que toute la garnison de Lille est composée dans ce moment de 225 volontaires.
« La Deûle et l'Escaut ne sont point gardés, et il n'y a point ici des troupes pour les garder. Il faut que vous preniez des mesures pour assurer la conservation des postes importants qui sont sur ces deux rivières, qui, s'ils étaient
en puissance de l'ennemi, nous citeraient la possibilité des approvisionnements de la place.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard, Robert, Carnot, Lesage-Senault. »
« Aux boues de Saint-Amand, le 31 mars 1793, l'an II de la République française.
Le général Dumouriez, aux citoyens commissaires de la G onvention nationale.
« Dans le moment où j'ai reçu votre lettre, citoyens commissaires, je donnais les ordres pour deux brigades ou six bataillons d'infanterie, avec un régiment de cavalerie, pour former la garnison de Lille. Il est impossible, et il serait très peu militaire de tirer d'une armée désorganisée, dont tous les corps sont mêlés par la retraite que nous avons faite, un camp de 14,000 hommes pour le mettre en avant de Lille. Pour former un corps de 14^000 hommes, il faudrait au moins 40 à 50 bataillons. Ce corps, mal organisé, ne couvrirait pas Lille, perpétuerait la confusion, nous ôteraient les moyens de faire nos recrutements, npus affaiblirait partout, et serait bientôt battu et chassé jusque sur les glacis de Lille.
« Je ne peux, en ce moment, mettre que des garnisons dans les places, et il est impossible de nous diviser en petits paquets. Il s'agit de séparer les deux armées du Nord et des Ardennes, leur rendre à chacune les corps qui leur appartient, pour les réorganiser, afin qu'elles puissent ou s'éloigner l'une de l'autre, ou agir à portée l'une de l'autre, selon les circonstances. C'est pour cet effet que nous les avons fait camper séparément, l'armée des Ardennes à Maulde, l'armée du Nord à Bruelle, afin qu'elles soient à portée d'échanger, sous deux jours, les bataillons qui leur appartiennent respectivement, afin aussi qu'on répare l'artillerie, les tentes et effets de campement.
« Quant à la disposition générale que j'ai faite pour le placement des troupes sur la frontière, j'ai cru devoir destiner l'armée de l'expédition de la Hollande pour la défense de la Flandre maritime et de l'Artois, qu'elle doit couvrir par un camp sous Cassel; les deux armées des Ardennes et du Nord, sur le flanc de Yalenciennes et Lille, pour pouvoir se porter au secours de celle de ces deux places qui serait menacée, et cependant pour être quelques jours dans un camp tranquille pour se réorganiser et se rétablir. La division du général Neuilly, qui était de 6,000 hommes, se trouvant réduite par la désertion à deux ou trois, a été placée, par mes ordres, dans Condé et Yalenciennes. Les flanqueurs de gauche du général Miaczinski occupent Orchies et les environs; les flanqueurs de droite aux ordres du général Dampierre, occupent Bavai, pour lier la communication avec Maubeuge, et couvrir la trouée de Landrecies. Le général d'Har-ville a ramené son corps d'armée à Maubeuge et à Givet; mais il vient d'être en état d'arrestation par les commissaires de la Convention nationale, et, dès ce moment, je ne réponds plus du sort de cette partie de la défensive.
« J'ai à vous observer que les généraux qui commandent les armées de la République et les troupes, seront consternés de tant d'actes arbitraires; et que bien loin de donner de la
force à l'armée, on l'affaiblit, en la privant des chefs sous lesquels elle a combattu avec confiance.
« Signé : Dumouriez, général en chef. »
« P. S. J'ai appris, comme vous, que l'armée autrichienne marche assez vivement sur nous. Cependant, comme il lui faut des vivres, et surtout des fourrages pour pouvoir pénétrer en France, j'espère qu'elle nous donnera au moins huit ou dix jours, avant de se présenter en force, pour pénétrer un point quelconque de notre territoire : ce n'est que lorsque je serai bien sûr de mon mouvement, que je pourrai savoir où porter mes principales forces, pour m'opposer à ses progrès. Vous verrez par la copie de la lettre du général Fer-rand, que l'archiduc menace aussi par le côté de Mons. Travaillez à nous procurer des approvisionnements sur Douai, Valenciennes et Bouchain, pour que nous puissions nous porter en avant; car, avant de penser à former des camps il faut savoir comment on les nourrira; il faut penser aussi à un approvisionnement pour le camp de Cassel, qui sera au moins de 12 à 15,000 hommes.
« Signé : Dumouriez, général en chef. »
Lille,, le
Aux citoyens commissaires de la Convention nationale.
« Citoyens,
u Nous venons d'apprendre que les troupes autrichiennes occupent en ce moment Menin. Comme il est possible qu'elles ne tardent pas à se porter vers Ypres, où nous avons encore des troupes, et que, d'un autre côté, nous évacuons Tournay, il est à craindre qu'elles ne cherchent aussi a s'emparer des postes d'Ar-mentières, du Pont-Rouge et de Cominës. Ces postes, néanmoins, sont de la première importance pour la défense de la Républiquej par leurs positions sur la rivière de Lys qui sert continuellement au transport des subsistances de ce district; leur conservation est même aussi utile que celle de la ville de Lille, dont les nombreux habitants, quel que soit leur courage pour battre l'ennemi, ne pourraient y trouver aucune ressource contre la disette de nourriture. Il est donc indispensable de se prémunir sans délai contre toute agression vers l'un ou l'autre de ces points, et nous prions les commissaires de la Convention d'user de l'autorité qui leur est confiée pour qu'ils soient garnis d'un nombre de troupes suffisant pour en empêcher l'accès.
Les administrateurs composant lé directoire
du district de Lille. c Signé : J. VantouronTj Siffet, Sirjean, secrétaire.
« Vu le mémoire ci-dessus, nous, membres de la Convention nationale, ses commissaires
Ërès l'armée, requérons le général de division 'uvalj de prendre à l'instant les mesures nécessaires pour faire occuper, sans aucun délai, par des corps de troupes suffisants, les postes de Comines, Armentières et Pont-Rouge et de donner à cet effet tous les ordres qu'il appartiendra, lesquels seront exécutés partout
où besoin seraj nonobstant tous ordres contraires.
« Fait à Lille, le
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai), Robert. »
Cette réquisition qui était nécessaire au général Duval, parce qu'il n'avait pas le commandement des troupes dont il fallait disposer pour occuper les postes, a été suivie d'ordres très précis, et qui ont été exécutés ponctuellement la nuit du 31 mars au 1er avril.
Art. 17. N° 1.
« Vues proposées au comité de la guerre.
Bruxelles, le
« Les commissaires de la C onvention nationale, etc., au comité de la guerre de la
Convention nationale.
« Voilà, citoyens nos collègues, 21 pièces ou mémoires que nous avons recueillies dans notre première tournée en Brabant, et sur lesquels il sera important que vous fixiez nos regards; toutes sont relatives au service de l'armée. Vous jugerez mûrement convenable de conférer avec le comité des finances sur plusieurs objets qu'elles contiennent. Nous vous prions de vous en occuper le plus tôt possible. 1
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
N° 2.
Bruxelles, le
( Les commissaires de la Convention nationale, etc., au comité de la guerre.
« Nous ne différons pas, citoyens nos collègues, à vous mettre sous les yeux un mémoire qui nous a été présenté à l'arsenal de Malines par des canonniers-artificiers, dont le civisme égale le courage et l'intelligence : ces braves citoyens sont employés journellement et sans interruption à faire des cartouches, des balles, des gargouches et autres artifices utiles à l'armée; ils ne reçoivent qu'un sol au-dessus de leur paye ordinaire. Nous leur avons promis de vous engager à prendre bien vite en considération leurs justes réclamations; nous vous assurons que leur position est de nature à mériter toute la sollicitude de la Convention nationale.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
N° 3.
Tournay, le
« Citoyens nos collègues,
« Nous nous empressons de vous adresser un projet du maréchal de camp de Fiers, qui
nous paraît digne de la plus sérieuse attention. Nous vous invitons à l'examiner, à le discuter sur-le-champ, et si vous l'adoptez, à en faire rapport sans délai à la Convention nationale.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Vouai), Treilhard. »
N° 4.
Bruxelles, le
( Les commissaires, etc., aux membres de la Convention nationale composant le comité de la guerre.
« Citoyens nos collègues,
« Le mémoire ci-joint, qui nous a été remis pendant notre séjour à Tournay, offre à votre sollicitude pour le salut de la République, la matière d'une loi qu'il est de la plus haute importance de proposer très incessamment. Si la Convention nationale n'emploie pas au plus tôt de grands moyens pour porter au complet les bataillons de volontaires, qui n'y ont iamais été ou qui ont cessé d'y être par les désertions, la gloire de nos armes sera infailliblement compromise.
« Il ne faut pas d'ailleurs se dissimuler que pendant que nos armées se battront en avant de la Belgique, ce pays aura encore besoin d'une force imposante. Le parti des malveillants y est très puissant, et c'est assez vous faire sentir combien il est urgent de mettre, et de maintenir sur pied le plus d'hommes qu'il est possible.
N° 5.
Bruxelles, le
« Les commissaires de la Convention nationale, aux citoyens composant le comité de la guerre de la Convention nationale.
« Citoyens nos collègues,
« Le troisième bataillon du district de Cambrai, en garnison à Tournay, nous a remis la copie ci-jointe d'un mémoire qu'il avait-précédemment adressé au département du Nord, sur les difficultés qu'il éprouve à se compléter.
« Ces difficultés n'étant pas particulières à ce bataillon, il est de notre devoir de les déférer par, votre organe à la Convention nationale. Ne nous le dissimulons pas, il est temps qu'elle trouve dans sa sagesse les moyens de compléter notre armée, et il faut que ces moyens soient aussi rapides que les besoins sont urgents; que la Convention parle : à sa voix la nation se lèvera encore une fois; chaque commune fournira son contingent d'hommes et de chevaux; une discipline vraiment républicaine réorganisera nos armées; et nous terrasserons, avant la fin de la campagne la ligue coupable qui ose menacer notre liberté.
« Signé : Camus, Gossuin, Merlin (de Vouai), Treilhard. »
N° 6.
Bruxelles, le
« Les membres de. la Convention nationale, à leurs collègues composant les comités de la guerre et des finances, réunis.
« Citoyens nos collègues,
« Il vous a déjà été rendu compte à Paris, par Camus, l'un de nous, des demandes multipliées que les soldats des troupes de ligne, de service hors les terres de la République, dont le temps de service est expiré et qui veulent se rengager, forment à l'effet d'être payés du prix de leur nouvel engagement, en numéraire. Vous connaissez les motifs de leur demande; elle vous a paru juste : mais l'espérance qu'on avait, dans ce moment, d'établir sur-le-champ la circulation libre des assignats dans les pays occupés par les armées de la République, a empêché de proposer à l'a Convention un décret qui se trouverait sans objet. Les nouvelles vues qu'on a adoptées ensuite, de suspendre toute opération forcée, relativement à la circulation des assignats, jusqu'à ce que les provinces se fussent expliquées sur la forme de gouvernement qu'elles désirent, obligent à ne pas différer plus longtemps de prononcer sur le mode de paiement du nouvel enrôlement des soldats dont le service est expiré. L'incertitude de la décision empêche plusieurs soldats de se rengager, et on perd des hommes accoutumés au service : ceux qui ont déjà contracté leur engagement ne cessent de se plaindre et de demander le paiement de ce qui leur est dû.
« Nous vous prions donc, citoyens nos collègues, de faire rendre sans délai un décret qui ordonne que les rengagements dus aux soldats des troupes de ligne qui servent hors des terres de la République, leur seront payés en numéraire.
« Signé : Camus, Gossuin, Merlin (de Vouai), Treilhard. »
N° 7.
Bruxelles, le 22 février 1793, l'an II de la République française.
te Les commissaires de la Convention nationale, au comité de la guerre.
« Un militaire très intelligent, qui se trouve à présent à l'avant-garde, nous a adressé, citoyens nos collègues, une lettre qui contient des vues sages et utiles : comme nous la trouvons digne de votre attention, nous nous empressons de vous l'envoyer.
( Signé : Gossuin, Merlin (de Vouai). »
Art. 18.
, Conduite de Dumouriez.
« C'est un phénomène bien extraordinaire que la conduite d'un homme qui, après avoir rendu les plus grands services à la patrie, a fini par la trahir de la manière la plus noire
et la plus lâche; qui, après avoir demandé à grands cris (1) la déchéance du roi des Français, a prétendu leur en donner un autre; qui, après avoir combattu avec autant de succès que de bravoure les satellites des despotes, s'est jeté dans leurs bras et mis à leur tête; qui, pour tout dire en un mot, après avoir paru exécrer La Fayette, l'a, non pas imité, mais surpassé en scélératesse.
Peut être connaîtra-t-on un jour toute la profondeur et toute l'étendue de ses crimes. Nous en sentons aujourd'hui les funestes effets, mais on ne voit pas encore à découvert les causes qui en ont amené, et les moyens qui en ont préparé la consommation. Seulement on sait qu'au commencement de la guerre actuelle, La Fayette et lui marchaient d'accord avec les meneurs du côté droit de l'Assemblée législative; et malheureusement on ne le sait que depuis peu de temps. C'est à la saisie qui a été faite de ses papiers, lors de leur passage à Douai, qu'on doit la connaissance de cet horrible secret. Si on l'eût connu plus tôt, Dumouriez, au lieu de mettre actuellement la République dans le plus grand péril, aurait, dès l'année dernière, porté sa tête sur un échafaud.
Les commissaires de la Convention ne le suivront pas dans toute sa conduite publique et privée, depuis le moment où il a été placé à la tête de l'armée la plus importante peut-être de la République. Us n'ont à rendre compte que des relations qu'ils ont eues avec lui. et des mesures qu'ils ont prises à son égard, lorsque ses projets perfides ont commence à se dévoiler.
Ce qui s'est passé à Liège entre la première commission et lui, est retracé dans le rapport du 11 janvier. „
Depuis, Gossuin, Merlin (de Douai) et Treilhard l'ont vu à Bruges le Ier février, et à Anvers le 10 du même mois.
Camus l'a vu seul à Bréda le 1er mars, et avec Treilhard à Tirlemont, le 11 du même mois. —
Les mêmes commissaires réunis à Gossuin et Merlin (de Douai), l'ont revu à Louvain le 14.
Enfin Delacroix et Danton l'ont vu le 20 en cette dernière ville.
Yoilà toutes les entrevues que les commissaires de la Convention ont eues avec Dumouriez, et l'on ne sera pas étonné qu'ils ne l'aient pas approché plus souvent, lorsqu'on se rappellera, d'un part, que depuis le 23 janvier jusqu'à la fin de mars, Dumouriez a passé plus de temps à Paris et en Hollande que dans la Belgique; de l'autre, que les commissaires de la Convention étant seuls chargés du gouvernement d'un pays désorganisé, par l'article premier du décret du 15 décembre, ne pouvaient pas être à tout moment auprès d'un général d'armée.
Rappelons maintenant ce qui s'est passé dans les six entrevues dont on vient de parler.
A la première, Dumouriez paraissait encore incertain s'il conserverait ou non le commandement en chef. Sans doute cette incertitude était simulée, mais elle avait dans sa bouche
tous les dehors de la sincérité; et il la fondait principalement sur la désorganisation qu'il accusait Pache d'avoir mise dans l'armée. Il se disposait à une conférence avec mylord Auckland, ministre d'Angleterre à la Haye; il se disait chargé, pour cet effet, des pouvoirs du conseil exécutif, et il en espérait de bons résultats pour la pacification générale. Du reste, il annonçait pour la Convention un respect qui, à la vérité, cadrait peu avec les lettres qu'il lui avait précédemment écrites, mais qui, par là même, n'en était que plus satisfaisant pour les commissaires. Il les assurait surtout que quoique opposé d'opinion au décret du 15 décembre, il le ferait exécuter par tou3 les moyens qui étaient à sa disposition, et que son vœu le plus ardent était que le territoire de la République française ne fût plus borné au Nord que par le Rhin.
A la seconde entrevue (à Anvers), Dumouriez communiqua à Gossuin, Merlin (de Douai) et Treilhard, son plan de campagne en Hollande; il leur en expliqua tous les détails, et leur parut, au demeurant, animé du même esprit qu'à Bruges. Il ne s'agissait plus de négocier avec mylord Auckland ; la guerre était déclarée aux cours de Londres et de la Haye; il ne pensait qu'à combattre, et se promettait de le faire avec le succès le plus grand et le plus rapide. Une particularité qu'il ne faut pas oublier, c'est que paraissant piqué de ce que les commissaires de la Convention ne voulaient pas dîner avec lui, ceux-ci lui dirent en plaisantant qu'ils n'accepteraient qu'à Amsterdam. Eh bien ! reprit-il en riant, je vous y invite, mais à condition que vous n'y viendrez pas comme commissaires de la Convention, ni commissaires nationaux.. Ce propos ne fût pris alors que pour une plaisanterie; mais il prouve aujourd'hui que dès ce moment Dumouriez méditait quelque projet ambitieux.
La troisième entrevue (à Bréda) se passa entre Camus et Dumouriez, en récit d'opérations militaires; Camus en a rendu compte à la Convention par une lettre qui est insérée dans le Bulletin.
La quatrième entrevue a eu lieu à Louvain, le 11 mars, et Dumouriez y arriva sur les huit heures du soir; il rendit compte à Camus et Treilhard des proclamations qu'il avait faites en passant par Bruxelles, sans cependant leur communiquer ces actes, dont il n'avait pas sur lui d'exemplaires. Camus et Treilhard le prévinrent qu'ils allaient informer la Convention de ce qu'il s'était permis de faire, et il les assura, de son côté, qu'il en écrirait également (1).
Trois jours après, Camus, Treilhard, Gossuin, Merlin (de Douai) se rendirent à Louvain; ce fut l'époque de la cinquième entrevue; et voici en quels termes ils en rendirent compte le lendemain, à la Convention nationale : — « Nous nous sommes avant tout assurés, par le général en chef Dumouriez, de l'exécution du décret qui ordonne que Lanoue et Steingel s*eront traduits à la barre. Nous avons eu ensuite une longue conversation avec ce général; il lui manque beaucoup d'effets de toute nature, mais il a pris des mesures qui paraissent le satisfaire pour les besoins du
moment. » Ce fut dans cette entrevue que Dumouriez donna aux commissaires lecture de la lettre qu'il avait adressée l'avant-veille à la Convention nationale. Il n'est pas besoin d'annoncer qu'ils lui en témoigneront leur étonnement : mais ce qu'il importe de savoir, c'est que, tout en soutenant sa lettre, il avait l'air de n'être pas très satisfait de l'avoir écrite. Les commissaires lui dirent que s'il s'avisait d'être César, ils seraient pour lui autant de Brutus. Il prit la chose en plaisanterie, et protesta qu'il ne songeait qu'à chasser les Autrichiens au delà du Rhin, qu'il voulait sauver la République, et qu'il y réussirait. La conséquence que les commissaires tirèrent de cette conversation, fut que Dumouriez avait la tête exaltée, que cette exaltation provenait du dépit d'avoir été forcé d'abandonner sa brillante expédition de la Hollande, mais que, du reste, il n'avait pas de mauvaises intentions.
La sixième entrevue se passa, comme on l'a déjà dit, le 20 mars, entre Delacroix et Danton d'une part, et Dumouriez, de l'autre. C'était à la suite d'un combat dans lequel celu'-ci, loin de réparer les pertes de la journée de Nerwinde, en avait essuyé de nouvelles. Delacroix et Danton lui représentèrent ses torts envers la Convention nationale, lui firent sentir la nécessité de les réparer, et rassurèrent que s'il ne se hâtait de le faire, ils ne pourraient pas se dispenser de prendre contre lui, de concert avec leurs collègues réunis à Bruxelles, les mesures que leur prescrivait le caractère dont ils étaient revêtus. Après beaucoup de débats, Dumouriez parut se rendre, et il écrivit à la Convention nationale une lettre qui, sans être décisive sur ses dispositions, paraissait néanmoins un acheminement à une rétraction absolue. Cette lettre était ainsi conçus :
« Citoyen Président, j'ai appris que la Convention nationale a renvoyé à son comité de défense générale ma lettre en date du 12 de ce mois, qui contient des opinions et des mesures que je crois indispensables pour le salut de nos frères et de l'armée de la Belgique. Comme les circonstances nouvelles où je me trouve peuvent amener des modifications dans les mesures que je proposais, et qu'il est nécessaire que je confère avec vos commissaires, je prie la Convention de surseoir à ce rapport jusqu'à ce qu'elle ait reçu le résultat de nos conférences avec les commissaires.
« Signé : Dumouriez, général en chef. »
D'après cet exposé des relations orales qu'ont eues avec Dumouriez les commissaires de la Convention, il est aisé.de juger si elles ont pu les conduire même au soupçon des projets criminels de ce moderne Catilina.
Ils voyaient bien en lui un cerveau échauffé, mais la Convention nationale avait vu, comme eux, lorsque, dès le mois de novembre, il lui écrivait d'un ton si insolent en faveur de Malus et d'Espagnac; elle l'avait vu comme eux lorsque par sa lettre du 7 janvier, il avait osé lui dire qu'il représentait aussi la nation à la tête de son armée; et la Convention nationale n'en avait pris aucun ombrage. Ses proclamations du 11 août et sa lettre du 12 mars étaient connues de presque tous les membres de la Convention, qui en avaient pris communi-
cation au comité de défense générale; et pas un seul membre, même parmi les plus ardents, n'en parlait à la tribune, tant on était généralement convaincu qu'il n y avait de sa part que folie et rodomontade, et que s'il était indispensable de servir contre lui, du moins il était sage de ne pas le faire dans un moment où ses services paraissaient si nécessaires à la République,
Quant aux relations épistolaires qui ont eu lieu entre les commissaires de la Convention et Dumouriez, elles étaient infiniment plus propres à éloigner qu'à inspirer l'inquiétude. On a déjà vu plusieurs de ses lettres dans les différents articles de ce rapport, et certainement il n'en est pas une qui prête au plus léger soupçon.
« J'espère (dit-il dans celle qu'il écrivait le 3 mars à Moërdick, et qui est transcrite ci-dessus article 12), j'espère que l'armée se souviendra toujours de ses victoires de Jemmapes, de Bruxelles^ de Tirlemont et de Liège, et qu'elle ne fera rien d'indigne de sa gloire et de la noble cause qu'elle défend. » Ces derniers termes ne pouvaient bien sûrement s'entendre que de la liberté de la République; et s'il eût été possible d'élever à cet égard le moindre doute, il aurait été bientôt dissipé par la proclamation qui était jointe en minute à cette lettre, et que les commissaires de la Convention Ont fait imprimer et distribuer à l'armée au nombre de dix mille exemplaires (1).
La lettre suivante, datée du même lieu, et du lendemain, n'était pas moins rassurante sur les opinions de Dumouriez.
« Citoyens commissaires,
. « Bonn© nouvelle, annoncez à ma brave armée que Gertruydenberg est pris d'aujourd'hui quatre heure et demie après midi. Le général Bédaux l'a rendu par une capitulation pareille à celle de Bréda, et la garnison s'en va à Bois-le-Duc, le succès doit consoler dès accidents qui nous sont arrivés, car il m'ouvre entièrement la Hollande. Gertruydenberg est presque aussi fort que Brédaj, à cause de ses inondations et des ouvrages extérieurs, qui le rendent inaccessible. J'y vais demain et je ^vous manderai de combien il aura augmenté nos richesses en artillerie et en munitions de guerre. Yous jugez combien il serait imprudent de rompre dans ce moment un plan d'autant mieux combiné qu'il est plus audacieux un plan qui peut seul sauver la Belgique, et par contre-coup ma patrie. J'écris à Miranda et à Yalence pour les engager à mettre la même audace que moi dans leur conduite. Je ne leur demande que quinze jours; concertez-vous avez eux, ayez confiance, inspirez-la, et comptez sur mon amitié fraternelle.
« Signé : Dumouriez, général en chef. »
Ce qu'il écrivait" d'Anvers avant son entrée dans la Hollande, était encore bien fait pour qu'on le crût franchement attaché à la République. Yoyez comme il cherchait à démasquer le fanatisme, par cette lettre datée du 18 février :
« Je vous adresse, citoyens commissaires, un moine Augustin frère, dont l'histoire est si extraordinaire,qu'en la- publiant avec quelques détails, elle peut servir à la Révolution, en donnant des notions sur les cruautés des moines; elle éclairera même le peuple brabançon sur les idoles de la superstition; cela peut servir aussi contre l'archevêque de Malines^ qui a eu connaissance de cette barbarie, que la mère et le frère de la malheureuse victime des moines avaient invoqué pour tâ'cher d'obtenir sa délivrance, et qui, avec le sang-froid cruel d'un prêtre, a toujours dit que cela ne le regardait pas. On peut tirer de grandes lumières de cette victime de la cruauté monacale, tant sur leurs crimes que sur leurs richesses. Je crois que ce sera bien fait de faire un récit authentique de tout ce qu'a souffert cet infortuné; il faut en même temps le prendre sous la protection spéciale de la République française (1). »
La lettre suivante, écrite le surlendemain de la même ville, annonçait encore qu'il était bien éloigné de chercher à enrichir la Belgique aux dépens de la France.
Anvers le 20 février, l'an II de la République.
« Je vous recommande, citoyens commissaires, le citoyen Zobert, avocat à Bruxelles, rue de l'Ecuyer, vis-à-vis de la porte de la Chapelle de la fondation de Saint-Eloi, que j'ai chargé, lors de mon passage dans cette ville, de faire des recherches sur la valeur des biens du ci-devant clergé français, situés dans la Belgique, et de donner les moyens de faire rentrer les revenus de ces biens. Ce citoyen,, en conséquence de mon ordre, s'est procuré toutes les connaissances nécessaires; il a fait des dépenses considérables pour se les procurer; je vous l'adresse pour qu'il vous donne toutes les instructions que vous pourriez désirer à cet égard, et pour que vous le dédommagiez des frais et des peines qu'il s'est données pour exécuter mon ordre (1) , ( Signé : Dumouriez, général en chef. »
Une chose plus remarquable encore, c'est la manière dont il recommande aux commissaires de la Convention d'en user avec les Belges, lorsque par sa lettré du 25 février, datée de Zevenburgen, il leur annonçait la prise de Bréda.
« Bréda est rendu d'hier au soir; j'espère avoir aujourd'hui ou demain Klundert et Yil-lemstadt. Alors je continuerai ma marche sans m'arrêter; l'ardeur des troupes est inconcevable! leur conduite est excellente, l'amour des Hollandais pour la liberté et pour nous, fait la satire des Belges, qu'il faut mener rudement, surtout les villes de Bruxelles, Louvain et Anvers. Tout va bien, et j'espère que la terreur des Orangistes et la confiance des patriotes me feront arriver bien vite à Amsterdam; j'ignore moi-même la valeur de ce que j'ai pris; mais j'espère trouver des munitions immenses.
D'après de pareilles dispositions, de quel œil les commissaires de la Convention ont-ils dû envisager les proclamations de Dumouriez du 11 mars 1 Certes, il ne leur était pas possible de Croire qu'il les eût faites pour se former dans la Belgique un parti contraire aux intérêts de la République. Mais à cette époque, et depuis un mois, la guerre civile éclatait d'intervalle à autre, sûr différents points de ce pays, véritable repaire de fanatisme. Bruges, les nombreux villages de son arrondissement, Gand, Grammolit, Tournai, Wardes, Alost, Crivelies, les environs de Bruxelles et de Louvain, avait été successivement ou étaient encore livrés à des mouvements hostiles contre les Français. Il fallait, avant de combattre l'ennemi, calmer ses mouvements; et c'était à ce but que tendaient les proclamations de Dumouriez. Sans doute il aurait pu, il aurait dû
Keldermans; et il a été remis à statuer sur cet objet, au moment où toute la commission serait réunie : cette réunion s'est effectuée plusieurs fois depuis, mais les-grands événements dont elle avait à s'occuper ne lui ont pas permis de terminer l'affaire du moine persécuté.
y arriver par des voies plus légales. Mais enfin il y était arrivé, et le calme paraissait rétabli. Que devaient faire les commissaires de la Convention 1 Ce qu'ils ont fait : informer le comité de défense générale de la conduite de Dumouriez (1) et attendre les ordres de la Convention, tant que ce général ne se permettrait pas d'autres écarts.
Ce n'est pas au reste, qu'alors même les commissaires de la Convention aient connivé aux actes arbitraires de Dumouriez. Loin de là, ils les ont réprimés avec toute la force dont ils étaient capables. — Il avait donné au général Duval, le 11 mars, l'ordre de faire arrêter le citoyen Chépy, commissaire du conseil exécutif, et de le faire conduire à Paris. Gossuin et Merlin (de Douai), avertis de cette vexation au moment de leur arrivée à Bruxelles,
mandèrent le général Duval, et l'obligèrent de faire retirer le gendarme sous la garde duquel il avait mis le citoyen Chépy. — Dumouriez avait-, par une de ses proclamations du même jour, ordonné qu'on rétablît dans les églises, cathédrales, collégiales .et monacales, les argenteries inutiles à la décence du culte divin, que les commissaires de la Convention en avaient fait enlever (conformément aux lois françaises, dont l'exécution devait avoir lieu dans la Belgique, depuis les décrets de réunions qui y avaient été publiés officiellement); et non seulement cet ordre n'a pas été exécuté, mais il a été contredit formellement par une proclamation que les commissaires de la Convention ont faite sur les profanations qui, dans une église de Bruxelles, avaient accompagné le déplacement des argenteries (1). Dumouriez avait ordonné au payeur de l'armée de lui fournir une somme de 1,500,000 livres en numéraire, dont il prétendait avoir besoin pour opérations militaires; les commissaires de la Convention, qui n'ont vu dans cet ordre aucune des conditions requises par la loi, pour
autoriser une pareille dépense, ont défendu au payeur d'y obtempérer (1).
Dumouriez avait fait mettre en état d'arrestation le contrôleur général des dépenses de l'armée, qui, alors, se trouvait à Tournay. Les commissaires de la Convention l'ont fait mettre en liberté par un arrêté du 13 mars (2). Dumouriez avait déclaré le 11 mars, aux soi-disant représentants provisoires de Bruxelles que, quoique méconnus par les commissaires de la Convention, ils devaient se regarder comme les vrais magistrats du peuple qui les avait choisis, çt en exercer tous les pouvoirs. — Les commissaires de la Convention n'en ont pas moins persisté à méconnaître ces prétendus fonctionnaires, qui nommés avant le décret du 15 décembre, avaient été supprimés par l'article premier de cette loi; et le premier acte d'autorité que ceux-ci se sont ingérés de faire après le 11 mars, les commissaires de la Convention l'ont cassé à l'instant.
Dumouriez avait ordonné, le 11 mars, que les otages pris à Bruxelles, à Anvers, et à Mons, en vertu des arrêtés des commissaires de la Convention, fussent mis sur-le-champ en liberté; ils ne l'ont pas été, et ce n'est qu'au milieu des désordres qu'a ensuite amenés l'évacuation de la Belgique, qu'ils sont parvenus à s'évader.
Tel était l'état des choses, lorsque Dumouriez s'est mis à la tête de l'armée campée dans les environs de Louvain. Les commissaires de la Convention ont vu par leurs propres yeux, les 11 et 14 mars, les dispositions qu'il faisait pour reprendre avantageusement l'offensive contre l'ennemi; et ils ne craignent pas de le dire, ces dispositions étaient faites pour donner les plus belles espérances.
Aussi les journçes du 15 et du 16 ont-elles offert les succès les plus encourageants; et ce qui paraissait du meilleur augure, c'est que Dumouriez, qui depuis s'est plu à décrier une partie des troupes de la République, écrivait alors au ministre de la guerre : Tous les corps de l'armée ont montré le plus grand courage (3).
Les journées même du 18 et du 19, quoique malheureuses par leur résultat définitif, annonçaient, de la part de Dumouriez, l'intention
la plus décidée de vaincre les Autrichiens. On en jugera par la lettre suivante qu'il écrivait le 20 au général Duval, et dont les commissaires de la Convention ont adressé copie, le même jour, au comité de défense générale (1).
« Du camp de Cumptiche, le 20 mars 1793, l'an II de la République.
« En réponse à votre lettre, mon cher Duval, je vous prie de m'envoyer les troupes que vous me destinez, car j'en a? plus besoin dans ce moment-ci qu'Harville. pour remplacer la désertion de plus de 4,000 lâches qui ont abandonné l'armée et m'ont arraché des mains une victoire certaine.
« Avant-hier 18, j'ai attaqué les • ennemis dans le fameux champ de bataille de Ner-vinde. Je les ai battus toute la journée avec ma droite et mon centre; la gauche non seulement s'est mal battue, mais elle m'a abandonné et s'est enfuie jusque derrière Tirlemont. J'ai heureusement retiré la droite et le centre derrière la petite Gette en escamotant. La nuit du 16 au 20, ma gauche avait abandonné les ponts; l'ennemi a cru pouvoir profiter de sa lâcheté pour venir m'attaquer par le grand chemin de Saint-Tron. Je me suis retiré dans la position où je l'avais battu le 16. J'ai rallié cette même gauche, et notre retraite a été savante. Cette nuit, j'ai quitté cette même position et j^ai pris celle des hauteurs de Cumptiche, où il y a apparence que je vais être attaqué. Si je ne suis pas battu, je me retirerai en un camp en avant de Louvain, que je fortifierai et où je recevrai tous mes renforts. Je vais jeter plus de mondie dans DiestetMalines. Je porte la division de l'avant-garde à Neuilly en communication entre Namur et Bruxelles, pour couvrir cette dernière ville. Poussez les administrateurs et le peuple de Bruxelles, à se préparer à la défense. Faites hâter le retour de 10 pièces de 16 qui sont sans doute sur la route de Tournay, et qu'on a confondues avec l'artillerie de 24; et pour cela, faites passer promptement l'ordre ci-joint au commanda,nt du parc de siège. Faites mille amitiés à Valence. Vous jugez, mon ami, combien l'infâme désorganisation de cette armée me cause de chagrin et d'embarras. Je tâcherai cependant de m'en tirer, et si je puis gagner du temps, tout est sauvé. Dites à Petit-Jean de nous envover des effets de campement, des tentes surtout et du fourrage.
« Je vous embrasse,
« Signé : Dumouriez, général en chef. »>
Le lendemain de cette lettre, le 21, le général Duval et le commissaire-ordonnateur Petit-Jean sont venus à plusieurs reprises avertir
les commissaires de la Convention, que s'ils ne voulaient pas exposer la représentation nationale à être violée dans leur personne, il était temps qu'ils sortissent de Bruxelles; que sinon, il faudrait peut-être faire servir à protéger leur retraite, des troupes dont on avait besoin pour d'autres objets; que d'ailleurs toutes les routes n'étaient pas également sûres, et que celle de Gand était la seule qu'il fût prudent de prendre. A ces avertissements se sont jointes les menaces faites en pleine rue à l'un d'eux, Merlin (de Douai), et le bruit qu'on proposait dans les groupes de s'assurer d'eux pour faire rendre les otages précédemment fournis par la ville.
S'il ne se fût agi que de leur sûreté individuelle, les commissaires de la Convention n'auraient pas hésité de rester, malgré toutes ces circonstances réunies; mais ils ont balancé les avantages qu'ils pourraient procurer à la République par la continuation de leur séjour à Bruxelles, et les inconvénients qui auraient pu résulter pour elle des voies de fait qu'une multitude fanatique se serait permise contre eux; et après une longue discussion, ils se sont déterminés à quitter momentanément Bruxelles, après avoir pris à cet effet un arrêté que la Convention nationale a approuvé le 24 du même mois (1).
Depuis le 21 jusqu'au 26, ils n'ont reçu de Dumouriez que deux dépêches les voici :
« Ath, le
« Le général Dumouriez aux citoyens commissaires de la Convention nationale.
« J'ai reçu aujourd'hui, citoyens commissaires, vos deux lettres du 24 et du 25 (2). Vous m'annoncez dans la seconde, deux ordres : l'un contre le général Miranda, l'autre contre le colonel du 73e régiment. Je vous annonce que, dans votre paquet, je n'ai trouvé que celui pour le général Miranda, que je mets sur-le-champ à exécution. Mais pour assurer l'exécution du second, que vous me renverrez vraisemblablement demain, je fais mettre aux arrêts au quartier général le colonel du 73e régiment, s'il se trouve à l'armée; ce dont je doute, car, excepté 25 bataillons et ma cavalerie qui forment mon arrière-garde, le reste est si en désordre, que je ne peux pas encore reconnaître quels sont les bataillons absents. C'est une bande de loups qui fuient comme j des moutons; cependant, au moyen de la bonne contenance de l'arrière-garde, j'espère ne rien, perdre.
« Je passe ici demain la journée, pour tâcher de démêler ce chaos et pour évacuer les magasins assez importants que nous avons ici.
« Signé : Dumouriez, général en chef. »
« Tournay, le
Le général Dumouriez aux citoyens commissaires de la Convention nationale.
« Dès que j'ai reçu votre arrêté de ce matin (1), citoyens commissaires, j'ai expédié sur-le-champ, par un officier, copie de votre arrêté, et un ordre au colonel Leclaire, qui commande un corps d'à peu près 3,000 hommes, d'aller faire relâcher nos bateaux et de faire procurer par les administrateurs mêmes de Bruges, les moyens de les faire arriver en sû-deté par Ostende, ou par les canaux, à Dun-kerque. Le colonel Leclaire sera suivi de près par le général Marassé, qui a été obligé de faire une capitulation pour évacuer Anvers, et se retirer avec les honneurs de la guerre. Cette capitulation est un grand bonheur dans la circonstance affreuse où nous nous trouvons, parce qu'elle nous donnera un corps de 10,000 hommes moins désordonnés que ceux que la terreur panique a fait retirer sans aucun ordre, avec une licence et un brigandage qui les rend. incapables d'être d'aucune utilité pour la défense de la patrie. Je sais positivement qu'il y a eu très peu d'ennemis à la poursuite de cette portion d'armée; que leur confusion et leur épouvante ont été sans au-i. cun fondement, et que ce sont eux qui, mêlés à la populace de Bruges, ont commencé le pillage des bateaux.
« Les mêmes désordres se sont passés à la retraite de Mons. Je tiens seul le camp de Tournay, et je le tiendrai jusqu'à ce que je voie trop de danger à être coupé par ma gauche. J'ai placé au camp de Maulde l'armée des Ardennes; ce sera le point de son rassemblement.
« J'envoie le général Duval pour commander à Lille. Il vous communiquera ses instructions.
« Signé : Dumouriez, général en chef. » Effectivement le général Duval a communiqué ses instructions aux commissaires de la Convention, mais en leur déclarant qu'il n'entendait en faire aucun usage, d'après la confusion qu'elles faisaient de la force militaire avec l'autorité civile, et la position d'une place de guerre en état de siège avec celle d'une place de guerre qui n'est point en cet état.
Tandis que les commissaires de la Convention nationale faisaient sur cette pièce les réflexions auxquelles elle conduisait naturellement par rapport à Dumouriez, un trait do lumière vint les frapper et leur découvrir les intentions perverses de ce général. Voici la pièce qui leur fut remise le 29; elle est écrite entièrement de la main du brave Ooguet, premier lieutenant-colonel d'un bataillon de volontaires, ci-devant commandant temporaire de Bruxelles; et elle est le résultat d'une conversation que cet officier avait e^e le 26 avec Dumouriez qui (notez cet excès d'audace ou d'inconséquence) savait très bien qu'il n'était pas son ami.
Le dire d'un homme en place.
« Il commande une armée de brigands, de scélérats et de poltrons. La France est perdue;
l'armée ne peut plus se rallier. Les places frontières sont diminuées de moyens de défense : si 6,000 Prussiens se présentaient devant Dunkerque, Lille ou Yalenciennes, elles sont perdues : il est sûr qu'elles manquent de tous les moyens de défense.
« Les insurrections du dedans sont horribles; elles croîtront encore; c'est pour cela qu'il se rapproche des frontières.
Il a dit aussi à une autre personne, que c'était l'état du dedans qui le forçait à se rapprocher des frontières.
« Il n'y a plus qu'un moyen de sauver la France; c'est un accommodement quelconque avec les puissances étrangères.
« Le 15 du mois prochain, il prédit qu'il n'y aura plus de numéraire. Sans la vertu point da succès. La France est un peuple de fous, d'enragés, conduit par des brigands, auxquels les assassinats ne coûtent rien. El faut, de force ou de gré, que cela finisse; que les honnêtes gens se rallient, autrement tout est possible, et la France est perdue.
« Lorsqu'il a voulu traiter avec l'Angleterre et la Prusse on lui a répondu qu'on traiterait volontiers avee la nation et avec lui;* mais qu'on ne voulait pas traiter avec la Convention ni le conseil exécutif en qui l'on n'avait aucune confiance.'
« La Convention perdrait tout, si les honnêtes gens ne se:ralliaient pour la faire finir; il faut qu'elle finisse, ou tout est perdu. D'ailleurs, elle a rendu le peuple juge d'un plan de de constitution; il faut que les assemblées primaires s'effectuent, et que l'on renvoie tous les conventionnels chez eux.
« Il faut une Révolution dans la Révolution, pour sauver la France; et c'est lui qui se charge de la sauver" : Il y perdra sa tête s'il le faut, mais il a) pris son parti. (Il l'a pris décidément; il avait la voix moins tremblante, l'air plus assuré, plus audacieux qu'à Bruxelles, dans une conversation du même genre dont on se rappelle peut-être (1). Il bravera dix décrets s'il le faut; mais il veut sauver son pays, qui est à deux doigts de sa perte. Il y a une guerre à mort entre les jacobins et lui; il faut qu'il périsse ou qu'on rase tous les jacobins, et qu'on sème du sel sur leur emplacement.
« Il a répété qu'il fallait une Révolution dans la Révolution; il n'en voyait pas bien le moyen d'exécution, mais il fallait une Révolution (Ecoutezbienceci). Cette Constitution de 1790 dont nous étions idolâtres, il faudra peut-être la reprendre: nous l'aimions tant ! D'ailleurs, il "faut absolument la paix avec les puissances étrangères; nous sommes perdus, tei nous continuons la guerre. Des volontaires! un tas de poltrons, de scélérats, à qui il a distribué 400 coups de plat de sabre, et en a fait donner autant par ses aides de oamp et ses ordonnances; que si la France devait rester avec une* Constitution telle quelle a, il quitterait le service. Remarquez qu'il n'y a plus d'ordre de bataille; on ne connaît plus les j brigades. Quand un soldat va demander son I bataillon à l'état-major, on lui répond qu'on
né sait où il est; et quand il s'égare sur la route et s'en retourne épuisé de fatigue et d'inanition, on le traite de lâche, on lui donne des coups de plat de sabre; et quand il entre chez le paysan pour prendre la subsis-tance-qui lui manque, on crie : rasez-le. Il de-; vient impossible de garder toute sa liberté. Il ne s'agit pas ici de discuter sur le plus ou le moins; il faut la garder. Heureux si nous en venons à bout; mais pour cela il faut faire des sacrifices, peut-être grands.
« L'homme oe jour dînait à Tournay, sur la place, chez l'Egalité; la sœur d'Egalité y dînait aussi. Un domestique, en sortant de l'appartement où ils étaient à table en petit comité, dit devant l'observateur : Dumouriez s ê-chauffe; diable, comme il fait l'amour ! Que de choses disait cet homme sans s'en douter 1 Qu'on remarque la désorganisation volontaire dans laquelle on tient l'armée; qu'on examine les circonstances, et qu'on juge. Nous n'avons rien gagné peut être en perdant La Fayette;
« (l) Nous soussignés déclarons avoir remis le présent au ^citoyen Delacroix, commissaire delà Convention nationale.
« Signé : Beaurain, lieutenant des troupes légères à cheval de Varmée de Belgique; Crouzat, capitaine au 9e bataillon des fédérés. »
Cette pièce fut un coup de foudre pour les commissaires de la Convention. Ils ne pouvaient douter de la vérité du récit de Goquet, dont les vertus républicaines leur étaient connues; et d'un autre côté, ils ne pouvaient entrevoir sans horreur les projets que paraissait méditer un homme trop longtemps honoré de la confiance de la nation. Ils n'étaient pas encore revenus de leurs premiers mouvements de surprise et d'indignation, lorsque les citoyens Dubuisson, Proli et Pereyra vinrent leur communiquer de nouveaux détails sur les dispositions liberticides de ce général; c'était plus qu'il n'en fallait pour les déterminer a un parti vigoureux; à l'instant ils prirent la délibération, et rédigèrent la série de questions qu'on va lire, bien résolus de faire arrêter Dumouriez s'il ne se justifiait pas à l'instant et avec la plus grande évidence.
« Les commissaires de la Convention nationale près l'armée de la Belgique et dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais réunis, requièrent le général Dumouriez de se rendre aujourd'hui, 29 mars, dans l'après midi, à Lille, maison du citoyen Mousquet, place du Lion d'Or, pour s'expliquer avec eux sur des inculpations graves qui le concernent, et dont il lui sera donné communication.
« Le général Dumouriez confiera le commandement de son armée, pendant son absence, à l'officier général à ses ordres qu'il jugera le plus propre à le remplacer.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai); Treilhard, Robert, Carnot, Lesage-Senault. » .
« Fait à Lille, le 29 mars 1793, l'an II de la République.
Série de questions à faire au général Dumouriez.
1° A-t-il dit qu'il s'était rapproché des frontières à cause des insurrections du dedans ?
2° Que le peuple français est composé de fous, d'enragés, conduits par des brigands, auxquels les assassinats ne coûtent rien; que la Convention était composée de 300 brigands, qui dirigeaient 400 imbéciles ?
3° Que la Convention nationale perdrait tout, si les honnêtes gens ne se rallient pour la faire finir ? Qu'il fallait que les assemblées primaires s'effectuassent, et que l'on renvoyât tous les conventionnels chez eux?
4° Qu'il fallait qu'avant trois semaines la Convention fût renvoyée et remplacée par une autre, composée de tous les présidents de districts ?
5° Qu'il fallait une Révolution dans la Révolution, pour sauver la France; qu'il se chargerait de sauver; qu'il y perdrait la tête, s'il le fallait; que son parti était pris?
6° Qu'il braverait dix décrets d'accusation, s'il le fallait; qu'il voulait sauver son pays, qui était à deux doigts de sa perte ?
7° Que s'il était décrété d'accusation, il ne quitterait pas Bruxelles ?
8° Après avoir parlé de la nécessité d'une Révolution dans la Révolution, a-t-il dit qu'il faudrait peut-être reprendre la Constitution de 1790 ?
9° Que si la France devait rester avec une Constitution telle qu'elle est, il quitterait le service ?
10° Est-il vrai qu'il a parlé de propositions de paix avec les puissances coalisées contre la République; qu'il a entamé une négociation avec l'Autriche et la Prusse, ou avec leurs généraux ?
11° A-t-il été question de reconnaître l'indépendance de la France, à condition qu'elle renoncerait à ses conquêtes, et que la ci-devant reine et son fils seraient envoyés en Autriche?
12° Que lorsqu'il a voulu traiter avec l'Angleterre et la Prusse il lui a été répondu qu'on traiterait volontiers avec la nation et avec lui; mais qu'on ne traiterait ni avec la Convention ni avec le conseil exécutif, en qui l'on avait aucune confiance?
13° Par qui avait-il été chargé de traiter avec l'Angleterre et la Prusse, et quelles pro^ positions était-il autorisé à leur faire ?
14° A-t-il dit qu'il y avait une guerre à mort entre lui et les Jacobins; qu'il fallait qu'il périt ou qu'on rasât les Jacobins, et qu'on semât du sel sur leur emplacement?
A peine l'arrêté fut-il expédié,.qu'un courrier extraordinaire le porta à Dumouriez avec la lettre que voici :
« Lille, le
« Les commissaires de la Convention nationale, etc.,,au général Dumouriez.
( Vous trouvrez ci-joint, général, un arrêté qui vous concerne. Il est nécessaire que vous
nous en accusiez la réception par le retour du courrier que nous vous expédions. « Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai); Treilhard , Robert , Carnot , Lesage-Senault. »
Au lieu de se rendre à Lille, conformément à l'arrêté, Dumouriez chercha à attirer les commissaires de la Convention à Tournay, (et l'on sait maintenant pourquoi); voici sa réponse :
« Tournay, le 29 mars, l'an II de la République.
« Le général en chef Dumouriez aux citoyens
commissaires de la Convention nationale.
« Il n'est impossible1 citoyens commissaires, de laisser un seul instant l'armée, dans le moment où ma présence seule la retient, ou par la défection de la droite et de la gauche je suis en l'air par l'approche de Clairfait, qui est aujourd'hui à Ath, de l'archiduc Charles, qui est arrivé cette nuit à Mons, et du général Mylins, qui s'avance sur Courtrai. Me voilà presque cerné et forcé à un mouvement rétrograde, que je suis forcé de diriger moi-même. Si j'allais à Lille, l'armée aurait des craintes, et certainement je n'entrerais dans cette ville qu'avec des troupes, pour la purger de tous les lâches qui ont fui et qui me calomnient. Envoyez-moi deux ou quatre d'entre vous pour m'interroger sur les imputations graves que l'on met en avant; je répondrai sur tout avec ma véracité connue; mais je vous déclare que je ne peux pas en même temps plaider et commander; ma tête ne suffirait pas à ces deux genres de guerre.
« Signé : Dumouriez, général en chef. »
Sur cette réponse, les commissaires de la Convention se déterminèrent d'abord à se rendre de suite à Tournay. Ils ne soupçonnaient pas encore Dumouriez capable de l'excès de scélératesse qU'il a manifesté depuis; et d'ailleurs ils étaient bien décidés, en cas de voies de fait, à abattre sa tête ou à lui laisser les leurs. Voici l'arrêté qui fut pris à ce sujet :
« Vu la réponse du général Dumouriez, en date de ce jour, à la "lettre par laquelle lui était notifié notre arrêté de ce même jour, qui le mande par devant nous;
« Nous, membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée de la Belgique et dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais, arrêtons que nous nous transporterons sur-le-champ à Tournay, pour entendre le général Dumouriez.
« Fait à Lille, le 29 mars 1793, l'an II de la République, 10 heures du soir. « Signé : Delacroix, .Gossuin, Merlin (de Douai); Treilhard , Robert , Carnot , Lesage-Senault. »
Cet arrêté pris, l'un des commissaires observa qu'avancés comme on letait dans la nuit, on ne pourrait pas arriver à Tournay avant deux heures du matin, heure à laquelle il serait peut-être impossible de voir Du mouriez, et qu'ainsi il valait mieux remettre le départ au lendemain quatre heures du matin. Cette proposition fut adoptée .
Le lendemain, à l'heure indiquée, les sept
commissaires étaient réunis, prêts à partir, leurs chevaux attelés, lorsqu'un courrier leur apporta la lettre suivante de Dumouriez :
« Du quartier général de Tournay, le
« Je vous envoie, citoyens commissaires, un procès-verbal qui vous prouvera notre détresse. Il faut absolument que vous nous aidiez de tout votre pouvoir, pour pourvoir à la subsistance de l'armée. La partie qui ' 'est débandée jusqu'à présent, ne l'a fait que par lâcheté; mais si les braves gens qui sont restés avec" moi, malgré le mauvais exemple, se débandent une fois faute de subsistances, je ne réponds pas des suites; je prévois qu'elles seront terribles. Je compte rester encore ici demain, quoique déjà totalement environné parce que j'ai ma retraite encore assurée sur Bruille, Maulde et Saint-Amand, où le conseil exécutif me prescrit d'aller camper. J'y serai après-demain; et à moins que le salut de la République ne dépende des explications que vous avez à me demander, je crois que vous ferez bien d'attendre cette époque pour venir me demander toutes les explications que je suis toujours prêt à vous donner.
« Signé : Dumouriez, général en chef. »
A la lecture de cette lettre, différents avis furent proposés. Les uns persistaient à partir pour Tournay; les autres voulaient qu'on attendît, pour aller à Saint-Amand, que Dumouriez s'y fût rendu. Après une longue discussion, ce dernier avis l'emporta de six voix sur l'autre (1) et donna lieu à l'arrêté que voici :
« Nous, membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée de la Belgique et dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais, vu la lettre du générai en chef Dumouriez, daté d'hier, et à nous parvenue ce matin, par laquelle il nous mande qu'il compte rester encore à Tournay aujourd'hui, quoique déjà totalement environné, par ce qu'il à sa retraite encore assurée à Bruille, Maulde et Saint-Amand, où le conseil exécutif lui prescrit d'aller camper, et où il sera demain;
(( Considérant que l'exécution de notre arrêté d'hier, d'après lequel nous devions nous transporter aujourd'hui à Tournay, pourrait entraver la retraite ordonnée par le conseil exécutif provisoire sur Bruille, Maulde et Saint-Amand;
« Arrêtons qu'il sera sursis à entendre le général Dumouriez sur les inculpations à lui imputées, jusqu'à ce que la retraite dont il s'agit soit effectuée.
« Fait à Lille, le 30 mars, l'an II de la République, 4 heures du matin.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
Après avoir signé cet arrêté, Treilhard, qui avait demandé et obtenu par décret la permission de rentrer dans le sein de la Convention nationale, partit pour Paris, emportant pour la Convention nationale et pour le
comité de salut public, deux lettres ainsi conçues et à la seconde desquelles étaient jointes les expéditions qu'elle énonce :
« Lille, le
« Les commissaires de la Convention nationale près l'armée, etc., à leurs collègues formant la Convention nationale.
« Citoyens nos collègues,
« Nous adressons au comité de salut public trois arrêtés que nous avons pris hier et ce matin.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard, Robert. »
« Lille, le
ic Les commissaires de la Convention nationale près l'armée et le pays de Liège, de la Belgique, à leurs collègues composant le* comité de salut public.
« Nous vous adressons, citoyens nos collègues : 1° un arrêté d'hier par lequel nous ayons mandé près de nous le général Dumouriez; 2° une lettre de ce général, en réponse à celle par laquelle nous lui avions envoyé cet arrêté; 3° un second arrêté du même jour, pris d'après cette lettre; 4° une autre lettre du même général, à laquelle il joint un procès-verbal sur la pénurie des subsistances; 5° un arrêté que nous venons de prendre d'après cette lettre.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard, Robert. »
Le lendemain, après avoir pris toutes les mesures nécessaires pour procurer à la place de Lille de puissants moyens de défense en cas de siège, les commissaires de la Convention apprenant que l'évacuation de Tournay était entièrement exécutée (l), se sont déterminés
à partir pour Saint-Amand, et voici l'arrêté qu'ils ont cru devoir prendre pour diriger leur marche, relativement à Dumouriez :
Du
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée, considérant qu'après avoir pris les mesures nécessaires pour assurer la place de Lille contre les entreprises des ennemis extérieurs et contre les manœuvres des contre-révolutionnaires de l'intérieur, et, dans la circonstances où ils sont informés que l'armée commandée par le général Dumouriez a effectué entièrement sa retraite hors de Tournay, il importe à la République qu'ils donnent suite à leur arrêté du 30 mars présent mois, concernant ledit général Dumouriez, et qu'ils déterminent avec précision la marche qu'ils devront tenir à cet égard ;
« Arrêtent ce qui suit :
Art. 1er.
« Les commissaires de la Convention nationale se rendront, demain lundi 1er avril, à Saint-Amand, pour interroger le général Dumouriez sur les inculpations dont il est l'objet.
Art. 2.
« Les questions dont la série a été arrêtée le 29 mars, seront proposées au général Dumouriez par Delacroix ; et il sera tenu note de ses réponses. ;
Art. 3.
« Si, d'après les réponses du général à toutes lesdites questions, il y a lieu de lui en faire d'ultérieures, chacun des membres de la commission pourra les lui proposer.
Art. 4.
« La proposition de distribuer et faire arrêter le général Dumouriez, est ajournée jusqu'après seis réponses.
Art. 5
« Après les réponses du général, les commissaires de la Convention se retireront dans une chambre particulière pour délibérer sans désemparer ; et pendant leur délibération le général sera gardé à vue.
Art. 6.
« S'il y a lieu de faire arrêter le. général, les commissaires manderont le plus ancien lieutenant général de l'armée, et le requerront au nom de la République, de donner à l'instant les ordres nécessaires pour effectuer son arrestation. Ils pourvoiront ensuite à son remplacement provisoire, et ils feront connaître à l'armée, par une proclamation, les mesures qu'ils auront prises, ainsi que les motifs sur lesquels elles seront fondées.
« Fait à Lille les jour, mois et an susdits. .
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai), Robert. »
D'après cet arrêté, nous nous disposions, le 1er avril au matin, à partir pour Saint-Amand, lorsque sont arrivés avec le ministre de la guerre Beurnonville, nos collègues Camus, Quinette, Bancal et Lamarque, apportant un décret qui mandait Dumouriez à la barre, et nous appelait dans le sein de la Convention, pour y donner de vive voix tous les renseignements nécessaires, tant sur ce général que sur l'état de l'armée.
Notre premier vœu, à la lecture de ce décret, fut d'accompagner nos collègue à Saint-Amand. Mais comme ils parurent ne pas le désirer, nous nous bornâmes à leur communiquer, et le rapport du lieutenant-colonel Go-guet dont nous leur laissâmes une copie certifiée, la série de questions que nous avions calquée, en grande partie sur cette pièce, et les dispositions d'après lesquelles nous devions, sans leur arrivée, nous rendre à l'instant même auprès de Dumouriez. Nous leur fîmes part en même temps des mesures que nous .avions prises relativement à l'armée. La place de Lille ne fut pas oubliée; nous leur rendîmes compte de ce que nous avions préparé pour la mettre en état de soutenir un siège ; et le dénuement dans lequel nous l'avions trouvée, parut étonner beaucoup le ministre Beurnonville, qui avait dans son portefeuille les états les plus tranquillisants sur l'armement et les approvisionnements de cette place.
La conférence finie, nos collègues partirent pour Saint-Amand après nous avoir remis pour la Convention nationale la lettre suivante :
Lille, le er avril
1793
« Les commissaires de la Convention nationale, etc., à leurs collègues composant le comité de défense générale.
( Citoyens nos collègues, nous venons d'arriver à Lille, où nos collègues Gossuin, Delacroix, Merlin et Robert s'étaient réunis. Nous avons conféré avec eux sur les mesures qu'ils avaient prises relativement à l'armée et au général Dumouriez. Nous les avons trouvés occupés, par rapport au général, des mêmes mesures que la Convention a décrétées ; et ayant pris par rapport à l'armée, les moyens d'assurer sa subsistance ; ils vous rendront compte de leurs opérations ; nous, nous allons nous rendre au camp de Maulde, où est le général Dumouriez, et nous y exécuterons le décret du 29 dans toutes ses parties.
« Le ministre a pris, de concert avec nous, sur toute la route, des mesures pour rallier les soldats qui avaient quitté l'armée.
« Signé : Henri Bancal, F. Lamarque, Camus, Quinette. »
Il n'est peut-être pas inutile de remarquer que cette lettre a été tronquée dans plusieurs journaux,de manière à faire entendre que nous n'avions pris, lors de l'arrivée de nos collègues, aucune mesure contre Dumouriez. Une pareille calomnie mérite sans doute plus de pitié que d'indignation; car elle est plus bête que méchante.
Quoi qu'il en soit, avant de partir de Lille, . nous prîmes deux arrêtés pour faire saisir les personnes et les papiers de deux complices
présumés de Dumouriez, dont l'un demeurait à Douai, et l'autre devait se trouver dans les environs de Cambrai. Voici comment ils sont conçus :
« Au nom de la République.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée, informés par leurs collègues Camus, Quinette, Lamarque et Bancal, des motifs de suspicion qui s'élèvent contre le citoyen Cornet des Grès, ci-devant Belge, demeurant à Douai, relativement à ses intelligences avec le général Dumouriez, et de la nécessité de s'assurer de sa personne et de ses papiers ;
« Requièrent le directoire du département du Nord de prendre les mesures nécessaires, pour que, dans le jour, le citoyen Cornet des Grès soit mis en état d'arrestation, et que les scellés soient apposés sur ses papiers; et arrêtent qu'il sera interrogé par qui il appartiendra, d'après les instructions qui seront données à cet effet par nos collègues Camus, Quinette, Lamarque et Bancal.
« Fait à Lille, le 1er avril 1793, l'an II de la République.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai), Robert. »
« Au nom de la République.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée, informés par leurs collègues Camus, Quinette, Lamarque et Bancal, des motifs de suspicion qui s'élèvent contre le citoyen Lasonde, actuellement retiré à Cambrai et aux environs, à raison de ses liaisons avec le général Dumouriez, et de la nécessité de* s'assurer de sa personne et de ses papiers ;
« Requièrent le directoire du département du Nord de prendre les mesures nécessaires pour que le citoyen Lasonde soit mis en état d'arrestation, et que les scellés soient apposés sur ses papiers ; et arrêtent qu'il sera interrogé par qui il appartiendra, d'après les instructions qui seront données à cet effet par nos collègues Camus, Quinette, Lamarque et Bancal.
« Fait à Lille, le 1er avril 1793, l'an II de la République.
«c Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai), Robert. »
Arrivés à Douai vers onze heures du soir, nous remîmes ces arrêtés au procureur général syndic du département du Nord, qui de suite les communiqua au directoire ; à l'instant, le premier fut exécuté par l'arrestation du citoyen Cornet des Grès'; et le procureur général syndic partit pour faire exécuter l'autre, partout où il pourrait rencontrer Lasonde.
Quoique très impatients d'arriver à Paris, nous fûmes obligés, fauter de chevaux, de passer à Douai le reste de la nuit, sans nous douter qu'alors même Dumouriez donnait des ordres pour nous faire arrêter à Lille, en cas que nous y fussions encore (1), et interrogeait,
sur la route que nous aurions pu prendre, dans le cas contraire, un citoyen qui nous avait été attaché pendant toute notre mission (1).
Nous partîmes de Douai le 2 avril au matin, et malgré le retard que nous y avions éprouvé, nous espérions arriver à Paris assez tôt pour n'y être pas dévancés par Dumouriez, lui proposer lorsqu'il paraîtrait à la barre, la série de questions que nous avions rédigée le 29 mars, et par là le démasquer tout entier.
Tandis que nous nous repaissions de ces idées, un courrier extraordinaire dépêché de Douai, après notre départ, nous joignit entre Péronne et Marche-le-Pot, et nous remit la lettre suivante :
Douai, le
« Législateurs,
« Nous avons juré de vivre libres ou de mourir , nous tiendrons nos serments.
« Nous vous envoyons la copie d'une lettre
que nous adresse le général Dumouriez. Guidez notre conduite.
( Les administrateurs composant le directoire du département du, Nord.
« Signé : Girard, vice-président ; Bouly, Lebon, Desmoutier et Lagarde, secrétaire général.
« Le général Dumouriez aux administrateurs du département du Nord.
« Citoyens administrateurs,
« La tyrannie, les assassinats et les Crimes sont à leur comble à Paris. L'anarchie nous dévore ; et sous le nom sacré de la- liberté, nous sommes tombés dans le plus vil esclavage. Plus les dangers sont grands, plus la Convention nationale met de cruauté, de tyrannie et d'aveuglement. Les vérités que je lui ai dites dans ma lettre du 12 mars, ont poussé les Marat et les Robespierre à dévouer ma tête à leur vengeance ; elle a envoyé pour m'arrêter, ou plutôt pour se défaire de moi, quatre commissaires : et le ministre de la guerre, Bèur-nonville, dont j'avais fait la fortune militaire, les a accompagnés. Depuis plusieurs jours, l'armée frémissait de tout ce qui se tramait contre son général ; et si je n'avais point retenu mon indignation ils auraient été victimes de l'injustice de leurs commettants. Je les ai fait arrêter, et je les ai envoyés en lieu sûr, pour me servir d'otages, en cas qu'on prétende commettre de nouveaux crimes. Je ne tarderai pas à marcher sur Paris pour faire cesser la sanglante anarchie qui y règne. J'ai trop bien défendu la liberté jusqu'à présent pour qu'on puisse imaginer que je change d'opinion. Nous avons juré en 1789-90 et 91, une Constitution qui nous assujettissait à des lois, et nous donnait un gouvernement stable. Ce n'est que depuis que nous l'avons rejetée, que nos crimes et nos malheurs ont commencé ; en la reprenant, je suis sûr de faire cesser la guerre civile et la guerre étrangère, et de rendre à la France le repos, la paix et le bonheur qu'elle a perdus en prenant la licence et l'infraction de toutes les lois pour la liberté.
« Je connais la sagesse du département ou je suis né ; j'ai déjà été une fois son libérateur, j'espère être bientôt celui devla France entière; et je vous jure sur tout ce qu'il y a de plus sacré, comme un homme vertueux qui aime sa gloire, que, bien loin d'aspirer à la dictature, je m'engage à quitter toutes fonctions publiques, aussitôt après que j'aurai sauvé ma patrie.
« Signé : Dumouriez, général en chef de Varmée du Nord. »
u Pour copie conforme.
« Signé : Girard, vice-président;
Lagarde, secrétaire général. »
Il n'est ni besoin ni possible d'exprimer ici les sentiments qui nous agitèrent à la nouvelle de cette atroce proclamation. La Convention nationale peut les apprécier par ceux qu'elle éprouva elle-même le lendemain, sur le rapport que nous lui en fîmes... Peut-être alors les amis'de la liberté ont-ils regretté comme nous, que notre mission n'eût pas duré 24 heures de plus ; car, nous l'avons déjà dit à
la tribune, et nous nous plaisons à le répéter, nous n'aurions pas, comme nos collègues, été à Saint-Amaud sans pistolets..., et ou Dumouriez nous aurait obéi, ou il aurait à l'instant payé de sa tête la résistance qu'il aurait essayé de nous faire.
Maintenant, qu'on rapproche toutes les circonstances détaillées dans cet article, et qu'on juge si avant le rapport de Goguet, qui ne nous a été remis que le 29 mars, il nous a été possible de soupçonner les projets de ce lâche conspirateur ; disons mieux, qu'on juge si lui-même a mis dans ses projets quelque suite, et si avec l'intention cachée de trahir la République, il ne l'a, pas fait tout à coup d'une manière toute différente de celle qu'il avait pu se proposer du premier abord; Sans doute, il paraîtra difficile de croire qu'il ait concerté avec les Autrichiens, la trouée d'Althenoven et d'Aix-la-Chapelle, qui, par contre-coup, devait faire manquer la conquête de la Hollande, conquête à laquelle il mettait trop d'ardeur, et qu'il faisait marcher trop rapidement, pour qu'on puisse imaginer qu'il ne voulût pas l'achever, au moins pour son propre compte. Sans doute, il paraîtra difficile de croire qu'avant de faire sa retraite sur Bruxelles, et d'évacuer cette ville, il n'ait pas combattu franchement l'armée que commandait Cobvurg. Sans doute il paraîtra difficile de croire que si alors il s'étendait avec une puissance étrangère, cette puissance ne fût pas plutôt la Prusse que l'Autriche, la Prusse dont il avait adulé le roi, dans une proclamation du mois de septembre 1792, la Prusse dont il avait si complai-samment ménagé et sauvé l'armée dans les plaines de Champagne ! Sans doute, il paraîtra difficile de croire que ses intelligences avec Gobourg, et le traité qui a dû en être le résultat, ait précédé le moment où il a vu qu'il lui était impossible d'exécuter le plan quelconque que son ambition avait conçu, et qu'il était forcé d'en former un autre. Ce qu'il y a de certain, c'est que le bruit que nous allions avoir la paix et un roi, n'ont commencé à circuler dans l'armée,( que lorsqu'elle se fut retirée sur Tournay. Ce seul fait doit paraître décisif.
seconde partie.
Exécution du décret du
Le décret du 15 décembre proclame, comme on le sait, la liberté et la souveraineté de tous les peuples chez lesquels la République a porté ou portera ses armes.
Peu de lois ont été attaquées avec autant d'obstination et d'acharnement, que celle-ci l'a été dans la Belgique, et l'on ne doit pas s'en étonner : la liberté avait dans ce pays une foule d'adversaires que leurs richesses et le fanatisme rendaient très puissants ; et Dumouriez, loin de combattre leurs réclamations, non seulement les appuyait de toute son influence, mais y joignait les siennes propres, qu'il adressait à la Convention nationale, en lui déclarant que si elle ne les accueillait pas, elle ne devait plus compter sur ses services (l).
A ces premières causes des difficultés que le
décret du 15 décembre a éprouvées dans son exécution, il s'en est jointe une autre que nous avons exposée à la Convention par la lettre suivante :
« Gand, le
« Depuis notre arrivée ici, nous avons remarqué avec satisfaction que Gand n'est pas la ville de la Belgique où l'esprit public soit le moins avancé. Le décret du 15 décembre y a été très bien accueilli par tous les vrais amis de la liberté ; et tout leur regret est qu'on les ait laissés si longtemps douter si la Convention nationale voulait ou non qu'il fût exécuté. Ces doutes qui ont surtout affligé les nombreux patriotes dont sont peuplés les riches campagnes de ce superbe pays, ont principalement eu leur source dans les divers renvois que la Convention nationale a faits au comité diplomar tique, des réclamations élevées contre ce sage décret.
( Les auteurs de ses réclamations ne manquent pas de se prévaloir de ces renvois, auprès des hommes faibles qu'ils cherchent à égarer. ( Si la Convention nationale, leur disent-ils, tenait fortement à son décret, elle passerait à l'ordre du jour sur nos pétitions, comme elle l'a fait le 26 décembre sur celles des députés du Hainaut. En chargeant son comité de les examiner et de lui en rendre compte, elle annonce qu'un pas rétrograde en cette matière ne répugne pas à ses principes ». Yoilà, citoyens nos collègues, le langage qu'on oppose ici aux mesures prises pour la prompte exécution du décret ; ne plus l'autoriser à l'avenir, rapporter à l'instant les renvois sur lesquels on le fonde, voilà ce que nous vous invitons à faire, si vous ne voulez pas rendre notre mission inutile.
« La Convention nationale ne saurait trop se tenir en garde contre les moyens employés pour surprendre sa sagesse sur ce grand objet. Par exemple, il s'est présenté le 26 de ce mois à la barre, des individus qui se sont qualifiés députés des deux Flandres : Eh bien ! non-seulement ils n'étaient pas envoyés par le peuple de l'une ni de l'autre Flandre, mais les administrateurs mêmes de qui ils tenaient leur mission, ne représent|ent nullement ce peuple. C'est ce que nous avons constaté au moins par rapport à la Flandre orientale dont la ville de Gand est le chef-lieu, et c'est ce qui nous a engagé hier, à requérir par un arrêté ci-joint sous le numéro 1, la dissolution de l'assemblée que ces administrateurs tenaient en cette ville.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
Les vérités que cette lettre annonçait à la Convention nationale avaient dté isenties d'avance; et le jour même que nous l'écrivions à Gand, la Convention nationale rendait à Paris le décret que nous sollicitions de sa sagesse.
Pour mettre de l'ordre dans l'exposé de tout ce qui a été fait en exécution de l'un et de l'autre décret, nous diviserons cette partie de notre rapport en sept ariticles qui auront pour objet :
1° La suppression des autorités établies avant la publication du 1° de ces décrets;
2° L'abolition des impôts et des contributions qui existaient à cette époque;
3° Les biens appartenant au fisc, aux fauteurs, adhérents et satellites volontaires de la tyrannie, aux établissements publics et aux communautés tant séculières que régulières;
4° Les fonctions des commissaires du conseil exécutif provisoire;
5° La convocation, la tenue et les résultats des assemblées primaires;
6° Les effets et suites des vœux émis dans ces assemblées.
Art. 1er.
« Suppression des autorités établies avant la
publication du décret du 15 décembre 1792.
« La disparition des autorités établies dans la Belgique sous le régime autrichien, avait précédé de beaucoup la publication du décret du 15 décembre: et ces autorités constituées avaient été remplacées par des administrations provisoires que le peuple de chaque ville ou arrondissement plus ou moins étendu, avait choisies.
« Ces choix n'avaient pas été partout réguliers quant à la forme, ni heureux quant aux personnages qui en étaient l'objet.
« Cependant les commissaires de la Convention n'ont pas cru devoir supprimer toutes ces administrations; une mesure aussi indéfinie, en nécessitant trop tôt la convocation de toutes les assemblées primaires, aurait totalement dérangé le plan des opérations politiques dont ils étaient chargés; et avant leur départ, il avait été convenu entre eux et le rapporteur du décret du 15 décembre, qu'au lieu d'une suppression générale, ils se borneraient à celle des administrations qui marqueraient de l'incivisme.
« C'est aussi ce qu'ils ont fait, comme on le verra par les arrêtés suivants :
N° 1.
« Au nom de la République,
« Yu par nous, commissaires de la Convention nationale de France, députés dans la Belgique, la proclamation des représentants provisoires du peuple libre de la ville de Louvain, du 23 de ce mois, portant ordre à tous individus de continuer le paiement des droits et impôts usités tant à l'entrée que dans l'intérieur de cette ville, sur le| fondement que l'abolition n'en a été prononcé par aucune autorité constituée en ladite ville;
« Considérant que cette proclamation est en opposition directe avec l'article premier du décret de la Convention nationale de France des 15 et 17 décembre 1792, lequel supprime toutes les contributions existantes à l'époque de sa publication;
« Considérant que cette résistance des représentants provisoires de la ville de Louvain, annonce de leur part l'intention manifeste de maintenir les abus de l'ancien régime, en continuant de faire peser sur la partie indigente et laborieuse du peuple les impôts dont l'aristocratie l'a chargé, et auxquels elle a eu l'art perfide de se soustraire par des privilèges et
exemptions créées par le despotisme, pour se faire des partisans;
« Considérant que par une conduite aussi incivique, les représentants provisoires de la ville de Louvain se déclarent ouvertement ennemis de la souveraineté du peuple, et fauteurs de la tyrannie à laquelle est dû l'établissement des droits et impôts dont il s'agit;
Nous commissaires susdits de la Convention nationale de France, requérons le citoyen Chépy, commissaire national du pouvoir exé-v cutif : l°de casser et annuler, sans aucun délai, la proclamation prise par les représentants provisoires de la ville de Louvain, le 23 de ce mois, avec défense à tous percepteurs et autres de l'exécuter ni faire exécuter, à peine d'être poursuivis extraordinairement comme concussionnaires; 2° de déclarer lesdits représentants provisoires déchus de toutes fonctions et autorité, et de leur défendre de s'assembler ni faire aucun acte d'administration et puissance publique, à peine d'être punis comme perturbateurs de la tranquillité générale, et coupables d'attentat à la souveraineté du peuple; 3° de tenir la main à ce que les assemblées primaires se réunissent de suite, pour procéder à la formation d'une administration et d'une justice provisoire, conformément à l'article 2 du décret des 15 et 17 décembre 1792; 4° de nommer des commissaires pour exercer provisoirement, en attendant que l'administration provisoire à nommer par les assemblées primaires soit en activité, les pouvoirs déterminés par l'article 5 dudit* décret.
« Requérons le général Moreton de prêter main-forte au citoyen Chepy, pour l'exécution du présent arrêté, et d'assurer l'effet de ses opérations par tous les moyens que là loi a mis en son pouvoir.
(( Ainsi fait et arrêté à Bruxelles, le 25 janvier 1793, l'an II de la République Française.
( Signé : Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
N° 2.
« Yu par nous, commissaires de la Convention nationale de France, députés dans la Belgique, le pays de Liège, etc., les protestations que les représentants provisoires de la ville et du Franc de Bruges ont fait signifier le 19 de ce mois, contre les décrets des 15, 17 et 22 décembre 1792, au maréchal de camp de Fiers, commandant au nom de la République française dans la ville de Bruges;
« Considérant que, sous le prétexte de maintenir la souveraineté du peuple de la ville et du Franc de Bruges, lesdits représentants provisoires cherchent, par leurs protestations, à empêcher l'effet d'un décret qui n'a pour but que d'anéantir les établissements formés et les droits imposés dans la Belgique par la tyrannie autrichienne et par ses adhérents;
« Considérant que, d'après une conduite aussi insidieuse, les représentants provisoires de la ville du Franc de Bruges ne peuvent plus rester davantage en fonctions sans compromettre la liberté du peuple même qu'ils affectent de défendre; qu'ainsi il y a lieu à leur appliquer, dans toute sa rigueur, la disposition de l'article 1er du décret des 15, 17 et 22 décembre 1792, qui supprime toutes les au-
torités existantes à l'époque de sa publication;
« Nous, commissaires susdits de la Convention nationale de France, requérons le citoyen Gadolle, commissaire national du pouvoir exécutif : 1° de casser et annuler toutes les protestations dont il s'agit, avec défense au notaire qui les a signifiées, ainsi qu'à tous autres officiers publics, d'en signifier de semblables à l'avenir, à peine d'être poursuivis comme perturbateurs du repos public, ennemis de la souveraineté du peuple, et fauteurs de la tyrannie; 2° de déclarer lesdits représentants provisoires déchus de toutes fonctions et autorité, et de leur défendre, sous les peines ci-dessus, de s'assembler ni faire aucun acte d'administration et puissance publique; 3° de tenir la main à ce que les assemblées primaires se réunissent de suite pour procéder à la formation d'une administration et d'une justice provisoires, conformément à l'article 2 du décret des 15, 17 et 22 décembre 1792 ; 4° de nommer des commissaires pour exercer provisoirement (en attendant que l'administration provisoire à nommer par les assemblées primaires soit en activité), les pouvoirs déterminés par l'article 5 dudit décret.
« Requérons le général Fiers de prêter main-forte au citoyen Gadolle, pour l'exécution du présent arrêté, et d'assurer l'effet de ses opérations par tous les .moyens que la loi a mis en son pouvoir.
« Fait à Bruxelles, le 28 janvier, l'an II de la République.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
N° 3.
« Au nom de la République française.
« Sur le compte rendu aux commissaires de la Convention nationale, députés dans la Belgique, le pays de Liège, etc., de la manière dont a été formée l'administration générale provisoire de la Flandre Orientale, séante à Gand;
. « Considérant que les membres de cette administration n'ont reçu du peuple, dont ils se disent les représentants, aucune mission pour exercer en son nom les pouvoirs qu'ils s'attribuent sur la généralité de la Flandre Orientale:
« Considérant que cette même administration a manifesté dans plusieurs occasions des sentiments opposés aux principes conservateurs de la souveraineté du peuple belge, qui ont dicté le décret salutaire des 15, 17 et 22 décembre 1792; et que, par là, elle a justement indisposé contre elle les véritables amis de la liberté belge;
« Considérant qu'elle a jusqu'à ce moment empêché la partie indigente et laborieuse du peuple de jouir de l'abolition des impôts prononcée par l'article 10 du même décret;
( Considérant que dans de pareilles circonstances, il est d'une extrême urgence d'appliquer à cette administration le texte précis et libéral de l'article 1er du décret des 15, 17 et 22 décembre 1792, par lequel sont supprimées toutes les autorités existantes au moment de sa publication;
Considérant que, d'ailleurs, il existe dans
chaque commune 4e la Flandre orientale, des administrations locales qui suffisent pour exercer, jusqu'à la très prochaine convocation-des assemblées primaires, les pouvoirs nécessaires à la sûreté et à la paix publique;
« Nous commissaires susdits de, la Convention nationale de France, requérons le eitoyen Darnaudery, commissaire national du pouvoir exécutif à Gand : 1° de casser et annuler, sans aucun délai, l'assemblée qualifiée d'administration générale provisoire de la Flandre orientale; 2° de défendre aux citoyens composant actuellement cette assemblée, de se réunir, ni de faire aucun acte d'administration et puissance publique, à peine d'être punis comme perturbateurs de la tranquillité générale, ennemis de la souveraineté du peuple et fauteurs de la tyrannie; 3° de tenir la main à ce que les assemblées primaires et communales se réunissent incessamment, .pour procéder à la nomination des administrateurs provisoires, conformément à l'article 2 du décret des 15, 17 et 22 décembre 1792.
« Requérons le commandant temporaire de la place de Gand de prêter main-forte au citoyen 'Darnaudery pour l'exécution du présent arrêté, et d'assurer l'effet de ses opérations, par tous les moyens que la loi a mis en son pouvoir.
« Fait à Gand, le 30 janvier, l'an II de la République.
. « Signé : Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
N°4,.
Au nom de la République française.
« Vu par nous commissaires députés de la Convention nationale dans la Belgique, le pays de Liège; etc., la protestation que les requérants provisoires de la ville et dépendances d'Alost ont faite contre le décret des 15, 17 et 22 décembre 1792, et qu'ils ont notifiée le 17 de ce mois au commandant des troupes françaises en la même ville;
« Considérant que sous le prétexte de maintenir la souveraineté du peuple de la ville et dépendances d'Alost lesdits représentants provisoires cherchent, par leur protestation, à empêcher l'effet d'un décret qui n'a pour but que d'anéantir les établissements formés etr les droits imposés dans la Belgique par la tyrannie autrichienne et ses adhérents;
« Considérant que, d'après une conduite aussi insidieuse, les représentants provisoires de la ville d'Alost et dépendances ne peuvent plus rester davantage en fonctions, sansi compromettre la liberté du peuple qu'ils affectent de défendre; qu'ainsi il y a lieu de leur appliquer, dans toute sa rigueur, la disposition de l'article 1er du décret des 15, 17 pt 22 décembre 1792, qui supprime toutes les autorités existantes à l'époque de sa publication;
_ « Nous commissaires susdits de la Convention nationale de France, requérons le citoyen Darnaudery, commissaire du pouvoir exécutif : 1° de casser et annuler les protestations dont il s'agit, avec défense à qui que ce soit d'en notifier de semblables à l'avenir, à peine d'être poursuivi comme perturbateur du repos public, ennemi de la souveraineté du peuple et
fauteur de la tyrannie ; 2° de déclarer lesdits représentants prvisoires déchus de toutes fonctions et autorité, et de le'ur défendre, sous les peines ci-dessus, de s'assembler, ni faire aucun acte d'administration et puissance publique; 3° de tenir la main à ce que les assemblées primaires se réunissent de suite, pour procéder à la formation d'une administration et d'une justice provisoires, conformément à l'article 2, du décret des 15, 17 et 22 décembre 1792; 4° de nommer des commissaires pour exercer provisoirement (en attendant quel'ad-ministration provisoire à nommer par les assemblées primaires soit en activité), les pou-roirs déterminés par l'article dudit décret.
« Requérons le citoyen commandant de la ville d'Alost, de prêter main-forte au citoyen Darnaudery, pour l'exécution du présent arrêté, et d'assurer l'effet de ses opérations, par tous les moyens que la loi a mis en son pouvoir.
« Ainsi fait et arrêté à Gand, le 31" janvier 1793, l'an II de la République française.
« Signé : Gossuin., Merlin (de Douai), Treilhard. »
N° 5.
« Au nom de la_Répuhlique française.
« Yu par nous, commissaires de la Convention nationale de France, députés dans la Belgique, la proclamation des représentants provisoires du peuple libre de la ville d'Ypres du 3 de ce moisi portant continuation de tous les impôts existant lors de la publication des décrets des 15-17 et 22 décembre 1792, à la seule exception d'une partie de ceux imposés sur les, boissons débitées dans les cabarets;
« Considérant que cette proclamation-est en opposition directe avec l'article Ie* du décret de la Convention nationale.de France des 15-17 et 22 décembre 1792, lequel supprime toutes les contributions existantes à l'époque de sa publication;
« Considérant que Cette résistance des représentants provisoires de la ville d'Ypres, annonce de leur part l'intention manifeste de maintenir les abus de l'ancien régime, en continuant de faire peser sur la partie indigente et laborieuse du peuple les impôts, dont F aristocratie l'a surchargée, et auxquels elle a eu . l'art perfide de se soustraire par des privilèges et des exemptions crées par le despotisme pour se faire des partisans;
« Considérant que par une conduite aussi incivique ainsi que per d'autres faits notoirement connus dans la ville d'Ypres, les représentants provisoires de cette ville se déclarent ouvertement ennemis de la souveraineté du peuple et fauteurs de la tyrannie à laquelle est dû rétablissement des droits et impôts dont il s'agit;
« NouSj commissaires susdits de la Convention nationale de France, requérons le citoyen Haron Romain, commissaire national du pouvoir exécutif : 1° de easser et annuler sans aucun délai la proclamation arrêtée par les représentants provisoires de la ville d'Ypres le . 3 de ce mois, avec défense à tous percepteurs et autres de l'exécuter *ni faire exécuter à' peine d'être poursuivis extraordinairement comme concussionnaires; 2° de déclarer lesdits repré-
sentants provisoires déchus de toutes fonctions et autorité, et de leur défendre de s'assembler, ni de faire aucun acte d'administration et puissance publique, à peine d'être punis comme perturbateurs de la-tranquillité générale et coupables d'attentat à la souveraineté du peuple; 3° de tenir la main à ce que les assemblées primaires se réunissent de suite, pour procéder à la formation d'une administration et d'une justice provisoires, conformément à l'article II du décret des 15-17 et 22 dé-cembrel792; 4° de nommer des commissaires pour exercer provisoirement (en attendant que l'administration provisoire à nommer par les assemblées primaires, soit en activité) les pouvoirs déterminés par l'article 5 dudit décret.
( Requérons le général Omoran de prêter main-forte au citoyen Haron Romain, pour l'exécution du présent arrêté, et d'assurer l'effet de ses opérations par tous les moyens que la loi a mis en son pouvoir.
« Ainsi fait et arrêté par nous commissaires susdits, à Tournay, le 5 février 1793, l'an II de la République française.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai);
Treilhard. »
6.
« Au nom de la République française.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires, etc., informés des obstacles multiples que les représentants provisoires de la ville d'Anvers ont apportés à l'exécution des décrets de la Convention nationale des 15-17 et 22 décembre 1792, et des efforts journaliers qu'ils font encore pour perpétuer l'oppression du peuple, et l'empêcher de jouir des heureux effets de la liberté que les armées françaises lui ont procurée; considèrent, en conséquence, qu'il importe surtout à la classe indigente et laborieuse des citoyens d'Anvers, d'étendre à cette ville les dispositions des arrêtés qui, pour des motifs semblables, ont, supprimé les administrations provisoires de Louvain, Gand, Alost, Bruges, Franc de Bruges, Ypres, etc. ;
« Arrêtent que les fonctions des représentants provisoires de la ville d'Anvers cesseront dès l'instant où le présent arrêté leur sera notifié par le3 commissaires nationaux du pouvoir exécutif ; leur font défense de continuer ultérieurement lesdites fonctions, à peine d'être poursuivis comme perturbateurs du repos public, et usurpateurs de la souveraineté du peuple; chargent les commissaires nationaux du pouvoir exécutif de nommer des commissaires provisoires, pour exercer toutes lesdites fonctions jusqu'à ce que le peuple, légalement convoqué pour cet effet, aux lieux et jour qui seront indiqués par les commissaires de la Convention nationale, ait élu des magistrats dépositaires de ses pouvoirs.
« Fait à Bruxelles, le 26 février 1793, l'an II de la République française.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin, (de Douai). »
Ce dernier arrêté était à peine envoyé à Anvers*que les commissaires de la Convention crurent devoir en suspendre l'exécution jusqu'au moment, qui alors paraissait très pro-
! chain, où ils se rendraient à Anvers; leur but était de nommer eux-mêmes les commissaires qui remplaceraient l'administration, afin de les investir d'une plus grande considération. En conséquence, ils écrivirent au citoyen Tronquet Saint-Michel, commissaire du conseil exécutif à Anvers, la lettre que voici :
N° 7.
Bruxelles, le 27 février 1793, l'an II de la République française.
« Vous voudrez bien, citoyen, ne parler à personne de l'arrêté que nous vous avons adressé hier! et qui a pour objet la suppression de l'administration provisoire d'Anvers; nous avons quelques changements à y faire : vous aurez soin de nous le renvoyer à Louvain (où nous serons demain le soir)! avec les autres dépêches dont vous parlera le citoyen Chaus-sart, qui part de Bruxelles, cette nuit, pour aller nous seconder.
« Signé: Delacroix,,Gossuin, Merlin (de Douai). »
Mais les circonstances ayant mis obstacle au voyage que les commissaires de la Convention se proposaient de faire à Anvers dans les premiers jours de mars, le sursis a été levé par l'arrêté du 7 de ce mois, voici comment :
8.
Autorisations demandées aux députés commissaires de la Convention nationale, par
les commissaires nationaux soussignés.
« 1° De casser l'administration provisoire d'Anvers qui a protesté, par deux actes pu-blics, contre les décrets;
« 2° De la remplacer par une commission provisoire composée de 10 membres. « Signé: Publicola Chaussard, Tronquet Saint-Michel.
« Du 7 mars, l'an II de la Répubique française.
« Les commissaires de la Convention nationale ont déjà répondu au premier article; ils confirment le3 pouvoirs déjà donnés, et autorisent le3 commissaires nationaux à remplacer provisoirement l'administration provisoire par une commission de 10 membres, à la charge de mettre au plus tôt le peuple en état de se nommer des administrateurs.
« Signé : Camus, Treilhard. »
L'arrêté suivant frappe sur une administration qui n'avait pas été établie, comme celles dont il vient d'être question, avant le décret dul5 décembre, mais dont la formation n'avait pas été régulière.
N° 9.
Du
«Au nom de la République française.
« Les députés de la Convention nationale de France et ses commissaires près les armées et dans la Belgique, pays de Liège, etc.;
( Vu les procès-verbaux des assemblées pri- i maires tenues le 6 du présent mois, pour l'élec- | tion des membres d'une administration provisoire, dans les paroisses de Notre-Dame, de la Madeleine, Saint-Jean, Saint-Jacques , Saint-Martin, Saint-Piat et Saint-Brice de la ville de Tournay;
« Attendu qu'il résulte de ces actes que le décret des 15 et 17 décembre n'a pas été exécuté, notamment en ce que, dans la paroisse Notre-Dame, les votants n'ont pas prêté de serment à la liberté et à l'égalité; que dans quelques autres paroisses, les listes ont été formées par des cabales anticiviques, ainsi que plusieurs des votants l'ont eux-mêmes déclaré; que dans presque toutes on a procédé -avec une telle négligence, que le nombre des votants aux scrutins n'a pas même été constaté;
« Arrêtent que l'élection d'une administration provisoire pour la ville de Tournay, faite le 6 février présent mois, est nûlle et de nul effet; font défense aux citoyens élus de prendre la qualité d'administrateurs, et d'en faire aucune fonctions; requièrent les citoyens Thiébaut et Beaumé, commissaires nationaux du conseil exécutif provisoire de la République Française, dans le Tournaisis, de nommer des citoyens, au nombre qu'ils jugeiront convet-nable, pour exercer les fonctions d'administrateurs, provisoirement, et jusqu'à l'élection qui sera faite d'une administration, conformément au décret des 15 et 17 décembre dernier.
« Requièrent pareillement les généraux et commandants de la force publique, de prêter main forte pour l'exécution du présent arrêté.
« Fait à Bruges, les jour et an que dessus.
« Signé : Camus, Treilhard. »
Art. 2.
Abolition des impôts et des contributions qui
existaient lors de la publication du décret
du 15 décembre.
On conçoit aisément que la partie du décret du 15 décembre qui prononçait cette abolition, n'est pas celle dont F exécution a souffert le plus d'obstacle. Cependant il s'est élevé, dans cette exécution même, des difficultés que les commissaires de la Convention nationale ont levées par des décisions qui se rapportent à quatre objets : 1° droits sur les consommations; 2° droits d'entré, de sortie ou de douanes; 3° droits de timbre ; 4° droits de barrière.
1° Nous avons rendu compte, dans le précédent article, de deux arrêtés pris contre des magistrats qui prétendaient, nonobstant le décret du 15 décembre, faire peroevoir les anciens doits sur les consommations.
2° A l'égard des droits d'entrée et de sortie ou de douanes, ils ont donné -lieu à plusieurs arrêtés et lettres.
N°-l.
( Au nom de la République française.
« Nous, commissaires de la Convention nationale, députés dans la Belgique, le pays de Liège, etc.
« Sur les représentations qui nous ont été faites concernant l'application aux droits de douanes, de l'article 1er dif décret du 15 dé-
LE MENT AIRES. [3 avril 1793. j ^ 20o
cembre dernier, qui prononce la suppression de tous impôts ou contributions existant;
« Considérant que les droits de douanes ne sont pas nominativement compris dans ledit article^ et que si d'un côté l'abolition de ses droite sur les limites qui touchent la France, ne peut être susceptible d'inconvénients, la même abolition sur les limites qui touchent le territoire étranger, pourrait être préjudiciable à la République et favoriser les vues et les projets de nos ennemis, en facilitant leurs approvisionnements; après en avoir délibéré en commun, en vertu des pouvoirs à nous attribués par le décret de la Convention nationale du 26 janvier dernier, avons arrêté :
1° « Que tous impôts ou contributions connus sous le nom de droits de douanes, qui etaient perceptibles dans les bureaux établis dans la Belgique, sur les marchandises et den-rees qui étaient introduites de France ou qui. y étaient importées, sont demeurent supprimées.
.2° ( Que les droits de même nature, perceptibles sur les marchandises exportées du territoire étranger ou qui y sont importées, continueront provisoirement d'être perçus, et que le montant en demeurera sous la sauvegarde de la République, jusqu'à ce qu'il ait été autrement ordonné par la Convention nationale.
« Fait à Bruxelles, le 8 février, l'an II de la République française.
« Signé: Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
N° 2.
Bruxelles, le
« Les commissaires de la Convention nationaleaux représentants provisoires de la ville de Bruxelles.
« Nous avons reçu la lettre par laquelle vous nous faites part de l'envoi qui vous a été fait par le généra Moreton, de notre arrêté du 8 de ce mois concernant les droits de douanes; vous nous marquez qu'il serait convenable de prendre un semblable arrêté pour toute la Belgique, et vous demandez ensuite si les marchandises venant de France, et qui ne sont point du crû de la République, sont comprises dans l'exemption des droits d'entrée à leur importation dans la Belgique, et si les marchandises de la Belgique jouiront de la même exemption à leur importation en France.
« Nous ne croyons pouvoir mieux répondre, à vos questions, que par l'envoi d'un exemplaire imprimé de notre arrêté : vous y verrez : 1° Qu'il est général et n'excepte aucune partie de la Belgique, que par conséquent ses dispositions embrassent tout le pays, comme vous le désirez; 2° que la suppression des droits d'entrée et de sortie, connus sous le nom de douane, perceptibles sur les marchandises importées en France ou exportées de France est entièrement absolue, et qu'il n'y a par conséquent aucune exception à faire; 3° que les droits supprimés sont seulement ceux qui se trouvaient perceptibles dans les bureaux établis dans la Belgique. Yous en sentez bien la
raison : les impôts n'y étaient pas établis par l'autorité du souverain légitime, mais bien par la volonté -absolue des despotes; or il ne se perçoit dans les bureaux établis en France, que des droits consacrés par la volonté générale de la nation. Dette explication lèvera certainement tous vos doutes, et nous n'en avons aucun sur votre empressement à-exécuter un arrêté qui va mettre le peuple belge en état de reprendre tet d'exercer sa souveraineté.
« Signé : Camus, Delacroix, Gossuin, Danton, Merlin (de Douai); Treilhard. »
3.
Au nom de la République française.
( Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc. .
« Informés des doutes élevés par les. administrateurs provisoires de la ville de Louvain, sur l'arrêté du 8 de ce mois, concernant les droits de douanes;
Arrêtent ce qui suit :
Art.1er
« Le décret de la Convention nationale du 15 décembre 1792, n'ayant pas aboli les droits de douane maintenus par l'arrêté dont il s'agit, ces droits doivent être perçus danB les bureaux y mentionnés, sans distinction des marchandises arrivées avant la publication dudit arrêté, d'avec les marchandises arrivées depuis.
Art. 2.
« Il ne peut 'être perçu aucun droit de douane sur les marchandises importées du pays de Liège dans la Belgique, ni sur celles exportées de la Belgique dans le pays de Liège.
Art. 3.
« Le nombre des commissaires employés aux douanes sera réduit proportionnellement aux besoins du service réglé, tant d'après le présent arrêté, que d'après celui du 8 de ce mois.
Art. 4.
« Les commissaires nationaux du pouvoir exécutif tiendront la main à l'exécution du présent arrêté.
« Fait à Bruxelles, l'an II de la République.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai). »
4.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée ét dans les pays de la Belgique, de Liège, etc.
« Yu le mémoire ci-dessus, (1) déclarent que les sieurs Jean Bastengs et G™, négociants d'Anvers, ne peuvent être dispensés des droits de douane dont il s'agit; et arrêtent néan-
moins qu'il doit leur être fait par les percepteurs de ces droits, déduction du montant des frais qu'ils ont éprouvés par le retard mentionné en leur mémoire, à la charge par 'les-dits sieurs Jean Bastengs et Cte,- de restituer auxdits percepteurs la somme formant le montant desdits frais, si dans trois semaines à compter de ce jour, ils n'ont pas justifié aux-dits percepteurs, de la preuve qui sera rapportée par eux aux commissaires de la Convention nationale, des dépenses qu'ils prétendent. leur avoir été faîtes d'acquiter lesdits droite,
« Fait à Bruxelles, le 20 février, l'an II de la République.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai). »
,N° 5.
Bruxelles, le
« Les commissaires de la Convention nationale, aux commissaires nationaux du \pouvoir exécutif, à Tournay.
« Nous sommes informés, citoyens, par un agent de la République, que venant ces jours derniers de Lille à Toumay, des soi-disant douaniers du peuple Belge se sont présentés à lui pour recevoir sa déclaration sur les effets qu'il pouvait avoir sujet aux droits d'entrée et de sortie. Ce n'est pas sans étonnement que nous apprenons qu'il existe encore deB douaniers belges dans votre arrondissement. Vous voudrez bien prendre, sans aucun délai, les mesures nécessaires pour faire exécuter sévèrement les arrêtés que nous avons pris Bur cette matière. - « Signé : Gossuin, Merlin (de Douai). »
'6.
« Au nom de la République française.
« Les membres de là Convention nationale, ses commissaires, etc., considérant que d'après l'article 11 de leur arrêté qui supprime les bureaux de douanes actuellement existant entre la -Belgique et le pays de Liège, il est plus intérressant que jamais de multiplier les moyens d'empêcher, dans les pays de Liège, et autres y adjacents, toute importation ou exportation frauduleuse ou prohibée de marchandises .provenant de l'Allemagne de la Hollande et généralement de tous les pays encore occupés par d'autres troupes que celles de la République française, ou destinées pour ces mêmes pays;
« Arrêtent q.ue les commissaires nationaux du pouvoir, exécutif des arrondissements d'Anvers, Diest, Dinant, Liège,_Verviers, Herve, Ruremonde et Malmedy, prendront toutes les mesures nécessaires pour qu'il soit, sans aucun délai, établi sur les frontières des pays ci-dessus désignés, un nombre de bureaux de douanes suffisant pour empêcher toute importation et exportation frauduleuse ou prohibée.
« Fait à Bruxelles, le 28 février 1793, l'an II de la République.
« Signé : Delacroix, ^Gossuin, Merlin {de Douai). »
7.
« Du
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc.
« Yu la lettre des commissaires nationaux du conseil exécutif à Ostende, expositive que le décret du 15 décembre dernier ayant été publié à Ostende plus tard qu'il ne l'a été à Bruxelles et 'Louvain, où s'acquittaient des droits sur les marchandises qui partaient d'Ostende, pour acquit-à-caution, quelques marchandises provenant des colonies française sont parties d'Ostende, sous acquit-à-caution, et ne sont arrivées à Bruxelles et à Louvain qu'à une époque où les droits n'étaient plus exigibles, ce qui fait naître la question de savoir si lesdits droits doivent être payés ou non;
« Arrêtent que l'acquit-à-caution n'étant qu'une précaution prise pour la sûreté d'un droit présumé dû dans le lieu où les marchandises doivent être portées, les marchandises provenant des colonies françaises, arrivées à Bruxelles et Louvain, après la publication en ces villes du décret du 15 décembre dernier, ne sont sujettes à acquitter aucun droit.
« Fait à Bruxelles, les jour et an que dessus.
« Signé : Camus, Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
3ST° 8.
« Au nom de la République française.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires, etc., informés que nonobstant les arrêtés par eux pris sur les droits d'entrée ou de sortie et de transit, ci-devant perçus dans les bureaux établis dans le pays de Liège, entre ce pays, la Belgique et la France,' et sans doute par l'effet de l'ignorance de leurs dispositions, les buralistes de Liège même prétendent encore faire payer ces droits, notamment par les marchandises et denrées importées tant de la France que de la Belgique, pour le service des armées de la République ;
« Arrêtent que le citoyen Petit-Jean, commissaire-ordonnateur en chef de l'armée de la Belgique, sera tenu de prendre, dans le jour, toutes les mesures nécessaires pour que les-dites marchandises et denrées soient remises à leur destination, sans payer aucun des droits ci-dessus énoncés ;
« Déclarent en outre que toute perception desdits droits, depuis la promulgation du décret des 15, 17 et 22 décembre 1792, est illégale
« Le commissaire national du conseil exécutif provisoire, en résidence à Liège, tiendra la main à l'exécution du présent arrêté.
« Fait à Liège, le 2 mars, l'an II de la République.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai). »
3° Les droits de timbre se sont perçus à Gand jusqu'à la fin de février ; c'était une contravention au décret du 15 décembre, mais les commissaires du conseil exécutif la toléraient,
et ce n'est que par une lettre du 19 février qu'ils en ont informé les commissaires de la Convention. Yoici la réponse qui leur a été faite :
Du
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans le pays de la Belgique, de Liège, etc.
« Yu la lettre des commissaires nationaux du conseil exécutif envoyés à Gand, en date du 19 de ce mois, expositive que les receveurs du timbre y continuent leurs perceptions ; que d'ailleurs, quoique la perception de tous les impôts eût dû cesser à l'instant de la publication du décret du 15 décembre, la perception de quelques-uns a continué pendant plusieurs jours, ce qui donne"'lieu à des demandes en restitution; -
« Arrêtent :
« 1° Qu'en conformité du décret du 15 décembre dernier, la perception de l'impôt du timbre doit absolument cesser, comme celle de tout autre impôt, sauf aux administrations provisoires, lorsqu'elles seront légitimement formées, à rétablir des contributions conformément au décret dudit jour 15 décembre dernier ;
« 2° Que les sommes payées, soit pour l'impôt du timbre, soit pour toute autre imposition, postérieurement à la publication du décret du 15 décembre seront restituées; savoir : d'après les registres de la perception, pour les sommes dont il n'avait pas été délivré de quittances, et sur les quittances quant aux sommes pour lesquelles il en aurait été délivré.
« Fait à Bruxelles, les jour et an que dessus. « Signé : Camus, Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
4° Quant aux droits de barrière, ils se percevaient encore sur plusieurs routes vers la fin de janvier. Mais pour les faire cesser, il a suffi aux commissaires de la Convention d'annoncer de vive voix qu'ils étaient abolis. Seulement un ancien buraliste s'est ingéré de les exiger encore, et même d'exercer des violences contre les citoyens qui les lui refusait ; mais voici la mesure que nous avons prise à son égard :
10.
Bruxelles, le
« Aux commissaires nationaux du pouvoir exécutif à Bruxelles.
( Vous trouverez ci-joint, citoyens, un mémoire fort important par son objet. Il s'agit de défendre un citoyen contre une oppression de l'ancien régime autrichien. Yous voudrez bien mander devant vous le percepteur inculpé par ce mémoire ; et si les faits sont rapportés exactement, lui déclarer que vous êtes chargés par nous de le faire mettre et tenir en état d'arrestation, jusqu'à ce qu'il ait pleinement indemnisé le plaignant, ce que vous exécuterez rigoureusement.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai). »
Art. 3.
Des biens et effets appartenant au fisc ennemi, aux fauteurs, adhérents et'satellites volontaires de la tyrannie, aux établissements publics et aux communautés tant séculières que régulières.
L'article 4 du décret du 15 décembre chargeait les généraux de mettre de,suite les biens et effets sous la sauvegarde et la protection de la République Française, d'en faire dresser sans délai un état détaillé qu'ils enverraient au pouvoir exécutif, et de prendre toutes les mesures qui seraient en leur pouvoir, afin que ces propriétés fussent respectées.
L'exécution de cet article a été pour les com-' missaires de la Convention nationale l'objet d'une grande surveillance.
D'abord, ils ont eu à stimuler quelques généraux et commandants de place qui ne hâtaient pas avec assez de vigueur, soit le séquestre ordonné par la loi, soit le compte qu'ils devaient en rendre. C'est dans cette vue qu'ils ont pris les quatre arrêtés qu'on va transcrire.
N° 1.
« Les commissaires de la Convention nationale dans la Belgique, le Hainaut et le pays de Liège, chargés de surveiller l'exécution des décrets des 15 et 22 décembre dernier, requièrent le citoyen Brunot, commandant temporaire" de la place, de faire mettre à exécution, sans délai, le. quatrième article du décret du 15 décembre dernier, et de leur rendre compte,„ par écrit, â Bruxelles, dimanche prochain, des démarches qu'il aura faites à cet égard.
« Fait à Louvain, le 16 janvier 1793, l'an II de la République.
« Signé : Camus, Gossuin. »
N° 2.
« Les commissaires de la Convention nationale dans la Belgique, le Hainaut et le pays de Liège, s'étant rendus à Malines, ont invité le maréchal de camp Berneron, commandant en cette ville, et le lieutenant-colonel Daver-ton, commandant temporaire de la place, à se rendre auprès d'eux ; et il leur ont demandé ce qui avait été fait dans la ville et dans le plat pays^ pour l'exécution des décrets des 15 et 22 décembre dernier : le général, arrivé depuis la surveille, et le commandant établi depuis le 23 décembre, ont répondu que lesdits décrets ne leur avaient point été envoyés." Les commissaires de la Convention nationale leur en ont donné lecture ; ils leur ont remis un exemplaire en placard, imprimé dans les trois langues française, allemande et flamande; les ont requis de le faire afficher, et de prendre toutes les mesures nécessaires pour faire exécuter, dès demain, les dispositions de l'article 4,-les requérant*en outre de leur rendre compte par écrit, le 20 de ce mois, à Bruxelles, du résultat de leurs opérations.
« Fait à Malines, le 16 janvier, l'an II de la République française, 7 h. et demie du soir.
« Signé : Camus, Gossuin. »
N° 3.
« Les commissaires de la Convention natio-x nale dans la Belgique, le Hainaut et le pays de Liège, requièrent le général Marassé, commandant dans la ville d'Anvers, de mettre sans délai à exécution, dans ladite ville et son territoire, le décret du 15 décembre dernier, particulièrement quant aux dispositions contenues dans l'article 4 dudit décret, et de leur rendre compte de ce qu'il aura fait à cet égard, par écrit, dans la ville de Bruxelles, où ils se rendront le 20 de ce mois.
« Fait à Anvers, le 18 janvier, l'an II de la République.
« Signé ' : Camus, Gossuin. » N° 4.
« Les commissaires de la Convention nationale dans la Belgique, le Hainaut et le pays de Liège, requièrent le lieutenant général Mouton, commandant la division dè l'armée à Bruxelles, de leur rendre compte, par écrit demain à 8 heures du matin, des mesures qu'il a prises pour l'exécution du décret du 15 décembre dernier, particulièrement de l'article 4, et de leur résultat.
« Fait à Bruxelles, le 20 janvier 1793, l'an II de la République.
« Signé : Camus, Gossuin. »
Ces arrêtés ont produit l'effet qu'en devaient attendre les commissaires de la Convention ; et c'est d'après les, avis multipliés qui leur en ont été donnés, que le 28 janvier ils ont écrit en ces termes à la Convention elle-même.
N°
« Les dispositions de l'article £ du décret du 15 décembre tendent à la conservation des biens et effets appartenant au fisc, au clergé belge, etc., sont presque généralement exécutées. Partout on appose les scellés nécessaires à cet objet ; et les agents employés à cette importante opération, ne rencontrent pas ou presque pas de résistance.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai). »
Cette assertion s'est cependant trouvée trop générale, et elle a été modifiée par le passage suivant, d'une lettre du 22 février datée de Gand.
N° 6.
« Nous avons été surpris de l'embarras qu'on a trouvé à mettre à exécution l'article concernant la sauvegarde des biens nationaux. Il semblerait que les agents français eussent appréhendé dé mettre tranquillement ces biens sous le séquestre, et qu'il leur eût été impossible de saisir un juste milieu entre une pure sauvegarde, qui conserve tout scrupuleusement,'' et l'espèce de déprédation qui accompagne si souvent la mainmise sur des effets mobiliers.
« Nous avons donné à tous les commissaires du pouvoir exécutif les instructions les plus détaillées; nous les avons fait agir sous nos yeux. Un peu de pratique les mettra complètement au fait ; ils ont commencé à opérer-.
« Signé : Camus, Treilhard. »
Il était dû des indemnités aux différents agents qui avaient été employés, tant à l'apposition des scellés, qu'à la confection des inventaires ; et ces indemnités étaient réclamées de toutes parts.
Pour établir à cet égard un mode uniforme, les commissaires de la Convention nationale ont pris un arrêté conçu en ces termes :
7.
Au nom de la République française.
« Les commissaires de la Convention nationale dans la Belgique, le Hainaut et le pays de Liège;
« Considérant que l'exécution de l'article 4 du décret des 15 et 17 décembre, qui place sous la sauvegarde de la nation les biens, meubles et immeubles appartenant au fisc, au prince, à ses fauteurs, adhérents et satellites volontaires, aux établissements publics, aux corps et communautés laïques et ecclésiastiques et qui ordonne la confection, sans délai, d'un état détaillé de tous ces objets, ne peut s'effectuer que par les soins et le concours de plusieurs personnes; qu'il est juste de pourvoir à l'indemnité de toutes celles qui seront employées, et qu'il convient aussi de prévenir les abus qui y pourraient résulter de taxations faites arbitrairement et sans règle, avons arrêté ce qui suit :
« Chaque commissaire préposé pour l'exécution de l'article 4 du décret des 15 et 17 décembre dernier, recevra 4 livres par jour, et le secrétaire de la commission recevra 2 livres le tout argent de France.
« Les frais de voyage sont payés en sus de cette indemnité, lorsque les commissaires seront obligés de voyager pour l'exécution de leur mandat.
« Il leur sera, en outre, alloué une somme pour les frais de bureau.
« Les taxes des frais de voyage et de ceux de bureau seront faites par les commissaires des guerres, équitablement et sous leur responsabilité.
« Fait et arrêté à Bruxelles, le 14 février, l'an II de la République française.
« Signé : Camus, Gossuin, Treilhard, Merlin (de Douai).
Parmi les biens séquestrés en vertu de l'article 4 du décret du 15 décembre, il se trouvait des bois dont il était essentiel de faire vendre les coupes ordinaires; il y avait "aussi une grande quantité de fourrages à recouvrer. C'est pour pourvoir à ces deux objets qu'a été pris l'arrêté suivant :
8.
Au nom de la République française.
« Nous, commissaires de la Convention, nationale dans la Belgique, les pays de Liège, etc.
« Instruits que les coupes ordinaires des bois dépendant d'établissements mis sous la sauvegarde et la protection de la République française par le décret du 15 décembre dernier, n'ont pas encore été adjugés, et que les | fermiers des biens dépendant des mêmes éta-
lre série, t. lxi.
blissements sont en retard d'acquitter les termes échus de leurs fourrages ;
« Considérant que la surveillance de la République française serait très imparfaite, si par des retards dans la perception des fruits, de quelque nature qu'ils puissent être, il survenait des pertes ou des dépérissements qu'il est important de prévenir, et que la première obligation attachée à la surveillance est de pourvoir avec soin à ce que la rentrée d'aucun objet échu ne soit retardée.
« Considérant pareillement que les biens dépendant des ci-devant bénéfices ou autres établissements dont les chefs-lieux étaient situés en France avant leur suppression méritent une attention d'autant plus sérieuse, que l'administration de ces biens a . été troublée par le despotisme qui pesait sur ces contrées ;
« Avons, en vertu des pouvoirs à nous attribués par le décret du 26 janvier dernier, arrêté ce qui suit :
« Art. 1er. Il sera procédé incessamment et sans délai à l'adjudication des coupes ordinaires de bois appartenant à des établissements dont les chefs-lieux étaient situés en France avant leur suppression; et sera ladite adjudication faite sur enchères, après publications, par devant un commissaire qui sera nommé à cet effet par les commissaires nationaux du conseil exécutif dans l'arrondissement de la situation des bois; le prix desdites adjudications sera versé entre les mains du receveur qui sera aussi indiqué à cet effet par les susdits commissaires nationaux du conseil exécutif.
« Art. 2. Les coupes ordinaires des années antérieures qui n'auront pas été vendues, seront pareillement adjugées en la forme et de la manière prescrite par l'article ci-dessus.
« Art. 3. Les fermiers ou régisseurs de biens, de quelque nature qu'ils puissent être, appartenant aux établissements mentionnés en l'article 1er, qui ne justifieront pas, par des quittances valables et en bonne forme, avoir acquitté les fermages et sommes échues de leurs baux ou régies, seront contraints par saisie et autres voies de droit, de les acquitter sans délai entre les mains du receveur qui sera indiqué par les commissaires nationaux du conseil exécutif dans chaque arrondissement.
« Art. 4. Les receveurs du prix des adjudications et fermages susdits verseront leur recette de huitaine en huitaine dans les mains du payeur général de l'armée, à qui ils adresseront en même temps des extraits des baux, actes de régie et adjudication en vertu desquels la recette aura été faite, et qui en fera mention sur ses registres.
« Art. 5. Il sera pareillement procédé sans délai à l'adjudication des coupes ordinaires des bois appartenant au fisc, au prince, à ses fauteurs, adhérents et satellites volontaires, ou dépendant des établissements publics, corps ou communautés laïques et ecclésiastiques, mis sous la sauvegarde et protection de la République française, par l'article 4 du décret du 15 décembre, et sera l'adjudication faite sur enchères, après l'affiche en la forme et manière usitées par devant un membre de l'administration provisoire du lieu, et en présence d'un commissaire qui sera nommé à cet effet
14
par les commissaires nationaux du conseil exécutif.
« Art. 6. Les fermiers et régiseurs de biens, de quelque nature qu'ils puissent être, appartenant aux personnes ou établissements désignés en l'article précédent, qui ne justifieront pas, par des quittances valables et en bonne forme, avoir acquitté les fermages et sommes échues, seront contraints à payer lesdites sommes et fermages, ainsi qu'il a été dit par l'article 3 ci-dessus, pour les fermiers et régisseurs de bien dépendant d'établissements dont les chefs-lieux sont situés en France.
« Art. 7. Le prix des adjudications, les fermages et autres sommes dont il est parlé dans les articles ci-dessus, seront acquittés aux personnes ou établissements desquels dépendent les objets vendus, affermés ou en régie.
« Art. 8. Les receveurs fourniront tous les huit jours le bordereau de leurs recettes aux commissaires nationaux, qui en feront passer, au fur et à mesure qu'ils les recevront, un double aux commissaires de la Convention nationale.
« Art. 9. Requérons les commissaires nationaux du conseil exécutif de mettre et faire mettre à exécution le présent arrêté, et les commandants des places de leur prêter main forte.
« Ainsi fait et arrêté à Bruxelles, ce 8 février 1793, l'an II de la République française.
m Signé .* Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
Pour assurer l'exécution entière de cet arrêté, il fallait prendre des mesures pour que tous les biens qui étaient dans le cas de l'article 4 du décret du 15 décembre, il n'en échappât aucun aux recherches des agents de la République. C'est, dans cet esprit que le 13 février nous avons écrit à la Convention nationale une lettre datée de Bruxelles, et ainsi conçue :
: 9..
« Citoyens nos collègues,
« On nous assure, et il est très vraisemblable qu'un grand nombre d'individus, tant de la Belgique que du pays de Liège, recèlent des effets provenant des émigrés, du fisc autrichien, des prélats, des abbayes, de tous les établissements dont les biens sont .mis, par le dé-, eret du 15 décembre 1792, sous la sauvegarde de la République française. Il est difficile sans doute de découvrir tous ces receleurs; mais la difficulté pourrait être levée, ou du moins diminuée de beaucoup, par des primes en faveur de ceux qui les dénonceraient. Nous croyons devoir, en conséquence, vous proposer de décréter que toute personne qui dénoncera aux agents de la République, dans les pays occupés par nos armées, des recelés frauduleux d'effets, titres* ou obligations appartenant à la nation française, ou mis sous sa sauvegarde, recevra pour récompense un dixième de la valeur des objets qu'il aura fait recouvrer. Les avantages qui peuvent résulter d'une pareille disposition, nous font espérer que la Convention nationale ne différera pas de s'en occuper. r Signé : Camus, Delacroix, Gossuin, Danton, Merlin (de Douai), Treilhard. »
La Convention nationale n'ayant pas statué sur la proposition que contenait cette lettre, nous-avons -été obligés d'aviser à d'autres moyens, et voici ceux que nous avons employés :
K° 10.
« Du
cc Au nom de la République française.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée, et dans les pays de la Belgique, de Liège etc.
« Yu les plaintes qui leur ont été portées par plusieurs commissaires et agents du conseil exécutif et de diverses administrations,sur la difficulté de procéder au recouvrement des revenus, rentes et fermages dus, soit à des établissements aujourd'hui supprimés en France, et qui avaient des biens dans la Belgique et autres provinces voisines, soit à des établisse^ ments locaux ou à des individus desdites provinces, du nombre de ceux qui sont désignés par l'article 4 du décret du 15 décembre dernier; difficulté résultant du défaut de connaissance de la situation et consistanoe desdits biens;
« Arrêtent que dans le délai de quinzaine, à compter du jour de la publication qui sera faite du présent arrêté, tous fermiers, colons, tenanciers, locataires, agents ou débiteurs, à quelque titre que ce soit, de biens fonds, rentes, sommes quelconques appartenant, soit à des ^chapitres, abbayes, monastères, communautés ou autres établissements qui existaient en France, et existant dans les pays occupés par les armées de la République française, du nombre de ceux qui sont désignés par l'article 4 du décret du 15 décembre, l'an Ier de la République, seront tenus de venir faire leur déclaration de ce dont ils sont débiteurs, ainsi que de la situation et état des biens dont ils sont tenanciers ou fermiers, devant les commissaires nationaux du conseil exécutif de la République française, aux bureaux que lesdits commissaires indiqueront.
« A défaut de déclaration dans le terme précisé, les débiteurs de sommes déterminées qui n'en auront pas fait la déclaration seront condamnés, indépendamment du paiement de la somme dont ils seront reconnus débiteurs, à une amende égale au montant de ladite somme; les tenanciers et autres possesseurs de biens qui n'en auront pas donné connaissance, seront condamnés à une amende proportionnée à l'importance des biens dont ils auront manqué de faire la déclaration, laquelle amende ne pourra pas être moindre de 50 florins; le tout indépendamment et sans préjudice des autres poursuites à faire, et peines à prononcer contre les citoyens qui auront refusé de faire les déclarations prescrites par le présent arrêté.
« Fait à Bruxelles, jour et an que dessus.
« Signé : Camus, Gossuin, Merlin (de Douai). »
C'est eneore à des mesures conservatoires que tend l'arrêté suivant :
N 11.
« Au nom de la République française.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, délibérant sur le mémoire adressé à la Convention nationale par le citoyen Armand, et renvoyé le 7 de ce mois au comité d'aliénation ensemble;, sur les pièces y jointes;
« Arrêtent que le citoyen Legier, commissaire national du pouvoir exécutif dans l'arrondissement de Mons, se transportera sur-le-champ à Beaumont, où il prendra connaissance de l'état de la caisse, papiers et registres de recette du citoyen Rincelot, ancien receveur du ci-devant chapitre des chanoinesses de Mau-beuge, visera lesdits registres, apposera les scellés, s'il le juge nécessaire, soit sur aucuns desdits papiers, soit sur la caisse, et prendra toutes les mesures nécessaires pour hâter, à l'égard des bois, fermages et créances mentionnées desdites pièces, l'exécution de leur arrêté du 8 de ce mois (1), auquel effet lesdits mémoires et pièces seront adressés au citoyen Legier qui en accusera la réception, et se soumettra de les représenter à toute réquisition et rendra compte de sa mission, aux commissaires de la Convention nationale.
« Fait à Bruxelles, le 25 février 1793, l'an II de la République française.
« Signé : Camus, Gossuin, Merlin (de Douai). »
Le dépérissement auquel les meubles séquestrés ont naturellement sujets, ne présente communément d'autre moyen de les conserver, que de les convertir en valeurs pécuniaires. Cette règle générale de la conduite des administrateurs, a dicté aux commissaires de la Convention nationale un arrêté dont voici les termes :
N 12.
(( Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique et de Liège, requièrent les commissaires des guerres de l'armée de la République française dans la Belgique, chargés de vendre les effets mobiliers : Ie de procéder sans délai à la vente de tous les meubles et effets mobiliers appartenant aux fiscs, aux princes, à leurs fauteurs, adhérents et satellites volontaires, sur lesquels les scellés ont été apposés, et dont il a été dressé inventaire, et de tous autres qui pourraient avoir été déclarés, découverts ou rendus;
« 2° De faire rentrer dans les 24 heures tous ceux desdits meubles et effets, qui ont pu être prêtés;
« 3° De faire les réquisitions nécessaires aux villes et communes où se trouve l'armée de la République française dans la Belgique, de fournir, sans aucun retard, tout le linge dont elle a besoin, afin que celui dont elle se sert actuellement, et qui appartient aux fiscs, aux princes, à leurs fauteurs, adhérents et satellites volontaires, puisse être mis en vente.
« Quant aux autres effets, qui, aux termes des décrets, ont été mis à la disposition de l'armée de la République française, les commissaires en dresseront ou feront dresser un inventaire sommaire qui sera signé, tant des généraux, que des commissaires respectifs des différents corps auxquels ils ont été remis.
« Fait à Bruxelles, le 13 février 1793, l'an II de la République française.
« Signé : Camus, Delacroix, Gossuin, Danton, Merlin (de Douai), Treilhard. »
Les administrateurs provisoires de Bruxelles, après le retour de Dumouriez dans la Belgique, fiers de la protection qu'il leur avait assurée dans leur séance du 11 mars, ont prétendu s'emparer de la -caisse du receveur que les commissaires du conseil exécutif avaient établie en vertu de l'article 3 de notre arrêté du 8 février ci-dessus transcrit; mais leur entreprise a été réprimée par l'arrêté suivant :
N 13.
« Du
« Yu la réquisition datée de Bruxelles le 18 du courant, commençant par oes mots : Les représentants provisoires de la ville de Bruxelles, au citoyen Gobert, signée, San-delin, président, /. Songelot, secrétaire, laquelle réquisition a été présentée par le citoyen Gobert;
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique et de Liège, déclarent ladite réquisition nulle et de nul effet; défendent d'y donner aucune suite; requièrent le général de division, Duval, commandant en Brabant, d'employer au besoin les moyens que la loi a mis à sa disposition, pour empêcher l'exécution de ladite réquisition, soit à l'égard du citoyen Gobert, soit à l'égard de tous autres.
« Fait à Bruxelles, les jour, mois et an que dessus.
Signé : Camus, Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
Un arrêté du 5 mars, signé Delacroix, Gossuin, Danton et Merlin (de Douai),, avait chargé les commissaires du cîonseil exécutif de faire exécuter le transport à Lille, de toute l'argenterie trouvée dans les maisons et communautés soumises au séquestre, pour la mettre à l'abri de tous les événements.
Cet arrêté a été exécuté avec assez de légèreté et de précipitation. D'une part, les agents des commissaires du pouvoir exécutif l'ont étendu à des églises paroissiales. De l'autre, dans les églises mêmes des chapitres et des abbayes, ils l'ont appliqué à des argenteries qui, étant nécessaires à la décence du culte divin, n'avaient pas été comprises dans le séquestre. Enfin, des gardes nationales belges, connus sous le nom de sans-culotte, s'étaient livrés, lors de l'enlèvement de oes objets, à des profanations très répréhensibles.
Pour remédier à oes abus, les commissaires de la Convention nationale ont fait une proclamation et pris des arrêtés qui trouvent naturellement ici leur place.
N 14.
« Les membres de la Convention nationale de France, ses commissaires près l'armée, et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc., au peuple de la ville de Bruxelles, réuni à la République française.
« L'article 4 du décret du 15 décembre dernier a placé sous la surveillance et la sauvegarde de la nation française, les biens meubles et immeubles appartenant aux communautés laïques et ecclésiastiques. Des ordres ont été donnés en conséquence sur les dispositions à faire de la portion de l'argenterie non nécessaire à la décence du culte, dans les maisons et communautés soumises au séquestre. Mais des excès infiniment répréhensibles ont été commis dans l'exécution de ces ordres. Profondément affligés de ces excès, les commissaires de la Convention nationale invitent le peuple de Bruxelles à leur faire connaître les coupables; déjà ils ont puni un officier pour son cjéfaut de surveillance; èt la peine qu'ils lui ont infligée' (l) est un sûr garant de celle qui attend # les véritables auteurs des profanations et crimes qui ont justement indigné un peuple fidèle à sa religion.
« Signé : Camus, Gossuin, Merlin (de Douai); Treilhard. »
15.
« Le soussigné vicaire de la paroisse de Sainte Gudule réclame, au nom de la paroisse, 9 calices, 7 ciboires, 2 vases pour les saintes huiles, un soleil, deux petits calices, 2 paires de burettes avec leurs plats, lé pied de bois de la Sainte-Croix monté en cuivre, _ et autres petits objets y relatifs à lui exibés hier par le citoyen Ducoudrai, employé à la monnaie.
« Bruxelles, le 13 mars 1793, l'an II de la République française.
« Signé : Morison. »
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc., arrêtent que les effets ci-dessus mentionnés seront remis par le citoyen Ducoudrai, en présence du citoyen Metmann, aux fabriciens ou. autres administrateurs de la paroisse de Sainte-Gudule, qui en donneront décharge. Requièrent le général Duval de procurer sur-le-champ l'exécution du présent arrêté.
« Fait à Bruxelles, le 13 mars, l'an II de la République française.
« Signé : Camus, Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
N° 16.
Du 16 mars 1793, l'an II de la République française.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays delà Belgique, de Liège, etc.;
« Après avoir entendu les plaintes qui leur ont été portées sur les abus et les excès commis dans FëgliSe de Sainte-Gudule de Bruxelles, lors de l'exécution de l'article 4 du décret du 15 décembre 1792, avoir vérifié par eux-mêmes les faits, et entendu, tant de vive voix que par écrit, le citoyen Langeois, capitaine au 2° bataillon de l'Eure, chargé par le commandant de la place de surveiller l'exécution du-dit décret du 15 décembre, à Sainte-Gudule.
« Vu qu'il résulte de la défense même, tant verbale qu'écrite et des aveux dudit citoyen Langeois, qu'il n'a pas employé la vigilance que_ le poste dans lequel il avait été placé exigeai^ soit pour prévenir, soit pour réprimer les excès dont il s'agit.
« Arrêtent que le citoyen Langeois est destitué de Sa place de capitaine au 2e bataillon | de l'Eure. Il sera procédé à son remplacement, suivant les formes ordonnées par les lois. Le présent arrêté sera envoyé à la Convention nationale, et il en sera remis expédition au général Duval, commandant en Brabant et fiai-naut, pour le faire mettre à exécution.
« Fait à Bruxelles, les jour et an que dessus.
« Signé : Camus, Gossuin^ Merlin (de Douai), Treilhard. »
« Du
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc. ;
« Vu leur précédent arrêté du 12 de ce mois, après avoir entendu le commandant du 2° bataillon de l'Eure, plusieurs officiers dudit bataillon, sur la conduite du citoyen Langeois, capitaine au même bataillon, et après avoir entendu de nouveau le citoyen Langeois;
« Arrêtent que le citoyen Langeois sera rétabli dans ses fonctions, les commissaires de la Convention nationale révoquant à cet effet leur précédent arrêté du 12 de ce mois. , « Fait à Bruxelles, les jour, mois et an que dessus.
« Signé : Camus, Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. » ~
N° 17.
« Du
de la République française.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays Belgique, de Liège, etc.;
( Instruits que lors de l'exécution de l'article 4 du décret du 15 décembre dernier, il a été retiré de quelques églises des vases et autres effets d'or ou d'argent qui sont nécessaires au service et à la décence du culte; instruits pareillement que dans le transport desdits effets, jl serait possible que quelques-uns eussent été rompus ou détériorés;
« Arrêtent que le citoyen Ducoudrai, préposé à la garde des effet» d'or et d'argent provenant des églises et communautés, déposés à la monnaie de cette villex est autorisé à remettre ceux de ces effets qui seront réclamés
comme nécessaires au service et à la décence du culte, d'après les états qui auront été vérifiés et visés par les commissaires du pouvoir exécutif; et dans le cas ou quelques-uns des effets compris aux états seraient détériorés, le citoyen Ducoudrai est autorisé à faire refaire avec les matières qu'il a entre les mains, mais avec la simplicité convenable, les vases et autres objets qui devront être restitués pour remplacer ceux qui se trouveraient hors d'état de servir.
« Signé : Camus, Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
Les extensions données illégalement à l'arrêté du 5 mars, et les profanations des sans culottes belges, ne sont pas les seuls abus contre lesquels les commissaires de la Convention. aient eu à s'élever, relativement aux argenteries des églises. Ils ont encore été obligés ds réprimer des voies de fait que des habitants de Hall, d'Alost et de Nivelle s'étaient permises, les uns pour empêcher le transport de ces argenteries à Lille, les autres pour les soustraire au scellé. Il a été fait à cet égard des informations et des procédures sur lesquelles les commissaires de la Convention nationale ont pris les arrêtés suivants :
N° 18.
« Du
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc. ;
« Yu leurs précédents arrêtés du 10 mars présent mois (1) par l'un desquels ils ont ordonné l'arrestation du maire et de tous les officiers composant la municipalité de Hall, comme prévenus de complicité dans le vol qui a été fait de l'argenterie de l'église de Notre-Dame de Hall; par le second, les commissaires nationaux du conseil exécutif ont été chargés d'établir une commission pour remplir les fonctions de la municipalité; vu aussi les rapports faits, tant par le citoyen Jacoton, capitaine d'artillerie détaché à Hall, que par le citoyen Vaugeois, commissaire national, chargés l'un et l'autre de l'exécution desdits arrêtés, lesquels rapports demeureront annexés à la minute du présent :
« Arrêtent que les arrestations commencées seront continuées en ce qui regarde la personne du greffier de la municipalité de Hall; quant aux autres officiers municipaux qui n'ont pas encore été arrêtés, il sera sursis à leur arrestation jusqu'après l'interrogatoire, tant des officiers précédemment arrêtés, que du greffier de la municipalité; les commissaires de la Convention nationale se réservant d'ordonner ce qu'il appartiendra, sur le vu desdits interrogatoires.
« Fait à Bruxelles, les jour et an que dessus.
« Signé, Camus, Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
N° 19.
Du
« Yu les procès-verbaux, en date des 9 et 10 mars présent mois, concernant le, pillage d'une voiture militaire à Alost, autre procès-verbal du 13 dudit mois, contenant l'interrogatoire fait par J.-B Tempette, lieutenant de la gendarmerie nationale, et du prévôt général de l'armée belge, de 18 personnes arrêtées à l'occasion dudit pillage;
cc Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique et de Liège, arrêtent que les citoyens qui avaient été arrêtés, et qui ont été interrogés le 13 de ce mois, seront mis en liberté, néanmoins aux conditions suivantes :
1° Jacques Yanderguchl, premier interrogé, et Pierre Peerlinck désigneront d'une manière plus particulière les personnes dont ils ont parlé dans leur interrogatoire, en donnant le signalement desdites personnes, indiquant leur domicile, et donnant par Jacques Yanderguchl le nom entier de l'individu désigné dans son interrogatoire sous le nom de Jean..., du village d'Escarbeck.
2° Les personnes comprises audit interrogatoire seront reconduites à leur domicile par un détachement de la gendarmerie qui, avant de les mettre en liberté, fera une perquisition exacte dans l'arrondissement de leurs domiciles; et dans le cas où il s'y trouverait quelques effets du nombre de ceux qui ont été pillés, il en sera dressé procès-verbal, et ils seront reconduits en prison.
« Signé : Camus, Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
N° 20.
« Du
« Yu le procès-verbal des informations faites à Nivelle, le 11 mars présent mois, par le citoyen Lanelle, commissaire nommé à cet effet, relativement à un vol d'argenterie fait dans l'église du chapitre de Nivelle;
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique,'de Liège, etc., arrêtent que le citoyen Lanelle se transportera de nouveau à Nivelle, pour y continuer l'information par lui commencée, -et entendre nommément le citoyen Lacroix, maître de fabrique de l'église de Nivelle, désigné dans la disposition d'Emmanuel Levenou; et qu'il fera mettre en état d'arrestation le citoyen Charles, prévenu par ses propres aveux d'avoir brisé les scellés à la garde desquels il était commis;
« Arrêtent que le citoyen Lanelle fera pareillement des informations sur les vols de même nature qui pourraient avoir été commis dans d'autres églises du lieu de Nivelle ou des environs;
« Requièrent le commandant de la foroe civile et militaire de donner au citoyen Lanelle toute l'assistance dont il aurait besoin pour l'exécution du présent arrêté.
« Signé : Camus, Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
Nous terminerons cette série de décisions, par deux arrêtés relatifs : l'un à des matières de monnaie de billon qui se trouvaient encore en mars, à Bruxelles; l'autre à des meubles de la cour de Bruxelles, dont nous avions requis le transport à Lille.
N° 21.
« Au nom de la République française.
« Yu l'avis donné le 11 de ce mois par les citoyens Dechetz et de Limare, commissaires envoyés par le conseil exécutif, pour prendre des éclaircissements sur le mode le plus économique de payer le prêt des troupes, par lequel ils estiment qu'il sera utile au service de la République de faire transporter à la monnaie de Lille 25 à 30 milliers de flaons de cuivre rouge, déposés à l'hôtel de la monnaie de Bruxelles avec les matrices et poinçons des différentes espèces de billon et de cuivre ayant cours dans la Belgique;
« Les députés à la Convention, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc., requièrent le citoyen Du-coudrai, l'un des préposés à l'hôtel de la mon naie de Bruxelles, de faire transporter à la monnaie de Lille les 25 à 30 milliers de cuivre rouge mentionnés dans l'avis des susdits Dechetz et de Limare avec les matrices et poinçons des différentes espèces de cuivre, ayant cours dans la Belgique : et à l'égard des matrices et poinçons des différentes espèces de billon qui ont aussi cours dans la Belgique, il sera sursis à leur transport, juqu'à ce que lesdits commissaires du conseil exécutif aient fait connaître les motifs d'utilité pour la République sur lesquels ils fondent cette partie de leur avis.
« Fait à Bruxelles, ce 18 mars 1793, l'an II de la République française.
« Signé : Camus, Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
N° 22.
« Citoyens commissaires,
« Il reste 5 malles ou coffres remplis d'effets précieux, provenant de la ci-devant cour de Bruxelles, et plusieurs autres caisses de même nature. Je pense qu'il serait à propos de les faire tranporter à Paris; ayant les chevaux et les chariots à ma disposition, les frais ne seront pas conséquents. L'on évitera, par ce moyen, des frais d'inventaire et de vente, qui demanderont en outre beaucoup de temps, s'il fallait effectuer cette vente à Lille. Je vous prie de décider à cet égard quelle marche je dois tenir.
« Signé : Chartrey, commissaire des guerres. »
« Les meubles mentionnés en cette lettre seront), sans aucun délai, vendus à Lille, à la diligence du commissaire des guerres Chartrey, qui en rendra compte jour par jour, à compter du 1er avril prochain, aux commissaires de la Convention nationle.
A Lille* le 30 mars 1793, l'an II de la République française. « Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai), Robert. »
Sans doute les commissaires du conseil exécutif, et les autres agents qui ont été chargés de l'exécution des mesures prises par les divers arrêtés que nous venons de transcrire, ont rendu compte de leurs opérations au conseil exécutif lui-même, ou à ses délégués; ils le devaient aux termes du décret du 15 décembre, et nous aimons à croire qu'ils se sont tous empressés de remplir ce devoir. On verra par ce compte, lorsqu'il sera mis sous les yeux de la Convention, ce que sont devenus, et les argenteries dont nous avions ordonné le transport à Lille, et l'argent provenu des recettes prescrites par notre arrêté du 8 février, et le prix des meubles vendus en exécution de celui du 13 du même mois, etc.
C ommissaires
Art. 4.
nationaux du provisoire.
conseil exécutif
L'article 7 du décret du 15 décembre avait ordonné qu'aussitôt que dans les pays occupés par les armées de la République les administrations provisoires se trouveraient organisées, le conseil exécutif provisoire nommerait des commissaires nationaux qui se rendraient de suite sur les lieux, pour se concerter avec les généraux et les administrateurs, nommés par le peuple, sur les mesures à prendre pour la défense commune, et sur les moyens à employer pour se procurer des habillements et subsistances nécessaires aux armées, et pour acquitter les dépenses qu'elles auraient faites et feraient pendant leur séjour sur son territoire.
L'article 8 ajoutait que les commissaires nationaux nommés par le conseil exécutif, lui rendraient compte, tous les 15 jours, de leurs opérations; que le Gonseil exécutif les approuverait, modifierait ou rejetterait, et qu'il en rendrait compte de suite à la Convention.
Voilà tout oe que portait sur oes commissaires le décret du 15 décembre 1792. Il est évident que d'après ses dispositions, ils n'auraient été nommés par le conseil exécutif, que pour les lieux où il existerait des administrations provisoires, formées en exécution de ce décret, et que leur nomination ou du moins l'exercice des pouvoirs qui devaient leur être délégués, n'aurait pas dû précéder la formation de ces administrations. . Si cette marche eût été suivie, il n'aurait été envoyé des commissaires nationaux que dans les pays dé Liège et du Hainaut; car ces pays sont les seuls où il ait été nommé des administrations provisoires, d'après ce décret du 15 décembre.
Cependant le conseil exécutif a nommé des commissaires pour le Brabant, la Flandre, le Limbourg et la Gueldre, comme pour le Hainaut et le pays de Liège; et ce qu'il y a de remarquable, c'est qu'il l'a fait d'après les reproches qu'il avait essuyés plusieurs fois dans le sein de la Convention sur sa lenteur à les nommer.
Sans doute ces reproches étaient mal fondés, et on ne les aurait oas faits, si l'on n'eût pas perdu de vue les véritables dispositions du décret du 15 décembre.
Mais qu'esfc-il résulté de là? c'est que le conseil exécutif ne pouvant pas donner à ses en-
voyés une mission calquée sur les articles 7 et 8 du décret, leur en a donné une, qu'aucune loi ne l'autorisait à leur déléguer, celle de se rendre en telle ville, « pour y faire exécuter, ainsi que dans l'arrondissement qui lui serait désigné, les décrets de la Convention nationale des 15-17 et 22 décembre de l'année dernière, concernant la proclamation de la liberté et de la souveraineté de tous les peuples chez lesquels la République a porté et portera ses armes ». Ce sont les propres termes de toutes les commissions de ce genre.
Les instructions que le conseil exécutif a données à ses commissaires sont rédigées dans le même esprit. Il paraîtrait par leurs dispositions, que les commissaires du conseil exécutifs fussent chargés, non seulement de tous les objets sur lesquels porte le décret du 15 décembre, mais encore de tout ce qui pouvait être relatif aux assemblées dans lesquelles les peuples devaient émettre leur vœu sur la forme de gouvernement qu'ils voudraient adopter.
C'est en effet dans ce sens qu'opéraient les commissaires dû conseil exécutif lorsqu'à commencé l'exercice des fonctions attribuées aux commissaires de la Convention nationale par le décret du 27 décembre, et qui consistaient tant à surveiller séparément ou collectivement l'exécution du décret des 15 et 17 du même mois, qu'à fraterniser avec les administrateurs provisoires qui seraient établies en exécution de ce même décret.
Les commissaires de la Convention nationale ont été frappés d'abord de l'opposition qui se trouvait entre les pouvoirs que le conseil exécutif était autorisé par le décret à déléguer à ses commissaires, et ceux qu'il leur avait délégués effectivement.
Mais ils n'ont pas cru devoir prendre sur eux de prononcer sur cette différence; ils ont attendu que la Convention nationale s'expliquât elle-même, et c'est ce qu'elle a fait par le décret du 31 janvier.
Dès lors, ils n'ont plus balancé à rappeler les commissaires du conseil exécutif à leurs véritables fonctions, et ils leur ont adressé pour cet effet la lettre circulaire que voici :
N° 1.
Bruxelles, le
( Les commissaires de la Convention nationale de France près l'armée et dans les pays de la Belgique et de Liège, aux commissaires nationaux du pouvoir exécutif de la République française.
« En rendant justice, citoyens, au zèle qui vous anime tous pour la prospérité de la République, et pour l'exécution de l'importante mission qui vous est confiée, nous ne pouvons vous dissimuler que quelques-uns d'entre vous ont dépassé les bornes de leurs pouvoirs, et se sont mépris sur le caractère dont ils sont revêtus.
« 1° Il en est parmi vous qui ont délivré des ordonnances de paiement sur les caisses publiques. En cela, ils ont fait ce que nous ne pouvons pas faire nous-mêmes, ce qu'un dé-
cret formel défend à tous les commissaires de la Convention nationale. Nous en sommes d'autant plus étonnés, que l'article 7 du décret des 15, 17 et 22 décembre 1792 circonscrit très clairement vos pouvoirs à cet égard. Ils consistent à vous concerter avec les généraux et les administrations provisoires, tant sur les mesures à prendre pour la défense commune, que sur les moyens à employer pour se procurer les habillements et subsistances nécessaires aux armées, et pour acquitter les dépenses qu'elles ont faites et feront pendant leur séjour sur le territoire qu'elles occupent. Tout ce que vous pourriez faire au delà, en matière de dépenses publiques, serait irrégulier.
« 2° Quelques-uns d'entre vous ont pris et prennent encore dans leurs proclamations la qualité pure et simple de commissaires de la République française. Cette dénomination peut induire en erreur; et il est de fait qu'il en est résulté dans l'esprit de beaucoup de monde une confusion de nos pouvoirs avec ceux des commissaires de la Convention nationale. Le plus sûr moyen de prévenir cet inconvénient, c'est de prendre exactement la qualité qui vous appartient, c'est-à-dire celle de commissaires nationaux du conseil exécutif de la République française.
« 3° D est quelques-uns de vos collègues qui, en arrivant dans les villes de leur arrondissement, ont fait mettre les troupes sous lefc armes, se sont fait "donner des gardes d'honneur, etc. Il est évident qu'ils ont, en cela, outrepassé les limites qui, pour le décorum, doivent distinguer la représentation nationale d'avec l'agence exécutive.
« 4° Yous avez pu penser, d'après vos instructions imprimées (quoiqu'elles fussent sur ce point coutraires au décret des 15, 17 et 22 décembre), que c'était à vous à convoquer les assemblées primaires, à en diriger la formation, et à en surveiller les résultats. Un autre décret du 31 janvier, ne reconnaissant pour cet objet d'autorité que celle des commissaires de la Convention nationale et des généraux de la République. Vous ne devez plus vous y entremettre à l'avenir ; cependant nous n'en comptons pas moins sur tout votre zèle et sur toute votre activité pour nous seconder, soit dans les opérations que nous jugerons utiles au bien de la chose publique de vous déléguer, suivant les circonstances, soit pour les renseignements dont nous aurons souvent besoin, et que vous serez particulièrement en état de nous procurer.
« 5° Enfin, il est arrivé à quelques commissaires nationaux de faire publier des arrêtés et des proclamations qui ne sont pas conformes aux vrais principes, ou contrarient les vues dans lesquelles nous devons tous marcher. Vous voudrez bien à l'avenir, pour ne plus voir se reproduire cet inconvénient, ne faire imprimer, ni faire afficher aucun arrêté ou proclamation, sans nous l'avoir préalablement communiqué; il est bien entendu que nous exceptons les cas d'urgence.
« Signé : Delacroix, Treilhard, Gossuin, Camus, Merlin (de Douai). »
Cette lettre a excité quelques réclamations. Voici la réponse que nous avons faite, le 28 fé-
vrîer, à celle du citoyen Le Hodey, commissaire national à Thuin, arrondissement de Dinant.
N° 2.
Bruxelles le
« Au citoyen Le Hodey, commissaire national
du conseil executif provisoire, à Thuin.
« Si tous les commissaires nationaux du conseil exécutif, citoyen, avaient mis dans leur mission tout ce que nous promet de votre part le zèle et le talent qui vous distinguent, nous ne nous serions pas vus forcés d'écrire la lettre circulaire sur laquelle vous nous adressez des observations.
« Nous allons répondre successivement à ces observations :
« 1° La loi seule doit être notre guide commun. Or, ni le décret du 15 décembre, ni celui du 31 janvier ne vous attribuent aucune fonction relative à la formation des assemblées primaires. Vous ne pouvez donc vous en occuper qu'en vertu de délégation spéciale. Voilà la règle dans toute sa sévérité. Vous l'avez outrepassée; mais vous avez obtenu des résultats heureux; de là nous ne pouvons qu'approuver ce que vous avez fait à cet égard. Quant aux assemblées qui restent à convoquer, nous vous autorisons à aller en avant; mais ne hasardez rien; ne convoquez aucune assemblée, que vous ne soyez moralement sûr du résultat, et suspendez jusqu'à notre arrivée sur les lieux, toutes celles des communes qui peuvent vous paraître suspectes.
« 2° Les divers arrêtés que nous avons pris sur le mobilier des émigrés, du fisc, etc., et que vous avez dû recevoir, répondent suffisamment à l'article de votre lettre, qui concerne cet objet.
« 3° En vous interdisant toute proclamation, toute publication d'arrêté qui ne nous aurait pas été préalablement communiquée, nous avons usé d'un droit que nous donne le décret du 26 janvier; miis nous avons formellement accepté le cas d'urgence : hors ce cas, vous voudrez bien vous conformer à notre lettre circulaire.
« 4° Les prêtres déportés doivent, comme les émigrés, déguerpir tous les lieux occupés »ar les armées de la République. C'est la disposition expresse d'un de nos arrêtés.
« 5° Vous ne pouvez apporter aucune modification à l'article du decret du 15 décembre, qui abolit tous les impôts; et il n'appartiendra qu'aux administrations provisoires de les rétablir.
« C'est à votre collègue de Dinant à vous envoyer les décrets et les bulletins. Il nous est impossible de vous les fournir.
C'est ici le lieu de parler du commissaire national Cochelet. Mais nous n'avons rien à ajouter aux arrêtés et lettres qui le concernent; on y verra dans le plus grand jour son zèle et ses fautes, son patriotisme et ses écarts.
N° 3.
Du
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique et de Liège, vu la lettre du contrôleur général des dépenses de la guerre à Bruxelles, en date d'aujourd'hui, et la lettre à lui adressée'hier, par le payeur et le contrôleur de l'armée à Liège, contenant des plaintes sur les ordonnances à fin de paiements considérables à faire, tant en numéraire qu'en assignats, données par le commissaire national du conseil exécutif, Cochelet; autre lettre du commissaire-ordonnateur, Lambert, datée de Liège le 11 de ce mois, à laquelle est jointe copie certifiée de lui d'une délégation donnée le même jour par le commissaire Cochelet au citoyen Jolivet, secrétaire de sa commission pour le remplacer et signer en son nom toutes ordonnances, suspendent des fonctions de commissaire du pouvoir exécutif le citoyen Cochelet, et lui ordonnent de se rendre à Liège, devant Delacroix et Danton, commissaires de la Convention, au lieu qui lui sera par eux indiqué, pour lui rendre un compte plus particulier de sa conduite, défendent au citoyen Jolivet d'exercer aucune des fonctions qui lui ont été déléguées par le commissaire Cochelet; défendent pareillement au payeur général de l'armée de payer sur les ordonnances du commissaire Cochelet aucune somme soit en numéraire, soit en assignats, dont l'acquit ne serait pas conforme au décret de la Convention nationale.
« Et pour remplaoer provisoirement le citoyen Cochelet, les commissaires de la Convention nationale nomment le citoyen Chaussart qui se rendra de suite à Liège.
« Il sera remis dans le jour une expédition du présent, arrêté au citoyen Chaussart, une autre expédition sera envoyée au commissaire-ordonnateur Lambert, qui est chargé de notifier le présent arrêté tant au commissaire Cochelet qu'au payeur Jehannot et de prendre toutes les mesures nécessaires pour le faire exécuter. Il en sera aussi donné connaissance, par le courrier de ce jour, à la Convention nationale et au conseil exécutif provisoire. « Signé : Camus, Delacroix, Gossuin, Danton, Merlin (de Douai), Treilhard. »
Bruxelles, le 14 février 1793 l'an II de la République.
« Les membres de la Convention nationale, commissaires près Vannée et dans les pays de la Belgique et de Liège, à leurs collègues, composant la Gonvention nationale.
« Citoyens nos collègues, nous vous envoyons copie d'un arrêté que nous avons pris hier pour suspendre de ses fonctions l'un des commissaires nationaux du conseil exécutif à Liège, le citoyen Cochelet. Il nous en a coûté de prononcer cette peine contre un citoyen qui s'est toujours montré bon patriote; mais d'une part, la facilité avec laquelle il délivrait des ordonnances en numéraire sur la caisse du payeur, pour des sommes considérables, pour
des causes qui ne nous ont pas paru assez urgentes, et sans pouvoirs suffisants; d'une autre part, l'indiscrétion (nous ne voulons pas employer pour cet instant un autre terme) l'indiscrétion qu'il a eue de déléguer, par une patente, toutes ses fonctions à son secrétaire en son absence, avec pouvoir de signer toutes ordonnances et injonctions à toutes personnes d'y obéir, nous ont forcé à arrêter sur-le-champ, et par les moyens les plus efficaces, une mesure aussi dangereuse.
« Signé : Camus, Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
Du
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près Varmée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc.
« Yu leur arrêté du 13 de ce mois, par lequel et sur les pièces visées audit arrêté, ils ont suspendu des fonctions de commissaire du pouvoir exécutif, le citoyen Cochelet, et lui ont enjoint de se trouver à Liège ou autres lieux qui lui seraient indiqués, pour rendre un compte plus particulier de sa conduite ;
« Après avoir entendu le citoyen Cochelet dans l'exposé de sa conduite et dans ses défenses; vu les pièces remises à l'appui de son exposé ; vu aussi les défenses écrites par lui adressées à la commission le jour d'hier ;
( Considérant qu'il résulte tant de l'exposé fait par le citoyen Cochelet, que par des pièces par lui remises, que dans plusieurs circonstances importantes et d'une grande conséquence, soit popr l'ordre et l'économie des finances de la République, soit pour 1» maintien et la conservation de la hiérarchie des pouvoirs publics, il a excédé les pouvoirs qui lui avaient été confiés ;
« Arrêtent que le citoyen Cochelet est provisoirement destitué de sa qualité de commissaire du pouvoir exécutif dans le pays de Liège; que dans le jour il lui sera remis expéditions, tant à la Convention nationale qu'au conseil exécutif. « Fait à Bruxelles, les jour et an que dessus.
« Signé : Camus, Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
Bruxelles, le
« Les commissaires de la Convention nationale près Varmée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc., aux membres du conseil exécutif provisoire.
« Citoyens, vous aviez nommé pour l'un des commissaires nationaux dans le pays de Liège le citoyen Cochelet ; nous avons cru devoir, par un premier arrêté pris le 13 de ce mois, le suspendre de ses fonctions jusqu'à ce que nous l'eussions entendu. Il a comparu devant nous; il s'est expliqué. Nous avons loué son patriotisme, son activité, son zèle pour faire le bien : mais nous n'avons pas pu nous dissimuler, et il a été forcé d'en convenir lui-même, qu'il avait outrepassé ses pouvoirs. C'est dans des matières graves, extrêmement
importantes pour le maintien de l'ordre dans les finances, et de la hiérarchie des pouvoirs, qu'il a commis ces excès. D'après de tels faits, nous avons jugé de notre devoir de le destituer, et nous vous envoyons copie, de l'arrêté que nous avons pris pour prononcer cette destitution.
Signé : Camus, Delacroix, Gossuin, Merlin ( de Douai). .»
Bruxelles, le 26 février 1793, l'an II de la République.
Les commissaires de la Convention nationale.
près l'armée et dans les pays de la Belgique,
et de Liège, etc., au citoyen Cochelet.
« Citoyen, vous recevrez ci-joint l'arrêté que nous avons pris à votre sujet : nous y joignons la lettre que nous adressons au conseil exécutif, et l'extrait, en ce qui vous concerne, de celle que nous adressons à la Convention; vous y verrez par les expressions que nous employons, combien il nous en a coûté d'avoir à prononcer la destitution d'un patriote dont nous aurions voulu pouvoir louer sans restriction le zèle et l'activité, comme nous louons sans restriction sa probité. Yous savez que le? décrets ne nous permettent pas de retourner quant à présent à Liège. Nous n'avons pas exprimé cette disposition dans notre arrêté, parce que vous la connaissez, et que nous n'avons voulu y insérer aucune autre disposition de rigueur que celle dont notre devoir nous faisait une nécessité impérieuse.
« Signé : Camus, Delacroix, Gossuin, Merlin ( de Douai). »
Le citoyen Cochelet n'est pas le seul commissaire du conseil exécutif, qui se soit permis d'ordonnancer des sommes d'argent. Il a été imité à Bruxelles, par deux de ses collègues, dans une circonstance bien singulière. Yoici l'arrêté qui a été pris à leur sujet :
N° 4.
Du
« Vu la réquisition faite le 12 de ce mois, par les commissaires nationaux du pouvoir exécutif au citoyen Gobert, de payer au citoyen Drugnan, directeur de l'hôpital Saint-Pierre, la somme de 1,800 florins, pour les besoins dudit hôpital, ladite réquisition mise au pied d'une délibération des représentants provisoires de la ville de Bruxelles, tendant à obtenir un secours pour l'hôpital de Saint-Pierre, laquelle avait été remise aux commissaires de la Convention nationale, et avait été apostillée par eux le 10 mars, d'une note portant envoi au citoyen Drugnan pour justifier les besoins de l'hôpital et en donner l'état ; le récépissé du citoyen Drugnan étant au pied de la réquisition des commissaires du pouvoir exécutif, en date du même jour 12 mars, portant qu'il a reçu ladite somme de 1,800 florins ;
« Considérant que les commissaires du pouvoir exécutif ne devaient pas requérir le paiement des sommes demandées, surtout pour un objet dont le mémoire même qui leur était
présenté justifiait que les commissaires de la Convention nationale étaient saisis, et sans avoir requis ni obtenu les renseignements dont ils voyaient par les pièces mêmes qu'ils avaient sous les yeux, que les commissaires de la Convention nationale avaient fait dépendre leur décision ;
« Considérant pareillement que le citoyen Drugnan, qui, d'après l'apostille mise en marge de la délibération des représentants provisoires de Bruxelles venait de fournir aux commissaires de la Convention nationale les états demandés par l'apostille, ne devait pas solliciter, d'autres que desdits commissaires de la Convention, une réquisition ou ordonnance qui ferait un double emploi avec les sommes portées dans l'arrêté des commissaires de la Convention, que de ceux du pouvoir exécutif :
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc.;
« Arrêtent :
« 1° Que le citoyens Robert et Gouget (des Landes), qui ont signé la réquisition dont il est question, seront avertis de se rendre devant les commissaires de la Convention nationale, pour leur faire connaître l'erreur dans laquelle ils sont tombés en accordant ladite réquisition et les dangers qu'elle devait avoir ;
( 2° Que le citoyen Drugnan est destitué provisoirement des fonctions de directeur de l'hôpital Saint-Pierre.
« 3° Pour remplacer le citoyen Drugnan, les commissaires du pouvoir exécutif choisiront un sujet qu'ils présenteront aux commissaires de la Convention nationale.
( Expédition du présent arrêté sera remise aux commissaires du pouvoir exécutif chargés de le notifier au citoyen Drugnan.
(( Fait à Bruxelles, les jour, mois et an que dessus.
« Signé : Camus, Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
Des difficultés élevées entre un autre commissaire du conseil exécutif et les commissaires chargés provisoirement de l'administration du Franc de Bruges, ont donné lieu à la lettre suivante :
N 5.
Courtrai, le
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique, Liège, etc.
« Au citoyen Sibuet, commissaire national envoyé par le conseil exécutif, à Bruges.
« Citoyen, nous avons conféré sur les observations que vous avez faites à l'un de nous, dimanche dernier, à Gand, et nous venons d'entendre, sur le même objet, les citoyens qui administrent provisoirement le Franc de Bruges. Il nous a paru que, dans toute cette affaire, il n'y avait que quelques malentendus de formes qui ne touchent point au fond de l'affaire, et qui ne doivent point empêcher de se concilier très facilement.
« Les dépenses que l'administration du Franc peut avoir à faire sont dé deux classes, les unes ordinaires, les autres extraordinaires. Il est juste que les scellés ayant été apposés sur les caisses publiques, vous connaissiez toutes les dépenses qui se font sur ces caisses; mais il serait d'un détail trop long et propre à entraver les affaires, de vous communiquer toutes les ordonnances de paiement pour les dépenses ordinaires : il est plus à propos qu'on vous en remette un état général, et qu'après que vous en aurez pris communication, il soit dit que toutes les dépenses qui s'y trouvent comprises, seront payées sans difficultés. Quant aux dépenses extraordinaires, il est juste que les ordonnances qui y ont rapport, vous soient communiquées, pour que vous déclariez, quand il y aura lieu, que vous ne mettez aucun obstacle au paiement. Mais, à cet égard encore, et pour faciliter, de toutes les manières possibles, l'expédition des affaires, il est convenable que vous ayez des conférences fréquentes avec ceux qui administrent, et que vous vous rendiez à leur invitation toutes les fois qu'ils désireront vous donner, de vive voix, connaissance de leurs opérations. C'est par ces réunions amicales et fraternelles qu'on prévient les difficultés, ou que, quand elles sont nées, on les fait cesser promptement et sans retour.
« Signé : Camus, Treilhard. »
Les circonstances nous ont quelquefois obligés d'assigner à des commissaires nationaux, des postes différents de ceux que le con-' seil exécutif leur avait fixés. C'est l'objet des trois arrêtés et de la lettre qu'on va lire :
; N° 6.
« Au nom de la République française.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires, considérant qu'il importe infiniment au bien de la République de réunir dans la ville de Bruxelles tous les commissaires nationaux que le pouvoir exécutif y a délégués,
« Arrêtent que le citoyen Chaussart, qui remplace, par intérim, à Liège, le citoyen Co-chelet, suspendu de ses fonctions par notre arrêté du 13 de ce mois, se rendra, dans la journée de demain, à son poste, à Bruxelles, et qu'il y sera remplacé, à Liège, par l'un des commissaires nationaux du pouvoir exécutif délégués pour l'arrondissement dont Yerviers forme le chef-lieu.
« Fait à Bruxelles, le 23 février, l'an II de de la République.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai). »
N° 7.
a Au nom de la République française.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc., considérant qu'il importe, dans les circonstances actuelles de réunir à Anvers plusieurs commissaires nationaux du conseil exécutif provisoire,
( Arrêtent que le citoyen Chaussart, commissaire national du pouvoir exécutif dans l'arrondisement de Bruxelles, se rendra inces-
samment à Anvers, et y restera jusqu'à ce qu'il en ait été autrement ordonné, pour remplir, dans cette ville, ainsi que dans toute l'étendue de son arrondissement, conjointement avec les commissaires nationaux qui y sont actuellement, la mission dont il est chargé.
« Fait à Bruxelles, le 26 février 1793, l'an II de la République.
( Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
N° 8.
« Au nom de la République française.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires, considérant l'impossibilité où sont les commissaires nationaux du pouvoir exécutif de l'arrondissement de Bruxelles de détacher plus d'un d'entre eux pour se rendre à Louvain, pendant la tenue des assemblées primaires de cette ville et de ses dépendances, fixées à vendredi prochain, 1er mars,
( Arrêtent que le citoyen Fabricius, commissaire du pouvoir exécutif dans l'arrondissement de Diest, se rendra, dans le jour à Louvain, avec le citoyen Gouget, l'un aes commissaires nationaux du pouvoir exécutif dans l'arrondissement de Bruxelles, et y resteront tous deux, jusqu'à ce que le peuple de Louvain et ses dépendances, ait émis son vœu sous la forme de gouvernement qu'il voudra adopter.
« Fait à Bruxelles, le 26 février 1793, l'an II de la République.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
N° 9.
Bruxelles, le
« Les députés de la Convention, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique ,de Liège, etc.
« Aux citoyens Legier et Melletier, commissaires nationaux du conseil exécutif, à Mons.
« Les commissaires du conseil exécutif dans l'arrondissement de Courtrâi, etc., éprouvent dans le cours de leurs opérations pour les assemblées primaires, de si grandes difficultés, résultant de la disposition et du peu de lumières des habitants, que nous pensons ne pouvoir rien faire de plus agréable pour nos collègues et de plus utile pour la chose publique, que de vous inviter et même requérir autant que de besoin, de vous transporter dans l'arrondissement de Courtrâi, et de travailler de concert avec les commissaires qui yL sont actuellement, aux préparatifs nécessaires pour la tenue des assemblées, et l'émission du vœu libre du peuple sur une forme de gouvernement.
« Signé : Camus, Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
Les commissaires de la Convention ont été plus loin encore dans une circonstance grave. — Notre armée évacuait Liège; une grande partie de la Belgique était en fermentation, et
d'après l'arrêté du 5 mars transcrit ci-dessus, première partie article 13, n° 3. La ville de Bruxelles, centre de toutes les intrigues et de toutes les factions, pouvait se trouver plusieurs jours sans commissaires de la Convention. Pour prévenir les maux qu'aurait pu causer leur absence même momentanée ils ont pris le même jour, 5 mars, un arrêté dont le second article a déjà été rapporté dans l'article précédent, et qui contient les dispositions suivantes :
N° 10.
« Nous, commissaires de la Convention nationale près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc., considérant que les circonstances extraordinaires nécessitent des mesures extraordinaires, requérons les commissaires nationaux du pouvoir exécutif de France pour l'arrondissement de Bruxelles :
« 1° De prendre en notre absence ou en celle de nos collègues toutes les mesures que commandera la sûreté générale, et ce, de concert avec les généraux et les commissaires nationaux repliés sur cette ville;
2° De faire effectuer le transport à Lille de toute l'argenterie trouvée dans les maisons et communautés soumises au séquestre, pour les mettre à l'abri de tous les événements;
« 3° Autorisons lesdits commissaires à prendre tous les otages qu'ils jugeront nécessaires pour répondre à la République, des mauvais traitements que pourraient éprouver les Français et les patriotes dans ce pays;
« 4° Arrêtons que les citoyens Chaussart et Gouget, actuellement en commissions, se rendront sur-le-champ à Bruxelles.
« Fait à Bruxelles, le 5 mars, l'an II de la République.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Danton, Merlin (de Douai).
« Tour copie conforme à l'original.
« Signé : Gouget (des Landes); Chepy, Robert.»
Les pouvoirs délégués par cet arrêté ont cessé le 7 par l'arrivée de Camus et de Treilhard à Bruxelles. Mais c'est pour nous un devoir de le publier.
Dans le court espace de temps qu'ils ont duré, ils ont été utiles à la chose publique par la vigueur avec laquelle les commissaires du pouvoir exécutif, alors réunis au nombre de 7, les ont exercés. On en jugera par la proclamation qu'ils ont faite, et par laquelle ils ont dissipé les attroupements qui menaçaient la tranquillité publique.
« Au nom de la République française.
« Les ennemis de la liberté et de l'égalité ont exagéré avec la plus imprudente malveillance des événements qui ne peuvent avoir d'autre suite que de réduire, pendant quelques jours, nos armées à une défensive régulière : les commissaires du pouvoir exécutif invitent les bons citoyens à se défendre de ces fausses impressions, et à se confier dans la valeur et dans la puissance de la nation qui les a affranchis; mais, comme ils sont informés que l'aristocratie profite de ces faux bruits pour pré-
parer un soulèvement général, ils arrêtent ce qui suit :
« Il est ordonné à tous marchands et habitants de cette ville de déposer dans le jour de la publication de la présente, entre les mains du garde-magasin de l'artillerie de la République, les fusils, sabres, pistolets et autres armes qu'il pourraient avoir en leur possession, à peine pour les contrevenants d'être traités comme ennemis de la nation française.
« Il est ordonné à tous habitants de déclarer dans les 24 heures aux administrateurs provisoires, le nom, l'état et le temps de résidence des personnes logées dans leurs demeures.
« La défense de tout attroupement est renouvelée, et sera maintenue avec vigueur.
« En cas d'émeute, la ville sera mise à exécution militaire.
« Les personnes et propriétés des citoyens connus par leur civisme, sont sous la sauvegarde spéciale de la République française.
« Signé : Robert, Gouget (des Landes), F. Etienne, Hébert, Roland, Bonne-mant, P. Chépy, Liébaut. »
Nous ne rappelons pas ici les autres missions que nous avons déléguées à différents commissaires du conseil exécutif. Il suffit de renvoyer aux arrêtés qui contiennent ces délégations, et qu'on trouvera dans les articles de ce rapport auxquels ils appartiennent par leurs objets respectifs.
Le dernier arrêté qui ait été pris sur les commissions du conseil exécutif, l'a été à Lille. On verra par sa teneur quelles sont les circonstances qui l'ont motivé.
N° 11.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée de la Belgique, informés qu'un grand nombre de citoyens envoyés en qualité de commissaires nationaux par le conseil exécutif provisoire dans la Belgique, le pays de Liège et autres occupés alors par les armées de la République, pour y surveiller l'exécution des décrets des 15, 17 et 22 décembre dernier, sont actuellement à Lille, qu'ils s'y réunissent en corps et qu'ils délibèrent, arrêtent que tous ces citoyens se rendront aujourd'hui, 5 heures du soir, chez les commissaires de la Convention nationale, maison du citoyen Mousquet, près la poste aux chevaux, et apporteront avec eux les pouvoirs, soit généraux, soit particuliers, qui leur auront été remis par le conseil exécutif
Ï>rovisoire, et que la présente délibération eur sera adressée chez le citoyen Bonnefoy, l'un d'eux rue des Augustins, où ils sont, ou doivent être maintenant assemblés.
« Fait à Lille, le 27 mars 1793 l'an II de la République française.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai), Robert, Treilhard. »
Les explications qui ont eu lieu au moment indiqué par cet arrêté, n'ont pas jeté un grand jour sur le fait qui est énoncé. La plupart des commissaires du conseil exécutif ont nié qu'ils se fussent réunis dans l'intention de délibérer; quelques-uns ont déclaré le contraire; mais tous se sont accordés à dire
qu'ils se regardaient comme dépouillés de leur caractère par l'évacuation de la Belgique, et dès lors ils se sont séparés.
Nous ne devons pas en terminant cet article, passer sous silence les plaintes qui nous ont été portées dans la Belgique et le pays de Liège, par plusieurs commissaires du conseil exécutif sur le défaut de fonds pour acquitter leurs frais de bureaux qui, dans certains arrondissements, étaient assez considérables. Notre réponse a été constamment la même que nous avions faite le 27 février aux braves et dignes républicains Liébaud et Bonnemant, commissaires nationaux à Rure-monde. Yoici notre réponse :
N° 12.
« Nous voudrions pouvoir vous procurer pour vos frais de bureaux les fonds qui vous sont nécessaires; mais, comme nous vous l'avons déjà dit, la loi du 15 novembre nous défend d'ordonnancer aucune dépense. C'est au conseil exécutif qu'il faut vous adresser; et si, sur cet objet, vous aviez à vous plaindre de lenteurs affectées, nous nous ferions un devoir de vous appuyer auprès de la Convention nationale.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai). » Art. 5.
Convocation, tenue et résultat des assemblées primaires.
L'article 2 du décret du 15 décembre chargeait les généraux de convoquer le peuple en assemblées primaires ou communales pour créer et organiser une administration et une justice provisoires.
Tout était en mouvement, comme nous l'annoncions à la Convention nationale le 27 janvier, pour l'exécution de cet article, lorsque par le décret du 31 du même mois, la Convention, a, sinon changé, du moins étendu l'objet des assemblées primaires, qu'il s'agissait de convoquer.
Suivant le décret du 15 décembre, ces assemblées primaires ne devaient s'occuper que du choix d'administrateurs ou de juges provisoires : mais par celui du 31 janvier, elles ont été invitées à émettre leur vœu sur la forme de gouvernement qu'elles voudraient adopter; et il leur a été déclaré en même temps que si elles ne se réunissaient pas dans la quinzaine de la publication de l'un et de l'autre décret, les peuples de qui elles eussent dû être composées, seraient déclarés ne vouloir être amis de la nation française, et traités comme refusant d'adopter ou de se former un gouvernement fondé sur la liberté et l'égalité.
Ces nouvelles dispositions ont obligé les commissaires de la Convention nationale de revenir sur leurs pas, et de concerter de nouvelles mesures pour assembler les peuples belges.
Il a fallu d'abord fixer l'arrondissement de chaque assemblée; et comme ce travail ne pouvait être que le résultat des renseignements qu'on était obligé de prendre sur la population de chaque commune, on n'a pu
y parvenir qu'avec un peu de temps et beaucoup de soins.
Un objet non moins essentiel à remplir, c'était d'instruire le peuple, de l'éclairer sur ses vrais intérêts, de le prémunir contre les suggestions perfides de ses prêtres et de ses moines. Plusieurs commissaires du conseil exécutif, et des citoyens que leur zèle seul dirigeait, y ont contribué, les uns par de bons écrits, les autres par des discours prononcés dans les sociétés populaires. C'est pour arriver au même but, que les commissaires de la Convention ont fait publier une proclamation qui a été insérée dans le Bulletin, en vertu d'un décret du 25 février, et qui est ainsi conçue :
N° 1.
« Au nom de la République française,
« Les membres de la Convention nationale de France, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique, Liège, etc., au peuple belge.
Des hommes qui jusqu'à ce jour ont éternisé la misère et l'anéantissement de la classe industrieuse, ne négligent rien pour voUs exciter contre les Français, et vous faire rentrer sous le joug autrichien. Ils ne rougissent pas de nous calomnier avec imprudence, de nous peindre comme des athées, des cannibales, qui foulent aux pieds les lois divines et humaines.
« Les Français, des athées et des cannibales ! ... eux qui dès 1789,. ont proclamé les droits de l'homme^. sous les auspices de l'Etre suprême ! eux qui, dès 1790, ont juré une paix immortelle à tous les peuples de la terre et mis en pratique cette belle maxime du fils de Dieu : Il faut aimer son prochain comme soi-même!... Les Français fouler aux pieds les lois divines et humaines ! eux qui rappellent ces beaux jours de l'église primitive, où les ministres du culte, choisis par les chrétiens, au lieu d'étaler un faste insolent, retraçaient dans une vie sainte et frugale toute la modestie des apôtres !
«i Tout rappelle en France les premiers siècles du catholicisme. Les citoyens commencent à goûter le vertueux plaisir de la fraternité. Les pauvres, ces enfants chéris du héros de l'évangile, ne sont plus un objet de dédain. Les hommes se rapprochent, s'aident mutuellement, s'exhortent à la pratique des vertus sociales, donnent leur superflu, quelquefois leur nécessaire, aux hommes moins heureux ou plus infortunés. Des chanoines, des abbés,,, des prieurs n'attirent plus à eux toutes les richesses, le Sauveur du monde ne les avait point établis; il n'avait institué pour prêcher sa sublime morale que des apôtres et des disciples, c'est-à-dire, des évêques, des curés, des vicaires, et il avait prononcé anathème sur les faux prophètes, sur les hommes qui oseraient imiter les pharisiens, sur les prêtres indignes, dont l'avarice mettrait le salut du monde à l'encan.
« Ministres de Dieu* s'écrie le prophète Isaïe, vous serez appelés; prêtres du seigneur, vous serez nommés; vous vous emparerez des richesses des nations; vous vous énorgueillirez de leur gloire ; mais, pour votre double honte et votre double confusion, les
nations reprendront leur héritage. Remis entre leurs mains, leur moyen de prospérité doubleront, et je serai au milieu d'eux,, dit le Seigneur; parce que je hais la rapine et l'argent dans les prêtres et le sacerdoce.
« Ouvrez la Bible, hommes égarés par les hypocrites qui corrompent la morale de l'Evangile; qui perdent la religion, qui deshonorent l'Eglise; ouvrez la Bible, et vous y lirez l'arrêt équitable et foudroyant que nous venons de citer.
« Ah ! sans doute il doit être las, ce Dieu de voir depuis si longtemps la honteuse faiblesse des uns, et l'exécrable tyrannie des autres. Il doit être las de voir des artisans et les laboureurs ne travailler que pour ramper aux pieds de leurs semblables, et pour alimenter les vices du plus petit nombre. Il doit être las de voir qu'une poignée d'individus abuse de son nom pour désoler, appauvri^ humilier ses créatures. Il est las, ce Dieu, d'être le complice de vos oppresseurs. C'est lui qui vient de réveiller les nations endormies, et de sonner l'heure dernière des tyrans.
« Les rois de la terre, a-t-il dit par l'organe du prophète déjà cité, seront assemblées en troupe, comme des prisonniers, jetés dans des fosses et des cachots. Il a livré leurs armées pour être tuées; elles tomberont comme la feuille de la vigne... Il n'y aura plus de royaumes, et tous les gouvernements seront réduits à rien.
« Eh ! n'avons-nous pas été assez heureux pour voir accomplir cette étonnante prédiction?
« Il faut être aussi perfide qu'un pharisien du siècle, pour oser méconnaître le doigt de la Providence dans les succès inouïs de notre République. Cette armée innombrable,^ accourue du fond du Nord pour écraser la nation fraçaise, obligée de se replier honteusement après quelques succès dus à la trahison, expirant de faim et de maladies dans les lieux qui furent le théâtre de ses brigandages et de ses cruautés; le drapeau national planté sur la cime des Alpes, et déployant ses trois couleurs jusqu'aux bords de la Meuse et du Rhin ; les montagnes inaccessibles, emportées d'assaut; de vieux soldats retranchés derrière ces cohues effrayantes, obligés de fuir devant une jeunesse inaguerrie; le Hai-naut, la Flandre, le Brabant, le pays de Liège, occupés par les armées françaises; l'esprit de vertige qui s'empare de tous les rois de la terre; les fautes, les crimes dont ils comblent la mesure; l'assassinat dont le prince de Rome, indigne successeur de saint Pierre, vient de se rendre coupable; cette France debout et encore vivante après quatre années de révolutions, inépuisable en hommes, en ressources, en vertus, ne comptant plus ses jours que par des actions miraculeuses et des traits de patriotisme étonnants... Quoi, Belges ! Rien n'a pu vous désiller les yeux? Vou osez méconnaître dans cette longue série de prodiges, la main du Tout-Puissant, les effets de la justice divine, de la vengeance de l'Eternel qui accomplit enfin ses promesses et donne à la terre ce bonheur promis depuis si longtemps... Non... Non, les hommes ne sont pas jetés ici-bas pour le bon plaisir de quelques brigands privilégiés. Les maux de l'espèce humaine durent depuis
quatre mille ans; il est temps que le règne des despotes finisse, et que celui des opprimés commence. Peuple belge ! Il dépend de vous de faire dès ce moment commencer le vôtre. La Convention nationale de France veut que vous soyez tous libres, tous égaux en droits: et c'est à ce grand but que tendent ses decrets si astucieusement dénaturés,, si audacieusement calomniés par ces hommes pervers qui cherchent à usurper votre souveraineté, en feignant de la défendre. Citoyens, le moment de vous expliquer est arrivé. Le décret du 31 janvier dernier vous a fixé un décret pour déclarer si vous vouliez être nos amis ou nos ennemis : ce délai expire. Nous vous ferons connaître incessamment les jours et les lieux où vous devrez, en conséquence, vous réunir pour prononcer en souverain sur votre sort.
« Fait à Bruxelles, le 19 février 1793, l'an II de la République française.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
En même temps que trois des commissaires de la Convention nationale combattaient par cette proclamation le fanatisme de tous les peuples belges, deux autres faisaient dans le Hainaut et le Tournaisis et les deux Flandres, des dispositions qui tendaient également au but du décret du 31 janvier. Yoici le compte qu'ils en ont rendu le 17 février à la Convention nationale par une lettre datée de Tournay; le 22 février aux oomités diplomatique et de défense générale, par une lettre datée de Gand.
N° 2.
« Citoyens nos collègues, nous avons, conformément à vos intentions, distribué entre nous le travail dont vous avez chargé la commission dans la Belgique et les pays voisins. D'après cette distribution, nous nous sommes transportés d'abord dans le Hainaut, à Mons, pour connaître les progrès du vœu de réunion prononcé par cette ville le 11 du présent mois.
« La ville persiste dans les meilleures^ dispositions; le général et les commissaires du pouvoir exécutif ont divisé le plat pays en plusieurs arrondissements, dans lesquels les assemblées primaires se sont tenues et continueront à se tenir successivement aux jours indiqués par le général. Le 24, elles seront terminées. Les procès-verbaux vous seront présentés tous ensemble, vraisemblablement par des députés que le pays enverra à la Convention. Le procès-verbal de l'assemblée de Mons ayant été imprimé, nous en joignons d'avance un exemplaire à notre lettre; nous avons entre les mains les procès-verbaux de plusieurs assemblées communales et primaires tenues cette semaine, dont le vœu est conforme à celui de la ville; et il y a lieu de penser que le vœu qui sera émis par les assemblées qui se tiendront la semaine prochaine, ne sera pas différent. „ « Nous venons aujourd'hui de disposer les opérations à faire à Tournay et dans le Tournaisis pour la tenue des assemblées primaires. Le décret du 31 janvier avait été déjà rendu public par les commissaires du pouvoir exé-outif; il sera publié de nouveau ces jours-ci par le général Omoran, qui indiquera en
même temps le jour de la tenue des assemblées primaires dans chaque arrondissement. La Société des amis de la liberté et de l'égalité établie à Tournay, a fait célébrer ce matin une cérémonie funèbre à la mémoire de Michel Le-peletier; nous y avons assisté; et l'éloge funèbre de Lepeletier a été prononcé par le citoyen Goëtmana, l'un des officiers d'une compagnie de volontaires qui se forme à Tournay.
Signé : Camus, Treilhard. » N° 3.
« Citoyens nos collègues, nous croyons devoir vous adresser quelques détails particuliers, relativement à la disposition des esprits dans les pays que nous venons de parcourir, et aux mesures que nous avons prises pour la tenue des assemblées primaires.
« Le partage que la commission de la Belgique a fait dans ses opérations en exécution du décret du 31 janvier dernier, a mis dans notre lot, le Hainaut, le Tournaisis et la Flandre, composées de deux parties, West-Flandre et Oest-Flandre. Les villes principales de ces contrées, comme vous le savez, Mons, Tournay, Ypres, Courtrai, Bruges, Ostende, Nieuport, Gand. L'objet principal et direct de notre mission dans ces différents lieux, était de disposer tout pour la convocation et la réunion des assemblées primaires, dans lesquelles les peuples doivent voter sur le gouvernement qu'ils veulent soit adopter, soit se former. Les objets secondaires étaient de nous assurer les mesures prises en 'exécution de l'article 4 du décret du 15 décembre, pour mettre sous la sauvegarde de la République les biens nationaux; de nous assurer pareillement des mesures prises relativement aux biens des émigrés, enfin nous ne devions pas passer dans les lieux où il se trouve des bataillons de la République, sans nous informer de leur état et de leurs besoins.
« Tels ont donc été les différents objets de notre travail, et ceux sur lesquels nous vous invitons, citoyens nos collègues, à fixer quelques instants votre attention.
« Notre course a commencé par le Hainaut ; la ville de Mons ayant déjà voté sa réunion à la République, il ne restait qu'aux campagnes à s'expliquer. Tout avait été disposé de la manière la plus avantageuse, pour connaître leur vœu qui, suivant les apparences, devait être partout celui de la réunion. Le conseil exécutif a envoyé déjà dans le Hainaut des commissaires très intelligents; Ligier et Mouchet. Ils se sont adjoints deux autres personnes. Le général Ferrand, qui commande à Mons, est un patriote zélé qui, par la simplicité franche de ses discours, commande la confiance. Une société d'amis de la liberté et de l'égalité est établie à Mons, et bien fréquentée. Enfin il ne faut pas perdre de vue un fait important : savoir, que dansi presque tout le Hainaut, on parle habituellement français.
« Les commissaires du pouvoir exécutif ont partagé, pour la tenue des assemblées, toute la province en divers arrondissements; le général Ferrand a établi, d'après leur indication, des chefs-lieux pour la tenue des assemblées, et fixé les jours où elles auraient lieu.
On avait, avant tout, fait imprimé le procès-verbal de l'assemblée de Mons, et une lettre des habitants de cette ville à ceux du plat pays; on a distribué les écrits avec des exem-' plaires de la Déclaration des droits de l'homme; les commissaires et les membres de la société de la liberté se rendaient dès le matin dans les lieux où l'assemblée était indiquée, et l'on avait eu l'attention de choisir pour ces lieux ceux où les esprits paraissaient le mieux disposés. Les assemblées se sont tenues avec tranquillité; nous avons déjà le résultat de la plupart, qui est pour la réunion. Cependant le peuple de la ville d'Enghien ne s'est pas contenté de s'opposer à oe vœu; il a mis en danger la vie du commissaire national Legier, qui a été obligé de se retirer. Le général Fer-rand nous consulte en ce moment par une lettre, pour savoir s'il enverra à Enghien une force armée, et s'il fera, dès cet instant, arrêter les mutins : ou bien si, d'après le fait résultant des procès-verbaux, que les ttrois-quarts et demi du peuple du Haipaut ont voté pour la réunion, il n'est pas plus convenable d'attendre que la Convention ait accepté le vœu de la province. Nous lui marquons de suspendre, quant à présent, toute démarche relative à Enghien, à moins que le désordre n'y fit des progrès marqués. Nous avons pensé qu'il n'y avait aucun inconvénient à laisser les choses en état jusqu'à ce que nous ayons pu connaître votre manière de penser.
« Le Tournaisis offre, quant à la langue française que l'on y parle, les mêmes. avantages que le Hainaut; mais il y a de grandes différences, d'abord quant à l'état des esprits. Il pourrait être que plusieurs des habitants regrettassent les Autrichiens; mais le caractère qui perce -le plus, et qui domine dans Tournay et les environst est une inertie expectante et taciturne, qui, espérant mieux de l'avenir, quelqu'incertain qu'il paraisse, que du présent qu'il n'aime pas, refuse de parler *et refuse d'agir. Les? deux commissaires établis dans cette ville (Thiébaut et Baume) ont seulement un adjoint qui est le fils de l'un d'entre eux (Thiébaut) : ils ont de/ très bonnes intentions, mais ils n'ont pas tous les moyens que l'on pourrait désire,r pour les faire valoir.
« Le général Omoran, qui commande dans le Tournaisis, est un excellent patriote, et ne néglige rien pour l'exécution du décret; il a également sous ses ordres les deux Flandres.
(c Les mesures que nous avons prises pour le Tournaisis étant les mêmes que nous avons prises pour la plus grande partie des deux Flandres, nous vous rendons compte des unes et des autres en même temps, et après vous avoir fait connaître les dispositions particulières de ces lieux.
« A Courtrai on est moins avancé que partout ailleurs. Là, il n'y avait pas, au moment où nous y sommes passé, une seule compagnie de soldats français. Nous avons demandé au général Omoran qu'il y en fit passer, et il nous l'a promis. La langue française n'y est presque pas entendue; les deux commissaires (Haron Romain et Maudrion) ne parlent point flamand; ils sont seuls; point de société de la liberté et de l'égalité : l'esprit du peuple n'est pas favorable à la République : on nous a rapporté qu'il avait été fait dernièrement des tentatives pour abattre l'arbre de la liberté.
« Bruges, ville riche, a quelques patriotes réunis en société de la liberté. Les habitants les plus aisés voudraient,comme la plupart des Flamands, ne point prononcer : ceux qui sont patriotes redoutent l'introduction des assi-I gnats, quant à l'effet rétroactif pour rembourser en cette monnaie les dettes anciennes : le peuple paraît disposé à demander l'union à la République. Quelques hommes riches avaient rédigé et fait circuler des protestations, et autres actes contraires aux opérations de la Convention. Nous avons ordonné, d'après les pièces écrites qui nous ont été produites, l'arrestation d'un des principaux, le ci-devant baron de Laïen : jusqu'à présent il a échappé; mais les poursuites qu'on a faites contre lui, ont suspendu et dérouté ses manœuvres.
« Les commissaires du pouvoir exécutif à Bruges et dans les environs, sont les citoyens Gadolle et Sibuet. Celui-ci s'est fixé particulièrement à Bruges; il a beaucoup de zèle; mais les moyens sont faibles, parce qu'il est jeune et sans expérience. Il ne parle pas le flamand, qui est la langue du pays; mais il est secondé par des patriotes qui entendent et parlent cette langue. Il y a lieu de croire que les efforts qu'il fait pour préparer la réunion, ne seront pas infructueux.
« La ville d'Ostende est difficile à remuer. Son port n'étant qu'un entrepôt, la plupart des habitants ne sont eux-mêmes que des commissionnaires de différents pays, que le lien de l'attachement à une patrie commune ne réunit pas, et qui sont fort indifférents à toute la Révolution, dans une ville qui leur est en quelque sorte étrangère. Le commissaire Gadolle, fixé à Ostende, est un homme précieux par son patriotisme et l'étendue de ses connaissances. Comme il entend et parle l'anglais, l'allemand et le flamand, il lui est facile de converser avec les habitants du pays; il a même l'avantage de saisir ce qu'on dit quelquefois imprudemment devant lui dans une langue autre que le français qu'il parle habituellement. Il est aidé d'un adjoint nommé Amandri, dont le patriotisme est très vif.
« On ne saurait, au moins quant à présent, prévoir quel sera le résultat d'une assemblée à Nieuport. Il y habite un très petit nombre de personnes qui aient quelque fortune et celles-ci appréhendent de perdre à la mutation du gouvernement. Les autres habitants de la ville ksont des pêcheurs, beaucoup plus occupés de leurs barques que des matières politiques. Il paraît que dans l'ancienne révolution, le parti de Yondernood était dominant dans cette contrée, et qu'il continue à y régner. Nieuport est de l'arrondissement des commissaires d'Ostende et de Bruges, qui n'ont pu s'y transporter que quelques iristants. Au 21 février, lorsque nous y sommes passés, tous les anciens impôts se payaient encore; le général Omoran, arrivé le même jour que nous, a. défendu que l'on continuât soit à les payer, soit à les exiger, et comme ils portaient principalement sur les boissons, il est possible que leur cessation donne à la République quelque faveur auprès du peuple.
« L'objet principal du transport d'Omoran à Nieuport et à Ostende, où il s'est également rendu, était de connaître l'état de la côte et la mettre en état de défense contre les descentes
possibles. Cet important objet de la défense extérieure ne le distrait pas sur les opérations relatives aux assemblées primaires.
« La ville le Gand et sa campagne étant dans une situation bien plus heureuse que toutes celles dont il vient d'être question, nous en parlerons à part.
« Quant aux mesures que nous avons prises par rapport aux autres lieux, nous avons pensé d'abord qu'il fallait concilier la nécessité d'exécuter les décrets du 15 décembre et du 31 janvier, dans le délai porté par le dernier de ses décrets, avec la nécessité de faire les préparatifs indispensables pour la tenue des assemblées. Dans cette vue, nous avons décidé que sans s'arrêter à des promulgations du décret du 31 janvier, qui avaient été faites précipitamment par les commissaires du pouvoir exécutif, il serait fait dans les derniers jours 3e cette semaine, et dans les premiers jours de la semaine prochaine, une nouvelle promulga-tion du décret, du 31, par ordre du général Omoran, qui commande dans toute cette partie; et que la quinzaine portée par le décret, ne compterait que de la date de cette promulgation. Elle expirera ainsi vers le 11 ou le j 12 mars. Nous avons ordonné aux commissaires du pouvoir exécutif de distribuer leur territoire en arrondissement particuliers, où ils marqueraient des chefs-lieux et dont ils enverraient l'état au général Omoran, lequel indiquera successivement les assemblées dans chacun des chefs-lieux. Nous leur avons proposé pour modèle ce qui s'est fait dans le Hai-naut où, leurs adjoints, dont le travail sera terminé dimanche, à aller aider de leur expérience les commissaires des autres arrondissements. Tout ainsi disposé, les assemblées -primaires se tiendront dans la fin de la semaine prochaine.et dans la semaine suivante.
« Il nous reste à vous parler de la ville de Gand. Les heureuses dispositions dans lesquelles lés citoyens Courtois et Darnauderi ont trouvé le peuple, les ont déterminés à accélérer la tenue de l'assemblée primaire. Le citoyen Ferrand (autre que celui de Mons) qui y commande, avait indiqué l'assemblée pour aujourd'hui même, 22 février. Elle a été tenue ce matin. Plus de 2,000 citoyens ont été présentés; leur vœu unanime a été la réunion à la République française, et l'expression de ce vœu a été reçue par toute la ville avec des marques de la plus grande satisfaction. La journée entière s'est passée dans des réjouissances générales, et elle s'est terminée par une illumination. Un bon citoyen, Lavalette, commandant du bataillpn des lombards, qui est en garnison à Bruxelles, s'était rendu avant-hier soir à Gand, pour seconder le commissaire Courtois. On doit à leur zèle et à leur intelligence réunis le succès de cette journée, dont nous ne vous donnons point d'autre détail, les procès-verbaux de l'assemblée de ce matin devant être portés à la Convention par les mêmes députés qui ont bien.voulu se charger de vous remettre notre lettre.
« La détermination de la ville he peut manquer d'avoir une grande influence sur les campagnes de son territoire. D'ailleurs ces campagnes sont, en général, portées pour la réunion. On ne 'craint des tentatives contre ce vœu que dans quelques petites villes, telles que celle d'Alost. Si elle vote contre la réunion, ce
sera le même cas que celui dont nous vous par? lions au commencement de notre lettre par rapport à Enghien dans le Hainaut, et l'on prendra les mêmes mesures pour l'un comme pour l'autre (l)i
« Vous voyez par les faits que nous venons de vous exposer, citoyens nos collègues, les moyens et les embarras qui peuvent accélérer ou retarder le vœu de la réunion de la part des Tournaisis et-de la plus grande partie des deux Flandres. Il faut, de bonne foi, convenir qu'il y a des difficultés considérables à surmonter. L'embarras de la différence des langues, est grand, surtout qu'il s'agit de mouvoir des esprits pesants, et qui, partie par habitude, partie par incertitude, affectent de ne vouloir que délibérer, sans agir.
« Les avantages que le peuple trouve à la Révolution par la suppression des impôts, contrebalancent ces difficultés. C'est le levier dont on peut se servir pour soulever la masse des villes et des campagnes. La quinzaine qui va s'écouler, nous montrera quel peut être le résultat des difficultés et des avantages opposés : vraisemblablement il y aura beaucoup de vœux pour la réunion, mais il pourra aussi se trouver des lieux, comme Enghien, où l'on refusera de s'assembler, ou bien dans lesquels on votera contre la réunion; et pour cela, il est indispensable d'avoir une marche certaine et uni-formé.
« Cette considération est le grand avantage qu'il y aura à vous développer de vive voix les détails que nous n'avons pu qu'effleurer par écrit, détermineront Treilhard a se rendre a Paris au commencement de la semaine, pour conférer avec vous, et nous rapporter promp-tement le résultat de vos délibérations.
« Nous avons pensé que dans cette première semaine, destinée principalement à préparer les assemblées, il est peu nécessaire que nous soyons sur les lieux : les ordres et les instructions que nous avons donnés paraissent suffire : mais dans la semaine suivante, où il s'agira de récueillir le résultat des assemblées, nous serons l'un et l'autre présents, et nous mettrons toute l'activité possible pour nous porter dans les endroits les plus importants, et y faire exécuter les mesures ordonnées par l'assemblée et concertées avec vous.
« Treilhard vous parlera en même temps de ce que nous avons remarqué sur les besoins de l'armée.
« Signé : Camus, Treilhard. » On voit, par ces deux lettres, que les commissaires chargés du Hainaut, du Tournaisis et des deux Flandres, ont laissé les généraux maîtres de fixer à leur gré les jours des assemblées; ils y étaient autorisés par le décret du" 31 janvier, et il n'est résulté de là aucun inconvénient. Mais le Brabant offrant plus de difficultés, tant parce qu'il était plus travaillé par les puissances ennemies, que parce que le fanatisme y était plus en force, des précautions particulières ont paru indispensables; et il ne s'y est pas tenu une seule assemblée primaire dont les -commissaires de la Convention n'eussent déterminé le lieu et le jour. Voici les réquisitions qui ont été faites à ce sujet :
N° 4.
« Au nôm de la République f rançaise.
« Les membres de la Convention nationale,ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc., requièrent le lieutenant général Moreton, commandant les troupes de la République dans le Brabant et le Hainaut, de prendre, aux termes du décret de la Convention nationale du 31 janvier dernier, publié en cette ville le 9 du présent mois, toutes les mesures nécessaires pour que le peuple libre de Bruxelles et de Molenbeke, Saint-Jos-Ten-Noode et Saint-Gilles, faubourg de la même ville, s'assemble lundi 25 de ce mois, neuf heures du matin, en l'église Saint-Gudule, à l'effet d'émettre son vœu sur la forme du gouvernement qu'il Voudra adopter.
« Fait à Bruxelles, le 21 février 1793, l'an II de la République française.
« Signé : Gossuin, Merlin (de. Douai). »
N° 5.
« Au nom de la République française
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc., requièrent le lieutenant général Moreton, commandant les troupes de là République dans le Brabant, de prendre, aux termes du décret de la Convention nationale du 31 janvier dernier, toutes les mesures nécessaires pour que les citoyens des communes ci-après nommées s'assemblent jeudi 28 février présent mois, neuf heures du matin :
« Savoir : les citoyens des communes de Vil-vorde, Penthy, Perck, Vambeke, Melsbroeck, Steenoèkkerzecie, Humelghem, Nosseghem, Saventhem, Saint-Stevens-Woluwe, Èvere, Haezen, Sainte-Gertrude-Machelën, Dieghem et Scaerbeke, eb leurs dépendances respectives, en l'église de Vilvorde;
« Les citoyens des communes de Tervueren, Sterrebeke, Crainhem, Wezembeke, Saint-Lambrechts-Woluwe, S aint-P eetars-Woluwe et Esterbeke, et leurs dépendances respectives en l'église de Tervueren ;
« Les citoyens des communes d'Isque ou Overysche, Hoeylaerde, La Hulpe, Notre-Dame au Bois, et leurs dépendances respectives, en l'église d'Isque ;
« Les citoyens des Communes d'Alsemberg, Rhode, Tourneppe, Buyssengen, Eyssimghen, Huyssinghen, Çaint-Peeters Lecuw, Bursel et Linkenbeké, en l'église d'Alsemberg ;
« Les citoyens des communes d'Uècle, R.uys-' broeck, Forêt, Stalle, Watermael, la Cambre, Boisfort, Vivier d'Oye, et leurs dépendances respectives en l'église d'Uècle;
« Les citoyens des communes de Laken, Jette, Dilighm, Over-Hembeke, Neder-Hem-beke, Strombeke, Wemmel, Meysse, Ophen, Grimberghe, les Trois-Fontaines, en l'église de Laken ;
« Les citoyens des communes d'Assche, Mol-lem, Merchtem, Masenzele, Baerdeghem, Mel-dert, Affighem, Hekelghem Esschene, Saint-Ulriw-Capelle, Sainte-Catherine Lombeke,
Termath, Beckerzèle, Zefllich, Relleghem, Hamme, Ossel, Brusseghem Cobbeghem et Bollebeke, en l'église d'Assche ;
« Les communes d'Itterbeke, Dilbeke, Ber-chem Sainte-Agathe, Grand-Beygard, Ander-lecht, Saint-Mertens Rodeghem, Wamebeke, Vlesenbeke et Wecweye en l'église d'Itterbeke;
« Les communes de Lennicke Saint-Quentin, de Lennicke Saint-Martin, Gaesbeck, Berchem Saint-Laurent, Oudenaken, Elingen, Goyck, Lerbeke, Paemele, Meerbeke, O. L. -V. Lombeke et Strytem, en l'église de Lennicke Saint-Quentin et leurs dépendances respectives.
« A l'effet d'émettre leur vœu sur la forme du gouvernement qu'ils voudront adopter.
« Fait à Bruxelles, le 23 février 1793, l'an I de la République.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai). »
« Au nom de la République française.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, requièrent le citoyen général Moreton, commandant dans le Brabant et le Hainaut, de prendre, aux termes du décret de la Convention nationale du 31 janvier dernier, toutes les mesures nécessaires pour que le peuple libre de Louvain s'assemble vendredi prochain, 1er mars, 9 heures du matin, dans l'église Saint-Pierre, à effet d'émettre son vœu sur la forme de gouvernement qu'il voudra adopter.
« Fait à Bruxelles, le 26 février 1793, l'an II de la République.
O « Signé : Gossuin, Merlin (de Douai). »
( Au nom de la République française.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique et de Liège, requièrent lé lieutenant général Moreton, commandant dans le Brabant et le Hainaut, de prendre aux termes du décret de la Convention nationale, du 31 janvier, toutes les mesures nécessaires pour que les citoyens des communes ci-après nommées s'assemblent samedi prochain, 2 mars, neuf lieures du matin; savoir :
( Les citoyens des communes de Thildonck, Wespelarc, Hacck, Vron, Perch, Campenhout, Berg, Bucken, Veder Ockerzele, Quarebbe, Buyssem, Vetlhem, Winxel, Erpo, Cortem-bergh et l'Abbaye, Meerbeke, Eversberg, He-rent, Wilscle, et leurs dépendances respectives, en l'église de Thildonck;
« Les citoyens des communes de Neerysche, Vieux Héverlé, Héverlé, Berthem, Leefdael, Vossùm, Duysbourg, Huldenberg, Saint-Joo-ris Weert, Saint-Achtenrode, Netene, Hammè, Mille, Valduc, Blanden, Rodde uap elle et leurs dépendances respectives, en l'église de Neerysche;
« Les citoyens des communes de Lubbeke, Corbeke-Over-loo, Lovenjoul, Pellemberg, Op-Vetp, Bierbeke; Parc, Linden, Vlierbeke, Holsbeke, les Trois-Harengs et leurs dépendances respectives, en l'église de Lubbeke.
« Les citoyens des communes d'Aerschot. Rillaer, Langdorp, Nienwrode, Hanwert,
Saint-Peeters, Rhode, Cortrhyk, Wesemael, Rolselaér, Werschster, Betecom, et leurs dépendances respectives, èn l'église d'Aerschot;
« Lee citoyens des communes de Warre, Bierges, Rosieren, Ottenbourg, Florival, Bos-sut, Arohêiineg, Grèz, Biez, Chapelle Saint-Laurent, Pictrebais, Longueville, Chaumont, Dion-le-Mont, Boulez, Dion-le-Val, Giston, Notre-Dame de Basse Warre, et leurs dépendances en l'église de Warre;
« A l'effet d'émettre leur vœu sur la formé de gouvernement qu'ils Voudront adopter.
« fait à Bruxelles, le 26 février 1793, l'an II de la République française.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai). » N° 7.
« Les membres de la Convention nationale, j ses commissaires près l'armée et dans les pays . de la Belgique de Liège, etc., requièrent le lieutenant général Moreton, de prendre, aux termes du décret de la Convention nationale, du 31 janvier dernier, toutes les mesures nécessaires pour tjue les citoyens des communes ci^après nommées, S'assemblent lundi prochain, 4 mars, neuf heures du mâtin, savoir :
( Les citoyens de la commune de Tirlemont, en l'église principale de Tirlemont ;
« Les citoyens des communes dé Cumptich, Willebringhem, Neervelp, Bantersem, Roos-beke, Nurbutsel, Kerckhem, Binkom, Actrode, Glabbeke, Wever, Bunsbeke, Saint-Peèters Yissenacken, Saint - MerteûS Vissenacken, Sainte1-Marguerite Hantem, Oirbeke, Meldert, Vertryk, et leurs dépendances respectives, en l'église de Cumptich;
« Les citoyens des communes de Jodoigne, Saint-Lambert, Jodoigne la Souveraine, Don-gelberg, RoUX-Miroir, Lathuy, Geest-Saint-Rémy, Zetrud-Lumay, Angaerde, Gest-Sainte-Marie, Gest-Saint-Jean, Pietermael, Op Hey lissem, Noduwez Pietrain, Herbais, Marets, Marilles, Molembais Saint-Job, Eminnes, Mo-lembais Saint-Pierre, Happais, Nodrenge, Jauche et leurs dépendances respectives, en l'église de Jodoigne ;
« Les citoyens des communes de Perwez-les-Marchez, Orbais, Thorembais Saint-Tron, Malèves, Sainte-Marie lès Opprebais, Was-tines, Opprebais, Incourt, Glimes, Jauchelet, Laramée, Bommelette, Bommale, Hedènge, Autre-Eglise, Faulz, Ghus, Gest à Gerômpont, Râmillies, Petit-Rosière, Mont Saint Lindré, Thorembais lès Béguines, Thorembisoul, Grand-Rosière, Hotomont et leurs dépendances respectives, en l'église de Perwez-les-Marchez;
« Les citoyens des Communes de Hannut, Viliers-le-Peuplier, Lens Saint-Servais,- Lens Saint-Remy, Lignet, Abolens, Putehet, Ber-trèis, Avernas-le-Gros, Avernas-le-Bauduin, Grand-Hallet, Petit-Hallet, Lincent, Orp-le-Grand, Orp-le-Petit, Jandrin, Jandrinoul, et leurs dépendances respectives, en l'église de Hannut;
« Les citoyens des communes de Landren, Over-Winden, Neer-Winden, Racour, Waes-mont, Rums-Dorp, Attenhoven, Neerlanden, Neerhespen, Overhespen, Guhenhoven, Laer, Esemael, Neerheylissem, Hackendover, Goid-
sénhoven, Linsmeau, Pellaines, Dormal, et leurs dépendances respectives, en l'église de ILanden ;
u Les citoyens des commUnes d'Orsmael Wommerâon, Grunde, Op-Linter, Neer-Linter, Magdendael, Heelen, Budingen, Betz, Leau, Elissem, Wanghe, et leurs dépendances respectives, en l'église d'Orsmael;
« Les citoyens des communes de Waenrode, Cortenaeken, Miseum, Kersbeke, Holêde, Suerbemde, Cap elle, Meensel, Kiescom, Saint-Jooris Winghe, Molenbeke, Weerbeke, Tielt-Notre-Dame, Thielt-Saint-Martin, Bekevoôrt, et leurs dépendances respectives, m l'église de Waenrode ;.
« Les citoyens de la commune de Diest, en l'église principale à Diest;
a Les citoyens des communes de Sichem, Montaigne, Melsbroêck, Thesselt, Àverboden, et leurs dépendances respectives, en l'église d& Bichem;
( Les citoyens des. communes de Haelen, Selk, Linkhont, Schulen, Lummen, Schaffen, Coursel, Webecom, et leurs dépendances respectives, en l'église de Haelen;
« A l'effet démettre leur vœu sur la forme de gouvernement qu'il voudront adopter.
« Fait à Bruxelles, le 28 février 1793, l'an J" de la République.
u Signé : Gossuin, Merlin (de Douai). » N° 8.
« Au nom de la République française,
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc.
« Arrêtent que le® commissaires nationaux du conseil exécutif provisoire, des arrondissements de Bruxelles et de Diest, sont autorisés à requérir les commandants de Tirlemont et de Diest, de fixer telles assemblées primaires desdits arrondissements qu'il jugeront convenir, à mardi ou mercredi prochain, suivant leur prudence; et ce nonobstant ta fixation de toutes lesdites assemblées à lundi prochain, par la proclamation du général More-ton, relative auxdits arrondissements.
« Fait à Bruxelles, le 28 février 1793, l'an II République.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
Le décret du 31 janvier imposait aux commissaires de la Convention le devoir de veiller particulièrement sur tout ce qui pourrait assurer la liberté des assemblées et des suffrages. C'est en partie (1) pour remplacer cet objet, qu'a été écrite de Bruxelles au comité de défense générale la lettre suivante, datée du 17 février.
N° 9.
Bruxelles, le
« Les commissaires de la Convention nationale, etc., à leurs collègues composant le comité de défense générale.
( Citoyens nos collègues,
« Plus le patriotisme fait de progrès dans la Belgique, plus l'aristocratie y devient entreprenante. Nous sommes informés par un commissaire du pouvoir exécutif, venant d'Ostende, qu'on y a crié publiquement, il y a quelques jours : vive l'empereur, et qu'on a trouvé chez des particuliers une grande quantité de poudre, de fusils et de canons. Le maréchal de camp Deflers, nous mande qu'à Bruges, on a tiré .en plein jour sur une patrouille et tué une sentinelle. A Bruxelles même, sous nos yeux, il existe dans plusieurs maisons particulières des dépôts secrets de fusils et de poudre; et ce qu'il y a de plus remarquable, c'est qu'il se trouve dans ces dépôts des gargouches qui ne répondent nullement au calibre des canons autrichiens, mais seulement à celui des canons français. Les dispositions de la ville de Namur ne sont pas plus rassurantes. Un courrier extraordinaire, qui en arrive, nous fait part d'enrôlements secrets qu'on y pratique pour le soutien de l'aristocratie.
« Si les aristocrates belges se permettent tout cela dans un temps où une grande force les environne et les contient, que ne doit-on pas craindre de leur part, lorsque le mouvement actuel de nos troupes vers la Hollande et le Rhin aura presque entièrement dégarni les villes de la Belgique, et que ne peuvent-ils pas entreprendre, dès ce moment même, à Bruxelles et à Anvers d'où viennent de partir une légion de 6,000 hommes et une division de gendarmerie, qui certes leur en imposaient. Nous vous invitons, citoyens, nos collègues, à y penser sérieusement. Si le ministre de la guerre ne nous envoie pas à l'instant de grands renforts, il faut nous attendre à de grands mouvements contre-révolutionnaires ; et que serait-ce, si malheureusement nos troupes, qui sont en avant, essuyaient des échecs qui les forçassent à un seul pas rétrograde? très certainement alors, les vêpres siciliennes sonneraient dans toute la Belgique sur les Français, sans que les patriotes belges, tremblant pour eux-mêmes, pussent leur être d'aucun secours.
« Ce n'est pas tout. On ne peut pas douter que l'Angleterre ne médite pas quelques attaques, et qu'elle ne les dirige de préférence sur la Belgique entre Dunkerque et Ostende ; sûre d'y trouver beaucoup d'amis, elle ne manquera pas de s'y porter. Il est donc bien essentiel de garnir toute cette côte d'une force imposante. C'est l'avis du général Dumouriez, avec qui nous avons conféré.
« Le salut de la République française, vous le savez, est dans la Belgique. Ce n'est que par l'union de ce riche pays à notre territoire, que nous pouvons rétablir nos finances et continuer la guerre. Mais, pour atteindre à ce grand but, il faut offrir aux patriotes timides
de la Belgique de puissants moyens de sécurité; il faut leur prouver, par un ample développement de nos ressources militaires, qu'ils n'ont pas à craindre le retour de la domination autrichienne. Leurs craintes dissipées, nous les verrons voter la réunion en grand» majorité, comme on l'a déjà fait dans les deux villes les mieux disposées en notre faveur, Mons et Charles-sur-Sambre.
( Supposons cependant la réunion rejetée et l'aristocratie triomphante: dans cette hypothèse, nous devons traiter la Belgique en pays ennemi; mais, pour la traiter ainsi, il faut être le plus fort.
Ainsi, dans tous les cas, nous vous le répétons, il est d'une nécessité indispensable d'envoyer dans ce pays 20 à 25 bataillons, et au moins deux escadrons de troupes légères, pris d'après la désignation du général San-terre, dans les dragons de la République ca-sernés à l'école militaire. Nous ne vous dissimulerons même pas que nous n'oserions point, avant leur arrivée, faire convoquer les assemblées primaires. Tout ce que nous voyons, nous assure que le sang coulerait dans ces assemblées, si une grande force ne venait contenir les mal intentionnés; et c'est parce qu'elles doivent être réunies incessamment que nous vous adressons ces observations par un courrier extraordinaire.
« Sans doute, on ne nous objectera pas l'arrêté par lequel nous venons de mettre en état de réquisition permanente les gardes nationales des départements du Nord, du Pas-de-Calais, de la Somme, de l'Aisne et des Ar-dennes; car ce serait s'abuser bien étrangement que d'attendre un grand succès de cette mesure (1). Elle n'est bonne et nous ne l'avons prise, que pour en imposer aux contre-révolutionnaires, en attendant l'arrivée des secours Que nous vous demandons.
(c Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
( P. S. A l'instant où nous terminons notre lettre, arrive un commissaire civil préposé à la vente des effets des émigrés, qui nous fait part de nouveaux mouvements survenus à Ostende et à Bruges.
« Comme il n'y a pas un moment à perdre, nous chargeons notre courrier d'attendre et de nous rapporter une réponse. »
Le lendemain, autre lettre au même comité. N° 10.
Bruxelles, le
« Les commissaires de la Convention nationale, etc., à leurs collègues composant le comité de défense générale.
« Citoyens nos collègues,
c De nouveaux faits venus à notre connaissance, et les réflexions qu'ils nous ont fait naître depuis hier, nous ont déterminés à des
mesures qui nécessitent une extrême rapidité dans l'envoi des renforts que nous vous avons demandés. La copie ci-jointe de la lettre que nous adressons au ministre de la guerre, vous informera de tout.
( Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
Bruxelles, le 18 février 1793, l'an II de la République française.
« Les commissaires de la Convention nationale, etc., au ministre de la guerre.
« Nous avons adressé hier, citoyen ministre, au comité de défense générale une lettre ci-jointe en copie, et dont il est important que vous ayiez connaissance.
« Depuis le départ du courrier porteur de cette lettre, de nouveaux faits dont on nous a informés, et de nouvelles réflexions qui nous sont survenues, nous ont déterminés à hâter le rassemblement du peuple de Bruxelles, pour exprimer son vœu en exécution du décret du 31 janvier, et nous en avons en conséquence fixé le jour au lundi 25 de ce mois.
« D'après cela, vous sentez, citoyen ministre, n'ayant devant nous que 6 jours, nous ne pouvons pas compter sur les troupes que nous avons hier engagé le comité de défense générale à nous faire envoyer de Paris. Il faut qu'elles viennent sans doute, mais elle ne viendront pas assez tôt pour Bruxelles; et cependant il importe au salut de la République française et à la liberté de la Belgique, que Bruxelles ait dans son sein une force imposante», lors de la réunion de ses habitants en assemblées primaires. Il ne s'y trouve en ce moment que 3,000 hommes au plus. C'est évidemment trop peu; ce n'est même presque rien pour une ville de 80,000 âmes, dans laquelle affluent les aristocrates, des intrigants, des espions de toute epèce, et des scélérats aux gages de toutes les puissances. Mais il y a un moyen très simple de nous procurer très promptement un renfort considérable : c'est de faire porter sur Bruxelles les meilleurs bataillons en garnison à Tournay, Ath et Mons, et de les y faire remplacer par des bataillons que vous emprunterez momentanément des garnisons de Lille, Douai et Yalenciennes. Peu de jours suffisent pour ces mouvements;
ne s'agit que de les ordonner de suite. Notre courrier attendra votre réponse, et il portera à leurs adresses, en revenant, les ordres que vous aurez à lui remettre pour les villes dont nous venons de parler.
(( Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
Paris, le
« Le ministre de la guerre aux commissaires de la Convention nationale près Varmée de la Belgique.
sures pour faire partir de Paris toutes les troupes qui n'étaient point nécessaires à sa sûreté. Je me suis concerté à cet égard avec le maréchal de camp Santerre; les deux bataillons de l'Yonne sont en conséquence partis pour Bruxelles, où ils seront rendus dans les premiers jours de mars. J'ai dirigé sur les côtes deux autres bataillons qui étaient également à Paris. J'envoie à Lille, aux ordres du général Dumouriez, le treizième régiment de chasseurs à cheval. Je fais avancer sur Liège et Sedan la légion Germanique et les hussards braconniers; enfin, j'ai tiré de Paris et de l'intérieur tout ce qui y était de disponible. Il ne reste plus que la cavalerie de l'Ecole militaire; j'en ai fait passer 100 hommes à Versailles, où ils se complètent en chevaux et en équipement; du moment qu'ils seront prêts, ils partiront pour la Belgique; un autre détachement de 1000 hommes viendra les remplacer à Versailles pour s'y former, et tout le corps filera ainsi successivement du même côté.
« Le maréchal de camp de Fiers, commandant à Ostende, Furnes, Nieuport et Bruges, est ici; le général Dumouriez l'avait chargé d'une mission particulière, et il va retourner incessamment à Bruges; il a pris des mesures pour maintenir la tranquillité dans les places de son commandement; il a fait avancer, particulièrement à Ostende, qui donnait quelque inquiétude, des troupes de Furnes et de Nieuport, en assez grand nombre pour arrêter dans leurs origines les troubles qui commençaient à s'y manifester; il s'est d'ailleurs concerté avec l'adjudant général Saint-Fief, mon adjoint pour l'artillerie et les fortifications, sur la nature des armements nécessaires pour la défense des places maritimes de cette côte.
(( Quant à Bruxelles, une garnison de 3,000 hommes doit être suffisante, bien employée, pour y maintenir l'ordre et déjouer les intrigues des malveillants; cependant on pourra profiter des renforts que je vous ai annoncés dans le commencement de cette lettre, si on le juge nécessaire. Je pense que la tranquillité de Bruxelles tient beaucoup à la conduite de l'officier qui y commande (1), et j'ai autorisé le général Dumouriez à employer le général Moreton dans toute autre partie de son armée, si sa présence à Bruxelles est contraire aux intérêts de la République.
( Je porte actuellement toute mon attention sur les moyens de mettre nos armées réellement en état d'agir, l'objet du recrutement est un des plus importants, et je mets aujourd'hui sous les yeux de la Convention nationale mes idées sur les mesures propres à compléter nos armées dans le plus court délai possible; c'est principalement vers la Hollande et vers Mayence qu'il faut porter les premiers renforts, et ces deux points importants, d'où dépendent nos succès, fixent entièrement mon attention.
« Je hâterai par tous mes efforts l'exécution du mode que la Convention nationale aura adopté. Je vous réponds de la plus constante
activité, et de la surveillance la plus suivie. Personne ne sait mieux que moi combien les moments sont précieux.
« Le ministre de la guerre, ( Signé : Beurnonville. »
Avant même que cette réponse du ministre ne parvînt aux commissaires de la Convention, le retard qu'ils éprouvaient à la recevoir leur faisant perdre l'espérance d'obtenir des renforts sur lesquels ils fondaient celle du calme pendant les assemblées qui étaient sur le point d'avoir successivement lieu dans les diverses parties du Brabant, ils se sont concertés avec le général Moreton pour y suppléer par des virements de garnisons; et cet officier a si bien pris ses mesures, en conséquence de leurs réquisitions que Bruxelles, Louvain, Diest, Tirlemont et leurs dépendances, ont été tour à tour gardées par des forces imposantes, les jours que leurs habitants respectifs se sont assemblés.
Yoici les réquisitions qui lui ont été adressées pour ceb objet :
N° 11.
Bruxelles, le
« D'après votre lettre d'hier, citoyen général, nous vous requérons de faire passer ici, avant dimanche prochain, les deux bataillons que vous vous proposez d'appeler de Louvain et de Mons, pour renforcer la garnison de Bruxelles; à l'égard des 50 hussards dont vous nous parlez, il suffira qu'ils arrivent dimanche vers le soir, mais que ce soit sans aucune faute.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai). »
N° 12.
Bruxelles, le
« Au général Moreton.
« Nous vous requérons, citoyen général, de faire porter sur Louvain des forces suffisantes pour y maintenir le bon ordre pendant la tenue de l'assemblée convoquée pour vendredi prochain, à l'effet d'émettre le vœu du peuple, en exécution du décret du 31 janvier dernier; vous jugerez, sans doute, à propos d'y envoyer de la cavalerie.
« Nous vous prévenons qu'il entre dans nos vues de faire tenir, dans les premiers jours de la semaine prochaine, les assemblées primaires des arrondissements de Diest, de Tirlemont et de Jodoigne. Il sera nécessaire que vous destiniez pour ces arrondissements qui sont considérables, les forces que vous ferez porter d'abord sur Louvain.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai). »
N° 13.
« Au nom de la République française.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires, etc., requièrent le citoyen commandant à Louvain, en l'absence du général Moreton, de faire porter sur Tirlemont
et Diest le premier bataillon de la réserve et les hussards en détachement audit Louvain ; savoir : les deux tiers du premier bataillon de la réserve demain soir, et les deux tiers des hussards, après demain à midi, sur Tirlemont; le tiers du premier bataillon de la réserve demain soir, et le tiers desdits hussards, après demain à midi, sur Diest; le tout à l'effet d'assurer la liberté des suffrages dans les assemblées qui doivent avoir lieu dans les arrondissements de Diest et de Tirlemont, en exécution du décret du 31 janvier dernier.
« Fait à Louvain, le 1er mars 1793, l'an II de la République.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
Il faudrait un volume entier pour rappeler toutes les autres précautions qui ont été prises par les différentes divisions de la commission, pour assurer, dans les circonstances dont il s'agit, le maintien de la tranquillité publique, et par conséquent la liberté des suffrages; mais une seule observation doit suppléer à tant de détails, c'est que toutes les assemblées qui ont émis leurs vœux pour la réunion à la République française, ont été calmes, et qu'il n'y a eu de troubles que dans le très petit nombre de celles qui ont, ou refusé de voter pour une forme quelconque de gouvernement, ou déclaré vouloir leur ancienne Constitution.
On a cependant osé dire en France, Dumouriez même a osé écrire à la Convention nationale, le 12 mars, que les vœux de réunions avaient été arrachés à coups de sabre, et l'on a cité notamment, pour preuve de cette assertion, une rixe qui s'était élevée dans l'assemblée communale de Mons.
Mais d'abord cette rixe n'avait çu lieu qu'entre quelques individus; ensuite ceux que l'avaient engagée étaient des aristocrates très prononcés; enfin elle avait précédé la nomination du président, et conséquemment l'ouverture de l'assemblée. — Tout cela est constaté par le procès-verbal de l'assemblée elle-même.
N° 14.
« L'an 1793, second de la République, le lundi 11 février, 9 heures du matin.
« Nous, commandant général et commissaires nationaux de la République française, nous sommes rendus en l'église de Saint-Wan-dru, ou avait été convoquée l'assemblée des habitants de Mons, en exécution des décrets * de la Convention nationale, des 15 décembre et 31 janvier derniers, à l'effet d'émettre leur vœu sur la forme de gouvernements qu'ils se proposaient d'adopter.
« Le citoyen général Ferrand est monté à la tribune; il a exposé au peuple réuni le motif de la convocation; et, dans un discours, il a exprimé le désir qu'il avait de le voir heureux du choix qu'il allait faire d'un nouveau gouvernement.
« Plusieurs voix s'élèvent aussitôt de différents côtés, et demandent la réunion do la France.
« Dans ce moment un mouvement s'est fait apercevoir dans une partie de l'assemblée.
« L'un des commissaires nationaux, le citoyen Mouchet, est allé pour rétablir le calme hors de l'église, où le mouvement s'était porté.
Revenu un instant après, il témoigne le regret qu'il aurait de voir un si beau jour troublé par des agitations dont les ennemis de la chose publique ne manqueraient pas de chercher à tirer avantage.
« Il a déclaré que la nation française n'ayant fait entrer ses armées sur le territoire étranger que pour apporter au peuple la liberté, et que de toutes les libertés, la plus sacrée^ étant celle des opinions; les agents de la République ne souffriraient jamais qu'il y fût porté la moindre atteinte; que les ennemis de la patrie avaient cherché dans ce moment à faire croire, par une rixe particulière qu'ils avaient suscitée, que les suffrages n'étaient pas libres; mais que s'il pouvait y avoir dans l'assemblée quelques personnes qui eussent cette opinion, il y avait un bon moyen de les rassurer, un moyen de confondre la calomnie et de prouver l'immense majorité des amis de la liberté, sur le petit nombre des partisans de l'esclavage : c'était de remettre la séance au lendemain.
« Le général annonce que, si cette mesure est adoptée, et s'engage à donner l'exemple de la sécurité et de sa conilancei dans la prudence des citoyens, en déposant les armes que son grade l'autorise à ne jamais quitter.
Un citoyen demande la parole : il annonce que loin que les ennemis de la liberté puissent dire qu'ils ont été gênés dans leur opinion, c'était l'un d'eux qui s'était permis de frapper, d'un bâton qu'il tenait à la main, un des citoyens qui s'étaient empressés de manifester leur vœu pour la réunion; que par conséquent si quelques personnes avaient à se plaindre, ce serait ceux-ci ; mais que loin de se croire gênés, ils demanderaient au contraire à émettre leur vœu sur-le-champ et par acclamation. Aussitôt toute la salle retentit du même cri : la réunion!
« L'un des commissaires observe qu7il ne pouvait recevoir ce vœu, l'assemblée n'étant pas encore formée, ce qui ne pouvait être qu'après la nomination du président.
« Un citoyen ayant demandé la parole, observe que d'après les lois relatives à l'organisation des assemblées, les villes dont la population s'élève au-dessus de 20,000 âmes, devaient être assemblées par sections; que celle de Mons, qui en contenait près de 20,000, devait être divisée.
« Le commissaire national Legier fait observer que les lois françaises ne pouvaient être en ce moment la règle absolue d'une nation qui ne les avait pas encore adoptées; que le peuple assemblé était le maître de terminer s'il entendait se diviser en plusieurs sections; mais qu'il devait se souvenir que la maxime, diviser pour régner, était la règle de conduite sous les despotes et le conseil favori de tous leurs suppôts.
« Un citoyen observe qu'avant de statuer sur une pareille proposition, celui qui l'avait faite étant privilégié, devait renoncer à ses anciens privilèges; mais il s'y refuse.
« L'assemblée, impatiente de s'organiser, demande à nommer son président, et elle indique à cet effet le citoyen Wolf.
« Alors le général ayant mis cette proposition aux voix, le citoyen Wolf est nommé président à' l'unanimité, et vient prendre place au bureau.
a Signé : Ferrand, Leqier, Motjchet, »
Du
« Le peuple assemblé en l'église de Saint-Wandru, en suite de convocation faite par le général Ferrand le 9 de ce mois, un des commissaires du pouvoir exécutif de la République française monte à la tribune, et propose de nommer un président pour cette séance : le citoyen Wolf est nommé de toutes voix par acclamation.
« Le commissaire se retire, et la séance est ouverte à 9 heures du matin, par l'hymne des Marseillais.
« Le président, entrant en fonctions, demande qu'il soit nommé deux secrétaires pour rédiger le procès-verbal de cette séance.
« Les citoyens Foucez et Buisseret sont indiqués par l'assemblée, proposés et acceptés par elle.
« Le citoyen Couteaux fait lecture d'un discours dans lequel il démontre l'avantage des Montois de se réunir à la France, et les dangers qu'ils résulteraient pour eux si cette réunion n'avait pas lieu. Ce discours est applaudi, et un cri général de réunion s'est fait entendre aux quatre coins du temple.
« Le président propose le mode de voter, et engage l'assemblée de décider si ce sera par scrutin, par appel nominal ou par acclamation; il observe au peuple qu'il est souverain dans, ses assemblées, et que c'est à lui qu'il appartient de déterminer ce mode : l'assemblée délibère de toutes voix qu'il sera voté par acclamation.
« Le président propose de prêter serment à la liberté et à l'égalité, et de renoncer à tous privilèges, aux termes du décret du 15 décembre dernier : ce serment est prêté à l'unanimité. U prévient ensuite l'assemblée qu'il y a un registre préparé ou chaque privilégié peut souscrire sa renonciation à ses ci-devant privilèges.
« Le citoyen Michel Buisseret, ci-devant privilégié, monte à la tribune : Il annonce à l'assemblée que depuis longtemps il a brûlé, en la Société des amis de la liberté et de l'égalité, ses titres de noblesses; il invite tous les ci-devant nobles et privilégiés de suivre son exemple; il souscrit sa renonciation au registre avec ses deux fils.
« Le président, après un discours relatif au but de cette assemblée, l'invite à émettre son vœu sur le mode de gouvernement qu'il veut adopter; alors tous les citoyens se lèvent et déclarent unanimement qu'ils veulent être Français : cette demande, généralement appuyée, est mise aux voix., et le président invite les citoyens qui veulent leur réunion à la France, à passer sur la droite, dans le haut de l'église, et ceux qui sont d'un avis contraire et veulent avoir un mode de gouvernement différent à celui de la France, de passer sur la gauche, dans le bas de l'église. A l'instant toute l'assemblée se précipite sur la droite, et aucun citoyen ne se présente sur la gauche; les cris de :' Vive la réunion, vive la République française, firent retentir les voûtes du temple, et ce ne fut qu'après un long intervalle, pendant lequel le peuple manifestait sa joie, qu'il put prononcer que le peuple libre de la ville de Mons avait voté de toutes voix pour sa réunion à la Frâncç.
« Un citoyen demande qu'à l'instant même, il soit nommé deux députés vers la Convention nationale, pour exprimer le vœu des habitants de la ville de Mons, et accélérer sa réunion à la France : les citoyens Wolf et Duvivier sont nommés pour cette députation.
« Un citoyen demande que le jour de fête soit marqué par un jour d'indulgence, et que tous les prisonniers, pour délit militaire, soient délivrés : cette motion est généralement applaudie, et le général Ferrand est prié de remettre toutes ces personnes en liberté.
« Le président propose de décréter qu'une fête aussi solennelle soit annoncée par le son des cloches de toute la ville, par des salves d'artillerie, par une illumination générale, et qu'enfin le drapeau tricolore soit arboré sur la tour blanche qui domine la ville. (Applaudi et arrêté).
« Le citoyen Mouchet, commissaire du pouvoir exécutif de la République française, prend la parole et dit : Que de tous les privilégiés il n'est que le seul citoyen Buisseret qui, conjointement avec ses deux fils, ait renoncé à ses anciens privilèges; que, quoique la voix de la réunion ait été générale, cependant, pour écarter tous les bruits que les malveillants pourraient encore répandre, il proposait qu'il fût ouvert un registre à la municipalité, ou chaque citoyen, qui ne voudrait pas sa réunion à la France, ou qui désirerait un autre mode de gouvernement, pourrait aller le souscrire. Un citoyen propose, par amendement, que ce registre soit ouvert pendant 24 heures, après lequel terme ils ne pourraient plus émettre leurs vœux. Cette motion et son amendement sont décrétés.
« Un citoyen demande que le procès-verbal de cette séance soit imprimé et envoyé à la Convention nationale, ainsi qu'à toutes les communes. (Décrété.)
« Le citoyen commissaire Mouchet rend hommage au civisme des administrateurs provisoires de la ville de Mons; mais il prévient le peuple que leur zèle n'est pas suffisant pour remplir leurs travaux, et demande que, jusqu'à ce qu'une administration définitive soit nommée, il soit choisi douze autres administrateurs pour se joindre à ceux d'entre les premiers qui sont restés à leur poste : cette proposition est décrétée, et à l'instant on procède à la nomination, et les suffrages se sont réunis sur les citovens Mambour, Couteaux, Burneau, Willame, J. B. Levieux, Dethuin, Claes, Biais, Lemerel, médecin; Louis Dereume, Delhaye, Capiaumont père, et Ego, ci-devant avocat.
« La séance est levée à 11 heures.
(( Signé : Wolf, président; M.-C Buisseret, Foncez, secrétaires. »
La calomnie s'est encore exercée particulièrement sur la manière dont la réunion avait été votée à Bruxelles. Mais à tous les propos qu'on s'est permis à cet égard, nous opposerons le compte que nous avons rendu le 25 février à la Convention nationale, et nous l'opposerons avec d'autant plus de confiance, qu'il a été rédigé par celui de nos collègues qui, détenu à Maïstrieht par la plus noire des trahisons, ne peut prendre aucune part au rapport que nous faisons ici.
N° 15.
Bruxelles, le
« Les commissaires de la G onvention nationale près Varmée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc., à leurs collègues composant la Convention. nationale.
« Citoyens nos collègues,
« Le peuple de la ville de Bruxelles vient de voter sa réunion à la République française. L'assemblée était nombreuse, et le vœu a été unanime; il a été accompagné de toute les démonstrations de la plus vive satisfaction. Le peuple a envoyé une députation vers nous pour nous informer du résultat de l'assemblée; nous avons embrassé les députés comme frères : on a crié à l'envi : Vive la République française et vivent les 86 départements.
« Le canon tire, les cloches se font entendre; toute la journée se passe en fêtes et en réjouissances : elle sera terminée par les illuminations.
« Nous ne vous dirons rien de plus, pour laisser aux députés du peuple qui vont se rendre près de la Convention, la satisfaction de rendre tous les détails d'une réunion aussi heureuse, et votée avec tant d'empressement.
« Signé : Camus, Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
Art. 6.
Effets et suites des vœux émis dans les assemblées primaires.
Trois sortes de vœux ont été émis par les communes réunies en assemblées primaires.
Quelques-unes ont demandé la conservation de leur ancien gouvernement.
Quelques autres ont voté leur réunion à la France sous différentes conditions.
Dans les autres, et c'est le très grand nombre, cette réunion a été votée purement et simplement.
Les premières devaient, d'après le décret du 15 décembre, être traitées en ennemies de la République; mais il n'a été fait à leur égard aucune disposition hostile; les circonstances ne l'ont pas permis.
Les secondes ne pouvaient être de notre part l'objet d'aucune délibération, jusqu'à ce que la Convention nationale ne se fût expliquée, ce qu'elle n'a pas fait .
A l'égard des communes qui avaient demandé purement et simplement leur réunion à la République française, on sait que leurs vœux ont été acceptés par la Convention nationale.
Les décrets rendus à ce sujet nous avaient chargés de différentes opérations. Mais, d'une part, ils ne nous ont jamais été adressés officiellement; et de l'autre, le peu d'intervalle qu'il y a eu de la connaissance que nous avaient donnée les bulletins, à l'évacuation totale de la Belgique, ne nous aurait pas permis de les mettre entièrement à exécution. Nous avons cependant pris, d'après leurs dispositions!,
trois arrêtés qu'il est de notre devoir de rappeler ici. Les deux premiers sont relatifs aux bureaux de douanes. Le troisième concerne la division et l'organisation du département de Jemmapes.
N° 1.
« Au nom de lu République française.
« Vu le mémoire des citoyens Henri Sechers et fils, négociants à Bruxelles, expositif que regardant la réunion de cette ville à la République comme effectuée par le décret du 1er de ce mois, quoique non encore publiée officiellement, ils ont fait partir pour Paris une voiture chargée de marchandises qui a été arrêtée à la douane de Valenciennes, faute de paiement des droits d'entrée, se montant à 13,860 livres 4 sous. ' \
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires, etc., arrêtent qu'en donnant par les citoyens Henri Sechers et fils, caution bonne et valable, et domiciliée à Valenciennes, pour le paiement des droits dont il s'agit, s'il y a lieu, les préposés à la douane laisseront passer librement ladite voiture.
«f Fait à Bruxelles, le 15 mars, l'an II de la République française.
« Signé : Camus, Gossuin, Treilhard et Merlin (de Douai). »
N° 2.
«Au nom de la "République française.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée, et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc., conidérant que par l'article 2 du décret de la Convention nationale, du 2 mars présent mois, portant réùnion du Hainaut à la République française, les bureaux des douanes établis sur les confins de la France et du ci-devant Hainaut sont supprimés, et doivent être transférés, dans le plus bref délai, aux limites extérieures du nouveau département; que depuis ce décret, il en est encore intervenu d'autres qui ont pareillement réuni à la République française une grande partie du restant de la Belgique; qu'il ne serait pas juste de laisser poser les droits de douanes sur celle-ci, pendant que le ci-devant Hainaut en serait exempt; mais qu'il est impossible, dans lés circonstances actuelles, de placer les bureaux de douanes aux limites extérieures des diverses parties réunies, puisque ces limites peuvent à chaque instant changer en plusieurs points par les décrets successifs de réunion : qu'il est donc infiniment urgent de prendre une mesure qui, en attendant le déplacement effectif desdits bureaux, concilie l'exécution de l'article 2 du décret de ce mois avec la justice que la République française doit à ses nouveaux membres, arrêtent ce qui suit :
« Art. 1er. Il est défendu, sous peine dé «oncussion, aux préposés des douanes établies sur les confins de la France et du ci-devant Hainant de percevoir aucun droit d entree ni de sortie sur les marchandises, denrées et effets qui seront prouvés venir directement, soit du ci-devant Hainant, soit des autres parties d© la Belgique, dont la
réunion à la ^République française est prononcée par des déçrets publics officiellement dans lesdites parties.
Art. 2. Cette preuve se fera par un certificat de la municipalité du lieu du départ originaire desdites marchandises, denrées et effets, légalisé par l'officier commandant les troupes dans ce lieu ou dans le plus voisin.
Art. 3. Le présent arrêté sera adressé au directoire du département du Nord, au commandant militaire de Valenciennes, au directeur des douanes de la même ville, avec réquisition de tenir la main, chacun en droit soi, à .son exécution.
« Fait à Bruxelles le 19 mars 1793, l'an II de la République.
« Signé : Camus, Gossuin, Treilhard, Merlin (de Douai). »
N° 3.
« Nous, membres de la Convnetion nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Bélgique, de Liège, etc.;
« Vu le décret du 2 mars présent mois, qui, d'après le vœu des communes du ci-devant Hamaui, les réunit à la République pour former sous le nom de département de Jemmapes, le 86e département du territoire français, et nous charge de procéder à sa division et organisation provisoires;
« Considérant qu'il importe d'accélerer cette division et organisation, en écartant toutes les difficultés qui pourraient y apporter des formes encore inconnues dans ce nouveau département;
« Arrêtons ce qui suit :
titre premier. Division du département de Jemmapes (1).
Art. 1er. Le département de Jemmapes a pour
chef-lieu la ville de Mons.
Art. 2. Ce département est divisé en trois districts, dont- les chefs-lieux sont Ath, Bin-che et Mons.
Art. 3. Le district d'Ath est borné, au midi, par les communes de Baufle, Grosage, et Grandglise; au levant, par les communes de Lombise et Loricourt; au nord, par les communes de Œtinghe, Camerage, Accrène-Saint-Martin et Ellezelle; au couchant, par les communes de Bary et Briffœil.
Art. 4. Le district de Binche est borné au midi, par les communes de Bourlers et Se-loigne; au levant, par les communes de Fon-taine-l'Evêque et Courcelle; au nord, par la commune de Braine-le-Comte; au couchant, par les communes de Gottignies, Boussoit et Villère-le-Sec.
Art. 5. Le district de Mons est borné au midi, par les communes de Givry, Aulnoit, Roisin et Quièvrain: au levant, par les communes de Villers-Saint-Guislain et Ghis-lage; au nord, par les communes de Neuville-les - Soignies et Chaussée - Notre - Dame ; au
couchant, par les communes de Neuf-Mai-son, Grandglise et Bernissart.
Art. 6. Les communes mentionnées dans les articles précédents, font ainsi que leurs dépendances, partie du district auquel elles sont données pour confins.
Art. 7. Le district d'Ath est divisé en quatorze cantons, dont les chefs-lieux sont Ath, Celle, Chièvres, Ellezelles, Enghien, Elli-gnies-Sainte-Anne, Forêt,, Franne, Hal, He^ rinne, Lessines, Leuze, Silly et Vianne.
Le canton d'Ath comprend les communes suivantes avec leurs dépendances ; savoir : Ath, Arbre, Atre, Bouvigni, Irchonwely, Lanquesain, Ligne, Maffle, Moulbayx, Ozme-
fnies, Villers-Notre-Dame- et Villers-Saint-mand.
Le canton de Celle comprend les communes suivantes avec leurs dépendances, savoir : Anserœille, Ainiëres, Celle, Derneaux, Escanaffle, Herrinet-sur-l'Escaut, Molem-baix, Obignies, PoI\et et Watripont.
Le canton de Chièvres comprend les communes suivantes avec leurs dépendances, savoir : Bauffle, Belœil, Brugelet, Cambron, Chièvres, Gage, Grosage, Henzignies, La-vense, Mevrigny, Tongre - Notre - Dame et Tongre-Saint-Martin.
Le canton d'Ellezelles comprend lés communes suivantes avec leurs dépendances, savoir : Ellezelles, Flobeck, Lahamaide et We-deck.
Le canton d'Enghien comprend les communes suivantes avec leurs dépendances, savoir : Bassily, Enghien, Hove, Marck, Petit-Enghien, Pierre-Chapelle, Quenast et Stéen-kerck.
Le canton d'Ellignies-Sainte-Anne comprend les communes suivantes, avec leurs dépendances, savoir : Aubechic, Bazecle, Blic-qui, Ellignies-Sainte-Anne, Ramegnies, Thu-maide, Tourpe et Wadlancourt.
Le canton de Forêt comprend les communes suivantes avec leurs dépendances, savoir : Auvaing, Arcq, Beccler, Forêt, Acquegnies, Herquegis, Montreuil, Popuelle, Quartel, Timongnies et Yelaine.
Le canton de Hal comprend les commu-munes suivantes avec leurs dépendances, savoir : Buissenal, Eligni, Franne, Hautin, Main-vaut, Moustier, Œdeghien-Saint-Sauveur.
Le canton de Haal - comprend les communes suivantes avec leurs dépendances, savoir : Bellinghem, Bierges, Braine-le-Châ-teau, Hal, Haut-Ihes, Lembeck, Pépinghem et Sainte-Renalde. .
Le canton d'Hérinne comprend les communes suivantes avec leurs dépendances, savoir : Castre, Haute-Croix, Helvelde, Herfe-linghe, Herinne, Œctinghe, Tollembeck et Wollezelle.
La canton de Lessines comprend les communes suivantes et leurs dépendances, savoir : Bois-de-Lessines, Ghoy, LèssinegÇ Ogy, Ollignies, Ostiche, Papigni et Wannebecq.
Le canton de Lenze comprend les communes suivantes avec leurs dépendances, savoir : Barry, Chapelle-à-Oyes, Chapelle-à-Wattines, Gadolle, Gramelz, Leuze, Maulde, Pipay, Thieulaing et Villempui.
Le canton de Silly comprend les communes suivantes avec leurs dépendances, savoir : Foullongx Ghilenghien, Gibecq, Gondregnies,
Hellebecq, Isière, Lombise, Silly et Toricourt.
Le canton de Viane comprend les communes suivantes avec leurs dépendances, savoir : Acrène-Saint-Gérion, Acrène-Saint Màrtin, Bivenne, Gamerage et Viane.
Art. 8. Le district de Binche est divisé en douze cantons, dont les chefs-lieux sont Beaumont, Binche, Braine-le-Comte, Car-nières, Chimay, Estine-HaUte, Fontaine-l'E-vêque, Rance, Rœulx, Soignies, Solre-sur-Sambre et Saint-Vaast.
Le canton de Beaumont comprend les communes suivantes et leurs dépendances, savoir : Beaumont, Chaudeville, Grandrieux, Leugniel Leval-sous-Beaumont, Solre-Saint-Gery et Tirimon.
Le canton de Binche comprend les communes suivantes avec leurs dépendances, savoir : Binche, Burène, Epinoy, Ressey-la-Haute et Vendrai.
Le canton de Braine-le-Comte comprend les communes suivantes avec leurs dépendances, savoir : Braine-le-Comte, Ecossine-Lallain, Ecossine-d'Enghien, Fey-Lui et Hen-ripont. J_
Le canton de Carnières comprend les communes suivantes avec leurs dépendances, savoir : Carnières, Levai, Lollive, Marimon, Mont-Sainte-Aldegonde, et Morlenwelz.
Le canton de Chimay comprend lès communes suivantes,, avec leurs dépendances, savoir : Bailieux, Bailièvre, Beauwelz, Bouton-ville, Bourlers, Chimay, Forges, Imberchies, Lompré, Mâcon, Monceau, Mommegies, Ro-bechies, Salles, Seloigne, Saint-Rémi, Vil-lers-la-Tour, Yirelles et Vaux.
Le canton d'Estine-Haute comprend les communes suivantes avec leurs dépendances, savoir : Croix, Estine-Basse, Estine-Haute, Foreux, Hollechin, Rouvroy, Veillezelle-le-Brieux et Veillezelle-le-Sec.
Le canton de Fontainè-l'Evêque comprend les communes suivantes avec leurs dépendances, savoir : Anderlu, Gourcelle, Fontaine - l'Evêque, Forchie - la- Marche, Mont -Sainte-Geneyiève et Piéton.
Le canton de Rance comprend les communes suivantes et leurs dépendances, savoir : Froid-Chapelle, Montbliard, Rance, Sautin et Siney.
Le canton de Rœulx comprend les communes . suivantes et leurs dépendances, savoir : Bois-d'Aine, Gœgnies, Gollignie, Hou-dau, Meygnaud et Rœulx.
Le canton de Soignites comprend les communes suivantes avec leurs dépendances, savoir : Chaussée-Notre-Dame, Haut-Ru, Mar-che-Ies-Eccussines, Nast, Neufville et Soignies.
Le canton de Solre-sur-Sambre comprend les communes, suivantes avec leurs dépendances, savoir : Bercillies, Bienne-le-Hapart, Erqueline, Grand-Reud, Gouy-la-Buisière, Solre-sur-Sambre, Merbe-le-Château, Merbe-Sainte - Marie, Montigni - Saint - Christophe, Piéchant et Sarre-la-Bussière.
Le canton de Saint-Vaast comprend les communes suivantes avec leurs dépendances, savoir : Boussoir, Bray, Haine-Saint-Paul, Haine-saint-Pierre, Péronne, Sterpy, Saint-Vaast, Thieux, Trivière et Ville-sur-Aine.
Art. 9. Le district de Mons est divisé en onze cantons, dont les chefs-lieux sont Cas-
teaux, Douze, Harvant, Jemmapes, Lens, Mons, Paturage, Perruwez, Quièvrain, Sireau et Thulin.
Le canton de Casteaux comprend les communes suivantes avec leurs dépendances, savoir ; Casteaux, Saint-Denis et Thiensis.
Le canton de Douze comprend les communes suivantes avec leurs dépendances, savoir : Atis, Blangis, Douze, Elouge, Warqui-gnies, Wiheries.
Le canton de Harvant comprend les communes suivantes avec leurs dépendances, savoir : Asquillie, Bougnies, Givry, Harmenies, Havay, Harvant,. Nouvelle, Spiennes et Vil-lers- S aint-Guislain.
Le canton de Jemmapes comprend les communes suivantes avec leurs dépendances;, savoir : Jemmapes, Ghlin, Hornu, Quarignon, Saint-Guillain et Walmœle.
Le canton de Lens comprend les communes suivantes avec leurs dépendances; savoir : Er-baut, Erbiseuil, Herchies, Jurbise, Lens, Lou-vigni, Montigni-les-Lens, TManni-Saint-Jean et Manni-Saint-Pierre.
Le canton de Mons comprend les communes suivantes avec leurs dépendances; savoir, Cuomnes, Gillage, Havre, Hion, Mézière, Melvin, Mons, Nimy, Aubourg et Saint-Sim-phorien.
Le canton de Paturage comprend les communes suivantes, avec leurs dépendances; savoir : Cipli, Framai, Genly, Nouarchin, Paturage et Wames.
Le canton de Peruwez comprend les communes suivantes avec leurs dépendances ; savoir : Beaugniss, Bernissard, Blaton, Bonse-cours, Braffe, Briffeuil, Bary, Harchies, Peruwez, Queraucamp et Roucon.
Le canton de Quièvrain comprend les communes suivantes, avec leurs dépendances; savoir : Angreau, Audergnies, Angre, Autrepe, Bezieux, Montigni-Sur-Roc, Morchipont, Mo-rin, Onnezi, Quièvrain, Rampernont et Roisin.
Le canton de Sireau comprend les communes suivantes, avec leurs dépendances; savoir : Rutrage, Baudoure, Estambruge, Neuf-Maison, Sireau et Villerot.
Le canton de Thulin comprend les communes suivantes, avec leurs dépendances; savoir : Boussu, Hainen, Hennesies, Mon-treuil, Pommereuil, Thulin et Ville.
TITRE SECOND.
Moyens d'organiser le département de Jemmapes.
« Art. 1er. Pour procéder à l'organisation du
département de Jemmapes, tous les citoyens domiciliés âgés de 21 ans, et
qui ne sont pas en état de domesticité, se réuniront en assemblées
primaires dans les chefs-lieux de leurs cantons respectifs.
« Il n'y aura qu'une assemblée primaire par canton, sauf que les citoyens des villes dAth, Binche, Chimay et Mons formeront des assemblées particulières et indépendantes des assemblées que tiendont dans ces villes les citoyens des cantons dont elles sont chefs-lieux.
« 2. Les assemblées primaires des citoyens des villes d'Ath, Binche et Mons se tiendront, le 8 avril prochain, aux lieux et heures qui seront indiqués par les commissaires nationaux du pouvoir exécutif provisoire.
« 3. Les mêmes commissaires indiqueront les lieux jours et heures des autres assemblées primaires.
« A l'ouverture de chaque assemblée primaire, le doyen d'âge fera les fonctions de président, et l'Assemblée nommera par acclamation un secrétaire provisoire.
« 5. Chaque citoyen s'avancera ensuite au bureau, et prêtera entre les mains du doyen d'âge le serment de maintenir la liberté et l'égalité, et de mourir en les défendant.
« 6. On procédera- ensuite, par la voie du scrutin, et à la pluralité relative des suffrages, à la nomination d'un président, d'un secrétaire et de 3 scrutateurs.
« 7. Ces nominations faites, il sera procédé à celle des électeurs, au nombre qui va être déterminé.
« 8. La ville d'Ath aura 7 électeurs; le canton d'Ath 15; le canton de Chièvres, 12; le canton de Celle, 12; le canton d'Ellezelles, 10; le canton d'Enghien, 14; le canton d'Ellignies-Saint-Anne, 8; le canton de Franne, 10; le canton de Hal, 10; le canton d'Herrine, 12; le canton de Lessine, 12; le canton de Leuze, 12; le canton de Silly, 10; le canton de Viane, 10.
( 9. La ville de Binche aura 7 électeurs; le canton de Binche, 14;- le canton de Beau-mont, 8; le canton de Braine-le-Comte, 12; le canton de Carnières, 8; la ville de Chimay, 6; le canton de Chimay, 10; le canton d'Estine-Haute, 8; le canton de Fontaine-l'Evêque, 10; le canton de Soignies, 12; le canton de Rance, 8; le canton de Rœulx, 8; le nanton de Sobre-sur-Sambre, 8; le canton de feaint-Vaast, 10.
(( 10. La ville de Mons aura 20 électeurs; le canton de Mons, 12; le canton de Casteaux, 8; le canton de Douze, 12; le canton de Harvant, 8; le canton de Jemmapes, 10; le canton de Lens, 10; le canton de Paturage, 12; le canton de Perruwez, 12; le canton de Quièvrain, 10; le canton de Sireau, 10; le canton de Thulin, 10.
« 11. Les électeurs ne pourront être choisis que parmi les citoyens du canton qui ont droit de voter, d'après les conditions requises par l'article 1er du présent titre.
« 12. Les nominations se feront par des scrutins de listes. Chaque liste comprendra 5 noms. Les cinq citoyens qui, d'après le recensement de toutes les listes, auront réunis le plus de suffrages, seront proclamés électeurs; on procédera ensuite à un autre scrutin sur le même nombre de citoyens, s'il en reste encore 5 ou plus à nommer; et sur un moindre nombre, s'il n'en reste plus autant.
« 13. Il sera remis à chaque électeur un extrait du procès-verbal de sa nomination.
« 14. Tous les électeurs du département de Jèmmapes, qui auront été nommés ainsi qu'il vient d'être dit, se réuniront en l'église de Sainte-Waudru à Mons, le 15 avril prochain.
« 15. La séance sera ouverte à 9 heures précises du matin. Le doyen d'âge prendra le fauteuil, et il sera nommé par acclamation un secrétaire provisoire.
« 16. Chaque électeur s'avancera ensuite au bureau, et y prêtera entre les mains du doyen d'âge le serment de maintenir la liberté et l'égalité et de mourir en les défendant.
« 17. On procédera ensuite, par la voie du scrutin, et à la pluralité relative des suffrages, à la nomination d'un président, d'un secrétaire et de trois scrutateurs.
« 18. Ces nominations faites, il sera nommé par scrutin individuel, et à la majorité absolue des suffrages, 10 députés à la Convention nationale, qui se rendront à Paris aussitôt après leur nomination.
«19. Les électeurs nommeront ensuite à la majorité absolue des suffrages : 1° le procureur général syndic; 2° 8 administrateurs pour former le directoire; 3° 28 administrateurs pour former le conseil général du département; 4° le président du tribunal criminel ; 5° l'accusateur public; 6° le greffier du même tribunal.
20. Les membres du directoire et après eux les membres du conseil général du département, seront nommés par scrutin de liste. Les autres fonctionnaires mentionnés dans l'article précédent le seront par scrutin individuel.
« 21. Les nominations ci-dessus faites, l'assemblée électorale sera dissoute de plein droit, et le troisième jour au plus tard après sa clôture, les électeurs de chaque district se réuniront dans la ville qui en est le chef-lieu, pour y élire dans la forme déterminée par les 6 articles précédents : 1° un procureur-syndic ; 2° 4 administrateurs pour former le directoire; 3° 8 administrateurs pour former le conseil général du district; 4° 5 juges, un commissaire national et un greffier pour former le tribunal; 5° 4 suppléants des juges; 6° des directeurs des postes pour tous les bureaux du district.
« 22. Dans toutes les élections ci-dessus énoncées, où la majorité absolue des suffrages est requise, il ne pourra être fait que deux tours de scrutin. En conséquence, quand il s'agira d'une élection au scrutin individuel et que le premier tour de scrutin n'aura pas produit la majorité absolue, le second tour n'aura lieu qu'entre les deux candidats qui auront obtenu le plus de voix; et s'il s'agit d'une élection par scrutin de liste, et qu'il faille aller à un second tour de scrutin, la pluralité relative, produite par ce second tour de scrutin, terminera l'élection. Dans l'un et l'autre de ces cas, s'il y a égalité de suffrages au second tour de scrutin, le plus âgé obtiendra la préférence.
« 23. Il sera remis aux commissaires de la Convention nationale deux doubles du procès-verbal de l'assemblée électorale du département et des procès-verbaux des assemblées électorales du district, pour l'un être par eux envoyé aux archives de la République, et l'autre demeurer entre les mains.
« Fait à Bruxelles, le 20 mars 1793, l'an II de la République.
« Signé : Camus, Delacroix, Gossuin, Treilhard, Robert, Merlin (de Douai). »
On doit ranger parmi les dispositions conséquentes aux décrets de réunion, l'arrêté qui a été pris pour faire avancer à l'administration provisoire du département de Jemmapes une somme de 100,000 livres. Voici dans quels termes il a été rendu compte à la Convention nationale, par une lettre du 9 mars, datée de Bruxelles :
N° 4.
« Les administrateurs provisoires de la ville de Mons et du Hainaut se sont présentés hier devant nous, pour demander, conformément aux promesses que la Convention a faites aux peuples réunis à la France, et qui, soit par le défaut de perception des impôts anéantis, soit par d'autres circonstances extraordinaires, auraient besoin de secours, de les aider, que la République voulût bien leur faire le prêt d'un million en assignats, et de 100,000 livres en numéraire. Nous avons pensé pouvoir autoriser le payeur de la guerre à faire une avance aux Montois, à titre de prêt, de 100,000 livres en assignats et de 10,000 livres en numéraire, si l'état de sa caisse le lui permettait. Il a fait cétte avance. Nous vous envoyons notre arrêté, et nous vous prions de décider si le surplus de l'emprunt demandé par les Montois leur sera fourni.
« Signé : Camus, Treilhard. »
Au nom de la République française.
« Les députés de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique et de Liège, vu l'arrêté pris dans l'assemblée générale des administrateurs provisoires de la ville libre de Mons, joints à eux les notables des bonnes villes du Hainaut et commissaires du pouvoir exécutif de la République française, réunis, ledit arrêté en date du 7 de ce mois;
« Requièrent le citoyen Géhennot, payeur général de l'armée, de faire, si la nécessité de son service n'y met pas obstacle, une avance de 100,000 livres en assignats et de 10,000 livres en numéraire. « Fait à Bruxelles, le vendredi 8 mars 1793, l'an II de la République. « Signé : Camus, Treilhard. »
troisième partie.
Exécution des lois relatives aux biens meubles et immeubles appartenant à la République française dans la Belgique et le pays de Liège.
| Les biens que la République française possédait dans la Belgique et le pays de Liège, ! lorsque les commissaires de Ta Convention nationale y sont arrivés, étaient de deux sortes.
Les .uns provenaient des communautés, établissements publics et bénéfices supprimés, dont | le chef-lieu existait en France; ils feront la ! matière du premier article de cette partie de | notre rapport.
| Les autres provenaient des émigrés, et à cet égard, nous avons pris des mesures qui se rapportent à trois objets différents, savoir :
Les immeubles, les meubles, les jugements rendus sur les uns et les autres, par des tribu-j naux belges.
Art. 1er.
i Biens provenant des communautés, établissements publics et bénéfices supprimés en | France.
Nous avons rappelé dans l'article 3 de la J seconde partie de ce rapport, plusieurs arrê-
tés qui renferment des dispositions relatives à ces objets. Il ne nous reste plus d'après cela, qu'à rendre compte d'une lettre que nous avons adressée le 25 janvier aux directoires des départements du Nord, du Pas-de-Calais, de la Somme, de l'Aisne et des Ardennes.
Bruxelles, le
« Citoyens,
« D'après la loi du 5 novembre 1790, la République française doit jouir des biens que possédaient ci-devant dans la Belgique les communautés, établissements publics et bénéfices supprimés, dont le chef-lieu existait en France; et les obstacles mis à l'exécution de cette loi par ordre de l'empereur Joseph II, du 14 septembre 1791, sont heureusement levés par les succès de nos armes.
« Mais il s'agit de connaître ces biens; et pour y parvenir, nous avons spécialement besoin des états que les ci-devant administrateurs et titulaires des établissements et bénéfices supprimés de France ont fournis au gouvernement de Bruxelles, en exécution d'un édit de l'empereur, de 1787. Les originaux de ces états, qui auraient dû se trouver ici, paraissent avoir été soustraits; du moins on n'a encore pu en découvrir le dépôt. Mais les communautés établissements publics et bénéfices de France ont dû, dans le temps, en garder des doubles, et nous sommes assurés que plusieurs les ont gardés effectivement. Nous vous requérons, en conséquence, de prendre à l'instant toutes les mesures nécessaires pour en faire faire la recherche la plus exacte dans tous les dépôts actuels des titres et papiers des communautés, établissements publics et bénéfices de votre département. Yous voudrez bien nous en adresser des copies dûment certifiées. Nous comptons pour cet objet, comme pour tous ceux qui intéressent la République, sur votre patriotisme et sur le zèle qu'il vous inspire.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
Art. 2.
Immeubles des émigrés, situés dans la Belgique.
Indépendamment des dispositions communes à ces biens et à d'autres dont il a été question dans l'article 3 de la seconde partie, il a été pris sur les immeubles des émigrés deux arrêtés importants.
N° 1.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique et de Liège, délibérant sur la dénonciation qui leur a été faite par les commissaires, 1 que le conseil exécutif provisoire a envoyés dans le Tournaisis, et dont la dépêche leur a été apportée aujourd'hui par une ordonnance; ladite dénonciation portant, « qu'une commission et un notaire autorisés par le citoven Sta, procureur syndic du district de Lille, se sont avisés de rendre dans le Tournais des biens-fonds appartenant aux
émigrés, et que les acquéreurs ont délivré quelques deniers qui ont été employés au service de la République » (1).
« Considérant que par différents décrets de la Convention nationale, et notamment par celui du...... dernier, la vente des biens immeubles des émigrés a été suspendue, déclarent nul et de nul effet celle des biens-fonds des émigrés, dénoncée, et toute autre qui pourrait avoir eu lieu; font défense aux corps administratifs d'en ordonner de pareilles, aux procureurs syndics de les requérir, et à tout officier public ou tout autre citoyen délégué d'y procéder; enjoignent aux commissaires du conseil exécutif provisoire de s'y opposer, de faire usage de tous les moyens que la loi met en leur pouvoir pour les arrêter, et de faire notifier la présente délibération, tant au directoire du district de Lille, qu'à l'acquéreur desdits biens.
« Fait à Bruxelles, le 10 février 1793, l'an II de la République.
a Signé : Camus, Delacroix, Danton. » N° 2.
« Au nom de la République française.
« Yu le mémoire présenté par le citoyen Minet de Louverval, prétendant-droits sur plusieurs terres possédées par Anne-Louis-Alexandre de Montmorenci-Robecq et Ano-nine de Montmorenci-Morbecq, frères, Français émigrés, tant dans le pays de Namur, que dans le Brabant; copie de l'arrêté du 26 février dernier, qui a nommé un séquestre pour les susdites terres situées dans le Namurois, et autres copies de pièces jointes au mémoire;
( Les députés commissaires de la Convention près l'armée et dans les pays de la Belgique de Liège ;
« Considérant que la légitimité et l'étendue des droits prétendus par le citoyen Minet ne peuvent être connus que par la liquidation qui en sera faite dans le mode prescrit pour la liquidation de toutes les créances et droits prétendus sur les émigrés;
« Considérant d'un autre côté que la nécessité de la liquidation ne doit en aucune manière, et sous aucun prétexte, arrêter la mainmise de la nation sur les meubles, biens et immeubles appartenant aux émigrés;
« Arrêtent :
( 1° Que les commissaires du Conseil exécutif feront mettre sous les scellés tous les titres, papiers et renseignements relatifs aux terres, tant du Namurois, que du Brabant qui ont appartenu aux susdits Montmorenci-Robecq et Morbecq, à l'exception toutefois des baux et autres pièces qui pourraient être nécessaires pour la perception journalière des fruits et revenus desdites terres, lesquels seront remis, après inventaire et sous récépissé, au receveur dont il sera parlé ci-après ;
« 2° Les commissaires du conseil exécutif nommeront un ou plusieurs receveurs entre les mains desquels tous fermiers et régisseurs desdites terres verseront les fermages et som-
mes échus des beaux ou régies, conformément | à l'arrêté du 8 février dernier.
c Fait à Bruxelles, le 18 mars 1793, l'an II ! de la République.
Signé : Camus,. Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
Art. 3.
Meubles des émigrés, trouvés dans la Belgique et le pays de, Liège.
L'article 14 de la première partie et l'article 3 de la seconde partie présentent des dispositions que nous avons faites relativement à ces meubles. Yoici les autres, par ordre de date :
N°l.
Au nom de la République française.
« Sur le compte qui nous a été rendu de la vente que le citoyen Cotel, commissaire au recouvrement de® biens des émigrés français dans l'arrondissement d'Ypres, s'est ingéré de faire d'une voiture appartenant à la République française, sans aucune des formalités prescrites par la loi, considérant qu'un procédé aussi illégal peut ouvrir la porte aux plus grands abus, et que le fonctionnaire qui se l'est permis ne mérite plus la confiance de la nation;
« Nous commissaires de la Convention nationale de France, députés-dans la Belgique, le pays de Liège, etc., usant des pouvoirs à nous attribués par le décret du 29 décembre 1792, déclarons, après avoir délibéré en commun, que le citoyen Cotel est suspendu de ses fonctions de commissaire au recouvrement des biens des émigrés français; requérons le général Omoran, commandant dans l'arrondissement d'Ypres, de lui faire notifier le présent arrêté, et de tenir la main à ce qu'il soit remplacé sans aucun délai, ni intervalle.
« Ainsi fait et arrêté à Bruxelles, le 8 février, l'an II de la République.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
N° 2.
Du
(( Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, délibérant sur le compte qui leur a été rendu par le commissaire des guerres, Chartrey, de la perception qu'il a faite de plusieurs fermages, et du prix du mobilier appartenant à des émigrés, arrêtent :
« 1° Que ledit commissaire des guerres continuera sans interruption lesdites perceptions et ventes, notamment la vente des objets susceptibles de dépérir ou d'être facilement consommés;
( 2° Que, dans le délai de deux jours, il remettra à Lemonnier, contrôleur général des dépenses de l'armée, la totalité des deniers
qu'il a entre les mains, provenant desdites perceptions et ventes, et qu'à l'avenir il remettra, le lundi de chaque semaine'audit Lemonnier, le montant de la totalité de ce qu'il aura perçu dans la semaine précédente, à peine par lui d'être personnellement responsable des sommes qu'il aurait perçues ou dû percevoir, et qui ne seraient pas comprises dans ses remises;
( 3° Dans le jour des remises que ledit Chartrey fera, il en remettra aux commissaires de la Convention nationale un état visé par Lemonnier, à l'effet d'assurer le montant et la réalité desdites remises.
« 4° Il sera délivré, dans le jour, une expédition du présent arrêté à chacun des citoyens Lemonnier et Chartrey qui en donneront leur récépissé.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
N° 3.
Bruxelles, le
« Les commissaires de la Convention nationale, etc., au citoyen Harville, lieutenant général au quartier général à Namur.
« Nous avons reçu avec votre lettre du 4 de ce mois celle qui était jointe, datée de Dus-seldorf, et suscrite : Varchevêque de Reims ; comme nous ne connaissons en France aucun établissement qui porte le titre d'archevêché, ni aucun individu revêtu de celui d'archevêque, nous pensons que cette lettre ne doit point arrêter les opérations que vous avez commencées en vertu du décret du 15 décembre, et nous vous requérons d'y procéder sans discon-tinuation.
N°4.
Bruxelles, le
« Les commissaires de la Convention nationale de France près Varmée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc., au commissaire-ordonnateur Lambert, à Liège.
« On nous assure, citoyen, que la vente des effets des émigrés français n'est pas encore commencée à Liège; nous ne croyons pas à un pareil retard, qui serait inexcusable; et comme cet objet mérite particulièrement votre surveillance, ne différez pas à vous en faire rendre compte, et à nous en instruire. Nous vous recommandons, dans tous les cas, de presser cette vente, en suivant les formes prescrites.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai). »
N° 5.
« Au nom de la République française.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc., informés par la correspondance des commissaires ordonnateurs, que le service des armées et des cours martiales souffrent considérablement du petit
nombre des commissaires des guerres, et que ' les inconvénients résultant de cette pénurie sont encore augmentés par l'emploi de plusieurs desdits commissaires des guerres a la vente des meubles des émigrés, du fisc, etc., et au séquestre des biens mis sous la sauvegarde de la République française, par l'article 4 du décret des 15, 17 et 22 décembre 1792; et considérant qu'il est de la plus grande urgence d'y pourvoir, dans un moment ou les armées entrent en campagne^ arrêtent ce qui suit :
« Art. 1er. A compter du jour de la notificar
tion qui leur sera faite du pouvoir exécutif, les commissaires des
guerres cesseront toutes fonctions relatives, tant à la vente qu'au
séquestre ci-dessus mentionnés.
« Art. 2. Les commissaires nationaux du pouvoir exécutif nommeront, dans leurs arrondissements respectifs, des commissaires civils dont ils garantiront la probité et la capacité pour remplacer sur-le-champ les commissaires des guerres dans les fonctions ci-dessus. Auquel effet les commissaires nationaux sont autorisés à requérir les commandants temporaires de leur donner toute aide et assistance, même de leur procurer au besoin dans les garnisons, des hommes en état de remplir lesdites fonctions.
« Art. 3. Dans les trois jours qui suivront leur remplacement, lesdits commissaires des guerres rendront leurs comptes de recettes et dépenses aux commissaires nationaux du pouvoir exécutif, et leur remettront sous inventaire tous les registres, titres, papiers et documents qu'ils auront en mains, relativement aux ventes et séquestres dont il s'agit.
« Art. 4. Les commissaires nationaux du pouvoir exécutif feront parvenir dans les trois jours suivants, aux commissaires de la Convention nationale, le relevé exact des comptes qu'ils auront reçus et arrêtés, ainsi que des registres, titres et pièces à eux remis, et les noms des commissaires des guerres qui pourraient se trouver en retard.
« Fait à Bruxelles, le 21 février 1793, l'an II de la République française.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Vouai). »
N° 6.
« Au nom de la République française.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc., sur la représentation à eux faite par les commissaires nationaux du pouvoir exécutif, que la ville de Bruxelles formant le point central des ventes à faire des effets provenant des émigrés, du fisc autrichien, etc., il faut, pour y suivre toutes les opérations relatives à ces ventes, une connaissance particulière et approfondie des localités, et que le commissaire des guerres Chartrey, ayant acquis cette connaissance par un travail très assidu, il importe à la fortune publique de le maintenir dans les fonctions à lui confiées en cette partie ;
« Arrêtent que leur arrêté d'hier, concernant les ventes dont s'agit, ne sera pas exécuté à l'égard du commissaire des guerres Chartrey,
lequel continuera ses fonctions comme avant ledit arrêté.
Fait à Bruxelles, le
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai). » N° 7.
Gand, le 22 février 1793, l'an II de la République française.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près Varmée, etc., à leurs collègues composant les comités diplomatique et de défense générale réunis.
« Les opérations relatives, soit aux biens des émigrés, soit aux biens nationaux, sont en bon train dans le Hainaut. A Tournay, une assez grande partie du mobilier des émigrés a été vendue par les soins du citoyen Sta, procureur syndic du département du Nord, qui nous a déclaré avoir eu à cet effet, dés l'entrée des troupes de la République dans le pays, des ordres des généraux. Il faut qu'il justifie de ces ordres, et qu'il rende compte du prix des -ventes; il a promis de porter son compte la semaine prochaine à Bruxelles (1). Ailleurs il a été découvert peu de mobiliers appartenant à des émigrés français (2).
« Signé : Camus, Treilhard. » N° 8.
Bruxelles, le
« Les commissaires de la Convention, etc., au citoyen Foucault, adjoint à Vétat-major de l'armée des Ardennes, contrôleur général de la vente des meubles des émigrés dans la Belgique.
« Nous sommes informés, citoyen, que la vente des meubles des émigrés n'est pas encore commencée à Anvers ni dans ses dépendances. Yous voudrez bien vous y rendre incessamment pour vous concerter avec les commissaires nationaux du pouvoir exécutif dans cet arrondissement, sur les moyens de mettre tout de suite en mouvement cette vente et celle des effets provenant du fisc autrichien, ainsi que des fauteurs, adhérents et satellites volontaires de l'ancien gouvernement.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai). » N° 9.
Du
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc. « Considérant que les motifs qui les ont dé-
terminés à retirer aux commissaires des guerres la suite des opérations relatives à la vente des biens des émigrés, sont susceptibles d'exception à l'égard de ceux de ces commissaires des guerres quiA ayant été chargés en chef de les établir et de les surveiller ne pourraient pas les abandonner subitement, sans qu'il en résultât quelque préjudice pour la chose publique;
(t Arrêtent que le commissaire des guerres Raphaël Leroi, chargé dès le principe, par le commissaire-ordonnateur Ronsin, d'établir et de surveiller les établissements faits à Mons et dans diverses partie de la Belgique pour la saisie et vente des biens des émigrési continuera à suivre les opérations dont il est personnellement chargé jusqu'à ce qu'elles soient terminées; qu'à l'égard de toutes les opérations nouvelles qui se présenteraient à faire, il les remettra entre les mains des commissaires nationaux du conseil exécutif, et qu'il sera averti de terminer le plus tôt possible celles dont il demeure chargé, afin de pouvoir se livrer en entier aux fonctions ordinaires de sa place de commissaire des guerres. ( Fait à Bruxelles, les jour et an que dessus.
(( Signé : Delacroix, Camus, Gossuin, Merlin (de Douai). »
N° 10.
(( Questions proposées aux commissaires de la Convention nationale, par le citoyen Raphaël Leroi, commissaire des guerres, contrôleur ambulant, chef du bureau de Mons.
« D. Les biens des émigrés déjà saisis pour dettes avant d'être séquestrés au profit de la République, cessent-ils de servir à l'indemnité ordonnée par la loi 1
« R. Les biens des émigrés saisis par leurs créanciers avant le séquestre mis au nom de la République, ne cessent pas d'être affectés à l'indemnité ordonnée par la loi; mais cette indemnité ne porte que sur ce qui reste, les droits des créanciers légitimes acquittés.
( D. Une autorité judiciaire peut-elle ordonner la remise de la vente desdits biens, lorsqu'ils sont séquestrés au profit de la République, et déjà rendus en son nom par le chef du bureau du séquestre, quoique antérieurement saisis par lesdits créanciers, le chef dudit bureau se conformant à la loi relative aux créances 1
(( R. Les juges ne peuvent faire remettre à un dépôt par eux indiqué le prix des objets vendus au nom de la République; ce prix doit être remis entre les mains des payeurs des guerres; mais réciproquement aussi les agents de la République ne peuvent tirer des greffes de consignation et autres dépôts semblables le prix des objets Vendus par autorité de justice; ils doivent se contenter de former des oppositions pour qu'on ne distribue ce prix qu'en leur présence.^ à l'effet de s'assurer que ce qui restera, les créanciers payés, sera versé dans les caisses de la République pour son indemnité.
« D. Les biens des émigrés belges, autrichiens et autres, qui ont porté et portent les armes contre la République, sont-ils compris
dans la classe des émigrés français et doivent-ils être vendus de suite 1
« R. Les poursuites sur les biens des émigrés belges doivent être faites non à ce titre d'émigrés, mais comme fauteurs et adhérents des anciens despotes. On doit vendre leur mobilier, parce qu'il dépérirait, et en verser le prix dans les caisses de la République qui en tiendra compte par la suite à la nation belge.
(( D. Les commissaires nationaux du pouvoir exécutif nommés pour l'exécution de la loi du 15 décembre, peuvent-ils, pour les besoins de l'armée, tirer des ordonnances sur la caisse formée du produit de la vente des biens des émigrés ?
(( R. Les commissaires nationaux ne peuvent, pour les besoins de l'armée, ni pour aucun autre prétexte, donner aucune ordonnance sur le prix de la vente des biens des émigrés. C'est à tort, au surplus, qu'on parle d'une caisse formée du produit de la vente des biens des émigrés; il ne doit pas en exister, puisque aux termes du décret du 26 janvier, le total du produit de ces ventes doit être versé sans délai entre les mains du payeur de la guerre.
(( D. Les commissaires nationaux peuvent-ils s'immiscer dans les opérations relatives au séquestre des émigrés ?
« R. Les commissaires des guerres ayant un service très actif en ce moment pour la guerre, les commissaires de la Convention ont, en général, saisi de la suite des opérations concernant les biens des émigrés, les commissaires nationaux du pouvoir exécutif. Ils ont fait une exception à l'égard du commandant Chartrey, à Bruxelles, et ils en font une à l'égard du commissaire Raphaël Leroi, qui ayant saisi ces opérations en chef dès le principe, sont plus en état de les suivre; mais ils ne doivent eux-mêmes se charger d'aucune opération nouvelle à cet égard, terminer seulement celles qu'ils ont commencées, et se décharger des autres sur les commissaires nationaux, afin de retourner le plus tôt possible à leurs fonctions propres de commissaires des guerres.
« A Bruxelles, le 27 février 1793, l'an II de la République française.
(( Signé : Camus, Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
11.
(( Au nom de la République française.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires, etc., informés que le citoyen Sachmann, employé par le commissaire des guerres Chartrey, au recouvrement des biens et effets des émigrés, est depuis plusieurs jours détenu sans cause légitime, à la requête de sa femme;
« Arrêtent que ledit citoyen Sachmann sera mis, sur-le-champ, en liberté, pour continuer ses fonctions; et chargent les commissaires nationaux 3u pouvoir exécutif, de leur rendre compte, dans le jour, de l'exécution du présent arrêté.
Fait à Bruxelles, le 27 février, l'an II de la République française.
(( Signé : Camus, Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
Art. 4.
Jugements rendus par les tribunaux belges sur les biens des émigrés français.
Trois jugements émanés de prétendus tribunaux belges nous ont été dénoncés comme violant les principes et contraires aux droits de la République française sur les biens des émigrés. Yoici les arrêtés qui ont été pris en conséquence :
N 1.
Du 27 février, l'an II de la République française.
« Les membres de la Convention nationale, etc.
(( Yu le mémoire remis le 19 de ce mois, par le citoyen Sta, commissaire chargé du recouvrement du prix de la vente du mobilier des émigrés dans Tournay et le Tournaisis, et les pièces jointes audits mémoires;
« Arrêtent que l'ordonnance de la prétendue commission de justice se disant séante à Tournay, en date du 25 janvier dernier, est nulle, comme émanée d'un tribunal dont l'existence est contraire aux dispositions du décret du 15 décembre; font défenses au commissaire chargé du recouvrement des biens des émigrés, au notaire Hiéfry et à tous autres d'y avoir égard, et de reconnaître les actes émanés de la prétendue commission de justice, sauf aux parties qui prétendent avoir quelques droits à exercer sur les objets vendus, ou sur leur prix, à se pourvoir par-devant l'Administration du département du Pas-de-Calais, dans lequel le ci-devant comte de Bryas était domicilié.
« Signé : Camus, Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
N° 2.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près Varmée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc.
« Yu un jugement en date du 7 mars 1793, prononcé, selon que le porte le préambule, par le tribunal supérieur de justice du peuple souverain de Hainaut, à Vencontre du citoyen Raphaël Leroi, commissaire des guerres des armées françaises;
« Yu pareillement le décret de la Convention nationale, du 4 décembre 1792, portant que tous les deniers et objets mobiliers appartenant aux émigrés qui seront saisis en pays étrangers par les armées françaises, seront confisqués au profit de la République; autre décret du 30 octobre, portant, articles 2 et 3, que les scellés qui auraient été apposés sur les effets des émigrés à la requête de leurs créanciers, n'empêcheront pas les poursuites de la République, et qu'il sera seulement donné acte des oppositions ou réclamations, sans qu'elles puissent arrêter les opérations à faire au nom de la République; autre décret de la Convention nationale, en date du 15 décembre
1792, qui supprime toutes les autorités établies dans les pays occupés par les armées françaises, jusqu'à la formation des administrations, ordonnées par l'article 5 dudit décret;
« Déclarent nul et de nul effet, comme contraire aux dispositions desdits décrets, le jugement du prétendu tribunal supérieur du Hainaut; défendent à toutes personnes de le mettre à exécution, à peine d'être poursuivies comme désobéissantes et réfractaires auxdits décrets; requièrent le maréchal de camp Ferrand, commandant à Mons, de défendre, par tous les moyens qui sont en son pouvoir, le citoyen Raphaël Leroi, contre toute exécution qu'on voudrait donner audit jugement, et de réprimer, par les mêmes moyens, quiconque tenterait de le mettre à exécution.
« Fait à Bruxelles, le 10 mars, l'an II de la République.
« Signé : Camus, Treilhard. » N° 3.
Du
« Vu les procès-verbaux en date du 6 et 7 du présent mois de mars, contenant l'apposition des scellés faite par le citoyen Coulomb, nommé à cet effet par le citoyen Raphaël Leroi, commissaire des guerres, sur divers effets trouvés dans la maison du citoyen Jean-François Leclerque, demeurant à Mons, à la remise d'une partie desdits effets au citoyen Deque-nare; expédition d'un prétendu jugement prononcé le 15 du présent mois, sur la, demande du citoyen Leclerque, contre le citoyen Raphaël Leroi par le soi-disant tribunal supérieur de justice du département de Jemma>pes, après avoir entendu les citoyens Raphaël Leroi et Leclerque;
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc., déclarent Je prétendu jugement du soi-disant tribunal supérieur de justice du département de Jemmapes, contraire au décret du 15 décembre 1792; en conséquence déclarent nul, ainsi que tout ce qui a suivi ou pourrait suivre; requièrent le général Ferrand, commandant à Mons, de prendre tous les moyens nécessaires pour empêcher qu'il soit mis à exécution;
« Requièrent le citoyen Raphaël Leroi, de faire transporter, dans un lieu sûr, tous les effets compris dans le procès-verbal d'apposition de scellés du 6 de ce mois, à l'exception de ceux qui ont été remis suivant le procès-verbal du 7 : pour quoi le général Ferrand lui donnera, s'il est besoin, la force nécessaire; et après ledit transport, de remettre à qui il appartiendra, et sur la justification qui sera faite de la propriété, les effets qui seront réclamés par des personnes non émigrées, et non comprises en l'article 4 du décret du 15 décembre dernier, au nombre de celles dont les biens meubles et immeubles sont mis sous la sauvegarde nationale.
« Fait à Mons, les jour, mois, an que dessus.
« Signé : Camus, Gossuin, Merlin (de Douai); Treilhard.
quatrième partie.
Mesures de police et de sûreté.
Cette partie sera divisée en quatre articles qui comprendront :
1° Les mesures relatives au service des postes;
2° Les mesures relatives aux faux assignats; 3° Les mesures relatives aux émigrés et aux prêtres déportés; 4° Des dispositions diverses; 5° Les mesures relatives à la sûreté de la place de Lille.
Article 1er.
Mesures relatives au service des postes.
La poste aux chevaux sur les frontières nous a offert un abus que nous n'avons pas cru devoir réprimer nous-mêmes, parce qu'il citait pour auteurs, des citoyens français, établis hors de l'arrondissement de notre mission, mais sur lequel nous avons provoqué, par la lettre suivante, l'attention du ministre de l'intérieur, qui ne l'a pas fait cesser.
N° 1.
Bruxelles, le 11 février, l'an II de la République française.
« Les commissaires de la Convention nationale près l'armée de la Belgique, etc., au citoyen faisant les fonctions du ministre de l'intérieur.
« Citoyen ministre, le voyage que nous venons de faire pour suivre la mission que la Convention nationale nous a donnée, nous a découvert un abus dont nous devons vous avertir.
« Le maître de poste de Valenciennes qui conduit les voyageurs à Quiénain, première poste après celle de Valenciennes; et avancée d'environ une demi-lieue sur les terres de la Belgique, exige qu'on lui paye sa course en numéraire; il refuse les assignats. Ce fait est constaté par les déclarations ci-jointes, que l'un de nous s'est fait remettre lorsque, pour éviter une rixe de la part du postillon, il a consenti à payer un numéraire, sous la condition que le fait serait constaté.
« La conduite du maître de poste de Valenciennes nous paraît évidemment répréhen-sible; comment peut-on être chargé d'un emploi dans le sein de la République et refuser sa monnaie courante, c'est-à-dire les assignats, pour le prix des fonctions que l'on remplit? Nous ne pourrons pas nous plaindre de ce que les Belges et les Liégeois les rejettent, si les Français mêmes ne peuvent pas les accepter.
« Le postillon a allégué des règlements de 1762, qui disent que les maîtres de poste des frontières seront payés de la monnaie qui aura cours dans le pays, et d'avance. Mais, 1° il est clair que cette ordonnance, par ses dispositions, ne s'applique qu'à des étrangers, qu'on fait payer d'avance, et dont on reçoit la monnaie qu'ils connaissent. Le maître de poste tient si peu à cette ordonnance, qu'il reçoit
fort bien, comme vous le verrez par la déclaration ci-j ointe, des couronnes ou écus de six livres, qui sont une monnaie française; de sorte que ce n'est pas la monnaie française qui lui répugne, mais la monnaie assignat; 2° il est évident par la date de cette ordonnance qu'elle ne peut pas avoir statué sur la réception ou le rejet des assignats.
« Nous vous observerons, au surplus, citoyen ministre, que nous ne connaissons l'ordonnance que par l'extrait sommaire qui se trouve à la tête du livre des postes, et qu'en la supposant précise pour appuyer la prétention du maître des postes de Valenciennes, il faudrait la faire abroger, étant intolérable, encore une fois, qu'un Français puisse refuser, sous un prétexte quelconque, de recevoir son paiement en assignats.
« Il est possible que l'abus que nous avons découvert à Valenciennes ait lieu dans d'autres postes frontières; nous vous invitons à vous en faire instruire, et à le faire cesser partout où il soit établi.
« Signé : Camus1 Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai); Treilhard. »
Quant au service de la poste aux lettres, on a vu dans le rapport du 11 janvier que les commissaires de la Convention nationale, après avoir suspendu le directeur du bureau de Bruxelles, Lopers, l'avaient remplacé par le citoyen Lebrun, mais que celui-ci ayant refusé d'accepter, ils se proposaient d'en nommer incessamment un autre.
Depuis, ils ont effectivement nommés à cette place le citoyen Dagant.
Mais, dès le 20 du même mois, ce dernier a prévenu les commissaires de la Convention que le mauvais état de sa santé s'opposait à cr qu'il en remplît les fonctions. Voici ce qui a été fait en conséquence :
N° 2.
Gand, le 31 janvier, l'an II de lai République.
« Les commissaires de la Convention nationale dans la Belgique, au citoyen Dagant, directeur provisoire des postes à Bruxelles.
« Aussitôt que votre première lettre nous est parvenue, nous en avons instruit le citoyen Philippe, pour l'inviter à nous proposer les personnes qu'il jugerait en état de vous remplacer; nous avons en même temps pris le citoyen Lebrun, contrôleur des postes à Bruxelles, l'engagement de vous seconder et secourir pendant le temps de votre maladie, ainsi nous avons lieu d'être surpris de ce que vous nous marquez dans votre lettre du 30, que le service public est en souffrance : nous espérons de vos soins et de ceux du citoyen Lebrun, qu'il n'éprouvera aucun échec, au surplus, le citoyen Philippe nous a déjà répondu, et doit être dans ce moment à Bruxelles, où il prendra des mesures pour que les bureaux de la poste soient composés de manière à n'inspirer aucune inquiétude sur la sûreté et l'inviolabilité des lettres.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai);
Treilhard. »
N° 3.
Gand, le 31 janvier, l'an II de la République française.
Les commissaires de la Convention nationale dans la Belgique, aux citoyens commissaires nationaux du pouvoir exécutif, à Bruxelles.
« Le service du bureau des postes, à Bruxelles, avait été confié depuis le 20 janvier au citoyen Dagant, en qualité de directeur général provisoire, mais ce citoyen nous ayant écrit depuis qu'une maladie grave l'empêchait de donner à cette place importante les soins et l'attention qu'elle mérite, nous avons sur-le-champ engagé le citoyen Lebrun, contrôleur de la poste à Bruxelles, d'aider, autant qu'il lui serait possible, le citoyen Dagant dans ses fonctions, et nous avons en même temps écrit au citoyen Philippe, directeur général des postes de l'armée pour l'expédition de la Belgique, pour le prier de nous indiquer promptement des sujets parmi lesquels nous pourrions faire un choix pour remplacer le citoyen Dagant.
« Le citoyen Philippe, en nous faisant part de son embarras pour trouver des sujets, nous annonce cependant qu'il nous fera parvenir incessamment une listé", et même il nous fait espérer qu'il viendra à Bruxelles conférer avec nous sur cet objet.
« Comme il est d'une extrême importance que le bureau de Bruxelles soit promptement organisé, de manière à ne laisser aucun soupçon sur la régularité du service, nous vous invitons, citoyens commissaires, et nous vous requérons de conférer avec le citoyen Philippe, aussitôt après son arrivée, et de prendre ensuite toutes les mesures que votre sagesse vous suggérera pour que le service des postes de .Bruxelles n'éprouve aucune interruption.
« Dans tous les cas, que le citoyen Philippe vienne ou ne vienne pas à Bruxelles, il est nécessaire que vous fixiez votre attention sur l'état du bureau des postes de cette ville, et nous vous ferons parvenir la liste des sujets que proposera le citoyen Philippe, s'il ne vous l'a pas donnée directement.
« Comme nous finissions cette lettre nous en avons reçu une du citoyen Philippe, que nous vous envoyons; vous y verrez quels sont les sujets qu'il propose; il désirerait que le citoyen Dagant pût rester en place. Nous vous requérons de vous occuper de cet objet en notre absence, et de faire part de votre résolution au citoyen Philippe, que nous prévenons de cette réquisition.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai);
Treilhard. »
N° 4.
Anvers, le
« Les commissaires de la Convention nationale dans la Belgique, le pays de Liège, etc., au citoyen Philippe, directeur général des postes de Varmée de Belgique, à Liège.
« La sûreté de la correspondance dans un pays occupé par les armées de la République,
étant un des points qui doit particulièrement fixer nos regards, vous voudrez bien, citoyen, nous faire passer, sans le moindre délai, à Bruxelles, une liste exacte de tous les directeurs et agents des postes qui sont sous votre direction, avec l'état de leur service, depuis quelle époque et à quel endroit chacun d'eux est employé : s'il vous est revenu jusqu'à présent des plaintes à leur charge; s'ils sont ou pas du pays; en un mot vous y joindrez toutes les observations que vous jugerez convenable, afin de ne rien nous laisser à désirer sur les renseignements dont nous avons besoin : les plaintes multipliées qui nous ont été portées sur l'infidélité des postes, et la preuve que nous en avons acquise par nous-mêmes, nous forceront à prendre aussitôt des mesures sans lesquelles le salut de la patrie se trouverait évidemment compromis.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai) ;
Treilhard. »
N° 5.
Bruxelles, le
(( Les commissaires de la Convention, etc., aux commissaires nationa/ux du pouvoir exécutif, à Bruxelles.
( Nous avons reçu votre lettre du 12 de ce mois, les deux tableaux des employés dans l'administration des postes de Bruxelles, qui y étaient joints : nous avons cru devoir faire passer le tout au citoyen Philippe, directeur général des postes de la Belgique, à qui nous avions déjà écrit, pour obtenir de lui l'état de tous les employés dans cette partie de l'administration; le travail pour le bureau particulier de Bruxelles, faisant partie du travail général que nous attendons du citoyen Philippe (1), il était convenable de ne rien statuer sans l'avoir préalablement entendu. Noua croyons devoir vous observer que votre tableau intitulé : « employés à retenir et à avoir au bureau », ne présente aucune espèce de renseignement sur les sujets que vous proposez d'admettre; il serait cependant fort à propos de nous faire connaître leur état, leur âge et les motifs qui peuvent leur mériter une préférence sur d'autres concurrents. Vous pourriez même, pour hâter une décision, adresser directement ces notes au citoyen Philippe, à qui elles seront utiles pour former son tableau général.
cc Signé : Camusx Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai); Treilhard. »
N° 6.
Bruxelles, le
« Les commissaires de la Convention, etc., au citoyen Philippe, directeur général des postes de Varmée de la Belgique.
. « Les commissaires du pouvoir exécutif nous ont fait passer deux tableaux des employés
de l'administration des postes de Bruxelles; l'un présente l'état des employés dans le bureau de cette ville au moment de l'arrivée des Français; l'autre présente l'état des employés qu'ils jugent devoir être conservés ou admis : nous vous faisons passer ces deux états, et vous invitons à nous transmettre promptement vos observations, tant sur les anciens employés que sur ceux qui sont proposés pour en remplacer d'autres; nous prendrons ensuite les mesures qui nous .paraîtront les plus efficaces pour assurer le service public en cette partie.
( Signé : Camus1 Delacroix, Merlin (de Douai); Treilhard. »
N° 7.
Bruxelles, le
» Les membres de la Convention, etc., au citoyen d'Etilly, inspecteur des postes de
Varmée.
« Citoyen, le remplacement du citoyen Da-gant a dû être effectué d'après les ordres que nous avons donnés en partant dernièrement de cette ville : ainsi rien ne peut arrêter vos opérations. Si le remplacement n'avait pas encore été effectué, vous voudrez bien nous en instruire.
« Signe: Camus, Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai) ; Treilhard. »
Les commissaires de la Convention ont. appris, par la réponse à cette dernière lettre, que les commissaires nationaux du conseil exécutif avaient disposé de la place de directeur des postes en faveur du citoyen Mezemaker.
Peu de temps après, celui-ci a donné sa démission ; de là, l'arrêté suivant :
N°-8.
« Au nom de la République française.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique,, de Liège, etc., considérant que l'emploi cie directeur de la poste militaire de Bruxelles, se trouve vacant par la démission du citoyen Mezemaker, et qu'il est urgent d'y pourvoir ;
et Déclarant commettre provisoirement à cet emploi le citoyen Lagace, directeur des postes aux lettres de la ville d'Avesnes, et requièrent le citoyen Philippe, directeur général des postes militaires, au quartier général à Liège, de l'y installer ou faire installer sans aucun délai (1); la présente commission demeurant comme non avenue, si ledit Lagace n'est pas rendu à Bruxelles, le 20 de ce mois.
« Fait à Bruxelles, le 16 février 1793, l'an II de la République française.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai). »
Les commissaires nationaux du conseil exécutif ayant prévenu les commissaires de la Convention, des abus criants qui se commet-
taient tous les jours au bureau de la poste de Louvain, ceux-ci se sont hâtés d'y pourvoir, et voici de quelle manière :
n° 9.
Bruxelles, le 16 février 1793, l'an II de la République française.
( Les commissaires de la Convention, etc., aux citoyens commissaires provisoires de la ville de Louvain.
« Il nous a été porté, citoyens, des plaintes graves contre le directeur de la poste aux lettres de votre ville; et nous nous sommes, en conséquence, décidés à le destituer. Nous vous prions de vouloir bien nous indiquer, pour son remplacement, un citoyen de votre ville;, qui, par son patriotisme et sa capacité, soit digne d'une place aussi importante.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai). »
n° 10.
Bruxelles, le
« Les citoyens commissaires provisoires de la ville libre de Louvain, aux commissaires de la Convention nationale, près Varmée et dans le pays de la Belgique.
« Nous venons de prendre communication, citoyens, de votre lettre en date d'aujourd'hui, par laquelle vous chargez les commissaires provisoires de la ville de Louvain, de vous indiquer un citoyen de notre ville, pour remplacer dignement le directeur de la poste aux lettres de notre ville, que vous venez de destituer.
« A cet égard nous vous faisons part que nos collègues et nous, avons prévenu vos désirs, et nous avons fait choix du citoyen Dejongh, avocat et président des commissaires provisoires, dont le patriotisme et la capacité sont à toute épreuve, vous priant de l'agréer pour occuper ledit emploi.
« Signé : MM. Robyns, commissaire provisoire. J. Michel.
n° 1l.
Au nom de la République française,
« Les membres de la Convention nationale de France, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc., informés dès abus qui régnent dans la direction de la poste aux lettres de Louvain, et considérant qu'il est urgent d'y pourvoir;
« Déclarent destituer le citoyen Rapallier, actuellement chargé de ladite direction; commettent provisoirement pour le remplacer le citoyen Dejongh, et requièrent le citoyen Philippe, directeur général des postes de la Belgique et du pays de Liège, d'installer ou faire installer sans aucun délai, ledit Dejongh, dans l'emploi dont il s'agit, j « Fait à Bruxelles, le 16 février 1793, l'an II de la République française.
! « Signé : Gosbuin, Merlin (de Douai). »
N° 12.
« Au nom de la République française.
' (( Les membres de la Convention nationale, ses commissaires, etc., sont informés que le cfc toyen Philippe est attaqué en ce moment d'une maladie trop graye, pour satisfaire à la réquisition à lui faite par leurs arrêtés du 16 de ce mois, d'installer le citoyen Lagace, dans l'emploi de directeur des postes de Bruxelles, et le citoyen Dejongt, dans celui de directeur des postes de Louvain:
,« Requièrent l'un aes commissaires nationaux du pouvoir exécutif dans l'arrondissement de Bruxelles, d'exécuter sans délai l'une et l'autre installation.
« Fait à Bruxelles, 21 février 1793, an II de la République.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai), »
La conduite irrégulière d'un commissaire du pouvoir exécutif, relativement à une malle des postes de Hollande, a donné lieu à la lettre suivante :
N° 13.
Bruxelles,
« Les commissaires de la Convention, etc., aux commissaires nationaux envoyés par le conseil exécutif à, Gand.
« Nous avons délibéré sur ce que le -citoyen Darnauderi a fait au sujet de l'arrestation de la malle des postes de Hollande. Il s'est conduit très imprudemment. Il ne devait ni fair^ enlever la malle au courrier, ni faire ouvrir les lettres, ni saisir des étoffes dont on ne pouvait pas dire qu'elles étaient introduites en contrebande, puisqu'elles n'avaient pas encore passé à des bureaux ou les droits dussent être acquittés. La justice eiige que l'on restitue les marchandises, et qu'on fasse droit sur les autres plaintes du citoyen Apers, après avoir vérifié la réalité des faits qu'il allègue.
« Signé : Camus, Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
Art. 2.
Mesures relatives aux faune assignats.
Une saisie de faux assignats de 200 et 300 livres, faites par le citoyen Niceville, juge de paix de Condé, ayant donné lieu à des perquisitions ultérieures, le directoire du département du Nord a pensé que le coupable de la contrefaçon de ses assignats était dans la Belgique; et il a en conséquence requis le citoyen Niceville de se transporter à Bruxelles.
Le 25 février, après avoir conféré avec le citoyen Niceville, nous avons décerné contre deux négociants de Bruxelles un mandat d'amener, conçu en ces termes :
N° 1.
« Au nom rie la République française.
( Les membres de la Convention nationale, ses commissaires, etc., requièrent le citoyen
Lescuyer, colonel de gendarmerie, prévôt de l'armée de la Belgique, de faire amener, sur-le-champ, par devant eux; les citoyens Henri et Joseph Lussiez, négociants, demeurant à Bruxelles, rué du Vieux-Marché.
« Fait à Bruxelles, le 25 février 1793, l'an II de la République.
« Signé : Camus, Gossuin, Merlin
(de Douai).
Les deux négociants ayant obéi au mandat, nous avons, d'après leurs interrogatoires et l'examen des pièces relatives au fait, pris le même jour un arrêté qui a été suivi le lendemain de deux lettres sur le même objet, l'une à la Convention nationale, l'autre au directoire du département du! Nord.
N°2
Du 25 février, l'an II de la République.
« Les commissaires de la Convention nationale près l'armée, et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc.
« Vu les procédures commencées par le juge de paix de la ville de Condé, district de Va-lenciennes, département du Nord, relativement à plusieurs assignats de la somme de 300 livres et de 200 livres suspects de faux, et qui paraissent être sortis de la ville de Mons, ou ils avaient été portés par le citoyen Joseph Lussie, négociant de Bruxelles; une lettre du ministre des contributions publiques adressée auxdits commissaires de la Convention, en date du 13 février présent mois, portant dénonciation de la circulation de faux assignât® dans la Belgique; une autre lettre relative au même objet, signée Lema/rchand, en date du 20 de ce mois; une liasse de six pièces, paraphées desdits commissaires, pareillement relative" a la circulation de faux assignats dans la Belgique; le procès-verbal dressé par les commissaires le 24 février présent mois, au sujet de deux assignats de 300 livres reconnus faux, et remis par François Lussie, négociant de Bruxelles, à Jacques-Joseph Corduannier, lesquels assignats sont annexés au procès-verbal,
(( Après avoir entendu Joseph Lussie, lequel a déclaré que les assignats par lui remis à Guillaume Castian, de Mons, lui avaient été fournis par le dénommé alors prince de Lam-besc, qui lui avait payé, en cette monnaie, une lettre de change de 10,000 florins, à l'échéance du 6 novembre dernier; lequel Joseph Lussie a fourni un acte de cautionnement, signé de son père et de Henri Lussie, son frère, qu'il se représentera à toute réquisition :
« Considérant la nécessité de faire prononcer, par la Convention nationale, sur la manière d'instruire un délit aussi important que la fabrication et l'émission de faux assignats qui se sont faits en partie hors des terres de la République, et hors du ressort des juges français; considérant aussi la nécessité de ne pas arrêter un seul instant l'instruction de ce délit, dans la crainte que le retard qu'on y apporterait ne fit dépérir les preuves; « Arrêtent : « 1° Qu'il sera écrit à la Convention, pour lui rendre compte des faits résultant des
pièces mises sous les yeux des commissaires, relativement à la fabrication et à l'émission des assignats dont il s'agit ;
« 2° Que cependant, et à titre de mesure de sûreté générale, le juge de paix de Condé sera requis et autorisé, comme il l'est par le présent arrêté, de suivre l'instruction qu'il a commencée relativement aux assignats dont il est question : lui donnant pouvoir de se transporter, et d'instruire, hors du territoire de la justice de paix de Condé, et en quelque lieu que ce soit, même sur les terres qui sont occupées par les armées de la République française;
« 3° Qu'à l'effet de ladite instruction, toutes les pièces visées au présent arrêté lui seront remises, et qu'il s'en chargera au pied d'un état sommaire desdites pièces;
« Enfin qu'expédition du présent arrêté sera remise audit juge do paix, et qu'une autre expédition sera envoyée, dans les 24 heures, à la Convention nationale.
« Fait à Bruxelles, les jour, mois ec an que dessus.
« Signé : Camus, Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
N° 3.
Bruxelles, le 26 février, l'an II de la République.
« Les commissaires de la Convention nationale près Varmée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc., à leurs collègues composant la Convention nationale.
« Citoyens nos collègues,
« Il nous a été dénoncé de plusieurs endroits de la Belgique et du pays de Liège, des émissions d'assignats de 300 livres et de 200 livres qui sont faux. Des procédures ont été commencées à ce sujet, à Mons. Il en a été fait aussi à Condé, district de Yalenciennes, par le juge de paix de cette ville. Le directoire du département du Nord nous a envoyé ici le juge de paix, qui nous a apporté ses procédures. Il résulte des renseignements que nous avons pris d'après l'instruction commencée par le juge de paix de Condé, que ces assignats ont été distribués par les émigrés, notamment par le ci-devant prince de Lambesc. Il est intéressant de suivre cette procédure, non pas tant pour connaître les premiers coupables, qui sont vraisemblablement, par leur fuite, hors de l'atteinte de la loi, que pour arrêter une circulation dangereuse et funeste au crédit de la République : mais il se rencontre, dans la poursuite, des difficultés résultant de ce que la circulation a eu lieu dans différents territoires, dont plusieurs sont hors de la République. Il devient indispensable, dès lors, de commettre un juge et un tribunal qui puissent étendre leur action partout, et la rendre uniforme, sans être arrêté par les distinctions de territoire. Déjà nous avons, par mesure de sûreté générale, autorisé le juge de paix de Condé à suivre son instruction partout où il serait nécessaire^ et à agir, à cet effet, même hors du territoire de la République; mais quand cette instuction sera faite, il faut un
tribunal unique ou elle soit rapportée, et les coupables jugés. Nous vous proposons, citoyens nos collègues, de décréter que la connaissance du crime de l'émission de faux assignats dans les départements du Nord, du Pas-de-Calais, des Ardennes et de l'Aisne1, dans la Belgique et les pays voisins occupés par les armées de la République, sera attribuée au tribunal criminel du département du Nord, et que l'instruction sera faite par le directeur du juré du tribunal du district de Douai, lequel pourra se transporter, à cet effet, partout où il sera nécessaire.
« Nous vous adressons, citoyens nos collègues, une copie de l'arrêté que nous venons de vous marquer avoir pris, pour donner au juge de paix de Condé le pouvoir de suivre son instruction hors de son territoire.
( Nous vous adressons également copie de notre arrêté d'aujourd'hui, par lequel, après avoir entendu le commissaire national Coche-let, envoyé à Liège, que nous avions suspendu, nous l'avons destitué de ses fonctions. On peut attribuer ses fautes à un excès de zèle; il a montré le plus grand désir de faire le bien, mais il s'est porté beaucoup au delà des limites de ses pouvoirs, et sa conduit était d'une conséquence trop dangereuse pour le laisser en place.
« Nous avons encore à vous annoncer aujourd'hui que la ville de Bruges a émis hier son vœu pour être réunie à la République française. Les députés de la ville doivent partir aujourd'hui pour vous présenter sa demande.
« Signé : Camus,, Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
N° 4.
Bruxelles, le 26 février, l'an II de la République.
(( Les commissaires de la Convention nationale près l'armée, et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc., aux administrateurs composant le directoire du département du Nord.
« Citoyens, nous avons reçu par le juge de paix Niceville, la lettre que vous nous avez adressée le 21 de ce mois, relativement à la circulation de faux assignats qui paraissent être sortis originairement de la Belgique. Nous avions déjà plusieurs renseignements sur cet objet : il y a lieu de croire que ces assignats ont été distribués par les émigrés, notamment par le ci-devant prince de Lambesc.
« Nous sommes persuadés, comme vous l'êtes, citoyens, de la nécessité de suivre cet objet important avec activité : dans cette vue, nous avons pris hier un arrêté qui ordonne au juge de paix Niceville, de suivre l'instruction qu il a commencée, l'autorisant, à cet effet, à se transporter partout ou besoin sera, même hors le territoire de la République, et. aujourd'hui nous écrivons à la Convention nationale pour l'inviter à rendre un décret qui, après la première instruction du juge de paix, attribue toute l'affaire au tribunal criminel du département du Nord, sur la poursuite du directeur du juré du tribunal du district de Douai. « Il sera nécessaire que vous fassiez fournir
au juge de paix Niceville, les fonds que ses différents transports hors de son domicile entraîneront, et cela, par des mandats sur les receveurs des droits et domaines nationaux.
« Signé : Gamus1 Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
Une autre affaire a depuis appelé notre sollicitude. Nous ne pouvons pas en publier les détails; mais voici l'arrêté auquel elle a donné lieu et la lettre par laquelle nous l'avons envoyé, avec les pièces qui y étaient relatives, au comité de sûreté générale.
N° 5.
« Au nom de la République française.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée, et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc. ;
« Yu la lettre écrite de.........le 3 du présent
mois de mars, par le citoyen.............au citoyen directeur et distributeur des lettres.......
a, ensemble la lettre y jointe, adressée à la
citoyenne..............., poste restante à............,
ce dernier mot rayé;
« Requièrent le citoyen Lescuyer, colonel de gendarmerie nationale, prévôt de l'armée de la Belgique, de s'assurer de la personne qui se présentera au bureau de la poste aux lettres
de................ pour en retirer ladite lettre
adressée à la citoyenne............ et de l'amener
par-devant les commissaires nationaux du conseil exécutif provisoire, en résidence à...........
qui l'interrogeront, dresseront procès-verbal de ses dires et réponses, et la feront mettre, s'il y a lieu, en état d'arrestation;
« Arrêtent, en outre, que copie certifiée desdites lettres sera envoyée au comité de sûreté générale de la Convention nationale, et que les commissaires nationaux qui se trouvent actuellement à................ de quelque arrondissement qu'ils soient, ou l'un deux, entendront le citoyen................ pour, d'après ses
réponses, faire mettre en état d'arrestation qui il appartiendra;
( Arrêtent enfin que les commissaires nationaux de............ et de ............ leur rendront
compte, ainsi qu'au comité de sûreté générale dé la Convention nationale, de ce qu'ils auront fait en conséquence du présent arrêté.
c Fait à Bruxelles, le 5 mars* l'an II de la République.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Danton, Merlin (de Douai). »
N° 6.
Bruxelles, le 5 mars, l'an II de la République.
« Lès commissaires de la Convention, etc., au
co>rnitê de sûreté générale de la Convention
nationale.
Citoyens nos collègues,
« Nous vous adressons copie d'un arrêté que nous venons de prendre d'après des lettres dont copie est ci-jointe. Yous jugerez sans doute que
vous aurez des mesures à prendre en conséquence dans l'intérieur de Paris. « Signé : Delacroix, Gossuin, Danton, Merlin (de Douai). »
Article 3.
Mesures relatives aux émigrés et aux prêtres déportés.
Les émigrés et les prêtres réfractaires que la France repoussait justement de son sein, affluaient encore dans la Belgique, et y faisaient une guerre ouverte aux principes de la liberté et de l'égalité, lorsque, par son décret du 26 janvier, la Convention nationale nous a autorisés à prendre toutes les mesures de sûreté générale qui nous paraîtraient nécessaires. Yoici l'usage que nous avons fait à leur égard de ce nouveau pouvoir.
N° l.
« Au nom de la République française.
« Les commissaires de la Convention nationale, etc.;
« Sur les avis multipliés qui nous ont été donnés, qu'il existe dans la Belgique des émigrés Français et des prêtres déportés qui travaillent avec activité à égarer l'opinion et les consciences des Belges, pour éteindre dans leur âme tous sentiments de liberté, et relever au milieu d'eux la tyrannie qu'ils ont inutilement défendue dans les lieux qui les ont vu naître;
« Considérant que la présence des émigrés et des prêtres déportés ne peut être que funeste aux deux peuples; qu'elle est contraire aux décrets de la Convention nationale, qui s|est formellement expliquée en ordonnant la saisie et la vente de tous les biens appartenant aux émigrés trouvés dans les lieux occupés par les armées françaises;
« Avons arrêté que dans les trois jours qui suivront celui de la publication du présent arrêté, tous les Français émigrés ou déportés seront tenus de se retirer des pays occupés par les armées françaises; que tous ceux qui seront arrêtés après ce délai expiré, seront conduits sous bonne et sauvegarde hors dudit territoire, avec défense d'y rentrer sous les peines portées par les lois contre les émigrés et les déportés.
( Requérons les généraux, les commandants des places et autres chefs de la force publique, de prêter main-forte à l'exécution du présent arrêté.
« Fait et arrêté à Bruxelles, le 13 février l'an II de la République française.
« Signé : Camus, Delacroix, Gossuin, Danton, Merlin (de Douai), Treilhard.
N° 2.
« Au nom de la République française.
« Les membres de la Convention, etc., informés que plusieurs citoyens des pays occupés par les armées de la République, égarés par les insinuations perfides des ennemis de la liberté et de l'égalité, recèlent chez eux des Français émigrés et des prêtres déportés du
territoire de la République, et considérant qu'il est d'une extrême urgence d'y pourvoir;
« Arrêtent que tout individu qui, 24 heures après la publication du présent arrêté, donnera retraite à un Français émigré ou prêtre déporté, sera regardé comme fauteur de la tyrannie et soumis comme tel aux dispositions de l'article 4^du décret des 15, 17 et 22 décembre 1792, lequel ordonne le séquestre de tous les biens, meubles et immeubles appartenant au fisc, aux princes, à ses fauteurs, adhérents et satellites volontaires.
« Les commissaires nationaux du pouvoir exécutif tiendront sévèrement la main à la très prompte publication et exécution du présent arrêté, et: en rendront compte aux commissaires de la Convention nationale.
« Fait à Bruxelles, le 23 février 1793, l'an II de la République.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai). »
Au nom de la République française.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires, etc.;
« Après avoir entendu Jean-Baptiste Marchandier, natif de Bellac, amené devant eux comme émigré et qui est convenu avoir suivi le ci-devant comte d'Egmont, lors de son émigration, et être resté avec lui en pays étranger pendant 2 ans ; vu le passeport délivré audit Marchandier par le conseil municipal de Liège le 16 décembre 1792, visé le 7 février dernier par le bureau municipal de Bellac, et le 19 du même mois par le comité permanent de la section du Mail de. la ville de Paris, duquel visa il résulte que ledit Marchandier est rentré en France après la promulgation de la loi portant défense aux émigrés d'y rentrer, sous peine de mort; et considérant que ledit Marchandier leur a paru, par ses réponses, être très suspect;
« Arrêtent que ledit Marchandier sera mis en état d'arrestation, jusqu'à ce que par eux il en ait été autrement ordonné;
« Arrêtent, en outre, que les scellés seront à l'instant apposés sur l'appartement qu'occupe en cette ville ledit Marchandier, par les citoyens Dignef et Bryxhn, membres de l'administration provisoire de la ville et pays de Liège, lesquels feront ensuite inventaire de ses papiers, les noteront, parapheront et en dresseront un état sommaire qu'ils remettront auxdits commissaires de la Convention nationale.
« Requièrent ladite administration provisoire de la ville et pays de Liège, de prendre les mesures nécessaires pour l'exécution du présent arrêté, et de leur en rendre compte.
« Fait à Liège, le 2 mars, l'an II de la République.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai). »
N° 4.
« Au nom de la République française.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires, etc. Yu la lettre des repré-
sentants provisoires de la ville de Gand, du 9 mars présent mois, concernant leurs arrêtés relatifs aux émigrés et prêtres déportés;
« Arrêtent que lesdits arrêtés seront publiés et exécutés sans aucun délai dans la Flandre-orientale, sauf à autoriser ceux des émigrés et prêtres déportés qui se trouveraient dans une infirmité bien caractérisée et légalement constatée, à rester dans le pays jusqu'à ce qu'ils soient en état d'en sortir;
« Requièrent les commissaires nationaux du conseil exécutif provisoire et le commandant de la ville de Gand et dépendances, de tenir la main à l'exécution du présent arrêté, et de leur en rendre compte dans le plus bref délai.
« Fait à Bruxelles, le 19 mars 1793, l'an II de la République française.
« Signé : Camus, Gossuin, Merlin (de Douai); Treilhard.
Article 4. Dispositions diverses.
La multitude et la diversité des objets sur lesquels devait s'étendre la surveillance des commissaires de la Convention nationale dans la Belgique et le pays de Liège, ont donné lieu à un grand nombre d'arrêtés et de réquisitions qui n'appartiennent à aucun des articles précédents, et qu'on va par cette raison transcrire par ordre de date.
Nota : Il a été écrit le même jour, et dans les mêmes termes, au ministre de l'intérieur.
N° 1.
« Les commissaires de la. Convention nationale, dans la Belgique, au général^ Mone-ton.
% « Le citoyen Joubert nous a fait passer copie d'une lettre qui vous a été adressée au sujet de Louis Belgiam qu'on soupçonne de recruter pour les pays éteangers. L'importance de l'objet nous assure de toute l'attention que vous y donnerez; nous vous invitons à nous faire part de ce que vous pourrez apprendre à cet égard.
m Signé : Gossuin, Merlin (de Douai),, Treilhard. »
N° 2.
« Sur le compte rendu aux commissaires de la Convention nationale de France, députés dans la Belgique, des motifs du citoyen curé de la paroisse de Baulert, qui l'empêchent de procéder à la célébration du mariage de François Charlier, ci-devant soldat autrichien, et actuellement déserteur.
« Les commissaires de la Convention nationale de France déclarent que les ordonnances de la domination autrichiennë qui défendaient ci-devant aux curés de la Belgique, de marier les soldats de cette domination, sont actuellement sans vigueur; et qu'en conséquence, aucun curé de la Belgique ne peut, sous les peines portées par l'article 7 du décret du 15 décembre 1792, se dispenser de marier ses paroissiens, sous prétexte qu'ils auraient été pré-
cédemment employés dans l'armée autrichienne.
« Ainsi fait et arrêté à Bruxelles, le 28 janvier 1793, l'an II de la République française.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
N° 3.
Bruxelles, 14 février 1793, l'an II de la République.
Aux administrateurs du département du Nord.
« Nous vous adressons, citoyens, une lettre et un billet non signés, qui ont été saisis ces jours derniers sur le courrier de la Haye à Maëstricht. Vous verrez que la lettre est adressée à une dame Varlet, au château de Villers-aux-Tertre. Il vous paraîtra peut-être prudent de mettre les scellés chez cette femme, et chez toute autre personne, que les suites de l'affaire vous indiquerait comme suspecte.
« Signé : Camus0 Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
N° 4.
Bruxelles, le 13 février, l'an II de la République.
« Lettre circulaire des commissaires de la Convention nationale, etc., à tous les commissaires nationaux• du pouvoir exécutif, et à tous les commandants des places dans la Belgique et le pays de Liège.
« Il nous est revenu, citoyen, que des déserteurs autrichiens se répandent dans toute la Belgique et du pays de Liège, occupés par les troupes de la République; que particulièrement à Tournay où il s'en trouve un très grand nombre, leur conduite paraît d'autant plus suspecte qu'ils font du matin au soir beaucoup de dépenses dans les cabarets, quoiqu'on ne leur connaisse aucune ressource; si ce fait est vrai, il mérite toute votre surveillance : nous vous prions de ne pas perdre un seul instant pour vous en assurer. La loi qui accorde secours et protection aux soldats de l'armée ennemie, réfugiés sur le territoire français, occasionnerait des abus bien préjudiciables, si, à prétexte de jouir de ses dispositions, des satellites salariés par les puissances coalisés venaient se mêler dans nos camps pour y exercer l'espionnage.
« Vous ne pouvez pas, citoyens, donner trop de soins à cet objet; le salut de la patrie y est essentiellement intéressé, et nous nous assurons que les braves soldats sauront distinguer l'homme qui, de bonne foi, est venu se ranger sous les drapeaux de la liberté, d'avec celui qui aurait le projet perfide de servir la cause des tyrans, et que, dans ce dernier cas, ils vous faciliteront les moyens de faire livrer les coupables à la vengeance des lois.
* Signé : Camus,, Delacroix, Gossuin, Danton, Merlin (de Douai), Treilhard. »
N° 5.
Du 17 février, l'an II de la République.
Les membres de la Convention nationale de France, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc., délibérant sur la dénonciation par écrit que le citoyen Sibuet, l'un des commissaires nationaux du conseil exécutif provisoire dans l'arrondissement de Bruges, leur a faite, d'assemblées clandestines provoquées par un individu connu ci-devant sous le nom de baron de Triest, et tendant à égarer le peuple sur ses véritables intérêts; dénonciations qui ont été appuyées et confirmées par le citoyen Gadolle, commissaire national du conseil exécutif dans le même arrondissement, lequel s'est, à cet effet, transporté devant eux en la ville de Tournay, arrêtent que le ci-devant baron de Triest sera sans délai mis en état d'arrestation provisoire, et qu'à l'instant de son arrestation, les scellés seront mis sur tous ses effets et papiers, desquels il sera dressé ensuite état sommaire en sa présence, et dans le cas où ledit baron de Triest ne pourrait pas être saisi, il sera procédé, en son absence, tant à l'apposition des scellés, qu'à la rédaction de l'état sommaire ci-dessus ordonné : chargent le citoyen Gadolle, auquel le présent arrêté a été à l'instant remis, de le mettre à exécution; requièrent les généraux et commandants de troupes, de lui donner toute l'assistance nécessaire à cet effet, lui enjoignent de leur rendre compte à Bruges où ils se transporteront demain, du résultat de ce qu'il aura fait pour l'exécution dudit arrêté, dont il sera donné avis dans les 24 heures à la Convention nationale.
« Fait à Tournay, les jour et an que dessus.
« Signé : Camus, Treilhard. »
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc.
« Vu leur arrêté du 17 février présent mois, portant ordre au citoyen Gadolle de mettre en état d'arrestation le ci-devant baron de Triest; les procès-verbaux de réquisition dudit de Triest, tant dans sa maison de Bruges que dans celle de Saint-Georges, desdits procès-verbaux en date des 18 et 19 février; l'expédition d'un procès-verbal dressé le 18 de ce mois par les citoyens Joseph Vanheule et A. J. Sauwereyun, contenant les déclarations faites par plusieurs citoyens et chefs de voisinage à la charge dudit Trieste, les pièces relatées et jointes audit procès-verbal :
« Requièrent le commandant temporaire de cette place de Bruges, et tous autres commandants des troupes de la République, de faire usage de tous les moyens qui sont en leur pouvoir pour se saisir de la personne du ci-devant baron de Triest, le tenir sous bonne et sûre garde, arrêtent que l'expédition du procès-verbal dressé par les citoyens Vanheule et Sauwereyun, et les pièces y relatées seront déposées entre les mains du citoyen Sibuet, commissaire national du pouvoir exécutif, pour y avoir recours au besoin. « Fait à Bruges, les jour et an que dessus.
« Signé : Camus, Treilhard. »
Bruges,
« Citoyens députés,
« J'ai l'honneur de vous adresser extrait du procès-verbal des opérations que nous avons faites en suite de votre réquisition du 17. Si nous n'avons pu saisir le ci-devant baron de Triest, c'est qu'informé d'une pièce trouvée dans ses papiers, il avait entendu dire au général Deflers qu'il le ferait arrêter.
« Aujourd'hui j'ai levé une partie des scellés et commencé l'examen des papiêrs. Huit pièces qui nous ont paru suspectes sont en notre pouvoir; mais comme la plus grande partie et écrite en flamand, je m'occupe de leur traduction; il en est une entre autres qui indique que les papiers concernant la protestation et les assemblées, ont été portés dans la maison du citoyen Gillon, riche négociant (1); je vous demande s'il ne serait pas à propos de faire aussi apposer les scellés chez ce particulier.
« Je suis informé, au surplus, que le ci-devant baron de Triest a une maison de campagne située à Saint-Georges, distant de 4 lieues; si vous jugez nécessaire d'y envoyer pour chercher le baron et apposer les scellés sur ses papiers, j'attendrai votre réquisition ou vos conseils, mais vous voudrez bien m'au-toriser à payer les dépenses qu'entraînent ces différentes mesures.
« Je viens de charger deux notaires de cette ville de continuer l'inventaire des papiers; ils s'en occuperont demain, et si vous êtes ici lorsqu'ils auront fini leurs opérations, je vous en rendrai compte, ainsi que du contenu des pièces que je fais traduire.
« Le commissaire civil du pouvoir exécutif, . « Signé : Sibuet. »
« Les membres de la G onvention nationale, ses
commissaires près Varmée et dans les pays
de la Belgique, de Liège, etc., etc.
« Vu le rapport ci-dessus, et de l'autre part, arrêtent qu'à l'instant même le citoyen Sibuet, commissaire civil du pouvoir exécutif, chargera des personnes sûres de se transporter chez le citoyen Gillon, dénommé audit rapport, à l'effet de faire perquisition, dans ses papiers, et tous ceux qui pourraient être relatifs à la correspondance du ci-devant baron de Triest, concernant les assemblées de voisinages, protestations et autres actes ayant rapport à l'exécution du décret du 15 décembre dernier; saisir lesdits papiers après la description sommaire, et du tout dressé procès-verbal qui sera rapporté auxdits commissaires de la Convention nationale; requérant le commandant.temporaire de cette ville de Bruges de donner audit citoyen Sibuet toute assistance nécessaire pour l'exécution du présent arrêté.
« Fait à Bruges, le 19 février 1793, l'an II de la République française, 8 heures du soir.
Signé : Camus, Treilhard. »
N° 6.
« Au nom de la République française,
« Les membres de la Convention nationale, etc., informés que le nommé Lambinet, ex-jésuite, est prévenu d'avoir été, à Givet, le principal agent et messager d'une correspondance entre le gouvernement autrichien et La Fayette, arrêtent qu'il sera fait perquisition dudit Lambinet à Liège, à Huy, et en tous autres lieux où se trouvent les armées françaises; qu'il sera mis en état d'arrestation, et que les scellés seront apposés dans son domicile et partout où peuvent exister ses papiers.
« Le présent arrêté sera exécuté à la diligence du premier commissaire national qui sera trouvé sur les lieux.
« Fait à Bruxelles, le 19 février, l'an II de la République.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai).
N° 7.
a Au nom de la République française.
« Les membres de la Convention nationale de France, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc., informés que des bateliers belges, connus sous le nom de belandriers, désirent continuer leur navigation en Hollande, nonobstant la guerre, et considérant qu'il importe de. maintenir une branche d'industrie qui alimente un grand nombre de citoyens, en prenant néanmoins les mesures nécessaires pour qu'il n'en résulte aucun préjudice à la République française ni à la liberté de la Belgique, arrêtent ce qui suit :
( Les commissaires nationaux du pouvoir exécutif de la République française sont autorisés à délivrer des passeports aux belandriers belges qui en demanderont pour la Hollande, à la charge : 1° qu'il ne pourra être exporté de la Belgique et des autres pays occupés par les armées françaises, aucun des objets dont l'exportation en est prohibée; 2° Qu'en conséquence, chaque belandrier subira une visite exacte et sévère, tant avant la délivrance des passeports que sur les frontières; 3° Qu'avant d'obtenir son passeport, chaque belandrier sera tenu de représenter une promesse de retour de la part des magistrats hollandais.
(( Fait à Bruxelles, le 19 février 1793,' l'an II de la République française.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai). »
N° 8.
« Au nom de la République française.
( Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans le pays de la Belgique, de Soignies, Liège, etc., informés que les prévôts, doyens et chanoines ont manifesté la plus forte résistance au décret de la Convention nationale, notamment à celui des 15, 17 et 22 décembre 1792, et qu'ils i sont les instigateurs de la sédition qui a eu
lieu ces jours derniers à Soig nies, et la suite de laquelle 32 citoyens de cette ville ont été arrêtés et conduits à Mons ;
« Arrêtent que lesdits prévôts, doyens et chanoines de Soignies, seront mis sans délai en état d'arrestation, conduits en France sous bonne et sûre garde, et répartis dans les citadelles de Lille, de Yalenciennes, de Douai, de Cambrai et d'Arras, où ils seront détenus jusqu'à ce qu'il en ait été autrement ordonné;
( Arrêtent, en outre, que l'administration provisoire de Mons fera mettre sur-le-champ en liberté ceux des 32 citoyens de Soignies ci-dessùs mentionnés, qui ne pourront être considérés que comme victimes de la séduction employée sur eux par lesdits prévôts, doyens, et chanoines, et que copie du présent arrêté sera remise à chacun de ceux qui seront élargis.
« Le maréchal de camp Ferrand, commandant à Mons, est requis de mettre le présent arrêté à exécution, par tous les moyens que la loi a mis en son pouvoir.
« Fait à Bruxelles, le 3 mars 1793, l'an II de la République française.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Danton, Merlin (de Douai). »
N° 9.
« Au nom de la République française.
( Nous, membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc., informés par la copie à eux remise par le conseil général du département du Pas-de-Calais, d'une lettre du citoyen Darthé, membre du directoire de ce département, commissaire député dans le district de Montreuil, qu'un individu, sous l'uniforme de hussard, a tenu et fait dans un cabaret d'Hudin, le 6 de ce mois, des propos et des actes contre-révolutionnaires qui font présumer qu'il est venu de la Belgique pour s'enrôler dans le corps des hussards de la mort, et y soulever les esprits contre le régime républicain; et qu'à la suite de ses propos et actes, il a été mis en état d'arrestation;
( Arrêtons qu'à la diligence des administrateurs du département du Pas-de-Calais, l'individu dont s'agit, sera, sans délai et sous bonne et sûre garde, amené à Douai par devant nous et nos collègues Bellegarde, Cochon et Lequinio, commissaires délégués pour la visite des frontières de la République, pour être interrogé et répondre aux interpellations qui lui seront faites.
« A Arras, le 9 mars, l'an II de la République française.
« Signé : Gossuin, Merlin (de Douai). » N° 10.
Les commissaires de la Gonvention nationale,
près l'armée et dans les pays de la Belgique,
de Liège, etc., à la Convention nationale. -
Tournay, le 10 mars, l'an II de la République française, 9 heures du soir.
« Citoyens nos collègues,
Revenus d'Arras à Douai, pour reprendre
en détail les opérations importantes dont nous
avions posé les bases avec les conseils généraux des départements du Nord et du Pas-de-Calais, nous avons été averti par le brave citoyen Gon-chon, arrivant de Tournay, qu'il y avait eu avant-hier, en cette dernière ville, des mouvements contre-révolutionnaires, excités par les prêtres et les moines; que le tocsin y avait été sonné dans trois églises; que Gonchon lui-même, pris par les séditieux pour un commissaire de la Convention nationale, avait été entouré et assailli; qu'on lui avait arraché sa cocarde; que sa vie avait été3 à plusieurs reprises, dans les dangers les plus imminents; qu'il n'avait dû son salut qu'à son grand courage» et aux pistolets avec lesquels il s'était fait jour à travers une multitude armée de sabres, de fourches et de pierres.
« A cette nouvelle, qui nous a été confirmée par la dépêche du général Omoran, nous nous sommes rendus à Tournay pour concerter avec ce brave officier les moyens d'assurer le bon ordre dans cette ville; en arrivant, à sept heures du soir, nous avons trouvé la ville illuminée, et présentant partout l'union et l'allégresse. Un contraste aussi agréable avec la scène fâcheuse qui nous amenait, nous a été bientôt expliqué par le général Omoran lui-même, qui nous a remis la copie d'une lettre qu'il venait de nous adresser à Douai, et par laquelle il nous faisait part des heureux changements survenus dans les esprits détrompés ; ces changements opérés par la raison, nous ont paru devoir être consolidés par un signe éclatant de patriotisme : demain, un drapeau tricolore flottera sur le beffroi, à la place de l'aigle autrichien qui est maintenant à la porte de votre salle.
« Nous croyons ne devoir pas perdre un instant pour vous informer de ces faits, dans la crainte qu'on ne les dénature_ auprès de vous, et .qu'ils ne répandent des inquiétudes mal fondées : nous profitons pour cela de l'occasion d'un citoyen qui se rend en poste à Paris. Yous applaudirez sans doute aux mesures» sages et vigoureuses du général Omoran. C'est à sa fermeté quel les patriotes de Tournay doivent le calme et la sûreté dont ils jouissent maintenant.
« Il nous a informés à ce sujet d'un fait qui mérite d'être connu : c'est qu'à peine la nouvelle de la sédition d'avant-hier etait-elle parvenue à Lille, que la nombreuse garde nationale de cette ville lui a fait dire qu'elle n'attendait que sa réquisition pour marcher au secours de ses nouveaux frères à Tournay.
« Yous n'apprendrez pas sans une vive satisfaction qu'au moment même où le tocsin sonnait, à l'instigation des prêtres de Tournay, 15 communes des campagnes du Tournaisis, rassemblées dans cette ville, votaient paisiblement leur réunion à la République; le même vœu a été émis aujourd'hui par celles des communes de la même province, qui ne s'étaient pas encore expliquées : tant il est vrai que les manœuvres sacerdotales qui agissent plus fortement dans les villes, sont l'unique cause des désordres qui viennent d'affliger celle de Tour-nay.
« C'est principalement pour prévenir ces désordres, que nous avions pris avec nos collègues Delacroix et Danton, l'arrêté du 5 de ce mois, d'après lequel nous nous sommes transportés -dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais.
« Tout nous pronostiquait la nécessité des mesures que renferme cet arrêté ; et elles n'étaient déjà malheureusement que trop démontrées par les révoltes qui avaient eu lieu dans les campagnes de l'arrondissement de Bruges, à Enghien, à Grammont, à Soignies, etc. Nous serons demain à Bruxelles; nos collègues Bellegarde, Cochon et Lequinio se sont chargés de hâter l'exécution de l'arrêté dont nous venons de parler. Leur zèle et celui des citoyens des départements du Nord et du Pas-de-Calais, nous promet que sous peu de jours une force imposante viendra dans la Belgique protéger les patriotes, assurer l'exécution des lois françaises dans les parties déjà réunies de la République, et remplacer dans les garnisons les bataillons qu'il est instant de réunir au gros de l'armée^; pour livrer, le plus tôt possible, à l'ennemi, une bataille décisive. Dès demain la garde nationale de Douai envoie à Bruxelles plusieurs compagnies de cancaniers et de grenadiers.
( 400 ouvriers, les volontaires qui forment la garnison de Tournay, et les patriotes de cette ville travaillent avec la plus grande activité à mettre cette place en état de défense.
( Signé : Gossuin, Merlin (deDouai).
Lettre du général Omoran, aux citoyens Gossuin et Merlin, commissaires de la Convention nationale, près les armées de la Belgique.
Tournay, le 10 mars, l'an II de la République-française.
« Je m'empresse de vous donner une nouvelle qui vous fera sans doute autant de plaisir qu'elle m'en a fait à moi-même. Les bateliers, gens du port, et portefaix de cette ville, m'ont fait demander la permission de se présenter devant moi pour me témoigner leurs regrets des événements qui se sont passés vendredi dernier. Ils sont venus au nombre de sept à huit cents personnes, faisant retentir l'air des cris de : vive la République française; ils ont tous juré entre mes mains amour et fraternité à la République. Je les ai harangués avec l'éloquence d'un soldat, et nous nous sommes mutuellement promis amitié et fraternité.
« J'ai cru le fait assez intéressant pour vous en donner connaissance sur-le-champ. Vous pourrez, si vous le jugez à propos, y donner toute la publicité possible.
« Croyez-moi bien fraternellement votre citoyen, frère et ami.
« Signé : Omoran. N° 11.
Autorisations demandées aux députés commissaires de la Convention, par les commissaires nationaux soussignés.
1° De casser (1), etc.;
2° De la remplacer par une commission provisoire composée de dix membres;
3° De mettre en arrestation les membres de ladite administration (2) suspects, et de les rétenir en qualité d'otages;
4° De rendre aux pauvres les effets de première nécessité engagés aux Lombards (1) ;
5° Les commissaires nationaux réitèrent aux députés la demande de prendre en très instante considération la dénonciation qu'ils font du général Marassé, commandant à Anvers, et de son aide de camp Dieudonné, ancien serviteur de Vandernoot.
« Signé : Publicola, Chaussart, Tron-quet, Saint-Michel.
Du 9Tnars, l'an II de la République française.
« Les commissaires de la Convention nationale, etc.,
« Autorisent pareillement les commissaires nationaux à mettre en état d'arrestation, et à retenir comme otages les quatre membres les plus suspects de l'administration provisoire, en conservant d'ailleurs pour eux tous les égards, et leur procurant tous les adoucissements possibles dans leur état d'arrestation (2) ;
- Autorisent aussi à rendre aux pauvres les effets de première nécessité engagés aux Lombards, pourvu que la valeur de ces objets n'excède pas 6 florins, ainsi qu'il s'est pratiqué à Bruges.
Les commissaires de la Convention se réservent d'écrire au ministre de la guerre sur cet article.
« Signé : Camus, Treilhard. »
N° 12.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires à l'armé et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc. ;
« Vu les interrogatoires subis les 8 et 9 mars par différents particuliers prévenus d'excès contre les militaires français, requièrent le général Duval, commandant en Brabant, de faire mettre en état d'arrestation les nommés Guillaume Bollyen, et Guillaume Verligt, tous manouvriers, demeurant au lieu le Faventhem, et le nommé Dekeises, officier de police audit lieu de Faventhem.,
( Fait à Bruxelles, ce 10 mars, an II de la République française.
« Signé : Camus, Treilhard. »
N° 13.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc.
« Instruits par plusieurs rapports et procès-verbaux des mouvements d'insurrection qui se eont manifestés et continuent à se manifester à Hall, Alost, Crammont, Thorout et autres lieux, situés entre les villes de Bruxelles, Gand, Bruges et Tournay, requièrent le général Valence, commandant en chef l'armée actuellement campée à Louvain, de détacher de ladite armée et faire partir sur-le-champ un eorps suffisant, composé d'infanterie, cavalerie et artillerie, pour se porter sur les lieux ci-dessus désignés, et prévenir les mouvements intérieurs, qui paraissent combinés avec les mouvements extérieurs, des ennemis de la République.
« Fait à Bruxelles, le 10 mars, l'an II de la République française.
« Signé : Camus, Treilhard. »
N° 14.
« Au nom de la République française.
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires, etc., informés qu'il existe à Louvain différents ballots "et caisses empaquetés à l'adresse de l'ambassadeur d'Espagne;
« Arrêtent que lesdîts ballots et caisses, se-ront visités par les citoyens Isnardi et Roland, commissaires nationaux du pouvoir exécutif, et par les membres de l'administration provisoire de Louvain, lesquels en dresseront pro-eès-verbal, et laisseront transporter tout ce qui ne sera pas de nature à être retenu pour la sûreté de la République.
« Fait à Bruxelles, le 10 mars, l'an II de la République française.
« Signé : Camus, Gossuin, Treilhard, Merlin (de Douai). »
Bruxelles, le 19 mars, l'an II de la République franaçise.
Les commissaires de la Convention nationale
près l'armée, dans les pays de la Belgique,
de Liège, etc.
Aux commissaires nationaux du pouvoir exécutif à Louvain.
« Citoyens, nous avons examiné la copie que vous nous avez adressée de votre procès-verbal du 16, concernant la visite des ballots du ci-devant ambassadeur d'Espagne. Le zèle que vous avez apporté à cet examen, est exactement louable, mais nous pensons que vous avez été trop effrayés du titre de certains écrits, dont la plupart, étant imprimés, seraient inutilement arrêtés sur un particulier. Nous ne croyons pas, d'ailleurs, que l'on puisse enlever à un in.dividu qui n'est prévenu d'aucune accusation, des papiers qui lui sont personnels. D'après ces considérations vous voudrez bien nous envoyer ici seulement les deux articles marqués d'une croix, savoir : l'état général des armées espagnoles et le manuscrit intitulé : Réflexions de Mirabeau, sur la Révolution. -Nous les examinerons, et nous vous ferons connaître le parti que nous aurons pris : à l'égard de tous les autres articles contenus au procès-verbal, et des lettres, vous devez les laisser.
« Signé : Camus, Gossuin, Merlin (de
Douai), Treilhard. »
N° 15.
« Au nom de la République française.
« Vu le mémoire de la municipalité de Soi-gnies, tendant à ce que le curé de ce lieu et le citoyen Pelliot, ci-devant chanoine, qui ont été arrêtés, lors de la sédition arrivée audit Soignies soient mis en liberté; vu pareillement l'avis des commissaires du pouvoir exécutif, Legier et Melletier, sur ledit mémoire, en date du 14 de ce mois;
« Les commissaires de la Convention nationale près dans l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc., arrêtent que le citoyen Pelliot sera mis sur-le-champ en liberté, et qu'il sera sursis, jusqu'à ce qu'il en ait été autrement ordonné, à l'élargissement du curé de Soignies.
« Fait à Mons, le 16 mars, l'an II de la République.
( Signé : Camus, Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
N° 16.
« Vu l'arrêté du 17 mars, présent mois, concernant les perquisitions à faire dans les papiers du citoyen Parmentier, directeur des postes à Tubise; procès-verbal dressé en conséquence par le citoyen Louis Lanelle, le 8 du même mois; autre arrêté du 10; procès-verbal d'interrogatoire dudit Parmentier, fait par les citoyens Robert et Gouget-Deslandes, commissaires nationaux du pouvoir exécutif, le 15; les lettres annexées auxdits procès-verbaux;
« Les membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc., arrêtent que le citoyen Parmentier demeurera en état d'arrestation dans sa maison, jusqu'à ce qu'il en ait été autrement statué ; que Joseph de Pœderlé qui a écrit et signé plusieurs lettres annexées aux procès-verbaux, sera arrêté et les scellés mis sur ses papiers ; requièrent les commissaires nationaux du pouvoir exécutif de mettre à exécution le présent arrêté et tous commandants civils ou militaires de leur donner, à cet effet, la force et assistance nécessaires.
« Fait à Mons, les jour, mois et an que dessus
( Signé : Camus, Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
N° 17.
« Bruxelles, le 18 mars, l'an II de la République.
« Les députés de la Convention, ses commissaires près l'armée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc. au citoyen Sibuet, commissaire du conseil exécutif à Bruges.
« Nous avons reçu, avec votre lettre du 14, le procès-verbal fait à Essenne, le 11, et la copie de la réquisition pour l'arrestation de 4 personnes coupables ou complices d'excès commis dans l'assemblée : nous approuvons
cette mesure, elle était nécessaire dans la circonstance; mais nous ne pensons pas qu'il convienne de les traduire à Lille; il suffit, quant à présent, de les retenir en arrestation, soit à Bruges, où ils sont actuellement, soit dans une autre ville de la Belgique, si vous le jugez à propos : cependant vous devez vous instruire de la véritable disposition des habitants d'Essenne; il faut découvrir les auteurs èt instigateurs du trouble; et si les auteurs n'ont été que de malheureux instruments d'une trame coupable, s'ils reconnaissent et abjurent leur erreur, vous penserez, sans doute, comme nous, qu'il conviendra de les mettre en liberté.
« L'opération de la réunion des caisses en une seule sera bonne, mais il ne faut pas la précipiter : ainsi, quant à présent, il est bon de laisser les choses dans l'état où elles sont (1).
« Signé : Camus, Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
N° 18.
( Question proposée par le citoyen Mou-chet, commissaire national du conseil exécutif, député momentanément à Oudenarde.
« La compagnie de la maréchaussée, àu nombre de 16 nommes répandus dans toute l'étendue du canton, est convaincue de s'être réunie sans pouvoir justifier d'ordre, dans le faubourg d'Oudenardej, armée de fusils, baïonnettes, sabres et pistolets, à l'époque de l'affaire de Grammont; ce qui la fait soupçonner d'avoir voulu appuyer un soulèvement à Oudenarde, qui ne s'est fait sentir qu'un moment.
« On demande d'être autorisé à les désarmer.
« On demande le moyen de les suppléer pour la police qu'ils étaient chargés de faire.
« Signé : Mouchet. »
« Autorisé à désarmer, en remplaçant sur l'indication des habitants dans les assemblées de communes.
« Fait à Bruxelles, le 19 mars, l'an II de la République.
« Signé : Camus, Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
N° 19.
« Bruxelles, le 8 mars, l'an II de la République.
( Les commissaires de la Convention nationale, près Varmée et dans les pays de la Belgique, de Liège, etc. au lieutenant général Duval, commandant en Brabant et Hainaut.
« Citoyen général,
« Il nous a été adressé de Gand, par les commissaires du pouvoir exécutif, des plaintes graves contre un agent qu'ils avaient employé
à l'apposition des scellés mis sur les meubles des émigrés, et qui est prévenu de vol. Ils nous envoient son signalement, que nous allons joindre ici; nous vous requérons, citoyen général, de prendre les moyens nécessaires pour le faire arrêter, s'il se trouvait dans les lieux où vous commandez.
« Le citoyen Lafraise, de la section de la fontaine de Grenelle, à Paris, se faisant appeler Chalais; taille de 5 pieds un pouce, brun, les yeux hagards et faux, barbe forte et noire.
« Signé : Camus, Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard. »
Art. 5.
Mesures relatives à la sûreté de la place de Lille.
C'est ici le lieu de rendre compte des motifs de notre transport à Lille. Les pièces que nous allons transcrire, les feront connaître en même temps qu'elles indiqueront les mesures auxquelles nous a déterminés le salut de la République.
N° 1.
Au nom de la République française.
« Nous, membres de la Convention nationale, ses commissaires;, etc.; informés par Delacroix, l'un de nous, arrivé exprès à Courtrai au moment où nous en partions pour Gand, qu'il lui a été fait des rapports qui méritent de notre part la plus sérieuse attention; que d'après ces rapports, il existe un plan combiné d'introduire dans la place de Lille un grand nombre de malveillants, d'agents de l'Angleterre, de l'Autriche et de la Prusse, qui se réuniront à quelques mécontents pour s'emparecr des portes de la ville;
« Arrêtons que nous nous transporterons à l'instant à Lille, et qu'il sera écrit à nos collègues Treilhard et Robert à Tournay, pour les inviter à venir nous y joindre sans délai, à l'effet d'y concerter ensemble les mesures qu'exigent le salut public, et que copie du présent arrêté, sera envoyé au comité de la sûreté générale.
« Fait à Courtrai, le 24 mars 1793, l'an II de la République.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlih (de Douai). »
N° 2.
Courtrai, 24 mars an II de la République.
« Citoyens nos collègues,
cc Au moment où nous reprenions la route de Gand, Delacroix est arrivé ici, apportant la nouvelle officielle que l'ennemi est à Bruxelles, et que la retraite se fait sur Gand, Mons et Tournay. Nous avons, en conséquence, pris à trois la résolution de nous rendre à Lille. Nous vous invitons à venir nous y joindre sur-le-champ, pour aviser aux mesures à prendre dans les circonstances. Nous vous envoyons
cette lettre par un pédestre, parce qu'il n'y a pas ici de chevaux.
Signé : Delacroix,. Gossuin, Merlin
(de Douai). »
P. S. Ne perdez pas un instant pour vous rendre à Lille; l'objet qui nous y appelle est de la plus haute importance. Nous ne pouvons pas vous en dire davantage, parce que nous ne sommes pas assez sûrs au porteur de cette lettre.
N° 3.
Lille, le 25 mars, l'an II de la République..
« Les commissaires de la Convention à leurs collègues composant la Convention nationale.
« Citoyens nos collègues,
- « Nous nous sommes réunis à Lille, nous avons cru que notre présence y était absolument nécessaire1. Nous avons informé lé comité de sûreté générale des motifs qui nous ont déterminés à prendre cette mesure.
« L'évacuation de la presque totalité de la Belgique, par les troupes de la République* met fin à notre mission politique; car il ne nous reste plus qu'à surveiller les opérations 4 des différentes administrations de l'armée : nous attendons les ordres de la Convention.
Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai), Robert, Treilhard. »
N° 4.
Lille, 25 mars, l'an II de la République.
( Les commissaires de la Convention à leurs collègues composant le comité de la sûreté générale. .
(« Citoyens nos collègues,
« Nous avons été informés que les ennemis de notre liberté ont des agents dans la place de Lille; qu'ils méditent des moyens d'y occasionner des troubles, de s'emparer des postes principaux, et de livrer les portes à l'armée des despotes. Nous ne vous le dissimulons point, il serait peut-être facile aux malveillants dé réussir dans leurs projets. Il entre tous les jours dans cette grande ville un nombre considérable d'hommes armés, les uns en uniformes, les autres en bourgeois. Nous sommes assurés que Joubert, ci-devant adjudant du général Dalton, est ici : on travaille la garnison. Nous sommes à la découverte des conspirateurs. Nous vous informerons des mesures que nous aurons prises. Nous croyons prudent, dans cette, circonstance, de ne pas envoyer notre arrêté à la Convention; nous, la prévenons que nous vous l'adressons directement.
« Signé: Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai), Robert, Treilhard. »
N° 5.
« Les commissaires de la Convention nationale près l'armée et dans les pays de la Bel-
gique, de Liège, etc., informés que des gens sans aveu et des malveillants se réunissent en assez grand nombre dans la ville de Lille; qu'il est très important de surveiller la conduite de ceux qui s'y rendent et qui n'ont point de fonctions à remplir, de veiller surtout à ce qu'il ne s'introduise aucun individu suspect dans cette place forte; qu'il est indispensable de s'assurer de ceux qui par leur ancien état, leurs liaisons et leurs habitudes avec les ennemis de la République, peuvent, par des intelligences perfides, entretenir avec eux une correspondance funeste, requièrent le chef dé brigade, commandant dans cette ville, de faire mettre en état d'arrestation provisoire le nommé Joubert, et quatre autres particuliers logés avec lui à l'hôtel Mariem-bourg, de faire visiter leurs papiers, et de s'en saisir; et arrêtent qu'il leur rendra compte des mesures qu'il aiira prises pour l'exécution du présent arrêté.
« Fait à Lille, le 27 mars, an II de la République.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai), Robert, Carnot et Lesage-Se-nault. »
N° 6.
« Nous, membres de la Convention nationale, ses commissaires près l'armée de la Belgique, et pour le recrutement dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais, informés que le citoyen Wandewalle, demeurant à Lille, chez la veuve Platrel, rue xles Fossés, s'est rendu suspect par ses propos et ses liaisons ;
« Arrêtons que le citoyen Wandewalle sera sur-le-champ mis en état d'arrestation provisoire et que les scellés seront apposés sur ses papiers, par le citoyen Delapierre, juge de paix de cette ville.
(( Fait à Lille, le 27 mars an II de la République.
ù Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (De Douaij, Robert, Lesage-Se-nault. » •
N°7.
(( Les commissaires de la Convention nationale près l'armée de la Belgique, informés que des gens sans aveu et des malveillants se réunissent en assez grand nombre dans la ville de Lille; qu'il est très important de surveiller la conduite de ceux qui s'y rendent, et qui n'ont point de fonctions à remplir, de veiller surtout à ce qu'il ne s'introduise aucun individu suspect dans cette place forte; qu'il est indispensable de s'assurer de ceux qui, par leur ancien état, leurs liaisons et leurs habitudes avec les ennemis de la République, peuvent, par des intelligences perfides, entretenir avec eux une correspondance funeste, requièrent le chef de brigade, commandant en cette ville, de faire mettre en état d'arrestation provisoire, le nommé C laissais; de faire visiter ses papiers, et de s'en saisir; arrêtent qu'il leur rendra compte des mesures qu'il aura prises pour l'exécution du présent arrêté.
« Fait à Lille, le 28 mars, an II de la République.
« Signé :_ Delacroix, Gossuin, Robert, Carnot, Lesage-Senault. »
N° 8.
« Les commissaires de la Convention nationale près l'armée de la Belgique, au comité de sûreté générale de la Convention nationale.
« Citoyens nos collègues,
« L'état politique et militaire de cette partie de la frontière devient de plus en plus inquiétant : partout de la tiédeur; partout des gens sans aveu, qu'on dit envoyés de Londres, Vienne, Berlin. Les citoyens Dubuison, Proly et Pereyna, tous trois commissaires envoyés par Lebrun, nous ont laissé sentir que les dispositions de Valenciennes étaient telles, que peut-être elle ne pourrait pas faire de résistance. Ils ont ajouté que Dumouriez devait évacuer Tournay ce soir; que déjà Mons et Na-mur étaient abandonnées; enfin que le projet du général était de jeter son monde dans les places, et de ne conserver en corps d'armée que 8,000 hommes destinés à inquiéter l'ennemi entre ces villes.
« Vous parlerons-nous particulièrement de Lille? Vous dirons-nous que dans le moment actuel il ne se trouve pas 300 volontaires nationaux pour toute garnison 1 Faudra-t-il que vous appreniez qu'au milieu de cet orage, nous sommes occupés matin et soir à empêcher l'explosion du complot qui a attiré notre présence ici 1 Oui, citoyens, il faut que vous sachiez tout cela; il faut que vous connaissiez dans toute leur étendue, les malheurs qui menacent notre patrie. Nous avons fait arrêter cette nuit deux agents présumés de l'Autriche; nous allons les interroger et prendre les mesures les plus rigoureuses pour écarter de cette ville tout ce qui pourrait alarmer les habitants, en exposant la place aux dangers de la trahison. Vous pourrez vous faire dire par Lebrun quel est le degré de confiance qu'on doit donner aux trois commissaires dont nous venons de parler.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai), Robert, Treilhard. »
N° 9.
Lille, 31 mars, an II de la République.
« Les commissaires de la Convention nationale près l'armée de la Belgique à la Convention nationale.
« Citoyens nos collègues,
« Nous vous envoyons un exemplaire du règlement de police que la municipalité de cette ville nous a présenté. Ce règlement renferme des mesures de sûreté générale, que la municipalité n'oserait mettre à exécution sans y être autorisée par nous : et, vu la difficulté des circonstances, nous n'avons pas cru devoir balancer un seul instant à le revêtir de notre approbation; nous avons même applaudi au zèle et à la surveillance des officiers municipaux.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin
(de Douai), Robert. »
« Arrêté du conseil général de la commune de Lille, concernant la police, du 28 mars 1793, l'an II de la République française.
a L'affluence des étrangers, tant militaires qu'autres, exige que ceux qui sont chargés de maintenir l'ordre et la tranquillité puissent employer à cet effet des moyens efficaces et prompts.
( Il faut que non-seulement tous les étrangers soient assujettis à une surveillance sage et active, mais que tous les citoyens même se conforment exactement aux règles prescrites; il faut que tous les étrangers soient connus, afin qu'aucun ne soit suspect.
« Les agents de la police ne doivent pas pouvoir seulement s'introduire dans les lieux publics, mais ils doivent pouvoir pénétrer aussi dans l'asile de tous les citoyens, lorsque la sûreté générale exige cette mesure extraordinaire.
« Ce n'est pas assez que le conseil général de la commune soit permanent, et se divise en différents comités, tous chargés d'objets relatifs à la police et aux subsistances; ce n'est pas assez que les chefs militaires employent, comme ils en ont été requis, tous les moyens qui sont en leur pouvoir, pour empêcher de séjourner dans la ville tous les militaires qui y arrivent sans chefs, sans congés, sans billet d'hôpital ou sans justifier d'une mission légale. Ce n'est pas assez enfin que la garde nationale de Lille, dont le zèle est infatigable, remplisse avec exactitude toutes les réquisitions qui lui sont faites, il faut encore que tous les citoyens soient, en quelque sorte, en surveillance permanente; il faut que tous ceux qui sont investis de quelque portion d'autorité par le suffrage de leurs concitoyens, correspondent avec une constance imperturbable, à tout ce que l'on attend d'eux; il faut enfin que de nouveaux agents soient créés, il est reconnu que le besoin des circonstances l'exige.
« En conséquence, ouï le procureur de la commune, nous maire, officiers municipaux et notables, avons résolu et arrêté les points et articles suivants, sous l'autorisation des membres de la Convention nationale, qui se trouvent actuellement en cette ville.
« Art. 1er. Les citoyens commissaires des six
sections tiendront des séances permanentes, aussi longtemps que les
fonctions qui leur sont déléguées l'exigeront; ils se concerteront avec
la municipalité sur l'organisation intérieure de leurs bureaux : les
frais en seront avancés par la commune.
« Art. 2. Il sera nommé par le conseil général 12 commissaires provisoires de police; l'exercice des fonctions qui leur seront attribuées, ne durera qu'autant que le conseil général le jugera nécessaire : ils porteront pour marque distinctive, un ruban tricolore en sautoir; leur traitement sera fixé par le conseil général.
« Art. 3. Il sera adjoint aux consignes des portes de la ville, des surveillants en nombre suffisant pour qu'ils puissent se relever, afin que la loi concernant l'exhibition des passeports soit rigoureusement exécutée.
« Art. Toute personne non actuellement domiciliée en ville, de quelque sexe, état ou profession qu'elle soit, ne pourra passer la
nuit en ville, sans s'être présentée, accompagnée de deux citoyens connus qui en répondront, au bureau de la section dans l'étendue de laquelle elle se propose de loger.
« Art. 5. Les commissaires de sections tiendront note sur leurs registres, des noms, surnoms, âge, profession et demeure de l'étranger qui leur sera présenté, ainsi que du lieu de sa naissance, du temps qu'il déclarera vouloir séjourner, et de l'objet de son séjour.
Art. 6. Lesdits commissaires donneront aux étrangers qui leur auront été présentés, et sur le compte desquels ils n'auront aucun motif de suspicion, une carte portant le cachet de la section et la signature d'un commissaire avec le nom de l'étranger, le numéro et la date de l'enregistrement, et le temps du séjour.
« Art. 7. Les personnes que les commissaires de sections regarderont comme suspectes, seront conduites à la municipalité, où elles seront interrogées devant l'un des comités, qui tiendra procès-verbal d'audition, s'il y échet, statuera ce que de droit, suivant l'exigence des cas, et pourra même constituer la personne suspecte en état d'arrestation.
« Pour faire conduire à la municipalité les personnes qu'ils regarderont comme suspectes, les commissaires de sections pourront requérir la force armée.
« Art. 14. Les billets de logement donnés jusqu'à ce jour, sont révoqués; les militaires qui voudront continuer à être logés chez les habitants, devront se présenter de nouveau à la municipalité et il est expressément défendu à tout citoyen d'admettre chez lui un militaire qui n'aura pas fait renouveler son billet de logement.
« Art. 15. Les anciens règlements concernant la police dés cabarets et autres lieux publics, et la déclaration des étrangers, sont maintenus : leur exécution sera spécialement attribuée aux commissaires provisoires de police, qui, à cet effet, devront visiter souvent les auberges, cabarets, cafés, maisons de jeux et autres lieux publics, en prenant préalablement les renseignements qu'ils trouveront convenir, dans les registres des commissaires de sections.
« Art. 16. Dans les cas de contraventions aux anciens règlements ci-dessus cités, les commissaires provisoires de police pourront requérir la force armée, et même constituer en état d'arrestation, ainsi que dans tous les cas où la prudence et l'exercice de leurs fonctions l'exigeront, à charge d'en faire dans le jour, leur rapport à la municipalité.
« Art. 17. Les contraventions aux règlements concernant la police des cabarets et la déclaration des étrangers, seront punies d'une amende de 30 livres tournois au moins, laquelle pourra être augmentée par le tribunal de police municipale; selon la gravité des cas, sans préjudice aux peines de policé correctionnelle, s'il y échet ; le jugement ne sera pas sujet à l'appel, les amendes se paieront de suite entre les mains du sergent de police, à péril d'emprisonnement, et la moitié de l'amende sera au profit du dénonciateur; non seulement les cabaretiers, mais aussi les personnes qui seront trouvées dans les cabarets après les heures prescrites seront sujettes à la condamnation de l'amende.
« Art. 18. Les visites domiciliaires pourront avoir lieu, soit de jour, soit de nuit, chez tous les citoyens indistinctement; elles seront faites sur la réquisition du procureur de la commune, par un officier municipal, ou un commissaire provisoire de police, qui pourront se faire accompagner d'un ou de plusieurs commissaires de sections.
« Art. 8. Aucun habitant, aubergiste ou autre, ne pourra donner le logement à un étranger, sans qu'il ai't exhibé la carte de la section, ou un billet signé par un officier municipal, lequel ne sera donné qu'aux personnes qui auront été renvoyées à la municipalité par les commissaires des sections.
( Art. 9. Tous habitants autres que ceux qui sont chargés de fonctions publique et élus par le peuple, devront aussi se munir d'une carte de leurs sections respectives. Il en sera de même de tous les étrangers qui sont actuellement en ville.
« Art. 10. Tout habitant ou étranger devra exhiber sa carte de section, lorsqu'il en sera requis par les officiers municipaux, les commandants militaires, et les officiers de police et de sûreté, légalement constitués ou autorisés à cet effet.
« Art. 11. Toute personne qui n'aura pas fait sa déclaration à la section, ou qui en aurait fait une fausse, ou enfin qui n'exhiberait pas sa carte, sera conduite à la section, et de là j à la municipalité, s'il y échet, pour y être ordonné et statué ce que de droit, suivant l'exigence des cas.
« Art. 12. Tout habitant ou étranger, qui, changeant de domicile ou de logement,- passerait d'une section à une autre, devra se présenter au bureau de la section dans l'étendue de laquelle il entend sa loger, pour y obtenir une carte civique.
(( Art. 13. Sont exceptés des dispositions relatives aux cartes de sections, les militaires ou autres personnes attachées à l'armée, à qui il aura été donné des billets de logement pour trois nuits; mais, si leur séjour devait durer davantage, les militaires ou autres devraient se munir d'une carte civique.
« Art. 19. Pour que le service public ne puisse rencontrer aucune entrave, toute personne de quelque profession qu'elle soit, qui sera requise par un officier municipal ou un commissaire de police, pour fournir ou faire ce qui est relatif à son art, métier ou profession, sera tenue d'obtempérer sur-le-champ, à péril d'emprisonnement.
« Art. 20. Pour ne donner lieu à aucune inquiétude sur les subsistances, et éviter que les suggestions des malveillants ne fassent craindre une disette apparente au milieu d'une abondance réelle, les boulangers et les bouchers seront tenus de s'approvisionner comme de coutume; ceux dont les boutiques seront trouvées dépourvues, seront condamnés, sans appel, à une amende de 150 livres tournois, pour chaque ^ jour de contravention, sans préjudice à plus forte peine, le cas échéant : la moitié de l'amende sera au profit du dénonciateur.
« Pour que personne n'en ignore, le présent arrêté sera lu, publié et affiché en la manière accoutumée.
« Fait en l'assemblée du conseil général, le 28 mars 1793, l'an II de la République française.
( Signé : Rohart, secrétaire greffier.
« Approuvé comme mesure de sûreté générale, pour être provisoirement exécuté.
« Lille, le 29 mars, an II de la République française.
« Les commissaires de la Convention nationale.
« Signé : Delacroix, Gossuin, Merlin (de Douai), Treilhard, Robert, L. Carnot, Lesage-Senault. »
Ici se termine l'exposé de nos opérations; elles ont été, comme l'on a vu, très multiples. La Convention nationale, en fixant son choix sur nous, pour cette mission, nous chargea d'une tâche d'autant plus intéressante et délicate, qu'elle comprenait une vaste étendue de pays, et différentes parties d'administration. Nous avons scrupuleusement rempli nos devoirs avec ce zèle, cette activité et ce désir du bien, que l'on avait droit d'attendre de nous; tout ce qui a été en notre pouvoir de faire, nous l'avons fait, sans aucune exception des choses et dès personnes; c'est à la Convention nationale, c'est à la République entière que nous soumettons notre conduite.
( Signé : Delacroix, Gossuin, Danton, Merlin (de Douai), Robert, Treilhard.
TABLE DES MATIÈRES (1)
première partie.
Pages. .
De Varmée............145
Article premier. Subsistances..................................146
— II....... Solde et habillement des troupes. 147
— III...... Hôpitaux.......................148
IV...... Police et instructions..................149
— V....... Tribunaux militaires..................151
— VI...... Mesures contre les officiers prévenus de délits ou de fautes.
154
— Vil..... Mesures contre les soldats qui
ont abandonné leurs drapeaux.....................- 159
— VIII..... Service des çommissaires des
guerres.................... 161
— IX......Charrois de l'armée........... 162
— X....... Des troupes belges et liégeoises. 162
— XI.....^ Défaite de l'avant-garde de la
Roër — Levée du siège de Maëstricht. — Evacuation de Liège. — Suite de cet événement ..................... 165
— XII..... Réquisition des gardes nationa-
les des départements du Nord, Pas-de-Calais, de la Somme, de l'Aisne et des Ardennes.173
— XIII..... Mesures pour assurer les com-
munications entre los parties de l'armée de Belgique.....179
Article XIV.....Mesures pour procurer à la République des étoffes, des effets de campement, des chevaux, des bois ctes charron- nage et de mariné......... 180
XV............Mesures pour la conservation des armées, munitions et approvisionnements de l'armée, de l'évacuation de la Belgique................... 182
— XVI............Mesures pour la défense des côtes de la Flandre et des frontières du Nord, notamment de la place de Lille..»
— XVII.... Vues proposées au comité de la guerre.................. 187
— XVIII... Conduite de Dumouriez....... 188
seconde partie.
Exécution du décret du 15 décembre 1792 et de celui du 31 janvier 1793.
Article premier. Suppression des autorités établies avant la publication du décret du 15 décembre-1792.,...................... 201
— II.......Abolition des impôts et des con-
tributions qui existaient lors de la publication du décret du 15 décembre................ 205
— III...... Des biens et effets appartenant
an fisc ennemi, aux fauteurs, adhérents et satellites volontaires de la tyrannie, aux établissements publics et aux communautés tant séculières que régulières............. 208
— IV......Commissaires nationaux du con-
seil exécutif provisoire..... 214
— V...J. . Convocation, tenue ei. résultats
des assemblées primaires.. 220
— VI......Effets et suite des vœux émis
dans les assemblées primaires........................ 231
troisième partie.
Exécution des lois relatives aux biens, meubles et immeubles appartenant à la République française dans le pays de la Belgique et le pays de Liège.
Article premier. Biens provenant des communautés, établissements publics et bénéfices supprimés en France................. 235
— Il....... Immeubles des émigrés situés
dans la Belgique........... 236
— III...... Meubles des émigrés trouvés
dans la Relgique et le pays de Liège................... 237
— IV.......Jugemenis rendus parles tri-
bunaux belges sur les biens des émigrés français....... 2i0
quatrième partie.
Mesures de police et de sûreté.
Article premier. Mesures relatives au service des
postes.................... 241
— II.......Mesures relatives aux faux as-
signats.................... 214
— III......Mesures relatives aux émigrés
et aux prêtres déportés..... 246
— IV...... Dispositions diverses......... 247
— V.......Mesures relatives à la sûreté de
la place de Lille.......... 253
fin de la table.
a la séance de la convention nationale du
lettre (1) du général Custine au Président de la Convention nationale (2).
Au quartier général, le
« Je viens vous faire le récit des événements qui sont arrivés à l'armée que je commande. Vous connaissez, citoyen Président, qu'elle était ma position; j'avais réuni ce que j'y avais de troupes, sur deux points orincipaux. Un de ces points occupait Bingen, l'autre occupait............ J'ai rendu compte des avantages
que nous avions obtenus, entre les avant-postes de la République et ceux de l'armée prussienne.
« Le mardi dans l'après-midi les ennemis revinrent en force ; ils recommencèrent l'attaque; dès que je m'en aperçus, j'ordonnai sur-le-champ à une brigade du 13e régiment d'infanterie de se porter sur les hauteurs à la gauche de Bingen, la seule que je voulusse occuper. Aussitôt je partis pour me rendre sur ces hauteurs, où j'arrivais presque en même temps que ces brigades; n'entendant plus le canon, j'envoyais dire au général Newinger, qui était dans la plaine, de venir me rejoindre sur la hauteur, d'où je découvrais l'ensemble des positions des ennemis. Là je lui fis voir que l'infanterie des ennemis se prolongeait sur sa gauche; je lui ai exposé la crainte que j'éprouvais qu'elle ne parvînt à s'emparer de quelques chemins accessibles dans la montagne dont elle nous délogerait de' la sommité que nous occupions par la disposition de la veille, parce que, dans la reconnaissance très exacte que j'avais faite des lieux, j'aurais pu perdre du terrain. Le général Newinger m'avait déjà assuré qu'il avait repoussé l'ennemi, il me dit qu'il avait coupé les chemins, et qu'il était sûr du succès.
« En effet à 10 heures du matin, une colonne d'infanterie avait tenté de s'emparer de cette hauteur qui alors était occupée par cinq bataillons du département de la Corrèze, qui tuèrent 400 hommes. Cette action donna le temps au général d'envoyer quatre compagnies de grenadiers, qui déterminèrent les Prussiens à la retraite. Il était environ deux heures après-midi. Plus de trois heures étaient écoulées tranquillement. Je pressais itérative-ment le général Newinger, de changer de position, il me répondit que son honneur était intéressé à la conserver et que j'aimais trop cet honneur pour vouloir le ternir. « Apprenant qu'il paraissait des troupes vers
le............. je m'y transportai moi-même. On
avait tiré quelque temps le canon sur les troupes ennemies qui paraissaient. Une demi-heure ne s'écoula pas, qu'une canonnade très vive recommença du côté de Bingen, et bientôt après j'entendis une forte mousqueterie, qui dura plus d'une heure. Je rassurai les troupes de ma gauche, qui me paraissaient ébranlées. Cette mousqueterie cessa tout à
coup ; ayant poussé tout d'un coup du côté de Bingen, occupé par ma gauche, je continuais à m'occuper de l'observer; mais quel fut mon sujet de crainte, d'apprendre par une ordonnance qui m'était envoyée, que la hauteur sur laquelle je pouvais compter, m'avait été enlevée; que vainement les cinq compagnies des bataillons de la Corrèze s'étaient battues jusqu'à l'extrémité, que leur artillerie avait aussi fait vainement un effet terrible sur la colonne première; que n'ayant point été secondés par une colonne de grenadiers qui avaient abandonné leurs canons pour se retirer avec une précipitation inouïe, l'artillerie ennemie ayant tiré sur notre cavalerie, dont la hauteur emportée appuyait au flanc, elle avait été obligée de se retirer par le tour de la hauteur, que j'avais voulu faire accepter et qui appuyait son flanc gauche. La cavalerie ennemie, ayant profité de cet avantage, avait aussitôt traversé le marais et avait chargé notre cavalerie, qui l'avait d'abord repoussée. Les ennemis, s'étant ralliés et étant revenus à la charge, notre cavalerie s'en laissa imposer par leur nombre, et se retira sans écouter la voix du commandant qui leur criait de charger. J'appris aussi que le général Newinger était fait prisonnier. Bingen n'était point encore au pouvoir des ennemis, mais d'une part, je ne comptais pas^ assez sur les troupes qui y étaient pour espérer de la conserver, et de l'autre la hauteur que j'avais voulu occuper, était enlevée; d'un autre côté, les escarpements qui occupaient les flancs n'était qu'une flanque droite.
« Je ne connaissais pas alors la fuite des cinq bataillons de grenadiers de Eugenhen, mais en réfléchissant sur le peu de forces comparées à celle de l'ennemi, je me décide à abandonner ce projet, non que j'en craignisse le reproche, car j'étais sûr, en l'abandonnant, d'y trouver la mort; il est des occasions où elle est douce. Je fus arrêté par la réflexion que ma témérité compromettrait le salut de l'armée de la République, qui m'était confiée, je l'ai donc abandonné et je me suis résolu à la retraite.
« Ma position, sans doute, était indépendante, si elle n'eût été forcée; et en effet, si j'avais eu de la cavalerie, je ne l'eusse jamais abandonnée, et les ennemis ne m'eussent jamais forcé; mais comment subsister et garder les passages libres, sans un secours suffisant de cavalerie. Les ennemis ne nous ont pas montré moins de huit à neuf mille chevaux; il a donc fallu penser à la retraite ; la différer, ç'aurait été la rendre difficile; autant il m'était aisé à me conserver dans ma position où j'étais inattaquable, autant aurais-je opposé d'obstacles et de difficultés à pouvoir subsister, quand neuf mille hommes de cavalerie viendraient m'enlever successivement mes convois. Je pris des mesures auprès de Worms; je vais me tirer successivement sur Landau, cherchant des positions où je puisse me passer de cavalerie, puisque je n'en ai point; je suis obligé de faire quitter et détruire tous les magasins de fourrages, qui étaient, malgré mes ordres, renouvelés par les administrateurs, réunis à Worms et.........par la trahison évidente des administrateurs du département de ..... du directoire des subsistances. Ma position est d'autant plus affligeante, que j'ai reçu cette nuit la nouvelle positive que le revers des Vosges
-était entièrement abandonné par l'armée de la Moselle; je n'ai ni cavalerie, ni artillerie, ni garnison, et la pénurie que j'éprouve de ces derniers, fait que je suis obligé de laisser mon train d'artillerie à Mayence. Au milieu de ces événements fâcheux, sans doute, il ne faut désespérer ni du salut de Mayence, ni de celui des départements du Rhin. J'ai mis dans Mayence le général Toiret, dont les talents sont depuis connus. Je lui ai envoyé, pour le seconder dans le commandement de la nombreuse garnison qui y est, le lieutenant-colonel Pulvain, dont le civisme, la bravoure et l'in-. telligence sont également prouvés. Je laisse à Cassel le général de brigade Regnier, infiniment recommandable; pour moi, je vais m'occuper de couvrir l'entrée des départements # du Rhin, et j'espère vous écrire bientôt que j'ai une position qui les mettra à l'abri; j'ai reçu des commissaires de la Convention à Mayence, l'ordre le plus positif de sévir avec la plus extrême rigueur, contre les infâmes grenadiers qui ont abandonné leur poste, et qui sont cause des malheurs qui nous sont arrivés. Les infâmes ont fui jusqu'à Mayence sans s'arrêter.
« Le général en chef de l'armée du Rhin, « Signé : Custine. »
a la séance de la convention nationale du
Discours prononcé par Garat, ministre de
VIntérieur, au nom du conseil exécutif.
Texte du Moniteur (2).
La Convention a décrété que le conseil exécutif, le département et la municipalité de Paris se rendraient à sa barre pour y rècevoir ses ordres; nous nous présentons en exécution de ce décret. Nous nous étions rassemblés ce matin pour nous concerter sur le compte que vous nous avez demandé de l'état de la République ; mais ayant reçu des nouvelles de la Belgique, nous sommes allés les communiquer au comité de sûreté générale.
J'ai pris, de concert avec le maire de Paris, toutes les mesures qui étaient en mon pouvoir pour maintenir l'ordre dans cette ville; j'espère qu'il ne sera pas. troublé.
C'est le moment où les ministre^ de la République doivent être réellement des ministres républicains, et je puis assurer à l'Assemblée qu'il n'en est aucun d'entre nous qui, dans l'occasion, ne jouât le rôle de soldat. (Applaudissements ).
Dans ce moment où des nominations importantes vont être faites, où plusieurs généraux vont être renouvelés, et que le conseil exécutif va être chargé d'opérations aux-
quelles le sort de la République est attaché, j'ignore quelle est l'opinion de mes collègues, mais la mienne serait que ces nominations doivent être faites par l'Assemblée elle-même.
Citoyens, l'époque la plus périlleuse de l'Assemblée constituante fut l'époque de la fuite du roi à Varennes. Eh bien ! dans ce moment elle saisit d'une main ferme les rênes du gouvernement; elle appela dans son sein les agents civils et militaires, et ils sortaient de cette enceinte investis de la confiance publique.
Si les mêmes mesures étaient prises en ce moment, si l'Assemblée faisait elle-même les nominations, si les ministres n'étaient que les exécuteurs matériels de ses ordres, j'ose croire ! que le salut de la République serait certain.
Je demande pardon à l'Assemblée de m'ex-pliquer avec tant de chaleur, mais c'est le sentiment profond qui m'inspire., (Applaudissements.)
Texte du Journal des Débats ( 1 ).
Citoyens, ce matin tous les ministres se concertaient sur le compte général qu'ils devaient vous rendre de l'état de la République, quand les nouvelles leur sont parvenues ; nous sommes accourus aussitôt au comité de défense ; générale, et nous avons pris, avec le maire de ^ Paris, toutes les mesures extraordinaires propres à"maintenir l'ordre public.
Ce1 moment est pour des ministres républicains celui d'être à la fois ministres et soldats s'il le faut.
Plusieurs généraux ont besoin d'être renouvelés; Mon opinion particulière serait que ces nominations fussent faites par la Convention nationale elle-même.
L'époque la plus périlleuse et la plus glorieuse de l'Assemblée constituante fut celle de la fuite du roi. Elle saisit alors toutes les rênes du gouvernement. Les ministres et les. généraux, après lui avoir prêté le serment de fidélité, sortaient de sa barre, investis de la confiarce publique, et jamais la France ne fut plus calme et le peuple plus majestueux. Dès ce moment il fut décidé dans la destinée que la France serait une République. Eh bien, ci-, toyens, en vous rappelant cette époque glorieuse, faites que celle-ci lui ressemble. Peut-être aussi serait-il nécessaire que les principales délibérations du conseil exécutif fussent prises au milieu de la Convention nationale, etMe donner aux membres de ce conseil im autre nom que celui de ministres, qui rappelle toujours au peuple tant de trahisons et de crimes. Citoyens législateurs, je soumets ces réflexions à votre sagesse.
Texte du Logotachygraphe (2).
Citoyens législateurs, aujourd'hui de meilleure heure qu'à l'ordinaire, nous nous sommés rendus à peu près tous les ministres dans la salle du conseil pour nous concerter sur le oompte général que vous nous avez demandé. C'est à ce moment que nous sont arrivées les nouvelles de vos commissaires de la Belgique. Nous sommes accourus sur-le-champ au comité de défense générale. Là, nous avons entendu le commandant général demander à être au-
torisé à choisir parmi les militaires qui lui étaient connus, et dans lesquels il avait la plus grande confiance^ pour composer un état-major, et sur-le-champ, il est reparti pour préparer les forces qui sont nécessaires pour la tranquillité de Paris : le maire s'est concerté avec lui à cet égard.
Citoyen Président, c'est le moment pour les ministres de la République, car nous sommes tous républicains, de faire ici leur profession de foi, et je puis assurer, au nom de tous les citoyens, qu'il n'est aucun d'eux qui ne joue non seulement le rôle de ministre, mais de soldat s'il le faut. J'ignore, citoyen Président, les opinions de mes collègues, mais la mienne serait que, vu que dans ce moment il importe essentiellement au salut de la patrie, que tous les agents de la République soient investis de la plus grande confiance populaire; mon opinion, dis-je, serait que tous les agents fussent choisis par la Convention nationale elle-même.
Citoyen Président, je rappellerai à la Convention une époque la plus périlleuse et la plus glorieuse dans le temps de l'Assemblée Constituante; ce fut l'époque de la fuite du roi à Yarennes. A ce moment, l'Assemblée constituante saisit d'une main ferme les rênes du gouvernement; elle faisait venir à sa barre les hommes à qui elle voulait confier l'exécution de ses ordres : ces hommes sortaient de sa barre environnés de sa confiance, et par conséquent, ils sortaient investis de la confiance publique. Je supplie la Convention nationale de se rappeler quel fut alors le maintien de la ville de Paris, le maintien de toute la France : rien, ne fut si imposant, et dès ce moment il fut décidé que la France serait République. Citoyen Président, si les mêmes mesures étaient prises, si la Convention nationale qui s'est déclarée permanente, faisait elle-même toutes les nominations, si les délibérations plus importantes du conseil exécutif étaient prises dans son sein, si les ministres n'étaient que les exécuteurs matériels de ses décrets, j'ose croire que le salut public en serait plus assuré.
Je demande pardon à la Convention nationale, si je m'exprime avec une chaleur qui n'est peut-être permise qu'à ses membres, et qù'un de ses ministres ne doit pas se permettre ; mais soyez assurés que c'est le zèle, c'est le sentiment profond qui m'inspire et qui me fait un besoin de vous communiquer ces mesures; il y a longtemps que je suis persuadé qu'il n'y en a pas de meilleure pour le salut de la République.
Séance permanente du
présidence de bréard, delacroix et dtjbois-crancé, anciens Présidents.
La séance est reprise à sept heures et demie du soir.
Le président Jean Debry, très incommodé d'un crachement de sang, se présente au fau-
teuil ; la Gonventionl'engage à se retirer; Vexprésident Brèard le remplace (1).
présidence de bréard, ancien Président.
, secrétaire, donne lecture des lettres suivantes :
1° Lettre des officiers municipaux de Fé-camp, qui font connaître à la Convention l'état de détresse dans lequel se trouve actuellement cette ville; cette lettre est ainsi conçue (1) :
Le
« Citoyens Législateurs,
« La commune de la ville de Fécamp va se voir incontinent plongée dans la plus affreuse • disette. Son marché ne lui offrait samedi dernier que six sacs de blé pour la subsistance de 8,000 âmes dont elle est composée, sâhs les communes voisines qui se la procurent au même marché.
« Plusieurs mères de familles retournèrent chez elles, leurs poches vides, mêler leurs larmes à celles de leurs malheureux enfants qui les pressaient en vain de les alimenter, puisque les boulangers mêmes manquaient de pain.
L'Assemblée constituante, la Législative et ensuite la Convention ont confirmé aux pauvres de Fécamp l'aumône journalière à laquelle * les biens des ci-devant religieux bénédictins étaient littéralement affectés; le directoire du département délivre, en conséquence, à la municipalité de cette ville les sommes nécessaires à ce légitime emploi, qui ne peut s'effectuer à cause de l'impossibilité d'achat de grains, de manière que douze cents pauvres, nourris chaque jour du pain de cette aumône, vont périr de faim.
« La commune de Fécamp ne peut pas se flatter d'aucun espoir d'approvisionnement prochain de blé dans sa halle, car ses membres ont invité les cultivateurs voisins chez eux de la fournir et ceux-ci n'ont pu accorder l'effet de cette réclamation.
« Que vont donc faire les malheureux habitants de Fécamp ? à quelles ressources leur municipalité va-t-elle recourir pour faire taire leurs justes plaintes? Elle n'en a aucune; elle les a épuisées toutes; elle s'est adressée au département qui l'a renvoyée au district de Montvilliers qui, quoiqu'on ne lui demandât qu'une voiture de blé, a répondu qu'il lui était impossible de lui en accorder; les villes de Saint-Valéry-en-Caux et de Dieppe en ont cependant obtenu; pourquoi ont-elles été préférées ?
Elles ne surpassent pourtant pas Fécamp en républicanisme et elles ont
bien moins de pauvres dans leur enceinte; Fécamp a toujours su maintenir
la tranquillité par l'exécution de vos décrets; elle a fourni beaucoup
de volontaires pour les frontières et de marins pour nos vaisseaux; la
municipalité eut enfin
« La ville de Fécamp est la seule restée sans secours et la seule exposée à être la proie de la plus terrible insurrection qui, malheureusement, s'étendra peut-être sur les laboureurs voisins que le peuple affamé soupçonnera d'un refus d'approvisionner son marché, car la famine ne respecte plus les propriétés, la force publique ne peut plus contenir les insurgés ou si elle les contient, c'est par l'effusion du sang de ses malheureux frères qui n'ont commis d'autre crime que celui de vouloir obtenir, par la force, l'aliment qu'ils n'ont pu se procurer en payant.
« Le conseil général de la ville de Fécamp vous atteste, législateurs, que sans l'aménité du caractère de son maire, sans la voix persuasive d'un meilleur avenir très prochain qu'il a employée à l'égard du peuple, c'en était fait; le désespoir s'en emparait et le trouble allait commencer.
« Yoilà législateurs, le tableau vraiment affligeant de la commune de Fécamp; elle réclame les actes d'humanité que vous avez toujours exercés envers ceux qui y ont eu recours; elle vous invite donc à donner les ordres les plus prompts et les plus précis pour qu'il lui soit fourni la subsistance dont elle a le plus pressant besoin, car le conseil général n'est pas certain que cette pétition vous parvienne avant que la disette ait produit ses plus affreux ravages.
« Fécamp, le 29 mars 1793, l'an II de la République française.
« Signé : Fouray, maire ; Bellet, Richard.' Aubry; Vittecoq; Bidel; Sandret; Bé~ nard ; Leborgue ; Louis Poitevin ; Jean Collot, Boullanger; Caumont; L. Guillaume ; Louis Ladiré ; Divaux ; Bérigny ; Roux, secrétaire■ »
«La Convention renvoie la demande au ministre de l'intérieur.)
2° Lettre du citoyen Lasaussaie, commissaire adjoint cm ministère de la 'guerre pour la cinquième division, qui envoie une somme de 250 livres qui lui a été adressée par le général Stettenhoffen; elle est ainsi conçue (1) :
Le commissaire-ordonnateur, adjoint au ministre de la guerre pour la 5e division, au
président de la Gonvention nationale.
Paris,
Citoyen président,
« En l'absence du ministre de la guerre, je m'empresse d'envoyer à la
Convention nationale une somme de 250 livres, adressée par le général de
brigade Stettenhoffen au ministre par une lettre datée du camp, près de
Brull,
Le commissaire-ordonnateur adjoint au ministre de la guerre pour la 5e division.
« Signé : Lasaussaie. »
(La Convention décrète la mention honorable et ordonne l'insertion de cette lettre au Bulletin. )
(1). Citoyens, Dumouriez n'est pas le seul traître ni le seul qui cherche à perdre la République. Après la séance j'ai parcouru différents endroits; et j'ai entendu dire que le bruit courait dans les départements, que la Convention nationale était dissoute. Vous voyez, citoyens, que les ennemis de la patrie prennent tous les moyeijs possibles pour la perdre. Pour empêcher ces calomnies, qui font plus de mal que les poignards et les satellites des despotes, je demande que tout homme qui se permettra de faire croire que VAssemblée est dissoute, ou toute autre chose semblable, soit puni de mort. (Murmures.)
Pour faire croire que la Convention n'est pas dissoute, faisons de bonnes lois.
Plusieurs membres : Oui, oui, et passons à l'ordre du jour.
(La Convention passe à l'ordre du jour.)
, donne lecture de la rédaction définitive du décret rendu à la séance du matin (2), qui rapporte la disposition du décret du 1er avril relatif au citoyens suspendus par les commissaires de la Convention dajis le département du Bas-Rhin (3) et autorise les commissaires dans les départements et près les armées à faire arrêter, même déporter, tous les gens suspects; cette rédaction est ainsi conçue (4) :
« La Convention nationale rapporte la disposition de son décret du 1er de ce mois, par laquelle les citoyens du département du Bas-Rhin, suspendus par les commissaires Couturier et Dentzel, sont autorisés à reprendre leurs fonctions.
« Décrète, en outre,que les commissaires,tant dans les départements, que près les armées, sont autorisés à faire arrêter, même faire déporter dans un autre département, tous gens suspects qui pourront troubler la tranquillité publique, à la charge d'en rendre compte à la Convention dans les 24 heures de leur arrêté.
« Les courriers extraordinaires qui doivent porter dans les départements du Haut et Bas-Rhin les décrets rendus dans la séance de ce jour, seront aussi porteurs du présent décret; et en cas de départ il sera envoyé par un courrier extraordinaire ».
(5) Vous permettez la déportation de fort honnêtes gens; toute une ville
va récla-
propose que la déportation ne puisse se faire que dans un département voisin.
répond qu'il n'a jamais entendu dire autre chose par le second paragraphe de son projet de décret.
(La Convention adopte la rédaction définitive présentée par Charlier.)
Un membre (1) propose de charger le comité des décrets de prendre toutes les mesures nécessaires pour que les trois volumes du Livre Rouge soient imprimés sans délai et l'autorise à faire travailler jour et nuit à cet ouvrage.
(La Convention décrète cette proposition.)
, au nom du comité des finances, fait un rapport et présente un projet de décret pour déclarer qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur la proposition du ministre des contributions publiques, tendant à ce que les certificats exigés par la loi du 5 février dernier ne pourront être refusés aux employés de l'enregistrement que pour faits d'incivisme articulés et vérifiés; ce projet de décret est ainsi conçu (2) :
« La Convention nationale, sur la proposition faite par le ministre des contributions publiques, tendant à ce que les certificats exigés par la loi du 5 février dernier ne pourront être refusés aux employés de l'enregistrement que pour faits d'incivisme articulés et vérifiés; après avoir entendu le rapport du comité des finances, décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer; que ladite loi du 5 février, et toutes celles subséquentes relatives aux certificats de civisme, seront exécutés sans délai selon leur forme et teneur, et qu'il sera en conséquence procédé incessamment au remplacement de tous les employés qui n'auront pas exhibé de certificat de civisme, selon les formes établies par la loi du mois de mai 1791, soit par l'administration de la régie du droit de timbre et d'enregistrement, soit par le conseil exécutif, lequel sera tenu de rendre compte de l'exécution des présentes à la Convention nationale dans le délai de quinzaine. »
Un membre (3) demande, par amendement, que les directoires ne puissent retenir les certificats de civisme qu'un temps marqué et qu'ils soient tenus de mettre leur visa dans huitaine.
(La Convention rejette l'amendement et adopte le projet de décret présenté par Mallarmé.)
, au nom du comité des finances, fait un rapport et présente un projet de
décret pour ordonner le versement, dans la caisse de la marine à Toulon,
de la somme de un million empruntée à cette caisse par les commissaires
de la Convention, pour l'appro-
« La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des finances sur la lettre du ministre de la marine, relative à la somme d'un million prise des fonds qui ont été affectés à son département, en exécution d'une délibération des commissaires de la Convention nationale pour l'approvisionnement du département du Var, à Gènes et à Livourne, décrète que sur les vingt-cinq millions mis à la disposition du ministre de l'intérieur pour achats.de blés, il fera remplacer sans délai ladite somme d'un million dans la caisse affectée au service de la marine à Toulon. »
(La Convention adopte ce projet de décret. )
, au nom du comité des financesT fait un rapport et présente un projet de décret relatif aux dépenses d'exploitation et d'entretien des bâtiments qui appartenaient à la ci-devant liste civile; le projet de décret est ainsi conçu (2) :
« La Convention, sur le compte rendu par le compte rendu par le comité des finances, concernant les fonds nécessaires en la présente année pour subvenir aux dépenses d'exploitation et entretien des bâtiments et autres établissements mis par décret du 29 novembre 1792 sous l'administration du ministre de l'intérieur, d'après les états vérifiés et visés des appointements des employés et salaires des ouvriers, décrète ce qui suit :
Art. 1er.
c Pour les six premiers mois de 1793 il sera mis à la disposition du ministre de l'intérieur, jusqu'à concurrence de la somme de 400,000 livres, pour servir à acquitter lesdites dépenses d'exploitation et d'entretien.
Art. 2.
« La Convention nationale charge le ministre de l'intérieur de se procurer tous les renseignements nécessaires et de pourvoir aux mesures suffisantes pour produire toutes les réductions et économies dans l'administration desdits établissements, et de lui présenter d'ici au mois de juillet prochain, avant aucune proposition ultérieure de fonds pour le service des six derniers mois de la présente année, l'état seul indispensable pour cet objet de dépense publique. »
(La Convention adopte ce projet de décret.)
, au nom du comité des finances, fait un rapport et présente un projet de décret pour autoriser la municipalité de Millau, département de l'Aveyron, à emprunter une somme de 40,000 livres', ce projet de décret est ainsi conçu (3) :
« La Convention nationale,- ouï le rapport du comité des finances,
autorise les officiers
(La Convention adopte ce projet de décret.)
, au nom du comité des finances, fait un rapport et présente un projet de décret tendant à autoriser la municipalité de Montauban à emprunter une somme de 160,000 livres; le projet de décret est ainsi çonçu (1) : -
« Sur le rapport du comité des finances, et sur le compte qui a été rendu des délibérations prises au conseil général de la commune de la ville de Montauban au directoire du département du Lot, sur l'avis du district de Montauban, la Convention nationale autorise les officiers municipaux de cette ville à emprunter la somme de cent soixante mille livres pour approvisionnement de ladite ville, à charge de rembourser cette somme sur le produit des ventes, d'imposer le déficit qui pourra se trouver sur les sous additionnels en 1793, selon le mode progressif, et de rendre compte du tout. »
(La Convention adopte ce projet de décret.)
, au nom du comité des finances, fait un rapport et présente un projet de décret pour déclarer qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur ta pétition du conseil général de la commune de Strasbourg tendant à obtenir une nouvelle somme de 500,000 livres sur le Trésor public; le projet du décret est ainsi conçu (2) :
« La Convention nationale, après s'être fait rendre compte par le comité des finances de la pétition du conseil général de la commune de la ville de Strasbourg, tendant à obtenir une nouvelle somme de cinq cent mille livres sur le Trésor public, tant sur les indemnités qu'elle a à réclamer sur la nation, qu'en remboursement des avances faites pour le service public, sauf liquidation;
« Considérant que plusieurs des objets mis au nombre de ceux sur lesquels la commune de Strasbourg prétend recouvrer une indemnité, ne semblent pas en être susceptible, et qu'il lui a déjà été avancé à compte de ladite indemnité une somme de sept cent mille livres, ce qui peut absorber ou excéder ladite indemnité;
( Considérant que les lois des 5 août 1791 et 17 novembre derniers
contiennent des dispositions relatives aux dettes particulières des
villes, pour prévenir toute augmentation de charges et de dépenses
envers le Trésor public et les communes, décrète ce qui suit : er.
« Il n'y a pas lieu à délibérer sur la demande du conseil général de la commune de la ville de Strasbourg d'une somme de cinq cent mille livres pour acompte sur l'indemnité et remboursement des avances faites à la nation par ladite commune, sauf à elle à se conformer aux décrets relatifs aux liquidations des dettes des communes, et notamment aux lois des 5 août 1791 et 17 novembre 1792.
Art. 2.
« La Convention nationale autorise néanmoins ladite commune de Strasbourg, en considération des circonstances particulières où elle se trouve et des besoins urgents de ladite ville, à percevoir à titre de prêt sur les contributions de la même ville qui ont dû rentrer pour l'année 1792, la somme de trois cent mille livres à charge de remboursement au fur et à mesure que le montant des sols additionnels de 1792 se percevra dans le courant de l'année 1793, par la voie des sols additionnels. »
(La Convention adopte ce projet de décret.)
, au nom du comité d'aliénation, présente la rédaction des deux articles réservés (1) du projet de décret sur la vente en détail des châteaux, parcs, enclos, palais épiscopaux et autres grandes propriétés nationales, situées dans les campagnes et dans les villes ; ils sont ainsi conçus (2) :
Dans le cas où la division d'un bien national exigerait l'ouverture d'une rue, et que pour y parvenir il serait jugé nécessaire de faire au nom de la nation l'acquisition des maisons et terrains appartenant à des particuliers, cette acquisition ne pourra avoir lieu qu'en vertu d'un décret de la Convention nationale; ' ou à cet effet l'administrateur des biens nationaux lui enverra toutes les pièces propres à constater les avantages du projet de division, dont l'exécution devra donner lieu à l'acquisition proposée.
( Lorsque la Convention aura décrété l'acquisition au nom de la nation desdites maisons, jardins ou autres terrains, l'évaluation en sera faite par deux experts nommés, l'un par le propriétaire et l'autre par le directoire du district, en prenant pour base le capital à cinq pour cent des loyers ou fermages connus ou présumés; il sera ajouté au prix ainsi réglé un quart en sus, par forme d'indemnité accordée aux propriétaires : le prix desdites acquisitions sera payé par la trésorerie nationale. »
(La Convention adopte ces deux articles, qui deviennent les articles 12 et 13 du décret définitif.)
Suit le texte définitif du décret rendu (3) :
Art. 1er.
« Les châteaux ci-devant royaux qui ne seront pas réservés pour cause d'utilité publique, les palais épiscopaux, les bâtiments, cours et jardins des abbayes, monastères ou congrégations supprimés, lçs grands emplacements nationaux situés dans les villes,,et tous autres biens nationaux d'une grande étendue, dont la vente en masse serait reconnue moins avantageuse, seront divisés et vendus par lots séparés. '
Art. 2.
« Les directoires de district et à Paris le directoire du département, feront lever par des experts, dans le délai de deux mois à compter du jour de la publication du présent décret, les plans visuels de tous ceux des susdits biens qui sont situés dans leurs arrondissements respectifs; et après avoir ouï la municipalité du lieu, dont les dires et réquisitions seront joints aux pièces, ils feront tracer les divisions dont ils seront jugés susceptibles, relativement à leur nature, aux localités, à l'utilité publique, et surtout au plus grand avantage de la vente; ils feront en même temps dresser, par des experts, des procès-verbaux d'estimation, tant desdits biens en masse, que de chacun des lots résultant de la division.
Art. 3.
« Pour faciliter l'exécution de l'article précédent, lesdits directoires sont autorisés à retirer, sous récépissé, des bureaux du contrôle des bâtiments du ci-devant roi, du garde-meuble et de tous autres dépôts, les plans des châteaux, parcs, jardins, conduite des eaux, ainsi que les plans, détaillés qui ont pu être levés de la ville de Paris. Tous dépositaires desdits.plans seront tenus de les livrer et invités à donner les renseignements qui sont à leur connaissance.
Art. 4.
« Si l'exécution du projet de division doit donner lieu à des démolitions, déblais et autres changements quelconques, les experts auront soin d'en donner les détails et l'évaluation dans leurs procès-verbaux.
Art. 5.
« Les directoires de district fourniront leurs observations sur ces plans et procès-verbaux, et les adresseront aux départements qui les examineront, proposeront les changements qu'ils jugeront convenables, et enverront le tout dans la quinzaine qui suivra la réception à l'administrateur des biens nationaux, qui demeure chargé d'arrêter définitivement les projets de division, hors les cas prévus ci-après dans les articles 6, 12 et 17, et d'en suivre l'exécution.
Art. 6.
« Dans le cas où ledit administrateur jugerait les plans et projets de division, susceptibles de changements considérables pour l'amélioration du produit des biens divisés, il
les indiquera aux départements, ceux-ci aux districts; et après avoir recueilli les nouvelles observations des corps administratifs, il fera passer toutes les pièces à la Convention nationale, qui statuera sur l'adoption de l'un ou de l'autre projet de division.
Art. 7.
« Les ventes des biens nationaux susceptibles de division, seront faites par lots; les enchères seront ouvertes sur chacun desdits lots, d'après l'estimation qui en aura été faite en exécution de l'article 2 ci-dessus. Il ne pourra être passé outre à l'adjudication définitive, qu'autant que la dernière enchère couvrira ladite estimation, augmentée de la portion contributoire de chaque lot dans les travaux et acquisitions qu'aura nécessités la division et qui auront été ou devront être faits aux irais de la République.
Art. 8.
( Lorsque l'administrateur des biens nationaux aura autorisé, ou la Convention nationale décrété l'exécution du projet de division d'un bien national, comme il est dit dans les articles 3, 5 et 6, le directoire annoncera, par deux affiches apposées de quinzaine en quinzaine, la première séance d'enchères pour la vente de ce bien, et une seconde séance pour l'adjudication définitive. Le même directoire aura soin de désigner dans ces affiches chacun des lots, avec des détails suffisants pour qu'ils soient facilement reconnus, et d'y ajouter le prix et l'estimation de chacun d'eux, ainsi que les travaux dont l'adjudicataire de chaque lot sera chargé. Les plans visuels, projets de division, procès-verbaux d'estimation, devis estimatifs, et autres pièces relatives à la vente du même bien, seront déposés au secrétariat du district, et les citoyens invités par les affiches à en prendre connaissance.
Art. 9.
« Les travaux à faire par les acquéreurs seront mis au nombre des clauses de l'adjudication, et le délai pour leur exécution sera fixé, à peine, en cas d'inexécution, d'y être procédé, par folle enchère.
Art. 10.
« Les travaux qui, par l'effet de la vente du bien par lots séparés, devront être exécutés aux frais de la nation, seront adjugés au rabais par le directoire, dans le plus court délai possible, après avoir rempli néanmoins toutes les formalités ordinaires en pareil cas.
Art. 11.
« Les frais auxquels donneront lieu et les plans et procès-verbaux de division et estimation que les travaux qui ne pourront être exécutés par l'adjudicataire de chaque lot séparé, seront au compte de la nation, payés par la trésorerie nationale, après que les formalités prescrites par la seconde section du titre 2 de la loi du 16 octobre 1791 auront été remplies.
Art. 12.
« Dans les cas où la division d'un bien national exigerait l'ouverture d'une rue, et que
pour y parvenir il serait nécessaire de faire, au nom de la nation, l'acquisition des maisons ou terrains appartenant à des particuliers, cette acquisition ne pourra avoir lieu qu'en vertu d'un décret de la Convention nationale; et, à cet effet, l'administrateur des biens nationaux lui enverra toutes les pièces propres à constater les avantages du projet de divisicin, dont l'exécution devra donner lieu à l'acquisi-sition proposée.
Art. 13.
« Lorsque la Convention aura décrété l'acquisition au nom de la nation, desdites maisons ou terrains, l'évaluation en sera faite par deux experts nommés, l'un par le propriétaire, et l'autre par le directoire du district, en prenant pour base le capital à 5 0/0 des loyers ou fermages connus ou présumés; et il sera ajouté au prix ainsi réglé un quart en sus, par forme d'indemnité accordée aux propriétaires.
Art. 14.
Les adjudicataires des différents lots ne seront pas solidaires les uns pour les autres. Chaque lot sera adjugé par adjudication séparée sur la troisième publication, en observant, au surplus, les formalités prescrites pour les ventes des biens nationaux.
Art. 15.
« Il sera sursis à la location par baux des bâtiments, jardins ou autres terrains dépendant des biens nationaux désignés dans le premier article, qui seront reconnus susceptibles d'être vendus divisément. Les préposés de la régie pourront seulement les louer en tout ou en partie, avec la condition expresse que les locataires seront tenus d'en sortir, et de les remettre au même état deux mois après leur vente, à la réquisition qui leur en sera faite par le district.
Art. 16.
(( Ceux des mêmes biens nationaux qui auront été vendus en masse antérieurement au présent décret, et qui, par défaut de paiement de la part des acquéreurs, seront dans le cas de subir la folle enchère, seront revendus de la même manière que ceux du même genre non encore vendus, et les dispositions du présent décret leur seront applicables.
Art. 17.
« Les demandes qui ont été ou seront formées par les municipalités pour l'abandon des bâtiments ou terrains nationaux sur le fondement qu'ils sont nécessaires à l'élargissement des rues, à l'agrandissement des places ou à l'embellissement des villes, seront adressées au ministre de l'intérieur, qui après avoir fait constater leur légitimité par les corps administratifs, et les avoir communiquées à l'administrateur des biens nationaux les remettra à la Convention nationale, avec toutes les pièces justificatives. Il ne pourra être fait aucun abandon de ce genre qu'en vertu des décrets particuliers.
Art. 18.
« Toutes les fois que les demandes dont il
s'agit n'auront pour objet qu'un simple ali-
gnement dont l'exécution intéressera essentiellement la santé publique, l'abandon qui pourra en résulter de quelques portions de terrains appartenant à la République, ne sera pas mis à la charge des villes.
Art. 19.
« Si, au contraire, l'objet de l'abandon réclamé est l'élargissement des rues ou des places, la commodité des citoyens ou l'embellissement de quelques quartiers des villes» sans qu'il soit prouvé que l'état actuel des choses puisse nuire essentiellement à la tranquillité et à la sûreté publique, les terrains laissés à la disposition des communes seront payés par elles; et à cet effet, l'estimation en sera faite par deux experts nommés, l'un par la municipalité, l'autre par le district, et à Paris par le département. Le prix fixé par lesdits experts sera soumis par le district à l'approbation du département, et par le département à celle de l'administrateur des biens nationaux, pour être ensuite définitivement arrêté par le décret qui autorisera la concession des terrains réclamés. »
(de Saintes), au nom du comité de sûreté générale, fait un rapport et présente un projet de décret tendant à ordonner l'arrestation provisoire de tous officiers ou soldats, revenant des armées, 'même s'ils sont porteurs de certificats, billets d'hôpitaux, passeports ou cartouches en règle; il s'exprime ainsi (1) :
Citoyens, votre comité de sûreté générale a été prévenu par la section Poissonnière que des soldats de l'armée de Dumouriez affluaient dans Paris, sans doute pour mettre à exécution les infâmes projets de leur général. Vous avez décrété que les soldats qui se présenteraient aux barrières munis d'un certificat qui paraîtrait suspect, seraient mis en état d'arrestation; mais votre comité pense que dans les circonstances actuelles cette distinction ne peut plus avoir lieu, car il serait possible à des scélérats de venir ici avec des passeports en règle, et d'y exciter des troubles.
C'est pour les prévenir que votre comité vous propose le projet de décret suivant :
« La Convention nationale, ouï le rapport de son comité de sûreté générale, décrète que tous officiers et soldats revenant de l'armée, fussent-ils porteurs de certificats, billets d'hôpitaux, passeports ou cartouches en règle, seront arrêtés et mis en lieu de sûreté jusqu'à nouvel ordre;
« Que le présent décret sera exécuté dans toutes les communes de la République, et envoyé sur-le-champ à l'administration de la police, au commandant général de la garde armée et aux 48 sections de Paris. »
(2). Plusieurs de nos collègues viennent de m'apprendre que ces soldats
arrachaient les cocardes des citoyens; mais je sais que depuis quelques
jours un grand nombre de personnes se dispensent d'en porter;
lorsqu'elles passent sur le Pont-Neuf, la sentinelle
(La Convention adopte ce projet de décret avec l'article additionnel proposé par Sergent.)
Suit le texte définitif du décret rendu (1) :
« La Convention nationale, ouï le rapport de son comité de sûreté générale, décrète :
Art. 1er
« Que tous officiers ou soldats revenant des armées, fussent-ils porteurs de certificats, billets d'hôpitaux, passeports ou cartouches en règle, seront arrêtés et mis en lieu de sûreté jusqu'à nouvel ordre ; que le présent sera exécuté dans toutes les communes de la République et envoyé sur-le-champ à l'administration de la police, au commandant général de la garde armée et aux 48 sections de Paris.
Art. 2.
« Toutes les personnes qui seront trouvées, soit dans les rues, soit dans les lieux publics, sans la cocarde tricolore, seront mises en état d'arrestation et conduites devant les officiers municipaux chargés de la police, pour y être interrogés. »
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion sur la contribution progressive et Vemprunt de guerre (2) ; la parole est à Ramel-Nogaret.
(2). Citoyens, votre comité a observé que la fortune des Français n'était qu'une suite de la progression de la civilisation; il a donc cru que l'une des colonnes de la contribution mobilière présenterait en quelque sorte le bilan de chaque citoyen et c'est sur cette base que sera établi l'impôt progressif. Mais il a considéré que les pères de famille méritaient des exceptions en proportion des enfants qu'ils pourraient avoir, et c'est dans ce sens qu'il pense devoir adoucir la taxe de guerre. Dans-l'impôt progressif seront compris tous les revenus sans exception et sans déduction des impositions : cette progression serait de 20 livres pour le premier sac de 1,000 livres de rentes et de 20 sous d'augmentation pour chaque sac jusqu'à 6,000 livres; le septième sac et les suivants paieront 5 livres par sac.........
(4). Un courrier extraordinaire de Valenciennes nous apporte une dépêche
des commissaires de la Convention. En raison de son importance, je prie
l'orateur, qui est à la tribune, de vouloir bien inter-
Un grand nombre de membres : Très bien, très bien ! _
, secrétaire, donne lecture d'une lettre des citoyens Cochon, Lequinio et Dubois de Bellegarde, commissaires de la Convention nationale pour les frontières du Nord, qui font connaître les mesures qu'ils ont cru devoir prendre pour prévenir les suites de la trahison de Dumouriez; ils transmettent différentes pièces sur le même objet ; cette lettre est ainsi conçue (1) :
Yalenciennes, le
Citoyens nos collègues,
« Les dangers de la patrie sont extrêmes; vous le verrez par la proclamation du scélérat Dumouriez que nous joignons ici; nous sommes en ce moment occupés à faire mettre le scellé sur la planche et à la faire transporter à la municipalité. Nous venons de donner l'ordre d'assembler la garnison dans ses quartiers; nous allons la haranguer; peut-être, dans peu, ne serons-nous plus, mais nous ne mourrons que patriotes. Adieu ! salut en la République. La proclamation est effectuée; nous l'apprenons à présent. Nous vous avons adressé ce matin une autre proclamation qui ne nous était que suspecte; en voici aussi un exemplaire :
« Les commissaires de la Convention nationale
pour les frontières du Nord. » Signé : Charles Cochon, de Bellegarde, Leqtjinio. »
Suivent les pièces dont il est parlé dans la lettre ci-dessus; elles sont ainsi conçues : *
I.
Proclamation de Dumouriez aux départements du Pas-de-Calais et du Nord (2).
« Citoyens,
« Je ne vous dissimulerai pas la grandeur des dangers qui nous menacent : ils existent moins dans le nombre et le courage de nos ennemis que dans l'abandon coupable des soldats de la République et dans leur indifférence pour la cause que nous avons juré de défendre. Ceux,qui restent avec moi et avec les autres généraux sont de braves soldats et de bons citoyens. Nous ne fuyons pas; nous reculons comme de vrais guerriers et chaque fois que l'ennemi tente de nous entamer, nous nous défendons comme des hommes libres. Nous couvrons en ce moment votre frontière. J'ai pourvu par des garnisons à la sûreté de vos principales places fortes ; nous les défendrons si on les attaque, et vous nous seconderez.
« Mais pensez, chers concitoyens, que nous avons à combattre un monstre
bien plus dan-
« J'ai été souvent menacé de mort; ne craignez rien, citoyens, nous défendrons nos têtes, parce qu'elles sont nécessaires à la République. Les braves se rassembleront autour de nous-; les hommes égarés reviendront de leurs erreurs; le règne des lois renaîtra et nous défendrons la patrie avec la même force contre l'anarchie que contre le despotisme.
« A Tournay, le 28 mars 1793, l'an II de la République française.
( Signé : Dumouriez, général en chef. » II.
Adresse du général _Dumouriez à Varmée française (1) :
« Mes compagnons,
« Quatre commissaires de la Convention nationale sont venus pour m'arrêter et me Conduire à la barre; le ministre de la guerre les accompagnait. Je me suis rappelé ce que vous m'avez promis, que vous ne laisseriez pas enlever votre père, qui a sauvé plusieurs fois la patrie, qui vous a conduits dans le chemin de la victoire et qui, dernièrement encore, vient de faire à votre tête une retraite honorable. Je les ai mis en lieu de sûreté^ pour nous servir d'otages. Il est temps que l'armée émette son vœu, purge la France des assassins et des agitateurs et rende à notre malheureuse patrie le repos qu'elle a perdu par les crimes de ses représentants (Mouvements d'indignation). Il est temps de reprendre une Constitution que nous avons jurée trois ans de suite, qui nous donnait la liberté et qui peux; seule nous garantir de la licence et de l'anarchie dans laquelle on nous a plongés.. Je vous déclare, mes compagnons, que je vous donnerai l'exemple de vivre et mourir libre. Nous ne pouvons être libres qu'avec de bonnes lois, sinon nous serions les esclaves du crime.
« Aux Bains de Saint-Amand, le 1er avril, à 11 heures du soir.
« Signé : Dumouriez, général en chef de l'armée française. »
Un membre (2) : Je demande que le citoyen qui a apporté les dépêches de
Valenciennes soit entendu; il vous rendra compte de l'état dans lequel
se trouve actuellement cette ville.
Le citoyen Languet, député de Valenciennes, se présente à la barre.
Il s'exprime ainsi (1) :
Citoyens législateurs, je suis parti hier de Valenciennes, à 11 heures du soir. Il y avait une petite agitation causée par l'horreur qu'inspirent à tous les citoyens les crimes du traître Dumouriez. Sa proclamation a été foulée aux pieds. (Applaudissements.) A 6 heures, la générale a été battue; les troupes se sont rendues dans leur quartier respectif, et tout, s'est passé avec tranquillité. Citoyens, Bellegarde yotre collègue est à Valenciennes; son patriotisme y est connu, et je regarde cette ville sauvée par sa présence.
J'ai eu, il y a trois jours, une heure d'entretien avec Dumouriez; j'ignorais le décret qui le mandait à la barre. Dès lors je vis qu'il méditait des projets perfides, et j'en fis part à Bellegarde. Je lui demandai, de la part de Bellegarde, des nouvelles de l'armée d'Hollande; il me répondit fort sèchement que lorsqu'il en aurait reçu lui-même, il en ferait part aux commissairtesi de la Convention. Il me demanda^ si c'était Bellegarde qui avait mis d'Harville en état d'arrestation. Sur la réponse que je lui fis que je l'ignorais, il me dit en me quittant : « On metmaintenant les généraux en état d'arrestation; mais cela changera bientôt. » C'est dans ses paroles et dans le ton qu'il conserva, que j'aperçus qu'il méditait les funestes desseins.
Du reste, législateurs, je vous assure que Valenciennes est en sûreté, et que quels que soient les projets qu'a médités Dumouriez, ils seront vains.
félicite le citoyen Languet de son zèle et lui accorde les honneurs de la séance.
Je demande la parole.
(2), Je dois auparavant faire donner lecture à l'Assemblée des dépêches de notre collègue Carnot, qui viennent de m'être remises; je dois lui annoncer également que les deux députés de Lille qui les ont apportées, sollicitent leur admission à la barre.
Plusieurs membres : Qu'on lise avant tout les dépêches de l'armée.
, secrétaire, donne lecture de la lettre -et des dépêches transmises par le citoyen Carnot :
I.
Lettre du citoyen Carnot (3).
A Douai, le 2 avril 1793, l'an II de la République française.
« Citoyens,
«Vous êtes instruits des attentats de l'infâme Dumouriez; j'étais à Arras
lorsque j'ai reçu
« Je vous envoie aussi copie d'un procès-verbal qui contient les détails de ce malheureux événement. Ce procès-verbal vient de nous arriver à Lille au moment où l'on faisait courir le bruit que Dumouriez s'en était emparé : heureusement on est maintenant averti et en garde contre la trahison. L'indignation a éveillé l'énergie des citoyens, et ils mourront tous avec nous plutôt que de laisser envahir le territoire de la République.
« Le commissaire de la Convention nationale,
« Signé : L. Carnot.
« Le conseil général du département du Nord fait imprimer le procès-verbal ci-joint au nombre de 6,000 exemplaires, afin d'en faire passer sur-le-champ dans toutes les parties de la République. »
II. .
Extrait du procès-verbal dressé par les administrateurs du département du Nord (1).
( L'an mil sept cent quatre-vingt-treize, le 2 avril, onze heures du
matin, s'est présenté, en la salle des séances du directoire du district
de Lille, le général Duval, commandant en chef, lequel nous a déclaré
qu'il avait des affaires de la plus haute importance à nous communiquer,
et de convoquer sur-le-champ tous les corps constitués, pour prendre les
mesures analogues aux circonstances. Etant réunis, il nous a dit que le
colonel et le lieutenant-colonel du 13e régiment de chasseurs* qu'il
nous amenait, arrivaient, ventre à terre, d'Orchies, et lui annonçaient
que le ministre de la guerre et les quatre commissaires de la Convention
nationale, qui s'étaient rendus hier à l'armée de Dumouriez. y avaient
été arrêtés cette nuit, et que le général Miaczinsky lui avait dit avoir
des ordres du général Dumouriez de se porter à Lille et à Cambrai. Le
général Duval nous a ajouté que dans une circonstance aussi
extraordinaire, ne voulant parler à qui que ce soit, en secret ni en
particulier, il nous amenait ses officiers pour n'agir et n'écouter
personne que de concert avec les autorités constituées.
perser, pour les mettre dans leurs voitures à leur particulier. Le commissaire Quinette me prit par la main, et me dit : Je n'ai pas mes pistolets pour me brûler la cervelle; nous sommes perdus : qu'allons-nous devenir?
« Aussitôt, je les ai accompagnés dans leurs voitures, autour desquelles il y avait beaucoup de troupes armées, et pendant cet intervalle, je me suis esqufvé, pour pouvoir suivre les voitures afin de voir de quel côté elles iraient. Comme je ne voulais point abandonner les voitures, je marchais derrière en versant des larmes. Ils ont pris la route de Tournay; j'ai été arrêté un moment après par une escorte qui m'a conduit au quartier général à Saint-Amand, où j'ai dit à des particuliers présents, qu'ils me connaissaient bien pour être le courrier du général, que je n'étais pas un espion, et qu'on pouvait me laissser aller. Aussitôt Dumouriez m'a d.emandé pourquoi je le quittais pour me mettre avec des gens qui étaient les auteurs de la perte de la France, et que je n'avais qu'à rester avec lui, et que bientôt nous serions délivrés de tous ces maux-là. Il m'a fait passer dans l'endroit où avaient été les commissaires; et crainte qu'il ne m'arrivât aucun malheur, j'ai adhéré de rester avec lui comme ci-devant; et aussitôt qu'il a vu cette façon de penser, il m'a envoyé en dépêche avec une lettre pour le général Miaczinsky qui était à Orchies, accompagné de deux cavaliers, afin de voir si je ferais ma mission; en arrivant au quartier général d'Orchies pour y donner mes dépêches, j'ai trouvé le général Miaczinsky avec le colonel Saint-Georges et d'autres officiers de son corps. J'ai pris le maréchal Miaczinsky à son particulier, pour lui faire part du malheur qui venait d'arriver : aussitôt il a décacheté sa lettre, et voici les mots qui y étaient inscrits : qu'il venait de faire arrêter les commissaires de la Convention, ainsi que le ministre, et qu'il fallait qu'il se transportât, avec ses troupes, du côté de Lille et de Cambrai. Aussitôt le général Miaczinsky est entré dans l'autre appartement, et en a fait part au colonel Saint-Georges, qui en a été bien surpris : aussitôt il a dit au général Miaczinsky qu'il fallait qu'il rejoignît à Lille son régiment. Saint-Georges eSt bien vite monté à cheval, d'après la nouvelle qu'il venait d'apprendre, est venu au galop à Lille, pour en apprendre la nouvelle aux généraux. Aussitôt j'ai fait une feinte de sortir; j'ai été à la poste aux chevaux, et je suis accouru à la ville de Lille, pour leur faire part de ce que je viens de dire.
Fait sous la dictée dudit Languet, à commencer du mot hier de la neuvième ligne de la seconde page de l'original jusqu'ici.
Fait au directoire du district de Lille, le 2 avril 1793, l'an II de la République?
« Signé : Languet,_ Saint-Georges, colonel; lé général de division, Duval; Dumas, lieutenant-colonel; L.Nolf, président; Detondy, Sifflet, commissaire procureur syndic et Bryan.
Pour copie conforme à Voriginal : « Signé : Delbecque-Castel, vice-président et Sirjean, secrétaire. Et scellé.
Pour copie conforme : « Signé : S.-J.-H. Girard, vice-président; La-nauce, secrétaire-greffier par intérim, n
III
Réquisition des commissaires de la Convention nationale, adressée aux conseils généraux _des départements du Nord et du Pas-
de-Calais (1).
« Citoyens administrateurs,
« Le traître Dumouriez vient enfin de jeter son masque hypocrite; il a mis le comble à ses forfaits. Jamais La Fayette ne porta si loin l'audace et la félonie. Déjà il ne dissimule plus qu'il a levé l'étendard de la révolte; il a porté ses attentats jusqu'à faire" arrêter des représentants du peuple, et il annonce qu'il va marcher sur Paris, et rétablir la royauté. Frémissez, citoyens, en lisant la lettre suivante, qu'il vient d'adresser aux administrateurs du département du Nord :
( La tyrannie, les assassinats et les crimes sont à leur comble à Paris. L'anarchie nous dévore; et sous le nom sacré de la liberté, nous sommes tombés dans le plus vif esclavage. Plus les dangers sont grands, plus la Convention nationale met de cruauté, de tyrannie et d'aveuglement. Les vérités que je lui ai dites, dans ma lettre du 12 mars, ont poussé les Marat et les Robespierre à dévouer ma tête à leur vengeance. Elle a envoyé pour m'arrêter, ou plutôt pour se défaire de moi, quatre commissaires; et le ministre de la guerre, Beurnonville, dont j'avais fait la fortune militaire, les a accompagnés. Depuis plusieurs jours l'armée frémissait de tout ce qui se tramait contre son généralj et si je n'avais pas retenu son indignation, ils auraient été victimes de l'injustice de leurs commettants. Je les ai fait arrêter, et je les ai envoyés en lieu sûr, pour me servir d'otages, en cas qu'on prétende commettre de nouveaux crimes. Je ne tarderai pas à marcher sur Paris, pour faire cesser la sanglante anarchie qui y règne. J'ai trop bien défendu la liberté jusqu'à présent, pour qu'on puisse imaginer que je change d'opinion. Nous avons juré en 1789, 1790 et 1791, une Constitution qui nous afesujétissait à des lois et nous donnait un gouvernement stable; ce n'est que depuis que nous l'avons rejetée, que nos crimes et nos malheurs ont commencé. En la reprenant, je suis sûr de faire cesser la guerre civile et la guerre étrangère, et de rendre à la France le repos, la paix et le bonheur qu'elle a perdus en prenant la licence et l'infraction de toutes les lois, pour la liberté.
« Je connais la sagesse du département où je je suis né; j'ai déjà été une fois son libérateur : j'espère être bientôt celui de la France entière, et je vous jure sur tout ce qu'il y a de plus sacré, comme un homme vertueux qui aime la gloire, que, bien loin d'espérer à la dictature, je m'engage à quitter toute fonction publique aussitôt après que j'aurai sauvé ma patrie. »
Etait signé : le général en chef de' Varmée du Nord, Dumouriez.
« Voilà, citoyens, le monstre qui avait captivé notre confiance; voilà
l'homme exécrable auquel on croyait des vertus. Hâtons-nous de
« Nous vous requérons, citoyens, de vous saisir provisoirement dans vos arrondissements respectifs, de toute l'étendue d'autorité qui vous paraîtra nécessaire dans ce moment de crise, pour mettre les frontières sur le pied le plus respectable de défense, et pour déjouer tous les complots qui peuvent se tramer au dedans.
« Levez des troupes et envoyez-les en garnison dans les villes de guerre, et surtout dans celles de première ligné.
« Requérez les commandants temporaires, les officiers du génie et de l'artillerie, de prendre les mêmes mesures que s'ils étaient certains que leurs places vont être assiégées.
« Rassemblez dans ces places toutes les subsistances de campagnes voisines, les fourrages et les armes.
( Faites rentrer dans l'intérieur si les vivres manquent, toutes les bouches inutiles.
« Prenez les précautions les plus rigoureuses contre les surprises, surtout à l'ouverture et à la fermeture des portes : prévenez avec le plus grand soin tout engorgement à leur passage, principalement les jours de marché et de fête.
« Empêchez les rassemblements des gens douteux; mettez en état d'arrestation les personnes suspectes; multipliez les patrouilles; ne recevez les troupes qui vous viendront de l'armée, qu'après vous être bien assurés de leurs dispositions civiques.
« Prenez tout l'argent nécessaire dans les caisses publiques, en faisant un état exact de vos opérations à'cet égard; levez même au besoin sur les personnes aisées les sommes qui seront indispensables pour faire face à tout, en tenant des registres, afin que ces sommes puissent être remboursées par le Trésor national.
« Faites passer aux districts et municipalités les ordres qui vous paraîtront nécessaires au salut de la chose publique. Engagez les sociétés populaires à redoubler de zèle et de vigilance. Que tous les citoyens s'enflamment au cri de la patrie en danger. Que cependant toutes les mesures soient prises avec calme et sagesse. Q'on se préserve et d'un enthousiasme aveugle, et d'un découragement indigne de Républicains français.
« Annoncez que quiconque livrera Dumouriez mort ou vif, aura bien mérité de la patrie. Ralliez tous les citoyens au seul centre d'autorité qui puisse exister, la Convention nationale.
( Nous attendons de vous, citoyens, de nouvelles preuves de la prudence et du courage qui n'ont cessé de vous animer.
« A Douai, le 2 avril 1793, l'an II de la République française.
( Les commissaires de la Convention nationale, (( Signé : L. Carnot, Lesage-Senault. »
IV.
Lettre des administrateurs du district de Lille (1).
Lille, le
(( Citoyens représentants,
(( Le général Miaczinsky était porteur de la lettre que lui avait remise Dumouriez. Instruits des manœuvres qui se préparaient contre la Républiquet nous ayons pris les précautions nécessaires pour faire arrêter, et la troupe, et le chef qui les commandait. Amené devant nous, ce chef a déclaré qu'il n'avait d'autre commission à remplir que celle de remettre la lettre au général Duval. La lecture en a été faite devant les membres de l'assemblée. Alors le général Miaczynski, à l'imitation de toute l'assemblée, a prêté le serment de servir la République de toutes ses forces et de celles de sa troupe, de la fidélité de laquelle il répondait.
(( Les citoyens Malus et Petit-Jean sont au milieu de nous, et ont aussi prêté avec nous le serment de s'ensevelir sous les ruines de la ville, plutôt que de la rendre aux ennemis de la République.
(( Les administrateurs composant le directoire du district de Lille, du conseil général de la commune et des chefs militaires, réunis en assemblée permanente.
(( Signé : Nolf, président; Lefebvre d'Henin, maire; le général de division, Duval. »
V.
Lettre du général Dumouriez au général Miaczynski (2).
Aux bains de Saint-Amandle 1er avril 1793.
((Je viens, mon cher Miaczynski, de faire arrêter le ministre de la
guerre Beurnonville, et les quatre commissaires de la Convention
nationale, envoyés ici pour m'arrêter, ou plutôt pour me faire
assassiner, et les généraux, ainsi que l'état-major de l'armée.
Mettez-vous en campagne dès la pointe du jour; marchez sur Lille;
entrez-y avec une partie de vos troupes; allez trouver le général Duval;
montrez-lui la lettre; annoncez-lui qu'il faut, si les commissaires ne
sont pas encore partis, les arrêter sur-le-champ. Vous les conduirez à
Or-chies, où je vous enverrai des ordres de ce qu'il faudra en faire;
dites-lui aussi que je lui donne ordre de s'emparer du trésor,
d'ordonner au commissaire-ordonnateur, Malus, de nommer sur-le-champ un
payeur, et de faire arrêter le citoyen Lemonnier que vous ramènerez à
Orchies : ce Lemonnier est contrôleur général de la tésorerie nationale
près l'armée. Vous direz à Duval de m'envoyer sur-le-champ Petit-Jean,
parce que je fais faire demain un mouvement à l'armée. Vous lui direz
que l'armée est décidée à proposer à la nation entière de reprendre la
Constitution que vous avez
« Le général en chef :
« Signé : Dumouriez, Delbecque-Castel, vice-président. »
Les deux députés de Lille sont admis à la barre.
L'un deux s'exprime ainsi : (1).
Citoyen président, étant au lieu des séances où les administrations sont réunies à Lille, le citoyen Duval nous a fait avertir de l'arrestation des commissaires de Convention et du ministre de la guerre. Une heure après est venu le général Miaczynski auquel Duval a dit : J'ai prêté serment .de ne rien faire que de concert avec les corps administratifs. Le général Miaczynski interpellé a dit ensuite qu'il n'avait qu'un ordre verbal qui lui avait été rapporté par un aide de camp de Dumouriez; on lui a répondu que l'usage était cependant de donner les ordres par écrit. Duval lui a dit : Général, si vous avez quelque chose à me dire, il faut parler : alors il a tiré de sa poche la lettre qu'on vous a lue. Quant au corps de troupes de 4,000 hommes, on l'a mis dehors de la place; comme ils peuvent être braves et républicains, on n'a pas cru devoir leur refuser les effets de campement ; mais ils sont tellement sous le bastion et à la portée du canon chargé à mitraille, qu'ils ne peuvent remuer. Une proclamation a été faite pour ordonner au dépôt de sortir, car il ne ferait que consumer les vivres. On les a envoyés à Béthune, à Arras et autres villes.
Citoyens, déjà nous avons vu l'ennemi de près; nous ferons voir que nous sommes encore les mêmes et que notre courage ne se démentira jamais. Nous sommes tous résolus à mourir, ensevelis sous les ruines de la ville plutôt que de nous rendre à ceux qui en veulent à notre liberté. (Vifs applaudissements).
félicite les deux députés de
Plusieurs membres demandent que la Convention approuve les mesures prises par ses commissaires et décrète l'insertion au Bulletin de ces différentes pièces, notamment du rapport du citoyen Languet.
(La Convention décrète cette proposition) (1).
(2). Je demande que le général Miaczynski soit traduit sous bonne et sûre garde à Paris et mis au secret aux prisons de l'Abbaye. Je propose également que le commandant en chef de l'artillerie à Douai soit mis en état d'arrestation et traduit à la barre pour y être interrogé.
(La Convention adopte ces deux propositions. )
Suit le texte définitif du décret rendu : (3)
« La Convention nationale décrète :
Art. 1er.
« Le général Miaczynski sera traduit sous bonne et sûre garde à Paris, et mis au secret aux prisons de l'Abbaye.
Art. 2.
« Le commandant en chef de. l'artillerie à Douai sera mis en état d'arrestation et traduit à sa barre pour y être interrogé. »
cède le fauteuil à Delacroix ancien Président (4).
présidence de delacroix, ancien Président.
La parole est à Robespierre.
(de sa placé) (5). Il est temps que cette comédie finisse. Il faut s'occuper sérieusement de trouver un remède à nos maux et de prendre les grandes mesures qu'exigent les dangers de la patrie. Ce n'est point par des nouvelles tantôt rassurantes, tantôt alarmantes que le traître Dumouriez sera confondu et que vous déjouerez le projet de contre-révolution qu'il médite. Ce n'est point non plus par des nouvelles particulières qu'il faut endormir la nation et influencer l'opinion de la Convention, c'est par des , mesures véritablement révolutionnaires qu'il j faut sauver la patrie; c'est sur la force de la nation qu'il faut s'appuyer. Jusqu'ici je n'ai entendu proposer que des palliatifs faits pour nous tromper sur la grandeur et la nature de nos maux. Il faut adopter des mesures dictées par la liberté.
Ici je dois faire une déclaration autant pour moi que pour l'intérêt de
la chose pu-
Un membre : Faites taire l'opinant ; il calomnie un comité de l'Assemblée.
Là règne, à mon avis...
Plusieurs membres : A la tribune ! à la tribune !
Il est impossible aux amis de la liberté de parler à la tribune; on les injurie.
Je prends l'engagement de maintenir la liberté des opinions.
(à la tribune). Citoyens, dans ce moment-ci, je me dois à moi-même, je dois à la patrie une profession de ioi. Nommé membre du comité de défense générale, mais convaincu que les principes qui doivent sauver la patrie ne peuvent pas être adoptés dans ce comité, je déclare que je ne m'en regarde plus comme membre. Pour sauver la liberté dans des moments si critiques, il faudrait avoir professé une haine bien profonde de la tyrannie et avoir prouvé à la France entière que l'on ne sera jamais tenté d'adopter un système de Constitution qui est visiblement l'objet des démarches du criminel et artificieux Dumouriez. Or, je ne suis pas bien convaincu qu'un système, où la royauté serait combinée avec une sorte de constitution aristocratique, déplairait à certain membre de ce comité; je ne suis pas bien convaincu qu'un pareil système ne conviendrait pas à certaines gens qui quelquefois parlent le langage du patriotisme, mais qui nourrissent et conservent dans leur cœur des projets d'ambition et une haine profonde pour l'égalité. Je ne veux pas délibérer avec ceux qui ont toujours parlé le même langage que Dumouriez, avec ceux qui ont attaqué les hommes auxquels Dumouriez déclare maintenant une guerre implacable, avec ceux qui ont combattu les principes qui servent de prétexte à ]a révolte de Dumouriez, avec ceux qui, à l'exemple de Dumouriez, ont calomnié Paris et la portion de l'Assemblée vraiment amante de la liberté.
Et s'il ne m'est pas donné de sauver la patrie, s'il ne m'est pas donné de voir adopter les mesures nécessaires pour triompher des ennemis de la liberté : je ne veux pas du moins être le complice de ceux qui veulent la perdre. Appelé par le suffrage de nos commettants à délibérer dans la Convention, je déclare que je renonce à l'honneur d'être membre d'un comité qui ressemble plutôt à un conseil de Dumouriez qu'à un comité de la Convention. (Murmures à droite.)
(Voix diverses à droite : A l'ordre ! à l'ordre ! Il veut perdre la patrie !
A l'appui de mon assertion, j'invoque le témoignage de Dumouriez lui-même qui, dans une de ses lettres, a dit que le comité de défense générale était excellent, à l'exception de cinq ou six de ses membres parmi lesquels ils me compte sans doute et dont je me fais gloire de faire nombre. Or, ces cinq ou six membres ne peuvent ob-
tenir la majorité dans ce comité. (Murmures à droite.)
Je n'aime pas qu'on m'impute le crime de médire d'un comité. Plût à Dieu que ceux qui sont prompts à faire pareil reproche aux âmes brûlantes de la liberté fussent aussi ardents à accuser les contre-révolutionnaires et à examiner la conduite des généraux.
Yeut-on des faits, en voici :
Quelle doit être ma surprise, à moi qui suis la marche politique de notre session et qui observe ce qui se passe autour de nous, de voir que ceux qui, depuis le commencement de la dernière révolution, s'attachent avec tant d'audace à calomnier les membres de ce côté (il désigne le côté gauche) et la cité de Paris qui fut et restera le boulevard de la liberté, que ceux-là, dis-je, soient restés muets sur les crimes de Dumouriez et qu'il n'y ait que nous, tant calomniés, qui nous soyons expliqués d'une manière franche sur les perfidies de ce traître. Qu'on ose démentir ces faits !
Je demande la parole après Robespierre.
Pour étouffer la voix de la vérité, lorsque le salut public est en péril, on a coutume d'amollir le courage des patriotes par certaines idées de réunion lancées en avant avec adresse. Mais moi, qui fais profession de croire que l'amour seul de la liberté doit réunir les hommes, je me défie de ces propositions brusques et tardives de conciliation, faites dans des moments critiques où l'on croit avoir besoin de feindre un rapprochement que l'on est bien loin de désirer; je me défie de ceux qui„ dans des moments critiques, m'ont tendu la main et qui, le lendemain, abusant de ma bonne foi, m'ont calomnié avec une nouvelle fureur.
Et puisque Brissot est ici, puisque Brissot, improuvant les vérités que j'ai dites, demande la parole pour me foudroyer, c'est à Brissot lui-même que je ferai l'application des principes qui dirigent ma conduite.
Je fais peu de cas des individus, et Brissot comme homme ne mérite pas de fixer l'attention d'un législateur, mais il est essentiellement lié au système de contre-révolution qui s'exécute en ce moment. Je ne veux pas sacrifier la patrie à Brissot, et Brissot eût-il la confiance d'une grande partie de cette Assemblée, je déclare que si j'avais des faits certains à alléguer contre lui, si l'intérêt de la patrie exigeait qu'il fût démasqué, j'aurais le courage de dire toute la vérité.
J'applique donc à Brissot les principes que j'ai avancés.
J'ai dit que je ne voulais point délibérer avec les conseils, les amis de Dumouriez. Eh bien, jamais Dumouriez, jamais les ennemis de la liberté n'eurent un ami plus fidèle, un défenseur plus utile que Brissot. C'est l'histoire de Dumouriez à la main que je veux le juger. Je prouverai que Brissot tint longtemps les fils moteurs de toute l'intrigue dont nous sommes occupés aujourd'hui; je prouverai que Brissot fut lié d'intérêt avec Dumouriez,, je prouverai que Dumouriez et Brissot nous trompèrent par le même motif sans doute. Il n'y a pas un homme de bonne foi, ayant suivi la vie politique de Brissot, qui ne puisse être convaincu de ce que j'avance. Je défie qu'on
me montre une action, une circonstance où Brissot n'ait été d'accord avec Dumouriez, avec les satellites et les suppôts de cet ambitieux.
Voix à droite : Des preuves !
Je déclare qu'il n'y a pas une seule circonstance où Brissot n'ait pris la défense de Dumouriez. Le système de Dumouriez a été de nous engager dans une guerre funeste et périlleuse, afin de la faire tourner contre la liberté. Dumouriez et Brissot furent les premiers à proposer la guerre contre l'Autriche. Et remarquez que nous leur disions alors : Attaquez les ennemis du dedans, réprimez les attentats d'une cour perfide, destituez les états-major infestés d'aristocratie, remplacez les généraux qui sont à la tête de nos armées. Que nous répondait-on ? On excusait la cour; on nous disait que dire du mal de La Fayette et des généraux, c'était troubler la discipline militaire, c'était se déclarer les ennemis de la patrie. On nous montrait tous les peuples, et principalement la Belgique, disposés à voler au-devant de la Constitution française et on nous faisait voir l'étendard de la liberté flottant sur le palais des rois.
Cependant cette guerre débuta par des revers. On dénonce La Fayette, alors chef des armées. Que répond Brissot à cette dénonciation? Il calomnie le soldat, parle d'obéissance aveugle aux chefs. Citoyens, ne perdez pas de vue que ce fut aussi le langage de Dumouriez. Remportait-il une victoire, c'est que les soldats ne délibéraient point. Etait-il battu, les soldats n'avaient aucune discipline. Lorsque les dénonciations s'accumulaient sur la tête de généraux, comment y répondaient Brissot et ses amis; ils nous appelaient désorganisa-teurs, contre-révolutionnaires, anarchistes; ils calomniaient les soldats, provoquaient contre eux des lois de sang et investissaient les perfides généraux d'alors d'un pouvoir dictatorial.
Apres l'époque du 10 août, nous étions cernés par les despotes qui avaient juré la perte de la liberté et avaient combiné leur projet avec les ennemis de l'intérieur, Au mois de septembre, nous apprenons tout à coup la prise de Longwy et de Verdun et la marche de l'ennemi sur Paris. Personne jusqu'alors n'avait donné avis de son approche.
Cependant quels étaient les ministres ? C'étaient ceux qu'avait fait nommer Brissot. Quels étaient ceux qui avaient la majorité dans le comité de défense générale et qui le dirigeaient? c'étaient Brissot et ses partisans. Et quand l'ennemi s'avançait sur Verdun, quelles mesures prenaient ces directeurs du salut public pour repousser nos ennemis? Je rappelle ici des^ faits notoires. Ces ministres, nommés par Brissot, vinrent proposer à l'Assemblée d'abandonner Paris, de fuir avec l'Assemblée législative, avec le Trésor public, avec le roi et sa famille prisonniers au Temple. Et si un autre ministre, qui n'était pas du parti Brissot, n'était venu à l'Assemblée pour lui apprendre ce que lui cachaient les hommes qui la dirigeaient, si Paris et la France, à son exemple, ne s'étaient levés pour voler au-devant des Prussiens, qui peut répondre que les ennemis n'arrivaient pas à Paris, qui peut répondre que la République n'était pas anéantie? N'est-il pas permis de croire que ce devra être là le résultat de leur conduite ?
Dumouriez fut alors nommé pour commander l'armée qu'avait abandonnée La Fayette; et ce fut Brissot et ses partisans qui le portèrent à cette place. Je ne sais ce qu'eût fait Dumouriez si la France ne s'était levée tout entière pour repousser les ennemis. Mais ce que je sais, et ce que toute la France connaît parfaitement, c'est que Dumouriez reconduisit très poliment le roi de Prusse hors de nos frontières; ce que je sais, c'est que notre armée, animée par l'enthousiasme de la liberté, fut enchaînée par ses soins et qu'elle frémissait de rage de voir échapper l'armée prussienne et autrichienne, de voir échapper les émigrés, quand elle eût pu les écraser; ce que je sais, c'est que les Prussiens et les émigrés, ainsi ensevelis, assuraient à jamais et le succès de la Révolution française et celui de la liberté de l'Europe; ce que je sais, c'est que Dumouriez se montra alors aussi courtois, aussi respectueux envers le général prussien, qu'il se montre maintenant insolent envers les représentants du peuple français; enfin, ce que je sais, c'est qu'il ravitailla l'armée du roi de Prusse; c'est que, par ses soins, cette armée fut soustraite aux suites de la maladie et de la disette, et qu'on peut se demander si Dumouriez n'a pas été plus utile aux Prussiens qu'à la République.
Si vous suivez cet homme depuis cette époque, la véritable trame du complot ne doit pas se dérober à vos yeux. Dumouriez, au lieu de veiller dans cette campagne au salut de la patrie, au lieu de se joindre aux autres généraux pour exterminer les Prussiens qui s'étaient si imprudemment engagés dans le cœur de la France, vient à Paris, et, après avoir assisté à des festins scandaleux, après avoir passé plusieurs jours dans la plus étroite intimité avec les détracteurs éternels de Paris et de la liberté, repart pour la Belgique. Il y débute par un succès brillant, nécessaire pour lui assurer la confiance des amis de la liberté : confiance que les opérations de première expédition étaient bien loin de lui avoir donnée.
Dumouriez, après avoir établi son empire dans cette partie de la Belgique, part pour la Hollande. S'il y fut parti trois mois plus tôt le succès de cette dernière expédition était aissuré. Il annonce qu'il sera sous peu à Amsterdam et on le croit sur parole; moi-même j'ai cru un instant que l'intérêt et la gloire de son pays l'emporteraient dans son cœur sur d'autres considérations et le retiendraient dans les bornes de ses devoirs; j'ai cru qu'il ne voudrait attenter à la liberté de sa patrie, qu'après avoir mené et ébranlé la puissance des despotes et qu'alors, ses projets étant mis à découverts, il serait facile d'écraser ce général victorieux et insolent.
Il s'empare de quelques places de la Gueldre, puis, dans le même instant, avant d'avoir terminé la compagne, il se découvre et devient l'ennemi le plus formidable de la patrie. Tandis qu'on nous vante ici ses • prodiges, il s'arrange pour évacuer la Belgique, qui nous a, coûté tant d'hommes et tant d'argent, et la livrer aux despotes de l'Europe. Il laisse son armée à la disposition de deux étrangers : d'un côté Steingel, né sujet d'un prince de l'Empire ; de l'autre, Miranda, un aventurier espagnol chassé du Pérou, employé ensuite par Pitt qui le donne à la France sur la recom-
mandation de Brissot. Et ce sontcesgénéraux qui nous ; trahissent en même temps à Aix-la-Chapelle et à Maëstricht! Voilà des faits. .iSi l'on ose les ,nier, j'en donnerai des preuves .jp lus. authentiques.
Ici il faut suivre les véritables traces de Dumouriez. A son retour de sa prétendue conquête de la Hollande, lorsqu e la. nation est •trahie par ces deux généraux, lorsqu'il a laissé derrière lui une partie dé son année, -se plaint-il d'avoir été trahi ? Dénonce-t-il à la'nation • les auteurs de ces perfidies? Non. Il jette au contraire un voile sur tous les faits; il fait l'éloge de tous les généraux sans distinction; il loue avec emphase et Miranda et Lanoue, connus pour avoir conspiré avant le 10 août ; il impute tous- nos malheurs aux soldats;'il 'veut persuader à la France,,il veutpersuader à l'Europe ?que nos ^armées ne sont composées que det lâches.et de pillards.
Nos revers se succèdent rapidement. Dumouriez livre une bataille et la perd. L'aile droite qu'il commandait a-conservé l'avantage, mais l'aile gauche a î plié »et il l'accuse s d'être la cause de la défaite. Cependant cette aile gauche était commandée par Miranda, qui avait trahi 4 Maastricht, ^ar Miranda son ami et sa icréature, et l'on doit se rappeler que Dumouriez, dans sa première proclamation faite à son retour de l'Argonne,, proclamation dans laquelle il donnait alors des -éloges aux très suspects généraux, disait à son armée : « Ne vous découragez pas; surtout ayez confiance dans vos généraux; ils sont mes élèves et ne se • conduisent que par mes conseils. »
-Dumouriez, avant-«es ^revers, avait protégé l'aristocratie dans la Belgique. Il avait dissous les sociétés populaires; il avait rétabli sous leurs fonctions 'les officiers municipaux destinés par vos commissaires pour cause d'incivisme, et cependant il les avait hautement accusés lui-même. Dans les premiers mouvements de la Révolution, il avait fait des emprunts énormes qu'il -avait chargé la nation de rembourser ; il s'était emparé du Trésor public qui suivait l'armée et avait fait emprisonner les hommes préposés par la nation à sa garde. Après a-vedr-ainsi assuré et sa fortune et la contre+révolution dans la Belgique, il déclare hautement la guerre au peuple français; il déclare la guerre, à la Convention nationale; il distingue deux partis dans la Oon-> vention, l'un qui est subjugué — et sans doute Brissot et i tous ses amis ont le droit de -sej ranger dans ce parti — l'autre qui prétend dominer et qui en réalité ne fut que calomnié et' décrié.
Dumouriez déclare qu'il vient protéger le premier qu'il dit être opprimé et affranchir la liberté de ce qu'il appelle âne minorité. Il >ajoute que Paris est un théâtre de sang et de carnage; que Paris fait la loi. à la Convention nationale et qu'il faut réduire Paris pour assurer le bonheur de la France.
Et ©'est dans ces circonstances que nous délibérons et que l'on me fait un crime d'être défiant. On m'en fait un crime lorsque je pense que Dumouriez a ici des nartisans et que ces partisans sont les hommes qu'il veut protéger ! On m'en fait un crime lorsque je suppose que, parmi ceux qui semblent proposer des mesures sévères contre Dumouriez, iî en est beaucoup à qui les principes de Du-
mouriez ne déplaisent pas ; on m'en fait un crime lorsque je crois que beaucoup ici font des vœux pour lui et comptent ne nous proposer que des mesures illusoires ou insuffisantes pour nous endormir sur le bord de l'abîme. On m'en fait un crime, lorsque-les hommes que je désigne ont tenu de tout temps un langage qui devrait les faire reconnaître efc de tout temps se- sont unis pour partager la puissance et diriger le cours de la Révolution. On m'en .fait un crime, lorsque nos départements sont troublés, lorsque les Anglais, si justement soupçonnés d'être .coalisés avec nos ennemis intérieurs et d'avoir des partisans jusque dans cette enceinte, menaçant nos,côtes de Bretagne. On m'en fait un crime, lorsque des revers désastreux sont suivis par des nouvelles qui peuvent paraître suspectes dans le moment où nous sommes, lorsque le premier général, nommé pour anéantir les rebelles, est 'lui-même un ennemi de la liberté et font égorger les meilleurs patriotes; lorsque Dumouriez. s'efforce de décourager la nation par tous les moyens, lorsqu'il nous déclare qu'il est impossible de lutter contre les ennemis extérieurs parce .que nous serons _ obligés de réunir toutes nos forces pour réduire les départements en contre-révolution, lorsqu'il porte l'insolence, le mépris pour les représentants de la nation, jusqu'à oser déclarer que nous n'avons d'autre parti à prendre que de transiger avec l'étranger et qu'il se propose lui-même pour médiateur; lorsque, pour nous amener par la terreur à des actions • honteuses, il nous dît qu'il a deux armées : l'une pour repousser les efforts des puissances étrangères avec lesquelles il ne dissimule pas ses intelligences, l'autre pour marcher contre ce qu'il appelle les ennemis de la liberté, c'est-à-dire contre une partie de la Convention nationale, contre le peuple de Paris, en-un mot contre tous ceux qui ont été calomniés par les meneurs.
Voilà, citoyens, une partie de mes doutes. Voilà la source dams laquelle nous» devons puiser les moyens de sauver la liberté. Sauver
la liberté !............. mais la liberté peut-elle
être sauvée, si ceux-là mêmes qui se «sont déclarés, lès amis du foi, qui ont inondé les départements ©n contre-révolution, d'écrits qui ont empoisonné l'opinion publique, qui ont égaré les habitants des campagnes, qui ont cherché à réveiller l'esprit royaliste en apitoyant le peuple sur le supplice du tyran, si ceux-là, dis-je, paraissent nos protecteurs, nos défenseurs contre Dumouriez, lorsqu'il est évident à nos yeux qu'ils en sont les complices.
Voilà mes faits, ils ne convaincront que les hommes de bonne foi; mais, je le déclare, la véritable cause de nos maux est dans la correspondance criminelle de Dumouriez avec l'homme que j'ai nommé et avec tous ceux qui le fréquentent............
Un membré : Vous appelez les poignards
Je -ne veux point convaincre les conspirateurs ni les ennemis de la France.
Un membre : Vous «appelez les poignards !
Je ne veux que que dire la vérité; efc quand les hommes qui parlent de poignards auront assassiné la liberté et le reste de ses défenseurs, comme ils ont assassiné celui-là (Il se retourne et montre Miùhel lihpeletier), on reconnaîtra qu'au mo-
ment où ils allaient exécuter leurs complots liberticides, et où leur indolence semblait redoubler à l'approche d'un général contre-révolutionnaire qui semblait guider les cohortes des despotes de l'Europe, on reconnaîtra, dis-je, que je proclamais la vérité, et que je démasquais les traîtres.
Je déclare que la première mesure de salut à prendre, e'est de décréter d'accusation tous ceux qui sont prévenus de complicité avec Dumouriez et notamment Brissot. (Applaudissements dans les tribunes.)
(1). Brissot a la parole, mais j'annonce à l'Assemblée qu'une députation de la Commune de Paris demande a être entendue.
Un grand nombre de' membres : Entendons-là tout de suite, le salut de la patrie avant tout.
La députation de la Commune de Paris est admise à la barre.
Le citoyen Hébert, orateur de la députation, donne lecture de l'adresse suivante : (2)
« Citoyens législateurs,
« Le conseil général de la Commune nous députe vers vous pour vous représenter que, dans les circonstances difficiles, il manque de moyens pour assurer la tranquillité publique; un très grand nombre de ses membres ne se rendent plus à ses délibérations; les uns ne se voyant pas réélus pour la municipalité définitive ont donné leur démission; d'autres, par une insouciance qui n'a pu être réprimée, se refusent à assister à ses séances.
« Le conseil cependant est chargé d'objets les plus importants ; obligé de fournir des commissaires pour constater l'état civil des citoyens, pour la levée des scellées, pour les passeports, pour les certificats de civisme et de résidence; souvent il n'en peut trouver pour le service du Temple; presque toujours quinze ou seize membres décident des intérêts, d'une population de cent mille âmes; pour le même service, la Commune du 10 août avait un nombre double de membres.
cc Des difficultés interminables retardent l'organisation de la municipalité définitive, jusqu'à ce qu'elles soient levées.
« Législateurs, nous vous demandons l'adjonction des membre© qui doivent composer le conseil général qui doit nous remplacer ; plus de cent ont passé à l'épuration des sections. Nous vous prions donc d'ordonner que tous les citoyens élus pour composer en définitif le conseil général de la Commune, entrent immédiatement en fonctions et que, concurremment avec ceux du conseil actuel, ils assurent le calme de cette grande cité.
« Le conseil général ayant entendu la lecture de cette adresse, en approuve la rédaction et nomme pour la porter sur-le-champ à la Convention nationale Brunot, Landragin, Destournelles, Dufour, Daubancourt, Minier et Boucher (René).
« Signé : Pache, maire; Coulombeau, secrétaire-greffier.
( Pour copie conforme :
« Signé : Coulombeau, secrétaire-greffier.
répond à l'orateur et accorde à la députation les honneurs de la séance.
Un membre convertit en motion la demande de la municipalité de Paris.
( La Convention décrète que, dans les circonstances difficiles où se trouve la chose publique,, elle autorise lé conseil de cette commune à s'adjoindre, en attendant l'organisation de la nouvelle municipalité, tous les citoyens élus pour composer en définitif le conseil général de la Commune (1).
La parole est à Brissot.
Citoyens (2), si je me suis abstenu jusqu'à présent d'énoncer mon opinion sur les crimes de Dumouriez, c'était pour ne pas paraître céder à la crainte, sentiment indigne de moi. J'attendais d'être provoqué, je le suis, je vais donc m'expliquer.
Plusieurs membres sur la Montagne : C'est bien tard !
Yous avez entendu l'accusa teur, entendez l'accusé.
Nous sommes tous ses accusateurs.
Voix nombreuses sur la Montagne : Oui t oui !
Il est convaincu. Je demande qu'il lise le numéro du 2 avril de son journal (3). Yous en verrez la preuve.
Je n'avais pas cependant attendu cette provocation pour donner au comité de défense générale des renseignements sur les individus qui semblaient être les complices de Dumouriez, et qu'il était instant de faire arrêter. Le jour même où les nouvelles de l'attentat de ce général arrivaient, vos commissaires emportèrent des notes et des indications qui pouvaient leur être utiles, si l'audace de Dumouriez ne les avait prévenus.
Je ne suivrai point Robespierre dans ses divagations. Je me bornerai à ce qui concerne ma prétendue complicité avec Dumouriez.
Robespierre a acquis, la preuve de cette complicité dans le rapprochement qu'il a fait de mes opinions avec celles de Dumouriez, et il a cité, à l'appui de ce qu'il avançait, toute l'histoire de Dumouriez depuis son entrée au ministère jusqu'à ce moment. Je vais la parcourir aussi, cette histoire, et je prouverai qu'il n'existe pas la moindre ombre de complicité.
D'abord, jedéclareque je n'ai eu aucune part à la nomination de Dumouriez
au ministère. C'est une fausseté que démontre l'histoire de cette
époque. Qui disposait alors des places? La ci-deyant reine. Ce fut elle
qui, de concert avec Talon et Bonnecarrère, choisit Dumouriez, et
assurément Robespierre ne prétendra, pas que j'aie eu des liaisons avec
cette femme.
Il a prétendu que j'étais complice des crimes de Dumouriez parce que j'avais, sur la guerre avec l'Autriche, la même opinion que ce général.
J'observe à cet égard que, jusqu'au moment de l'entrée de Dumouriez au ministère, je ne le connaissais pas et que, quatre mois avant qu'il y entrât, j'ai exposé aux Jacobins, dans quatre séances successives, mon opinion sur la guerre avec l'Autriche. Je crois avoir prouvé alors que cette guerre était le seul moyen de donner la République à la France. Il me paraissait en effet impossible de déroya-liser la Constitution si l'on ne parvenait à dévoiler les perfidies de Louis Capet qui nous trompait avec des serments infidèles. L'événement a justifié mes prévisions.
Je sais bien que Robespierre fondait son opinion sur un raisonnement inverse. Il voulait guérir la nation de ses maux intérieurs avant de déclarer la guerre à l'Autriche. Il croyait parvenir plus sûrement au républicanisme en ôtant à La Fayette son commandement et au roi ses pouvoirs. J'avais senti que, dans les circonstances, cette opinion était impolitique, parce qu'on venait toujours, la Constitution a la main, s'opposer aux mesures que nous jugions nécessaires. Il fallait faire tomber la Constitution car j'avais bien compris que la Constitution resterait tant que nous aurions la paix, la cour devant profiter de tous les moyens pécuniaires qu'elle avait entre les mains pour corrompre les esprits et faire périr la liberté. Voilà le sentiment qui a dirigé ceux qui, comme moi, ont voulu la guerre avec l'Autriche. Mais encore une fois, mon opinion était à moi, et je ne connaissais pas Dumouriez.
Quand Dumouriez entra au ministère, il vit que cette opinion prévalait dans l'Assemblée ^législative et il se hâta de l'adopter. La guerre fut décrétée à l'unanimité et sans discussion.
Ainsi, citoyens, quand, pour faire peser sur ma tête une effroyable responsabilité, on vient me reprocher d'être l'auteur de la guerre avec l'Autriche et de tous les désordres qui affligent la France, on me calomnie, on calomnie l'Assemblée législative, car ce fut elle seule qui, animée par les vrais principes du républicanisme, déclara la guerre à l'Autriche.
Je viens à la guerre avec l'Angleterre et, à cet égard, on ne m'accusera certainement pas d'avoir provoqué cette guerre, ni d'être .de complicité avec Dumouriez.
Et en effet, citoyens, vous devez vous, rappeler que dans la déposition qui vous a été faite par les trois commissaires du pouvoir exécutif, Dumouriez traite cette déclaration de guerre « d'ouvrage ridicule et perfide de Brissot. » Il devait savoir, cependant, que cette déclaration de guerre n'était pas mon ouvrage, qu'elle était l'ouvrage du comité qui, -à l'unanimité, avait décidé de vous la proposer : que d'ailleurs elle était l'ouvrage de la nécessité.
Car, je vous le demande, citoyens, lorsque notre ambassadeur était chassé ignominieusement de Londres, lorsque le ministère britannique faisait des préparatifs de guerre, lorsqu'il arrêtait les blés qui vous étaient des-
tinés et la circulation de vos assignats, lorsqu'il prouvait, en un mot, par mille faits, qu'il était en état d'hostilité contre vous, était-il de la dignité, de l'intérêt de la République française de laisser toutes ces injures impunies 1
Mais d'ailleurs? j'ai un autre moyen à faire valoir. Quand j'ai publié mes opinions à l'égard du ci-devant roi, je vous ai prédit que l'Angleterre, la Hollande et l'Espagne profiteraient de votre jugement pour vous déclarer la guerre, et l'événement m'a encore justifié. Non pas que ce jugement en fût la la cause, je sais et j'ai dit quelles étaient leurs dispositions à cet égard : mais je vous ai déclaré en même temps qu'il était possible que votre jugement fanatisât les têtes en Angleterre, en Hollande et en Espagne, et convertît une guerre de rois contre un peuple libre en une guerre de dix peuples esclaves contre un peuple libre, ce qui cause vos malheurs. On ne doit donc pas m'accuser d'avoir provoqué la guerre contre l'Angleterre. Ce sont plutôt ceux qui ont voté dans le parti contraire qui pourraient être accusés.
Je demande que les pièces qui ont été trouvées chez Bonnecarrère et qui accusent Brissot soient lues.
Je le demande aussi.
Citoyens, une troisième opinion, sur laquelle on me prête une complicité avec Dumouriez, c'est celle qu'il a développée dans les proclamations que vous avez entendues. Il calomnie Paris, et l'on soutient que, moi aussi, j'ai calomnié Paris.
Voix nombreuses sur la Montagne : Oui ! oui !
Citoyens, Dumouriez a calomnié Paris; mais dans les diverses opinions que j'ai énoncées, soit à la tribune, soit dans mes écrits, j'ai constamment distingué les habitants de Paris des brigands qui infestent cette capitale, qui multiplient les soulèvements et les agitations, uniquement pour donner plus de prix aux ennemis extérieurs et fatiguer le peuple. Je défie, à cet égard, qu'on me cite une seule opinion, un seul écrit, une seule circonstance où je n'aie pas rendu justice à la ville de Paris, à sa soumission aux lois et aux autorités constituées. Je me suis seulement élevé contre les agitateurs et contre les hommes qui entretiennent l'anarchie. J'ai bien senti en effet que le seul moyen d'affermir la révolution en France et de la proposer dans toute l'Europe était de faire régner l'ordre dans la République. L'ordre, je l'ai dit vingt fois, vous aurait valu des armées. Si l'ordre eût régné, les peuples se seraient empressés d'imiter une Constitution qui faisait tant d'heureux; tandis que les tableaux de votre anarchie, répandus sans cesse en Angleterre, en Allemagne et en Belgique....
Un membre sur la Montagne : C'est toi qui les faisais !
Ces tableaux, dis-je, sont les véritable causes qui ont empêché les peuples étrangers de vous imiter dans votre révolution.
Si vous prenez garde, citoyens, aux pillages qui ont eu lieu dans la Belgique, vous verrez...
J'observe à Brissot que les pillages
n'ont encore été dénoncés que par Dumouriez, et que Dumouriez est un scélérat et un traître aux rapports duquel on ne doit ajouter aucune foi.
Vous verrez qu'ils sont l'unique cause de nos échecs dans ce pays.
Enfin, citoyens., Dumouriez a énoncé une opinion exécrable dans sa proclamation. C'est l'opinion par laquelle il annonce qu'il veut rétablir la royauté et l'ancienne Constitution. A cet égard je fais le serment ou plutôt je le renouvelle, ae ne jamais transiger. (Murmures sur la Montagne.) Je le répète, citoyens, peut-on accuser d'aimer les rois un homme qui s'est consacré au républicanisme bien avant son accusateur; un homme qui, en 1782,. fut enfermé à la Bastille pour avoir émis des principes alors réprouvés; un homme qui, en 1788, quitta son pays pour aller dans les Etats-Unis respirer l'air de la liberté et uniquement pour empêcher que ses enfants ne fussent souillés par la présence d'un tyran. J'en atteste les amis qui m'ont connu, à qui je fis part de mes projets et qui alors, partageant les mêmes opinions que moi, voulurent s'établir aux Etats-Unis.
Enfin, peut-on accuser de vouloir ressusciter la royauté un homme qui, depuis l'origine de la Révolution, n'a cessé de vouloir établir la République dans ce pays, tandis que mes accusateurs ou se cachaient ou paraissaient conspirer contre elle; un homme qui soutenait que la France était républicaine aux cinq sixièmes et qu'il fallait peu de chose pour la rendre telle que le désiraient les amis de la liberté 1 Yoici, citoyens, un fait sur lequel je prie la Convention de fixer son .attention. En juillet 1791, époque où l'on sévissait avec rigueur contre les patriotes, j'étais le seul, avec un autre écrivain, qui osât propager les principes du républicanisme. Et aujourd'hui, on m'accuse, moi Brissot !
Etais-tu au Champ de-Mars ?
Oui, car on le poursuivait pour s'y être trouvé. J'en ai les preuves.
Au surplus, citoyens, la haine des rois et de la royauté a pris racine de bonne heure dans mon âme, et, je le déclara, je mourrai plutôt que de transiger avec le scélérat Dumouriez pour le rétablissement de la royauté. (Rumeurs sur la Montagne.)
(1). Ce fut pour aller combattre les Volsques que Manlius abandonna ses haines particulières. Je demande l'ordre du jour sur toutes ces misérables accusations.
Plusieurs membres : L'ordre du jour et le rapport du comité !
(La Convention passe à l'ordre du jour.)
Une députation de la section de Paris, dite du Théâtre-Français ou de Marseille, est admise à la barre (2).
André Hureville, orateur de la députation, donne lecture de l'adresse
suivante (3) :
(( La section du Théâtre-Français, dite de Marseille, convaincue que la patrie appelle à son secours les bons citoyens, arrête à l'unanimité qu'elle marchera contre l'ennemi et les traîtres. La Convention, qui doit veiller au salut de la patrie, est invitée à rendre un décret pour autoriser la section à voler promptement à la défense de la République.
« Nous attendons le décret et nous partons. (Vifs applaudissements.)
« Signé : Dutrone; Lambert, secrétaire. »
répond à l'orateur que demain son vœu sera satisfait, et déclare qu'il se félicite de n'avoir qu'à modérer le zèle patriotique d'une section qui en a donné tant de preuves.
(1). Il n'y a pourtant pas de quoi ; ce sont tous des mauvais citoyens. (Murmures prolongés.)
Un membre (à droite) : C'est sans doute parce qu'il ne les dirige pas.
(La Convention décrète la mention honorable et l'insertion au Bulletin, tant de la pétition que de la réponse du président (2).
(La députation de la section du Théâtre-Français est admise aux honneurs de la séance. )
, au nom, du comité de défense générale, fait un rapport (3) et présente unt projet de décret (4) pour la création d'un. conseil d'exécution, composé de neuf membres ■ pris dans le sein de la Convention; il s'exprime ainsi :
Citoyens, votre comité de défense générale-s'occupe de déterminer les grandes mesures de salut public que nécessitent les circonstances. Mais il a pensé qu'il devait à l'instant même vous en proposer une qui doit tout précéder, et sans laquelle peut-être toutes les autres seraient vaines.
Votre comité a reconnu que dans un moment où les revers se succèdent, où un vaste plan de contre-révolution couvre la France, où des trahisons de tous genres se manifestent, il fallait donner aux ressorts du gouvernement plus d'action, plus d'énergie, plus d'unité, une discussion approfondie, les méfiances qui environnent le pouvoir exécutif et vos comités, l'abus qui peut résulter de Cette publicité^, l'aveu des ministres eux-mêmes, tout a concouru à déterminer le comité à la mesure qui-va vous être soumise.
Il a pensé qu'il fallait nommer un comité d'exécution, composé de 9
membres choisis dàn3 le sein de cette Assemblée, chargé de remplir les
fonctions qui étaient attribuées au conseil exécutif, et de prendre
toutes les mesures de défense générale que nécessitent les
circonstances. Vous pouvez et vous devez adopter ce que le comité vous
propose; vous le pouvez, parce que la nation^ en nommant une Convention
nationale, lui a délégué l'exercice de la souveraineté et tous les
pouvoirs; vous
Je ne me livre pas à de plus longs développements, car il faut dans ce moment des actions et non pas des discours.
Yoici le projet que votre comité vous présente :
« La Convention nationale décrète :
« Art. 1er. Qu'il sera nommé dans le jour,
par appel nominal, un comité de neuf membres de la Convention.
« Art. 2. Le comité délibérera en secret, il dirigera toutes les fonctions dont étaient .chargés les ministres.
« Art. 3. Le comité rendra compte tous les huit jours, à la Convention, des mesures qu'il aura prises.
«Art. 4. Les ministres seront réduits à l'administration pure et simple.
« Art. 5. Lorsque le comité fera arrêter des généraux, des ministres, il en rendra compte à la Convéntion. »
cède le fauteuil à Dubois-Crancé, ancien président (1)
présidence de dubois-crancé, ancien président.
(2). Citoyens, où en sommes-nous, si l'opinion du comité vient à dominer
dans cette Assemblée ? Ne voyez-vous pas que c'est tout bouleverser,
tout désorganiser, que d'attribuer à la Convention le pouvoir législatif
et le pouvoir exécutif ? Je m'oppose vivement à cette mesure, car
lorsqu'il faut tant marcher, par son adoption et sa mise en exécution
vous allez tout entraver. D'ailleurs, où sont les hommes, qui ont le
talent, les vertus nécessaires pour sauver la patrie ? Les ministres
n'ont pu vous dire, après trois mois d'expérience, ce que vous aviez de
force ni comment vous deviez en disposer? Acquiert-on tous les talents
en un jour? Suffit-il de bonnes intentions? A peine ces, hommes, que
vous aurez nommés, seront dansi la commission, que ceux-là mêmes qui les
auront nommés, viendront ici leur enlever la confiance et en-* traver
leurs opérations. Rien n'ira; on lassera le peuple, qui, une fois
chassé, vous chas-
Je ne partage pas l'avis de Thuriot, car ce n'est pas la partie d'administration que l'on vous propose de donner à votre comité, c'est la partie délibérative. Dans ce moment, le conseil exécutif ne délibère pas, c'est votre comité de défense générale, et toujours le conseil ne marche pas, parce que sa timidité le retient. Le projèt de décret qui vous est présenté, a le mérite de remédier à ces inconvénients. Le comité des, Neuf ayant un programme bien délimité, débarrassera d'abord votre comité de défense des affaires qui l'accablent et par suite entravent la marche des affaires; il rendra ensuite à l'exécution toute son activité. Je suis d'avis d'adopter le projet d'Isnard.
Si vous avez l'intention, de placer le conseil exécutif dans cette Assemblée, j'estime qu'il serait mieux de l'avouer franchement que de le faire par des moyens détournés. Le pouvoir exécutif doit avoir une volonté; si vous nommez des membres qui délibèrent pour lui, les ministres ne seront que les commis de votre volonté; ce sera un grand tort. Dans l'état de choses où nous sommes, il ne suffit pas d'avoir de grandes lumières, il faut encore posséder la confiance publique, sans laquelle il ne,peut pas y avoir de grands ministres. Or, avec ce système perfide de toujours dénoncer sans preuves, il ne peut régner aucune confiance; je comprends que les ministres veuillent se décharger de la responsabilité.
Je ne partage pas l'opinion du comité et je voterai contre le projet, je crois, qu'à l'heure actuelle, nous avons besoin d'une surveillance active, je ne pense pas qu'on doive aller jusqu'à l'usurpation du pouvoir exécutif.
Plusieurs membres : La clôture ! la clôture !
s'y oppose, et, par son insistance, cause quelques désordres dans l'Assemblée.
Les mêmes membres : La .clôture ! la clôture ! et Duhem à l'Abbaye.
Vaîné. J'estime que la Convention ne. peut prononcer la clôture, sans aboutir en même temps à une solution. Rien ne va, et si cela a duré jusqu'à présent, il faut convenir que quelque chose est mal, car ce n'est pas vous. Si cela venait de votre part, vous seriez des traîtres ou des. ignorants; or, comme aucun de vous se lèvera pour attester qu'il • est traître ou ignorant... .
Un membre : La division... (Rires.)
Vaîné. Je suis de l'avis du comité, car je défie de sauver la patrie avec des hommes pris hors de son sein.
Depuis six mois vous combattez en vain contre les abus; vous n'avez pas encore porté la coignée à la racine; il ne faut que du sens commun pour sauver la patrie. Tant que vous prendrez publiquement des mesures de salut public, vous ne ferez rien. Dumouriez est un traître? Eh bien! je dois dire qu'une partie de la Convention ne mérite pas notre
confiance, puisque Dumouriez vient pour en protéger ce qu'il appelle la saine partie, contre celle qui doit sauver la République. (Des applaudissements s'élèvent à l'extrême, gauche, et se mêlent-aux acclamations des tri-^ hunes.) Il est impossible que la Montagne (désignant l'extrême gauche) ait la moindre confiance en la plupart des hommes d'Etat. (De nombreux murmures couvrent la voix de Marat.)
Donnez-nous des moyens de salut public.
Un membre : Sommes-nous en séance permanente pour écouter les injures de cet homme?
Plusieurs membres : Voilà celui: qui veut dissoudre la Convention. A bas, à bas Marat ! (Une vive agitation règne dans■ l'Assemblée. Le Président se couvre. L'ordre se rétablit.)
Les circonstances sont telles, qu'on ne doit s'occuper que de la chose publique* Marat, vous avez manqué à la représentation nationale, je vous rappelle à l'ordre.
(Drôme). Je déclare, au nom de la ; Montagne, qu'elle désavoue les expressions de Marat, en ce qui concerne la; généralité de l'autre partie de la Convention; elle reconnaît qu'il y a plusieurs membres sur qui elle n'a jamais:conçu de-, soupçons.
quitte la tribune.
Je demande, par motion d'ordre, que lorsque nous n'avons pas un moment à perdre pour agir, on déclare complice de Dumourieiz tout homme qui fera perdre: le temps de. la Convention. (Applaudissements).
Je demande aussi îa parole pour une motion d'ordre. Qu'elle qu'ait la différence des opinions, il n'en est pas moins vrai que la* majorité de la Convention veut, la République.
Un grand nombre de. membres : Tous la veulent.
Nous voulons, repousser et anéantir la conjuration des rois; nous sentons que telle est la nature des circonstances, telle est la grandeur du péril qui nous menace, qu'il nous faut un développement extraordinaire de forces et de mesures de salut public : nous cherchons à établir une agence funeste pour les rois ; nous sentons que pour créer des armées, trouver de nouveaux chefs, il faut un pouvoir nouveau toujours dans la main de la Convention, et qu'elle puisse anéantir à volonté : mais je pense que ce plan doit être médité, approfondi. Je crois qu'une République, tout en proscrivant les dictateurs et et les triumvirs, n'en a pas moins le pouvoir et même le devoir de créer une autorité terrible; telle est la violence de la tempête qu-i agite le vaisseau de l'Etat,. qu'il est impossible, pour le sauver/ d'agir avec les- seuls principes de l'art. Ecartons toute idée d'usurpation. Eh ! qui donc pourrait être usurpateur? Vous voyez que cet homme qui avait remporté quelques victoires, va appeler contre lui toutes les forces des Français. Déjà.le département où il est né demande sa tête. Rapprochons-nous, rapprochons-nous fraternellement; il y va du salut de tous. Si la conjuration triomphe, elle proscrira, tout ce qui aura porté le nom de patriote, quelles qu'aient
été les nuances. Je demande le renvoi du projet de décret, et. l'ajournement à demain.
(La Convention renvoie le projet à un nouvel examen du comité et en ajourne la discussion au lendemain.)
Une députation de la section des Amis de la patrie est admise à la barre.
L'orateur de la députation- donne lecture de l'extrait suivant des registres : (1)
Extrait des délibérations de l'assemblée générale et permanente de la section des Amis de la patrie, ce jourd'hui 3 avril 1793, l'an deuxième de la République une. et indivisible.
( L'assemblée, toujours constante dans ses principes, a arrêté qu'elle; regarde la Convention nationale comme le point central du salut public, et qu'elle le défendra collectivement par tousr ses moyens, sans prétendre soustraire au glaive de la loi les traîtres qu'elle pourrait renfermer dans son sein.
En conséquence, que le présent arrêté sera renvoyé sur-le-champ,; par les commissaires de la Convention," à la commune et aux quarante^sept autres sections. L'assemblée a nommé les'citoyens: Cellier, Hellin, Sàurand, Jolicorps, et;' Debvois-Rousselot, auxquels elle a donné copie du présent arrêté.
« Signé ; Buteau,v président., » Pour, copie conforme, « Signé : Fournier, secrétaire. »
répond à l'orateur et aGcor de à la députation les honneurs de la séance.
(La Convention ordonne l'impression de cet extrait, la mention honorable au procès-ve»-bal et: l'insertion au Bulletin).
Une députation des citoyens de là section de. Gravilliers se présente à la barre (2).
L'orateur de la députation informe la Convention que; cette section a arrêté qu'il serait envoyé une députation pour lui remontrer que la mesure proposée de 15,000 hommes est insuffisante, et que le canon d'alarme serait tiré; que tous les citoyens, depuis 16 ans jusqu'à 50, tireraient au sort ; que tous les signataires de pétition seraient déclarés avoir tiré au sort: et marcheraient, pour couvrir de leur corps les patriotes; que tous les riches dont les revenus excèdent' 2,000 livres; dom: neraient comme taxe de guerre' tout ce qui passerait cette somme.
répond à l'orateur et accorde à la1 députation les honneurs de la séance:
(La Convention renvoie cet arrêté au comité de défense générale.)
Une: citoyenne se présente à la barre (3).
Elle donne lecture d'une pétition par laquelle elle propose, comme
mesure, qui, peut sauver Paris, de faire garder les otages les femmes et
les enfants de tous les égoïstes que l'on fera marcher pour remplacer
les; Sansr,
, tout en admettant la pétitionnaire aux honneurs de la séance, lui montre les inconvénients et les dangers que ferait naître un patriotisme exagéré par le mouvement général de réprobation qu'il a inspiré à l'Assemblée.)
(La Convention décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur cette pétition.)
Une dèputation des citoyens de la section du Panthéon est admise à la barre (1).
L'orateur de la dèputation présente un arrêté de cette section, pour demander que demain il soit fait une revue afin de constater la force armée; que les scellés soient apposés sur les papiers des ministres de la guerre, et des affaires étrangères; que les six adjoints du ministre de la guerre soient mis en état d'arrestation; que la peine de mort soit portée contre ceux qui approuveraient les projets de Dumouriez; que dans trois jours le procès soit fait à Dumouriez, à Philippe-Joseph Egalité et à ses enfants; que les enfants des ci-devant nobles soient expulsés des bureaux de la Convention et des administrations, et remplacés par les pères de ceux qui combattent aux frontières; enfin, que la Convention rapporte le décret qui déclare l'argent marchandise.
répond à l'orateur et accorde à la députatiop les honneurs de la séance.)
(La Convention renvoie cet arrêté au comité de défense générale.)
Le citoyen Boisson de Quercy, premier capitaine commandant au bataillon des arquebusiers de la légion des Germains est admis à la barre (2).
Il s'exprime ainsi :
Législateurs, trois cent mille républicains bién armés, non compris ceux qui vont aux frontières, suffisent sans doute pour terrasser la ligue des tyrans ; vous n'êtes pas embarrassés de les trouver. Parlez, et à l'instant tous les Français vous offriront leurs bras pour aller combattre ces ennemis. Mais il faut les équiper et les armer.
La diversité du calibre des fusils qui existent dans toute l'étendue du territoire de la la République, les marchés d'armes devenus illusoires par l'embargo que les puissances ont fait mettre dans tous les pays sur l'exportation des armes, rendent cet armement difficile. Eh bien ! je lève toutes ces difficultés dans le projet que je soumets à vos lumières. En le déposant sur votre bureau, vous y remarquerez aussi un projet de décret en seize articles, précédé d'un considérant digne de législateurs, vraiment républicains, qui ne craignent rien des vaines menaces d'un ennemi moins dangereux que fanfaron et scélérat. (Applaudissements. )
Vous verrez dans tout ce projet unique qu'il est possible dans le courant
de ce mois d'équiper et d'armer en fusils de munition d'un
Je demande que la Convention décrète que le rapport sur icelui lui sera fait dans deux fois vingt-quatre heures et qu'il me Bera permis d'assister à la séance de son comité militaire quand on le discutera.
répond au pétitionnaire et lui accorde les honneurs de la séance.
(La Convention accorde la mention honorable et décrète la demande formulée par le citoyen Boisson du Quercy.)
, au nom du comité de défense générale, fait un rapport et présente un projet de décret tendant à garder à vue, comme otages, les pères, mères, femmes et enfant's des officiers de l'armée de Dumouriez ; le projet de décret est ainsi conçu :
« La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de défense générale, décrète :
Art. 1er.
« Les pères et mères, les femmes et les enfants des officiers de l'armée qui était commandée par Dumouriez, depuis le grade de sous-lieutenant jusqu'à celui de lieutenant général inclusivement, seront gardés à vue, comme otages, par chaque municipalité du lieti de leur résidence, jusqu'à ce que les commissaires envoyés par la Convention nationale et le ministre de la guerre détenus par la perfidie de Dumouriez soient mis en liberté, ou que l'armée de la Belgique, soit remise /sous les ordres du nouveau général qui sera nommé.
Art. 2.
« Chaque municipalité sera tenue d'envoyer dans le plus bref délai au directoire du district, le procès-verbal contenant les noms des citoyens détenus en otage.
Art. 3.
« Le ministre de la guerre remettra dans vingt-quatre heures à la Convention nationale l'état nominatif de tous les officiers, pour être imprimé et envoyé aux directoires des départements pour l'exécution du présent décret. »
(La Convention adopte ce projet de décret.) (1)
Un membre : Je propose de décréter que quiconque parlera de capituler
avec Dumouriez ou sera convaincu d'avoir approuvé sa rébellion et ses
principes antirépublicains, sera puni de mort.
(La séance est suspendue, le jeudi 4 avril, à quatre heures du matin et prorogée à neuf heures. )
A LA SÉANCE DE LA CONVENTION NATIONALE DU
DISCOURS (2) de MAXIMILIEN ROBESPIERRE
pour demander la mise en accusation de Brissot.
Texte du Moniteur (3).
Il est temps que cette comédie finisse. Ce n'est point par des nouvelles tantôt décourageantes, tantôt plus satisfaisantes, qu'on doit endormir la nation; il faut que la Convention prenne des mesures révolutionnaires, Jusqu'ici je n'ai entendu proposer que des palliatifs faits pour nous tromper sur la mesure de nos maux; il faut adopter des mesures dictées par la liberté : mais je dois déclarer que ce ne sera jamais dans le comité de défense générale qu'elles seront proposées; car dans ce comité régnent des principes que la liberté réprouve. (Des murmures s'élèvent dans une partie de VAssemblée et couvrent la voix de l'orateur.)
Un membre : Faites taire l'opinant ; il calomnie un comité de l'Assemblée.
Là règne à mon avis..... (A la tribune, montez à la tribune, s'écrient plusieurs membres.)
Il est impossible aux amis de la liberté d'aller parler à la tribune, on les injurie.
Je prends l'engagement de maintenir la liberté des opinions.
(à la tribune). Citoyens, dans ce moment-ci je me dois à moi-même, je
dois à la patrie une profession de foi. Nommé membre du comité de
défense générale, mais convaincu que les principes qui doivent
sauver la patrie ne peuvent pas y être adoptés, je déclare que je ne
me regarde plus comme faisant partie de ce comité; je ne suis pas
convaincu qu'un système où la royauté serait combinée avec une sorte
de constitution aristocratique, déplairait à certains membres de ce
comité; je ne suis pas bien convaincu qu'un pareil système ne
conviendrait pas à certaines gens qui quelquefois parlent de
patriotisme, mais qui nourrissent et conservent dans leuï âme une
haine profonde pour l'égalité. Je ne veux pas délibérer avec ceux
qui ont parlé le langage de Dumouriez,. avec ceux qui ont calomnié
les hommes à qui maintenant Dumouriez déclare une guerre implacable,
avec
S'il ne m'est pas donné de sauver la liberté, je ne veux pas du moins être le complice de ceux qui veulent la perdre, je ne veux pas être membre d'un comité qui ressemble plutôt à un conseil de Dumouriez, qu'à un comité de la Convention nationale. (Murmures à la droite de la tribune.)
J'invoque à l'appui de ce que je dis, le témoignage de Dumouriez lui-même; car dans une de ses lettres, il a dit que le comité dont je parle, était excellent, à l'excsption de six membres : or, ces six membres, dont je m'honore de faire partie, ne peuvent obtenir la majorité; enfin, je ne peux pas être d'un comité dont la plupart des membres poursuivent avec acharnement les patriotes, tandis qu'ils gardent le silence sur les crimes de nos généraux.
Je ne puis vous dissimuler ma surprise de voir que ceux qui,depuis le commencement de la Révolution, n'ont cessé de calomnier ce côté (désignant le côté gauche) qui fut et qui sera toujours le parti de la liberté, soient restés muets sur les crimes de Dumouriez, et qu'il n'y ait que nous, tant calomniés, qui ayons élevé la voix sur les perfidies de ce traître.
Je demande la parole après Robespierre.
Pour étouffer la voix de la vérité dans les moments critiques pour le salut public, on a coutume d'amollir le courage des patriotes par certaines idées de réunion qu'on a l'adresse de jeter en avant; mais moi je fais profession de croire que l'amour seul de la liberté doit réunir les hommes, et je me défie de ces protestations brusques faites dans des moments critiques, où l'on croit avoir besoin de feindre un rapprochement que l'on est bien loin de désirer; je me défie de ceux qui, dans des moments critiques., m'ont tendu la main, et qui le lendemain m'ont calomnié, et puisque Brissot demande la parole pour me foudroyer, je vais faire sur Brissot l'application de ce que je viens de dire. Je ne veux point sacrifier la patrie à Brissot, et Brissot eût-il la confiance de cette Assemblée, je déclare que si j'avais des faits certains à alléguer contre lui, je ne balancerais pas un moment à le démasquer.
J'applique à Brissot le principe que j'ai avancé.
J'ai dit que je ne voulais point délibérer avec les amis de Dumouriez : eh bien ! Brissot a été et est encore l'intime ami de Dumouriez, c'est l'histoire de Dumouriez à la main que je veux le juger. Brissot est lié avec Dumouriez, Brissot est lié à tous les fils de la conspiration de Dumouriez. Je déclare qu'il n'y a pas un homme de bonne foi, qui ait suivi la vie politique de Brissot, qui puisse ne pas être convaincu de ce que j'avance.
J e déclare qu'il n'y a pas. une seule circonstance où Brissot n'ait pris la défense de Dumouriez; le système de Dumouriez a été de nous engager dans une guerre funeste et périlleuse, aifin de la faire tourner contre la liberté. Dumouriez et Brissot furent les premiers à proposer la guerre contre l'Autriche^ et remarquez que nous leur disions avant de déclarer la guerre à l'Europe : abattez la cour
et remplacez vos généraux. Que nous répondait-on ? On excusait la cour, on nous disait que dire du mal de Lafayette et des généraux, c était troubler la discipline militaire, c'était se déclarer les ennemis de la patrie; on nous montrait tous les peuples et principalement la Belgique, disposés à venir au-devant des Français, et on nous faisait voir l'étendard de la liberté flottant sur le palais des rois.
Cependant cette guerre commença par des revers, et malgré cela, on protégeait les généraux, et on les investissait d'un pouvoir dictatorial sur la motion des chefs de parti, ennemis jurés des patriotes.
Après l'époque du 10 août, nous étions cernés de despotes qui avaient juré la perte de la liberté, et qui avaient combiné leur projet avec les ennemis de l'intérieur ; au mois de septembre, nous apprîmes la prise de Verdun, et que l'ennemi se portait sur Paris; personne jusqu'alors n'avait donné avis de son approche. Cependant quels étaient les ministres? C'étaient ceux qu'avait fait nommer Brissot. Quels étaient les membres qui composaient la commission des Vingt-et-Un ? Brissot et ses partisans. Et ces ministres nommés par; Brissot vinrent proposer à l'Assemblée d'abandonner Paris avec le roi et sa famille, qui étaient alors au Temple; et si un autre ministre, qui n'était pas du parti Brissot, n'était venu apprendre au peuple ce que lui cachaient les hommes qui le dirigeraient; si la France ne s'était pas levée en masse, les ennemis seraient venus à Paris, et la République serait anéantie.
Dumouriez fut alors nommé pour commander l'armée qu'avait abandonnée Lafayette; et ce. fut Brissot et ses partisans qui le portèrent à cette place. Je ne sais ce qu'eût fait Dumouriez si la France ne s'était levée tout entière; mais ce que je sais, c'est que Dumouriez conduisit poliment le roi de Prusse aux frontières; ce que je sais, c'est que l'armée française était furieuse de voir échapper les ennemis, quand elle eût pu les écraser; ce que je sais, c'est que Dumouriez se montra aussi respectueux envers le monarque, prussien, qu'il se montre maintenant insolent envers les représentants du peuple français ; enfin ce que je sais, c'est qu'il ravitailla l'armée ennemie lorsqu'elle était prête à périr de misère et de faim.
Dumouriez, au lieu d'exterminer les Prussiens qui s'étaient si imprudemment engagés dans le cœur même de la France, vient à Paris, après avoir passé quelques jours avec les détracteurs des amis de la liberté, dans des festins scandaleux, va dans la Belgique, où il débute par des succès éclatants pour, ceux qui ne l'avaient pas apprécié.
Dumouriez, après avoir établi son empire dans cette partie de la Belgique, part pour la Hollande; s'il fût parti trois mois plus tôt, le succès de cette expédition était assuré. J'ai cru un moment que la gloire retiendrait pendant quelque temps Dumouriez dans les bornes de ses devoirs, et qu'il n'attenterait à la liberté de son pays qu'après avoir abattu les despotes conjurés contre elle; alors Dumouriez dont les projets auraient été à découvert me paraissait facile à renverser.
Dumouriez, après s'être emparé de quelques
places de la Gueldre, se découvre tout à fait,
et tandis que tout était arrangé pour évacuer
la Belgique, les généraux allemands, en partie donnés par Brissot, qui commandaient l'armée devant Maëstricht, nous trahissent. Si l'on ose nier ces faits, j'en donnerai des preuves plus authentiques.
A son retour de la Gueldre, Dumouriez se plaint-il d'avoir été trahi? Non. Il jette au contraire un voile sur tous les faits; il fait l'éloge des généraux; il loue Miranda et La-noue, généraux très connus par leur incivisme; il impute tous nos malheurs aux soldats; il veut persuader à la France que nos armées ne sont composées que de lâches et de voleurs. Nos revers se succèdent. Il donne une bataille, il la perd; il en accuse l'aile gauche de son armée, qui, dit-il a plié : mais cette aile gauche était commandée par Miranda, par son ami, et l'on doit se rappeler que Dumouriez disait de son armée : ne vous découragez pas, surtout ayez confiance en vos généraux; ils sont mes élèves, ils sont mes amis.
Dumouriez avait établi l'aristocratie dans la Belgique, en réintégrant les officiers municipaux destitués par vos commissaires : Dumouriez avait fait des emprunts énormes : Dumouriez s'était emparé du trésor public, après en avoir fait emprisonner les gardiens : Dumouriez s'était emparé du Trésor public, après ensuite il déclare la guerre à la Convention nationale; il distingue deux partis qui la composent; l'un qui est subjugué, et Brissot doit se ranger dans ce parti, et l'autre qui dominer
Dumouriez dit qu'il vient protéger ce parti, qu'il dit être opprimé : il dit que Paris donne' la loi à la nation, et qu'il faut anéantir Paris : et c'est dans ce moment que nous délibérons; et que l'on me fait un crime de penser que Dumouriez a ici des partisans, et que ces partisans sont les hommes qu'il veut protéger. On m'en fait un crime , lorsqu'ils tinrent toujours un langage qui devrait les faire reconnaître; on m'en fait un crime, lorsqu'ils firent tout pour se partager la puissance; on m'en fait un crime, lorsque les Anglais, accusés d'avoir des partisans dans cette enceinte^ menacent nos côtes; enfin, l'on m'en fait un crime, lorsque; Dumouriez s'efforce de décourager la nation, en lui disant que les troubles qui nous agitent nous mettent dans l'impossibilité de résister aux ennemis extérieurs, en même temps que nous réduirons les révoltés de l'intérieur; lorsque Dumouriez méprise la nation, au point de dire qu'elle n'a plus d'autre parti à prendre que de transiger avec les ennemis; et' il se propose pour médiateur, lorsqu'il propose de diviser son armée et de marcher avec une partie sur Paris.
Voilà une partie de mes doutes; voilà la force dans laquelle nous devons puiser les moyens de sauver la liberté. Sauver la liberté!... Mais la liberté peut-elle se sauver, lorsque les amis du roi, lorsque ceux qui ont pleuré la perte du tyran, et qui ont cherché à réveiller le royalisme, paraissent nos protecteurs;- paraissent les ennemis de Dumouriez, lorsqu'il est évident à mes yeux qu'ils sont les complices 1
Voilà mes faits; ils ne convaincront que les hommes de bonne foi; mais je déclare que lorsque Dumouriez est d'intelligence avec l'homme que j'ai nommé, et avec tous ceux...... (Quelques voix : Nommez-les donc!) Je ne veux pas convaincre les conspirateurs ni les ennemis
de la France; je ne veux que dire la vérité, et ! quand les hommes que j'ai désignés auront assassiné la liberté et ses défenseurs, on dira qy.'au moment où ils allaient exécuter leur complot liberticide, je disais la vérité, et que je démasquais les traîtres.
Je déclare que la première mesure de salut à prendre, c'est de décréter d'accusation tous ceux qui sont prévenus de complicité avec Dumouriez, et notamment Brissot. (Applaudissements des tribunes.)
TEXTE DU « JOURNAL DES DÉBATS » (l). -
Robespierre demande la parole pour une motion d'ordre.
Ce n'est point, dit-il, par des comédies, mais par de grandes mesures que l'on sauve la patrie; et ici je dois faire une déclaration, autant pour moi que pour l'intérêt de la chose publique. Je ne pense pas que ce soit du comité de défense générale actuel de la Convention, que sortiront les moyens de sauver la patrie : je le déclare; je ne suis pas bien convaincu qu'un système de royauté, mêlé à une constitution aristocratique, déplût à tels membres de Ce comité ; à ces membres qui, en affectant le langage du patriotisme, tiennent en secret celui de Dumouriez; qui, comme lui, se sont attachés à calomnier les principes auxquels il a déclaré vouloir faire la guerre.
S'il ne m'est pas donné de sauver la patrie, dit Robespierre, du moins je ne participerai point à sa destruction. Appelé par le suffrage de mes commettants à délibérer dans la Convention, je renonce à délibérer dans un comité qui me paraît, à moi, plutôt le conseil de Dumouriez, que l'un des comités de la Convention.
A l'appui de mon assertion, j'invoque Dumouriez lui-même qui, dans l'une de ses lettres, a dit que le comité de défense générale était excellent, à l'exception de cinq ou six individus parmi lesquels il me compte sans doute, et dont je me fais gloire de faire nombre.
Veut-on des faits? en voici : En suivant la marche politique de notre session, j'ai constamment vu tous ceux de nos membres qui s'attachaient avec le plus d'audace à calomnier les patriotes qui y siégeaient, et la cité de Paris, rester muets sur le compte de Dumouriez, et se taire en toute circonstance jusque sur les probabilités de sa perfidie. Qui osera démentir ces faits?
(Brissot se présente à la tribune : Je demande à répondre, dit Brissot.)
Et puisque Brissot, dit Robespierre, improuvant les vérités que j'avais commencé à dire, demande la parole pour me foudroyer sans doute; c'est à Brissot lui-même que je ferai l'application des principes que je viens de, poser.
Je fais peu de cas des individus; et Brissot, comme homme, ne mérite pas de fixer l'attention d'un législateur : mais Brissot, essentiellement lié au système de contre-révolution qui s'exécute en ce moment, Brissot doit être démasqué.
Je disais que je ne voulais point délibérer avec les conseils, les amis de Dumouriez : eh bien .! l'histoire de la Révolution à la main,
je prouverai que Brissot tint longtemps les fils moteurs de toute l'intrigue dont nous sommes occupés aujourd'hui; je prouverai que Brissot fut lié d'intérêt avec Dumouriez; je prouverai que Dumouriez et Brissot nous trompèrent jusqu'ici par le même motif, sans doute.
Suivant Brissot et Dumouriez, notre cause devait enflammer d'un enthousiasme brûlant tous les peuples chez qui nous voudrions porter la liberté : fiers de pouvoir affranchir des peuples trop longtemps tyrannisés, nous déclarons la guerre à tous les rois.
La guerre commence. — Nous éprouvons des revers. — On dénonce Lafayette, alors chef des armées; que répond Brissot à ces dénonciations? Il calomnie le soldat, parle de discipline et d'obéissance aveugle aux chefs. Citoyens, ne perdez pas de vue que ce fut aussi là le langage de Dumouriez. Remportait-il une victoire ? c'est que les soldats ne délibéraient point. Etait-il battu ? les soldats n'exerçaient aucune discipline. Cependant, les dénonciations s'accumulaient sur la tête des généraux : comment y répondaient Brissot et ses amis? Ils nous appelaient agitateurs, désorganisateurs. Dumouriez succède à Lafayette; il débute par des succès, inspire une confiance nécessaire; et dans un moment, peut-être unique pour la République, au moment où la prudence suffisait à Dumouriez pour ensevelir dans les plaines de la Champagne le roi de Prusse et son armée, Dumouriez le reconduit poliment dans les Etats, ravitaille son armée, et fait avec lui je ne sais quel pacte, dont le mot n'est pas loin peut-être à savoir : le territoire français est libre.
Dumouriez, revenu à Paris, tient des conciliabules avec ces hommes dont j'ai parlé; puis part pour la conquête de la Belgique; y débute par des actions d'éclat; puis part pour la Hollande, et laisse son armée à la disposition de deux étrangers, Miranda espagnol, aventurier inconnu, et Steingel, né sujet d'un prince de l'Empire. Vous avez su quel fut le résultat de leurs opérations mal combinées. C'est ainsi que l'on préparait l'évacuation de.la Belgique, qui avait coûté tant de monde et de trésors; et cette évacuation a été faite. Voilà des faits.
Et c'est dans ces circonstances que nous délibérons; c'est dans un moment où l'Europe nous menace de toutes parts que l'on me fait un crime d'une défiance contre un comité qui jusqu'ici n'a rien fait pour inspirer de la confiance à personne!
Je demande que sans attendre des résultats dont je doute qu'il puisse résulter aucun heureux succès, nous prenions une mesure préliminaire : c'est de mettre en état d'accusation tous les complices de Dumouriez, et notamment Brissot.
TEXTE DU « LOGOTACHIGRAPHE » (1).
Qu'on s'occupe sérieusement du remède de nos maux. Les grandes
masures qu'exige le danger de la patrie doivent faire cesser cette
comédie. Ce n'est pas par des nouvelles, tantôt rassurantes, tantôt
alarmantes, que le traître Dumouriez sera confondu, et que vous
déjouerez le projet de contre-révolution qu'il médite. Ce n'est pas-
non plus par des
Je n'aime pas qu'on m'impute le crime de médire d'un comité, et plût à Dieu que ceux qui sont si ardents à faire de oareils reproches aux amis brûlants de la liberté, soient aussi ardents à accuser les contre-révolutionnaires et la conduite des généraux.
Mais quelle doit être ma surprise, à moi qui suis la marche de la Révolution et qui observe ce qui se passe autour de nous, de voir ceux qui, depuis le commencement de la dernière Révolution, ont calomnié avec tant d'audace la cité qui fut le boulevard de la liberté, soient restés muets sur les complots de Dumouriez; qu'il n'y ait que nous qu'on calomnie tous les jours, qui aient osé jusqu'ici s'd&pliquer d'une manière franche contre cet
ennemi de la patrie. (Interrompu.) Pour étouffer la voix de la vérité, dans ces moments pour le salut public, on a continué d'amollir le courage par certaines idées de réunion; et moi je fais profession de croire» que l'amour de la liberté doit seul réunir les hommes; et je me défie des propositions brusques et tardives de conciliation, lorsque dans les temps qu'il fallait s'unir pour prévenir le plus grand des dangers, on se déchirait mutuellement; et moi je me défie de ceux qui, dans des moments critiques, m'ont tendu la main et qui, le lendemain, abusant de ma bonne foi, me calomniaient avec une nouvelle fureur. Puisque Brissot est ici, puisque Brissot demande la parole pour me foudroyer, je vais faire sur Brissot lui-même l'application des principes qui dirigent ma conduite. Je ne veux point sacrifier la patrie à Brissot; et Brissot eut-il la confiance d'une grande partie de cette Assemblée, je déclare que si l'intérêt de la patrie exigeait que Brissot fut démasqué, j'en aurais le courage ; je dirais la vérité tout entière J'applique donc à Brissot les principes que j'avais déjà annoncés. J'ai dit que je ne voulais point délibérer avec les amis de Dumouriez. Eh bien! je dis que jamais Dumouriez, que jamais les ennemis de la liberté n'eurent ni un ami plus fidèle, ni un défenseur plus utile que Brissot : s'il est de bonne foi, il avouera d'avance dans sa conscience, la preuve de ce que je vais dire. Je défie que l'on me montre une action, une circonstance, où Brissot n'ait été d'accord avec Dumouriez, avec les satellites et avec les supôts de cet ambitieux.
Le système de Dumouriez a été de nous engager dans une guerre funeste, et ensuite de la détourner au détriment de la liberté. Dumouriez et Brissot furent les premiers apôtres de la guerre; et remarquez que nous leur disions alors : attaquez les ennemis du dedans, réprimez les atentats d'une cour perfide, destituez les états-majors infectés d'aristocratie, remplacez les généraux perfides qui sont à la tête de nos armées. On nous disait que dire du mal de Lafayette et des généraux, c'était anéantir la cause de la liberté; on nous montrait tous les peuples, à commencer par la Belgique, disposés à voler au-devant de la constitution française; on nous montrait l'étendard tricolore flottant sur les palais de tous les rois.
Cette guerre cependant, créée sous le ministère de cette même coalition, débuta par des revers; et lorsqu'on se plaignait des trahisons évidentes des généraux, les mêmes hommes nous disaient : Vous êtes des désorganisateurs, vous êtes des contre-révolutionnaires, vous êtes des anarchistes. Les mêmes hommes calomniaient les soldats, provoquaient contre eux des lois de sang, et investissaient les perfides généraux d'alors d'un pouvoir dictatorial. Après cela nous étions cernés par des despotes, qui avaient combiné une conjuration en France avec les complots intérieurs. Au mois de septembre nous apprenons tout à coup la nouvelle de la prise de Longwv et de Yerdun; nous apprenons que l'ennemi s avance vers Paris, et personne ne nous avait donné avis ni des projets de nos ennemis, ni de leurs premières invasions : et cependant quels étaient les ministres d'alors? tétait ceux que
Brissot avait placés. Quels étaient ceux qui avaient la majorité dans le comité de défense générale, et qui le dirigeaient ? C'était Brissot et ses partisans. Et quand l'ennemi s'avançait vers Verdun, quelles mesures prenaient ces directeurs de la fortune publique, pour repousser nos ennemis? Je rappelle ici des faits notoires. Les mêmes ministres proposent d'abandonner Paris, de fuir avec l'Assemblée législative, avec le trésor public, avec le roi et sa famille prisonniers au Temple; et si un ministre n'était venu à l'Assemblée législative lui apprendre ce que ne lui apprenaient pas les hommes qui la dirigeaient; si Paris et la France, à son exemple, ne s'étaient levés pour voler au-devant des Prussiens, qui peut répondre que nos ennemis n'arrivaient pas à Paris ? ou plutôt qui ne devait pas croire que ce devait être là le résultat de leur conduite?
Dumouriez commandait alors l'armée, il avait été mis à la tête de cette armée par les hommes qui étaient en possession de l'autorité. Je ne sais ce que Dumouriez aurait fait, si la France n'eût été ébranlée pour se porter contre les ennemis. Mais, ce que je sais bien et toute la France le connaît parfaitement, c'est que Dumouriez éconduisit très poliment le roi de Prusse hors de nos frontières ; c'est que notre armée nombreuse, animée par l'enthousiasme de la liberté, fut enchaînée par ses soins et qu'elle frémissait de rage de voir échapper l'armée autrichienne et prussienne, et les émigrés que nous pouvions ensevelir dans notre territoire. Les Prussiens et les émigrés ainsi ensevelis, assuraient à jamais le succès de la Révolution française, et celui de la liberté de l'Europe; ce que je sais c'est que Dumouriez se montrait alors aussi courtois, aussi officieux envers le général prussien, qu'il parut depuis insolent avec les représentants de la nation française; c'est qu'il ravitailla l'armée du roi de Prusse; c'est que par ses soins il l'avait soustraite aux suites décisives de la maladie et de la disette qui la dévastaient, et qu'il est au moins douteux, s'il n'a pas été plus utile aux Prussiens qu'à la République.
Mais, si vous suivez cet homme depuis cette époque, la véritable trame ne doit pas se dérober à vos yeux. Dumouriez, au lieu de conserver dans cette campagne le salut de la patrie, au lieu de se joindre aux autres généraux, pour exterminer les Prussiens, qui avaient osé s'engager dans le cœur de la France, dont le peuple entier s'était levé, retourne à Paris, et après avoir passé plusieurs jours, dans la plus étroite intimité avec les détracteurs éternels de Paris et de la liberté, il va dans la Belgique où il débute par un succès brillant, nécessaire pour lui assurer la confiance que les opérations de sa première expédition étaient bien loin de lui avoir donné aux yeux clairvoyants de la liberté. Dumouriez, après avoir établi son empire dans cette partie de la Belgique (car pour la Hollande, s'il s'y était établi, s'il avait commencé trois mois plutôt, le succès était infaillible), Dumouriez a répandu qu'il serait dans peu à Amsterdam, et on l'a cru sur sa parole; moi-même, j'ai cru un instant que l'intérêt et la gloire de son pays pourrait l'emporter dans son cœur sur d'autres considérations, et qu'il ne commencerait à vouloir tenter sur la liberté de son pays, que lorsqu'au moins il au-
rait miné et ébranlé la puissance des despotes, et qu'alors il serait facile d'écraser ce général victorieux et insolent : mais ce général, après avoir remporté quelques places dans la Hollande, dans le même instant, sans avoir terrassé les ennemis, il devient lui-même l'ennemi le plus formidable de la patrie; et tandis qu'on ne nous parlait pas de prodiges, tout était arrangé pour évacuer la Belgique, et la laisser à la discrétion des despotes de l'Europe. Alors, nous avions pour généraux, d'un côté, un Allemand sujet d'une puissance belligérante ; de l'autre, un aventurier espagnol, chassé du Pérou, employé ensuite par Pitt, donné ensuite à la France par Pitt, à la recommandation de Brissot. Au même instant, ces généraux nous trahissent à Aix-la-Chapelle et à Maëstricht. Ici, il faut suivre les véritables traces de Dumouriez. A son retour de sa prétendue conquête de la Hollande, lorsque la nation est trahie par ces deux généraux, qu'il a laissé derrière lui une partie de l'armée, se plaint-il d'avoir été trahi lui-même, dénonce-t-il à la nation les auteurs de ces perfidies ? non : il jette un voile sur tous ces faits, il fait l'éloge de tous les généraux sans distinction; il loue avec emphase et Miranda et Lanoue connus pour conspirateurs avant la révolution du 10 août. Il impute tous nos malheurs à nos soldats; il veut persuader à à la France, il veut persuader à l'Europe que nos armées ne sont composées que de deux classes d'hommes, de lâches et de pillards.
Ici nos revers se succèdent rapidement : Dumouriez donne une bataille, il la perd; la partie qu'il commandait a conservé l'avantage ; l'aile gauche a plié ; mais l'aile gauche était commandée par Miranda, son ami et sa créature. Dans la première proclamation faite à son retour d'Argonne, proclamation dans laquelle il donnait alors des éloges aux suspects et très suspects généraux, il disait à l'armée : Ne vous découragez pas de vos revers, ayez confiance dans vos généraux, ils sont mes élèves, ils ne se conduisent que par mes conseils.
Dumouriez, avant ces revers, avait protégé l'aristocratie dans la Belgique, il avait dissous les sociétés populaires, il avait rétabli les officiers municipaux destitués par vos commissaires, pour cause d'incivisme, et qu'il avait hautement accusé lui-même. Dans les premiers mouvements de la Révolution, Dumouriez avait fait des emprunts énormes, qu'il avait chargé la nation de rembourser; Dumouriez s'était emparé du Trésor public qui suivait l'armée : il avait fait emprisonner des hommes préposés par la nation. Dumouriez avait assuré à la fois et sa fortune, et la contre-révolution dans la Belgique : alors, il déclare hautement la guerre au peuple français; il déclare la guerre à la Convention nationale; il distingue deux partis dans la Convention nationale, l'un qui est subjugué (et sans doute Brissot et tous ses amis ont le droit de se ranger dans ce parti), l'autre qui prétend dominer et qui ne fut que calomnié, qui ne fut que décrié. Dumouriez déclare qu'il vient affranchir la liberté de ce qu'il appelle la minorité : il déclare que Paris est un théâtre de sang et de carnage, que Paris donne des lois à la Convention nationale, et que c'est en réduisant Paris qu'il faut assurer le bonheur de la France ; et c'est dans ces circonstances
qu'on, me fait un crime d'être défiant \ et parmi ceux-là mêmes qui semblent proposer des mesures contre lui, l'on me fait un crime de supposer que les principes de Dumouriez ne déplaisent pas à ces hommes que je désigne, qui pourraient bien faire des vœux pour lui, et ne nous proposer que des mesures illusoires et insuffisantes pour nous endormir sur le bord de l'abîme; on m'en fait un crime, lorsqu'ils ont tenu de tout temps le même langage, lorsqu'ils s'unirent de tout temps, lorsqu'ils veulent partager la puissance,. pour diriger le cours de la Révolution;, dont vous voyez les résultats; on m'en fait un crimè, lorsque des troubles intérieurs sont excités, au moment où Dumouriez nous menace, lorsque les Anglais, si justement suspectés d'être coalisés avec nos ennemis intérieurs, et d'avoir des partisans dans notre sein, menacent la Bretagne; lorsque des revers désastreux sont suivis par des nouvelles qui peuvent paraître suspectes dans le moment où nous sommes; lorsque le premier général, nommé pour anéantir les rebelles, est lui-même un ennemi de la liberté, et qu'il a fait égorger les meilleurs patriotes; lorsque Dumouriez lui-même s'efforce de détruire la nation par tous les moyens possibles, lui prédit les troubles intérieurs et extérieurs qui vont l'agiter, et nous déclare qu'il est impossible de penser à réprimer les ennemis extérieurs, puisque nous serons obligés de réunir toutes nos forces pour réduire les départements en contre-révolution; lorsque Dumouriez porte l'insolence, le mépris pour les représentants de la nation, jusqu'à oser déclarer que nous n'avons d'autre parti à prendre que de transiger avec nos ennemis étrangers, et qu'il se porte lui-même notre médiateur; lorsque, pour nous amener par la terreur à des actions honteuses, il nous dit qu'il a deux armées : l'une avec laquelle il repoussera les efforts des puissances étrangères, avec laquelle il ne dissimule pas cependant ses intelligences; et l'autre pour marcher contre ce qu'il appelle les ennemis de la liberté, c'est-à-dire contre une partie de la Convention nationale, et le peuple de Paris, c'est-à-dire contre tous ceux qui ont été calomniés par les meneurs.
Voilà, citoyens, une partie de nos maux ! voilà la source dans laquelle nous devons puiser les moyens de sauver la liberté. Peut-elle être sauvée ? si ceux-là mêmes qui se sont déclarés les amis des rois, si ceux-là qui ont inondé les départements en contre-révolution, des mêmes écrits qui ont empoisonné l'opinion publique, qui ont égaré les habitants des campagnes, qui ont cherché à réveiller l'esprit du royalisme, en apitoyant le peuple sur le supplice du tyran, paraissent nos protecteurs, nos défenseurs contre Dumouriez; voilà, citoyens, une partie de mes doutes.
Pour moi je déclare la véritable cause de nos maux, et la correspondance criminelle des hommes qui sont dans notre sein, et notamment de l'homme que j'ai désigné, avec tous ceux qui le fréquentent.
Je ne veux point convaincre les conspirateurs, (N... Vous appelez les poignards!) je ne veux que dire la vérité; et quand les hommes qui parlent de poignards auront assassiné la liberté et le reste de ses défenseurs^ comme ils ont assassiné celui-là (Il se tourne et montre Michel Lepeletier), alors
on dira du moins dans le moment où ils croyaient avoir consommé leurs complots liberticides, et où leur indolence semblait redoubler par l'approche d'un général contre-révolutionnaire, qui semblait guider les cohortes des despotes de l'Europe, j'aurai dit la vérité, et j'aurai fait tout ce qui était en moi pour engager la Convention nationale à prendre des mesures véritables pour sauver la patrie; et je déclare que je regarde comme la première des mesures, de décréter d'accusation ceux qui sont prévenus de complicité avec Dumouriez, et notamment Brissot.
a la séance de la convention nationale du
discours de brissot, en réponse au discours de Robespierre.
Texte du Moniteur.
Citoyens, si je me suis abstenu jusqu'à présent de prononcer mon opinion sur les crimes de Dumouriez, c'était pour ne pas paraître céder à la crainte, sentiment indigne de moi. J'attendais que_je fusse provoqué, je le suis, je vais m'expliquer. (Quelques rumeurs dans la partie gauche.)
Vous avez entendu l'accusateur, entendez l'accusé.
Nous sommes tous ces accusateurs. (Oui, oui, s'écrient en se levant une grande partie des membres du côté gauche. Ce cri.est plusieurs fois répété.)
Il est convaincu ; je demande qu'il lise le numéro du 2 avril de son journal (le Patriote français), vous en verrez la preuve.
Citoyens, je n'avais pas attendu cette provocation pour donner au comité, le jour même des nouvelles de l'attentat de Dumouriez, des renseignements sur plusieurs de ses complices qu'il était instant d'arrêter.
Je ne suivrai point Robespierre dans ses divagations, je répondrai simplement au reproche qu'il m'a fait d'être le complice de Dumouriez.
Robespierre a acquis la preuve de cette prétendue complicité dans le rapprochement qu'il a fait de mes opinions avec celles de Dumouriez, et il a cité, à l'appui de ce qu'il avançait, l'histoire de Dumouriez depuis son entrée au ministère jusqu'à ce moment; je vais la parcourir aussi, cette histoire.
D'abord, je déclare que je n'ai eu aucune part à la nomination de
Dumouriez au ministère. Qui est-ce qui, dans ce temps-là, disposait
de ces places ? C'était la reine; et certes, Robespierre ne
m'accusera pas de complicité avec cette femme. La nomination de
Dumou-
Robespierre a prétendu que j'étais le complice de Dumouriez, parce que j'avais sur la guerre avec l'Autriche la même opinion que lui. Je déclare que je ne connaissais point Dumouriez avant son entrée au ministère, et que quatre mois avant qu'il y entrât, j'avais fait part de mon opinion aux Jacobins, et j'avais prouvé que la guerre était le seul moyen de dévoiler les perfidies de Louis XVI. L'événement a justifié mon opinion. Robespierre croyait parvenir plus sûrement au républicanisme ,en ôtant à Lafayette son commandement, et au roi son pouvoir. J'avais senti que, dans les circonstances, cette opinion était impolitique, parce qu'on nous opposait toujours la Constitution, et que la Constitution ne pouvait tomber qu'en ayant la guerre. Yoilà le sentiment qui m'a dirigé, et encore une fois mon opinion était à moi. Dumouriez, entré au ministère, vit que cette opinion prévalait dans l'Assemblée législative, il l'adopta, et la guerre fut décrétée à l'unanimité et sans discussion.
Ainsi, citoyens, quand pour faire peser sur ma tête une effroyable responsabilité, quand pour me faire regarder comme l'auteur des maux qui affligent la France, on me calomnie, on calomnie l'Assemblée législative : car ce fut elle seule qui, guidée par un principe de républicanisme, déclara la guerre à l'Autriche.
Je viens à la guerre avec l'Angleterre, et l'on ne m'accusera pas de l'avoir provoquée, ni d'être le complice de Dumouriez, car il traite cette guerre d'ouvrage perfide de Brissot. Cependant il devait savoir qu'elle était l'ouvrage du comité, et de la nécessité : car quand votre ambassadeur, chassé de Londres d'une manière honteuse, quand le gouvernement britannique arrêtait les blés qui vous étaient destinés, quand par toutes ces démarches il prouvait qu'il était en état d'hostilités avec vous, je vous le demande, était-ce de la dignité française de laisser toutes ces injures impunies 1
J'ai un autre moyen à faire valoir, c'est que lorsque j'ai prononcé mon opinion sur le ci-devant roi, j'ai prédit que l'Angleterre et la Hollande profiteraient de ce jugement pour vous déclarer la guerre. L'événement a prouvé que j'avais eu raison; on ne doit donc pas m'accuser d'avoir provoqué la guerre contre l'Angleterre.
Je demande que les pièces qui ont été trouvées chez Bonnecarrère, et qui accusent Brissot,. soient lues.
Je le demande aussi.
Citoyens, une troisième opinion sur laquelle on me prête une complicité avec Dumouriez, c'est celle qu'il a développée dans des proclamations. Il calomnie Paris, dit-on, et l'on soutient que j'ai calomnié Paris. (Un grand nombre de voix : Oui, oui !) Dumouriez a calomnié les habitante de la ville de Paris; mais dans les opinions que j'ai énoncées, soit dans cette tribune, soit dans mes écrits, j'ai constamment distingué les habitants de cette ville des brigands qui infestent Paris, qui multiplient les soulèvements et les dissensions, afin de donner plus de prise aux ennemis. Je défie qu'on me cite un seul écrit qui ne soit fait dans ce sens; et si je me suis élevé
contre les agitateurs, c'est que le seul moyen de propager la Révolution française était de faire régner l'ordre; et s'il eût régné, vous eussiez vu les peuples s'empresser d'adopter votre Constitution, tandis que les tableaux qu'on faisait dans l'Angleterre et dans la Belgique, de votre anarchie (Une voix : C'est toi qui les faisais) sont les véritables causes qui or»t empêché les peuples de vous imiter dans, votre révolution.
Si vous prenez garde, citoyens, aux pillages qui ont eu lieu dans la Belgique, vous verrez...
J'observe à Brissot que les pillages-n'ont encore été prouvés que par Dumouriez, et que Dumouriez est un scélérat et un traître, aux rapports duquel on ne doit ajouter aucune foi.
Enfin, citoyens, Dumouriez a énoncé une opinion exécrable dans sa proclamation, c'est l'opinion par laquelle il annonce qu'il veut rétablir l'ancienne Constitution; et à cet égard, je fais le serment, ou plutôt je le répète de ne jamais transiger. (Quelques murmures dtp l'extrémité gauche.) Je le répète, citoyens,, peut-on accuser d'aimer les rois un homme qui s'est consacré au républicanisme bien longtemps avant son accusateur; un homme qui, en 1782, fut enfermé à la Bastille pour avoir émis des principes, alors réprouvés; un homme qui, en 1788, quitta son pays pour aller dans les Etats-Unis respirer l'air de la liberté, et uniquement pour empêcher que ses enfants ne fussent souillés par la présenoe d'un tyran ; enfin, peut-on ao cuser de vouloir ressusciter la royauté, un homme qui n'a cessé de vouloir établir la République dans ce pays; un homme qui a osé croire que l'ancienne constitution était républicaine au cinq sixième, et qu'il fallait peu de chose pour la rendre telle que le désiraient les amis de la liberté; un homme qui, en juillet 1791, époque où l'on sévissait avec rigueur contre les patriotes, était le seul, avec un autre républicain, qui osât propager les principes du républicanisme.
Etait-il au Champ-de-Mars 1
Oui; car on le poursuivait pour s'y être trouvé; j'en ai les preuves.
Au surplus, citoyens, l'horreur des rois et de la royauté a pris racine dans mon âme, et je déclare que je périrai plutôt que de transiger avec le scélérat Dumouriez. (Mêmes rumeurs dans une extrémité de la salle.)
TEXTE DU « JOURNAL DES DÉBATS » (1).
Si j'ai différé jusqu'à ce jour d'exprimer mon opinion sur les crimes de Dumouriez, c'est que je ne voulais pas paraître céder à la crainte ou à d'autres sentiments indignes de moi ; mais aujourd'hui je suis provoqué, je vais donner ma profession de foi.
Je n'ai pas cependant attendu ce moment pour donner au comité de
défense générale des lumières sur les individus qui pourront être
ses complices. Vos commissaires ont emporté des renseignements qui
auraient pu leur
Je ne suivrai point Robespierre dans toutes ses divagations, je me borne à ce qui concerne la prétendue complicité entre moi et Dumouriez. Il a prétendu démontrer par des faits et des opinions; je le suivrai dans l'examen qu'il en a fait.
Il m'accuse d'avoir porté Dumouriez au ministère; c'est une fausseté que démontre l'histoire de cette époque. Qui disposait alors des places? La ci-devant reine. Ce fut elle qui, de concert avec Talon et Bonnecarrère éleva Dumouriez; car, assurément, Robespierre ne prétendra pas que j'aie jamais eu de liaison avec cette femme.
Robespierre m'accuse d'avoir coopéré avec Dumouriez à la déclaration de la guerre à l'Autriche. Mais cette opinion était à moi seul, je l'avais longtemps avant de connaître Dumouriez; je l'ai soutenue parce que je croyais la République naître de cette déclaration de guerre, parce que j'avais la certitude qu'elle mettrait à découvert la trahison du tyran, et l'événement m'a justifié. — Si e'est un crime que cette déclaration de guerre, je le partage avec toute l'Assemblée législative, qui l'a décrété à l'Unanimité.
On m'accuse d'avoir fait déclarer la guerre à l'Angleterre, à la Hollande et à l'Espagne, et d'être en cela complice avec Dumouriez. — Il est temps de détruire ce reproche qu'on me fait tous les jours, pour attirer sur ma tête une effrayante responsabilité, pour me tra-* duire aux yeux du peuple comme l'auteur de toutes nos calamités. Et l'on oublie que j'ai sans cesse prêché la nécessité d'éviter cette guerre; l'on oublie que la déclaration de cette guerre a été nécessité par les outrages du cabinet britannique, par ses préparatifs hostiles, par le renvoi de notre ambassadeur. On a oublié que je vous ai pré lit, lors du jugement du ci-devant roi, que sa mort amènerait cette guerre, et l'événement m'a justifié. ♦ Je vous ai prédit encore que cette mort fanatiserait' les têtes en Angleterre, en Allemagne, en Espagne, et l'événement m'a encore justifié. Car vous n'avez pas maintenant une guerre de rois contré un peuple libre, mais de dix peuples esclaves contre un peuple libre, ce qui cause vos malheurs. Ce sont donc ceux qui ont voté dans le parti contraire qu'on pourrait en accuser.
Sur le point de cette guerre, il ne pouvait y avoir de complicité entre moi et Dumouriez; car rappelez-vous qu'il a traité cette déclaration de guerre à l'Angleterre d'ouvrage perfide et ridicule de Brissot. Comment serais-je le complice et l'ami de Dumouriez, qui tient un pareil langage sur moi ?
Robespierre m'accuse d'avoir la même opinion que Dumouriez sur l'anarchie; d'avoir calomnié Paris.
Mais je n'ai jamais calomnié les habitants de Paris ; j'ai toujours, au contraire, rendu justice à leur soumission à la loi, à leur dévouement pour la Convention; j'ai toujours distingué les Parisiens des brigands qui causent les agitations pour seconder les puissances étrangères.
Quant à l'anarchie, j'ai soutenu et je soutiens encore qu'elle est la cause de nos maux; c'est elle qui cause nos divisions, nos guerres intestines ; c'est elle qui a empêché les peu-
ples étrangers d'imiter notre révolution Je l'ai dit vingt fois, ayez de l'ordre dans le sein de la République, et les peuples s'empresseront d'adopter l'esprit républicain, Mais veut-on qu'il fasse des révolutions pour se précipiter aussi loin dans l'anarchie? Voilà l'unique cause de la perte de la Belgique; elle est dans le tableau de nos pillages, de nos massacres.
M'accuse-t-on', de partager l'opinion de Dumouriez sur la nécessité de rétablir l'ancienne constitution, la royauté !
Moi, qui, dès ma plus tendre jeunesse, ai conçu la plus profonde horreur pour les rois et la royauté! moi, emprisonné à la Bastille en 1782, pour avoir, dans mes ouvrages, attaqué le despotisme! moi, qui ai passé en Amérique en 1789, pour m'arracber, avec ma famille, à la tyrannie qui dévastait la France! moi, qui, depuis la Révolution, n'ai cessé de prêcher le gouvernement républicain ! moi, qui l'ai prêché en juillet 1791, et sous les. poignards, tandis que mes accusateurs eux-mêmes ou se cachaient ou conjuraient contre le gouvernement républicain ! moi, rétablir aujourd'hui la royauté ! ah ! je jure de périr plutôt que de transiger jamais avec Dumouriez sur le rétablissement de la royauté.
TEXTE DU « LOGOTACHIGRAPHE » (1).
Citoyens, si je me suis abstenu jusqu'à présent d'énoncer mon opinion
sur les crimes de Dumouriez, c'était pour ne pas paraître céder à la
crainte. J'attendais d'être provoqué, je le suis et je vais donner
ma profession de foi; (C'est bien tard !) — Je n'aurais pas attendu
à donner cette explication, le jour même où les nouvelles de
l'attentat de Dumouriez arrivèrent, je n'avais pas, dis-je, attendu
cette provocation, pour donner des renseignements sur des complices
de Dumouriez, qu'il était instant de faire arrêter, des notes et
indications que prirent vos commissaires. Je ne suivrai point
Robespierre dans ©es divagations. Je me borne à ce qui regarde ma
complicité avec Dumouriez. Robespierre a appuyé cette complicité sur
des faits et sur des opinions; il a cité toute l'bistoire de
Dumouriez, depuis son entrée au ministère, jusqu'à présent. Je vais
la parcourir aussi, et je vais prouver qu'il n'existe pas la moindre
ombre de complicité : d'abord je dois déclarer à ceux qui croient
que j'ai eu quelque part à l'élévation de Dumouriez, que je n'y ai
eu aucune part, et par des preuves bien sensibles. Qu'est-ce qui
disposait alors des places, c'est la ci-devant reine, et c'est de
l'intrigue d'un nommé Bonnecarrère avec cette femme, qui fit élever
Dumouriez au ministère. Et certes on ne soutiendra pas que j'avais
des liaisons avec cette femme. Je suis Robespierre dans les faits
postérieurs. Il a prétendu que j'étais complice aujourd'hui des
crimes de Dumouriez, parce qu'alors j'avais sur la guerre avec
l'Autriche les mêmes opinions que Dumouriez. J'observe à cet égard
que jusqu'au moment de l'entrée de Dumouriez au ministère, je ne le
connaissais pas. Mes opinions sur la guerre contre l'Autriche
étaient antérieures de quatre mois. Ma profession de foi sur cet
objet a été donnée aux Jacobins dans quatre
Quand Dumouriez vint au ministère, il vit mon opinion, il vit qu'elle prédominait dans l'Assemblée législative, et il se hâta de l'adopter; ce ne fut point moi qui la provoquai, ce fut toute l'Assemblée législative qui se leva unanimement, qui ne voulut pas même de discussion sur ce sujet. Ainsi, citoyens, quand, pour faire peser sur ma tête une effroyable responsabilité, on vient me traduire comme l'auteur de la guerre avec l'Autriche, comme l'auteur de tous les désordres qui affligent la France, quand on me calomnie, on calomnie l'Assemblée législative; car ce fut elle qui, animée par de vrais principes, par les principes du républicanisme, fit la guerre à l'Autriche. Je viens à la guerre avec l'Angleterre, et à cet égard, on ne m'accusera pas certainement d'avoir ' provoqué cette guerre, ni d'être de complicité avec Dumouriez; car, citoyens, d'un côté, vous devez vous rappeler que dans la déposition qui vous a été faite par les trois commissaires du pouvoir exécutif, Dumouriez traite cette déclaration de guerre d'ouvrage ridicule et perfide de ma part : il devait savoir cependant que cette déclaration de guerre n'était point mon ouvrage, qu'elle était l'ouvrage du comité, qui, à l'unanimité, l'aVait adoptée; que d'ailleurs elle était l'ouvrage de la nécessité. Car, je vous le demande, citoyens, lorsque votre ambassadeur était chassé ignominieusement de Londres; lorsque le ministère britannique faisait des préparatifs de guerre; quand il arrêtait vos blés, la circulation de vos assignats; quand, en un mot, il prouvait, par mille faits, qu'il était votre ennemi, était-il de la dignité, de l'intérêt de la République française, de souffrir tant d'outrages qu'on accumulait sur sa tête? Mais d'ailleurs, j'ai un autre moyen à faire valoir, c'est que quand j'ai délibéré, quand j'ai publié mes opinions à l'occasion du ci-devant roi, je vous ai prédit, d'un côté, que l'Angleterre, que la Hollande, que l'Espagne profiteraient de votre jugement pour vous déclarer la guerre, non pas que ce jugement en fût la cause; je vous le dis encore une fois,je sais, et je l'ai dit, quelles étaient leurs
dispositions à cet égard; mais je vous ai dit en même temps qu'il était facile que votre jugement fanatisât les têtes en Angleterre, en Hollande et en Espagne, et convertît une guerre de peuples libres en une guerre de rois. Mais, encore une fois, on ne doit donc pas m'accu-ser. (Interrompu.) Une troisième opinion, sur laquelle on me prête plus de complicité avec Dumouriez, c'est sur celle qu'il a fait connaître dans les proclamations que vous avez entendues : il calomnie Paris, et l'on soutient que moi aussi, j'ai calomnié Paris. (Interrompu.)
Citoyens, Dumouriez a calomnié les habitants de la ville de Paris; mais les diverses opinions que j'ai énoncées, soit à cette tribune, soit dans mes écrits, j'ai constamment distingué les habitants de Paris, des brigands qui infestent cette capitale, qui multiplient les soulèvements et les agitations, uniquement pour donner plus de prise aux ennemis extérieurs, pour fatiguer le peuple. Je défie à cet égard qu'on me cite une seule opinion, un seul écrit, une seule circonstance où je n'aie pag-rendu justice à la ville de Paris, à sa soumission aux lois, aux autoritées constituées, et si je me suis élevé, ce n'est que contre les agitateurs, contre les hommes qui propageaient l'anarchie; c'est que j'ai bien senti que le.séul moyen, d'un côté, d'affermir la Révolution en France; de l'autre, de propager la Révolution dans toute l'Europe était de faire régner l'ordre dans toute la République française. Avec cet ordre, et je l'ai dit vingt fois, "lors vous auriez vu que cet ordre valait des arguées. Si cet ordre avait régné, les peuples se seraient empressés d'imiter une Constitution qui faisait tant d'heureux, tandis que les tableaux que l'on ne cessait de répandre, soit en Angleterre, soit en Allemagne, soit dans la Belgique, les tableaux qu'on a fait de l'anarchie, ces tableaux ' sont les véritables causes qui ont détourné les peuples étrangers de vous imiter dans votre Révolution; et certainement citoyens, si vous prenez garde aux pillages qui ont eu lieu dans la Belgique, à cette désorganisation... (Interrompu.)
Citoyens, Dumouriez a énoncé une opinion exécrable dans sa proclamation, c'est l'opinion par laquelle il annonce qu'il veut rétablir la royauté, l'ancienne Constitution; et à cet égard, je fais serment et je renouvelle celui que j'ai fait de ne jamais transiger. Pourra-t-on accuser de non républicanisme un homme qui avait été à la Bastille, précisément pour avoir soutenu des opinions qui, en 1782, avaient la plus grande défaveur? Pourra-t-on accuser de vouloir un roi, un homme qui, en 1788, avait renoncé à sa patrie, parce qu'elle était sous le despotisme, qui était passé dans les Etats-Unis, un homme qui était revenu en France, uniquement pour empêcher que ses enfants fussent jamais souillés par la présence d'un tyran; j'en atteste des amis qui m'ont connu; des amis à qui alors je fis part de mes projets, qui alors partageant les mêmes opinions que moi, voulurent s'établir dans les Etats-Unis.
Enfin, comment veut-on accuser de vouloir ressusciter la royauté, un homme qui, depuis l'origine de la Révolution, a voulu transporter le républicanisme dans ce pays, dans ce temps même où les patriotes les plus ardents paraissaient conspirer contre le républicanisme ? Ose-
rait-on accuser un homme qui soutenait que la France était républicaine au sixième, qu'il fallait peu de chose pour avoir la République? Voici, citoyens, un fait sur lequel je prie la Convention de fixer son attention. En juillet 1791, à cette époque où les patriotes étaient le plus en danger, j'étais le seul avec un autre écrivain, qui osais proposer les principes du républicanisme; et aujourd'hui on m'accuse, moi Brissot. (Interrompu. J La haine pour les rois et la royauté a été implantée en moi de bonne heure; et je le déclare, je mourrai plutôt que de transiger avec le scélérat Dumouriez, pour la résurrection de la royauté.
texte du patriote français (1).
M'accuse-t-on d'avoir coopéré avec Dumouriez à la déclaration de la guerre à l'Autriche 1 —* Mais cette opinion était à moi seul, je l'avais longtemps avant de connaître Dumouriez, je l'ai soutenue parce que je voyais la République naître de cette déclaration de guerre, •%t l'événement m'a justifié. — Si c'est un crime que cette déclaration de guerre, je le partage avec toute l'Assemblée législative, qui l'a décrétée à l'unanimité.
M'accuse-t-on d'avoir fait déclarer la guerre à l'Angleterre, à la Hollande et à l'Espagne, et d'être en cela complice avec Dumouriez ? — C'est en effet le reproche qu'on me fait tous les jours, pour attirer sur ma tête une effrayante responsabilité.
Mais je vous ai prédit trois fois, lors du juge fait du ci-devant roi, que sa mort amènerait cette guerre, et l'événement m'a justifié.
Mais je vous ai prédit que cette mort fanatiserait les têtes en Angleterre, en Allemagne, en Espagne, et l'événement m'a encore justifié. Car vous n'avez pas maintenant une guerre de rois contre un peuple-libre, mais de dix peuples esclaves contre un peuple libre, ce qui cause vos malheurs. Ce sont donc ceux qui ont voté dans le parti contraire qu'on pourrait en accuser.
Sur le point de cette guerre, il ne pouvait y avoir de complicité entre moi et Dumouriez; car rappelez-vous qu'il a traité cette déclaration de guerre à l'Angleterre d'ouvrage perfide et ridicule de Brissot. Comment serais-je donc le complice et l'ami de Dumouriez, qui tient un pareil langage sur moi 1 -
M'accuse-t-on d'avoir la même opinion que lui sur l'anarchie, d'avoir calomnié Paris ?
Mais je n'ai jamais calomnié les habitants de Paris; je les ai toujours distingués des brigands qui causent les agitations pour seconder les puissances étrangères.
Quant à l'anarchie, j'ai soutenu et je soutiens encore qu'elle est la cause de tous nos maux; c'est elle qui cause nos divisions, nos guerres intestines; c'est elle qui a empêché les peuples étrangers d'imiter notre Révolution. Je l'ai dit vingt fois, ayez de l'ordre dans le sein de la République, et les peuples s'empresseront d'adopter l'esprit républicain. Mais veut -on qu'ils fassent des révolutions pour se précipiter aussi dans l'anarchie 1
Enfin m'accusera-t-on de partager l'opinion
Moi, qui dès ma plus tendre jeunesse ai conçu la plus profonde horreur pour les rois et la royauté! moi, emprisonné à la Bastille en 1782, pour avoir, dans mes ouvrages, attaqué le despotisme ! moi qui passai en Amérique en 1789, pour m'arracher avec ma famille à la tyrannie qui dévastait la France ! moi qui, depuis la Révolution, n'ai cessé de prêcher le gouvernement républicain ! moi qui l'ai prêché en juillet 1791, et sous les poignards, tandis que mes accusateurs eux-mêmes se cachaient, ou conjuraient contre le gouvernement républicain ! moi rétablir aujourd'hui la royauté ! ah ! je jure de périr plutôt que de transiger jamais avec Dumouriez sur le rétablissement de la royauté.
Séance permanente du
présidence de treilhard, ancien président.
La séance est reprise à dix heures dix minutes du matin.
, secrétaire, donne lecture des lettres, adresses et pétitions suivantes:
1° Lettre des commissaires de la Convention aux armées du Rhin, des Vosges et de la Moselle relative à la position du général Custine à Alzey ; ils annoncent que le 10e bataillon de la Haute-Saône, quoique dépouillé à Bingen et à Francfort, offre un don patriotique; cette lettre est ainsi conçue (1) :
Mayence, le 28 mars, l'an II de la République française.
( Citoyens nos collègues,
(( Nous vous apprenons qu'après avoir repoussé l'ennemi pendant trois jours de suite, nos braves soldats ont été repoussés à leur tour de Bingen et l'aile droite forcée de se replier sur l'aile gauche. Le général Custine vient de prendre une bonne position en avant d'Alzey et se prépare à enlever à l'ennemi le faible avantage qu'il vient d'emporter avec le triple de force.
( Nous nous empressons de faire connaître à la Convention qu'il n'a pas
suffi au brave 10e bataillon de la Haute-Saône d'avoir été dépouillé à
Bingen et à Francfort, d'avoir combattu avec courage, dans toutes les
circonstances, les ennemis de la République, mais qu'il vient encore
d'offrir à la patrie 2,214 livres, prix de ses travaux, et que les
officiers ont réuni de même une somme de 1,015 livres, Avec de tels
défenseurs, la patrie peut-elle être en danger ? Nous ne le pensons pas.
Aussi, plein de confiance dans nos braves frères d'armes et comptant sur
la justice de notre cause, nous ne quitterons pas plus qu'eux, dé-
« Les commissaire? de la Convention nationale aux armées du Rhin, des Vosges et de la Moselle.,
« Signé : Rewbell, Merlin. »
(La Convention décrète la mention honorable de l'offrande et ordonne l'insertion de cette lettre an Bulletin.)
2° Lettre de Jacob Benjamin (1), relative aux marchés qu'il a passés avec le gouvernement pour différentes fournitures.,
(La Convention renvoie la lettre au comité de la guerre. )
3° Lettre des administrateurs du département de la Vendée (2), du 28 mars dernier; ils demandent des forces pour les aider à repousser les rebelles.
(La Convention renvoi© la lettre au comité de défense générale.)
4° Lettre des membres de la municipalité de Moncmtour (Côtes-du-Nord) qui annoncent un don patriotique de plusieurs fournitures destinées au 1er bataillon des Côtes-du-Nord; cette lettre est ainsi conçue (3) :
Moncontour, le
« Citoyen président,
« Les besoins de la patrie commandent im- 1 périeusement aux vrais patriotes; c'est' pour satisfaire à un devoir si doux qu'un certain nombre de bons citoyens des deux sexes de cette commune se sont empressés de remplir une souscription que la municipalité ouvrit dès qu'elle fut instruite des souffrances et de la détresse de nos frères sur les frontières.
« En conséquence, nous venons d'adresser au citoyen ministre de la guerre un ballot contenant vingt-quatre chemises, vingt-quatre-paires de guêtres et vingt-quatre paires de souliers, destiné pour le 1er bataillon des volontaires du département des Côtes-du-Nord; c'est un faible témoignage de notre entier dévouement aux besoins de la patrie; .mais nous en avons donné des preuves et sommes encore disposés à le faire dans toutes les circonstances. Tout notre regret est de ne pouvoir faire des sacrifices plus étendus.
« Nous sommes fraternellement et avec les sentiments qui vous sont dus,
« Citoyen Président, vos compatriotes.
a Les membres du bureau municipal de Mou-contour.
t Signé : MoNJARET-KERJÉGtr, maire; Joseph Gogtoelin, officier municipal; Boscher, procureur de la commune, a
(La Convention décrète la mention honorable de l'offrande et ordonne
l'insertion de cette lettre au Bulletin.)
Aux citoyens députés de là Convention nationale.
« Représentants,
«Il est enfin irrévocablement engagé' ce grand combat entre les Français, libérateurs des nations et les despote qui les enchaînent.
« La liberté du genre, humain et les hautes destinées de la République reposent aujourd'hui dans vos mains hahiles et courageuses ! Continuez d'opposer votre sagesse et votre impassible fermeté à la cruelle extravagance, à-la perfide atrocité des tyrans coalisés - ' nos forces seront doubles; leurs efforts seront vains; les peuples seront libres.
« C'est au sein des dangers, des revers et de la perfidie que-no us devons à la patrie de nouveaux témoignages de constance et de fidélité; la plus entière adhésion à tous vos salutaires et bienfaisants décrets; l'attachement à la République, une, indivisible et populaire : guerre éternelle à tous le® tyrans, à leurs satellites, à tous les liberticides, de quelques pays qu ils soient, sous quelque dénomination, qu'ils se présentent; tels sont les serments solennels que nous renouvelons à la République entière. Oui, représentants, si le sang des hommes fait gémir l'humanité, le sang des tyrans la console, et nous vous remercions de nous avoir placés entre la liberté et la mort.
« De grands et affreux complota menaçaient la sûreté intérieure et extérieure de l'Etat : de puissantes mesures ont été à l'instant déployées; les décrets des 21» 23, 24 et 25 février et 8 mars assureront pour jamais nos succès et nos triomphes au dehors, comme ceux des 10 et 19 de ce mois rétabliront le calme et l'heureuse sécurité au dedans : grâces immortelles vous soient rendues.
Un décret que la justice sollicitait depuis longtemps va sortir de l'équité naturelle sur laquelle reposent des décrets qui dureront autant que lie monde dont, ils feront le bonheur. Les riches ingrats paieront des contributions progressives et nous jouirons d'avance de la félicité que votre droiture et. votre sagesse préparent au genre humain qui vous bénira !
« Les administrateurs et procureur syndic du directoire du district de Falaise.
« Signé : Mollet, président; Lecointe, L^i-suetjr, Dumettil, Richomme, procureur syndic, n
(La Convention décrète la mention hono-lable et ordonne l'insertion de cette lettre au Bulletin.)
6° Lettré des correspondants de la société populaire de Bagnols, qui
annonce l'envoi de plusieurs fournitures destinées pour la troisième
compagnie du 2e bataillon du Gard; cette lettre est ainsi conçue (2) :
« Citoyens,
« Nous avons été chargés par les citoyens Marsial, Teste, Roubaud et Faguet, membres du comité de correspondance de la société populaire de Bagnols, de vous expédietr une caisse contenant chemises, corsets, culottes, guêtres et souliers pour les citoyens volontaires de Bagnols, de la 3e compagnie du 2e bataillon du Gard, en cantonnement à Huy,pays libre de Liège; nous l'avons fait partir le 26 courant sous la conduite duN citoyen Antoine Blanc de Lézignan, pour vous être rendu en 18 jours, franc de voiture, à sa réception, il vous plaira de la faire passer à sa destination.
« Nous sommes avec fraternité, vos dévoués concitoyens.
« Signé : Neuville, Genaud. »
(La Convention décrète la mention honorable de l'offrande et ordonne l'insertion de cette lettre au Bulletin.)
7° Lettre du procureur syndic du district de Réthel, qui annonce -que le recrutement s'est fait avec le plus grand succès; elle est ainsi conçue (1) :
Rethel, ce
« Citoyens,
« Le recrutement est fait depuis huit jours dans le district de Rethel. Tous les citoyens ont montré le plus grand zèle; tous brûlent de voler à la défense de. la liberté et de la République; presque tous sont habillés et équipés et, dans peu, ils seront rendus à leur destination. Déjà même ils y seraient si l'absence de l'agent militaire n'eut retardé leur départ. C'est cette absence qui a jusqu'ici paralysé le courage de ces nouveaux défenseurs de la République.
« Le recrutement fait, la patrie a eu besoin dit quart des gardes nationaux et les a appelés aux frontières par la bouche de vos commissaires. Cette nouvelle levée n'a demandé que le temps nécessaire pour le rassemblement des gardes nationaux; cette nouvelle levée est maintenant aux frontières.
( Le procureur syndic du district de Rethel.
« Signé : (Illisible). »
(La Convention décrète la mention honorable du patriotisme et du zèle des citoyens de Féthel.)
8° Lettre des citoyens J.B. Lacoste et Faure, commissaires de la Convention dans le département de la Haute-Loire (2), qui annoncent que 6,000 rebelles, réunis à Saint-Front, ont été dispersés par divers détachements de gardes nationales venues du département voisin.
(La Convention renvoie la lettre au comité de sûreté générale.)
9° Lettre des citoyens Guermeur et Lemal-lia/ud,„ commissaires de la C
onvention dans le
Yannes,
( Citoyens nos collègues,
« Les rebelles qui s'étaient emparés de la ville et château de Rochefort, chef-lieu de district dans le département du Morbihan, y ont été attaqués par une force imposante; ils ont été chassés de ce poste et en partie exterminés. Leur chef dans cette lopalité se faisait appeler commandant des catholiques et il avait des subordonnés dans les principaux bourgs des paroisses ameutées. La terrible correction que les brigands y ont reçue, celle qui doit aujourd'hui même être également subie parleurs imitateurs et complices réfugiés à la Roche-Bernard, la manière expéditive dont un autre attroupement semblable a été déposté des hauteurs de Redon qu'il occupait et d où il menaçait cet autre chef-lieu de district, la résistance ferme et vigoureuse des villes de Pontivy et d'Auray, enfin les exemples sévères qui ont déjà résulté et qui résulteront encore de la stricte exécution de l'importante loi du 19 de ce mois, tout annonce que ces troubles ne tarderont pas à s'apaiser. Ces malheureux protestent de leur égarement et c'est ce qui n'est pas douteux; ils témoignent aussi beaucoup de repentir, et c'est ce qui n'est pas aussi sincère peut-être qu'ils le voudraient faire croire. Plusieurs membres de ce département pensent, non sans des motifs plausibles, que cette rescipiscence pourrait bien n'être qu'une dissimulation nécessitée par l'empire de la force et persuadée par la considération que les Anglais ne sont pas prêts pour la descente, qui devait coïncider avec le soulèvement presque général si perfidement combiné et disposé de longue main sur une lisière fort étendue de nos côtes. Nous pensons donc aussi, citoyens nos collègues, qu'il est toujours pressant de faire descendre des troupes le plus promptement possible dans les parties qui ont été ou qui sont encore le théâtre de la rébellion.
« Nous pensons de même qu'il est non moins essentiel de faire sortir des vaisseaux et des frégates pour protéger les vaisseaux de commerce et celles de nos îles qui sont exposées aux entreprises de l'ennemi; telle est par exemple celle de Belle-Isle, d'où l'on écrit aux administrateurs du Morbihan et au citoyen général du Petit-Bois pour solliciter la prompte expédition de quelques bâtiments armés pour arriver dans ces parages et pour réclamer surtout la rentrée de 700 et quelques hommes que la garnison de Belle-Isle a fournis pour les opérations sur Auray, sur Rochefort, sur la Roche-Bernard et pour la défense de Yannes.
« Nous n'avons jusqu'à présent, citoyens nos collègues, que des éloges à donner au zèle et à l'activité des différents corps administratifs de cette ville et au courage des soldats citoyens qui ont déployé dans ces trop fâcheuses occasions un grand caractère.
« Nous vous particulariserons quelques détails dans notre première
lettre. Nous séjournerons dans cette ville jusqu'à y avoir pris les
« Nous sommes, avec fraternité, vos collègues les commissaires dans le Morbihan et le Finistère,
« Signé : Guekmeur, Lemalliatjd. »
(La Convention renvoie la lettre au comité de défense générale;)
10° Lettre des commissaires du département de la Somme, commissaires des guerres, vice-président du district et officiers municipaux, du 3 avril, par laquelle ils font passer à la Convention une proclamation du traître Dumouriez et font part du zèle du citoyen Dulac, aide de camp de ce général. Ils annoncent en même temps les arrêtés qu'ils ont pris pour arrêter la trahison de Dumouriez; ces arrêtés sont ainsi conçus (1) :
« Le mercredi 3 avril 1793, l'an II de la République française, une heure après-midi la municipalité assemblée, s'est présenté, le citoyen Charles Dulac, aide de camp employé dans l'armée du Nord, venant de Saint-Amand, lequel a annoncé qu'il avait à communiquer des nouvelles de la plus haute importance. La municipalité s'est à l'instant retirée dans la chambre du conseil avec les citoyens Dulac, Arcam-bal, commissàire des guerres, employé dans le département de la Somme, de présent en cette ville : un membre de la municipalité a été envoyé au directoire du district, pour l'inviter à se réunir aussitôt à la municipalité avec le commissaire du département envoyé dans ce district, ledit commissaire du département rendu à la chambre du conseil avec le vice-président du district, le citoyen Dulac a fait par écrit la déclaration suivante :
« Je déclare à mes concitoyens qu'il est en ma connaissance que le
général Dumouriez a fait arrêter à leur arrivée à l'armée les quatre
commissaires de la Convention nationale, envoyés par son décret du 30
mars, ainsi que le
Sur quoi il a été arrêté, à l'unanimité, d'en-vojrer sur-le-champ un courrier extraordinaire, tant à la Convention nationale, qu'au département de la Somme, pour les informer des faits ci-dessus, et leur porter copie du présent procès-verbal et de la proclamation, le renvoi approuvé du général Dumouriez à l'armée française datée des Bains de Saint-Amand, le 1er avril, 11 heures du soir.
« Le citoyen Conte, capitaine de la compagnie de grenadiers de la garde nationale de cette ville, sera porteur du présent procès-verbal, et accompagnera le citoyen Dulac à la Convention nationale. Fait à Péronne, en la chambre du conseil, les jours, mois et an que dessus, et ont les dénommés signé, ainsi que le citoyen Dulac, qui, au moment de la signature, a ajouté qu'il était à sa connaissance qu'il y avait suspension d'armes entre l'armée du Nord et celle commandée par Cobourg.
( Pour l'empêchement au citoyen Conte, le citoyen Jacquart se rendra à la Convention, où il descendra directement avec le citoyen Dulac, ledit jour et an. »
(1). Le citoyen Dulac a des détails très intéressants à communiquer, et qui pourront éclairer la Convention sur les mesures qu'elle doit prendre en ce moment. Je demande qu'il soit renvoyé au comité de défense générale pour y être entendu.
(La Convention adopte cette proposition; elle décrète ensuite la mention honorable de tous ces citoyens et renvoie les pièces au comité de défense générale.)
11° Lettre des administrateurs du département des Gôtes-du-Nord, qui font, part des troubles qui y ont éclaté à l'occasion du recrutement, et des mesures qu'ils ont prises pour les arrêter. Us signalent à l'attention de la Convention la bonne conduite du citoyen Ta-vaux, tué par les rebelles, des gardes nationales de Saint-Brieuc, Lamballe, d'Yssiniac et Hillion.
(La Convention décrète la mention honorable de la conduite de ces communes et ordonne le renvoi de la pièce au comité de défense générale.)
12° Pétition des marins de Cherbourg, qui demandent à n'être soumis qu'à l'examen exigé par l'ordonnance de 1786 (2).
(La Convention renvoie la pétition au comité de marine.)
13° Lettre du ministre des contributions publiques, du 1er de ce mois,
concernant les dépenses de la fabrication des monnaies.
14° Lettre du citoyen Monge, ministre de la marine (1), qui annonce que l'assemblée coloniale de la Guyane a adhéré, par un acte formel du gouvernement, au décret-qui accorde le droit de citoyen aux hommes de couleur.
(La Convention renvoie la lettre au comité des colonies.)
15° Lettre de Garat, ministre de l'intérieur, qui transmet à la Convention, l'état des décrets envoyés aux départements le 3 avril 1793; cet état est ainsi conçu :
ÉTAT des décrets de la Convention nationale, envoyés aux départements, par le ministre de l'intérieur,
le S avril 1793, l'an II de la République française (2).
DATES DES DÉCRETS.
Mars 15 n° 595...
— 19 '608 ...
— 21 n° 597....
— 20,23 »° 614.
— 23 n° 617......
— 23 ii° 619......
— 23 Ti° (527......
— 26 707_______
— 16 j.° 7D8......
— 28 n° 632......
— 29 n» 679......
— 30 n° 710______
— 31 712.......
— 26 a» 661......
3 avril m" 'SU..-. ...
TITRES DES DÉCRETS.
Décret relatif au traitement des militaires qui seront admis provisoirement à l'Hôtel des Invalides.,... ..................................
Décret qui ordonne la vente des chevaux des émigrés gui ne p euvent servir aux armées...
Décret qui exempte de la loi du 24 février sur le recrutement les payeurs de guerre...........
Décrets relatifs aux émigrés :
1° Défenses à tous dépositaires de payer aucunes sommes de deniers, sur des jugements rendus par défaut contre des absents ou émigrés.
2° Interprétation de l'article 1er de la loi du 9 octobre contre les émigrés pris les armes à la main.......................................
Décret qui met deux raillions à la disposition du ministre de l'intérieur pour acquitter les dépenses des mesures prises pour arrêter les' troubles.....................................„
Décret qui met 70 millions à la disposition du ministre de la marine pour les frais d'armement_____________..._________ _____ ________
Décret relatif aux dons volontairement faits pour tes frais de la guerre......................
Décret qui nomme le C. Villers, commissaire dans le département de la Loire-Inférieure .......
Décret relatif aux émeutes de Caen...........
Décret qui met en activité le tribunal criminel extraordinaire...............................
Décret relatif au don fait par David d'un tableau représentant .Michel Lepeletier sur son-' lit de mort..........................................
Décret qui accorde 2 millions à la commune de Bordeaux.........................................;
Décret relatif aux bureaux de santé de Marseille.
Décret relatif aux citoyens d'Orléans mis en-état d'arrestation...................................
Adresse du citoyen Grenier....................
Lettre-du ministre delà marine à la Convention nationale........................ ..........i
Extrait du procès-verbal de l'assemblée générale1 de la section (ta BanChéon français.............
iBéraraft :qui déclare que Dumouriez, traître à la patrie, est mis hors >de la loi, autorise tant '.ci-, toyen à courir sus et assure une récompense de 380,000 ÎT- et des couronnes civiques à ceux qui s'en saisi kqbI et l'amèneront à îParis mort ou vif............................................
Nota. — 'Ce décret est parti le 4, à ;9 haures est demie du matin,-par des'oourriers extraordinaires (posjr tous les-dqpartements.
DÉPARTEMENTS auxquels l'envoi a été fait.
OBSERVATIONS.
A tous les départements...
Mayenne et Loire-Inférieure.
Calvados .......
A tous les départements...
Paris......................
iGirsBiie..................
BcHich es-du-ft hône.....,____
Loiret (aux commissaires de la Convention etj aux commissaires du pouvoir exécutif)....................
A tons les départements...
Paris..
.Manuscrit.
(1) Moniteur universel, Ie 3* colonne.
semestre de 1793, (page 43:1,
Le ministre de l'intérieur,
Signé ;-Garat .
(2) Archives nationales, carton C n 251. chemine 428, pièce n° 15.
16° Lettre de l'adjoint de la 4e division du ministère de la guerre, relative à la loi sur la-désertion; cette lettre est ainsi conçue (1) :
Paris,
« Citoyen Président,
(f J'ai l'honneur de vous adresser une note sur une question à résoudre par la Convention nationale, relativement à l'exécution des lois des 15 septembre 1791 et 12 février 1792. J'ai craint d'outre-passer les limites fixées au pouvoir exécutif en cherchant dans l'esprit de ces lois de quelle manière elles doivent être appliquées aux militaires détenus aux galères, -pour une désertion antérieure au leT juin 1789. Comme il y a plusieurs réclamations qui m'ont été adressées à ce sujet de la part de différents soldats, j'attends que la Convention nationale lève le plus tôt possible toute difficulté pour donner des ordres à leur égard, avec d'autant plus de raison que l'un de mes prédécesseurs a déjà écrit pour cet objet à l'Assemblée législative, sans en avoir reçu aucune réponse.
« L'adjoint de la 4e division du département de la guerres en l'absence du ministre.
« Signé : (Illisible). »
A cette lettre se trouve jointe la pièce suivante (2) :
« L'article 4 de la loi du 15 septembre 1791 portant abolition de toute procédure instruite sur les faits relatifs à la Révolution dit :
« L'Assemblée nationale décrète une amnistie générale en faveur de tout homme de guerre prévenu, accusé ou convaincu de délits militaires, à compter du 1er juin 1789; en conséquence, toutes plaintes portées, poursuites exercées ou jugements rendus à l'occasion de semblables délits, seront regardés comme non avenus et les personnes qui en étaient l'objet, seront mises immédiatement en liberté si elles sont détenues, sans néanmoins qu'on puisse induire du présent article que ces personnes conservent aucuns droits sur les places qu'elles auraient abandonnées.
« Il résulte de cet article que tout militaire condamné aux galères pour désertion commise depuis le 1er juin 1789 jusqu'au 15 septembre 1791 est dans le cas de jouir de l'amnistie et d'être mis en liberté.
« Le 12 février 1792, une autre loi a accordée aux sous-officiers et soldats qui avaient déserté avant le 1er juin 1789 la rémission de leur faute, mais les six premiers articles ne concernent que ceux qui, s'étant réfugiés en pays étranger, voudraient rentrer en France.
« Le 7e est ainsi conçu :
« Les sous-officiers et soldats qui, ayant déserté leurs drapeaux, avant
l'époque du 1er juin 1789, ne sont point sortis du royaume ou y seront
rentrés antérieurement à la publication du présent décret, jouiront de
l'amnistie en se présentant à la municipalité de leur domicile
« Les termes dans lesquels il s'exprime, pris dans leur sens strict, ne peuvent s'entendre des hommes jugés contradictoirement et renfermés en vertu de leurs jugements.
« Cependant quelques soldats condamnés et détenus aux galères pour désertion antérieure au 1er juin 1789 croient être dans le cas de participer à l'amnistie et demandent leur élargissement.
« Si l'Assemblée nationale juge que leurs réclamations soient fondées sur l'esprit de la loi, le ministre de la guerre la supplie de rendre un décret qui, ne laissant plus de doute à. cet égard, l'autorise à les faire mettre en liberté.
(( Signé : Beuenonville. »
(1). Je demande que tous les individus détenus aux galères pour crime de désertion, soient mis en liberté; les circonstances réclament d'autant plus en ce moment -l'indulgence nationale, que nous avons plus que jamais besoin d'hommes pour combattre nos ennemis.
(La Convention adopte la proposition de Thuriot.)
Suit le texte définitif du décret rendu (2) :
( La Convention nationale décrète que. les militaires détenus aux galères pour désertion antérieure à la déclaration de guerre faite le 20 avril 1792, seront mis sur-le-champ en liberté, abolit tout jugement rendu contre eux, fait défense de faire aucune poursuite contre ceux qui se sont rendus coupables du même délit avant ladite époque, et qui ne sont pas sortis du territoire de la République. »
17° Lettre des citoyens Elie Lacoste et Jean-Bon-Saint-André,commissaires dans les départements du Lot et de la Dordogne (3); ils font passer un arrêté pris par eux le 27 mars dernier, contenant d'une part des mesures de sûreté générale, et de l'autre des mesures relatives aux subsistances.
Je demande l'ordre du jour, motivé sur l'existence de la loi qui autorise les commissaires à prendre cette mesure.
Un membre : Je demande la confirmation du premier de ces arrêtés, et je demande, en outefe qu'ils soit enjoint aux commissaires de "faire arrêter tous les parents des émigrés et les prêtres insermentés.
En ce cas, tous les Français seront arrêtés, car il n'en est pas un malheureusement qui n'ait quelque parent émigré.
Je m'étonne de l'indulgence de Thuriot pour les gens qui doivent
nécessairement paraître suspects. Je demande, moi, j l'arrestation de
tous les ci-devant nobles,
(La Convention approuvé l'arrêté de ses commissaires contenant des mesures de sûreté générale et renvoie à l'examen du comité d'agriculture l'arrêté relatif aux subsistances. )
Une députation du directoire du département de Seine-et-Oise est admise à la barre.
L'orateur de la députation s'exprime ainsi (1) :
C'est avec indignation que nous apprenons l'audace du perfide Dumouriez; il doit être puni, et nous nous offrons pour être les premiers vengeurs de ses attentats;. la confiance dont nous ont investi nos concitoyens _ est un sûr garant de l'impression que produira sur eux notre exemple. Permettez à la moitié d'entre nous de s'armer du glaivé exterminateur; nous serons suivis de la majorité des habitants du département de Seine-et-Oise. Il faut que la France entière se lève, ou que la liberté périsse ! Si vous nous refusez, vous_ serez comptables envers la patrie d'avoir rejeté des mesures qui peuvent la sauver. (Vifs applaudissements. )
Extrait des registres des délibérations du directoire du département de Seine-et-Oise (2).
Séance publique du S avril.
« Le directoire du département de Seine-et Oise, instruit de l'attentat commis par un général impudent contre la souveraineté nationale; et voulant concourir, en ce qui le concerne, aux mesures vigoureuses qui vont être adoptées par la Convention nationale;
Ouï le substitut du procureur général syndic, arrête ce qui suit : 1° il sera porté sur-le-champ à la Convention nationale une adresse, pour inviter à arrêter que la moitié des membres des administrations, districts et municipalités, seront appelés à marcher à l'armée qui sera formée entre les frontières et la capitale.
« 2° Quatre membres du directoire du département se tiendront, en conséquence, prêts à partir, armés, au premier ordre.
« 3° Les corps administratifs et municipaux sont requis de s'occuper, sur-le-champ, des mesures les plus promptes pour assurer la sûreté intérieure, faire faire toutes perquisitions domiciliaires, et achever le désarmement des personnes suspectes.
4° Ils sont invités à faire mettre en état d'arrestation, tout citoyen notoirement connu pour son incivisme.
« 5° Ils sont également requis de faire ouvrir un registre pour l'inscription d^s Français de leurs communes qui se lèveront pour le salut de la patrie.
( 6° Ils emploieront tous les moyens possibles d'assurer les armes dé toute espèce et les munitions de guerre qui peuvent se trouver chez tous les marchands et fournisseurs. »
(3). La Convention applau-
(La Convention renvoie la pétition au comité de défense générale).
, secrétaire, donne lectlire d'une lettre du citoyen Fouché, commissaire de 1a, Convention nationale dans le département de la Loire-Inférieure, qui transmet deux arrêtés du directoire de ce département ; cette lettre est ainsi conçue : (1).
Nantes,
« Citoyens collègues,
« Je vous adresse ci-jointes deux expéditions d'arrêtés du directoire du département de la Loire-Inférieure, relatives l'une à la formation du tribunal criminel, l'autre à une nouvelle liste de jurés pour le trimestre d'avril prochain. Je vous prie de vouloir prendre en la plus grande considération ces deux mesures impérieusement dictées par les circonstances.
« Le commissaire de la Convention nationale près le département de la Loire-Inférieure.
« Signé : Fouché, député commissaire de la C onvention nationale. »
Suivent les* deux arrêtés dont il est question ci-dessus ; ils sont ainsi conçus :
I
Extrait des registres du directoire du département du 29 mars 1793, l'an II de la République (2).
« Séance non publique, sur les circonstances, où présidait Beaufranchet et assistaient So-tin, Poton, Fourmy, Peccot fils, Sorreau, Gourlay et Bazille.
( Présent le procureur général syndic qui a représenté que, suivant l'ordre établi par la loi concernant l'institution'du jury, il devait pour le trimestre d'avril former une nouvelle liste des jurés, mais il observe que l'état de bouleversement où se trouve le département, la dévastation des districts, l'interruption des communications, les dangers et l'impossibilité même de voyager sur toutes les routes rendraient illusoire la formation d'une nouvelle liste, puisque les citoyens des campagnes qui la composeraient, rebelles eux-mêmes ou retenus par^ les rebelles, ne viendraient pas à leur poste, ou ne pouvant être prévenus de leur insertion à la liste ou au tableau des jurés.
« Il requiert, en conséquence, l'administration de délibérer sur ee qui
convient de faire et de diriger la marche qu'il avait à suivre dans une
position aussi extraordinaire et qu'aucunes lois n'avaient pu prévenir ;
il a
« Le directoire délibérant en conséquence, sur le réquisitoire du procureur général syndic et d'après les considérations malheureusement trop vraies et trop réelle qu'il a motivées, jugeant impossible de former une nouvelle liste de jurés pour le trimestre d'avril prochain;
« Arrête que la liste des jurés formée pour le trimestre de janvier dernier sera continuée et maintenue pour servir au juré de jugement pendant le trimestre d'avril prochain et que, pour cette fin, le présent sera, a la diligence du procureur général syndic, notifié officiellement au président du tribunal criminel ;
« Qu'une expédition en sera de suite adressée au citoyen Fouché, commissaire de la Convention nationale pour être par lui approuvée et avec prière de la faire approuver par la Convention nationale.
« En directoire, à Nantes^, le 29 mars 1793, an II de la République.
« Signé : Fouché, député commissaire.
c Pour expédition : « Signé : Grelier, secrétaire général. »
II
Extrait des registres du directoire du département du 29 mars 1793, Van II de la République (1).
« Séance non publique, vu les circonstances, où présidait Beaufranchet et assistaient So-tin, Poton, Fourmy, père ; Peccot fils ; Sor-reau, Gourlay et Bazille.
Présent le procureur général syndic qui a dit que le trimestre de janvier devant expirer sous deux jours, il était bien urgent de nommer les juges des tribunaux de district qui doivent juger au tribunal criminel pendant le trimestre d'avril ;
( Il a observé que suivant l'ordre établi et suivi jusqu'à ce jour, le tour des tribunaux à appele/ était celui des tribunaux de Nantes, Paimbœuf et Savenay ; qu'il était impossible de prendre des juges, dans les deux premiers tribunaux ; quant à celui de Savenay, il n'existe plus ; les membres en ont peut-être tous été égorgés ; le tribunal d'Ancenis est indiqué pour y suppléer, et celui-là pour fournir un juge.
« Mais il ne suffira pas de ces trois juges; le président du tribunal criminel est aux mains des brigands et a pu devenir leur victime ; il est indispensable de nommer un juge pour remplir ses fonctions, au moins pendant le temps de son absence.
« Le procureur général syndic a requis qu'il en fût délibéré et que la
délibération qui se-
« Le directoire, délibérant sur le réquisitoire du procureur général syndic,
« A nommé et nomme, pour composer le tribunal criminel, pendant le trimestre d'avril prochain, les citoyens Le Minihy, juge du district de Nantes ; Gautrais, du district d'Ancenis et Brèges du district de Blain.
« Et pour remplir les fonctions de président pendant l'absence et la détention du citoyen Gandon, aux mains des brigands, nomme le citoyen Phelippes, juge au tribunal de Nantes.
« Arrête, au surplus, que le citoyen Fouché, député commissaire de la Convention nationale, sera prié de donner son approbation à la présente, principalement pour ce qui concerne la nomination du juge qui doit remplir les fonctions de président.
« Fait en directoire, à Nantes, le 29 mars 1793, l'an II de la République.
« Signé ; Fouché, député commissaire. » « Pour expédition :
« Signé : Pierre Grelier, secrétaire général. »
(La Convention renvoie ces pièces au comité de sûreté générale.)
Le même secrétaire donne lecture d'une lettre des membres composant le comité de défense et de sûreté générale de la ville de Lille, qui transmet à la Convention différentes pièces relatives à la trahison de Dumouriez.
Suit la teneur de ces pièces :
I.
Lettre des membres composant le comité de défense et de sûreté générale de la ville de Lille (1);
« Citoyens représentants,
« Chaque instant développe quelques nouveaux ressorts de la trame ourdie contre le salut de la République. Yous verrez par les lettres et pièces quejious nous empressons de vous envoyer que le traître Dumouriez a employé tous les moyens qui étaient en son pouvoir pour s'assurer de son armée.
« Les autorités civiles et militaires, pour travailler plus sûrement au salut de la République, se sont réunies et ont extrait de leur sein un comité de défense et de sûreté qui a juré de sauver la ville.
« La vigilance qu'exerce ce comité vous répond que vous serez instruits
de tout à temps, mais observez que les moments sont comptés quand il
s'agit de se préparer à tenir tête à toute l'Europe, même aux Français.
Les préparatifs de défense se poussent ici avec toute l'activité
imaginable, et nous espérons que
« Lille, le 2 avril 1793, l'an II de la République.
« Les membres composant le comité de défense et de sûreté générale.
« Signé : Sifflet, commissaire procureur syndic; La Valette, commandant temporaire de Lille; Bryan, chef de légion; Joseph Bluysen, administrateur; Vantomont, administrateur du district, n
II.
Rapport de l'adjoint aux adjudants généraux
Biotière au citoyen commandant temporaire
à Bergues (1).
Quartier général des Bains de Saint-Amand, le 4 avril 1793, l'an II de la République.
Mot d'ordre : Camarades, suivez-moi! Ralliement : Tout ira bien!
« L'armée conservera sa position; le général la prévient qu'il ira la voir aujourd'hui, à trois heures.
« Pour laisser reposer ses braves troupes et pour mieux servir son pays, il est convenu d'une suspension d'armes avec les généraux de l'armée impériale, et comme les deux armées sont très voisines, il ordonne une surveillance exacte pour la police. Il défend sous peine de mort de passer les limites du territoire français. Les généraux de l'armée impériale ont proclamé chez eux la même défense et sous la même peine.
« L'adjoint aux adjudants généraux.
« Signé : Biotière. »
Ut
Lettre du général de brigade Thouvenot au citoyen commandant la place de Lille (2).
Au quartier général de Saint-Amand, le 31 mars 1793, l'an II de la République.
« Citoyen commandant,
( Je vous prie d'envoyer à l'état-major de l'armée, aux bains de Saint-Amand, l'état des troupes qui sont à vos ordres.
« Le général de brigade, chef de l'état-major de l'armée du Nord.
et Signé : Thouvenot. »
Nota. — Une pareille lettre a été écrite à tous les commandants de place depuis Dunkerque jusqu'aux Ardennes.
« Signé ; Thouvenot. »
Lettre du conseil général d'administration du
Pas-de-Calais au président de la Convention
nationale (1).
Arras,
« Citoyen président,
« Nous vous envoyons l'adresse que les circonstances et la conduite affreuse du traître Dumouriez nous ont déterminés à faire. Nous vous prions de la mettre sous les yeux de la Convention nationale.
« Le conseil général d'administration du département du Pas-de-Calais,
« Signé : Ferdinand Dubois, Galou. »
(La Convention renvoie ces pièces au comité de défense générale. )
Deux aides de camp de l'armée de Dumouriez sont admis à la barre.
Le premier, le citoyen Bernazais (2), du district de Poitiers, département de la Vienne, officier de Vétat-major de l'armée de Dumouriez, s'exprime ainsi :
Législateurs (3), j'ai bravé tous les dangers, la mort même, pour venir déposer dans la Convention nationale des faits importants dont je vous donnerai connaissance ouvertement et dont plusieurs ne doivent être dévoilés qu'à vos comités de défense et de sûreté générales. J'étais à l'état-major de Dumouriez. Ce perfide disait qu'il trouvait en moi de grands avantages, que j'étais savant, expérimenté, mais ni l'or, ni l'argent, ni la flatterie, rien ne doit ébranler un Français républicain. L'amour de ma patrie, le courage m ont guidé, et j'ai laissé là l'ambitieux Dumouriez. Je vais vous dévoiler les fils secrets des complots de ce général. J'étais l'homme d'affaires; tout m'était confié; je vous prie de m'entendre avec calme et indulgence.
Vous n'ignorez pas (4) quels moyens le perfide Dumouriez a mis en usage pour corrompre les soldats qu'il commande; vous avez vu les proclamations qu'il leur a adressées. Son but était de détruire la Convention nationale pour lui substituer une autorité illégale, la sienne peut-être. C'est à l'instant où ij méditait ce coupable projet que vos commissaires, arrivés à Saint-Amand, se sont présentés devant lui, accompagnés du ministre de la guerre.
Ils arrrivèrent (5) sans autre arme que la force de l'opinion qui
investit la Convention nationale, pour s'emparer d'un traître environné
de hussards, d'Allemands et de baïon-
Je cherchai à m'évader; mais je trouvai des sentinelles à toutes les portes, et je fus obligé de revenir. En rentrant j'aperçus les citoyens commissaires qu'on traînait dans une voiture malgré eux, et qui, au milieu de leurs assassins, criaient encore à Dumouriez de se rendre à la barre de la Convention; mais on les enferma dans la voiture, et l'on marcha pour les livrer à l'ennemi. (.Mouvement d'indignation dcms l'Assemblée et les tribunes.) Vous avez appris cette nouvelle avec horreur; vous n'en éprouverez pas moins lorsque vous saurez que Beurnonville, voulant se précipiter de sa voiture pour suivre les commissaires, reçut des scélérats qui l'escortaient, un coup de sabre qui le baigna dans son sang.
Je conçus alors le projet de risquer mes jours pour sauver la patrie, et j'y réussis heureusement. Après que Dumouriez eût pris en otage vos commissaires et le ministre dè la guerre, il envoya, pour égarer l'armée, des orateurs qui ont sans cesse à la bouche les mots de faction et d'anarchie. J'en fus un; je parcourus les camps, j'y trouvai un morne silence, et la crainte qu'avaient les troupes de l'envahissement de l'ennemi, malgré la suspension d'armes. Au lieu de remplir la mision odieuse dont j'étais chargé, j'ai éclairé l'armée et j'ai même fait jurer à des bataillons de combattre et mourir pour la République; je puis vous assurer, d'après cela, que vous pouvez compter sur l'armée, et que quand elle n'aurait d'autres armes que le désespoir, elle vaincra. (Vifs applaudissements. )
Après avoir ainsi pris connaissance de l'esprit de l'armée, de l'état des places, des ressources de nos ennemis et de nos propres moyens, je crus devoir me rendre auprès de la Convention nationale. Je dis à Dumouriez : « Vous voulez marcher sur Paris; il fallait auparavant vous assurer des intelligences dans les places; il fallait y envoyer des gens tout dévoués à vous, pour être sûr qu'elles se défendraient bien, et que votre armée ne vous abandonnera pas comme Lafayette ». Il me dit : (( Eh bien, allez vous-même à Valenciennes, tâchez de vous emparer de cette ville, j'y ferai
filer de la cavalerie ce soir ». J'obéis; j'arrive à Valenciennes, je vais trouver le maire et lui dis : Si vous êtes bon républicain, vous pouvez sauver votre patrie; conduisez-moi aux commissaires de la Convention ». Je leur fis le détail du tout. Aussitôt les ponts furent levés, on* garnit les remparts et tout le monde est disposé à se battre. J'écrivis ensuite à Dumouriez de me renvoyer le lendemain à Valenciennes l'ordonnance qui m'avait accompagné, que je lui donnerais de bonnes nouvelles; j'étais bien sûr que le lendemain matin je serais trop loin pour qu'il pût m'atteindre.
Il est possible que la distance fasse voir au peuple les objets sous différents points de vue; mais s'il y avait dès dangers, je ne les dissimulerais pas, parce que je me confie trop h votre sagesse pour les prévenir. Toutes les places sont couvertes; partout le peuple est dans les meilleures dispositions, les. garnisons sont sur les remparts,voscommissaires donnent l'exemple et se mêlent aux travaux. Il est cependant un point dont on ne pourrait pas répondre, parce que Dumouriez a eu soin de m'y faire précéder par un homme- suspect, mais je vous demande la permission de communiquer au comité de défense générale des renseignements si positifs que l'on assurera tout.
Je dois ajouter un fait, c'est que Dumouriez compte sur votre désunion. Il a fait hier une proclamation qui contient l'apologie honteuse des services qu il a rendus à la patrie, et qu'il termine en vous proposant d'accepter la Constitution de 1790.
Plusieurs membres (1) demandent le nom de cet officier.
L'officier. Mon nom est Bernazais, officier de l'état-major de l'armée du Nord.
Je demande que le ministre emploie ce brave homme.
(La Convention renvoie cette proposition au Conseil exécutif.)
, après avoir félicité le pétitionnaire de son zèle et l'avoir admis aux honneurs de la séance, l'invite à se rendre au comité de défense générale pour y faire part des renseignements qu'il peut donner.
Le second officier, Charles-Louis Hoche, capitaine au -58e régiment d'infanterie du département de Seine-et-Oise, aide de camp du général Leveneur, s'exprime ensuite en ces termes (2) :
Législateurs, s'il est dans les armées de la République des généraux
indignes de la confiance de la nation, il en est aussi, croyez-le, qui
brûlent du plus ardent patriotisme et qui méritent de la reconnaissance
et des éloges. J'ai été chargé par le général Leveneur, de vous apporter
une dépêche; j'observerai même que j'ai éprouvé beaucoup de difficultés
pour arriver jusqu'ici; car tous les passages sont interceptés. Elle
contient l'expression de ses sentiments; vous y verrez qu'il a
courageusement résisté aux insinuations perfides de Du-
, secrétaire, donne lecture de cette lettre qui est ainsi conçue :
Le citoyen Leveneur, premier chef de division de Varmée des Ardennes, à la Convention nationale.
Au camp de Maulde, le
« Citoyens représentants, Dumouriez que j'aimais, auquel j'avais même des obligations et que j'étais bien éloigné de soupçonner de ce qu'il fait aujourd'hui, vient de commettre un grand attentat. U en a fait part aux armées, et espère sans doute les décider pour lui. Valence qui commande celle des Ardennes, est coalisé avec lui. On veut me faire entrer dans ce fatal complot, parce qu'on sait que les troupes ont confiance en moi.
( Depuis vingt-quatre heures j'élude, sous divers prétextes, les ordres et les invitations de me rendre chez Dumouriez; mais ma position est affreuse. Si je me range du parti de Dumouriez, j'agis contre ma conscience; si j'annonce une opinion contraire à la sienne, je m'expose à être arrêté sur-le-champ et envoyé comme les autres en otage à l'ennemi. D'un autre côté on ne peut se dissimuler que la position de l'armée est affreuse : dénuée de tout et particulièrement de fourrages; administrations désorganisées à dessein; positions prises de manière à placer entre l'ennemi et les troupes dont on croit, très injustement peut-être, être sûr, celles dont on doute, qui sont celles de l'armée des Ardennes, auxquelles je suis attaché: trêve insidieuse conclue avec l'ennemi, qui lui donne la liberté d'approcher aussi près de nous qu'il voudra toutes ses forces, pour écraser à l'instant les victimes qu'on lui désignerait; voilà notre situation : situation horrible pour le citoyen fidèle, dont toutes les démarches sont observées, et qui court les plus grands risques, s'il donne à connaître sa façon de penser.
« U y a six ans, citoyens, que je sers la patrie sans relâche, soit dans
les administrations nationales, tant avant que depuis la Révolution,
soit à la guerre depuis un an, n'ayant pas quitté mon poste d'une
minute; depuis six semaines, je couche sur la paille : j'ai commandé à
quatre batailles en six jours. C'est moi qui commandais en chef celle du
22, où les troupes ont fait inutilement des prodiges de valeur : mon
corps et mon esprit sont fatigués et ont besoin de repos : je l"e
demande à grands cris. Fournissez-moi, citoyens, le moyen de quitter
honorablement un poste où je ne puis plus être utile et où je suis en
danger, tant qu'il y aura des conspirateurs. Je rentrerai donc dans le
sein de ma famille, sans que les braves frères d'armes que je commande
et que j'aime puissent m'accuser d'une lâche désertion. J'y servirai au
moins comme exemple d'un citoyen fidèle qui a résisté-à tous les orages,
à tous les
« Le général de division, « Signé : Leveneur. »
(Applaudissements.)
P. S. Les circonstances peuvent devenir assez critiques pour m'obliger de m'échapper d'ici, et de me rendre dans une ville où je puisse être en sûreté, et attendre les ordres de la Convention.
, après cette lecture, engage le citoyen Hoche à rejoindre son collègue au comité de défense générale pour y fournir à son tour les renseignements qu'il croirait utile de donner.
(La Convention renvoie la lettre du général Leveneur au comité de défense générale.)
, secrétaire, donne lecture d'une lettre des citoyens Charles Cochon, de Bellegarde et Lequinio, commissaires de la Convention aux places fortes du Nord, par laquelle ils annoncent que les bataillons de la garnison de Valenciennes ont juré de combattre pour la République; elle est ainsi conçue (1) :
« Valenciennes, le.....
« Citoyens nos collègues,
« Nous vous adressons par le porteur (2) des pièces qui vous attesteront notre conduite. Nous avons visité la garnison de Valenciennes, et tous les bataillons ont juré de combattre pour la République : le traître est reconnu comme tel : la patrie sera encore une fois sauvée, et le tyran périra. (Applaudissements).
« Salut à la République, nous mourrons pour elle ou nous vivrons avec elle.
« Signé : Lequinio, Cochon et Bellegarde. »
« P. S. Nous n'avons pas le temps d'en écrire davantage, nous agissons...
(La Convention renvoie cette lettre au comité de défense générale.)
(3). Je demande le remplacement d'une partie des membres du comité de défense générale. Personne n'ignore que plusieurs ont eu des relations avec Dumouriez, et que par-là ils peuvent être justement soupçonnés de complicité avec lui. Je demande que ceux-là soient remplacés et qu'on ne conserve que ceux qui sont reconnus pour des patriotes décidés. (Interruptions et murmures.)
Plusieurs membres : Non, non, l'ordre du jour!
Je m'explique peu ces murmures, car Dumouriez le reconnaît lui-même dans ses lettres : il a dit qu'il n'y avait que six membres de mauvais dans ce comité.
(4). U y a cinq mois que nous avons dénoncé la faction d'Orléans, et
pendant cinq mois nous avons été traités de scé-
Plusieurs membres (à l'extrême gauche) : Non, non!
Il est des faits que personne ne peut contester et qui éclaireront la France. En effet, que demande Dumouriez 1 L'ancienne Constitution. Quel est celui qu'elle placera sur le trône 1 C'est d'Orléans, c'est sa famille.
Les mêmes membres : Ce n'est pas vrai!
C'est le Dauphin.
Je demande à prouver que Barbaroux est de la faction de Dumouriez.
Je me retire de la tribune, puisqu'on ne veut pas m'entendre, mais je demande acte de ma dénonciation.
(La Convention passe à l'ordre du jour sur ces différentes propositions.)
(1). Des mesures avaient été prises par les comités de défense et de sûreté générale réunis pour s'assurer des complices de la conspiration qui vient d'éclater. Dans la nuit du 31 mars, trente mandats d'arrêt avaient été décernés contre des personnes suspectes ; hier nous recevons une lettre du ministre Lebrun, qui nous annonçait qu'à l'instant ou il allait expédier le mandat d'arrêt décerné contre Valence, les citoyens Lasource et Méaulle sont venus lui redemander ce mandat : je ne sais si le comité de défense générale a pu prendre une délibération contraire à celle qui avait été déjà prise ; mais pendant ce temps le général Valence a pu s'évader. Je demande que le mandat d'arrêt soit expédié sur-le-champ contre Valence, et que toute sa famille soit mise en état d'arrestation.
Un membre : Je demande que Lasource et Méaulle soient entendus pour se justifier.
Il est important de rétablir les faits dont Montaut ne s'est peut-être pas bien souvenu. Ce n'est pas le comité de défense générale qui a changé l'ordre. Il a proposé de décerner plusieurs mandats d'arrêt contre les personnes suspectes d'avoir trempé dans la conspiration de Dumouriez : à l'égard des citoyens Egalité et Sillery, qui pouvaient aussi paraître suspects, il fut arrêté qu'ils seraient entendus au comité. Lorsqu'ils se furent expliqués, plusieurs membres observèrent que Valence était blessé et que sa situation ne permettait pas de le transférer à Paris, et il fut décidé que -sans lever le mandat d'arrêt, Valence resterait en arrestation chez lui.
Voilà les explications que j'ai cru devoir donner à l'Assemblée. J'observe d'ailleurs que c'est Châteauneuf-Randon qui fit cette proposition, et je l'interpelle de dire si j'ai dit la vérité.
C'est exact.
Quant aux citoyens Lasource et Méaulle, je dois dire qu'ils s'opposèrent
tout d'abord à cette mesure et que ce ne fut que sur
J'appuie la proposition de faire mettre en état d'arrestation la femme, les enfants de Valence, et la citoyenne Montesson; mais je réclame aussi cette mesure contre la femme Egalité. Parmi les lettres prises sur le courier expédié par Valence, il en existe deux d'Egalité fils, l'une à sa mère, l'autre à son père. Dans la lettre qu'il écrit à son père, il dit : « C'est la Convention qui a précipité la nation française dans l'abîme. » Si Egalité fils écrit en ce sens, il importe de s'assurer de la mère. Je demande donc qu'elle soit mise en état d'arrestation.
Plusieurs membres : Appuyé, appuyé!
Que la Convention se souvienne qu'il est dit dans le procès-verbal des trois commissaires du conseil exécutif, que Dumouriez a énoncé ses projets contre-révolutionnaires en présence de Valence et d'Egalité fils. Je ne veuxjpas d'autre preuves de leur complicité. Quand le fils d'Egalité ne partagerait pas l'opinion de Dumouriez, il serait coupable par cela seul qu'il ne l'a point poignardé, lorsqu'il tenait de pareils discours. (Applaudissements.) Comme l'inviolabilité ne doit durer que jusr qu'au soupçon, je demande qu'Egalité père et Sillery soient gardés à vue.
J'appuie la demande de Levasseur ; elle est juste ; il faut qu'elle s'exécute pour la tranquillité de la nation et pour la mienne. Je demande que les scellés soient apposés sur mes papiers. Je demande à être gardé à vue ; mais je supplie la Convention de ne pas me priver de venir à ses séances. Quand il s'agira de punir les traîtres, si mon gendre est coupable je suis ici devant l'image de Brutus; je fais le jugement qu'il porta contre son fils.
(Morbihan). Je demande la question préalable sur l'apposition des scellés, car il faudrait supposer bien de l'imprudence aux citoyens Sillerey et Egalité pour n'avoir pas ôté depuis trois ou quatre jours Geux de de leurs papiers qu'ils n'auraient pas voulu qu'on leur surprît.
Le comité de défense générale m'envoya chercher à cinq heures du matin. En y arrivant, je fus fort surpris de tout ce qu'on y disait, et j'atteste les citoyens qui y étaient présents, de déclarer si je ne conjurai pas le comité d'envoyer sur-le-champ des commissaires pour mettre les scellés sur mes papiers. Le comité n'ayant-pas jugé à propos de le faire, je réitérai cette demande à la Convention. Il ne faut pas que le soupçon pèse sur la tête d'un patriote pur. Si j'ai des traîtres dans ma famille, il faut qu'ils soient punis ; si je suis coupable, il faut que ma tête tombe.
(1). Le comité de défense générale a rendu compte à la Convention de la demande que j'ai faite de l'examen de ma conduite. Si je suis coupable, je dois être puni, cela va sans dire ; si mon fils l'est, je vois aussi Brutus ; c'en est assez.
Il faut que l'on sache par' quelle fatalité la conversation infâme de
Dumouriez s'est tenue en présence de ma femme. On sait qu'en vertu d'une
loi rendue sur les émigrés,
J'estime que le plus sûr moyen de connaître les sentiments des généraux Egalité et Valence, c'est de les sommer de se rendre à la barre.
J'appuie la proposition, car je verrai dans la façon dont ils accueilleront la décision de la Convention, la preuve de la culpabilité ou l'indice de leur innocence. Il n'est pas douteux, en effet, que s'ils obéissent, les nuages élevés sur leur conduite disparaîtront ; si, au contraire, ils refusent, ils se mettent en état de révolte, et l'Assemblée les traitera comme Dumouriez.
Il faut les mettre dès aujourd'hui en état d'accusation ,car ils auraient dû poignarder Dumouriez, lorsqu'il a trahi la patrie.
(1). Je demande que, séance tenante, la Convention nomme une commission de six membres, pour examiner la conduite des commissaires envoyés dans la Belgique et que Lasource soit de la commission.
Citoyens, je refuse d'être de cette commission.
Plusieurs membres : L'ordre du jour! l'ordre du jour !
Lorsque j'ai énoncé mes doutes sur la conduite de Delacroix et de Danton, j'ai ajouté que je le faisais dans toute la sincérité de mon cœur et que je n'entendais, en aucune façon, inculper les commissaires. Ce que j'ai fait, je le ferais pour tout collègue qui ne m'inspirerai pas confiance, je le ferais pour la nation entière. Je suis prêt à reconnaître mon erreur, si elle existe ; c'est pourquoi j'appuie de toutes mes forces la nomination de la commission que demande Delacroix.
Je suis également de cet avis et je demande qu'on étende la proposition à tous les commissaires qui se sont rendus dans les départements. Il ne faut pas qu'il dépende de quelques hommes de jeter du louche sur la conduite de ceux qui ont bien rempli leur devoir.
l'aîné. Nous connaissons la franchise de nos commissaires, et toute enquête est inutile; je demande l'ordre du jour.
Plusieurs membres : Oui, oui, l'ordre du jour !
Il faut pourtant faire cesser toutes ces divisions, ces personnalités qui déshonorent la Convention. Mais, je déclare que si l'on m'attaque on prouvera les faits ou je garde un poignard pour les calomniateurs. (Vifs applaudissements.)
Oui, il faut que l'on établisse une commission pour juger notre conduite et recevoir nos comptes. On nous soupçonne, eh bien, qu'on examine; on verra alors comment nous nous sommes comportés.
Point de commission ; que les membres qui ont été en commission rendent leurs comptes à la tribune.
Les mesures qu'on vient de nous proposer sont nulles, il en faut de plus étendues, de plus générales pour sauver la patrie. Il est étonnant que le comité de défense générale, depuis le temps qu'il connaît les dangers de la patrie, ne vous ait pas présenté le projet de donner le signal à tous les vrais républicains qui n'attendent que vos ordres pour voler à la défense de la patrie. J'ai proposé plusieurs fois de former un camp aux environs de Paris, cela me paraît d'une nécessité absolue. Yotre comité ne l'a-t-il pas senti?
J'en reviens à la proposition de Génissieu; ce n'est pas ces deux officiers seuls qu'il faut mettre èn état d'arrestation, mais tout l'état-major du scélérat Dumouriez; les officiers qui le composent sont aussi traîtres que lui.
J'appuie les observations du préopinant; en effet, citoyens, c'est par les armes que nous pouvons sauver la patrie; c'est au tribunal de la guerre que nous devons plaider contre les conspirateurs, c'est par la force que nous, qui ne voulons céder ni à aucune crainte, ni à aucune espérance, que nous pouvons l'emporter; et cependant nous n'avons organisé encore ni armée, ni camps nouveaux; et cependant nous n'avons pas fait partir encore les courriers que je demandais pour les départements, et lorsque vous devriez leur crier de courir aux armes, vous ne les avez pas même prévenus encore sur les dangers nouveaux que la trahison d'un général veut faire courir à la liberté. Le comité de défense prépare ses projets; décrétons-les aujourd'hui; que ces mesures fortes succèdent à de vagues dénonciations, et ne travaillons plus pour nos passions, mais pour la patrie.
J'en reviens à la proposition de Génissieu ; on a dit avec raison et esprit, qu'il ne fallait pas conserver dans la République de la graine d'émigrés; je ne veux pas non plus de la graine de roi, celle-là germe dans la corruption. Les Egalités, dit-on, ont servi la liberté. Je ne veux rien devoir moi à ces hommes, dans les veines desquels coule le sang des rois; et je dois dire ici tous mes soupçons, c'est devant Egalité que Dumouriez a fait ses atroces confidences, et il n'est point encore arrêté. Je demande qu'il le soit, et traduit à la barre, ainsi que Yalence.
Je demande que la lettre d'Egalité fils, à son père, qu'on a interceptée, soit lue.
Un grand nombre de membres : Appuyé, appuyé !
, secrétaire, donne lecture de cette lettre qui est ainsi conçue (1) :
Tournay, 30 mars.
« Je vous ai écrit de Louvain, cher papa, le 21; c'est le premier instant
dont j'ai pu disposer après la malheureuse bataille de Ner-
« Mon couleur de rose est à présent bien passé, et il est changé dans le noir le plus profond; je vois la liberté perdue, je vois la Convention nationale perdre tout à fait la France, par l'oubli de tous lesprincipes; je vois laguerre civile allumée, je vois des armées innombrables fondre de tous côtés sur notre malheureuse patrie, et je ne vois pas d'armées à leur opposer; nos troupes de ligne sont presque détruites; les bataillons les plus forts sont de 400 hommes. Le brave régiment des Deux-Ponts est de 150 hommes, et il ne leur vient pas de recrues; tout va dans les volontaires ou dans les nouveaux corps;, en outre, le décret qui a assimilé les troupes de ligne aux volontaires, les a animés les uns contre les autres. Les volontaires désertent et fuient de toutes parts, on ne peut pas les arrêter ; et la Convention croit qu'avec de tels soldats, ' elle peut faire la guerre à toute l'Europe? Je vous assure que, pour peu que ceci dure, elle en sera bientôt détrompée. Dans quel abîme elle a précipité la France! (Murmures).
Voilà précisément les principes de Dumouriez.
, secrétaire, poursuit la lecture :
« En arrivant ici, je me suis mis au lit avec un peu de fièvre. Il m'est survenu au corps plusieurs boutons, que les chirurgiens m'ont dit être une maladie de peau. J'en suis bien fâchée Avec un peu de repos, cela ne sera rien.
« Je m'en vais demain à Saint-Amand : ma sœur y viendra aussi; elle y sera beaucoup plus tranquille de toute manière et moins recherchée qu'à Lille sur l'article de l'émigration. Quant à la sûreté, elle est tout autant en sûreté à Saint-Amand, et, en supposant que son affaire ne fût pas terminée promptement, comme je le crois, s'il lui arrivait malheur, elle pourrait toujours aller à Valenciennes, où elle est encore beaucoup plus tranquille qu'à Lille.
« Si vous désapprouvez ce que j'ai fait, parlez et bientôt je le réparerai. Madame Sillery me mande qu'elle n'est pour rien dans cet arrangement; cela me paraît inutile : mais comme cela ne peut avoir aucun inconvénient, je le ferai d'autant plus que l'affiuence à Lille est considérable et qu'il n'en est pas de même à Saint-Amand.
Adieu, cher papa,
« Signé : Egalité. »
La lettre d'Egalité respire le même esprit que celle de Dumouriez; il y règne le même ton; l'on y conspue la Convention de la même manière. Je demande que la Con-tion prononce de suite sur les différentes propositions qui y ont été faites.
Un grand nombre de membres : Appuyé, appuyé !
, secrétaire, lit la rédaction des différentes propositions qui ont
été formulées ; tout d'abord celle de M aribon-Montaut et celle de Châteauneuf-Randon qui demandent la mise en arrestation sur-le-champ de la femme du général Valence, de la citoyenne Montesson et de la citoyenne femme Egalité.
(La Convention nationale décrète que -la femme et les enfants du général Valence, la citoyenne Montesson et la citoyenne Egalité seront mis sur-le-champ en état d'arrestation et que le scellé sera mis sur leurs papiers (1).
Le même secrétaire donne lecture de la proposition du Levasseur, demandant que les citoyens Brultar-Sillery et Egalité soient gardés à Vue.
J'appuie la proposition de Levasseur, mais je demande qu'on ajoute : « avec la facilité d'aller et venir dans l'intérieur- de Paris. »
Pourquoi cette addition ? Ces citoyens sont toujours députés; or, un député ne peut sortir de Paris. Je demande la question préalable.
Un membre : Pas du tout, j'estime, au contraire, que cette addition est excellente, et je demande, avec Lecointre, qu'on dise bien que ces deux citoyens pourront aller et venir dans Paris, mais dans Paris seulement. La proposition en a été faite d'ailleurs par Sillery lui-même.
(La Convention nationale décrète que les citoyens Brultar-Sillery et Egalité, membres de la Convention nationale, seront gardés à vue, avec liberté d'aller où ils jugeront à propos dans Paris seulement (2).
Le même secrétaire donne ensuite lecture de la motion de Delacroix, tendant à la nomination chargée d'examiner les comptes rendus par les divers commissaires de la Convention.
(La Convention décrète qu'il-n'y a pas lieu à délibérer sur cette proposition (3).
Le même secrétaire donne enfin lecture de la proposition de Génissiêu et de celle de Carrier, qui demandent que les généraux Valence, Egalité et tojut l'état-Jmajor de Dumouriez soient traduits à la barre, avec injonction à tout citoyen de courir sus et de confisquer leurs biens au profit de la République, si lesdits prévenus n'ont pas obéi, dans huit jours, au décret de la Convention.
« La Convention nationale décrète que le généraux Valence et Egalité, ainsi que l'adjudant général Devaux, l'adjudant général Montjoye, l'officier général Bermert, le général Léquevillé et le général Westermann, Malus, commissaire ordonnateur, seront traduits à la barre; décrète, en outre, que si lesdits prévenus ne s'y sont pas rendus huit jours après la notification du présent décret ils seront, par le fait, déclarés hors de la loi : il sera enjoint à tout citoyen de courir sus, et leurs biens confisqués au profit de la République (4). »
présente un projet d'adresse aux soldats français de l'armée du
(La Convention en ajourne l'adoption, jusqu'à ce qu'on ait entendu celles qui ont été rédigées par d'autres membres (1).
annonce àla Convention qu'il est saisi d'une lettre du général Miranda, qui demande à être entendu à la barre (2).
(La Convention nationale, après avoir entendu la lecture d'une lettre du général Miranda, décrète qu'il sera renvoyé aux comités de sûreté générale et de la guerre, réunis pour être interrogé par eux.)
Des députés de la ville de Lille se présentent à la barre.
L'orateur de la députation s'exprime de la sorte (3) :
« Citoyens représentants, les Lillois viennent de donner une nouvelle preuve de leur courage, de leur amour pour la République, de leur attachement à la Convention, et de leur respect pour ses décrets. Sans leur fermeté, sans leur prudence, Lille serait déjà au pouvoir de Dumouriez.
« Le général Duval s'est mis à la tête du détachement de Miaczynski, bien persuadé qu'il ne lui serait pas difficile de faire revenir de leur égarement ce3 soldats, tous bien intentionnés. Yous approuverez sans doute la conduite de ce général, qui jusqu'à présent a donné les plus grandes et les plus fréquentes preuves de patriotisme. »
L'orateur termine par demander que le Trésor national acquitte les créances dont la ville est chargée. Il sollicite, au nom des citoyens de cette ville, qu i Sbi tant souffert, la prompte liquidation des rentes et arrérages qui ont été placés sur les entrées des octrois supprimés.
répond à l'orateur et accorde à la députation les honneurs de la séance..
(La Convention renvoie la lettre au comité des finances.)
annonce qu'il est saisi d'une lettre du Conseil exécutif concernant la nomination du général qui doit remplacer Dumouriez (4).
TJn membre : J'estime que cette nomination ne peut être rendue publique avant l'exécution des mesures prises par l'arrestation de Dumouriez et je propose son renvoi au comité de défense générale.
(La Convention nationale décrète que la lettre du Conseil exécutif qui
annonce la nomination qu'il a faite, pour remplacer Dumouriez, ci-devant
général de l'armée du Nord,
, au nom des comités de défense et de sûreté générales réunis, fait un rapport (1) sur les mesures prises pour arrêter Dumouriez et donne lecture d'un projet de décret (2) portant qu'il sera pris quatorze membres parmi les commissaires envoyés dans les départements du Nord et de l'Est, pour faire mettre, en état de défense les places de guerre ; il s'exprime ainsi :
Citoyens, de toutes les mesures à prendre, la principale était de séparer Dumouriez de son armée. Un moyen d'y réussir a frappé tous les membres de votre comité ; il l'a saisi, mais il a pensé que les circonstances lui faisaient un devoir de vous le cacher. Si les mesures que votre comité avait arrêté de prendre dans la nuit du dimanche ne vous eussent pas été communiquées, Dumouriez n'en aurait pas été instruit avant qu'on pût les mettre à exécution. La nouvelle du départ de vos commissaires avait rendu leur mission inutile. Eh bien, ce qu'ils n'ont pu faire, de bons citoyens l'ont entrepris ; nommer ces citoyens, ce serait les exposer inutilement. Il me suffit de vous dire qu'ils sont partis depuis trente heures. (Applaudissements.)
Yoici maintenant un projet de décret qui vous permettra de mettre, en peu de temps, les places frontières dans un état respectable de défense ; il est ainsi conçu :
( La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de défense générale, décrète ce qui suit :
Art. 1er.
« Parmi les commissaires de la Convention nationale envoyés dans les départements du Nord et de l'Est, il sera pris quatorze membres pour faire mettre sur-le-champ en état de défense les places fortes de cette frontière.
Art. 2.
« Les commissaires se partageront en sept divisions de deux membres chacune : chaque division se chargera de faire mettre en état de défense les placés qui lui seront assignées dans les instructions qui seront jointes au présent décret.
Art. 3.
« Chaque division se fera assister de deux ingénieurs et de deux officiers ou sous-offi-ciers de chaque espèce d'arme, d'un officier de santé, d'un employé dans les vivres, réunissant le plus d'expérience et de zèle dans la partie qui sera confiée à chacun d'eux.
Art. 4.
« U sera procédé par les commissaires à un inventaire de tous les objets
de munition et
Art. 5.
« Les commissaires pourront faire toutes réquisitions aux corps administratifs, suspendre ou destituer tous officiers civils et militaires, et prendre toutes les mesures de sûreté générale et toutes celles nécessaires à la célérité, à l'utilité de leurs opérations, et à l'exécution du présent décret. »
(La Convention adopte ce projet de décret.)
(1). Le ministre des contributions a nommé à la place de directeur vacante dans l'administration de la fabrication des assignats le citoyen Mercier; pour se conformer à votre décret, il demande que vous approuviez ou que vous rejetiez le choix qu'il a fait.
En prononçant sur le choix du ministre, vous ôteriez sa responsabilité.
Plusieurs membres : Mais il y a un décret qui l'exige.
On dit qu'il y a un décret qui porte que le ministre vous" soumettra les choix qu'il fera; eh bien, je demande le rapport de ce décret.
(La Convention passe à l'ordre du jour motivé sur ce que la nomination du conseil exécutif est suffisante, et elle rapporte le décret qui exige son approbation ou son improbation des nominations faites par le pouvoir exécutif.)
, au nom du comité de défense générale, fait un rap-port et présente un projet de décret, concernant la levée de 40,000 hommes,la nomination d'un ministre de la guerre, l'envoi de commissaires aux armées et autres mesures de salut public; il s'exprime ainsi (1) :
Citoyens, le comité de défense générale s'occupe des diverses mesures à
prendre; elles vous seront présentées à mesure qu'elles seront
délibérées. La première sur laquelle vous devez prononcer, est la
nomination d'un ministre; vous savez que Beurnon ville a été blessé, et
il est peut-être mort en ce moment; d'ailleurs il n'avait le
portefeuille que provisoirement. La seconde mesure est relative à
l'envoi de commissaires aux armées, pour y ranimer le courage
des-soldats et les éclairer. La troisième regarde la formation d'un
noyau d'armée à Péronne, avec les recrues et- les soldats qui ont
abandonné l'armée de Dumouriez. La quatrième a pour objet de donner une
marque définitive à vos commissaires. Tous les membres de cette
Assemblée qui ont été en commission ont dit que, dans les armées, ils
étaient méconnus; qu'on les regardait plutôt comme des commis, que comme
des représentants du peuple. Je vous propose de leur donner une écharpe
en ceinture, avec une frange jaune; ils pourront porter cette décoration
à cheval comme à pied. La cinquième est relative à la
Voici du reste le projet de décret que j'ai reçu mission de vous présenter :
« La Convention nationale, après avoir entendu le rapport du comité de défense générale décrète :
« Art- 1er. Il sera procédé dans le jour, par
appel nominal, à l'élection du nouveau ministre de la guerre.
« Art. 2. Il y aura près les armées du Nord et des Ardennes six commissaires pris dans le sein de la Convention nationale, qui s'occupe^-ront d'abord d'établir les communications les plus promptes entre les diverses parties de ces armées, d'y faire publier la proclamation de la Convention nationale, et d'y maintenir les principes qui les ont toujours animés pour la défense de la République.
« Art. 3.i Les commissaires sont : Carnot, Gasparin, Briez, Duhem, Roux-Fazillac, Du-quesnoy, Du Bois Du Bais et Delbrel.
« Art. 4. Deux...... se rendront à Valenciennes, d'où ils se porteront sur tous les points où ils jugeront leur présence nécessaire.
« Art. 5. Trois......se rendront à Lille, où ils
se joindront à Carnot, et d'où ils se transporteront partout où besoin sera. Deux d'entre eux s'arrêteront à Douai, pendant le temps nécessaire pour y prendre .toutes les mesures qu'exige la défense de cette place.
Art. 6. Deux autres commissaires..... se
rendront à Péronne, pour y former un noyau d'armée, tant de recrues que des soldats qui se sont séparés des armées par la perfidie de Dumouriez. Les commissaires sont...; le conseil exécutif provisoire enverra à cet effet, à Péronne, sur-le-champ, deux commissaires des guerres et deux officiers de l'état-major.
« Art. 7. Les commissaires seront investis des mêmes pouvoirs que ceux qui ont été précédemment envoyés; ils sont autorisés à se diviser, délibérer et agir au nombre de deux.
(( Art. 8. En attendant qu'un costume soit décrété les commissaires porteront, comme marque distinctive, une écharpe en ceinture, avec une frange jaune, qu'ils pourront mettre à cheval comme à pied.
« Art. 9. Les commissaires seront égaleiûent chargés de la distribution des bulletins et autres écrits et adresses dont la Convention aura décrété l'envoi aux armées, sous le couvert et par l'entremise des commissaires. Les commissaires porteront le nom de commissaires de la Convention nationale à...
« Art. 10. La Convention approuve la nomination faite par le conseil exécutif provisoire du général Dampierre pour commander en chef les armées du Nord et des Ardennes.
« Art 11. Il sera formé sans délai une armée de 40,000 hommes, qui sera divisée sur les points qui devront couvrir toutes les rivières navigables avec Paris.
« Le comité de défense générale, réuni au comité militaire, présentera demain le mode d'exécution, qui indiquera les points où seront campés les 40,000 hommes qui seront spécialement destinés à couvrir Paris. »
, rapporteur, soumet à la discussion les articles 1 à 7, qui sont adoptés sans modifications, puis l'article 8, qui est ainsi conçu :
( En attendant qu'un costume soit décrété, les commissaires porteront, comme marque distinctive, une écharpe en ceinture avec une frange jaune, qu'ils pourront mettre à cheval comme à pied. »
J'estime que ces insignes ne sont pas suffisants et je demande que David soit chargé de présenter un costume pour les commissaires de la Convention nationale.
Nous allons prendre une nouvelle salle, il faut y changer notre caractère, et ce qui peut y contribuer, c'est le changement de notre costume. Je voudrais que la couleur seule d'une frange indiquât les fonctions; je n'approuve pas, pour des républicains, les cordons, les distinctions décoratives.....
Finissons vite la toilette de nos commissaires.
Ajournez après qu'on aura sauvé la patrie.
Eh bien, voici un costume : un sabre en demi-espadon pendu à, un baudrier de cuir noir placé en baudrier, par-dessus l'habit, une écharpe en ceinture; sur la tête un chapeau rond, surmonté de trois plumes aux trois couleurs nationales : la rouge sera la plus haute.
(La Convention adopte le costume proposé par David.)
, rapporteur, soumet à la discussion l'article 9, qui porte :
« Les commissaires seront également chargés de la distribution des bulletins et autres écrits et adresses dont la Convention aura décrété l'envoi aux armées, sous le couvert et par l'entremise des commissaires.
« Les commissaires porteront le noiq de commissaires de la Convention nationale. >>
Le mot commissaire est trop commun; il y a commissaire 4es guerres, commissaire ordonnateur : ce nom n'en impose pas assez. Je propose de substituer cette dénomination : Délégué du peuple.
Moi, je demande qu'ils ne portent d'autre nom que celui que leur donne leur qualité, c'est-à-dire qu'ils'soient appelés représentants du peuple.
Plusieurs membres : Appuyé, appuyé !
(La Convention adopte l'article 9 du projet, avec l'amendement de Thuriot;)
, rapporteur, soumet à la discussion les articles 10 et 11 qui sont adoptés sans modifications.
Suit le texte définitif du décret rendu (1) :
Art. 1er.
« Il sera procédé dans le jour, par appel nominal, à l'élection d'un nouveau ministre de la guerre.
Art. 2.
« Il y aura près les armées du Nord et des Ardennes, huit commissaires pris dans le sein de la Convention nationale, qui s'occuperont d'abord d'établir les communications les plus promptes entre les diverses parties de ces armées, d'y faire publier les proclamations de la Convention nationale, et d'y maintenir les principes qui les ont toujours animés pour la défense de la République.
Art. 3.
« Ces commissaires sont : Carnot, Gasparin, Briez, Duhem, Roux-Fazillac, Dequesnoy, Du Bois Du Bais et Delbrel.
Art. 4.
Deux.....se rendront à Valenciennes, d'où ils se porteront sur tous les points où ils jugeront leur présence nécessaire.
Art. 6.
Trois....... se rendront à Lille, où ils se joindront à Carnot, et d'où ils se transporteront partout où besoin sera. Deux d'entre eux s'arrêteront à Douai pendant le temps nécessaire pour y prendre toutes les mesures nécessaires qu'exige la défense de cette place.
Art. 6.
« Deux autres commissaires.......se rendront à Péronne pour y former un noyau d'armée, tant des recrues que des soldats qui se sent séparés des armées par la perfidie de Dumonriez. Le conseil exécutif provisoire enverra à cet effet à Péronne, sur-le-champ, deux commissaires des guerres et deux officiers de l'état-major.
Art. 7.
( Ces commissaires seront investis des mêmes pouvoirs que ceux qui ont été précédemment envoyés; ils fcont autorisés à se diviser, délibérer et agir an nombre de deux.
Art. 8.
« En attendant qu'un costume soit décrété pour la représentation nationale, tous les commissaires de la Convention porteront un sabre eu demi-espadon pendu à un baudrier de cuir noir, placé en baudrier, par-dessus l'habit, une écnarpe en ceinture ; sur la» tête un chapeau rond, surmonté de trois plumes aux trois couleurs nationales : la rouge sera la plus haute.
Art. 9.
Les commissaires seront également chargés de la distribution des Bulletins et autres écrits et adresses dont la Convention aura décrété
l'envoi au? armées ; en conséquence, les Bulletins seront dorénavant adressés aux armées sous le couvert et par l'entremise des commissaires.
( Les commissaires porteront désormais le nom des représentants de la nation, députés par la Convention nationale, à.....
Art. 10.
« La Convention nationale approuve la nomination faite par le Conseil exécutif provisoire, du général Dampierre, pour commander en chef les armées du Nom et des Ardennes.
Art. 11.
« Il sera formé, sans délai, une armée de 40,000 hommes, qui sera divisée sur les points qui devront couvrir toutes les rivières navigables avec Paris.
« Le comité de défense générale, réuni au comité militaire, présentera demain le inode d'exécution, et indiquera les points où seront campés lep 40,000 homines qui seront spécialement destinés à couvrir Paris. »
Un membre demande qu'on change l'uniforme des officiers généraux (J).
(La Convention nationale décrète que l'uniforme des officiers généraux de la République française sera l'uniforme national, et elle renvoie à son comité militaire pour lui proposer les signes qu'il croira nécessaires pour faire reconnaître son grade.)
, secrétaire, donne lecture d'une adresse des administrateurs du département du Pas-de-Calais aux citoyens de ce département, qui est ainsi conçue (2) :
Concitoyens,
Vous n'apprendrez pas sans horreur que la République est attaquée par celui que vous regardiez comme son défenseur ; il vous a séduit longtemps par ses qualités brillantes, pour vous porter plus sûrement les coups qu'il vous destinait ; et plus vous l'avez cru digne de votre confiance, plus vous allez être indigné lorsque la noirceur de son âme et sa profonde ambition se développeront à vos yeux.
Dites-le-nous, citoyens, quel sentiment vous inspirerait celui qui yiendrait vous proposer de perdre tout le fruit d'une révolution que vous avez achetée par tant de travaux ; qui voudrait vous faire porter de nouveaux les fers que vous avez brisés ; qui relèverait ce trône que vous avez renversé ; qui y ferait asseoir un homme pour être encore votre maître et pour que vous soyez ses esclaves ; qui anéantirait cette représentation nationale, votre centre et votre point de réunion ; qui avilirait vos représentants ; qui oserait porter sur eux une main sacrilège, et blesser, par le plus sanglant outrage, la majesté nationale? ah ! sans doute vous le regarderiez comme le plus perfide des hommes ; eh bien ! oe traître, c'est dumouriez.
Yous frémissez : oui, e'est lui, sa rage se
Ne voyez-vous pas comme cette trame s'est ourdie contre vous? ne voyez-vous pas qu'il fallait laisser abattre et exténuer cette armée, jadis victorieuse, pour lui faire penser qu'elle ne pouvait échapper à ses revers que par un régime despotique, "et par le gouvernement d'un seul ?ne voyez-vous pas qu'il fallait laisser accoutumer cette même armée à l'indiscipline, pour lui ôter l'estime et l'affection de ses nouveaux frères, afin que cette estime et cette affeo-tion se portassent tout entier sur le chef qui avait l'air de chercher un remède au mal, sans jamais donner à ce remède l'activité qui aurait détruit ce mal? et où vous allez reconnaître toute son astuce, c'est lorsque ce même homme, qui se nomme déjà le libérateur de là France entière, vous annonce que bien loin d'aspirer à la dictature, il s'engage à quitter toute fonction publique aussitôt après qu'il aura sauyé sa patrie. Tel fut toujours,le langage des ambitieux ; jamais ils ne sont rien pour eux-mêmes, ces hommes qui sont égoïstes de sang-froid et par réflexion ; ils n'ignorent pas le pouvoir qu'a sur une armée victorieuse le ehef qui lui a frayé le chemin de la gloire ; il sait que pîus alors ce chef montre de répugnance pour la récompense qu'on lui offre, plus on redouble d'efforts pour la lui faire accepter, et qu'il finit toujours par oéder avec de faux gémissements, et recevoir le prix que ses désirs effrénés dévoraient depuis si longtemps.
Yoilà, concitoyens, l'homme qui fut peut-être longtemps votre idole, et que vous aurez sans doute la sagesse d'apprécier ; vous le con-naissz maintenant tout entier, jugez s'il mérite votre estime et votre confiance : renoncez donc à tout sentiment qui lui serait favorable ; ralliez-vous autour de vos vrais amis, de vos administrateurs, de vos représentants ; songez que vous êtes le seul peuple de l'univers qui ne soit pas asservi ; sentez votre dignité, employez tous vos efforts pour défendre la République, qui court les plus grands dangers, mais qui peut encore être sauvée si vous écoutez la voix de toutes les autorités constituées, de tous
les chefs et commandants militaires qui se sont réunis pour vous parler le seul langage qui convient à dés républicains et à des hommes libres.
Fait en séance des corps administratifs, municipaux, chefs et commandants militaires réunis à Arras, le 3 avril 1793, Fan II de la République.
Signé : Galand.
(La Convention décrète la mention honorable, l'insertion au Bulletin, l'impression, l'envoi aux armées et aux corps administratifs et la distribution aux membres de la Convention.)
Le même secrétaire donne lecture d'une lettre du général Gustine, datée dé Newstadt, le 1er avril 1793, qui est ainsi conçue (1) :
« Citoyen Président,
« J^avais espéré, même après la perte du combat près de Bingen, dans lequel le général Newinger a été fait prisonnier par la lâcheté des grenadiers qui avaient abandonné le poste qu'ils devaient défendre; de trouver près d'Alzey une position où je pusse m'arrêter? et de cette position combattre les ennemis. L'inspection du terrain m'apprit bientôt qu'il fallait me retirer jusqu'auprès de Worms, où une position en avant de cette ville me mettait en mesure de pouvoir réunir mes forces et d'y attendre l'ennemi, dans la supposition où il voudrait -pénétrer plus avant ; mais pour que ce plan pût avoir son effet, il fallait être assuré de tenir le revers des Vosges, et que le corps qui était dans le pays des Deux-Ponts fût assez fort pour occuper la position de Fran-kenstein : jamais l'on n'a voulu composer ce corps de manière à pouvoir occuper cette position. Il ne me restait donc plus qu'une position près de Franckendall à occuper, en tenant la gorge de Turkeim à la tête dés bois, en arrière d'Hochspire ; cette dernière position, pour laquelle la nature a tout fait, pouvait être, avec peu de peine, rendue inexpugnable, si elle était occupée par le corps aux ordres du général d'Estourmel.
« Mais quel a été mon étonnement, citoyen Président, lorsque j'ai appris
par un de mes aides de camp, que j'avais envoyé au général d'Estourmel
pour lui indiquer ces différentes positions, et les moyens de s'y rendre
inaccessibles à nos ennemis, que ce général avait reçu un ordre précis
d'évacuer Kaiserslautern et le pays des Deux-Ponts, et ne l'a communiqué
a mon aide de camp que sur les instances réitérées que celui-ci lui fit
de marcher en avant, et en repoussant les reproches multipliés qui lui
furent faite à ce sujet, sur la précision de l'ordre qu'il en avait reçu
de la part du général Ligneville. Depuis, ce général m'a lui-même
adressé copie de la lettre du général ministre Beurnonville, en date du
26 mars, par laquelle il lui est enjoint de faire rentrer la division du
général d'Estournel, destinée à défendre le revers des Vosges, D'après
cette disposition, je devais nécessairement ne plus songer qu'à la
retraite qui devait s'exécuter devant un ennemi qui avait sur moi la
supé-
« C'est dans cette cruelle position qu'il fallait résoudre un parti; sur-le-champ j'ai ordonné l'évacuation de l'artillerie que j'avais dans les forts et batteries à l'embouchure du Necker, et près de Manheim; sur-le-champs cette évacuation a été effectuée, et l'artillerie est rentrée dans Landau. Mais quelques pressants que devinssent les moments, je voulais attendre l'arrivée d'un convoi d'artillerie qui devait venir de Mayence, escorté par quelques bataillons de grenadiers; et le 14e régiment de cavalerie, auxquels devait se joindre, en passant à Oppenheim, un escadron du 10® régiment de chasseurs à cheval et 6 bataillons d'infanterie, que j'avais ordonné au général Blou d'y réunir pour s'amener sur Worms. .« Dès le 28, le général Houchard, en commençant la retraite, avait été suivi par quelques troupes légères de nos ennemis; quelques coups de canon avaient suffi pour les dissiper.
« Le vendredi 29, l'ennemi se porta plus en force sur lui ; une position avantageuse qu'il occupait en avant d'Alzey, et l'effet de l'artillerie volante, sur les escadrons qui se présentèrent, continrent ces nombreuses troupes légères, et les forcèrent à le respecter.
« Samedi 30, le général Houchard n'occupait pas une position moins imposante; elle était d'autant plus nécessaire à soutenir, qu'une fois dépassée, nos ennemis voyaient le vallon du Rhin-Turckeim, et tout ce qui arrivait sur la chaussée du Rhin* en conséquence, j'avais recommandé à ce général de la soutenir avec la plus grande vigueur, afin d'y arrêter nos ennemis. Effectivement, dans la matinée du 30, il avait soutenu contre eux une attaque très vive, dans laquelle il avait eu à combattre 10 escadrons d'Eben et cinq de Gootz, avec le corps franc du major Sakelly, le tout aux ordres du général d'Eben : ils les avait repoussés avec perte, et me fit annoncer l'heureux succès du combat. Jusqu'à cette époque, ayant à réaliser beaucoup de dispositions, auxquelles me forçait l'abandon des gorges et du revers des Vosges, effectué par l'ordre de Beurnonville, je fus forcé de retarder jusqu'à deux heures le moment d'aller le rejoindre et juger de la position des ennemis. Je pressentais dès lors les nombreuses forces qui allaient fondre sur moi : 66,000 Hessois et Prussiens doivent se réunir à 26,000 Autrichiens, dès l'instant où j'aurais reculé derrière la Spire-Bach. Cependant j'attendais toujours l'arrivée de ce convoi que j'avais demandé à Mayence. Je calculais que mon ordre y étant arrivé le vendredi à sept heures du soir, qu'il y était libellé d'une manière très pressante la nécessité d'en accélérer l'envoi, je- n'avais à tenir dans ma position qu'un nombre d'heures faciles à calculer. Cependant quoique la communication
entre Mayence et Worms n'ait été rompue que le samedi 30, à quatre heures de l'après-midi, non seulement le convoi n'est point arrivé, mais même n'est jamais sorti de Mayence. On aura sans doute voulu différer son départ de quelques heures, sans réfléchir que la plus grande faute que l'on puisse commettre à la guerre, c'est de perdre du temps; et le temps écoulé, on aura jugé impossible de le mettre en marche. Le fait est qu'il n'est pas sorti de Mayence.
« Roulant ces réflexions dans ma pensée, les ordres donnés, je me décidai à me porter au corps placé sur les hauteurs de Niderflesheim ; en y arrivant, j'allai en avant, et je reconnus que les troupes qui avaient combattu le matin étaient retirées jusque sur le contrefort de la montagne sur laquelle est la tour Alzey. On ne tarda pas à venir m'avertir qu'il paraissait une grande colonne d'ennemis vis-à-vis de la montagne d'Oberslesheim,d'où l'on pouvait découvrir le vallon de Rhin-Turckeim, et je m'aperçus bientôt aussi que cette colonne se dirigeait de manière à venir s'emparer d'une hauteur égale à celle qu'occupait le général Houchard, et qui se trouvait en arrière du flanc droit de l'avant-garde. Je n'hésitai donc pas à me porter avec toute l'artillerie volante sur la montagne d'Oberlesheim que voulaient gagner nos ennemis. Arrivé à sa sommité, j'ap-nerçus la colonne, dont les dix escadrons de Wolfrath avaient la tête, qui se dirigeait par le penchant onposé sur le sommet de la montagne; sur-le-champ je fis mettre l'artillerie en batterie, et commencer son feu, en même temps que je formais le 8e régiment de chasseurs à cheval en bataille : l'effet de l'artillerie sur les hussards de Wolfrath fut terrible; ils prirent leur direction à mi-pente pour s'étendre et déborder notre droite; mais comme j'avais le sommet de la montagne, et que par conséquent mon cercle était moins long à parcourir, ils n'v purent réussir. La brigade du 9e régiment de cavalerie à laquelle j'avais fait donner l'ordre de me suivre, arrivait; je la portai diagonalement sur If» r>oint ou voulait se former le régiment de Wolfrath; une fois arrivé à la hauteur, elle se mit en bataille, chargea et fit plier ce régiment avec perte. De nouvelles troupes arrivaient, et pouvaient r»rendre à revers la brigade du 9e : alors ie lui envoyai l'ordre de venir se mettre à la hauteur du 8e régiment de chasseurs. Pendant ce temps l'artillerie volante s'exerçait avec un prodiguenx effet sur cinq escadrons des dragons de Bareith, et cinq escadrons de Kal-kreuth.
« Cependant l'infanterie ennemie arrivait; la colonne commençait à gravir la montagne dont la brigade du 13e régiment d'infanterie avait atteint la sommité. .Te lui ordonnai de se former rapidement èt d'attaquer la tête de cette colonne qui ne pouvait lui présenter, quoique plus nombreuse, qu'un front égal au sien, puisqu'elle était contenue entre un escarpement et un ravin. Cette brigade marcha, avec une valeur extrême, et le feu de son artillerie faisait un ravarre prodigieux sur les ennemis qu'elle prenait à revers. Cependant ils continuaient à mettre une opiniâtreté extrême à faire un très grand feu de plus de trente pièces de canon réunies dans le mê^ne point. La brigade du 13e régiment se décida à la charge,
qu'elle a exécutée à la baïonnette avec un courage que le succès a couronné. (Applaudissements.) Les ennemis se replièrent sur un des contreforts de la montagne, d'où ils faisaient encore, quoique avec désavantage, un feu d'artillerie très soutenu. Je fis alors avancer la cavalerie pour empêcher le 13e régiment d'être pris en flanc. Je la plaçai derrière un pli de terrain, et son flanc appuyé à un petit bois qui la dérobait au feu des ennemis, et je portai, à l'aide de l'appui qu'elle donnait alors à l'infanterie, le 7e bataillon d'infanterie légère et le bataillon des chasseurs de ligne, dans une position d'où ils prenaient totalement à revers la cavalerie et l'infanterie prussienne qui déjà avaient beaucoup souffert. Dans moins de dix minutes, l'artillerie de cette infanterie, qui alors avait un feu rasant, tira à*mitraille, joncha la terre -de morts, et força les Prussiens à la retraite qu'ils exécutèrent dans le plus grand désordre.
« La nuit arrivait, l'arrière-garde était excédée de fatigue, et j'allais aller à l'appui du général Houchard que j'avais laissé à la gauche : elle avait été forcée de se replier; mais renforcée, elle reprit bientôt le terrain qu'elle avait perdu. C'est dans cette position que l'arrière-garde est restée jusqu'à minuit sur le champ de bataille qu'avaient acquis par leur valeur les troupes de la République. Je ne puis assez donner d'éloges à ces braves soldats et au colonel d'Arlandes du 13e régiment d'infanterie, et au colonel Loubat du 90 de cavalerie. Ce dernier a été blessé dans la charge. Notre perte a été peu forte. Les Prussiens ont laissé sur la place plus de 600 chevaux et un grand nombre de morts. Ce combat a duré deux heures. Dans la journée du 31, aucun ennemi n'a paru devant nous. Aujourd'hui l'arrière-garde a aperçu quelques hussards.
( Les Hessois qui avaient, dans la journée du 30, des patrouilles jusque près d'Ausweil-ler, et dont on disait l'armée à Kaiserslautern, ne se font plus voir. Dans l'instant où j'avais appris l'abandon du revers des Vosges, j'avais de suite fait occuper la position de Franc-kenstein, situé à là réunion de la gorge de Ramstadt et de Turkeim, et les patrouilles qu'ont poussées les troupes que j'y ai envoyées, m'ont confirmé la retraite des ennemis. Je viens de poser dans les gorges d'Ausweiller un corps aux ordres du général Fulet. Leurs projets étaient vastes, et l'abandon du revers des Vosges les avait très bien servis : ils comptaient, en passant par Ausweiller, me fermer le retour dans les départements du Rhin, pendant que les Prussiens me passeraient de front, et seraient incessamment joints par les Autrichiens. Ils auraient ainsi vérifié la. prédiction que depuis si longtemps a faite Beur-nonville sur ma situation. Mais le succès du combat d'Oberslesheim les a fait évanouir.
( 12,000 Saxons, 4.000 Hessois de Darmstadt, sont restés devant la tête du pont de Cassel, retranchés sur les hauteurs d'Hockeim. Je suppose que les Prussiens laisseront aussi environ 15,000 hommes pour observer la garnison de Mayence, ce qui fera 31,000 hommes emplovés à cette opération. Il est resté une armée dans Mayence : car 21 k 20,000 hommes sont une armée. Je n'en avais destiné que 15,000, mais ces 7,000 hommes d'augmentation proviennent de l'escorte du convoi que j'y avais demandé, et
qui n'en sont point sortis. Cette garnison est poUvuë pour un an; j'ai laissé des généraux expérimentés poUr y commander; des hommes actifs et intrépides les sëdonaënt; et de ce point ils pëUvënt porter les coups les plus funestes à nos ennemis, qui, dans Six mois, se trouveront trop heureux pour obtenir la libre navigation du Rhin, qui leur est si nécessaire, de leur accorder la plus brillàhtë capitulation, quand même, d'ici à cé temps, la République n'aurait pas fait dès efforts pourieS dégager. La vilie même ne sera ni Canomiéè, ni bombardée; car Cette armée pouvant perdre une position superbe en avant dé la placé, et qui en a les ouvrages pour âpptii, déboucherait de nuit sur les batteriës ennemies et les détruirait. Cette force ën emploie une bien plus grande aux ennemis, le pays qui leur a été cédé par moi est ruiné; quant aux subsistances, ils n ën pourraient tirer que du pays que je voulais qu'occupât l'armée de la Moselle, ët que les ordres du général ministre Beurnon-ville (obtenus selon là lettre du pouvoir exécutif) lui ont fait céder.
« L'armée oCciipë une position en avant dé LàndàU; ëllë à des subsistances, et elle en aurait ëncotë beaucoup plus, si mes ordres avàietit été exécutés; on y aurait versé celles qtië j'ai été obligé dé détruire â Worms et à Strakëhdall : car, malgré mes ordres réitérés dé n'avoir que dé très faibles magasins dans éë§ villes, et qtioique j'éusëë déjà fait étacuer dëui fois ëèux qui avaient été formés, j'ën ai encore tfoùvé, lé 30, de très Considérables ën foin, pàillé et avoifië, que j'ai été obligé de faire brûler radicalement. Cet abus n'a eu lieu qUë parce qu'il m'a été impossible d'avoir justice dé Cërf-Bérg, dont jê connaissais depuis longtèmps lës vastes ët perfides projets, de tenir prêts dés magasins poUr nos ennemis sur les points où ils pourraient en avoir besoin, dans le cas où ils réussiraient à passer le Rhin. J'étais alors éloigné de croire que le suôcès des événements qui pouvaient les mettre dans leur main, serait l'abandon du révers et des défilés des Yosgës. Il y avait 8,000 sacs de farine de plus, que je n'ën avais ordonné d'y tenir; j'ai été forcé) en partant de faire jeter à l'eau les farines, et de brûler radicalement les magasins dé fourrages.
« Cet exposé, et tous les comptes que j'ai rendus à Vog comités, prouveront à la nation entière que l'on ne voulait pas les succès de l'armée qui était en Allemagne. 8a position eût été cependant le salut des départements des Haut et Bas-Rhin, de la Mëurthe, de la Meuse et de la Moselle; ainsi je serais un mauvais citoyen, et ce ne pourrait être désormais que par une folle ambitidn que je pourrais vouloir en conserver lé commandement ; je le remets donc aux représentants dU peuple : je fie renonce pas à servir mon pays, et à travailler à conquérir la liberté* mais ce sera comme soldat. BeurfionVille peut avoir dès talents militaires^ mais je le déclare, il est biën loin d'avoir les vertus d'un républicain ; et; pour le bonheur de ma patrie* je lui en souhaite au moins les opinions; Je ne le juge point* la France et la postérité prononceront sur lui.
« J'enVoie cette lettré aUxdéj>artements dont la conservation m'était confiée ; je VOUs prié d'en donner connaissance aux représentante du peuple français ; et immédiatement après jë la
rendrai publique. Je prie la Convention de vouloir bien recevoir l'assurance de mbn attachement à ses lois et à la République. »
Plusieurs membres : Non ! non ! Il ne faut pas recevoir sa démission.
Le secrétaire continuant la lecture :
« J'attendrai mon successeur avec impa^ tience, mais sans diminution dé zélé dans le commandement qui m'a été confié.
« Signé : Le citoyen français Custine.
« P. S. On vient de me donner des. généraux; mais au moment du combat, je n'ai point encore d'état-major. »
(1). Il ne faut pas susprendre là permanence, avant d'avoir nommé un mi^ nistre de la gUerre. Yous ne pouvez doutër que BeurnbUville n'ait fait Choix de très mauvais adjoints; il y a dans ses bureaux un nommé Blanchard que j'ai VU dans l'Assemblée législative, constamment attaché au char des Vau-blanë, été,
Citoyens, si îes efforts Courageux de Custine n'ont pas été secondés, cé. n'a pas été notre faute ni celle de ce général. Nous avons toujours sonné le tocsin contre ce ministre et toujours vainement. Je demande que les adjpints de Beurnonvilîe soient mis en état d'arrestation; ils pourront nous donner des renseignements très importants.
Il y a dans la lettré de Custine un point qui mérite de fixer de suité l'attention de l'Assemblée; c'est sa démission. D'après lës déclarations des commissaires envoyés dans les départements du Rhin, il paraît qUe Custine mérite la confiance nationale. Je demandé que la Convention n'acbepte point sa démission, ët lui ordonne de rester à soh poste. (Tifs applaudissements.)
Les mêmes agitateurs qUi hier ont calomnié la commune de Strasbourg, ont demandé que l'on ôtât le commandement à Custine; on ne pourrait rendre un plus grand service aux Prussiens. J'appuie la proposition de Fonfrède.
(La Convention nationale, après avoir entendu la lettre du général Custine du 1er avril, déclare qu'elle refuse d'accepter sa démission et qu'il a son estime et sa confiance : la Convention nationale ordonne au général Custine de rester à la tête de l'armée avec laquelle il a si glorieusement servi la République) (2).
l'uîiîê (3). Si Custine a eu delà revers, éë n'est que par la trahison dë Beurnonvilîe, dont Ligneville et d'Estourmel ont été les perfides agënts. Je demande qué la Convention charge le conseil exécutif provisoire de fairë mettre leS généraux d'EstoUrmêl et Ligneville en état d'ârreStatidn et de faire mettre le sëellé sur leurs papiërs.
(La Convention décrète cette proposition.)
(1). La lettre de Custinë flbus signale également l'impéritie ou la mauvaise foi dû fournisseur Oerf-Befg, qui a dissimulé à Stra-kendall et à Worms des quantités considérables de paille ét d'avoine, dont l'armée aurait tiré un si grand profit et qu'on a été oblige de brûler ensuite pour ne pas les voir tomber entre les mains de F ennemi .; je demande qû'il soit mis en état d'arrestation.
, (La Convention décrète qUe le citoyen Oerf-Berg, fils, fournisseur dè l'armée, sera mis en état d'arrestation (2).
(3)i Je ctois savoir que la nouvelle des coups de sabre dontiés à Beurnonville, n'est autre chose qu'une farce ridicule, qu'on veut jouer devant la Convention nationale pour la tromper sur la conduite de ce ministre. Je propose de faire arrêter l'aide de camp qui est Verni Cê matin apporter cette prétendue nouvelle et qui n est peut-être qu'Un espion de Dtt-mouriez (4).
Un membre s'y oppose et atteste que cèt aide de camp est Un excellent patriote.
(La Convention passe à l'ordre du jour.)
Il va être procédé à l'appel nominal pour la nomination d'un ministre de la guerre à la place de Beurnonville.
Un des seàrétaires ptocèdô à Cèt appel et en fait connaître le résultat.
Le citoyen BoîtchottE, commandant temporaire à Gdmbrai, réunit l'unanimité des suffrages; il est proclamé ministre de la guerrë(S).
(La séance est suspendue à cinq heUres et deinie du soir et prorogée jusqu'à hUit heures.)
Séance permanente du
présidence de Sréard, ancien président-.
La séance est reprise à huit heures quarante minutes du soir.
, au nom du comité de la guerre et êt de là marine réunis, fait un rapport ët pré-sehtë Un projet de décret (6) sur lès sècOurs à accorder audc familles dès militaires dé toutes les armées et des marins employés au Service de là République ; lé projët dè décret est ainsi COnçU :
La Convention nationalé, après avoir en-
. « Art. 1er. Il sera accordé des secoUrs aux
familles des militaires de toutes armes, servant dans les armées, et aux
familles des marins, ouvriers marins, canonniers et soldats de marine,
en activité de service, sur les vaisseaux et autres bâtiments de la
République.
« Art- 2. Les individus de ces familles, qui auront droit à ces secours, sont les pères, les mères, les épouses, les enfants, les frères et sœurs orphelins, qui seraient reconnus et jugés par les sections ou municipalités, n'avoir pour tout moyen de subsister, que le produit du travail desdits militaires ou marins.
« Art; 3; Les pères, mères, épouses* frères.et soeurs* de tous ceux qui sont partis en remplacement, n'y auront aucune part.
« Art. 4. Ces Secours seront dus, savoir :
1° A dater du 26 novembre dernier, à tous ceux qui devaient en obtenir aux termes de ladite loi, et en auraient rempli les formalités ;
2° a compter de la date du présent décret, aux familles de tous autres militaires, ou marins actuellement en activité de service ;
( 3d a toûtës les familles dës militaires ou marins qui partiront à l'avenir, à compte^ du jour dë ce départ-
« Ces secoUrfe êesseroUt du moment que lë inilitaifê oU lë marin sera reUtré dans son domicile, ou que lé délai pour s'y rendrë sëra eipifé.
« Art.5 Si les citoyens, en considération desquels les secours auront été accordés, viennent à périr dans les combats au service de la République, les individus de leur famille se-courus, i'êëevf'ôht, à titré de gratification, une soihlfië Unê fois payée, ët égale à là valeur de quatre annéës, du Secours dont ils jouissaient. Néanmoins, lés individus qUi, à raisbn de la mort dU Même éitoyën, auraient droit d'ailleurs, en vertu d'une autre loi, à d'aUtres pensions ou gratifications de l'Etat, ne pourront en même temps jouir du bénéfice de la présente loi.
« Art.6 Il sëra Ouvert, dans dhaque municipalité, ët dans chaqUë sëction, des villes di-viiséës en sections, pendant Un mois, à coinptèr du jour de la publication du présent décret, un registre; Où iront sé faife inscrire tous cèUx qui croiront aVoir des droits à ces Secours.
« Art. 7. Ceux qui se présenteront pour se faire inscrire sur le registre des secours, seront, tenus de remettre, sur papier libre, au greffe de leur municipalité ou section, l'extrait signé de l'acte légal qui constate l'époque de lëUï naissance.
« Ils devront remettre encore l'extrait dûment signé de l'inscription ou enrôlement des militaires ou marins, en considération desquels ils réclament dës secoUrs.
« Art. 8. A l'expiration du mois, le registre sera clos. Chaque municipalité ou section en fera le dépouillement, ët formera un rôle de ceux qu'elle jugera devoir obtenir des secours, et réunir pour cela des conditions requisés par le présent décret ; ellé portera en marge,
article par article, les sommes qu'elle croira être dues à chacun, d'après les règles établies ci-après.
« Quant à ceux qui n'auront pas paru devoir obtenir des secours, il en sera tenu note sur un registre séparé, avec mention sommaire des motifs sur lesquels leur exclusion sera fondée.
« Art. 9. Après avoir certifié au bas desdits rôles, qu'il est de leur parfaite connaissance que les personnes qui y sont portées, réunissent les conditions, et ont rempli les formalités prescrites par le présent décret, les municipalités et sections feront parvenir, sans délai, lesdits rôles, avec les pièces justificatives, au directoire du district.
« Art. 10. Les directoires de district seront tenus, dans la huitaine de la réception desdits rôles de les examiner et de faire passer avec leur avis, aux directoires de département, qui, dans le même délai, les arrêteront et les enverront au ministre de l'intérieur, avec toutes les pièces justificatives.
« Art. 11. Le ministre de l'intérieur après les avoir vérifiés et signés, les fera parvenir, sans retard, par la voie des corps administratifs, à chaque municipalité ou section, avec les secours qui seront dus et échus à l'époque de la signature.
« Art. 12. Ces secours seront payables à l'avenir par trimestre, mais non par avance ; la date des trimestres sera comptée du jour de la signature des rôles, par le ministre de l'intérieur qui sous sa responsabilité, sera, en conséquence, tenu de faire passer, avant l'échéance, à chaque municipalité ou section, par la voie des corps administratifs, les fonds qui doivent revenir à ces sections ou municipalités.
« Art. 13. Le paiement sera fait par chaque municipalité ou section, à chaque individu porté dans le rôle, ou à ceux qui le représentent légalement, comme père, mère et tuteurs, au fur et mesure qu'ils se présenteront après l'échéance.
Art. 14. Les municipalités et sections ne pourront payer le trimestre échu aux individus portés au rôle ou à leurs représentants légaux, que sur le vu d'un certificat signé des conseils d'administration des régiments ou bataillons qui constatera que le militaire est effectivement présent au corps, ou sur le vu d'un certificat des officiers des classes et d'administration de la marine, portant que le marin est réellement en activité de service.
( Lesdits certificats pourront être expédiés sur papier libre, ils devront être renouvelés à chaque trimestre, et resteront annexés au rôle, afin de justifier de la validité du paiement.
« Art. 15. Il sera fait des rôles de paiement en double dans lesquels, article par article, il devra être fait mention ;
« 1° De la date du paiement.
« 2° Des certificats d'après lesquels le paiement aura été fait et de leur date.
« 3° De la somme payée.
« 4° De celui qui l'aura reçue.
« 5° De la signature, s'il a su ou n'a pas bu signer.
« L'un de ces rôles sera envoyé chaque tri-
mestre, au ministre de l'intérieur, après avoir été certifié par les officiers municipaux ou par les président et secrétaires des sections.
« Art. 16. Les secours à fournir seront fixés pour chaque année de leur durée de la manière suivante :
« A 40 livres pour chacun des fils ou filles âgés de moins de huit ans accomplis. « A 25 livres pour chacun desdits fils ou filles, qui auraient plus de huit ans, mais qui n'auraient pas encore douze ans accomplis.
« A 60 livres pour chacun desdits fils ou filles, qui auraient plus de huit ans, mais quel que soit, en ce cas, leur âge après huit ans accomplis.
« A 60 livres pour les épouses, quel que soit leur âge.
« A 60 livres pour les pères et mères, et pour chacun d'eux, s'ils sont âgés de plus de 60 ans, ou, s'ils sont infirmes ou incapables de travailler, quel que soit leur âge.
« A 60 livres pour les mères en état de vi-duité, quel que soit leur âge.
« A 40 livres pour les frères et sœurs orphelins, âgés de moins de 8 ans accomplis.
« A 25 livres pour lesdits frères et sœurs orphelins, âgés de plus de 8 ans, mais qui n'auront pas encore 12 ans. accomplis.
« A 60 livres pour lesdits frères ou soeurs orphelins, qui, âgés de plus de 8 ans, seraient, à raison ae leurs infirmités, hors d'état de travailler.
« Art. 17. Lorsque dans l'intervalle d'un trimestre à l'autre, il sera survenu des changements au rôle de secours, les municipalités ou sections en instruiront les corps adminis-tratifs? qui les feront connaître au ministre de l'intérieur, afin que celui-ci puisse faire les retranchements convenables dans les sommes à envoyer.
« Art. 18. Si après la formation des rôles le nombre des personnes qui ont droit à ces secours venait à augmenter, leur demande serait reçue, jugée et envoyée dans les formes ci-dessus prescrites, au ministre de l'intérieur, qui, après en avoir connu la légitimité, se conformera, pour l'envoi des nouveaux fonds, aux dispositions précédentes.
(c Art. 19. Il sera mis provisoirement, par la trésorerie nationale, à la disposition du ministre de l'intérieur, une somme de trois millions pour ladite somme réunie à ce qui reste des deux millions; décrétés le 26 novembre dernier, être employee au paiement des secours accordées par la présente loi. »
(La Convention décrète l'impression de ce projet de décret et en ajourne la discussion à une séance ultérieure.)
Un aide de camp du général Dampierre est admis à la barre.
Il s'exprime ainsi (1) :
Citoyens, le général Dampierre n'a pas plutôt appris la trahison du
perfide Dumouriez, qu'il m'a dépêché aussi auprès du comité de défense
générale pour lui faire part de la
Citoyens, j'apprends en ce moment la promotion de ce brave général au commandement en chef de l'armée de Belgique. Je vous en remercie au nom de tous mes camarades ; vous pouvez être assuré qu'il se montrera toujours digne par sa bravoure, par ses talents et son civisme de la confiance que vous lui avez témoignée. (Vifs applaudissements.)
, répond au pétitionnaire et lui accorde les honneurs de la séance.
Le citoyen Bernazais, aide de camp de Dumouriez, se présente à la barre (1).
Il s'exprime ainsi :
Législateurs, je suis venu ce matin à votre barre vous déclarer toutes les trames du traître Dumouriez, ses trahisons, ses complots de détruire la Convention et de la remplacer par un gouvernement monarchique. Je croyais bien servir ma patrie et cepe^ant j'ai eu le malheur d'être calomnié dev&m vous ; on m'a désigné comme un imposteur, comme un traître. Je sais bien que dans un temps de révolution, on doit soupçonner jusqu'à la vertu même, mais on doit aussi encourager le patriote qui à donné des preuves de son dévouement et de son attachement à la patrie. Je vous prie donc, citoyens, d'examiner ma conduite, et de déclarer si je suis coupable, ou si, reconnu pour patriote, il m'est encore permis de servir mon pays. Je suis à cette heure devant vous, que celui, qui m'a accusé, m'interroge ; me voilà à votre barre, parlez, je réponds. (Applaudissements.)
(Oise).. Je demande que jusqu'aux éclaircissements ce citoyen soit gardé à vue.
Je m'oppose à une pareille motion. Comment, citoyens, je vous ai vus ce matin verser des larmes de reconnaissance au récit que vous faisait ce brave guerrier, et maintenant vous paraissez douter de sa sincérité? Par quelle fatalité la calomnie a-t-elle donc pu noircir un des plus zélés défenseurs de la liberté ? Comment se fait-il qu'ûn républicain qui, pour la servir, a passé à travers les baïonnettes et a bravé pendant vingt jours les plus grands dangers, soit aujourd'hui livré aux fers des assassins? S'il eût été un agent de la faction de Dumouriez, croyez-vous qu'il n'aurait pas profité de sa liberté pour fuir à l'étranger, au lieu de risquer, en venant au milieu de nous, les plus terribles châtiments ? Citoyens, il faut encourager de tels hommes ; il faut récompenser la vertu. Bernazais a mérité l'estime de la Convention, je demande qu'elle le déclare. (Vifs applaudissements.)
Citoyen Bernazais, la Convention vous déclare, par ma voix, que vous
Bernazais : Citoyens, je n'ai jamais éprouvé de plus douce sensation que dans ce moment. Au moment même où vous déclarez que je puis encore servir la liberté, J'apprends que le général Dampierre vient d'être promu, en vertu d'une confirmation de votre part, au comman-. dement de l'armée du Nord. Je vous assure que c'est un brave homme, un excellent patriote, populaire, fraternisant avec le soldat, sans jamais se compromettre et désiré ardemment par l'armée du Nord. C'est un bon soldat, qui ne s'occupe jamais ni de politique, ni du plan de Constitution; il ne sait que se battre et mourir pour la République. (Applaudissements. )
Il remplacera Dumouriez, il l'imitera dans ses victoires et la reconnaissance nationale dira un jour en quoi ces généraux diffèrent, (Nouveaux applaudisseinents).
Quant aux places frontières, comme je vous l'ai dit ce matin, je vous déclare, sur ma tête, qu'elles ne souffriraient pas que Dumouriez, ce perfide, vienne combattre sa patrie. Je vous "assure que pour pénétrer dans l'intérieur de la République et venir jusqu'à vous, il faudra qu'il passe sur le corps de milliers de Français, car jamais aucun n'aura la perfidie de suivre ses projets. Soyez persuadés, en ce qui me concerne, que je ne suis pas assez lâche pour venir vous en imposer à cette heure (1). (Vifs applaudissements.)
annonce que les volontaires nationaux, séduits apparemment par Dumouriez et rentrés dans Paris, y répandent déjà que Dampierre est un traître. C'est le moment, observe-t-il, d'investir ce général de toute votre confiance (2).
Un membre (3). Le citoyen Lelorrain, originaire de Reims, établi à Lisbonne, a fait parvenir à la Convention, par l'intermédiaire du citoyen Milliet, le 15 janvier dernier, un don patriotique de 1,200 livres, destiné aux habitants de Lille et Thionville. Ce don n'ayant pas été mentionné au Bulletin, je demande, pour réparer cet oubli, que la Convention décrète que cet offre sera mentionnée honorablement dans le Bulletin de demain.
(La Convention décrète cette proposition.)
Une députation de la section des Quinze-Vingts se présente à la barre (4).
Gouchon, orateur de la députation, s'exprime ainsi (5) :
« Législateurs révolutionnaires,
« Yous voyez devant vous les hommes qui ont porté les premiers coups à la
Constitution mo-
ii Yolis âfëÉ déëtété la République une et in-divisible; ¥bUs âVe2 sënti c|tië la r'dyatité serait tdUjbiirë unè êbUfëë dë ëdf-mption, d'intrigues efc dé bàësës perfidies. CëUi cjlii étaient façonnés àVèë dë tels Vidés n'bht pli së familiariser avec lté vëitlis qu'ekige là République..., ils osent ifiédiïër là réSUrrëëtidn du dëSpoiiëihe royal. Cë mâHiétti- ne èerait pas àrrivé Si l'indulgence cHmifiellë deS magistrats n'eût point épargné les ëôlispii'âtëurs...
pi Le pëUtole est las dë së traînei* dë ïéfôlu-tibâ êh dévolution, dë së rUihër ët dë se perdrë par làmbeàUx. Lê peuple est las d'étiv le jbUëfc des intrigants. Il faltt dptëi"; (}Uë lëâ rôyâli&tës sç déclarent ouvertement ët, S'illëUr est pdS-Siblô d'être frâhcë, qti'ils Së ittëèUtëfit avec nous, Nous "âgiSSbhS a décdUvëft; hdtis déclèfc-fôns à iàfâdë dit tyrârihiëidë Ërutuë quë ftous plongerons le pbighârd dans lfe èteuf dô 1 ifc-lâine qui dsëtait regretter les rois.
« Nous demandons que la Convention nationale àutorîse.la lëvée d'un corps, dë Scœvolas, et que leur chef soit pris au milieu dë nous. Le fer* le. feu, tous les moyens sont légaux pour délivrer l'univers de celui qui aspire au droit de dominer, d'appauvrir et d'égorger ses égaux.
«Il nous faut donner un èxemplë à la terre. Il falit qu'elle soit .ébranlée jusque dans ses fondements et qu'elle vomisse, non seulëmeht tous les monstres qui la dévorent, mais encore tout ce qui pourrait en entretenir l'espèce. (Vifs applaudissements. )
L'otatéUr dofiiié énstïite lëctUrë dë la délibération authentiquant les ëpMffîiâsâilreâ Auprès de la ConventioÉ. natidnàlë :
Extrait du Registre des délibérations de l'assemblée générale deè Quinze-Vingts ^ du
4 avril 1798) l'an II dé l'a République française (1)4
« Appert par procès-verbal de ce jourj
L'aSseniblée a homtaé dix commissaifësj adjoints âu ëitô^èfi Gaiichbfi., jiOur présenter une pétition SUf les circbnistancës présentés à la. Convention nationale. Lës ditbyëtts nommés sont : Castille, Déperaux, Gilet, Ducoudray, Dêtâl, Quâihbe, Làngldis, Boùet; Pignaîet et Dezouche.
ti Pôîlr ôôpie conforme à t original,
« Ce 4 avril 1793, l'an II de la République françaises
« Signé i TaIlleuRj préèidêM; YiSdEïtT,. secrétaire, a
répond à l'orateur et accorde à la députation les hdhhèUrs de la séance.
(La Convention décrète la mention hoho-raible du patriotisme des citoyens
de la section des Quinze-Vingts et renvoie lëtir demande au comité de
salut ptiblic.)
Le ciïàytn tidtiLbSrj ofatéut dé lu députation, dônlie lëëtiiïë dë l'adressé suivante (2) :
« Mandataires du pèUplë,
« Les dàhgërs de la patrie sont à leur comble; lës despotes dbàlisës a¥ëc lës traîtres et les parjurés dè l'intérieur sont parvenus, à fores d'intfigUes. à noUs conduire au bord du pré-cipicë. -Il faut sauver la chdse publique; l'infâme DumoUfiëz vient dë ndUS apprendre quel ëst leUr horrible projet; ils ne peuvent nous vaincre; ils Veulent nous effrayer; ils nous croient fatigués de combattre pour- la liberté; ils hoUS offrëht la paix; ët lë rétablissement de la royauté est là condition cjU'ilâ nou& imposent. Eh bien ! que tous les Français se ressouviennent de leurs serments, qUë lë danger ëëmftUn lëë réunissent, qu'ils expriment àVec éflërgië leur Vdldnté, qu'ils la soutiennent par '€ôu3 les ïfldyens possibles^ et les despotes et les dôhkpiïàèêUtfë rëntrërdnt dâtië 1e néânt. Quant à hdUëj vdici îio§ sentiments ï nous ne redoutons rien dë Paginée dont Dumouriez nous me-flàôe, Elle est compdséë dë Français ët ilë sdnt âds ftètëô; noUS voulions là liberté et l'égalité, ttduS vdulofijs pâf-de§SUs tout ndtrd indépen-dânee et la sëuvefaineté du -peuple; nbus ne ferons la pai± avec ncfe ennemis que quand elles seront assurées.
« Nous nê vbulbns ni foi, ni dictateur, hi pïotcdtëur; nous avons ëh horteUr toutë espèce dë poUvdif arbitraire et ndus sommes prêts à màfchèr poUï là défense de là pàtrië ët de là République, Une ët indivisible. Fàrleé ! fâitéS des lois sàges ëè sévères; qu'ëlles fassènt tomber lê glaiVë dë îâ justicë sur totit les traîtres; qu'elles indiquent à ëhàqUë citbyèn lë. poste qu'il doit occuper et nous lës exécuterons
« L'assemblée de la section du Pont-Neuf a arrêté quë. la présente .adresse sera portée à la Convëntidn nationale par l'assemblée entière.
Paris, 4 atvril 179S, l'an II de la Républiques
« Signé : CouLGNj président; URtr, èecrétairet j>
répond à l'draiëuf et accdrdë a là députation les honneurs de la séance.
(La Convention décrète la mention hono-rabiç du patriotisme des citoyens du Fdnt-NeUf| et renvoie leuf adresfee àU comité de salut publiei)
U ne députation des citoyens de la section des Sans-Culottes, composée des citpyens Bourse Duval et Gambert, se présente à la barre (3).
Le léitoijm Bourse^ OrâteUT dë là députàUorni commence par lire un arrêté
de la section qui est ainsi Conçu (4) :
Extrait du registre des délibérations.
Séance du
« Mandataires du peuple,
«La section des Sans-Culottes n'apas entendu sans frémir d'indignation la lecture de la lettre de 1*infâme Dumouriez; surtout à ces mots liberticides, il faut Un roi à lit France, la G onvention n'a plus que trois semaines à exister, ils se sont tous levés et d'une voix unanime ils ont proféré ces paroles énergiques : Ce sera donc quand le dernier des Français sera ense-v'eli sous les débris de la République. Mandataires du peuple, ne craignez rien; les Sans-Culottes se lèvent; la patrie est sauvée;
« L'assemblée susdite a arrêté que le présent serait porté à la Convention par une Réputation airtâi qu'aux 47 sections, à l'assemblée électorale et aux sociétés populaires, avec invitation d'y adhérer, afin de former le terrible faisceau d'union qui renversera les dès-potes et les lâches intrigants qui ploient le genou devant eux.
« Pour copie conforme,
« Signé : Deschamps, président; Lemaire, secrétaire, »
Il présente ensuite à la Convention le sous-lieutenant Gambert, blessé à l'affaire de Tir-lemont et s'exprime en ces termes (1) :
« Mandataires du peuple,
« La section des Sans-Culottes a député vers vous les citoyens Bourse et
Duval pour vous présentér un héros de la République. Il se nomme
Gambert, âgé de 62 ans, sous-lieutenant du bataillon des Sans-Culottes à
l'armée, ayant 44, ans de service àvant 1789 et ayant été à toutes les
batailles; ii en a les marques honorables qui lui ont fait accorder,
ainsi que ses services de sergent-major de grenadiers, une pension.
Apprenant dans notre arrondissement que les satellites des despotes
étaient sur notre territoire, il s'est enrôlé comme volontaire, en
septambre dernier, dans une compagnie de notré section qui n'a cessé
d'être à l'avant-garde. Il ne se Contenta pas seul de cueillir des
lauriers dans sa famille; il appela son fils aîné âgé de seize ans, qui
ne s'est pas moins défendu avec courage qtie son père et là, , après
avoir cueilli les lauriers de Grandpré, il Voulut,que son fils cueillît
avec lui les lauriers de Mons et de Jemmapes. A l'affaire des 17 et 18
mars dernier, à Tirlemont, se trouvant toujours à l'ayant-gârde, il
reçut un boulet qui lui blessa grièvement le bras et le rein gauches.
Nos retraites subies ont occasionné le dômble dë& malades et des
blessés dans nos hôpitaux. Ayânt
répond â l'otàtëur, féliditè le citoyen Gambert de son coufragé ét son patriotisme et àccordè aùx trois délégués les honneurs de la séance.
(1). Je propose de renvoyer la pétition en faveur du citoyen Gambert à la commission des Invalides.
(2). Certes j'appuie la proposition, mais je demande qu'en attendant il soit accordé à ce militaire un secours provisoire de 150 livres-.
(La Convention nationale, après avoir entendu la pétition du citoyen Gambert, sous-lieûténant du bataillon dès Sàns-Gulôttes, la renvoie à la commission des Invalides, ét décrète en faveur de ce militaire un secours provisoire de 150 livret (3);
, sé'èrétairèj dônfie lecture des lettres suivantes (4) :
1° Lettre des commissaires de ta comptabilité ; ils adressènt au comité de l'examen des comptes l'état remis en leur bureau pendant les quinze derniers jours de mars; cette lettré est ainsi conçue (5) :
Paris,
« Citoyen Président*
« Nous avons l'honneur de vous informer que noUs avons adressé aujourd'hui au comité de l'examen des comptes l'état des comptes remis au bureau de la comptabilité pendant les quinze derniers jours du mois précédent.
« Nous sommes avec respect, citoyen Président,
« Les commissaires de la comptabilitéj ( Signé : MiChElîn, Leclérc Saint-Aubin, Banzot, Jouiville, CoLLiot, RamoND, Ëé-
crakdln. »
2° Lettre du conseil exécutif provisoire ; il déclare n'avoir point
connaissance de l'ordre donné au général Ligneville d'abandonner les
revers des Vosges. Il annoncé que, loin d'accepter la démission dé
CUstinéj il vient d'arrêter que non seulement il gardera le
cbmman-dement en chef de l'armée du Rhin, mais encore y joindra celui de
la Moselle ; cette lettre est ainsi conçue (6) :
« Citoyen Président,
« Le conseil exécutif provisoire soumet à la Convention nationale la délibération qu'il vient de prendre relativement à la lettre adressée par le général Custine à la Convention, en date du 1er avril et dont ce général envoie copie au conseil, laquelle contient la démission de ce général, démission qui, dans l'opinion du.conseil, ne pourrait avoir que des effets funestes.
« Le conseil exécutif provisoire doit observer à la Convention nationale qu'il n'a eu aucune connaissance d'un ordre donné au général Li-gneville d'abandonner les revers des Vosges, quoique cet ordre, suivant un passage de la lettre du général Custine, paraisse être émanée du conseil.
u Signé : Garat, président; Grouville, secrétaire. »
A cette lettre se trouve jointe la pièce suivante :
Extrait du registre des délibérations du conseil exécutif provisoire.
4 avril 1793, l'an II de la République (1).
« Lecture faite d'une lettre du général Custine adressée à la Convention nationale, par laquelle il expose que l'abandon du revers des Vosges par un corps de l'armée de la Moselle, a empêché le succès du plan d'opérations qu'il a^ait combiné et, en conséquence, donne sa démission du commandement de l'armée du Rhin.
« Le conseil exécutif provisoire, considérant que," dans les circonstances présentes, la démission de ce général donnée au moment même où il vient de combattre si glorieusement pour la République serait une véritable calamité;
Arrête que non seulement le général Custine gardera le commandement en chef de l'armée du Rhin; mais même que le général Beurnonville se trouvant actuellement blessé et au pouvoir des ennemis, l'armée de la Moselle sera mise immédiatement sous les ordres et à la disposition du général Custine qui, en conséquence, restera chargé de la défense des frontières, depuis la Moselle jusqu'à Huningue. (Applaudissements.)
« Pour copie conforme au registre :
«. Signé ; Grouville, secrétaire. »
(La Convention applaudit à cette résolution et renvoie, pour le surplus, au comité de salut public.)
, présente un projet dadresse aux soldats français de Varmée du Nord et de la Belgique, qui auraient pu être égarés par les perfidies et les trahisons de Dumouriez (2).
présente un autre projet sur le même objet (3)
(2). L'ordre du jour appelle le scrutin public pour la nomination dun pré-sident en remplacement de Jean Debry, dont les pouvoirs sont expirés. Le scrutin est ouvert.
On procède à l'appel nominal.
Sur 377 votants, la majorité absolue étant de 188 voix, Delmas obtient 282 suffrages. Il est, en conséquence, proclamé président de la Convention (3).
(4) déclare ouvert le scrutin pour la nomination de trois secrétaires.
Les citoyens Cambon, Romme et Mellinet, ayant obtenu la majorité des suffrages, sont proclamés secrétaires.
, secrétaire, proclame la liste des membres choisis pour composer le co-mité de l'analyse (5).
Ces membres sont :
Les citoyens Jean Debry, Mercier, Dufriche-Valazé, Barère, Lanjuinais, Romme.
Les quatre suppléants sont :
Les citoyens Delmas, Danton, Rabaut-Saint-Etienne, Jean-Bon-Saint-André.
(6). Nos commissaires sont entre les mains des ennemis, nous pouvons craindre pour leurs jours; je demande à la Convention de décréter que les prisonniers du Temple répondent de leur sûreté.
(7). Ce n'est point le moment de discuter cette motion, mais il faut prendre des mesures de précaution contre les détenus du Temple. Votre comité de défense générale a reçu des renseignements que le projet de nos ennemis, notamment le but de Dumouriez, était de les délivrer. Je demande que la garde de ce poste soit doublée. (.Applaudissements.)
(La Convention décrète qu'à compter de ce jour la garde du Temple sera doublée.) (8).-
(La séance est suspendue à minuit et prorogée au lendemain neuf heures.
Séance permanente du
présidence de delmas, président.
La séance est reprise à neuf heures du matin.
donne lecture d'une lettre du citoyen Strouyen, disciple du thes-salien Hérodote, qui adresse à la Convention une somme de 50 livres pour les frais de la guerre; cette lettre est ainsi conçue (1) :
er avril
1793
« Citoyen,
« Le citoyen Strouyen, disciple du thessalien Hérodote, ne peut remettre aujourd'hui en argent son petit contingent patriotique et volontaire pour les frais de la guerre. Il vient de faire dans le lieu de sa résidence quelques dispositions en faveur des citoyens qui viennent de s'enrôler pour marcher contre l'ennemi. Il ne peut donc en ce moment offrir que cinquante livres qu'il prie le citoyen Rabaut de vouloir bien remettre au comité ou entre les mains de ceux qui en régleront l'emploi et toujours sous l'anonymat.
« Signé : Strouyen. »
(La Convention décrète la mention honorable de cette offrande qu'elle accepte et ordonne l'insertion de la lettre du citoyen Strouyen au Bulletin.)
, secrétaire, donne lecture des lettres, adresses et pétitions suivantes (2) :
1° Lettre du citoyen J. Poulion, de Rocher-fort, qui fait hommage à la patrie d'une somme de 275 livres pour subvenir aux frais de la guerre et qui, de plus, a habillé, équipé et armé un homme pour marcher à sa place aux frontières. Cette lettre est ainsi conçue (3) :
Rochefort, le 30 mars, l'an II de la République.
« Citoyen Présidelnt,
« Citoyen, comme tous les Français républicains doivent se pénétrer de la
vérité et des sentiments qu'emploie la majorité des législateurs à
sauver la patrie, dans cette confiance, permettez que je vous fasse part
avec franchise de mes sollicitudes. Il y a environ six mois que, par le
malheureux sort qui nous est destine à tous, j'ai été privé par la
cruelle mort d'une épouse la plus respectable et qui n'avait en vue que
l'amour de sa patrie. Je me trouve donc aujourd'hui seul et sans enfants
et
( Mais comme tous les bons citoyens qui doivent un tribut à leur patrie quand lés circonstances l'exigent et qu'ils ne peuvent pas par eux-mêmes remplir, en conséquence, j'ai pris l'engagement d'engager un volontaire qui marche pour moi aux frontières, à qui j'ai fourni tout ce qui lui était nécessaire. J'ai pris aussi celui de le solder pour une année, parce que je crois que c'est la dernière année des tyrans. Si elle ne suffit pas, contre toute mon attente, je ferai tous mes efforts pour continuer sa solde. Je vous remets ci-joint 275 livres que vous verserez dans la caisse du ministre de la guerre avec la copie du compte des effets que j'ai fournis, certifié par ledit volontaire et visé par notre municipalité et district.
Permettez-moi, je vous prie, quelques observations sur ma malheureuse situation. J e crois que, d'après ce que je fais, qu'il serait injuste si l'on voulait me forcer à laisser mes foyers. Mais soyez bien persuadés, législateurs, que je respecterai toujours vos décrets et suivrai vos lois et que je remplirai mon service, comme je l'ai toujours fait, à surveiller tous les malveillants et à assurer le repos et la tranquillité publique. Tels sont mes sentiments. Veuillez, je vous prie, m'accuser réception de la somme que je vous envoie, pour que je puisse faire voir aux membres de la Liberté et de l'Egalité, dont je fais partie, que j'ai rempli l'engagement que j'ai contracté dans leur sein.
« Daignez m'accorder, législateurs, votre bienveillance et mes vœux seront remplis.
« Salut et fraternité.
« Signé -: J. Poulion, « Sans-Culotte. »
« Le citoyen Vignier, lieutenant de la marine de cette ville, a été chargé par moi d'une lettre d'une maîtrise pour faire hommage à l'Assemblée nationale. Il y a environ un mois, il m'a dit qu'il l'avait remise au citoyen Bréard, l'un de vos membres. Je vous prie de lui dire de m'envoyer l'extrait du procès-verbal de ce jour.
« Signé : J. Poulion. »
A cette lettre, se trouve jointe la pièce suivante:
Etat des marchandises fournies au volontaire qui s'est engagé de remplacer le citoyen Poulion sur les frontières penda/nt le temps que le service l'exigera (1) :
Drap bleu fort........................40 1. »s.
Serge blanche......................................................9 »
Drap écarlate.......................................6 »
Futaine.........................................................5 »
Toile blanehe........................... 3
ÏPïÏP foyteppur ç^egiises.......... |5 15
2 paires de souliers fort^...12 »
J paire de guêtres uoifgSi,.. 9 »
- 1 paire en toile blanehe.,.....? »
1 chapeau, tout retapé..........................ô «
| §aiC de peau.......;.................... 15 »
> ; 3 Bftjrgp de bas, qôtpp et fil à
4 livres-- >1
Cl bonnet de poliee........................................10 H
1 sac à poudre, peigne et brosses 8 » Pour façon dp tous les habillements...................................................30 v
6 pois blanpg, 1 înp\|çhpirr7 »
1 giberne et banderolle....................6 »
1 fusil et baïonnette.......................42 »
1 tire-bourre..:...................................1 >>
1 gar-rau ^e toile.................; 6 »
Pour pngageîpent à lui donné... 60 »
Total............... 3§8 1.
( Je çerti^p, moi) pierre Bernard, natif de Rochefort, département 4§ Ift Charente-Inférieure, 4gé de vingt-trois aus, taijlp de cinq pieds, m'êtrp pngagé au citpyen J, Ppulipu, marchand, ppur lp remplacer dans le§ armées qui sont aux frontières pou? Je temps que Je service l'exigera. .$!»• cqn#qupupp, j'ai rpçu dudit Ppulion tous les pf e^ çapntipnnés 4ans le cpmpte ci-dessus et la somme dp soixante livres pour Ipdit engagement ; en foi 4e quai j'ai approuvé et signé tout ce que dessus ppqr lui valoir et servir comme dp raison,
« A Rochefort, le 20 mars 1793, l'an II de la République française.
« Signé ; Pierre BernardûIs. »
« J'approuyp tout que dessus.
« Signé : Bernard. »
« Vu et vérifié à la maison çonipnune de Ro-chpfpii;, 20 paars 1793, l'an II de la République française.
( Signé : Delisle, maire ; §ayi&ny, pfâ-yier municipal ; Pjsrrîn f[}s jeune ; BER-f^AHTD, notable,.
« Vu par nous, administrateurs du district de Rochefort;- certifié approuvé avec éloges, à Rochefort, le 20 mars 1793 l'an, II de la République française.
(. Signé : BoiChoî ; Testu ; Regnac ;
Faurie ; Rondeau, secrétaire. »
- (La Convention nationale dépyète la men-tipn honorable dans lp propè^yerbal du sèle du citoyen Poulion et ordonue l'insertion dp sa lettre au Bulletin.)
2° Lettre des citoyens de la ville de Retfiel qui offrent des effets
d'habillement et d'armement aux soldats de la République ; cette lettre
est ainsi conçue (1) :
« Législateurs,
« Les citoyens de la ville de Rethel viennent de faire passer aux citoyens administrateurs du département des Ardennes leur pffrapde patriotique pour les soldats dè la République.
$( ïSJle consiste en A4 obeïwises» 48 paiye^ de souliers, 16 paires 4e bas 4e S papptps, l fusil, 1 gibêrnp e| § sabres.
« Notre contingent, pour le recrutement 4e l'armée, était de 21 hommes, 23 hommes 4e bonne volonté se sont à l'instant présentés pour aller combattre les satellites des tyrans.
« Nous avons fourni, en outre, 44 hommes formant le quart de notre garae nationale en réquisition.
« Rethel comptait déjà 167 soldats dans tous les bataillons 4e l'armée.
« Hier, nos concitoyens- ont réparé la chaussée de Rethel à Mézières, sur une lieue 4'étendue, laquelle était très dégradée.
. « NOUS n'avons qu'un même psprit : soumission aux lois pt ponfiauce pn la Convention nationale. C'est le seul fanal qui pops appprte la lumière. ÎSTop-a n'en connaissons point d'autre, fi np npqs égarera jamais»
« Les officiers municipaux de la ville de Rethel.
« Signé : Robert Beaumont, maire; Tournes; HaBON ; de LaPIERRE ; vuïlaemjlf ; de
Clèves ; Clairon, procureur de la commune. » .
(La Convention décrète la mention honorable et ordonne l'insertion de cette lettre au Bulletin.)
8e Lefôrê des. citoyen? cfe la, commune de Tulle, qui a4Èprent au 4eçî"et qui a PUUi le tyrap ; ils regrettent la mort du vertueu* Le-pejptipr, an^pueent qU8 Je recrutement se fait avec un plein succès et que des don® en nature et en argent ont afflué 4e toutes parts ; cette lpttrp est ainsi connue (1) :
Tulle, le
« Citoyens mandataires,
« Si les tyrans se coalisent, ils ne nous intimident point ; ils trouveront leur défaite dans notre adhésion entière aux décrets; émanés dp votre sagesse, comme jls ont trouvé leur honte et leur ignominie 4aus la phute du dernier 4es Capets.
assassinât 4e l'imwpytel kepeletier nous a pénétré de la plus profonde
4ouieur. bfy w 4e la Correze a retenti de nos accents plaintifs et nos
hymnes funèbres et le bon peuple, en vprsant 4es larmes, a prouyé
cpmbien ses man-
« Nous envoyons au ministre deux cent vingt paires de souliers, dont trente-six sont le fruit des sueurs des canonniers de la manufacture des armes de la viïle de Tulle. Les braves guerriers qui doivent s'en sçryir, en marchant d'un pas ferme à l'ennemi, répondront à l'ardeur qui nous anime et seront assurés, lorsqu'ils combattront, d'avoir nos cœurs à leurs côtés. Et s'ils périssent au milieu de leurs triomphes, de trouver en nous des vengeurs inflexibles.
« Puissiez-vous, courageux mandataires, être témoins de nos succès dans l'exécution de la loi sur le recrutement. Tous nos jeunes citoyens, impatients de voler aux frontières, nous laissent à peine le teçaps de pourvoir à leur équipement ; ils ne voient que la gloire de la République et le bonheur pour eux d'être destinés à y contribuer.
« A la première nouvelle des soulèvements occasionnés dans les départements des Deux-Sèvres et de la Vendée par la fureur sacerdotale et la; rage nobiliaire, presque tous les citoyens qui n'étaient point enrôlés sont partis avec des armes et des munitions ; garçons, hommes mariés, tou£, ont juré de ne rentrer dans leurs foyers que lorsque la horde contre-révolutionnaire serait entièrement exterminée.
« Au moment de leur départ, on vit s'ouvrir une contribution volontaire pour subvenir aux besoins de leurs femmes et de leurs enfants. Elle s'est déjà montée à la somme de quinze mille livres, et elle augmente tous les jours. La commune semble avoir oublié qu'au départ du second et du troisième bataillon, elle avait déjà fait une semblable contribution qui a facilité les moyens de distribuer cent vingt setiers de blé par mois depuis le mois de septembre, tant les citoyens sont convaincus que rien ne doit coûter lorsqu'il s'agit de sauver la chose publique et que les sacrifices les plus pénibles sont les plus honorables.
« Les femmes versèrent des larmes lorsqu'elles aperçurent les généreux volontaires sortir de nos murs, et courir en chantant s'exposer au fer meurtrier des bourreaux de la patrie, mais leur tristesse fut bientôt changée en joie, lorsqu'elles virent arriver, le même jour, vos deux collègues que vous nous avez envoyés pour commissaires; ils semblaient des dieux tutélaires dont la présence seule pouvait ranimer la confianoe et l'espoir. L allégresse rayonna sur tous les visages et l'on n'entendit plus, de toutes parts, que ces cris mille fois répétés de : Vive la République ! Vive la Convention nationale !
« Les citoyens composant le conseil général de la commune de Tulle, en permanence.
Signé : VîW+eneuve, maire ; Rirat, Rigaud, officier municipal; Bardon, officier municipal ; f?ORis ; Flouraud; Dubois ; Pam-phille, kruyez, procureur de la commune.
P. S. — Nous venons de prendre connaissance du décret qui fixe le mode de faire parvenir à leur destination les offrandes patriotiques; au lieu d'envoyer les nôtres au ministre, nous nous y conformerons.
(( Signé : Villeneuve, Guyez. »
(La Convention décrète que les citoyens de Tulle ont bien mérité de la patrie et ordonne l'insertion de leur adresse au Bulletin.)
4° Lettre des citoyens Lequinio, Dubois de Bellegarde et Charles Cochon (1), commissaires de la Convention aux places fortes du Nord, qui annoncent à la Convention que la trahison de Dumouriez est connue à VaJpn-ciennes, et qu'elle n'a servi qu'à donner un nouveau degré d'énergie aux patriotes.
A cette lettre sont joints : 1° une proclamation que le traître Dumouriez a fait répandre avec profusion pour annoncer l'arrestation des quatre représentants du peuple, qu'il a livrés à nos ennemis, et soulever les habitants des départements du Nord contre la Convention nationale ; 2P un arrêté pris par toutes les autorités publiques, civiles et militaires réunies, sur la réquisition des commissaires représentants, pour rester en permanence, et porter partout une surveillance plus active.
(La Convention approuve la conduite de ses commissaires, et ordonne la mention honorable de celle des autorités publiques de Valen-ciennes.
5° Lettre des citoyens Lejeune et Piorry, commissaires de la Convention nationale dans les départements de la Vienne et de l'Indre (2) qui écrivent dp ^oitjprs, le 29 mars, qu'ils ont suspendu Rampillon, accusateur publio du département de la Vienne, pour p-voir commenté, expliqué, défiguré et interprété l'article 6 de la- loi du 19 mars contre les révoltés, de manière à persuader au peuple qu'il ne pouvait être applicable à des délits qui avaient été reconnus par des procès-verbaux authentiques, et a sauvé deux rebelles qui depuis ont été exécutés aux cris unanimes et répétés de : Vive la République ! vive la loi !
(La Convention approuve la conduite de ses commissaires et renvoie leur arrêté au comité de sûreté générale).
6° Lettre des commissaires nationaux Cochon et Lequino, de Mauheuge (3), le 30 mars, qui envoient une déclaration d'un capitaine tyrolien, qui peut jeter quelque jour sur la-conduite du général Steingel.
(La Convention renvoie cette lettre aux comités de la guerre et de sûreté générale.)
7° Lettre des mêmes commissaires Lequinio et Cochon, datée de Rocroy, qui adressent à la Convention divers arrêtes pris par eux à Rocroy et Valenciennes,
(La Convention renvoie ces arrêtés au comité de la guerre. )
8° Lettre des commissaires Lequinio et Cochon, datée de Maubeuge, le 30
mars, par laquelle ils annoncent à la Convention qu'ils
(La Convention nationale approuve la conduite de ses commissaires et renvoie leur arrêté au comité de défense générale.)
(1). Je propose de charger ce même comité de défense générale de nous faire un rapport sur l'arrestation du général Harville*
(La Convention décrète cette proposition.)
9° Lettre de Bo et Daubermesnil, commissaires de la Convention dans les départements du Tarn et de VAveyron (2), datée de Castres, le 25 mars. Ils se plaignent du mauvais état des routes, et se louent de la fermeté des administrateurs. A Brassac, l'arbre de la liberté avait été abattu dans la nuit par des brigands ; le lendemain il a été relevé solennellement, et les brigands ont été arrêtés. Les commissaires demandent l'établissement d'un tribunal révolutionnaire,, à l'instar de celui de Paris. Le recrutement s'est terminé dans le Tarn, malgré les manœuvres des malveillants.
(La Convention approuve la conduite de ses commissaires et renvoie leur lettre au comité de sûreté générale.)
10° Lettre du citoyen Belair, de Montmartre (3), datée du 4 avril, qui propose des moyens de défense pour Paris.
11° Lettre des commissaires Forestier et Fauvre-Ldbrunerie, dans les départements du Cher et de VAllier (4), datée de Bourges, le 26 mars : ils annoncent l'arrestation de trois prêtres. Le fanatisme agite ses brandons dans ce département. Les prêtres y entretiennent une correspondance crminelle avec nos ennemis.
(La Convention approuve la conduite de ses commissaires, et renvoie leur lettre au comité de sûreté générale.)
12° Lettre du commissaire de la Convention Blaux (5), datée des Deux-Ponts, le 29 mars, par laquelle il fait connaître l'abandon coupable où on laisse cette partie, les besoins de nos troupes, les vexations qu'on fait éprouver aux habitants des campagnes.
(La Convention renvoie cette lettre au ministre de la guerre.)
13° Lettre des commissaires de la Convention-, Turreau-Linières et
Garnier, dans les départements de l'Aube et l'Y orme (6), par laquelle
ils font connaître le zèle et le patriotisme des citoyens de ces
départements et des sociétés populaires. Dans la ville de Troyes, les
(La Convention renvoie cette lettre au comité de la sûreté générale.)
14° Lettre Jean-Bon Saint-André et Elie Lacoste, commissaires de la Convention dans les départements du Lot et de la Dordogne, par laquelle ils annoncent qu'ils ont suspendu la municipalité de Caylus, que le recrutement est terminé, et que le zèle des patriotes a répandu partout un bon esprit.
(La Convention approuve leur conduite, et renvoie leurs arrêtés aux comités de défense et de sûreté générales.)
15° Lettre de Léonard Bom bon, qui écrit de Dijon, le 29 mars, que les principaux agents du soulèvement qu'on voulait exciter dans plusieurs points de ce département, sont arrêtés. Le zèle et le patriotisme des administrateurs et du tribunal criminel y ont ramené le calme, en déjouant tous ces projets liber-ticides.
(La Convention approuve la conduite de ce commissaire, et renvoie sa lettre au comité de sûreté générale. )
16° Lettre des citoyens Petitjean et Mones-tier, commissaires de la Gonvention dans les départements du Puy -de- Dôme et de la Creuse (1), par laquelle ils écrivent de Guéret, le 30 mars, qu'ils ont pris différents arrêtés que dictait le salut public.
(La Convention renvoie ces arrêtés au comité de la guerre, pour en faire son rapport incessamment.)
17° Lettre des citoyens Defermon, Roche-gude et Prieur, commissaires de la Convention (2), par laquelle ils écrivent de Saint-Malo, le 30 mars, que les routes sont en plusieurs endroits de leur traversée impraticables; il importe qu'elles soient promptement réparées pour faciliter les mouvements militaires que la guerre avec les puissances maritimes occasionne dans ces départements.
(La Convention renvoie cette lettre au ministre de l'intérieur pour faire ; passer les fonds nécessaires.)
18° Lettre des mêmes commissaires (3) qui recommandent à la Convention Germain Ravaleux, canonnier volontaire et père de six enfants en bas âge, qui a eu les deux bras emportés dans un exercice militaire. Ils lui ont fait donner provisoirement 500 livres.
(La Convention approuve la conduite de ses commissaires et renvoie la lettre au comité des secours publics.)
19° Lettre du citoyen Dartigoeyte, commissaire de la Convention dans les
départements du Gers et des Landes, par laquelle il annonce que la
plupart des communes du Gers ont montré du zèle pour le recrutement et
provoque l'exécution du décret sur les chevaux de luxe; elle est ainsi
conçue (4) :
« Citoyens mes collègues,
« On doit de grands éloges au zèle, à l'énergie de la grande majorité des communes du département du Gers; mais, dans quelques-unes, l'aristocratie avait réussi à faire choisir des hommes infirmes ou évidemment défectueux. Nous avons cru devoir prendre l'arrêté ci-joint qui nous paraît déjouer les vues des malveillants.
« Les agents militaires ne sont pas encore arrivés et je ne sais d'où provient ce retard, qui fait ici la plus vive sensation ; il importe d'organiser l'armée; je ne puis concevoir pourquoi le conseil exécutif met autant de lenteur.
« Nous ignorons encore la destination des chevaux de luxe et nous pensons que le ministre de la guerre devrait donner des ordres pour faire examiner ces chevaux et pour faire partir ceux qui seraient propres au service. Nous avons cru prudent de les consigner chez les propriétaires, car autrement on aurait le double inconvénient de se charger de mauvais chevaux et de dépenser en frais de garde et de nourriture des sommes énormes, si toutefois le pays fournissait assez de fourrages pour les bien entretenir.
« Veuillez, citoyens nos collègues, prendre cet objet en considération; il intéresse la chose publique.
« Signé : Dartigoeyte. »
{La Convention renvoie cette lettre au comité de défense générale.)
20° Lettre des membres du conseil général de la Seine-Inférieure qui font connaître à la Convention le dévouement exemplaire des citoyens de Rouen; cette lettre est ainsi conçue (1) :
Rouen, le
« Législateurs,
« Nous profitons de l'occasion de la commune de Rouen, qui vous offre l'élite de ses forces, pour vous annoncer que nous allons proclamer cet exemple dans le département.. Nous espérons qu'il trouvera autant d'imitateurs qu'il y a de citoyens. Quant à nous, citoyens législateurs, à quelque poste que la patrie nous appelle, nous y montrerons l'intrépidité qui convient à des hommes libres. Nous savons qu'il n'en est point où des magistrats ne puissent mourir avec gloire.
« Les membres du conseil général de la Seine-Inférieure,
« Signé : De Fontenay, président; Thil, secrétaire général. »
A cette pièce se trouve jointe la suivante; elle est ainsi conçue (2) :
« Législateurs,
« De nouveaux dangers vous environnent; la liberté est menacée; les patriotes brûlent de la défendre et de mourir pour elle et pour vous. Nous vous offrons deux bataillons; ordonnez qu'ils partent et,, dans vingt-quatre heures, ils seront dans les murs de Paris.
« Signé : Rondeau, maire; Pinon, Turgis, Thoret, Gérout, E. Carré, Brémontiee, Dieu, Jean Asselin, Lamine, Féré, Cham-bard, Le Gendre, Dezaubris, IIavard. »
(La Convention décrète la mention honorable et ordonne l'insertion de ces deux pièces au Bulletin.)
2l°Letire des citoyens Sevestre et Billaud-Varenne, commissaires de la Convention dans-le département de VIlle-et-VHaine, qui écrivent que le zèle infatigable et le courage des gardes nationales de Rennes viennent d'obtenir un grand succès sur les rebelles et qu'ils ont cru devoir faire une proclamation aux habitants des campagnes pour les rappeler de leur égarement. Cette lettre est ainsi conçue (1) :
Redon, le
« Citoyens nos collègues,
« Arrivés à Redon, un des chefs-lieux de la coalition, nous avons cru qu'il n'y avait pas un moment à perdre pour attaquer les rebelles; quoique nos forces fussent peu considérables, et que les leurs, à la vérité très exagérées, nous parussent très imposantes. Heureusement l'expédition a eu un entier succès. Tous les postes occupés par les séditieux, sur les bords de la Vilaine, ont été enlevés et les passages rétablis. Nous devons les plus grands éloges au zèle infatigable et au courage des braves gardes nationales de Rennes, ainsi qu'à l'intelligence et à la valeur de l'adjudant général Beysser, chargé par le département do l'Ille-et-Vilaine de conduire cette opération militaire. La veille de l'action, il avait sommé les révoltés de mettre bas les armes dans le délai de trois heures, sous peine de voir brûler et raser le village de Saint-Péreux. Pour réponse, on avait menacé l'officier porteur de ces ordres de faire feu sur lui s'il ne se retirait sur-le-champ.
« Les séditieux, couverts par un retranchement près l'église, ont d'abord
tiré quelques coups de fusil sur les premiers bateaux de débarquement,
mais le feu de quelques pièces de canon de quatre les a bientôt
débusqués, et quand nous sommes descendus, nous avons trouvé la place
entièrement déserte. Deux rebelles ont été tués dans cette affaire et un
a été fait prisonnier. En arrivant, le soldat, dans son premier
transport, mit le feu à deux ou trois maisons. Cet exemple terrible a
produit un effet très utile, car les séditieux éclairés
« Nous avons donc la satisfaction de yous apprendre, citoyens nos collègues, que maintenant l'ordre et la paix sont presque entièrement rétablis dans le département de l'Ille-et-Vilaine. Mais après avoir dissipé et soumis les rebelles, il est d'une sage politique de les contenir assez pour qu'ils ne puissent ni se rallier ni se lever de nouveau, en supposant que les Anglais voulussent essayer de faire une descente sur nos côtes. En conséquence, on va distribuer des troupes en garnison dans les endroits connus pour être infestés de fanatisme et d'aristocratie. Nous avons également pensé qu'une mesure essentielle pour prévenir tout soulèvement était le désarmement entier des communes révoltées, et des mauvais citoyens dénoncés comme tels, dans les endroits restés dans la subordination. Nous avons aussi voulu profiter de la circonstance impérieuse de cette malheureuse sédition pour presser le recouvrement des impositions, et surtout pour hâter le recrutement en ordonnant qu'il serait complété en vingt-quatre heures pour les communes rebelles. Ces dispositions sont l'objet de l'arrêté que nous vous adressons avec celui relatif au changement qui nous ont paru nécessaires dans la composition du district de Redon, ville où l'on compte à peine trente patriotes, et où nous avons trouvé, sous les yeux mêmes de la municipalité, des couvents de religieuses conservant encore leur costume.
Une lettre du département des Côtes-du-Nord nous apprend aujourd'hui qu'il ne s'est formé sur son territoire qu'un seul attroupement considérable, entre Moncontour et Lam-balle. Le district de Lamballe y a envoyé un détachement qui a dissipé les révoltés, et qui en a tué quarante, et fait vingt-cinq prisonniers. Le même département nous fait part que les districts de son arrondissement fournissent leur contingent sans difficulté.
( Pour achever de rétablir la tranquillité publique, nous avons dû réunir, aux moyens de répression, le langage de la persuasion et de la clémence. C'est dans cette vue que nous avons fait une proclamation adressée aux habitants des campagnes, pour leur démontrer leur égarement, les rappeler à leur devoir, et les inviter conformément au décret du 19 mars, à rentrer sous vingt-quatre heures dans leurs foyers; avec l'assurance d'y revenir sans inquiétude, en se tenant désormais paisibles et soumis aux lois.
« Nous sommes, citoyens, vos collègues avec fraternité.
«Signé : Sevestre, Billaud-Varenne. »
A cette lettre se trouvent jointes les deux pièces suivantes :
I
Arrêté des députés commissaires de la Convention nationale dans le département de l'Ille-et-VHaine et des Côtes-du-Nord, pour le recrutement et le désarmement des cantons révoltés (1).
« Les commissaires de la Convention nationale, après avoir employé tous les moyens de force que la nécessité des circonstances exigeait pour faire rentrer les communes révoltées dans le devoir, voulant établir la paix dans tous les lieux que leur mission les appelle à parcourir, y faire respecter les lois et empêcher qu'à l'avenir des excès aussi contraires à l'intérêt de la République qu'à celui des malheureux qu'on égare se renouvellent dans le département de l'Ille-et-Vilaine et principalement dans le district de Redon où les mouvements contre-révolutionnaires ont le plus éclaté,
Chargent le conseil général du département de l'Ille-et-Vilaine de prendre les mesures les plus efficaces à l'effet de faire enlever le plus tôt possible les canons, fusils, sabres, épées, pistolets, aux habitante des communes où l'insurrection et la désobéissance aux lois se sont manifestées; d'enjoindre aux officiers municipaux des lieux où la loi sur le recrutement n'a pas été mise à exécution d'en faire assembler dans les vingt-quatre heures de l'arrêté du département, tous les habitants qui doivent concourir au contingent exigé et, en cas de refus, d'obliger lesdits officiers municipaux à former le rôle des hommes en état de servir aux termes de la loi, de l'apporter au département pour qu'il procède lui-même au choix des soldats destinés à partir pour la défense de la patrie, et de faire savoir à toutes les communes qui n'ont point encore fourni leur contingent que si les hommes choisis par lui ne se rendent pas aux lieux qui leur seront indiqués, ils seront regardés comme déserteurs et poursuivis et traités comme tels.
« A Redon, le 25 mars 1793, l'an II de la République.
« Signé : Billaud-Varenne, Sevestre. »
II
Arrêté des députés commissaires de la Convention nationale dans le département de l'Ille-et-Vilaine et des Côtes-du-Nord, relatif aux changements dans la composition du district de Redon (2).
« Les commissaires de la Convention nationale, envoyés, en vertu de ses décrets dans les départements de l'Ille-et-Vilaine et des Côtes-du-Nord,, pour prendre toutes les mesures qui leur paraîtraient nécessaires pour rétablir l'ordre partout où il serait troublé;
« Considérant que si les ennemis de la République osent, en présence des
citoyens de Redon, braver la puissance nationale, arborer la cocarde
blanche et le drapeau blanc, sommer la
( Considérant qu'il est instant, pour empêcher l'opinion publique de rester dans l'état de dépravation où elle est plongée, de porter la réforme dans les autorités constituées où il existerait quelques sujets indignes d'en faire partie;
« Reconnaissant que dans le directoire et le conseil général du district de Redon, il est des membres dont la cumulation des pouvoirs est réprouvée par la loi ou indignes par leur incivisme de remplir des fonctions dont il importe au salut public de s'acquitter dans ce moment de crise avec autant de dévouement que d'activité;
( Arrêtent :
« 1° Que le citoyen Fromenteau, président actuel du directoire et, en même temps, juge de paix à Maure, est remplacé par Legouné, curé de Redon;
« 2° Que le membre du directoire, appelé Simon, est suspendu provisoirement pour incapacité et désertion de son poste et remplacé par Binel, citoyen de Rennes;
« 3° Que le citoyen Bélouard, membre du directoire, faisant temporairement les fonctions de procureur syndic y sera remplacé par le citoyen Lodin, de Rennes;
( 4° Que les citoyens Rozy, le deuxième, et Lemoine, juges de paix et membres du conseil général y sont remplacés par les citoyens Le-mintière et Lallemand;
« 5° Que le nommé Dayot restera suspendu de ses fonctions de procureur syndic, comme prévaricateur et coupable d'incivisme et déjà suspendu par le conseil général du département de l'Ille-et-Vilaine;
« Chargeons expressément tous les membres composant le conseil général du district de surveiller avec la plus grande exactitude les autorités qui lui sont subordonnées, à faire mettre, sur-le-champ, les rôles des contributions arriérées, en état de recouvrement et à rendre compte, sous huit jours, au département, du succès de leurs opérations.
« A Redon, le 26 mars 1793, l'an II de la République.
( Signé Billaud-Varenne, Sevestre. »
(La Convention approuve la conduite de ses commissaires et ordonne la mention honorable de la conduite des gardes nationales dans son procès-verbal.)
22° Lettre; du citoyen Brûlé, président de la section du Temple, qui annonce que le contingent de cette section est arrivé à Valenciennes; cette lettre est ainsi conçue (1) :
section du temple.
Paris, ce
« Citoyen Président,
La section du Temple vous apprend avec la plus grande satisfaction, par l'organe de son président, que son contingent et au-delà, non-seulement est parti pour les frontières, mais encore que les quatre détachements dont il était composé sont tous arrivés à Valenciennes et qu'il y a huit jours ils ont été formés en compagnie par le général Ferrand, assisté de deux officiers municipaux et qu'enfin ces braves volontaires que la section a complètement armés et habillés se sont tous rendus au poste d'honneur où les appelaient les dangers de la République. Et si la section du Temple a tardé de vous instruire du départ de ces volontaires, c'est qu'elle voulait avoir la certitude qu'ils étaient tous arrivés à leur destination.
« Je suis avec fraternité, citoyen Président, votre concitoyen,
« Signé : Brullé, Président. »
23° Lettre des commissaires de la Convention, Lequinio, Ch. Cochon et Dubois-Bel-legarde qui envoient un exemplaire de la proclamation qu'ils ont publiée dans le département du Nord, pour prémunir les habitants contre les infâmes manœuvres de Dumouriez; cette lettre est ainsi conçue (1) :
Proclamation des commissaires de la Convention nationale pour les frontières du Nord, aux vrais amis de la République, à toutes les autorités constituées, civiles ou militaires, à tous les citoyens.
« Citoyens, la patrie est en danger : le plus noir complot est formé,
mais la trahison éclate et le traître se démasque; par le décret du 30
mars, la Convention nationale a mandé à sa barre le général Dumouriez,
pour lui rendre compte de l'état de son armée, et des causes qui ont
nécessité l'évacuation de la Belgique; par le même décret, elle envoyait
à l'armée du Nord, pour prendre toutes les informations utiles, quatre
députés commissaires de la Convention nationale et le général
Beurnonville, ministre de la guerre : les commissaires et le ministre
sont arrivés hier à l'armée de Dumouriez, et lui ont fait connaître le
décret; à l'instant ce général ambitieux et traître, loin d'obéir et de
se rendre à Paris, s'est emparé des quatre représentants du peuple et du
ministre de la guerre, et il les garde en otage, et le bruit public
annonce qu'il les a transférés en la puissance de l'ennemi, aux mains du
prince Cobourg, à Tournay; mais ce qui n'est que trop certain, c'est
qu'il vient de répandre une proclamation audacieuse; dans laquelle il ne
rougit pas d'annoncer qu'il a mis en lieu de sûreté et gardé comme
otage, les quatre représentants du peuple et le ministre Beurnon-
Citoyens, une pareille audace, une aussi profonde perfidie serait incroyable, si l'exemple de La Fayette, des Cromwels et de tant d'autres traîtres dont l'histoire nous a transmis la scélératesse, ne nous instruisait de la possibilité de ce forfait.
« Citoyens, La Fayette avait été pendant trois ans l'idole de la France; ce n'est pas pour la liberté publique qu'il combattait, c'était pour lui-même, et dès que ses projets ont été arrêtés il s'est démasqué en émigrant; il a dans un instant dévoilé toutes ses trames et terni toute sa gloire : Dumouriez, citoyens, fait aujourd'hui ce que faisait La Fayette il y a Un an; il a plus d'audace encore et plus de perfidie; depuis longtemps, Dumouriez tramait un plan d'élévation pour lui, et de trahison pour la France; dans ses proclamations, il humiliait sans cesse les gardes nationales afin de les avilir, de les dégoûter, de les forcer à la désertion; c'est par ses combinaisons abominables, qu'après avoir conquis à la liberté la Belgique, il en a ordonné l'évacuation, même avant que l'ennemi se présentât, nous en avons vu l'ordre écrit de sa main, le général Harville nous l'a exhibé; c'est par ses combinaisons perfides que nos munitions sont tombées aux mains de l'ennemi; c'est par ses combinaisons perfides, enfin que 30,000 Français sont déjà morts victimes de son ambition en croyant défendre la République et la Liberté, tandis qu'ils ne combattaient que pour de nouveaux tyrans.
( Citoyens, sans de grandes qualités un homme ne peut jamais acquérir la confiance publique et monter à la souveraine puissance : tous les premiers rois, tous les tyrans ont montré du courage, des vertus guerrières, de l'intelligence et souvent même des vertus privées; ils n'auraient point séduit la multitude sans cela; ils ne l'auraient point dominée pour monter à la puissance suprême, il fallait que Dumouriez se fît l'idole de ses frères d'armes, il y est parvenu; son courage et son intelligence lui ont conquis les coeurs des soldats et quand il s'en est vu suffisamment le maître, il s'est dit leur père pour devenir le chef de la Constitution qu'il veut reproduire pour devenir roi.
« Citoyens, il importe peu aux ennemis de la France quel en soit le roi, pourvu qu'il y en ait un : les tyrans et les despotes étrangers veulent que le despotisme se reproduise en France, pour que le leur se soutienne ; ils ont vu dans Dumouriez le seul homme qui put y réussir, ils se sont arrangés avec lui, ils ont consenti une suspension d'armes afin de capter encore mieux en sa faveur, le suffrage des soldats fatigués de la guerre qu'ils soutiennent avec tant de courage depuis si longtemps.
« Vous voyez la perfidie au grand jour, elle
éclatera bien davantage avant peu. Dumouriez,
comme La Fayette, va, pendant qu'il trompe
encore ses soldats, passer dans le camp de l'ennemi ; il avait tout disposé pour s'emparer, cette nuit même, de Valenciennes, et fixer dans cette place forte le trône de sa puissance ; notre surveillance l'a déjoué, d'accord avec les corps administratifs et municipaux de cette ville et le brave général Ferrand, nous avons fait manquer le complot : Valenciennes et la France sont encore sauvés de la tyrannie d'un traître ; citoyens, la patrie est tout, un homme n'est rien, quelque recommandable qu'il se soit montré, dès qu'il trahit la chose publique, il ne mérite plus que la vengeance nationale et la haine de tous les citoyens ; vous avez tout fait pour anéantir le despotisme et la tyrannie ? Voudriez-vous les voir renaître et vous forger de nouveaux fers? Vous vous êtes donné des représentants ; ils rie sont rien en eux-mêmes, ils ne sont rien que par vous et rien que pour vous ; celui qui attente à la représentation nationale,, attente à votre propre liberté. Dumouriez livre à l'ennemi quatre de vos représentants et son chef immédiat, le ministre de la guerre, auquel il devait toute obéissance. Abhorrez le traître Dumouriez, ralliez-vous à la Convention : chacun de ses membres en particulier n'est rien, mais réunis ils vous représentent, et ne peuvent ni vouloir, ni faire que votre bonheur. Dépouillez-vous de toute idolâtrie, périssent tous les tyrans, vive la République !
« Les commissaires de la G onvention nationale.
« Signé : Lequinio, Ch. Cochon, Belle-garde. »
(La Convention approuve la conduite de ses commissaires.)
24° Lettre du citoyen Fouché, commissaire de la Convention, dans le département de la Loire-Inférieure qui dénonce que les patriotes ont repoussé avec avantage les rebelles, et qu'un membre du département ainsi que le commandant d'artillerie du château de Nantes, ont été révoqués de leurs fonctions et remplacés ; cette lettre est ainsi conçue (1) :
Nantes, le
« Citoyens, mes collègues,
« Nous sommes toujours dans un état inquiétant. Nous attendons des forces avec impatience. La garde nationale fait tous les jours des sorties sur les routes de communication. Elle montre un courage et une intrépidité qui méritent tous vos éloges. Quatre cents hommes partis de Nantes ce matin, ont chassé deux mille brigands, ont enlevé leurs provisions, leurs munitions et ont renversé leurs retranchements.
« Je vous envoie copie des différents arrêtés que les circonstances m'ont
impérieusement commandés, et j'espère qu'ils auront votre approbation.
Tous les magistrats du peuple sont demeurés dignes de sa confiance ; un
seul a été infidèle, il est destitué.
« Signé : Fouché. »
A cette lettre, se trouvent jointes les deux pièces suivantes :
I
Au nom de la République, au nom de la Convention et en vertu des pouvoirs qu'elle nous a délégués (1) :
« Nous, commissaire soussigné, après avoir entendu en présence du conseil du département de la Loire-Inférieure, le citoyen Grasset, membre dudit conseil, dans les moyens qu'il a employés pour justifier son absence de son poste depuis les douze jours derniers ;
« Et considérant qu'il résulte de ses réponses que ledit Grasset a constamment préféré son intérêt particulier au bien général, que le soin de sa famille, la santé de son épouse, la conservation de sa fortune ont seuls occupé tous ses;, moments, toute son attention et que le danger de la chose publique, la voix de la patrie déchirée, n'ont pu agir sur son cœur et pénétrer jusqu'à lui ;
« Considérant qu'il n'est pas possible de croire au civisme d'un administrateur qui ne veille qu'à ses affaires domestiques, quand la République est menacée ;
« Par ces motifs et après avoir pris toutes les informations nécessaires et l'avis des administrateurs du département, déclarons le citoyen Grasset suspendu et déchu de ses fonctions d'administrateur et de juge du tribunal du district de Clisson, lui défendons de les exercer à l'avenir sous quelque prétexte que «ce soit et chargeons le procureur général syndic de lui notifier officiellement le présent.
« Nantes, le 29 mars 1793 l'an II de la République française.
« Signé : Fouché. »
ii
(( Au nom de la République, au nom de la 'Convention et en vertu des pouvoirs dont nous sommes investi (2) :
« Nous, commissaire soussigné, informé par la voix publique et par les
administrateurs que le sieur Bonvoux, directeur chef de l'artillerie, au
château de Nantes est absent et éloigné de son poste depuis plusieurs
mois ; qu'il a été dénoncé par ce département au ministre de la guerre,
il y a plus de trois mois ; que le ministre n'a pas répondu et que ledit
Bon-
« Considérant que dans l'occasion d'une guerre maritime avec les trois puissances maritimes de l'Europe et dans l'état de crise où se trouve ce département, travaillé d'une insurrection générale suscitée et entretenue par le fanatisme, le parc d'artillerie du château de Nantes, si important par sa position, par les fournitures dont il est chargé pour les ports de Brest, Lorient et Rochefort et la facilité qu'il a de les approvisionner, ne peut et ne doit pas rester plus longtemps privé d'un chef capable d'y mettre l'activité nécessaire, et de le rendre aussi profitable à la République qu'il peut l'être, d'un chef qui jouisse de la confiance des citoyens et des corps administratifs ;
Et considérant que le citoyen Boirot, capitaine d'artillerie, chargé par le conseil exécutif provisoire de pourvoir à la défense des côtes, nous a paru réunir les qualités et talents propres à la place de directeur du parc d'artillerie du château de Nantes ;
Déclarons destituer ledit Bonvoux de la place et fonctions du directeur dudit parc et commandant de l'artillerie au château de Nantes, et avons nommé provisoirement, pour le remplacer, le citoyen Boirot, capitaine d'artillerie, aux mêmes appointements, pouvoir et autorité dont jouissait ou devait jouir ledit Bonvoux.
« Le présent sera envoyé à la Convention nationale, pour avoir son approbation et au con-seil'exécutif provisoire pour son information.
« Nantes, le 30 mars 1793, l'an II de la République française.
«c Signé : Fouché. »
(La Convention approuvelaconduite de son commissaire, et ordonne qu'il sera fait mention honorable au procès-verbal de celle de la garde nationale de Nantes, et que la lettre sera insérée au Bulletin.)
25° Lettre des citoyens Trullard et Ni ou, commissaires de la Convention; ils envoient de La Rochelle copie d'une sommation faite par Guerry au magistrat de l'Ile-Dieu; ils annoncent aussi qu'ils ont requis les frégates pour empêcher les secours que les rebelles attendent de l'extérieur; cette lettre est ainsi conçue (1) :
La Rochelle,
« Citoyens,
« Nous vous adressons copie de la sommation qu'un nommé Guerry, chevalier
de la Forti-nière, qui s'est emparé de l'île de Noirmou-tiers, a faite
aux magistrats de l'Ile-Dieu. Aujourd'hui que les troupes que nous avons
requises seront rendues aux Sables, nous ferons passer des secours aux
habitants de cette dernière île. Le siège des Sables se continue
toujours, avec un acharnement inconcevable; les rebelles sont au nombre
de plus de quatre mille, mais nous avons requis des forces imposantes
pour cette place, et nous espérons qu'elles y arriveront ce soir par
mer. Nous avons aussi
( Notre zèle sera infatigable, notre dévouement absolu; soyez-en assurés, citoyens; la cause de la liberté est en péril, mais elle ne succombera pas, si nous sommes secondés.
Signé : Niou, Trullard. »
A cette lettre sont jointes les deux pièces suivantes :
I
Copie de la lettre du sieur Guerry, ci-devant chevalier de la Fortinière, écrite aux officiers municipaux de l'Ile-Dieu, transmise par ces derniers, aux citoyens commissaires de la Convention chargés de la défense des côtes et ports de la République.
23 mars 1*793, de Noirmoutiers (1).
« Messieurs,
« Après avoir réduit l'île de Noirmoutiers et y commandant en chef au nom de Monsieur régent du royaume, je déclare que si vous ne vous rendez pas à mon ordre, je vais, chez vous, vous y contraindre par la force armée; en conséquence, je vous invite et ordonne aussitôt la présente reçue de faire flotter le drapeau blanc sur le lieu le plus élevé de votre île et de me donner en Noirmoutiers trois têtes des plus notables de l'endroit pour otage et gage de votre fidélité et obéissance et cela au 26 au plus tard de ce mois; sans quoi, craignez les suites de mon voyage; votre conduite décidera du sort de votre île. Je vous demande, Messieurs, avec vos otages, un acte authentique, signé des principaux habitants de la reddition. Si, comme je l'espère de vous, vous vous rendez obéissants, je vous donne ma parole d'honneur que vous et vos propriétés seront respectées. Je vous donnerai un commandant qui veillera à votre sûreté et vous prouvera quelle est l'intention du partisan du roi. La paix, Mes=-sieurs, c'est notre vœu; trouvant la paix, vous serez heureux. J'ai l'honneur d'être, Messieurs, votre très humble et très obéissant serviteur.
« Signé : Le chevalier Guerry de la Fortinière, commandant pour le roi à Noirmoutiers. » « Pour copie conforme à l'original : « Signé : Trullard, Niou. »
II.
Extrait du registre des délibérations du conseil des districts des Sables
et Challans, réunis au commissaire du département, envoyé
27 mars 1793, l'an II de la République (1).
( Sur les quatre heures de l'après-midi, se sont présentés à l'administration les citoyens Jean-Joseph Gatineau et François Turbé, députés de la commune de l'Ile-Dieu, qui ont déposé sur le bureau une lettre du conseil général de ladite commune, accompagnée d'une copie, d'une autre lettre datée de Noirmoutiers le 23 de ce mois, signée Guerry, chevalier de la Fortinière, prenant la qualité de commandant en chef de ladite île, au nom de Monsieur, régent du royaume. Cette pièce est une sommation aux habitants de cette île, de se rendre et d'arborer le drapeau contre-révolutionnaire et de lui donner pour otage trois des notables habitants pour gage de leur fidélité, avec acte authentique, signé des principaux habitants. Le commissaire du département, réuni aux autorités constituées des districts des Sables et de Challans, formés en conseil, satisfaits des dispositions où ils sont de repousser les agressions des rebelles ;
_ « Arrêtent qu'il sera fait de suite une réquisition au capitaine du yacht l'Enfant, actuellement en cette rade, d'aller établir sa croisière dans les parages de l'Ile-Dieu, à l'effet de protéger cette île des incursions des brigands et de mettre sous sa protection des bâtiments chargés de comestibles qui se trouvent de re-x lâche à l'Ile-Dieu.
« Yu l'impossibilité de donner des secours suffisants en armes et en hommes à nos frères de l'Ile-Dieu, dans la position critique où nous nous trouvons nous-mêmes, pour en imposer aux brigands, autorisons les commissaires de la commune de l'Ile-Dieu de se rendre auprès, du commandant de la 12e division, même auprès des autorités supérieures pour y réclamer les secours que nécessitent leur position.
« Arrêtent encore que, si les commissaires se décident à cette démarche, copie des pièces déposées sur le bureau seront transmises tant au commandant Yerteuil qu'aux commissaires de la Convention nationale députés pour la défense des côtes.
« Pour copie conforme :
« Signé : Niou, Trullard. »
(La Convention approuve la conduite de se» commissaires.)
26° Lettre de Garat, ministre de l'intérieur, qui fait passer à la
Convention l'état des décrets envoyés par lui aux départements, le 4
avril 1793; cette pièce est ainsi conçue :
le 4 avril 1793, Van II de la République française (/).
DATES DES DÉCRETS.
Mars 20. N° 623. — 22. 622.
— 20 et 24. N° 616.
— 29. N° 656.......
— 28. Avril 2.
— 2.
— 3.
— 3.
— 4.
Mars 11. % 25.
— 27.
— 27.
Avril 3.
— 3.
718. 676
719
678.
679
680
636.
637.
652. 636.
678. 678.
TITRES DES DÉCRETS.
Décret relatif à la réclamation des troupes sur les côtes de l'Océan.....................
Décret relatif aùx professeurs et aux élèves pensionnaires qui se rendront aux frontières pour la défense de la patrie...............
Décrets relatifs aux gendarmes des 30e et 35e divisions de la gendarmerie nationale de Paris.
Décret qui enjoint à tout propriétaire ou principal locataire de faire afficher à l'extérieur de leurs maisons, les noms, prénoms, âges et professions de tous les individus résidant dans leurs maisons.................................
Décret qui accorde 40,000 livres pour les besoins de l'hôpital des Quinze-Vingts...............
Décret relatif à un arrêté pris le 30 mars dernier par les commissaires de sections rassemblés à l'Évêché........................
Décret (Jui accorde à Simon Garnier le cheval offert par le député Marey et un secours de 300 livres.....................................
— 4. 680.
Mars 28. 724,
— 28. 682. — 30. 686
Décret qui ordonne d'arrêter tous les officiers et soldats revenant de l'armée...............
Décret qui rapporte la disposition du décret du 1er avril relatif aux citoyens suspendus par les commissaires de la Convention dans le département du Bas-Rhin ....................
Décret portant que les pères et mères, femmes et enfants-des officiers commandant sous Dumouriez seront gardés à vue* comme en otage, par les municipalités........................
Décret relatif au renvoi au tribunal extraordinaire sur les délits dont la connaissance lui est attribuée.................................
Décret qui charge les municipalités de faire cultiver et ensemencer les terres qui étaient ci-devant cultivées par les émigrés, ou pour leur compte...-,..............................
Décret relatif aux jugements rendus contre les prévenus de complots contre-révolutionnaires.
Décret-articles additionnels au décret du 10 de ce mois portant établissement du tribunal criminel extraordinaire pour juger les conspirateurs ....................i...................
Décret qui ordonne d'arrêter tous officiers et soldats revenant de l'armée......____1.......
Décret qui rapporte la disposition du décret du lor avril, relatif aux citoyens suspendus par les commissaires de la Convention dans les départements du Bas-Rhin et autorise les commissaires dans Les départements et près les armées à faire arrêter, même déporter, tous les gens suspects............................
Décret portant que les pères et mères, femmes et enfants des officiers de l'armée commandée par Dumouriez seront gardés à vue, comme otage, par les municipalités.^................
Décret qui ordonne des indemnités à la société civique d'Amiens ............................
Décret qui établit à Paris une commission centrale de bienfaisance.......................
Décret relatif à la suppression des barrières entre les départements de Jemmapes et du Nord.........................................
DÉPARTEMENTS auxquels l'envoi a été fait.
A tous les départements.,
Paris.
Côte-d'Or,
Paris.
Bas-Rhin
Paris.
A tous les départements.
Somme Paris..
Nord.
OBSERVATIONS.
Manuscrit.
Le ministre de Vïntérieur1
Signé : Garat.
Paris,
« Citoyen Président,
« Tous mes fils sont sur les frontières pour le service de la patrie et moi-même j'ai l'honneur de la servir dans l'intérieur quoique accablé de mes infirmités. Les 50 livres que voici en assignats font la huitième partie de tous mes petits revenus, et le manuscrit ci-inclus est le fruit de mes travaux et de la pureté de mes bonnes intentions pour le bien général de la République française.
« Je dépose le tout sur l'autel de la patrie et je vous prie, citoyen Président, d'en faire part à la Convention nationale et d'ordonner à l'un de vos secrétaires de m'en envoyer un récépissé à mon adresse. Yous obligerez infiniment votre très affectionné concitoyen.
« Signé : Créquy-Montmorency domicilié rueCocatrix, n° 9, Section de la Cité.»
(La Convention renvoie ce mémoire au comité de législation (1).
28° Lettre de Garat, ministre de l'intérieur (2), qui envoie à la Convention la réclamation de quelques membres de l'Académie, à qui les commissaires de la Trésorerie refusent de payer à la fois les deux traitements qu'ils ont reçus jusqu'à présent comme professeurs et Comme académiciens, la loi ne permettant pas cette cumulation de traitements.
(La Cbnvention renvoie cette lettre au comité d'instruction publique.
29° Lettre des administrateurs du district de Tarascon? département de l'Ariège, qui applaudissent au décret qui a délivré la France des tyrans, expriment leur douleur sur l'assassinat de Lepeletier et annoncent que le contingent de leur recrutement est dépassé de plus de cent. Cette lettre est ainsi conçue (3) :
« Citoyens,
« Dignes représentants d'un, peuple libre, la tête du plus infâme des
tyrans vient d'être abattue; le glaive de vos justes lois a mis fin à
tous ses complots criminels; tous les despotes ile l'Europe ont alors
médité notre perte, mais ils subiront dans peu le même sort que Capet.
Et toi, cher Lepeletier, tu es mort, victime d'un cruel assassin ! nos
larmes viennent d'arroser ton effigie, mais hélas ! elles n'ont pu te
rendre à la patrie; nos cœurs sont navrés de la plus vive douleur, et
notre postérité, connaissant tes bienfaits, te pleurera comme nous.
« Les administrateurs composant le directoire
du district de Tarascon, département de
l'Ariège .
« Signé : Deramond, D arnaud, Boullier, Es-tèbe, procureur syndic ; J. M. Siers, secrétaire général.
(La Convention décrète la mention honorable de cette adresse et ordonne son insertion au Bulletin.)
30° Lettre des volontaires du 4e bataillon de l'Isère, qui envoient à la Convention, pour les frais de la guerre, une somme de 1,500 livres et qui témoignent de leur ardeur patriotique; elle est ainsi conçue (1) :
Saint-Jean-de-Maurienne, le 28 mars 1793, l'an II de la République française.
« Citoyens législateurs,
« Tous les individus composant le 4e bataillon de l'Isère attendent avec impatience l'honneur de verser leur sang pour la patrie. Si la destinée les a tenus jusqu'ici dans une inaction plus cruelle que les combats, ils n'ont cessé de porter des regards de sollicitude sur cette chère patrie que des êtres avides de sang et de crimes semblent vouloir anéantir dans ce moment. Nous vous envoyons la faible somme de 1,500 livres pour subvenir aux frais de la guerre. Dites à nos ennemis intérieurs que nos bras sont armés contre eux, et que l'esclavage menaçant n'élèvera sa tête sanglante que lorsqu'il ne restera pas un de nous pour l'abattre.
« Les officiers, sous-officiers et volontaires du 4e bataillon de l'Isère.
« Signé : Casterets, lieutenant-colonel; Ho-vella, commandant ; Marchand, capitaine; Simond, sous-lieutenant; Rambert, sergent-major; Marquis, sergent; Roux, caporal; Decorps, volontaire. »
(La Convention décrète la mention honorable de l'offrande et renvoie cette lettre au ministre de la guerre.)
31° Lettre du pilote Sueck (2), qui fait connaître à la Convention une prise faite par lui sur nos ennemis.
(La Convention renvoie cette lettre au comité de marine pour en faire un rapport dans les vingt-quatre heures.)
32° Lettre des administrateurs du district de Boulogne-sur-Mer (3), qui
annonce que plusieurs citoyens de cette ville, venant à Paris, ont été
arrêtés sans autres motifs de suspicion
Un membre convertit en motion cette requête; il demande à la Convention de décréter que son comité de surveillance lui fera un rapport sur la question de savoir si les motifs qui ont provoqué le décret relatif aux passeports délivrés par les municipalités de Boulogne-sur-Mer et de Calais subsistent encore. Il propose également de charger ce même comité d'examiner les papiers et les passeports des personnes arrêtées en vertu dudit décret.
' (La Convention adopte ces deux poposi-tions.)
Un membre du comité d'instruction publique (1) propose de désigner les citoyens La-hanal et Daunou pour suivre les expériences du, citoyen Chappe, inventeur d'un système destiné à correspondre rapidement à de grandes distances dont l'essai a été ordonné par un précédent décret.
(La Convention adopte cette proposition.).
Un autre membre (2) fait une proposition relative aux élèves de l'école d'artillerie de Châlons.
(La Convention, après une légère discussion, adopte la proposition et la renvoie, pour la rédaction, au comité d'instruction publique.)
U n membre (3) : Je demande à la Convention de décréter que les citoyens qui ont abandonné le lieu de leur domicile, dès qu'ils ont eu connaissance de la loi du recrutement, et pour s'y soustraire, seront traités comme de lâches déserteurs, et seront obligés de marcher.
(La Convention charge son comité de la guerre de lui présenter un mode d'exécution de ce décret.)
Un membre (4) : Je propose de décréter que le comité de défense générale prendra, avec le conseil exécutif, toutes les mesures néces-* saires pour assurer la défense des côtes des ci-devant provinces de Normandie, Poitou et Bretagne, et en rendre compte dans le plus court délai.
(La Convention adopte cette proposition.)
(5). Lorsque nous nous sommes transportés à Reims, nous avons vu des
mal-
Je dois relever une erreur de Thuriot. Il a dit que ces officiers pourraient être échangés contre nos commissaires.
Je n'ai point dit cela.
C'est que les rois eux-mêmes ne pourraient être échangés contre eux.
(La Convention décrète de faire venir à Paris les officiers pris sur l'ennemi, et qui sont actuellement à Reims, afin qu'ils servent d'otage à la République, et lui répondent sur leur vie de celle des commissaires de la Convention qui sont en la puissance des Autrichiens par la trahison de Dumouriez.)
Citoyens, je propose d'étendre cette mesure à tous les prisonniers de grade et je demande que le ministre de l'intérieur nous rendre compte de l'endroit où ils sont pour l'instant détenus.
(La Convention décrète cette nouvelle proposition.)
Citoyens, comment pouvez-vous rendre un décret aussi intéressant pour ainsi dire au pied levé et avec si peu de monde? Quelle en est la cause? Sachez que l'on traiterait semblablement vos prisonniers, sachez que vous en avez chez eux qui étaient de grade dans l'armée française. Moi, aussi, j'ai un fils qui est prisonnier. Je demande que le décret soit discuté, ou plutôt que les propositions soient renvoyées au comité de défense pour faire le rapport séance tenante.
J'appuie fortement la proposition de Mallarmé ; il faut traiter très fraternellement les prisonniers de guerre.
(La Convention suspend les deux décrets rendus sur la proposition de Thuriot et de Bréard et, maintenant la proposition générale déjà votée par elle, charge le comité de défense générale de lui présenter, séance tenante, le développement et la rédaction du décret. )
(1). Il est instant que la Convention rende un décret pour remédier à un
abus dont nous avons été témoins. Dumouriez avait eu la précaution de
faire sortir de toutes les places les commandants temporaires sur
lesquels il ne comptait pas. U les envoyait
Je demande qu'aucun général ne puisse envoyer des officiers temporaires et inférieurs à Paris pour rendre compte de leur conduite, sans un ordre exprès du ministre. Ils seront tenus d'envoyer l'officier avec une copie de l'ordre.
Cette mesure est très bonne, mais le général qui voudrait agir ainsi, enverrait une prétendue copie. Il faut prévoir tous les cas et y remédier, si c'est possible. Je propose d'ajouter à la rédaction, présentée par Delacroix, l'addition suivante :
« Le général en chef sera tenu de leur envoyer l'ordre même en original du conseil exécutif, lequel enverra à cet effet deux minutes de cet ordre aux généraux en chef, qui, pour leur responsabilité, garderaient une de ces minutes.
(La Convention adopte la proposition de Delacroix avec l'amendement présenté par Dumont.)
Suit le texte définitif du décret rendu (1) :
« La Convention nationale décrète qu'aucun général ne pourra, à l'avenir, éloigner.les officiers généraux et autres officiers supérieurs de leur poste, sous prétexte de venir rendre compte de leur conduite au conseil exécutif. Le général en chef sera tenu de leur envoyer l'ordre même en original du conseil exécutif, lequel enverra à cet effet deux minutes de cet ordre aux généraux en chef, qui, pour leur responsabilité, garderont une de ces minutes. »
(2). Le décret que nous venons de rendre est excellent pour l'avenir, mais il n'empêche pas qu'à cette heure bon nombre de ces officiers, envoyés par Dumouriez, sont à Paris sans commandement ; et, comme ils sont très patriotes j'estime que la République aurait le plus grand tort de se priver de leurs services.
Je demande que le comité de la guerre soit tenu de prendre connaissance des ordres donnés arbitrairement par Dumouriez, en exécution desquels plusieurs généraux se sont rendus à Paris pour rendre compte de leur conduite au ministre de la guerre, quoique ce ministre ne les eût pas mandés. Je propose également que le conseil exécutif puisse, sur sa responsabilité, employer les généraux destitués, s'il juge qu'ils peuvent encore servir utilement dans les armées de la République.
(La Convention adopte les propositions de Puyraveau.)
, secrétaire, donne lecture d'une lettre des membres du comité de sûreté
et de défense générales, établi à Lille par le conseil général des corps
constitués, par laquelle ils transmettent à la Convention nationale
diverses pièces relatives à la trahison de Du-mOuriez ; ces pièces sont
ainsi conçues :
« Citoyens représentants,
Yoici des nouvelles preuves de l'esprit de révolte que le traître Dumouriez propage dans l'armée que la République lui a si malheureusement confiée. Yous jugerez, par ces différentes pièces, quelle exacte surveillance le comité de sûreté de Lille met dans les fonctions que le conseil général des corps constitués lui a commises et quelles sont les lumières qu'il répand pour éclairer votre sagesse et la puissance que la nation française vous a donnée. Comptez sur la fermeté des Lillois. S'ils peuvent sauver une seconde fois la République de tout leur sang, la République sera sauvée.
« Nous ne vous envoyons qu'une des circulaires du rebelle aux divers commandants temporaires de villes et postes de première, seconde et troisième ligne, depuis Givet jusqu'à Boulogne et nous avons retenu les autres toutes semblables. »
(Suivent les signatures.) Les pièces qui forment l'envoi sont :
I
Copie d'une lettre de Dumouriez à l'armée du Nord, datée de Saint-Amand, le 3 avril, par laquelle il promet un mémoire qui développera les motifs de sa conduite envers sa patrie et la Convention nationale (1).
Au quartier général de Saint-Amand, Le 3 avril 1793.
« Mot d'ordre : — Enfants, suivez-moi. « Ralliement : — Je réponds de tout.
« Mes amis, mes braves frères d'armes, nous touchons à un moment attendu depuis longtemps par lès vrais amis de la patrie. Tous voient avec bien de la douleur ce temps d'anarchie. où les bons citoyens ont tout à craindre, et ou les brigands et les assassins font la loi. Depuis cinq ans notre malheureux pays est devenu leur proie. Une représentation populaire, la Convention nationale), au lieu de s'occuper de vos besoins, de votre subsistance ; de créer des lois qui vous assurent un avenir paisible et tranquille, passe son temps à l'intrigue, à former et combattre perpétuellement des factions, et emploie les revenus publics à faire voyager des intrigants, des factieux, sous le nom de commissaires.
Ils viennent près des armées, non pour les secourir, non pour diminuer
l'étendue de leurs besoins, mais pour les désorganiser par des rapports
calomnieux, et envoyer à l'écha-faud, en empruntant la forme des lois,
vos braves frères d'armes, vos généraux quo vous avez vus si souvent à
votre tête braver des dangers de toute espèce. Il est temps de mettre
fin à eette cruelle anarchie ; il est temps de rendre à votre pays la
tranquillité ; il est pressant de lui donner des lois : les moyens
( Je ferai connaître demain à mon armée, par un mémoire imprimé, ma conduite envers ma patrie, et celle de la Convention nationale ; et l'armée pourra juger entre elle et moi qui de nous a le plus à cœur le salut de son pays.
« Le quartier général de l'armée du Nord est établi à Saint-Amand.
« Signé : Lorreri, adjudant général.
« Sur l'enveloppe : Au général Miaczinsky, commandant les flanqueurs de gauche, à Or-chies. »
II
Lettre de Thouvenot, général de brigade en chef de Vétat-major de l'armée du Nord, au commandant de Douai, pour lui demander l'état des troupes qui sont à ses ordres (J).
Au quartier général de Saint-Amand, le 31 mars 1793, l'an II de la République.
« Je prie le citoyen commandant à Douai d'envoyer à l'état-major de l'armée, aux Bains de Saint-Amand, l'état des troupes qui sont à ses ordres.
« Le général de brigade, chef de l'état-major de l'armée du Nord,
« Signé : Thouvenot. » III
Copie de la lettre du bataillon der Saône-et-Loire à Dumouriez, dans laquelle les officiers et volontaires témoignent leur douleur de voir les soupçons s'élever contre leur général et l'anarchie menacer leur patrie (2).
« Citoyen,
« Le cinquième bataillon du département de Saône-et Loire s'empresse de vous communiquer sa douleur sur les soupçons qui vous environnent, et les maux dont vos ennemis veulent vous environner. Il n'est pas un officier qui n'ait gémi à cette nouvelle, et dont le cœur ne soit navré. Bientôt assurément l'armée vous témoignera son affection générale. Les méchants qui vous persécutent sont vos ennemis sans doute, et ce sont vos vertus qui vous les attirent ; mais ils ont encore plus les nôtres, et nous les détestons sans les craindre.
« Toujours les méchants ont fait le mal ; aujourd'hui, ils veulent le
porter à son comble ; mais nous les bravons. C'est en désorganisant la
force armée et en s'en formant une à leur choix, qu'ils peuvent servir
leurs passions. Ils veulent bouleverser l'ordre social
« Vos collègues et tous ceux qui ont partagé vos travaux, ont bien mérité et ils ont, à juste titre, votre confiance intime ; c'est du moins là une faible reconnaissance. Nous pleurons l'arrestation du brave Lerday et désirons que nos sentiments se bornent à cela.
« Nous sommes, général, avec soumission, fermes dans l'inviolabilité de nos serments que nous tiendrons.
Signé ; Chassieux (1), commandant général dudit bataillon; Lelong, adjudant-major. »
(Suivent les noms des officiers et sous-officiers au nombre de 26.)
IV èt V.
Lettre du général de division Philippe-Ega-lité à Paul Thiébaut, aide de camp, pour presser son retour au camp de Saint-Amand (2).
a Arrivez bien vite, mon cher Paul, nous avons bien besoin de vous pour une affaire importante et pressée. Ces dames vous disent mille choses, et vous prient de ne pas perdre de temps.
« Il est ordonné à tous les maîtres des postes de la route de Lille de fournir sur-le-champ des chevaux nécessaires au porteur du présent, chargé de dépêches importantes.
« Saint-Amand, 3 avril, à une et demie du matin.
« Signé : le général de division, Philippe Egalité.
« L'adresse à Paul Thiébaut, aide de camp, chez M. Hamilton, rue Nationale à Lille.
« Contresigné : Egalité. » VI
Extrait des registres du comité de sûreté de Lille, portant une
déclaration d.u citoyen Perrin, sous-lientenant au 19e bataillon des
« Le citoyen Perrin, sous-lieutenant au dix-neuvième bataillon des fédérés, envoyé au camp de Maulde par le comité, pour s'informer de l'esprit qui régnait dans l'armée, a déclaré. qu'il s'est rendu d'abord au parc d'artillerie; que les canonniers volontaires lui ont dit que ceux de ligne paraissent avoir reçu beaucoup d'argent des chefs ; qu'ils commettaient des orgies dans leurs tentes ; qu'ils y avaient crié plusieurs fois : vive le roi, vive Dumouriez. Il s'est rendu au camp où Dumouriez passait en revue les bataillons et les haranguait, en leur disant qu'il comptait sur eux, qu'il fallait détruire l'anarchie, qu'il les mènerait à Paris les armes à la main ; qu'une partie des troupes de ligne de son armée partageait ses sentiments, et principalement la cavalerie. Berchiny-hussards ne le quitte pas. Ce sont ces hussards qui ont arrêté les commissaires de la Convention.
« Le citoyen Perrin s'est porté dans plusieurs tentes où l'on lui a remis une adresse de Dumouriez, qu'il a déposée sur le bureau. Il a fait circuler dans l'armée la proclamation du Comité de défense et de sûreté générale établi à Lille, dont il lui avait été donné copie à son départ. Il a ajouté que Dumouriez avait fait arrêter plusieurs officiers qui avaient parlé de lui, et les avait fait conduire à Tournay; que lui-même allant à la poste pour y prendre des chevaux, avait été arrêté par un caporal et deux fusiliers qui le conduisirent au quartier général ; mais il a trouvé moyen de leur échapper, à l'aide des canonniers volontaires de la Fontaine-Grenelle. »
vir.
Copie d'une dépêche des administrateurs du département du Nord aux administrateurs du Directoire du district de Lille, en date du 2 avril (2).
( Nous vous adressons, citoyens administrateurs, copie d'une réquisition que les commissaires de la Convention nationale viennent de nous faire. Elle est suffisamment motivée pour que nous n'ayons pas besoin d'entrer dans aucun détail sur les mesures que vous aurez à prendre pour atteindre son but en vous concertant avec nos commissaires, si vous en avez dans notre ville. Nous nous hâtons de vous la faire passer et vous recommandons de nous faire part chaquejour de ceque vous aurez fait.
« P. S. Vous sentez qu'il est important que les soldats qui rejoignent l'armée suspendent leur marche et se réunissent dans nos villes sous les généraux de la République.
VIII.
Réquisition des commissaires de la Convention aux conseils généraux des
départements du Nord et du Pas-de-Calais (3).
Proclamation du Comité de sûreté aux Lillois.
X.
Arrêté des commissaires de la Convention, par lequel ils suspendent Dumouriez de toutes ses fonctions et défendent à tout militaire de le reconnaître pour général (1).
« Nous, commissaires de la Convention nationale pour les frontières du Nord,
« Instruits du décret de la Convention qui mande à sa barre le général en chef Dumouriez et qui envoie à l'armée du Nord, pour prendre des renseignements, quatre commissaires de la Convention et le général Beurnonville, ministre de la guerre;
( Instruits par une proclamation du général Dumouriez, imprimée à Valenciennes, intitulée imprimée aux Bains de Saint-Amand, le 1er avril, à 11 heures du soir, et dont nous avons saisi des réimpressions et la planche chez Pri-gnet, imprimeur de cette ville;
(( Instruits que loin d'obéir au décret de la Convention nationale qui le mande à sa barre, le général Dumouriez a fait saisir et mettre en lieu de sûreté, pour garder comme otages, et les quatre commissaires de la Convention, et le ministre de la guerre;
« Considérant qu'une pareille conduite est en même temps, et une rébellion à l'autorité nationale, et un attentat contre la liberté publique, le comble de l'audace et de la perfidie, et qu'il est du plus grand intérêt, qu'il y va même du salut de la nation, de mettre promp-tement un frein à cette audace dont l'histoire nous offre peu d'exemples;
« En vertu des pouvoirs que nous avons reçus de la Convention;
« Suspendons de toutes ses fonctions le général Dumouriez, défendons à tout militaire, de quelque grade qu'il soit, de le reconnaître pour général, et à toute autorité civile et militaire de lui obéir, ainsi que tout citoyen de quelque qualité que ce puisse être.
« Requérons expressément le général Fer-rand, les corps administratifs et municipaux de cette ville de prendre toutes les mesures les plus actives pour arrêter ce général, s'il se présente à Valenciennes, et le faire conduire sur-le-champ, sous bonne et sûre escorte, à la Convention nationale.
( A Valenciennes, en la maison commune, le 2 avril, l'an II de la République française.
« Signé : Debellegarde, Ch. Cochon et Le-quinois. »
, secrétaire (2). J'ai reçu des renseignements sur l'arrestation du
général d'Har-ville; il a été arrêté par les commissaires natio-
Ce ne sont pas des commissaires nationaux qui ont appréhendé d'Harville, mais les commissaires de la Convention Hentz et Laporte, qui l'ont suspendu. Il n'y a donc plus lieu à examiner leur conduite, puisque la Convention l'a déjà approuvée. Je propose la question préalable sur la proposition de Romme.
Plusieurs membres : Non, non : nous demandons que la suspension de d'Harville soit soumise au comité de la guerre.
D'autres membres : L'ordre du jour, l'ordre du jour.
l'aîné. Oui, oui, l'ordre du jour. Dumouriez se plaignait de l'arrestation de d'Harville; donc, ce général était son complice. Je demande que vous passiez à l'ordre du jour sur la proposition de Romme, ou que vous approuviez la conduite de vos commissaires.
Et moi, je demande que l'on examine l'arrêté et qu'on nous fasse un rapport séance tenante. Ainsi on coupera court à tout débat, car je ne doute pas de l'approbation unanime qui sera donnée à toutes les décisions qu'ont prises nos commissaires.
(La Convention décrète que son comité de défense générale lui fera un rapport, séance tenante, sur l'arrêté des commissaires représen" tants Hentz et Laporte, qui ont mis en état d'arrestation le général d'Harville (1).
, au nom du comité de défense générale, donne lecture du décret et de la proclamation adressée aux soldats de Dumouriez, que la Convention avait adopté dans sa séance, du 4 avril 1793, au soir (2), et qu'elle avait renvoyés à ce comité pour rédaction définitive; ils sont ainsi conçus (3) :
(La Convention nationale adopte à l'unanimité la proclamation qui lui a été présentée par le comité de défense générale pour éclairer l'armée de la Belgique sur la trahison de Dumouriez, et prévenir l'égarement dans lequel ce conspirateur cherche à l'entraîner.)
Suit la proclamation :
La Convention nationale à l'armée de la Belgique.
« Braves guerriers,
« Dumouriez a trahi sa patrie. Ce conspirateur, sous lequel votre valeur obtint jadis des triomphes dont il s'attribuait la gloire, ne cherche plus qu'à vous faire essuyer des défaites pour vous en attribuer la honte.
« Il tente de tourner contre la liberté las armes que vous n'aviez prises
que contre la tyrannie. Vous, Français, menacer votre patrie !
« Eh ! n'est-ce pas à la voix de la patrie en péril que vous avez marché et vaincu 1 N'est-ce pas elle qui demande encore vos bras et vos armes ?
« Sa voix sacrée retentira au fond de vos cœurs; vous vous souviendrez de vos triomphes, et vous brûlerez d'en obtenir de nouveaux.
« Ainsi vous jugent les représentants de la nation, dont vous avez la confiance et l'estime; ils vous connaissent mieux que le chef perfide qui vous trompe pour vous avilir et vous perdre.
« Sa main audacieuse a violé la souveraineté du peuple, en saisissant ceux de ses représentants que la Convention nationale avait envoyés vers vous. Son crime est connu : il veut vous donner un roi. Son nom est voué à l'infamie, sa tête à l'échafaud. Vengez votre gloire et la patrie; livrez le traître; une couronne civique est le prix qui vous attend.
« Soldats français, s'il pouvait y avoir parmi vous des hommes qui ne restassent pas fidèles par l'horreur de la trahison, qu'ils apprennent du moins à l'être par la terreur du châtiment.
« Vous n'êtes que l'avant-garde de la nation, elle est tout entière derrière vous, prête à protéger de sa puissance ceux qui sauront la servir, à écraser de sa foudre ceux qui oseraient être rebelles. " • ^
« Le traître Dumouriez a calomnié Paris pour vous irriter contre cette ville, qui fut le berceau de la liberté, qui doit en être le soutien; Paris est calme, il veille à la sûreté des représentants du peuple, respecte les lois, est prêt à faire marcher'ses phalanges républicaines.
« Il vous a présenté la Convention nationale comme divisée en deux factions ; il s'est prévalu de quelques débats que l'amour brûlant de la liberté, toujours ombrageux, surtout dans des temps révolutionnaires, a dû exciter parmi des hommes chargés des intérêts d'un grand peuple.
« Soldats républicains, c'est de sa part une perfidie pour vous rendre les instruments aveugles de l'anéantissement de la Convention, et du rétablissement de la royauté.
( La Convention nationale est une comme la nation; elle maintiendra l'individualité de la République; elle est ralliée autour de l'oriflamme de la liberté; elle la portera, s'il le faut, dans vos rangs; elle fait unanimement le serment de mourir avec vous, ou d'exterminer les tyrans et leurs satellites. »
(La Convention adopte la rédaction présentée par Lasource.)
fait savoir que des pétitionnaires demandent à être entendus (1).
(La Convention décrète qu'ils seront admis à la séance du soir.)
Une députation du conseil général de la commune de Paris, se présente à
la barre (2).
répond à l'orateur et accorde à la dêputation les honneurs de la séance.
(La Convention renvoie la pétition au comité de sûreté générale pour en faire un rapport séance tenante.)
, secrétaire donne lecture d'une lettre du citoyen Thuring, se disant adjoint à l'état-major de Dumouriez (1), qui a été mis en état d'arrestation par ordre du comité de défense générale et qui demande à la Convention d'être entendu a la barre; cette lettre est ainsi conçue :
Paris, le 5 avril, l'an II de la République.
« Citoyen Président,
« J'arrivai hier à Paris pour dénoncer à la Convention nationale les généraux conspirateurs; par crainte d'alarmer le peuple, je demandai à communiquer au comité de salut public ce que je savais. Je m'y rendis plusieurs fois et n'y trouvai personne. J'y retournai vers les sept heures du soir. Le comité était alors rempli de monde. J'en vins à l'article de Dampierre. Je dis ce que j'en.savais et ce que j'en pensai avec la franchise d'un vrai républicain. Tout le monde fut indigné contre moi... comme si j'eus touché à l'oint du Seigneur. On me mena au comité de sûreté générale où l'on me fit subir un interrogatoire de douze heures, à l'issue duquel je fus, pour prix de mon dévouement civique, envoyé à l'Abbaye. N'ayant parlé que pour ma justification, je demande à être traduit à la barre et de là au supplice si je ne dis pas vrai pro salus populi.
Le Républicain, « Signé : Tbluring. »
(2). J'observe qu'après avoir interrogé ce particulier au comité, nous
avons eu des soupçons, qui se sont bientôt changés en certitude,
lorsqu'après l'avoir fait fouiller, nous avons trouvé sur lui un petit
bonnet vert et un petit cadre, sur lequel était gravé d'un côté une
Marie-Antoinette, sous l'emblème d'une Vierge avec un enfant dans ses
bras, de l'autre un soleil levant avec une corne d'abondance, signe de
la résurrection de la royauté. A la suite de cess constatations nous
avons cru devoir l'envoyer à l'Abbaye.
Si nous nous conduisons avec faiblesse au milieu des conspirations dont nous sommes environnés, il est impossible de sauver la République. D'après les rapports qui nous ont été faits, il est clair que c'est un émissaire de Dumouriez, qui venait calomnier Dampierre et demander qu'on nomme Villiers £1 Scb place. Je demande qu'au lieu de passer à l'ordre du jour, il soit décrété d'accusation.
Cet homme doit être regardé comme un traître, avec d'autant plus de raison qu'il a été surpris jetant au feu des signes de contre-révolution.
Je propose larédaction suivante:
« La Convention prononce le décret d'accusation contre Thuring, passe à l'ordre du jour sur sa demande, et charge son comité de lui présenter l'acte d'accusation dans la séance du soir. »
(La Convention adopte cette rédaction.)
(1). Je demande la parole pour une motion d'ordre.
Vous avez la parole.
Le décret que vous venez de rendre contre Thuring est inutile. U n'y a pas besoin de décret d'accusation. L'accusateur public du tribunal révolutionnaire doit avoir le droit de poursuivre. C'est un piège qu'on a voulu tendre à la Convention en lui faisant décréter que les prévenus de crimes de lèse-nation ne pourraient être poursuivis devant le tribunal révolutionnaire qu'en vertu d'un décret d'accusation. On favorise ainsi l'impunité des grands coupables par la lenteur et la manière dont l'acte d'accusation est dressé, et votre but est manqué. Je demande le rapport de cé décret, et que l'accusateur public du tribunal révolutionnaire puisse traduire devant ce tribunal tous ceux qui seront prévenus de crimes de lèse-nation.
Pour maintenir les principes et accélérer en même temps l'instruction de la procédure devant le tribunal révolutionnaire, je demande que les prévenus de conspiration, sur un simple décret d'accusation, soient renvoyés avec les pièces devant ce tribunal.
La Convention nationale a voulu qu'un tribunal révolutionnaire fût créé,
elle 1 a voulu, pour le salut public; elle l'a voulu pour effrayer les
conspirateurs de toutes les
Mais remarquez bien, citoyens, que votre objet sera manqué si vous voulez vous en tenir ■au régime premier que vous avez établi. Vous l'avez tellement senti que vous avez anéanti la commission que vous aviez créée pour proposer les décrets d'accusation. Si l'on ne pouvait entamer une procédure qu'en vertu d'un décret d'accusation, telle va être la multiplicité de ces décrets, que la Convention aura à porter, qu'elle ne pourrait, pour ainsi dire, se livrer qu'à ces seules fonctions.
Je demande, si vous voulez éviter des scènes sanglantes qu'amènerait la vengeance populaire...
Plusieurs membres ; Oui ! oui !
si vous voulez vous montrer terribles à l'égard des ennemis du peuple. Dans ce cas il n'aura rien à vous reprocher, puisque vous lui aurez donné- un tribunal qui pourra lui rendre justice.
Remarquez bien qu'en dispensant l'accusateur public d'un décret préalable contre les prévenus, on ne peut rien articuler contre vous. Eh ! quels sont donc ces criminels de lèse-nation 1 Pourquoi une loi particulière pour eux ? Y a-t-il une loi particulière pour les autres délits? Y a-t-il un acte préliminaire dirigé contre le coupable par l'accusateur public?
Plusieurs membres (au centre) : Il y a un jury d'accusation.
On m'observe qu'il y a un jury d'accusation. Certes je le sais bien; mais qui de nous peut comparer une institution faite ; pour un gouvernement en harmonie,, avec îa nécessité de mettre en activité un tribunal qui coupe la trame d'un crime dirigé contre la sûreté publique ? Je dis qu'il ne faut nulle indulgence contre le conspirateur ; je dis qu'il reste assez de solennité à l'instruction ; je dis que lorsque l'accusateur public aura dirigé une procédure contre un prévenu, ce prévenu, s'il est véritablement innocent-, pourra mettre sa justification en pleine lumière, en pleine évidence, puisqu'il a tous les moyens de défense quoiqu'il soit privé de ce jury d'accusation.
Et d'ailleurs l'intérêt public ne doit-il pas marcher avant l'intérêt privé ? Il suffit que l'innocent ne périsse pas, pour que vous deviez conserver, resserrer tout ce qui peut donner à ce tribunal toute l'activité nécessaire pour déjouer nos ennemis.
Certes, si le despotisme venait à triompher, vous verriez bientôt un tribunal prévôtal dans tous les départements, pour faire tomber les têtes de tous les patriotes, même de ceux qui n'auraient pas montré un patriotisme très énergique. N'imitons pas le despotisme dans
ses atrocités ; mais quand vous avez pris toutes les mesures pour que l'homme juste ne soit pas confondu avec le coupable, d'où vient donc cette sollicitude pour ceux qui voudraient voir la nation baignée dans son propre sang ? J'en appelle à la nécessité de sauver tout le peuple. Il ne peut trouver son salut que dans notre énergie, que dans votre rigueur.
Ainsi, plus de ménagements pour les conspirateurs. Je demande qu'on passe à l'ordre du jour sur la proposition qui a été faite de rendre un décret d'accusation contre ceux qui pourraient être prévenus du crime de conspiration; et à cet égard je répète ma première réflexion, c'est que tel est le nombre de scélérats qui ont porté la guerre dans les départements maritimes, que la Convention serait forcée de perdre de vue les autres grands objets qui appellent son attention, s'il fallait rendre des décrets d'accusation contre tous les prévenus.
Qu'on me permette, pourtant, un amendement à la proposition de Charlier; c'est qu'il soit bien entendu que la Convention ne veut pas qu'aucun de ses membres puisse être traduit devant un tribunal, sans qu'elle ait elle-même prononcé, s'il y a lieu à accusation contre lui. La représentation nationale doit rester intacte pour le salut même du peuple, jusqu'à ce que la Convention elle-même ait jugé qu'il y a lieu à accusation contre un de ses membres. Ainsi vous concilierez par là ce que vous devez à vous-mêmes, avec ce que vous devez à la nation, pour déjouer les conspirateurs.
Je demande que ma proposition soit mise aux voix; plus de crainte, plus de pusillanimité, et je me flatte que bientôt le peuple verra que vous voulez bien lui faire justice, et qu'il s'en rapportera à votre sagesse et à votre énergie. (Vifs applaudissements.)
Un grand nombre de voix : Aux voix, aux voix !
Citoyensril faut que la justice révolutionnaire soit sévère et prompte, mais il ne faut pas qu'elle soit oppressive et subversive de la liberté. Il y aurait oppression, si vous mettiez entre les mains de l'accusateur public le pouvoir d'accuser seul, car dans le tribunal révolutionnaire vous n'avez point de juré d'accusation. Il y aurait évidemment oppression, parce que ce serait un seul qui exercerait le droit d'accuser, et il pourrait, de son propre mouvement, dresser des actes d'accusation contre les meilleurs citoyens et contre la moitié de la République.
D'un autre côté, la proposition qu'on vous fait est subversive de la liberté; car c'est une véritable dictature judiciaire qu'on vient de vous proposer. Le décret d'accusation doit être porté par vous toutes les fois qu'il y a délit national; ç'estiin principe incontestable, mais lorsqu'on vient me parler de sauver la République par des mesures qui attaquent les principes, on n'observe pas que les républiques ne se sauvent que par la justice.
Pour la sauver, il faut se serrer entre nous; pour la sauver, il faut être sensible à la vérité et aux droits de l'homme. Il ne faut pas souffrir qu'il y soit porté atteinte; il faut que nous soyons sévères et non injustes; inflexibles, mais non pas bourreaux; législateurs, mais non pas assassins. Je demande que la proposition de Laujuinais soit mise aux voix, et qu'on
passe à l'ordre du jour sur la motion de Char-lier et celle de Danton.
Plusieurs membres (à droite) : Appuyé ! appuyé !
J'oppose à Barbaroux un fait : il a exposé ici, aux applaudissements de l'Assemblée, l'institution à Marseille d'un tribunal vraiment populaire, qui a empêché le peuple, dans des jours de désespoir, d'exterminer les contre-révolutionnaires. Il est assez étonnant qu'un homme qui a lui-même justifié cette mesure, qui a sauvé la liberté à Marseille, s'élève,aujourd'hui avec tant de force contre une semblable institution. (Applaudissements.)
Danton ne se contente pas d'attaquer tous les jours les principes à cette tribune, il dénature encore les faits. Le tribunal populaire, établi à Marseille, et dont j'ai moi-même fait l'éloge à la tribune, n'a jamais condamné personne à mort.
Un grand nombre de membres : La clôture ! la clôture !
(La Convention ferme la discussion.)
Je demande la- parole pour un amendement.
Citoyens, je serai toujours le défenseur des principes et de la liberté de mon pays. Si, cependant, le péril des circonstances vous a forcés à laisser fléchir la rigueur du principe, qui veut, dans toute sa rectitude, que tout criminel de lèse-nation ne puisse être accusé que • par la nation ou ses représentants, je crois qu'à l'exception faite par Danton, il faut en ajouter deux autres. Quel est cet accusateur public 1 Qui de nous voudrait garantir l'incorruptibilité d'un fonctionnaire public quelconque? Et cependant on vous propose de rendre un homme plus puissant que vous-mêmes .
Plusieurs membres : Non, non !
Qui me garantira, lorsque je suis environné de trahison, qu'un homme, un seul homme n'arrête pas à la fois, en un instant, les ministres, les généraux de la République, tous les principaux fonctionnaires publics; celui-là, je le repète, qui aurait ce pouvoir serait plus puissant que vous; et maître, s'il voulait l'être un instant, de vos armées, de vos flottes et de vos finances, il pourrait dissoudre la République, et par des accusations successives, vous ôter la faculté même de la réorganiser. Je demande donc, d'abord, que les ministres, les généraux, la trésorerie soient exceptés; vous examinerez ensuite la question générale des fonctionnaires publics. (Vifs applaudissements.)
Président, rallions-nous aux principes.
Il est facile de mettre d'accord ma proposition avec les deux amendements qui ont été présentés, le premier par Danton, le second par Boyer-Fonfrède. Je demande que tous les citoyens puissent être poursuivis par l'accusateur public du tribunal révolutionnaire, sauf en ce qui concerne les représentants du peuple. Quant aux ministres et aux généraux, je demande que l'accusateur public soit tenu de rendre compte à l'Assemblée de la pro- '
cédure qu'il va entamer et que, dans le cas où la Convention n'en ordonnerait pas la suspension, il puisse en poursuivre l'action devant le tribunal révolutionnaire.
J'appuie cette proposition, mais je demande qu'il soit bien entendu qu'en adoptant les exceptions dont on vient de vous parler, vous désirez ôter à l'accusateur public du tribunal révolutionnaire le pouvoir de désorganiser la République; car, s'il peut faire mettre en état d'arrestation et par conséquent soustraire à leurs fonctions les généraux et les ministres, il est évident que votre but est manqué. Je demande donc que l'accusateur public ne puisse pas ordonner l'arrestation de ces fonctionnaires, sans y avoir été autorisé par la Convention.
J'appuie la motion du préopinant, car il faut avant tout respecter la vie des citoyens.
Plusieurs membres (sur la Montagne):Mais, il ne s'agit pas de la cour d'Orléans.
Quoi! vous voulez, par des mesures liberticides, anéantir la liberté civile, sous prétexte de conserver la liberté politique. Je propose que cette exception soit étendue aux administrateurs des départements, et que l'accusation ne puisse être poursufrie devant le tribunal sans que la Convention ait connaissance de cause.
Dans beaucoup de départements les administrateurs ont été obligés de s'emparer de tous les pouvoirs, pour opposer une résistance salutaire aux ennemis de la République. C'est ainsi qu'à Lille les administrateurs ont arrêté les effets de la trahison de Dumouriez. Si donc le général Dumouriez, qui avait capté la confiance de beaucoup de patriotes, parvenait à capter celle de l'accusateur public, et à combiner avec lui les moyens de paralyser cette administration en enlevant à leurs fonctions tous les administrateurs, voyez quels seraient les dangers de la chose publique? Il faut, au moins, prendre des précautions contre cette probabilité ; car dans un temps de révolution il y a tant d'intrigants, tant d'ambitieux qui parviennent aux places les plus importantes, qu'il faut se tenir toujours sur ses gardes. Ce n'est qu'avec de la méfiance,que nous viendrons à bout de sauver la patrie. Je crois donc qu'il faut que l'accusateur public, avant de lancer un décret d'accusation contre des administrateurs, en donne avis à la Convention nationale, de crainte qu'on ne désorganise deux ou trois départements à la fois, et qu'on n'y allume par ce moyeç la guerre civile.
Je partage les craintes de Cambon, je n'entends pas que le comité de salut public puisse prendre aucune mesure contre les citoyens dont le concours est nécessaire à la marche de la machine politique et à la défense de l'Etat, pas plus que contre les ministres, les généraux et les administrateurs et les commissaires de la trésorerie. Ainsi, pour que ce comité ne désorganise pas la société, je demande qu'on excepte de la classe des citoyens qu'on pourra suspendre, destituer ou arrêter les armuriers, les charrons, les fondeurs et autres citoyens qui travaillent à fabriquer des armes et des instruments de guerre.
Bravo, Marat, bravo !
Un moment, Barbaroux, j'ai de quoi refroidir ta joie. Je demande qu'on excepte les tailleurs, les cordonniers, les fourreurs, les passementiers, les fabricants de draps, de toile, de chapeaux, de casques, de ceinturons, de havresacs, de guêtres, de pompons. Je demande qu'on excepte les boulangers, les bouchers, les charcutiers, les pâtissiers. Je demande qu'on excepte les laboureurs, les jardiniers, les charretiers, les porteurs d'eau. Je demande qu'on excepte tous les citoyens en état de porter les armes, les jeunes gens qui devront les remplacer un jour; les femmes qui font des enfants; car, Messieurs les hommes d'Etat, il faut bien conserver intacts ces soutiens de la société, pour ne pas la désorganiser. (Interruptions violentes et murmures prolongés à droite et au centre.)
Président, maintenez-moi le silence, pour que je fasse sentir à la Convention qu'elle est composée d'hommes irréfléchis, d'hommes inconsidérés (1)... (Nouveaux murmures.)
Un grand nombre de membres : A l'ordre, à l'ordre.
Marat, je vous rappelle à l'ordre.
Et moi, je vous rappelle au sens commun. (Murmures prolongés.) La censure n'empêchera pas que la vérité ne soit la vérité.
Marat, je vous rappelle à l'ordre avec censure et inscription au procès-verbal.
J'appuie la proposition de Marat et je demande que tous les citoyens soient traités également devant le tribunal révolutionnaire.
(La Convention adopte la proposition de Charlier, et renvoie toutes les exceptions, sauf celles concernant les députés, les généraux et les ministres, au comité de législation, pour lui en faire son rapport dans le plus bref délai.)
Suit le texte définitif du décret rendu (2) :
« La Convention nationale décrète ce qui suit :
Art. 1er.
« La Convention nationale rapporte l'article de son décret, qui ordonnait que le tribunal extraordinaire ne pourrait juger les crimes de conspiration et délits nationaux que sur le décret d'accusation porté par la Convention.
Art. 2.
« L'accusateur public près du tribunal est autorisé à faire arrêter,
poursuivre et juger
Art. 3.
« Ne pourra cependant ledit accusateur décerner aucun mandat d'arrêt ni d'amener contre les membres de la Convention nationale sans un décret d'accusation, ni contre les ministres et généraux des armées de la République, sans en avoir obtenu l'autorisation de la Convention.
Art. 4.
« Quant aux autres exceptions, la Convention renvoie à son comité de législation, pour lui en faire son rapport dans le plus court délai. »
Un membre (1) nommé commissaire pour les départements du Nord, fait remarquer une omission dans le décret rendu dans la séance précédente sur le nombre des commissaires.
(La Convention décrète en conséquence qu'après ces mots : six commissaires, dans l'article 1er, il sera mis ceux-ci : outre deux autres commissaires envoyés à Péronne.)
, au nom du comité de la guerre, donne lecture d'un rapport sur la demande faite par le citoyen Bertèche d'une gratification de 4,000 livres, et présente un projet de décret tendant à autoriser le ministre de la guerre à prendre, sur les fonds de son ministère, la somme nécessaire pour le rétablissement de la santé de ce militaire; ce projet de décret est ainsi conçu (2) :
« Sur la demande qui en est faite, la Convention nationale décrète que le ministre de la guerre est autorisé à prendre, sur les fonds de la guerre, la somme nécessaire pour le rétablissement de la santé du brave Bertèche, à charge d'en rendre compte à la Convention. »
(La Convention adopte ce projet de décret.)
, secrétaire, reprend la lecture des lettres, adresses et pétitions envoyées à l'Assemblée ;
33° Lettre des citoyens Billaud-Vàrenne et Sevestre, commissaires de la Convention nationale dans les départements des Côtes-du-Nord et de l'Ille-et-Vilaine (3), qui annoncent que les routes de ces départements sont devenues totalement impraticables dans plusieurs parties et rendent impossibles les transports militaires et d'artillerie que pourrait rendre nécessaires la défense des côtes de la République.
(La Convention décrète que le ministre de l'intérieur mettra sur-le-champ à la disposition des administrateurs de ces départements, les fonds qui leur ont été répartis pour la réparation des routes de leur arrondissement. )
34° Lettre du citoyen Lebrun, président du conseil exécutif provisoire
(4), par laquelle
Paris, le
« Citoyen Président,
« Une lettre de Mindin, au-dessous de Paimbœuf, en date du 29 mars, adressée au ministre de la marine, annonce que la frégate la Gracieuse, après avoir été mise un instant en danger par le feu d'une batterie, élevée dans une nuit par les rebelles, a démonté cette batterie, et chassé les révoltés par une descente de tout l'équipage de la frégate.
« L'effet de ce succès sera que la Perdrix pourra revenir balayer les côtes, et forcer les rebelles d'abandonner les forts dont ils se sont emparés.
« L'équipage du capitaine Savary s'est distingué par une subordination égale à son zèle. »
« Le président du conseil, ministre des affaires étrangères.
« Signé : Lebrun. »
(1). Je dois informer la Convention d'un fait digne de toute son admiration. La commune de Pornic, près Nantes, département de la Loire-Inférieure, était menacée par un corps de 3,000 révoltés : 85 habitants de cette commune prennent la résolution de marcher au-devant des rebelles. Us partent ; mais ils marchent par un autre chemin. Les révoltés arrivent, emportent le village, pendent deux officiers municipaux. Les 85 citoyens reviennent, font le siège de leurs propres foyers, entrent la baïonnette au bout du fusil, tuent 215 ennemis, et mettent le reste en fuite. (Vifs applaudissements.) Cette nouvelle m'a été annoncée par le maire de Nantes.
(La Convention décrète la mention honorable et ordonne l'insertion de cette lettre au Bulletin.)
35° Lettre des citoyens Carnot et Lesage-Senault, commissaires de la Convention dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais, par laquelle ils annoncent que les garnisons de Lille, Valenciennes et Douai pnt renouvelé avec enthousiasme le serment de fidélité à la République. Us envoient copie de deux lettres de Dumouriez, l'une à l'armée, l'autre à Miaczinski (2) et une proclamation qu'ils ont faites sur la conduite du traître ; ces pièces sont ainsi conçues (3) :
Douai, le 3 avril 1793, l'an II de la République
« Citoyens,
_ « Nous vous envoyons plusieurs pièces relatives à la trahison de
Dumouriez. Nous vous
« Les commissaires de la Convention nationale,
Signé : L. Carnot, Lesage-Senault. »
Proclamation de Carnot et Lesage-Senault.
« Au nom de la République française,
« Nous, commissaires de la Convention nationale, déclarons le ci-devant général Dumouriez infâme et traître à la patrie, défendons à tous les officiers généraux èt commandants de place, à tout officier, soldat ou autre agent militaire quelconque, à tous commissaires des guerres, payeurs et pourvoyeurs des troupes, de le reconnaître et de lui obéir ; ordonnons à tous les généraux de division de rallier les troupes de la République qui sont à leurs ordres et de se retirer sous le canon des places fortes les plus exposées avec les vivres, l'artillerie, les munitions et les bagages de l'armée, et de s'y maintenir jusqu'à la mort contre les forces ennemies et celles que pourrait commander Dumouriez ; invitons tous les soldats restés fidèles à la patrie de courir sus et de nous livrer ledit Dumouriez mort ou vif, ainsi que tous ses complices et adhérents connus.
« Soldats de la République, vengez la nation, vengez votre honneur. Tant que cet homme eut des succès, vous étiez d'excellents soldats; depuis qu'il a essuyé des revers il vous traite de lâches et de brigands à la face de l'Europe entière. Mais ses victoires ne prouvent que votre courage, et ses défaites, son ignorance non moins profonde que sa perfidie. Il a semé parmi vous la division, il a vendu à nos ennemis communs votre liberté et celle de son pays, il a volé les trésors qui étaient prodigués par la Convention nationale pour que rien ne vous manquât, et il a eu la scélératesse d'attribuer à vos représentants ses propres infamies. Méritez, citoyens, la reconnaissance de la République en la délivrant du monstre le plus odieux qui ait jamais désolé la terre.
« A Douai, le 3 avril 1793, l'an II de la République.
« Signé : L. Carnot, Lesage-Senault. »
36° Lettre de Gohier, ministre de la justice, par laquelle il demande, au nom des administrateurs du département du Finistère, que la Convention veuille bien étendre aux tribu-
naux de l'arrondissement de Brest les dispositions de la loi du 4 mars, et leur attribue la connaissance des complots qui viendraient à éclater dans ce département ; cette lettre est ainsi conçue (1) :
« Paris le
« Citoyen Président,
« Une insurrection violente, dont le prétexte a été le recrutement, s'est manifestée dans le district de Brest, la force armée l'a dissipée ; mais les prisons renferment une quantité considérable de coupables, et le sang des patriotes qui a coulé, demande une prompte vengeance.
( Les dispositions de la loi du 19 octobre, présentent au département du Finistère des difficultés qu'il appartient seul à la Convention de lever. Les coupables sont emprisonnés dans des lieux assez écartés les uns des autres, la difficulté du transport, le retard qu'il occasionnerait dans leur jugement, la nécessité de leur faire subir sur le lieu même la peine qu'ils ont encourue, seul moyen d'intimider les coupables, toutes ces considérations ont déterminé le département du Finistère à demander à la Convention qu'elle veuille bien étendre aux tribunaux de son arrondissement les dispositions de la loi du 4 mars, et de leur attribuer la connaissance des complots qui pourront éclater dans ce département.
« Si ce moyen peut être adopté, c'est sans doute dans le moment où l'aristocratie et le fanatisme se coalisent pour détruire la liberté, dans le moment où les tribunaux renouvelés ne sont plus composés que de patriotes. Peut-être la Convention nationale trouvera-t-elle convenable d'investir tous les tribunaux de districts de l'instruction de ces jugements.
« Signé : Gohier. »
(La Convention renvoie cette lettre au comité de législation.)
37° Lettre du conseil exécutif provisoire par laquelle il transmet à la Convention une lettre du général Biron qui annonce les bonnes dispositions de l'armée qu'il commande et fait part de quelques avantages qu'elle vient d'obtenir ; cette lettre est ainsi conçue (2) :
Paris, le
« Citoyen Président,
« J'adresse à la Convention nationale copie d'une lettre que je reçois du général Biron ; elle rend compte d'un avantage remporté par les troupes de la République contre ses ennemis, et elle annonce en même temps les bonnes dispositions des soldats français pour repousser les ennemis dans le cas où ils tenteraient une nouvelle attaque.
( Signé : Lebrun, par intérim. »
Le général Biron au ministre de la guerre.
« Nice, le
« Citoyen,
J'ai l'honneur de vous rendre compte que nonobstant plus d'un pied de neige tombé depuis deux ou trois jours, les ennemis ont attaqué le camp de Braons sur trois colonnes le 28, à trois heures du matin ; ils ont été vigoureusement repoussés ; leur perte que l'obscurité de la nuit rend difficile d'évaluer exactement doit avoir été fort considérable à en juger par la quantité de sang trouvé dans beaucoup d'endroits différents, et celle de chapeaux et de fusils qui a été ramassée, car vous savez avec quels soins ils emportent leurs morts. Nous avons fait sept prisonniers ; nous en aurions "fait beaucoup plus sans l'obscurité. Un grenadier du 28e régiment, nommé Dussoc, a fait deux prisonniers à la fois en les prenant au collet, un de chaque main, au moment où les ennemis faisaient leur retraite. Je vous adresserai par le prochain courrier des renseignements détaillés sur ce grenadier qui mérite certainement votre attention et votre intérêt. On nous assure que les ennemis tenteront, sous quarante-huit heures, de prendre leur revanche avec des forces très considérables. Les soldats de la liberté les attendent et les désirent avec impatience.
« Signé : Biron. »
« Pour copie conforme :
' « L'adjoint de la 5e division au ministère de la guerre.
« Signé : Illisible. »
(La Convention décrète l'insertion de cette lettre au Bulletin.)
, au nom du comité de défense générale, donne lecture d'un rapport (2) et présente un projet de décret (3) qui désigne les personnes appelées à servir d'otages à la nation française, jusqu'à ce que la liberté ait été rendue aux commissaires de la Convention et au ministre Beurnonville, détenus dans l'armée du prince de Cobourg; il s'exprime ainsi :
Citoyens, vous avez renvoyé à votre comité de défense générale la
proposition qui a été faite de prendre pour otage une partie des
prisonniers faits sur les Autrichiens. Votre comité n'a cru devoir
adopter cette proposition, en raison des représailles dont les ennemis
useraient sur les. Français qui sont leurs prisonniers. Mais en
parcourant le tableau des prisonniers que nous avons faits aux
Autrichiens, le comité a reconnu qu'il se trouvait parmi ces prisonniers
deux parents du prince de Cobourg, ayant voix et séance à la
Si jamais le droit de représailles peut être pratiqué, c'est sans doute dans un moment où le droit des gens a été si indignement violé vis-à-vis des Français, dans la personne de quatre de leurs représentants.
Le comité vous propose de prendre pour otage les deux princes de Linange.
Yoici d'ailleurs le projet de décret qu'il m'a chargé de vous présenter :
« La Convention nationale, considérant que tous les principes du droit des gens sont violés par la détention à l'armée du prince de Cobourg, de*> quatre commissaires envoyés à l'armée du Nord, et du ministre de la guerre;
« Considérant que ces commissaires, ainsi que le ministre Beurnonville, n'ont pu, sous aucun rapport, être regardés comme prisonniers de guerre, et que si les généraux de l'armée autrichienne eussent respecté les principes qui lient encore les nations, alors même qu'elles se font la guerre, ils auraient rendu à ces citoyens, fonctionnaires publics, la liberté dont un général rebelle les avait lâchement et traîtreusement privés;
« Considérant que le prince de Cobourg ne peut avoir aucun prétexte pour excuser une conduite aussi révoltante, puisque tous les prisonniers faits sur les armées ennemies ont été traités avec tous les égards que l'humanité commande, et que d'ailleurs ce ne serait jamais sur dea citoyens représentants du peuple ou fonctionnaires publics, et livrés par la trahison la plus infâme, que devrait tomber la représaille;
« Considérant enfin que la justice et l'humanité même exigent que la Convention nationale use de tous les moyens qui sont en son pouvoir pour prévenir les derniers excès auxquels pourraient se livrer ceux qui ont maintenant les commissaires en leur puissance, décrète ce qui suit :
« Art. 1er. François-Xavier, comte Avesperg;
Auguste, comte de Linange, tous les deux de la famille du prince de
Cobourg, et ayant voix et séance à la diète de Ratisbonne, actuellement
prisonniers de guerre, et détenus dans la ville de Reims, serviront
d'otages à la nation française,, jusquà ce que la liberté ait été rendue
aux quatre commissaires de la Convention nationale et au ministre de
Beurnonville.
« Art. 2. Il en sera usé, à l'égard de ces otages, de la même manière qu'il en sera usé à l'égard des commissaires de la Convention nationale et du ministre Beurnonville.
« Art. 3. Le conseil exécutif est chargé de faire mettre sur-le-champ le présent décret à exécution, en ce qui concerne la translàtion et l'emprisonnement des otages. Il est également chargé de veiller à ce que tous les prisonniers de guerre continuent à jouir du traitement que les lois et les capitulations leur assurent. »
(1). Ces deux personnes ne doivent pas seules servir d'otages. Vos com-
(de Douai). Je demande que la disposition du premier article soit étendue à deux neveux du général Clairfait, que l'administration de Mons a fait transférer à Valenciennes, et qui y sont actuellement.
U n grand nombre de membres : Appuyé ! appuyé !
J'appuie bien volontiers les additions apportées au décret par Haus-semann et Merlin, mais à mon avis cela ne suffit pas. Il faut avant tout déclarer que ces prisonniers seront transférés sur Paris.
C'est principalement sur cette ville que les ennemis et le traître Dumouriez veulent diriger leur marche, et nous devons croire que les autorités constituées de Paris seront assez fermes pour faire respecter ce dépôt.
Je demande, en outre, de transférer dans cette même ville, pour y servir • également d'otages, tous ceux qui, ayant voix et séance à la diète de Ratisbonne, pourraient se trouver actuellement en France, à l'exception cependant de tous ceux qui sont maintenant en activité de service dans les armées de la. République.
Les mêmes membres : Appuyé, aux voix, aux voix !
(La Convention adopte le projet de décret présenté par Guadet, avec les amendements de Haussmann, de Merlin et de Boyer-Fonfrède.)
(1). Je demande qu'on expédie de suite des courriers extraordinaires, afin que ce décret soit plus promptement mis à exécution, en d'autres termes afin qu'on s'assure au plus tôt des prisonniers.
(La Convention adopte cette nouvelle proposition.)
Suit le texte définitif du décret rendu (2) :
« La Convention nationale, considérant que tous les principes du droit des gens sont violés par la détention, dans l'armée du prince de Cobourg, des quatre commissaires envoyés par elle à l'armée du Nord, et du ministre de la guerre;
« Considérant que ces commissaires, ainsi que le ministre Beurnonville, n'ont pu, sous aucun rapport, être regardés comme prisonniers de guerre, et que si les généraux de l'armée autrichienne eussent respecté les principes qui lient encore les nations, alors même qu'elles se font la guerre, ils auraient rendu à ces citoyens fonctionnaires publics, la liberté dont un général rebelle les avait lâchement et traîtreusement privés;
« Considérant que le prince de Cobourg ne peut avoir aucun prétexte pour
excuser une conduite aussi révoltante, puisque tous les prisonniers
faits sur les armées ennemies ont été traités avec tous les. égards que
l'humanité commande, et que d'ailleurs ce ne serait
« Considérant enfin que la justice et l'humanité même exigent que la Convention nationale use de tous les moyens qui sont en son pouvoir pour prévenir les derniers excès auxquels pourraient se livrer ceux qui ont maintenant ses commissaires en leur puissance, décrète ce qui suit :
Art. 1er.
« François-Xavier, comte Aversperg, et Auguste, comte de Lin ange, tous les deux de la famille du prince de Cobourg, et ayant voix et séance à la diète de Ratisbonne, actuellement prisonniers de guerre, et détenus dans la ville de Reims; les deux Labarre, frères, neveux du général Clairfait, actuellement détenus à Valenciennes; Charles Woldemar, comte régnant de Linange-Westerbourg; Ferdinand Charles, son fils, comte héréditaire, et Frédéric, comte de Linange, ayant tous les trois voix et séance à la diète de Ratisbonne, et actuellement détenus à Landau, seront transférés à Paris pour y servir d'otages à la nation française, jusqu'à ce que la liberté ait été rendue aux quatre commissaires de la Convention nationale et au ministre Beurnonville.
Art. 2.
« Seront transférés dans la même ville, et pour y servir également d'otages, tous ceux qui ayant voix et séance à la diète de Ratisbonne, pourraient se trouver actuellement en France. Seront néanmoins exceptés tous ceux qui sont maintenant en activité de service dans les armées de la République.
Art. 3.
« Il en sera usé à l'égard de ces otages de la même manière qu'il en sera usé à l'égard des commissaires de la Convention nationale et du ministre Beurnonville.
Art. 4.
« Le conseil exécutif est chargé de faire mettre sur-le-champ le présent décret à exécution, en ce qui concerne la translation des otages et leur emprisonnement. Il est également chargé de veiller à ce que tous les prisonniers de guerre continuent à jouir du traitement que les lois et les capitulations leur assurent.
« Le présent décret sera expédié par des courriers extraordinaires, afin qu'il soit plus promptement mis à exécution ».
, secrétaire, donne lecture d'une lettre du Conseil exécutif provisoire
qui soumet à la Convention une lettre adressée par le général Dampierre
; cette lettre était ainsi conçue (1) :
( Citoyen Président,
« Le conseil exécutif provisoire adresse à la Convention nationale la copie d'une lettre qu'il vient de recevoir du général Dampierre. Les sentiments qu'elle contient justifient le choix qu'en avait fait le conseil pour remplacer le perfide Dumouriez.
Le conseil exécutif provisoire.
« Signé : Garat, Grouville, secrétaire.
Copie de la lettre du général de division Dampierre au conseil exécutif provisoire ( 1 ).
Du Quesnoy, ce 3 avril.
« Citoyens,
La patrie en danger me fait prendre des mesures extraordinaires que vous approuverez. Je rallie autant que je puis autour de moi les troupes et les bons citoyens pour m'op-poser aux entreprises du traître qui vient de se démasquer.
« Je vous envoie le citoyen Tardi, officier du génie ; il a vu toute l'intrigue de la cour de Dumouriez, toutes les horreurs dont les gens qui l'entourent sont coupables ; il vous en instruira. Je veux sauver la patrie; j'attends de vous secours et protection. Je me prononce parce que je ne vois pas de général qui parle, je suivrai les ordres de celui qui voudra sauver la patrie et maintenir la République. (.Applaudissements ).
« Signé : Dampierre, général de division. » Pour copie conforme à V original.
Signé : Garat.
(La Convention décrète la mention honorable de la conduite du général Dampierre et ordonne que sa lettre sera insérée au Bulletin.)
(2). Je demande la parole sur l'ordre du jour. *
Vous avez la parole.
Je fais observer à l'Assemblée qu'avant-hier un projet de décret fut
présenté, tendant à établir un comité d'exécution. Cette proposition fut
combattue, et après une discussion, elle fut renvoyée au comité de
défense générale pour en faire son rapport. Le comité n'a point remis à
la discussion ce projet. Je demande, non pas qu'il soit adopté tel qu'il
a été présenté, mais qu'on mette à la discussion dans ce moment un
projet quelconque, relatif à l'organisation du pouvoir exécutif, qui
dans ce moment n'existe pas ; car il ne veut rien prendre sur lui : il
vient au comité, et
Il est impossible au comité que vous avez nommé de faire le bien, parce qu'il n'est pas seulement composé de 25 membres, mais de toute l'Assemblée, et que, par conséquent, les délibérations qu'il prend ne peuvent demeurer secrètes ; il demande lui-même que vous organisiez un autre comité, de télle manière qu'il puisse remplir l'objet pour lequel il a été créé ; je demande que la discussion s'ouvre à l'instant sur cet objet, et je donne ma démission de membre du comité de défense générale.
Et moi aussi.
Moi aussi.
Je viens appuyer la proposition d'Isnard, je viens vous dire avec le sentiment d'un honnête homme, que si vous voulez sauver la chose publique, il est temps que vous y songiez ; il est impossible que les mesures soient prises par votre comité, lorsqu'il a pour témoins de ses opérations 300 individus, et je vais vous citer un fait à l'appui de ce que j'avance. Hier le ministre a annoncé au comité le choix qu'il avait fait de Dampierre, pour remplacer Dumouriez. Eh bien, en sortant de cette salle, on m'annonça cette nomination. Cependant, il eût été à désirer qu'elle ne fût pas sue de l'armée de Dumouriez, parce que cette publicité dérange les projets des ministres.
Un autre fait, c'est qu'il a été pris au comité des mesures secrètes contre Dumouriez, et qu'il en a été prévenu aussitôt qu'elles ont été adoptées. Il faut absolument, comme Isnard l'a dit, non pas s'emparer totalement du pouvoir exécutif ; mais il faut investir quelques membres de la Convention du pouvoir et de la confiance nécessaires pour surveiller les travaux du conseil exécutif, et il faut que ce comité ait le droit d'arrêter les ordres qu'aura donnés le pouvoir exécutif, s'il les croit préjudiciables aux intérêts de la République; en un mot, c'est un comité de surveillance nationale dont je demande l'établissement. Je demande que les membres qui ont des projets de décret sur cet objet, les présentent, et que la discussion s'ouvre à l'instant sur celui qui aura obtenu la priorité. Et je déclare qu'il est impossible au Comité de défense générale d'opérer le bien tant qu'il restera organisé comme il l'est maintenant. Je donne ma démission de membre de ce comité.
Je combats la proposition du préopinant, et je vous proposerai un plan qui, en conservant le comité actuel de défense générale, amènera au but désiré.
J'ai voué une haine implacable à toute espèce de tyrannie, et ce n'est pas moi qui viendrait à cette tribune défendre des mesures qui pourraient même n'avoir que de la tendance a une dictature quelconque ; mais il suffit de nous entendre de bonne foi, et de ne pas nous donner des terreurs imaginaires, pour convenir de l'organisation d'un bon comité de salut public.
Celui que vous avez organisé en dernier lieu ne peut pas travailler efficacement au salut de la patrie ; il se compose de 25 membres ; il s'arrête, s'embarrasse et se paralyse par la manie délibérative, et par le nombre des déli-
bérants. Ce comité est public, et le secret est l'âme des affaires de gouvernement ; c'est un grand moyen pour nos ennemis que cette publicité de nos mesures : car nos conspirateurs savent nos projets et nos moyens de défense, avant qu'ils soient décrétés. Ce comité a toujours dans le lieu de ses séances près de 2oo membres de la Convention ; la délibération s'y perpétue souvent sans ordre, et nous faisons comme les Athéniens, quand Philippe était à leurs portes : nous délibérons beaucoup et nous agissons peu ; c'est un club ou une nouvelle Assemblée nationale. Ce n'est plus là l'objet de votre institution ; ce n'est plus un comité actif et prenant promptement des mesures de défense générale. Ce comité, tel qu'il est, a été une sorte de transaction entre les partis fortement prononcés ; vous avez formé le congrès des passions, il fallait faire celui des lumières. Ce comité, par son organisation vicieuse, par sa composition incompatible, par sa publicité dangereuse, par sa délibération trop lente, ne peut qu'entraver et laisser périr la République. On dirait à entendre les objections éternelles de ces politiques timides et ombrageux qui s'opposent à ce comité, qu'il s'agit d'un corps à constituer, ou d'une autorité spéciale, ou d'un conseil national ; cependant il ne s'agit que d'un comité de la Convention. Il ne s'agit que de confirmer et d'améliorer ce qui existe déjà, et de rendre utile un instrument de défense publique.
Dans tous les pays on a senti la nécessité d'avoir momentanément dans les temps de révolutions et de conjurations contre la patrie, des autorités dictatoriales et des pouvoirs consulaires, pour que la liberté publique ne souffrît pas de dommage. Ce n'est pas que je veuille vous proposer de telles autorités ; elles ne conviennent pas à des peuples libres, et encore moins dans un temps où des ambitieux et des scélérats peuvent abuser de tout et égarer le peuple. J'observerai seulement qu'à Rome le peuple disputait au Sénat toutes les branches de la puissance législative, parce qu'il était jaloux de sa liberté ; mais il ne lui disputait jamais les branches de la puissance exécutive, parce qu'il était jaloux de sa gloire et de sa sûreté.
Or, ici, il ne s'agit de transporter ni de déléguer au comité de salut public aucune branche de la puissance législative. Qu'avez-vous à craindre d'un comité toujours responsable à la Convention nationale toujours surveillé par tous les membres, ne faisant aucune espèce de lois, ne faisant que surveiller le conseil exécutif ; ne faisant que presser l'action de l'administration exécutive ; ne faisant que suspendre les arrêtés pris par les ministres, en les dénonçant aussitôt à la Convention elle-même ? Qu'avez-vous à craindre d'un comité de salut public de qui la trésorerie nationale est entièrement indépendante, et qui ne peut agir sur la liberté civile, mais seulement sur les agents publics qui pourraient être suspects ou impliqués dans quelque conspiration? Qu'avez-vous à craindre d'un comité établi pour un mois et réglé dans toute sa marche par le registre et la signature de ses délibérations ? Qu'avez-vous à redouter d'un comité sur lequel tous les regards sont portés, toutes les espérances réunies, et toutes les défiances agglomérées.
Citoyens, nous environnerons-nous toujours de terreurs et de chimères? La peur de la tyrannie amène à sa suite la tyrannie même. Voyons nos ennemis tels qu'ils sont, et combattons-les. Nos plus grands ennemis sont les calomniateurs et les dénonciateurs sans preuves ; nos plus grands ennemis sont nos excessives défiances. Sans doute, dans les trahisons qui nous cernent, dans les crimes anti-nationaux qui nous affligent, la défiance est excusable ; mais portée à l'excès, elle devient une arme en faveur des ennemis publics.
Si vous voulez avoir un bon comité de salut public, choisissez de bonne foi ceux à qui vous croyez de la probité et des moyens; et après leur élection, environnez-les de votre confiance, appuyez-les de votre opinion, défendez-les contre les calomniateurs habituels, qui sont les plus cruels ennemis de la Convention, et les véritables conspirateurs qui servent Dumouriez. L'opinion a fait la révolution de la liberté, l'opinion seule peut la maintenir, l'opinion seule peut donner de l'activité et du nerf au conseil exécutif et au comité de salut public. Bornez ce comité à la surveillance des ministres, à la délibération des mesures de salut public, et à la reddition du compte de l'état de la République, à certaines époques. Environnez aussi d'opinion les ministres trop découragés, qui sont accablés de la crainte de la responsabilité et d'un fardeau bien lourd dans les circonstances révolutionnaires qui se renouvellent encore devant nous, au moment où nous croyons voir le port ; mais excercez aussi une surveillance active et impartiale sur tous les fonctionnaires publics, dépositaires du salut de tous.
On parle sans cesse de dictature ! je n'en connais qu'une qui soit légitime, qui soit nécessaire, et que la nation ait voulu, c'est la Convention nationale ; c'est par vous que la nation exerce la dictature sur elle-même; et je crois fermement que c'est la seule dictature que des hommes libres et éclairés puissent supporter.
Vous vous effrayez de dictature, tandis que vous avez confié au comité de surveillance, à cause des trahisons et des conspirateurs, le droit terrible de lancer des mandats d'arrêt et d'amener contre les citoyens.
Les grands enfants de la Révolution crient sans cesse à la dictature, tandis qu'ils ont concouru à la nomination de ces commissaires envoyés dans les départements, avec l'effrayante autorité de déporter les ennemis de la liberté et de l'égalité.
Vous parlez de dictature ! parlez donc de cette dictature, de toutes la plus effrayante par ses effets sur la Révolution, comme par ses progrès rapides, la dictature de la calomnie. C'est celle-là qui, courant tous les rangs de la société et tous les bancs de la Convention nationale, verse partout ses poisons, et devient ainsi la plus dangereuse auxiliaire des puissances réalisées contre nous. Voilà la dictature que je vous dénonce, et qui écrasera tout si vous n'y prenez pas garde.
Après ces réflexions générales, je résume ainsi mon opinion.
Un comité sans pouvoir sur la liberté civile, délibérant sans publicité, sans action sur les finances, sans pouvoir indépendant de l'Assem-
blée nationale, exerçant une simple surveillance, délibérant dans les cas urgents les mesures de salut public, et en rendant compte à la Convention, pressant l'action du conseil exécutif, dénonçant à lAssemblée les agents publics suspects on infidèles, et suspendant provisoirement les arrêtés du conseil exécutif, quand ils paraîtront contraires au bien public, à la charge d'en rendre compte dans le jour à la Convention ; mais en finissant je dois déclarer que je regarde ceux qui se consacreront aux travaux de ce comité^ dans les terribles circonstances où nous sommes, comme de nouveaux Curtius, se dévouant pour leur pays; car avec les passions qui nous agitent, avec les défiances hideuses qui nous affligent, avec le génie malveillant qui nous poursuit depuis quelque temps, il est impossible de s'occuper ae la chose publique, sans refaire tous les jours son courage, et sans faire le sacrifice de son existence. Je conclus à ce que Isnard, Cam-bacérès, Condorcet et Thuriot se réunissent pour présenter demain un projet de décret analogue aux bases qui ont été développées dans cette séance.
Je ne partage pas l'opinion de Ba-rère. Si un comité d'exécution existe, il ne peut y avoir de responsabilité pour les ministres. Mais un point que l'on n'observe pas, c'est que la délibération est dans l'administration elle-même, avec cette différence que le pouvoir législatif détermine les principes et les rapports des loi®, tandis que le pouvoir exécutif délibère sur les objets d'exécution et de détail.
Abordons franchement la question et disons-le : S'il y a des) hommes dans l'Assemblée qui jouissent d'une assez grande confiance et d'une telle popularité, qu'elles ^puissent sauver la chose publique, qu'on les nomme au ministère; du moins, il y aura une responsabilité : tandis que votre comité n'en présente aucune.
(La Convention décrète qu'Isnard, Danton Barère, Thuriot et Mathieu se réuniront pour présenter ce soir à sept heures un projet de décret sur l'établissement de ce comité.)
, secrétaire, donne lecture des deux lettres suivantes :
1° Lettre de l'adjoint au ministre de la guerre (1), qui fait remarquer à la Convention une obscurité qui se trouve dans l'expédition du décret d'accusation porté contre un nommé d'Estourmel, sans l'indiquer d'une manière assez précise.
(La Convention nationale décrète qu'après ces mots : contre d'Estourmel, il sera mis ceux-ci : général de brigade\dans Varmée de la Moselle, qui commandait le corps d'armée campé en avant de Hombourg.)
2° Lettre de l'adjoint au ministre de la guerre, qui soumet à la
Convention un règlement rédigé en exécution de l'article 8 de la loi du
21 février dernier; cette lettre est ainsi conçue (2) :
'« Citoyen Président,
« En l'absence du ministre, j'ai l'honneur de vous adresser le règlement rédigé en exécution de l'article 8 de la loi du 21 février dernier. Je vous prie de vouloir bien le mettre sous les yeux de la Convention nationale et l'engager à prononcer sur ces dispositions qui doivent, au terme de son décret du 10 mars dernier, être mises en exécution le 15 du courant.
« J'aurai l'honneur de vous observer, citoyen Président, que la loi du 21 février, ne fait aucune mention des troupes à cheval, mais persuadé que l'intention de la ^Convention nationale est de les traiter à l'instar de celles; d'infanterie, j'ai joint au règlement des observations relatives au traitement de ces corps, sur lesquelles je vous prie de vouloir bien aussi faire prononcer la Convention.
« Le décret à rendre pour ces deux objets est d'autant plus instant qu'il intéresse généralement toute l'armée de la République. J'ose donc attendre de vos soins que vous voudrez bien me (faire connaître promptement les intentions de la Convention à cet égard, auxquelles je m'empresserai de satisfaire.
« L'adjoint du ministre de la guerre.
« Signé : Illisible. »
(La Convention renvoie cette lettre au comité de la guerre.)
, au nom du comité de défense générale, donne lecture d'un rapport et présente un projet de décret sur la formation d'un camp de 40,000 hommes entre Saint-Quentin et Péronne, pour protéger Paris; il s'exprime ainsi (1) :
Citoyens, votre comité de défense générale a pensé que le traître Dumouriez ne s'amuserait pas à tenter le siège de nos villes fortes, mais qu'il songerait plutôt à marcher tout droit sur Paris; c'est pourquoi al a résolu d'établir des camps sur les points où il pourrait tenter le passage,, et comme la route entre Saint-Quentin et Péronne est de beaucoup la plus directe et la plus facile à surprendre, il a décidé qu'une armée de 40,000 hommes y serait envoyée pour marcher à sa rencontre et lui barrer le chemin. Yoici, en conséquence, le projet de décret qu'il m'a chargé de vous présenter :
« La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de défense générale, décrète ce qui suit :
« Art. 1er. Tous les citoyens non mariés, de
18 ans jusqu'à 50, sont en état de réquisition permanente.
« Art. 2. Il sera créé un camp de 40,000 hommes, entre Paris et la frontière, et répartis savoir : 20,000 à Péronne; 15,000 à Meaux; 25,000 à Essonne et 2,500 à Mantes et à Meu-lan.
« Art. 3. Les départements qui fourniront à cette armée, sont ceux de
Paris, 10,000 hommes; d'Eure, 3,000; de Seirie-et-Oise, 3,000; de
Seine-Inférieure, 2,500; de Seine-et-Marne,
(La Convention, après une courte discussion, adopte ce projet de décret, et ordonne qu'une rédaction définitive lui sera lue à la séance du soir (1).
, secrétaire, donne lecture d'une lettre du conseil exécutif provisoire qui propose à la Convention de faire examiner la conduite du général Custine; cette lettre est ainsi conçue (2) :
Paris,
« Citoyen Président,
« Des feuilles publiques dénoncent aujourd'hui comme traître le général Custine, que la Convention nationale a déclaré hier digne de toute sa confiance et dont le conseil exécutif provisoire a étendu le commandement.
Plusieurs membres : C'est Marat, c'est Marat!
, secrétaire, poursuivant la lecture ture : « Bien loin d'accepter la démission qu'il présentait, le conseil exécutif provisoire, responsable du choix des généraux, convaincu que dans les circonstancés périlleuses où se trouve la République, la confiance du peuple est nécessaire aux citoyens chargés de sa défense et que les soupçons vagues qui s'élèvent contre eux doivent être dissipésb croit devoir proposer à la Convention nationale d'examiner la conduite du général Custine et si elle lui paraît, ainsi qu'au conseil, irréprochable, de le déclarer positivement à la nation.
« Les citoyens composant le conseil exécutif provisoire :
« Signé ; Lebrun, Monge, Clavière, Garat, Gohier, Grou-ville, secrétaire. »
(3). Je convertis en motion ia proposition des ministres, et je de-
Je ne connais point Custine, mais je suis étonné qu'un membre de la Convention, qui prétend avoir des inculpations à faire contre lui, ne soit pas monté à cette tribune pour le dénoncer, et que ce soit dans une feuille publique qu'il l'ait fait; je ne connais point d'ennemis plus déclaré de la République que ceux qui agissent ainsi, et qui cherchent à détruire la confiance que nous devons avoir dans les généraux patriotes : je ne connais pas de moyens plus sûrs de servir nos ennemis, que de se conduire de cette manière. J'ai dit.....
C'est la fatale sécurité dans laquelle
la faction des hommes d'Etat..... (De violents murmures couvrent la voix de Marat.)
Plusieurs membres : Il veut tout désorganiser..... décret d'accusation !
C'est la fatale sécurité dans laquelle vous avez vécu sur les généraux conspirateurs, sur Dumouriez, que vous avez ridiculement couronné il y a quelque temps, qui nous, a perdus. Il y a environ quatre mois que j'avais prévu la défection. Mes journaux en font foi. L'événement a prouvé que j'étais le seul homme prévoyant dans la République. (Applaudissements des tribunes.) Le civisme de Custine n'est pas un problème. Je demande que Ruamps vous donne communication d'une lettre qu'il a portée au comité, dans laquelle Custine disait à la ci-devant duchesse de Lian-court, qu'elle ne lui ferait pas l'injustice de croire que le ridicule qu'a voulu lui donner Curtius, en le faisant passer pour patriote dans les sociétés de Paris..... (1)
Ce n'est pas cela. Je demande à rétablir le fait.
Il y a quatre mois qu'on nous a amené au comité de surveillance un commissionnaire porteur d'un panier de pommes, sous lesquelles 40 lettres étaient cachées : nous les ouvrîmes, et il s'en trouva une adressée à Mme de Liancourt, sans signature, mais qui était écrite de la main de Custine. Il lui disait : « J'espère, ma bonne amie, que vous n'avez ajouté aucune foi au bruit répandu dans les sociétés de Paris par Curtius. » L'on sait que Curtius avait dit que Custine était très bon patriote. Yoilà le fait.
Je puis certifier que ni mes collègues ni moi n'avons jamais trouvé
Custine en défaut; si nous l'avions trouvé, nous n'aurions pas balancer
à le destituer; nous l'avons trouvé marchant dans le sentier du
patriotisme. Il est vrai qu'il y avait dans
(Joseph). Par ce ou e vient de dire Haussmann, il est évident que Marat est l'émissaire de Dumouriez. On s'étonne partout que cet être soit encore parmi nous; je "demande contre lui le décret d'accusation.
Il est incontestable que, d'après sa missive, Custine a dit qu'il avait été trahi par Newinger.
Plusieurs membres : C'est faux.
En second lieu, Haussmann n'a point dit le mot : Beurnonville, par trahison, a fait évacuer les postes des Yosges. (Quelques murmures.) J'ai été le seul dans cette assemblée qui se soit opposé à la fuite de Beurnonville ; d'après le passeport que lui avait donné le comité, on vous a dit que ce comité était celui de Dumouriez ; èh bien, moi je déclare que c'est celui des traîtres. (Nouveaux murmures.)
(La Convention passe à l'ordre du jour.)
(La séance est suspendue à 5 heures et demie et prorogée à huit heures du soir. )
Suite de la séance permanente du
Présidence de Delacroix et de Bréard, ex-présidents.
Présidence de Delacroix, ancien président.
La séance est reprise à huit heures du soir.
TJn membre, au nom du comité des domaines, présente un projet de décret tendant à casser une proclamation du conseil exécutif, qui surseoit à la vente des bois appartenant à l'Abbaye de Saint-Médard à Soissons ; ce projet de décret est ainsi conçu (1) :
« La Convention nationale casse et annule la proclamation du conseil exécutif, du 2 mars dernier, et décrète que l'adjudication faite le 21 janvier précédent à Jean-Alexis-Simon Ferney, de la réserve de la ci-devant abbaye de Saint-Médard, aura son plein et entier effet. »
(2) expose que ce n'est peut-être pas sans motifs que le conseil
exécutif a décrété
(La Convention décrète cette proposition.)
Suit le texte définitif du décret rendu (1) :
« La Convention nationale décrète que demain le conseil exécutif provisoire rendra compte par écrit des motifs qui ont déterminé la proclamation du 2 mars dernier, et cependant, par provision, ordonne la suspension de l'adjudication qui pourrait avoir été annoncée par le district d'Epernay, jusqu'à ce qu'il ait été définitivement prononcé sur la réclamation du citoyen Eerney ».
Un membre, au nom du comité des décrets, présente un projet de décret tendant à inviter les suppléants- des citoyens Balld, député du Gard, et Fokedey, député du Nord, à venir siéger à la Convention ; ce projet de décret est ainsi conçu (2) ':
« La Convention nationale charge son comité des décrets d'appeler immédiatement" les suppléants des citoyens Balla (3), député du département du Gard, et Fockedey (4), député du département du Nord, lesquels ont- donné leur démission le 1er et le 2 de ce. mois, a
(La Convention adopte ce projet de décret.).
, secrétaire, donne lecture de la rédaction du décret, adopté à la séance du 5 avril 1793, au matin (5), sur la formation dJun camp de 40,000 hommes, entre Saint-Quentin et Péronne, pour protéger Paris ; cette rédaction est ainsi conçue (3) : ^ :« La Convention après avoir entendu le rapport de son comité de défense générale, décrète ce qui suit : /
Art. 1er.
« La Convention nationale fait l'appel de 40,000 hommes dans les départements désignés par le tableau annexé au présent décret.
Art. 2.
« Tous les citoyéns français, depuis l'âge de 18 ans jusqu'à celui de 50 inclusivement* sont en état de réquisition permanente.
Art. 3.
« Il sera formé un camp sous Paris pour la sûreté de la ville.
Art. -4. 8!
« Les 40,000 hommes seront réparais sur différents points indiqués
ci-après.
« Ils seront payés par le Trésor public. Les levées seront faites par les commissaires de départements.
Tableau de. répartition de 40,000 hommes entre différents départements.
. « Paris, 6,000 hommes ; Seine-et-Oise, 3,000; Eure, 3,000 ; Seine-Inférieure, 2,500 ; Aisne 2,500 ; Somme, 3,000.
« Total ; 20,000 hommes qui s'assembleront à Péronne.
« Les autres 20,000 hommes seront pris dans les départements de Paris (qui fournira encore 4,000 hommes) de l'Oise, 2,500 ; de L'Eure-et-Loir, 2,500 ; de l'Aube, 2,000 ; du Loiret, 2,000 ; Seine-et-Marne, 2,500 ; Marne, 2,500 et de l'Yonne, 2,000. »
« Les lieux de rassemblement seront Meaux, Nogent-la-Ferté et Pont-Sainte-Maxence. »
, cède le fauteuil à Bréard, ex-Président, et demande la parole sur ce projet de décret (1).
Présidence de Bréard, ancien président.
(Eure-et-Loir)" (2). Citoyens, le mode d'organisation qui a été combiné avec le comité de défense générale et .les bureaux de la guerre, ne peut pas remplir le but que vous vous proposez. Il faut qu'en moins d'un mois cette armée soit organisée, Car vous devez compter que Dumouriez ne nous.laissera, pour nous préparer, que le moins de temps qu'il pourra. Les départements doivent, outre leur contingent, fournir encore des hommes pour cette nouvelle armée ; or, le contingent, en exécution de la loi du 24 février, se fait très lentement. Dans notre retour dé Lille à Paris, nous avons vu beaucoup de volontaires qui quittaient l'armée et très peu qui s'y rendaient. Il faut stimuler les citoyens par les engagements, mais il faut surtout les encourager par la perspective des places. Je demande donc qUe le projet qui vous est présenté soit renvoyé au, comité comme insuffisant et qu'il lui soit enjoint de présenter dès demain un nouveau mode pour la formation plus prompte et l'organisation plus expéditive de cette nouvelle armée.
Je termine par cette observation. Jusqu'ici les ci-devant nobles ont eu
le privilège exclusif de commander ou plutôt de conduire à la boucherie
les armées de la République. Il en est résulté que depuis le
commencement de la Révolution, il y a eu beaucoup de trahisons, car les
nobles nous ont toujours trahis. Eh bien, le temps est venu où toute la
horde nobiliaire doit être exclue de nos armées ! Ce sont lës
sans-culottes qui doivent aller combattre les vils suppôts du despotisme
et tous les vils intrigants "élevés à l'ombre des cours. Avec eux nous
aurons une armée invincible. Je demande qu'aucun ci-devant privilégié ne
soit admis dans cette nouvelle armée, ni comme volontaire, ni comme
officier. (Vifs applaudissements. )
(La Convention adopte les propositions de Delacroix.)
(Applaudissements réitérés des tribunes.)
Suit le texte définitif du décret rendu (1) :
« La Convention nationale décrète que les officiers généraux, l'état-major et tous les autres officiers de la nouvelle armée de quarante mille hommes, seront pris exclusivement hors de la classe des ci-devant privilégiés.
« Elle renvoie à son comité militaire pour lui présenter demain un nouveau mode pour la formation plus prompte et l'organisation plus expéditive de cette nouvelle armée ».
(Oise) (2) Il £aut que tout député prenne un mousquet et aille combattre en simple soldat. )>
(3). Le décret que vous venez de rendre annoncera à la nation et à l'univers entier quel est le grand moyen d'éterniser la République ; c'est d'appeler le peuple à sa défense. Yous allez avoir une armée de sans-culottes. (On applaudit à plusieurs reprises dans toutes les parties de la salle.) Mais ce n'est pas assez ; il faut que tandis que vous irez combattre les ennemis de l'extérieur, les aristocrates de l'intérieur soient sous la pique des sans-culottes. (Nouveaux applaudissements.) Nous avons besoin d'un service journalier, qui fatigue singulièrement le peuple ; il est juste que la portion nécessiteuse du peuple, qui ne tire ses moyens de subsistance que de la sueur de son front, soit alimentée aux dépens du Trésor public. Je demande qu'il soit créé une garde du peuple qui sera salariée par la nation. Nous serons bien défendus, quand nous le serons par les sans-culottes.
J'ai une autre proposition à faire. Il ne faut, ni ruiner l'agriculture, ni décourager le commerce, mais il faut que dans toute la France, le prix du pain soit dans une juste proportion avec le salaire du pauvre : ce qui excédera sera payé par le riche. (Vifs applaudissements.) Par ce seul décret, vous assurerez au peuple et son existence et sa dignité ; vous l'attacherez à la révolution ; vous acquerrez son estime et son amour. Il dira : Nos représentants nous ont donné du pain ; ils ont plus fait qu'aucun de nos anciens rois. Je demande que vous mettiez aux voix les deux propositions que j'ai faites, et qu'elles soient renvoyées au comité pour vous en présenter la rédaction.
(L'orateur descend de la tribune, couvert de vifs applaudissements. )
met aux voix les deux propositions de Danton ; elles sont décrétées à l'unanimité.
Suit le texte définitif des deux décrets rendus :
Décret relatif à la formation d'une garde salariée (4).
« La Convention nationale décrète qu'il sera formé dans chaque grande
ville une garde de
« La Convention charge son comité militaire de lui faire un rapport sur le mode d'exécution du présent décret. »
Décret pour la fixation du prix du pain (1).
« La Convention nationale décrète que dans chaque section de la République où le prix des grains ne se trouvera-plus dans une juste proportion avec les salaires des ouvriers, il sera fourni par le Trésor public un fonds nécessaire qui sera prélevé sur les grandes fortunes, et avec lequel on acquittera l'excédent de la valeur du pain comparé au prix des salaires du citoyen nécessiteux.
« La Convention nationale charge ses comités des finances et d'agriculture réunis de lui faire un rapport sur les moyens d'exécuter le présent décret, de telle sorte qu'il ne nuise ni à l'agriculture, ni à la circulation des grains, -n
Le citoyen Ducrest, aide de camp de la division commandée par le général Dampierre, est admis à la barre.
Il s'exprime ainsi (2) :
Citoyens représentants, j'étais envoyé ici pour vous présenter la situation de la ville du Quesnoy, je dois vous faire part des dispositions du général Dampierre, en apprenant la trahison de Dumouriez. Il fit assembler la garnison, et après avoir lu la proclamation de vos commissaires dans le Nord, parla ainsi :
« Citoyens (3),
« Yous venez d'entendre les ordres de la Convention nationale. C'est de cette Assemblée des représentants du peuple que ressortent tous les pouvoirs légitimes c'est donc à elle que nous devons obéir, puisque les ordres de la Convention nationale émanent de la majorité du peuple qui l'a élue.
« Eh bien ! cette obéissance légitime que Dumouriez lui-même a juré le premier, il est aussi le premier à y manquer, et dans quel moment? Dans un temps où, par la suite de batailles et de combats, il a fait couler le sang des Français et affaibli l'armée, dans un temps enfin où l'ennemi est à nos portes et en concluant un traité perfide avec cet ennemi victorieux par lequel il veut lui livrer la France entière. C'est- là l'instant qu'il choisit pour faire arrêter quatre de vos représentants, députés du sein de la Convention et le ministre de la guerre Beurnônville, votre frère d'armes dont la tête et le bras vous guidaient dans les combats et vous marquait le chemin de l'honneur. Eh bien ! le malheureux Beurnônville a été sur le point de perdre la vie,, et lui et vos quatre représentants, pour avoir obéi aux lois, sont livrés aux Autrichiens par Dumouriez.
« Et nous, nous partagerions ces crimes affreux ; et quoi ! ne vous
souvenez-vous plus de vos frères tués à Jemmapes, à Nerwinden et à
Waroux ; leurs mânes vous demandent ven-.
« Il n'y a plus à balancer entre la honte et l'honneur, la honte est de trahir ses serments, l'honneur est de défendre le poste qui nous est confié par la patrie.
« Je jure de conduire toujours mes frères d'armes dans le chemin de l'honneur, de ne jamais vous abandonner, vous, enfants de la patrie, qui combattez avec tant de courage pour la défendre, et je jure, de concert avec vous, que nous saurons braver tous les dangers pour repousser les Autrichiens et tous les ennemis de la patrie. »
A peine le général eût-il prononcé ces derniers mots, que tous les soldats répétèrent le même serment avec la plus vive allégresse. (Vifs applaudissements.)
Jeune défenseur delà liberté, la Convention a entendu avec satisfaction le compte que vous venez de lui rendre des sentiments du général Dampierre ; la troupe qui est sous ses ordres secondera ses efforts, et la liberté triomphera de ses ennemis.
Qu'il me soit permis, citoyens, de jouir avec vous du seul moment de consolation que j'éprouve depuis l'infâme trahison de Dumouriez. Vous venez d'entendre un aide de camp du général Dampierre : ce jeune enfant est celui que j'avais recommandé à Dumouriez ; il a mêlé quelque douceur à l'àmertume dont mon âme est abreuvée. (Ap-p l audissements. )
(La Convention nationale admet le citoyen Ducrest aux honneurs de la séance et décrète la mention honorable du discours du général Dampierre et l'insertion au Bulletin (1).
Une députation des employés au bureau des subsistances de Paris se présente à la barre (2).
L'orateur de la députation renouvelle, en son nom et pour tous ses camarades, le serment de défendre la République et offre à la patrie 2,800 livres en assignats pour les huit premiers mois de cette année, conformément à l'engagement qu'ils ont pris, le 5 septembre dernier, d'entretenir dix hommes aux armées pendant la guerre.
répond à l'orateur et accorde à la députation les honneurs de la séance.
(La Convention décrète la mention honorable et ordonne l'insertion de cette offrande au Bulletin.)
Les citoyens iÀébich et Lauth, députés des douze sections de Strasbourg,
sont admis à la barre (3).
Législateurs, les députés des douze sections de Strasbourg se présentent encore à votre barre... Ils sont pénétrés de la plus vive douleur.
Des hommes connus pour des perturbateurs publics dans leur commune, l'ont calomniée ; ils ont osé vous dire que le sang était prêt à couler dans notre ville, et ce sont eux qui provoquent le carnage depuis longtemps.
Plusieurs membres : C'est comme ici.
L'orateur poursuit : Non, il ne coulera pas, citoyens législateurs : nous résisterons aux calomniateurs, aux agitateurs, comme aux ennemis qui nous investissent.
Connaissez ces deux hommes qui étaient avant-hier à votre barre : l'un a parlé en son nom et en celui de dix collègues, dont neuf sont administrateurs de la création de Couturier et Dentzel ; l'autre n'a aucune mission ni caractère ; il est absent de Strasbourg depuis dix mois.
Que ceux qui se sont faits les échos de ces hommes inconsidérés articulent donc un seul fait, une seule circonstance plausible, qui puissent faire présumer la trahison dont ils osent accuser notre commune. La trahison, l'incivisme ne sont point dans le mot ; ils sont dans les faits : or l'on n'a encore entendu que des j déclamations stériles contre les meilleurs citoyens, et pas un seul fait.
Il est temps enfin que ce principe désorga-nisateur cesse. — Aucune ville n'a plus signalé son attachement pour la chose publique ; nos détracteurs eux-mêmes en conviennent ; tout y est encore tranquille, parce que les citoyens ont mis leur confiance dans la Convention ; mais il est à craindre que le triomphe des agitateurs qui nous dénoncent ne trouble cette paix intérieure, si nécessaire à maintenir dans les circonstances critiques où nous nous trouvons. Vous avez donné à vos commissaires pour le recrutement le terrible droit de déporter; nous ne craignons pas de vous dire qu'on les portera à en abuser, tout comme on y a porté Couturier et Dentzel contre des citoyens dont quelques-uns ont peut-être à pleurer leurs enfants morts pour la patrie; car se sont ces hommes-là que l'on persécute spécialement.
Nous vous conjurons donc, au nom de la patrie que vous voulez sauver, de prendre tous les partis qui pourront préserver notre pays des malheurs que ces agitateurs y provoquent depuis trop longtemps.
Maintenez vos décrets des 17 mars et 1er avril jusqu'à ce que de nouveaux commissaires vous aient fait un rapport vrai et exact sur la situation de Strasbourg, que l'on ne dénature que trop, et sur laquelle on voudrait vous égarer.
Nous vous demandons de nouveaux commissaires au fait des deux langues, et
revêtus de
Législateurs, n'oubliez pas que nous, qui paraissons en ce moment à votre barre, que nous sommes les vrais mandataires d'une commune de cinquante mille âmes ; au lieu, que ceux qui l'y ont dénigrée et calomniée, n'ont parlé que pour une poignée d'agitateurs.
Nous avons dit la vérité tout entière; nous mourrons pour elle comme pour la liberté. ( Applaudissements,)
demande, au nom de la Convention aux députés les pouvoirs qu'ils ont reçu de leurs commettants.
Les commissaires en font de suite le dépôt sur le bureau.
(1) appuie la pétition présentée par les députés de Strasbourg et rend justice au patriotisme des habitants de cette ville.
(La Convention admet les pétitionnaires aux honneurs de la séance et renvoie leur demande au comité de sûreté générale.)
Un des pétitionnaires (2) ayant obtenu la parole, observe qu'il est un des fonctionnaires publics suspendus par les commissaires de la Convention ; il demande, attendu son civisme, à remplir provisoirement les fonctions qui lui étaient confiées.
(La Convention, sur la proposition d'un membre, passe à l'ordre du jour.)
Des citoyens gendarmes nationaux sont admis à la barre (3).
Ces citoyens, anciens gardes-françaises, hommes du 14 Juillet, soldats des 102e, 103e et 104e régiments, ou anciens militaires, rassemblés à la caserne rue Saint-Victor, au nombre de six cents, rappellent la première pétition qu'ils ont présentée pour obtenir une organisation et voler à la défense de la patrie; ils renouvellent leur demande en exprimant le plus vif désir de combattre les ennemis de la République, et demandent un prompt rapport.
répond à l'orateur et accorde à la députation les honneurs de la séance.
(La Convention renvoie la demande au comité militaire pour en faire son rapport le lendemain.)
Des citoyens des ci-devant légions, dites du Luxembourg, se présentent à la barre (4).
Ils rappellent les services qu'ils ont rendus dans l'Inde et lors de
l'invasion de Jersey ; ils réclament le paiement de leurs gages et
salaires depuis leur rentrée en France, qu'ils disent leur avoir été
retenus par celui qui avait levé ces légions. Ils demandent que le
comité de législation fasse promptement le rapport de leur première
pétition, pour obte-
répond à l'orateur et accorde à la députation les honneurs de la séance.
(Sur l'observation du citoyen rapporteur du comité de législation, qui annonce qu'il est prêt à faire son rapport, la Convention décrète qu'il sera mis à l'ordre du jour.)
Une députation de la section des Quatre-Nations est admise à la barre.
Lacroix, orateur de la députation, donne lecture de la pétition suivante (1) :
Délégués du peuple, la section du Souverain, dite des Quatre-Nations (2), nous, a députés vers vous pour vous présenter le tableau véridique de notre situation et celui de nos immenses ressources, si vous les mettez sur-le-champ en usage. Il n'y a pas une heure à perdre, elle peut être fatale comme elle peut sauver la République.
Les dangers de la liberté, les malheurs du peuple ne proviennent que de
la corruption et de la faiblesse de ses délégués, de l'impunité des
conspirateurs (3) et des traîtres. Le mal est à son comble, parce que
vous ne l'avez pas prévenu à sa source, et qu'au contraire, sous vos
auspices, un ministère en a favorisé (4) les progrès funestes.
Dumouriez, qui toute sa vie n'a été qu'un intrigant, un espion de la
tyrannie, avait évidemment trahi la nation dans les plaines de
Champagne, en protégeant la retraite d'une armée enne-
dans cette asslembljée,, tfout prouve combien sont nombreux les ressorts de ce complot ; car au même instant où la conspiration de Dumouriez éclatait dans la Belgique, des révoltés ravageaient les départements de la Vendée, des Deux-Sèvres, de Maine-et-Loire et de la Loire-Inférieure, etc. L'infâme Bouillé, dont Dumouriez est le digne émule, est présumé le chef de cette horde de brigands qu'on soupçonne être des émigrés,' des déportés ou des étrangers vomis des îles de Jersey et Guer-nesey ; car au même instant l'île de Corse était sur le point d'être livrée à nos ennemis, par la trahison de Paoli. Tout prouve donc la nécessité de prendre des mesures promptes et tellement vigoureuses, qu'elles'' déconcertent tout à coup les projets des conspirateurs du dehors et du dedans ; la nécessité d'employer tous les moyens de sûreté générale pour découvrir les traîtres si vous voulez sincèrement vous opposer au triomphe de leurs désastreux projets.
Si vous ne vous hâtez d'apporter remède au mal, il est à craindre que les Anglais ne fassent avant peu une descente sur nos côtes, ne s'emparent de l'île de Corse et ne se rendent maîtres de la Méditerranée, comme ils le sont de l'Océan, tandis que les Prussiens et les Autrichiens, après s'être emparés de nos villes frontières du nord par la trahison de Dumouriez et la désorganisation^ de l'armée qui est son ouvrage, s'avanceront à grands pas vers Paris, pour l'affamer et intercepter la communication si nécessaire des départements.
Vous ne pouvez vous dissimuler que vos ennemis secondés par la trahison de Dumouriez, ne soient supérieurs à nous, en ce moment, en nombre, en munitions, en vivres ; il faut donc employer des mesures extraordinaires pour quadrupler nos forces sur les frontières du nord, ou nous attendre à tous les maux qu'enfantent le démon de la guerre, la famine, la peste, le pillage, le fer, la flamme, la guerre civile et la dissolution du corps politique. Voilà le tableau malheureusement trop vrai de notre situation : nous avons dû vous le présenter pour vous faire sentir plus vivement la nécessité d'employer de grandes mesures.
Nous vous proposons de faire proclamer de nouveau le danger de la patrie, et d'accompagner cette proclamation d'une adresse énergique au peuple, dans laquelle vous lui montrerez, franchement, la source du mal qui est ici : il y apportera (1) un prompt remède;
D'ordonner la permanence de tous les corps administratifs, et en cela vous leur avez donné un exemple digne d'éloges ;
De prendre connaissance prompte de l'état du recrutement dans toute l'étendue de la République ;
De former à l'instant trois armées de cent mille hommes chacune sur les
frontières du nord, de leur nommer des généraux sans-cu-lottes, connus
par leur ardent amour de la République.
Destituer à l'instant tout officier, tout général qui aurait l'une des qualités ci-dessus ;
Assurer à chaque soldat sans fortune, quand nos ennemis seront entièrement vaincus, une propriété de la valeur de 600 livres de revenus; s'il meurt dans les combats, cette propriété sera assurée à sa femme et à ses enfants (1).
Les biens des émigrés, ce qui reste des biens nationaux, ceux des conspirateurs condamnés à mort, suffiront au delà pour remplir cet engament sacré ; nous devons faire beaucoup pour ceux qui donnent tout ce qu'ils peuvent donner, quand ils donnent la vie.
Tout déserteur de troupes ennemies jouira des mêmes avantages que les soldats français ; à cet effet il sera fait une adresse traduite dans toutes les langues de nos ennemis, et l'on emploiera tous les moyens propres à la faire parvenir aux hommes égarés qui combattent sous l'étendard du despotisme.
Tous les bataillons nommeront eux-mêmes leurs officiers, la Convention nommera les généraux.
Les états-majors des généraux nobles ou étrangers qui seront supprimés en vertu de l'article précédent, .ne pourront être employés dans la nouvelle organisation de l'armée.
Tout général, tout officier, tout soldat qui ne sera pas à son poste le jour d'un combat, ou qui criéra perfidement à la trahison, sauve qui peut, sera puni de mort à l'instant.
Les bataillons feront parmi eux un scrutin épuratoire pour chasser de l'armée les nobles, les royalistes, les signataires de pétitions anti-civiques, les membres de sociétés antipopulaires qui s'y sont réfugiés de désespoir, dans la coupable espérance d'émigrer ou de compromettre le sort des combats par des cris perfides.
Tous ceux qui, après avoir pris volontairement les armes pour la défense de la patrie, déserteront, leurs noms seront affichés dans leurs municipalités respectives ; ils seront dégradés du titre de citoyen et employés comme esclaves aux travaux publics de l'état.
Pour arrêter les fuyards et s'assurer de leur personne, il sera formé autour de nos armes un cordon de piquiers qui présenteront aux lâches déserteurs une forêt impénétrable de piques. Tout citoyen qui, placé dans une ville frontière ou dans telle autre ville de la République, parlera de se rendre, sera puni de mort.
Indépendamment du ministre de la guerre et de ses adjoints, il sera
établi près de la Convention un conseil de guerre chargé de
Aucun marché désormais ne sera passé pour la République qu'au rabais, pour éviter les horribles concessions des entrepreneurs, des fournisseurs qui ont surpassé en audace et en activité ceux de l'ancien régime, ou pour couper court à ces dilapidations, décréter que les départements équiperont, habilleront dorénavant tous les bataillons qu'ils enverront aux frontières; ce moyen sera plus simple, plus ex-péditif, plus juste puisqu'il divisera le travail, pour diviser le bénéfice et le faire refluer dans le sein des citoyens peu fortunés ;
Tout citoyen qui ne partira pas aux frontières sera tenu, sous peine de détention et de mort s'il est reconnu suspect, de remettre son fusil de munition pour le prix duquel il recevra trente livres; des commissaires des guerres envoyés dans chaque département, prendront connaissance de l'état et du nombre de ces fusils, et si le nombre excède celui nécessaire aux soldats des frontières, l'excèdent sera distribué aux citoyens reconnus pour être sincères républicains dans l'intérieur ;
Toutes villes, villages, hameaux faisant partie de la République, seront requis au nom de la patrie en danger, de remettre aux bataillons de leurs départements qui partiront aux frontières, les bouches à feu et les munitions qui sont en leur pouvoir, pour opposer à l'ennemi une masse de force capable de l'anéantir, quand au préalable les conspirateurs du dedans sont punis de mort ou contenus comme au 10 août par la terreur, seul sentiment, que connaissent les esclaves ;
Pour avoir une cavalerie nombreuse en peu de temps, il suffirait de décréter que chaque municipalité, composée de 200 habitants et au-dessous, fournira un cavalier tout équipé ; celles composées de 400 habitants, en fournira deux, et ainsi progressivement en augmentant, en autorisant toutefois les municipalités de retenir sur les contributions publiques, ou de prendre dans les caisses de districts, les sommes nécessaires à cette dépense : 'de cette manière nous aurions, avant trois semaines, une cavalerie de plus de 60,000 hommes, qui, jointe à celle qui est déjà aux frontières, serait en état de faire face à l'ennemi ;
Décréter qu'il sera formé une armée révolutionnaire pour les frontières où elle contiendra l'esprit public, et une pour l'intérieur, à l'effet de maintenir les ennemis du dedans ;
Décréter qu'il sera formé une légion de ty-rannicides dans laquelle pour être admis, il faudra donner les preuves du plus ardent républicanisme ;
Assurer un million de récompense à prendre sur les biens de la ci-devant royauté, à tout citoyen français ou étranger qui apportera la tête d'un roi coalisé, ou celles des généraux en chef de leurs armées. U est aisé de voir que si on les apportait toutes ici,nous y gagnerions encore, car nous procurerions au monde la liberté et le bonheur ;
Décréter les honneurs du triomphe comme-chez les Romains, à tout soldat, à tout géné-
ral, qui, par quelque action d'éclat, aura contribué à sauver la République. "
Décréter que chaque municipalité fera, dans le plus court délai, le recensement de graines et fourrages qui seront dans son arrondissement; il sera envoyé aux départements avec l'état approximatif des besoins de ses habitants jusqu'à la récolte. Ces différents procès-verbaux peuvent donner une connaissance exacte de nos ressources en subsistances et désespérer nos ennemis ;
Accorder à tous les départements, le même avantage qu'à celui de Paris, de manger le pain à trois sous la livre, en les autorisant, toutefois à mettre des sols additionnels aux contributions des riches égoïstes. Former à cet effet un comité de subsistances' et d'approvisionnements dans la Convention ;
Décréter que jusqu'à ce que nos ennemis soient vaincus, les fortunes de tous les citoyens supporteront comme mesure révolutionnaire et momentanée un impôt somp-tuaire qui les réduira toutes à dix mille livres, ce sacrifice qui peut paraître énorme aux égoïstes paraîtra d'une disproportion prodigieuse quand on le comparera avec le dévouement sublime, de celui qui va aux frontières mourir pour sa patrie; car celui qui, dans un pays où l'égalité est reconnue, donne sa vie pour la liberté, donne plus que celui qui ayant cent millions de rente donnerait à la patrie 99 millions 90 mille livres, car en donnant sa vie un volontaire donne tout ce qu'il peut donner, il donne un bien sans lequel les autres ne sont rien. D'ailleurs ne nous y trompons pas, ce sont les riches qui par leur insouciance, leur perfidie, leur insensibilité ont attiré sur nous le fléau destructeur de la guerre : ils doivent donc en payer les frais ;
Décréter que tout citoyen qui conservera un domestique ;mâle, sera tenu d'entretenir un homme aux frontières; il ne doit y avoir rien d'oisif dans la République. Dans ce nombre ne peuvent être compris, les citoyens qui sont attachés aux cultivateurs, aux négociants et aux artistes utiles ;
Décréter que le traitement des fonctionnaires publics sera réduit à 3,000 livres pen- • dant tout le temps que durera la guerre (1) il est temps de prouver qu'on aime la patrie et la liberté pour elle et non pour la fortune et les honneurs qu'elles peuvent procurer.
Décréter que toute fortune qui excédera celle que tout fonctionnaire public avait avant la Révolution, le produit de ses divers traitements excepté, sera acquise à la République, et celui qui en sera le possesseur déchu du titre de citoyen, détenu et jugé comme suspect de concussions et de dilapidations. Ce n'est que sur les mœurs que vous établirez la République : tant que les Romains aimèrent la pauvreté et la simplicité, ils furent invincibles, mais si tôt qu'ils se laissèrent corrompre par les richesses de l'Asie, ils dégénérèrent et périrent.
Il sera établi à la Convention nationale, un comité révolutionnaire
suprême, qui correspondra par des courriers, avec tous ceux qui seront
établis partout où besoin sera dans la République. Ce comité pourra
mettre en arres-
Il ne sera plus envoyé dans les départements de commisaires pris dans le sein de la Convention, parce que tous doivent être à leur poste, et que c'est compromettre la dignité du peuple que d'exposer ses représentants immédiats, aux outrages de l'ambition et d'ennemis de la République. Ceux qui seront en commission seront rappelés sur-le-champ et remplacés par des commissaires nommés par la Convention, pris hors de son sein, connus et désignés par la voixpublique pour les plus constantsetlesplus ardents ennemis des rois.
La Convention nommera douze censeurs dans son sein pour noter ceux qui manqueront à leur poste, ce qui est aussi criminel qu'à un soldat de ne pas se trouver à son rang le jour d'un combat.
Il sera nommé dans chaque département, sous l'inspecteur des commissaires nationaux, un tribunal révolutionnaire (1); ce tribunal sera divisé en plusieurs sections, selon l'étendue du département et les conspirations qui pourront s'y tramer. Les sections seront ambulantes et accompagnées de guillotines.
La veuve de Capet, sa sœur, ses frères, seront jugés sur-le-champ par le tribunal révolutionnaire de Paris.
Seront condamnés à mort sans avoir recours aux longueurs évasives du jury, tout homme saisi de preuves de fabrications de faux assignats, tout homme qui,"par la vente de numéraire métallique, tendra à atténuer la valeur des assignats, tout agent comptable convaincu d'infidélités ou de concussions, tout homme qui arborera le moindre signe de rebellion, contre la République.
Seront détenus comme suspects tous ceux qui dans leurs écrits, dans leurs discours, attaqueront directement ou indirectement les principes de la République.
Les comédiens qui joueront des pièces tendant à des applications injurieuses à la liberté et même à affaiblir l'énergie du patriotisme, les signataires, de pétitions anticiviques, les membres des sociétés antipopulaires, les membres de l'Assemblée constituante qui ont voté l'inviolabilité du tyran, les membres de l'Assemblée législative qui ont voté l'impunité de Lafayette (2) ; car notre situation est telle, ou il faut anéantir nos ennemis
ou nous attendre à être anéantis par eux.....
( Murmures. )
Nous perdons notre temps à entendre de pareilles extravagances.
Un membre : C'est là le fruit de la permanence.
Un autre membre ; C'est un conspirateur !
Yotre mémoire est trop long, finissez. Lacroix. Je n'ai plus que deux lignes à lire.
, ironiquement. Je demande l'impression de la pétition (On rit.)
J e dois à ma conscience de déclarer que le pétitionnaire que vous venez d'entendre, se trouvant dans le département de la Marne, comme commissaire du conseil exécutif, fut nommé procureur général syndic du département par Prieur; il a tenu cette place pendant trois jours. Sitôt qu'il apprit la prise de la ville de Verdun, il donna sa démission et s'enfuit. Plusieurs membres : Le décret d'accusation !
(Oise). J'annonce à la Convention que j'ai signé un mandat d'arrêt contre ce citoyen, pour avoir vendu 2,400 livres un certificat de résidence au ci-devant duc de Châte-let (2).
Il faut démasquer les conspirateurs !
Je demande la parole.
Nous ne sommes pas ici pour des querelles personnelles.
J'insiste, il faut démasquer cet homme.
Plusieurs membres : Non, non; l'ordre du jour !
Un membre : Quoi, un conspirateur viendra à la barre et l'on ne pourra le démasquer?
Un autre membre : Où donc sera, dès lors, la liberté des opinions ?
(La Convention passe à l'ordre du jour, mais autorise les pétitionnaires
à assister à la séance ) (3).
répond à l'orateu*r et accordé à la dépUtàtioh lés honneurs de la séàficë.
(La Convention renvoie la demande au comité de législation. )
Une députation dés citoyens dè la section des Lombards se présente à la barre.
Le ïitôy'eVb Appert, orat'eûr de la députation, s'expriihe ainsi (i) :
Citoyens législateurs,
Environnés de trahisons de tous genres, il ne nous est plus permis de rester tranquilles au milieu des orages; c'eist par la masse imposante des hommes vraiment républicains, soumis à l'abiorité des lois, que hou s pouvons écraser l'hydfè iàohstrueusb dé l'anarchie ou le tyran cruel qui voudrait nous rendre esclaves.
Il ne nous est plus permis d'attendre paisiblement dans nos foyets ùn bohheUr qui n'est pas fait pont les insouciants.
C'est èh nous réunissant,, c'est en confondant nos moyens et nos ljimières, que nous pou vens désormais éclairer la conduite sombre et tortueuse des traîtres et des intrigants et joui? enfin de cette paix délicieuse qui donne la libérté, lorsqu'elle est pure et éclairéè.
Citoyens législateurs, tous nos regards sont fixés sur Vbus, et toutes nos démarches tentent & âssurer à okaoun de vous sa liberté et sa sûreté individuelle, ainsi, que la tranquillité et le respect dus à vos délibératibiis. Les mesures que nous vous offrons sont de maintenir plus que jamais l'exécution de vos décrets, l'union et la fraternité avëc lès aUtreè sections et lès départemënts, de protégei* la sûreté des personne et déë jdfcopriétés et, enfin dé vouloir la République une èt indivisible, mais elle ne sera que lorsque nous serons nous-mêmes vé- j ritablement unis.
Pour vous, législateurs, qui Sentez Cette grande Vérité et qui noUs donnerez l'exemple de cette Union, abolissez toutes distinctions entré vdUs; ces hoihs, ou plutôt ces mots de t cote gauche », de « Montagne » et autres, sont indignes de législateurs républicains réunis pour ne former qu'un même esprit et pour -concourir également au salut de la République.
Ecrasez l'anarchie et la tête orgueilleuse du deSpotisriié, si ëlle ose se rencontrer encore.
Nous jurons une haine égale et éternelle aux deux partis; c'est le serment général dé la section des Lombards, calomniée tant de fois pàr des intrigants qu'elle méprise.
NoUs soihmes réunis, citoyens législateurs ; nos assemblées, plus
nombreuses que jamais, nos postes remplis de citoyens soldats,
attendent, avec impatience,, vos décisions sur les grandes mesures que
les circonstances exigent; que tous nos frères, à notrë exemple, se
réunissent entre eux, bar si l'insouciance ou la division nous
retiennent encorè, nous CrèUse-rons de nouveâu l'abîme qUê nous avons
comblé en y renfermant le despotisme et le
répond à l'orateur et accorde à la députation les honneurs de la séance.
(La Convention décrète la mention hono-rablé ët ordonne l'insertion de cette lettre au Bulletin. )
, secrétaire, donne lecture dune lettre dés citoyens Leqûinio, Cochon et ÎJu-bois-de-Bellegarde, commissaires de IdConvèn- ' tion à Valenciennes, qui est ainsi cbnçuë (i) :
Valenciennes, le 4 avril de l'an II, trois heures de l'après-midi;
( Citoyens hOs collègues,
« Nous avons reçu hier et aujourd'hui beaucoup de bataillpns qui viennent se ranger sous les drapeaux de la République et sous l'étendard de la loi; nous ne suffisons pas aux mesures à prendre, quoique nous veillions jour et nuit. Le traître, Dumouriez a été manqué par le 3e bataillon de l'Yonne, à Saint-Amand; il s'est sâuvé à la nagé. Nous vous avdns déjà envbyé plUsièurs courriers extraordinaires. ; nous ignorons s'ils vous sont parvenus; car noils Savons qu'il y avait partout des ordres pour arrêter paquets et hommes, pour peu qu'ils fussent Suspects d'être Vrais républicains. Nous ignorons aussi si plusieurs a'éntre eux ne sont pas des hypo'critës vehdus à là faction de Dumouriez; car nous ne doutons pas qu'il ait eu chez lui des traîtres capables de prendre tous les masques.
« A l'instaUt, au moment où nous vous écrivons, on vient nous avertir que l'armée marche sûr Vàlehciéhnës; ëouS lès ôtdres du traître; mais nous sôihmes persuades qu'elle s'éclairera aVant que d'ëti;è rèndué sôùs leè niurs. Pour éviter toute surprise, nbus vous éxpédiôns deux courriers èitràojrdinaiteSpardèUx routes différentes. Nous faisdh& fotiner iiji ctaip à Famars; il nous faut des effets de 'Càihpë-ment et de l'argent pour l'armée républicaine, qui heureusement se grossit à chàquè quart d'heure, mais qui n'apporte avec elle que très peu d'effets,. parce qUe les, bataillons se détàchènt lb plus dducehient qu'ils peuvent; s'ils bsàiëht, l'armée du rebelle serait déjà réduite présqû'àù néant. Quant à nous trois per-sohnelleiftënt, il faut nous expédier aussi des fonds; càr nous ne ménageons pas; et bous croirions trahir la* patrie, que de ménaget* : vous devez sentir que nous ne pouvons tenir aucun compte en ce moment; et mille dépensés? extraordinaires nous épUisèht'.
« Nous venons de bonférér provisoirement le commandement de l'armée
depuis Valenciennes; inclUsiVfettient jusqu'à belle de la Mo-sélle âu
général Dampierre, qui nous semble, en tout point, digne de commander ;
noUs vous envoyons copie de la proclamation qU'il à faite au Quésno-y;
nous là faisons impHihëfc pour la répandre; nous joignons à ce pàquet,
copie des lettres que hoUs àvbns écrites J« l'une àU général Egalité,
l'autre au général Valence. Petit-être fàisohs-noUs des démarches qui hé
le trouvent pas les meilleures possibles;
« Signé : Lëquinio, Cochon et Belle-garde, commissaires de la Convention nationale. »
« P.-S. Nous venons d'écrire à nos collègues à Douai, pour les engager à conférer le commandement du reste de la frontière vers Calais au général Duval. Nous avons cru devoir laisser cette partie à leur disposition ; puisque le général Duval est auprès d'eux.
« Quand vous nous ferez des envois, vous songerez à de bonnes escortes, et prenez des précautions pour que vos ordres nous parviennent sûrement.
« A l'instant, cinq heures, nous ne voyons point encore l'armée du traître s'avancer, et nous avons lieu de présumer que c'est une fausse alerte.
« Nous haranguons toujours les bataillons à mesure qu'ils arrivent et nous voyons souvent couler des larmes de joie, à des citoyens heureux de s'être échappés des serres du traître.
« On a arrêté deux soldats portant des cocardes inciviques. La procédure ne sera pas longue. Oh vient d'arrêter aussi un des secrétaires de Dumouriez ; on l'interroge eh ce momënt.
« A l'instant, six heures, on nous annonce que Dumouriez est émigré* le général Stelten-hofen s'est bien montré ; mais il a été enlevé par Dumouriez, à ce qu'on croit. Le troisième bataillon de l'Yonne, qUi a manqué Dumouriez ce matin, à, lorsque je finissais de lui dire quelques mots de fraternité et de félicitations, fait le serment d'assassiner tout traître reconnu tel. Ce mouvement spontané n'a point été provoqué, c'était l'élan du patriotisme. ( Applaudissements.)
« Nous vous expédierons, par voie sûre, le secrétaire intime de Dumouriez, que l'on interroge, et diverses pièces prises par le bataillon de l'Yonnè, qui a saisi six chevaux de sa suite, ainsi que plusieurs autres trouvés ailleurs. Nous n'avons pàs le temps de les faire transcrire aujourd hui pour en garder copie.
« Nous vous envoyons un homme sûr, et qui connaît le pays ; nous n'expédierons qu'un courrier.
« Toutes les places voisines vont bien. Ne soyez pas étonnés du désordre de cette lettre. Il faut écrire par les Courriers tous en même temps.
« Signé : Lequinio. »
Suit le texte de la lettre écrite par les mêmes commissaires au général Egalité (1) :
Valenciennes, en l'hôtel commun, le 3 avrii 1793.
« Vous connaissez, citoyen, les dispositions de Dumouriez, vous
connaissez ses proclania-
« Vous portez le nom d'Égalité, vous avez juré le maintien du gouvernement qui ia professe, vous avez juré soumission aux décrète émanés de la Convention nationale, seul pouvoir légitime représentant de l'autorité souveraine du peuple français ; vous connaissez vos devoirs, vous prouverez à la France que vous aimez à les remplir, et que ce n'est point avec hypocrisie que vous portez le nom d'Egalité. Vous deviez obéir à DumoUriez, tant qu'obéissant lui-même aux lois, il exerçait un pouvoir légitime ; actuellement qu'il a trahi la nation, vous ne devez plus voir en lui qu'un tyran. En vertu du pouvoir que nous a conféré la Convention nationale* nous venons de le suspendre; nous vous envoyons ci-joint un exemplaire de notre arrêté. Nous vous requérons, au nom du salut public, de vous y conformer, de refuser toute obéissance à Dumouriez, de prendre les moyens qui sont en vous saisir de sa personne et le faire conduire sous bonne escorte, à la barre de la Convention nationale. Vous pouvez encore mériter l'estime des bons citoyens, ou encourir leur haine, vous exposer a la vengeance des lois et vous couvrir du mépris de la postérité ; c'est à VOUS à choisir, nous vous requérons do douflef ou faire donner, à haute et intelligible voix aux troupes que vous commandez, connaissance et lecture entière de l'ordre et de la proclamation ci-jointe, signé de vous le premier, date du jour d'hier; la seconde, d'aujourd'hui :
( Citoyen* couvrez-vous de gloire et détestez les tyrans ; nous vous y engageons au nom de la République, pour lé maintien de laquelle vous avez fait serment de mourir. »
(l). J'observe quë le citoyen Ro-iriain de Lamines, notable de la ville de Valenciennes, a bravé tous les dangers et les fatigues pour apporter à la Convention la lettre des commissaires, et je demande qu'il Soit fait mention honorable du zèle et du dévouement de ce citoyen.
(La Convention décrète cette proposition.)
(2). J'ai encore une autre motion à formuler.
Citoyens, ce ne sont paS les seuls administrateurs des départements du
Pas-de-Calais et du Nord, mais tous les Citoyens qui donnent des preuves
de patriotisme. VoUs savez qu'ils ont patiemment supporté, en 1792, les
pillages, les massacres et les horreurs de la plus injuste des guerres ;
ils n'ent sont pas encore indemnises ; leur commerce souffre beaucoup,
leurs champs demeurent incultes, le laboureur n'a pas cessé d'Occuper
ses chevaux aux transports des équipages et des Vivres utiles à l'armée,
et à traîner de lourdes pièces de siège jusque sous les murs de
Maëstricht. Dumouriez et Cobourg menacent leur territoire d'une nouvelle
invasion : ces départements avertis par nous que l'aristocratique
Belgique, d'abord
(La Convention décrète cette proposition.)
(1). Les sentiments de Peletier, victime des royalistes, sont passés dans l'esprit des volontaires de l'Yonne. Je demande que vous décrétiez qu'ils ont bien mérité de la patrie.
(La Convention décrète cette nouvelle proposition.)
Suit le texte définitif du décret rendu (2) :
( La Convention nationale décrète que les départements du Nord et du Pas-de-Calais, par le zèle et l'énergie qu'ils ont déployés depuis le commencement de la guerre; et notamment depuis le décret du 19 février, appro batif de l'arrêté des commissaires de la Convention dans la Belgique, du 17 du même mois, et depuis la trahison de l'infâme Dumouriez, ont bien mérité de la patrie.
« La Convention nationale décrète que le troisième bataillon de l'Yonne a bien mérité de la patrie. »
, secrétaire, donne leoture d'une lettre du général de brigade Ferrand, datée de Valenciennes le 4 avril, par laquelle il assure l'Assemblée que malgré ses 57 ans de services et ses blessures de guerre, son zèle pour le salut de la République est sans bornes; il demande des effets de campement pour les armées, en observant que le traître Dumouriez les retient ; en voici l'extrait (3) :
« La République peut compter que mes braves frères d'armes et moi mourrons plutôt sous le fer des traîtres et des tyrans, que de leur abandonner le poste si important que nous occupons.
( Les citoyens députés de la Convention, Bel-legarde, Cochon et Lequinio étant ici, pourront, par leurs lumières et leur grande activité, ramener une grande partie de l'armée, qui a été égarée.
( Cette place ne pouvant contenir toutes les troupes, qui successivement
se rendent à leur devoir, j'ai proposé aux commissaires députés de
former un camp sur le flanc droit de cette place, qui la couvrira, ainsi
qu'une partie du terrain vers le Quesnoy et Bavay ; un autre camp en
avant du Quesnoy, pour couvrir la partie de Bavay jusqu'à Maubeuge, le
camp retranché de Maubeuge existant, déjà en partie ; au moyen de ces
trois camps, il serait possible d'y réunir au moins cent mille hommes ;
mais il nous faut des effets de
c Je prie la Convention d'être persuadée que, malgré mes cinquante-sept ans de services et mes blessures à la guerre, mon zèle pour le salut de la République est sans bornes. Mais cela ne suffit pas : il faut, pour cette armée qui, je l'espère, se ralliera bientôt à son devoir, un chef qui n'ait d'autre ambition que celle de se rendre utile à la République, et le talent de bien déployer une armée et de la faire mouvoir à propos. »
« Signé : Ferrand. »
Le même secrétaire donne lecture d'une lettre des citoyens Cochon, de Bellegarde et Lequinio, commissaires de la Convention aux places fortes du Nord, par laquelle ils annoncent que Dumouriez a arrêté un caisson de 500,000 livres qui leur était envoyé de Lille et' réclament de nouveaux fonds : cette lettre est ainsi conçue (1).
« Valenciennes, 4 avril, 8 heures du soir.
« Citoyens nos collègues,
« Nous apprenons dans ce moment qu'un caisson de 500,000 livres, qui venait de Lille et que nous comptions retenir pour le service de l'armée qui est dans cette place et aux environs, a été intercepté par un détachement de l'armée de Dumouriez. Nous prions la Convention de nous faire parvenir de nouveaux fonds et de les adresser directement ici sans les faire passer à Lille. U n'est rien de plus instant car le... (2) de l'armée est sur le point de manquer.
« Les commissaires de la Convention nationale aux places frontières du Nord,
« Signé : Charles Cochon, de Belle-garde, Lequinio. »
(La Convention nationale décrète que le conseil exécutif sera chargé de faire passer le plus tôt possible à Valenciennes les «ffets d'équipement et de campement, et les fonds réclamés, soit par les commissaires de la Convention, soit par le général Ferrand. ) (3)
(4). Il y a à Lille pour 150,000 livres d'argenterie transportée de Liège. Je demande qu'elle puisse être employée aux besoins de la nation, sauf à compter ensuite avec les Liégeois.
(La Convention adopte cette proposition.)
Suit le texte définitif du décret rendu (5) :
« La Convention nationale décrète que l'argenterie et le numéraire
provenant du pays de Liège et de la Belgique, qui se trouvent en dépôt à
Lille, ou dans d'autres places frontières, y seront de suite convertis
en monnaie, et mis à la disposition du payeur général de l'armée du
Nord, qui sera tenu d'envoyer la note de
Un membre, au nom du comité de la guerre, présente un projet de décret tendant à approuver la partie du règlement rédigé par le ministre de la guerre sur la solde et les masses des armées de la République ; ce projet de décret est ainsi conçu (1) :
(La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité militaire, décrète qu'elle approuve la partie du règlement présenté par le ministre de la guerre, en exécution de l'article 8, en ce qui regarde seulement la solde et les masses des armées de la République.)
(La Convention adopte le projet de décret.)
L'ordre du jour appelle le scrutin public pour la formation du comité de de Salut public (2).
Je demande le renvoi à demain.
Un grand nombre de membres : Appuyé, appuyé !
(La Convention nationale ajourne à demain, neuf heures du matin, la formation du comité ae Salut public.)
(La séance est suspendue à onze heures du soir.)
a la séance de la convention nationale du
Observations importantes sur la pétition de la section des Quatre-Nations et sur celui qui Va présentée, par le citoyen Lacroix, excommissaire du conseil exécutif provisoire (4 ).
Les moyens ci-dessus (5), que je crois propres à sauver la chose publique (car ils ont pour base l'armement de toute la sans-culotterie, aux dépens des riches égoïstes et des sangsues du peuple) n'étaient pas d'abord destinés à faire une pétition. Avant que la conspiration de Dumouriez éclatât au grand jour, et quelque temps après le massacre prémédité de notre armée à Aix-la-Chapelle, j'avais formé le projet de présenter à mes concitoyens le tableau rapide des conspirations nombreuses tramées contre la liberté depuis la prise de la Bastille jusqu'à l'évacuation de la Belgique, ensuite celui des dangers de la patrie, résultant de ces conspirations, de l'impunité de leurs auteurs, de la crédulité du peuple; enfin, celui de nos immenses ressources, et des moyens infaillibles de prévenir de semblables malheurs.
Je jetai d'abord mes premières idées ça et là sur le papier pour me servir de matériaux ; j'avais commencé mon ouvrage quand j'appris que le danger était tellement pressant, que de plus grands développements à mes moyens seraient infructueux et qu'ils pourraient même me faire manquer l'occasion d'être utile. En conséquence, je renonçai à l'achèvement de mon ouvrage, et j'allai aux environs de la Convention, savoir au juste la situation de la chose publique ; elle me parut tellement critique, que je n'hésitai pas de publier les moyens que je croyais capables de sauver la patrie; ils parurent faire impression à quelques bons citoyens qui m'avaient entendus et ils m'engagèrent d'en faire part aux jacobins ; j'y consentis. Arrivé à la porte de la société, Peyre demanda la parole pour moi; aussitôt des réclamations se font entendre de toutes parts, la calomnie me lance ses traits enveniméa : l'un dit que je suis membre du comité central dont j'ignorais même l'existence ; l'autre, que je n'ai pas renouvelé ma carte (ce qui est vrai, et j'en dirai la raison dans cette franche explication) ; enfin, un membre propose et la société arrête, qu'avant d'être admis, je communiquerai mes idées à des commissaires qui feront leur rapport. Ces formes, ces langueurs accompagnées de soupçons, me déterminèrent à me retirer pour aller dans ma section., La malveillance profita de cette occasion pour mentir impudemment à la société, en lui disant qu'en me retirant j'avais dit : Je sauverai bien la République sans les jacobins ; propos invraisemblable dans la bouche d'un citoyen qui. dans tous ses écrits, dans ses discours, a dit que les jacobins avaient déjà plusieurs fois sauvé la patrie, et je le répète encore, à la honte de mes ennemis, les jacobins seuls peuvent la sauver encore.
Arrivé à ma section, je lui communiquai mes idées qui firent une grande impression; oar elle arrêta que je les rédigerais en forme de pétition, pour la présenter en son nom à la Convention. On nomma des commissaires à cet effet, nous nous rendîmes le lendemain à la Convention, et nous ne pûmes être admis à la barre, parce qu'on procédait à la nomination d'un président, d'un ministre de la guerre et d'un général. Le lendemain j'y revins de nouveau, je rencontrai Danton, qui me fit inscrire pour le soir; je me promenai en attendant dans le jardin des Feuillants, où quelques citoyens me prièrent de leur donner communication de ma pétition ; je n'ai point vu d'inconvénient, au contraire, une propagation d'idées propres à sauver la patrie, d'obtempérer à leur demande; quelque temps après, causant avec quelques patriotes, un petit homme d'assez mauvaise figure m'accosta, et me dit que j'étais un conspirateur, aue dans les dernières visites on avait trouvé d'Aligre chez moi, qu'il me sommait de me rendre au comité de surveillance. Aussitôt une douzaine d'aides-mouchards sautèrent sur moi, me frappèrent; l'un d'eux, que je reconnus pour être un garçon de bureau de 1a. Convention me serra tellement par la cravate, qu'il faillit m'étrangler ; je me débarrassai comme je pus de leurs griffes; je me préparais à bâtonner leur chef; mais, fort de mon innocence et de mon brûlant républicanisme, je me déterminai à suivre ce mou-
chard au comité, quând une foule innombrable 4© républicains environnèrent mon hape-cfyair et moi, et me prièrent de m'ex-pliquèr. Mon explication les convainquit de mon innocence, de la scélératesse de mes agresseurs; mais ce qui provoqua l'indignation des assistants, c'est quand ils apprirent de la bouche même du mouchard, sommé de décliner son nom et sa qualité, qu'il était député du département de l'Ille-et-Vilaine, quil se nommait Le Breton ; alors tous de crier : qu'ils n'ayaient pas voté la mort du tyran, que cela n'était pas étonnant, et ce valet d'intrigues fut éconduit au milieu des huées. J'ai su depuis que cette scène avait été préparée pour m'empêcher de lire ma pétition; 3e sais que si j'avais été au comité, des faux' témoins auraient déposé contre moi, et qjie j'aurais couché dans un cachot, où. je gémirais encore pour prix de mon zèle.
Le covm a manqué, j'ai paru à la barre, les complices de Dumouriez ont été obligés d'entendre lës yérités fortes contenues dans la pétition, les moyens consolants pour les amis de la, patrie, et désespérants pour eux, de sauver encore la liberté, ils murmurèrent, ils m'inYectivèrent, et c'est ma plus douce récompense, c'est la preuve la plus certaine de la bonté de mes moyens ; enfin, ils firent tant que je ne pus pas lire la pétition jusqu'à la fin, la députation fut néanmoins invitée aux honneurs de la séance, avec promesse de prendre en considération les mesures qu'elle venait de proposer.
En montant les marches de la Montagne Marat «t Panis mft diront : « Gomment n'as-tu « pas eu la force et la présence d'esprit de « aire aux interrupteurs qui trouvaient les « moyens trop longs : ils sont proportionnés « à vos crimes ». $
Pendant ce temps, un habitant de la Plaine, un certain Jjqcrqix (1) de Contaut, député du département de la Marne, qu'on a confondu ayec Lacroix de la Belgique, demanda la pa-rple, et qfeserya à lft (Oonventioij « que l'orateur « de la pétitiop avait été nonpné par Prieur, « procureur général du département dp la Marne, et qu'ayant appris la prise de Ver? « dun, il avait donné sa démission de cette « place, et fui lâchement. >>
Cette impudente et atroce calomnie excita les mesures de l'Assemblée ; je demandai à répondre, et je ne pus obtenir la paroje. Buzot se préparait à parler, on demanda l'ordre (Jn jour, qui fijt adopté.
Les journaux, en rendant compte de la pétition, ne manquèrent pas de rapporter la calomnie de Laproix, dit Contaut. L'article enfin fut lu à ma section, avec des commentaires et des inculpations qui la déterminèrent à m'invitep de venir lui rendre compte de ma conduite, et à suspendre son jugement jusqu'après m'avoir entendu ; je parus le soir à ma sectioii et les faits exposés ci-dessus ne }ui laissèrent aucijn doute que je ne l'avais pas? compromise, et qu'au contraire, les vrais amis du peuple avaient vivement applaudi aux mesures que j'avais présenté en son nom à la Convention. Il me restait à me justifier da l'inculpation de Lacroix de Contaut ; je le fis, en donnant lecture d'une réponse impri-
mée, que je publiai au mois d'octobre dernier à la même calomnie qu'on a reproduite avec art pour affaiblir l'impression qu'avait fait dans la Convention les grandes mesures de salut public que j'avais proposées.
Comme il m'impofte de me justifier non seulement dans l'esppt des citoyens de ma section; mais dans celui de tous m6® concjtoyenst je vais donner l'extrait dë cette réponse, qui suffira pour confondre mes ennemis.
Je fus nommé commissaire du conseil exécutif après le 10 août ; j'eus pour collègue le citpyen tlonsin, aujourd'hui commissaire générai de l'armée du Nord, son patriotisme et ses lumières sont connus ; il a, un des premiers,; dénoncé les complots de Dumouriez, dont il pressentait l'horrible conspiration; il peut attester le zèle pur et ardent avec lequel j'ai rempli ma mission dans le département de Seine-et-Marne. Mes travaux révolutionnaires dans pette partie de la j$épublique? jn-festée de royalisme et de fanatisme, m'ont valu d'honorables persécutions et un décret d'accusation rendu par le tribunal criminel de Melun pour avoir requis l'arrestation d'un prêtre perturbateur. Le propès-verbal du corps électoral de ce département contient les détails les plus honorables SUf WPU civisme et mon courage à poursuivre les ennemis de"ma Patrie.
Notre mission étant finie dans ce département, je me "séparai de Rousin qui alla dans le Soissonnais pour l'approvisionnement des soldats qui arrivaient en foule aux frontières, je me rendis dans le département de la Marne, ma patrie, pour y exciter le zèle des citoyens, et surveillef l'administration ; j'arrivai à Chàlons ; j'y vis Prieur qui m'offrit avee empressement la place de procureur général du département de la Marne qu'il était chargé de nommer par le conseil exécutif ; je lui dis qu'étant commissaire du conseil exécutif, et espérant être nommé député à la ÔonventioH par le département de Seine-et-Marne, je ne pouvais me déterminer à accepter la place qu'il m'offrait. Quelques jours après, il me pressa tellement que, par un excès de zèle, je consentis à remplir provisoirement les fonctions du procureur général.
Peut-être me serais-je déterminé à les continuer si j'avais vu la possibilité d'être utile ; mais à peine initié dans les affaires de haute administration, peu connu à Châlçns et dans le département, ne pouvant jouir de la confiance du peuple, puisque je ne tenais pas cette place ^ de lui, mais de Prieur qui la tenait du eonseij exécutif, je me suis convaincu qu'avec tout mon zèle, j'aurais fait plus de mal que de bien, surtout dans un moment aussi critique, et dans un département sur lequel la France et l'Europe entière avaient les yeux.
Ces raisons me déterminèrent à dire à quelques membres de l'administration qu'il m'était impossible de remplir plus longtemps les fonctions de procureur général, et cela le jour où l'on apprit la nouvelle d'un avantage considérable remporté sur l'ennemi. Le lendemain on publia une défaite de l'armée de Dumouriez, et. la marche de celle de l'ennemi sur Çhâlons : c'était la njiit, on vint m'éveil-ler ; je me rendis au département où je m'efforçai de persuader l'invraisemblance d'une telle nouvelle, et à ce que le département quittât Châlons. Le jour arrivé justifia ce
que j'avais dit : l'armée de Dumouriez avait éprouvé un revers parce que des- scélérats avaient crié : à Iq trahison, 'sauve qui peut. Des lâches qui avaient déserté leurs drapeaux s'étaient répandus dans On^lons, et]ils menaçaient de renouyeler la scpne qui s'était passée quelques jours aupq.ra.vant à la maison commune. Les commissaire^ de l'Assemblée législative, ceux du pouvoir exécutif, les autorités constituées et les généraux étant réunis pour délibérer sur les intérêts des défendeurs ae la patrie, ceux-ci prétendirent que ceux qui se dévouaient avec un zèle au-dessus de tout éloge étaient des traîtres ; ils braquèrent les canons devant la maison commune ; et sans les efforts de quelques bons citoyens, ils allaient y mettre le feu et foudroyer tous ceux qui y étaient. Ces mêmes hommes entravaient la marche des autorités constituées, et menaçaient de la mort les citoyens les plus zélés pour les intérêts de la patrie. Voyait que ma quàjitë provisoire de procureur général portait ombrage aux malveillants, jè repris ma, première, celle de commissaire du conseil exécutif ;' je me rendis au département, et jp fis part de ma résolution aux membres de l'administration que j'y trouvai ; Laproix, mon* dénonciateur; était du nombre. Alors, con^me commissaire du conseil exécutif, j'àlïqi partout où je trouvai des soldats, les haranguer, les engager à rentrer sous leurs drapeaux et je né me déterminai à partir de Châlons que lorsque l'espérance succéda aux craintes et aux dangers, que lorsque mon hôte ne me dissmulà pas que mes jours étaient rrie-nacés, et par suite les siens et ceux 4® sa famille, non par les Autrichiens et les prussiens qui n'étaient plus à craindre, mgis p^r des soldats français qui se disaient défenseurs de la liberté. Yoilà l'exacte vérité : il est encore constant que je n'ai' point fui après la prise de Verdun, puisque Verdun était pris quand je suis arrivé à Châlons. Ce sont §u contraire les commissaires dé l'Assemblée législative qui partirent la nuit même où l'on anjionça la marche de l'ennemi sur Châlpps. Lacroix de Contaut partit le lendemain. Ôn conviendra d'après cela qu'il y a bien de la perfidie de là part du sieur Lacroix de .Contaut, d'avoir reproduit cetéé' dénonciation, dans un moment surtout où je venais faire un acte dé patriotisme, dans un moment où j'usais, au nom de ma sectiop, du droit sacré de pétition. Les observations d'un vrai patriote ne pouvaient porter que sur la pétition que l'on a trouvé bonne, puisqu'on m'a inculpé sur des choses qui y etaient absolument étrangères, pour diminuer, sans doute^ l'impression qu'elle avait faite dans la Convention.
Puisque cette pétition me fournit l'occasion de répondre à un de mes ennemis, il n'est peut-être pas inutile à la chose publique que je veux défendre, de les confondre tous ; ils redoutent mon énergie, ma franchise, mon irascibilité profonde pour le crime, et voilà pourquoi ils s'efforcent de m'écarter en saisissant avidement les erreurs qui ont pu m'échapper, erreurs qui ne sont pas de mon cœur, mais de mon impétuosité.
Des sentiments d'humanité et de reconnaissance que je ne crois pas incompatibles avec ceux du plus farouche républicanisme, me portèrent à servir de témoin à Duchâtelet au-
quel j'avais des obligations, pour lui obtenir un certificat de présence : je ne connaissais à cet homme d'autre crime que celui d'avoir été un grand dans l'anqien régime Je nie prêtai à lui rendre ce service avec cette bonne foi qui caractérise J'jnnocpnpp et la purptp des intentions. Des hommes appartenant à Duchâtelet sqnt arrêtés comme suspects d'avoir fait de faux certificats. Les soupçons sè portent sur moi ; je suis arrêté, détenu, persécûté, traduit ail jury d'accusation, qui, à l'unqnipaité, a reconnu jpqn innocence ; malgré pela., les serpents dp la calomnie et 4e l'envip lancèrent leur venifj; ils répandirent qu'pp; avgit trouvé cent mille livres d'assignats chez moj, et j'ai un certificat du* juge de'paix qui atteste qu'on n'a trouvé que quelques petits assignats de 5 livres et qe et 10 sot§. Mes calomniateurs intéressés à me pprdre ont répandu le brujt que j'étais l'espion de Manuel, mqi qui ait écrit, parlé contre lui, moi qui l'ahorro depuis qu'il s'est montré le lâche défenseur du tyran aprps avoir dit : Je n?aime pa% les rois. Ils ont publié que j'avais été très Ijé avec les Lamèth, et qu'il fallait se méfier de moi," tandis que j'ai le premier arraehé le masque dont ils s'étaient couverts, poinme je l'ai arraphé à Mirabpau, pn publiant sa trahison lprs du décrct sur la paix et la guerre, comme je l'ai arraché à Lafayette dans plusieurs écrits, à Brissot, à ^jeyès, à Condorcet, à Guadet, à Vergniaud, à Gensonné, à Pétion, à Bolaud, à Clayièrp, à Lebrun, erçfip à to^is lp§ ennemis de ma patrie, en pprjvant cqntre ses ennemis, et en faisant paraître mps écrits spus des noms plus heureux? Par on mp met sut le oo^ps tc»up ici® méfaits de ceux qui portent mon nom ; c'est pput-être ce qui 4 fait dire qu'on ayait trouvé d'Aligre cfiez mqi, quant au contraire j'ai moi-même demandé à ma section que des commissaires vinssent visiter mes papiers pour dissiper tous soupçons sjir mon compte, et qu'ils ont déclaré qu'ils avaient trouvé les preuves lps plus authentiques de mon brûlant patriotisme; j'ai gardé le silence (1) pendant nos victoires ; je me montre depuis que nous avons des revprs, d'abord parce que c'est un besoin pour moi d'aimer et de défendre mon pays et la liberté, ensuite parce que je suis, comme tous les répuoljcaiiis, convaincus qu'un combat à mprt doit s'engager aujourd'hui entre les commissaires du ppuplp et ses ennemis.
« Signé : Lacroix, ex-commissaire du conseil exécutif provisoire. »
Séance permanente du
La séance est reprise à dix heures et quart du matin.
, secrétaire (2), donne lecture du procès-verbal de la séance permanente du jeudi 4 avril 1793, depuis une heure du matin jusqu'à six heures du soir.
(La Convention en adopte la rédaction.)
, secrétaire, donne lecture des lettres, adresses et pétitions suivantes :
1° Lettre des citoyens Pocholle et Saladin, commissaires de la Convention dans les départements de la Seine-Inférieure et de la Somme, qui font part des mesures qu'ils ont prises, lorsqu'ils ont été instruits de la trahison de Dumouriez; cette lettre est ainsi conçue (3) :
Amiens, le
« Citoyens nos collègues,
( Vous étiez instruits par l'arrivée de l'aide de camp Dulao et du courrier que vous a expédié la municipalité de Péronne du forfait de Dumouriez et de l'acte audacieux qui complète le cour» de ses trahisons. Il nous reste à vous informer des mesures que nous avons prises aussitôt que nous avons appris, à Amiens où nous sommes, ce nouvel attentat à la souveraineté du peuple et à la représentation nationale.
« Le département de la Somme est bien voisin des frontières du Nord. Une
lettre du conseil exécutif, adressée à l'administration de ce
département, changeait une disposition antérieure, d'après laquelle les
nouvelles recrues devaient se rendre au Havre; elle les fixait dans le
département même où elles devaient être dirigées d'après les ordres du
ministre de la guerre pour les besoins de l'armée du nord. Ces besoins
.pouvaient, en augmentant, nous mettre dans la nécessité d'user des
pouvoirs que nous donne votre décret du 9 mars de requérir tout oh
partie des gardes nationales des départements que nous avons à
parcourir. Il manquait à l'exécution de ces mesures et de quelques
autres que la nécessité pouvait provisoirement commander un agent
militaire qui pût mériter et justifier notre confiance. L'état du
département de la Somme, la nécessité de déployer dans un moment
difficile un pouvoir capable d'en imposer aux ennemis
« Nous ne développerons pas chacun de ces articles, mais nous les croyons tellement conformes à vos vues que nous nous flattons que vous les approuverez.
« Nous avons pressenti que si le danger de la patrie l'exigeait, une armée entière sortirait des murs de Paris et volerait vers, nos frontières, et nous nous occupons des mesures qui ,sans fatiguer les gardes nationales ou sans être onéreuses à la République, offriront à l'armée qui s'avancerait des renforts considérables pris soit dans les nouvelles levées, soit dans les gardes nationales qui seraient requises.
« Pour assurer le succès de toutes ces dispositions, nous avons dépêché un courrier extraordinaire vers le citoyen Lamorlière, adjudant général de l'armée des cotes et commissaire supérieur du pouvoir exécutif. Son attachement à la République l'a ramené près de nous, et c'est avec lui que nous concertons tout ce qui peut assurer dans le département de la Somme des forces suffisantes, et dont l'emploi serait utilement dirigé.
« Nous joignons ici l'adresse et l'arrêté qui est à la suite.
« Nous avons cru devoir autoriser, de la part du département de la Somme, l'envoi, tant à Arras qu'à Lille, de commissaires chargés de se procurer sur l'état des deux départements du Pas-de-Calais et du Nord, quant aux subsistances surtout, des renseignements qui, doivent surtout nous mettre à même de pourvoir, par tous les moyens que peut offrir celui de la Somme, aux besoins d'une armée qui grossissant encore, exigera plus de secours. Nous vous instruirons du résultat de ces connaissances.
« Nous eussions mis plus de célérité dans l'exécution de ces mesures, si la commune de Péronne avait été aussi prompte qu'elle eût dû l'être à nous donner communication des faits parvenus à sa connaissance. Nous ne les avons appris que d'une manière indirecte, quoiqu'elle n'ignorât pas notre séjour à Amiens. Nous avons cru devoir lui en témoigner notre improbation et nous pensons qu'elle mérite aussi la vôtre.
« Signé : Pocholle, Saladin. »
Proclamation des commissaires de la Convention nationale dans les départements de la
Somme et de la Seine-Inférieure (1).
« Citoyens,
« Les desseins de Dumouriez se dévoilent enfin dans tout leur jour.
« La Convention nationale, justement alar-
« Citoyens, cet attentat vous laisse assez pressentir quels sont les projets que conçoit aujourd'hui le monstre qui s'en est rendu coupable. Il vous éclaire aussi sur les causes de nos dernières défaites, et vous apprend pourquoi le sang de vos frères a coulé devant Maës-tricht, dans les campagnes de Tirlemont et de Saint-Tron.
« Citoyens, la souveraineté du peuple réside dans la représentation nationale, et Dumouriez l'a violée avec une'audace impie. Le salut de la liberté est dans la force de nos armées, et le scélérat les a livrées à un ennemi barbare et sans pitié. Tant de perfidie et de cruauté ne sauraient rester impunis. Armez-vous, citoyens, armez-vous pour votre liberté, armez-vous pour votre défense, armez-vous pour venger vos frères morts, pour venger ceux qui traînent, d'asile en asile, leurs membres mutilés et leurs corps couverts de blessures.
« On vous fera craindre l'armée que commande le rebelle. Serait-il possible que les soldats qui ont vaincu pour la liberté fussent assez lâches pour servir les desseins d'un traître qui veut donner des fers à sa patrie 1
( Non, citoyens, des Français n'hésiteront point entre un homme et la liberté, et quel que soit l'empire de Dumouriez sur les esprits de ceux qui l'environnent ; quelques moyens qu'il emploie pour les égarer, le remords leur dira bientôt combien ils s'aviliraient en restant sous des drapeaux souillés par la rébellion.
« Nous avons pensé, dans ces circonstances, qu'il était de notre devoir de vous rappeler au serment que vous avez fait de vivre ou de mourir républicains, à ce serment que Dumouriez foule aux pieds, et qu'il a l'audace de vous proposer d'abjurer. Mais nous comptons encore plus sur votre courage et sur vos vertus, que sur vos serments; c'est au nom de ces vertus que nous vous invitons à vous rallier autour de la Convention nationale. Là sont vos vrais représentants, là sont les amis du peuple, là sont ceux qui vous ont délivrés d'un tyran, couvert de honte et de crimes. Là sont ceux qui doivent, dans leur sagesse et sur les ruines d'un trône odieux, préparer les lois qui assureront votre bonheur et celui de vos descendants. Environnez de toute votre force et de toute votre confiance ce sanctuaire de votre liberté. Vouez à l'opprobre et à la mort quiconque tentera de vous en détacher. Mon-tiez-vous inébranlables dans les périls qui nous menacent, et il ne restera bientôt plus aux parjures, aux ambitieux, aux tyrans, quels qu'ils soient, que le juste châtiment de leur scélératesse. C'est avec la plus ferme confiance que vos armes se soutiendront au degré d'énergie que nous commandent impérieusement les circonstances, que nous avons arrêté ce qui suit :
Art. 1er.
« Les commissaires de la Convention natio-
nale déclarent qu'ils exerceront, en son nom,
dans les départements de la Somme et de la Seine-Inférieure, la plénitude des pouvoirs confiés aux représentants du peuple.
Art. 2.
« La force publique de ces départements est à leur disposition et sera tenue d'agir et de marcher d'après leurs réquisitions.
Art. 3.
« Les corps administratifs et les conseils généraux des communes seront tenus de reconnaître la présente déclaration, de l'enregistrer et de l'exécuter, sous leur responsabilité personnelle.
Art. 4.
« Tout acte émané d'une autre autorité que celle de la Convention nationale et de ses commissaires, sera regardé comme un acte de rébellion contre la souveraineté du peuple, et les auteurs et instigateurs punis de mort.
Art. 5.
« Dumouriez est déclaré traître à la patrie. U est défendu, sous peine de mort, d'obéir à aucun ordre ou réquisitoire émané de lui.
Art. 6.
« Le jour de la réception de la présente déclaration, tous les citoyens s'aoecmblciont dans leur commune en présence de leur maire et de leurs officiers municipaux, et renouvelleront le serment de maintenir jusqu'à la mort, la liberté et l'égalité, de respecter en tout les lois émanées de la Convention nationale, et de ne reconnaître d'autre autorité que celle qu'elle aura déléguée.
Art. 7.
« Tous les fonctionnaires publics, civils et militaires, seront tenus de preter le même serment et d'en justifier.
Art. 8.
« Aucun dépositaire des deniers publics ne pourra délivrer de fonds que sur des ordonnances visées par les administrateurs du département, lesquels répondront de tout emploi illégal qui pourrait en être fait.
Art. 9.
« U sera nommé provisoirement, pour le département de la Somme,, un chef militaire auquel obéiront toutes les gardes nationales et autres troupes, conformément aux réquisitions légales qui lui seront faites par nous, et par les corps administratifs.
Art. 10.
« Les conseils des départements adresseront cette déclaration, par des courriers extraordinaires, aux districts : les districts, aux municipalités, qui justifieront, dans les vingt-quatre heures, de sa réception et de son enregistrement.
« Art. 11.
« Cette déclaration sera pareillement envoyée, par un courrier extraordinaire, à la Convention nationale.
A Amiens,, le 4 avril 1793, l'an II de la Répu-bjiquè française.
« : ppch0^e? ^al^diîj. |
(La Convention approuve cet arrêté et*la conduite de ses commissaires.) /
Lettre dçs administrateu/rs composant le conseil çxèçutif et militaire du département (le Iggiwçzef-Lpire (fi. en date du l®r avril 1793, dans laquelle ils donnent des détails sur l'état actuel de leurs frères, sûr loir position et sur celle des contre-révolutionnaires. Un corps de 10,000 hommes, rassemblé à Doué, marche, sous les ordres du général Duhoux, contre les révoltés, dont lé nombre peut être évalué à 20,000 hommes, dans ce seul département; leur artillerie est de 23 canons de différent» calibres. Mais cës administrateurs observent que malgré l'ignorance et lé mauvais armement de ces forces ennemies, les dangers de ce département sont réels et qu'ils sont fondés à mal juger des intentions de ceuç qui osent assurer que tous ces troubles sont apaisés.
(La Convention renvoie cette lettre au comité de salut public.)
3° Lettre des administrateurs du directoire, du département de VAllier par laquelle ils an-nonbêiiib quo le recrutement est terminé, malgré les troubles que les prêtres fanatiques et les ci^devant nobles excitaient; elle est ainsi conçue (2) :
boulins, le
« Citoyen Président,
« Nous nftus hâtons de faire connaître à la Convention nationale l'état
du département de l'Allier, sur la levée du contingent que la loi du 24
février exige pour nos armées. Les infâmes manœuvres des prêtres et des
ci-devant nobles ont été déjoués dans les districts de Montmarault et de
Cerilly- 400 volontaires et la gendarmerie, secondés de 4 pièces de
canon, ont tout. dispersé et rétabli l'ordre. 23 rebelles, 4 prêtres
réfractaire et un capitaine des gardes du ci-devant roi, sont dans la
maison d'arrêt à Moulins; ils vont être livrés au tribunal criminel?
conformément à la loi du 19 de ce mois, Le recrutement est terminé; Jps
militaires nommés dans chaque district par vos commissaires, disposent
le départ des recrues pour Strasbourg. Les deux tiers des volontaires
seront obligés de partir sans armes. Le ministre de 1» guerre, à qui
nous avons écrit, ne nous ayant point répondu, nous pensons que les
volontaires trouveront à Strasbourg tout ce qui leur sera nécessaire;
assurez la Convention de notre soumission & décrets. Aussi
fidèles à nos serments qu'à notre amour pour la liberté, nous
(La Convention ordonne la mention honorable, l'insertion de la lettre au Bulletin, qt le) renvoi aù con^pjl e^pcutif, pour faipe fournir les fmes au détachement flù bataillon de l'Àlliér.)
4? Lettre dp§ eitoyetis Qeriigoëyfç et Içhqn, commissaires de la Convention nationale les dépqrte'menfts dvt Gers et des Landes (1), en date du 31 mars 1793, par laquelle il préviennent la Convention qu'ils ont ordonné l'arrestation des citoyens P arrivai et Dau-hine, membres du directoire du district de Lille; Jourdain, commissaire préposé à la vente des effets nationaux; JÂgnac, administrateur du département du Gers, commissaire délégué pour, surveiller les ventes, et £qrrieut officier municipal de la ville de Crimop. Ces fonctionnaires se sont permis des dilapidations coupables.
(La Convention approuve la conduite de ses commissaires, et renvoie leur lettre aU comité de sûreté générale. )
5° L.efôve des çftqyewf GoupiUeau (dç. Afon-taiguJ. tyfiçhpl et Conthpn, commissaires de la CoiyyentiçM, Çfîwg ' dqn$ Iq, çi-dpvqnt principauté çip halm \2), en date* du 22 mars 179|; elle consent lés détails de leurs opérations; ils de|panHeuti que la Convention les ^pr prouve, et ils annQWept Ie dévpuemeut des habitants de S endnnes à la cause de la liberté et dé Pégalit^. 7p0 îeunès gens se §gnt enrôlés dans les divers bataillons 4es Vosges. Ils espèrent' que sop quinze jours leur mission s|ir ïe mode d'incorporation de la ci-devant principauté de ijUjalRl gpfp." terminée.
(La Convention ordonne la mention honorable' du dévouement de ces citoyens nouveL lèvent acquis à la République? elle approuve la conduite 4e ses commissaires, et renvoie la letttre au comité 4e division.)
6Q Lettre du citoyen GoupiUeau (de Mon-taigu), commissaire de là Convention, nationale dans-la ci-devant principauté de iSqlm \%), en date du 22 mars 1793; il observe que tou|>e§ les propriétés g ans le département de la Vendée sont rasées et ràv^géès, qUe sa femme, pop frère et ses enfante sont peut-être égorgés : il damande d'être adjoint aux commissaires envoyés dans ce département, où il sera utile à sa patriè.
(La Convention décrète que Goupilleau sera rappelé de sa mission au pays des Deux-Ponte? pour être adjoint aux deux commissaires envoyés dans le département de la Vendée, afin de les aj4er P;ar ses connaissances locales à détruire le pafti des rebelles dans ce département-)
7° Lettre des citoyens Le Tourneur, Rouyer et Brunei, commissaires de la
Convention ria-
Perpignan, le
« Le plus pressant de nos devoirs à notre arrivée dans cette ville était
de nous assurer par nous-mêmes des moyens de défense qu'elle pouvait
opposer à l'ennemi. Nous avons dirigé tous nos soins vers ce but
important. L'inspection la plus scrupuleuse de l'état des fortifications
de la place et de la citadelle de Perpignan ne nous laisse plus rien à
désirer sur tous les détails qui nous étaient nécessaires pour rendre
compte de la situation de ce premier boulevard de la République du côté
de l'Espagne. La Convention nationale ne désapprouvera pas sans doute
que nos observations sur la défensive ne soient confiées
« Mais nous devrons assurer la Convention nationale qu'au moyen des mesures que nous avons prises, tant pour l'action des bouches à feu, dont nous avons fait disposer les affûts de manière à procurer aux pièces tout le champ de tir dont elles sont susceptibles, que pour la réparation des parties de l'enceinte qui pouvaient donner quelques inquiétudes, Perpignan se trouve sur un pied de défense respectable. Nous ne pouvons qu'insister sur la nécessité de compléter tous les objets de son armement dont nous adressons les détails au comité de défense.
« Les écorchements qui se trouvent dans plusieurs parties des revêtements
exigeraient une réparation très dispendieuse, et tous les gens de l'art
s'accordent sur ce point que la dégradation de la première chemise d'un
vêtement diminue d'une manière très peu sensible la force de résistance.
Nous pensons donc avec eux que les esprits peuvent être rassurés et
« On s'occupe avec l'activité que peuvent comporter les ouvrages de sujétion de la perfection des lunettes avancées sur les fronts de la citadelle. Elles seront puissamment défendues par les ressources de la guerre souterraine. Nous nous sommes rendus aux différents forts de Bellegarde, de Bains, de la Garde à Prats-de-Mollo, dont la situation sur l'extrême frontière fait assez sentir l'importance. Us avaient besoin de notre surveillance, moins pour les fortifications, qui sont en bon état, et dont nous avons cependant cru devoir augmenter la force par des ouvrages de campagne placés avantageusement, que pour l'état des garnisons, les approvisionnements en subsistances et munitions de guerre, l'augmentation des bouches à feu et plusieurs autres détails aussi essentiels que pressants dont nous rendons un compte exact au comité de défense générale commandant temporaire, troupes de garnison et de cantonnement, artillerie, mousqueterie, munitions et vivres, tout est aisposé à assurer ces points intéressants et à faire échouer les entreprises de nos ennemis. Nous avons vu de près leurs fort touchent le sol étranger, et nous avons eu postes avancés, à Bellegarde. Les glacis du la douce satisfaction d'embrasser de nouveaux frères qui ont fui la terre du despotisme et ont émis librement le vœu de se ranger sous le drapeau tricolore. Chaque jour en augmente le nombre. Nous avons donné l'ordre de les transférer à Perpignan et de suite dans les cantonnements intérieurs.
« A Prats-de-Mollo, le canon de la liberté a instruit l'ennemi de notre présence. Nous avons planté l'arbre de la fraternité, et l'écho des montagnes a répété au loin les cris de : « Vivent la liberté et l'égalité ! »
« Nous sommes avec respect, citoyen Président,
« Les commissaires de la Convention nationale,
« Signé : Le Tourneur, Rouyer, Brunel. »
(La Convention renvoie ces observations au comité de défense générale.)
8° Lettre du citoyen Mazade, commissaire de la Convention nationale pour
l'inspection des côtes de Lorient à Bayonne (1), en date du 26 mars
1793, par laquelle il annonce qu'il vient de faire partir 500 hommes
bien armés et bien équipés pour la Vendée. Le département des
Basses-Pyrénées, quoique très éloigné; lui a offert des secours pour ce
département; l'administration de Lot-et-Garonne lui a promis 400 hommes
de cavalerie, dont il presse tous les moyens de départ. U a fait passer
au ministre de l'intérieur des observations du directoire de la
Çrironde, relatives à l'état des grandes routes, dont il prie instamment
la Convention de s'occuper. Il a demandé au ministre de la Marine un
convoi pour des bâtiments de Dunkerque, chargés de grains pour la ville
de Bordeaux, dont les besoins sont très pressants ; il appelle toute la
sollicitude de la Convention en faveur de cette
(La Convention ordonne le renvoi de cette lettre au conseil exécutif.)
9° Lettre des citoyens Bonnier et Voulland, commissaires de la Convention nationale dans les départements de l'Hérault et du Gard (1), en date du 27 mars 1793, par laquelle ils annoncent que dans le département du Gard les opérations relatives au recrutement se continuent avec rapidité ; quelques agitateurs tentèrent à Montpellier de s'y opposer, mais leurs soins et ceux des autorités constituées rétablirent le calme, pour lequel il faudra faire quelques sacrifices en indemnités aux communes des campagnes qui les ont promises à leurs volontaires. Us attribuent aussi le retard des opérations du recrutement au manque d'agents de l'administration de la guerre, qui, au lieu d'envoyer un agent supérieur par département, n'en envoie qu'un par armée.
(La Convention renvoie cette lettre aux comités de la guerre et des finances réunis.)
10° Lettre des administrateurs du directoire du département de l'Ain (2); en date du 28 mars 1793, par laquelle ils envoient l'extrait" du procès-verbal de leur séance du 27, dans lequel ils demandent l'indulgence de la Convention nationale en faveur des citoyens Grosbuy et Deveyle, dont ses commissaires ont ordonné l'arrestation pour cause de propos tendant à ralentir le recrutement.
(La Convention renvoie à ses commissaires à statuer sur cette demande.)
11° Lettre des citoyens Dartigoëyte et Ichon, commissaires de la Convention nationale dans les départements du Gers et des Landes (3), en date du 30 mars 1793, qui annoncent que cette partie du territoire de la République est suffisamment pourvue de grains.
(La Convention renvoie cette lettre au comité d'agriculture.)
12° Lettre des citoyens Elie Lacoste et Jecm-Bon-Saint-André, commissaires de la Convention dans les départements du Lot et de la Dordogne ; ils annoncent que des nouvelles plus satisfaisantes sur la situation de la Vendée et autres départements voisins les déterminent à suspendre l'exécution de leur arrêté du 27, dont ils avaient envoyé copie à la Convention; cette lettre est ainsi conçue (4) :
Castillanès, 27 mars, l'an II de la République française.
« Citoyens nos collègues,
« Les nouvelles reçues d'Orléans et de la Vendée, des menaces de troubles
dans les départements voisins et jusque dans celui du Lot nous avaient
déterminés à prendre l'arrêté du 27 de ce mois dont nous vous avons
envoyé copie. Des nouvelles plus satisfaisantes nous engagent à en
suspendre l'exécution. Nous
« Signé : Elie Lacoste et Jean-Bon-Saint-André. »
(La Convention renvoie cette lettre aux comités de défense et de sûreté générale réunis.)
13° Lettre des citoyens Michaud et Siblot, commissaires de la Convention nationale dans les départements du Doubs et de la Haute-Saône, en date du 31 mars 1793; ils annoncent que le recrutement est terminé dans ces deux départements, dont les citoyens sont disposés à faire toute espèce de sacrifices pour le salut de la patrie. Ils envoient un arrêté portant destitution du directeur des droits d'enregistrement à Besançon, qui n'avait pu se procurer un certificat de civisme ; ils instruisent la Convention que les troubles qui avaient eu lieu dans cette ville les 22 et 23, sont apaisés et les coupables punis ; ils réclament instamment en faveur de cette ville un secours de 300,000 livres, à titre de prêt, pour ses approvisionnements.
Suit la teneur de ces différentes pièces : I
Lettre des commissaires Michaud et Siblot à la Convention (1).
Besançon, le
« Citoyens collègues,
c La ville de Besançon est tranquille ; les événements qui s'y sont passés les 22 et 23 de ce mois et qui auraient pu avoir des suites très fâcheuses si les corps administratifs ne s'étaient pas empressés de réprimer les malveillants qui les ont occasionnés vous sont connus par le procès-verbal que la municipalité vous a envoyé depuis trois jours, les juges de paix sont saisis de cette affaire ; plusieurs témoins ont déjà été entendus et dans peu on en connaîtra les auteurs qui seront punis, suivant l'exigence du cas.
« Nous avons reconnu, depuis que nous sommes ici, citoyens collègues, que
les subsistances y sont d'une cherté excessive et qu'il est instant que
la somme de trois cent mille livres que la municipalité vous a demandée
à titre de prêt pour en faire un approvisionnement lui soit accordée.
Elle a fait jusqu'ici des sacrifices considérables pour apaiser les
besoins du peuple. Ses ressources sont épuisées. Ces circonstances,
citoyens collègues, sont dignes de toute votre attention et vous
n'oublierez pas
« Le recrutement est fini, tant dans ce département que dans celui de la Haute-Saône. Nous avons la satisfaction de pouvoir vous annoncer qu'aucune commune n'a murmuré pour fournir son contingent, que l'esprit public qui y règne est en général très bon, qu'elles ont la plus grande confiance en vous et qu'elles sont disposées à faire les plus grands sacrifices pour le salut de la patrie.
« Nous allons, citoyens collègues, continuer avec la plus grande activité les opérations dont vous nous avez chargés. Nous avons lieu d'espérer qu'à notre retour, nous n'aurons rien que de consolant à vous annoncer.
« Agréez, citoyens collègues, l'assurance de notre respectueux attachement.
( Les commissaires de la Convention nationale dans les département du Doubs et de la Haute-Saône :
« Signé : Michaud, Siblot. »
P. S. — En vous parlant des recrutements, nous avons oublié de vous dire, citoyens collègues, qu'une grande partie des citoyens fournis par les différentes municipalités des deux départements que nous avons parcourus sont en chemin pour se rendre à leur destination. Nous devons vous dire aussi que nous avons suspendu de ses fonctions le nommé Roslin, directeur des droits d'enregistrement, lequel n'avait pas pu se procurer un certificat de civisme et qui était donc dans le cas d'être destitué. Nous avons l'honneur de vous envoyer une copie de l'arrêté que nous avons pris à ce sujet.
« Signé : Michaud; Siblot. » II
Pétition de tous les corps constitués de Besançon, réclamant instamment, en faveur de cette ville, un secours de 300,000 livres à titre de prêt, pour ses approvisionnements (1).
« Citoyens représentants.
« La municipalité de Besançon vous a demandé des secours ! Elle vient de
nouveau les solliciter ! Un peuple nombreux se presse autour de ses
magistrats et leur demande du pain ! Us ont épuisé toutes les ressources
et tous les sacrifices pour alimenter la classe indigente; ils lui
distribuent à vingt-deux sous
« Signé : Masseliee, maire ; Couchery, procureur de là commune, »
« Vu là présenté pétition dil consëil général de la commùnë de Besançon, lë pi-OcureUr syndic ehteiidii ;
« Le directoire du district, considérant que lé seUl moyen de inainteiiir l'drdre ët la paix dans cette ville dît la gardé nationale fait depuis longtemps un service militaire très actif, c'est d'introduire le pain à un prix proportionné aux besoins des malheureux qui sont en grand nombre à Besançon ; frappé des raisons et des sages mesures de la municipalité le directoire du district réunit son vœu à celui de cette mûnicipalité auprès de la Convention nationale pour, obtenir un décret, conforme à la demande oi-dessus. C'est le seul moyen de soulager le pauvre, et de sauver cette commune des maux qui la menacent.
« JTàit en Dirèctbire, à Besançon, le 31 mars i7Ô3, l'an II de là République française.
« Signé : Pajot, Bonard, Nordin, Mourgeon, Yaïssiêr. »
« Yu la présente pétition et l'avis ci-dessUs du district dé Besànçon, ouï lé procureur général syndic, /
« Le conséil général du département du Doubs, considérant que les raisons qui l'avaient j déjà déterminé à donner le 6 du courant, un avis favorable sur là jpremière pétition de la municipalité de Besançon, tendant au même objet, Subsistent et deviennent même tous les jours plus pressantes, se réùhit aux deUx corps administratifs de Besançon, pour prier la Convention nationale d'àèëôïttër à là Villé de Besançon l'avance des 300,000 livres qu'elle demande et qui lui sont absolument nécessaires pour là mettre en éta#t de pourvoir à la subsistance des citoyens cle cette cômmune.
Fait à là séànce publique du conseil général du département du DoUbs, à Besançon, lé 31 mars 1793, l'an II dé là République française.
« Signé : Pierre Bouvenot, président ;
Rannier, secrétaire général. »
Arrêté des commissaires Michtmd et Siblot concernant le citoyen Roslin, directeur de l'éri-registreiheni à Besançon (1);
« Nous membres et commissaires de la Convention nationale près les départements du Doubs et de la Haute-Sâone, sur la dénomination qui nous a été faite par l'administration du département du Doubs pour le conseil général,de la commune et par la société des amis de la liberté et de l'égalité de Besançon, de la négligence que Roslin, directeur des droits du timbre et de l'enregistrement et autrés y réunis, a mis depuis le commencement de la Révolution à remplir les devoirs" de sa place, de l'incivisme qu'il a constamment affiché, confirmé par le refus que le conseil général de la commune lui a fait d'un certificat de civisme : en vertu des pouvoirs qui nous sont délégués par le décret du 9 du courant, le .suspendons provisoirement de ses fonctions; enjoignons à 1 administration du département de faire apposer instamment les scellés sur ses papiers et arrêter ses registres et journaux, afin de constater sa situation ; et pour assurer le service de la place qu'occupait ledit Roslin» avons nommé le citoyen Bourgeon, dont le civisme et les talents nous ont été attestés par le département et sur sa présentation, pour exercer aussi provisoirement les fonctions dé ladite plàce, à charge par lui de se conformer exactement à toutes les lois et instructions concernant la régie des droits d'enregistrement, timbre et domaines nationaux ; chargeons le procureur général syndic de tenir la main à l'exécution du présent arrêté, et d'en informer les administrateurs de la dite régie.
« Fait à Besançon, le 31 mars 1793, l'an II de la République française.
« Signé : Miohaud ; Biblot. »
Je propose la rédaction suivante (2) :
« Sur la pétition du conseil général dé Besançon, là Convention UatiOnalé décrète qu'il lui sera prêté une somme dé 30Û,0dd livres, pour être employée à l'achat des subsistances; qùë cette sbmmé sera prisé sur le recouvrement des coiitribUtions directës de là même ville pour l'année 1792 ët années antérieures, et que lë remboursement én sefcà fait dans le courant de l'ànnée 1793, pàr le prôdUit des reventes, et eh càa d'ihsuffisance, par addition à l'impôt progressif ».
(La Convention adopte cette rédaction, elle approuvé ensuite la conduite tenue par ses commissaires et renvoie leur lettre aux oomités dé défense et de sûreté générale.)
14° Lettre des citoyetts Turreau et Garnie?, commissaires de la
Gonventiob dans les départements de l'Aube et de l'Yonnne, én date dti
28 mars 1793, pat- làqUelle ils annoncent qu'ils ont suspendu dé Ses
fonctions le citoyen Ju-
« An II de la République, 28 mars 1793.
« Nous vous faisons passer, citoyens collègues, l'arrêté qui suspend le citoyen Juglard, commissaire des guerres, de ses fonctions. Vous verrez nos motifs dans nos arrêtés (2). Nous atolls pëttsé que les intérêts de là République exigeaient cette mesure.
« Ndus vous saluons fraternellement,
« Signé : L. Turreau, Garnier. »
(La Convention approuve cet arrêté et le renvoie au comité de défense générale.)
15° Lettre des citoyens Turreau et Garnier, commissaires de la G onvention dans les départements de l'Aube et de l'Y onne (3), en date du 31 mars 1793, par laquelle ils adressent les différents arrêtés qu'ils ont cru devoir prendre pour l'activité du recrutement dans les départements confiés à leurs soins.
(La Convention renvoie ces arrêtés au comité de la guerre.)
16° Lettre des citoyens J. B. Lacoste et Bal-thazar Faure, commissaires dans les départements de la Haute-Loire et du Gantai, en date du 1er avril 1793, dans laquelle ils annoncent que des troubles étaient sur le point d'éclater au Puy et comment,par leur arrêté du 29 mars, dont ils envoient urn^ copie, ils sont parvenus à les calmer; cette lettre est aihsi conçue (4) :
Au Puy, le er avril
1793
« Citoyens législateurs,
« C'est avec empressement que nous croyons pouvoir voUs annoncer d'être
déjà parvenus, non seulement à dissiper les nombreux attroupements qui
s'étaient formés dans ces envi-roils, mais èncore de bhariger ce foyer
de contre-rëvoliitidn en fin foyer dë pàtriotisine. Les rebelles de
plusieurs paroisses, intimidés par les mesures extraordinaires que nous
avions prises pour leur donner la chasse et les faire exterminer, se
sont volontairement rendus auprès de nous, se sont Soumis à la loi, nous
ont conduit et livré un de leurs chefs (qui est déjà jùgé et doit être
mis à mort dans le joUr), noiis ont déclaré les autres, témoigne leur
vive indignation, 'contté lës monstres qui
( Toutes les autorités constituées de cette ville, réunies dans les moments de danger, ont montré autant de patriotisme que de courage et se sont empressées de seconder nos opérations de tous leurs pouvoirs.
« La gendarmerie, la garde nationale principalement, celle de la ville du Puy, méritent les plus grandes éloges.
Elles ont marché contre les attroupés et grimpé sur les montagnes où ils étaient campés, de nuit comme de jour, avec une ardeur et Une intrépidité incroyables.
« Nous vous adressons un second arrêté que nous avons cru devoir prendre, pour parvenir à découvrir Une centaine de prêtres rëfrac-taires cachés dans ces environs, qu'il est aussi urgent qu'indispensable de faire arrêter, sans quoi la tranquillité, qui paraît déjà rétablie dans le département, ne le serait pas pour longtemps, étant la véritable souroe de toutes les % conspirations tramées contre la sûreté de la République.
a Vos commissaires pour les départements de la Haute-Loire et du Gantai.
« Signé : LAcoste, Faure. »
« P. — Les administrateurs aU directoire du district de Saint-Flour, département du Cantal, nous ont annoncé que le recrutement est déjà terminé dans leur district.
« Signé : Lacoste, Faure. »
Suit le texte de l'arrêté pris par les commissaires (1) :
Arrêté des comWiisèaires députés de la Convention nationale, du S9 mars 179&~, l'àn 11 de là République.
« Nous, Jean-Baptiste Lacoste et Baltha^ zard Faure, commissaires députés de la Convention nationale pour les départements du Cantal et de la Haute-Loire;
« Considérant, que le plus grand nombre des communes des cantons de Fay
du Monas-tier, district du Puy, département de la Haute-Loire, dans
l'étendue desquels la loi du recrutement a fourni l'occasion d'exciter
des attroupements séditieux, présentent des montagnes presque
inaccessibles; qu'elles ont été constamment un foyer de
contre-révolutiott, qu'elles forment une chaîne avec le camp de J aies,
les environs d'Issingeaux; qu'elles étaient comprises dans les grandes
conpira-tions de Dusaillant; que les concitoyens du Puy, pour prévenir
des incursions dévastatrices, ont été forcés d'y faire marcher à
plusieurs reprises la force armée; qu'elles sont le repaire d'un grand
nombre de prêtres réfrac-taires qui ne cessent d'y allumer les torches
du fanatisme de ia guerre civile; que l'ordre, la tranquillité publique
ne peuvent être rétablis dans ce département avant qu'il ne soit purgé
de ces êtres malfaisants, arrêtent : er.
« Que les officiers municipaux des com- ( munes de Saint-Front, Laussonne, Lantriac, Montusclat, Saint-Julien-Chapteuil, Cham-pelause, se rendront au Puy dans le délai de vingt-quatre heures, après la réception du présent arrêté, pour y rendre compte des motifs dudit attroupement, des mesures qu'ils ont prises pour l'empêcher, indiquer les chefs, donner la liste de tous les citoyens de leur commune qui en ont fait partie, déclarer pourquoi ils ont. souffert que leurs dites communes soient privées d'un curé constitutionnel, si depuis la proclamation de la loi sur la déportation des prêtres réfractaires, il n'en a point résidé dans l'étendue de leur commune, s'ils ont été aperçus, les maisons qui sont connues, ou soupçonnées de les avoir récélés, s'ils n'ont point pratiqué dans les bois, dans les antres qu'ils habitent, et s'il a été dit des messes dans des chapelles particulières, dans des greniers ou des caves, s'ils n'ont point administré, baptisé; quels sont les papiers et les lettres qui ont circulé pour égarer les citoyens; quels en ont été les auteurs et les porteurs.
Art. 2.
«Pour entendre lesdits maires et officiers municipaux et recevoir leurs "déclarations, nommons les citoyens Morel, Liogier-de-Craponne et Liogier-de-Pieyres, administrateurs du directoire du département; Aulagnier, administrateur du conseil; Bleu et Brunei, administrateurs du directoire du district; Laussac père, membre du bureau de conciliation; Arnaud, officier municipal; Descourt, procureur de la commune du Puyj Vincent-Maizieu, Chauchat, libraire, et Hilairé, greffier du tribunal du district du Puy, qui se formeront en commission. extraordinaire dans le lieu qui leur sera indiqué par la municipalité de cette ville : et si les indications qui seront données à ladite commission ne sont pas suffisantes pour dévoiler la trame l'horrible complot attenté contre la sûreté publique, nous les autorisons à se diviser en quatre sections, à se transporter séparément sur lesdites communes, à y prendre le« déclarations et renseignements qu'ils croient nécessaires, à requérir au besoin la force publique, à mettre en état d'arrestation tous ceux qui seront prévenus, à la charge par ladite commission de nous instruire sur-le-çbamp.
Art. 3.
« Les communes de Coubon, Lantriac, Champelause, Front, les Yastres, Chaudey-rolles, les Etables, Laussonne, Freicenet-La-tour, Sangues, et toutes les autres qui ont refusé ou retardé de se conformer à la loi, seront tenues dans le délai de vingt-quatre heures, après l'envoi du présent arrêté a leur municipalité, de fournir et par la voie du sort, leur contingent, d'en donner avis sur-le-champ au procureur syndic et au procureur général; et faute par elles de s'y conformer, elles seront dénoncées à la Convention pour être réputées en état de rébellion.
Art. 4
« Chargeons le procureur général syndic de
faire imprimer le présent arrêté et de l'en-
voyer à tous les corps administratifs, municipalités et sociétés populaires du département, pour y être publie et affiché.
« SignéL : J.-B. Lacoste, Faure. »
a Nota. La Convention nationale a décrété, le 23 du courant, qu'elle n'a-pas entendu comprendre dans la loi du recrutement les évêques, curés et vicaires salariés par la nation : et, en conséquence, décrète que ceux qui ayant concouru au recrutement, se trouveraient au nombre des citoyens qui doivent marcher, seront libres de rester ou de revenir à leur poste.
« Signé : Lacoste, Fatjre. »
(La Convention décrète la mention honorable, ordonne l'insertion au Bulletin de la lettre de ses commissaires et approuve l'arrêté qu'ils ont pris.)
17° Lettre des citoyens Roux et Perrin, commissaires de la Convention nationale dans les départements des Vosges et de la Haute-Marne (1), en date du 31 mars 1793, par laquelle ils rendent une justice éclatante à l'esprit public qui règne dans le département des Vosges, dont le recrutement est totalement effectué.
(La Convention ordonne la mention honorable et l'insertion au Bulletin, et renvoie au comité des domaines les plaintes qu'ils portent contre les anciens officiers de la maîtrise de Saint-Diez, pour leur négligence à veiller sur les forêts dont le soin leur avait été confié; ils ont été dans la nécessité de suspendre le procureur de cette maîtrise.)
18° Pétition de la société populaire de Dieppe (2), qui présente certaines observations sur un projet de canal de navigation jusqu'à Paris.
(La Convention renvoie cette demande au comité des ponts et chaussées.)
19° Lettre du vérificateur en chef des assignats qui annonce le brûlement de 3 millions d'assignats; cette lettre est ainsi conçue (3) :
Paris, 6 avril 1793, l'an II de la République.
« Citoyen Président,
« Je vous prie de prévenir la Convention nationale qu'il sera brûlé aujourd'hui la somme de 3 millions, lesquels joints aux 715 déjà brûlés fera celle de 718 millions, ladite somme provenant de la vente des biens nationaux.
« Le vérificateur en chef des assignats, « Signé : Duperey. »
20° Lettre de Lebrun, ministre des affaires étrangères, par laquelle il
annonce que ce sont les citoyens Proly, Pereira et Dubuisson qui ont
fait la première découverte de la trahison de Dumouriez et qu'ils ont
bien mérité de la patrie ; cette lettre est ainsi conçue (4) :
« Citoyen Président,
« La Convention nationale a accueilli avec bonté le rapport qui lui a été fait de la mission des citoyens Proly, Pereira et Dubuisson; non seulement ces commissaires se sont exposés à un grand danger, mais ils ont le mérite d'avoir fait la première découverte de la trahison du général Dumouriez.
« Les citoyens qui ont rendu un service aussi important à la patrie sont encore dans le cas de lui être utiles et il paraît être de la justice et de l'intérêt de la République de leur donner une preuve de la satisfaction des représentants de la nation. La récompense la pluB digne d'un homme libre est aussi celle qui les flatterait le plus; ce serait une déclaration formelle de la Convention nationale qu'ils ont bien mérité de la patrie.
«t Le ministre des affaires étrangères, « Signé : Lebrun. »
(1). Je propose d'adopter la demande de vos commissaires, en d'autres termes de décréter que les citoyens Proly, Pereira et Dubuisson ont bien mérité de la patrie.
(La Convention décrète cette proposition.)
{de Douai) (2). J'observe que le citoyen Goguet, commandant du bataillon de l'Hérault, nous avait avertis des vues de Dumouriez, avant les commissaires Proly, Dubuisson et Pereira; je demande que la Convention déclare qu'elle est également satisfaite de la conduite du citoyen Goguet.
(La Convention déérète cette nouvelle proposition.)
21° Lettre des officiers municipaux de Château-Thierry, qui annoncent à la Convention un don de souliers et de chemises qu'ils envoient à leurs frères des bataillons de l'Aisne; elle est ainsi conçue (3) :
Château-Thierry, le 27 mars 1793, l'an II de la République.
Citoyen, frère et ami,
« Nous vous prévenons de l'envoi que nous faisons au ministre de la guerre de 130 paires de souliers et de 126 chemises pour nos frères des bataillons de l'Aisne. Nous vous prions d'en suivre l'envoi et de vouloir bien remettre la lettre ci-jointe au président de la Convention nationale.
« Les officiers municipaux de Château-Thierry,
« Signé : Sifflet, Dulubre, Maine, Satjvigny, fils, »
(La Convention décrète la mention honorable et ordonne l'insertion de
cette lettre au Bulletin. )
Saint-Mihiel, le
( Citoyens législateurs,
« La faiblesse de mon tempérament m'em-pêchant de voler aux frontières, je me suis, conformément à vos décrets, fait remplacer par un home marié, fort et nerveux, que j'ai habillé et équipé. Malgré mes petits moyens, j'ai assuré une somme capable de subvenir au besoin de sa femme et de ses enfants. Je voudrais pouvoir mieux faire pour la patrie. Je suis orphelin de père et de mère, jumeau d'un frère qui sert aux frontières. Je recevais une pension sur la cassette du ci-devant roi ainsi que mon frère, seul patrimoine et récompense des services de mon frère : j'en fais hommage à ma patrie tant que la guerre durera.
« Signé : Duplessis. » (La Convention décrète la mention honorable. )
23° Lettre des administrateurs du lycée des Arts et Métiers, qui invitent les tnembres de la Convention nationale à vouloir bien assister à l'inauguration de cet établissement; cette lettre est ainsi conçue (2) :
Paris,
« Législateurs,
« Des artistes distingués se sont réunis pour fonder à Paris un lycée des arts et métiers ; toutes les sociétés savantes ont été appelées à y concourir et y ont nommé des commissaires. Depuis un an, des travaux immenses ont été suivis avec zèle et constance ; ils sont terminé et c'est au dimanche, 7 de ce mois, que cette ouverture a été fixée. Le conseil général de la commune a arrêté qu'il y assisterait en corps; le département veut bien y prendre part. Déjà, votre comité d'instruction a marqué qu'il y viendrait volontiers; 6,000 artistes ou savants sont convoqués et, malgré la crise du moment, on n'a pas cru Revoir différer cette espèce d'assemblée primaire des arts dont le but principal est l'utilité publique.
« Les ennemis de la chose publique, ceux qui calomnient sans cesse la ville de Paris, apprendront, peut-être avec étonnemenfc, que c'est au milieu de cette cité que l'on dit déchirée par les dissensions et les meurtres qu'une fondation aussi importante a eu lieu, malgré les circonstances, avec cette tranquillité, avec ce calme républicain, seul digne de la vraie philosophie.
« Cette installation sera consacrée par la distribution de trois prix qui
seront décernés, l'un à un objet d'agriculture, le second
« line somme de 20,000 livres est déstihée pour chaque année à 10 cours d'instruction nouvelle pour les arts, et à des prix qui seront également distribués chaque premier dimanche du mois.
« On y a joint un cabinet littéraire, un dépôt des arts pour les nouvelles inventions, un bureau général d'indication dés artistes, un journal encyclopédique des sciences et des arts, des conférences publiques, enfin une école dramatique.
« Ce dernier point a été ménagé pour préparer quelques bénéfices et suffife aux dépenses énormes de la partie gratuite.
« Voilà, citoyens législateurs, ce que des artistes isolés, forts seulement dè leur zèle et de leur courage, ont osé entreprendre.
« Pourriez-vous voir avec indifférence de pareils efforts? Il ne manquera rien à nos voeux, si vous daignez venir nous encourager par votre présence et nommer des commissaires qui puissent vous rendre compte de cet établissement, et vous instruire s'il est digne de votre attention et de la protection de la République.
-« Cette faveur sera le premier prix de nos efforts, et votre estime, si nous parvenons à la mériter» le garant le plus flattëur de nos èuccès.
« A Paris, le 5 avril 1793, l'an II de la République française.
« Les administrateurs du lycée des Arts, Signé : Gervais et Jottan. »
« P. S. Ci-joint 800 prospectus dont nous vous prions d'agréer la distribution.
« Signé : Gervais et Joitan. au bureau du Lyçëej rué Lévêque, Butte-desMoulins, n°l. »
(La Convention nationale décrète que 4 de ses membres se rendront au lycée des Arts et Métiers.)
24° Lettre du citoyen Garat^ président du conseil exécutif provisoire, qui fait part des succès que lés troupes républicaines ont rein-portés Sur lës révoltés devant les Sables d'Olonne. U ajoute, par poSt-scriptum, qu'un aidé de camp du général Duval, parti de Lille le 5, àtrois hèures du matin, annonce âù conseil que le corps de 4)000 hommes, aux qrdres du général Miaczynski, a prêté lé serment à la République; et que le colonel De-vaux, premiër aide de camp de Dumouriez, est arrêté ; cette lettre est ainsi conçue (1) :
Paris»
« Citoyen Président,
« La Convention nationale est peut-être déjà informée des succès que les troupes républicaines ont remportés sUr les révoltés devant les Sables d'Olonne.
« Le 28 au soir, l'ennemi se présente devant
« En peu de temps, l'ennemi fut mis en déroUt'é ét a laissé toute son artillerie et ses munitions, tant de guerre que dé bouche. La force des révoltés était dè 6,000 hommes; leur perte a été de plus de 300 hommes.
« Les troupes qui les ont combattus étaient au nombre de 1,800. Elles n'ont qu'un homme tué et un seul blessé.
. « Une lettre dè Nantes du 2 avril annonce qué lë Croisic et Guërande ont été repris par les patriotes.
, « Le général Berruyer mandé; le 3, avril, que la circulation de lâ Loire est actuellement tout à fait libre.
« Le président du conseil provisoire, « Signé : garat. »
« P. S. Un àidé dé camp du général Duval, parti dé Lille lé 5, à trois heures du matin, annonce au conseil que le corps de 4,000 hommes, aux ordres du général Mia-zinsky, a prêté lë serment à la République. » ( Le colonel De vaux, premiër aidé dè camp de Dumouriez a été arrêté.
« Signé : Garat. »
(1). Citoyens, nous avons ici le citoyen Savigny, aide de camp du général Duval, qui demande à confirmer à la barre les faits relatés dans la lettre du président du conseil exécutif provisoire. (Applaudissements.)
Plusieurs membres : Qu'on l'entende. Le citoyen Savigny, aide de camp du général Duval, est introduit à la barre.
U dépose entre les mains du Président la lettre ci-après, dont Mellinet, secrétaire, donne aussitôt lecture (2) :
Le
« Citoyen Président,
« _Un aidé _ de câmp du général Duval, qui arrive de Lille chargé de dépêches pour le département de la guerre, désirerait qu'il lui fût permis d'annoncer à la barre de la Convention que le premier aide de camp du général Dumouriez est arrêté dans Lille, que lés 4,000 hommes, campés sous les murs de Lille, qui étaient aux ordres du général Miazinski ont prêté le serment de mourir pour le soutien de la République. (Applaudissements.)
« L'aide de camp du général Duval, « Signé : Savigny. »
A cette lettre, se trouve jointe la pièce suivante (3).
« Nous vous envoyons, citoyen Président, lë citoyen Savigny, aide de oamp
du général
( Fait à la maison commune du Bourget, en permanence, ce six avril mil sept cent quatre-vingt-treize, l'an II de la République française.
« Signé : Gouffé, maire ; Blèsson, procureur de la commune ; Legrand.
(La Convention accorde à cet officier les honneurs dé la séance.)
U n membre, au nom du comité d'aliénation, fait un ràpport et présente un projet de décret Pendant à accorder une indemnité de 1,609 livres au citoyen Guy on de Mont-Le-veauic ; le projet de décret est ainsi conçu :
« La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité d'aliénation, décrète ce qui suit :
« Les administrateurs de la Trésorerie nationale paieront au citoyen Gùyoh de Mont-LeveaUx la somme de 1,609 livres, pour l'indemnité à lui accordée, par arrêté du directoire du département de Paris, du 24 mars 1792, pour le montant de neuf piècès de glaces faisant partie de l'adjudication à lui faite par la municipalité de Paris, le 3 février 1791, et dont il n'a pas pu jouir, comme n'étant pas dépendantes dudit hôtel. »
(Là Convention adopte ce projet dé décret.) (1).
donne lecture d'une lettre de la société des amis de la République à
Argenton (2), en date du 29 mars 1763, par laquelle ils annoncent que
l'on à été obligé de faire le recrutement dans leur district par là voié
dit sort, parce que les ennemis de la patrie ont tout mis en usage pour
corrompre l'esprit publia La petite commune de Menoux, dont rien n'a pu
affaiblir le. civisme, après avoir foUrni 28 hommes, vient d'en fournir
encore 14, qui forment son contingent.. Les élans du véritable
patriotisme ont répondu à la mesure que le. véritable patriotisme avait
inspirée. Les officiers municipaux dé cette petite coxh-mune ont planté
14 piques, et le commandant dé là garde nationale a dit : « Camarades,
ils auront l'honneur de marchér à la défense de la patrie, ceux qui
auront saisi les premiers ces signes guerriers d'un peuple libre. > Les
piques ont été aussitôt enlevées par 14 jeunes gens les plus lestes, au
grand regret de ceux que les travaux de la campagne retenaient, et qui
pour se dédommager ont fait un don de 1,500 livres à leurs frères qui
partaient. Le commandant de la garde nationale a donné son habit
uniforme à celui qui avait devancé ses heureux rivaux.
donne ensuite lecture d'une lettre écrite pàr la société des amis de la République de la ville d'Argenton, district du même nom, département de l'Indre (I),' portant qu'une coalition dé malveillants àvuit fait des efforts pour empêcher le recrutement, en colportant une liste où ils pressaient de s'instruire comme se refusant an recrutement, ceux que la loi pouvait y soumettre, et en les sollicitant à ce refus par des propos et des insinuations perfides; que cette manœuvre ayant été dénoncée au jiigè de paix, il avait) d'après une enquête concluante et même l'aveu dé l un dés prévenus, décerné des mandats d'arrêt contre deux citoyens qui avaient colporté ladite liste; que malgré ces preuves le citoyen Badou, l'un des juges du tribunal de ladite ville d'Argen-ton, faisant momentanément les fonctions dé directeur du juré, avait renvoyé les dits prévenus.
XJn membre propose de décréter :
, 1° Que les deux citoyens contre lesquels le juge de paix avait décerné les mandats d'arrêt, et que lê citoyen Badou, juge, a fait élargir, seront mis en état d'arrestation;
2° Que le citoyen Badou, juge aû tribunal du district d'Argenton, est mandé à la barre poùr rendre compté dé sa conduite. >»
(Là Convention décrète ces deux propositions (2).)
Je suis saisi d'une lettre des commissaires du corps 'électoral du département de Paris, qui demandent, au nom du salut public, à proposer une mesuré sur l'administration des postes; cette lettre est ainsi conçue (3) :
« Citoyen Président,
« TJne députation du corps électoral du département dé Paris demande à être entendue. Lé salut public dépend én grande partie dès mesures qu'elle viëfcit proposer à la Convention sur l'administration, des postes. Nous vous prions, citoyen, de consulter l'Assemblée sur notre adnhssion à la barre.
« Les commissaires du corps électoral,
« Signié : Vincent, Fauvel, Naigeon. »
Nous ne connaissons pas de corps électoral. Lés corps électoraux qui ont
terminé leurs fonctions, et qui ne sont plus ën activité, doivent être
dissous. Je demande l'ordre dù jour (4).
(1 ). La société populaire de Noyers, petite ville du département d! Y orme, composée de pauvres, mais braves sans-culottes, déposé sur l'autel de la patrie, 79 livres en assignats; elle a en outre envoyé quelques paires de souliers au district; c'est le denier de la veuve offert par le courage républicain.
(La Convention décrète la mention honorable et son insertion au Bulletin.)
(2) dépose également sur le bureau, au nom du citoyen Doré, une somme dt 3')0 livres en assignats pour les frais de la guerre.
(La Convention décrète la mention honorable de l'offrande et en ordonne l'insertion au Bulletin.)
(3) demande que le citoyd/t Ailhaud, ci-devant commissaire civil à Saint-Domingue, mis provisoirement en état d'arrestation chez lui, jusqu'à ce qu'il ait rendu compte de sa mission, ait la permission d'aller et de venir où bon lui semble dans Paris.
Un membre demande que le conseil exécutif rende compte, sous le plus bref délai, des motifs de son arréstation.
(La Convention nationale décrète que le conseil exécutif rendra compte dans trois jours des motifs de cette arrestation.)
, au nom du comité des f inances, fait un rapport et présente un projet de décret tendant à mettre une somme de 8,000 livres à la disposition du ministre de l'intérieur pour acquitter les demi-soldes conservées aux sous-officiers, cavaliers et soldats de la, ci-devant garde de Paris; le projet de décret eBt ainsi conçu (4) :
« La Convention nationale décrète, après avoir entendu le rapport de son comité des finances, qu'il sera mis à la disposition du ministre de l'intérieur jusqu'à concurrence de la somme de 8,000 livres, par la Trésorerie nationale, pour acquitter les demi-soldes conservées aux sous-officiers, cavaliers et soldats de la ci-devant garde de Paris, échues le premier de ce mois, et qu'à l'avenir toutes ces demi-soldes seront acquittées sur les fonds ies Invalides,/6oit à Paris, soit dans les départements.^»
(La Convention adopte ce projet de décret.)
, au nom du comités des finances, (section des assignats et monnaies)
fait un rapport et présente un projet de décret pour déclarer que les
défenses et autres dispositions portées par le décret du 10 mars
dernier, ne peuvent s1 étendre au delà des termes ordinaires dés
engagements ni de là cessation légitime des travaux des ouvriers,
graveurs, artistes et autres employés à la fabrication des
« La Convention nationale, sur la demande dé plusieurs ouvriers employés à l'impression des assignats, déclare que les défenses et autres dispositions portées par le décret du 10 mars dernier, ne peuvent s'étendre au delà des termes ordinaires des engagements, ni de la cessation légitime des travaux des ouvriers, graveurs, artistes et autres employés à la fabrication des papiers à l'administration et à la confection des assignats; en conséquence, les fabricants desdits papiers et les directeurs de l'administration des assignats, feront passer à leurs municipalités et sections respectives, les changements qui deviendraient nécessaires à faire, d'après les dispositions du présent décret, aux états nominatifs ordonnés par l'article 2 de celui du 10 mars. »
(La Convention adopte ce projet de décret.)
, secrétaire, donne lecture d'une lettre de l'accusateur public du tribunal criminel révolutionnaire (2), qui écrit que le ministre de la justice lui a fait passer plusieurs décrets d'accusation contre Darambure, Fon-tenay et Lanaagh, ainsi que plusieurs autreB émigrés, et qu'il ne peut obtenir de pièces pour le jugement. Il ajoute qu'il lui parvient, chaque jour, des divers départements, des rapports et des pièces qui constatent l'arrestation ae nombreux insurgés et contre-révolutionnaires ; il demande que la Convention veuille bien lui indiquer quelle marche il doit suivre.
lit, sur cet objet, un projet de décret conçu en douze articles.
(La Convention renvoie ce projet au comité de législation pour en faire le rapport séance tenante.)
Je demande que l'accuBateur public soit autorisé à se faire remettre toutes les pièces qu'il avait transmises soit au ministre de la justice, soit aux comités de la Convention pour motiver le décret d'accusation.
(Somme). J'appuie la proposition, mais pour éviter tout retard, je demande que le ministre de justice et les comités soient tenus de faire passer, sans aucun délai, à l'accusateur public dudit tribunal toutes les pièces dont ils sont dépositaires, sans déroger néanmoins aux exceptions portées par la loi rendue dans la séance d'hier.
(La Convention adopto ces deux propositions.)
Suit le texte définitif du décret rendu (3) :
« Un membre propose et la Convention nationale décrète que l'accusateur
public du tribunal extraordinaire est autorisé à se faire remettre
toutes les pièces qu'il avait trans-
, secrétaire, donne lecture de l'arrêté et de la pétition du conseil permanent du département du Jura (1), tendant à obtenir que les sept bataillons qu'il vient d'organiser et d'armer pour résister à tous les actes d'hostilité intérieurs ou extérieurs, soient mis à la solde de la nation.
J'appuie cette demande et j'en demande le renvoi au comité de la guerre. J'observe, en outre, que ce même département a déjà fourni quatre bataillons au delà de son contingent, qu'il a fait le nouveau recrutement avant l'arrivée des commissaires de la Convention ; je propose de décréter qu'il a bien mérité de la nation et que mention honorable en soit faite au procès-verbal et au Bulletin.
(La Convention adopte ces propositions.)
Suit le texte définitif du décret rendu (2) :
« La Convention nationale, après avoir entendu la lecture de l'arrêté et de la pétition du conseil permanent du département du Jura, tendant à obtenir que les sept bataillons qu'il vient d'organiser et d'armer, pour résister à tous actes d'hostilité intérieurs ou extérieurs, soient mis à la solde de la nation, décrète le renvoi du tout au comité de la guerre, pour en faire son rapport dans trois jours ; et, sur les observations faites que ce même département a déjà fourni quatre bataillons au delà de son contingent ; qu'il a fait le nouveau recrutement avant l'arrivée des commissaires de la Convention, la Convention décrète que ce département a bien mérité de la nation, que mention honorable en sera faite au procès-verbal, avec insertion au Bulletin ».
, au nom du comité des finances (section des assignats et monnaies), fait un rapport et présente un projet de décret tendant à ordonner que la Trésorerie nationale tiendra à la disposition du ministre des contributions publiques la somme de 400,000 livres pour les dépenses de la fabrication des assignats; le projet de décret est ainsi conçu (3) :
« La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des finances, section des assignats et monnaies, décrète ce qui suit :
« La Trésorerie nationale tiendra à la disposition du ministre des
contributions publiques la somme de 400,000 livres, pour les dépenses de
la fabrication des assignats, à la charge par le ministre de rendre
compte successivement de l'emploi de cette somme, par
(La Convention adopte ce projet de décret.)
Un membre (1) expose que les tribunaux viennent d'être réorganisés, que les juges qui viennent d'être remplacés ne peuvent prononcer les jugements des affaires rapportées par les anciens juges, il demande que la Convention nationale autorise les juges actuellement installés à prononcer les jugements des affaires rapportées.
(La Convention renvoie cette proposition au comité de législation, pour en être fait rapport incessamment.)
Un membre du comité des décrets (2) observe que dans la rédaction du décret du 28 mars, relatif à Bouvier et à Bosquet, il s'est glissé une erreur qui en retarde l'exécution. Le renvoi au ministre de la guerre qu'on a décrété n'est pas suffisant; il faut, en outre, l'autoriser à faire les avances nécessaires à ces deux militaires, sauf à en récupérer plus tard le montant. J e vous demande la permission d'intercaler cette clause dans le décret.
(La Convention nationale décrète qu'il sera ajouté au, décret que le ministre de la guerre fera les avances nécessaires, sauf à en récupérer le montant.)
, au nom de ses collègues Danton, Thuriot, Mathieu et Barère, et d'après le décret rendu le 5 avril au matin (3), présente le projet de décret relatif à Vorganisation 'd'un comité de salut public ; il est ainsi conçu (4) :
« La Convention nationale décrète :
« Art. 1er. Il sera formé, par appel nominal,
un comité de salut public, composé de neuf membres de la Convention
nationale.
« Art. 2. Ce comité délibérera en secret; il sera chargé de surveiller et d'accélérer l'action de l'administration confiée au conseil exécutif provisoire, dont il pourra même suspendre les arrêtés, lorsqu'il les croira contraires à l'intérêt national, à la charge d'en informer sans délai la Convention.
Art. 3. Il est autorisé à prendre, dans les circonstances urgentes, toutes les mesures de salut public qu'il croira nécessaires ; et ses arrêtés signés de la majorité de ses membres délibérants, qui ne pourront être au-dessous des deux tiers, seront exécutés sans délai par le conseil exécutif provisoire.
« Art. 4. Tous les agents, que le comité jugera nécessaire d'employer,
seront payéB
« Art, Y. Il fera chaque semaine un rapport général et par écrit de ses opérations et de la situation de la République.
« Art. VI. Il sera tenu un registre de toutes ses délibérations.
« Art. VII. Le comité n'est établi que pour un mois. »
La parole est à Buzot qui l'a demandée pour combattre le projet.
Citoyens, le projet, qui vous est présenté, est non seulement dangereux, mais insuffisant pour remplir le but que vous vous proposez.
Il est dangereux, car il donne à un comité le droit que vous devez seuls exercer, celui de faire les lois, puisque ce comité pourra prendre des mesures provisoires qui sont toujours des lois définitives en matière de salut public. En effet, si on examine de près l'article 3, qui semble former le fond même du projet et qui permet de saisir plus particulièrement le caractère du comité que vous voulez former, qu'y voit-on ? Ce n'est point un comité de surveillance ; il ne s'agit de veiller à aucun objet particulier, mais de sauver la République trahie par un ambitieux. Ce n'est point un pouvoir exécutif ; car ce dernier ne peut faire de délibérations et se trouve dans la seule obligation de faire exécuter les lois. C'est donc un comité à qui vous déléguez, comme je le disais tout à 1 heure, tous vos pouvoirs, c'est-à-dire qui a le droit de faire ce que vous faites seuls, et de prendre des mesures, dont l'exécution provisoire étant autorisée, deviendront des lois par la force des circonstances.
J'ajoute qu'il est insuffisant et qu'il ne remplira aucunement le but que vous vous proposez. Il est inutile pour le prouver de chercher à vous tromper vous-mêmes. En effet, où le prendrez-vous ? A droite 1 II sera calomnié. A gauche ? Il sera injurié, déchiré. N'êtes-vous pas convaincus que le pouvoir exécutif est sans force, que parce qu'il n'est pas investi d'une unanime confiance. Qui l'a nommé cependant? _ Vous. Or, ne craignez-vous pas que ce qui arrive pour des gens pris hors de votre sein, n'arrive pour des membres que l'on pourra dire appartenir à l'un des partis que l'on croit exister parmi nous? Qu'arri-vera-t-il alors pour leur tenir lieu de la force d'opinion ? Ils seront obligés de se revêtir de toute l'autorité possible et surtout de cette puissance que donne l'argent. Et ne peuvent-ils pas en abuser ?_Ne sont-ils pas des hommes aussi ? Ne pourraient-ils pas nous faire trem- I bler un jour? Mais non : Romains modernes, pensez-vous, ils imposeront silence à la médisance. Mûrs et grands comme leurs modèles, ils commanderont jusqu'à la confiance en leur pouvoir. Chez les Romains, on confiait à un seul homme le soin de sauver la patrie eA péril : on nommait un dictateur. Oui, mais chez les Romains, pourquoi le pouvoir dictatorial était-il salutaire ? C'est qu'il était remis à un seul homme, le nlus vertueux de tous, qui réunissait la confiance de tous les autres. D'ailleurs, comment oseriez-vous vous comparer avec ce peuple, qui, pendant cinq
cents ans de révolution, n'avait pas encore versé une goutte de sang avant Tiberius. Croyez moi, vos neuf hommes ne seront que neuf ministres despotes, et ils ne seront pas infaillibles. Il est impossible qu'avec de telles mesures la liberté soit sauvée. Citoyens, j'ai encore une observation à vous présenter. Je suppose qu'il existe un homme excessivement ambitieux, qui, par des calomnies adroitement dirigées tantôt contre un côté, tantôt contre l'autre, parvienne à amener insensiblement la dissolution de cette Assemblée, de sorte qu'il ne reste plus que ce comité et qu'il devienne le point de ralliement de toute la République, avec un tribunal révolutionnaire dans ses mains, je vous demande ce que devient la liberté? (Murmures sur la Montagne.. )
Vous n'avez pas voulu jusqu'ici concentrer tous les pouvoirs dans la Convention, lorsque vous avez rejeté la proposition qui vous lut faite de prendre le conseil exécutif dans votre sein. Eh bien, citoyens, je vois dans le comité qu'on vous propose, non seulement le projet que vous avez repoussé, sur la chaleureuse intervention de La Révellière. dans la fameuse journée du 10 mars (1), mais encore le pouvoir législatif lui-jnême joint au pouvoir révolutionnaire. Une pareille institution porterait la terreur dans l'âme de tous les citoyens.
Je sais bien que les circonstances actuelles nécessitent de nouvelles mesures, je ne puis penser cependant que ce soient des mesures propres à inquiéter tous les Français, à vous inquiéter vous-mêmes et à faire périr la liberté. J'espère plutôt que reproduisant aujourd'hui les mêmes içlées que vous avez déjà adoptées, les mêmes raisons vous les feront adopter encore.
Citoyens, vous ne voulez pas que neuf personnes usurpent vos pouvoirs, ou plutôt ceux que la nation vous a délégués : vous voulez uniquement un comité de surveillance dont la marche active et continuelle surveille de près les ministres et les empêche de faire le mal : enfin vous voulez qu'il vous propose tontes les mesures nécessaires au salut, nublic. Saris doute, votre premier comité était mauvais, en cela qu'il v avait trop de personnes pour délibérer, qu'elles ne pouvaient prendre que des mesures fort lentes et parce que les opinions ne pouvaient se réunir avec Cftte rapidité nécessaire aux circonstances. Votro comité, en outre, ne pouvait tenir ses délibérations secrètes, tjaree que vingt-cino personnes gardent très difficilement un secret, et, parce que tous les députés, les membres du département, de la municipalité et même les étrangers pouvaient y venir.
Il faut donc réparer tous ces inconvénients et pour parvenir h ce but, îe
comprends qu'o" concentre dans un comité, composé de ne"* membres, la
surveillance du conseil exécutif. Je les adopterai bien volontiers ;
j'irai même
Croyez-vous, avec le®* moyens que vous nous donnez, empêcher la dictature a laquelle on nous mène graduellement ?
Je le crois, et c'est pourquoi je vous prie, citoyens, dans cette grande et solennelle délibération, de songer qu'il s'agit peut-être ici de la liberté de votre pavs, car ce n'est pas plus neuf hommes qu'un qui peuvent se montrer ialoux de la conserver... (Interruptions.) et s'ils étaient organisés par vous, ils seraient peut-être indestructibles, au moins pour quelque temps.
Maintenant si, cet article 3 mis de côté, j'examine les autres articles du projet, je prétends qu'ils sont tous insignifiants. En effet, les fonctions de votre comité sont de combiner les mesures de salut public, de faire des arrêtés, des lois provisoires, appelées, ccmme je vous l'ai montré, à devenir définitives. Dans ce cas, il ne peut agir qu'autant au'il aura de l'argent, car si vous ne lui en donnez pas, il ne fera rien : et votre comité l'a si bien compris qu'il a décidé de mettre, sur les fonds de la trésorerie, 100.000 francs, r>our ses dépenses secrètes, à sa disposition. Mais alors, ne voyez-vous pas le dangrer du Trésor public, laissé ainsi à sa disposition, et par suite le reproche de dilapidation forcément attaché à ses actes... (Violentes interruptions sur la Montagne.) Toujours interrompu, il m'est presque impossible de suivre le fil de mes idées, mais la haine de la tyrannie est trop fortement gravée dans mon cœur, t>our que ces bruits m'empêchent de combattre un projet aussi terrible. Je m'y opposerai de tout mon pouvoir, car je veux que les bons citoyens entendent mes réclamations. (Nouvelles in-terriiwtions.}
Je demande donc. Président, que la Convention fasse aujourd'hui ce qu'elle a fait dans la séance mémorable du 10 ma.rs (l), c'est-à-dire qu'elle établie se un comité de surveillance et rien de plus. Je demande encore qu'on nomme de nouveaux ministres, si ceux-ci ne vous conviennent, r>a,s. mais je m'oppose à ce qu'un
pomit^. t.pl nn'nn VO'I^ l'o T>rO'OOepi poif, introduit; dans le sein de
la Convention nationale. T'apppr>te mi'nrt pnl^ve au comité nue l'on
vpnt former. les inconvénients qu'on avait laissés ?>-u r)r°mi«-»* pf,
oui étaient tror* nombreux, ninîq il pnffit. à mon sens. cmM puisse
surveiller toutes les parties de l'administration
Ma proposition est en deux mots : « U sera choisi, dans le sein de la Convention nationale, par appel nominal, neuf membres, pour former un comité de surveillance, chargé de surveiller les opérations de toutes les administrations du ministère. Ce comité délibérera en secret. U présentera à la Convention nationale toutes les mesures de salut public qu'il jugera convenables ; il pourra même suspendre les arrêtés du pouvoir exécutif piovisoire, à la charge d'en faire part à l'instant à la Convention nationale. »
Citoyens, lorsque je me suis élevé contre la première proposition qui vous fut faite d'un comité de salut public, c'est que j'y ai vu le renversement de la liberté de notre pays ; mais, voyons si les mêmes principes se retrouvent encore ici, comme l'a avancé Buzot. Je crois qu'il ne sera pas difficile de'vous prouver que ce^ comité sera retenu dans la ligne de ses devoirs, et je me fais fort de vous montrer, avant peu, que le projet qui vous est présenté est loin de réunir tous les inconvénients qu'a semblé y trouver à plaisir le précédent orateur.
Dans le premier projet, le ministre n'agissait point, la responsabilité était supprimée : aujourd'hui le comité délibère, le ministre agit, la responsabilité est conservée tout entière. Ce n'est que lorsque l'arrêté pris par le conseil exécutif est contraire à l'intérêt national que le comité, chargé de surveiller toutes les parties de l'administration, intervient et en suspend l'exécution. Mais, dans ce cas, il est tenu d'en rendre compte à l'Assemblée ; pour tous les autres points son rôle se borne à surveiller et à servir d'intermédiaire entre la Convention qui ne peut administrer et le conseil exécutif qui n'en a pas l'énergie. Certes, un tel comité,' à mon avis, eût dû exister depuis longtemps; il eût vu que beaucoup d'hommes que l'on met à la direction du vaisseau de l'Etat, sont souvent des êtres nuls ; il eût mis le flambeau sacré de la vérité sous les yeux de la Convention et il l'eû*-forcée de prendre des mesures qui eussent sauvé la France. (Applaudissements.) On vous a parlé de la corruption dont pourrait 83 servir ce comité au moyen de l'argent mis à sa disposition ; on a voulu jeter sur lui du ridicule, des soupçons mêmes, en. disant qu'on avait spéculé pour ceux qui en seraient membres. Eh bien, qu'importe qu'on lui laisse les dépenses jusqu'à concurrence de 100.000 livres ! N'en seront-ils pas toujours responsables, et les ministres ne seront-ils pas toujours là pour en rendre compte, dans ces moments surtout où notre devoir est de tout savoir et de nous entourer de toutes les lumières 1 D'ailleurs, il est une disposé vr
dans le projet qui porte que ce ne sera que dans les cas imprévus, qu'il sera loisible à ce comité d'ordonner les dépenses, et lorsque ses décisions seront signées de la majorité de ses membres délibérants, qui ne pourront être au-dessous des deux tiers.
Citoyens, dans un moment où tout est convulsion et à l'heure où l'incendie de l'insurrection à l'intérieur et de la coalition de l'étranger menacent de dévorer l'Empire, j'estime qu'on a eu raison de ne pas s'arrêter à de misérables calculs de finances. Il est besoin d'une grande surveillance, on ne peut le faire sans moyens ; et dût-il en résulter quelque dilapidation je crois qu'il vaut mieux ne pas compter l'or, quand il s'agit de sauver le corps politique et la vie des citoyens. C'est ici le combat à mort de l'esclavage et de la tyrannie contre la Convention nationale, épuisons le Trésor national, mais sauvons la liberté ! (Vifs applaudissements. )
J'arrive à la composition de ce comité. Nous nous sommes dit : la Convention ne peut point administrer, -car elle est tenue avant tout de faire des lois; le conseil exécutif, d'autre part, n'a qu'une marche timide, incertaine et lente. Il faut qu'il existe entre la Convention et le conseil exécutif une existence particulière qui veille sur l'administration. Cette existence particulière ne peut absolument être créée que par la représentation nationale pour avoir la dignité, le caractère qui lui convient ; il faut encore qu'elle soit une émanation de cette représentation nationale ; il faut que ce soit des représentants du peuple qui composent ce comité, sans quoi la confiance ne sera point donnée, sans quoi tous les actes qui pourraient en résulter n'auront pas tout l'effet qu'on doit en désirer. Il est incontestable, en principe, que la Convention, qui représente le peuple en masse, doit exercer toutes les branches de l'administration ; il est donc incontestable qu'elle a le droit de déléguer ce pouvoir, cette surveillance à une portion de ses membres.
Tel est le simple résultat de cette opération qui nous a fait vous proposer la création d'un comité qui puisse agir pour vous, qui représente la Convention. (Murmures à droite et au centre.)
Plusieurs membres : Des dictateurs, quoi ; qui auront le droit de prendre des arrêts !
Je sais qu'on redoute les arrêtés que pourra prendre ce comité ; voyons le cercle qci Jui est tracé. Ce n'est pas dans tous les temps que ces arrêtés peuvent être pris, c'est dans les moments difficiles, lorsque la Convention ne sera point assemblée. Nous ne sommes pas, citoyens, dans des circonstances ordinaires ; rien ne peut s'assimiler à notre position ; il faut qu'il y ait continuellement un centre d'activité, un corps qui représente la Convention. (Murmures à droite et au centre.)
Il est difficile de concevoir qu'on puisse s'échauffer sur des idées qu'on a déjà adoptées. Déjà pourtant vous avez fait plus, car vous avez renvoyé des commissaires dans tous les départements de la République et vous les avez autorisés à prendre toutes les mesures nécessaires de sûreté générale. Eh bien ! votre comité de salut publis ne sera pas investi d'un
plus grand pouvoir : il vous rendra compte comme le faisaient ces derniers, et j'ajoute qu'à l'instant même, s'il commettait un abus, vous seriez là pour le répriàier et l'anéantir. Que vient-on dans ces conditions, parler de dictature, c'est un mot quand ce comité ne pourra d'un côté rien faire sans que le conseil exécutif le sache, puisque c'est lui qui exécutera, et alors que d'un autre côté vous pouvez suspendre ses arrêtés ou le changer lui-même. Et puis n'est-il pas élu pour un temps très court ?
Citoyens, vous n'avez rien à craindre d'un comité dépendant de la Convention, d'un comité qui n'a qu'un pouvoir précaire, d'un comité surveillé par toute la France, d'un comité dont toute l'existence est de servir d'intermédiaire entre le pouvoir exécutif et cette Assemblée. C'est à tort qu'on l'a cru susceptible de faire du mal, dites plutôt qu'il y a des hommes assez lâches pour craindre qu'il fasse du bien. (Vifs applaudissements.)
Je crois donc, pour me résumer en deux mots, qu'il n'y a point ici cumulation du pouvoir exécutif et législatif, ni une réunion de pouvoirs dans les mains de l'Assemblée ; je pense qu'il s'agit simplement d'une délégation qu'elle fait à quelques-uns de ses membres du droit de surveillance qui lui appartient, puisqu'il ne s'agit que de prendre des mesures de salut public, qui exigent le secret, la promptitude, ou qui doivent se prendre parce que l'Assemblée n'est pas en séance. Je crois que les dépenses ordonnées par ce comité, n'étant faites que par le pouvoir exécutif, offrent toujours la même responsabilité. Je ne crois pas qu'il puisse mettre en état d'arrestation beaucoup de citoyens, puis cet objet regarde plutôt le comité de surveillance, qui doit remplir à cet égard les vues de la Convention.
Citoyens, il faut que votre comité soit tel qu'il ne puisse physiquement que faire du bien, et qu'il lui soit physiquement impossible de faire du mal. Il faut qu'il s'entoure des lumières de tout ce qu'il y a d'hommes instruits dans toutes les parties de la République, de façon que si, dans sa marche, un ministre s'écarte de sa ligne, s'il est d'intelligence avec vos ennemis ou s'il est dans une léthargie aussi coupable que la négligence, vous en soyez instruits aussitôt et puissiez remédier au mal.
Quant à moi je déclare que si l'on ne prend pas cette mesure de sûreté générale ou si l'on n'y supplée pas par quelque autre moyen efficace, il est impossible de sauver la patrie. (Nouveaux applaudissements.)
annonce que Marat doit parler sur, Barère pour et Barbaroux contre.
J'observe qu'il y a un malentendu. Ce qui m'avait effrayé, c'est que je croyais qu'on donnait à ce comité le droit d'arrestation et j'y voyais la dictature ; mais si vous ne lui donnez pas ce droit déjà conféré au comité de surveillance, j'adopte le projet et nous sommes d'accord.
Plusieurs membres demandent que la discussion soit fermée.
Je m'oppose à cette proposition. Il s'agit de prendre une grande mesure de salut public et non d'organiser la tyrannie. Il est nécessaire d'éclairer les doutes de quelques membres ; c'est de la franchise des opinions
que naîtra la confiance. Je demande que la discussion soit continuée.
La torpeur du conseil exécutif, sa négligence à rassembler des forces pour re-
fiousser les ennemis publics, à pourvoir à 'approvisionnement de nos armées et de nos places de guerre, son silence sur les machinations de nos généraux et sa connivence avec eux, vous ont forcé d'instituer un comité de défense générale pour surveiller leurs opérations. Ce comité n'a point rempli vos vues ; une triste expérience a fait croire au peuple qu'il était lui-même d'accord avec les ennemis de la liberté et l'a fait surnommer dérisoire-ment le comité Dumouriez.
Les événements désastreux qui ont été la suite de la trahison de vos généraux, les forces considérables que les ennemis du dehors conspires contre nous rassemblent sur vos frontières, la nécessité urgente de prendre des mesures de salut public, vous forcent aujourd'hui de substituer un nouveau comité à celui qui a perdu la confiance du peuple.
Je n'examinerai point l'établissement de ce nouveau comité d'après les principes politiques, ni relativement à ces lois constitutionnelles ; ce n'est point une autorité constituée que vous, établissez en ce moment, c'est une autorité provisoire destinée uniquement à mettre en mouvement les forces nationales, à les précipiter sur les ennemis du dedans et du dehors et à les écraser tous à la fois.
On vous a fait peur de ce comité, en vous disant que c'était la dictature ; mais ceux qui font cette objection savent mieux que personne que celui qui est provisoirement revêtu de la puissance suprême, n'échapperait pas, s'il était tenté d'en abuser, à la justice souveraine de la Convention, devant laquelle toutes les autorités disparaissent. D'ailleurs comment comparei ce comité à la dictature? La dictature est la pleine puissance confiée à un seul homme, devant qui toutes les lois se taisent, Au contraire, ce comité vous est subordonné, c'est vous qui, malgré tout, restez investis de la puissance souveraine, puisque vous conservez encore la possibilité de le dissoudre, dans le cas où il ne remplirait pas le but que vous vous êtes proposé.
On est venu faire valoir contre ce comité les raisons les plus misérables. Est-ce l'instant de lésiner lorsqu'il y va du salut de la patrie, et a-t-on raison de venir discuter ici froidement quelques dépenses peu considérables, au moment où il est question du salut de 25 millions d'habitants ? Je n'examinerai pas à cette heure ces petites objections, mais je demanderai si ceux qui les font sont de bonne foi. En effet, ces hommes qui viennent s'élever contre une mesure de salut public, entièrement indispensable, sont les mêmes qui ont demandé qu'on investît de la dictature un ministre prévaricateur. Ces hommes qui font valoir contre votre comité la crainte de dépenser de légères sommes, sont les mêmes qui ont mis entre les mains d'un ministre dilapidateur, des millions et des millions. (Murmures prolongés à droite et au centre. )
La seule objection que l'on puisse faire contre ce comité, c'est que, peut-être, il ne sera pas investi d'un pouvoir assez grand pour mettre en mouvement les forces nationales et écraser
les ennemis. C'est par la violence qu'on doit établir la liberté... (Nouveaux murmures)... et le moment est venu pour nous d'organiser le despotisme de la liberté, en terrassant le despotisme des rois. Je conclus à l'adoption du projet du comité. (Applaudissements sur la Montagne et da/ns les tribunes.)
Citoyens, dans une question aussi importante que celle qui nous occupe, il n'est aucun de nous qui ne désire que les mesures de salut public, qui doit prendre la Convention, ne paraissent à toute la République prises à l'unanimité, mais lorsque dans cette tribune, on vient nous dire qu'il faut que ce soit la violence qui pose les bases de la liberté, certes il est permis de montrer quelques soupçons sur les vues qu'on se propose dans l'établissement de ce comité. (Violentes interruptions sur la Montagne.)
Plusieurs membres : Il ne fait que répéter l'opinion de Buzot ; la clôture, nous demandons la clôture.
Non, l'opinion que j'émets est la mienne et personne ne peut me l'enlever. Buzot vous a démontré les dangers de cette institution, telle que le comité vous la présente, mais moi je veux vous faire voir derrière le rideau un ambitieux qui se cache pour étouffer la liberté. Quand cet ambitieux aura pour lui, d'un côté, le tribunal révolutionnaire ; de l'autre^ le comité et cette armée dont on a décrété hier la formation, je vous demande ce que deviendra la liberté. Qu'on ne vienne pas me dire que ces craintes sont exagérées... (Nouvelles interruptions. )
Les mêmes membres : La clôture, la clôture !
Il est étonnant que je ne jouisse pas de ma liberté !
Citoyens, croyez que ces considérations peuvent effrayer un vrai républicain, un ami de la liberté. Oui, je crois que si un ambitieux se levait, vous ne pourriez, s'il avait derrière lui les grands pouvoirs que je vous ai montrés, réprimer ses arrêtés, qui seraient aussitôt suivis d'une immédiate exécution. L'exemple de Dumouriez est là, d'ailleurs, pour montrer que mes craintes ne sont pas aussi chimériques qu'on pourrait le croire... (Murmures prolongés.)
Les mêmes membres : La clôture ! Président, nous insistons pour la clôture.
J'observe que la discussion est assez éclaircie et qu'il ne s'agit plus d'investir ce comité du pouvoir d'ordonner des arrestations arbitraires. Je propose d'aller aux voix.
Non, non, je m'y oppose et je demande la parole.
Un grand nombre de membres : Aux voix, aux voix !
(La Convention ferme la discussion et décide de passer à la discussion des articles.)
, rapporteur, soumet à la discussion les articles 1 et 2, qui sont adoptés, puis l'article 3, qui est ainsi conçu :
« Il est autorisé à prendre, dans les circonstances urgentes, toutes les mesures de salut public qu'il croira nécessaires ; et ses arrêtés, signés de la majorité des membres délibérants, qui ne pourront être au-dessous des deux tiers,
seront exécutés sans délai par le conseil exécutif provisoire. »
(La Convention adopte cet article avec cet amendement qu'il ne pourra, dans aucun cas, délivrer des mandats d'amener ni d'arrêt et qu'au lieu des mesures de salut public, il ne prendra que des mesures de defenses intérieures et extérieures (1).
, rapporteur, soumet à la discussion l'article 4 du projet qui est ainsi conçu :
« Tous les agents particuliers, que le comité jugera nécessaire d'employer, seront payés par le Trésor public, pourvu que la totalité dé la dépense n excède pas la somme de 100, ÔOÔ liv.
(La Convention renvoie cet article à la rédaction, pour qu'il soit bien spécifié que la Trésorerie nationale demeurera indépendante du comité d'exécution et seulement soumise à la surveillance immédiate de la Convention, suivant le mode fixe par les décrets (2).'
, rapporteur, soumet à la discussion les articles 5, 6 et 7 du projet, qui sont adoptés.
Suit le texte définitif du décret rendu (3) :
« La Convention nationale décrète :
Art. 1er
« Iî sera, formé par appel nominal ui} comité de Salut public, composé de 9 membres de la Convention nationale.
Art. 2
« Ce comité délibérera en secret; il sera chargé de surveiller et d'accélérer l'action de l'administration confiée au conseil exécutif provisoire; dont il pourra même suspendre les arrêtés lorsqu'il les croira contraires à l'intérêt national, à là charge d'en informer sans délai la Convention.
Art. 3
« Il est autorisé à prendre, dans les circonstances urgentes, des mesures de défense générale extérieure et intérieure; et les arrêtés signés de la majorité de ses membres délibérants, qui ne pourront être au-dessous des deux tiers, seront exécutés sans délai par le conseil exécutif provisoire. Il ne pourra, en aucun cas, décerner des mandats d'amener ou d'arrêt, si ce n'est contre des agents d'exécution, et à la charge d'en rendre compte sans délai à la Convention.
Art. 4
« La trésorerie nationale tiendra à la disposition de comité du Salut
public, jusqu'à
Art. 5
« Il fera chaque semaine un rapport général et par écrit de ses opérations, et de la situation de la République.
Art. 6
« Il sera tenu registre de toutes les délibérations.
Art. 7
« Ce comité c'est établi que pour un mois.
Art. 8
La trésorerie nationale demeurera indépendante du comité d'exécution, et soumise à la surveillance immédiate de la Convention, suivant le mode fixé par les décrets. »
(1). Le comité de défense générale vous a déclaré publiquement qu'il ne pouvait sauver la patrie; plusieurs membres de ce comité ont donné leur démission; je demande, à cette heure où vous venez de proclamer le décret relatif à l'organisation d'un comité de Salut public, qu'il soit procédé de suite à la nomination des membres qui doivent former ce comité.
Un grand nombre de membres : Appuyé, appuyé !
(La Convention décrète la proposition de Levasseur.)
(2) déclare ouvert le scrutin pour la nomination des neuf membres qui doivent composer le comité de Salut public.
Il est cinq heures du soir.
A huit heures, Boyer-Fonfrède, secrétaire (3), monte à la tribune et interrompt l'appel nominal pour faire lecture des lettres suivantes :
1° Lettre des citoyens Lequinio, Cochon et Dubois-de-Bellegarde, commissaires de la Convention aux frontières du Nord, par laquelle ils font part des moyens employés par Dumouriez pour séduire son armée et annoncent qu'ils espèrent reprendre le trésor dont s'est emparé le traître; elle est ainsi conçue :
Valenciennes, le
« Citoyens nos collègues,
« Le désordre que vous avez remarqué dans notre lettre d'hier, vous le
verrez encore dans celle d'aujourd'hui. Nous sommes si obsédés
Nous sommes fort inquiets sur les courriers que nous avons dépêchés extraordinaire-ment, attendu que nous n'avons reçu de vous aucun signe qu'il vous en soit parvenu ; au nom du salut public, faites-nous savoir régulièrement si vous les recevez et outre les courriers extraordinaires et lorsqu'il sera utile que vous nous en envoyiez, _ faites-nous une expédition par la poste qui nous apprenne au moins la réception de nos lettres avec leurs dates et faites-nous encore une expédition par voie indirecte; si l'une ne peut nous parvenir, l'autre arrivera et, certains de la réception de nos paquets, nous nous reposerons entièrement sur vous des mesures que votre sagesse indiquera
« Nous avons des choses à vous dire pardessus la tête; mais il nous faut être à tout et partout, et nous ne pouvons mander que l'essentiel et le plus pressé; chaque courrier que nous expédierons" sera porteur d'un exemplaire au moins des affiches, proclamations ou ordres les plus essentiels que noi^s aurons donnés; nous vous prévenons de cette mesure afin que l'espèce de minutieuse répétition qu'elle faitnevous étonne pas; c'est une précaution qui tient à la crainte que nos paquets soient arrêtés; une fois pour toutes, ne vous attachez pas au mode d'exécution, les circonstances nous commandent; voyez si nous voulons et si nous faisons la chose.
« Le camp de Dumouriez* continue toujours à se débander partiellement; chaque heure nous recevons ou de nouvelles compagnies ou de nouveaux bataillons, mais vous connaîtrez mieux par quel despotisme Si rigoureux et si audacieux il avait séduit le cœur des soldats par son courage, par ses propos, par ses écrits; il retient les uns par la crainte et les autres par cette espèce d'affection idolâtre qui semble être le partage du plus grand nombre des hommes en faveur de celui qui a une fois capté leur estime. Il n'est point dans l'histoire d'exemple d'une trame aussi scélérate, aussi profondément ourdie, aussi audacieuse-ment conduite que celle qui cause actuellement nos sollicitudes. Dumouriez a auprès de lui une presse à l'aide de laquelle il fait chaque jour une proclamation nouvelle et nouvellement insidieuse, perfide et audacieuse tout en même temps. Dumouriez pousse la noirceur jusqu'à faire et répandre de faux décrets qui semblent vraiment émanés de la Convention et qui autorisent aux yeux de son armée ses crimes mêmes. Dumouriez ne veut laisser parvenir dans son camp aucunes de nos proclamations, aucuns de nos ordres, aucuns de nos écrits, mais il éprouve en cela le sort de tous les tyrans; nous trompons sa surveillance et nous en glissons (sic); cependant nous ne pouvons dissimuler fclufi ses précautions sévères nous gênent extrêmement, car si nous pouvions faire connaître publiquement la vérité. en une heure toute son armée le délaisserait Heureusement, il vient de commettre une sottise qui nous servira beaucoup; il vient de se faire entourer d'une garde des dragons de Hobourer et cet excès d'audace qui a déjà indigné plusieurs volontaires qui sont parvenus à s'échapper ne manquera pas, nous le pensons, de dessiller les yeux au plus grand
nombre; jamais vos bulletins, jamais vos décrets n'ont été lus à l'armée, jamais ils n'y ont été connus, ou bien ils ne l'ont été que quand ils contenaient le récit de quelques-unes de ces scènes affligeantes, conséquence malheureuse de la défiance ou de l'excès de zèle et dans tous les cas susceptibles d'une interprétation qui peut tourner à l'avilissement de la Convention nationale. Dumouriez a tout fait, tout dit, tout écrit pour l'avilir, d'abord sourdement et par cette affectation de sagesse qui se présente avec un air de vérité si frappant et qui trompe si aisément la multitude, ensuite avec le ton et les expressions de mépris lq plus insultant et de la révolte la plus ouverte; il a profité des fautes les plus légères, des débats trop aigres, des discussions trop longues sur des affaires peu importantes, de la défiance à laquelle les circonstances devaient nécessairement entraîner les âmes ardentes du bienj des reproches réciproques qui en ont été les conséquences pour nous peindre sans cesse à sa troupe comme un tas de factieux et d'hypocrites, usurpateurs de l'autorité souveraine et ne songeant qu'à notre propre avancement et à nos fortunes particu lières; il a pris tous les moyens possibles poui établir la division et la haine entre les volontaires et les troupes de ligne, afin de dégoûter les premiers; il a pris tous les moyens de les faire manquer de tout afin de les forcer à la désertion et de les rendre ensuite odieux aux soldats de ligne, en les avilissant lui-même par ses proclamations; nous savons qu'il a formellement favorisé le pillage dans plusieurs cas et que, se trouvant comme par hasard à l'endroit, il disait aux pilleurs : Mes amis, je ne puis vous blâmer, la Convention vous laisse manquer de tout. Et à l'instant, il faisait une proclamation menaçante contre les pilleurs et surtout contre les jçardes nationales qu'il s'attache essentiellement à rendre odieux aux troupes de ligne. On nous annonce qu'il vient de faire cerner, par de la cavalerie, les gardes nationales qui sont encore à son camp, mais nous apprenons en même temps que la fermentation s'y établit et nous ne doutons pas que l'éruption patriotique se fasse sous peu et que nous ne soyions rejoins par la très grande majorité du camp ; le parc d'artillerie de Saint-Arnaud, composé de quatre-vingts pièces de canon vient de nous arriver (Applaudissements), il est en sûreté; le trésor nous arrivait aussi, mais Dumouriez en a eu avis et a fait courir un régiment de cavalerie après; l'escorte n'était pas assez forte; le trésor a été repris; heureusement, nous en avons eu avis sur-le-champ; un régiment- de cavalerie a couru après et l'on nous annonce trois bataillons d'infanterie revenant du camp vers là République, en sorte que le trésor et les preneurs se trouveront entre deux feux et nous espérons le posséder dans peu d'heures. (Applaudissements.)
« Nous apprenons que Dumouriez doit se mettre à la tête- de 30.000 Autrichiens et les troupes françaises sur lesquelles il compte ^t marcher sur Paris. Les uns disent qu'ils doivent commencer par attaquer Yalenciennes, le plus grand nombre dit qne c'est Lille; les précautions que nous avons prises ici, et toute l'activité que nous avons mise dans nos préparatifs nous laisse croire qu'il ne prendrait pas
sa route par ici; au surplus, s'il vient, nous le verrons.
« Sur toute chose, songez à nous envoyer des fonds bien escortés et des effets de campement ; mais des fonds, des fonds.
« Vous avez reçu, par notre dernier courrier, copie de la lettre que nous avons écrite au général Valence et celle que nous avons écrite au général Egalité; nous vous en renvoyons de nouvelles copies; elles vous apprendront que ces deux généraux ne peuvent désormais alléguer aucune excuse; car nous ne leur avons laissé rien ignorer et le paquet pour Egalité ne peut pas manquer de lui avoir été rendu; car nous en avions chargé un de ses domestiques même, trouvé ici avec trois chevaux pour prendre des provisions; nous avons retenu la voiture et deux chevaux et laissé un cheval au domestique pour qu'il retournât porter le paquet; ces deux généraux sont les compagnons habituels et inséparables de Dumouriez.
« A l'instant, six heures, on nous annonce qu'une très grande partie du camp de Maulde revient se mettre sous les étendards de la République; la patrie est sauvée encore une fois, nous osons l'espérer.
« Signé : Lequinio, Charles Cochon, de Bellegarde. »
2° Lettre des mêmes commissaires par laquelle ils annoncent que les troupes de Dumouriez se débandent et reviennent à Lille, que l'artillerie est rentrée et que le trésor est repris. Ils informent en outre la Convention que Dumouriez avait donné l'ordre de les arrêter et qu'on a arrêté à leur place des administrateurs du département du Nord qui ont ensuite été relâchés; elle est ainsi conçue :
Valenciennes, le 5 avril 1793, l'an II de la République à 8 heures du soir (1).
« Citoyens,
« La patrie est sauvée (.Applaudissements), citoyens nos collègues; tout le camp de Maulde se débande et presque tout nous arrive; il faut espérer que Dumouriez sera demain général en chef d'une armée composée de deux ou trois douzaines d'officiers français sans soldats ni canons, car tout le reste de l'artillerie revient. (Applaudissements réitérés.) La première entrée de l'artillerie était de 80 pièces comme nous le disions tout à l'heure, 500 voitures d'artillerie et 700 canonniers et 700 auxiliaires, et c'est la grosse artillerie de Saint-Amand. Le citoyen Songis, lieutenant-colonel d'artillerie, sous-directeur du parc, commandait cette portion intéressante de nos moyens de défense, et nous avons vu l'épanchement d'une âme vraiment patriote se développer en lui quand il est venu nous annoncer la fin de cette rentrée. Dumouriez avait envoyé, le matin, l'ordre de conduire cette artillerie à Maulde.
« Huit heures et demie, on nous annonce le trésor en question repris. (Vifs applaudissements.)
« L'artillerie légère est rentrée, mais nous n'en savons pas encore les
détails.
« Nous devons vous répéter et vous répéter mille fois qu'il nous faut des fonds et des effets de campement; plus il nous rentre d'hommes, plus les effets de campement nous sont nécessaires, car une partie des troupes a laissé ses effets de campement pour s'échapper aisément.
« Maintenant que les dangers sont passés, nous pouvons nous permettre de vous dire qu'il avait été donné ordre de nous arrêter ici et que si le général Ferrand avait été moins honnête, nous serions maintenant au pouvoir de l'ennemi. Il nous en fit l'ouverture à notre arrivée; nous avons l'ordre écrit de la main de Dumouriez pour Bellegarde qui était ici vingt-quatre heures devant. Pour nous, Cochon et Lequinio, qui étions allés à Maubeuge, il est probable que l'ordre écrit était arrivé quelques heures après notre départ et comme les affaires nous déterminèrent à passer par Avesnes, nous évitâmes, sans le savoir, le piège qui nous attendait sur la route directe de Maubeuge à Valenciennes. Dans la prise, faite hier, d'un des chevaux de Dumouriez, nous avons trouvé des papiers où nous avons vu écrit l'ordre de nous arrêter tous les trois. Les commissaires du département de Douai, sortant de Valenciennes, ont été arrêtés réellement pour nous à une certaine distance de Valenciennes, par quelques gendarmes qui les ont relâchés quand ils ont vu que ce n'était pas nous. Nos collègues et Beurnonville ont été transférés d'abord à Tournay et ensuite à Mons, de là à Maëstrich. Beurnonville ayant voulu faire quelque résistance a reçu plusieurs coups de sabre. Nous nous procurerons plus de détails sur cette abominable arrestation.
« Les commissaires de la Convention nationale pour les frontières du Nord.
« Signé ; Lequinio, Charles Cochon, de Bellegarde. »
3° Déposition du citoyen Becker, aide de camp du général Diettmarm; elle est ainsi conçue :
« Le citoyen Becker (1), aide de camp du général Diettmann, vient de nous
annoncer l'arrivée de l'armée des Ardennes, composée le vingt bataillons
tant de troupes de ligne que volontaires avec son parc d'artillerie et
effets de campement. Il nous a dit que le général Dumouriez avait passé
au camp ce matin, vers dix heures, avec le lieutenant-colonel de Latour
et plusieurs dragons ; qu'il avait dit à haute voix que l'armée devait
le suivre, que sous peu, il aurait la paix, un roi et des lois et que
dans ce moment on vivait dans l'anarchie, que les députés leur avait
laissé manquer de pain, chemises, etc. Après son départ, j'ai commencé à
faire entendre à la division l'erreur dans laquelle le général Dumouriez
les avait mis; les deux bataillons de Paris ont commencé à mettre bas
les tentes et à s'emparer du parc d'artillerie, de suite tous les
bataillons de volontaires ont suivi en marchant sur Valenciennes
(Applaudissements); les troupes de lignes se sont décidées et les ont
suivis. J'ai
« Signé : Becker, aide de camp. »
4° Lettre des citoyens Charles Cochon, Le-quirvio et Dubois de Bellegarde, commissaires aux frontières du Nord, par laquelle ils annoncent que Dumouriez et son état-major sont en fuite et que toute l'armée s'est séparée des traîtres; elle est ainsi conçue :
« Neuf heures du soir.
« Yive la République (1). (Acclamations. Toute VAssemblée se lève ainsi que les citoyens des tribunes en répétant : Vive la République!)
« Dumouriez, Valence et l'Egalité, les deux Thouvenot et plusieurs autres officiers, le commissaire-ordonnateur Soliva et la plupart des hussards de Berchigny sont passés à l'ennemi; tout le reste est à nous (Vifs applaudissements); le général Diettmann qui entre dans notre bureau avec plusieurs officiers et soldats, nous donnent cette assurance ; enfin voilà la pièce finie. Il ne nous reste plus qu'à remonter tous nos effets de campement et à mettre de l'ordre dans toute cette armée débandée et affluante ici par détachements les uns sur les autres; mais l'intelligence et l'activité du général Dampierre, que nous avons institué provisoirement général en chef de la division, depuis Yalenciennes à l'armée de la Moselle, nous tirera d'affaires ; vous avez reçu par notre courrier d'hier, la proclamation de ce général à sa troupe; il ne pouvait pas s'exprimer plus énergiquement et nous pouvons vous assurer
Îue ses démarches répondent à ses expressions. ie domestique du général l'Egalité, porteur de notre paquet, entre à l'instant; il nous assure que ce paquet lui a été remis et nous en avons d'autres preuves dont nous donnerons demain les détails circonstanciés.
« L'adjudant général Chérin, qui avait été arrêté le trois au soir par ordre de Dumouriez, a été assez heureux pour tromper la vigilance de ses gardes, et nous assez pour le posséder, car c'est un patriote actif et intelligent.
« On nous annonce que l'armée ennemie marche sur Condé par deux colonnes, mais nous n'en sommes pas certains, c'est la seule inquiétude qui nous reste; cette incertitude et les justes regrets que nous portons à nos collègues et à Beurnonville sont les seules afflictions qui puissent altérer la joie que nous éprouvons de voir notre armée toute séparée des traîtres; nous avons éprouvé cinq jours et quatre nuits de chagrins et de fatigues continuelles, mais ils se changent, en cet instant, en un vrai ravissement.
« Les commissaires de la Convention nationale pour les frontières du Nord,
« Signé : Lequinio, Charles Cochon, de Bellegarde. »
(1). Je demande que ces pièces soient renvoyées au comité de défense générale, où les ministres seront appelés. Ce renvoi est d'autant plus pressant, qu'il est instant de prendre des mesures pour arrêter la marche de l'ennemi : car déjà le camp de Maulde est en sa puissance, et après demain Lille peut être do nouveau bombardé. Je demande, en outre, l'impression et l'envoi de ces pièces aux départements et aux armées par des courriers extrao r d inai res.
(La Convention décrète les propositions de Delacroix.)
Je demande que l'on mette en ce moment Egalité et Sillery en état d'arrestation. Il faut arrêter tous les Bourbons et les garder en otage (2). (Applaudissements.)
Plusieurs membres : Aux voix, aux voix !
demande la parole.
Je m'étais déjà fait inscrire pour parler sur cette question.
La parole est à Marat.
Citoyens, le moment est venu pour la Convention nationale de se couvrir de gloire aux yeux de l'univers entier ; il faut qu'elle déclare que cent mille des parents et amis des émigrés seront pris en otages, afin que s'il arrivait la moindre chose à vos commissaires, la tête de ces scélérats pût en répondre. (Applaudissements des tribunes.)
Mais au milieu des événements heureux que le génie titulaire de la France fait naître chaque jour, je prie les représentants du peuple de ne se livrer ni à une joie aveugle, ni à des mesures précipitées, surtout de ne pas entamer la dignité de la Convention.
Jusqu'ici aucune preuve convaincante, pas même de soupçon justifié ne repose sur la tête de Sillery et d'Egalité. (Murmures.) Je demande qu'ils soient seulement surveillés, ou plutôt qu'eux-mêmes se constituent en état d'arrestation pour constater leur innocence. Je demande aussi que Dumouriez, Valence et les autres généraux, qui sont passés chez l'ennemi, soient jugés par contumace.
Réjouissons-nous, au contraire, ncus tenons le fil d'une conspiration
dénoncée par des hommes qui trop longtemps ont été flétris dans
l'opinion publique. (Murmures.) Mais il faut connaître toutes les
ramifications de cette conspiration. Je ne prétends inculper personne
par des calomnies, mais depuis longtemps j'ai eu des soupçons sur
Egalité. D'autres aussi en ont eu. Ces soupçons se sont augmentés chaque
jour, et chez moi particulièrement, par une lettre que j'ai reçue, et
dont j'ai différé de faire lecture, dans la crainte de jeter du trouble
dans l'Assemblée.
En réponse à cette lettre, j'ai demandé des renseignements précis ; je ne les ai pas reçus encore, mais j'espère les obtenir incessamment. J'ai communiqué cette letre au comité d^ défense générale, en l'invitant à n'en point faire part à l'Assemblée, que je n'eusse reçu de réponse à la mienne.
Plusieurs membres demandent la date de la lettre.
D'autres membres observent que Egalité n'est pas sorti de Paris.
Je ne Sais si Egalité est sorti de Paris, mais voilà ce que l'on m'a écrit; et il esï certain que les citoyens de la ville de Sées ont été consultés pour Savoir s'ils le voudraient avoir pour roi ; il est certain également que ce propos a été tenu à Ghâtel d'An-givet (1) à Sées, et je ne doute pas, moi, qu'il n'eût des agents ou des partisans : il est donc dangereux pour la liberté : je demande le décret d'accusation contre lui.
Egalité ne nous a jamais montré sa correspondance avec son fils : eh bien ! qu'il la montre aujourd'hui, ou tout annonce qu'il est un conspirateur lui-même.
Je suis de Sées, et ce propos ne m'a pas été rapporté. Je demande que le souscripteur de la lettre adressée à Delahaye, soit traduit à la barre et y subisse un interrogatoire : c'est le seul moyen de connaître la vérité des faits.
Je demande que les scellés soient mis à l'instant sur les papiers de Sillery et d'Egalité.
Il est trop tard; vous ne connaissez pas les hommes. Si j'étais •un conspirateur, vous ne trouveriez chez moi aucune trace de mes projets.
Lorsque vous avez appris que les trois généraux, Dumouriez, Valence et Egalité, venaient de consommer leurs ciimes et leurs longues trahisons en passant à l'ennemi, une indignation égale a passé dans tous les cœurs : « Il faut arrêter tous les Bourbons, les garder en otage », s'est écrié Carlier; c'est la motion de ce républicain que je veux appuyer; et dont je vais développer la justice et la nécessité.
Un grand nombre de membres : Oui, oui, parlez !
Oui, il faut enfin nous délivrer des Bourbons et nous serons républicains.
Je ne quitterai pas ma place, sans purger la République des conspirateurs évidemment connus.
. On nous parle sans cesse de lois révolutionnaires, de la nécessité de prendre des mesures fortes et vigoureuses; sans doute, elles seules peuvent sauver la pa-tiie ; mais je ne conçois pas comment la proscription de la famille, ci-devant et toujours royale, n'a pas encore été comprise par nous au nombre de ces mesures : il faut fairé cette loi révolutionnaire, cette loi terrible que le salut du peuple commande et justifie. (Vifs applaudissements. )
Les mêmes membres : Oui, oui !
Le jour où vous fondâtes la République, si vous aviez banni tous les Bourbons, ce jour-là eût épargné à la France bien des troubles, à Paris bien des mouvements, à vous bien des divisions, à vos armées bien des échecs. C'est le moment d'abjurer cette faiblesse ; les républiques ne subsistent que par les vertus ; les princes ne méditent et ne vivent que de crimes ; corrompus dans les cours, ils corrompent vos soldats dans les camps, vos citoyens dans les villes, et il n'est pour eux, ni foi, ni serment ; leur ambition se cache sous mille formes, et c'est en profanant le nom sacré de patrie qu'ils aspirent en secret à devenir un jour vos maîtres.
Voyez Egalité ! il fut comblé des faveurs de la République, il était né du sang de vos tyrans, et malgré cette tache d'infamie, il commandait vos armées. Eh bien ! il conspire, il fuit, il passe à l'ennemi : rendons-en grâce au génie qui veille sur la République. Il nous éclaire enfin et nous trace nos devoirs. Tandis qu'on conspirait au Nord, que va faire cet autre Egalité au Midi, dans l'armée du Var ? Est-ce dans les mains d'un nouveau général un nouvel instrument d'ambition ? Les traîtres qui servaient cette famille, à laquelle nous avions livré, par je ne sais quel aveuglement, nos armées et nos flottes, ont conduit nos collègues à Maestriçh ; ils sont au pouvoir des rois nos ennemis. Citoyens, les princes, au moins pour les forfaits, sont tous parents. Conservons donc tous ces Bourbons en otage, ét Si le tyran qu'est allé joindre Egalité, auquel il a livré nos collègues, ose, au mépris du droit des gens, porter sur les re-piésentants du peuple français un fer assassin, que tous ces Bourbons soient traînés au supplice ; que leurs têtes roulent au pied des échafauds ; qu'ils disparaissent de la. vie, comme la royauté a disparu de la République, et que la terre de la liberté n'ait plus à supporter leur exécrable existence.
(L'Assemblée tout entière se lève par enthousiasme, en criant aux voix; on applaudit à plusieurs reprises.)
(La Convention nationale décrète que tous les membres de la famille des Bourbons seront mis en état d'arrestation.)
J'observe à la Convention, que déjà le comité de sûreté générale avait lancé un mandat d'arrêt en vertu duquel Egalité fils devait être traduit à l'Abbaye à Paris, et mis au secret. Le décret, nue vous venez de rendre, en a anéanti l'effet contre lui, mais il peut recevoir son exécution
dans la personne du jeune Egalité, employé dans l'armée du Yar. On pourrait en faire uu nouvel instrument de conspiration.
Je demande que ce jeune homme soit amené à Paris, pour y être gardé comme otage.
(La Convention décrète cette proposition.)
demande que les femmes et les enfants de cette famille soient compris dans le décret.
(La Convention décrète cette nouvelle proposition.)
(le jeune). Ce n'était donc pas à tort qu'une partie de la Convention nationale avait élevé des soupçons sur la famille des Bourbons. Il ne faut pas qu'ils restent à ! Paris.
Je demande que le comité de Salut public j indique la ville où ils seront déposés.
Plusieurs membres : A Marseille.
Yous ne pouvez pas encore les traduire ailleurs ; leur présence i^i pcurra être nécessaire d'un jour à l'autre.
Vous devez décréter que les Bourbons qui sont au Temple y resteront ; car si vous les faisiez voyager, vous pourriez craindre de les perdre. Ces otages ont assuré vos têtes ; car si les malveillants n'eussent pas craint de voir tomber celles-là, ils auraient déjà attaqué les vôtres.
Je demande aussi que le comité de salut public indique le lieu où seront conduits les Bourbons.
J'appuie la proposition de Lasource d'un fait ; c'est que, lorsqu'il s'est agi d^expulser les Bourbons, des citoyens se sont répandus dans les sections, et y ont fomenté des mouvements qui auraient pu apporter quelques obstacles à l'exécution de votre décret. J'ajoute qu'après la prononciation du décret, les tribunes nous violentèrent pour le rapporter ; c'en est assez. J e demande qu'à l'exception des prisonniers du Temple, tous les Bourbons seront gardés dans une autre ville.
(La Convention nationale décrète que les membres de la famille ci-devant royale, détenus au Temple, continueront d'y rester.)
Un membre : Le décret qui vient d'être rendu ne règle que la situation des prisonniers détenus au Temple ; il laisse de côté la question des autres otages. Je demande que Paris et Marseille qui se sont montrés également patriotes, partagent la garde de ces otages précieux ; d'ailleurs j'observe qu'Egalité, par exemple, a beaucoup d'amis à Paris et n'en a point à Marseille ; je demande qu'il y soit envoyé.
(La Convention décrète que son comité de Saïut public indiquera le lieu où seront détenus les autres Bourbons) (1).
Président, dès lé début de la discussion j'avais demandé la parole.
La parole est à Sillery.
(1). Malgré l'ignominie dont lin fâme lâcheté de mon gendre flétrit mes cheveux blancs, je conserverai devant vous l'âme calme et paisible que conserve toujours l'honnête homme soupçonné, mais dont la conscience est pure. Un soupçon n'est point un crime, mais dans un moment tel qUé celui-ci, le soupçon même ne doit pas planer sur ma tête, je sais que mes liaisons avec la famille Egalité, je sais que l'émigration de mon gendre peut justifier les craintes qu'on élève ; mais je demande qu'avant de me juger, l'on examine ma conduite, et j'ose croire que l'on n'y trouvera rien qui puisse les justifier, rien qui m'accuse : je demande que toute ma vie soit connue depuis la Révolution. J'èspère que je sortirai de cet examen, aussi pur que mon âme l'est : je demande même que l'on ajoute, si l'on veut, au nombre des citoyens nommés pour me garder ; et quelque pénible que Soit pour moi cette privation, je renoncerai à représenter le peuple, jusqu'à ce que les soupçons élevés sur ma conduite soient entièrement dissipés.
Un membre : Je demande que Sillery justifie de sa correspondance avec Yalence.
Je n'ai jamais eu de correspondance avec lui, je ne lui ai écrit que deux lettres ; ce fut pour lui recommander un officier qui allait à l'armée. Quand vous aurez examiné ma conduite, vous verrez qu'il est impossible que je sois compromis dans cette intrigue.
La proposition de Sillery annonce la pureté de son âme; mais Sillery doit se rappeler ce qu'il se doit à lui-même et à la représentation nationale. Il ne doit pas demander à être mis en état d'arrestation, parce qu'en l'ordonnant la Convention nationale violerait elle-même la représentation nationale. (Murmures.) Je demande que le tout soit renvoyé au comité du Salut public, qui sera chargé de prendre les mesures convenables.
(2) propose que Sillery ainsi que les femmes et les enfants des émigrés soient détenus en ôtagè.
(La Convention écarte cette proposition par la question préalable.)
, le jeune (3). Je demande que Bonne-Carrère, Gouy d'Arsy et Laclos, mis
(La Convention adopte cette proposition.)
donne l'ordre de reprendre l'appel nominal pour l'élection des membres qui doivent composer le comité de Salut public (1). Il est minuit.
Cet appel est terminé à trois heures et demie du matin. Le résultat en sera proclamé à la séance du lendemain (2).
, secrétaire, donne lecture du bordereau des dons patriotiques faits depuis et y compris le SI mars 1793 jusqu'au 6 avril inclusivement; il est ainsi conçu (3) :
Bordereau des dons patriotiques faits depuis et compris le SI mars jusqu'au 6 avril inclusivement.
Du dimanche 31 mars 1793.
Le citoyen Maurisse, demeurant rue Française au Havre, a fait déposer, par le citoyen Richoux, député, 1,200 livres en assignats, pour les veuves et orphelins de la journée du 10 août.
Les officiers, sous-officiers et soldats du 2e bataillon du 38e régiment d'infanterie, en garnison à Givet, ont envoyé, pour les frais de la guerre, la somme de 525 livres en assignats et 600 livres en argent, ce qui fait en tout 1,125 livres.
Le citoyen Nicolas Ausbourg a donné, pour les frais de ld guerre, 100 livres en assignats.
Du lundi 1er avril.
Le citoyen Aubusson, secrétaire commis au bureau de correspondance de la Convention, a donné, pour le mois d'avril, 100 sols.
Le citoyen Armand, doyen des huissiers de la Convention, a donné, pour le mois d'avril, 25 livres.
Le citoyen Sauvageot Ducroisi, secrétaire commis au bureau des procès-verbaux, a donné 100 sols pour le mois d'avril.
Le citoyen Crosnier, de Rouen, a fait parvenir, pour les frais de la guerre, un assignat de 100 sols.
Les citoyens chasseurs et bons tireurs, en garnison à Bitche, armée de la Moselle, ont envoyé 450 livres.
Du mardi 2 dudit.
Il a été déposé sur le bureau 13 décorations militaires, envoyées par les douze citoyens dont les noms suivent :
Le général Pully, le colonel d'Aubigny, le lieutenant-colonel d'Aban, le
colonel Després, le lieutenant-colonel Latour, le capitaine Pelletier,
le capitaine Legrosse, le capitaine Le-
Du mercredi 3 dudit.
Il s'est trouvé sur la table du citoyen président une décoration militaire, sans désignation de nom du donateur.
Le citoyen P. A. Flobejt» de la Fère, a fait déposer sur le bureau un contrat de 18 livres tontine; il fait l'abandon de six années d'arrérages qui lui sont dues, le tout pour les frais de la guerre.
Le général de brigade Stétenhoffen a fait parvenir, par l'intermission du ministre de la guerre, la somme de 250 livres, pour les frais de la guerre.
Du jeudi 4 dudit.
Rien.
Du vendredi 5 dudit.
Le citoyen Rabaut, député, a remis, de la part d'un anonyme, 50 livres en assignats, pour les frais de la guerre.
Le citoyen J. Pouliou, de Rochefort, a fait parvenir, pour les frais de la guerre, 275 livres en assignats.
Le citoyen Créqui-Montmorency, 9 rue Co-catrix, section de la Cité, a fait parvenir le huitième de son revenu, pour les frais de la guerre; il consiste en 50 livres en assignats.
Le 4e bataillon du département de l'Isère, faisant partie de l'armée des Alpes, a fait parvenir, pour les frais de la guerre, la somme de 1,500 livres en assignats.
Les employés des bureaux des subsistances militaires, à Paris, ont fait parvenir, en exécution de leur engagement du 5 septembre dernier, 2,800 livres en assignats, pour l'entretien de dix hommes aux armées, pendant les huit premiers mois de 1793.
Du samedi 6 dudit.
Le citoyen Joseph Doré offre à la patrie la somme de 300 livres en assignats, qu'il s'engage de payer tous les ans, tant que la guerre durera.
La société populaire de Noyers, département de l'Yonne, a envoyé, pour les frais de la guerre, 79 livres en assignats et 6 sous en argent.
(La Convention nationale, accepte les dons ci-dessus faits, et ordonne la mention honorable au procès-verbal, et qu'extrait en sera délivré à chacun des donateurs.)
(La séance est suspendue le dimanche 7 avril à trois heures quarante-cinq minutes du matin pour être reprise le jour même à dix heures.)
A LA SÉANCE DE LA CONVENTION NATIONALE DU
Discussion du projet de décret présenté par
Isnard, relatif à Vorganisation d'un comité
de Salut public.
Texte du Moniteur (2).
relit le projet de décret relatif à l'organisation du comité d© Salut public.
Le projet qui vous est présenté, est non seulement dangereux, mais insuffisant pour remplir le but que vous vous proposez. Il est dangereux car il donne à un comité le droit que vous devez seuls exercer, celui de faire des lois, puisque ce comité pourra prendre des mesures provisoires qui sont toujours des lois définitives en matière de salut public.
Cette mesure vous a déjà été présentée dans la fameuse journée du 10 mars ; La Révellière l'a combattue avec vigueur, et la Convention l'a rejetée. Ce sont les mêmes idées que vous avez adoptées alors, que je reproduis aujourd'hui, et que les mêmes raisons doivent vous faire adopter encore. Je sais que les circonstances nécessitent des mesures extraordinaires; mais pour cela il ne faut pas tuer la liberté. Chez les Romains, on confiait à un seul homme le soin de sauver la patrie en péril. On nommait un dictateur; mais à Rome, un dictateur était un homme vertueux; et vou-driez-vous vous comparer avec ce peuple, qui, pendant 500 ans de révolution, n'avait pas encore versé une goutte de sang avant Tibé-rius. Je demande, moi, que vous établissiez un comité de surveillance, et rien de plus, que vous nommiez d'autres ministres, si ceux-ci ne vous conviennent pas; que ce comité soit composé de neuf membres, choisis par appel nominal parmi les membres de la Convention; qu'il puisse délibérer en sûreté, et qu'il soit chargé de surveiller les opérations du conseil exécutif.
Citoyens, lorsque je me suis élevé contre la première proposition qui vous fut faite d'un comité de Salut public, c'est que j'y ai vu le renversement de la liberté de notre pays; mais, voyons si les mêmes principes se retrouvent encore ici, comme l'a avancé Buzot. Je crois qu'il ne sera pas difficile de vous prouver que ce comité sera retenu dans la ligne de ses devoirs.
Dans le premier projet, le ministre n'agissait point; la
responsabilité était supprimée : aujourd'hui le comité délibère, le
ministre agit, la responsabilité est conservée tout entière. On vous
a parlé de la corruption dont pourrait se servir ce comité par le
moyen de l'argent mis à sa disposition. On a voulu je-
Mais voyons quel est le résultat simple de cette opération. La Convention ne peut administrer; le conseil exécutif n'a pas assez d'activité ; il faut un corps intermédiaire; et pour qu'il puisse faire le bien, il faut que ce soit une émanation de la Convention, car elle a le droit incontestable de déléguer à quelques-uns de ses membres la surveillance qu'elle est chargée d'exercer. On craint les arrêtés que pourra prendre ce comité. Voyons le cercle qui lui est tracé. Ce n'est pas dans tous les temps que ces arrêtés peuvent être pris, c'est dans des circonstances difficiles et extraordinaires, quand la Convention n'est pas assemblée; il faut un corps qui représente la Convention. (Murmures.) U est difficile de concevoir qu'on puisse s'échauffer sur des idées qu'on a déjà adoptées. On a créé un comité de sûreté générale qui agit pour la Convention contre les particuliers, et sans lui en rendre compte. Ici le comité de Salut public est tenu de vous rendre compte de toutes ses opérations : on craint son influence sur le tribunal criminel; mais on a démontré que, ne pouvant accuser personne, le tribunal no peut être son instrument. Ne craignez donc pas qu'il fasse du mal, dites qu'il y a des hommes assez lâches pour craindre qu'il fasse du bien.
Je crois donc, pour me résumer en deux mots, qu'il n'y a point ici une réunion de pouvoirs dans les mains de l'Assemblée, que c'est une délégation qu'elle fait à quelques-uns de ses membres du droit de surveillance qui lui appartient. Je crois que les dépenses ordonnées par le comité, n'étant faites que par le pouvoir exécutif, offrent toujours la même responsabilité. Je crois qu'il n'y a point de dictature, puisque ce comité n'a qu'une existence intermédiaire, et toujours soumise à l'inspection de la Convention. Quant à moi, je déclare que si l'on ne prend pas cette mesure de sûreté générale, ou si l'on n'y supplée pas par quelque autre moyen efficace, on ne pourra sauver la patrie.
(On demande que la discussion soit fermée.)
Je m'oppose à cette proposition. Il s'agit de prendre une grande mesure de salut public, et non d'organiser la tyrannie. Il est nécessaire d'éclairer les doutes de quelques membres; c'est de la franchise des opinions que naîtra la confiance. Je demande que la discussion soit continuée.
Citoyens, la torpeur du conseil exécutif, sa négligence à rassembler les forces nationales contre les ennemis du dehors, son refus d'approvisionner nos armées et nos places de guerre, son silence sur les machinations des généraux, sa connivence apparente, vous ont forcés d'instituer un comité de défense générale; mais il n'a point rempli vos
vues; une triste expérience a fait croire au peuple fluu était lui-même d'accord, et là fait dérxsoirçment nommer le comité de Dumouriez, au lieu d'être celui du Salut public. . Les événements désastreux, qui sont la suite des trahisons des généraux, les forcés considérables que les ennemis coalisés rassemblent sur nos frontières, la nécessité de sauver la patrie, vous forcent aujourd'hui d'organiser un nouveau Comité.
Je n'examinerai point cette institution, sous ie rapport des principes pôlitiqueà et cbhsti-titionnels; ce n'est point Une autorité constituée, c'est une autorité provisoire destinée à organiser là garde nationale et à là précipiter sur les ennemis. On vous a fait péUr de ce Comité, en vous disant que C'était là dictature; mais la dictature ést la pleine puissance confiée à un seul homme, devant qui toutes les lois se taisent; au Contraire, ce comité Vous est subordonné, et voUs conserverez le droit de le dissoudre. Mais qUels hommes font cette objection ? Ce sont les mêmes hommes qui ont voulu mettre la dictature entre les mains de Roland, et qui ont fait mettre des millions entre les mains d'u$ ministre prévaricateur.
Peut-être cependant. Ce comité, avec Tes moyens que vous lui donnez, ne sera-t-il pas encore assez fort pour sauver là liberté; c'est par la violence qu'on doit établir la liberté, et le moment est venu d'organiser momentanément le despotisme de là liberté, pour écraser le despotisme des rois. Je Conclus pour le projet du comité. (Les tribunes retentissent d applaudissements; ■quelques-uns se font entendre dans l'Assemblée.)
Quand on ose dire à cette tribune que c'est par la violence qu'il faut établir la liberté, certes on peut élever quelques soupçons sur le projet de ce comité. Si, derrière le rideau, il est un ambitieux, que ne sera-t-il pas quand il aurà à sa disposition le Comité révolutionnaire et l'àrmée que vous avez hier décrétée? PbUrrez-voUs le réprimer, quand ses arrêts auront été suivis d'Une immédiate exécution? Et si Dumouriez menace aujourd'hui la liberté, n'est-il pas permis à un ami de la liberté de craindre qu'il ne s'élève dans ce comité un ambitieux, qui, sous le masque du patriotisme, usurpe le pouvoir suprême? (Des murmures interrompent. On réclamé de nouveau la clôture de la discussion.)
(AprèB quelques débats, le décret présenté pàr Isnard est adopté.)
Texte du journal des Débats (1).
présente le projet d organisation d'un comité de Salut public.
obtint là parole pour le combattre. Je chercherai, ait-il, à saisir
d'abord le véritable caractère du comité qUe vous voulez former. Ce
n'est point un comité .de surveillance. Il ne s'agit de veiller à
aucun objet particulier, mais de sauver la République tràhie par un
ambitieux. Ce n'est point un pouvoir exécutif, car il n'entre dans
ses fonctions que l'obligation de faire exécuter vos lois : et vous
donnez j à votre comité le droit de prendre des mesures
Yoilà le pouvoir que vous confiez à neuf personnes : et ne nous faisons pas illusion; c'est adopter ce que vous avez rejeté tant de fois avec horreur, la réunion de tous les pouvoirs entre vos mains.
Mais il remplira le but qUe vous vous proposez. Pourquoi chercher à voUs tromper vous-mêmes. Il sera nul. Où le prendrez-vous ? A droite? il sera calomnié. A gauche? il sera injurié, déchiré. N'êtes-vous pas convaincus que le pouvoir exécutif n'est sans fotcé, qUe parce qu'il n'est pàs investi de la confiance^? Qui l'a nommé cependant ? Yous. Or, ne craignez pas que ce qui arrive pour des gens pris hors de vôtre sein, n'arrive pour des membres que l'on pourra dire appartenir à l'un des partis que l'on croit exister parmi vous? QU'arrivera-t-il alors pour leur tenir lieu de la force d'opinion ? Ils seront obligés de se revêtir de toUtè l'autorité possible, et surtout de cette puissance que donne l'argent. Et ne peuvent-ils pas en abuser? Ne sont-ils pas hommes aussi ? Ne pourraient-ils pas vous faire tremblér un jour? Mais non, Romains modernes, ils imposeront silence à la médisance. Mûrs et grands comme leurs modèles, ils commanderont jusqu'à la confiance en leur pouvoir. Mais pourquoi, chez les Romains, le pouvoir dictatorial était-il salutaire? C'est qu'il était remis à un seul hommes qui réunissait la confiance de tous les autres; et c'est de là qu'il tenait toute sa foroe. Mais vos neuf hommes ne seront que neuf ministres despotes,, et ils ne seront pas infaillibles. Est-il possible qu'avec de telles mesures la liberté soit sauvée ? Qu'un seul homme ambitieux veuille renverser l'As-smblée, en perdant tour à tour l'un et l'autre côté, que ne pourra-t-il pas faire avec ce comité et ce tribunal révolutionnaire ?
Vous ne voulez pas, citoyens, que neuf personnes exercent le pouvoir suprême; mais vous voulez qu'un comité surveille les ministres, les empêche de faire mal, et vous présente tous les moyens de sauver la patrie. Eh bien ! confiez la surveillance à neuf personnes : qu'elles puissent délibérer en secret et suspendre les arrêtés du conseil exécutif; qu'elles soient chargées de vous présenter toutes les mesures qu'elles jugeront salutaires.
Mais vous, dit La liévellière - Lépeaux, donnez-nous les moyens d'empêcher la dictature à laquelle on nous mène graduellement.
Je m'opposerai de tout mon pouvoir, reprend ISuzot à ce qu'un décret aussi terrible soit porté; je veux que les bons citoyens m'entendent.
Je demande, Président, que la Convention fàsèe aujourd'hui ce qu'elle a fait dans la nuit mémorable du 10 mars, qu'elle rejette là confusion des pouvoirs, le principe le plus puissant du despotisme; qu'elle ne crée point un corriité aussi terrible que celui qui lui est proposé; qu'elle se Dorné a donner à neuf membres la surveillance la plus active sur les ministres.
Citoyens, lorsque je me suis élevé contre la première proposition qui nous fut faite d'un Comité de Salut public, c'est que j'y ai vu le renversement de la liberté de notre pays : voyons si les mêmes principes se retrouvent encore ici, comme l'a avancé Buzot.
Je crois qu'il ne sera pas difficile de vous prouver que le comité sera retenu dans la ligne de sfes devôirâ. Dans le premier projet-, lé M-nistre n'agissait point : la responsabilité était suppriïhéë : aujourd'hui le comité délibère, le ministre agit, la responsabilité est conservée tout entière. On. vous a parlé de la corruption dont pourrait se servir ce Comité par lê moyen de l'argent mis à sa disposition; 011 a voulu jeter du ridicule, deà soupçons même sur ce comité, en disant qu'on avait spéculé pour ceux qui en seraient membres. Eh bien* la disposition porte que, dans des cas imprévus, les dépenses pourraient être ordonnées par le comité, et dans ce moment où le feu est dans tout l'Empire, fallait-il s'arrêter à des combinaisons froidement calculées dans un comité : et s'il pouvait en résulter quelques dilapidations, faut-il compter l'or quand il s'agit de sauver le corps politique ?
Mais voyons quel est le résultat de cette opération : la Convention ne peut administrer, le conseil exécutif n'a pas assez d'activité : il faut un corps intermédiaire qui soit une émanation de la représentation nationale. On craint les arrêtés que pourra prendre ce comité; mais il ne peut lés prendre que dans les circonstances extraordinaires, et quand la Convention n'est pas assemblée.
On eraiht son influence sur le tribunal criminel; mais on a démontré que ne pouvant accuser personne, le tribunal ne pouvait être son instrument. Ne craignez donc pas qu'il fasse du mal, mais dites qu'il est des hommes assez lâches pour craindre qu'il fasse du bien.
Je crois donc,pour me résumer en deux mots, qu'il n'y a point ici une réunion de pouvoirs dans les mains de l'Assemblée: que C'est une délégation qu'elle fait à quelques-uns de ses membres, du droit de surveillance qui lui appartient; je crois que les dépenses ordonnées par le comité, n'étant faites que par le pouvoir exécutif, offrent toujours la même rês-ponsabilité; je crois qu'il n'y a point de dictature, puisque ce comité n'a qu'une existence intermédiaire, et toujours coifamise à l'inspection de la Convention. Quant à moi, je déclare que si l'on ne prend pas cette mesure, ou si l'on n'y supplée pas par quelque mesure efficace) on,he pourra sauver la patrie.
annohce i^ûe Marat doit parler sur, Barère pour, et Barbaroux contre.
observe qu'il y malentendu : ce qui m'avait effrayé, dit-il, c'est que je croyais qu'on donnait à ce comité , le droit d'arrestation, et j'y voyais la dictature ; mais si vous ne lui donnez pas ce droit déjà Gonféré au comité de surveillance, j'adopte le projet, et nous sommes d'accord.
(On demande que la discussion soit fermée. )
s'y oppose. Comme il s'agit, dit-il, de prendre un grand moyen de salut public, et non pas d'organiser la tyrannie, il est nécessaire d'éclairer, les doutes dé quelques membres ; c'est de la franchise des opinions que naîtra la confiance. Je dèmande que la discussion continue.
énolnce ainsi son opinion : Citoyens, là torpeur du conseil exécutif, sa négligence à rassembler les forces nationales contre les ennemis du dehors, son refus d'approvisionner nos armées et nos places de guerre, son si-
lence sur les machinations des généraux, sa connivence apparente, vous ont forcé d'instituer un comité de défense générale ; mais il n'a point rempli vos vues ; une triste expérience a fait croire au peuple qu'il était lui-même d'accord, e„t l'a fait nommer dërisoire-ment le comité de Dumouriez, au lieu d'être celui du salut public.
Les événements désastreux, qui sont la suite des trahisons des généraux, les forces considérables que les ennemis coalisés rassemblent sur nos frontières, la nécessité de sauver la patrie, vous forcent aujourd'hui d'organiser un nouveau comité.
J e n'examinerai point cette institution sous le rapport des principes politiques ou constitutionnels ; ce n'est point une autorité constituée, c'est une autorité provisoire destinée à organiser la force nationale et à la précipiter sur les ennemis. On vous a fait peur de ce comité, en vous disant que c'était la dictature. Mais la dictature est la pleine puissance confiée à un seul homme devant qui toutes les lois se taisent. Au contraire, ce comité vous est subordonné, et vous conservez le droit de le dissoudre. Mais quels hommes font cette objection ? Ce sont les mêmes qui ont voulu mettre la dictature entre les mains de Roland, et qui ont fait mettre des millions entre les mains d'un ministre prévaricateur.
Peut-être, cependant, ce comité, avec les moyens que vous lui donnez, ne sera-t-il pas fencore assez fort pour sauver la liberté. C'est par la violence qu'on doit établir la liberté ; et le moment est venu d'organiser momentanément le despotisme de la liberté, pour écraser le despotisme des rois. Je conclus pour le projet du comité. (Les citoyens applaudissent. )
Quand oh ose dire à cette tribune que c'est par la violence qu'il faut établir la liberté, certes on peut élever quelques soupçons sur le projet de ce comité. Si, derrière le rideau, il est un ambitieux, que ne fèra-t-il pas quand il aura à sa disposition le comité révolutionnaire et l'armée que vous avez hier décrétée ? Pourrez-voùs le réprimer quand ses arrêtés auront été suivis d'une immédiate exécution ? Et si Dumouriez menace aujourd'hui ïa liberté, n'est-il pas permis à un ami de la patrie, de craindre qu'il ne s'élève, dans ce comité, \in ambitieux qtti, Sous le masque du patriotisme, usurpe le pouvoir suprême ?
est interrompu.
demande la clôture de la discussion.
s'y oppose : majgré ses réclamations, lâ discussion est fermée.
(Le projet d'Isnard, après avoir éprouvé quelqUës amendements, a été décrété.)
Texte du Logotachigraphe (1).
Yous avez renvoyé à aujourd'hui la discussion sur un projet de décret pour Vorganisation d'un comité de défense générale ; je demande à le lire.
Il lit son projet de décret, tendant à éta-
Citoyens, non seulement le projet ds votre comité présente une mesure dangereuse, mais il ne remplit pas l'objet que vous vous êtes proposé. Je tâche d'abord de saisir le caractère du comité que vous voulez former, et je vois dans l'article 3 qu'il peut faire des arrêtés et prendre des mesures de salut public qui doivent être exécutées provisoirement par le conseil exécutif. Ici, citoyens, il ne s'agit point d'un comité de surveillance qui n'a pour objet que des choses particulières, mais il s'agit de considérer le salut public dans un objet dont une seule partie mal combinée peut précipiter la chose publique dans un abîme. Ici, je vois que ce n'est pas seulement un conseil exécutif qui ne peut faire de délibérations que d'après la loi : mais le comité qu'on vous propose peut prendre des mesures de salut public, peut faire, en un mot, ce que vous faites vous-mêmes, ce que vous faites seuls, parce que vous seuls avez l'autorité de faire des lois.
Citoyens, je n'ai qu'une observation à vous présenter. Je suppose qu'il existe un homme excessivement ambitieux, qui, par des calomnies adroitement dirigées tantôt contre un côté, tantôt contre l'autre, parvienne à amener insensiblement la dissolution de cette Assemblée, de sorte qu'il ne reste plus que ce comité, et qu'il devienne le point de ralliement de toute la République, avec un tribunal révolutionnaire dans ses mains, je vous demande ce que devient la liberté. (Interrompu.)
Yous n'avez pas voulu concentrer tous les pouvoirs dans la Convention, lorsque vous avez rejeté la proposition qui vous était faite de prendre le conseil exécutif dans votre sein.
Eh bien ! citoyens, je vois dans le comité qu'on vous propose, non seulement le projet que vous avez déjà rejeté, mais encore le pouvoir législatif lui-même joint au pouvoir révolutionnaire, et une pareille institution porterait la terreur dans l'âme de tous les citoyens. Je sais que les circonstances actuelles nécessitent de nouvelles mesures, mais certes ce ne sont pas des mesures qui doivent inquiéter les citoyens, vous inquiéter vous-mêmes et faire périr la liberté. (Interrompu.)
Citoyens, vous ne voulez pas que neuf personnes usurpent vos pouvoirs, ou plutôt ceux que la nation vous a délégués ; vous voulez uniquement un comité de surveillance dont la marche active et continuelle surveille de près les ministres, et les empêche de faire le mal : enfin vous voulez qu'il vous propose toutes les mesures nécessaires au salut public. Sans doute, votre premier comité était mauvais, en cela qu'il y avait trop de personnes pour délibérer, qu'elles ne pouvaient prendre que des mesures fort lentes, parce que les opinions ne pouvaient se réunir avec cette rapidité nécessaire aux circonstances. Votre comité, en outre, ne pouvait pas tenir ses délibérations secrètes, parce que 25 personnes gardent très difficilement un secret, et parce que tous les députés, les membres du département, de la municipalité et'même les étrangers pouvaient y parvenir.
Il faut donc réparer tous ces inconvénients,
et pour parvenir à ce but, je concentrerai, dans un comité composé de neuf membres, la surveillance du conseil exécutif ; je lui donnerai la faculté de faire arrêter, en vertu de délibérations prises entre eux, tér ou tel prévenu ; de combiner les mesures de salut public, et de les présenter à l'Assemblée, de sus-p rendre tel ou tel arrêté du pouvoir exécutif, avec la charge d'en rendre compte à la Convention. Il me semble que ces idées simples en elles-mêmes ne compromettent pas le salut public, et qu'elles renferment le but que vous vous proposez ; je vois bien qu'elles ne sont pas de nature à satisfaire les ambitieux ; mais elles doivent satisfaire la Convention qui ne doit jamais remettre entre les mains de neuf personnes un pouvoir exécutif aussi terrible que celui qu'on veut leur donner. (Interrompu.)
Je vous prie, citoyens, dans cette grande et solennelle délibération, de songer qu'il s'agit peut-être ici de la liberté de votre pays ; car ce n'est pas plus neuf hommes qu'un qui peuvent se montrer jaloux de la conserver. (Interrompu.) Et s'ils étaient organisés par vous, ils seraient peut-être indestructibles au moins pour quelque temps. Je prétends que les deux premiers articles du projet sont insignifiants ; car les fonctions de votre comité sont de combiner les mesures de salut public, de faire des arrêtés, des lois provisoires, qui sont définitives dans ce cas, et il ne peut agir qu'autant qu'il aura de l'argent; car si vous ne lui en donnez pas, il ne fera rien, et si vous laissez le trésor public à sa disposition, dès lors il a tout dans ses mains, et sous une légère nuance de désintéressement, on veut vous faire croire... (Interrompu.) Toujours interrompu, il m'est presque impossible de suivre le fil de mes idées ; mais la haine de la tyrannie est trop fortement gravée dans mon cœur, pour souffrir qu'on adopte un projet aussi terrible, et je veux du moins que les bons citoyens entendent mes réclamations. (Interrompu. )
Je demande donc, Président, que vous fassiez aujourd'hui ce que vous avez fait à la séance mémorable de la nuit du 10 mars, c'est-à-dire que vous établissiez un comité de surveillance et rien de plus. Je demande une fois pour toutes, que vous nommiez de nouveaux ministres, si ceux que vous avez ne conviennent pas ; mais je m'oppose à ce qu'un comité tel qu'on vous l'a proposé, soit introduit dans le sein de la Convention nationale. Je demande donc un comité qui puisse surveiller toutes les parties de l'Administration, et concerter des mesures de salut public, qu'il sera obligé de soumettre à la Convention, à qui seul appartiendra le droit de statuer définitivement. Je veux qu'on ôte à celui-ci les inconvénients qu'on avait laissés au premier qui était trop nombreux. Je demande qu'il soit réduit à neuf, et qu'il soit pris dans le sein de cette Assemblée, par appel nominal ; qu'il puisse délibérer en secret, et qu'on ne vienne pas incessamment l'importuner par des lumières étrangères. Je demande enfin que ce comité ne soit que ce qu'il doit être et qu'il ne présente pas un pouvoir exécutif suprême et terrible, qui pourrait devenir redoutable à la liberté.
Ma proposition est en deux mots : il sera
choisi dans le sein de la Convention nationale, par appel nominal, neuf hommes, pour former un comité de surveillance, chargé de surveiller les opérations de toutes les administrations du ministère. Ce comité délibérera en secret.
Il présentera à la Convention nationale toutes les mesures du salut public qu'il jugera convenables ; il pourra même suspendre les arrêtés du pouvoir exécutif provisoire, à la charge d'en faire part à l'instant à la Convention nationale.
Citoyens, je suis bien éloigné de voir, comme Buzot, dans le projet du comité de Salut public, tel qu'il vous est présenté aujourd'hui, tant d'inconvénients. D'abord les ministres auront toujours la direction, l'action ; et la responsabilité repose sur leur tête, c'est-à-dire que s'ils font un arrêté contraire à l'intérêt national, le comité chargé de surveiller toutes les parties de l'administration, ea suspend l'exécution, et rend compte de ses motifs à l'Assemblée ; et certes un tel comité eût dû exister depuis longtemps ; il eût forcé la Convention de prendre des mesures qui eussent sauvé la France. Dans un moment où tout est en convulsion, on voudrait s'arrêter à de misérables calculs de finances. Le conseil exécutif n'est-il donc pas responsable de l'emploi des sommes qu'il touche ? Ce n'est point à l'or qu'il faut s'attacher, lorsqu'il s'agit d'épargner le sang des citoyens... C'est la lrtte de la France avec les tyrans. (Applaudissements. )
Je viens ensuite à la composition de ce comité. Nous nous sommes dit : la Convention ne peut point administrer ; le conseil exécutif n'en a point l'énergie. Il faut qu'il existe entre la Convention et le conseil exécutif une existence particulière, qui veille sur l'Administration. Cette existence particulière ne peut absolument être créée* que par la représentation nationale, pour avoir la dignité, le caractère qui lui convient ; il faut encore qu'elle soit une émanation de cette représentation nationale ; il faut que ce soit des représentants du peuple qui composent ce comité, sans quoi la confiance ne sera pas donnée, sans quoi tous les actes oui en résulteraient n'auraient pas tout l'effet qu'on doit eu désirer. Il est incontestable en principe que la Convention, qui représente Je peuple en masse, doit exercer toutes les branches d'administration, il est donc incontestable qu'elle a le droit de déléguer ce pouvoir, cette surveillance à une portion de ses membres.
Mais ils auront le droit de prendre des arrêts ? Oui, mais dans les cas urgents, mais dans le moment où le pouvoir exécutif s'arrêtera, dans les moments où la Convention ne sera point assemblée. Nous ne sommes pas dans des circonstances ordinaires, citoyens ; rien ne peut s'assimiler à notre position, : il faut qu'il y ait continuellement un centre d'activité. (Interrompu.) Déià vous avez fait plus, car vous avez envoyé des commissaires dans tous les départements de la République, et vous les avez autorisés à prendre toutes I*»* mesures nécessaires de sûreté générale. Eh bien ! votre comité de salut public ne sera pas investi d'un plus grand pouvoir : au contraire, à l'instant même où ce comité com-
mettrait un abus vous êtes là, vous vous lèverez, et vous pouvez anéantir, en un instant, ce comité. Yous craignez qu'il fasse le mal 1 Dites plutôt qu'il y a des hommes assez lâches pour craindre qu'il fasse le bien. (Applaudissements.)
Citoyens, on vous parle de dictature, et c'est un mot dont on vous abuse depuis longtemps. Une dictature ! dans un comité dépendant de la Convention, un comité qui n'a qu'un pouvoir précaire, dans un comité surveillé par toute la France, dans un comité qui n'a qu'une existence intermédiaire. Mais on dit : le comité pourra mettre en état d'ar-. restation beaucoup de citoyens... Eh bien 1 point du tout : vous avez un comité de surveillance, c'est à lui à remplir à cet égard les vues de la Convention. Il faut que votre comité soit tel qu'il ne puisse physiquement que faire du bien, et qu'il lui soit physiquement impossible de faire le mal. Ce comité s'entourera des lumières de tout ce qu'il y a d'hommes instruits dans toutes les parties de la République. Il en résultera que, si dans sa marche, un ministre s'écarte de sa ligne, s'il est d'intelligence avec vos ennemis, ou s'il est dans une léthargie aussi coupable que la négligence, vous en serez instruits et vous remédierez au mal. En un mot, ce comité prendra les mesures promptes que le danger de la patrie exigera; et, je le déclare, si vous n'adoptez pas ce comité, il est impossible de sauver la patrie.
Comme il s'agit uniquement de mesures de sûreté publique et non de dictature, il est bon que toutes les voix de l'Assemblée soient unanimes, et elles le seront, j'espère, quand on aura bien compris le projet : il est donc nécessaire de discuter pour et contre, afin d'éclairer les opinions, et c'est à la franchise de vos discussions que vous devez de bonnes mesures.
La torpeur du conseil exécutif, sa négligence à rassembler des forces pour repousser les ennemis, à pourvoir à l'approvisionnement de nos armées et de nos places de guerre, son silence sur les machinations de nos généraux et sa connivence avec eux, vous ont forcé d'instituer un comité de défense générale pour surveiller leurs opérations. Ce comité n'a point rempli vos vues ; une triste expérience a fait croire au peuple qu'il était lui-même d'accord avec les ennemis de la liberté et l'a fait surnommer dérisoirement : le comité de Dumouriez. Les événements désastreux qui ont été la suite de la trahison de vos généraux ; les forces considérables que les ennemis du dehors, conspirés contre vous, rassemblent sur vos frontières, la nécessité ur-erente de prendre des meures de salut public, vous forcent aujourd'hui de substituer un nouveau comité à celui oui a perdu la confiance du peuple. Je n'examinerai point l'établissement de ce nouveau comité, d'après les Principes" politiques, ni relativement aux lois constitutionnelles ; ce n'est, ^oint une autorité constituée que vous établissez dans ce moment, c'est une autorité provisoire destinée uniquement à mettre en rnouvem^nt les forces nationales, à les précipiter sur les ennemis du dedans et du dehors et à les écraser tous à la fois.
On vous a fa,it peur de ce comité, en voue disant que c'était former une dictature ; mais ceux qui font cette objection, savent mieux que personne que celui qui est revêtu provisoirement de la puissance suprême, n'échapperait pas, s'il était tenté d'en abuser» à la justice souveraine de la Convention, devant laquelle toutes les autorités disparaissent.. Peut-on comparer votre comité à la dictature 1 C'est vous qui en êtes investis, et puisque vous le créez dans ce moment, vous pouvez l'anéantir dans un autre, dès qu'il né remplira pas le but que vous vous êtes proposé. On est venu faire valoir contre ce ooxnité les raisons les plus misérables. Est-ce à l'instant où la patrie est menacée, où il s'agit du salut d"s vingt-cinq millions d'hommes, que l'on vient froidement oalculer quelques dépenses peu considérables ? Je n'examinerai pas, dai^s ce moment, ces petites objections ; mais je demanderai si ceux qui les font, sont; de' bonne foi ? Ces hommes qui viennent s'élever contre une mesure de salut public, entièrement indispensable;, sont les mêmes qui ont demandé qu'on investît un ministre prévaricateur de la dictature. Ces hommes qui font valoir contre votre comité la crainte de dépenser de légères sommes, sont les mêmes qui ont mis entre les mains d'un ministre dilapidateur, des millions et des millions. (Interrompu- )
La seule objection qu'on puisse faire contre C3 comité, c'est que, peut-être, il ne sera pas investi d'un pouvoir assez grand pour mettre en mouvement. les forces nationales et écraser nos ennemis. C'est par la violence qu'on doit établir la liberté, et le moment est venu oît nous devons organiser le despotisme de la liberté, pour terrasser le despotisme des rois. Je conclus à l'acceptation du projet du comité.
Citoyens, dans une question aussi importante que celle qui nous occupe, il n'est aucun de nous qui ne désire que les mesures de salut public que doit prendre la Convention, ne paraissent à toute la République prises à l'unanimité ; mais lorsque dans eette tribune, on vient vous dire qu'il faut que ce soit la violence qui pose les bases de la liberté, certes il est permis de montrer quelques soupçons sur les vues qu'on se propose dans l'établissement de ce comité. (Interrompu.) Je crois que mon opinion est à moi, et personne ne peut me l'enlever. Buzot vous a démontré les dangers de cette institution, telle que le comité vous la présente : mais moi, je veux vous faire voir derrière le rideau un ambitieux qui se cache pour étouffer la liberté ; quand cet ambitieux aura pour lui, d'un côté, le tribunal révolutionnaire, d'un autre, le comité, et cette armée dont on a décrété hier la formation, je vous demande que deviendra la liberté ? Qu'an ne vienne pas me dire que ces craintes sont exagérées. (Interrompu.)
J'observe que la discussion est assez éclaircie, et qu'il ne s'agit plus d'investir ce comité "du pouvoir d'ordopn îr des arrestations arbitraires. Je demande que la discussion soit fermée,
(Cette proposition est adoptée, et le projet du comité, après quelques amendements, est décrété. )
Tçvte dy. Mercure universel (1),
fait une nouvelle lecture du projet de décret qu'rl a présenté hier/ pour la formation d'un comité de Salut public.
Si vous créez un comité de salut public, que vous lui donniez le pouvoir d'agir sans décrets, alors il faudra un comité pour le surveiller, et il faudra que vous surveilliez ensuite ce comité de. surveillance ; ce comité serait d'ailleurs un vrai pouvoir exécutif suprême qui pourrait faire tout ce qu'il voudrait, qui n'agirait qu'autant que vous lui donneriez beaucoup d'argent. (Interruptions sur la Montagne.) Je demande que ce comité ne puisse effrayer la liberté, qu4l ne soit qu'un simple comité de surveillance des ministres ; si vous en êtes mécontents, changez vos ministres.
Sj les minières faisaient un arrêté contraire à l'intérêt national, le comité de Salut public le suspendrait : il eut été à désirer qu'un tel comité existât depuis longtemps, il eût vu que beaucoup d'hommes que l'on met au vaisseau de l'Etat, sont souvent de? êtres nuls, et il eut mis le flambeau sacré de la vérité sous les yeux de la Convention.
Qu'importe, d'ailleurs, de laisser les dépenses jusqu'à concurrence de 100 livres à la disposition des ministres, n'en seront-ils pas toujours responsables ? Les membres de ce comité pourront-ils jamais y toucher, puisque les ministres rendront compte dans le moment où il _ faut s'environner de toutes les lumières ; qu'il faut exercer une grande surveillance, peut-on le faire sans moyens : croyez-moi, citoyens, sauvons la chose publique, sauvons la vie des citoyens ; c'est ici le combat à mort de l'esclavage et de la tyrannie contre la Convention nationale et la liberté. Nous avons vu que la Convention ne pouvait administrer, nous avons vu que le conseil^ exécutif n'avait qu'une marche timide, incertaine et lente, il faut donc dans les moments OÙ la Convention n'est pas assemblée, où elle est occupée d'objets importants, où le conseil attend des décisions, et reste sans action ; eh bien ! dans ces moments il faut un comité qui puisse agir pour vous, qui représente la Convention. (Cris dans la vallée : Quoi des dictateursl)
N'avez-vous pas donné des pouvoirs illimités aux commissaires que
vous envoyez dans les départements. Votre comité ne vous rendrait-il
pas compte ainsi que vos commissaires ? On parle de dictature, mais
ce comité ne pourra, d'un côté, rien faire sans que le conseil
exécutif le sache, puisque c'est lui qui exécutera ; d'un autre
côté, vous êtes là, et vous pouvez suspendre les arrêtés, pu changer
le comité lui-même. D'ailleurs, n'est-il pas ce comité élu pour un
temps très court? Mais il pourra, de toutes les parties de la
République, appeler des hommes instruits, il s'environnera de toutes
les lumières, et ce n'est que par ce concours de choses que vous
pourrez faire le bien, Il n'y a pas ici curou-lation de pouvoirs
exécutif et législatif, puisqu'il ne s'agit que de prendre des
mesures de
Si ce comité n'a pas le droit de faire arrêter des citoyens dans les rues, s'il ne se mêle que des fonctions politiques, dë la défense générale intérieure et extérieure, des mesures de salut public, nous sommes tous d'accord. (Aux voix! aux voix! dit-on.)
Non, dit Barère ; il faut que tous les membres de l'Assemblée s'éclairent : il faut que l'on sache bien que l'on ne veut pas organiser une dictature ; il importe que la discussion soit continuée.
La torpeur du conseil exécutif, sa négligence à rassembler les forces nationales, son refus d'approvisionner nos armées, nos places de gueîre, vous ont forcé de créer un comité de défense générale, sa marche a été trop lente; il vous faut un nouveau comité; ce n'est point une autorité constituée que vous établissez, c'estf un pouvoir provisoire ; ce n'est point un dictateur, vous seuls êtes investis de la dictature, et vous le changerez quand vous le voudrez : il ne s'agit pas de lésiner quand il faut sauver 25 millions d'âmes. Si quelque chose manquait à ce comité, ce serait bien plutôt le pouvoir suffisant pour porter toutes nos forces nationales pour écraser les ennemis. C'est par la violence qu'il faut établir la liberté. (Applaudissements des tribunes.) Le moment est arrivé d'organiser le despotisme de la liberté, pour anéantir le despotisme des rois. Je vote pour le projet du comité.
S'il existait derrière le rideau un ambitieux ; et moi, je crois le voir, qui déjà a dans sa main le tribunal révolutionnaire, l'armée des sans-culottes que l'on a décrétée hier, et qu'il fût placé dans ce comité d'exécution ; que ne pourra-t-il pas faire 1 Croyez-vous qu'un ami de la liberté, un vrai républicain, ne puisse pn être effrayé 1 (Interruption.) Il est étonnant que je ne jouisse pas ici de ma liberté.
(L'Assemblée ferme la discussion, et décrète les articles suivants du projet de décret.)
Séance permanente du
présidence de delmas, président, et de garran-coulon, secrétaire.
Présidence de Delmas, président.
La séance est reprise à 10 heures 40 minutes i du matin.
(1). J'ai l'honneur de déposer sur l'autel de la patrie une somme de J00
livres,
(La Convention nationale décrète Ja mention honorable et l'insertion au Bulletin,.)
(1). Je suis également chargé, par une personne qui désire garder l'anonymat, de déposer sur l'autel de la patrie une décoration militaire, une épaulette, une contre-épau-lette, et 840 livres, dont 150 en écus.
(La Convention nationale décrète la mention honorable de cette offrande et en ordonne l'insertion au Bulletin.)
(2). A mon tour, je dépose sur le bureau une offrande patriotique de 168 livres 15 sols, qui m'a été transmise à cet effet par la commune de Fays-13illot (Haute-Marne) et celle de 100 livres en assignats, que le citoyen Prégnier m'a remise pour le même objet.
(La Convention nationale décrète la mention honorable de ces deux offrandes qu'elle accepte, et décrète que l'insertion en sera faite au procès-verbal, dont un extrait sera remis aux donateurs.)
, secrétaire, donne lecture des lettres suivantes (3) :
1° Lettre de la citoyenne Tour nier, veuve d'un portier de la surintendance des bâtiments du ci-devant roi, à Compiègne, qui demande à la Convention l'indemnité, tant pour la non-jouissance du loyer attribué à son mari, depuis le mois d'octobre 1789, jusqu'au 21 janvier 1793, jour de son décès, que pour les objets d'embellissement et de commodités faits par eux à oette maison.
(La Convention renvoie la lettre au comité de liquidation.)
2° Lettre de la municipalité de Marseille, qui adresse à la Convention nationale une délibération de la quatrième section de cette ville, suivie de l'adhésion des autres sections et de la société républicaine, qui a pour objet de prévenir les funestes effets de l'agiotage et les créations successives et multipliées d'assignats nationaux.
(La Convention renvqie cette lettre au comité des finances.)
3° Lettre du commandant général Santerre, qui envoie à la Convention nationale un extrait de l'ordre général de la veille, qui contient ses vues sur la formation de l'armée de 40,000 hommes qui vient d'être décrétée.
(La Convention renvoie cette lettre au comité de la guerre.)
4° Lettre de l'adjoint d'y ministre de la, guerre, Saint-Fief, par laquelle il adresse à la Convention nationale l'état des officiers de l'artillerie et du génie, qui étaient employés aux armées du Nord et des Ardennes.
(La Convention renvoie cette lettre au comité de la guerre.)
(La Convention renvoie cette lettre au comité de la guerre.)
6° Lettre de l'adjoint du ministre de la guerre, Saint-Fief, par laquelle il prévient la Convention nationale que les fournitures en nature se feront aux troupes des côtes de l'Océan au 15 avril prochain.
(La Convention^ renvoie cette lettre aux comités de la guerre et des marchés réunis.)
7° Lettre de l'adjoint du ministre de la guerre, Saint-Fief, qui fait parvenir à la Convention un mémoire qui lui a été adressé par les administrateurs généraux des subsistances militaires, relativement à la fourniture de la viande pour les armées de la République.
(La Convention renvoie la lettre aux comités de la guerre et des marchés réunis.) x
8° Lettre de l'adjoint du ministre de la guerre, Saint-Fief, relative au paiement des pensions de la fondation des écoles militaires dans les collèges nationaux, et un mémoire relatif à l'insuffisance des fonds décrétés le 25 janvier dernier pour les dépenses de ces écoles.
(La Convention renvoie'cette lettre aux comités des finances et de la guerre réunis.)
9° Lettre de Clavière, ministre des contributions publiques, qui adresse à la Convention une réclamation relative, tant aux fonctionnaires, ouvriers et employés aux monnaies qu'on a compris, en quelques départements, dans le tirage pour le recrutement, qu'aux chevaux des directeurs des monnaies servant à la fabrication, dont quelques municipalités se sont emparés.
(La Convention renvoie cette lettre au comité de législation.)
105* Lettre de Clavière, ministre des contributions publiques, par laquelle il fait part à la Convention des réclamations de la trésorerie nationale sur un arrêté du directoire de la Charente-Inférieure, qui ordonne aux receveurs de districts de garder à la disposition de ce directoire tous les fonds de leur recette, et de suspendre même tout annulement d'assignats provenant tant des domaines nationaux que des échanges. '
(La Convention renvoie cette lettre au comité des finances.)
11° Lettre de Clavière, ministre des contributions publiques, relative à l'usage qu'on pourrait faire, pour la monnaie, de quatre anges d'argent, de Coustau et de Sarrazin.
(La Convention renvoie cette lettre aux comités des finances et d'instruction publique réunis.)
12° Lettre de Clavière, ministre des contributions publiques, qui contient une demandé du département du Lot, pour être autorisé à employer le produit des rôles supplétifs de 1789, au paiement des sommes dues en remplacement des droits supprimés.
(La Convention renvoie cette lettre au comités des finances.)
13° Lettre de Monge, ministre de la marine, qui prie la Convention nationale de décider s'il doit faire exécuter en France le décret du 5 mars dernier, dont l'expédition pour les colonies a été suspendue par un autre décret du 19 mars.
(La Convention renvoie cette lettre au comité colonial.)
14° Lettre de Monge, ministre de la marine, qui prie la Convention nationale de fixer son attention sur le refus fait par les autorités constituées de l'Ile-de-France, de recevoir et de transcrire sur leurs registres la loi du 8 août 1790, concernant la liquidation de l'arriéré.
(La Convention renvoie cette lettre aux comités colonial et des finances réunis.)
15° Lettre de Monge, ministre de la marine, qui en contient une autre du citoyen Sontho-nax, commissaire national à Saint-Domingue, dans laquelle il annonce à la Convention qu'il a cru devoir renvoyer en France des membres de l'assemblée de Saint-Marc et quelques autres personnes.
(La Convention renvoie cette lettre aux comités de la marine et des colonies réunis.)
16° Lettre de Gohier, ministre de la justice, qui adresse à la Convention nationale le tableau des membres qui composent le tribunal criminel extraordinaire établi par la loi du 10 mars. H demande que la Convention nationale procède à la nomination : 1° d'un juge et de cinq suppléants ; 2° de deux suppléants de l'accusateur public; 3° de douze suppléants du jury.
(La Convention renvoie cette lettre au comité de législation.)
17° Lettre de Gohier, ministre de la justice, qui transmet à la Convention une pétition des citoyens qui étaient officiers municipaux d'Avignon lors des scènes malheureuses dont cette ville a été le théâtre.
(La Convention renvoie cette lettre au comité de législation.)
18° Lettre de Garat, ministre de l'intérieur, qui transmet à la Convention nationale les états des demandes de pensions, gratifications, secours et indemnités qui lui ont été adressés, et qui ont été présentés et arrêtés au conseil exécutif provisoire.
(La Convention renvoie ces pièces au comité de liquidation.)
19° Lettre de Garat, ministre de Vintérieur, qui transmet à la Convention un arrêté du directoire du département de l'Aube, avec diverses autres pièces qui lui ont été adressées à l'effet d'obtenir l'autorisation nécessaire pour procéder à la vente de la ferme des Bons Hommes, située dans l'étendue du district de Troyes.
(La Convention renvoie ces pièces aux comités des domaines et d'aliénation réunis. )
20° Lettre des citoyens Lavechin et Laredde, qui transmettent un mémoire dans lequel ils demandent la permission d'exploiter une carrière à plâtre, sur une partie du terrain national situé à Reuil, district de Meaux, que le même ministre adresse à la Convention na-
tionale, avec l'arrêté pris à ce sujet par le département de Seine-et-Màrne.
(La Convention renvoie le mémoire au comité des domaines.)
21° Lettre des administrateurs du département de Seine-et-Oise, qui transmettent à la Convention un état nominatif des personnes ci-devant attachées à l'Administration et au service de la maison de Saint-Cyr.
(La Convention renvoie la lettre au comité des finances, pour en faire son rapport sans délai.)
22° Lettre du citoyen Monge, ministre de la marine, par laquelle il transmet à la Convention copie d'une lettre du citoyen Laroque-Montel, gouverneur provisoire de Sainte-Lucie et d'une adresse qui a été envoyée à ce dernier par la société patriotique de Tabago sur les services qu'il a rendus à cette colonie; elle est ainsi conçue (1) :
Paris, 5 avril 1793, an II de la République.
« Citoyen Président,
(( Je vous adresse copie d'une lettre que je viens de recevoir du citoyen Laroque-Montel, gouverneur provisoire de Sainte-Lucie; j'y ai joint copie d'une adresse qui lui avait été adressée par la société patriotique de Tabago. La Convention connaîtra la fidélité des habitants de cette colonie, et la lâcheté du gouverneur Marguenat, qui a abandonné son poste dans l'instant où Tabago était menacé de la fureur du rebelle Rivière.
« Adresse de la société patriotique de Tobago,
île fidèle, au citoyen Laroque-Montel, commandant en chef des Iles-du-Vent.
« La société patriotique de Tabago s'empresse de vous adresser l'hommage de la haute estime que vous lui avez inspirée; elle ne vous adresse pas de vaines phrases, elle vous parlera le langage du cœur et de la reconnaissance.
« Yous avez donné de grands exemples ; vous avez montré ce que peut produire l'amour de la patrie et des lois.
« Votre tâche n'est pas finie, citoyen ; il vous reste encore de grandes choses à faire, et nous les attendons de vous; il vous reste à consolider la paix et l'union parmi des frères trop longtemps victimes des embûches des méchants et de leur propre erreur; il vous reste encore à tourner un regard d'amitié vers nous, en nous nommant le plus promptement possible un chef digne de votre confiance, et qui protège la loi que nous jurons de maintenir avec lui.
« Nés Français, dans une colonie remplie d'aristocratie, nous ne pouvons
que gémir et attendre patiemment que le pouvoir exécutif qui nous sera
par vous envoyé, porte remède à nos maux, et par son exemple, nous fasse
jouir de cette précieuse liberté. Que de remerciements nous vous devons,
de nous avoir envoyé les citoyens d'Avesne et Kergariou, I
« Le gouverneur de Tabago nous a abandonnés dans ce moment suprême, à la veille d'être pillés et égorgés par le traître Rivière et Ses complices; il est parti furtivement dans un bateau anglais, sans régler ses affaires, sans payer ses dettes, et laisse son autorité au chef des fortifications, peu digne de notre confiance. Le sentiment de sécurité ne se commande point, il s'acquiert. Le sieur Fontallard n'a rien fait pour cela; il a, au contraire, suffisamment prouvé son incivisme en méprisant les décrets émanés de l'Assemblée nationale.
« Venez donc, citoyen, à notre secours, en établissant provisoirement à Tabago un chef qui vous transmettra notre attachement et notre respect.
« Les protestations qui vous seront envoyées par un nombre de citoyens français, membres de l'assemblée coloniale, prouveront assez l'é-loignement de cette assemblée pour la Constitution. »
Lettre du citoyen Laroque-Montel, datée de Saint-Pierre de la Martinique, le 12 février 1793, Van II de la République.
« Citoyen ministre,
« J'ai à vous rendre compte d'événements bien intéressants, je m'en acquitte avec une satisfaction difficile à exprimer. Voici les changements heureux arrivés aux Iles-du-Vent, depuis la clôture de ma dernière lettre.
« La Martinique était gouvernée, depuis le départ de Béhague, par une espèce de conseil exécutif composé de quatre membres et un commandant militaire.
« Les membres de ce conseil étaient Martel, Levassor, Honnetene et Guignos : le commandant militaire était le sieur Molterat, depuis longtemps commandant à Saint-Pierre.
« Les mêmes gens armés qui servaient sous Béhague, et de sa création, faisaient encore la police dans la colonie sous les lois et les influences de la même assemblée coloniale, qui repoussa Rochambeau, les commissaires et les troupes le 16 septembre dernier.
« Je cherchai les moyens d'occuper le fort Bourbon, de le garnir de troupes fidèles, sans diminuer la garnison de Sainte-Lucie; j'envoyai le citoyen Sabatier-Saint-André à la Guadeloupe, concerter avec le citoyen La-crosse, l'exécution de ce projet. Il trouva là les citoyens Rochambeau et Ricard, arrivant de Saint-Domingue.
« Dès lors, citoyen, je n'eus plus rien à faire sur la Martinique; Rochambeau s'y rendit, accompagné par Lacrosse; le même respect pour les décrets de la Convention, la même confiance que votre signature avait inspirée à la Guadeloupe, fit éclore à Saint-Pierre les expressions de la joie la plus pure. Rochambeau y reçut les témoignages les plus flatteurs que puisse recevoir un délégué de la République. Sa présence et celle du citoyen Lacrosse enracinèrent pour jamais, dans tous
les cœurs, cet amour ardent, de la patrie, qui ne cède même pas en mourant.
« llochambeau vint ensuite au Fort-Royal. Le détail de ses opérations, il vous le don^e sans doute lui-même : moi je me bornerai à vous dire qu'il a pris son gouvernement avec la seule force que lui donnait la volonté nationale, qu'il a développé beaucoup de moyens, et que les ennemis de la chose publique respectent sa personne et ses opérations, et que le bon ordre règne.
« Du Fort-Royal, surnommé Fort-cle-la-Ré-publique, Rochambeau a envoyé Ricard à Sainte-Lucie ; l'assemblée coloniale n'a pas voulu d'abord le reconnaître, parce qu'il n'avait pas de pouvoirs; j'ai fait auprès de cette assemblée tout oe que j'ai pu et dû, afin qu'elle portât la plus grande attention à cette affaire. Je suis venu moi-même au Fort-Royal reconnaître les pouvoirs de Rochambeau, les certifier aux colons de Sainte-Lucie, et les engager à recevoir Ricard; j'ai été heureux, car au même instant le citoyen Ricard est reçu et installé.
« Je la rends donc toute pnre à la patrie, cette île fidèje. U est bien flatteur pour moi que ma dernière dépêche comme gouverneur en fonction de cette colonie, soit celle qui vous annonce le retour de toute l'île à la paix, à la soumission, et de pouvoir yous annoncer que cet archipel ne présente plus de rebelles, ba-lut.
Le premier lieutenant-colonel du> 31e régiment,
« Signé Laroque-Montel. »
« P. S. Je reçois, dans l'instant, des nouvelles de Tàbago que je vous envoie en original, l'aviso partant, vous aurez, citoyen ministre, l'état actuel de cette colonie, où je crois que le général va m'envoyer; entièrement dévoué à la République, je ne calculerai pas, pour y aller, l'insalubrité de l'air. Les deux compagnies de mon bataillon qui y sont y ont perdu quatre fois plus qu'à Sainte-Lucie.
« Signé : Laroque-Montel. » ( Pour copie, Monqe. »
(La Convention nationale décrète l'insertion au Bulletin de la lettre de Laroque-Mon-tel, et renvoie le, tout, au surplus, aux comités colonial et de marine. )
23° Lettre de Gohier, ministre de la justice (1), par laquelle il informe la Convention que le feu a pris à celui de ses bureaux qui renfermait les procédures criminelles, mais que les flammes n'ont point atteint celles qui concernent les accusés qui doivent être jugés par le tribunal extraordinaire. Le ministre ajoute qu'il fait des recherches pour savoir si le feu a été mis à dessein. U fait garder à vue provisoirement le chef de ce bureau.
(Lg. Convention renvoie cette lettre au comité de sûreté générale.)
24° Lettre de Vex-ministre Roland, relative à l'apposition des scellés
faite sur ses papiers
Paris, ce 5 avril, l'an II de la République.
( Citoyens représentants,
« Les scellés ont été apposés sur mes papiers, lundi premier de ce mois, par ordre des comités de la Convention. Quelle que puisse paraître cette mesure, à l'égard d'un houime qui n'a pas mérité d'inspirer des soupçons, je me suis applaudi de la voir prendre, parce qu'elle doit fournir de nouveaux témoignages en ma faveur ; mais il importe d'accélérer leur manifestation ; il importe de dissiper les doutes que cette précaution suppose et qu'elle a dû répandre ; il m'importe d'acquérir enfin, sous le régime de la liberté, celle de porter mës pas sur mes propriétés et de respirer l'air qui convient à ma santé.
« Je réclame de l'Assemblée qu'elle veuille nommer des commissaires pour la levée des scellés et la vérification de mes papiers. Sa justice ne les choisira pas, sans doute, plus parmi mes successeurs qu'au milieu de mes amis : le caractère de 1 impartialité doit le distinguer, car je n'ai pas plus besoin de grâce que je ne dois être exposé à craindre la malveillance.
« Je demande, en outre, à être autorisé à appeler des commissaires de ma section pour assister à la vérification que les commissaires de la Convention feront de mes papiers, afin que la plus grande publicité éclaire tout ce qui me concerne. C'est l'unjque sauvegarde dont je me sois jamais appuyé et que je ne cesserai d'invoquer.
« Je demande enfin l'observation du décret qui ordonnait, sous huitaine, l'examen et le rapport de mes comptes.
« Signé : Roland. »
(La Convention nationale décrète qu'elle nommera deux commissaires pour assister à la levée des scellés mis sur les papiers de cet ex-ministre et qu'il est autorisé à prendre deux des commissaires dans sa section pour y assister avec ceux de la Convention. Elle décrète, en outre, le renvoi de la lettre pour le surplus au comité de l'examen des comptes.)
met aux voix le scrutin pour la nomination de deux commissaires appelés à assister à cette levée des scellés.
(La Convention désigne les citoyens La-plaïgne et Thuriot (2).
Baudoin, imprimeur de la Convention nationale, est admis à la barre (3).
Il observe qu'il ne dépend pas de lui d'imprimer, ainsi que la Convention
l'a ordonné, les pièces relatives à Dumouriez, qui sont entre les mains
de différents comités et du conseil exécutif. Il demande que les
commissaires inspecteurs de la salle, chargés de l'inspection des
impressions, se concertent avec les comités et les agents du conseil
exécutif provisoire, qui peuvent avoir ces pièces, pour les
(La Convention décrète que les commissaires inspecteurs de la salle, chargés de l'inspection des impressions, se concerteront avec les comités et les agents du conseil exécutif provisoire, qui peuvent avoir les pièces de la correspondance de î)umouriez, pour les délivrer à l'imprimeur de la Convention, afin d'en accélérer l'impression.)
, secrétaire., donne lecture du procès-verbal de la séançe permanente du mercredi 3 avril 1793, au matin (1).
(La Convention en adopte la rédaction.)
, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance permanente du vendredi 5 avril 1793, au matin (2).
(La Convention en adopte la rédaction.)
Un membre du. comité de défense générale donne lecture d'une lettre de Custine, qui est ainsi conçue (3) :
Landau, le
( J'ai l'honneur de vous adresser copie de ma lettre aux administrateurs des départements qui m'environnent, dont je requiers toutes les gardes nationales, ainsi que copié d'une lettre que j'adresse au département du Bas-Rhin, pour pourvoir à l'évacuation des magasins qui se trouvent dans la plaine de l'Alsace, car, outre 32,000 hommes qui bloquent Mayënce, c'est à une armée de 80,000 hommes que j'ai affaire ici, sans y comprendre celles qui sont du côté du Haut-Rhin.
« Voilà le résultat des brillantes mesures qu'a prises Beurnonville, de laisser l'armée de la Moselle dans l'inaction, en l'empêchant de couvrir les revers des Vosge,3, en ne renforçant pas mon armée où elle est dans l'inaction ; enfin, en faisant tout ce qu'il fallait pour me faire essuyer l'échec le plus terrible. Cette conduite ne peut avoir que les motifs les plus méprisables et les plus condamnables dans un ministre, et me décide à vous dire que dans le peu de temps où je dois conserver le commandement, je ne correspondrai plus avec lui, vous priant de lui donner connaissance de mes dépêches pour ce qu'il sera utile que je sache.
« J'ai en opposition une cavalerie immense, et rien n'empêche qu'il n©
soit possible de me couper toutes les subsistances ; je n'ai pas devant
moi moins de 50 escadrons de hussards et de dragons, sans les
cuirassiers dont j'ignore le nombre, et je n'ai à leur opposer que 10 à
12 esoadrons de chasseurs à cheval, et 5 ou 6 de dragons, et
journellement le ministre Beurnonville envoie des. ordres pour les
retirer sans les faire remplacer.
« Mais aujourd'hui il faut empêcher l'invasion dans nos départements, ce ne sont plus des conquêtes à défendre. Il faut que la nation se lève tout entière ; il faut qu'elle se porte sur B icône, afin d'empêcher celles de l'ennemi de s emparer des Vosges. A la manière dont on opère, et en jetant un coup d'qeil sur la carte, on ne douterait pas que le plan ne fût forme de livrer les départements à. la fureur des ennemis. Je me charge de le démontrer dans un entretien public que je provoque sur ma conduite, et sur celle des ministres et des généraux que j'ai eu à lutter.
« On vous a dit une grande vérité, représentants du peuple, en vous assurant que le rpode d'organisation que vous avez décrété pour l'avancement militaire, devait perdre l'armée, et si vous ne vous empressez d'y remédier, elle vous sera constatée dans'peu de temps. Je parle pour les intérêts de ma patrie et pour la gloire de ceux qui me remplaceront. Il ne peut plus y avoir rien de personnel, puisque ma carrière est finie...
« Signé : Custine. »
(1). Je vous ai déjà dévoilé une partie des perfidies de Beurnonville; je dois vous citer ûn trait qui achèvera de vous en convaincre : c'est que sa cavalerie, très nombreuse et tant sollicitée par Custine, il l'a fait marcher sur ses derrières et jusque vers Nancy, de manière qu'elle ne pouvait être là d'aucune utilité, tandis qu'elle aurait été extrêmement utile à l'armée de Custine. Citoyens, pour juger la conduite de cet homme, qui a si indignement trahi la patrie, je demande que vous ordonniez à Custine, de vous envoyer toute sa correspondance avec Beurnonville, et que l'état-major de l'armée de la Moselle soit tenu de vous envoyer l'état, le contrôle de l'armée de la Moselle et de sa position depuis le mois de décembre, jusqu'à la fin du mois de mars, et que vous nommiez une commission ad hoc, pour examiner cette affaire.
(2). Nous devons nous féliciter d'une mesure que la Convention a prise,
qui est l'envoi des commissaires auprès de l'armée.
Je demande donc que, dès ce jour même, on nomme deux ou trois commissaires pour aller à l'armée de Custine, prendre toutes les informations relatives aux plaintes qui vous sont
f)ortées, afin de punir les traîtres qui ont été a cause de l'échec qu'a essuyé ce général. Je ne doute pas que la trahison qui a eu lieu à l'armée de Custine, ne fût liée avec celle de l'armée de Belgique. Il y a longtemps qu'on attaque Custine, qu'on le représente comme un fou, parce qu'il n'était pas du parti de Dumouriez. Il faut tout examiner, afin de savoir si le parti de Dumouriez n'existait pas dans les bureaux de la guerre. (Applaudissements.)
(La Convention, décrète qu'elle nommera trois commissaires pour se rendre à l'armée de Custine.)
(1). Je crois devoir dans ce moment présenter une réflexion à l'Assemblée. J'ai lu, il y a déjà quelque temps, une partie de la correspondance de Beurnonville, dans le temps qu'il était à l'armée, j'y ai constamment vu ce qui, dans tous les temps, a été la perte de tous les Etats; j'ai vu cette jalousie, et cette rivalité de métier assez ordinaire aux généraux, qui n'ont jamais su calculer les avantages, ou les désavantages de leur patrie, qui ont toujours compté pour peu le sang des hommes et n'ont jamais en vue que leur intérêt, leurs avantages individuels.
Je suis intimement convaincu que Beurnonville, ministre de la guerre, depuis qu'il occupe ce poste, s'est attaché principalement à se ménager une armée dans le meilleur état. J'ai vu Beurnonville vous dire ici qu'il n'acceptait le ministère que pour un temps, qu'il vous redemanderait le commandement de l'armée. Eh bien ! citoyens, faites bien examiner l'affaire, et vous serez convaincus de la vérité de mon observation.
Je suis fâché de parler contre lui en son absence; il n'entre jamais dans mon caractère d'inculper un homme absent, et surtout un homme qui, revêtu d'un caractère public, a été livré par la lâcheté du général Dumouriez : mais je demande que cette lettre de Custine soit renvoyée au comité de Salut public aussitôt qu'il sera organisé.
(La Convention adopte la proposition de Bréard, c'est-à-dire ordonne le
renvoi de la lettre de Custine au comité de Salut public.)
Plusieurs membres : Pas du tout, nous demandons la question préalable sur cette proposition.
Un autre membre demande, par amendement, que le renvoi de cette question soit fait au comité de Salut public.
(La Convention décrète cette proposition ainsi amendée.)
(2). Je demande que les commissaires de la Convention, qui avaient été envoyés aux armées et qui en sont de retour, soient appelés par le comité de Salut public, lors de l'examen de cette question.
Vous avez créé hier un comité de Salut public sur de grands principes, vous l'avez composé seulement de neuf membres. Si vous y joignez des commissaires, c'est déjà violer les principes. Je demande la question préalable.
, le jeune. Vous savez que Dumouriez faisait circuler de faux décrets et que les vôtres n'étaient jamais lus aux armées. J'appuie la demande de question préalable sur l'adjonction des commissaires au comité et je propose de décréter qu'à l'avenir vos commissaires seront tenus de proclamer eux mêmes vos décrets à la tête des armées.
(La Convention nationale passe à l'ordre du jour, motivé sur ce que le comité de Salut public pourra appeler qui bon lui semblera. )
. (3). Vous savez que plus de 20,000 hommes de l'armée de Belgique ont quitté leurs drapeaux, pour ne pas obéir au perfide Dumouriez : ces 20,000 hommes sont presque tous arrêtés; je demande qu'on prenne des mesures pour qu'ils rejoignent nos armées.
J'ai un projet de décret sur cet objet; je demande à le soumettre à la Convention.
(4). Je demande auparavant à faire connaître à la Convention le résultat de l'appel nominal pour la nomination des membres du comité de Salut public.
Les citoyens qui ont obtenu le plus grand nombre de suffrages sont :
Rarère, 360 voix.
Delmas, 347
Rréard, 325
Cambon, 278
Jean Debry, 233
Danton, 227 voix.
Guyton-Morveau, 202 Treilhard, 167
Delacroix (d'Eure-et-Loir). 151
peaux, 146 voix. Dubois-Crancé, 96
Lasource, 143 Boyer-Fonfrède, 86
Isnard, 141 Merlin (de Douai), 85
Robert Lindet, 122 Cambacérés, 62
Les citoyens Barère, Delmas, Bréard, Cam' bon, Jean Debry, Danton, Guyton-Morveau, Treilîiard et Delacroix, ayant obtenu la majorité absolue des suffrages, je les proclame membres du comité de Salut public.
Plusieurs membres demandent que les neuf membres suivants soient reconnus comme suppléants.
(1). Le décret en vertu duquel vous avez nommé les membres du comité d'exécution, ne porte pas qu'il y aura des suppléants. Je demande en conséquence que la nomination des suppléants soit regardée comme non avenue.
(La Convention adopte la proposition de Brival.)
, secrétaire, donne lecture d'une lettre par laquelle le citoyen Jean Debry déclare ne pouvoir accepter, pour raisons de santé, les fonctions de membre du comité de Salut public. Cette lettre est ainsi conçue (2) :
Paris,
« Citoyen Président,
« Je serais un mauvais citoyen, si j'acceptais une place que je ne peux remplir. L'état actuel de ma santé ne me permet pas ni de veiller, ni la moindre application, sans qu'au-sitôt je crache le sang. C'est cette seule considération qui m'empêche de me rendre au témoignage de confiance que m'a donné la Convention en me nommant au conseil d'exécution.
« Je vous prie, citoyen Président, d'en prévenir l'Assemblée.
« Signé : Jean Debry. »
(3). Ce n'est pas assez de décréter un comité, il faut le mettre en activité. Je demande que les autres membres, nommés au comité de Salut public, déclarent s'ils acceptent leur nomination; que ceux qui accepteront se réunissent sur-le-champ au lieu des séances du comité de défense générale, pour s'occuper des grands objets de leur mission; qu'à cet effet, le président Delmas et le secrétaire Cambon soient provisoirement remplacés au bureau de l'Assemblée, et qu'il soit procédé de suite, par appel nominal, au choix de nouveaux membres à la place de ceux qui n'auront pas accepté.
(La Convention décrète les propositions de Bréard.) (4)
cède le fauteuil à Garran Couloi, le plus ancien des secrétaires (5).
Un membre, au nom du comité diplomatique, fait un rapport et présente un projet de décret pour ordonner que l'Erguet et le Munsterthal continueront à jouir des avantages attachés à la neutralité helvétique jusqu'à ce que les points en litige aient été réglés à l'amiable et que, pour y parvenir, l'ambassadeur de la République auprès des cantons helvétiques sera chargé de les éclaircir; le projet de décret est ainsi conçu (1) :
« La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité diplomatique, considérant que l'Erguet et le Munsterthal ou Prévôté de Moustier-Grandval, qui faisait partie du ci-devant évêché de Bâle, avaient néanmoins une existence politique particulière qui les rendait en quelque sorte indépendants du prince-évêque;
« Que l'un de ce pays est allié de la république de Brinne, que l'autre est en com-bourgeoisie avec l'Etat de Berne, et qu'ils ont été en conséquence compris jusqu'à présent dans l'enceinte de la neutralité helvétique;
« En approuvant et confirmant l'arrêté du conseil exécutif provisoire du 19 mars dernier, concernant les parties du ci-devant évêché de Bâle qui ont été comprises dans la neutralité du corps helvétique, et dont les relations avec ce corps peuvent etre susceptibles de difficultés;
« Décrète que l'Erguet et le Munsterthal continueront a jouir des avantages attachés à la neutralité helvétique jusqu'à ce que les points en litige, aient été réglés à l'amiable, et que pour y parvenir l'ambassadeur de la République auprès des cantons helvétiques sera chargé de les éclaircir. »
(La Convention adopte ce projet de décret.)
le jeune, au nom du comité de législation, fait un rapport et présente un projet de décret sur le mode de jugement, par les tribunaux criminels, des personnes prévenues d'avoir pris part aux révoltes ou émeutes contre-revolutionnaires ; le projet de décret est ainsi conçu (2) :
« La Convention nationale, après avoir entendu son comité de législation, décrète :
Art. 1er.
« Les tribunaux criminels seront tenus, sous la réquisition des administrations de départements, de se transporter dans les chefs-lieux de district, pour y juger, conformément à la loi du 19 mars, les prévenus d'avoir pris part aux révoltes ou emeutes contre-révolutionnaires.
Art. 2.
« Les jugements seront exécutés dans les vingt-quatre heures, et sans
recours au tribunal de cassation, conformément à l'article 4 de la même
loi du 19 mars.
te Liais directoire» dé départémént férônt ïàire, pèt l'intermédiaire de§ directoires dè distfricfc, toute» lëé diiS|)Oàitiôûs nécëssaiféis à la tenue dès séancès dés tïibunàu* eriîhinéls. Ils ordonnanceront les état» dé frais de voyage et de transport, »ui* le visa dés présidents des tribunaux criminels. » . (ta Convention âdoptè eê projet de décret.)
secrétaire, donne lecture djwîe lettre de.ùohier, ministre de. là justice, $uh prôpes-v'èrbal des .^f/imistràtewrs de la policé, et d'une lettre ae L.-P.-J. -È-gàlïïè, relative a la réclamation fâiiè par cé citoyen contre son arrestation, su? lé fôndcment qu'il fi'ésî pâg .(^itopris hbminàiîyê|ïignt q&Us le Q& tbrét d'hier, ép au il se trouve aàhs Un càs pâr-tiëùliei*, 'dôimne débuté.
Suit la teneur de ces trois pièces : .
Lettre de (rohier, ministre de In justice, à la Convention nationale (l)i.
Paris
à. Citoyen Président,
» ; « |ln-exécution du décret rendu hier par la Convention nationale, portant que tous les individus de la famille des BoUrbqns .seront liiiê ëfiétàt d'arrestation, le citoyen LoUis-Phi-lippé-Jbsfepii-Êéalité. a été mis ën état d'artës-tàti'bn et cbhduit à la mairie jioUr constater l'identité de sa pérsonne.
cc J'çti l'honneur de vous adresser une copie certifiée conforme du procès-Verbal qui a été dressé à la mairie. Vous y verrez qùë le citoyen Egalité regardé le décret comme étranger à, sa personne, en sa qualité de représentant de la nation.
( Lçs égards due à la représentation Nationale m'empêchent de ine rendre juge de ses réclamations. Je lès soumets à la Convention nationale, qui seule peut statuer sur la demande du citoyen Egalité et régler la détermination que le maire de Paris ainsi que moi devons prendre jaour l'exécution de la loi.
« Le ministre de la justice, Ju Signé : Gohier. »
Prochsrverbid^des administrateurs dè là po-liêe de la commune de Paris (2^.
Département de police / commune de Paris.
Le V avril 1798, l'an II de la République.
« Ce jourd'hui. dimanche, 7 avril 1793, l'an II de la République^ huit
meures du matin, par devant nous, administrateurs de police, est comparu
le citoyen Egalité, conformément à un décret de la Convention nationale
du jour d'hier qui nous a été notifié par le mi-
«À lui, demandé ses noms, prénoms, âge, profession, pays dë naissancè et de derhèliïé ;
« A répondu s'appeler Louis-Philippe-Joseph-Egalité* âgé de quarante-cinq ans, né à Sajnt-ÇlQud, département de Seine-ét-Oise. député à la Convention national^ du département de Paris et demeurant rue Saini-Honoré.
« A lui exhibé et notifié le décret de la Convention nationale-qui ordonne l'arrestation de tous leB individus de la famille des Bourbons ;
te Nous a répondu que ce djécret qup nous venons de lui exhiber mérite une explication à pon égard, parce qu'il hë Je désigne pâs h-imjnatiVeinent ei qu'il est dans une classé â .ptyrt, ëtàn| député à là Convention nàtrôûâlé ; pourquoi il croit devoit nOUs requérir de àUs-
f>endre à son égard l'exécution entière de la oi, jusqu'à ce qu'il èfi ait référé à là Convention, ce qu'il va faire sur-le-champ.
« A lui demandé si ses réponses contiennent vérité ;
« Lecture faite a dit que bui, qu'il y pérsiste eib a signé.
« Et avant de signer, nous déclare ledit Egalité qu'il ^n'entend pas que sa comparution puisse nuire ni préjudicier à la représentation nationale dont u se trouve investi, et qu'il n'a entendu comparaître que pour s'en expliquer avec les magistrats du peuple.
« Signé : Louis-Philippe-Joseph Egalité et Louis Rotjlx.
. « Sur dùoî, noUs administrateurs de la policé, disons qu'il sera référé sur-lë-champ au ministre 'dè là jùstibe dé l'interrogatoire ci-dessus, avfec invitation de nous traéér la marche qué nous avons à suivre ét avons signé :
« Signé : Louis Rqulx, Gatjdray t). E. Laurent. m
« Certifié conforme à l'original, « Signé : Gohier. »
Lettre du citoyen Philippe-Egalité à ses collègues de la Convention (1).
A la mairie, le
ft Citoyens mes collègues,
« Il est venu ce matin che? moi deux citoyens se disant l'un officier de
paix, l'autre inspecteur dé là police, qui m'ont présenté une
réquisition signée en vëjriu d'un décret de la Convention pour que
j'eusse à. lès suivre à lâ mairie. Je m y suis rëhdù â l'instant pour
m'éxpliquer avec les magistrats dû peuple. Je leur aï déclaré que
j'étais venu pour conférer avec èux, ét feans deFogéi- aux droits
attachés à la qualité de représentant du peuple dont je suis investi.
Alors ils m'ont exhibé un décret rendu hier portant ces mots : « La
Conventibh nationale décrète qûe tous lès individus de la famille des
Bourbons seront mis en état d'arres-
« Signé : Joseph Egalité. »
(1). Je demande l'ordre du jour, mo tivé sur ce que la Convention a entendu le comprendre dans son décret d'hier soir.
(La Convention passe à l'ordre du jour, motivé sur ce qu'elle a bien entendu comprendre L.-P.-J. Egalité dans le décret qui ordonne l'arrestation des Bourbons.)
(2). Je demande qu'il reprenne son nom d'Orléans ou de Bourbon ; il ne faùt pas souffrir qu'il porte le nom d'Egalité plutôt qu'un autre citoyen,
(La Convention décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur cette proposition.)
Au nom du Comité de finances, je demande que la Convention ajourne à demain la discussion du projet de décret tendant à prohiber la vente du numéraire et à augmenter et favoriser la circulation des assignats.
(La Convention décrète la motion de Cam-bon.)
(3). Yous avez pris hier Une mesuré que vous avez crue nécessaire à la tranquillité publique ; je viens vous en proposer une qui n'est moins intéressante. J e demande, sans inculper personne, qu'il soit donné des gardes aux adjoints des ministres de la guerre et de la marine.
(La Convention décrète cette proposition. )
Vaînè (4). Je demande qu'il en soit donné également à Dumas, ex-législateur, qui est directeur du dépôt des plans de campagne.
(La Convention décrète cette nouvelle proposition. )
(5). Je demande que tous les étrangers, qui ont des places en France, soient destitués.
(La Convention renvoie cette proposition au comité de Salut public.)
Un membre (6) : Je demande que vous met-
{dé Douai.) Cette pi4oposition, faite ainsi d'une manière générale, tomberait sur moi. Il y a trois ans que Philippe-Joseph d'Orléans m'avait donné l'administration en chef d'une partie de ses biens : je m'en suis acquitté sans me mêler des opinions politiques, et sitôt que j'èUs connaissance de là conduite du général Egalité, je pris lé parti de quitter cette administration. J'en fis part à baon collègue Gossuin ; et à mon arrivée ici, j'écrivis à Philippe, pour lui donner ma démission. Il demanda ia me voir ; je m'y suis refusé.
j'atteste ce fait. Merlin m'a dit ne vouloir plus être attaché à un hommè sUr lequel il avait des doutes.
Ce sont les agents secrets qu'il faut atteindre. Je demande que Laclos, l'âme damnée de la maison d'Orléans, soit réintégré dans les prisons.
Cette proposition a été décrétée hier soir.
, le jeune. J'avais demandé qu'on y joignît Victor Broglie, et surtout Sauvans, qui donne à dîner à beaucoup de députés, et qui est de la maison d'Orléans.
(La Convention décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur ces différentes propositions.)
fait connaître l'acceptation des huit autres membres nommés au comité de Salut public, et déclàre le scrutin ouvert pour le remplacement de Jean Débry (1).
(La Convention nationale passe à l'appel nominal (2).
(Ô). Je demande à dénoncer Un fait contre le bureau. Sur la proposition de Danton, la Convention a décrété que le pain serait taxé partout et aux dépens au riche. Il n'en est pas fait mention au procès-verbal.
J'ai lu ce matin le procès-verbal et le décret y était bien compris^ le voici.
(Là Convention passe à l'ordre du jour.)
(4). Je donne la pàrole à Lecointe-Puyraveau pour la lecture du projet dé décret tendant à autoriser le conseil exécutif provisoire à prendre sur-le-champ toutes les mesures nécessaires pour que les sofdats de l'armée de la, Belgique, que des manœuvres criminelles et des trahisons évidentes ont déterminés à s'éloigner de leurs drapeaux, les rejoignent sans délai, et que le ministre puisse à cet effet mettre en liberté ceux qui, en exécution de la loi, sont en état & arrestation.
(1) donne lecture de son projet de décret.
(2) en communique un autre sur le même objet.
(La Convention accorde la priorité au projet de Thuriot et en ordonne le renvoi au co--mité de la guerre.)
, secrétaire, donne lecture des lettres suivantes :
1° Lettre des citoyens Lemalliaud et Guer-meur, commissaires de la C convention dans les départements du Morbihan et du Finistère (3), pour annoncer qu'il manque dans ce département des hommes, des vivres, de l'argent et des armes.
(La Convention renvoie cette lettre au comité de Salut public.)
2° Lettre du citoyen Lebrun, ministre de la guerre par intérim, par laquelle il transmet une lettre du général de division Dubouquet, qui annonce nos premiers succès eontre les Espagnols; ces pièces sont ainsi conçues (4) :
« Paris,
« Citoyen Président,
« J'ai l'honneur d'envoyer à la Convention nationale la copie d'une lettre que je reçois du général de division Dubouquet; elle annonce la nouvelle des premières hostilités et des premiers succès de nos armes contre les Espagnols (5).
« Signé : Lebrun. »
Le général de division Dubouquet, commandant l'armée des Pyrénées, en l'absence du
général en chef, au général Beurnonville,
ministre de la guerre.
« Saint-Gaudens, le 1er avril 1793.
« J'ai l'honneur de vous rendre compte, général, que le général de brigade Sahuguet, conformément à l'ordre que je lui ai donné, a fait son entrée dans la vallée d'Arand, hier 31 mars, sur deux colonnes, l'une dirigée sur Foz, et l'autre par le Postillon, et qu'il s'en est emparé. Il est actuellement à Vielle. Je sais qu'il a fait environ 80 prisonniers, dont un capitaine et un lieutenant, et qu'il a pris 60 fusils et 600 cartouches à balles.
« Il n'a perdu que 2 chasseurs, qui ont été tués, et 4 blessés. Rien n'a pu arrêter l'ardeur des troupes, ni la neige, ni les mauvais chemins; ils ont surmonté tous les obstacles en vrais soldats républicains : ce mot seul fait leur éloge. Quand j'aurai reçu les détails ultérieurs, j'aurai l'honneur de vous les adresser.
« Signé : Dubouquet. »
(1) fait connaître que Robert Lindet a obtenu 148 voix, soit la majorité absolue des suffrages exprimés. Il le proclame membre du comité de Salut public, en remplacement de Jean Debry.
(La séance est suspendue à cinq heures du soir et prorogée au même jour sept heures.)
Séance permanente du
présidence de treilhard, ex-président (1).
La séance est reprise à sept heures du soir.
, secrétaire, donne lecture d'une lettre de Carnot et Lesage-Senault, commissaires de la Convention dans le Nord et le Pas-de-Calais, par laquelle ils annoncent l'envoi d'une malle remplie de papiers ayant appartenu à Dumouriez; elle est ainsi conçue (2) :
« A Douai, le
« Citoyens,
« Votre décret du 2 de ce mois, relatif à la trahison de Dumouriez, vient d'arriver au conseil général du département du Nord, et sur-le-champ nous l'avons fait proclamer dans la ville et a la tête de la force armée : nous allons lui donner la plus grande publicité possible. La proclamation que nous avions faite était rédigée dans le même esprit, et nous espérons que cette loi achèvera de fixer entièrement l'opinion, que Dumouriez s'efforce d'égarer par ses émissaires secrets.
( Hier, nous avons fait la visite des fortifications de cette ville, accompagnés des chefs de notre garnison. Nous avons donné tous les ordres nécessaires pour que cette place importante fût mise, à l'instant, à l'abri de toute espèce d'insulte.
« Nous avons fait ouvrir et inventorier, en présence des administrateurs
et des commissaires de la municipalité, la malle du traître, que nous
avons dit avoir interceptée. Elle était remplie de papiers très
importants; mais les pièces relatives à la trahison n'étaient point dans
le nombre de ceux que nous avons examinés; il en est plusieurs autres
qui étaient cachetés, sous bande, et que nous
« Il paraît certain que Dumouriez a conclu une suspension d'armes avec les ennemis; il n'oublie rien pour captiver la confiance de l'armée qui, commence à lui échapper, et qui bientôt, nous l'espérons, sera complètement éclairée.
Les corps administratifs nous ont parfaitement secondés, en général, dans ces moments critiques, et nous ne pouvons nous empêcher de rendre la même justice au général Moreton.
« Les commissaires de la Convention nationale,
« Signe : L. Carnot, Lesage-Senault. •»
Le même secrétaire donne ensuite lecture de l'inventaire de cette, malle, tel que l'ont adressé les citoyens Carnot et Lesage-Senault, commissaires de la Convention dans le Nord et le Pas-de-Calais ; il est ainsi conçu (2) :
Inventaire des effets trouvés dans une malle appartenant au général Dumouriez.
1. Un registre relié en carton contenant divers renseignements et une correspondance relatifs au port de Cherbourg.
2. Différentes cartes de géographie.
3. Les vies des hommes illustres grecs et romains, en deux volumes in-8°.
4. Un atlas relié format ordinaire in-4°.
5. Une analyse manuscrite de différents ouvrages, reliés en carton.
6. Un registre relié en carton vert, portant pour titre : Registre de minutes des lettres écrites par M. Dumouriez, ministre des affaires étrangères, commencé le 18 mars 1792.
7. Un registre, aussi relié en carton vert, contenant différents mémoires et lettres de Dumouriez en sa qualité de général.
8. Six paquets de papier, dont cinq de la grandeur d'un petit in-folio et l'autre de la grandeur d'un petit in-quarto, tous fermés dans de larges bandes de papiers cachetés d'un sceau portant l'empreinte de la figure de la liberté, en légende les mots : République française, et en exergue ceux : Légation de Hollande.
9. Un autre paquet de papiers sous enveloppe, scellé d'un cachet noir,
avec l'adresse et l'étiquette suivantes : « Au général Marassé,
10. Un grand portefeuille de maroquin rouge fermé par une serrure avec l'étiquette : M. Dumouriez.
« Fait à Douai par nous, commissaires de la Convention nationale, présents les administrateurs du département du Nord, ainsi qu'un administrateur du district de Douai et un officier municipal, au lieu ordinaire des séances dudit département, ce 3 avril 1793, an II de la République française.
« Etaient signés les commissaires de la Convention, les administrateurs du département, etc. »
(La Convention renvoie ces deux pièces au comité de Salut public.)
(de Douai) (1). Citoyens, le 5 avril, à une heure après minuit, Vadjudant major Devaux a été conduit à Lille. Ayant été interrogé sur la cause de son voyage, il a montré un ordre conçu en ces termes :
« U est ordonné à toutes les troupes conduites par le général Miaczynski, et qui sont sous les murs de Lille, de se rendre au camp sous les ordres de l'adjudant général Devaux.
Signé : Dumouriez. » Saint-Amand, le
Les administrateurs de Lille n'ont répondu à cet ordre que par la lecture de la proclamation de la Convention qui déclare Dumouriez traître à la patrie.
Devaux a été mis en état d'arrestation, ainsi que Vacher, son domestique. Je propose qu'il soit traduit par devant le tribunal extraordinaire.
Je m'empresse, en outre, de faire connaître à la Convention que 35 milliers de poudre ont été transférés de Cassel à Lille. Les désertions se multiplient dans le camp de Dumouriez; il a dit à tous ceux qui n'étaient pas contents qu'ils pouvaient se retirer. U paraît qu'il a réuni les troupes qui lui sont restées fidèles à l'armée autrichienne.
(La Convention nationale décrète que l'adjudant général Devaux, détenu à Lille, sera, traduit par devant le tribunal criminel extraordinaire séant à Paris) (2).
(3) : J'observe que dans les dernières lettres des commissaires de
Valenciennes (4), il est dit : qu'en vertu des ordres de Dumouriez, des
gendarmes du département du Nord ont arrêté, par méprise, des
commissaires nationaux, au lieu de ceux que la Convention a envoyé
visiter nos places du Nord; je demande que ces soldats, coupables
d'avoir obéi au traître, et les officiers qui leur ont transmis cet
ordre, soient mis en état d'arrestation et traduits par devant le
tribunal extraordinaire de Paris.
Une dêputation de la commune de Versailles est admise à la barre (2).
L'orateur de la dêputation sollicite la prompte exécution de la loi concernant le partage des biens communaux, et des lois qui, en respectant la liberté de la circulation des grains, remédient aux maux incalculables de l'accaparement et de l'agiotage.
répond àl'orateur et accorde à la dêputation les honneurs de la séance.
(La Convention renvoie la demande au comité des finances et d'agriculture réunis.)
Un député de l'administration du Pas-de-Calais ®e présente à la barre (3).
U annonce qu'aussitôt après la réception du décret qui déclare Dumouriez traître à la pa- , trie, les troupes de ligne, les gardes nationales et les autorités constituées ont été convoquées sur la place publique.
du département a harangué les magistrats et les troupes, en ces termes : « Quand il existe une grande trahison, il faut montrer une grande fidélité ; quand la République est attaquée de toutes parts, il faut employer toute son énergie pour la défendre ; quand une secousse violente vient agiter le vaisseau de l'Etat, il faut que tous les bons citoyens mettent la main à l'œuvre pour conjurer l'orage ; quand un traître se démasque, tous ceux qui ne se déclarent pas contre lui sont traîtres comme lui ; quand dans son audace impudente, il dit anathème à la République, tous ceux qui ne crient pas vive la République sont ses complices. Crions donc tous ensemble : vive la République / Faisons plus encore, jurons par le salut de la patrie, et jurons d'une voix unanime de maintenir la République une et indivisible. » Une voix unanime a prêté ce serment, auquel ont répondu des cris réitérés : vive la République ! vive la Liberté !
Le Président!; répond à l'orateur et lui accorde les honneurs de la séance.
(La Convention ordonne l'impression de la harangue du président- du département du Pas-de-Calais et en décrète l'insertion a>u,Bulletin.)
Une dêputation du corps électoral de Paris est admise à la barre (4).
L'orateur de la dêputation dénonce les administrateurs du directoire des
postes, les ac-
observe à la dêputation qu'un précédent décret rendu par la Convention a déclaré qu'elle ne reconnaissait pas de corps électoral hors le temps d'élection, que dans ces conditions il lui était difficile de ne pas passer à l'ordre du jour sur la pétition présentée.
(La Convention passe à l'ordre du jour) (1).
, secrétaire, donne lecture d'une lettre des administrateurs du département de la Meuse (2), en date du 5 avril, l'an II de la République, dans laquelle ils rendent compte d'une manœuvre qu'ils imputent au général Chazot, pour empêcher le recrutement.
(de Verdun) (3). Je demande le renvoi de cette dénonciation au comité de Salut public, qui sera chargé d'examiner la conduite du général Chazot. En mon particulier, je l'accuse d'avoir fait tous ses efforts pour arrêter .lés progrès du recrutement dans le département de la Meuse, et pour jeter le découragement parmi les volontaires, tandis que dans le même moment il annonçait qu'une nouvelle levée de 100,000 hommes était nécessaire, et qu'il requérait 900 hommes au delà du contingent.
J'observe que la réquisition de Chazot était fondée uniquement sur ses craintes de ne pas être en état de repousser l'ennemi, qui semblait menacer cette partie de nos frontières.
Je rappelle à la Convention que c'est Chazot qui a voulu, au mois d'octobre, faire punir les bataillons de Bonconseil et le Républicain.
(La Convention charge son comité de Salut public d'examiner la conduite du général Chazot et de prendre à cet égard les mesures nécessaires à la sécurité publique.)
Lettre d'un commissaire de la Convention dans les départements de la Marne et de la Meuse (4) par laquelle il rend compte du zèle et du patriotisme qui animent ce dernier département. U ajoute que son contingent était rempli avant leur arrivée, ainsi qu'un supplément de 900 hommes, requis par le général Chazot, au delà de ce contingent, et que les dons patriotiques s'y multiplient chaque jour (5).
(La Convention décrète la mention honorable de la conduite des citoyens
du dépàrte-
Des commissaires des ^8 sections de Paris sont admis à la barre (1).
Ils présentent à la Convention différentes mesures relatives à l'habillement et à l'équipement des-volontaires et aux subsistances.
répond à l'orateur et accorde à la députation les honneurs de la séance.
(La Convention renvoie cette demande aux comités des secours et de la guerre réunis. )
Un membre (2) dénonce un abus, dans l'administration des postes, relatif à la franchise. Il demande qu'à l'avenir elle soit supprimée à tout employé de cette administration.
(La Convention nationale décrète que nul commis .employé dans les bureaux de l'administration ou des directeurs des postes ne pourra, sous quelque prétexte que ce soit, jouir d'aucune franchise de port de lettres et paquets.)
, secrétaire, donne lecture ctes trois lettres suivantes :
1° Lettre de Lebrun, ministre de la guerre par intérim (3), par laquelle il transmet à la Convention l'état des dons patriotiques qui ont été faits aux armées de la République par des départements^ des districts, des communes, et par différents particuliers, depuis le premier janvier dernier jusqu'au premier de ce mois : cet état se monte à 7,842 chemises, 21,408 paires de souliers, 6,464 paires de bas, 54 paires de gants, 244 paires de chaussons, 391 bracelets, 3,055 paires de guêtres, 5 paires de bottes, 34 chapeaux, 75 bonnets, 247 havre-sacs, 123 habits, 206 vestes, 99 gilets, 835 culottes, 321 capotes, 214 pantalons, 127 cols, 53 mouchoirs, 2 caleçons, plus 1 fusil, 1 giberne, 4 baudriers, 2 ceintures, 1 panache, 40 aunes et demie de tricot, une cession d'action pour l'indemnité due à cause de la suppression d'un droit de terrage évalué à 3,000 livres; plusieurs communes avaient déjà fourni une quantité de souliers et chemises à l'armée de Custine.
(La Convention décrète la mention honorable de ces différentes offrandes qu'elle accepte et elle en ordonne la mention honorable au Bulltin.)
2° Lettre de Foumier-Thinville, accusateur public du tribunal
extraordinaire, relative à la franchise de ses lettres; elle est ainsi
conçue :
« Citoyen Président (1),
« Il m'arrive de tous les points de la République des paquets non affranchis qui coûtent de gros ports. D'après les nouveaux pouvoirs qui .m'ont été donnés par Particle 2 du décret de la Convention nationale, le 5 de ce mois, ces envois ne vont pas manquer de se multiplier ; cela ne peut se faire sans quelques inconvénients. Dans mon sens, il serait plus expédient de m'accorder le port franc de tous ces paquets, d'autant mieux qu'il faut qu'ils soient remboursés par la trésorerie nationale ; d'ailleurs ces paquets se multiplient tellement qu'il peut arriver que le concierge n'ait pas de quoi les payer, alors il faudrait que je les avançasse ; j'attends, au surplus, la décision d? la Convention.
« L'accusateur public du tribunal extraordinaire et révolutionna/ire. c Signé : Fouquier-Tinville. »
(La Convention nationale décrète que l'accusateur public du tribunal criminel extraordinaire et révolutionnaire établi à Paris, recevra en franchise, par la poste, les lettres et paquets qui lui seront adressés.)
3° Lettre du citoyen Bonnecarrère, par laquelle il déclare n'avoir aucune liaison avec la famille Egalité ; cette lettre est ainsi conçue (2):
Paris, le
« Citoyen Président,
« Je déclare, en présence du peuple souverain, à ses représentants, que je n'eus jamais de liaison directe ni indirecte avec la famille Egalité. Je demande à être interrogé sur cet objet, et surtout que le comité de sûreté générale veuille bien faire son rapport sur le procès-verbal du juge de paix de la section de la Fontaine de Grenelle qui me concerne, ainsi que sur les papiers qui lui ont été adressés par ledit citoyen juge de paix.
« Signé : G. Bonnecarrère, républi-cain jusqu'à la mort. »
(La Convention passe à l'ordre du jour.)
Le citoyen Pépin-Desgrouhettes, à la tête d'une députation d'une section du faubourg Montmartre, se présente à la barre (3).
Il présente, au nom de cette section, un capitaine tyrolien qui a fait serment de se consacrer à la défense de la République.
Le 3 février, il abandonna les drapeaux impériaux et annonça au général
Steingel que 5 bataillons prussiens partaient sur Ru remonde, et que si
le siège de Maëstricht n'était pas poussé avec vigueur et des forces
considérables, les Français seraient obligés de le lever.
Rendu à Aix-la-Chapelle, le tyrolien dénonça les mêmes faits à Miranda qui n'y fit pas plus d'attention que Steingel.
Le pétitionnaire demande que le capitaine tyrolien jouisse du bienfait de la loi qui accorde une pension aux déserteurs étrangers.
Il propose ensuite, au nom de la même section, comme mesures de sûreté générale :
1° Que les murs de Paris et les anciens corps de garde soient rétablis ;
2° Qu'il y soit établi une garde extraordinaire tant que durera le danger de la patrie ;
3° Qu'il soit exercé une surveillance très active sur la rivière ;
4" Enfin, qu'on arrête aux barrières tous ceux qui ne sont pas munis de passeports, ou d'une carte de sûreté, excepté ceux chargés des approvisionnements de la ville de Paris.
répond à l'orateur et accorde à la députation les honneurs de la séance.
(La Convention renvoie cette demande aux comités de la guerre et de sûreté générale, chacun pour la partie qui les concerne.)
(1). Je demande que le déserteur qui vient d'être présenté à la barre, soit gardé à vue, pour être confronté avec Steingel et Miranda. Je dois dire, pour le triomphe de la vérité et pour le salut de la patrie, qu'ayant assisté à l'interrogatoire de ces deux généraux, le comité de la guerre ne leur a fait que" des questions échappatoires.
Je demande que Miranda, Steingel, Miaczynski et Lanoue soient décrétés d'accusation et livrés au tribunal révolutionnaire.
. Le comité de la gurere a fait cet interrogatoire en présence de tous les membres de la Convention qui ont voulu y assister. J'observe que Marat, qui se présente et qui a posé de son fait beaucoup de questions, était libre d'interroger à son aise les généraux dont il est question. S'il ne l'a pas fait, il a eu tort.
Le décret d'accusation demandé par Bentabole n'est pas nécessaire ; il suffit que la Convention entende demain la lecture de ces interrogatoires et qu'elle renvoie, s'il y lieu, les accusés au tribunal révolutionnaire.
(La Convention nationale décrète oue l'interrogatoire des généraux
Steingel et Lanoue, fait par le comité de- la guerre, sera lu demain à
la Convention; que le général Miranda subira demain son interrogatoire
au même comité et à celui de sûreté générale, qui lui en feront aussitôt
leur rapport ; qu'enfin, lecture lui sera donnée demain des pièces
relatives au
La citoyenne Marie-Madeleine Peignet, veuve Derland, est admise à la barre (2).
Elle présente une pétition relative au remboursement d'une charge d'huissier.
répond à la pétitionnaire et lui accorde les honneurs de la séance.
(La Convention renvoie la demande au comité de liquidation.)
Le citoyen de Rubigny, domicilié rue Gen-sier, se présente à la barre (3).
Il dépose sur le bureau, en hommage à la Convention, deux imprimés intitulés : l'un, Observations importantes (4) ; l'autre, Lettre aux Français (5), puis il s'exprime en ces termes (6) :
« Citoyens patriotes, concitoyens de l'honnête Camus et d'autres, je suis beaucoup connu du comité du commerce qui adresse cet ouvrage à l'Assemblée législative ; on verra à la fin de cet ouvrage, intitulé Lettre aux Français combien, dans tous les temps, l'odieuse famille d'Orléans a trahi la patrie. L'histoire fourmille de différents faits abominables. Il y a trois vues importantes : la première : conserver son bien, quoique sorti des mains de la nation en 842 ; la deuxième : rester ici, payer, soudoyer des espions d'émigrés pour soulever le peuple. Je tiens ce fait d'un valet renvoyé de chez lui en 1791 qui me l'a assuré comme vrai. Lors de nos sorties, Egalité père avait déjà soulevé le peuple à la sortie de nos assemblées de l'archevêché et près de la ville, trois à quatre cents personnes criaient! : Vive le duc d'Orléans ! Il sera roi ! le nôtre va être réformé ! J'ai entendu ce fait faubourg Saint-Antoine et vu nombre de fois Egalité père à Versailles. Le jour que le roi fut conduit, il avait un habit puce, un chapeau rabattu et était parmi le peuple, il fut témoin du massacre du garde du corps, il riait ; beaucoup de femmes disaient : criez donc vive le duc d'Orléans, le roi va partir pour Paris ; un homme dit : ce n'est point le moment ; taisez-vous. La troisième raison : que, en 1791 et 1792, Egalité père restait dans l'assurance qu'il monterait au trône. L'on assurait qu'il était l'un de ceux qui, contre-révolutionnaires, ont fait le projet à l'école militaire, lors de l'arrivée des troupes auprès de Paris. Lisez la fin, vous verrez. »
remercie la pétitionnaire et lui accorde les honneurs de la séance.
(La Convention décrète la mention honorable au procès-veifcal.)
Le citoyen Testard est admis à la barre (7).
Il donne lecture d'une pétition relative aux mesures à prendre pour arrêter les dégâts commis dans la forêt de Fontainebleau.
répond au pétitionnaire et lui accorde les honneurs de la séance.
(La Convention renvoie la demande au comité d'agriculture.)
Les citoyens, ci-devant gens de livrée de la demoiselle Bourbon-Condé, sont admis à la barre (1).
Ils exposent à la Convention leur situation malheureuse et demandent qu'on leur vienne en aide.
répond aux pétitionnaires et leur accorde les honneurs de la séance.
(La Convention renvoie la demande, au comité de liquidation.)
Le citoyen Mazuel ést admis à la barre (2).
Il dépose une pétition, accompagnée de diverses pièces, tendant à obtenir une place dans les bureaux de la Convention.
répond à l'orateur et lui accorde les honneurs de la séance.
(La Convention renvoie la demande au comité des Inspecteurs de la salle.)
Les membres du conseil de discipline du bataillon des Sans-Culottes se présentent à la barre (3).
Ils demandent les Invalides pour le citoyen Louis Gérard, aveuglé dans le camp de la Lune, par l'effet d'un boulet de canon.
répond au pétitionnaire et leur accorde les honneurs de la séance.
(La Convention renvoie la demande aux comités de la guerre et des secours réunis pour en faire ràpport dans trois jours.)
Une députation des ouvriers charrons et forgerons, qui ont fourni des affûts de canon, sont admis à la barre (4).
Us demandent à être incessamment payés de leurs travaux.
répond aux pétitionnaires et et leur accorde les honneurs de la séance.
(La Convention renvoie la demande au comité de la guerre, pour se concerter sur cet objet avec le conseil exécutif, pour l'exécution du décret du 20 janvier dernier.)
Les citoyens créanciers des maisons de Sou-bise et de Guéménée sont admis à la barre (5).
Us exposent leur situation malheureuse à l'Assemblée et lui demandent aide et protection en cette circonstance.
répond aux pétitionnaires et leur accorde les honneurs de la séance.
(La Convention renvoie la demande au comité des domaines pour en faire son rapport jeudi.)
Une députation des cordonniers, fournisseurs des souliers pour les
armées, est admise à la barre (6).
répond àl'orateur et accorde à la députation les honneurs de la séance.
(La Convention renvoie la demande au comité des marchés.)
Divers marins delà ville du Havre sont admis à la barre (1):
Us réclament des salaires qu'ils prétendent leur être dus.
répond aux pétitionnaires et leur accorde les honneurs de la séance.
(La Convention renvoie la demande au comité de marine.)
(La séance est suspendue à minuit et demi et prorogée au lendemain matin, 8 avril, à neuf heures.)
a la séance de la convention nationale du
Observations importantes présentées à la Convention nationale par le citoyen de Rubi-gny, tanneur, l'une des victimes du despotisme en 1778, par un emprisonnement de sa personne à la Bastille, et l'un des électeurs de Paris, en 1789 (3).
Citoyen Président,
Le citoyen de Rubigny présente ses observations aux restaurateurs de la liberté française à l'occasion de motions incendiaires faites par des orateurs peu patriotes, qu'il ne veut pas nommer, vu que sa délicatesse est de les préserver de la honte publique ; néanmoins, s'il® venaient à recommencer leurs motions ina lentes, il se ferait un vrai devoir de les dénoncer.
Des gens qui sont susceptibles d'agiter le peuple, qui abusent de sa simplicité, et qui l'égarent dans sa bonne foi, ne peuvent faire entendre à des citoyens que les droits du peuple souverain dépendent de l'égalité de naissance et de droit. L'union fraternelle va devenir le flambeau de la liberté parmi le peuple français, tyrannisé depuis si longtemps sous le joug des lois fiscales et financières du despotisme le plus dur. Toutes ces lois barbares, inventées par des rois despotes, ont cessé leur ridicule, grâce à l'Eternel et aux gens éclairés qui composent l'auguste Sénat qui, à son tour, éclaire tant de citoyens courageux, qui se sont fait un devoir d'instruire et de servir la patrie tout à la fois. Les dépenses, les sacrifices de leur temps, l'abandon de leur commerce, rien ne leur coûte dans cette grande cité, chef-lieu de réunion de tous les empires, où tous les courtisans affreux avaient conçu le fatal projet de l'anéantir. Oh ! perfidie de la noblesse, du
clergé, de la magistrature, de tous les conseils du roi, des ci-devant princes, ducs, marquis, barons, financiers et intendants des finances. Il a fallu du courage aux premiers électeurs de Paris, en 1789, où tous ces bons citoyens, choisis par le peuple pour la défense des droits de la nation, sont entrés dans les plus grandes entraves. Combien d'intrigues ont été dévoilées, qui ne tendaient qu'à ruiner le royaume et le faire culbuter ! C'étaient toujours par les besoins que ces vampires voulaient faire souffrir les peuples !
Dès l'année 1788, les agents du despotisme s'aperçurent que le peuple allait, comme il est prescrit par le droit de nature, s'élever à sa hauteur, et réclamer des droits que l'on n'aurait jamais dû lui usurper.' En 1789, que ne firent pas ces infâmes satellites ministériels ! Une trame ourdie fut concertée pour mettre le peuple dans la plus grande détresse, et le réduire à la famine. L'aristocratie prétendit punir le peuple et le retenir sous le joug. Enfin d'autres manœuvres scélérates ont été mises en usage; le numéraire, qui était en circulation dans le commerce, fut enlevé ; les membres aristocratiques firent des accaparements considérables en denrées et marchandises, qu'ils firent sortir du royaume. Ces accaparements furent triplés aussitôt que notre papier-monnaie fut mis en circulation. La contrefaçon des assignats, dernière ressource de l'aristocratie expirante, fut la première cause du surhaussement de toutes les denrées. L'émigration, qui prouve jusqu'à l'évidence, leur lâcheté, leur trahison perfide envers la mère patrie, les a forcés à employer tous les moyens possibles pour renvoyer, dans le royaume, ces faux assignats, en enlevant nos denrées et nos marchandises à un très haut prix.
Ges perfides ont osé publier, en 1790 et 1791, que la contre-révolution arriverait par la coalition de toutes les puissances contre la France. Les matières premières du commerce, qui alimentent les fabriques et manufactures, sont montées tout à coup.
Les sangsues, en 1789 et 1790, disaient : Payez-nous en argent, et vous aurez dix pour cent de meilleur marché ; langage que tous les étrangers nous tiennent encore aujourd'hui. Voilà la véritable cause du haut prix de l'argent, Ceux qui avaient des assignats contrefaits, achetaient l'argent et la marchandise à tout prix. Le versement de toutes les marchandises mises au détail dans le commerce, a causé une augmentation considérable. Alors l'ouvrier, payant toutes les denrées plus cher, a exigé une augmentation de salaire pour ses journées. Il a fallu, d'après cela, que tous les consommateurs, fabricants et marchands, se ressentent de eet accroissement. Les agitateurs turbulents ne cessèrent de les égarer. Quelle en fut la raison ? Us dirent : J'ai besoin d'être placé; pour cet effet, il faut que je rampe, que je fasse ma cour au peuple. Et telle est la conduite de la plupart des agitateurs !
Il faut que tout bon citoyen sache que le vrai patriote, que l'homme juste, éclairé et moraliste, cherche toujours à donner des conseils sages et raisonnables pour le bien général.
Combien de vertueux citoyens, très éclairés, ont cessé de se rendre dans les sections de leur commune, vu les tripots odieux qui se commettent pt,r ces perfides agitateurs ! Enfin, il est prouvé que, pour un sujet indigne de
la confiance, ces agitateurs, qui n'étaient point connus dans leurs sections en 1790 et 1791, sont venus s'y réfugier ; et quel en est le motif, la peur, toujours mêlée d'un sentiment de'crainte, et non celui d'un vrai patriote ! L'on en citerait en quantité ! mais je me vois néanmoins forcé d'en citer un exemple (1), en invitant les sections à en faire de même.
Des cabaleurs et des agitateurs veulent faire croire au peuple que les marchands vendent avec usure ; ces odieux dénonciateurs osent inculper le commerce entier ; ils ne sont, ces hommes bornés et agitateurs, ni fabricants ni marchands ; ils n'ont aucune connaissance des détails politiques du commerce intérieur et extérieur ; ils ne savent pas que c'est en étudiant les arts et métiers, que c'est en les professant, que l'on apprend à connaître tous les détails du commerce, seules ressources qui font les bases sociales et les revenus des nations, qui occupent tous les bras oisifs et qui donnent une valeur à l'industrie et au commerce national. Sera-ce le peuple peu aisé qui tirera de l'étranger, de nos colonies, de fortes parties de marchandises en tout genre, et qui courra les risques du commerce maritime? Ce sont ces forts spectateurs qui s'associent, que l'on nomme à présent et vulgairement accapareurs ; ce sont ces couragux commerçants qui donnent tous leurs soins aux débouchés et aux productions territoriales de l'industrie commerciale de la France.
Peuple parisien, toute l'Europe connaît votre courage et votre fidélité ; c'est vous qui avez fait le premier pas vers la liberté ! ne souillez point cette haute réputation que vous avez acquise ; ne vous laissez plus égarer ; souvenez-vous que nous formons une République, et que nous devons tous jurer d'être fidèles aux lois que nous faisons par l'organe de nos délégués, et que nous ne devons jamais parler que le langage de la vérité et de la raison.
Le commerce, et tout genre, éprouve des vis-sicitudes, occasionnées par notre sainte révolution; ces variations inévitables sont causées par diverses causes inattendues; variations d'achat, de rareté, défaut de numéraire, dépenses excessives portées sur l'industrie. Un homme, sans connaissance, a osé dire que le haut prix des souliers était occasionné par les tanneurs, et qu'ils profitaient de ce haut prix; cela est faux. Il a osé dire encore au peuple que les tanneurs payaient ci-devant huit sols par livre de droit sur chaque livre de cuir; tandis qu'il n'y avait que deux sols portés par l'édit de création (août 1769.) Il n'égarait le peuple que de six sols par livre. Voilà un échantillon mensonger de l'orateur.
Un besoin d'Etat exigea un impôt sur le cuir, de deux sols par livre; ce revenu donnait annuellement plus de six millions par an, et il en dura trente. La forme abominable de lever cet impôt, avec les dilapidations, coûtèrent au royaume et aux fabriques nationales, y compris la perte de notre commerce avec l'étranger, la somme totale de deux cent quarante millions (2).
Un travail assidu de recherches, par des voyages que je n'ai cessé de faire dans le royaume, m'ont mis à portée d'instruire le ci-devant roi, à qui je n'ai pas. dissimulé, à lui-même, l'état de délabrement dans lequel se trouvaient les tanneries nationales de France, et en lui objectant que cet objet de commerce était très important, et qu'il s'élevait, avant l'impôt, de trente-cinq à quarante millions. L'étranger, dans ces circonstances, a profité de nos malheurs, et s'est enrichi de nos dépouilles, par l'inertie du ministre, qui, pour avoir osé l'instruire en faisant imprimer diverses vues d'amélioration, me fit arracher du sein de ma famille, composée de onze enfants, pour me camper à la Bastille.
Laissons de côté ces exactions commises par cet être méprisable, et parlons du prix des cuirs.
Puisque l'on accuse mal à propos les tanneurs, je vais observer que depuis dix à douze années le prix des cuirs, chez le boucher, a beaucoup augmenté; en 1765 et 17.66, je payais vingt-trois et vingt-quatre livres de cent pesant de cuir au boucher, et il a monté à vingt-six, vingt-huit et trente livres pendant sept à huit années. A présent, le boucher le vend soixante à soixante-quatre livres le cent pesant; il y laisse les os dans les têtes, la crotte et les cornes, ce qui fait un doublement de prix. Ce n'est donc point le tanneur qui a porté ce haut prix aux cuirs, quoiqu'il soit obligé de perdre sur l'huile, le dégras, le tan et autres matières, et même d'augmenter le prix des journées pour la fabrication; c'est le boucher. Jamais, de mémoire d'hommes, aucune marchandise n'a éprouvé semblable surhaussement. Le cordonnier étant forcé d'acheter très cher, et de donner le double pour façon à l'ouvrier, occasionne aussi un renchérissement Les cuirs verts et ceux fabriqués, enlevés du royaume par les satellites des émigrés en 18 mois, ont occasionné cette disette que j'avais prévue, et que je ne cesse de prêcher depuis trois années (1). J'ai été forcé de faire venir d'Espagne, de Russie, de Suède et de Hollande, des cuirs verts pour mes fabriques; cependant il se tue à Paris, par chaque semaine, 2,500 à 3,0Û0 bœufs et vaches. Quand tout serait fabriqué, ce qui peut se faire, il faudrait encore pour la consommation, plus de 20,000 peaux du dehors.
J'ai démontré à la commune de Paris, l'année dernière, qu'il était d'un© nécessité absolue de faire un règlement général d'approvisionnement de cuirs pour cette capitale, vu qu'elle en a un besoin urgent. Je désirerais aussi que les 48 sections, veuillent s'occuper de cet important objet. Je déclare que si l'on ne s'en occupe pas promptement, sous deux ou trois, mois, la capitale manquera de cuirs, et que chaque ville devant s'occuper aussi de son commerce et de ses approvisionnements, en fasse de même.
Il été consommé une très grande quantité de cuirs depuis deux années, pour l'équipement de toute la force armée. Cette capitale se
trouve dépourvue de cuirs par un très grand défaut d'administration municipale, et d'hommes peu éclairés sur l'objet des subsistances et approvisionnements nécessaires, surtout dans le moment actuel. Enfin depuis le commencement de la Révolution, certaines personnes n'ont cessé d'agiter le peuple, en désignant des commerçants honnêtes, comme des accapareurs, ce qui n'a pas peu contribué à mettre un désordre affreux dans le commerce, et décourager le spéculateur. Le commerce ec l'agriculture méritent pourtant l'attention la plus sérieuse, et nécessitent de grandes considérations ; elles sont, comme deux sœurs jumelles, inséparables, faisant ensemble l'objet principal de nos besoins; car j'ai démontré à l'Assemblée nationale, l'abus énorme de tirer annuellement de l'étranger pour six à sept millions de blé chaque année, ayant, dans le royaume, plus de huit cent quarante mille arpents de terre incultes, qui peuvent se mettre en valeur. Il est honteux, pour un peuple instruit et éclairé, de payer annuellement plus de deux cent trente millions à l'étranger, pour des denrées et marchandises à eux achetées.
J'ai dit des vérités importantes à l'Assemblée, des notables, tenue à Versailles en 1787, où Calonne (1), cet ex-ministre, fit donner contre moi un mémoire au ci-devant comte d'Artois, disant que je n'étais pas membre de l'Assemblée des notables, et que, par cette raison, je devais me retirer. Les ci-devant duo de Nivernais et Charast, le procureur général du parlement de Paris, ont insisté pour que je reste. Dans l'ancien régime, il ne fallait pas instruire les possesseurs de places; car l'on fuyait les lumières des patriotes. La municipalité a commis des fautes graves dans ses opérations, en ce que personne ne s'est encore mêlé ni du commerce, ni de l'administration de la police de cette capitale; il y a une désorganisation totale; elle ne rend aiicun compte aux sections, ni au peuple; pourquoi n'en disent-ils pas les raisons ?
Il y a quelques années que 75,000 bêtes à cornes sont mortes et d'autres assommées par l'ignorance du docteur Vicq-d'Azir, envoyé par ordre du gouvernement dans les provinces méridionales; il a fallu que- toutes les provinces fournissent des élèves; j'ai seul combattu et prouvé l'abus d'enterrer les bêtes,à cornes avec leurs cuirs, suif, etc., et les ministres, pour s'en convaincre, ont fait faire des expériences d'après celles que j'avais faites.
Depuis notre révolution, l'empereur a défendu, sous peine de mort, de ne laisser sortir de son royaume aucune bêtes à cornes, dont nous en tirions une grande quantité, ainsi que plus de 30,000 moutons qui venaient également garnir nos marchés de Poissy et de Sceaux. La Souabe, l'Alsace et la Lorraine, ne nous en envoient plus : les marchés de Sceaux et de Poissy se dégarnissent par les enlèvements de bœufs pour les armées. C'est toujours la forte consommation de la denrée qui sert de règle et de base-à son prix journalier; c'est une vérité connue : quant aux subsis-
tances, il faut étudier la marche et contremarche des spéculations en blés et farines; je l'ai vue en 1790, à l'Ecole militaire, où j'ai été envoyé, en qualité de commissaire de ma section. Il serait trop long de calculer l'objet-essentiel qui intéresse toutes les parties du commerce de la République; c'est cependant une vérité importante, qu'il faut que tous les citoyens d'es départements s'instruisent. Le prix du blé, mesure de Paris, peut se vendre, par le fermier, depuis 24 livres le setier, 1blé métiel, et 25 et 26 livres le bon blé; je conviens tjUe le haut prix de ferme donnera peu de bénéfice au laboureur; il doit se prêter aux circonstances, en garnissant toujours les marchés; cependant, il faut que le laboureur ait la liberté de vendre chez lui; la liberté est l'âme du commerce, et il serait ridicule d'empêcher un laboureur de vendre du blé aux habitants de son endroit et à deux ou trois lieues de son arrondissement, même aux boulangers; ces décisions ont été faites par des avis de députés du commerce. Il existe encore des approvisionneurs de blé et subsistances que l'on ne connaît pas encore; il faut qu'ils soient connus, puisqu'ils sont payés par la nation.
Que de réflexions se présentent à la mémoire du patriote, qui déplore le sort de la patrie, pour lequel il a fait des vœux les plus sincères pour l'obéissance aux lois et au rétablissement de l'ordre social et fraternel de tous les bons citoyens qui se sont voués à la chose publique. Enfin, n'était-il pas honteux de voir l'insolence des traitants, leur luxe et leurs dissipations? Combien de jouissance le roi ne possédait-il point? Tous les courtisans, les pensionnés du livre rouge ruinaient tous la République, par la tyrannie et le mauvais exemple. Les vies des rois, tirées de l'histoire, et au hasard, vu qu'ils ne méritent aucun Ordre, font frémir. Clovis fut teint du sang du peuple; Louis XI fut un meurtrier; Charles IX, ses horribles cruautés sont connues; Henri III se déshonora par ses débauches; Louis XIV, fut un des plus grands tyrans; Clotaire, Chilpéric, Dagobert et autres, leurs débauches ne sont malheureusement que trop connues.
Eh bien, citoyens ! voici ce qu'étaient les nobles, des cœurs lâches, des adulateurs; le clergé, des hommes qui étaient soudoyés, salariés, et qui avaient la bassesse d'écrire les • vies des rois, de faire leurs oraisons funèbres. Combien de temps ne s'est-il pas écoulé où ces despotes jouèrent la crédulité des peuples? Sous Charlemagne, c'était le règne des brigands; beaucoup de nobles ont été décolés pour Avoir volé et assasssiné sur les routes; leurs châteaux étaient des repaires de brigands; et il n'y avait qu'eux qui avaient le droit d'avoir des armes; ils désarmèrent toutes les campagnes; et par là-dessus il fallait des éloges à ces messieurs ci-devant rois, qui n'étaient, sous la première dynastie, que des capitaines qui recevaient les ordres de la nation.
Enfin, sous Louis XIII, la noblesse se révolta; la plus forte révolte de ce temps fut celle de Monsieur, frère du roi, et des seigneurs de son parti. Les seigneurs se soulevèrent contre Louis XIII; le prince de Condé soutint la guerre de la Fronde. Louis XIV, ce despote, pensa différemment; il enchaîna la noblesse par des bienfaits et des espérances. La cour fut le centre des grâces et des pen-
sions de toutes espèces; Louis XV et le ci-devant Louis XVI les ont conservées. Voilà l'ignorance des rois despotes, peu instruits. A peine Louis XIV et Louis XV savaient-ils lire à 15 ans. Les courtisans aimaient que les rois fussent ignorants; qu'ils aient eu plutôt des vices que de la sagesse; c'était le moyen de les corrompre et de les diriger à leur fantaisie. Sous les règnes de Henri III et Henri IV, quel brigandage la noblesse ne commît-elle pas? Sous Louis XI, vingt-six nobles ont péri par la main du bourreau, pour vols, brigandages, révoltes et conspirations; ils étaient tous de la même famille. En 1592 l'on décapita quatre seigneurs qui étaient coupables de vols. En 1602, furent rompus vifs trois seigneurs, qui avaient avec eux des brigands qui assassinaient sur les routes et ravageaient les campagnes. Le 28 avril 1604,. cinq gentilhommes de 17, 20, 21, 26 et 32 ans, furent exéeutés en place de Grève, pour vols de grande route. En septembre 1608, 400 gentilhommes ravageaient la Bretagne, le Poitou et la Saintonge; 83 furent pris et exécutés en place de Grève. Le rapport fait aux Etats généraux de 1614, contient beaucoup d'autres atrocités de la part des nobles, même de famille de ci-devant princes, volant la nuit les passants sur le Pont-Neuf. En 1369, les nobles s'étant réunis en force, firent le commerce de blé du royaume, qui était défendu. Aucune cour de justice ne pût arrêter ce brigandage exercé contre le peuple. La noblesse refusa de payer les impôts, disant : les rois ont affranchi* la noblesse. En 1408, le duc d'Orléans avait appelé les Anglais à Paris. Le roi arma contre le ci-devant duc et le fit assassiner. Eh bien ! vous voyez dans ce récit un tableau du pouvoir tyrannique des anciens nobles, tous gratifiés des rois, et pos-sessionnés des biens domaniaux, qui servaient de revenus à la couronne.
J'ai démontré à la Convention l'origine des biens de la noblesse, qui sont véritablement sortis des mains de la nation; les usurpations de ces biens sont aussi réelles que ceux du ci-devant clergé : j'ai démontré à l'Assemblée nationale de 1792, un traité de confédération passé avec l'Empire, en octobre 1642, qui défend toute association, ligue et intelligence entre les princes français et ceux de l'Empire. Un duc d'Orléans, un duc de Guise, et un duc de Bouillon, ont été accusés d'avoir des intrigues secrètes contre le repos de la France, et étaient avec d'autres conspirateurs. Ce duc étant à Bruxelles, envoya l'abbé de la Rivière pour demander grâce au roi, le roi répondit : « Us se sont séparés de'la fidélité, de toute obéissance, et ont offensé l'Etat, qui n'usera d'aucune clémence. » Ce traité se voit au registre du parlement de Nancy, 16 octobre 1643.
Vous voyez, citoyens, que nous ne devons pas, d'après toutes les cruautés commises par tous ces despotes sanguinaires, et à qui nous ne devions pas même l'hospitalité, nous séparer, et que nous devons être pleins de courage pour terrasser nos ennemis; l'honneur et la vertu du Français nous le commandent; et par dessus tout, aimer l'ordre social et l'égalité.
a la séance de la convention nationale du
Lettre aux Français, à nos frères de l'empire et à ceux de tous les autres pays, envoyés à LêopoUl, en septembre dernier, par de Ru-bigny de Berteval, l'un des électeurs de la ville de Paris, en 1789, commissaire notable de la section des GobeTins, tanneur de la même ville et ancien prisonnier de la Bastille (2).
La cause de la détention du sieur de Ru-bigny, le patriote, l'ami des arts, du commerce et de la liberté du peuple français, était pour avoir dénoncé au gouvernement l'abus de l'impôt sur les cuirs.
c L'abbé Terray, contrôleur général, en 1772, avait publié une loi qui défendait d'écrire sur aucune partie d'administration et de finance; lui, avec le ruineux duc de Choiseul, ministre de la guerre, avaient accaparé, pendant deux années, presque tous les blés du royaume avec l'argent de l'Etat; il y eut des immenses quantités de farines perdues. L'abbé Terray les fit rebattre, les fit manger au peuple et à tous les dépôts de pauvres qu'il avait formés. L'abbé Terray causa la mort à plus de 250,000 personnes, par la mauvaise qualité des farines envoyées dans le royaume. Voilà l'horreur des anciens ministres qui étaient bien avec les maîtresses de Louis XV. Croirait-on que de Rubigny a dénoncé, l'an dernier, un des élèves de Terray et de Choiseul, encore à la tête des subsistances, à l'Ecole militaire, devenu puissamment riche?
« M. de Vergennes (ce dernier était ministre de la maison du roi), l'ami de M. de Maurepas, n'ignorait pas ce tripot ; ils répandirent tous trois une fausse nouvelle au conseil du roi, disant que le commerce et la bourse avaient de grandes eraintes^ parce que des particuliers, assez hardis, se mêlaient de faire des projets pour donner une autre forme au gouvernement. Le ruineux Choiseul endetta l'Etat de plus de 16 à 17 millions, et son château de Chanteloup, près d'Ambroise, a été bâti et payé par les deniers du peuple. Ce château coûta 8 à 9 millions; il devrait rester à la nation. Demandez à M. de Pen-thièvre, qui l'occupe, de qui il l'a acheté, à quel prix, et où les fonds ont été versés? L'abbé Terray ruina l'Etat et la fortune de beaucoup de bons citoyens. Un jour, je lui présentai un mémoire important de détails. Il me dit : « Je vous défends de le faire paraître. » Il m'écrivit une lettre aussi dure que celle que l'abominable Calonne m'écrivit en 1787. Deux mois avant l'Assemblée des notables, lettre de menaces; ainsi se passaient les choses dans l'ancien régime du gaspillage. C'est d'après des projets d'utilité que j'avais donnés, qui déplaisaient, que les deux abominables hommes, Amelot et Le Noir, me firent enlever au milieu d'une famille de onze
enfants, et me firent conduire dans ces horribles cachots de la Bastille, où le chagrin s'emparait de l'âme. Enfin, j'étais l'ami de MM. Mirabeau le père, de l'abbé Beaudeau et de beaucoup d'autres. Les bons projets d'amélioration pour l'Etat étaient défendus aux patriotes; car quiconque voulait éclairer sa patrie par de bons conseils, devenait suspect aux yeux des ministres, et il ne fallait qu'attendre l'événement d'être conduit à cette inexorable Bastille, si redoutable aux honnêtes gens qui se vouaient au bien public. L'oppression du peuple était à son comble ; toutes les parties de commerce souffraient beaucoup, enfin les Français tourmentés, vexés, avilis depuis plus de trente ans, sous le règne odieux de Louis XV, et de la dissipation du revenu public, provenant du travail du peuple, les ministres gaspillaient, au préjudice des grands besoins de l'Etat, ces dépenses énormes avec des maîtresses, des partisans de la cour, qui avaient part au gaspillage, et obtenaient des pensions injustes que le peuple payait. Tel était le règne de Louis XV, qui était ci-devant de bon caractère. Le feu dauphin, son fils, père de Louis XVI, avait déjà fourni un plan de changement pour les affaires du royaume. Ce plan, assure-t-on, a été remis à Louis XVI. Après la mort du dauphin, son père, personne n'a plus connu le brigandage de la cour que les Jésuites, etc.
« La France était écrasée d'impôts; l'insolence des ministres, leurs menaces et celles des intendants, les terribles emprunts de Louis XVI, à la sollicitation de Necker; ces emprunts accumulés, ruinèrent presque le royaume. Enfin, en 1784 et 1785, le conseil des finances vit bien qu'il était nécessaire de former quelque changement à l'Etat. Ce conseil se conféra, en 1787, avec M. de Calonne, ministre adroit pour lui. Ce ministre paya des vieilles dettes énormes qu'il avait contractées, et s'est enrichi beaucoup. Il aurait ruiné, à lui seul, le trésor public par sa dépense. Le conseil avait déjà adopté les administrations provinciales, ouvrage de M. Turgot et du célèbre citoyen M. le Trosne, avocat du roi à Orléans; lors de ces administrations provinciales, qui furent tenues dans la province du Berry, l'archevêque de cette ville fut nommé président; il s'aperçut que dans cette assemblée de patriotes, il allait être question de faire payer la noblesse et le clergé; mais on assure qu'un membre du Parlement de Paris dit : « Cette assemblée ne tend rien moins qu'à culbuter l'ordre qui règne dans le gouvernement ». Il était question, dans cette assemblée, de réduire, de réviser les lois, de refondre les finances, de percevoir l'impôt par province.. Les délicieuses assemblées provinciales furent abolies; et, en 1787, M. de Vergennes et M. de Calonne dirent à M. de Maurepas qu'il fallait voir comment le roi et son conseil entendaient porter remède au désastre ruineux de l'Etat. Le roi, qui précédemment avait déj* établi un comité de finances, ne se borna pas là. En 1787, il assembla les notables pour sonder la grande plaie de l'Etat. Chaque ministre, chaque intendant cachait le mystère du vrai. Cette assemblée décida d'assembler les provinces ou du moins leurs représentants. L'assemblée des Etats généraux fut convoquée
par ordre du roi; il prononça un discours à son ouverture qui plut beaucoup. Les ennemis de l'Etat, émigrants, vagabonds, fugitifs, reconnaîtront qu'il est de vérité que le roi, d'accord avec son peuple, ont reconnu la nécessité des assemblées nationales pour le bien du royaume. Le roi, depuis son avènement au trône, avait promis à son peuple de détruire les abus; il voulut reconnaître les lois fondamentales de la monarchie, rétablir l'ordre public par de nouvelles lois, dont il a déclaré ne vouloir régner que par elles; il a senti, avec l'Asselmblée nationale, la nécessité de permettre d'écrire et d'imprimer, afin que chacun puisse manifester sa pensée.
« Les émigrants disent que le roi n'avait pas le droit d'accepter la Constitution; ils se trompent, il a demandé que tout citoyen, sans distinction d'état, rang et naissance, payât le tribut foncier comme le peuple; tel que Louis XII, roi de France, le père du peuple, le modèle des rois, l'avait proposé. Louis XVI demanda que l'on tirât le meilleur parti dés biens du domaine. En 1787, Louis XVI consentit au reculement des barrières du royaume, et que l'on examinât l'impôt du sel, du tabac et les droits des aides.
« Le roi demanda aux Etats généraux que l'on s'occupât de l'administration de la justice, dont le peuple se plaignait depuis longtemps. Eh bien ! l'aristocratie toute fulminante dans son émigration et ses abominables complots, apprendra que le roi, avec le peuple et l'Assemblée nationale,, n'avaient pas leurs pouvoirs, n'avaient pas le droit de changer la Constitution vicieuse de l'Etat sans leur consentement. Que sont ces nobles, qu'étaient-ils à leur origine 1 Des hommes nés dans l'Etat sans prérogative de la divinité, mais bien, la plupart, des valets, des rois et des provinces; enfin, des protégés, des courtisans à la cour; d'autres se sont fait reconnaître par leurs sujets, car les premières dynasties du royaume parlent des barons et de leurs sujets. Les registres du parlement de Paris ont donné des éclaircissements sur la noblesse. Combien de gens de basse extraction jusqu'à des états autrefois reconnus vils, se sont fait annoblir sans avoir jamais rendu aucun service à l'Etat; voilà les abus, etc; et l'aristocratie émigrante ose se plaindre, réclamer des droits, des privilèges. Les hommes sont égaux aux yeux de la loi. La noblesse, le elergé, la finance, l'ancienne magistrature osent dire que le roi ayant accepté, signé la ■Constitution, cela tend à dégrader la royauté; c'est une fausseté évidente. Le 26 février 1783, le roi s'occupait déjà à projeter des grands changements dans l'Etat; il créa un comité particulier, sous le nom de comité des finances, composé du chancelier, du garde des sceaux, des principaux chefs de son conseil, de son ministre des finances, de plusieurs membres de la chambre des comptes, d'un intendant et ordonnateur, afin que tous lui rendent des comptes. Eh bien ! messieurs les fugitifs, le roi aima et voulut le bien dès son enfance. U existe des particularités d'économie, de sa part, qui sont connues; jamais il ne fut personnellement dissipateur du revenu public ; il a été trompé y l'on a employé des moyens malhonnêtes pour le tromper; il est le père d'un peuple obéissant et soumis.
-« Le 17 juin 1789, l'Assemblée nationale, de concert avec le roi, a fixé le principe de la régénération française. Le roi fit une réponse, le 21, à l'Assemblée, qu'il désirait qu'on s'occupât de l'examen des causes qui produisent dans les provinces du royaume la disette qui les afflige; ce fut sous la présidence de M. Bailly, et de M. Camus, secrétaire à réassemblée nationale.
« Le 6 juin 1789, une députation fut envoyée vers le roi pour divers objets intéressants. Le roi répondit : « Je reçois avec satisfaction « le témoignage de dévouement à ma personne « et d'attachement à la monarchie des repré-« sentants du tiers-état de mon royaume. Je « vous recommande par-dessus tout de se-« conder promptement, par un esprit de sa-« gesse et de paix, l'accomplissement du bien « que je suis impatient de faire à mon peuple, « ëfc qu'il attend avec confiance de mes senti-« ments pour lui. »
« Il est vrai qu'un souverain doit être attaché au peuple; il lui doit assistance et protection; il doit faire un bon usage du revenu public, économiser, si faire se peut, pour servir au besoin et pour la défense de l'Etat qui lui est confiée. Tels sont les devoirs des rois : de maintenir le meilleur ordre possible dans leur royaume, de ne pas tenter la guerre contre ses voisins sans de puissants motifs. La guerre dépeuple la terre d'hommes nécessaires et ruine les contribuables des deniers publics. Un grand peuple, comme la France, a toujours de grandes ressources, lorsqu'il est conduit par l'honneur et pour le bien de la patrie; il est de nécessité d'assurer à un grand peuplé de bonne lois; telles que Léopold en a faites lorsqu'il était grand-duc de Toscane. Le prince Margrave de Bade l'a de même imité dans ses Etats. Un corps social doit avoir de grandes vues; un projet n'est rien s'il ne s'occupe point à faire le bien; l'humanité prescrit aux rois la justice, la douceur et la modération.
« C'est la sagesse suprême qui établit l'ordre parmi les hommes; la vertu et la justice des rois sont l'unique rempart pour les mœurs publiques.
« Un citoyen qui cache la vérité à sa nation est coupable de trahison; l'honneur soutient le patriotisme, la concorde et l'union; les grandeurs humaines sont dans la vertu et l'amour de la patrie; tous les enfants de l'Etat doivent fidélité à la nation; la cour brillante et estimable d'un roi est de chasser tous les courtisans et s'attacher des savants et de bons négociants, etc; car la finance a ruiné le commerce du royaume.
« La crainte de la justice divine, après la mort, force l'homme à se rendre heureux, à aimer ses concitoyens et à bien servir sa patrie.
« Un royaume bien gouverné est le modèle d'une grande famille qui prospère.
« On ne peut se dispenser de rapporter ici de beaux traits d'humanité qui font honneur à Henri IV, roi de France; il aimait, comme Louis XVI, beaucoup son peuple. Henri disait à son respectable et vénérable ministre, le grand Sully : « J'ai reçu hier un projet ten-« dant au grand remède de rendre mon peuple « heureux; et pour le bien de l'Etat, je viens « vous consulter (son ministre était son ami) ;
« je vais envoyer ce projet au conseil pour « l'examiner. » La réponse du conseil était que, c'était le projet d'un fou, qui tendait à renverser toute la finance, seule ressource du revenu de l'Etat. Le roi répondit : « Eh bien ! « vous tous, qui m'avez paru être des sages, c vous m'avez tous trompés; je vais essayer de « ce projet, qui doit rendre mon peuple à son « aise. » Car l'assassinat de Henri IV, par Jean Châtel, a eu de puissants motifs. Châtel a déclaré qu'il y avait plus de huit mois qu'on l'avait sollicité. Toute la France prit le deuil pour ce grand roi, père du peuple. A sa mort, toutes les églises et les places publiques de Paris étaient baignées de larmes. Les magistrats, revêtus de leurs costumes, allaient dans les places et les églises consoler le peuple.
« Eh bien ! peuples de tant de pays, frères, amis et concitoyens, vous ne deviez pas ignorer combien le peuple français était oppressé, accablé depuis très longtemps, du poids énorme d'une quantité d'impôts et de mauvaises lois bursales, presque toutes créées par la finance; lois dures, gênantes; enfin le bonheur public et la liberté étaient étouffés par la finance et le despotisme ministériel le plus cruel. L'Eternel enfin, maître de tout, a voulu qu'à tant de maux, il fût apporté un remède prompt, qui remît au peuple tous ses droits; car le soutien de tous les Etats, la force publique sont dans les mains du peuple; lui seul donne toutes les productions territoriales et commerciales seule et unique ressource qui alimente toutes les nations. Il y a donc eu une pressante nécessité reconnue par le roi de France et par son conseil, et par M. de Galonné et M. de Vergennes; ces deux derniers étaient les principaux ministres de Louis XVI qui voyait la détresse alarmante de l'Etat ruiné par les privilèges des nobles et du clergé, par les pensions, par la finance, par l'accumulation d'une dette énorme, incalculable, contractée par Louis XV. Louis XVI fit comme Henri IV; il demanda conseil, à Compiègne, en 1775, à M. Turgot, son premier ministre alors. Ensuite, en 1786, à son conseil, à ses ministres, la revision et les changements nécessaires à tout ce qui était abusif «ontre le peuple. Ce plan préliminaire a commencé à l'Assemblée des notables de 1787; ce fut là où la dette affligeante de l'Etat se dé- , couvrit et de suite le plan de réforme, à la demande de toute la France, en 1789, au désir de la classe souffrante qui était oppressée de mille manières différentes. ~ En 042, les nobles et le clergé avaient usurpé line partie des biens du royaume j ce fut l'abbé Suger, abbé de l'Abbaye des bénédictins de Saint-Denis, devenu habile et grand ministre d'Etat, qui arrêta tout ce brigandage affreux ; car les nobles et le clergé n'auraient jamais pu prouver la légitimité ni l'origine de tous leurs biens. La Révolution de France a donc été absolument prouvée nécessaire et indispensable pour réformer les abus et former la constitution du royaume. Le peuplé français est bien assuré que tous ses frères et concitoyens de tous pays-ne se coaliseront jamais contre toute justice, pour venir troubler le repos, le bonheur et la liberté dont il jouit. Pous les bons citoyens français prient toutes es puissances, toutes les nations de chasser de eur territoire tous les émigrants fugitifs de
France qui s'y sont retirés pour cabaler comtre l'Etat, se coaliser avec d'autres ennemis pour se révolter contre la Constitution signée par le roi. Déjà plusieurs princes d'Allemagne chassent de leurs Etats les aristocrates français. Le cardinal de Rohan a été chassé depuis peu d'Etteinhiem, avec toute sa bande, par les paysans ; le prince Margrave de Bade en a fait autant dans tous ses Etats contre tous les aristocrates qui s'y étaient réfugiés : il ne veut plus souffrir personne qui appartienne à la bande des noirs ; il a envoyé, il y a peu de temps, 400 hommes près de Kehl, frontière du Rhin, qui ont chassé tous les fugitifs français qui n'osent plus se montrer ; ils sont surveillés par tous les postes. L'on assure que Léo-pold n'est pas disposé de se prêter à donner aucune force armée contre la France. Toutes les nations se doivent des secours de patrie, et doivent, chacune pour leur intérêt, déharras-ser le commerce de toutes ses tyrannies, et rendre au peuple sa liberté, seul bien qu'il doit désirer. On ne peut .encore se dispenser de répéter que le droit du peuple en France était violé et que tous les crimes étaient à leur comble. Henri IV et Sully, son ministre, avaient tenté de grands changements ; mais Il noblesse, le clergé, la finance .et le parlement s'étaient fortement opposés à la régénération de l'Etat. Nos émigrés fugitifs et leurs adhérents pensent, il me semble, encore de même, puisqu'ils veulent asservir encore le peuple français à l'ancien régime du despotisme, cherchant à solliciter les puissances étrangères d'armer contre la patrie. Cependant ces émigrés n'ignoraient pas le déficit des finances. Le parlement, depuis longtemps, avait abusé du peu de confiance que le peuple avait en lui. A l'Assemblée des notables, tenue à Versailles, en 1787, il semblait que les 240 notables qui la composaient, craignaient ds faire connaître à la nation la position désastreuse des finances du royaume : la recette, la dépense et la dette, tout était mystère pour la noblesse, le clergé et la finance, ainsi que pour les parlements, les intendants de finances et ceux de provinces ; ils étaient tous très inquiets sur le parti que l'Etat allait prendre. Les emprunts multipliés du roi par M. Necker, ministre, et les gaspillages de Calonne, faisaient entrevoir la France menacée de périr par ce manque de ressource. Le clergé, la noblesse, les nouveaux annoblis et les parlements virent qu;i-ls ne pouvaient se dispenser d'être assujettis à la taxe du peuple comme propriétaires ; ce sont ces mêmes coalisés qui cherchent à réunir toutes leurs forces pour détruire la Constitution française. Que penser de ces princes fugitifs ?. Croient-ils que des citoyens français prendront les armes contre leur patrie 1 Quelle récompense auraient-ils à espérer de voir revenir l'ancien régime de la féodalité et les impôts onéreux qui désolaient le pauvre peuple dans tout le royaume ? Non, jamais des citoyens français ne penseront ainsi de verser leur sang pour les ennemis de l'Etat qui cherchent à renverser la Constitution de la monarchie, qui présente à toutes les classes de citoyens des avantages. Ces émigrés osent nous menacer de la réunion des différentes puissances. Iront-ils, ces souverains, s'armer, s'épuiser, se ruiner,, se coaliser, former des Querelles étrangères à
la France, très libre de former ses lois, de réformer ses abus, libre de faire la Constitution de son royaume Déjà les peuples prussien et autrichien déclarent ne vouloir donner aucun secours aux aristocrates français. L'Angleterre a elle-même fait sa Constitution ; d'autres peuples la demandent ; tous les souverains savent que le despotisme, la féodalité et l'état de serfs nuisent aux progrès des arts et du commerce de tous les peuples du monde. L'ordre social demande la liberté. La France sait que Calonne et l'infâme Bouillé sont traîtres à leur patrie ; des hommes aussi méchants ne doivent pas être tolérés par aucune puissance étrangère. Tous les souverains vont s'occuper du rétablissement de l'ordre.
( En 1786 et 1787, le roi de Suède s'est occupé du plan de réforme dans les différents ordres. La France a été pressurée par la finance, le peuple écrasé par les divers impôts qui servaient au luxe du traitant et aux dissipations des plaisirs des rois, des courtisans et des pensionnaires. La France a eu beaucoup de mauvais rois, dissipateurs, injustes et pleins de tyrannie. Le règne de Clovis, premier roi, fut teint du sang du peuple. Louis XI fut un meurtrier; Charles IX, toutes ses cruautés sont connues ; Henri III se déshonore par ses débauches ; Louis XIV, de combien de malheurs ne fut-il pas cause 1 II serait trop long de rapporter les tyrannies et les injustices commises par d'autres rois contre le peuple. Eh bien ! des évêques, des prêtres attachés aux pensions et à la cour ont osé faire l'éloge de plusieurs dissipateurs ! Clotaire, Chilpéric, Dagobert et leurs désordres sont connus. Combien de temps les rois se sont-ils joués de la crédulité du peuple, qui cent fois maudissait leur naissance et la pleurait ! Que do malheurs arrivés sous Cliarlemagne ! C'était le règne des brigands qui désolaient le royaume. Quiconque veut réfléchir sur le sort malheureux où la France s?est vue mal gouvernée par des rois injustes, méprisables, pleins d'intrigues et d'ambition, ne pourra s'empêcher d'admirer notre nouvelle constitution. Nos émigrés diront-ils encore que tout était bien dans l'ancien régime 1 Puisqu'ils osent encore le réclamer, je vais leur rapporter la copie fidèle d'un traité de paix et de confédération qui a. beaucoup de rapport aux circonstances actuelles. Je ne doute pas que Léopold, qui a un bon esprit et une bonne în-diciaire, voulût se refuser à un acte de justice, qui conciliera l'intérêt de la paix et de l'union avec les Français.
Traité de voix et de confédération entre Louis XII et le prince d'Empire, Charles de Lorraine, passé en décembre 1631.
« Ce duc déclare à Louis XIII qu'il s^i départ, dès à présent, de toute intelligence, ligue et associations avec aucuns nobles et princes français, au préjudice des affaires concernant l'intérêt de la France ; déclare ce duc ne vouloir contracter aucune alliance avec aucun prince français ; promet ce duc faire sortir de son duché tous les ennemis du roi de France, qui sont désobéissants à ses ordres : qu'il ne permettra pas que ces mêmes ennemis d^ la France fassent, dans son pays, aucunes levées de gens de guerre, ni même qu'aucun
de ses sujets puisse y servir ; déclare ce même duc qu'il donnera toute force pour faire saisir et arrêter, dans ses Etats, tous les sujets rebelles de Sa Majesté le roi de France, prévenus ou accusés de crimes de lèse-nation.
« Louis XIII offre, par ce même traité de paix et de confédération, la même réciprocité. »
Pourquoi donc lès puissances étrangères permettent-elles dans leurs royaumes des quantités de foyers d'émigrés, qui sont étrangers à leur patrie et sans aucune mission ? Tous les princes étrangers ne doivent absolument leur permettre aucun ralliement, surtout Léopold, l'allié de la France, et qui, ci-devant, dans son duché de Toscane, a fait de grandes actions pour la liberté et le bonheur de ses sujets ; il a corrigé beaucoup d'abus, supprimé toutes les lois bursales. On peut citer encore l'excellent Margrave de Bade, prince d'Allemagne : lui et Léopold étaient les modèles de leur empire. Les peuples ont déclaré qu'ils goûtaient le bonheur de la paix et de la liberté ; enfin, frères et concitoyens de tous pays, vous n'ignorez point qu'il est du devoir des rois d'aimer leurs sujets, de protéger les arts et le commerce du royaume, de défendre enfin l'état que le peuple leur confie ; vous n'ignorez pas que le bonheur est le premier élément de la vertu et de la liberté.
Il semble que l'Assemblée nationale devrait engager le roi, et notamment ses ministres, d'envoyer copie de ce traité de paix et de confédération aux puissances étrangères, dans cette circonstance.
Le duc défend à tous les ennemis de Sa Majesté le roi de France, qui sont partis hors du royaume, contre son gré, toute association dans ses Etats, leur déclare ledit duc ne leur donner aucune retraite et assistance.
Arrêté le 6 janvier 1632 ; registré en notre hôtel de ville de iNancy le 17 juin 1632.
Signé : Charles de Lorraine.
Registré, ouï le procureur général du roi, à Paris, en Parlement, le 20 décembre 1632.
Le 13 août 1641, le duc de Guise, le duc d'Orléans et le duc de Bouillon projetèrent un voyage à Bruxelles. Y étant arrivés, ils se sont déclarés les ennemis de la France par des actions infâmes ; les Français les ont regardés comme leurs ennemis déclarés.
Le duc de Guise, le duc d'Orléans et le duc de Bouillon, ayant éprouvé de grands mécontentements à Bruxelles, sont venus, le 18 octobre 1641, supplier humblement le roi de leur pardonner de s'être séparés de la fidélité et de toute l'obéissance qu'ils leur devaient.
Au mois d'avril 1642, l'Etat ayant appris que le duc de Bouillon, M. de Cinq-Mars et le duc d'Orléans avaient eu des intrigues et des intelligences secrètes contre le repos de la France et de la souveraineté, leurs cabales furent anéanties.
Ces conspirateurs avaient fait distribuer, pour l'exécution de leurs noirs desseins, de fortes sommes d'argent. Pressés par la conscience, disaient-ils, ils firent demander grâce au roi par l'abbé de la Rivière. Le roi répondit ': MM. d'Orléans et de Bouillon m'ont offensé grièvement, et plus encore l'Etat. Nous
ne voulons plus user de notre clémence envers eux ; au contraire, nous aurons les yeux constamment ouverts sur leur conduite.
Lettre à nos frères d'armes des régiments.
Mes chers camarades et frères,
Je vous adresse cette lettre pour-vous dire que le roi, les ministres, l'Assemblée nationale, les départements, les bons citoyens, les princes et seigneurs émigrés, les magistrats des villes de l'Empire, toutes les puissances couronnées, leurs ministres et tous nos ambassadeurs, ont reçu la lettre ci-jointe que je leur ai adressée. Léopold en a reçu six exemplaires au mois de décembre dernier. Enfin, mes chers camarades, je vous l'adresse à votre tour, persuadé qu'elle ne peut qu'influer sur votre patriotisme et que, comptant toujours sur le zèle le plus actif, de votre part, à maintenir la Constitution française, si jamais l'aristocratie avait l'audace d'attenter à la vie des citoyens, le Français vigilant s'armerait et périrait plutôt que de souffrir qu'ils y portassent atteinte dans aucun point.
« Depuis plus de vingt années, les Français cherchaient tous les moyens de régénérer la monarchie qui était menacée de sa ruine par tous les abus qui se commettaient dans toutes les parties civiles et militaires. Henri IV, un des plus grands rois que nous puissions citer, fut forcé de réduire à son obéissance tous ceux qui étaient les plus obstinés contre la raison ; il voulut que la noblesse, le clergé, la finance et les parlements fissent oesser tous les désordres et les malversations, et qu'ils se rendissent à l'obéissance. D'après les vexations de tous genres, que nous n'avons cessé d'essuyer depuis ce temps, il était juste que nous apprenions à secouer le joug de l'insolent despotisme de nos oppresseurs. Ainsi, camarades et frères d'armes, veillons tous à ia chose publique : le courage est une vertu qui honore tous les hommes qui sont égaux aux yei}x de la loi. Les citoyens de Paris se sont montrés vigoureux pour la Révolution et notamment les électeurs, les 11 et 12 juillet 1789. Le 14, Paris brise enfin les liens de cet abominable despotisme ; tous les pouvoirs s'évanouissent ; les espions, leurs agents, le lieutenant de police, l'intendant de Paris fuient ; les ministres restent sans pouvoirs ; les tribunaux sont arrêtés ; le siège de la Bastille se fait ; le roi reste seul, toujours aimé de son peuple. Les électeurs forment les districts ; ils s'occupent d'un plan d'organisation, qu'ils divisent en six tribunaux, sous les titrés : Constitution ; Finances et Commerce ; Religion et Clergé; Mœurs, Education et Hôpitaux ; Législation; Municipalité; et ils instruisent toutes les villes du royaume du danger où se trouve la capitale menacée; le serment de fidélité est prêté de leur part; ils s'occupent de la chose publique, dénoncent tous les traîtres à la patrie.
Ainsi, chers camarades et frères d'armes, en ranimant notre courage nous sommes sûrs de vivre heureux. Cela ne tient qu'au patriotisme le plus pur.
Signé : de Rubigny de Berteval.
Séance permanente du lundi
présidence de romme, secrétaire.
La séance est reprise à dix heures du matin.
, secrétaire, donne lecture des lettres suivantes :
1° Deux lettres du général Kellermann (1), qui demande, dans la première, à être autorisé à former un bataillon, sous le titre de chasseurs; dans la seconde, à être autorisé à former une compagnie de guides à pied.
(La Convention renvoie ces deux lettres au comité de la guerre pour en faire son rapport le lendemain. )
2° Lettres des citoyens V illier s et Fouché, commissaires de la Convention nationale dans les départements de la Loire-Inférieure et de la Mayenne, qui écrivent de Nantes'pour annoncer la mort héroïque du citoyen Sauveur, président du district de la Roche-Bernard, et du curé de Savenay; ils font espérer la prompte réduction des rebelles; ils envoient copie de la proclamation qu'ils ont fait publier.
Suit un extrait de cette lettre (2) :
« Nous pouvons enfin vous parler d'une manière positive de l'état actuel du département de la Loire-Inférieure, et vous faire espérer que les brigands qui le désolent aujourd'hui en seront bientôt chassés. Les routes qui conduisent à Nantes ne sont pas encore libres, et nous n'y sommes parvenus l'un et l'autre qu'avec difficulté, et au milieu des dangers. Les brigands se sont emparés de presque tous les districts; et après avoir massacré tous les administrateurs qui s'y trouvaient, ils en ont brûlé tous les papiers : leur projet était surtout de pénétrer jusque dans la ville do Nantes; mais les mesures vigoureuses prises par les administrations, et le zèle infatigable de la garde nationale, les ont repoussés avec avantage, et tout nous promet que les derniers efforts des ennemis de la patrie n'auront encore aucun succès. Cet espoir est surtout fondé sur les forces imposantes que le conseil exécutif nous destine, et sur les talents et la bravoure des généraux qui les commanderont.
« Nous ne vous parlerons pas des cruautés que les brigands exercent dans les différents endroits qu'ils parcourent ou qu'ils habitent; vous vous en formerez facilement l'idée, en songeant à toutes les atrocités que peuvent inspirer le désespoir de l'orgueil humilié et la fureur sacrée du fanatisme : nous aimerions bien mieux pouvoir vous retracer ici tous les traits de courage et d'héroïsme qui distinguent les défenseurs de la liberté et dont nous entendons parler à chaque instant.
c Nos collègues qui sont dans le département du Morbihan, ne manqueront
pas de vous instruire de la mort héroïque du président du district de la
Roche-Bernard, le citoyen Sauveur : les brigands, après avoir
« A l'approche des troupes que le général Labourdonnaye a fait sortir de différents ports, les brigands ont évacué Guérande, le Croisic et la Roche-Bernard. Nous nous flattons que ces mouvements, combinés avec ceux des autres généraux, délivreront bientôt cette partie de la République, des brigands qui la désolent.
(( Nous vous prions de vouloir bien approuver la proclamation et l'arrêté que nous joignons ici, et que les circonstances ont nécessités.
(La Convention décrète la mention honorable de la conduite des gardes nationales, l'insertion au Bulletin, l'approbation de l'arrêté des commissaires, et renvoie au comité de Salut public.) (1).
3° Lettre des entrepreneurs de la fourniture de viande à Varmée du Nord. Ces fournisseurs demandent qu'il leur soit fait l'avance d'un tiers sur leurs marchés.
(La Convention renvoie la lettre au comité des marchés.)
4° Lettre des citoyens composant la Société populaire d'Aurillac, qui rappelle ses différents actes de civisme et fait passer la note des effets d'équipement destinés aux troupes; cette lettre est ainsi conçue (2) :
Aurillac, le er
avril 1793
« Citoyens représentants,
« La société d'Aurillac a fait passer, en son temps, à la Convention nationale, son adhésion au décret qui a aboli la royauté et érigé la France en République; elle a, la première, célébré une pompe funèbre en l'honneur de Michel Lepeletier, et le procès-verbal de la cérémonie ainsi que l'éloge de ses vertus, imprimé, a été sur-le-champ, envoyé au Président de la Convention et à la veuve du martyr de la liberté; elle a applaudi à la mort du dernier tyran au moment-même où sa tête a roulé sur l'écha-faud, et aucun de ces actes de son dévouement à la chose publique n'a été consigné dans le Bulletin de la Convention.
« La société, citoyens représentants, ne sait pas avoir démérité pour se
voir condamnée à un oubli qui l'afflige, tandis qu'elle a vu le* journal
de vos séances rempli périodiquement de ces témoignages de civisme qui
se sont portés de toute part dans le sein de la représentation
nationale; le découragement ne s'est pas néanmoins emparé de l'esprit
qui n'a cessé de l'animer; toujours inflexible dans ses prin-
« Elle a ouvert et réalisé une souscription,, qu'elle a convertie en des effets d'équipement pour les généreux défenseurs de la patrie.
( Elle ne les destine qu'à ceux qui se trouvent dans le plus grand dénûment, n'importe qui. Elle consiste en :
« 273 paires de souliers de la meilleure qualité.
« 24 chemises.
« 6 paires de bas de laine.
« 1 paire de guêtres d'étoffe noire.
« L'objet n'est pas très considérable en soi : mais si vous vous rappelez la misère du pays, les impositio nénormes qui pèsent sur ses habitants, un don déjà offert à la patrie pour les frais de guerre, une,somme très considérable employée à l'achat de huit canons que la ville vient de se donner et tant d'autres sacrifices qui ont tous trait à l'intérêt public, vous regarderez comme excédant la raison de nos modiques facultés.
« L'envoi est prêt à partir; nous n'attendons que l'avis du ministre de la guerre; déjà nous en avons fait la déclaration à l'administration du département, conformément à la recommandation que nous en a faite le citoyen Blanchard, commissaire-ordonnateur.
( La société vous prie de nous donner les mouvements nécessaires pour que cette faible preuve de notre reconnaissance envers nos braves défenseurs ne languisse plus longtemps dans le magasin.
« Nous sommes très fraternellement, citoyens représentants,
« Les membres composant la société populaire $ Aurillac.
« Signé : Abadie, président; Laparva;
Astier. »
« P. S. — Le recrutement s'achève dans ce district, grâce au zèle des commissaires que nous avons envoyés. dans tous les cantons sous la sanction des corps administratifs. Les aristocrates n'ont pas manqué de travailler les habitants des campagnes, mais leurs manœuvres ont été déjouées et nous jouissons de la paix dans le département.
c Signé ; Abadie.
(La Convention décrète la mention honorable de la lettre et en ordonne l'insertion au Bulletin.)
5° Lettre des membres du conseil général d'Arpajon, département du Cantal, qui annonce que cette commune a fourni plus que son contingent et a donné des effets d'équipement à ses volontaires ; cette lettre est ainsi conçue (1) :
24 mars 1793, l'an II de la République française.
Représentants de la République française.
« La patrie est donc encore redevenue en danger ; eh bien il le fallait
pour réveiller l'ardeur des Français qui, accoutumés déjà à n'entendre
parler que de victoires remportées
( La République une et indivisible, voilà, législateurs, voilà notre serment. La peine de mort, par vous prononcée contre tout homme qui oserait attenter ou qui proposerait d'attenter à la souveraineté nationale, l'adhésion la plus formelle à vos salutaires et éternels décrets, c'est ce que nous serons fortement décidés à défendre toujours aux dépens de nos vies et de nos biens. -
« Pour copie extraite du registre où sont les signatures. '
« Signé : Bonhomme, maire ; Rentières, secrétaire-greffier. )>
(La Convention décrète que. la commune d'Àrpajon a bien mérité de la patrie et ordonne l'insertion de cette lettre au Bulletin.)
6° Lettre des membres du conseil général du département de la Seine-Inférieure (1) par laquelle ils informent la Convention que, d'après la loi du 3 de ce mois, qui autorise l'arrestation de tous officiers ou soldats revenant des armées, ils ont fait mettre en lieu de sûreté, jusqu'à nouvel ordre, le général Leveneur, qui disait aller rejoindre son épouse qu'il s'avait pas vue depuis quatorze mois. Ils demandent que la Convention décide des suites que doit avoir cette arrestation.
(La Convention renvoie cette lettre au Comité de salut public.)
7Ô Lettre des citoyens Mauduyt et Lakanal, commissaires envoyés dans les départements de l'Oise et de Seine-et-Marne, datée de Nemours, le 5 avril 1793 (2). Ces commissaires annoncent que Mirdondel, nommé par le pouvoir exécutif pour recevoir et faire partir les volontaires à Melun, n'en fait partir que vingt-cinq par jour.
(3). J'observe que la marche du
(La Convention décrète que ses commissaires seront autorisés à faire marcher les volontaires aux frontières, et renvoie au comité de Salut public.)
8° Lettre du citoyen Levasseur, ancien volontaire du bataillon de l'Eure (1). Ce citoyen se plaint des voies de rigueur exercées arbitrairement contre lui par la municipalité de la Selle. Il estime que lorsque la Convention sera instruite des faits, elle décrétera la mention honorable de sa conduite. Il demande la permission d'aller quelques instants rétablir sa santé délabrée, dans -sa famille, à Alençon.
(La Convention renvoie la lettre au comité des pétitions.)
9° Lettre des membres du Conseil général de la commune de Rambouillet, par laquelle ils annoncent qu'ils n'ont pas voulu laisser passer un membre de la Convention qui accompagnait sa femme en voyage et n'avait pour passeport que sa carte de député ; cette lettre est ainsi eonçue (2) :
Rambouillet, le
« Citoyens représentants,
( Le citoyen Bourgeois, député d'Eure-et-Loir, a été témoin de l'exactitude scrupuleuse avec laquelle nous exécutons la loi. Il passait aujourd'hui par notre commune pour, ainsi qu'il nous l'a déclaré, accompagner sa femme jusqu'à Chartres. Elle seule était munie d'un passeport, lui n'avait que sa carte de député. Nous lui avons témoigné de la répugnance pour le laisser aller plus loin en lui observant que les fonctionnaires publics ne devaient pas quitter leur poste sans congé formel du corps dont ils sont membres ; il nous a représenté que l'usage s'était introduit dans la Convention de pouvoir s'absenter deux ou trois jours sans congé, et qu'il n'avait éprouvé •aucune difficulté en sortant de Paris et passant à Versailles. Nous avons mis en délibération si le citoyen Bourgeois serait laissé libre de continuer sa route qui l'éloignait de son poste où il pouvait être très utile. Le conseil général a cru ne pas devoir s'écarter d'une loi qu'il connaissait en déférant à un usage dérogatoire dont on ne faisait que lui alléguer sans en justifier ; en conséquence, a refusé, à l'unanimité, au citoyen Bourgeois la faculté de passer outre en s'écartant de son poste et arrête qu'il en serait sur-le-champ donné connaissance à la Convention pour savoir si le Conseil n'a pas erré.
« Les membres du conseil général permanent de la commune de Rambouillet,
département de Seine-et-Oise. « Signé: Dttfotjr, maire ; Trotte,
officier mu-
(La Convention approuve la conduite du Oonseil général et-prononce que le député Bourgeois sera tenu de se rendre de suite à son poste. )
10° Lettre de Garat, ministre de Vintérieur, sur la question de savoir comment seront remplacés les membres des directoires dans les corps administratifs, lorsque les suppléants se trouveront épuisés ; cette lettre est ainsi conçue (1) :
Paris,
« Citoyen Président,
« Plusieurs corps administratifs s'étant trouvés dans le cas de me proposer la question de savoir comment se devaient remplacer les membres du directoire, lorsque les suppléants se trouvaient épuisés, je leur ai répondu que je pensais qu'en pareille circonstance, ils se conformeraient à l'esprit de la loi en appelant celui des administrateurs qui aurait été le premier élu après les suppléants.
« Mais comme ce que j'ai cru devoir décider provisoirement pour ne pas paralyser les directoires n'est pas prévu par la loi, je vous prie de vouloir bien soumettre mon opinion a cet égard à la sagesse de la Convéntion.
. « Signé : Garat. »
(La Convention décrète que le premier membre du Conseil remplacera celui qui viendra à quitter son poste.)
11° Lettre de Garat, ministre de Tinté-rieur (2), par laquelle il envoie une pétition de la commune de Hellenhausen, qui demande à être distraite du canton de Walscheid.
(La Convention renvoie cette lettre au comité de division.)
12° Lettre cle Garat, ministre de l'intérieur (3), qui fait part de la demande faite par les maîtres de poste aux chevaux, département du Haut-Rhin, pour que leurs postillons soient dispensés du recrutement.
(La Convention renvoie la lettre au comité de la guerre.)
13° Lettre de Garat, ministre de Vintérieur (4), qui fait parvenir à l'Assemblée un mémoire du ci-devant commissaire du pouvoir exécutif près le tribunal criminel d'Avignon.
(La Convention renvoie la lettre au comité des finances.)
14° Lettre de Garat, ministre de l'intérieur; il demande, pour la commune
de Villiers-le-
Paris, le
« Citoyen Président),
« Le directoire du département de la Côte-d'Or m'a adressé la pétition ci-jointe du conseil général de la commune de Villiers-le-Duc tendant à ce que ce nom soit changé en celui de Villiers-la-Forêt. Le motif qui a déterminé les citoyens de cette commune à solliciter ce changement est louable et mérite d'être pris en considération.
« Je vous prie donc,-citoyen Président; de mettre cette demande sous les yeux de la Convention nationale pour en obtenir l'effet le plus tôt possible.
« Le ministre de l'intérieur,
« Signé : Garat. »
A cette lettre, se trouve jointe la pièce suivante (2) :
Extrait des registres des délibérations de la municipalité de Villiers-la-Forêt.
« Ce jourd'hui, huit février mil sept cent quatre-vingt-treize, l'an deuxième de la République française, une heure après-midi, sur les réquisitions du procureur de la commune, le conseil général de Yilliers-le-Duc s'étant assemblé au lieu ordinaire de ses séances, composé de Jean-Baptiste Aubertot, maire; Jean Parisot, officier municipal; Georges Chainey, officier municipal; Nicolas Chame-rois, l'aîné, procureur de la commune; Jean Vennevot; Jean-Baptiste Carteret; Louis Chaisney; Vincent Chevallot; Nicolas Petit Tobie; et Claude Chaisney, les notables, assistés de Nicolas Lereuil, secrétaire;
« Le procureur de la commune a exposé, parlant au nom de cette commune qui s'est toujours écrit jusqu'à ce jour Yilliers-le-Duc, a dit qu'il répugnait sur ces mots le Duc, et a invité le conseil à délibérer à ce que le nom de Villiers soit suivi d'un terme distinc-tif autre que celui de le Duc, qui ne doit plus subsister.
« Ouï le procureur de la commune, dans son exposé et y voulant faire droit, le conseil général, considérant que ce mot de Duc, en conformité du décret de l'Assemblée nationale du 23 juin 1790 doit être aboli dans toute la France, que le laissant subsister davantage, cela donnerait une occasion de répugnance et d'horreur à tous les bons citoyens, amis d'un blique; en conséquence, avons délibéré que le serait laisser régner un reste de fanatisme qui doit être avili et rejeté à jamais de cette république; en conséquence, avons délibéré que ce nom de Villiers serait suivi des mots distinc-tifs : la Forêt, c'est-à-dire qu'à compter de ce jour, cette commune sera appelée Villiers-la-Forêt,
« Extrait de la présente sera expédié et envoyé, dès demain, aux citoyens
administrateurs
« Et nous sommes soussignés :
Signé : Je an-Baptiste Aubtmtot, maire; J. Pa-risot, officier municipal; G. Chàisney, officier municipal; Chamerois, procureur de la commune; J. Vennerot, L. Chàisney, N. Petit, Chevallot, C. Chàisney, J.-B. Carteret, notables ; Lereuil, secrétaire.
« Pour copie conforme « Signé : Aubertot, maire; Lereuil, secrétaire. »
« Yu le présent extrait, ouï le rapport et le procureur-syndic entendu;
« Le directoire du district, considérant qu'il n'y a plus de duché; que toute distinction est abolie ; que le mot Duc accompagnant celui de Villiers, est vide de sens direct et rappelle le temps de l'esclavage;
« Considérant que la loi autorise les communes à changer de nom lorsqu'elles en porteront qui auront trait à des distinctions d'ordres;
« Est d'avis qu'en louant le zèle ët l'esprit qui anime le conseil général de cette commune, sa délibération du 8 février 1793 doit être homologuée; qu'en conséquence, la commune qui portait lès nom et dénomination de Villiers-le-Duc, portera et sera connue sous les nom et dénomination de Yilliers-la-Forêt.
« Fait en séance publique, au directoire du district de Châtillon-sur-Seinë, le 28 février 1793, l'an II de là République.
« Signé : A. Legrand; Martin, secrétaire. »
« Vu le présent avis, ouï le rapport et le procureur général syndic ;
« Le directoire du département de la Côte-d'Or a arrêté que l'objet de la pétition du conseil général de la commune de Villiers est du ressort de la Convention nationale, qu'elle lui sera adressée avec invitation d'y faire droit.
« Fait et arrêté en séance publique, au directoire du département de la Côte-d'Or, à Dijon, le 6 mars 1793, l'an II de la République française.
« Signé: A. Clemenceau, vice-président;
Vaillant. »
(La Convention décrète la demande formulée par le conseil général de la commune de Villiers-le-Duc, convertie en motion par un de ses membres.)
15° Lettre de Garat, ministre de l'intérieur, qui demande, pour la commune de Bar-le-Duc que ce nom soit changé en celui de Bar-sur-Meurthe; cette lettre est ainsi conçue (1) :
Paris, le 5 avril 1793, l'an II de la République française.
« Citoyen. Président,
« Le directoire du département des Vosges
« Je vous prie, citoyen Président, de le soumettre à l'approbation de la Convention nationale.
« Le ministre de l'intérieur, u Signé : Garat. »
A cette lettre se trouve jointe la pièce suivante (1) :
département de3 vosges.
Arrêté du directoire du département.
Séance du 81 janvier 1793 l'an II de la République française.
« Présents les citoyens Benoist, président; Janhaud, Bigotte, Leroux, Poirson, Dieu-donné et Claudel ;
« Sur la délibération du conseil général de la commune de Bar-le-Duc, tendant à changer le nom de Bar-le-Duc en celui de Bar-sur-Meurthe; N -
« Vu la délibération du conseil général de la commune de Bar-le-Duc, district de Saint-Dié, tendant à changer le nom de Bar-le-Duc en celui de Bar-sur-Meurthe, avec l'avis du directoire du district;
« Le directoire du département des Vosges, sur le rapport de Joseph-Etienne Poirson, ouï le procureur général syndic; considérant qu'il est digne d'un peuple libre d'anéantir tout ce qui pourrait rappeler à la postérité l'idée du régime oppresseur sous lequel il a gémi depuis plusieurs siècles, en applaudissant à la fierté républicaine des citoyens de cette commune, qui veulent oublier jusqu'au nom de leurs anciens maîtres ;
Arrête que le nom de Bar-le-Duc de cette commune siéra changé en celui de Bar-sur-Meurthe, que la pétition dont il s'agit restera déposée aux archives du département et qu'une expédition du présent arrêté sera envoyée au directoire du district de Saint-Dié et à la municipalité de Bar-sur-Meurthe, pour êtré également déposée dans leurs archives; enfin que pareille expédition sera adressée tant à la Convention nationale qu'au conseil exécutif provisoire.
« Signé : Benoist, vice-président; Denis. »
(La Convention décrète la demande formulée par le conseil général de la commune de Bar-le-Duc, convertie en motion par un de ses membres.)
16° Lettre de Garat, ministre de Vintérieur (2), qui fait part à la Convention de différentes dispositions faites par le conseil permanent du département de l'Aisne, par rapport au désarmement.
(La Convention renvoie ce mémoire au comité de Salut public.)
17° Lettre de Garat, ministre de Vintérieur (3), qui demande à être
spécialement
(La Convention renvoie la lettre an comité des finances.)
18° Lettre de Garat, ministre de> l'intérieur, par laquelle il demande que le général d'As-seux-Gestas, destitué par les commissaires, soit dispensé de se transporter à Bayonne, pour s'y procurer un certificat de résidence; cette lettre est ainsi conçue (1) :
Paris,
« Citoyen Président,
« Le maréchal de camp Gestas commandait une division de l'armée des Pyrénées. ït était à Bayonne. Les commissaires de la Convention nationale l'ont destitué le 23 octobre dernier. H s'est retiré à Bordeaux, pour obéir à la loi du 20 août qui défend aux généraux suspendus ou destitués d'approcher des frontières et des années où ils ont commandé, sous peine de détention, jusqu'à la fin de la guerre. Cependant les administrateurs du département de la .Haute-Marne ont fait -séquestrer ses biens situés dans leur arrondissement. Pour obtenir la levée du séquestre, il leur a adressé d'abord un certificat de sa résidence à Bordeaux, délivre dans la forme prescrite par la loi au 20 décembre, c'est-à-dire en sa présence et signé de lui, ainsi que de huit citoyens certifiants.
« Il ne pouvait en fournir un pareil de sa résidence à Bayonne;, puisque la loi du 20 août lui défend d'approcher de cette ville de vingt lieues. 11 y a suppléé autant qu'il était en lui en chargeant quelqu'un de procuration, à l'effet de lui en procurer un de cette commune; mais le directoire dû département de la Haute-Marne exige, pour le remettre en possession de ses biens, un certificat délivre en sa présence.
« Le citoyen Gestas s'est adressé à moi, à l'effet de faire admettre, par ie département de la Haute-Marne, le certificat de la commune de Bayonne, tel qui lui a été délivré.
« J'ai trouvé, citoyen Président, que placé entre la loi du 20 août qui
lui défend d'approcher de vingt iieues de cette ville et celle du 20
décembre qui veut qu'il y aille pour être présent au certificat dont il
a besoin; que réduit à l'alternative d'encourir la peine portée par la
première, ou d'être traité comme émigré faute de satisfaire à la
seconde, sa position était extrêmement pénible. H m'a semblé qu'il avait
satisfait à l'esprit de la dernière des deux lois citées qui ne peut
vouloir l'impossible; mais il m'a semblé aussi qu'il n'appartenait qu'à
la Convention Fexplîquer la contradiction qui se trouve entre elles par
rapport au citoyen Gestas, et je me suis abstenu de prononcer. Je vous
prie donc, citoyen Président, de soumettre cette difficulté à
î'AssemMée. Il serait à désirer pour cet offi-
Le ministre de l'intérieur, m Signé : Garat. » (La Convention passe à l'ordre du jour.)
19° Lettre de Garat, ministre de F intérieur (1), qui réclame des secours pour le citoyen Ragué, de Remiremont.
(La Convention renvoie là lettre au comité de secours.)
20° Lettre de Lebrun, ministre des affaires étrangères, et de la guerre par intérim. Ce ministre demande une explication sur le décret du 17 février dernier, relatif à la gendarmerie nationale.
(La Convention renvoie la lettre au comité de la .guerre.)
21° Lettre de Lebrnm, ministre de la guerre par intérim, qui donne des détails sur la compagnie supprimée du citoyen Lelièvm
(La Convention renvoie la lettre au comité de la guerre.)
22° Lettre de Lebrun, ministre de la guerre par intérim, qui envoie l'état nominatif des commissaires des guerres, des secrétaires écrivains des places.
(La Convention renvoie la lettre au comité de la guerre.)
23° Lettre de Clavière, ministre des contributions publiques. Ce ministre envoie l'état de situation, au 30 mars dernier, de la confection des rôles de la contribution mobilière de I7S2.
(La Convention renvoie la lettre au comité des finances.)
24° Lettre de Clavière, ministre des contributions publiques, qui envoie un mémoire d'Ame lot sur la contribution patriotique, et deux questions du département de la Oôte-d'Or sur le même sujet.
(La Convention renvoie la lettre au comité des finances.)
25° Lettre de Clavière, ministre des contributions publiques, qui demande des éclaircissements sur le droit de gruerie et sur le droit domanial, dît des écorces.
(La Convention renvoie la lettre au comité des domaines.)
26° Lettre de Clavière, ministre 'des contributions publiques, qui propose que l'importation du sel ammoniac ne soit plus prohibée.
(La Convention renvoie la lettre au comité de commerce.)
27° Lettre de Clavière, ministre des contributionsî publiques, relative à
la suppression du droit de fret, dans le cas de grand cabo-
Paris,
« Citoyen Président,
« Les circonstances où se trouve la République exigent que les navires étrangers soient encouragés à venir dans les ports et à faire pour elle le grand cabotage. L'un des moyens dont on pourrait faire usage, à cet égard, serait, dans ces deux cas, la suppression du droit de fret, sauf à le faire, revivre à la paix, comme utile à notre navigation. Je vous prie de soumettre cet objet à la considération de la Convention nationale.
« Le ministre des contributions publiques, « Signé : Clavière. »
(La Convention décrète cette demande, convertie en motion par un de ses membres.)
28° Lettre de Clavière, ministre des contributions publiques (2) par laquelle il demande que les proclamations pour diverses coupes de bois faites par le conseil exécutif, et jugées nécessaires pour l'exploitation de quatre forges, soient confirmées par la Convention.
(La Convention renvoie la lettre au comité d'aliénation. )
29° Lettre de Gohier, ministre de la justice, par laquelle il annonce que la citoyenne Egalité, mise en état d'arrestation en vertu des décrets de la Convention du 4 de ce mois, ne peut, à cause de maladie, être transportée dans une maison d'arrêt ; cette lettre 'est ainsi conçue (3) :
Paris,
( Citoyen président,
« La Convention nationale a Ordonné par son décret du 4 de ce mois que la citoyenne femme Egalité sera mise sur-le-champ en état d'arrestation et que le scellé sera apposé sur ses papiers.
« L'adjudant de la garde nationale parisienne, chargé de l'exécution du décret, m'instruit que la citoyenne femme Egalité est dans un état de maladie qui ne permet pas, sans l'exposer à un très grand danger, de la transférer à Paris, pour être constituée prisonnière dans une maison d'arrêt.
(( Un certificat de médecin, le procès-verbal de la signification du décret et les lettres de l'adjudant que je joins ici attestent le mauvais état de la santé de la citoyenne Egalité qui, d'ailleurs, observe que le décret et l'ordre que j'ai donné pour son exécution portent seulement qu'elle sera mise en état d'arrestation, et réclame contre son transfèrement à l'Abbaye.
« J'ai toujours pensé que le ministre de la justice, chargé d'exécuter un
décret qui met en état d'arrestation un citoyen, ne peut pas
« C'est à la Convention seule qu'il appartient de prononcer sur la réclamation de la citoyenne femme Egalité, et je la prie de me tracer ce que je dois faire dans cette circonstance.
« Le ministre de la justice, « Signé : Gohier.
(La Convention ordonne que la citoyenne Egalité sera gardée à vue chefc elle jusqu'au rétablissement de sa santé.)
(1). J'ai appris que plusieurs malveillants travaillent en ce moment à retenir les Bourbons à Paris, d'où votre décret les bannit; je demande que le comité de Salut public soit tenu de vous indiquer, sous une heure, les lieux où seront transférés ces individus suspects aux amis inquiets de la liberté.
(La Convention nationale décrète que le comité de Salut putuic indiquera, sous une heure, le lieu, hors de Paris, où seront mis en état d'arrestation les membres de la famille des Bourbons, et ordonnera au conseil exécutif de les y faire conduire sur-le-champ, sous bonne et sûre escorte.) (2).
secrétaire, reprend la lecture des lettres adressées à l'Assemblée.
30° Lettre de Gohier, ministre de la justice (3), par laquelle il prie l'Assemblée de donner une décision sur le sort des prisonniers détenus, et dont les affaires ne peuvent être instruites, parce que les témoins à entendre sont aux armées.
(La Convention renvoie la lettre au comité de législation, pour en faire rapport incessamment. )
31° Lettre du citoyen Lebrun, président du Conseil exécutif, par laquelle il demande, au nom du conseil des ministres, qu'il soit établi dans chaque armée un corps de prisonniers.
(La Convention renvoie la lettre au comité de la guerre.)
32° Lettre de Lebrun, ministre de la guerre par intérim, qui envoie le mémoire de 66 gendarmes nationaux renvoyés par le général Custine, pour désobéissance à un arrêté des commissaires de la Convention.
(La Convention renvoie la lettre au comité de la guerre.)
33° Lettre des membres du conseil général de la commune de Beàune, qui
demandent qu'on tirendes arsenaux de la République les fusils qui,
n'étant pas de calibre, n'ont pu
(La Convention renvoie la lettre à la section des armes du comité de la guerre, pour en faire rapport dans trois jours.)
34° Lettre des membres de la société des Amis de la liberté à Libourne, qui demandent qu'on s'occupe de leur fournir des armes pour résister aux ennemis, s'ils paraissaient sur les frontières.
(La Convention renvoie la lettre au comité de la guerre.)
35° Lettre des fermiers des messageries, par laquelle ils demandent avec instance que le rapport préparé sur cette partie soit entendu; cette lettre est ainsi conçue (1) :
Paris,
« Citoyen Président,
« C'est malgré nous que nous nous voyons forcés de vous interrompre encore relativement au bail des Messageries; mais notre sollicitude ayant pour objet la sûreté d'un service indentifié avec celui des armées, sera sans doute approuvée par la Convention nationale.
« Elle avait bien voulu, citoyen Président, fixer à lundi dernier l'ordre du jour pour cet objet; cependant le rapporteur n'a pas encore été entendu; les circonstances survenues depuis quelques jours aggravent tellement les difficultés que nous ne pouvons vous dissimuler que, si la Convention ne s'occupe pas aujourd'hui même de cette affaire, le service manquera entièrement.
« Nous avons l'honneur de vous prévenir, citoyen Président, que notre démarche est d'accord avec le comité des contributions publiques et que le citoyen Le Breton, chargé du rapport, attend avec la plus vive impatience que la Convention nationale veuille bien l'entendre.
« Son rapport a été distribué, il y a quatre jours, l'opinion individuelle est fixée; il ne s'agit que d'adopter ou de rejeter le plan proposé. La discussion sera très courte et ne dérobera pas beaucoup de moments à la Conven--tion nationale.
c Nous vous supplions donc, citoyen Président, de vouloir bien accorder la parole au citoyen Le Breton dans la séance d'aujourd'hui.
« Signé : Cretté, Daix, Labbé, Barberaux, Denanteuil, Charpentier, fondé de procuration du bureau, sous-fermier des Messageries.
(La Convention décrète que le rapport sera fait à la séance du soir, après lecture du procès* verbal.)
36° Lettre des membres du conseil général du département de la
Charente-Inférieure (2) Ces administrateurs envoient un exemplaire
(La Convention renvoie la lettre au comité de Salut public.)
37° Lettre de Fouquier-Tinville, accusateur public près le tribunal révolutionnaire, par laquelle il réclame des pièces relatives au général d'Harambure, qui ne se trouvent pas parmi celles annoncées; cette lettre est ainsi conçue (1):
Paris,
« Citoyen Président,
« J'ai l'honneur de réitérer à la Convention que parmi les pièces concernant l'arrestation du général d'Harambure, qui m'ont été remises par le citoyen ministre de la justice, ne se trouvent pas celles qui sont annoncées avoir été déposées le 13 mars dernier par un membre de la Convention sur le bureau. Ces pièces sont, je crois, des ordres donnés par ce général aux corps administratifs et judiciaires d'enregistrer une proclamation à lui adressée par le soi-disant régent du royaume de France, ces pièces sont nécessairement la base de l'accusation. Elles ne se trouvent ni au comité des décrets, ni chez le citoyen ministre de la justice; où sont-elles donc? Si j'avais bu le nom du membre qui paraît les avoir déposées sur le bureau, je me serais adressé à lui pour ne pas interrompre les importants travaux de la Convention.
« L'accusateur public du tribunal extraordinaire et révolutionnaire,
« Signé : Fouquier-Tinville. ».
(La Convention renvoie la lettre au comité de sûreté générale.)
38° Lettre du citoyen William Trollope, négociant anglais, qui, pris sur un navire hambourgeois, par un corsaire de France, réclame sa liberté ; cette lettre est ainsi conçue (2):
Paris, le
« Citoyen Président,
« William Trollope, natif de Londres, prend la liberté de vous exposer
que des affaires de famille l'avaient conduit, l'année dernière, en
Portugal, où sa sœur est mariée. Obligé de retourner dans sa patrie, en
Angleterre, il s'embarqua, pendant la déclaration de guerre entre les
puissances de l'Europe, sur un navire hambourgeois qu'il supposait
neutre, afin de s'y rendre. Il fut trompé dans son attente à la
rencontre du corsaire national Le Furet, à bord duquel il fut mené et
qui le débarqua à la Rochelle. Le traitement vraiment honnête qu'il a
éprouvé à bord de ce bâtiment et les promesses de vos commissaires dans
ce port lui font espérer, citoyen Président, qu'il trouvera dans vous et
les membres de la Convention, des soutiens dans cette occurrence. Les
pièces qu'il porte sur lui tant en
« Signé : William Trollope. »
A cette lettre, se trouve jointe la pièce suivante :
Certificat (1).
« Nous, capitaine et officiers du corsaire de Saint-Malo Le Furet, certifions que William Trollope s'est trouvé embarqué, comme passager, à bord de VAmitié que nous avons amar-riné; que le capitaine de ladite prise, allant à Hambourg, a déclaré avoir pris ce passager à Porto, en Portugal, où il avait résidé neuf mois chez une de ses sœurs, et avoir fait marché avec lui pour le débarquer le long des côtes anglaises, à bord de quelques bateaux pêcheurs. Déclarons, en outre, que ledit passager, William Trollope, n'avait aucune arme à bord, qu'il s'est comporté avec une honnêteté et une délicatesse qui nous font désirer qu'il puisse bientôt retourner dans sa patrie où certainement il publiera et l'humanité des corsaires français ët la générosité des représentants de la République qui, toujours fidèles à leurs principes, trouvent dans cette circonstance-ci une occasion bien belle de convaincre le peuple anglais que ce n'est point à lui que nous faisons la guerre, mais bien à ceux qui ont usurpé sa souveraineté.
« A la Rochelle, ce 20 mars 1793, l'an II de la République française. « Signé : Guichard, Gontier, Rochefort, La-motte, plron.
« Les commissaires de la Convention nationale, chargés de la défense des côtes et ports de la République depuis Lorient jusqu'à Bayonne;
« Yu l'exposé d'autre part, requérons ceux qui sont à requérir de mettre en liberté et de laisser partir le citoyen William Trollope, Anglais, passager à bord du bâtiment l'Amitié, étant parfaitement instruits il n'a point porté les armes contre les Français et sachant qu'il est dans les principes de la Convention nationale de ne faire la guerre qu'aux tyrans qui gouvernent l'Angleterre et non à cette nation généreuse.
« Fait en commission, à la Rochelle, le 23 mars 1793, l'an II de la République française.
« Signé : Nion, Trullard. »
(La Convention renvoie la lettre au ministre
39° Lettre du citoyen Brieude, qui demande la permission de se rendre auprès de la citoyenne Bourbon dont il est le médecin; elle est ainsi conçue (1) :
Lundi,
« Citoyen Président,
« Je viens réclamer l'humanité et la justice de la Convention nationale pour qu'elle me permette de me rendre auprès de la citoyenne Bourbon, détenue à la Force. Je suis son médecin. Elle faisait des'remèdes à la campagne. Je crains qu'elle n'ait éprouvé quelque révolution. Je desire de pouvoir aller à son secours.
« Je suis avec fraternité.
« Signé : Le citoyen Brieude. »
(La Convention passe à l'ordre du jour, motivé sur ce que les Bourbons arrêtés ne sont point au secret.)
40° Lettre de Monge, ministre de la marine (2), par laquelle il envoie à la Convention les pièces relatives à la nomination d'un député et d'un suppléant par la colonie de Cay.enne.
(La Convention renvoie la lettre au comité de division, pour vérifier les pouvoirs.)
U n membre (3) annonce à la Convention nationale que la ville de Nuits a fourni un tiers en sus de son contingent, qu'elle a donné 200 livres à chaque volontaire, et se charge de pourvoir aux besoins de leur famille.
(La Convention en décrète la mention honorable et l'insertion au Bulletin.)
41° Lettre des citoyens Carnet et Lesage-Senault, commissaires de la Convention aux frontières du Nord, par laquelle ils font connaître que Dumouriez est presque abandonné et que l'état des places frontières est des plus satisfaisants ; elle est ainsi conçue (4) :
Douai, le
« Citoyens,
« La situation de notre frontière devient chaque jour de plus en plus
rassurante. Dumouriez est presque abandonné, et sera bientôt tout seul.
Les différents corps de l'armée du Nord rentrent successivement dans nos
places. Le traître a essuyé les fusillades de plusieurs bataillons; on
assure même que son cheval a été tué, et que son aide de camp est tombé
à côté de lui : il s'est enfui, mais il est revenu, dit-on, escorté par
un régiment de hussards autrichiens. Nous n'avons pas encore de détails
circonstanciés sur ces faits; mais nous vous donnons pour certain que la
grosse artillerie est déjà rentrée à Valenciennes, et
Les villes de guerre sont dans l'état le plus respectable de défense contre les surprises et les attaques de vive force; elles le siéront bientôt contre les sièges réguliers, et bien avant que les ennemis aient pu rassembler les approvisionnements nécessaires pour une pareille entreprise. Ainsi cette nouvelle trame n'aura, nous l'espérons, servi qu'à l'humiliation des traîtres; et la République en aura tiré le plus grand de tou^ les avantages, si cet événement peut enfin guérir les Français de leur idolâtrie pour les individus, et du besoin d'admirer sans oesse» Les alarmes excessives que des ignorants ou des mal intentionnés s'efforcent perpétuellement de répandre, font un autre mal du même genre, et qui n'est pas moins funeste.
« L'opération qu'il importe de consommer en ce moment est le recrutement qui s'achève : si l'on veut exagérer cette mesure plus que suffisante pour écraser tous nos ennemis, on la fera échouer elle-même; la République éprouvera des convulsions aussi violentes qu'inutiles, car les ennemis savent bien que la France ne saurait succomber que par un excès ou une mauvaise direction de ses propres efforts.
« Il nous arrive en ce moment, de l'évacuation de Malines, une multitude d'effets infiniment précieux : environ 90 pièces de canon, 7,500 fusils excellents, 2,000 canons de fusils neufs, 3,000 livres pesant de cuivre,, beaucoup d'ustensiles d'artillerie, et enfin un mortier qrevé au bombardement de Lille :. nous allons le lui envoyer, ne croyant pouvoir, au nom des représentants du peuplé, faire un présent plus agréable aux citoyens de cette superbe ville, qui a sauvé la République, et qui la sauvera encore.
« Les commissaires de la Convention nationale.
« Signé : L. Carnot, Lesaqb-Senault. »>
(La Convention renvoie cette lettre au comité de Salut public.)
(1). Citoyens, la Convention décréta, le 5 février dernier, que les receveurs de district, les employés payés des deniers de la République, et tous les fonctionnaires publics ou élus par lé peuple, seraient tenus de produire un certificat de civisme, donné par le Qonseil général de la commune du lieu de leur résidence, vérifié et approuvé par les directoires de district et de département.
Il y a un mois que je fis la motion d'étendre cette sage disposition à tous les Français pensionnés par la République : vous la renvoyâtes au comité de législation pour en rendre compte incessamment.
Cet objet, très pressant dans les circonstances actuelles, demeure néanmoins enseveli àyec une infinité d'autres affaires dont votre çomité se trouve surchargé.
Cependant, citoyens, quels sont les individus qu'une mesure,aussi salutaire doit atteindre? La plupart des ci-devant privilégiés, encore engraissés par l'effet des prodigalités d'une cour corrompue, qui dissipatrop longtemps le fruit des sueurs et du sang du peuple. La classe d'hommes contre laquelle je^ provoque un
décret, est aussi composée de militaires de tout grade, de tout âge, qui ont eu l'infâme lâcheté de donner leur démission, de quitter, Ou de ne pas reprendre le service lorsque les dangers de la patrie qui les paie les y appelait de toutes parts.
Enfin, c'est des ecclésiastiques non employés, ci-devant séculiers et réguliers; des ci-devant religieuses, et des membres des congrégations supprimées, que je propose d'exiger les certificats de civisme, avant qu'ils puissent dorénavant jouir des bienfaits de la République,,
Citoyens, lequel d'entre nous peut se dissimuler que la plupart des êtres dont il est question détestent la Révolution; qu'ils la calomnient parce que leur fol orgueil ne peut supporter l'idée de l'égalité qu'elle enfante?
Qui ne sait pas qu'il s'est fait parmi eux des collectes perfides, pour seconder les atroces projets des émigrés?
Qui leur a dit que ces mêmes pensions, payées au Trésor national,n'ont pas servi à stipendier les armées des rebelles, qui viennent d'incendier, de dévaster les possessions çt de massacrer une partie de nos frères, les patriotes de la ci-devant Bretagne?
M'objecterez-vous qu'il existe des lois pour les en faire repentir ? Allégation futile. Ignore-t-on que la difficulté d'administrer lés preuves suivant les formes ordinaires, entraîne trop souvent l'impunité de qe genre de délits ?
Une ville entière, toute une contrée, sont moralement convaincus que tell© personne nuit à la chose publique par ses œuvres, par ses discours clandestins. Eh bien! la justice ne pourra l'atteindre faute de preuves physiques.
Pour remédier à ce mal, dira-t-on qu'il suffit d'avoir décrété que ces pensionnaires prêteront le serment de maintenir la liberté et. l'égalité ? Vaine précaution envers ceux qui se jouent avec l'effronterie la plus indigne de la foi du serment : Lafayette, Bouilïé, Dumouriez n'avaient-ils pas aussi juré d'être fidèles à la. patrie ? A Dieu ne plaise que je forme indistinctement pareil soupçon contre tous ces pensionnaires ! J'aime à penser qu'il existe parmi eux de fort bons citoyens; mais les administrations ne s'empresseront-elles pas à leur rendre justice ? Ce n'est donc que vis-à-vis des pervers que j'appelle votre prévoyance?
Représentants du peuple ! non, vous ne souffrirez plus qu'on se serve de ses propres deniers pour le faire assassiner. Vous vous hâterez d'adopter, sauf rédaction, le projet de décret suivant :
« La Convention décrète qu'après le 30'de ce mois, les Français de tout sexe qui ont des pensions de retraite, ou autres quelconques sur les caisses de la République, ne pourront les percevoir qu'en rapportant au payeur, outre les pièces exigées par les précédentes lois, un certificat de civisme, donné par le conseil général de la commune du lieu de leur résidence, • vérifié et approuvé par les directoires de district et de département. »
(La Convention, après quelques débats, renvoie cet objet à son comité de législation pour en faire un prompt rapport.)
(1) donne lecture d'une lettre qu'il a reçue du département de la.
Vendée, dans la-
Cette lettre annonce qu'il arrive de foutes parts une grande force toute prête à écarter les rebelles et à leur porter les derniers coups.
(La. Convention nationale décrète que mention honorable sera faite au procès-verbal et insérée au Bulletin, de la prudence et de la bravoure qu'ont manifestées les citoyens Foucaud et Gaudin, commandant les troupes cantonnées aux Sables- L'Assemblée décrète aussi que les habitants de la ville dè& Sables ont bien mérité de la partie ; décrète, en outre, que le comité des secours publics fera demain un rapport sur l'indemnité à accorder à la veuve du citoyen Châtaignier,, massacré par les révoltés, pour avoir déclaré qu'il voulait vivre ou mourir républicain (1).
Un membre propose et la Convention rend le décret suivant (2) :
« Lat Convention nationale décrète que quatre de ses membres se rendront aux armées du Rhin, des Vosges. et de la Moselle, pour prendre toutes les informations sur les entraves qui ont été portées au succès des armées de la République ; ces membres seront investis des mêmes pouvoirs que ceux qui ont été précédemment envoyés. lia pourront vérifier toutes les caisses, livres et magasins de la République i ils pourront examiner les comptes et l'a conduite de fous les agents civils et mili-taireis, suspendre, destituer, remplacer et faire arrêter ceux qui se seront rendus coupables,; ainsi que tous les perturbateurs de Fordre public ; ils pourront prendre toutes les mesures de salut public que les circonstances pourraient nécessiter, à la charge d'en instruire- aussitôt là Convention ; ils surveilleront l'exécution des décrets, et particulièrement de ceux relatifs aux. armées, et ils feront tontes les réquisitions nécessaires à l'exécution dé leurs mandats.
« La Convention nationale nomme pour ses députés lès citoyens Haussmann, Maribon-Montaut, Soubrany et Ruamps. »
(3). Je demande que lie conseil exécutif, en*faisant procéder aux
listes, étais et tableaux des officiers généraux, officiers de tous
grades et agents du conseil exécutif , soit tenu d'y énoncer leurs nom
et prénons> le lieu dfe leur naissance et domicile, le temps; de leur
service dans chaque grade et les qualités qufils ont pu. y déployer,
enfin la date de leurs différentes promotions. Je propose* en outre,
qu'un exemplaire die ces états, ainsi rectifiés
(La Convention adopte la. proposition de Genissieu.)
Suit le texte définitif du décret rendu (1):
« La Convention nationale, sur la proposition d'un membre, décrète que le conseil exécutif,. en faisant procéder aux listes, états efi tableaux des officiers généraux, officiers, de fous grades, civils et militaires, tant de terre que de mer, même des surnuméraires, et de tous les agents du conseil exécutif, sera tenu, d'y énoncer leurs nom, prénoms, ïe lien cle naissance et domicile^, les dates de leurs différentes nominations ou promotions, le temps de leur service dans chaque grade ou emploi, et les qualités qu'ils avaient, prenaient -Jbu exerçaient à l'époque de chaque nomination! ou promotion ; décrète que ceux des états où ces détails ne se trouveront pas, seront incessamment refaits on rectifies; ordonne que tous lesdits états seront incessamment imr-primés, et les exemplaires délivrés à chacun aes membres de la Convention ».
Un membre (2): Je demande que la section du comité de la guerre chargée de la, partie de1 l'armement des troupes, soit autorisée à présenter directement à la Convention les rapports dont elle est chargée, ainsi que les? projets de décret qu'elle croira nécessaires, sans avoir besoin de l'assentiment du comité général de la guerre
(La Convention décrète cette proposition.)
, au nom du comité de Défense gène raie, fait un rapport et présente un projet de décret pour ordonner la: miseen liberté des soldats de Formée de la Belgique qui ont quitté les drapeaux : ïe projet dé décret est ainsi conçu (3):
« La Convention nationale décrète ce qui suit :
Art. 1er.
( Le conseil exécutif provisoire prendrai toutes les mesures nécessaires pour que le» soldats de l'armée de la Belgique, que des manœuvres criminelles et des trahisons évidentes ont déterminés à s'éloigner de leurs drapeaux, les rejoignent sans délai, et l'autorise à faire mettre^ en liberté ceux desdits soldats, qui,, e» exécution de la loi, sont en état d'arrrestation.
Art. 2.
« Ordonne qu'il en sera usé de même à l'égard dés recrues qui seraient aussi en état d'arrestation.
Art. 3»
« Les soldats porteurs de congé seront mis en liberté, pour rejoindre leurs corps respectifs.
Art 4.
« Les malades seuls pourront jouir de l'effet de leurs congés.
« Il sera donné à chaque soldat qui rejoindra, un ordre de route pour son régiment, et l'étape lui sera fournie.
Art. 6.
« Il est enjoint à chaque conseil d'administration de bataillon ou de régiment, de vérifier les motifs qui auront déterminé les congés accordés par Dumouriez ; et, dans le cas où ils auraient été déterminés par une intelligence criminelle avec ce chef, les porteurs de ces congés seront dénoncés à l'accusateur public du tribunal extraordinaire ».
(La Convention adopte ce projet de décret.) (1).
Un membre, au nom du comité...... (2) fait
un rapport et présente un projet de décret pour ordonner que les soldats, matelots et sous officiers, à l'exception des officiers des trois légions dites de Luxembourg, ne seront point obligés de produire des quittances ni des certificats de résidence pour toucher du receveur des consignations, ce qui leur est dû sur le prix des biens provenant de la suscession du feu prince de Luxembourg ; le projet de décret est ainsi conçu (3):
« La Convention nationale décrète ce qui suit :
Art. 1er.
« Les soldats, matelots et sous-officiers des trois légions dites de Luxembourg, ne sont point obligés de produire des quittances d'imposition, ni des certificats de résidence, pour toucher du receveur des consignations ce qui leur est dû et adjugé sur le prix des biens provenant de la succession du feu prince de Luxembourg : les seuls officiers de ces légions seront obligés de produire des certificats de résidence seulement.
Art. 2.
« Ledit receveur dés consignations sera tenu, dans trois mois à compter de ce jour, de verser à la trésorerie nationale les portions de la somme due par la succession dudit prince de Luxembourg qui n'auront point été réclamées dans ledit délai, pour y rester à la disposition des membres de la susdite région, lesquels toucheront ce qui peut leur revenir, en se conformant aux dispositions du présent décret ».
(La Convention adopte ce projet de décret.)
(Hérault\ au nom du comité d'agriculture, fait un rapport et présente un projet de décret sur le mode de partage des biens communaux ; il s'exprime ainsi (4) :
Citoyens représentants, le premier, le plus utile des arts,
l'agriculture, après avoir longtemps gémi sous la verge du despotisme,
doit reprendre une nouvelle vie sous le règne de la liberté. Ses
premiers jours furent signalés par
On ne vit bientôt disparaître du sol qu'elle venait féconder, les restes impurs du régime féodal, fléau destructeur, qui ne nous offrait qu'un serf avili dans le citoyen estimable qui arrachait en gémissant à la terre la subsistance de ses tyrans.
Mais si nos lois ont déjà rendu à l'agriculture cette liberté qui lui permet de se livrer sans crainte à sa fertile industrie, il nous reste encore une grande tâche à remplir : nous de-, vons réparer les maux que ces abus avaient entraînés à leur suite. Le moyen, sans doute, le plus sûr d'y parvenir est de rendre à la culture, de faire rentrer dans les mains de leurs vrais propriétaires, ces biens immenses connus sous le noms de communaux. Pénétrée de ce principe, l'Assemblée nationale législative en ordonna le 14 août le partage, mais elle n'en décréta pas le mode ; et depuis cette époque les difficultés et les demandes se sont multipliées ; on a même réclamé d'un décret qu'une discussion préalable n'avait pas éclairé. U est donc utile de démontrer que le partage des communaux est commandé par la justice, l'intérêt de la République et celui de l'agriculture : ces observations fourniront quelques leçons utiles au cultivateur, et préviendront les désordres qu'une loi mal entendue pourrait produire.
Les biens communaux sont les biens de toute nature sur la propriété ou le produit desquels tous les habitants d'une ou de plusieurs communes ont un droit commun; ils peuvent se diviser en trois espèces : 1° Les communaux proprement dits, connus dans quelques départements sous le nom d'usages; 2° les biens patrimoniaux : nous déterminerons dans la suite ce qui caractérise la différence de ces deux sortes de biens; 3° les droits de lignerage, de dépaissance, etc., que les communes ont la faculté d'exercer; enfin les sursis et vacants attribués autrefois aux seigneurs par droit de déshérence, et dont la loi du 14 août a accordé le partage aux communes.
Nous n'avons pas besoin ici d'observer que nous entendons par commune toute réunion de citoyens considérée sous le rapport de relations locales, soit qu'elle forme une municipalité particulière, soit qu'elle fasse partie d'une municipalité plus considérable, et que, quoique plusieurs hameaux ne forment qu'une même municipalité, il ne s'ensuit pas que tous doivent concourir au partage d'un communal qui appartient à un seul d'entre eux.
Après cette définition nécessaire pour répandre quelque clarté sur ce que nous allons dire, il nous reste à prouver l'utilité du partage, d'après les divers aspects sous lesquels nous l'avons présenté. Nous avons dit que la justice réclamait le partage des biens communaux : pour établir cette vérité, peut-être serait-il nécessaire de remonter à leur origine; mais elle se perd dans la nuit des temps et sous le voile du régime féodal. Cependant nos anciennes lois nous prouvent que lorsque les Francs firent une irruption dans les Gaules, chaque légion des vainqueurs se partagea un canton, et laissa une partie des terres en commun, pour offrir sans doute quelque ressource à ceux qui n'avaient pu participer au partage; car les peuples sauvages sentent toute l'étendue des aroits de
l'homme aussi énergiquement que nous les raisonnons. C'est ainsi que les Oncida de l'Amérique réservant des terres pour les orphelins, et destinent leur produit à leur éducation. Enfin une partie des biens communaux est le fruit des anciennes concessions des rois ou des seigneurs, et a été donnée aux communes sous certaines redevances.
Mais, sans nous égarer dans des recherches plus judicieuses qu'utiles, sans nous perdre dans le dédale obscur de notre histoire, le seul nom des biens communaux suffit pour nous prouver qu'ils appartiennent également à tous les habitants d'une commune. Cependant le plus désastreux abus en a depuis longtemps fait la propriété exclusive des riches : le pauvre, dans l'impossibilité d'entretenir de nombreux troupeaux, se voit privé d'un droit dont le propriétaire aisé jouit seul : les revenus des biens affermés se mettent au moins imposé, et l'indigent paie la contribution du riche. « Il est temps de faire cesser cet absurde privilège; il est temps de rétablir le pauvre dans ses droits usurpés : l'humanité le réclame, la justice le commande, l'intérêt de la République l'exige. »
Détruire l'affreuse mendicité; attacher à la patrie un grand nombre de citoyens par le plus puissant des liens, celui de la propriété; faire fructifier dans des mains industrieuses des terres incultes; tel est le but que doit se proposer le législateur instruit; tel est celui auquel nous parviendrons par le partage des communaux. Le désastreux vagabondage ne viendra plus porter à la tranquillité publique les plus funestes atteintes : nous ne verrons plus les campagnes peuplées de cette foule d'êtres inutiles qui contractent l'habitude de la faiblesse, compagne de l'oisiveté. Leurs bras, qu'il auraient plus utilement employés, s'engourdissent; ils dégradent les héritages du cultivateur, détruisent les bois des propriétaires, ravagent les récoltes, et cependant vivent et meurent pauvres. Attachez ces hommes au sol qui les a vus naître ; donnez-leur la flatteuse espérance de retirer des fruits de leurs soins laborieux; transformez en propriétaires actifs des citoyens insouciants et malheureux; et vous verrez vos campagnes acquérir une nouvelle vie, et l'active industrie fertiliser toutes les parties de l'administration. Mais j'aurai prouvé que l'intérêt de la République demande le partage des communaux, si j'établis que l'agriculture sollicite cette utile opération. Pour parvenir à cette démonstration importante, parcourons d'un coup d'œil rapide l'état actuel des communaux. Il résulte des recherches faites
f>ar Turgot, qu'il existe en France huit mil-ions d'arpents de communaux, qui peuvent représenter un capital de 600 millions, et un revenu de 25 millions, s'ils étaient dans l'état de culture ou d'industrie active où l'intérêt particulier pourrait les porter. Ces communaux sont en général des terres incultes : on sent aisément combien leur défrichement augmenterait la masse des subsistances, objet intéressant, et si étroitement lié avec la félicité publique. Les communaux, mis en culture, seraient une conquête sur le néant ; des terrains stériles deviendraient des champs productifs, et des lieux couverts de fange et de bruyères se revêtiraient d'utiles moissons.
Lorsque l'on parcourt les champs avec l'œil
observateur du philosophe, on voit avec douleur, à côté d'une terre cultivée, un sol voué à une affreuse stérilité. Ces terrains infertiles sont ces communaux immenses que personne n'entretient, parce qu'ils appartiennent également à tous : aucun habitant n'y attachant en particulier l'idée de propriété ne pense point à les améliorer par des réparations utiles; chacun au contraire les dilapide, en use sans réserve et sans précaution, et par des usurpations cachées tâche d'augmenter sa propriété.
Ces empiétements, insensibles d'abord, se font enfin sentir par la diminution de l'héritage commun, et alors les réclamations se manifestent, les troubles naissent, et les municipalités se consument en procédures inutiles, qui propagent les haines et les divisions,
U y a longtemps que l'utilité du partage des communaux est reconnue par les cultivateurs intelligents. L'ancien gouvernement s'en était occupé à diverses reprises; mais des obstacles insurmontables s'opposaient à l'exécution de ce plan utile, les chaînes du règne féodal et les excessives prétentions des ci-devant seigneurs. Malgré donc les réclamations, ces terrains immenses sont restés comme abandonnés à eux-mêmes sous le rapport de la culture, et livrés à une espèce de pillage de la part des usagers. En prononçant le partagé des communaux, vous devez vous attendre à une objection importante : Que deviendront, dira-t-on, ces troupeaux nombreux qui ne pâturent que dans les communaux, où ils paissent ensemble sous la garde d'un même berger?
Peut-être, pour répondre à cette objection, il suffirait de rappeler l'exemple des lieux où il n'existe point de communaux; mais la routine est aveugle, et la conviction ne suffit pas pour en détacher celui qui s'en est rendu l'esclave. En Angleterre, où l'agriculture est portée à un degré de perfection dont nous sommes éloignés, où l'éducation des bestiaux est un objet principal des soins du gouvernement, depuis longtemps les communaux ont été partagés. On y voyait autrefois des terrains incultes, appartenant à une société d'habitants; mais dans le moment où le peuple anglais reprit ses droits usurpés et où il brisa ses chaînes qu'un ministre despote cherche encore à lui donner, il sentit que l'agriculture était la première richesse d'un Etat; et que pour qu'elle obtînt l'activité qu'elle devait avoir, il convenait de rendre à la culture un sol inutile, et de transformer en propriétaires vigilants, d'insouciants usagers. La voix du préjugé se fit entendre, celle de la raison l'étouffa; et depuis cette époque, la masse des subsistances a doublé en Angleterre, et l'Europe entière est devenue tributaire de ses manufactures.
Frédéric, dont la postérité juste estimera peu les prétendues vertus et la royale philosophie, mais dont elle saura apprécier les connaissances en administration, s'empressa d'encourager, dans ses Etats, le dessèchement des marais et le partage des communaux ; il exempta de l'impôt, avança même de l'argent à ceux qui formaient ces entreprises utiles. Bientôt il fut récompensé de ses soins; des champs voués à la stérilité devinrent des plaines fertiles; et des villages s'élevèrent
dans les lieux qui servaient de retraite aux animaux malfaisants. Mais la raison se joint ici à l'expérience. Je ne parlerai pas d'abord des communaux qui consistent en marais. Les hommes que le malheur condamne à vivre sur le sol qu'ils avoisinent, et à y chercher une subsistance précaire, traînent en général une vie languissante et malheureuse, et ne la communiquent qu'à des êtres pour qui elle doit être un fardeau.
Une figure pâle, un corps faibli, fruit des exhalaisons méphitiques et pestilentielles qu'ils hument, sollicitent l'administratëur philosophe de réparer les torts de la nature, et de convertir en prairies, riches et peuplées, des lieux qui semblaient être le domaine de la mort et de la stérilité. C'est dans ces marais inconsidérément dépouillés, ouverts avant le temps, habituellement surchargés d'un grand nombre d'animaux, que fermentent les maladies épizootiques qui désolent trop souvent nos campagnes; mais généralisons davantage nos idées. Les terrains incultes sont ce qu'étaient autrefois nos meilleures terres : en effet, qu'on laisse le meilleur champ sans le travailler, peu à peu les eaux pluviales entraîneront les terres à la superficie, et laisseront à découvert les pierres et les cailloux; la croûte durcira; de chétives plantes végéteront çà et là.; les lichens couvriront les cailloux; les mousses et autres plantes de cette famille s'étendront sur le sol; l'herbe n'y croîtra plus, et l'air atmosphérique qui est au-dessus ne recevra plus ces émanations précieuses qui portent la vie et la nourriture aux plantes.
Dans les pâturages communs, foulés constamment par les pieds des animaux, la terre se durcit au point que les racines ne peuvent plus la pénétrer; les herbes dont les tiges sont sans cesse coupées, dont la végétation est sans cesse dérangée ou contrariée, dépérissent insensiblement et s'amaigrissent. Les bestiaux y pâturent dans toutes les saisons de l'année, sans interruption. Les pluies de l'hiver et du printemps amollissent le terrain; le bétail est obligé de parcourir un grand espace pour y trouver une chétive subsistance; dans ces courses multipliées, il piétine le ter-nain frais et humide, le délaie, le pétrit et le ravage. Les chaleurs de l'été, venant à frapper sur cette terre durcie par le piétinement dès bestiaux, desséchent et brûlent jusque dans la racine l'herbe qui la recouvre. Aussi ces terrains immenses ne sont-ils couverts que de troupeaux maigres et décharnés; et il ne serait pas difficile de prouver que trois arpents seméis en trèfle, en luzerne ou en navets, nourriront un plus grand nombre de troupeaux, que vingt arpents de communaux. Mais, comment suppléer, me dira-kon, aux avantages que l'on retire des communaux, pour la nourriture des bestiaux ? Comme les Normands et les Anglais y ont suppléé eux-mêmes, en faisant des prairies artificielles, qui ont davantage de renouveler les sels fécondante de la terre par l'espèce de repos qu'elle trouve dans ce changement de culture; en semant le trèfle et autres herbages avec les avoines et les orges, en faisant par ce moyen, de nos inutiles jachères, des prairies abondantes et fertiles, nos troupeaux ne languiront plus dans les communaux qui ne sont pour la plupart que des forêts dégé-
nérées, hérissées de broussailles et d'une infinité de plantes vivaces qui, tout amaigries par la mousse, offrent de tous côtés une image expressive de la stérilité et de la misère profonde des possesseurs communs, et dont la teinte olivâtre annonce la dégénération.
Il existe encore d'autres moyens pour augmenter le nombre des bestiaux, que votre comité vous proposera dans la suite : favoriser les échanges des terres, encourager la clôture des propriétés, apprendre aux cultivateurs à croiser les races, leur enseigner à ne point renfermer les bêtes à laine, même dans les saisons les plus froides, accorder quelques récompenses à celui qui cultivera le mieux ces plantes légumineuses qui servent en Angleterre à entretenir de nombreux troupeaux; telles sont les ressources que l'absurde préjugé peut seul ne vouloir pas reconnaître.
Il est cependant des terrains secs et arides, dira-t-on, qu'il est inutile de partager. Il est des localités où le partage pourrait peut-être devenir funeste. Un dilemme servira de réponse à cette objection : ou l'intérêt de la majorité des habitants réclamera que les biens demeurent en commun, ou il en exigera le partage. Dans le premier cas, votre comité ne vous proposera point de contraindre à partager les lieux où la majorité des habitants s'y opposerait; dans le second cas, je ne vois pas pourquoi on sacrifierait les intérêts dui plus grand nombre des copropriétaires à celui de quelques-uns: d'ailleurs, il y a bien peu de terrains qui ne soient susceptibles de recevoir quelque genre de culture : si le blé exige une terre forte et grasse, la vigne se plaît dans un terrain caillouteux, l'olivier croît dans des terres argileuses et le chêne étend: ses racines dans les crevasses des rochers. Le partage même des lieux propres à la seule5 dépaissance de ces lieux qu'aiment à parcourir la chèvre et le mouton, doit produire un effet désiré. On évitera par là la confusion des troupeaux, qui occasionne ordinairement ces cruelles épizooties, destructives de l'agriculture dans les sources qui la fécondent.
On ne verra plus un troupeau nombreux livré à l'invigilance d'un pasteur unique et insouciant. Economie routinière, désastreuse dans ses effets, et que paie bien cher le pro^ priétaire peu instruit.
L'éducation des bestiaux demande des soins* ils ont besoin qu'un berger attentif les surveille, les défende contre les attaques des animaux destructeurs, prévienne leur maladie et travaille à leur guérison.
On objecte enfin que si les biens communaux sont partagés, on ne pourra plus acquitter, avec leurs revenus, les charges locales.
Nous aurons occasion de revenir sur cette objection, nous observerons seulement ici que les charges locales sont une imposition; que les impositions doivent être proportionnées aux fortunes; que les biens communaux appartiennent également à tous, aux pauvres comme aux riches.
Ainsi en payant les charges locales sur le» fonds communaux, le pauvre paie autant que le riche. Je demande si c'est là.ce qu'on nomme égalité.
Après s'être convaincu de l'utilité du partage; après avoir soumis au creuset de la dis-
cussion la loi du 14 août, votre comité s'est occupé de remplir la tâche importante que cette loi lui avait laissée.
Il a d'abord cherche à définir d'une façon précise ce qu'on appelait un bien communal. Je vous ai déjà présenté cette définition ; nous en avons conclu que tous les biens communaux qui, par leur nature, pourraient être partagés, devaient l'être. Cette loi générale sera cependant susceptible de quelques exceptions; nous vous les rappelerons dans la suite. I-î est temps d'aborder la question principale qui nous a été envoyée.
De quelle manière le partage se fera-t-il ?
Divers modes nous ont été présentés; ils sont l'objet des réclamations des corps administratifs et particuliers. Ils ont été discutés dans votre comité,, il doit vous les rappeler pour vous mettre à même d'apprécier ces motifs et prévenir des débats inutiles;
Premièrement :
On a proposé le partage au marc la livre de la contribution foncière; c'est avec peine que nous fixons un instant vos regards sur cette prétention absurde. Loin de nous l'idée de vouloir attaquer le droit sacré de la propriété, ce droit que le contrat social doit garantir à l'homme civilisé; nous le respectons,, mais nous n'en ferons jamais le prétexte d'une injustice. Serait-ce, je le demande, respecter les propriétés que de dépouiller le pauvre de la sienne, pour en revêtir l'homme opulent ? Serait-ce les respecter que de faire^ du bien de tous, la propriété exclusive de quelques-uns %
Tous les habitants d'une commune ont un droit égal aux biens communaux; tous doivent avoir un droit égal au partage. Les propriétaires diraient-ils, pour fonder leurs prétentions, qu'aujourd'hui ils en avaient seuls la jouissance 1 Quoi. 1 des abus deviendraient des titres 1 et parce que le pauvre a jusqu'ici été opprimé, il devrait continuer de l'être 1
Je m'arrête : de pareils paradoxes ne peuvent soutenir l'œil impartial de la justice. Nous avons donc rejeté tout partage, à raison des propriétés, nous n'avons pas cherché de termes moyens. Mais, forts des principes dfune exacte équité, nous avons cru qu'un bien qui appartenait également à tous, devait être partagé entre tous.
On nous a ensuite pr-oposé le partage par ménage : au premier aperçu, ce moyen paraissait présenter moins d'inconvénients et conforme auxprincipes de la justice; il était même fondé sur les usages locaux de plusieurs communes de la République : mais votre, comité l'a trouvé onéreux pour le pauvre, et injuste dans ses conséquencesj et ces motifs lui ont suffi pour le rejeter; et certes le riche en général fait plusieurs ménages avec ses enfants; le pauvre n'en forme qu'un, la même chambre sert de demeure à l'indigent et à sa famille, et il ne connaît pas l'art malheureux de se trouver logé à l'étroit dans un immense palais.
Après cette première observation, qui ne trouvera pas sans doute de contradicteurs, il est un autre raisonnement plus déterminant encore : tous les habitants sont également propriétaires des communaux, peu importe qu'ils aient un ménage.
Leur droit n'en acquiert point une plus grande force.
Enfin, le partage par feux est avantageux
aux célibataires, et onéreux aux pères de famille ; cependant, c'est à cette classe de la société que la loi doit des encouragements.
Nous n'avons pas besoin de motiver davantage cette vérité politique. Si la population est. la richesse d'un Etat; si les- bonnes mœurs sont la base d'une République; si on ne doit plus voir sur son territoire des citoyens qui, aux douceurs d'être époux et pères, préfèrent la crapuleuse gloire d'être corrupteurs ou corrompus; si un père de famille a plus de besoins qu'un inutile célibataire, nous avons suffisamment démontré le principe qui a dirigé nos déterminations. Le partage par tête nous a paru plus juste, plus favorable aux pauvres, plus avantageux aux pères de famille, et nous n'avons pas hésité à l'adopter.
Avant de discuter davantage les motifs qui ont déterminé notre manière de voir, nous devons vous faire part encore d'un autre mode, de partage qui nous a été présenté, et qui, plus favorable en apparence aux indigents, doit à ce titre fixer toute votre attention : je veux parler du partage à raison inverse des propriétés.
Votre comité s'est longtemps arrêté à discuter le mode : il aurait désiré que les principes d'une stricte justice et les difficultés d'une interminable exécution ne le forçassent pas à le rejeter.; et d'abord, tous les hommes sont égaux en droits : tout bien qui appartient à tous,, doit être également partagé entre tous. Ces principes sont incontestables : comment d'ailleurs tirer la ligne du démarcation qui séparerait les copartageants ? Elle eût dû varier pour chaque département : tel est dans un lieu riche avec 30 arpents de terre qui, avec la même propriété, serait pauvre dans un autre. Dans la même commune, le propriétaire de 5 arpents de bon terrain est quelquefois plus riche que celui qui en possède 20 de mauvaise. Enfin, on peut être très riche, et n'avoir pas de propriété. Le fermier est souvent plus riche que le propriétaire dont il exploite le bien. Le commerçant, le capitaliste, l'artisan même, ont quelquefois de la fortune, sans avoir de propriétés. Dans les pays de petite culture, presque tous les manouvriers de campagne sont propriétaires, et n'en sont pas moins quelquefois dans l'indigence : la contribution même n'aurait pu servir de base à cette opération; la répartition en est souvent injuste. Les calculs sur lesquels est établie la contribution mobilière, présentent les résultats les plus inégaux, surtout pour les campagnes. En adoptant ce moyen, les difficultés se seraient donc multipliées; et en croyant avantager le pauvre, on lui aurait effectivement nui, puisqu'on aurait retardé le partage dont son intérêt réclame la prompte exécution.
Nous avons cru parvenir au même but, en adoptant, le partage par tête, en en excluant tous eeux qui, quoique possesseurs d'une propriété dans une commune, n'en seraient pas habitants. La suite enfin des mesures que nous vous proposerons dans ce travail, prouvera que, si nous n'avons pas cru que la justice, l'intérêt de l'agriculture, le bien même du pauvre nous permissent d'adopter un mode source intarissable de procès et de discus* sions, nous nous sommes fait un devoir de le réintégrer dans tous ses droits, et de le faire
jouir de cette égalité précieuse dont il est temps qu'il ressente les heureux effets. Nous nous sommes donc déterminés pour le mode de partage par tête. Il suffirait sans doute, pour justifier ce système, d'établir qu'il est plus favorable à la classe indigente. En effet, le pauvre en général a plus d'enfants que le riche : il n'a pas appris à regarder comme un malheur une famille nombreuse; il n'a pas appris à étouffer, par calcul ou par satiété, les plus doux penchants de la nature. Il suffirait de cette vérité, qu'on ne contesterait pas; mais si on y joint qu'un bien communal étant le bien de tous les habitantSj ils y ont des droits, quels que soient leur âge et leur sexe, la voix de la justice étouffera toutes ces astucieuses réclamations.
Multiplier les propriétés a été le but de la loi; le mode que nous vous proposons est celui qui y parvient le plus sûrement. Quel plaisir pour un jeune citoyen, d'aller faire ses premiers essais sur un sol qui lui rappellera ce qu'on fait pour lui les lois quil doit chérir? Il dira en y exerçant ses forces : « C'est pour moi que je travaille; l'arbre que je plante, je le verrai s'élever avec moi, et ses fruits ne seront pas recueillis par un autre. » Si son champ est mieux cultivé que celui de son jeune ami, cet intéressant succès lui procurera la plus flatteuse jouissance ; une. douce émulation s'établira entre eux; leurs jeux deviendront des travaux utiles. Ah ! combien de fois, en voyant croître l'herbe qu'il aura semée, il s'écriera dans sa joie : « Et moi aussi je suis cultivateur. » Ce tableau, sans doute, ne paraîtrait pas fantastique à celui qui a étudié le cœur de l'homme, et qui sait diriger ses penchants. On vous objectera peut-être que le motif subdivisera trop les propriétés ; d'abord, en ordonnant le partage des communaux, la loi a voulu multiplier les petits propriétaires, et non pas faire de grands tenanciers : La culture gagnera à cette subdivision, puisque les petites propriétés sont toujours mieux cultivées que les grandes.
Enfin cette subdivision ne sera dans le moment qu'apparente, puisque plusieurs portions échéant'à la même famille n'en seront réellement qu'une.
Après avoir posé les premières bases,, il nous a fallu fixer ce que donne la qualité d'habitant. Nous avons cru que tout citoyen français, domicilié dans une commune un an avant la promulgation de la loi du 14 août 1792, soit qu'il fût absent ou présent, devrait être réputé habitant et aurait droit au partage pourvu qu'il n'ait pas quitté la commune un an au moins avant la promulgation de ladite loi, pour aller s'établir dans un autre lieu.
Cette distinction claire et précise nous a paru lever toutes les difficultés : point d'exceptions, les peuples libres n'en connaissent pas; tous les hommes sont égaux à leurs yeux : toute distinction de classe admet une différence que la nature proscrit; c'est ainsi que se sont établis les privilèges et les privilégiés. On n'a pas manqué, dans l'origine, de prétextes pour colorer ces injustices, et elles avaient pris un tel empire qu'on ne cherchait plus à les pallier. Il existe encore dans quelques départements un reste de ces absurdes distinctions qui ne doit plus souiller le sol
de l'égalité : je veux parler de la différence établie entre les bourgeois et les manants. L'association des bourgeois commença en Alsace en 1700; alors on y était admis, moyennant une rétribution de 50 sols.
Cette rétribution augmenta graduellement; enfin, en 1739, elle fut élevée à 9 livres. Alors cette société chercha à se faire reconnaître par des arrêts du Conseil ; elle les obtint et devint à peu près une classe mitoyenne entre les ci-devant nobles et leurs vassaux. On vit donc régner en France les mêmes vexations qu'en Pologne; les bourgeois payaient des droits à leurs ci-devant seigneurs, et les citoyens qu'on nommait manants étaient obligés de payer des redevances aux bourgeois, pour pouvoir commercer, travailler et user des communaux.
L'aristocratie nobiliaire a disparu, mais l'aristocratie bourgeoise subsiste encore dans ces départements; et lorsqu'on a parlé du partage des communaux, les bourgeois ont rappelé leurs usurpations, qu'ils ont nommées leurs droits.
Ils ont voulu que les manants ne pussent point être admis au partage : quelques-uns cependant ont consenti à les élever jusqu'à eux, pourvu qu'ils leur payassent un droit d'entrée. Vous sentez que votre comité ne s'est point arrêté à ces puériles distinctions, il n'y a plus en France ni nobles, ni bourgeois, ni manants; on n'y doit plus voir que des citoyens ; le nom de Sparte est encore déshonoré par le souvenir de ses ilotes. Les domestiques sont même appelés au partage.
Nous ne concevons pas pourquoi on pourrait les en exclure : les raisons qui les ont fait priver de leurs droits politiques n'existent plus ici. Rendons-les propriétaires, et nous en diminuerons le nombre.
Nous verrons moins de ces êtres oisifs qui contractent dans la paresse l'habitude pernicieuse du vice. On verra plus de monde dans les campagnes, et moins dans les antichambres.
Ces principes fondamentaux sont suivis de quelques articles de détails qui n'ont pas besoin d'une longue discussion.
Le fils de famille est censé domicilié dans la maison paternelle jusqu'à 21 ans : le père jouira de la portion de son fils jusqu'à 14 ans : à cet âge elle lui sera restituée; alors il a acquis la force nécessaire pour la cultiver; et on ne doit pas oublier qu'un père n'a que le droit de surveiller, et non pas celui de s'approprier les biens de son fils.
Le domicile d'un citoyen est dans le lieu où il a sa principale habitation. Les orphelins et les enfants naturels, cette classe intéressante, en faveur de laquelle depuis longtemps la philosophie élève inutilement la voix, a fixé nos regards.
Nous lui avons accordé tout ce que la justice réclame pour elle. Heureux, si nous avions pu faire davantage ! C'est à vous, représentants d'un peuple libre, à déterminer cet ouvrage. Jusques à quand la voix du préjugé étouffera-t-elle le cri de l'humanité outragée? Jusques à quand insultera-t-on à la morale, en se parant de son nom ? Quoi ! On servirait les mœurs en vouant à la misère une classe de citoyens innocents ! Les faiblesses du sentiment seraient des crimes, et la vie pourrait encore être un fardeau pour un
Français 1 Mais je m'écarte de mon sujet; hâtons-nous d'en reprendre la suite. Appelés au partage, les défenseurs de la liberté ne pourront surveiller la portion qui leur écherra; la patrie doit veiller pour eux, tandis qu'ils combattent pour elle. Les officiers municipaux seront chargés de ce dépôt précieux : élus du peuple, ils en sentiront l'importance. Ce n'est point une récompense que nous avons cru offrir à nos généreux défenseurs; la nation s'acquittera envers eux de la dette qu'elle a contractée. Nous n'avons voulu établir aucune distinction; elles peuvent toutes devenir funestes. Les premiers privilèges furent accordés à la vertu, les seconds l'ont été à la faveur; mais nous avons veillé à la conservation de leurs droits : tandis qu'ils défendent nos propriétés, cultivons les leurs, et qu'ils trouvent des économes vigilants dans les Français pour lesquels ils exposent leur vie.
Ces diverses propositions auront sans doute peu de contradicteurs : il en est une autre qui, ayant été l'objet de réclamations multipliées, trouve ici naturellement sa place : les propriétaires forains seront-ils admis au partage? Cette question ne présente pas de doute pour les pays où ils n'avaient aucun droit à l'usage des communaux; mais elle devient litigieuse pour les départements où la taille était autrefois réelle, et où les habitants dit forains avaient les mêmes droits que les manants à l'usage des communaux.
Yotre comité n'a pas cru cependant devoir les admettre au partage. Les communaux sont les propriétés des habitants seuls; leur dénomination, les actes de concession qui nous restent établissent cette importante assertion.
Si des édits et des arrêts ont admis les propriétaires forains à leur jouissance, les motifs qui leur ont servi de base, ne peuvent être ici invoqués. On pensera que l'intérêt de l'agriculture demandait que tous les propriétaires fussent admis à la dépaissance commune; _ on voulut éteindre les procès que leur exclusion pourrait entraîner; on crut que, participant aux dépenses communales, ils avaient droit aux avantages communs : tous ces motifs cessent dans le moment où I'od restitue à leurs véritables propriétaires les biens communaux.
On ne peut invoquer contre eux leur consentement qu'ils n'ont jamais donné; car, en permettant que les propriétaires forains jouissent comme eux, ils n'ont jamais cru les admettre au partage av c eux; d'ailleurs, le but de la loi est de multiplier les propriétaires : or, si on admettait les propriétaires forains au partage, ce but serait manqué, car on ne ferait qu'augmenter les propriétés de quelques citoyens. Le même cultivateur pourrait concourir au partage dans 50 communes; plus on serait riche, plus on aurait de portions, et nous n'aurions offert aux pauvres qu'un illusoire. Ces mêmes motifs nous ont déterminés à juger de nul effet les modes de partage fixés par les actes ou les usages locaux lorsqu'ils seraient contraires à la présente loi.
Ouvrage de la féodalité, ces titres, ces usages en portent l'empreinte, on y a presque toujours oublié l'intérêt de la classe indi-
gente, pour ne s'occuper que des puérilités féodales.
Toutes les coutumes doivent plier devant la loi; elle doit être la même pour tous les Français : ils ont les mêmes droits, et cette bigarrure révoltante de lois romaines, gothiques et saxonnes, ne doit plus souiller le code d'une république une et indivisible.
L'Assemblée nationale législative avait décidé que la portion qui écherrait à chaque copartageant, lui demeurerait en toute propriété. En adoptant ce principe, nous avons cru cependant devoir y porter une modification.
Les communaux sont un patrimoine immense rendu à des héritiers légitimes après des débats ruineux, et la longue oppression du plus fort contre le plus faible. La loi leur rend leurs biens usurpés; mais elle ne doit pas borner là sa vigilance paternelle : il faut qu'elle évite de ne leur offrir qu'un bien passager, et qu'elle les prémunisse même contre les dangereuses tentations du besoin et de l'oisiveté. Le pauvre s'attache avec ardeur à la propriété qu'il a, mais il compte pour peu de chose celle qu'il n'a pas encore cultivée. En proie à des besoins renaissants, il sera bientôt tenté de vendre sa portion à quelque riche propriétaire qui la convoitera; et ce qui devait faire le patrimoine des pauvres de tous les temps, se rejoindra à celui des riches pour une faible rétribution qu'obtiendront les pauvres du moment; au lieu de diviser les propriétés, nous les amoncèlerions dans une même main; le malheureux imprévoyant, soit par besoin, soit par paresse, préférera une somme qui lui procurera une jouissance momentanée, à une propriété qu'il serait obligé de cultiver. Il faut transiger avec les vices : dans une république naissante, on régénère plutôt les lois que les mœurs. Convaincu de cette vérité, le législateur d'Athènes défendait au pauvre de vendre le terrain qu'il cultivait : Solon voulait par là éviter la trop grande inégalité des richesses territoriales; en attachant le pauvre à la culture de son héritage, il cherchait à le rendre meilleur citoyen.
Imitons la sage prévoyance du philosophe de la Grèce, et évitons le spectacle qui se présente dans quelques communes où déjà le partage s'est opéré, et où les pauvres se sont empressés d'aliéner la portion qui leur était échue. L'agriculture d'ailleurs souffrirait de ces aliénations particulières. La réunion dans un petit nombre de mains, d'un bien communal, en retarderait le défrichement; la division en plusieurs petits propriétaires en hâtera la culture; tous vont s'empresser de déployer toute leur activité, toute leur industrie, pour en retirer quelque moyen de subsistance.
On nous objectera peut-être qu'en empêchant d'aliéner, on établit une espèce de substitution : nous répondrons qu'en abolissant le droit de substituer, le but du législateur a été d'arrêter l'accumulation des fortunes dans une même main; et que pour parvenir au même but, il faut ici prendre une marche contraire.
On observera encore que nous portons des limites injustes au droit de propriété : mais nous répondrons que personne n'a encore de propriété individuelle sur les communaux;
car ce qui appartient à tous n'appartient à aucun en particulier. C'est donc par l'effet de la loi que les habitants acquerront aujourd'hui cette propriété : la loi peut donc leur imposer des conditions que leur intérêt même commande. Cependant, toujours fidèles aux principes, nous avons cherché à les concilier avec la prévoyance qu'exigent les circonstances où nous nous trouvons : nous n'avons mis d'autre restriction à la propriété entière de la portion de communal qui écherrait à chaque habitant, que celle de lui défendre de l'aliéner pendant les dix ans qui suivront la promulgation de la loi : excepté qu'il ne change de domicile, car dans ce cas il serait injuste de l'obliger à conserver une portion de terrain qui lui deviendrait inutile, puisqu'il ne pourrait plus la faire valoir.
Nous avons cru, par là, prévenir tous les maux qu'une liberté sans restriction aurait pu entraîner. Avant cette époque, une utile régénération dans les mœurs, une amélioration dans le sort de l'indigent, rattachement qu'il aura contracté pour une propriété qui sera son ouvrage, tout nous rassure contre les abus que nous voulons éviter dans ce moment.
Ce n'était point de l'intérêt seul d'une partie de la société que nous devions nous occuper; celui de l'agriculture sollicitait notre attention. Quoique nous ayons démontré que le partage des communaux était en général utile, il est cependant possible que dans quelques parties de la République il présente des inconvénients. La loi ne peut pas les prévoir, mais elle a un moyen de les prévenir : c'est à ceux qui ont droit au partage, à prononcer s'il leur est avantageux; membres d'une même famille, ils doivent décider de leurs intérêts. Si la majorité veut le partage, il sera effectué; car alors on ne peut pas sacrifier les intérêts du plus grand nombre à ceux de quelques-uns. Laissons au peuple à examiner ce qui lui est utile : son sens toujours droit le conduira au but, et il s'égarera bien plus difficilement que ceux qui estiment tant leur philosophique raison. Les habitants assemblés statueront sur la destination qu'ils veulent donner à des biens qui leur appartiennent également à tous. Il a fallu cependant les prévenir contre la séduction : l'égoïsme est si astucieux dans ses moyens, si fécond dans ses ressources, qu'on doit se mettre en garde contre ses efforts ^ les deux tiers des voix seront nécessaires pour déterminer que le partage n'aura pas lieu.
Cette idée simple, qui s'offrait naturellement à l'esprit a cependant trouvé quelques contradicteurs. On nous a objecté la lettre de la loi du 14 août : Nous répondrons que cette loi n'a fait que décréter un principe; qu'elle n'est point entrée dans les détails; que rendue sans discussion, elle n'a pu envisager la question sous ses divers aspects. On nous objecte encore La crainte que les riches, intéressés à ne point partager, ne séduisent la majorité de l'assemblée, et ne l'engage à porter une décision contraire à ses vrais intérêts. Nous avons déjà prévu cette objection, et nous y avons répondu.
Mais nous observerons que c'est toujours en parlant de la facilité du peuple à être trompé qu'on lui a donné des fers; que c'est sous ce fallacieux prétexte qu'on l'a privé des droits que la nature lui assurait; que c'est en disant qu'il ne pouvait se gouverner lui-même,
que le despotisme l'a écrasé. Rendons enfin justice au peuple, et que les sophismes disparaissent devant les vérités républicaines. D'ailleurs, quoique le partage ne soit point décidé aujourd'hui, l'assemblée des habitants ne se liera point à ne pas le prononcer dans la suite; ainsi on aura bien peu d'intérêt à multiplier les soins et les intrigues pour obtenir une détermination qui pourra être changée.
Les frais du partage seront supportés par les copartageants. Ils seront tenus, avant d'y procéder de racheter les redevances dont pourront être grevés les biens communaux, et qui ne se trouvent point comprises dans la suppression des droits féodaux. Ils seront encore obligés, avant de partager leurs biens patrimoniaux, de justifier qu'ils ont acquitté leurs dettes : la loi du 5 décembre 1791 leur en faisait un devoir. Cette loi a déjà été exécutée dans plusieurs communes.
En effet, les biens patrimoniaux étant le gage des créanciers des communes, le partage n'en peut être autorisé que lorsqu'on aura rempli ces engagements. Il serait injuste de priver des créanciers de leur hypothèque, de laisser peser sur la race future des dettes qu'elle n'anrait pas contractées, après lui avoir ôté toutes ses ressources pour les acquitter.
Il est ici important d'établir, d'une manière précise, la distinction qui existe entre "un communal et un bien patrimonial; cette distinction qui existe dans toutes nos lois, dans toutes nos coutumes, doit être précisément définie, pour éviter les procès que le défaut de définition a déjà fait naître. Tout terrain soumis à la compascuité, c'est-à-dire dans lequel tous les habitants ont le droit de conduire, dans tous les temps de l'année, leurs bestiaux, est un communal. La possession en est collective; chaque habitant y a individuellement un droit. Le bien patrimonial, au contraire, n'est point soumis à la compascuité; il a tous les caractères de la nue propriété; il est celle de tous, et aucun en particulier n'y a un droit individuel. C'est ainsi que le corps politique l'a affecté au paiement des dettes qu'il a contractées, tandis >qu'il n'a point puy hypothéquer les communaux.
Mais c'est trop insister sur cet objet : il a été prévu par la loi; son exécution a déjà produit une infinité de ventes; il serait injuste, il serait dangereux de la changer ! le bouleversement le plus funeste pourrait en être la suite, et préparerait d'interminables débats. On nous a proposé encore de déclarer que lors même que l'assemblée des habitants déterminerait de continuer à vivre en commun, les biens cessassent d'être >commu»aux, mais qu'ils devinssent la propriété de ceux qui actuellement auraient droit au partage. Nous n'avons pas cru devoir accepte!" cette mesure, qui pourrait entraîner les plus désastreux abus, puisque, en argumentant par conséquence, les habitants actuels d'une commune auraient pu se dire les propriétaires exclusifs de tous les édifices dont l'intérêt public réclame la conservation.
L'assemblée des habitants y prononcera elle-même sur ce que son intérêt exige; elle ne pourra se plaindre, puisqu'on s'en rapporte en entier à cette détermination. De plusieurs départements on réclame des exceptions à la loi commune du partage. Nous allons parcou-
rir rapidement celles que votre comité a cru devoir admettre, celles qu'il a pensé devoir rejeter. Les forêts ne sont point comprises dans le partage; l'intérêt général le réclame; depuis longtemps cette importante question a été discutée : elle ne peut présenter de doute pour ceux qui ont un instant réfléchi sur la nécessité de ne point dépeupler nos bois, sur l'importance dont ils sont pour la République, et sur la pénurie qui nous menace, si l'œil vigilant de l'administration n'en encourage et n'en hâte le repeuplement. Que sont devenus ces forêts immenses qui couvraient la crête de nos montagnes 1
Leurs sommets, absolument nus, ne présentent plus que des terrains arides et incultes. L'insouciant égoïsme, toujours occupé du présent, a détruit cette branche importante de l'économie rurale. Hâtons-nous de réparer les maux dont la race future est menacée; offrons des encouragements à ceux qui feront croître le chêne et le sapin sur les montagnes de l'intérieur. On sait que les forêts placées sur les ■collines, garantissent les vallons de l'influence souvent funeste des grands vents, préviennent les ravages des torrents, en divisant et en absorbant les eaux pluviales, ajoutent au domaine de la culture en formant au-dessous d'elles une couehe végétale par la décomposition des feuilles.
Nous avons aussi suspendu le partage des marais dont le dessèchement exigerait une entreprise générale; notre motif sera aisément senti. Avant de partager un sol, il faut qu'il soit en état de l'être. Dans cette espèce, le partage nuirait au dessèchement. Une foule de travaux partiels, entrepris sans ordre et sans plan, serait un temps perdu pour la culture, et pourrait même nuire aux opérations que l'ensemble du dessèchement commandera. Mais votre comité n'a point perdu de vue qu'un des premiers bienfaits de la liberté devait être le dessèchement de ces plaines marécageuses, depuis longtemps sollicité par l'humanité souffrante.
Il se propose de faire suivre ce rapport d'un travail sur cet objet; et nous renvoyons à cette époque a vous faire part de nos observations. Nous ne vous parlerons pas des autres exceptions que le décret présente; elles tiennent à la nature même des choses et ne peuvent offrir d'objections; mais nous vous devons compte de celles que nous avons rejetées; vous apprécierez nos motifs et prononcerez sur leur légitimité. On nous demandait d'abord d'excepter du partage les lieux dont on extrait la tourbe; j on craignait que les partageants, s'empressant de multiplier l'extraction, ne vinssent à épui- I ser cette précieuse ressource. Nous n'avons pas partagé ces craintes; nous avons cru que l'intérêt privé était un guide qui rarement nous égarait, que les tourbières étaient bien plus -mal placées entre les mains des communes, qui s'occupaient peu de l'amélioration, qu'entre celles des particuliers, qui, par intérêt, devraient en faire leur étude; que bien loin de produire une bien moindre quantité de cette terre bitumeuse, les tourbières partagées deviendraient d'un plus grand rapport, et que l'active industrie trouverait des ressources pour en bonifier les produits.
On nous a proposé ensuite de ne point permettre le partage des crêtes des montagnes. Ici nous devons convenir que dans quelques lieux
leur défrichement pourrait nuire à l'agriculture; en effet, les eaux ont bientôt entraîné la légère couche végétale qui les couvre, et elles n'offrent bientôt plus que des rocs à découvert, et sur lesquels il ne reste que quelques pouces d'une terre sablonneuse et sans consistance : leur dégradation produit celle des coteaux qui sont sur leur penchant; et pour un bien d'un moment on produit des maux que l'industrie même ne peut réparer.
Votre comité ne s'est point dissimulé ces inconvénients, mais il n'a point cru devoir faire de prohibition textuelle; car le partage étant une faculté et non une obligation, il a pensé que les habitants ne voudraient point consumer inutilement leurs utiles labeurs pour défricher des terrains ingrats qui se refuseraient à leur attente. Il a pensé que les localités pouvant exiger des différences, il était impossible de les préciser dans la loi, et qu'on avait répondu à tout, lorsqu'on avait déclaré le partage facultatif. On a réclamé encore l'exception pour les terres, où dans quelques départements on rouit le lin. Cette branche importante de notre commerce doit sans doute fixer notre sollicitude; elle fournit du travail à l'indigence, et des richesses à la République. Sans doute nous ne devons pas souffrir qu'on y porte les moindres entraves. ' C'est dans les étendoirs de mars que se rouit le lin le plus blanc et le plus beau, et l'intérêt de cet important commerce réclame qu'on les conserve ; mais nous faisons ici la même réponse : le partage n'est que facultatif. Les négociants auront toujours le droit d'affermer les terrains qui leur seront nécessaires ; le partage même ne leur en ôtera pas la faculté.
Serait-il juste de leur attribuer exlusiveinent un droit qui appartient à tous ? Serait-il juste de priver le pauvre de son bien pour enrichir l'homme fortuné? Cette conséquence ne peut être admise; nous avons parcouru la série des exceptions que l'on réclamait sous divers prétextes.
Il nous reste à vous entretenir d'une difficulté qui n'aurait jamais dû s'élever, et qui cependant s'est présentée. On a réclamé dans quelques lieux le partage des lais, relais et rivage de la mer .
Cette portion du domaine national ne peut être comprise dans les communaux; elle a été déclarée faire partie des biens nationaux, par un décret du 22 septembre 1790; ainsi le décret que nous vous présenterons ne préjugera rien sur leur destination, et nous vous proposerons de charger vos comités d'aliénation et d'agriculture de vous faire, dans un court délai, un rapport sur la meilleure manière d'en disposer.
U s'est encore présenté des doutes sur deux questions dont la décision n'est pas difficile, mais qui cependant doivent fixer un instant vos regards.
Le parcours donne-t-il droit au partage1? nous ne l'avons pas pensé.
En effet, le parcours qu'on ne doit pas confondre avec le droit d'usage, puisque l'un est un contrat synallagmatique, et l'autre une vraie servitude, peut être regardé comme une obligation réciproque de plusieurs communes entre elles, ou de plusieurs citoyens entre eux.
Notre loi ne préjuge rien sur son existence; nous comptons incessamment vous offrir un rapport particulier sur cet objet; il peut exis-
ter sur les communaux partagés comme sur ceux qui ne le sont pas. Nous aurons, dans la suite, occasion de vous parler du droit de com-pascuité dont jouissait quelquefois une commune sur le communal d'une autre. On nous a demandé encore si le ci-devant seigneur qui avait usé du droit de triage en vertu de l'article 4 du titre XXY de l'ordonnance de 1669, aurait encore droit au partage; nous nous sommes décidés pour la négative, car il a déjà obtenu sa portion, et il serait injuste de le faire concourir deux fois.
Après ces décisions préliminaires, nous vous proposerons quelques articles réglementaires sur la forme de l'assemblée des habitants : elle prononcera d'abord sur le partage : s'il est arrêté par le tiers des voix il aura lieu, et cette délibération ne pourra plus être changée : si au contraire les deux tiers des voix le rejettent en tout ou en partie, l'assemblée pourra arrêter la vente ou l'afferme des objets non partagés, et dans ce cas la délibération qui déterminera la vente ou l'afferme, n'aura son effet qu'après avoir été autorisé par les corps administratifs qui feront vérifier si l'intérêt de la commune exige cette mesure, et si les biens ne sont point susceptibles de partage.
Nous avons cru devoir mettre ces entraves à des moyens qu'un intérêt mal entendu, qu'une cupidité du moment pourrait faire adopter. En général, la vente des biens communaux serait un mal; elle contrarierait le but de la loi; nous avons déjà eu plusieurs fois occasion de démontrer cette vérité. Il est possible que, dans quelques cas, elle soit utile et commandée par les circonstances ; mais les cas sont rares; ils sont contraires au vœu de la loi, et il était de notre devoir d'empêcher qu'ils ne se multipliassent; la même assemblée d'habitants pourra consentir à la continuité de la jouissance en commun, et en régler le mode; dans cette hypothèse, elle ne pourra revenir sur la délibération qu'elle aura prise, qu'après avoir laissé écouler une année, et l'arrêté qui fixera le mode de jouissance commune, sera soumis à l'autorisation des corps administratifs. — Alors les propriétaires forains qui jouissaient auparavant du droit d'y conduire leurs bestiaux, continueront à en jouir; il n'y aurait pas de motif pour les en priver.
Enfin, l'assemblée des habitants terminera ses opérations par la nomination d'experts, pour procéder au partage. Des experts diviseront les lots en ayant égard à la valeur comparative du sol; ils y placeront des bornes, détermineront les chemins pour les communications nécessaires, et ceux qu'il serait utile de laisser pour parvenir à des marcs indispensables dans quelques pays pour abreuver les bestiaux, ou pour d'autres usages d'une utilité publique.
Les lots seront numérotés, tirés ensuite publiquement au sort; enfin, pendant cinq ans le droit d'enregistrement pour les échanges de portion de bien communal ne pourra être que de 15 sols; favoriser ces échanges est le moyen le plus sûr d'améliorer la culture.
Cette assertion ne sera pas contestée par ceux qui ont réfléchi sur cette partie intéressante de l'industrie agricole. Un terrain réuni est en général mieux cultivé que lorsqu'il est épars : on perd moins de terre en chemins, en
fosses, en haies. Il est plus propre à l'éduça-tion et à l'accouplement des bestiaux, qui exigent un espace d'une certaine étendue. Les Anglais ont bien senti cette importante vérité; et, c'est peut-être aux précautions qu'ils ont prises pour multiplier les échanges, qu'ils doivent les succès et la perfection de leur agriculture. Nous avons annoncé qu'il serait permis à l'assemblée des habitants de délibérer sous l'autorisation des corps administratifs, l'aliénation ou l'afferme de tout ou partie de leurs biens communaux.
Il en est qui par leur nature ne seront pas susceptibles d'être partagés. Il est donc important de déterminer l'usage qu'on fera du prix de leur aliénation ou de leur revenu. Autrefois ils servaient d'abord à l'acquit des charges locales; l'excédent était mis en moins imposé. Ce double emploi nous a paru également injuste; et quelques principes clairs serviront à le démontrer. Les biens communaux, nous l'avons déjà dit, appartiennent également à tous les habitants d'une commune; les contributions doivent être réparties entre les citoyens, en proportion de leurs facultés; que deviendrait cette égalité proportionnelle dans un ordre de choses où le pauvre paierait autant que le riche? C'est ce qui arrive lorsque l'on acquitte les charges locales, et partie de l'impôt foncier avec les revenus communaux. Car les dépenses municipales sont aussi une imposition, qui doit être répartie dans la même forme et d'après les mêmes règles que les autres.
Frappé de ces considérations, votre comité a pensé qu'après avoir prélevé sur le produit des biens communaux, les frais qu'ils peuvent occasionner, et la contribution qu'ils doivent supporter, le restant devait être également partagé par tête entre tous les habitants de la commune. La justice commande cette détermination; car ce serait violer ces premières règles, que d'employer au profit de quelques-uns ce qui appartient également à tous.
Les coupes annuelles des bois nous ont paru cependant devoir exiger] quelques modifications. Nous avons cru que la répartition devant s'en faire à raison du besoin, le partage par tête entraînerait ici des subdivisions embarrassantes, et nous lui avons préféré celui par chef de famille. Il nous aurait sans doute suffi, pour suivre cette marche, de consulter les usages locaux de presque toutes les communes, qu'il ne faut pas inutilement contrarier. D'ailleurs, ce partage se faisant ordinairement en nature, on sent que tout autre mode deviendrait embarrassant et minutieux; mais toujours pénétrés du soin vigilant que réclamait de nous l'intérêt des pauvres, nous avons voulu que chaque chef de famille, soit qu'il n'eût pas ménage, fût appelé au partage; nos motifs seront aisément sentis. Le pauvre marie ses enfants et ne se sépare pas d'eux; il n'en a ni la volonté, ni les moyens; le riçhe les établit souvent, dit-il, pour s'en débarrasser. Ce sentiment lui assurerait-il une récompense ? Nous ne vous rappellerons pas ici tous les divers Usages qui régnent dans les différentes communes, tous doivent à peu près leur origine à la féodalité; tous sont des ramifications de l'aristocratie bourgeoise. Ils doivent disparaître dans une république où tous les citoyens sont frères, où ils ne doivent plus avoir qu'un même intérêt, le maintien de leur
liberté; qu'un même sentiment, haine pour tous lçs tyrans, fraternité pour tous les hommes. Il suffira d'être chef de famille et de réunir les qualités nécessaires pour être réputé habitant, pour avoir droit au partage des coupes annuelles des bois.
Nous n'avons point ici parlé des quarts de réserve, c'est-à-dire de cette portion de bois qui n'était point coupée pendant un certain temps, et qui ne pouvait l'être que d'après les formalités que prescrivaient avec soin nos anciennes lois. L'Assemblée nationale constituante s'en était occupée; mais elle avait mis tant d'entraves, elle avait exigé tant de formalités, que les communes ne pouvaient qu'avec peine obtenir le montant du produit des quarts de réserve, qui cependant était leur patrimoine. Nous vous proposerons de charger vos comités d'agriculture et d'aliénation de vous présenter un projet de loi sur cet objet. Nous avons parcouru rapidement les difficultés que pouvait entraîner le partage des biens communaux, notre tâche n'était encore qu'à moitié remplie; il fallait enfin prévoir et mettre fin aux interminables procès que les biens communaux occasionnent. Ces procès existent, soit entre les communes, soit entre les communes! et leurs ci-devant seigneurs, soit enfin entre les communes et les citoyens.
Parcourons successivement ces trois hypothèses. : Lorsqu'un communal n'est attaché particulièrement à aucune commune, le partage doit en être fait entre toutes celles qui étaient en possession d'y faire pâturer; et ce, dans la proportion de leur population. Il n'est pas nécessaire de faire de longs raisonnements pour prouver la justice de cette décision, car où le droit est le même, les conséquences doivent être les mêmes. Mais la communauté la plus populeuse, étant présumée celle qui pouvait conduire le plus de bestiaux sur le pâturage commun, doit avoir un droit plus considérable au partage. Ce communal appartient également à tous les habitants des diverses communes usagères; si dans la division on n'avait point égard à la population, il en résulterait que les usagers ne seraient pas traités également, puisque dans le partage entre habitants, ceux de la commune la moins peuplée auraient une portion plus forte que ceux de celle qui le serait le plus. Il en doit être de même pour la division d'un communal, joui indivisément par titre, par deux ou plusieurs communes. Si cependant le titre fixait un autre mode de partage entre elles, il devrait être observé. La volonté des parties contractantes doit faire la loi dans les contrats; on ne peut suspecter des lésions dans de pareils actes : d'ailleurs, les communes auraient pu en réclamer; elles ont à s'imputer de ne l'avoir pas fait.
Il est encore une exception à la règle générale du partage entre les communes, à raison de la population, lorsqu'elles ont également contribué aux charges et aux contributions jetées sur le bien commun. Le partage doit être égal entre elles : cette présomption légale supplée le titre; elle tend à faire voir que dans l'origine leurs droits sur ce terrain indivis étaient les mêmes : quand on supporte également les charges,. on doit partager également les avantages : cet axiome incontestable décide la question que nous
traitons. Des experts procéderont au partage entre les communes, cette opération devra précéder celui qui aura lieu entre les habitants, pour ne pas y jeter de" l'embarras et des difficultés. Si les experts sont en disoords, les corps administratifs nommeront le tiers expert qui devra vider le partage. Ainsi, dans un court délai, cesseront ces jouissances indivises qui ont excité tant de procès, allumé tant de divisions intestines, et ruiné un grand nombre de citoyens par d'inutiles frais. Si une communauté a un simple droit de dépaissance, il sera important que le fond soit rédimé d'une désastreuse et litigieuse compascuité. Pour peu qu'on ait habité les campagnes, on se sera aperçu des abus innombrables que ces droits entraînaient à leur suite; on se sera perçu que, sous le prétexte de jouir d'une faculté qui lui appartenait, l'usager ravageait la terre commune, et ne songeait qu'à tirer de sa jouissance tout le parti qu'il pouvait, sans s'occuper de la dégradation du fond®. Dans cette hypothèse, des experts fixeront aussi quelle est l'indemnité qui peut être due à la commune usagère, en représentation de son droit d'usage. Ces deux mesures mettront fin à une foule de discussions qui déjà commençaient à reprendre une nouvelle force; mais ce n'est point assez d'avoir prévu les difficultés qui pourraient s'élever entre les communes, il faut aussi aplanir celles qui se multiplient entre les habitants et leurs ci-devant seigneurs; la loi du 28 août a rendu au cultivateur opprimé des droits usurpés par de longs abus. Les citoyens peuvent réclamer de ces arrêts oppressifs, fruits de l'intrigue et de la vexation, achetés de l'avarice, et rendus souvent par d'infâmes courtisanes. On ne pourra point se faire un titre des monuments de l'injustice, et on n'opposera plus au peuple des vexations anciennes, pour avoir droit de les perpétuer. Mais cette loi juste laisse encore un moyen à l'oppresseur qui pourrait rendre tous ces bienfaits illusoires : « Les terres vaines et vagues ou gastes, les marais, landes, garrigues, dont les communes ne justifieront pas la propriété, leur appartiendront, dit la loi, si le ci-devant seigneur ne justifie de ses droits, soit par titre, soit par une possession de 40 ans non interrompue ». La prescription peut donc fournir un titre au ci-devant seigneur; c'est contre cette partie de la loi que nous avons cru devoir réveiller votre sollicitude; car presque tous les ci-devant seigneurs pourraient invoquer la prescription quarantenaire, et rendre par-là inutiles les dispositions de cet article favorable aux communes : nous croyons que le ci-devant seigneur ne peuit réclamer aucun droit sur les biens dont il est ici question, s'il ne justifie de sa propriété par titre.
En effet, la présomption de propriété est dans ce cas en faveur des communes. Nous pourrions invoquer l'autorité de tous les anciens jurisconsultes, qui malgré le siècle où ils vivaient, n'ont pu se refuser à l'aveu que, dans l'origine, les Ibiens dont il est ici question, étaient la propriété des communes : nous pourrions citer les Isidore de Seuille, les Lebret, les Boissieu et lès Loiseau; nous pourrions nous étayer de l'autorité des lois romaines, et des dispositions de notre ancien code. Mais ee fatras d'érudition inutile, ne
ferait que surcharger notre travail, sans le rendre plus concluant. Nous n'avons pas besoin d'auteurs pour prouver l'absurdité de cette maxime, que les terres et possessions qui n'ont pas de maîtres, appartiennent aux seigneurs, d'est cependant ce prétendu axiome féodal qui a été le prétexte des usurpations seigneuriales : les seigneurs ont dit que ce qui appartenait à tous, n'appartenait à personne; et qu'à ce titre c'était une propriété dont ils pouvaient s'emparer : ils s'en sont investis, et ont répondu aux réclamations par le plus irrésistible des arguments, celui du plus fort. Nous avons déjà sapé une partie de cet édifice, en parlant de l'origine des communaux; il paraît démontré pour tous ceux que l'intérêt privé n'aveugle pas, que les terres qui n'avaient point de propriétaire particulier avaient été, lors du partage, laissées pour être jouies en commun, et servir à la dépaissance des bestiaux. La loi des Wisigoths (livre X, titre 1er) en fournit la preuve incontestable. Mais on me dira que les communes ont à s'imputer de n'avoir pas réclamé contre les usurpations, et que leur silence doit leur ôter tout espoir de retour. D'abord, la nouvelle loi est ici plus sévère que les anciennes; elles considéraient les communes en une continuelle pupillarité, et ne voulaient pas qu'on se fît un titre de leur faiblesse. Peut-on leur imputer leur silence, lorsque leurs plaintes ne pouvaient se faire entendre; lorsque souvent on jetait dans les fers celui qui voulait invoquer les droits lésés du peuple; lorsque des intendants les repoussaient quand elles réclamaient contre l'injustice et les vexations ? Peut-on les accuser de négligence, lorsque ceux à qui leurs intérêts étaient confiés, étaient presque toujours des créatures Ide leurs oppresseurs; lorsque les portes des tribunaux, qu'un rameau d'or pouvait seul ouvrir, leur étaient fermées? Peut-on imputer à un homme de n'avoir pas crié, quand on lui tient un bâillon dans la bouche? A quoi leur auraient d'ailleurs servi leurs plaintes, leurs juges étaient les pairs de leurs adversaires; des frais immenses les écrasaient, et la ruine de celles qui avaient voulu tenter ce recours inutile leur apprenait qu'elles n'avaient d'autre ressource que oelle de souffrir sans se plaindre.
Nous avons donc cru que pour justifier sa propriété sur des terres vaines, vagues ou gastes, landes, marais, garrigues, le ci-devant seigneur ne pourrait invoquer la prescription, mais qu'il devrait l'établir par titre.
La loi du 28 août a encore offert à votre comité un article contre lequel les citoyens réclament, et qui détruit en parti l'effet salutaire de la loi. Les articles 1er et 2 fixent les droits que les communes peuvent exercer contre leurs ci-devant seigneurs, pour rentrer en possession des portions de biens commu naux dont elles ont été privées. Il était sans doute juste de réintégrer les communes dans des propriétés dont elles avaient été dépouillées par l'effet ou plutôt par l'abus de la puissance féodale; mais l'article 3 porte : (( Que les dispositions des articles 1 et 2 n'auront lieu, qu'autant que les ci-devant seigneurs se trouveront en possession actuelle desdites portions de bois et autres biens dont les communautés auront été dépossédées; mais
qu'elles ne pourront exercer aucune action en délaissement, si les ci-devant seigneurs ont vendu lesdites portions à des particuliers non seigneurs, par des actes suivis de leur exécution. » Cet article nous a paru contraire aux règles de l'équité, car nul ne peut transmettre un droit qu'il n'a pas; or le ci-devant seigneur n'a pu faire passer sur la tête d'un autre une propriété qui ne résidait pas sur la sienne. Tout acte nul ne peut produire aucun effet. L'acte de vente passé par le ci-devant seigneur est nul, puisqu'il a vendu ce qui ne lui appartenait pas. On ne peut donc se faire un titre de cette aliénation. Enfin ce qui est contraire à la loi, dans son principe, ne peut jamais devenir valable. Le ci-devant seigneur avait usurpé les biens communaux; cette usurpation n'a pu être couverte par les actes subséquents, où les communes n'ont été pour rien, et qui n'ont été que les suites de la première usurpation à laquelle ils n'ont pas enlevé son caractère. Je demande si quelqu'un s'emparait par force de la maison d'un citoyen et la vendait, le citoyen dépouillé ne serait-il pas admis à revendiquer sa propriété, parce que l'usurpateur l'aurait aliénée? Je ne crois pas que dans aucun code cette conséquence puisse être admise. Or les communaux sont la propriété des communes; le considérant de la loi du 28 août en contient l'aveu : les seigneurs les en ont privées par l'abus du droit du plus fort; et à présent ils pourraient se maintenir dans leurs usurpations parce qu'ils les auraient aliénées? La justice se refuse à admettre un pareil principe; car de son admission il résulterait que l'usurpateur le plus adroit serait le plus heureux; que celui qui, pressentant la loi, aurait cherché à pallier sa fraude, trouverait dans cette loi le succès qu'il espérait. ' Nous ne nous étendrons pas davantage pour prouver que cet article est contraire au but que la loi se propose. Nous ayons cependant apprécié les motifs qui l'ont dicté. Elle a craint, en admettant la rigueur des principes, de ruiner une foule de propriétaires de bonne foi, de porter le trouble dans les familles, le désordre dans quelques parties de la République. Ces considérations sont sans doute puissantes. Nous avons cherché à les concilier avec l'équité, et nous avons décidé qu'on ne pourrait réclamer de ces aliénations, que dans le cas où il n'y aurait pas 30 ans qu'elles^ auraient été faites. La prescription couvrira la nullité de l'acte, lorsqu'elles seront plus anciennes. Nous avons cru aussi que, lorsque l'acquéreur aurait planté le terrain qui lui aurait été vendu, ou qu'il y aurait^ fait construire, quelque bâtiment, ce terrain devrait lui demeurer en représentation du lot qui lui écherrait en partage, s'il était habitant, sauf à lui à payer à la commune la somme qui serait fixée par les experts nommés pour le partage, dans le cas où cette portion aurait une valeur plus considérable que celle à laquelle il avait droit; et que lors même qu'il ne serait pas habitant, il pourrait conserver le terrain qu'il avait acquis, sauf l'indemnité qu'il serait tenu de payer à la commune, et qui serait fixée par les même experts. Nous lui avons enfin réservé tous ses droits contre son vendeur.
Après avoir rendu aux communes la jus-
tice qui leur était due, il nous restait à terminer les funestes discussions que font naître les droits de lignerage, de bois mort et de dépaissanoe, etc., etc., qu'exerçaient quelquefois les communes sur les biens de leurs ci-devant seigneurs. Ces usagers funestes à l'agriculture, donnent la facilité de ravager impunément les propriétés; l'usager abuse du privilège qui lui est accordé; le propriétaire ^'industrie pour le restreindre; les bois soumis à ces compascuités s'abougrissent; il est impossible de les repeupler. La dent meurtrière des bestiaux détruit les nouveaux plants, et souvent le droit de lignerage n'est que le droit d'aller arracher des arbres sains qui ne peuvent se remplacer. U est donc important de faire disparaître ces funestes servitudes. Que le sol de chaque citoyen soit libre; l'agriculture n'aime pas les entraves. Des experts fixeront l'indemnité qui est due à l'usager: ils la lui assigneront, autant qu'il sera possible, en terre; en cas de discords entre eux, un tiers choisi par les corps administratifs videra le partage. Ainsi nous tarirons cette source d'interminables procès; et nous ôterons à l'avarice et à la cupidité un moyen de tourmenter les habitants des campagnes.
Il-sera procédé de la même manière pour rédimer de oes servitudes, les terres des particuliers qui pourraient y être soumises. Ce n'est point avec leurs èi-devant seigneurs seuls que les communes, ont des débats. Les communaux en font naître entre elles et les citoyens : des usurpations, des partages illi-citement faits, en sont la cause, et on les voit tous les jours sa multiplier. Si on ne peut les prévenir, il faut au moins leur assigner un terme,. D'ici au mois de mars 1794, toutes les actions en revendication devront être formées; passé ce terme, elles ne seront plus admises. On ne pourra les faire remonter au-dessus de 30 ans. Ce terme, fixé pour la prescription, nous a paru devoir ici servir de bornes à des demandes dont les conséquences deviendraient funestes, si on les prolongeait au delà. Notre motif sera aisément senti, si on réfléchit sur les difficultés qui suivraient une détermination indéfinie. Des troubles dans les familles, des actions multipliées en garantie, une desorganisation entière dans une partie de la République, le possesseur de bonne foi ruiné pour une usurpation dont il ne serait pas coupable, et pour laquelle il n'aurait qu'une garantie souvent illusoiré; telles sont les raisons qui nous ont été déterminées : nous ne les étendrons pas davantage; elles nous paraissent de nature à ne pas présenter d'objections.
Votre comité n'a pas cru devoir borner là sa sollicitude. Depuis 1789, le peuple a, dans quelques lieux, effectué le partage ; empressé de jouir d'un bienfait çju'on lui promettait, mais qu'on ne lui donnait pas, il â devancé la loi qu'il désirait. Sans approuver les partages illicites, qui souvent n'ont eu pour causé que la cupidité, où presque toujours le pauvre a été la dupe des intrigants qui l'oppriment, en criant toujours qu'ils ne pensent qu'à lui, en les déclarant tous nuls, nous avons cru devoir y porter deux modifications, la tranquillité publique, le désir de maintenir l'ordre nous en faisait un devoir. II ne faut pas que les bienfaits de la loi diminuent la source des divisions intestines, et qu'elle ait à pleurer sur
des excès,_ lorsqu'on peut les prévenir. Le partage, quoique illicitement fait, pourra être confirmé par l'assemblée des habitants, à la majorité des deux tiers, des suffrages, Celui qui aura planté, en vignes ou en arbres, une partie d'un communal, ou qui aura bâti une maison, obtiendra cette portion pour son lot ; mais si elle est plus considérable que ■celle qui lui devait être destinée dans le partage, les experts fixeront la somme qu'il paiera, soit en terre, soit en argent, à la commune, pour cet excédent de valeur.
C'est ainsi que nous avons cru concilier l'intérêt individuel avec l'intérêt public ; faire le bien de tous, sans tourmenter inutilement aucun citoyen ; punir la cupidité, sans frapper l'ignorance ; servir l'aigriculture et exercer les fonctions intéressantes d'une paternelle justice.
Ces mêmes motifs nous ont portés à conserver les récoltes pendantes à ceux qui les avaient semées ; il serait affreux d'aller leur arracher les fruits de leurs sueurs : ce n'est point parmi un peuple 'libre qu'une pareille doctrine peut trouver des panégyristes. Nous avons terminé ces détails par valider les partages, possessions, concessions, faits en vertu des anciennes ordonnances ; la loi leur sert de garantie : on ne peut, sans injustice, y porter atteinte. Malgré ces précautions, il serait encore possible que des discussions s'élevassent ; il est important d'en accélérer la décision. Tous les procès qui auraient pour objet le mode de partage, soit entre les communes, soit entre les citoyens, seront terminés par les corps administratifs, sur simple mémoire. Cette première détermination ne trouvera point sans doute de contradicteurs. U s'agt ici de l'exécution d'une loi, et les corps administratifs, chargés d'une surveillance générale, doivent aplanir toutes les difficultés qui entraveraient sa marche. Mais, ce n'était point assez de prévoir ces légers débats qui seront rares, puisque la loi, par sa clarté, doit laisser peu de doute ; il fallait encore mettre un terme à ces interminables procès, qui existent, soit à raison de la propriété, soit à raison de la possession des biens communaux. Ici, votre comité ne doit pas vous dissimuler que ces discussions sont multipliées à l'infini ; qu'elles existent " dans presque toutes les communes, et qu'il a cru que l'intérêt ' public demandait qu'on ne suivît pas pour leur jugement les voies ordinaires. Il va succinctement vous exposer des motiis. En général, les communes ne devraient jamais plaider ; elles sont" toujours mal défendues ; personne n'apportant, dans la poursuite de leurs affaires, la chaleur de l'intérêt particulier, elles sont suivies avec lenteur, et souvent jugée» avec inattention ; les frais en sont toujours énormes. Les procès des communautés sont à présent Tunique ressource de l'avide praticien : mémoires volumineux, consultations multipliées, requêtes inutiles, rien n'est épargné pour prolonger des procédure» qui forment un revenu annuel à d'industrieux avoués. Si o» joint à ces dépenses, celles des députation», que trop souvent on cherche à perpétuer, on verra, qu'obliger les communes à plaider, c'est décréter leur ruine. Elles n'ont même aucun moyen pour pourvoir aux frais. Leur per-' mettra-t-on cfe vendre pour cet objet leurs
biens patrimoniaux? Bientôt ils seront consumés en procédures, et il ne restera plus rien aux habitants, qu'un procès qu'on aura l'art de prolonger? Leur permettra-t-on d'emprunter ? Le système des emprunts qu'on avait rejeté avec sagesse, va reparaître. Les communes se ruineront en intérêts, et l'obligation que la loi leur avait faite de se libérer, ne produira d'autre effet que de faire remplacer des dettes par d'autres dettes.
Enfin, pourront-elles imposer ces frais? Mais la contribution deviendra énorme, au-dessus des facultés des citoyens, et éprouvera dans la levée, des obstacles qu'on ne pourra vaincre. Car, il ne faut pas se le dissimuler, la justice/ quoique gratuite, est encore bien chère, et la chicane n'a rien perdu de son activité. Si donc les procès que font naître de toutes parts les biens communaux, se poursuivent devant les tribunaux ordinaires, le partage n'est plus qu'un mot dont on cherchera vainement la réalité. Déjà, de toutes parts, il nous arrive des pétitions, pour demander la permission d'emprunter ou de vendre pour fournir aux frais des procédures^ Les habitants des campagnes se laissent aisément séduire par les promesses et les espérances chimériques ; et ils sont les dupes d'un homme d'affaires intéressé, comme celles d'un charlatan fripon. Pénétré de ces considérations importantes, votre comité a cru qu'il était de votre justice, de ne point présenter aux communes un avantage illusoire, et de les faire jouir sans délai des bienfaits de la loi. L'arbitrage est le moyen le plus simple et le plus utile de déterminer ces procès : cette vérité sert de base à la loi sur l'organisation judiciaire. Il est difficile de concevoir comment les législateurs, qui avaient rendu hommage à ce principe, avaient enlevé cette ressource aux communes. Cependant la loi les empêchait d'arbitrer leurs affaires.
Quant à nous, nous "avons pensé que tous les procès quelconques, qui auraient pour objet les biens communaux ou patrimoniaux, devraient être jugés sans appel par la voie de l'arbitrage. Nous ne nous sommes point égarés dans lés formes : quelques articles simples et clairs ont suffi pour mettre à même les communes de jouir de cet utile bienfait. Les arbitres seront nommés devant le juge de paix du canton où sera située la majorité des biens. En cas de discords entre eux, le bureau de paix procédera à la nomination du tiers arbitre. Cette forme nous paraît simple, dans trois mois, tous les procès pour les communaux seront terminés. Si on nous objectait que nous nous écartons des formes ordinaires, nous répondrions qu'il faut bien les abandonner quand elles sont impraticables et ruineuses. Si on nous disait que nous devrions attendre et non pas prévenir la nouvelle orga^ nisation judiciaire, nous répliquerions que si on veut que le partage des communaux s'effectue, il faut en fournir les moyens ; et qu'en attendant un nouvel ordre de choses, les frais se multiplient, et écrasent les communautés.
Il nous avait été proposé d'attribuer la connaissance de toutes les affaires aux corps administratifs : votre comité n'a pas cru devoir adopter ce mode. H a pensé que les fonctions administratives et judiciaires ne devaient point se confondre et se cumuler dans la
même main. Le principe de la division des pouvoirs, qui est le garant le plus sûr de la liberté, nous a paru devoir être respecté avec soin et nous aurions craint d'y porter atteinte.
Avant de terminer le travail que vous nous avez imposé, nous devons vous rendre compte de quelques mesures réclamées par quelques citoyens, et que nous n'avons pas pensé pouvoir adopter.
On nous demandait de fixer un délai, après lequel on serait tenu d'avoir défriché la portion de communal qui écherrait en partage : nous avons écarté cette disposition. L'intérêt individuel, si, actif, si industrieux, n'a pas besoin de lois réglementaires : gardons-nous de la funeste manie de vouloir tout diriger, tout administrer : c'est par ce système attrayant pour les despotes, que l'ancien gouvernement a si souvent enchaîné le génie. L'agriculteur ne demande que des lumières et la liberté ; que l'administration instruise, mais qu'elle n'ordonne pas. On nous a proposé encore d'exiger un droit des habitants qui concourraient au partage ; de conserver une portion de communal pour l'accouplement des bestiaux; de fixer un maximum, c'est-à-dire que lorsqu'un communal serait d'une telle étendue que le partage donnerait à chaque ci-toyen'une portion plus forte que le taux le plus élevé déterminé par la loi, alors sa portion serait réduite à cette mesure, et le surplus serait ou vendu, ou employé à quelque autre usage.
Tous ces moyens nous ont paru contraires aux bases que nous avions adoptées, injustes dans les détails, et difficiles dans l'exécution ; enfin, la portion qui écherra à chaque habitant, ne pourra être saisie pour dettes, pen-dans les dix ans qui suivront le partage. Le même motif qui nous a portés à en empêcher l'aliénation pendant ce délai, motive cet article. On pourrait autrement éluder facilement la loi.
Nous voilà parvenus au terme de l'important travail que vous nous aviez confié ; nous l'avons discuté sous tous les aspects. Heureux, si par nos efforts nous avons pu parvenir au but que nous nous proposions. Représentants du peuple, ses intérêts nous sont confiés ; nous ne devons pas un instant les perdre de vue. Assez et trop longtemps on n'a offert à l'habitant des campagnes que des dissertations théoriques; rendons-lui ses droits, dont il doit jouir sous le règne de l'égalité; que le pauvre soit heureux ; qu'il goûte les bienfaits d'une Révolution qui est son ouvrage; et notre bonheur fera plus de conquêtes à la liberté que nos armes.
Après avoir terrassé les despotes, que la paix et la tranquillité viennent se fixer parmi nous ; que nos campagnes se couvrent de propriétaires actifs et vigilants, et bientôt nos pertes seront réparées ; l'utile industrie fertilisera notre sol fécond, et nous jouirons des plaisirs des hommes libres, que les esclaves ne peuvent apprécier. N'oublions jamais que l'agriculture est la richesse d'une République; que la prospérité des campagnes se répand bientôt dans les villes ; et que le citoyen le plus utile est celui qui nous procure le plus précieux dés trésors, puisque ce sont les seuls dont nous ne pouvons nous passer.
projet de décret.
section 1re.
Art. 1er. Les biens communaux sont ceux sur
la propriété ou le produit desquels tous les habitants d'une ou de
plusieurs communes ont un droit commun.
Art. 2. Une commune est une société de citoyens unis par des relations locales, soit qu'elle forme une municipalité particulière, soit qu'elle fasse partie d'une municipalité plus considérable ; de manière que si une municipalité est composée de plusieurs sections différentes, et que chacune d'elles ait des biens communaux séparés, les habitants seuls de la section qui jouissait du bien communal auront droit au partage.
Art. 3. Tous les biens appartenant aux communes, soit communaux, soit patrimoniaux, de quelque nature qu'ils puissent être, pourront être partagés, s'ils sont susceptibles de partage, dans les formes et d'après les règles ci-après prescrites, et sauf les exceptions qui seront prononcées.
Art. 4. Pourront pareillement être partagés les biens connus sous le nom de sursis et vacants.
Art. 5. Seront exceptés du partage, les places, promenades et voies publiques, les fossés et remparts des villes, les édifices et terrains destinés au service public.
Art. 6. Sont pareillement exceptés du partage, les bois communaux, lesquels seront soumis aux règles qui ont été ou qui seront décrétées pour l'administration des forêts nationales.
Art. 7. Lorsque, d'après les visites et procès-verbaux des agents de l'administration forestière, auxquels seront joints les officiers municipaux, il demeurera constant que tout ou portion de ces bois n'est pas d'un produit suffisant pour rester en cette nature, l'exception portee en l'article précédent, n'aura pas lieu pour cette partie ; à cet effet, il sera délibéré et statué sur son partage ou son repeuplement par l'assemblée des habitants, dans la forme qui sera ci-après prescrite.
Art. 8. Si le sol des communaux est submergé en tout ou partie, et que le dessèchement ne puisse s'opérer que par une entreprise générale, le partage en sera suspendu, jusqu'à ce que le dessèchement soit exécuté.
La Convention nationale charge son comité d'agriculture de lui présenter incessamment un projet de loi, tendant à accélérer le dessèchement des marais, décrété par la loi du 5 janvier 1791.
Art. 9. Seront tenus en réserve, les terrains qui renfermeront des mines, minières, carrières et autres productions minérales, dont la valeur excéderait celle du sol qui les couvre, ou qui seraient reconnues d'une utilité générale, soit pour la commune, soit pour la République.
Art. 10. Avant de procéder au partage de leurs biens patrimoniaux, les communes seront tenues de justifier qu'elles ont pourvu à l'acquittement de leurs dettes, conformément à la loi du 5 août 1791.
Art. 11. Ne sont point compris parmi les biens communaux, les lais, relais et rivages de la mer, déclarés partie du domaine national par le décret du 22 novembre 1790.
La Convention nationale charge les comités d'agriculture et d'aliénation de lui faire un rapport sur cet objet.
Art. 12. Les communes où les citoyens qui avaient joui jusqu'à présent du droit d'y conduire leurs bestiaux, continueront à en jouir comme par le passé.
section ii.
Art. 1er. Le partage des communaux sera fait
par tête d'habitant domicilié de tout âge et de tout sexe, absent ou
présent.
Art. 2. Sera réputé habitant, tout citoyen français domicilié dans la commune, un an avant le jour de la promulgation de la loi du 14 août 1792, ou qui ne l'aurait pas quittée un an avant cette époque, pour aller s'établir dans une autre commune.
Art. 3. Les fermiers, métayers, valets de labour, domestiques, et généralement tous citoyens, auront droit au partage, pourvu qu'ils réunissent les qualités exigées pour être réputés habitants.
Art. 4. Les propriétaires non habitants n'auront aucun droit au partage.
Art. 5. Nul ne pourra avoir droit au partage dans deux communes.
Art. 6. Tout enfant aura droit au partage jusqu'à l'âge de 21 ans, dans la commune que son père ou sa mère habitent, pourvu qu'il ne soit point domicilié dans une autre commune.
Art. 7. Tout citoyen est censé domicilié dans le lieu où il a son habitation ordinaire et il y aura droit au partage.
Art. 8. Les orphelins et les enfants naturels auront droit au partage dans-le lieu qu'ils habitent.
Art. 9. Le père jouira de la- portion qui écherra à ses enfants, jusqu'à ce qu'ils aient atteint l'âge de 14 ans.
Art. 10. Les tuteurs ou personnes chargées de l'entretien des orphelins et des enfants naturels, veilleront avec soin sur la conservation de la portion qui leur écherra en partage.
Art. 11. Les corps municipaux sont spécialement chargés de veiller, en bons pères de famille, à l'entretien et à la conservation des portions qui écherront aux citoyens qui se seront voués à la défense de la République.
Art. 12. Le ci-devant seigneur, quoique habitant, n'aura point droit au partage, lorsqu'il aura usé du droit de tirage, en exécution de l'article 10 du titre XXV de l'ordonnance de 1669, quand même il aurait disposé de sa portion en faveur des particuliers non seigneurs.
Art. 13. Chaque habitant jouira en toute propriété de la portion qui lui écherra dans le partage.
Art. 14. Il ne pourra cependant, l'aliéner pendant les dix années qui suivront la promulgation de la présente loi, que dans le cas
où il changerait de domicile ; et dans tous les autres cas, la vente qu'il en pourrait faire sera regardée comme nulle et non avenue.
Art. 15. Le parcours ne donne aucun droit au partage.
Art. 16. Tout acte ou usage qui fixerait une manière de procéder au partage des biens communaux ou patrimoniaux, différente de celle portée par le présent décret, sera regardé comme nul et de nul effet, et il sera procédé au partage dans les formes prescrites par la présente loi.
Art. 17. La portion de communal qui écherra à chaque citoyen dans le partage, ne pourra être saisie pour dettes, même antérieures à la promulgation de la présente loi, pendant les dix ans qui suivront ladite promulgation, excepté pour le paiement des contributions publiques.
section xii.
Art. 1er. Le partage des biens communaux sera
facultatif.
Art. 2. En conséquence, huit jours après la publication de la présente loi, la municipalité convoquera tous les habitants dans la forme prescrite pour la convocation des assemblées communales.
Art. 3. L'assemblée des habitants aura toujours lieu un dimanche.
Art. 4. L'assemblée des habitants sera tenue suivant les formes établies pour les assemblées communales.
Art. 5. Tout citoyen âgé de 21 ans, ayant droit au partage, aura droit d'y voter.
Art. 6. A l'ouverture de l'assemblée, un commissaire, nommé par le conseil général de la commune, donnera connaissance à l'assemblée de l'objet de sa convocation et fera lecture de la présente loi ; après quoi, il sera procédé à la nomination d'un président et d'un secrétaire.
Art. 7. L'assemblée formée, elle délibérera d'abord si elle doit partager ces biens communaux en tout ou partie.
Art. 8. Les opinions seront recueillies par oui ou non.
Art. 9. Si le tiers des voix vote pour le partage, le partage sera décidé.
Art. 10. Après cette détermination, la libération qui portera le partage ne pourra plus être révoquée.
Art. 11. L'assemblée délibérera ensuite sur les autres objets qui pourront résulter de sa première délibération.
Art. 12. Les questions seront posées de manière qu'elles puissent être décidées par oui ou par non.
Art. 13. L'assemblée des habitants pourra délibérer la vente ou l'afferme d'un bien communal qui ne pourrait se partager, et dont la jouissance en commun ne serait pas utile à la commune ; mais ladite délibération ne pourra avoir son effet qu'après avoir été autorisée par le directoire du département, sur l'avis de celui du district qui fera constater gi ledit bien communal n'est pas susceptible
d'être partagé, ou si l'intérêt de la commune en demande la vente ou l'afferme.
Art. 14. L'assemblée des habitants pourra pareillement déterminer qu'un bien communal continuera à être joui en commun et dans ce cas elle fixera les règles qu'elle croira les plus utiles pour en régler la jouissance commune.
Art. 15. La délibération qui déterminera la jouissance en commun ne pourra être révoquée pendant l'espace d'une année.
Art. 16. La délibération qui, dans ce cas, fixera le mode de jouissance, sera transmise au directoire du département, pour y être autorisée sur l'avis du directoire du district.
Art. 17. Dans le cas où l'assemblée des habitants aura déterminé la jouissance en commun de tout ou de partie d'un communal, les propriétaires non habitants qui jouissaient du droit d'y conduire leurs bestiaux continueront d'en jouir comme les autres habitants.
Art. 18. Lorsque le partage sera décidé, l'assemblée procédera à la nomination de trois experts pris hors de la commune, dont un au moins sera arpenteur, et de deux indicateurs choisis dans l'assemblée, pour effectuer le partage.
Art. 19. Cette nomination sera faite à haute voix et à la pluralité relative des suffrages.
Art. 20. Si l'assemblée n'a pas terminé ses opérations le dimanche fixé pour sa première séance, elle pourra s'ajourner au dimanche suivant.
Art. 21. Le procès-verbal de l'assemblée sera dressé en double original dont un sera déposé aux archives de la commune, et l'autre à celles du district.
Art. 22. Le conseil général de la commune conviendra d'avance, avec les experts nommés, du prix qui devra leur être payé pour leurs opérations.
Art. 23. Les experts procéderont de suite au partage et à la fixation comparative et proportionnelle de chaque lot, suivant les différentes qualités du sol, avec bornages distinc-tifs.
Art. 24. Chaque lot sera numéroté.
Art. 25. Les experts, conjointement avec les indicateurs, désigneront préalablement les chemins nécessaires pour toutes issues, ainsi que ceux qu'il conviendra de laisser pour les communications intérieures et l'exploitation particulière ; ils désigneront pareillement tous les canaux, fosses d'égouts et autres objets d'art nécessaires et d'une utilité commune, afin qu'ils soient tous soustraits de la masse générale à partager.
Art. 26. Lesdits experts désigneront pareillement les chemins nécessaires pour parvenir j à des mares ou à des abreuvoirs communs, re-I connus indispensables dans quelques lieux, ; pour abreuver les bestiaux, ou pour d'autres | usages d'une utilité générale.
Art. 27. Us dresseront procès-verbal de leurs opérations en double original, qu'ils signeront, ainsi que les indicateurs, et dont un sera déposé aux archives de la commune et l'autre à celles du district.
" Art. 28. Dès que les experts auront terminé
leurs opérations et clos leur procès-verbal, le lot de chacun sera tiré au sort.
Art. 29. En conséquence, les officiers municipaux feront proclamer, huit jours à l'avance, le jour du tirage, qui sera toujours un dimanche.
Art. 30. Les numéros correspondant à chaque lot seront placé dans une urne.
Art. 31. L'appel se fera par ordre alphabétique, et les officiers municipaux tireront pour les absents.
Art. 32. Il sera du tout dressé procès-verbal en double original, dont un sera déposé aux archives de la commune, l'autre à celles du district.
Art. 33. Les frais qu'entraînera l'opération du partage, seront répartis par tête entre les copartageants.
Art. 34. Si un bien communal était assujetti à une rente foncière ou redevance non supprimée par les précédents décrets, elle sera rachetée avant de procéder au partage, et le prix du rachat sera réparti par tête entre les copartageants.
Art. 35. Si tout ou partie d'un communal était affermé, les copartageants seront tenus d'entretenir le bail, ou d'indemniser les fermiers.
Art. 36. Les citoyens qui auront, en vertu de la loi du 11 octobre, cultivé et ensemencé une partie d'un bien communal, jouiront des récoltes provenant de leurs travaux, sans qu'il puisse leur être porté, à raison du partage, aucun trouble ni empêchement.
Art. 37. Pendant les cinq premières années, à compter du jour de la promulgation de la présente loi, il ne sera perçu que 15 sous pour tout droit d'enregistrement pour chaque contrat d'échange des fonds partagés.
Art. 38. Il ne pourra rien être changé à raison de la présente loi, à l'état actuel des chemins vicinaux, connus sous le nom de voyeux, voiries ou autres dénominations quelconques.
La Convention nationale charge son comité d'agriculture de lui présenter incessamment un projet de loi pour déterminer la largeur qu'ils doivent avoir.
section iv.
Art. 1er. Les revenus provenant, soit du prix
des fermes, des biens patrimoniaux ou communaux qui ne seraient pas
partagés, ou de la vente de ceux que l'assemblée des habitants aurait
délibéré et obtenu la permission de vendre, ne seront plus mis en moins
imposé, ni employés à l'acquit des charges locales; mais ils seront
partagés par tête dans la forme prescrite pour le partage des biens
communaux.
Art. 2. Les coupes annuelles des bois communaux seront partagées à l'avenir entre chaque chef de famille, qui réunira les qualités déterminées par la présente loi, pour être réputé habitant, soit que ledit partage ait lieu en nature, soit qu'il soit fait en argent. La Convention nationale dérogeant à tout usage à ce contraire.
Art. 3. Il ne sera plus, en conséquence,
exigé à l'avenir aucun droit d'entrée, de bienvenue ou autres, pour avoir droit audit partage.
Art. 4. La Convention nationale renvoie à ses comités d'aliénation et d'agriculture, pour lui présenter incessamment un projet de loi sur les quarts de réserve.
Art, 5. Il sera prélevé sur le produit des biens communaux et sur celui des coupes annuelles des bois, le montant de la contribution à laquelle ils seront imposés, et les frais de garde, de balivage et autres généralement quelconques, que l'entretien desdits objets peut exiger.
SECTION v.
Art. 1er. Lorsqu'un communal n'est attaché
singulièrement à aucune commune, et qu'aucune n'en a la propriété par
titres, le partage sera fait entre toutes les communes qui étaient en
possession depuis plus de trente ans d'y faire pâturer, et ce, dans la
proportion de leur population.
Art. 2. Lorsque deux ou plusieurs communes jouissent indivisément par titre, d'un communal, il sera procédé au partage entre elles, et ce, dans la proportion de leur population.
Art. 3. S'il existait cependant un mode de partage déterminé par les titres de propriété, on serait tenu de s'y conformer.
Art. 4. Le partage sera fait par portions égales entre chaque commune, quelle que soit leur population, s'il est établi que chacune d'elles contribue également à la contribution foncière supportée par le communal indivis.
Art. 5. Avant de procéder au partage des biens communaux ci-dessus mentionnés, entre les habitants, il sera fait un partage préparatoire entre les communes.
Art. 6. En conséquence, elles seront tenues de suite, après la publication de la présente loi, de nommer conjointement des experts pour faire cette opération.
Art. 7. Les experts procéderont au partage entre les communes et à la fixation comparative et proportionnelle de chaque portion, avec bornages distinctifs, suivant les différentes qualités du sol et la population des communes, sauf les exceptions ci-dessus relatées.
Art. 8. Ils dresseront procès-verbal de leurs opérations qui sera déposé aux archives du district, et expédition en forme en sera déposée aux archives de chacune des communes copartageantes.
Art. 9. En cas de division entre lesdits experts, il sera procédé sans délai à la nomination d'un tiers expert par le directoire du département.
Art 10. La possession de quarante ans exigée par la loi du 28 août 1792, pour justifier La propriété d'un ci-devant seigneur, sur les terres vaines, vagues ou gastes, landes, marais, biens, hermes ou vacants, garrigues, ne pourra en aucun cas suppléer le titre, et le ci-devant seigneur ne pourra revendiquer la propriété desdits objets, s'il ne justifie de ses
droits par titres, quel que soit le temps qu'il en ait joui.
Art. 11. Le droit de pâturage, chauffage, glandage, lignerage et autres, exercé par les communes, dans les bois ou prairies de leur ci-devant seigneur, ou sur les terres vaines, vagues ou gastes, landes, biens, hermes ou vacants, marais, garrigues ou pâturages dont le ci-devant seigneur justifiera par titre avoir la propriété, sera racheté de la manière suivante.
Art. 12. De suite, après la publication du présent décret, il sera nommé des experts, savoir : un par la commune ou les communes usagères, un par le ci-devant seigneur et un tiers, en cas de discords, par le directoire du département.
Art. 13. Lesdits experts détermineront quelle est la portion des objets sur lesquels est établi le droit d'usage qui doit être attribué en toute propriété à la commune, en représentation des droits dont elle jouissait.
Art. 14. La portion qui demeurera au ci-devant seigneur, après ladite opération, lui restera en toute propriété, redimée de tout droit d'usage.
Art. 15. Dans les opérations, les experts auront égard si la concession du droit d'usage a été faite à titre onéreux ou gratuit.
Art. 16. S'il n'était pas possible d'assigner une portion de fonds à la commune, en représentation de son droit d'usage, lesdits experts fixeraient la somme qui devrait lui être payée en indemnité.
Art. 17. Il sera procédé de la même manière pour l'évaluation des droits d'usage ou autres, que les communes ont droit d'exercer sur les biens de quelques propriétaires.
Art. 18. U en sera de même pour l'évaluation des droits dont une ou plusieurs communes jouissent sur le communal appartenant à une autre commune, soit qu'elles paraissent avoir été admises au pacage par les usagers eux-mêmes, dans une époque au delà de 40 ans, en contribuant à des taxes extraordinaires, soit qu'elles ne puissent établir leur droit que par une possession immémoriale, sauf à avoir égard, par les experts, à cette différence dans la fixation de l'indemnité.
Art. 19. Dans le cas où il s'agirait d'un domaine national non vendu, ou d'un bien des émigrés, il sera procédé à ladite opération dans le délai de 3 mois; auquel effet les communes seront tenues de faire, dans le délai de 2 mois, parvenir leurs réclamations au directoire de district, passé laquelle époque elles n'y seront plus admises.
Art. 20. Le directoire de district sera tenu d'enregistrer lesdites demandes, et de les faire parvenir, dans le délai de huitaine, avec son avis, au directoire du département, où elles seront pareillement enregistrées et décidées de suite.
Art. 21. Un des experts sera nommé par le receveur du droit d'enregistrement, qui sera pareillement appelé pour assister à l'opération des experts.
Art. 22. Dans tous les cas oi-dessus men=
tionnés, les experts procéderont, parties présentes ou dûment appelées, et dresseront procès-verbal de leurs opérations, qu'ils signeront, ainsi que les parties si elles sont présentes, et si elles le savent faire, autrement il ne sera fait mention.
Art. 23. Les portions de terre, ou les sommes qui pourront échoir aux communes, à raison de l'exécution des précédents articles, seront comprises parmi les biens communaux, et partagés de la même manière.
Art. 24. Les frais seront supportés, par portions égales, par la commune ou les communes usagères et le propriétaire du fonds, et réglés par le directoire du département, sur l'avis de celui du district.
Art. 25. La répartition de la portion que devra supporter la commune, sera faite par tête d'habitants ayant droit au partage.
Art. 26. La Convention nationale n'entend rien préjuger par le présent décret sur le parcours et la vaine pâture dans les lieux où ils sont autorisés par les lois; elle renvoie à son comité d'agriculture pour lui faire incessamment unTapport sur cet objet.
Art. 27. Tout partage antérieur à la publication de la présente loi, et contraire à ses dispositions, est déclaré nul et de nul effet.
Art. 28. Pourra, cependant l'assemblée des habitants valider lesdits partages, à la majorité des deux tiers des voix.
Art. 29. Toute rente de portion échue dans un pareil partage est déclarée nulle, sauf le recours de droit de l'acheteur contre le vendeur.
Art. 30. L'action en revendication, touchant les biens communaux, soit pour usurpations partielles, soit pour partage illicite-ment faits, sera intentée avant le 1er mars 1794, lequel temps passé on n'y sera plus reçu.
Art. 31. L'action en revendication à exercer par les communes ne pourra avoir lieu contre les particuliers non seigneurs, que pour les usurpations ou partages qui auraient été iaits depuis 30 ans, à moins que la prescription ne fût interrompue par des poursuites légales, sauf la garantie du droit des acheteurs contre les vendeurs.
Art. 32. Néanmoins, si celui qui s'est emparé d'une partie d'un communal, l'avait plantée en arbres ou en vignes, ou y avait construit quelques bâtiments, ladite portion lui sera conservée pour le lot qui lui écherra en partage, s'il a droit d'y concourir; et si elle se trouve de plus grande valeur que la portion à laquelle il avait droit, les experts qui procéderont au partage évalueront la somme qu'il sera tenu de payer à la commune, pour cet excédent de valeur.
Art. 33. Sont exceptés des dispositions des articles précédents les objets qui ont été partagés en vertu du titre 1er de la loi du 20 avril 1791, ainsi que les terrains desséchés et défrichés, en exécution de l'édit et de la déclaration du roi des 14 juin 1764 et 13 avril 1766, de même que toutes autres concessions, partages, _ ou possessions autorisées par les anciennes lois, et revêtues des formalités qu'elles prescrivent.
Art. 34. L'action en revendication exercée par les communes n'emportera aucune restitution des fruits, et le possesseur actuel ne pourra être dépouillé qu'après avoir recueilli la récolte pendante.
Art. 35. Les dispositions des articles 1 et 2 de la loi du 28 août 1792, relatives au rétablissement des communes dans les propriétés dont elles ont été dépouillées par l'effet de la puissance féodale, auront leur exécution, quand bien même les ci-devant seigneurs auraient vendu ou inféodé à des particuliers non seigneurs, les portions de bois et autres biens dont les communautés avaient été dépossédées, si l'acte d'aliénation ou d'inféodation n'a pas été fait 30 ans avant la promulgation de la présente loi.
Art. 36. Dans le cas où les actes d'inféodation ou d'aliénation faites par les ci-devant seigneurs, remonteraient à une époque antérieure de 30 ans à la promulgation de la présente loi, les articles 3 et 4 de la loi du 28 août 1792 auront leur plein et entier effet.
Art. 37. Néanmoins, si le particulier non seigneur avait planté en vignes, en oliviers, en arbres fruitiers ou en bois, le terrain qui lui avait été vendu par le ci-devant seigneur, ou s'il y avait construit quelques bâtiments, il ne pourra en être dépossédé* mais s'il est habitant, cette portion lui tiendra lieu du lot qui lui écherrait dans le partage; et si elle se trouve d'une plus grande valeur que celle à laquelle il avait droit, les experts qui seront nommés pour le partage, fixeront l'indemnité qu'il sera tenu de payer à la commune, soit en terres soit en argent, pour cet excédent de valeur.
Art. 38. Si ledit acquéreur n'est pas habitant, les mêmes experts fixeront la somme qu'il devra payer à la commune, en représentation de la portion de terrain dont il jouit et dont il conservera la propriété.
Art. 39. Dans tous les cas, les acquéreurs pourront exercer leur action en garantie et en dommages-intérêts contre leur vendeur, et ils ne pourront être dépossédés qu'après avoir recueilli la récolte pendante.
Art. 40. La loi du 28 août 1792 continuera à avoir son exécution en tout ce qui n'y est pas dérogé par la présente loi.
section vi.
Art. 1er. Les contestation qui pourront
s'élever à raison du mode de partage entre les communes, seront
terminées sur simple mémoire, par 'le directoire du département, d'après
l'avis de celui du district.
Art. 2. Le directoire du département, sur l'avis de celui du district, prononcera pareillement, sur simple mémoire, sur toutes les réclamations qui pourront s'élever à raison dii mode de partage des biens communaux.
Art. 3. Tous les procès actuellement pendants, ou qui pourront s'élever contre les communes et leurs ci-devant seigneurs, à raison des biens communaux ou patrimoniaux, soit pour droits, usages, prétentions, demandes en rétablissement dans les propriétés dont elles ont été dépouillées par l'effet de la puissance féodale, ou autres réclamations généra-
lement quelconques, seront vidées par voie de l'arbitrage.
Art. 4. Les procès qui ont ou qui auront lieu entre deux ou plusieurs communes, à raison de leurs biens communaux ou patrimoniaux, soit qu'ils aient pour objet la propriété ou la jouissance desdits biens, seront terminés pareillement par la voie de l'arbitrage.
Art. 5. Il sera procédé de la même manière pour les actions exercées ou à exercer par les communes, contre des citoyens, pour usurpations, partages illicitement faits, concessions, défrichements, dessèchements, et généralement pour toutes les contestations qui auront pour objet les biens communaux ou patrimoniaux.
Art. 6. En conséquence, les parties comparaîtront devant le juge de paix du canton où la majeure partie des biens sera située, et nommeront chacune un ou plusieurs arbitres à nombre égal.
Art. 7. Il sera dressé procès-verbal de cette nomination par le juge de paix.
Art. 8. Ledit procès-verbal sera signé par le juge et par les parties, si elles savent le faire, autrement il en sera fait mention.
Art. 9. Dans le cas où l'une des parties ne voudrait pas comparaître volontairement, elle sera sommée de le faire par un simple . cédule qui sera délivrée par le juge de paix.
Art. 10. Les délais expirés, si la partie ne comparaît pas, le juge de paix nommera d'office, un arbitre ou plusieurs arbitres pour la partie non comparaissante.
Art. 11. Il en sera dressé procès-verbal qui sera signé par le juge de paix et par la partie qui aura comparu.
Art. 12. Les parties seront tenues de remettre leurs titres et mémoires entre les mains des arbitres dans le délai d'un mois, lesdits arbitres seront tenus d'avoir rendu leur sentence arbitrale deux mois après cette remise.
Art. 13. Dans le cas "où il fût nécessaire de faire, quelques vérifications, lesdits arbitres nommeront des gens de l'art pour y procéder.
Art. 14. Les experts nommés pour les vérifications, y procéderont, parties présentes ou dûement appelées, en dresseront procès-verbal qui sera signé par eux et par les parties, si elles savent le faire, autrement il en sera fait mention.
Art. 15. Dans le cas de partage entre les arbitres, ils en dresseront procès-verbal par eux signé, qu'ils transmettront de suite au bureau de paix du canton où la majeure partie des bien sera située.
Art. 16. Le bureau de paix fera citer les parties à comparaître devant lui, pour voir procéder à la nomination du tiers arbitre.
Art. 17. Le jour fixé, le tiers arbitre sera nommé par le bureau de paix à la pluralité des voix; il en sera dressé procès-verbal signé par les parties, si elles le savent faire, autrement il en sera fait mention.
Art. 18. Les assesseurs qui devront assister le juge de paix, seront toujours choisis parmi
ceux d'une des municipalités du canton non intéressées dans l'affaire.
Art. 19. Si toutes les municipalités du canton y étaient intéressées, le tiers arbitre sera nommé par le bureau de paix du canton le plus voisin, dans les formes ci-dessus prescrites.
Art. 20. Les délais pour les diverses citations ci-dessus mentionnées, seront les mêmes que ceux déterminés par la loi du 14 octobre 1790, pour les citations devant les juges de paix.
Art. 21. La sentence arbitrale sera exécutée sans appel, et rendue exécutoire par une simple ordonnance du président du tribunal du district, qui sera tenu de la donner au bas ou en marge de l'expédition qui lui sera présentée conformément à l'article 6 du titre Ier de la loi du 16 août 1792.
(La Convention décide de passer à la discussion immédiate de ce projet de décret.)
(Hérault), rapporteur, donne une seconde lecture des deux premiers articles du projet qui sont adoptés dans la forme qui suit (1) :
« La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité d'agriculture, décrète :
section ire.
Art. 1er.
( Les biens communaux sont ceux sur la propriété ou le produit desquels tous les habitants d'une ou plusieurs communes, ou d'une section de commune ont un droit commun.
Art. 2.
« Une commune est une société de citoyens unis par des relations locales, soit qu'elle forme une municipalité particulière, soit qu'elle fasse partie d'une autre municipalité; de manière que si une municipalité est composée de plusieurs sections différentes, et que chacune d'elles ait des biens communaux séparés, les habitants seuls de la section qui jouissait du bien communal auront droit au partage. »
(La Convention ajourne la suite de cette disoussion à une séance ultérieure.)
, secrétaire, donne lecture d'une lettre de Monge, ministre de la marine, relative à la démission du citoyen Taillevis, adjoint à la première division de la marine; elle est ainsi conçue (2) :
Paris,
« Citoyen Président,
« Le citoyen Taillevis m'ayant donné sa démission de la place d'adjoint
de la première division, j'ai proposé au conseil exécutif^ pour le
remplacer, le citoyen Kerguelin, capitaine de vaisseau, officier
expérimenté et dans le
« Le ministre de la marine, « Signé ; Monge. »
(1). Le citoyen Taillevis, qui vient de donner sa démission d'adjoint au ministre de la marine, est un agent responsable. Je demande qu'il soit gardé à vue, jusqu'au moment où ses comptes seront apurés.
(La Convention adopte cette proposition.)
Suit le texte définitif du décret rendu (2) :
« La Convention nationale, sur la proposition d'un membre, décrète que le citoyen Taillevis, adjoint du ministère de la marine, qui vient de donner sa démission, présentera sans délai les comptes particuliers de l'administration qui lui était confiée, et que, jusqu'à l'accomplissement de ce décret, il continuera d'être établi une garde auprès de cet agent responsable. »
, au nom du comité des finances, fait un rapport (3) et présente un projet de décret tendant à prohiber la vente du numéraire et à favoriser la circulation des assignats. Il s'exprime ainsi :
Citoyens, la Révolution a créé un nouveau signe monetaire. L'Assemblée
constituante mit en vente des domaines nationaux très considérables, et
pour en accélérer la vente, elle créa des assignats. Ces assignats
d'abord destinés au remboursement de la dette publique, ont été employés
au service public, ou au remplacement de la non-rentree de la
contribution, particulièrement à toutes nos dépenses; et il. n'est pas
étonnant que les ennemis de notre Révolution se soient attachés à en
déprécier le cours. Notre ancien ministère, celui qui était gouverné par
notre ancien pouvoir exécutif, a commencé d'attaquer ce système
monétaire par des opérations d'agiotage : ces opérations n'étant pas
assez actives pour lui, il eut recours au gouvernement même, pour
déprécier les assignats. Les généraux connus pour vouloir renverser la
Révolution, Lafayette, Luck-ner, Rochambeau ont agi auprès des soldats
de la liberté, pour leur faire demander que leur solde fût payée en
numéraire; et ils n'agissaient point en secret, toutes les fois qu'ils
voulaient favoriser une opération d'agiotage. Il arrivait à l'Assemblée
législative une pétition de l'état-major qui faisait sonner fort haut le
besoin et la nécessité de payer les soldats en numéraire. Dumouriez,
lorsqu'il a conçu son plan de trahison, a pensé aussi que le numéraire
était un des objets par lequel il pourrait nous asservir. Il a commencé,
en entrant dans la Belgique, de vouloir s'emparer de la fortune
publique; n'ayant pas pu y réussir, il n'a cessé de répéter des plaintes
sur ce.
De toutes parts on vous demande une loi pour condamner ce commerce et pour déclarer que l'argent ne soit plus marchandise. Pour faire cette opération, il fallait nécessairement que nous examinassions que le Trésor public ne fût pas le principal acheteur du numéraire; des lors, nous avons dû examiner comment se faisaient toutes les opérations de la République. D'après le décret qui déclarait l'argent marchandise, le gouvernement a passé des marchés pour payer en numéraire, et d'autres marchés pour payer en assignats; dans les marchés en numéraire, il y a eu des conditions qu'on ne pourrait pas payer en assignats, sauf la différence qui existerait entre l'assignat et le numéraire. Il attendait un jour fixe pour faire cette livraison, et le jour que ladite livraison s'effectuait, il allait sur le marché de la place en acheter une petite quantité, tandis qu'il y avait un grand calcul à régler avec le gouvernement. Il faut que nous en finissions, tous les particuliers de la République font leurs affaires avec des assignats. Pourquoi la République ne ferait-elle pas les siennes comme le font les particuliers? Nos fournisseurs en vivres ou en marchandises, voulant flatter leurs comptes, faisaient des marchés payables en écus; dès lors, le paysan qui trouvait un intérêt à vendre en numéraire, lorsque le particulier allait lui demander à traiter avec des assignats, rejetait ce particulier, et le gouvernement avait une préférence exclusive, qui désappréciait nos assignats. Le gouvernement est un particulier; il doit traiter comme tous les autres particuliers; car, avec la concurrence, il écrase tous les autres particuliers, s'il n'est pas soumis à la même règle. Le bénéfice d'ailleurs était illusoire. Les fournisseurs qui achetaient ce numéraire, avaient bien l'air de faire payer meilleur marché à la République en chiffres, mais la trésorerie qui était obligée de fournir ce numéraire était obligée de l'acheter à un prix très haut. Les assignats sont la monnaie de la République : il faut que les fournisseurs fassent leur compte sur les assignats, et renoncent à cette distinction d'assignats et de numéraire, qui ne tend absolument qu'à jeter la défaveur sur notre système monétaire, et donner un discrédit à nos assignats. Cette question a été traitée avec toutes les administrations; nous les avons réunies au comité des finances. Nous leur avons dit : Il n'est plus fcemps de nous tromper sur cette question; vous nous fournissez des calculs, valeur en argent, valeur en assignats. Yous nous faites voir une différence dans les achats faits en tel temps ou
en tel autre; mais, en dernière analyse, l'assignat que nous vendons, nous occasionne une grande perte. Yoyez si vous pouvez traiter pour ce qui concerne tout le service de la République en assignats ? Tous ont dit : Il n'y a pas le moindre risque à nous forcer à en acheter en assignats, lorsque tout le monde marchera sur le même pied, lorsque tout le monde sera obligé de traiter en assignats. > Une fois assurés que le service de la République pouvait se faire en assignats aussi exactement, nous avons examiné la question du paiement des troupes de la République.
Déjà vous avez, le 21 décembre, arrêté un mode de paiement des troupes de la République; vous avez décrété que les troupes seraient payées en numéraire; mais cette partie n'est pas si considérable, comme vous pouvez le croire, parce que, lorsque les troupes sont en campagne, on ne les paye ni en assignats ni en numéraire, mais on les paye avec des vivres en nature, en leur fournissant tout ce qui leur est nécessaire en nourriture, armement et équipement. Il reste donc une petite portion, qui est la portion du décompte; et ici, si le soldat n'a pas fait de grandes réclamations, c'est que ce sont les état-majors, ce sont toujours les officiers qui, ayant beaucoup à recevoir, ce sont les quartiers-maîtres, ce sont toutes ces sortes de gens qui, ayant à faire les décomptes pour le soldat, étaient devenus des agioteurs à la suite de nos armées; et alors on s'entendait avec le soldat, avec une petite gratification on lui enlevait tous les avantages que la loi pouvait lui donner. Dès lors, votre comité a cru que la partie de payement qui devait être acquittée en numéraire, suivant la loi du 21 décembre, pouvait être payée en assignats, et pour que le soldat profitât de la faveur que vous lui aviez accordée par la loi du 21 décembre, il vous propose d'augmenter la partie de solde qui était payée au soldat en numéraire. Le soldat aura directement l'indemnité qui ne lui parvenait que par main tierce, et il ne sera pas assujetti à passer par les mains et d'un état-major et d'un quartier-maître, qui, souvent, lui prenaient la partie du bénéfice qui pouvait lui revenir. Ayant une fois pourvu aux besoins de la République, nous avons pensé aux opérations commerciales qui se trouvent liées avec ce grand système..
Nous avons examiné que l'agiotage avait un autre moyen de fixer le cours du numéraire, par les lettres de change sur l'étranger. Dès lors, nous avons examiné la question de faire fermer absolument la Bourse, pour que ce commerce avec l'étranger n'existât plus. Nous avons été épouvantés d'une mesure si contraire aux opérations commerciales; mais nous avons dit : L'agiotage a besoin de constater le cours des places pour calculer ses opérations. En épouvantant par le discrédit des changes qu'on fait parvenir par des courriers extraordinaires, on fait la hausse et la baisse, certains que nous sommes, que l'agiotage n'a point de réel aliment, qu'il n'a que du fictif (ce n'est qu'un fictif de papiers qu'on tire fictivement sur l'étranger, sur d'autres lettres de change et qu'on soutient par un cours public). DèB lors, nous avons cru devoir prendre un terme moyen. Nous avons cru devoir faire une distinction entre les relations commerciales avec l'étranger, et celles qui ont lieu de particu-
lier à particulier. Il ne fallait pas priver les négociants des moyens de faire venir de l'étranger les fonds qu'ils y ont, comme de lui faire passer ceux qu'ils doivent. Nous avons donc pensé qu'il fallait empêcher que la cote de ces changes, que les agents de change proclamaient si scandaleusement de minute en minute, ne fût publiée par la voie de l'impression.
Ensuite, nous avons cru qu'il serait important de défendre la vente du numéraire. On nous a proposé de faire décréter qu'un écu de 6 livrés ne vaudrait plus 6 livres, et de supprimer ainsi le système monétaire. Cette mesure, outre qu'elle serait injuste, nous a paru illusoire. Car, par le fait, le système monétaire est détruit puisqu'il n'y a pas un individu en France, qui donne un écu en paiement. t)e plus, quand un écu ne sera plus monnaie, il deviendra au moins marchandise, et le décret de l'Assemblée constituante en autorise la vente sous ce rapport.
(La lecture du rapport est interrompue.)
, au nom du comité de Salut public, donne lecture d'un rapport dont les conclusions tendent à ordonner que les membres de la famille des Bourbons seront transférés provisoirement au château de Vin-cennes. Il s'exprime ainsi (1) :
Citoyens, vous avez décrété que votre comité de Salut public vous indiquerait, dans une heure, le lieu, hors de Paris, où seront mis en état d'arrestation les membres de la famille des Bourbons. Votre comité a parcouru successivement tous les lieux qui étaient à sa connaissance. Il a d'abord reconnu que l'on ne pouvait envoyer ces individus dans un lieu où on ne pourrait pas se défendre contre un coup de main, à moins d'y entretenir une force considérable. Il s'est ensuite convaincu que ce ne pouvait être dans des lieux maritimes, qui, indépendamment des troubles qui agitent les départements, peuvent encore être exposés aux attaques des ennemis du dehors. 11 a pensé que pour remplir parfaitement vos vues, il fallait fixer le lieu de cette détention dans l'intérieur, à l'abri d'un coup de main, loin des frontières et des côtes maritimes ; mais comme il y aura des réparations à faire au château que vous désignerez pour leur détention, il a pensé que vous deviez fixer, en attendant un lieu provisoire, jusqu'à ce qu'on ait pu préparer cet endroit sûr. Il vous propose de faire transférer provisoirement les individus de la famille des Bourbons à Vin-cennes. (Interruptions sur un grand nombre de bancs.)
Citoyens, votre comité n'a pas pas, ce me semble, rempli vos intentions,
et je vous demande de repousser ses propositions, puisqu'elles ne
satisfont pas au salut public. Vous avez décrété, en effet, que la
famille des Bourbons serait mise en état d'arrestation hors de Paris,
parce que vous avez pensé que c'était la ville où les malveillants de
l'extérièur pouvaient le plus facilement se
Quant à la crainte, manifestée par votre comité, relativement aux villes maritimes, j'estime qu'elle est dénuée de fondement. En effet, s'il survenait un événement de la nature de celui dont vous a parlé le rapporteur, certainement la première chose qu'on ferait serait d'amener les prisonniers dans l'intérieur; cela me paraît évident.
Je suis,. par conséquent, très étonné que le comité de Salut public n'ait pu trouver un lieu autre que le château de Vincennes pour y faire transférer la famille des Bourbons. Je demande qu'ils soient transportés dans une des villes qui renferme, après Paris, la plus grande population, et qui, après lui, a montré lé plus de patriotisme.
U n'est plus question de savoir si les Bourbons resteront à Paris ; vous avez décidé le contraire; votre comité de Salut public, sans dessein sans doute, trouve un moyen ingénieux de l'éluder ; vous ferez exécuter votre décret avec fermeté. Quels sont donc nos malheurs ? Eh ! quoi ! il n'existe pas une seule ville en France où nous puissions loger les Bourbons? Vous jugerez par là, citoyens, combien une famille royale est une chose embarrassante. (Rires et applaudissements.) Je me rappelle cependant que Montpellier, Toulouse, Bordeaux, Marseille (Marseille qui proscrivit tous les Bourbons avant vous) existent encore dans la République, je me rassure. Là il existe des gardes nationales ennemies des familles royales ; là vous n'avez point à craindre que l'or étranger enlève du fond de leurs prisons les Capet, pour les replacer sur le trône ; peu m'importe celle de ces villes à laquelle vous ferez ce funeste présent, mais qu'ils partent.
Je demande que la Convention se décide pour une de ces quatre villes.
Un grand nombre de membres : La clôture, la clôture !
monte à la tribune et réclame la parole.
(La Convention la lui refuse et déclaré la discussion close.)
Plusieurs membres réclament la priorité pour Marseille.
D'autres membres la demandent pour Bordeaux.
met la priorité aux voix. — Une première épreuve est douteuse.
J'observe à la Convention qu'elle ne doit pas choisir Marseille, parce que Biron, qui commande l'armée des Alpes, est un ami intime d'Egalité.
Si Biron est suspect, il faut le destituer.
Je demande la destitution de Biron, parce que je sais qu'il avait des liaisons avec Egalité.
remet à nouveau la priorité aux voix. Cette seconde épreuve est encore douteuse.
Plusieurs membres : L'appel nominal.
Oui, l'appel nominal, et que, pour calmer toute inquiétude, on interne une moitié de la famille des Bourbons à Marseille, et l'autre moitié à Bordeaux.
Je propose d'enfermer les Bourbons dans la forteresse de Montpellier.
Un membre : Je propose, à mon tour, la forteresse de Zizins, où fut enfermé Bajazet second.
procède à une troisième épreuve.
(La Convention nationale décrète ensuite que tous les individus de la famille des Bourbons, hors ceux qui sont détenus au Temple, seront transférés sur-le-champ à Marseille, où ils seront tenus en état d'arrestation dans les forts et châteaux de cette ville, sous la garde des citoyens, et sous la responsabilité des corps administratifs) (1). (Vifs applaudissements des tribunes.)
(2). Afin que les Bourbons ne passent pas dans le camp de Biron, je demande qu'il soit destitué.
J'appuie la proposition de Fon-frède, et je demande que le comité de Salut public soit tenu de nous présenter un projet de décret sur le rappel, de nos armées, de tous les ci-devant nobles. (.Applaudissements des tribunes.)
Je demande la destitution immédiate de Biron, parce qu'il a des intelligences avec Egalité.
fils. Je demande à combattre cette proposition.
(La Convention passe à l'ordre du jour.)
La Convention reprend la discussion du projet de décret tendant à prohiber la vente du numéraire et à augmenter et favoriser la circulation des assignats.
, rapporteur, termine la lecture de son rapport (3) et donne lecture du projet de décret qui est ainsi conçu (4) :
La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des
finances : er.
Art. 1er. A compter de la publication du
présent décret, la négociation publique des lettres de change, billets
et autres effets de toute nature sur des places de commerce ou villes
situées dans les pays gouvernés par les personnes qui sont en guerre
avec la République, est prohibée ; en conséquence, il est défendu de
coter, publier et imprimer le cours des changes avec ces places ou
villes.
Art. 2. Ceux qui contreviendront aux dispositions de l'article précédent, seront poursuivis à la requête et diligence du procureur de la commune, et condamnés, par le juge de paix, à une amende qui ne pourra être moindre de 2,000 livres, laquelle sera perçue au profit de la nation par le receveur du droit d'enregistrement.
Art. 3. A compter de la publication du présent décret, la vente du numéraire dans toute l'étendue du territoire français ou occupé par les armées françaises, sera défendue sous peine de 6 années de gêne, pour les personnes qui seront convaincues d'en avoir acheté ou vendu.
Art. 4. L'exportation des espèces et des lingots d'or ou d'argent, hors le territoire français ou occupé par les armées françaises, est prohibée, sous peine de confiscation au profit de la nation, et d'une amende qui ne pourra être moindre de 2,000 livres, laquelle sera poursuivie par le procureur-syndic du district, par-devant le tribunal de district, et sera perçue au profit de la nation par le receveur du droit d'enregistrement.
Art, 5. Toute personne qui refusera de recevoir des assignats en paiement y sera contrainte par le juge de paix, qui la condamnera en outre à une amende du dixième du montant de la somme refusée, laquelle amende sera perçue au profit de la nation par le receveur du droit d'enregistrement.
Art. 6. Les commissaires de la Convention, qui se trouvent dans les pays occupés par les armées de la République, sont autorisés à prendre toutes les mesures qu'ils jugeront convenables pour y établir, favoriser et accélérer la circulation des assignats.
titre 11.
Pour le paiement en assignats de toutes les dépenses de la République.
Art. 1er. A compter du jour de la publication
du présent décret, le prix de tous les achats, marchés, ou' conventions
pour le service de la République, seront stipulés en sommes fixes
d'assignats, sans qu'il puisse y être inséré aucune stipulation de
paiement en espèces, ni aucune autre clause y relative.
Art. 2. Le prix desdits marchés ou conventions qui auront été passés pour le compte de la République, antérieurement au présent décret, avec stipulation de paiement en espèces, ou autres clauses y relatives, sera également payé en assignats, avec une indemnité proportionnée auxdites clauses et réserves.
Art. 3. L'indemnité sera réglée par le ministre dans le département duquel les marchés auront été passés, et par le fournisseur; elle sera ajoutée aux marchés comme clause
additionnelle, et sera soumise à toutes les formalités prescrites pour les marchés passés par les ministres.
Art. 4. A compter du 15 avril présent mois, la partie de solde, appointement, traitement, qui, d'après les lois, était payée en numéraire, aux officiers, soldats et autres personnes de tout grade et de toute dénomination, qui sont employés dans les départements de la guerre et de la marine, et qui seront en Europe dans le territoire français ou occupé par les armées françaises, sera payée en assignats, avec une plus-value de moitié, en sus de la somme qui itait payée en numéraire, laquelle sera payée dans la même forme que les appointements, solde et traitement.
Art. 5. Les décomptes des corps et individus, compris dans l'article précèdent, seront arrêtés en numéraire et en assignats, jusqu'au 15 avril, conformément aux lois existantes.
Art. 6. Les revenant-bon ou débet en numéraire, résultant de ces décomptes, seront soldés, savoir :
S'il est dû du numéraire au corps ou individu, le revenant-bon leur sera payé en assignats, avec une plus-value de moitié en sus.
Si, au contraire, le corps ou individu doit du numéraire, il le paiera :
1° Avec une somme égale en assignats;
2° Avec une reconnaissance de la moitié de cette somme, à précompter sur la plus-value du décompte des trimestres suivants.
Art. 7. Le paiement de cette reconnaissance se fera par des retenues successives qui ne pourront, dans aucun cas, réduire de plus d'un quart de la plus-value fixée par l'article 4 ci-dessus.
titre iii.
Surveillance pour découvrir les faux assignats.
Art. 1er. Chaque administration de district
nommera un commis pour faire les fonctions d'inspecteur-vérifioateur des
assignats.
Art. 2. Ces inspecteurs-vérificateurs seront chargés de vérifier les assignats qui leur seront présentés, d'en constater le faux, de prendre les informations, recevoir les dénonciations, et faire toutes les recherches nécessaires pour découvrir les fabricateurs ou distributeurs des faux assignats.
Art. 3. La direction de la fabrication des assignats à Paris enverra auxdits inspecteurs-vérificateurs toutes les instructions, procès-verbaux et documents qu'elle peut avoir pour reconnaître les faux assignats, ainsi qu'un assignat de chaque nature et valeur, après les avoir estampillés du mot modèle; ces assignats devant servir de point de comparaison pour vérifier ceux qui seront présentés.
Art. 4. Les inspecteurs-vérificateurs correspondront avec l'inspecteur-vérificateur auprès de la fabrication des assignats à Paris; ils dresseront procès-verbal des signes caractéristiques des assignats qu'ils auront reconnus faux ils en enverront de suite copie au vérificateur à Paris, qui le fera imprimer,
et l'enverra de suite à tous les inspecteurs-vérificateurs.
Art. 5. Les assignats qui seront présentés à la vérification, et qui seront reconnus faux, seront de suite estampillés par l'inspecteur-vérificateur, du mot faux, et du nom du district où la vérification aura été faite; ils seront ensuite remis à celui qui les aura présentés à la vérification, lequel pourra les soumettre à une seconde vérification qui -sera faite à Paris par l'inspeoteur-vérificateur auprès de la fabrication des assignats, sous la surveillance des directeurs de ladite fabrication.
Art. 6. S'il résultait de cette nouvelle vérification qu'un assignat estampillé fût reconnu bon, l'inspecteur-vérificateur en dressera procès-verbal au dos dudit assignat; et après l'avoir fait certifier par les directeurs de la fabrication des assignats, le porteur pourra s'en faire rembourser à la trésorerie nationale.
Art. 7. Les assignats qui seront remboursés à la trésorerie nationale en vertu de la disposition de l'article précédent, seront brûlés dans la même forme et avec les mêmes formalités que ceux provenant du paiement des domaines nationaux- il sera dressé un procès-verbal de leur brûlement, et leur montant sera remplacé dans la caisse de la trésorerie nationale, par des assignats qui seront sortis de la caisse à trois clefs.
Art. 8; Lorsque l'inspecteur-vérificateur des assignats aura des indices et présomptions suffisantes pour asseoir un délit, il dressera un procès-verbal des motifs sur lesquels il fonde ses présomptions; et après l'avoir signé, il le remettra, avec toutes les pièces qu'il pourra avoir, au procureur-syndic du; district.
Art. 9. Si le procureur-syndic, après avoir pris connaissance du procès-verbal et des pièces qui pourront y être jointes, y trouve un commencement de preuve, il requerra soit le directeur ou le jury, soit le juge de paix, soit le maire du lieu où le délit de fabrication ou de distribution des faux assignats sera présumé, de faire faire, en présence de deux notables ou fonctionnaires publics, les ouvertures des portes et perquisitions nécessaires dans les lieux occupés par les personnes suspectes et par leurs complices.
Art. 10. Les directeurs de jury, juges de paix, ou maires qui procéderont auxdites perquisitions, sont autorisés à saisir toutes les pièoes de conviction et à décerner tous mandats d'arrêts contre les prévenus.
Art. 11. Les inspecteurs et préposés aux douanes vérifieront les assignats venant de l'étranger; ils en constateront la vérité ou le faux; à cet effet il leur sera adressé, par la direction de la fabrication des assignats, les modèles, procès-verbaux et instructions mentionnées en l'article 3 ci-dessus.
Art. 12. Les porteurs d'assignats suspectés de faux, entipjit en France, seront tenus d'accompagner l'inspecteur ou. préposé des douanes, chez le juge de paix du canton, ou chez le maire, pour y faire la déclaration dans quel endroit et de quelle personne ils se sont procuré lesdits assignats, lesquels se-
ront estampillés, ainsi qu'il est preserit par i l'article 4, et remis au porteur, qui jouira des avantages mentionnés aux articles 4 et 7.
Art. 13. Les inspecteurs des douanes correspondront avec î'inspecteur-vérificateur du lieu le plus voisin de leur domicile; ils dresseront procès-verbal des signes caractéristiques des assignats qu'ils auront reconnus faux; ils l'adresseront à I'inspecteur-vérificateur, avec lequel ils correspondront, et qui le fera passer de son côté au vérificateur à Paris. (Vifs applaudissements.)
(1). Citoyens, les grandes vues du comité des finances ne doivent être ni légèrement combattues, ni adoptées avec une confiance sans bornes. Ce projet doit être mûri et ajourné à huitaine, afin qu'on y puisse ajouter tous les articles nécessaires. Je vous présenterai quelques réflexions qui vous paraîtront justes, surtout dans une matière aussi importante, où les doutes peuvent être comptés pour quelque ohose, s'ils peuvent nous mettre à l'abri de la précipitation et de l'erreur, nous forcer à rectifier ce qui peut être défectueux et à suppléer à ce qui peut manquer pour compléter la loi qui nous est présentée.
Tout le monde conviendra que si nous pouvions exister sans aucune relation au dehors, sans aucun besoin des objets de première nécessité, ou de ceux qui nous tiennent de très près, par nos mœurs et nos habitudes, nous pourrions nous passer de numéraire, en y substituant des signes d'échange, indifférent par lui-même, et sans autre prix intrinsèque que celui qu'il aurait par sa nature; un signe, en un mot, tel que le fer, le papier, les coquillages et toute autre matière; ce signe produirait les mêmes effets que la monnaie métallique, si nous étions réellement renfermés dans l'enceinte de notre territoire, sans communication au dehors. Mais malgré les abondantes productions de la France, nous sommes bien éloignés d'être dans cette heureuse position. L'état actuel de notre agriculture ne se concilie pas avec la loi qui vous est proposée. Une triste expérience nous prouve que .nous manquons quelquefois de graines et d'autres denrées de premier besoin, et que nous sommes forcés d'y suppléer par l'achat chez l'étranger. Or, nous ne pouvons imposer aux étrangers aucune loi sur les assignats. Comment fera donc le négociant? U aura besoin de numéraire; et s'il n'en a pas, il sera forcé d'en acheter. Et qu'on ne se dise pas que nous traiterons avec les négociants, qui se procureront eux-mêmes du numéraire, moyennant une augmentation de prix et l'indemnité qu'ils recevront en assignats! Ces-négociants ne peuvent se livrer à l'entreprise qu'autant qu'ils auraient eux-mêmes en numéraire tous les millions qu'exige ce commerce, ce qui ne peut pas etre mis en supposition; ils seraient donc, en dernière analyse, obligés d'acheter du numéraire, et dès lors s'évanouiraient les dispositions de la loi.
L'industrie sert également d'obstacle à
A l'égard du commerce, ce projet demanderait en théorie les plus profondes considérations et les connaissances particulières d'une multitude de faits relatifs aux négociants, surtout dans les grandes villes. Avant de prohiber la vente ou l'achat de l'argent, no faudrait-il pas examiner dans quelle position se trouvent nos commerçants avec l'étranger? S'ils sont en avance de fonds, il faut leur donner le temps de se retirer; si, au contraire, ils sont débiteurs, comment pourront-ils s'acquitter sans numéraire, et s'ils ne peuvent se procurer du numéraire, comment pourront-ils acheter, pour la République, les matières que nous tirons de l'étranger, les mâts de vaisseau, les cordages et autres objets, tels que le café, le sucre, les épiceries, qui à la vérité ne sont pas de première nécessité, mais qui sont devenus en quelque sorte une habitude? Et vous savez, citoyens, qu'il n'en est pas des habitudes comme des habits et des modes qu'on peut changer en un jour.
Vous voyez donc, citoyens, que l'agriculture, l'industrie et le commerce éprouveraient des dommages incalculables par la loi qu'on vous propose : elle n'est donc qu'un signal de détresse et de discrédit qui ferait passer, chez l'étranger, tout le numéraire qui se trouve dans la République; car, est-ce bien sérieusement qu'on prétend empêcher l'exportation des lingots et des espèces dans une circonférence aussi grande que celle de la France ?
Une double haie de gardes suffirait à peine pour en empêcher le passage; et, outre les inconvénients que oette loi présente, elle deviendrait superflue.
Quel serait donc le remède qu'on pourrait proposer 1 Si nous voulions approfondir cette matière, nous ne nous dissimulerions pas qu'il deviendrait très difficile, peut-être même im-j possible, si l'on exigeait une prompte exécution, de faire des lois sages; il faut donc une loi longtemps méditée, et son exécution devrait être dès longtemps préparée. Mais il faut, avant tout, faire des lois sages sur l'agriculture, s'assurer d'un produit suffisant pour les objets de première nécessité, restreindre le luxe des objets de second besoin, commencer par prohiber non seulement l'achat, mais encore l'usage de tout ce qui n'est pas pour nous d'une indispensable nécessité, réprimer surtout l'agiotage du numéraire. ^ Comme on ne peut rompre tout à coup d'anciennes habitudes, il faut préparer de loin la suppression de l'usage du sucre et du café; et quand tout sera disposé pour l'exécution, c'est alors qu'on pourra frapper de grands coups, et faire des lois vraiment républicaines. Ainsi, citoyens, la loi qui vous est présentée est sage dans les grandes vues qu'elle embrasse, mais elle a besoin d'être profondément réfléchie; il est essentiel surtout de ne pas comprendre, dans la défense, la trésorerie nationale, à moins qu'on ne fasse voir que l'achat du numéraire est absolument inutile pour le service de la
République. Par toutes ces considérations j'en demande l'ajournement à huitaine (1).
Je ne viendrai pas combattre le projet de Cambon, dans le sens de m'opposer au but qu'il a d'empêcher l'infâme commerce de l'argent; si je le combats, ce sera pour proposer d'autres mesures qui tendront au même but. Ainsi j'ai la même intention; j'ai dû en prévenir la Convention nationale pour que mes vues, sur la critique de quelques-uns de ces articles, ne puissent pas être douteuses.
Je ne m'opposerai point du tout à ce qu'on décrète le premier article relatif à la prohibition de la publicité du prix des changes; d'autres pourront s'y opposer : je laisse cette tâche à des personnes qui auront des vues plus lumineuses sur la partie commercialeT Je m'arrête à l'article 3, qui défend la vente du numéraire, et qui porte une peine de six années de gêne contre les personnes qui seront convaincues d'en avoir acheté ou vendu.
Cet article, citoyens, me paraît être la base de la validité de son
système. Je dis que la prohibition de la vente et de l'achat du
numéraire sera absolument illusoire. Yous ne doutez pas que ceux qui ont
envie de vendre et d'acheter n'aient des ressources, des subterfuges
pour
J'ai entendu à mes oreilles : N'avez-vous rien à vendre? S'a,! entendu cela plusieurs fois; or, cela ne suffit pas pour trouver les coupables, car le vendeur et l'acheteur sont tous les deux intéressés à garder le secret.
Ainsi, sur cette première observation, je crois que ce système croule absolument. (Interruptions). Je désirerais donc que la .matière que nous traitons fût discutée par les personnes qui s'y entendent mieux que moi.
(La discussion est de nouveau interrompue.)
, au nom de comité du Salut public, fait un rapport (1) et présente un projet de décret (2) pour ordonner que le général Chazot, commandant de la deuxième division, sera traduit à la barre pour rendre compte de sa conduite; il s'exprime ainsi :
Citoyens, vous avez renvoyé hier, au comité de Salut public une dénonciation faite par les administrateurs du département de la Meurthe, contre Chazot, que l'on accuse d'avoir désarmé les volontaires et de les avoir repoussés dans l'intérieur. Cette dénonciation, jointe à quelques autres renseignements, qui, au même moment que vous renvoyiez au comité de Salut public, parvenaient à un autre de vos comités, ont décidé le comité de Salut public à prendre des précautions que sans doute l'Assemblée approuvera.
Nous avons senti, par l'expérience que nous avons eue, combien il serait imprudent de vous présenter un projet de décret avant d'avoir pris toutes les mesures pour l'exécuter sans danger; c'est ce que votre comité a cru devoir faire. Actuellement les mesures sont prises, je vais vous les proposer, j'espère que la Convention nationale voudra bien les approuver.
Yoici le projet de décret :
« La Convention nationale, approuvant les mesures prises par le comité de Salut public, décrète que le général Chazot, commandant de la deuxième division, sera traduit à sa barre pour rendre compte de sa conduite. »
(La Convention adopte ce projet de décret.)
, au nom des comités d'agriculture et d'aliénation, fait un rapport et présente un projet de décret pour ordonner que les moulins des usines, appartenant à la nation ou provenant des émigrés, qui sont placés sur des cours d'eau, ne pourront être vendus qu'après qu'il aura été vérifié que leur conservation ne cause aucun dommage aux propriétés environnantes; le projet de décret est ainsi conçu (3) :
« La Convention nationale après avoir entendu le rapport de ses comités
réunis d'agriculture et d'aliénation, décrète ce qui suit : er.
« Les moulins et usines appartenant à la nation ou provenus des émigrés, qui sont placés sur des rivières à cours d'eau, ne pourront être vendus, qu'après qu'il aura été vérifié que leur conservation ne cause aucun dommage aux propriétés environnantes, et que leur destruction ne deviendra pas nécessaire au dessèchement des marais.
Art. 2.
« Il sera procédé à cette vérification, sur la demande du procureur général syndic du département, par l'ingénieur du même département, en présence d'un-commissaire du district et de deux officiers municipaux de la commune sur le territoire de laquelle se trouveront ces moulins et usines.
Art. 3.
« Après ce rapport, le directoire du département, sur l'avis de celui du district, ordonnera la vente desdits objets, et il y fera surseoir si le cas l'exige. »
(La Convention adopte ce.projet de décret.)
, au nom du comité du Salut public, fait un rapport et présente un projet de décret pour ordonner que les commissaires de la Conventions dans les départements et aux armées entretiendront une correspondance journalière avec le comité de Salut public et prendront toutes les mesures nécessaires pov/r assurer Vhabillement, l'équipement et les subsistances des armées de terre et de mer de la République ; le projet de décret est ainsi conçu (2) :
« La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de Salut public, décrète :
Art. 1er.
« Tous les commissaires de la Convention nationale près les armées, dans les département frontières, maritimes et de l'intérieur, entretiendront avec le comité de Salut public une correspondance journalière, indépendamment de leur correspondance avec la Convention nationale.
Art. 2.
« Les commisssaires feront sans délai dresser l'état effectif des armées et forces navales de la République, des magasins de vivres, fourrages, armes, habillement, équipements effectifs de campement, munitions, artillerie et hôpitaux militaires; a cet effet, ils requerront tous les agents civils et militaires de travailler, de concert avec eux ou avec des Commissaires par eux nommés, à la confection de ces états, et ils les feront parvenir sans délai au comité de Salut public.
Art. 3.
> (( Les commissaires envoyés par la Convention pour accélérer le
recrutement dans les départements de l'intérieur, ou, en leur absence,
les directoires du département prendront toutes les mesures nécessaires
pour s assurer de la situation des subsistances et des
(La Convention adopte ce projet de décret. )
La Convention reprend la suite de la discussion (1) du projet de décret tendant à prohiber la vente du numéraire et à augmenter et favoriser la circulation des assignats.
Je donne la parole à Génissieu pour continuer son discours.
(2>. Citoyens, j'observais que par la perte successive des assignats, vous ne retirez pas les deux tiers de la somme que vous devriez retirer. Deux faits sont tour à tour la chose et l'effet de la perte que vous éprouvez : plus vous êtes obligés d'acheter de l'argent chèrement, et plus vous perdez d'une manière directe : il faudrait donc y remédier d'une manière quelconque; je propose, pour mesure ultérieure, que le comité des finances soit chargé de vous présenter un projet de décret, qui soit équivalent à ce dont la trésorerie nationale peut avoir besoin, et que cet impôt ne pèse pas sur les pauvres. Je demande le renvoi de ma proposition au comité des finances.
, rapporteur. Je vais ramener la question à un point plus simple. Le titre premier tient de grandes questions politiques. Le titre second tient au service de la trésorerie. Ici nous n'avons pas de question politique à faire, nous ajournerons à demain, si l'on veut, le titre premier, mais allons à la chose publique, car il faut que la chose publique marche. (Applaudissements). Je crois qu'il n'y a personne qui ne dise que j'ai continuellement observé à l'Assemblée qu'à force de donner du numéraire à tous nos agents publics, nous épuiserions totalement nos finances.
Je dois vous dire la vérité ; vous êtes montés à un point que vous aurez besoin de 24 à 25 millions par moisjde numéraire, si vous continuez comme vous êtes allés pendant les quatre derniers mois. Voilà votre position : ne vous la dissimulez pas. Voici comment se fait l'achat du numéraire ; car puisque vous voulez couper le mal, il faut le faire actuellement.
On a cru remédier à tout, en disant à la trésorerie : achetez aujourd'hui 100,000 écus, demain autant, et vous serez au cours de la place de Paris.
Mais voici le fait : la Bourse de Paris, qui est le centre commun,
fournissait 3 à 400,000 livres par jour. Vous achetez, à Paris, 8 à
9,000,000 livres par mois de numéraire : pendant les deux dernières
époques, vous avez eu besoin de 24 à 25 millions par mois. Il fallait
donc prendre des mesures pour en tirer de chez l'etranger ! Alors
quelles opérations faisait-on? On prenait du papier sur l'étranger ; on
l'envoyait recevoir ; et comme chez l'étranger, on paie en numéraire, on
faisait venir de l'argent, qu'on frappait dans les villes de Paris,
Orléans, Bordeaux, Toulouse, Montpellier, Lyon, et vous avez tous vos
états qui vous le prouvent. Mais aujourd'hui vous êtes
(1). Je propose d'ajourner à demain la discussion sur le titre 1er, mais comme il faut que la chose publique marche, je demande que, dès aujourd'hui, la Convention prononce sur le titre second du projet de décret.
(La Convention adopte cette proposition.)
Suit le texte des articles adoptés du titre II du projet de décret (2) :
TITRE II
Pour le paiement en assignats de toutes les dépenses de la République.
Art. 1er.
« A compter du "jour de la pubication du présent décret, le prix de tous les achats, marchés ou conventions pour le service de la [République, seront -stipulés en sommes fixes d'assignats, sans qu'il puisse y être inséré aucune stipulation de paiement en espèces, ni aucune autre clause y relative.
Art. 2.
« Le prix desdits marchés ou conventions qui.auront été passés pour le compte de la République, antérieurement au présent décret, et depuis la promulgation de la loi qui déclare l'argent marchandise,.avec stipulation de paiement en espèces, ou autres clauses y relatives, sera également payé en assignats, avec une indemnité proportionnée auxdites clauses et réserves.
Art. 3.
« L'indemnité sera .réglée par le .ministre dans - le département duquel les marchés auront été passés, et par le fournisseur, et sera revue et définitivement déterminée parla Convention nationale, sur le rapport de son Gomité des finances; elle sera ajoutée aux marchés comme clause additionnelle, et sera soumise à toutes les formalités prescrites pour les marchés passés par les ministres.
Art. 4.
« A compter du 15 avril, présent mois, la partie de solde, appointements,
traitement, qui, d'après les lois, était payée en numéraire aux
officiers, soldats et autres personnes de tout grade et de toute
dénomination, qui sont employés dans les départements de la guerre et de
la marine, et qui seront en Europe, dans le territoire français, ou
occupé par les armées françaises, sera payée en assignats, avec une
plus-value de moitié en sus de la-somme qui était payée en numéraire,
laquelle sera payée dans la même forme que les appointements, solde et
traitement.
« Les décomptes des corps et individus compris dans l'article précédent seront arrêtés en numéraire et en assignats, jusqu'au 15 avril, conformément aux lois existantes.
Art. 6.
« Les revenants-bon ou débets en numéraire, résultant de ces décomptes, seront soldés ;
Savoir :
« S'il est dû du numéraire au corps ou individu, lé revenant-bon lui sera payé en assignats, avec une plus-value de moitié en sus.
« Si, au contraire, le corps ou individu doit du numéraire, il le paiera :
« 1°. Avec une somme égale en assignats ;
( 2°. Avec une reconnaissance de la moitié de cette somme, à précompter sur la plus-value du décompte des trimestres suivants.
Art. 7.
« Le paiement de -cette reconnaissance se fera par des retenues successives, qui ne pourront, dans aucun cas, réduire de plus d'un quart la plus-value fixée par l'article 4 ci-dessus ».
fait connaître à la Convention que les commissaires de Varmée du Nord lui ont fait parvenir une malle destinée à Dumouriez (1).
(La Convention désigne six membres pour en faire l'inventaire ; ces membres sont : B rival, Féraud, Granet, Marec, Albitte l'aîné et Maure.)
, secrétaire, donne lecture d'une lettre de Lebrun, ministre de la guerre par intérim, qui envoie un don de 50 livres l'ait par le citoyen Touronaire ; elle est ainsi conçue (2) n
Paris, le
Citoyen Président,
Je m'empresse de vous envoyer une offrande patriotique de cinquante livres que fait à nos frères d'armes le citoyen Touronaire, capitaine au deuxième bataillon de Taucluse. Il ajoute, dans sa lettre, datée de Nice, qu'il acquitte une dette envers la patrie en lui consacrant le fruit de ses économies sur ses appointements militaires.
Le ministre de la guerre, par intérim, Signé : Le Brun.
(La Convention décrète la mention honorable et ordonne l'insertion de cette lettre au Bulletin.)
(La séance est suspendue à 5 h. 20 et renvoyée au même soir 8 heures.)
Séance permanente du
présidence de ôarran-coulon.
La séance est reprise à huit heures dix minutes du soir .
, secrétaire, donne lecture d'une lettre du citoyen Gohier, ministre de la justice et président du conseil exécutif provisoire, par laquelle il annonce que les nouvelles des départements de l'Ouest continuent d'être rassurantes et que lès généraux La Bourdonnaye et Berruyer prennent des mesures pour attaquer les rebelles sur tous les points : elle est ainsi conçue (1) :
Paris, ce
« Citoyen Président,
« Les nouvelles des départements continuent à être rassurantes. Le recrutement s'avance dans le département de la Loire-Inférieure. Les détachements envoyés de Rennes viennent de rentrer dans cette ville, après avoir débusqué les révoltés de leur dernier repaire aux environs de Mozay. Plusieurs des citoyens égarés sont venus se jeter dans les bras des patriotes et ont nommé leurs chefs. Les coupables arrêtés vont être jugés suivant la rigueur de la loi.
Dans toute la contrée qui environne Brest, la tranquillité est rétablie : les communes insurgées ont rempli toutes les conditions qui leur avaient été imposées, même celle du paiement des frais.
« Plusieurs communes dans le district de Lamballe sont venues d'elles-mêmes à résipiscence, et demandent à satisfaire sans contrainte à la loi du recrutement.
« Le chef des rebelles, dans cette partie, se nomme Bras-de-Forge Bois-Hardi, ci-devant lieutenant au régiment royal marine.
« Toute la côte à la droite de la Loire est absolument délivrée. Le district de Savenay était encore le 2 au pouvoir de l'ennemi; mais les troupes de la République étaient en marche pour s'y porter et en chasser les brigands.
« Si jamais ville a bien mérité de la patrie, c'est celle de Paimbœuf. Sa garde nationale est infatigable. Sans sa résistance extraordinaire, l'ennemi devenait ^maître de la navigation et de tout le commerce de Nantes qui n'aurait pu tenir et eut entraîné l'invasion de tout le département.
« L'équipage de la frégate La Capricieuse et principalement le capitaine Savary qui la commanderont rendu les plus grands services. Leurs fréquentes sorties ont partout intimidé Fennemi et ont beaucoup contribué à purger cette côte.
« Cependant Nantes n'est pas encore sans inquiétude. Des attroupements sont toujours
considérables à la rive .gauche de la Loire. C'est dans la ville de Machecoul que les révoltés paraissent se concentrer. 'Chassés par les forces qui agissent dans les départements de la Vendée et des Deux-Sèvres, ils ont réuni à Machecoul leurs approvisionnements, leurs munitions et une artillerie redoutable. Ils occupent même encore Bourgneuf, Noirmou-tiers et une partie de cette côte; mais le général La Bourdonnaye, qui est à Nantes et qui a combiné les opérations avec lie ; général Berruyer, n'attend que quelques troupes de plus pour faire attaquer les brigands sur tous les points et achever d'éteindre l'incendie. Suivant une lettre de Saint-Brieuc, les conspirateurs Desilles, Dubuat et autres qui avaient échappé à toutes les recherches, ont péri en passant à Jersey.
« Telle est, citoyen Président, la situation de ces départements, telle que l'annoncent les lettres qu'a reçues le conseil exécutif. Le ministre de la guerre s'occupe des dispositions à faire pour accélérer l'entière dispersion des rebelles. Le conseil en rendra compte ce soir au >comité de Salut publia
« Le président -du conseil exécutif provisoire,
« Signé : Gohier. »
(La Convention décrète que le rapport du conseil exécutif sera inséré dans le Bulletin; décrète, en outre, que Paimbœuf a bien mérité de la patrie.)
(Morbihan) (1) demande que la Convention (nationale décrète aussi que les autres villes des départements troublés, qui se sont distinguées dans oette circonstance par leur dévouement, ont bien mérité de la patrie.
(La Convention nationale ajourne cette proposition au moment où elle connaîtra officiellement la conduite de ces villes.)
, secrétaire, donne lecture d'une lettre de Monge, ministre de la marine, par laquelle il rend compte des môtifs qui ont déterminé le conseil exécutif à mettre en état d'arrestation Ailhaud, l'un des trois commissaires civils envoyés à Saint-Domingue.
Suit la teneur de cette lettre (2) :
Paris, le
« Citoyen Président,
« Je m'empresse d'informer la Convention des motifs qui ont déterminé le
conseil exécutif à faire mettre en état d'arrestation le citoyen
Ailhaud, commissaire délégué à Saint-Domingue. Il était adjoint aux
citoyens Pol-verel et Santhonax. Son opinion n'ayant jamais pu
s'accorder avec celles de ses collègues, et désespérant de déjouer seul
l'intrigue qui enveloppe toute cette colonie, il s'est embarqué sans
l'aveu de ses collègues, qui ne m'ont appris son départ que longtemps
après. Il m'a prévenu de son arrivée du port de Lo-rient à Paris; il
s'est rendu chez moi, je lui ai demandé le motif qui l'avait engagé à
quit-
Je lui ai dit qu'il n'avait pas de motifs suffisants pour en agir ainsi. Je l'ai blâmé d'être parti sans autorisation et sans même prévenir ses collègues. Je lui ai dit que sa conduite était très répréhensible, et je lui ai montré combien il exposait la colonie, en quittant son poste dans un moment où sa présence était si nécessaire. Je lui ai assuré, de plus, que la Convention ne pouvait voir cette action d'un bon oeil; qu'au surplus, j'en informerais le conseil, et que je lui communiquerais ensuite sa délibération. Tel est, citoyen Président, le fompte que j'ai rendu à la Convention et que je vous prie de lui communiquer.
« Signé : Monge. »
(La Convention renvoie cette lettre au comité colonial pour en faire "un rapport.)
La parole est à Lidon pour présenter, au nom du comité de la guerre, un article additionnel au décret, rendu ce matin par la Convention (1), pour ordonner la mise en liberté des soldats de l'armée de la Belgique qui ont quitté les drapeaux.
(2). Citoyens, vous avez rendu ce matin une loi pour mettre en liberté les soldats de l'armée de Belgique, qui sont en état d'arrestation pour avoir quitté les drapeaux.
Les commissaires de la trésorerie refusent de leur accorder les frais de route; je demande que vous décrétiez que le ministre de la guerre leur fera accorder lès sommes nécessaires pour leur voyage et fera tout pour faire rejoindre à ces volontaires leurs corps d'attachement.
Yoici le texte de l'article additionnel que votre comité de la guerre vous propose de joindre au décret précédemment rendu (3) :
Art. 7.
« La Convention nationale décrète que le ministre de la guerre est autorisé à ordonnancer, »ur sa responsabilité, les sommes qu'exige l'exécution du décret de ce jour, qui ordonne au conseil exécutif de faire rejoindre aux soldats de la République, de l'armée de la Belgique, leurs drapeaux, et de faire rejoindre aussi ceux qui sont en état d'arrestation à Paris ».
(La Convention adopte cet article).
Suit le texte définitif du décret rendu (4) :
La Convention nationale décrète ce qui suit :
Art. 1er.
« Le conseil exécutif provisoire prendra toutes les mesures nécessaires
pour que les soldats de l'armée de la Belgique, que des manœuvres
criminelles et des trahisons évidentes ont déterminées à s'éloigner de
leurs drapeaux, les rejoignent sans délai ; et l'autorise
Art. 2.
« Il en sera usé de même à l'égard des recrues qui seraient aussi en état d'arrestation.
Art. 3.
« Les soldats porteurs de congés, seront mis en liberté pour rejoindre leurs corps respectifs.
Art. 4.
« Les malades seuls pourront jouir de l'effet de leurs congés.
Art. 5.
« Il sera donné à chaque soldat qui rejoindra, un ordre de route pour son régiment, et l'étape lui sera fournie.
Art. 6.
« Il est enjoint à chaque conseil d'administration de bataillon ou de régiment, de vérifier les motifs qui auront déterminé les congés accordés par Dumouriez, et dans le cas où ils auraient été déterminés par une intelligence criminelle avec ce chef, les porteurs de ces congés seront dénoncés à l'accusateur public du tribunal extraordinaire.
Art. 7.
« La Convention nationale décrète que le ministre de la guerre est autorisé à ordonnancer, sur sa responsabilité, les sommes nécessaires à la dépense qu'exige l'exécution du décret rendu aujourd'hui, qui ordonne au conseil exécutif de faire rejoindre ceux des soldats de la République, de l'armée de la Belgique, qui s'étaient éloignés de leurs drapeaux et qui se trouvent en état d'arrestation, ou autres qui se trouvent actuellement à Paris. »
Une députation du bataillon de Saint-Antoine, de la commune de Bar-sur-Ornain, est admise à la barre (1).
L'orateur de la députation apporte le serment de ses camarades de mourir tous pour la patrie et dépose sur le bureau de l'Assemblée la somme de 120 livres.
répond à l'orateur et accorde à la députation les honneurs de la séance.
(La Convention décrète la mention honorable et ordonne l'insertion de cette offrande au Bidletin.)
Une députation des citoyens de la section de Bonne-Nouvelle se présente à la barre.
L'orateur de la députation donne lecture de l'adresse suivante (2) :
Citoyens représentants,
La section de Bonne-Nouvelle à Paris nous a députés vers vous pour vous
faire pa/rt que, dès le 12 mars dernier, elle avait complété et fourni
au delà de son contingent pour la levée des 300,000 hommes, ordonnée par
la loi du mois de février dernier.
Citoyens représentants, nous venons vous dire que la section de Bonne-Nouvelle ne balancera jamais entre un homme et la patrie.
Nous ne connaîtrons que la volonté générale de la République; vous en êtes les organes, vous êtes les dépositaires de ses droits immortels, ne souffrez pas qu'ils s'avilissent, ou qu'ils périssent dans vos mains.
Les rois, les tyrans, les traîtres passeront, mais les droits éternels des nations ne passeront jamais.
Le salut du peuple, les intérêts de la République française vous sont confiés; que tout autre intérêt cède, que toute ' fonction particulière périsse à jamais; nous vous déclarons que la section de Bonne-Nouvelle n'a jamais appris ces noms particuliers qui voudraient désigner quelque genre du gouvernement nouveau.
Nous ne connaissons que la République et des citoyens; nous ne voyons en vous que les représentants de la patrie française, et ce titre a un prix tel que nous n'en connaissons pas d'autre qui puisse l'égaler.
Mais des ennemis intérieurs plus cruels mille fois que l'ennemi intérieur tournent autour de vous pour vous envelopper, ces ennemis sont cruels, mais ils se laissent aisément connaître ! et qui sont-ils donc1? ne les cherchons pas loin; ce sont nos passions, notre mollesse, le vil égoïsme, l'intérêt particulier qui tue l'intérêt public; sachons enfin que les républiques ne naissent et ne vivent que par les vertus.
Sortez enfin, citoyens représentants, de ce cercle étroit que tracent autour de vous ces hommes à petites passions, qui ne voient que le moment présent, et qui savent épier les circonstances; sachons profiter du passé, corriger le présent, et sauver l'avenir, et dans ce passage pénible d'une constitution qui n'est plus une constitution, conservons, citoyens représentants, la République française.
Nous venons renouveler en vos mains, au nom de la section de Bonne-Nouvelle, le serment de vivre ou de mourir pour sauver la patrie. (Vifs applaudissements.)
En se retirant Vorateur dépose sur le bureau le texte de la délibération qui justifie de son mandat et qui est conçu en ces termes :
Extrait des délibérations de Vassemblée générale de la section de Bonne-Nouvelle (1.)
Du
« L'assemblée générale de la section de Bonne-Nouvelle, sur la représentation d'un
membre que le contingent qui lui était assigne pa r la municipalité de Paris pour la levée des 300,000 hommes, en vertu de la loi du mois de février dernier, était fourni et au delà par elle depuis le 12 mars dernier et qu'on en avait pas encore fait part à la Convention nationale;
« Arrête que, dans le jour, huit commissaires seraient choisis dans son sein pour en prévenir la Convention nationale;
« Et pour l'exécution de son arrêté, elle a nommé les citoyens Folâtre, Kaisser, Blochet, Oudin, Habert, Thiboult, Fournier et Violette.
c Ils se présentent devant l'Assemblée pour lui renouveler le serment de vivre et mourir pour la défense de la patrie.
c Signé: Mollard, président; Delion, secrétaire. »
répond à l'orateur et accorde à la députation les honneurs de la séance.
(La Convention décrète la mention et ordonne l'insertion de cette adresse au Bid-letin.)
TJnè députation des citoyens de la section de Bonconseil se présente à la barre.
L'orateur de la députation donne lecture de l'adresse suivante (1) :
Section de Bonconseil.
À s se m blée per m an ente.
Extrait du registre des délibérations de l'assemblée permanente de la sedtion de Bon-
conseil.
Séance du
« Législateurs,
u La section de Bonconseil vient vous demander que vous fassiez l'examen le plus sévère et le plus approfondi de la conspiration de Dumouriez; les complices de ce traître n'étaient pas seulement dans nos armées, d'autres auxiliaires encore se disposaient l'intérieur à recevoir ses projets. Les troubles qui ont agité la République étaient sans doute combinés avec les déroutes de nos armées; le peuple h'est-il pas fondé à croire qu'il avait de ses complices jusque dans votre sein?... (Applaudissements sur la Montagne et dans les tribunes) Peut-il attribuer à d'autres qu'à ses agents, ceux qui, pendant tout l'hiver ont occupé vos séances à calomnier le. peuple, Paris et les sociétés populaires ? c'est par leurs clameurs que votre attention a été totalement distraite de l'organisation de l'armée; ces précieux moments consommés en personnalités nos ennemis les ont employés à régénérer leur légion et Dumouriez à détruire la nôtré. (Nouveaux applaudissements sur les mêmes bancs.)
« Depuis assez longtemps, la voix publique
(Double salve , d'applaudissements sur la Montagne et, dans les tribunes. — Les membres du centre et de la droite sont dans une profonde agitation et protestent violemment ; plusieurs s'avancent clans le milieu de la salle et protestent violemment: Ils demandent à grands cris que les pétitionnaires soient chassés d'e la barre) (1).
Maintenez la parole aux pétitionnaires, ils doivent être entendus.
Un membre : Ils disent vrai.
Un autre membre :Ces hommes qui font une tellë pétition sont des1 agents de Dumouriez.
Un autre membre : Président, qui aura le droit de se faire entendre ou de la Convention ou des tribunes 1
L'insertion de la pétition au Bulletin, l'envoi aux départements !
Cette section est la section de Bon-conseil, elle vous apporte des conseils... (Interruptions et murmures. )
essaie en vain de se faire entendre.
(2). Puisqu'on a fait la proposition de ne pas permettre aux pétitionnaires de continuer de parler, et puisque cette proposition a été appuyée, il faut la combattre. Je ne fais que rappeler les principes. Tous avez reconnu que le droit de pétition était un droit sacré, par conséquent les pétitionnaires doivent être entendus ; d'ailleurs- vous avez décrété que les membres de cette assemblée pourraient être dénoncés et renvoyés devant le tribunal extraordinaire. Je crois bien que les accusés* sont innocents ; mais lorsque des citoyens ont le courage de venir pour dire la vérité, il faut les entendre. (Applaudissements-sur un grand nombre de bancs et dans les tribunesi)
Je disais que lorsque des pétitionnaires viennent à votre barre dénoncer des complices, il faut les entendre;,mais aussi il ne faut pas qu'ils dénoncent impunément. (Applaudissements à droite et au centre.) Ainsi, voici mes conclusions : je demande que les pétitionnaires soient entendus jusqu'au bout, qu'ils signent ensuite individuellement leur dénonciation, et qu'elle soit renvoyée au comité pour vous en faire un rapport demain. (Vifs applaudissements. )
(La Convention décrète la proposition de Mallarmé.)
L'orateur de la députation des• citoyens de . la section de Bonconseil poursuit :
Qu'attendez-vous donc, législateurs, à les
Craindriez-vous, législateurs, de manquer de preuves assez convaincantes; il en est une qu'eux-mêmes ne peuvent récuser. : c'est la contenance calme de Paris dans ce moment de conspiration universelle;, cette ville, qu'ils calomnient depuis- si longtemps^ cette ville qu'ils n'ont cessé de dépeindre aux départements comme un foyer d'anarchie prête à. renverser à chaque instant la représentation nationale, sontrils assez confondus, lorsque dans cette crise terrible eux-mêmes demeurent en sûreté dans ses murs ? Le tableau qu'ils faisaient, de Paris n'avait donc d'autre but que d'exciter le.-i départements oontre Paris et de donner par là un prétexte à Dumouriez d'intervenir comme médiateur.
La; scélératesse de ce traître vient, de mettre la République à deux doigts de sa perte ; les patriotes peuvent encore la sauver, mais leurs efforts seront, vains si, pendant qu'ils couvriront de leur corps la frontière française, vous ne prenez les mesures les plus terribles pour découvrir les fils secrets- de cette trahison infernale.
Représentants du peuple, patriotes de la Montagne,-c'est à-vous que s'adresse la section de Bonconseil. (Vifs applaudissements des tribunes),, c'est sur vous qu'elle S9 repose du soin de désigner les traîtres : il est: temps de vous montrer enfin dignes du caractère dont vous êtes revêtus ; il est temps que vous dépouilliez d'une inviolabilité liberticide ces hommôs perfides qui, coalisés avec nos ennemis,^ ne siègent parmi vous que pour engourdir votre patriotisme et paralyser votre énergie. Sortez, sortez de ce sommeil que tue la liberté. Les traîtres veillent,, ils vous entourent,, ils vous serrent ; levez-vous^. législateurs^ ib en. est temps encore, livrez aux tribunaux ces monstres que l'opinion publique a déjà proscrits y livrez: une guerre à mort à ces modérés, à ces Feuillants, ces Prothées aristocrates et enfin à tous ses collaborateurs du ci-devant cabinet des Tuileries. Voilà, repré-sentantsj. voià le devoir que vous impose l'amour de la. liberté et de l'égalité; La France a: les yeux fixés sur vous et la France attend. Appelez sur la tête de ces inviolables conspirateurs le glaive de la loi; alors vous aurez vraiment servi la République; alors vous serez les dignes représentants du peuple, et la patrie reconnaissante, même lorsque vous ne serez plusj bénira encore le jour où vous aurez existé. {Vifs applaudissements sur la Mon*• tagne et murmures prolongés à droite et au centre. )
« Pour copie conforme à V original,
« Signé;: Sarrazin, Marchand, Grive,
Cousin, Fournier, Nerger, Bonhomme,.
Jotien-, secrétaire-grefjiier. »
Avant de se retirer, l'orateur dépose la pétition mr le bureau; ainsi que
la commission gui le délèf/ue. lui et ses r.am.ar-crdes. auprès de
ï'Assemblée,, et qui est ainsi conçue (1) :
Commissaires provisoires clu comité établi par VAssemblée générale du 13 août 1792.
Extrait du registre des délibérations de la section de Bàn-C onseil du 7 avril.
« En cette séance, l'assemblée générale, apurés avoir entendu la lecture de la rédaction de l'adresse qui devait être présentée s la Convention nationale à l'effet de faire un examen scrupuleux de ses membres, a arrêté qu'il serait nommé douze membres dans son sein qui se transporteront à la Convention nationale avec les commissaires rédacteurs.
( Les commissaires nommés sont les citoyens Garnerin et Gréois, rédacteurs- Vivier, Gi-rault, Fourny,. Carmin, Sarrazin,.Dupin, Qui-net," Merger, Moreau, Huet, Dautencourt, Trolle et Lamothe, le jeune.
« Délivré pour pouvoir-, « Signé : Marchand, président. »
« Pour copie conforme, « Signé : jouen, secrétaire-greffier. »
(1). Sous le règne de la liberté et de l'égalité, tous les citoyens sont soumis à la loi. La Convention a prouvé qu'elle reconnaît ce principe, mais elle reconnaît aussi que c'est à tous qu'il appartient d'énoncer la volonté générale. La Convention se fera rendre compte de votre pétition ; elle vous invite aux honneurs de la séance.
Plusieurs membres {à droite) : Non, non, qu'ils soient chassés de la barre !
Plusieurs instants se passent dans le tumulte et Vagitation des débats particuliers.)
(Les pétitionnaires signent leur dénonciation.)
(Dans Vintervalle, la droite et le centre continuent toujours à protester, pendant que la Montagne et les tribunes répondent à ces protestations par des murmures.)
Plusieurs membres interpellent le président de rappeler les tribunes à l'ordre.
(2). Citoyens, pourquoi ces clameurs et ces agitations, et pourquoi
faut-il que ce soit la violation d'un principe sacré qui occasionne
cette SGène scandaleuse? Pourquoi contester aux pétitionnaires la
faculté de dénoncer les mauvais citoyens ?. Vous avez bien accordé les
honneurs de la séance à des pétitionnaires qui sont venus me dénoncer.
(Appla/u-clissements des tribunes.) Parmi ces pétitionnaires se trouvait
pourtant un commandant du bataillon de la Corrèze, voleur de chevaux,
dont les crimes sont connus du comité de sûreté générale. Cet individu
était'l'agent des Brissot, des Guadet, des Vergniaud, des Bar-baroux et
des Gensonné. (Nouveaux applaudissements.) La Convention ne saurait,
sans se couvrir d'opprobres, refuser les honneurs de la séance à des
pétitionnaires qui ont le cou-
monte à, la tribune ; il est hué.
lui crie: Retire-toi, oses^u paraître! (.Applaudissements dès tribunes.)
se présente.; ii est hué. {De profonds'murmures s'élèvent dans l'Assemblée.)-
Plusieurs membres : Levez la séance!
se couvre, le calme renaît.
Les tribunes ont violé le règlement {Murmures prolongés)... Je répète que les tribunes ont violé le- règlement, mais j'ai aussi la douleur de constater que plusieurs membres se déshonorent également par ces manifestations violentes. Je rappelle tout le monde- à l'ordre.
(La Convention ferme la discussion et admet les pétitionnaires aux honneurs de la séance )
(l). Je demande la parole pour un fait; je ne serai pas long. Il y a longtemps que j'entends dénoncer et dans la Convention, et dans toutes les parties de la République, les Guadet, les Vergniaud, et toute la faction rolandine.. Je me flatte d'être un des membres: les plus purs de cette Assemblée. {Murmures sur la Montagne.) Si je pèche par quelque chose, mes chers concitoyens, c'est par trop de zèle, par un amour trop ardent pour ma patrie. Si Guadet, Vergniaud et les autres sont coupables, leurs têtes doivent tomber,, et mes yeux seront dessillés, C'est le patriotisme qui vous parle; éeoutez-moi. Dans l'Assemblée législative, j'étais un des plus ardents montagnards.
Plusieurs membres (sjtr la Montagne) : Oui I c'est vrai !
M'a-t-on égaré ? suis-je trompé ? qu'on me tire de mon erreur, mais d'une manière digne de la Convention. Ainsi, je demande que tous ceux qui auront des faits à apporter contre ce» citoyens accusés,, déposent leurs dénonciations au comité de Salut public, et que ceux-ci soient traduits devant le tribunal révolutionnaire., (Applaudissements.) Mais s'ils sont innocents, et nous devons le croire pour l'honneur de nos collègues; {Murmures sur la Montagne) je le répète, nous devons nous croire tous de bons patriotes avant qu'on ait prouvé que nous sommes coupables. Si l'on ne fait que jeter des dénonciations, c'est fournir des armes à nos ennemis; c'est vouloir dissoudre la Convention. Eclair-cissons cette grande affaire, la patrie sera sauvée, si nous cessons d'être divisés. La patrie sera perdue, si d'un côté on accuse Brissot, et si nous, de l'autre, nous accusons les Egalité, les Marat, etc. {Applaudissements universels.) Je me résume et je demande que, sous huit jours, tous ceux qui auront des faits contre les Girondins...
Plusieurs membres : Contre tous !
et contre toutes les factions qui peuvent exister ici et ailleurs, nous
les dénoncent, et que lesaccusés soient traduits au tribunal
révolutionnaire ;; car il fkut
(La Convention décrète que tous ceux qui auront des dénonciations à faire contre quelques-uns des membres de la Convention nationale, et qui tendront à les faire reconnaître pour fauteurs ou complices des trahisons qui menacent notre liberté, seront tenus de les faire au comité de Salut public, dans la huitaine. Le comité en fera un rapport dans le plus court délai, pour être statué ce qu'il appartiendra (1).)
Un membre (2) : Je demande que la dernière lecture pour l'expédition de ce décret soit renvoyée à la séance de demain.
(La Convention adopte cette proposition.)
(3). Nous devons nous garder de porter atteinte au droit sacré de pétition. Les pétitionnaires en ont usé avec courage et énergie; mais il y a du danger à permettre des accusations vagues. Il y a un, mot dans la pétition qu'il est nécessaire do préciser, parce que dans une dénonciation il ne doit y avoir rien de vague. On nous a dit : nous vous dénonçons Guadet, Yergniaud, etc. Je demande que les pétitionnaires soient tenus de dire à l'instant quels sont ceux qu'ils entendent comprendre dans l'et caetera.
(La Convention décrète cette proposition.)
Un membre : Comme les ennemis du bisn public pourraient abuser du décret qui vient d'être rendu, je demande que tous ceux qui ne pourront pas prouver leurs dénonciations, soient punis de mort. (Murmures.)
Je demande l'ordre du jour sur cette proposition, motivé sur l'existence de la loi contre les calomniateurs.
(La Convention passe à l'ordre du jour.)
Les pétitionnaires rentrent dans la barre.
Yous venez d'entendre le décret qué la Convention vient de rendre : -répondez.
L'orateur de la députation des citoyens de la section de Bonconseit : Législateurs, tous les noms des traîtres ne nous sont pas connus, nous connaissons bien leurs crimes, mais non pas leurs noms ; il y en a qui ont écrit dans les départements pour faire arrêter vos commissaires; d'autres ont corrompu l'esprit public dans les départements. Nous connaissons les crimes, et non les auteurs. Voilà ce que nous avons entendu désigner.
(La Convention passe à l'ordre du jour.)
, secrétaire, donne lecture des lettres suivantes :
1° Lettre du secrétaire-greffier du bureau des hôpitaux, qui envoie 202
1. 10 s. de la part (b-s officiers de santé et des employés de l'Hôtel-
Bureau des hôpitaux, le
« Citoyen Président,
« Nous venons, au nom des officiers de santé et employés de l'Hôtel-Dieu, nos confrères, et de ceux des enfants trouvés et de l'hôpital du Saint-Esprit, déposer sur l'autel de la patrie la somme de deux cent deux livres dix sols pour le troisième trimestre de la solde de trois volontaires que nous avons équipés et armés pour la défense de la République, et que nous entretiendrons pendant ia durée de la guerre, suivant l'engagement solennel que nous en avons contracté ici, le 10 septembre 1792, et que nous renouvelons aujourd'hui devant la Convention nationale.
« Le secrétaire-greffier du bureau des hôpitaux,
« Signé : Lévéville. »
Suit la note ci-dessous (2) r
« Je reconnais que le citoyen Romme, député et secrétaire de la Convention m'a remis 200 1. 10 s. offerts par les officiers de l'Hôtel-Dieu.
« Paris, le
« Signé : Du Croisy. »
(La Convention décrète la mention honorable et ordonne l'insertion de cette lettre au Bulletin.)
2° Lettre d>& Louis-François-Joseph Bourbon, qui transmet à la Convention différentes pièces concernant son séjour à Sucy-en-Brie et le serment de maintenir la liberté prêté par la loi, et sollicite à raison de son état maladif et souffreteux, d'être transféré dans un endroit moins éloigné que Marseille ; cette lettre est ainsi conçue (3) :
« Citoyens représentants,
« Louis-François-Joseph Bourbon s'est soumis âu décret qui ordonne son arrestation comme individu de la famille des Bourbons.
« Mais, citoyens, il est dans un état de maladie et de souffrance qui ne permet pas, sans inhumanité, sa transfération dans un endroit aussi éloigné que l'est Marseille et de faire un aussi long et aussi fatigant voyage.
« Il supplie la Convention d'indiquer un endroit pius prochain qui, sans nuire aux mesures de sûreté que la Convention a jugé convenable de prendre; soit plus conforme à l'état de maladie dans lequel il se trouve depuis trois mois.
« Son attachement à sa patrie n'est pas douteux. Rentré volontairement en
France le 2 avril 1790, après avoir été obligé d'en sortir en 1789, et
par conséquent longtemps avant le
« Il a prêté le 15 octobre 1792 le serment de maintenir la liberté et l'égalité ou de mourir en la défendant.
Il n'a cessé de résider à Paris et à sa maison de campagne, depuis le 2 avril 1790 : il en joint ici les preuves. 11 ne vous demande, citoyens, que ce que votre, justice et votre humanité ne sauraient lui refuser.
« Signé : Louis-François-Joseph Bourbon. » Suivent les deux pièces suivantes :
I
Copie du certificat de prestation de serment dont le citoyen pétitionnaire est porteur (1).
Municipalité de Villiers-sur-Marne, district de Corbeil, département de Seine-et-Oise.
« Nous certifions que le citoyen Louis-François-Joseph Bourbon, demeurant dans l'étendue de notre municipalité, a prêté le serment ordonné par le décret de l'Assemblée nationale du) 15 août 1792, le 15 octobre 1792, de maintenir de tout son pouvoir la liberté et l'égalité ou de mourir en la défendant.
(( Fait à notre maison commune, le 21 octobre 1792, l'an premier ae la République française, et auquel nous avons fait apposer le sceau de notre municipalité et ont signé, etc.
« Pour copi'3 conforme à Vexpédition qui est en mes mains.
« A Paris, le 8 avril 1793, l'an II de la RépuT blique.
« Signé : Louis-François-Joseph Bourbon. » II
Certificat de résidence qui est valable pendant trois mois à compter du jour de Venregistrement (2.)
Commune de Sucy, chef-lieu du canton de Sucy, département de Seine-et-Oise. Délivré gratis, sauf le droit de timbre.
Extrait des registres des délibérations de la commune de Sucy, chef lieu de canton, district de Corbeil, département de Seine-et-Oise.
municipalité de paris.
Certificat de résidence délivré gratis.
« Nous, soussignés, président et commissaire de la section de la Croix-Rouge ;
Sur la demande qui en a été faite en exécution des décrets de
l'Assemblée nationale, des vingt-quatre juin, treize décembre mil
sept-cent-quatre-vingt-onze et trente mars mil sept cent
quatre-vingt-douze, conformément à l'arrêté du conseil général de la
commune du vingt-six juin mil sept cent quatre-vingt-onze
« Yu et certifié par nous, maire et officiers municipaux de la ville de Paris.
« Fait à la maison, commune, ce dix juillet mil sept cent quatre-vingt-douze, l'an quatrième de la liberté.
« Signé: N.-F.- Lonay, -officier municipal Royer, secrétaire-greffier. »
Certificat de résidence à la Lande.
« Nous soussignés, maire, officiers) municipaux et membres du conseil général de la commune de Sucy, sur la demande qui en a été faite par Louis-François-Joseph Bourbon, ci-après nommé et signalé, certifions et attestons qu'il a résidé à Paris, depuis plus de six mois jusqu'au dix juillet dernier, sans interruption, ainsi qu'il nous en a justifié par un certificat de sa section, en date du même jour, visé aussi le même jour qu'il nous a représenté en original et duquel copie est ci-dessus transcrit; certifions sur l'attestation des citoyens Jean-Claude Larue, Jean-Louis Grangez, Gaspard Bougamont, Pierre-Etienne Boisseau, Claude Trotin, Spire-Etienne Servin, Pierre Magny et Pierre-Louis Vallée, demeurant à Villiers-sur-Marne, tous domiciliés dans le canton de Sucy qui est celui dans l'arrondissement duquel est la résidence du certifié, que Louis-François-Joseph. Bourbon, âgé de cinquante-huit, ans, taille de cinq pieds six pouces; cheveux et sourcils blonds, yeux bleus, nez gros, bouche grande, menton arrondi, front découvert, visage allongé, demeure actuellement à la Lande, commune de Yilliers-sur-Marne, maison à lui appartenant et qu'il réside et qu'il y a résidé, sans interruption, depuis le onze juillet mil sept cent quatre-vingt-douze jusqu'à ce jour. En foi. de quoi, nous avons délivré le présent certificat qui a été donné en présence du certifié et des huit citoyens certifiants, lesquels certifiants ne sont à notre connaissance et suivant l'affirmation qu'ils ont faite devant nous, parents, alliés, fermiers, domestiques, créanciers, débiteurs, ni agents dudit certifié, et ont, lesdits certifié et certifiants, signé tant sur le registre des délibérations, et actes de la commune de Sucy que sur le présent extrait.'
« Fait en la maison commune, le vingt-deux février mil sept cent quatre-vingt-treize, l'an II de la République française. « Signé : Servin, Vallée, Moret, Fouré, maire; Guilbert, Bidaut, David, Trotiïi, Grangez, Allonneau, Fromont, Larue, Mogny, Bougamont, Boisseau, Gaut, secrétaire-greffier ; Louis-François-Joseph Bourbon.
« Nous soussignés, maire, officiers^ municipaux et membres du conseil général de la commune de Sucy, qui est celle du chef-lieu du canton de Sucy et de la commune de Villiers, qui est celle de la résidence de Louis-François-Joseph Bourbon, certifions que le certificat de résidence ci-dessus, délivré le vingt-deux février, a été publié et affiché dans le chef-lieu du canton de Sucy, et dans l'étendue de la commune de Villiers, pendant quinze jours consécutifs, aux termes de la loi.
« Fait à Sucy, le-dix mars 1793, l'an LE de la République française.
« Signé : Fouré, maire ; Dupont, David, Bidaut, Guilbert, Fromont, Mqret, Allonneau, Gaut, secrétaire-greffier. »
( Fait à Villiers-sur-Marne, le 11 mars 1793, l'an II de la République française. « Signé : Germain Petit, Charles Guillemin, Denis Petit, Discotigny. »
« Vu par nous, président et membres du directoire du département - de Seine-et-Oise pour service de certificat de résidence, seulement depuis le 11 juillet 1792 jusqu'au 2 février 1793,
« Fait à Versailles, le 13 mars 1793, l'an II de la République française.
« Signé: Rotrou, Charbonnier, Lavallée, Lecuve, Cévenez. »
« Vu par nous, président et administrateurs du directoire du district de Corheil, le 27 mars 1793, l'an II de la République. « Signé: Grappe, Langlois, Proustat, Ran-
douin. »
(1). J'observe que le pétitionnaire pourra n'aller qu'à petites journées-, si sa santé ne lui permet pas d'aller plus vite : dans ces conditions j'estime qu il n'y a pas lieu de revenir sur un décret que nous avons tous jugé nécessaire et qui a été rendu à une forte majorité. Je propose l'ordre du jour.
(La Convention décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur la demande de Louis-François-Joseph Bourbon.}
Un membre (2) demande pourquoi le décret, relatif à la formation d'un corps de quarante mille hommes, n'est pas encore expédié, et observe que le projet présenté par le comité de la guerre lui a été envoyé, après avoir décrété la proposition principale, afin qu'il présentât un mode de formation plus expéditif..
(La Convention décrète que ce rapportl lui sera fait dans la séance du lendemain. )
Une députation des citoyens de ta section du Finistère se présente à la barre.
L'orateur de la députation donne lecture de l'adresse suivante (3) :
« Citoyens législateurs,
( La confiance et l'estime sont en politique les premiers soutiens de
l'homme public et surtout pour ceux qui représentent une grande nation.
« La première c'est pour vous dire qu'il ne se lassera jamais de faire les plus généreux sacrifices pour la patrie et-surtout pour consolider sa liberté,
( Mais il vient vous dire aussi, ce peuple, qu'il est las de voir la trahison se propager de toutes parts et les traîtres impunis.
« La seconde est pour vous représenter que le sang qu'il a versé depuis la Révolution et qu'il verse encore dans ce moment affreux où la plus horrible des perfidies (dont le traître et infâme Dumouriez et ses alentours ont donné l'exemple) eh bien, ce sang qu'il verse encore et qu'il prodigue, la cruelle volonté de ces lâches ambitieux a consolidé plusieurs constitutions, et il n'en a pas encore une.
« Législateurs, il est temps que vous mettiez un terme à cette douloureuse anxiété. Elle avilit trop la nation que vous avez l'honneur de représenter pour que vous n'employiez les moyens de terminer cette lutte indécente que l'ambition, l'intrigue et la perfidie surtout font à la raison, la justice et l'équité des seuls principes qui .basent notre cause.
« Nous ne vous dissimulerons pas l'inquiétude qui nous agite en ce moment lorsque nous voyons, à la place des lois et au bonheur que nous espérons tous, nous voyons,, dis-je, la guerre civile et que l'anarchie afflige notre triste patrie.
( Que penser de la stupide sécurité ou plutôt criminelle insouciance de ceux en qui nous plaçons- notre confiance à l'aspect de cette coalition monstrueuse et scélérate de ministres et de généraux vendus aux amis de la contre-révolution et aux puissances étrangères, que vous, Convention nationale des Français, avez placé (par trop peu d'examen ou d'enthousiasme peut-être par le faux éclat de perfides victoires), à la tête de nos opérations civiles et militaires; que nous les voyons, ces perfides, livrer nos frères et nos intrépides défenseurs à la plus désastreuse misère et au massacre, nos frontières abandonnées et livrées à nos plus cruels ennemis.
« Eh bien, législateurs, ces traîtres ont trouvé dans votre auguste sein un appui dans des hommes trompés ou perfides.
« Maintenant que cette horrible trame ourdie contre la liberté et souveraineté du peuple est rompue, que vous en connaissez tous les fils, que craignez-vous pour tarder de faire usage de la foudre que nous avons mise dans vos mains, pour frapper tous les traîtres et les conspirateurs ? Nous sommes là pour vous défendre et vous couvrir de nos corps; ayez confiance en nous, il nous tarde de voir étince-ler le glaive de la loi, protectrice de l'innocence et vengeresse du crime, se promener sur la tête coupable de ces monstres.
« C'est de vous, et de nous qui vous soutiendrons, que nous attendons le salut de la chose publique.
« Un homme qui se dit républicain doit être simple comme la nature; son luxe doit être dans son patriotisme, ses talents et ses mœurs.
« Arrêtez la rapacité de ces spiolateurs qui, comme les oiseaux de proie, ne vivent que de cadavres; faites un exemple terrible de ceux
qui sont convaincus d?avoir spéculé sur l'accaparement des comestibles de première nécessité pour agiter le peuple afin de le livrer au dégoût de la liberté et au mépris des lois.
« Faites-taire, nous vous en conjurons, législateurs, tous'ces vils intrigants, qui ne se sont servis et ne se servent de la Révolution que pour s'enrichir et mépriser le peuple; établissez des peines contre ceux qui, ne pouvant être heureux du bonheur des autres, entravent ou dérangentl'application des lois afin de faire murmurer le peuple et le livrer au désespoir, que lès hypocrites en patriotisme soient classés parmi les traîtres et poursuivis-comme les-plus dangereux de ia société.
« Qu'une Constitution digne de vous et de nous soit l'objet de vos sollicitudes; que, comme une rosée bienfaisante, elle nous rafraîchisse après une fièvre aussi longue et aussi ardente, comme étant lé but de notre espérance; qu'elle établisse un bonheur durable, pour tous les Français présents et futurs, et vous mérite, à vous qui l'aurez faite et à nous qui l'aimerons et la. défendrons^ de la postérité qui en profitera, une reconnaissance éternelle et la bénédiction de l'Univers.
« C'est par cette seule et unique mesure que vous l'assurerez. Souvenez-vous de votre auguste caractère, quittez la petite^ passion de l'intrigue; montez à toute la hauteur de la dignité), elle ne doit 'que vous inspirer l'énergie du vrai courage; nous lé seconderons puissamment, ce courage, malgré que nos ressources ont été altérées par l'usage perfide qu'en on fait de méchants ambitieux; il nous en reste encore assez pour faire trembler et punir les tyrans et les traîtres.
( Souvenez-vous qu'on peut nous trahir, mais non nous vaincre; quatre années dé courage et de persévérance contra-; toutes les- machinations de- l'intrigue, de" la perfide ambition et du plus vil intérêt, doivent être à vos yeux un titre assez puissant pour vous assurer de notre promesse.
«c Examinez de près, nous vous en prions, la conduite de ces privilégiés de l'ancien régime et la sotte prétention de ceux du nouveau, vous trouverez la véritable cause de la dissolution de nos armées, de l'insubordination de plus; d'un corps, de la perte des plus braves défenseurs de la liberté; vous verrez que c'est là l'insidieuse manière dont ces ci-devants individus interprètent l'égalité et la liberté, afin de dégoûter nos- soldats en les décourageant; arrachez ces plantes parasites du territoire de la liberté, jetez-les hors du sein de la patrie, ils n'en sont plus les enfants, ils ont trahi leurs mères ;; donnez: pour chefs aux soldats la liberté de ces hommes blanchis par l'expérience et la valeur que leur modestie ne fait point apercevoir,, mais que leurs vertus vous feront connaître.
« Signé : Bourgoin, Rousseau, Paillaud. »
, répond an tàla députation (\). Citoyens, l'énergie et la fierté sont
l'apanage des hommes libres. Dépuis longtemps vous avez prouvé qu'elles
savent s'allier avec l'amour des lois. La Convention entend toujours
avec satisfaction l'expression de vos sentiments généreux. Elle ne
négligera au-
(La Convention décrète la mention honorable et ordonne l'insertion de cette adresse au Bulletin.)
Une députation des citoyens de- la section dit Louvre se présente à la barre (1).
L'orateur de la députation, après avoir exprimé avec énergie les. sentiments douloureux dont les citoyens de cette section sont pénétrés, propose en leur nom les mesures suivantes :
1° Qu'aucun noble ni prêtre n'occupent aucune place dans les armées, ni dans les. administrations;
2° Que ^administration des postes soit promptement changée ;
3° Que toutes les places dans lés armées, comme dans l'intérieur ne soient données qu'aux pères; de famille, dont le. civisme et les talents seront reconnus ;
4° Que les femmes et les enfants des généraux soient retenus en France, pour servir d'otages en cas de trahison.
.répond-à l'orateur et accorde à la députation les honneurs de la séance.
(La Convention décrète la mention honorable et ordonne l'insertion de cette adresse au Bulletin.)
Le citoyen Acier-Lerica, sexagénaire,, connu par ses talents dans une branche importante de la physique expérimentale, est admis à. la barre (2).
Il dépose les titres t^u'il reçut du tyran, et qu'il dédaigne aujourd'hui;
Il propose de donner les moyens de faire tiompher nos- armées tant sur terre que sur mer, nos ennemis fussent-ils cinq fois plus nombreux que nous. Une seule bordée de canons-sera plus que suffisante pour fracasser voiles, mâts et cordages, ou porter le désordre et l'effroi dans un camp;
Cette invention consiste en balles, boulets et bombes qui. se divisent infiniment et deviennent invisibles aux yeux de l'ènnemi.
L'essai en a été fait en présence de Vander-monde, Fourcroi et Dumas, nommés commissaires par le ministre Servan pour cet objet.
U ajoute au dépôt de ses lettres un assignat de 5 livres, pour lés frais de la guerre.
répond au pétitionnaire et lui accorde les honneurs de la séance.
(La Convention nationale ordonne la mention honorable de l'offrande, et renvoie la pétition aux comités de la guerre et d'instruction publique, réunis.)
Wne députation des citoyens de la section des: Ghravilliers est admise à
la barre (3).
Osget est estropié pour la vie; il demande à jouir, chez lui, de la retraite des invalides.
Les deux autres peuvent encore travailler; mais tous ont droit à une indemnité pour les pertes qu'ils ont faites.
répond aux pétitionnaires et leur accorde les honneurs de la séance.
(La Convention renvoie la pétition au comité de la guerre, et accorde provisoirement 300 livres aux pétitionnaires.) (1).
Une députation des citoyens de la section du Mail est admise à la barre.
Le citoyen Lavarde, orateur de la députation, donne lectute de l'adresse suivante (2) :
« Législateurs,
« Les complots du traître Dumouriez sont découverts; mais la patrie ne sera sauvée que quand vous frapperez ses complices.
« Nous sommes députés vers vous par la section du Mail, non pas pour vous complimenter, mais pour vous" conjurer, au nom de la patrie, de faire ce que le salut public exige de vous, dans les circonstances critiques où nous sommes. Prenez de grandes mesures, faites tomber sans distinction toutes les têtes coupables, sous le glaive de la loi; songez que le peuple est debout, qui est las de servir de jouet aux intrigants et aux ambitieux, qui le trahissent chaque jour, en le calomniant.
« Nos ennemis s'étonnent du calme qui règne dans Paris, d'après les
menaces du traître Dumouriez, et ils concluent de cette tranquillité que
le feu sacré du patriotisme est éteint dans cette grande cité. Qu'ils
connaissent mal l'esprit qui nous anime ! Si nous concentrons notre
indignation contre les conspirateurs de toutes espèces qui nous
environnent, c'est que nous savons par expérience que le calme est
nécessaire pour dé-
« Législateurs, faites triompher la cause de la liberté, yous en avez les moyens; songez que si vous ne sauvez pas le peuple, le peuple se sauvera lui-même, car il veut la liberté ou la mort.
« Nous demandons :
« 1° Que le directoire des postes soit renouvelé et que la conduite des membres de ce directoire ainsi que celle du ministre C.la-vière soient examinées avec une scrupuleuse attention;
« 2° Que les comptes de l'ex-ministre Roland, ce corrupteur de l'esprit public, soient enfin apurés;
« 3° Que tous les ci-devant nobles qui sont à la tête de nos armées, soient destitués et remplacés par des sans-culottes;
« 4° Que la conduite des membres du comité de défense générale, dont quelques-uns étaient en correspondance directe avec Crom-well-Dumouriez, soit soumise à un examen sévère et rigoureux. »
Avant de se- retirer, le citoyen Lavarde dépose sur le bureau la commission qui le délègue, lui et ses camarades, auprès de VAssemblée et qui est ainsi conçue (1) :
Extrait du procès-verbal de Vassemblée générale permanente de la section du Mail.
Du
« L'assemblée arrête à l'unanimité (et ce au moment où elle était la plus nombreuse) que l'adresse à la Convention nationale dont copie est ci-jointe, sera portée par les 6 commissaires ci-après nommés et lue à la barre de la Convention par le citoyen Lavarde, l'un d'eux.
(( L'assemblée a nommé pour ses commissaires les citoyens Lavarde, Wendenyver père, Pelletan, Mainy Saint-Aubin, Gâté et Cordas,
« Auxquels le présent est expédié pour pouvoirs.
« Fait en l'assemblée générale lesdits jours et an.
( Signé : Moessard, président ; Pelletan, secrétaire-général, Letellier, secrétaire-adjoint, faisant les fonctions de secrétaire-greffier. »
répond à l'orateur et accorde à la députation les honneurs de la séance.
(La Convention décrète la mention honorable et ordonne l'insertion de
l'adresse au Bulletin.)
L'orateur de la députation demande :
1° Que la cocarde tricolore soit uniforme pour tous indistinctement, pour la grandeur, la proportion des couleurs et la matière;
2° Que tous les autres signes soient prohibés;
3° Que la position sur le chapeau soit déterminée, et qu'il y ait une peine prononcëe contre quiconque y contreviendrait.
répond à l'orateur et accorde à la députation les honneurs de la séance.
(La Convention renvoie la demande au comité de Salut public.)
(La séance est suspendue à minuit et prorogée au lendemain matin, dix heures.)
Séance permanente du
présidence de romme, secrétaire.
La séance est reprise à dix heures du matin.
(2). Je demande la permission à la Convention de lui donner lecture d'une lettre que m'ont adressé, pour lui remettre, les républicains de Rodez, réunis en société populaire et qui est ainsi conçue (3) :
Rodez,
« Citoyen Président,
( Et nous aussi nous venons acquitter une dette en déposant sur l'autel de la* patrie 161 paires de souliers, 27 paires de bas, 45 culottes, 12 paires de guêtres, 1 sac de peau, 1 chapeau, 1 giberne.
J « Sûrs de la qualité de ces fournitures, nous les destinons aux volontaire de Rodez qui se trouvent dans le 2° bataillon de l'Aveyron en présence de l'ennemi et ne tarderont pas à les user à sa poursuite.
« Ce premier envoi sera bientôt suivi d'un autre, et chacune de leur victoire sera pour nous l'époque d'une nouvelle souscription.
( Puisse cet engagement épuiser nos facultés; il nous faut à tout prix la liberté; sa conquête n'appauvrit jamais.
« Passion généreuse comme la bienfaisance, elle inspire des élans et ne dicte pas de calculs.
« Pourvoir aux besoins de nos frères, c'est subvenir aux nôtres, et nous
ne nous fatigue-
« Signé : Monseignat, secrétaire.
(La Convention décrète la mention honorable et ordonne l'insertion de cette lettre au Bulletin.)
(1). Je suis prévenu que le département de la Corrèze a très facilement complété son recrutement et que toutes les communes ont considérablement augmenté leur contingent sitôt qu'elles ont appris la trahison de Dumouriez. Ces braves défenseurs de la patrie ne demandent que des armes pour courir venger la République, je réçlame pour eux la mention honorable et que le ministre de la guerre mette à profit au plus tôt cette bonne disposition pour repousser les ennemis.
(La Convention décrète la mention honorable du civisme des habitants de la Corrèze.)
(2) J'ai l'honneur de déposer sur le bureau de la Convention les clef s de la ville de Gand, qui m'ont été remises par le parisien Lavalette, commandant temporaire à Bruxelles et depuis à Gand, qui est sorti le dernier de cette ville après y avoir assuré la retraite des troupes. Je demande pour lui la mention honorable et que le dépôt de ces clefs aux archives soit ordonné.
(La_ Convention décrète la proposition de Gossuin.)
, secrétaire, donne lecture des lettres et adresses suivantes :
1° Lettre' du citoyen Jean-Maurice La-catte (3), lieutenant en troisième au régiment, de Toul du corps d'artillerie, officier'"retiré à Avesnes, département du Nord, qui offre la décoration militaire.
2° Lettre du citoyen Lebeufve (4), lieutenant du 1er bataillon de chasseurs francs, cantonné à Cosslar, près Juliers, qui offre aussi, en faveur des veuves et orphelins de la ville de Lille, sa décoration militaire, et la médaille patriotique qu'il a reçue en 1789, sur la demande des gardes françaises qui composaient la tête de la compagnie, bataillon des Petits-Pères-Nazareth, section du Temple.
(La Convention décrète la mention honorable de ces deux offrandes et en ordonne l'insertion au Bulletin.)
3° Lettre des administrateurs du district de Beciuvais, qui félicitent la
Convention des mesures grandes et vigoureuses qu'elles a aodptées ;
cette lettre est ainsi conçue (5) :
Beauvais,
« Citoyens,
«c Les administrateurs du district de Beauvais n'ont jamais varié depuis le commencement de la Révolution : ils seront toujours les mêmes.
« Aux mesures grandes et vigoureuses que vous adoptez, ils reconnaissent les véritables représentants d'un peuple républicain.
« Comptez sur notre zèle, les traîtres n'échapperont pas à notre vigilance, et nous saurons mourir à notre poste plutôt que de nous séparer de vous.
« Liberté, égalité ! Respect à nos représentants, haine aux tyrans, obéissance aux lois, voilà notre serment !
« Périsse l'infâme Dumouriez et ses pareils ! Voilà notre voeu.
Signé : Joseph Blanchard, président ; San-gnier, Demoulin, Patin, Minet, Pillet, Rigault, procureur - syndic ; Maingny, secrétaire.
(La Convention décrète la mention honorable de cette adresse .et en ordonne l'insertion au Biilletin. )
4° Lettre des citoyens Rochegude, Defermon et Prieur (de la Côte-dOr), commissaires de la C onvention aux côtes ae Lorient à Dun-herque, par laquelle ils rendent compte du zèle patriotique des habitants de Saint-Malo; elle est ainsi conçue (1) :
Saint-Malo, leer
avril 1793
« Citoyen président,
« La Convention nationale apprendra avec plaisir que pendant notre séjour à Saint-Malo, les corps administratifs, les commandants militaires et les citoyens ne nous ont laissé aucun doute de leur patriotisme et de leur zèle pour le maintien de la République.
« Cette commune, qui a plus de 1,200 marins embarqués sur les vaisseaux de la République ou sur des corsaires, n'en a pas moins fourni encore avee empressement son contingent pour l'armée. Le -recrutement y a été complété par des citoyens inscrits volontairement; et la commune s'est chargée de les armer et équiper à ses frais. Sa garde nationale vient de réprimer efficacement les mouvements séditieux qui s'étaient fait sentir dans plusieurs endroits de ce département.
« Ses corsaires soutiennent aussi leur ancienne réputation, et ils ont pour plus de 3 millions de prises entrées dans les ports de la République.
« Nous avons pris toutes les mesures propres à assurer la défense de
cette ville et des
« Enfin, dans plusieurs communes voisines de la côte, des officiers municipaux, par indifférence ou mauvaise volonté, tenaient une conduite dont les ennemis de la patrie ne pourraient manquer de tirer avantage, surtout en raison de la localité; nous les avons remplacés par des hommes ôapables, par de bons sentiments, de faire aimer la liberté; et par leur fermeté, Cl© 116 J)clS souffrir qu'on lui porte impunément des atteintes.
Les commissaires de. la C onvention nationale,
«.Signé: Rochegude, C. A. Prieur, Defermon.
(La Convention renvoie cette lettre au comité de marine.)
5° Lettre des administrateurs du département de la Charente (2), par laquelle ils informent la Convention nationale qu'aussitôt qu'ils ont appris la position critique de nos frères d'armes dans les départements des Deux-Sèvres^ de la Loire-Inférieure et de la Vendée, ils ont fait partir 1,800 hommes, tant infanterie que cavalerie, avec cinq pièces de campagne et les munitions nécessaires; ils sont en face des brigands depuis quelques jours; ils les ont déjà fait repentir de leur scélératesse.
« Les recrutements, disent-ils, n'ont été que plus actifs; l'énergie de nos braves concitoyens s'est accrue dans la proportion des dangers. Nous vous apprenons avec plaisir que notre contingent, fixé à 4,489 hommes, a été porté à 6,000 hommes.
« L'esprit public de notre département peut être comparé à celui qui régnait dans les plus beaux jours de la Grèce et de Rome. La plus parfaite union règne entre tous les citoyens, les sociétés populaires et les corps constitués; et notre département peut être considéré comme un département de frères qui se tiennent intimement unis à la chose publique, qui confondent tous leurs intérêts particuliers dans l'intérêt de la famille entière.
« Le courrier qui nous est arrivé hier de Niort, et qui a été à
Fontenay-le-Peuple, nous a donné les nouvelles les plus satisfaisantes
sur la situation actuelle des départements révoltés. Les brigands sont
repoussés partout avec beaucoup d'avantage, et on n'y
(La Convention renvoie la lettre au comité de sûreté générale.)
6° Lettre des membres des conseils généraux du district et de -la commune de Gonfolens réunis (1), par laquelle ils font part à la Convéntion des mesures qu'ils ont cru devoir prendre pour assurer la tranquillité publique, dès qu'ils ont appris les nouvelles de la rébellion de la Vendée, soit en faisant arrêter les personnes suspectes, soit en mettant les conseils généraux des communes en surveillance permanente et les gardes nationales en état de réquisition permanente.
Ils annoncent que, pour prévenir l'explosion d'une insurrection dont plusieurs communes de leur arrondissement étaient depuis quelque temps menacées et qui, dans quel-ques-unes, a déjà éclaté immédiatement après le départ d'une partie de la force armée envoyée au secours des départements agités, ils ont cru, dans ces circonstances difficiles, devoir prendre, contre certains individus désignés comme, suspects par l'opinion publique,, des mesures rigoureuses à la vérité, mais commandées par le salut commun.
En conséquence, ils soumettent à l'approbation de la. Convention deux arrêtés qu'ils ont pris les 18 et 28 mars dernier, portant :
1° Que les'sieurs Lafordie, Dubois-Lavi-gone, Marchand-Duchaume, Lapardoussie, Lendrevie, Chamborant, Pommet, Drinojaud et leurs familles, de la commune de Confolens, seraient sur-le-champ renfermés, les hommes dans une maison et les femmes dans une autre, pour y être gardés en otages jusqu'à nouvel ordre, et répondre des événements de la guerre civile dont cettre contrée était menacée ;
2° Que ces mêmes mesures seront sur-le-champ mises à exécution dans toutes les communes du district, et que les personnes jugées suspectes par les conseils généraux, seraient conduites dans le chef-lieu de leurs cantons respectifs, pour y être gardées ainsi qu'il est ci-dessus prescrit :
Ces mêmes arrêtés contiennent, en outre, plusieurs autres mesures secondaires et d'exécution.
(La Convention approuve ces mesures et la conduite des conseils généraux et décrète l'insertion par extrait au Bulletin.)
7° Adresse de la municipalité du Havre (2), qui expose qu'elle n'a de subsistances que pour quatre jours et demande qu'on vienne promptement à son secours.
(La Convention renvoie l'adresse au conseil exécutif.)
(La Convention renvoie l'adresse au comité de liquidation.)
9° Lettre de Vadministration du département de l'Isère (2), qui envoie deux délibérations relatives, l'une à l'établissement de la contribution territoriale en nature, et l'autre à la conversion de la contribution mobilière et du droit de patentes en capita-tion, et une contribution industrielle.
(La Convention renvoie la lettre au comité des finances. )
10° Lettre de Lebrun, ministre de la guerre par intérim (3), qui adresse à la Convention nationale l'état nominatif des employés des lre, 2e, 3e, 5e et 6e divisions du département de la guerre, celui de la 4e division ayant été envoyé le 3 de ce mois; le ministre y joint l'état du secrétariat de la guerre.
(La Convention renvoie la lettre au comité militaire. )
11° Lettre de l'adjoint de la 4e division du ministre de la guerre (4) qui demande à la Convention nationale un examen prompt et sévère de sa conduite.
(La Convention renvoie la lettre au comité de l'examen des comptes.)
12° Lettre des citoyens Guermeur et Lemal-liaud, commissaires de la Convention dans les départements du Finistère et du Morbihan, par laquelle ils rendent compte des mesures de sûreté publique qu'ils ont prises contre les rebelles et de celles destinées à assurer l'approvisionnement de Brest et préserver ce port de l'incendie dont il était menacé par les brigands ; elle est ainsi conçue (5.)
Vannes,
« Citoyens nos collègues,
« Par notre lettre du 30 mars dernier, nous vous annoncions la reprise de la ville et du château de Roehefort, et nous vous faisions pressentir qu'elle allait être suivie de celle de la Roche-Bernard par le brave Beysser, qui s'en est réellement rendu maître et qui de .là a marché sur Guérande, dont il s'est également emparé. Comme nous ne doutons pas que les administrations ne vous fassent passer les procès-verbaux de toutes les expéditions militaires, nous n'entrerons encore aujourd'hui dans aucun détail, ni ne vous ferons aucun récit particulier à cet égard. Nous allons nous borner à nous acquitter de l'obligation où nous sommes de vous rendre compte incessamment des mesures de sûreté générale que nous avons prises.
( Le très grand avantage qu'avaient obtenu les rebelles en se logeant
dans le château de Roehefort fit craindre, même après leur expulsion,
pour le retour du même événement, et l'on sembla désirer que nous or-
Nous fîmes donc au général de brigade du Petit-Bois, qui commande ici, une réquisition de convoquer son état-major et tous les militaires expérimentés de la garnison à l'effet de délibérer sur cette démolition et sur celle du château de la Bretèche, situé à proximité de la Roche-Bernard; vous avez ci-joint une copie de cette réquisition sous la cote n° 1 (1). La délibération a eu lieu le 31; l'avis unanime a été qu'il fallait démolir le château de Rochefort;. on n'a point pensé de même au sujet de celui de la Bretèche, qu'on n'a point regardé comme dangereux. Nous avons communiqué cette délibération au conseil général du département du Morbihan, qui dans sa séance d'hier soir a, dit-on, arrêté qu'il était expédient de démolir le château de Rochefort et celui du bois de la Roche au sujet duquel nous l'avions aussi interpellé à s'expliquer. Quant à celui de la Bretèche, on a pensé qu'il convenait de le faire examiner par les ingénieurs, pour ne pas tomber dans l'inconvénient de faire détruire de simples habitations, sous prétexte qu'elles ont été autrefois fortifiées et qu'on les appelle encore châteaux. Il est en conséquence bien probable, citoyens nos collègues, que nous autoriserons 1a. démolition des donjons de Rochefort et du bois de la Roche.
(( Lé même jour 30 mars, nous fîmes une deuxième réquisition au général du Petit-Bois, relativement aux troupes disponibles pour la défense de Vannes et pour la garde du département; car il ne faut pas se dissimuler qu'on a des raisons de craindre que le calme qui paraît se rétablir ne soit qu'apparent et que, si l'ennemi extérieur venait à tenter une descente dont nous sommes en effet menacés, les habitants des campagnes s'insurgent de nouveau. C'est dans la vue de connaître et les ressources actuelles et les besoins auxquels il faut pourvoir que nous avons fait au général du Petit-Bois cette seconde réquisition, en vertu de laquelle l'état-major assemblé délibéra le 31 qu'il était nécessaire d'augmenter les forces actuellement existantes dans le département du Morbihan de 6,000 hommes d'infanterie, deux régiments de dragons. Nous joignons ici notre réquisition et la délibération du conseil militaire sous les ootes 2 et 3.
« Le soir du même jour, la société populaire nous envoya une députation pour nous représenter qu'il était nécessaire ae retenir à Vannes un nombre suffisant de canonniers, qui partaient le lendemain, pour le service de deux pièces de canon et pour instruire les canonniers de la garde nationale; nous écrivîmes sur-le-champ au général qui nous remit le lendemain la note ci-jointe sous la cote n° 4. Nous prions la Convention de renvoyer ces trois dernières pièces à ses comités militaire et de défense générale, et de presser la marche des troupes pour la défense de nos côtes et de l'intérieur.
« En attendant, nous venons d'écrire au gé-
« Le 30 mars après-midi, nous reçûmes une lettre des administrateurs du département du Finistère en date du 27, par laquelle ils nous recommandaient instamment de remédier à l'affligeante situation du port de Brest, qui, à l'époque du 23, n'avait plus que pour -45 jours de subsistances, et dont l'arsenal était en outre menacé d'un incendie, elle était justifiée par des copies : 1° d'une lettre du 28 mars écrite par l'adjoint de la lre division du ministre de la marine ; 2° d'une lettre du 23 mars, écrite par les administrateurs du district de Brest ; 3° d'une autre lettre de même date, écrite par le citoyen Redon, ordonnateur civil de la marine ; 4° d'une noté du 23, envoyée par le citoyen Douesnel. Nous vous transmettons ici toutes ces espèces telles qu'elles nous ont été adressées et nous les chiffrons et cotons sous les numéros 5, 6, 7, 8 et 9.
( Le temps nous manque, citoyens nos collègues, pour rappeler ici les motifs pressants qui nous ont déterminés à venir promptemenfc au secours de la ville de Brest ; ils sont d'ailleurs consignés dans les différentes pièces que nous mettons sous vos yeux et déduits dans notre arrêté du 31 mars, dont voici la copie cotée n° 10. Vous y verrez que nous avons provisoirement approuvé la mesure prise par le citoyen Redon, sur l'indication et de l'avis des autorités constituées, de s'approvisionner dans les greniers du Pont-l'Abbe ; vous verrez aussi les restrictions que nous avons mises à cette faculté; vous verrez également deux autres mesures additionnelles auxquelles nous avons cru devoir autoriser le directoire du département du Finistère à l'effet de découvrir et de se procurer de nouvelles ressources. Nous vous prions de vous faire donner lecture sur-le-champ de toutes les pièces de cette affaire, afin que vous puissiez approuver ce que nous avons fait ou y substituer d'autres moyens plus efficaces, si vous en avez sous la main. Pour nous, nous avons cédé avec confiance aux vives impulsions de nos craintes pour une place aussi importante que celle de Brest, et de notre zèle pour le salut public; si nous nous étions trompés, du moins faudrait-il toujours rendre justice à la pureté de nos intentions.
« C'est dans le même esprit, citoyéns nos collègues, que nous avons pris
les autres mesures que nous allons également vous soumettre. La première
est un arrêté, en date d'aujourd'hui, par lequel nous avons ordonné la
prompte et stricte exécution de la loi du 19 mars concernant la punition
de ceux qui ont pris part à des révoltes ou arrêtés
contre-révolutionnaires (l); nous envoyons pour copie un exemplaire
imprimé sous le numéro 11.
« Après nous être occupés du soin d'empêcher que l'on ne se refroidît sur la punition des coupables déjà détenus, nous songeâmes encore hier aux moyens de faire de nouvelles découvertes relativement aux principaux auteurs et aux instigateurs des attroupements et des mouvements séditieux qui ont eu lieu ; de là notre arrêté concernant la mise en arrestation et l'interrogatoire des sacristains, sonneurs de cloches, dépositaires de clés et autres servants dans des églises ou chapelles des paroisses dans lesquelles les attroupements se sont formés pareillement au son du tocsin; de là encore un autre arrêté concernant pareillement l'arrestation de ceux des agents et receveurs des ci-devant nobles et seigneurs qui sont suspects d'incivisme, et qui, par leurs propos et leurs menaces, alarment les habitants des campagnes sur la stabilité du nouvel ordre de choses, qu'ils leur dépeignent comme devant être bientôt renversé.
« Yoici les deux arrêtés cotés n08 14 et 15; veuillez encore bien statuer sur-le-champ sur ces deux mesures. Nous avons cru encore devoir vous informer des qualités civiques ou non civiques de tous les fonctionnaires civils ou militaires, et en conséquence, par une première lettre, nous avons demandé au directoire du département une liste de tous ceux qui peuvent être suspects, de ceux mêmes qui, par négligence ou indifférence, peuvent être rangés dans la même classe ; nous leur avons ensuite demandé la note de tous les citoyens non fonctionnaires publics connus par leur incivisme, et c'est le sujet de la seconde lettre. Nous vous envoyons l'une et l'autre sous les cotes 16 et 17.
« Voilà, citoyens nos collègues, le tableau de nos principales opérations jusqu'à ce jour. Nous désirons bien vivement que vous les jugiez convenables aux circonstances et propres à atteindre le but que nous nous sommes proposé, celui de maintenir la tranquillité publique là où elle s'est conservée et de la rétablir là où malheureusement elle a été troublée, de continuer de calmer les malveillants par la vigueur de nos recherches et par la sévérité de nos démarches. Nous allons aujourd'hui ordonner que le recrutement qui a été suspendu sera complété et nous nous proposons ae statuer que le mode du tirage au sort qui a servi de prétexte aux rebelles ne pourra être employé que par ceux-mêmes qui sont sujets au recrutement, et que, quant à ceux qui ne voudront pas fournir volontairement leur contingent et particulièrement dans les paroisses où la révolte a éclaté, les directoires de district inscriront, sur les rôles qui ont été ou qui ont dû être faits les individus qui marcheront.
« Après avoir séjourné ici pendant quelques jours, nous passerons à Quimper dont vous voyez que nous comprenons le département dans tous nos arrêtés relatifs à des mesures de sûreté générale.
« Signé : Guermeur, Lemalliaud. »
« P.-S. Le défaut de secrétaire nous a obligés jusqu'ici à faire nous-mêmes de triples et même de quadruples copies de nos arrêtés, réquisitions et lettres. Comme cela retarde considérablement nos expéditions, nous vous prévenons que nous prendrons un secrétaire si nous en pouvons trouver. »
(La Convention renvoie cette lettre au comité de Salut public : elle autorise les commissaires à prendre un secrétaire.)
12° Lettre des citoyens Voulland et Bonnier, commissaires de la Convention dans le Gard et l'Hérault, par laquelle ils rendent compte des troubles qui ont eu lieu à Bédarieux, à l'occasion du recrutement ; elle est ainsi conçue (1) :
« Montpellier,
« Citoyens nos collègues,
« Nous avons été instruits le 27 mars courant, à 9 heures du soir, par le directoire du département de l'Hérault, qu'à Bédarieux petite ville du district de Béziers, il y avait eu le 23, à l'occasion du recrutement et dans l'assemblée où il devait s'opérer, une espèce d'émeute, qui par les lettres parvenues, soit au directoire, soit à l'accusateur public de la part du juge de paix, présentait quelques indices de projets contre-révolutionnaires. Nous nous sommes décidés à nous rendre le lendemain 28 à Béziers pour de là pousser, s'il en était besoin, jusqu'à Bédarieux.
« Arrivés à Béziers le soir du même jour, accompagnés de l'accusateur public, les membres -du district que nous avons appelés, en nous confirmant la nouvelle des troubles de Bédarieux, nous ont assuré qu'ils avaient été facilement calmés au moyen de la force armée qui y avait été envoyée, et que le recrutement y était terminé, mais ils ajoutent que cette ville, fanatisée et voisine d'un endroit du département du Tarn où se sont rassemblés une foule de prêtres réfractaires, avait éprouvé depuis un an diverses agitations. Le résultat de cette première conversation fut que, le lendemain 29, l'accusâteur public se porterait à Bédarieux pour y faire continuer les informations relatives à l'affaire du 23.
« Le même jour, 29, dans la matinée, nous nous sommes rendus au
directoire. Là, sur la demande que nous avons faite à cette
administration, nous avons appris d'une manière précise que l'ordre
public était parfaitement rétabli à Bédarieux, qu'une force armée de 300
hommes, actuellement rassemblée dans cette ville, était plus que
suffisante pour y prévenir toute agitation ultérieure, et surtout que le
recrutement y était terminé, sans aucune espèce d'inconvenients. Ces
détails, joints au départ de l'accusateur public pour
Mais, avant de quitter le directoire du district, nous l'avons invité, nous l'avons sommé au nom de la patrie de nous donner un tableau sincere de l'esprit public dans son ressort, de la nature des troubles qui ont éclaté par intervalles dans quelques communes et notamment à Bédarieux, de leurs véritables causes, et de nous dénoncer avec courage, soit les : fonctionnaires publics qui les favorisent par leur indifférence ou leur incivisme, soit les individus qui peuvent en être les instigateurs secrets. Ce directoire, au patriotisme duquel nous donnons un éloge bien mérité, a promis de nous faire passer sans délai un mémoire circonstancié, dans lequel nous trouverons des indices propres à nous diriger dans les mesures que nous aurons à prendre pour la découverte des coupables et la régénération de l'esprit public.
_ « Les derniers troubles de Bédarieux et plusieurs autres circonstances que nous remettrons sous vos yeux nous ont convaincus que l'esprit public, qui est bon en général dans le département de l'Hérault, a été corrompu dans quelques parties de ce ressort par le fanatisme qu'y ont entretenu des prêtres réfrac-taires dont on n'a pas assez surveillé les manœuvres, par l'égoïsme et l'insouciance de quelques fonctionnaires publics et par ce perfide modératisme que certains journaux trop accrédités ont cherché à propager. Lorsque nous aurons bien approfondi les causes de cette dépravation, nous prendrons avec courage les mesures lès plus efficaces pour y remédier.
u. Les commissaires de la Convention nationale dans les départements de l'Hérault et du Gard,
« Signé : Voulland, Bonnier. »
(La Convention renvoie cette lettre au comité de sûreté générale.)
16° Lettre des citoyens, Thibault et Bézard, commissaires de la Convention à Chantilly, par laquelle ils annoncent qu'ils ont interrogé et mis en liberté quinze habitants qui avaient été mis en état d'arrestation en vertu d'une circulaire du ministre de l'intérieur et d'un arrêté du comité de défense générale. Ils der mandent ensuite des ordres pour continuer ou cesser la dépense de la garde du château : 41e est ainsi conçue (1) :
Chantilly, 2 avril 1.793. « Citoyens, collègues,
« En vertu d'un ordre du ministre de l'intérieur et d'un arrêté du comité
de sûreté générale, la municipalité de Chantilly a fait arrêter seize
^domiciliés; quinze d'entre eux ont été amenés devant nous; nous les
avons interrogés et ils nous ont donné quelques renseignements relatifs
à la mission dont vous
« Vous avez approuvé la mesure que nous avons prise de placer au château une force armée pour en garder les issues et empêcher la destruction des effets, qui n'a déjà été que trop considérable. Nous avons invité la municipalité à choisir pour cette garde extraordinaire les eitoyens les plus pauvres, et nous avons promis de les payer, et pour soulager les citoyens, et diminuer la dépense, nous avons requis le commandant d'une compagnie de gendarmerie,, envoyée de Paris, de nous fournir douze gendarmes pour faire le service communément avec la garde nationale. Nous vous demandons donc une autorisation pour continuer ou cesser oette dépense qui monte environ à 36 livres par jour. Nous vous observons cependant que c'est un léger secours accordé à des malheureux qui vivent sur un sol que la nature n'a pas favorisé et où les denrées sont d'un prix excessif.
« Signé : Thibault, Bézabd. »
(La Convention renvoie cette lettre au comité des finances qui en communiquera avec le Conseil exécutif.)
14° Lettre des citoyens Fayau et Gaston, commissaires de la Convention dans les départements des Pyrénées-Orientales et de l'Ariège (1), par laquelle ils instruisent la Convention que la Révolution y est en général aimée, que quelques autorités constituées sont dans les bons principes^ qu'ils en sont secondés avec énergie. Us croient pouvoir assurer que le nombre de défenseurs que ce département va donner à la patrie, remplira pleinement l'attente des représentants du peuple. Ils observent néanmoins qu'un incendie qui a eu lieu dans le lieu des séances de l'administration du département, retardera un peu la marche de leurs opérations. Ils dénoncent l'incivisme des maîtres de, poste, en assurant que le service public se fait très mal dans cette partie de l'administration.
(La Convention renvoie cette lettre au comité de sûreté générale. )
15° Lettre du citoyen Dartigo'èyte, l'un des commissaires de la
Convention nationale dans les départements, du Gers et des Landes (2),
qui instruit la Convention, dans une lettre du 29 mars, que malgré les
intrigues de l'aristocratie, le recrutement s'opère avec assez d'acti-
(La Convention renvoie cette lettre au comité de sûreté générale.)
16° Lettre, du citoyen Dartigoëyte, l'tm des commissaires de ta Convention nationale dans le* départements du Gers et des Landes (l), qui informe la Convention qu'a Sauviac (Gers) et à Sarron (Landes) on a eu l'audace d'arracher l'arbre de la liberté, pour y faire substituer celui de l'aristocratie; qu'il y a e» aussi dans le canton drAignan une insurrection qui aurait pu avoir des suites fâoheuses, sans les mesures vigoureuses prises par le directoire du département; que tous ces mouvements sont fomentés par des prêtres. On prend des informations pour. découvrir les auteurs du sacrilège commis à Sauviac et à Sarron. Le commissaire de la Convention a cru devoir approuver divers arrêtés du département, relatifs à ees mouvements, qu'il adresse à la-Convention.
(La Convention renvoie cette lettre au comité de sûreté générale. )
ift Lettré, tien datée, des citoyens Le G argentier et Bourdon (de FÛise), commissaires de là Convention dans les' départements de la Manche et de l'Orne, par laquelle ils annoncent que leineilleur esprit règne dans ce département et que* dès qu'ils ont été informés de l'insurrection qui a eu iieju dans le département d'Ille-et-Villame, r!s y ont envoyé 3 bataillons de volontaires avec 10 pièces de canon ; cette- lettre est ainsi conçue (2)
« Citoyens xvos collègues,
« Arrivés 1er 18 dfia? courant dans M département de la Manche, nous avons eu la satisfaction d'y trouver un bon esprit et l'énergie du vrai patriotisme. Etes malveiHaBîts se tourmentent pour y exciter des troubfes; mais c'est en vain; chacun les dénonce et veut qu'ils soient punis. Le contingent fixé pour ce département dans le recrutement de l'armée a été1 aussitôt fourni que demandé,- et le mode le plus digne de bons républicains a été saisi, eelui de l'inscription volontaire, Tous vent partir incessamment.
« L'état d'indéfense dans lequel nous trouvons- une partie des côteB- de
ce département voisines de Pennemi nous donne quelques inquiétudes. Nous
mettons tous nos soins à préparer les moyens de résistance, et nous
sommes
« Nos collègues commissaires dans le tement de l'Ille~et-Vilaine nous ayan^ijofliçf avis de ce qui se passait dans ce département, nous avons fait partir» sUr-Ie-champ 3 bëv&til-lons de volontaires avec 6 pièces de eài&te^M gendarmerie entière et 1,500 gardes riationsuix des différents points de la Manche Kg&n n'égale l'empressement de ces braves crtoyeîi^ La petite ville de Saint-Lô seule en àTofiiM 400. | I 9 ^
« Une autre circonstance occupera plus agréablement la Convention. Un . vertueux citoyen de la commune de Saint-Vaast-de-la-Hougue, fait don à la patrie d'un^tynent neuf de 60 tonneaux : « J'ai gagné ma fortune à la mer, nous a dit ce citoyen, je i^spptfnt d'enfants r j'adopte la patrie pour^âta fflfe1^ la seule chose que je demande à la est de donner un nom à ce bâtiment, de^Fàrçnfôt, de me laisser choisir l'équipage, et «reè toi protégerai le commerce de la côte. ft^ëHé^yug^ d'après ée dévouement généreux, citëo^éSé^fiëfe collègues, combien il est importait ^ue^léîè armateurs en courses dé la Manche^&^ffîf^tfÉP-tégés par les vaisseaux de la Bientôt nous ferons à la Conventiowjunsiétail circonstancié de l'état des côtes dœadépaaîfce? ment de la Manche et des moyens de les armer convenablement.
« Salut et fraternité. ifanp noidid
« Signé : Le Carpentier, Bourdon n
« P.-S. — L'acte qui contient l'opr^n^gga-triotique du citoyen Dubos est joi^^. iftjgfilv sente. * - .
« Déjà une certaine quantité de éhéV&tf&vont vers les dépôts désignés pour la cavalerie » | «bnoo sisibloa
(La Convention décrète la meniijojBG hmiOfi rable de cette offrande au Bulletié. s E jU®qr«o&l voie ensuite aux comités de cte
marine et de la guerre réunis, là dfetfeea^iessem commissaires et celle du citoyen
Un membre, au rtiom du coiMti w&mw!^ fait un rapport (1) sur la demartâô Prévost, gourde-magasin à la Gr^k^ê)- i'îoq (La Convention passe à l'ordi^s^hçjaiir, motivé sur la loi du 12 août lï9i,r^}raB3if>ps«o ce citoyen à faire juger au tribunal an arrondissement de Paris sa rébîàifi^âM" en indemnité.) ~ 9iïI9ra W*
ÎVIelliiiet, secrétaire, poursuit la lecture cfës lettres- et adresses envoyées^jA^ïftW^'.
18° Lettre du, général MiranÈa ^(^rq^iq adresse à la Convention une
lett^fqte'jfoap adressée au Président pour êtqe,cèntéhéu? aia insiste de
nouveau, persuadé qUeste^iÊfé^-d^it
(La Convention renvoie la lettre au comité de la guerre.)
19° Lettre du général Lamoue (1), qui réclame contre les inculpations qui lui ont été faites dans la séance du dimanche 7 avril 1793, au soir (2) par un capitaine tyrolien, amené à la barre par la section de Montmartre.
(La Convention renvoie cette lettre au comité de la guerre.)
20° Lettre dm citoyen Laîné, qui demande à être admis à la barre pour lire une pétition au nom de deux personnes condamnées à mort; sa lettre est ainsi conçue (3) :
Paris, le
« Citoyen Président,
« Je vous supplie de vouloir bien m'obtenir de la Convention nationale la permission de paraître à la barre tout de suite pour un projet de la plus haute importance : il s'agit de la vie de deux hommes condamnés à mort par un tribunal incompétent. Il n'y a pas un moment à perdre... le jugement va être exécuté. La justice et l'humanité de la Convention en arrêteront l'effet. J'attends votre réponse à la porte.
« Je suis avec respect, citoyen Président, votre très humble et très obéissant serviteur, « Signé : Lainé. »
« P.-S. — Je joins ici un exemplaire de la pétition que je dois lire à la Convention nationale.
, secrétaire, demande si la Convention veut en entendre la lecture.
Plusieurs membres : L'ordre du jour !
(4). Il s'agitde deux malheureux soldats condamnés à expier par la main du bourreau une erreur qu'ils désirent effacer par le repentir le plus amer et par une vie, toute de réparation, qu'ils demandent à employer au service de la patrie. Dans ces conditions, vous ne pouvez adopter l'ordre du jour; je demande la lecture de la pétition et le renvoi au comité de législation pour en faire son rapport le lendemain.
Les mêmes membres : Non, non, ce sont deux émigrés qu'on veut sauver.
(5). J'observe que, suivant la pétition même, les accusés se sont
pourvus au
(La Convention décrète cette dernière proposition.)
, secrétaire, reprend la lecture des lettres et adresses envoyées à l'Assemblée :
21° Lettre de Gohier, ministre de la justice, relative à la demande faite par le citoyen Louis-François-Joseph Conti; elle est ainsi conçue (1) :
Paris,
« Citoyen Président,
«Je transmets à la Convention nationale une lettre et une pétition du citoyen Louis-François-Joseph, ci-devant Conti, mis en état d'arrestation par le décret d'hier. Il expose dans sa lettré et dans sa pétition que son état d'incommodité, certifié d'ailleurs par Barthélémy Dutaret, chirurgien, lui fait demander de rester en état d'arrestation chez lui, sous telle garde que l'on jugera convenable.
( La Convention nationale peut seule statuer sur cette demande,. et je la prie de régler la détermination que je dois prendre pour l'exécution de son décret.
« Le ministre de la justice, a Signé : Gohier. »
Suivent les pièces dont il est parlé ci-dessus :
I
Lettre du maire de Paris au ministre de la justice (2).
Commune de Paris.
Paris,
« Citoyen ministre,
« Je vous envoie une lettre que je reçois du citoyen Louis-François-Joseph avec une pétition pour le comité de sûreté générale et la Convention nationale, dans lesquelles il expose que son état d'incommodité lui fait demander de rester en état d'arrestation à la Lande.
« Je vous prie de me faire connaître la conduite qui doit être tenue à son égard.
« Signé : Pache.
Lettre du citoyen ,Louis-François-Joseph, au maire de Paris (3).
A la Lande, ce
« Citoyen maire, « J'ai reçu expédition de la notification du
« L'état déplorable de ma santé me ferait vivement désirer de pouvoir rester ici, à la Lande, où je suis depuis le 11 juillet 1792, sans interruption.
« Veuillez bien me rendre le bon office de transmettre au comité de sûreté générale la pétition ci-jointe. J'attends réponse et fort de ma conscience et de mon civisme, je suis et serai' toujours prêt à souscrire à tous les décrets émanés de la Convention.
« Signé : Louis-François-Joseph.
« Pour copie conforme,
« Signé : Pache.
III
Pétition du citoyen Louis-François-Joseph (1).
« Le citoyen Louis-François-Joseph représente aux citoyens membres des comités de sûreté générale et à la Convention nationale, qu'étant dans un état déplorable de santé, il ne peut, sans s'exposer à l'empirer grièvement, quitter le séjour de la Lande qu'il a habité sans interruption, depuis le 11 juillet 1792, tant par amour pour le repos que par ordonnance de ses médecins.
« Il joint ici un certificat en due forme de son chirurgien habituel. En conséquence, il demande instamment à la Convention la permission de rester en état d'arrestation à la Lande, département de Seine-et-Oise, sous la garde d'un officier de paix ou telle garde qu'on jugera convenable. Sa conduite avant et depuis la Révolution, lui fait espérer qu'on ne fera aucune difficulté de lui accorder cette faveur qu'il attend de la justice de la Convention et de la République.
« A la Lande, ce 7 avril,
h Signé : Louis-Fbançois-Joseph.
« Pour copie conforme,
« Signé : Pache.
IV
Certificat médical du chirurgien Dutaret (2).
« Je soussigné, Barthélémy Dutaret, chirurgien à Champ igny-sur-Marne, certifie que je soigne le citoyen Louis-François-Joseph Bourbon-Conti, depuis trois mois d'un engorgement au foie et a'un pissement de sang fréquent; que pour cette maladie, il est indispensable qu'il prenne l'air de la campagne et fasse de l'exercice, sans cela sa santé sera dans le plus grand danger.
« En foi de quoi, j'ai délivré le présent certificat.
« A la Lande, ce 7 avril,
« Signé : Dutaret.
« Pour copie conforme,
« Signé : Pache.
(La Convention passe à l'ordre du jour.)
« Citoyen Président,
« J'apprends que mon départ est arrêté pour Marseille et que je n'ai que deux heures pour m'y préparer. J'aurais dû m'attendre que n'étant coupable que du nom que je porte, l'Assemblée aurait eu égard à l'état de ma santé, qui est très mauvaise dans ce moment-ci. J'ai un rhume considérable et, de plus, une migraine qui ne m'a pas permis de sortir de mon lit. J'ose espérer que l'on ne me refusera pas un délai de quelques jours. Je le demande avec d'autant plus de confiance que mon médecin et le chirurgien dé la maison de la Force pourront attester que je ne suis nullement en état de faire un voyage aussi pénible sans risque pour ma vie. J'attends cette justice, citoyen Président, d'une Assemblée qui sûrement ne voudrait pas confondre l'innocent avec le coupable.
« J'ai l'honneur d'être, citoyen Président, avec toute la considération possible.
« Votre concitoyenne, « Signé : L. M. T. B. d'Orléans.
« P.-S. J'ose espérer aussi que vous voudrez bien donner des ordres afin qu'il me soit permis d'emmener avec moi une femme de chambre ou deux, et ceux de mes gens qui me seront le plus utiles.
« Signé : L. M. T. B. d'Orléans;
(La Convention passe à l'ordre du jour.)
23° Adresse des administrateurs des postes et des télégraphes (2) pour se justifier des plaintes portées contre leur administration sur différentes lettres qui ont été reçues décachetées, et sur l'enlèvement; des lettres ou journaux. Ils observent qu'indépendamment de leur extrême surveillance, leulrs opérations étant publiques, les faits à eux imputés né peuvent pas procéder de leur fait.
24° Pétition du citoyen Coupery, entrepreneur des charrois de Varmée des Alpes (3), tendant à obtenir une interprétation sur l'article de son marché.
(La Convention renvoie cette demande au ministre de la guerre pour y faire droit.)
Un détachement des recrues fournies par la ville d'Eiampes se présente à la barre (4).
Le commandant prête, au nom de tous, le serment dé vaincre ou de mourir, de maintenir la liberté, l'égalité, l'unité, l'indivisibilité de la République, et sojlicite la faveur de défiler avec ses troupes dans la salle.
reçoit le serment et accorde l'autorisation demandée.
Le détachement défile au son du tambour et aux cris de : « Vive là République, vive la nation! »
(1). Les citoyens ^efe communes du département du Calvados, sur le bruit d'une descente des Anglais sur les côtes de ce département, se sont réunis au chef-lieu et ont renouvelé le serment de mourir en défendant la République, et^de ne pas souffrir que la terre de la liberté fût souillée liar la présence des satellites d'un despote. Us ont refusé de recevoir l'indemnité que les administrateurs avaient cru devoir leur offrir jbour les frais ocasionnés par leur déplacement. Je demande que la Convention décrète la mention honorable et ordonne l'insertion de cet acte patriotique au Bulletin.)
(La Convention décrète ces propositions.)
(2). On m'annonce que les aristo-W^raP font des efforts dans le département de T^mgphe. U est important de s'opposer aux gfi^Ç^es des troubles. U y a un bataillon fk|1iè: département, mais il n'est point armé. "Je; demànde ique le conseil exécutif soit tenu aèiaire parvenir le plus promptement possible, au troisième bataillon formé dans le dé-Se l'Ardèche, tous les objets d'armement •%fe-'tf^quipement qui leur sont nécessaires, e£}$®g*&otive cette proposition sur la une force imposante prête à marcher dans tous les points d'un départe-33ariBtooàicilfiofanaj>isme s'efforce perpétuellement ralitumérplesuincendies qui ont éclaté l'an dtemiartoï oais iorn i
^HëÉaMtô que cette proposition soit étendue à tous les départements, et que le miflfetVe^fkssêl leï dMgehces pour armer tous le\ M^UB^i IjWfc»11 formés.
demande que le conseil exécutif IteM ^d¥feridrè compte, dans les 24 heures, ad© rétivèîqu'il devait faire, aux termes de la loi, de commissaires pour recevoir les recrues, et en diriger la marche.
Toutes les propositions formulées sont bonnes, néanmoins je crois qu'il serait préférable d'adopter la mesure générale suivante qui donnerait satisfaction à tous : c'est d'autoriser les commissaires de la Convention, envoyés par elle dans les départements de la République pour surveiller et presser la .revue de 300,000^ nommes, et, en leur absence les corps administratifs, à prendre toutes les mesures nécessaires pour que tous les citoyens, qui doivent rejoindre les armées, se mettent en marche sans retard pour se rendre aux lieux qui leur ont été indiqués par le conseil exécutif provisoire.
(La Convention adopte la proposition de Thuriot.)
(3), Je demande
(La Convention adopte cette nouvelle proposition.)
Suit le texte définitif du décret rendu (1).
a La Convention nationale autorise les commissaires par elle envoyés dans les différents départements de la République pour surveiller et presser la levée de 300,000 hommes, et, en leur absence les corps administratifs, à prendre toutes les mesures nécessaires pour que les citoyens-soldats, qui, en exécution de la loi des 24 et 25 février dernier, doivent joindre les armées de la République, se mettent en marche sans retard pour se rendre aux lieux qui leur ont été indiqués par le conseil executif provisoire.
« Le présent décret sera envoyé aux conseils généraux des départements par des courriers extraordinaires. »
(2). Citoyens, le comité de surveillance demande, en raison du grand nombre d'affaires dont il est chargé, de vouloir bien l'augmenter de quatre membres, et de remplacer par deux autres de nos collègues, les citoyens Ruamps et Montaut, que la Convention nationale a envoyés en mission.
(3). J'appuie la motion de Carrier et je demande à cet effet la parole pour demain matin, J'ai la preuve écrite des mains des conspirateurs et vous prendrez à l'égard de votre comité de sûreté générale des mesures indispensables ; il s'agit de la destitution de quelques membres, dans lesquels le public n'a pas dé confiance>
(La Convention décrète cette proposition.)
Le comité propose, pour adjoints et en remplacement, les citoyens Cavaignac, Brival, Lanot, Carrier, Leyris et Maure.
(La Convention désigne les membres proposés par le comité.)
, au nom du comité d'aliénation et des domaines, fait un rapport et présente un projet de décret sur la pétition de la commune de Maubeuge, tendant à obtenir la maison des ci-devant soeurs grises de cette ville et les terrains en dépendant, pour organiser un hôpital, en échange des bâtiments composant les hôpitaux de Saint-Nicolas et de Saint-Jacques, appartenant à la commune de Maubeuge; le projet de décret est ainsi conçu (4) :
« La Convention nationale, après avoir entendu le rapport fait au nom des
comités
Art. 1er.
« La municipalité de Maubeuge est autorisée à transférer dans les bâtiments, terrains et dépendances de la maison ci-devant oocupée par les sœurs grises, les deux hôpitaux connus sous le nom de Saint-Nicolas et de Saint-Jacques de la même ville, qui y seront et demeureront réunis, sous le nom de maison de bienfaisance.
Art. 2.
« Les bâtiments, terrains et dépendance^ des hôpitaux de Saint-Nicolas et de Saint-Jacques appartiendront à la République ; ils seront administrés et vendus à son profit, dans les formes précédemment décrétées pour les domaines nationaux, à la diligence du procureur syndic du district d'Avesnes.
Art. 3.
« Il sera fait, à la diligence du même procureur syndic, contradictoirement avec la municipalité de Maubeuge, une estimation, tant de ladite maison des sœurs grises, qui appartiendra à la commune de Maubeuge^ que de celles de Saint-Jacques et de Saint-Nicolas ».
(La Convention adopte ce projet de décret (1).
, au nom du comité d'aliénation et des domaines, fait un rapport et présente un projet îe décret relatif à la translation d,e la paroisse Notre Bame-de-la-Ghaussée de Valenciennes:; le projet de décret est ainsi conçu (2) :
te La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de ses comités d'aliénation et des domaines nationaux, sur la pétition dés citoyens de la paroisse de Notre-Dame-de-la-Chaussée de Valéneiennes, appuyée par le conseil général de la commune, par l'administration du district, par celle du département du Nord et par l'avis du ministre de l'intérieur, aux fins d'obtenir la translation de ladite paroisse de Notre-Dame-la-Chaussée dans l'église du ci-devant béguinage, dite de Sainte-Elisabeth, de la même ville, décrète ce qui suit.':
Art. 1er.
« La paroisse de Notre-Dame-la-Chaussée de Valéneiennes, sera transférée dans l'église du ci-devant béguinage, dite de Sainte-Elisabeth, de la même ville.
Art. 2.
« L'église, les bâtiments et les terrains dépendant de ladite paroisse de
Notre-Dame la-Chaussée, feront partie des domaines nationaux, et seront
administrés et vendus comme les autres domaines nationaux. »
Plusieurs rapporteurs se présentent à la tribune.
(La Convention accorde la priorité au rapport relatif aux fournitures des armées (2).
, aunom de la commission des marchés et fournitures, pour les armées, fait un rapport ét présente un projet de décret sur le mode de confiscation des fournitures pour Varmée, lorsque ces fournitures sont défectueuses ou non conformes aux échantillons^ et modèles; le projet de décret est ainsi conçu (3) :
Arfc. 1er.
u La confiscation des fournitures pour l'armée, prononcée par le décret du 21 février dernier, n'aura lieu que pour les objets défectueux ou d'une qualité inférieure aux échantillons, dont on aurait cherché à couvrir par l'art les défectuosités quelconques, et pour ceux dont les défectuosités, quoique de facile apparence, seraient cependant telles que l'objet ne pourrait servir à l'usage auquel il était destiné.
Art. 2.
« Cette confiscation n'aura pas lieu pour les simples défectuosités ou infériorités apparentes, mais qui n'empêcheraient pas que l'objet ne pût servir à l'usage auquel il est destiné : dans ce dernier cas, néanmoins, les objets défectueux ou non conformes aux échantillons et modèles, seront rebutés, estampillés, et rendus aux fournisseurs qui seront tenus de les remplacer dans le plus bref délai, et lesdits fournisseurs seront condamnés à une amende égale au quart de la valeur desdits objets, s'ils étaient recevables.
Art. 3.
« Si les fournisseurs ne remplaçaient pas les fournitures rejetées dans le temps qui leur sera prescrit, le ministre de la guerre ou ses agents seront autorisés à faire ce remplacement aux frais et dépens des fournisseurs et de leurs cautions.
Art. 4.
« Les dispositions du présent décret sont applicables a toutes les soumissions faites jusqu'à ce jour, quelles que soient les clauses y portées ».
(La Convention adopte ce projet de décret)
Un membre (1) : Président, les fermiers des messageries demandent qu'on statue sur le projet de décret qui les concerne, sans quoi leur service et par conséquent celui des armées courraient le risque de manquer demain.
(de Bigorre), rapporteur. Le comité des finances et son rapporteur sont à la disposition de la Convention.
(La Convention décrète l'audition immédiate de ce rapport et la discussion, séance tenante, du projet de décret.)
(de Bigorre) (1), au nom du comité clés finances, section des contributions publiques, fait un rapport et présente un projet de décret (2) sur les messageries, la poste aux lettres et la poste aux chevaux; il s'exprime ainsi :
Le comité des finances a examiné avec le plus grand soin, les mémoires que vous lui avez renvoyés, relativement aux postes et messageries ; il a" reconnu des abus dans toutes les parties du service; il va vous les dénoncer. Beaucoup de changements et de moyens d'amélioration lui ont paru convenir ; il va les soumettre à votre examen.
Avant de vous les présenter, le comité doit vous donner connaissance du régime actuel de la poste aux lettres, des messageries et de la poste aux chevaux. Lorsque vous saurez ce qui est, vous serez plus à portée de juger ce qui doit être.
Yoici quel est le régime actuel des postes et messageries, dans les trois parties du service.
La poste aux lettres, la poste aux chevaux, les messageries, sont soumises au directoire des postes, composé de quatre administrateurs et dun président ; mais l'exploitation est divisée. Les administrateurs des postes sont régisseurs de la poste aux lettres, et ils en versent les produits à la Trésorerie nationale. Les messageries sont en ferme au profit de 131 maîtres des postes, qui ont choisi entre eux des chefs, à l'effet de diriger l'exploitation.
Vous devez remarquer que ces deux parties ainsi ordonnées, l'administration des messageries, accordée au directoire des postes, n'est qu'imaginaire. Dès que les messageries sont en ferme, qu'il y a des chefs parmi les fermiers, afin de conduire l'exploitation, ces chefs sont les véritables administrateurs; sous prétexte de veiller à leurs intérêts privés, ils administrent réellement, et la surveillance attribuée au directoire des postes n'est qu'une illusion. L'expérience l'a si bien démontré, que les fermiers des messageries n'ont rempli qu'imparfaitement les conditions de leur bail, et que le directoire des postes a été à peine dans le cas de s'en apercevoir.
Quant à la poste aux chevaux, elle n'est ni en ferme, ni en régie, ni
susceptible de l'être ; elle est un moyen d'accélération de la marche
des voyageurs et des courriers de la malle. Elle sert aussi aux
diligences ; mais elle ne compose un ensemble d'établissement que par sa
correspondance immédiate, constante, et suivie de proche en proche, d'un
relais à l'autre, du centre de la France aux extrémités, et sur les
grandes routes, dans tous les
Une police commune, un traitement uniforme, des brevets qui expriment pour chacun les conditions et le prix du service, voilà les seules bases de leur établissement.
Beaucoup de personnes pensent que ces maîtres des postes sont libres de continuer ou d'abandonner le service. La vérité est, au contraire, qu'ils sont tenus, par leurs brevets et par la disposition expresse de la loi, de continuer le service lorsqu'ils en font l'entreprise, et qu'ils sont obligés de prévenir plusieurs mois d'avance le directoire des postes, s'ils veulent abandonner.
Ainsi organisés, n'ayant que du travail à attendre à un prix déterminé les maîtres des postes aux chevaux n'ont que leur salaire à recevoir; telles sont leurs occupations partielles; ils ne peuvent être mis en ferme, ni en régie.
Il n'est aucune de ces trois parties du service qui n'ait donné matière à des réclamations, il n'en est aucune sur laquelle votre comité n'ait des observations et des vues intéressantes à vous soumettre.
Le premier abus dont il ait été frappé, est le vice de l'organisation; il s'est convaincu que l'Assemblée constituante a été trompée, lorsqu'on lui a conseillé de tenir la poste aux lettres en régie, et les messageries en ferme. Ce régime entretient les deux parties dans un combat continuel. Si la poste aux lettres a ses droits particuliers, les messageries. ont aussi les leurs qui ont été réservés. Là poste aux lettres n'a pas le droit de conduire des voyageurs; les courriers des malles en reçoivent cependant beaucoup dans leurs voitures; les messageries ne doivent porter ni lettres, ni paquets; les conducteurs sont néanmoins dans l'usage d'en faire des distributions considérables sur leurs passages. De là une multitude d'agents nécessaires de la part du directoire des postes, afin de vérifier si les messageries n'entreprennent point sur le service de la poste aux lettres, et d'autres agents nécessaires aux messageries, pour s'assurer si la poste aux lettres ne préjudicie point à leurs droits.
Mais dans cette lutte des deux parties de la chose publique, l'une étant régie au compte de la nation, l'autre étant mise en ferme, il y a ceci d'inconvenant : les ennemis d'une compagnie particulière, et choisis par elle, ont les mêmes fonctions que ceux de la régie, instituée au nom de la nation. Cependant, les commis de la ferme des messageries manquent du caractère public dont ceux de la régie nationale de la poste aux lettres sont revêtus.
Les actes des uns et des autres ne devraient point avoir le même caractère d'autorité ni d'authenticité. La loi qui consacre ces abus est opposée aux vrais principes.
Votre comité a pensé qu'il était nécessaire de changer cet ordre de choses, de réunir les trois services, et de les faire concourir ensemble au même but, celui du bien général.
Après un mûr examen, voici le plan que votre comité a jugé le meilleur, et qu'il vous soumet :
Réunir la ferme des messageries à la régie de la poste aux lettres; à cet effet résilier la ferme des messageries, et appliquer la poste aux chevaux aux deux objets.
Quelques développements vous rendront sensibles les avantages de ce projet et son urgente nécessité.
Les messageries et la poste aux lettres, dans leur état présent, font un service identique. Aux termes des décrets de l'Assemblée constituante, les deux parties ont les mêmes routes à parcourir; elles doivent marcher sur les routes principales qui vont du centre aux extrémités, et desservir les communications particulières qui consistent dans les routes d'une ville à l'autre, du chef-lieu d'un département à l'autre, et du chef-lieu d'un département à ceux des districts de son ressort.
Puisque les mouvements des deux parties sont uniformes, il est évident qu'il y a des hommes, des chevaux et des voitures employés sans nécessité, s'il est démontré possible de charger de la malle du courrier la diligence qui suit la même route, et qui arrive à peu près à la même heure. Cela est surtout évident, s'il est possible d'accélérer la course de la diligence, en changeant la voiture de construction.
Le comité, afin d'éviter la dépense, a jugé convenable d'exécuter le service des malles, par des voitures qui conduiront en même temps des voyageurs; qui atteindront la vitesse de la marche des brouettes de la poste aux lettres, et qui produiront une économie à laquelle on aurait dû songer. Cet usage existe en Angleterre depuis près d'un siècle, et son succès a été constant.
Ayez une voiture commode et légère, ici nous la nommerons malle-poste, qui conduise des voyageurs avec les paquets du courrier, les frais de la poste aux lettres seront à peu près acquittés.
Au prix de 25 sous par cheval par poste, le postillon compris, la dépense,des courriers de malles était de 3 millions; il y faut ajouter l'abonnement, ou le prix des marchés pour les communications particulières; mais, la cherté des chevaux et des fourrages, le discrédit des assignats, le mauvais état des chemins, vous ont obligés dernièrement d'améliorer le sort des maîtres des postes. Vous leur avez accordé autant de chevaux qu'ils sont obligés d'en mettre sur les voitures, le paiement de chaque cheval à 30 sous par poste, et 15 sous de guides au postillon. Au moyen de cette augmentation de salaire, la dépense va doubler; ainsi vous jugez de la nécessité de l'économie qui vous est proposée.
La réunion des messageries à la poste aux lettres vous offre encore un
moyen d'économie digne de l'attention nationale. La ferme des
messageries coûte à la nation plus de 2 millions en frais de transports
des deniers publics, et Qe prix de >son bail n'est que de 600.500
livrés. Lorsque le service des messageries sera à la disposition de la
nation, le transport des fonds publics sera gratuit, et le gouvernement
aura un bénéfice annuel de 1,500,000 à 1,800,000 livres (1).
Enfin, la réunion des messageries à la poste aux lettres, vous donne la solution d'un problème que l'on a cherché en vain jusqu'à présent. "Vous y trouvez le moyen de charger des assignats en sûreté à la poste, de satisfaire le public, et de mettre les administrateurs des postes à l'abri des malheurs du soupçon.
Si le gouvernement n'a osé, sous le régime actuel de la poste aux lettres, confier des sommes aux courriers des malles, en voici la raison : Ces courriers, allant de jour et de nuit, ont souvent été assassinés et dévalisés. Récemment encore celui de Brest a été attaqué et volé auprès de Versailles. Ces malheurs trop souvent répétés, ont éloigné de la poste aux lettres la circulation des assignats. Le gouvernement s'est toujours attaché à les écarter de la poste, en refusant la garantie des transports à moins de charger à vue, au droit exhorbitant de 5 0/0 et l'intention de ne donner qu'une garantie de 300 livres pour les paquets chargés, sans sommes présentées à vue.
Un pareil ordre, citoyens, doit être changé; il ne faut laisser subsister aucune institution qui puisse porter atteinte à la confiance publique. Nous éprouvons plus que jamais le besoin de l'affermir.
Nous devons donc saisir le moyen de la réunion de la poste aux lettres aux messageries, qui met les malles en sûreté en les faisant accompagner des voyageurs, qui permet, en écartant le danger, de fournir au public une responsabilité qu'il n'a point, ou qui lui est vendue si cher, qu'il n'en veut pas profiter. En un mot, nous devons user des moyens que nous offre la réunion proposée de satisfaire au désir du public et du commerce, d'exécuter ses transports à bas prix, sûrement et avec une responsabilité suffisante.
Ces avantages résultent de la réunion proposée; en voici la preuve :
Nous le répétons, des voyageurs accompagnent les courriers des malles, et ces courriers sont en sûreté. Ainsi nulle inquiétude pour le directoire des postes à se charger des sommes en numéraire ou en assignats, et nulle difficulté d'accorder aux citoyens, une responsabilité entière du prix de leurs chargements; enfin, comme la grande masse des produits doit résulter de la multiplicité des petits profits, on pourra réduire le prix des transports de numéraire, opération qui flattera et encouragera le public.
Cette perspective très séduisante s'évanouit, si vous abandonnez le projet de réunion des messageries à la poste aux lettres.
Vous trouvez encore dans ce projet une économie incalculable. Vous appliquez au même service, les mêmes conducteurs, les mêmes voitures, les mêmes chevaux, les mêmes édifices, et en général les mêmes agents. Vous évitez une infinité de multiplications de dépenses; vous formez une unité d'action et de volontés qui font sans cesse concourir les messageries au service de la poste aux lettres, et la poste aux lettres à la perfection des messageries; l'ensemble composé de ces éléments
rapprochés a le double avantage de satisfaire le public, et de consolider l'établissement.
Votre comité attache la plus grande importance à ce projet de réunion; mais il y est forcé d'ailleurs par les circonstances. Les fermiers des messageries lui ont déclaré qu'ils ne peuvent plus tenir le bail, s'ils n'ont le transport des fonds publics; mais oela ne saurait etre : il n'est pas d'une sage économie de procurer un bénéfice annuel de 2 millions et plus, à des fermiers qui ne versent que 600,500 livres au Trésor public. Jamais la nation n'a pris cet engagement avec les fermiers; elle est toujours restée la maîtresse d'expédier ses fonds comme elle le juge plus à propos, et plus économique. On l'a démontré aux fermiers dans le comité.
Nous observons aussi que la résiliation du bail des messageries est en quelque sorte nécessitée. Les fermiers ne se justifient point complètement des reproches qui leur ont été faits par le ministre des contributions publiques. Ils restent toujours sous le coup de l'accusation de ne pas remplir exactement les conditions de leur bail. Les réclamations des receveurs de districts fournissent, à oet égard, une présomption très grave.
Lorsque le ministre dès contributions publiques assure qu'on ne peut espérer un meilleur service, en laissant les messageries entre les mêmes mains, ce qu'il dit n'est pas encore sans fondement. Si l'on suit les détails de leur exploitation dirigée par les chefs opulents d'une société composée de 131 bailleurs de fonds, l'on est tenté de penser que les chefs administrateurs ont le dessein de s'approprier la totalité de l'entreprise, et qu'ifs affectent de commettre des fautes, afin d'inspirer du découragement à ceux de leurs associés qui n'ont que de faibles intérêts d'une action de 3,333 livres; une exploitation gouvernée dans ce mauvais esprit, pourrait seule consommer, en quelques années, la ruine de l'établissement.
Nous ne dirons plus qu'un mot de ces fermiers : ils ont déclaré au comité, qu'ils n'ont point l'autorité suffisante pour obliger les maîtres des postes à marcher; et ils s'en plaignent, et ils demandent une augmentation dans le prix de leur tarif, en cas qu'ils continuent l'exploitation de leur bail. Il faut le résilier, puisqu'ils ne peuvent le tenir sans cette condition, ou bien celle du transport des deniers publics.
Ainsi les principes d'une sage organisation et ceux d'une prudente économie s'accordent avec les circonstances, en faveur de la réunion de la ferme des messageries à la poste aux lettres, pour en composer une seule régie.
L'établissement ainsi formé peut acquérir toute l'extension que la nation voudra lui donner. Il ne s'agit, pour en faire le commissionnaire général des citoyens et du commerce, et augmenter les produits peut-être de plusieurs millions, que de réduire le tarif à si bas prix, que tout particulier ait plus d'intérêt de recourir à l'établissement national, que de faire par lui-même ses expéditions. Votre comité a réglé sur cette base le tarif qu'il va vous présenter.
Tout est prévu, tout a été discuté pour le projet de réunion proposé.
Sur la vitesse de la marche des malles-postes, le comité a consulté les hommes qui ont le plus
de connaissances en cette partie; il S'est convaincu de la possibilité dans l'exécution. Il vous sera présenté un modèle en petit, approuvé des connaisseurs. On s'est assuré que la voiture exécutée en grand suivant les proportions du modèle, sera solide, roulera au train des voitures à présent usitées; et les voyageurs acquitteront la totalité ou la majeure partie des frais des malles qui coûtent plus de six millions, depuis le dernier décret.
On sait avec quel empressement est acceptée l'offre d'un voyageur, de donner une place dans sa voiture, à la condition de payer un seul cheval. C'est le même offre que la nation fait ici à tous les citoyens, tous les jours de l'année, sur toutes les routes. Au prix calculé par votre comité, chaque voyageur paie au juste la course d'un cheval; il ne lui en coûte rien pour les guides.
Un nouvel agrément doit attacher le public aux malles-postes : les directeurs des bureaux des départs seront intéressés, pour la sûreté publique, à n'accorder de places à aucun homme suspect. Ainsi, tout voyageur fera sa route par ces voitures, avec une pleine sécurité. Il est d'un extrême avantage de voyager ainsi, d'accélérer sa course et d'éviter les frais des auberges.
Le service une fois disposé de cette manière, la France doit être le pays du monde entier qui fournira le plus d'agréments aux voyageurs; il fixera l'attention et l'admiration des étrangers; ce sera un luxe national, comme le furent autrefois les belles routes des Romains.
Le comité n'a pas perdu de vue deux vérités également frappantes : la première, que les circonstances actuelles sont peu favorables aux innovations; la seconde, qu'il n'est pas possible, dans une partie aussi vaste que compliquée, d'opérer un changement subit. Pour ne rien donner au hasard, il a pensé qu'il convenait d'établir le nouveau service graduellement. Le moyen d'y parvenir sans effort et d'éviter une crise dangereuse, est de s'en rapporter à l'expérience.
On peut en charger le directoire des postes, qui dirigera les mouvements de la régie. Il choisira la route dont l'exploitation lui paraîtra la plus facile; il y établira des malles-postes pendant quelques jours, afin de s'assurer à quels points sont les rencontres, et à quels endroits il peut procurer les avantages des retours; définitivement, il montera cette première route au service des malles-postes.
On présume que, dans le premier mois, ou le second mois au plus, la première route sera montée. Cela dépend de l'activité des constructions dans l'atelier des messageries.
La'seconde route viendra ensuite; puis la troisième, et les autres successivement jusqu'à la dernière. En dix-huit mois, les routes principales seront garnies; en deux ans, les communications particulières seront pareillement montées.
Les routes ne fournissent point un service aussi actif les unes que les autres, et cette observation n'a point échappé à votre comité. N'ayant pas le même service, il n'y a pas non plus le même produit à espérer. Ainsi, la nation doit se prêter à cette combinaison, et ne pas fonder partout la même dépense. Modifiant donc le projet,_ et l'accordant avec les accidents que produisent les localités et les circonstances, le comité pense qu'il faut con-
sulter encore sur ce poini les leçons de l'expérience; sur les routes où le nombre des voyageurs ne serait jamais complet, on peut tenir des voitures à un moindre nombre de places. Mais il est bon d'attirer toujours les voyageurs; ils couvrent les frais de la poste, et ils font la sûreté des malles. Même aux routes de communications qui se desservent avec un seul cheval, on obtiendra de l'économie sur les frais du courrier, en lui donnant une voiture où il puisse avoir un voyageur; le courrier en éprouvera moins de fatigue et d'embarras, en remplissant son service.
Au reste, les précautions que le comité a cru devoir être adoptées pour n'abandonner, rien au hasard, n'empêchent point la réunion actuelle des messageries à la poste aux lettres. Les vieilles machines servent provisoirement, jusqu'à l'établissement du nouveau service. La réunion seule entretient, dès le premier moment, le système du transport des assignats et du numéraire au plus bas prix, puisque les diligences et les grosses voitures des messageries exécutent ce transport. La même réunion rend aussi, dès le premier moment, le transport des fonds publics gratuit, et cette réunion se peut exécuter à l'instant même. A cet égard, on est fort des leçons de l'expérience, puisque les passages d'une ferme à une régie, ou d'une régie à une ferme, ont toujours été subits, et n'ont produit aucune secousse. Le 27 septembre 1782, un arrêt du conseil cassait la régie Dupin, et le premier octobre, commençait le premier bail consenti à d'Hauteville.
Mais la réunion proposée, si facile qu'elle puisse être, si avantageuse qu'elle paraisse, ne sera vraiment utile, qu'avec l'attention de bien choisir les agents, la précaution d'en proportionner le nombre aux besoins, de bien définir leurs fonctions et de les attacher à l'établisse-met par une sage organisation.
Le comité s'est donc attaché à rechercher les moyens d'organiser cette partie, de façon à contenir, par les lois précises, les agents du service, depuis l'administrateur jusqu'au dernier commis, et à les intéresser par le salaire et par les espérances.
L'expérience ici veut encore être consultée, avant d'arrêter définitivement l'organisation; mais les bases peuvent être fixées dès à présent, c'est-à-dire la Convention nationale peut ordonner au directoire des postes, qui va désormais régir l'établissement, de profiter des premiers moments de la réunion et de s'assurer du nombre d'inspecteurs, de contrôleurs, de directeurs et autres agents nécessaires au service, et décréter en même temps, qu'à une époque donnée, il lui sera rendu compte de la composition ou de l'organisation en activité.
Alors," sur le_ compte rendu à l'Assemblée, cette organisation sera adoptée à l'entier ou avec des modifications, et ce dernier décret prononcé sera invariable. L'organisation ainsi formée ne pourra plus éprouver de changements, à moins d'un décret exprès. En un mot, voulant soumettre entièrement l'organisation à la volonté de la loi, on ne pourra, sans un décret, établir un bureau, un relais, un commis de plus, ni en supprimer un dans toute la France.
Le comité a même étendu ses idées en cette partie, jusqu'à proposer un mode d'avancement qui conviendra peut-être à toutes les administrations. Il existe un abus qu'il est
temps de faire cesser. Les hommes qui, du temps des rois, et des faveurs de la cour, obtenaient les places, ont changé la direction de leurs intrigues. Ils obtiennent aujourd'hui le soutien d'un club ou d'une députation, en singeant le patriotisme, comme ils avaient jadis la protection des hommes titrés et ils continuent- à usurper les places. La vertu et la modestie attendent qu'on aille les prévenir, et elles restent inconnues, de même que sous l'ancien régime. Un mode d'élection et d'avancement institué par la loi, préviendra, ou plutôt rompra l'effort de ces intrigues.
Mais, il faut le dire, ces changements qui annoncent les plus belles espérances, ne peuvent se réaliser qu'en rompant un marché consenti par la nation; c'est à regret que nous y sommes forcés. Malgré les négligences et les erreurs des chefs qui ont dirigé l'exploitation de la ferme des messageries, le comité a pensé qu'il était juste de dédommager les fermiers. Que l'intérêt privé doive céder à l'intérêt général; que cette considération l'emporte, il n'en est pas moins vrai que le fermier dont le bail est résilié, a droit à des indemnités; mais ceci doit être l'objet d'un rapport particulier.
Le projet de réunion qui vous est présenté, aura peut-être ses contradicteurs. Il est basé sur l'existence d'une régie; on lui opposera les désordres et les malheurs des régies de 1775 à 1776 et de 1780 à 1782.
Mais la Convention nationale voudra bien considérer que les produits des fermes et des régies sont connus depuis 1775, année qui a fait époque dans les messageries; que la comparaison faite, les régies ont plus rapporté que les fermes, et que la mauvaise foi des régisseurs a seule empêché les régies d'atteindre le degré de prospérité auquel on avait droit de s'attendre.^
Le ministère employa, comme régisseurs, des capitalistes qui avaient tenu les messageries en ferme; ils ne s'occupèrent qu'à dégoûter le gouvernement d'une régie, afin d'obtenir un nouveau bail. Si nous étions moins avares du temps de la Convention nationale, nous pourrions lui donner les détails les plus intéressants et les plus circonstanciés. Ce ne serait pas sans surprise, qu'à la fin de ces détails, chacun de vous s'apercevrait, en dernier résultat, que ce sont toujours les mêmes hommes à peu près, qui ont tenu l'objet successivement en ferme. Ce ne serait pas sans surprise non plus que vous verriez le système qui a préjudi-cié aux régies, exercer son empire dans la ferme actuelle.
Le grand moyen qui servait aux administrateurs des régies, à commettre des infidélités et à couvrir les abus de leur exploitation, était celui-ci : Maîtres du choix de leurs agents et libres de les congédier, ils s'environnaient de leurs parents et de leurs créatures; ils éloignaient tout ce qui leur semblait trop clairvoyant ou opposé à leurs principes.
Mais observez, dans la régie qui doit suivre la réunion proposée, que son succès repose sur de meilleures combinaisons. Les agents de cette régie seront à peu près réduits à la seule capacité de faire le bien. Les bénéfices résulteront des économies, et surtout d'économies forcées, sur lesquelles les administrateurs et leurs préposés ne pourront porter la main. Il n'y a pas de profit à tirer sur une négation de
dépense. On ne commettra pas dans cette régie les mêmes erreurs que dans celle de 1780 à 1782, où l'on perdait tout le plaisir, surtout les chevaux qu il fallait renouveler continuellement.
Le comité croit devoir prévenir cette perte en ne gardant à l'établissement, que le moindre nombre possible de chevaux.^ C'est le motif qui a singulièrement décidé à confier l'exécution du service aux maîtres des postes ou entrepreneurs des relais.
Ici le comité concilie encore les principes de son projet avec la nécessité des circonstances du moment. Il est indispensable, pour soutenir les relais, de leur accorder le double service de la poste aux lettres et des messageries, comme il est indispensable aux messageries de renoncer à tenir les chevaux qu'elles entretiennent à présent.
Les fermiers des messageries possèdent à peine la moitié des chevaux nécessaires à l'exploitation, si l'on veut remplir bien le service. Ainsi, la nation venant à leur succéder, aussitôt la résiliation de leur bail, on serait obligé d'employer cinq à six cent mille livres à de nouveaux achats. L'économie des finances invite à s'en dispenser, et à saisir l'occasion qui se présente, en attribuant le service des deux parties aux maîtres des relais. C'est le plus grand service que vous puissiez leur rendre. Yous allez en juger :
Quels sont les moyens qui font subsister les relais ? Il en est un seul : le travail, qui couvre la dépense de l'achat et de la nourriture des chevaux, du service des postillons, des loyers et de tous objets dont se compose en général la dépense des maîtres des relais. Yous procurez donc aux maîtres des relais les secours dont ils ont besoin pour se soutenir, lorsque vous leur assurez une plus grande quantité de service; et vous l'augmenterez, en leur attribuant celui des divers objets réunis de la régie.
Lorsque la nation sera certaine de procurer aux maîtres des relais une quantité déterminée de travail elle aura une base de calcul assurée et sur laquelle reposeront ses offres. Ceux qui ont déjà l'entreprise du service, auront la même base pour consentir leurs soumissions de le continuer. Ce mode est plus encourageant que la part éventuelle et sujette à discussion, dans une somme destinée à des indemnités. Il n'y aura pas d'entrepreneur de relais qui ne préfère son marché particulier avec le gouvernement, à l'espoir aussi douteux qu'indéfini, d'être appelé à la distribution des 600,000 1. décrétées envers ceux qui ont éprouvé des pertes.
L'avantage de ces soumissions est sensible : chacun des entrepreneurs des relais se rendra justice; il conviendra que la circonstance dans laquelle il se trouve au moment de son traité ne peut continuer, il établira sa soumission sur une espèce d'équation entre le temps présent et un meilleur avenir, et il réduira ses demandes. La nation en dernière analyse y trouvera de puissantes ressources d'économie.
Mais, voici un motif qui doit exciter à saisir l'occasion de se ménager des soumissions; elles sont un premier pas vers le bien; elles conduisent à la destruction d'un abus introduit sous l'ancien régime, et renouvelé sous un mode différent par l'Assemblée constituante.
Personne n'ignore qne les relais ne sont
point aussi avantageusement posés les uns que les autres. Ici les chevaux sont plus chers, ainsi que les fourrages; là les chemins sont plus difficiles; ailleurs les relais sont moins occupés. La différence de position d'une route à l'autre est susceptible de mille combinaisons; cependant l'ancien régime} avait mis tous les maîtres des postes sur une ligne uniforme, en les soutenant tous par des privilèges égaux. L'Assemblée constituante a commis la même erreur en substituant aux privilèges une indemnité uniforme de trente livres par tête cheval.
Yous ferez disparaître ces inégalités dans les traitements des entrepreneurs des relais : vous établirez un nouvel ordre qui convient à tous les temps, et à tous les lieux, et vous en recueillerez le fruit à l'expiration des commissions.
Alors la quantité du service sera connue; le commerce aura repris ses mouvements; les citoyens étendront leurs spéculations; les étrangers qui viendront visiter la terre de la liberté entretiendront les relais, et les citoyens s'empresseront de concourir à les occuper. Sur des positions favorables, on aura peut-être des relais qui rendront des sommes à la nation, au lieu des trente livres par tête de cheval qu'elle a pris l'engagement de payer, ailleurs, le montant de l'indemnité sera réduit à un prix modéré. Les situations extraordinaires exigeront seules des secours plus considérables, et les finances y profiteront, sans exciter les plaintes d'aucun maître des relais.
Les moyens qui concourent au même but, sont tous admissibles dans un établissement dont le service est aussi multiplié, aussi répandu que celui des relais; en conséquence, le comité a jugé à propos de saisir, encore deux moyens d'affermir les relais. Le premier est de supprimer, autant que les localités le permettront, les relais de deux lieues. Lorsque les chevaux sont rares, les fourrages très chers, il faut que le prix du tràvail y puisse suppléer. On y réussira, si l'on augmente le travail de chaque cheval assez pour gagner ou surpasser même sa dépense. On y parviendra en établissant que les courses seront de quatre lieues. La course de chaque cheval produira le double de ce qu'elle rapporte, et le public n'en sera que mieux servi. Les relais seront mieux garnis de chevaux, et des courses de quatre lieues ne les fatigueront guère plus que celles de deux lieues, dont le prix ne couvre pas la dépense.
En second lieu, pour donner aux entrepreneurs des relais un nouvel encouragement, le comité a pensé qu'il serait à propos d'augmenter le prix des courses des voyageurs qui sont à 30 sous par poste, de le porter à ti'énte-cinq sous, et quinze sous de guides au postillon. L'augmentation du prix des denrées, le discrédit du papier, les autres malheurs des circonstances exigent la même progression dans le prix du tarif. Le dernier décret rendu, afin de soulager les maîtres des postes, impose à la nation seule l'entretien de l'établissement, et il est dans l'équité d'appeler à y concourir les voyageurs qui s'en servent. Si l'on néglige cette précaution, le secours de 600,000 livres sera bientôt épuisé. Vous serez sous peu contraints de le renouveler.
Votre comité n'a pas cru devoir insister davantage sur les détails. Il vous sera facile
d'y suppléer par l'examen des articles qui vont vous être soumis.
Il a trouvé matière à deux projets de décret; il offre le premier à la discussion, et il ne fera pas attendre le second qui vous sera distribué séparément ; il vous présente le projet de décret suivant :
« La Convention nationale décrète ce qui suit (1) :
Art. 1er.
« Le bail des messageries, coches et voitures d'eau, adjugé le 16 mars 1791, à Jean-François de Queux, pour six ans neuf mois, commencé au 1er avril suivant, demeurera résilié à l'époque du 1er mai 1793.
Art. 2.
« Dans le mois, à compter du jour de la publication du présent décret, des experts, respectivement nommés par le directeur des postes, et les fermiers actuels des messageries, procéderont à l'estimation des voitures de toute espèce, coches, bateaux, fourrages, chevaux, ustensiles et effets de toute nature, maisons et magasins servant à l'exploitation des messageries. Il en sera usé de même à l'égard des sous-fermiers, à l'instant de la résiliation de leurs sous-baux.
Art. 3.
« Le montant de ces estimations sera payé comptant, des deniers qui seront mis, à cet effet, à la disposition du ministre des contributions publiques.
Art. 4.
« La Convention nationale se réserve de prononcer sur les indemnités des fermiers et sous-fermiers, après avoir entendu le rapport qui lui sera présenté, à ce sujet, par son comité.
Art. 5.
« La poste aux lettres, les messageries et la poste aux chevaux seront, à compter du 1er mai 1793, réunies sous une seule et même administration, spécialement chargée de la surveillance et du maintien de l'exécution des trois services.
Art. 6.
« La poste aux lettres et les messageries seront exploitées en régie. Le service de la poste aux chevaux sera fait en vertu d'adjudications, à l'enchère ou au rabais.
Art. 7.
« Le service de la poste aux lettres, des messageries et de la poste aux chevaux, sera fait exclusivement par les agents et les préposés de la nation.
Art. 8.
« Le comité des finances présentera incessamment un plan d'organisation
sur le régime et l'administration de ces trois services.
« Les maîtres de poste ou entrepreneurs qui font actuellement le service de messageries, soit en vertu de traités particuliers, soit par suite de convention sociale, seront tenus de continuer ce service jusqu'à ce qu'il soit organisé par les agents de la nouvelle administration, d'après les bases qui seront réglées.
Art. 10.
« Attendu qu'il s'agit d'un service public et de celui des armées, les maîtres de poste ou entrepreneurs seront personnellement responsables des frais, dommages et intérêts résultant des retards ou refus qu'ils pourraient apporter.
Art. 11.
« Ce service provisoire sera payé, savoir : pour les voitures à 6 places intérieures, à raison de 6 chevaux; et pour les voitures à 8 places, et au-dessus, à raison de 8 chevaux.
Art. 12.
« Le prix des chevaux sera de 30 sous par poste ; et les guides, de 15 sous aussi par poste.
Art. 13.
« Il sera accordé aux maîtres de poste et entrepreneurs qui jouissent d'une gratification ou d'une indemnité à cause de leur localité difficile ou des croisières de voitures, la même gratification ou indemnité que par le passé, pour le temps que durera le service provisoire. »
(La Convention adopte ce projet de décret.)
(1). L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de décret (2), présenté au nom du comité d'agriculture, sur le mode de partage des biens communaux; la parole est au rapporteur.
(Hérault) (3), rapporteur, soumet à la discussion les articles 3 et 4, qui sont adoptés, sauf rédaction, dans la forme qui suit :
Art. 3.
(( Tous les biens appartenant aux communes, soit communaux, soit patrimoniaux, de quelque nature qu'ils puissent être, pourront être partagés, s'ils sont susceptibles de partage, dans les formes et d'après les règles ci-après prescrites, et sauf les exceptions qui seront prononcées.
Art. 4.
« Sont exceptés du partage les bois communaux, lesquels seront soumis aux règles qui ont été ou qui seront décrétées pour l'administration des forêts nationales. »
Un membre propose les deux articles additionnels suivants (4) :
« Seront pareillement exceptés du partage les places, promenades, voies publiques et édifices à l'usage des communes ; et ne sont point compris au nombre des biens communaux les fossés et remparts des villes, les édifices et terrains destinés au service public, les rivages, lais et relais de mer, les ports, les havres, les rades, et en général toutes les portions du territoire qui, n'étant pas susceptibles d'une propriété privée, sont considérées comme une dépendance du domaine public.
Art. 6.
c Les communes, néanmoins, ou les citoyens qui ont joui jusqu'à présent du droit d'y conduire leurs bestiaux, continueront à en jouir comme par le passé. »
(La Convention adopte ces deux articles additionnels.)
La discussion est interrompue par un rapport fait au nom du comité de Salut public (1).
, au nom du comité de Salut public, fait un rapport et présente un projet de décret, sur les pouvoirs et fonctions des commissaires aux armées; le projet de décret est ainsi conçu (2) :
« La Convention nationale, après avoir entendu son comité de Salut publie, décrète :
(c Art. 1er. IX y aura constamment trois
représentants du peuple, députés près de chacune des armées de la
République.
( Art. 2. Us exerceront la surveillance la plus active sur les opérations des' agents du conseil exécutif, sur la conduite des généraux, officiers et soldats de l'armée; ils se feront journellement rendre compte de l'état des magasins de toutes les espèces de fournitures,, vivres et munitions; ils porteront l'examen le plus sévère sur les opérations et la conduite de tous les fournisseurs et entrepreneurs_des armées de la République.
« Art. 3. Us prendront toutes les mesures qu'ils jugeront convenables pour accélérer la réorganisation des armées, l'incorporation des volontaires et recrues dans les cadres existants; ils agiront, pour cet effet, de concert avec les généraux et commandants de divisions et autres agents du conseil exécutif.
c Art. 4. Les représentants députés près les armées, sont investis de pouvoirs illimités; ils pourront employer tel nombre d'agents qu'ils croiront convenable; les dépenses extraordinaires qu'ils auront autorisées, se- i ront acquittées par le Trésor public, sur des états visés par eux; leurs arrêtés seront exécutés provisoirement, à la charge de les adresser dans les 24 heures à la Convention nationale, et pour ce qui devra être secret, au comité du Salut publie.
« Art. 5. Il est enjoint à tous les agents civils et militaires d'obéir
aux réquisitions des commissaires de la Convention nationale, sauf à eux
à faire auprès de la Convention toutes les réclamations qu'ils croient
fondées.
, rapporteur, soumet à la discussion l'article 1er du projet (1).
un membre demande que l'un des commis-\ saires soit renouvelé tous les mois.
s'oppose à cet i amendement, sur ce que les commissaires des : armées, dit-il, ne doivent être changés que par | les circonstances, qu'on ne saurait trop ac-| corder de pouvoir à la représentation natio-! nale, et sur le droit que la Convention aura : toujours de les rappeler. Je pense, ajoute-t-il, i que la durée illimitée de leur mission présente | beaucoup plus d'avantages ; que les généraux ! conserveront de ce chef plus de respect, que s'ils j étaient périodiquement renouvelés, et qu'enfin ; ces représentants, par les connaissances qu'ils i ont acquises, deviendront beaucoup plus | utiles à la patrie.
craint, au contraire, que deshommes i revêtus de pouvoirs illimités et contractant l'habitude de les exercer sur une armée, ne deviennent funestes à la liberté. Il cite l'exemple de Dumouriez et de tous ceux qui, : comme lui, avaient abusé d'une autorité passagère pour en conserver l'exerciee.
(La Convention adopte l'article 1er du projet avec l'amendement proposé.)
Un membre (sur la Montagne) : Puisque l'Assemblée a décrété que ses commissaires près l'armée seraient renouvelés^ c'est une preuve qu'elle ne peut sauver la République. (Murmures à droite et à gauche.)
Jusques à quand viendra-t-on1 saturer la Convention de calomnies parce qu'on ne fait pas au gré de certaines personnes f Jusques à quand nous fera-t-on des propositions dictatoriales?
(Murmures prolongés sur la Montagne.)
Plusieurs membres : La clôture, la clôture !
(La Convention retire la parole à Le-cointe-Puyraveau et décide la suite de la discussion.)
, rapporteur, soumet à la discussion les articles 2 et 3, qui sont adoptés sauf rédaction, puis l'article 4.
, effrayé de eette illimitation de pouvoirs, combat cet article, comme
tendant à établir une véritable dictature militaire, d'autant plus
dangereuse pour la République,,
, rapporteur. Par ces mots pouvoirs illimités, le comité entend, non que les commissaires pourront guider les armées, les commander; mais surveiller seulement, soit les généraux, les fournisseurs, faire arrêter les traîtres, s'il y en a, les faire traduire au tribunal révolutionnaire; mais non ordonner des suspensions d'armes ou telle autre mesure, qui contrarierait les mouvements militaires.
Il ne résulte pas de l'article le? du projet qui vous est présenté que les commissaires auprès des armées soient autorisés à se charger de la conduite des armées, mais il en résulte qu'ils doivent avoir le pouvoir nécessaire pour surveiller l'intérêt public et prendre les mesures que la situation des choses peut exiger pour le salut de la République. Il serait absurde, vous a-t-on dit, que vos commissaires ordonnassent des opérations, militaires; je crois, moi, qu'il y a des cas où ils devraient avoir ce droit et en user; par exemple, lorsque l'infâme Miranda nous trahissait à Maëstricht, lorsque Steingel et Lanoue ourdissaient la trahison d'Aix-la-Chapelle, lorsque Dumouriez méditait le plan par lequel il devait livrer la Belgique à l'ennemi, s'il y avait eu un commissaire qui eût aperçu la trahison, croyez-vous qu'il n'eût pas bien mérité de la patrie... (Interruptions et murmures à droite et au oentre.y
Plusieurs membres : Il y en avait.
D'autres membres : Et Delacroix; et Danton!
Je méprise les sarcasmes imbéciles par lesquels jse m'entends interrompre, lorsqu'il s'agit des grands intérêts du salut public; je ne puis, les concilier avec l'amour de la patrie. Que ceux qui savent si bien plaisanter sur les malheurs de l'Etat, sauvent donc seuls la République. (Applaudissements des tribunesX On dirige sans cesse les épi grammes contre les commissaires de la Belgique, reconnus pour être des patriotes irréprochables, tandis que c'est sur leurs calomniateurs seulement que les soupçons doivent tomber; mais laissons à part toutes ces personnalités et revenons au principe.
Je dis que si vos commissaires s'apercevaient qu'un général eût évidemment le dessein de trahir la République et qu'il ordonnât d'abandonner un poste nécessaire au salut de la patrie, il faut qu'ils aient le droit de dire au général, à la face de toute l'armée s « Je te défends d'évacuer ce poste, parce que je te défends de trahir la liberté et de perdre la patrie ! » Je dis plus,, ils. auraient même le droit de poignarder le général pour sauver la liberté.
Il est. donc évident que les pouvoirs d© vos commissaires doivent être inimités et que
vouloir les restreindre, ce serait se jeter dans i des exceptions interminables. Quand on veut sauver la chose publique, on marche de bonne I foi aux grandes mesures, sans se laisser ar-| rêter par des craintes perfides ou pusilla-! nimes.
Je demande, en conséquence, qu'en bannissant toutes les chicanes et tous les vains scrupules, on accorde à vos commissaires les pouvoirs sans lesquels ils ne pourraient pas rem-| plir les fonctions qui leur sont déléguées. Je ; propose, en un mot, que l'article soit adopté ; tel qu'il vous a été présenté.
Il est facile de vous mettre tous d'accord : il n'y a qu'à dire que les représentants, députés près des armées, seront in-' vestis de pouvoirs illimités pour ce qui est relatif à l'exécution du présent décret. Nous pouvons ainsi sauver la patrie, sans nous donner des maîtres. En ce qui me concerne, je n'en reconnaîtrai jamais. L'important ' c'est de ne leur permettre, dans aucun cas, de diriger les opérations militaires : il en résulterait trop de dangers pour la liberté.
, rapporteur, accepte l'amendement ! présenté par Féraud.
(La Convention adopte l'article 4, ainsi ; modifié.)
, rapporteur, soumet à la discussion | l'article 5, qui est adopté sauf rédaction* puis | l'article 6 du projet.
TJn membre demande, que, dans les crimes i dont les commissaires chercheront à décou-j vrir les traces, pour faire traduire les coupables devant le tribunal révolutionnaire, i soient compris ceux qui avaient provoqué ou I conseillé la dissolution de la Convention na-: tionale.
(La Convention décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur cette proposition.)
Un autre membre propose d'ajouter après les mots : « qui ont aidé,, conseillé ou favo-: risé, d'une manière quelconque, la trahison de i Dumouriez... » la phrase suivante : « ou tout l autre complot contre la sûreté de la nation. »
(La Convention adopte cet amendement,, ainsi que l'article 6 du projet.)
Suit le texte définitif du décret rendu (i) :
« La Convention nationale, après avoir entendu son comité de Salut public, décrète ;
Art, 1er.
« Il y aura constamment trois représentants du peuple, députés près de chacune des armées; de la République; tous lies mois, l'un des trois sera renouvelé.
Art., 2..
« Ils exerceront la surveillance la plus active sur les opérations des.
agents du conseil exécutif, sur la conduite des généraux, officiers et.
soldats de l'armée; ils se feront journellement rendre compte de l'état
des magasins de toutes les espèces de fournitures, vivres, et munitions;
ils porteront l'examen le plus sévère sur les opérations et la con-
Art. 3.
« Us prendront toutes les mesures qu'ils jugeront convenables pour accélérer la réorganisation des armées, l'incorporation des volontaires et recrues dans les cadres existants; ils agiront pour cet effet de concert avec les généraux et commandants de divisions et autres agents du conseil exécutif.
Art. 4.
« Les représentants députés près les armées sont investis de pouvoirs illimités pour l'exercice des fonctions qui leur sont déléguées par le présent décret; ils pourront employer tel nombre d'agents qu'ils croiront convenable; les dépenses extraordinaires qu'ils auront autorisées seront acquittées, par le Trésor public, sur des états visés par eux; leurs arrêtés seront exécutés provisoirement, à la charge de les adresser dans les 24 heures à la Convention nationale, et pour ce qui devra être secret, au comité de Salut public.
Art. 5.
« Il est enjoint à tous les agents civils et militaires d'obéir aux réquisitions des commissaires de la Convention nationale, sauf à eux à faire auprès de la Convention toutes les réclamations qu'ils croient fondées.
Art. 6.
« Les représentants du peuple, députés près les armées, prendront, sans délai, toutes les mesures nécessaires pour découvrir, faire arrêter et traduire au tribunal révolutionnaire tout militaire, tout agent civil et autres citoyens qui ont aidé, conseillé ou favorisé d'une manière quelconque la trahison de Dumouriez ou tout autre complot contre Ja sûreté de la nation, ou qui ont machiné la désorganisation des armées et tenté la ruine de la République. »
., secrétaire, donne ensuite lecture d'une lettre des citoyens Billaud-Varennes et Sevestre, commissaires de la Convention nationale dans les départements d'Ille-et-Vi- j laine et des Côtes-du-Nord, qui envoient une copie de l'arrêté que l'ordre public a nécessité et qui prononce la suspension provisoire de trois membres du Conseil général de la commune de Redon. Us annoncent aussi qu'ils ont cru devoir faire mettre en état d'arrestation quelques personnes qui leur ont été dénoncées comme suspectes ou comme ayant trempé dans la conspiration de la Rouairie; cette lettre est ainsi conçue (1) :
Rennes, le
« Citoyens nos collègues,
«c Profondément indignés de la trame infernale ourdie par Dumouriez et
dont le dernier courrier nous a donné les détails, nous nous empressons
de vous transmettre les sen-
« Citoyens nos collègues, que l'illusion ait donc un terme! Les vrais Scylla et les Antoine sont les ambitieux qui n'aspirent ouvertement qu'à la tyrannie; qui disposent arbitrairement des forces de l'Etat pour se créer des Empires; qui, sans consulter la représentation nationale, sous le prétexte de porter la liberté chez les peuples étrangers, travaillent évidemment à la tuer dans l'intérieur. Nous vous le disons donc avec la franchise du républicanisme : il n'est qu'un moyen de réparer tant de fautes et tant de faiblesses, d'effacer les désastreux résultats d'un trop long aveuglement : c'est de se lever avec le peuple pour lui montrer enfin quels sont ses véritables amis. Songez que quand la nation est debout, elle nous dit que tant de fois trompée par ces hommes qui, pour mieux cacher leurs complots, ne parlent que de factions imaginaires, d'agitateurs, et de désorganisateurs; elle nous! dit que si, souvent entraînée sur les bords de l'abîme par des scélérats qui ne se succèdent que parce que l'impunité les encourage, le moment est venu de la sauver par des exemples éclatants; sinon, le législateur s'éclipse, et se souille en même temps des excès qui se commettent. Que le glaive de la justice frappe donc les coupables, quels qu'ils soient ! C'est le vœu du peuple; c'est le salut public qui le com-
mande. Comptez sur le courage d'une nation qui, à la première alarme, ne connaît plus d'autre soin que celui de défendre la patrie. Sa seule énergie saura bien faire respecter vos décrets; plus ils seront vigoureux, plus ils électriseront les âmes; avec de l'enthousiasme, le Français sera toujours à la hauteur des circonstances; et quand c'est à vous de l'y maintenir, n'oubliez pas un seul instant qu'une honte plus affreuse que la mort serait de survivre à la République, et qu'il faut, ou la sauver définitivement, ou s'engloutir sous ses ruines. Pour nous, citoyens nos collègues, pénétrés de ces sentiments, nous allons presser le terme de notre mission, pour nous hâter de vous rejoindre, car, dans ces moments critiques, nous sommes aussi ambitieux de partager votre gloire que vos dangers, et notre devoir est de sauver ensemble la liberté ou de mourir en la défendant.
« Nous sommes avec fraternité, « Les députés commissaires dans les départements de VIIle-et-Vilaine et des Côtes-du-Nord.
« Signé : Sevestre; Billaud-Yarenne. »
« P. S. Voici un exemplaire de la proclamation que nous avons adressée aux habitants des campagnes insurgées (1), avec une copie de l'arrêté que l'ordre public a nécessité, et qui prononce la suspension provisoire de trois membres du conseil général de la commune de Redon. Nous vous prévenons aussi que nous avons cru devoir faire mettre en état d'arrestation quelques personnes qui nous ont été dénoncées comme suspectes ou comme ayant trempé dans la conspiration de la Rouairie. Quand les ennemis de la patrie nous environnent de tous côtés, le défaut de sévérité et de surveillance ne tendrait qu'à en consommer la ruine. On a reçu à Rennes trois compagnies, mais ces forces sont insuffisantes, car il ne faut pas se dissimuler que si l'on ne contient dans le respect les campagnes insurgées, les soulèvements recommenceront au premier jour. « Signé : Sevestre; Billaud-Yarenne. »
A cette lettre se trouve joint l'arrêté ci-dessus (2) :
Arrêté des commissaires de la Convention nationale qui suspend provisoirement trois membres du conseil général de la com/nmne de Redon.
Redon, er avril
1793
« Les commissaires de la Convention nationale, instruits des dissensions
perpétuelles que la diversité d'opinions et de principes excite dans le
conseil général de la commune de Redon, sachant qu'il y existe des
membres qui, par des discours et actes publics, ont répandu la défiance
dans le peuple et entravé I3 recrutement des soldats dont la patrie a un
si pressant besoin au milieu des mouvements
« Arrêtent que les citoyens Berthelot, Des-hayes et La Haie-Jousselin sont suspendus provisoirement de leurs fonctions et remplacés par les citoyens N. N. N.;
« Arrêtent également que les citoyens Le-feuvre, Rosyle, Barbe Le Mintière, membres du conseil général de la commune et qui sont passés dans celui du district, seront remplacés provisoirement par les citoyens N. N. N.
« Les commissaires de la Convention nationale.
« Signé : Sevestre; Billaud-Yarenne. »
(La Convention renvoie ces différentes pièces au comité de sûreté générale.)
Le même secrétaire donne lecture dTune lettre de Lebrun, ministre de la guerre par intérim, qui fait passer à la Convention nationale des lettres du général Dampierre et du citoyen Bouchotte; cette lettre est ainsi conçue (1) :
Paris, le
« Citoyen Président,
« Je m'empresse de faire passer à la Convention nationale la copie des lettres que je viens de recevoir du général en chef de l'armée du Nord, le citoyen Dampierre et du nouveau ministre de la guerre, le citoyen Bouchotte.
« Celui qui me les a remises, et qui a vu de près les dispositions prises sur nos frontières, m'a assuré que l'ordre et la confiance s'y rétablissaient et que déjà la presque totalité de l'armée de la République était rentrée sous les étendards de la liberté.
( Le ministre des affaires étrangères( Signé : Le Brun. »
Cette lettre est suivie des deux suivantes : I
Lettré du général Dampierre au ministre de la guerre (2).
Valenciennes, le 7 avril 1793, l'an II de la République française.
« Citoyen ministre,
« Je viens de recevoir les différentes dépêches que vous m'avez
adressées. Je refuserais dans toute autre circonstance le poids immense
du commandement; mais, dans ce moment-ci, comme tous les autres citoyens
de la République, je ne m'appartiens plus : je suis tout entier à mon
pays. Je m'étais déjà occupé de passer les revues que vous m'ordonnez.
Bientôt, à ce que j'espère, l'armée sera organisée. La trêve avec
l'ennemi semble continuer. J'ai envoyé un trompette au général
J'aurai soin, citoyen ministre, de vous donner jour par jour compte de tous mes mouvements et de ceux des ennemis. Je vous prie, de votre côté, de me faire part de vos plans, de m'aider de vos conseils et de secours puissants en hommes, en munitions et en argent.
« Je puis vous informer que le brave régiment de Chamboran, et le 5e régiment de hussards et tous les chasseurs sont restés fidèles à leur poste... (Vifs applaudissements.)
« Le général en chef de l'armée du Nord, « Signé : Dampierre. »
« Pour copie conforme, « Le ministre de la guerre, par intérim, « Signé : Le Brun.
II
Lettre du citoyen Bouchotte au ministre de la guerre, par intérim (1).
Yalenciennes, le 7 avril 1793, l'an II de la République française.
« Citoyen ministre,
« J'ai reçu le décret de la Convention nationale qui me nomme au ministère de la guerre et la lettre que vous avez pris la peine de m'écrire pour m'annoncer cette nomination. Dans les temps de révolution, l'on doit plus consulter son dévouement que sa capacité, lorsqu'on est appelé aux emplois publics. Je vais me rendre aux ordres de la Convention. J'ai voulu rapporter des nouvelles de Valen-ciennes; cette circonstance retardera de deux ou trois jours mon arrivée. « Signé : Bouchotte, commandant temporaire de la place de Cambrai.
( Pour copie conforme, « Le ministre de la guerre, par intérim, « Signé : Le Brun. »
(La Convention renvoie ces trois lettres au comité de Salut public.)
, secrétaire, donne encore lecture d'une lettre des citoyens Lequinio1 Cochon et Dubois de Bellegarde, commissaires de la Convention aux frontières du Nord, par laquelle ils annoncent que toute l'armée a déserté les drapeaux du traître Dumouriez. Ils rendent compte de la trahison du général Neuilly et des mesures qu'ils ont cru devoir prendre de concert avec le nouveau ministre de la guerre, Bouchotte; cette lettre est ainsi conçue (2) :
Valenciennes, le
« Tout est bien, tout ira bien, citoyens nos collègues; l'armée tout
entière a déserté les drapeaux du traître, et s'est venue ranger sous
« Il est impossible de vous peindre la noirceur et le tissu profond de la trame qu'avait ourdie le scélérat Dumouriez, ainsi que la multitude des moyens employés assidûment pour corrompre l'esprit public, égarer le soldat, et faire naître en sa faveur l'affection idolâtre et l'aveuglement de son armée; mais le cœur des soldats, toujours pur, est fidèlement attaché à sa patrie. (Applaudissements. ) Les Français veulent entièrement la liberté : ils abhorrent les tyrans, ils ne veulent que la République; et il ne nous est nullement douteux que le scélérat eût été puni par son armée même, s'il ne s'était pressé de H quitter au moment où il s'est aperçu qu'elle ouvrait les yeux, malgré sa force et la multiplicité des prestiges employés pour la tenir dans l'aveuglement.
« A la démarche audacieuse et scélérate de Dumouriez, il fallait pour pendants quelques-uns de ces traits de lâcheté indigne, qui font tableau dans le nombre des infamies que nous présente l'histoire, eh bien ! le général Neuilly s'est chargé de remplir cette tâche, et il s'en est acquitté d'une manière éminemment infamante : jamais militaire n'a montré une aussi basse hypocrisie; jamais personne n'a tenu une conduite aussi avilissante; mais les détails en sont trop longs pour que nous puissions vous les apprendre aujourd'hui, nous vous les donnerons demain : il nous suffit de vous annoncer qu'il s'est fait autrichien.
« Le trésor dont nous vous parlions dans notre dernière lettre a couru trois fois les chances de l'enlèvement; enfin, après prises et reprises réitérées, il nous est arrivé hier sur les trois heures après midi. (Applaudissements.)
« Nous recevons à l'instant de nos collègues, à Douai, une lettre qui nous apprend qu'eux aussi ils ont reçu hier une voiture portant une partie du trésor de l'armée, et qu'il leur est arrivé un peu de cavalerie et de l'infanterie suffisamment pour leur faire une garnison nombreuse. Ils nous annoncent aussi qu'ils ne reçoivent de Paris d'autres nouvelles que par les papiers publics : nous sommes absolument dans le même cas: nous n'avons encore reçu aucune lettre de la Convention, ni d'aucun de ses comités, et nous ne pouvons guère douter d'après cela de l'interruption des courriers, car il ne nous paraît pas présumable que la Convention nous abandonne à nous-mêmes dans les circonstances difficiles où nous sommes placés. Elle aura toujours à compter sur notre patriotisme constant et sur toute l'activité que nous permettent nos forces physiques; mais vous sentez que cela ne suffit
pas, et qu'avec la meilleure volonté du monde, nous pourrions commettre des erreurs que la marche sûre et puissante de la Convention peut seule éviter.
« Il n'est peut-être pas indifférent que la Convention sache que nous ne correspondons presque point avec le conseil exécutif; le temps nous manque absolument. Nous venons de savoir que le 3e régiment de dragons avait été en très grande partie entraîné à Tournai par l'empire qu'exerçait Dumouriezr qui s'était plus particulièrement encore appliqué à séduire et à s'attacher étroitement la cavalerie; mais que cette troupe ouvre elle-même, enfin, les yeux et qu'elle s'échappe, et qu'il en est déjà rentré beaucoup d'individus comme par désertion.
« Le citoyen Bouchotte, que vous venez de nommer au ministère de la guerre, est arrivé ici hier au soir à 9 heures, pour conférer avec nous, et prendre par lui-même connaissance de l'état positif des choses en ce moment; il voulait partir ce matin pour Paris, mais nous l'avons retenu pour qu'il pût voir dans plus grand détail, et nous nous rendons bientôt avec lui au camp pour y examiner l'état actuel de l'armée. Il compte s'en retourner ce soir ; quoiqu'il ne puisse pas encore expédier d'ordre, il.est toujours infiniment avantageux qu'il se soit transporté ici pour voir par lui-même, et pour connaître les mesures nécessaires à déterminer, aussitôt qu'il sera rendu près de vous. Nous savons qu'il reste encore dans l'armée plusieurs soldats que la séduction opérée par les écrits, par les vertus apparentes et par le courage de Dumouriez, laisse incertains sur la cause des malheurs actuels, et qui n'ayant vu rien autre chose que les proclamations par lesquelles il s'attachait à avilir la Convention nationale, et à faire goûter le besoin d'avoir un nouveau roi, n'ont pas encore entièrement dépouillé leur illusion, et qui, quoique revenus sous l'étendard républicain, n'ont pas encore certainement repris le feu de leur premier enthousiasme; mais nous osons espérer que cela va s'évanouir totalement en peu de jours.
« Il ne faut que les instruire,, ils ont le cœur bon, puisqu'ils sont Français et nous allons prendre tous les moyens qui sont en notre pouvoir pour porter la lumière à leur esprit. Quant aux traîtres partisans du roi manqué, car nous ne doutons pas qu'il y en ait encore de restés peut-être exprès pour le servir, nous emploierons contre eux toute la sévérité de la loi. Nous vous répétons et nous le ferons dans toutes nos lettres que nous avons besoin de fonds et d'effets de campement. Le trésor arrivé hier ici n'est que d'un million ; il paraît que celui arrivé à Douai est plus faible encore, et vous sentez de quelle insuffisance eela est aux besoins d'une grande armée. Dumouriez avait eu soin de mettre la grosse caisse en pays ennemi, avant de tenter ses grands coups. Jetez au sairplus les yeux sur les premières lettres que nous vous avons écrites avant ce moment de crise, et qui doivent être au comité de défense générale, vous y verrez les différents détails des besoins, et vous savez quels sont les plus urgents.
« Beaucoup d'officiers ont entièrement perdu leurs chevaux et effets par le despotisme de Dumouriez, auquel ils ne se sont soustraits
qu'en échappant à la dérobée ; ils réclament des moyens d'avance sans lesquels il est très difficile qu'ils reprennent leur service. Quelque justes que vous paraissent ces réclamations, nous n'avons pas cru devoir prendre sur nous d'y faire droit et nous vous prions instamment d'y statuer sur-le-champ. Plusieurs soldats suisses, servant maintenant dans l'artillerie, viennent aussi de nous faire encore la motion relativement à la conservation de leur grade, etc.; cette réclamation nous avait déjà été présentée à Douai par d'autres Suisses également artilleurs; nous l'avons fait passer au ministre Beurnonville; nous venons d'en parler à celui-ci, mais comme il ne nous paraît pas bien certain qu'il puisse y statuer sans un nouveau décret, nous vous prions de le rendre dès que le ministre de la guerre vous aura exposé le détail de cette demande.
« Signé : Lequinio, de Bellegarde,
Charles Cochon. »
(La Convention renvoie cette lettre au comité de Salut public.)
, au nom du comité de Salut public, fait un rapport et présente un projet de décret tendant à établir de quatre heues en quatre lieues les relais nécessaires pour transporter rapidement aux armées les munitions de guerre, les effets de campement, les fourrages et les subsistances; le projet de décret est ainsi conçu (1) :
« La Convention nationale, après, avoir entendu le rapport de son comité de Salut public, décrète t
Art. 1er.
« II sera établi, sans délai, de quatre lieues en quatre lieues, la quantité de chariots ou charrettes nécessaires pour transporter rapidement aux armées du Nord, des Ardennes, de la Moselle et du Rhin, le train d'artillerie, les munitions de guerre, les effets de campement, les fourrages et subsistances dont elles peuvent avoir besoin, ainsi que tout ce qui peut accélérer le développement des forces nationales.
Art. 2.
« Il sera établi, à cet effet, sur les différentes routes de ces armées, le nombre de chevaux nécessaire pour ce service.
Art. 3.
« Il sera formé sur-le-champ à Paris un bureau général, qui aura constamment des chevaux de relais, voitures et harnais nécessaires à cet établissement.
Art. ,4.
« Le ministre de la guerre est autorisé à choisir un local propre à rétablissement de ce bureau central.
Art. 5.
« Le ministre de la guerre fournira un état détaillé des dépenses que
nécessitera cet établissement; en attendant, la Trésorerie natio-
(La Convention adopte ce projet de décret.)
, secrétaire, donne lecture d'une lettre du citoyen Rebecquy, député des Bou-ches-du-Rhône, qui est ainsi conçue (1) :
Paris, le
« Citoyen Président,
« U existe une loi qui condamne à la mort quiconque oserait porter atteinte à la liberté, en vous proposant un roi. Eh bien ! Robespierre vous a proposé un chef, un régulateur, et Robespierre n'a pas porté sa tête sur l'é«ha-faud. "Vous avez porté la peine de mort contre quiconque attenterait à la représentation nationale. Eh bien ! le 27 décembre 1792, et le 10 mars 1793, on a formé aux Jacobins le projet d'assassiner les représentants du peuple, et tous ces crimes sont impunis. Comme je ne puis, ni ne veux siéger plus longtemps dans une Assemblée qui n'a pas le courage de frapper les coupables, je donne ma démission.
Je suis, etc...
« Signé : Rebecquy. »
se porte à la tribune (2). (Murmures.)
Plusieurs membres (à droite) : Vous n'avez pas la parole.
Je veux défendre le salut public... (Nouveaux murmures.")
Les mêmes membres : Vous n'a,vez pas la parole.
Eh bien ! je resterai à la tribune, ou vous m'en ferez arracher.
(La Convention décrète de passer à l'ordre du jour.)
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de décret (3) présenté au nom du comité d agriculture, sur le mode de partage des biens communaux; la parole est au rapporteur.
(Hérault), rapporteur (4), soumet à la discussion les articles 7 à 10, qui sont adoptés, sauf rédaction, dans la forme qui suit :
Art. 7.
«( Lorsque, d'après les visites et procès-verbaux des agents de
l'administration forestière, auxquels >seront joints les officiers
municipaux, il demeurera constant que tout ou portion de ces bois n'est
pas d'un produit suffisant pour rester en cette nature, l'exception
portée en l'article précédent n'aura pas lieu pour cette partie, après
que lesdits procès-
Art. 8.
« Si le sol des communaux est submergé en toute partie, et que le dessèchement ne puisse s'opérer que par une entreprise générale, le partage de la partie submergée sera suspendu jusqu'à ce que le dessèchement soit exécuté.
« La Convention nationale charge son comité d'agriculture de lui présenter incessamment un projet de loi, tendant à accélérer le dessèchement des marais, décrété par la loi du 5 janvier 1791.
Art. 9.
« Seront tenus en réserve les terrains qui renfermeront des mines, minières, carrières et autres productions minérales, dont la valeur excéderait celle du sol qui les couvre, et qui seraient reconnues d'une utilité générale, soit pour la commune, soit pour la République.
Art. 10.
« Les communes seront tenues de justifier qu'elles ont pourvu à l'acquittement de leurs dettes, conformément à la loi du 5 août 1791, avant de pouvoir procéder à aucun acte relatif au partage de leurs biens patrimoniaux. »
(La séance est supendue à 4 h. 20 du soir et prorogée au même jour sept heures.)
a la séance de la convention nationale du
Lettres des citoyens Rochegude, Defermon et Prieur (de la Côte-d'Or), commissaires de la Convention aux côtes de Lorient à Dun-kerque, adressées au comité de défense générale, dans lesquelles ils rendent compte des mesures qu'ils ont prises pour la défense des côtes de la Bretagne.
I
« Saint-Malo,er
avril 1793
« Citoyens nos collègues (2),
« Nous vous adressons sous les numéros 47, 62, 37, 49, 58 et 48 (3), plusieurs arrêtés qui contiennent toutes les mesures qui nous ont paru indispensables pour la sûreté du territoire français à Saint-Malo et aux forts qui en dépendent.
Le numéro 47est le seul auquel nous ayons à joindre quelques explications particulières. C'est aussi le plus important, celui qu'il
faut communiquer le plus promptement au ministre de la guerre. La ville de Saint-Malo, par sa position singulière, n'exige que peu d'ouvrages pour être mise à l'abri d'un coup de main. Les forts sont en général déjà en bon état. U ne reste presque plus que les garnisons à y placer. Mais la difficulté tient aux fournitures des logements, comme matelas, couvertures, etc. Le ministre doit être prévenu que l'on va se trouver bientôt dans la plus grande pénurie à cet égard.
« Quant au fort de Château-Neuf, il y faut un armement pour ainsi dire complet et cela est indispensable ; car, par cela seul qu'il existe, il devient entièrement important, vu sa position, de ne pas le laisser surprendre, soit par l'ennemi du dehors, soit seulement par les malveillants de l'intérieur.
« Le palissadement entier de ce fort, ainsi que de quelques autres et de quelques parties devant l'enceinte de Saint-Malo, étant une mesure nécessaire, nous avons cherché à en diminuer la dépense en prenant des ressources dans les forêts nationales, comme nous avions fait à Lorient et à Brest ; c'est l'objet particulier du numéro 37.
( Nous joignons aussi ici une note de l'aperçu de la dépense, dont le total s'élève à 84,000 livres, sur quoi il faut observer qu'il y aura vraisemblablement une assez forte réduction à cause de la fourniture des palissades et autres bois par les forêts nationales ou d'émigrés. Par cette raison, la dépense a été évaluée à "moitié prix de celle de l'achat entier des matériaux, mais elle sera sans doute réduite davantage.
« Nous avons cru d'abord utile de mettre sur-le-champ une somme de 40,000 livres à la disposition des directeurs du génie et de l'artillerie pour ces travaux, d'autant plus que l'entrepreneur de la fortification est déjà en avance de plus de 13,000 livres, ce qui le met hors d'état d'en faire de nouvelles. Sans cette mesure, les préparatifs n'eussent pas pu avoir l'activité que les circonstances exigent. Ainsi il est instant que le ministre se hâte, non seulement de remplacer les 40,000 livres, mais encore de fournir la totalité des 84,000 livres. Les états estimatifs lui seront incessamment adressés suivant les formes ordinaires.
« Veuillez bien, chers collègues, recommander au ministre de terminer promptement cette affaire importante.
« Signé : Rochegude, Defermon, C. A. Prieur. »
II.
« Saint-Malo, er
avril 1793
« Citoyens nos collègues (1),
« Nous venons de terminer notre travail sur la défense des côtes depuis Brest jusqu'au point où nous sommes, ainsi que nous vous l'avions annoncé en vous envoyant la première partie. La seconde a été faite suivant le même mode. En voici quelques résultats indiqués par nos arrêtés numéros 57, 50, 60 et 51 (2).
qui sont annoncées dans cette lettre et dans ta suivante.
« Nous ne vous en faisons pas passer plusieurs autres qui rentrent absolument dans ceux que vous avez déjà connus précédemment. Ce sont pour la plupart des dispositions de détail qu'il suffirait d'adresser aux généraux ou autres agents militaires et aux corps administratifs.
« Les numéros 57 et 51 méritent une attention particulière du ministre de la guerre.
« Le premier annonce une disposition de 20,000 livres, c'est à peu près à quoi se montera la dépense de toutes les réparations, armements, approvisionnements, transports de pièces et autres objets, des batteries dans toute la partie qui nous restait à mettre en état. Le ministre aura à remplacer ce qui aura été employé de cette somme sur les états qui lui en seront envoyés dans le temps.
« Daiis le deuxième, il s'agit des lunettes à fournir aux gardiens des signaux et nous pensons que l'on ne doit pas différer cette emplette. Elle n'est pas d'ailleurs fort dispendieuse. Les lunettes communes peuvent être du prix de 6 livres environ, et les autres d'une qualité et d'un prix supérieurs.
« Le ministre pourra envoyer cet assortiment de lunettes, qu'on ne peut bien former qu'à Paris, au général Canclaux, à Brest ou à Saint-Malo. Ce général, qui a une parfaite connaissance des côtes, ainsi que de notre travail, en fera aisément la répartition.
« Maintenant, chers collègues, il ne nous reste qu'à continuer notre route pour suivre la mission dont nous sommes chargés. Demain matin, nous partons pour Cherbourg où nous serons rendus dans peu, ne comptant nous arrêter dans les lieux intermédiaires que ce qu'il faut de temps pour recevoir les renseignements que les corps administratifs pourront avoir à nous donner.
« Salut et fraternité,
« Signé : Rochegude, Defermon, C. A. Prieur. »
III.
« Saint-Malo,er
avril 1793
« Citoyens nos collègues (1),
« Au moment de notre départ de cette ville, nous nous empressons de vous faire passer lës derniers résultats des opérations que nous y avons faites.
« Nous vous remettons une lettre destinée d'abord pour l'Assemblée (2), mais que nous nous sommes décidés ensuite à vous remettre directement avec les pièces à l'appui, son objet étant de presser le rapport que nous demandons à l'Assemblée du projet de la digue, projet que nous vous recommandons comme une mesure indispensable pour conserver des propriétés du plus grand intérêt.
« Vous verrez, par l'arrêté numéro 59, que tous les citoyens dont le payement devrait être
le moins retardé sont ceux qu'on semble affecter de faire attendre, et il était de notre devoir et de l'intérêt de la République de prévenir les maux qui seraient résultés dé_ la cessation du service dont on nous menaçait.
« Le fanatisme s'est plus ou moins répandu dans les campagnes et dans quelques communes. Les officiers municipaux sont dénoncés à l'opinion publique comme aristocrates, parce qu'ils s'éloignent des prêtres constitutionnels. Sans la division élevée par les prêtres, on ne trouverait guère dans les campagnes que des patriotes. Nous avons regretté d'avoir à sévir pour des querelles de religion. Mais l'inconvénient de laisser à la tête des communes de la côte des officiers municipaux contre lesquels s'élevait l'opinion publique, nous a déterminés à les suspendre par notre arrêté numéro 61, et à les remplacer par les citoyens patriotes.
« Enfin notre arrêté numéro 64 a été déterminé par les réclamations des administrateurs de district et des amis de l'égalité fondée sur une foule de motifs. Les personnes à qui il est favorable, absentes depuis peu de jours, ne semblent pas coupables d'émigration. En tout cas, il serait facile de s'en ressaisir même d'après l'arrêté du département qui avait accordé la liberté provisoire aux deux plus riches à cause de la nécessité de vider le château où étaient détenus ces prisonniers et où on va mettre la garnison.
« Enfin, lorsqu'on a plus d'occasion de renvoyer à l'étranger des émigrés rentrés dans le temps où la loi de mars n'était pas encore prononcée, nous avons cru indispensable de statuer.
« Les commissaires de la Convention nationale,
« Signé : Rochegude, Defermon, C. A. Prieur. »
a la séance de la convention nationale du
Pétition présentée à la Convention nationale par les sieurs Colman et Cremen, condamnés à mort (2).
« C'est au moment où les dangers de la patrie font un besoin de rallier, sous les drapeaux de la liberté, tous ses enfants égarés par les insinuations perfides de leurs chefs, que deux malheureux soldats sont condamnés à expier par la main du bourreau, une erreur qu'ils venaient effacer par le repentir le plus amer et par des services utiles. Et comme si la loi n'était pas déjà suffisamment violée, par cette fausse application d'une peine visiblement réservée à ces conspirateurs orgueilleux, qui ne veulent que perpétuer les inégalités de la naissance et du crédit, on n'a
pas craint de la faire prononcer par un tribunal incompétent.
« Représentants d'un peuple libre et généreux, c'est à vous qu'il est réservé de consacrer l'échange du supplice de deux infortuné» contre les services qu'il vous offrent, et que leurs âmes républicaines n'ont jamais sincèrement destinés qu'à leur patrie. Voici le fait.
« Pierre Caïman, dragon au régiment ci-devant du roi, séduit par son capitaine, eut la faiblesse de déserter et de s'enrôler pour grossir le nombre des ennemis de la France.
« Tourmenté par ses remords, il ne tarda pas à céder à leur impulsion. A-la fin du mois de novembre dernier, il prit et effectua la résolution de rentrer dans sa patrie. Il fit route avec un appelé Jacques Crémen, soldat comme lui* et ramené comme lui, par le cri de sa conscience.
« Le 11 décembre, ils furent arrêtés, sans armes, à Lomméranger, district de la Moselle. Interrogés par les officiers municipaux, ils répondirent, franchement, qu'ils avaient servi dans un corps appelé les chasseurs des princes; qu'on leur avait même donné des grades, et qu'on leur faisait espérer un avancement rapide ; mais qu'ayant reconnu qu'on les avait trompés, en les entretenant dans l'espoir des voir négocier une paix satisfaisante par tous les partis, ils avaient préféré de revenir prendre leur rang de simple soldat parmi les défenseurs de la République. Nonobstant cette déclaration ils furent livrés au tribunal criminel, qui, le 20 janvier, les a condamnés à mort.
« Us se sont adressés au tribunal de cassation, sur le fondement de différentes infractions faites à la loi, dans le cours de l'instruction de leur procès.
« Ils ont entre autres choses, réclamé contre l'incompétence du tribunal qui les a jugés, quoique, aux termes du décret du 9 octobre dernier, ils dussent l'être par une commission militaire. Ce dernier moyen était décisif, car il n'y a pas de plus grand vice, dans l'instruction d'un procès criminel surtout, que le défaut de caractère des juges qui dirigent cette instruction. Cependant, soit que le tribunal de cassation ait méconnu cette importante vérité, soit qu'il n'ait osé la consacrer ouvertement,, dans un temps où le peuple, devenu soupçonneux par nécessité, accuse quelquefois trop facilement les autorités constituées, soit ainsi qu'il ait pensé que le corps législatif, auquel il aurait peut-être toujours été indispensable de recourir, après la cassation prononcée, ne serait pas fâché de saisir la première occasion d'expliquer le véritable sens de ses décrets, tant sur la qualité des personnages contre lesquels il a entendu prononcer la peine de mort, que sur les juges auxquels il a voulu que la connaissance de ces sortes d'affaires fût déférée, il a rejeté la requête et nécessité, ou du moins accéléré par là le moment de recourir à la source de toutes les autorités.
« Dans cette conjecture la Convention est donc suppliée de déclarer :1° quepar son décret du 9 octobrel792, qui, en exécution de celui qui prononce la peine de mort contre les émigrés pris les armes à la main, ou convaincus de les avoir portées contre la France, porte que cette peine sera prononcée et appliquée par une commission militaire, elle n'a investi du pouvoir de juger ce délit que les membres d'une
commission militaire; 2° que, dans tous les cas, les nommés Caïman et Crémen, simples soldats, étrangers par leur naissance et par leur fortune à toutes les prétentions de la noblesse émigrée, doivent être exceptés de la loi, ou tout au moins déclarer qu'il n'y a pas lieu à la peine de mort contre eux.
« Pour déterminer l'adoption de la première de ces deux demandes, il suffit de lire le décret du 9 octobre, ainsi conçu :
« En exécution de ia loi qui prononce la peine de mort contre les émigrés pris les armes à la main, ils seront, dans les vingt-quatre heures, livrés à l'exécuteur de la justice, et mis à mort, après qu'il aura été déclaré, par une commission militaire, composée de cinq personnes et nommée par l'état-major de l'armée, qu'ils sont émigrés et qu'ils ont été pris -les armes à la main, ou qu'ils ont servi contre la France. » Toutes réflexions seraient superflues. La loi a caractérisé ce délit; elle a déterminé la peine; elle a désigné les juges; il n'y a que ceux qu'elle a désignés qui soient compétents.
« Sur le second chef, beaucoup plus important pour les deux infortunés qui réclament, puisqu'il a pour objet de faire statuer définitivement sur leur sort, sans recourir au pouvoir judiciaire, il est nécessaire de rapprocher les différentes lois sur la matière.
« On vient de voir que le décret du 9 octobre prononce la peine de mort contre tous ceux qui seront pris les armes à la main, ou qui seront convaincus de les avoir portées. Le 23 octobre, autre décret qui porte que « tous les émigrés français sont bannis à perpétuité du territoire de la République, et que Ceux qui, au mépris de cette loi, y rentreraient, seront punis de mort, sans néanmoins déroger aux décrets précédents, qui condamnent à la peine de mort les émigrés pris les armes à la main. »
« Cette loi, restée longtemps sans exécution, ou plutôt sans avoir été promulguée, l'Assemblée décréta, le 26 novembre, une proclamation portant qu'elle serait incessamment publiée, et que dans la quinzaine, à compter de ladite publication, tous les émigrés rentrés seraient tenus de sortir de la République, sinon punis de mort.
« Il résulte de là que le décret du 28 octobre, qui bannit les émigrés et prononce la peine de mort contre ceux qui l'auront enfreint, ou auront été pris les armes à la main, n'aurait permis de prononcer contre Caïman et Crémen la peine de mort, que dans le cas où ils auraient été pris les armes à la main, ou bien dans celui où ils auraient rentré, au mépris de cette loi. Or, ils ne sont évidemment dans aucun de ces deux cas. ils ne sont pas dans le premier; le fait est constaté par leur procès. Ils ne sont pas non plus dans le second; car, pour être rentrés, au mépris de la loi du 23 octobre, il faudrait qu'elle eût été promulguée avant leur rentrée, et le contraire, déjà plus que vraisemblable par la proclamation du 26 novembre, est facile à vérifier, en comparant la date de la publication de cette proclamation (qui est la même que celle de la loi), dans le département de la Moselle, avec l'époque de la rentrée desdits Caïman et Crémen.
Cette proclamation n'a été décrétée, comme on vient de le voir, que le 26 novembre; Caïman et Crémen sont rentrés les premiers jours de
décembre, et certes il a fallu plus de temps qu'il ne s'en trouve entre ces deux époques, pour l'impression, l'envoi et la publication dans le département de la Moselle. Au surplus, on pourra s'en convaincre par le certificat d'enregistrement; il suit bien évidemment de ce rapprochement que Caïman et Crémen étaient en France quand la loi du 23 octobre y a été promulguée. Ils avaient donc quinze jours pour sortir du territoire de la République; mais comme ils ont été arrêtés le 11 décembre, leur retraite fut impossible.
« Arrêtés pendant qu'ils étaient sous le bénéfice de la loi du 23 octobre, on ne pouvait que les déporter; la peine de mort est, à la vérité, réservée par cette loi, mais elle n'est réservée que contre les émigrés pris les armes à la main, et non contre ceux rentrés sans armes, dans la confiance que leur patrie voudra bien leur pardonner et les accueillir.
« Si on ajoute que sans l'aveu de Caïman et Crémen, on ne pouvait avoir contre eux la preuve du délit pour lequel ils ont été condamnés;
« Si on n'a pas perdu de vue que ces malheureux ne peuvent être soupçonnés d'avoir cordialement embrassé la cause des révoltés; enfin, si la Convention frappée des suites de la trahison d'un général qu'elle avait cru digne de sa confiance, jugeait prudent dans sa sollicitude de modérer la peine de l'émigration, en faveur des soldats qu^un moment d'erreur pourrait avoir éloignés de leurs drapeaux, on ne doutera ni du succès de cette triste réclamation, ni de l'intérêt que méritent d'inspirer ceux qui l'adressent. Comme il est vraisemblable que la Convention ne statuera pas sans avoir entendu le rapport cie l'un de ses comités, elle est suppliée jusqu'à ce rapport, de vouloir bien recommander au ministre de la justice de faire suspendre l'exécution du jugement.
« Signé : Lainé. »
a la séance de la convention nationale du
Pétition de la commune de Maubeuge, tendant à obtenir la maison des ci-devant Sœurs-Grises de cette ville et les terrains en dépendant, pour organiser un hôpital en échange des bâtiments composant les hôpitaux de Saint-Nicolas et de Saint-Jacques, appartenant à la commune de Maubeuge:
I
Lettre du rapporteur Sallengros au citoyen Ainelot, explicative de son rapport à la Convention et des décisions prises par les comités d'aliénation et des domaines nationaux (2).
Paris, le
« Citoyen,
« Votre lettre du 26 de ce mois et les détails qu'elle contient ont fait sentir au comité la
force des motifs qui militent en faveur de la demande de la municipalité de Maubeuge, tendant à échanger les deux maisons servant d'hôpitaux, contre la maison des Sœurs-Grises. Il aurait désiré pouvoir adopter le mode que vous proposez pour parvenir à cet échange, mais il a cru qu'il convenait mieux de proposer à la Convention un projet de décret tendant à déterminer les formes à suivre pour parvenir aux échanges qui sont journellement demandés contre les biens nationaux. Il va s'en occuper; en attendant, il vous invite d'écrire au district d'Avesnes pour faire surseoir à la vente de la maison desdites Sœurs-Grises et pour que vous l'invitiez à faire procéder, concurremment avec la municipalité, par des experts, à l'estimation des deux maisons proposées en échange, à vous renvoyer l'extrait du procès-verbal d'estimation de ces deux maisons, ainsi que de celle des Sœurs-Grises, à laquelle ils doivent avoir fait procéder. Le comité vous prie de lui faire passer Ces pièces aussitôt qu'elles vous seront parvenues.
« Signé : Sallengros. »
II
Pétition du conseil général de la commune de Maubeuge, et arrêtés approbatifs des corps administratifs du district d'Avesnes et du département du Nord (1).
Maubeuge, le
« Citoyens,
« Le conseil général de la commune de Maubeuge croirait manquer au plus essentiel de ses devoirs s'il ne saisissait toutes les occasions d'améliorer le sort des malheureux dont l'administration lui est confiée.
« Depuis longtemps, il lui tardait de voir la maison des ci-devant Sœurs-Grises évacuée, pour en faire la demande et pouvoir l'obtenir pour y réunir les différentes administrations de l'hôpital Saint-Nicolas et de celui de Saint-Jacques.
(Déjà, les commissaires de l'Assemblée nationale ont été prévenus du projet et reconnaissent tout l'utile et l'avantage qui doivent résulter de cet établissement, ils y ont applaudi, et ont permis de l'appuyer de tout leur pouvoir.
« Cette maison présente toutes les commodités nécessaires pour y recevoir et réunir les deux administrations dont il s'agit.
(( Des appartements sains et commodément distribués, pour placer séparément les individus de différents sexes et cle différents âges, des décharges commodes et existant pour la buanderie, emplacements indispensables à ces sortes de maisons, un petit potager propre à y recevoir les légumes d'une journalière et indispensable nécessité, l'eau de la rivière pour les lessives qui se répètent nécessairement toutes les semaines dans les maisons qui, comme celles-là, renfermant un certain nombre de vieillards et d'infirmes, sont peu fortunées et où le pauvre qui y est entretenu, n'a point de linge superflu.
(( Cette maison, d'ailleurs, est située dans un quartier de la ville qui la met dans le cas d'être peu recherchée pour l'acquisition. Elle ne pourrait convenir qu'aux entrepreneurs de la manufacture d'armes, qui, n'ayant point de concurrent, obtiendraient à vil prix un bâtiment qui présente toute l'utilité imaginable pour la réunion des maisons de secours de notre ville.
(( Si, dans l'ordre actuel des choses, la nation ne peut pas venir au secours de ces malheureux hospitaliers, le conseil général de la commune ne persiste pas moins dans son projet, et il offre de donner en échange les bâtiments de l'hôpital Saint-Nicolas, qui sont placés dans une rue tellement commerçante, qu'il y a la certitude de s'en défaire beaucoup plus avantageusement que du bâtiment des ci-devant Sœurs-Grises qui, comme nous l'avons dit plus haut, ne peut convenir qu'aux entrepreneurs de la manufacture.
« D'ailleurs, il y a encore en ville des emplacements qui présentent auxdits entrepreneurs autant d'avantages que celui-là. Telles sont, par exemple, la maison des ci-devant Sœurs-Noires et celles des ci-devant Oratoriens. Cette dernière surtout qui a un immense jardin, dans lequel il ne serait pas difficile de pratiquer la quantité d'habitations et d'ateliers dont lesdits entrepreneurs pourraient avoir besoin, pour l'établissement et le logement de leurs ouvriers.
(( Le conseil général de la commune ose se flatter qu'animés comme lui du désir ardent d'alléger le sort des malheureux, vous appuierez d'un avis favorable auprès de la Convention nationale la présente réclamation.
« Signé : Moutiers, Lucq, François Menu, Drounesal, Loyer, Lhotellerie, Ber-taux, Contamine, A. Ailliet, Clerfaut, Marchant, procureur de la Commune. >
(( Vu la lettre qui précède du conseil général de la commune de Maubeuge en demande de la maison des ci-devant Sœurs-Grises pour y réunir les hôpitaux Saint-Jacques et Saint-Nicolas;
« Considérant que, dans tous les temps, il est du devoir des administrateurs d'employer les moyens qui sont en leur pouvoir pour procurer tous les avantages possibles aux administrations qui leur sont confiées, que celle du district d'Avesnes croirait manquer, si elle n'appuyait d'un avis favorable près du département du Nord, la pétition formée par le conseil général de la commune dudit Maubeuge, qui sent tout l'utile qu'il y aurait en réunissant dans le couvent ci-aevant occupé par les Sœurs-Grises les hôpitaux qui existent dan? cette ville;
(( Considérant aussi que les avantages à on retirer, vantés et démontrés dans ladite lettre, sont de la plus exacte vérité et que le procès-verbal des experts jurés, en date du 11 de ce mois, prouve que la nation ne sera pas lésée dans cet échange;
(( Ouï, sur ce, le procureur syndic,
« Nous, administrateurs composant le directoire du district d'Avesnes, estimons que le bâtiment demandé par ledit conseil général doit lui être accordé en échange de ceux desdits hôpitaux Saint-Jacques et Saint-Nicolas, et que l'administration du district devra être
autorisée à passer, au nom de la nation, tous actes à ce nécessaires.
« Fait en séance du district d'Avesnes, le 13 octobre 1792, l'an Ier de la République. « Sir/né: Dumoneteatj, Caron, Botjlenger, E. Pirard, Hannoge, procureur-syndic. »
« Vu par nous, administrateurs composant le directoire du département du Nord, la requête présentée par lé conseil général de la commune de Maubeuge, tendant à obtenir la concession du monastère des ci-devant Sœure-Grises de la ville de Maubeuge, pour y réunir les hôpitaux de Saint-J acques et de Saint-Nicolas, en échange des terrains et bâtiments de l'hôpital dudit Saint-Nicolas, le procès-verbal d'extinction desdits hôpitaux Saint-Jacques et Saint-Nicolas, la lettre des concitoyens Darets, Hennet, fondé de procuration des entrepreneurs de la manufecture d'armes, établie à Maubeuge, et envoi d'un mémoire des dits entrepreneurs qui, de leur côté, réclament ledit monastère des Sœurs-Grises, pour l'agrandissement des ateliers de la manufacture.
« L'avis du directoire du district d'Avesnes, en date du 13 octobre 1792;
« Ouï le commissaire procureur général syndic;
« Nous, administrateurs susdits, déclarons que la réunion des deux hôpitaux à un seul dans la maison des ci-devant Sœurs-Grises de Maubeuge, demandée par la municipalité est d'autant plus digne d'être favorablement accueillie par la Convention nationale qu'elle tend à supprimer, entre deux établissements de même _ nature une distinction contraire aux principes de l'égalité républicaine;
Et attendu que les entrepreneurs de la manufacture nationale d'armes ont fait, pour ladite maison des ci-devant Sœurs-Grises une première soumission de la somme de 25,000 livres pour augmenter le nombre des ateliers de cette manufacture, nous estimons que la Convention nationale doit être priée de prononcer promptement sur ces demandes respectives, afin que ces entrepreneurs puissent tourner leurs vues sur quelques autres établissements dont la demande de la municipalité serait accueillie, afin qu'il n'en résulte aucun retard pour la fabrication des armes nationales;
Et en attendant que la Convention nationale ait prononcé sur ces demandes, nous avons arrêté et arrêtons qu'il sera écrit au citoyen Amelot, administrateur de la caisse de l'extraordinaire, pour lui demander s'il convient de surseoir aux enchères de la maison des Sœurs-Grises et terrains en dépendance des Sœurs-Grises.
Fait à Douai, en la séance publique du directoire, le 20 octobre 1792, l'an I de la République française.
« Signé : Michel, président. »
III
Rapport des experts (1).
« L'an mil sept cent quatre-vingt-douze, le premier de la République française, le
douze octobre, nous soussignés, experts jurés de la commune de Maubeuge, en vertu de la délibération du conseil général de ladite commune, en date d'aujourd'hui, nous sommes transportés dans le couvent des ci-devant Sœurs-Grises et là, après avoir parcouru le haut et le bas des bâtiments, toisé le terrain et tout considéré, nous l'avons estimé valoir vingt-six à vingt-sept mille livres.
( Nous sommes transportés dans la maison de l'hôpital Saint-Nicolas et après avoir procédé comme dessus, -nous l'avons èstimée valoir vingt mille six cents livres.
« Enfin nous sommes transportés dans la maison dite Saint-Jacques, occupée par les orphelins et après avoir procédé comme est dit ci-dessus, nous l'avons estimée valoir neuf mille livres.
« En foi de quoi nous avons dressé le présent procès-verbal que nous avons déposé en la maison commune pour servir et valoir en ce que de raison.
« Fait les jour, mois et an que dessus. «• Signé : Etienne Folie, architecte ; Louis Cambien, charpentier. »
« Nous, maire et officiers municipaux de la ville de Maubeuge, district d'Avesnes, département du Nord, certifions à tous qu'il appartiendra que les citoyens Folie et Cambien qui ont signé ci-dessus, sont le premier, ma çon et le second, charpentier, tous deux experts jurés de cette ville; qu'aux actes par eux signés en ladite qualité, foi doit être ajoutée tant en jugement que dehors; en foi de quoi nous avons, aux présentes, signé et avons fait apposer le sceau de cette ville de Maubeuge.
« Le
« Signé : Lucq, Clerfaut. »
IV
Lettre des citoyens Darets et Hennet aux citoyens administrateurs de la commune de Maubeuge (1).
Maubeuge, le
c Citoyens administrateurs, « Nous avons l'honneur de vous adresser un mémoire relatif à la soumission que nous avons faite au district d'Avesnes sur le couvent des ci-devant Sœurs-Grises. Le bien public nous force d'insister sur l'acquisition de ce bâtiment que nul autre ne peut remplacer pour notre établissement. Nous attendons votre décision.
« Nous sommes avec respect, citoyens, vos très humbles et obéissants serviteurs,
( Signé : Darets; Hennet, fondé de procuration. »
V
Mémoire (2).
« Les entrepreneurs de la manufacture nationale d'armes de Maubeuge ont fait, au
«district d'Avesnes, une soumission de 25,000 livres pour les bâtiments, cours et jardins du couvent des ci-devant Sœurs-Grises, à Maubeuge.
« Depuis, ils ont été instruits que la municipalité de Maubeuge réclamait le même bâtiment, d'abord pour y loger des troupes pendant l'hiver et ensuite pour en faire un hôpital.
« Les entrepreneurs de la manufacture ont alors vu avec peine que leurs projets dictés par l'amour du bien public se trouvaient en opposition avec ceux de la municipalité qui ont les mêmes motifs d'utilité publique.
Dans ces circonstances, les entrepreneurs pensent que leur civisme leur impose le devoir de défendre des vues qu'ils ont crues avantageuses à la nation, mais avec franchise et loyauté et sous les yeux mêmes de la municipalité à laquelle ils soumettront toutes leurs démarches.
« Plusieurs ouvriers, habitant les faubourgs de Maubeuge, expulsés de leurs boutiques par les ennemis, se sont réfugiés dans la ville. Les entrepreneurs, hors d'état de les loger, ont eu recours à la municipalité qui les a autorisés à construire des boutiques provisoires dans une cour du couvent des Sœurs-Grises.
( Le désir d'être plus longtemps utiles à ces malheureux ouvriers a donné aux entrepreneurs la première idée d'acquérir les bâtiments de ce couvent.
« Us ont pensé, ensuite, que ce couvent situé sur le bord de la rivière dans une étendue assez longue et placé à proximité des bâtiments de revision et des autres bâtiments de la manufacture, donnerait les plus grandes facilités à augmenter et à accélérer la fabrication des armes. Us savent combien la nation a besoin d'armes, la Convention nationale, le pouvoir exécutif provisoire ne cessent d'en demander; les commissaires de l'Assemblée législative, venus à Maubeuge, vers le 15 septembre dernier, ont recommandé aux entrepreneurs les plus grands efforts, les plus grands sacrifices; les entrepreneurs ont promis et seront fidèles à leurs promesses.
« Déjà, ont-ils acquis deux moulins à Haut-mont et à Louvroil pour y construire des usines; cette acquisition, de près de 60,000 livres est une mise hors qui ne produira rien pendant un an; les constructions exigeront de nouvelles avances. En augmentant les usines, il faut nécessairement augmenter les approvisionnements; il faut des magasins, surtout pour les bois; on les trouvera dans le couvent dont les entrepreneurs demandent à faire l'acquisition; cette nouvelle dépense des entrepreneurs doit donc être regardée moins comme une spéculation commerciale que comme un sacrifice patriotique.
« Sans doute, par la suite, ces acquisitions seront avantageuses aux propriétaires; mais elles le seront et plus et plutôt pour la nation; en effet, ils espèrent, à l'aide de ces •sacrifices que la fabrication des fusils qui n'est que de 10,000 ou 12,000 sera portée à 30,000 et qu'ils pourront doubler le nombre de leurs ouvriers.
« Ainsi, augmentation d'armes, augmentation d'ouvriers, commerce plus étendu, cir-
culation plus active pour la ville, ressources plus multipliées ouvertes aux habitants du département. Quels plus grands avantages peut trouver, non seulement la nation entière, mais le département en particulier, le district et surtout la ville de Maubeuge.
« Citoyens de Maubeuge, les entrepreneurs cherchent le bien-être de leurs concitoyens; ils sont loin de vouloir contrarier les intérêts d'une ville où ils sont nés et que plusieurs d'entre eux habitent; aussi, ils abandonneraient leurs projets, s'ils n'y trouvaient l'intérêt de la ville, le bien-être de leurs concitoyens.
« Us observeront d'abord que leur acquisition n'empêchera pas de loger des troupes cet hiver dans une partie du couvent; ainsi ce premier projet de la municipalité ne sera nullement contrarié.
« L'avantage qui résulterait pour la ville de mettre le couvent des Sœurs-Grises en hôpital, est-il plus grand que celui qui résulterait pour la ville et pour la nation de consacrer ce même couvent à la manufacture d'armes ?
« Telle est la question, sur laquelle les administrateurs du département ont à prononcer; les entrepreneurs de la manufacture-les supplient de l'examiner dans leur sagesse; ils ne leur adressent ce mémoire qu'après en avoir donné connaissance à la municipalité en l'invitant à défendre son opinion. La municipalité et les entrepreneurs n'ont tous les deux en vue que le bien public; ils sont en concurrence sans être en opposition, et les entrepreneurs seront satisfaits quelle que soit la_ décision, sûrs qu'elle sera dictée par la justice et le patriotisme.
VI
Lettre du ministre Roland au Président de la Convention nationale (1).
Paris,
« Citoyen Président,
« La municipalité de Maubeuge sollicite, d'un côté, l'échange des bâtiments qui composent les hôpitaux de Saint-Nicolas et de Saint-Jacques de cette ville, estimés par experts 29,600 livres, contre la maison ci-devant habitée par les Sœurs-Grises de la même ville. Les entrepreneurs de la manufacture nationale d'armes de Maubeuge ont fait, de l'autre, une soumission de 25,000 livres pour l'acquisition de cette maison, qu'ils regardent comme indispensable pour le succès de leur manufacture. Des considérations également puissantes militent en faveur de ces deux établissements utiles. L'un trouve dans cet échange des moyens plus prompts et plus sûrs de venir au secours de l'humanité souffrante; l'autre voit dans l'acquisition qu'il propose de faire le moyen de doubler le nombre des ouvriers de la manufacture d'armes et de porter à 30,000 le nombre de fusils dont la fabrication ne s'élève en ce moment qu'à 12,000.
« Au milieu de cette lutte honorable entre l'amour de l'humanité et celui de la patrie, le directoire du département du Nord n'a pas voulu prendre de parti et il a arrêté que la Convention nationale serait priée de prononcer sur ces demandes respectives. Je fais, en conséquence, passer à la Convention : 1° la pétition du conseil général de la commune de Maubeuge, appuyée de l'avis du directoire du district d'Avesnes à la suite duquel est l'arrêté du département; 2° le procès-verbal d'estimation du couvent des ci-devant Sœurs-Grises, et des deux hôpitaux Saint-Nicolas et Saint-Jacques; 3° la copie d'un mémoire relatif à la soumission par les entrpreneurs de la manufacture d'armes de Maubeuge, et je prie la Convention nationale de prendre le plus tôt possible une détermination à cet égard afin que ces entrepreneurs puissent tourner leurs vues sur quelque autre établissement dans le cas où la demande de la municipalité serait accueillie. »
« Le ministre de Vintérieur, « Signé : Roland. »
YII
Le président et le secrétaire du comité d'aliénation au citoyen Amelot, administrateur des domaines nationaux (1).
Le
« Citoyen,
« Le comité vient d'examiner une pétition du conseil général de la commune de Maubeuge, tendant à un échange de bâtiments formant deux hôpitaux contre un édifice national sur lequel il y a sommation.
« Le comité vous envoie toutes les pièces relatives à cette pétition et concertera ensuite avec le comité des secours publics pour proposer une projet de décret à la Convention.
« Si vous le croyez utile, vous pourrez faire suspendre la vente de cet édifice pendant le délai nécessaire, pour que la Convention statue sur la pétition des habitants de Maubeuge.
« Le président et le secrétaire du comité d'aliénation.
« Signé: Delacroix, Gauthier. »
VIII
Lettre de Vadministrateur des domaines nationaux aux membres composant le comité d'aliénation de la Convention nationale (2).
« Paris, le 26 janvier 1793, l'an II de la République.
« Citoyens,
« J'ai reçu avec, votre lettre du 23 de ce mois les pièces relatives à la demande de la commune de Maubeuge qui propose de céder à la nation les bâtiments composant les hôpitaux de Saint-Nicolas et de Saint-Jacques, dont la propriété lui appartient, en échange
de la maison des Sœurs-Grises de cette ville, domaine national pour lequel les entrepreneurs de la manufacture d'armes de Maubeuge ont fait une soumission de 25,000 livres.
« La municipalité de Maubeuge s'était adressée à moi dès le mois d'octobre dernier, et comme il était question principalement de juger s'il était de l'intérêt général de réunir deux hôpitaux dans le même local, en privant un établissement public de la faculté d'acquérir un domaine qui. était à sa convenance, j'avais pensé que, sous ce rapport, l'affaire dont il s'agit concernait particulièrement le ministre de l'intérieur, à qui j'en ai, en conséquence, fait le renvoi, le 26 novembre dernier.
« Je vois, citoyens, par les pièces dont vous voulez bien me donner communication, que ce ministre, partagé entre les considérations respectivement présentées par la municipalité et par la manufacture d'armes, ne s'est point expliqué sur les motifs de préférence qui pourraient déterminer la Convention à prononcer, et, qu'à l'exemple du département du Nord, il s'est borné à solliciter une prompte décision, de sorte que le comité d'aliénation n'a encore reçu, de la part du pouvoir exécutif, aucun des éclaircissements dont il croit avoir besoin pour prendre une détermination : je vais y suppléer, sans prétendre m'immiscer en rien dans ce qui pourrait être de la compétence du ministre de l'intérieur et uniquement pour répondre, comme je le dois, à la confiance du comité.
« J'observe d'abord, citoyens, que les motifs allégués par la municipalité, sont d'un plus grand poids que ceux présentés par les entrepreneurs de la manufacture : en effet, ceux-ci ont traité avec la nation pour leurs fournitures et leur traité doit être rempli, soit qu'ils acquièrent la maison des Sœurs-Grises, soit qu'on ne donne aucune suite à leur soumission, puisque cette acquisition n'a point fait partie des conditions auxquelles ils se sont engagés de fabriquer des armes : ainsi la chose publique n'a aucun intérêt réel à ce qu'ils soient déclarés acquéreurs, tandis que l'humanité souffrante, qui doit être l'objet de la sollicitude d'un gouvernement fondé sur la liberté et sur l'égalité, exige impérieusement que l'on prenne des mesures pour le plus grand soulagement des malades de la ville de Maubeuge. D'un autre côté, les entrepreneurs peuvent diriger leurs vues vers d'autres établissements; on leur en indique plusieurs qui rempliraient également leur but, au lieu que la maison des Sœurs-Grises est le seul local qui convienne à la municipalité, et que si on lui fait perdre l'occasion qui se présente, elle ne pourra peut-être jamais réaliser ses projets de bienfaisance et d'humanité, faute de moyens pour subvenir aux dépenses que nécessiterait un nouvel établissement, et dont elle sera exempte, si la voie de l'échange lui est ouverte.
U reste donc à examiner si l'intérêt de la nation ne souffrira point de cet échange et je vois que la République ne fera aucun sacrifice réel, puisque, d'une part, les bâtiments offerts par la municipalité ont été. estimés 29.600 livres et que, de l'aufre, la soumission des entrepreneurs de la manufacture d'armes pour la maison des Sœurs-Grises n'est que de 25,000 livres, ce qui semblerait même donner
un bénéfice de 4,600 livres, au profit de la nation. Mais je ne dois pas vous dissimuler, citoyens, que les estimations ne paraissent avoir été faites que par ordre de la municipalité et sans le concours des corps administratifs, et qu'il serait convenable que le district nommât, de son côté, des experts, afin qu'il fût bien constaté que les objets, donnés en échange du domaine national, ont effectivement la valeur qu'on leur attribue. Lorsque cette formalité, qui n'entraînera pas un long délai, aura été remplie, j'estime qu'il n'y aura aucun inconvénient à accéder à la demande de la municipalité de Maubeuge, sans néanmoins qu'il y ait lieu de lui tenir compte de la mieux-value, attendu que la République sera privée, en définitive, du bénéfice qui aurait résulté pour elle, de la chaleur des enchères, si la maison des Sœurs-Grises avait été mise en vente, comme les autres domaines nationaux.
Quant au sursis pour l'adjudication de cette maison, je vous observe, citoyens, qu'il y a lieUj pai* le fait de la demande qu'avait formée la municipalité de Maubeuge et que, quoique les décrets n'aient pas autorisé formellement les retards apportés aux ventes, ils ne peuvent être considérés comme une violation de la loi, puisqu'ils sont l'effet nécessaire de la faculté que les municipalités ont de se pourvoir auprès de la Convention, dans des circonstances semblables à celles où se trouve aujourd'hui la commune de Maubeuge.
Si vous adoptez mon avis, je vous prie, citoyens, de vouloir bien me le faire connaître, afin que j'invite le district de Maubeuge, par l'intervention du département, à ordonner, ccntradictoirement avec la municipalité, une nouvelle estimation des deux hôpitaux de Saint-Nicolas et de Saint-Jacques. « L'administrateur des domaines nationaux, « Signé : Amelot. »
a la séance de la convention nationale du
Pétition, avec pièces annexes, des paroissiens de Notre-Dame-de-la-Chaussée à Valenciennes., ayant pour objet la translation de leur paroisse dans Véglise du ci-devant béguinage, dite de Sainte-Elisabeth, et lettre approbative du ministre Roland, transmettant le dossier à la Convention.
I
Lettre de Roland, ministre de l'intérieur, au Président de la Convention nationale (2).
Paris, le
« Citoyen Président, « Les administrateurs du département du Nord m'ont adressé une pétition des paroissiens de Notre-Dame-de-la-Chaussée, à Valenciennes, dont l'objet est d'obtenir la transla-
tion de leur paroisse dans l'église du ci-devant béguinage, dite Sainte-Elisabeth. Je vous fais passer cette pétition ainsi que les pièces jointes, parmi lesquelles se trouve l'arrêté du département du Nord, auquel cette demande paraît susceptible d'être favorablement accueillie. Comme je partage cette opinion, je vous prie de mettre la pétition sous les yeux de la Convention nationale qui, seule, a le droit de peser, dans sa sagesse, ce qu'il convient de prononcer définitivement à cet égard.
« Le ministre de l'intérieur, « Signé : Roland. »
II
Pétition des paroissiens de Notre-Dame-de-la-Chaussée aux citoyens administrateurs composant le directoire du département du Nord, à Douai (1).
à Les citoyens de la paroisse de Notre-Dame-de-la-Chaussée de Valenciennes ont l'honneur de vous représenter que l'église du béguinage, dite de Sainte-Elisabeth, en ladite ville, ayant été dénommée par la municipalité pour former la quatrième paroisse, il a été délibéré que les béguines qui occupaient alors ladite église, n'étant pas comprises dans le décret concernant la réforme des religieuses, que l'église de la Chaussée servirait provisoirement de paroisse.
« A présent, les béguines n'existent plus; leur église est vacante; celle de la Chaussée menace ruine par son ancienneté; d'ailleurs, elle est fort malsaine, et se trouve à l'extrémité de la paroisse, ce qui est très incommode à la majorité des habitants de ladite paroisse; d'un autre côté, sa situation présente un plus grand avantage pour la nation, tant pour le produit des matériaux, bois, cloches, etc., que l'on retirerait de la démolition de cette église que par l'emplacement pour y bâtir.
« Les citoyens soussignés demandent que vous vouliez bien leur accorder provisoirement l'église du béguinage qui est neuve, pour Ic-ur paroisse, ce qui les faciliterait énormément à cause qu'elle est saine, bien placée et se trouve vraiment au centre de ses habitants et qu'il vous plaise faire ratifier leur demande à la Convention nationale. « Signé: Menu père; Beaux, Hutard, Car-lier, Delescat, Ferdinand, Hôrorette, - Joly, Pastel, Fromont, Goffart, Poi-rette, Pierre Leduc, Gamachet, Hous-sier, colier, fouquet, dabencourt, Wallois, Louis Manez, Becquet, Bourgeois, Ganuchez, Boulant, Deschamps, Levesque, Laine, Proust, Benoit, Ber-nier, Pillion, Léonard Teinturier, A. Georges, Emile Limât, Louis Oudart, Veuve Robert, Joseph Aubert, Joseph Lombrais, Jacques Cambray, Mahieux, Pierart, Deroubey cadet, Bassez, Henry Noël, Bouchetet, Legrand, Chefde-
VILLE, HoUSSEAU, VERDAVAINE fis, MA-
larin, Durit, Yvois, J. Vaudeville, Aubret, Droubay, Barbieux, Alabert, Lombran, Brousse, Pentois fils, Dutruin, François Rénaux, Vivien, Danceaux, Bourgan, Ousart, Joseph Defossés,
Hyacinthe Rémy, Théodore Rémy, François Mencher, Bourgogne père, Leroy, Abancourt, Malengre, Cartier, Dulieu, Bourgeois, Menai, Veuve Lamant, Patôu, Baudouin, Charles Lamant, Joseph Du-sar, Marguerite Delait, Laburiau fils, Bournoux, Jean-Baptiste Lemerre, Veuve Marais, Veuve Barrai, Portier, Ala-voine, François Brassart, Elie Podevin; Veuve Duflos, Hebert, Langlois, Antoine Dehenain, Antoine Bellepate, Bal-lin, Jacques-François Dupuis, Veuve Michel, Labour^ Gille," Gabelle, Mo-voix, Dupont fils, Bataille, Jacques Gossart, Jean-Baptiste Carhin, Calart, Benteux fils, Wibaille, Pochez, Jean-Baptiste Missard, Càrpentier, Elisabeth Thirion, Caroline Thirionr>Veuve Aury, Henry Pocher, Jacques Debaralle, Joseph Thierry, Charles Nichez, François Wibaille, François Marcaille, Hugue-nep, Pasture, Chauvin père,. Chauvin fils, Stanislas Duflos, Dugrond, Veuve Craie, Tadot, Descamps, Veuv'é Dupain, Dufont père, Lesieùr, LaGilie, Van Ruymbeke, Veuve: Càrpentier, Rosalie Dexebut, Baron, Etienne Monjeux, Bancel, Gilon, Gibon, Richard, Lefort, RouilLon, J.-B. Clément, Thomas Pa-riseau, Gille, Caplot, Julie Laplace, Bajat, Ruffin, Claùde Urban, Puv rez, Dorinaz père, Guillaume Delvigné, Joseph Godart, Veuve Redon, Fauquet, Lebrent, Alardin, Madeleine Urbain, Céléstine Dorinaz, Antoine Brabant, Elisabeth Brabant, Rosalie Brabant, Schmit, Tracy, Vacheron, André Sant, Le Roy, Peltier père, PeLtier fils, Meurant, BiÉcouRy Louis Wallon, Del-mer, Dauhiez, Chantreau, Dessaut père} Lament, Jean-Baptiste Jenot, Henri Naïve, Veuye Libour, Veuve Matu, Nicolas Venain, Veuve Malhit, Bernard Garçon, Joseph Hardy, Poiret, Julien Thiévenard, Sotin, Louis Legrand, Hubert, Pierre-Célestin-Joseph NoëL cadet, Locoge, Bricout, Menchez père, Men-chez fils, Gariez, Petit, Burret, Com-baret père, Veuve François, Lapour, Moulinois, Gaùtrefier, Adan, Dugand, Veuve Durand, Albert Poirel père, Clau-dien Lacour, Poirel, Thiévenard fils, Bricout fils, Maréchal, Rombaut, Debos, Joseph Bocquet, Cliché père, Carré père, Teinturier neveu, P.-S. Richard, Michel fils, Bisaux, Boucher, Vaillant, Veuve Bain, Pierre Rollet, Jean-Baptiste Balienie, Delsart fils, Lottiay, Durosay, Niomet, Lecoq, Delsart, François Bette, Veuve Bisaux, Bain, Cliché . cadet, Jeanne Philippe, Gosseaux, Pierre Morette, Veuve Thiébaut, André Le-clercq, Burbé, Jean-Baptiste Decamp, Louis Pocher.»
III
Extrait de la délibération du conseil général de la ' commune de Valenciennes dû 84 novembre, l'an I de là République française (1).
« Le conseil général de la commune de Va-
lenciennes, ayant attentivement examiné et
discuté la requête qui doit être présentée aux administrateurs composant le directoire du département du Nord par les habitants de la paroisse de Notre-Dame-de-la-Chaussée en ladite ville.
« Déclare que les faits mentionnés en ladite requête sont vrais et exacts et que les administrateurs du district de cette "ville et les administrateurs du département du Nord, en l'appuyant d'un avis favorable, déterminer ront une opération conforme aux intérêts de la République en général et à ceux de la commune en particulier.
' « Ên conséquence, copie authentique de la présent déclaration sera remise aux requérants pour être annèxée à leur requête.
« Certifié conforme à l'original, « Signé : Mornet. »
IV
Arrêté du directoire du district de Valen-ciennes (1). •
« Vu la requête qui précède, enseniblela délibération du conseil général de la commune de Valenciennes, tout considéré, le directoire du district de Valenciennes pense qu'il est aussi avntageux à la nation qu'aux citoyens de la paroisse de. Notre-Dame-de-la-Chaussée de cette ville, de leur accorder l'échange qu'ils sollicitent si justement pour les causes y détaillées; « Ouï le procureur syndic, « Nous, administrateurs susdits, sommes d'avis que ce qui se requiert, peut être provisoirement maintenu par le département, jusqu'à Ce qu'il lui ait plu solliciter la Convention de confirmer la décision provisoire qu'il voudra rendre sur l'échange des bâtiments dont il s'agit.^
« Fait en la séance du directoire du district de Valenciennes, du 26 novembre 1792, l'an I de la République française,
« Signé : Lenglé, Demory; Dupin, procureur syndic. »
V
Extrait du registre aux décisions sur requêtes présentées au directoire du département du Nord (2).
« Vu par nous, administrateurs composant le directoire du département du Nord, la requête présentée par les paroissiens de Notre-Dame-de-la-Chàussée à Valenciennes, aux fins d'obtenir la translation de leur paroisse dans l'église du ci-devant béguinage, dite de Sainte-Elisabeth; %
« Vu aussi l'extrait du procès-verbal de la séance du,conseil général de,la commune de Valenciennes, en date du 24 dé ce mois, l'avis du directoire du district, ensemble l'article 1er de la loi du 12 juillet 1791; Ouï le-procureur général syndic, -« Nous, administrateurs susdits, attendu qu'il résulte de la prescription du conseil général de la commune et l'avis du district de Valenciennes, que l'église Notre-Dame-de-la-
Chaussée est, par sa vétusté, par son insalubrité et par sa position, incommode aux habitants; que l'échange de cette église contre celle de Sainte-Elisabeth ne peut aucunement pré-judicier aux intérêts de la République, sommes d'avis que la demande des pétitionnaires doit être favorablement accueillie;
« Arrêtons, en conséquence, que le présent arrêté sera envoyé au ministre de l'intérieur pour être par lui transmis à la Convention nationale, pour qu'elle prononce la translation et l'échange sollicités.
( Fait à Douai, en la séance publique du directoire le 30 novembre 1792, l'an I de la République française.
« Pour copie conforme au registre, « Signé : P. Boule; Lugansey. »
Séance permanente du
présidence de Romme, secrétaire, et de Thuriot, vice-président.
présidence de romme, secrétaire.
La séance est reprise à sept heures dix minutes du soir.
(1). Citoyens, je vois avec douleur que la Convention est comme nos armées; elles sont sans chef et la Convention est sans président. Je demande que demain matin l'on nomme un président et un vice-président; qu'ils ne puissent s'absenter sous aucun prétexte et que le président ne puisse être d'aucun comité durant sa présidence.
La demande de Gossuin me parait excessive, car ce serait mettre un homme dans un singulier embarras que de l'appeler à choisir entre deux postes, dans lesquels il peut rendre d'éminents services à son pays. Je demande simplement qu'il soit procédé à l'élection d'un vice-président, lequel remplacera le président actuel pendant la durée de l'exercice et qu'en l'absence des secrétaires les anciens secrétaires occupent le bureau.
(La Convention se range à l'avis de Camba-cérès et décrète qu'il devra être procédé à l'élection d'un viee-président au cours de cette même séance) (2). -
, donne lecture des lettres et adresses suivantes r
1° Lettre de Lebrun, ministre de la guerre par intérim (3), relative à
l'administration des hôpitaux militaires, en date du 8 avril;
2° Lettre des administrateurs du district de Bergue; ils font passer copie d'une sommation du général autrichien Meskœr, au commandant des troupes françaises campées dans ses environs, pour évacuer le territoirel autrichien.
(La Convention renvoie la lettre au comité de Salut public.)
3° Lettre de Lebrun, ministre de la guerre par intérim, en date du 8 avril, relative à la solde des officiers et soldats prisonniers de guerre. :
(La Convention renvoie la lettre au comité de la guerre.
4° Lettre de Lebrun, ministre de la guerre par intérim, qui contient l'état nominatif de 8 militaires auxquels il a délivré aes brevets de pension.
(La Convention renvoie la lettre au comité de la guerre.)
5° Lettre de Lebrun, ministre de la guerre par intérim, relative à des indemnités réclamées par des militaires que leurs blessures ont mis dans le cas d'éprouver des pertes considérables.
(La Convention renvoie la lettre au comité de la guerre.)
6° Lettre de Lebrun, ministre de la guerre par intérim (1), qui écrit que plusieurs laboureurs, à qui le dernier recrutement a enlevé beaucoup de bras, demandent qu'il leur soit permis de salarier des prisonniers de guerre pour leurs travaux.
(La Convention renvoie cette lettre au comité de la guerre et d'agriculture réunis.)
7° Lettre du citoyen Gleizal, commissaire de la Convention dans les départements de VAr-dèche et de la Lozère, par laquelle il .rend compte du zèle extraordinaire des citoyens pour marcher au secours de la patrie et pour presser les fourniments et équipements; cette lettre est ainsi conçue (2) :
Le
« Citoyens nos collègues,
( Ën attendant le compte général que nous aurons à vous rendre, vous apprendrez avec satisfaction que le recrutement s'est fait dans le département de l'Ardèche avec la plus grande activité. Les corps administratifs, les municipalités et surtout les commissaires du département et des districts ont rempli leur tâche avec beaucoup de soin et d'exactitude et la loi a été parfaitement exécutée.
Plusieurs communes ont fourni au delà de leur contingent et tous les
hommes demandés à ce département seraient déjà en route pour
« Le commissaire de la Convention nationale dans les départements de l'Ardèche et de la Lozère.
« Signé : Gleizal. »
* (La Convention décrète la mention honorable du patriotisme des habitants des départements de l'Ardèohe et de la Lozère et ordonne l'insertion de la lettre du commissaire Gleizal au Bulletin.)
8° Lettre des citoyens Perrin et Roux, commissaires de la Convention dans les départements de la Haute-Marne et des Vosges, par laquelle ils témoignent de leur indignation sur la conduite de Dumouriez et protestent de
leur zèle ardent pour le maintien de la République ; elle est ainsi conçue (1) :
Neufchâteau, le 6 avril 1*793, l'an IX de la République française.
« Citoyens nos collègues,
« Nous apprenons avec la plus vive douleur les trahisons infâmes du scélérat qui voudrait nous donner de nouveaux fers en nous donnant un roi. Cet acte de folie de la part d'un lâche intrigant n'abattra point le courage et l'énergie que nous avons rencontrés dans les départements de la Haute-Marne et des Vosges où tous les volontaires sont en marche pour leur destination respective. Nous sentons le nôtre s'accroître au récit des nouveaux dangers qui paraissent menacer la patrie. Dans tous les districts que nous avons parcourus, un seul et même cri s'est fait entendre : « La loi pour maître, la République une et indivisible ou la mort ! » Voilà, citoyens, nos collègues, notre profession de foi et nous jurons par les mânes de tous les braves Français, qui ont péri victimes de trahisons, que nous poignarderons quiconque voudra asservir notre patrie; nous nous hâtons de terminer nos opérations pour pouvoir retourner au milieu de vous et vous aider à anéantir les traîtres.
« Les commissaires de la Convention nationale pour la Haute-Marne et les Vosges.
« Signé * Roux, Perrin. »
(La Convention décrète la mention honorable.)
9° Lettre de Garat, ministre de l'intérieur (2), qui transmet à la Convention une pétition de la commune de Sassenay, département de Saône-et-Loire (3), tendant à établir, dans cette commune, deux foires par an; cette lettre est ainsi conçue :
Paris,
« Citoyen Président,
« Je vous envoie une pétition de la commune de Sassenay dont le but est d'obtenir l'établissement de deux foires par an. La Convention nationale verra que cette pétition a été communiquée au département de Saône-et-Loire et au district de Chalon ; que ces deux administrations ont donné des avis favorables et que les municipalités qui avoi-sinent la commune de Sassenay désirent cet établissement. Je ne puis que m'en rapporter à la sagesse de la Convention sur ce qu'elle croira devoir statuer à cet égard.
« Le ministre de F intérieur, « Signé : Garat. ».
(La Convention passe à l'ordre du- jour motivé sur la liberté de
commerce.)
Paris,
« Citoyen Président,
« Je vous envoie une pétition de la commune de Verdun-sur-le-Doubs, tendant à obtenir l'établissement de deux foires par an. La Convention nationale verra que cette pétition a été homologuée par le département de Saône-et-Loire et par le district de Cha^ Ion, auxquels elle a été communiquée et que les municipalités qui avoisinent la commune de Verdun y ont donné leur adhésion.
« Je ne puis que m'en rapporter à la sagesse de la Convention, sur ce qu'elle croira devoir statuer à cet égard.
« Le ministre de l'intérieur, « Signé : Garat. »
(La Convention passe à l'ordre du jour motivé sur la liberté de commerce.)
11° Lettre d'un cavalier du 7e hussards (3). dans laquelle il s'exprime ainsi :
( Dès que le 7e régiment de hussards a eu connaissance de la trahison de Dumouriez, il a fait serment de fidélité à la République; ces braves citoyens mourront tous plutôt que de l'abandonner. — Boyer, leur brave colonel, pleure de joie de les voir dans les mêmes sentiments que lui : aussitôt le régiment s'est rendu à Douai; il offre à la France des Cassius, des Cinna, des Cimber et des Brutus ».
(La Convention décrète la mention honorable et ordonne l'insertion de cet extrait au Bulletin.)
(4). Un courrier apporte une lettre du conseil, général de la commune de Calais; il serait prudent de la renvoyer au comité de Salut public sans la lire publiquement.
(La Convention renvoie la lettre au comité de Salut public.
(5). Je gémis de voir combien peu nous songeons à nos commissaires
détenus à Mons. J'observe que ce n'est que par une violation inouïe du
droit des gens que ces citoyens sont constitués prisonniers. Je propose
à la Convention de charger le conseil exécutif de faire demander aux
généraux en-
J'estime qu'il serait préférable de se borner à envoyer un trompette au général ennemi, de lui demander s'il veut conserver les commissaires, dont la tradition est une violation du droit des gens, et s'il s'y refuse ou les traite mal, de traiter de même les otages que nous avons.
; Il n'est pas de la dignité d'une grande Assemblée de traiter avec un général, je demande que la sommation soit faite à l'empereur.
(La Convention renvoie ces différentes propositions au comité de Salut public.)
, secrétaire, donne lecture de la rédaction définitive du décret, rendu la veille (1) sur la proposition de Lauze-Duperret, relatif aux citoyens qui auront des dénonciations à faire contre des membres de la Convention; cette rédaction est ainsi conçue (2) :
« La Convention nationale décrète que tous ceux qui auraient des dénonciations à faire contre quelques-uns des membres de la Convention nationale, et qui tiendraient à les faire reconnaître pour fauteurs ou complices des trahisons qui menacent notre liberté, seront tenus de les faire au comité du Salut public; savoir : ceux qui sont domiciliés à Paris, dans la huitaine; ceux qui sont domiciliés hors de Paris, dans le mois, à compter de la publication du présent décret.
« Le comité de Salut public en fera un rapport à la Convention dans le plus court délai, pour être statué ce qu'il appartiendra. »
(3). Je propose à cette rédaction un amendement que je considère comme indispensable : c'est de décréter que tout citoyen pourra dénoncer à la barre les membres de la Convention, sans être obligé de se présenter au comité de Salut public.
Plusieurs membres : Appuyé, appuyé !
D'autres membres : Non, non, il est inutile d'exciter plus longtemps les passions et de faire perdre le temps de l'Assemblée.
(La Convention maintient son premier décret et adopte la rédaction présentée (4).
(5). L'ordre du jour appelle le scrutin public pour la nomination d'un
vice-président (6).
Sur 196 votants, la majorité absolue étant de 99, Thuriot obtient 118 voix; il est proclamé vice-président.
monte au fauteuil que lui cède le Président (1).
présidence de thuriot, vice-président.
(2). Je demande la parole.
Vous avez la parole.
Je viens observer à la Convention nationale que plusieurs prêtres ré-fractaires qui existent encore dans la République par la négligence, l'insouciance ou l'aristocratie des administrations, s'empressent en ce moment à prêter leur serment. Je sais même qu'ils sont accueillis par quelques corps administratifs, bien peu délicats, et sans doute aussi très répréhensibles. Mais comme il faut constamment se défier des tartufes en tous genres, de ces élans de patriotisme qui ne sont dus qu'à votre dernier dé-. cret; comme il ne faut enfin jamais réchauffer la vipère dans son sein, je demande que tous ces prêtres soient arrêtés et déportés sur-le-champ.
(La Convention nationale passe à l'ordre du jour, motivé sur 'la loi du mois de mars dernier.)
(3). Je vous dénonce, citoyens législateurs, ces lâches jeunes gens qui, à la première nouvelle de votre décret sur le recrutement, se sont expatriés du lieu de leur domicile, souvent même du sein de leur famille, pour s'aller cacher dans les grandes villes, surtout à Paris. Je ne dois pas vous laisser ignorer qu'ils sont parvenus de la sorte à se soustraire à cette loi. Telle commune qui ne possédait que vingt individus propres à porter les armes, s'est vue tout à coup privée d'une moitié. Je demande donc que ces lâches déserteurs soient tous déclarés volontaires nationaux, et comme tels, forcés de marcher.
(La Convention décrète cette proposition et charge son comité de la guerre de lui présenter, sans délai, le mode d'exécution.)"
, secrétaire, donne lecture d'une adresse des officiers municipaux de la commune d'Argentan, qui est ainsi conçue (4) :
« Citoyens, la commune d'Argentan vous a informés du malheureux événement
qui a eu lieu dans son arrondissement, le 14 mars; elle vient
d'apprendre que la garde nationale a rétabli la tranquillité. Nous nous
sommes occupés de rechercher les coupables, et d'accélérer le
recrutement qu'on avait voulu empêcher. Le peuple, justement irrité,
s'est em-
(1). Je propose de décréter-que les détenus seront traduits devant le tribunal criminel du département, qui fera remettre en liberté ceuxf qui se sont trouvés dans le rassemblement et qui ont été induits en erreur, et de juger tous les chefs.
(La Convention décrète la mention honorable de la conduite de la municipalité de la commune d'Argentan et renvoie son adresse" au comité de législation pour en faire son rapport le lendemain.)
Une dêputation du conseil général de la commune de Paris est admise à la barre (2).
L'orateur de la dêputation sollicite de la Convention une loi nouvelle qui puisse hâter l'organisation définitive des membres qui doivent composer la municipalité. Il lit un long projet de règlement.
répond à l'orateur et accorde à la dêputation les honneurs de la séance.
(La Convention renvoie cette pétition au comité de législation pour en faire un prompt rapport.)
Vaîné (3) donne lecture d'une lettre et de plusieurs pièces qui lui ont été envoyées par les citoyens Pocholle et Saladin, commissaires de la Convention dans les départements de la Seine-Inférieure et de la Somme, notamment d'une proclamation dans laquelle il est défendu, sous peine de mort, d'obéir à aucune autre autorité que celle des commissaires, ou que celle qu'ils auraient établie; il y est ordonné de traiter les ordres et les proclamations de Dumouriez comme doit être traité tout ce qui vient d'un traître.
Plusieurs membres demandent que l'on approuve le zèle des commissaires et que l'arrêt soit renvoyé au comité de Salut public.
Le premier article de l'arrêté dont on vient de vous faire lecture, qui enjoint aux administrations de la Somme et de la Seine-Inférieure de reconnaître le pouvoir de vos commissaires et les actes émanés de leur part, comme le pouvoir et les actes de la Convention nationale; cet article, dis-je, me paraissant ranfermer des mesures extraordinaires et attentatoires à l'autorité et à l'indivisibilité du corps conventionnel dont vos commissaires ne sont que les membres, je demande le renvoi au comité de Salut public.
Vaîné insiste sur l'approbation-des arrêtés des commissaires, motivé sur la nécessité où ils sont de rallier les bons patriotes, et de réprimer les malveillants qui cherchent, par des troubles, à faciliter l'invasion des ennemis dans ces départements. U ajoute que ees pièces ne lui ont été envoyées directement que parce que le premier envoi qui en avait été fait était: resté-sans réponse.
Un membre : J'observe-à l'Assemblée que les arrêtés de vos commissaires prononcent des peines de mort : et certes il n'appartient qu'au corps législatif de faire des lois pour de pareilles peines. J'appuie, la proposition qui vous a été faite du renvoi au comité de Salut public.
Je demeure d'accord du principe que le pouvoir suprêine de. la nation réside dans la Convention qui la représente; mais vos commissaires ne sont-ils pas une émanation de ce pouvoir lorsque vous les avouez? N'avez-vous pas,, plus d'une fois, confirmé des arrêtés qui renfermaient des mesures aussi sévères? N'avez-vous point approuvé la conduite de Le-quinio, Cochon et Bellegarde, à Valenciennes ? Et alors ils disposaient du Trésor public, et vous disaient qu'il ne fallait pas penser, dans de pareils moments, qu'ils seraient en état de vous rendre des comptes. La question se réduit donc à savoir si les circonstances sont.telles que vous confirmiez leurs arrêtés. Quant à moi, je le déclare, si je connaissais un moyen de sauver ma patrie, sans m'embarrasser si toute la responsabilité doit tomber sur ma tête, dût ma tête aller à l'échafaud, tout moyen me fierait bon, pouvu que je sauve ma patrie.
(Isa Convention nationale, sur la lecture qui lui a été faite par un de ses membres,d'une proclamation et d'un arrêté pris dans les départements dé la Seine-Inférieure et de la Somme, sur la nouvelle de la trahison de Dumouriez, par les citoyens Pocholle et Saladin, membres de la Convention, et ses commissaires dans lesdits ^départements, approuve leur zèle, et renvoie ledit arrêté à son comité de Salut public, pour lui en faire incessamment le rapport.)
, secrétaire, donne lecture d'une lettre des citoyens Lequinio, Cochon et Dubois-Bellegarde, commissaires de la Convention nationale aux f rontières du Nord, qui est ainsi conçue (1) :
"Valenciennes, le
« Citoyens législateurs,
« Nous vous envoyons les pièces relatives à Lescuyer, général de brigade
dans la gendarmerie nationale et Quentin* secrétaire intime de
Dumouriez. Pour celui-ci, c'est un long interrogatoire qu'il a subi à la
maison com-
( Nous avons recueilli les renseignements que nous vous faisons passer à l'insu de Lescuyer; nous avons trouvé la lettre ci-jointe dans une redingote appartenant à Dumouriez prise par le troisième bataillon de l'Yonne, lors des fusillades qu'il a essuyées dans sa fuite. Vous y verrez que Lescuyer mandait à Dumouriez qu'il lui était impossible d'arrêter les commissaires dans la ville, mais, qu'il exécuterait son ordre au moment où ils sortiraient hors des murs. Nous avons évité sans le savoir, les pièges qui nous étaient tendus, par la nécessité où nous nous trouvions de rester à Valenciennes, -à cause de la multiplicité des affaires :le général; Ferrand nous a beaucoup servis et sa vigilance nous a sauvés.
« Lescuyer a voulu sefaire un mérite auprès de nous de n'avoir pas exécuté un ordre dont, d'après son aveu, l'exécution lui avait été impossible, puisque nous n'avions pas quitté la ville. U n'est pas de démarche rampante, de singerie patriotique, que ce vil agent n'ait faite pour s'attirer notre confiance.
« Dampierre, qui avait promis de ne pas rompre la trêve, a rempli cet engagement,mais cette trêve a été rompue de fait. Dans la nuit du 8 au 9, les Autrichiens se sont emparés du camp de Maulde; cependant il n'y a eu encore aucune fusillade. D'après les indications que nous avons reçues nous jugeons que Clairfait et Cobourg sont fort distants en ce moment. On dit que le premier se porte sur Lille, l'autre sur Valenciennes, ou même sur la Moselle, en se rapprochant de l'armée de Custine. Dumouriez ne perd pas l'espoir de marcher sur Paris. Dampierre a pris à l'instant toutes les mesures que lui permettaient les ■ circonstances. ^
« Cependant il y a toujours des agitateurs qui provoquent aux cris de royauté. Cette nuit, il a été affiché à l'arbre de la liberté une cocarde blanche, en papier, avec des inscriptions d'un civisme très expressif; l'auteur est resté inconnu. Chaque jour, on arrête des pro-clamateurs presque effrontés, mais on ne sait qu'en faire. Une loi condamne à mort, il est vrai; mais le mode d'exécution et la procédure sont totalement ignorés. Donnez le moyen de faire un très prompt exemple; sans cela, vous ne pouvez compter sur une tranquillité réelle.
« L'article premier de la loi du 19 mars dernier paraît sujet à des difficultés en ce qu'il ne comprend pas nommément ceux qui demandent publiquement ou qui excitent à demander le. rétablissement de la royauté et en ce qu'il ne désigne pas la forme de procéder et les juges qui-doivent prononcer.
« Permettez-nous, en terminant, de nous plaindre à Vous de n'être pas désignés^dans la liste des membres de la nouvelle commission chargée de la visite des frontières que vous avez créée. Nous craignons que la Convention n'ait voulu, par là, improuver notre conduite. Nous attestons devant vous que nous avons tout fait pour parer aux dangers dont la trahison de Dumouriez a menacé nos places depre-mière ligne, et que, dans la nuit du 2 au 3, nous avons sauvé Valenciennes, en faisant arrêter le général Neuilly, qui, par l'ordre de
Dumouriez, devait s'en emparer avec plusieurs j régiments de ligne, que nous avons fait bivouaquer sur les glacis de la place.
«'Nous espérons que nos collègues nous rendront au moins là justice dont notre zèle nous rend dignes.
(Les commissaires de la Convention nationale aux frontières du Nord.
« Signés : Lequinio, Cochon et Dubois-Bellegarde.
« P.-S.— Nous ne saurions trop engager la Convention à ne pas juger défavorablement le général Ferrand, désigné dans l'ordre de Dumouriez à Lescuyer; c'est à lui que nous devons une partie des mesures qui ont contribué à sauver Yalenciennes et tous les renseignements que nous avons recueillis sur les projets de Dumouriez. »
(La Convention déclare qu'elle approuve les mesures que ses commissaires aux frontières du Nord ont prises, et qu'elle est satisfaite de leur conduite et de leur zèle pour le salut de la République. )
(1). Il est question dans la lettre de Lequinio, Cochon et Bellegarde d'une lettre de Lescuyer à Dumouriez en ré-. ponse à l'ordre qui lui avait été donné d'arrêter nos commissaires; il est fait mention également d'une dépêche de Cobourg au commandant de Maubeuge, * et de deux lettres de Cobourg et de Clairfait, datées du 5 avril au matin, sur l'armistice. Je demande qu'il nous soit fait avant tout une lecture de ces pièces.
(Lia Convention décrète cette proposition.)
, secrétaire, donne lecture des pièces signalées par Boyer-Fonfrède; elles sont ainsi conçues :
Le général Dumouriez au général Lescuyer (2).
« Il est ordonné au citoyen Lescuyer de s'emparer cette nuit de la personne du citoyen Bellegarde, député à la Convention, et de l'amener à la petite pointe.du jour, au quartier généra] de/Bains de Saint-Amand.
Ce 1er avril.
« P.S. — Si le général Ferrand s'oppose à cette expédition, il en sera responsable.
« Signé : Dumouriez. »
Réponse de Lescuyer à Dumouriez (3)
Yalenciennes, le
(( Je sors de communiquer votre lettre au général Ferrand. U ignorait que le général Neuilly venait avec des forces à Yalenciennes, et il m'a paru étonné de ne pas recevoir de vos nouvelles.
« L'esprit de cette ville est dans une grande fermentation; il m'a dit, ainsi que le commandant temporaire,. qu'il y aurait" du danger à mettre votre ordre à exécution, surtout dans la ville. Le général doit aller dîner avec vous .à Saint-Amand, pour conférer avec vous sur
cet objet. Voici cependant la marche que je dois suivre. Aussitôt que ces messieurs, iront demander des chevaux de poste, j'irai rejoindre mon détachement, qui les attend sur les chemins de Douai, Lille et Paris, alors je me fais fort de les conduire à Saint-Amand. Mail il est bon que vous en soyez prévenu. Je vous avertis cependant que s'ils restent en ville, il y a tout à craindre de-les manquer, ou du moins de soulever le peuple. C'est à vous de donner des ordres précis au général Ferrand et au commandant temporaire de la place.
« Le général Ferrand a peine à comprendre ce que signifie le bas de votre lettre : U faut que demain nous soyons sûrs de Yalenciennes. Je vous assure que je n'ai pu le satisfaire à cet égard; est-ce qu'il doit être attaqué? Ou peut-on présumer, craindre enfin un mouvement d'insurrection ? Il serait bon que lui et moi en soyons instruits. La suspension d'armes avec les Autrichiens nous foroe-t-elle a des sacrifices quelconques ? Voilà ce qu'il désire de savoir.
« Signé ; Lescuyer. »
Lettre de Cobourg au commandant de Maubeuge (1).
Au quartier général de Mons, 4 avril, « Monsieur,
« Le colonel Brannovasky m'avait fait parvenir la léttre que vous avez bien voulu lui remettre, au sujet du rétablissement du pont de Merbe-sur-Sambre, que vous avez donné l'ordre de faire sauter, avant d'avoir eu avis de la suspension d'armes. Comme dans cette lettre vous manifestez l'intention de faire rétablir ce pont, si je le désire, je vous préviens que je verrai cette reconstruction avec plaisir.
« Signé : Cobourg. »
Lettre du même (2).
Au quartier général de Mons, 5 avril. « Monsieur,
« J'ai reçu l'adresse que vous m'avez envoyée. Je consens volontiers que l'armistice convenu entre les avant-postes des deux armées, s'étende à la f rontière que vous commandez. Je souscris donc à la suspension d'armes, à condition d'un dédit de 24 heures. Agréez, monsieur, mes remerciements de vos arrangements à l'égard du pont de Merbe, ainsi que l'expression de ma reconnaissance de ce que votre lettre contient d'obligeant pour moi. J'y joins l'assurance de mon estime très distinguée pour votre personne.
« Signé : Cobourg. »
« Lettre de Clairfait au commandant général de Maubeuge (3).
« Comme nous étions convenus de nous avertir réciproquement 24 heures
d'avance, quand la cession d'armes pourrait eesser d'un côté ou de
l'autre, je dois vous prévenir, mon général, que les circonstances
m'empêchent de
« En l'absence du prince de Cobourg, « Signé : Clairfait. »
. (La Convention renvoie ces quatre lettres au comité de Salut public.)
(1). Je demande que tous les provocateurs au rétablissement de la royauté soient punis comme les auteurs des troubles de la Vendée et qu'à cet effet il soit établi dans tous les départements de la République un tribunal militaire; mais avant tout je propose que Lescuyer et Quentin soient traduits au tribunal révolutionnaire.
(La Convention adopte cette dernière proposition. )
Suit le texte définitif des décrets rendus (2).
« La Convention nationale décrète que le citoyen Lescuyer, commandant de la gendarmerie, détenu à Valenciennes, sera traduit sur-le-champ par-devant le tribunal criminel extraordinaire, séant à Paris, pour y être définitivement jugé. »
« La Convention nationale décrète que Quem tin, ci-devant secrétaire de Dumouriez, arrêté à Valenciennes, sera traduit par-devast le tribunal extraordinaire, séant à Paris, pour y être définitivement jugé. >» -
(La séance est suspendue à onze heures et demie du soir et prorogée au lendemain matin dix heures.)
PREMIÈRE ANNEXE
a la séance de la convention nationale du
pétition (3) de la commune de Sassenay, département de Saône-et-Loire et pièces à Vappui pour demander Vétablissement dans cette commune de deux foires par an.
I
Extrait des minutes déposées au secrétariat du district de Chai on (4).
A Messieurs les administrateurs du département de Saône-et-Loire.
« Vous représentent les maire et officiers municipaux et notables de la commune de Sassenay et disent que depuis plusieurs années il leur était établi une foire fixée au jour de fête de Saint-Roch, mais que depuis près de quarante ans, elle se trouve totalement abolie, ce qui prive leur pays dans lequel était établie cette foire d'un droit qui leur était et doit être encore légitimement dû, eu égard à l'étendue et à la population du pays au nombre de cent soixante-trois feux qui l'oc-
cupent; de la fertilité du bétail qui s'y nourrit, source de l'aliment nécessaire à la vie surtout de ceux qui en sont voisins.
(( A ces causes, ils rcourent à ce qu'il vous plaise, Messieurs, par vos pouvoirs, leur accorder deux foires dans leur pays dont l'une serait annuellement au dernier jour du mois d'avril et l'autre le premier mardi du mois de septembre. C'est de ce dont ils ont, Messieurs, de vous prier et ce qu'ils espèrent de vous; et tandis, ils ne cesseront de faire des vœux au Ciel pour la conservation de vos santés et de tous les amis de la Constitution, et ont signé, ceux le sachant, la minute.
-« Signé : Saint-Georges, maire ; Proul, curé; Pierre Ducrez, Farion, Brussois, Bon-not, Thiébaut, Morain, Nicolas, J. Broudant, L. Broudant, J. Lombard, Cotton, P. Girardin, C. Cirdé, Cavard, secrétaire-greffier. »
« Vu et ouï le rapport du procureur général syndic et les opinions prises;
« Le directoire du département de Saône-et-Loire a arrêté que les présentes seront envoyées au directoire du district de Chalon pour donner son avis sur la pétition de la commune de Sassenay à Mâcon.
« Séance du matin, le 14 décembre 1790.
« Signé ; Panier, vice-président, et Simonot, pour le secrétaire.
« Vu et ouï le procureur syndic;
( Le directoire du district de Chalon arrête que la présente pétition sera communiquée aux quatre municipalités voisines : Virez, Chamforgueil, Fragues et Gergy et aux municipalités de Demigny, Chalon et Cha-gny, à la diligence du procureur de la commune de Sassenay pour, ensuite, des observations desdites municipalités être donné tel avis qu'il appartiendra.
(( Fait au directoire du district de Chalon le 19 décembre 1792, l'an I de la République.
« Signé : Delacroix, vice-président;
Ogier, secrétaire.
- « Voilà, Messieurs et frères, ce dont vous nous avez chargé de vous faire parvenir. Nous espérons que vous nous enverrez, le plus tôt possible, votre délibération à ce sujet.
« C'est ce que nous espérons de vous et nous sommes très fraternellement,
(( Citoyens et amis, vos très humbles serviteurs,
« Les officiers municipaux de Sassenay,
« Signé : par ordonnance Baudrand, secrétaire-greffier. »
II
Municipalité de Virey (1).
« Vu l'arrêté du directoire du district de Chalon-sur-Saône, en date du 19 décembre 1792, l'an Ier de la République française, signé : Delacroix, vice-président et Ogier, secrétaire, tendant à ce que la pétition de la municipalité de Sassenay, pour 1 établissement de deux foires dont la première se tiendrait
le dernier jour du mois d'avril et la seconde le premier mardi du mois de septembre, serait communiquée aux municipalités voisines pour, à elles, faire leurs observations.
« La municipalité de Virey pense que l'établissement de deux foires sollicité par la municipalité de Sassenay ne peut que devenir très avantageuse à la chose publique; que la situation de Sassenay, la fertilité de son territoire, sa proximité de la rivière ne peuvent que concourir à rendre ces deux foires des plus intéressantes pour le commerce tant pour l'entrée que pour le transport facile des marchandises de toutes espèces.
« Fait à Virey ce 30 décembre 1792, l'an Ier de la République française. « Signé: Claude Bernard, maire; Pernette, officier municipal ; Patire, officier municipal ; Chassuis, curé, l'un des notables ; Pierre Gros, procureur-syndic : Antoine Pernette, secrétaire-greffier. »
III
Municipalité cle Demigny (1). Extrait des minutes du greffe de la municipalité de Demigny.
« Du jeudi, 3 janvier 1793, l'an II de la République française. t Le conseil général de la commune de Demigny, assemblé en la chambre commune de Demigny, à la diligence du citoyen Jean Mois-seney, procureur de ladite commune;
« Ouï le procureur de la commune, a dit qu'en exécution d'un arrêté du directoire de Chalon-sur-Saône, en date du 17 décembre dernier, concernant une pétition du conseil général de Sassenay, par laquelle il demande le rétablissement de deux foires dans leur commune, savoir : la première le dernier mardi du mois d'avril et la seconde le premier mardi de septembre de chaque année;
« Le conseil général délibère et a délibéré qu'il est effectivement très intéressant pour le bien général des habitants de Sassenay et des environs de leur accorder le rétablissement des deux foires par eux demandées, nous supplions les citoyens administrateurs du district de Chalon-sur-Saône de vouloir bien leur accorder sur leur pétition et leur demande desdites foires. En conséquence de ladite délibération, nous nous sommes soussignés avec notre secrétaire-greffier.
( Fait en notre chambre commune, les an et mois et jour avant dits. « Signé : LÀmalle,' maire : Nicole Goudard, Picïïon, Guichard, Gennetot, officiers municipaux; François Boutavant, Bar-din, G. Lefaure, L. Gaugey, Jean Can-dier, A. Mellet, F. Jannaux, Didier Guyot, Joseph Fleury et Chambrion, tous notables ; Moisseney, procureur de la Commune ; Laboureau, secrétaire-greffier. »
IV
Municipalité de Chagny (2).
Ouï le procureur de la commune; « La municipalité de Chagny observe que
les deux foires demandées par les habitants de Sassenay doivent être établies; elles ne peuvent qu'être utiles au bien public;
« A Chagny, en la chambre commune, le 8 janvier 1793, l'an II de la République française.
« Signé : Bruche, maire; Boussin, Leurchez, officier municipal ; Lebaut, Pacotte, secrétaire municipal. »
V
Municipalité de Gergy (1).
« Les officiers municipaux de la commune de Gergy soussignés, ayant examiné la pétition de la commune de Sassenay, au sujet de deux foires à établir dans ledit village de Sassenay, déclarent ne voir aucun inconvénient à ce que lesdites foires soient accordées par l'administration.
A Gergy, dans la chambre commune, le 3 février, l'an II de la République française. « .. Signé : Monnier, maire ; Malivernet, officier municipal ; Linay, officier municipal ; Cavard,* officier municipal ; Ru-lieu, procureur de la Commune ; Brenot, secrétaire-greffier. »
VI
Municipalités de Fragues (2).
« Nous soussignés, maire et officiers municipaux de la commune de Fragues, trouvons la demande des foires ci-dessus très juste et utile pour les pays voisins.
« Le 2 mars 1793, l'an II de la République française.
« Signé: André Loiseau, maire; F. Dusert, officier municipal. »
VII
Municipalité de Chauforgueil (3).
« Nous soussignés, maire et officiers municipaux de la commune de Chauforgueil, trouvons la demande des foires ci-dessus très juste et utile pour les pays voisins.
« A Chauforgueil, ce 5 mars 1793, l'an II de la République française. « Signé: C. Mugnier, officier municipal; C. Dubief, secrétaire-greffier. »
VIII
Commune de Clialon (4).
« Je, soussigné, certifie que sur la pétition de la commune de Sassenay, présentée au département de Saône-et-Loire à l'effet d'obtenir l'établissement de deux foires par an audit Sassenay, la. commune de Chalon, ayant eu communication de la pétition des habitants de Sassenay, a donné son adhésion à icelle, par une décision du 3 janvier 1793, l'an II de
la République française, en foi de quoi je me suis soussigné.
« Audit Chalon, le 8 mars 1793, l'an II de la République française;
« Signé : Cheminot fîsr secrétaire: »
IX
Directoire du district et du département de Saône-et-Loire (1).
« Yu la requête d'autre part, les arrêtés à la suite et les observations des différentes municipalités.
« Ouï le rapport, le procureur syndic en-tendu et lés opinions prises;
« Le directoire du district'de Chalon, considérant que l'établissement des foires dont il s'agit ne peut qu'être avantageux à la commune de Sàssenay ;
« Est d'avis que la municipalité de Sasse-nay doit être autorisée à établir les deux foires qu'elle réclame et faire en conséquence les annonces et publications nécessaires, ' « Chalon, le 8 mars 1793, l'an II de la République française.
« Signé : Delacroix, vice-président ; Ogier, secrétaire. »
« Vu le rapport, le suppléant du procureur général syndic entendu;
« Le directoire du département, de Saône-et-Loire arrête que la présente péRLion et les pièces jointes seront envoyées au ministre de l'intérieur avec prière de solliciter l'établissement des deux foires demandées.
« Mâcon, séance publique dù matin 16 mars 1793, fan II de la République française.
« Signé : Robin, Charvtet. »
a la séance de la convention nationale du
pétition (2) de la commune de verdun-sur-le doubs, département de Saône-et-Loire, et pièces à l'appui; pour demander Vétablissement, dans cette localité, de deux foires par an,
I
Pétition- de là commune de Yerdun-sur-le-Doubs (3).
Verdun, le
« Citoyens,
« Le canton de Verdun est peut-être le seul qui ne jouisse pas du privilège d'avoir des
foires;- il n'y en a qu'une à Verdun, le 28 octobre, mais elle est presque entièrement : tombée ; la commune de cette ville a délibéré de demander l'établissement de deux nouvelles foires : l'une pour le deuxième lundi de carême, l'autre pour le 22 juin. Elle a présenté sa requête au district de Chalon pour y être autorisé ; le directoire du district a répondu qu'elle serait communiquée aux municipalités du canton pour fournir leurs observations dans la huitaine. Nous nous hâtons, en conséquence, chers concitoyens, de vous adresser copie de cette requête et de l'ordonnance, pour; qu'en exécution vous vous assembliez pour donner vos observations sur nos demandes; nous espérons qu'elle nous seront d'autant plus favorables, que même vous voudrez bien vous joindre à nous, puisqu'elles tendent en même temps à votre bien comme au nôtre pour la vente des bestiaux et autres marchandises et que vous y mettiez toute la célérité possible pour que nous puissions tous jouir promptement de l'effet de nos demandes; vous voudrez bien nous adresser le plus tôt possible l'extrait de votre délibération pour que nous puis-, sions la renvoyer nous-mêmes au district.
c Nous sommes vos égaux en droit,
« Signé: Carillon, maire ; Renard, officier municipal ; OnaGkieu, officier municipal; Martin, officier municipal ; Legey aîné! »
« S'ensuit la copie des requête et ordonnance aux citoyens.
« Citoyens administrateurs, composant le directoire du district de-Chalon-sur-Saône;
( Exposent les citoyens, officiers municipaux de la ville de Verdun-sur-Saône-et-sur-Doubs, qu'en vertu dé la déclaration de notre commune, du 7 du présent mois de novembre, au sujet dé l'établissement de deux foires dans notre ville,; attendu que la seule qui existe tombe d'année à autre et que bientôt elle ne sera plus qu'un simple marché, à cause de la mauvaise saison où elle se trouve;
« Disent pour exprimer le vœu général de la ville et même des environs qu'il n'y a point d'endroit plus propre à établir des foires qu'à Yerdun, qu'il est même surprenant qu'on n'ait pas encore pris des mesures pour en établir de nouvelles; en conséquence, vu le procès-verbal des différents commissaires nom-més*à l'effet de choisir les jours qui conviendraient le mieux pour fixer les deux foires, nous avons approuvé les jours qu'ils ont déterminés; ces jours sont poujr le deuxième lundi de carême pour une et l'autre le 22 juin; nous espérons, chers concitoyens, que vous voudrez bien peser vos raisons et appuyer de votre autorité la présente auprès du directoire du département de Saône-et-Loire et faire justice.
« Signé: Bardolet, Duchesne, Dumichel, Larnoy, officiers municipaux. »
« Vu la présente pétition et ouï le procureur syndic;
« Le directoire du district de Chalon-sur-Saône, considérant que s'il est juste dé faire jouir la commune de Verdun des avantages Qu'elle réclame, il est de même de tout justice d'entendre les municipalités voisines sur l'objet de la demande de celle de Verdun;
« Arrête que la présente demeurera communiquée aux municipalités de Bragny, Ecuelle,
deux nouvelles foires dont l'une pour le second lundi de carême et l'autre pour le vingt-deux juin, et nous nous sommes soussignés les an et jour susdits.
« Signé: Chevaux, maire ; David père, officier municipal ; Mouriaux, officier municipal ; Boyer, procureur de la Commune; Bonne, notable.
f§ Certifié conforme à ïoriginal : « Signé: David fils, en Vabsence du secrétaire-greffier. »
VIII
Extrait des registres de la municipalité de Sermesse (1).
« Vu la requête des citoyens et officiers municipaux de la commune de Verdun-sur-le-Doubs, de la demande par eux formée^ au directoire du district de Chalon-sur-Saône ;
( Vu aussi l'arrêté du directoire du district de Chalon qui demande la communication aux municipalités du canton ;
« Ouï le procureur de notre commune et l'avis que la demande formée par les citoyens de la commune de Verdun, que nous consentons et désirons que les deux foires leur soient accordées : savoir, la première le deuxième lundi de carême et l'autre le vingt deux juin.
« A Sermesse, en séance publique, le 23 décembre 1792, l'an II de la République française.
« Signé : Rousseau, notable ; Nacrait, notable ; Revinard, notable ; Mitot, officier municipal ; Vivez, notable; Cordelier, procureur de la Commune.
P « Pour extrait conforme : .. « Signe : Girard, secrétaire-greffier. »•
IX
Extrait du registre des délibérations du
corps municipal de la commune de Mo-: laize.
Du 24 décembre 1792, l'an I de la République française (2)^
« Le corps municipal étant assemblé au lieu ordinaire de ses séances, en présence des citoyens maire et officiers municipaux;
« Lecture faite par le secrétaire-greffier'de cette municipalité d'une pétition de la ville et canton de Verduh-sur-Sàône-et-Doubs, à nous adressée par ordre-du directoire du district de Chalon, ladite pétition a nous adressée en date du 18 décembre 1792, ensemble l'arrêté du directoire du district, en date du 3 décembre 1792, tendant à l'établissement de deux nouvelles foires en la ville et canton de Verdun, lesquelles foires auront lieu, savoir :. la première le 2e lundi de carême et l'autre, le 22 juin;
« Vu la présente pétition; ouï le procureur de la commune, le conseil municipal de cette commune adhérant à la demande formée par la susdite ville et canton de Verdun de l'établissement des deux foires nouvelles ci-dessus
citées, ladite commune de Môlaize ne trouvant aucune contradiction à la susdite demande, trouvant même que l'établissement de ces deux foires nouvelles se trouvant être très utiles à toutes les communes qui dépendent dudit canton de Verdun, le susdit conseil a arrêté.qu'il sera dressé extrait de la présente affirmation par le. procureur de la commune, le plus tôt possible, pour procurer les avantages aussi bien à ladite ville et canton de Verdun qu'à nous.
« Ainsi fait et arrêté en l'assemblée du corps municipal, tenu le vingt-quatre décembre mil sept cent quatre-vingt-douze, l'an I de la République française. « Signé : janelot, ma?Ve ; Veaux, procureur dé la Commune ; Chapnot, officier municipal ; Maître, secrétaire.
« Pour extrait conforme : « Signé : Maître, secrétaire. »
X "
Extrait du registre des délibérations - de la commune d'Ecuelle (1). |
« Nous, maire et officiers municipaux et notables formant le conseil général de la commune d'Ecuellé, au canton de Verdun, communication prise de la requête de la municipalité de Verdun-sur-le-Doubs et de l'arrêté du directoire du district ci-dessus, reconnaissant l'utilité des foires et désirant qu'elles soient multipliées, déclarons que les deux foires demandées par la commune de Verdun, chef-lieu de notre canton, sont très avantageuses pour notre commune. Et nous nous réunissons volontiers aux citoyens de'Verdun pour en demander la prompte érection.
« A Ecuelle, le 26 décembre 1792, l'an I de la République française. " Signé ; Saunier, maire ; Louis Cuiseau, Charvot, notable ; Denischenoux, The-venin, notable ; Merle, secrétaire.
« Pour copie conforme : « Signé : Merle, secrétaire. »
XI
Extrait du registre des délibérations de la municipalité d'Allerey-sur-Saône (2).
« Charles-Antoine Poulleau, maire; Jacques Barbier, Jean Lafond, Jacques Mouchon,. François Bertault et Claude Guilleminot, officiers municipaux;
( Les citoyens Simon Guepey, Pierre Gal-land, Joseph Marché, Antoine Arnoux, Jean-Baptiste Futestu," Jacques Courtepée, Thomas Levreux, Claude Cohidr et Jean-Bap-tiste Bernard, notables, ayant avec nous notre secrétaire-greffier; |§ Savoir, faisons que ce jourd'hui, vingt-six décembre mil sept cent quatre-vingt-douze, l'an I de la République française; i « Etant réunis au lieu ordin^ire des séances de la municipalité;f
« Le citoyen Pierre Cotte,, procureur de la commune, a représenté une lettre sur le
de carême et l'autre le vingt-deux juin, adressée aux citoyens administrateurs du district de Chalon-sur-Saône.
« Nous, -officiers municipaux et conseil de la commune, après avoir ouï et entendu le procureur de la commune dans ses conclusions ;
« Yu aussi la pétition et l'arrêté du directoire du district de Chalon qui ordonné que la requête des officiers municipaux de Verdun soit communiquée aux municipalités du canton pour voir s'il est juste de faire jouir la commune de Verdun des avantages qu'elle réclame ;
( En conséquence, disons qu'il serait très avantageux pour toutes les municipalités voisines, qu'il y ait plusieurs foires à Verdun, qu'il n'y a pas même d'endroit plus convenable et plus propre pour tenir des foires qu'à Verdun, qu'il est surprenant qu'il n'y en ait qu'une et qu'elle se trouve eneore dans une mauvaise saison ;
« Disons donc que tous les faits mentionnés dans la requête de la commune de Verdun sont sincères et véritables ; en conséquence, nous vous demandons, citoyens administrateurs, qu'il vous plaise autoriser la commune de Verdun pour l'établissement des deux foires que cette commune réclame et ferez justice.
« Délibéré dans notre chambre commune, les an et jour que dessus et nous nous sommes soussignés ceux le sachant, les autres ayant déclaré ne le savoir'.
« Signé : Ponsot, maire ; Rebilliard, officier, municipal ; Edouard, officier municipal ;
, Cordelier, procureur de la Commune ; Merle, Verot fils, Nicolas Pon sot, Vantey et Desperry, secrétaire-greffier. »
« Pour extrait conforme : « Signé: Deseerry, secrétaire-greffier. »
Extrait des registres des délibérations de la commune de Ciel et Vauvry (1).
« Le conseil municipal et général de la commune de Ciel et Vauvry, qui a pris lecture de la pétition de la municipalité de Verdun, en date du sept novembre dernier, tendant à demander au directoire du district l'établissement de deux foires nouvelles, au chef-lieu de canton : l'une qui se tiendrait le second lundi de carême et l'autre le vingt-deux juin, ensemble de l'arrêté du district au bas de ladite pétition, en date du 3 décembre suivant, portant que cette pétition sera communiquée à toutes les municipalités du canton, qui seront tenues de s'expliquer dans le délai de huitaine sur l'objet de ladite pétition.
« Est d'avis que la pétition ne contient rien que d'utile pour le canton; en conséquence, arrête qu'il approuve les deux foires proposées par la municipalité de Verdun et trouve bon qu'elles aient lieu les jours mentiçnnés à ladite pétition.
« Fait au conseil général, séant dans la chambre de la commune, le 23 décembre 1792, l'an I de la République française. « Signé: Dubois, maire-, Moreau, E. Jacob,
Riot, Dumichel, Petit, G. Constant, C. Viollot, Baraud, Bouquin, procureur-syndic.
« Pour copie conforme :
« Signé : Baraud. »
VI
Extrait du registre des délibérations de la, commune de Verjus aux citoyens maire et officiers municipaux de la ville de Verdun-sur-le-Doubs (1).
« Les citoyens mairê et officiers municipaux et procureur de la commune de Verjus, et ensemble le conseil général de ladite commune, assemblés pour délibérer sur la demande faite au directoire du district de Chalon-sur-Saône par les officiers municipaux et conseil de la commune de Verdun-sur-le-Doubs, pour l'établissement de deux nouvelles foires, l'une le deuxième lundi de carême et l'autre le 22 juin ;
« Vu la présente pétition et ouï le procureur de la commune, il a été délibéré à l'unanimité, d'après les dires et avis de chaque membre que la demande faite par la commune de ladite ville de Verdun était juste et que, bien loin de nuire à la commune de Verjus, elle tourne à son avantage.
« Fait et délibéré à la maison commune de Verjus, le 23 décembre 1792, l'an I de la République française.
« Signé : Levêque, maire ; Rigé, procureur ; Mugnier, officier ; Joachim Bejot, officier; Jean Granier, Pierre Petit, officier; Berry, secrétaire-greffier.
Pour extrait : « Signé : Berry, greffier. »
VII
Extrait du registre du greffe des municipalités de Toutenaut et Sennecey, réunies présentement (2).
( Ce jourd'hui, vingt-trois décembre, mil sept cent quatre-vingt douze, l'an I de la République française, assemblé en conseil général de la commune de Toutenant et de celle de Sennecey, sur les réquisitions de Jean Boyer, notre procureur de commune, lequel nous a dit et remontré qu'il a reçu une demande des citoyens et officiers municipaux de la ville et commune de Verdun par laquelle ils nous enjoignent, suivant l'arrêté du district de Chalon-sur-Saône qui enjoint la municipalité de la dépendance du canton de Verdun pour avoir à former ses observations sur la demande des citoyens et officiers municipaux de la ville de Verdun de deux foires nouvelles dans ledit canton, dont l'une pour le second lundi de carême et l'autre le vingt-deux juin ; étant tous assemblés, nous avons délibéré d'unanime voix que nous acceptons à la demande des citoyens et officiers municipaux de Verdun des jours choisis par eux pour les
deux nouvelles foires dont l'une pour le second lundi de carême et l'autre pour lé vingt-deux juin, et nous nous sommes soussignés les an et jour susdits.
« Signé : Chevaux, maire; David père, officier municipal ; Mouriaux, officier municipal ; Boyer, procureur cle la Commune; Bonne, notable.
« Certifié Conforme à l'original : « Signé: David fils, en l'absence du secrétaire-greffier. »
VIII
Extrait des registres de la municipalité de Sermesse (1).
« Vu la requête des citoyens et officiers municipaux de la commune de Verdun-sur-le-Doubs, de la demande, par eux formée au directoire du district de Chalon-sur-Saône ;
« Vu aussi l'arrêté du directoire du district de Chalon qui demande la communication aux municipalités du canton ;
« Ouï le procureur de notre commune et l'avis que la demande formée par les citoyens de la commune de Verdun, que nous consentons et désirons que les deux foires leur soient accordées : savoir, la première le deuxième lundi de carême et l'autre le vingt deux juin.
« A Sermesse, en séance publique, le 23 décembre 1792, l'an II de la République française.
« Signé : Rousseau, notable ; Nachait, notable ; RevinArd,notable ; Mitot, officier municipal; Vivez, notable ; Cordelier, procureur de la Commune.
« Pour extrait conforme : . « Signé : Girard, secrétaire-greffier. » •
IX
Extrait du registre des délibérations du corps municipal de la commune de Mo-, laize.
Du 24 décembre 1792, l'an I de la République française (2).
« Le corps municipal étant assemblé au lieu ordinaire de ses séances, en présence des citoyens maire et officiers municipaux;
« Lecture faite par le secrétaire-greffier de cette municipalité d'une pétition de la ville et canton de Verdun-sur-Saône-et-Doubs, à nous adressée par ordre, du directoire du district de Chalon, ladite pétition à nous adressée en date du 18 décembre 1792, ensemble l'arrêté du directoire du district, en date du 3 décembre 1792, tendant à l'établissement de deux nouvelles foires en la ville et canton de Verdun, lesquelles foires auront lieu, savoir i la première le 2e lundi de carême et l'autre, le 22 juin;
« Vu la présente pétition; ouï le procureur de la commune, le conseil municipal de cette commune adhérant à la demande formée par la susdite ville et canton de Verdun de l'établissement des deux foires nouvelles ci-dessus
citées, ladite commune de Molaize ne trouvant aucune contradiction à la susdite demande, trouvant même que l'établissement de ces deux foires nouvelles se trouvant être très utiles à toutes les communes qui dépendent dudit canton de Verdun, le susdit conseil a arrêté,qu'il sera dressé extrait de la présente affirmation par le procureur de la commune, le plus tôt possible, pour procurer les avantages aussi bien à ladite ville et canton de Verdun qu'à nous.
« Ainsi fait et arrêté en l'assemblée du corps municipal, tenu le vingt-quatre décembre mil sept cent quatre-vingt-douze, l'an I de la République française. « Signé : janel0t, m«2re ; Veaux, procureur de la Commune ; Chapnot, officier municipal ; Maître, secrétaire.
« Pour extrait conforme : « Signé : Maître, secrétaire. »
X
Extrait du registre des délibérations - de la commune d'Ecuélle (1).
« Nous, maire et officiers municipaux et notables formant le conseil général de la commune d'Ecuelle, au canton de Verdun, communication prise de la requête de la municipalité de Verdun-sur-le-Doubs et de l'arrêté du directoire du district ci-dessus, reconnaissant l'utilité des foires et désirant qu'elles - soient multipliées, déclarons que les deux foires demandées par la commune de Verdun, chef-lieu de notre canton, sont très avantageuses pour notre commune. Et nous nous réunissons volontiers aux citoyens de Verdun pour en demander la prompte érection.
« A Ecuelle, le 26 décembre 1792, l'an I de la République française. " Signé: Saunier, maire ; Louis Cuiseau, Charvot, notable ; Denischenoux, The-venin, notable ; Merle, secrétaire.
« Pour- copie conforme : « Signé : Merle, secrétaire. »
XI
Extrait du registre des délibérations de la municipalité d'Allerey-sur-Saône (2).
« Charles-Antoine Poulleau, maire; Jacques Barbier, Jean Lafond, Jacques Mouchon, François Bertault et Claude Guilleminot, officiers municipaux!
« Les citoyens Simon Guepey, Pierre Gal-land, Joseph Marché, Antoine Arnoux, Jean-Baptiste Futestu, Jacques Courtepée, Thomas Levreux, Claude Cohiér et Jean-Baptiste Bernard, notables, ayant avec nous notre secrétaire-greffier;
_ « Savoir, faisons que ce jourd'hui, vingt-six décembre mil sept cent quatre-vingt-douze, l'an I de la République française;
« Etant réunis au lieu ordinaire des séances de la municipalité;
« Le citoyen Pierre Cotte, procureur de la commune, a représenté une lettre sur le
bureau des citoyens officiers municipaux de la ville de Verdun-sur-le-Doubs, en date du 18 de ce mois, contenant copie: d'une requête par eux présentée aux : citoyens administrar teurs composant le directoire du district de Chalon, par laquelle ils demandent l'établissement de deux nouvelles foires dans ladite ville de Verdun, l'une au 2°- lundi de carême et l'autre au 22 juin de chaque année; ensemble celle d'un arrêté du directoire du district qui ordonne la communication de ladite requête aux différentes municipalités pour former leurs observations dans le délai de huitaine pour, à la vue desdites observations, être sur la pétition des officiers municipaux de Yerdun, donné tel avis qu'il appartiendra, ledit arrêté en date du 3 dudit mois de décembre et a requis le. citoyen Pierre Cotte que le conseil municipal eut à prendre communication desdites lettres, copie des requêtes et arrêté du directoire. « Signé : Cotte, procureur de la commune. »
« Lecture faite par notre secrétaire-greffier des pièces ci-dessus, la matière mise en délibération, ouï de nouveau le procureur de la commune et les opinions prises,- le conseil municipal que l'établissement des deux foires demandées par les citoyens officiers municipaux de Verdun ne peut être qu'avantageux au public et à tous les citoyens du canton; que, dés lôrs, leur pétition doit être accueillie par les citoyens administrateurs du district et du département comme étant le bien général du canton et des pays voisins, mais-qu'il estime en même temps que comme la rivière de Saône empêche, soit dans lé temps des grandes eaux, soit dans lés temps orageux, les citoyens de cette partie du canton et des pays voisins de. communiquer facilement audit Verdun et les priver par le désa^-vantage qu'ils pourraient retirer de ses soins qu'il serait de l'utilité publique d'en établir une ou; deux au village d'Allerey, dont une le 3 février et la seconde le 10 août de chaque j année; lieu très commode pour la réunion de j tous les citoyens, puisqu'on peut y communi- J quer dè toutes parts par une grande route et I que, d'ailleurs, cet établissement serait également favorable aux citoyens du canton au i delà de la rivière de Saône qui pourraient y communiquer pour la vente de leur bétail dans les temps;
« En foi de quoi nous nous sommes sous- i signés avec les officiers municipaux sachant I signer, avec notre secrétaire-greffier, ceux j non soussignés ayant déclaré* ne le savoir. « Signé : Barbier, M-onichon, Lafond, Poul-leau, Arnqux, Simon Guépey, Marchal, | Cotte,procureurdelaCbmmune; Pôussy, j secrétaire.
* \Fbur Copie conforme à Voriginal.
« Signé : Poussy, secrétaire. »
XII
Extrait du registre des délibérations de la ! commune de Saint-Didier (1).
« Céjourd'hui, vingt-six décembre mil sept ! cent 1 quatre-vingt-douze, l'an I de la République française;
« Nous, soussignés, conseil général de la commune de Saint-Didier-en-Bresse, Laber-gement et dépendances, étant assemblé publiquement en la chambre commune dudit lieu, pour répondre et donner nos observations sur la pétition de nos chers confrères les officiers municipaux de la ville de Ver-dun-sur-le-Doubs, dont nous formons partie canton, sur ce qu'ils ont demandé par requête, à nos chers concitoyens les administrateurs du directoire du district de Chalon-sur-Saône, pour qu'ils aient à appuyer de leurs autorités auprès des concitoyens les administrateurs formant le directoire du département de Saône-et-Loire, pour que les concitoyens les officiers municipaux de la ville de Verdun soient autorisés à créer deux nouvelles foires, l'une le 2e lundi de carême et l'autre le 22 juin;
« Ouï le procureur syndic de notre dite commune en ses conclusions, la matière mise en considération et suffisamment. discutée, nous, conseil général soussigné, observons à nos concitoyens les administrateurs formant le directoire du district de Chalon-sur-Saône, qu'à la vérité, la demande des officiers municipaux de Verdun pour deux nouvelles foires parait nécessiter rendre le trafic plus-florissant, et par conséquent le bien public et que,, sur cet objet, le conseil soussigné s'en réfère à tous ce qu'il plaira, à nos concitoyens les administrateurs du directoire de Chalon-sur-Saône, ordonner à cette occasion.
(( En foi de quoi nous nous sommes soussi- gnés.
« Signé : Noirot, officier municipal ; Meecey, officier ; Mauchamps, notable ; Maire, notable; Mazure, notable; Bassey, procureur-syndic ; Gaudillière, secrétaire-. greffier.
« Pour copie conforme : « Signé: Gaudillière, greffier. »
XIII
Extrait du registre des délibérations de la commune de Saulnière (1).
« Céjourd'hui, trente décembre mil sept cent quatre-vingt-douze, sur environ une heure après-midi, dans l'église de Saulnière, lieu choisi par l'assemblée générale: de la municipalité dudit Saulnière et la Barre, a été convoquée sur les réquisitions de Jean Valon, maire, assisté des citoyens Philibert Jugniot, Louis Jeunon, officiers municipaux, Louis Chevrey, procureur de la commune, François Jeunon, François Vallon, François Billon, Pierre Jeunon, Jean Lauquin et Jacques Jeunon, tous notables, formant le conseil général, ayant avec nous Benoît Grapin, secrétaire-greffier de notre commune, ledit secrétaire ayant fait lecture d'une requête du conseil de Vérdun-sur-le-Doubs en date du 18 décembre 1792, qui demande l'établissement de deux nouvelles foires audit Verdun, l'une pour le 2e lundi de carême, l'autre pour le 22 juin prochain;
Le conseil général dudit Saulnière, ayant délibéré qu'il approuve et donne son consen-
tement pour l'établissement des deux dites nouvelles foires demandées par le canton du-dit Verdun; connaissant que c'est un bien pour notre municipalité dudit Saulnière pour la vente des bestiaux;
« En foi de quoi, nous, maire, officiers municipaux,. procureur de la commune, et notables avec notre secrétaire-greffier, nous nous sommes soussignés, ceux: le sachant faire, pour servir et valoir, ce qu'il appartiendra.. « Signé: Valon, maire', Jeunon, notable;
Chevrey, procureur de la Commune ;
Grapin, secrétaire-greffier.
.« Pour extrait conforme : « Signé : Grapin, secrétaire-greffier. »
XIV
Lettre des membres de la commune de Verdun, aux citoyens administrateurs composant le directoire du district de Chalon-sur-Saône.
Arrêté du directoire du district de Chalon et* arrêté du directovredu département de Saône^et-Loire (1).
Verdun, le 10 novembre 1792 l'an I de la République française.
(( Citoyens;
« Exposent les citoyens officiers municipaux de la ville de Verdun-sur-Saône-et-Doubs, qu'en vertu de la délibération de notre commune du 7 du présent mois de novembre, au sujet de l'établissement de deux foires dans notre ville, attendu que la seule qui existe tombe d'année à autre et que bientôt elle ne sera plus qu'un simple marché, à cause de la mauvaise saison où elle se trouve;
« Disent pour exprimer le vœu général de la ville et même des environs qu'il n'y a point d'endroit plus propre à établir des foires qu'à Verdun, qu'il est même surprenant qu'on n'ait pas encore pris des mesures pour en établir de nouvelles; en conséquence, vu lé procès-verbal des différents commissaires nommés à l'effet de choisir les jours qui conviendraient le mieux pour fixer les deux foires, nous avons approuvé les jours qu'ils ont déterminés; ces jours sont pour le 2e lundi de carême pour une et l'autre pour le 22 juin; nous espérons, chers concitoyens, que vous voudrez bien peser vos raisons et appuyer de votre autorité la présente auprès du directoire du départeràent de Saône-et-Loire et faire justice.
« Signé : Bardolet, Duchesne, Dumichel, Larnoy, officiers municipaux. »
a Vu la présente pétition et ouï le procureur syndic;
« Le directoire du district de Chalon-sur-Saône, considérant que s'il est juste de faire jouir la commune de Verdun des avantages qu'elle réclame; il est de même de toute justice d'entendre les municipalités voisines sur l'objet de la demande de celle de Verdun;
« Arrêté que la présente demeurera communiquée aux municipalités de Bragny, Ecuelle,
Ciel, Gergy, Verjux, Toutenant, Sermesse, Saint-Maurice, Saint-Didier, Saunière, Al-lerey, Les Bordes, Molaize et Sennecey-en-Bresse, lesquelles municipalités composent le canton de Verdun, lesquelles sont invitées de fournir leurs observations dans le délai de huitaine, pour à la vue des observations être, sur ladite pétition, donné tel avis qu'il apî-partiendra;
« A Chalon-sur-rSaône, en séance publique, le 3 décembre 1792, l'an I de la République française.
« Signé: Deschamps, président ; Ogier, secrétaire. »
« Vu de nouveau la pétition ci-dessus;
c L'arrêté à la suite portant qu'elle sera, communiquée à toutes les municipalités du canton de Verdun;
« Vu aussi les délibérations prises par les conseils généraux des communes d'Ecuelle de Gergy, des Bordes, de Bragny, Verjux* Sér-rnesse, Toutenant et Sennecey, Molaize, Alle-rey, Saint-Didier et Saunière des 18, 21, 23, 24, 26 et 30 décembre dernier, contenant adhésion à la demande de la commune de Verdun;
« Ouï le rapport, le procureur syndic entendu et les opinions prises;
« Le directoire du district de Chalon, considérant que le commerce et l'importance de la ville de Verdun mérite que sa réclamation soit accueillie avec d'autant plus de raison que toutes les communes voisines sollicitent elles-mêmes l'établissement des deux foires dont il s'agit;
> « Est d'avis que la municipalité soit autorisée à ouvrir les deux foires qu'elle réclame et à faire, en conséquence, les publications nécessaires pour les indiquer.
« Chalon, le 5 février 1793, l'an II de la République française.
« Signé : Desbois, Ogier, secrétaire;
« Le procureur syndic entendu,
« Le directoire du département de Saône-et-Loire arrête que la présente pétition et pièces jointes seront envoyées au ministre de l'intérieur avec prière d'accorder à la commune de Verdun les deux foires qu'elle demande et que sollicitent un grand nombre de communes voisines.
« A Mâcon, séance publique du matin, le 18 février 1793, l'an II de la République française.
« Signé : Ailhaud, Simonot, secrétaire. »
Séance du mercredi
La séance est reprise à dix heures huit minutes du matin.
, secrétaire, donne lecture du proces-verbcd de la séance du vendredi 5 avril 1793 au matin (1).
(La Convention en approuve la rédaction.)
, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance du jeudi 4 avril 1793, au soir (1).
(La Convention en adopte la rédaction.)
, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance du dimanche 7 avril 1793, au soir (2).
(La Convention en adopte la rédaction.)
, secrétaire, donne lecturè du procès-verbal de la séance de lundi 8 avril 1793, au matin (3).
(La Convention en adopte la rédaction.)
, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance du lundi 8 avril 1793, au soir (4).
(La Convention en adopte la rédaction.)
, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance du mardi 9 avril 1793, au soir (5).
(La Convention en adopte la rédaction.)
(6). Je suis saisi d'une lettre de vos commissaires dans le département des Bouches-du-Rhône. Us annoncent que le recrutement est effectué. Cette lettre contient, en outre, certains détails importants qu'il serait bon, je crois, de ne pas faire connaître au public. Je vous demande de la renvoyer, sans être lue, au comité de Salut public.
(La Convention renvoie cette lettre au comité de Salut public sans être lue (7).)
Deux militaires de l'armée de Dumouriez se présentent à la barre (8).
Yoici deux braves militaires de l'armée de Dumouriez, l'un deux va vous lire une pièce importante; je demande leur admission sur-le-champ.
(La Convention décrète l'admission immédiate de ces deux militaires.)
L'orateur : Nous venons vous faire part de la trahison de Dumouriez; nous venons du camp de Maulde et voilà surtout une pièce qui prouve la perfidie de ce général; c'est la proclamation qu'il a faite. Elle est ainsi conçue :
Au quartier général de Saint-Amand, le 5 avril 1793.
Armée des Ardennes. Supplément à l'ordre du Ier avril 1793.
« Le général Dumouriez déclare à ses braves soldats, c'est-à-dire à ceux
qui, restés fidèles
« Le général Dumouriez a sauvé une fois la France à la tête de son armée; il vient de la sauver une deuxième fois en ramenant cette armée sur la frontière par une retraite savante; son intention est de la sauver une troisième fois à la tête de ses compagnons d'armes, mais il faut pour cela qu'ils fassent connaître leur opinion à la France entière; il faut qu'ils déclarent hautement que le général Dumouriez s'est toujours montré à la tête de l'armée et qu'ils sont satisfaits de son courage.
« Signé : l'adjudant du général Dumouriez, N***. »
L'orateur ajoute : Si l'on eût formé un camp avant de commencer le bombardement de Maëstricht, il est incontestable que dans ce moment nous serions sur les rives du Rhin et que nous n'aurions pas fait cette retraite déshonorante, que le traître Dumouriez décore si fallacieusement du nom de savante.
Nous sommes actuellement au camp de Maulde; le traître y est venu deux fois, accompagné des généraux Valence et Egalité; il était escorté de plus de 200 hommes. On pérora l'armée pour lui prouver qu'il fallait rétablir l'ancienne Constitution. Un officier de notre bataillon lui dit : Vous voulez donc un roi ? — Oui, répondirent les généraux. — Eh bien, ça n'ira pas comme cela, répliqua notre officier. — Voulez-vous la paix, disait Valence ? Eh bien, vous ne pouvez l'obtenir qu'en acceptant un roi. — J'observai, moi, à mon commandant qu'on voulait nous faire marcher contre nos amis et nos frères et nous résolûmes de nous rendre tous deux à Paris peur vous informer des faits dont nous avions été témoins. (Applaudissements.)
L'Assemblée applaudit à votre zèle, elle vous accorde les honneurs de la séance.
Citoyens, d'après l'ordre qui vient de vous être lu vous avez pu vous rendre compte des sentiments de l'armée de Belgique. Elle a rendu à Dumouriez le témoignage le plus manifeste, "en lui prouvant l'indignation dont elle était pénétrée à cet égard.
De votre côté vous avez pris certaines mesures et rendu un décret; mais je crains fort que dans ce moment tout cela ne soit inutile, à moins que vous n'adoptiez la mesure additionnelle que je vais vous proposer.
Citoyens, Dumouriez se flatte peut-être de jouir en paix au milieu de nos ennemis de ses trésors, tant de ceux qu'il a reçus du roi de Prusse que de ceux qu'il a volés dans la Belgique. Eh bien, il ne faut pas qu'il fasse un seul pas, même en territoire étranger, sans être en péril. Je demande que la récompense de 300,000 livres que vous avez décrétée pour celui qui livrera mort ou vif la personne du traître Dumouriez, soit étendue à tout étran-
ger qui pourrait remplir ce décret. Je vous propose même de décréter que si c'est un émigré qui remplit votre objet, il pourra rentrer en France, reprendre ses biens, devenir citoyen et obtenir la récompense. J'excepte les membres de la famille ci-devant royale.
Si vous adoptez cette mesure, tous vos généraux seront exposés au fer des assassins, car vos ennemis ne manqueront pas de promettre de pareilles récompenses à ceux qui les feront périr. D'ailleurs vous devez craindre encore que, par vengeance, Dumouriez ne fasse tomber la tête de vos commissaires; ces considérations doivent vous déterminer à passer à l'ordre du jour.
Je demande le renvoi de la pièce qui vient de nous être lue au comité de Salut public.
et plusieurs autres membres demandent qu'on renvoie également au même comité les propositions qu"ë Philippeaux a faites;
(La Convention renvoie la proclamation lue par les officiers de Dumouriez et les propositions de Philippeaux au comité de Salut public.)
(1). Le département du Jura, qui s'est toujours distingué par son zèle, par son civisme, par son amour pour le maintien de l'ordre et de la liberté, vient encore d'en donner de nouvelles preuves. Après avoir fourni, stir une faible population, 13 bataillons, dont 5 au delà de son contingent, après avoir fait le recrutement avant l'arrivée des commissaires, il vient encore d'organiser 7 bataillons de 833 hommes chacun, pour être en état de résister à tous les actes d'hostilité intérieurs et extérieurs. (Applaudissements.) Sur la pétition du conseil général de ce département, tendant à obtenir que ces bataillons soient mis à la solde de la nation5 la Convention avait décrété le renvoi au comité de la guerre, pour en être fait rapport dans les trois jours. Or, ce rapport n'a pas encore été •déposé. Je demande que les motifs de cette pétition soient prochainement discutés et je propose de décréter, en outre, que ce département a bien mérité de la patrie et que mention honorable en sera faite au procès-verbal avec l'insertion au Bulletin.
(La Convention décrète ces différentes propositions.)
(2). Une lettre que j'ai reçue de mes mandants de Tarbes m'annonce que
les commissaires de la Convention ont été reçus dans l.e département des
Hautes-Pyrénées, avec tous les égards dus aux représentants de la
nation; que là, toutes les autorités constituées et les sociétés
populaires ont secondé parfaitement leur mission, que le recrutement
s'opère avec calme et activité, que les revers éprouvés dans la
Belgique, loin d'abattre leur courage, l'a rehaussé, et que les dons
patriotiques se continuent avec le plus grand .civisme : des armes, des
munitions et des vivres,
(La Convention décrète la mention honorable. )
Un membre (1) observe que la municipalité de Saint-Avold a établi, par économie, un hôpital pour le soulagement des militaires cantonnés à Saint-Avold et lieux circonvoisins, dénués de tout secours; et que le mémoire ayant été renvoyé au comité de la guerre pour en faire son rapport dans vingt-quatre heures, néanmoins ce rapport n'est pas fait depuis trois mois.
(La Convention nationale ordonne que le rapport en sera fait demain.)
Un autre membre (2) annonce qu'au bruit d'une descente des Anglais sur le territoire de la République, les citoyens des cantons de Fontenay-le-Pesnel, Fontenay-le-Marmion, Ranville, et autres du district de Caen, se sont rendus en armes au chef-lieu de l'administration du Calvados pour secourir la patrie, et qu'ils n'ont pas voulu accepter l'indemnité qu'on avait cru devoir leur accorder.
U demande que la Convention décrète la mention honorable du dévouement patriotique de ces bons citoyens, et l'insertion au Bulletin de la lettre du département, qui en fait part à la Convention.
(La Convention adopte ces deux propositions. )
, secrétaire, donne lecture des lettres et adresses suivantes :
1° Lettre de Couturier, l'un des commis-' saires de la Convention dans le département du Bas-Rhin, écrite de Strasbourg; ce député réclame contre le décret rendu le 17 mars dernier (3).
(La Convention renvoie cette lettre au comité de sûreté générale, avec les pièces qui l'accompagnent.)
2° Lettre de Prieur {de la Marne), l'un des commissaires de la Convention à Orléans, qui annoncent les mesures prises pour l'embarquement sur la Loire, et le déportement de 37 prêtres réfractaires (4).
(La Convention renvoie cette lettre au comité de sûreté générale.)
3° Lettre -de Clavière, ministre des contributions publiques, relative à l'administration des sous-fermiers des coches d'eau (5).
(La Convention renvoie cette lettre au comité des ponts et chaussées.)
4° Lettre du général Westermann, transféré à Paris (6), qui demande d'être entendu à la barre ou au comité.
(La Convention nationale renvoie le géné-
6° Lettre du citoyen Guillaume Peuvergue, député du Cantal (1), qui envoie sa démission pour affaires de famille et pour statuer sur le sort de trois mineurs.
(La Convention l'accepte, et renvoie la lettre au comité des décrets pour appeler le suppléant.)
6° Lettre de trois administrateurs du directoire de district à Evaux (Creuse) (2) qui demandent une augmentation de leur traitement.
(La Convention renvoie la lettre au comité des finances pour présenter une loi générale sur l'objet de la pétition.)
7° Lettre du citoyen Delmas (3), qui envoie plusieurs pièces qui lui ont été adressées, entr'autres une , lettre anonyme de Rouen. L'auteur dit qu'il faut que tout citoyen français, en général, se prive de toute son argenterie et objet de luxe, les dépose dans sa commune, et que si, après le temps marqué, on trouvait de l'argenterie chez des citoyens, elle leur serait enlevée.
(La Convention, attendu que la lettre n'est pas signée, passe à l'ordre du jour.)
86 Lettre des administrateurs du district de Bar, département du Bas-Rhin, par laquelle ils informent la Convention que les citoyens de leur canton sont animés du plus pur civisme. Nous osons vous assurer, .disent-ils, que les ennemis, en attaquant notre frontière, trouveront des Lille et des. Thionville, au lieu de Verdun et de Longwy' (4).
(La Convention décrète la mention honorable de cette lettre au procès-verbal.)
9° Lettre des mêmes administrateurs, datée du 28 meurs, par laquelle ils se plaignent du rappel des commissaires Couturier et Dentzel; elle est ainsi conçue (5), :
« Législateurs,
( C'est avec tous les sentiments de la plus vive douleur, que les
soussignés ont appris que l'intrigue et la cabale, sous le masque 'du
patriotisme et de la justice, ont osé souiller même le. sanctuaire de la
liberté, jusqu'au point de suspendre l'opinion de nos représentants,
jusqu'à les porter à des mesures qui, au lieu de soutenir la cause de la
raison et de la liberté, à peine relevée dans nos contrées fanatiques,
serviront plutôt à. la saper jusque dans ses fondements. C'est du rappel
de vos commissaires Couturier et Dentzel, que des agitateurs hypocrites
et des ambitieux démasqués, trop justement punis pour avoir empoisonné
l'opinion publique, et semé-la division parmi les patriotes même, ont
osé vous dépeindre comme des hommes injustes et despostes, que nous
« Citoyens représentants, nous vous conjurons, au nom de la patrie que vous avez juré de sauver, au nom de la chose publique et de la révolution qui à peine commencent à revivre dans notre département, de suspendre votre jugement sur les actes ae vos commissaires, jusqu'à ce que des rapports fidèles et véritables vous auront mis à portée de les connaître, pour ne pas anéantir vous-mêmes la même cause que vous voulez sauver.
(La Convention renvoie cette lettre au comité de sûreté générale.)
100 Adresse du.... mars à la Convention, par les administrateurs du district de Haguencm, dans laquelle ils protestent contre le décret qui a autorisé les citoyens déportés de Strasbourg à rentrer dans leurs foyers; elle est ainsi conçue (1) :
« Citoyens législateurs,
« C'est avec, la plus vive douleur que nous avons appris que quinze
pertubateurs du repos public, déportés à juste titre de la ville de
Strasbourg et de tout le département du Bas-Rhin, s'étant présentés à
votre barre, vous ont
« Ce décret, qui rend nulles toutes les mesures sages prises par la commission choisie dans votre sein, et qui, par le rappel des commissaires, les fait soupçonner d'actes arbitraires, a déjà des suites dangereuses dans ce département. De tous côtés on voit les aristocrates, les fanatiques et surtout les feuillants, sortir la tête de la poussière où les avait plongés la mesure de vigueur prise contre eux, et qui, au lieu d'être aussi modérée, aurait dû s'étendre sur tous les individus de cette espèce, dont fourmille malheureusement notre département : ces individus prêchent sous main, et même ouvertement, le royalisme, le fanatisme, enfin tout ce qui peut avoir rapport à l'ancien régime et être contraire au nouvel ordre des choses, tant désiré par les vrais amis de la liberté et de l'égalité.
(( Que sera-ce donc quand ces quinze-apôtres du feuillantisme le ;?plus effréné seront rendus à leurs amis et à leurs partisans 1
« Citoyens législateurs, nous n'osons y penser sans frémir : hâtez-vous donc d'ordonner le rapport d'un décret rendu sans doute par une minorité trop .indulgente. Sans cette mesure, nous craignons pour notre district et pour tout le département, les troubles les plus funestes; ils ont commencé depuis l'absolution du traître Dietrich; à quel point ne se porteront-ils pas si ses plus zélés partisans se trouvent lavés, et si des commissaires répùbli-cains, qui ont tout fait pour établir la paix et la concorde sur les bases du véritable civisme, sont inculpés?
(La Convention renvoie cette lettre au comité de sûreté générale.)
11° Lettre des citoyens Bourbotte, Julien (de Toulouse) et Prieur (de la Marne), commissaires de là G onvention à OHèans, par laquelle ils. rendent compte des mesures qu'ils ont prises, pour rétablir l'ordre dans cette ville et annoncent un don patriotique de 36,148 1.15 s. offert par. la section des Piques ; elle est ainsi conçue (1). :
Orléans,
« Citoyens nos collègues,
c En prenantJa suite des opérations commencées par Collot-d'Herbois et Laplanche dans la commune d'Orléans, nous devons aussi reprendre la correspondance qu'ils entretenaient avec vous.
« En arrivant dans cette ville, notre premier soin a été de (nous) y
concerter avec nos collègues sur les mesures qui doivent écraser
l'aristocratie et faire triompher le patriotisme. Nos premiers moments
ont ensuite été "employés à visiter les autorités constituées. Nous
avons trouvé, dans les membres qui les composent, du zèle, des
intentions pures, mais ils avaient befeoin d'être secondés pour prendre
cette énergie républicaine et révolutionnaire que demandent les
circonstances dans lesquelles nous nous trouvons. Nous nous sommes
rendus ensuite dans la société populaire et dans les sections. Dans
l'une et dans les autres nous avons trouvé un patriotisme pur et
« La présence de vos commissaires a dissipé pour le moment les nuages aristocratiques qui infectaient l'atmosphère de cette ville. Des adresses et des souscriptions patriotiques s'y préparent dans toutes les sections, et le peuple d'Orléans est disposé à tout faire pour détruire l'impression fâcheuse qui a fait naître contre lui l'attentat sur Léonard Bourdon, attentat qu'il a en horreur et qui est l'ouvrage de l'aristocratie et de ses infâmes satellites. : Mais nous ne nous laisserons pas tromper par ce calme momentané qui règne dans cette ville; nous savons par de trop funestes expériences que l'aristocratie ne cède que pour relever ensuite une tête plus insolente, et nous ne négligerons aucune des grandes mesures qui doivent empêcher jusqu'à son réveil. C'est d'après cela que nous avons porté notee attention sur tout ce qui peut assurer pour toujours le triomphe de la liberté dans.Orléans. Les différents arrêtés que nous avons pris et que nous joignons ici (1) vous en affirment la preuve; nous les transmettons .à votre sagesse et nous attendons avec impatience votre approbation. Plusieurs des mesures qui y sont indiquées sont déjà exécutées et -les autres sont subordonnées à des circonstances particulières.
« Une de nos premières opérations a été de changer le conseil général de la commune qui, par son association aux opérations de l'ancienne municipalité, avait perdu la confiance du peuple; nous l'avons remplacé par des patriotes qui ont l'assentiment général. Nous avons aussi, de concert avec nos collègues, destitué quelques autres fonctionnaires que la voix publique accusait fortement d'incivisme et dont la présence et l'action étaient dangereuses dans des moments de trouble.
« Nous avons fait partir hier les conjurés du camp de. Jalès : ils marchent vers le tribunal révolutionnaire où ils ne tarderont pas sans doute à recevoir la peine de leurs crimes.
« La présence des prêtres réfractaires enfermés dans cette ville y entretient le fanatisme; demain ils partiront sous bonne et sûre garde pour le port de mer le plus voisin.
« La municipalité d'Orléans, en état d'arrestation, sera sous peu de jours conduite à Paris. Déjà 7 des assassins de Léonard Bourdon sont arrêtés et nous les aurions déjà fait partir, si leur présence n'était encore nécessaire dans eette ville pour l'instruction de la procédure que les commissaires du conseil exécutif provisoire suivent avec activité. Les comités de surveillance sont formés dans toutes les sections.
« Nous activons, par tous les moyens possibles, la fabrication des piques
qui doivent armer les Sans-Culottes. Bientôt la liste des
(« Le contingent du recrutement de la ville d'Orléans et de son district est parti; nous avons reçu successivement en votre nom le serment de plusieurs détachements, et leur enthousiasme pour la liberté nous garantit le triomphe de la République, malgré les horribles trahisons de nos infâmes généraux.
(c Au milieu des soins importants qui nous arrêtent ici, notre seul chagrin est de ne pas être au milieu de vous dans un instant où les dangers dé la patrie se multiplient d'une façon aussi affligeante; nous les voyons comme vous, mais sans nous en effrayer, mais sans rien craindre pour la liberté qui ne peut jamais périr. Une seule journée nous sépare, et si ces dangers deviennent plus pressants nous volerons dans votre sein et nous apprendrons aux traîtres ce que valent, ce que peuvent des républicains. Citoyens nos collègues, comme vous nous jurons de poignarder le premier ambitieux qui, sous un nom quelconque, voudrait usurper la moindre portion de la souveraineté du peuple.
« Nous vous jurons aussi amitié, fraternité et dévouement.
« Signé : Bourbotte, Julien (de Toulouse), P rieur (de la Marne).
(c P. S. A l'instant où nous allions fermer notre lettre, la section des Piques, qui la première a émis son vœu pour un don patriotique et qui forme la 11e partie de la ville d'Orléans, nous envoie une députation pour offrir à la patrie, par notre organe, un don patriotique de 38, 148 livres, 15 sols, dont 48 en numéraire, pour fournir aux frais de la guerre contre les tyrans qu'elle jure de combattre jusqu'à la mort; les autres sections s'occupent en oe moment de former aussi de mêmes dons patriotiques.
« Nous espérons, d'après le développement de l'esprit public qui se manifeste dans cette ville, être bientôt à même de vous demander le rapport du décret rendu contre elle; mais nous croyons qu'il est prudent de ne rien préciter jusqu'à ce que nous ayons pris toutes les mesures propres à assurer le triomphe complet des patriotes et surtout jusqu'à ce que les assassins de Léonard Bourdon soient transférés à Paris.
Artyêtés pri\s par Ies> députés commissaires de la Convention nationale, à Orléans.
1er Arrêté (1).
Procès-verbal du 2 avril 1793. « Arrêté qu'il ne serait signé aucun
passeport, qu'il n'eût été présenté aux commis-
« Signé : J. Julien (de Toulouse); Bourbotte, Prieur (de la Marne). »
2e Arrêté (1).
Procès-verbal du 2 avril 1793.
« Arrêté qu'il sera écrit au directoire du département pour connaître le nombre des conjurés du camp de Jalés et les motifs de leur détention, afin d'opérer sur-le-dhamp leur translation au tribunal révolutionnaire, établi à Paris.
« Signé : J. Julien (de Toulouse) ; Bourbotte, Prieur (de la Marne). »
3e Arrêté (2).
Procès-verbal du 2 avril 1793.
« Arrêté que les 400 hommes du 14e bataillon de Paris seront logés au ci-devant couvent des-Uruslines et qu'en conséquence la municipalité prendra les mesures les plus promptes pour leur procurer, de concert avec le commissaire des guerres, tous les «ffets et ustensiles nécessaires à leur casernement.
« Signé : J. Julien (de Toulouse); Bourbotte, Prieur (de la Marne). »
4e Arrêté (3).
Procès-verbal du 2 avril 1793.
« Arrêté que le procureur général syndic du département du Loiret sera tenu de fournir, dans le jour, la tableau nominatif des administrateurs composant le conseil général du département, le lieu de leur résidence, et de rendre compte des diligences qu'il a faites pour les appeler à leur poste, dans la crise où se trouve la ville d'Orléans, comme aussi soit donné des ordres pour que le conseil d'administration de chaque district soit en état de permanence.
« Signé : J. Julien (de Toulouse); Bourbotte, Prieur (de la Marne ). » |
5e Arrêté (4).
Procès-verbal du 2 avril 179S.
« Arrêté que les commissaires se concilieront dans le jour avec le département pour la déportation des prêtres réélus au séminaire, pour le port le plus voisin de cette ville.
« Signé : J. Julien (de Toulouse); Bourbotte,. Prieur (de. la Marne). »
Procès-verbal du 2 avril 1793.
« Arrêté que les prêtres destitués, en vertu de nos réquisitions, sortiront dans le délai de trois jours des lieux où ils remplissaient des fonctions, avec injonction de déclarer à la municipalité de leur résidence, le lieu où ils entendent se retirer, laquelle déclaration sera mentionnée dans le passeport qui lur sera délivré.
« Signé : J. Julien (de Toulouse) ; Bourbotte, Prieur (de la Marne). »
7e Arrêté (2).
Procès-verbal du 2 avril 1793.
« Arrêté que les citoyens Sicard et Durmïs père, juge de paix, demeureront provisoire^ ment destitués des fonctions qui leur sont attribuées et seront remplacés par les citoyens commissaire actuel de police, et Pizot-Bouil-lier, actuellement procureur de la commune d'Orléans.
« Signé : J. Julien (de Toulouse) ; Bourbotte, Prieur (de la Marne). »
8e Arrêté (3).
Procès-verbal du 2 avril 1793.
« Arrêté que la municipalité fournira, dans les vingt-quatre heures de la communication qui lui en sera faite, le relevé exact des passeports qui ont été délivrés par l'ancienne municipalité depuis l'époque du 16 août au 21 du même mois.
« Signé : J. Julien (de Toulouse) ; Bourbotte, Prieur (de la Marne). »
9e Arrêté (4).
Procès-verbal du 3 avril 1793.
« Arrêté que la municipalité d'Orléans est autorisée à nommer deux commissaires pris dans son sein, pour se transporter à l'hôtel des monnaies, à l'effet de faire les recherches et perquisitions des ;chevaux de luxe qu'on dit y être renfermés.
« Signé : J. Julien (de Toulouse); Bourbotte, Prieuiî (de la Marne). »
10e Arrêté (5).
Procès-verbal du 3 avril 1793.
« Arrêté, après avoir pris communication des mesures désignées par le
directoire du département et le commissaire national auprès du tribunal
du district d'Orléans sur la translation des conjurés du camp de Jalès
que ces mesures seront exactement suivies et qu'in-
« Signé : J. Julien (de Toulouse) /Bourbotte, Prieur (de la Marne). »
11e Arrêté (1).
Procès-verbal du 3 avril 1793.
« Arrêté que ladite municipalité est autorisée à faire à la maison des Ursulines toutes les réparations nécessaires pour y caserner les quatre cents hommes de la garde nationale parisienne, que nous avons provisoirement retenus à Orléans pour concourir au maintien de l'ordre public, prêter main-forte à la loi et faire respecter les décrets de la Convention nationale.
« Signé : J. Julien (de Toulouse); Bourbotte, Prieur (de la Marne). »
12e Arrêté (2).
Procès-verbal du 3 avril 1793.
« Arrêté que les commissaires se transporteront en la maison commune, à 3 heures de l'après-midi, pour y faire l'installation du nouveau conseil général provisoire de la commune, en remplacement de celui que l'opinion publique avait déjà depuis longtemps frappé d'incivisme.
« Signé : J. Julien (de Toulouse) ; Bourbotte, Prieur {de la Marne). »
13e Arrêté (3).
Procès-verbal du 3 avril 1793.
« Arrêté qu'il sera fait à la municipalité d'Orléans, pour l'inviter à redoubler de Surveillance sur la délivrance des passeports, à faire avec la plus grande attention le signalement des citoyens à qui ils sont accordés, et surtout d'y insérer avec la plus scrupuleuse exactitude leur âge, noms, prénoms, professions ancienne ou actuelle.
« Signé : J. Julien (de Toulouse); Bourbotte, Prieur (de la Marne). »
14e Arrêté (4).
Procès-verbal du 3 avril 1793.
« Arrêté que le procureur général syndic du département sera requis d'enjoindre à tous les forgerons de suspendre leurs travaux ordinaires pour se livrer tout entier à la fabrication des piques.
« Signé : J. Julien (de Toulouse) ; Bourbotte, Prieur (de la Marne). »
Procès-verbal du 4 avril 1793.
« Arrêté que la section de la loi est autorisée à établir son comité de surveillance dans le local qu'elle a proposé et adopté pour tous les corps administratifs. « Signé : J. Julien {de Toulouse) ; Bourbotte, Prieur (de la Marne). »
16e Arrêté (2).
Procès-verbal du
« Arrêté qu'il sera écrit à la municipalité pour lui demander de fournir, dans le jour, l'état exact de toutes ses ressources en armes, de la quantité de fusils et de piques qui sont à sa disposition.
Signé : J. Julien {de Toulouse) ; Bourbotté,
Prieur (de la Marne.)-
(La Convention approuve les mesures prises par ses commissaires, renvoie au comité de Salut public et décrète la mention honorable du don patriotique et l'insertion au Bulletin.)
12° Lettre des entrepreneurs, serruriers et charrons, qui réclament le paiement des affûts fournis à des canons pour la République.
(La Convention renvoie la lettre au comité de la guerre.)
13° Lettres et pétitions des citoyens du Havre et des colons, qui se disent commissaires de Saint-Domingue, sur le paiement des traites de cette colonie.
(La Convention renvoie ces pièces aux comités colonial et de marine.)
14° Lettre du citoyen Charles Tocquot, député de la Meuse, qui demande un congé ou offre sa démission; cette lettre est ainsi conçue (3) :
Paris,
« Citoyen Président,
( Je suis laboureur et veuf avec trois enfants dont l'aîné n'a que seize
ans. J'avais deux domestiques qui m'étaient absolument nécessaires pour
me remplacer et conduire mon train. L'un s'est enrôlé le 10 mars
dernier, l'autre vient d'être employé pendant douze jours aux convois
militaires, de sorte que pendant cette absence, mon train s'est trouvé
sans chef et presque sans bras et nous touchons au moment des semailles.
Des affaires de famille me rappellent non moins impérieusement. Mon
unique beau-frère, qui était déjà veuf, vient de mourir et laisse deux
enfants mineurs avec lesquels il me reste des comptes et des partages à
faire qui demandent ma présence.
Signé : Ch.-N. Tocquot, député de la Meuse. »
(La Convention passe à l'ordre du jour.)
15° Lettre du général Kellermann (1), qui écrit de Chambéry pour demander à être autorisé à lever, dans les départements des Alpes, un bataillon de 600 hommes, sous le nom de chasseurs des Alpes, composé d'hommes robustes et bons tireurs, accoutumés à gravir les montagnes. Ce général observe que le département des Hautes-Alpes lui offre un corps de 600 chasseurs qui seront bientôt équipés.
(La Convention décrète la formation dudit bataillon et renvoie au comité de la guerre pour l'organisation.)
16° Lettre et pétition du citoyen Bance (2), blessé à la journée du 10 août; ce citoyen réclame des secours ou une place.
(La Convention renvoie la lettre au comité des secours.)
17° Lettre des administrateurs des conseils généraux de département, de district, et de la commune, à Angers (3), qui jurent de défendre la liberté, ou de mourir à leurs postes; cette lettre est ainsi conçue :
Angers,
« Représentants,
« La République est sur le bord de l'abîme; la perfidie a creusé cet abîme; une fermeté vigilante et sage peut le franchir. Que la représentation nationale soit majestueuse, prudente, énergique, unanime, le peuple français fera le reste. Quant à nous, qui avons la douleur de voir la moitié du département de Maine-et-Loire, en proie à la révolte et à la superstition, nous sommes à notre poste.
( Nous y serons jusqu'au moment où le génie delà France aura triomphé, ou
jusqu'à celui où nous n'aurons plus d'autre parti à prendre, que de nous
ensevelir, à votre exemple, sous les
Ls administrateurs des conseils généraux du département de Maine-et-Loire, district et commune d'Angers, réunis en permanence.
« Signé: Dieusy, président du département i Patrineau, président du district ; Berger, maire ; Roussel, procureur-syndic ; Bar-bot, secrétaire général. »
(La Convention décrète la mention honorable et ordonne l'insertion de cette lettre au Bulletin.)
18° Lettre des citoyens Anthoine et Levas-seur, commissaires de la Convention nationale dans les départements de la Meurthe et de la Moselle; ils font part du serment de fidélité à la République qui a été prêté sur la place d'armes par toute la garnison, les corps civils et tous les citoyens ; cette lettre est ainsi conçue (1) :
Metz, le
« Citoyens nos collègues,
« Hier, en apprenant la nouvelle de l'infâme trahison de Dumouriez, nous avons assemblé un conseil de guerre où nous avons proposé le serment républicain que vous trouverez consigné dans le procès-verbal ci-joint : il a été prêté à l'instant, avec de vives acclamations, par tous les membres du conseil de guerre, et il a été arrêté qu'il serait prêté aujourd'hui à trois heures sur la place d'armes, au pied de l'arbre de la liberte, par tous les corps civils et militaires et par les citoyens. Pendant la nuit, le procureur général syndic du département de la Moselle nous a communiqué votre excellent et salutaire décret contre Dumouriez. A l'instant, nous nous sommes applaudis de la mesure du serment ; et, en effet, il ne pouvait venir plus à propos. Aujourd'hui, la proclamation du décret contre le traître a été faite à toute la garnison, à la garde nationale et aux citoyens. Immédiatement après, nous avons parlé en hommes libres à cette assemblée, hérissée de baïonnettes et entourée de canons ; nous avons prononcé la formule du serment et à l'instant des cris universels de : Je le jure ! Vive la République ! vive la Convention nationale ! ont rempli la place et se sont répandus dans les rues adjacentes jusqu'aux extrémités de la ville. Nous vous envoyons le procès-verbal de cette séance imposante où nous avons remarqué un enthousiasme pareil à celui dans lequel nous avons aboli la royauté. La place importante de Metz et les braves hommes qu'elle renferme sont, pour toujours, nous l'espérons, à la République. Le procès-verbal et le serment sont déjà portés dans les autres places de guerre du département, et vont être envoyés à l'armée de la Moselle où ils ne produiront, sans doute, qu'un effet salutaire.
« Les commissaires de la Convention nationale,
« Signé : Anthoine, Levasseub. »
RLEMENTAIRES. |10 avril 1793.j g^g
A cette lettre, se trouve jointe la pièce ci-dessous :
Extrait dit, registre des délibérations du conseil général de la commune de Metz (1).
« Ce jour, 6 avril 1793, l'an II de la République française, trois heures de relevée, en la maison commune, les commissaires de la j Convention nationale, les corps administratifs et de la commune, les tribunaux civil et criminel, les officiers supérieurs de la garde nationale de là place et de la garnison, réunis pour la promulgation solennelle du décret de la Convention nationale du trois de ce mois, apporté cette nuit par un courrier extraordinaire et qui déclare que Dumouriez, traître à la patrie, est hors de la loi, ordonne de lui courir sus, et assure des récompenses à ceux qui l'amèneront, à Paris, mort ou vif.
« Un des commissaires a proposé de s'engager par serment à ne reconnaître d'autre souveraineté que celle du peuple en masse, à n'obéir à d'autre autorité qu'à celle de la Convention.
« La proposition, adoptée d'acclamation, chaque membre de l'assemblée et les citoyens présents ont prononcé le serment qui suit :
« Je jure de mourir, plutôt que de reconnaître un roi, un dictateur ou toute autorité quelconque, autre que celle du peuple français et de la Convention nationale.
« Je jure de maintenir l'égalité, la liberté, l'unité de la République française et de conserver la place de Metz et les postes qui me seront confiés au péril de ma vie ».
« L'assemblée est sortie de la maison commune et s'est rendue sur la place de la Loi; là, en face de l'arbre de la liberté, la garnison était sous les armes.
« L'assemblée, placée au centre du bataillon carré, un des commissaires a porté la parole et a dit :
« Citoyens, vous allez entendre la proclamation de la loi qui foudroie le traître Dumouriez ».
« Ce vil courtisan, jadis rampant dans la fange des antichambres pour y chercher sa subsistance, maintenait par un despote la nation souveraine qui l'a tiré du néant : tant d'immoralité et de folie ne doivent ni vous étonner ni vous alarmer. Tous n'avez pas oublié que souvent, à ma voix, vous vous êtes ralliés dans ces murs pour déjouer l'hypocrite et lâche Lafayette.
« Tous n'hésiterez pas à prononcer, entre les légitimes représentants du peuple et un misérable charlatan dont le cœur a médité tous les crimes ; si vous aviez quelque confiance en lui, vous l'abjurerez à l'instant, parce qu'il a trahi sa patrie et vendu le sang de vos frères ; vous n'accepterez pas un roi, parce que vous êtes des hommes ; vous remplirez vos serments, car vous n'avez jamais respiré l'air empoisonné des cours.
« Citoyens, Dumouriez n'accomplira pas ses affreux projets ; il
n'égorgera pas nos braves soldats ; il ne désarmera pas nos troupes
fidèles, il ne déchirera pas les enseignes de la liberté ; il ne livrera
pas vos représentants au
« Ce discours, écouté dans le plus grand silence, a été couvert d'applaudissements.
« Le président a fait battre un ban, le décret du 3 de ce mois a été lu et proclamé. Vive la République ! ont répondu les braves militaires. Le ban a été fermé.
« Les officiers de la place, de la garde nationale et de la garnison ont formé le cercle autour de l'assemblée. La formule du serment leur a été lue ; ils ont tous juré et la musique, fréquemment interrompue par un cri de : Vive la République ! Point de roi ! a exécuté l'air chéri de Ça Ira.
« Braves républicains, a dit le citoyen Le-vasseur, vous venez de nouveau de jurer de mourir ou de rester libres, et le soldat français, régénéré à la liberté, n'a jamais juré en vain.
« C'est la servitude qui fait les lâches et les parjures ; c'est la royauté qui fait les traîtres et les valets. U périra, le traître ; ils périront tous, quels qu'ils soient, les scélérats qui, pour s'élever au-dessus du niveau de l'égalité ont trahi et livré nos frères et osent encore aujourd'hui les calomnier.
« Citoyens soldats, non, jamais vous ne deviendrez les esclaves d'un despote, d'un chef, d'un dictateur, d'un maître, sous quelque nom qu'il puisse se produire.
« Le peuple dans sa masse, voilà notre souverain, et lorsque nous en sommes tous membres, avilirions-nous cette sublime dignité de l'homme pour courber encore nos têtes sous l'abominable joug des tyrans 1
« La Convention nationale, voilà notre guide : elle exprime la volonté générale ; tous •les citoyens concourent à la former. En obéissant aux lois qu'elle dicte, nous ne faisons donc qu'accomplir nos propres volontés.
« La patrie, voilà notre mère : c'est d'elle seule que l'homme libre peut, sans rougir, recevoir des bienfaits. C'est elle seule qui sait reconnaître les services de' ses braves défenseurs. Les rois, au contraire, n'ont jamais récompensé que leurs vils flatteurs et leurs infâmes courtisans, tandis que, sous leur verge de fer, l'intrépide guerrier répand son sang, vit et meurt dans la misère.
« Mais sans la liberté, point de patrie, point de salut; périssons tous, généreux soldats, en triomphant avec elle ».
Ce discours a été reçu avec les plus vifs applaudissements.
Les officiers s'en retournaient à leurs corps. La formule du serment a été répétée à la tête de chaque régiment et tous les soldats, sous-officiers et officiers ont répondu : Je le jure !
La garnison a défilé ; elle a été remplacée par la garde nationale sédentaire qui avait aussi pris les armes ; formée en bataillon carré, elle a entendu la promulgation du dé-
cret et juré, comme la garnison, de ne reconnaître ni roi ni dictateur et de n'obéir qu'à la Convention.
La garde nationale a défilé.
L'assemblée, escortée de la compagnie de sexagénaires, ayant le tambour et la musique en tête, s'est rendue sur la place de la Liberté où la loi a été lue et promulguée solennellement ; de là, le cortège s'est dirigé vers la place de l'Egalité où la même promulgation s'est faite. « De retour à la maison commune, apprenez à la Convention, a dit l'assemblée aux commissaires, que les citoyens soldats et soldats citoyens de Metz sont tous à la liberté, qu'ils ont juré la mort des traîtres; quels qu'ils soient et qu'ils tiendront leurs serments ; rendez-lui compte de ce que vous venez de voir ; dites-lui que, tranquilles sur cette ville importante, elle peut, avec sécurité, compter sur elle et diriger ses soins et son attention vers les points de la République où la trahison pourrait préparer des revers ; quant à nous, nous saurons les braver et si l'ennemi attaque nos remparts, il apprendra à ses dépens qu'un sang républicain nous a été transmis par nos ancêtres libres et dignes de l'être. »
L'assemblée a arrêté ensuite qu'expédition du présent procès-verbal sera remis sur-le-champ aux commissaires, avec invitation de le faire passer à la Convention nationale ; qu'il serait, en outre, imprimé pour être adressé aux d^ffr^entes communes du département et à la force armée qui s'y trouve.
Fait et délibéré, en séance permanente, à Metz, ledit jour, six avril 1793, l'an II de la République française.
« C ollatiormé,
( Signé : Adam Seuche. »
(La Convention décrète la mention honorable et ordonne l'insertion de cette lettre au Bulletin.)
19° Pétition des fondés de pouvoirs des Génois, créanciers de l'Etat (1), qui réclament le rapport d'un décret rendu le 3 février dernier contre deux Génois.
(Ta Convention renvoie cette lettre au comité diplomatique.)
20° Lettre des administrateurs du district de Bar-sur-Seine, département de l'Aube, qui annoncent :
« 1° Que les dons qu'ils ont déjà reçus pour l'armée, consistent en 5 capotes, 12 chemises, 21 paires de guêtres et 222 paires de souliers;
« 2° Que le recrutement est fini, que la première division des volontaires est partie pour Metz, le 24 du mois de mars dernier ; qu'une autre division est partie pour la même destination le lendemain 27, et qu'ils en seront partis tous les jours jusqu'à la fin. »
(La Convention décrète la mention honorable au procès-verbal et
l'insertion au Bulletin) (2).
Valence,
« Législateurs,
« Vous avez abattu l'idole de la royauté, mais vous n'avez rien fait si vous ne nous donnez bientôt une Constitution; la République ne peut périr que par l'anarchie.
« Le recrutement de l'armée s'est fait avec le succès qu'on doit attendre des vrais républicains. A peine est-il effectué que nos frères de la Vendée et de la Loire-Inférieure réclament notre secours. Le département nous communique son arrêté le 19, et le 25 le contingent du district et beaucoup au-dessus, est en marche.
« Partout, nous avons eu la satisfaction de voir des vieillards présenter leurs enfants aux commissaires recruteurs, et ces enfants, qui n'avaient pas l'âge requis pleurer leur jeunesse; et il s'est trouvé des pères qui ont demandé à servir à leur place.
« Tandis que nos frères s'acheminent pour l'armée, nos femmes travaillent à l'équipement de ceux qui sont sous les armes... La citoyenne Dagénès, femme de Laurent, député à la Convention, dépose, dans ce moment, son offrande de 6 chemises, 6 paires de bas et 6 paires de souliers.
« Le district de Valence est une nouvelle preuve de cette vérité que la France n'est qu'un camp, et ses entours une manufacture d'armes et d'équipements militaires.
« Les membres du directoire du district de Valence, département de Lot-et-Garonne,
» Signé : Rigal, Massaire, vice-président ;
Corneille, Laborde, procureur syndic ;
Ducom, secrétaire. »
(La Convention décrète la mention honorable et ordonne l'insertion de la lettre au Bulletin.)
21° Lettre des citoyens artistes du théâtre de la Nation, qui font passer à la Convention un don patriotique; cette lettre est ainsi conçue (2) :
« Citoyen Président,
« Ne voulant point abuser par de vaines phrases d'un temps précieux et que la Convention nationale emploie au bonheur de la République, nous déposons en vos mains, un nom des citoyens artistes du théâtre de la Nation, une nouvelle somme de 1,500 livres pour coopérer aux frais de la guerre.
« Signé : Saint-Prix; Saint-Fa. »
(La Convention décrète la mention hono-
22° Adresse de la société républicaine des amis de la liberté et de Végalité, séante à Saint-Avold (1) qui fait un don patriotique pour nos frères d'armes, de 127 chemises 102 paires de souliers, 9 paires de guêtres, 2 paires de culottes, 4 pantalons, 21 paires de bas, un habit uniforme, une capote neuve et différents morceaux d'étoffe de la valeur de 45 livres.
Le citoyen Adelin, ingénieur des mines de la République, fait don d'un habit, veste et culotte uniforme.
Le citoyen d'Arrainville, maire de Saiiit-Avold, fait don d'un habit et une veste uniforme.
Le citoyen Villeroy fait don d'un habit, veste et culotte uniforme, d'une paire de bas et d'une giberne.
Le recrutement s'est fait dans cette ville avec célérité; elle a fourni plus que son contingent, et a équipé tous les volontaires prêts à partir.
(La Convention décrète la mention honorable et ordonne l'insertion de cette adresse au Bulletin.)
23° Lettre de la municipalité de la commune de Moissac (2), qui fait don à la nation de la monture d'une épée en argent.
(La Convention décrète la mention honorable et ordonne l'insertion de la lettre au Bulletin.)
24° Lettre des officiers de santé et employés de l'Hôtel-Dieu, ceux des Enfants-Trouvés et de l'hôpital du Saint-Esprit (3), qui déposent sur l'autel de la patrie la somme de 202 livres, 10 sols.
(La Convention décrète la mention honorable et ordonne l'insertion de la lettre au Bulletin. )
25° Lettre des administrateurs du département de la Meuse (4), qui dénoncent la conduite du général Chazot. Lettre de l'un des commissaires de la Convention envoyé dans ce département, épuisé par le ravages de l'ennemi, pour arrêter le recrutement par laquelle il rend compte à l'Assemblée du zèle et du patriotisme qui l'animent; il ajoute que son contingent était rempli avant leur arrivée, ainsi qu'un supplément de 900 hommes, requis par le général Chazot, au delà de ce contingent; que les dons patriotiques s'y multiplient chaque jour.
(La Convention décrète la mention honorable et l'insertion au Bulletin.)
26° Lettre de Garat, ministre de l'intérieur, qui adresse à la Convention
l'état des décrets qu'il a envoyés le 9 dans les départements; cet état
est ainsi conçu :
DATES des décret». TITRES DES DÉCRETS. DÉPARTEMENTS auxquels l'envoi a été fait* OBSERVATIONS.
5 avril. Décret qui enjoint au Conseil exécutif à rendra, compte des motifs qui ont déterminé sa proclamation du2 mars dernier. de la Mârne. manuscrit.
7 avril. Décret portant que les adjoints de s ministres de la guerre et de la marine et le citoyen Dumas seront gardés à vue. de la Seine-Inférieure. id.
19 mars. . Décret qui réunit à la République française les communes de Nerel,d'AëItre, de Thouroult,de Blankenberg, d'Ecloc, de Damne et de la banlieue de Bruges. à tous les départements.
19 mars; Décret qui ordonne aux ministres de faire imprimer l'état nominatif de tous les officiers civils et militaires, et de tous tes employés dans les-bureaux et dans toutes les parties de leur administration^ id.
24 mars. Décrets relatifs aux troubles de la ville d'Orléans. du Loiret.
27 mars. Décret qui met hors de la loi les aristocrates et les ennemis do la Révolution ; ordonne que les citoyens seront armés au moins de piques et que le tribunal extraordinaire sera mis dans le jour en pleine activité. à tous les départements.
28 mars. Décret qui détermine les mesures à prendre pour assurer le recrutement et les approvisionnements des armées, ^ et pour prévenir et punir la désertion et la vente des armes par les soldats et volontaires. id.
29 mars. Décret qui abolît la course sur mer, à l'égard des navires des villes de Hambourg et des villes hanséatiques et ordonne de lever, dans le plus court délai, l'embargo mis sur les navires de ces villes. de Paris. id.
29 mars. Décret qui fixe le prix des chevaux de poste, à compter du 1er avril prochain. à tous les départemenis,
29 mars. Décret relatif aux dépenses des membres de la Convention nationale qui seront envoyés en commission. de Paris. id.
3 0 mars. Décret relatif aux jurés et suppléants du tribunal criminel extraordinaire. à tous les départements.
2 avril. Décret interprétatif de l'article 3 de la loi du 21 mars, relatif à la formation d'un comité de surveillance dans chaque section. de Paris. id.
5 avril. Décret : adresse de la Convention à l'armée de la Belgique. id. id.
6 avril. Décret qui rappelle le citoyen Goupilleau, commissaire au pays ci-devant Deux-Ponts, et l'adjoint à ceux du département de la Vendée. de Paris et de la Vendée.
6 avril. Décret relatif à l'arrestation des membres de la ci-devant famille des Bourbons. à tous les départements.
25 mars. Décret relatif à l'acquittement des dépenses concernant les restitutions à faire par les acquéreurs des domaines nationaux. id.
25 mata Décret relatif à l'organisation et à la composition du comité de défense générale. id.
25 mars. Décret concernant les hussards de la Liberté. id.
25 mars. Décret relatif aux matières d'or et d'argent versées à la Monnaie de Paris. id.
26 mars. Décret qui rétablit une commission dans l'article 14 de la loi des 11 et 12 mars relative à l'administration des biens des émigrés, et à la vente de leur mobilier. id.
27 mars. Décret qui annule tous les sursis à la vente des biens des émigrés accordés par le ministre de l'intérieur. id
29 mars. Décret relatif au compte à rendre par les administrateurs et agents chargés de la surveillance du mobilier de la ci-devant liste civile. id.
Adresse de l'escadron de cavalerie du Calvados. id
Adresse des officiers municipaux de la Rochelle à la Convention
nationale. Le ministre de Vintérieur, Signé : Garat. id
De l'Abbaye,
« Citoyen Président,
« J'ai énoncé dans ma pétition à la Convention nationale ma soumission aux décrets rigoureux qui me concernent. Trouvez bon que j'observe ici par supplément que le saisissement occasionné par mon arrestation subite a augmenté la maladie dont je suis attaqué et qui, faute de soins, peut, à 58 ans révolus, devenir incurable. Je joins ici les attestations des médecins à l'appui de ce que j'avance.
« Je demande donc en conséquence qu'on me permette de demeurer en état d'arrestation à la Lande, département de Seine-et-Oise, jusqu'à ce que ma santé qui commençait à s'améliorer, puisse me donner la faculté de me conformer au décret. Je demande encore que la Convention veuille bien nommer deux commissaires tirés de son sein, à l'effet d'examiner les certificats ci-joints. Ma conduite avant et depuis la Révolution, l'amour de ma patrie, attestée par ma rentrée en France, dès l'époque du 2 avril 1790, me font espérer que la Convention ne traitera point avec rigueur un citoyen qui, sûr de sa conscience, n'a rien à se reprocher et réclame ainsi de la République entière ce délai comme acte de justice.
« P.-S. — Mon état est tel que même à l'Abbaye, mon chirurgien habituel a été obligé de se constituer en état d'arrestation et de souscrire à la condition imposée de n'en point sortir et de ne communiquer avec personne. « Signé :. Louis-François-Joseph Bourbon. »
Suivent les certificats mentionnés dans la lettre :
I
Certificat du docteur Dufouard (2).
« Je, soussigné, de l'Académie de chirurgie et ancien chirurgien consultant des armées, certifie que Louis-François-Joseph Bourbon est, à ma connaissance, affecté depuis un grand nombre d'années d'une humeur dartreuse très mobile qui se porte alternativement sur toutes les parties essentielles à la vie et, particulièrement depuis environ cinq mois, sur le foie et la vessie, ce qui occasionne fréquemment des pissements de sang et ne peut permettre à Louis-François-Joseph Bourbon d'entreprendre un long voyage sans courir les plus grands risques pour sa vie.
_ « En foi de quoi, j'ai délivré le présent certificat, à Paris, le 9 avril 1793, l'an II de la République.
« Signé: Dufouard. »>
Certificat du docteur Soupé (1).
« Je soussigné, chirurgien de la prison de l'Abbaye, certifie qu'après avoir examiné le citoyen Louis-François-Joseph Bourbon, ci-dessus désigné, sa foi doit être ajoutée au présent certificat. Il a même craché le sang en ma présence.
« Fait à ladite prison de l'Abbaye, le 9 avril 1793, l'an II de la République française.
« Signé: Soupé. »
III
Certificat du docteur Labreuille (2).
« Je soussigné, ancien docteur régent de la faculté de medecine de Paris, certifie avoir, depuis trente-cinq ans et plus, soigné Louis-François-Joseph de Bourbon dans différentes maladies très graves, dont une, occasionnée par une humeur dartreuse, répercutée sur la poitrine, fut accompagnée d'un crachement de sang et d'un long crachement de pus qui ont laissé la poitrine délicate et très suceptible d'irritation; par une suite de la même humeur, il est resté sujet à des crachements de sang. Il est, depuis cinq mois, affecté d'un pis-sement de sang avec douleur, d'où il s'ensuit, selon mes connaissances et ma forte persuasion, qu'il est hors d'état à pouvoir soutenir et supporter un long voyage de long cours, sans courir un risque évident de sa vie dans de telles circonstances où il a besoin de repos, d'une continuité de régime et de remèdes pour être en état de supporter un long voyage.
« En foi de quoi, j'ai donné le présent certificat à Paris, le 9 avril 1793, l'an II de la République française.
« Signé : Pautier Labreuille ; Dutaret, chirurgien. »
(La Convention passe à l'ordre du jour.)
Deux lettres me sont parvenues,presque à la même heure; elles émanent du citoyen Bougon, procureur général syndic du département du Calvados. Je vais en faire donner lecture à l'Assemblée.
, secrétaire, donne lecture de ces deux lettres :
Première lettre du citoyen Bougon (3).
Paris,
« Citoyen Président,
« Chargé par l'administration du Calvados de soumettre à la Convention nationale des vues relatives à la défense et à la sûreté de nos côtes, je demande la faveur d'être entendu un instant.
« L'urgence et l'importance de l'objet me
« Le Procureur général syndic du département du Gcdvados.
« Signé: Bougon. »
Deuxième lettre sur le même objet (1) :
Paris,
« Citoyen Président,
« J'ai sollicité la faveur d'être entendu de la Convention nationale sur des objets qui intéressent le salut public. . Permettez que j'insiste de nouveau pour l'obtenir. La nature des choses que j'ai à dire et la mission expresse dont je suis chargée m'en font un devoir.
« Le Procureur général syndic du département du Calvados.
« Signé .- Bougon. »
(La Convention ordonne l'admission immédiate à la barre du citoyen Bougon. )
Le pétitionnaire est introduit; il s'exprime en ces termes (2) :
« Représentants du peuple,
« Deux mois se sont écoulés depuis que je vins à cette barre proclamer les dangers qui menaçaient les contrées, voisines de la Manche. Je vous disais, législateurs, des hordes d'émigrés et des réfractaires se forment dans les îles anglaises et préparent une invasion prochaine.
« Les cadavres encore sanglants qui couvrent les plaines de l'ancienne Bretagne, le drapeau blanc qui flotte encore en ce moment dans ce pays et l'armée contre-révolutionnaire qui formée tout à coup et dirigée par ces traîtres vient d'y porter le carnage et la désolation, n'ont que- trop justifié mes alarmes.
( Organe des administrateurs du Calvados, j'invoquais alors vos soins paternels pour le salut de nos concitoyens et je vous demandais à l'avance le remède à ces maux. Eh bien! je reviens apporter dans votre sein les mêmes vœux et les mêmes inquiétudes.
« Les périls de la patrie n'ont pas diminué. Les trahisons et les complots dans l'intérieur secondent les préparatifs formidables des ligues étrangères et semblent concourir avec eux. De nouvelles invasions se préparent et des descentes sont encore projetées. L'oeil le moins exercé aux mouvements de la guerre voit l'ennemi nombréux qui nous entoure, prêt à attaquer à la fois tous les points de la République.
« Chaque jour des vaisseaux anglais paraissent sur nos plages; leurs desseins hostiles se manifestent et sans le courage intrépide des habitants de nos campagnes, ils auraient déjà vomi sur nos rivages de nouvelles troupes de brigands.
« Cependant les moyens employés jusqu'à ce moment par le pouvoir exécutif
ne viennent ré-
( Pères de la patrie, agissez-vous-mêmes, secondez nos efforts et autorisez les mesures que nous vous proposons. La patrie vous devra encore une fois son salut et nos concitoyens leur existence.
« Je vous adjure donc, au nom de l'administration du Calvados, d'ordonner :
1° Que l'organisation de l'armée des côtes s'effectue sans délai;
« 2° Qu'il soit mis sur-le-champ à la disposition du directoire les sommes nécessaires aux dépenses qu'exige là défense intérieure et extérieure du département;
« 3° Qu'il nous soit délivré sans retard des munitions suffisantes et des armes, et de nous autoriser, dans le cas où on ne pourrait nous fournir assez d'armes, à en établir sur notre territoire;
« 4° Enfin, d'autoriser le projet que l'administration vous soumet d'une force locale destinée à maintenir l'ordre au dedans et à marcher sans la division sur les réquisitions des directoires ou des généraux.
« Au reste, législateurs, recevez-en l'assurance, nos âmes vigoureuses ne fléchiront sous le joug d'aucune tyrannie. A la liberté, à la liberté républicaine, nous avons consacré notre existence et nos bras, et le dernier de nos poignards est réservé à celui qui oserait tenter de relever ou d'établir un pouvoir suprême. Ce mot seul nous est en horreur. Quant à l'ennemi du dehors, nous saurons le combattre avec le même courage; si nos armées sont trop faibles, si le succès de la cause la plus juste devient douteux, nous marcherons noUs-mêmes. Alors, je saisirai d'une main la bannière du Calvados, cet oriflamme sacré de la liberté, et donnant à mes concitoyens l'exemple et le signal, nous jurerons de ne revoir nos frères qu'après avoir écrasé les ennemis de la République et assuré son entière indépendance. (Applaudissements. )
répond au pétitionnaire et lui accorde les honneurs de la séance.
(1). Je propose à la Convention de charger son comité de Salut public d'examiner les réclamations du département du Calvados et d'en faire un prompt rapport.
(La Convention décrète la proposition de Legot.)
(1). Je saisis cet instant pour faire connaître à l'Assemblée que je suis informé, par le procureur syndic du district de Bagneux, que la commune de Cartigny, qui ne devait fournir que quatre hommes pour son contingent et qui en avait fourni neuf, yient encore d'en fournir cinq, tous bien constitués et de taille de plus de cinq pieds six pouces.
(La Convention décrète la mention honorable et l'insertion de ce fait au Bulletin.)
Un membre, au nom du comité de division, donne lecture d'un rapport tendant à l'admission, comme député de Cayenne et de la Guyane française, du citoyen Pomme, dont les pouvoirs ont été vérifiés, ainsi que ceux du citoyen Bagot, qu'il propose ae désigner comme son suppléant (2).
(La Convention adopte les conclusions de ce rapport et admet le premier comme député, le second comme suppléant.)
(3). Je crois qu'il est de la dignité de l'Assemblée que les ministres des puissances étrangères avec lesquelles la nation n'est point en guerre, et qui ont reconnu son indépendance,puissent voyager librement dans l'intérieur du territoire; or, j'ai appris qu'un envoyé d'une nation qui a reconnu la République n'a pu obtenir un passeport de la commune de Paris. Je demande qu'il n'en soit plus ainsi, et que le ministre des affaires étrangères soit autorisé à délivrer les passeports suivant le mode ordinaire.
(La Convention nationale décrète que la loi portant suspension des passeports ne s'étend pas sur les agents des puissances étrangères accrédités, ni sUr les personnes de leur nation qui sont à leur service; et que le ministre des affaires étrangères est autorisé à leur délivrer des passeports suivant le mode ordinaire.)
(4). Il y a quelque temps qu'une dêputation se présenta, au nom d'une section, à la barre de la Convention, pour obtenir un décret tendant à défendre aux citoyens de sortir de Paris sans passeport. La Convention passa à l'ordre du jour. Cependant la commune a éludé cette disposition, en prenant un arrêté qui exige d'un citoyen qui voudrait sortir des barrières un laissez-passer de leur section. Le véritable laissez-passer est la cafte civique. Si la commune fait de Paris une prison, personne n'y viendra. Je propose de décréter que, tout en maintenant l'exécution de sa loi sur les passeports, la Convention nationale supprime l'usage des laissez-passer, établi par la commune de Paris pour sortir des barrières.
(La Convention décrète cette proposition.)
U n menribre, au nom du comité de Salut public, donne lecture d'un
rapport (5) et pré-
« La Convention nationale décrète ce qui suit :
Art. 1er.
« La Convention nationale met au nombre des tentatives contre-révolutionnaires la provocation au rétablissement de la royauté.
Art. 2.
« Le Conseil exécutif provisoire donnera sur-le-champ les ordres nécessaires pour que, conformément à la loi du 7 avril présent mois, le tribunal criminel du département du Nord, se- transporte sans délai à Valenciennes, et dans tels autres lieux de son arrondissement qu'il appartiendra, pour y juger aéfinitive-ment' et sans recours à la voie de cassation, tous les prévenus de provocation au rétablissement de la royauté, ou d'émeutes contre-révolutionnaires, et prononcer contre les coupables les peines déterminées par la loi du 19 mars dernier, et dans les formes prescrites par ladite loi.
Art. 3.
« Les tribunaux criminels de tous les départements de la République, sont également chargés de poursuivre et juger les mêmes délits dans les mêmes formes et d'après la même loi, et celles précédentes auxquelles il n'a pas été dérogé. »
(La Convention adopte ce projet de décret.)
U n autre membre (3) : La lettre des citoyens Lequinio, Cochon et Bellegarde, dont il a été hier au soir donné lecture à l'Assemblée (4), porte que, pour les sauver de l'indignation populaire, nos commissaires à Valenciennes font transférer le général Lescuyer et le secrétaire Quentin à Paris. Je demande le renvoi de cette lettre au Conseil exécutif provisoire, afin qu'il prenne les mesures nécessaires pour l'exécution des décrets rendus dans le jour d'hier pour faire conduire ces prévenus devant le tribunal révolutionnaire.
(5). Il serait préférable, au lieu de toutes ces mesures, que tous ces généraux qui, comme Lescuyer et Miac-zynsky, sont pris les mains pleines des preuves de leurs crimes, soient exécutés sur-le-champ.
(La Convention nationale décrète que la lettre des commissaires Lequinio,
Cochon et Bellegarde, concernant l'arrestation et l'envoi qu'ils ont
fait par-devant le tribunal criminel extraordinaire, séant à Paris, de
la personne
(2). Je demande à faire une motion qui intéresse essentiellement le salut public et que son objet ne permet pas de différer.
Citoyens, depuis longtemps l'orage grossit et grandit sur nos têtes; il est temps de le conjurer. Quelque redoutables que soient nos ennemis extérieurs, les ennemis intérieurs le sont davantage. Il est temps de leur arracher le masque d'une fausse popularité : Il est évident, pour tout observateur ou pour tout homme de bonne foi qui veut ouvrir les yeux, que chaque jour la représentation nationale est outragée et menacée.
Yoici encore un nouveau projet d'adresse qui circule dans toutes les section de Paris. Ce projet est celui d'une adresse à la Convention nationale, adoptée par une section, celle de la Halle-aux-Blés, et envoyée ensuite à toutes les autres. Je vais vous en donner lecture et présenter ensuite quelques observations.
En voici d'abord la teneur :
Projet d'adresse de la section de la Jdalle-aux-Blés à la Convention nationale.
« Législateurs, nous venons vous dire la vérité et nous espérons que vous ne nous forcerez plus de vous la dire.
« Jusqu'à présent nos pétitions ont été ensevelies dans la poudre de vos comités, de ces comités où siègent des mandataires coupables, qui viennent ensuite vous tromper par des rapports insidieux ou tard venus; et quant l'honnête homme, quand le républicain veut réclamer, les ennemis du bien public s'empressent aussitôt d'étouffer sa voix, si bien que, d'une façon ou d'une autre, elles ne produisent jamais les effets qu'on en attendait.
(( Représentants, nous venons vous présenter le vœu des sections de Paris, et nous pouvons vous affirmer que c'est le vœu de toute la France. Entendez-nous et entendez-nous pour la dernière fois.
« La nation française est lasse d'être continuellement en butte à des trahisons; elle est lasse de voir parmi vous d'infidèles mandataires qui abusent de sa confiance. Ont-ils donc oublié que le peuple est leur souverain ? Il faut donc le leur rappeler ; il faut leur dire qu'il veut que tous les traîtres tombent sous le glaive des lois. (Murmures.)
« C'est votre indulgence qui est la cause d'une partie de nos désastres.
Si vous aviez puni Dumouriez quand il vous fut dénoncé pour la première
fois ou lorsqu'il laissa échapper les brigands prussiens, il n'eût pas
conduit
« De même, si vous n'aviez pas protégé la cabale infernale qui méditait avec lui la ruine de la République, les Liégois et les Belges n'accuseraient pas aujourd'hui la France de ne les avoir secourus que pour les livrer enchaînés à leurs tyrans.
« Que cet exemple vous suffise; c'est le reproche que vous fait l'Europe entière et que vous fera la postérité.
« Qui méritait plus l'échafaud que ce Roland 'qui a violé le dépôt sacré de la nation, et qui, dès cet instant, s'est rendu capable de haute trahison. Cependant il respire encore, et médite peut-être de nouveaux crimes.
« Sous son administration, tous les bureaux du ministère étaient remplis de contre-révolutionnaires, à peine daignait-il nous écouter. Un Rouillac a refusé de prêter le serment civique, et quand nous vous le dénonçons, quand. Denormandieson chef, cité devant vous, s'excuse par un mensonge impudent, vous l'entendez et vous passez à l'ordre du jour. Peut-on marquer plus de mépris pour les lois et pour ce peuple que vous devez respecter !
« Partout où nous portons nos regards, nous ne voyons que des conspirateurs. Les officiers de nos armées ont été nommés par • Beurnonville et les employés sont ses créatures. Les tribunaux ne jugent point ou font échapper les criminels, et l'administration de la poste semble redoubler d'activité quand il faut servir nos ennemis,
« Toutes les sections de Paris, et la plupart des départements, vous demandent depuis longtemps une loi contre les accapareurs et les marchands d'argent; vingt fois vous avez promis de satisfaire à des réclamations aussi justes, et cependant le mal augmente chaque jour et vous le voyez tranquillement. Y a-t-il donc parmi vous des hommes intéressés à favoriser le monopole ? Ou d'autres espèrent-ils que le peuplé, lassé de ne pouvoir atteindre au prix exorbitant des objets de première nécessité, viendra demander humblement des secours et des fers? Us se trompent ceux qui le pensent. Le peuple périra dans la misère, mais il ne périra qu'après avoir vu la chute des intrigants qui triomphent de ses malheurs.
« Eh ! quoi, la patrie est en danger, l'ennemi est à nos portes, et c'est dans le moment où nous avons tout à craindre, où nos maux sont à leur comble, que vous diminuez le nombre de nos défenseurs et que vous affaiblissez vos moyens ! C'est dans ce moment que vous envoyez les députés patriotes dans les départements ! N'eût-il donc pas été plus sage de conserver vos frères? Est-ce donc une majorité corrompue, indigne de notre confiance et qui l'a déjà perdue à jamais, qui doit prononcer sur le sort de la République?
( Oui, législateurs, c'est parmi vous qu'existe cette ligue qui veut nous vendre à nos tyrans et qui embrasse toute la France. Nous sommes dans la Convention nationale, dans cette Convention nommée par le peuple, et nous y voyons nos plus grands ennemis ; ils ont l'audace d'y siéger ! Malheureuse patrie ! A qui as-tu confié tes intérêts ? Tu cher-
chais des défenseurs et tu as trouvé des hommes qui ne respirent que pour hâter l'instant de ta destruction.
Législateurs, il faut frapper un grand coup, il faut arrêter le mal dans sa source, il faut effrayer par le supplice des coupables, les mandataires qui oseraient un jour renouveler les crimes dont nous sommes les témoins et les victimes.
(( Nous demandons :
« 1° Que Roland soit décrété d'aècusa-tion et mis en état d'arrestation;
« 2° Que tous les employés dans les bureaux du ministère et dans les armées soient soumis à la censure la plus sévère et que ceux qui seront suspects soient destitués;
« 3° Que Denormandie soit chassé;
« 4° Que l'administration des postes soit renouvelée et que tous les chefs de bureau soient nommés par le peuple;
« 5° Que tous les officiers suspects ne puissent plus servir dans nos armées;
« 6° Qu'il soit fait une loi contre les acca-K parements et que la vente du numéraire soit défendue;
« 7° Que tous les députés soient rappelés, excepté ceux qui sont dans nos armées, et que l'on envoie dans les départements des citoyens patriotes, avec des pouvoirs exceptionnels;
« 8° Que tous les membres de la Convention qui, par leurs opinions ou par leurs écrits, ont trahi les intentions de leurs commettants, soient décrétés d'accusation;
« 9° Enfin, que ceux qui n'ont pas eu le courage de défendre la République, soient destitués et remplacés par leurs suppléants. (Applaudissements. )
« Montagne de la Convention, députés patriotes, c'est à vous que nous nous adressons pour sauver la République. Si vous ne vous sentez pas assez forts pour le faire, osez nous le dire avec franchise, nous nous chargerons de la sauver. La crise que nous éprouvons doit être la dernière; il faut que la France entière soit anéantie ou que la République triomphe. (Nouveaux applaudissements. )
« Arrête dans la section de la Halle-aux-Blés, que cette adresse sera envoyée aux 47 autres sections, pour recevoir, soit leur approbation, soit les modifications qui paraîtront convenables. » (Vifs applaudissements sur la Montagne et dans les tribunes.)
Je ne suis pas surpris d'entendre applaudir une pétition qui tend à dissoudre la
Convention nationale..... (Interruptions et murmures prolongés sur la Montagne.)
Je demande qu'on entende le rapport de Cambon, au nom du comité de Salut public; ensuite on discutera, si l'on veut, les conclusions de ce projet d'adresse pour lequel j'ai l'intention de demander la mention honorable. (Applaudissements de la Montagne.)
La parole est à Pétion.
Je ne suis pas surpris qu'une pétition qui tend à dissoudre la représentation nationale ait reçu des applaudissements.....
(Nouveaux murmures.)
Plusieurs membres (sur la- Montagne) : Le rapport du comité de Salut public !
L'ennemi est au camp de Maulde, occupons-nous de sauver la patrie.
s'élance à la tribune.
Plusieurs membres s'y précipitent en même temps que lui et demandent à combattre ce que vient de dire Pétion.
D'autres membres (du centre) conseillent, au contraire, à ce dernier de ne pas céder son droit de priorité et de rester à la tribune.
(Une agitation tumultueuse s'élève dans toutes les parties de la salle. Le Président se couvre. — La droite et le centre rentrent peu à peu dans le calme. — La tribune est toujours assiégée.)
Plusieurs membres : Nous saurons mourir, mais nous ne mourrons pas seuls !
Nous avons des enfants qui vengeront notre mort !
"Vous êtes des scélérats! (Applaudissements sur la Montagne et dans les tribunes.)
Plusieurs membres (du centre) : A bas le dictateur 1
menacent le centre qui répond à leurs attaques
Ce sera ton dernier crime ; je mourrai républicain et tu mourras tyran ! (Après quelques minutes d'agitation, les membres s'asseyent et le calme se rétablit.)
, découvert. La position où nous venons de nous trouver est extrêmement périlleuse pour la chose publique. Ce n'est qu'en faisant le calme dans nos délibérations que nous pourrons sauver la République. Il faut entendre toutes les opinions avec tranquillité; le droit de dire son avis est un droit sacré qui appartient à tout le monde. Si Danton a à répondre à Pétion, il aura la parole après lui.
Je la demande pour une motion d'ordre.
Ces tableaux forceraient les citoyens qui nous entendent à désespérer du salut de l'Etat, nous leur en devons d'autres. Je rappelle les représentants du peuple à leur serment, à leur dignité; j'invite les citoyens des tribunes au respect et au silence. Pétion, tu as la parole.
Je ne faisais pas aux citoyens de la section de la Halle-aux-Blés l'injure de croire qu'ils eussent pu faire une pétition aussi incendiaire, aussi évidemment tendante à la destruction de la représentation nationale. On sait assez, citoyens, comment ces pétitions se font dans les sections. Il n'y a qu'un petit nombre d'hommes dans les sections qui, en l'absence des vrais citoyens, font toutes ces motions subversives, avec lesquelles ensuite on jette le trouble, on mène à l'anarchie, on excite au pillage et à la dissolution de la République.
J'ai dit que je ne voulais pas accuser toute la section, mais seulement un petit nombre de citoyens. Vous conviendrez cependant qu'il est bien étrange, qu'au sein même de cette Assemblée, on aille autoriser des excès aussi coupables, que l'on souffre qu'on outrage à ce point la représentation nationale.
Quoi ! citoyens, l'avez-vous bien entendu 1 lia vous disent qu'ils vous énoncent le vœu de la
France entière; ils vous disent qu'il y a ici des conspirateurs, des monopoleurs, des hommes qui veulent étouffer la liberté; ils vous disent que la majorité de la Convention est corrompue. Mais, alors, où est donc la représentation nationale1? Nous a-t-on envoyés ici pour être abreuvés d'outrages? Serions-nous dignes de représenter la République entière, si nous ne sévissions pas, avec la dernière énergie, contre de pareils scélérats?... (Murmures sur la Montagne. )
Plusieurs membres (au centre) : Oui, oui !
, s élançant clans le milieu de la salle. Je donne ma vie et ma. conduite à examiner.
Tu n'as pas la parole ; elle est à Pétion.
Oui, citoyens, nous serions coupabples et même bien coupables si nous ne prenions pas de sévères mesures contre de pareils coquins, contre des hommes qui ont l'audace de s'adresser, après ces paroles, à une minorité, de lui demander si elle peut sauver la patrie et de dire ensuite : Nous nous chargeons, nous, de la sauver.
Ainsi, représentants, on viendra vous dire et vous écouterez de sang-froid ces paroles : Votre majorité est corrompue, nous sauverons la patrie. Et comment la sauveront-ils ? Est-ce par des brigandages ? Par des assassinats ?
Plusieurs membres (sur la Montagne) : Voilà le langage de Dumouriez.
Eh bien, citoyens, voilà comment on égare le peuple, comment on le fait égorger. (Nouveaux murmures). Voilà comment on le traîne dans le précipice; voilà ce qu'on appelle du patriotisme.
Un membre (sur la Montagne) ; C'est Dumouriez qui a égaré le peuple.
D'Orléans voulait régner et vous le protégiez.
Président, j'entends renouveler ce système infâme de calomnie que l'on suit avec une constance bien propre à corrompre l'opinion publique; on affecte de rapprocher mon opinion de celle de Dumouriez; mais on ne doit pas croire que ce système puisse durer. (Murmures). Depuis longtemps qu'entendons-nous sans cesse ? Des calomnies, des outrages, des dénonciations. Certes, il n'en coûte rien pour dire : Vous êtes un complice de Dumouriez, de d'Orléans, mais sans présenter le plus léger indice, et toujours lorsqu'on a envie de commettre des délits ou qu'on vient d'en commettre. On a toujours le soin de les attribuer aux autres. (Nouveaux murmures). C'est une tactique constante. Si l'on pouvait discuter avec calme, on parviendrait à prouver quels sont les calomniateurs et les complices des contre-révolutionnaires; mais on embarrasse sans cesse la délibération par des imputations personnelles et voilà comment on se masque soi-même, comme on a l'art de couvrir les délits, pour empêcher de les reconnaître. Aussitôt que vous montez à la tribune, vous êtes environné de soupçons; on crie après vous de la manière la plus scandaleuse, la plus indécente, parce qu'on croit que le public, qui vous entend, prendra ces vociférations pour des preuves. Voilà la manière dont nos discussions sont conduites dans cette Assemblée.
Et pourtant, quel est l'homme qui au fond de son cœur peut me soupçonner?
Plusieurs membres (sur la Montagne) : Moi, moi !
Un grand nombre de membres (sur les autres bancs) manifeste sa désapprobation par de vif s murmures.
Des preuves, donnez donc des preuves ?
N'est-il pas évident, citoyens, que les démarches qui sont faites depuis quelque temps auprès de l'Assemblée ne tendent qu'à l'avilir, qu'à la deshonorer, qu'à la compromettre? N'est-il pas évident, dis-je, que toutes ces trames, faites pour la jeter dans des mesures inconsidérées, partent de comités secrets ou particuliers? Tout se trouve coïncider en même temps. D'un côté ce sont des calomnies qu'à profusion on répand sur les vrais défenseurs de la liberté, de l'autre c'est tout un système de terreur et de menaces propres à entraîner les hommes faibles, à embarrasser les délibérations et entraîner ces votes de surprise, qui sont si désastreux, lorsqu'il s'agit de pallier certains désordres ou de provoquer certains mouvements révolutionnaires.
Plusieurs membres : Citez-en !
Par exemple, ne cherche-t-on pas sans cesse à diviser la Convention en deux partis...
Les mêmes membres : C'est vous !
Non, ce n'est pas nous, car les appelations seules vous dénoncent et vous condamnent.
Les mots de patriotes et de non patriotes, qu'emploient les agitateurs pour diviser, la nation, n'ont pas d'autre origine que le vocabulaire de vos oracles révolutionnaires, qui pour en faire bien sentir la nuance traitent de non patriotes ceux qui possèdent quelque chose et de patriotes ceux qui' n'ont rien. En voulez-vous un autre exemple ? Depuis quelques jours, on veut sans explications, et pourtant il faut des explications; eh bien, depuis quelques jours, dis-je, on veut faire une armée de sans-culottes. Qu'entend-on par sans-culottes? Si on entendait par ce mot les braves citoyens du tiers état...
Plusieurs membres, ironiquement : Ah ! ah ! le tiers état !
Président, il faut bien se servir d'un terme intelligible (Murmures). Eh bien, si on entendait par ce mot les braves citoyens du tiers état; nous pourrions être avec vous, mais on entend par sans culottes, non tous les citoyens, les nobles et les aristocrates exceptés, mais toua les hommes qui sont propriétaires pour les distinguer de ceux qui ne le sont pas.
Voilà le moyen qu'on emploie sans cesse pour jeter la division dans l'Assemblée et dans la nation; voilà comment on amène la guerre sourde et intestine qui se répand dans toute la République. (Murmures prolongés sur la Montagne.)
Ce moyen, dont je viens de parler, est employé par les auteurs de l'adresse que j'ai dénoncée. Je maintiens que cette adresse né peut être faite que par des hommes en délire ou des royalistes contre-révolutionnaires, (/n-
terruptions sur les mêmes bancs.) Qui peut désirer, en effet, dans la République la dissolution de la Convention nationale, si ce n'est ceux qui regrettent l'ancien régime, ou, si vous préférez, les aristocrates déguisés et les royalistes. Pour moi, cette adresse n'a pas d'autre but. Elle l'a de la manière la plus indécemment prononcée, et je dis qu'il nous est impossible de tolérer les outrages qui vous y sont faits. Je répète que nous ne serions pas dignes de la confiance publique, si nous souffrions que l'on vînt nous dire que la majorité de la Convention est corrompue, et que d'autres que nous doivent sauver la chose publique. Certes, nous usons d'une indulgence coupable, d'une indulgence qui fait mépriser la Convention nationale. Il faut déployer de la force et de la sévérité, surtout contre ces ennemis de la chose publique, car cette impunité les enhardit et les provoque à de nouvelles tentatives et de nouveaux crimes. Yous aviez -ordonné la poursuite des pillages de février et des conspirations du 9 au 10 mars. Ces poursuites sont-elles faites ? Non. Vous avez dans votre sein un homme couvert d'opprobres, un homme qui vous a prêché le despotisme sous tous ses formes. (Mwmures sur la Montagne.)... Oui, le despotisme, le royalisme, le triumvirat, le meurtre et le pillage; eh bien, non seulement il siège parmi nous, mais, certes, il obtient bien plus aisément la parole qu'un homme connu par sa probité et ses mœurs. (Murmures prolonges sur les mêmes bancs.) Rappelez-vous ce qui se passait au commencement ae nos séances, à peine un membre voulait-il s'asseoir à côté de lui. Aujourd'hui, il obtient sans cesse la parole, lui seul a le droit acquis de dénoncer, de calomnier, et comme il ne s'en faft pas faute, il dénonce tous les jours les meilleurs citoyens.
Un membre : Et Dumouriez; il a pourtant dénoncé Dumouriez.
J'entends dire : Il a dénoncé Dumouriez. Sans doute, mais je réponds Qu'il n'est pas étonnant qu'il ait rencontré la vérité, quand on dénonce tout le monde, il n'est pas impossible de trouver un coupable. (Applaudissements au centre.) Comment voulez-vous qu'un homme qui n'est nourri que de fiel et de calomnies, qui ne voit partout que des conspirateurs, ne tombe pas un jour juste et ne rencontre en son chemin un traître, soit dans les administrations, soit dans les armées ? (Murmures sur la Montagne.) D'ailleurs je lui supposais d'autres motifs; notamment quand je le voyais dénoncer Dumouriez et .qu'il ne dénonçait pas Egalité. (Applaudisse ments.) quant au contraire, il le défendait qu'il ne dénonçait pas Egalité; (Applaudisse-sements au centre.)
Je reviens à l'objet qui nous occupe. Si tous les citoyens allaient dans leurs sections, je me serais bien donné de garde de vous dénoncer une pareille adresse, car certainement cette adresse eût été vue, comme vous le voyez vous-mêmes, avec une profonde indignation. Mais comme tous les citoyens ne sont pas assidus à leurs sections, comme il y a des hommes qui ont intérêt à s'y trouver, il fallait inviter les bons citoyens à s'y rendre afin de prévenir le coup que cette adresse pouvait porter à la Convention.
Il faut qu'on sache bien le moyen employé
en pareille circonstance. On vient à la barre de la Convention et on lui dit : « Ce sont tous les citoyens composant telle section » et on laisse croire que ce sont les citoyens de toutes les sections de Paris qui viennent exprimer leur vœu ; alors que ce ne sont que 20 ou 30 personnes, dont les unes sont soudoyées, les autres des royalistes déguisés, qui sont continuellement là et qui. choisissent précisément le jour où il n'y a presque personne pour prendre toutes ces délibérations désastreuses.
J'ai donc cru qu'il était important pour la chose publique de vous dénoncer cette adresse. Le pian des signataires est arrêté, il est connu. On a fait à cette heure circuler ce projet d'adresse dans toutes les sections, on tâte l'opinion et on prépare les esprits à toutes ces horreurs, à toutes ces dénonciations, à toutes ces calomnies, de façon à obtenir et à rendre la dénonciation plus générale. C'est demain que les commissaires des différentes sections doivent se réunir et arrêter un projet d'ensemble. La pétition vous sera infailliblement présentée dimanche.
Voilà par quels moyens on parvient à exciter le trouble et le désordre. On voudrait bien avoir une insurrection, mais on ne l'obtiendra pas, car il faut bien l'avouer, la masse du peuple est excellente. Je suis sûr qu'il n'y a pas plus de 4 ou 500 misérables en tout, qui sont cause de ces mouvements-là. (Applaudissements sur un grand nombre de bancs.)
Il faut pourtant que cela finisse. Il faut que tous les citoyens soient invités à se rendre dans leurs sections, car je le maintiens, si la Convention demandait un appel nominal sur cet objet de toutes les sections de Paris, je suis convaincu que l'immense majorité des citoyens la désapprouverait et vouerait à l'indignation et a l'infamie les hommes abusés, imbéciles ou scélérats qui ont rédigé le projet que j'ai dénoncé.
Je ne sais comment, dans cette enceinte, on a l'audace ou la bassesse d'applaudir à son propre déshonneur ? Quoi, on entend dire que la majorité est corrompue, et il n'y a pas un mouvement unanime dans l'Assemblée, pour repousser une pareille injure ! Que dira-t-on dans les départements ? Quoi, l'Assemblée entière ne s'est pas levée d'indignation, lorsque des hommes ont le délire de vous dire qu'ils sauveront la patrie ! Murmures prolonges.)
Et vous, pourquoi êtes-vous donc là ? Est-ce pour être témoins de la perte de la République, et spectateurs tranquilles de toutes les infamies et les trames qui s'ourdissent contre vous?
Citoyens, je ne proposerais pas que tous les signataires de l'adresse soient mandés à la barre; mais je demande que le président et les secrétaires de la section y soient mandés. Si ce sont eux qui ont signé le projet d'adresse, je ne doute pas que la Convention ne les envoie au tribunal révolutionnaire. (Applaudissements.)
monte à la tribune. Il est salué par les applaudissements de la Montagne et des tribunes.
(1). C'est une vérité incontestable
Citoyens, considérez bien attentivement les passions qui doivent posséder un grand peuple dans un moment de révolution, et ensuite examinez en vous-même la nature de vos propres passions; vous verrez alors comment- vous devez juger la partie du peuple qui peut mettre de l'exagération dans ses opinions.
Je vais examiner froidement le projet de décret présenté par Pétion; je n'y mettrai aucune passion, mais je conserverais mon immobilité, quels que soient les flots d'indignation qui me pressent en tout sens. Je sais quel sera le dénouement de ce grand drame; le peuple restera libre; mais quel que soit le sort de la liberté, j'aurai toujours le même caractère. J'aime la République, je la désire pour le salut et la grandeur de ma patrie; je prouverai que je marche constamment à ce but. (Vifs applaudissements. )
Pétion a disséqué le projet d'adresse qui vous a été lue; je n'en connaissais .que la dernière portion lorsque j'en ai demandé la mention honorable, car, lorsque je suis entré dans la salle on en était à la fin. J'estimais qu'il y avait dans cette adresse des articles vraiment bons... (Murmures sur certains bancs de droite.) Je rétablis les faits relativement à ce -que j'ai entendu, je ne m'explique pas ces murmures.
Je dis que la conclusion que Pétion a tiré de son discours est pour le moins insignifiante et ne peut produire aucun effet. Yoici comment je le prouve.
Nous savons tous que dans différentes parties de la France, chaque portion de la République a jugé nos débats, selon les passions qui dominaient ici ou suivant l'influence qu'avaient dans l'Assemblée certains de leurs représentants. Nous savons tous qu'alternativement on a demandé la tête des membres qui siégeaient dans l'un ou l'autre côté de la salle. N'a-t-on pas aussi demandé ma tête, et cela d'une manière telle, que la demande a provoqué dans cette assemblée un mouvement de mécontentement et d'indignation générale ? N'est-on pas venu également, sans qu'il y ait de jugement rendu par vous, de chasser de la Convention, comme indignes de porter le nom de Français, certains citoyens que nous avons encore l'honneur de compter parmi nos collègues ? Des administrations, des départements, et notamment le département du Finistère, ont émis, en ce qui me concerne, une pareille opinion.
Eh bien, citoyens, remarquez quelle serait la conséquence générale de la
proposition de Pétion. Tous les jours il arrive des pétitions
Que doit faire alors la représentation du peuple ? Elle doit être immobile et mettre à profit toute cette énergie? ces excès mêmes. Et là encore, je suis certain que Pétion ne me contredira pas, car mieux que personne, il connaît, lui, la force de cette énergie populaire. Rappelez-vous la première Assemblée constituante. Marat n'était ni moins terrible aux aristocrates, ni moins odieux aux modérés. Eh bien ! Marat y trouva des défenseurs. U disait aussi que la majorité était mauvaise, exécrable, parce qu'elle l'était réellement. (Murmures à droite et au centre.)
Ce n'est pas que je croie qu'il en soit de même dans cette Assemblée. Mais comment devez-vous répondre au peuple, quand il vous dit des vérités sévères ? Je veux les prendre dans toute leur force. J'estime que vous devez répondre à une portion du peuple, qui vous dirait que vous vous êtes montrés indignes de votre mission, en prenant de grandes mesures et en sauvant la patrie.
Eh ! depuis quand vous doit-on des éloges ? Etes-vous à la fin de votre mission ? (Applaudissements.) En vertu de quoi un citoyen aurait-il ' perdu le droit de s'expliquer, et sur ceux qui le gouvernent et sur ceux qui font les lois? On parle de calomniateurs? La calomnie, dans un Etat libre, n'est rien pour l'homme qui a la conscience intime de son devoir. (Nouveaux applaudissements.) Je vous ramène à un axiome politique vraiment trivial. Tout ce qui a rapport à la calomnie ne peut être la base d'une délibération dans la Convention. Il existe des lois contre ceux qui veulent porter atteinte à la République ou à la personne d'un ou plusieurs représentants; que ceux qui croient devoir poursuivre cette adresse l'y poursuivent. Mais si vous délibérez sur cet objet, pourquoi ne délibéreriez-vous pas aussi sur l'adresse de Marseille? Voyez sur quelle mer vous vous embarqueriez. Oui, je le déclare, vous seriez indignes de votre mission, si vous n'aviez pas constamment devant les yeux ces grands objets : vaincre les ennemis, rétablir l'ordre dans l'intérieur et faire une bonne Constitution. (Applaudissements.) Nous la voulons tous cette Constitution, la France la veut, la demande, et elle l'aura d'autant plus belle, qu'elle sera née au milieu des orages de la liberté. Ainsi, un peuple de l'antiquité construisait ses murs en tenant d'une main la truelle et de l'autre l'épée pour repousser les ennemis.
Ne nous effrayons donc pas de ce qu'on appelle calomnie, rallions-nous comme nous en sommes convenus, faisons notre devoir, prenons ce qu'il y a d'énergie dans les adresses que le peuple nous envoie, et n'allons pas surtout nous faire la guerre en faisant délibérer les sections sur des calomnies, sur des opinions politiques, tandis que nous devons concentrer leur énergie pour la diriger contre les Autrichiens.
Je répète donc qu'il est impolitique de convoquer les sections pour délibérer sur cette adresse; je répète que si un décret portait une pareille disposition, elle devrait s'étendre à toutes les adresses, quelques principes qu'elles manifestassent. Que l'on ne vienne donc plus nous apporter de dénonciations exagérées, comme si l'on craignait la mort... (Interruptions et murmures.)
Plusieurs membres (à droite) : Oh ! oh !
Je ne crains pas la mort pour moi, mais je crains celle de la République.
Voilà les preuves de sagesse, voilà l'exemple de raison que vous donnez, et vous voulez faire le procès du peuple. Vous voulez sévir contre lui et vous êtes cent fois plus violent. (Murmures à droite et au centre; applaudissements sur la Montagne.)
Plusieurs membres (du centre) : Au fait, vous ne parlez pas dans la question.
On me dit de venir au fait ; ah ! n'y suis-je pas venu au fait? N'ai-je pas parlé de vaincre les ennemis, de rétablir l'ordre, de faire une Constitution ? J'y suis au fait.
Tout à l'heure quelques-uns d'entre vous ont eu la stupide lâcheté de dire que je voulais être dictateur; il vous sied bien de vous élever contre le peuple, lorsque vous écoutez des calomnies pareilles, surtout lorsqu'il vous dit de si énergiques vérités.
Je soutiens donc que la discussion qui a été entamée sur cet objet est insignifiante et ne peut avoir aucun effet; je soutiens que vous devez être tout entiers aux grands intérêts de la République qui appelle vos soins; je soutiens que quand même il y aurait lieu à une discussion profonde sur cette adresse, vous devriez l'ajourner en ce moment, car il est quelque chose de plus important que je vous rappelle, c'est le rapport qu'a à vous présenter le comité de Salut public. (Interruptions sur certains bancs.)
Notre marine peut se présenter encore d'une manière imposante. Le comité va vous dire que le ministre de la marine, d'après sa propre déclaration, ne peut suffire au fardeau qui lui est imposé. Il faut, à l'instant même, choisir un autre ministre, qui donne plus d'impulsion à l'action, qui réponde à la force des circonstances. L'influence de l'équi-noxe est passée; les Anglais, enhardis par les premiers succès de nos ennemis, vont infester toutes les mers. Eh bien, augmentons notre marine, vainquons nos ennemis; nous avons l'Europe pour point d'opposition. C'est là, c'est là seulement que doivent aboutir nos efforts et non à nous faire la guerre. Si notre gouvernement était affermi, si nous n'avions plus à discuter que des lois ordinaires, peut-être serait-il bon qu'il y ait une agitation réelle, une sorte d'opposition qui donne aux discussions une forme en quelque sorte dramatique, pour lui donner plus de force et d'intérêt; mais quand l'Europe nous presse, comment se fait-il que nous ne composions pas tous une seule et même phalange pour la vaincre ou pour mourir ensemble?
Je demande donc la question préalable sur l'adresse en question, et que, si on fait un
rapport, on y enveloppe tous ceux qui, par leurs écrits ou leurs actions, ont contribué à disséminer des principes dangereux. (Murmures au centre.) En effet, si Paris montre une espèce d'indignation, il a bien le droit de reporter la guerre à tous ceux qui ont eu la hardiesse ou la lâcheté de le calomnier après les services qu'il a rendus. (Nouveaux murmures.)
Un membre ; Ce n'est pas le peuple de Paris.
Je demande surtout, qu'avant toute discussion, vous entendiez à l'instant même le rapport que votre comité de Salut public doit vous faire sur notre marine.
(La Convention décrète que Cambon sera tout d'abord entendu, et qu'ensuite la discussion sur la proposition de Pétion sera reprise.)
, au nom du comité de Salut public, donne lecture d'un rapport et présente un projet de décret qui nomme Dalbarade, ministre de la marine; il s'exprime ainsi (1) :
Citoyens, la surveillance que vous avez confiée à votre comité de Salut public, sur tous les agents du pouvoir exécutif, lui a imposé l'obligation de se faire rendre par tous les ministres un compte exact de la situation actuelle de la République, et des mesures qu'ils croyaient devoir prendre dans les grandes circonstances où nous nous trouvons. Ce compte ne nous ayant pas satisfait, le comité vous a proposé d'autoriser vos commissaires dans les départements, de correspondre directement avec lui, et de lui rendre un compte détaillé des opérations du pouvoir exécutif. Par ce moyen, vous pouvez être assurés que vos armées ne manqueront d'aucun des objets nécessaires à leur approvisionnement.
Le ministre de la marine nous a donné des éclaircissements sur l'état de notre marine; le tableau qu'il nous a présenté sera incessamment mis sous vos yeux; mais en même temps il nous a dit que le fardeau dont il était chargé était au-dessus de ses forces; qu'accoutumé à un travail de cabinet, l'activité nécessaire à un temps de guerre lui manquait absolument. J'offre à la République tous mes services, nous a-t-il dit; je serai premier commis dans l'un de mes bureaux, si elle le veut, mais je ne puis plus continuer le ministère : je demande un successeur. Votre comité, en rendant justice au zèle et au patriotisme du citoyen Monge, vous propose, pour le remplacer, le citoyen Dalbarade, adjoint au département de la marine.
(La Convention adopte à l'unanimité la proposition du comité de Salut public.)
Suit le texte définitif du décret rendu (2) :
« La Convention nationale, après avoir en^ tendu le rapport de son comité
de Salut public, décrète que le citoyen Dalbarade, adjoint au ministre
de la marine, remplacera
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la proposition de Pétion (1), le parole est à Boyer-Fonfrède.
(2). Je vais faire une proposition qui, je crois, ne trouvera pas de contradicteurs.
Lorsqu'on prépare, dit-on, une adresse insolente adressée à la minorité de cette assemblée, j'ai le droit de m'adresser à la majorité et de venger la nation des outrages qu'on a osé faire ici à ses représentants. Je ne ferai pas au peuple, comme le préopinant, l'injure de croire, ou de dire au moins que cette adresse soit son ouvrage; elle est souscrite par quatre individus, et je n'ai pas encore pris l'habitude de prendre quelques hommes pour le peuple; cette marche est commode; elle n'en imposera ni à vous qu'on veut avilir, ni au peuple dont on veut usurper les droits. J'abhorre et l'esprit de parti et l'esprit de faction; leur rage doit se fondre sans doute en énergie contre l'ennemi qui nous menace et nous presse; mais enfin il est permis d'attaqur cette faction des ennemis de la patrie, qui accuse de corruption la majorité de cette Assemblée ; je la révère moi, et je l'accuse aussi, mais c'est de faiblesse.
On accuse la majorité de cette Assemblée de corruption ! Et qui l'accuse ? C'est Dumouriez qui veut la dissoudre. Qui l'accuse ? C'est Egalité lorsqu'il passe à l'ennemi. Qui l'accuse ? Ce sont les rois qui veulent détruire la République. Qui l'accuse? Les royalistes qui vous redemandent le tyran dont vous avez abattu la tête. Qui l'accuse enfin? Tous les nobles, tous les prêtres, tous les rois, tous ces tyrans obscurs qui versent le sang pour .avoir de l'or, et qui sont même trop vils pour aspirer au pouvoir, si le pouvoir ne menait pas à la fortune. Voilà quels sont ceux qui vous accusent de corruption; ils vous accusent de corruption, parce qu'ils n'osent pas vous accuser d'avoir fondé la République, d'avoir déclaré la guerre à la royauté, d'avoir enfin banni ces Bourbons qu'ils ont longtemps défendus, et dont le chef méprisable vous fait ainsi ses adieux. Voilà quels sont ceux qui vous accusent; voilà les motifs qui les guident : reconnaissez-les aux traits fidèles que j'ai dépeints. (Vifs applaudissements sur un grand nombre de bancs.)
Eh ! sans doute, il faut marcher droit au but; il faut d'une main
repousser l'ennemi, et de l'autre élever une Constitution : mais quelle
est donc cette nouvelle perfidie? Vous
Citoyens, c'est ici, c'est dans cette enceinte que doit résider le génie de la nation dans toute sa vigueur; ne la laissez donc pas avilir : si vous perdez le sentiment de votre dignité, le peuple perdra le sentiment de sa force; les sentiments généreux se communiquent, et c'est dans l'Assemblée de ses représentants que le peuple doit prendre l'exemple du courage. Cette adresse, dictée par les ennemis de la liberté, colportée par quelques royalistes , adoptée peut-être par quelques citoyens égarés, doit être improuvée par vous, comme vous avez improuvé celle de Marseille; elles sont dictées peut-être par les mêmes hommes, mais à coup sûr par le même esprit. Je demande l'improbation et le passage à l'ordre du jour.
Plusieurs membres : Appuyé, appuyé !
D'autres membres demandent, au contraire, que la discussion soit fermée.
Je demande la parole pour des faits.
Citoyens, cette adresse ne peut avoir été dictée, à mon avis, que par les agents d'Egalité qui travaillent à le mettre sur le trône. Je vous ai lu dernièrement une lettre dans laquelle on m'assurait qu'Egalité était sorti de Paris pour aller sonder les départements, afin de savoir s'ils le voudraient accepter pour roi. Je vous ai dit, en même temps, que j'attendais une lettre qui ne laisserait plus aucun doute sur la vérité de ces faits. Citoyens, cette réponse m'est parvenue, la voici :
Extrait d'une lettre datée de Séez, département de l'Orne le 5 avril 1793.
« Si je ne vous ai pas fait un détail circonstancié relativement à Egalité, c'est que je ne vous instruisais de son passage que parce que je le crois homme dont il est prudent de se méfier, même de ces actions qui paraissent indifférentes; d'ailleurs, je n'avais de certitude sur son voyage en Bretagne que par le bruit public, qui, dans ce pays, ne paraît pas lui être favorable, puisqu'on le soupçonnait déjà d'être fomentateur des événements fâcheux qui s'y sont passés. Ces faits n'ont assurément pas lieu pour avoir été occasionnés par son passage à Séez, le 22 mars dernier, puisque je me suis assuré, par une des domestiques du citoyen Broquet, aubergiste à l'hôtel d'Angleterre, à Séez, où il logea, qu'il avait dit qu'il allait à Alençon voir le département; il se donna le nom du citoyen Fécamp, intendant d'Egalité. Par le détail qu'on m'a fait de sa taille, de sa figure rouge et bourgeonnée, que j'ai vue souvent à Eu, il n'y a pas de doute que c'est Egalité père lui-même. Il invita son aubergiste d'aller à Alençon avec lui dans sa voiture,
parce que, vraisemblablement, c'était pour l'annoncer auprès de son beau-frère Hommez, ci-devant procureur à Séez, homme fait pour lui être utile, vu qu'il est actuellement membre du département à Alençon; mais ce particulier ne put l'y accompagner, à cause qu'il se trouva forcé de partir avec le détachement de volontaires, destiné pour la Bretagne : alors j'ignore ce qu'a pu faire notre homme en question.
« U logea à l'hôtel du Maure, chez Bussy, .à Àlençon, autre beau-frère de notre membre du département (et faites attention qu'il y a des désordres à Argentan, lieu où il a passé) ; mais ce que je puis vous assurer, c'est, qu'à son retour par Séez, le lundi 25, il logea au même hôtel qu'à son départ; et passant sur la place, il fut arrêté par la garde; alors il montra un passeport sur lequel il était dénommé : Philippe premier, Egalité. Quant à la conversation qu'il eut, en passant par Séez, avec l'aubergiste qu'il fit monter à sa chambre, et avec lequel il but du vin, il l'interrogea pour savoir ce que l'on disait de lui, s'il était aimé dans ce pays, et si le peuple serait fâché ou bien aise de l'avoir pour roi. A quoi il lui fut répliqué qu'il n'avait pas assez de connaissance pour lui répondre rien d'affirmatif.
« Sans doute qu'Egalité n'aura pas manqué d'interroger les aubergistes par où il a passé. U n'avait avec lui qu'un jeune homme de .14 ou 15 ans; il voyageait en poste. _ « Si ces détails peuvent être de quelque utilité à ma patrie, je me réjouis d'avance d'avoir pu la iservir au moins en quelque chose.
« Signé : Anqtjelin.
« P.-S. J'ai rayé deux lignes qui contenaient un fait que j'ai vérifié être faux. »
Citoyens, ce post-scriptum doit vous faire voir que tous les faits ont été vérifiés, et qu'il est impossible de les révoquer en doute.
Je demande à faire une observation sur la proposition de Fonfrède, il vous a demandé de passer à l'ordre du jour sur la pétition qui a été dénoncée par Pétion, attendu que vous avez tenu la même conduite relativement à celle qui vous fut présentée par Marseille. Mais je vous prie d'observer que nous nous trouvons ici dans des circonstances bien différentes de celles où nous étions lors de la pétition de Marseille. Fonfrède a oublié que depuis cette pétition une loi punit de mort ceux qui proposeront de dissoudre la Convention, or la pétition qui vous est dénoncée ne tend évidemment qu'à ce but. J'appuie à cet égard la proposition de Pétion; et quant à la lettre dont je viens de vous donner lecture, je demande que l'Assemblée nomme des commissaires, afin d'aller dans le département de l'Orne saisir les fils de cette conspiration nouvelle des 9 et 10 mars. Je propose également ■que ces commissaires soient investis des pouvoirs nécessaires pour tfaire arrêter toutes personnes relativement aux faits que je viens de vous dénoncer et de les poursuivre suivant la rigueur des lois.
Un membre : Je suis de la ville de Séez, j'ai écrit à la municipalité de cette ville de se saisir de l'aubergiste dont vient de parler Dela-liaye; de l'interroger et de me faire passer ses
réponses : je communiquerai à l'Assemblée la lettre qui me parviendra.
Le fait est assez important pour charger un tribunal de suivre cette affaire; j'en demande le renvoi à l'accusateur public.
Plusieurs membres : Quand on aura des preuves.
U vous faut des renseignements pour cela. Je demande qu'Egalité soit mandé à la barre.
Dautres membres : Non, non !
Je demande la parole.
La parole est à Guadet.
(1). Citoyens, je demande tout d'abord que l'Assemblée statue sur la proposition de Delahaye.
Quant à la proposition qu'on a faite du renvoi immédiat au tribunal extraordinaire de tous ceux qui semblent avoir pris une part quelconque aux troubles qui divisent à cette heure les départements de la Vendée et autres, ea d'autres termes d'Egalité et de ses complices, je m'y oppose, car il est évident pour moi que ce tribunal ne veut point poursuivre les fauteurs de cette conspiration qui tient essentiellement à celle du 10 mars.
Je demande la parole après Guadet, pour dénoncer les vrais coupables.
Un décret de la Convention nationale avait ordonné au tribunal révolutionnaire de s'occuper, incessamment et dans les premiers instants de sa formation, de la poursuite des chefs de la conspiration tramée les 9 et 10 mars, contre la Convention nationale; et, certes, il est plus qu'étonnant, si Robespierre connaît les véritables traîtres......
Oui, je les connais.
qu'il ne soit pas déjà allé à l'accusateur public pour exciter son zèle et les dénoncer.
Je veux les dénoncer à la Convention.
J'entends dire que cette conspiration se lie à celle de Dumouriez, celle
qui vient d'éclater dans le centre même de l'armée française : je n'en
ai pas le moindre doute, et il faudrait être bien dépourvu de sens, pour
ne pas apercevoir la liaison de ces deux conspirations. Mais c'est parçe
que je considère ces deux conspirations comme liées entré"elles, c'est
parce qu'elles n'en forment qu'une, que je sollicite la poursuite
rigoureuse et prompte de cette grande conjuration. Ce n'est qu'à la
lueur d'une procédure que l'on pourra suivre les fils de cette
conspiration et que le peuple, qu'on parle sans cesse de venger,
connaîtra
Car, citoyens, ne vous y trompez pas, on ne cherche à vous environner d'opinions factices qu'afin de vous déguiser la véritable opinion publique. Or, l'opinion factice, qui nous environne, ressemble, si je puis m'exprimer ainsi, à ces coassements de crapauds...
Vil oiseau, tais-toi !
L'opinion factice, dont on nous environne, ressemble, je le répète, aux croassements des crapauds qui, au rapport de je ne sais quels voyageurs, sont, pour certains sauvages, l'expression de la volonté de leurs dieux. Moi, je ne connais d'opinion véritablement imposante, pour l'homme de bien, que celle de la masse du peuple français. Or, celle-là, il faut l'éclairer, non par des procédures précipitées qui tendraient à faire absoudre les coupables, mais par la recherche des preuves qui mettraient les tribunaux à même de suivre le fil des conspirations. C'est pourquoi citoyens, je repousse le renvoi immédiat au tribunal extraordinaire et je demande, ainsi que l'a fait Delahaye, la nomination de 4 commissaires pour vérifier les faits.
Mais, dira-t-on, ne sentez-vous pas que ces faits sont faux, qu'ils sont tout au moins exagérés? C'est possible, je le crois même; je maintiens cependant que, dans un aussi grand péril, lorsque la liberté est menacée, il ne faut se permettre de négliger aucun moyen de découvrir la vérité, et c'est par les commissaires que vous enverrez sur les lieux que vous la découvrirez.
Je demande que ces commissaires aient le pouvoir d'envoyer les coupables au tribunal révolutionnaire. Je demande aussi que l'accusateur public du tribunal révolutionnaire soit mandé à votre barre et y rende compte de sa conduite. Il doit nous faire connaître les motifs qui l'ont empêché, en violation du décret de la Convention nationale, de n'avoir pas occupé les premiers moments de ce tribunal à découvrir les fils qui relient cette conspiration, qui éclata à Paris, les 9 et 10 mars, avec celle qui a été tramée par Dumouriez.
Citoyens, ne vous y trompez pas; le moment est venu de déployer votre énergie et de la déployer tout entière. Je l'ai dit, il y a quelques jours à cette tribune, la République est perdue......
Plusieurs membres : Non, non !
si vous continuez à user d'une indulgence, qu'on peut appeler coupable, envers les conjurés, envers ceux qui travaillent sourdement, que dis-je, publiquement, à la dissolution de la Convention nationale.
Ne sentez-vous pas, citoyens, que le despotisme s'avance au milieu de la désorganisation et de l'anarchie ? Ne sentez-vous pas que ceux-là rendent un roi nécessaire au peuple, qui le provoquent sans cesse au désordre? Citoyens, les hommes ne sont rien dans les résolutions et je partage là-dessus l'opinion de Danton. Qu'importe au salut public que tel ou tel homme soit abreuvé de calomnies et de diffamation : c'est la liberté qui est tout; c'est elle qu'il faut préserver, c'est elle que la patrie
à genoux vous demande de sauver. (Double salve d'applaudissements.)
Or, vous ne la sauverez pas, tant que vous souffrirez que des scélérats, que l'on investit cependant du nom sacré du peuple, viennent vous dire que la majorité d'entre vous est corrompue, qu'il n'y a dans cette Assemblée que quelques hommes qui puissent sauver la République, et qui, doutant encore qu'ils le puissent faire, sont là, disent-ils, pour la sauver eux-mêmes.
Il importe, peut-être, à leurs projets que cette majorité ait vraiment l'impuissance de la sauver. Citoyens, ou vous représentez la j nation française, ou vous n'êtes rien. Si vous I représentez la nation française, vous lui devez, vous devez à son salut de punir de pareils i outrages, vous devez à la loi, que vous-mêmes avez portée, de ne pas laisser impuni un tel excès d'audace et de crime.
En ce qui concerne la pétition des citoyens de la section de la Halle-aux-Blés que vous a dénoncée Pétion, j'estime que l'on ne vous a proposé que des mesures partielles, du moins ceux qui se sont bornés à en demander l'im-probation. L'adresse de Marseille, que l'on a voulu mettre en parallèle, ne disait pas que la majorité de la Convention était corrompue. Elle appelait bien ennemis de la patrie ceux qui avaient émis une opinion contraire à son brûlant patriotisme, mais elle ne s'adressait point à la Convention nationale, et cette différence devra être sentie par fout homme impartial et par tous ceux qui regardent pour quelque chose le salut public.
Je demande donc, en terminant, que la Convention nationale envoie des commissaires dans cette section, et que ces commissaires aient le pouvoir, après avoir vérifié le tout et pris des renseignements, de faire traduire devant le tribunal révolutionnaire tous ceux qui auraient pris part à cette délibération, en supposant qu'elle ait eu lieu.
Je demande, en second lieu, que l'accusa-tfeur public soit mandé à la barre, pour rendre compte des motifs qui l'ont empêché de poursuivre les coupables compromis dans la conjuration formée les 9 et 10 mars à Paris.
Je demande la parole.
Je la demande auparavant pour le citoyen Bouchotte, qui vient obéir à un décret de la Convention et prêter serment devant elle comme ministre de la guerre. La parole est au citoyen Bouchotte.
, ministre de la guerre (1). Représentants du peuple, je viens obéir à votre décret qui me nomme ministre de la guerre ; en acceptant, je n'ai consulté que mon dévouement à la souveraineté nationale, à la liberté et à l'égalité.
Une longue suite de trahisons, et la conspiration de Dumouriez et de ses
complices, ont mis en danger la liberté; c'est par la guerre qu'on veut
la détruire, c'est par la guerre qu'il faut la sauver. Le peuple la fera
et la fera bien : mon devoir est d'employer tous mes moyens pour en
assurer le succès.
(La Convention ordonne l'impression de ce discours.)
La parole est à Robespierre.
(1). Citoyens, celui qui dit que la majorité de la Convention est corrompue, est insensé ; mais celui qui nierait que la Convention nationale peut être quelquefois égarée par une coalition composée de quelques hommes profondément corrompus, serait un imposteur. On vous a parlé souvent de conspiration, et tout en en parlant, on feint de ne pas en connaître les auteurs ; elle éclate cependant sous vos yeux, cette conspiration qui nous environne: tout le monde en aperçoit la nature et l'étendue, c'est une chaîne qui s'étend de Londres à tous les cabinets de l'Europe, et dont l'anneau aboutit dans cette enceinte sacrée.
Non, la majorité de la Convention n'est pas corrompue, sans cela la patrie serait perdue ; car comment aurions-nous pu échapper à tant de pièges et résister à tant de malheurs? La conspiration est tramée à la fois et par les ennemis intérieurs et extérieurs ; les chefs en sont Dumouriez et les individus qui pouvaient prétendre au trône par le droit antique de leur naissance et par les manœuvres des amis de Dumouriez et de tous ceux qui peuvent être justement despotes. (Murmures sur certains bancs à droite.)
J'estime £}ue si la corruption a eu quelque pouvoir parmi nous, ce n'est
que sur quelques individus ; mais celui qui chercherait la conspiration
d'un individu, ne ferait que s'égarer. Quand on veut connaître la
conspiration, il faut embrasser l'ensemble des événements, l'objet et
les moyens des conspirateurs. Il y a quelque temps que je m'occupe de
cet objet, il y a quelque temps aussi que, sans faire des lieux communs
sur la liberté, je cherche avec douleur les causes qui la compromettent
et que je cherche en vain à fixer les yeux de la Convention nationale
sur les plus dangereux ennemis de la liberté. Je viens dans ce moment
lui offrir le fruit de quelques réflexions ou pour mieux dire encore le
tableau de notre révolution. Sans doute, si les hommes que j'ai à
dénoncer sont toujours soutenus dans cette Assemblée, sont toujours en
possession de dominer la Convention nationale ; si elle ne veut pas se
résoudre à les soupçonner d'après l'évidence de leurs crimes nouveaux,
j'aurai fait encore une fois de vains efforts ; mais du moins j'aurai
fait mon devoir à la satisfaction de mon âme.
Si vous voulez, je vais lever une partie du voile...
Plusieurs membres: Tout entier !
Un membre : Je demande que si Robespierre ne combat pas les propositions qui ont été faites par Pétion, elles soient mises sur-le-champ à la délibération.
Je parle sur l'ensemble des mesures à prendre.
Il importe de ne pas distraire l'attention de l'Assemblée par de nouvelles dénonciations ; je demande que Robespierre ne parle qu'après que vous aurez pris les mesures urgentes qui vous ont été proposées, et qu'il soit décrété que ceux que va accuser Robespierre, soient entendus après pour le confondre.
Les propositions soumises à votre délibération ne peuvent être séparées de l'objet que j'ai à traiter.
Plusieurs membres : Déclarez si vous voulez les combattre, ou bien nous décréterons l'ajournement.
Je demande qu'il parle et que l'on répondra immédiatement après lui : quoique nous n'ayons pas de discours artifi-cieusement préparés, nous saurons répondre et confondre les scélérats. Je m'oppose à l'ajournement, point d'ajournement po-ur un dénonciateur.
C'est ainsi qu'on prolonge longtemps les échéances pour éloigner ce que je veux dire.
Je demande le renvoi de la dénonciation au comité, ces dénonciateurs perdent la République.
Je demande que Robespierre parle, car j'estime, au contraire, que ces moments ne sont pas perdus pour la patrie : ils nous feront connaître ses amis et ses ennemis. Qui vous dit, d'ailleurs, que de ce discours de Robespierre ne naîtra pas l'union de l'Assemblée ; l'union parmi nous ne peut naître qu'après une explication franche.
Si votre attention est fatiguée, je demande à parler dans un autre moment.
Un grand nombre de membres : Non, non !
Eh bien ! si l'Assemblée veut décréter auparavant les propositions qui lui sont faites par Pétion et Guadet, comme je déclare que ce que je veux dire doit influencer sur ces propositions...
On prend nos villes, et nous nous dénonçons.
Je demande si ceux qui réclament la parole avec tant d'acharnement sont assurés que nos armées ont du pain.
Il faut que tout s'éclaircisse ; je demande que Robespierre soit entendu, et qu'ensuite toutes les propositions soient décrétées séance tenante, et surtout qu'on ne lève pas la séance sans avoir entendu ceux que Robespierre va dénoncer.
(La Convention décrète la proposition de Lasource.)
Robespierre a la parole.
(1). Une faction puissante conspire avec les puissances de l'Europe pour nous donner un roi avec une Constitution aristocratique et une représentation illusoire composée de deux Chambres. Elle espère nous amener à cette transaction honteuse par la force des armées étrangères et par les troubles du dedans. Ce système convient au gouvernement anglais; il convient à Pitt, l'âme de toute cette ligue de tyrans, à tous les intrigants ambitieux. Il plaît à tous les aristocrates bourgeois, qui ont horreur de l'égalité, à qui on a fait peur, même pour les propriétés ; il plaît même aux nobles, trop heureux de retrouver dans la représentation aristocratique et dans la Cour d'un mauvais roi, les distinctions orgueilleuses qui leur échappaient. La République ne convient qu'au peuple, aux hommes de toutes les conditions, qui ont une âme pure et élevée, aux philosophes amis de l'humanité, aux Sam-Culottes^ c'est-à-dire aux hommes de tous les états, qui, en France, se sont parés avec fierté de ce titre dont Lafayette et la Cour voulaient les flétrir, comme autrefois les amis de la liberté en Hollande s'emparèrent de celui de gueux que l'insolent duc d'Albe leur avait donné.
Ce système de république aristocratique, dont je parle, n'est pas nouveau : c'était celui de Lafayette et de tous ses pareils, connu sous le nom de Feuillants ou de modérés. Il a été^ continué par ceux qui ont succédé à sa puissance et que je vais dénoncer. Quelques personnages ont changé ; mais le but est semblable, les moyens sont les mêmes, avec cette différence, que les continuateurs ont augmenté leurs ressources et accru le nombre de leurs partisans.
Tous les ambitieux, qui ont paru jusqu'ici sur le théâtre de la Révolution, ont eu cela de commun, qu'ils ont défendu les droits du peuple jusqu'au moment où ils ont cru en avoir besoin. Tous l'ont regardé comme un stu-pide troupeau destiné à être conduit par le plus habile ou par le plus fort. Tous ont regardé les assemblées représentatives comme des corps composés d'hommes, ou cupides ou crédules, qu'il fallait corrompre ou tromper pour les faire servir à leurs projets criminels.
A l'exemple de leurs devanciers, les dominateurs actuels ont caché leur
ambition sous le masque de la modération et de l'amour de l'ordre ;
comme leurs devanciers, ils ont cherché à détruire les principes de la
liberté. Tous se sont servis des sociétés populaires contre la Cour, et
dès le moment où ils eurent fait leur pacte avec elle ou qu'ils l'eurent
remplacée, ils cherchèrent à la détruire. Tous ont successivement
combattu pour ou contre les Jacobins, selon les temps et les
circonstances. Pour mieux y réussir, ils ont même cherché quelquefois de
ridicules applications ; ils ont appelé tous les amis de la patrie des
agita-
La faction dominante aujourd'hui était formée longtemps avant la Convention nationale. A la fin de juillet dernier, elle négociait avec la Cour un traité pour obtenir le rappel des ministres qu'elle avait fait nommer au mois de janvier précédent. Une autre condition du traité était la nomination d'un gouvernement du prince royal ; je crois inutile de vous dire que le choix devait tomber sur l'un d'entre eux.
A la même époque, elle s'opposait à la déchéance de Louis, demandé par le peuple et les fédérés, elle fit même décréter un message et des représentations au roi, pour en prévenir l'effet. Je vous prie de vous rappeler de ce que j'ai dit et de ce que je vais vous dire: ce sont des faits consignés dans l'histoire de la Révolution.
Elle n'avait rien négligé pour empêcher la révolution du 10 août; dès le lendemain elle travailla à en arrêter le cours. Elle fit tout son possible pour empêcher le tyran d'être enfermé au Temple, et elle tâcha de nous rattacher à la royauté, en faisant décréter par l'Assemblée législative qu'il serait nommé un gouverneur au prince royal.
A ces faits, consignés dans les actes publics et dans l'histoire de notre révolution, vous reconnaissez déjà les personnes aue j'inculpe et que j'ai le courage de dénoncer sans connaître ni considération, ni danger (car le plus grand danger est de dénoncer ' les plus puissants lorsqu'on les réduit au désespoir), à ces faits, dis-je, que je vous expose sans autre intérêt que celui du salut public, vous reconnaissez les Brissot, les Guadet, les Vergniaud, ïes Gensonné et d'autres agents hypocrites de la même coalition. Dès le lendemain du 10 août, ils n'oublièrent rien pour déshonorer la Révolution qui venait d'enfanter la République et, tout aussitôt, calomnièrent le conseil de la Commune, qui dans la nuit précédente venait de se dévouer pour la liberté, en même temps qu'ils
renouèrent toutes les opérations par leurs intrigues et par les décrets qu'ils dictaient à l'Assemblée législative. Us s'en attribuèrent même tout l'honneur ; eux seuls recueillirent les fruits de la dernière révolution.
Leur premier soin, après l'acte conservatoire du prince royal et de la royauté, fut de rappeler au ministère leurs créatures : Servan, Cla-vière et Roland; ils s'appliquèrent surtout à s'emparer de l'opinion publique. Us avaient eu soin de faire remettre entre les mains de Roland des sommes énormes pour la façonner à son gré, pour payer les journaux les plus répandus.
Devenus ainsi auteurs et payeurs de tous ces écrits, prodigués et distribués à profusion dans les départements; ils ne cessèrent de, tromper la France et l'Europe sur la Révolution qui enfanta la République.
Il fallait commencer par perdre Paris, il fallait détruire ce vaste foyer du républicanisme et des lumières publiques. A l'exemple de tous les ennemis de la liberté qui avaient paru pour remettre Je peuple dans les fers, ils s'accordèrent tous à peindre cette immortelle cité comme le séjour au crime et le théâtre du carnage, et à travestir en assassins ou en brigands, les citoyens ou les représentants dont ils redoutaient l'énergie. Us dénoncèrent chaque jour Paris et tous les citoyens patriotes, ils cherchèrent même à armer contre la capitale la défiance et ia jalousie des autres parties de la République.
Cependant les Prussiens se préparaient à envahir notre territoire (c'était l'époque du mois de septembre 1792); les dominateurs étaient membres du comité diplomatique, du comité de défense générale, ils dirigeaient le ministère, ils avaient eu d'étroites liaisons avec la Cour, et ils laissaient ignorer à la France entière, au Corps législatif, les dangers qui nous menaçaient.
Les ennemis s'étaient rendus maîtres de Longwy, de Verdun; ils s'avançaient vers Paris et les dominateurs avaient gardé le silence; ils ne s'occupaient que d'afficher, que d'écrire contre Paris. Notre armée était faible, divisée, mal armée, mal approvisionnée, et si Paris ne s'était levé tout à coup, si, à son exemple, la France ne s'était ébranlée, Brunswick pénétrait sans résistance jusqu'au cœur de l'Etat.
Mais ce n'était pas tout : la faction voulait livrer Paris et la France. Elle voulait fuir avec l'Assemblée législative, avec le Trésor public, avec le Conseil exécutif, avec le roi prisonnier et sa famille. Les ministres qu'ils avaient nommés : Roland, Servan, Clavière, Lebrun', parlaient de ce projet aux députés : il fut proposé dans le Conseil et il eût été adopté si Garat, le ministre de la justice d'alors, n'en avait empêché l'exécution en menaçant ses collègues de les dénoncer au peuple, et si Paris ne l'eût fait avorter, en se levant pour écraser les ennemis de la France. Ce projet de fuite est connu des membres de l'Assemblée législative qui siègent encore sur ces bancs et de plusieurs citoyens. Il a été dénoncé à la Convention nationale et Roland lui-même a été forcé de l'avouer dans une lettre très intéressante de l'époque et qu'on a malheureusement trop tôt oubliée.
La Convention nationale était convoquée,
elle était l'espoir de la France; sa majorité était pure, car elle avait été nommée dans un temps favorable aux élections populaires. Mais un grand nombre de représentants, trompés d'avance par les papiers imposteurs dont la faction avait inondé les départements, apportèrent à Paris des préventions sinistres qui devaient causer bien des maux. Ce fut d'ailleurs toujours le sort des hommes qui ont des lumières sans probité ou de la probité sans lumières, d'être les complices ou les dupes des intrigants. Malheureusement ce fut toujours aussi le sort des assemblées, dont les membres, pourtant bien intentionnés, n'ont pas abordé la carrière politique avec du savoir, des principes, du civisme et la connaissance particulière des opinions qui ont trop d'influence sur le sort des révolutions, d'être longtemps le jouet des habiles qui détiennent le pouvoir.
Le décret qui déclare l'abolition de la royauté, proposé à la fin de la première séance par un des députés de Paris calomnié, fut voté d'enthousiasme. Si le lendemain, on se fût occupé de l'affaire du tyran il eût été condamné, et si la Convention, libre de toute dangereuse influence, eût ensuite prononcé des lois générales, la paix et la liberté seraient maintenant affermies. (Murmures sur certains bancs. )
Je n'accuse pas tout le monde, j'inculpe seulement les meneurs, ceux qui s'étaient emparés de toute l'influence sur l'Assemblée, et qui, depuis longtemps en possession des comités importants de l'Assemblée législative, les firent conserver provisoirement, en attendant de composer les nouveaux à leur gré.
Je disais donc que les intrigants, qui n'avaient osé s'opposer à la proclamation de la République, s appliquèrent à l'étouffer dès sa naissance. Après.s'être emparés à nouveau des comités, ils s'emparèrent du bureau, du fauteuil et même de la tribune; ils tenaient toujours dans leurs mains le ministère et le sort de la nation. Alors ils occupèrent sans cesse la Convention nationale de dénonciations contre la municipalité de Paris, contre le peuple de Paris, contre la majorité des députés de Paris. (Nouveaux murmures à droite et au centre.)
Je déclare que je ne cherche ici que la vérité, car je n'ai pas l'intention d'outrager, de blesser même ceux qui ont partagé quelques-uns des torts que je développe. Çe sont les intentions de certains hommes que j'accuse, et je rappelle que j'ai toujours publié et toujours dit que c'était à certains intrigants seuls qu'il fallait reprocher les fautes que de bonne foi la majorité de cette Assemblée avait commises.
Si quelqu'un doute que les objets dont j'ai parlé n'aient pas occupé nos délibérations, qu'il lise seulement les procès-verbaux de nos séances; il y verra comment ils inventèrent et répétèrent cette ridicule fable de la dictature, qu'ils imputaient à un citoyen sans pouvoir comme sans ambition, pour faire l'affreuse oligarchie qu'ils exerçaient eux-mêmes et le projet de tyrannie nouvelle qu'ils voulaient ressusciter. Par là, ils cherchaient encore à dégoûter le peuple français et l'Assemblée de la République naissante, à arrêter les progrès de notre révolution dans les contrées voisines, en leur présentant la chute du trône comme
l'ouvrage d'une ambition criminelle, et le changement, de gouvernement comme un changement de. maître.
De là, ces; éternelles déclamations contre la justice révolutionnaire qui immola les Mont-morin, les Delessart et d'autres conspirateurs, au moment où le peuple et les fédérés s'ébranlaient pour repousser les Prussiens. De là, ces diatribes violentes contre les événements malheureux du 2 septembre, dont ils dissimulèrent les circonstances: et les auteurs. Dès ce moment ils ne cessèrent de remplir les âmes des députés de défiance, de jalousie, de haine et d© terreurs, et de faire entendre dans le sanctuaire de la liberté, les clameurs des plus vils préjugés et les rugissements des plus furieuses passions. Dès lors ils ne cessèrent de souffler le feu de la guerre civile et dans la Convention et dans les; départements, soit par leurs journaux, soit par leurs harangues à la tribune, soit par leur correspondance.
Ils étaient venus à bout de reculer par là, pendant quatre mois, le procès du tyran ; et durant la discussion de cette affaire, quelles chicanes, quelles entraves, quelles manoeuvres n'employa-t-on pas pour égarer l'opinion des membres les plus purs de la Convention nationale 1
Qui peut calculer sans frémir les moyens employés par Roland, et les sommes prodiguées par le ministère, pour dépraver l'esprit public, pour apitoyer le peuple sur le sort du dernier roi ? Avec quelle lâche cruauté les avocats du tyran appelaient des corps armés contre Paris et contre les députés patriotes, dénommés par eux comme des assassins et comme des traîtres ? Avec quel insolent mépris des lois,, les corps, administratifs dignes de ces députés levaient eux-mêmes des troupes, de leur autorité privée, aux dépens du Trésor public ? Avec quelle perfide audace cette même faction protégeait de toutes parts la rentrée des émigrés^ et ce rassemblement de tous les assassins et de tous les scélérats de l'Europe à Paris l Avec quel odieux machiavélisme on employait tous les moyens de troubler la tranquillité et le repos de cette ville et de commencer la guerre civile, sans même dédaigner celui de faire ordonner par un décret la représentation de l'Ami des lois, cette pièce aristocratique) qui avait déjà fait couler le sang et que la sagesse des magistrats du peuple avait interdite !
A quoi a tenu le salut de la patrie et la punition du tyran % Au courage invincible des patriotes* à l'énergie calme du peuple éclairé sur ses véritables intérêts; et surtout à la réunion imprévue des fédérés. S'ils avaient observé les fatales préventions que leur avaient inspirées ceux qui les avaient appelés; si le bandeau était resté deux jours de plus sur leurs yeux, c'en était fait de la liberté. Le tyran était absous, les patriotes égorgés, le fer même des défenseurs de la patrie, égaré, s.î serait combiné avec celui des assassins royaux. Paris était en proie à toutes les horreurs et la Convention nationale, escortée des satellites qu'ils avaient rassemblés, fuyait au milieu de la confusion et de la consternation universelle.
Mais-, ô force toute puissante de la vérité et de la vertu ! Ces généreux citoyens ont abjuré leurs erreurs, ils ont reconnu, avec une sainte indignation, les trames perfides de ceux qui
les avaient trompés; ils les ont voués au mépris, public; ils ont serré dans leurs bras les Parisiens calomniés. Réunis tous aux Jacobins,, ils ont juré, avec le peuple, une haine éternelle aux tyrans et un dévouement sans borne à la liberté; ils ont cimenté cette sainte alliance sur la plaee du Carrousel, par des fêtes civiques, où assistèrent tous les magistrats de eette grande cité, avec un peuple généreux que l'enthousiasme du patriotisme élevait au-dessus de lui-même. Quel spectacle ! Comme il console des noirceurs de la perfidie et des; crimes de l'ambition ! Ce grand événement fit pencher la balance dans la Convention nationale, en faveur des défenseurs de la liberté; ils déconcerta les intrigants et enchaîna les factieux. Lepeletier seul fut la victime de son courage à défendre la cause de la liberté, quoique plusieurs patriotes aient été poursuivis par des assassins. Heureux martyr de la liberté., tu ne verras plus les maux que nos ennemis communs ont préparé à la patrie !
Au reste, quelques efforts qu'ils aient faits pour sauver Louis XVI, je ne crois pas que ce soit lui qu'ils voulussent placer sur le trône; mais il fallait lui conserver la vie, pour sauver l'honneur de la royauté qu'on voulait rétablir, pour remplir un des articles du traité fait avec Londres, et la promesse donnée à Pitt,, comme le prouvent les discours de ce ministre au parlement d'Angleterre. Il fallait surtout allumer la guerre civile par l'appel au peuple, afin que les ennemis qui devaient bientôt nous attaquer, nous trouvassent occupés à nous battre pour la querelle du roi détrôné.
La punition éclatante du tyran, la seule victoire que les républicains aient remportée à la Convention nationale, n'a fait que reculer le moment où la conspiration devait éclater; les députés patriotes, désunis, isolés,, sans politique et sans plan, se sont endormis dans une fausse sécurité, et les ennemis de la patrie ont continué de veiller pour la perdre.
Déjà ils recueillent, les fruits des semences de guere civile qu'ils ont jetées depuis si longtemps, et la ligue des traîtres de l'intérieur avec les tyrans du dehors se déclare.
On se rappelle ici ce que sont les personnes de cette faction que je. désigne, que j'ai déjà nommées, qui, en 1791, ont porté à la Cour le secours de leur fausse popularité, pour engager la nation dans cette guerre contre l'Autriche, provoquée par la perfidie, déclarée par l'intrigue et conduite par la trahison. Je disais alors aux Jacobins (il est permis de citer l'endroit) où ils venaient prêcher leur funeste croisade^ où Dumouriez lui-même, qui était déjà avec eux, venait, coiffé du bonnet rouge, étaler tout le charlatanisme dont il est doué : « Avant de déclarer la guerre aux étrangers, détruisez les ennemis du dedans; punissez les attentats d'une Cour parjure qui cherche elle-même à armer l'Europe contre vous ; changez les états-majors, qu'elle a composés de ses complices et de ses satellites; destituez les généraux perfides qu'elle a nommés, et surtout ce Lafayette, déjà souillé tant de fois du sang du peuple; forcez le gouvernement à armer les défenseurs de la patrie,, qui demandent en vain des armes depuis deux ans; fortifiez et approvisionnez nos places frontières qui sont dans un dénuement absolu; faites triompher
la liberté au dedans, et nul ennemi étranger n'osera vous attaquer. C'est par les progrès de la philosophie et par le speetaele du bonheur de la France, que vous étendrez l'empire de notre révolution, et non par la force des armes et par les calamités de la guerre. En vous portant agresseurs, vous irritez les peuples étrangers eontre nous, vous favorisez les vues des despotes et celles de la Cour, qui a besoin de faire déclarer la guerre par les représentants de la nation, pour échapper à la défiance et à la colère du peuple. »
Les chefs de la faction répondaient par des lieux communs faits pour allumer l'enthousiasme des ignorants. Ils nous montraient l'Europe entière volant au-devant de la Constitution française, les armées des despotes se débandant partout, pour accourir sous nos drapeaux, et l'étendard tricolore flottant sur les palais des électeurs, des rois, des papes et des empereurs. Ils excusaient la Cour, ils louaient les ministres et surtout Narbonne; ils prétendaient que quiconque cherchait à inspirer la défiance contre les ministres, contre Lafayette et contre les généraux, était un désorganisateur, un factieux, qui compromettait la sûreté de l'Etat.
En dépit de toutes leurs intrigues, les Jacobins résistèrent constamment à la proposition qu'ils leur firent de prononcer leur opinion en faveur de la guerre; mais tel était le prix qu'ils attachaient à consacrer les projets de la Cour, par la sanction des sociétés populaires, que le comité de correspondance de cette société, dont ils disposaient et qu'ils remplissaient pour la plus grande partie, envoya, à son insu, une lettre circulaire à toutes les sociétés affiliées, pour leur annoncer que le vœu des Jacobins était pour la guerre. Ils portèrent même l'impudence jusqu'à dire que ceux, qui avaient embrassé l'opinion contraire, l'avaient solennellement abjurée. Ce fut par ces manoeuvres que l'on détermina la nation et les patriotes même de l'Assemblée législative à voter comme le côté droit et comme la Cour.
Nos prédictions ne tardèrent pas à s'accomplir. La première campagne fut marquée par des trahisons et par des revers, qui ne furent pour la Cour et pour Lafayette que de nouveaux prétextes de demander des lois de sang contre les plus zélés défenseurs de la patrie et un pouvoir absolu qui leur fut accordé sur la motion des chefs de la faction, et particulièrement des Guadet et des Gensonné.
Dès ce temps-là, tous ceux qui osaient soupçonner les généraux et la Cour furent dénoncés comme des agitateurs et des factieux. On se rappellera avec quel zèle les mêmes hommes défendirent, divinisèrent le ministre Narbonne; avec quelle insolence ils outrageaient l'armée et les patriotes. Le prix de ces manœuvres criminelles fut l'élévation de la faction au ministère, dans la personne de Cla-vière, Roland, Servan et Dumouriez.
Bientôt tous nos généraux nous trahirent à l'envi. Notre invasion dans la Belgique ne produisit d'autre effet que de livrer ensuite nos alliés à la vengeance de leur tyran et d'irriter les étrangers contre nous par l'infâme attentat du traître Jarry, qui n'a pas même été puni. Nos places fortes étaient dégarnies; notre armée divisée par les intrigues des états-majors et presque nulle; tous les chefs s'effor-
çaient à l'envi de la royaliser ; la ligue des tyrans étrangers se fortifiait; l'époque du mois d'août ou de septembre était destinée pour leur invasion combinée avec la conspiration de la cour des Tuileries contre Paris et contre la liberté. C'en était fait de l'une et de l'autre, sans la victoire remportée par le peuple et par les Fédérés, le 10 août 1792. Or, j'ai déjà remarqué que les chefs de la faction s'étaient opposés de tout leur pouvoir à cette insurrection nécessaire, et lorqu'au mois de septembre suivant, Brunswick, encouragé sans doute par la faction, osa envahir le territoire français, vous avez déjà vu qu'ils ne songeaient qu'à abandonner et qu'à perdre Paris, pour mieux servir le traître.
Paris se sauva lui-même, mais Dumouriez était à la tête de nos armées. Brissot avait écrit de lui,peu de temps auparavant, qu'après Bonnecarrère, Dumouriez était le plus vil des hommes. Dumouriez avait répondu par écrit que Brissot était le plus grand des fripons, sans aucune espèce de réserve. Il avait affiché que la cause du courroux, que la faction affectait contre lui, était le refus qu'il avait fait de partager avec elle les six millions, qu'elle lui avait fait accorder, pour dépenses secrètes, dans le temps de son ministère et de leur amitié. Ils annoncèrent des dénonciations réciproques qui n'eurent point lieu.
C'est encore un problème à résoudre, que celui de savoir à quel point cette brouillerie était sérieuse; mais ce qui est certain, c'est qu'au moment où Dumouriez prit le commandement de l'armée de Châlons,, il était très bien avec la faction et avec Brissot, qui le pria d'employer Miranda,. dans une occasion importante. C'est là un fait que Brissot a avoué lui-même au comité de défense générale.
J'ignore ce qu'aurait fait Dumouriez, si Paris et les autres départements ne s'étaient pas levés au mois de septembre pour écraser les ennemis intérieurs et extérieurs; mais ce qui est certain, c'est que le mouvement général et spontané de la nation n'était pas favorable au roi de Prusse pour pénétrer au cœur de la France. Dumouriez réconduisit avec beaucoup de politesse pendant une longue retraite, assez paisible, en dépit de nos soldats, dont on enchaînait constamment l'impétuosité, et qui mordaient leurs sabres en frémissant de voir que leur proie leur échappait. L'armée prussienne, ravagée par la maladie et par la disette, a été sauvée; elle a été ravitaillée, traitée avec une générosité qui contraste avec les cruautés dont nos braves défenseurs ont été les victimes. Dumouriez a parlementé et traité avec le roi de Prusse dans le moment où la France et l'armée s'attendaient à voir la puissance et l'armée de ce despote ensevelies à la fois dans les plaines de la Champagne ou de la Lorraine.
Ainsi, au moment même où Dumouriez lui-même annonçait dans ses lettres à l'Assemblée nationale que les ennemis ne pouvaient lui échapper, il se montrait aussi complaisant, aussi respectueux pour le roi de Prusse, qu'il fut plus tard insolent avec la Convention. Dans ces conditions, il est au moins douteux d'affirmer qu'il a rendu plus de services à la République qu'aux Prussiens et aux émigrés. Rappelez-vous qu'au lieu de terminer la guerre et d'affermir la Révolution, en exterminant cette armée dont les ennemis n'au-
raient jamais pu réparer la perte; au lieu de se joindre aux autres généraux pour pousser nos conquêtes jusqu'au Rhin, il revint à Paris pour y vivre dans la plus étroite intimité avec les chefs de cette faction dont le rôle néfaste pour notre pays doit de mieux en mieux nous apparaître.
Mais continuons le récit des faits et pesons ensemble les enseignements que comporte l'histoire.
Après quelque temps passé à Paris, dans des fêtes et des parties de plaisir, Dumouriez part pour la Belgique. Il débute par un succès brillant, nécessaire pour lui donner la confiance que sa conduite avec les Prussiens était loin de lui avoir assurée; et quiconque rapprochera de ce qui se passe aujourd'hui la brulsque témérité qui acheta la victoire de Jemmapes, par le sacrifice de tant de Français républicains, concevra facilement que ce succès était moins fatal au despotisme qu'à la liberté. Dumouriez était maître de la Belgique : on sait que, dans ce moment, s'il avait envahi la Hollande la conquête de ce pays était certaine. Nous étions maîtres de la flotte hollandaise, les richesses de ce pays se confondaient avec les nôtres et sa puissance était ajoutée à celle de la France. Le gouvernement anglais était perdu et la révolution de l'Europe était assurée.
On a dit, et je l'ai cru moi-même un instant sur ces ouï-dire, que tel était le projet de Dumouriez, mais qu'il avait été arrêté par le conseil exécutif. Il est aujourd'hui démontré que ce bruit n'était qu'une nouvelle imposture répandue par la faction. En effet, si, comme on l'a dît, Dumouriez avait conçu ce grand dessein, s'il y attachait sa gloire et sa fortune, pourquoi n'a-t-il pas réclamé l'appui de l'opinion publique contre les oppositions perfides du gouvernement? Pourquoi n'a-t-il pas exposé la nécessité de son plan à la Convention nationale, à qui il appartenait de prononcer sur cette grande question? Pourquoi n'en a-t-il pas dit un mot aux députés du peuple, connus par leur zèle pour la liberté? Pourquoi n'a-t-il pas invoqué la nation elle-même contre des oppositions qui compromettaient son salut? Il est bien plus naturel de penser que ce bruit n'avait été répandu par les amis de Dumouriez que pour lui concilier la confiance. On sait d'ailleurs que les chefs de cette faction ont l'air de paraître quelquefois divisés, pour mieux cacher leur criminelle intelligence.
Au surplus, que Dumouriez ait eu part ou non à ce retard funeste qu'a éprouvé l'expédition de la Hollande, il doit avant tout être imputé à la malveillance de la majorité du conseil exécutif et des coryphées de la faction qui dominent dans les comités diplomatiques et de défense générale. Les députés bataves se sont plaints eux-mêmes hautement, dans un mémoire qu'ils ont rendus public et qui est entre nos mains, de l'opiniâtreté avec laquelle leurs offres et leurs instances ont été repous-sées depuis trois mois par le ministre des affaires étrangères. On ne peut nier du moins que Dumouriez et les chefs de la faction ne fussent parfaitement d'accord sur le projet de ravir la Belgique à la France; on connaît les efforts de Dumouriez pour empêcher l'exécution des décrets des 15 et 21 décembre, on connaît toutes ses perfidies. D'un autre côté, on
sait comment le comité diplomatique a repoussé tous les peuples qui voulaient s'incorporer à nous. Roland disait, dans ces circonstances, des députés de Savoie : « On doit m'envoyer des Savoisiens pour solliciter leur réunion à la France, je les recevrai à cheval. Comment est-il possible que vous vouliez vous réunir à notre anarchie, disait Brissot aux Belges et aux Liégeois. » Tel était encore le langage des Guadet et des Gensonné, et c'est ainsi qu'ils sont venus à bout de retarder toutes ces réunions, jusqu'au moment où le parti ennemi de la Révolution eût tout disposé pour les troubles et que les despotes eussent rassemblé des forces suffisantes contre nous.
Dumouriez et ses partisans avaient commencé par porter un coup mortel à la fortuna publique, en empêchant la circulation des assignats dans la Belgique, en ruinant cette contrée après l'avoir fatiguée par ses intrigues, après avoir levé, de son autorité privée, des sommes énormes qu'il chargeait la nation de rembourser. Il part enfin pour la Hollande et s'empare de quelques places dans la Gueldre. Mais tandis qu'on ne nous parlait que de succès et de prodiges, tout était disposé pour nous enlever en un moment la Belgique. Steingel et Miranda, le premier aristocrate, allemand; l'autre, aventurier espagnol, chassé du Pérou, ensuite employé par Pitt, et donné par l'Angleterre à la France par l'entremise de Brissot, de Petion, de Guadet et de Vergniaud (j'atteste ici leur témoignage), enfin adopté particulièrement par Dumouriez, nous trahissaient en même temps, à Aix-la-Chapelle et à Maëstricht. Une partie de l'armée exposée dans un poste désavantageux, appelée improprement avant-garde, puisqu'elle n'avait rien derrière elle, disséminée sur un si grand espace de terrain, qu'en cas d'attaque les corps qui la composaient ne pouvaient se rallier, ni se soutenir, est livrée à une armée ennemie, dont le général avait l'air de ne pas soupçonner l'existence, et qui avait repoussé tous les avis qu'on lui avait donnés de son approche.
Les corps les plus distingués par leur patriotisme sont spécialement trahis et égorgés par les ennemis; le reste est obligé de fuir. En même temps, le siège de Maëstricht entrepris sans aucun moyen, avec des boulets qui n'étaient pas de calibre, dirigé par une perfidie profonde, pour se défaire de nos braves défenseurs et les exposer sans défense à l'artillerie supérieure de nos ennemis, est levé avec précipitation; nos conquêtes sont abandonnées ; les braves Liégeois, nos fidèles alliés devenus nos frères, sont remis sous la haîche des tyrans, pour expier encore une fois leur généreux attachement à la cause de la France et de la liberté.
Dumouriez laisse à Berg-op-Zoom son armée victorieuse et se rend en Belgique pour se mettre à la tête de celle qui a été trahie. Va* t-il se plaindre d'avoir été lui-même trahi par les généraux; va-t-il les dénoncer à la nation? Non, il jette un voile sur la trahison, parle seulement de quelque imprudence de la part du général de l'avant-garde, montre la plus grande confiance à l'armée et promet de la conduire à la victoire. Il donne une bataille, elle est perdue. Cependant le centre et l'aile droite suivant lui ont eu l'avantage, mais, l'aile gauche a plié : or, l'aile gauche était
commandée précisément par ce même Miranda qui avait trahi à Maëstricht. La suite de ce nouvel échec est la perte de la Belgique.
Alors Dumouriez se découvre tout entier. U se déclare ouvertement pour les généraux perfides; il se plaint du décret qui mande à la barre Steingel et Lanoue; il fait le plus pompeux éloge de pe dernier, oonvaincu d'avoir conspiré en faveur du tyran, avant la révolution du mois d'août; il veut que la Convention nationale, imitant le Sénat romain, remercie les traîtres de n'avor pas désespéré de la patrie; il menace de l'abandonner si on contrarie aucune de ses vues et loue le civisme et le courage de Miranda et de tous les autres généraux et officiers sans distinction, comme il avait autrefois loué, d'ailleurs, le courage d'Egalité fils, si bien qu'aucune de ses dépêches n'était exempte d'éloges pour ce jeune général. Puis il impute tous no3 revers aux soldats ; il oublie qu'il avait vanté lui-même le courage et la conduite de l'armée, et surtout la patience héroïque avec laquelle elle avait supporté la disette et les fatigues au-dessus des forces humaines, dans tous les temps et récemment au siège de Maëstricht; il prétend que l'armée n'est qu'un ramas de lâches et de pillards : ce sont ses propres expressions. Il fait plus, et déclare avec la même insolence contre les nouveaux défenseurs qui volent dans la Belgique de toutes les parties de la République, pour réparer les revers dus à sa trahison; il les appelle des brigands.
Tandis qu'il écrivait ces détails, il abandonnait la Belgique aux Prussiens et laissait à leur disposition, intactes, les immenses provisions que nous y avions amassées. U avait ordonné aux commissaires de compter 4 millions aux Belges, mais auparavant il avait eu soin d'y éteindre, autant qu'il était en lui, toute espèce d'affection pour les principes de la Révolution et d'y allumer la haine du nom français. U avait été jusqu'à publier hautement dans une adresse à la Convention que la Providence punissait le peuple français de ses injustices. U avait peint Paris comme un théâtre de sang et de carnage, la France comme le séjour du crime et de l'anarchie, les déplutés patriotes de la Convention comme des fous ou comme des scélérats. U avait enfin foulé aux pieds l'autorité du gouvernement français; il avait fait des proclamations qui, sous le prétexte de réprimer certains actes impolitiques, ne tendaient à rien moins qu'à réveiller tous les préjugés du fanatisme et de l'aristocratie et à les rattacher à sa personne; il avait rétabli dans leurs fonctions les administrateurs destitués, pour cause d'incivisme, par les commissaires de la Convention nationale; il avait détruit les sociétés populaires, attachées à notre cause.
Il a voulu depuis excuser tous ces forfaits, en disant que l'on avait irrité les Belges, en les contraignant, sous des prétextes de réunion, d'abandonner leur argenterie et les trésors de leurs églises. Sans doute, ce fut le comble de l'étourderie et peut-être de la perfidie, de faire la guerre à des saints d'argent; mais qui pouvait mieux prévenir ces désordres que lui, qui réunissait en lui toutes les forces de la contrée et qui était tout puissant? Quant aux commissaires du Conseil exécutif contre lesquels il n'eût pu sévir, qui les avait nommés, si ce n'est son propre parti?
N'étaient-ils pas l'ouvrage de Roland et des ministres coalisés avec le généralissisme Dumouriez ? Les déclamations de cet homme et les éternelles homélies de ce vieillard étaient les mêmes; et c'est en vain qu'on objectera les ordres sévères de ce général intrigant contre un Cheppi ou contre d'autres créatures également méprisables de la même faction, on ne prouvera jamais qu'il n'était pas d'intelligence avec elle, pour exécuter le projet d'empêcher la réunion de la Belgique à la France. Il fallait, en effet, pour exécuter un tel projet, que la faction employât à la fois de tels commissaires qui s'appliquassent à mécontenter les Belges et un général qui profitât de ce mécontentement pour les éloigner à jamais de notre Révolution.
On parle de désorganisateurs commis pour semer le trouble dans l'armée; mais quoi de plus facile aux généraux que de les réprimer, que de maintenir une discipline sévère, si tous les généraux n'avaient pas eu besoin de ces moyens et de ces troubles pour exécuter et pour pallier leurs trahisons. Le traître Lafayette avait pris la même marche ; lui aussi, il entretenait, autant qu'il était en lui, des désordres dans son armée, pour la calomnier, pour la dissoudre et pour perdre la liberté. Il n'avait oublié qu'une chose : c'était de débuter, comme Dumouriez, par un succès.
Enfin, Dumouriez a levé l'étendard de la révolte; il menace de marcher vers Paris, pour ensevelir la liberté sous ses ruines. Comme il est d'accord avec la faction dont j'ai parlé jusqu'ici, il déclare qu'il veut protéger les amis de la liberté, que la Convention renferme dans son sein, contre les députés attachés à la cause du peuple, les patriotes, qu'il appelle des anarchistes et des agitateurs. U ne dissimule plus le projet de rétablir la royauté. Après avoir fait égorger une partie de l'armée, il trompe l'autre et s'efforce de la débaucher, après l'avoir calomniée à son in§u. Fier du succès de ses trahisons, gorgé des trésors qu'il a puisés dans la Hollande, dans la Belgique et dans les caisses nationales dont il s'est emparé; fort de son alliance avec les ennemis, à qui il a livré nos magasins; fort de l'appui des Belges, qu'il a joints aux autres coalisés, il cherche à semer le découragement dans la nation; il s'efforce de déshonorer les Français et nos braves défenseurs aux yeux des peuples étrangers; il nous annonce hautement qu'il ne nous reste aucunes ressources; dans ses lettres officielles à Beurnonville, il parle, avec une joie insolente, des troubles qui allaient éclater au milieu de nous. Il en présage même de nouveaux, il nous montre déjà les départements du Nord, du Pas-de-Calais, de la Somme, en état de contre-révolution; il dit, déclare en propres termes que nous ne pourrons tenir tête à nos ennemis étrangers, parce que nous serons obligés d'employer nos forces à réprimer ceux du dedans. U nous montre en même temps nos places fortes sans défense, et il ose nous déclarer que nous n'avons d'autre parti à prendre que de demander la paix et de transiger avec les despotes : que dis-je ? il ose se montrer lui-même comme médiateur.
Tel était le coupable secret de la conspiration tramée depuis longtemps contre votre liberté. Le chef de la faction l'a dévoilée au moment où il croyait pouvoir l'exécuter avec
succès. Tout semblait, en effet, disposé pour faire réussir ses projets. Un ministre de la guerre, audacieux et hypocrite, avait été nommé tout exprès, par la faction, pour les grands événements qui devaient arriver en peu de temps. Il avait purgé les bureaux de la guerre, les garnisons et l'armée, de tous les agents et de tous les chefs patriotes; il les avait remplacés par des contre-révolutionnaires ou des hommes plus que suspects; il s'était entouré de tout ce: que la France compte de plus compromis dans la cause du tyran; il avait laissé nos places fortes sans garnisons et sans munitions. On se rappelle avec quelle hardiesse il trompait la Convention nationale sur l'état de nos affaires dans la Belgique, au moment où les trahisons de nos généraux les avaient déjà perdues, et comment les fausses nouvelles, qu'il débitait, furent démenties par les commissaires de l'Assemblée. Tous les généraux étaient entrés dans ce vaste plan de conspiration; et pour mieux en assurer le succès, le ministre avait mis le comble à ses attentats, en faisant suspendre la fabrication des armes dans toutes nos manufactures.
Dans le même temps, on excitait des troubles dans une grande partie de la France, et surtout dans nos départements maritimes. Les aristocrates révoltés avaient levé de grandes armées bien approvisionnées; ils avaient saccagé des villes, égorgé une multitude de patriotes et personne n'avait songé à réprimer cette conspiration dans sa naissance. Elle existait depuis quatre mois, que ni le ministre, ni le comité de défense générale, composé pour la plus grande partie de la faction que je dénonce, n'en avaient donné connaissance à l'Assemblée, ni à la nation. Enfin le ministre de la guerre nomme un général pour commander les patriotes et arrêter les progrès de l'insurrection. U désigne Marcé ; mais ce général est un traître, qui livre notre artillerie aux révoltés et qui mène les défenseurs de la liberté à la boucherie. Partout il nomme des officiers également perfides : des Wittenkoff, des d'Hermigni, des Légonier ; il montre surtout dans ses choix une prédilection singulière pour les étrangers, pour les sujets ou anciens amis des despotes, nos ennemis, et quelquefois même pour les parents de nos tyrans.
Grâce à ces criminelles machinations les troubles se prolongent et la victoire coûte beaucoup de sang aux républicains. On vient nous dire que le calme pourra être rétabli dans six semaines ou deux mois : deux mois de guerre civile et de massacres des plus zélés patriotes.
Encouragés par tant d'attentats, les royalistes lèvent partout une tête audacieuse et osent menacer les amis de la liberté. Eh ! pourquoi non, quand l'infâme Dumouriez a. conspiré impunément contre nous dans la Belgique avec tous les despotes et tous les ennemis de l'intérieur? Pourquoi non, quand ce même général nous annonce, avec une insolente satisfaction, que, dès le moment où Féquinoxe serait passé, nos départements maritimes seraient envahis par les Anglais ? Ne pouvaient-ils pas, d'ailleurs, compter sur l'ascendant que la faction exerçait au sein de la Convention nationale ? N'était-ce pas elle qui, depuis longtemps, dépravait l'esprit public dans les départements révoltés ? Et les massacres de la
Bretagne et le fanatisme royal et religieux qui égarait les habitants des campagnes, n'étaient-ils pas les dignes fruits des écrits empoisonnés qu'elle avait semés sur la surface de cette importante contrée, de la correspondance perfide des députés qui suivaient sa bannière, enfin des persécutions suscitées contre tous les vrais républicains ? N'était-ce pas elle qui faisait et qui défaisait les ministres, protégeait tous leurs crimes et multipliait les conspirateurs par l'impunité 1
Mais son audace redoublait surtout, au moment où la conspiration était près d'éclater. Avec quelle perfidie ils désorganisaient tout, en criant sans cesse aux désorganisateurs ! Avec quelle lâche cruauté ils cherchaient à exciter dans Paris quelques petits mouvements aristocratiques, pour préparer au traître Dumouriez le prétexte de marcher contre cette cité.
Quand je vois ensuite Egalité fuir avec Dumouriez, avec Valence, je n'ai pas besoin d'en savoir davantage pour connaître la faction tout entière dont je viens de vous tracer l'histoire, en traçant celle des malheurs de la patrie. (Murmures. ) Je devine la perfidie profonde des conspirateurs, qui, pour couvrir leurs complots d'un voile impénétrable, avaient feint de vouloir expulser tous les individus de la ci-devant famille royale, dans un temps où la France entière ne voyait aucun motif à cette proposition imprévue; dans un temps où les patriotes de bonne foi croyaient défendre, en la repoussant, les principes^ et l'intégrité de la représentation nationale. Je conçois pourquoi ils demandaient l'expulsion des Bourbons en général, pour éloigner la condamnation de la royauté dans la personne de Louis XVI et pourquoi, depuis la punition des tyrans, ils ont oublié ou même rejeté cette mesure, dans le moment où l'aristocratie levait l'étendard de la révolte pour rétablir la royauté. (Murmures prolongés.)
s'arrête un instant.
Plusieurs membres : Allez donc !
Eh bien ! puisque je suis écouté avec tant de défaveur... (.Nouveaux murmures à droite et au centre.)
Je vous prierai de vous arrêter quand on vous interrompra.
Président, j'attendrai, car j'estime qu'on a le droit d'exiger au moins quelque patience, lorsqu'on remplit un ministère aussi pénible que celui que je remplis et surtout le droit de demander quelque indulgence pour la lassitude, pour la douleur où sont ceux qui se sentent si entourés d'ennemis.
Sans doute, je ne dois pas être écouté favorablement quand je dévoile les complots contre les meilleurs amis de la liberté. Bien plus, je dois m'attendre à être fortement attaqué, quand je parle de ces hommes qui ont eu une influence accablante, et lorsque je retrace l'histoire de ce premier comité de défense générale, dont les chefs étaient si évidemment liés d'intelligence avec Dumouriez, qui gardaient visiblement le silence sur toutes ses manœuvres et qui entretenaient avec lui une correspondance presque journalière. Tous les hommes qui n'appartiennent à aucun parti et qui l'ont vu comme moi, vous diront que la
première fois qu'il fut parlé de Dumouriez et des moyens à prendre pour réprimer sa révolte, tous les membres de la faction se levèrent pour excuser sa lettre insolente du 12 mars, en opposant les dénonciations prétendues insensées, faites contre lui précédemment. Je les ai vu épuiser les sophismes les plus insidieux, je les ai vu, pour détourner les soupçons qui pesaient sur leur tête, répéter leurs déclamations ordinaires contre les députés qui les accusaient et qu'ils traitaient encore d'agitateurs et d'anarchistes. Là, j'ai entendu, comme beaucoup de membres de cette Assemblée l'ont pu faire, Vergniaud prétendre que l'opinion politique de Dumouriez était indifférente... (Murmures), qu'il était nécessaire à la cause de la République... (.Murmures -prolongés. )
Je vous donne un démenti formel.
Un membre : Et Danton ! Que nous a donc dit Danton !
II n'y a rien d'étonnant à ce qu'un commissaire à l'armée ait pu être trompé un moment sur les desseins de Dumouriez, qu'il ne voyait que dans ses fonctions, au milieu de ses troupes; mais ce qui doit étonner, c'est que ceux qui étaient en relations habituelles avec lui, c'est que ceux qui ont marché à ses côtés dans la carrière de la Révolution, n'aient point trouvé dans ce que j'ai déjà dit et dans ce que je vais dire, de quoi fixer leur opinion sur le compte de ce général.
Les amis et les complices de Dumouriez, membres du comité de défense générale, connaissaient sans doute ses secrets mieux que personne ; mais ils comptaient sur le succès de sa criminelle entreprise. Aussi nous les avons vu d'abord excuser la lettre insolente du 12 mars à la Convention, sous le prétexte que ce général devait être irrité par les dénonciations faites contre lui dans les sociétés populaires. Nous les avons vu cherchant à écarter les accusations qu'ils redoutaient, en se hâtant de. répéter leurs déclamations ordinaires contre les députés patriotes et les Jacobins. Là nous avons entendu Vergniaud prétendre que les opinions politiques de Dumouriez étaient indifférentes e.t qu'il était intéressé à la cause de la Révolution. U ajoutait même qu'il serait pendu si la liberté succombait.
Il a fallu que je réponde à Vergniaud, qu'il y avait plusieurs manières de faire une contre-révolution, qu'il y avait des intrigues profondes dont Dumouriez était le principal agent et un genre de révolution qui ne lui serait point funeste, car alors ce ne serait pas Dumouriez qui serait pendu, mais les vrais amis de la liberté.
Mais passons aux autres, et rappelez-vous Gensonné s'indigner de ce que l'on donnait à Dumouriez les qualifications qu'il méritait; et vanter impudemment son civisme, ses services et son génie. Il est prouvé que Gensonné i entretenait une correspondance habituelle avec Dumouriez, courrier par courrier, et Gensonné voulait se charger vis-à-vis des membres de la Convention, présents au comité, du rôle de médiateur auprès de son correspondant et de son ami Dumouriez.
Là, nous avons vu encore Pétion embrasser avec chaleur la cause de Miranda, et après
que j'eus dénoncé ce général, et Steingel et Lanoue, se lever en couroux, en s'écriant que l'on dénonçait toujours sans preuves. Et le siège de Maëstrieht était levé ! Et l'armée trahie à Aix-la-Chapelle 1 Et la Belgique livrée à nos ennemis 1 Et c'était le moment où on délibérait sur la révolte déclarée de Dumouriez !
Là, nous avons vu le même jour Brissot, pour toute mesure de salut public, déclarer que la Convention nationale avait perdu sa confiance publique, que son unique devoir était de faire bien vite la Constitution et de partir. Je l'ai entendu proposer de s'arranger, dans le comité de défense générale, sur les divers articles de la Constitution qui pouvaient partager les avis, et de la faire adopter d'emblée par la Convention pour éviter, disait-il, des débats scandaleux. (Murmures prolongés à droite et au centre. )
Ah ! je sais bien que c'est en vain que je dénonce des traîtres puisque je les dénonce à eux-mêmes.
Ah ! je te dénoncerai, moi, traître!
Au reste, je n'attends le triomphe de la liberté que de la justice de la Convention nationale entièrement détrompée; aussi, quelque parti qu'elle prenne, je suis ici armé de la vérité qui est plus forte que toutes les puissances. Je plaide la cause des nations, je plaide la cause de la liberté, et la liberté triomphera, quand tous les vils scélérats que je dénonce seront dans la tombe. (Violentes interruptions et murmures à droite et an centre; applaudissements réitérés sur la Montagne ei dam les tribunes. )
rappelle les membres et les tribunes au silence.
Je vous remercie, Président; toutes ses manifestations sont oiseuses, car la liberté triomphera de toutes les explosions qui rugissent autour d'elles, quand on aura oublié les noms des vils scélérats que je dénonce.
Oui, nous avons vu là les chefs de la faction refuser de discuter la conduite de Dumouriez, pour proposer un rapprochement entre ses amis et ses adversaires; et, sous le prétexte de s'expliquer, renouveler toutes les calomnies dont ils avaient tant de fois souillé la tribune et les papiers publics. Nous avons entendu les ministres apporter à ce comité des nouvelles et des projets illusoires, concertés d'avance avec eux. Nous avons vu le. ministère de la guerre déclamer contre l'insubordination des soldats, sans vouloir convenir de la perfidie des généraux; nous l'avons entendu faire l'éloge du système défensif; nous garantir la neutralité de la Savoie et du comté de Nice, comme si ces deux départements français étaient pour nous des contrées étrangères. Je l'ai entendu nous faire un éloge ironique du système défensif et nous annoncer d avance la retraite de Custine; je l'ai vu enfin déclamer contre les écrivains, contre les sociétés populaires qui critiquent les généraux et solliciter contre eux des mesures rigoureuses; citer pour preuve du républicanisme des chefs la fameuse blessure du général Valence; répéter tous les lieux communs de Dumouriez sur l'éloignement des Belges pour la Révolution
française; et le comité approuver beaucoup toutes ses vues.
Nous avons vu surtout Brissot, à ce propos, lui-même déclarer que nous étions heureux que l'esprit public des Belges ne fût pas plus français, par la raison qu'en renonçant à la Belgique, nous pourrions obtenir plus facilement la paix des puissances ennemies. Brissot fut toujours le plus hardi de tous les conspirateurs à jeter en avant les idées de transaction ouvertement proposées par Dumouriez. Dans la discussion de l'affaire de Louis XVI., il osa demander qu'il fût sursis à l'exécution du décret qui le condamnait, jusqu'à ce que l'opinion des puissances étrangères sur ce jugement nous fût manisfesté ; c'est lui qui nous avait menacés de la colère des rois de l'Europe, si nous osions prononcer la peine de mort contre le tyran.
Brissot! combien de faits n'aurais-je pas à rappeler sur lui et sur la faction dont il est le chef ! Brissot ! dont les discours, dont les harangues ne sont que des manifestes de Brunswick, et ressemblent en tout, pour l'esprit et pour le style, au langage des Cours étrangères et des ministres hypocrites, et au discours de Coblentz (Murmures), que n'aurais-je point à dire si je voulais relater son rôle néfaste dans-cette guerre, si je voulais montrer comment après nous avoir fait déclarer la guerre à l'Europe au nom de l'émancipation des peuples, il ne cessa de nous inspirer, dès que nous y fûmes engagés, des défiances sur les dispositions de ces mêmes peuples, et si la situation qui nous serait faite auprès des cours étrangères,, si nous donnions un exemple aussi nécessaire que celui de la condamnation du tyran !
Je veux vous observer seulement que loin d'avoir employé aucun moyen d'attacher à notre cause tous les peuples pour faire adopter l'esprit de notre révolution, on a fait précisément en France et ailleurs, tout ce qu'il fallait pour faire détester le nouveau régime et tourner l'Europe contre nous. C'est si vrai, que pour discréditer la liberté dans les pays étrangers, les despotes n'ont rien de plus à faire que de dire à. leurs peuples : « Si vous étiez tenté d'embrasser les principes de la Révolution française, voyez le tableau qu'étalent à vos yeux ceux qui dominent à cette heure dans la Convention nationale. Voyez comme ils prétendent que les députés de cette cité, où s'est opérée cette révolution, et qui eux-mêmes y ont participé, ne sont que des brigands et des hommes de sang. Il y est dit chaque jour que Paris n'est qu'un théâtre de carnage et qu'on n'a renversé le trône de Louis XVI, que pour ohoisir un dictateur. Ils vous annoncent eux-mêmes que la terreur règne partout, que le désordre et l'anarchie sont à leur comble. »
Voilà, citoyens, les faits et gestes de votre premier comité de défense générale, et dites-moi s'il n'est pas exact de dire qu'à tous ces crimes il n'en a pas ajouté un dernier : celui de s'appliquer constamment à retarder toute mesure nécessaire au salut public, pour donner le temps à Dumouriez d'exécuter sans obstacles ses détestables projets.
Enfin vous décidâtes de le recomposer, et par décret le nombre en fut porté à 25 membres. Hélas, ils appartenaient tous à
la faction, excepté cinq ou six patriotes qu'on y introduisait par une sorte de transaction, pour endormir les amis de la liberté et faire servir des noms, qui inspiraient la confiance, à couvrir des perfidies. Et si vous doutez de ce que j'affirme aujourd'hui devant vous, rappelez-vous le jugement que porta Dumouriez lui-même. Souvenez-vous que lorsqu'il déclarait la guerre aux agitateurs : il disait que ce comité était bien composé à l'exception de cinq ou six membres. Indigné de tant de perfidies et connaissant le motif qui avait engagé les intrigants à me choisir, je déclarai hautement à la Convention nationale que ce comité n'était que le conseil de Dumouriez et que ne pouvant lutter contre la majorité, je donnais ma démission.
Ce qui s'est passé, depuis cette époque, répond parfaitement à l'esprit qui a toujours dirigé cette faction, et nous retrouvons, encore et toujours, cette fatale influence exercée par elle sur nos délibérations.
La Convention a fait une grande faute en envoyant auprès de Dumouriez cinq commissaires, dont l'arrestation était concertée d'avance, et surtout en leur adjoignant Beur-nonville. C'était envoyer un complice, un ambassadeur auprès des chefs de la conjuration, car vous n'avez pas été dupes de la comédie, jouée à votre barre par cet aide de camp, qui vint deux jours après raconter qu'il avait reçu un coup de sabre d'un satellite de Dumouriez, et de cette pasquinade plus grossière encore de Dumouriez, se plaignant de ce que son collègue et son confident Beur-nonville était venu pour l'assassiner au milieu de son armée et disant ensuite hautement qu'il répondait de lui, parce qu'il était son ami.
Plusieurs circonstances ont dérangé ici le cours de mes idées, et c'est pourquoi je'm'ex-cuse auprès de la Convention, si j'en ai présenté une partie en ce moment, sans mettre en ordre la suite et sans en résumer les conséquences. C'est que l'audace des conspirateurs m'a paru être à son comble et que cette hardiesse avec laquelle ils cherchaient à détourner l'opinion publique de leurs complots par une de ces farces auxquelles ils sont accoutumés, méritait d'être réprimée. J'ai cru qu'il était important, avant tout, de jeter en avant ces idées.
Je pose cette accusation et je la soutiendrai devant les tribunaux, si elle y est renvoyée. Je la soutiendrai également devant la Convention nationale, si elle veut s'en occuper d'un manière calme, approfondie et impartiale, surtout si elle veut m'entendre après que les accusés se seront défendus à cette tribune. Mais je soutiens que dès ce moment il est prouvé, aux yeux de tout homme de bonne foi, que si Dumouriez a des complices, ce sont ceux que j'ai désignés; que s'il existe une faction, c'est celle que j'ai indiquée. S'il eût été en mon pouvoir de prendre les mesures qui seules peuvent donner aux incrédules 1 unique genre de preuves qui peut les subjuguer, des preuves écrites émanées des mains des coupables même : si j'avais composé à mon gré les comités diplomatique et de défense générale, si j'avais disposé du ministère, je vous les aurais apportées ces preuves authentiques, auxquelles on n'a pas osé toucher ; j'aurais montré tout entier à vos regards
ce dépôt caché dans l'antre dés Tuileries et je n'eusse pas donné le temps aux coupables de s'échapper et de mettre à l'abri les papiers qui pouvaient les compromettre.
Mais lorsqu'il est question d'une conspiration politique qui tient aux événements, n'est-il pas d'autres preuves qui peuvent être suffisantes. Les faits publics par exemple, et dans l'espèce il s'agit de tous les faits consignés dans l'histoire de notre révolution, de toutes ces liaisons et de toute cette connivence éternelle des hommes que je dénonce avec le chef connu de la conjuration, avec le traître qui voulait vendre la patrie. Ce sont ces preuves là que j'apporte : je suis sûr que si elles ne suffisent pas à tel ou tel individu, elles suffiront du moins à l'opinion publique, à la nation, qui, comme l'histoire, jugeront sans partialité.
Or, je vous ai montré, depuis la Révolution du 10 août jusqu'à ce moment, un système soutenu, composé de faits clairs, très connus, dont le résultat est de perdre la République. Yous avez vu ce système développé par les amis de Dumouriez.
Je cherche les amis de Dumouriez; je les trouve, je les saisis. Ce sont ceux qui composaient sa société intime; ce sont ceux qui ont parlé, qui ont agi comme lui, qui ont favorisé, excusé ceux qui trahissaient avec lui; ce sont ceux qui étaient en correspondance avec lui dans la Belgique, et ce fait est prouvé à l'égard de Gensonné, à qui chaque courrier apportait une dépêche de son ami Dumouriez. Voilà des faits.
Je cherche maintenant les complices et je trouve ses généraux. Je vois qu'apparemment c'est ce Yalence qui a fui avec lui; c'est Egalité fils...
Un membre : Et le père?
Le père ? Eh ! pourquoi non ? (Applaudissements.)
C'est apparemment le confident dé toute cette famille, Sillery, qu'on a eu la bonne foi de croire patriote, comme si l'on avait oublié que c'était lui qui s'appelait jadis le comte de Genlis; c'est apparemment cette femme intrigante et perverse, malgré ses livres sur l'éducation, qui acompagnait au camp de Dumouriez la sœur d'Egalité et qui a suivi l'armée en Belgique.
Il n'y a pas de conspiration ou c'est celle-là; il n'y a pas de coupables, ou ce sont ceux-là.
Plusieurs membres : Oui, mais n'oubliez pas les amis d'Egalité.
Je la développerai cette conspiration, j'ordonnerai les faits qui la démontrent et la caractérisent; en ce moment pourtant, j'estime qu'aux yeux de la Convention ces preuves doivent être claires, car les agents et complices de toute cette conjuration lui sont connus. Il eût mieux valu, dès le moment où la conspiration éclata, les mettre tous, sans distinction, en état d'arrestation. Il ne fallait pas leur donner le temps de mettre à couvert les preuves de leurs crimes; il ne fallait pas leur donner le temps de faire de nouvelles trames par des déclamations, par des diatribes contre les patriotes. A cette heure, puisque
tout le mal est fait, j'estime que vous n'avez qu'une mesure à prendre. Vous devez renvoyer au tribunal extraordinaire la connaissance de la conspiration de Dumouriez ; vous devez le mettre en état d'accusation, ainsi que Valence, Egalité, Sillery, sa femme et tous les agents spécialement attachés à cette maison.
Je renouvelle, en ce moment, la même proposition que j'ai déjà faite à l'égard de Marie-Antoinette d'Autriche. Je demande que la Convention nationale s'occupe ensuite, sans relâche, des moyens tant de fois annoncés de sauver la patrie et de soulager la misère du peuple.
Je n'ose pas dire que vous devez frapper du même décret, des patriotes aussi distingués que MM. Vergniaud, Brissot et autres ; (Rires ironiques sur la Montagne) je n'ose pas dire qu'un homme qui correspondait jour par jour avec Dumouriez, doit être, au moins, soupçonné de complicité, car, à coup sûr, cet homme est un modèle de patriotisme, et ce serait une espèce de sacrilège que de demander le décret d'accusation contre M. Gensonné. (Rires.) Aussi bien je suis convaincu à cet égard de l'impuissance de mes efforts et je m'en rapporte, pour tout ce qui concerne ces illustres membres, à la sagesse de la Convention.
descend de la tribune au milieu des plus vifs applaudissements de la Montagne et des tribunes.
monte à la tribune et demande à répondre.
Je vais faire lire à la Convention plusieurs lettres dont il est important que l'Assemblée prenne connaissance, plutôt que de s'occuper plus longtemps de ces dénonciations. (Murmures. )
Plusieurs membres : Il faut entendre Vergniaud.
fait lire les lettres.
(Ce sont des comptes que rendent les commissaires à l'armée du Nord, de plusieurs de leurs opérations, et notamment des mesures qu'ils ont prises pour soustraires à la fureur populaire le général Lescuyer, complice de Dumouriez, chargé par lui de l'arrestation des commissaires) (1).
(2). Je rends grâces aux membres de cette Assemblée qui, en
applaudissant
J'oserai répondre à M. Robespierre... (Murmures sur la Montagne et dans les tribunes). J'oserai répondre..... (Nouveaux murmures).
, Président, rappelez donc les tribunes à un sentiment de justice.
Je demande acte à la Convention de ce que les hommes qui ont accueilli avec une si avide complaisance la calomnie, s'opposent à ce que je confonde l'imposteur qui en a distillé'le poison,
Plusieurs merrtbfes à droite .* Tous, nous demandons acte de ces interruptions. Nous sommons le Président de faire son devoir.
XL.es murmures continuent dans les tri-hunes.)
Je suislein de croire q®e le peuple se persuade de lui-même qu'il a le dreit de manquer à la Convention.
Plusieurs membres (à droite) z Dites donc une portion du peuple.
Je suis loin de croire aussi que les membres de la Convention veuillent manquer à son Président ; Je suis l'homme de tous les citoyens ; je ne me dévoue au parti d'aucun ; je suis l'homme de la République et non des factions ; je n'en connais aucune. S'il est un membre qui veut m'inculper, je le prie...
Mais, Président, c'est moi qui aî la parole.
Je dois être dégagé .de cette lutte.
Personne ne vous accuse.
Je ne sais pas ce que c'est que trahir mes devoirs ni la délicatesse...
Un membre (à droite) .' Tout ce qu'on tous demande, c'est du silence pour Yergniaud.
On vient de me rappeler à mon devoir, comme si je ne faisais pas tous mes efforts...
Je vous demande de me maintenir la parole.
C'est mon devoir de vous la maintenir : mais ce l'est aussi de ne pas présider si je suis inculpé.
Plusieurs membres : Vous ne l'êtes pas.
Par les membres de ce côté-là (désignant la partie droite, — Des murmures et des cris: Non, non I s'élèvent dans •cette partie.)
J'oserai répondre...
Si vous étiez au fauteuil comme moi, vous sentiriez combien il est pénible*..
Mais maintenez-moi la parole.
comhien est pénible la fonction de maintenir l'ordre au milieu d'interruptions sans cesse renaissantes.
Laissez-moi enfin parler.
J'oserai répondre à M. Robespierre qui, par un roman perfide, artificieusement éerit dans le silence du cabinet, et par de froides ironies,, vient provoquer de nouvelles discordes dans le sein de la Convention, J'oserai lui répondre sans méditation ; je n'ai pas, comme lui, besoin d'art : il suffit de mon Urne.
Je parlerai non pour moi ; c'est le eœur navré de la plus profonde douleur, que, lorsque la patrie réclame tous les instants de notre existence politique, je vois la Convention réduite par des dénonciations, où Fab-surdité seule peut égaler la scélératesse, à la nécessité de s occuper de misérables intérêts individuels ; je parlerai pour la patrie, au sort de laquelle, sur les bords de l'abîme où on l'a conduite, les destinées d'un de ses représentants qui peut et qui veut la servir, ne sont pas tout_ à fait étrangères ; je parlerai non pour moi, je sais que dans les révolutions, la lie des nations s'agite, et s'élevant sur la surface politique, paraît quelques moments dominer les hommes de bien. Dans mon intérêt personnel, j'aurais attendu patiemment que ce règne passager s'évanouît ; mais puisqu'on brise le ressort qui comprimait mon âme indignée, je parlerai pour éclairer la France qu'on égare. Ma voix qui, de cette tribune, a porté phts d'une fois la terreur dans ce palais d'où elle a concouru à précipiter le tyran, la portera aussi dans l'âme des scélérats qui voudraient substituer leur tyrannie à celle de la royauté.
Je vais d'abord réfuter les ridicules accusations de M. " Robespierre. Je parlerai ensuite de la pétition qui vous a été dénoncée par Pétion, et que M. Robespierre a su si bien vous faire perdre de vue : et à mon tour, je ferai connaître à la France les véritables complices de Dumouriez.
Je déclare, au reste, que, dans les accusations tout étant personnel, je n'entends point ravir à mes collègues dénoncés l'avantage de se défendre eux-mêmes, et que je réponds pour moi seul.
Je déclare enfin que je parlerai avec toute l'énergie qui convient à un homme libre ; mais que je veillerai sur moi pour me préserver des passions qui pourraient amortir celle qui doit nous animer tous, l'amour de la République. En vain on cherche à m'aigrir. Je ne seconderai pas les projets infâmes des traîtres qui, pour faciliter le triomphe des puissances liguées contre nous, travaillent à distraire notre attention des mesures nécessaires à notre défense, et s'efforcent de nous faire en-tr'égorger comme les soldats de Gadmus, pour livrer notre place vacante au despote qu'ils ont l'audace de vouloir nous donner.
Première inculpation. Robespierre nous accuse de nous être opposés, dans le mois de juillet, à la déchéance de Louis Gapet.
Je réponds que dans un discours que j'ai prononcé le 3 juillet, moi le premier, à cette tribune, j'ai parlé de déchéance, et si, sous le poids de la grande accusation de M. Robespierre, il m'était permis de dire quelque bien de moi, j'ajouterais que peut-être l'énergie de mon discours ne contribua pas peu à préparer le mouvement révolutionnaire.
A la vérité, des patriotes ardents, dont le zèle était inconciliable avec une espèce de ré-
flexion ; sans avoir étudié l'opinion publique, sans avoir pris les moyens qui pouvaient la former et la mûrir, sans s'être assurés que dans les départements on ne regarderait pas la seule mesure qui pût les sauver comme un parjure de la part de l'Assemblée législative, sans avoir combiné aucune des précautions qui devaient assurer le succès de cette mesure extraordinaire, crièrent avec emportement: A la déchéance! Je crus devoir modérer l'impétuosité d'un mouvement qui, bien dirigé, faij sait triompher la liberté, qui, , désordonné comme celui du 20 juin, la perdait à jamais. Où d'ailleurs nous aurait menés la déchéance, si, comme ils le demandaient, on l'eût prononcée en vertu de la Constitution ? A tous les désordres qui auraient pu naître de la minorité d'un nouveau roi, et du despotisme d'un régent, au maintien de la Constitution et de la royauté. Eh bien ! dans la commission des vingt et un, dont j'étais membre, nous ne voulions ni d'un roi, ni d'un régent : nous voulions la République. Ce motif nous détermina, après de grandes discussions, à préférer la mesure de la simple suspension et de la convocation d'une Convention qui, chargée de donner un gouvernement à la France, la délivrât enfin du fléau de la royauté sous lequel elle gémissait depuis tant de siècles : et cette mesure, ce fut moi, après avoir présidé toute la nuit du 9 au 10 août, au bruit du tocsin, qui vins, pendant que Guadet présidait, le matin, au bruit du canon, la proposer à l'Assemblée législative.
Je le demande, citoyens, est-ce là avoir composé avec la Cour ? Est-ce à nous qu'elle doit de la reconnaissance, ou bien à ceux qui, par les persécutions qu'ils nous font éprouver, la vengent avec tant d'éclat du mal que nous lui avons fait ? (Vifs applaudissements.)
Seconde inculpation. Robespierre nous accuse d'avoir inséré dans le décret de suspension, un article portant qu'il serait nommé un gouverneur au prince royal. U prétend que c'était là une pierre d'attente que nous avions posée pour la royauté.
Le 10 août, je quittai le fauteuil du Président sur les neuf heures du matin. Je me rendis à la commission des vingt et un, où je rédigeai en dix minutes le projet de décret que je présentai ensuite à l'Assemblée. Je suppose que les motifs sur lesquels je me fondai pour y insérer l'article qu'on me reproche, aient été de ma part une opinion erronée : peut-être dans les circonstances graves où nous étions, peut-être au milieu des inquiétudes qui devaient m'agiter pendant le combat que les amis de la liberté livraient au despotisme, peut-être serais-je excusable de n'avoir pas été infaillible. Au moins ne conviendrait-il pas à M. Robespierre, qui alors s'était prudemment enseveli dans une cave, de me témoigner tant de rigueur pour un moment de faiblesse. Mais voici mes motifs, que l'Assemblée les juge.
Lorsque je rédigeai à la hâte le projet de décret, la victoire flottait incertaine entre le peuple et le château. Si le château eût triomphé, Louis eût sans doute réclamé contre sa suspension, qu'il eût soutenu être contraire à la Constitution ; mais il n'eût pu réclamer contre la nomination d'un gouverneur à son fils, qui était textuellement pres-
crite, par la Constitution. Cette nomination isolait sur-le-champ et constitutionnellement le fils du père ; elle livrait entre les mains du mmple un otage, contre les vengeances d'un tyran vainqueur et irrité ; et remarquez que les destinées du peuple l'ayant emporté, que la victoire ayant couronné son courage après un très court combat,il ne fut plus question de nommer un gouverneur au fils de Louis, et que le lendemain ou le surlendemain, la commission des vingt et un demanda elle-même le rapport de l'article du décret qui ordonnait cette nomination.
Citoyens, une pareille conduite vous semble-t-elle de nature à vous laisser des doutes sur mes intentions? Croyez-vous qu'il y ait eu de la perfidie dans le décret ? Ne la trouvez-vous pas plutôt dans l'imputation de Robespierre? (Nouveaux applaudissements à droite et au centre.)
Troisième imputation; Nous avons loué Lafayette et Narbonne.
Je déclare que je n'ai parlé de Narbonne qu'une seule fois ; ce fut lorsqu'on demanda l'insertion au procès-verbal d'un discours qu'il avait prononcé ; mais ce fut pour m'opposer à cette proposition, en disant que si Narbonne avait parlé patriotiquement, il n'avait fait que son devoir, et qu'il ne fallait pas faire du patriotisme une chose si étrangère aux ministres, qu'on regardât comme digne d'une mention particulière un discours écrit dans les principes de la liberté.
Nous avons loué Lafayette ! Eh ! qui donc a parlé contre lui, si ce n'est les membres qu'on accuse ? C'est Guadet et moi qui, malgré les murmures et les huées d'une grande partie de l'Assemblée législative, l'avons attaqué, lorsque, dans ses lettres ou à cette barre, il a tenté de faire le petit César. Je n'ai pas parlé dans la grande discussion qui s'éleva pour savoir s'il serait mis en état d'accusation. Plus de vingt orateurs étaient déjà inscrits lorsque je me présentai pour demander la parole; mais on ne contestera pas sans doute que j'ai voté pour le décret d'accusation; or, je prie M. Robespierre de développer tout son talent pour prouver que c'est là un panégyrique.
Quatrième inculpation: Robespierre nous accuse d'avoir fait déclarer la guerre à l'Autriche.
La Convention n'exigera pas sans doute que pour me justifier, je lui développe les motifs d'après lesquels l'Assemblée législative vota à l'unanimité pour la déclaration de guerre. Je ne ferai qu'une seule observation. De toutes parts, nous étions cernés par les troupes prussiennes et autrichiennes, et par les émigrés à qui l'Autriche et la Prusse avaient permis de se former en corps d'armée. La question n'était pas de savoir si nous aurions la guerre: elle nous était déjà déclarée par le fait : il s'agissait de savoir si nous attendrions paisiblement qu'ils eussent consommé les préparatifs qu'ils faisaient à nos portes pour nous écraser; si nous leur laisserions transporter le théâtre de la guerre sur notre territoire, ou si nous tâcherions de le transporter sur le leur. L'Assemblée législative se décida pour l'attaque, et si quelques revers ont signalé le commencement de la campagne, les victoires qui
l'ont terminée justifient assez la résolution courageuse de l'Assemblée législative (1).
Cinquième inculpation. On a parlé de Vhistoire dès 6 millions accordés à Dumouriez pour dépenses secrètes. Je vais, à cet égard, donner à la Convention une explication sur ce qui peut m'être personnel.
Dumouriez ayant présenté un mémoire à l'Assemblée législative pour obtenir les 6 millions, ce mémoire fut renvoyé à l'examen du comité diplomatique et du comité des finances réunis. J'étais membre du comité diplomatique ; on convient dans l'assemblée des deux comités que les dépenses secrètes étaient une source de grands abus et de grandes dilapidations; mais qu'une distribution patriotique des 6 millions demandés, d'après notre position avec la Belgique et les puissances ennemies, pouvait, au commencement de la campagne, produire de grands avantages; et après avoir calculé les diverses chances, il fut décidé de proposer à l'Assemblée législative d'accorder les 6 millions. Alors il fut question de nommer un rapporteur. Personne ne voulut l'être. Un instinct secret avertissait tous les membres présents qu'un jour on tenterait, pour se populariser, de flétrir l'honneur de celui qui aurait fait le rapport. Us s'adressèrent tous à moi ; ils me dirent : Vous seul ici avez assez de popularité pour présenter le projet de décret; vous seul n'avez pas le droit de refuser de vous en charger. Je résistai d'abord, on me pressa; ce fut au risque d'une popularité qui m'était aussi chère qu'elle peut l'être à mes accusateurs, que, consultant plus l'intérêt public que mon intérêt personnel, je vins proposer ce décret à l'Assemblée législative (2).
Je déclarai seulement que je ne ferais le rapport qu'autant qu'il y
aurait unanimité dans les opinions des deux comités, et que si le projet
de décret était attaqué dans l'Assemblée, tous les membres des deux
comités se lèveraient pour le défendre et pour soutenir le rapporteur
qui n'était que leur organe. On me le promit; je fis le rapport; les 6
millions furent accordés; et comme pendant son ministère, je n'ai vu
Dumouriez qu'au comité ; comme dans l'Assemblée législative, j'ai été
assez étranger à la partie des finances, aux redditions de comptes, j'ai
toujours ignoré de quelle manière les 6 millions furent remis à la
disposition de Dumouriez, et l'usage qu'il en a fait.
Ici il n'est pas inutile de rappeler que, sans doute pour donner plus d'activité à notre surveillance, Robespierre entouré d'assassins nous dénonçait le 2 septembre, comme les agents de Brunswick; qu'il n'est pas de moyens, de calomnies, de menaces que lui ou ses amis, n'aient employées pour dissoudre cette commission qui, j'ose le dire, servait bien la patrie. C'est elle, aujourd'hui accusée d'avoir négligé l'organisation ou l'approvisionnement de nos armées qui, s'occupant jour et nuit, prépara tous les travaux de l'Assemblée législative et les moyens de réparer, autant qu'il était possible, les désordres que les trahisons de Louis et de ses perfides ministres avaient introduits dans nos armées : ces travaux insuffisants peut-être, si on les compare aux circonstances, furent cependant immenses; ils ont concouru, avec l'énergie du peuple, à préparer nos succès; et Ces succès dont la Convention nationale est venue recueillir le fruit, ont été assez éclatants pour être une réfutation suffisante des reproches de M. Robespierre.
Septième imputation. Après le 10 août, nous avons calomnié le conseil général de la commune révolutionnaire de Paris qui a sauvé la République.
Ma réponse sera simple. Pendant l'administration de ce conseil général, des dilapidations énormes ont été commises sur les biens nationaux, sur le mobilier des émigrés, sur celui trouvé dans les maisons ci-devant royales, sur les effets déposés à la commune. Pour mettre un terme à ces dilapidations, je demandai que le conseil général fût tenu de rendre ses comptes. Cette demande était juste; je la' fis sans aucune espèce de .déclamation. Un décret ordonna que les comptes seraient rendus. Etait-ce calomnier le conseil général de la commune ? N'était-ce pas plutôt lui fournir une occasion de prouver avec quel zèle il avait administré la fortune publique? Cependant c'est à cette époque principalement que l'on a commencé à me ravir ma popularité. Tous les hommes qui craignirent de voir leurs brigandages découverts, se répandirent en calomnies contre moi, et je fus oientôt un mauvais citoyen, pour n'avoir pas voulu être le complice des fripons.
Huitième imputation. Robespierre nous accuse d'avoir calomnié Paris.
Lui seul et ses amis ont calomnié cette ville célèbre. Ma pensée s'est toujours arrêtée avec effroi sur les scènes déplorables qui y ont souillé la Révolution ; mais j'ai constamment soutenu qu'elles étaient l'ouvrage, non du peuple, mais de quelques scélérats accourus de toutes les parties de la République, pour vivre de pillage et de meurtre dans une ville dont l'immensité et les agitations continuelles ouvraient la plus grande carrière à leurs criminelles espérances; et pour la gloire même du peuple, j'ai demandé qu'ils fussent livrés au glaive des lois.
D'autres, au contraire, pour assurer l'impu-
nité des brigands et leur ménager sans doute de nouveaux massacres et de nouveaux pillages, ont fait l'apologie de leurs crimes'et les ont tous attribués au peuple; or, qui calomnie le peuple, ou de l'homme qui le soutient innocent des crimes de quelques brigands étrangers, ou de celui qui s'obstine à imputer au peuple entier l'odieux de ces scènes de sang ? (Applaudissements. )
Ce sont des vengeances nationales.
Je poursuis.
Neuvième imputation : Nous avons voulu faire fuir de Paris VAssemblée législative.
Je suis étonné que cette imputation se trouve dans la bouche de Robespierre, qui consultait avec ses amis s'il ne convenait pas qu'un homme aussi précieux que lui allât chercher un asile à Marseille, c'est-à-dire dans la ville la plus reculée du théâtre de la guerre.
Nous avons voulu fuir Paris! C'est une calomnie infâme : Je ne sais si quelques membres de la commission conçurent ce projet; c'est possible : il y avait alors des Feuillants, il y avait des âmes agitées par la terreur que leur inspirait l'approche des Prussiens qui étaient en Champagne. Je ne sais si quelques membre du conseil exécutif se livrèrent, comme l'a dit Robespierre, aux mêmes frayeurs et aux mêmes rêves; mais je sais que cette idée ayant été jetée dans le comité d'une manière vague, je la repoussai avec la plus grande énergie; je déclarai que c'était à Paris qu'il fallait assurer le triomphe de la liberté ou périr avec elle; je déclarai que, si l'Assemblée législative sortait de Paris, ce ne pourrait être que comme Thémistocle sortit d'Athènes, c'est-à-dire avec tous les citoyens, en ne laissant à nos ennemis pour conquêtes que des cendres et des décombres, et en ne fuyant un instant devant eux que pour mieux creuser leur tombeau. La proposition fut en effet repoussée par la commission d'une voix unanime... (Violentes interruptions et murmures sur la Montagne. )
Je défie ceux qui murmurent de prouver la fausseté de cette assertion, dont 200 membres de l'Assemblée législative furent témoins.
Moi, je la nie.
Vous n'étiez pas alors dans la commission.
Dixième imputation. Robespierre nous accuse d'avoir corrompu, par notre correspondance, l'esprit des départements.
J'adjure celui auquel je me fais gloire d'appartenir, et qui, je l'espère, ne maudira pas ma mémoire, le département de la Gironde; j'adjure ce département qui, dans les commencements de la Révolution, a le premier donné l'exemple à la France de la formation d'une armée marchant à ses propres frais pour secourir à cinquante lieues de ses foyers les patriotes opprimés à Montauban sous le joug de l'aristocratie; qui, malgré les pertes immenses, qu'il a faites dans les colonies, n'a cessé de multiplier les sacrifices pour la grande querelle des peuples contre les rois; qui a fourni 10 bataillons à nos armées; qui, à la première nouvelle des troubles de la Vendée, a fourni 4,000 hommes; qui, dans le dernier
recrutement, au lieu de 2,800 hommes que la loi lui demandait, en a donné 5,000; qui, dans un court espace de temps, a fait une collecte en dons patriotiques, de plus de 600,000 francs; qui fournit à notre marine 6,000 matelots, et harcèle le commerce de nos ennemis par ses corsaires : je l'adjure ce département qu'on voudrait bien appeler Feuillantin, parce qu'il a su se préserver des horreurs de l'anarchie, moins contre l'énergie duquel toutes les calomnies viennent ignominieusement échouer; je l'adjure de déclarer si j'ai tenté en quelque manière d'égarer ses opinions. Ce n'est pas que je veuille faire entendre que j'ai influé par ma correspondance sur le bon esprit qui s'y est maintenu. Sans qu'il soit besoin d'impulsion étrangère, les hommes de la Gironde trouvent dans leur cœur l'amour de la liberté et la haine des brigands. Quant à ma correspondance, en voici en deux mots tout le secret : Je n'écris jamais de lettres. (Applaudissements. )
Onzième imputation : Nous avons sans cesse dénoncé et suscité des divisions dans le sein de la G onvention.
Je ne sais si c'est à moi que s'adresse ce reproche; j'avoue que j'en serais fort surpris, car peut-être ne m'a-t-on appelé modéré que parce que je n'ai jamais fait une seule dénonciation.
Douzième imputation : Nous avons détourné les députés belges de la réunion à la France.
Je n'ai vu que deux députés belges. Je ne les ai vus qu'une seule fois : ce fut pendant ma présidence. Ils vinrent me demander leur admission à la barre : je les fis sur-le-champ introduire. Si c'est là les avoir éloignés de la réunion, je suis grandement coupable.
Treizième imputation. Robespierre nous accuse d'avoir voté pour l'appel au peuple.
Lui devais-je le sacrifice d'une opinion que je croyais bonne ? J'ai voté pour l'appel au peuple, parce que je pensais qu'il pourrait nous éviter une nouvelle guerre dont je redoutais les calamités ; parce qu'il déjouait infailliblement les projets d'une faction dont je soupçonnais l'existence; parce qu'en votant pour la mort de Louis, je ne voulais pas voter le couronnement d'un nouveau tyran. La guerre que je craignais est déclarée. Resterait-il encore des doutes sur l'existence de la faction d'Orléans?
Si ces doutes sont entièrement évanouis, comment se permet-on de qualifier d'inciviques les motifs qui détermineront mon opinion, motifs que d'ailleurs personne n'entreprit de combattre en principe?
L'appel au peuple pouvait, sous quelques rapports, être une faute politique. Mais à qui faut-il l'imputer? A ceux qui, en refusant de prononcer le bannissement des Bourbons, avant d'envoyer Louis au supplice, me donnèrent aussi le droit de souçonner leurs intentions. .
Quatorzième imputation. Robespierre nous accuse d'avoir de grandes relations avec Dumouriez, et il m'accuse nominativement de l'avoir soutenu dans le comité de défense générale .
L'histoire de mes relations est courte. A son retour de la Champagne, j'ai été d'un souper
auquel il était invité, et où il y avait au moins 100 personnes. A son retour de la Belgique, le hasard me l'a fait rencontrer dans une maison où j'ai dîné avec lui. Je déclare que depuis qu'il commande nos armées, nous n'avons pas eu ensemble d'autre^ relations. Jamais il n'a reçu de lettre de moi : jamais je n'en ai reçu de lui. Que si c'est un crime de l'avoir rencontré, même avec plaisir, lorsqu'il revenait triomphant de la Champagne ou de la Belgique, et qu'il faisait croire à son patriotisme autant par ses services que par ses discours, je demande le décret d'accusation contre tous les citoyens de Paris qui se sont empressés de le voir et de l'accueillir ; je le demande contre la Convention nationale, qui l'a reçu dans son sein avec les témoignages de la plus grande bienveillance ; je le demande contre toute la France, qui lui votait des remerciements.
Robespierre a embrassé Dumouriez aux Jacobins.
J'ajoute pour ceux à qui mes moyens de justification ne paraissent pas péremptoires, que Dumouriez a été couronné et embrassé par Robespierre aux Jacobins.
Ce n'est pas par Robespierre, c'est par Collot-d'Herbois.
Yous en avez donc été dupes comme moi.
C'est Dumouriez qui alla embrasser Collot-d'Herbois.
Et ce qui sans doute est bien plus fort, je demande le décret d'accusation contre les Jacobins, qui l'ont couronné et embrassé dans une de leurs séances. (.Applaudissements.)
Pourquoi, d'ailleurs, nous reproche-t-on avec une ! méchanceté si niaise, des soupers faits avec Dumouriez dans un temps où la France le proclamait l'un des plus utiles défenseurs, et se tait-on sur les dîners que nos calomniateurs ont faits habituellement avec d'Orléans? «H n'est pas indifférent que je dise que dans les premiers jours de la Convention, je fus invité à dîner chez un député de Paris, et que j'y trouvai d'Orléans.
Un membre ; Nommez le député.
C'est ;Rofeert.
Maintenant, je nie formellement que j'aie soutenu Dumouriez dans le comité de défense générale. J'ai pu ne pas croire d'abord qu'il fût d'intelligence avec les Autrichiens; et ni Danton, ni Camus, ne paraissaient le croire. J'invoque, à eet égard, le compte qu'ils ont rendu eux-mêmes à la Convention. N'ont-ils pas dit à cette tribune qu'il serait dangereux d'ôter le commandement de l'armée à Dumouriez, avant que la retraite de Belgique ne fût consommée? Quant aux faits qui inculpaient sa conduite, comme je ne pouvais pas les connaître je déclarai m'en référer entièrement à ce que diraient les commissaires. Je déclarai que leur rapport seul pouvait déterminer la conduite de l'Assemblée. J'interpellerais Camus, s'il était présent, sur la vérité de ce que je dis, et je ne crains pas d'interpeller Danton.
Quinzième imputation. Robespierre nous accuse, eomme membres du comité de défense gé-
nérale, de n'avoir pris aucune des mesures convenables aux circonstances.
Rappelez-vous, citoyens, que vous aviez composé ce comité des hommes que vous supposiez les plus divisés par leurs haines. Yous aviez espéré que sacrifiant leurs passions à la chose publique, ils consentiraient à s'entendre mutuellement; que s'ils s'entendaient, la raison et le danger commun les auraient bientôt mis d'accord; et que de là, il résulterait plus de calme dans les discussions de l'Assemblée, et de promptitude dans les délibérations. Empressés de seconder vos vues nous nous sommes rendus franchement et loyalement à ce comité. Robespierre et ses amis n'y ont presque jamais paru; mais s'ils ne remplissaient pas la tâehe que vous leur aviez imposée, ils en remplissaient une bien chère à leurs cœurs, ils nous calomniaient. Ils nè venaient pas au comité, dit Robespierre, à cause de l'influence que nous y exercions ! Ils sont donc bien lâches, puisqu'ils n'osaient entreprendre de la combattre? Je dois dire comment on a paralysé ce comité, comment on l'a contraint à se dissoudre. Lorsqu'il se réunissait, il se rendait habituellement au lieu de ses séances 50, 100, quelquefois 200 membres de la Convention. Ce n'était plus un comité, c'était un club où il était impossible de travailler, parce que tout le monde parlait à la fois, et que les membres du comité étaient ceux qui souvent éprouvaient le plus de difficultés pour obtenir la parole.
Qu'arrivait-il, si, après avoir surmonté ce premier obstacle, le comité parvenait à mettre enfin quelque objet important en discussion? Alors un des assistants venait vite à la Convention, proposer en son nom le projet de décret qui se discutait au comité; de sorte que quand le comité avait fini son travail, il apprenait que la Convention l'avait devancé, et on se donnait le plaisir d'accuser le comité de ne rien faire.
A ce misérable manège si indigne de la représentation nationale, j'ajouterai un fait qui mettra dans tout son, jour le caractère de mon délateur. Le comité avait arrêté de faire, pour l'armée, une adresse qui serait signée individuellement par les membres de la Convention. Condorcet et moi nous fûmes nommés commissaires de la rédaction. Je crus convenable, dans les circonstances, de nous faire adjoindre un des membres sur qui repose la popularité, et dont la coopération aurait prévenu tout débat dans l'Assemblée. Robespierre était présent. Je priai le comité de l'engager à se réunir à nous. Robespierre répondit qu'il n'avait pas le temps. Je le demande à la France entière, est-ce à l'homme qui, quand on le presse de faire quelque chose pour la patrie, répond qu'il n'a pas le temps? Est-ce à un être aussi morose ou aussi apathique, que peut appartenir le droit, je ne dis pas de calomnier, ce droit infâme n'appartient à personne, mais même de censurer les hommes qui consacrent à la chose publique toute leur existence, et n'ont de temps que pour elle ?
(Vifs applaudissements à droite et au centre.)
interrompt.
Je demande si les membres qui, par leur négligence, nous laissaient tout
le travail du comité, peuvent nous accuser de nous être rendus les meneurs.
, s avançant au milieu de la mile. On ne voulait pas aller dans un comité où il y avait des conspirateurs.
Je ne dirai qu'un mot à Panis : c'est qu'avant d'avoir le droit de m'inter-rompre, il faut qu'il rende ses comptes.
profère quelques paroles au milieu du tumulte et retourne à sa place.
Après avoir suivi Robespierre dans les détails de son accusation, je vais le suivre dans ses généralités. A son avis, nous sommes des meneurs, des intrigants, des modérés.
Seizième imputation : Nous sommes des meneurs.
Robespierre a-t-il voulu dire que nous dirigeons les travaux de la Convention nationale, que nous influençons les décisions, que nous ne désemparons pas la tribune, que nous faisons rendre les décrets ? Mais c'est là une imposture, dont toute la Convention peut rendre témoignage. Donne-t-il un autre sens à ce mot meneur? Qu'il s'explique, ou qu'il me dispense de lui répondre.
Dix-septième imputation : Nous sommes des intrigants.
Et où avons-nous intrigué? dans les sections ? Nous y a-t-on vus exciter les passions du peuple par des discours bien féroces et des motions bien incendiaires; le flatter pour usurper sa faveur, et le précipiter dans un abîme de misères, en le poussant à des excès destructeurs du commerce, des arts et de l'industrie? Non, nous n'avons pas été jaloux de cette gloire ; nous l'avons laissée à nos adversaires. Est-ce dans le sein de la Convention, pour faire passer tel ou tel décret, nommer tel ou tel président, tel ou tel secrétaire, tel ou tel ministre ? Eh bien ! s'il est un membre dans cette Assemblée dont il me soit arrivé dans une seule occasion de solliciter le suffrage, soit pour une opinion, soit pour une personne, qu'il ose se lever et m'accuser.
Pourquoi avons-nous intrigué? pour satisfaire notre ambition personnelle ? Mais le 10 août, nous-t-on vus proposer de prendre les ministres dans le sein de l'Assemblée législative? Nous jouissions cependant d'une grande popularité. L'occasion nous souriait, nous pouvions croire, sans présomption, que le choix tomberait sur quelqu'un d'entre nous; nous ne l'avons pas fait. Où donc sont les preuves de cette passion de fortune ou de pouvoir dont on nous accuse ? Aurions-nous au moins intrigué pour faire donner des places à nos parents, à nos amis ?
Mais Danton s'est glorifié d'en avoir sollicité et obtenu pour des hommes qu'il croyait bons citoyens. Si, ce que j'ignore, quelqu'un de nous a suivi la même règle de conduite, comment pourrait-on lui faire un crime de ce qui n'a pas paru blâmable en Danton ? Quant à moi, à l'exception de cinq ou six attestations de civisme que j'ai signées, et auxquelles il est possible que les ministres aient eu quelque égard, je n'ai sollicité individuellement, ni auprès d'eux, ni auprès de leurs agents, ni dans les comités de l'Assemblée lé-
gislative, ni dans ceux de la Convention nationale, et je n'ai pas fait donner même une place de garçon de bureau. Ceux qui m'accusent d'intrigue et d'ambition, pourraient-ils faire la même déclaration ? (Applaudissements. )
Dix-huitième imputation. Enfin Robespierre nous accuse d'être devenus tout à coup des modérés, des feuillants.
Nous, modérés ? je ne l'étais pas le 10 août, Robespierre, quand tu étais caché dans ta» cave. Des modérés ! Non, je ne le suis pas, dans ce sens que je veuille éteindre l'énergie nationale. Je sais que la liberté est toujours active comme la flamme, qu'elle est inconciliable avec ce calme parfait qui ne convient qu'à des esclaves. Si on n'eût voulu que nourrir ee feu sacré qui brûle dans mon cœur, aussi ardemment que dans celui des hommes qui parlent sans cesse de l'impétuosité de leur caractère, de si grands dissentiments n'auraient pas éclaté dans cette Assemblée. Je sais aussi que dans ces temps révolutionnaires, il y aurait autant de folie à prétendre calmer à volonté l'effervescence du peuple, qu'à commander aux flots de la mer d'être tranquilles quand ils sont battus par les vents. Mais c'est au législateur à prévenir, autant qu'il peut, les désastres de la tempête par de sages conseils ; et si, sous prétexte de révolution, il faut, pour être patriote, se déclarer le protecteur du meurtre et du brigandage, je suis modéré.
Depuis l'abolition de la royauté, j'ai beaucoup entendu parler de révolution. Je me suis dit :. il n'y en a plus que deux possibles; celle des propriétés ou la loi agraire, et celle qui nous ramènerait au despostime. J'ai pris la ferme résolution de combattre l'une et l'autre, et tous les moyens indirects qui pourraient nous y conduire. Si c'est là être modéré, nous le sommes tous : car tous nous avons voté la peine de mort contre tout citoyen qui proposerait l'une ou l'autre.
J'ai aussi beaucoup entendu parler d'insurrection, de faire lever le peuple, et je l'avoue, j'en ai gémi. Ou l'insurrection a un objet déterminé, ou elle n'en a pas; au dernier cas, c'est une convulsion pour le corps politique, qui ne pouvant lui produire aucun bien, doit nécessairement lui faire beaucoup de mal. La volonté de la faire naître ne peut entrer que dans le cœur d'un mauvais citoyen. Si l'insurrection a un objet déterminé, quel peut-il être? de transporter l'exercioe de la souveraineté dans la République. L'exercice de la souveraineté est confié à la représentation nationale. Donc ceux qui parlent d'insurrection veulent détruire la représentation nationale; donc ils veulent remettre l'exercice de la souveraineté à un petit nombre d'hommes, ou le transporter sur la tête d'un seul citoyen; donc ils veulent fonder un gouvernement aristocratique, ou rétablir la royauté. Dans les deux cas, ils conspirent contre la République et la liberté; et s'il faut ou les approuver pour être patriote ou être modéré en les combattant, je suis modéré. {Vifs applaudissements.)
Lorsque la statue de la liberté a pour socle les débris du trône, l'insurrection ne peut être provoquée que par les amis de la loyauté. Eh! quels funestes effets n'ont pas produit ces provocations continuelles? Quelles armes n'ont-elles pas fournies à l'aristocratie? C'est
elle qui prenant d'abord les couleurs du patriotisme, et ce langage exagéré, a crié, dans les départements de la Vendée et du Finistère : « Citoyens, toute la France vous appelle, il faut vous lever ! » c'est elle qui, mettant à profit les mouvements qu'elle avait eu l'art d'exciter et les passions qu'elle avait allumées, a marché ensuite directement à son but et a crié sur les bords aujourd'hui dévastés de la Loire : « Citoyens, on a renversé les autels, on a ravi vos subsistances; vous n'avez plus ni pain, ni travaux ; les assignats perdent; que fait pour votre bonheur la Convention nationale ? Vous êtes levés, restés debout jusqu'à ce que vous ayez obtenu des prêtres et des rois. »
Ainsi pour avoir toléré les appels à l'insurrection, vous vous êtes mis dans la nécessité de punir, comme des brigands, des hommes qui eussent été bons citoyens, si on ne les eût égarés.
Nous sommes des modérés! mais au profit de qui avons-nous montré cette grande modération? Au profit des émigrés? nous avons adopté contre eux toutes les mesures de rigueur que commandaient également et la justice et l'intérêt national. Au profit des conspirateurs du dedans ? nous n'avons cessé d'appeler sur leurs têtes le glaive de la loi; mais j'ai repoussé la loi qui menaçait de proscrire l'innocent comme le coupable. On parlait sans cesse de mesures terribles, de mesures révolutionnaires. Je les voulais aussi ces mesures terribles; mais contre les seuls ennemis de la patrie. Je ne voulais pas qu'elles compromissent la sûreté des bons citoyens, parce que quelques scélérats auraient intérêt à les perdre; je voulais des punitions et non des proscriptions. Quelques hommes ont paru faire consister leur patriotisme à tourmenter, à faire verser des larmes. J'aurais voulu qu'il ne fît que des heureux. La Convention est le centre autour duquel doivent se rallier tous les citoyens. Peut-être que leurs regards ne se fixent pas toujours sur elle sans inquiétude et sans effroi. J'aurais voulu qu'elle fût le centre de toutes les affections et de toutes les espérances. On a cherché à consommer la Révolution par la terreur, j'aurais voulu la consommer par l'amour. Enfin, je n'ai pas pensé que, semblables aux prêtres et aux farouches ministres de l'inquisition, qui ne parlent de leur Dieu de miséricorde qu'au milieu des bûchers, nous dussions parler de liberté au milieu des poignards et des bourreaux. (Nouveaux applaudissements. )
Nous, des modérés ! Ah ! qu'on nous rende grâce ae cette modération dont on nous fait un crime. Si, lorsque dans cette tribune on est venu secouer les torches de la discorde et outrager avec la plus insolente audace la majorité des représentants du peuple; si, lorsque on s'est écrié avec autant de fureur que d'imprudence : plus de trêve, plus de paix entre nous, nous eussions cédé aux mouvements de la plus juste indignation, si nous avions accepté le cartel contre-révolutionnaire que l'on nous présentait : je le déclare à mes accusateurs, de quelques soupçons dont on nous environne, de quelques calomnies dont on veuille nous flétrir, nos noms sont encore plus estimés que les leurs; on aurait vu accourir de tous les départements, pour combattre les hommes du 2 septembre, des hommes également redoutables à l'anarchie et aux tyrans. Nos accusa-
teurs et nous, nous serions peut-être déjà consumés par le feu de la guerre civile. Notre modération a sauvé la République de ce fléau terrible, et par notre silence nous avons bien mérité de la patrie. (Vifs applaudissements.)
Je n'ai laissé sans réponse aucune des calomnies, aucune des divagations de Robespierre. J'examine maintenant la pétition dénoncée par Pétion; mais comme cette pétition tient à un complot général, permettez que je prenne les faits d'un peu plus haut.
Le 10 mars, une conjuration éclata contre la Convention nationale, je vous la dénonçai; je nommai quelques-uns des chefs. Je vous lus des arrêtés pris au nom de deux sections, par quelques intrigants qui s'étaient-glissés dans leur sein. On feignit de révoquer les faits en doute; on regarda comme incertaine l'existence des arrêtés. Cependant les faits étaient attestés même par la municipalité de Paris. L'existence des arrêtés fût confirmée par les sections qui vinrent les désavouer et vous en dénoncer les auteurs.
Vous ordonnâtes, par un décret, que les coupables seraient poursuivis devant le tribunal révolutionnaire; le crime est avéré. Quelles têtes sont tombées? aucune. Quel complice a été seulement arrêté ? aucun. Vous-mêmes avez concouru à rendre votre décret illusoire. Vous aviez mandé Fournier à votre barre. Fournier convint qu'il s'était trouvé dans le premier rassemblement formé aux Jacobins, que de là il avait suivi le rassemblement aux Cordeliers, lieu du rendez-vous général; que dans ce rendez-vous, il avait été question de sonner le toscin, de fermer les barrières, et d'égorger une partie de la Convention. Mais, parce qu'il ajouta que, dans ces scènes où il avait été acteur, il n'avait apporté aucune mauvaise intention; e't comme si celle d'égorger une partie de la Convention n'eût pas dû être réputée mauvaise, vous lui rendîtes la liberté, en ordonnant qu'il serait entendu comme témoin, s'il y avait lieu, devant le tribunal révolutionnaire. C'est à peu près comme si, à Rome, le sénat eût décrété que Lentulus pourrait servir de témoin dans la conjuration de Catilina.
Cette incroyable faiblesse apprit à vos ennemis que vous n'étiez pas redoutables pour eux. Aussitôt il se forma un nouveau complot qui s'est manifesté par la formation du comité central qui devait correspondre avec tous les départements. Ce complot a été déjoué par le patriotisme de la section du Mail, qui vous l'a dénoncé; vous avez mandé à votre barre les membres de ce comité central : ont-ils obéi à votre décret ? sont-ils venus ? Non. Qui êtes-vous donc? Avez-vous cessé d'être les représentants du peuple ? Où sont donc les hommes nouveaux qu'il a investis de sa toute-puissance? Ainsi on insulte à vos décrets : ainsi vous êtes honteusement ballotés de complots en complots. Pétion vous en a dévoilé un nouveau. Dans la pétition de la Halle-aux-Blés, on prépare la dissolution de la représentation nationale, en accusant sa majorité de corruption : on y verse sur elle l'opprobre à pleines coupes, on y annonce la volonté formelle de changer la forme du gouvernement, puisqu'on y manifeste celle de concentrer l'exercice de l'autorité souveraine dans le petit nombre d'hommes que l'on y représente comme seuls dignes de la confiance publique.
Ce n'est pas une pétition que l'on vient soumettre à votre sagesse, ce sont des ordres suprêmes qu'on ose vous dicter. On vous avertit que c'est pour la dernière fois qu'on vous dit la vérité; on vous prévient que vous n'avez plus à choisir qu'entre votre expulsion, ou subir la loi qu'on vous impose. Et sur ces insolentes menaces, sur ces outrages sanglants, on vous propose tranquillement l'ordre du jour ou une simple improbation ! Eh ! comment voulez-vous que les bons citoyens vous «soutiennent, si vous ne savez vous soutenir vous-mêmes. Citoyens ! si vous n'étiez que de simples individus, je vous dirais : Etes-vous des lâches ? Eh bien ! abandonnez-vous au hasard des événements : attendez avec stupidité que l'on vous égorge ou que l'on vous chasse. Mais il ne s'agit pas ici de votre salut personnel, vous êtes les représentants du peuple; il y va du salut de la République; vous êtes les dépositaires de sa liberté et de sa gloire. Si vous êtes dissous, l'anarchie vous succède, et le despotisme à l'anarchie. Tout homme qui conspire contre vous est l'allié de l'Autriche. Vous en êtes' convaincus, puisque vous avez décrété qu'il serait puni de mort. Voulez-vous être conséquents, faites exécuter votre décret, ou rapportez-le; ou ordonnez jue les barrières de la France seront ouvertes aux Autrichiens, et que vous serez les esclaves du premier brigand qui voudra vous enchaîner. (Applaudissements.)
Vous cherchez les complices de Dumouriez; les voilà; les voilà ! Ce sont ceux qui ont conjuré le 10 mars; et les hommes qui leur ont accordé protection et assuré l'impunité. Rappelez-vous la coïncidence de cette première conjuration, avec les premiers désastres de la Belgique. Pensez-vous qu'elle soit un simple effet du hasard.
Ce sont ceux qui ont formé le comité central dénoncé par la section du Mail, et les faux patriotes qui les ont protégés.
Ce sont les provocateurs de la criminelle adresse adoptée par quelques scélérats intri-.gants, au nom de la section de la Halle-aux-Blés, qui, j'en suis sûr, ne la connaît pas. Tous ces hommes veulent, comme Dumouriez, l'anéantissement de la Convention; tous ces hommes, comme Dumouriez, veulent un roi.
Là, je reprends le reproche que l'on a eu l'impudence de nous adresser de complicité avec Dumouriez. Pour qui travaille Dumouriez ? ce n'est pas pour lui; il n'a pas la folie •de vouloir être roi; ce ne peut être que pour le fils aîné de d'Orléans, qui sert dans son armée, et dont plusieurs fois il nous a .fait l'éloge, •et qui s'est déclaré pour être de moitié dans l'exécution de ses complots. Quoi ! nous les complices de Dumouriez ! et c'est un Bourbon qu'il veut mettre sur le trône ! on a donc oublié que nous avons demandé l'expulsion de tous les Bourbons ? Nous les complices de Dumou riez ! on a donc oublié quels sont ceux qui ont •combattu notre demande ! Nous les complices de Dumouriez ! on a donc oublié que nous avons sans cesse dénoncé la faction d'Orléans ! Nous les complices de Dumouriez ! on a donc .oublié les persécutions que nous ont attirées ces dénonciations courageuses ! Nous les complices de Dumouriez ! on a donc oublié qu'au milieu des orages d'une séance de plus de iiuit heures, nous fîmes rendre le décret qui bannissait tous les Bourbons de la Répu-
blique? Nous les complices de Dumouriez! on a donc oublié quels furent ceux qui firent rapporter ce décret ? Quoi ! Dumouriez conspire pour un Bourbon; nous avons lutté sans cesse pour obtenir le bannissement des Bourbons; et c'est nous qu'on accuse !
Quoi ! Dumouriez conspire pour un Bourbon; nous avons voulu qu'on expulsât tous les Bourbons de la République; et ceux-là qui les ont ouvertement protégés, accueillent avec des applaudissements scandaleux l'accusation dirigée contre nous. Non, cet excès d'audace, de méchanceté et de délire n'égarera pas l'opinion sur les vrais coupables. ( Applaudissements.)
J'ai répondu à tout; j'ai confondu Robes^ pierre dans chacune de ses allégations; j'attendrai tranquillement que la nation prononce entre moi et mes ennemis.
Citoyens, je termine cette discussion aussi douloureuse pour mon âme, que fatale pour la chose publique à qui elle a ravi un temps précieux. Je pensais que la trahison de Dumouriez produirait une crise heureuse, en ce qu'elle nous rallierait tous par le sentiment d'un danger commun. Je pensais qu'au lieu de songer à nous perdre les uns les autres, nous ne nous occuperions que de sauver la patrie. Par quelle fatalité prépare-t-on au dehors des pétitions qui viennent dans notre sein fomenter la haine et les divisions? Par quelle fatalité des représentants du peuple ne cessent-ils de faire de cette enceinte le foyer de leurs calomnies et de leurs passions? Vous savez si j'ai dévoré en silence les amertumes dont on m'abreuve depuis six mois; si j'ai su sacrifier à ma patrie les plus justes ressentiments. Vous savez si, sous peine de lâcheté, sous peine de m'avouer coupable, sous peine de compromettre le peu de bien qu'il m'est encore permis d'espérer de faire, j'ai pu me dispenser de mettre dans tout son jour les impostures et la méchanceté de Robespierre. Puisse cette journée être la dernière que nous perdions en débats scandaleux.
Je me propose de demander que les signataires de la pétition de la section de la Halle-aux-Blés soient traduits devant le tribunal révolutionnaire. Mais comme je n'aime pas à accuser sans preuves, je fais motion qu'ils soient mandés à la barre pour reconnaître leurs signatures, et que les registres de la section soient apportés sur le bureau de la Convention.
descend de la tribune au milieu des applaudissements d'une grande partie de VAssemblée.
(La Convention adopte les propositions de Vergniaud. )
Suit le texte définitif du décret rendu (1) :
« La Convention nationale décrète que le citoyen Bocqueha, président de
la section de la Halle-aux-Blés, et le citoyen Maître-Jean, secrétaire,
dont les noms se trouvent au bas d'un projet d'adresse, et d'une
délibération de la section, en date du 7 du présent mois, seront mandés
à la barre pour reconnaître
demande la parole:
Plxmmr*. membres • -{'du centre^: CTèstJ inutile 1
D'autres membresLa suspension de la séance !
, secrétaire, donne ïfe-ture de l'ordre du jour dé la séance du lendé-inain. '
ORDRE DU JOUR
Pour là séance du jeudi' H avril, l'an II de la. République (!) :
GRAND ORDRE.
Suite: de; la discussion! sur le-moée de partage des biens communaux.
Discussion sur le» jeux et loteries (par décret.)
Discussion sur les taxes de. guerre (par décret du 8 avril;) •
Suite du rapport sur le commerce d'argent.
PETIT ORDRE.
Les rapports de la commission dès Six sont toujours à l'ordre (par décret exprès.)
Examen des comptes.
Rapport sur l'organisation du bureau des commissaires de la comptabilité^ (à midi, par décret dû 30 mars. )
Sûreté générale.
Rapport sur la pétition, du citoyen Dcy-dier, relatif à une procédure de brûlement de drapeaux de l'ancien régime.
Surveillance:
Rapport relatif aux nommés Cally, Beauvoir et autres agents des ci-devant princes. (Par décret.)
Se-cours publics et finances.
Rapport sur les secours à accorder au département de la Corrèze. v
Domaines.
Rapport sur la réclamation du duc de Bouillon.
Liquidation.
Rapport sur l'indemnité réclamée par Louis Duroeirer.
Domaines.
Rapport sur-, un;-échange fait entre l'Etat et le sieur Bernay-Favencourt.
Secours publics.
Rapport sur la reddition de Longuyon.
Rapport sur la réclamation du citoyen Mi-chaud^ mis en état d'arrestation.
Secours publics;
Rapport sur les secours à accorder aux femmes, mères et enfants des volontaires qui sont aux» armées.
Examen des marcHés.
Rapport sur la fourniture des chevaux de l'année de làt Moselle.
Liquidation et finances.
Rapport sur les pensions à accorder aux femmes et filles entretenues dans la maison du refuge de* là marine, à Brest.
Comité d'inspection. •
Rapport sur les travaux faits sous l'Assemblée constituante à l'imprimerie nationale.
Examen des marchés.
Rapport sur la pétition du citoyen De-molde, relative à une indemnité.
Commission des'. Vingt-quatre.
Rapport sur lès inculpations faites à là commission des Vingt-quatre par le comité de surveillance de la commune.
Commerce.
. Rapport sur la pétition des citoyens Le-gendre et Martin.
Sûreté générale.
Rapport sur l'argenterie et les bijoux, du ci-devant' Monsieur, saisis à Fontainebleau:
Législation.
Rapport concernant le tribunal du district de Montignac, département de la Dordogne.
Liquidation.
Rapport sur le mode de" remboursement des propriétaires de greffes et autres offices domaniaux.
Division.
Rapport sur la division des deux municipalités d'Auxy-le-Château.
Législation.
Rapport sur le remplacement des notaires.
Liquidation.
Rapport sur l'exécution d'un décret' du 15 septembre: dernier, 'relatif an citoyen Bèl-lôc.
Secours publics.
Rapport sur les indemnités dues aux familles des volontaires naufragés dans le Rhône, lors de l'expédition contre la ville d'Arles.
Législation.
Rapport concernant là municipalité cL'Au-rignac et le département de la Haute-Garonne.
Domaines.
Rapport sur la réclamation du citoyen Fer-net contre une proclamation: du pouvoir osé-
cutif, qui annule une adjudication faite par la: ci-devant maîtrise de Reims.
Sècù-urs publics-. -
Rapport concernant lé citoyen Persevol, dont les possessions ont été incendiées pour raison de sa fermeté dans la circulation dès grains.
Législation.
Rapport, relatif à là fixation d'un délai pour la contrainte par corps, pour- défaut de paiement dès amendés en matière de police correctionnelle.
Examen des marchés.
Rapport relatif aux fournitures dè bois et lumières aux troupes,, tant à Mtetz qu'à Longwy, et».
Domaines.
Rapport sur les indemnités à accorder à ceux qui. ont échangé des biens territoriaux avec les ci-devant ecclésiastiques contre des droits supprimés sans indemnité:
Législation.
Rapport et projet de décret relatifs au citoyen Philibert, évêque du département dès Ardennes.
Finances.
Rapport sur la découverte du citoyen Ger-baut, artiste de Bordeaux.
Colonial.
Rapport relatif au citoyen Ailhaut, commissaire à Saint-Domingue.
(La séance est suspendue à huit heures du soir et prorogée ;au lendemain matin dix heures.)
A LA SÉANCE DE LA CONVENTION NATIONALE DU
Lettre (1) des citoyens Boisset et Moyse Bttyle, commissaires de la Convention dans lès départements des• Bouches-du-Rhône et de la Drâme, par laquelle il» se plaignent des retards apportés, par le pouvoir exécutif, au départ du citoyen Sémonville, ambassadeur à Constantinople et & l'expédition projetée en Sardaigne (2) ;
Marseille,er avril
1793
« Citoyens nos collègues,
« Le recrutement dans les départements de là Drôme et? des Bouches-du-Rhône se fait avec facilité. Les républicains du Midi s'en
font plutôt une fête qu!un devoir, et, quant, à ©et objet* tout va bien.. IL n'en est. pas de même du, pouvoir exécutif,, et. lès ministres de la marine et des affaires étrangères sont bien coupables. Monge laisse la marine dè Toulon dans un état d'inertie alarmant, et l'arsenal est dépourvu de. tontes les provisions et. effets relatifs aux armements.. Il manque à peu pisès>4j00tt matelots,pour, armer nos escadres et l'insubordination est: tellè parmi les équipages qu'il est' impossible, de pouvoir, se promettre quelque succès* si nos flottes sortaient* L'amiral Truguet, qui sera à Paris peut-être avant notre lettre., vous rendra compte de l'état de la marine, a Tour Ion. D est chargé par les corps administratifs et par la société populaire, de cette ville de vous demander la destitution des membres qui- composent ce-pouvoir exécutif. Nous ne pouvons nous dispenser de nous joindre à eux pour' cet objet. Le commerce de Marseille à qui, faute de convoi* on enlève chaque jour des vaisseaux* forme Les mêmes vœux. Il est temps d'éclairer la République sur les trames liberticides qui se forment contre elle,, et la conduite du ministre Le. Brun, chargé des affaires étrangères, va vous en présenter le fidèle tableau.
«Depuis le mois: de. septembre, quelle a été la conduite du. pouvoir exécutif relativement à la Porte ottomane et à la. Méditerranée ? Le citoyen. Sémonville a été nommé ambassadeur le 12 juin. Le Conseil exécutif a paru, pendant les premiers moments qui ont suivi le triomphe de la liberté, s'occuper derson départ et lever les obstacles, apportés par le despotisme. Les présents furent commandés. Une somme de 300,000 livres fut remise pour les dépenses imprévues. Une corvette fut équipée pour porter ces présents. On. emharqua sur le bâtiment deux naturalistes, deux diamantaires demandés par le Grand-Seigneur, un ingénieur constructeur de la marine sollicité! par. le Ca»pitan-Paeha. et trois maîtres constructeurs. Le citoyen. Sémonville devait mettre à. la voile à. chaque instant. Le mit nistre lui avait écrit,, en date, du 12 sep» tembre : « Vous recevrez incessamment les lettres de créance et d'instructions. ».
« Cependant silence absolu, jusqu'au 27 octobre, malgré que le. citoyen Sémonville eût envoyé de Toulon à Paris, vers le 16 septembre, le. secrétaire: de son ambassade pour presser toutes les expéditions relatives à son départ.
t( Que- porte L'ordre du 27 octobre! Die se rendre en Corse et dè laisser croix» qu'on fàit voile directement pour Constantinople ; de plus l'assurance que, dans cette île, la corvette montée par le secrétaire d'ambassade allait apporter les instructions et , les présenta si. longtemps attendus.
a Cette lettre est venue à Gênes, lès premiers jours de novembre L'ambassadeur part quarante-huit heures après. Depuis cette époque et malgré ses plus vives instances, renouvellement dë silence absolu jusqu'au 2Lfévrier. Encore la. lettre, écrite à cette époque fut-elle arrachée par les sollicitations du cir toyen Lamarre, secrétaire dè l'ambassadeur, que ce dernier fit partir de Corse au mois de janvier.
« Ce citoyen «fut, chargé de se, plaindre au ministre : 1° de l'oubli dans lequel on laissait
Sémonville; 2° d'une phrase insérée dans une lettre du ministre Monge au contre-amiral Truguet qui la communiqua, à Ajaccio, à Sémonville.
« Cette phrase portait, en date du mois de novembre, que nos affaires périclitaient au Levant et que le Conseil exécutif était mécontent des retards de l'ambassadeur; phrase inconcevable dans la bouche d'un homme qui devait savoir que Sémonville n'avait à Gênes ni instructions, ni lettres de créance, excepté celles du ci-devant roi, et que l'ordre du 27 octobre lui prescrivait d'attendre en Corse. Celles qui devaient, suivant la même lettre, lui être apportées dans cette île par la corvette la Belle-Isle ne sont pas venues. Quelle peut en être l'excuse?
( En septembre, l'ennemi avait pénétré dans plusieurs départements et s'y était établi, à force de trahisons. Cependant, on sentait alors que la seule diversion possible à opérer était par la Porte. Par des lenteurs on laisse à la lettre du grand vizir le temps d'arriver. On laisse à Choiseul (1) le temps de tramer avec la Russie, la Prusse et l'Autriche les intrigues dont cette lettre était le résultat.
- « Cependant le génie de la liberté permet que le portefeuille du ci-devant Monsieur, tombé (fans nos mains, mette au jour cette infâme manœuvre. Nous y voyons à découvert toute la politique de nos ennemis. Ils regardent comme un succès, auquel ils attachent le plus grand prix, l'éloignement de l'ambassadeur de France, ne fût-il que momentané. Et l'on ne fait pas partir l'ambassadeur. Ils annoncent que la proposition d'aider les Turcs à reconquérir ia Crimée fait l'impression la plus dangereuse pour eux sur l'esprit du Grand-Seigneur, et l'on retient Sémonville en Corse, au lieu de le laisser arriver dans l'archipel sur les frégates chargées de l'ordre d'arrêter lés bâtiments russes, ordre qui eût jeté dans la -consternation le commerce de cette nation et eût.démontré par le fait aux Mahométans que la guerre que nous leur promettions de faire aux ennemis de leur dogme et de leur empire était déjà déclarée.
« Enfin, le mémoire de Choiseul aux princes rebelles porte que les ambassadeurs d'Angleterre et de Pologne dissimulent mal leur impatience de voir arriver Sémonville Au lieu de hâter son départ, on laisse à la Pologne, le temps d'être écrasée par l'ambitieuse Catherine, et à l'Angleterre Celui d'être entraîné contre nous par le machiavélisme de Pitt.
« Les mois de novembre, décembre et janvier se passent, et c'est le 2 février seulement qu'on écrit à Sémonville que la crainte d'exposer à un outrage l'ambassadeur de la République est l'unique cause du retard qui a dû contrarier son zèle.
« Et à quelle époque conçoit-on cette crainte? A celle où nos armes victorieuses avaient soumis les Pays-Bas, la Savoie, Nice, Mayence à l'empire de la liberté, à celle où les lettres de Fonton, nommé chef provisoire
de là nation à Constantinople, assurent le ministre de l'accueil qui sera fait à Sémonville. Comment pourrait-on penser raisonnablement que des succès si éclatants n'auraient pas changé à notre égard les dispositions que la Russie et l'Autriche avaient suggérées momentanément à la Porte? '
Cependant trois lettres sont écrites à la chambre de commerce par les députés de la nation à Constantinople.
\« L'une, en date du 26 novembre, annonce que la Porte, déjà revenue de ses préventions, -recevra Sémonville, mais qu'elle ne le reconnaîtra comme ministre de la République que ■ lorsque quelques puissances de l'Europe reconnaîtront la République de France.
« La seconde, du 27 décembre, porte que tous les projets de Choiseul sont déjoués, que la Porte se trouve dans les dispositions les plus favorables et que toutes les impressions dirigées contre Sémonville sont détruites.
« Enfin, le 22 janvier, la troisième lettre annonce que les intrigues des ministres d'Allemagne, de Prusse et de Russie, n'ont pu empêcher que la. Porte ne fît remettre à la nation le firman qu'elle avait expédié ad hoc aux Dardanelles pour permettre à la frégate qui doit conduire Sémonville de monter avec lui à la capitale..
« Après ae pareils faits, à qui doit-on attribuer aujourd'hui nos malheurs, si ce n'est au ministre Le Brun ?
« Après ce que la nation a fait seule et sans chef, que n'eût-on pas dû attendre du zèle d'un ambassadeur qui eût présenté aux Turcs une grande représentation nationale et des présents, deux objets qui ont si grand prix à leurs yeux, d'un ambassadeur enfin qui se faisait précéder à Constantinople par des hostilités avec la Russie, et dont les offres, faites au nom de la nation, auraient fait repousser celles corruptrices de cette puissance?
« Quel a donc été, pendant ce long intervalle, l'état des négociations de Le Brun avec la Porte ? Il & envoyé à Chalgrin, secrétaire de légation, le décret d'accusation contre Choiseul. Mais pourquoi n'a-t-il jamais dit franchement à l'Assemblée que ce même Chalgrin lui avait écrit une lettre, le 10 octobre, qui faisait frémir d'horreur le citoyen tant soit peu attaché à sa patrie ? Cette lettre infâme, imprimée, publiée dans tout l'archipel, a été répandue même à Venise, où le chargé d'affaires de France en a pris une copie qu'il a envoyée au citoyen Sémonville. Ce dernièr en a entretenu le ministre Le Brun dans sa correspondance.
« Comment donc l'Assemblée seule l'ignore-t - elle ? Pourquoi le ministre Le Brun, en donnant part, en janvier, à la Convention de l'élection faite par les Français au chef provisoire Fonton, a-t-il l'air d'élever encore des doutes sur la faiblesse de Chalgrin qui aurait pu se laisser séduire par Choiseul ? Pourquoi ces criminelles réticences? j Pourquoi? Pour que la nation ne lui demande pas compte du temps qu'il a laissé, faute d'agents patriotes, ses intérêts les plus chers se perdre à Constantinople.
« Cependant dans le courant de janvier, Le Brun a dépêché par terre Descorches Sainte-Croix, en qualité d'envoyé extraordinaire, pour précéder Sémonville et lui aplanir les difficultés. Si telle est sa mission,
pourquoi n'a-t-on pas fait partir Sémonville aussitôt qu'on a su qu'elles étaient levées et que le firman était aux Dardanelles? Veut-on, avec l'air d'un zèle et d'une prudence extrêmes, attendre qu'il soit survenu un nouvel obstacle, que des revers, qu'on doit toujours prévoir à la guerre, et qui seront exagérés par nos ennemis, aient une seconde fois influencé la Porte contre nous?
« Déjà les nouvelles arrivées de Constan-tinople, en date du 27 février, voie de Vienne, annoncent obscurément que notre position s'altère. Quel sera l'auteur du malheur irréparable? Qu'a-t-on fait pour l'empêcher? Depuis trois mois l'ambassadeur pouvait être à la Porte. Il est à Marseille.
« Depuis six mois, le Grand-Seigneur a demandé des hommes habiles pour réparer sa marine : ils sont à Marseille.
« Depuis la même époque, il a témoigné le désir d'avoir des lapidaires pour tailler et remonter des diamants auxquels il attache un grand prix : ces mêmes artistes sont encore à Toulon. On abandonne la Porte à elle-même, aux suggestions de nos ennemis, et l'on oublie que c'est dans sa diversion et dans ses domaines que l'on aurait pu trouver des moyens si puissants de repousser les puissances coalisées, èt que nous nous serions procuré et des subsistances et des approvisionnements de construction dont sont dépourvus nos départements.
« Qu'a donc fait le ministre sur la Méditerranée? La flotte, après avoir si bien et si promptement servi à la conquête de Nice, a été retenue inutilement devant Oneille, puis devant Gênes, jusqu'au milieu de novembre. A cette époque, le ministre commit la grande faute de la diviser pour envoyer une partie devant Naples et l'autre en Sardaigne.
« Le Conseil exécutif n'ayant pas pourvu à ce que cette dernière division pût emmener avec elle les troupes marseillaises du débarquement, il était évident que la conquête de la Sardaigne devenait impossible sans elles.
((Le contre-amiral Truguet, à qui d'Anselme les refusait (sans doute parce qu'il n'avait pas l'ordre de les donner), chercha à y suppléer en demandant quelques secours au département de la Corse où il se rendit. Le temps s'écoulait, la saison devenait tous les jours plus orageuse. Par différentes circonstances, la Corse ne fournit que 1,500 hommes de débarquement. L'amiral partit au milieu de janvier, et le convoi n'arriva dans cette île que deux jours après lui. Encore était-il dispersé, moitié à Saint-Florent, moitié à Ajac-cio.
« Le reste de l'expédition est connu. Croit-on qu'elle eût pu manquer, si, en sortant de Nice, toute la flotte avec quelques troupes de débarquement se fût présentée devant Ca-gliari, où rien n'était prêt pour les repousser, où tous les habitants étaient disposés à les recevoir comme les Niçards ?
( Plus de deux mois se sont écoulés ; des préparatifs nombreux ont été faits par la Sardaigne. Et cependant, malgré tout ce qu'on avait fait pour qu'elle ne fût pas en notre pouvoir une terreur panique seule l'a conservée à nos ennemis. Supposez que le Conseil exécutif n'ait pas perdu ces deux mois ! la
Sardaigne prise, tous les blés qui passaient ordinairement à Nice, et à qui on a laissé le temps de s'écouler en Italie, auraient approvisionné notre escadre, et les bâtiments de transport des troupes de débarquement laissés en garnison en auraient été chargés pour les départements méridionaux.
« L'escadre aurait fait respecter le pavillon et le nom français devant Malte. Elle aurait paru à l'entrée de l'Archipel, aurait montré aux yeux des Turcs l'appareil des forces que la nation française pouvait envoyer pour leur défense.
(( On aurait encore eu le loisir de passer devant Naples pour obtenir vengeance du traître Acton, et nos vaisseaux, rentrés dans nos ports au mois de janvier, seraient aujourd'hui en état de ressortir. Lorsque l'on rapproche ces différents faits de l'espèce d'insouciance avec laquelle le Conseil exécutif est venu annoncer successivement la guerre avec l'Angleterre, la Hollande et l'Espagne, quand il est démontré que cette déclaration n'a point été précédée par les ministres des précautions, des armements, des approvisionnements qui pouvaient nous rendre redoutables à nos ennemis, quand on se rapelle qu'après la prise de Longwy et de Verdun, Kellermann, dans un entretien avec le prince de Brunswick, tenait dans ses mains la paix, la reconnaissance de la République et l'alliance de la Prusse contre la maison d'Autriche, et que ces propositions honorables furent à peine écoutées du Conseil exécutif, n'est-on pas tenté de croire que le système du château a survécu à la chute du tyran, qu'on cherche à augmenter le nombre de nos ennemis, pour lasser notre courage, pour fatiguer le peuple de sa liberté, pour le traîner par la famine et la cessation du commerce dans les horreurs de l'anarchie et le soumettre enfin à des compositions aristocratiques?
« L'examen que feront les commissaires législateurs de l'état et de la distribution de-son forces sur la Méditerranée achèvera sans doute la démonstration de ce problème : ou les ministres sont coupables de la plus atroce des trahisons en n'employant pas toutes leurs ressources pour éloigner au moins une guerre désastreuse pour nous, ou ils sont dirigés dans leurs opérations par une impéritie profonde qui ne leur a permis de concevoir ni d'exécuter à temps aucun des plans auxquels soit attaché le salut de la République.
« Nota. Il est impossible de concevoir comment, après avoir annoncé depuis deux mois que la station de l'Archipel serait renouvelée | et composée de trois frégates, de quatre corvettes et de trois bricks, il se trouve que cet armement n'y est pas encore rendu et que la station est dans ce moment réduite à une seule frégate, tandis qu'en temps de paix il y a au moins dans cette partie trois ou quatre bâtiments.
« D'après ce tableau, trop vaste peut-être, mais fidèle, il est aisé, citoyens nos collègues, d'apercevoir que le pouvoir exécutif tient toujours au système des rois, qu'il veut anéantir la République en nous jetant sur les bras toutes les puissances de l'Europe, en ruinant notre commerce qui, ne pouvant obtenir des ^"escortes, se voit enlever chaque jour des vaisseaux, et ce moment même est celui où un convoi destiné pour notre armée des Pyrénées,
et depuis longtemps prêt dans ce port, n'a pu encore mettre à la voile.
« A Toulon, rien ne se fait ou se fait bien lentement. Sémonville, qui devait être à Cons-tantinople, est ici. Qu'est-ce donc que ce Lebrun, ce Monge ? Yeulènt-ils voir la France livrée à ses ennemis ? Les maux sont grands, mais il est encore des remèdes, et, d'après les pouvoirs que vouls nous avez confiés, nous allons les appliquer.
Signé : Boisset, M. Bayle.
a la séance de, la convention nationale du
Discours de Pétion (1) surlë projet d'adresse de la section de la Halle-aux-Blés.
texte du moniteur (2).
Je demande la parole pour une motion d'ordre. Depuis longtemps l'orage grossit et gronde sur nos têtes. U est temps de le conjurer. Quelque redoutables que soient nos ennemis extérieurs, les ennemis intérieurs le sont davantage. Il est temps de leur arracher le masque d'une fausse popularité. U est évident que chaque jour la représentation nationale est outragée. Yoiei un projet d'adresse rédigé dans une section de Paris (celle de la Halle-aux-Blés), qui le fait circuler en ce moment dans les autres sections.
Projet d'adresse à la Convention nationale,
Législateurs, nous venons vous dire la vérité, et nous espérons que vous ne nous forcerez plus de vous la dire.
Jusqu'à présent nos pétitions ont. été ensevelies dans la poudrç de vos comités, de ces comités. où siègent des coupables qui viennent ensuite vous tromper par des, rapports insidieux et quand l'honnête homme, quand le républicain veut réclamer, les ennemis du bien publie s'empressent d'étouffer sa voix.
Nous venons vous présenter le vœu des sections de Paris, et nous pouvons vous affirmer que c'est celui de toute la France.
Entendez-nous, et entendez-nous pour la dernière fois.
La nation est lasse d'être continuellement en butte à des trahisons. Elle est lasse de voir parmi vous d'infidèles mandataires qui abusent de sa confiance. Ont-ils oublié que» le peuple est leur souverain? Il faut donc le leur rappeler. Il faut leur dire qu'il veut que tous les traîtres tombent sous le glaive des lois.
C'est votre indulgence qui est cause d'une partie de nos désastres.
Si vous aviez puni Dumouriez, lorsqu'il laissa échapper les brigands
prussiens; si vous n'aviez protégé la cabale infernale qui méditait
avec lui la ruine de la République, lés Liégeois et les Belges
Qui méritait plus l'échafaud que ce Roland qui a violé le dépôt sacré de la nation, et qui, dès cet instant, s'est rendu coupable de haute trahison ; cependant il respire, et médite peut-être de nouveaux crimes.
Sous son administration, tous les bureaux du ministère ont été remplis de contre-révolutionnaires ; et quand nous vous les dénonçons, à peine daignez-vous nous écouter. Un Rouil-lac a refusé de prêter son serment civique ; et Normandie, son chef, cité devant vous, s'excuse par un mensonge impudent ; vous l'entendez et vous passez à l'ordre du jour. Peut-on marquer plus de mépris pour les lois, et pour ce peuple que vous devez respecter.
Partout où nous portons nos regards, nous ne voyons que des conspirateurs. Les officiers de nos armées ont été nommés par Bernon-villë,- et les employés sont ses créatures. Les tribunaux ne jugent point où font échapper les criminels, et l'administration de la poste semble redoubler d'activité quand il faut servir nos ennemis.
Toutes les sections de Paris et la plupart des départements, vous demandent depuis longtemps une loi contre les accapareurs et les marchands d'argent ; vingt fois vous avez promis de satisfaire à des réclamations aussi justes, et cependant le mal augmente chaque jour, et vous le voyez-tranquillement» Y a-t-il donc parmi vous des hommes intéressés à favoriser le monopole? ou d'autres espèrent-ils que le peuple lassé de ne pouvoir atteindre au prix exorbitant des objets de première nécessité, viendra demander humblement des secours et des fers? Ils se trompent ceux qui le pensent. Le peuple périra dans la misère, mais il ne périra qu'après avoir vu la chute des intrigants qui triomphent de ses malheurs;
C'est dans le temps où nous avons tout à craindre, où nos maux sont à leur comble, que vous diminuez le nombre de nos défenseurs, et que vous envoyez les députés patriotes dans les départements! N'eût-il pas été plus sage de conserver vos frères? Est-ce donc une majorité corrompue qui doit prononcer sur le sort de la République? Oui, législateurs,, c'est parmi vous qu'existe cette ligue qui veut vous vendre à nos tyrans, et qui embrasse toute la France. Nous sommes dans la Convention nationale, dans cette Convention nommée par le peuple, et nous y voyons les plus grands ennemis; ils ont l'audace d'y siéger. Malheureuse patrie ! A qui as-tu confié tes intérêts ? Tu cherchais des défenseurs, et tu as trouvé des hommes qui ne respirent que pour hâter l'instant de ta destruction.
Législateurs, il faut frapper le mal dans sa source; il faut effrayer par le supplice des coupables, les mandataires qui oseraient un jour renouveler les crimes dont nous sommes les témoins et les victimes.
Nous demandons. : 1° que Roland soit décrété d'accusation; 2° que tous les employés dans les bureaux du ministère et dans les armées soient soumis à la. censure la plus sévère, et que ceux qui seront suspects soient destitués ; S 3r que Normandie soit chassé; 4° que l'admi-j nistration des postes soit renouvelée, et que
tous les chefs des' bureaux soient nommés par le peuple; 5° que tous les officiers suspecte ne puissent plus servir dans nos armées; 6° qu'il soit fait une loi contre les accapareurs, et que la vente du numéraire soit défendue; 7° que tous les députés soient rappelés, excepté ceux qui sont dans nos armées, et que Ton envoie dans les départements des- citoyens patriotes-, avec des pouvoirs nécessaires; 8° que les députés coupables soient, décrétés d'accusation;, 9Q et enfin que ceux qui n'ont pas eu le courage de défendre la République, soient destitués et remplacés par leurs suppléants. (Applaudissements .)
Montagne de la Convention, c'est à vous que nous nous adressons, sauvez la République; ou, si vous ne vous sentez pas assez forts pour le faire, osez nous le dire avec franchise, nous nous chargerons de la sauver. La crise que nous éprouvons doit être la dernière; il faut que la France soit anéantie, ou que la République triomphe.
Arrêté dans la section de la Halle-aux-Blés, que cette adresse sera envoyée aux 47 autres sections, pour recevoir, soit leur approbation, soit les modifications qui paraîtront convenables.
(Des applaudissements s'élèvent dans l'extrémité gauche, et se mêlent aux acclamations des tribunes.)
Je ne suis pas: surpris que cette pétition ait reçu des applaudissements...
Je demande qu'on entende le rapport de Cambon, au nom du comité de Salut public; ensuite on discutera la mention honorable que je propose de l'adresse qui a été lue. (Les membres de F extrémité gauche applaudissent.)
La parole est à Pétion.
Je ne suis pas surpris qu'une pétition qui tend à dissoudre la représentation nationale ait reçu des applaudissements...
Plusieurs voix de la même extrémité : Le rapport du comité de Salut public !
L'ennemi est au camp de Maulde,. occupons-nous de sauver la patrie.
(Danton s'élance à la tribune. Plusieurs membres de VAssemblée y montent avec lui.)
Plusieurs voix : Restez-là, Pétion.
(Une agitation tumidtueuse s'élève dans toutes les parties de la salle. —le Président se couvre. — Le milieu de T Assemblée rentre dans le calme. — La tribune est toujours environnée.)
Plusieurs voix : Nous saurons mourir, mais nous ne mourrons pas-seuls.
(l). Nous avons des enfants qui vengerons notre mort.
Vous êtes dès scélérats ! (Les- tri-bunes et Vextrémité gauche applaudissent.)
Plusieurs membres : A bas le dictateur !
Ce sera ton dernier crime : je mourrai républicain, et tu mourras tyran.
(Après quelques minutes d'agitation, les membres s'asseyent et le calme se rétablit.)
, découvert. Ce n'est qu'en faisant régner lë calme dans nos délibérations, que nous pourrons sauver la République. Si Danton a à répondre à Pétion, il aura la parole après lui.
Je la demande pour une motion d'ordre.
Ces tableaux forceraient les citoyens qui nous entendent à désespérer du salut de l'Etat, nous leur en devons d'autres. Je rappelle les représentants du peuple à leur serment, à leur dignité; j'invite les citoyens des tribunes au respect et au silence. Pétion, tu as la parole.
Je ne faisais pas aux citoyens de la section de la Halle-aux-Blés l'injure de croire qu'ils eussent pu faire une pétition aussi incendiaire, aussi évidemment contraire à la représentation nationale; On sait assez comment on obtient dans les sections ces pétitions avec lesquelles on amène des pillages et la dissolution de la République. Il est bien étrange qu'au sein de l'Assemblée on aille autoriser des excès aussi coupables. Quoi ! citoyens, l'avez-vous bien entendu ? Ils vous disent qu'ils vous énoncent le vœu de la France entière; ils vous disent qu'il y a ici des conspirateurs, des monopoleurs; ils vous disent que la majorité de la Convention est corrompue. Avons-nous été envoyés ici pour être abreuvés d'outrages ? Ne serions-nous pas coupables si nous ne sévissions pas contre des scélérats? (Il s7élève de nouveaux murmures.)
Plusieurs voix ? Oui, oui !
, s élançant au milieu de la salle. Je donne ma vie et ma conduite à examiner.
Tu n'a pas la parole, elle est à Pétion.
Contre des hommes qui ont l'audace de s'adresser après ces paroles à une minorité, de lui demander si elle peut sauver la patrie; et de dire ensuite : Nous nous char-' geons, nous, de la sauver. Quoi ! représentants, on viendra vous dire, et vous écouterez de sang-froid ces paroles : Votre majorité est corrompue, nous sauverons la patrie. Et comment la sauveront-ils la patrie ? Est-ce par des brigandages? par des assassinats?
Plusieurs voix d'une, des extrémités : Voilà le langage de Dumouriez.
Eh bien, citoyens, voilà comme on égare le peuple, comment on le fait égorger. (Nouveaux murmures.)
Président, j'entends renouveler ce système infâme de calomnie que l'on suit avec une constance bien propre à corrompre l'opinion publique; mais on ne doit pas croire que ce système puisse durer. (On murmure.) Depuis longtemps qu'entëndons-nous sans cesse? des calomnies, des outrages, des dénonciations. Certes,, il n'en coûte rien pour dire : Vous êtes un complice de Dumouriez, de d'Orléans; mais sans présenter le plus léger indice, et toujours lorsqu'on a l'envie de commettre des délits ou qu'on vient d'en commettre. On a toujours le soin de les attribuer aux autres. (On murmure.)' C'est une tactique constante. Si l'on pouvait discuter avec calme, on parviendrait à prouver quels sont les calomniateurs et les complices des contre-révolutionnaires ; mais on embarrasse sans cesse la délibération
par des imputations personnelles, et voilà comme on se masque soi-même, comme on a l'art de couvrir des délits, pour empêcher ae les reconnaître. On espère que le public prendra des vociférations pour des preuves; quel est l'homme qui, par exemple, pourrait dans cette Assemblée me soupçonner?
Plusieurs voix de la même extrémité : Moi, moi !
(La plus grande partie de VAssemblée manifeste son improbation par des murmures.)
N'est-il pas évident que les démarches qui sont faites depuis quelque temps auprès de l'Assemblée, et qui tendent à l'avilir, à la jeter dans des mesures inconsidérées, partent des comités secrets et particuliers. Tout se trouve coïncider avec des circonstances pour parvenir à cet avilissement de la Convention, ou à lui arracher des délibérations par surprise, ou par des moyens qu'on fait employer, sous prétexte de mesures révolutionnaires.
Plusieurs voix : Citez, citez !
Par exemple, ne cherche-t-on pas sans cesse à diviser la Convention en deux partis?
Les mêmes voix : C'est vous !
Le parti patriote et le parti qui n'est pas patriote; ne cherche-t-on pas à diviser la nation? Depuis quelques jours, on voulait, sans explication, et cependant il fallait des explications, on voulait faire une armée de Sans-Culottes; si on entendait par ce mot les braves citoyens du Tiers-Etat. (Il s'élève de nombreux murmures.) Il faut bien se servir d'un terme qui soit intelligible; car en parlant des Sans-Culotfes, on n'entend point tous les citoyens, les nobles et les aristocrates exceptés, mais on entend les hommes qui n'ont pas, pour les distinguer de ceux qui ont. Voilà le moyen qu'on emploie sans cesse pour jeter la division dans l'Assemblée et dans la nation; et voilà ceux qui se trouvent dans l'adresse que j'ai dénoncée. Je maintiens que cette adresse ne peut être f aite que par des hommes en délire ou des royalistes contre-révolutionnaires. Qui peut désirer dans la République la dissolution de la Convention nationale, si ce ne sont ceux qui regrettent l'ancien régime, et les aristocrates déguisés, et les royalistes? Eh bien ! cette adresse a ce but. Elle l'a de la manière la plus prononcée, et je dis qu'il vous est impossible de tolérer les outrages qui vous y sont faits. Je dis que nous ne serions pas dignes de la confiance publique, si nous souffrions que l'on vînt nous dire que la majorité de la Convention est corrompue. Depuis trop longtemps une indulgence coupable enhardit, par l'impunité, les scélérats à de nouveaux délits. Vous aviez ordonné la poursuite des pillages de février, et des conspirations du 9 au 10 août. Ces poursuites sont-elles faites? Vous avez dans votre sein un homme qui vous a prêché le despotisme sous toutes les formes, qui vous a demandé des fêtes, qui a conseillé le pillage. Eh bien! il siège parmi vous ; il obtient la parole plus facilement qu'un homme connu par sa probité et par ses mœurs. (On murmure.) Rappelez-vous ce qui se passait au commencement de nos
séances, à peine un membre voulait-il s'asseoir à côté de lui. Aujourd'hui il obtient sans cesse la parole ; c'est lui qui dénonce tous les jours les meilleurs citoyens.
Quelques voix : Et Dumouriez.
J'entends dire : il a dénoncé Dumouriez. Sans doute; mais moi, je lui supposais d'autres motifs. Il dénonçait Dumouriez, mais il ne dénonçait pas Egalité; mais il le défendait; mais il allait chez lui : et d'ailleurs, comment voulez-vous qu'un homme qui n'est nourri que de fiel, qui dénonce tout le monde, ne rencontre pas des conspirateurs? ( Applaudissements.)
Si tous les citoyens allaient dans leurs sections, je me serais bien donné de garde de dénoncer l'adresse qu'on y fait circuler; car elle y eût été vue avec une profonde indignation : mais comme tous les citoyens n'y vont pas, comme il y a des hommes qui ont intérêt à y aller, il fallait prévenir les mauvais effets que cette adresse peut produire. On voudrait bien avoir une insurrection, mais on ne l'obtiendra pas; car la masse du peuple de Paris est excellente. Je suis sûr qu'il n'y a pas plus de 4 ou 500 misérables qui sont cause de tous Ces mouvements. (Une grande partie de VAssemblée et quelques citoyens des tribunes applaudissent.) Il est temps que les bons citoyens soient avertis de se rendre dans leurs sections; et s'ils y allaient, je jure que cette adresse y serait brûlée. Eh bien, je demanderais un appel nominal sur cet objet dans les sections de Paris, et je suis persuadé que l'immense majorité des citoyens serait pour la Convention, et vouerait à l'exécration les imbéciles ou les scélérats qui ont rédigé le projet que j'ai dénoncé. Je ne sais comment on a l'audace d'applaudir à son propre déshonneur. Que dira-t-on dans les départements? Quoi ! l'Assemblée entière ne s'est pas levée d'indignation, quand on lui a dit que sa majorité est corrompue, lorsque des hommes ont poussé le délire et l'insolence jusqu'à vous dire qu'ils sauveront seuls la patrie ! et vous, pourquoi donc êtes-vous là ? Est-ce pour être témoins de la perte de la République ? Je ne demanderai pas que tous les signataires soient mandés à la barre; mais je demande que le président et les secrétaires de la section y soient mandés. Si ce sont eux qui ont signé le projet d'adresse, je ne doute pas que la Convention ne les envoie au tribunal révolutionnaire. {On applaudit.)
texte du logotachygraphe (1).
La motion d'ordre que j'ai à faire est une des plus importantes. Depuis longtemps l'orage gronde et grossit sur nos têtes, il est temps de le conjurer; il faut enfin que les traîtres soient punis, il faut arracher le masque qui couvre leur fausse popularité. Il est évident pour tous les observateurs, et pour tout homme de bonne foi qui veut ouvrir les yeux, que chaque jour la représentation nationale est menacée.
Voici encore un nouveau projet qui circule dans toutes les sections
de" Paris; ce projet
Adresse de la section de la Halle-aux-Blés.
« Législateurs, nous venons vous dire la vérité, et nous espérons que vous 11e nous forcerez plus de vous la dire. Jusqu'à présent nos pétitions ont été ensevelies dans la poudre de vos comités, de ces comités, où siègent des coupables qui viennent ensuite vous faire des rapports insidieux. Quand l'honnête homme, quand les républicains veulent faire des réclamations, les ennemis du bien public s'empressent de détruire le vœu des sections de Paris; et c'est certainement le vœu de tous les départements. Entendez-nous, et entendez-nous pour la dernière fois. La nation est lasse d'être continuellement en butte à des trahisons; elle est lasse de voir parmi vous des lâches mandataires qui abusent de sa confiance. Ont-ils donc oublié que le peuple est leur souverain? Il faut le leur rappeler, il faut leur dire que la nation veut que tous les traîtres tombent sous le glaive de la loi.
( C'est votre indulgence qui est la cause d'une partie de nos désastres; si vous aviez puni Dumouriez, lorsqu'il laissa échapper les brigands prussiens, les Liégeois et les Belges n'accuseraient pas aujourd'hui la France. C'est le reproche que vous fait l'Europe entière. Qui méritait plus l'échafaud que ce Roland qui méditait sans cesse la ruine de la nation, et qui, dès cet instant, trame encore de coupables conspirations ! Cependant il respire encore; peut-être il médite de nouveaux crimes. Sous son administration, tous les bureaux du ministère étaient remplis de contre-révolutionnaires: à peine daignait-il nous écouter. Dorignac (1) a refusé son serment, et quand nous le dénonçons, et quand Normandie son chef, s'excuse par un mensonge impudent, vous l'entendez et vous passez à l'ordre du jour!
« Peut-on marquer plus de mépris pour les lois, et plus de mépris pour le souverain ! Partout où nous portons nos regards, nous voyons des conspirateurs : les officiers de nos armées ont été nommés par Beurnonville; l'administration de la poste semble redoubler d'activité pour servir nos ennemis ; les tribunaux ne jugent point; on laisse échapper les criminels ; toutes les sections de Paris et la plupart des départements vous demandent une loi contre les accaparements; vingt fois vous avez promis de satisfaire à des réclamations si justes, et cependant le mal augmente chaque jour, et vous le voyez tranquillement. Y a-t il donc parmi vous des hommes intéressés à favoriser le monopole? Espèrent-ils que le peuple, lassé des calamités, viendra demander humblement des secours et des fers? ils se trompent ceux qui le pensent; le peuple périra dans la misère, mais il ne périra qu'après avoir vu la chute des tyrans qui triomphent de ses malheurs; et c'est dans les moments où nous avons le plus à craindre, c'est lorsque nos maux sont les plus grands, que vous diminuez le nombre de nos défenseurs, et que vous envoyez les députés patriotes dans les départements. N'eût-il pas été plus sage de conserver vos forces? est-ce
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une majorité corrompue qui doit prononcer sur le sort de la République?
Oui, législateurs, c'est parmi vous qu'existent ceux qui veulent nous vendre à des tyrans. Nous voyons dans cette Convention nommée par le peuple, nos plus grands ennemis; ils ont l'audace d'y siéger. Malheureuse patrie! à qui as-tu confié tes intérêts? Tu cherches des défenseurs, et tu n'as trouvé que des hommes qui ne respirent que pour hâter l'instant de ta ruine.
« Législateurs, il faut frapper le mal dans sa source, il faut effrayer, par le supplice, les coupables, et les mandataires qui oseraient un jour renouveler les crimes dont nous sommes victimes.
« Nous demandons que Roland soit mis en état d'arrestation. Que tous les employés dans les bureaux du ministère et dans les armées, soient soumis à. la censure la plus sévère; que ceux qui seront suspects soient destitués ; qua Normandie soit chassé; que l'administration des postes soit changée; que tous les officiers suspects ne puissent plus servir dans nos armées; qu'il soit fait une loi contre les accapareurs; que la vente du numéraire soit défendue; qu'on envoie dans les départements des patriotes avec des pouvoirs nécessaires; que les membres coupablss soient décrétés d'accusation; enfin que ceux qui n'ont pas eu le courage de défendre leur patrie soient destitués et remplacés par leurs, suppléants. (.Applaudissements.)
( Montagne de la Convention ! C'est à vous que nous vous adressons; sauvez la République, ou si vous ne vous sentez pas en état de le faire, osez nous le dire avec franchise, nous vous aiderons à la sauver. La cris3 que nous éprouvons doit être la dernière; il faut que la France s'anéantisse ou que la République triomphe. » (Applaudissements.)
Je ne suis pas surpris d'entendre applaudir une pétition qui tend à dissoudre la Convention nationale ( interrompu ; la tribune est assiégée par une foule de membres qui demandent à combattre ce que vient de dire Pétion; une partie du côté droit se lève, on crie qu'on laisse continuer l'orateur. Le plus grand désordre règne dans l'Assemblée. Le Président se couvre; le calme renaît.)
La position où nous venons de nous trouver est extrêmement périlleuse pour la chose publique. Il faut entendre toutes les opinions avec tranquillité : le droit de dire son avis est un droit sacré, qui appartient à tout le monde. Si Danton a à répondre à quelqu'un, il aura la parole. Je rappelle tous les membres de la Convention à leur serment et à leur dignité. J'invite les tribunes à garder le plus profond silence; c'est Pétion qui a la parole.
continue. Je ne faisais pas aux citoyens des halles l'injure de
croire qu'ils eussent pu faire une pétition aussi incendiaire, aussi
évidemment tendante à la destruction de la représentation nationale;
je sais, citoyens, comment ces pétitions se font dans les sections;
il n'y a qu'un petit nombre d'hommes qui, en l'absence des vrais
citoyens, font toutes les motions incendiaires, avec lesquelles en-
J'ai dit que je ne voulais pas accuser toute la section, mais seulement un petit nombre de citoyens. Il est bien étonnant qu'au sein même de l'Assemblée nationale, on aille autoriser des excès aussi coupables; que l'on souffre qu'on outrage à ce point la représentation nationale.
L'avez-vous bien entendu, citoyens? Quoi! on viendra vous dire que vous êtes des monopoleurs; qu'il y a au milieu de vous des hommes qui conspirent contre la liberté ! On vous dit, en propres termes, que la majorité est corrompue, et alors où est donc la représentation nationale? Nous a-t-on envoyés ici pour être abreuvés d'outrages ? Serions-nous dignes de représenter la République entière, si nous ne sévissions pas, avec la dernière sévérité, contre des coquins qui viennent vous dire que la majorité est corrompue ? Sommes-nous donc capables de sauver la patrie si cette majorité est corrompue ? (Interrompu.) Quoi ! représentants, on viendra vous dire de sang-froid, votre majorité est corrompue, et vous dites que nous sauverons la patrie ! Comment la sauver la patrie ? Est-ee par des excès, est-ce par des brigandages, est-ce par des pillages qu'on sauve la patrie? (Il est encore interrompu par les murmures.)
Voilà, citoyens, voilà comme on égare le peuple, voilà comme on l'égorgé, voilà comme on le traîne dans le précipice, voilà ce qu'on appelle, citoyens, avoir du patriotisme. (In terrompu.) J'entends renouveler les systèmes de calomnies,que l'on fait avec une constance qui est bien propre, en effet, à égarer l'opinion publique; mais il ne faut pas croire que ce système subsiste longtemps.
Qu'entendons-nous sans cesse : les dénonciations, des accusations; c'est une tactique constante, et s'il était possible, on démontrerait ici quels sont les calomniateurs, quels sont les complices, et on parviendrait, sans doute, à pouvoir les trouver. Mais que fait-on ? on embarrasse sans cesse la discussion par des mouvements, par des vociférations, par des imputations, et voilà comme on a l'art de masquer soi-même tout ce que l'on a fait; et voilà comme on parvient à voiler ses forfaits. Aussitôt que vous montez à la tribune, vous êtes environnés de .soupçons; on crie après vous de la manière la plus scandaleuse, la plus indécente, parce qu'on croit que le public qui vous entend, prendra ces vociférations pour des preuves; voilà pourtant la manière dont nos discussions sont conduites dans cette assemblée. Quel est l'homme qui. au fond de son cœur, peut me soupçonner? (Plusieurs voix : Moi, moi !) N'est-il pas évident, citoyens, que les démarches qui sont faites depuis quelque temps auprès de l'Assemblée ne tendent qu'à l'avilir, qu'à la déshonorer, qu'à la compromettre? N'est-il pas évident, dis-je, que ces démarches sont préparées, que toutes ces trames se trouvent dirigées par des comités secrets? Tous se trouvent coïncider en même temps. N'est-il pas évident que tout se trouve préparé de manière que d'une part on couvre de calomnies les vrais défenseurs de la liberté, et que de l'autre on cherche à avilir la Convention natio-
nale, à inspirer un système de terreur aux hommes faibles, à enlever les délibérations, tantôt par^ surprise, et tantôt par ces moyens que l'on sait trop bien employer depuis quelque temps, et qui réussissent trop bien pour faire passer des mesures désastreuses, sous prétexte d'employer des mesures révolutionnaires ? Par exemple, ne cherche-t-on pas sans cesse à diviser l'Assemblée en deux parties, à distinguer dans cette Assemblée le parti patriote et celui qui ne l'est pas ? Ne cherche-t-on pas à diviser la nation de la manière la plus pernicieuse ? Par exemple, depuis quelque temps on parle à la tribune de former une armée des Sans-Culottes ; je voudrais que l'on m'expliquât si l'on entend par ce mot les braves citoyens du Tiers-Etat. Ah, le Tiers-Etat ! bruit.) Président, il faut bien se servir d'un terme moins inintelligible ; car faute de s'en servir, voici positivement ce qui arrive, c'est qu'on ne dit pas, en parlant des Sans-Culottes, tous les citoyens, moins les anciens nobles et les privilégiés, et on entend très bien distinguer, comme on le fait sans cesse, entre les propriétaires et eéux qui ne possèdent rien. Voilà comme on amène une guerre sourde et intestine qui se répand dans toute la République. (Interrompu. )
Dans l'adresse on parle aussi des patriotes que l'on distingue des autres membres de l'Assemblée, sans les nommer. C'est de cette manière que l'on opère sans cesse des scissions, des divisions, des haines, et je maintiens que cette adresse ne peut être faite que par des hommes entièrement en délire, égarés, ou bien par des royalistes ou des contre-révolutionnaires. (Interrompu.) Qui peut désirer dans la République la dissolution de la Convention nationale, si ce ne sont les aristocrates déguisés, si ce ne sont les royalistes ? Il n'y a qu'eux qui peuvent vouloir avilir et dissoudre la Convention nationale; car cette adresse tend à ce but, de la manière la plus indécemment prononcée.
Je dis qu'il vous est impossible de tolérer les outrages qui nous sont faits; je dis que nous ne serions pas dignes de la confiance qui nous a été remise, si nous souffrions qu'on nous dise que la majorité de cette Assemblée est corrompue, et que d'autres que nous doivent sauver la chose publique. Il est temps de mettre fin à ces excès. Certes, nous usons d'une indulgence coupable, d'une indulgence qui fait mépriser la Convention nationale. Il faut déployer de la force et de la sévérité, surtout eontre ces ennemis de la chose publique; car cette impunité les enhardit à de nouvelles tentatives et à de nouveaux crimes. Vous avez ordonné des poursuites; eh bien ! vous les laissez là; vous avez dit de poursuivre les auteurs des pillages ; sont-ils punis ? Nom Vous aviez dit de punir les auteurs des conjurations du 10 mars; sont-ils punis? Non. Vous avez dans votre sein un homme couvert d'opprobres, un homme qui vous a prêché le despotisme; il vous l'a prêché sous la forme de la dictature; il vous l'a prêché sous la forme du triumvirat ; il a prêché le meurtre: il a demandé des têtes: il a provoqué au pillage; tous ees faits sont notoires ; eh bien ! non seulement il siège parmi vous, mais, certes, il obtient bien plus aisément la parole dans cette Assemblée, qu'un homme
dont la probité et les mœurs sont connues. (Murmures.) C'est lui, surtout, qui calomnie avec une audace que rien n'égale, si ce n'est son infamie : c'est lui qui dénonce tous les bons citoyens. (Interrompu. — Une voix : c'est lui qui a dénoncé Dumouriez. ) J'entends dire qu'il a dénoncé Dumouriez; mais il se gardait bien de dénoncer Egalité; non seulement il ne le dénonçait pas (Interrompu), mais il allait chez lui, mais il l'a constamment défendu ; et, d'ailleurs, comment voulez-vous qu'un homme qui n'est nourri que de fiel, que de calomnies, qui dénonce tout le monde, ne rencontre en son chemin des traîtres, soit dans les administrations, soit dans les armées. (Interrompu. )
Je reviens à l'objet qui nous occupe. Si tous les citoyens allaient dans leurs sections, je me serais bien donné de garde de vous dénoncer une pareille adresse, car certainement cette adresse eût été vue, comme vous la voyez vous-mêmes, avec une profonde indignation; mais comme tous les citoyens ne sont pas assidus à leurs sections, comme il y a des hommes qui ont des raisons pour s'y trouver, il faut inviter les bons citoyens à s'y rendre, afin de prévenir le coup qu'on pourrait porter à la Convention. On vient à la barre de la Convention, et on lui dit : Ce sont les citoyens composant telle section, et on croit simplement que ce sont les sections de Paris qui viennent vous exprimer leur vœu, tandis que ce ne sont que 20 ou 30 personnes, dont plusieurs sont probablement soudoyées, ou sont des royalistes déguisés, qui sont continuellement là, et qui choisissent le moment où ils sont presque seuls pour prendre toutes ces délibérations désastreuses.
J'ai donc cru qu'il était important pour la chose publique de vous dénoncer cette adresse; et remarquez qu'on est déjà venu d'une manière isolée vous faire des pétitions à peu près semblables. Que fait-on aujourd'hui ? on fait circuler cette adresse dans toutes les sections; on a commencé par chercher à préparer les esprits à toutes ces dénonciations, à toutes ces horreurs, à toutes ces calomnies, et ensuite on cherche à rendre la dénonciation plus générale. C'est demain qu'elles doivent envoyer des commissaires pour se réunir et examiner cette adresse, et elle vous sera infailliblement présentée dimanche.
Yoilà par quels moyens on parvient à exciter le trouble et le désordre; on voudrait bien avoir une insurrection, mais on ne l'obtiendra pas dans Paris. Car il faut l'avouer, la masse est excellente, et je suis convaincu qu'il n'y a pas plus de 4 à 500 misérables en tout, qui sont cause de ces mouvements-là. Il faut pourtant que cela finisse. (Applaudissements.)
Il faut que les citoyens soient enfin invités à se rendre dans leurs sections, car, je le maintiens, si la Convention voulait dire aux citoyens de se rendre à leurs sections, je garantis que cette adresse serait brûlée, et je suis convaincu que l'immense majorité des citoyens la désapprouverait et vouerait à l'indignation et à l'infamie les hommes abusés, imbéciles ou gagnés qui ont fait une pareille adresse. Eh quoi ? on a l'audace et la bassesse d'applaudir à son propre déshonneur ; on entend dire que la majorité est corrompue, et il n'y a pas un mouvement unanime dans l'Assemblée, pour repousser une pareille injure !
Que dira-t-on dans les départements? Quoi! l'Assemblée entière ne s'est pas levée d'indignation, lorsque des hommes (Bruit) ont le délire et l'insolence de vous dire qu'ils sauveront la patrie. Et vous! pourquoi êtes-vous donc là ? Etes-vous spectateurs tranquilles de toutes ces infamies, et des trames qui s'ourdissent autour de vous ? Citoyens, je demande que le président et le secrétaire de cette section soient mandés à la barre, pour délibérer si ce sont eux qui ont fait cette adresse, et si ce sont eux qui l'ont faite ou signée, je ne doute pas que la Convention ne les envoie, sur-le-champ, au tribunal révolutionnaire.
texte du journal des débats (1).
Je demande à faire une motion qui intéresse essentiellement le salut public, et que son objet ne permet pas de différer.
Depuis trop longtemps l'orage gronde sur nos têtes et grossit chaque jour; chaque jour la représentation nationale est indignement outragée, et nouvellement encore par la pétition que je vais vous lire; et qui, dans ce moment, circule dans toutes les sections.
En voici la teneur : Représentants, nos pétitions sont toutes enfouies dans vos comités; dans ces comités où siègent des mandataires coupables; ou si l'on vous en fait rapport, c'est d'une manière tellement insidieuse, c'est si tard, que jamais elles ne produisent les effets qu'on en attendait. Représentants, écoutez-nous pour la dernière fois, c'est le vœu de tous les citoyens de la République que nous vous présentons ici. La nation française est lasse, enfin, de voir siéger au milieu de vous des mandataires infidèles; si vous aviez puni Dumouriez quand il vous fut dénoncé pour la première fois, il n'eût pas conduit tout récemment la République sur les bords de l'abîme, et n'eût pas porté l'audace jusqu'à porter ses mains sur la personne sacrée de nos représentants; il n'eût pas osé porter la scélératesse jusqu'à les livrer aux ennemis. Que cet exemple vous suffise.
Eh quoi ! la patrie est en danger, l'ennemi est à nos portes, et c'est dans ce moment que vcus affaiblissez vos moyens; c'est dans ce moment que vous envoyez les membres les plus patriotes dans l'intérieur; c'est dans ce moment que vous remettez le sort de la République entre les mains d'une majorité corrompue, indigne de notre confiance, et qui l'a déjà perdue à jamais !
Il est temps encore de prévenir les progrès du mal, mais il faut en frapper les auteurs sans ménagement.
Nous demandons, en conséquence, que Roland et tous les membres de la Convention qui, par leurs opinions ou leurs écrits, ont trahi les intentions de leurs commettants, soient décrétés d'accusation;
Que le directeur de la liquidation soit destitué pour avoir souffert dans ses bureaux des citoyens suspects;
Que la vente du numéraire soit défendue;
Que l'administration des postes soit renouvelée pour avoir évidemment favorisé les correspondances des ennemis de l'Etat avec leurs complices de l'intérieur.
Députés patriotes, montagnards de là Con-
Cette crise doit être la dernière; il faut enfin, ou que la République soit anéantie, ou que la liberté triomphe.
Cette adresse est signée par le président et par un secrétaire de la section de la Halie-aux-Blés.
demande la mention honorable de cette adresse, et demande la parole pour une motion d'ordre; il va à la tribune; sa présence y cause un moment d'agitation; plusieurs membres s'y portent : le Président se se couvre; le calme renaît. Pétion continue.
Je ne ferai pas, dit-il aux citoyens qui composent la section de la Halle-aux-Blés, l'injure de croire qu'une pétition aussi incendiaire, une pétition qui tend si évidemment à la dissolution de la représentation nationale, soit leur ouvrage. Non, elle est celui d'un petit nombre d'hommes qui, chaque jour, profitent de l'absence des bons citoyens pour proposer et faire adopter leurs mesures désastreuses, et c'est ainsi que l'on égare le peuple.
Une voix : C'est Dumouriez qui a égaré le peuple.
D'Orléans voulait régner, et vous le protégiez.
On affecte de rapprocher mon opinion de celle de Dumouriez : ainsi l'on suit avec constance un système de calomnie qui, je l'espère, ne durera pas longtemps, et certes il n'est pas difficile de calomnier sans preuves; et s'il était possible de discuter avec calme les faits avancés, on saurait enfin quels sont les véritables conspirateurs : mais toujours les délibérations de la Convention sont entravées par des clameurs que le peuple a la bonté de prendre pour des preuves; oui, c'est ainsi qu'on le conduit à l'anarchie par la désorganisation, et de là à la dissolution de la République.
Citoyens, ce sont ces gens-là qui vous osent dire qu'ils parlent au nom de la République entière; ce sont eux qui vous disent que la majorité de la Convention est corrompue.
Eh quoi ! nous a-t-on envoyés ici pour être ainsi chaque jour abreuvés d'amertumes et d'outrages ? Eh ! que feraient de plus les émissaires de Brunswick, de Frédéric et de François ? Eh ! serions-nous dignes des importantes fonctions qui nous sont confiées, si, par une faiblesse coupable, nous souffrions de pareils outrages ?
A qui s'adressent les vœux de ces pétitionnaires? A la minorité de la Convention. Que lui disent-ils ? « Pouvez-vous sauver la Réputé blique ? dites-nous-le avec franchise. Si vous « ne le pouvez pas, nous nous chargerons de « la sauver. »
Eh! comment la sauveraient-ils? Est-ce par le pillage, par le brigandage, par les assassinats que l'on sauve la République ?
(Pétion est interrompu. )
Il est évident, reprend-il, que tel est le plan des agitateurs; ils veulent diviser la nation, comme leurs oracles divisent la Convention, en patriotes et en non-patriotes, avec cette différence que les patriotes, pour ces scélérats,
sont ceux qui n'ont rien, et les non-patriotes, ceux qui ont quelque chose. >
C'est par une suite de ce plan qu'on vous a proposé ces mesures exagérées, ces décisions désastreuses que l'on décore du nom imposant de mesure révolutionnaire.
Il n'en faut pas douter, citoyens; cette adresse est l'ouvrage ou de quelques royalistes, ou d'aristocrates déguisés, ou de quelques émissaires gagés par nos ennemis : eux seuls peuvent désirer la dissolution de la Convention.
Mais il faut mettre fin à ces excès ; il faut déployer toute l'énergie dont vous êtes capables : c'est votre indulgence, cette indulgence coupable, qui a enhardi les traîtres.
Yous avez, par exemple, dans votre sein, un homme couvert d'opprobres, qui depuis longtemps a prêché le despotisme... Oui, le despotisme, le royalisme, le triumvirat, le meurtre et le pillage. Eh bien ! cependant lui seul obtient la parole; lui seul dit ce qu'il veut; lui seul a le droit acquis de dénoncer, de calomnier.
Il a dénoncé Dumouriez, dit un membre.
Je le crois, dit Pétion; et il n'est pas étonnant qu'il ait rencontré la vérité; quand on dénonce toute le monde, il n'est pas impossible de trouver un coupable.
Eh bien ! je le répète, c'est votre indulgence qui encourage les scélérats. J'espère que vous n'aurez pas cette indulgence pour les auteurs de l'adresse que je vous dénonce, afin de prévenir les bons citoyens du piège qui leur sera tendu lors de la présentation de cette adresse à leur adhésion ; et je suis tellement persuadé de la vérité de ce que j'ai avancé relativement à cette adresse, que je demanderais avec confiance un appel nominal des citoyens de Paris sur cette adresse, certain que la masse des citoyens est tellement bonne, qu'elle serait foulée aux pieds dans toutes les sections de cette ville.
Je conclus à ce que les deux signataires de cette adresse soient mandés à la barre, pour apprendre d'eux s'ils ont ou non signé oette adresse; et dans ce cas, à ce qu'ils soient envoyés au tribunal révolutionnaire.
a la séance de la convention nationale du
Discours de Danton en réponse à celui de Pétion (1) sur le projet d'adresse de la section de la Halle-aux-Blés.
texte du moniteur (2).
C'est une vérité incontestable, que vous n'avez pas le droit
d'exiger du peuple ou d'une portion du peuple plus de sagesse
Ce n'est pas que je croie qu'il en soit de même de cette Assemblée. Mais que devez-vous répondre au peuple, quand il vous dit des vérités sévères? Vous devez lui répondre, en sauvant la République. Eh ! depuis quand vous doit-on des éloges? Etes-vous à la fin de votre mission? On parle de calomniateurs; la calomnie, dans un Etat vraiment libre, n'est rien pour l'homme qui a la conscience intime de son devoir. Encore une fois, tout ee qui a rapport à la calomnie ne peut être la base d'une délibération dans la Convention. Il existe des lois, des tribunaux; que ceux qui croient devoir poursuivre cette adresse, l'y poursuivent. Mais si vous délibérez sur cet objet, pourquoi ne délibéreriez-vous pas sur l'adresse de Marseille? Voyez sur quelle mer vous vous embarqueriez. Oui, je le déclare, vous seriez indignes de votre mission, si vous n'aviez pas constamment devant les yeux ces grands objets : vaincre les ennemis, rétablir l'ordre dans i intérieur, et faire une bonne Constitution ; nous la voulons tous, la France la veut; elle sera d'autant plus belle, qu'elle sera née au milieu des orages de la liberté; ainsi un peuple de l'antiquité construisait ses murs, en tenant d'une main la truelle et de l'autre l'épée pour re-
pousser les ennemis. N'allons pas nous faire la guerre, animer les sections, les mettre en délibération sur des calomnies, tandis que nous devons concentrer leur énergie pour la diriger contre les Autrichiens. Je dis qu'il est impolitique de convoquer les sections pour délibérer sur cette adresse; je dis que si un décret portait une pareille disposition, elle devrait s'étendre à toutes les adresses, quelques principes qu'elles manifestassent. Que l'on ne vienne donc plus nous apporter de dénonciations exagérées, comme si l'on craignait la mort. (On murmure.)
Je ne crains pas pas la mort pour moi, mais je crains celle de la République.
Et voilà l'exemple que vous donnez! Vous voulez sévir contre le peuple, et vous êtes plus virulents que lui. (Quelques rumeurs.) On me dit de venir au fait : eh ! n'y suis-je pas venu au fait? n'ai-je pas parlé de vaincre les ennemis, de rétablir l'ordre, de . faire une Constitution ? J'y suis, au fait.
Tout à l'heure quelques-uns d'entre vous ont eu la lâcheté de dire que je voulais être dictateur; il vous sied bien de vouloir vous élever contre le peuple, lorsqu'il vous dit des vérités énergiques. Je dis que la discussion est insignifiante. Je ramène l'Assemblée au rapport que le comité de Salut public va vous faire.
Notre marine peut se présenter encore d'une manière fort importante. Le comité va vous dire que le ministre de la marine, d'après sa propre déclaration, ne peut suffire au fardeau qui lui est imposé. U faut, dès l'instant même, nommer un ministre. L'influence de l'équinoxe est passée, les Anglais enhardis par les premiers succès de nos ennemis, vont infester toutes les mers. Quand l'Europe est liguée contre nous, ne devons-nous pas former une phalange pour la vaincre ou pour mourir ensemble ?
Je demande la question préalable sur la motion de Pétion. Si Paris montre une espèce d'indignation, il a bien le droit de reporter la guerre à ceux qui l'ont calomnié après les services qu'il a rendus. (On murmure.)
TJne voix : Ce n'est pas le peuple de Paris.
Je demande la question préalable et le rapport du comité de Salut public.
texte du logotachygraphe (1).
C'est une vérité incontestable que vous n'avez pas le droit d'exiger
du peuple, ou d'aucune portion du peuple plus de sagesse que vous
n'en montrez vous-mêmes. Eh bien, si cette vérité est incontestable,
le peuple n'a-t-il pas le droit, lui, de bouillonner d'un excès de
patriotisme qui le porte I jusqu'au délire patriotique, lorsque
cette tribune est presque une arène de gladiateurs, lorsque j'y ai
été moi-même en quelque sorte assiégé, provoqué par un grand nombre
de membres de cette assemblée. Citoyens, considérez les passions qui
doivent posséder un grand peuple dans un moment de révolution.
Je dis que la conclusion que Pétion a tirée de son discours est pour le moins insignifiante, et ne peut produire aucun effet : voici comme je le prouve. Nous savons tous que dans différentes parties de la France, chaque section de la République a jugé nos débats, selon les passions qui dominaient ici, ou suivant l'influence qu'avaient dans l'Assemblée certains citoyens; nous savons tous qu'alternativement on a demandé la tête des citoyens qui se trouvaient de tel côté, et ensuite des oitoyens qui siégeaient dans un autre.
Je dois répéter aussi ce qui a été dit de moi; on a aussi demandé ma tête, et on l'a demandée d'une manière qui pouvait bien plus provoquer le mécontentement et l'indignation de cette assemblée.
Sans qu'il y ait eu un jugement rendu par vous sur des individus de la Convention, on est venu vous demander qu'on les chassât de votre Assemblée, comme indignes de porter le nom de Français et que tout citoyen devait en délivrer la République. Des administrations, des départements, et notamment le département du Finistère en ce qui me concerne, ont émis une pareille opinion.
Citoyens, remarquez bien quelle serait la conséquence générale de ce que vous propose Pétion : plusieurs pétitions contiennent des suites funestes au bien public; mais il faut les juger suivant la nature des circonstances. Ainsi, j'en appelle à Pétion lui-même : ce n'est pas d'aujourd'hui qu'il se trouve dans les orages populaires; lorsqu'une monarchie se brise, lorsqu'on veut arriver à une République stable, le peuple, surtout quand il est menacé par des ennemis extérieurs, dépasse, pour ainsi dire, le but, par la force de projection politique... Saisissez bien ces vérités, ©lies sont éternelles; le peuple dépasse 'en quelque sorte son but par l'impulsion de la force qu'il sent pouvoir se donner... Mais, que doit faire la réunion des législateurs ? elle doit être immobile, elle doit mettre à profit toute cette énergie populaire; et certes, Pétion ne méconnaît pas cette énergie populaire, car, dans la première Assemblée constituante, dans toutes ses parties, eh bien ! à cette époque aussi, on a cent fois dit que la majorité était exécrable, parce qu'elle l'était réellement ! (Interrompu.) loi je n'en tire pas la même conséquence; mais comment des représentants
doivent-ils recevoir ces calomnies? Je veux les prendre dans toute leur force : comment devez-vous répondre à une portion du peuple, qui pourrait vous dire que vous vous êtes montrés indignes de votre mission? Vous devez répondre par de grandes mesures, vous devez lui répondre que vous sauverez la République. Et depuis quand vous doit-on des éloges ? êtes-vous arrivés au terme de vos travaux? (Applaudissements) Et depuis quand chaque citoyen a-t-il perdu le droit de s'explique^ et sur ceux qui le gouvernent, et sur ceux qui font les lois?
On parle de calomnie ! la calomnie, dans un Etat vraiment libre, n'est rien pour celui qui a le sentiment profond de son devoir. (Applaudi.) Je vous ramène à un axiome politique vraiment trivial. Encore une fois, ce qui s'appelle calomnie, ne peut pas devenir la base d'une délibération particulière de l'Assemblée. Je dis qu'il existe des lois contre ceux qui veulent porter atteinte à la République ou à la personne d'un ou de plusieurs de ses représentants. Que ceux qui croient pouvoir traduire devant les tribunaux, les citoyens de la pétition, que ceux qui croient avoir ce droit l'exercent. Mais si vous délibérez sur cette pétition, pourquoi ne délibérez-vous pas aussi sur l'adresse de Marseille? Voyez dans quelle mer vous vous embarquez. Yous allez vous embarquer dans une mer de calomnies ou d'erreurs. Si vous y attachiez de l'importance, oui, je le répète, vous seriez indignes des fonctions qui vous sont déléguées; vous devez avoir perpétuellement devant vous ces grands objets d'intérêt public, prendre des mesures énergiques pour repousser les ennemis de la République et faire une autre Constitution. (Applaudissements.) Nous la voulons tous, cette Constitution, la France la veut, la demande, et elle l'aura d'autant plus belle, qu'elle sera créée parmi les périls dont nous sommes environnés : ainsi un peuple de l'antiquité tenait d'une main la truelle et, de l'autre, l'épée pour repousser ses ennemis.
Ne nous effrayons pas parce qu'on appelle calomnie; rallions-nous comme nous en sommes convenus; faisons notre devoir, prenons ce qu'il y a d'énergique dans ce que le peuple nous adresse, et n'allons pas surtout faire la guerre en faisant délibérer les sections sur des calomnies, sur des opinions politiques, tandis que nous devons conserver leur énergie pour la diriger contre les Autrichiens.
Je dis qu'il est impossible de courir des dangers, parce qu'on vient faire ici des dénonciations exagérées, et tout membre qui semble craindre que la mort ne l'atteigne, qui semble redouter oes dénonciations. (Interrompu par des ho! ho! ho!). Voilà vos preuves de sagesse, voilà l'exemple de raison que vous donnez, et vous voulez faire le procès au peuple ! Vous êtes cent fois plus virulents que lui, et il vous jugera. (Vifs applaudissements. Quelques voix: Vous n'allez pas au fait.) Je ne viens pas au fait ? mais je suis tellement venu au fait, que je vous ai dit qu'il fallait marcher droit à vos ennemis, et tourner contre eux les fureurs populaires; qu'il fallait marcher droit au but, et ce but est de faire une Constitution, et de mettre la République en harmonie. Est-ce là venir au
fait ? Et qui y est venu plus que moi au fait ? Et tout à l'heure encore, plusieurs d'entre vous avaient la stupide lâcheté de m'aecuser de vouloir être dictateur : il vous sied bien d'après cela de porter la guerre au peuple. Je soutiens que la discussion qui a été entamée sur cette adresse, est insignifiante, et ne peut avoir aucun effet, je soutiens que vous devez être tout entier aux grands intérêts de la République qui appelle vos soins : je soutiens que., quand même il y aurait eu lieu à une discussion profonde de cette adresse, que, quand même il y aurait eu lieu à rendre des décrets relatifs à cette adresse, il était quelque chose de plus important, et que je vous rappelle, c'est le rapport que de-vait vous faire votre comité de Salut public (Interrompu), mais qui donrîera l'exemple le plus parfait du mépris que méritent des calomnies. Je ramène donc l'Assemblée à un objet réel; je la ramène au rapport qu'on va vous faire; je la ramène à la nécessité de donner une grande activité à notre marine, qui peut encore se présenter d'une manière formidable, qui, d'après les déclarations même du ministre de la marine, est estimable sous bien des rapports. U vous fera connaître, dis-je, qu'il faut à l'instant même choisir un autre ministre, qui donne plus d'impulsion à l'action, qui réponde à la force des circonstances, et je demande que le rapport soit discuté à l'instant même, car le moment de l'équinoxe, jsur l'Océan, est passé.
L'Angleterre, enhardie par les succès de nos ennemis, va développer toutes ses forces maritimes. Eh bien ! augmentons notre marine; vainquons nos ennemis; nous avons l'Europe pour point d'opposition; c'est là, c'est là seulement que doivent aboutir nos efforts, et ne faisons pas la guerre. Si notre gouvernement était affermi, si nous n'avions plus à discuter que des lois ordinaires, peut-être serait-il bon qu'il y ait une agitation réelle, une sorte d'opposition qui donne aux discussions une forme, en quelque sorte, dramatique, pour lui donner plus de force et plus d'intérêt; mais quand toute l'Europe nous presse, comment se fait-il que nous ne composions pas tous une seule et même phalange, puisqu'il faudra périr tous ou tous sauver la République?
Je demande donc la question préalable sur l'adresse en question, ou que, s'il est fait un rapport sur cette adresse, on enveloppe tous ceux qui, par leurs écrits et leurs actions, ont disséminé des principes dangereux... car, si Paris montre une sorte d'indignation, il a bien le droit de s'en prendre à tous ceux qui ont eu la hardiesse et la lâcheté de le calomnier, après tous les services qu'il a rendus; je demande surtout, qu'avant toute autre discussion, vous entendiez à l'instant même le rapport que votre comité de Salut public doit vous faire relativement à votre marine.
a la séance de ja convention nationale du
Discours de Guadét (1) sur la proposition de
Pêtion relative au projet d'adresse de la
section de la HaUe-anx-Blés, et sur les faits
cités contre Egalité.
texte du moniteur (2).
Je demande que l'Assemblée statue sur-le-champ sur la proposition de Delahaye.
A l'égard de la traduction immédiate au tribunal révolutionnaire, d'Egalité et de ses complices, je m'y oppose, parce qu'il est évident pour moi que ce tribunal ne veut pas poursuivre les fauteurs de cette conspiration qui tient essentiellement à celle du 10 mars.
Je demande la parole après G.uadet pour dénoncer les véritables coupables.
Un décret avait ordonné la poursuite des chefs de cette conspiration; et certes, je suis très étonné que Robespierre, qui dit connaître les vrais coupables, ne les ait pas encore dénoncés à l'aocusateur public du tribunal criminel extraordinaire.
(Je veux les dénoncer à la Convention, dit Robespierre.)
Mais cette conspiration est, dit-on, liée ;à celle de Dumouriez; je n'en fais aucun doute : mais c'est précisément parce qu'elle est liée intimement, que les auteurs sont les mêmes, que j'en sollicite la poursuite prompte et rigoureuse. Ce n'est qu'à la lueur d'une procédure que l'on pourra suivre les fiils de cette conspiration, et que le peuple, que l'on parle sans cesse de venger, connaîtra alors les vrais conspirateurs. On cherche à vous environner d'une opinion factice pour vous dérober la connaissance de la véritable. Cette opinion factice est comme le croassement de quelques crapauds.
Vil oiseau, tais-toi !
Cette opinion factice dont on vous environne, est comme le croassement des crapauds, que, au rapport de je ne sais quel voyageur, certains sauvages appellent l'expression de la volonté de leur dieu. Moi, je ne connais d'opinion véritablement imposante que celle que forme la masse du peuple français. Or, celle-là, il faut l'éclairer, non par des procédures précipitées qui tendraient à faire absoudre les coupables, mais par la recherche des preuves qui mettront les tribunaux à même de suivre le fil des conspirations.
Je demande donc, au lieu du renvoi au tribunal révolutionnaire, la
nomination de quatre commissaires, pour vérifier les faits.
Je demande aussi que l'accusateur public vienne ici vous rendre compte de sa conduite, et vous apprenne pourquoi il n'a pas mis le tribunal en état de juger les auteurs et les chefs de la conspiration du 10, au mépris du décret en vertu duquel la poursuite des auteurs de cette conjuration devait occuper les premiers moments de ce tribunal.
N'en doutez pas, citoyens, la République est perdue, si vous continuez l'indulgence avec laquelle vous avez jusqu'ici traité ceux qui, sourdement, que dis-je, publiquement provoquent la dissolution de la Convention nationale; et ne sentez-vous pas que les despotes s'avancent au milieu du désordre et de l'anarchie. Ne sentez-vous pas que ceux-là rendent un roi nécessaire au peuple, qui provoquent sans cesse l'anarchie? Les hommes ne sont rien; la liberté est tout : c'est elle qui faut préserver^ c'est elle que la patrie à genoux vous conjure de sauver. Oh ! vous ne la sauverez pas, tant que vous souffrirez que des scélérats, que l'on investit cependant du nom sacré du peuple, viennent vous dire que la majorité d'entre vous est corrompue; qu'il n'y a dans cette Assemblée que quelques hommes qui puissent sauver la République, et qui, doutant encore qu'ils le puissent faire, sont là, disent-ils, pour la sauver eux-mêmes.
On vous a proposé des mesures partielles, comme celle adoptée relativement à l'adresse de Marseille ; mais dans cette dernière adresse on ne prétendait pas que la majorité de l'Assemblée était corrompue ; elle se contentait de nommer mauvais citoyens ceux qui n'étaient pas à la hauteur de son patriotisme ardent, et cette différence doit être sentie par tout homme impartial.
Je demande que mes propositions soient mises aux voix.
Texte dtj Logotachygraphe (1).
On fait la proposition du renvoi immédiat au tribunal révolutionnaire de tous ceux qui pouvaient avoir pris part dans le département du Finistère, à la conspiration qu'on suppose y avoir été tramée par Egalité, père ; je m'oppose à ce renvoi immédiat ; car il est évident pour moi que le tribunal révolutionnaire ne veut point suivre le fil de cette conjuration évidemment liée à celle qui avait été ourdie à Paris le 9 et le 10 mars (Interrompu).
Je demande la parole après Guadet, pour dénoncer les traîtres.
Un décret de la Convention nationale avait ordonné au tribunal révolutionnaire de s'occuper incessamment, et dans les premiers instants de sa formation, de la poursuite de la conspiration tramée le 9 et 10 mars, contre la Convention nationale ; et certeSj il est plus qu'étonnant que si Robespierre connaît les véritables traîtres et ceux qui ont eu part à cette conjuration...
Oui je les connais.
il ne soit pas déjà allé à l'accusateur public exciter son zèle et les dénoncer. J'entends dire que cette conspiration se lie avec celle de Dumouriez, celle qui vient d'éclater dans le centre de l'armée française : je n'en ai pas le moindre doute, et il faudrait être bien dépourvu de sens, pour ne pas apercevoir la liaison de ces deux conspirations : mais c'est aussi parce que ces deux conspirations se lient évidemment et essentiellement, c'est parce qu'elles n'en forment qu'une, que je demande la poursuite prompte de cette grande conjuration. Car enfin, on parle sans cesse de venger le peuple, eh bien ! il faut que le peuple français soit vengé, en voyant tomber sous le glaive de la loi les têtes de ces grands coupables, les têtes des véritables auteurs de cette conjuration ; et c'est alors, peut-être que l'opinion publique s'éclairera sur les véritables ennemis de la patrie. Car, citoyens, ne vous y trompez pas, on ne cherche à vous environner ici d'opinions factices, qu'afin de vous déguiser la véritable opinion publique. L'opinion factice qui nous environne, ressemble, si je puis m'exprimer ainsi, à ces coassements de crapauds. (Interrompu). L'opinion factice dont on vous environne, ressemble, je le répète, aux coassements de ces crapauds qui, au rapport de je ne sais quels voyageurs, sont, pour certains sauvages, l'expression de la volonté de leurs dieux. Moi, je ne connais d'opinion véritablement imposante pour l'homme de bien, que celle de la masse du peuple. Or, c'est celle-là qu'il faut éclairer, et il faut l'éclairer en armant les tribunaux du glaive de la loi, pour que, comme je le disais tout à l'heure, à la lueur d'une procédure juste, on puisse suivre enfin le fil de cette conspiration. Ainsi, citoyens, je demande, d'un côté, qu'au lieu de renvoyer immédiatement au tribunal révolutionnaire, deux commissaires de la Convention nationale, comme l'a proposé Dela-haye, soient chargés de se transporter sur les lieux pour vérifier les faits. Quoique je sente moi-même que les faits qu'on nous a annoncés, peuvent être faux; quoiqu'ils puissent être exagérés; cependant, je maintiens que dans un aussi grand péril, lorsque la li-toyens, je demande, d'un côté, qu'au lieu de négliger aucuns moyens pour découvrir la vérité, et c'est par deux commissaires que vous enverrez sur les lieux, que vous la découvrirez. Ces commissaires, doivent avoir le pouvoir de renvoyer devant le tribunal révolutionnaire les coupables ou du moins les prévenus; mais je demande de plus que l'accusateur public du tribunal révolutionnaire soit appelé à votre barre, afin qu'il rende compte de sa conduite et des motifs qui l'ont empêché, en violation du décret de la Convention nationale, de n'avoir pas donné ses premiers moments à la conjuration qui a été tramée à Paris, le 10 et le 11 mars, d'une conspiration qui a une liaison étroite, qui a une liaison évidente avec celle qui a été tramée par Dumouriez.
Citoyens, ne vous y trompez pas, le moment est venu de déployer .votre énergie, et de la déployer tout entière. Je l'ai dit, il y a quelques jours, à cette tribune, la République est perdue (Non ! non! si vous continuez à
user d'une indulgence qu'on peut appeler coupable envers les véritables ennemis de la patrie, envers les conjurés, envers ceux qui travaillent sourdement, que dis-je ? publiquement à la dissolution de la Convention nationale. Ne sentez-vous pas, citoyens, que le despotisme s'avance au milieu de la désorganisation et de l'anarchie? Ne sentez-vous pas que ces gens-là veulent, faire dire qu'un roi est nécessaire au peuple ? Ces gens-là, qui travaillent sans cesse à jeter partout la désorganisation, le mécontentement, l'anarchie et tous les excès qu'elle entraîne après elle? Citoyens, les hommes ne sont rien dans les révolutions, et je partage là-dessus l'opinion de Danton. Qu'importe au salut public que tel ou tel homme soit récusé de calomnies et de diffamation ? C'est la liberté qui est tout; c'est elle, que la patrie presque à genoux vous demande de sauver. (Applaudissements réitérés. )
Or, vous ne la sauverez pas, tant que vous souffrirez quelques scélérats, qu'on investit cependant du nom sacré du peuple, aient l'audace de vous dire que la majorité de la Convention nationale est corrompue : que quelques hommes de l'Assemblée nationale peuvent seuls sauver la République. Il importe peut-être à leurs projets que cette majorité ait vraiment l'impuissance de la sauver. Citoyens, ou vous représentez la nation entière, ou vous n'êtes rien. Si vous représentez la nation française, vous lui devez, vous devez à son salut, de punir de pareils outrages. Yous devez à la loi, que vous-même vous avez portée de ne pas laisser impuni un tel excès d'audace et de crime, lorsqu'il sera question de la pétition qui vous a été prononcée par Pétion, je m'opposerai de toutes mes forces à cette demi-mesure, par laquelle on vous propose d'improuver l'adresse de la section de la Halle-aux-Blés. L'adresse de Marseille, que l'on a voulu mettre en parallèle à celle-ci, ne disait pas du moins que la majorité de la Convention était corrompue; elle appelait bien ennemis de la patrie, ceux qui avaient émis une opinion contraire au brûlant patriotisme, mais elle ne s'adressait point à la majorité de la Convention nationale, et cette différence devra être sentie par tous ceux qui regardent pour quelque chose le salut public.
Je demande que la Convention nationale envoie des commissaires dans cette section, et que ces commissaires aient le pouvoir, après avoir vérifié le tout et pris des renseignements, de faire traduire devant le tribunal révolutionnaire tous ceux qui auraient pris part à cette délibération, en supposant qu'elle ait eu lieu. J e demande en second lieu que l'accu- | sateur public soit mandé à la barre, pour rendre compte des motifs qui l'ont empêché de poursuivre la conjuration formée à Paris.
texte du journal des débats (1).
Je demande que lAssemblée statue sur-le-champ sur la proposition de Delahaye.
A l'égard de la traduction immédiate au tribunal révolutionnaire,
d'Egalité et de ses complices, je m'y oppose, parce qu'il est
évident
Robespierre demande la parole après Gua-det pour dénoncer, dit-il, les véritables coupables.
Un décret avait ordonné la poursuite des chefs de cette conspiration; et certes, je suis très étonné que Robespierre, qui dit connaître les vrais coupables, ne les ait pas encore dénoncés à l'accusateur public du tribunal criminel extraordinaire.
Je veux les dénoncer à la Convention, dit Robespierre.
Mais cette conspiration est, dit-on, 'liée à celle de Dumouriez; je n'en fais aucun doute : mais c'est précisément parce qu'elle est liée intimement, que les auteurs sont les mêmes, que j'en sollicite la poursuite prompte et rigoureuse. Ce n'est qu'à la lueur d'une procédure que l'on pourra suivre les fils de cette conspiration, et que le peuple, que l'on parle sans cesse de venger, connaîtra alors les vrais conspirateurs. On cherche à vous environner d'une opinion factice pour vous dérober la connaissance de la véritable. Cette opinion factice est comme le croassement de quelques crapauds.
Tais-toi, vil oiseau ! dit Marat.
Oui, dit Guadet, c'est comme le croassemnet de quelques crapauds, qui étourdit le voyageur.
Je ne connais moi qu'une opinion, celle de la masse du peuple, c'est elle que vous devez éclairer en armant les tribunaux.
Je demande donc, au lieu du renvoi au tribunal révolutionnaire, la nomination de quatre commissaires, pour vérifier les faits.
Je demande que ces commissaires aient le pouvoir d'envoyer ces coupables au tribunal révolutionnaire.
Je demande aussi que l'accusateur public vienne ici vous rendre compte de sa conduite, et vous apprenne pourquoi il n'a pas mis le tribunal en était de juger les auteurs et les chefs de la conspiration du 10.
N'en doutez pas, citoyens; la République est perdue, si vous continuez l'indulgence avec laquelle vous avez jusqu'ici traité ceux qui, sourdement, qui, dis-je, publiquement provoquent la dissolution de la Convention nationale; et ne sentez-vous pas que les despotes s'avancent au milieu du désordre et de l'anarchie? Ne sentez-vous pas que ceux-là rendent un roi nécessaire au peuple, qui provoquent sans cesse l'arnachie? Les hommes ne sont rien; la liberté est tout; c'est elle qu'il faut préserver; c'est elle que la patrie à genoux vous conjure de sauver. Oh ! vous ne la sauverez pas, tant que vous souffrirez que des scélérats, que l'on investit cependant du nom sacré du peuple, viennent vous dire que la majorité d'entre vous est corrompue; qu'il n'y a dans cette Assemblée que quelques hommes qui puissent sauver la république, et qui, doutent encore qu'ils le puissent faire, sont là, dit-il, pour la sauver eux-mêmes.
On vous a proposé des mesures partielles comme celles adoptées relativement à l'adresse de Marseille; mais dans cette dernière adresse on ne prétendait pas que la majorité de l'Assemblée était corrompue; elle se contentait de nommer mauvais citoyens ceux qui n'étaient
pas à. la hauteur de sou patriotisme délixaait, et cette différence doit être sentie par tout homme impartial
Gttudet rappelle sa proposition.
a la séance de la convention nationale du
Discours de Maximillien Robespierre (1) contre les Girondins.
texte du moniteur (2).
Une faction puissante conspire avec les tyrans de l'Europe pour nous donner un roi, avec une espèce de Constitution aristocratique et une représentation illusoire, composée dte deux Chambres. Elle espère nous amener à cette transaction honteuse par la force des armées étrangères, et par les troubles du dedans. Ce système convient au gouvernement anglais, il convient à Pitt, l'âme de toute cette ligue des tyrans, à tous les intri-grants ambitieux. Il plaît à tous les aristocrates bourgeois, qui ont horreur de l'égalité, à qui on a fait peur, même pour leurs propriétés; il plaît même aux nobles, trop heureux de- retrouver dans la représentation aristocratique et dans la Cour d'un nouveau roi, les distinctions orgueilleuses qui leur échappaient. La République ne convient qu'au peuple, aux hommes de toutes les conditions, qui ont une âme pure et élevée, aux philosophes amis de l'humanité, aux Sans-Culottes, qui se sont en France parés avec fierté de ce titre dont Lafayette et l'ancienne Cour voulaient les flétrir, comme les républicains de Hollande slemparaient de celui de gueux, que le due d'Alfee leur avait donné.
Le système aristocratique dont je parle, était celui de Lafayette et de tous ses pareils, connus sous le nom de Feuillants et de modérés. Il a été continué par ceux qui ont succédé à sa puissance; Quelques personnages ont changé; mais le but est semblable, les moyens sont les mêmes, avec cette différence, que les continuateurs ont augmenté leurs ressources et accru le nombre de leurs partisans.
Tous les ambitieux qui ont paru jusqu'ici sur le théâtre de la
Révolution, ont eu cela de commun, qu'ils* ont défendu les droits du
peuple jusqu'au moment où. ils ont cru en avoir besoin. Tous l'ont
regardé comme un stupide troupeau, destiné à être conduit par le
plus habile ou par le plus fort. Tous ont regardé les Assemblées
représentatives comme des Gorps composés d'hommes ou cupides, ou
crédules, qu'il fallait corrompre ou tromper pour les faire servir à
leurs projets criminels.
La. faction dominante aujourd'hui était formée longtemps avant la Convention nationale. A la fin de juillet dernier, il existait avec la Cour un traité pour obtenir le rappel des ministres qu'ils avaient fait nommer au mois de janvier précédent. Une autre condition du traité, était la nomination d'un gouverneur du prince royal; il n'est pas nécessaire de dire que le choix devait tomber sur l'un d'entre eux. A la même époque, ils s'opposaient de tout leur pouvoir à la déchéance de Louis, demandée par le peuple et par les fédérés; ils firent décréter un message et des représentations au roi. Ils n'ont rien négligé pour empêcher la révolution du 10 août; dès le lendemain, ils travaillèrent efficacement à en arrêter le cours. Le jour même du 10, ils firent tout ce qui était en eux pour empêcher que le ci-devant roi ne fût renfermé au Temple. Ils tâchèrent de nous rattacher à la royauté, en faisant décréter par l'Assemblée législative qu'il serait nommé un gouverneur au prince royal.
A ces faits, consignés dans les actes publics et dans l'histoire de notre révolution, vous connaissez déjà les Brissot, les Guadet, les Vergniaud, les Gensonné,. et d'autres agents hypocrites de la même coalition.
En même temps ils n'oublièrent rien pour déshonorer la révolution qui venait d'enfanter la République. Dès le lendemain du 10 août, ils calomniaient le conseil de la Commune, qui dans la nuit précédente venait de se dévouer pour la liberté, en même temps qu'ils re-
nouèrent toutes les opérations par leurs intrigues et par les décrets qu'ils dictaient a l'Assemblée législative; ils s'en attribuèrent même tout l'honneur; eux. seuls recueillirent les fruits de la dernière révolution. Leur premier soin, après l'acte conservatoire du prince royal et de la royauté, fut de rappeler au ministre j leurs créatures Servan, Clavière et Roland; ils s'appliquèrent surtout à s'emparer de l'opinion publique. Us avaient eu soin de faire remettre entre les mains de Roland des sommes énormes pour la façonner à leur gré, pour payer les journaux les plus répandus; ils ne cessèrent de tromper la France et l'Europe sur la révolution qui enfanta la République. Ils dénoncèrent chaque jour' le peuple de Paris, et tous lès citoyens énergiques qui y avaient le plus puissamment concouru.
Il fallait détruire ce vaste foyer du républicanisme et dès lumières publiques; ils Raccordèrent tous à peindre cette immortelle cité comme le séjour du crime et le théâtre du carnage, et à travestir en assassins ou en brigands les citoyens et les représentants dont ils redoutaient l'énergie. Us Cherchèrent à armer contre la capitale la défiance et la jalousie des autres parties de la République. Cependant les Prussiens se préparaient à envahir notre territoire (c'était l'époque du mois de septembre 1792); les dominateurs étaient membres du comité diplomatique, du comité de défense générale; ils dirigeaient le ministère, ils avaient eu d'étroites relations avec la Cour, et ils laissaient ignorer à la France entière, au Corps législatif même, les dangers qui nous menaçaient. Les ennemis s'étaient rendus maîtres de Longwi, de Verdun; ils s'avançaient vers Paris, et les dominateurs avaient gardé le silence; ne s'occupaient que d'afficher, que d'écrire contre Paris. Notre armée était faible, divisée, mal armée, mal approvisionnée, et si Paris ne s'était levé tout à coup ; si à son exemple la France ne s'était ébranlée, Brunswick pénétrait sans résistance jusqu'au cœur de l'Etat. Mais ce n'est pas tout, la faction voulait livrer Paris et là France : elle voulait fuir avec l'Assemblée législative, avec le trésor public, avec le Conseil exécutif, avec le roi prisonnier et sa famille. Les ministres qu'ils avaient nommés, Roland, Servan, Clavière, Lebrun, parlaient de ce projet aux députés ; il fut proposé dans le conseil, et il était adopté, si le ministre de la justice n'en avait empêché l'exécution, en menaçant ses collègues de les-dénoncer au peuple, et si Paris ne l'eût fait avorter, en se levant pour écraser les ennemis de la France. Ce projet de fuite est connu des membres de l'Assemblée législative et de plusieurs citoyens; il a été dénoncé à la Convention nationale, et Roland lui-même a été forcé de l'avouer dans sa lettre du.........;
La majorité était pure; mais un grand nombre de représentants trompés d'avance par les papiers imposteurs dont la faction disposait, apportèrent à Paris des préventions sinistres qui devaient causer bien des maux; et d'ailleurs ce fut toujours le sort des hommes qui ont des lumières sans probité, ou de la' probité sans lumières, d'êtfre les complices ou les dupes dè l'intrigue. Le décret qui déclare la royauté abolie, proposé, à la fin de la première séance, par un des députés de Paris calomnié, fut rendu avec enthousiasme.
11 eût été condamné, si la Convention, libre de leur dangereuse influence, ne s?était enfuie occupée du bonheur public. La liberté et la paix seraient maintenant affermies; mais les intrigants, qui n'avaient osé s'opposer à la proclamation de la République; s'appliquèrent à l'étouffer dans sa naissance. En possession des comité les plus importants de l'Assemblée législative, qu'ils firent conserver provisoirement, ils composèrent bientôt les nouveaux à leur gré; ils s'emparèrent du bureau, du fauteuil, et même de la tribune; ils tenaient toujours dans leurs mains le ministère et le sort de la nation. Ils occupèrent sans cesse la Convention nationale de dénonciations contre la municipalité de Paris, contre le peuple de Paris, contre la majorité des députés de Paris; ils inventèrent, ils répétèrent cette ridicule fable de la dictature, qu'ils imputaient à un citoyen sans pouvoir comme sans ambition, pour faire oublier, et l'affreuse anarchie qu'ils exerçaient eux-mêmes, et le projet de la tyrannie nouvelle qu'ils voulaient ressusciter. Par là, ils cherchaient encore à dégoûter le peuple français de la République naissante, à arrêter les progrès de notre révolution dans les contrées voisines, en leur présentant la chute du trône comme l'ouvrage d'une ambition criminelle, et le changement de gouvernement comme le changement de maître.
De là, ces éternelles déclamations contre la justice révolutionnaire qui immola les Mont-morin, les Delessart, et d'autres conspirateurs, au moment où le peuple et les fédérés s'ébranlaient pour repousser les Prussiens. Dès ce moment ils ne cessèrent de remplir les âmes des députés de défiance, de jalousie, de haine et de terreurs, et de faire entendre dans le sanctuaire de la liberté, les clameurs des plus vils préjugés, et les rugissements des plus sérieuses passions. Dès lors ils ne cessèrent de souffler le feu de la guerre civile, et dans la Convention même, et dans les départements, soit par leurs journaux, soit par leurs harangues à la tribune, soit par leur correspondance.
Ils étaient venus à bout de reculer par là, pendant quatre mois, le procès du tyran. Quelles chicanes! quelles entraves ! quelles manœuvres employées durant la discussion de cette affaire !
Qui peut calculer sans frémir les moyens employés par Roland, les sommes prodiguées par le ministère, pour dépraver l'esprit public, pour apitoyer le peuple sur le sort du dernier roi ? Avec quelle lâche cruauté les avocats du tyran appelaient des corps armés contre Paris et contre les députés patriotes, dénoncés par eux comme des assassins et comme des traîtres? Avec quel insolent mépris dès lois, des corps administratifs, dignes de ces députés, les levaient de leur autorité privée, aux dépens du trésor public1? Avec quelle perfide audace cette même faction protégeait de toutes parts la rentrée des émigrés, et ce rassemblement de tous les assassins et de tous les scélérats de l'Europe à Paris, Avec quel odieux machiavélisme on employait tous les moyens de troubler la tranquillité de cette ville, et de commencer la guerre civile, sans même dédaigner celui de faire ordonner par un décret la représentation d'une nièce aristocratique (l'Ami des lois), qui avait déjà fait
couler le sang, et que la sagesse des magistrats du peuple avait interdite.
A quoi a tenu le salut de la patrie et la punition du tyran 1 au courage invincible des patriotes, à l'énergie calme du peuple éclairé sur ses véritables intérêts, et surtout à la réunion imprévue des fédérés. S'ils avaient conservé les fatales préventions que leur avaient inspirées ceux qui les avaient appelés ; si le bandeau était resté deux jours de plus sur leurs yeux, c'en était fait de la liberté; le tyran était absous, les patriotes égorgés, et le fer même des défenseurs de la patrie, égaré, se serait combiné avec celui des assassins royaux. Paris était en proie à toutes les horreurs, et la Convention nationale escortée des satellites qu'ils avaient rassemblés, fuyait au milieu de la confusion et de la consternation universelle.
Mais, ô force toute puissante de la vérité et de la vertu ! ces généreux citoyens ont ob-juré leurs erreurs; ils ont reconnu, avec une sainte indignation, les trames perfides de ceux qui les avaient trompés; ils les ont voués au mépris public, ils ont serré dans leurs bras les Parisiens calomniés; réunis tous aux Jacobins, ils ont juré, avec le peuple, une haine éternelle aux tyrans, et un dévouement sans borne à la liberté. Ils ont cimenté cette sainte alliance sur la place du Carrousel, par des fêtes civiques, où assistèrent tous les magistrats de cette grande cité, avec un peuple généreux que l'enthousiasme du patriotisme élevait au-dessus de lui-même. Quel spectacle ! comme il console des noirceurs de la perfidie et des crimes de l'ambition ! Ce grand événement fit pencher la balance dans la Convention nationale, en faveur des défenseurs de la liberté; il déconcerta les intrigants, et enchaîna les factieux. Lepeletier seul fut la victime de son courage à défendre la cause de la liberté, quoique plusieurs patriotes aient été poursuivis par des assassins. Heureux martyr de la liberté, tu ne verras plus les maux que nos ennemis communs ont préparés à la patrie !
Au reste, quelques efforts qu'ils aient faits pour sauver Louis XYI, je ne crois pas que ce soit lui qu'ils voulussent placer sur le trône; mais il fallait lui conserver la vie, pour sauver l'honneur de la royauté qu'on voulait rétablir, pour remplir un des articles du traité fait avec Londres, et la promesse donnée à Pitt, comme le prouvent les discours de ce ministre au parlement d'Angleterre. Il fallait surtout allumer la guerre civile par l'appel au peuple, afin que les ennemis, qui devaient bientôt nous attaquer, nous trouvassent occupés à nous battre pour la querelle du roi détrôné.
La punition éclatante de ce tyran, la seule victoire que les Républicains aient remportée à la Convention nationale, n'a fait que reculer le moment où la conspiration devait éclater ; les députés patriotes, désunis, isolés, sans politique et sans plan, se sont rendormis dans une fausse sécurité, et les ennemis de la patrie ont continué de veiller pour la perdre.
Déjà ils recueillent les fruits des semences de guerre civile qu'ils ont jetées depuis si longtemps, et la ligue des traîtres de l'intérieur avec les tyrans du dehors, se déclare.
On se rappelle ici ce que sont les chefs de cette faction qui, en 1791, ont porté à la Cour
le secours de leur fausse popularité, pour engager la nation dans cette guerre provoquée par la perfidie, déclarée par l'intrigue, et conduite par la trahison. Je leur disais alors, aux Jacobins, où ils venaient prêcher leur funeste croisade, où Dumouriez lui-même, coiffé d'un bonnet rouge, venait étaler tout le charlatanisme dont il est doué : Avant de déclarer la guerre aux étrangers, détruisez les ennemis du dedans, punissez les attentats d'une Cour parjure qui cherche elle-même à armer l'Europe contre vous ; changez les états-majors qu'elle a composés de ses complices et de ses satellites ; destituez les généraux perfides qu'elle a nommés, et surtout ce Lafayette déjà souillé tant de fois du sang du peuple ; forcez le gouvernement à armer des défenseurs de la patrie, qui demandent en vain des armes depuis deux ans ; fortifiez eit approvisionnez nos places frontières, qui sont dans un dénuement absolu ; faites triompher la liberté au dedans, et nul ennemi étranger n'osera vous attaquer ; c'est par les progrès de la philosophie, et par le spectacle du bonheur de la France, que vous étendrez l'empire de notre révolution, et non par la force des armes et par les calamités de la guerre. En vous portant aggresseurs, vous irritez les peuples étrangers contre vous ; vous favorisez les vues des despotes et celles de la Cour, qui a besoin de faire déclarer la guerre par les représentants de la nation, pour échapper à la défiance et à la colère du peuple. Les chefs de la faction répondaient par des lieux communs faits pour allumer l'enthousiasme des ignorants ; ils nous montraient l'Europe entière volant au-devant de la Constitution française ; les armées de despotes se débandant partout, pour accourir sous nos drapeaux, et l'étendard tricolore flottant sur les palais des électeurs, des rois, des papes et des empereurs. Ils exécutaient la Cour; ils louaient les ministres, et surtout Narbonne ; ils prétendaient que quiconque cherchait à inspirer la défiance contre les ministres, contre les généraux, était un désorganisateur, un factieux, qui compromettait la sûreté de l'Etat.
En dépit de toutes leurs intrigues, les Jacobins résistèrent constamment à la proposition qu'ils leur firent de prononcer leur opinion en faveur de la guerre ; mais tel était le prix qu'ils attachaient à consacrer les projets de la Cour, par la sanction des sociétés populaires, que le comité de correspondance de , cette société a su envoyer, à son insu, une lettre circulaire à toutes les sociétés affiliées, pour leur annoncer que le vœu des Jacobins était pour la guerre ; ils portèrent même l'impudence jusqu'à dire que ceux qui avaient embrassé l'opinion contraire, l'avaient solennellement abjurée. Ce fut par ces manœuvres que l'on détermina la nation et les patriotes même de l'Assemblée législative à voter comme lq côté droit et comme la Cour.
Nos prédictions ne tardèrent pas à s'accomplir. La première campagne fut marquée par des trahisons et par des revers, qui ne furent pour la Cour et pour Lafayette que de nouveaux prétextes de demander des lois de sang contre les plus zélés défenseurs de la patrie, et un pouvoir absolu qui leur fut accordé sur la motion des chefs de la faction, et particulièrement des Guadet, des Gensonné. Dès ce temps-là tous ceux qui osaient soupçonner
les généraux et la Cour furent dénoncés comme des agitateurs et des factieux ; on se rappellera avec quel zèle les mêmes hommes défendirent, divinisèrent le ministre Narbonne ; avec quelle insolence ils encourageaint l'ar-mée et les patriotes. Le prix de ces manœuvres ciminelles fut l'élévation de la faction au ministère, dans la personne de Clavière, Roland, Servan et Dumouriez.
Bientôt tous nos généraux nous trahirent à l'envi ; une invasion dans la Belgique ne produisit d'autre effet que de livrer ensuite nos alliés à la vengeance de leur tyran, et d'irriter les étrangers contre nous par l'infâme attentat du traître Jarry, qui n'a pas même été puni. Nos places fortes étaient dégarnies ; notre armée divisée par les intrigues des états-majors, et presque nulle ; tous les chefs s'efforçaient, à l'envi, de la royaliser ; la ligue des tyrans étrangers se fortifiait ; l'époque du mois d'août ou de septembre était destinée pour leur invasion combinée avec la conspiration de la Cour des Tuileries, contre Paris et contre la liberté. C'en était fait de l'un et de l'autre, sans la victoire remportée par le peuple et par les Fédérés, le 10 août 1792. Or, j'ai déjà remarqué que les chefs de la faction s'étaient opposés de tout leur pouvoir à cette insurrection nécessaire ; et lorsqu'au commencement du mois de septembre suivant, Brunswick, encouragé sans doute par la faction, osa envahir le territoire français, vous avez déjà vu qu'ils ne songeaient qu'à abandonner et qu'à perdre Paris.
Paris se sauva lui-même ; mais Dumouriez était à la tête de l'armée. Brissot avait écrit de lui, peu de temps auparavant, qu'après Bonnecarrère, Dumouriez était le plus vil des hommes. Dumouriez avait répondu par écrit que Brissot était le plus grand des fripons, sans aucune espèce de réserve. Il avait affiché que la cause du courroux que la faction affectait contre lui, était le refus qu'il avait fait de partager avec elle les six millions qu'elle lui avait fait accorder pour dépenses secrètes, dans le temps de son ministere et de leur amitié. Us annoncèrent des dénonciations réciproques qui n'eurent point lieu. C'est encore un problème à quel point cette brouillerie était sérieuse ; mais ce qui est certain, c'est qu'au moment où il prit le commandement de l'armée de ChMons, il était très bien avec la faction, et avec Brissot, qui le pria d'envoyer Miranda dans une commission importante, s'il en faut croire ce que Brissot a dit lui-même au comité de défense générale. J'ignore ce qu'aurait fait Dumouriez, si Paris et les autres départements ne s'étaient levés au mois de septembre pour écraser les ennemis intérieurs et extérieurs : mais ce qui est certain, c'est que ce mouvement général de la nation n'était pas favorable au roi de Prusse pour pénétrer au cœur de la France. Dumouriez l'éconduisit avec beaucoup de politesse pendant une longue retraite assez paisible, en dépit de nos soldats, dont on enchaînait constamment l'impétuosité, qui mordaient leurs sabres en frémissant de voir que leur proie leur échappait. L'armée prussienne, ravagée par la maladie et par la disette, a été sauvée ; elle a été ravitaillée, traitée avec une générosité qui contraste avec les cruautés dont nos braves défenseurs ont été les victimes. Du-
mouriez a parlementé et traité avec le roi de Prusse dans le moment où la France et l'armée ^attendaient à voir la puissance et l'armée de ce despote ensevelies à la fois dans les plaines de la Champagne ou de la Lorraine ; dans le temps où Dumouriez lui-même avait annoncé, dans ses lettres à l'Assemblée nationale, que les ennemis ne pouvaient lui échapper. Il se montra aussi complaisant, aussi respectueux pour le roi de Prusse, qu'il fut depuis insolent avec la Convention nationale. Il est au moins douteux s'il a rendu plus de services à la République qu'aux Prussiens et aux émigrés. Au lieu de terminer la guerre et d'affermir la Révolution, en exterminant cette armée dont nos ennemis n'auraient jamais pu réparer la perte, au lieu de se joindre aux autres généraux pour pousser nos conquêtes jusqu'au Rhin, il revint à Paris ; et après avoir vécu quelque temps dans une étroite intimité aveo les chefs de la faction, il part pour la Belgique.
U débute par un succès brillant, nécessaire pour lui donner la confiance que sa conduite avec les Prussiens était loin de lui avoir assurée ; et quiconque rapprochera de ce qui se passe aujourd'hui la brusque témérité qui arrachera la victoire de Jemmapes, par le sacrifice de tant de Français républicains, concevra facilement que ce succès même était moins fatal au despotisme qu'à la liberté. Dumouriez était maître de la Belgique ; on sait que dès ce moment, il ménagea nos ennemis. U avait aussitôt envahi la Hollande ; la conquête de ce pays était certaine. Nous étions maîtres de la flotte hollandaise ; les richesses de ce pays se confondaient avec les nôtres, et sa puissance était ajoutée à celle de France. Le gouvernement anglais était perdu, et la révolution de l'Europe était assurée. On a dit, et je l'ai cru moi-même un instant sur ses ouï dire, que tel était le projet de Dumouriez,; on a dit qu'il avait été arrêté: Il est aujourd'hui démontré que ce bruit n'était qu'une nouvelle imposture répandue par la faction. En effet, si, comme on l'a dit, Dumouriez avait conçu ce grand dessein, s'il y attachait sa gloire et sa fortune, pourquoi n'a-t-il pas réclamé l'appui de l'opinion publique contre les oppositions perfides du conseil exécutif? pourquoi n'a-t-il pas exposé la nécessité de son plan à la Convention nationale, à qui il appartenait de prononcer sur cette grande question? pourquoi n'en a-t-il pas dit un mot aux députés du peuple, connus par leur zèle pour la liberté?' pourquoi n'a-t-il pas invoqué la nation elle-même, contre des oppositions qui compromettaient son salut? U est bien plus naturel de penser que ce bruit n'avait été répandu par les amis de Dumouriez, que pour lui concilier la confiance.
On sait assez que les chefs de cette faction ont l'art de paraître quelquefois divisés, pour cacher leur criminelle intelligence. Au surplus, que Dumouriez ait eu part ou non à ce retard funeste, qu'a éprouvé l'expédition de la Hollande, il doit au moins être imputé à la malveillance de la majorité du conseil exécutif et des coriphées de la faction qui dominent dans les comités diplomatique et de défense générale. Les députés bataves se sont plaints eux-mêmes hautement, dans un mémoire qu'ils ont rendu public et qui est entre nos mains, de l'opiniâtreté avec laquelle leurs offres et leurs
instances ont été repoussées depuis trois mois par le ministre des affaires étrangères. On ne peut nier du moins que Dumouriez et les chefs de la faction ne fussent parfaitement d'accord sur le projet de ravir la Belgique à la France ; on connaît les efforts de Dumouriez pour empêcher l'exécution des décrets des 15 et 21 décembre ; on connaît toutes ses perfidies. D'un autre côté, on sait comment le comité diplomatique a repoussé tous les peuples qui voulaient s'incorporer à nous. Roland disait des députés de la Savoie : On doit m'en-voyer des Savoisiens pour solliciter la réunion du pays, je les recevrai à cheval. Gomment est-il possible que vous vouliez vous réunir à notre anarchie, disait-on aux Belges et aux Liégeois. Tel était le langage des Guadet et des Gensonné. Ils sont venus à bout de retarder toutes ces réunions, jusqu'au moment où le parti ennemi de la .Révolution eût tout disposé pour les troubler, et que les despostes eussent rassemblé des forces suffisantes contre nous.
Dumouriez et ses partisans porteront un coup mortel' à la fortune publique, en empêchant la circulation des assignats dans la Belgique. Après avoir fatigué cette contrée par ses intrigues; après avoir levé, de son autorité privée, des sommes énormes qu'il chargeait la nation de rembourser, il part enfin pour la Hollande, et s'empare de quelques places dans la Gueldre. Mais tandis qu'on ne nous parlait que de succès et de prodiges, tout était disposé pour nous enlever en un moment la Belgique, Steingel et Miranda : le premier aristocrate allemand ; l'autre aventurier espagnol, chassé du Pérou, ensuite employé par Pitt, et donné par l'Angleterre à la France par l'entremise de Brissot. et de Pétion, enfin adopté particulièrement par Dumouriez, nous trahissaient en même temps à Aix-la-Chapelle et à Maëstricht. Une partie de l'armée exposée dans un poste désavantageux, appelée improprement avant-garde, puisqu'elle n'avait rien derrière elle, disséminée sur un si grand espace de terrain, qu'en cas d'attaque les corps qui la composaient ne pouvaient se rallier, ni se soutenir, est livrée à une armée ennemie dont le général avait l'air de ne pas soupçonner l'existence, et qui avait repoussé tous les avis qu'on lui avait donnés de son approche. Les corps les plus distingués par leur patriotisme sont spécialement trahis et égorgés par les ennemis; le reste est obligé de fuir. En même temps le siège de Maëstricht entrepris sans aucuns moyens, avec des boulets qui n'étaient pas de calibre, dirigé par une perfidie profonde, pour se défaire de nos plus braves défenseurs, et les exposer sans défense à l'artillerie supérieure de nos ennemis, le siège de Maëstricht est levé avec précipitation; nos conquêtes sont abandonnées; les braves Liégeois nos fidèles alliés, devenus nos frères, sont remis sous la hache des tyrans, pour expier encore une fois leur généreux attachement à la cause de la France et de la liberté.
Dumouriez laisse son armée à Berg-op-Zoom et se rend dans la Belgique, pour se mettre à la tête de celle qui a été trahie. Va-t-il se plaindre d'avoir été lui-même trahi par les généraux ? Ya-t-il les dénoncer à la nation ? Non, il jette un voile sur la trahison, parle seulement de quelque imprudence de la part
du général de l'avant-garde, montre la plus grande confiance à l'armée et promet de la conduire à la victoire. Il donne une bataille; elle est perdue. Cependant le centre de l'aile droite, suivant lui, ont eu l'avantage; mais l'aile gauche a plié : or, l'aile gauche était commandée précisément par ce même Miranda qui avait trahi à Maëstricht. La suite de ce nouvel échec est la perte de la Belgique. Alors Dumouriez se découvre tout entier. Il se déclare ouvertement pour les généraux perfides; il se plaint du décret qui mande à la barre Steingel et Lanoue; il fait le plus pompeux éloge de ce dernier, convaincu d'avoir conspiré en faveur du tyran, avant la révolution du mois d'août; il veut que la Convention imite le sénat romain, et qu'elle remercie les traîtres de n'avoir pas désespéré de la patrie; il menace de l'abandonner si on contrarie aucune de ses vues; il loue le civisme et le courage de Miranda, et de tous les autres généraux et officiers sans distinction. Il impute tous nos revers aux soldats; il oublie que lui-même les avait attribués au moi»s à la négligence de celui qui commandait à Aix-la-Chapelle; il oublie qu'il avait vanté lui-même le courage et la conduite de l'armée, et surtout la patience héroïque avec laquelle elle avait supporté la disette et des fatigues au-dessus des forces humaines, dans tous les temps, et récemment encore au siège de Maëstricht; il prétend que l'armée n'est qu'un ramas de lâches et de pillards : ce sont ses propres expressions. U fait plus, il déclame avec la même insolence contre les nouveaux défenseurs qui volent dans la Belgique de toutes les parties de la République, pour réparer les revers; il les appelle des brigands.
Tandis qu'il écrivait' tout cela, il abandonnait la Belgique aux Prussiens, il leur abandonnait nos immenses provisions que nous y avons amassées. Il avait ordonné aux commissaires de compter 4 millions aux Belges, mais auparavant il avait eu soin d'y éteindre, autant qu'il était en lui, toute espèce d'affection pour les principes de notre Révolution, et d'y allumer la haine du nom français. Il avait été jusqu'à publier hautement, dans une lettre adressée à la Convention, que la Providence punissait le peuple français de ses injustices. Il avait peint Paris comme un théâtre de sang et de carnage, la France comme le séjour du crime et de l'anarchie, des députés patriotes dé la Convention comme des fous ou comme des scélérats. U avait foulé aux pieds l'autorité du gouvernement français; il avait fait des proclamations qui, sous le prétexte de réprimer certains actes impolitïques,tendaient à réveiller tous les préjugés du fanatisme et de l'aristocratie, et à les attacher à la personne; il avait rétabli dans leurs fonctions les administrateurs destitués pour cause d'incivisme, par les commissaires de la Convention nationale; il avait détruit les sociétés populaires, attachés à notre cause. Il a voulu excuser tous ces forfaits, en disant que l'on avait imité' les Belges par quelques actes de cupidité et d'irréligion. Sans doute, c'était le comble de l'étourderie peut-être de la perfidie, de faire la guerre à des saints d'argent; mais qui pouvait mieux prévenir ces désordres, si ce n'était un général tout puissant ?
Quant aux commissaires du conseil exécutif contre lesquels il a pu sévir, qui les avait
nommés, si ce n'est son propre parti? N'étaient-ils pas l'ouvrage de Roland et des ministres coalisés avec le généralissime Dumouriez.
Ni les déclamations, ni les ordres sévères de ce général intrigant contre un Cheppi, et contre d'autres créatures également méprisables de la même faction, ne prouveront jamais qu'il n'était point d'intelligence avec eux, pour exécuter le projet d'empêcher la réunion de la Belgique à la France. Il fallait que la faction employât à la fois de tels commissaires qui s'appliquassent à mécontenter les Belges, et un général qui profitât de ce mécontentement pour les éloigner à jamais de notre révolution.
On parle des désorganisateurs commis pour semer les troubles dans l'armée; mais quoi de plus facile aux généraux que de les réprimer, que de mantenir une discipline sévère, si tous les généraux n'avaient besoin de ces moyens pour exécuter et pour pallier leurs trahisons. Lafayette aussi entretenait, autant qu'il était en lui, des désordres dans son armée, pour la calomnier, ps>ur la dissoudre et pour perdre la liberté. Il n'avait oublié qu'une chose, c'était de débuter, comme Dumouriez, par un succès.
Enfin, Dumouriez a levé l'étendard de la révolte; il menace de marcher vers Paris, pour ensevelir la liberté sous ses ruines; il déclare qu'il veut protéger les ennemis de la liberté que la Convention renferme dans son sein, contre les députés attachés à la cause du peuple, qu'il appelle aussi des anarchistes et des agitateurs; il ne dissimule pas le projet de rétablir la royauté. Après avoir fait égor-gerune partie de l'armée, il trompe l'autre, et s'efforce de la débaucher, après l'avoir calomniée à son insu. Fier du succès de ses trahisons, gorgé des trésors qu'il a puisés dans la Hollande, dans la Belgique et dans les caisses nationales, dont il s'est emparé; fort de son alliance avec des ennemis, à qui il a livré nos magasins; fort de l'appui des Belges, qu'il a joints à nos autres ennemis, il cherche à semer le découragement dans la nation; il s'efforce de déshonorer le peuple français et nos braves défenseurs aux yeux des peuples étrangers; il nous annonce hautement qu il ne nous reste aucunes ressources; dans ses lettres officielles à Beurnonville, il parle avec une joie insolente des troubles qui allaient éclater au milieu de nous; il en présage de nouveaux; il nous montre déjà les départements du Nord, du Pas-de-Calais, de la Somme, en état de contre-révolution; il dit, déclare en propres termes que nous ne pourrons tenir tête à nos ennemis étrangers, parce que nous serons obligés d'employer nos forces à réprimer ceux du dedans. Il nous montre en même temps nos places sans défense^; et il ose nous déclarer que nous n'avons d'autre parti à prendre que de demander la paix et de transiger avec les despotes : que dis-je? il ose se montrer lui-même comme médiateur.
Tel était le coupable secret de la conspiration tramée depuis longtemps contre notre liberté. Le chef de lia faction l'a dévoilée, au moment où il croyait pouvoir l'exécuter avec succès. En effet, tout semblait disposé pour la favoriser. Un ministre de la guerre, malicieux et hypocrite, avait été nommé tout exprès par la faction, tout exprès pour les grands événements qui devaient arriver en peu j
de temps; il avait purgé les bureaux de la guerre, les garnisons, et l'armée, de tous les agents et de tous les chefs patriotes; il les avait remplacés par des hommes plus que suspects;, il avait laissé nos places fortes sans garnisons et sans munitions. On se rappelle avec quelle hardiesse il trompait la Convention nationale sur l'état de nos affaires dans la Belgique, au moment où les trahisons des généraux les avaient déjà perdues; et comment les fausses nouvelles qu'il débitaient furent démenties par les commissaires de l'Assemblée. Tous les généraux étaient entrés dans ce vaste plan de conspiration; et| pour mieux en assurer le succès, le ministre avait mis le comble à ses attentats, en faisant suspendre la fabrication des armes dans toutes nos manufactures. Dans le même temps on excitait des troubles dans une grande partie de la France, et surtout dans nos départements maritimes. Les aristocrates révoltés avaient levé de grandes armées bien approvisionnées; ils avaient saccagé des villes, égorgé une multitude de patriotes, et personne n'avait songé- à réprimer cette conspiration tramée depuis quatre mois, et ni le ministre, ni le comité de défense générale, composé en grande partie de la faction que je dénonce, n'en avaient donné avis à l'Assemblée ni à la nation; enfin le ministre de la guerre nomme un général pour commander les patriotes, et ce général (Marcé) est un traître qui livre notre artillerie aux révoltés, et qui mène les défenseurs à la liberté à la boucherie. Partout il nomme les officiers également perfides; des Wittenkoff, des d'Hermigni, des Ligqnier; il montre surtout dans ses choix une prédilection singulière pour les étrangers, pour les sujets des despotes, nos ennemis, et quelquefois même pour les parents de nos tyrans. Grâce à ces criminelles machinations, les troubles se prolongent, et la victoire coûte beaucoup de sang aux républicains : on vient nous dire que le calme pourra être rétabli dans six semaines ou deux mois : deux mois de guerre, civile et de massacres des plus zélés patriotes ! Quand l'infâme Dumouriez conspirait contre nous dans la Belgique, avec les despotes de l'Europe et tous les ennemis de l'intérieur, Dumouriez qui nous annonçait avec une insolente satisfaction, que, dès le moment où l'équinoxe serait passé, nos départements maritimes seraient envahis par les Anglais ; encouragés par tant d'attentats, les royalistes levaient partout une tête audacieuse et osaient menacer les amis de la liberté.
Eh! pourquoi non? ne pouvaient-ils pas compter sur l'ascendant que la faction exerçait au sein de la Convention nationale ? N'était-ce pas elle qui, depuis longtemps, dépravait l'esprit public dans les départe1-ments révoltés? Et les massacres de la Bretagne, et le fanatisme royal et religieux qui égarait les habitants des campagnes, n'étaient-ils pas les dignes fruits des écrits empoisonnés qu'elle avait semés sur la surface de cette importante contrée, de la correspondance perfide des députés qui suivaient sa bannière, enfin des persécutions suscitées à tous les vrais républicains? N'était-ce pas elle qui, chaquc-jour, cherchait à dégoûter le peuple de la Révolution en aggravant sa misère ? qui repoussait toutes les mesures nécessaires pour réprimer la fureur de l'agiotage, pour assurer la subsistance publique, pour mettre un frein à
l'excès des accaparements? N'était-ce pas elle qui faisait, défaisait les ministres, protégeait tous leurs crimes, et multipliait les conspirateurs par l'impunité.
Mais son audace redoublait surtout, au moment où la conspiration était près d'éclater. Avec quelle perfidie ils désorganisaient tout, en criant sans cesse aux désorganisateurs ! Avec quelle lâche cruauté ils cherchaient à exciter dans Paris quelques petits mouvements aristocratiques, pour préparer au traître Dumouriez le prétexte de marcher contre cette cité !
Quand je vois ensuite Egalité fuir avec Dumouriez, avec Yalence, je n'ai pas besoin d'en savoir davantage pour connaître la faction tout entière. Je devine la perfidie profonde des conspirateurs qui, pour couvrir leurs complots d'un voile impénétrable, avaient feint de vouloir expulser tous les individus de la ci-devant famille royale, dans un 'temps où la France entière ne voyait aucun motif à cette proposition imprévue; dans un temps où les patriotes de bonne foi croyaient défendre, en la repoussant, les principes et l'intégrité de la représentation nationale. Je conçois pourquoi il3 demandaient l'expulsion des Bourbons en général, pour éloigner la condamnation de la royauté, dans la personne de Louis XYI; et pourquoi, depuis la punition du tyran, ils ont oublié et même rejeté cette mesure, dans le moment où l'aristocratie levait l'étendard de la révolte pour rétablir la royauté.
(Robespierre s'arrête quelques instants.)
Je vous prierai de vous arrêter quand on vous interrompra.
Eh bien ! puisque je suis écouté avec tant de défaveur... (On murmure. ) On a le droit de réclamer quelque indulgence quand on remplit un ministère aussi pénible que celui que je remplis; car on ne doit pas être écouté favorablement, quand on parle de ces hommes qui ont une influence accablante ; et je ne dois pas être écouté favorablement, quand je parle de ce comité de défense générale où j'ai vu les membres attachés à Dumouriez excuser sa lettre insolente du 12 mars en opposant les dénonciations, prétendues insensées, faites contre lui précédemment; où j'ai entendu, comme beaucoup de membres de cette Assemblée l'ont pu faire, Vergniaud prétendre que l'opinion politique de Dumouriez était indifférente.
Vergniaud. Je vous donne un démenti.
Une voix : Et Danton ?
Robespierre. Il n'y a rien d'étonnant à ce qu'un commissaire à l'armée ait pu être trompé un moment sur les desseins de Dumouriez qu'il ne voyait que dans ses fonctions, au milieu de son armée; mais ce qui doit étonner, c'est que des membres de cette Assemblée, qui ont eu avec lui les correspondances les plus suivies, aient dit et fait ce que j'ai dit et ce que je vais dire.
Les amis et les complices de Dumouriez, membres du comité de défense générale, connaissaient, sans doute, ses secrets mieux que personne; mais ils comptaient sur le succès de sa criminelle entreprise. Aussi nous les avons vus d'abord excuser la lettre insolente du
12 mars à la Convention, sous le prétexte que ce général devait être irrité par les dénonciations faites contre lui dans les sociétés populaires. Nous les avons vus cherchant à écarter les accusations qu'ils redoutaient, en se hâtant de répéter leurs déclamations ordinaires contre les députés patriotes, contre les Jacobins, etc. Là nous avons entendu Yergniaud, prétendre que les opinions politiques ae Dumouriez étaient indifférentes, et qu'il était intéressé à la cause de la Révolution : là nous avons vu Gensonné s'indigner de ce que l'on donnait à Dumouriez les qualifications qu'il méritait, et vanter impudemment son civisme, ses services et son génie. Il est prouvé que Gensonné entretenait une correspondance habituelle avec Dumouriez, courrier par courrier, et Gensonné voulait se charger vis-à-vis des membres de la Convention présents au comité, du rôle de médiateur auprès de son correspondant et de son ami Dumouriez.
Là nous avons vu Pétion embrasser avec chaleur la défense de Miranda; et après que j'eus dénoncé ce général, et Steingd et Lanoue, se lever en courroux, en s'écriant que l'on dénonçait toujours sans preuves; et le siège de Maëstricht était levé ! et l'armée trahie à Aix-la-Chapelle ! et la Belgique livrée à nos ennemis ! et c'était le moment où on délibérait sur la révolte déclarée de Dumouriez.
Là, nous avons vu le même jour Brissot, pour toute mesure de salut public, déclarer que la Convention nationale avait perdu la confiance publique, que son unique devoir était de 'faire bien vite la Constitution et de partir. Je l'ai entendu proposer de s'arranger dans le comité de défense générale, sur les divers articles de la Constitution qui pouvaient partager les avis, et de la faire ensuite adopter d'emblée par la Convention, pour éviter, disait-il, des débats scandaleux. Là, nous avons vu les chefs de la faction refuser ensuite de discuter la conduite de Dumouriez, pour proposer un rapprochement entre ses amis et ses adversaires; et sous le prétexte de s'expliquer, renouveler toutes les caloamies dont ils avaient tant de fois souillé la tribune et les papiers publics. Nous avons entendu les ministres apporter à ce Comité des nouvelles et des projets illusoires, concertés d'avance avec eux. Nous avons vu le ministre de la guerre déclamer contre l'insubordination des soldats, sans vouloir convenir de la perfidie des généraux; nous l'avons entendu faire l'éloge du système défensif ; nous garantir la neutralité de la Savoie et du comté de Nice, comme si ces deux départements français étaient pour nous des contrées étrangères; je l'ai entendu nous faire un éloge ironique du système défensif, et nous annoncer d'avance la retraite de Custine. Nous l'îtvons entendu provoquer des mesures rigoureuses contre ceux qui médisaient des généraux; citer pour preuve de leur républicanisme la fameuse blessure de Valence; répéter tous les lieux communs de Dumouriez sur l'éloigne-ment des Belges pour la Révolution française; et le comité approuver beaucoup toutes ces vues. Nous avons vu surtout Brissot, à ce propos, lui-même déclarer que nous étions heureux que l'esprit public des Belges ne fût pas plus français, par la raison qu'en renonçant à la Belgique, nous pourrions obtenir la paix plus facilement des puissances ennemies.
Brissot fut toujours le plus hardi de tous les conspirateurs à jeter en avant les idées de transaction ouvertement proposées par Dumouriez. Dans la discussion de l'affaire de Louis XVI , il osa demander qu'il fût sursis à l'exécution du décret qui le condamnait, jusqu'à ce que l'opinion des puissances étrangères sur ce- jugement nous fût manifestée ; c'est lui qui nous avait menacés de la colère des rois de l'Europe, si nous osions prononcer la peine de mort contre le tyran.
Brissot ! combien de faits n'aurais-je pas à rappeler sur lui et sur la faction dont il est le chef !
Enfin, nous avons vu le comité de défense générale s'appliquer constamment à retarder toute mesure nécessaire au salut public, pour donner le temps à Dumouriez d'exécuter sans obstacle ses détestables projets. Ensuite on le recomposa de 25 membres, qui lui appartenaient tous, excepté cinq ou six patriotes qu'on y avait introduits par une sorte de transaction, pour endormir les amis de la liberté, et faire servir des noms qui inspireraient la confiance, à couvrir leurs perfidies. Aussi Dumouriez écrivait-il que ce comité était bien composé, à l'exception de cinq ou six membres. Indigné de tant de perfidies, et connaissant le motif qui avait engagé les intrigants à me choisir je déclarai hautement à la Convention nationale que ce comité n'était que le conseil de Dumouriez, et que ne pouvant lutter contre la majorité, je donnais publiquement ma démission. Nous avons vu avec douleur qu'égarée par la même influence, la Convention avait envoyé à Dumouriez cinq commissaires, dont l'arrestation était concertée d'avance, et surtout ce Beurnonville qui fut arrêté par son complice. Que dirons-nous de la comédie grossière de cet aide de camp, qui vint deux jours après raconter à la barre de l'Assemblée nationale qu'il avait reju un coup de sabre d'un satellite de ..Dumouriez, et de cette pasquinade plus grossière encore de Dumouriez, qui se plaignait de ce que son collègue et son confident Beurnonville était venu pour l'assassiner au milieu de son armée, et qui ensuite disait hautement qu'il répondait de lui, parce qu'il était son ami.
Plusieurs circonstances ont dérangé ici le cours de mes idées, et si j'en ai présenté une partie en ce moment, sans mettre en ordre la suite, et en résumer les conséquences, c'est que l'audace des conspirateurs m'a paru être à son comble; que cette audace avec laquelle les conspirateurs cherchaient à détourner l'opinion publique de leurs complots par une de ces farces auxquelles ils sont accoutumés, méritait d'être réprimée; c'est que j'ai cru qu'il était important de jeter en avant ces idées. Je pose cette accusation, et je la soutiendrai devant la Convention nationale, si elle veut s'en occuper d'une manière calme, approfondie et impartiale; surtout si elle veut m'en-tendre après que les accusés se seront défendus à cette tribune.
Mais je soutiens que dès ce moment il est prouvé, aux yeux de tout homme de bonne foi, que si Dumouriez a des complices, ce sont ceux que j'ai désignés; que s'il existe une faction, c'est elle que j'ai indiquée. S'il eût été de mon pouvoir de prendre les mesures qui seules peuvent donner aux incrédules l'uni-
que genre de preuves qui peut les subjuguer, des preuves écrites, émanées des coupables même; si j'avais composé à mon gré les comités diplomatiques et de défense générale; si j'avais disposé du ministère, je vous les aurais apportées ces preuves écrites, auxquelles on n'a pas osé toucher; j'aurais montré tout entier à vos regards ce dépôt caché dans l'antre des Tuileries, et je n'eusse pas donné le temps aux coupables de s'échapper et de mettre à l'abri les papiers qui pouvaient les compromettre.
Mais lorsqu'il est question d'une conspiration politique qui tient aux événements, n'est-il pas d'autres preuves qui peuvent être suffisantes? Les faits publics, par exemple, ce sont ces preuves-là que j'apporte, et si elles ne suffisent pas à tel ou tel individu, elles suffiront au moins à l'opinion publique, à la nation, qui, comme l'histoire, jugeront (sians partialité.
Je demande que les individus de la famille d'Orléans, dite Egalité, soient traduits devant le tribunal révolutionnaire, ainsi que Sillery, sa femme, Valence et tous les hommes spécialement attachés à cette maison; que le tribunal soit également chargé d'instruire le procès de tous les autres complices de Dumouriez, sans en excepter même MM. Brissot, Vergniaud, Gensonné, Guadet.
Je renouvelle en ce moment la même proposition que j'ai déjà faite à l'égard de Marie-Antoinette d'Autriche. Je demande que la Convention nationale s'occupe ensuite, sans relâcher, des moyens tant de fois annoncés de sauver la patrie, et de soulager la misère du peuple»
Je n'ose pas dire :• Vous devez frapper du même décret, des patriotes aussi distingués que MM. Vergniaud, Guadet et autres : je n'ose pas dire qu'un homme qui correspondait jour par jour avec Dumouriez, doit être au moins soupçonné de complicité, car, à coup sûr, cet homme est un modèle de patriotisme, et ce serait une espèce de sacrilège, que de demander le décret d'accusation contre M. Gensonné. Aussi bien, je suis convaincu de l'impuissance de mes efforts à cet égard, et je m'en rapporte pour tout ce qui concerne les illustres membres, à la sagesse de la Convention.
(Robespierre descend de la tribune au milieu des applaudissements d'une grande partie de l'Assemblée et des tribunes.)
TEXTE DU LOGOTACHYGRAPHE (1).
Une faction puissante conspire avec les tyrans coalisés pour nous donner un roi, avec une espèce de constitution aristocratique; elle espère nous amener à cette transaction honteuse par la force des armes étrangères, et par les troubles de l'intérieur.
Ce système convient au gouvernement ancien ; il convient à tous les
intrigants, à tous les égoïstes, bourgeois et autres, qui ont
horreur de l'égalité à qui on a fait peur pour leurs propriétés. Il
plaît même aux nobles trop heureux de trouver, dans une
représentation aristocratique, et dans la Cour d'un nouveau roi, des
distinctions qui leur échap-
A l'exemple de leurs devaneiers; les dominateurs actuels ont caché leur ambition, sous l'amour de la paix et de l'ordre; comme leurs devanciers, ils ont voulu discréditer les amis de la liberté et de l'égalité; pour mieux réussir, ils ont cherché à faire quelquefois de ridicules applications des principes de la liberté; quelquefois même ils ont appelé tous les amis de la patrie des agitateurs; quelquefois ils en ont suscité de véritables pour couvrir leurs calomnies : ils se sont montrés habiles surtout dans l'art de couvrir leurs forfaits, en les imputant au peuple ou à ceux qui cherchaient de bonne foi la vérité; comme leurs devanciers, ils ont épouvanté les citoyens par un fantôme de lois agraires, ils ont séparé les intérêts des riches, de ceux des patriotes; ils se sont présentés comme les protecteurs des Sans-Culottes; ils ont attiré à leur parti tous les ennemis de l'égalité. Maîtres presque entièrement des places de tout le gouvernement, dominant dans la plupart des tribunaux et des corps administratifs, dépositaires du Trésor public, ils ont employé toute leur puissance à arrêter les progrès de l'esprit public, à réveiller le royalisme et l'aristocratie. I)ls ont opprimé en détail les patriotes, qui ont constamment défendu les droits du peuple, sous des prétextes spécieux, protégé les modérés. Us ont tâché de corrompre successivement les défenseurs du peuple qui ont montré quelque talent, et persécuté ceux qu'ils n'ont pu corrompre. Comment la République pourrait-elle naître ou survivre quand la nation s'épuise pour décourager la vertu, pour récompenser l'incivisme et la perfidie? La faction dominante aujourd'hui était formée longtemps avant la Convention nationale; à la fin de juillet dernier elle négociait avec la Cour, pour obtenir le rappel des ministres qui avaient été congédiés. Une des conditions du traité était la nomination d'un gouverneur au fils de Cap et. Il n'est pas nécessaire de dire que ce gouverneur devait être un d'entre eux. A la même époque, ils s'opposaient de tous leurs pouvoirs à la déchéance de Louis, demandée par le peuple et les fédérés; ils firent même décréter un message au roi. Je vous prie de vous rappeler de ce que j'ai dit, de ce que
je vais vous dire : ce sont des faits consignés dans l'histoire de la Révolution. Us n'ont rien négligé pour empêcher la révolution du
10 août, et le lendemain ils travaillèrent efficacement à en arrêter le cours. Le jour même du 10, ils firent tout ce qu'ils purent pour empêcher que le ci-devant roi ne fût enfermé au Temple. Ils tâchèrent de nous rattacher à la royauté ce jour là même, en faisant décréter par l'Assemblée législative, qu'il serait nommé un gouverneur au prince royal.
Vous reconnaissez déjà les personnes que j'inculpe, que j'ai le courage de dénoncer, sans connaître, ni considération ni danger; car le plus grand danger est de dénoncer'les plus puissants lorsqu'on les réduit au désespoir. Vous connaissez déjà ces hommes; vous nommez déjà vous-mêmes les Brissot, les Guadet, les Gensonné, les Vergniaud; ils n'oublièrent rien en même temps pour détruire la Révolution qui amenait la République. Dès le lendemain du 10 août, ils calomniaient le conseil de la Commune, qui, dans la nuit précédente, venait se dévouer pour la liberté. En même temps qu'ils entravaient toutes ces opérations, eux seuls voulaient recueillir les fruits de la seconde révolution. Leur premier soin fut de s'occuper du roi, du prince royal et de sa royauté; leur premier soin fut de rappeler leurs créatures, Servan, Clavière eit Roland. Us s'appliquèrent surtout à s'emparer de l'opinion publique; ils avaient eu soin de faire mettre entre les mains de Roland des sommes énormes, pour les façonner à leur gré : ils furent bientôt auteurs ou payeurs des journaux répandus avec profusion dans les départements; ils ne cessèrent de tromper la France et l'Europe sur la dernière révolution. Il fallait commencer par perdre Paris;
11 fallait détruire ce vaste foyer de patriotisme; ils s'accordèrent donc tous à peindre cette vaste cité comme le séjour du crime et le théâtfre du carnage, à travestir de brigands les citoyens et les représentants dont ils redoutaient l'énergie; ils cherchèrent à faire germer dans Paris la défiance et la terreur, et à exciter contre Paris les soupçons jaloux des autres parties de la République.
Cependant les Prussiens se préparaient à envahir notre territoire. Le comité de défense générale, dont ils composaient la majorité, laissait ignorer à la France entière, au Corps législatif même, les dangers qui nous menaçaient. Les ennemis s'étaient rendus maîtres de Longwy, de Verdun; ils s'avançaient vers Paris, et les dominateurs avaient gardé le silence; ils ne s'occupaient qu'à afficher, qu'à calomnier Paris, qu'à écrire contre Paris; notre armée était défaite, divisée, mal approvisionnée; et si Paris à cette époque, si la France ne s'était pas levée tout entière, Brunswick, sans résistance, pénétrait jusqu'au cœur de l'Etat; mais ce n'est pas tout, la faction voulait fuir avec l'Assemblée législative, avec le Conseil exécutif, avec le roi prisonnier et sa famille. Des ministres qu'ils avaient nommés parlaient de ce projet. J'atteste ici plusieurs témoins de l'Assemblée législative. Il fut agité et il eût été adopté, si le ministre de la justice n'eût menacé ses collègues de les dénoncer, et si Paris ne l'eût fait avorter en se levant tout entier. Si voua vous rappelez, le fait est connu, je le répète,
des membres de l'Assemblée législative et d'un grand nombre de citoyens : il a été dénoncé à la Convention nationale même. -Si vous vous rappelez la réponse de Roland dans une lettre très intéressante, et trop tôt oubliée, qu'il vous écrivit dans le temps, vous y trouverez l'aveu de ce fait. La Convention nationale était convoquée, la Convention (nationale, la protectrice de la France, en était l'espoir; les membres avaient été nommés dans les moments les plus heureux; trompés d'avance par les papiers publics, dont les dominateurs. disposaient, ils apportèrent à Paris des préventions sinistres qui devaient produire bien des maux. Ce fut , toujours le sort des hommes le mieux intentionnés qui n'ont point apporté dans la carrière politique, avec des lumière®, avec des principes, avec du civisme, la connaissance particulière des opinions qui ont trop d'influence sur le sort des révolutions, d'être la dupe longtemps et le jouet des intrigants armés du pouvoir. Si la Convention nationale se fût uniquement occupé du bonheur public, la paix, la liberté seraient maintenant affermies; je n'accuse pas tout le monde; mais j'inculpe les meneurs, j'inculpe ceux qui s'étaient emparés de toute influence sûr la municipalité, et quiî depuis longtemps en possession des comités les plus importants de l'Assemblée législative, le composèrent provisoirement de membres q.uiils y conservèrent à leur gré. Bientôt ils s'emparèrent du fauteuil, du bureau et même de l'Administration; ils tenaient toujours dans leurs mains le ministère, et faisaient continuellement des dénonciations contre la municipalité de- Paris, contre le peuple -de; Paris, contre la majorité des députés de Paris.
Je déclare que je ne cherohe ici que la vérité, car je n'ai pas l'intention d'outrager, de blesser même ,eeux ciui ont partagé quelques-uns des torts que je développe. Ce sont les .intentions des nommes qijie j'accuse; j'ai toujours publié,, j'ai toujours dit que les hommes égarés ne sont conduits que par dûs intrigants. Si vous douiez que les objets, dont j'ai parlé, n'aient pas occupé une délibérajbion, lisez seulement le procès-verbal de votre séaaace; ils répétèrent cette ridicule. f aree de la dictature; ils imputaient le projet de la dictature à un citoyen sans pouvoir, pour faire oublier l'affreuse oligarchie qu'ils exerçaient eux-mêmes, et le projet de tyrannie nouvelle qu'ils voulaient ressusciter. Par là ils cherchaient à dégoûter le peuple français et l'Assemblée de la République naissante, à arrêter les progrès de notre Révolution dans les contrées étrangères, on leur présentant la chute d'un homme, comme l'ouvrage d'une ambition criminelle et le changement d'un gouvernement, comme un changement de maître : -de là ces étemelles .déclamations contre les événements malheureux du 2 septembre, dont ils. dissimulèrent les circonstances et les auteurs.
Dès ce moment, ils ne cessèrent de remplir Aes âmes des députés de méfiaaiee, de haine •et de terreur... Dès lors ils ne cessèrent d'allumer le feu de la guerre civile dans la Convention nationale, dans les départements, soit par leurs journaux, soit par leurs harangues, soit par leur correspondance, ils
étaient venus à bout, pendant ce temps-là, d'arriérer le jugement du tyran; et durant la discussion de cette, affaire, quelles manœuvres; quelles chicanes n'employa-t-on pas pour égarer, i'-opinion des membres les plus purs ide la Convention national®' !
Qui peut penser, sans frémir, aux moyens qux>n employait dans les feuilles, répandues avec profusion pour égarer le peuple, pour dépraver l'esprit public, pour apitoyer le peuple sur le sort du tyran; avec quelle lâche cruauté on appelait une force armée contre Paris, contre les députés patriotes at contre des députés dénommés, comme des brigaaads et des anarchistes? Avec quel insolent mépris des lois les corps administratifs levaient eux-mêmes des troupes de leur autorité privée, aux dépens de la République? Avec quelle audace ils protégeaient sans cesse la rentrée des émigrés, et ce rassemblement à Paris de tous les assassins et de tous les tyrans de l'Europe? Avec quel odieux machiavélisme on employait les moyens de troubler le repos de cette ville, sans même ordonner la représentation d'une pièce patriotique, à l'exception de celle qui avait déjà fait couler du sang, et que la sagesse de la Commune await défendue ? Au reste, quels efforts faisaient-ils pour sauver le tyran ? Je ne crois pas que ce fût lui qu'on voulait faire remonter sur lé trône; mais il fallait lui conserver la vie, pour .conserver l'honneur de la royauté, qu'on voulait rétablir, pour remplir un des articles du traité qu'on avait fait avec Londres, et la promesse donnée à Pitè, comme le prouvent les discours prononcés dans le parlement d'Angleterre : il fallait empêcher que, par cet acte d'énergie, la Convention nationale ne jetât le dard à tous les despotes de l'Europe r il fallait empêcher que le peuple prît lui-même ee caractère de patriotisme, de républicanisme.
Déjà ceux qui ont ourdi ces trames, recueillent les fruits des semences de la guerre civile; et la ligue des ennemis de l'intérieur, avec ceux de l'extérieur, se développe. On se rappelle ici que ee sont les personnes que je désigne, que j'ai déjà nommees, qui, en 1791, ont prêté à: la Cour le secours de leur fausse popularité, pour l'entraîner dans la> guerre contre l'Autriche. Nous disions alors aux Jacobins i(il est permis de citer l'endroit), quand on venait prêcher leur doctrine funeste; nous disions à Dumouriez même, qui venaait alors avec eux, coiffé du bonnet rouge, étaler tout le charlatanisme dont il était doué; nous leur disions, avant de déelarer la guerre aux étrangers ; Détruisez les ennemis du dedans; faites justice des attentats tant de fois commis; changez les états-majors, composés des complices et des satellites de la Cotur; destituez les généraux perfides qu'elle a nommés, et surtout ce La Fayette, qui ne cesse de tyranniser le peuple; armez tous les défenseurs de la patrie, qui demandent en vain des places pour la défendre, fortifiez et approvisionnez nos villes frontières, qui sont dans un dénuement absolu; c'est par les progrès de la philosophie et en étendant le bonheur dans toute la France, que vous étendrez l'empire de notre Révolution, et non par la force des armes, et non par les fléaux de la guerre.
En vous portant agresseurs, vous exciterez
les peuples étrangers; vous favoriserez les vues des despotes et celles de la Cour, qui a besoin de faire déclarer là guerre par nous, pour échapper à la fureur du peuple. Us nous répondaient pas des lieux communs, faits pour en imposer aux enthousiastes. Us montraient l'Europe entière qui devait venir au-devant de la Constitution de 1791. Les soldats des despotes se débandant partout pour accourir sous nos drapeaux, et le drapeau tricolore flottant partout sur les palais des rois, des électeurs et des gouvernements: ils excusaient 'la Cour, ils louaient les ministres, surtout Narbonne; ils prétendaient que quiconque cherchait à discréditer les généraux, les ministres, étaient des agitateurs et des brigands. Les Jacobins résistèrent aux propositions que leur fit Dumouriez, de renoncer à leur opinion en faveur de la guerre; mais tel était le prix qu'ils consacraient à disposer les projets de la Cour par la sanction des sociétés populaires, qu'à l'insu du comité de correspondance de cette société, dont ils disposaient, et qu'ils remplissaient, ils osèrent, envoyèrent des lettres circulaires à toutes les sociétés affiliées, pour leur annoncer que le vœu des Jacobins était pour la guerre. Le prix de ces manœuvres fut l'élévation de leurs protégés; nos prédictions ne manquèrent pas à se réaliser. La première campagne ne fut marquée que par des trahisons et des revers qui ne furent, pour la Cour, qu'un prétexte pour demander des lois de sang contre les plus grands défenseurs de la patrie et la confirmation d'un pouvoir absolu qui fut accordé sur la motion des mêmes hommes, et particulièrement Guadet ; dès ce temps-là, tous ceux qui osaient dénoncer la Cour, furent dénoncés comme des agitateurs et des factieux.
On se rappellera avec quel zèle on divinisait Narbonne, et comment ils calomniaient notre armée patriote. Bientôt tous nos généraux trahirent à l'envi. Notre invasion dans la Belgique n'a produit l'effet que de livrer ensuite nos alliés à la vengeance de leur tyran, et d'irriter les étrangers par l'infâme attentat du traître Jarry, qui n'a pas même été puni. Nos places fortes étaient dégarnies; les états-majors, tous les chefs étaient royalisés. La ligue des tyrans se fortifiait : l'époque du 10 août, ou du mois de septembre, était destinée pour leur invasion, combinée avec la conspiration de la Cour des Tuileries contre Paris et contre la liberté. C'en était fait de l'une ou de l'autre, sans la victoire remportée par le peuple et les fédérés le 10 août 1792. Or, j'ai déjà remarqué que les chefs de la coalition s'étaient pourvus de tout ce qui leur était nécessaire ; et lorsqu'au commencement du mois de septembre suivant, Brunswick, encouragé d'avance par ses intelligences intérieures, Osa envahir le territoire français, vous avez déjà vu qu'ils ne songeaient qu'à l'abandonner pour mieux servir le traître. Paris se sauva lui-même; mais Dumouriez était à la tête de nos armées : Brissot avait dit publiquement, peu de temps auparavant, qu'après Bonnecarrère, Dumouriez était le J plus brave des hommes : Dumouriez avait écrit que Brissot était le plus grand des fripons. Il avait affiché que la cause du courroux que Brissot et ses amis affectaient contre lui, n'était que l'effet du refus qu'il lui avait fait
de partager avec eux les 6 millions, qu'il lui avait fait accorder sur les dépenses secrètes. Dans le temps de son ministère et de leur amitié, on annonçait des dénonciations réciproques qui n'eurent point lieu; mais ce qui est certain c'est qu'au moment où Dumouriez prit le commandemant de l'armée, il était très bien avec ces mêmes hommes, et avec Brissot, qui le pria d'employer Miranda dans une occasion importante.
J'ignore ce qu'aurait fait Dumouriez, si Paris et les départements ne s'étaient levés au mois de septembre, pour écraser les ennemis intérieurs et extérieurs; mais ce qui est certain, c'est que si le roi de France n'était pas favorable au roi de Prusse, qui était au cœur de la France, au moins Dumouriez les conduisait avec beaucoup de politesse pendant une longue retraite assez paisible, en dépit de nos soldats, dont on enchaîna l'impétuosité, et qui mordaient leur sabre en frémissant de rage, de voir que leur proie leur échappait. L'armée prussienne, ravagée par la maladie et la disette, a été sauvée,, elle a été ravitaillée avec une générosité qui contraste avec) les cruautés dont nos braves défenseurs ont été ies victimes. Dumouriez a parlementé, a traité avec une générosité qui contraste avec les mée et la France s'attendaient à voir la puissance et les troupes de ces despotes ensevelies dans les plaines de la Champagne.
Dans ce moment, où Dumouriez avait annoncé dans ses lettres à l'Assemblée nationale que les ennemis pouvaient lui échapper, il se montra aussi complaisant, aussi courtois auprès du duc de Brunswick qu'il fut plus insolent avec nous : il est au moins douteux s'il a rendu plus de services à la République dans ce temps-là même, qu'aux Prussiens, qu'aux émigrés...... Il aurait fallu dès ce temps-là affermir la Révolution en exterminant cette armée, dont nos ennemis n'auraient jamais pu réparer la perte. Au lieu de se réunir avec nos généraux pour pousser nos conquêtes jusqu'au Rhin, il vint à Paris; et après avoir vécu quelque temps dans des parties de plaisir, indignes des représentants du peuple, avec la faction, il débute par un succès brillant, nécessaire pour lui donner une confiance que sa conduite avec les Prussiens était loin de lui avoir assurée. Enfin il entra dans la Belgique : on sait que dans ce moment (et quiconque rapprochera de ce qui se passe aujourd'hui la brusque témérité qui acheta la victoire de Jemmapes par le sacrifice de tant de Français, concevra facilement que ce succès n'était pas moins fatal à la liberté qu'aux satellites des despotes); on sait que dans ce moment, s'il avait dès lors envahi la Hollande, la conquête de ce pays était certaine; nous étions maîtres du Brabant-Hollan-dais, les richesses de cette contrée se confondaient avec les nôtres, et sa puissance était ajoutée à celle de la France; le gouvernement anglais était perdu et la Révolution de l'Europe assurée. On a dit et on a prévenu qu'il serait sous peu à Amsterdam (et je l'ai cru moi-même un instant, ce qui prouve qu'il ne faut jamais croire aux hommes de tel ou tel caractère, qu'il ne faut pas croire qu'il se soit jamais attaché au bien.) J'ai vu quel était le projet de Dumouriez : ce projet avait été arrêté par le conseil exécutif, par ceux qui le dirigeaient; ce qui s'est passé depuis, a prouvé
que. ce n'était qu'une imposture de la faction même.
En effet, si comme on a dit, Dumouriez avait conçu ce projet, s'il y attachait sa gloire et sa fortune, pourquoi n'a-t-il pas réclamé l'appui de l'opinion publique? pourquoi n'a-t-il pas montré la nécessité de ce plan à la Convention nationale, à qui il appartenait de prononcer sur cette grande question? pourquoi n'en a-t-il pas dit un mot à aucun représentant du peuple? pourquoi n'a-t-il pas convoqué la nation elle-même, contre des oppositions injustes, qui compromettraient ses amis. Le silence qu'il a gardé sur ce point, ses liaisons étroites avec les ministres, et beaucoup de membres du comité diplomatique ne permettent pas de croire que le projet fut réel. Il est bien plus naturel de penser que ce bruit n'avait été donné qu'aux amis de Dumouriez, que pour lui concilier la confiance; on sait d'ailleurs que les chefs de faction ont l'art de paraître quelquefois divisés pour mieux serrer leur intelligence. Au surplus le retard que Dumouriez a éprouvé dans l'expédition de la Hollande, doit être imputé aux manœuvres de la majorité du conseil exécutif et des membres qui dominaient dans les comités diplomatiques et de défense générale.
Les députés bataves se sont plaints dans un mémoire de l'opiniâtreté avec laquelle leurs offres avaient été repoussées par le ministre des affaires étrangères. On ne peut nier du moins que Dumouriez et ses amis ne fussent parfaitement d'accord sur le projet de ravir la Belgique à la France. On connaît les efforts de Dumouriez pour empêcher l'exécution des décrets relatifs à la révolution de la Belgique; on connaît toutes ses perfidies. D'un autre ■côté, on sait comment, au comité diplomatique, on s'opposait à la réunion des peuples ; Roland disait dans ces circonstances : on doit m'envoyer des Savoisiens, pour solliciter leur réunion à la France; je les recevrai, rien de plus. Mais, comment était-il possible que vous vouliez vous réunir à notre anarchie, disait Brissot? Tel était le langage de ses coopéra-teurs; ils sont venus à bout de retarder toutes les réunions, jusqu'au moment où le parti de l'opposition eut tout disposé pour faire échouer ce projet, et où les despotes rassemblaient des forces puissantes contre nous. Dumouriez et ses partisans avaient commencé par porter un coup mortel à la fortune publique, en empêchant la circulation de nos assignats dans la Belgique ; en ruinant notre armée, après l'avoir fatiguée par ses intrigues, après l'avoir épuisée par des levées d'hommes; après avoir levé de son autorité privée des sommes énormes qu'il chargeait la République de rembourser : il part enfin pour la Hollande, il s'empare de quelques places. Mais tandis qu'on ne nous parlait que de victoires et de prodiges^ tout était déjà posé pour nous enlever en un moment la Belgique. Notre armée était à la disposition d'un Miranda, aventurier espagnol, chassé du Pérou, ensuite envoyé par pitié aux Guadet, aux Brissot... J'atteste Guadet, Yergniaud et Pétion, de l'avoir recommandé. J'atteste Brissot et Pétion, qu'ils ont protégé Miranda et Witenkof pour qu'ils soient employés au service de la France. Ces deux généraux nous trahissaient en même temps à Aix-la-Chapelle et à Maëstricht. Une partie de l'armée, placée
dans un poste avantageux, puisqu'elle n'avait rien derrière elle, disséminée sur un si grand espace de terrain, qu'en cas d'attaque, ces corps pouvaient se rallier et s'unir, cette armée livrée à un général ennemi, dont le général avait l'air de ïne pas soupçonner l'existence, les corps les plus distingués, sont spécialement trahis et livrés au fer de l'ennemi.
En même temps le siège de Maëstricht était commencé avec des boulets même qui n'étaient pas de calibre* dirigé par une perfidie profonde, pour se débarrasser de nos braves défenseurs, en les exposant sans défense à l'artillerie supérieure de nos ennemis. Le siège de Maëstricht est levé avec précipitation. Ces braves Liégeois, devenus nos frères, sont rentrés dans leurs fers; de plus, nos frères sont mis sous le fer des tyrans prussiens et autrichiens, pour expier encore une fois leur généreux attachement à la cause de la liberté. Dumouriez abandonne son armée victorieuse et se rend dans la Belgique, pour se mettre à la tête de celle qui a été battue. Va-t-il se plaindre d'avoir été lui-même trahi par les généraux? Va-t-il les dénoncer à la nation? Non : il jette un voile sur la trahison : il n'accuse pas même l'imprudence de quelques-uns de ces généraux; au contraire, il prêche à son armée la plus grande constance dans ces mêmes généraux.
Il livre bataille; l'aile gauche plie, et cette aile gauche était commandée par ce Miranda : la suite de cette défaite est la perte de la Belgique. Alors il se déclare ouvertement pour les généraux perfides. Il se plaint du décret qui mande à la barre Steingel et Lanoue; il fait le plus pompeux éloge de ce général convaincu d'avoir conspiré contre la révolution du mois d'août; il veut que la Convention nationale fasse tomber son improbation sur les soldats, et qu'elle remercie les traîtres de n'avoir pas désespéré de la patrie; il menace de l'abandonner si on contrarie aucune de ses vues; il loue le civisme et le courage de ses généraux, et de plusieurs autres officiers; il avait loué depuis longtemps le courage d'Egalité fils, et aucune de ses dépêches n'étaient exemptes des éloges de ce jeune général; il attribue tous nos revers aux soldats; il ne pense même pas à la négligence de celui qui commandait à Aix-la-Chapelle; il oublie qu'il avait loué lui-même le courage de l'armée, et surtout le courage avec lequel elle avait supporté la disette et la misère, courage qu'il disait être au-dessus des forces humaines.
Il déclame contre les commissaires qui sont envoyés par le pouvoir exécutif; il les appelle des brigands; tandis qu'il écrivait Ces détails, il abandonnait aux Prussiens la Belgique : auparavant il avait eu soin d'éteindre dans cette contrée, autant qu'il était en lui, toute espèce d'affection pour la Révolution française, et d'y allumer la haine du nom français, il avait été jusqu'à publier hautement, dans une lettre qui vous fut adressée, que la Providence punissait le peuple français de ses crimes : il avait peint Paris comme le centre du meutre et du carnage, la France comme le séjour des crimes et de l'anarchie, les députés de la Convention qu'on accusait d'un patriotisme plus ardent, comme des fous, ou comme des scélérats : il avait foulé aux pieds l'autorité du gouvernement français; il avait rétabli dans leurs fonctions
les administrateurs destitués par les ministres de la Convention nationale; il avait détruit les sociétés populaires attachées à notre révolution; il a voulu excuser tous ses forfaits, en disant que l'on avait irrité-les Belges en les contraignant, sous des prétextes de réunion, d'abandonner leur argenterie ; sans doute c'était une faute d'étourdèrie de faire la, guerre sans argent; mais qui pouvait pré-s venir ces désordres, si ce n'est un général tout-puissant. Quant aux commissaires du pouvoir exécutif contre lesquels il a paru sévir, qui lés avait nommés? N'étaient-ils pas l'ouvrage de Roland et des commissaires coalisés avec là faction et avec le général en chef ? Les déclamations de cet homme et les éternelles homélies: de ce vieillard étaient de même nature.On ne saurait prouver qu'il n'était pas d'intelligence avec eux. Pour exécuter un tel projet,, d'empêcher là réunion de la Belgique, iT avait fallu, employer à la fois et un général et des commissaires qui préparassent d'avance la trahison. Quant aux émissaires qui ont été soudoyés par les ennemis de la République, quoi de plus facile encore aux. généraux, que de les réprimer et de faire, régner une exacte discipline, si tous les généraux n'avaient pas pris les moyens de fatiguer, de dégoûter les peuples? Le traître Lafayette avait pris la même marche. Lafayette aussi entretenait, autant qu'il était en lui, le désordre dans son armée, pour la calomnier, pour la dissoudre, et pour perdre la liberté : il n'avait oublié qu'une chose* c'était que Dumouriez avait eu des sueeès.
Enfin,. Dumouriez. a levé l'étendard de la révolte,, il menace de marcher sur Paris, pour ensevelir la liberté avec ses ruines. Comme iL est d'accord avec ceux dont j'ai parlé jusqu'ici, il déclare qu'il veut protéger les députés opprimés contre ceux qu'il appelle aussi des anarchistes et des agitateurs.
Il ne dissimule plus enfin le projet de rétablir la royauté; Après avoir, fait égorger une partie de son armée*, ili trompe l'autre, et s'efforce' de la débaucher, après l'avoir calomniée; à= sou insu. Fier du succès de ses trahisons, gorgé des trésors qu'ilx a puisés dans la Hollande, dans la Belgique et dans la caisse nationale; fort de son alliance avec nos ennemis* avec lesquels il a parlementé; fort de l'appui des Belges dont il a su s'environner, il cherche à jeter le découragement dans la nation et la Convention ; il s'efforce de déshonorer et la nation et la Convention; il nous annonce hautement qu'il ne reste aucune ressource. Dans ces lettres officielles à Beurnônville, il parle avec complaisance des troubles qui avaient éclatés dans le Midi ; il en présage de nouveaux ; il nous montre déjà les départements du Nord, du Pas-de-Calais et de la Somme en état de révolution ; il déclare en propres termes que nous ne pourrons tenir tête à nos ennemis, parce que nous serons obligés d'employer nos forces pour réprimer les troubles du dedans. U nous montre, en même temps, nos places fortes sans défenses; et il ose nous déclarer que nous n'avons point d'autre parti à prendre que de lui demander la paix et que de transiger avec les despotes; il ose, dis-jë, se montrer lui-même comme un médiateur. Tel était le coupable secret de la conspira-
tion tramée depuis longtemps contra notre liberté ! Le chef de la faction l'a dévoilée au moment où il croyait pouvoir l'exécuter avec succès. Tout était disposé pour faire réussir ses projets. Un ministre de la guerre, audacieux et hypocrite, avait été nommé pour cette grande faction ; en peu de temps il avait purgé les bureaux et les armées de tous les agents et de tous les chefs patriotes; ils les avaient remplacé- de contre-révolutionnaires; il était entouré de ce que la France a de plus suspect; il avait laissé nos places fortes sans garnison et sans munition.
On se rappelle avec quelle audace il trompait la Convention, sur l'état de nos affaires dans la Belgique, au moment où les trahisons les avaient perdues et comment les fausses nouvelles qu'il débitait furent démenties par les commissaires de l'Assemblée.
En même temps on excitait des troubles dans chaque partie de la France et surtout dans nos départements maritimes,, les aristocrates avaient saccagé des villes* égorgé des patriotes et personne n'avait songé à réprimer cette conspiration dans sa naissance, et. ni le ministère, ni personne ne nous en donnaient avis. Enfin, le ministre dè la guerre nomme un général pour commander les patriotes, et ce général est un traître qui mène les défenseurs de la République à la boucherie. Partout il nomme des officiers suspects, des ligo-niers, des...; il. montre sur tous ces choix une prédilection singulière pour tous les étrangers et les anciens amis des despotes. Combien déjà de sang a été répandu en six semaines de guerre civile et de massacre des plus zélés patriotes.
Quand l'infâme Dumouriez tramait contre nous avec les despotes de l'Europe, Dumouriez profitait de ces troubles dans ces contrées, pour nous annoncer avec une joie insolente, que dès le moment où l'équinoxe serait passé, nos départements maritimes seraient envahis par les Anglais. Encouragés par son appui et par ses manifestes séditieux, les aristocrates et les royalistes relevaient partout une tête insolente et osaient menacer les amis de la liberté. Le principal motif de- leur confiance, était peut-être l'influence des amis qu'il avait, même dans votre- sein, dans le comité de défense générale, qui existait alors, qui avait encore gardé sur ces désastres, sur les dangers de- la patrie le plus grand silence, le comité*. à la tête duquel: étaient toutes les personnes dont je viens de parler, et qui sont les- grands acteurs et les intrigants de la Révolution. (Murmures.) Eh bien! puisque je suis écouté avec tant de défaveur, on a droit d'exiger-au moins quelque patience, quand on remplit un ministère aussi pénible que celui que je remplis, on a le droit de demander quelque indulgence pour la lassitude, pour la douleur où. sont ceux qui sentent qu'ils sont entourés de leurs ennemis.
Sans doute, je ne dois pas être écouté favorablement quand je dévoile les complots contre les meilleurs amis de la liberté. Je ne dois pas être écouté favorablement, quand je parle de ce premier comité de défense générale j dont les chefs étaient évidemment d'intelligence avec Dumouriez-, qui gardaient visiblement le silence sur les manœuvres de Du-| mouriez, avec lequel ils entretenaient une
correspondance habituelle. Tous les hommes qui ne tiennent à aucun parti, et qui l'ont; vu comme moi la première fois-qu'il fut parlé dès crimes de Dumouriez et des moyens à prendre pour réprimer ses mesures : eh bien ! moi je l'ai vu ce comité de défense générale; je l'ai vu : j'y ai vu les membres attachés à Dumouriez, excuser sa lettre insolente, sous prétexte de dénonciations injustes, faites contre lui précédemment. Je les ai vu épuiser les sophismes les plus insidieux : je les ai vu, pour détourner les soupçons qui pesaient sur leurs têtes, répéter leurs déclamations ordinaires contre les députés qui les accusaient et qu'ils traitaient encore d'agitateurs et d'anarchistes. Là j'ai entendu et beaucoup de membres ont entendu comme moi, Vergniaud prétendre que le& opinions politiques de Dumouriez étaient indifférentes, qu il était nécessaire à la cause de la République. (Interrompu,.)
Il n'y a rien: d?étonnant, que lorsqu'il était en présence de l'armée, quelques personnes aient été trompées un moment sur ses desseins. Mais ce qu'il y a d'étonnant, c?est que ceux qui ont marché avec lui dans la carrière de la Révolution, n'aient point trouvé dans ce que-j'ai déjà dit et ce que je vais dire encore, de quoi fixer leur opinion sur le compte de Dumouriez;. car j'ai entendu Vergniaud dire que Dumouriez était attaché' à la Révolution, et qu'il serait pendu si la liberté succombait, li a fallu que je réponde à Vergniaud qu'il y avait des intrigues profondes,, dont Dumouriez était le principal agent, et un? genre de révolution qui ne lui serait point funeste, et qu'alors ce ne serait point Dumouriez qui serait pendu, mais les véritables amis de la liberté. Là nous avons entendu Gensonné s'indigner des qualités que l'on donnait à Dumouriez; et que Dumouriez méritait; et pour toute réponse, j-ai entendu Pétion prendre avec chaleur la défense de Miranda, et quand je disais que Witenkof et Stïhgel étaient des: traîtres, une grande partie des membres se leva en courroux pour se plaindre de ce que l'on dénonçait sans avancer aucun fait.
Au reste, je n'attends le triomphe de la liberté que de la justice de la Convention nationale entièrement détrompée;, et quelque parti que prenne la Convention nationale, je suis ici armé de la vérité, qui est plus forte que toutes les puissances» Je plaide la cause des nations, je plaide la cause de la liberté, et la liberté triomphera, quand tous les vils scélérats que je dénonce seront ensevelis. (Grand tumulte. Le président rappelle les tribunes au silence:) La liberté triomphera de toutes les explosions qui rugissent autour d'elle, quand on aura oublié les noms des vils scélérate que je dénonce.
J'ai vu dans, le même comité le ministre de la guerre apporter des nouvelles et des projets illusoires concertés d'avance avec les chefs de la faction. J'ai vu déclamer contre l'insubordination des soldats, sans vouloir convenir de la perfidie des généraux: j'ai vu convertir en systèmes les trahisons de Dumouriez, et les faire dénoncer à ceux avec lesquels il les avait concertées;, j'ai entendu le même ministre dé-clamer contre les écrivains, contre les sociétés populaires qui critiquaient les généraux, solliciter contre eux des lois fortes et répres-
sives, citer pour preuves de civisme des officiers militaires, la fameuse blessure de Valence, répéter les déclamations de Dumouriez sur l'éloignement des Belges à la Révolution française. J'ai entendu dire à Brissot que, par la raison qu'on ne conservait pas la Belgique, nous pourrions obtenir plus facilement la paix des puissances ennemies. Brissot, le plus hardi des conspirateurs, fut le premier à jeter en avant des idées de transaction, ouvertement proposée par Dumouriez; c'est lui qui, dans la discussion de l'affaire de Louis XVI, osa demander qu'il fût sursis à l'exécution de son jugement jusqu'à ce que l'opinion des puissances étrangères, sur ce jugement, fût manifestée ; c'est lui qui alors nous menaçait de- la. colère des rois, si nous osions prononcer la peine de mort contre le tyran. Brissot, combien de faits n'aurais-je point à rapporter sur lui et sur la faction dont il est un des chefs ?
Si je voulais rappeler qu'après nous avoir montré, lorsqu'il s'agit de la déclaration de guerre sous un roi despote et parjure, Brissot, après nous avoir montré alors que nous ne devions pas craindre de provoquer les tyrans, ne cessa de nous inspirer des défiances sur les dispositions des peuples de l'Europe, si. nous donnions l'exemple aussi nécessaire que celui de condamner le tyran. Brissot, qui dans ce moment ne s'occupait qu'à nous tracer des tableaux lugubres de l'état de la France, si nous condamnions le tyran, de désigner d'avance à l'Europe le décret qui devait condamner à mort le tyran, comme un acte cruel, comme un acte barbare, provoqué par des députés qu'il désignait aussi comme des amis des puissances étrangères, comme des tyrans, comme des agitateurs, comme des hommes de sang. Brissot, dont les discours, dont les harangues ne sont que des manifestes de Brunswick, et ressemblent en tout, et pour l'esprit, et pour le style, au langage des cours étrangères et des ministres aristocrates,, et avec les proclamations de Coblentz (interrompu) ; que n'aurais-je point à dire si je voulais parcourir,, développer la manière dont cette guerre a été conduite depuis le commencement? Je veux vous observer seulement que loin d'avoir employé aucun moyen d'attacher à notre cause tous les peuples pour faire adopter l'esprit de notre révolution, on a fait précisément en France et ailleurs, tout ce' qu'il fallait pour irriter les peuples contre nous; de manière que depuis la révolution du 10 août, pour discréditer la liberté dans les pays étrangers, les despotes n'ont rien de plus à faire que de leur dire : « Si vous étiez tenté d'embrasser les principes de la Révolution française, voyez les tableaux de ceux qui dominent dans la Convention nationale ! Voyez comme ils prétendent que les députés de cette cité, où s'est opéré cette révolution, et qui eux-mêmes y ont participé, ne sont que des brigands, des hommes de sang; que Paris n'est qu'un théâtre de carnage; qu'on n'a renversé le trône de Louis XVI que pour choisir un dictateur. Us nous annoncent eux-mêmes, ils-nous disent toujours que le désordre et l'anarchie régnent partout, qu'ils sont à leur comble ». Citoyens, vous voyez que c'est depuis cette époque que datent précisément tous ces discours, qui appellent les départe-
ments contre Paris, et qui allument la guerre civile.
Voilà une partie des objections contre notre révolution, qui sont consignées dans les discours, dans les harangues publiques, dans tous les écrits que j'accuse ici aux yeux de toute la France, et qui seront condamnés par la nation et par la postérité. Enfin j'ai vu le comité de défense générale, composé en grande partie de toutes les factions, s'appliquer constamment à retarder les mesures nécessaires au salut public, pour donner le temps à Dumouriez d'exécuter ses projets monstrueux. Alors vous vous rappelez le jugement que Dumouriez portait lui-même; car, tandis qu'il déclarait qu'il venait mettre les révolutionnaires à la raison, il déclarait qu1-le comité de défense générale, tel qu'il était composé, était très bien composé, à l'exception de cinq ou six membres. Tout ce qui s'est passé depuis cette époque, répond trop parfaitement à l'esprit qui dirigeait sa fatale influence sur nos délibérations. L'Assemblée a sans doute commis une erreur bien grande, lorsqu'elle a regardé Beurnonville comme un ambassadeur digne d'elle auprès de Dumouriez. En embrassant tous les faits, en rapprochant l'intelligence de Beurnonville avec Dumouriez et les généraux, elle aurait dû voir qu'elle envoyait un complice à un coupable. Elle n'a sans doute pas été dupe d'une certaine comédie jouée à cette barre, où on lui annonçait que Beurnonville avait été frappé par un des satellites de Dumouriez. Elle n'a pas été non plus la dupe, lorsqu'on lui a dit que Dumouriez se plaignait que son ami Beurnonville était venu l'assassiner; mais tout cela suppose la continuation de l'ascendant de la faction, cette faction que j'ai tâché de dévoiler autant qu'il était en moi dans ce moment. Plusieurs circonstances ont dérangé ici le cours de mes idées, et si j'en ai présenté une partie dans ce moment, avant d'avoir pu donner tous les faits et résumer les chefs d'accusation, c'est parce que l'audace avec laquelle les conspirateurs cherchaient à détourner l'accusation publique de dessus leur conduite, par une de ces farces misérables, par lesquelles ils nous ont trop souvent abusé, était extrême. Mais ils ont fini, j'espère, par persuader qu'il était temps de confondre les traîtres. Je la soutiendrai cette accusation. Je reclame le droit de la soutenir devant les tribunaux, de la soutenir devant la Convention nationale, si elle veut s'en occuper d'une manière sérieuse et approfondie, surtout d'une manière calme et impartiale : si elle veut m'entendre, après avoir entendu ceux qui voudront monter à cette tribune.
Mais, je soutiens que dès ce moment il est prouvé aux yeux de tout homme de bonne foi, que si Dumouriez a des complices, ce sont ceux que j'ai désignés; que, s'il est une conspiration, c'est celle que j'ai développée. S'il avait été en mon pouvoir de donner aux individus que j'ai nommés les seules preuves qui sont en état de subjuguer (je veux dire des preuves écrites et émanées des traîtres mêmes), comme mes adversaires; si j'avais composé avec eux dans le temps que l'on préparait les fils de conspiration, avec le comité de défense générale, le comité militaire, et le conseil secret du ministère, je n'aurais pas
manqué de vous apporter sous les yeux ces preuves authentiques; et ce dépôt auquel on osa attenter, ce dépôt caché dans les Tuileries aurait été fourni tout entier à vos regards, et depuis ce n'est pas lorsque l'on aurait averti les coupables, lorsqu'ils auraient eu le temps nécessaire pour prendre toutes les. précautions possibles, que j'aurais fait mettre les scellés sur leurs papiers : sur-le-champ, j'aurais arrêté tous les traîtres, et sur-le-champ j'aurais eu les preuves, quels que fussent leurs noms, quelle que fût leur influence, et alors je viendrais avec des preuves écrites.
Mais, lorsqu'il est question d'une conjuration politique, mais lorsque l'on tient à une question qui peut découvrir tous les fils d'une conspiration, n'est-il pas des preuves satisfaisantes d'un autre genre; et des faits publics, des faits consignés dans l'histoire de la révolution même, toutes ces liaisons et toute cette connivence éternelle des hommes que je dénonce, avec le chef connu de la conspiration, avec le traître qui voulait vendre la patrie, ces preuves-là ne sont-elles pas faites pour subjuguer les bons esprits? ce sont celles que j'apporte; et je déclare que, si elles ne suffisent pas à cet esprit à cet individu, elles suffiront à l'opinion publique, elles suffiront à la Convention, elles suffiront à la nation, elles suffiront à tous les peuples qui verront l'histoire avec impartialité. Or, je vous ai montré, depuis la révolution du 10 août jusqu'à ce moment, un système soutenu, composé de faits clairs, très connus, dont le résultat est de perdre la République. Vous avez vu ce système développé par les amis de Dumouriez. Je cherche les amis de Dumouriez, je les trouve, je les saisis, ce sont ceux qui composaient sa société intime; ce sont ceux qui ont parlé, qui ont agi comme lui, qui ont favorisé, excusé ceux qui trahissaient avec lui; ce sont ceux qui étaient en correspondance avec lui dans la Belgique, et il en est un parmi eux contre lequel il est prouvé qu'il avait une correspondance suivie; il est prouvé que Gensonné entretenait une correspondance avec Dumouriez; que Dumouriez n'envoyait point une lettre, pas un courrier qui ne fut lui-même chargé de dépêches pour Gensonné. Voilà des faits. Je cherche les complices de Dumouriez; ces complices sont sans doute ses généraux; c'est apparemment Valence, Egalité fils, (et père! crie un membre) ; et père, eh î pourquoi non ? (Applaudi). C'est apparemment Egalité fils qui a fui avec lui; c'est apparemment Sillery, c'est apparemment le confident de cette famille, c'est apparemment un Sillery, que l'on a eu la bonne foi de croire patriote, comme si on avait pu oublier que c'était lui qui jadis portait le nom de comte de Genlis; c'est apparemment cette femme impudente, malgré ses livres d'éducation, qui était au camp de Dumouriez avec la sœur d'Egalité : voilà apparemment les complices; ou il n'y a pas de conspiration, ou ce sont ceux-là : Dumouriez, Egalité, Sillery; ce sont là les coupables, les complices de la faction d'Orléans, c'est sans contredit Dumouriez; Dumouriez était le chef de l'armée, le chef de ces factions; d'autres, les amis de Dumouriez; donc les amis de Dumouriez, les j confidents de Dumouriez les complices éter-
nels de Dumouriez ne sont pas étrangers à cette faction, (et les amis d'Egalité! crient quelques voix.)
Voilà cette conspiration : je la développerai, cette conspiration ; j'ordonnerai les faits qui la démontrent et qui la» caractérisent; mais aux yeux de la Convention ces preuves doivent être claires; ses principaux agents et complices doivent être connus; il y a longtemps qu'elle aurait dû prendre des mesures sévères pour la punir. Dès le moment il fallait que la conspiration éclatât, et les mettre tous en état d'arrestation sans distinction ; il ne fallait pas leur donner le temps de mettre à couvert les preuves de leurs crimes; il ne fallait pas leur donner le temps de faire de nouvelles trames par des déclamations, par des diatribes contre les patriotes.
Puisque la conspiration existe, puisque les complices sont prévenus; voilà la base de la mesure que vous devez prendre; vous devez renvoyer devant le tribunal révolutionnaire la connaissance de la conspiration, et mettre en état d'arrestation les Valence\ les Sillery, les Egalité, la femme de Sillery, tous les agents d'Orléans ; vous devez (mais je ne sais pas ce que vous devez) frapper d'un décret d'accusation des membres aussi patriotes que ces Messieurs Vergniaud, Gensonné et autres... Je n'ose pas vous dire qu'un homme qui correspondait tous les jours avec Dumouriez doit être le premier réputé suspect de la conspiration de Dumouriez et de tous ceux qui y trempaient; car cet homme est un patriote, un modèle, dis-je, de patriotisme et ce serait une espèce de sacrilège que de demander un décret d'accusation contre M. Gensonné. Aussi bien convaincu de mon impuissance à cet égard je demande tout simplement que la maison d'Orléans, Valence, Egalité, Sillery, mari et femme, etc., soient traduits au tribunal révolutionnaire. Quant aux autres la Convention en décidera.
texte du journal des débats (l).
Une faction puissante conspire avec les puissances de l'Europe pour
nous donner un roi avec une constitution aristocratique, et une
représentation illusoire composée de deux Chambres; elle espère nous
amener à cette transaction honteuse, par la force des armées
étrangères et par les secousses intérieures. Ce gouvernement
convient à Pitt, l'âme de tous les complots ; il convient à tous les
intrigants ambitieux ; il plaît à tous les aristocrates bourgeois ou
autres qui ont horreur de l'égalité; il plaît même aux nobles, qui
sont trop heureux de retrouver dans une représentation
aristocratique, et à la cour d'un roi, les distinctions
orgueilleuses qui leur échappaient. La République ne convient qu'aux
hommes de toutes les conditions qui ont une âme pure et élevée;
qu'aux Sans-Culottes, c'est-à-dire aux hommes de tous les états qui,
en France, se sont parés avec fierté de ce titre, dont Lafayette et
la Cour voulaient les flétrir, comme autrefois les amis de la
liberté en Hollande s'emparèrent de celui
Ce système de république n'est pas nouveau : c'était celui de Lafayette et de ses partisans, qu'on a appelés Feuillants ou modérés. Il a été continué par ceux que je vais vous dénoncer. Quelques hommes ont changé, le système est resté le même. Les moyens sont les mêmes aussi, avec cette différence que les continuateurs de Lafayette ont accru leurs ressources et le nombre de leurs partisans.
Dans les révolutions, les ambitieux ont tous suivi cette marche; tous ont défendu les droits du peuple; mais tous l'ont regardé comme un stupide troupeau, destiné à être conduit par le plus habile. Tous ont regardé les assemblées représentatives comme une réunion d'hommes,ou assez stupides ou assez crédules, qu'il fallait intimider ou corrompre. A l'exemple de leurs devanciers, les dominateurs actuels ont caché leur ambition sous le masque de la modération et de l'amour de l'ordre. Ils ont quelquefois appelé tous les amis de la patrie agitateurs, anarchistes, quelquefois même ils ont excité des désordres réeis^ afin de pouvoir les accuser; comme leurs devanciers, ils ont de bonne heure épouvanté les citoyens d'un système de loi agraire; ils ont séparé les riches des pauvres; ils se sont présentés aux premiers comme leurs protecteurs contre les Sans-Culottes. Ennemis de l'égalité, maîtres presque entièrement du gouvernement et de toutes les places, dominant dans les tribunaux et les corps administratifs, disposant du Trésor public, ils ont employé tous les moyens de corrompre l'opinion pour révemer le royalisme et l'aristocratie. Comment la République pouvait-elle naître et se soutenir quand toute la puissance publique s'épuisait pour perdre la vertu?
La faction dominante était formée longtemps avant la Convention nationale.
A la fin de juillet dernier, elle négociait avec la Cour pour obtenir le rappel des ministres qu'elle avait nommés. Une des conditions du traité était la nomination d'un gouverneur du prince royal. Il n'est pas nécessaire de vous dire que c'eût été l'un d'eux. A la même époque elle s'opposait à la déchéance demandée par le peuple et les fédérés, elle fit même décréter un message au tyran, pour en prévenir l'effet. Tous ces faits sont consignés dans l'histoire de la Révolution. Elle s'étaiu opposée secrètement à la Révolution du 10 août, et dès le lendemain elle travailla à en arrêter le cours. Elle fit tout son possible pour empêcher le tyran d'être enfermé au Temple, et elle fit décréter, par l'Assemblée législative, qu'il serait; nommé un gouverneur au ci-devant prince royal.
A ces faits, vous reconnaissez déjà les personnes que j'ai le courage de dénoncer, sans autre intérêt que celui du salut public, et sans crainte d'aucun danger. Et vous avez déjà nommé les Brissot, les Guadet, les Vergniaud, les Gensonné.
Ils n'oublièrent rien pour déshonorer la Révolution qui amenait la République; ils calomnièrent la commune. Leur premier soin, après l'acte conservatoire du prince royal, fut de rappeler leurs créatures Servan, Clavière et Roland. Ils eurent -soin de faire remettre entre les mains de ces derniers des sommes énormes pour façonner, disaient-ils, l'esprit public, et auteurs ou payeurs de presque tous les jour-
naux, ils ne cessèrent de tromper l'Europe sur notre Révolution.
A l'exemple de tous les ennemis de la liberté, qui avaient paru pour remettre le peuple aux fers, ils devaient commencer par perdre Paris, et ils s'accordèrent à peindre cette immortelle cité comme le théâtre de l'anarchie et de tous les fléaux. Ils cherchèrent à armer contre Paris •les défiances et la jalousie des autres parties de la République.
Cependant les Prussiens se disposaient à envahir notre territoire; les dominateurs étaient membres des comités diplomatique! et de défense générale; ils dirigeaient le ministère, et ils laissaient ignorer à l'Assemblée les dangers de la patrie.
De Verdun l'ennemi s'avançait vers Paris, et les dominateurs gardaient le silence : la faction voulait livrer Paris et la France; elle voulait fuir avec l'Assemblée législative, le trésor public, les ministres, le roi et sa famille. Rappelez-vous une réponse de Roland à une lettre mémorable *et trop tôt oubliée, et vous y verrez ce fait consigné.
La Convention nationale était convoquée; elle était l'espoir de la France, elle le sera toujours; elle était nommée dans un temps favorable pour des élections populaires; mais une partie des représentants, trompés par les récits perfides de la faction, y apporta des préventions contre Paris. Le ^décret qui déclare l'abolition de la royauté, proposé à la fin de votre première séance par un des députés calomniés d'avance, fut adopté avec enthousiasme. Si le lendemain on se fût occupé de l'affaire du tyran, il eûc été condamné.; et si la .Convention eût ensuite prononcé des lois générales, la paix et la liberté étaient à jamais affermies.
En possession des comités importants de l'Assemblée législative, ils-composèrent à leur gré les nouveaux; ils s'emparèrent presque toujours du bureau, du fauteuil, même de la tribune. Ils avaient dans xeurs mains le ministère; ils occupèrent la Convention nationale de dénonciations contre la commune de Paris,; contre la .majorité des députés de Paris; ils inventèrent cette ridicule fable de la dictature qu'ils imputèrent à un citoyen sans pouvoirs, pour faire oublier l'oligarchie qu'ils exerçaient, et le projet de despotisme qu'ils voulaient ressusciter. De là ces éternelles déclamations contre les événements malheureux du 2 septembre; ils retardèrent ainsi le jugement du tyran. Et dans cette affaire que de chicanes pour égarer l'opinion des membres les plus purs! Avec quelle lâche perfidie ils appelèrent des corps armés contre Paris ! Il fallait empêcher le peuple français de prendre ce grand caractère de républicanisme qui l'empêchera de transiger jamais avec les tyrans, et l?appel au peuple fut jeté au milieu de la France comme un germe de guerre civile. Déjà ils en recueillent les fruits.
Au reste quelques efforts ou'ils aient faits pour sauver le tyran, je ne crois pas que ce fût lui qu'ils voulaient nous donner pour roi; mais il fallait sauver l'honneur du trône, pour oonserver la royauté, pour remplir le traité fait avec Pitt, comme Te prouvent les discours de ce ministre au parlement d'Angleterre.
C'était une de ces personnes que j'ai nommées, qui prêta à la cour sa fausse popularité, pour faire décréter la guerre, qui a été si
funeste à la patrie. Nous disions alors dans les Jacobins, à Dumouriez lui-même, qui venait avec eux coiffé du bonnet rouge : « Avant de déclarer la guerre aux ennemis du dehors, détruisez les ennemis du dedans. » Entourés d'intrigues, les Jacobins résistèrent à la proposition qu'on leur faisait d'émettre leur vœu à l'avance pour la guerre. Mais telle était l'importance qu'ils mettaient à ce vœu que le comité de - correspondance de cette .société, 'qu'alors ils composaient en partie, envoya à son insu une lettre aux sociétés affiliées, pour leur annoncer que le vœu des Jaco-bins était pour la guerre.
Nos prédictions s'accomplirent : nos premiers pas furent des malheurs.
On s'en servit pour demander des lois de sang contre les soldats patriotes, pour appeler désorganisateurs ceux qui se plaignaient des généraux.
On se rappelle surtout avec quel zèle ils défendaient, ils divinisaient Narbonne. La Cour allait nous accabler, c'en était fait de la liberté, sans la victoire remportée par les fédérés et le peuple de Paris, et j'ai déjà remarqué .que.les^chefs-s'étaient opposés à cette journée.
Dumouriez était alors à la tête des armées de la Belgique. Brissot avait écrit, 'qu'après Bonnecarrère, Dumouriez était le plus vil des hommes. Dumouriez avait répondu par écrit que Brissot était le plus grand des fripons. On avait affiché que la cause du courroux que Brissot et ses partisans-montraient contre Dumouriez était le refus qu'avait celui-ci de partager avec eux les 6 millions qu'il avait obtenus pour les dépenses secrètes pendant son ministère. C'était un problème que la brouillerie qui existait alors. Mais quand Dumouriez alla en Champagne, on était fort bien ensemble, *et surtout -avec Brissot, qui pria Dumouriez d'employer Miranda dans une occasion, et c'est un fait qu'il a avoué dans le comité de défense générale. Les Prussiens qui devaient être exterminés dans cette campagne, furent reconduits polime at hors de nos frontières par Dumouriez. Ce général revint à Paris pour y vivre dans la plus parfaite intimité avec les chefs de la faction. Il part pour la Belgique, débute par des succès, et s'en rend maître. S'il eût alors attaqué la Hollande, le succès était certain. La flotte hollandaise était saisie : cette puissance eût été jointe à la nôtre : les ressources de Pitt eussent été épuisées.
On a dit que Dumouriez avait été arrêté par le conseil exécutif : mais ce qui s'est passé depuis, prouve que c'est un bruit répandu par la faction elle-même pour attacher la confiance à ce général : car s'il eût eu de véritables contradicteurs, pourquoi ne démontrait-il pas la nécessité de cette expédition à la France entière? Pourquoi n'invoquait-il pas l'autorité de la Convention nationale? Au surplus, que Dumouriez ait eu part ou non à ce retard il faudrait toujours l'imputer à la majorité des comités diplomatique et de défense générale, où l'on rejetait avec opiniâtreté les offres des députés bataves; il faudrait l'imputer à Roland, qui disait : on doit m'envoyer des députés de Savoie pour demander la réunion, je les recevrai à cheval; à Brissot qui disait aux Belges et aux Liégeois :
voulez-vous vous réunir à l'anarchie 1 On recula ainsila réunion jusqu'à ce que les despotes fussent en force pour revenir. Deux généraux traîtres commandaient notre avant-garde,; Miranda, que Brissot et Pétion avait recommandé, dirigeait le v&iqge de Maëstricht. Nos ennemis nous mettent en déroute; nos conquêtes sont .abandonnées avec précipitation; les Liégeois, nos fidèles alliés, devenus nos frères, sont de nouveaux abandonnés à leurs tyrans. Dumouriez quitte -son armée de Hollande pour se mettre à la tête de celle qui a été trahie. Dénonce-t-il les traîtres 1 Non; il loue Miranda et Egalité ; il calomnie l'armée : il fait plus il déclame avec insolence contre les nouveaux défenseurs qu'on lui envoie; il os? dire que la Providence punissait la France de ses excès; il peint les patriotes ardents comme -des scélérats; il accuse les commissaires envoyés pour la réunion; enfin, Dumouriez lève l'étendard de la révolte; et comme il est d'accord avec ceux que j'ai nommes^ il déclare qu'il vient protéger les amis de la liberté que la Convention renferme dans son sein contre les assassins, c'est-à-dire les patriotes; il ne dissimule plus le projet de rétablir la royauté; il veut gagner l'armée, après l'avoir calomniée à son insu. Fier du succès de ses trahisons, gorgé de trésors qu'il avait reçus de la Prusse et de l'Autriche, et qu'il avait volés à la France, fort de l'alliance des ennemis, il déclare qu'il ne nous reste aucune ressource; il se prévaut des troubles qui éclatent dans l'intérieur; il nous en présage de nouveaux ; il nous montre en même temps des places sans défense; il ose déclarer qu'il ne nous reste d'autre moyen que la paix; il nous propose de transiger avec les despotes; il ose s'offrir pour médiateur. Tel était le coupable secret de la conspiration tramée depuis longtemps contre la liberté. Le chef vient de la dévoiler, au moment où il a cru pouvoir le faire avec succès. Tout était préparé ; un ministre audacieux et hypocrite avait été nommé; il avait désorganisé nos armées et nos places fortes. Des troubles s'étaient élevés; il ne les avait pas calmés; il nous annonçait qu'après l'éq-uinoxe, nos départements maritimes seraient livrés aux Anglais. Encouragés par son appui, déjà les séditieux, aristocrates, royalistes levaient partout la tête. Mais le principal motif de leur hardiesse était la confiance qu'ils avaient dans leurs amis qui se trouvaient au sein de l'Assemblée, et qui, étant au comité de défense générale, gardaient le silence sur les dangers de la patrie. Ce comité, à la tête duquel étaient précisément toutes les personnes dont je viens de vous tracer l'histoire, en traçant celle des malheurs de la patrie...
Robespierre s'arrête un instant. — Allez-donc! lui disent Quelques membres.
Qn.a bien le droit, leur répond Robespierre, de réclamer quelque indulgence quand on remplit un ministère ausia pénible. Sans doute on ne doit pas être écouté favorablement quand on parle de ces hommes qui ont une influence accablante. Je ne dois pas être écouté favorablement quand je parle de ce comité de défense générale, où j'ai vu les membres attachés à Dumouriez exouser sa lettre insolente du 12 mars, en opposant -les dénonciations prétendues insensées faites
précédemment contre lui : où j'ai entendu Vergniaud prétendre que l'opinion de Dumouriez était indifférente.
Je vous donne un démenti f ormel, lui dit Vergniaud.
JEt que nous a donc dit Danton? dit un autre membre.
Il n'y a rien de commun entre la conduite d'un commissaire à l'armée de Dumouriez, qui a pu être trompé un moment sur ses desseins, et -celles des membres de cette Assemblée qui ont eu avec lui les correspondances les plus suivies. Ils ont prétendu que Dumouriez était attaché à la cause de la Révolution; qu'il serait lui-même pendu par les ennemis si la contre-révolution arrivait. Il a fallu que je répandisse qu'il y avait différentes manières de faire la contre-révolution; qu'il y avait des intrigues pro-tfondes dont Dumouriez était le principal agent ; que ces intrigues amèneraient un résultat qui ne lui serait pas funeste, -et qu'il ferait pendre les seuls amis de la liberté. J'ai entendu Gensonné s'indigner de ce qu'on donnait à Dumouriez certaines qualifications; et pour toute réponse vanter ses services et son patriotisme. Là, j'ai entendu Pétion défendre Miranda; et quand je disais que Steingel, Win-'teukof, et autres, étaient des traîtres, je les ai vus se lever en courroux pour se plaindre de ce qu'on dénonçait sans avoir aucun fait. J'ai vu'ce jour-là BrissOt détourner l'attention des mesures de salut public, et dire que la Convention n'en avait plus qu'une à prendre, qu'il fallait qu'elle fît bien vite la constitution, et qu'elle partît. Je l'ai -entendu proposer dans le comité de s'arranger sur les articles qui pouvaient faire quelques difficultés : afin, disait-il, d'éviter des débats scandaleux. Je sais bien -que c'est en vain que je dénonce les traîtres, puisque c'est à eux-mêmes que je les dénonce.
Ah! je te dénoncerai, moi! s'écrie ^Guadet.
Quelque parti que ;prenne la Convention, je suis ici armé de la vérité qui est la plus forte de toutes les puissances : je plaide la cause de la liberté, et la liberté triomphera quand les vils scélérats que je dénonce seront dans la tombe.
J'ai vu dans ce comité le ministre de la guerre apporter ries nouvelles affligeantes, et proposer des moyens illusoires concertés d'avance avec les schefs de la faction. J'ai entendu dire à Brissot qu'il était heureux que les Belges n'eusBent. pas l'esprit plus français, parce qu'en rendant la Belgique, nous pourrions obtenir la paix. Brissot fut de tout; temps le plus hardi des conspirateurs à jeter en avant les idées de transaction que vous propose Dumouriez. C'est lui qui, dans l'affaire de Louis XVI, osa demander que l'exécution du décret fût suspendue jusqu'à ce que l'opinion des puissances nous fût manifestée; c'est lui qui nous menaçait de la colère des rois, si nous posions prononcer la mort du tyran. Brissot ! combien de faits n'aurais-je pas à rappeler sur la faction dont il est un des chefs. Enfin j'ai vu ce comité s'appliquer à retarder les mesures de salut public pour donner le "temps à Dumouriez d'exécuter ses complots ; et si vous dontez qu'il ne fût composé de la faction que je vous dénonce, rap-
pelez-vous le jugement qu'en porta Dumouriez lui-même. Souvenez-vous que lorsqu'il déclarait la guerre aux agitateurs, il disait que ce co nité était bien composé, à l'exception de six ou sept membres.
Ce qui s'est passé depuis cette époque répond parfaitement à l'esprit qui a dirigé . cette faction. La Convention a fait une grande faute en envoyant Beurnonville auprès de Dumouriez; c'était un complice en ambassade auprès du chef de la conjuration car, vous n'avez pas été dupes de la comédie jouée à votre barre, où l'on a annoncé que Beurnonville avait reçu un coup de sabre; vous n'avez pas été dupes de ces lignes où Dumouriez disait que Beurnonville, son ami, était venu pour l'assassiner; mais si vous y avez cru un seul instant, cela prouve l'ascendant de la faction que j'ai tenté de dévoiler.
Plusieurs circonstances ont dérangé ici le cours de mes idées : si j'en ai présenté une partie en ce moment sans en ordonner la suite, et en résumer les conséquences, c'est que l'audace des conspirateurs m'a paru être à son comble; c'est que cette audace avec laquelle les conspirateurs cherchaient à détourner l'opinion publique de leurs complots, par une de ces farces auxquelles ils sont accoutumés, méritait d'être réprimée; j'ai cru qu'il était important de jeter en avant ces idées ; je soutiendrai cette accusation devant les tribunaux, si elle y est renvoyée; je la soutiendrai devant la Convention nationale, si elle veut s'en occuper d'une manière calme, approfondie et impartiale; surtout si elle veut m'entendre après que les accusés se seront défendus à cette tribune ; mais je soutiens que, dès ce moment, il est prouvé aux yeux de tout homme de bonne foi, que si Dumouriez a des complices, ce sont ceux que j'ai désignés; que s'il existe une faction, c'est celle que j'ai indiquée. Si j'avais composé à mon gré les comités diplomatique) et de défense générale, si j'avais disposé du ministère, je vous aurais apporté des preuves écrites émanées des coupables mêmes; j'aurais montré tout entier à vos regards ce dépôt caché dans l'antre des Tuileries, et je n'aurais pas donné le temps aux coupables de s'échapper, ou de mettre à l'abri les papiers qui pouvaient les compromettre; mais lorsqu'il est question d'une conspiration politique, qui tient aux événements, n'est-il pas d'autres preuves qui peuvent être satisfaisantes? Les faits publics : ce sont ces preuves là que j'apporte, et si elles ne suffisent pas à tel ou tel individu, elles suffiront du moins à l'opinion publique, à la nation qui, comme l'histoire, jugera sans partialité.
Il a donc existé un projet pour anéantir la liberté; Dumouriez en était le principal agent. Je cherche ses complices, et je trouve d'abord ceux qui composaient sa société intime, ceux avec qui il avait une correspondance suivie, et ce fait est prouvé à l'égard de Gensonné, à qui chaque courrier extraordinaire apportait une dépêche; je cherche ses complices, et je vois qu'apparemment c'est ce Valence qui a fui avec lui, cet Egalté fils...
Et le père! dit un membre.
Le père ! et pourquoi non ! répond Robespierre? Et il continue ainsi :
C'est apparemment le confident de toute
cette famille, Sillery qu'on a eu la bonne foi de croire patriote : comme si l'on avait oublié que c'était lui-même qui s'appelait jadis le comte de Génois; c'est apparemment cette femme intrigante et perverse, malgré ses livres sur d'éducation, et qui a suivi l'armée de la Belgique.
U n'y a pas de conspiration, ou c'est celle-là; il n'y a pas de coupables, ou ce sont ceux-là; je la développerai cette conspiration ; je dirai des faits qui la caractérisent et la démontrent; mais puisque des traîtres sont connus, vous devez renvoyer au tribunal révolutionnaire la connaissance de la conspiration de Dumouriez; vous devez le mettre en état d'accusation, ainsi que Valence, Egalité, Sillery, sa femme, et tous leurs agents.
Je n'ose pas dire que vous devez frapper du même décret des membres aussi patriotes que MM. Vergniaud, Guadet et autres : je n'ose pas dire qu'un homme qui correspondait jour par jour avec Dumouriez, doit être pour le moins soupçonné de complicité ; car, à coup sûr, cet homme est un modèle de patriotisme, et ce serait une espèce de sacrilège que de demander le décret d'arrestation contre M. Gensonné, aussi bien que je suis convaincu de l'impuissance de mes efforts à cet égard; et je m'en rapporte, pour tout ce qui concerne ces illustres membres, à la sagesse de la Convention.
(Plusieurs membres de l'Assemblée et les citoyens ont souvent interrompu ce discours par leurs applaudissements.)
Séance permanente du
La séance est reprise à 10 h. 5 du matin.
, secrétaire, donne lecture du procès-ver bal de la séance du samedi 6 avril 1793 (1).
(La Convention en adopte la rédaction.)
, secrétaire, donne lecture des lettres et adresses suivantes :
1° Lettre de Garat, ministre de Vintérieur, datée du 10 avril 1793 (2),
par laquelle il communique à la Convention l'arrêté du directoire du
département de Seine-et-Oise, lequel, d'après les plaintes des citoyens
de la commune d'Ermont, sur la longue absence, l'in-conduite, les
injustices et les violences du citoyen Carton, leur curé, ordonne qu'il
en sera référé à la Convention sur le remplacement demandé par les
paroissiens ,et que cependant l'évêque est invité à nommer un desservant
(La Convention renvoie cette lettre à son comité de division.)
2° Lettre de Garat, ministre de l'intérieur, datée du 10 avril 1793 (1), qui fait passer à la Convention une pétition des citoyens composant la cavalerie nationale du district de Dieppe, compagnie de Basqueville ; ils demandent, qu'aux termes de l'article 33 de la loi du 14 octobre 1791. section 2, il y ait deux compagnies de cavalerie dans ce district, ainsi que dans tous les districts maritimes, pour repousser l'ennemi en cas de descente. Le directoire du département de la Seine-Inférieure, sur l'avis du district, a arrêté que la loi serait exécutée incessamment.
(La Convention renvoie cette lettre au comité de la guerre.)
3° Lettre de Garat, ministre de l'intérieur (2), dans laquelle il dénonce, que par jugement du tribunal du district de Mortain, département de la Manche, dont il - donne copie, les deux sœurs d'un émigré ont été admises à partager la succession de leur frère, d'après la loi reîidue sur l'égalité des partages.
Le ministre observe que si cette loi pouvait s'interpréter ainsi, elle préjudicierait aux intérêts de la République.
(3). Je demande que le comité de législation soit chargé de nous faire un rapport sur la question de savoir si les ci-devant religieux, et religieuses doivent être exclus de l'égalité des partages.
(La Convention renvoie cette lettre et la proposition de Birotteau aux comités réunis de législation et des domaines.)
4° Lettre de Garat, ministre de l'intérieur (4), qui écrit à la Convention que le citoyen Desjobert est propriétaire d'une maison, rue de Bourgogne, faubourg Saint-Germain, à Paris, qui servait de caserne à la troupe du centre. Le ministre pense qu'il est dû à ce citoyen une somme de 385 liv. 5 s. 6 d., pour réparations locatives à faire à ladite maison. Les titres, à l'appui de cette demande, accompagnent la lettre du ministre.
(La Convention renvoie cette lettre au comité des finances.
5° Lettre de Garat, ministre de l'intérieur (5), qui consulte la
Convention sur la question de savoir si un notaire, un huissier, maire
ou procureur de commune, peuvent exercer leur profession personnelle,
relativement à la vente des effets mobiliers, des mai-
(La Convention renvoie cette lettre au comité de législation pour faire un prompt rapport.)
6° Lettre de Louis Lestrangè, adjoint de la quatrième division au département de la guerre, pour demander que sa conduite soit sévèrement examinée ; il proteste de son dévouement aux intérêts de la République.
(La Convention renvoie la lettre au comité de l'examen des comptes. )
7° Lettre des citoyens Julien (de Toulouse),^ Bourbotte et Prieur (de la Marne), commissaires de la Gonvention nationale à Orléans, datée du 10 avril 1793, par laquelle ils rendent compte de l'état de la ville d'Orléans, et des mesures qu'ils ont prises pour sa tranquillité ; ils annoncent qu'ils font traduire au tribunal extraordinaire six individus prévenus d'être les auteurs de l'assassinat de Léonard Bourdon, ainsi que Boucher, dont ils ont parlé dans leur dernière lettre. Ils feront successivement transférer les autres prévenus, lorsque l'instruction sera complète ; ils envoient à la Convention copie de la procédure contre Boucher, ainsi que les différents arrêtés qu'ils ont pris.
(La Convention renvoie la lettre au comité de sûreté générale.)
8° Lettre du citoyen Baudry, commandant militaire de Laon, en date du 8 avril 1793, qui promet de défendre avec courage la place qui lui est confiée. Il envoie à la Convention les proclamations du traître Dumouriez adressées tant à l'armée qu'aux départements du Pas-de-Calais et du Nord.
(La Convention renvoie la lettre au comité de Salut public.)
9° Lettre de Roland, ancien ministre de l'intérieur, par laquelle il sollicite l'examen et l'apurement de ses comptes et demande que les commissaires, nommés par la Convention, pour la levée des scellés apposés sur ses papiers, s'occupent incessament de leur mission : elle est ainsi conçue (1) :
« Le 10 avril. « Au Président de la Convention nationale.
« En quittant le ministère, j'ai cédé, non à la peur, sentiment auquel je suis inaccessible, mais aux circonstances qui me la isaient une loi de me retirer, parce que j'étais un prétexte de division dans le Corps législatif, et que l'altération de la confiance dans Paris, produite par les clameurs de la malveillance m'ôtait les moyens d'y faire tout le bien dont ma place m'imposait le devoir.
« Après l'administration la plus franche et la plus publique, j'ai fourni
les renseignements les plus détaillés sur l'état de situation du
département qui m'avait été confié, et les
« J'ai sollicité cet examen par tous les motifs que fournissent la raison, la justice et le besoin ; je l'ai pressé avec la fermeté .de l'innocence qui soupire après sa manifestation, avec l'impatience de l'homme de bien, indigné de languir au milieu des soupçons cruellement amoncelés sur sa tête avec la fierté de l'homme libre dont on entrave la marche, dont on cherche à flétrir la réputation, et qu'on opprime gratuitement.
( Trois mois environ se sont écoulés. Durant cet intervalle je n'ai cessé d'être l'objet de quelques dénonciations ; soit dans cette société devenue fameuse par les excès de ce genre, et dans le sein de laquelle des cris féroces se sont élevés plusieurs fois pour demander ma tête ; soit à la tribune de la Convention, soit dans les lieux publics, où les prédicateurs du pillage et du meurtre avaient soin de me présenter à la vengeance populaire, toutes les fois qu'un mouvement d'insurrection paraissait se préparer. Enfin, les scellés ont été mis sur mes papiers par ordre du comité de défense générale, à la suite d'une vive discussion entre l'impartialité de quelques hommes sages et l'acharnement de mes éternels accusateurs, qui voulaient -me faire mettre en état d'arrestation. Je n'avais eu à répondre que par le démenti le plus formel de l'acte absurde, soi-disant énonciatif de mes crimes, dressé par les soins de Collot, à la satisfaction des Jacobins, et à la veille de la-conspiration du 10 mars; je me suis applaudi d'une apposition de scellés qui devait nécessiter un utile examen ; j'ai donc pressé de nouveau pour l'obtenir, et si la Convention a fait droit à ma demande -en nommant deux commissaires, ces commissaires ne se sont point encore mis en peine de remplir leur mission.
«c Cependant on s'agite dans les sections; celle de la Halle-aux-Blés vient d'arrêter une pétition qui a pour objet de demander contre moi le décret d'accusation, en me prêtant des délits, ramas informe de calomnies cent fois répétées,; cette pétition est colportée avec chaleur pour obtenir une majorité qui la fasse présenter avec poids. Dans toute autre circonstance, je sourirais de pitié à ces efforts de la haine et de l'aveuglement ; mais dans une situation agitée, où le peuple, souvent trompé, presque toujours mal instruit, ne sait plus comment asseoir son jugement et reposer sa confiance, où ses flatteurs cherchaient à profiter des revers pour tenir école d'assassinat, et en professer la doctrine sous le nom de vengeance ; où l'emportement a été jusqu'à méconnaître la dignité de la représentation nationale, et menacer les délégués du peuple au milieu de leurs délibérations ; dans un tel état de crise, on peut tout craindre ou tout attendre, surtout lorsque des Trahisons ^véritables ont donné lieu d'établir des formes et le tribunal dont la rapide décision, salutaire Gontre le crime, peut offrir des facilités à la méprise ou aux préventions.
« Je n'écris point aujourd'hui pour me soustraire à la suite des événements ; leur marche
et leur puissance extrême entraînent tout dans les révolutions ; mais tandis que l'ambitieux les calcule, les saisit ou les fait exciter pour son profit, l'nomme de bien les médite pour son instruction ; il les présente ce qu'ils sont ponr éclairer le public ; il prédit leurs résultats pour inviter à prévenir ceux-ci s'ils doivent être fâcheux ; et, dans tous les cas, il prend date de la vérité, comme de son courage à la dire, pour sauver sa mémoire de l'opprobre, et servir à la génération suivante.
« C'est ainsi, je le sais, que j'ai mérité la haine qui me poursuit encore, et c'est ainsi que je la démasquerai jusqu'à mon dernier soupir. Je demande pour la cinquième fois l'appurement de mes comptes, et l'examen de mon administration; je demande la levée des scellés et l'examen de mes papiers; je demande que ces mesures précèdent la décision de l'Assemblée sur la pétition qui doit solliciter contre moi le décret d'accusation.
« Je déclare de nouveau n'avoir rien à redouter de l'oeil sévère de la justice ; je prends acte des réclamations nombreuses que j'ai faites pour l'attirer et la .fixer sur ma gestion; j'ajoute franchement que l'inutilité jusqu'à ce jour de mes pressantes réclamations, me paraît Jaire partie du .système de persécution dont je suis l'objet, et qui me semble dirigé contre les hommes qui ont mis quelque force de caractère à l'austérité des principes. Je finirai par en appeler à la postérité, quelque .puisse être la conduite de mes juges et de mes contemporains à mon égard : dédommagé par ma conscience, même de l'injustice, si je devais l'éprouver, et fier d'avoir donné un assez grand exemple qui ne sera pas sans utilité.
« Signé : Roland. »
(La Convention renvoie cette lettre au comité de l'examen des comptes. )
Un membre (1) demande que la Convention nomme deux commissaires naur remplacer les citoyens Thuriot et Laplaïgne, qui sont occupés à cette heure à d'autres fonctions et ne peuvent rendre au comité de l'examen des comptes les services qu'on attendait d'eux.
présente pour ces fonctions les citoyens Pelé et Brival.
La Convention nomme pour commissaires les citoyens Pelé (Loiret) et Brival, pour rem, placer les citoyens Thuriot et Laplaïgne, qui avaient -été nommés précédemment.
10° Lettre du général Ligneville (2), datée de l'Abbaye, le 9 avril 1793, qui demande à être entendu à la barre, afin de dissiper les soupçons sur sa conduite, et donner des éclaircissements relatifs à la sûreté et à la défense de la République.
(La Convention renvoie la lettre au comité de Salut public.)
11° Lettre de Lebrun, ministre de la guerre par intérim (3), datée du 10
avril, 'qui soumet à la Convention les brevets de pensions
(La Convention renvoie la lettre aux comités des finances et de liquidation réunis.)
Le citoyen Camille Tessière, officier municipal et député extraordinaire de la commune de Grenoble, est admis à la barre.
Il s'exprime ainsi (1) :
Citoyens représentants,
Yous voyez devant vous un député extraordinaire de la commune de Grenoble. Depuis l'instant heureux où mes concitoyens arborèrent les premiers l'étendard de la liberté, la paix, l'ordre, l'amour de la liberté et de l'égalité ont régné parmi eux : tant qu'ils ont eu du pain, ils ont conservé cette mâle tranquillité qui caractérise ,1e vrai républicain. L'extrémité de leurs besoins a pu seule les contraindre à suspendre un moment vos importants travaux.
Vers la fin du mois dernier, l'excessive cherté des grains fournit aux aristocrates les moyens d'égarer le peuple : il y eut une insurrection bientôt apaisée par les soins des magistrats et l'excellent esprit des habitants.
Le pain valait alors 7 sols 6 deniers la livrer dans un pays où il était inouï de le payer plus de 4 sols.
La municipalité délibéra dès lors un rabais en faveur du pauvre sur le prix du pain, rabais dont la perte serait supportée par le riche et, depuis, vous avez consacré par un décret cette mesure de justice.
Ce matin, je reçois un courrier extraordinaire. Il me force de paraître devant vous. Le pain coûtait à son départ 9 sols 9 deniers la livre, et le marché ne suffisait pas aux consommations. La viande était montée de 8 sols 6 deniers à 12 sols, poids de marc. La disette est telle que la municipalité a défendu qu'il fût fait d'autre pain que du pain bis. Voici les pièces qui constatent cette hausse alarmante. Les symptômes de la famine épouvantaient les habitants. Les plus grands troubles menaçaient ma patrie. La municipalité, le district, le département s'unissaient pour les prévenir. Us seront secondés par le zèle patient des bons citoyens-; mais leur angoisse ne peut durer plus longtemps sans amener le bouleversement de cette ville.
Trente mille recrues s'assemblent dans ses murs. Le département du Mont-Blanc qui, avant la Révolution, ne pouvait en tirer ses grains, les y achète presque tous. Les départements voisins sont nourris en partie par le marché de Grenoble. Les étapiers y font chaque jour d'énormes provisions ; enfin les armées ont dévoré les subsistances qui, dans la paix, affluaient sur son marché.
Représentants, grâces vous soient rendues de ce que vous avez décrété la
taxe de guerre ! Grâces vous soient rendues du décret qui doit établir
l'équilibre entre le prix des subsis- j tances et celui du salaire ! La
commune de
Gh ! il est temps que cette classe généreuse qui a payé de son sang une Révolution qui ne coûte à l'opulent qu'une part de son superflu, il est temps que les Sans-Culottes reçoivent légalement de vous leur nécessaire.
Représentants du peuple, apaisez sa faim avec le superflu des riches ; il leur en coûtera peu, car il ne faut au peuple, pour achever la Révolution, que du fer ; il ne demande pour en supporter le poids que du pain.
La commune de Grenoble demande pour pourvoir aux subsistances, une avance d'un million, remboursable par la vente des grains et une taxe sur les riches.
Le pétitionnaire dépose sur le bureau la pétition de la commune de Grenoble et en demande la lecture.
(La Convention décrète que la lecture en sera faite à l'Assemblée.)
, secrétaire, donne connaissance-de cette pétition à la Convention nationale ; elle est ainsi conçue i
I
Lettre de la commune de Grenoble à la Convention nationale (!).
« Citoyens législateurs,
« La commune de Grenoble est au moment d'éprouver les liorreurs de la famine.
(« Placée entre deux départements dépourvus de ressources, le Mont-Blanc et celui des Hautes-Alpes, elle voit tous les jours épuiser ses marchés pour les alimenter.
« Ce n'est pas tout ; les fournisseurs de l'armée des Alpes, en faisant leurs achats dans le département de l'Isère, ont, par ce moyen, tari les sources qui fournissaient aux marchés de Grenoble.; ce n'est donc qu'au loin qu'on peut à présent parvenir à s'approvisionner ce qui nécessite des dépenses extraordinaires.
« Une autre cause vient concourir encore à absorber le peu de grains qui arrive dans les marchés de Grenoble ': les habitants des montagnes, qui avoisinent cette ville, vivaient avec du pain d'avoine ; ils ont trouvé à vendre avec avantage cette -espèce de grain aux fournisseurs de l'armée sans prévoir qu'ils en auraient besoin pour vivre ; aujourd'hui, forcés par ce besoin impérieux, ils viennent s'approvisionner sur les marchés de Grenoble et, ne trouvant pas d'avoine, ils achètent du froment.
Enfin, il doit se faire à Grenoble un rassemblement à peu près de trente mille bammes provenant des nouveaux recrutements et ce prodigieux accroissement de consommateurs va sans doute enlever le peu de pain qui pourra se trouver chez les boulangers.
« Citoyens législateurs 1 Le conseil général
Les maires, officiers municipaux et notables composant le~conseil général de la commune de Grenoble;
« Signé : Barral, maire; Guédy, officier municipal ; Périer, officier municipal; Marcel, officier municipal; Accarier, officier municipal; Valliér, officier municipal; Trouilloud, officier municipal; Grange, notable; Pantin, notable; Férrouillat, Ducruy, notable ; Botut, notable ; Lamou-rotjx, notable; Royér-Désgrangés , noble ; Michal, notable; Bartholon, procureur de la commune. »
II
Extrait du registre des délibérations de la commune cle Grenoble (1).
« Du dimanche sept avril mil sept cent quatre-vingt-treize, l'an II de la République, à sept heures du matin, le conseil général permanent de la commune de Grenoble où étaient présents les citoyens Barral, maire; Périer, Marcel, Rafin, Dalban, Charvin, Ros-set, Guéry, Gonnet, Accarier, Hache, Olla-gnier ,Yallier et Trouilloud, officiers municipaux; Bonin, Dautard, Lamouroux, Artaud, Brettou, Hélie, Belair, Botut, Couturier, Navizet, Duport, Férrouillat, Meyraud, Berthou, Cheminade, Fantin, Michal, Grange, Perrotin, Laurent, Mallein, Pyot, Royer-Desgranges, 'Buisson, Ducruy, Le-maistre, notables; Bartholon, procureur de la commune; Blanc, substitut;
« Yu le besoin urgent de grains dans lequel fce trouve la commune.
« Le procureur de la commune ouï, signé Bartholon, procureur de la commune.
« Le conseil général a délibéré qu'il sera fait une adresse à la Convention nationale, pour lui demander l'avance d'un million, à l'effet de pouvoir s'approvisionner des grains
nécessaires à la subsistance des habitants de la commune et qu'un courrier extraordinaire lui sera aussitôt dépêché. - « Le conseil général a aussi délibéré que deux députés seront nommés et partiront dès demain en poste pour se rendre dans les départements de Rhône-et-Loire, Saône-et-Loire et autres, à l'effet de faire des marchés de grains, froment et seigle, pour approvisionner la ville; et pouvoir leur est donné de contracter au nom de la commune, aux prix, clauses et conditions qu'ils trouveront le plus convenable, et à l'instant les citoyens Périer et Dalban, officiers municipaux, ont été nommés et ont accepté.
« Le conseil général a encore délibéré que les boulangers de la commune ne feraient, à compter de ce jour, qu'une sorte de pain, c'est-à-dire le pain bis.
« Et ont les délibérants signé.
« Pour extrait conforme, u Signé : Nyer, greffier. »
«i Yu la délib(érarf>io(n pi-dessus et oujï le procureur syndic;
« Le directoire du district, considérant que tous les faits qui ont déterminé les mesures délibérées par le conseil général de la commune de Grenoble, sont constantes; que l'exécution de ces mesures ne saurait être trop prompte pour assurer des subsistances et la tranquillité publique aux départements de l'Isère, des Hautes-Alpes et du Mont-Blanc, surtout à la cité de Grenoble;
« Est d'avis, d'après ces considérations, d'homologuer ladite délibération pour être exécutée suivant la forme et teneur.
« Fait à Grenoble, en directoire de district, le 7 avril 1793, l'an II de la République française.
« Signé : Broivér, président; Giroud, Fontaine, Hilaire; Charpin, secrétaire. •»
« Yu la présente, l'avis du directoire du district de Grenoble, ouï le procureur général syndic;
« Le directoire, considérant que les mesures délibérées par le conseil général de la commune de Grenoble témoignent hautement le vif intérêt qu'il prend à ses concitoyens et et à la chose publique;
« Que ces mesures peuvent seules garantir la cité et ses environs d'une pénurie qui rendent toujours plus menaçantes les conjonctures actuelles;
« A arrêté qu'il homologue la délibération de ce jour du conseil général de la commune de Grenoble et qu'elle sera exécutée selon la forme et teneur.
« Fait en séance publique du directoire du département de l'Isere, le 7 avril 1793, l'an II de la République française. « Signé : Drublet, vice-président ; Decombe rousse, Puis, Royer, Yignon. »
répond à l'orateur et lui accorde les honneurs de la séance.
(La Convention accorde la demande formulée par la ville de Grenoble.)
« Sur la pétition du conseil général de la ville de Grenoble, la Convention nationale décrète :
« Qu'il lui sera prêté un million pour être employé à l'achat de subsistances; que cette somme sera prise sur le recouvrement des contributions directes de la même ville pour l'année mil sept cent quatre-vingt-douze et années antérieures, et que le remboursement sera fait dans le courant de l'année mil sept cent quatre-vingt-treize par le produit des reventes, et, en cas d'insuffisance, par addition de l'impôt progressif. »
, secrétaire, poursuit la lecture des lettres et adresses envoyées à l'Assemblée :
12° Lettre du citoyen Jacob Dupont, député d'Indre-et Loire (2), qui demande une prorogation de congé.
Loches,
« Citoyen Président,
( Je m'empresse d'obéir au décret de la Convention relatif au rappel des députés absents, quoiqu'il ne me soit connu que par les journaux. L'état de délabrement où était ma santé, lorsque la Convention m'a accordé un congé jusqu'à son parfait rétablissement, et l'état où elle se trouve aujourd'hui exigeraient que je restasse éloigné de mon poste, jusqu'à la fin de ce mois. Je prie la Convention nationale de vouloir bien me le permettre.
« Signé : Jacob Dupont. »
(La Convention accorde la prorogation demandée. )
13° Lettre des membres de la société des Amis de la République de la commune de Sens, qui font part à la Convention de plusieurs actes de patriotisme qui ont eu lieu dans cette commune et lui transmettent un extrait des registres de leurs délibérations où ces faits sont constatés; cet extrait est ainsi conçu :
Extrait des registres des délibérations de la
société des Amis de la République, séant à
Sens, département de l'Yonne (3).
Séance du 21 mars 1793, l'an II de la République française.
(( Le citoyen Bouvier, âgé au moins de 60 ans, membre de cette société,
ayant déjà donné des preuves non équivoques de civisme et de courage en
s'enrôlant sous les drapeaux de la liberté dans le 1er bataillon de
l'Yonne, qù'il n'a quitté, à son grand regret, que parce que les forces
lui ont manqué pour continuer la campagne. Ce respectable citoyen monte
à la tribune pour rendre compte d'un fait qui s'est passé sous ses yeux
à Soucy, de l'impres-
( Le jeune Serré, unique ressource d'un père et d'une mère affligés de toutes sortes d'infirmités et dans la plus grande misère, ayant déjà deux frères à l'armée, a beau représenter aux autres garçons ses concitoyens, assemblés pour le recrutement, qu'il attend de leur humanité qu'ils ne le forceront pas à tirer, qu'ils ne l'exposeront pas à voir périr de cnagrin un père et Une mère accablés de maux et dans la plus affreuse indigence, le pauvre jeune homme ne trouve pas une âme sensible au milieu de ses camarades : l'égoïsme l'emporte sur l'humanité. Le malheureux jeune homme, obligé de se soumettre au sort, tire le billet qui met toute la famille au désespoir. La belle âme du citoyen Bouvier est déchirée à ce spectacle. Il se souvient de son ancienne valeur, ramasse toutes ses forces, son courage lui fait oublier son âge; il dit à cette famille infortunée : Serré ne partira pas, je pars pour lui.
« Tous les membres de la société, pénétrés de la générosité d'un pareil procédé, se sont écriés : Non, Bouvier ne partira pas; il a plus de courage que de forces; c'est à nous à ralentir son zèle. Il est arrêté qu'à l'instant il sera ouvert une souscription au profit du citoyen qui voudra remplacer le jeune Serré. Le résultat de la collecte s'est monté à cent quatre-vingt-huit livres quinze sols, auxquels le citoyen Aqueloque a joint l'offre d'un habit complet.
« Un membre de la société, le citoyen Au-blet, sous-diacre, s'élance à la tribune, non pour annoncer que le fruit de la collecte qui venait d'être faite serait pour lui, mais pour rendre hommage à l'action généreuse du citoyen Bouvier, et pour exécuter lui-même le projet que ce bon vieillard avait conçu. Il s'offre rpour remplacer le jeune Serré, se fait une fête d'en aller annoncer la nouvelle à cette famille éplorée et de verser dans son sein la somme entière résultant de la collecte.
« Le citoyen Magin, membre commissaire du département, monte à la tribune, annonce combien il lui serait doux de remplir en ce moment les fonctions de son ministère. Il demande, en conséquence, de faire à l'instant l'acte de remplacement et de l'envoyer au département. U fait aussi la motion qu'un extrait du procès-verbal de la séance soit envoyé à la Convention; le tout est arrêté à l'unanimité.
« Un membre ayant observé que le maire de Soucy était dans les tribunes, il est appelé dans l'Assemblée, y reçoit le baiser fraternelle du Président, et est invité à se joindre au citoyen Aublet et à tous ceux des membres de la société qui voudront l'accompagner pour aller à Soucy annoncer cet heureux dénouement à la famille Serré.
« Certifié conforme à Voriginal, par nous, président et secrétaire de la société des amis de la République, séante à Sens.
« Signé : Desmaisons, vice-président ; G. Gui- charel, secrétaire. »
(La Convention décrète la mention hono-rable de cette lettre et en ordonne l'insertion auBulletin.)
Le citoyen Dalbarade, nouveau ministre de la marine, entre dans la salle et demande la parole (1).
La parole est au ministre de la. marine;
Dalbarade, ministre de la marine : Citoyens représentants, j'aurais calculé dans d'autres moments le poids que vous venez de m'imposer, mais la République est en danger; vous m'appelez pour concourir à son salut, je ne calcule plus que mon zèle et* mon courage : ils sont au-dessus des difficultés.
« Toutes les vertus du patriotisme sont dans l'âme des braves marins; ils n'ont besoin que d'une administration juste. Appuyez-moi, jer vous seconderai de toutes mes-facultés; et vous verrez, je l'espère, la marine active et florissante, (Applaudissements.)
reçoit le serment du ministre.
(La Convention ordonne l'impression de son discours. )
(2). Vous aviez décrété que les adjoints au ministère de la marine et de la guerre seraient gardés à vue. Le citoyen Dalbarade était de ce nombre : vous lui avez donné votre confiance, il faut cesser de le garder à vue;
(La Conveation décrète que le citoyen Dal-barade, ci-devant adjoint, et actuellement" ministre de la marine, ne sera plus gardé à vue (3).
, secrétairereprend la lecture des lettres et adresses envoyées à l'Assemblée :
14° Lettre du citoyen Guillerault, député du département de la Nièvre,, qui demande un congé de huit jours pour aller porter quelques consolations dans sa famille; cette lettre est ainsi conçue (4) :
Paris, le
« Citoyen Président,
« Une lettre que je viens de recevoir de chez moi m'apprend que ma femme
est dangereusement malade et qu'elle désire me voir. Jaloux de rester
ferme au poste honorable que m'ont confié mes concitoyens, je ne me
permettrais pas de solliciter un congé auprès de la Convention nationale
dans les moments actuels, si je n'y étais déterminé par les pressants
motifs de la nature et de l'humanité souffrante. J'ose donc espérer,
citoyen Président, que la Convention nationale ne refusera pas de
m'accorder un congé pour huit jours et je lui engage ma parole sacrée
que, quel que soit l'événement de la maladie de mon épouse, j'exécuterai
rigoureusement les ordres de l'Assemblée auprès de laquelle je
« Signé : Guillerault., député du département de la Nièvre. »
(La Convention accorde le congé.)
15? Lettre des citoyens républicains et volontaires de la commune de Sainte-Marie-d'Oléron, département des Basses-Pyrénées, qui partant pour les frontières, envoient une adresse à la Convention pour jurer sur le corps sanglant du vertueux Lepeletier une haine implacable aux tyrans qui sont tous les complices de l'assassin Pâris; cette lettre est ainsi conçue (1) :.
Le
« Citoyens représentants,
« Les rois sont pour les peuples ce que sont pour la nature les fléaux dont les ravages se prolongent après leurs funeste existence; périssent donc les rois, périsse jusqu'à leur mémoire.
« Et toi! oh! Lepeletier, qui es tombé sous le fer assassin d'un satellite de Capet, ta mémoire vivra d'âge en âge, ton sang va cimenter l'édifice de la liberté universelle; toutes les nations te devront l'apothéose.
« Législateurs, vous avez juré sur la plaie encore fumante du généreux martyr de la liberté de sacrifier toutes les haines privées au grand intérêt public; et nous, nous avont^ juré sur cette même plaie, d'éterniser notre haine contre les tyrans; ils sont tous les complices de L'infâme Pâris; ils sont tous teints du sang de Saint-Fargeau. Nous en ferons une hécatombe aux mânes de notre représentant immolé.
« Nos-serments ne seront pas vains; les ennemis sont là... nous prenons les armes, nous marchons... Tyrans- de l'Espagne, tremblez.
« Les citoyens républicains et volontaires de la comrrmne de Saïnte-M arie-d' Oléron.
(( Signé : Bordes,, président; Fordes, secrétaire. »
(La Convention décrète la mention honorable de cette lettre et en ordonne l'insertion au Bulletin. )
JJn ancien capitaine du 3e bataillon de Pans, faisant partie de Varmée de Dumouriez, se présente à la barre (2).
U dépose sur le bureau un mémoire sur l'élection des officiers, dont il demande le renvoi au comité de la guerre.
répond au pétitionnaire et lui accorde les honneurs de la séance.
(La Convention renvoie le mémoire au comité de la guerre (3).
, secrétaire, donne lecture dune lettre du citoyen Louis-François-Joseph
Bour-
De l'Abbaye, ce
« Citoyen Président,
« J'ai appris que les scellés étaient apposés chez moi. à Paris, notamment sur ma caisse rue Hillérin-Perrin et chez mon comptable, dans ma maison, ce qui empêche de pouvoir payer mes1 créanciers de toutes espèces.
« Trouvez bon, citoyen Président, que j'en demande la levée, au moins sur cette partie, afin de ne point arrêter le courant de mes paiements.
« Signé : L.-E.-J. Bourbon. *
P. S. — Vous avez dû recevoir, citoyen Président, à l'ouverture de la séance, une lettre de moi, relativement à ma maladie; je vous conjure d'en donner connaissance à la Convention..
« Signé : Louis-François-Joseph Bourdon.
le jeune (2) observe que le comité-de défense générale est instruit qu'il existe dans la maison de Conti une armoire secrète qu'il est bon de visiter.
(La Convention décrète que deux membres du comité de surveillance assisteront à cette levée de scellés.)
(3). Je demande à ce sujet que le conseil exécutif rend compte dans le jour, de l'exécution du décret qui ordonne la translation de tous les Bourbons à Marseille.
(:La Convention décrète cette proposition qui est appuyée par Clauzel.)
Le même secrétaire continue la lecture des lettres et adresses envoyées à l'Assemblée :
16° Lettre des citoyens Isoré et Manduyt, commissaires de la C onvention dans les départements de VOise et de Seine-et-Marne; ils instruisent la Convention de la destitution qu'ils viennent de prononcer contre Godart, commissaire, faisant les fonctions de procureur général syndic du département de Seine-et-Marne, pour cause d'inexactitude ; cette lettre est ainsi conçue (4) :
Meaux, le
« Citoyen Président,
« Nous nous empressons d'informer la Convention nationale qu'après avoir
parcouru les cinq districts qui composent le département dé
Seine-et-Marne et avoir reconnu l'inexactitude à son poste et
l'incivisme de Godart,
« Les commissaires de la Convention dans les départements de VOise et de Seineret-Marne.
« SignéIsoré, Mauduyt. »
(1). Sans prendre parti dans le cas-actuel, j'observe à la Convention que plusieurs commissaires se sont permis' de destituer sur les plus légers soupçons, des officiers de marine et autres fonctionnaires fort utiles à leur poste. Je demande à ce qu'on n'adopte pas ainsi de piano tous les arrêtés rendus en notre nom.
Plusieurs membres réclament l-'ordre du jour sur la proposition de Mellinet, motivé sur ce que les destitutions prononcées par les commissaires ne sont que provisoires.
(La Convention nationale approuve la conduite de ses commissaires.)
17° Lettre des administrateurs du directoire du département du Finistère (2), qui annoncent que ce département, dépourvu de secours étrangers, a envoyé 2,(J00 hommes dans les départements du Morbihan, de la Loire-Inférieure et de Maine-et-Loire. Us ont rétabli la paix dans le premier, et travaillent à là rappeler dans les autres. Les ennemis ont cru que c'était le moment d'attaquer le Finistère lui-même ; ils ont soulevé contre les villes plus de 8,000 cultivateurs, à la tête desquels étaient des prêtres et des ci-devant nobles. Tout le Finistère s'est levé aussitôt sous les ordres du général Canclaux, qui est parvenu à réduire les rebelles.. La ville de Brest, pendant quelques jours,, a été gardée par des vieillards et des enfants. Plus de 400 rebelles ont été tués dans les différents combats ; on a fait plus de 300 prisonniers. Ceux qu'on avait égarés ont ouvert les yeux, et se sont rendus à la raison. C'est au milieu de ces inquiétudes que s'est fait le recrutement, qui n'en a été ni retardé, ni affaibli,
Le département du Finistère a pris pour l'avenir les mesures les plus sages et les plus vigoureuses.
(3) propose de décréter que le département du Finistère a bien mérité de
la patrie, que l'insertion de ces détails sera faite au Bulletin, qui
fera mention honorable au procès-verbal de la bonne conduite du général
Canclaux,. et qu'un extrait
(La Convention adopte ces différentes propositions.)
18° Lettre du procureur syndic du département de l'Yonne (1), qui envoie à la Convention un arrêté dte ce département, auquel sont jointes des pièces concernant des propos inciviques tenus par le citoyen Pelletier, maire de Nailly.
(La Convention renvoie la lettre au comité de sûreté générale.)
19° Adresse de Louis-Joseph Grimont, capitaine du régiment de Narnur (2) ; il expose qu'il a été blessé à l'affaire du 17 au 18 mars, qu'il est à Paris pour le rétablissement de sa santé, et avec la permission du général; il demande que la somme de 781 livres lui soit payée pour appointement, fourrages et avances d'equipement, dont il est en retard par les obstacles que le traître Dumouriez a voulu mettre à l'organisation du corps. Il demande du service dans un autre corps de cavalerie.
(La Convention renvoie la lettre au comité de la guerre.)
20° Adresse des commissaires de la commune de Longjumeau (3), qui exposent à la Convention la pénuerie extrême des subsistances où se trouve leur arrondissement; ils craignent qu'il n'en résulte du trouble, et que leur vigilance, quoique suffisante jusqu'à présent pour le prévenir, ne vienne à succomber.
(La Convention renvoie la lettre aux comités des secours publics et d'agriculture réunis.)
21° Lettre du citoyen Leveneur, chef de division (4), qui se plaint à la Convention -de la mesure prise contre lui et demande justice; cette lettre est ainsi conçue :
Rouen, dans la maison commune où je suis détenu prisonnier, S avril, l'an II de la Répu-plique.
« Citoyen Président, j'ai exposé cent fois mes jours depuis un an, en combattant pour la liberté et je perds la mienne. Je suis le seul officier qui ait osé déserter le camp du traître Dumouriez. Dampierre, qui n'avait rien à craindre de lui dans une place forte, Dampierre qui a harangué les troupes avec Dumouriez, Dampierre est général et je ne puis être libre. Pour surcroît de douleur, ma femme et mes enfants sont en otages, et si le féroce Autrichien fait massacrer vos commissaires... je frémis d'y penser. C'est là la justice que l'on exerce contre un citoyen fidèle, dont l'armée respecte, j'ose le dire, le civisme et la bravoure.
( Signé : LavenéUR, chef de division. »
(La Convention renvoie la lettre au comité de Salut public.)
(La Convention renvoie cette adresse au comité des secours.)
, au nom du comité de la guerre, fait un rapport et présente un projet de décret pour donner aux troupes à cheval une augmentation de solde dans la même proportion que celle accordée à l'infanterie. Le projet de décret est ainsi conçu (2) :
« La Convention nationale décrète que les troupes à cheval de la République française recevront une augmentation de solde dans la même proportion que celle accordée à l'infanterie, et que cette augmentation datera pareillement du 15 mars.
« Qu'il n'y aura qu'une classe de capitaines dans les troupes à cheval^ et que leurs appointements, ou solde, seront de 2,500 livres pour chaque année. »
(La Convention adopte ce projet de décret.)'
, au nom du comité de Salut public, donne lecture d'un rapport et (présente un projet de décret relatif aux forges de la Ghaussade; il s'exprime ainsi (3) :
Citoyens, avant de commencer la discussion sur la vente du numéraire, je suis chargé par votre comité de Salut public de vous proposer un projet de décret ou de règlement relatif aux forges de la Chaussade qui étaient sous la surveillance du ministre des contributions. Votre comité vous propose, pour des raisons que vous connaissez tous, de les mettre sous la surveillance du ministre de la marine.
Voici le projet de décret (4) :
« La Convention nationale après avoir entendu le rapport de son comité de Salut public, décrète que l'Administration des forges de la Chaussade, qui est sous la surveillance du ministre des contributions publiques, sera sous la surveillance du ministre de la marine.
(La Convention adopte ce projet de décret.)
, au nom du comité des finances, soumet à la discussion le titre I du
projet de décret (5) tendant, à prohiber la vente du numéraire et à
augmenter et favoriser la circulation des assignats; il s'exprime ainsi
(6) : Citoyens, le projet qui vous fut présenté,
Il vous reste maintenant à examiner si le département du service public peut se passer de ce commerce; si vous permettez la vente du numéraire et cet agiotage qui se fait perpétuellement entre les assignats et le numéraire. L'ajournement a réveillé les spéculations et on est occupé à agioter toujours, comme si on n'attendait pas le projet de loi.
On a demandé de défendre le signe monétaire, c'est-à-dire qu'on ne peut jamais solder avec le numéraire en circulation. Voilà un système qui a été mis en avant par le ministre des contributions publiques, qui a été soutenu dans le comité et à l'Assemblée... _
(1). J'annonce à la Convention que le commandant de la ville de Lille a fait partir Philippe Devaux pour le faire conduire au tribunal révolutionnaire. Voici également des papiers trouvés sur lui; je vous propose de renvoyer le tout au comité de Salut public.
(La Convention décrète cette proposition.)
, rapporteur, poursuit : Ce système consiste à lever toute la valeur de la monnaie et à ne la rendre que comme une matière de métal.
A bien examiner cette question, il serait possible de pouvoir faire cette opération; mais dans ce moment, où les ennemis de la chose publique font tous leurs efforts pour la perdre, malgré que vous changiez la valeur fictive d'un écu de 6 livres, vous ne parviendrez pas à empêcher que cet écu ne valût 6 livres, et on ne pourrait pas faire que les assignats ne perdent point.
Ce système, qui a été soutenu à l'Assemblée nationale, n'est point à l'intelligence de tout le monde : il n'y a personne qui ne mette une idée à un écu de 6 livres, comme une idée monétaire, et lorsque l'écu de 6 livres augmente en valeur, on ne manque pas de dire que l'assignat perd en proportion.
On a avancé que si nous empêchions ce commerce, nous n'aurions pas de numéraire pour nos échanges avec les étrangers, et que dès lors le gouvernement, qui a besoin de tirer du suif, du bois, du chanvre de l'étranger, ne trouverait point à les payer.
La question relativement au gouvernement est décidée. Vous avez décrété
que tous les
donne lecture du titre 1er du projet de décret :
La Convention nationale, après avoir entendu
le rapport de son comité des finances, décrète :
TITRE Ier.
Art. 1er. A compter de la publication du
présent décret, la négociation publique des lettres de change, billets
et autres effets de toute nature sur des places de commerce ou villes
situées dans les pays gouvernés par les personnes qui sont en guerre
avec la République, est prohibée; en conséquence, il est défendu de
coter, publier et imprimer le cours des changes avec ces places ou
villes.
Art. 2. Ceux qui contreviendront aux dispositions de l'article précédent, seront poursuivis à la requête et diligence du procureur de la commune, et condamnés, par le juge de paix, à une amende qui ne pourra être moindre de 2,000 livres, laquelle sera perçue au profit de la nation par le receveur du droit d'enregistrement.
Art. 3. A compter de la publication du présent décret, la vente du numéraire dans toute l'étendue du territoire français ou occupé par les armées françaises, sera défendue sous peine de 6 années de gêne, pour les personnes qui seront convaincues d'en avoir acheté ou vendu.
Art. 4. L'exportation des espèces et des lingots d'or ou d'argent, hors le territoire français ou occupé par les armées françaises, est prohibée, sous peine de confiscation au profit de la nation, et d'une amende qui ne pourra être moindre de 2,000 livres, laquelle sera poursuivie par le procureur syndic du district, par devant le tribunal de district, et sera perçue au profit de la nation par le receveur du droit d'enregistrement.
Art. 5. Toute personne qui refusera de recevoir des assignats en paiement, y sera contrainte par le juge de paix, qui la condamnera, en outre, à une demande du dixième du montant de la somme refusée, laquelle amende sera perçue au profit de la nation par le receveur du droit d'enregistrement.
Art. 6. Les commissaires de la Convention, qui se trouvent dans les pays occupés par les armées de la République, sont autorisés à prendre toutes les mesures qu'ils jugeront convenables, pour y établir, favoriser et accélérer la circulation des assignats. »
, rapporteur, soumet à la discussion l'article 1er du projet de décret (1)
Citoyens, je viens combattre les deux premiers articles du projet, ou plutôt l'article 1er, car le second article n'en est que là sanction pénale.
Je me plais à croire que le comité des finances, dans son projet, a cru voir le bien de la République; mais a-t-il assez réfléchi sur le résultat des prohibitions qu'il présente1? Je soutiens, moi, qu'elles sont destructives du commerce français et qu'elles portent la hache sous la seule racine qui transmet la vie à l'arbre de la félicité publique.
En effet, interrompre la négociation des lettres de change sur les places de commerce et dans les villes, chez les puissances avec lesquelles nous sommes en guerre, c'est arrêter au même moment toute espèce de commerce avantageux. (Interruptions sur plusieurs bancs.)
Je demande la question préalable.
Je demande l'impression du rapport et je m'oppose à la question préalable.
Je m'oppose à l'impression, parce qu'il y aura des vues plus grandes que celles qui vous sont présentées.
(La Convention, après quelques débats, ajourne la discussion des deux premiers articles à deux jours.)
, rapporteur, soumet à la discu-cussion l'article 3 du projet qui est adopté, sauf rédaction.
Je demande à présenter une motion additionnelle à cet article.
Il est beaucoup d'endroits dans la République où l'on prend une mesure différente. On dit dans toutes les transactions : paierez-vous en argent ou en assignats 1 Si c'est en argent, c'est tant ; si c'est en assignats, c'est tant de plus. On devrait stipuler, à mon avis, qu'aucun achat, vente, traité, convention ou transaction ne pourrait désormais contenir d'obligation autrement qu'en assignats, et, sans interdire néanmoins à ceux qui ont du numéraire la faculté d'en faire usage pour leurs paiements au pair des assignats, décréter une peine quelconque contre ceux qui auraient arrêté différents prix. Je propose 6 années de fer ainsi que vous l'avez décidé dans l'article 1er.
(La Convention adopte les propositions de Lasource.)
rapporteur, soumet à la discussion l'article 4 du projet qui est adopté avec les modifications suivantes :
« L'exportation des ouvrages d'orfèvrerie et de joaillerie en or et en
argent, et des matières d'or et d'argent, continuera d'être défendue,
Un membre expose qu'il ne suffit pas d'empêcher l'exportation des matières d'or et d'argent; il montre qu'il faut encore empêcher les dépôts de numéraire dans l'intérieur de la République. Il propose, en conséquence, de régarder comme engagements ordinaires, et de ce chef remboursables en assignats, tous billets, comptes ou reconnaissances de dépôt ou de garde de numéraire de la République, qui seront faits postérieurement au présent décret*
(La Convention adopte cette proposition.)
, rapporteur, soumet à la discussion l'article 5, qui est adopté, sauf rédaction.
propose, pour cet article, la disposition additionnelle suivante :
« Dans toute transaction particulière antérieure au présent décret, où la stipulation aura été faite en argent ou en assignat, la stipulation en argent sera nulle, et le paiement sera fait en assignats, conformément aux conditions stipulées entre les partiés. »
(La Convention passe à l'ordre du jour motivé sur l'existence de la loi du 2 septembre.)
demande, par article additionnel, que les sous-fournisseurs du gouvernement obtiennent une indemnité proportionnelle à celle que les fournisseurs en chef reçoivent du gouvernement aux termes de la loi.
(La Convention adopte cette proposition et décrète, en conséquence, qu'il sera ajouté à la loi sur les indemnités à accorder en payant en assignats, un article portant que les sous-fournisseurs jouiront des mêmes indemnités que les fournisseurs.)
, rapporteur, soumet à la discussion l'article 6 qui est adopté sauf rédaction.
Suit le texte définitif du décret rendu (1) :
( La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des finances, décrète :
Art. 1er.
« A compter de la publication du présent décret, la vente du numéraire de la République dans toute l'étendue du territoire français, ou occupé par les armées françaises, est défendue, sous peine de six années de fers, contre les personnes qui en achèteront ou en vendront .
Art. 2.
« Aucuns achats, ventes, traités, conventions ou transactions ne pourront
désormais contenir d'obligation autrement qu'en assignats. Ceux qui
seront convaincus d'avoir arrêté ou proposé différents prix, d'après le
paiement en numéraire ou en assignats, seront pareillement condamnés en
six années de fers, sans néanmoins interdire à ceux qui ont du numéraire
la faculté d'en faire usage dans leurs paiements au pair des assignats.
« A compter de la publication du présent décret, il ne pourra être fait aucun dépôt en numéraire de la République ; en conséquence, tous billets,, comptes ou reconnaissances de dépôts, ou de garde du numéraire de la République, qui seront faits postérieurement au présent décret, seront réputés engagements ordinaires et le remboursement en sera fait en assignats.
Art. 4.
« Toute personne qui refusera des assignats en paiement, sera contrainte à les recevoir, et condamnée à une amende égale à la somme refusée, laquelle amende sera perçue au profit de la nation par le receveur du droit d'enregistrement. La présente disposition aura lieu nonobstant toute stipulation contraire qui pourrait avoir été faite.
Art. 5.
« Sont exceptées de la disposition du présent article, les personnes qui, antérieurement au présent décret, et depuis la promulgation de la loi qui déclare l'argent marchandise, auront traité avec les fournisseurs de la République, avec stipulation en espèces ou autres causes y relatives, lesquels jouiront des avantages accordés aux fournisseurs par les articles 2 et 3 de la loi du 8 avril courant.
Art. 6.
( Les représentants de la nation envoyés par la Convention auprès des armées, qui sont ou seront dans les pays hors du territoire français, occupés par les armés de la République, pourront prendre toutes les mesures qu'ils jugeront convenables pour y établir, favoriser et accélérer la circulation des assignats.
Art. 7.
« L'exportation des ouvrages d'orfèvrerie et de joaillerie en or et en argent, et des matières d'or et d'argent, continuera d'être défendue, conformément aux lois des 5 et 15 septembre 1792, et sous les peines qui y sont portées. »
Un membre, au nom des comités des finances et d'aliénation réunis, fait un rapport et présente un projet de décret tendant à ordonner que la trésorerie nationale tiendra à la disposition de l'Administration des domaines nationaux la somme de 6,000 livres par mois à compter du 11 mars dernier, pour le paiements des commis et frais de bureaux; le projet de décret est ainsi conçu (1) :
« La Convention nationale, sur le rapport de ses comités des financés et d'aliénation, décrète que la trésorerie nationale tiendra à la disposition de l'Administration des domaines nationaux la somme de six mille livres par mois, à compter du 11 mars dernier, pour le paiement des commis et frais de bureaux, suivant le tableau annexé .au présent décret ;
Savoir :
Un premier commis, à raison de 6,000 livres par an, ci, par mois......... 5001. » s. » d.
Deux chefs de bureaux à 4,000 livres par an, ci, par mois------------------------------------ 666 6 8
Deux commis principaux, l'un à 3,000 livres et l'autre à 2,400 livres et par mois... 450 >» »
Deux autres commis de correspondance à 2,000 livres par an, par mois....--------- 333 6 8
Deux autres commis de comptabilité à 2,400 1. par an, ci, par mois,............... 400 » »
Deux autres commis à 2,000 livres par mois......... 333 6 8
Huit commis ordinaires de comptabilité à 1,800 livres par an, ci, par mois... 1,200 » »
Un commis aux enregistrements des dépêches à 1,600 livres........................ 133 6 8
Quatre commis aux expéditions à 1,500 livres par an, par mois........................... 500 » »
Lumières et menues fournitures des commis à 6 livres par mois pour 24 commis.................................. 144 » »
Frais de bureaux en papiers, registres, cartons, cire, etc............................. 1,349 13 4
Total par mois.......... 6,0001. » s. » d.
(La Convention adopte ce projet de décret.)
, au des comités de commerce et de marine réunis, fait un rapport et présente un projet de décret relatif aux marchandises, chargées sur des navires ennemis arrêtés dans les ports de la République, qui seront prouvées appartenir à des Français ou aux sujets des puissances amies et alliées de la France : le projet est ainsi conçu (1) :
« La Convention nationale, ajoutant à l'article 6 de la loi du 14 février 1793, relatif aux navires ennemis arrêtés dans les ports de la République, après avoir entendu ses comités de commerce et de marine, décrète:
Art. 1er.
« Les marchandises et autres effets chargés sur les navires ennemis arrêtés dans les ports de la République, en vertu des ordres du Conseil exécutif provisoire, qui seront prouvés appartenir à des Français ou aux sujets des puissances amies et alliées de la France, au moment de l'embargo mis sur lesdits navires, seront rendus aux propriétaires, et ne seront sujets à confiscation que dans le cas d'insuffisance de preuves écrites pour en constater la propriété.
Art. 2.
(( Cette remise n'aura lieu à l'égard des sujets des puissances amies et
alliées avec lesquelles les circonstances auraient nécessité une rupture
postérieure, qu'autant que leur récïa-
Art. 3.
« Les denrées, les matières premières et les autres objets desquels la sortie est défendue, qui feraient partie des chargements, dont main levée est accordée par le -présent décret, ne pourront être exportés à l'étranger ; les marchandises, et autres objets dont l'entrée est prohibée, depuis leur chargement, ou qui auraient été chargées en entrepôt, seront assujetties aux droits fixés par les lois des "19 février et 1er mars 1793.
Art. 4.
« La Convention nationale déroge à toutes les lois ou jugements contraires au présent décret. »
(La Convention adopte ce projet de décret.)
, secrétaire, donne lecture d'une lettre du maréchal-de-camp Stettenhofen (1), par laquelle il fait un don patriotique de 250 livres, pour les frais de la guerre, et informe la Convention que le traître Dumouriez a étéj le 6 de ce mois, au camp de Maulde, escorté de la cavalerie ennemie, et qu'il est dans ce moment-ci à Tournay, qui est le quartier général des ennemis pour se concerter avec eux. Il pense que son projet est d'aller droit sur Paris. « Il ne s'exposera pas, dit-il, contre cette forteresse. L'armée ennemie; qui a également souffert dans le Brabant, tant par le fer, mais plus_ encore par les maladies, ne saurait être considérable. » U la met à 40 ou 45,000 hommes. Les troupes qui ont pris parti pour le traître ne montent qu'à environ 12,000 hommes, dont une grande partie reviendra à nous lorsqu'elle trouvera l'occasion. U pense qu'il serait nécessaire de former un camp près Paris, et d'établir un quatrième rang armé de piques et faire rentrer tous les fourrages dans l'intérieur.
« Nous n'avons que des lâches à combattre, dit-il. A la dernière affaire du 18, leur cavalerie arrêta et fit rentrer dans les rangs, à coups de plat de sabre, l'infanterie qui a refusé de se battre. » -
(La Convention décrète la mention honorable de l'offrande et renvoie le surplus de la lettre au comité de Salut public.)
Un membre, au nom du comité de législation, fait un rapport et présente un projet de décret pour ordonner la mise en liberté immédiate de Marc-Antoine Michaux, supérieur de l'hôpital Saint-Nicolas ou Saint-Jean de Dieu, de Nancy, arrêté le 5 janvier dernier par ordre des commissaires de la Convention dans les départements de la Meurthé, de la Moselle et du Bas-Rhin ; le projet de décret et ainsi conçu^) :
« La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité
de législation, décrète que Marc-Antoine Michaux, supérieur de l'hôpital
Saint-Nicolas ou Saint-Jean de Dieu, à Nancy, mis en état d'arrestation,
le
(La Convention adopte ce projet de décret).
Un membre, au nom du comité de Vexamen des comptes, fait un rapport et présente un projet de décret sur la pétition du citoyen Bi-nard, tendant à obtenir un augmentation de 12 livres par quintal de viande fraîche qu'il doit fournir dans le port de Brest, ou la résiliation de son marché ; le projet de décret est ainsi conçu (1) :
« La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de l'examen des marchés sur la pétition du citoyen Binard, tendant à obtenir une augmentation de 12 livres par quintal de viande fraîche qu'il doit fournir dans le port de Brest, ou la résiliation de son marché, passe à l'ordre du jour, motivé sur ce que ce marché contient une disposition expresse que Binard ne pourra exiger aucune indemnité, pour perte ou autrement ; l'exécution est renvoyée au Conseil exécutif ».
(La Convention adopte ce projet de décret.)
Vaîné (2). J'ai l'honneur de déposer sur le bureau de l'Assemblée, au nom de la société populaire de Pont-de-1'Arche, un ballot de bas pour les défenseurs de la patrie.
(La Convention décrète la mention honorable et ordonne l'insertion de l'offrande au Bulletin.)
, secrétaire, donne lecture d'une lettre des citoyens Proly, Dubuisson et Pe-reira, qui avaient été envoyés comme commissaires vers le traître Dumouriez ; ils demandent à la Convention nationale jue la garde placée auprès d'eux pour veiller à leur sûreté soit levée'et qu'ils soient mis en pleine liberté; cette lettre est ainsi conçue (3) :
Paris, ce
« Citoyen Président,
« Les trois commissaires envoyés par le ministre Le Brun auprès de
Dumouriez et qui
« Ce second motif étant devenu surabondant par l'émigration et la publicité des attentats du grand scélérat et l'objet de la sûreté personnelle des trois commissaires restant seul maintenant, ils désirent qu'il leur soit permis de s'en rapporter davantage-à leurs précautions individuelles qui, jusqu'à présent, ne leur ont pas mal réussi, qu'à la garde d'un seul nomme, pour chacun d'eux, qui deviendrait trop faible en cas d'accident, et qui ne sert journellement en nous accompagnant partout, qu'à nous faire calomnier par les malveillants, et à indiquer nos démarches particulières aux assassins.
Signé : Pereira, Proly, Dubt^sson.
. (de Saintes) (1). Je fais mienne cette demande et je propose que la garde placée auprès d'eux pour veiller à leur sûreté soit levée et qu'ils soient en pleine liberté.
(La Convention adopte cette proposition.)
l'aîné (2). J'ai demandé que le citoyen Dumas, dépositaire et directeur des cartes et plans de la guerre, fût gardé à vue. J'ai pris des renseignements : c'est une erreur que j'ai commise, car il "n'occupe plus cette place depuis le ministère du citoyen Pache. Je demande que la garde de surveillance qui lui avait été donnée soit levée.
(La Convention décrète cette proposition.)
Un membre (3), au nom du comité de division, demande à faire un rapport
sur l'arrêté er.
(La Convention nationale ajourne ce rapport jusqu'au travail général de la division de la République.)
, secrétaire, reprend la lecture des lettres et adresses envoyées à l'Assemblée :
23° Lettre de Garat, ministre de l'intérieur (1), qui envoie l'état des décrets qu'il a expédiés, pour les départements, le 10 avril.
24° Lettre de Bouchotte, ministre de la guerre, qui; se conformant au décret du 13 décembre, fait connaître qu'il envoie l'état des objets demandés et expédiés aux armées ainsi que celui des marchandises et effets d'habillement et d'équipement ; la lettre d'envoi est ainsi conçue (2) :
Paris, le
« Citoyen Président,
« Conformément au décret de la Convention nationale du 13 du mois de décembre, qui enjoint au conseil exécutif provisoire de rendre compte, de huitaine en huitaine, des demandes faites pour les besoins des armées de la République et des moyens qu'il aura pris pour y satisfaire,
« Je vous envoie, ci-joints pour être communiqués à la Convention nationale :
« 1° l'état des objets demandés et de ceux expédiés aux armées, depuis le 1er octobre dernier jusqu'au 7 du courant;
« 2° L état des marchandises et effets d'habillement et d'équipement dont on a donr' ordre, depuis le 24 mars jusqu'au 7 du mois d'avril, à l'administration de l'habillement, de faire l'envoi aux divers bataillons de volontaires nationaux qui en ont fait la demande (3).
« Le Ministre de la guerre, Signé : Bouchotte.
(4). Je demande qu'on fasse une loi pénale contre les fournisseurs infidèles.
(La Convention renvoie la demande au co mité de législation.)
25° Lettre du citoyen Prévôt (5), peu fortuné, résidant à Gray, département de la Haute-Saône, qui fait remettre sur le bureau 600 livres pour les frais de guerre.
(La Convention décrète la mention honorable de l'offrande et ordonne
l'insertion au Bulletin.)
Reims, le
« Monsieur le Président,
Le comte d'Aversperg, major au régiment de Kinski et le comte de Linange, cadet gentilhomme dans le corps des chasseurs, tous - deux prisonniers de guerre, sont conduits à Paris, comme soi-disant otages. On les croit membres à la diète de Ratisbonne. J'ai l'honneur de vous observer, monsieur le Président, et de vous certifier, sur ma parole d'honneur, qu'aucun de ces deux messieurs n'est membre de la diète de Ratisbonne, ni n'y a voix, et n'est aucunement non plus parent de monsieur le prince de Cobourg.
« Toutes les lettres de nos armées nous confirment formellement que -tous les officiers autrichiens, prisonniers de guerre, ont été décidément échangés depuis les derniers jours de mars. Nous réclamons, monsieur le Président, la protection de votre autorité et de votre justice, pour que l'expédition de cet échange nous soit intimée: 1e. plus tôt possible et que nous ayons la liberté de retourner en Allemagne.
( J'ai l'honneur d'être avec le plus profond respect, monsieur le Président, votre très humble et très dévoué serviteur* « Signé : De Moitelle, général major autrichien. *
(La Convention passe à l'ordre du jour.)
27° Lettre des volontaires du deuxième bataillon du Pas-de-Calais, qui envoient à la Convention une adresse courte et énergique; cette lettre est ainsi conçue (2) :
Citadelle de Lille, le
m Citoyens républicains,
« La Belgique est évacuée, mais le monstre qui en est l'auteur est
.démasqué. L'insolente royauté dont il osait vouloir relever la tête
anéantie .sous vos décrets est de nouveau rentrée dans le néant avec
tous les vils suppôts du despotisme. La plus grande partie de 1 armée,
un instant séduite par la valeur ambitieuse de ce nouveau Catilina,
vient de l'abandonner à: ses remords et à l'infamie qui accompagne les
traîtres. La République ou la mort : c'est notre dernier mot/Nous jurons
de nous ensevelir tous sous les ruines de la liberté républicaine,
plutôt que de laisser revivre un instant; le pouvoir arbitraire d'un
tyran couronné. Qu'un nouveau César reparaisse et il trouvera
« Signé : Maréchal, Sauvage, Goblas, Fer-net, Lamare, Dezerolle, lieutenant ; Au-■ puits, capitaine ; Carron, Flament, capitaine ; Pouquet; Daillecourt, Bouf-fart, capitaine; Carlier, Dufour, Gourdin, ajudant-major ; Mannelier, capitaine; Geneau, capitaine; Parmentier, Tremolez, Blondel, Halle, lieutenant ; Mutuel, capitaine; Henselmense, lieutenant; Setier, Cornât, Azalot, Saunier, capmal; Dubqs, Danicourt; Dau-tard, fasquellé, augustin, pringart,
. - Jacques Legrand, Pierre Mansieu, Le-leu, Tassin, sergent; Jourdan, Talbot, Guichard , Copin, Barriet , Salles , Blotz,Vion, Calonne, Bergue, Bouvelet, Pinel dit Sans-Souci, Pagé, Delobèlle. Souillard, Greville. Masson, André Dubois, Alexandre Dupuis, Gaspard, Chomeil, Pierre Yarlet, Fossée, Mary, Laléau. ')
(La Convention décrète la mention honorable et Ordonne l'insertion de cette lettre au Bulletin. )
28° Lettre de Gohier, président du Conseil exécutif provisoire, qui donne des nouvelles des départements des Côtes-du-Nord, de mie-et-Yilaine, de la Loire-Inférieure et de la Vendée et rapporte deux traits, dignes des républicains français; cette lettre est ainsi connue (1) :
Paris, ce
« Citoyen Président,
« Lé Conseil exécutif s'empresse de transmettre à la Convention nationale des détails satisfaisants qu'il reçoit des départements.
« Le département des Côtes-du-Nord est entièrement pacifié. La rigueur des châtiments et la sévérité des exemples empêcheront les troubles d'y renaître. La commission militaire et le tribunal du département opèrent avec une énergie qui doit épouvanter les conspirateurs.
« Le calme renaît également dans le département de rille-etVilaine. Plusieurs des chefs des rebelles ont été mis à mort. Partout les brigands sont en déroute, partout le malheureux paysan, qu'ils avaient séduit, rentre dans ses foyers honteux et repentant. La route de Rennes à Nantes est parfaitement libre. La garde nationale de Rennes s'est montrée digne d'elle-même èt digne de la République par Bon infatigable activité.
« La situation de la ville de Nantes n'a point encore changé. Les commissaires ne sont point parfaitement libres; mais des forces arrivent de toutes parts. Machecoul, qui est toujours le quartier, général des révoltés, doit avoir été attaqué par les forces aux ordres de Berruyer.
« En ce moment, la ville de Savenay, dont l'ennemi était encore maître, a
dû aussi être attaquée par un détachement aux ordres de l'adjudant
Laval, dont la marche était corn-
« Du côté de la Vendée, l'état des choses est à peu près le même et les troubles approchent de leur fin. La victoire remportée sur les brigands auprès des Sables a été complète; elle est due, en partie, au zèle des braves marins qui ont été employés à l'artillerie; pendant plus de quinze jours,-ils ont servi jour et nuit tant sur terre que sur mer. Le sloop de la République L'Enfant croise actuellement vers Saint-Gilles et Noirmoutiers, qui sont au pouvoir des rebelles. Il a aussi porté des munitions à l'île Dieu qui n'a point été conquise par les brigands, comme on l'avait cru, et qui, au contraire, est décidée à la plus vigoureuse résistance.
« Un corps de 7 à 8,000 hommes est actuellement réuni aux Sables et ses mouvements étant combinés avec ceux du corps de 6,00(5 hommes au moins qui se trouvent à Fontenay et des autres divisions, les brigands doivent être bientôt cernés dans toute cette partie. Il paraît qu'ils sont encore réunis en assez grande masse au ci-devant château de l'Oye, sur la route de Nantes, entre Chantaunay et Saint-Fulgent.
« Cependant une lettre particulière de Sau-mur annonce un léger échec essuyé par des patriotes.
( Un détachement d'infanterie avait été commandé pour protéger un convoi de vivres. Il paraît que s'étant arrêté à butiner dans un village, ce détachement fut surpris par les rebelles et que, dans cette surprise, il prit la fuite en désordre, abandonnant son, convoi.
« Le Conseil exécutif a déjà fixé l'attention de la Convention nationale sur la nécessité de réprimer par une loi cette funeste et honteuse habitude du pillage. Il croit devoir le lui rappeler en cette circonstance.
« Le conseil se hâte d'effacer l'impression fâcheuse de cet événement par le récit de deux faits vraiment admirables et dignes des républicains français.
« A la reprise de Pornic par les révoltés, le jeune Reliquet, garde national de cette ville, âgé de seize ans, servait une pièce de canon; quarante coups de feu des insurgeants ne purent lui faire quitter sa batterie. Se couchant sur son canon, et faisant brûler de temps à autre des amorces, il retint l'ennemi au moins trois quarts d'heure; il finit, lorsque tout espoir fut perdu, par enclouer son canon malgré les balles qui pleuvaient et sortit le dernier de la ville au milieu des flammes.
« Dans une rencontre auprès de Montfort, le citoyen Juguet se trouve à la tête de 60 ou 80 gardes nationaux, en face d'un attroupement de 500 des rebelles, la plupart désarmés. Sa troupe allait faire feu; il l'arrête et veut épargner le sang; il se détache seul et sans armes vers cette multitude. Tandis qu'il harangue et cherche à calmer les esprits, un des brigands lui tire un coup de fusil dans la tête; il tombe, mais il ne cesse pas de porter des paroles de paix : « Je pardonne le conp « que je viens de recevoir; celui qui l'a porté « est dans l'erreur; il sentira sa faute; je ne « veux jamais le connaître; je vous prie seule-« ment de ne pas m'achever et de m'écouter. » Au même instant, le forcené lui porte un se-
cond coup de feu et a la barbarie de l'assommer à coups de crosse. Ainsi périt ce jeune homme, victime de son humanité. Ses camarades vengèrent sa mort, et repoussèrent les brigands, mais le monstre qui. avait tué le jeune Juguet n'est pas encore pris.
« Le président du Conseil exécutif provisoire,
« Signé : Gohier. »
(La Convention nationale décrète la mention honorable de la conduite du jeune citoyen et l'insertion au Bulletin de la générosité du citoyen Juguet. Elle renvoie cette lettre au comité des finances pour les récompenses à accorder. )
29° Lettre des membres du directoire du district d'Alais, département du Gard; ils expriment leur dévouement au salut de la patrie et annoncent que les communes ont fourni leur contingent pour leur recrutement; cette lettre est ainsi conçue (1) :
« Législateurs,
« A peine avons-nous proclamé la loi sur le recrutement de l'armée que toutes les communes de notre district ont complété leur contingent. Un mouvement général d'émulation et de patriotisme entraînait les citoyens, et agitant leurs armes, ils allaient en foule prendre place dans la lice des défenseurs de la République; les voilà tous prêts au combat, ces généreux et braves guerriers; ils jurent de vaincre ou de mourir pour la liberté et l'égalité, pour la sûreté personnelle et des propriétés, pour l'unité et l'indivisibilité de la République, bases d'une Constitution durable. Ah ! puissent se propager et à jamais être inviolables ces principes consacrés par vos derniers décrets 1 que la terre sacrée de la liberté, volcanisée par des secousses violentes, vomisse au loin ces désorganisateurs qui déchirent ses entrailles et elle se raffermira sous l'empire des lois et l'union des citoyens. L'arbre de la liberté, planté sur le sol de la prospérité, en jettera de plus profondes racines. L'égalité, non des moyens, mais des droits des citoyens, fera leur bonheur et l'unité de la République fera toute sa force.
« Les membres du directoire et le procureur syndic du district d'Alais, département du Gard.
« Signé : Fermas, vice-président ; Coulomb, aîné-, Béchard, Caisset. »
(La Convention décrète la mention honorable et ordonne l'insertion de cette lettre au Bulletin.)
30° Lettre des officiers municipaux de la commune de Viverols,- district
d'Ambert, département du Puy-de-Dôme (2), par laquelle ils informent la
Convention que cette commune a fourni au delà de son contingent pour la
(La Convention décrète la mention hono-rabel et ordonne l'insertion de cette lettre au Bulletin.)
31° Lettre de Dalbarade, ministre de la marine, relative au procès-verbal du recrutement de la commnue de Servon, district de Rennes, département de l'Ille-et-Vilaine, 'et démontrant que cette commune, qui devait fournir 11 hommes seulement, en a fourni 41 ; cette lettre est ainsi conçue (1) ;
Le
« Citoyens,
« Le procès-verbal du recrutement fait dans -la commune de Servon, district de Rennes, département de l'Ille-et-Vilaine, constate que les membres de la municipalité, les pères de famille et autres citoyens exempts par la loi ont voulu concourir, et quoique la population de cette commune se trouvât déjà diminuée par les cinquante-trois hommes qu'elle avait précédemment fournis pour les frontières, elle n'en a pas moins procuré encore 41 sur 85, au lieu de 11, nombre auquel était fixé son contingent.
« Un si bel exemple n'a pas peu influé sur les communes voisines, qui ont aussi fourni au delà de leur contingent, malgré les menées aristocratiques.
« Le ministre de la marine, « Signé -. Dalbarade. »
(La Convention décrète- la mention hono^ rable et ordonne l'insertion de la lettre du ministre au Bulletin.')
, au nom du comité de la guerre, fait un rapport sur la pétition de François Orchampt, lieutenant au 6e bataillon de Paris, qui a été fait prisonnier après s'être vaillamment battu et a été dépouillé de tout; recueilli par le général Poulier, et revenu à Paris, il demande des armes et des habits pour retourner à son poste; il s'exprime ainsi (2) :
Citoyens, la Convention nationale a renvoyé à son comité de la guerre, la pétition que lui a présentée le 31 mars dernier,le citoyen Claude-François Orchampt, lieutenant au 6e bataillon de Paris, dit de Bon-Conseil.
Ce citoyen expose dans sa pétition que le 5 du mois de mars dernier, étant au bivouac, il tomba malade et que, dans cet état, il remit au sous-lieutenant le commandement de la compagnie qui lui était confiée.
D'après la visite et l'ordonnance du chirurgien major du 6e bataillon, le citoyen Orchampt suivit les équipages pour prendre du repos et-faire quelques remèdes.
Etant arrivé à Louvain, il apprit que l'armée venait de recevoir l'ordre
de retourner sur Liège.
A quelques lieues de Louvain, cette petite troupe composée de vingt-cinq hommes fut surprise et attaquée par un détachement de troupes légères et de cavalerie autrichienne d'environ cent hommes.
Malgré la supériorité du nombre, le lieutenant Orchampt se défendit autant qu'il put avec sa petite troupe; mais, après avoir perdu deux hommes, et accablé par le nombre. Orchampt fut obligé de se rendre avec les vingt-deux hommes qui lui restaient.
Fait prisonnier, il fut dépouillé par les ennemis qui ne lui laissèrent que sa chemise et sa culotte et lui prirent quatre cents livres tant en argent qu'en assignats.
Orchampt a"été assez heureux pour, dans la nuit du 8 au 9 mars, s'échapper des mains de ses ennemis.
U dirigea sa route sur Givet; il se présenta dans cet état de dénuement au général Poulier, commandant dans cette dernière place, qui le couvrit de ses propres habits et lui donna l'hospitalité pendant deux jours.
Enfin, Orchampt est arrivé à Paris, encore malade et accablé de fatigue. Quoique sa santé ne soit pas complètement rétablie, il désire retourner à son poste.
U ne demande point d'indemnité pour les pertes qu'il a faites, mais il demande des habits et des armes pour être en état de servir la patrie, dans son grade de lieutenant.
Votre comité de la guerre, après avoir pris connaissance des objets contenus dans la pétition du citoyen Orchampt, vous propose le décret suivant :
« La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de la guerre sur la pétition du citoyen Orchampt, renvoie ladite pétition au Conseil exécutif provisoire. »
(La Convention adopte le projet de décret présenté par Viennet.)
Voici le résultat du dépouillement du scrutin pour l'élection des membres du comité de l'examen des comptes (1).
Sont élus membres, les citoyens : Boissieu, Fourmy, Précy, Texier, Laurent (Lot-et-Garonne), Ferroux, Salmon, Guyomar, Vincent, Noguères, Bonnemain, Birotteau.
Sont élus suppléants, les citoyens : Enlard, Portiez, Charrel, François (de la Somme), Dufestel.
Sur la proposition d'un membre, la Convention rend le décret suivant (2) :
« La Convention nationale décrète qu'il .sera nommé deux commissaires,
l'un par le comité des marchés, l'autre par celui dé la guerre, pour
faire la visite aes magasins de
(1). Je demande la parole pour un fait personnel.
Vous avez la parole.
Je n'aurais pas entretenu la Convention de ce qui m'est arrivé hier, si plusieurs de. mes collègues ne m'avaient témoigné leur sollicitude.
Je sortais de chez moi, je traversais la cour du château des Tuileries, je venais ici. A la porte du grand escalier, une sentinelle me refuse le passage. Je lui montre ma carte de député, même refus. La sentinelle me déclara que ma cocarde n'est pas celle ordonnée par un arrêté de la commune, et que c'est cette contravention qui fait naître sa résistance. Telle est la consigne. J'insiste, en disant que ma cocarde est tricolore, suivant la loi décrétée, et que la municipalité n'a pas le droit de faire de nouvelles lois. Je suis à l'instant entouré de je ne sais quelles gens, insulté, maltraité. On me traîne au corps de garde, de là à la section des Tuileries. On se préparait à entendre en témoignage la foule qui m'avait suivi, en me traitant d'aristocrate, d'émigré,- et bientôt toute cette troupe s'évade du comité. Je reste seul et un officier du corps de garde avec moi. Heuréusement je suis reconnu par un citoyen de la section, qui me fait rendre ma liberté.
Voilà, citoyens, l'exposé des faits. Je déclare que je n'y attache rien de personnel, je ne demande aucune réparation, mais je propose que la Convention prenne une mesure sévère pour empêcher que de pareils désagréments n'arrivent à d'autres de nos collègues.
Dimanche dernier pareille chose nous arriva; nous sûmes respecter la consigne et nous nous sommes retirés. Si Taillefer en eût fait autant, il n'eut point essuyé tant de mauvais traitements.
Je demande l'exécution de la loi et j'observe à la Convention qu'au mois d'août dernier l'Assemblée législative déclara que tout citoyen était libre de porter sa Gocarde de telle manière qu'il voudrait, pourvu qu'elle fût aux trois couleurs. Cependant, au mépris de cette loi, la commune de Paris s'est permis de défende toutes les cocardes qui ne seraient pas de laine, par un arrêté dont j'ignore la date.
Je demande que l'officier du poste soit mandé à la barre; je demande
aussi
Plusieurs membres Le renvoi du tout au comité de sûreté générale.
Je demande " que le commandant de l'armée parisienne mette à l'ordre désormais la défense expresse d'arrêter aucun député.
U n membre : Excepté en flagrant délit.
Et pour crime.
Je propose cette rédaction :
« La Convention nationale décrète qu'aucuns de ses membres ne pourront être arrêtés lorsqu'ils seront munis de leur carte de député, si ce n'est pour crime et lorsqu'ils seront pris en flagrant délit.
« La Convention nationale décrète que le commandant général sera tenu de faire mettre à l'ordre de la garde nationale parisienne le présent décret. »
(La Convention adopte la rédaction proposée par Boyer-Fonfrède) (1).
, au nom des comités de commerce et des finances réunis, soumet à la discussion un projet de décret sur la pétition du citoyen Thomas Guérard, négociant au Havre, relative au pillage de ses magasins; ce projet de décret est ainsi conçu (2) :
La Convention nationale décrète sur ce rapport ce qui suit :
« La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de ses comités de commerce et des finances, réunis, sur la pétition du citoyen Thomas Guérard, négociant au Havre.
« Considérant qu'il est constant, par les procès-verbaux dressés sur les lieux, et par les arrêtés des directoires du district de * Montivilliers et du département de la Seine-Inférieure, que la perite éprouvée par le citoyen Thomas Guérard, dans le pillage de ses grains et farines, s'élève à la somme de 38,896 livres 11 sols.
« Considérant que la municipalité d'Ingou-ville n'a pris aucune des précautions prescrites par la loi pour arrêter le pillage, décrète ce qui suit :
« La trésorerie nationale tiendra à la disposition du ministre de l'intérieur la somme de 38,896 livres 11 sols pour être employée, conformément à l'article 2 de la loi du 2 octobre 1791, à acquitter l'indemnité due pour raison du pillage.
( Le Conseil exécutif provisoire est chargé de poursuivre la rentrée de
cette somme, en la faisant imposer pour l'année 1793, sur le département
de la Seine-Inférieure, qui en
(La Convention adopte ce projet de décret) (1).
(2). Je suis saisi d'une lettre du citoyen Lebrun, qui transmet à la Convention une proclamation adressée par Cobourg aux Français.
Président , souvenez-vous que vous m'avez donné hier la parole.
Plusieurs membres demandent la lecture de la (proclamation transmise par le ministre des affaires étrangères.
Si quelque chose a contribué à armer les Français, c'est le manifeste de Brunswick : j'appuie la demande formulée par plusieurs membres de lire cette proclamation.
(La Convention décrète que Guadet sera entendu ultérieurement (3) et ordonne la lecture de la proclamation de Cobourg.)
, secrétaire, donne lecture de ces différentes pièces (4) :
Lettre de Lebrun, ministre des affaires étrangères.
« Citoyen Président,
Je m'empresse de faire passer à la Convention une proclamation adressée par Cobourg aux Français. J'espère qu'elle n'aura d'autre effet que de ranimer leur courage, et d'exciter de plus en plus leur indignation. »
« Signé: Lebrun. »
Proclamation du maréchal prince de Saxe-Cobourg.
« Le maréchal prince de Saxe-Coboitrg, géné-. ral en chef des armées de S. M. Vempereur
et VEmpire.
« Aux Français,
« Le général en chef Dumouriez m'a communiqué sa déclaration à la nation française. J'y trouve les sentiments et les principes d'un homme vertueux qui aime véritablement sa patrie, et voudrait faire cesser l'anarchie et les calamités qui la déchirent, en lui procurant le bonheur d'une Constitution et d'un gouvernement sages et solides.
« Je sais que c'est le vœu unanime de tous les souverains, que des
factieux ont armés contre la France, et principalement celui de Sa
Majesté Impériale et de Sa Majesté Royale, remplies d'estime encore pour
l'ensemble d'une nation si grande et si généreuse, chez laquelle les
principes immuables de justice et d'honneur furent jadis sacrés, avant
qu'à force d'attentats, de bouleversements et
et Je déclare par conséquent ici, sur ma parole d'honneur, que je ne viendrai nullement sur le territoire français pour y faire des conquêtes, mais uniquement et purement aux fins que j'ai ci-dessus indiquées.
« Je déclare aussi, sur ma parole d'honneur, que si jes opérations militaires exigent que l'une ou l'autre place forte soit remise à mes troupes, je ne la regarderai jamais que comme un dépôt sacré, et je m'engage ici, de la manière la plus positive et la plus expresse, à la rendre aussitôt que le gouvernement qui sera établi en France ou le brave général Dumouriez le demanderont; je déclare enfin que je donnerai les ordres les plus sévères, que je prendrai les mesures les plus vigoureuses et les plus efficaces pour que mes troupes ne commettent aucun excès, ne se permettent pas la moindre exaction, ni aucune violence, pour qu'elles respectent partout les personnes et les propriétés sur le territoire français, et que quiconque dans mon armée oserait contrevenir à mes ordres, soit puni sur-le-champ de la mort la plus ignominieuse.
J « Donné au quartier général à Mons, le 5 avril 1793.
« Signé : Le prince Cobourg. »
(Plus bas est écrit à la main) :
« Remis au directoire de Lille, dans la nuit du 7 au 8, par un garde national qui s'est esquivé aussitôt.
' « Signé : Sta, procureur syndic. »
•Un membre : Je demande que cette proclamation soit brûlée par la main du bourreau.
(La Convention passe à l'ordre du jour.)
(La séance est suspendue à quatre heures et demie et renvoyée au même soir sept heures.)
a la séance de la convention nationale du
Réflexions d'un ancien capitaine des grenadiers du 3e bataillon de Paris, faisant
partie .de Varmée de Dumouriez (2).
( Un général ambitieux, qui voulait tout faire servir à ses projets liberticides, trouvait un obstacle irrésistible dans le mode d'élection déterminé par l'Assemblée constituante pour les bataillons de volontaires; aussi dès le moment qu'il prit le commandement de l'armée de Lafayette, s'occupa-t-il de tous les moyens qui lui parurent les plus propres à jeter de la crainte sur ; cette mesure qui le contrariait; aussi l'a-t-on vu s'élever avec force contre la nouvelle organisation décrétée par la Convention par ses décrets des 21, 23, 24 et 25 février dernier; aussi l'a-t-on vu, au mépris de ces décrets, casser des chefs de corps et des officiers subalternes qui ne lui plaisaient pas, pour placer l'un de ses aides de camp et d'autres sujets sur les groupes desquels il comptait.
« On ne doit pas se dissimuler que le mode d'élection, tel qu'il était décrété par l'Assemblée constituante, était trop imparfait et qu'il donnait bien trop de mouvement pour qu'il pût subsister tel qu'il était adopté.
« Sans entrer dans l'énumération de tous les inconvénients, il suffira d'en retracer quel-ques-uns.
« La latitude indéfinie, qu'on avait laissée au choix du soldat, lui permettait d'élever au grade de chef supérieur dé son bataillon des officiers de la classe inférieure et même un simple fusilier qui, par intrigue, serait parvenu àvcapter les suffrages.
« Le bataillon auquel j'étais attaché en a fourni un exemple/Un sous-lieutenant de la compagnie de grenadiers, élevé depuis peu à ce grade, fut nommé deux mois après commandant en second.
Les capitaines, lieutenants et les officiers de ce grade, qui tous étaient ses anciens, ne purent voir cette injustice sans témoigner leur mécontentement. On se doute bien quel en fut le résultat. Toujours contrarié, il ne put parvenir à opérer le bien qu'il voulait faire et ses moindres fautes, exagérées par la prévention, lui causèrent des désagréments tels qu'il fut obligé de donner sa démission. Ceux mêmes qui. l'avaient porté à "sa place se tournèrent à ses ennemis; ils avaient cru disposer de lui et l'amener à tout ce qu'ils désiraient. Trompés dans leur attente, ils ne dissimulèrent plus leur inirûitiê et de là les actes réitérés d'indiscipline et d'insubordination furent dénoncés au général qui sut si bien en profiter.
« Les vices de cette réélection se faisaient sentir avec plus de force dans les nominations d'officiers inférieurs que dans les fonctions
attachées à leurs grades; ces officiers étaient obligés de commander immédiatement aux soldats. Ces derniers n'y plaçaient que ceux qui, par la faiblesse de leur caractère ou par des connivences non moins dangereuses, leur permettaient l'impunité de leurs fautes.
« De ces nominations résultaient nécessairement l'inexactitude dans le service, le désordre dans les effets de campement confiés aux soldats, le peu d'entretien des objets d'équipement et d'habillement et surtout la nonchalance dans l'entretien le plus important ; celui des armes.
« Les caporaux, sergents et officiers inférieurs à qui les volontaires faisaient du passe-droit par les nominations, dégoûtés du service, n'apportaient plus la même exactitude. Placés dans une alternative embarrassante, s'ils punissaient les soldats coupables, on attribuait à la vengeance personnelle leur juste sévérité; s'ils ne punissaient pas, ils étaient punis et le soldat, loin de se plaindre, plaisantait sur leur punition; l'homme élevé par lui à la place supérieure était encore dans ses mains un instrument de vengeance dont il se servait contre l'nférieur disgracié.
( Mais les décrets rendus par la Convention ont remédié à tous les inconvénients.
« L'article 7 de la section seconde porte : « Les candidats seront pris dans le grade im-« médiatement inférieur à celui qui sera « vacant, savoir : pour une place de sergent « parmi les caporaux et l'article suivant pres-( crit un scrutin opératoire fait à la majo-« rité absolue des suffrages pour les individus « du grade égal à celui qui sera vacant. »
« De ces deux articles, on peut raisonnablement attendre tout ce que le comité militaire a promis : un bon choix.
« Il n'y a donc qu'un général ambitieux et perfide qui sut contrarier les mesures dictées parles principes de justice et d'égalité. J'ajouterai même que le comité militaire n'a pas étendu aussi loin qu'il le désirait le droit précieux qu'il réserve aux soldats volontaires. Des places vacantes n'étaient conférées par ancienneté de grade, d'après les dispositions de l'article 1er de la section seconde, qu'aux officiers et sous-officiers qui auraient servi dans la ligne, et il est plus que probable qu'ils seront les plus anciens et le privilège me paraît une injustice qu'il serait possible de réparer en donnant le droit d'élection pour toutes les places.
« Je retrouve dans l'organisaton décrétée toutes les modifications que je viens d'indiquer, des moyens de parer aux inconvénients résultant du mode d'élection décrété par l'Assemblée constituante, mais je n'en vois pas pour parer à ceux qu'entraîne une première élection !
« La Convention vient de décréter la levée de 40,000 hommes pour former une armée de réserve. Je regarde la formation des corps qui la composeront comme devant sauver la République, si elle est bien dirigée. Voici qu'elles seraient les vues que je soumets au comité de Salut public; elles sont si simples qu'il est impossible de ne pas en saisir la nécessité.
« Je conserverais à tous les volontaires le droit.d'élection de ses officiers et sous-officiers; je voudrais que, dans toutes les municipalités, les hommes qui seront délégués pour faire partie de cette armée fussent, au jour indiqué,
tous convoqués dans le chef-lieu du département; que là, en présence des commissaires nommés par la Convention ou par le pouvoir exécutif, ou par le département, il fût procédé à la formation d'autant de compagnies que le nombre fourni par le département pourrait en comporter, quelles compagnies divisées par 9 formassent le bataillon, et que chaque compagnie ainsi divisée procédât sur-le-champ à la nomination de ses officiers, à commencer par le capitaine.
« Je voudrais, ainsi que le prescrit le décret pour la réélection, que les trois candidats pour chaque grade fussent présentés par la compagnie; mais je voudrais aussi qu'ils fussent ensuite obligés de subir un examen qui serait fait par les commissaires et que ces derniers pussent indiquer celui des trois qui leur paraîtrait le plus capable de remplir les fonctions où le choix de ses camarades l'appelleraient. Cette mesure remplacerait le scrutin opératoire prescrit par la réélection.
« Pour parvenir à une formation aussi régulière, il faudrait qu'un décret formel défendît aux volontaires de procéder à aucune élection partielle, avant la réunion dans le chef-lieu de département. Cette précaution est indispensable. Nous n'avons eu que trop d'exemples de ces nominations; un village qui avait fourni 9 ou 10 hommes les faisait partir avec un autre homme qu'ils avaient nommé caporal ; un autre village qui en avait fourni un plus grand nombre, souffrait qu'il fût nommé un sergent et ainsi de suite
« Premier abus : Un caporal ou sergent qui devait être nommé par toute la compagnie, ne l'était que par une partie très faible;
Deuxième abus : 30 ou 40 hommes réunis formaient une compagnie qui se choisissait des chefs, quoique dans un état incomplet, et de cette manière, la République, au lieu de 100 bataillons complets, en a payé 150 qui n'ont jamais été au complet, parce que des sujets, qui ont désiré se placer, ont préféré entrer dans un nouveau corps que de compléter ceux déjà formés.
( On conçoit de quelle utilité peut être l'examen auquel j'assujettis les candidats; c'est un moyen d'écarter les gens sans talent qui, par cabale, pourraient se flatter de se déplacer.
( La tenue d'un corps dépend absolument de sa formation; s'il est vicieux dans son principe, il sera impossible de bien le réformer, quelques précautions que l'on prenne; mais, s'il est sain, il ne faudra que du courage pour lui conserver sa vigueur primitive.
« Ce projet que je donne est plus facile encore à exécuter dans le département de Paris que dans tous les autres. Paris seul doit fournir 10,000 hommes; chaque bataillon est composé d'après la nouvelle formation de 812 hommes, ce qui donne pour Paris, dans le moment, 12 bataillons et 4 demi-brigades.
« Pour éviter la réunion de ces 12 bataillons et leur formation dans le même jour, un décret ordonnerait que 4 sections de la capitale se réuniraient pour former une brigade et, de cette manière, les 12 bataillons seraient organisés en quatre jours différents.
« Ce n'est pas assez d'avoir prévu quelques-
uns des vices qui tendraient à s'introduire dans la nouvelle formation; il est des vues bien plus grandes, plus dignes du nouveau régime sous lequel nous vivons.
« Sous un gouvernement monarchique, les soldats chargés de défendre l'Etat contre les incursions et les entreprises des ennemis du dehors ne restaient que de vils stipendiés, dévoués aux caprices de leurs maîtres; sous un gouvernement républicain il faut que les défenseurs de la République soient choisis dans toutes les classes, parce que toutes ont un intérêt sensible au bonheur de leur patrie. Et qu'a-t-on fait jusqu'à ce jour? Des hommes, des ouvriers suspects décriés ou perdus de dettes sont, pour la plupart, ceux qui au mois de septembre dernier sont venus infester l'armée que commandait le traître Dumouriez; lui était-il donc s'y difficile d'exciter le désordre parmi des gens de cette trempe et doit-on s'étonner du degré de confiance qu'il s'était acquis dans son armée ?
« La Convention, en faisant l'appel de 300,000 hommes, a rejeté presque à l'unanimité la voix du sort, et cependant c'est celle qu'on a adoptée dans la majeure partie des villes, bourgs et municipalités.
« Depuis mon retour de l'armée, occupé à ré* tablir ma santé délabrée, je ne me suis présenté dans ma section que huit jours après le décret qui ordonnait cette levée. Il s'agissait de former le contingent, je proposais le scrutin et si le contingent n'eût pas été fourni, j'ose croire qu'il eût été adopté.
( Pourquoi la Convention nationale, en élevant les Français à la dignité qui leur convient ne rendrait-elle pas un décret qui prescrirait ce mode comme le seul à suivre?
( Je prévois toutes les objections qu'on pourrait me faire; elles seront dictées par cet égoïsme qui malheureusement sait reprendre le dessus dans toutes les classes de la société, et j'y réponds d'avance.
« On me dira : mais ce mode est sujet à bien des inconvénients; l'intrigue et la cabale feront tomber les suffrages sur la classe des hommes aisés.
« Non. ;La classe des hommes malaisés ne se laisse pas facilement tromper sur ses véritables intérêts; elle sait que si la propriété appartient à quelques individus, l'usufruit de cette propriété est pour tous. Elle réfléchirait sur les suites d'une nomination concentrée dans la classe des hommes riches et elle se dirait à elle-même : Quelles ressources le travail pourrait-il nous offrir?
« Je fais pour la classe malaisée cette ré* flexion par laquelle un motif plus noble la déterminerait encore à ne pas consentir à une pareille nomination; c'est l'envie de partager les dangers et la gloire attachés à l'état de nos frères d'armes.
« Prétendre que la classe des hommes riches intriguerait pour déférer à l'autre classe un honneur dont ils se croiraient peu dignes, ce serait une absurdité. Cette classe est bien moins nombreuse que l'autre; elle recevrait donc la loi, loin de la faire; mais quelque reproche que mérite leur conduite depuis la Révolution, j'aime à croire que les riches seraient flattés de contribuer dans une juste proportion à la défense de la mère commune.
« D'ailleurs, pour éviter toutes difficultés,
prévenir tous les abus, l'Assemblée pourrait adopter un division telle que je la propose.
« Dans les campagnes, les habitants sont ou propriétaires ou journaliers, la division ne serait donc que de deux classes.
« Dans les villes, elle en formerait quatre : les propriétaires ou rentiers et leurs enfants, les fonctionnaires publics salariés ou non et leurs enfants, les marchands et leurs enfants, enfin"les artisans, journaliers,et leurs enfants.
« Il serait fait deux colonnes dans les bourgs et les villages, quatre dans les villes conformément à la division ci-dessus proposée et la nomination au scrutin se ferait dans la proportion du nombre porté sur les deux ou les quatre tableaux.
« Je le répète, je ne propose le dernier parti que pour parer aux abus qu'on paraît craindre, mais je soutiens que l'esprit public, un peu ranimé par une adresse énergique de la Convention, le scrutin n'aurait aucun des inconvénients qu'on suppose; si mes idées passent pour un rêve au moins ce sera le rêve d'un bon citoyen.
« Un ancien capitaine de grenadiers. »
Séance permanente du
présidence de thuriot, vice-président et de delmas, président.
présidence de thuriot, vice-président.
Là séance est reprise à sept heures douze minutes du soir.
au nom du comité des domaines, fait un rapport et présente un projet de décret sur la réclamation du citoyen Fernel, contre une proclamation du Conseil exécutif, laquelle annulle l'adjudication de 91 arpents de bois dans la forêt de Saint-Marc, qui lui avait été faite par les officiers de la maîtrisé de Reims ; le projet de décret est ainsi conçu (1) :
« La Convention nationale casse et annule la proclamation du conseil exécutif du 2 mars dernier, décrète que l'adjudication faite le 21 janvier précédent à Jean-Alexis-Simon Fernel, devant les officiers de la maîtrise de Reims, de 91 arpents de bois formant la réserve de la ci-devant abbaye de Saint-Médard de Soissons, en la forêt de Saint-Marc, aura son plein et entier effet. »
Un autre membre combat cette proposition, prouve la nullité de la vente
et la justice des motifs de la proclamation du Conseil exécutif tif. Il
demande la question préalable sur le projet du comité, et propose le
projet de décret suivant :
(La Convention adopte ce nouveau projet de décret) (1).
(2) propose à la Convention de décréter que les ventes et adjudications des bois appartenant ci-(devant aux Domaines, ainsi que celles des bois des ci-devant corps et communautés ecclésiastiques, seront faites à l'avenir par les directoires de district.
(La Convention décrète cette nouvelle proposition.
U n autre membre (3) demande la suspension de l'administration forestière actuellement existante. Il propose que la surveillance des forêts nationales soit confiée aux municipalités des lieux, sous celle des districts et des départements.
(La Convention renvoi» cette motion au comité des domaines pour en faire son rapport incessamment. )
(4). Le perfide Dumouriez a livré quatre de nos commissaires. Vous ignorez quelle est leur situation, s'ils ont suffisamment de l'argent et s'ils sont traités par nos ennemis d'une manière convenable ; il est de la justice et du devoir de la Convention de s'en informer. Je demande que le Comité de Salut public soit chargé de présenter à cet égard, un moyen de connaître au plus tôt leur situation.
Je vais vous rapporter des faits qui vous prouveront la nécessité
d'admettre la proposition de Rabaut. Vos commissaires sont arrivés sur
les cinq heures à Saint-Amand ; aussitôt ils ont été entourés par une
troupe de-hussards; ils avaient froid : ils ont demandé à se chauffer,
on leur a refusé du feu en payant. Ils ont demandé à boire, Dumouriez a
fait donner de l'eau à vos commissaires et du vin à Beurnonville. Une
personne de celles qui étaient avec vos commissaires, a voulu appeler
Dumouriez : citoyen; ce traître lui a fait donner des coups de plat de
sabre, et lui a dit qu'il n'y avait de citoyens que les scélérats. Jugez
par ces faite de la position de nos collègues. Je demande que la motion
de Rabaut soit adoptée. Je demande aussi que le décret par lequel vous
avez ordonné qu'il serait bâti, aux frais de la nation, une maison aux
filles Fernig, soit suspendu. Ces filles sont les aides de camp de
Dumouriez; elles ont bien effacé les services qu'elles peuvent avoir
ren-
(La Convention décrète la suspension du décret demandé par Gossuin, ainsi que le renvoi au comité de Salut public de la proposition de Kabaut.)
. Un artiste, sourd et muet, le citoyen Desenne, désire faire hommage à la Convention du buste de Michel Lepeletier, que vous voyez sur le bureau.
Lepeletier est représenté dans un costume parlementaire ; comme il n'y a plus de parlements en France, et que nous ne voulons pas les rétablir, je demande que l'hommage ne soit pas accepté.
(La Convention, après quelques débats, décrète l'admission du pétitionnaire à la barre.)
Le citoyen Desenne est introduit.
Il demande, par l'organe du citoyen Deneau « qu'on assigne à ce buste une place quelconque dans cette auguste enceinte ; il ne peut, dit-il, y avoir dans ce temple trop d'images d'un grand homme ; qu'en le voyant ici de toutes parts, nous sachions tous mourir comme lui, plutôt que de voir jamais la tyrannie renaître sous quelque forme qu'on tente de la défigurer. »
exprime aux pétionnaires la sensibilité de la Convention nationale pour cette nouvelle offrande. Il les invite aux honneurs de la séance.
(La Convention décrète la mention de cette offrande au procès-verbal.)
, au nom du comité des. finances, section des assignats, donne lecture d'un rapport et présente un projet de décret (1) portant que 150,000,000 d'assignats de 50 livres seront remplacés par une même somme d'assignats de 400 livres.
Il expose que l'émission des 150 millions en assignats de 50 livres qui devaient faire partie de fémission des 800 millions décrétés le 3 février dernier, éprouve des retards imprévus par la perfection que les artistes cherchent à donner aux filigranes et aux tailles douces des assignats. Dans la crainte des inconvénients que ce retard pourrait occasionner pour la chose publique, il propose le projet de décret suivant :
« La Convention nationale décrète que les cent cinquante millions en assignats de 50 livres qui devaient faire partie de l'émission des 800,000,000, décrétés le 4 février dernier, seront déposés, après leur fabrication, dans la caisse à trois clefs, pour n'en sortir qu'après un décret de la Convention nationale ; ils seront remplacés par une même somme en assignats de quatre cents livres. »
(La Convention adopte ce projet de décret.)
(2). Le salut de la République est notre premier devoir. Une grande
conjuration a été tramée ; nous devons nous occuper d'en découvrir les
auteurs et les complices. Des
Je demande l'exécution du décret qui accorde à Guadet et aux autres accusés la faculté de répondre à leur dénonciateur. Cependant comme la séance est avancée, je n'insisterai pas pour que la parole leur soit accordée ce soir, mais je fais la motion qu'ils soient entendus demain à midi. Je demande, également, que vous nommiez ce soir les quatre commissaires qui doivent aller dans le département de l'Orne, suivre les traces de la conspiration d'Orléans. Retarder la nomination de ces commissaires, ce serait rendre leur mission inutile.
(La Convention adopte, ces deux propositions.)
(1). Je ne sais pas quel prestige une faction criminelle (Murmures) se flatte d'en imposer à la nation, en égarant l'opinion publique. Elle veut détourner les yeux de dessus ses complots, en attirant l'attention sur une conspiration imaginaire. Je vous répète ce que je vous ai dit souvent : la majorité de cette faction n'est qu'égarée. C'est aux meneurs que j'en veux ; c'est sur leurs têtes que j'appelle le glaive de la loi.
Au reste, leur complicité n'est plus un problème ; Dumouriez l'a découverte en se déclarant pour eux contre la Montagne. (Rires ironiques à droite et au centre. — Applaudissements sur la Montagne.)
Je ne déciderai pas si Egalité père, que j'ai poursuivi dans mes écrits (Murmures), que j'ai dit être sans mœurs et sans vertu, est criminel de lèse-nation ; je le livre à vos recherches ; mais le fils est un traître. Je vais vous faire une proposition qui vous mettra au pied du mur, qui vous forcera dans vos derniers retranchements. (Nouveaux applaudissements sur la Montagne.)
Je demande que la tête d'Egalité fils soit mise à prix comme celle de Dumouriez. Je fais la même proposition à l'égard des Capets fugitifs, et nous verrons si vous voulez proscrire la famille que vous semblez poursuivre.
Quant à la justification de Guadet, Ver-gniaud et consorts qui ont tenu une correspondance criminelle avec Dumouriez, qu'ils se lavent, s'ils le peuvent, de l'opprobre dont les couvre l'opinion publique. ( Vifs applaudissements des tribunes.)
rappelle les tribunes à l'ordre ; il observe qu'il existe un décret qui défend tout signe d'approbation et d'improba-tion.
Non, non, Président, laissez applaudir les tribunes sur l'ignominie de cet homme !
Plusieurs membres : La clôture, la clôture !
Je m'oppose à ce que la proposition de Marat soit adoptée, et je pense qu'on ne m'accusera pas d'être suspect, moi qui ai fait plusieurs fois inutilement la proposition de bannir les Bourbons. Si vous mettez les têtes des chefs de la conspiration à prix, vous perdez le fil de la conspiration.
Je demande la question préalable.
Je demande à répondre.
U n grand nombre de membres : Fermez la discussion 1
insiste pour avoir la parole.
persiste à la lui refuser.
Buzot est l'homme d'affaires de Philippe d'Orléans.
Buzota été l'homme d'affaires du duc d'Orléans, et Marat en a reçu 15,000 livres. (Applaudissements à droite.)
La proposition de Marat est sous un point de vue conforme aux intérêts de la République et je l'appuierais de tout mon pouvoir, s'il n'existait malheureusement, parmi les nations, un sentiment qui les porte à exercer un droit incontestable, celui des représailles... (Interruptions sur la Montagne.) Vous exposeriez vos commissaires... (Nouveaux murmures.)
Un membre : Qu'est-ce que c'est que des membres de la Convention ! (Murmures prolongés sur un grand nombre de bancs.)
On me dit : Qu'est-ce que c'est que des membres de la Convention? Voudrait-on faire croire qu'il n'y a plus de représentation nationale ? La France en reconnaît encore, et quel que soit le nom des conspirateurs... (Les murmures couvrent la voix de Vorateur.)
Plusieurs membres (du centre) : Attendez le silence.
Où sommes-nous donc ? Nous n'aurons donc pas la liberté des opinions?
Je dis que vous ne devez pas admettre la proposition du citoyen Marat, car il existe chez toutes les nations un droit des représailles. (Murmures prolongés.)
Plusieurs membres : La tête de Dumouriez est bien à prix.
Je proteste devant tous contre ces interruptions et ces murmures. Ne suis-je pas représentant du peuple ; n'ai-je pas le droit de dire ici ce que je crois utile et juste ! Quoi, Marat vient ici prêcher l'assassinat ; il vient parler de faction scélérate ; il est entendu en silence, et moi qui viens proposer des mesures de sagesse, je ne pourrais pas les formuler? De quelle douleur l'âme ne doit-elle pas être navrée... (Nouveaux murmures et agitations très vives sur la Montagne.)
fait mine de descendre de la tribune.
(Aussitôt une bonne partie du côté droit et du centre se précipite au milieu de la salle et se dirige vers la Montagne. Les injures les plus grossières, les gestes les plus menaçants sont tour à tour adressés et rendus. Au milieu
de ce tumulte scandaleux, un membre se plaint que Lauze-Deperret a tiré son épée contre un de ses collègues. Alors l'agitation devient extrême; la salle retentit des cris répétés : A l'Abbaye ! à l'Abbaye ! Enfin, après une heure cle vociférations et de tu/nvulte, pendant laquelle le Président est obligé de se couvrir deux fois, le calme se rétablit.)
La question qui est agitée est de la plus haute importance ; chacun doit être entendu avec calme. Je rappelle à l'ordre les membres de ce côté (désignant la Montagne) qui ont interrompu ; j'y rappelle aussi tous ceux qui ont troublé la délibération...
Rappelez à l'ordre le scélérat qui nous a menacé de nous... (Murmures.)
Il m'est physiquement impossible de continuer de présider, si l'on ne veut pas faire du silence, si chacun se permet d'interrompre l'opinant. Lecointe, vous avez la parole. (Violentes rumeurs à l'extrême gauche.)
Le trouble vient de ce qu'un membre de ce côté (indiquant le côté droit) a tiré l'épée contre nous.
Plusieurs membres ; C'est faux !
C'était une écritoire (Rires).
J'avais prévenu l'Assemblée...
Président, faites votre devoir; rappelez à l'ordre l'assassin.
Président, je vous rappelle à l'ordre, moi.
Un membre : Je fais une motion d'ordre.
J'en fais une, moi; c'est qu'il n'y ait plus de séances du soir. (Vifs applaudissements sur un grand nombre de bancs.)
Il est de la justice, il est de la dignité de l'Assemblée, de punir l'insolent qui a tiré son épée... (Nouvelles interruptions et murmures. )
(Calon continue de parler dans le tumulte. — Le Président le rappelle à l'ordre; il persiste à vouloir parler et s'avance dans le milieu de la salle, au milieu des rumeurs et cle l'agitation — Le Président se couvre encore ; le calme renaît.) '
J'invite Lecointe à simplifier les idées.
il ne s'agit pas de cela, envoyez à l'Abbaye le scélérat qui a tiré son épée!
(Le tumulte et l'agitation recommencent et se prolongent.
Je demande la parole.
Attendez, je suis ici par le droit de mes commettants...
Je demande la parole contre vous, Président. (Applaudissements des tribunes.) La représentation nationale est perdue d'aujourd'hui. Je demande vengeance... (Violentes interruptions au centre.)
Un grand nombre de membres : A l'ordre ! à l'ordre ! vous n'avez pas la parole !
Président, de la justice et de l'impartialité !
Marat, vous n'avez pas la parole.
Je vous la demande.
Je ne veux pas vous l'accorder.
Vous me la donnerez, je la prendrai.
Marat, je vous rappelle pour la vingtième fois à l'ordre.
quitte la tribune:
Je demande à faire une motion d'ordre ; consultez l'Assemblée pour savoir si je serai entendu.
(La Convention accorde la parole à Massieu.)
Plusieurs membres (sur la Montagne) : A l'Abbaye ! celui qui a voulu nous assassiner !
D'autres membres : Levez la séance, Président ; levez la séance !
Et moi aussi, je demande que de pareils excès ne restent point impunis.
On insiste sur l'explication des faits qui se sont passés dans l'Assemblée. Le membre inculpé demande à parler, je lui accorde la parole.
Je quitte la tribune, mais mes commettants le sauront.
La grâce que je demande à la Convention et aux tribunes elles-mêmes. .. (Murmures et interruptions sur plusieurs bancs.)
Je répète ce que j'ai dit ; je demande à la Convention et aux tribunes... (Nouveaux murmures.)
Plusieurs membres (au centre) : Vous avili-sez la représentation nationale.
Si je suis coupable, je ne veux pas me soustraire à la peine, je suis soumis à la loi, mais je demande qu'on m'entende ; et je demande cette grâce aux tribunes, parce que depuis longtemps un membre lie peut parler ici, s'il n'en a obtenu la permission des tribunes. (Murmures sur la Montagne. — Applaudissements à droite et au centre.) Si je suis coupable, punissez-moi ; mais accordez-moi ce qui n'est pas refusé au dernier des criminels, d'être entendu avant d'être condamné. Citoyens, il y a dix-neuf mois que dans l'Assemblée législative, je commençai à lutter contre la Cour,contre les Feuillants et contre toutes les espèces d'aristocraties. Depuis la Convention, je lutte contre une horde de scélérats qui travaillent à perdre la chose publique. Je voyais que depuis deux jours on s'opposait à ce que les véritables coupables- fussent recherchés ; je voyais que depuis deux heures un membre faisait de vains efforts pour obtenir du silence. Je vous l'avoue, citoyens, cela m'indignait. Une partie de l'Assemblée, partageant cette indignation, a fait un mouvement vers le côté d'où venait les interruptions; j'ai suivi ce mouvement. Lorsque j'ai été au milieu de la salle,
j'ai vu qu'un membre avait un pistolet à la main. (Murmures à gauche.) Ecoutez-moi jusqu'au bout, je vous en prie. Beaucoup de membres peuvent croire que c'est une défaite ; mais... (Mêmes rumeurs.) On ne demande dans cette partie que des coupables, autrement on écouterait. J'avoue que dans un moment où je me voyais menacé, dans ce moment de délire de celui que se permettait contre moi......
(Violents murmures dans les tribunes.)
(Louvet, Grangeneuve, Barbaroux et plusieurs autres membres s'avancent vers le Président, et demandent avec chaleur vengeance de l'insulte des tribunes. Quelques membres désignent un citoyen pour avoir fait des gestes menaçants. Le Président donne ordre de l'arrêter. Le calme se rétablit.)
C'est violer tous les principes que de ne pas vouloir entendre un accusé. Je vous déclare qu'il n'y a que de mauvais citoyens qui puissent se permettre d'interrompre. Deperret, je vous maintiendrai la parole.
Je dis, citoyens, que, provoqué par ce mouvement menaçant, j'ai tiré l'épée ; mais dans ce moment je n'étais pas à moi, j'étais animé d'une sainte fureur, si l'on peut s'exprimer ainsi, et je vous jure que si je m'étais permis, dans mon accès de fureur, de porter la main sur un représentant du peuple, il me restait une arme, je me serais brûlé la cervelle. Voilà ce que j'avais à dire.
Plusieurs membres au centre : L'ordre du jour !
D'autres membres (sur la Montagne) : Non, non !
(La Convention, consultée; décide de passer à 1 ordre du jour.)
Les mêmes membres : C'est un déni de justice... A l'Abbaye, Deperret !
Lecointe a la parole.
S'il existe un membre de ce côté qui ait tiré un pistolet, la Montagne ne veut pas lui faire de grâce; que Deperret l'indique.
le jeune et Fabre d'Fglantine font la même sommation.
Je déclare que je ne puis pas tenir contre une pareille tyrannie. Je quitte le fauteuil.
descend du fauteuil; Deluias va l'occuper.
Présidence de Delmas, président.
J'insiste pour que Deperret désigne le membre qui a tiré le pistolet contre lui.
U n grand nombre des membres : L'ordre du jour !
Le moyen de nous tirer de là, c'est de consulter l'Assemblée. Je vais mettre aux voix l'ordre du jour.
(La Convention passe pour la seconde fois à l'ordre du jour.)»
Plusieurs membres (sur la Montagne) : Deperret est un assassin et un calomniateur.
paraît à la tribune.
Vous n'avez pas la parole.
(1), Je vais faire procéder à l'appel nominal pour la nomination des quatre commissaires dont la Convention nationale a décrété l'envoi dans le département de l'Orne.
Président, mettez aux voix auparavant les propositions que j'ai faites.
Plusieurs membres : Non, non, l'appel nominal !
(La Convention accorde la priorité à l'appel nominal.)
On reconnaît maintenant les complices des Capets.
, secrétaire,. procède à l'appel nominal pour la nomination des quatre commissaires à envoyer dans le département de l'Orne.
U résulte de cet appel que les citoyens suivants ont réuni le plus de voix :
Lesage (.Eure-et-Loir), 147 voix, Mariette 119 voix; Plet-Beauprey, 117 voix; Duval (de Rouen), 117 voix.
les proclame commissaires.
(2) fait connaître à la Convention que le citoyen Travau, secrétaire des commissaires de la Convention nationale à Chantilly, est tombé malade, et propose le citoyen Calance, commis au comité des décrets, pour le remplaoer.
(La Convention désigne le citoyen Calance et autorise son Président à lui délivrer un lais-sez-passer.)
(La séance est suspendue à une heure et demie, et prorogée au lendemain matin dix heures.)
Séance du
présidence de thuriot, vice président et de delmas, président.
La séance est reprise à dix heures cinq minutes du matin.
, secrétaire, donne lecture des lettres et adresses suivantes :
1° Lettre de Dalbarade, ministre de la marine ; il demande une prompte
expédition du décret qui réunit les forges de la Chaussade à son;
département ; cette lettre est ainsi conçue: (3)
« Citoyen Président,
« Il est on ne peut plus urgent de me procurer le décret d'hier qui réunit les forges de la Chaussade au département qui m'est confié. Je l'ai fait démander plusieurs fois, sans avoir pu l'obténir. Je vous demande en grâce de m'en faire délivrer l'extrait sur-le-champ ; les mesures que j'ai à prendre pour cette réunion sont pressantes.
Le ministre de la marine et des colonies, « Signé : Dalbarade. »
(La Convention renvoie cette lettre au comité des décrets.)
2° Lettre du citoyen Roux, commissaire de la Convention dans les départements de la Haute-Marne et des Vosges ; il fait part du patriotisme des citoyens du district de Mire-court ; sa lettre est ainsi conçue(l) :
Mirecourt,
« Citoyens, nos collègues,
« Nous nous empressons de vous informer que, malgré l'intrigue des malveillants, le recrutement s'est effectué dans les départements de la Haute-Marne et des Vosges ; que déjà plusieurs détachements de la Haute-Marne seront rendus le huit du courant à Strasbourg et plusieurs aussi des Vosges le sont déjà à Metz, bien habillés et armés. J'ajouterai que notre présence a produit un bon effet dans plusieurs communes de ces départements où le fanatisme et l'intrigue cherchaient à exciter des troubles et où les autorités constituées, quoique animées de bons principes, avaient besoin d'être stimulées.
« Des avis pleins de chaleur, des réquisitions vigoureuses, des suspensions que nous avons jugées indispensables, une surveillance activement exercée sur les officiers de maîtrise, presque tous aristocrates j sur les percepteurs des droits d'enregistrement, presque tous suspects ou indolents ; sur les officiers de gendarmerie, en général ennemis du'nouvel ordre de choses, beaucoup de détails d'administration où nous sommes entrés avec les autorités constituées, leur ont prouvé que nous aimions nos devoirs, que nous aimions à les remplir et que nous désirions rendre notre mission utile. Nous espérons surtout ce dernier avantage des notes que nous nous sommes fait remettre par chacune des administrations que nous avons parcourues.
« Je ne vous entretiens point du mouvement contre-révolutionnaire qui a
eu lieu le jour de Pâques, à Corgirnou, près Langres; le maire de
Chaumont vous l'aura sûrement appris. Nous nous en sommes référés au
zèle et aux mesures qu'a prises en cette rencontre le directoire du
département, auprès duquel néanmoins nous avons décidé de nous rendre,
vers les premiers jours de la semaine prochaine,
« Nous nous hâterons de nous rendre à notre poste à la Convention, Où àotis Sëfitoâs qu'il importe au salut publié que se rallient tôtis les bons citoyens pour Concourir â sauvêï là patrie des dangers qui la menacent.
« Nous ne pouvons iléanmoins eèpérër de nous y rendre avant le 18 ou le 20 du courant.
« Les çontrées que nous parcourons gémissent des malheurs qui accablent plusieurs départements, mais cela n'abat point leur courage. Ils parlent, au contraire, de voler en màsse à la frontièrè, au fireihièr sighai des généraux.
Nous avons fait exécuter avec vigueur la loi du désarmement dans plusieurs communes, ayant même que le décret y fut parvenu officiellement. Aujourd'hui, le district de Mire-court l à .reçu, et sur-le-champ il l'a fait exécuter avec beaucoup d'appareil ; les aristocrates ët les modérés (Car nous avons |ait aux çom-munés un devoir de ne plus les distinguer) s'y sont soumis sans oser souffler. Ils ont seulement réclamé pour leurs personnes la protection de là loi ; on leur a répondu que son glaive était, levé pour les protéger, s'ils s'y conforment et pouf les exterminer, s'ils troublaient l'ordre.
« Nous âfbhs appris, lé 5, les scélératesses dé DumoUrlel ÈïleS ont éxcité là, juste indignation. dë toùs lês bons citoyeîis. Mais 6è qui êSÉ côfisolaiit |5ôur holis, é'ëSt la rëëOlûtion que îlÔUS àVonâ vu prendre à toutes les Com-munes que ÉLOtiS avons pârcouruës depuis, de toarchef èii njàsilê vëfs le poiiit de là frontière qui serà èn danger.
I « Cette conduite du plus scélérat dès hommes, loin de jeter le. découragement, a inspiré une nouvelle énergie, â tous les patriotes, ç[ui à faiè trembler lés infâmes aristocrates qui partout Osaient, aëpilis quelque temps, lever une tête altière:
Ôn a achevé de les désarmer. Ôn surveille dans Chaque eommufce les personnes suspectes et l'on s'est mis èfi mësure pour, les anéantir àu premier mouvement qu'elles feraient pour troubler, la tranquillité publique; Nous àvonS applaudi à ces sages précautions et nous avons fait sentir aux sociétés populaires, ces sentinelles vigilantes, qu'elles devaient employer tous leurs moyens pour éclairer le peuple, surveiller les malveillants et se concerter avec les autorités constituées pour faire respecter la loi et observer les décrets importants que les circonstances viennent impérieusement de conimander.. Notre lettre devait partir de Mirecourt, mais feous avons manqué l'heure de la poste.
u Nous vous prions de Remettre et faire lire sans délai la lettre que nous écrivons àu président, relativement aùx affreuses nouvelles qui U0U3 ont fait connaître les nouveaux dangers de la patrie.
J'éïhbrassë tous ifiëS collègues de la Haute-Mârfie ét Vous prie dë faire agréer l'assurance dê ihoh fèspeëtUéUi attachement à votre ehère iâ&ltie.
« Nous nous rendrons après-demain à Cîiau-mont.
Signé : Roux. »
(La Convention décrète la mention hôno-1 rableêfi ordonhe l'ihsërtidïi dé cette lettre au Bulletin.)
3° Lettre des citoyens Britz ét Dubois-Bu-baisi commis bevirès de la Convention nationale auùj frontières du Nord (1)$ qUi instruisent la Convention de leur arrivée à Yalenciënnes ét témoignent leur regret de voir partir leurs collègues CochOti, LeqUiniô et Dubois-Ëëlle-garde, qui ont fàit Uh biëti ifafini sut lés frontières, mais qui croieht devOir se rendre à la Convention.
(2) J'appuie la demande de feos commissaires Briez et Dubois-Dubais. Je propose que les citoyens Cochon, Lequinio et Bel-îègârde côntihùënt avec lëtifs nbUvéâUÈ: collègues la visite des villes frontières dès départements du Nord ët des Ardennes, et je fais la motion qu'on envoie sur-le-champ un courrier extraordinaire pour les en informer;
(La Convention adopte là proposition de Gossûin;)
Suit le texte définitif du décret rendu (S) :
a La Convention nationale, sur la proposition d'un de ses membres, décrète 4ue Belle-garde, Cochon et Lequinip,- représentant^ du pèuplè, députés pour là visité des villes frontières des dépàrtèîneuts du Nord et des Ardennes, rempliront, concurremment avec leurs collègues Dubois-Dubâiâ et BHez, là mission dont ces deraiërs soat chargés jpàr décret du 4 de cë mois. Le Conseil exécutif provisoire les en informera sur-le-champ par un courrier extraordinaire. »
Lettre dè Ijfôhiér, rmnuîfe dè là justice, qui fait part à la Convention de l'ëxécu-tion du décret relatif aux membres dé la famille des Bourbouà; ëëttê lettre est aiiàBi conçue (4) :
Paris,
Citoyen Président,
( Le Conseil exécutif provisoire a fait exécuter avec tOutè là frrëfaiptitudé possible, le décret relatif aux individus de la famille des Bourbqns. Dans la nuit du 9 au 10, tous les individus dë cëttë fâîhiyë, à l'extië£tion de ceux qui sont détenus au Temple et de la ci-toyennë Egalité; demeurée en état d'arrestation chez elïèj Conformément au décret de la Convention, sont partis pour se rendre au lieu qui leur est indiqué.
( Le Conseil rendra compte, si la Convention le juge à propos, des
mesures qui ont été prises. Il ànnôncêrâ Sëulëinënt quë ces Mesures ont
été CbtiinlUniquéèô au ëomitë de Salut public qui les a jugées
convenables et suffisantes ët qU'il a cru (jUe cette conduite doit
« Lé président du Conseil exécutif provisoire; « Signé : Gohier ; Groûvellè^ secrétaire. >i
(Là Convention prend acte de cette lettre qu elle rènvôiê à son cômité des déôïëts.)
5° Lettre dès citoyens Léoiiafd BèuHîoH èt Pi *ost (i), commissaires dé là Convention nâ-tionale dans les départements dp ta Côtè-d'Or et du^ Jura, qui annoncent qUe lë recrutement se fait avec la plus grande activité dans ëës deux départements ; qu'ils ont suspendu à Dôle plusieurs membres dès administrations de diS-trict, et fait déporter tous les hommes suspects et ênhëmis dii bien public.
(La Convention renvoie la lettre au comité dë législation.)
6° Lettré dés citoyens Léonard Bourdon et Prost, commissaires de la Convention natio-nàlé dans les départements du Jura et de la Ûôte-d'Ofj qui font passer Un. arrêté pris par eux: dans le département du Jura, relativement aux grèves.
(La. Conyention renvoie cette lettre au comité d'agriculture pour en fairë l'examen. )
7° Lettre des administrateurs du directoire du district de Chautmont, département dé là Ilaute-Mâme, qui jurent de maintenir la République, malgré les trahisons do Dumouriez; cette lettre ést ainsi conçue (2) :
Chaumont, le
« Citoyens législateurs,
« Quels que soient lés attentats de Dumou-riezj nOuS n'avons pas perdu courage; en aspirant à la République, noûs savions que de Violents orages s'élèveraient contré nous. Nous sëftmeS dans les tourments* mais_ nous savons" aussi que l'horizon doit s'éclaircir et quë les dangers disparaîtront, que lés bons citoyens s'Unissent de plus en plus ; que leur point de ralliement Soit la Convention et si les généraux, si lés agents du gouvernement nous trahissent la Convention ne nous trompera pasi Son intérêt et sa gloire, le bonheur du peuple sont les garants de la confianëe qué les amis de la République lui doivent. Qùahd de nouveaux tyrans dressent une tête hidëuse, nous, calmes et forts de ndtré courage, nous jurons, de nouveau, devant vous : La République ou la mort !
M Lès administrateurs du directoire du dis-tHbl dè Chaumont, département de la Hautè-ilïàrnëi
« Signé : GuiRONj Deshayes, J.-J Bothiec. » A cette lettre se trouve
jointe céllë des
Chaumont, le
« Représentants,
« Dë nouveaux attentats ont été commis envers la sôûvëràineté dii peuple français. Yous avez parlé ; à l'instant, 300,000 hommes Sé sont portés sur les frontières pour reiifohôer nos nombreuses armées.
(( Le_contingent de ce département ést effectué. Nos braves défenséurs veulent tous, à I'éhvi, marcher les premiers, mais il demandent des armes et nous avons là douleûr de nous voir dans l'impossibilité dé leur en fournir. NoiiS leiir disons qu'arrivés à destination, il lëUr eh sërà distribué et ils partétit conteiitS;
« Représentants, notte promesse ne sera-t-elle point trompée ? Nos arsenaux sont-ils garnis ? Avons-hoUs encorë eii notre possession cette quantité prodigieuse d'armes que nous avons prises à nos ennemis ? Faites-vous dono rendrë éciffiptë, par le ministre de la guerre, de rtbs fOicéS éotis le rapport dés armes ; ren-déz-ëfi lâ liste pUblique par là vbië de l'iinpres-sion ; cette mesure est nécessaire pour déjouer lës bomplbts des trâîtrés cdâlisëfe dont la plupart de nos armées est infestée.
« Les meiiibr'eS du comité de correspondance,
« Sùjiié ^Ldtf-^c, A. Deshayes, Guiron. »
(t*a Conyention décrète la mention honorable et ordonne l'insertion dë ces deux lettres au Bulletin.)
(2), annoncé que le capitaine Joba demande à etre admis à la barre pour présenter une pétition, àii hdih dés officiers dé la région du Nord, ëoUcernant le général Westermann. Il propose, avëiit dè donner l'ordre dë l'ihtroduifëî dë faire lire une lettre dés^métiibfës toniposàht le conseil dè guèrrê dë lài bille Ûè Lillë silr çettë mêfctie affaire.
(La Convention se range à l'avis du Pré-sident. )
, Sècrétâiré, donhe leètlitë de cëttè lettre^ par laquelle lè conseil de feUërre dë Lille envoie à la Convention toutes les pièeëS de la correspondance de Westermann, ét l'avertit que cet officier a refusé d'obéir aux Ordres dès commissaires qui lui efijbigiiàieftt dé ramener toutes ses forcés sous les mtifs dë Lille; qu'il s'ést campé à une lieUe dë la villë, et que d'après ses opérations, il a pâru aVbir dëS vuëS hostiles.
Le même secrétaire donne également lecture d'une lettre de Bouchotte, ministre de la guerre, qui annonce que Westermann demande à être entendu le plus promptement possible.
Lééafiitaiftè Jobà est ensuite introduit à la bàrrë et S'ëàprime ainsi :
« Citoyens, lèâ officiers èt Soldats de là lé-
Si Westermann n'est pas coupable, son innocence sera proclamée, et il vous sera rendu, mais s'il a trahi sa patrie, il faut que sa tête tombe sous le glaive de la loi. La Convention vous invite aux honneurs de la séance.
(La Convention nationale décrète que l'adjudant général Westermann sera entendu et interrogé par les comités réunis de la guerre et de sûreté générale, qui en feront leur rapport à la Convention.)
, secrétaire, réprend la lecture des lettres et adresses envoyées à l'Assemblée.
8° Lettre du citoyen Jollivet (1), qui fait passer à la Convention un exemplaire d'un ouvrage sur les principes fondamentaux du régime social (2), dont il lui fait hommage.
(La Convention agrée cet hommage, et le renvoie au comité des Six, chargé de l'examen des plans de Constitution, et au comité des finances.)
9° Adresse des membres du conseil général de la commu/ne de Ghâlons, contenant les sentiments du plus pur patriotisme ; cette adresse est ainsi conçue (3) :
Châlons, département de la Marne, le 8 avril 1793, l'an II de la République française.
« Citoyen Président, « C'est avec la plus douce satisfaction que le conseil général de la commune de Châlons-sur-Marne a vu deux de ses sages représentants venir assister à ses délibérations, y répandre la lumière et y propager les principes du plus pur patriotisme. Ce n'est pas non plus sans émotion que nous les avons vus nous quitter précipitamment pour se réunir au sein de la Convention nationale, afin de prendre les mesures les plus efficaces pour déjouer les intrigues des traîtres et des tyrans coalisés contre la République. Oui, citoyens législateurs, 300,000 hommes levés, armés, équipés, et partis en moins de quinze jours, apprendront à ces despotes ce que peut une nation libre ; encore un généreux effort, et leurs trônes seront ensevelis sous les décombres de l'édifice féodal et sacerdotal, qu'ils ne s'imaginent pas qu'une nation qui a déjà goûté les charmes de la liberté puisse facilement reprendre les fers qu'elle a brisés.
(L'Europe entière tramera en vain notre ruine, la République française
sera toujours et plus forte et plus courageuse ; les efforts multipliés
des tyrans seront toujours autant de pas vers la liberté universelle.
« Nous renouvelons ici le serment de ne point souffrir que la terre sainte de la liberté soit de nouveau profanée par la présence des esclaves du despotisme. Avec de tels sentiments, nous triompherons sans doute de tous les esclaves et de tous les crimes, comme nous avons triomphé de tant de préjugés. Quoi, serait-il plus difficile de maintenir la liberté que de la conquérir?
« Le traître qui est actuellement à la tête de nos armées, croit-il échapper au juste châtiment qui lui est dû? non, sans doute ; dites encore un seul mot, citoyens législateurs, et la nation entière sans distinction d'âge ni de sexe se rangera sous l'étendard sacré de la République ; nous parcourrons toutes les terres étrangères jusqu'à ce que nous ayons trouvé cet infâme scélérat. Qu'il vienne, ce lâche, et il verra tous les habitants de cette cité se disputer à l'envi la gloire de le livrer au fer vengeur des lois.
« Tels sont, citoyens législateurs, les sentiments des habitants de la commune de Châlons-sur-Marne. Nous vous prions, citoyen Président, d'assurer la Convention nationale de notre parfait dévouement à la chose publique et notre entière adhésion à tous^ vos sages décrets. Les commissaires qui ont été envoyés parmi nous, vous diront que la plus grande harmonie et la plus grande intelligence régnent dans nos murs, parce que nous sommes assurés que c'est le seul moyen de vaincre nos ennemis intérieurs et extérieurs. Us vous diront que le recrutement était fait lorsqu'ils sont arrivés ; ils vous diront que sur une population de 12,000 à 13,000 âmes que présente la commune de Châlons, elle avait déjà fourni 500 hommes dans les armées de la République et qu'elle vient encore d'en fournir 140. Us vous diront que quelques agitateurs secrets avaient voulu entraver les opérations de la commune relativement au recrutement, mais que la fermeté et le courage des magistrats du peuple ont bientôt dissipé ces perturbateurs, puisque, dans la même journée, le contingent déterminé par la loi a été fourni ; ils vous diront aussi que tous les habitants se sont empressés d'armer et d'équiper ces généreux défenseurs.
Nous vous ajouterons, qu'aussitôt l'arrivée du courrier qui nous a apporté la loi qui déclare Dumouriez traître à la patrie, les gardes nationaux et autres troupes qui se sont trouvés à Châlons ont été assemblés, et que cette loi a été lue et publiée à la tête de chaque bataillon avec des cris de « Vive la Convention nationale ! »
« Les membres du conseil général de la commune de (Jhâlons.
« Signé : Delestré, maire : Le Nain, officier municipal; Vaugnier, Le Hardy, officier municipal; Bourdon, Ancel, officier municipal; Mangin, Trouille, Menestré, officier municipal; Pellerier, notable; Lamiraux, officier municipal. »
(La Convention décrète la mention honorable et ordonne l'insertion de cette adresse au Bulletin.)
10° Lettre souscrite par divers créanciers d'émigrés, relative à des difficultés qu'éprouvent leurs créances (1).
(La Convention renvoie cette lettre au comité de législation.)
11° Lettre des créanciers de l'île de Ta-bago; ils réclament leurs créances.
(La Convention renvoie cette lettre aux comités diplomatique et de Salut public.)
12° Lettre de la citoyenne Laudelle, qui réclame des secours, après avoir exposé sa profonde misère.
(La Convention renvoie cette lettre au comité des secours. )
13° Pétition du citoyen Louis Forgeot, ca-nonnier, sur les moyens de former prompte-ment un corps de cavalerie.
(La Convention renvoie cette lettre au comité de la guerre.)
14° Lettre de Gohier, ministre de la justice, et pièces relatives à la difficulté qui s'élève sur l'exécution de la loi du 3 mars, qui commet le tribunal criminel de Seine-et-Oise pour juger les prévenus du pillage qui a eu lieu à Paris les 25 et 26 février.
(La Convention renvoie cette lettre au comité de législation pour en faire un prompt rapport.)
15° Lettre du citoyen Belot (2), ci-devant religieux de chœur, au couvent des Petits-Pères, et jouissant d'une pension de retraite, de 700 livres, qui demande à la Convention, qu'elle soit convertie en une somme de 14,000 livres une fois payée, dont il fera à la patrie un don de 12,000 livres.
Plusieurs membres demandent la mention honorable de cette offre.
Un membre observe que c'est peut-être la crainte de la contre-révolution qui a déterminé ce prêtre, et demande l'ordre du jour.
Un autre membre demande le renvoi au comité de liquidation.
(La Convention renvoie cette lettre au comité de liquidation.)
16° Lettre des citoyens, Julien (de Toulouse) Bourbotte et Prieur (de la
Marne), commissaires de la Convention à Orléans; ils annoncent qu'ils
ont fait partir pour Paris les prévenus de l'assassinat de Léonard
Bourdon, et ils font passer cinq arrêtés qu'ils ont pris en
Le
« Citoyens collègues,
( Nous vous avons marqué, par notre lettre d'hier, que la tranquillité de la ville d'Orléans exigeait la translation à Paris des particuliers prévenus d'être les auteurs ou les complices de l'attentat commis sur Léonard Bourdon, ainsi que de François Boucher, prévenu d'être un émissaire du traître Dumouriez.
( Ces sept particuliers sont-partis cette nuit à minuit et leur sortie de la ville a été très tranquille.
( Nous avons pris hier cinq arrêtés que nous joignons ici et pour lesquels nous demandons ainsi que pour ceux que nous vous avons précédemment envoyés, votre approbation.
« Nous ne cesserons de vous répéter au surplus que nous voyons avec peine que nos lettres et nos arrêtés ne sont pas lus à la Convention nationale. Nous pensons cependant que la France entière, ayant dans ces instants les yeux fixés sur la ville d'Orléans, d'après l'attentat qui y a eu lieu contre la représentation nationale, il serait bon que l'état de ce point important de la République fût connu.
c Les députés de la C onvention nationale à Orléans,
« Signé : J. Julien (de Toulouse); Bourbotte, Prieur (de la Marne). »
« P. S. — Nous vous recommandons particulièrement la lecture de notre lettre du 5. »
A cette lettre, se trouvent joints les cinq arrêtés qui suivent :
1er arrêté (2).
« Nous, commissaires de la Convention nationale à Orléans,
« Yu : 1° La lettre à nous adressée par le citoyen Jacob, président du district d'Orléans, en date du 10 de ce mois, de laquelle il résulte que Montaudouin est soupçonné d'avoir eu des intelligences avec les ennemis de l'extérieur, d'en avoir recélé chez lui, dans sa maison de la Source, et même d'être coupable d'émigration ;
( 2° Le procès-verbal dressé lors de la visite et perquisition qui a été faite le 31 mars dernier, à l'effet de s'assurer de la personne de Montaudouin, lequel procès-verbal contient la déclaration faite par un de ses domestiques que son maître était parti pour Orléans, le dimanche 17 mars, à 11 heures du matin, pour y faire son service, en qualité de garde national dans la cavalerie
« 3° Les lettres du citoyen Jacob, des 31 mars et 7 avril suivant et son
rapport du 19 du même mois;
« 5° Plusieurs lettres des corps administratifs concernant le même objet et éjioncia^iyes des soins que le sieur Montauplouin apportait dans sa marche pour n'être pas reconnu;
(( Considérant que, de toutes pes pièces, ainsi que des bruits public? sur le personnel de Montaudouin, il résulte évidemment des preuves non suspectes qu'il était, sj^on. le cjief d'une conspiration contré la liberté et la sûreté de son pays, du mpius un agents de la contrp-révolution qu on cherphait à opé' rer dans toutes les parties de la République.
Considérant que, dans lès circonstances actuelles, il est important de s'assurer de la personne de tqus lps coupables, de connaître la nature et l'étendue de leurs crimes pour les livrer au glaive de la vengeance nationale.
Arrêtons, en vertu des pouvoirs à nous donnés, qute toutes les pièces^ y relatées seraient remises aux commissaires du conseil pxéputif provisoire, à l'effet d'informer contre ledit Montaudouin sur tous Jps faits dont il est prévenu et de nous rendre compte ensuite du résultat de la- procédure.
« Fait à Orléans, le 10 ayrij 1793, l'an II de la République française.
« Signé Bourbotte, Prieur (de la Marne);
J. Julien {(le TouÏQUse),
2e arrêté (1).
(( Nous, députés commissaires de la Convention nationale à Orléans;
( Considérant qu'il est important qu'U J ait toujours dans cette ville une forcé à la disposition des autorités constituées;
« Arrêtons qu'il sera fqrmé une réserve de cinquante hommes à la maison commune, laquelle sera composée des troupes qui se trouvent en cette ville en proportion de leur force respective.
« Requérons le colonel du 16^ régiment de dragons, commandant en cette ville, de prendre toutes les mesures et donner tous les ordres nécessaires pour l'exécution du present arrêté.
« Fait à Orléans, le 10 avril 1793, l'an II de la République française « Signé : J. Julien (de Toulouse) ; Bgurbqtte, Prieur (de la Marne). »
3e arrêté (2).
« Nous, députés commissaires de la Convention patioriale à Orléans,
« Requérons le colonel du 16e régiment, commandant en cette ville, de mettre a notre disposition, à la maison de l'Egalité, upe ordonnance de chaque corps.
« Fait à Orléans, le 10 avril 1793, J'an II de la République française.
e arrêté (l),
« Nous, députés commissaires de la Convention nationale à Orléans ;
(( Considérant que l'aptivité et sûreté (lu service exigent que les ordres a donner à toutes les parties de la force armée leur parviennent directement par l'organe du commandant de la ville;
« Arrêtons que toutes les autorités constituées adresseront leurs réquisitions au citoyen en Barbazan, colonel du 16e régiment de dragons.
« Fait à Orléans, le 10 avril 1793, l'an II de la République française.
« Signé : J. Julien (de Toulouse) ; Bourbotte, Prieur (de la Marrie). »
5e arrêté (2).
« Nous, commissaires de la Convention nationale à Orléans;
« Vu la lettre à nous écrite par le procureur-général syndic du département du Loiret, en date de ce jour, par laquelle il nous consulte su? la question de savqir s'il dqjt exercer auprès du comieté de sûreté générale, établi par l'arrêté du conseil général du département eu date cj'hipr, les mêmes fonctions qu'auprès du conseil général.
« Considérant : 1° Que le comité de surveillance n'est qu'une émanation plu conseil général, qui, ppur Ip Salut public, lui a confié une partie de ses pouvoirs ;
« 2° Que la grande police est confiée au procureur général syndie ;
« 3° Qu'il est chargé de mettre en action la force armée, en cas de troubles et que c'est à lui à la requérir ;
« Avons arrêté que le procureur général syndic exercera près le comité de sûreté générale du département les mêpies fonctions qu'auprès du conseil générales Fait à Orléans, le 10 avril, l'an II de la République française.
Signé: J. Julien (de Toulouse); Bourbotte, Prieur (de la Marne)*.
(La Convention nationale approuve les dits arrêtés. )
17° Lettre du comte d'Aversperg ef Augustin comte de Linange (3) qui réclament contre le décret qui les a fait placer à l'Abbaye, comme otages en qualité de parents du prince de Cobourg, ce qui est, disent-ils, une erreur.
(La Convention renvoiç cette lettre au comité dû Salut public.)
18° Lettre des citoyens Charles Cochon, Dubois de Bellegrade et Lequinio,
çpmfnis-sairès de la Convention aux places fortes au Nord, par laquelle
ils rendent compte de l'état de l'armée et font une proclamation qu'ils
ont
( Valenciennes,
« Citoyens nos ppllègijps,
« Les choses sont à peu près dans le même étgtt que nous les avons apprises par notre .lettre d'hier, et pous ne vous écrivons celjp-ci que pour vous tirer d'inquiétude dans laquelle il nous est si naturel de vous croire encore. Il se montre quelques ennemis au delà de Condé, ils ont même tiré des obus vers la place, mais de si loin qu'ils n'arrivent pas jusqu'aux glacis; ils torpbent dans l'inondation. Bien des motifs portent à croire que oe n'est qu'une fanfaronnade et que l'ennemi ne se montre là que pour couvrir sa marche vers un autre point. Au surplus, on lui répondra ; nous ne manquons pas de troupes. Nous avons fait multiplier les moyens de s'assurer du nombre de celles de l'ennemi ; s'il n'y a que 15,000 hommes en tout dans les environs, ainsi qu'on l'assure, il n'y sera pas longtemps.
« Il s'est tenu ce matin un conseil de guerre chez le général Ferrand ; deux membres de chacun des çqrps administratifs et nous trois en faisions partie. Ce conseil avait pour objet des mesures à prendre relativement à la place de Valenciennes ; il nous sera remis une expédition des arrêtés et nous vous les ferons passer. Dans cette séance? le général Ferrand a déposé plusieurs lettres scellées du cachet de l'Empire et qui lui ont été apportées pu premier poste avance par un trompette autrichien ; elles étaient en un paquet, sous une enveloppe qui contient quelques lignes écrites en allemand. Il est plus que probable que ce sont des lettres de nos collègues et du ministre Beurnonville, et qu'elles n'ont été cachetées qu'après avoir été lues ; les écritures et les noms des adresses en donnent la presque certitude. Au surplus, le conseil de guerre a unanimement arrêté qu'elles seraient renvoyées au comité de sûreté générale de la Convention, qui pourra faire venir dans son sein plusieurs de ceux à qui elles sont adressées ; nous les avons à l'ijistant réunies en un paquet, scellé du cachet du général, et nous vous les faisons passer avec la présente.
« Il se tient toujours ici et dans les environs, même dans les
cantonnements, des propos inciviques et provoquant au retour de la
royauté; c'est le fruit de l'égarement opéré par les instructions du
traître Dumouriez, ou même l'œuvre de quelques-uns de ses machinateurs
appelés encore ici. Nous prenons tous les moyens qui sont en nous pour
anéantir cette provocation perfide à l'insurgence, et la muni' cipalité
met de l'activité dans la recherche de ce genre de délit. Au surplus,
comme le mal est absolument dans le défaut d'instruction, nous venons de
faire une proclamation de quelque étendue à cet égard et nous la
répandrons à très grand nombre ; nous n'avons pas Cru devoir nous
attacher à y développer un style pompeux et fleuri, mais à y mettre une
grande simplicité, une grande clarté et des
« A l'instant, nos deux collègues Briez et Du Bois Du Bais viennent d'arriver ; nous yenons de les embrasser et nous dînons ensemble ; nous allons leur donner les instructions nécessaires pour les mettre au courant de l'état actuel des choses, et nous partons aussitôt pour achever la mission dont nous avajt détournés la trahison de Dumouriez ; nous visiterons Bouchajn et Cambrai, que nous avpns laissées derrière pomme places de seconde et de troisième ligne. Nous nous rendrons ensuite auprès de la Convention nationale pour y déposer les matériaux qui sont le résultat de nos opérations et faciliter, par nos instructions verbales détaillées, le moyen de presser l'exécution des objets qui nous ont paru nécessaires au service de la République. Il paraît, par ce que nous ont dit nos collègues, que nous avons été induits en erreur par une faute "d'expression en vous demandant de faire passer ici des fonds ; nous entendions par là du signe représentatif et non du métal. Si nous avons employé le mot argent, c'est un effet de la précipitation avec laquelle nous étions obliges d'ecrire. Il ne faut point iei d'argent ; les assignats y ont un libre cours comme dans le reste de la République et nous croirions fort dangereux de laisser croire que l'argent y est nécessaire ; il est certain que 1 on paye tout fort cher, mais encore vaut il mieux faire des sacrifices et maintenir la circulation du papier comme il était indubitable qùe nous fussions forcés à traverser quelques portions de la Belgique pour abréger nos courses ou pour nous aboucher avec les généraux, nous avions emporté quelques fonds en espèces, mais nous les rapporterons presque entiers.
« Nous avons lu avec étonnement dans un Bulletin que le citoyen Bernezais, aide de camp de Dumouriez, aurait dit à la Convention qu'il avait harangué au camp plusieurs bataillons et qu'il les avait même fait prêter serment d'être fidèles à la République. Toutes les informations que nous avons prises sont il ne se peut plus contraires à cette assertion. Elles sont toutes opposées ; il est également faux que Ge soit lui qui ait fait fermer les portes de Valenciennes ; nous ne vous cacherons même pas que cet homme nous est suspect et que quelques légères indications reçues depuis n'ont pas contribué à détruire nos soupçons, nous ne lui confiâmes que des im? primés dont la perte n'était pas dangeureuse ; la lettre qui accompagnait ces imprimés ne I signifiait rien en elle-même. Il est de notre
devoir de vous faire connaître ces faits afin que vous soyez en garde contre tous les imposteurs.
« Nous recevons à l'instant des nouvelles de Maubeuge qui nous annoncent qu'il y a dans cette garnison quelques agitateurs ; nous nous arrangerons demain avec nos collègues pour que quelqu'un y aille.
« Signé : Charles Cochon, de Bellegarde, Lequinio. »
(La Convention renvoie cette lettre au comité du Salut public.)
19° Adresse des laboureurs de la commune de la Roche, près Gap ; elle expose les sentiments les plus purs et les plus énergiques de la liberté, et elle invite les membres de la Convention à se rallier ; cette adresse est ainsi conçue (1) :
La Roche, près Gap, le
« Citoyens représentants,
« Une entière confiance en vous, l'obéissance la plus absolue à vos sages décrets, le respect des personnes et des propriétés, un ardent amour pour la liberté et l'égalité, la ferme résolution de maintenir l'unité et l'indivisibilité de la République, voilà, Citoyens représentants, les sentiments qui animent les laboureurs de la commune de la Roche, près Gap.
« Aussitôt que les nouveaux dangers de la patrie ont été proclamés et que la loi du 24 février a été promulguée dans cette commune, de jeunes et robustes citoyens se sont voués généreusement à sa défense et, dans moins de deux heures, son contingent a été fourni.
« Une souscription volontaire s'est ouverte sur-le-champ ; elle a produit 350 livres. L'Assemblée des citoyens a désiré qu'elle fût convertie en souliers qu'elle a fait passer au ministère de la guerre pour le 2e bataillon des Hautes-Alpes. Elle en fait une offrande à la patrie, qu'elle vous prie da'ccepter.
« Citoyens représentants, une seule chose nous inquiète : ce sont vos divisions. Ne croyez-vous pas qu'elles font notre tourment, qu'elles alimentent l'espoir criminel de nos ennemis et leur préparent des triomphes. Au nom de la patrie, ajournez vos querelles particulières, sauvez la liberté, sauvez-nous. C'est de votre courage et de votre fermeté que nous attendons le bonheur, et une Constitution qui nous l'assure, et s'il est vrai comme on nous le dit que des malveillants, sous le masque du patriotisme, entravent votre marche et troublent vos délibérations, ordonnez ! Les bras qui nous restent sont vieux, mais ils sont encore fermes et vigoureux. Parlez ! Représentants, ils sont à vous !
Les laboureurs de la commune de la Roch'e, près Gap.
« Signé : Chaix, maire ; Serre, officier municipal; Pierron, procureur de
la commune; C. Dupont, Blondel, Antoine Pons, D. Aloix, J. Marcellin,
Brahier, D. Chaix, curé; Anthquard, secrétaire-adjoint. »
20° Lettre du citoyen Audrist (1) : il annonce qu'il a imaginé un nouveau plan d'organisation de l'armée, très utile selon lui dans les circonstances actuelles.
(La Convention décrète la mention honorable du zèle de ce citoyen et l'invite à donner connaissance de son plan au comité de la guerre. )
21° Adresse de la société populaire de Châ-lons) dans la Marne (2) ; elle annonce que le recrutement de ce département s'est effectué avec un grand zèle et un prompt succès ; elle invite l'Assemblée à surveiller le prompt armement.
(La Convention décrète la mention honorable de cette adresse et en ordonne l'insertion au Bulletin.)
22° Lettre des citoyens de la section du Luxembourg (3), qui sollicite l'admission d'une députation de ses membres à la barre.
(La Convention décrète que cette députation sera admise aussitôt qu'elle se présentera.)
23° Adresse des administrateurs du conseil général du district de Saint-Gaudens, par laquelle ils adhèrent aux décrets de la Convention ; en voici l'extrait (4) :
« Vous avez trouvé un coupable, puisqu'il l'était envers le corps politique; vous l'avez jugé et puni. Quel serait le Français qui oserait vous disputer ce droit, ou l'homme pervers qui blâmerait ce grand acte de justice 1 Autant vaudrait-il dire qu'il n'est ni crime ni vertu sur la terre. Ce n'est point par des expressions pompeuses que nous adhérons à vos décrets; c'est en les exécutant, non point avec les convulsions de ces personnes qui en séparent ce qui semble contrarier leurs desseins perfides, ou celles qui n'y obéissent que parce qu'elles n'osent y résister ; ou bien encore celles qui n'embrassent la cause commune que pour la mieux desservir; mais au contraire avec cette franchise, cette affection et ce zèle qui ne savent ni faire d'exception, ni composer avec l'obéissance, ni trouver des vices aux lois d'un peuple libre.
« C'est de ces sentiments que découle le brûlant patriotisme qui anime les citoyens de ce district. Le contingent a été outrepassé. Il a été fourni 1,367 hommes, quoiqu'il en ait déjà été fourni avant 1,300. La paix règne, malgré le nombre de prêtres fanatiques et de ci-devant nobles et seigneurs. Nous conservons cette concorde qui fait le bonheur des sociétés et qui est le plus sûr moyen d'anéantir les ennemis de la République. »>
(La Convention renvoie cette adresse au co-
24° Lettre des citoyens Roux et Perrin, commissaires de la Convention dans les départements des Vosges et de la Haute-Marne, par laquelle ils adressent à la Convention les procès-verbaux de différentes suspensions qu'ils ont été obligés de prononcer contre plusieurs fonctionnaires publics, d'après les dénonciations faites par les autorités constituées. Ils observent qu'ils ont trouvé, dans ces deux départements, le plus ardent amour pour la liberté, l'attachement le plus inviolable pour la République (1).
(La Convention renvoie la lettre et les procès-verbaux au comité de sûreté générale.)
25° Lettre du citoyen commissaire de la section du Théâtre-Français (2), qui invite la Convention nationale à accorder un sursis à l'exécution du jugement porté par le tribunal criminel de Paris contre Charles-François Geoffroi, comme prévenu de complicité de fabrication de faux assignats.
appuie cette requête et en demande le renvoi au comité de législation.
(La Convention nationale décrète que l'exécution du jugement /porté par le tribunal criminel de Paris contre Charles-François Geoffroi, comme prévenu de complicité de fabrication de faux assignats, est provisoirement suspendue, et renvoie au comité de législation, pour lui faire un prompt rapport sur cet objet (3).
26° Lettre des administrateurs du département des Deux-Sèvres qui font connaître à la Convention que les fonctionnaires sont doués de plus de lumières et de civisme que de fortune et qui réclament le versement d'une somme de trois cents mille livres dans les caisses du département; cette lettre est ainsi conçue (4):
Niort, le
« Législateurs,
« Un germe de malveillance et de sédition dont les effets malheureux nous accablent aujourd'hui, entrave, depuis trois ans, le recouvrement de nos contributions; nous gémissions avec vous sur la situation de plusieurs départements qui offrent, à cet égard, le même tableau.
« Le défaut de rentrée de nos sous additionnels, attachés au recouvrement
du principal, a réduit nos six districts et notre administration
elle-même à l'impossibilité de satisfaire, depuis près de dix mois, à
leurs dépenses et à celles de l'ordre judiciaire, au
« Les commis désertent en demandant, à grands cris, la récompense de leur travail; depuis cette époque, les imprimeurs et fournisseurs refusent leurs services.
« Le plus grand "zèle, tous nos efforts ne peuvent rien pour parer à ces malheurs. Yous seuls, citoyens représentants, pouvez réparer l'atteinte que reçoit, par cet effet, la chose publique, ou de la malveillance ou du régime, peut-être compliqué des nouvelles contributions, que vous vous empressez de rectifier en ce moment.
« Ordonnez donc, citoyens législateurs, le versement d'une somme de 300,000 livres dans les caisses de notre département, en supplément de nos sous additionnels de 1791 et 1792, dont nous nous empresserons de faire le remboursement au Trésor public, aussitôt leur rentrée et vous nous donnerez les moyens de reprendre, avec fruit, les branches d'administration qui, jusqu'à ce jour, ont souffert de la pénurie de nos finances, sans cependant cesser d'être l'objet de nos soins et de notre activité.
« Les administrateurs et procureur général syndic du département des Deux-Sèvres.
« Signé : Poupard ; président; Morisset, L. lè., clerc du fief; Viollet, J.-C. Jard, Mounet, Corbeau, Lavialle, Fribault, Sauzeau, Aymé, Guilhaut, Briault, Bodin, Prou, Andrault, Chauvin, Hersant, Richard, GvkRm, procureur syndic; Moraud, secrétaire général. »
«e Pour copie conforme : « Signé : Moraud, secrétaire général. »
A cette lettre, se trouve jointe la copie de la pétition faite par les administrateurs du département des Deux-Sèvres; cette pétition est ainsi conçue (1) :
« Législateurs,
« Les dangers qui nous environnent relèvent notre courage; ils affermissent nos sentiments républicains. Comptez que nous tiendrons nos serments. Les Français ont vaincu à Jemmapes, au grand regret du traître même qui vient de se déclarer et qui cherchait dès lors à les livrer. Ils vaincront, bien plus sûrement encore, si vous leur trouvez des généraux incapables de trahir.
« Maintenons la République, législateurs, et pour annoncer combien les Français abhorrent la royauté, décrétez que tout homme condamné à mort pour crime de contre-révolution, sera conduit au lieu du supplice avec une couronne royale sur la tête.
« Signé : Viollet, Poupard, président ; Chauvin, Hersant, Lavialle, L.
R., clerc du fief-, Andrault, Fribault, Bodin, Prou, Mounet, Corbeau,
Guilhaud, Sauzeau, Briault, Atoé, Richard, Arnaudet, Amillet, Guérin,
procureur syndic : Morisset, Moraud, secrétaire gênerai; Char-
mesnil, plnoteau, r.ocheteau, cgarr
rier, Lefranc, Guillemeau jeune, Pil-eot, Sanson, Fèvre, Apert pèrer Pert rault, De^auny. »
« Pour copie conforme : « Signé ; Mqraud, secrétaire général. »
(1) rappelle à la Convention l'état de détresse où la guerre civile a réduit le département des Deux-Sèvres; il observe que la plupart des fonctionnaires de ce département sont généralement doués de plus de lumières et de civisme que de fortune, que néanmoins ils sont sans salaire depuis longtemps malgré les immenses travaux auxquels les circonstances les ont condamnés depuis plus d'un an; il propose le décret suivant :
« La Convention nationale décrète que le directoire du département des Deux-Sèvres est autorisé à retenir, sur les recouvrements faits ou à faire des contributions directes de ce département, une somme de 300,pOO livres, pour être employée au paiement des fonctionnaires publics et des dépenses administratives, à la charge d'en faire le remplacement au fi}r et mesure de la rentrée des sols additionnels. »
(La Convention adopte ce prpjet de décret) (2).
, rapporteur de Iç, partie pénale de la loi contre les émigrés (3), observe que les différents articles dè cette loi ayant été recueillis dans les procès-verbaux de diverses dates, il est convenable d'en arrêter l'ern semble à la date du 28 nmrs 1793, jour auquel le dernier article a été décrété.
(La Convention décrète que tous les articles de la loi contre lés émigrés, partie pénale, seront réunis et datés du 28 mars 1793, et que tous les articles de cette loi seront insérés dans le procès-verbal dudit jour 28 mars.)
, secrétaire, donne lecture d'une lettre du général Custine, concernant la conduite d'un de ses aides de camp, nommé Coquebert, qui paraît avoir eu l'esprit aliéné et qui lui a fait le reproche d'être complipe de la trahison de Dumouriez; cette lettre est ainsi conçue (4) :
Wissembourg, le
« Citoyen Président,
« Un de mes aides de camp, nommé Coquebert, lieutenantTeolonel, arriva
chez moi, il y a quelques jours, en me disant : « Je vois
( Ce jeune homme, blessé d'une telle inculpation, m'en a porté ses plaintes, en me disant, cependant, qu'il croyait que cet homme avait la tête perdue. Je ne fis que redoubler mes efforts pour ramener l'imagination de Coquebert; je craignais qu'il ne perdît la tête, mais ma crainte ne s'est que trop vérifiée.
« Mon aide de camp, colonel, nommé d'Hil-liers, qui depuis longtemps était son ami, a tout fait pour le ramener; il croyait avoir réussi quand voyant expédier la dépêche que j'adresse à la Convention nationale, Coquebert reprit le même langage qu'il avait tenu quelques jours auparavant; j'étais dans mon bureau, et j'en sortis pour le montrer aux officiers d'ordonnance qui étaient chez moi, pour leur dénoncer la vérité et la scène qui venait de se passer et leur dire que Coquebert allait être envoyé à la Convention pour lui annoncer ce qu'il savait de ma prétendue trahison; je rentrai dans mon bureau pour écrire ma lettre ; il m'interrompit en démentant la vérité que je traçais. Alors il sauta sur un pistolet qui était dans la chambre, il l'arma et le dirigea à trois pas sur ma poitrine, en me disant qu'il était ou pour moi ou pour lui; je la lui présentai, en disant : Tirez donc. Alors levant avec rapidité le pistolet, il me dit : C'est pour moi, et le mettant dans sa bouche, il tira. : faire et dire ne fut qu'un moment; étendu, les yeux fermés, je craignais qu'il ne fût mort; j'ouvre la porte, j'appelle les officiers qui étaient daps la, pièce à côté, pour être témoins des suites de cette scène.
( Je fais ôter les armes de cette homme égaré, de peur qu'il ne se tire encore. Je le fais soigner et je l'envoie à la Convention, pour qu'elle juge de son état, le questionne et puisse tirer tous les éclaircissements que cette tête perdue est en état de donner. Ma loyauté ne me permet pas de laisser rien à désirer sur les connaissances à acquérir sur eet événement. L'homme est né vertueux, il était excellent citoyen; les trahisons et nos malheurs lui ont fait perdre la raison; j'ai de trop intéressantes occupations pour me livrer à de longs détails sur cet événement. Il m'est personnel, et dès lors, a peu d'intérêt pour moi; je n'ai qu'un regret, c'est de voir la République privée d'un homme qui aurait été un de ses meilleurs défenseurs.
« Le général en chef de Varmée du Rhin.
« Signé ; Custine. »
(La Convention décrète l'impression de ce^te lettre ët en ordonne le renvoi aux co-
mités de guerre et de sûreté générale qu'elle cliarge ç}'interroger le citoyen Coquebert.)
Le même secrétaire donne lecture d'une seconde lettre où ce général expose quels ont été les mobiles de sa conduite jusqu'à ce jour, ef ofi il se plaint des ordres donnés à son insu par le ministre de la guerre Beurnonville, ordres qui ont failli entraîner l'écrasement de son armée.
Suit la teneur de cette lettre (1) :
Wissembourg, le
« Citoyen Président,
« Quelques sentiments que m'inspire la marque dè confiance que je''viens de recevoir des représentants du peuple, je dois à brave armée républicaine que je commande, à la nation tout entière, à ses représentants, à moi-même de ne pas dissimuler la vérité et de la dire tout entière. Cette brave arrflée a pensé être ipjmolée dans le milieu dps plaides du Palatinat, par l'effet de l'ordre donné P§r Beurnonville, d'abandonner le revers des Vosges, ordre donné à mon insu, à l'insu même, m'assure-t-on, du conseil exécutif; car l'on dit qu'il n'existe sur ses registres aupune trace de cet arrêté, malgré l'extrait de la- délibération que ce ministre m'a envoyé, et qui np m'est arrivé que le jour après son exécution. Les généraux 4e l'armée de la Moselle ont exécuté l'ordre de leur retraite avant de m en donner connaissance; leurs lettres ne me sont parvenues qu'après l'exécution de cet ordre. Sans doute, ce n'est qu'inconséquence de leur part; sans doute, cette conduite est la suite de l'ignorance des inconvénients qui pourraient résulter de cette évacuation : mais si l'armée qui m'est confiée doit toujours être livrée aux résultats de ].'ignorance, de la cabale ou de la perfidie de cet agent de la nation, dois-je consentir à rester l'instruipent passif de la destruction de ces braves soldats dont la conduite m'est confiée ? Et ne serais-je pas le plus misérable et le plus méprisable de§ apabitieux, si je conservais un commandement dans lequel tant d'erreurs, qui me seraient étrangères, ne pourraient produire que la ruine de la République 1 Mais, j'oserai vous le dire avec cette franchise qui ne convient qu'à un républicain, une telle conduite a été enpouragée par vous le jour où Kellermann, après avoir trahi indignement les intérêts de son pays, a reçu vos applaudissements.
« Je crpis devqir vous retracer succinctement mes opinions politiques,
dans les fonctions publiques que j'ai été appelé à remplir dès 1789,
epoque à laquelle j'ai paru dans l'Assemblée constituante : alors, avec
toute la France, je voulais un roi; mais je l'ai toujours voulu avec
cette autorité qui lui aurait permis de faire le bien, en lui ôtant la
facilité de faire le mal. En 1791, lors de l'évasion de Louis, j'aurais
désiré la République, si je n'avais suivi que mon goût pour ee genre cje
gouvernement. Mais à cette époque, où il
« J'en appelle à mon opinion du 26 août. Depuis cette époque, les rois de l'Europe ont conjuré notre perte; Louis, avec eux, l'avait tramée. Une telle conduite a fait prononcer aux représentants du peuple leur vcpu pour la République. J'ai juré de vivre et de mourir républicain; mais pour tenir ce serment, il ne faut pas que la Convention elle-même n'offre que le tableau d'une arène où les passions se heurtent avec effort, où l'égqïsme et l'intérêt de quelques individus dominent aux dépens de l'intérêt' national, où quelques hommes prostituent à un parti la liberté publique; où l'on n'entend enfin que les hurlements de la fureur, les invectives de la haine; où les résolutions les plus exagérées tiennent lieu de discussions réfléchies et de raison.
« Si l'homme loyal qui veut franchement la liberté de son pays, ne peut envisager que la douloureuse certitude de ne pouvoir atteindre le but, il ne lui reste d'autre parti à prendre que de le dire à ses concitoyens et de demander cle nouveau aux représentants du peuple de cesser de se servir de lui; je remplis tous mes devoirs en vous prévenant; garaez-vous de penser, mes concitoyens, qu'un plan ambitieux entre dans ma pensée; mon âme se révolte autant à l'idée d'exercer un pouvoir absolu qu'à celle d'y être soumis : il ne peut exister qu'une dictature, même dans le mpment de la plus grande crise, c'est celle de la confiance qu'inspire un grand caractère, une âme ferme qui n est guidée que par la vertu : la force des conseils d'un seul homme doit prévaloir, quand ces conseils sont utiles. Mais ce pouvoir immense de l'opinion doit cesser, lorsqu'on aperçoit son égoïsme : un si grand caractère ne doit avoir d'ennemi que les ambitieux sans moyens, et les vils agitateurs, et dans la crise où nous sommes, il faut y avoir reGours.
« Je crois qu'il n'est qu'un seul moyen de sauver patrie : ce moyen sera développé à à votre comité de Salut publiG et au Conseil exécutif; s'il est adopté, si vous me croyez capable de le mettre à exécution, alors conservez-moi un moment le commandement de l'arjnéa. Chargé d'une telle mission, je saurai, s'il le faut, m'anéantir avec elle sous les débris de la République. Je pense que tous autres partis ne seront qu'incohérents et dilatoires; ils n'amèneront que le plus douloureux déchirement, que l'anéantissement de l'armée que je commande, et la République elle-rriême n'aura été qu'un rêve; les rois en ont juré la destruction et leurs satellites partagent la fureur qui les anime. La harangue de uobourg, avant le combat dé Nerwinde, vous en est une preuve; ce n'est donc que par un grand parti que nous pouvons sortir de cette crise discutee, mais surtout résolue; et sj, contre mes vœux, vpus abandonnez au hasard dès événements le salut de l'Etat, recevez de nouveau la démission que je denne du commandement de l'armée dans lequel vous venez
de me confirmer. Je ne veux pas être complice de sa ruine, puisque je n'aurai pu assurer sa gloire.
« Le général en chef de l'armée du Rhin, « Signé : Custine. »
A cette lettre se trouvent jointes les deux suivantes :
I
Lettre du général Wurmser au général Gilot, commandant à Landau (1).
« Citoyen général,
Yous savez sans doute que Dumouriez, à la tête de son armée, vient de faire arrêter les commissaires de la Convention nationale qu'il a envoyés au quartier général de M. le prince de Cobourg, à Mons, d'où ils ont été transférés à Maëstrich.
« Dumouriez a mis son armée sous la protection de l'armée impériale; il a proclamé Louis XYII roi de France; vous voyez que vous n'avez pas un moment à perdre pour prouver que vous vous réunissez à la bonne cause. Né Français, je me trouve heureux de commander l'armée de Sa Majesté qui est prête à tendre une main bienfaisante à une nation que des insensés ont égarée.
« Suivez l'exemple d'une armée revenue de ses erreurs; remettez-moi une place qui ne peut manquer d'être soumise par les armées qui vont l'entourer; épargnons le sang que des enragés ont versé avec profusion; mettez-moi à même de faire éprouver au peuple français la bienveillance des souverains qui ne veulent que l'ordre dans le système politique de l'Europe; mais songez que vous n'avez pas un moment à perdre. »
« Signé : comte Wurmser. »
II
Note de Custine cm général Wurmser (2).
Wissembourg, ce
« La proposition du général Wurmser est au moins le comble de la jactance, lorsqu'il imagine intimider ou séduire, par l'offre de la protection du roi, son maître, les Français qui sont chargés de défendre Landau. Le général Custine s'empresse de lui apprendre que les Français ne veulent la protection de qui que ce soit, et (que l'armée qu'il commande, fidèle au serment qu'elle a prêté à la République, défendra la liberté et l'égalité trahies en Flandre par Dumouriez. Le général Wurmser connaît trop la nation française, pour ignorer que 24,000,000 d'hommes ne recevront la loi de personne.
« Le général en chef de l'armée du Rhin, « Signé : Custine. »
(1) Voici encore une autre lettre du général Custine; elle contient des détails militaires que je demande la permission de ne pas faire lire à l'Assemblée, et que l'envoyé, chargé de nous les transmettre, pour en conférer avec nous de vive voix et nous faire connaître la pensée entière de son chef, nous demande de renvoyer au comité de Salut public.
Je dois vous faire part néanmoins d'une phrase, dont l'énergie toute républicaine et le laconisme vraiment Spartiate, vous touchera vivement; c'est la suivante : « Le jour où vous aurez un roi, sera celui de mon émigration. » (Double salve d'applaudissements. )
(La Convention décrète la mention honorable, ordonne l'insertion au Bulletin de l'extrait du procès-verbal et renvoie cette dernière lettre de Custine, sans en entendre la lecture, au comité de Salut public.)
(2). Je demande la parole pour un fait. Votre comité de Salut public a pris connaissance de la lettre de Custine et s'est entretenu avec l'envoyé que ce général lui avait délégué. Il a fait appeler devant lui les ministres, et il s'est convaincu qu'il n'existait, sur le registre du conseil, aucune délibération prise par le pouvoir exécutif provisoire, relativement à l'abandon du revers des Vosges .Les ministres ont confirmé le fait de vive voix; néanmoins le ministre de la justice a déclaré avoir sur ce point diverses pièces. On attend au comité les renseignements qui vont éclairer ces faits.
, secrétaire, donne lecture d'une lettre des membres du Conseil général cle la Côte-d'Or (3), qui font part à la Convention d'une arrestation de farine faite dans le département.
(La Convention renvoie cette lettre aux comités d'agriculture et de sûreté générale réunis.)
Le même secrétaire donne lecture d'une lettre du général Auguste d'Harville (4), qui adresse à la Convention les pièces justificatives de sa conduite et demande à être entendu au plus tôt.
(La Convention renvoie cette lettre aux comités de la guerre et de sûreté générale avec mission de faire subir à ce général l'interrogatoire relatif aux faits qui lui sont imputés et de déposer un prompt rapport.)
(5). Je propose à la Convention d'inviter ceux de ses membres, à la connaissance desquels il existerait des faits particuliers, de se rendre aux comités réunis pour les déclarer.
(La Convention adopte cette proposition.)
« La Convention nationale décrète que les comités de la guerre et de sûreté générale feront subir au général d'Harville l'interrogatoire relatif aux faits qui lui sont imputés, et que lesdits comités lui en feront un prompt rapport, pour être statué par elle ce qu'elle jugera convenable : les membres qui ont des renseignements à donner sur la conduite de ce général, sont invités à se rendre au comité pour lui en faire part. »
U n membre, au nom du comité de sûreté générale, fait un rapport et présente un projet de décret sur la reddition de Longuyon.
Le rapporteur rappelle les faits ; il rend justioe à la bravoure et aux talents militaires du commandant de la place, « mais, ajoute-t-il, vous avez à prononcer, en ce moment, sur la conduite des officiers de cette ville, qui eurent la bassesse d'aller au devant de Brunswick pour solliciter sa protection, et sur la conduite de la gendarmerie, qui servit sous les ordres de ce prince. A l'égard des habitants, ils n'ont pu se défendre, car leur ville est ouverte et sans défense (2).
Le projet de décret est ainsi conçu (3):
« La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de sûreté générale sur ce qui s'est passé à Longuyon lorsque les Prussiens s'en emparèrent, décrète :
Art. 1er.
« Les membres de la municipalité de Longuyon seront mis en liberté ; néanmoins ils sont déclarés inéligibles à aucun emploi public pendant la durée de la guerre, le citoyen Rondu excepté.
Art. 2.
« La Convention nationale décrète d'accusation les gendarmes nationaux et leur commandant, qui étaient de résidence à Longuyon à l'époque de l'invasion ennemie, et qui y ont continué leur service. »
(La Convention adopte ce projet de décret.)
Un membre, au nom du comité de législation, fait un rapport et présente un projet de décret sur une lettre du ministre de la justice, du 6 de ce mois, énonciàtive dun arrêté du tribunal du district du Donjon,du 11 mai 1792, adresse à l'Assemblée législative, portant sur-séance du jugement définitif de cinq prévenus de tentatives de vol non consommé et demande d'interprétation du Gode pénal à cet égard: le projet de décret est ainsi conçu (4):
« La Convention nationale, ayant entendu son comité de législation sur
une lettre du ministre de la justice, du 6 de ce mois, énonciàtive d'un
arrêté du tribunal du district du
(La Convention adopte oe projet de décret.)
(1). Je ne sais par quelle fatalité les mesures dictées par l'humanité et la justice éprouvent toujours de si longs retards dans leur exécution. Il y a un mois que vous avez détruit l'usage inhumain de la contrainte par corps, et ordonné l'élargissement de tous les prisonniers détenus pour dettes, et ces lois salutaires, ces lois de bienfaisance ne sont pas encore exécutées. J e demande qu'enfin les pères de famille soient rendus à I eurs femmes, a leurs enfants ; je demande que les représentants du peuple et tous les agents de la République s'interessent plus vivement à l'infortune du pauvre et qu'il n'y ait pas un si long intervalle entre la création d'une loi et son exécution. Je demande enfin que le ministre de la justice soit tenu de rendre compte de l'exécution de ces décrets dans toute la République, et qu'après demain il nous présente la liste de ceux qui auront été élargis des prisons de la ville de Paris.
(La Convention adopte la proposition de Robespierre.)
Un membre (2) : Je demande que dans quinze jours le ministre rende compte de l'exécution de ce décret dans toute l'étendue de la République.
(La Convention adopte cette proposition.)
Suit le texte définitif du décret rendu (3) :
Le ministre de la justice prendra les mesures les plus promptes pour faire mettre en liberté les prisonniers pour dettes, détenus dans toute l'étendue de la République ; il rendra compte de l'exécution de cette loi pour Paris dans deux jours, et pour le reste de la République dans quinze jours. Il remettra sous les yeux de la Convention les noms des prisonniers pour dettes qui auront été mis en liberté. »
(4). L'instruction la plus rapide, celle qui atteint le plus utilement son but, est l'instruction qui se propage par l'exemple.
Je vais mettre sous les yeux de la Convention nationale la conduite que
viennent de tenir les citoyens d'Epinal, chef-lieu du dépar-ment des
Vosges. A la première nouvelle des trahisons de Dumouriez, plus de 1,
200 citoyens réunis dans le lieu des séances de la société
Jë dèànâàdè qii'il sdlt fâit Mê,ntiôn hôûo-rable dë cétte èdhaUite àu prdéës-vêrbàl, êt l'insertioii àu Bulletin.
(La .Convention décrète, la mention honorable du patriotisme dés citoyens d'Èpinal et l'insertion àu Bulletin.)
(1), ahhbrice que lë f êèrUfcêtiieht s'ëst fâit dans là Mlle dè Nuits, dêpârlément âé t& Oôiê d'Or, sans fjU'dh àit ëu beSdin dë recourir à là vôië dii soft; tjUë les hâbitànts ont fdUifhi Un tiëtfl êh Stis dé leUt côtttingéht, qu'ils ont dôftné 200 livres de gratification à chaque Volontaire, et qU'ehfih ils Se io'nfc fehârgéë dë pourvoir tJënflâmi toui lë fcëinfjs de la gUëfrë à la subsistance &e§ pèrëfe, mères, femmes et en-fâhtà dëS btf&Vêfe défenseurs dë la ttbêftô.
(Là (Convention décrète la mention honorable et ordonne, l'insertion de cet acte de patriotisme au Bulletin.)
, tiU Hbfti du voniité dit S'aluï publié) jpfêsehtê.ià liëtë des ëômihiâsàit'ëà envoyés àtix arniéës; il fe'é±pi*imë âihëi (2):
Je demande la pàrolé aU nom du comité dé Salut public.
Yous avez décrété qu'il y aurait cohstani-meût auprès de vds armées trais représentaiits du peùplë, qui y seraient toujours attachés et qui n'en partiraient pas Sans êtte rappelés par un décret de la Convention nationale.
Yqus avez décrété qu'un de, ces trois députés Serait rëhouVele châqUé mois ; à cette heure 1 notre mission est dé Vous mettre 'sdUs les jrëUx le tableau des commissaires, le tableau des représentants du peuple que vous avez et que vous àUrëz près de Vds armées.
YotJ*e coniité de Salut public S'est fâit remettre lë tableau de tous les èommissaires qui sont atuell^hent dans vos armées^ ét poUr éviter bien des frais, de ceux qui sont dans lés départements à leur prôxiihitë ; il à eru que ce serait bien remplir les intentions de la Convention nationale en vous proposant d'^ laisser ceux qui y sont déjà etlde prendre parmi ceux qui Sdtit dans les départements çeux qui pourraient Jiàràîtïë proprës à rêmplir cette niiisidh'.
Dans ce nombre, il s'en trouvera encore quel-qUéà-Uhë. qui partiront comme députés dé la ÔdnVèûtiôh nationale. Je vous prié d'pbserver qUë cëtfce mission est pârfaitèîhéfct indé^ën-aante.ae la comifîisâion quë vôiîs àvëz decrétéë pour ies frdntières.
Veici le tableau que vctre ccmite de Salut public m'a chargé de vous
présenter (3):
Laporte. Hehtz. Dëvillë:
Gaiparin. Duhêîâ. DuqUesnoy. Carnet; Briez.
Du Bois Du Bais.
Bdu&-Fâzillâë; Delbrèl.
DUbois-Êëllegàr dé. Lesàgê-Sénault.
f)espinassy. RouDaud. Barras.
Âmar. Youlland. Moyse Bayle.
Projean.
Chaudrch-RbussaU. Baudot (à Ë'dydrttiê).
Ysabçau. Léyris. Garrau.
Bernard (de Sainte). Choudiëû: Richàrd.
Bill aUd-Yar ènne. GuërmeUr.
Goupilleau(aë Montaigu)
Àrméèè ait Ëhiii,
dëè Fq^éS et de td Moèêlle.
Armée des Ardenhes.
Armée du Nora.
A Péroririç. A Saint-Quentin.
Armée au Van
Mont-Blanc.
Armée des Pyrénées.
A Perpignan. Cêtiss de tOUêûti. (fêtes âù Êofâ.
(1). Je demande qu'aucun prêtrè në Soit ënvdyé eh hiiSsidh; car jë inë defle de cëttë sêcte, sdit cohstitutidnnèllé bu ndh.
ÎTous ne voulons pas rétablir de de câstes privilégiées, nous ne connaissons que des citoyens. Personne n'a démérité et né pëUï aérûëritér que Jîàr des àetiohs perâdn-nelles. Examinez les individus, à la bonne heure, avant de les honorer , de votre choix. Je demande, la question préalable sur l'amendement de BoiileaUi
(La Convention natioiiàlë pfdndn'èe la question jjréâlàble sur l'âniendennent présenté par Boilleau, et adopte le tableau de nomination des commissaires aux armées et dans les dé-pàrtemehts de la République, tel qu'il est présenté par le Comité de Salut public.)
tùtHpàgnie de là section du Mti.il est admise à l'hdnhéuï de défiler et dé prêter lê sër-niéiiî (2).
L'orateur s'exprime ainsi :
Législateurs, c'est lë quatrième détachement pour la frontière que vous
présente la section dU Mail. Ils Vont cdihbàttrë lés tyrans
répond à l'orateur et reçoit le serment de vaincre ou de mourir que prête ce détachement tout entier en passant devant lui.
(La Convention décrète la mention honorable.)
(1) annonce que lé 1er bataillon de la Gironde. est .rentré à Douai. Moreton lui a confié la garde d'une contrescarpe, et il a juré de s'y ensevelir plutôt que de la livrer aux énnemis. (Nouveaux applaudissements).
monte à la tribuhe pour lirè l'interrogatoire subi, en présence des comités réunis de surveillance et de la guerre, par les généraux Lanoue et Steingel; il s'exprime ainsi (2) :
Avant dé vous lire, au nom du comité de la guerre, l'interrogatoire des généraux Lanoue et Steingel, je vous dois l'aveu que cette forme de procéder ne vous fera jamais connaître la vérité.
Eloigné de la scène où la trahison s'est consommée, $éparé des témoins qui peuvent lui fournir des données pour les demandes à faire, et les objections a opposer; peu instruit des localités, n'ayant aucune copie des livrés d'ordres, votre comité sest trouvé comme dans une contrée inconnue, et les accusés au contraire, profitant de notre position, se sont rendus maîtres du champ de bataille; quelque coupables qu'ils eussent été dans notre conscience, ils sont sortis innocents de nos mains; et noUs serions presque tentés, d'après leurs réponses, de leur voter des remerciements.
Pour moi je pense que- vous ne devez, ni ne pouvez prendre aucune détermination d'après la lecture que je vais vous faire des interrogatoires de Lanoue et de Steingel. Ce sont les soldats que Vous devez interroger sur la conduite des généraux; ce sont deux qui ont souffert; ou dé leur lâcheté, ou de leur intelligence avec nos ennemis ; ce sont ceux qui en ont été les témoins, qui en ont vu les développements et lés suites; ce sont Ceux-là qui peuvent vous éclairer dans ce dédale d'horreurs et de trahisons. Les généraux inculpés et leurs complices vous tromperont toujours; mais les soldats* qui sont le vrai peuple des armées, ne vous tromperont jamais; ils vous diront la vérité dans toute son austérité redoutable; ils sont les précurseurs de la postérité, et jamais l'histoire n'a rappelé de leurs jugements; au contraire, elle a recueilli leur témoignage ingénu pour peindre et les Turenne et les Cati-nat.
Je demande donc que vos commissaires auprès de l'armée du Nord, faàsënt
une enquête sévère sur la conduite des généraux accusés; qu'ils
fecùeilleht toutes les pièces, qu'ils se transportent dans les
chambrées, qu'ils écôu-
(Les membres du comité de la guerre réclament avec force contre lé rapport de Poultier, que le comité ne Vavait pas chargé de faire.)
(1). Le comité de la guerre n'avait point nommé de rapporteur pour vous faire ce rapport, il avait seulement entendu exécuter votre décret en vous présentant l'interrogatoire de LànoUe et de Steingel. Jè m'étonne qUe Poùltier ait eu l'inconséquence dë formuler Uhë opinion eh sbn nom et de vous dire que le comité dè là guerre avait des dispositions à l'indulgence.
Jë n'ai pas dit lè comité.
Dire qUe le comité de la guerre est porté à l'indulgence, c'ëst incriminer cet interrogatoire et assurer dè par avance qu'il est mal fait. Rien n'est moins exact. Je demande qu'on se conforme au décret, et vous verrez, par la lecture qui vous en sera faite, qiie le comité de là guerre a rempli son dëvëii' avëe l'intégrité qu'on peut exiger de lui. L'eXàmëh qu'il a fait des griefs imputés à cës généraux vous pàraîtra juste et séVèfë, j'àjoutê ihême que la pfeUvê de leur culpabilité vous apparaîtra tout entière. J'insiste pour la lecture pure et simple.
; Je demande la censure du membre qui s'est permis de lire son opinion individuelle sous le nom d'un comité.
Et moi je demande la cëhsure de ceux qui protègent les tiràîtrës.
Bravo! bravo! (Murmures sur plusieurs bancs.)
Plusieurs membres (au centre): Oui, ce rajppdi't était fait pour induire le public en ëttëUrj
Il fallait bien l'aVertir qu'on cherche à sauver des coquins.
s'élance à là tribune. (Murmures dans les tribunes.)
Je demanderai, en effet, que les traîtres et les conspirateurs soient punis.
Et leurs complices.
Oui, leurs complices, et vous-même.
Il est temps enfin que toutes les infamies finissent; il est temps que les traîtres et les calomniateurs portent leurs têtes sur l'écha-faud ; et je prends ici l'engagement de les poursuivre jusqu'à la mort.
Je réponds aux faits. (Applaudissements sur la Montagne.)
C'est toi que je poursuivrai.....
(Une longue clameur s'élève du côté des tribunes. La droite et le centre se lèvent aussitôt et témoignent de leur indignation. On somme le Président de rappeler le respect aux tribunes.)
J'ai rappelé plusieurs fois les tribunes à l'ordre et je les rappelle encore, dans ce moment-ci, à l'exécution de la loi qui défend tout signe d'approbation ou d'impro-bation. Je les conjure, au nom du salut public, de se souvenir que tout est perdu si la Convention nationale ne conserve pas sa liberté.
Maintenant j'ajouterai pour tous les membres qui sont dans cette enceinte, que je n'ai pris ce matin le fauteuil que parce que le calme régnait dans l'Assemblée. Hier, j'ai présidé pendant huit heures, pendant toute la nuit; et si le calmé ne se rétablit pas, je prie la Convention de me faire remplacr.
Demandez à la Convention de se tenir dans le calme et la tranquillité qu'exigent les circonstances, et vous ne serez pas épuisé de fatigues comme vous l'êtes.
Il est impossible ............(Les membres de
la Montagne continuent.)
Plusieurs membres : C'est une tactique.
J'ai la parole : il ne s'agit point ici de tactique, je parlerai.
Président, il est impossible de tolérer plus longtemps toutes ces infamies; il est impossible à l'honnête homme de supporter à nouveau le système de calomnies et de désorganisation que je vois, suivi avec une constance qu'un grand intérêt seul peut donner. Ma patience est à bout, je fais le serment de démasquer les traîtres, tous ces êtres flétris du sceau de la réprobation universelle, et de dénoncer tous ces calomniateurs qui devraient garder le plus profond silence. Il faut enfin que je sois puni ou que Robespierre soit marqué du fer chaud destiné chez les anciens à faire connaître les imposteurs. (Murmures sur la Montagne.)
Que signifient donc toutes ces calomnies, ces dénonciations perpétuelles, aussi absurdes qu'atroces, dont on abreuve sans cesse ceux qui ont toujours respiré et qui respireront sans cesse pour la liberté? Oui le peuple connaîtra bientôt ceux qui, sous le masque du faux patriotisme, le trompent, l'égarent, le poussent dans l'abîme, et je ne serai content que lorsque je verrai ces hommes, qui se disent patriotes par excellence, et qui finiraient par perdre la liberté et la patrie, auront mis enfin leur tête sur l'échafaud. (Applaudisse-
ments à droite.) Je prouverai jusqu'à l'évidence quels sont ceux qui trahissent la République, quels sont ceux qui la font détester et haïr avant qu'elle soit établie, quels sont ceux qjui emploient pour la détruire lefâ mêmes moyens que nous avons employés pour détruire la royauté.
Ils crient sans cesse au peuple : Levez-vous ! Eh ! quand il sera debout, que pourrez-vous lui dire? Qu'a-t-il à renverser? Qu'a-t-il à égorger, si oe n'est la Convention nationale ?
C'est nous qu'on veut faire égorger... (Vifs murmures à droite et au centre.)
Un membre 10 août !
Taisez-vous, dictateur du
Président, il est permis à la fin de perdre patience.
On sait avec quel calme, avec quelle modération, j'ai toujours parlé : jamais je ne me suis permis d'insulter, d'injurier, d'inculper personne. Je voulais entretenir dans l'Assemblée l'ordre et la dignité. Eh bien ! je me vois abreuvé d'outrages et de calomnies. Et, cela ne serait rien, si je ne voyais en même temps, la chose publique entraînée dans l'abîme et trahie; si je ne voyais une foule de bons citoyens aveuglés, méconnaître le gouffre où l'on cherche à les précipiter. On ne cesse de calomnier la Convention, et ce système abominable d'avilissement, qui existe depuis le commencement de sa réunion, qui existait même avant sa naissance, on le poursuit sans cesse, tantôt en attaquant ses membres par des dénonciations infâmes, tantôt en le poussant à des mesures extrêmes, tantôt en la désignant aux poignards des assassins.
Je le demande, qu'eussent fait de plus nos ennemis? (Applaudissements). Oui, voilà les véritables et les plus cruels ennemis de la République. (Nouveaux applaudissements.)
Et aujourd'hui qu'ils voient leurs complots sur le point d'être dévoilés (Murmures sur la Montagne) ils voudraient écarter, par de nouvelles calomnies, l'approche de la vérité !
Mais ne vous y trompez-pas, la nation ne sera pas toujours égarée, et la postérité surtout verra bien quels sont les vils intrigants qui nous ont amenés au point où nous en sommes.
A quoi s'arrête-t-on depuis longtemps? A des horreurs..On ait sans cesse : vous êtes le complice de Dumouriez, le complice d'Orléans... Infâmes que vous êtes! Où avez-vous trouvé que nous fussions les complices de ces hommes? Et qui donc périrait le premier, si leurs conspirations réussissaient ! Jamais, je le déclare, non jamais je ne transigerai avec les despotes ; et si l'ennemi était à nos portes, on verrait quels sont les faux braves et quels sont les républicains courageux. (Murmures prolongés sur la Montagne.)
interrompt.
Un vil scélérat qui a prêché le despotisme...
C'est vous qui êtes un scélérat !
Ne vous y trompz pas, mes collègues, et vous peuple qui m'entendait, Voilà l'homme qui vous a demandé sans cesse
le despotisme, tantôt sous le nom de dictature, tantôt sous celui de triumvirat. Lorsqu'il a été question de moi personnellement, lorsqu'il m'a attaqué dans ses feuilles, j'ai gardé le silence. Je me suis honoré de ses calomnies; il n'avilit que ceux qu'il loue.
renouvelle ses interruptions.
Plusieurs membres (au centre) : Taisez-vous scélérat !
Président, je ne suis pas inquiet de l'opinion que la nation peut avoir de nous en cet instant; je ne suis pas inquiet de celle qu'elle pourra avoir par la suite; je ne suis pas inquiet surtout» du jugement que la postérité portera sur nous. Mais dans ce moment nous devons nous montrer ici sans ménagement, sans faiblesse; nous devons sévir contre les hommes audacieux qui avilissent, par un système constamment suivi, la représentation nationale. Nous pouvons périr, mais nous ne devons pas souffrir qu'on nous insulte dans cette enceinte; nous ne devons compte de nos actions et de nos vies qu'à nos commettants et à la postérité. Peut-être que ceux à qui je m'adresse nous ferons périr, mais nous périrons en faisant notre devoir...
C'est vous !... (Vif mouvement d'indignation à droite et au centre.)
descend de la Montagne au milieu de la salle et découvrant sa poitrine : Je demande que vous m'assassiniez... Je suis un homme vertueux aussi... La liberté triomphera... (Une assez vive agitation succède pendant quelques minutes à ces apostrophes.)
Qu'est-ce que prouve l'action de David? Le dévouement d'un honnête homme en délire et trompé.
Non.
Yous vous en apercevrez.
Tu n'as pas toujours tenu ce langage. (Murmures.)
Je ne demande qu'une chose, et je la demande en grâce : c'est qu'au lieu de ces dénonciations déclamatoires, on avance des faits par écrit et qu'on les signe... (Nouveaux murmures.)
Un membre (sur la Montagne) : Occupons-nous de sauver la patrie !
Le premier et le plus grand des moyens pour sauver la patrie est d'empêcher l'avilissement, la dissolution de la Convention. J'entends sans cesse dire à ceux qui accusent : A quoi bon s'occuper des personnes, passons à l'ordre du jour. Certes, c'est une étrange tactique que d'accuser et de ne pas entendre ceux qu'on inculpe ; certes, la nation doit être bien étonnée de voir quels hommes jouent ici le rôle d'accusateurs, quand il est prouvé qu'ils ont constamment conspiré contre la patrie.
On m'accuse, moi, d'être le complice d'Orléans. Le fait a été avancé dans une certaine société : savez-vous pourquoi ? C'est que d'Orléans est une fois venu chez moi. Il venait me demander ce qu'il avait à faire, relativement à son expulsion de la République; et je lui donnai un conseil qui pouvait sauver la
liberté, car s'il l'avait suivi, il ne serait plus en France. Mais il le dédaigna. C'est sur cette entrevue qu'on a osé m'accuser d'être son complice et cette calomnie a été affichée dans tout Paris.
Pétion, étiez-vous en correspondance avec Egalité fils?
Oui, oui, oui, cent fois oui, et il eût été à désirer qu'il n'en eût pas eu avec d'autres, car il ne serait pas un traître aujourd'hui et il ne serait plus en France.
Qui, moi ? conspirer contre la République ? moi, conspirer pour d'Orléans? Infamie! Infamie ! C'est ainsi qu'on prodigue des calomnies odieuses. Y répondez-vous, on ne vous écoute point; on réitère, on suit le même plan, et on espère qu'à force de les répéter, on y croira.
Je dois cette recrudescence de mensonges contre moi, à ce que j'ai pu avoir et à ce que je puis avoir encore quelque influence sur Paris. Yous cherchez à détruire cette influence, parce que je ne pense pas comme vous. Ah ! non certes, je ne pense pas comme ceux qui à force de violences, à force d'excès finiront par étouffer la République! (Murmures prolongés sur la Montagne.)
se précipitent vers la tribune et menacent l'orateur.
Il sera permis de répondre.
Oui, oui ! Je voudrais qu'il s'engageât ici une lutte qui n'a jamais eu lieu. Je voudrais que l'on commençât par écrire les inculpations, que l'on entendît par écrit les réponses, que chacun se soumît à mettre là sa tête, pour que celle du coupable tombât.
Je propose la mienne.
Je ne prétends pas faire ici une lutte ni de poumons, ni de déclamations, une lutte ni d'injures ni d'outrages. Tout cela ne signifie rien. Ce n'est pas ainsi que se justifient les hommes libres; les hommes libres agissent avec une parfaite intégrité. Je ne demande ici ni approbation, ni improbation, mais je veux le calme, je veux la liberté. Je demande par-dessus tout qu'on ne se permette pas ces inculpations indécentes, mille fois plus atroces que des faits. Déjà nous avons lutté avec Robespierre; il sait que je le connais, et certes, je lui rends ici cette justice, c'est qu'à l'Assemblée constituante il s'est très bien conduit. J'avoue que je n'ai jamais conçu les motifs qui l'ont fait changer. (Murmures sur la Montagne.)
Le rapporteur du comité de Salut public est là et nous perdons notre temps à nous occuper de personnes.
Je demande la parole pour une motion d'ordre.
Plusieurs membres : Non, non, elle est à Pétion.
Personne ne désire plus que moi que ces explications fassent connaître les véritables amis de la liberté et nous conduisent à ce but très simple, mais en même temps le plus noble et le plus beau, celui de sauver la chose publique. Il n'est personne qui, ayant
assisté à la séance d'hier au soir, ne dise : Il n'y a donc plus de Convention nationale ! Si nous tolérons plus longtemps ces désordres, si nous supportons encore que les calomnies que les soupçons environnent ainsi nos collègues, je maintiens que nous perdons la patrie et que nous ne remplissons pas le but de nos commettants.
Or, voici ce que je demande : Si vous avez une inculpation à faire contre moi, écrivez-la et signez-la. Les paroles volent, dit le proverbe, mais les écrits restent. Je répondrai de même et je signerai. Le coupable ou le calomniateur, si coupable ou calomniateur il y a, portera sa tête à l'échafaud. Sans cela, si on vous provoque sans cesse, comme on vient de le faire dans ce moment; si on vous dit, lorsque vous allez demander la parole, vous êtes un factieux, vous êtes un traître, vous êtes un complice (Murmures), comment voulez-vous que les hommes les plus patients ne sortent pas enfin de leur caractère et ne soient pas suffoqués d'indignation !
En effet, lorsque dans les moments où nous sommes, on dit ainsi, sans cesse, voilà les traîtres, n'est-ce pas dire, voilà ceux qu'il faut égorger? Et croit-on que le peuple ait besoin de victimes, parce qu'il éprouve des revers ? Ne vaudrait-il pas mieux lui élever l'âme, l'agrandir, lui montrer le chemin qui peut le sauver? Mais, lâches que vous êtes, quand vous aurez dissous la Convention nationale, que restera-t-il ? l'anarchie, et avec l'anarchie plus de République. Eh bien, je le dis d'avance, si nous continuons de la sorte, la chose publique, est perdue.
U n membre : Dites-nous ce qu'on doit faire ?
Cherchons les coupables, mais ne soyons pas sans cesse à nous entre-déchirer.
En ce qui me concerne, je demande que lorsque nous sommes ici, on n'aille pas m'ac-cuser ailleurs. J'ai été, moi, à l'Assemblée constituante; certes, je n'ai pas manqué d'énergie. Je n'en ai pas manqué sous les poignards où j'étais. Le lendemain de l'affaire du Champ de Mars, j "osais à peine me montrer à cette tribune, tellement était forte la prévention qu'on avait contre moi. Mais on reconnut que j'étais un homme de bien et j'obtins un amendement, sans lequel la loi terrible qu'on portait n'aurait pu passer.
C'est qu'alors il y avait de l'humanité, de la justice; alors on savait respecter la représentation nationale...
Plusieurs membres : Résumez-vous.
Eh bien, je vais me résumer, et d'une manière bien généreuse. Je ne parle pas plus pour moi que pour un autre, pour un côté que pour l'autre. Je demande que si on a une inculpation à faire, au lieu de venir la faire d'une façon vague, qu'on ia signe, et qu'on poursuive enfin les infâmes calomniateurs qui, sans cesse, colportent dans tous les lieux leurs infamies. Telles sont mes propositions.
Je demande ensuite, dans l'affaire actuelle, que le rapporteur soit censuré pour s'être permis de présenter un préambule qui n'était pas adopté par le comité et que défendaient vos décrets.
Si l'on n'eût pas relevé cette açluce, que
serait-il arrivé ? C'est que, dans les papiers, on eût répondu que c'était là l'intention du -comité. C'est ainsi que par mille petites supercheries particulières on parvient à égarer l'opinion publique.
Le rapporteur a donc eu tort de vous faire un rapport dont il n'était pas chargé...
, rapporteur. J'ai fait ce rapport en mon nom.
D'ailleurs ce rapporteur parle d'une chose qu'il ne connaît pas. Moi, j'avoue que je ne pourrais pas faire un rapport sur un objet militaire; eh bien, nous voyons sans cesse ici des ci-devant prêtres, des ci-devant ecclésiastiques...
Dites des moines, je l'ai été, mais depuis,et avant de venir ici, j'ai combattu dix-huit mois pour la liberté sur la frontière.
Ce sont ces Messieurs [Murmures), ce sont ceux-là qui ont le patriotisme au degré de chaleur qu'il faut pour prendre continuellement la parole.
Il est permanent.
Je vous demande la permission à ce propos de vous présenter une observation très importante.
Il n'est à cette heure personne qui osât demander les anciens privilèges, et accuser un parti de pareilles revendications serait s'exposer au ridicule et à une controverse trop évidente et trop facile. Dès lors qu'a-t-on fait? On a divisé les patriotes en deux classes; l'une, qu'on appelle les patriotes par excellence, et l'autre des amis des lois, des modérés. On accuse cette dernière classe de vouloir rétablir la royauté.
Eh bien, je demande dans quelle classe sont donc tous les aristocrates et tous les prêtres ? Je demande s'ils ont cessé d'être républicains, ceux qui avant 89 avaient écrit pour la liberté; ceux qui ont combattu la royauté en 92, alors qu'elle n'était pas abattue comme aujourd'hui, mais dans toute sa puissance? Si jamais l'ennemi pénétrait sur notre territoire et parvenait à dominer l'opinion publique, quel serait donc le salut de ces derniers? Il faudrait de toute nécessité qu'ils combattent les ennemis ou qu'ils se détruisent; il n'y a pas entre eux et 1 étranger de composition à faire et certes il n'y en aura pas. Au contraire, vous verriez alors tous ces calomniateurs, tous ces patriotes ardents, demander à former le bataillon sacré et concourir de leur mieux à la défense et au triomphe des tyrans.
Eh bien, moi, je jure, et c'est là un engagement solennel que je prends devant la nation, je jure que je n'existerai jamais sous le despotisme. (Applaudissements.) Maintenant je demande que le rapporteur soit censuré et rappelé à l'ordre pour avoir fait un rapport qui lui était interdit de faire par les décrets, et dont il n'avait pas reçu mission du comité.
J'ai demandé la parole pour une motion d'ordre.
Plusieurs membres : Non, non !
, rapporteur. Le comité de la guerre ne m'a chargé de faire aucun rapport. Seulement, celui qui a écrit l'interrogatoire de
Lanoue et de Steingel, ne se trouvant pas au comité, on m'a chargé de le lire à la tribune. Je l'ai parcouru auparavant, j'ai vu qu'il était insignifiant; la conviction bien nette s'est alors formée en moi, que le plus coupable, après avoir été interrogé se trouverait innocent. Là-dessus j'ai fait des réflexions par écrit et je les ai communiqués à la Convention; mais c'est individuellement et après en avoir prévenu la Convention dès le début... (Interruptions à droite.) Les réflexions que j'ai faites, je ne vous ai pas dit que c'étaient les réflexions du comité de la guerre, ce sont les miennes, j'ai peut-être eu tort de vous les faire, ce n'était peut-être pas le temps. (Nouvelles interruptions.) Ce que je vous ai dit, est de moi, le comité de la guerre ne m'a chargé spécialement que de lire l'interrogatoire. C'est de mon propre fait que j'ai pensé : Il est impossible d'abréger l'interrogatoire qui est très long et qui ne signifie rien ; peut-être qu'en faisant ces réflexions l'Assemblée n'en demandera pas davantage... (Murmures prolongés sur un grand nombre de bancs.) J'avoue que j'ai eu tort.
(La Convention passe à l'ordre du jour motivé sur l'explication de Poultier.)
Président, j'ai demandé la parole pour une motion d'ordre.
La parole est au rapporteur pour lire l'interrogatoire de Lanoue et de Steingel. Ensuite Guadet l'aura, d'après le décret rendu hier.
, rapporteur, commence la lecture de l'interrogatoire qui est conçu en ces termes.
Extrait du procès-verbal des séances du comité de la guerre.
Séance du samedi 30 mars 1793, l'an 11 de la République, huit heures après-midi.
Interrogatoire du général Lanoue.
À huit heures, s'est présenté le citoyen général Lanoue, pour répondre aux questions qui lui seraient faites, en conséquence du décret du 29 mars 1793.
D. Par quel ordre vous êtes-vous rendu à Aix-la-Chapelle ?
R. Sur l'ordre qui m'a été donné par le général Miranda, le 16 février, et je m'y suis rendu le 18.
D. En' quelle qualité y étiez-vous employé ?
R. Comme lieutenant général.
D. Etiez-vous commandant en chef?
R. J'ai pris comme lieutenant général le commandement, dès que je suis arrivé.
D. Quels étaient vos ordres?
R. Je n'avais aucune instruction particulière, que la lettre du général Miranda.
D. Quand avez-vous été visiter pour la première fois, les postes qui étaient sous votre commandement ?
R. Le lendemain de mon arrivée.
D. Les avez-vous tous visités ?
R. Cela était impossible ; j'avais quatorze lieues à parcourir.
D. N'avez-vous pas trouvé que ces postes
étaient trop éloignés les uns des autres, qu'ils occupaient une trop grande étendue de pays, et qu'au besoin leur rassemblement serait lent à s'opérer ?
R. Je l'ai reconnu parfaitement, et je l'ai écrit au général Miranda, et en conséquence je lui ai demandé un renfort de troupes et d'artillerie ; la copie de ma lettre est dans mes papiers.
D. N'étiez-vous pas le maître de prendre sur vous de changer les dispositions déjà faites, dans le cas où vous trouveriez que cela fût avantageux aux armes de la République ?
R. J'en avais le droit lorsque j'en ai pris le commandement, mais j'eusse fait une faute militaire, en ce que l'ennemi eût pu plus facilement passer la rivière, si j'eusse dégarni différents points.
D. Avez-vous fait part au général en chef de vos réflexions sur les dispositions des postes que vous aviez visités ?
R. Je n'ai plus eu de communication avec Miranda, vu que je savais qu'il était occupé au siège de Maëstricht.
D. Lorsque vous avez pris le commandement de l'avant-garde qui couvrait Aix-la-Chapelle, vous êtes-vous fait rendre compte si tous les officiers étaient à leur poste ?
R. Il a été à ma connaissance qu'il y avait quelques officiers absents, mais comme ils ne l'étaient pas par moa ordre, je n'en ai pas de connaissance de détail; d'ailleurs n'ayant eu le commandement que dix jours, je n'ai pu m'occuper que la visite des postes, à raison de la distance qui exigeait que je fisse huit à dix lieues par jour.
D. Pendant votre commandement à l'avant-garde qui couvrait Aix-la-Chapelle, avez-vous donné à quelques officiers la permission de s'absenter? R. A aucun.
D. Vous êtes-vous fait donner de temps à autre, ainsi qu'un commandant doit l'exiger, l'état de situation des troupes sous votre commandement ?
R. L'état de situation a été par moi demandé, et à moi remis le jour de mon arrivée : le fonds se montait à 30,000 hommes, mais l'effectif n'était que de 18,000.
D. Cet état de situation aurait dû vous donner connaissance des officiers absents.
R. Je n'ai eu le temps que de m'occuper des grandes dispositions, sans pouvoir entrer dans tous les détails.
D. Avez-vous eu à peu près connaissance des forces de l'ennemi?
R. Je n'ai pu les évaluer que quand l'ennemi a débouché sur moi, et alors je l'ai estimé à 25,000 hommes ; mieux reconnu je l'ai jugé à 30,000, et nous avons appris depuis qu'il passait ce nombre.
D. Qu'avez-vous fait pour les connaître depuis votre arrivée à l'avant-garde, jusqu'au jour où l'ennemi a paru pour forcer vos postes ?
R. J'ai employé les mêmes moyens que ceux dont le général Steingel s'était servi, savoir : celui des émissaires, étant impossible d'avoir autrement connaissance des forces de l'ennemi, lorsqu'il est en cantonnement.
D. Avez-vous fait pendant votre commandement avant l'apparition de l'ennemi quelques dispositions relatives à votre défense, ou à une plus active surveillance?
R. J'ai trouvé les dispositions faites par le général Steingel fort bonnes, je les ai approuvées ; j'y ai ajouté quelques dispositions de sûreté ; j'ai recommandé la plus grande surveillance.
D. Quand avez-vous été instruit des mouvements de l'ennemi?
R. Le 28 à 11 heures du soif.
D. Quand avez-vous eu connaissance de son approche?
R. Dans la même nuit ; nous nous sommes portés, le général Steingel et moi, au point central de tous les cantonnements, pour nous porter ensuite où il serait nécessaire.
D. A quelle distance les postes les plus avancés étaient-ils de l'ennemi ?
R. A une lieue de la rivière.
D. Puisque vous saviez qu'il se renforçait, et qu'il vous avait paru impossible de l'empêcher de passer la rivière de la Roër, guéable toute l'année, sur un grand nombre des points, pourquoi n'avez-vous pas prévenu le général en chef de l'insuffisance de vos forces et de l'impossibilté où vous vous trouviez de vous opposer au passage de l'ennemi ?
R. J'ai eu l'honneur de répondre au comité que le même jour de mon arrivé j'avais écrit au général Miranda de m'envoyer du renfort ; Miranda répondit, qu'ayant le fonds de 30,000 hommes je devais, avec cette force, remplir l'objet dont j'étais chargé. Quelques jours après, le général Thouvenot, chef de l'état-major, m'écrivit qu'il m'enverrait 5 bataillons et 4 pièces de canon sur une nouvelle demande de ma part.
D. Comment s'est-il fait que ce n'a été que le 28 février au soir, que vous avez été instruit que les ennemis, se disposaient à passer la rivière de la Roër, et que le lendemain 1er mars à cinq heures du matin ils effectuaient ce passage ?
R. Je ne puis répondre à cette question parce qtie c'est le secret de l'ennemi, quand il veut tenter un effort et intercepter tout passage, toute communication.
D. Pourquoi, sur l'avis que vous avez eu de la marche d'une colonne, n'avez-vous pas rapproché vos postes et disposé vos forces sur le point où l'ennemi paraissait plus particulièrement se diriger ?
R. Je ne savais pas sur quel point il se dirigeait ; j'ai répondu d'ailleurs à cette question, en disant que si j'avais dégarni un point quelconque, j'aurais peut-être donné une \ facilité de plus à l'ennemi. D'ailleurs j'observerai qu'il y avait une position reconnue pour recevoir le combat, la moins mauvaise que le site offrait, où les troupes devaient se mettre en bataille, et que l'on avait garni de redoutes, pour y réunir les troupes en cas d'attaques, et livrer le combat si l'occasion se présentait.
D. Pourquoi la colonne ennemie a-t-elle percé vos cantonnements par le centre, sans que la gauche et la droite de vos troupes aient été instruites assez tôt pour pouvoir
se rallier et s'opposer aux progrès de l'ennemi ?
R. Il y avait des troupes éloignées de sept lieues du point central ; mais pour réunir un corps de 6,000 à 7,000 hommes, pour arrêter le premier effort de l'ennemi, les troupes cantonnées avaient trois ou quatre lieues à faire.
D. En combien de temps les divers cantonnements pouvaient-ils se rendre au point déterminé pour la réunion ?
R. On ne savait pas le point par où l'ennemi passerait; l'ennemi a passé par trois débouchés, savoir : Durenne où il y avait un pont, Carlart et un autre point plus bas.
D. A-t-on fait des tentatives pour se rendre maître de Durenne?
R. Certainement l'intention de l'ennemi avait été d'occuper Durenne ; mais l'ennemi intéressé à conserver ce passage, en a chassé nos troupes, et depuis il s'est renforcé, il n'a plus été possible de le reprendre. Le général Dumouriez avait donné ordre à un corps de 4,000 hommes, d'y aller prendre poste, mais il n'a pas été possible d'y pénétrer.
D. Quelle disposition avez-vous faite pour résister au passage de la Roër, par le pont du Rever ?
R. U y avait des cantonnements à Lan-grevé, château de Mérode, en tout 2,000 hommes de cavalerie ou d'infanterie.
D. Yos commettants étaient-ils retranchés vis-à-vis de Durenne ?
R. Il y avait 47 cantonnements on ne pouvait pas les retrancher tous, il n'y en avait pas de retranchés vis-à-vis de Durenne.
D. Yos postes avancés ont-ils été surpris ?
R. Aucun poste n'a été surpris, ou du moins n'a pas dû l'être, parce qu'on a battu la générale à minuit dans tous les cantonnements.
Cependant il y en a eu deux de surpris, parce que, quoique le colonel Gueyssat leur eût envoyé des ordonnances, il est probable que l'éruption rapide de l'ennemi les a empêchées de parvenir.
D. Où étiez-vous alors ?
B. J'étais au point central des cantonnements à Videume, pour me porter à la droite ou à la gauche, suivant le mouvement de l'ennemi, ainsi que le général Steingel (1).
Plusieurs membres : Cet interrogatoire est insignifiant et ne mérite pas d'être lu jusqu'au bout.
, rapporteur. On vient de me remettre des pièces signées de quelques membres de la Convention ; elles portent que ces offi-' ciers n'étaient pas à leur poste lorsque l'ennemi s'est présenté.
J'estime qu'il est inutile d'en entendre la lecture, puisque la
Convention ne
(de Douai) expose que les renseignements prouvent que ces généraux étaient avertis, depuis plusieurs jours avant le 1er mars, de la trouée qui devait se faire, et cependant ils n'ont pas resserré leurs cantonnements.
(La Convention renvoie les généraux Steingel et Lanoue devant le tribunal criminel extraordinaire, et décrète que le comité de la guerre transmettra à l'accusateur public toutes les pièces et renseignements qu'il a recueillis.)
Je demande que toutes les pièces qui seront produites dans le cours de la procédure et les interrogatoires soient imprimés et distribués aux membres de l'Assemblée, afin que chacun de nous puisse juger dans sa conscience et découvrir les fils d'une conspiration que l'on a tant d'intérêt à connaître.
(La Convention adopte la proposition de Chambon. )
observe qu'il n'y a pas seulement Steingel et Lanoue, mais que Miranda et les autres coupables doivent être également ren-; voyés au tribunal révolutionnaire.
J'appuie cette proposition. Miranda surtout doit être regardé comme le chef de toute cette vaste conspiration formée contre la République; je ne sais pas pourquoi on veut l'exempter de paraître devant le tribunal révolutionnaire.
Citoyens, le peuple s'étonne de ce que Lescuyer et Miaczynski ne subissent pas le châtiment qu'ils méritent d'après les preuves les plus claires qui existent contre ces deux conspirateurs. Vous avez déjà renvoyé par un décret du 9 avril le général Lescuyer devant le tribunal révolutionnaire ; je vous demande le même décret contre Miaczynski, afin qu'il soit promptement fait justice de tous les traîtres.
(La Convention adopte ces différentes propositions.)
Suit le texte définitif du décret rendu (1) :
(( La Convention nationale décrète que les généraux Lanoue, Steingel, Miranda et Miaczynski sont renvoyés par-devant le tribunal criminel extraordinaire, séant à Paris ; qu'en conséquence, le comité de la guerre fera passer sans délai à l'accusateur public toutes les pièces qui sont entre ses mains, qui ont rapport aux délits qui leur sont imputés, et que les pièces et renseignements recueillis par les commissaires dans la Belgique, relativement nduite de ces généraux, seront communiquées, par eux, au tribunal.
c La Convention décrète en outre que toutes les pièces qui seront produites dans le cours de la procédure et les interrogatoires seront imprimés et distribués aux membres de l'Assemblée. »
(1). Je viens dénoncer à la Con vention une nouvelle manœuvre aristocratique tendant à gêner la circulation des assignats. Depuis plusieurs jours, à la Bourse, plusieurs mauvais citoyens cherchent à persuader que les assignats, qui ne portent pas l'effigie du ci-devant roi, sont de nulle valeur et particulièrement ceux de 10 et de 400 livres. Je demande qu'on prononce la peine de mort contre les auteurs de semblables délits.
Porterez-vous la peine de mort contre les laboureurs, contre les individus qui ne savent pas lire et qui refusent un assignat parce qu'on leur dit qu'il n'est pas bon?
Vous avez une loi qui condamne à six ans de gêne ceux qui refusent la monnaie du pays ; vous en avez une autre qui condamne à mort ceux qui tendraient à demander un roi ; si donc, c'est parce que la figure d'un roi n'est pas sur un assignat qu'on le refuse, c'est que l'on demande indirectement un roi ; conséquemment l'une et l'autre est applicable dans le refus des assignats. Passez donc à l'ordre du jour, motivé sur l'existence de ces deux lois.
(La Convention passe à l'ordre du jour ainsi motivé.)
Suit le texte définitif du décret rendu (2) :
« La Convention nationale, après avoir entendu la dénonciation faite par un de ses membres, du refus que font quelques personnes de recevoir, sen paiement, des assignats de 10 livres et 400 livres parce qu'ils ne portent pas l'effigie du roi ;
« Considérant qu'une loi porte la peine de mort contre quiconque provoquerait le rétablissement de la royauté, et une autre peine de six ans de fers contre quiconque refuserait de recevoir des assignats en paiement, passe à l'ordre du jour, motivé sur l'existence de ces deux lois. »
Je demande la parole.
Plusieurs membres (du centre) : Non, non ! la parole est à Guadet, Gensonné, Brissot, à qui un décret l'a accordée.
monte à la tribune; il veut parler.
Les mêmes membres : A bas ! à bas !
donne l'ordre à un huissier de le faire descendre ; il résiste ; il est rappelé à l'ordre.
(La Convention décrète que Guadet seul sera entendu.)
cède le fauteuil à Delmas, président.
présidence de delmas, Président.
La parole est à Guadet pour répondre à Robespierre.
(1). Citoyens, si en dénonçant de vant le sénat de Rome celui qui avait conspiré contre la liberté de son pays ; si en dénonçant Catilina, Cicéron avait fondé son accusation sur des preuves de la nature de celles que Robespierre a produites contre moi, Cicéron n'eût inspiré dans l'âme de ceux qui Feussent entendu, que de l'indignation et du mépris. Mais si après avoir annoncé qu'il venait remplir un ministère douloureux et pénible, qu'il y était forcé par l'amour de sa patrie, Cicéron eût terminé son discours par une ironie ou une plaisanterie, Cicéron eût été honteusement chassé du sénat ; car, chez ce peuple, on détestait la calomnie, et on savait punir les calomniateurs. Mais Cicéron était un homme de bien ; il n'accusait pas sans preuves. Cicéron n'eût pas spéculé sur l'ignorance du peuple ; Cicéron n'aurait pas accaparé une réputation populaire, pour accaparer la République... Je m'arrête... Aussi bien que r>eut-il y avoir de commun entre Cicéron et Robespierre, entre Catilina et moi !
Je divise en trois époques la calomnieuse histoire que Robespierre vous a débitée : ce que j'ai fait à l'Assemblée législative depuis sa formation jusqu'au renversement du trône : ce que j'ai fait à l'Assemblée législative depuis le renversement du trône jusqu'à l'époque du rassemblement de la Convention nationale; ce que j'ai fait depuis que la Convention est formée.
Sur la première époque, je suis forcé de diviser encore ; car il faut bien essayer de suivre cette accusation dans le dédale où on l'a jetée. Influencé sur la nomination des ministres ; influence sur leur administration ; influence dans les comités ; influence dans l'Assemblée ; influence sur la déclaration de guerre à l'Autriche ; intelligence avec les traîtres, et notamment avec Lafayette ; enfin intelligence avec la Cour.
Je passerai rapidement sur la plupart de ces faits dont Vergniaud a déjà démontré avec beaucoup d'esprit l'absurdité, et je ne prétends pas convaincre ceux que Vergniàud n'a pas convaincus.
J'ai fait nommer les ministres l Mais de quels ministre veut-on parler ? C'est sans doute ceux que la voix publique a désignés comme bons patriotes ; et je ne vois pas quel crime on pourrait faire à un citoyen qui, au milieu des divisions et des trahisons, eût rendu à la patrie le service de porter au ministère des hommes fidèlement attachés à la liberté ; mais ce service, je n'ai pas eu le bonheur de le rendre à ma patrie.
Le ministère, désigné sous lé nom de ministère patriote, a été d'abord
composé de 4 hommes ; j'entends parler de Dumouriez, Servan, Glavière et
Roland. Quant à Dumouriez, je n'avais jamais entendu parler de lui avant
l'époque où il a été fait ministre, si ce n'est par Gensonné que
l'Assemblée constituante avait chargé d'aller porter la paix dans le
département de la Vendée, et qui dans son
Cependant je dois en convenir, je n'ai jamais formé avec Dumouriez de liaison ; je n'ai pas tardé à m'apercevoir que cet homme n'avait pas de principes de morale ; et les hommes qui n'ont pas de morale ne m'appartiendront jamais. Je-fis plus. Au moment où je fus convaincu de cette vérité, je déposai mes soupçons dans le sein de quelques amis particuliers, membres de l'Assemblée législative, et entre autres, dans le cœur de celui qui vous préside en ce moment, de Delmas. Au moment où je fus convaincu des petits manèges de Dumouriez, c'est moi qui de cette tribune (il était à la barre,) lui reprochai ses trahisons envers la chose publique, et demandai contre lui le décret d'accusation. Ceux, ou la plupart de ceux qui m'accusent aujourd'hui d'avoir eu des liaisons avec Dumouriez, et de les avoir conservées jusqu'au moment de sa conspiration, ne me secondèrent pas tous dans mes efforts, qui, j'ose le dire, s'ils l'eusssent été, eussent peut-être sauvé la République. Quoi qu'il en soit, Dumouriez quitta le ministère. Dumouriez devint général. C'est en parlant de cette seconde époque, à laquelle je passerai tout à l'heure, que je répondrai aux accusations de liaison avec lui. (Rumeurs sur la Montagne.)
Au reste, citoyens, ce que- je dis ici, je n'ai pas attendu pour le dire, que la conjuration de Dumouriez fût dévoilée : car tous les journaux d'alors déposèrent de la vérité des faits que j'articule. Je dois dire que le comité de défense générale, ou plutôt la réunion d'un grand nombre de membres de cette Assemblée, dans le local du comité de défense générale, ont pu m'entendre, quand on ne connaissait encore que la lettre du 12 mars ; je prononçai mon opinion à son égard, comme je la prononcerai aujourd'hui, et il est un fait que je ne dois pas passer sous silence. Dumouriez, pendant son ministère, obtint du comité diplomatique et de la commission extraordinaire, l'abandon de six millions pour dépenses secrètes de son ministère des affaires étrangères; on a prétendu, car il est facile d'accuser surtout lorsqu'on s'embarrasse peu de mettre les preuves à côté de l'accusation, on a prétendu que mon éloignement de Dumouriez ne venait que de ce qu'il avait refusé de partager cette somme avec moi.
Citoyens, il est impossible de pousser plus loin la scélératesse et l'atrocité ; d'abord si on avait voulu prendre la peine d'examiner, on aurait su que sur cette somme de six millions, Dumouriez n'avait dépensé, pendant son ministère, que 700,000 livres. Son compte est au comité des finances. On attrait su surtout que
si Dumouriez a rendu ce compte, dont, aux termes du décret, il était dispensé, c'est sur ma motion ; car je connaissais aussi le placard infâme qu'on est venu tirer de dessus quelques piliers de la halle, ou de quelque carrefour pour venir nous l'opposer.
Je savais que dans ce placard on prétendait que ce refus de Dumouriez avait été la cause de notre éloignement. Je n'étais pas embarrassé de savoir aussi dans quel arsenal avait été fabriqué ce libelle infâme et dégoûtant et peut-être Robespierre ne serait-il pas content si je lui rappelais ce que les Durosoy et les Gautier, de ce temps, ont pu dire sur sa conduite, et peut-être aurais-je le droit de dire que celui-là est l'auteur du placard, qui a la bassesse de me le reprocher aujourd'hui. Quoi qu'il en soit, c'est sur ma motion que Dumouriez fut obligé, par décret de l'Assemblée légis-laitve, de rendre compte.
Voilà pour Dumouriez ; je passe à Servan. Je dois dire encore sur lui que je ne connaissais son nom que par l'excellent ouvrage intitulé: le Soldat-citoyen, qu'il avait composé avant son ministère ; ouvrage qui m'avait quelquefois fait espérer que la liberté se planterait en France. Servan entra au ministère sans que je l'eusse jamais vu, et pendant son ministère je n'ai jamais eu avec lui que des liaisons que deux honnêtes gens peuvent avoir ensemble. Quant à Clavière, mes liaisons avec Brissot, liaisons dont je m'honore... (Nouveaux mxir-mures sur la Montagne) Brissot combattait pour la liberté, il souffrait pour elle, il écrivait pour elle, alors que Robespierre disait qu'il ne savait pas ce que c'était qu'une République.
Ces liaisons dont je m'honore d'autant plus, que c'est en lui que j'ai trouvé cette véritable philosophie, non pas cette philosophie de paroles, mais de pratique, qui n'allie point le vice avec la prédication de la vertu, qui fait qu'on se contente de la médiocrité dans laquelle on est né, qui fait qu'on n'avance jamais sa fortune par des moyens illégitimes ; liaisons dont je m'honore d'autant plus, que j'ai trouvé en lui un ami fidèle, un ami constant, un ami éclairé. Mes liaisons avec Brissot m'ont mis à même de connaître Clavière, dont la réputation dans la science des finances, était faite avant que je l'eusse connu. J'atteste sur ce qu'il y a de plus sacré dans la liberté, que^ je n'ai eu aucune influence sur cet homme ; j'atteste que je n'ai jamais eu besoin de lui, j'atteste que je ne me suis jamais servi de l'amitié qu'il m'a témoignée. Quant à Roland, le lendemain de son élévation au ministère, je l'ai vu chez Pétion; je l'ai constamment estimé depuis. J'ai admiré son inflexibilité, la sévérité de son caractère au milieu d'une Cour corrompue; j'admirai le courage avec lequel il a su lutter contre les trahisons de cette Cour; j'admirai le courage bien plus grand encore avec lequel il a su lutter contre une faction plus puissante, armée de calomnies, de diffamations, d'insultes, d'outrages et de poignards ; je l'ai admiré surtout par la confiance qu'il a eu d'être toujours grand au milieu de ses persécuteurs, modeste avec des talents. Mais mes relations avec lui se sont bornées, comme avec les autres ministres à des relations de pure estime et d'amitié.
Je puis même citer à cet égard un fait remarquable : la ville de Bordeaux a un hôpital qui était ruiné, il renfermait près de 400 malades. Deux ou trois capitalistes de Bordeaux, négociants patriotes, qui avaient prêté des fonds, demandèrent à en être remboursés ; de son côté, l'hôpital demandait des fonds ; l'Assemblée nationale en avait mis entre les mains du ministre de l'intérieur pour les dépenses de cette nature. Bordeaux avait ici deux députés, Fonfrède en était un ; ils restèrent ici trois mois, ou à peu près, pour obtenir du ministre de l'intérieur une somme de 300,000 livres pour l'hôpital de Bordeaux. Je les accompagnai une fois chez lui ; et, quoique la ville de Bordeaux eût évidemment des droits légitimes à l'obtention de cette somme, le ministre de l'intérieur n'accorda que 60,000 livres ; voilà la grande influence que j'avais sur le ministre de l'intérieur, qui, je le répète, a toujours été pour moi un objet d'estime et de respect.
Je passe à l'influence qu'on suppose que j'ai eue dans les comités de l'Assemblée nationale législatives ; certes, il me serait difficile de répondre à une accusation de cette nature. Je n'ai appartenu dans l'Assemblée législative du moins jusqu'à l'époque dont je parle, qu'au comité de législation ; j'y avais préparé quelques travaux que la séparation de l'Assemblée législative a rendus inutiles, du moins pour elle. Le comité diplomatique de l'Assemblée législative, qui est celui que l'on a particulièrement dénoncé et décrié, je n'y suis point entré pendant tout le cours de l'Assemblée nationale législative ; je n'en étais pas membre ; et je ne suis pas devenu membre du comité de défense générale et de la commission des vingt et un, que dans les moments de crises qui se préparaient, lorsque l'Assemblée législative crut devoir les former : et certes, j'ai connu beaucoup d'hommes qui j auraient été bien aises de m'éloigner de ce comité, et ces hommes n'étaient pas des patriotes très ardents ; si j'y fus porté, ce fut par les patriotes. Comment se fait-il donc que Robes-, pierre, se transportant dans les Feuillants d'alors, trouve mauvais avec eux que je fusse membre de ce comité ; mais enfin qu'y ai-je fait 1 Je peux répondre ici d'une manière générale. « Vous accusez toute ma carrière politique dans l'Assemblée législative, vous soupçonnez toute ma conduite ; eh bien ! j'ai attaché mon nom à quelques décrets de cette Assemblée; prenez-les, voyez s'il y en a un seul que l'on puisse appeler liberticide, alors accusez-moi ; mais on ne peut jamais accuser un membre de l'Assemblée nationale pour des opinions erronées. Mais s'il est vrai que ces décrets puissent être avoués par le patriotisme le plus pur, comment se fait-il que vous fassiez à mon égard ce que les journaux aristocratiques faisaient alors, que vous vous attachiez à mon nom pour le diffamer. » Citoyens, je vous laisse à tirer la conséquence.
Dans la commission des vingt et un, il a été question de la déchéance du roi. J e suis obligé de répéter ici ce que j'ai dit; mais, comme le disait encore Pétion ce matin dans cette tribune, la calomnie déjà repoussée se répète toujours; on espère que bientôt la blessure sera si profonde qu'il faudra bien que la cicatrice paraisse. Il a été question de la déchéance du roi;
je me suis opposé à cette mesure, parce que je croyais que la déchéanec du roi ne pourrait oonduire qu'à de grands maux. J'ai vu dans la déchéance du roi son fils montant sur le trône, et d'Orléans régent. J'ai pensé, et cette opinion a été partagée par un grand nombre de mes collègues, que ce n'était point à la mesure de la déchéance qu'il fallait s'attacher, mais à la suspension et à la convocation d'une Convention nationale. Par là toutes les passions devaient à la fois se taire; car il fallait . bien qu'elles courbassent toutes la tête devant la volonté générale. Nous étions alors dans un temps heureux ; npus n'y sommes plus. La déchéance du roi ne fut donc pas accueillie par la commission des vingt et un; et si quelque chose m'étonne, d'après la mesure adoptée par ce comité, c'est qu'on ait pu la transformer en crime. On nous a reproché, et c'est un fait qui probablement est échappé à Vergniaud dans l'embarras où l'avait jeté le roman incohérent et absurbe de notre accusateur ; on nous a reproché d'avoir voulu à cette époque transiger avec la Cour. Calomniateur impudent ! Transiger avec la Cour ! Où sont tes preuves ? Tu parles, tu entends parler du mémoire qu'à l'époque du mois de juillet nous avons remis à un patriote estimable, qui devait le faire passer sous les yeux de Louis XVI. Mais l'as-tu lu ce mémoire ? Eh bien, qu'y as-tu vu ? Tu y as vu trois bons citoyens, tremblant pour la liberté de leur pays évidemment compromise, disant à un roi qu'ils avaient le courage d'appeler perfide : « La guerre que nous éprouvons, c'est pour vous qu'on nous l'a fait ; c'est en votre nom que les émigrés sont armés ; c'est pour vous que les cabinets de Berlin et de Vienne sont réunis. Eh bien, faites cesser cette coalition ; faites déposer les armes aux émigrés, alors on pourra croire que vous voulez sincèrement la Constitution. Un général perfide est à la tête de nos armées; il nous trahit évidemment ; ôtez-lui le commandement par la Constitution, ce droit appartient à vous seul. »
Et dans quelle circonstance ce discours était-il tenu? Vous ne pouvez pas l'oublier, vous, Robespierre, qui, dans un journal public, vous étiez proclamé le défenseur de la Constitution; vous qui, jusqu'à l'époque du
10 août, vous en déclarâtes le champion; vous ne pouvez l'ignorer, les efforts des patriotes avaient échoué, le 20 juin, devant la coalition de la Cour ; un nouvel échec semblable pouvait à jamais renverser la liberté; voilà ce que des hommes, qui n'ont peut-être pas vu si étroitement que vous, ont aperçu; voilà ce que tous les bons citoyens ont dû apercevoir alors :
11 était de leur devoir de prendre la mesure capable de nous sauver, en supposant que les efforts renouvelés du patriotisme et de la liberté succombassent encore. Mais en même temps que nous employions ce moyen, moyen qui n'en était pas un, car ce n'était pas une transaction avec la Cour, c'était un mémoire remis en mains tierces, des conseils à un ami; oui, en même temps que nous employions ces moyens, avons-nous négligé ceux par lesquels les efforts des patriotes devaient être secondés, en supposant qu'ils se réitérassent? Si vous ne nous croyez pas, demandez-le ou plutôt souvenez-vous de ce que vous ont dit des membres de l'Assemblée législative, composant la
commission extraordinaire; ils vous diront que les mesures par lesquelles le trône a été renversé le 10 août, c'est nous, nous vos accusés, qui les avons proposées (Murmures prolongés sur la Montagne); ils vous diront que c'est l'opinion fortement prononcée de Gensonné dans ce comité, qui a fait pencher celle de la commission extraordinaire des vingt et un; ils vous diront, ou plutôt ils vous répéteront, que le décret de suspension, c'est Vergniaud qui l'a proposé, rédigé et lu à cette tribune; ils vous diront que le décret de la convocation des assemblées primaires, le décret d'abolition du droit de citoyen actif, le décret de convocation de l'Assemblée conventionnelle, c'est moi qui les ai conçus, rédigés et lus à cette tribune.
Mais plutôt si tout le monde vous est suspect, interrogez les témoins qui ne mentent pas, ce sont les journaux d'alors. Ah ! certes, si le prince de Cobourg arrivait dans Paris, c'est alors que je m'attendrais à voir faire mon procès, précisément sur les mêmes faits que vous avez l'impudence d'articuler contre moi. U me dirait : « C'est toi qui as constamment lutté dans l'Assemblée législative contre les trahisons de la Cour; c'est toi qui le 9 août disais à cette tribune : oui, nous sauverons la patrie; nous la sauverons malgré les efforts de l'aristocratie et de la trahison réunies. » Il me dirait : « C'est toi qui as proposé la formation des assemblées primaires, et la convocation d'une Convention nationale, par laquelle la royauté devait être abolie, et le trône anéanti. Tu aurais bien mieux servi nos intérêts, si du moins tu avais adopté cette mesure de déchéance qui, prononcée en vertu de la Constitution, aurait fait disparaître un homme, et qui nous aurait laissé un roi. » Voilà sur quels faits, sur quelles preuves je m'attendrais à voir faire mon procès, à perdre la tête. Ainsi donc lorsque Robespierre articule contre moi les mêmes faits, j'ai le droit de dire : Le complice de Cobourg, c'est toi ! (Vifs applaudissements à droite et au centre. )
Je passe, citoyens, à la troisème époque, c'est-à-dire à mes travaux dans la Convention nationale; et c'est ici où je suis forcé de m'avouer coupable : oui, je le suis; mais de quoi? d'avoir cru qu'il fallait ménager des scélérats et des traîtres, pour ne pas perdre la chose publique; d'avoir cru que lorsque d'infâmes libelles, q'-e lorsqu'une faction scélérate m'avait signalé comme le chef d'un parti quelconque, je devais laisser passer la tempête, m'écarter en quelque sorte moi-même.
Voilà de quoi je m'accuse, voilà de quoi mes commettants auront peut-être le droit de m'accUser; mais j'aurai de quoi me justifier par l'intention qui m'a dirigé et qui m'a fait croire que le bien s'opérerait plus facilement par mon silence qu'au son de ma voix. Voilà mes crimes, ce sont les seuls, et je défie l'accusateur le plus audacieux d'articuler ici un seul fait prouvé qui soit à ma charge. Citoyens, je pourrais peut-être vous en laisser juges vous-mêmes; mais au milieu de ces conjectures, de ces soupçons, à la faveur desquels on a fasciné les yeux de quelques citoyens, il faut bien que je me condamne à me traîner encore dans cette fange où l'on a eu l'intention de m'ensevelir.
Je reprends à la troisième époque mes prétendues liaisons avec Dumouriez, et je répète que je n'en ai eu aucunes, d'aucune espèce. Un de mes collègues m'a prié d'écrire à Dumouriez pour un de ses fils dont la santé est faible, et qui était dans l'armée de Dumouriez.
TJn membre : C'est moi.
Je lui répondis que je n'avais pas de liaisons avec Dumouriez, que cependant je hasarderais une lettre. Je l'écrivis; mais je me bornai dans cette lettre à la recommandation qui m'était demandée pour ce jeune homme. Dumouriez ne me répondit point; je reçus sa réponse par un officier de son armée, qui venait à Paris, et qui me remit en même temps un mémoire écrit tout entier de la main de Dumouriez, par lequel ce général demandait au ministre de la guerre un de mes frères attaché à l'armé de Custine, et dont il avait entendu parler avec distinction. Ce mémoire, je l'ai gardé, et je ne l'ai point remis au ministre de la guerre. J'ai cru que dans un gouvernement républicain, nul ne devait s'élever à la place d'un autre que par ses talents. Le mémoire doit encore être chez moi.
Dumouriez est venu à Paris; il était précédé de la réputation de grand général; il était environné de tout l'éclat de ses victoires. Je ne l'ai point recherché; je l'ai vu quelquefois au comité dont j'étais membre; je l'ai vu une autre fois dans une maison tierce où on lui donnait une fête à laquelle je fus invité, et à laquelle j'allai par amitié pour celui qui la donnait, Talma. J'y restai une demi-heure seulement; et je n'y étais plus, lorsque Marat et ses suppôts vinrent lui faire subir l'interrogatoire dont on a tant parlé. (Rumeurs sur la Montagne.) U a resté plusieurs jours à Paris. Je n'ai pas su où il logeait. Je ne l'ai pas vu davantage; je parle de son premier voyage; mais ceux qu'on a vus assidûment à côté de Dumouriez, je le tiens de la voix publique, ce n'est pas moi, ce ne sont pas ceux qu'on accuse, ce sont précisément les hommes qui accusent Dumouriez, et cette démarche ne m'a pas donné une opinion meilleure de son civisme. Dans tous les spectacles de Paris, qui était sans cesse à ses côtés ? Votre Danton.
Ah ! tu m'accuses, moi!... tu ne connais pas ma force !......
Si toutefois on peut appeler vôtre celui qui, dans le nombre de ses agents, vous place au troisième rang.
Je te répondrai ; je prouverai tes crimes... A l'Opéra, j'étais dans une loge à côté de lui, et non dans la sienne... Tu y étais aussi.
J'aurais pu vous citer des témoins occulaires. L'homme dont j'ai parlé; Fabre d'Eglantine, le général Santerre formaient la cour du général Dumouriez, et je n'en étais pas étonné; il en a été de même dans tous les spectacles, et remarquez que je n'en veux pas faire de crimes à personne. Je n'ai jamais prétendu tirer de l'association d'un homme avec un autre devenu coupable, la conséquence qui l'est aussi; je veux prouver seulement que ceux-là sont bien insensés de supposer des crimes à ceux qu'ils voient liés en apparence
avec tel ou tel personnage, lorsque je les surprends liés eux-mêmes avec lui. Si j'avais voulu suivre ta doctrine, Robespierre, je t'aurais dit : Tu accuses Pétion de trahir la chose publique, je pense différemment; car je le regarde comme digne de l'estime de tout homme de bien, et son amitié me console souvent des amertumes que toi et les tiens répandez sur ma vie.
Mais enfin, tu le dis, c'est un traître : eh bien ! puisque tu as eu des liaisons avec lui, voudrais-tu qu'on en conçluât que tu es un traître aussi? Pourquoi donc commences-tu d'abord par me supposer des liaisons avec Dumouriez, quand le ifait est faux? Ensuite, pourquoi me supposes-tu traître, parce que cet homme l'est devenu ? Certes, cette- doctrine-là ne fut jamais celle du peuple même le plus barbare; elle est tout entière à toi, Robespierre, (Vifs applaudissements à droite et au centre; Murmures prolongés sur la Montagne.) En deux mots je n'ai jamais eu de liaisons avec Dumouriez; ce ne sont pas là des imaginations, ce sont des faits. Je l'ai accusé; je me suis expliqué sur son compte, dans un temps où sa conspiration n'éclatait pas encore, comme je le fais aujourd'hui; mais j'en aurais eu, qu'il ne s'ensuivrait pas que j'aurais partagé ses intrigues criminelles. Conquérant, victorieux, je l'admirai; conspirateur, je saurai le condamner : et crois-tu que Brutus n'aimait pas ses enfants? Brutus avait des liaisons naturelles avec eux; cependant Brutus les condamna, et personne ne le supposa complice des crimes de son fils. Ainsi de même si Gensonné a eu des liaisons avec Dumouriez; s'il l'a admiré, estimé pendant qu'il a cru qu'il rendait de grands services à sa patrie, pendant que vous-mêmes vous le proclamiez le sauveur de la République, pendant que vous-mêmes volus condamniez ceux qu|i venaient ici demander un décret d'accusation contre lui, pendant que vous appeliez un crime d'oser même le soupçonner : eh bien ! Gensonné saura aussi vous répondre; et comme moi, il saura condamner Dumouriez, comme il a pu l'admirer. Je le répète, quant à moi, aucune liaison d'aucun genre ne m'a attaché à cet homme. Sur tout le reste, il me serait facile de répondre d'une manière encore plus générale, et de dire à Robespierre, qui m'impute d'avoir formé une faction dans la Convention nationale, où sont tes preuves?
Si j'entends bien les termes, une faction est un concert d'hommes qui travaillent à renverser l'autorité légitime, à usurper la puissance. Eh bien, Robespierre, qui de toi ou de moi a travaillé ainsi ? réponds-moi.
TJn membre (sur la Montagne) : C'est toi!
Depuis longtemps et vous devez en être aperçus, citoyens, leur tactique, c'est d'imputer aux autres ce qu'ils ont fait eux-J mêmes. Ont-ils ordonné des pillages dans Pa-I ris, c'est vous, c'est moi qui les avons provo-: qués; ont-ils porté le peuple à des excès plus criminels encore, c'est encore moi; quelques brigands répandus dans les sections de Parts prennent-^ls des arrêtés subversifs des autorités nationales, c'est encore une manœuvre des factieux de la Gironde. Je n'ai pas besoin de les nommer, ceux qui se permettent cette tactique infâme; vous les devinez, citoyens, et c'est là ma plus forte preuve contre eux. Nous
composons une faction ! Si ce n'était là le comble de l'atrocité, ce serait le comble de la dérision. Quoi ! nous, vos victimes ; nous contre lesquels vous avez ouvertement, publiquement conjuré dans la nuit du 9 au 10 mars, nous sommes une faction ? Mais dans quelle tribune nous voit-on donc tâcher de propager nos principes factieux et liberticides ? Abordons-nous les tribunes de vos sociétés populaires, devenues l'arsenal de la calomnie, du pillage, du meurtre, de l'assassinat ? (Rumeurs sur la Montagne.) Oui, vos sociétés, prenez garde que je parle des vôtres, devenues, dis-je, l'arsenal de prédications d'attentats contre la représentation nationale ? Nous voit-on dans les sections de Paris augmenter le nombre de ceux que vous-mêmes, lorsqu'ils vous ont rendu quelques services indiscrets, vous appelez des contre-révolutionnaires ? Non, on ne nous voit nulle part ; nous vivons seuls avec nos amis. Youdriez-vous aussi nous interdire de pareilles liaisons? Voudriez-vous jeter dans une députation liée ou à peu près par les mêmes sentiments, par les mêmes principes, la division que vous jetez tous les jours dans la Convention nationale? Non, vous n'y parviendrez pas ; la liberté nous réunit, nous sommes inséparables. Je termine par une accusation qui devait naturellement se détacher de toutes les autres; celle sur la guerre et sur les maux qu'elle peut avoir entraînés.
Citoyens, permettez-moi de vous faire une réflexion, elle s'échappe de mon âme ; lorsque nous avons voulu la guerre, la France tout entière la voulait avec nous, Robespierre seul et son orgueil ne la voulaient pas, parce qu'il ne veut jamais ce que les autres veulent. (Murmures prolongés sur la Montagne.) Il n'était même pas question de savoir si on la voudrai®, si on ne la voudait pas; car il était question de se défendre. Les armées ennemies s'étaient déjà réunies, elles marchaient sur le territoire français; un traité de coalition entre deux puissances qui n'avaient d'autre objet que d'anéantir la liberté française était formé, les émigrés étaient aussi réunis alors, fallait-il se laiser subjuguer ?, Ah ! les Delessart de ce temps-là vous^ le disaient, les Durosoy vous le disaient aussi. Delessart disait qu'il fallait temporiser encore, parce que les ennemis n'étaient pas prêts. Ainsi c'est encore un nouveau trait de ressemblance que je trouve entre Robespierre et nos ennemis communs. (Rumeurs sur la Montagne.) On voulait donc la guerre, il fallait la vouloir, elle était forcée pour nous, à peine d'être subjugués; on la voulait, la nation la voulait, comme elle a voulu la République. Comment arrive-t-il donc à présent que pour des revers qu'eux-mêmes peut-être ils ont préparés, on calomnie une mesure à laquelle je déclare, au surplus, n'avoir pris d'autre part dans cette déclaration de guerre, que celle de mon opinion dans l'Assemblée législative; opinion que j'avais écrite, et que je n'ai même pu prononcer; car l'Assemblée adopta cette mesure d'enthousiasme et sans discussion. Comment arrive-t-il donc qu'on nous reproche cette mesure ? Citoyens, ils nous la reprochent après qu'ils ont attiré les revers sur nous, à peu près comme si, suivant leure espérances, qui ne se réaliseront jamais, je l'espère, la République venait à périr, ils nous signaleraient aux es-
' pions de la police, comme ayant voulu cette République. La guerre ! Lafayette la désirait pour être générai : nous avons eu des intelligences avec lui. Nous ! citoyens, permettez-nous de vous dévoiler ici un fait que Robespierre connaît parfaitement bien; car il lui est attesté par des hommes que Robespierre ne soupçonnera certainement pas, si toutefois il est quelqu'un que Robespierre ne puisse pas soupçonner.
La source de la plus grande partie des calomnies répandues contre nous est nos prétendues intelligences avec Lafayette. On a bâti, dans le temps, je ne sais quelle histoire d'un dîner fait avec Lafayette, et là-dessus de conséquence en conséquence, on est allé jusqu'à la trahison. Eh bien ! citoyens, voici ce que c'est : un de nos collègues dans l'Assemblée législative, qui souffre maintenant pour la liberté, je ne dirai rien qui soit à sa charge; mais comme je suis loin de le soupçonner en aucune manière, et que je ne pense, pas qu'il puisse l'être, à moins d'une malveillance diabolique, je dirai le fait tout simplement; un de nos collègues, dans l'Assemblée législative, c'est Lamarque, nous invita un jour, Ducos, Grangeneuve et moi à dîner chez lui; nous y allâmes. Plusieurs autres députés s'y trouvèrent.- Après le dîner, on nous fit passer dans l'appartement d'un ami de notre hôte, qui demeurait sur le même,palier que lui. A peine fûmes-nous chez ce voisin, qu'on nous annonça Lafayette; comme par instinct, sans nous être rien communiqué, car Lafayette était jugé pour nous depuis longtemps, Grangeneuve, Ducos et moi, sans saluer personne, nous prenons nos cannes et nos chapeaux, et nous sortons...
J'atteste que ce fait est vrai.
(de la Gironde). Tais-toi, Ducos, tu es suspect, tu es Girondin.
Cette entrevue fortuite où j'avais vu Lafayette, fut transformée aux Jacobins en une véritable intelligence avec lui; et comme nous dédaignâmes de répondre à ce bruit, il prit bientôt beaucoup de consistance.
J'abandonne ici beaucoup de circonstances, et je passe à des preuves.
Tu nous accuses d'avoir eu des intelligences avec Lafayette; mais où t'es-tu donc caché le jour où on le vit dans tout l'éclat de sa puissance, porté du château des Tuileries jusqu'à cette barre, au milieu des acclamations qui se font entendre sur cette terrasse comme pour en imposer aux représentants du peuple ? Moi, moi tout seul, je me présentai à la tribune, et je l'accusai, non pas ténébreuse-ment comme tu le fais, Robespierre, mais publiquement. Il était là... (Guadet montre le banc des pétitionnaires situé à la Montagne.) Je l'accusai; la motion que je fis fut soumise à un appel nominal, dans lequel les patriotes n'eurent pas la victoire. Voilà des faits; et cependant, éternel calomniateur, que m'as-tu opposé, si ce n'est tes rêveries habituelles et tes conjectures insultantes? (Rumeurs sur la Montagne.) Citoyens, c'est assez sans doute; j'ai mis devant vous toute ma carrière politique; ce n'est point dans les ténèbres, ce n'est point dans les caves que l'on m'a vu travailler pour la liberté. U était donc bien simple de m'accuser par des preuves, si l'on
avait pu en avoir; et de l'impuissance où on a été d'en trouver, on doit conclure, après avoir longtemps médité sur cette grande trahison, qu'il n'en a pas existé. Cependant, avec quelle audace ne vous a-t-on pas dit : c'est une chaîne dont le premier anneau est à Londres, et le dernier est à Paris et cet anneau est d'or. Ainsi donc vous nous accusez d'être corrompus, d'être vendus à l'Angleterre, d'avoir reçu l'or de Pitt pour trahir notre patrie. Eh bien ! où sont-ils donc ces trésors? Yenez, vous qui m'accusez; venez dans ma maison (Nouvelles rumeurs sur la Montagne); venez-y voir ma femme et mes enfants, se nourrissant du pain des pauvres (Murmures prolongés sur les mêmes bancs); venez-y voir l'honorable médiocrité au milieu de laquelle nous vivons; allez dans mon département, voyez-y si mes minces domaines sont accrus; voyez- moi arriver à l'Assemblée; y suis-je traîné par des coursiers superbes?
Infâme calomniateur, je suis corrompu ! . Où sont donc mes trésors? Informez-vous auprès de ceux qui m'ont connu? demandez-leur si je fus jamais accessible à la corruption; demandez quel est le faible que j'ai opprimé, quel est l'homme puissant que je n'ai pas attaqué, quel est l'ami que j'ai trahi. Ah ! citoyens, pourquoi chacun de nous ne peut-il pas dérouler, si je puis m'exprimer ainsi, sa vie entière ? C'est alors que nous connaîtrions quels sont ceux qu'il faut estimer, quels sont ceux qu'il faut exécrer; car celui qui fut toujours bon père, bon époux, bon ami, sera toujours, à coup sûr, bon citoyen. (Applaudissements.) Les vertus publiques se composent des vertus privées; et je sens combien il faut se défier de ceux qui parlent de sans-culotterie au peuple, en même temps qu'ils affectent un faste insolent; je sens qu'il faut se défier de ces hommes qui Se disent patriotes par excellence, et qui ne pourraient pas souffrir qu'on les interrogeât sur aucunes... aucunes de leurs actions privées.
C'est peut-être assez longtemps jouer un rôle auquel ma conscience ne m'a pas accoutumé; il est temps de passer à celui que mon devoir m'oblige dé prendre.
Une chaîne, dites-vous, s'étend de Londres à Paris. Ah! je le crois bien; c'est la chaîne de la corruption, je le crois encore; et sans elle aurions-nous ici... ici tous les mêmes individus applaudissant à vos mouvements, se réglant sur vos volontés? (Applaudissements.) Oui, je le comprends, Pitt ou toute autre coalition criminelle nous travaille par l'intrigue. Mais je suppose que quelqu'un de nous soit ici pour parvenir à ses fins, à la destruction de la République et de la liberté, qu'aurait-il fait? Il aurait d'abord commencé par dépraver la morale publique, afin que les citoyens fussent dans ses mains ce qu'ils étaient autrefois, ce qu'ils sont encore dans quelques endroits, entre les mains des prêtres; il aurait jeté sur l'Assemblée nationale de la déconsidération et le dérespect; il aurait essayé de lui enlever la confiance; il aurait semé dans la République, et surtout dans la ville que la Convention habite, l'amour du pillage, l'amour du meurtre; il aurait fait entendre la voix du sang.
Si un homme en exécration à toute la
France s'était trouvé sous sa main, il s'en se-
rait servi et l'aurait poussé à la Convention nationale. Il aurait bien pris ses moyens pour que la Convention nationale ne pût pas le vomir de son sein; il aurait fait dicter au corps électoral de Paris des lois, afin de porter encore dans la Convention nationale un homme qui pût servir les espérances des rois; et si la Convention se fût trouvée divisée dans une grande discussion; s'il s'était formé deux opinions, il aurait armé les partisans de l'une de ces deux opinions de calomnies contre l'autre; il aurait espéré par là dissoudre la Convention. S'il n'avait pu réussir par elle-même, il aurait travaillé dans les sociétés prétendues patriotes, dans les sections, où il aurait eu soin de répandre de fidèles amis, à assurer le succès de cette dissolution de la représentation nationale; il aurait surtout fortifié ce système atroce de calomnies, par lequel il aurait attaqué le plus homme de bien,, et qui aurait montré quelque courage; voilà ce que Pitt aurait fait. Est-ce moi qui l'ai fait? est-ce nous qui l'avons fait? Citoyens, chacun de vous peut appliquer non pas l'hypothèse que je viens de faire, mais les faits que je viens de mettre sous vos yeux. Ceci m'amène tout naturellement à vous entretenir d'intérêts bien autrement majeurs, que ceux dont la pénible situation où on m'a réduit, m'a forcé de vous entretenir jusqu'à ce moment. Cette conjuration que j'ai supposé devoir être fomentée par les agents secrets des puissances étrangères, pour renverser la Convention nationale; cette conspiration elle a eu lieu; cette conspiration, personne n'en peut douter, a des liaisons intimes avec la trahison de Dumouriez; car, je le répète avec Yergniaud, il est évident pour tout homme de bonne foi, que Dumouriez travaillait pour'Egalité.
C'est une calomnie. (.Murmures à droite et au centre.)
Dumouriez n'était que l'instrument d'une infâme conspiration dont d'Orléans était l'âme et le chef. Car je vous ramènerai sans cesse à ce raisonnement inexpugnable : A qui devait profiter la trahison de Dumouriez ? A d'Orléans. Il est donc évident que c'est lui qui en était le chef; et comment en douter ! Je ne parcourrai pas toutes les époques de sa vie entière; mais je sais bien que celui qui aurait voulu asservir son pays, ne se serait pas conduit autrement que d'Orléans père ne l'a fait depuis la Révolution. Or, maintenant il n'est peut-être plus permis de demander quels étaient ceux qui favorisaient les projets de d'Orléans, quels étaient ceux qui vivaient dans l'intimité avec lui, quels étaient ceux qui ont ordonné au corps électoral de Paris de le nommer lui 24e, afin qu'on sût bien que c'était leur volonté et non celle du corps électoral qui opérait cette nomination. Quels sont-ils? Je n'ai encore pas besoin de les indiquer. Cependant, par l'effet de cette tactique dont je parlais tout à l'heure...
(Un mouvement se produit dans Vune des tribunes. — Plusieurs membres se plaignent de ce qu'un citoyen les a insultés; ils demandent qu'il soit arrêté. — L'Assemblée l'ordonne (1).
J'annonce à l'Assemblée que le citoyen qui a outragé la Convention nationale, est au corps de garde.
Je demande qu'on rende compte à l'Assemblée des motifs qui ont autorisé cette arrestation, car un citoyen ne doit pas être arrêté sur une simple dénonciation.
(1). Les signataires de la pétition de la Halle-aux-blés sont à la porte depuis longtemps; ils attendent vos ordres.
(La Convention décrète qu'ils seront entendus après Guadet.)
Je demande à faire une interpellation à Guadet.
Président, je vous prie d'apprendre à David que je ne suis point ici sur la sellette, pour répondre à ses interpellations; et remarquez, citoyens, que lorsque je parle d'un parti favorable aux projets ambitieux de d'Orléans, je n'entends pas tirer une preuve de la demande faite du rapport d'un décret par lequel sa famille a été bannie du territoire de la République. Loin de moi l'idée que jamais l'opinion d'un représentant du peuple puisse être transformée en crime; je donnerai le premier l'exemple du respect pour la liberté pleine et entière des opinions; mais je ne puis pas avoir oublié les circonstances qui ont accompagné, et le décret d'expulsion, et le rapport de ce décret. Je ne les retracerai point, pour ne pas scandaliser, par ce récit, la République française, autant qu'elle a pu l'être par l'acte même. Je vous prie seulement de vous souvenir que la violence, bien plus que la raison, arracha le décret par lequel celui qui avait banni la famille des Bourbons fût rapporté. D'ailleurs, je ne peux avoir que l'idée que d'Orléans a été porté dans la Convention nationale, où l'on avait besoin qu'il fût, par les mêmes hommes^ qui nous accusent aujourd'hui d'être ses partisans. Ce n'est pas d'aujourd'hui, ce n'est pas en confidence que j'ai dit sur d'Orléans ce que j'en pensais. C'est à lui-même, et Danton me l'a reproché. J e m'explique. Je fis un jour, à la tribune de la Convention, une motion, et dans le discours qui la précéda, je supposai que des ennemis de la liberté pouvaient avoir l'intention de rétablir la royauté en France; je dis qu'il était facile d'apercevoir ceux qui aspiraient à oe grade éminent.
Le lendemain, à sept heures du matin, je vis entrer chez moi M.
d'Orléans; ma surprise fut grande. Il me demanda, en protestant que sa
renonciation absolue à la royauté était bien sincère; si j'avais entendu
le désigner, si j'avais des craintes sur lui, il me priait de
m'expliquer franchement. Je lui
Maintenant, je le demande, quels sont donc ceux qui peuvent avoir favorisé les projets de cette famille ambitieuse? De ceux qui, pour éviter dans la Convention nationale une lutte qui pouvait être scandaleuse, et elle l'a été, lui conseillaient de se bannir lui-même, ou de ceux qui s'y sont constamment et avec fureur opposés? Ou de ceux qui le lendemain ont lutté avec force pour empêcher le rapport de ce décret, et ont prononcé à cette tribune les opinions les plus vigoureuses et les plus libres, ou bien de ceux qui ont avec fureur demandé le rapport de ce décret, et rendu impuissants dans cette occasion tous les élans, tous les efforts de la liberté ? Ou bien de ceux qui allaient gémissant de ce rapport, tout en s'y soumettant; ou de ceux qui s'en allaient, déclamant qu'ils avaient remporté une grande victoire; ou bien de ceux qui s'en sont allés s'énorgueillissant de ce que des citoyens, sans doute égarés, avaient braqué des canons devant la maison d'une des femmes de cette famille ?
Certes, citoyens, si jamais il y a eu quelque chose d'étonnant et pour la nation et pour l'histoire et pour la postérité, ce sera sans doute qu'une pareille question ait pu souffrir des difficultés au milieu de la Convention nationale : mais non, elle n'en souffrira pas; le jugement des hommes de bien est porté. ( Applaudissements.)
Ainsi, citoyens, cela est démontré; les deux conjurations se lient, parce que toutes deux elles devaient tourner au profit du même homme, de la même famille. Eh bien ! qui a
ourdi celle du 10 mars1? Qui l'a ourdie, citoyens ! j'aurai le courage de dire la vérité tout entière ; car Yergniaud dans cette tribune, lorsqu'il vous parla de la conjuration, usa d'un ménagement que l'amour de la patrie et la nécessité d'être entendu le forcèrent d'employer; mais aujourd'hui toute dissimulation serait un crime, et c'en sera toujours un pour moi.
Celle-ci l'a été été publiquement; elle a été consignée sur des registres, proclamée en présence même des magistrats du peuple, des officiers municipaux. Le foyer en a été aux Jacobins de Paris (Murmures sur la Montagne); et si l'on peut supposer que celui qui nous a dénoncés, car son rôle est d'être un dénonciateur éternel, la nature l'y a condamné; si l'on peut supposer qu'il n'y ait eu aucune part active, du moins il y a eu sa part non moins criminelle de l'avoir connue, d'en avoir été témoin sans la révéler. Mais il la préparait sans doute le jour où il s'écriait, après les scènes du pillage des épiciers : « On a bien raison de s'étonner que le peuple se soit levé pour du sucre et du café. Quand le peuple se lève, il doit être terrible dans les vengeances tant qu'il y a des ennemis à exterminer. » Tandis que ce nouveau Mahomet,7 aux talents près, enveloppait ainsi dans une mystérieuse désignation les victimes qu'il fallait frapper, son Omar les nommait dans ses feuilles, et d'autres se chargeaient du soin de les désigner. C'était la Convention nationale qu'il fallait frapper, là étaient les victimes. Mais, citoyens, ce danger auquel vous avez échappé, croyez-vous qu'on ne vous le prépare pas encore? détrompez-vous; écoutez:
« La société des Amis de la liberté de Paris\ à leurs frères des départements.
( Amis, nous sommes trahis, aux armes ! aux armes! voici l'heure terrible où les défenseurs de la patrie doivent vaincre ou s'ensevelir sous les décombres sanglants de la République. Français, jamais votre liberté ne fut en plus grand péril; nos ennemis ont enfin mis le sceau à leur noire perfidie, et pour la consommer, Dumouriez, leur complice, marche sur Paris. Les trahisons manifestes des généraux, coalisés avec lui, ne laissent pas douter que ce plan de rébellion et cette insolente audace ne soient dirigés par la criminelle faction qui l'a maintenu, déifié ainsi que Lafayette, et qui nous a trompés jusqu'au moment décisif sur sa conduite, les menées, les défaites et les attentats de ce traître, de cet impie, qui vient enfin de faire mettre en état d'arrestation les quatre commissaires de la Convention, et qui prétend la dissoudre. Trois membres de notre société, commissaires du Conseil exécutif, les avaient précédés. Ce sont eux qui, en risquant leur existence, ont déchiré le voile et fait décider l'infâme Dumouriez.
« Mais, frères, ce ne sont pas là tous vos dangers, il faut vous convaincre d'une vérité bien douloureuse ! Yos plus grands ennemis sont au milieu de vous, ils dirigent vos opérations, vos vengeances ! ils conduisent vos moyens de défense !
(( Oui, frères et amis, c'est dans le Sénat que de parricides mains déchirent vos entrailles !
i oui, la contre-révolution est dans le gouvernement, dans la Convention nationale; c'est là, c'est au centre de votre sûreté et de vos espérances que de criminels délégués tiennent les fils de la trame qu'ils ont ourdie avec la horde des despotes qui viennent nous égorger ! C'est là qu'une cabale sacrilège dirigée par
la Cour d'Angleterre et autres..... Mais déjà
l'indignation enflamme votre courageux civisme. Allons, républicains, armons-nous !.....
(1): C'est vrai.
(Un violent murmure s'élève sur presque tous les bancs de VAssemblée. A l'Abbaye! à l'Abbaye! crie-t-on de toutes parts. Plusieurs membres demandent le décret d'accusation contre Marat. U n cri général et prolongé appuie cette proposition.)
J'observe que l'adresse que vient de lire Guadet circule dans les départements sous la signature de Marat.
s'élance à la tribune. (Vifs applaudissements des tribunes.)
rappelle les tribunes au silence.
(2). Pourquoi ce vain batelage, et quoi bon? On cherche à jeter au milieu de vous une conspiration chimérique, afin d'étouffer une conspiration malheureusement trop réelle. On ne peut plus la révoquer en doute; Dumouriez lui-même y a mis le sceau, en déclarant qu'il marchait sur Paris pour faire triompher la faction qu'il appelle la saine partie de l'Assemblée contre les patriotes de la Montagne. (Applaudissements des tribunes.) Mais hier au soir voulant donner à la France entière des preuves non équivoques de ma loyauté, j'ai demandé, moi, un décret qui mît la tête du fils d'Egalité, la tête du régent prétendu, du ci-devant comte d'Artois et de tous les Capets rebelles à prix. Vous avez vu la Montagne demander qu'on allât aux voix sur cette proposition, tandis que les conspirateurs faisaient un vacarme horrible pour s'y opposer.
Un membre (sur la Montagne): On demande le décret d'accusation contre Marat, parce qu'il a dénoncé Dumouriez. (Applaudissements sur la Montagne et dans les tribunes; murmures à droite et au centre.)
Il est temps que les conspirateurs soient démasqués et expirent sous le
glaive de la loi. Je renouvelle mes propositions; je demande qu'elles
soient mises aux voix, et
(1). Citoyens, le fait qui vient de vous être dénoncé n'est que trop vrai. C'est à la commune de Sens que nous devons la connaissance de cette adresse que l'on faisait circuler dans cette ville, en même temps qu'elle circule à Paris. Je ne sais pas pourquoi ceux qui sont membres de la commission que vous avez établie pour lire vos lettres ne vous en ont pas donné connaissance. Eh bien, puisque vous avez décrété la peine de mort indistinctement contre tous ceux qui provoqueraient la dissolution de la Convention, et viseraient le rétablissement de la royauté ou la chute dé la République, qu'attendriez-vous maintenant que vous voilà avertis et que vous connaissez le coupable, pour prendre une mesure sévère? Il est temps enfin qu'on s'explique et qu'on se montre pour de bons républicains. ( Applaudissements.) Il est temps que vous mettiez à exécution le décret qui déclare que personne n'est au-dessus des représentants de la nation; il est temps que s'il est quelqu'un atteint et convaincu, par sa propre bouche, d'avoir voulu provoquer la dissolution de cette Assemblée, le glaive de la loi fraprie le coupable.
Jusqu'ici nous avons cru devoir garder le silence sur ces fréquentes prévarications, qui ont fini par creuser l'abîme où nous sommes prêts d'être engloutis. Je déclare que ma conscience ne peut plus s'accommoder de ce profond silence; et si je meurs, je mourrai moins digne de la confiance de mes commettants...
Plusieurs membres : Oui, oui, et nous aussi !
et s'il me restait un regret, ce serait celui de ne pouvoir me jeter encore entre mes assassins et mes commettants qui viendront venger ma mort.
Oh ! mes collègues ! sauvez la République ; elle est perdue si la Convention est dissoute; frappez, portez le décret d'accusation!
se dirige vers la tribune (Vifs ap-dissements sur la Montagne et dans les tribunes.)
Plusieurs membres (au centre) : La clôture ! la clôture !
Je demande à parler contre la clôture : le règlement m'y autorise. (Murmures à droite et au centre.) Si On peut décréter sans entendre, je laisserai la tribune.
Il n'est pas besoin de discussion quand le délit est connu.
Que l'Assemblée entende tous ceux qui veulent parler en faveur de Marat ; il ne faut pas que l'on dise qu'il n'a pas été défendu.
(La Convention décrète que Danton sera entendu.
(2). Je savais bien que la majorité
Pourquoi ces murmures, vous pouvez être sans crainte. Je ne veux pas faire peur, à moins que le langage de la raison et de la liberté ne vous épouvante. J e vais dire simplement mon opinion, et mon but est qu'elle porte seulement sur les grands intérêts de la patrie. On n'aura pas de peine, je l'espère, à voir bientôt que je joue ici un rôle sensé, bien que l'on me dépeigne un peu partout comme l'agitateur de la République.
Je déclare d'abord, que tout en reconnaissant le civisme de Robespierre, je n'aurais pas fait, moi, la dénonciation qu'il a jeté dans cette Assemblée. (Murmures.)
Oh ! ne me prêtez pas vos idées, laissez-moi les miennes ; la dénonciation de Robespierre n'est fondée que sur des preuves politiques. Quoique j'aie été en quelque sorte mêlé à cette question par la réponse de Guadet, je ne veux pas m'en souvenir, par crainte de soulever la tempête des passions ; je ne veux parler qu'à la raison. Il faut voir si, de part et d'autre, nous ne poursuivons pas vraiment des fantômes, ou bien il faut s'assurer s'il y a des conspirations, et surtout s'il y a une conspiration d'Orléans. Toute la question est là.
J'aborde franchement ce sujet ; je n'ai jamais pris le parti d'aucun des» hommes dont il s'agit. J'étais dans la Belgique, lorsqu'on a discuté dans cette Assemblée s il fallait expulser d'Orléans de cette Assemblée ; j'ai cru longtemps que cette faction n'était que chimère, je commence à croire aujourd'hui' qu'elle peut avoir quelque réalité.
Maintenant je dis que j'ai la plus grande latitude, soit que je veuille parler pour Marat, soit sur l'intérêt général.
et plusieurs autres membres : Non, non ! la question c'est Marat.
Citoyens, voulez-vous m'ôter la parole par un décret? J'aurai rempli mon devoir, et, après un triomphe misérable, vous demanderez à revenir sur un décret qu'on ne devrait qu'aux passions.
Eh bien ! moi j'estime qu'en parlant de Marat et du décret d'accusation demandé contre lui, j'ai le devoir d'envelopper dans ma discussion la totalité des conspirations vraies ou imaginaires dont il a été ici question. Vous êtes ses juges, vous êtes les miens ; mais moi je suis son défenseur et vous ne pouvez circonscrire mes idées. Bien au contraire, je garrotte les vôtres et telle est la force du principe qui rallie toujours les plus opposés, que quand bien même, comme je vous le disais tout à l'heure, vous porteriez un décret, cette misérable victoire vous forcerait vous-mêmes de le rapporter avant peu.
D'ailleurs, puisqu'on me rappelle que je dois parler de Marat, Marat n'est-il pas représentant du peuple, et ne vous souvenez-vous plus de ce grand principe, que vous ne devez entamer la Convention qu'autant qu'une foule de preuves irréfragables en démontrerait la nécessité? Comment se fait-il, si ces principes sont vrais, comment se fait-il qu'au milieu des passions qui agitaient les deux partis, dans une discussion où on s'attaquait
respectivement, où on se traitait de conspirateurs, comment se fait-il, dis-je, que vous consultiez assez peu la voix de la raison, pour ne pas sentir que ce serait commettre une grande injustice que de prononcer sans avoir articulé la série des griefs.
Si je demande quel est le coupable dans cette affaire, vous me diriez : c'est Marat. Il répondra : ce sont les hommes d'Etat. Notre juge ne peut donc être que l'évidence bien acquise ; eh bien, cherchons l'évidence et cher-chons-là contre tous ceux qui peuvent être coupables ; efforçons-nous de ne pas être en quelque sorte juge et partie; surtout ne nous hâtons pas trop de prononcer sur un mot lâché dans une discussion trop véhémente.
Le vrai coupable, à mon avis, c'est d'Orléans. L'intérêt politique, la justice, tout ce qui a été dit par plusieurs membres des deux côtés de cette Assemblée, tout tend à l'accuser : pourquoi n'est-il pas déjà traduit au tribunal révolutionnaire, au lieu d'être confondu avec les membres de sa famille ? (Applaudissements.)
Plusieurs membres : Ce n'est pas encore le moment.
Comment, ce n'est pas le moment?
Et qu'attend-on, puisque l'accusation paraît venir des deux côtés de cette Assemblée 1 Quoi ! plusieurs d'entre-nous sont soupçonnés d'avoir travaillé de concert avec lui, et on dit que ce n'est pas le moment d'éclairer cette raison ! Pourquoi donc ces ménagements ? Pourquoi cette mesure incomplète par laquelle vous avez envoyé quatre commissaires dans les départements où cet individu a pu se transporter ? Ce n'est pas par cette instruction immédiate que l'on connaîtra et la faction et ses complices; il faut que ce grand procès soit instruit à la face de toute la nation. (Applaudissements.)
Je demande donc qu'avant tout d'Orléans soit traduit devant le tribunal révolutionnaire... (Murmures sur certains bancs.)
Plusieurs membres : Pas à Paris, à Marseille; le conduire à Paris, c'est l'acquitter.
Il n'y a qu'un moment, il semblait que la portion de l'Assemblée> qui siège à la Montagne, défendait d'Orléans, et quand je demande, moi, qu'il soit traduit devant le tribunal révolutionnaire, j'entends le côté droit dire tout à coup « pas à Paris » Pourquoi pas à Paris? (Nouveaux murmures.) Eh bien, moi aussi, je veux qu'il soit traduit à Marseille, car cette ville a montré qu'elle voulait la liberté et l'indivisibilité de la République française ; elle a montré qu'elle n'épargnait aucun coupable. Soyons d'accord sur le local. (Applaudissements.) Yous voyez que je suis accommodant.
Les mêmes membres : Oh ! accommodant !
Je veux dire accommodant avec la raison.
Je demande donc, car cette mesure doit précéder la décision à prendre sur Marat, qu'avant tout, il soit statué sur cette proposition : Que d'Orléans sera traduit devant le tribunal révolutionnaire. Je demande aussi que ce tribunal soit tenu d'envoyer à la Convention copie exacte de la procédure qui sera
faite dans l'affaire d'Orléans, afin que la Convention puisse connaître ceux de ses membres qui ont pu y tremper ; et comme j'aime à lier deux grands objets, je demande aussi que la tête des Capets émigrés soit mise à prix, comme l'a été celle du général.
Plusieurs membres : Et nos commissaires.
Nos commissaires sont dignes de la nation et de la Convention nationale ; ils ne doivent pas craindre le tonneau de Régu-lus. (Applaudissements.)
J'ai dit tout ce que me dictait mon amour pour la patrie sur cette question, revenons à Marat.
Si Marat peut être dénoncé, ce n'est pas pour un fait, ce n'est pas après une lecture. (Interruptions au centre.) Ce n'est pas avec la rapidité, avec la véhémence, avec les passions que vous avez montrées, que vous pouvez prononcer présentement sur son cas. U est impossible que vous vous écartiez assez des principes de justice pour le décréter d'accusation ; je ne dis pas sur son écrit, mais sur tous les faits dont on l'accuse, sans avoir rènvoyé à un comité ; et pour qu'il y ait réciprocité, je demande le renvoi au même comité, des accusations faites par Marat contre ses accusateurs.
Examinez d'ailleurs quel moment vous choisissez pour traiter cette question. Plusieurs membres sont absents. Youlez-vous saisir cet à-propos pour entamer une partie de l'Assemblée, tandis que cette même partie a eu le courage de vous quitter pour aller échauffer l'esprit public dans les départements et diriger de nouvelles forces sur les ennemis. Prenez garde ; que vous le vouliez on non, ce grand complot se complique ; il est pendant à l'opinion publique plus que jamais ; Marat a le droit de n'être jugé que par la totalité de ses pairs ; si vous mettez de la partialité jusqu'à envoyer ce dernier devant les tribunaux ce ne sera évidemment que par le résultat des passions.
Soyez rassurés, si Marat est coupable, Marat n'a pas l'intention de vous échapper.
Non.
Guadet a été aussi accusateur, et si l'on retranchait tous les membres que les passions ont entraîné, l'Assemblée serait bientôt déserte ; je regarderais un tel décret, dans le moment où la plupart des membres de cette Montagne sont absents, comme un déchirement, à vous, qui paraissez n'en pas vouloir.
Moi on m'assure qu'un décret existe, portant qu'aucun membre ne pourra être accusé sans un rapport préalable...
U n membre : Produisez ce décret.
S'il n'existe pas, il faudra le créer; maintenant surtout que j'ai fait voir que l'on est exaspéré contre les sociétés popu-lairesj contre le peuple... (Vif mouvement d'indignation à droite et au centre. Longs applaudissements des tribunes. )
Un grand nombre de membres : Yous calomniez, nous révérons le peuple, c'est vous qui appelez les poignards du vôtre.
Jamais Danton ne monta à la tribune sans évoquer les citoyens et sans invoquer tout ce qui peut lui donner des applau-} dissements.
Est-ce moi qui, dans cette discussions, ai parlé le premier du peuple ou d'une portion du peuple ? J'ai dû et j'ai eu le droit de répondre à ce que Guadet a ait... (Nouveaux murmures au centre)... Or, Guadet a parlé des sociétés populaires.
Je rappelle, en terminant, que tous les griefs qu'on a reprochés à Marat ne seront point affaiblis par le renvoi au comité. Je demande que mes propositions soient mises aux voix.
(1). C'est aussi la voix du peuple que j'invoque, non pour faire de cette voix redoutable un moyen de terreur, et pour vous arracher, par l'épouvante, à laquelle je sais que vos âmes sont inaccessibles, un décret favorable à mes vœux ; c'est aussi la voix du peuple que j'invoque, non pas seulement celle de ce petit nombre d'hommes qui m'entourent, mais celle de tous les citoyens français ; et sans doute vous croyez que nos ifèrcs des départements sont aussi le peuple ; si ma voix pouvait, de cette tribune, se faire Mrs à tous, ils s'écrieraient d'une voix unanime que je ne trahis ni leurs vœux, ni leurs espérances, lorsque je viens appeler sur v->tre justice et votre sévérité.
C'est à la bonne foi, à la confiance de chacun de vous... (Quelques murmures.) c'est surtout à la conscience de celui qui vient de m'inter-rompre, que je m'adresse. Cet homme est-il en vénération ou en horreur dans les départements ? Son nom est-il béni ou exécré par vos commettants? Ses écrits sont-ils voués à l'impression ou aux flammes? Est-il un d'entre nous auquel l'existence de cet homme, dans la Convention, n'ait été reprochée? Yos concitoyens ne vous ont-ils pas cent fois conjuré de bannir du Sénat ce génie malfaisant, cet artisan de crimes, de calomnies, de troubles, de discordes et de haines ?
Un grand nombre cle membres (en se levant) : Oui, c'est Vrai 1
C'est donc la voix dm peuple qui réprouve Marat, qui s'indigne de le voir au nombre de ses représentants. Interrogez vos commissaires dans les départements; ceux-là ne sont pas des modérés ; quel est celui d'entre eux qui s'est osé vanter de ses liaisons avec cet homme? Quel est celui qui n'a pas désavoué sa doctrine de sang? Comment se fait-il donc que cet homme que toute la France accuse, que personne n'avoue et dont tout le monde rougit, trouve même ici des défenseurs? Il n'en trouve pas dans nos départements ; et peut-être serez-vous surpris, lorsque vous saurez que quelques-uns de vos commissaires, auxquels le préopinant fait l'injure de croire qu'ils défendraient Marat, pressés par l'opinion publique, ont pris dans des sociétés républicaines l'engagement de demander, à leur retour, le décret d'accusation auquel vous vous opposez aujourd'hui.
J'atteste que Gleizal l'a promis dans le département de l'Ardèche, qui a demandé le décret d'accusation contre Marat à la suite de son opinion sur le jugement de Louis XVI.
Je m'en fais honneur et gloire.
Après avoir posé en fait cette vérité, que la voix du peuple français proscrit Marat, je vais suivre Danton dans quelques-uns de ses raisonnements ; et d'abord pourquoi donc a-t-il détourné votre attention sur d'Orléans? Est-ce parce qu'il faut bien parler de tous les complices à la fois? Est-ce parce que les deux mortels les plus vils doivent être accusés ensemble ? Le premier est parti, mais il n'a pas emporté tous les poisons et tous les poignards. Et lorsque nous proposâmes de l'arrêter, on n'observa point que cent membres étaient en commission ; d'Orléans était pourtant assis du même côté, sur le même banc que Marat ; mais Sci complicité avec les rebelles nous parut évidente et nous le bannîmes à l'unanimité ; citoyens, nous ne demandâmes plus un rapport !
Danton demande un rapport ; mais un rapport est inutile là où l'évidence est acquise. Ah ! renoncez à faire des lois si vous tolérez vous-mêmes leur inexécution. N'avez-vous pas porté des lois contre les provocateurs au pillage? Eh bien! Marat l'a provoqué. N'avez-vous pas porté des lois contre les provocateurs au meurtre ? Eh bien ! Marat les provoque sans cesse.
Oui, contre les royalistes.
N'avez-vous pas porté la peine de mort contre quiconque demanderait le rétablissement du pouvoir arbitraire? Eh bien ! Marat a formellement demandé la dictature. N'avez-vous pas porté la peine de mort contre quiconque demanderait la dissolution de la Convention ? Eh bien ! Marat la demande chaque jour. Nous sommes ainsi juges et parties, nous dit Danton ; et n'est-ce pas à nous à conserver le dépôt précieux de la représentation nationale? C'est la France entière qui accuse Marat, nous ne sommes que ses juges. (Applaudissements. )
C'est vous qui m'interrompez ; vous qui chaque jour, en tous lieux, applaudissez avec fureur ces adresses insolentes où des hommes égarés et payés demandent l'expulsion de trois cents membres de cette Assemblée. Ah ! si vous en aviez le pouvoir, vous n'objecteriez pas que vous êtes juges et parties, vous les banniriez ; et c'est lorsque la République en péril vous conjure de bannir vos divisions avec cet homme qui désigne ici même les victimes de sa rage, cet homme qui attise sans cesse au milieu de vous les flambeaux de la discorde ; c'est alors, c'est pour lui seul que vous vous prétendez inhabiles à prononcer. (Vifs applaudissements dans un grand nombre de bancs.)
Citoyens, j'ai rempli mon devoir ; je n'ai pas eu la lâcheté de trahir le vœu de mes commettants ; je veux retourner paisible au milieu d'eux ; je veux n'avoir point à rougir du compte que j'aurai à leur rendre ; je veux conserver ma propriété la plus chère, l'estime de moi-même. J e demande donc le décret d'accusation contre Marat.
Un grand nombre de membres : Appuyé ! appuyé ! et qu'on prononce de suite la clôture !
(La Convention ferme la discussion.)
Plusieurs membres demandent la parole
pour des questions de priorité entre les différentes propositions faites.
(1). Nous ne pouvons nous dissimuler que dans ce moment-ci tous les ennemis de la République s'agitent pour la perdre. U faut éviter de seconder leurs desseins, et oublier plutôt les haines personnelles.
Un membre : Marat vous a dénoncé...
Je le sais, mais je me croirais coupable d'entretenir la Convention de ce qui m'est personnel, au moment où il faut s'occuper du salut public. Je suis loin d'approuver les erreurs de Marat ; j'aurais désiré de toute mon âme qu'il ne fût pas membre de cette Convention, non plus que ceux qu'il a dénoncés. J'aurais désiré que ce matin, comme mesure de salut public, votre comité vous eût présenté un tableau de tout ce qui, depuis un an, combattent pour des haines personnelles. ..
Plusieurs membres : Ce n'est point là parler sur la priorité.
Je ne prétends pas m'ériger en juge entre les deux partis (Murmures), mais je dis que les hommes qui sont venus ici pour faire le bien, et qui sont étrangers à cette querelle doivent être sur leurs gardes. U faut faire attention que les deux extrêmes sont bien près de se toucher. (Nouveaux murmures.)
Gardez-vous de vous y tromper ; on veut tout employer pour déterminer un mouvement : ce n'est pas l'existence de Marat... (Murmures.)
Thuriot veut lasser l'Assemblée pour écarter la grande mesure de salut public qui a été proposée ; mais nous resterons ici sans craindre que les habitants de cette vaste cité se portent sur les représentants du peuple ; et si ce malheur arrivait, nous ferions notre devoir, en mourant à notre poste.
Je prie le président d'interpeller les membres de la Convention pour déclarer si on est libre de prononcer son opinion, oui ou non ; parce que je ne suis pas libre dans cette tribune. (Murmures prolongés à droite et au centre.)
Un membre: Qu'il explique sa priorité en deux mots. (Murmures sur la Montagne )
Je ne suis point ici dans une tragédie commandée ; je n'ai point étudié mon rôle ; j'arrive au moment du dénouement ; mais j'arrive à propos pour t'â'cher d'arrêter le mal qu'on prépare contre la chose publique. Citoyens, faites bien attention à la position dans laquelle vous vous trouvez ; ce n'est pas Marat que je considère. (Murmures.)
Président, Thuriot sort de la question. La question est de savoir si le décret d'accusation aura la priorité, et je demande qu'il s'y renferme.
Citoyens, comment pouvez-vous concevoir que je me détermine pour le
renvoi, si je n'entreprends pas de vous démontrer quels sont les
inconvénients qui peuvent résulter de l'autre opinion. (Murmures.) U me
serait facile sans doute de dire à Grangeneuve
U est bien étonnant que lorsqu'il s'agit d'un décret d'accusation contre un de vos membres, vous n'écoutiez pas ceux qui parlent en faveur de l'accusé.
Ce que je vois dans le combat qui s'engage est une preuve de ce que je dis. D'un côté Marat et Robespierre accusent; de l'autre Brissot, Vergniaud, Guadet et Gensonné s'élèvent contre la dénonciation et dénoncent à leur tour leurs dénonciateurs. (Murmures prolongés. )
Je conclus, attendu que la précipitation ne peut convenir à une grande Assemblée, attendu qu'il n'y a pas d'inconvénient à saisir un comité qui fasse un rapport réfléchi, à ce que vous chargiez le comité de législation de vous faire ce rapport demain matin.
(1). L'écrit qui vous a été dénoncé est signé de moi : j'ai été pendant 7 à 8 minutes président de la société des Jacobins. On m'a présenté un écrit que je n'ai point lu, portant la signature des secrétaires, et sans savoir ce qu'il contenait... (Rires ironiques à droite et au centre.) Cet écrit n'est point mon fait. C'est un délibéré de la société, auquel, suivant l'usage, je n'ai mis ma signature que pour attester qu'il était émané de la société. Quant aux principes qu'il contient, si ce sont ceux que j'ai entendu énoncer par Guadet, lorsque j'ai dit c'est vrai, ce sont mes opinions, je les avoue.
De quoi s'agit-il maintenant? Je suis accusé par des hommes dont je me suis porté l'accusateur. Us demandent un décret d'accusation contre moi, par la même raison j'en demande un contre eux. Fort de mon inno-cenoe, de la pureté de mon civisme, je ne récuse pas même ceux qui sont mes ennemis connus. Articulez les griefs que vous avez contre moi; ceux que j'articule contre vous sont contenus dans mes écrits; le public jugera, si vous n'êtes pas déjà jugés.
Quant à mes actions, je défie mon plus mortel ennemi de dire que mon nom
ait été jamais compromis avec ceux des ennemis de la patrie, que je me
sois jamais trouvé avec les conspirateurs et dans leur conciliabule
nocturne. Ma correspondance a été entre les mains de mes ennemis, jamais
ils n'y ont trouvé un mot qui pût me compromettre. J'ai reçu des lettres
anonymes; c'était des pièges que l'on me tendait. J'ai eu la prudence,
la sagesse et le civisme de les porter au comité de sûreté générale;
j'en atteste les membres; s'il est un seul homme qui puisse alléguer
contre moi un seul fait incivique, je dédaigne de me justifier; j'ai
l'œil ouvert sur les manœuvres de mes ennemis et ma prudence et mon
courage sauront déjouer leurs complots.
Tous prétendez que j'ai vbulu dissoudre là Convention nationale} j'ai au contraire tout fait pour l'empêcher j mais vous né prétendez pas sous le vain prétexte de sa conservation" assurer un brevët d'impunité âtix conspirateurs; càr s'il y en à dans là Côilvèntip^, il faut qu'ils soient coiihtis, jU^ës àuthénti^uë-ment et quë iëur têtë • tombe. • ^A^ftdUaûêé-fnents sur là Montagne.)
Personne û'a plus gémi qtië mdi Sur les scènes scandaleuses qui ont agité cette Assemblée; perfeotitie plus que moi n'a voulu ramener les membres àu sentiment de leur devoir.
Je déclare, au reste, que si j'étaié dans l'Assemblée une pierre d'àchtijipëment, et que je fusse ^ërsUadé qtie lè sâlut public ne pût s'opérer que par ma retraite, et que je ne compromisse pas ma réputation soutenue par la cotifiancë que j'inspire àti peuplé, à cet instant mêmë je donnerais ma démission, ëâf ie suis un ami de la paix; et si je savais être l'occasion d'un .mouvement*, je .m'enterrerais aujourd'hui; mais je ne crois pas que, quelque passion qui nous agite* vous manquiez assez à la justice pour manquer à votre réputation; quant à la faction que j'ai dénoncée et dont je reconnais ia main au coup qu'elle essaie de me porter, je déclare que je la dénoncerai sahs cesse; Dumouriez lui-même d'ailleurs leur a délivré un certificat d'opprobre* en les avouant pour ses complices contre les pa^ trioies de la Montagne. (Applaudissements sur la Montagne et dans les tribunes.)
rftppellë les tfibuneâ à l'ordre !
tlri membre (à droite) : Laissez-leur gagner leur argent.
El }ë déclaré qtié je fie régardé point ëèmïne tels lcâ hommes qui sofit menés et avetiglés par Ms chefs d'une faction qui a été dénommée la faction des hommes d'Etat; je sais qu'ils Sont purs, quoique égarés. Si Vous ne voulez pas étonner à la nation entière, devant laquellë lës scefiés scandaleuses qui ont ëit lieU hier' ëi aujourd'hui seront présentées, lâ certitude qtië le complot a pour btit de soustraire dës coupables àu glaive de la loi, je demande qtie vous ne Votis opposiez pas aux propositions qtie j'ai faites de livrer au tribunal révolutionnaire Philippe Egalité, que la tête des Oàpets émigrés éoit mise à f)rix; ne profitez pas du ifioitiëfit où les patriotes sont absents pour attaquer la Montagne. Je dompté aâ§ez sur votre justice, £ouT votis prendre vous-mêmes pour jtigeg : prononcez.
Plusieurs membres (sur la Montagne) : La priorité pour le renvoi an comité.
(La Convention répousse la priorité pour le renvoi àti comité. )
ÎPoutrés membres (au centre) demandent à aller aux voix sur le décret d'accusation par appel nominal.
Un grand nombre de membres : Otii ! oui I
Ce n'est pltjs pour moi, c'est pour la Convention que je demande à parler.
, Je demande que Marat soit mis sur-le-champ en étàt d'arrestation, et què ee comité soit chargé de faire un Rapport demain sur lè décret d'accusation;
je dois parler potir éviter aë grands mouvements;
Marat, vduà faites injure aux habitants de Paris.
S/il y a du mouvement, c'ëst tinë preuve qtië Màrat èst bien dangereux.
Les mêmes membres (du centre) : Aux voix ! aux voix 1e décret d'accusation 1
Il ést dohc vrai qtië le séhtimënt dë la jtistice ét de lâ ptideur n'a plus d'effet stir l'ânie dë més ëniiemis. Si c'est Un fcarfci pris par ceux qui ont juré ma mort ët qtie j'ai le droit de récuser, il ne me reste pltis que lè sentiment qui porte Un homme de bien à braver leur fureur; mais pour éviter dës in&l-i heurs, je demande à être conduit aux Jacobins, sous la garde de deux gendarmes, pour y prêcher la paix. (Murmures 'prolongés sur un grand nombre de bancs.)
Marat, je vdu^ rëtiète fc][iiè vous faites injure aux habitants dë Paris dé croire qti'ils né respecteront ftàS lâ loi.
(Les rhêniés membres du centre réclament dë nouveau à grands ciris lè décret d!Accusation. — Ceux de la Montagne se lèvent alors et proposent de procéder par appel nominal. Uné cinquantaine d'entre eïtûs viennent ail bureau s'inscrire et dresser, lès listés, aux vifs applaudissements des tribunes.)
(Là Convention décrété qU il y à lieu aë procédé^ à Un appel nominal sur la qtiestion dé savôir S'il y a lieu, oui ou non, dë prononcer lè décret d'accusation cohtre Marat.)
Les tiiémès mënWrës . ( dè là Montagne), àphès îtie retournés à leur place : Nous demandons qtie l'appel nominal qui va être fait Soit imprimé ét envoyé aux départements ët aux armées.
(La Convëntion décrète ces deux nouvelles propositions.)
donne l'ordre de procéder à l'appel nominal.
(Plusieurs membres s'élèvent tontre cet ordre et déclarent leur impossibilité de voter sans que la question sur laquelle l'Assemblée va délibérer soit\ nettemment pàêée; ils demandent â 'présenter de nouvelles observations à cet égard. —TJn membre de la Montagne, Levasseur, s'avance vers le centre et déclaré que lui dùêsi à un décret d'île cuiâtidri à formuler. — Il eëi rëfi'ôuSèë par deiix Ou trois membres. — Le tumulte augmente; le Président est obligé de se couvrir. — Le calme renaît peu à peu.)
(1>. Je déclaré à là ïlépublique que je résisterai à l'oppression et que
je repousserai, moi, la force par la forcé. Je dé-
Quelle est l'intention de la Convention dans çé montent 1 C'ëst dë s'àssttrer d'un prévenu pour le livrer au glaive de la loi. Il faut mettre dans cette circonstance toute la maturité qu'elle èxige. Déjà la Confettiort nationale a rendu plusieurs décrets d'accùsation qu'elle a été obligée de rapporter, par l'impossibilité où l'un de ses Comités s'est trouvé de rédiger l'acte d'accusation.
Jé ne prétends pas dire qu'il n'y ait pas contre Màrat de 'délit qui nécessite ce décret, mais je crois que la Convention doit donner l'exemple de l'exécution des lois, en exécutant celle qui porté qu'il në sera plus rëndu dè décret d'accusation, sans uh rapport préalable d'Un de vos comités. C'est ici le moment de réclamer l'exécution de là loi. (Applaudissements sur la Montagne. ) Je demandé donc, non le décret d'accusation, mais je renvoi au comité de législation. _ (Murmures prolongés à droite et au centre.)
Je déclare à la République entière qu'il n'est plus possible de délibérer ici.
TJn grand nombre de membres : Si, si, parlez et continuez à motiver votre opinion !
(La Convention décrète qu'elle maintient là parole à Delacroix pour motiver son opinion.)
refuse dé remonter à lé, tribune.
Eh bien, puisqu'il en est ainsi, jë déclare que je ne voterai ni potir ni contre.
(La Convention ferme la diécuésioii et adopte la proposition formulée par Delacroix.)
(Meurthe). N'ayez pas deuk tabids et déux méStiïes : je dëihandè à mbtivër a, hioii tBhr un débrét d'afrestation contre Salle, qui hous a càlbmhiés par sès Correspondances dans le département de la Meurthe, qui a provoqué l'arrestation des commissaires envoyés pour le recrutement. (Applaudissements sur là Montagne.)
J'appuie la demande de Lëva-§bur; Sàllil feonèçillàiit aux administrateurs de éon département cé qtië Dumoûriéz a exécuté.
, secrétaire, donné lëcture de la rédaction du décret contre Marat; elle est ainsi cohçue :
La Cohvëntion nationale décrète Marat, l'un de ses membres, sera mis dès à présënt en état d'arrestation, et ique demain à midi, saris autre délai, son comité dé législation lui fera son rapport sur tous les délits imputés à Marat. »
,XJn membre proposé, par amendement, que Mârat soit mis en état d'arréstation chez lui.
D'autres membres : Non ! non ! à l'Abbaye ! (Murmures sur la Montagne.)
Jè déclaré qùè nlôn intention à
été que Marat fût mis en état d'arrestation à l'Abbaye;
(La Convention, après deux, épreuves, décrète que Marat sera mis en état d'arrestation à l'Abbaye.)
(Huées et tunvulte prolongé sur la Montagne.)
Il n'y a pas de doute; la volonté dé la Convention est bien nette : Marat Sera mis en état d'arrestation à l'Abbaye.
A l'Abbaye Sont les conspirateurs, vous n'avez point de justice. (Applaudissements sur la Montagne.)
Un grand nombre de membres (sur la Montagne) : Noûë irons tous, tous, tous ! (Nouveaux applaudissements.)
i Plusieurs membres demandent la suspension dë la séance.
(Meurthe). C'est une injusticé; Salle doit être mis en état d'arrestation. (Oui! oui! oui! s'écrient les tribunes.)
(La Convention, après deux épreuves, décrète que Levasseur sera entendu.)
(Meurthe) (1). Je deinànde à dénoncer Salle d'après dés preuves écrites.
Sans dPUte celui-là est coupable qui cherche à avilir la Convention nationale; mais celui-là ëst bien plus coupable qui dit quë lës maux qui affligent la République, sont l'ouvrage de là section de. d'Orléans, et que cette faction dirigé les délibérations de la Convention; celui-là ëst plûs coiipable qui, lorsque la Convention nationale a décrété des mesures de salut publié, dit que ces mesures ont été prisés pour servir la faction de d'Orléans, et qui, par conséquent, accuse la majorité de la Convention d'être vendue à cët hoirime. (Applaudissements sur la Montagne). Citbyehë, les grands événements qui se sont passés depuis quelque tettips ont nécessité la formation d'un tri-bUilàl extraordinaire. Ce tribunal doit son existence à un décret, ët par conséquent il est l'ouvrage de la majorité de l'Assemblée. Eh bien ! qu,'a dit Salle ? Salle a dit que la faction de d'Orléans avait décrété ce tribunal; Salle a ait que là faction de d'Orléans avait fait créer un comité d'exécution pour représenter la Convention nationale, c'est-à-dire la dissoudre; Salle a dit que la faetion d'Orléans avait envoyé des commissaires dans les départements, afin dë pervertir l'esprit public; Salle a dit que la majorité de la Convention, qui est la faction d'Orléans, avait...
Plusieurs membres : Lisez la lettre et ne la commentez pas.
(Meurth'e). Sâllë a voulu avilir la Convention nationale, en faisant
croire que la majorité était composée d'hommes vendus à d'Orléans. Je
demande qu'il soit envoyé à l'Abbaye, et que, demain, il soit fait un
rap-
Je demande à faire une motion d'ordre.
J'observe qu'il est heureux que les décrets d'accusation doivent être environnés de formules qui suspendent l'activité des passions : car s'il était permis de rendre des décrets d'accusation, sans qu'au préalable un rapport ait été fait, ce qui donne le temps aux passions de se calmer, je ne doute pas que les divers partis de cette Assemblée, en se balançant, ne fissent pleuvoir des décrets d'accusation sur la totalité des membres de la Convention. Je crois qu'il existe une faction coupable de d'Orléans fils, qu'il faut dévoiler; mais pour y parvenir plus sûrement, il faut commencer par rendre à cette Assemblée le calme et la dignité qui lui conviennent. On dit qu'il a été répandu dans cette enceinte une brochure dans laquelle il est dit que ceux qui ont voté pour la mort du tyran sont des conspirateurs. Eh bien ! je déclare, moi, que je n'ai voté la mort du tyran que pour avoir le droit de voter la mort de tous les conspirateurs. (Vifs applaudissements.) Je dois dire que c'est seulement depuis quelques jours que je commence à espérer du salut public, et que si cette Assemblée avait eu plus de calme, vous auriez déjà vu le fantôme de la République se réaliser. Poursuivons les conspirateurs, mais assurons-nous que chaque coup que nous porterons sera mortel à la tyrannie. Je demande que la séance soit suspendue, et que l'accusation faite contre Salle soit renvoyée à demain. Si j'ai voté pour l'arrestation de Marat, c'est pour qu'il soit fait un rapport avant de le décréter d'accusation, afin que si l'Assemblée se détermine à prendre cette mesure, ses motifs en soient connus de toute la France.
l'aîné. Je demande l'ajournement du décret d'arrestation contre Marat, jusqu'après le rapport des commissaires qui sont chargés de faire l'examen de la malle de Dumouriez.
J'observe que le décret a été rendu solennellement, il ne peut être rapporté. J'interpelle Delmas de le déclarer.
On n'a rien entendu, tellement la Convention était troublée.
Il est exact que le décret a été proclamé dans le trouble, mais il n'en est pas moins exact qu'il a été proclamé, et qu'il est à cette heure définitif.
Un membre : Il y a douze heures que nous sommes ici; nos forces sont épuisées; je demande que l'on suspende la séance et que les propositions soient ajournées.
(La Convention adopte ces propositions.)
(La séance est suspendue à neuf heures trente-cinq minutes du soir et renvoyée au lendemain matin dix heures.)
a la séance de la convention nationale du
Principes fondamentaux (1) du régime social comparés avec le plan de Constitution présenté à la Convention nationale par Jean-Baptist-Moïse Jollivet, ex-député à l'Assemblée législative (2).
Avertissement.
Il était peu difficile, sans doute, d'apercevoir que la principale défectuosité du plan de Constitution présenté à la Convention nationale de France, par le comité qu'elle avait chargé de ce travail, c'est de tout promettre et de ne rien garantir; que, par conséquent, l'effet le plus certain de son adoption serait un nouveau bouleversement du régime social; mais j'ai moins cherché à démontrer cette vérité qu'à retracer les principales conditions de l'organisation des sociétés, afin de pouvoir les comparer avec tout autre plan de Cons_ titution, reconnaître plus facilement ses vices ou ses erreurs, et rendre ainsi mon ouvrage d'une utilité indépendante des circonstances et des événements.
Les personnes qui n'ont pu acquérir des idées assez positives de contributions publiques, et qui ne savent pas précisément comment elles agissent sur tout le système social, pourront regretter de ne trouver ici que des aperçus généraux sur l'effet comparatif des deux impôts, l'un simplement proportionnel, l'autre progressif, mais ce que j'en ai dit suffira vraisemblablement pour le moment actuel, et je ne reprendrai cette matière qu'à l'époque où l'opinion publique n'aura plus rien d'équivoque ou de gigantesque.
Au reste, on me saura gré peut-être, d'avoir renfermé dans un aussi petit volume les erreurs qui me seraient échappées, et dont il paraît impossible de se garantir dans la recherche si épineuse des droits et des devoirs de chacun des membres de la société.
CHAPITRE Ier.
De l'origine des sociétés.
1 Dans l'état de non-civilisation ou de non-société, l'individu n'ayant
d'autres armes que sa force pour vaincre les résistances, il doit être
déterminé à l'employer jusqu'à ce qu'elle soit annulée par une force
contraire plus grande que la sienne, mais il ne tarde point à
s'apercevoir que la réunion d'une ou de plusieurs autres forces
individuelles fournit de plus grands résultats, et dès lors il est
conduit, par son intérêt personnel, vers le régime social. Et comme
chaque individu a nécessairement plus de droits qu'un autre à l'habit
qui couvre plus ou moins grossièrement sa nudité, à la cabane qu'il a
édifiée pour se garantir de l'ntempérie des saisons, au champ qu'il a
cultivé de ses mains; en un mot, à toutes
D'où il faut conclure que le droit de propriété a pris naissance avant la société même.
Il est aisé aussi de voir que la réunion des hommes en société a dû s'accélérer encore par le besoin de détruire enfin le droit de rapine si nuisible à tous.
Voilà, je pense, ce qu'on peut dire de moins absurbe sur l'origine des sociétés dont, au reste, je ne m'occuperai pas d'avantage; mon objet étant de parcourir rapidement les principes fondamentaux d'après lesquels elles doivent être organisées, et de les comparer avec le plan de Constitution présenté à la Convention nationale de France, les 15 et 16 février 1793, afin de découvrir, s'il est possible, les erreurs échappées aux auteurs de ce plan.
CHAPITRE IL
Bu principe de désorganisation des sociétés et du droit de propriété.
2. « Le premier, dit J-J. Rousseau, qui ayant enclos un terrain, s'avisa de dire : Ceci est à moi, et trouva des gens assez simples pour le croire, fut le vrai fondateur de la société civile. »
Plus loin, il ajoute, à l'occasion des liaisons sociales primitives : « Chacun commence à regarder les autres et à vouloir être regardé soi-même, et l'estime publique est un prix. Celui qui chantait ou dansait le mieux; le plus beau, le plus fort, le plus adroit, ou le plus éloquent devint le plus considéré et ce fut là le premier pas vers l'inégalité, et... vers le vice en même temps ; de ces premières préférences naquirent, d'un côté, la vanité et le mépris, de l'autre, la honte et l'envie : et la fermentation causée par ces nouveaux levains produisit enfin des composés funestes au bonheur et à l'innocence. »
3. C'est ainsi qu'en peignant avec autant d'éloquence que de chagrin les vices inséparables du régime social, le philosophe de Genève a donné, peut-être contre son intention positive, la preuve que les hommes ayant-reçu de la nature des facultés intellectuelles, une force physique et en général des moyens de conservation inégalement partagés entre eux, il doit en résulter nécessairement des produits inégaux qui ne manquent jamais de croître avec une effrayante rapidité jusqu'à ce que cet état de choses étant devenu intolérable au plus grand nombre, une crise salutaire, mais terrible dans ses effets momentanés, vienne replacer la société à une époque moins reculée de ses institutions primitives.
4. Un examen approfondi de la marche de l'intérêt personnel démontre, en effet que, dans quelque ordre de société où l'homme se trouve placé, auelle que soit la nature du gouvernement établi, des magistratures qui le composent, même dans celui où le régime élec-
f toral appelle aux fonctions publiques, d'une manière plus ou moins temporaire, un plus grand nombre de citoyens, et où l'on pourrait croire avec fondement qu'il existe un plus grand attachement aux lois, l'individu, constamment dirigé, par le sentiment naturel de sa,conservation, vers la jouissance de tous les avantages du régime social, l'est aussi, et par la même clause, vers l'affranchissement des charges du gouvernement, des devoirs qu'il prescrit; et cet effort de l'individu contre tous a lieu avec plus ou moins d'énergie et de succès, sous des modifications plus ou moins fortement prononcées, suivant qu© l'individu y apporte plus ou moins de persistance et qu'il est lui-même, en ce sens, plus ou moins parfaitement organisé; suivant aussi que les lois ne l'ont pas suffisamment garanti contre les efforts semblables des autres individus, qu'elles ne sont pas ou sont trop peu réprimantes, et même suivant qu'elles le sont trop; car l'excès de la répression équivaut à l'absence des lois.
Tel est le principe le plus actif de désorganisation des sociétés, j 5. Si l'on pouvait concevoir un ordre de société dans lequel le droit de propriété serait totalement proscrit, et où par conséquent tous , les biens seraient appelés à une possession i commune; cette société n'en serait pas moins troublée dès l'origine par les manœuvres de l'ambition qui veut commander pour être dispensée d'obéir.
Et comme le Vêtement nécessaire à chaque individu ne pourrait, à raison de sa destina^ tien exclusive, être rangé dans la classe des choses communes que par une fiction plus ou moins absurbe, il s'ensuit que l'abus du pouvoir si voisin de son exercice aurait bientôt effacé une telle fiction: ce premier pas conduirait à la possession, d'abord furtive, puis ouverte, de certaines choses, appliquées à l'usage de certaines personnes, à l'exclusion des autres; et de proche en proche on verrait naître, sans contradiction formellement prononcée, le droit de propriété tel qu'il existe présentement dans tous les gouvernements connus; alors la société se retrouverait au même état qu'avant cet étrange pacte social.
Ainsi donc, d'une part, l'existence du droit de propriété a moins de part à la désorganisation des sociétés que l'inégalité de distribution des taléntis; maJis c'est à l'instruction seule qu'il appartient, comme on le verra plus bas, d'affaiblir l'intensité de ce danger; d'une autre part, il est clair qu'aucune société ne peut exister ni s'organiser convenablement sans la condition préalable du droit de propriété.
6. Mais l'exercice de ce droit, considéré dans ses effets, renferme des dangers plus ou moins graves, lorsque l'intérêt personnel ne trouve plus, dans les lois sociales, aucun obstacle à son développement. Alors tout étant vénal, par une suite naturelle et indispensable de ce droit, la classe laborieuse, toujours plus nombreuse, mais moins fortunée que l'autre portion de la société, n'est plus seulement envers celle-ci dans une dépendance simplement relative, mais complète et absolue.
Ainsi, par exemple, les denrées cle première nécessité viennent-elles à prendre un accroissement de valeur qui ne permette plus à l'indigent d'y atteindre que par un excès de tra-
vail au-dessus de la mesure de ses forces? Il s'ëc'oulë un ténias considérable avant qué le prixdes salaires ait 'acquis là juste proportion qui" lëuf côpvient.
"0e la, ce 'çombaj; perpétuel eptre }a richesse d'un côté et ^indigence de ïautré. de celle-ci ain^i Ôét'rïe et' àbaridonnéë naïf;5 bientôt 1^.'paresse, "puis ce $êau |ë nés gouyememen^S ifoo^ cjternes', jçoniiju sotis le nonî ae méndiqite.'
' Bans un'ordre ae choses àu§si peryèr^', il est olàîr' que lë" riche' étant" aëvenu tyran, Hë pauvre se trouve constitué dans la fiëcêskitp de'devenir lin conspirateur.
7. Qr, jl n'est pas possible que lp contrat spcial reufprjpé en }ui gprine de sa propjrç destruction ; i]i f^ut $pup pu pjrpspriré le drpit dë'; propriété, ce qui u.e pourrait avoir lien sans y suftsistner plHS fàrrfjîlè de rapine pt fié yjqjpncp. oti qui} §xi$j;p & cpt^ du droit de pfopriété 4rpit sacré qiij en preyiei^^e }'jnfiuè|içe flp^trpufip.
£g drqij; dpnt jp ypU£ pa-rfpr». ïue je développerai dans un moment, p?jspe pu puet> et c'est parpe que Rousseau l'avait mal saisi et plus mal appliqué qu'il a cru un moment que ^ui'de prôfjrîété n'étâi^ que le fruit dé l'ini-bécifité, forè^ù'au contraire'la société n'existe qÏÏè'pàr Mi, pt"ne pourrait jamais exister sans lùî.' "'*
CHAPITRE III.
Des çon^,itions fondamentales du pacte social..
8. 1°. Se prêter mutuellement assistance et protection poiir la conservation de la vie dè chacun des associés. S'insfruirë. 8? Se défendre contre les attaques extérieures. 4°, contribuer aux charges communes : voilà les points capitaux: du régime social; et je vais les pàrcoùrir dans le mêihe ordre.'
§ I. — Vivre.
9. Cette proposition est évidente; car i;ab-senoe ou la*négàtion d^unë telle condition fait rentrer les individus dans l'état de pure hâttire oftla f auffi W pouVàn"t jî'ajPurUer fié Bailrplus ' distinguer entre lé VÔignaM'ôji' la prière.
'ÏO. Qr, puïsgû|!'telle pst la çondi|îon essen-. tipjïp p acte swialj' là pçffti^n dè la société qn\ | g'rPÔ^ des £v^ntages de pe régime pfrur qtpqnérjE pu conserver ses prcrorTéres aptueljàï, ^ànauer 'a la prp^ieré 'dp seg obligà-primitives; en refusant on, cg qui produit Jp juçuiç effet, en négligeant de pourYoir à Iq, sups}sj;ajice de l'autre portion beaucoup plus nombreuse qui n'a rien, sans mettre pelle-ci en danger de périr, et sans porter l'atteinte la plus funeste aù contrat social.
11. Mais il est pareillpmëçit de sou essence que^nTjr individu ne puisse ^èxpmptpr "dpîi chargés de ^'Association" et jouir pn mêfné temps" tous ses avantagé: ôd' nliitot cette donditiqn est impliçitemëjît repfern^'ée (fansïp droit* d'gssistaïïce efc prôlièc'tipn. E£ comnie lé travail gs£ le Ken cohservàtëUr dë'lâ^scj^étéj logent par Teqiiël ëlle èxj^te, il suif évidemment "que le" pauvre në~ peut' s'affranchir du travail et prétendre cpp'èhaànt à" la ' subsis-tanfee." Autrement' la parééSë" ët l'indigence qui" eh ësf lëiriiit deviendraient un tîtfe effroyable p'Opp ressiOn "contre'lés autres 'associés. ~ ■ ' * """ "
12. D'après ces notions du caractère principal qui constitue jfe pacte social, il'est évident que lé droit de propriété nè peut être protégé de toutè 'là forfce publique que sous la cOndifipn dé fpurhir du travail aUx pauvres valides et des secbUrs efficaces à ceux à qiii là faiblesse ou là Caduçîté^de l'âge, les infirmités", ou l'inertie plus'du moins grande des facultés physiques onp refusé ce moyen de subsîspanpë.
13. De ce que? dans l'ordre de la nature, Ip§ père et mère sont tenus d3 pourvoir à la subsistance de leurs enfants, on ppurrait conclurp que, s'ils' spnt dans l'indigence, cette pbnga-tion passe à leurs parents les plus proches?, puis aux parents du degré suivait si les premier^ se trouvaient eux-mêmes dans l'indigence, et ainsi 4e suite jusqu-à: ce que la fa-mille soit épuisée.
Qn peurrait être, avec aussi peu de f°$4f?" ment, conduit aù même résultat par la considération que les parents jouissant de la faculté de recueillir leur succession, il pa?#$t juste, que ce droit, quoique purement éventuel, ne puisse être affranchi de toutes 1er, charges antérieurés à son ouverture.
Mais : l6 la société ne s'enrichit de nouveaux membres que par l'extrême fécondité de ces hommes laborieux que n'a point encore corrompus la ppsspsgio^ d'uft riche patrimoine; et il arriverait que les familles pauvres, toujours plus nombreuses, se trouveraient épuisées ayant d'avoir pu recueillir des divers membres dont p]les sont pp^ppséçs quelque léger ac|pucissement à ]a ppsition malheureuse des plus indigents de leurs parents; et que, dans ce cas, il fautjrait encore recourir à ïa graude laïnille, ç'est-à-4ire ât la société tout entière.
2° La dispersion des membres d'une mêine famille gUr un grand territoire rendrait ce mode de secours impraticable en beaucoup de cas; pt toujours injuste pt tardif dans ceux eù il po'urait avoir lieu.
3° Il est facile d'apercevoir que le droit éventupl 'de succession devient d'autant moins lucratif que les présomptifs héritiers se trouvent obligés de pourvoir davantage à la subsistance de leurs auteurs.
Dès lors, Un traité de cette nature serait évidemment une nouvelle conquête du droit de propriété sur l'indigence, pu du riche sur le pauVre. '
Donc, c'est à la société, et non à chaque famille en "particulier que ce devpir est prescrit.
14. Mais le droit de propriété serait trop illusoire OU au moins "trop précaire, si chaqiïé individu en particulier, àu lieu d'avoir la disposition absolue de'ce'quï lui appartient, était obligé përsohhèllëfnent de fournir du travail à tous ceux qui sè'présëntéraient à lui pour en obtenjr, et de" répdndre à toutes les demande^ dë' sëéoUra qui lui "seraient individuellement adressées; indépendamment de ce qu'iin tel mode de pourvoir aux besoins de l'indigence, appelant le" combat Corps à ' corps ' 'entre le riche et le pauvre finirait, en dernière analyse ,par corrompre la société en provoquant tout à la fois la mendicité et le brigandage.
15. Il y a donc une condition sous-entendue p ar kT p acte " social, "éjest celle d'y "pourvoir en comm'ufiéVêôit sûr le Trésor publie,'soit par des
contributions locales et forcées, en ouvrant pour les pauvres validas, non pas demain, puisque la faim est de tous les instants, mais aujourd'hui, des ateliers de travaux publics de différentes espèces, organisés de manière à ne pas troubler l'ordre et l'harmonie des autres travaux ordinaires : et à l'égard des pauvres constitués dans l'impuissance de travailler, en établissant pour eux ou des moyens de guérison, ou des lieux de retraite, ou enfin en préparant à l'avance les fonds qui puissent être versés dans le sein de l'indigence aussitôt qu'ils lui deviennent indispensables.
16. Ces divers moyens n'atteindraient pas encore coippletement le but que le pacte social s'est proposé; car, comme je l'ai déjà dit, il est dans la nature de l'intérêt personnel e rejeter sur la classe laborieuse tout le poids de la cherté des denrées de première nécessité en refusant d'élever proportionnellement le prix des salaires; et comme, d'une autre part, lë droit de protection envers tous commande impérieusement la libre circulation 4e toutes les productions soit naturelles soit industrielles, circulation qui manque rarement d'être soumise à tous les événements de la peur et de la faim qui ne connaissent pas c(e loi; il faut encore sous-entendue une autre condition du pacte social destinée à concilier ces deux intérêts, c'est qu'une contribution supplémentaire vienne ajouter à l'instant des ressources plus abondantes, aux différents secours génériu^ employés par la soçiété pour corriger l'opiniâtreté dé l'intérêt personnel uni à l'ascendant de la propriété.
Alors, l'avance craignant la désertion de ses ateliers, la suspension de ses travaux, le déchet de son commerce, au moment où des travaux publics mieux salariés, de phis abondantes ressources sopt offertes à l'indigence, est forcée de céder et de prendre sa part du malheur général.
Alors encore, la classe aisée de la société plus intéressée à la recherché des causes qui l'ont produit et possédant plus de moyens de découverte, prendra la peine de le faire cesser.
Alors enfin, il ne pourra plus exister aucune de ces spéculations hardies et stupides Qui n'ont pour obiet les subsistances qu'à l'époque où les riches comme les pauvres mé-çonnaissnnt à la fois et leurs droits et leurs devoirs, la circulation est arrêtée de toutes parts, et offre à celui oui veut entreprendre de la rétablir un gain d'autant plus considérable que les dangers sont plus graves.
17. Ainsi donc, le maintien du droit de propriété d^ns le régime social est impérieusement subordonné à la condition de pourvoir suffisamment aux divers besoins, et dans les circonstances que je viens d'énoncer.
18. Dès lors, il faut conclure que si une société quelconque, ne voulant plus laisser à l'arbitraire des interprétations mensongères ou intéressés, le pacte social par lequp>1 elle existe avait résolu d'en exoos«?? les ^Otiditio'ns principales dans une déclaration des droits, il serait d'une absurdité révoltante d'v comprendre le droit de propriété revêtu de tous les accessoires qui peuvent le rendre respectable, sans y expliquer de la manière la plus précise et 1" plus positive que ce droit est grevé de l'obligation : 1? de fournir danB tous
les temps de l'année, aux pauvres valides du travail, à tous les pauvres malades infirmes ou privés de la faculté de travailler, des secours gratuits; 2° d'augmenter ces deux moyens de subsistance à l'instant où le prix des denrées de première nécessité étant devenu plus considérable a dérangé l'équilibre.
19. Inutilement, pour se dispenser d'exprimer la condition principale, moyennant laquelle le droit de propriété fait partie intégrante du pacte social, prétendrait-on qu'elle est sous-entendue dans l'obligation générale de pourvoir, par des contributions communes, aux différentes charges du gouvernement ou que lé doute, s'il y en avait encore à cet / rard, ne doit plus subsister après la déclaration expresse que les secours publics sont une dette sacrée de la société.
Mais puisqu'on se trouve obligé de recourir à cette dernière déclaration, il est clair qu'on ne doit pas la sous-entendre d^ns la première uniquement relative aux contributions ordinaires. j£t l'égard de l'insignifiante et vague expression de seçour? publics, tellé qu'elle est employée dans le projet de déclaration des droits, à la place d'Un article très insuffisant, moins coercitif, mais du moins plus étendu, place dans la Constitution de 1791,' au titré des dispositions fondamentales garanties par la Constitution : c'est une véritable et cruelle dérision d'avoir ainsi mutilé le devoir le plus impérieux des 'sociétés'," le dro't le plus" sacé des bommesi celui sans lequel le droit de propriété ne serait qu'une nouvelle calamité ajoutée à celles dont l'espèce humaine est dévorée.
20. Voudrait-on, comme autrefois, laisser à la religion le soin de suppléer à l'insuffisance ou à la corruption des éléments du pacte social 1'
Portez vos regards jusque dans les replis du cœur de ces hommes gagés par la crédulité pour étouffer le cii de la nature, ajouter, s'il était possible, de nouvelles ténèbres aux ténèbres de l'ignorance.
Ecoutez qe que vous dirait le ministre salarié d'un culte religieux, car je n'en distingue ici aucun, et ce langage convient à tous ; écoutez ce qu'il vous dirait si son intérêt personnel ne lui commandait impérieusement de se taire :
« O nations ! s'écrierait-il, je reconnais que le pacte "social Comprend essentiellement l'oblieration du travail, et que le droit de propriété est enchaîné à la nécessité de pourvoir à la subsistance de ceux des associés oui n'ont rien, ou dont la propriété est insuffisante ; mais aussitôt que vous l'aurez reconnu d'une manière solennelle, plaire pt positive, et que ce dogme social, ainsi manifesté, sera consolidé par les étabjisspjnénts qu'il exige, la permanence des moyens destinés à les aliment ter sans interruption ; alors son enseignement ne faisant plus partie intégrante d'aucur culte religieux, je me trouverai réduit à l'enseignement d'une doctrine que je ne comprends pas, sur laquelle les opinions sont si diversement prononcées et dont, au reste, l'existence pourrait bien, comme on l'a prétendu detrois ïpngtpmos. n'être que le triple produit de la peur, de l'orgueil des hommes, et de la corruption de leurs gouvernements, ce que mon intérêt personnel en opposition
avec une telle origine a dû m'empêcher de croire ou d'examiner sincèrement ; alors, je dois vous le dire, ô nations! votre justice, quoique tardive, anéantit sans retour mon existence politique et celle de mes semblables.
« Nous ne pourrons donc plus troubler la société par nos rêveries fanatiques, caresser à la fois et la propriété pour en obtenir des largesses, et le pauvre pour le tromper dans les moyens de rectification du pacte social ; il ne nous sera donc plus permis d'être les instruments secrets et redoutables de ces mouvements populaires qui, en arrêtant tout à coup la circulation des subsistances, n'ont d'autre objet que d'en rendre le peuple même la première et innocente victime, et de le faire périr à côté de l'abondance.
« Mais forcés d'être citoyens, notre intérêt nous prescrit cependant de ne le devenir qu'après que vous nous aurez assuré des moyens de subsistance. "Vous nous les devez, parce que, privés maintenant de la ressource des emplois lucratifs de la société, il ne nous resterait que la misère ajoutée à la dégradation ; n'ayez pas, du moins, la maladresse ou l'imbécile cupidité de refuser ce momentané sacrifice, indispensable à votre tranquillité future ; car le moment n'est pas encore venu de compter pour peu de chose et les ravages du poison qui circule dans nos veines et l'empire de la crédulité qui ne cessera de s'en abreuver qu'à l'époque où l'éducation publique, purgée de tous les accessoires inutiles ou dangereux dont nou3 avions su l'environner, aura dissipé les ténèbres qui dérobent à l'espèce humaine l'usage de sa raison.
21 « Si, au contraire, votre pacte social est imparfait à cet égard, il le sera infailliblement dans ses autres éléments ; car le premier de tous, celui auquel les autres se trouvent subordonnés, c'est la protection due au pauvre, c'est le droit qu'il a, à la fois, et au travail et à la subsistance.
«c Alors, le pauvre n'ayant plus que la prière pour obtenir justice, c'est à nous, ministres du culte, à devenir ses organes auprès de vous ; nous dirons, nous enseignerons à l'univers que la religion commande la charité ; et ne nous croyez pas assez ineptes pour nous charger de propager une vérité encore plus exacte, c'est que le pacte social prescrit beaucoup plus impérieusement ce devoir de toutes les nations, de toutes les sociétés politiques. Mais si la domination universelle est le fruit d'une telle fonction, si les salaires qui y seront attachés absorbent la portion la plus considérable des moyens que vous auriez dû consacrer, non à salarier de ridicules et dangeureux empiriques, mais à payer votre dette la plus sacrée, qu'importe après tout que vous soyez pour toujours les esclaves, non des cultes, mais de leurs ministres, puisque vous les avez forcés de s'emparer du premier élément de votre pacte social, et d'en faire l'instrument principal de leur puissance.
« Vous le dirai-je enfin, ô nations! votre réticence coupable ne sera qu'une erreur de plus ; car la mendicité et la paresse qu'il nous faudra tolérer et peut-être accroître sourdement pour conserver notre domination sacerdotale, ne manqueront pas de dévorer une portion plus considérable de votre propriété que celle qui aurait suffi à l'extinction de ces deux fléaux politiques, indépendamment de la
nécessité de souiller votre code de législation de toutes les petites précautions de l'avarice contre la multiplicité des larcins, et de salarier à plus graids frais les agents de l'administration de la justice.
« Inutilement vous aurez aboli la royauté qui n'était pour nous qu'un levier secondaire : en vain des formes plus raisonnables auront été substituées à l'exercice du pouvoir exécutif, la superstition attachée à l'hérédité des fonctions deviendra une conquête du sacerdoce qui ne meurt jamais tant qu'il existe pour lui un point de ralliement. Gardez-vous donc de croire que tout ce que vous feriez perdre à l'un des principaux régulateurs du régime social, toutes les enveloppes hypocrites dont vous l'auriez si justement dépouillé pour le rappeler à ses véritables fonctions, puissent cependant disparaître sans retour, autrement que par la justice éclatante des nations ; et n'imaginez pas surtout qu'il importe peu à notre existence politique ainsi conservée, de ne pas recueillir, pour en faire un usage plus direct, tous les débris de cet instrument que vous venez d'anéantir dans des mains inexpertes ou maladroites?
« Sans doute, nous nous trouverons encore en concurrence de pouvoir avec quelques-uns de ces hommes qui, comme nous, se gardent bien de stipuler les intérêts du peuple, si ce n|est pour l'immoler plus sûrement à leur ambition forcenée ; mais le temps n'est pas loin où notre puissance reprenant cette vigueur qui sait se jouer impunément de tous les obstacles, n'aura pas même besoin de transiger sur des droits irrévocablement usurpés.
« Si donc, ô nations ! le gouvernement politique du sacerdoce est encore plus hideux que l'instrument de la royauté ; si vous voulez enfin précipiter l'un dans la chute de l'autre, reconnaissez donc formellement le droit du pauvre dans votre pacte social, et garantissez-le par des formes constitutionnelles que l'ascendant de la propriété ne puisse altérer impunément. »
22. Ecoutez maintenant ce qu'auront à répondre les peuples àuxquels, pour les déterminer plus efficacement à briser les liens oppressifs qui les tiennent enchaînés, la nation française présenterait son pacte social ainsi mutilité.
« Vous avez, diraient-ils, arraché des mains du clergé ses richesses corruptives ; c'est un acte de prudence, de sagesse et de courage que nous voudrions pouvoir imiter.
« Toute fonction héréditaire ou simplement viagère vous est odieuse ; vous avez aboli la royauté ; nous ne sommes pas loin de partager la même haine contre ce pouvoir aussi extraordinaire que dangereux, et contre toutes les autres fonctions qui proviendraient de la même source ou pourraient rccéler les mêmes caractères.
« Vous avez affranchi vos propriétés de tout servage féodal. Cette antique oppression qui s'est étendue jusqu'à nous, blesse également nos regards.
« O peuple courageux ! tout nous porte à vous prendre pour modèle.
« Mais ces réformes salutaires dans les points capitaux de votre régime n'ont rien changé à la disposition respective des riches et des pauvres : elles ont dû même accroître la somme des besoins de ceux-ci dont le
nombre se trouve ordinairement cent fois plus considérable que les riches; mais supposez que la proportion soit encore la même qu'auparavant, voilà 99 individus contre 1 dont les droits ne sont qu'ébauchés, loin d'être suffisamment garantis par votre pacte social.
« A la bonne heure que, pour le maintien du régime social, il ne puisse exister entre le pauvre et le riche, pris individuellement, d'autres relations que celles déterminées paile besoin qu'a le premier de travailler pour subsister, et par l'espérance qu'a le second d'accroître sa fortune à la faveur du nombre des bras qu'il peut employer ; et que de cette dépendance réciproque il ne reste jamais que des transactions purement volontaires. Mais l'effet de la cupidité, vous le savez, c'est de détériorer le prix des salaires et de convertir bientôt en dépendance absolue, ce qui, dans le principe, et par la nature même du droit de propriété, ne comporte qu'une dépendance relative; c'est de faire considérer les secours indispensables à l'indigent infirme ou invalide, le travail auquel a droit le pauvre valide, non comme une obligation rigoureuse du pacte social, mais comme un précepte purement religieux, dont il est permis d'étendre ou resserrer la mesure à son gré et qu'on peut, au reste, violer impunément si l'on ne croit point à Dieu ni à l'immortalité de l'âme.
( Qu'avez-vous fait pour prévenir ou arrêter cette pente funeste de la propriété 1 Rien.
« Vous avez, raisonné prudemment, sans doute, en aliénant et remettant dans le commerce les propriétés territoriales de l'Eglise ; car toute dotation en biens-fonds pour subvenir à quelque service que ce soit d'utilité publique, même pour l'entretien des pauvres, est une monstruosité politique inventée par l'ignorance et la paresse qui voudraient pouvoir se débarrasser à perpétuité d'une surveillance qui, de sa nature, ne doit jamais cesser d'être journalière; mais ces biens, quoique leur usage fût restreint à engraisser vos oppresseurs ecclésiastiques, étaient cependant, pour la plus forte partie, considérées comme le patrimoine des pauvres. Y avez-vous du moins suppléé par quelque obligation positive et déterminée imposée à tous les riches en raison de leur fortune, et qui, les garantisant, malgré eux, de toutes les horreurs de la rapine, du brigandage et de la dévastation, appelle enfin l'emploi de tous les bras et de toute l'industrie nationale vers la prospérité publique ?
« Non. Les municipalités des principales villes ont imaginé, pour arrêter la grandeur du mal, de vendre le pain au-dessous du véritable prix de commerce, sans considérer .que cette opération renfermait le double inconvénient et d'entraver de fait la libre circulation des denrées et de provoquer des spéculations désordonnées, toujours destructives de la grande concurrence qui, seule, peut ramener l'abondance.
« Viennent ensuite des contributions local'»*, fruit honteux d'insurrections plus ou moins graves, dont le véritable besoin est le mobile, mais dont la malveillance se sert avec une effrayante perfidie pour calomnier les défenseurs de la souveraineté des peuples.
Puis des distributions générales prises en masse sur le Trésor public ; et enfin des contributions volontaires dont, à la honte des
riches, le pauvre fait lui-même presque tous les frais.
Sans que, de tous ces divers moyens réunis, il soit encore né aucun établissement public et permanent qui présente au pauvre en état de travailler la perspective consolante et d'un afelier public où il puisse gagner son pain, lorsque le riche n'offrira de son travail qu'un salaire insuffisant comparé à la cherté des subsistances, et d'un refuge pour sa vieillesse qui lui offre encore des occupations assorties à la caducité de son âge ou à la déperdition de ses forces.
« Mais puisque telle est l'indécente imperfection des moyens par lesquels vous avez essayé jusques à présent de faire équilibre à l'avidité du riche, vous avez du moins, dans votre pacte social, posé des bases certaines dont il ne soit plus possible de s'écarter à l'avenir, et vous avez, sans doute, environné ces bases de toutes les formes constitutionnelles qui en assurent la garantie ? »
Non encore, notre pacte social ne contient que ce peu de mots : les secours publics sont une dette sacrée de la société ; et c'est à la loi (aux législateurs) à en déterminer l'étendue et l'application.
Nous avons même poussé l'indifférence à cet égard, jusqu'à ne pas prévoir que cette phrase peu réfléchie de notre pacte social : la distribution annuelle et momentanée des secours et travaux publics (qui se rapporte à l'une des fonctions attribuées au corps législatif), deviendrait l'arme la plus redoutable de la cupidité pour prétendre que le droit du pauvre a la subsistance n'est qu'un droit momentané et purement d'exception : en sorte que, suivant que les législatures seront composées de pauvres ou de riches, d'hommes vertueux ou pervers, elles pourront à leur gré étendre ou resserrer la mesure des secours, et même dénaturer complètement cette disposition du pacte social, ce que semble permettre, d'une part, l'insignifiance du mot secours, et de l'autre, la faculté de l'appliquer suivant les lieux et les circonstances.
« Eh quoi ! en proclamant la souveraineté des peuples, vous avez agrandi le domaine de l'espérance et de l'ambition, et vous ne rougissez pas d'avoir rétréci les moyens du pauvre, lui qui ne peut avoir d'autre espérance, d'autre ambition que celle de ne jamais manquer de travail ou de ne pas mourir de faim!
« Une si longue oppression, tant de malheurs accumulés sur les générations passées n'auraient-ils donc servi qu'à vous dissimuler cette vérité éternelle : c'est que le gouvernement ne peut jamais atténuer les efforts terribles de la cupidité qu'en la menaçant, par des ateliers publics toujours ouverts, d'une concurrence toujours prête à déjouer ses manœuvres !
« Vous ne craignez donc pas qu'après avoir ainsi rompu l'équilibre, um de ces hommes nés pour le malheur de l'espèce humaine, profitant habilement de vos fautes, aidé surtout par la cohorte d'ambitieux qu'il aurait à sa solde, et saisissant le moment où des insurrections partielles qu'il n'aurait pas même eu besoin de fomenter, lui permettraient de lier les révoltés à sa destinée, ne consomme enfin ce système absurde des lois agraires où tous les biens sont appelés à une possession commune.
,« Le même instant, sans doute, verrait naître et périr cet ordre de choses qui n'est pas même tolérable dans une société de sauvages ; mais du moins il aurait été le prétexte de l'élévation d'un ambitieux; vbtre pacte social serait anéanti au milieu des cadavres sanglants de vos concitoyens, et vous voijs retrouveriez sous la main d'un tyran.
« Eh bien, ce que vous n'avez pas su prévoir, nous le craignons ; ce que vous n'avez pas fait chez vqus pour le bonheur du plus grand nombre, existe ici, sinon formellement, au moins d'une manière tacite.
« Nos prêtres sont aussi corrompus que ceux que vous avez si justement proscrits.
« Nos magistrats supérieur^, toujours les rivaux d'ambition, et plus souvent encore les esclaves des ministres du culte, recèlent, comme ceux que votre puissance a fait rentrer dans la poussière, tous lès vices attachés à l'usurpation des pouvoirs, à l'hérédité des fonctions.
( Mais dans cette composition hétérogène de notre gouvernement, le pauvre est là qifl en menace tous les agents ; sa position èst améliorée depuis que là Révolution Jes a fait trembler ; le riche est moins avàre à son égard, l'industrie plus active *;*èt si le droit' du pàuvre à la subsistance n'est pàs encore formellement reconnu, c'est une erreur qu'il peut réparer aussitôt que les lumières, dont il est privé maintenant, lui permettront d'apprécier à leur jUstë valeur lés caresses perfides avec lesquelles ils viennent d'enchaîner sa bonté.
nation courageuse, mais imprévoyante ; dites un mot de plus dans votre pacte social, garantissez ce mot contre les atteintes de la richesse, ët les brigandages de la paresse. Alors, ce trait de lumière fait disparaître la crainte des lois agraires que votre pacte social semble provoquer. Alors votre cause sera celle de 99 individus contre un ; nous sommes à vous : paraissez Seulement ; la défection des ennemis du genre humain n'attend pour se réàlisèr que 'cette dernière et décisive détermination d'une justice éclatante ; et la répu-blicanisation de l'Europe en est le fruit.
« Ne tardez donc pas à rendre votre paete social digne de ses regards, ou craignez de lui répondre de vos essais infructueux en faveur dé la liberté et de la souveraineté des peuples. '»
23. Il ne suffit pas comme on a dû le voir par ce qui précède, il ne suffit pas de reconnaître le droit du pauvre, il faut encore déterminer le minimum de la contribution commune qui'doit y être distribuée annuellement, pour lë mettre à l'abri'dés entreprises dès pouvoirs constitués.
A la vérité, cette fixation est un peu arbitraire,' elle exige du moins le concours de plus de lumières que jë n'ai pu en acquérir sur cette importante et solennelle question.
Et comme la plupart des autres dispositions du pacte social y sont subordonnées, il est clair que cette première base devait être discutée par la Convention nationale, avant de se faire présenter par ses comités aucun plan de constitution.
24. Mais puisque cette marche simple et naturelle n'a point été suivie, je serais coupable de taire ici ce que des recherches activés et laborieuses m'ont fait découvrir pendant le cours de mes travaux à la dernière législature.
L'étendue de la France, réduite à ses 83 départements primitifs, en y comprenant les districts de Vaucluse et de Lpuvèze, surpasse, mais de peu, 27,000 lieues carrées de 25 au degré.
La richesse de ce territoire pouvait être représentée en 1791 par un capital de 40 milliards, ou par un produit annuel de 1260 millions dégagés de tous salaires, frais et avances de reproduction ; c'est cè que l'on désigne sous le nom de revenu net ; car le brut est de plus de trois milliards.
L'accroissement successif des valeurs numéraires a dû depuis en apporter une semblable et proportionnelle dans le prjx vénal du territoire et dans ses revenus annuels.
Quoi qu'il en soit de cet accroissement, les revenus seuls de la France suffisaient et suffisent encore à la nourriture de ses nombreux habitants, saps le secours des bénéfices du commerce étranger, et l'on peut même assurer qu'ils sont supérieurs à ses besoins, puisque l'excédent de nos productions territoriales et industrielles nous a permis de couvrir le déficit annuel occasionné par la lésion que nous avions souffert jusqu'à présent de notre traité de commerce avec l'Angleterre.
A l'égard de la population, elle était en 1791. de 28,160,000 individus de tout âge et de tout sexe, et non pas seulement de 25 millions, comme on ne cesse de le répéter à la tribune de l'Assemblée.
On comptait, dans cette population, 4 millions d'individus riches ou pauvres, mais propriétaires de biens fonds d'où résultait la proportion d'un à sept. Vraisemblablement l'aliénation des biens nationaux, une législation sagement combinée, tendront à anp^p^W le nombre des propriétaires et à diminuer cette énorme différence.
La même population de 28 millions, considérée dans son état absolu de richesse ou de pauvreté présentait 1 individu sur 100 qui pût à la rigueur se dispenser d'aucun commerce, art, profession, métier, salaire de fonction publique, ou labeur quelconque, en un mot dont la fortune fût dégagée de toutes charges et sollicitudes personnelles pour être en état de vivre dans un parfait repos, et c'est encore beaucoup trop pour le bonheur de la société.
Considérée ensuite à l'égard des indigents proprement dits, qui consistent dans les enfants ou abandonnés ou appartenant à des parents privés des moyens de pourvoir entièrement à leur subsistance, dans les vieillards, les infirmes, et ceux dont la force et l'intelligence se trouvent insuffisantes pour obtenir, par un travail continu, l'étroit nécessaire, cette classe composait près de trois millions, c'est-à-dire un peu moins que le neuvième de la population totale.
Je sais que le comité des secours de l'Assemblée législative l'avait porté beaucoup plus bas ; mais son évaluation était évidemment fautive : il avait fait trop peu attention à ce nombre d'enfants qUe les pères et mères ne peuvent nourrir dans là plupart des saisons de l'année et que, dans nos campagnes on voit, par troupeaux, se livrer à la mendicité d'un village à l'âutre, dans le voisinage de leur habitation.
Si, de plus, on porte son attention sur ceux que l'absence momentanée d'un travail à leur
disposition, et J'imprévoyance pour la saison la plus rigoureuse, celle de l'hiver qui, dans les campagnes sùrtoùt, ne présente'qùë peu ou point de travaux lucratifs, prive plus ou moins longtemps des moyens de subsistance, on trouvera que leur nombre doit êtrp au moins aussi considérable que celui des indigents absolus : mais à raison de ce que leurs besoins ne sont que momentanés, il y a tout lieu de croire qu'en les assimilant parfaitement à la première classe, la seconde r^e doit être représentée que par le fciej*s> pu un millipn d'individus.
Voilà donc une population de 4 millions qui réclame impérieusement des secours et du travail continus ; c'est le septième de la population.
Quelle que doive être, au surplus, }!in$u(e:pçp de ce calcul sur la solution complète de la 'question du minimum, il est plair que, puisqu'il y a déficit de secpurs et de tray^i], la société doit y poprvpir sur ses rqyejiufj. '
On peut concevoir 1rs peyepus (l'une Ration comme formés : 1° (le ^es pçoductipn§ gènes; 2° de son industrie ^ppliqùée apx productions étrangère^ 4 son teprij>piyè : pais il serait inconséquent de compter cellp-ci, à moins qu'elle ne soit constante, visible et assez importante pp^ç- entrer flans les ressources indispensable^ à ia subsistance de ses habitants, car, dè sa nature, elle est variable, soumise à tous les événements des traités diplomatiques; elle s'apcroît ou §e fesserfe par l'impéritié ou la sagesse des gouvernements limitrophes; et plus une nation est troublée intérieurement, plus |ps nations voisines s'enrichissent à ses dépens.
Il y a donc peij dp cas où l'oi} doive, pouy la certitude des calculs politiques, §ortir de la limite des révenus, soif; naturels, soit industriels, formés par les productions purement indigènes; et telle est la circonstance dans laquelle la France doit être considérée.
Mais tout produit que l'industrie a rendu commerçable ou qui n'attend plus qu'un consommateur ou un possesseur ~définitif, n'est devenu tel qu'après des avances plus ou moins Considérables, dèé manipulations plus ou moins nombreuses. Ces" avances peuvent être considérées sous trois classes principales.
La première de toutes, quoique dans l'ordre social elle paraisse occuper un rang inférieur, c'est la location du sol,''où ce qui, à prix défendu, revient au propriétaire pour que le colon ou le manufacturier puisse jouir et disposer, à son profit,' conformément à leur convention, soit de tout ce qu'il pourra, y faire croître ou recueillir dë matières premières, soit de l'usage dés ateliers, manufactures, usines, maisons, habitations, etc., qui couvrent le sol.
Cette avance est appelée revenu net : on le portait en 1791 à 1 milliard 260 millions, y compris le loyer des habitations; et il est indifférent pour l'objet actuel de distinguer entre le propriétaire qui occupe ou fait valoir par lui-même sa propriété foncière, et celui qui en a abandonné la jouissance temporaire, à prix d'argent; car le premier se rembourse par lui-même du prix annuel ou revenu net qu'il a droit d'en attendre.
La seconde avance comprend les frais et salaires de tous les agents nécessaires à la reproduction et récolte des matières première^
au nombre desquelles les subsistances tiennent le premier rang. Cette avance est, à peu de chose près, d'un quart en sus de là première.
Là troisième avance est composée des frais et salaires de toutes les diverses manipulations'auxquelles un grand nombre de matières premières, autres cependant que les subsistances proprement dites, doivent être soumises pour être appropriées aux divers besoins de la société et devenir commerçâmes.
Malgré toutes mes recherches, je n'ai pu avoir sur celle-ci des notions aussi positives que sur les dpux autres; cependant je ne crois pas trop m'écârter dé la vérité en portant cette "troisième classe d'avances au tiers de là première.
Ainsi le revenji net des propriétés foncières, ou première avancé............. î,260,000,000 ir.
2° Frais et salaires nécesr saires à la reproduction et récolte des matières premières, ou seconde classe d'avances, un peu plus du quart en sus de là première, ci............................. 1,575,000,000
3° Idpn des matières premières manufacturées, etc., ou troisième classe d'avances. 420,000,000
Tptal......... 3,255,000,000 fr.
Qn pquriiajt donc, sans erreur sensible, porter à 3 jnilliards 20Q millions la valeur annuelle de toutes les productions indigènes réduites à l'état de commerce, op. considérées dans le moment qu'elles sont prêtes à être livrées au consommateur.
Dans ce produit de 3 milliards 255 millions, on présume, avec assez de vraisemblance, que la portion sur laquelle doivent être prisés les contributions publiques de toutes natures nécessaires à l'action du gouvernement, ne pourrait s'élever au delà de 1 milliard 150 millions, sans atteindre le travail indispensable à la subsistance du pauvre, et par conséquent sans arrêter l'essor de l'industrie, à moins d'une très prompte rentrée en circulation, dans l'intérieur de la République, des fonds versés à la trésorerie nationale et dans les autres caisses publiques-
Mais l'exactitude rigoureuse de ces résultats n'est pas tout ce qui importe à la solution de la question actuelle, que la connais^ sance positive de la somme des besoins annuels d'un individu constitué dans lin état d'extrême pauvreté.
Or, des calculs de Lavoisier que j'ai eu occasion de vérifier plusieurs fois et dont j'ai recorinu la très prochaine exactitude, élèvent à 70 livres par an, la somme des besoins annuels d'un individu pris sur 1,000 pauvres, tant hommes que femmes et enfants des deux sexes, depuis la mamelle jusqu'à l'âge du travail, distribués entre eux dans la, même proportion où les phefs de famille se trouvent à l'égard de leurs enfants.
Peut-être devrait-on porter actuellement cette fixation à 75 livrés, en considération de l'accroissement de valeur des denrées de première nécessité principalement ooeasionnée par une plus grande quantité de numéraire en circulation, et dont les autres causés^ politiques qui y influent plus ou moins direete-
ment ne peuvent cesser qu'à une époque très reculée;
Ainsi les besoins annuels de 4 millions d'individus de tout âge et de tout sexe (c'est le nombre de ceux que j'ai présentés comme formant la portion ds citoyens à la subsistance desquels il faut pourvoir dans tous les temps de l'année), se trouvent représentés par 4 millions de fois 75 livres, ce qui fait 300 millions.
Tel est le fonds annuel qu'exige le service des hôpitaux, maisons des secours et de retraite, etc., ainsi que des ateliers publics ; en y comprenant toutefois le produit des dotations qui y sont encore exclusivement destinées : ce fait à peu de chose près le cinquième de tous les produits, soit territoriaux, soit industriels, susceptibles de contributions publiques.
300 millions, dira-t-on, 300 millions pour éteindre le fléau de la paresse, de la mendicité et du brigandage !
Oui, 300 millions; et ce n'est qu'à ce prix qu'il est permis d'espérer le retour de la prospérité générale.
25. On sera moins étonné, sans doute, et l'on se convaincra davantage de la nécessité d'y consacrer cette somme, si l'on veut bien parcourir le tableau qui suit des sommes qui y sont destinées annuellement, soit en fonds, soit en opérations de détail qui semblent échapper à tous les regards par la difficulté de les rassembler sous un seul point de vue.
1° Revenus actuels des hôpitaux et établissements de charité, dotés en biens territoriaux et rentes foncières, etc., environ ........................................ 30 millions.
2° Quêtes d'église, environ... 4 —
3° Sociétés philanthropiques établies dans un assez grand nombre de villes de France, en-
4° Quêtes dans les maisons et contributions purement volontaires, environ.........................
5° La mendicité, sans produire aucun travail à la société, lui consomme annuellement, en distributions de détail .......................................
Cette somme paraîtra sans doute exhorbitante à ceux : 1° qui ne savent pas assez que tel fermier, placé dans le centre d'une mendicité active et toujours renaissante, obligé d'avoir ses granges en plein air, n'en peut prévenir l'incendie qu'en faisant des sacrifices joujTialiers, dont la somme annuelle excède le montant de toutes les contributions directes imposées sur le territoire qu'il exploite, et sur son industrie; 2° qui ne savent pas non plus que l'individu dont la fortune médiocre ne comporte qu'une cotisation d'un écu de contributions, refuse rarement à la mendicité, dont le besoin le touche plus
150 —
qu'un autre parce qu'il en est plus près, un sacrifice annuel d'une pistole, et souvent au delà.
6° Les nombreux larcins, les dégâts de la mendicité qui disparaîtraient avec elle, tiennent présentement dans la somme des pertes annuelles, une place
d'au moins..............................
7° Pourrait-on évaluer à moins la perte de temps, d'industrie et de travail, occasionnée et par le découragement et par la surveillance indispensable pour prévenir de plus grands larcins? Cependant je ne porte ici cet objet que pour moitié................
Je né fais point entrer en ligne de compte le vol, le brigandage, qui ne peuvent être efficacement réprimés qu'en déployant toute la sévérité du code pénal; la mendicité a moins de part à ces forfaits qu'une perversité originelle incorrigible
8° Lorsque tous les bras, au lieu d'être oisifs et livrés à la mendicité seront portés vers les ateliers publics, la confection et l'entretien des routes et autres travaux publics de première nécessité, et à raison desquels le mode actuel d'y pourvoir devrait être changé, il résulterait vraisemblablement en travail effectif au produit annuel, à la décharge du Trésor public et des départements, d'environ.....................
9° Dans ce système, il est évident que le gouvernement n'a plus à s'occuper des subsistances : si elles viennent à manquer, le commerce libre y pourvoit : et le pauvre recevant une augmentation de salaire proportionnel à l'accroissement de leur prix, d'abord dans les ateliers publics, puis forcément à l'égard des travaux ordinaires et libres de la société, il n'a plus aucun intérêt, présent ou futur, à porter le désordre dans le commerce et la circulation des denrées : celles-ci alors n'éprouvent aucun obstacle pour se distribuer également sur toute la surface du territoire
Dans le système contraire, c'est-à-dire dans le système actuel, les sacrifices et du Trésor public et des caisses municipales n'ont plus de bornes; l'avarice commerciale sait en tirer un profit aussi hardi qu'impossible à prévenir; et malgré les prohibitions d'exporter, il nest que trop fréquent de voir arriver dans les
ports de France, comme une conquête faite sur les produits de l'étranger, de riches cargaisons de blé indigène dont le commerce a su faire auparavant un entrepôt inexpugnable, et cela aux dépens de la nation, puisque les frais de cet entrepôt sont un gain pour celle qui le fournit. Qui ne sait, en effet, que pendant longtemps les Hollandais n'ont accru leurs richesses qu'en faisant de leur territoire l'entrepôt de tous les denrées, de toutes les marchandises de l'univers.
L'achat des subsistances a coûté au gouvernement plus de 44 millions en 1789.
Les deux années 1792 et 1793 coûteront chacune davantage tant au Trésor public qu'aux diverses municipalités',, principalement du midi de la France, qui se sont chargées de tirer des subsistances de l'étranger.
Ainsi, je crois être très modéré en ne portant cette dépense qu'à.............................. 25 —
10° Indépendamment de cette opération sur les subsistances, la nation en général, et les départements ainsi que les municipalités en particulier, pourvoient, l'une par le moyen d'une prise de fonds sur le Trésor public, les autres par la voie de contributions locales et forcées plus ou moins hétérogènes, à la distribution de secours momentanés ou à payer des primes aux boulangers pour qu'ils puissent vendre le pain au-dessous du véritable prix de commerce, opération tellement désastreuse qu'elle trouve à peine son excuse dans l'absence de travaux publics et de moyens de subsistances ouverts à l'indigence. Il serait difficile à calculer le terme moyen de oes divers sacrifices; mais je crois encore être modéré en ne les plaçant ici que pour........................... 15 —
Total............ 322 millions.
Au reste, je ne garantis l'exactitude d'aucun de ces objets de détail; forcé d'écrire ceci avec la rapidité de l'éclair, et privé des matériaux qui pourraient conduire à des résultats plus certains, ma mémoire était le seul guide que je pusse consulter.
11° Je n'ose porter mes regards sur cette effroyable dévastation des forêts, cette belle et riche propriété nationale, l'espoir de la France dont il semble qu'un génie malfaisant, cent fois plus dangereux, plus redoutable que les ennemis dont la nation a présentement à se défendre, ait conjuré la perte finale. Qui répondra de ce brigandage homicide?... lia
plume se refuse à consigner ici l'énormité des ravages de quatre années d'incertitudes sur le mode de les administrer, comme s'il fallait le même temps pour faire jouer la pompe qui doit éteindre l'incendie...
12° Je me tairai de même sur les pertes qui résultent pour les citoyens qui en ont souffert de tous ces mouvements désordonnés que suivent les taxes arbitraires des comestibles, puis le pillage, et enfin le découragement et la stupeur générale...
Mais un levier de six millions d'individus que le défaut absolu de travail rend forcément inoccupés ! Une telle force laissée à la disposi-et à toutes les tentations de ces fleuves d'or qui coulent de l'Angleterre, de la Hollande, de la Prusse, de l'Allemagne, etc, au moment où il faut la diriger contre les despotes de ces nations, pour les punir d'avoir osé manœuvrer avec tant d'astuce et d'insolence contre la liberté des Français !
Hommes riches, osez maintenant vous plaindre de l'énormité de votre dette. Quoi ! s'il est vrai qu'une mesure générale est le seul moyen de ramener la sécurité, la prospérité publique, et le bonheur de tous, vous ne rougissez pas de l'absurdité, ou plutôt de la demeure qui vous fait dépenser en détail pour accroître la paresse et la mendicité, la même somme qu'il aurait suffi de dépenser en gros pour l'éteindre?
26. Au reste, les réclamations de la propriété qui auraient pour objet d'écarter la contribution générale du cinquième des revenus ou produits imposables, ou de tout autre quotité reconnue indispensable, ne seront jamais que des cris de sédition et de révolte contre le plus pressant et le plus sacré de ses devoirs; puisqu'en dernière analyse, une grande partie de cette somme reviendrait se confondre dans la fortune de tous, par l'emploi d'un plus grand nombre de bras, par les profits que la société ne manquerait pas d'en tirer, et enfin par la diminution des contributions générales et locales destinées à la confection et à l'entretien des choses publiques.
27. Quel que soit le minimum de cette taxe sur la propriété, il ne peut ni ne doit être, dans le pacte social, exprimé en valeurs numéraires, sans de graves inconvénients; car des opérations purement législatives, telles que l'introduction d'une plus grande quantité de numéraire fictif, des combinaisons commerciales, en un mot, des causes variées à l'infini, et dont aucun pacte social ne peut jamais enchaîner ou circonscrire les effets, auraient infailliblement celui de rendre trop faible le minimum dont il s'agit ; à la différence d'une quotité quelconque du revenu net imposable, dont l'effet naturel est de s'accorder avec tous les temps, toutes les circonstances et qui s'accroît ou se dégrade, comme la prospérité publique elle-même, en conservant toujours les mêmes rapports qui doivent exister entre le riche et le pauvre.
28. Ces premières notions du pacte social conduisent à la question de savoir s'il ne faudrait pas également déterminer le maximum de cette contribution (que, pour la distinguer des autres, on pourrait désigner sous le nom de taxe des pauvres). U serait possible, pourra-t-on penser, que les législateurs élevassent tellement la taxe des pauvres que l'effet
de cette détermination ne tendrait pas moins qu'à mettre tpUS les Biens eig commun,, en no laissant plus.à leurs propriétaires que ië vain titre d'économes dont ils ne tarderaient pas, sans doute, à se dépouiller.
Mais, la faculté de vendre, à prix entièrement "conventionnel, toutes le.3 productions de la nature ou de l'industrie acquises en vertu du droit de,propriété, faculté inséparable de l'existence de ce droite dévient le régulateur nécessaire et absolu de l'excès des contributions, en sorte que celles-ci ne peuvent augmenter sans apporter ie itfêjne accroissement dans le prix des choses vénales.
29. Les législateurs né pourraient donc introduire indirecteilient lë rëgiiné des lois àgrairës où dè la communauté dë tbUk biens, proscrit pàr le pacte social môme; que par uhe autre mesUre, ce sëràit de taxer, perUiettire du toléret la taie d'une seule ou plUsiëtiis de toutes les choses vénales, poUr arrêter l'ès-s.or de l'industrie^ et détacher les individus du droit de propriété, àfin d'y subsister le droit dè rapinë et dë Violéhce.
Je l'avouerai, ce danger existe, et dès lors, uU pouvoir aussi redoutable, aussi destructeur du régime social, bue lë pouvoir de taxer ne pouvant être exerce par le Corps législatif, il ëst clair qu'il fàUt lUi en interdire expressément l'usagé.
U ne suffit donc pas de regarder Sa prohibition cominé sous-entendue dans le développement du droit dë propriété qui, suivant le nouveau projet de déclaration des droits, consiste en ce. que tout homme est le maître cle dispose)', à son gré, de ses biens, de ses .capitaux, de ses revenus et de son industrie; il faut encore exprimer nettement, au titre des fonctions du Corps législatif, la défense expresse de taxer aucun des produits de la nature bu de l'industrie, ni d'en permettre ou tolérer là taxé, par aucun des autres corps constitués.
30. Une prohibition de cette nàtUrë ne pourrait cependant faire pàrtie intégrante dit pàcte social, bU de la Constitution, qu'autant que le droit du pàuvre à la subsistance et aux secours publics y sèrait formellement rëconnu; ces deux conditions sont telléfiiènt liées, tellement inséparables que toute syncope finit par rendre absurde l'une des deux propositions dégagée de l'aUtrë.
« Donnez-moi du travail, èt le salaire qûi lui appartient, où laissez-moi taxer vos denrées. >> Voilà l'alternative du pauvre; à l'égard du riche; d'une portion de la société} à l'égard de l'autre : je aoute que persorinë au monde puisse répondre quelque chose dè raisonnable à un tel argument.
11 ne faut donc pas les règarder tous comme coupables ou ml&veillants, ëeux. qui, entraînés par les funestes conséquences de. l'absence du travail et de tous autres haoyens de subsistance en faveUr du pauvre, proposent aujourd'hui à la Convention nationale, les Uns de ta±er les denrées et les marchandises d'une consommation journalière ou qui entrent dans les besoins dû pauvre; leS autres; la pèine de mort contre les accaparëtirS dë marchandises, etc.; les vendeurs de nunïérâïrë métallique,etc, etc.; sans eohsidérëi* tfUe ces Ibis ne pouvant avoir que des applications ihefficacës ët arbitraires, porteraient l'épouvante èt la terreur dans les opérations de commercé souvent tés plUs in-
nocentes et les plusjpropres à ramener l'abondance; et que, si la Convention iiàtioriâie aVâit le malheur de commettre l'ëirëùr Qu'ils semblent vouloir provoqUër a'ëllè, sdfi effet le plus naturel sëràit d'agrandir lst fi laie àu lieu de la cicatriser.
Il est ni naturel, ën effet, d'avoir en horreur tous ceux à qui la fortune pu de grandes combinaisons et de grandes relations coinmer-ciales semblent offrir la possibilité de devehir les maîtres dU prix dés subsistances où des autres denrées de prëmiër besoin qUè, sans examiner si la concurrence n'est point l'obstacle le plus réel à ce màllleiir, on est tènté d'y appliquer les remèdes lès plus Viblëiits au moment où l'on croit s'apereèvoir de l'existence d'une telle manoeuvre.
C'est donc une simple erreur d'avoir indiqué une mesure à la plàtë d'une autre.
Mais si jamais le pacte social était condamné au silence sur le droit du pauvre tel que je viens de lë développer; alors tout semble justifier lë rbhiède extrême des taxes, des prohibitions, dés recherchés inquisitoriales sur les grandës opérations de commerce, du Code pénal, en Uh mbt, de tbutës lës mesurés subversives du régimë social ,puisque de leUr usage on pourrait espérer dU moihs l'établisSë-ment d'un nouvel ordre de choses moins pervers.
J'ai dit précédemment qu'aucune société politique ne pouvait faire équilibre à l'activité du riche qu'en le menaçant, par dés ateliers publics toujours ouverts d'une concurrence toujours prête à déjouer ses manœuvres.
Mais ces ateliers ne produiraient aucun dès effets pour lesquels ils doivent être institués et, au contraire, le régime social serait encore menacé de subversion, si les salaires des trà-vaux publics se trouvaient dans une trop forte disproportion avec les besoins de la classe indigente forcée d'y recourir par l'absence ou l'insuffisancë des traVaux ordinaires de la société : car alors la paresse qui veiit consommer sans fournir le contingent de sa dette qui est le travail, ne manquerait pas de se faire un titre de l'insuffisance du salaire pour introduire la corruption et l'esprit de révolte au sein des ateliers publics : non qu'il faille "atteindre ou dépasser la limite du salaire des travaux ordinaires de même nature, si ce n'est à l'époque où le prix des subsistances, ayant reçu un accrdissemeht défavorable au plus grànd nombre, n'a point encore été suffisamment couvert par les Compositions de gré à gré entre les individus; mais l'excès contraire est précisément ce qui, jusqu'à présent, avait rendu les ateliers publics là honte et l'opprobre des gouvernements qui ont voulu en user sans en connaître les .véritables régulateurs, indépendamment du vice capital de leur institution qUi devait être permanente et non pas momentanée : ce sont ces erreurs qui, n'ayant pas été soumises à l'exacte et sévère analyse de la raison, font croire encore aujourd'hui à des hommes dont le civisme n'a rien d'équivoque ou de suspect que les ateliers publics doivent être proscrits, par cela seul qu ils deviennent le réceptacle de lâ_pàressë de la révolte et du brigandage.
Mais comment le deviennent-ils ? Voilà ce qu'il était important de rechercher avant de prononcer d'urle .mànièrë aussi tranchante : et il est Vraisemblable qu'on ne serait jamais àr-
rivé à un résultat aussi absurdement contradictoire avecja nécessité reconnue de pourvoir, à ia subsistance des pauvres, si l'on eût voulu se transporter, comme je vais le faire, jusque dans la pensée de l'indigent,( et prendre la peine de réfléchir sur la solidité de ses objections. ,_.•.-.. ~
« "Vos ateliers pwiblics, dirait-il à la société, ne sont pas toujours ouverts et je ne puis y être reçu au moment où le besoin se fait sentir à moi.
« Un sentiment énergique de mon existence et de la place que j'occupe dans le régime social me dit qué jë ne atiis pas être ainsi délaissé. A qui là faute? Elle est à vous, et non pas à moi. Là commence votre injustice : là aussi doivent coinmencer mes torts envers la société; car voùs ne pouvez vous écarter de vos devoirs dans un sens, que vous ne m'invitiez à l'instant de m'écartef des miens dans le sens directement opposé, et à la même distance du point qui liait notre existence sociale.
« Ainsi le découragement, la paressé, la mendicité, l'inertie de mes facultés qui ne së réveillent que pour agir furtivement contré vous sont autant de fruits amers de votre imprévoyance.
« A mesure que le temps s'écoule, je souffre moins d'être avili à mes propres yeux, mais le sentiment de votre injuste reste tout entier.
« Le nombre des individus que vous avez ainsi délaissés, viènt-il à s'accroître et à menacer plus sérieusement la tranquillité publique ? C'est alors seulement que le besoin dë votre propre conservation, et non pas un juste retour sur vous-mênies, détermine l'ouverture d'ateliers publics organisés avec toute la précipitation de la peur et de l'inquiétude, et qui, par cette raison, ne manquent presque jamais de devenir, pour les chefs et leurs subordonnés à qui vous remettez le soin de leur régime, une occasion de vols et de brigandages.
« La modicité du salaire serait seule suffisante pour n'obteriir de moi qûe des travaux encore inférieurs au prix que j'en reçois; mais je sais d'aVance que ces ateliers ne doivent avoir qu'une courte durée; il est donc naturel que j'aie de la répugnance à reprendre péniblement l'usage de mes forces pour n'avoir ensuite que la perspective d'une nouvelle mendicité.
« Telles sont les causés par lesquelles cette honteuse maladie de la paressé et de la mendicité semble devenir incurable.
« 32. Si, aù contraire, vos ateliers étaient permanetits, comme ils ne doivent jamais cesser de l'être;
« S'ils étaient distribués sur la surface du territoire d'une manière à peu près égale; et à des points suffisamment rapprochés pour que nul individu ne soit forcé de perdre l'habitude chérie de sbn domicile, et pour que, d'une autre part, il n'en résulte ni de trop petits établissements ni de trop grands rassemblements;
, u Si tous les individus y étaient reçus sans difficulté, sans être même tenus de justifier dit lieu de leur naissance ; et qu'il fût permis & qui qùë cé soit de dégrader ùn individu par des recherches iiiquisitoriales sur sa conduite àhtérieurè;
« Si le salaire se rapprochait sèniiblemént du prix des travaux ordinaires semblables;
Si les espèces de travaux étaient assez variées pour prévenir le passage trop brusque d'un talent ou d'une, forcé à l'autre : si, pour accorder cette condition, la société fondait, dans un seul et même régime d'ateliers publics, ses établissements de ponts et chaussées, canaux,. etc.
( Si les tâches y étaient distribuées de manière à entretenir l'émulation ; qu'il fût libre à chaque individu de s'associer pour une tâche commune avec celui qu'il aurait reconnu le plus en état de la seconder;
« Si l'instruction publique; l'enseignement des devoirs sociaux faisait partiè intégrante de ce régime; .
« Si les individus, ayant fait preuve de zèle, de travail et de capacité, étaient admis graduellement à toutes les fonctions du gouvernement intérieur des ateliers publics;
« Si leur organisation était telle que les actes d'administration, la preuve des recettes et dépenses hé pusseiit jamais être fermés, même à la curiosité inquiète et .soupçonneuse;
Si, enfin, c'étàit un mérite dë hë sortir des iteliërs publics qu'avec un cërtifieât de bonne conduite et de civisme, ou que ce fût Un titre de recommandation pour ne plus manquer de travail auprès de ceux dont lës entreprises commerciales exigent l'emploi de forces ou ^'intelligences étrangères ;
« roUrriez-vous douter alors que je ne fussë puissamment entraîné à rëprendre, dans le régime sotial, la place que votre cruelle indifférence et, tranchons le mot, votre propre iniquité, m'avait forcé d'abandonner?
« Vous dites que la pârésse est une maladie incurable ; cela peut être à la rigUeùr pour un infiniment petit nombre d'individus, quoique le travail finisse par devenir une jouissance, et qu'il soit démontré qUe le repos est hors dë là nature; mais avez-vous donc jamais tenté sériëusement de la guérir cettë maladie, pour vous permettre ainsi de me calomnier après m'avoir laissé souffrir toutes les ângoiSSeë de l'humiliation, dé la faim et de la colère ?
« Vous commettriez donc envers moi une nouvelle injustice, si, sans avoir organisé des ateliers publics et leur avoir donné une permanence irrévocable, vous portiez des lois plus ou moines répressives contre la merldicité; car l'expérience a dû vous apprendre qu'elles seraient toutes inefficaces, sans ce préalable que rien ne peut suppléer.
riches de la société, ô vous les magistrats du peuple et Sâns doute ses vrais amis, dites par qUèlle étrange apathie, par quel inconcevable abUs du pouvoir ou de la raison me con-damneriez-vOUs à n'être qu'un consommateur, lorsque jë suis appelé, par la nature, à dohnef à la société le contingent de travail qu'elle a droit d'exiger de tous ses membres ?
33. U n'entre pas ici dans le plan que je me sUis tracé de parcourir toutes les conditions essentielles de l'ùrganisatioii dès ateliers publics; oe serait appesantir l'attention sur des mesures purement législatives; le peu de développement que je viens de donner à cette matière, suffit pour résoudre les principales objections contre les dispositions fondamentales proposées; et jë ne vois rien de plus à ajouter au pacte social que la condition de la permanence des àteliers. A l'égard du mini-mum du salaire dès tràvauit que j'estimé de-
voir être porté aux quatre cinquièmes du prix des travaux ordinaires de même nature, la difficulté d'en vérifier l'exactitude et par conséquent de le purger de tout arbitraire, ne permet pas de le regarder comme un point fondamental du pacte social.
Je me dispense, par la même raison, de discuter la question relative à la portion qui doit être prise, dans le cinquième de la matière imposable, pour le service des hôpitaux et maisons de retraite.
Un aperçu, très rapide à la vérité, m'a fait penser qu'il fallait y affecter au moins 60 millions, ou plutôt le cinquième de la taxe des pauvres, et que le surplus devait faire le service des ateliers public?-, y compris le salaire de tous les agents indispensables à leur régime.
34. Puisque, de la nature même de cette obligation de la société envers les indigents, il résulte que c'est le premier de tous ses devoir, celui auquel toute l'économie du régime social est subordonnée; on conçoit facilement que le pacte social doit encore garantir l'acquittement de cette dette contre tous les événements possibles, même contre la guerre; car l'approche de ce danger, ou les malheurs qu'elle aurait déjà occasionnés, pourraient faire imaginer au Corps législatif qui ne connaîtrait pas ou voudrait méconnaître les vrais principes sur le recrutement, de.s'emparer en tout ou partie de la contribution destinée à pourvoir aux besoins de l'indigence, et c'est précisément alors que les travaux ordinaires, devenus languissants, doivent être remplacés par de plus abondantes ressources.
Je n'ai à indiquer pour le moment d'autre remède que la condition de verser cette contribution directement, et sans aucun intermédiaire, du Trésor public, dans les caisses particulières destinéles au service des hôpitaux, maisons de retraite, et ateliers publics; d'où suit l'obligation, quant aux contributions directes, de percevoir celle-ci distinctement et séparément, quoique sur les mêmes rôles, et par les mêmes agents.
35. Mais la société ayant intérêt qu'aucuns deniers libres ne restent oisifs, il s'ensuit qu'après chaque année le Corps législatif doit être autorisé à faire verser au Trésor public tout ce qui n'aurait pas été employé au service de l'année précédente, ou ne serait pas destiné à en couvrir l'arriéré.
36. Au reste, on me pardonnera sans doute, d'avoir insisté sur cette matière plus que sur chacune de celles qui me restent à traiter, si l'on considère que la bonté et par conséquent la durée du pacte social y est attachée toute entière.
2° S'instruire.
37. C'est le besoin de tous, comme l'exprime très bien le projet de la déclaration des droits.
Mais l'instruction ou la communication des pensées et des connaissances acquises donne des produits variés à l'infini depuis la brute jusqu'à l'individu le plus parfaitement organisé.
Voilà les faits indiqués par la nature. Ainsi tous les hommes ne peuvent pas être instruits sans exception, et tous ne peuvent pas l'être également. En cela, du moins Helvétius n'est pas d'accord avec moi, lorsqu'il prétend que
les facultés intellectuelles seraient absolument et parfaitement semblables dans tous les individus, si chacun, depuis le moment de la naissance, se fût trouvé entièrement dans les mêmes ciroonstaces, et que les objets extérieurs eussent été placés ou disposés de manière à produire les mêmes impressions : supposition, 1° impossible à réaliser, 2° absurde, en ce qu'il faudrait concevoir l'organisation physique est étrangère à nos perceptions, tandis que tout démontre au contraire la concordance parfaite de l'une à l'autre.
38. Je n'examinerai pas ce que la connaissance la plus approfondie des vrais éléments du contrat social peut apporter de bonheur aux hommes, ajouter de parfait au régime social et de devoirs réciproques aux membres de la société. Cette recherche occuperait une place trop considérable ici, et je la réserve pour un autre moment.
U suffit à l'objet actuel de connaître avec quelque certitude les principales causes de dépravation des sociétés qui dérivent de l'ignorance ou de l'abus du talent.
39. Mais ne disons pas, avec Rousseau, que la science est un mal; car si aucune puissance à la disposition des hommes ne peut empêcher un individu de se livrer à la méditation, d'acquérir à la faveur d'une organisation plus parfaite des connaissances auxquelles un autre individu ne puisse atteindre, et d'avoir sur celui-ci une supériorité quelconque qu'il est forcé intérieurement de reconnaître ou de laisser juger par d'autres individus; s'il est vrai, comme personne n'en peut douter, que les hommes soient appelés, par une force su-
I périeure à leur propre volonté, au perfection-
j nement de leur intelligence, il ne doit pas plus être question de rechercher si les sciences sont utiles ou nuisibles à la société, que de savoir s'il ne serait pas plus expédient d'égorger l'espèce humaine tout entière, sous prétexte que la force abuse quelquefois de la faiblesse, et que le savoir ou l'éloquence, dans la main d'un ambitieux, devient pour lui l'instrument le plus pervers.
40. Or, de même que ce ne sont pas les richesses, mais la trop grande inégalité de leur distribution qui corrompt le régime social, de même aussi ce n'est pas la science, mais la trop grande inégalité de sa distribution, ou plutôt son absenœ dans le plus grand nombre des individus qui les condamne à l'oppression.
Mais c'est une règle générale, déduite de l'expérience même, que plus il y a de rivaux d'une même ambition, moins l'ambition devient un danger : la vérité de cette proposition ne peut être révoquée en doute, puisque c'est l'ignorance seule du plus grand nombre qui fournit au plus petit l'occasion et la possibilité qui se sont tant de fois réalisées d'appesantir sur les peuples le joug de l'esclavage et de la tyrannie.
Ainsi donc, en dernière analyse, l'ignorance est le seul et véritable fléau du genre humain.
41. Dès lors, la société a incontestablement le droit de prévenir ce danger aux dépens du droit de propriété, en grévant celui-ci, comme il l'est en effet par la nature même du régime social, de la condition de pourvoir à l'instruction de tous ; et, à cet égard, je n'ai rien à reprocher au sujet de déclaration des droite,
si ce n'est un défaut de rapprochement entre l'exercice du droit de propriété et les charges dont il est grevé, ce qui nuit excessivement à son intelligence, et renferme l'inconvénient très grave de provoquer tous les malheurs de l'anarchie, du pillage et de la dévastation.
Mais je ne trouve pas, dans le projet de Constitution, la garantie que la volonté nationale ne sera point éludée par le Corps législatif. Qui l'empêcherait, en effet, de réduire l'enseignement public à des établissements si mesquins que le droit de propriété resterait tout entier avec son influence corruptrice, et l'ambition désordonnée avec toutes ses fureurs 1
42. H est donc indispensable que le pacte social détermine expressément, comme pour la taxe des pauvres, le minimum au-dessous duquel le corps législatif ne pourra fixer annuellement la contribution destinée à l'entretien de tous les établissements d'instruction publique.
On sentira facilement que ce minimum de contribution ne doit pas être exprimé en valeurs numéraires, mais en quotité de la matière imposable : au reste, j'en ai donné la. raison en traitant de la taxe des pauvres; et ici s'applique une très grande partie de ce que j'ai développé sur cette matière; aussi j'y renvoie la lecteur.
43. Je laisse à d'autres le soin de rechercher quel doit être rigoureusement ce minimum : dans tous les cas, il n'y a que la volonté nationale qui puisse lever tout arbitraire ; cependant je crois que cette volonté serait erronée qui le fixerait au-dessous du vingtième de la matière imposable, ce qui répond dans l'état actuel de la richesse nationale à 75 millions.
Quelque énorme que paraisse au premier aperçu la dépense nécessaire à l'entretien des établissements d'instruction publique, ajoutée à la taxe des pauvres que je suppose ne pouvoir être moins de 300 millions, on ne tardera pas à revenir de cette surprise en considérant qu'il est impossible de simplifier tous les autres rouages du gouvernement, de diminuer le nombre des fonctionnaires établis et, par conséquent, la somme de leurs salaires, et en général de toutes les dépenses à la charge du Trésor public, sous la condition préalable d'une très parfaite organisation : 1° des établissements destinés à procurer au pauvre une garantie complète et perpétuelle contre l'ascendant de la propriété ; 2° de l'enseignement public qui apprenne enfin à tous les membres de la société, aussi bien leurs devoirs que leurs droits, et puisse les garantir suffisamment contre les manœuvres ou les scélératesses de l'ambition : car tout est là, rien n'est ailleurs.
3° Se défendre contre les attaques extérieures.
44. Lorsque la société est menacée par l'ennemi, la personne et les propriétés d'un de ses membres ne doivent jamais être considérées comme plus en danger que celles des autres, et il n'est pas question de distinguer ici entre le riche et le pauvre ; car la personne de celui-ci, le vêtement qui compose toute sa propriété, les enfants qui font toute sa jouissance, ne lui sont pas moins chères que ne le sont au riche sa personne, sa fortune et ses enfants.
Or, la menace est telle que la société a besoin de se livrer tout entière, en un mot de déployer toutes ses forces, ou qu'il lui suffise seulement de n'en présenter à l'ennemi qu'une partie.
Dans le premier cas, tous les intérêts individuels sont forcés de se taire ; nul ne peut acheter les bras d'un autre," puisque tous se trouvent dans la nécessité de combattre personnellement et d'abandonner à l'inaction tous leurs établissements de commerce et d'industrie ; et certes, le riche comme le pauvre qui refuserait de marcher à l'ennemi est lui-même un ennemi de la société sur lequel elle a incontestablement le droit de vie et de mort. Ainsi l'obligation de défendre la patrie en danger est entièrement personnelle : voilà son caractère indélébile.
Ce qui existe dans le premier cas est le même à l'égard du second ; car l'obligation dont il s'agit ne peut changer de nature par cette seule circonstance que la société n'a besoin que d'une partie de ses forces.
D'où il résulte que, dans ce second cas, il ne peut être pourvu à la formation ou au recrutement des armées que par un mode conservateur des droits de tous, et qui ne blesse les intérêts d'aucun des individus en état de porter les armes.
Je ne parle point encore ici de la nécessité d'une contribution supplémentaire destinée à solder et à faire mouvoir les armées dans le sens le plus favorable à la victoire : cette question trouvera sa place ailleurs.
46. Les intérêts du pauvre sont blessés lorsque le riche est exempt de marcher à l'ennemi.
Ceux du plus grand nombre le sont également lorsque les ministres du culte, les fonctionnaires publics, salariés ou non, etc., se trouvent dispensés de courir la chance des combats.
Il en est de même des célibataires à l'égard des hommes mariés et, en général, d'une classe ou espèce à l'égard d'une autre.
La société peut bien, à la vérité, soit pour ne pas nuire à la population qu'elle attend des mariages, soit en considération de l'agriculture, des manufactures, etc., soit enfin à raison de quelques fonctions publiques, indispensables à l'action du gouvernement pendant la durée de la guerre, et auxquelles toutes mutations pourraient être dangereuses, rendre mixte cette obligation, en permettant à certaines personnes, en considération de leur utilité sociale, de se faire remplacer, à prix d'argent, par ceux des citoyens en état de porter les armes et qui consentiraient à ce traité ; mais jamais, non jamais, la société ne doit les dispenser de concourir au mode de formation ou recrutement de la force publique.
47. S'il en était autrement et qu'une telle exemption fût consacrée, la condition du défenseur de la patrie serait tout à son désavantage, puisque ayant à craindre pour sa vie, lorsque même le danger n'aurait pas lieu pour les autres membres de la société ou ne serait pas aussi prochain à leur égard, et obligé de se livrer tout entier à la défense commune, il est forcé de renoncer à faire valoir son industrie, ses capitaux ; il ne peut plus espérer d'être porté par le suffrage de ses concitoyens aux fonctions publiques lucratives pendant la
durée de la guerre ; en un mot, il perd tous les avantages du régime social, tandis que les autres citoyens les éonservent dans toute leur plénitude.'
48. Supposons maintenant qu'il n'y ait nulle exemption d'aucun individu en état de porter les armes, et que cependant un certain nombre plus ou moins considérable de citoyens soient admis à se faire remplacer, à prix d'argent ; l'effet naturel de cette faculté est d'établir aussitôt entre le riche et le pauvre des transactions plus ou moins avantageuses à celui-ci et qui tendent plus ou moins directement à prévenir la trop grande extension des richesses ou letir concentration entre les mains d'un petit nombre d'individus, sans qu'il en résulte aucun deuûger pour la composition de l'armée, pou vu que la réception du remplaçant ou son agrégation dans le système général de la force publique ne soit environnée que de formes simples uniquement re-lativés soit à l'organisation physique du sujet, soit à son civisme ; car le pauvre a autant et plus de courage que le riche.
Il me semble peu nécessaire d'observer ici que ces capitulations entre le riche et le pauvre, lorsque la loi accorde la faculté du remplacement, doivent être entièrement libres et volontaires pour opérer tout l'effet que la société a droit d'en attendre et que, par conséquent, le gouvernement, en aucun cas, ne peut ni ne doit y influer soit eh déterminant, par exemple, le minimum ou le maximum du prix du remplacement, soit par toute autre mesure qui ferait perdre à ces capitulations leur caractère essentiel de la liberté.
Je réserve pour un autre temps le développement des causes les plus prochaines qui rendent la patrie plus chère au pauvre qu'au riche. Il suffit à l'objet aotuel que ce fait soit constant et ne puisse être révoqtlé en doute.
49. C'est donc une nouvelle perfidie de la richesse et du savoir contre l'ignorance et la pauvreté, de provoquer, par la voie de I'en-thousiasme, la formation et le recrutement des armées or, on sait bien que le riche est prémuni d'avance contre tout mouvement de patriotisme ; le pauvre, au contraire, ne voit que la nécessité de repousser l'ennemi ; toutes ses affections se dirigent vers le salut de la patrie ; il s'enrôle à l'instant : la mesure de toutes ses vertus croit s'acquitter suffisamment par d'insolentes contributions volontaires, par le plus détestable des impôts, puisqu'il est toujours inégalement distribué et toujours excessivement inférieur aux besoins.
Et ne voit-on pas, en effet, dans nos gouvernements modernes, au milieu même d'une révolution la plus étonnante dont puissent jamais se charger les fastes de l'histoire, ne voit-on pas le riche se couvrir , avec autant d'audace que d'habileté dé toûtes lës enveloppes du patriotisme, afin d'écarter plus sûrement le nombre de ses rivaux d'ambition et de fortune, et de pouvoir spéculer avec d'autant plus d'activité et de succès sur toutes les chances favorables que lui présentent le sort des combats et les malheurs inséparables de ce mouvement convulsif de la société, que personnellement tranquille sur ce danger, il n'y prend plus d'autre intérêt que celui de faire de la calamité publiquè un nouvel instrument de sa fortuné !
Mais l'enthousiasme dont le riche voudrait faire le principal agent de recrutement des armées n'agit pas également sûr toute la surface du territoire : voilà un des inconvénients de toutes les mesures prises hors de la nature. Dès lors, il devient nécessaire de recourir à des formes locales toujours chancelantes, arbitraires, 'et qui manquent rarement d'apporter une lenteur funeste à la composition de l'armée, de faire perdre l'occasion de la victoire, et de mettre en danger la société tout entière. r •
U peut donc arriver qu'aucun individu ne veuille s'offrir volontairement ou quel le nombre des souscriptions soit insuffisant. Dans ce cas, il est naturel de recourir à la voie du sort î mais Un long usage peut avoir établi l'exemption absolue en faveur des hommes mariés, et quelque abusif que paraisse cet Usage, on peut espérer de se le rendre favorable. Dès lors l'approche d'une guerre produit naturellement dans certains lieux, l'effet de multiplier les mariages au-delà de toute mesure, en sorte que le nombre des hommes veufs sans enfants et des garçons, en état de porter les armes, se trouve inférieur ou excéder de très peu le contingent nécessaire. En vain, la loi aura consacré de nouveau cette exemption absurde, la tiédeur et la lâcheté de ces jeunes mariés est trop révoltante, et il n?est pas rare de les voir contraints par la force à courir les chances du sort.
Il y a certainement ici violation de la ioi ; prétendrait-on qu'il y a de plus vexation absolue 1 Mais il est facile d'apercevoir que ces mariages précipités et purement accidentels ne méritent aucune faveur, et que C'est la loi seule qui a tort.
L'union des deux sexes est dans la nature ; laissez-la se développer, agir par elle-même, n'accélérez point ses jouissances par la peur ou le ridicule appât d'une exemption ; en un mot, faites le bonheur de tous, én n'affranchissant aucun individu des charges personnelles du régime social. Voilà la maxime sacrée sur laquelle repose la prospérité des nations, la durée du pacte social.
50. Ainsi la conscription militaire ou la voie du sort est indiquée par la nature même, et ce mode de formation! ou recrutement des armées serait adopté uniformément, sans presque le secours d'aucune loi antérieure, .si des mesures législatives plus ou moins erronées ne venaient en contrarier ou faire avorter les heureuses combinaisons.
Je né m'arrête point à tout ce que l'on a écrit contre la conscription militaire ; j'ai eu le courage de le lire, et ce qui m'a paru de plus étrange dans cette question si horriblement défigurée c'est que personne n'ait abordé le véritable point de la difficulté.
Or, je le dis hardiment, toute mesure différente de la conscription militaire produit infailliblement le dangereux effet de mettre, avec plus ou moins de rapidité, dans les seules mains du riche et du contre-révolutionnaire, le sort des combats, et par conséquent, la liberté des nations.
Que la formation ou le recrutement soient ou non favorisés par l'appât d'un prix d'engagement volontaire dans ces deux cas, il est
toujours naturel de s'exagérer ses forcés et, par conséquent là faiblesse de l'ennemi. Il ii'y a donc presque jamais, dans la première formation de l'armée, une forcé suffisante pour obtenir les résultats quelle devrait fournir ; voilà un fait incontestable, puisqu'il est donné par l'expérience de tous les temps : on est dOtic obligé de recourir successivement à dés mesurés additionnelle» plus ou moins rapprochées de la première, et de rendre la prime originaire successivement plus attrayante.
Mais à mesure que toutes ces capitulations volontaires s'effectuent, le nombre des bons courageux citoyens se dégage de l'intérieur de la République, et les choses peuvent êtte poussées au point que les riches, les lâches, les hommes pusillanimes et les malveillants se trouvent en assez grand nombre, en-dedans de la République, pour étouffer les derniers efforts du patriotisme expirant.
Alors l'esprit public se corrompt. Si la guerre avait été trouvée juste, nécessaire, indispensable dans le principe, elle n'est pius maintenant qu'un fléau, Une scélératesse de ceux qui l'ont proposée, de l'autorité publique, du corps législatif qui l'avait solennellement discutée] Une insurrection, osent-ils dire, va j nous en faire justice : les agents soudoyés de l'ennemi la provoquent, et voilà la liberté anéantie.
51. De tout cé qui précède, on doit conclure: 1° que la formation et le recrutement de l'armée ne peut avoir lieu autrement qué par la circonscription militaire oïl la voie du sort qui, frappant également sur tous, n'épargne ni ne blesse les intérêts d'aucun individu en état de porter les armes : 2° que nul ne doit-être exempt de courir la chance du sort ; 3° que la faculté du remplacement, à prix d'argent, ne doit être accordée.que pour l'avantage de là société même, et non pour l'avantage particulier des individus que le sort aurait appelés à marcher à l'ennemi.
52. Si l'on parcourt ensuite la nomenclature des cas où le remplacement peut être autorisé, on trouve que l'intérêt de la population doit se placer au premier rang et que, dès lors^ la faculté dont il s'agit, lorsqu'il n'y a aUcun de l'accorder, doit appartenir de préférence aux hommes mariés.
Dans ce système : 1° le Trésor public n'a plus à pourvoir aui frais de recrutement ou Rengagement : ils deviennent Une charge des individus tombés au sort, et qui veulent ou peuvent user de la faculté du remplacement ; 2° à l'égard de celui pour qui cette faculté deviendrait illusoire par la modicité de sa fortune, la société, indépendamment de tous les objets qui sont-personnellement nécessaires au soldat pour voler aux combats, est obligée, en vertu de la première condition du pacte social précédemment développée, de pourvoir aux besoins de sa femme et de ses enfants : c'est ainsi que l'exactitude et la bonté d'un premier principe ne laisse plus de difficulté pour résoudre toutes les autres questions attachées à la confection du pacte social.
Je m'abstiens, par conséquent, de parcourir les autres cas de remplacement.
53. Mais je ne puis concevoir qu'une telle faculté puisse être accordée, sans danger, à
toUs les fonctionnaires publics indistinctement et c'est ici qu'on mé doit un pëU d'attention puisque je la refuse même aux membres du Corps législatif.
Et d'abord, il n'est ni présumable ni possible que le sort les indique dans une proportion plus forte que le nombre nécessaire à la défense dé la société, relativement à celui soumis à l'événement du sort. Ainsi, par exemple, a-t-on besoin de six cent mille combattants sur six millions d'hommes en état de porter les armes 1 La proportion étant du dixième, il est clair et le bon sens suffit pour remarquer que le sort n'appellera pas même un dixième du Corps législatif ainsi que de tous les autres fonctionnaires publics, puisqu'il faut ajouter aux membres restants que le sort n'a point désignés, ceux des fonctionnaires publics qui jouissent naturellement de toute exemption à raison soit de la caducité de l'âge, soit de quelque vice capital de conformation.
U n'y a donc point à craindre la désorganisation de la plupart des corps délibérants ou ' agissant pour l'intérêt du gouvernement. Les suppléants sont là, et d'ailleurs l'élection y pourvoit aussitôt.
En vain prétendait-on que la chose publique souffrirait pendant l'intervalle, et jusqu'à ce que les successeurs fussent au courant dès fonctions : voilà un des principaux arguments suggérés par l'intérêt personnel des hommes revêtus de fonctions publiques pour s'y rendre héréditaires.
Je réponds que quelques inconvénients très passagers peuvent en être la suite ; mais que tout privilège est si odieux par lui-même qu'il ne peut quentraîner les plus fâcheuses conséquences.
Et en effet, si les membres du Corps législatif en état de porter les armes jouissaient de la faculté de se faire remplacer et de ne point marcher personnellement à l'ennemi, il ■est évident :
1° Que le Corps législatif n'aurait plus le même intérêt à prévenir des guerres inutiles, injustes ou ruineuses ; que les ayant provoquées avec autant de légèreté que d'imprudence, il pourrait encore, avant que le mal eût fait des progrès assez visibles, se mettre habilement à couvert de l'animadversion générale, en se faisant remplacer par un autre Corps législatif que la haine populaire rendrait bientôt victime d'une faute inhérente à l'exercice de ses fonctions ;
2° Qu'il serait tenté de faire partager la même exemption de péril au plus grand nombre des individus en état, par leurs fonctions ou leur crédit, de faire taire de justes réclamations contre les entreprises du Corps législatif sur 'la liberté ;
3° Que la faculté du remplacement étant consacrée, il y aurait peu d'individus qui ne prétendissent à la même faveur, nonobstant les dispositions contraires de la loi, d'où naîtrait, au moment du péril, cet étrange combat de jalousie, avant-cbUrèur du découragement et la défection des armées, lorsqu'au contraire c'est par l'exemple seul de la non-exemption qu'elles peuvent être menées à la victoire.
54. Ces inconvénients sont trop graves, ces considérations trop puissantes pour ne pas
regarder comme une base fondamentale du pacte social et qui doit en faire partie intégrante la prohibition absolue, aux membres du Corps législatif, à se faire suppléer dans le cas où le sort les aurait désignés pour marcher à l'ennemi.
55. Il n'est pas nécessaire que le pacte social se charge de spécifier aucune autre prohibition] celle-ci suffit pouf empêcher le Corps législatif de divaguer sur les vrais principes, et pour prévenir toute exemption personnelle qui ne serait point d'accord avec la troisième condition exprimée au n° 51.
Il importe même que le pacte social soit renfermé à cet égard dans les limites les plus étroites ; car, au moment d'une guerre plus ou moins menaçante, la société peut se trouver dans une position telle qu'il lui soit avantageux de faire partager à tous les citoyens sans exception, la faculté du remplacement à prix d'argent.
La détermination do l'âge au-dessous duquel on ne peut pas encore être forcé de courir la chance du sort, et de celui au-delà duquel on ne doit plus y être contraint, paraît également appartenir aux mesures simplement législatives.
Il en est de même de l'exemption absplue relative à des infirmités ou vices capitaux de conformation, car, à mesure que la société a besoin de déployer de plus grandes forces, la limite de ces deux sortes d'exemptions doit se resserrer dans la même proportion.
66. Cependant, je ne puis résister au désir de présenter ici l'idée d'une mesure législative et peut-être constitutionnelle.
Elle consiste à déterminer avant toute déclaration de guerre, tout soupçon d'hostilités ;
1° Non pas le nombre d'hommes à fournir par chaque localité, mais le mode de rassemblement des citoyens pour procéder à la conscription militaire et les règles du tirage au sort ;
2° L'ordre successif dans lequel se fera ce tirage pour obtenir une première formation, et désigner les suppléants qui devront remplacer les individus en cas de fuite ou de décès, afin que le nombre soit toujours complet ; "
3° Les principes et le mode des tirages subséquents ;
4° L'organisation des bataillons, la durée de leur service ;
5° L'armement et l'équipement ;
6° Les peines de l'absence au tirage, et celles de la fuite ou la désertion.
Si les individus en état de porter les armes, connaissaient d'avance une telle loi, que son enseignement fît partie de l'éducation publique, il n'est pas douteux alors que la force publique ne puissé être mise sur pied avec une extrême diligence, au moyen d'une loi additionnelle portant règlement du nombre d'hommes.à fournir, des exemptions personnelles d'âge ou d'infirmités, des limites de la faculté du remplacement à prix d'argent, et de la. paie du soldat dans les différents grades qu'il occuperait à l'armée, et l'on conçoit facilement que le succès est attaché principalement à la rapidité et à l'unité des mouvements.
Au surplus, je ne regarde point comme une base fondamentale du pacte social le licenciement des armées en temps de paix, quoique le contraire soit infiniment redoutable à la
liberté et à la souveraineté des peuples ; mais la permanence de la force publique salariée pourrait être encore nécessaire jusqu'à ce que les nations de l'Europe aient adopté le même régime et les mêmes principes que le peuple français.
Je rangerai dans la même classe la contribution supplémentaire indispensable au service de la guerre, dont j'ai parlé à lajin du n° 45 ; car, si le pacte social ou la Constitution convient à "la nation, le peuple saura toujours bien stimuler ses représentants pour les déterminer à ne pas négliger ce soin important.
4° Contribuer aux charges communes.
57. Lorsque j'entends parler de liberté, d'égalité et de fraternité, sans que les mêmes hommes s'empressent de rien proposer pour garantir la liberté, l'égalité et la fraternité contre les atteintes de la richesse, les brigandages de la paresse ou de la mendicité et les manœuvres de l'ambition aux regards farouches et pervers, il me semble voir ou d'insignes fripons, ou des joueurs de gobelets, ou enfui ces fous de Bedlam ou de Bicêtre, qui se croient des rois au milieu des chaînes dont ils sont accablés.
On a tant et si profondément déraisonné sur le mode de contributions le plus propre à atteindre la fortune dans les mains de celui où elle rassemblée en plus ou moins gros volumes, qu'il semble que cette matière soit épuisée, et cependant les choses sont encore à cet égard au même point que du temps du bon et vertueux abbé de Saint-Pierre. L'inégalité de distribution des contributions publiques est palpable, évidente ; les préceptes les plus sacrés sont violés ; voilà le mal ; où donc est le remède ?
58. Il n'est pas douteux que si la société avait résolu de faire contribuer chacun de ses membres, à raison de leur fortune, dans une proportion soit simplement géométrique, soit croissante comme les carrés, les cubes, les quatrièmes puissances, etc., ou suivant le rapport des cosinus, tangentes du cercle, ou de leurs logarithmes etc., soit enfin d'après l'échelle intermédiaire plus ou moins rapprochée de l'une de ces progressions, et croissant de la pauvreté à l'extrême richesse ou réciproquement, etc. î ce principe de cotisation universellement adopté, deviendrait à peu près illusoire, quoique compris au nombre des dispositions fondamentales du pacte social ou de la Constitution ; car chaque individu agirait effectivement comme s'il osait parler ainsi à la société : « J'emploierai à derober à la con-« naissance de ma fortune ou de la matière « imposable que je possède ou qui est à ma dis-« position tout ce que la nature m'a donné de « forces, d'audace, d'intelligence, d'astuce et « de souplesse, jusqu'à oe que vous m'ayez suf-« fisamment garanti, non la bonne foi des « autres contribuables, je n'y crois pas plus « qu'à la mienne ; mais qu'ils se trouveront (t constitués, malgré eux, et par l'endroit le « plus sensible qui est l'intérêt personnel, dans « la nécessité de contribuer aux charges com-( munes dans la vraie proportion indiquée par « le pacte social ».
Dès lors, si la Constitution déterminait la
base de cotisation, il serait indispensable de la mettre, par une garantie suffisante, également exprimée dans le pacte social, à l'abri des entreprises de la propriété, des atteintes de la cupidité ou des manœuvres de l'intérêt personnel, comme de l'inexpérience des corps législatifs ou de la précipitation, de la turbulence de ses délibérations ; sans quoi il y aurait toujours inégalité de répartition des contributions publiques sur les diverses localités de la République, et de cotisations sur les individus : le pacte social réduit à la seule expression d'une base que chacun pourrait violer impunément, finirait par devenir la risée des nations.
Ainsi donc le mode de garantie est inséparable du précepte ou de la base de cotisation.
59. Dans le nombre des garanties qu'on pourrait imaginer, il en est une qui, par sa nature, ses heureuses combinaisons, l'avantage qu'elle a de donner, avec la plus grande précision, la valeur de toutes les richesses imposables soit territoriales, soit mobilières, et par conséquent de conduire enfin au cadastre, tient le premier rang et ne pourrait être négligée sans apporter le désordre le plus manifeste dans l'organisation de toutes les contributions publiques.
C'est celle par laquelle, tous les ans, pour les richesses mobilières et tous les cinq ou dix ans pour les richesses territoriales, indépendamment du cas de mutation dans l'intei*-valle, chaque individu riche ou pauvre, sans exception, serait tenu, à un jour déterminé pour tous ou du moins dans un espace de temps dont le terme fatal serait précisé de faire, non en présence de tous, non avec la précipitation qui veut faire consacrer ses erreurs ou ses infidélités dans une assemblée générale et tumultueuse, dans laquelle un petit nombre d'intrigants en crédit auraient tous les avantages, les citoyens vertueux et paisibles, présents ou absents, toutes les défaites, mais séparément, isolément, avec le calme de la réflexion et la crainte salutaire d'être puni de ses réticences, la déclaration, par écrit, signée de lui, ou légalement certifiée à son défaut, de toutes ses propriétés foncières et mobilières, avec leur situation précise et tous les indices propres à les reconnaître en cas de doute, leur valeur, non pas seulement en produit annuel, toujours incertain, mais vénale et absolue ; et les charges en capitaux et intérêts dont elles sont grevées au profit des créanciers, avec les noms et demeures de ceux-ci, pour être en état de les atteindre et prévenir d'ailleurs toute fausseté.
Si la négligence était punie d'une double cotisation.
S'il en était de même en cas d'omissions ou de fausse déclaration.
Si la récidive donnait lieu à une triple ou quadruple cotisation avec la peine de destitution des fonctionnaires publics ; car la société ne doit plus sa confiance à un homme qui l'a déjà trompé deux fois, et qui, par son influence sur les autres citoyens, leur a peut-être inspiré la haine de leurs devoirs, ou le désir secret de s'en affranchir.
Si le produit de la peine pécuniaire, au lieu d'entrer au Trésor public, ce qui ne manquerait pas de corrompre les contributions, était versé partie dans la caisse des pauvres et
l'autre partie entre les mains du dénonciateur ou venait en déduction de sa cotisation.
Si le dépôt de ces déclarations était ouvert à tous les individus indistinctement, et qu'ils eussent le droit de les critiquer devant les autorités constituées.
Si, lorsque la nécessité publique, également constatée, exige le sacrifice d'une propriété quelconque foncière ou mobilière, le propriétaire n'en pouvait être remboursé que sur le pied de la valeur qu'il y aurait lui-même affecté dans sa déclaration.
Si l'organisation des hypothèques était telle que le propriétaire ne pût acquérir de confiance pour emprunter que sur la base même de sa déclaration à la contribution.
Si le régime immoral des contre-lettres était proscrit, comme il doit l'être dans tout gouvernement tant soit peu supportable, puisque sous quelque point de vue que l'on en considère l'usage, leur objet positif est de dérober la vérité, ou pour tromper des tiers, ou pour se soustraire aux contributions publiques et en rejeter le fardeau sur les autres citoyens, et souvent pour remplir ce double but à la fois.
Si l'individu créancier ne pouvait être admis à poursuivre son débiteur ni à recevoir des caisses publiques, qu'en rapportant la preuve, non pas au paiement de ses contributions dont le recouvrement peut toujours se faire sans recourir à cette gêne particulière qui, d'ailleurs, n'est point applicable à la contribution foncière, mais que la dette par lui réclamée, soit litigieuse, soit résultante d'un titre quelconque, est consignée dans sa déclaration contributive pour toute la somme qui fait l'obi et de sa demande.
Si, relativement aux richesses territoriales, nul ne pouvait s'exproprier volontairement que par la voie de l'adjudication publique, au plus offrant et dernier enchérisseur, devant des magistrats désignés, après qu'elle aurait été désignée par affiches, non pas clandestines, mais publiques, d'où résulterait l'avantage de faire disparaître sans retour ces fraudes scandaleuses, ces réticences coupables dans le véritable prix des acquisitions d'immeubles, ces collusions si fréquentes entre le vendeur et l'acquéreur, pour braver impunément le droit d'enregistrement et qu'aucun frein ne peut arrêter ni prévenir, maintenant que la libre disposition des biens territoriaux n'est plus entravée par les retraits lignagers, féodaux, censuels, etc., etc.
Si enfin les contributions publiques étaient tellement liées avec le système général de législation civile et les actions intéressées de chaque individu, que ce fût, sinon un crime, au moins une honte et un opprobre aux tribunaux et aux autorités constituées d'avoir deux jurisprudences, l'une ferme et vigoureuse lorsqu'il s'agit d'intérêts individuels, l'autre lâche et pusillanime lorsqu'il s'agit des contributions publiques, des intérêts ou du bonheur de toute la société.
U semble démontré qu'alors :
1° La base de cotisation serait suffisamment garantie ;
2° La société pourrait simplifier extrêmement le système de ses contributions publiques les réduire peut-être à trois espèces principales, telles que la contribution foncière, celle mobilière qui ne présenterait plut aucun
de ses vices actuels et le droit d'enregistrement : elle pourrait du moins se débarrasser des loteries, des patentes, et avec elle de cette multiplicité d'agents dont la présence, plus encore que l'énormité des salaires, importune si fréquemment les regards des bons citoyens ; et, dans tous les cas, renoncer à l'emploi de cette autre base (si injuste et vexatoire pour les professions les moins lucratives de la société), qui attache la présomption de la fortune là où il y a un plus grand local d'habitation personnelle, comme s'il fallait moins d'espace pour log^r des sabots que des diamants.
3° L'administration de la justice civile deviendrait moins dispendieuse, puisque les tribunaux se trouveraient, d'un trait de plume, débarrassés de cette foule de prétentions à des créances véritablement éteintes et que l'ignorance d'un héritier, où la cupidité et la mauvaise foi voudrait faire revivre à la faveur d'un titre resté par oubli dans ses mains ; et c'est déjà un grand acheminement vers le retour des bonnes mœurs qu'il est plus que temps de rappeler au milieu des Français.
60. Il est infiniment juste que, quelle que soit la proportion de cotisation adoptée, la portion du produit de l'industrie et du travail reconnue nécessaire à chaque citoyen pour sa subsistance ne puisse être, comme le propose l'article 5 du titre XII du projet de Constitution assujettie à aucune contribution ; mais on conçoit aisément que l'extrême avarice, qui ne manquerait pas de prendre le costume de la. médiocrité ou de l'indigence, finirait par abuse'* étrangement de cette faveur, si elle n'était point retenue par la déclaration contributive et les diverses peines et privations de droits attachés à l'omission de cette déclaration ou aux infidélités sont elle serait imprégnée : voilà pourquoi le pauvre comme le riche doit y être assujetti, sauf à faire, pour le premier, la déduction que le pacte social accorderait à ses vrais besoins.
61. Cependant les garanties désignées au n° 59 ne sont pas toutes également et indistinctement nécessaires au maintien de la base de cotisation adoptée ; car, dans celle d'après laquelle un écu ne doit jamais, lorsqu'il est accompagné de plusieurs autres, dans la même bourse, contribuer dans une proportion plus forte que s'il y était renfermé tout seul (c'est la proportion simplement géométrique, celle d'où il résulte que si 100 livres de richesses doivent être cotisées à 20 livres, 10 francs de fortune doivent contribuer pour 2 livres,) il est infiniment plus simple et surtout plus convenable de rendre l'impôt collectif, sauf à rétablir l'égalité proportionnelle par la voie du dégrèvement.
Dans l'impôt collectif, dont il est utile peut-être d'expliquer ici les principaux caractères, ce n'est pas rigoureusement une quotité quelconque de la matière imposable, mais une somme fixe et déterminée de contribution que le Corps législatif a jugée nécessaire, indispensable au service du Trésor public et qu'il répartit d'une manière plus ou moins erronée sur les départements, en désignant le contingent que chacun d'eux devra supporter dans la somme totale ; les départements font la même opération sur les districts de leur arrondissement, ceux-ci sur les communes qui leur sont subordonnées, et enfin le contingent
définitif de chaque commune est réparti, au marc la livre, c'est-à-dire en proportion, simplement géométrique, sur tous les contribuables de la commune, cotisables, soit la contribution foncière, soit à la contribution mobilière, à raison de leur fortune.
Alors il suffit de prescrire la déclaration contributive individuelle avec les peines pécuniaires qui doivent y être attachées pour la rendre exacte et en forcer le dépôt au terme indiqué, sans recourir à la garantie particulière qui consiste à interdire toute action ou exécution, au propriétaire sur son fermier, au créancier sur son débiteur public ou privé, etc., jusqu'à ce qu'il ait prouvé que cette dette n'est point omise ou scellée dans sa déclaration contributive ; car l'individu dans l'hypothèse de l'impôt collectif, se trouve nécessairement grevé d'un marc la livre plus fort qu'il n'aurait dû le supporter, s'il n'y avait point eu omissions ou infidélités par un seul ou plusieurs contribuables, ou par une commune voisine, etc., etc.,; alors l'intérêt personnel, cet agent le plus actif, comme le plus puissant de tous les surveillants, lui prescrit suffisamment de corriger l'erreur et de faire rétablir de proche en proche l'égalité proportionnelle : or, c'est un principe de gouvernement politique qu'il ne faut pas multiplier ces sortes de garanties sans une évidente nécessité.
62. Mais tout change dans l'impôt dont la progression suit la raison des carrés, des cubes, des quatrièmes puissances, etc., etc., ou la raison d'une autre échelle quelconque croissante de la pauvreté ou de la simple médiocrité à l'extrême richesse.
Je prie qu'on me donne ici une attention soutenue, car je crois devoir annoncer que je me connais actuellement peu de rivaux en Europe sur cette matière. Que cela soit vrai ou non, j'ai longtemps réfléchi si je me permettrais une telle jactance dont l'effet naturel et indubitable, est de vouer tout à la fois et au ridicule et à la perte d'une partie des avantages du régime social, celui qui ne craint pas de se prôner avec tant d'insolence : mais il m'a paru démontré que si j'étais condamné à en porter la peine, l'activité des passions qu'elle va mettre en jeu pour établir la proposition contraire ne pouvait manquer de devenir utile à la chose publique, en constatant mieux que je n'aurais pu le faire, le véritable point de la difficulté ; et je n'ai plus hésité : ainsi je continue.
Suivant cette progression, un écu lorsqu'il est accompagné de plusieurs autres dans la même bourse, devant contribuer pour une somme plus considérable que s'il y était renfermé tout seul, le contribuable terrien ou capitaliste est intéressé, pour échapper à l'impôt; d'abord comme terrien, à vendre ou à échanger ses propriétés foncières trop con-tiguës ou trop réunies sous un même point de vue, un même centre de surveillance, afin de le disséminer sur une plus grande surface; .comme capitaliste, manufacturier, etc., à distribuer ses spéculations, ses ateliers, etc., d'après le même système.
L'extrême mobilité de toutes ces combinaisons celles résultant du partage des successions, et d'autres causes qu'il faut laisser à la sagacité du lecteur, ne permettent pas de rendre collectif cet impôt, comme dans la progrès-
sion simplement géométrique; car, d'un instant à l'autre, la matière imposable ne prér sente plus les mêmes résultats dans une même commune et il arriverait que de deux fortunes semblables, l'une serait écrasée par l'impôt collectif, tandis que l'autre placée dans une commune contiguë, n'aurait presque rien à pay er, d'où résulterait un scandale qui deviendrait l'opprobre du gouvernement.
U serait absurde de chercher à donner à cet impôt aucun caractère collectif.
Dès lors, le voilà rangé dans la classe de ceux connus sous le nom d'impôt de quotité. Il n'est pas indirect, puisqu'il frappe sur l'universalité des propriétés foncières et mobilières de chaque individu, à la différence des contributions indirectes proprement dites qui n'agissent sur toutes les choses commerçables, ou seulement sur quelques-unes d'entre elles, que dans certains cas, certaines circonstances ou certaines actions de leurs possesseurs ; mais il retient un des caractères de celles-ci, qui est d'être indéterminé ; le Trésor public ne peut jamais, en effet, savoir d'avance, ni le Corps législatif préciser, par aucune loi exécutable, la somme exacte qu'il doit produire annuellement, quoique la base de cotisation reste toujours la même.
Or, dans l'impôt de quotité, chacun stipule pour soi contre le gouvernement, et fait sa condition la meilleure qu'il lui est possible; nul lien, nulle correspondance intime d'un individu à l'autre : il ne reste que la dénonciation civique toujours faible et tardive : l'ascendant de la propriété manque rarement d'atténuer la force des réclamations contre l'infidélité trop évidente; mais parmi le petit nombre de celles qui échappent à ce premier ravage, quelques-unes se trouvent tellement déshonorées par la haine et la vengeance individuelles, qu'elles communiquent aux autres tout l'odieux de cette origine; et de proche en proche, la dénonciation civique, si utile lorsque les lois l'ont environnée d'une garantie protectrice de l'innocence, finit par manquer totalement son effet.
D'où il résulte que l'impôt de quotité doit être accompagné de plus de garanties ou de précautions que l'impôt collectif.
Je ne me propose pas de faire ici un traité complet de l'organisation des contributions publiques; cela ne mènerait trop loin : ce que j'en ai dit suffit, ce me semble, pour faire apercevoir qu'il serait peut-être imprudent de retrancher une seule des garanties indiquées au n° 59.
63. La nature et l'espèce de ces garanties a, sans doute, de quoi faire frémir, non pas les pauvres ou les individus propriétaires d'une fortune très médiocre, mais le petit nombre de riches et de commerçants, négociants, etc., dont les affaires multipliées et la cupidité leur permettent à peine de s'occuper un instant du salut public.
« Quoi! diront-ils à la société, vous exigeriez de nous, une fois tous les ans, le bilan exact de notre fortune?
« — Oui, si vous-même n'avez pas d'autre garantie de la bonne foi des autres contribuables, et qu'il soit impossible de maintenir autrement la base de cotisation adoptée. »
64. J'avais résolu de placer ici sous forme
de dialogue toutes les objections pour et contre la nature de ces garanties, avec les réponses qu'on pouvait y faire; mais tout ce qui précède ayant été imprimé avec précipitation, je me suis aperçu trop tard que l'ordre du manuscrit avait été interverti et qu'il devenait indispensable de suivre une autre méthode pour rétablir la liaison des idées.
Afin de réparer cette méprise, je vais comparer successivement une des bases de cotisation avec l'autre! et les considérer toutes deux dans leurs rapports immédiats avec le régime social.
J'avertis ici que pour lever tout doute sur le sens des expressions, il faut entendre par impôt proportionnel, celui dont la base de cotisation est la proportion simplement géométrique; et par impôt progressif, celui dont la base de cotisation est formée par une seule ou plusieurs progressions de suite, croissantes avec plus ou moins de rapidité ou de lenteur, comme on voudra, depuis la pauvreté ou l'extrême médiocrité jusqu'à l'extrême richesse; non que j'approuve cet emploi du mot progressif, puisque la proportion simplement géométrique, est elle-même une progression, mais on connaît déjà ce dernier impôt sous le nom que je lui affecte ici, et ce n'est pas la peine d'en changer.
65. Dans l'impôt proportionnel, l'individu ne peut jamais être conduit à se détacher du droit de propriété, et cette proposition est trop évidente par elle-même pour qui je m'y arrête plus longtemps.
Dans l'impôt progressif, au contraire, il arrive un moment où, mathématiquement, l'individu riche se trouve constitué dans l'impossibilité absolu de rien acquérir au delà, ou d'exercer plus longtemps son industrie, à moins de consentir volontairement à la perte successive de tout ce qu'il aurait acquis.
Ainsi, par exemple, dans la progression où 100 livres de revenu seraient affranchies de toutes contributions, mais d'après laquelle 200 livres seraient cotisées au dixième; 300 livres au dixième plus un centième, ce qui fait 11 0/0; 400 livres au dixième, plus deux centièmes, cé qui fait 12 0/0; 500 livres au dixième plus trois centièmes, ce qui fait 13 0/0; et ainsi de suite, le moment où un individu ne peut plus acquérir est celui où il paierait 2,484 livres de contributions, parce qu'il posséderait alors un revenu de 4,600 livres; s'il augmente sa fortune de 100 livres, c'est-à-dire qu'elle soit portée à 4,700 livres, il devra payer 2,585 livres ou 101 livres de plus que dans la première hypothèse : mais sa fortune n'est augmentée que de 100 livres; voilà donc 20 sols qu'il est obligé de prendre sur ce qu'il avait acquis précédemment, et à mesure qu'il veut avancer vers la richesse, sa fortune décroît en telle sorte que lorsqu'il croit posséder 9,200 livres de revenu, il n'a plus rien à lui, puisqu'il est obligé de contribuer pour une pareille somme de 9,200 livres.
Suivant la nature des choses, le moment où il n'a plus aucun intérêt à acquérir (c'est le maximum de 4,600 livres, dans l'hypothèse actuelle) est beaucoup plus proche encore que ce point mathématique; car il ne faut pas négliger de tenir compte des dépenses person { nelles de l'individu, ainsi que des frais de
gestion et de surveillance qui s'accroissent comme le patrimoine lui-même.
On pourrait,- sans doute, imaginer une infinité de progressions plus lentes que celles-ci dans leurs effets, ou une suite de progressions dont l'une croîtrait moins ou plus que la suivante ou la précédente, etc.; on ne manquera pas même de faiseurs qui en proposeront de toutes sortes; mais la seule différence entre elles, c'est que le point mathématique où l'individu doit être de sa propriété se trouvera plus ou moins reculé : voilà tout le mystère.
Enfin il est possible de le reculer davantage en terminant la suite des progressions par une proportion simplement géométrique. Dans cette hypothèse, il pourrait arriver que l'individu fut détaché de sa propriété plutôt par l'énormité des frais de gestion que par celle de l'impôt.
66. Dans l'impôt proportionnel, nul obstacle au développement de l'industrie, à l'établissement de grands ateliers qui puissent enlever ou du moins soutenir la concurrence des nations voisines.
Dans l'impôt progressif, au contraire, l'industrie est forcée dé se taire; l'individu n'a nul intérêt à développer ses talents et il serait possible qu'un peuple qui aurait adopté cet impôt devint en peu de temps la proie d'une nation voisine, moins puissante, mais plus industrieuse, et qui ne manquerait pas, sans doute, de faire couler son or corrupteur par tous les canaux qui pourraient servir ses desseins ambitieux : voilà son effet général et politique.
67. Dans l'impôt proportionnel, les valeurs numéraires qui alimentent le Trésor public se trouvent, par la circulation, rappelées à peu près également à leur premier point de départ, si ce n'est le cas de guerre où leur rappel se fait avec plus ou moins de lenteur vers les lieux éloignés de la présence de la force armée qui consomme le plus des deniers publics.
Dans l'impôt progressif, ce rappel a lieu inégalement, savoir avec profit pour les localités qui paient peu de contributions et avec déchet pour celles qui en paient beaucoup; et la raison en est sensible, puisque de deux communes également riches, prises en masse, celles où les richesses se trouveraient distribuées très inégalement entre les individus, pourrait contribuer pour une somme double ou triple de l'autre où les fortunes seraient à peu près de niveau entre elles.
Ainsi supposé qu'il soit possible de vaincre toutes les résistances attachées à la perception ou l'impôt progressif, il est dans sa destinée absolue et insurmontable d'écraser Paris, Bordeaux, Marseille, etc.; où se trouvent réunis le plus grand nombre de riches, de capitalistes, de manufacturiers, armateurs, commerçants, etc.; jusqu'à ce qu'un nouvel ordre de choses dans le régime social y ait appelé une autre sorte d'industrie, des moyens de subsistance d'un autre genre, d'une autre mesure, en un mot, un autre système politique, civil ou moral.
Le calcul démontre en effet que, pour prévenir ou arrêter ces funestes inconvénients, il faudrait tellement rapprocher la base de cotisation de celle de l'impôt proportionnel
qu'elle vînt se confondre totalement avec elle; et dès lors, il n'est plus question d'impôt progressif : celui-ci ne serait plus qu'une abstention absurde ou ridicule.
68. Dans l'impôt proportionnel, la vraie définition du droit de propriété n'éprouve aucune altération : elle reste tout entière telle qu'on la trouve dans les quatre articles 18, 19, 20 et 21 du projet de déclaration des droits.
Dans l'impôt progressif, il n'est pas vrai que le droit de propriété consiste en ce que tout homme est maître de disposer à son gré de ses biens, de ses capitaux, de ses revenus et de son industrie; il n'est pas vrai que nul genre de travail, de commerce, de culture, ne puisse lui être interdit, etc., etc., puisque la faculté d'acquérir, d'appliquer son industrie, etc., est limitée par l'effet de la base de cotisation qui force l'inaividu de se détacher de tout exercice du droit de propriété à l'époque à laquelle arrive pour lui le maximum de richesses qu'il peut posséder.
Dès lors, c'est une ' autre société, d'autres mœurs, d'autres usages, un autre parti social; les pouvoirs publics doivent être organisés d'une autre manière; ce ne sera, si l'on veut, ni république ni monarchie, mais à coup sûr il faudra plus de baïonnettes et de canon que dans tout autre gouvernement.
69. Dans l'impôt proportionnel, les individus sont laissés à la pente naturelle de leur caractère : ainsi les uns travaillent pour acquérir des richesses, les autres se poussent vers les fonctions publiques, etc., sans l'intervention forcée du parti social.
Dans l'impôt progressif, au contraire, les hommes deviennent fripons pour éluder l'effet de la base de cotisation; et si la progression agit avec une certaine rapidité sur les fortunes, les uns se jettent dans l'agiotage, le prêt sur gages, l'usure, etc.; les autres, avec non moins de violence, dirigent tous leurs efforts vers les fonctions publiques, et il se fait un mouvement de rotation tel que, pour satisfaire toutes les ambitions, il devient indispensable de créer des places au delà de toutes mesures et de toute proportion avec les vrais besoins du gouvernement.
70. Dans l'impôt proportionnel comme dans celui progressif, le nombre des pauvres est toujours le même, car de ce qu'un riche paiera beaucoup et un pauvre très peu ou rien, il ne s'ensuit pas nécessairement que celui-ci acquière une partie de ce que le premier a versé de plus au Trésor public; le travail et l'industrie font tout; la paresse est un fléau politique*.
Mais un des effets moraux de l'impôt progressif, c'est d'introduire entre le riche et le pauvre une guerre d'autant plus active et plus dangereuse à l'a tranquillité publique, au bonheur général, que de l'exemption des contributions que l'impôt progressif semble accorder plus éminemment au pauvre et qui, dans la réalité, ne lui profite jamais, il n'y a qu'un pas à la prétention d'être affranchi du travail.
Ce n'est donc pas l'impôt progressif qui ramène la paix et le bonheur au sein de la société; c'est uniquement l'application bien entendue de la maxime qui fait le sujet de la
première partie de cet ouvrage et que je répète ici : c'est que le gouvernement ne peut jamais atténuer les effets terribles de la rapidité qu'en la menaçant, par des ateliers publics toujours ouverts, d'une concurrence toujours prête à déjouer ses manœuvres.
71. Si l'on porte ensuite ses regards sur les difficultés d'exécution attachées à l'une et l'autre contribution, on trouve le premier résultat qui suit :
Dans l'impôt proportionnel la mauvaise foi d'un contribuable ne peut être tolérée par la commune entière qu'autant qu'il y a réticence semblable et proportionnelle par tous les autres contribuables de la même commune; mais il est aisé de faire disparaître cette sorte de résistance collective, par les moyens indiqués aux pages 12 et 13 du rapport du 21 août 1792 et aux titres 3 et 4 du protêt de décret sur l'organisation de la contribution foncière, qu'on pourrait appliquer aussi à la contribution mobilière, moyennant le régime des déclarations contributives.
Dans l'impôt progressif, au contraire, il n'est pas nécessaire que les autres contribuables soient en faute pour déterminer la commune entière à protéger de toute sa force, de toute sa puissance, la réticence d'un seul d'entre eux; car les contributions excessives qu'auraient à payer un petit nombre d'individus dont la grande fortune ou les grands établissements de commerce, de manufactures, etc., entretiennent l'abondance et vivifient l'industrie dans le voisinage, ne pourraient être versées au Trésor public qu'aux dépens de la classe laborieuse qui n'aurait plus les mêmes moyens de subsistance, puisque la circulation ne pourrait jamais ramener avec assez de diligence la même somme à son point de départ.
Cette classe est donc intéressée à couvrir de toute sa protection la résistance des contribuables; c'est alors véritablement que le gouvernement devrait posséder, pour le malheur des peuples, toute l'énergie des baïonnettes et du canon : C'est alors enfin que la nation se retrouverait, sans le savoir, sous le plus abominable et le plus atroce de tous les gouvernements.
72. Je néglige de comparer entre elles les autres difficultés d'exécution propres à chacune des deux contributions : celle-ci suffit; la réflexion et l'intelligence du luteur feront aisément le reste.
73. Ainsi et voilà ma conclusion, l'impôt proportionnel est le seul qui convienne au maintien du régime social.
L'autre est surnaturel, impossible à réaliser ou subversif de la société.
74. Cependant il serait possible qu'une nation, dont les lumières auraient été corrompues par une longue oppression, livrée tout à coup à ses propres forces, dirigée tout à la fois et par les déclamations insensées du tribun, du factieux, et par celles des ennemis de l'extérieur intéressés à étouffer la science qui éclaire, le courage qui sait arracher sans pitié le masque du faux patriote, déjouer les manœuvres du mauvais citoyen; il serait possible, dis-je, que cette nation voulût une chose absurde ou de la plus difficile exécution.
Il serait possible encore que les représentants de cette nation eussent tenté vainement de l'éclairer sur les manœuvres de l'ambition tribunitienne, ou de la malveillance absolue qui aurait provoqué cette absurdité, et qu'ils se trouvassent dans la nécessité de suivre le torrent.
Il est donc nécessaire de rechercher comment la volonté nationale pourrait être garantie contre les efforts sans nombre que l'intérêt personnel ne manquerait pas d'y opposer pour la rendre inutile, ou ridicule, ou dangereuse.
75". Au reste, quelle que soit la nature et l'espèce de ces garanties, il est d'une nécessité indispensable de les exprimer dans le pacte social, sans quoi la législature qui suivrait une Convention, ne voulant pas employer les mesures nécessaires au maintien de la base de cotisation, cette omission seule changerait tout le système social et la législature deviendrait infailliblement constituante ou conventionnelle.
76. C'en est assez sur ce point; laissons de côté les autres conditions fondamentales du pacte social et passons rapidement aux principes sur l'organisation des pouvoirs publics.
CHAPITRE IV.
De l'organisation des pouvoirs publics.
77. C'est pour que les hommes se croient toujours plus de droits à exercer que de devoirs à remplir que le gouvernement politique des sociétés devient nécessaire.
Le gouvernement est simple et peu coûteux, ou il est compliqué et extrêmement dispen-pendieux, suivant que le pacte social aura plus ou moins garanti l'observation des devoirs contre la prétention toujours renaissante des droits.
78. Ainsi, à mesure que les fonctions publiques s'élèvent en autorité et qu'elles doivent agir sur un plus grand territoire ou sur une plus grande masse d'individus, elles doivent avoir une durée plus considérable : voilà le principe incontestable. La proposition inverse donnant à l'ambition une direction désordonnée et toujours en exercice, remettrait infailliblement entre les mains des autorités inférieures le pouvoir de renverser, de proche en proche, les autorités supérieures qui feraient olbstacle à leur ambition. Ainsi le pouvoir municipal désorganiserait d'abord, puis anéantirait ensuite l'autorité du district; la même chose aurait lieu de celle-ci au département, et enfin du département au Corps législatif.
Alors la société n'aurait véritablement aucun parti social : elle serait en révolution perpétuelle et permanente.
Le plan de Constitution que je discute ici est donc en contradiction formelle avec ce principe, lorsqu'il propose, article 3 de la section 2 du titre IV, une durée de quatre années pour les fonctions des corps administratifs de département, et d'un an seulement pour celles du Corps législatif, article 1er, section 1™ du titre VII.
79. Rien de plus détestable, sans doute, que les extrêmes. Le ridicule ineffaçable des fonc-
tions d'un jour et le danger de celles héréditaires ou même simplement viagères sont trop connus pour que la raison n'en ait pas déjà fait justice complète. Mais n'y a-t-il donc pas un autre terme plus convenable à la prospérité des nations, à la durée du pacte social, que le maxirrvum d'un an? Est-il permis à des hommes raisonnables de céder avec tant de facilité à un premier mouvement de popularité contraire aux intérêts du peuple même, car c'est lui seul qu'il faut voir partout, en le garantissant d'une main ferme et vigoureuse contre les atteintes si déliées de la malveillance et la démagogie de l'ambition qui ne sait égarer l'opinion de la multitude que pour la conduire plus sûrement à sa perte? Doit-on écouter avec tant de complaisance les divagations de ces pamphlétaires qui ne voient de bonheur public que là où le peuple est en convulsion ?
80. Toute fonction publique doit être salariée ; je n'en excepte pas même les fonctions simplement municipales; cette maxime est une conséquence de l'exercice du droit de propriété qui appelle tous îles individus à recueillir le fruit de leurs travaux.
Dans le système de la gratuité des fonctions: 1° l'homme vertueux, modeste, instruit, mais peu fortuné, ne peut jamais devenir l'objet du choix de ses concitoyens, si ce n'est sous la Condition présupposée d'une détermination aussi désintéressée de sa part qu'elle serait absurde ou tyrannique de la part de la société; 2° nulle responsabilité possible, et la garantie du bon exercice des fonctions n'est plus qu'un mot vide de sens ; 3° Le gouvernement est nécessairement dans la main et à la disposition absolue des riches, des intrigants, des fripons ou de ceux qui n'attendent que l'occasion favorable de le devenir avec plus d'impunité.
81. Il n'est pas permis de supposer qu'aucune société politique veuille déléguer ou ce qu'induirait manifestement le silence de la Constitution, laisser aux divers fonctionnaires publics, soit en corps, soit individuellement la faculté, trop évidemment abusive, de régler eux-mêmes le salaire qui leur appartient.
C'est à l'autorité supérieure que ce soin doit être confié à l'égard de toutes les autres autorités subordonnées.
Mais, dans l'hypothèse où le Corps législatif serait la première de toutes les autorités constituées, il est clair que la nation, le souverain en un mot, doit intervenir pour fixer irrévocablement la liste civile de cette première autorité.
S'il en était autrement, qui empêcherait le Corps législatif de dévorer la fortune publique et, avec elle, toutes les fortunes particulières, puisqu'aucune autorité rivale ou supérieure ne pourrait l'arrêter ?
L'opinion ? Mais les efforts redoublés et successifs de la mer contre le rivage ne finissent-ils donc pas par l'engloutir s'il n'y a }à un rocher qui la force de reculer ?
J'avoue franchement que je n'ai rien compris au silence du plan de Constitution sur la liste civile du Corps législatif qui valait certainement bien la peine d'un article constitutionnel.
On dira peut-être que l'extrême mobilité des valeurs numéraires rendrait, par succession
de temps, cette fixation excessive ou insuffisante. Ce dernier cas est le plus probable.
Mais rien n'empêche de l'évaluer en quotité de la richesse nationale imposable, ou comparativement à une quantité donnée des trois ou quatre denrées de premier besoin, ce qui la purgerait de toute variation, comme de tout arbitraire.
82. J'en étais là de mon ouvrage, et, sans m'attacher exclusivement à prouver que ce plan de Constitution promet tout et ne garantit rien, j'aurais du moins tracé quelques autres principes fondamentaux, de l'organisation des pouvoirs publics, lorsque j'ai appris que la Convention nationale avait décrété l'impôt progressif.
J'ignore si c'est comme base constitutionnelle, ou seulement comme une mesure temporaire qui doit cesser avec la guerre.
Dans tous les cas, il me faut un peu plus de recueillement pour savoir si aucune société politique peut exister et comment les pouvoirs publics peuvent et doivent être organisés avec un tel élément.
Pour le moment, je crois remplir le devoir d'un bon citoyen en usant du droit de pétition pour demander à la Convention nationale, ou de retirer ce décret, ou de soumettre à la discussion la plus solennelle et le droit de propriété et les quatre points fondamentaux du régime social ; car la question isolée de l'impôt progressif n'est pas suffisante seule pour démontrer à tous l'incompatibilité absolue de cet impôt avec aucun régime social.
Signé : Jollivet.
a la séance de la convention nationale du
Discours de Pétion en réponse aux accusations portées par Robespierre, contre la Gironde et au rapport fait par Poultier (1) sur les interrogatoires de Steingél et de Lanoue.
texte du moniteur (2).
Il est impossible de tolérer plus longtemps toutes ces infamies ; il
est impossible à l'honnête homme de contenir son indignation,
lorsqu'il se voit insulté avec audace par des êtres flétris du sceau
de la réprobation. Oui, je fais le serment de poursuivre les
traîtres ; oui, il faudra que Robespierre enfin soit marqué comme
autrefois les calomniateurs. (Nouveaux murmures.) Que signifient
donc ces dénonciations perpétuelles contre des hommes qui ont
toujours respiré pour la liberté ? Oui, le peuple connaîtra bientôt
ceux qui, sous le masque d'un faux patriotisme, le trompent,
l'égarent, le poussent dans l'abîme; et je ne serai content que
lorsque j'aurai vu
C'est nous qu'on veut faire égorger.
(Il s'élève de violents murmures dans une partie de la salle.)
U ne voix : Taisez-vous, dictateur du 10 août.
Président, il est permis à la fin de perdre patience. On sait avec quel calme, avec quelle modération j'ai toujours parlé; jamais je ne me suis permis d'insulter, d'injurier, d'inculper personne. Je voulais entretenir dans l'Assemblée l'ordre et la dignité; mais je vois la chose publique trahie, traînée à sa perte ; je vois une foule de bons citoyens aveuglés, méconnaître l'abîme où l'on cherche à les précipiter. On ne cesse de calomnier la Convention. Le système d'avilissement contre elle existait avant qu'elle ne fût assemblée. Qu'eussent fait de plus nos ennemis? Oui, voilà les ennemis les plus cruels de la République ; et aujourd'hui qu'ils voient leurs complots sur le point d'être dévoilés... (De nouveaux murmures partent de Vextrémité ci-devant gauche.) Ne vous y trompez pas, la nation ne sera pas séduite, et la patrie saura juger les intrigants et les vrais amis de la liberté. A quoi s'arrête-t-on depuis longtemps ? à des horreurs. On dit sans cesse : Yous êtes le complice de Dumouriez, le complice d'Orléans... Infâmes que vous êtes ! et qui donc périrait le premier, si leurs conspirations réussissaient ? Jamais, je le déclare, non, jamais je ne transigerai avec la tyrannie ; et si l'ennemi était à nos portes, on verrait quels seraient alors les vrais braves.
(Marat interrompt. )
Un vil scélérat qui a prêché le despotisme...
C'est vous qui êtes un scélérat !
Yoilà l'homme qui vous a demandé sans cesse le despotisme, tantôt sous le nom de dictature, tantôt sous le nom de triumvirat. Lorsqu'il a été question de moi personnellement, j'ai gardé le silence, Je me suis honoré de ses calomnies ; il n'avilit que ceux qu'il loue, (Marat renouvelle ses interruptions. )
Plusieurs membres : Taisez-vous, scélérat !
Président, je ne suis pas inquiet de l'opinion que la nation peut avoir de nous en cet instant; je ne suis pas inquiet de celle qu'elle pourra avoir par la suite. Je ne suis pas inquiet surtout du jugement que la postérité portera sur nous. Mais dans ce moment, nous devons nous montrer ici sans ménagement, sans faiblesse; nous devons sévir contre les hommes audacieux qui avilissent, par un système constamment suivi, la repré-
sentation nationale. Nous ne devons pas souffrir qu'on nous menace sans cesse du poignard des assassins.
C'est vous!....
(Une grande partie de VAssemblée manifeste son indignation par des cris.)
, s'avançant au milieu de la salle. Je demande que vous m'assa-ssiniez !... Je suis un homme vertueux aussi...... La liberté triomphera... (Une assez vive, agitation succède pendant quelques minutes à ces apostrophes.)
Qu'est-ce que prouve l'action de David? le dévouement d'un honnête homme en délire et trompé.
Non.
Yous vous en apercevrez.
Tu n'as pas toujours tenu ce langage. (On murmure. )
Je ne demande qu'une chose, et je la demande en grâce : c'est qu'au lieu de ces dénonciations déclamatoires, on avance des faits par écrit et qu'on les signe......
(Nouvelles interruptions. Quelques voix de la même extrémité : Occupons-nous de sauver la patrie !)
Le premier et le plus grand des moyens pour sauver la patrie, est d empêcher l'avilissement, la dissolution de la Convention. J'entends sans cesse dire à ceux qui accusent : A quoi bon s'occuper des personnes; passons à l'ordre du jour. Certes, c'est une étrange tactique que d'accuser et de ne pas entendre ceux qu'on inculpe; certes, la nation doit être bien étonnée de voir quels hommes jouent ici le rôle d'accusateurs, quand il est prouvé qu'ils ont constamment conspiré contre la patrie. N'a-t-on pas osé dire à une certaine société que moi, par exemple, j'étais le complice de d'Orléans. Eh ! ne sait-on pas ce qui s'est passé ? Ne sait-on pas que lorsqu'il était question d'expulser les Bourbons, je lui ai donné un conseil qui peut-être eût sauvé la patrie ? II n'a pas suivi mon conseil.
Pétion, étiez-vous en correspondance avec Egalité fils ?
Oui, oui, oui, cent fois oui; et il eût été à désirer qu'il n'en eût pas eu avec d'autres, il ne serait pas un traître aujourd'hui, et il serait loin de la France. Qui, moi? conspirer contre la République! moi, conspirer pour d'Orléans ! moi qui voulais le faire sortir de son sein. On prodigue des calomnies infâmes; y répondez-vous, on ne vous écoute point; on réitère, on suit même le plan, on répète les calomnies, on espère qu'à la fin on y croira.
Il sera permis de répondre.
Oui, oui..... Je voudrais qu'il
s'engageât ici une lutte qui n'a jamais lieu. Je voudrais que l'on commençât par écrire les inculpations, que l'on entendît par écrit les réponses, que chacun se soumît à mettre là sa tête, pour que celle du coupable tombât.
Je propose la mienne !
Je ne prétends pas faire sans cesse lutte de poumons, de déclamations; cela ne
produit rien. Ce n'est pas ainsi que luttent les hommes libres. Je ne veux ni approbation, ni improbation; mais je veux le calme, je veux la liberté. Déjà nous avons lutté par écrit; et cet homme qui sait que je le connais, Robespierre, je l'avoue, s'est bien conduit dans l'Assemblée constituante; mais je l'avoue aussi, je n'ai jamais conçu ses motifs. (On murmure. )
Le rapporteur du comité de Salut public est là, et nous perdons le temps à nous occuper des personnes.
Je demande la parole pour une motion d'ordre.
Plusieurs voix : Non, non ; la parole est à Pétion !
Que ces explications amènent à connaître les vrais amis de la République. Personne ne désire plus que moi qu'elles nous donnent les moyens de sauver la patrie. II n'est personne qui, ayant assisté à la séance d'hier au soir, ne dise : U n'y a donc plus de Convention nationale. Si nous tolérons plus longtemps ces désordres, je maintiens que nous ne remplirons pas le vœu de nos commettants; je maintiens que nous ne sauverons pas la chose publique. Comment voulez-vous que les hommes les plus patients ne sortent pas de leur caractère et ne soient pas suffoqués d'indignation ? Lorsque, dans les moments où nous sommes, on dit sans cesse : voilà les traîtres, n'est-ce pas dire, voilà ceux qu'il faut égorger? Et croit-on que le peuple ait besoin de victimes, parce qu'il éprouve des revers? Ne vaudrait-il pas mieux lui élever l'âme, l'agrandir, lui montrer le chemin qui peut le sauver ? Si l'on parvient à dissoudre la Convention, que restera-t-il ? l'anarchie. Oui, la chose publique sejra perdue. Ne soyons pas sans cesse à nous déchirer; et surtout quand nous sommes hors d'ici, qu'on n'aille pas m'accuser ailleurs.
M'a-t-on jamais vu dire la moindre injure à mes collègues ? Dans l'Assemblée constituante, certes, je ne manquai pas d'énergie. Le lendemain de l'affaire du Champ de Mars, j'étais sous les poignards; mais on reconnut que j'étais un homme de bien, et j'obtins un amendement, sans lequel la loi n'aurait point passé. P'est qu'alors il y avait de l'humanité, de la justice; alors on savait respecter la représentation nationale......
Quelques voix. Résumez-vous.
Eh bien ! Je vais me résumer. Je demande que si on a quelque inculpation à faire contre un collègue, au lieu d'apporter des présomptions, des déclamations, on écrive et on signe la dénonciation. Je demande que les calomniateurs soient punis; et dans l'affaire actuelle, je demande que le rapporteur soit censuré pour s'être permis de présenter un préambule qui n'était pas adopté par le comité, et que défendaient vos décrets.
J'ai fait ce rapport en mon nom.
U vous fait un rapport sur ce qu'il ne connaît pas. J'avoue que je ne pourrais faire un rapport sur un objet militaire. On voit sans cesse des ci-devant prêtres, des ci-devant ecclésiastiques...
Dites des moines. Je l'ai été ; mais depuis 18 mois je suis à la frontière.
Ce sont ceux-là qui ont le vrai patriotisme *au juste degré de chaleur.
U est permanent.
Tout le monde se dit patriote : plût au ciel que cela fût vrai ! On divise les patriotes en deux classes, dont l'une a le nom d'amis des lois, de modérés. Mais dans quelle classe sont donc les ci-devant nobles, ci-devant aristocrates, royalistes, prêtres? Dans quelle classe ! ils ont le patriotisme par excellence. Ceux qui n'ont pas cessé d'être républicains, ceux qui avant 1*789 avaient attaqué la royauté, ceux-là donc que peuvent-ils attendre? quel serait leur sort si l'ennemi pouvait jamais entrer en France? U faudrait qu'ils mourussent en combattant contre lui; et vous verriez alors quels seraient ceux qui demanderaient à former le bataillon sacré, et ceux qui espéreraient de capituler avec les tyrans. Oui, j'en prends l'engagement solennel; je jure à l'Assemblée, je jure à mes commettants que quelque chose qui arrive, je ne vivrai jamais sous le despotisme...... (On applaudit.) Je demande que le rapporteur soit rappelé à l'ordre pour avoir présenté un rapport qui lui était interdit par les décrets.
texte de logotachyoraphe (1).
U est impossible de tolérer plus longtemps cette infamie (Murmures),
il est impossible à un honnête homme de retenir son indignation,
lorsqu'il aperçoit que des hommes qui devraient garder le plus
profond silence ; que des hommes qui sont marqués de la plus insigne
infamie, osent l'insulter avec cette audace. Oui, je compte
poursuivre les traîtres ; je compte poursuivre les calomniateurs, et
je dis à la France entière qu'il faudra que Robespierre soit puni,
ou qu'il soit marqué d'un fer chaud sur le front, comme
calomniateur. Que signifie donc toutes ces calomnies, aussi absurbes
qu'atroces, dont on abreuve sans cesse ceux qui ont toujours respiré
et qui respireront toujours pour la liberté. Le peuple s'éclairera à
la fin et ceux qui ont pris le masque imposteur de la popularité,
pour le précipiter dans l'abîme, seront connus un jour et punis de
leurs forfaits ; et je ne serai content que lorsque je verrai que
les hommes qui se disent patriotes par excellence, pour perdre la
République, pour perdre la liberté, auront mis la tête sur
l'échafaud. (Applaudi du côté droit.) Je prouverai, jusqu'à
l'évidence, quels sont ceux qui trahissent la République ; quels
sont ceux qui la font détester et haïr avant qu'elle soit établie ;
quels sont ceux qui emploient pour la détruire les mêmes moyens que
nous avons employés pour détruire la royauté. Quels sont ceux qui
disent sans cesse au peuple : levez-vous et réunissez les
conspirateurs, et je demanderai, qui a-t-il à punir, qui a-t-il à
égorger, si oe n'est la Convention nationale ? U est permis à la fin
de perdre patience ; on sait avec quel calme, avec quelle modération
descend de la Montagne au milieu de de la salle ; il découvre sa poitrine, et s'écrie : Frappe !
reprend : Que prouve le dévouement de David 1 II prouve le dévouement d'un honnête homme dans le délire ou dans l'erreur; mais il s'en apercevra, ou mieux vous vous en apercevrez.
Je ne demande qu'une chose, et je la de-
mande pour vous : au lieu de ces déclamations,
au lieu de ces vociférations qui se perdent dans le tumulte, je demande que l'on consigne par écrit les faits. (Une voix : Sauvez la patrie.) Le premier et le plus grand moyen de sauver la patrie, est d'empêcher l'avilissement et la dissolution de la Convention nationale ; voilà ce dont il s'agit ; voilà ce qui devrait être à l'ordre du jour depuis longtemps. J'entends sans cesse dire, lorsqu'on a calomnié, lorsqu'on a outragé de la manière la plus infâme : « A quoi bon s'occuper de querelles personnelles ? Passons à l'ordre du jour. » Voilà ce que font les calomniateurs.
Lorsque tout sera connu, nous verrons si les accusateurs d'aujourd'hui ne sont pas ceux qui ont constamment conspiré contre la liberté : voilà ce qu'il faudra examiner avec attention.
Est-il possible que des hommes soient assez fous, assez atroces pour m'accuser de conspirer contre la liberté Ne sait-on pas ce qui s'est passé ? et ne sait-on pas que d'Orléans est venu chez moi lorsqu'il était question d'expluser la famille des Bourbons 1 Eh bien, que lui ai-je dit 1 Je lui ai donmé un conseil, et voici ce conseil : Je lui ai dit de sauver la chose publique, ot j'ai été dénoncé pour avoir donné ce conseil, et on a fait des affiches contre moi. (Interrompu.)
Oui, cent fois oui : je dirai ce que j'ai fait, et il eût été à désirer qu'il n'eût pas trouvé d'autres conseillers ; car il ne serait plus en France ni ses enfants, voilà le conseil que je lui ai donné ! On vous accable de calomnies infâmes ; vous y répondez, et on n'y fait aucune attention. On continue toujours ces mêmes calomnies, et on dit, à force de les répéter on les croira; on dit : Pétion avait quelque influence, il faut la détruire cette influence, parce qu'il ne pense pas comme nous ; en effet, je ne pense pas comme ceux qui, à force d'excès, à force de violences, veulent étouffer une République dans un berceau.
Il me sera permis de répondre à tes calomnies.
reprend : Je voudrais ici qu'il s'engage une lutte par écrit, parce que les paroles fuient; je voudrais que l'on consignât les inculpations par écrit ; que l'on entendît également par écrit les réponses; que chacun se soumît à mettre là sa tête, et je demanderais ensuite que celui qui serait jugé coupable la perdît.
Je ne prétends pas faire sans cesse une lutte ri de poumons ni de railleries, ni d'injures ni l'outrages ; tout cela ne signifie rien : ce n'est pas ainsi que se justifient les hommes libres : les hommes libres agissent avec une parfaite intégrité. Je ne demande ici ni improbation ni approbation; mais je demande le calme et la tranquillité : je demande par-dessus tout qu'on ne permette pas ces inculpations indécentes, mille fois plus atroces que des faits. Déjà nous avons lutté par écrit avec Robespierre ; il sait que je le connais, et certes, je lui rends ici un genre de justice. A l'Assemblée constituante, par exemple, Robespierre s'est bien conduit, et j'avoue que je n'ai jamais été convaincu par quel motif il a changé. (Long tumulte.)
reprend : Personne ne désire plus que moi que ces explications fassent connaître les véritables amis de la liberté et nous condui-
sent à oc but très simple, à ce but qui fera pourtant que nous pourrons sauver la chose publique: car il n'est qui que ce soit de nous qui, ayant assisté, par exemple, à la séance qui a eu lieu hier soir, n'ait dit : mais il n'y a donc plus de Convention nationale; et si nous tolérons davantage que les calomnies, que les soupçons environnent ainsi les membres, je maintiens que nous nie remplissons pas le but de nos commettants.
Or, voici ce que je demande : si vous avez une inculpation à faire connaître contre moi, écrivez-la; parce que les mots alors ne s'échappent pas ; signez-la ; et je répondrai de même, et je signerai. Mais si on vous provoque sans cesse, comme on vient de le faire dans le moment ; si on vous dit, lorsque vous allez demander la parole : vous êtes un factieux, vous êtes un traître, vous êtes un complice (iiitér-rompu) ; comment Voulez-vous que les hommes les plus patients puissent à la fin ne pas sortir de leur naturel ? Voilà les conspirateurs ! n'est-ce pas dire : voilà les hommes qu'il faut égorger ! Eh bien ! cependant, voilà ce qui se dit tous les jours. Quoi ! est-ce donc la peur qui nous fait parler ? Croit-on donc que le peuple a besoin de victimes, parce qu'il a reçu des échecs"; eh ! ne sait-on pas qu'il vaudrait mieux lui élever l'âme contre nos ennemis, le porter au courage, et lui dire : vainquez vos ennemis : voilà ce qu'il faudrait faire. Mais, lâches, quand vous aurez dissous la Convention, que restera-t-il 1 l'anarchie, lâches, et plus de République. Quand j'entends dire : nous sauverons la chose publique. Ne nous abusons donc pas. Quel est le bien commun, quel est le point central où il faille se réunir ? la Convention. Eh bien ! si elle est anéantie, je le dis d'avance, oui, la chose publique sera perdue.
Mais que doit-on faire ? Il y a des coupables; eh bien ! voyons, mais ne soyons pas sans cesse à nous déchirer ; mais surtout quand nous sommes ici, qu'on n'aille pas me déchirer ailleurs à un de mes collègues. J'ai été, moi, à l'Assemblée constituante, certes je n'ai pas manqué d'énergie. Je n'en ai pas manqué sous les poignards où j'étais. Le lendemain du Champ de Mars, j'osais à peine me montrer à cette tribune. J osais représenter qu'on avait de la prévention contre moi. On reconnut ce*-pendant que j'avais l'amour de la chose publique. On proposa une loi terrible, je fis un amendement à la loi, qui ne pouvait passer sans cela ; mais c'est parce qu'il régnait de la morale et de l'humanité, parce qu'on sentait qu'il y avait de la justice : mais si sans cesse on me déchire... (Interrompu.)
Eh bien ! je me résume, et d'une manière bien généreuse ; je ne parle pas plus pour moi que pour un autre, pour un côté que pour l'autre. Je demande que, si on a un© inculpation à faire, au lieu de venir la faire d'une manière vague, qu'on la signe ; et je demande qu'on poursuive enfin les infâmes calomniateurs qui, poursuive enfin les infâmes calomniateurs qui sans cesse colportent, dans tous les lieux, leurs infamies. Voilà ce que je demande dans l'affaire actuelle.
Je demande ensuite que le rapporteur soit censuré, et voici pourquoi : c'est que le rapporteur yous a fait un préambule que l'on eût cru
être autorisé par le comité : si on n'eût pas relevé cette astuce, que serait-il anivé ? C'est que, dans les papiers, on eût répandu que c'était là l'intention du comité ! C'est ainsi que, par mille petites supercheries particulières, on parvient à égarer l'opinû n publique. Le rapporteur a donc eu tort de vous faire un rapport dont il n'était pas chargé par le comité. D'ailleurs, ce rapporteur parle d'une chose qu'il ne connaît pas. Moi, j'avoue que je ne pourrais pas faire un rapport militaire. Eh bien ! Cependant nous voyons sans cesse ici, et des jadis prêtres et des jadis nobles qui viennent vous faire de pareils rapports. Ce isont ces messieurs (Interrompu), ce sont ceux-là qui ont le patriotisme au degré de chaleur qu'il faut pour prendre continuellement la parole.
Mais je prie de faire ici une observation très importante. Il n'est personne ici qui osât demander les anciens privilèges ; aussi ce n'est pas là la marche que l'on prend ; on divise ce que l'on appelle les patriotes en deux classes ; une, qu'on appelle les patriotes par excellence; et l'autre, les modérés; et l'on suppose que cette dernière classe veut rétablir la royauté. Eh ! dans quelle classe sont donc et tous les aristocrates et tous les prêtres 1
Je le demande ; ceux qui n'ont pas cessé un instant d'être républicain, ceux qui l'ont été avant 1792, ceux qui avaient écrit avant 1789 pour la République, ceux qui, depuis ce temps-là, n'ont cessé d'être républicains, ceux qui, depuis ce temps-là ont combattu la royauté, non pas abattue, mais dans toute sa puissance, ceux-là, que peuvent-ils donc espérer 1 Si jamais l'ennemi pouvait entrer dans notre territoire et dominer l'opinion publique, quel serait donc le salut de ces hommes-là ? Il faudrait de toute nécessité qu'ils combattissent les ennemis où qu'ils se détruisissent ; il n'y a pas entre eux et les ennemis de composition à faire, et certes il n'y en aura pas. Et si les ennemis entrent sur le territoire de la République, vous verrez alors quels sont ceux qui demanderont à périr en formant un bataillon sacré, en allant au-devant d'eux, et quels seront ceux qui espéreront peut-être transiger avec eux. Eh bien ! moi, je jure que, si jamais l'ennemi venait à pénétrer dans l'intérieur, c'est un engagement solennel que je prends devant la nation, oui, je le jure à la Convention, je le jure à mes commettants, je le jure à la nation tout entière, de ne jamais vivre sous le despotisme.
Maintenant je demande que le rapporteur soit censuré, et rappelé à l'ordre, pour avoir fait un rapport qui lui était interdit de faire par les décrets, et dont il n'avait pas commission par le comité.
texte du journal des débats (l).
s'élance à la tribune et avec la plus vive émotion s'exprime ainsi:
Il est impossible à l'honnête homme de tolérer plus longtemps le système de calomnie et de désorganisation que je vois, suivi avec une constance qu'un grand intérêt seul peut donner.
Oui, je combattrai les traîtres et les calom-
Il est permis à la fin de perdre patience. On sait avec quelle modération j'ai toujours parlé dans cette Assemblée ; je n'accuse personne : je croyais pouvoir y entretenir le calme et l'union ; mais je vois la République s'enfoncer dans l'abîme, et je réclame, et je dénonce enfin les conspirateurs.
Avant même l'existence de la Convention nationale, on avait déjà formé le système de la calomnier, de l'outrager, de la dissoudre, et quelques personnes n'ont cessé de suivre ce système. Ah ! les voilà, les véritables ennemis de la République;
Je le déclare, jamais je ne transigerai avec les despotes : et si l'ennemi était aux portes, on verrait quels sont les faux braves et quels sont les républicains courageux.
Ne vous y trompez pas, mes collègues, et vous, peuple qui m'entendez, il existe ici un vil scélérat, partisan du despotisme; ce scélérat m'a dénoncé dans ses feuilles, je m'en suis honoré, car il ne calomnie que ceux dont 'il fait l'éloge.
Je ne suis pas inquiet du jugement que porte sur nous la nation française, ni de celui que portera la postérité; mais nous devons nous montrer ici sans ménagement, sans faiblesse; nous devons sévir contre les audacieux qui insultent et attaquent la représentation nationale.
David s'élance au milieu de la salle et découvrant sa poitrine, il décrie : Frappez, je demande à mourir ! «— (Les citoyens applaudissent. )
Qu'est-ce que le dévouement de David prouve, dit Pétion, il prouve que c'est le dévouement d'un honnête homme en délire et trompé !
La République sera étrangement surprise, lorsqu'elle connaîtra ceux qui accusent et ceux qui sont accusés. On m'accuse, moi, d'être le complice d'Orléans, savez-vous pourquoi? c'est que d'Orléans est une fois venu chez moi; il venait me demander ce qu'il avait à faire, relativement à son expulsion de la République, et je lui donnai un conseil qui pouvait sauver la liberté, car s'il l'avait suivi, il ne serait plus en France. Mais il le dédaigna. C'est sur cette entrevue qu'on ose m'ac-cuser d'être son complice, et cette calomnie a été affichée dans tout Paris.
On a continué ces calomnies, car on s'est dit : à la fin on le croira ; Pétion avait quelque influence à Paris, il faut la détruire, car il ne pense pas comme nous.
En effet, je ne pense pas comme ceux qui,, à
force d'excès et de violences, veulent étouffer la République qui ne fait que naître.
Qu'il me soit permis, interrompit Robespierre, de répondre à ces calomnies.
Oui, répond Pétion, et je voudrais qu'il s'engageât une véritable lutte entre nous; je voudrais qu'on signât les accusations et les réponses; que chacun mît ici sa tête, et que celle du coupable tombât. Mais, je ne sais point lutter à cette tribune d'injures et d'outrages; déjà nous avons lutté par écrit avec Rooes-pirre, et il sait bien que je le connais. Qu'il m'accuse, s'il l'ose, mais que ce soit ici, devant vous, et que, tandis que je me repose, sur ma conscience, on n'aille point me dénoncer et me proscrire ailleurs.
Je demande que les dénonciations et les réponses soient écrites et signées, qu'on punisse les coupables, et qu'on puisse poursuivre les infâmes calomniateurs.
Des jadis prêtres......
J'étais moine, interrompt Poultier, mais j'ai combattu dix-huit mois pour la liberté.
Des jadis prêtres^ reprend Pétion, des jadis nobles se disent aujourd'hui les patriotes par excellence, et sous ce masque imposteur ils désorganisent et perdent la République, ils divisent les patriotes en deux classes, ils se placent dans la première, et la seconde ils la composent des hommes qui ont écrit pour la liberté, longtemps avant sa naissance, des hommes qui ont fait la Révolution, des hommes qui ont attaqué la royauté dans sa puissance, des hommes qui ont fondé la République ; et ces citoyens, ils osent les appeler des modérés, des royalistes, des traîtres, cependant tous les jours on ne découvre de conspirateurs que dans la classe des nobles et des prêtres.
Si jamais les ennemis entraient, on reconnaîtrait alors ceux qui n'auraient d'autre ressource que de mourir en les combattant ou de se détruire eux-mêmes, tandis que ces patriotes si ardents, et surtout si calomniateurs, seraient les premiers peut-être à se soumettre à leur puissance.
Pour moi, je le jure à la nation entière, je n'existerai jamais sous le despotisme.
a la séance de la convention nationale du
Interrogatoires des généraux Lanoue, Steingel et Miranda.
extrait du procès-verbal des séances du comité de la guerre. — Séance du samedi 30 mars 1793, l'an deuxième de la République, huit heures après midi (2).
interrogatoire du général lanoue.
A huit heures, s'est présenté le citoyen général Lanoue, pour répondre aux questions
qui lui seraient faites, en conséquence du décret du 29 mars 1793.
D. Par quel ordre vous êtes-vous rendu à Aix-la-Chapelle ?
R. Sur l'ordre qui m'a été donné par le général Miranda, le 16 février, et je m'y suis rendu le 18. D.En quelle qualité y étiez-vous employé? R. Comme lieutenant général. D. Etiez-vous commandant en chef ? R. J'ai pris comme lieutenant général !e commandement, dès que je suis arrivé. D. Quels étaient vos ordres ? R. Je n'avais aucune instruction particulière, que la lettre du général Miranda.
D. Quand avez-vous été visiter, pour la première fois, les postes qui étaient sous votre commandement ? R. Le lendemain de mon arrivée. D. Les avez-vous tous visités? R. Cela était impossible; j'avais quatorze lieues à parcourir.
D. N'avez-vous pas trouvé que ces postes étaient trop éloignés les uns des autres, qu'ils occupaient une trop grande étendue de pays, et qu'au besoin leur rassemblement serait lent à s'opérer?
R. Je l'ai reconnu parfaitement, et je l'ai écrit au général Miranda, et en conséquence, je lui ai demandé un renfort de troupes et d'artillerie : la copie de ma lettre est dans mes papiers.
D. N'étiez-vous pas le maître de prendre sur vous de changer les dispositions déjà faites, dans le cas où vous trouveriez que cela fût avantageux aux armes de la République ?
R. J'en avais le droit lorsque j'en ai pris le commandement; mais j'eusse fait une faute' militaire, en ce que l'ennemi eût plus facilement passé la rivière si j'eusse dégarni différents points.
D. Avez-vous fait part au général en chef de vos réflexions sur les dispositions des postes que vous aviez visités?
R. Je n'ai plus eu de communication avec Miranda, vu que je savais qu'il était occupé au siège de Maëstricht.
D. Lorsque vous avez pris le commandement de l'avant-garde qui couvrait Aix-la-Chapelle, vous êtes-vous fait rendre compte si tous les officiers étaient à leur poste?
R. U a été à ma connaissance qu'il y avait quelques officiers absents; mais comme ils ne l'étaient pas par mon ordre, je n'en ai pas de connaissance de détail; d'ailleurs, n'ayant eu le commandement que dix jours, je n'ai pu m'occuper que de la visite des postes, à raison de la distance qui exigeait que je fisse huit à dix lieues par jour.
D. Pendant votre commandement à l'avant-garde qui couvrait Aix-la-Chapelle, avez-vous donné à quelques officiers la permission de s'absenter? R. A aucun.
D. Vous êtes-vous fait donner de temps à autre, ainsi qu'un commandant doit l'exiger, l'état de situation des troupes sous votre commandement ?
R. L'état de situation a été par moi demandé, et à moi remis le jour de mon arrivée : le fonds se montait à 30,000 hommes, mais l'effectif n'était que de 18.000.
D. Cet état de situation aurait dû vous donner connaissance des officiers absents.
R. Je n'ai eu le temps que de m'occuper des grandes dispositions, sans pouvoir entrer dans tous les détails.
D. Avez-vous eu à peu près connaissance des forces de l'ennemi?
R. Je n'ai pu les évaluer que quand l'ennemi a débouché sur moi, et alors je l'ai estimé à 25,000 hommes; mieux reconnu je l'ai jugé à trente, et nous avons appris depuis qu'il passait ce nombre.
D. Qu'avez-vous fait pour les connaître depuis votre arrivée à l'avant-garde, jusqu'au jour où l'ennemi a paru pour forcer vos postes ?
R. J'ai employé les mêmes moyens que ceux dont le général Steingel s'était servi, savoir, celui des émissaires, étant impossible d'avoir autrement connaissance des forces de l'ennemi, lorsqu'il est en cantonnement.
D. Avez-vous fait pendant votre commandement, avant l'apparition de l'ennemi, quelques dispositions .relatives à votre défense, ou à une plus active surveillance ?
R. J'ai trouvé les dispositions faites par le général Steingel, fort bonnes, je les ai approuvées, j'y ai ajouté quelques dispositions de sûreté, j'ai recommandé la plus grande surveillance.
D. Quand avez-vous été instruit des mouvements de l'ennemi ? R. Le 28, à 11 heures du soir. D. Quand avez-vous eu connaissance de son approche ?
R. Dans la même nuit, nous nous sommes portés, le général Steingel et moi, au point central de tous les cantonnements, pour nous porter ensuite où il serait nécessaire.
D. A quelle distance les postes les plus avancés étaient-ils de l'ennemi? R. A une lieue de la rivière. D. Puisque vous saviez qu'il se renforçait, et qu'il vous avait paru impossible de l'empêcher de passer la rivière de la Roër, guéable toute l'année, sur un grand nombre de points, pourquoi n'avez-vous pas prévenu le général en chef, de l'insuffisance de vos forces, et de l'impossibilité où vous vous trouviez de vous opposer au passage de l'ennemi ?
R. J'ai eu l'honneur de répondre au comité, que le même jour de mon arrivée, j'avais écrit au général Miranda de m'envoyer du renfort; Miranda répondit, qu'ayant le fonds de 30,000 hommes, je devais, avec cette force, remplir l'objet dont j'étais chargé. Quelques jours après, le général Thouvenot, chef de l'état-major, m'écrivit qu'il m'enverrait 5 bataillons et 4 pièces de canon sur une nouvelle demande de ma part.
D. Comment s'est-il fait que ce n'a été que le 28 février au soir, que vous avez été instruit que les ennemis se disposaient à passer la rivière de la Roër, et que le lendemain, 1er mars, à 5 heures du matin, ils effectuaient ce passage?
R. Je ne puis répondre à cette question, parce que c'est le secret de l'ennemi, quand il veut tenter,un effort, et intercepter tout passage, toute communication.
D. Pourquoi, sur l'avis que vous avez eu de la marche d'une colonne, n'avez-vous pas rapproché vos postes, et disposé vos forces sur le point où l'ennemi paraissait plus particulièrement se diriger ?
R. Je ne savais pas sur quel point il se dirigeait; j'ai répondu d'ailleurs à cette ques-ton, en disant que si j'avais dégarni un point quelconque, j'aurais peut-être donné une facilité de plus,à l'ennemi. D'ailleurs, j'observerai qu'il y avait une position reconnue pour recevoir le combat, la moins mauvaise que le site offrait, où les troupes devaient se mettre en bataille, et que l'on avait garnie de redoutes, pour y réunir les troupes en cas d'attaque, et livrer le combat si l'occasion se présentait.
D. Pourquoi la colonne ennemie a-t-elle percé vos cantonnements par le centre, sans que la gauche et la droite de vos troupes aient été instruites assez tôt pour pouvoir se rallier et s'opposer aux progrès de l'ennemi?
R. Il y avait des troupes éloignées de sept lieues du point central; mais pour réunir un corps de 6,000 à 7,000 hommes, pour arrêter le premier effort de l'ennemi, les troupes cantonnées avaient 3 ou 4 lieues à faire.
D. En combien de temps les divers cantonnements pouvaient-ils se rendre au point déterminé pour la réunion?
R. On ne savait pas le point par où l'ennemi passerait : l'ennemi a passé par trois débouchés, savoir : Durenne où il y avait un pont, Corlart et un autre point plus bas.
D. A-t-on fait des tentatives pour se rendre maître de Durenne?
R. Certainement l'intention de l'ennemi avait été d'occuper Durenne; mais l'ennemi intéressé à conserver ce passage, en a chassé nos troupes, et depuis il s'est renforcé, il n'a plus été possible de le reprendre. Le général Dumouriez avait donné ordre, à un corps de 4,000 hommes, d'y aller prendre poste, mais il n'a pas été possible d'y pénétrer.
D. Quelle disposition avez-vous faite pour résister au passage de la Roër, par le pont du Rener ?
R. Il y avait des cantonnements à Lan-grevé, château de Mérode, en tout deux mille hommes de cavalerie ou d'infanterie.
D. Yos cantonnements étaient-ils retranchés vis-à-vis de Durenne ?
R. Il y avait quarante-sept cantonnements, on ne pouvait pas les retrancher tous, il n'y en avait pas de retranché vis-à-vis de Durenne.
D. Yos postes avancés ont-ils été surpris ?
R. Aucun poste n'a été surpris, ou du moins n'a pas dû l'être, parce qu'on a battu la générale à minuit dans les cantonnements.
Cependant il y en a eu deux de surpris, parce que, quoique la colonne Queyssat leur eût envoyé des ordonnances, il est probable que l'éruption rapide de l'ennemi les a empêchés de parvenir.
D. Où étiez-vous alors?
R. J'étais au point céntral du cantonnement, à Yideun, pour me porter à la droite ou à la gauche, suivant le mouvement de l'ennemi, ainsi que le général Steingel.
D. Quels moyens avez,-vous pris, soit pour vous opposer à la marche de l'ennemi, soit pour faire votre retraite en ordre, soit enfin pour ne pas vous laisser trop entamer ?
R. Lorsque j'ai appris la détermination de l'ennemi, dont l'effort se faisait par Durenne, je me portai à la droite avec Steingel, au bourg d'Eicheweiller ; à la sortie de ce bourg, je trouvai les troupes qui avaient été placées sur la chaussée de Durenne, qui se repliaient en assez bon ordre ; elles furent placées sur une position sur la hauteur de Roër, bonne position, qui était le point essentiel de la défense de notre droite, où le général Steingel avait ordonné qu'il serait placé une compagnie d'artillerie légère. Dans cette position où nous restâmes au moins quatre heures, nous aperçûmes les ennemis qui filaient par leur droite, se tenant toujours hors la portée de notre canon, à l'exception d'un corps de cavalerie nombreux, qui voulut s'approcher de cette position. Je fis avancer quatre pièces de canon, et des troupes pour tirer sur cette cavalerie, le bon effet de nos pièces les fit replier sur le gros de leur armée, après une canonnade d'une heure.
Quelque temps avant, une troupe d'infanterie qui avait débouché sur la chaussée d'Eicheweiller, à Roër, nous fit une fusillade fort vive, dans laquelle le cheval de mon aide de camp eut un coup de fusil à la tête ; je fis riposter par une vingtaine de coups de canon et une mousqueterie assez vive ; les ennemis se retirèrent.
La position de Roër fut maintenue jusqu'à la nuit close ; le capitaine Anic, commandant l'artillerie légère, ne s'en retira que quand je lui en envoyai l'ordre.
D. Les officiers généraux et les officiers supérieurs des troupes étaient-ils à leur poste, lorsque l'ennemi vous a forcé?
R. Il m'a paru que les officiers supérieurs étaient à la tête de leurs corps.
D. Où vous êtes-vous tenu pendant votre retraite ?
R. J'ai toujours marché le dernier pendant la retraite et n'ai pas laissé un soldat derrière moi.
D. Qui conduisait la tête de la colonne?
R. Les officiers supérieurs qui étaient à la tête de leurs corps.
D. Quels ordres avez-vous donnés pour rallier vos troupes et pour en régler la marche ?
R. C'est moi qui ai rallié un régiment de dragons de la gauche, pour couvrir la retraite de l'infanterie, et qui ai protégé la retraite avec eux. Il y avait de plus une seconde position de fixée, en cas que nous fussions forcés dans la première, sur les hauteurs de Saint-Gilles, et où elles se sont formées réellement.
D. Où avez-vous terminé votre retraite?
R. La retraite s'effectua dans la nuit ; on se retira derrière les bois, en arrière d'Aix-la-Chapelle, et la ville fut évacuée à sept heures du matin.
D. Où étiez-vous lorsqu'on vous a signifié
le décret de la Convention qui vous mandait à la barre?
R. «T'étais à Louvain.
D. Comment les troupes françaises, en évacuant Aix-la-Chapelle, se sont-elles comportées ?
R. Les soldats n'ont pas commis le moindre désordre. Je n'ai pas reçu la moindre plainte.
D. Quelle a été la conduite des habitants d'Aix-la-Chapelle, lors de l'évacuation?
R. On a fusillé, par les fenêtres, les Français commandés par Miakzinsky: mais je présume que c'est par quelques soldats tyroliens qui étaient à Aix-la-Chapeile.
D. A combien évaluez-vous la perte des troupes françaises dans cette retraite ?
R. On l'a singulièrement exagérée ; elle ne doit pas aller à plus de huit cents hommes.
D. Croyez-vous que dans l'affaire sur laquelle vous avez été interrogé, il y ait des officiers supérieurs ou inférieurs coupables?
R. Je ne le crois pas et n'en connais pas.
D. Ftes-vous dans le cas de produire la correspondance avec le général en chef et tous les autres qui vous ont été donnés ?
R. Oui.
D. Avez-vous fait exécuter ponctuellement la loi contre les émigrés pris les armes à la main?
R. Je n'ai point pris d'émigrés ; du moins il n'y en a pas eu de pris à ma connais--sance.
D. Avez-vous reçu la loi à cet égard?
R. Oui je l'ai reçue comme général.
D. Avez-vous reçu et fait distribuer les bulletins de l'Assemblée nationale, ainsi que les autres envois à l'armée ?
R. On a toujours donné connaissance des lois par le moyen de l'ordre, et les bulletins ont été envoyés avec l'ordre aux différents corps et cantonnements.
D. Aviez-vous des fonds pour les dépenses secrètes?
R. Lorsque le général Dumouriez me laissa le commandement de l'armée de la Belgique, il me laissa une autorisation pour disposer des fonds de cinq cents mille livres destinées pour les dépenses extraordinaires.
D. Aviez-vous des espions?
R, C'étaient les généraux en chef Valence et Miranda.
D. Quels fonds avez-vous employés pour les espions qui devaient reconnaître les mouvements des ennemis?
R. Je n'en ai point payé, n'étant point chargé de ce détail.
D. Qui vous a réintégré dans votre poste, remis en activité, et à quelle date?
R. Après avoir été jugé et absous par le tribunal de Douai, n'ayant jamais été destitué je me suis rendu à mon poste, après en avoir prévenu le ministre.
D. Avez-vous eu connaissance du décret d'accusation rendu contre vous? R. Oui,
D. A quelle époque avez-vous été arrêté?
R. Lt 9 octobre à minuit, j'ai été conduit en
prison, diaprés les ordres du général Ma-rassé.
D. Avez-vous reçu signification officielle du décret d'accusation porté contre vous?
R. Je n'ai eu connaissance que de l'ordre* donné par le général Labourdonnaye, que' le général Marassé a fait exécuter.
D. Depuis cette époque à celle où vous avez eu connaissance de la rédaction de votre acte d'accusation, êtes-vous toujours resté en prison?
R. J'en suis sorti le 22 octobre, par ordre du général Dumouriez, adressé au général Marassé.
D. Qu'êtes-vous devenu depuis que vous êtes sorti de prison ?
R. J'ai été rejoindre Dumouriez à Yalen-eiennes, je n'y ai fait aucun service. Je suis resté huit jours dans eette ville, j'ai appris que j'avais été renvoyé au tribunal de Douai pour mon jugement, en conséquence j'ai été trouver le général Dumouriez, au quartier général d'Honnein, et je lui ai dit : Je suis renvoyé au tribunal de Douai, je ne puis reprendre mes fonctions jusqu'à ce que je sois jugé ; je vous rends le cautionnement sous lequel vous m'avez fait sortir, je vais me remettre en prison à Douai, pour y attendre mon jugement. Ce jugement a eu lieu le 5 novembre ; je suis parti de Douai pour rejoindre l'armée à Tirlemont, ayant été absous par le tribunal, après en avoir prévenu le ministre.
D. Avant l'éruption des colonnes prussiennes sur vos cantonnements, les soldats français étaient-ils indisciplinés et pillards?
R. J'ai toujours entendu porter des plaintes contre la discipline et le bon ordre, et cela pendant toute la campagne.
D. Les plaintes portées touchant le pillage et l'indiscipline des soldats, vous ont-elles été portées à vous-même, ou par les habitants du pays, ou par les officiers de votre armée 1
R. J'ai réprimé, autant que je l'ai pu, celles contre la discipline, par les ordres que j'ai donnés.
Représenté au général que sa réponse ne répond pas à la question précédente ;
A répondu qu'il y avait eu des plaintes des habitants qui lui avaient été adressées contre la légion de Miakzinsky, et qu'il avait menacé ce général de renvoyer la légion sur le derrière, si elle ne rentrait dans l'ordre.
D. Le général Miakzinsky est-il toujours resté à son poste pendant votre commandement à l'avant-garde?
R. Le général Miakzinsky est toujours resté à son poste pendant les dix jours que j'ai commandé à 1 avant-garde.
D. Le général Miakzinsky vous a-t-il répondu ? a-t-il fait exécuter la loi ?
R. Le général Miakzinsky est venu chez moi répondre verbalement qu'il avait donné les ordres les plus sévères pour le rétablissement de l'ordre.
D, Avez-vous reçu des plaintes d'autres corps de son armée 1
R. A répondu qu'il ne lui en était pas revenu directement} mais qu'étant à Gelinden, le 26 novembre, avec le général Dumouriez, il avait trouvé une multitude de soldat* dans une maison qui la pillaient depuis la cave
jusqu'au grenier ; qu'ils en avaient fait arrêter une douzaine, et que le général Dumouriez les avaient envoyés en prison à Saint-Tron.
D. Dans quelle maison d'Aix-la-Chapelle étiez-vous lorsque vous avez appris la nouvelle que les ennemis s'avançaient pour passer la rivière de Roër?
R. J'étais chez le nommé Grouher, baigneur d'Aix-la-Chapelle; j'étais couché, lorsque l'adjudant général Montjoie vint m'avertir des mouvements de l'ennemi, à onze heures du soir.
D. Y avait-il d'autres officiers logés dans la même maison?
R. Je n'ai vu qu'un seul officier des troupes de ligne logé dans la même maison.
D. En partant pour prendre le commandement de l'avant-garde, saviez-vous que les cantonnements au nombre de quarante-sept, occupaient près de quatorze lieues d'étendue 1
R. Je n'étais pas instruit du nombre de cantonnements ; mais je l'étais de l'étendue de quatorze lieues qu'occupaient lesdits cantonnements.
D. Avez-vous entendu dire que les commissaires de la Convention nationale, Delacroix et Danton, aient eu quelque part à la disposition des cantonnements ?
R. J'ai entendu dire auxdits commissaires qu'ils avaient été presque à Juilliers ; quant à la disposition des cantonnements, je n'ai point entendu dire que Delacroix et Danton y eussent quelque part.
D. Les habitants de la ville vous ont-ils porté des plaintes du pillage de la part des troupes des cantonnements sous vos ordres, pendant les dix jours que vous avez commandé ?
R. Les plaintes que j'ai reçues contre la légion du général Miakzinsky m'ont été adressées par les commissaires habitants du pays.
La séance a été levée après minuit, et renvoyée au lendemain à onze heures du matin, pour collationner l'interrogatoire.
Signé : Lanoue et Gasparin.
Séance du dimanche SI mars 179S, Van II de la République.
Lecture faite de l'interrogatoire de la veille, en présence du général Lanoue, il l'a reconnu exact et l'a signé et paraphé à chaque page avec le président du comité de la guerre, le général se réservant d'y faire des additions et observations.
II
Procès-verbal de la séance extraordinaire du dimanche SI mars, 7 heures du soir,
Présents : Olivier Gérente, Aubry, Yiennet, Châteauneuf-Randon, Delbrel, Boissy-d'An-glas, Poultier.
Interrogatoire général Steingel (1).
Interrogé depuis quelle époque il commande l'avant-garde d'Aix-la-Chapelle ?
R. Du moment qu'elle est arrivée à Aix.
D. Avez-vous commandé en chef cette avant-garde ?
R. Oui, tant et aussi longtemps que je n'ai pas eu de général plus ancien que moi, ; bien entendu que lorsque Lanoue et Valence y sont venus, mon commandement a cessé.
D. Pendant combien de temps avez-vous commandé?
R. Je n'ai jamais quitté mon poste ; à l'exception d'environ vingt-quatre heures que Miranda m'avait appelé à Liège pour conférer des dispositions de cette avant-garde.
D. Est-ce vous qui avez fixé les cantonnements de l'avant-garde d'Aix-la-Chapelle?
R. J'ai eu ordre d'occuper les bords de la Roër, d'occuper nommément Eschreilen et Hattenlauven; le reste des dispositions était nécessairement à ma sagesse et à mon intelligence. Au reste, la disposition de mes cantonnements, et les changements que j'y ai faits ont été envoyés aux généraux en chef successivement.
D. Qui avait réglé ces dispositions dont vous venez de parler ? Autrement, de qui avez-vous reçu ordre ?
R. De l'adjudant général de la part du général en chef.
D. Avez-vous fait part au général de ces dispositions ?
R. Oui, comme je l'ai dit, et chaque fois.
D. Que vous a-t-on répondu sur les avis que vous leur avez donnés à cet égard?
R. Cela doit se trouver dans mes correspondances.
D. Les généraux à qui vous avez donné ces avis ont-ils approuvé vos dispositions?
R. Ils ne pouvaient pas les désapprouver, puisque je n'ai agi que d'après leurs ordres.
D. Tous les officiers qui étaient sous votre commandement étaient-ils à leur poste ?
R. Je dois le croire, n'ayant donné aucune permission de s'absenter, sinon à un capitaine de volontaires dont la compagnie était réduite à six hommes pour aller recruter sa compagnie ; à un lieutenant de dragons, et peut-être encore un autre, d'après les réquisitions des conseils d'administration.
D. Avez-vous eu connaissance des forces rie l'ennemi ?
R. J'ai su que les Prussiens assemblaient peu à peu des forces dans la partie de la Gueldre ; que ce devait être le prince Frédéric Brunswick qui devait les commander, et que le corps devait être porté de 13 à 15,000 hommes. Nous avons été également prévenus "que l'armée autrichienne était journellement renforcée par de différentes armées ; que, depuis longtemps, ils avaient travaillé à la construction de quatre ponts portatifs, et je n'ai pas manqué d'en faire mon rapport aux généraux à Liège; qu'au surplus, je n'ai pu donner à ces nouvelles d'autre degré de latitude que celles que j'avais moi-même, sur les rapports de nos espions, des voyageurs et des gens du pays.
D. Quels sont les moyens que vous avez employée pour reconnaître les forces de l'ennemi, depuis votre 'arrivée à Xavant-garde jusqu'au
moment où il s'est présenté pour forcer vos postes ?
R. J'ai employé des espions, je me suis servi des gens du pays et des voyageurs ; j'ai vu les feuilles publiques : voilà à peu près les moyens dont j'ai fait usage.
D. Avez-vous fait pendant votre commandement, avant l'apparition de l'ennemi, quelques dispositions relatives à votre défense et à une plus active surveillance ?
R. J'avais ordonné que de nuit il y aurait des perches goudronnées, faites pour annoncer ceux des villages qui pouvaient être attaqués de nuit, et j'avais fait en général un dispositif d'attaque qu'on doit trouver dans mes papiers, et qui assignait à chacun ce qu'il avait à faire.
D. Quand et à quel moment avez-vous été instruit du mouvement de l'ennemi ?
R. Un espion nous l'avait annoncé dès le 27 ; son rapport, très détaillé, a été traduit de l'allemand, et l'adjudant général Mont-joie l'a envoyé à Liège, à l'état major; ensuite, dans la nuit du 28, vers onze heures, le lieutenant-colonel Chapui, du troisième bataillon franc, nous a prévenus qu'il savait de source certaine, par un villageois, que les ennemis devaient passer la Roër le lendemain.
D. Quels étaient les généraux et autres qui cômposaient à cette époque l'état-major à Liège ?
R. Je ne saurais vous dire si c'étaient à cette époque Valence et Miranda qui commandaient, qui fussent présent à Liège.
D. Lorsque vous avez appris que les ennemis faisaient des mouvements pour attaquer vos avant-postes, où étiez-vous?
R. Je sortais de chez le général Dampierre, à Aix-la-Chapelle.
D. N'aviez-vous pas auprès de vous plusieurs officiers?
R. Je ne me rappelle pas qu'il y en eût d'autres que Mont joie et peut-être Barroy.
D. Tous ces officiers se sont-ils rendus à leurs postes dès l'instant que vous avez reçu des nouvelles du mouvement des ennemis ?
R. Montjoie n'a mis d'intervalle que celui qui était nécessaire pour expédier les différents ordres, et Barroy nous a ensuite accompagnés à trois heures, le général Lanoue et moi.
D. Vous-même êtes-vous parti de suite pour vous y rendre ?
R, A trois heures.
D. A quelle distance les postes les plus avancés étaient-ils de l'ennemi ?
R. U y a eu différents postes assez près de"5 ceux de l'ennemi pour que, de part et d'autre, les vedettes pussent se voir de jour, tel que celui de la Maison-Rouge, par où nous avons été attaqués.
D. Avez-vous été informé que le 15 février, les sentinelles des postes avancés de l'ennemi portaient à leurs chapeaux des branches de laurier, et disaient hardiment à nos gardes des avant-postes qu'avant quinze jours ils nous chasseraient de nos cantonnements et qu'ils seraient maîtres de Liège ?
Jt. Premièrement, j^suis persuadé que très
souvent les postes qui pouvaient se parler n'ont pas manqué de se menacer, n'ont pas "manqué de se faire des bravades, parmi lesquelles sans doute ont pu entrer les menaces de reconquérir Liège et la Belgique ; quant aux lauriers, je crois que selon les apparences c'étaient des branches de chêne dont ils décoraient ordinairement leurs chapeaux.
D. Puisque vous saviez que l'ennemi se renforçait, et qu'il vous paraissait impossible de l'efnpêcher de passer la rivière de la Roër sur un grand nombre de points, pourquoi n'avez-vous pas prévenu le général en chef de l'insuffisance de vos forces et de l'impossibilité où vous vous trouviez de vous trouver au passage de l'ennemi?
R. Je me regarderais comme très coupable si je n'avais pas fait toutes mes diligences à cet égard ; je n'ai cessé de faire connaître l'insuffisance de mes moyens, et la facilité-qu'auraient les ennemis de poster de grandes forces sur ceux des points qu'ils voudraient choisir pour m'attaquer.
D. Quelles sont les réponses que vous avez reçues des généraux en chef à ce sujet?
R. Elles se trouvent consignées dans mes papiers, mais le fait est qu'on nous a envoyé de temps à autre différents renforts, soit en troupes, soit en canons, que j'ai trouvés toujours insuffisants, vu la grande étendue de notre terrain et qui ne nous ont jamais rassurés sur notre position.
D. Avez-vous fait connaître aux généraux l'insuffisance des secours qu'ils vous procuraient ?
R. Je suis entré à cet égard chaque fois dans les détails nécessaires avec les généraux à ce sujet, et suis persuadé que le général Lanoue en a fait autant.
D. Quelles ont été les réponses itératives des généraux 1
R. Vous les trouverez dans ma correspondance, le résultat en était qu'on espérait de forcer Maëstricht à se rendre, avant que les ennemis eussent le temps d'avoir tous les moyens préparés pour nous attaquer en force supérieure pour en faire lever le siège.
D. Pourquoi, sur l'avis que vous avez eu de la marche d'une colonne, n'avez-vous pas rapproché vos postes et disposé vos forces sur le point où l'ennemi paraissait plus particulièrement se diriger ?
R. Je réponds à cela premièrement, que je n'ai pas commandé ce jour-là ; secondement, que, si j'avais eu le commandement, je n'aurais vraisemblablement rien changé aux dispositions données, par une raison bien simple : c'est que, si, obligé de défendre le passage d'une rivière, on voulait chaque fois quitter le bord opposé lorsque l'ennemi fait mine d'y passer, on serait tout le temps obligé à changer de position ; j'ai déjà dit, au reste, que mon avis n'avait jamais été que des cantonnements, épars à une si grande distance derrière une petite rivière, fussent une grande défense.
D. Vos postes avancés ont-ils été surpris?
R. Non, ils n'ont pu ni dû l'être ce jour-là.
D. Où étiez-vous lorsque l'ennemi a tenté de forcer vos postes ?
R. J'étais à Widen où j'avais choisi mon quartier général comme dans un lieu qui formait à peu près le centre de nos cantonnements, lorque nous reçûmes la nouvelle que l'ennemi se présentait de l'autre côté de la rivière dans la partie opposée à Gollad et Bernard, en même temps qu'on nous avertît que les ennemis passaient déjà le point à Duren.
D. Quels sont les moyens qui ont été pris pour s'opposer à la marche de l'ennemi, soit pour faire une retraite en ordre, soit enfin pour ne pas vous laisser trop entamer?
R. Nous nous sommes rendus de suite à l'aile droite ; nous avons garni la hauteur de la Roër, ce poste ayant été désigné par sa nature comme tenable, comme effectivement on a tenu et qu'on s'y est battu la plus grande partie de la journée ; je me réfère, d'ailleurs, pour tout ce qui s'est passé pendant l'action, à la relation que j'ai eu l'honneur de présenter au comité militaire, dont je garantis la vérité.
D. Les officiers généraux et les officiers supérieurs des troupes étaient-ils à leur poste lorsque l'ennemi vous a forcé?
R. Quant aux officiers généraux, nous n'étions malheureusement à toute l'avant-garde que quatre ; savoir : le lieutenant général Lanoue et Miakzinsky, Dampierre et moi, maréchaux de camp, et aucun des quatre n'a manqué de se trouver à son poste ; quant aux officiers supérieurs, je crois bien que quelques-uns avaient permission de s'absenter, motivée sur des raisons de service.
D. Où vous êtes-vous tenu pendant la retraite de vos troupes ?
R. Je ne les ai pas quittées ; j'ai conduit au village de Neussen, le bataillon des Républicains ; voyant que l'ennemi voulait forcer ledit village, l'adjudant général Montjoie a fait, par mon ordre, mettre ce bataillon en bataille dans les vergers sur la gauche pendant que je faisais porter du canon à l'endroit du village qui, battant le grand chemin, a forcé à la retraite la cavalerie ennemie qui s'est présentée à différentes reprises pour nous prévenir à ce passage, ce qui eût rendu la retraite extrêmement difficile, sinon impossible, pour le reste des troupes de la gauche.
D. Où avez-vous terminé votre retraite?
R. Au village Saint Jobs, où les chemins commençant à devenir très difficiles et très étroits, il a fallu nécessairement rallier et remettre en bataille toute l'infanterie pour donner le temps, et laisser à la cavalerie et à l'artillerie le seul chemin qui restait pour filer et gagner la ville l'Orry ; pour ma personne, je suis retourné sur mes pas pour reconnaître, à la tête d'un petit détachement de dragons, le mouvement ultérieur de l'ennemi.
D. A combien évaluez-vous la perte des troupes françaises à cette retraite ?
R. Je ne saurais le dire positivement ; mais, autant que je puis le juger, la perte de cette journée peut se porter depuis 900 à 1,000 hommes.
D. Croyez-vous que dans l'affaire sur laquelle vous êtes interrogé, il y avait des officiers supérieurs ou inférieurs coupables?
R. Je ne connais pas de coupables ; mais
je crois que quelques-uns ont manqué faute de savoir et de bien connaître leur métier.
D. Etes-vous dans le cas de produire les correspondances que vous avez eues avec les généraux en chef et autres?
R. Toute ma correspondance privée et officielle se trouve dans mes équipages, qui, à ce qu'on me rapporte, doivent être à Valenciennes, où ils ont couru disque d'être pillés.
L'interrogatoire fini, la séance a été levée à onze heures du soir, ^t ont signé le président et le général Steingel.
« Signé : Olivier Gérente, Steingel.
Collationné conforme, à la minute restée au secrétariat du comité de la guerre de la Convention nationale, par nous président dudit comité, le 20 avril 1793, l'an II de la République française.
III
Extrait du procès-verbal des délibérations
du comité de la guerre. — Séance du lundi
8 avril, huit heures du soir.
Interrogatoire du général Miranda (1)
D. Pourquoi avez-vous attaqué Maëstricht?
R. Par ordre par écrit du général Dumouriez
D. Quelles étaient vos instructions à cc sujet ?
R. U me dit expressément, et par les renseignements qu'il avait, que Maëstricht se rendrait à la troisième bombe, que la garnison ne voulait pas se défendre, que les bourgeois obligeraient le gouverneur à rendre la place ; qu'ainsi il fallait brusquer cette attaque, car ce n'était ni le temps ni la saison d'ouvrir un siège régulier ; que tout dépendait d'ailleurs de la célérité avec laquelle je me débarrasserais de ce siège pour marcher sur-le-champ à Nimègue avec un corps de 25,000 hommes ; qu'il fallait que l'attaque de Maëstricht fût très brusque, et que c'était de ma célérité à le seconder que dépendait le salut, non seulement de la Hollande, mais de la République, et de la liberté des peuples, et qu'il espérait d'ailleurs que la place ne tiendrait pas plus de deux ou trois jours, et que, si la place tenait plus longtemps, il fallait laisser la continuation de 1 attaque à l'armée des Ardennes et de la Belgique, et moi avec celle du Nord, qui était sous mes ordres, marcher immédiatement sur Nimègue, pour empêcher que les Prussiens qui étaient dans la Gueldre ne pénétrassent dans la Hollande et ne tombassent sur lui : en exécution duquel ordre, l'avant-garde de l'armée du Nord tenait la rive gauche de la Meuse, depuis le fort Saint-Michel jusqu'à Vesème.
D. Aviez-vous cette instruction par écrit du général Dumouriez ? R. Oui.
D. Vous y êtes-vous exactement conformé?
R. Si parfaitement conformé, que le général
m'a donné son approbation, et que, pour les ordres que j'ai donnés d'après les siens aui autres généraux, il me dit en termes exprès : « Tous vos ordres à vos différents généraux me paraissent très clairs et très bien faits. »
D. Etiez-vous autorisé à prendre sur vous de faire toutes les dispositions que vous croiriez convenables pour assurer et accélérer le succès de votre opération ?
R. Je n'étais pas autorisé à faire autre chose que ce que mes ordres me prescrivaient, et j'avais ceux du conseil exécutif, pour exécuter tout ce que le général en chef Dumouriez m'ordonnerait, comme étant lui. seul chargé de conduire les opérations militaires.
D. Avez-vous trouvé, lors de l'exécution, les ordres qui vous ont été donnés suffisants pour enlever Maëstricht ?
R. Si les ordres qui lui avaient été donnés par le général Dumouriez étaient vrais, il croit que oui ; mais que, s'ils n'étaient pas vrais, il croit que non ; la ville de Maëstricht exigeant un siège en règle et une attaque vigoureuse, si elle était promptement défendue par sa garnison.
D. Avant d?arriver devant Maëstricht, aviez-vous pris toutes les précautions d'usage pour une opération de cette nature ?
R. J'ai fait venir l'artillerie de siège des trois armées réunies"; et, avec toutes les pièces capables de jeter les bombes, j'ai exécuté le bombardement, faisant encore venir toute la grosse artillerie de siège des trois armées pour ccntinuër le bombardement en tirant à boulets rouges sur la place, si le bombardement n'était pas suffisant.
- D.. Etiez-vous suffisamment pourvu de bouches à feu, de munitions et de vivres pour toute la durée de votre opération ?
R. J'étais pourvu de tous les approvisionnements nécessaires pour le bombardement de cinq à six jours, ainsi que le général le supposait dans ses ordres, et pour la continuation du bombardement, et ensuite tirer à boulets rouges. Toutes les pièces et toutes les munitions nécessaires étaient dans les dépôts de Tongres, Liège, Tirlemont, Saint-Tron, Louvain et Malines, pour arriver au fur et à mesure pour la continuation du siège par les armées des Ardennes et de la Belgique, puisque celle du Nord, qui était sous mes ordres, devait partir, sous ma conduite, pour la Hollande, son avant-garde étant déjà sur Grave.
D. A quel nombre se montaient les troupes sous votre commandement pour votre opération sur Maëstricht?
R. Les troupes qui formaient l'investissement de Maëstricht étaient environ de 14,000 à 15,000 hommes, lesquelles, dans le cours du siège, furent diminuées de 3,000 à 4,000 hommes qui marchèrent sur les frontières de la Hollande, d'après quelques mouvements des ennemis.
D. Etait-il en votre pouvoir de les augmenter ?
R. Non, il n'était pas en mon pouvoir, sans désobéir aux ordres du général en chef.
D. Quel jour êtes-vous arrivé devant Maëstricht ?
R. Du 21 au 22 février.
D» Quelles sont les dispositions que vous avez faites en y arrivant ?
R. Ouvrir la tranchée étant en personne avec tous les chefs de l'artillerie et du génie.
D. Pourquoi vous êtes-vous décidé à bombarder la ville, de préférence à en faire le siège en règle ?
R. Parce que mon ordre me défendait l'un et m'ordonnait l'autre.
D. Quelles raisons aviez-vous pour croire que vous pouviez réduire la ville à se rendre par un simple bombardement 1
R. Je ne l'ai jamais cru personnellement ; mais le général le croyait, et me donna des ordres en conséquence.
D. Quelles précautions avez-vous prises pour couvrir votre bombardement, et garantir votre armée de toute surprise?
R. Faire exécuter les ordres que le général en chef Dumouriez m'avait donnes, qui étaient de faire passer la Meuse à toutes les troupes de l'armée des Ardennes, pour se joindre à celle de la Belgique, qui gardait la Roër, formant, avec ces deux corps, une armée d'observation qui, sous les ordres des généraux Valence, Lanoue, Steingel, Miakzinsky, Dampierre, Lamarche et Neuilly, devait couvrir l'attaque de Maëstricht.
D. A quelle distance de la place avez-vous établi vos batteries pour votre bombardement, et combien de jours a-t-il duré?
R. A peu près à 500 toises de l'enceinte de la ville ; le bombardement a duré cinq à six jours.
D. Pourquoi vous êtes-vous absenté et vous êtes-vous fait demander pendant vingt-deux heures lors de l'attaque?
R. Je n'ai jamais été absent du quartier général pendant le siégé que pour aller à la tranchée, excepté l'avant-dernier jour de la levée du siège, que je suis allé à Onze heures du matin sur les hauteurs de la Homberg et Villeré, pour établir des batteries de 24 qui devaient tirer à boulets rouges sur la place, et pour faire une reconnaissance sur le fort Saint-Pierre, et voir si nos troupes se tenaient en ordre, m'étant rendu au parc d'artillerie au coucher du soleil.
D. Aviez-vous connaissance de la position des armées ennemies ?
R. Pas autres que celles que les officiers de l'avant-garde me communiquaient, et qu'ils recevaient des espions qu'ils employèrent à cet effet.
D. Quelles sont donc celles que vous ont données ou communiquées ces espions ?
R. Que les forces de l'ennemi augmentaient considérablement, et par les différents rapports, que je pouvais former une opinion que ces forces étaient de 30,000 ou tout au plus de 40,000 hommes.
D. Quel jour avez-vous reçu ces avis ?
R. Je ne pourrais pas fixer le jour ; mais les derniers me sont venus, à ce qttê jè eroli, du 20 au 26.
D. Par quel général vous ont été donnés ces àvisl est-ce verbalement ou par écrit.
R. Ces avis m'ont été donnés par écrit par les
différents généraux qui commandaient succès^ sivément l'avant-garde èt l'armée d'observation, que j'ai toujours fait parvenir au général en chef.
D. Avez-vous gardé état de ces avis ?
R. La coutume est de former un état général de tous ces différents rapports qui viennent de différents endroits, et de déposer les pièces à l'état-major de l'armée, lesquels états je les ai envoyés régulièrement au général en chef et au ministre de la guerre.
D. Quelles précautions avez-vous prises sur les avis qui vous ont été donnés ?
R. Je ne pouvais en perdre aucune, puisque toutes les troupes disponibles étaient envoyées à l'armée d'observation d'après les ordres du général en chef et les généraux Valence et La-noue, chargés particulièrement de cette défense, tandis que je m'occupais de l'attaque de Maëstricht et de la marche sur la Hollande à une distance fort considérable.
D. Quelles dispositions avez-vous faites pour connaître les mouvements des armées ennemies?
R. Je n'en pouvais faire aucune, étant occupé du siège de Maëstricht, et les armées ennemies à une distance très éloignée.
D. Quand avez-vous été instruit qu'elles marchaient sur vous ?
R. Le jour que nous avons levé le siège, par un officier du génie qui est arrivé à onze heures du matin à mon quartier général de l'Abbaye d'Hœthen, et qui m'a apporté une lettre des généraux de l'avant-garde, m'informant qu'un corpB de 30,000 ou 35,000 hommes avait pénétré par nos cantonnements sur la Roër, battu nos troupes, et qu'il marchait sur Maëstricht pour secourir la place.
D. Qu'avez-vous fait pour vous y opposer?
R. N'ayant en tout qu'un corps de 12,000 hommes auprès de Maëstricht à leur opposer, je les ai rassemblés, fait retirer l'artillerie sur Tongres, que j'ai couvert par un corps de 5,000 à 6,000 hommes, mettant le reste des troupes sur les hauteurs des Vises pour couvrir également la place de Liège et donnant avis au général Valence pour nous réunir et former un corps assez considérable pour nous opposer aux entreprises de la garnison de Maëstricht et du corps ennemi qui marchait sur cette place, ce que nous exécutâmes avec succès.
ï). Etiez-vouS maîtres de vos communications avec le général Lanoue ?
R. Mes communications n'étaient libres avec le général Lanoue que par Liège, le corps ennemi étant entre lui et moi, et les ponts de bateau des Vises et Rekem étant brûlés.
D. Les troupes confiées au commandement du général Lanoue étaient-elles sous vos ordres 1
R. Non, elles étaient sous les ordres du général Valence depuis son arrivée, par les dispositions du général en chef Dumouriez et parce que le général Valence était mon ancien ; j'ai néanmoins, dans un cas d'urgence, donné ton ordure au général Lanoue, qui a été approuvé par le général Valence.
D. Ce général vous a-t-il donné avis de la marche des ennemis sur lui ?
R. Comme il était sous les ordres immédiats du général Valence, il a communiqué tous ses avis à ce général, m'ayant prévenu seulement, au commencement, de l'attaque des ennemis, et de la marche d'un gros corps sur Maëstricht.
D. Qu'avez-vous fait lorsque vous avez été instruit que les postes avancés du général Lanoue avaient été forcés, et qu'une colonne ennemie s'avançait sur vous ?
R. J'ai rassemblé toutes mes forces pour protéger la retraite de toute son artillerie, et je me suis posté sur Tongres et sur Vises pour empêcher les progrès des ennemis sur Liège et Saint-Tron, comme je l'ai dit ci-dessus.
D. Avez-vous fait tirer à boulets rouges?
R. Non.
D. Avez-vous donné des ordres pour chauffer des boulets afin de tirer à boulets rouges ?
R. Oui ; mais, comme les grilles, charbons et choses nécessaires pour cette opération ne se trouvaient pas prêtes, le général d'artillerie m'a fait observer que cela ne pourrait pas avoir lieu aussi vite que je le désirais, et l'a remis au lendemain ; et comme le siège a été levé dans la nuit, il est arrivé qu'on n'a pas tiré de boulets rouges.
D. Aviez-vous donné des ordres pour faire éprouver le charbon de terre et les grilles qui devaient faire rougir les boulets avant de donner des ordres précis pour ce service?
R. Le général en chef de l'artillerie étant chargé pour sa partie de tout ce qui concernait le bombardement et l'artillerie, était le chef sous la responsabilité duquel pesaient les épreuves de tous ces objets.
D. Observé au général que sa réponse est évasive, en ce qu'il ne dit pas directement s'il a donné lui-même des ordres au général d'artillerie pour les épreuves.
R. J'ai donné des ordres très précis au général d'artillerie pour tenir prêt tout ce qui pouvait être nécessaire dans l'artillerie, conformément aux lois et règlements militaires, sans croire devoir lui particulariser le charbon plutôt que la poudre et autres objets concernant la partie de l'artillerie.
D. Avez-vous eu connaissance que le charbon s'est trouvé d'une qualité si différente, que les boulets n'ont pu être rougis?
R. On m'a dit d'abord que le charbon qui avait été porté au parc d'artillerie n'avait pas la force nécessaire pour rougir les boulets, sur quoi, ayant fait appeler le chef d'artillerie pour lui en demander la raison, m'a observé que les fourneaux étaient un peu défectueux ainsi que lé charbon, mais qu'il faisait corriger ce défaut et faire venir du meilleur charbon, avec lequel il espérait tirer parfaitement bien le lendemai n à boulets rouges, comme je l'ai déjà observé.
D. Avez-vous eu connaissance que les grilles n'ont pu soutenir le service auquel elles étaient destinées ?
R. Cette plainte n'est pas arrivée à ma connaissance, et les grilles que j'ai fait préparer pour tirer à boulets rouges avec l'artillerie de 24 sur les hauteurs de lâ Hombreg et de la Vilïeré, m'ont paru parfaitement bonnes comme celles dont j'ai vu faire usage
en pareille occasion ; d'ailleurs, les officiers d'artillerie qui étaient présents, m'assuraient qu'ils répondaient de la réussite.
D. Avez-vous eu connaissance que, dans la plupart des canons de 12, 16 et 24, les boulets étaient d'un calibre absolument inférieur à la bouche à feu pour laquelle ils étaient destinés ?
R. C'est la première fois que je l'entends dire, et m'étant trouvé présent à plus de 20 actions avec la même artillerie et les mêmes officiers, je n'ai jamais pu m'empêcher d'admirer la bonne direction de notre feu dans toutes les occasions.
D. Avez-vous fait dresser procès-verbal de la défectuosité du charbon et des fourneaux destinés à rougir les boulets?
R. Non, je ne l'ai pas fait, et je n'ai jamais vu ni entendu dire qu'on fasse dresser des procès-verbaux dans de pareilles occasions.
D. Avez-vous fait punir ou arrêter les personnes qui avaient la direction immédiate de ces fournitures ?
R. J'ai réprimandé le chef de l'artillerie, responsable de. toutes ces fautes ; j'ai donné plainte au général en chef, qui a puni le chef d'artillerie.
D. Quels sont les chefs qui ont été punis, et quels genres de punition ont été exercés sur eux?
R. Le lieutenant général Dangest que le général Dumouriez me dit avoir puni, et qui fut effectivement renvoyé de l'armée à Douai,
D. Avez-vous gardé copie de la plainte que vous avez dirigée contre ces officiers d'artillerie ?
R. Si la copie de ces papiers n'est pas perdue avec dix ou douze autres qui se sont égarés dans la retraite, elle sera parmi, les miens sûrement.
D. Quel jour avez-vous donné ces plaintes, et quel jour ces officiers ont-ils été punis?
R. La plainte, je l'ai donnée du même quartier général de Hocten, et le général Dumouriez me marque, dans les lettres que j'ai déposées ici, le jour qu'il a envoyé le général Dangest.
D. Quels sont les noms, surnoms des deux aides de camp qui l'accompagnent à Paris, et quel était leur état avant qu'ils fussent auprès de lui ?
R. Mes deux aides de camp ayant été, l'un tué ou resté sur le champ de bataille à l'affaire de Nerwinder, et l'autre bless-4, le général en chef nomma pour rester auprès de moi, comme suppléants à ces deux aides de camp, les deux adioints aux adjudants généraux de l'armée du Nord, placés par les commissaires de la Convention nationale, Nicolas-Charles-Grégoire Dulac et Charles Dulac, l'un ci-devant sergent au bataillon du Puy-de;Dôme, et l'autre lieutenant au même bataillon, tous d^ux ensuite aides de camp du général Cha-zot.
D. N'avez-vous pas reçu un avis par un capitaine de chasseurs tyroliens, déserteur, vers la mi-février, que les ennemis se formaient en corps pour forcer les cantonnements français le long de la Roër?
R. J'ai reçu avis par différents déserteurs
que j'ai examinés à Liège, et parmi eux il y en avait un qui se disait officier qui confirmait à peu près le rapport de nos espions, qui s'accordaient tous à dire que la force des ennemis s'augmentait sur la Roër, et ce sont ces différents rapports qui m'ont formé l'opinion que la force des ennemis était de 30,000 à 40,000 hommes, ainsi que je l'ai dit ci-dessus.
D. N'avez-vous pas reçu avis, par ce même capitaine tyrolien, déserteur, que les troupes autrichiennes qui étaient au-delà de la Roër recevaient habituellement des vivres et fourrages dans nos magasins pour leur subsistance?
R. Non, et c'est une chose que je n'ai jamais entendu dire jusqu'à présent ; d'ailleurs cet officier déserteur n'a jamais parlé avec moi, puisque je n'entends pas la langue ; mais je sais bien que la déposition a été mise et traduite par écrit, et renvoyée, dans l'état général, au commandant en chef et aux autres officiers généraux à qui il appartient.
D. Pourquoi n'avez-vous point tenté d'arrêter l'ennemi dans sa marche?
R. Parce qu'il était trois fois plus fort que moi.
D. Quelles dispositions avez-vous faites pour couvrir votre arrière-garde, retirer vos magasins et vos approvisionnements ?
R. J'ai retiré l'artillerie et presque tout ce qui était relatif au siège, aux environs de Maëstricht, ainsi qu'à Tronges ; les magasins de Liège, d'Aix-la-Chapelle et autres étaient sous la protection des armées des Ardennes et de la Belgique, commandées par le général Valence, à qui je me suis réuni ; après et d'accord avec lui qui était mon ancien, nous avons fait la retraite depuis Liège jusqu'à Louvain.
D. Sur quel point avez-vous dirigé votre retraite ?
R. Sur Louvain dans la forme expliquée ci-dessus.
D. Dépendait-il de vous de faire votre jonction avec les troupes du général Lanoue, de manière à couvrir Liège ?
R. Non sans quitter les postes de Visé et de Tongres, par lesquels les ennemis auraient pénétré et nous auraient coupés.
D. Quelles ont été vos opérations depuis votre jonction avec le général Lanoue ?
R. Celles de continuer notre retraite depuis Liège jusqu'à Louvain, sous les ordres du général Valence, qui, comme plus ancien, commandait toutes les forces réunies.
D. Quels ordres aviez-vous reçus du général Dumouriez le jour de la bataille de Ner-winde ?
R. Ceux-ci, du 18 mars :
Le général Miranda attaquera par la gauche entre Ossmael et la chapelle de Béthanie, tant avec ses troupes qu'avec celles du général Champmorin ; il passera la rivière sur tous les ponts et attaquera sur autant de colonnes et vigoureusement l'ennemi dans sa position ; il est prévenu que l'attaque est générale depuis Ossvervenden jusqu'à la chapelle de Béthanie ; la totalité de l'attaque de gauche est absolument à ses ordres. Le général Champ-
morin doit nécessairement faire garder le pont de Budengen, et y employer une force assez imposante pour pouvoir, au besoin, menacer l'ennemi d'une attaque de flanc vers la partie, de Leaw, où cette force marcherait en colonne.
Signé : Dumouriez, général en chef.
D. Les avez-vous exactement exécutés ?
R. Si exactement que j'ai rassemblé tous les officiers généraux et chefs de brigade qui commandaient les différents corps de troupes; que j'ai formé sept colonnes, commandées par les généraux Ruault, Çhampmorin, Dumenil, et Keating, auxquels j'ai lu l'ordre du général en chef ; ces différentes colonnes ont passé la petite Gette par le pont d'Orstmael, Hellem et Leaw, et ont attaqué vigoureusement l'en-nemi, avant aucune autre division, les colonnes sous les ordres de Çhampmorin, Ruault et Dumenil ayant été conduites à -l'attaque par moi personnellement.
D. Qui peut avoir occasionné le désordre qui a eu lieu dans l'aile que vous commandiez, et la,retraite.précipitée qui en a été la suite?
R. La position très avantageuse que l'ennemi occupait sur la droite, que notre gauche avait ordre d'attaquer, la nombreuse artillerie, qui ajoutait aux avantages du terrain, le nombre presque double .des troupes ennemies qui la défendaient, et enfin la grande difficulté que nos troupes trouvaient à chercher des chemins pour approcher l'ennemi et-faire usage de son artillerie, ont été la cause des pertes considérables que tous les corps ont essuyées, en faisant l'attaque ; de manière qu'au bout de trois heures du combat le plus vigoureux et le plus meurtrier que des troupes aient jamais essuyé, lés nôtres furent obligées de-replier, ayant laissé sur le champ 'de bataille deux mille braves défenseurs de la liberté, témoignage illustre de leur vertu républicaine, et la plus lâche action peut-être du général en chef, est celle d'enlever cette gloire à la patrie, et l'honneur aux soldats qui ont su mourir à leurs postes en remplissant le plus sacré des devoirs. S'ils ont perdu quelque artillerie, c'est parce que les chevaux ont été tués et les pièces démontées sous le feu dominant de l'ennemi ; la seul brigade que commandait. le colonel Champpalon, a eu, en quatre minutes de temps, pendant qu'elle se déployait devant la ligne dix-sept chevaux tués et quatre pièces démontées, selon le rapport de cet officier ; et quand on la perd de cette manière, on la perd avec honneur. La troupe avait une rivière à dos et deux ou" trois ponts seulement sur une grande distance, pour passer, puisque le général en chef n'avait donné aucune disposition pour y jeter des ponts ; ainsi il n'est pas étrange qu'ayant tant souffert dans le combat et étant vivement poursuivies par un ennemi très supérieur en nombre et qui avait de son côté tous les avantages que le terrain et les situations peuvent donner en pareil cas, les troupes se fussent retirées une partie en confusion ; mais, je le répète, ce n'était que le petit nombre, et le reste de la division s était toujours comporté en braves et dignes défenseurs de la liberté. Les fautes les plus essentielles n'ont pas été certainement celles du soldat, qui, quand on l'a bien conduit, s'est comblé de gloire, comme ceux de cette même
division l'ont fait le jour suivant et le 22 mars, à Pellinberg, de l'aveu même de ses ennemis: Je ne prétends pas couvrir la honte des lâches, ni les désordres infâmes des pillages auxquels s'est livrée une partie des troupes, commandées par de mauvais chefs, ce qui a pu jeter quelques nuages sur la réputation glorieuse que l'armée s'était acquise à si justes titres jusqu'à cette époque ; mais la source principale de ce désordre était dans l'état-major et le commandant en chef, qui n'appliquaient pas les remèdes nécessaires, ou au moins ceux que nous avions employés jusqu'alors pour les prévenir.
D. Pourquoi n'avez-vous pas fait prévenir aussitôt le général en chef des causes de votre retraite 1
R. J'ai envoyé un aide de camp et deux ordonnances pour le prévenir, tandis que je recevais les mêmes rapports de la retraite des autres divisions par des officiers de l'état-major et des ordonnances ; immédiatement apès que j'ai pu avoir une lumière pour écrire, je lui fis mon rapport très détaille, que je lui ai envoyé par un courrier, accompagné de nos ordonnances de l'armée, pour qu'il pût lui parvenir le plus tôt possible.
D. Qu'avez-vous fait pour rallier vos troupes dispersées, et où avez-vous porté votre division?
R. Les troupes qui étaient en confusion, je leur ai donné l'ordre de se rallier derrière la ville de Tirlemont, où les premiers corps débandés étaient déjà, et par ce moyen ils se sont tous arrêtés a l'endroit que je leur avais indiqué. Les divisions sous les ordres du général Çhampmorin et Ruault ont reçu l'ordre de venir prendre la position de Wommersons, et cinq bataillons qui arrivaient de Louvain de prendre la même position sous les ordres du général Hiller, ainsi que toute la cavalerie qui était sous mes ordres.
D. Quel jour avez-vous rejoint le général Dumouriez, campé près Louvain?
R. Le 21 mars, après avoir reçu l'ordre qui suit : « Le corps d'armée aux ordres des généraux Miranda,- Chancel, Stenhoff et Egalité se formera sur deux colonnes ; une colonne passera par la chaussée, et se retirera sur les hauteurs en arrière de Louvain, où le camp a été placé ; l'autre marchera par Lauwem-houl, Corbekhowirloo et Haverte, où elle prendra une position en arrière de Louvain, la droite appuyée à la rivière de Vou, et la gauche vers le bois de la Communauté. Louvain, le 21 mars 1793, l'an II de la République..
Le général en chef.
« Signé : Dumouriez.
« P. S. Le mouvement se fera à onze heures précises ; le général Miranda prendra le commandement ae ces deux colonnes pour y maintenir l'ordre. »
J'observe que le même jour que le colonel m'a confié la conduite de tous ces différents corps, il m'inculpait auprès des commissaires de la Convention nationale, et leur faisait prendre un arrêté pour me rendre sur-le-champ à la barre de la Convention, et y rendre compte de ma conduite, lequel ordre ne m'a été signifié que le 25 au soir, quand la retraite des troupes a été effectué sous mes ordres.
D. Qu'avez-vous fait depuis votre jonction avec le général Dumouriez, jusqu'au moment où vous avez été requis dé vous rendre à la barre de la Convention?
R. J'ai suivi jour par jour les ordres du général en chef, dont je dépose les originaux au comité, ayant toujours commandé l'arrière-garde dans la retraite de l'armée jusqu'au 25 à dix heures du soir, que le général m'envoya au camp de Bauvigny-sous-Ath l'arrêté au 21 mars, fait à Bruxelles par les commissaires de la Convention nationale dans la Belgique, pour me rendre à la barre de la Convention.
D. Aviez-vous connaissance des opinions du général Dumouriez sur les travaux de l'Assemblée ?
R. Oui : je lui avais entendu dire souvent que la moitié était des imbéciles et l'autre moitié des scélérats; ce qui produisit mon inimitié et ma séparation de liaisons; ce qui, joint à d'autres observations et autres faits survenus depuis son retour de la Hollande, a motivé la lettre que j'écrivis, en date du 21 mars, au citoyen Pétion, dont je dépose copie au comité, laquelle lettre j'envoyai au citoyen Pétion par duplicata par deux courriers.
D. Le citoyen Pétion a-t-il répondu à cette lettre?
R. Etant parti le 25, je n'ai reçu aucune réponse.
D. Quel jour êtes-yous arrivé à Paris, et ce jour-là avez-vous fait part à quelques membres de. la Convention dés sentiments inciviques de Dumouriez ?
R. Je suis arrivé à Paris le 28 mars, à 9 heures du soir; j'ai envoyé immédiatement prier le citoyen Pétion de venir me trouver pour un objet de la plus grande importance; il s'ést rendu chez moi, accompagné du citoyen Bancal, membre de la Convention nationale, et je leur ai dit que Dumouriez était un traître; que je croyais qu'il voulait marcher sur Paris avéc l'armée, et qu'il eût à prévenir les pouvoirs constitués,_ pour prévenir ce mal qui menaçait la République; et que je craignais fort que dans ce moment où je parlais, il n'eût déjà levé le masque et fait éclater la conspiration, puisqu'il m'avait assuré très positivement, dans nos derniers entretiens, qu'il ne mettrait jamais le pied en France; et je l'avais quitté sur la frontière, et je me proposais de faire cet exposé exact à la Convention nationale le lendemain de mon arrivée; c'était à cet effet que j'écrivis au Président pour lui demander d'être admis à la barre; et n'ayant pu obtenir mon admission malgré que je me sois présenté tous les jours, je me suis décidé à le publier dans un mémoire imprimé qui contient tous ces faits.
D. Avez-vous connaissance que les citoyens Pétion et Bancal aient fait parvenir à la Convention nationale vos déclarations, qui étaient d'une si grande importance?
R. Le citoyen Pétion m'a informé qu'il les avait communiquées immédiatement au comité de défense générale ; le citoyen Baneal étant parti pour se rendre à la frontière, je ne l'ai pas vu depuis.
D. Avez-vous eu connaissance que le citoyen qui vous a accompagné à Paris, et qui servait
auprès de vous à l'armée, ait fait part à quelques membres de la Convention des trahisons dè Dumouriez, et des lumières que vous pouviez donner sur ces trahisons, si vous étiez entendu sur le champ à la barre ?
R. Oui : n'ayant aucUne connaissance intime avec aucun membre de là Convention nationale, et étant informé par le citoyen Grégoire Dulac, qui est auprès de moi, en l'absence de mes aides de camp, de l'intégrité du citoyen Magniez, membre de la Convention nationale, qu'il connaissait intimement, je le priai de lui faire cette confidence, pour qu'il la communiquât à ceux de ses collègues, pour qu'ils pussent remédier aux maux qui menaçait la République par les dessins perfides de Dumouriez.
D. Le général Dumouriez vous a-t-il donné ordre de faire exécuter le décret du 15 décembre dernier dans la partie de la Belgique confiée à votre commandement?
R. Je n'ai pas reçu d'ordre positif du général Dumouriez pour faire exécuter le décret du 15 décembre dernier; mais, d'après les conférences qui avaient eu lieu avec les commissaires de la Convention, je l'ai fait exéeuter dans l'armée que je commandais.
Le général a remis en appui de ses réponses un registre des lettres et ordres de service, le tout en original; et les interrôgats ont été clos ce jourd'hui 10 avril 1798, à minuit.
« Signé : Miranda.. «
a la séance de la convention nationale du
Réponse de Guadet (1), député de la Gironde à Robespierre, député de
Paris, prononcée le vendredi
Citoyens, si en dénonçant au Sénat de Rome celui qui avait conspiré contre la liberté de son pays, si en accusant Catilina, Cicéron eût fondé son accusation sur des preuves de la nature de celles que Robespierre a produites contre moi, Cicéron aurait excité contre lui-même l'indignation de tout le Sénat : et 31 après avoir annoncé qu'il venait remplir un ministère douloureux et- pénible, si après avoir déclaré que l'amour de la patrie et la connaissance d'une grande conjuration avaient seules pu le forcer à rompre le silence, Cicéron eût terminé son accusation par une plate et froide plaisanterie; si, mêlant aux grands intérêts de la liberté de ridicules jeux de mots, il eût conclu en faveur de l'accusé après l'avoir peint comme un vil scélérat, Cicéron
eût été honteusement chassé du Sénat : car à Rome on détestait la calomnie et on savait punir les calomniateurs. Mais Cicéron était un homme de bien, il n'accusait pas sans preuves : Cicéron respectait les lois, il ne citait pas les traîtres devant les poignards. Cicéron aimait son pays : il n'eût pas pris les mouvements de l'orgueil et de la haine pour
les élans du patriotisme. Cicéron enfin.........
je m'arrête. Aussi bien que peut-il y avoir de commun entre Cicéron et Robespierre, entre Catilina et moi 'I
La calomnieuse histoire qui vous a été débitée embrasse trois époques assez distinctes. La première comprend la session du Corps législatif jusqu'au 10 août; la seconde comprend la prolongation de cette session jusqu'à la réunion de la Convention nationale; la troisième comprend tout le temps qui s'est écoulé depuis cette réunion.
En parcourant les faits qui appartiennent à la première époque;, je trouve six chefs d'accusation. Influence sur la nomination des ministres; influence sur leur administration; influence dans les comités; influence sur la déclaration de guerre à l'Autriche; intelligences criminelles avec les traîtres, et notamment avec Lafayette ; traité secret avec la Cour.
Je passerai rapidement sur la plupart de ces faits. Vergniaud en a déjà démontré l'absurdité, et je ne prétends pas convaincre ceux que Vergniaud n a pas convaincus.
Les ministres que * Robespierre m'accuse d'avoir fait nommer ne sont pas, sans doute, les Lajard, les Chambonas, les Sainte-Croix, etc., sans doute, il entend parler de ceux que la France entière a désignés sous le nom de ministres patriotes : or, je suppose qu'ils aient été choisis par mon influence, mes efforts pour les porter à la tête du gouvernement auraient-ils été un crime ou une trahison ?
Eût-ce été trahir son pays que donner à la France pour ministres, et à un roi perfide pour agents des hommes dévoués à la cause de la liberté, attachés aux principes de la Révolution et d'un caractère capable de résister aux séductions de la Cour, des hommes enfin dont le renvoi a depuis été regardé par tous les amis de la liberté comme une calamité publique, et par ses ennemis comme un triomphe ? Mais ce service que je m'enorgueillirais d'avoir rendu à mon pays, je ne le lui ai pas rendu. Je n'avais pas vu Roland une seule fois avant sa nomination; je ne le connaissais même pas de nom, et je l'ai rencontré deux fois chez le maire de Paris après son élévation au ministère, sans savoir quê l'homme à qui je parlais fût le nouveau ministre de l'intérieur. J'en dirai autant de Servan ; le ministre Degrave l'avait, je crois, appelé à Paris : je l'y ai vu deux fois par hasard dans la maison d'un de nos amis communs, et sans connaître de lui que son nom et l'excellent ouvrage dont il est l'auteur, intitulé : le Soldat Citoyen, ouvrage qui m'avait quelquefois fait espérer de voir planter sur le soi français l'â.rbre de la liberté. Clavière était donc le seul que je connusse avant qu'il arrivât au ministère : mais si Sa réputation ou des circonstances extraordinaires ont fait ministre un homme que j'estimais, est-ce une raison de m'attribuer sa nomination ?
En tout cas, je déclare que je n'y ai eu au-
cune part, et je défie qui que ce soit au monde de prouver le contraire. Malgré le respect que j'ai toujours eu pour les talents de Cla-vière, et la sincérité de l'estime qu'il avait su m'inspirer, beaucoup de gens, et je parle même de ceux qui me calomnient* ont été moins étonnés que moi de le voir arriver à cette place.
Quant à Dumouriez, s'il est vrai qu'il soit du nombre des ministres qu'on me reproche d'avoir faits, on verra bientôt qu'elle a été ma conduite avec lui dans le Corps législatif, et on pourra juger s'il fut jamais ma créature : en attendant, je déclare qu'ayant entendu parler de lui avec éloge dans le compte que Gensonné rendit au Corps législatif de sa mission dans le département de la Vendée, je le vis avec intérêt dans un voyage qu'il fit quelque temps après à Paris, mais que je n'ai su ni par qui, ni par quelle voie il avait été porté au ministère des affaires étrangères : cela n'est pas difficile à deviner aujourd'hui, quand on a lu le recueil des pièces saisies au château des Tuileries : il est aisé de voir que c'est par Sainte-Foy qu'il a été porté; or j'atteste que je n'ai jamais parlé à Sainte-Foy, que je ne le connais même pas de vue.
Je n'ai donc pas fait les ministres dont on parle : voyons maintenant si j'ai dirigé leur administration.
Ici encore je pourrais demander où serait le crime, où serait la trahison ; car enfin qu'ont fait ces ministres qu'un bon citoyen ne voulût pas avoir conseillé. Ils ont Burveillé la Cour, déjoué autant qu'ils l'ont pu ses secrètes intelligences avec les contre-révolutionnaires du dedans et du dehors : ils ont déclaré l'opinion, felevé l'esprit public et fortifié les patriotes : ils ont obtenu la sanction du décret de licenciement d'une garde contre-révolutionnaire, sollicité celle des décrets sur les princes émigrés, sur les prêtres fanatiques et rebelles et sur la formation d'une armée entre Paris et les frontières, décret qui, pour le dire en passant, fut vivement attaqué par Robespierre, qui pourtant depuis a proscrit, désigné au fer des assassins, et fait chasser des assemblées primaires les 20,000 pétitionnaires qui, au lieu de le combattre dans les tribunes par des déclamations, en avaient demandé le rapport suivant les formes autorisées par la loi. Ces ministres ont plus fait : à l'instant même où, par le refus d'une sanction désirée, par tous les amis de la liberté ils se sont vus dans l'impuissance de faire le bien, ils ont donné leur démission, et en ont publié les motifs dans une lettre qu'on ne peut pas avoir oubliée. Qu'offrenMls donc à partager que de la gloire à celui qui les aurait aidée de ses conseils et de ses lumières ?
Mais cette gloire, je l'usurperais si je n'avouais qu'elle ne m'est pas due. Des ministres dont je viens de parler, les seuls que j'aie vus avec quelque intimité, c'est Roland et Cla-vière i Roland qui, dès les premiers jours de son ministère, m'a inspiré une estime que je I conserve encore, que tous les hommes de bien j partagent, et qui a dû augmenter dans leur I cœur comme dans le mien depuis que sa vie publique, toute remplie de courage, de civisme | et de vertu, l'a rendu l'objet de la plus atroce persécution : Ol&vièrô que mes liaisons avec Brissot, liaisons dont je m'honore, puisque j'ai j trouvé en lui le véritable ami de la liberté
et de la philosophie ; non de cette philosophie de paroles qui sait allier la censure du vice pour les autres et le mépris de toutes les vertus pour soi-même, mais de cette philosophie p»atique qui donne à l'homme l'amour de ses devoirs et le courage de les remplir, le bonheur dans la médiocrité, et la constance dans le malheur : Clavière, dis-je, que^ mes liaisons avec Brissot m'ont mis à portée de cultiver, et que j'ai appris, chaque jour, à estimer davantage. Je ne le cache pas, souvent je me suis entretenu avec ces deux ministres de la chose publique, mais jamais de leur administration. Souvent nous nous sommes communiqués nos alarmes sur le sort de la liberté, jamais nous n'avons arrêté ensemble de mesures : jamais, que je m'en souvienne au moins, nous n'avons concerté de projets : et, quoiqu'il y eût loin de là à l'influence qu'on me reproche, je dois ajouter que jamais on ne m'a vu dans leurs bureaux, que jamais je n'ai eu avec eux d'entretiens particuliers et secrets. Au surplus, tous ceux qui les connaissent doivent sentir combien le reproche auquel je réponds est ridicule : il n'y a qu'un sot ou un lâche qui puisse devenir l'instrument de la volonté d'autrui ; et certes, ce n'est ni à Roland ni à Clavière que l'une ou l'autre de ces épithètes pourraient convenir.
Je reviens à Dumouriez pour dire qu'avec beaucoup d'esprit, beaucoup de connaissances et beaucoup de talents, il me parut bientôt n'avoir aucun principe de morale : et comme ce fut toujours la règle d'après laquelle je jugeai les hommes, je m'éloignai de lui, je cessai de le voir ; et à l'instant même où je pus soupçonner qu'il trahissait la cause de la liberté ou qu'il pouvait la trahir, je l'attaquai, non pas sourdement et par intrigues, mais ouvertement, à la tribune du Corps législatif. U avait obtenu une somme de 6 millions pour dépenses secrètes de son département : ces dépenses n'étaient par leur nature soumises à aucune surveillance : je fis porter un décret qui l'obligea à en rendre compte au comité des finances ; et si quelque chose m'a prouvé que cette mesure était nécessaire, c'est que, quoiqu'il fût entouré d'hommes très corrompus, ses dépenses de quatre mois ne se sont élevées qu'à 700,000 livres, et qu'il a laissé à son successeur 5 millions et 300,000 livres. Ce n'est pas tout : peu de temps après, sa coalition avec la Cour m'ayant paru évidente, je l'accusai, toûjours à la tribune de l'Assemblée nationale ; et cè qu'il y a de bien étonnant, c'est que la plupart des hommes qui m'accusent aujourd'hui d'intelligence avec lui, le défendirent à cette époque et écartèrent le décret que je sollicitais contre lui.
J'ai donc, d'après cela, le droit de le dire : Robespierre a fait une chose indigne, je ne dis pas d'un homme de bien, mais d'un brigand qui aurait quelque pudeur, lorsque laissant à l'écart tous ces faits qui sont publics et notoires, il est venu reproduire ici un placard sans nom d'auteur, affiché quelques jours après le décret qui, sur ma motion, soumit les dépenses secrètes du ministre des affaires étrangères à l'examen et à la surveillance du comité des finances, placard dans lequel on avait la maladresse impudente de dire que si quelques-uns de mes collègues et moi avions
attaqué Dumouriez, c'est qu'il avait refusé de partager avec nous les 6 millions de dépenses secrètes. Robespierre ! je te le demande, consentirais-tu à être jugé sur les écrits des Royon et des Durozoy de ton temps ? On t'a accusé, toi aussi, dans des placards affichés d'avoir eu, avant le 10 août, diverses entrevues avec la princesse de Lamballe. Que me répondrais-tu si je t'opposais de pareils écrits, et si les rapprochant de la fin tragique de cette femme, j'observais, comme on l'a dit encore, que tu as commandé les journées de septembre, où elle a péri victime des assassins que tu appelles des vengeurs? Et cependant quelle différence entre le cas où je te place, et celui où m'a placé ta haine. Non, je ne crains pas de l'avouer : il n'y a que celui qui a fait ou commandé une telle affiche qui ait pu songer à me l'opposer.
Au reste, ce que je dis ici de Dumouriez je n'ai pas attendu, pour le publier, que sa conjuration fût connue. Ce général était encore environné de tout l'éclat de sa gloire, on regardait encore comme une manœuvre contre-révolutionnaire la demande d'un décret d'accusation contre lui, lorsque je me suis expliqué sur son compte au comité de défense générale, et en présence de cent de mes collègues de la même manière que je le fais en ce moment. Loin de moi cette lâcheté qui fait renier l'homme qu'on crut estimable lorsqu'il est ou justement poursuivi par la loi, ou injustement persécuté par la haine 1
On peut juger maintenant si le reproche d'avoir influencé les opérations du ministère est ridicule et mal fondé. Je passe aux travaux des comités de l'Assemblée législative que-mon accusateur suppose avoir également été dirigés par moi.
Le règlement du Corps législatif portait qu'on ne pourrait être membre de deux comités à la fois : en conséquence, ayant été porté à celui d'éducation publique et à celui de législation, j'optai pour ce dernier, et je ne crois pas avoir paru une seule fois dans un autre, si ce n'est à celui d'éducation publique, où la députation de la Gironde a été deux ou trois fois convoquée, et à celui de surveillance, où j'ai été appelé deux ou trois fois, et notamment lorsqu'il fut question de défendre Chabot, Bazile et Merlin, qui dès lors me calomniaient dans les tribunes et dans des placards, mais qui ne m'en trouvèrent pas moins prêt à défendre avec zèle et avec courage la représentation nationale outragée en leur personne, et la cause de la liberté liée au mandat d'amener décerné contre eux. Je n'ai pas besoin tle dire que le comité de législation n'avait aucun rapport avec les affaires du gouverne ment ; je n'ai pas besoin de dire qu'il ne s& mêlait ni de l'armée, ni des finances, ni de nos relations extérieures : je me borne donc à répondre sur ce point à Robespierre que je ne sais ce qu'il veut dire lorsqu'il parle de mon influence dans les comités, à moins qu'il n'appelle influence la rédaction de quelques parties de la législation civile que la séparation prématurée du Corps législatif m'a empêche de lui soumettre.
Mais peut-être Robespierre n'a-t-il voulu parler que du comité de défense créé par l'Assemblée nationale législative dans les derniers jours de mai ? Peut-être est-ce à ce comité que
se rapportent tous ses reproches d'influence et de domination 1 S'il en était ainsi, voici ma réponse :
Oui, j'ai heureusement eu quelque influence dans ce comité : mais voulez-vous savoir quelle a été cette influence 1 C'est celle du courage, du patriotisme et de la raison. J'ai influencé les délibérations de ce comité comme Brissot, Jean Debry, Guyton-Morveau, Condor-cet, Vergniaud, Quinette et quelques autres, en luttant constamment contre les membres qui ne partageaient pas alors notre opinion sur les trahisons de la Cour, et sur les moyens par lesquels on pouvait les déjouer. J'ai influencé les délibérations de ce comité comme les patriotes qui en étaient membres en y portant chaque jcmr le produit de mes méditations sur la situation de la chose publique, en appuyant l'excellent décret de Jean Debry sur les dangers de la patrie, l'excellente opinion de Vergniaud sur les cas de déchéance, en détournant l'orage que la malheureuse journée du 20 juin avait attiré sur la tête des patriotes, en faisant casser la suspension du maire et du procureur de la commune de Paris, en provoquant et faisant arrêter un décret d'accusation contre le général Lafayette, en provoquant, quoique sans espoir de l'obtenir, la suspension du pouvoir exécutif dans les mains du roi, et la convocation des assemblées primaires pour la formation d'une Convention nationale, et depuis le 10 août, ainsi que je le dirai tout à l'heure, en m'éle-vant, Robespierre, contre ton insolente domination, et attaquant la dictature que dans les jours de deuil qui suivirent notre victoire tu voulus exercer, en arrachant à ta fureut les membres du Corps législatif que tu avais proscrits, et que tu voulais voir tomber sous les lois draconiennes que tu avais dictées afin de faire un essai de ta puissance : ah ! si c'est là l'influence que tu me reproches, tu as raison : mais n'espère pas que je m'en justifie.
J e viens à la déclaration de guerre, et je ne serai pas long sur ce point. Pour pouvoir supposer que cette mesure a été influencée par quelqu'un, il faudrait au moins qu'il y eût deux opinions là-dessus dans le Corps législatif ; or, cela n'existait pas ; et si j'en excepte deux ou trois royalistes renforcés, tous les membres la voulaient et elle a été votée à l'una^ nimité.
Eh ! comment n'en aurait-il pas été ainsi : il n'était pas question d'attaquer l'Autriche et la Prusse, mais de se défendre contre ces deux puissances, qui depuis longtemps étaient coalisées contre nous, et qui, dans cet instant-là, faisaient tous leurs préparatifs pour nous surprendre au printemps. La dignité de la nation, sa sûreté, les rassemblements de Français rebelles, le refus de Léopold de renoncer au traité de Pilnitz, tout faisait au Corps législatif la loi de porter cette déclaration, et de céder au vœu bien prononcé de la France entière; oui, de la France entière, et c'est une vérité si incontestable, que les termes me manquent pour qualifier cette assertion de Robespierre, que la déclaration de guerre à l'Autriche a été l'ouvrage d'une faction ; expressions renouvelées des Delessart e*t des Montmorin, et qui sont bien propres à faire cesser les cris de paix que des traîtres jettent dans nos armées pour
dégoûter nos défenseurs,et nous livrer à Co-bourg.
Robespierre ! parmi les hommes qui se disaient patriotes, je n'en connais qu'un seul qui n'ait pas voulu la guerre : c'est toi ; et tu ne la voulais pas, parce qtie tout le monde la voulait. Tu prétends que nous avons usé de supercherie pour former l'opinion sur la guerre, que nous nous sommes emparés du comité de correspondance des Jacobins, et que nous avons fait écrire, par ce comité, que le vœu des J acobins était pour la guerre, quoique cela fût faux. Je n'ai qu'un mot à te répondre. Tu mens avec impudence. Je n'ai jamais parlé à aucun membre du comité de correspondance des Jacobins : je n'en ai jamais connu aucun. Pendant un an que j'ai été membre de cette société, je n'y suis pas allé quinze fois en tout, et je crois que Brissot, Vergniaud et Gensonné y sont allés moins souvent encore.
Mais je Veux qu'on sache pourquoi tu nous reproches, contre toute évidence, d'être les auteurs de la guerre. Tu nous le reproches parce que la campagne vient de s'ouvrir par des revers. Le premier septembre, lorsque les Prussiens étaient maîtres de Longwy et de Verdun, et qu'ils s'avançaient en vainqueurs, tu tenais le même langage : tu nous signalais dans tes tribunes de sang, comme les auteurs de ces maux. Depuis, et lorsque nos armes ont été partout victorieuses, tu as parlé de la guerre comme d'une mesure de salut, et si l'homme qui est destiné à écrire l'histoire de cette grande Révolution t'était connu, tu l'aurais volontiers payé pour t'en faire les honneurs. Aujourd'hui tu reprends tes discours de septembre. Nous sommes les auteurs de la guerre, parce que la guerre est malheureuse et qu'on peut craindre de nouvelles défaites. C'est ainsi, homme lâche et sans pudeur ! que tu dis toujours non, ce que tu penses, mais ce que le soin de ta popularité veut que tu dises : c'est ainsi que dans tes discours, comme dans tes actions, tu consultes toujours, non ta raison et ta conscience, mais ton orgueil et ta haine. Aussi nous nous y attendons : s'il arrive que malgré nos efforts ta secte anarchique et toi, vous parveniez à renverser la République., c'est par vous que nous serons signalés comme républicains, et livrés à la vengeance du despote qui régnera sur la France. Vous direz de nous : ils voulurent la République, comme tu dis aujourd'hui : ils ont voulu la guerre.
J'arrive enfin à la grande trahison, c'est-à-dire à mes prétendues intelligences avec Lafayette et à notre prétendue transaction avec la Cour.
J'ai eu des intelligences avec Lafayette ! mais où étais-tu donc caché, éternel calomniateur, le jour, où dans l'éclat de sa puissance, porté, du château des Tuileries jusque dans cette enceinte, au milieu des acclamations d'un peuple immense, qui, par ses cris de: Vive Lafayette, semblait vouloir en imposer aux représentants du peuple, soutenu de la majorité de l'Assemblée nationale, et organe d'une armée dont on le disait l'idole, il se présenta à cette barre pour y faire sa fameuse pétition. Les patriotes paraissaient abattus, chacun d'eux gardait le silenoe. J'eus seul le oourage de le rompre. Je me présentai à la tribune, et je l'accusai, non pas ténébrousement comme tu
le fais, Robespierre, lorsque tu penses craindre ! quelque chose, mais ouvertement, en sa présence. La motion que je fis fut soumise à un appel nominal, dans lequel les patriotes n'eurent pas la victoire, mais cette motion et le discours qui la précéda, et qui n'est pas sans énergie, n'en sont pas moins là pour te répondre.
Tu insistes cependant, et tu veux que j'aie eu des entrevues secrètes avec ce générai : eh bien, je vais dire un fait que tu connais, et qui t'a été attesté par des hommes qui ne te sont pas suspects, si toutefois il y a quelqu'un au monde que tu puisses ne pas soupçonner ; peut-être parviendrai-je à te faire honte à toi-même de ton accusation.
Un de nos collègues dans le Corps législatif, (quoiqu'il souffre maintenant pour la République, je peux le nommer parce qu'il n'y a rien à sa charge dans ce que je vais dire,) c'est Lamarque, m'invita un jour à dîner chez lui. J'y trouvai plusieurs députés, et entre autres Vergniaud, Grangeneuve et Ducos ; après le dîner, nous fûmes invités à passer dans l'appartement d'un ami de Lamarque, et qui demeurait sur le même palier que lui. A peine y fûmes-nous rendus, qu'on annonça M. de Lafayette. A l'instant même, et sans nous être fait aucun signe, Vergniaud, Grangeneuve, Ducos et moi, nous prîmes nos chapeaux et nos cannes, et nous sortîmes sans saluer ce général, qui dès lors, et depuis la fuite du roi, surtout, était jugé pour nous (1). Voilà comme nous nous sommes conduits avec l'homme que l?on suppose s'être entendu avec nous pour faire triompher la cause des rois. La première et l'unique fois que nous nous sommes trouvés avec lui face à face, nous l'avons quitté brusquement, et sans répondre un seul mot à ses avances. U faut avouer que si c'est là une coalition, elle ne ressemble guère à une coalition ordinaire.
Et c'est cependant cette entrevue fortuite, transformée à la tribune des Jacobins, par je ne sais quel dénonciateur, en un dîner arrangé, qui paraît avoir été la source de toutes les calomnies répandues contre nous. C'est de cette entrevue et des divers commentaires qui en ont été la suite, que datent toutes ces dénonciations, toutes ces accusations de trahison et d'intrigue, que quelques brigands patentés, et quelques scélérats vendus aux ennemis de la France n'ont cessé de colporter de tribune en tribune, dénonciations cent fois réfutées, et toujours reproduites, parce qu'on espère qu'à la fin l'audace tiendra lieu de preuves, et que si la blessure guérit, la cicatrice du moins pourra rester. '
La réflexion que je fais ici, citoyens, sans doute vous l'avez appliquée d'avance au reproche de transaction avec la Cour, que notre accusateur a osé renouveler.
Comment, en effet, après la réponse que dans le temps j'ai faite à cette accusation, pourrait-il dire encore que Vergniaud, Gensonné et moi, avons voulu transiger avec la Cour, s'il n'espérait qu'à force de retourner le poignard dans nos cœurs, il y laissera enfin quelques marques de la plaie qu'il y a faite. Gensonné a fait im-
primer la lettre sur laquelle cette imputation est fondée ; et qu'y a-t-on vu ? Une explication franche sur la cause des maux et des dangers de la patrie. On nous demandait quels étaient les moyens de faire cesser les dangers^ et on ne nous avait pas caché que notre réponse serait mise sous les yeux du roi. Cette réponse fut digne de nous ; nous déclarâmes que la cause de nos maux était tout entière dans le pouvoir exécutif. Nous ne déguisâmes pas une seule vérité utile. Les intelligences vraisemblables du roi avec ses frères, avec les émigrés, avec les puissances ennemies, le mystère qui enveloppait l'emploi de sa liste civile, la coalition du général Lafayette avec les royalistes du dedans, nous dîmes tout sans ménagement: et l'on appelle cela avoir transigé avec la Cour; mais, qu'on explique donc à quelle expression on attache cette idée. Jusqu'ici c'est en vendant à la Cour son crédit et son talent, qu'on a été accusé de transiger avec elle : aujourd'hui et dans la langue de Robespierre, c'est en lui reprochant ses trahisons et ses crimes.
« Mais on demandait la déchéance du roi, et lui conseiller de faire quitter les armes aux émigrés, de renoncer à l'appui des Cours de Vienne et de Berlin, de rendre epmpte de l'emploi de sa liste civile, de sanctionner des décrets nécessaires au maintien de la tranquillité publique, d'ôter le commandement de l'armée à un général qui trahissait la cause de la liberté, et de chasser de son palais les contre-révolutionnaires qui y conspiraient, c'était lui indiquer des moyens de salut, c'était conjurer l'orage qui menaçait et son trône et sa tête. » D'abord, on ne demandait pas la déchéance du roi lorsque notre lettre a été écrite : la pétition des sections de Paris n'est venue que plusieurs jours après ; en second lieu cette mesure extrême n'eût point été adoptée par l'Assemblée nationale législative ; il n'y a pas un homme de bonne foi qui puisse me démentir sur ce point : et les patriotes en étaient bien convaincus puisqu'ils préparaient «ne irsur-rection qui pût suppléer à la faiblesse du Corps législatif, ou son respect religieux pour la Constitution qu'il avait jurée. Troisièmement enfin, en admettant l'insurrection possible la victoire pouvait rester à la Cour : et alors que devenait la liberté ? A entendre Robespierre, et tous ces braves après le danger, qui crient comme lui à la trahison, on dirait que ces messieurs étaient assurés du succès ; que confidents de la fortune, ils savaient que les patriotes seraient vainqueurs dans la journée du 10 août. Et cependant qu'avaient-ils fait pour faire triompher la cause de la liberté ? Rien, absolument rien. Peu de jours avant le 10 août, Carra et quelques patriotes ayant voulu se réunir chez un d'entre eux, dans la maison qu'habitait Robespierre, le maître de l'hôtel leur déclara qu'il ne le souffrirait pas, parce que cela pourrait compromettre 'M. Robespierre, et le faire soupçonner de conspiration. Et le 10 août, où le vit-on, lui et ses amis ? Nulle part. Cachés pendant le combat, ils ne se montrèrent qu'après la victoire. Et les voilà pourtant «es hommes qui prophètes après l'événement valeureux lorsqu'il n'y a plus d'ennemis à vaincre, vous disent que le succès des patriotes était certain, et dénoncent comme d«s traîtres ceux qui, té-
moins de l'agitation du peuple, mais ignorant quelles précautions avaient été prises pour régler ses mouvements, convaincus des trahisons de la Cour, mais avertis, par la journée du 20 juin, du mal que pouvait faire à la liberté une insurrection desordonnée, essayaient de déjouer les complots de la Cour en montrant au roi tous ses dangers, et en lui déclarant que c'était à lui que la France imputait, avec raison, et la coalition des despotes de l'Europe, et les troubles de l'intérieur du royaume.
N'oubliez pas d'ailleurs, citoyens, qu'en même temps que nous hasardions ce moyen, nous appuyions de toutes nos forces dans le comité de défense, celui de la suspension du roi, et de la convocation des assemblées primaires pour la formation d'une Convention nationale ; n'oubliez pas que cette mesure (bien préférable sans doute à celle de la déchéance qui nous livrait à tous les maux d'une minorité et d'une régence), c'est Gensonné qui l'a proposée au comité quoiqu'il n'en fût pas membre: n'oubliez pas que c'est Yergniaud et moi qui l'avons rédigée en loi, et présentée à l'Assemblée nationale, lui, pour la partie de la suspension, et moi pour celle de la formation d'une Convention nationale.
Il est, au reste bien singulier, et c'est la réflexion par laquelle je termine ; il est bien singulier que Robespierre nous reproche d'avoir voulu maintenir la Constitution, en demandant au roi d'y rester fidèle, lui, qui dans un journal, publié sous son nom, s'en était établi le défenseur. Dira-t-il que cela était sans conséquence, attendu que son journal n'était lu de personne ; j'en conviens ; mais il n'en déposait pas moins ses sentiments dans cet écrit périodique, et ne l'eût-il fait que pour lui, j'aurais le droit de le lui opposer. Au surplus, désire-t-il que je fasse ici ma profession de foi bien sincère? Oui, je voulais maintenir la Constitution!, je l'avais juré ; et sans les trahisons de la Cour, sans ses intelligences avec nos ennemis, dont l'évidence m'était démontrée, toute imparfaite qu'elle était, et pour bien que je déteste les rois, fidèle à mes devoirs de représentant du peuple, non seulement, je n'aurais pas aidé à la renverser, mais je l'aurais défendue de toutes mes forces, même au bruit du canon du 10 août, et en présence des baïonnettes. Que mes ennemis tirent de cet aveu le parti qu'ils voudront, je le leur livre: ma conscience et ma pensée sont à moi: je ne trahirai jamais l'une, je ne déguiserai jamais l'autre, et Ceux qui m'ont vu le 10 août, savent que je sais attendre la mort avec calme et courage
Je passe à la seconde époque, et J'y distingue, comme dans la première, six chefs d'accusation : Intelligence avec Brunswick, efforts multipliés pour faire rétrograder la révolution, calomnies contre Paris, improba-tion des massacres de septembre, corruption de l'esprit public, au moyen des sommes mises dans les mains du ministre de l'intérieur, préventions jetées à l'avance contre les plus ardents amis# de la liberté, et notamment contre la députation de Paris.
Tous voyez, citoyens, que je ne laisse rien à l'écart : il n'y a pas une absurdité, pas une rêverie de mon accusateur que je n'ai recueillie avec sççupulè ; s'il était susceptible de honte, ce serait peut-être la plus cruelle vengeance
que Je pusse tirer de ses dégoûtantes réclamations.
Ainsi donc, j'étais d'intelligence avec Bruns-fwick pour lui livrer la France : mais Robespierre, concilie au moins tes discours ; s'il faut t'en croire, c'est par moi, c'ést par mes amis que le comité de défense était dirigé, c'est par moi, c'est par mes amis que le conseil était gouverné : or, qui a pris les mesures propres à repousser Brunswick ? C'est le comité de défense. Qui les a fait exécuter ? C'est le conseil. Tu vois dans quelle contradiction te jette ta haine : je n'ai besoin que de l'une de tes accusations pour détruire l'autre sans retour. ~
Au reste, que dans la première nuit de septembre, dans cette nuit qui précéda immédiatement le jour de tes vengeances ; quelques heures après avoir arrêté les listes de proscription et quelques instants avant d'avoir fait donner le signal du carnage, tu aies lancé cette atroce accusation contre nous, je n'en suis pas surpris, il fallait aiguiser contre tes victimes le fer de tes satellites, et d'ailleurs Brunswick n'avait pas encore été vaincu et repoussé : mais que tu la renouvelles aujourd'hui, malgré tous les faits qui nous disculpent et qui nous défendent, c'est ce qui m'étonne. Préparerais-tu de nouveaux massacres, et aurais-tu besoin de cette atrocité de plus, pour t'assurer que nous y serons enveloppés ? Ah ! oui, tu en prépares de nouveaux. Je le prouverai dans un instant : car ce que j'affirme moi, je le prouve.
En attendant, interroge tous les membres du comité de défense, demande-leur qui a proposé la mesure de l'envoi des commissaires dans les départements, pour hâter la formation de nos légions citoyennes, échauffer l'esprit public, et exalter les âmes, ils te diront que c'est moi. Demande-leur quel est celui qui a proposé et rédigé le décret d'encouragement à la désertion, ils te diront que c'est moi. Demande-leur quel est celui qui, au moment où l'ennemi était sur notre territoire, a proposé et rédigé la proclamation par laquelle nous jurions tous, comme citoyens, de ne vivre jamais sous un roi, ils te diront que c'est moi. Demande-leur quel est celui qui, lorsque Lon-gwy fut tombé au pouvoir du roi de Prusse,' proposa le décret où les vrais républicains ont dû trouver quelque énergie et quelque grandeur, ils te diront encore que c'est moi. Interroge-les enfin sur toutes mes opinions dans le comité ; et répète, après cela, si tu l'oses, que j'avais des intelligences avec Brunswick, et que je favorisais ses projets.
Forcé d'abandonner ce chef d'accusation, tu diras que j'ai voulu faire rétrograder la Révolution : mais qu'entends-tu par là ? Prétends-tu que j'ai cherché à étouffer l'énergie du peuple, à le dégoûter, à l'avanoe, du régime républicain, à sauver les débris du trône ? Je le nie, et je te demande où sont tes preuves. Si, au contraire, tu prétends trouver la preuve de mes efforts pour arrêter la Révolution, dans ma résistance à l'oppression des représentants provisoires de la commune de Paris, dans ma fermeté à dénoncer le sanguinaire comité de surveillance créé par ces représentants provisoires, dans mes opinions au comité contre l'insolente domination que tu venais y exercer au nom de oes représentants, dans le courage aVec lequel je m» suis
élevé contre les massacres que vous aviez commandés, dans mon refus de livrer de nouvelles victimes à un tribunal sans jurés, et institué par les sections de Paris, dans mon indignation fortement prononcée contre la faiblesse de l'Assemblée laissant ses propres membres sous le couteau des scélérats, livrant lâchement les prisonniers de la nation à des assassins, osant à peine mettre sous la protection de la loi les 28,000 pétitionnaires de Paris, et, souffrant qu'on la menaçât du canon si elle ne rendait un "décret qui lui était demandé ! Ah ! tu as raison ; oui j'ai cherché à faire rétrograder la Révolution, et je n'ai qu'une excuse à présenter, c'est que le ciel me fit une âme qui exècre les tyrans et les assassins, et que je ne croyais pas que la Révolution eût été faite pour eux.
Tu ajoutes « que nous avons calomnié Paris, et sa députation; que nous avons corrompu Vesprit public, et que nous avons employé à cet usage les fonds remis à la disposition du ministre Roland ». Yoilà quatre mensonges en quatre phrases.
Nous n'avons pas calomnié Paris, si nous n'avons avancé que des faits exactement vrais : car calomnier, c'est faire ce que tu fais, c'est mentir pour diffamer : or, cite-nous un seul fait faux que nous ayons mis à la charge de Paris. Les massacres de septembre, peux-tu les nier? Les pillages de février, peut-tu les nier? Les arrêtés des sections, arrêtés dans lesquels la folie semble le disputer à l'insolence, peux-tu les nier ? L'insubordination du conseil de la Commune, ses ursupations de pouvoir, sa révolte habituelle envers les lois et la Convention nationale, peux-tu les nier ? L'anarchie qui règne à Paris, le système de désorganisation qui s'y prêche publiquement, en même temps que publiquement aussi on y provoque au meurtre et au pillage, peux-tu les nier ? Enfin les menaces faites à la Convention nationale, l'état d'oppression où on la tient, les proscriptions portées contre plusieurs de ses membres, peux-tu les nier ? Que parles-tu donc de calomnie, lorsque loin d'imputer toutes ces horreurs aux citoyens de Paris, nous les avons rejetées sur les brigands que renferme cette ville, et sur les chefs qui les dirigent.
Tu diras peut-être que la publicité de ces faits devant faire des ennemis à la Révolution, il fallait les taire. Ah ! voilà donc ta doctrine ! Le mal n'est plus à commettre le crime, mais à le poùrsuivre. Fais adopter ce système, et vous voilà à votre aise : vous pourrez piller, assassiner, proscrire, braver les autorites, dissoudre même la représentation nationale si cela vous convient ; vous en serez quittes pour dire : Il faut jeter un voile sur tout cela de peur de faire des ennemis à la Révolution... Non, non2 il faut au contraire poursuivre les scélérats jusqu'à la mort afin de réconcilier les bons citoyens avec la Révolution, et gagner les peuples de l'Europe à la liberté. Sais-tu à qui je te compare lorsque tu me reproches d'avoir calomnié Paris ? Je te compare à ce curé qui accusait un voyageur, de calomnier sa paroisse, parce qu'il se plaignait d'avoir, en la traversant, été détroussé par des voleurs.
Mais si nous n'avons pas calomnié Paris, si nous n'avons fait que dénoncer des atten-
tats réels, et obéir à notre devoir en en demandant la punition, ton imputation de corruption de l'esprit public tombe d'elle-même; car si je t'ai bien entendu, c'est par ces prétendues calomnies que tu nous accuses d'avoir égaré l'opinion et corrompu l'esprit des départements. Dès lors il ne me reste qu'à répondre à l'imputation de nous être servis des fonds remis à la disposition de Roland, et j'y réponds d'un mot. Roland a remis depuis longtemps ses comptes à la Convention nationale; il en poursuit l'apurement avec chaleur; que ne le secondes-tu pour obtenir qu'ils soient examinés ? Tu auras là une belle occasion d'assouvir ta haine, puisque tu es sûr qu'il a, pour nous complaire, et servir nos passions, détourné les fonds de la nation, mais non, tu ne le seconderas pas ; tu éluderas, au contraire, cet examen qui te confondrait. Tu l'éluderas, et cependant, tu n'en répéteras pas moins que Roland nous a remis les fonds de la nation pour corrompre l'esprit public.
Mais comment en être étonné, lorsqu'on t'entend dire que nous sommes les meneurs de la Convention nationale, que nous y formons une faction puissante, que c'est à cette faction qu'on doit les revers que la France vient d'éprouver, et que tout cela est une de nos intelligences, soit avec Dumouriez, soit avec la Cour de Londres dont l'or nous a corrompus. Tels sont, en effet, les quatre chefs d'accusation que comprend la dernière époque que tu as parcourue en nous calomniant.
Je suis l'un des meneurs de la Convention ! Se peut-il rien de plus impudent qu'une telle assertion! Quoi! je mène la Convention, moi, qui n'ai presque pas paru à la tribune, moi, qui vis dans le cercle de cinq ou six amis, moi, dont les motions ont presque toutes été écartées. Je mène la Convention et je n'ai pu faire adopter ni la convocation des assemblées primaires pour faire un scrutin épuratoire des membres de la Convention, ni une loi répressive contre les provocations au meurtre, ni l'exil de la famille Bourbon, ni la formation d'une garde départementale, ni le renvoi au peuple du jugement de Louis, ni la poursuite des massacres de septembre, ni celle des pillages de février, mesures que j'ai toutes ou proposées ou appuyées. Quoi ! je mène la Convention, et toutes les autorités de Paris contre lesquelles je n'ai cessé de m'élever sont en état de révolte ouverte, et la Convention est, chaque jour, menacée, outragée, avilie ! Je suis un des meneurs de la Convention ! Mais je ne connais que trois moyens de mener une assemblée : la raison jointe au talent, l'intrigue, et la terreur : or, de ces trois moyens, il y en a un dont tu serais bien fâché de me faire honneur, et les deux autres sont en conscience trop évidemment les tiens pour que tu osasses me les imputer. En effet, qui intrigue dans les sections de Paris si ce n'est toi et les tiens? Qui prépare ces arrêtés, ces pétitions et ces adresses où l'on ne sait ce qui l'emporte de la bêtise ou de l'audace, si ce n'est encore toi et les tiens ? Qui entoure la Convention nationale de satellites armés prodiguant aux membres, que tu leur as désignés l'outrage et les menaces, si ce n'est encore toi et les tiens? Qui compose ces tribunes insolentes toujours rebelles aux décrets, montrant le poing aux représentants du peuple, couvrant de huées toua
ceux que tu as proscrits et d'applaudissements tous ceux que tu protèges, si ce n'est encore toi et les tiens? Nous sommes les meneurs de la Convention ! Quoi ! Nous tes victimes, nous qui dans la nuit du 10 mars, n'avons échappé que par hasard au fer que tu avais dirigé, nous que par tes ordres on insulte, on menace, on calomnie tous les jours sous les yeux de la Convention même, tu nous accuses de la mener ! Va ! vil calomniateur, tu ne mérites pas qu'on te réfute, et ton règne doit finir bientôt, ou celui de la raison est perdu.
Mais peut-être, est-ce par les comités que nous menons la Convention nationale? En ce cas, dis donc les décrets que nous y avons préparés, et surtout dis quels sont ceux de ces décrets qui violent les principes de la liberté et de T égalité.
Car enfin, tu ne prétendras pas peut-être que nous eussions dû nous condamner à ne rien faire, pour éviter le soupçon de faire du mai; et ce ne sera pas pour avoir proposé des mesures utiles que tu nous appelleras les meneurs de la Convention. Je le répète donc, présente la liste des décrets liberticides que nous sommes parvenus à faire adopter, et nomme les comités où ils ont été agréés par notre influence. Voyons : est-ce dans le comité de la guerre? Je n'y suis entré qu'une seule fois. Est-ce dans le comité ues finances ? Oh ! pour celui-là, tu ne diras pas que je le mène. Est-ce dans le comité de marine? Je ne connais seulement pas le local où il tient ses séances. Est-ce dans le comité diplomatique? J'en suis membre, et je vais t'apprendre en deux mots ce qu'il fait : il a arrêté la réunion de la Savoie et du comité de Nice à la France, voilà tous ses travaux en une ligne. Est-ce enfin dans le comité de défense générale? Mais ici encore, essaye donc de te concilier avec toi même : d'un côté, tu nous accuses de nous être opposés au décret du 15 décembre, à celui de réunion de la Belgique à la France, et enfin à celui qui réglait les droits de la Franoe sur la Hollande; et d'un autre côté tu soutiens que le comité qui a adopté tous ces décrets n'agissait que par nous et par notre influence. Cela ressemble assez à ton accusation, « d'avoir porté Beurnonville au ministère de la guerre, pour consommer notre pian de contre-révolution », tandis que Beurnonville n'a eu la voix d'aucun de nous, qu'il a été nommé par vous tous, et que vous avez hué à peu près tous ceux qui, comme moi, ont nommé Achille Duchateiet, républicain ardent et sûr, autant qu'habile et courageux officier.
Mais si j'ai bien entendu l'accusation, ce n'est pas en faisant adopter nos vues que nous avons influencé le comité, c'est en combattant celles des autres. Ce n'est pas en présentant nos plans, c'est en contrariant ceux que le comité avait arrêtés.
J'observe d'abord que s'il en est ainsi, notre accusateur ne s'est pas servi du mot propre ; car celui qu'il a employé signifie précisément tout le contraire de ce qu'il voulait dire. Mais je passe sur cette légère erreur, et je. demande quels sont les plans que ce comité a arrêtés. Je l'ai vu arrêter des projets de décret, et jamais de plans : or, si j'ai combattu quelques projets de décret lorsqu'ils ont été discutés, c'est que j'étais au comité pour cela, c'est-à-
dire pour y exprimer librement mon opinion, et proposer ce que» dans ma conscience je croyais le plus utile et le plus juste. Je ne le nie donc pas : oui, j'ai regardé le décret du 15 décembre comme très funeste à la France, et je n'ai jamais douté qu'il ne nous fît perdre la Belgique..
La séance où l'on arrêta ce décret dans le comité fut tellement tumultueuse que je pus, à peine, énoncer les principales raisons qui me faisaient penser ainsi, et que n'ayant pu obtenir la parole pour répondre à Cambon, je me bornai à dire à Béai, notre collègue, qui était à mon côté : Voilà un décret qui, s'il est adopté, nous fera chasser de la Belgique. J'espérais encore qu'il ne le serait pas, et je me disposais à le'combattre dans l'Assemblée; mais on se rappelle que cela fut impossible. La Convention, séduite par ces mots : pouvoir révolutionnaire, mesure révolutionnaire, l'adopta sans discussion et par enthousiasme : sentiment grand et louable lorsqu'il se porte vers les beautés de la nature ou de l'art, mais dangereux et condamnable lorsqu'il se porte vers le projet d'une loi qui doit faire ou le bonheur ou le malheur de plusieurs millions d'hommes. Telle a été, je le répète, mon opinion sur le décret du 15 décembre, et cep en-dans nul ne s'est montré plus sévère que moi pour en réclamer l'exécution. Des députés de quelques villes de la Belgique se sont présentés au comité où leur demande en rapport du décret avait été renvoyée : je ne crois pas que personne leur ait parlé avec plus de force que moi sur la nécessité d'exécuter le décret, et sur les maux qui pourraient résulter pour les Belges eux-mêmes de l'opposition qu'on mettrait à son exécution. Dumouriez, dans son dernier voyage à Paris, a présenté au comité trois ou quatre mémoires sur le même objet, ses objections contre le décret me parurent fortes et victorieuses : néanmoins le comité n'ayant pas cru uevoir demander le rapport, je déclarai publiquement à Dumouriez que ne pas le faire ' ïécuter serait une trahison, ou du moins une violation manifeste de ses devoirs.
Ma conduite a été la même pour les réunions. Si j'en excepte celle de Porentruy, toutes les autres m'ont paru impolitiques et dangereuses, et ce n'est pas sans alarme que j'ai vu s'établir au comité le système de tout réunir jusqu'au Rhin. Cette opinion était celle de Sieyès : il pensait que c'était là les limites naturelles de la République française. J'étais bien de son avis quant au territoire, mais non pas quant aux hommes, car je ne les croyais pas mûrs pour la liberté; et cependant en prenant la terre, il fallait aussi prendre les habitants. Mon avis ne prévalut pas, n'importe : il ne s'est pas fait un rapport sur cet objet que je n'aie invité le rapporteur à ne négliger aucune des circonstances qui pouvaient rendre la réunion imposante, que je ne les lui aie même indiquées, lorsqu'il m'a paru les avoir oubliées : j'invoque là-dessus avec confiance le témoignage de Grégoire et de Carnot.
Nous approchons de l'époque où la trahison de Dumouriez a éclaté : et pour pouvoir nous accuser de complicité avec lui, il fallait revenir sur nos prétendues liaisons, assurer même qu'elles s'étaient fortifiées depuis quelque
temps, au point que dans ses deux derniers voyages à Paris, ce général avait eu avec nous de fréquentes entrevues nocturnes, et que nous avions tenu ensemble des conciliabules secrets. Il fallait surtout laisser croire qu'au comité de défense nous avions justifié ce général, reconnu traître, et que "nous nous étions opposés à ce que l'Assemblée fût instruite de sa trahison. C'était autant d'infâmes calomnies, autant d'exécrables mensonges, mais y a-t-il d'horreur qui coûte à une âme pétrie d'envie et d'orgueil, de fiel, de haine et de sang !
Pour en finir de Dumouriez, je dirai que dans aucun de ses voyages, je ne l'ai vu ni chez lui ni chez moi, que je n'ai pas même su où il logeait à Paris, et qu'à l'exception des séances du comité auxquelles il a assisté, je ne me suis trouvé que deux fois avec lui : l'une après ses victoires de la Champagne, chez Talma qui lui donnait une fête, à laquelle je fus invité, et où je ne restai pas plus d'une heure; l'autre à son retour de la Belgique, chez mon collègue Boyer-Fonfrède, qui lui donna à dîner, et qui m'invita, sans même me prévenir qu'il devait avoir ce général, tant il croyait que j'attachais d'importance à l'honneur de dîner avec le vainqueur de Jemmapes.
J'ajouterai que je n'ai jamais entretenu de correspondance avec lui, que je ne lui ai écrit qu'une seule lettre dans la Belgique, et que dans cette lettre écrite à la demande d'un de mes collègues à qui je ne crus pas devoir la refuser, je me bornai à réclamer auprès de lui une chose juste en faveur d'un jeune volontaire de d'armée qu'il commandait. Les papiers de ce général ont, dit-on, été saisis : si l'on y trouve aucune lettre de moi, ou si ma lettre contient autre chose que ce que je viens de dire, je donne ma tête.
J'ajouterai encore que je n'ai reçu aucune lettre de lui, pas même en réponse à ma recommandation. U me fit écrire, à cette époque, par un officier général de l'armée, et m'envoya, par la même voie, un mémoire pour le ministre de la guerre, dans lequel il demandait qu'on attachât à son état-major un de més frères qui sert dans l'armée de la Moselle, et dont il avait entendu parler avec éloge. Le mémoire doit être dans mes papiers. Je ne l'ai ni remis ni communiqué au ministre de la guerre.
J'ajouterai enfin que de tous les membres de la Convention nationale, il n'en est pas un qui ait moins recherché que moi le vainqueur des Prussiens et des Autrichiens, pas un qui l'ayant connu comme ministre, l'ait moins vu comme général, pas un enfin qui l'ait moins loué pour ses services, et ait moins célébré ses succès. Comment aurais-je donc cherché à justifier sa trahison, et à empêcher que l'Assemblée en fût instruite ? Aussi, est-ce une imposture atroce. Je n'étais point au comité de défense lorsque ses lettres et ses proclamations qui ont été imprimées depuis, y furent lues. J e ne pus donc pas les justifier. Et le lendemain, lorsque je m'y rendis, j'appris qu'il avait été arrêté de ne pas les lire à la Convention, et de faire partir sur-le-champ Danton et Delacroix pour la Belgique. Je ne dissimule pas que cette résolution me parut bonne, surtout lorsque j'entendis Delacroix et Danton assurer, ou qu'ils engageraient le général Dumouriez à se rétracter, ou qu'ils l'amèneraient à Pa-
ris pieds et poings liés : mais quand l'arrêté m'eût paru mauvais, j'aurais, sans doute, vainement essayé de le faire rapporter puisqu'il avait été pris à l'unanimité, après une très longue discussion, et de l'avis de plus de 60 membres de l'Assembée présents à la séance.
Tels ont été mes rapports avec Dumouriez pendant tout le temps qu'il a commandé les armées de la République. Je n'en ai point eu d'autres, et je défie qu'on me démente par un seul fait prouvé. Comment arrive-t-il donc que Robespierre m'établisse en liaisons intimes avec ce général, et qu'il nous suppose unis de l'amitié la plus étroite? L'explication de ce problème ne peut se trouver que dans l'atrocité de son âme.
Après avoir ainsi combattu le reproche de liaison avec Dumouriez, me sera-t-il permis de faire remarquer à quel oubli de tous les principes de justice et de morale ces hommes-là nous ont conduits. Je suppose que, trompé par l'amour apparent dè Dumouriez pour la liberté, partageant l'admiration de l'Europe pour ses talents militaires, entraîné vers lui par les services qu'il rendait à la patrie, j'eusse recherché son amitié, serait-ce une raison de me proclamer son complice ? Ne fau-drait-il pas me plaindre au contraire d'avoir été trompé dans le sentiment le plus cher au cœur de l'homme. Dis-moi, Robespierre, n'as-tu pas été l'ami de Pétion? et ne dis-tu pas aujourd'hui qu'il est un traître? C'est une indignité safis doute, et on ne me soupçonnera pas de vouloir répéter une telle calomnie, moi qui me console par son amitié de l'amertune que toi et les tiens vous répandez sur ma vie : mais enfin tu le dis, tu l'imprimes, et tu ne voudrais pas qu'on pensât que tu te mens à toi-même : eh bien ! que répon-drais-tu à celui qui, de ton ancienne amitié pour Pétion, conclurait que tu es son complice? O le plus fou, si tu n'es pas le plus méchant des hommes, obtiens donc du Ciel que l'âme des mortels soit toujours ouverte à tous les regards, ou bien ne nous fais pas un crime d'être quelquefois les jouets de notre confiante sensibilité ; songez à quel prix la nature a mis la garantie d'un tel danger : on ne l'évite qu'avec un cœur comme le tien. Aussi ta doctrine qui eût conduit Brutus au supplice, n'a-t-elle été celle d'aucun peuple, d'aucun homme, elle est toute à toi, Robespierre !
Ah ! si je^ voulais l'employer contre toi et les tiens, comme il me serait facile de récriminer ! Je rappellerais que le 14 octobre, Dumouriez se présenta aux Jacobins, et je lirais ce passage du journal des débats de la société : « Dumouriez entre dans la salle; Santerre Vaccompagne ; le général embrasse Robespierre : tout le monde applaudit. Danton paraît : il monte au fauteuil, et est couvert d'applaudissements. » Je rappellerais, toujours votre journal à la main, que cette séance fut consacrée à flagorner le général, et à outrager, à calomnier ceux que tu dis ses amis.
Je rappellerais que depuis et dans son dernier voyage, on ne l'a vu qu'avec ton Danton, si toutefois on peut appeler tien, celui dont tu es l'instrument, et qui t'a donné la troisième place parmi ses agents. Je rappellerais que Danton et quelques autres ont constamment formé sa cour dans tous les spectacles où il s'est présenté : je rappellerais enfin que lorsque la section de Booj-Conseil est reve-
nue demander à la barre un décret d'accusation contre lui, c'est ton parti, c'est Danton qui arrivait alors de la Belgique, d'où il devait le ramener pieds et poings liés s'il était traître. C'est Delacroix, c'est Marat qui l'ont défendu à la tribune, et ont provoqué un décret contre les auteurs de la pétition.
« Mais Dumouriez nous a déclarés ses complices : c'est pour la saine majorité de la Convention et contre la Montagne qu'il voulait conduire l'armée à Paris. D'ailleurs il tient le même langage que nous : il parle d'anarchie, de désordre, de pillage, et de meutre ; il déclame contre Paris, et prétend que la Convention n'y est plus libre. »
-Ce raisonnement est celui sur lequel la calomnie paraît avoir le plus compté, car on le retrouve dans tous les libellés qu'elle compose : et cependant il n'en fut jamais de plus absurde et de plus misérable.
Premièrement, on conviendra que nous serions des conspirateurs bien maladroits, si nous entendant avec Dumouriez, et agissant de concert avec lui, nous lui eussions laissé tenir un langage qui devait nous faire reconnaître pour ses complices. Il n'y a donc pas de milieu : ou nous ne nous entendions pas avec Dumouriez, ou ses lettres ne prouvent; rien contre nous.
En second lieu, est-il donc si difficile de deviner le motif qui aura engagé Dumouriez à s'exprimer ainsi ? Il a parlé d'anarchie parce qu'il a pensé que la nation en était fatiguée ; il a parlé des pillages et des massacres, parce qu'il a pensé que la nation en a été révoltée, et qu'elle est indignée de l'impunité des coupables ; il a parlé « de Robespierre, de Marat, etc., comme des auteurs de nos maux, » parce qu'il a pensé que telle était l'opinion de la France. Il a parlé « d'une faction, luttant contre la Convention nationale, et cherchant à la subjuguer », parce qu'il a pensé que l'évidence de cette faction, et la réalité de ses manœuvres n'étaient douteuses pour personne. Enfin il a parlé de la saine majorité de la G onvention, parce qu'il, a pensé qu'elle était l'objet des espérances de tous les bons citoyens, et qu'on se rallierait toujours autour de cette majorité voulant l'ordre et les lois, la liberté et la République.
Et dans quel temps a-t-il parlé ainsi ? Est-ce après avoir jeté le masque, et s'être déclaré pour le rétablissement de la royauté? Qu'on lise ses mémoires, ses lettres, ses proclamations, et jusqu'à la déclaration des trois commissaire jacobins, et on se convaincra que dès l'instant qu'il a fait connaître ses véritables projets, et parlé de royauté, toute la Convention nationale a été enveloppée dans sa haine, d'où tout homme non prévenu, conclura que lorsqu'il parlait d'aider la saine majorité à abattre l'anarchie, il ne cherchait qu'à se rendre la nation favorable, et à se ménager un secret appui dans le cœur des citoyens : avantage qu'il eut craint de perdre on se déclarant le protecteur des Robespierre, des Marat et de leur secte.
Je ne dis plus qu'un mot : nos discours, répète-t-on sans cesse, ressemblent aux siens Et pourquoi ne remarquez-vous pas qu'ils ressemblent aussi à ceux des dix-neuf vingtième de la France? Ouvrez les adresses qui parviennent chaque jour à la Convention nationale; il n'y en a pas une sur cent où vous ne
trouviez le même langage : appelez donc complices de Dumouriez tous ceux qui les onï signées. Au fond, que signifie cette objection? de ce que nous luttons contre l'anarchie et contre les mépris des lois, de ce que nous combattons le système de désorganisation qu'on s'efforce de répandre, de ce que nous nous plaignons de l'impunité accordée au crime, s'en- ' suit-il que nous soyons les complices d'un général qui a eu l'air de vouloir faire cesser ces maux en dirigeant son armée sur Paris ? Je le répète, avec de telles preuves, on conduirait la Convention nationale à laisser tomber sous ses yeux l'Etat en dissolution .
Si j'ai détruit toutes les accusations dirigées contre moi, si j'ai fourni la preuve de la fausseté de toutes les imputations qui m'ont été faites, il est inutile que je réponde à la dernière : car on ne m'aurait corrompu que pour trahir la'liberté, et si, au lieu de la trahir, je l'ai constamment servie, le reproche de corruption tombe de lui-même, et c'est dans d'autres mains que les miennes qu'il faut chercher cet anneau d'or de la chaîne qui s'étend de Londres à Paris... Calomniateur infâme! Tu m'accuses d'être corrompu, d'être vendu à l'Angleterre, de recevoir de l'argent de Pitt pour trahir ma patrie ! Mais où donc sont mes trésors? Viens, venez vous tous qui m'accusez, venez dans ma maison ; venez von dans quelle obscure médiocrité vivent ma femme et mes enfants ; venez voir si les mets qui couvrent ma table annoncent l'opulence ou la pauvreté ; suivez-moi hors de cette enceinte, voyez si de superbes coursiers et de brillants équipages m'attendent à la porte. Allez dans mon département, demandez si mes minces domaines se sont accrus. Informez-vous de ma vie entière auprès de ceux qui m'ont connus : amis et ennemis, je ne récuse personne ; ils vous diront si je fus jamais accessible à la corruption, si je rampai jamais devant l'homme puissant, si j'opprimai jamais le faible, si je trahis jamais l'amitié ou mes devoirs. Ah ! citoyens ! pourquoi chacun de nous ne peut-il pas dérouler ici, si je peux ainsi m'exprimer, toute sa vie privée ? C'est alors que nous connaîtrions les véritables, les sincères amis du peuple ; car le? vertus publiques se composent des vertus privées, et celui qui fut toujours bon fils, bon père, bon époux et bon ami est, à coup sûr, bon citoyen î il n'imitera pas ces patriotes, comme on en voit tant, qui ne flagornent le peuple que pour l'asservir, et ne l'entretiennent de sa puissance que pour l'usurper ; il ne parlera pas, comme eux, de la misère du peuple au milieu de l'abondance, de sans-culotterie au sein des jouissances, et du bonnet rouge dans un boudoir : fidèle aux principes, il les défendra avec courage ; pénétré de ses devoirs, il les remplira avec zèle et constance ; ami de la vérité, il la cherchera dans la sincérité de son cœur ; incorruptible comme la vertu, impassible comme les lois, et supérieur à toutes les craintes, il n'obéira jamais qu'à sa conscience, ne parlera que d'après sa raison, et servira le peuple sans le flatter, qu'on rapproche ces traits de ma conduite : j y consens. Qu'on relise les décrets auxquels j'ai attaché mon nom, on n'en trouvera aucun qui soit contraire aux principes de la liberté; qu'on relise les opinions que j'ai prononoées , on n'en trouvera aucune qui ne
respire l'amour de ces principes, et peut-être en distinguera-t-on quelques-unes marquées au coin d'un grand courage.
Si donc la chaîne dont on a parlé s'étend jusqu'à Paris, je le répète, ce n'est pas dans mes mains qu'il faut chercher l'anneau qui , la termine. Mais peut-être avec quelques efforts et quelques recherches ne sera-t-il pas difficile à Robespierre de le découvrir.
Connaît-il des hommes qui fassent métier de prêcher l'anarchie et le désordre, d'entourer le peuple de défiances, et de lui parler sans cesse d'insurrection? Qu'il observe ces hommes-là : ils pourraient bien être les agents de Pitt, car ils le servent mieux que des flottes et des armées. Connaît-il des hommes qui outragent, insultent, menacent la Convention nationale et provoquent sa dissolution 1 Qu'ils les observe aussi : car Pitt ne doit désirer rien tant que de voir la Convention nationale dissoute, et il ne saurait trop payer un tel service. Enfin, connaît-il des hommes qui, idoles d'une multitude qu'ils égarent par leurs criminelles exagérations, se soient élevés d'un état de gêne et de misère à un haut degré d'aisance et de richesse? Qu'il les saisisse, qu'il s'attache à eux; voilà les hommes vendus à Pitt ; je les vois, tenant l'anneau d'or d'une main, et de l'autre la chaîne qui les lie aux anarchistes, aux calomniateurs, aux dénonciateurs ; et à tous ces républicains en domino connus sous le nom de Maratistes.
Si cette règle n'est pas infaillible, elle est du moins la plus sûre : car enfin c'est par leurs actions que les hommes qu'on a corrompus donnent quittance : lors donc que j'ai trouvé ce qui est le plus avantageux aux ennemis de la France, je cherche par qui cela a été opéré, et si je découvre pour agents, des hommes qui emprutent le masque du pratrio-tisme, je dis : Cès hommes-là, ou du moins ceux qui les mènent nous trahissent et sont vendus à nos ennemis pour la seconde fois, j'invite Robespierre à suivre cette règle et surtout à nous faire part du fruit de ses recherches. Peut-être, s'il y met quelque soin, par-viendra-t-il à découvrir par quels ressorts secrets un homme chargé de décrets d'accusation et en horreur à toute la France a été jeté dans la Convention nationale ; peut-être s'il ne se décourage pas, dès les premiers pas, parviendra-t-il à découvrir encore par que]s moyens et dans quelles vues un membre de la famille des Bourbons a également été porté dans la Convention nationale. Peut-être, s'il met à cette recherche la même ardeur qu'à dénoncer, parviendra-t-il à découvrir aussi par qui Pitt fait soudoyer ces tribunes insolentes qui, au premier signal de leurs chefs, outragent, menacent les représentants du peuple, et font quelquefois douter si les mandataires du souverain pourront sortir en sûreté du lieu de leurs séances. Peut-être enfin parviendra-t-il à découvrir par qui ont été payés et les auteurs de la conjuration du 10 mars, et ceux de la conspiration nouvelle qui se trame en ce moment.
Oui, citoyens, une conspiration rouvelle se trame en ce moment contre vous. Je vais dénoncer à mon tour : que mes accusateurs tremblent ! car, je le répète, je ne dénonce jamais sans preuves.
Mg-is avant de passer au développement de
cette conjuration, permettez-moi de rechercher avec vous quels peuvent être, quels doivent être les complices de Dumouriez.
Que la conjuration du 10 mars fût liée à la trahison de ce général : qu'elle eût pour objet de lui ouvrir les portes de Paris en dispersant la représentation nationale après le massacre de quelques-uns de ses membres, c'est ce dont il n'est pas permis de douter, à moins qu'on ne veuille nier l'évidence. Si donc je parviens à découvrir les auteurs de la conjuration du 10 mars, j'aurai trouvé les complices de Dumouriez.
Que la trahison de Dumouriez fût liée à la cause d'Orléans ; qu'elle eût pour objet de le porter ou au trône ou à la régence, et infailliblement au trône par la régence, c'est encore une chose dont il n'est pas permis de douter, à moins qu'on ne veuille aussi nier l'évidence; car enfin, qui devait profiter du rétablissement de la royauté? d'Orléans et sa famille. Si donc je parviens à découvrir les protecteurs de d'Orléans, j'aurai infailliblement trouvé les complices de Dumouriez.
Or, pour commencer par les auteurs de la conjuration du 10 mars, il n'y a que ceux qui n'ont pas voulu les connaître qui ignorent qui ils sont. A la différence de toutes les conjurations qui se préparent dans le secret et dans l'ombre, la leur a été publique, que dis-je publique? consignée sur des registres, et hautement proclamée en présence de 3,000 citoyens rassemblés. La crainte de n'être pas entendu et un concours de circonstances qu'il est inutile de rappeler ici, forcèrent Vergniaud à ne lever, en la dénonçant, qu'un coin du voile : mais si quelques esprits purent alors rester incertains, ils ne le sont plus aujourd'hui. Et toi, notamment, Robespierre, tu ne peux pas ignorer quels ont été les auteurs de cette conspiration. C'est par tes conseils qu'ils ont ourdi cette trame infernale ; c'est sous tes yeux qu'ils ont agi. Le 28 février, après le pillage des épiciers, ne t'écries-tu pas : On doit, en effet, être étonné que le peuple se soit levé pour du sucre et du café; quand le peuple se lève, il doit être terrible clans ses vengeances, Il doit exterminer ses ennemis. Et tandis que nouveau Mahomet, au talent près, tu enveloppais ainsi dans une mystérieuse désignation les victimes qu'il fallait frapper, ton Oman ne les désignait-il pas dans ses feuilles, ton peuple ne les nommait-il pas, et tes brigands répandus dans les sections n'y répétaient-ils pas ces cris de fureur et de sang ? Le 10 mars, ou du moins dans la nuit du 10 au 11, n'étais-tu pas dans cette caverne, autrefois le temple de la liberté, d'où partirent en criant : vengeance! vengeance! vengeance! ces 1,200 conjurés dont l'espoir était de grossir leur troupe avant d'arriver à la Convention nationale, et à qui la peur, et la connaissance de la courageuse résolution de 100 membres de l'Assemblée, bien plus que la lâche harangue de tes officiers municipaux firent abandonner, pour ce jour-là, leur atroce et parricide résolution. Ainsi le complice de Dumouriez, c'est toi. Le complice de Dumouriez, c'est Dubois-Crancé qui, après avoir, pour la forme, blâmé, dans la tribune des Jacobins, ce qu'il appelait une mesure extrême, eut le courage de venir présider la Convention nationale, sans dire un mot de la conspiration, et sans témoigner d'autre douleur que de ne pas voir
dans la salle tous ceux dont la mort avait été jurée. Le complice de Dumouriez, c'est ce Fournier qui a avoué qu'il avait conduit la troupe : c'est ce président de la section du Théâtre-Français, qui a indiqué le lieu du rassemblement, et qui a formé le comité d'insurrection, comité que le ministre de la justice a cherché partout, excepté où il était réellement. Enfin le complice de Dumouriez, c'est la faction qui a pris le nom des Jacobins, et que tu mènes de concert avec les Desfieux, les Marat, les Bentabole, etc., etc.
Et la conjuration du 10 mars n'est pas le seul trait auquel on puisse reconnaître cette complicité : la protection accordée à d'Orléans en est un, peut-être, plus frappant encore. Nos accusateurs l'ont si bien senti, que par un effet de leur tactique ordinaire, qui est de rejeter sur nous tous les crimes qu'ils ont commis ou voulu commettre, ils ont cherché à persuader que c'est par nous qu'il a été protégé et défendu.
D'Orléans protégé, défendu par nous! et où ? comment? dans quelle circonstance? Je n'ai parlé à ce demi-roi qu'une fois en ma vie : c'est le lendemain du jour où discutant, je ne sais quelle motion, je laissais entrevoir le soupçon de l'existence d'une faction qui voulait nous donner un roi. Il vint chez moi dès les sept heures du matin, me parla très peu de lui, mais beaucoup de moi, me dit qu'il faisait un très grand cas de mon estime, et finit par me demander si c'était lui que j'avais entendu désigner en parlant d'un homme qui soulevait l'anarchie d'une main, pour saisir le sceptre de l'autre. Ma réponse fut franche j et courte. Si je vous voyais seul, lui dis-je, votre nullité me rassurerait, mais derrière vous sont des hommes à qui leurs crimes rendront bientôt nécessaire tin roi qui les pardonne. Au reste, voulez-vous bannir toutes mes craintes, provoquez un décret qui vous bannisse du territoire de la République, vous et votre famille. Il me répliaua que Rabaut-Saint-Etienne lui avait déjà donné ce conseil; et il me quitta en m'assurant qu'il y réfléchirait. Voilà toutes les relations que j'ai eues avec lui. Brissot 'et Gensonné en ont eu moins encore, et si Vergniaud s'est trouvé, un jour, à la même table que lui, on sait que ce fut par hasard, et chez Robert, député de Paris.
Mais, après ce qui s'est passé dans la Convention nationale, j'ai sans doute tort d'insister là-dessus ; car, en conscience, la calomnie est trop grossière. Le décret d'expulsion de la famille des Bourbons, par qui a-t-il été proposé, par qui a-t-il été voté ? Ceux qui nous accusent oseraient-ils dire que c'est par eux ? La proposition du rapport de ce décret par qui a-t-elle été faite ? Le rapport du décret, par qui a-t-il été voté? Ceux qui nous accusent oseraient-ils dire que c'est par nous ?
Qu'on n'aille pas croire, au reste, que c'est du rapport du décret d'expulsion que j'entends tirer mes preuves : loin de moi l'idée que l'opinion d'un représentant du peuple, puisse jamais lui être imputée à crime! mes preuves, je les tire des circonstances qui ont environné, et le décret d'expulsion et la demande en rapport ; je les tire de la violence avec laquelle on voulut, le dimanche, vous empêcher de délibérer sur la proposition du bannissement ; je les tire de l'insurrection de
la minorité, réduite à ce qu'ils appellent la Montagne, contre la majorité qui venait d'adopter la proposition ; je les tire du soulèvement excité par les Jacobins, dans la séance du même jour, contre l'exécution du décret : je les tire des manœuvres employées, le lundi, pour arracher à la Convention le rapport de ce décret : manœuvres auxquelles n'auraient jamais songé à recourir des hommes qui n'auraient été pénétrés que de l'amour de la justice ; mes preuves, enfin, je les tire de la nomination de d'Orléans, dictée au corps électoral de Paris, par Robespierre, Marat et Danton.
Les protecteurs de d'Orléans, ses défenseurs, ses amis, les voilà donc connus, et avec eux les complices de Dumouriez, puisqu'il n'est douteux pour personne aujourd'hui que la trahison de ce général devait porter d'Orléans sur le trône.
Je ne dirai pas que la conspiration qui se forme en ce moment ait le même objet ; mais ce que je sais bien, c'est qu'un peu plus tôt ou un peu plus tard, elle nous mènerait au même résultat, c'est-à-dire au rétablissement de la royauté ; ce que je sais bien, c'est qu'elle tend à renverser la liberté, à violer la souveraineté nationale, à faire passer sur la France le règne affreux des proscriptions et de l'anarchie, pour livrer bientôt ses débris sanglants au despotisme... Vous me demandez, citoyens, où sont les conjurés. Déjà vos bras se lèvent, impatients de les frapper. Ecoutez d'abord la preuve du crime. J'en indiquerai ensuite les auteurs à votre vengeance.
« Amis, nous sommes trahis ! Aux armes ! aux armes! voici l'heure terrible où les défenseurs de la patrie doivent vaincre ou s'ensevelir sous les décombres sanglants de la République française! Votre liberté ne fut jamais en plus grand péril ! nos ennemis ont enfin mis leur sceau à leur noire perfidie, et pour la consommer, Dumouriez. leur complice, marche sur Paris. Les trahisons manifestes des généraux coalisés avec lui ne laissent pas douter que ce plan de rébellion et cette insolente audace ne soient dirigés par la criminelle faction qui l'a maintenu, déifié, ainsi que Lafayette, et qui nous a trompés, jusqu'au moment décisif, sur sa conduite, les menées, les défaites et les attentats de ce traître, de cet impie qui vient de faire mettre en état d'arrestation les quatre commissaires de la Convention, et qui prétend la dissoudre. Trois membres de notre société, commissaires du Conseil exécutif, les avaient précédés : ce sont eux qui, en risquant leur existence ont déchiré le voile et fait décider l'infî&ne Dumouriez.
« Mais, frères, ce ne sont pas là tous vos dangers. Il faut vous convaincre d'une Vérité bien douloureuse : vos plus grands ennemis sont au milieu de vous : ils dirigent vos opérations, ô vengeance ! ils conduisent vos moyens de défense !
« Oui, frères et amis, c'est dans le Sénat que de parricides mains déchirent vos entrailles ! Oui, la contre-révolution est dans le gouvernement, dans la Convention nationale. C'est là, c'est au centre de votre sûreté et de vos espérances que de criminels délégués tiennent les fils de la trame qu'ils ont ourdie avec la horde des despotes qui viennent nous
égorger; c'est là qu'une cabale sacrilège dirigée par la cour d'Angleterre et autres...
« Aux armes ! Républicains ! volez à Paris : c'est là le rendez-vous de la France, Paris doit être le quartier général de la République. Aux armes. ! aux armes ! Point de délibération, point de délai ! Tous les moyens d'accélérer votre marche doivent être mis en usage.. (1) ».
Le croiriez-vous, citoyens, ou plutôt, après tous les excès dont vous avez été les témoins, et failli être les victimes, pourriez-vous en être étonnés ! Cet écrit est une adresse des Jacobins de Paris à tous leurs frères des départements. Ainsi les Jacobins de Paris, que dis-je ? les contre-révolutionnaires qui en ont pris le nom, lèvent une armée contre vous; ils appellent dee bataillons autour d'eux, pour combattre de concert les ennemis de la liberté, c'est vous, c'est le ministère, qui ligués avec les armées de Dumouriez, préparez ensemble le rétablissement du trône et l'oppression du peuple ! Laisserez-vous impuni un tel excès d'audace, et d'aussi criminels complots trouveront-ils ici des protecteurs î Citoyens, j'aurai le courage de le aire, dût la mort être le prix de mon dévouement ; vous luttez contre une puissance qui vous renversera si vous ne vous hâtez de la renverser; plus dangereuse que les armées des rois, qui ne pourraient jamais abattre de l'arbre de la liberté que les branches, c'est au tronc qu'elle porte la hache ; c'est dans le cœur du corps social qu'elle porte la mort. Elle est prête à réaliser le vœu parricide de Néron, et à abattre la tête du peuple français. Dérobez-la à ses coups ; il en est temps encore. Détruisez cette avant-garde de l'armée de Cobourg ; nos braves soldats feront le reste. Douteriez-vous de l'intelligence qui règne entre les traîtres que je vous dénonce et les rois coalisés contre nous ? Examinez leur conduite-depuis six mois, voyez-les semant la division et la haine entre les patriotes, entre les vrais républicains, séparant la nation en deux classes, afin d'affaiblir d'autant sa puissance ; effrayant les propriétaires afin de les détacher d'un gouvernement où les droits les plus sacrés seraient sans garantie ; prêchant le meurtre et le pillage, afin de porter partout la terreur et l'effroi ; mettant l'anarchie en système, afin que toutes les autorités soit méconnues, corrompant la morale du peuple afin de mettre à profit ses erreurs ; calomniant ses amis les plus ardents, afin de lui ôter tout appui, lorsque le moment de l'asservir sera venu ; voyez-les constamment occupés à tout désorganiser, à substituer l'arbitraire le plus odieux au règne sévère, mais consolant de la justice, à tout confondre, même l'innocence et le crime, afin qu'il n'y ait pas un seul citoyen qui puisse s'assurer, après s'être couché sans remords, de n'être pas livré, dans la nuit même, au fer des bourreaux. Voyez-les enfin à l'aide des brigands qu'ils ont jetés dans les sections de Paris, et des anarchistes qu'ils ont répandus dans toute la République, travailler sans relâche, à dissoudre la représentation du peuple, après l'avoir fait marcher pendant quatre mois dans l'avilisse-
ment. Qu'eussent fait de plus, pour notre ruine, et les despotes et leurs agents, s'ils étaient au milieu de nous ? Mais quoi ! tout cela se fait à côté de vous, et vous le souffrez ! le gouffre s'agrandit tous les jours, et vous ne le fermez pas ! qui peut donc vous arrêter, et que craignez-vous ! la mort 1 Aimeriez-vous mieux vivre sous le despotisme, et croyez-vous qu'il vous épargnerait 1 D'ailleurs ne vous souvient-il plus de vos serments ? N'avez-vous pas juré de défendre la liberté et l'égalité, ou de mourir 1 Craindriez-vous de blesser l'opinion du peuple qui n'a pas oublié les services que les Jacobins de Paris ont rendus à la li--berté 1 Citoyens ! Dumouriez aussi avait rendu des services à la libertéj il est devenu traître : vous l'avez frappé ; d'ailleurs, elle n'existe plus cette société recommandable par ses services : abandonnée de tous les amis de la liberté, elle est livrée aux ennemis du peuple, ennemis d'autant plus dangereux qu'ils le perdent en le flattant, et en ne lui parlant que de sa puissance. Agents des rois et de la faction qui nous travaille, ils n'ont dès Jacobins que le local et le nom. S'avise-t-on de respecter les stupides esclaves du despote mitre de Rome, parce qu'ils s'appellent Romains, et qu'ils végètent sur le même sol où vécurent les Scipion, les Caton, les'Brutus (1). Je vous le demande : Si deux cents conitre-révolution-naires connus, se réunissaient, tous les jours, à côté de vous ; s'ils y conspiraient publiquement contre la représentation nationale, s'ils y appelaient les poignards sur vos cœurs, s'ils y invitaient une multitude égarée à venir vous forcer de rendre tel ou tel décret ; s'ils vous faisaient violence jusqu'à changer la consigne à vos portes; si après une séance ou, par les discours les plus atroces, ils auraient essayé d'enflammer les esprits, ils sortaient en conjurés pour marcher contre les représentants du peuple ; si forcés de renoncer à ce projet, parce qu'ils n'auraient pas pu exciter une insurrection, ils le reprenaient une seconde fois ; s'ils appelaient des armées à leurs secours, si dans une adresse répandue avec profusion ils affirmaient que la contre-révolution est dans la Convention nationale et dans le gouvernement, croiriez-vous une telle réunion d'hommes indifférente à la chose publique, ou plutôt désempareriez-vous avant d'avoir détourné de vous une telle conjuration1? Eh bien ! les noms ne font rien ici : les actes sont les mêmes.
On dira peut-être que les hommes que j'accuse ont pourtant dénoncé Dumouriez ; certes, je le crois bien. Feraient-ils quelque mal s'ils ne se couvraient du masque du patriotisme? Citoyens qui m'écoutaient, reconnaissez enfin ceux qui vous trompent: voici leur traité avec les despotes, et avec Dumouriez devenu leur agent. Des armées ne suffisent pas, leur aura-t-il dit, pour subjuguer le peuple français et lui rendre un roi: tant que ce peu pie conservera son énergie, il sera invincible ; travaillez donc à la lui ôter en le mettant en convulsion ; parlez-lui sans cesse de trahisons, afin qu'il ne prenne de confianoe en personne ; aigrissez
ceux qui n'ont rien contre ceux qui ont quelque chose, afin de porter les premiers à des excès, et d'amener les autres jusqu'au dégoût du régime républicain ; calomniez toutes les autorités, afin que les lois soient sans force ; dites même qu'il n' y a plus de lois, afin que les brigands soient sans frein ; parlez sans cesse d'accapareurs de grains, afin d'amener la famine ; attaquez la Convention nationale, réduisez-la à une nullité absolue, faites-la menacer et outrager, afin que les bons citoyens soient sans espérances, et qu'on voie sa dissolution sans surprise. Quant à moi, dès ma première victoire, dites que je suis un traître, et répétez-le sans cesse afin de me fournir un prétexte de lever le masque, et de paraître ne céder qu'à mon amour pour mon pays, et au désir de faire cesser l'anarchie dont la nation sera infailliblement fatiguée. Il n'est pas que cette manière de m'adresser au peuple ne me gagne quelques cœurs ; et afin que la Convention nationale ne puisse porter elle-même le remède que j'offrirai, la fin de l'anarchie, vous continuerez à la calomnier, vous augmenterez même de fureur ; vous direz que la majorité des membres sont mes complices, et vous le direz après mes lettres, où j'aurai soin d'insinuer que je ne marche à Paris que pour tirer cette majorité" de l'oppression où vous l'avez mise... Citoyens ! je le répète, voilà leur traité. Considérez la situation où vous êtes, et voyez avec quelle fidélité toutes les conditions en ont été remplies. Une seule clause reste encore imparfaite : c'est celle de votre dissolution ; et cette dissolution est, après plusieurs tentatives inutiles, l'objet de l'adresse que je vous dénonce.
Au nom de la liberté qui nous a déjà coûté tant de sacrifices, au nom de la patrie dont le salut est dans vos mains, représentants du peuple ! Sortez de la léthargique confiance où, par mille moyens, on a eu l'art de vous plonger ! Que les cris de 25 millions d'hommes vous réveillent, si le bruit des poignards et des fers qu'on vous prépare n'a pas cette puissance. Ils vous conjurent de les sauver du danger qui les menace, et des maux prêts à fondre sur eux ; ils vous conjurent de ne pas laisser tomber en d'autres mains la puissance dont ils vous ont investis. Songez qu'ils vous demanderont compte un jour de l'usage que vous aurez fait de ce pouvoir. Songez que l'anarchie est le garant du succès de toutes les conspirations, que l'ordre et l'amour des lois en sont le tombeau ; songez enfin, songez que c'est dans l'anarchie qu'est l'espoir de nos ennemis. C'est elle, et non Pharsale, qui livra Rome à César; c'est elle, et non les victoires de Cobourg, qui vous livrera à l'Europe coalisée.
Je propose à la Convention nationale de décréter :
1° Que les scellés seront apposés sur les papiers des sociétés des Jacobins et des Corde-liers de Paris.
2° Que toutes les administrations de Paris sont cassées, et seront provisoirement remplacées par des commissions nommées par le Conseil exécutif.
3° Que les sections de Paris cesseront d'être permanentes et que les comités révolutionnaires créés par les sections seront tenus de se dissoudre.
4° Qu'il sera nommé, dans la séance de de-
main et par la Convention nationale, un commandant de la garde nationale de Paris, lequel s'occupera aussitôt de l'organisation de cette garde conformément aux lois.
5° Qu'il sera fait une adresse au peuple pour lui exposer les motifs de la conduite de la Convention nationale, ranimer ses espérances et lui promettre une Constitution.
6° Qu'il sera fait aussi une adresse aux sociétés populaires pour les éclairer sur les complots des hommes qui ont usurpé le nom de Jacobins de Paris, et les inviter à se rallier toutes aux principes d'ordre et de respect pour les lois sans lesquels il n'y a point de liberté.
a la séance de la convention nationale du
Adresse (1) de la société des Amis de la liberté et de l'égalité de Paris à leurs frères des départements (2).
« Amis, nous sommes trahis ! Aux armes ! aux armes ! Yoici l'heure terrible où les défenseurs de la patrie doivent vaincre ou s'ensevelir sous les décombres sanglants de la République. Français, jamais votre liberté ne fut en plus grand péril. Nos ennemis ont enfin mis le sceau à leur noire perfidie, et pour la consommer, Dumouriez, leur complice, marche sur Paris. Les trahisons manifestes des généraux coalisés avec lui, ne laissent pas douter que ce plan de rébellion et cette insolente audace ne soient dirigées par la criminelle faction qui l'a maintenu, déifié, ainsi que Lafayette, et qui nous a trompés, jusqu'au moment décisif, sur ia conduite, les menées, les défaites et les attentats de ce traître, de cet impie qui vient de faire mettre en état d'arrestation les quatre commissaires de la Convention, et qui prétend la dissoudre. Trois membres de notre société, commissaires du Conseil exécutif, les avaient précédés : ce sont eux qui, en risquant leur existence, ont déchiré le voile et fait décider l'infâme Dumouriez.
« Mais, frères, ce ne sont pas là tous vos dangers. Il faut vous convaincre d'une vérité bien douloureuse ! Vos plus grands ennemis sont au milieu de vous, ils dirigent vos opérations : ô vengeance 1 ils conduisent vos moyens de défense 1
Oui, frères et amis, c'est dans le Sénat que de parricides mains déchirent vos entrailles ! oui, la contre-révolution est dans le gouvernement, dans la Convention nationale. C'est là, c'est au centre de votre sûreté et de vos espérances, que de criminels délégués tiennent les fils de la trame qu'ils ont ourdie avec la horde des despotes qui viennent nous égorger! C'est
là qu'une cabale sacrilège, dirigée par la Cour d'Angleterre et autres...
« Mais déjà l'indignation enflamme votre courageux civisme. Allons, républicains, armons-nous ! Et sans nous laisser amollir par de vaines terreurs sur nos calamités, que notre sagesse s'arrête sur les moyens de salut qui nous restent, les voici :
« Levons-nous ! Oui, levons-nous tous ! Mettons en état d'arrestation tous les ennemis de notre Révolution, et toutes personnes suspectes. Exterminons sans pitié tous les conspirateurs, si nous ne voulons être exterminés nous-mêmes. Pour rendre à la Convention nationale, qui seule peut nous sauver, sa force et son énergie, que les députés patriotes qui sont en mission dans les 83 départements, soient renvoyés à leur poste, qu'ils y reviennent le plus promptes ment possible, et à l'exemple des Marseillais, que de nouveaux apôtres de la liberté, choisis par vous, au milieu de vous, remplacent ces commissaires ; qu'ils soient envoyés dans les villes et dans les campagnes, soit pour faciliter le plus prompt recrutement, soit pour échauffer le civisme et signaler les traîtres.
« Que les départements, les districts, les municipalités, que toutes les sociétés populaires s'unissent et s'accordent à réclamer auprès de la Convention, à y envoyer, à y faire pleuvoir des pétitions qui manifestent le vœu formel du rappel instant de tous les membres ■infidèles qui ont trahi leur devoir, en ne voulant pas la mort du tyran, et surtout contre ceux qui ont égaré un si grand nombre de leurs collègues. De tels délégués sont des traîtres, des royalistes ou des hommes ineptes. La République réprouve les amis des rois; ce sont eux qui la morcellent, la ruinent et ont juré de l'anéantir. Oui, citoyens, ce sont eux qui ont formé cette faction criminelle et désastreuse. Avec eux c'en est fait de votre liberté, et par leur prompte expulsion la patrie est sauvée!
« Que tous s'unissent également pour demander que le tonnerre des décrets d'accusa-
tion soit* lancé, et sur les généraux traîtres à la République, et sur les ministres prévaricateurs, et sur les administrateurs des postes, et sur tous les agents infidèles au gouvernement. Voilà nos plus salutaires moyens de défense, mais repoussons les traîtres et les tyrans.
« Le foyer de leur conspiration est ici : c'est à Paris que nos perfides ennemis peuvent consommer leur crime. Paris, le berceau, le boulevard de la liberté, est, n'en doutez pas, le lieu où ils ont juré d'anéantir, sous les cadavres des patriotes, la cause sainte de l'humanité.
« C'est sur Paris que Dumouriez dirige ses vengeances, en ralliant à son parti tous les royalistes, les Feuillants, les modérés et tous les lâches ennemis de notre liberté. C'est donc à Paris que nous devons tous la défendre; et pénétrez-vous bien de cette vérité, que Paris, sans vous, ne peut sauver la République. Déjà les intrépides Marseillais sont debout, et c'est pour prévenir leur arrivée, que la cabale scélérate presse l'accomplissement des forfaits du traître Dumouriez.
« Français, la patrie est menacée du plus grand danger ! Dumouriez déclare la guerre au peuple, et, devenue tout à coup l'avant-garde des féroces ennemis de la France, une partie de son armée, séduite par ce grand criminel, marche sur Paris pour rétablir la royauté et dissoudre la Convention nationale.
« Aux armes, républicains, volez à Paris : c'est là le rendez-vous de la France, Paris doit être le quartier général de la République. Aux
armes ! aux armes !...... Point de délibération,
point de délai, ou la liberté est perdue ! Tous moyens d'accélérer votre marche doivent être mis en usage. Si nous sommes attaqués avant notre arrivée, nous saurons combattre et mourir, et nous ne livrerons Paris que réduit en cendres.
« Signé : Marat, député-président ; Dubois-son, w'ce-prmdtewtf ;Jay, Duquesnoy, député; Coindre, Deperret, Champertois, Prieur, secrétaire. »
FIN DU TOME LXI
ARCHIVES PARLEMENTAIRES
première série
TARLE CHRONOLOGIQUE
DU TOME LXI
(DU 31 MARS 1*793 Ail 12 AVRIL 1793.)
ARCHIVES PARLEMENTAIRES
PREMIÈRE SÉRIE
TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE
OU TOME SOIXANTE ET UNIÈME
DO 31 mars 1793 ad 12 avril 1793.)
2* Projets d'adresse aux soldats français de Varmée du Nord et de la Belgique — Projet proposé par Fabre d'Eglantine (4 avril 1793, t. LXI, p. 303 ; — projet proposé par Barère {ibid. p. 316) ; — projet proposé par Lasource (ibid.) ; — la Convention accorde la priorité au projet de Lasource et décide qu'il en sera fait une seconde lecture (ibid.). — Deuxième lecture et adoption d'un projet d'adresse de Lasource (5 avril, p. 333).
Administrateurs. Sollicite l'indulgence de la Convention en faveur des citoyens Grosbuy et Deveyle (6 avril 1793, t. LXI, p. 364).
Conseil permanent. Fait part de dispositions relatives au désarmement (8 avril 1793, t. LXI, p. 417).
Administrateurs. Rendent compte des opérations du recrutement et expriment leur dévouement au salut de la patrie (11 avril 1793, t. LXI, p. 599).
— Dénonce la non-exécution de la loi relative aux Invalides (t. LXI, p. 25). — Parle sur les mesures à prendre pour le salut public (g). 83 et suiv.). — Demande la suppression de la commission des six (p. 93), (p. 95). — Parle sur la création d'un comité d'exécution (p. 278). — Demande la mise en état d'arrestation des généraux d'Estourmel et Ligneville (p. 310).
— Parle sur l'arrestation du général d'Harville (p. 333).
— Propose de donner des gardes au citoyen Dumas (p. 339). — Est chargé do faire l'inventaire du contenu d'une malle destinée à Dumouriez (p. 450). — Parle sur un arrêté pris par les commissaires dans les départements de la Seine-Inférieure et de la Somme (p. 497) (p. 498).
Troubles. Lettre des administrateurs (3 mars 1793, t. LXI, p. 12).
Administrateurs. Envoient une adresse de dévouement (10 avril 1793, t. LXI, p. 514).
Société des Amis de la République. Annonce que le recrutement s'est fait par voie du sort (6 avril 1793, t. LXI, p. 371).
§ 1er. — Organisation.— Composition.— Avancement.
— Recrutement.
§ 2. — Renseignements sur la, situation, les opérations, les besoins des armées.
§ 3. — Solde des troupes.
§ 4. — Approvisionnement.
§ 5. — Commissaires de la Convention aux armées.
§ ler,— Organisation.— Composition. —Avancement.
— Recrutement.
Recrutement. Pétition de la section du Tempie demandant une loi répressive contre ceux qui refusent de faire leur service personnel (2 avril 1793, t. LXI, p. 93 et suiv.) ; — renvoi aux comités de la guerre et de la défense générale réunis (ibid. p. 96). — Décret relatif à une levée de 40.000 hommes (4 avril, p. 307).
— Décret sur la formation d'un camp de 40.000 hommes entre Saint-Quentin et Péronne (5 avril, p. 344);
— texte définitif de ce décret (ibid. p. 346). — Décret portant qu'aucun des ci-devant privilégiés ne sera admis dans la nouvelle armée (ibid. p. 347).
§ S.— Renseignements sur la situation, les opéra-lions, les besoins des armées (3 avril 1793, t. LXI, p. 113), (p. 122 et suiv.), (5 avril, p. 339), (7 avril, p. 400).
§ 3. — Solde des troupes. Décrets y relatifs (S avril 1793, t. LXI, p. 337), (11 avril, p. 592).
§ 4. — Approvisionnement des armées. Décret sur l'établissement, de quatre lieues en quatre lieues, dos relais nécessaires pour transporter aux armées les munitions de guerre, les effets de campement, les fourrages et les subsistances (9 avril 1793,t. LXI, p. 483).
§ S. — Commissaires de la Convention envoyés aux armées. Liste de ces commissaires (12 «avril 1793, t. LXI, p. 622).
Année de Belgique. Compte rendu de la trahison de Dumouriez (3 avril 1793, t. LXI, p. Il7 et suiv.), (p. 134 et suiv.), (p.~143 et suiv.).— Adresse de la Convention à l'armée de Belgique (5 avril, p. 333).— Renvoi au comité de la guerre d'un projet de décret tendant à autoriser le conseil exécutif à prendre les mesures nécessaires pour faire rejoindre les drapeaux par les soldats de l'armée de Relgique qui s'en sont éloignés (7 avril, p. 399 et suiv.). — Les fournisseur de viande demandent qu'il leur soit fait l'avance d'un tiers sur leurs marchés (8 avril, p. 414) ; — renvoi au comité des marchés [ibid.). — Décret sur la mise en liberté des soldats qui ont quitté les drapeaux (8 avril, p. 423 et suiv.) — Adoption d'un article additionnel à ce décret [ibid. p. 452). — Texte définitif du décret {ibid.).
Voir Dumouriez.
Armée de la Moselle. Commissaires chargés de s'y rendre (8 avril 1793, t. LXI, p. 423).
Armée du Rhin. Commissaires chargés de s'y rendre (8 avril 1793, t. LXI, p. 423).
Armée des Vosges. Commissaires chargés de s'y rendre (8 avril 1793, t. LXI, p. 423).
Conseil général. Ecrit au sujet du recrutemen-(8 avril 1793, t. LXI, p. 414 et suiv.).
2° Brûlement de 3 millions d'assignats (6 avril 1793, t. LXI, p. 368),
3° Adoption d'une modification au décret du 10 mars 1793 qui défend aux ouvriers employés à la fabrication du papier des assignats, imprimeurs, graveurs, artistes, etc., de quitter leurs ateliers (6 avril 1793, t. LXI, p. 372).
4° Rapport sur les moyens de favoriser la circulation des assignats (8 avril 1793, t. LXI, p. 442 et suiv.) ; —projet de décret(ibid.p.445 et suiv.);—discussion (ibid. p. 447 et suiv.), (p. 449) ; — la Convention ajourne le titre Ior du projet de décret et adopte le titre II (ibid. p. 450). — Discussion et adoption du titre I,r (11 avril, p. 592 et suiv.).
5° Décret portant que 150,000,000 d'assignats de 50 livres seront remplacés par une même somme d'assignats de 400 livres (U avril 1793, t. LXI, p. 606).
Directoire. S'élève contre la fraction qui voudrait désorganiser la République. (2 avril 1793, t. LXL p. 76 et suiv.).
Société populaire. Fait des dons patriotiques (8 avril 1793, t. LXI, p. 414).
t. LXI, p. 80 et suiv.); — renvoi au comité d'instruction publique (ibid. p. 81).
Tribunal criminel. Renvoi au comité des finances d'un mémoire du ci-devant commissaire du pouvoir exécutif (8 avril 1793, t. LXI, p. 416).
Société populaire. Annonce l'envoi de fourniture (4 avril 1793, t. LXI, p. 291et suiv.)
Administrateurs. Font part du civisme de leurs concitoyens et se plaignent du rappel des commissaires Couturier et Dentzel (10 avril 1793, t. LXI, p. 510).
Conseil général. — Demande que les fusils des arsenaux qui ne sont pas de calibre soient distribués aux citoyens qui ont délivré leurs armes aux volontaires (8 avril 1793, t. LXI, p. 419 et suiv.).
Administrateurs. Adresse de félicitation (9 avril 1793, t. LXI, p. 461).
tion est demandée par Boyer:Fonfrède, Carrier et Marat (8 avril, p. 445) ; — la Convention passe à l'ordre du jour sur cette motion (ibid.).
2° Décret portant que les ventes des bois appartenant aux domaines et aux ci-devant communautés ecclésiastiques seront faites par les directoires de district (11 avril 1793, t. LXI, p. 605).
décret portant que les membres de la ci-devant famille royale détenus au Temple continueront d'y rester et que le comité de Salut public indiquera le lieu où seront détenus les autres (ibid.) (8 avril, p. 419) ; — rapport par Guyton-Morveau sur le lieu de détention des Bourbons (8 avril, p. 444);— discussion : Génissieu, Boyer-Fonfrède, La Revellière-Lépeaux (ibid. et p. suiv.). ; — la Convention décrète qu'ils seront transférés à Marseille, à l'exception de ceux qui sont détenus au Temple (ibid. p. 445) ; — le conseil exécutif rendra compte de l'exécution de ce décret (11 avril, p. 591) ; — compte rendu (12 avril, p. 610 et suiv.).
— décret lui enjoignant de rejoindre son poste (ibid.).
— Demande la traduction à la barre des généraux Egalité et Valence (p. 302). — Parle sur la démission de Custine (p. 310), — sur les attributions du tribunal révolutionnaire (p. 336), — sur les personnes appelées à servir d'otages à la nation française (p. 349), — sur la conduite de Custine (p. 345). —; Demande que tous les membres de la famille des Bourbons soient gardés
j en otage (p. 382).— Parle sur le lieu do détention de la famille des Bourbons (p. 444). — Demande la destitution du général Biron (p. 445). —Parle sur une adresse de la section de la Halle aux blés (p. 528). — S'étonne que Marat puisse trouver des défenseurs, l'accuse d'avoir demandé la dictature et demande le décret d'accusation contre lui (p. 640).
Tribunaux. On demande que les dispositions de la loi du 4 mars leur soient appliquées (5 avril 1793, t. LXI, p. 338 et suiv.); — renvoi au comité de législation (ibid. p. 339).
— Est chargé de vérifier le contenu d'une malle destinée à Dumouriez (p. 450). — Membre du comité de sûreté générale (p. 470). — Est chargé d'assister à la levée des scellés apposés sur les papiers de Roland (p. 586).
— sur la création d'un comité d'exécution (p. 278). (p. 343) (p. 374 et suiv.). — Demande que la Convention s'occupe de découvrir les auteurs de la conjuration tramée contre la République (p. 606).
Conseil général. Renvoi au comité de Salut public d'une lettre du conseil (9 avril 1793, t. LXI, p. 496).
— On demande des armes et des munitions (10 avril, p. 520) ; — renvoi au comité de Salut public (ibid.).
— Parle sur une pétition du citoyen Lainé (p. 468). •— Demande qu'il soit accordé des passeports aux ministres des puissances étrangères accrédités près de la République (p. 521).
Administrateurs. Font part des menées des rebelles (2 avril 1793, t. LXI, p. 82 et suiv.).
Conseil général. Envoie une adresse patriotique (13 avril 1793, t. LXI, p. 612) ; —mention honorable (ibid. p. 613).
Société populaire. Rend compte des opérations du recrutement (12 avril 1793, t. LXI, p. 616).
fait mettre en liberté quinze habitants et demandent des ordres pour continuer ou cesser la dépense de la garde du château (9 avril, p. 466) ; — renvoi au comité des finances (ibid.).
— renvoi aux comités d'agriculture et des finances réunis (ibid.).
— Commissaires de la Convention chargés de suivre ses expériences (5 avril, p. 329).
Administrateurs. Ecrivent qu'ils ont envoyé dès troupes au secours des départements des Deux-Sèvres et de la Loire-Inférieure (9 avril 1793, t. LXI, p. 462).
Volontaires nationaux. Les chasseurs volontaires demandent à voler au secours de la patrie (3 avril 1793, t. LXI, p. 130).
Conseil général. Fait part des mesures do sûreté générale qu'il a prises (8 avril 1793, t. LXI, p. 420).
Directoire. Réclamation contre un arrêté du directoire qui ordonne aux receveurs de districts de garder tous les fonds de leur recette (7 avril 1793, t. LXI, p. 392).
— sur une pétition du citoyen Louis-François-Joseph Rourbon (p. 458), — sur une pétition du citoyen Lainé (p. 468), — sur les ventes des bois appartenant aux domaines et aux ci-devant corps ecclésiatiques (p. 605).
12* régiment. Décret réunissant à ce régiment l'escadron formé à Arras (2 avril 1793, t. LXI, p. 92).
Officiers municipaux. — Annoncent des dons patriotiques (31 mars 1793, t. LXI, p. 3), (6 avril, p. 369).
— Commissaire à l'armée des Pyrénées (t. LXI, p. 022).
Administrateurs. Envoient une adresse de dévouement à la République (12 avril 1793, t. LXI, p. 611).
— Décret ordonnant sa comparution à la barre (8 avril, p. 488). — Nouvelle dénonciation des administrateurs du département de la Meuse (10 avril, p. 517).
— Sa proclamation aux Français (11 avril p. 602).
— Décret prorogeant sa mission aux places fortes du Nord (t. LXI, p. 610).
Comités spéciaux selon l'ordre alphabétique.
Travaux. — 1793. —Rapports sur le mode de partage des biens communaux (8 avril, p. 424 et suiv.),
— sur la vente des moulins des usines appartenant à la nation (ibid. p. 448 et suiv.).
Travaux. — 1793. — Rapports sur la vente en détail des propriétés nationales (1" avril, t. LXI, p. 64 et suiv.), — sur l'indemnité à accorder au citoyen Guyon de Mont-Leveaux (6 avril, p. 371), — sur la vente des moulins des usines appartenant à la nation (8 avril, p. 448 et suiv.), — sur une pétition de la commune de Maubeuge (9 avril, p. 470), — sur la translation de la paroisse de Notre-Dame de la chaussée de Valenciennes (ibid. p. 471), — sur le paiement des dépenses de l'administration des domaines nationaux (11 avril, p, 595).
Organisation. — 1793. — Liste des membres et des suppléants (4 avril, t. LXI, p. 316).
Travaux. — 1793. — Rapport sur l'exportation des drilles ou chiffes (3 avril, t. LXI, p. 135), — sur les navires ennemis arrêtés dans les ports de la République (il avril, p. 595), — sur la pétition du citoyen Thomas Guérard (ibid. p. 601).
Travaux. — 1793. — Rapport sur trois pièces qui inculpent gravement Dumouriez (lor avril 1793, t. LXI, p. 39 et suiv.), — sur la création d'un conseil d'exécution (3 avril, p. 277 et suiv.), — sur les mesures à prendre à l'égard des parents des officiers de l'armée de Dumouriez (ibid. p. 280), — sur les mesures prises pour l'arrestation de Dumouriez et sur la mise en état de défense des places fortes du Nord et de l'Est (4 avril, p. 304), — sur une levée de 40,000 hommes et la nomination d'un ministre de la guerre (4 avril, p. 305 et suiv.), — sur les personnes appelées à servir d'otages à la nation française (5 avril, p. 339 et suiv.), — sur la formation d'un camp de 40,000 hommes entre Saint-Quentin et Péronne (ibid. p. 344), — sur la mise en liberté des soldats de l'armée de Belgique qui ont quitté les drapeaux (8 avril, p. 423 et suiv.).
Travaux. — 1793. — Rapport sur la situation de l'Erguet et du Mûnsterthal (7 avril, t. LXI, p. 397).
Travaux. — 1793. — Rapport sur la suspension de la vente des bois appartenant à l'abbaye de Saint-Médard à Soissons (5 avril, p. 345), — sur la pétition du citoyen Fernel (11 avril, p. 605).
Organisation. — 1793. — Nouvelle composition (11 avrifl, t. LXI, p. 600).
Travaux. — 1793. — Rapport sur la pétition du citoyen Binard (11 avril, t. LXI, p. 596).
Travaux. — 1793. — Rapports sur le mode de paiement des jurés du tribunal révolutionnaire (3 avril 1793, t. LXI, p. i26), — sur les certificats de civisme des employés de l'enregistrement (ibid. p. 262*,
— sur la remise do la somme d'un million à la caisse de la marine de Toulon (ibid.), — sur les dépenses d'entretien des bâtiments qui appartenaient à la ci-devant liste civile (ibid.), — sur une pétition de la municipalité de Millau (ibid. et p. suiv.), — sur une pétition de la municipalité de Montauban (ibid. p. 263),
— sur une pétition du conseil général de Strasbourg (ibid.), — sur les demi-soldes des sous-officiers «t soldats de la ci-devant garde de Paris (6 avril, p. 372),
— sur une moditication au décret du 10 mars relatif anx ouvriers employés à la fabrication des assignats (ibid.), —sur les dépenses pour la fabrication des assignats (ibid. p. 373), — sur la prohibition de la vente du numéraire (8 avril, p. 442), — sur les messageries et les postes (9 avril, p. 472 et suiv.), — sur le paiement des dépenses de l'administration des domaines nationaux (11 avril, p. 595), — sur le remplacement d'assignats de 50 livres par des assignats de 400 livres (ibid. p. 06).
Travaux. — 1793. — Rapport sur une proposition du citoyen Chappe (l01, avril, t. LXI, p. 61 et suiv,), — sur la réunion au 12° régiment de chasseurs de l'escadron formé à Arras (2 avril, p. 92), — sur les manufactures d'armes (ibid. p. 107), — sur les secours à accorder aux familles des militaires et des marins employés au service de la République (4 avril, p. 311 et suiv.), — sur la pétition du citoyen Bre-tèehe (5 avril, p. 337), — sur la solde des troupes (ibid. p. 357), (11 avril, p. 592), — sur la pétition du citoyen Orchampt (ibid. p. 600).
Travaux. — 1793. — Rapport sur une invention du citoyen Chappe (1er avril, t. LXI, p. 61 et suiv.).
Travaux. — 1793. — Rapport sur la pétition du citoyen Pondeux (31 mars, t. LXI, p. 21), — sur le mode de paiement des jurés du tribunal révolutionnaire (3 avril, p. 126), — sur le jugement des personnes qui ont pris part aux révoltes ou émeutes contre-révolutionnaires '(7 avril p. 397), — sur la mise en liberté du citoyen Marc-Antoine Michaux (11 avril, p. 596), — sur un arrêté du tribunal du Donjon (12 avril, p. 621).
Travaux. — 1793. — Rapport sur les secours à accorder aux familles des militaires et des marins employés au service de la République (4 avril, t. LXI, p. 311 et suiv.), — sur les navires ennemis arrêtés dans les ports de la République (11 avril, p. 595).
Organisation. — 1793. — Rapport par Isnard au nom du comité de défense générale sur la création d'un comité chargé de délibérer en secret sur les mesures relatives au salut commun (3 avril 1793, t. LXI, p. 277 et suiv.) ; — projet de décret (ibid. p. 278) ; — discussion : Thuriot, Cambon, Buzot, Albitte, Marat, Danton (ibid. et p. suiv.): — renvoi du projet de décret à un nouvel examen du comité (ibid. ,p. 279); — nouvelle discussion : Isnard, Bréard, Barère, Buzot (5 avril, p. 341 et suiv.); — la Convention charge Isnard, Danton, Barcre, Thuriot et Mathieu de présenter un projet de décret sur rétablissement de ce -comité (ibid. p. 343). — Projet de décret présenté par Isnard (6 avril, p. 373 et suiv.); — discussion : Buzot, Thuriot, Marat, Birotteau (ibid. p. 374 et suiv.) ; — adoption des articles 1 at 2 (ibid. p. 377).
— Art. 3 : adoption avec amendement (ibid. p. 378).
— Art. 4 : adoption sauf rédaction (ibid.). — Adoption sans discussion des articles 5, 6 et 7 (ibid.) — Texte définitif du décret (ibid.). — La Convention décrète qu'il sera procédé de suite à la nomination des membres du comité (ibid.). —Liste des membres (7 avril, p. 396). — Démission de Jean Debry (ibid. p. 397), — Il est procédé à un scrutin pour le remplacement de Jean Debry (ibid. p. 399). — Proclama-
tion de Robert Lindet en remplacement de Jean Debry (ibid. p. 400).
Travaux. — 1793. — Rapports sur le lieu de détention de la famille des Bourbons (8 avril, t. LXI, p. 444), — sur la traduction à la barre du général Chazot (ibid. p. 448), — sur la correspondance à entretenir par les commissaires de la Convention dans les départements avec le comité de Salut public (ibid. p. 449), — sur les pouvoirs et fonctions des commissaires aux armées (9 avril, p. 478), — sur le transport aux armées des munitions et des subsistances (ibid. p. 483), — sur les poursuites contre les provocateurs au rétablissement de la royauté (10 avril, p. 521), — sur la nomination de Dalbarade comme ministre de la marine (ibid. p. 527),— sur les forges de la Chaussade (11 avril, p. 592).
Organisation. — 1793. — Sur la motion de Carrier la Convention décide d'augmenter de quatre le nombre des membres du comité et de procéder au remplacement de Ruamps et de Montaut envoyés en mission . (9 avril, t. LXI, p. 470). — Liste des nouveaux membres (ibid.).
Travaux. — 1793. — Rapports sur la destination à donner aux objets trouvés à Chantilly (31 mars, t. LXI, p. 22 et suiv.), — sur trois pièces qui inculpent gravement Dumouriez (1er avril, p. 39 et suiv.), — sur la surveillance à exercer sur les officiers et les soldats qui se trouvent dans la capitale sans motif valable (ibid. p. 60), — sur l'arrestation provisoire de tous les officiers et soldats qui reviennent des armées (3 avril, p. 265), — sur les mesures prises pour l'arrestation de Dumouriez et sur la mise en état de défense des.places du Nord et de l'Est (4 avril, p. 304), — sur la reddition de Longuyon (12 avril, p. 621).,
§ 1. — Nomination de commissaires.
§ — Costume des commissaires.
§ 3. — Pouvoirs des commissaires.
§ 4. — Correspondance des commissaire avec la Convention et rapports sur leurs missions.
§ 5. — Arrestation des commissaires à Varmée4e Dumouriez.
§ 1. — Nomination de commissaires. Commissaires envoyés près les armées du Nord et des Ardennes (4 avril 1793, t. LXI, p. 306).— Commissaires aux armées des Vosges, du Rhin et de la Moselle (8 avril, p. 423). — Commissaires envoyés dans le département de l'Orne (11 avril, p. 609). — Commissaires envoyés aux armées (12 avril, p. 622).
§ S. — Costume des commissaires. Décret fixant provisoirement le costume (4 avril 1793, t. LXI, p. 306).
§ 3. — Pouvoirs et fonctions des commissaires. Sont autorisés à faire arrêter et même à faire dépor-
ter toutes les personnes suspectes de pouvoir troubler la tranquillité publique (3 avril 1793, t. LXI, p. 261). — Ils entretiendront une correspondance journalière avec le comité de Salut public et prendront toutes les mesures nécessaires pour l'entretien et l'équipement des armées (8 avril, p. 449). — Sont chargés de la mise «n marche des volontaires nationaux (9 avril p. 470). — Rapport et projet de décret présentés par Rréard sur les pouvoirs et les fonctions des commissaires aux armées (ibid. p. 478).
— Discussion. — Art. 1er : Maximilien Robespierre, Féraud (ibid.)', — adoption (ibid.). — Adoption des articles 2 et 3 (ibid.). — Art. 4 : Birotteau, Bréard, rapporteur, Maximilien Robespierre, Féraud [ibid. et p. suiv.); — adoption (ibid. p. 479). — Adoption des articles 5 et 6 [ibid). — Texte définitif du décret (ibid. et p. suiv.)
§ 4. — Correspondance des commissaires avec la Convention et rapports sur leurs missions. — 1793.
— Lettres des commissaires dans les départements de l'Ardèche et delà Lozère (31 mars,t. LXI, p. 8),
— des commissaires dans les départements de l'Eure et du Calvados (ibid.), — des commissaires dans le pays des Denx-Ponts (ibid. 'p. 10), — des commissaires dans les départements de la Mayenne et de la Loire-Inférieure (ibid. p. 11), — des commissaires à Chantilly (ibid. p. 22 et suiv.), — des commissaires dans les départements de l'Ardèche et de la Lozère (1er avril, p. 28), — des commissaires dans les départements du Doubs (ibid. et p. suiv.), — des commissaires dans les départements de l'Oise et de Seine-et-Marne (ibid. p. 29), — des commissaires dans les départements de l'Ardèche et de la Lozère (ibid.),
— des commissaires dans les départements du Cher et de l'Allier (ibid. p. 30), — des commissaires pour l'inspection des côtes de l'Ouest (ibid.), — des commissaires près l'armée de Relgique (ibid. et p. suiv.), (1er avril, p. 33), — des commissaires dans les départements de l'Ain et de l'Isère (ibid. p. 37), — des commissaires dans le pays de Porrentruy (2 avril, p. 76), — des commissaires dans les départements de la Gironde et de Lot-et-Garonne (ibid, p. 76), — des commissaires dans les départements de la Nièvre et du Loiret (ibid. p. 77 et suiv.) ; — des commissaires près l'armée de Belgique (ibid. p. 79 et suiv.), des commissaires dans les deux Charentes (2 avril, p. 84 et suiv.), — des commissaires dans le Bas-Rhin (ibid. p. 85 et suiv.), — des commissaires dans les départements de la Côte-d'Or (ibid. p. 86), — des commissaires dans les départements de la Haute-Marne et des Vosges (ibid.), — des commissaires aux frontières du Nord (ibid. p. 87),— des commissaires à l'armée de Dumouriez (3 avril, p. 117 et suiv.), — des commissaires dans les départements des Ardennes et de l'Aisne (ibid. p. 126), — des commissaires à l'armée de Dumouriez (ibid. p. 143 et suiv.), — des commissaires à la frontière du Nord, (ibid. p. 226 et suiv.), — des commissaires aux armées du Rhin, des Vosges et de la Moselle (4 avril, p. 290;, — des commissaires dans la département de la Haute-Loire (ibid. p. 292j, — des commissaires dans les départements du Morbihan et du Finistère (ibid. et p. suiv.), des commissaires dans le département de la Somme (ibid. p. 293), — des commissaires dans les départements du Lot et de la Dordtogne (ibid. p. 295), — des commissaires aux places fortes du Nord [ibid. p. 300), —des commissaires aux places du Nord (5 avril, p. 319), — des commissaires dans les départements de la Vienne et de l'Indre (ibid.), — des commissaires aux places fortes du Nord (ibid. et p. suiv.), — des commissaires dans les départements du Tarn et de l'Aveycon (ibid. p. 320), — des commissaires dans les départements du Cher et de l'Allier (ibid.), — des commissaires dans le pays des Deux-Ponts (ibid.), — des commissaires dans les départements de l'Aube et de l'Yonne (ibid.), — des commissaires dans les départements du Lot et de la Dor-dogne (ibid.), — des commissaires dans les départements du Puy-de-Dôme et de la Creuse (ibid.), — des commissaires dans les départements du Gers et des Landes (ibid. et p. suiv.), — des commissaires dans le département d'Ille-etVilaine (ibid. p. 321 et suiv.), — des commissaires aux frontières du Nord (ibid. p. 323 et suiv.), — des commissaires aux côtes de Lorient à Rayonne [ibid. p. 326 et suiv.), — des commissaires dans les départements des Côtes-du-Nord et d'Ille-et-Vi-laine (ibid. p. 337), — des commissaires dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais (ibid. p. 338), — des commissaires à Valenciennes (ibid. p. 354), (p. 356), —des commissaires dans les départements de la Somme et de la Seine-Inférieure (6 avril, p. 360 et suiv.), — des commissaires dans les départements du Gers et des Landes (6 avril, p. 362), — des commissaires dans la ci-devant [principauté de Salm (ibid.), des commissaires dans les départements maritimes méridionaux (ibid. et p. suiv.), — des commissaires pour l'inspection des côtes de Lorient à Bayonne (ibid. p. 364), — des commissaires dans les départements du Gers et des Landes (ibid.), — des commissaires dans les départements du Lot et de la Dordogne (ibid.),— des commissaires dans les départements du Doubs et de la Haute-Saône (ibid.p. 365), — des commissaires dans les départements de l'Aube et de l'Yonne (ibid. p. 366), — des commissaires dans les départements de l'Aube et de l'Yonne (ibid. p. 367), — des commissaires dans les départements de la Haute-Loire et du Cantal (ibid.), — des commissaires dans les'départements des Vosges et de la Haute-Marne (ibid. p. 368,) — des commissaires aux frontières du Nord (ibid. p. 378 et suiv.), (p. 381), — des commissaires dans les départements du Morbihan et du Finistère (7 avril, p. 400), — des commissaires dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais [ibid. et p. suiv.), — des commissaires dans les départements de la Loire-Inférieure et de la Mayenne (8 avril, p. 413), — des commissaires dans les départements de l'Oise et de Seine-et-Marne (ibid. p. 415), — des commissaires aux frontières du Nord (ibid. p. 421), — des commissaires aux côtes de Lorient à Dunkerque (9 avril, p. 462), — dos commissaires dans les départements du Finistère et du Morbihan (ibid. p. 463 et suiv.), — des commissaires dans les départements du Gard et de l'Hérault (ibid. p. 465), — des commissaires à Chantilly (ibid. p. 466), — des commissaires dans les départements des Pyrénées-Orientales et de l'Arièg© (ibid.), — des commissaires dans les départements du Gers et des Landes (ibid. et p. suiv.), — des commissaires dans les départements de la Manche et de l'Orne (ibid. p. 467), — des commissaires dans
les départements d'Ille-et-Vilaine et des Côtes-du-Nord (ibid. p. 480 et suiv.), —des commissaires aux frontières du Nord (ibid. p. 482 et suiv.), —des commissaires dans les départements de l'Ardèche et de la Lozère [ibid. p. 494), —des commissaires dans Ieî départements de la Haute-Marne et des Vosges (ibid. p. 495), — des commissaires aux frontières du Nord (ibid. p. 498 et suiv.), — des commissaires dans le département des Bouches-du-Rhône (10 avril, p. S08), — des commissaires dans le département du Bas-Rhin (ibid. p. 509), — des commissaires à Orléans (ibid.), (ibid. p. 511 et suiv.), — des commissaires dans les départements de la Meurthe et de la Moselle (ibid. p. 515 et suiv.), — des commissaires à Orléans (11 avril, p. 585), — des commissaires dans les départements de l'Oise et de Seine-et-Marne (ibid. p. 591), — des commissaires dans les départements de la Haute-Marne et des Vosges (12 avril, p. 609), — des commissaires aux frontières du Nord (ibid. p. 610), — des commissaires dans les départements de la Côte-d'Or et du Jura (ibid. p. 611), — des commissaires à Orléans (ibid. p. 613 et suiv.), — des commissaires aux places fortes du Nord [ibid. p. 614 et suiv.), — des commissaires dans les départements de la Haute-Marne et des Vosges (ibid. p. 617.)
§ 5. — Arrestation des commisssaires à l'armée de Dumouriez. Lettre de Carnot annonçant l'arrestation des quatre commissaires Camus, Quinette, Latnar-que, Bancal, par Dumouriez (3 avril 1793, t. LXI, p. 267 et suiv.), — Liste des personnes qui doivent servir d'otages à la nation française jusqu'à ce que les commissaires aient été rendus à la liberté (5 avril, p. 340 et suiv.). — Sur la motion de Rabaut-Saint-Etienne et de Gossuin, la Convention charge le comité de Salut public de présenter un moyen de connaître leur situation (11 avril, p. 605 et suiv.).
Administrateurs. Rendent compte des opérations du recrutement (2 avril 1793, t. LXI, p. 75).
accepté la démission du général Custine (4 avril 1793, t. LXI, p. 315 et suiv.). — Propose de faire examiner la conduite du général Custine (5 avril, p. 344).
1° Discussion du rapport de Vernier sur la contribution mobilière : Ramel-Nogaret (3 avril 1793, t. LXI, p. 266).
2° Etat de situation de la confection de la matrice des rôles (8 avril 1937, t. LXI, p. 418).
§ 1er — Députations admises à la barre.
§ 2. — Permanence.
§ 1er. — Députations admises à la barre. —
1793
— Dêputation du 40* régiment d'infanterie (31 mars, t. LIX, p. 13), — des épiciers de la ville de Paris (ibid. p. 14), — du conseil général de la commune de Paris [ibid. p. 15), — du directoire du département de Paris (ibid. p. 16), — de la section du contrat social (ibid. p. 17), — de la section de l'Oratoire (ibid. p. 22), — de la section des Quinze-Vingts (ibid. p. 25), — de la commune de Strasbourg (l,r avril, p. 62), — de la section de la paix (2 avril, p. 87), — de la commune de Saint-Arnoult (ibid.), — de la section du Mail (ibid. p. 92), —des juges et jurés près le tribunal révolutionnaire (ibid. p. 93),—de la section du Temple (ibid.), — de la section de la Butte-des-Moulins (3 avril, p. 131), — de la section de Beaurepaire (ibid.), — de la section des Droits de l'homme (ibid.), — de la municipalité de Paris (ibid. p. 133), — de la ville de Strasbourg (ibid. p. 134), — de la commune do Paris (ibid. p. 275), — de la section du Théâtre français [ibid. p. 277), — de la section des Amis de la Patrie (ibid. p. 279), — de la section de Gennevilliers [ibid.),
— delà section du Panthéon (ibid. p. 280), — du directoire du département de Seine-et-Oise (4 avril, p. 296),
— de la section des Quinze-Vingts (ibid. p. 313), — de la section du Pont-Neuf [ibid. p. 314), — de la section des Sans-Culottes (ibid.), — du conseil général de la commune de Paris (5 avril, p. 333), — des employés au bureau des subsistances de Paris (ibid. p. 348), — de la ville de Strasbourg (ibid.), — des gendarmes nationaux (ioid. p. 349), — des légions dites du Luxembourg (ibid.), — de la section des Quatre-Nations (ibid.), —de la municipalité de Paris (ibid. p. 3#3),
— de la section des Lombards (ibid. p. 354),
la commune de Versailles (7 avril, p. 402),-— de l'administration du Pas-de-Calais (ibid.), • — du corps électoral de Paris (ibid.), -— des gens de livrée de la demoiselle de Bourbon-Condé (ibid. p. 405), — des membres du conseil de discipline du bataillon des Sans-Culottes (ibid.), — des ouvriers charrons et forgerons (ibid.), — des créanciers des maisons de Sou-bise et de Guémenée (ibid.), — des cordonniers fournisseurs de l'armée (ibid.), — des marins de la ville du Havre (ibid.), — des volontaires de Bar-sur-Ornain (8 avril, p. 452), — de la section de Bonne-Nouvelle (ibid.), — de la section de Bon-Conseil (ibid. p. 453),
— de la section du Finistère (ibid. p. 453), — de la section du Louvre (ibid. p. 459), — de la section des Gravilliers (ibid.), — de la section du Mail (ibid. p. 460), — de la section de l'Arsenal (ibid. p. 461),
— de la section du Mail (12 avril, p. 622).
§ 2. — Permanence. — La Convention décrète qu'elle sera en permanence et en activité jusqu'à nouvel ordre (3 avril 1793, t. LXI, p. 125).
Administrateurs. Fait part d'une arrestation de farine faite dans le département (12 avril 1793, t. LXI, p. 620).
Administrateurs. Envoient un état de^ effets adressés au ministre de la guerre et destinés aux volontaires nationaux (31 mars 1793, t. LXI, p. 2). — Font part des troubles qui ont éclaté à l'occasion du recrutement (4 avril, p. 293).
est chargé de prendre toutes les mesures nécessaires pour la défense des côtes des ci-devant provinces de Normandie, Poitou et Bretagne (5 avril, p. 329).
— Accuse Beurnonville d'être cause des insuccès de l'armée et donne sa démission (4 avril, p. 308 et suiv.) ; — décret lui ordonnant de conserver son commandement (ibid. p. 310). — Le conseil exécutif propose de faire examiner sa conduite (5 avril, p. 344) ;
— discussion (ibid. et p. suiv.); — ordre du jour (ibid. p. 345). — Accuse de nouveau Beurnonville d'avoir compromis le salut de la République (7 avril, p. 395). — Décret portant qu'il sera nommé trois commissaires pour se rendre à son armée (ibid. ]). 396);
— renvoi de sa lettre au comité de Salut public (ibid.). — Sa lettre concernant la conduite de son aide de camp Coquebert (12 avril, p. 618). — Expose les motifs de sa conduite (ibid. p. 619). — Sa note au général Wurmser (ibid. p. 620). — Envoie des détails militaires (ibid.).
— Ses explications (p. 49 et suiv.% (p. 53 et suiv.)
— Parle sur la création d'un conseil d'exécution ^p. 279). — Suppléant au comité de l'analyse (p. 316).
— Parle sur les attributions du tribunal révolutionnaire (p. 334 et suiv.), (p. 33o). — Est chargé de présenter un projet de décret sur l'établissement d'un comité d'exécution (p. 343). — Fait décréter qu'il sera créé une garde du peuple et que le prix du pain sera en proportion avec le salaire des ouvriers (p. 347).— Membre du comité de Salui public (p. 396). — Justifie une adresse de la section delà Halle-aux-blés dénoncée par Pétion (p. 525 et suiv.). — Est accusé par Guadet de complicité avec le parti d'Orléans (p. 630 et suiv.). — Reconnaît le civisme de Robespierre, propose de traduire Orléans devant le tribunal révolutionnaire et de mettre à prix Ta tête des Rourbons émigrés (p. 638 et suiv.).
2° Le comité des décrets surveillera leur envoi dans les départements (3 avril 1793, t. LXI, p. 126).
3° Les décrets seront collationnés à la minute par deux membres du comité des décrets avant d'être présentés à la signature du bureau de la Convention (3 avril 1793, t. LXI, p. 135).
2" Décret rapportant le décret qui enjoint aux membres de la Convention qui rédigent des journaux d'opter entre les fonctions de députés et celles de rédacteur de journal (2 avril 1793, t. LXI, p. 97).
3* Les députés munis de leur carte ne pourrontétre arrêtés qu'en cas de flagrant délit (11 avril 1793, t. LXI, p. 601).
Yoir Démission de députés.
2° Renvoi au comité de la guerre d'une motion tendant à. faire traiter comme des déserteurs les citoyens qui ont abandonné le lieu de leur domicile dès qu'ils ont eu connaissance de la loi du recrutement (5 avril 1793, t. LXI, p. 329).
Société populaire. Observations relatives à un projet de canal de navigation jusqu'à Paris (6 avril 1793 t. LXI, p. 368) ; — renvoi au comité des ponts et chaussées (ibid.).
ie.
2° La trésorerie nationale tiendra à la disposition de l'administration des domaines nationaux la somme de 6,000 livres par mois pour le paiement des commis et frais de bureau (11 avril 1793, t. LXI, p. 595).
Voir Propriétés nationales.
Tribunal. Décret sur une demande du tribunal relative à cinq individus prévenus de tentative de vol (12 avril 1793, t. LXI, p. 621).
— Décret ordonnant l'impression des lettres et mémoires adressées par lui à la Convention, aux comités et au ministre de la guerre (ibid. p. 106).
— Premier rapport sur sa trahison par Delacroix (Eure-et-Loir) (3 avril, p. 117 et suiv.), — par Merlin (de Douai) (ibid,. p. 121 et suiv.), — par Gossuin (ibid. p. 122), — par Treilhard (ibid.), — par Thuriot (ibid. p. 123 et suiv.). — Décret le déclarant traître à la patrie, le mettant hors la loi et assurant des récompenses à ceux qui s'en saisiront (ibid. p, 132).— Sa proclamation aux départements du Pas-de-Calais et du Nord (ibid. p. 134). — Second rapport sur sa trahison (ibid. p. 143 et suiv.). —Mesures prises par Iescommissaires à la frontière du Nord pour prévenir les suites de sa trahison (ibid. p. 266). — Sa proclamation aux départements du Pas-de-Calais et du Nord (ibid. et p. suiv.). — Son adresse à l'armée française (ibid. p. 267). — Compte rendu de sa trahison par Carnot (ibid. et p. suiv.).
— Décret ordonnant de garder à vue les pères, mères, femmes et enfants des officiers de son armée (ibid. p. 280). — Décret prononçant la peine de mort contre quiconque approuvera sa conduite (ibid.). — Pièces relatives à sa trahison (4 avril, p. 297 et suiv.),
— Compte rendu de sa trahison et de l'arrestation des commissaires de la Convention, par le citoyen Bernazais (ibid. p. 298 et suiv.). — Rapport sur les mesures prises pour son arrestation (ibid. p. 304).
— Le. comité de la guerre prendra connaissance des ordres arbitrairement donnés par lui (3 avril, p. 330).
— Envoi des pièces relatives à sa trahison (ibid.).— Lettre des commissaires de la Convention sur les moyens employés par lui pour séduire son armée (6 avril, p. 378 et suiv.). — On annonce qu'il est en fuite (ibid. p. 381). — Envoi de papiers lui ayant appartenu (7 avril, p. 400). — Ou écrit qu'il est presque ahaudonné (8 avril, p. 421). — Commissaires chargés de vérifier le contenu d'une malle à lui adressée (ibid. p. 450). — Ordre donné par lui d'arrêter le député Bellegarde (9 avril, p. 499). — Sa proclamation datée du quartier général de Saint-Amand (10 avril, p. 508). — Décret ordonnant la levée de la garde chargée de veiller sur les citoyens Proty, Dubuisson et Pereira, envoyés comme commissaires près de Dumouriez par le ministre Lebrun (11 avril, p. 596 et suiv.).
2° Tous les articles de la loi contre les émigrés, partie pénale, seront réunis et datés du 28 mars 1793 (12 avril 1793, t. LXI, p, 618).
Conseil général. Annonce des dons patriotiques (31 mars 1793, t. LXI, p. 3).
la représentation de la tragédie de Mérope (p. 26). — Propose de sommer les généraux Egalité et Valence de se rendre à la barre (p. 302). — Fait une motion d'ordre (p. 371). — Demande que le comité de Salut public indique le lieu où les Bourbons seront mis en étal d'arrestation (p. 419). — Fait une motion relative à la confection de la liste des officiers (p. 423). — Parle sur le lieu de détention des Bourbons (p. 444), — sur la prohibition de la vente du numéraire (p. 448), (p. 449).
Société des Amis de Ici liberté et de V égalité. I Adïesse relative au jugement de Louis Capet, à l'as- j sassinat de Michel Lepeletier et dons patriotiques 1 (31 mars 1793, t. LXI, p. 2 et suiv.).
Administrateurs. Protestent contre le décret qui a autorisé les citoyens déportés de Strasbourg à rentrer dans leurs foyers (10 avril 1793, t. LXI, p. 510 et suiv.).
7e régiment. Mention honorable do sa conduite (9 avril 1793, t. LXI, p. 496).
Directoire. Demande que le payeur général et l'ingénieur du département soient dispensés de se rendre à l'armée (31 mars 1793, t. LXI, p. 8 et suiv.).
38° régiment. Don patriotique du 2* .bataillon (31 mars 1793, t. LXI, p. 17).
40° régiment. Pétition relative à la destitution des officiers (31 mars 1793, t. LXI, p. 13) ; — décret (ibid.).
Volontaires nationaux. Don patriotique du 4* bataillon (5 avril 1793, t. LXI, p. 328).
suiv.).— Parle sur le cas du général Valence (p. 301), -— sur le cas du citoyen Thuring (p. 334). — Propose de nommer un comité chargé de présenter l'organisation d'un comité délibérant en secret sur les mesures qui intéressent le salut commun (p. 341 et suiv.). — Est chargé de présenter un projet de décret sur l'établissement de ce comité (p. 343). — Présente ce projet de décret (p. 373). — Parle sur les moyens de favoriser la circulation des assignats (p. 594).
Volontaires nationaux. Renvoi au comité de la guerre d'une pétition du conseil permanent du département tendant à obtenir que les sept bataillons qu'il vient d'organiser soient mis à la solde de la nation (6 avril 1793, t. LXI, p. 373).
Société des Amis de la liberté et de l'égalité. Fait un don patriotique (31 mars 1793, t. LXI, p. 20).
— Parle sur une dénonciation contre Guadet, Vergniaud, etc. (t. LXI, p. 455). — Est accusé d'avoir tiré l'épée contre un de ses collègues (p. 607). — Ses explications (p. 608).
(7 avril 1793, t. LXI, p.- 392 et suiv); — renvoi au comité des domaines (ibid.).,
— Fait un don patriotique (9 avril 1793, t. LXI, p. 461).
— Demande que les députés à la connaissance desquels il existerait des faits particuliers au sujet du général d'Harville soient invités à se rendre aux comités pour les déclarer (t. LXI, p. 620). — Parle sur le rapport de Poultier relatif à l'affaire des généraux Lanoue et Steingel (p. 623).
— Adresses relatives à son assassinat, des administrateurs et des membres du tribunal du district de Pont-Saint-Esprit (t. LXI, p. 1), — des administrateurs du district de Tarascon, p. 328). — Le citoyen Deseune fait hommage de son buste (p. 606).
— 1793. — Dénonce Salle et demande son envoi à l'Abbaye (t. LXI, p. 643).
— Demande qu'Egalité père et Sillery soient gardés à vue (301). — Propose de procéder à la nomination des membres du comité de Salut public (p. 378).
se trouve (4 avril, p. 300). — On annonce son arrestation (8 avril, p. 415); —renvoi au comité de Salut public (ibid.). — Se plaint de la mesure prise contre lui et demande justice (11 avril, p. 592) ; — renvoi au comité de Salut public (ibid.).
Société des Amis de la liberté. Demande des armes (8 avril 1793, t. LXI, p. 420).
Directoire. Arrêté ordonnant la mise en état d'arrestation de plusieurs membres du directoire (6 avril 1793, t. LXI, p. 362).
— Membre du comité de Salut plublic (t. LXI, p. 400).
— Fait un rapport sur la solde des troupes (p. 592).
Administrateurs. Rendent compte des dangers qui menacent la ville de Nantes (31 mars 1793, t. LXI, p. 11 et suiv.).
Directoire. Ses arrêtés relatifs à la formation du tribunal criminel et à la nouvelle liste des jurés pour le trimestre d'avril (4 avril 1793, t. LXI, p. 296).
Troubles. Lettres sur les menées des rebelles (31 mars 1793, t. LXI, p. 11). — Lettre relative à un avantage remporté sur les rebelles (15 avril, p. 324).
Administrateurs. Communiquent un interrogatoire du nommé Joseph Cathelineau (2 avril 1793, t. LXJ, p. 76).
Troubles. Renseignements sur l'état des forces des armées de la République et sur celles des rebelles (3 avril 1793, t. LXI, p. 130 et suiv.), (6 avril, p. 362).
les demi-soldes des sous-officiers et soldats de la ci-devant garde de Paris (p. 372). — Parle sur une pétition de la section du Ron-Conseil (p. 454).
et suiv.). — La Convention décrète qu'il sera procédé à un appel nominal sur la question de savoir s'il y a lieu ou non de prononcer le décret contre lui et que cet appel sera imprimé et envoyé aux départements et aux armées (p. 642). — La Convention décrète qu'il sera mis immédiatement en état d'arrestation à l'Abbaye et que le comité de législation fera un rapport sur lès délits qui lui sont imputés (p. 643).
Directoire. Demande des armes pour un bataillon de grenadiers et chasseurs (2 avril 1793, t. LXI, p. 92).
— Commissaire aux armées du Rhin, des Vosges et de la Moselle (t. LXI, p. 622).
Directoire. Son arrêté augmentant le salaire des gardes forestiers (3 avril 1794, t. LXI, p. 114).
Administrateurs. Dénoncent le général Chazot(7 avril 1793, t. LXI, p. 402), (10 avril, p. 517).
— Décret le renvoyant devant le tribunal criminel extraordinaire (12 avril, p. 629).
des côtés de la Loire (31 mars, t. LXI, p. 7). — Fournit des renseignements sur les troubles de l'Ouest (2 avril, p. 102 et suiv.). — Envoie des éclaircissements sur la destitution dû citoyen Sémonville (3 avril, p. 114). — Ecrit que les citoyens Proly, Pereira et Dubuisson ont bien mérité de la patrie (6 avril, p. 368 et suiv.). — Transmet des pièces à la Convention (8 avril, p. 318).
Lebrun, ministre par intérim. Demande une explication sur le décret du 17 février relatif à la gendarmerie (8 avril, p. 418). — Donne des détails sur la compagnie supprimée du citoyen Lelièvre (ibid.). — Envoie l'état nominatif des commissaires des guerres (ibid.). — Envoie un état nominatif des employés de son département (9 avril, p. 463). — Transmet des lettres du général Dampierre et du citoyen Bouchotto (ibid. p. 481). — Transmet des pièces à la Convention (ibid. p. 494).
Bouchotte, ministre. — 1793. — Envoie un état des objets demandés et expédiés aux armées (11 avril, t. LXI, p. 597).
— Transmet différentes pièces (7 avril, p. 392), (8 avril, p. 416), (9 avril, p. 495), (11 avril, p. 584 et suiv.).
— Transmet des pièces à la Convention (7 avril 1793, t. LXI, p. 392). — Ecrit q ue le feu a pris dans un de ses bureaux et qu'il fait garder à vue le chef de ce bureau (ibid. p. 394). — Transmet un procès-verbal de l'arrestation de Louis-Philippe-Joseph Egalité (ibid% p. 398), — une demande du citoyen Conte (9 avril,
p. 468). — Rend compte de l'exécution du décret relatif aux Bourbons (12 avril, p. 610 et suiv.).
— Décret ordonnant de donner des gardes à ses adjoints (ibid. p. 399). — Transmet des pièces relatives à la nomination d'un député à Cayenne (8 avril, p. 421). — Annonce la démission du citoyen Taillevis (ibid. p. 442). — Rend compte des motifs de l'arres-tion du citoyen Ailhaud (ibid. p. 451). — Nomination de Dalbarade en remplacement de Monge (10 avril, p. 527).
Dalba ade, ministre. — 1793. — Signale le patriotisme des habitants de Servon (11 avril, t. LXI, p. 600).
— Demande une prompte expédition du décret concernant les forges de la Chaussade (12 avril, p. 609).
— Demande à être entendu par la Convention (9 avril, p. 467); —renvoi au comité de la guerre (ibid. p. 468).
— Décret le renvoyant devant le tribunal criminel extraordinaire (12 avril, p. 629). — Son interrogatoire devant le comité de la guerre (ibid. p. 677 et suiv.).
— mention honorable (ibid. p. 610).
Voir Ministre de la marine.
2° Réclamation du ministre des contributions publiques relative aux ouvriers des monnaies qui ont été compris dans le recrutement (7 avril 1793, t. LXI, p. 392).
Troubles. Compte rendu des opérations faites contre les rebelles (4 avril 1793, t. LXI, p. 292 et suiv.).
Conseil général. Annonce un don patriotique (lor avril 1793, t. LXI, p. 37).
Directoire. Annonce des dons patriotiques (31 mars 1793, t. LXI, p. 17).
2° Rapport par Cambon sur la prohibition de la vente du numéraire et sur la circulation des assignats (8 avril 1793, t. LXI, p. 442 et suiv.); — projet de décret (ibid. p. 445 et suiv.). — Discussion : Ver-nier, Génissieu (ibid. p. 448 et suiv.); — Génissieu, Cambon, rapporteur, Maximilien Robespierre (ibid. p. 449 et suiv.); — la Convention ajourne le titre I" du projet de décret et adopte le titre II (ibid. p. 450). — Discussion et adoption du titre Ier (11 avril, p. 592 et suiv.).
2° Décret ordonnant l'arrestation provisoire de tous ceux qui reviennent des armées (3 avril 1793, t. LXI, p. 265); — adoption (ibid. p. 266).
3° Décret ordonnant de garder à vue les pères, mères, femmes et enfants des officiers de l'armée de Dumouriez (3 avril 1793, t. LXI, p. 280).
4° Renvoi au comité de Salut public d'une motion sur le mode de nomination des officiers (7 avril 1793, t. XLI, p. 396).
5° Le conseil exécutif en faisant procéder à la liste des officiers sera tenu d'y énoncer leurs noms, pré-
noms,, lieux de naissance et de domicile (8 avril 1793, t. LXI, p. 423).
§ 1er Commune de Paris. § S. Département de
Paris.
§ 1er. Commune de Paris. 1° Citoyens. — Adresses.
— Pétitions. 2° Conseil général. 3° Sections.
4° Procureur de la commune. 5° Municipalité. 6° Hôpitaux.
1° Citoyens. — Adresses. — Pétitions. Les épiciers demandent des indemnités pour les pertes qu'ils ont subies dans les journées des 25 et 26 février 1793 (31 mars 1793, t. LXI, p. 14) ; — discussion (ibid. et p. suiv.) ; — renvoi au comité des finances (ibid. p. 15). — Pétition relative aux mesures de défense nationale (3 avril, p. 127).
2° Conseil général. Députation et adresse de dévouement (31 mars 1793, t. LXI, p. 15 et suiv.). — Décret le mandant à la barre (3 avril, p. 125). — Il est autorisé à s'adjoindre, en attendant l'organisation de la nouvelle municipalité, tous les citoyens élus pour composer en définitif le conseil général (ibid. p. 275). — Il demande qu'il soit statué sur la conduite à tenir par la commune de Paris à l'égard des volontaires qui reviennent de l'armée de Belgique (5 avril, p. 334). — Demande une loi sur l'organisation de la municipalité (9 avril, p. 497).
3° Sections en général. Les commissaires des sections qui ont pris part à l'arrêté du 31 mars à l'évêché rendront compte des motifs de cet arrêté (2 avril 1793, t. LXI, p. 97). — Eclaircissements du
procureur de la commune de Paris au sujet de cet arrêté {3 avril, p. 116). — Pétition relative à l'habillement et à l'équipement des - volontaires (7 avril, p. 403).
Sections individuelles par ordre alphabétique.
Section des Amis de la patrie. Adresse de dévouement (3 avril 1793, t. LXI, p. 279).
Section de l'Arsenal. Demande que la cocarde tricolore soit uniforme pour tous (8 avril 1793, t. LXI, p. 461)..
Section de Beaurepaire. Demande la dissolution du comité central nommé à l'évêché (3 avril 1793, t. LXI, p. 131).
Section de Bon-Conseil. Demande le décret d'accusation contre Brissot, Gensonné, Vergniaud, etc. (8 avril 1793, t. LXI, p. 453 et suiv.).
Section de Bonne-Nouvelle. Fait une adresse de dévouement (8 avril 1793, t. LXI, p. 452 et suiv.).
Section de la Butte des Moulins. Demande la dissolution du comité central nommé à l'évêché (3 avril 1793, t. LXI, p. 131)..
Section du Contrat social. Défilé devant la Convention et serment de la compagnie des canonniers (31 mars 1793, t. LXI, p. 17).
Section des Droits de l'homme. Demande la dissolution du comité central nommé à l'évêché (3 avril 1793, t. LXI, p. 131).
Section da Faubourg Montmartre. Pétition relative aux opérations militaires (7 avril 1793, t. LXI, p. 403 et suiv.).
Section du Finistère. — Demande à la Convention ile ^'occuper de la Constitution (6 avril 1793, t. LXI,
458.et suiv.)
Section de la Fontaine de Grenelle. Pétition relative à l'armement des domestiques (2 avril 1793, t. L X p. 87).
Section de Gennevilliers. Adresse concernant les mesures'prises pour le salut de la République (3 avril 1793, n. LXI, p. 279).
Section de Oravilliers. Demande des secours pour trois volontaires nationaux infirmes par suite de blessures de guerre (8 avril 1793, t. LXI, p. 459 et suiv.)
Section de la Halle aux Blés. Pétion dénonce une adresse de cette section contre la majorité de la Convention et propose de mander à la barre le président et les secrétaires de la section pour savoir s'ils ont signé cette adresse (10 avril 1793, t. 'LXI, p. 522 et suiv.); — discussion: Danton (ibid. p. 525 et suiv.)1; — Boyer-Fonfrède, Delahaye, Guadet, Robes-
pierre, Vergniaud (ibid. p. 528 et suiv.) ; — décre mandant à la barre le citoyen Bocquechu, président de la section, et le citoyen Maitre-Jean, secrétaire (ibid. p. 549 et suiv.).
Section des Lombards. Demande à la Convention de prendre les mesures nécessaires au salut public (5 avril 1793, t. LXI, p. 354).
Section du Louvre. Propose des mesures de salut public (8 avril 1793, t. LXI, p. 459).
Section du Luxembourg. Les citoyens sollicitent l'admission à la barre d'une députation de ses membres (12 avril 1793, t. LXI, p. 616), — jour fixé (ibid).
Section du Mail. Extrait du procès-verbal de l'assemblée permanente (2 avril 1793, t. LXI, p. 92). — Décret portant que la section a bien mérité de la patrie {ibid. p. 97).— La section propose des mesures de salut public (8 avril, ,p. 460). — Mention honorable du patriotisme des citoyens (12 avril, p. 623).
Section de la Maison commune. Compte rendu des opérations du recrutement (31 mars 1793, t. LXI, p. 20.)
Section de l'Oratoire. Pétition relative à la nomination des membres du tribunal révolutionnaire (31 mars 1793, t. LXI, p. 22).
Section de la Paix, dite des Fédérés. — Dénonce l'administration de l'habillement des troupes (2 avril 1793, t. LXI, p. 87).
Section du Panthéon. Fait hommage d'un ouvrage en l'honneur de Michel Lepeletier, intitulé : Epode à réciter près du tombeau (31 mars 1793, t. LXI, p. 14). — Propose différentes mesures de salut public (3 avril, p. 280).
Section du Pont-Neuf. Adresse sur les circonstances actuelles (4 avril 1793, LXI, p. 314), — mention honorable du patriotisme des citoyens (ibid.)
Section des Quatre-Nations. Sa pétition sur les mesures à prendre pour le salut public (5 avril 1793, t. LXI, p. 349 et suiv.). —Observations sur cette pétition (ibid. p. 357 et suiv.).
Section des Quinze-Vingts. Adresse relative à la trahison de Dumouriez (31 mars 1793, t. LXI, p. 25).
— Adresse sur les circonstances actuelles (4 avril, p. 313 et suiv.) ; — mention honorable du patriotisme des citoyens (ibid. p. 314).
Section des Sans-Culot tes. Adresse sur les circonstances actuelles (4 avril 1793, t. LXI, p. 314 et suiv.)
— Pétition en faveur du citoyen Gambert (ibid. p. 315).
Section du Temple. Demande une loi répressive contre ceu-x que refusent de faire leur 'service personnel (2 avril 1793, t. LXI, p. 95 et suiv.). — On
annonce que le contingent de la section est arrivé à Valenciennes (5 avril, p. 323).
Section du Théâtre-Français, dite de Marseille. La nation demande un décret qui l'autorise à voler au secours de la République (3 avril 1793, t. LXI, p. 277).
4° Procureur de la Commune. — Anaxagoras Chaumette procureur. — 1793. — Fournit des explications au sujet de la réunion des commissaires des sections à l'archevêché et propose des mesures de défense nationale (3 avril, t. LXI, p. 116).
5° — Municipalité. Demande un décret qui empêche de sortir des barrières de Paris sans passeport (5 - avril 1793, t. LXI, p. 353 et suiv.).
6° — Hôpitaux.Don patriotique des officiers de santé et des employés de l'Hôtel-Dieu (8 avril 1793, t, LXI, p. 456), (10 avril, p. 517).
§ S. Département de Paris.
1° — Directoire.
2° — Volontaires et autres militaires.
1° Directoire. — Demande le remboursement des billets de confiance déposés en exécution du décret du 9 janvier 1793 (31 mars 1793, t. LXI, p. 16 et suiv.).
2° — "Volontaires et autres militaires. Don patriotique du bataillon des vétérans (31 mars 1793, t. LXI, p. 24 et suiv.).
Administrateurs. Leur adresse à leurs concitoyens (4 avril 1793, t. LXI, p. 307 et suiv.).
Volontaires nationaux. Envoient une adresse de dévouement (11 avril 1793, t. LXI, p. 598).
l'Est de faire mettre les places fortes en état de défense (4 avril 1793, t. LXI, p. 304).
Société populaire. Don patriotique (11 avril 1793, t. LXI, p. 596).
Tribunal. Adresse relative au jugement de Louis Capet et à l'assassinat de Michel Lepeletier (31 mars 1793, t. LXI, p. 1).
rapport sur l'affaire des généraux Lanoue et Steingel (p. 623).
2° Renvoi au comité de législation d'une question relative aux prisonniers dont les affaires ne peuvent être instruites parce que les témoins à entendre sont aux armées (8 avril 1793, t. LXI, p. 419).
Procureur général s«/»tJî'c.Demande que la commune de Montlouis soit autorisée à prendre le nom de Mont-Libre (3 avril 1793, t. LXI, p. 113),
Conseil général. Ecrit qu'il a refusé de laisser partir le citoyen Bourgeois, député d'Eure-et-Loir, qui n'avait pour passeport que sa carte de député (8 avril 1793, t. LXI, p. 415) ; — approbation de sa conduite (ibid. p. 416).
Conseil général. Arrêté portant suspension provisoire de trois de ses membres (9 avril 1793, t. LXI, p. 481).
Administrateurs. Ecrivent que diverses communes se sont distinguées par leur zèle contre des contre-révolutionnaires (2 avril 1793, t. LXI, p. 103).
Procureur syndic. Annonce que le recrutement s'est fait avec le plus grand succès (4 avril 1793, t. LXI, - p. 292).
S'oppose à l'adjonction de commissaires au comité de Salut public (p. 396).
Société populaire. Fait un don patriotique (9 avril 1793, t. LXI, p. 461).
— La Convention décrète que Pelé et Brival assisteront à la levée des scellés apposés sur ses papiers en remplacement de Thuriot et de Laplaïgne (ibid. p. 586).
— Annonce l'arrivée d'une lettjre de Dumouriez adressée au ministre de la guerre (p. 102). — Demande que le citoyen Du lac soit entendu par le comité de défense générale (p. 293). — Secrétaire (p. 316)- — Membre du «comité de l'analyse (ibid.),. —r Parle sur l'arrestation du général d'Harville (p, 332),
Municipalité. Adresse relative au jugement de Louis Capet et d'adhésion à tous les décrets (31 mars 1793, t. LXI, p. 6 et suiv.).
Administrateurs. Font part des menées dès rebelles (2 avril 1793, t. LXI, p. 82 et suit,).
Société républicaine des amis de la liberté et de l'égalité. Fait un don patriotique et rend compte des opérations du recrutement (10 avril 1793, t. LXI, p. 517). — Mention honorable (ibid.).
Administrateurs. Envoient une adresse d'adhésion aux décrets (12 avril 1193, t. LXI, p. 616); — renvoi au comité de la guerre (ibid. p. 611).
Société populaire. Transmet l'exemplaire d'une adresse faite pour hâter la recrutement (2 avril 1793, t. LXI, p. 73 ét suiv.).
Volontaires nationaux. Don patriotique du 10° bataillon (4 avril 1793, t. LXI, p. 290).
Directoire. Demande que la moitié de ses membres soit autorisée à s'armer pour la défense de la patrie (4 avril 1793, t. LXI, p. 296).
Conseil général. Fait connaître le dévouement des citoyens (5 avril 1793, t. LXI, p. 321). — Ecrit qu'il a fait arrêter le général Leveneur (8 avril, p. 415).
Société des Amis de la République. Fait part à la Convention de plusieurs actes de patriotisme qui ont eu lieu dans cette commune (11 avril 1793, t. LXI, p. 589) ; — mention honorable (ibid.). •
2° Décret sur la surveillance à exercer sur ceux qui se trouvent dans la capitale sans motif valable (l,r avril 1793, t. LXI, p. 60).
3° Projet de décret ordonnant l'arrestation provisoire de tous ceux qui reviennent des armées 13 avril 1793, t. LXI, p. 265) ; — adoption (ibid. p. 266).
Société patriotique. Adresse relative aux services rendus par le citoyen Laroque-Montel, gouverneur provisoire de Sairite-Lucië (7 avril 1793, t. LXI, p. 393 et suiv.) ; — frerivdi âu Comité colonial et de iûariHe (ibid.). — Réëlàmation des Êfrêanciers dé l'Ile (12 avril, p. 613) ; — renvoi aux comités diplomatique et de salut publié (ibid.).
Administrateurs. Leur adresse relative au jugement de Louis Capet* a l'assassinai de Michel Lepeletier et au recrutement (5 avril 1793, t. LXI, p. 328).
Troublés. Méstirés prisés par lés corps administratifs pour les réprimer (31 mars 1793, t. LXI, p. 10).
papiers de l'e$-ministre Roland (p. 3Q4). — Donne lepturp d'un projet de décret relatif aux soldats de l'armée de Belgique (p. 400). — Parle sur }a conduite du général Chabot (p. 402). — sur la mise en route des vçlpntaires (p. 4J5), (p. 470). «t Yipe-prégfçLent (p. 497). — Propose de charger le comité de législa-tiou de faire un rapport sur les dénonciations contre Marat (p. 641).
Administrateurs. Font une adresse relative au jugement de Louis XVI et annoncent des dons patriotiques (31 mars 1793, t. LXI, p. 3).
— Membre du comité de Salut public (p. 396).
— Adresse de dévouement des juges et jurés et serment de mourir pour le salut de la République (2 avrjl, p. 93).— Décret eb^rgeani l'accusateur public de poursuivre les délits de sa compétence sur les dé-
crets d'accusation rendus et à rendre par |a Convention nationale [ibid. p. 95). — Renvoi aux comités des fipanees et de législation réunis d'une motion relative "à la fixation des honoraires des; jurés (ibid.). Décret çur lp modp de paiement des jurés (3 avril, p. 126). — Décret portant qu'il pourra juger les prévenus sur les dénonciations des autorités, à l'exception des membres de la Convention, des ministres et des généraux qui ne pourront l'être sans un décret (5 avril, p. 337). — L'accusateur public demande quelle marche il doit suivre pour se faire remettre les pièces relatives aux affaires qui lui sont soumises (6 avril, p. 372) ; — décret (ibid. et p. suiv.). — Le ministre de la justice adresse le tableau des membres qui composent le tribunal et demande la nomination d'un juge et de deux suppléants, de deux suppléants de l'accusateur public et de douze suppléants du jury (7 avril 1793, t. LXI, p. 392); — renvoj a# conjité da législation (ibid.).
Administrateurs. Rendent compte des opérations du recrutement et annoncent un dop patriotique de la citoyenne Dagenés (10 a-yril (t. JjXI, p. 517).
Administrateurs. Demandent des forces pour repousser les rebelles (4 avril 1793, t. LXI, p. 291).
Officiers municipaux. Annoncent que la commune a fourni au delà de soncontingent et envoient un don patriotique (11 avril 1793, t. LXI. p. 599 et suiv.).
2° La Convention décrète que les jeunes gens qui ont tenté de se soustraire à la loi du recrutement seront tous déclarés volontaires nationaux et charge le comité de la guerre de lui présenter un mode d'exécution (9 avril 1793, t. LXI, p. 497).
Volontaires nationaux. Décret portant qu'ils ont bien mérité de la patrie (5 avril 1793, t. LXI, p. 336).
FIN DE LA TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE DU TOME LXI.
ERRATA
Page 4, 2e col-, 16e ligne :
Au lieu de : Maribon-^ontant, lire : Maribon-Montant.
Page 128, lre col., 40e ligne :
Au lieu de : Pinard, lire : Picard.
Page 129, 1'° col., 22e ligne :
Au lieu de : Penard, lire : Picard.
Page 493, 2e col., 10® avant-dernière ligne :
Au lieu de Y cet espèce de criminel, lire; cette espèce de criminel.
Page 540, 2e col., 16e ligne, Lehardy :
Au lieu de : La Convention, par qu'elle vient de rendre ; lire : La Convention, par le décret qu'elle vient de rendre.
Page 584, 2e col., 3e avant-dernière ligne :
Au lieu de : tomper la nation > lire : tromper la nation.
Nota. — Dans le cours du même Tome LX, il est souvent question du généra} Steingel. Ce nom a été quelquefois imprimé Stengel. C'est Steingel qu'il faut lire.
Imp. Paul Dupont. 4, rue du Bouloi, — Paris, i*' Arr. — 166.6.1902.